N° 4129 tome VI - Avis de M. Francis Vercamer sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).


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N° 4129

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈMELÉGISLATURE

EnregistréàlaPrésidencedel’Assembléenationalele 13 octobre 2016.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2017,

TOME VI

TRAVAIL ET EMPLOI

TRAVAIL

PAR M. Francis VERCAMER,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 4061, 4125 (annexe n° 47).

SOMMAIRE

___

Pages

I. LES CRÉDITS DES PROGRAMMES NOS 111 ET 155 DE LA MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI » EN 2017 6

A. LES CRÉDITS DU PROGRAMME NO 111 – AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE L’EMPLOI ET DES RELATIONS DU TRAVAIL 6

1. La santé et la sécurité au travail 7

2. La qualité et l’effectivité du droit 10

3. Le dialogue social et la démocratie sociale 10

B. LES CRÉDITS DU PROGRAMME N° 155 CONCEPTION, GESTION ET ÉVALUATION DES POLITIQUES DE L’EMPLOI ET DU TRAVAIL 10

1. Une architecture du programme stable 11

2. Des dépenses de personnel en hausse 12

II. LES NOUVEAUX CHAMPS DE LA NÉGOCIATION SOCIALE 13

A. UNE INVERSION DE LA HIÉRARCHIE DES NORMES OU PAS ? 13

1. Une inversion de la hiérarchie des normes verrouillée par les dispositions supplétives 13

2. L’ordre public conventionnel : une mesure discutable et provisoire ? 14

3. Clarifier le rôle des branches avant de les restructurer 16

4. La déclinaison locale des accords de branches 17

B. LES NOUVEAUX ESPACES DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE : LES PISTES À EXPLORER 17

1. La reconnaissance des accords territoriaux 17

2. Les accords transfrontaliers 18

3. Les accords collectifs concernant les filières et les sous-traitants 19

4. Formaliser le dialogue social au niveau national interprofessionnel 21

C. UNE QUESTION EN SUSPENS : LE DÉFI DE L’UBÉRISATION 22

1. Les nouvelles formes d’emploi 22

2. Subordination juridique et dépendance économique 23

3. La représentation de ces travailleurs, un chantier à ouvrir 24

TRAVAUX DE LA COMMISSION 27

EXAMEN DES CRÉDITS 27

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 29

INTRODUCTION

La mission Travail et emploi constitue l’un des principaux budgets d’intervention de l’État : ses crédits de paiement s’élèvent à 15,49 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2017. Elle comporte quatre programmes, dont deux fondent le présent avis : le programme 111 Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail, rassemblant les moyens consacrés à la politique du travail, et le programme 155 Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail, support de la mission (1).

Le présent avis n’a pas pour objectif l’analyse détaillée de l’ensemble des crédits des programmes 111 et 155, cet objet étant imparti prioritairement au rapport spécial établi au nom de la Commission des finances. Après un rappel des principales actions de ces deux programmes de la mission Travail et emploi, le rapporteur pour avis souhaite procéder à une analyse des suites qui ont été données au rapport de M. Jean-Denis Combrexelle relatif à la négociation (2).

Une partie des conclusions de ce rapport ont trouvé une traduction législative dans la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. Cependant, la loi n’est pas allée au bout de la logique qui a présidé au rapport Combrexelle en donnant l’oxygène nécessaire aux partenaires sociaux afin de leur permettre d’inventer et d’appliquer leurs propres normes au plus près de la réalité de leur entreprise.

Les crédits demandés pour la mission Travail et emploi sont en forte augmentation en 2017 par rapport à 2016 en CP comme le montre le tableau suivant, la principale augmentation est portée par l’action 1 Développement de l’emploi en TPE-PME du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi et concerne l’aide « Embauche PME », créée par le décret n° 2016-40 du 25 janvier, versée aux entreprises pour toute embauche en CDI ou en CDD d’au moins six mois, dont la rémunération est inférieure ou égale à 1,3 SMIC. Cette forte augmentation n’est pas une augmentation réelle puisqu’elle résulte d’une budgétisation d’une aide existante.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI » ENTRE 2016 ET 2017

(en milliards d’euros)

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2016

PLF 2017

Évolution entre 2016 et 2017

LFI 2016

PLF 2017

Évolution entre 2016 et 2017

11,54

16,47

+ 42,7 %

11,7

15,49

+ 32,4 %

Source : Programme annuel de performance 2017

Dans le projet de loi de finances pour 2017, le montant des crédits des programmes 111 – Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail et 155 – Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail, s’élève à 812,1 millions d’euros de crédits de paiement et à 763,8 millions d’euros d’autorisations d’engagement (3).

Ce budget apparaît en baisse par rapport à l’année dernière en crédits de paiement puisque le montant des crédits de ces deux programmes s’élevait en LFI 2016 à 856,1 millions d’euros de crédits de paiement et à 808,7 millions d’euros en autorisations d’engagement. Le rapport revient ci-dessous sur les principales évolutions budgétaires des deux programmes.

Le programme 111 se voit doté de 78,49 millions d’euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2017, soit une diminution de 13,35 millions d’euros par rapport à 2016. Il a pour but d’améliorer la qualité de l’emploi et des relations de travail, c’est-à-dire de garantir aux 15,9 millions de salariés du secteur privé, des conditions de travail conformes aux normes collectives et contrôlées, protégeant leur santé et leur sécurité, et reposant sur une négociation sociale dynamique.

La composition du programme 111 reflète ces objectifs. Il compte quatre actions, aux poids inégaux : « Santé et sécurité au travail » (31,3 % des crédits de paiement), « Qualité et effectivité du droit » (14,5 % des crédits de paiement), « Dialogue social et démocratie sociale » (54 % des crédits de paiement), et « Lutte contre le travail illégal » (4). Leurs crédits connaissent des évolutions contrastées en 2017, comme expliqué ci-dessous.

DOTATION AU PROGRAMME 111 ENTRE 2016 ET 2017 EN CP

(en milliers d’euros)

 

LFI 2016

PLF 2017

Action 1 – Santé et sécurité au travail

25 308

24 635

Action 2 – Qualité et effectivité du droit

11 093

11 413

Action 3 – Dialogue social et démocratie sociale

55 439

42 451

Action 4 – Lutte contre le travail illégal

   

Total

91 841

78 499

Source : Programme annuel de performance 2017.

