N° 4132 tome III - Avis de M. Alain Tourret sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).



N
°  4132

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 4061)
de
finances pour 2017

TOME III

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

FONCTION PUBLIQUE

PAR M. Alain TOURRET

Député

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Voir le numéro : 4125-III-28

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir au rapporteur pour avis au plus tard le 10 octobre 2016.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur pour avis.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : LA POURSUITE DE LA MODERNISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE EN 2017 7

I. L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME FONCTION PUBLIQUE 7

A. LA PROGRESSION NOTABLE DES DÉPENSES DE FORMATION DES FONCTIONNAIRES EN 2017 (+ 6,3 %) 7

B. DES DÉPENSES D’ACTION SOCIALE GLOBALEMENT STABLES 9

C. UN EFFORT ACCRU EN FAVEUR DE L’APPRENTISSAGE (+ 22%) 10

1. Un objectif de 10 000 apprentis supplémentaires en 2015 / 2016 dans la fonction publique de l’État 10

2. Des crédits budgétaires en hausse pour parvenir à l’objectif 11

II. LES PRIORITÉS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L’ADMINISTRATION ET DE LA FONCTION PUBLIQUE POUR 2017 12

A. LA MISE EN œUVRE DU PROTOCOLE RELATIF AUX PARCOURS PROFESSIONNELS, AUX CARRIÈRES ET AUX RÉMUNÉRATIONS 12

B. LA POURSUITE DE LA SIMPLIFICATION DU PAYSAGE INDEMNITAIRE 14

C. LA RÉNOVATION DES LEVIERS MANAGÉRIAUX 15

SECONDE PARTIE : UN BILAN POSITIF DE LA MISE EN œUVRE DES PROPOSITIONS DE VOTRE RAPPORTEUR DEPUIS 2013 17

I. LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS DANS LA FONCTION PUBLIQUE A ÉTÉ LARGEMENT RENFORCÉE 17

A. UNE MEILLEURE DÉTECTION DES DISCRIMINATIONS 17

B. DE NOUVEAUX INSTRUMENTS POUR RÉDUIRE LES DISCRIMINATIONS 21

C. LE RENFORCEMENT DES SANCTIONS EN CAS DE DISCRIMINATION 24

D. LE RENFORCEMENT DE L’EXIGENCE D’EXEMPLARITÉ DE LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE PAR D’AUTRES VOIES QUE CELLES PROPOSÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR 25

II. LA RÉFORME DE LA POLITIQUE DES EFFECTIFS, DES RÉMUNÉRATIONS ET DE L’ORGANISATION DU TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE DOIT ÊTRE POURSUIVIE ET ACCENTUÉE 26

A. UNE AMBITION INSUFFISANTE CONCERNANT LA POLITIQUE DES EFFECTIFS DANS LA FONCTION PUBLIQUE 27

1. Une amélioration des statistiques relatives à la gestion des ressources humaines dans les trois versants de la fonction publique, à parfaire 27

2. Une amélioration des voies d’accès des jeunes à la fonction publique 29

3. Un encouragement, dans la fonction publique hospitalière, à l’enrichissement des tâches des professionnels paramédicaux et des auxiliaires médicaux 30

4. Le rejet des propositions tendant à assouplir le statut de fonctionnaire 31

5. Le report sine die de la proposition tendant à inciter les collectivités territoriales à geler ou réduire leurs effectifs à travers une exonération totale ou partielle de la baisse de leurs dotations l’année suivante. 32

B. UNE DÉMARCHE AMBITIEUSE EN FAVEUR D’UNE PLUS GRANDE MAÎTRISE DES RÉMUNÉRATIONS 33

C. UNE RÉFORME DE L’ORGANISATION DU TRAVAIL À APPRONFONDIR RAPIDEMENT 35

1. Respecter la durée légale du travail dans l’ensemble de la fonction publique et harmoniser le régime des autorisations spéciales d’absence 35

2. Mettre en place un véritable plan de lutte contre l’absentéisme 37

3. Poursuivre le renforcement de la démarche de management et l’accompagnement des personnels dans la conduite du changement 39

EXAMEN EN COMMISSION 41

PERSONNES ENTENDUES 71

ÉTAT DE LA MISE EN œUVRE DES 34 PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR DEPUIS 2012 73

La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » comprend quatre programmes budgétaires dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 : le programme 148 « Fonction publique », le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local », le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » et le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges ».

Le présent rapport pour avis de la commission des Lois porte sur les crédits du programme n° 148 « Fonction publique » et poursuit deux objectifs.

Le premier consiste à donner un aperçu de l’emploi des crédits alloués à ce programme budgétaire pour 2017. Avec 245,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, il est en augmentation de 4,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. Pour autant, il ne rassemble pas la plupart des ressources nécessaires à la mise en œuvre de la politique appliquée dans les trois versants de la fonction publique.

Sur le seul versant de l’État, les dépenses de personnel s’élèvent, pour 2017, à 127,3 milliards d’euros dont 72,5 milliards d’euros s’agissant des rémunérations d’activité. L’évolution des effectifs de l’État et de ses opérateurs est d’ailleurs un sujet sensible, le Gouvernement s’étant engagé, au début du quinquennat, à stabiliser les effectifs sur la période 2012-2017. Le Gouvernement considère que cet objectif devrait être atteint, hors contexte sécuritaire ayant conduit à partir de 2015 à renforcer les effectifs des ministères de la Défense, de l’Intérieur et de la Justice au-delà des plafonds d’emplois prévus par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012-2017 (1).

Le second objectif découle du choix affirmé par votre rapporteur pour avis au début de la législature consistant à traiter une thématique transversale intéressant les trois versants de la fonction publique.

Après avoir approfondi la question de la lutte contre toute forme de discrimination dans la fonction publique (2), la politique des effectifs, des rémunérations et de l’organisation du travail des agents publics (3), puis la problématique du cumul d’activités des fonctionnaires (4), il est temps de faire le bilan de la mise en œuvre des propositions formulées dans l’ensemble de ces avis durant ce quinquennat.