La baisse constatée est essentiellement concentrée sur l’action 3 Dialogue social et démocratie sociale du programme 111. En 2015, 97,5 millions d’euros d’AE ont été ouverts pour 45,4 millions de CP pour financer la mise en œuvre du fonds destiné à financer les organisations syndicales et patronales tel qu’introduit par l’article 31 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. En 2016, deuxième année de financement du fonds, 55,4 millions d’euros de CP sont demandés pour 19,8 millions d’euros d’AE, la majorité des AE ayant été ouvertes en 2015. En 2017, ce sont 42,45 millions d’euros qui sont ouverts en CP et 8,57 millions d’euros en AE.

L’action Santé et sécurité au travail bénéficie de 24,6 millions d’euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2017, soit une diminution de 0,67 million d’euros par rapport à 2016. Elle est portée par deux opérateurs, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT).

Un budget global de l’ANSES en baisse

Premier opérateur du programme, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) qui a pour mission principale de réaliser et de fournir aux autorités compétentes une expertise scientifique et pluridisciplinaire, reçoit en 2017 une subvention de 8,37 millions d’euros au titre du programme n° 111, soit une dotation inférieure à celle octroyée en 2015, qui était de 8,55 millions d’euros. C’est la deuxième baisse successive de la dotation.

Au-delà du programme 111, l’ANSES concourt à la mise en œuvre de quatre autres programmes budgétaires relevant des ministères chargés de l’agriculture (programme 206 Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation), de la santé (programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins), et de l’écologie (programmes 181 Prévention des risques et 190 Recherche dans le domaine de l’énergie, du développement et de la mobilité durable), au titre desquels elle reçoit des subventions. Les subventions sont plutôt orientées à la baisse.

Au final, le budget global de l’ANSES diminuera de 1,431 million d’euros entre 2016 et 2017, comme l’indique le tableau ci-dessous.

ÉVOLUTION DU BUDGET GLOBAL DE L’ANSE ENTRE 2016 ET 2017 EN CP

(en milliers d’euros)

 

LFI 2016

PLF 2017

Programme 204 – Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

13 429

14 264

Programme 111 – Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

8 554

8 375

Programme 181 – Prévention des risques

7 000

7 000

Programme 190 – Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables

1 562

1 551

Programme 206 – Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

63 582

61 506

Total

94 127

92 696

Source : Programme annuel de performance 2016 – Mission Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales.

En 2016, le champ de compétence de l’ANSES a été largement étendu. D’une part, l’agence est désormais chargée de la délivrance des autorisations de mise sur le marché et de la procédure d’évaluation des produits biocides. D’autre part, comme le prévoit la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, elle assure la mise en œuvre du système de toxicovigilance. Au regard des nouvelles compétences dévolues à l’ANSES et la baisse de dotation de l’ordre de 1,5 %, celle-ci risque de rencontrer des difficultés. En tout cas, les priorités affichées par le Gouvernement ne trouvent pas de traduction budgétaire.

L’ANACT : acteur majeur du troisième plan de santé avec un budget en baisse

Second opérateur du programme 111, l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) se voit dotée d’une subvention de 11,76 millions d’euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2017. L’ANACT avait reçu une dotation de 12,08 millions d’euros en 2016.

Sollicitée en 2015 pour participer à l’élaboration du 3e Plan Santé au Travail (PST) sur la période 2016 – 2020, l’ANACT est l’un des principaux partenaires du ministère, avec le réseau des ARACT, pour la mise en œuvre opérationnelle du PST au niveau national et régional.

Le PST est structuré autour de 3 axes :

– donner la priorité à la prévention primaire et développer la culture de la prévention ;

– améliorer la qualité de vie au travail, levier de santé, de maintien en emploi des travailleurs et de performance économique et sociale de l’entreprise ;

– renforcer le dialogue social et les ressources de la politique de prévention en structurant un système d’acteurs, notamment en direction des TPE – PME.

Au-delà du plan santé, la signature, le 26 novembre 2013, du premier contrat d’objectifs et de performance (COP1) entre l’État et l’ANACT, qui couvre la période 2014-2017 vise à démultiplier l’action des réseaux ANACT – ARACT afin de rompre l’isolement des entreprises, « par la mutualisation des efforts, la recherche d’acteurs – relais et le choix d’approches sectorielles et territoriales ».

Le rapporteur pour avis note qu’une nouvelle fois, les objectifs affichés par le Gouvernement ne trouvent pas de traduction budgétaire. Le plan santé est présenté comme une priorité et l’un de nos principaux acteurs n’en est pas moins fragilisé par l’amputation de ses crédits.

Une diminution des crédits destinés aux études

Les crédits du programme 111 consacrés à la santé au travail recouvrent non seulement les dotations de fonctionnement des deux opérateurs précités, mais aussi les subventions accordées aux études menées en matière de santé au travail et au Fonds d’amélioration pour les conditions de travail (FACT).

5,99 millions d’euros de CP permettant de financer les études destinées à la connaissance des risques professionnels et les interventions du FACT contre 6,15 millions d’euros en 2016.

Le montant des crédits de paiement de l’action Qualité et effectivité du droit augmente en 2017, passant de 11,09 millions d’euros en 2016 à 11,41 millions d’euros en 2017 sans toutefois revenir au niveau de 2014 où il s’élevait à 14,4 millions d’euros. Ces fortes variations reflètent les incertitudes qui ont accompagné la désignation des juges prud’homaux, qui devrait désormais être fondée sur la mesure de l’audience des organisations syndicales et patronales. Les crédits de fonctionnement de l’action n° 2 sont destinés à financer l’opération qui, au plus tard en décembre 2017, aboutira au renouvellement de quelque 14 512 conseillers prud’hommes. Les crédits d’intervention financent la formation des élus prud’homaux.

L’action Dialogue social et démocratie sociale se voit dotée de 42,45 millions d’euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2016, contre 55,43 millions en 2016. Les crédits de cette action connaissent une diminution très sensible après la hausse enregistrée l’année dernière. Ces fluctuations sont dues au caractère cyclique des dispositifs de mesure d’audience financés par cette action ainsi qu’à la mise en œuvre de la réforme du financement des partenaires sociaux.