Or, ce bilan apparaît très positif. En effet, sur les 34 propositions recensées par votre rapporteur dans ses quatre avis budgétaires sur les projets de loi de finances pour les années 2013 à 2016, il apparaît que 16 d’entre elles ont été mises en œuvre par le Gouvernement et le Parlement tandis que 11 autres sont en cours de mise en œuvre ou soumises à l’étude des partenaires sociaux. Au total, près de 80 % des propositions de votre rapporteur auront donc été suivies d’effet.

PREMIÈRE PARTIE : LA POURSUITE DE LA MODERNISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE EN 2017

Au total, le montant des crédits alloués au programme 148 s’élève à 245,1 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) contre respectivement 231,5 et 234,4 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2016. Cela représente une augmentation de 4,5 % par rapport à la loi de finances pour 2016, après une progression de 15 % entre 2015 et 2016 exclusivement dédiée à la création d’une nouvelle action relative à la promotion de l’apprentissage (5).

Le montant global des dépenses de l’action n° 1 « Formation des fonctionnaires » s’élève à 83,13 millions d’euros en AE et CP contre 78,17 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2016. Cette prévision budgétaire représente une progression de 6,3 % des crédits de formation des fonctionnaires après plusieurs années de baisse (– 0,6 % en 2016 et – 2,8 % en 2015 et 2014).

Ces crédits correspondent essentiellement aux subventions pour charge de service public versées aux opérateurs en charge de la formation initiale des futurs cadres supérieurs de l’État – l’École nationale d’administration (ENA) – ainsi que celle des futurs attachés d’administration formés dans les instituts régionaux d’administration (IRA). La dimension « recrutement » inclut depuis 2009 les classes préparatoires intégrées (CPI), mises en place dans le cadre de la promotion de l’égalité des chances. Une part des crédits est, par ailleurs, consacrée à la formation continue des agents afin de favoriser, notamment par l’échelon interministériel déconcentré, le développement des politiques de professionnalisation selon une logique de « métiers ».

L’augmentation des crédits de formation des fonctionnaires en 2017 devrait notamment permettre de financer :

– le recrutement de 110 élèves-attachés supplémentaires au sein des IRA à compter du 1er septembre 2017 afin de répondre aux besoins de recrutements exprimés par l’ensemble de la communauté interministérielle ;

– la création de trois nouvelles classes préparatoires intégrées (CPI) et l’augmentation de 700 à 1 000 du nombre d’élèves afin de favoriser l’accès des étudiants d’origine modeste et des demandeurs d’emplois aux corps et cadres d’emploi de la fonction publique à la rentrée 2017 ;

– l’instauration de formations à la conduite du dialogue social proposées aux chefs de service déconcentrés dans l’année suivant leur prise de poste ainsi qu’une formation obligatoire au management à l’attention des personnes nommées pour la première fois à un emploi de chef de service ou de sous-directeur.

Votre rapporteur souligne également les efforts engagés par le Gouvernement pour attirer de nouveaux talents dans la fonction publique dans le cadre de la lutte contre les discriminations, grâce à la rénovation des voies d’accès à la fonction publique proposée dans le projet de loi égalité et citoyenneté (PLEC) (6), à travers :

– la promotion du troisième concours grâce à la suppression de la condition d’accès en fonction de la « nature » de l’activité exercée dans le secteur privé (article 36) ;

– la reconnaissance de l’expérience professionnelle des apprentis du secteur public comme privé et des titulaires d’un contrat de professionnalisation pour se présenter au troisième concours, conformément à la proposition n° 1 de votre rapporteur dans son avis budgétaire sur les crédits du programme Fonction publique pour 2016 ou encore la prise en compte des engagements de type service civique dans les épreuves de concours (article 36) ;

– l’extension du Parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et de l’État (PACTE) aux jeunes jusqu’à 28 ans au lieu de 25 ans et l’ouverture de ce dispositif aux seniors en très grande difficulté (chômage de longue durée, être titulaire d’un minimum social) (article 36 bis C). Cette évolution s’inscrit parfaitement dans le cadre de la proposition n° 5 de votre rapporteur relative à la rénovation du PACTE, présentée dans son avis budgétaire sur les crédits du programme Fonction publique pour 2015 ;

– la création d’une nouvelle voie d’accompagnement des demandeurs d’emplois vers la fonction publique (article 36 septies). Il s’agit, dans le texte adopté par le Sénat, de l’expérimentation d’une voie de recrutement contractuel pour l’accès aux corps et cadres d’emplois de la catégorie A et B dans les trois versants de la fonction publique : ce dispositif, ouvert aux jeunes et aux seniors en grande difficulté leur permettrait de bénéficier pendant une année ou deux de ce dispositif contractuel pour préparer les concours, tout en occupant un emploi dans l’administration, sur l’ensemble du territoire national.

Sur le plan de la performance, l’indicateur 2.1 du programme Fonction publique relatif à l’optimisation de la formation initiale des fonctionnaires retrace l’évolution du coût complet du recrutement et de la formation d’un élève à l’ENA (environ 83 000 euros par an) et dans les IRA (environ 60 500 euros par an). Il est globalement stable depuis deux ans.

Néanmoins, étant donné le coût de ces formations, votre rapporteur soutient la proposition de Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, lors de son audition, qui lui a précisé vouloir porter une vigilance accrue au respect de l’obligation des élèves-fonctionnaires d’exercer une activité professionnelle dans le secteur public durant plusieurs années suivant leur sortie d’école (obligation décennale pour les élèves de l’ENA), sous peine de devoir rembourser les frais de scolarité engagés par l’État.