En effet, 2016 est la dernière année de la mesure de l’audience des organisations syndicales portant sur la période 2013 – 2016, opération à laquelle sont consacrés 18,43 millions d’euros. Ces crédits ne sont plus nécessaires en 2017. En revanche, il convient de prévoir en 2017 les crédits nécessaires au lancement du premier processus de mesure de l’audience des organisations d’employeurs, conformément aux dispositions issues de la loi du 5 mars 2014 (5), et pour lesquelles sont prévus 0,8 million d’euros.

Le Fonds paritaire destiné à financer les partenaires sociaux créé par la loi du 5 mars 2014 et mis en place en 2015 sera abondé 32,6 millions d’euros en 2017, au même niveau qu’en 2016. L’équilibre de ce fonds repose également sur une contribution des entreprises et des organismes paritaires à la gestion desquels participent les organisations syndicales et patronales.

Le programme n° 155 constitue le programme support des politiques publiques de la mission Travail et emploi, regroupant l’essentiel de leurs moyens en personnel, fonctionnement, investissement et recherche. Le projet de loi de finances pour 2017 lui attribue 733,6 millions d’euros de crédits de paiement, contre 764,2 millions d’euros en 2016.

Depuis la LFI 2015, le programme 155 est organisé en douze actions, ce qui en améliore notablement la lisibilité. En effet, les intitulés des actions sont plus précis et permettent de cibler clairement la destination des crédits qui y sont inscrits. En effet, ils ne se contentent plus d’indiquer les crédits alloués aux différents programmes. Ces douze actions se répartissent en deux catégories :

– les dépenses de fonctionnement et d’intervention, regroupant les crédits finançant le fonctionnement des services (action n° 8) pour 10,4 millions d’euros contre 34,2 millions d’euros en 2016, les systèmes d’information (action n° 9) pour 23,9 millions d’euros, les affaires immobilières (action n° 10) pour 25 millions d’euros, la communication (action n° 11) pour 3,9 millions d’euros, les activités de statistiques, d’études et de recherche (action n° 12) pour 9,3 millions d’euros, et la politique des ressources humaines (action n° 13) pour 31,6 millions d’euros ;

– et les dépenses de personnel, regroupant les crédits affectés aux personnels mettant en œuvre les politiques d’accès et retour à l’emploi (action n° 14) pour 75,3 millions d’euros contre 97,3 millions d’euros en 2016, les politiques d’accompagnement des mutations économiques et du développement de l’emploi (action n° 15) pour 75,23 millions d’euros contre 93,3 millions d’euros en 2016, personnels mettant en œuvre les politiques d’amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail (action n° 16) pour 335,2 millions d’euros contre 289,6 millions d’euros en 2016, ainsi que les crédits destinés aux personnels responsables des activités de statistiques, d’études et de recherche (action n° 17) pour 24,7 millions d’euros et enfin aux personnels transversaux et de soutien (action n° 18) pour 118,8 millions d’euros.

Les importantes baisses sont dues à des mesures de périmètres. Les travaux menés au printemps 2015 dans le cadre de la réforme territoriale sur la mutualisation des fonctions support ont conduit, d’une part, à annoncer dans la communication du Conseil des ministres du 31 juillet 2015 que « Les fonctions supports des administrations de l’État [seront] mutualisées dans chaque ville, à l’image de ce que font les collectivités locales » et, d’autre part, à la création au sein des secrétariats généraux de l’action régionale (SGAR) d’un pôle de la coordination interministérielle de la déconcentration, de la modernisation et des mutualisations piloté par un nouvel adjoint au SGAR (circulaire du 29 septembre 2015 et décret n° 2015-1894 du 29 décembre 2015). Ces annonces ont eu des répercussions sur le réseau des DIRECCTE en plaçant des agents sous la tutelle directe des SGAR. Les crédits de fonctionnement courant correspondant à 30,5 millions d’euros sont désormais retracés au sein du programme n° 333 Moyens mutualisés des administrations déconcentrées de la mission Direction de l’action du gouvernement.

DOTATION AU PROGRAMME 155 ENTRE 2016 ET 2017 EN CP

(en milliers d’euros)

 

LFI 2016

PLF 2017

Action 7 – Fonds social européen – assistance technique

   

Action 8 – Fonctionnement des services

33 208

10 384

Action 9 – Système d’information

27 710

23 908

Action 10 – Affaires immobilières

28 929

25 081

Action 11 – Communication

3 946

3 946

Action 12 – Études, statistiques, évaluation et recherche

12 339

9 308

Action 13 – Politique des ressources humaines

32 773

31 588

Action 14 – Personnels mettant en œuvre les politiques d’accès et retour à l’emploi

96 704

75 326

Action 15 – Personnels mettant en œuvre les politiques d’accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

96 236

75 235

Action 16 – Personnels mettant en œuvre les politiques d’amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

289 616

335 241

Action 17 – Personnels de statistiques, études et recherche

21 258

24 751

Action 18 – Personnels transversaux et de soutien

121 539

118 823

Total

764 262

733 596

Source : Programme annuel de performance 2017.

Comme rapporté précédemment et comme l’indique le tableau ci-dessous, la diminution des crédits du programme n° 155 n’est due qu’à des mesures de périmètre concernant les dépenses de fonctionnement. En revanche, si le plafond d’emplois a été réduit de 178 ETPT, passant de 9 701 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2016 à 9 523 ETPT en 2017, les dépenses de personnels sont en hausse de plus de 4 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME 155 PAR TYPE DE DÉPENSES

(en euros)

 

LFI pour 2016

PLF pour 2017

Dépenses de personnel

625 355 322

629 378 455

Dépenses de fonctionnement

138 636 616

103 946 998

Dépenses d’intervention

270 791

270 791

Total

764 262 729

733 596 244

Source : Projet annuel de performances pour 2017.

Enfin, l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (INTEFP) reçoit, pour charge de service public, une dotation de 15 millions d’euros, en baisse de 0,4 million d’euros par rapport à 2016.