Représentant 51,6 % des crédits du programme n° 148, l’action n° 2 « Action sociale interministérielle » fait l’objet, dans le projet de loi de finances pour 2017, d’une enveloppe budgétaire d’un montant total de 126,4 millions d’euros en AE et CP (contre 123,3 millions d’euros en AE et 126,3 millions d’euros en CP en loi de finances initiale pour 2016). Ces crédits assurent le financement :

des prestations individuelles ayant principalement pour objet de faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle ou de favoriser la mobilité des agents de l’État : issues en partie des négociations salariales avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique à l’échelon national, il s’agit des chèques vacances (36,15 millions d’euros, soit 123 000 ouvertures de droit), des chèques emploi service universel pour la garde d’enfants (39,4 millions d’euros, soit 81 000 bénéficiaires), des aides à l’installation des personnels de l’État (10,4 millions d’euros, soit 10 500 bénéficiaires), du financement des sections régionales interministérielles d’action sociale (4 millions d’euros) et du logement d’urgence (0,5 million d’euros) ;

des prestations collectives qui répondent à une triple finalité : garantir à tous les agents de l’État un socle minimal de prestations, quelle que soit la politique menée par le ministère dont ils relèvent ; permettre des économies d’échelle dans la gestion des prestations individuelles désormais déléguée à des opérateurs retenus dans le cadre d’appels d’offre au niveau national ; traduire concrètement au niveau interministériel le principe de participation des fonctionnaires à la définition et à la gestion de l’action sociale dont ils bénéficient. Il s’agit plus précisément de financer la réservation de places en crèches (25,4 millions d’euros, permettant de financer un parc d’environ 2 700 berceaux) ou de logements sociaux (0,7 million d’euros), d’opérations d’investissement destinées à la mise aux normes des restaurants interministériels administratifs (8,2 millions d’euros en AE et 7,5 millions d’euros en CP), d’aides aux retraités (2,2 millions d’euros).

Afin de donner une impulsion nouvelle à l’apprentissage dans la fonction publique, le Président de la République a fixé des objectifs de recrutement ambitieux en ce qui concerne l’État au cours de la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet 2015. Ainsi, 4 420 apprentis devaient être recrutés à partir du mois de septembre 2015 et 5 580 à partir du mois de septembre 2016.

Selon les données issues de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des études statistiques (DARES), en 2015, la fonction publique a enregistré 10 689 nouveaux contrats d’apprentissage, soit une hausse de 24,9 % par rapport à 2014.

La fonction publique territoriale reste le principal employeur des nouveaux apprentis avec 61 % des entrants en 2015 malgré un recul de 9,8 % par rapport à 2014. Dans la fonction publique hospitalière, le nombre des nouveaux entrants en 2015 a augmenté de 2,6 % par rapport à 2014. En revanche, les entrées en apprentissage dans la fonction publique de l’État, qui représentent cette année un tiers des nouveaux entrants comptabilisés par la DARES, ont quadruplé en 2015 pour atteindre 3 589.

LES ENTRÉES EN CONTRAT D’APPRENTISSAGE DANS LA FONCTION PUBLIQUE PAR VERSANT EMPLOYEUR

À ces 3 589 apprentis recrutés dans la fonction publique d’État au cours de l’année 2015, s’ajoutent les professeurs alternants et étudiants apprentis professeurs dont le recrutement n’est pas enregistré par la DARES et les contrats conclus avant 2015 pour deux ou trois années (7). Il en résulte qu’au total 4 496 apprentis en formation ont été recrutés au sein de la fonction publique d’Etat au titre de l’année scolaire 2015/2016. Tous les ministères ont participé à cette campagne de recrutement, en particulier les ministères de l’Éducation nationale (2 500 contrats), de l’Intérieur (600 contrats), de la Défense (400 contrats) et les ministères économiques et financiers (260 contrats).

S’agissant de l’année 2016, il serait prématuré d’établir un bilan tant que la rentrée 2016-2017 n’est pas achevée, les contrats pouvant être conclus jusqu’en décembre. Néanmoins, votre rapporteur considère que les perspectives de recrutement pour la campagne 2016-2017 devraient permettre de répondre à l’objectif de 10 000 contrats d’apprentissage conclus et « vivants » au sein de la fonction publique de l’État d’ici la fin de l’année.

Dotée de 30 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2016, la nouvelle action n° 3 du programme « Fonction publique » est en progression de 22 % dans le présent projet de loi de finances pour 2017 pour atteindre 35,77 millions d’euros.

Cette action est destinée à prendre en charge 50 % des coûts de rémunération et de formation des nouveaux apprentis recrutés dans la fonction publique d’État, le solde étant directement financé par les ministères ou leurs opérateurs.

Ces remboursements s’opèrent sur la base des frais réels constatés par les éléments d’information transmis par les ministères après avis des contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM) et des contrôleurs financiers des opérateurs concernés. Aucun indicateur de performance n’est toutefois associé à cette action.

La progression des crédits de l’action n° 3 en 2017 est cohérente avec l’objectif fixé par le Président de la République d’intensifier les recrutements de jeunes de 16 à 25 ans en apprentissage dans la fonction publique d’État pour atteindre 10 000 contrats nouveaux sur la période 2015/2016 d’ici la fin de l’année.

Ouverte le 7 octobre 2014, la négociation relative aux Parcours professionnels, carrières et rémunérations – Avenir de la fonction publique (PPCR) s’est donnée pour objectif de construire, par le dialogue social, la fonction publique de demain en confortant et modernisant les grands principes d’une fonction publique de carrière. Cette négociation s’est conclue le 17 juillet 2015, après la tenue de quarante réunions thématiques associant les organisations syndicales et les employeurs publics représentés au Conseil commun de la fonction publique, par la transmission d’un projet de protocole s’articulant autour de deux thématiques : la première regroupant les mesures d’adaptation de la fonction publique aux évolutions de l’action publique, la seconde concernant l’amélioration de la politique de rémunération.

Le protocole a recueilli l’approbation de six organisations syndicales (CFDT, UNSA, FSU, CFTC, FA-FP, CGC), rassemblant 49 % des suffrages exprimés en faveur des organisations disposant d’au moins un siège au Conseil commun de la fonction publique. Trois organisations n’ont pas souhaité l’approuver (CGT, FO, Solidaires), estimant que les revalorisations n’étaient pas à la hauteur de leurs revendications.

Au regard de ces résultats, proches du seuil de 50 % du nombre de voix nécessaire pour la validation d’un projet d’accord dans la fonction publique, le Premier ministre a pris la décision, le 30 septembre 2015, d’appliquer l’intégralité des mesures du protocole à l’ensemble des fonctionnaires. Deux dispositions inscrites à l’article 148 de la loi de finances pour 2016 prévoient, à ce titre :

– une mesure de rééquilibrage de la rémunération des fonctionnaires en faveur du traitement indiciaire, par la mise en œuvre d’un dispositif de transformation d’une partie du régime indemnitaire en points d’indices. Le décret d’application de cette mesure a été publié au Journal officiel du 13 mai 2016 (décret n° 2016-588 du 11 mai 2016) et plus de vingt décrets statutaires et indiciaires ont également été publiés à ce jour pour permettre son déploiement.

Les montants moyens par agent des revalorisations accordées dans le cadre du protocole s’établissent comme suit :

– pour les agents de catégorie C : 10 points d’indice majoré, à l’issue de la montée en charge 2017/2020, soit 562 euros brut d’augmentation indiciaire annuelle en 2020 (estimés en fonction de la valeur du point au 1er février 2017), desquels sont déduits 167 euros au titre de la mesure de transfert primes / points ;

– pour les agents de catégorie B : 13 points d’indice majoré, à l’issue de la montée en charge 2016/2018, soit 731 euros brut d’augmentation indiciaire annuelle en 2018 (estimé en fonction de la valeur du point au 1er février 2017), desquels sont déduits 278 euros au titre de la mesure de transfert primes /points ;

– pour les agents de catégorie A : 20 points d’indice majoré, à l’issue de la montée en charge en 2018, 2019 ou 2020 selon la filière professionnelle à laquelle appartiennent les corps ou cadres d’emplois concernés, soit 1 125 euros brut d’augmentation indiciaire annuelle en 2020 (estimé en fonction de la valeur du point au 1er février 2017), desquels sont déduits 389 euros au titre de la mesure de transfert primes /points.

Dans le cadre de cette rénovation des grilles indiciaires, une attention particulière a été portée sur les traitements des agents en début de carrière, de manière à mieux traduire sur le plan indiciaire la différence de niveau de qualification exigée pour le recrutement dans les corps et cadres d’emplois des différentes catégories. Ainsi, la revalorisation indiciaire à l’entrée dans un corps ou cadre d’emplois s’élèvera, à l’issue de la montée en charge, à 58 euros bruts par mois en catégorie C (recrutement sans exigence de diplôme), à 98 euros bruts par mois en catégorie B (recrutement niveau Bac) et à 137 euros bruts par mois en catégorie A (recrutement niveau licence ou master).

Par ailleurs, la revalorisation des grilles prend en compte l’allongement de la durée de la vie professionnelle et permet de restaurer les écarts entre les catégories statutaires. Le processus de revalorisation a débuté au 1er janvier 2016 pour les corps et cadres d’emplois de catégorie B et pour les corps et cadres d’emplois paramédicaux et sociaux de catégorie A. Au 1er janvier 2017 débutera la seconde vague de la revalorisation, pour les agents relevant des corps et cadres d’emplois de catégorie C, les corps et cadres d’emplois de catégorie A ne relevant pas des filières sociales et paramédicales, et les personnels sous statuts spéciaux.

Au total, tous les corps et cadre d’emplois des trois versants de la fonction publique sont concernés, soit environ 300 corps de fonctionnaires d’État, 55 cadres d’emplois pour la fonction publique territoriale et 50 corps pour la fonction publique hospitalière ;

– une mesure d’harmonisation des modalités, jusqu’ici très disparates, d’avancement d’échelon entre agents des trois versants de la fonction publique avec la mise en place d’un cadencement unique d’avancement d’échelon à compter de la date de publication des décrets de revalorisation indiciaire. La loi a en outre prévu la possibilité de prendre en compte la valeur professionnelle de chaque agent dans l’avancement d’échelon : une concertation a été ouverte avec les organisations syndicales le 17 décembre 2015 sur ce sujet et les travaux réglementaires conduisant à la modification d’autant de statuts particuliers doivent être achevés au 1er janvier 2017.

Le protocole PPCR prévoit en outre la définition d’un programme de simplification statutaire propre à la fonction publique d’État. Selon l’indicateur 1.2 du projet annuel de performance, au 31 décembre 2016, l’on dénombrait encore 301 corps dans la fonction publique de l’État contre 304 fin 2015. Or, ce programme de simplification statutaire pourra se traduire par des rapprochements de corps et/ou par le développement de corps interministériels, dans le respect des identités professionnelles et des missions exercées, et après engagement d’une concertation avec les partenaires sociaux. Ce programme pourrait notamment conduire à la création de nouveaux corps interministériels à gestion ministérielle (CIGEM), à l’image du corps des actuels attachés d’administration.

Toutefois, votre rapporteur observe que l’ampleur des travaux à mener dans un calendrier contraint constitue la principale difficulté de mise en œuvre du protocole. Dans ce contexte, le ministère de la fonction publique a indiqué privilégier, pour les corps de la fonction publique de l’État, le recours à des décrets transversaux permettant de procéder aux modifications de plusieurs statuts particuliers au sein d’un même texte soumis à l’avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l’État, dans le cadre de la mise en place de dispositions statutaires communes à plusieurs corps (8).

La création du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 s’inscrit dans une démarche de rationalisation du paysage indemnitaire en remplaçant la plupart des primes et indemnités existantes dans la fonction publique de l’État, dont la prime de fonction et de résultats (PFR). En effet, le système de primes était très complexe et fragmenté, ce qui nuisait à sa visibilité mais aussi à la mobilité des fonctionnaires.

Répondant à un objectif de transversalité et reposant sur des ressorts volontairement souples, ce nouveau dispositif indemnitaire a vocation à s’appliquer à la majorité des corps et emplois de la fonction publique de l’État, devenant ainsi le régime indemnitaire de référence, alors que la PFR ne concernait que la filière administrative (9). Au 1er juillet 2016, on dénombrait près de 200 000 fonctionnaires de l’État bénéficiant du RIFSEEP (10), étant précisé que deux chantiers interministériels sont en voie d’achèvement avec la publication d’un barème applicable à certains emplois de responsabilités supérieures tels que les chefs de service ou les sous-directeurs, et d’autres propres aux différents corps d’infirmiers (catégories A et B).