À la suite du rapport de M. Jean-Denis Combrexelle (6), un large débat s’est ouvert sur les nouveaux champs de la négociation collective. En effet, la définition du dialogue social évolue et est appelée à évoluer encore avec la multiplication des formes de relations du travail. Les conclusions du rapport Combrexelle ont trouvé une traduction législative partielle dans la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

La seconde partie du présent rapport propose une analyse des dispositions mises en œuvre dans la loi précitée et des avancées qui restent à accomplir afin de faire de notre dialogue social, un dialogue social moderne capable de trouver des organisations du travail adaptées à la diversité des réalités économiques et sociales des entreprises.

Contrairement à ce qu’affirme le Gouvernement, la loi vise bien à inverser de la hiérarchie des normes dans les champs relatifs au temps de travail et aux congés. Cette nouvelle hiérarchie devra inspirer le travail d’une commission chargée de la refondation du code du travail. Ce nouveau code serait organisé sur chaque sujet en trois blocs :

 Des dispositions d’ordre public qui sont des grands principes auxquels il sera impossible de déroger par accord. Ils définissent les protections minimales accordées aux salariés, ainsi que le cadre de l’organisation collective du travail.

 Le champ de la négociation collective dans lequel la priorité est donnée aux conventions et aux accords d’entreprise ou d’établissement et, seulement à défaut, aux accords de branche.

 Le retour à la loi en l’absence d’accord. En l’absence d’accord d’entreprise ou de branche et seulement dans ce cas, s’appliquent alors des dispositions supplétives définies par la loi.

La nouvelle architecture issue du rapport Combrexelle et de la loi constitue donc bien une inversion de la hiérarchie des normes puisque les accords d’entreprises priment sur les accords de branches et que les accords peuvent déroger aux dispositions supplétives de la loi, in mejus mais aussi désormais in pejus.

Cependant, pour l’heure, cette inversion concerne uniquement les champs relatifs au temps de travail et aux congés et, surtout, reste verrouillée par l’existence de dispositions supplétives susceptibles de décourager la conclusion d’accords par manque d’intérêt pour l’une ou l’autre des parties.

Le rapporteur pour avis estime nécessaire d’aller au bout de la logique visant à assurer la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche et sur la loi afin de rapprocher le dialogue social du lieu où il s’applique. Pour cela, il convient de supprimer les dispositions supplétives afin que la norme sociale soit entièrement et exclusivement élaborée par les partenaires sociaux, la seule limite tenant aux dispositions d’ordre public.

Proposition n° 1 : Revoir l’organisation du code du travail en y prévoyant désormais uniquement des dispositions d’ordre public et en renvoyant l’élaboration de la norme à l’accord d’entreprise, ou, à défaut, à l’accord de branche

L’article 24 de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a inscrit expressément dans le code du travail le rôle de la branche, en précisant les missions relevant de sa compétence.

Dans un premier temps, le législateur a énoncé à l’article L. 2232-5-1 nouveau du code du travail plusieurs domaines constituant le socle légal des missions des branches professionnelles, c’est-à-dire les domaines dans lesquels la loi prévoit que l’accord de branche s’impose à l’accord de niveau inférieur, qu’il soit territorial, d’entreprise ou d’établissement. Dans ces domaines, les partenaires sociaux ne peuvent pas autoriser l’accord de niveau inférieur à déroger aux dispositions des accords qu’ils concluent.

Les domaines relevant de la négociation de branche prévus par le législateur avant la loi du 8 août n’ont pas été modifiés. Ainsi :

– la mutualisation des fonds de la formation professionnelle, les classifications professionnelles sont des domaines toujours réservés à la négociation de branche ;

– la détermination des salaires minimaux et des garanties collectives complémentaires au niveau de l’entreprise ne peut déboucher que sur des mesures plus favorables que celles prévues par la branche, cette dernière jouant le rôle de filet de sécurité.

À ces domaines, la loi du 8 août en a ajouté deux autres pour lesquels la branche professionnelle constitue, là encore, un socle minimal devant être respecté par l’accord d’entreprise :

– la prévention de la pénibilité prévue au titre VI du livre Ier de la quatrième partie du code du travail ;

– l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mentionnée à l’article L. 2241-3.

En outre, s’inspirant directement des propositions du rapport Combrexelle visant à renforcer les branches professionnelles, les nouvelles dispositions créent à proprement parler ce que le Gouvernement a appelé ordre public conventionnel. L’article L. 2232-5-1 nouveau du code du travail dispose en effet que renvoient à l’ordre public conventionnel les thèmes sur lesquels les partenaires sociaux peuvent décider au niveau de la branche que conventions et accords d’entreprise ne peuvent pas être moins favorables que les conventions et accords conclus au niveau de la branche. Or, ce même article prévoit une limite à cette latitude laissée aux branches, à savoir les cas dans lesquels la loi prévoit la primauté des accords d’entreprise : dans ces matières, les partenaires sociaux ne peuvent pas interdire à l’accord d’entreprise ou d’établissement de prévoir des dispositions différentes de celles prévues par l’accord de branche.

Ces dispositions apparaissent clairement comme discutables et ont été ajoutées au texte uniquement pour rassurer ceux qui craignaient la disparition des branches professionnelles dans leur fonction régulatrice avec l’inversion du rapport entre l’accord d’entreprise et l’accord de branche, ce dernier ne s’appliquant qu’en l’absence du premier. En effet, l’inversion de la hiérarchie ne concerne à ce stade que la durée du travail et les congés. Par conséquent, les autres champs continuent à voir l’accord de branche s’imposer à l’accord d’entreprise. Il n’y avait nul besoin de le spécifier.

Ces dispositions apparaissent également par nature provisoires puisqu’une fois le code du travail entièrement refondé sur le modèle ordre public – négociations collectives – dispositions supplétives, l’accord de branche ne pourra plus s’imposer à l’accord d’entreprise quel que soit le domaine comme c’est déjà le cas lorsque la loi prévoit la primauté de l’accord d’entreprise. Dans le cas contraire, l’entreprise de refondation n’en sera pas une. En conclusion, l’ordre public conventionnel se videra de sa substance et s’apparente à un coup d’épée dans l’eau.

Il aurait été plus clair d’assumer plus clairement la prééminence de l’accord d’entreprise et de laisser la branche définir les dispositions supplétives en cas d’absence d’accord d’entreprise.