Le nouvel indicateur 1.1 du programme Fonction publique traduit la montée en charge du dispositif en indiquant la part des agents des filières administratives, sociales et technique s’inscrivant dans un dispositif de simplification indemnitaire. La prévision actualisée pour 2016 est de 55 %. Pour 2017 la cible de 100 % est maintenue mais pourra difficilement être atteinte : la prévision est de 68 %.

En effet, alors que le décret du 20 mai 2014 prévoyait une généralisation du dispositif au 1er janvier 2017, le Gouvernement estime désormais nécessaire d’assouplir le calendrier initial afin de favoriser l’adhésion des agents au dispositif. Un arrêté listant les corps et emplois selon qu’ils resteront concernés par l’adhésion au 1er janvier 2017, bénéficieront d’un délai complémentaire en raisons de difficultés particulières, ou seront, au moins dans un premier temps et pour une durée limitée, exclus, devrait donc être publié cet automne.

Votre rapporteur regrette ce report dans la mise en œuvre de la simplification du régime indemnitaire des fonctionnaires qui aurait dû être achevée fin 2017.

Outre le renforcement de la formation des cadres et l’ouverture du recrutement dans la fonction publique aux étudiants d’origine modeste et aux demandeurs d’emplois (voir supra, I, A), la DGAFP envisage de promouvoir en 2017 le développement de la culture managériale et la rénovation des leviers managériaux, à travers :

– le renforcement de la fonction « ressources humaines » (RH) interministérielle grâce à un meilleur positionnement de la DGAFP pour animer les instances interministérielles de gouvernance que constituent le comité de pilotage des secrétaires généraux et des directeurs des ressources humaines (11) et le comité de pilotage « métiers » (12) ;

– le déploiement de plans managériaux dans les ministères afin de professionnaliser certaines pratiques managériales, en encourageant par exemple la pratique des évaluations à 180° ou 360° comme levier de développement personnel, en améliorant la gestion prévisionnelle des ressources humaines (diffusion du nouveau guide méthodologique sur la GPRH dans les services de l’État), en prenant mieux en compte les conséquences des nouvelles organisations du travail issues notamment de l’usage du numérique ou des réorganisations territoriales(13) ;

– une amélioration des processus de détection des talents, à travers le décloisonnement des viviers et la professionnalisation des nominations par la généralisation des revues de cadres et des comités d’audition. Ces procédures, prévues pour les directeurs d’administration centrale (14) et les chefs de service (15), doivent conduire à professionnaliser et à rendre plus transparent le recrutement des cadres dirigeants de l’État en ouvrant plus largement la sélection des candidatures. Ainsi, depuis le 24 mai 2016, pour chaque nomination à un emploi de chef de service, un comité d’audition est chargé d’émettre un avis sur les candidatures présentées afin d’éclairer le choix du ministre. Un rapport sur l’application de ces dispositions devra être présenté au Conseil supérieur de la fonction publique de l’État avant le 1er mai 2017.

Votre rapporteur soutient activement la création d’une véritable « DRH de l’État » qui devrait conduire in fine à piloter les directions des ressources humaines ministérielles, avant de pouvoir envisager une coordination RH entre les trois versants de la fonction publique.

SECONDE PARTIE : UN BILAN POSITIF DE LA MISE EN œUVRE DES PROPOSITIONS DE VOTRE RAPPORTEUR DEPUIS 2013

L’examen des crédits du programme Fonction publique pour 2017 est l’occasion de faire le point sur l’ensemble des propositions formulées par votre rapporteur durant ce quinquennat. Trois thématiques ont été étudiées : la lutte contre les discriminations dans la fonction publique (2013 et 2014), les effectifs, le temps de travail et l’organisation du travail à l’horizon 2019 (2015) ainsi que la réforme du cumul d’activités des agents proposée par le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (2016). Au total, votre rapporteur a proposé au Gouvernement d’engager 34 réformes d’ampleur.

L’heure du bilan étant venue, votre rapporteur se félicite du fait que sur ces 34 propositions, 16 ont déjà été mises en œuvre et 11 sont en cours de mise en œuvre ou soumises à la réflexion des partenaires sociaux en vue d’aboutir d’ici la fin du quinquennat. Reste 7 propositions que le Gouvernement n’a pas jugées opportunes et sur lesquelles il conviendra de revenir (16).

Dans ses avis sur les crédits du programme 148 Fonction publique dans le cadre des projets de loi de finances pour 2013 et 2014, votre rapporteur avait fait le choix de consacrer son étude thématique à la lutte contre les discriminations dans la fonction publique. Il avait ainsi formulé douze propositions pour améliorer la détection des discriminations, résorber les inégalités entre les femmes et les hommes, améliorer la situation des handicapés, renforcer les sanctions en cas de discrimination et rendre plus équitable l’accès à la haute fonction publique dont les représentants se doivent de montrer l’exemple.

Beaucoup d’efforts ont été entrepris pour améliorer la situation. Votre rapporteur estime que l’action du Gouvernement et de la majorité parlementaire en la matière a été efficace et doit être saluée. Il se réjouit d’avoir pu contribuer utilement à ce combat pour l’égalité réelle au sein de la fonction publique puisque le Gouvernement a déjà traduit sept de ses douze propositions tandis que deux autres sont en cours de mise en œuvre.

Dès 2013, votre rapporteur a formulé trois propositions pour mieux connaître et rendre publiques les discriminations dans la fonction publique.

● La première était relative à l’institution d’un « observatoire des discriminations » dans la fonction publique.

Des progrès certains ont été enregistrés pour améliorer la connaissance statistique sur les phénomènes de discrimination dans la fonction publique et le recensement de bonnes pratiques, bien qu’il n’ait pas été créé formellement un « observatoire des discriminations dans la fonction publique ».

En pratique, le Conseil commun de la fonction publique (CCFP) assure le suivi de la mise en œuvre des politiques de lutte contre les discriminations dans la fonction publique, et notamment le suivi de la charte pour la promotion de l’égalité et la lutte contre les discriminations dans la fonction publique, signée le 13 décembre 2013 entre le Défenseur des Droits et la Ministre de la fonction publique (17). De la même manière, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) est chargé du suivi de l’accord-cadre pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique territoriale, signé le 2 juillet 2013 avec le ministère des Droits de la femme.

De plus, dans la continuité du comité interministériel « Égalité et Citoyenneté » du 6 mars 2015, le Gouvernement s’est engagé sur des actions fortes en faveur de l’égalité d’accès aux métiers de la fonction publique et d’une plus grande diversité des profils et des parcours. Le principe de l’égal accès aux emplois revêt en effet une importance majeure.

Une mission a ainsi été confiée par le Premier ministre à M. Yannick L’Horty, Professeur à l’Université Paris-Est Marne-La-Vallée, afin d’évaluer les risques de discriminations des recrutements dans les trois versants de la fonction publique. Ce rapport, remis le 12 juillet 2016 au Premier ministre (18), est très instructif et montre que l’égalité réelle n’est pas encore atteinte malgré des progrès notables. Or, les conclusions de cette étude reprennent la proposition de votre rapporteur puisque l’auteur indique : « Au terme de cette mission, nous ne formulons qu’une seule recommandation : la mise en place d’un outil de pilotage des politiques d’égalité consistant à pérenniser ce type d’investigation. En unifiant l’ensemble des formulaires dématérialisés d’inscription aux concours de la fonction publique et en coordonnant les systèmes d’information et de gestion des concours des ministères et des écoles du service public, il deviendrait possible de créer un réservoir de données de concours, individuelles, anonymes et exhaustives qui pourrait être utilisé de façon régulière pour le suivi de l’égalité de chaque concours. Ce dispositif de recueil et de traitement des fichiers de gestion de concours serait utilement complété par des tests ponctuels de discrimination et par des outils complémentaires d’évaluation d’impact, ciblés sur quelques politiques d’égalité ».

Le Gouvernement a indiqué qu’il donnerait suite à cette recommandation et a notamment déposé un amendement au projet de loi égalité citoyenneté précité (PLEC), adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, pour permettre de systématiser la collecte des données statistiques nécessaires et prévoir un rapport biennal sur les discriminations dans les trois versants de la fonction publique confié au CCFP (article 36 bis(19)).

Enfin, s’agissant des discriminations constatées en matière de rémunérations, le Gouvernement a également amélioré sa connaissance du sujet.

Après la publication en septembre 2014 d’une étude sociologique sur « Le plafond de verre dans les ministères, une analyse de la fabrication organisationnelle des dirigeant.e.s », des travaux économétriques conduits par trois laboratoires de recherche sur les écarts de rémunérations entre les femmes et les hommes ont été présentés au printemps 2015 à la formation spécialisée « Égalité » du Conseil commun de la fonction publique ainsi qu’aux hauts fonctionnaires à l’égalité, en présence de la ministre en charge de la fonction publique. Les résultats de ces travaux montrent notamment qu’un écart de salaire moyen de 12 % entre les femmes et les hommes persiste dans la fonction publique, contre 19 % dans le secteur privé ; que la concentration des femmes ou des hommes dans des types et niveaux d’activité et d’emploi différents a des conséquences sur les écarts de rémunération ; que la maternité est une source d’inégalités salariales et que les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes s’accroissent tout au long des carrières. D’ores et déjà, des ministères, tels que celui de la Culture et de la Communication, se sont saisis de ces résultats pour réaliser leurs propres études.

En outre, les articles 50 et 51 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, a prévu deux types de rapports relatif au suivi de ces questions. Il s’agit du rapport annuel sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, d’une part, et du rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes, inclus dans le bilan social de chaque employeur public, d’autre part. Le rapport annuel sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique est présenté au Conseil commun de la fonction publique, puis transmis aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. La première édition a été publiée en 2014, la seconde édition 2015 a été enrichie et publiée le 28 avril 2016 (20).

Dans ces conditions, votre rapporteur considère que sa première proposition est satisfaite.

● Sa seconde proposition visant à consacrer la lutte contre les discriminations comme l’un des thèmes systématiquement abordés au cours des concertations annuelles organisées entre le Gouvernement et les organisations représentatives est également mise en œuvre.

En effet, votre rapporteur ne peut que se féliciter du fait que la lutte contre les discriminations ait été l’un des thèmes systématiquement abordés dans le cadre de l’agenda social porté par le Gouvernement, soit au travers du traitement direct de ces sujets (formation des jurys de concours, formation des agents, labellisation « Diversité et Égalité » …), soit, de manière dite « intégrée », dans le cadre des négociations conduites par ailleurs. À titre d’exemple, le Gouvernement a décidé le 21 janvier 2016, conformément à l’accord du 8 mars 2013 et dans le cadre du protocole PPCR précités, de prendre en compte de façon systématique la dimension d’égalité entre les femmes et les hommes dans la politique de rémunération de la fonction publique. Le rapport biennal du Gouvernement sur les discriminations dans la fonction publique, prévu par le projet de loi « égalité-citoyenneté » précité, fera également l’objet d’une concertation approfondie avec les partenaires sociaux.

● Enfin, sa troisième proposition, visant à consacrer 10 % du volume horaire de la formation initiale et continue des fonctionnaires à l’apprentissage de la gestion des situations de discrimination dans les trois versants de la fonction publique, est en cours de mise en œuvre.

En effet, la Direction interministérielle de lutte contre le racisme et l’antisémitisme (DILRA) et la DGAFP ont mandaté l’IRA de Nantes pour mettre en œuvre un module de sensibilisation, obligatoire et commun à tous les nouveaux agents de l’État, portant sur les valeurs de la République, les Droits de l’Homme, la lutte contre les stéréotypes et les préjugés, ainsi que sur les comportements qui seront attendus d’eux, à ces égards, dans l’exercice de leurs fonctions. L’IRA de Nantes organise donc des formations de formateurs internes à l’administration, afin que ceux-ci soient en mesure d’animer ces formations dans les services. Depuis 2015, 120 formateurs internes ont été formés et sont à la disposition des ministères.