Proposition n° 2 : Renvoyer les dispositions supplétives – en cas d’absence d’accord d’entreprise – à un accord de branche

Avec 700 branches professionnelles, le paysage conventionnel est très contrasté. Ainsi on trouve des branches professionnelles qui regroupent plusieurs centaines de milliers de salariés et d’autres quelques dizaines de salariés ou un nombre très réduit d’entreprises, des conventions collectives territoriales et aussi des conventions collectives de groupe. Certaines branches sont inactives depuis des années.

Le résultat est une négociation collective particulièrement pauvre avec des conventions qui se contentent trop souvent de reprendre des dispositions du code du travail. Il ne s’agit pas toujours de mauvaise volonté mais parfois d’un manque évident de moyens – humains et financiers.

Le rapport de M. Jean-Denis Combrexelle fait également un état des lieux sévères des branches professionnelles. En effet, il estime que : « Comme cela a été maintes fois souligné dans différents rapports, le paysage conventionnel avec de multiples branches sans moyens et sans stratégie sociale et économique n’est pas à la hauteur des défis. Même si l’État a longtemps avalisé ce morcellement, la responsabilité en incombe principalement aux organisations professionnelles si promptes par ailleurs à dénoncer chez les autres acteurs l’absence de dynamisme et la méconnaissance des réalités économiques. » (7)

Pourtant, la branche qui regroupe l’ensemble d’une filière de donneurs d’ordre et sous-traitants, présente un réel intérêt en ce qu’elle permet de prendre en compte l’intérêt de l’ensemble d’un secteur.

Dans le but de parvenir à des branches cohérentes répondant à cet objectif, la loi du 8 août 2016 entend accélérer le mouvement de restructuration et de regroupement des branches engagé par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. L’objectif affiché est de parvenir à 200 branches professionnelles d’ici à 3 ans.

À la suite de l’entrée en vigueur de la loi du 8 août 2016 précitée, le ministère du travail peut fusionner les branches qui ont peu de salariés, peu d’activités conventionnelles (les branches n’ayant pas négocié depuis 15 ans seront fusionnées cette année et celles n’ayant pas négocié depuis 10 ans dans les 3 ans), les branches territoriales ou celles dont moins de 5 % des entreprises adhèrent à un syndicat patronal. Enfin, les branches de moins de 5 000 salariés seront fusionnées dans un délai de 3 ans.

Le Gouvernement entend ainsi, améliorer la qualité des normes fixées par les conventions collectives, permettre à la branche de jouer son rôle de régulation économique, de créer de véritables filières économiques cohérentes et donner une base de droits sociaux pour les TPE – PME qui n’ont pas d’accord d’entreprise. Ces objectifs sont louables. Cependant, il convient de bien préciser le rôle futur de la branche professionnelle avant de procéder de manière administrative à des regroupements forcés. La méthode top down n’a jamais été un gage d’efficacité et d’appropriation par les acteurs du terrain.

Dans la logique de la prééminence de l’accord d’entreprise, le rapporteur pour avis estime que la réduction du nombre de branches est un objectif louable qui peut rapprocher l’application de la norme au plus près des salariés et des employeurs.

L’article 24 de la loi du 8 août 2016 précise notamment que le champ d’application d’une branche est national. Il est complété par l’article 25 qui prévoit que le ministre chargé du travail engage, avant le 31 décembre 2016, le processus de restructuration des branches dont le champ d’application géographique est uniquement régional ou local.

En effet, les difficultés observées s’agissant de la négociation de branche et qui ont justifié l’intensification du mouvement de restructuration des branches se rencontrent, dans une large proportion, au sein des conventions collectives qui ont un champ d’application géographique infranational. Ainsi, sur les 241 branches qui n’ont pas déposé d’accords depuis plus de 10 ans, 212 relèvent du niveau régional ou local.

Pour autant, la négociation au niveau local doit rester possible. En témoigne le fait que certaines branches dont le champ d’application est national prévoient que certains sujets (comme les primes de déplacement par exemple) sont plus en phase avec les réalités et les besoins s’ils sont négociés et définies localement. L’article 24 de la loi prévoit donc que des stipulations des conventions collectives nationales pourront être définies, adaptées ou complétées au niveau local.

Il appartiendra aux partenaires sociaux des branches concernées de définir l’architecture conventionnelle qui leur paraît la plus opportune, et notamment les modalités d’articulation entre le local et le national. Dans plusieurs secteurs, les partenaires sociaux ont d’ailleurs déjà amorcé un processus d’élaboration d’un « socle national » distinguant les sujets de portée nationale de ceux relevant davantage de la négociation locale.

La négociation collective est historiquement construite selon un axe vertical autour de trois espaces que sont le niveau interprofessionnel, la branche et l’entreprise.

L’axe horizontal est en revanche complètement ignoré alors que la négociation peut aujourd’hui avoir du sens par le regroupement d’entreprises au sein d’un territoire ou d’un bassin.

Le rapport de M. Jean-Denis Combrexelle fait la proposition d’accords territoriaux mais ne va pas jusqu’à la formaliser. Il pointe même les risques de complication liés à : « l’institution d’un nouveau niveau de norme, celui du territoire s’intercalant entre la branche et l’entreprise, ne peut que conduire à la confusion. Elle favoriserait les conflits de normes en s’en remettant à des arbitrages prétoriens qui ne sont pas toujours opportuns. »

Toutefois, il serait dommageable de se priver des initiatives innovantes en matière de matière de gestion de l’emploi et des conditions de travail prises au niveau du territoire et des sites. Le rapport de M. Jean-Denis Combrexelle cite les exemples d’accords mettant en place des crèches collectives, relatifs à l’organisation des transports, la formation ou à la mutualisation des lieux de restauration.

Si, lors de son audition par le rapporteur pour avis, M. Jean-Denis Combrexelle a mis en garde quant à la complexité de la reconnaissance par la loi de tels accords, il ne s’agit en aucun cas de se lancer dans une mesure de la représentativité des partenaires sociaux au niveau des territoires et de donner un effet normatif direct à l’accord territorial mais plutôt de conditionner ses effets à une transcription dans un accord d’entreprise.