Par ailleurs, le dispositif de formation, tel qu’il a été conçu, s’inscrit pleinement dans la démarche de candidature au Label Diversité (21) que les ministères ont à conduire d’ici fin 2016, en application de la décision du Gouvernement lors du comité interministériel « Égalité et Citoyenneté » du 6 mars 2015. En effet, la formation des agents à la prévention des discriminations fait partie des critères d’attribution du Label Diversité. La DGAFP favorise cette démarche pour les ministères en facilitant la candidature des organismes publics par l’adaptation du cahier des charges à la fonction publique. En outre, un accompagnement interministériel est mis en place, notamment par la mise à disposition d’un outil d’autodiagnostic permettant à l’organisme candidat d’établir une cartographie des risques et de prioriser son plan d’actions. Enfin, un appui bilatéral est proposé aux ministères et aux organismes publics candidats.

Au-delà de l’amélioration du diagnostic en matière de discrimination dans la fonction publique, votre rapporteur a émis plusieurs propositions invitant le Gouvernement à adopter des mesures concrètes pour réduire puis mettre fin à ces situations inadmissibles.

 La première de ces propositions consistait à lutter contre les écarts de salaires injustifiés à travers l’instauration, auprès de chaque employeur public, d’un comité des rémunérations compétent pour engager, le cas échéant, une procédure tendant à résorber ces inégalités.

Cette proposition a été concrétisée même si elle ne revêt pas la forme proposée par votre rapporteur. En effet, les ministères sont désormais tenus de publier un rapport de situation comparée dans le cadre du bilan social annuel, sur le fondement des 27 indicateurs prévus par le protocole d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 8 mars 2013 (22) et précisés par un arrêté du 23 décembre 2013 (23). Ces données sont présentées devant chaque comité technique et permettent de définir un plan d’actions concrètes et de contester, le cas échéant, les écarts salariaux injustifiés.

De plus, l’article 61 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes prévoit désormais que, dans les communes de plus de 20 000 habitants, préalablement aux débats sur le projet de budget, le maire présente un rapport sur la situation en matière d’égalité entre les femmes et les hommes en deux parties : la première partie concerne le fonctionnement de la commune (volet RH), et la seconde les politiques qu’elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. Ces dispositions sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plus de 20 000 habitants, ainsi qu’aux conseils départementaux et aux conseils régionaux, à compter du 1er janvier 2016 et, pour les régions regroupées, à compter du 1er janvier 2017. Ce débat est l’occasion de mettre en évidence d’éventuelles injustices et de permettre aux élus d’adopter les mesures adéquates pour y mettre fin.

Enfin, une mission a été confiée à Mme Françoise Descamps-Crosnier, députée des Yvelines, par le Premier ministre, le 1er juillet 2016 pour « identifier les éventuelles discriminations existantes dans le système de rémunération et de promotion dans la fonction publique ». Elle devrait remettre son rapport avant la fin de l’année 2016 pour permettre au Gouvernement de réagir avant la fin du quinquennat.

● Deux autres propositions de votre rapporteur tendaient à garantir des nominations équilibrées entre les femmes et les hommes.

Pour ce faire, votre rapporteur invitait le Gouvernement à « transmettre chaque année à l’Assemblée nationale et au Sénat le bilan détaillé de la mise en œuvre du dispositif de nomination d’un pourcentage minimal de personnes de chaque sexe dans l’encadrement supérieur des collectivités publiques » et à « annuler les nominations non conformes à ce dispositif ».

Rappelons que la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 (24) impose, depuis le 1er janvier 2013, que les nominations de nouveaux agents aux principaux emplois de l’encadrement supérieur et dirigeant de l’État, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière soient pourvues par au moins 20 % de personnes de chaque sexe. Ce taux est porté à 30 % au 1er janvier 2015 et à 40 % à partir de 2017. Il est également prévu un mécanisme de pénalité financière lorsqu’un employeur public ne respecte pas cette obligation.

Le décret n° 2014-1747 du 30 décembre 2014 modifiant le décret n° 2012-601 du 30 avril 2012 relatif aux modalités de nominations équilibrées dans l’encadrement supérieur de la fonction publique organise la mise en œuvre du dispositif, notamment le calendrier de transmission des données au ministre chargé de la fonction publique et le montant des contributions financières qui devront être acquittées par les employeurs en cas de non-respect de l’obligation chiffrée de nominations équilibrées. Ce décret a également avancé d’une année le calendrier initial pour atteindre le taux de 40 % en 2016. En cas de non-respect de l’obligation chiffrée de nominations équilibrées, des contributions financières devront être acquittées par les employeurs, qui se monteront en 2017 à 90 000 euros par unité manquante. Ce mécanisme de pénalités financières ayant été jugé suffisant par le législateur, la proposition de votre rapporteur d’annuler les nominations non conformes au dispositif proposé n’a pas été retenue.

En revanche, l’application de ce dispositif fait l’objet d’un bilan annuel établi par la DGAFP. Il dresse pour chaque versant de la fonction publique et ministère par ministère s’agissant de la fonction publique de l’État le bilan annuel du dispositif des nominations équilibrées. Ce bilan est public et il est publié en ligne sur le site du ministère de la fonction publique de sorte que le Parlement est parfaitement informé de la situation (25).

Les bilans 2013 et 2014 montrent des progrès notables. En 2014, 1 928 agents ont été nommés sur des postes à haute responsabilité. Parmi ceux-ci, 1 093 ont fait l’objet d’une primo-nomination, dont 33% de femmes. L’objectif de 20 % fixé par la loi a donc été dépassé cette année encore, avec une proportion de femmes identique à celle constatée en 2013.