Proposition n° 3 : Reconnaître dans la loi les accords territoriaux, sans effet normatif direct

La loi du 8 août 2016 vise à favoriser la négociation collective tant au niveau de la branche qu’aux autres niveaux de négociation, tels que le groupe, l’entreprise ou l’établissement. Cet encouragement à la négociation se trouve toutefois bridé par l’existence de dispositions supplétives à droit constant comme rappelé précédemment.

Les nouvelles règles de validité des accords collectifs d’entreprise énoncées à l’article L. 2232-12 modifié du code du travail renforcent la légitimité des accords signés ; elles n’entravent en rien la possibilité de négocier des accords au champ d’application supranational.

Article L. 2232-12 du code du travail

La validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement est subordonnée à sa signature par, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

Si cette condition n’est pas remplie et si l’accord a été signé à la fois par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au premier alinéa, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d’un délai d’un mois à compter de la signature de l’accord pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord.

Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1.

Une réflexion sur les accords transnationaux fut déjà menée en 2012, dans le cadre d’une consultation menée par la Commission européenne. L’absence de consensus et de cadre légal défini par la Commission a permis de conclure à l’absence de nécessité, en l’état, de mettre en place un régime juridique propre à ce type d’accord, lequel aurait pour conséquence non pas d’en faciliter la négociation, mais bien plutôt d’entraver la tâche des partenaires sociaux.

Cela ne remet pour autant pas en cause l’opportunité de conclure des accords de dialogue social transnational. Ces accords peuvent en effet, par leur champ d’application supranational, mieux prendre en compte les intérêts d’une communauté de travail particulière, identifiée, nécessitant la mise en place d’une norme commune, transcendant les limites frontalières. Il est par conséquent laissé aux partenaires sociaux une liberté pour les encadrer, au cas par cas. La prise en compte des règles nationales relatives à la représentativité syndicale et à la négociation collective reste cependant nécessaire pour les accords concernant le territoire français, afin d’assurer la légitimité des accords ainsi conclus.

En l’absence de normes européennes ou d’accord bilatéral, ces accords ne peuvent avoir d’effet normatif s’ils n’ont pas été préalablement transcrits dans un accord d’entreprise ou de branche. Le rapporteur pour avis n’estime pas nécessaire d’aller plus loin et de laisser les partenaires sociaux des régions transfrontalières régler les situations particulières qui naissent de la proximité avec un pays étranger aux normes sociales nécessairement différentes.

La recherche permanente d’une minimisation des coûts et d’un accroissement de rentabilité a poussé un grand nombre d’entreprises à recourir à la sous-traitance afin de gagner en flexibilité. La chaîne de production dépasse ainsi de plus en plus la sphère juridique de l’entreprise et se traduit par la coexistence dans la chaîne d’activités de travailleurs aux statuts et aux conventions collectives différents.

Le dialogue social dans la chaîne de production devient donc une question à part entière et pose la question du bon niveau de négociation.

Certaines expériences de dialogue social dans le cadre de filières ont déjà été menées. Ainsi, en 2010, à l’initiative de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Saint-Étienne (42), 140 entreprises de la filière mécanique, essentiellement des TPE et PME, pour la plupart sous-traitantes, directement ou indirectement, de grands groupes, se sont constituées en association loi 1901 – association Mécaloire. Si l’objectif premier de cette association était d’aider les adhérents à développer leur entreprise, il a été rapidement mis en place une aide afin de répondre aux besoins en termes d’emploi et de compétences. Ainsi, l’association a initié une action expérimentale autour d’un programme de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC). À la demande de l’État et de la région, financeurs du programme, le comité de pilotage de l’action a intégré les organisations syndicales locales et ouvert ainsi la possibilité d’un dialogue social inter-entreprise.

Le rapport de M. Jean-Denis Combrexelle « La négociation collective, le travail et l’emploi » remis au Premier Ministre le 9 septembre 2015 soulignait que si la restructuration des branches aboutissait à une meilleure adéquation avec les logiques de filières, une partie de la difficulté pourrait à terme disparaître.

Il n’a pas été toutefois prévu de lancer une expérimentation spécifique sur de tels accords car la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a reconnu dans son article 23 la notion plus large d’accord inter-entreprises. Les modalités de négociation et de validité de ces accords, entre des entreprises qui n’ont pas de lien juridique, y ont été définies. Peuvent négocier et conclure un tel accord, les organisations syndicales représentatives à l’échelle de l’ensemble des entreprises concernées.

« Section 5
« Accords interentreprises

« Art. L. 2232-36. – Un accord peut être négocié et conclu au niveau de plusieurs entreprises entre, d’une part, les employeurs et, d’autre part, les organisations syndicales représentatives à l’échelle de l’ensemble des entreprises concernées.

« Art. L. 2232-37. – La représentativité des organisations syndicales dans le périmètre de cet accord est appréciée conformément aux règles définies aux articles L. 2122-1 à L. 2122-3 relatives à la représentativité syndicale au niveau de l’entreprise, par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans les entreprises ou établissements concernés lors des dernières élections précédant l’ouverture de la première réunion de négociation.

« Art. L. 2232-38. – La validité d’un accord interentreprises est appréciée conformément aux articles L. 2232-12 et L. 2232-13. Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés aux mêmes articles sont appréciés à l’échelle de l’ensemble des entreprises comprises dans le périmètre de cet accord. La consultation des salariés, le cas échéant, est également effectuée dans ce périmètre. »

Ce nouveau type d’accord peut ainsi s’appliquer dans plusieurs configurations ; un territoire comme par exemple un accord sur l’ouverture dominicale des commerces dans une commune, un site comme un ensemble commercial ou encore une filière.

En revanche, il n’est pas évident que l’accord puisse associer les sous-traitants et les donneurs d’ordre ; il semble qu’il puisse au mieux réunir les entreprises sous-traitantes d’un même donneur d’ordre.

Lors de leur audition par le rapporteur pour avis, les représentants de la CFTC ont préconisé la création d’un « comité paritaire permanent du dialogue social » qui siégerait au Conseil économique social et environnemental (CESE) et permettrait d’établir, en amont, à froid, sans lien direct avec une actualité parfois sensible, la liste de tous les sujets du ressort des partenaires sociaux susceptibles de faire l’objet de discussions, concertations ou négociations (sans obligation systématique de résultat), afin de bâtir un agenda partagé de réforme.

Cette proposition rejoint la proposition de loi déposée par le rapporteur pour avis lors de la législature précédente et visant à créer un Conseil permanent du dialogue social (8).

Si, les accords d’entreprise et de branche sont très importants, la conclusion d’accords nationaux interprofessionnels est un marqueur important de la vitalité du dialogue social.

Depuis maintenant plusieurs années, la prise en compte du dialogue social et des résultats de la négociation collective dans le cadre de l’élaboration de la loi s’est accentuée, via en particulier le mécanisme de concertation préalable des partenaires sociaux instauré par la loi du 31 janvier 2007 sur les projets de réforme touchant aux relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle et qui relèvent du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle (9). Dans le même esprit, l’Assemblée Nationale s’est dotée le 16 février 2010 d’un protocole qui, à titre expérimental, formalise une procédure d’information et de consultation des partenaires sociaux, préalablement à l’inscription à l’ordre du jour, de tout projet de loi relatif aux mêmes domaines

Pour autant, le périmètre du dialogue social ne saurait se limiter au seul champ défini par l’article L. 1 du code du travail. Au-delà des domaines précisés dans ce texte, le dialogue social s’étend à des thèmes aussi divers que la conciliation entre vie familiale et professionnelle, la protection sociale, la sécurisation des parcours professionnels, le développement durable, la lutte contre les discriminations, le logement, la dimension sociale de la construction européenne… Autant de sujets vastes, dont les conséquences pour demain sont loin d’être négligeables, et à propos desquels il est non seulement légitime, mais indispensable que les partenaires sociaux débattent régulièrement au niveau national interprofessionnel.

Instaurer un lieu institutionnalisé de débats permanents ouvert aux partenaires sociaux représentatifs permettrait de faire entrer de façon significative ces derniers dans une logique d’échanges réguliers favorables au développement du dialogue social. Les partenaires sociaux seraient enfin maîtres de leur agenda et sortiraient de la « liberté surveillée » consistant à demander à leur demander de trouver un accord sur un sujet défini par le Gouvernement faute de quoi, celui-ci reprend la main.

Au contraire, ce Conseil serait chargé d’établir la liste de tous les thèmes relevant du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle pour lesquels une telle négociation pourrait être ouverte et d’établir, lorsqu’un thème a été inscrit sur la liste, un calendrier prévisionnel de négociation.

Le Conseil serait le lieu des négociations interprofessionnelles sur saisine de l’État, du Parlement ou auto saisine.

Ce Conseil permanent du dialogue social pourrait constituer une commission du Conseil économique, social et environnemental et se réunir dans les locaux de celui-ci pour plus d’indépendance à l’égard de toute autre institution.

Proposition n° 4 : Créer un Conseil permanent du dialogue social, instance nationale d’organisation et de coordination du dialogue social siégeant auprès du Conseil économique, social et environnemental et composé des organisations syndicales de salariés et d’employeurs.

Le dialogue social, tel qu’il est appréhendé en France, est encore intrinsèquement lié à un rapport employeur/salarié dans une relation de subordination.

L’économie collaborative est l’expression consacrée pour désigner l’économie numérique ou de l’économie des plateformes, mais ces notions ne se recoupent pas parfaitement. Toutefois, beaucoup contestent que l’activité d’une société comme Uber puisse être qualifiée de « collaborative ». On parlera alors d’économie de plateforme.

La façon de travailler subit une transformation par l’usage de techniques numériques qui se traduit concrètement par la présence d’une plateforme d’échanges. Il s’agit en général d’une « place de marché » où clients et prestataires peuvent se rencontrer. Les nouveaux travailleurs sont des travailleurs des plateformes mais pas des employés de celle-ci pas plus que les vendeurs de quatre saisons ne sont les employés du marché. Le rôle de la plateforme est d’éviter au travailleur d’avoir à rechercher un client puisque c’est celui-ci qui recherche un prestataire par le biais de la plateforme. Les travailleurs du numérique travaillent à la tâche.

La conséquence de cette nouvelle forme de travail est un transfert du salariat en contrat à durée indéterminée vers d’autres formes de travail : contrat à durée déterminée et travail indépendant en fait sous la dépendance économique de la plateforme.

La subordination juridique demeure le critère principal de définition du contrat de travail salarié. Il est bien cerné par une jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle le salariat est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui donne des ordres et des directives, en contrôle l’exécution et en sanctionne les manquements (10).

La capacité de ces critères à rendre compte de la relation entre une plateforme et un travailleur fait débat. Nombre de personnes estiment aujourd’hui qu’il existe un salariat déguisé, dans les entreprises de transport notamment.

Toutefois, il semble encore délicat, en droit, de qualifier de salarié de la plateforme un prestataire libre de ses horaires et propriétaire de son outil de travail. En tout état de cause, cette question n’a pas encore été tranchée nettement par le juge.

Le rapporteur pour avis estime par conséquent plus responsable de ne pas laisser le juge dégager de nouvelles formes de subordination et de légiférer dans le domaine. Mme Véronique Descacq, secrétaire générale adjointe de la CFDT, a affirmé au cours de son audition par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur le paritarisme (11) : « Je suis persuadée qu’il faut dépasser ces notions de subordination juridique et économique. Il y a un lien de subordination lorsque quelqu’un fournit du travail, surveille l’exécution de ce travail, le contrôle et en fixe plus ou moins le prix. Cela montre que la frontière entre la subordination juridique et économique est artificielle. Sans qu’il y ait un lien de subordination juridique, les plateformes fournissent le travail et en surveillent l’exécution – on ne peut pas prétendre que les travailleurs concernés sont complètement autonomes dans l’organisation de leur travail. En outre, les plateformes contrôlent l’exécution de leur travail – puisqu’elles peuvent les écarter – et en fixent le prix. Pour moi, c’est un lien de subordination qui justifie d’imposer les règles du code du travail […] Je pense que les formes d’exercice de certaines plateformes méritent d’être requalifiées comme de l’emploi salarié. Cela ne vaut pas pour toutes les plateformes collaboratives, notamment celles qui se trouvent à la frontière du bénévolat et du prêt d’appartement. En revanche, cela vaut pour celles qui présentent toutes les caractéristiques d’un lien de subordination que l’on qualifiait jusqu’ici de subordination juridique, et que je qualifierai, pour ma part, de lien simplement de subordination, comme pour le secteur des transports. »

Le rapporteur pour avis appelle à prendre en compte ces nouveaux liens directement induits par l’évolution de l’organisation du travail. Une réflexion poussée sur l’extension de la notion de subordination à la subordination économique, lui semble indispensable. Il ne s’agit pas de rigidifier les nouvelles formes de travail, mais de remettre du dialogue social dans l’économie de plateforme sous peine de voir apparaître des cohortes de travailleurs dits indépendants mais sans aucun droit. Un équilibre reste donc à trouver, pour garantir aux travailleurs de plateformes les droits auxquels ils peuvent légitimement prétendre, sans pour autant remettre en cause le modèle de ces nouvelles formes d’activité, génératrices de dynamisme économique et d’emplois.

Le code du travail dispose dans sa rédaction actuelle que les organisations syndicales représentent les salariés. Un travailleur de plateforme est juridiquement un travailleur indépendant. Ces travailleurs se situent donc dans une situation hybride entre les employeurs et les salariés et se trouvent donc dans un vide représentatif préjudiciable à la défense de leurs intérêts.

Le rapporteur pour avis ne prétend pas apporter de solution à cette épineuse question juridique, économique et sociale. Mais il note l’urgence d’inventer un nouveau paritarisme qui prenne en compte les nouvelles formes d’économie. Pour cela, il faut régler la question de la représentation de ces nouveaux travailleurs :

– soit en favorisant leur représentation par les syndicats de salariés en étendant la notion de subordination à la subordination économique ;

– soit en favorisant la constitution de syndicats dédiés susceptibles de conclure des accords d’entreprise ou de branche.

Dans une publication récente (12), Jean-Denis Combrexelle ne manque pas de souligner les enjeux juridiques posés par les évolutions à venir du travail et de l’emploi et les inquiétudes que ces changements suscitent. « L’interrogation principale porte sur les changements qui affecteront le travail des techniciens, ingénieurs, cadres et professions libérales, c'est-à-dire sociologiquement celui qui correspond aux classes moyennes » soulève-t-il. Parmi les différents scénarios d’évolution de l’organisation du travail, se dessine celui d’une diversification des situations que l’on devine d’ores et déjà, entre travail salarié, travail indépendant et « des situations intermédiaires et variées de para-subordination » amenées à se développer. Votre rapporteur pour avis partage la conviction que ces situations n’attendront pas le cadre de la loi pour se diffuser. C’est l’un des principaux défis que devront relever le législateur, mais aussi les partenaires sociaux, dans les toutes prochaines années, que de trouver la réponse juridique adaptée à une question dont tous les termes n’ont pas encore fini d’être posés.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social (voir le compte rendu de la commission élargie du 3 novembre 2016 à 15 heures (13)), la commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2017 de la mission « Travail et emploi » sur les rapports de Mme Chaynesse Khirouni (Emploi), de M. Francis Vercamer (Travail), et de M. Gilles Lurton (Compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage »).

M. Jean-Patrick Gille, président. Mes chers collègues, cinq amendements ont été déposés auprès de notre commission

La Commission est saisie de l’amendement II-AS14 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Je rappelle que les amendements déposés l’ont été au terme d’échanges avec le rapporteur spécial de la commission des finances et que certains de nos débats vont naturellement faire écho à ceux qui viennent d'avoir lieu en commission des finances.

Cet amendement précédemment évoqué vise à majorer les crédits de l’aide aux postes pour les entreprises adaptées. Je tiens à souligner que notre objectif est l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Le chemin est encore long.

La Commission adopte l’amendement II-AS14.

Puis elle examine l’amendement II-AS9 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Il s’agit de majorer les crédits destinés au financement des programmes sociaux innovants.

La Commission adopte l’amendement II-AS9.

Elle examine maintenant l’amendement II-AS8 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Cet amendement a pour objet de doter les missions locales de référents justice leur permettant d’accueillir le public des jeunes anciens détenus.

La Commission adopte l’amendement II-AS8.

Puis elle examine l’amendement II-AS15 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. L’amendement II-AS15 vis à augmenter les moyens consacrés à la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences.

La Commission adopte l’amendement II-AS15.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » modifiés et à celle des crédits du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » sans modification.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Table ronde syndicats salariés :

Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – M. Pierre Jardon, secrétaire confédéral en charge du dialogue social, et M. Michel Charbonnier, conseiller politique

– Force ouvrière (FO) – Mme Marie-Alice Medeuf-Andrieu, secrétaire confédérale, et Mme Heïdi Akdouche, assistante confédérale

– Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) – M. Abdel Kader Axel Ramdane, délégué national au dialogue social, restructuration des branches et représentativité, et Mme Barbara Reginato, juriste confédérale en droit social

– Confédération française démocratique du travail (CFDT) (*) – Mme Carole Hellegouarc’h, secrétaire confédérale, et M. Christophe Clayette, secrétaire confédéral

– Confédération générale du travail (CGT) – M. Fabrice Angei, membre du bureau confédéral, et Mme Anne Braun, responsable du pôle juridique

Ø Conseil économique social et environnemental (CESE) – M. Patrick Bernasconi, président, Mme Nathalie Vaysse, administratrice de la section du travail et de l’emploi, et Mme Catherine Lopez, conseillère chargée des relations institutionnelles

Ø Table ronde syndicats employeurs :

– Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-Michel Pottier, vice-président, en charge des affaires sociales et de la formation, M. Florian Faure, directeur des affaires sociales et de la formation, et Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale adjointe

– Mouvement des entreprises de France (MEDEF) (*) – M. Michel Guilbaud, directeur général, Mme Pia Voisine, directrice de mission à la direction des relations sociales, et Mme Marine Binckli, chargée de mission à la direction des affaires publiques

Ø Direction générale du travail (DGT) – M. Yves Struillou, directeur général, et Mme Cécile Nissen, adjointe au chef du bureau des relations collectives du travail

Ø Cabinet de la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnel et du dialogue social – Mme Bethânia Gaschet, directrice adjointe, Mme Amel Hafid, conseillère droit du travail, Mme Mathilde Tournier, conseillère budgétaire, et M. Nicolas Vignolles, conseiller parlementaire

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

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