Dans la fonction publique de l’État, le taux global de 30 % de primo-nominations féminines reste très supérieur au taux légal fixé même si une baisse est constatée par rapport à l’année 2013 (-3 points). Cette évolution masque de fortes disparités entre les ministères qui respectent tous, cependant, le taux légal de 20 %. Dans la fonction publique territoriale, les nouvelles nominations de femmes s’établissent à 28,5 %, en baisse par rapport à celles de 2013 (- 4,5 points). Dans la fonction publique hospitalière, il y a eu 55 % de femmes nouvellement nommées, soit un taux en forte hausse par rapport à l’année 2013 (+ 27 points).

Si votre rapporteur regrette que le bilan 2015 ne soit pas encore disponible, il est optimiste sur la réalisation de l’objectif de nomination de 40 % au moins de personnes de chaque sexe en 2016 compte tenu des informations qui lui ont été transmises par la ministre de la fonction publique et la DGAFP.

● Une autre proposition visait plus spécifiquement l’amélioration de l’emploi des personnes atteintes d’un handicap.

En effet, votre rapporteur avait observé que le taux d’emploi des handicapés au 31 décembre 2011 s’élevait à 4,41 % pour l’ensemble de la fonction publique, dont 3,34 % pour l’État, 5,10 % pour la fonction publique hospitalière et 5,32 % pour la fonction publique territoriale. Ces taux demeurent inférieurs à l’obligation d’emploi de personnes handicapées fixée à 6 % de l’effectif total des établissements publics ou privés d’au moins vingt agents alors qu’en vertu de la loi, le handicap ne doit pas être considéré comme un motif permettant d’écarter une personne d’un concours ou d’un emploi de la fonction publique (26).

Votre rapporteur observe que si la situation de l’emploi des personnes atteintes d’un handicap s’est légèrement améliorée, des efforts importants restent à faire. Au 31 décembre 2013, le taux d’emploi de ces personnes dans la fonction publique a atteint, globalement, 4,92 %, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière tendant à respecter l’objectif de 6 % (respectivement 5,97 % et 5,34 %) alors que la situation dans la fonction publique d’État reste très préoccupante (seulement 3,84 %).

Il proposait par ailleurs, dès 2013, de garantir aux personnes en situation de handicap un droit effectif de saisine directe du Fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique. En effet, la saisine directe de cet organisme, prévue par l’article 13 de la loi n° 2011-901 du 28 juillet 2011, n’était pas possible en l’absence d’un décret modifiant le décret n° 2006-501 du 3 mai 2006.

Cette garantie a enfin été inscrite à l’article 3-1 dudit décret par l’article 4 du décret n° 2016-783 du 10 juin 2016. Au terme du premier alinéa de cet article, les agents reconnus travailleurs handicapés pourront donc saisir le fonds, à compter du 1er janvier 2017, d’une demande de financement pour les actions relatives à l’aménagement des postes de travail, les actions de formation et d’information et la prise en charge des rémunérations versées aux agents chargés d’accompagner une personne handicapée dans l’exercice de ses fonctions.

Par-delà les actions à mettre en œuvre pour résorber les discriminations dans la fonction publique, votre rapporteur a émis deux propositions pour renforcer les sanctions en cas de discrimination à l’encontre des agents publics, qui ont été consacrées par la loi.

● La première de ces propositions était d’inclure, dans le statut général de la fonction publique, un nouveau critère de discrimination lié à la « situation de famille ».

En effet, les travaux de votre rapporteur l’ont conduit à constater que la situation de famille pouvait entraîner des discriminations à l’encontre des agents publics opérées à raison de la situation matrimoniale, de la nature de la filiation, d’une situation de concubinage ou de PaCS ou encore de l’absence ou de l’existence d’enfants.

Or, les discriminations en fonction de la situation de famille sont réprimées pénalement (par l’article 2251 du code pénal) et interdites, pour les salariés du secteur privé, par l’article L. 11421 du code du travail (la situation de famille ne peut être mentionnée dans une offre d’emploi et ne peut motiver un refus d’embauche, une mutation ou la résiliation du contrat de travail).

En droit de la fonction publique, la situation de famille est certes prise en compte dans certaines décisions relatives à la carrière des agents (par exemple le rapprochement de conjoints), mais elle était ignorée de la liste des discriminations interdites, fixée à l’article 6 de la loi n° 83634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

La proposition de votre rapporteur a finalement trouvé une traduction par l’adoption de l’article 55 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, issu d’un amendement présenté par Mme Françoise Descamps-Crosnier, rapporteure du texte à l’Assemblée nationale.

L’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, modifiée, prévoit désormais que : « Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation ou identité sexuelle, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race […] ».

● La seconde proposition visait à instituer une procédure d’action de groupe pour la réparation des préjudices causés par des faits de discrimination au bénéfice des agents de la fonction publique.

L’action de groupe se définit comme une voie ouverte par la procédure civile, permettant à un ou plusieurs requérant(s) d’exercer, au nom d’une catégorie de personnes, une action en justice.

Or, les investigations de votre rapporteur l’ont conduit à constater qu’en matière de discriminations, certains agents publics peuvent éprouver des réticences à intenter, seuls, une action devant la justice administrative tandis que la perspective de lourds dommages et intérêts pourrait inciter à la prévention des discriminations.

Il a donc milité en faveur de l’introduction d’une action de groupe pour la réparation des préjudices causés par des faits de discrimination au bénéfice des agents de la fonction publique depuis 2014 et se félicite du fait que le législateur l’ait finalement consacrée à l’article 88 de la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle, adoptée définitivement par le Parlement le 12 octobre 2016.

Désormais, une organisation syndicale de fonctionnaires représentative au sens du III de l’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou un syndicat représentatif de magistrats de l’ordre judiciaire pourra agir devant le juge administratif afin d’établir que plusieurs candidats à un emploi, à un stage ou à une période de formation ou plusieurs agents publics font l’objet d’une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur un même motif et imputable à un même employeur. Une association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans intervenant dans la lutte contre les discriminations ou œuvrant dans le domaine du handicap pourra agir aux mêmes fins en faveur de plusieurs candidats à un emploi ou à un stage.

Le dernier thème abordé par votre rapporteur dans le cadre de la lutte contre toute forme de discrimination dans la fonction publique était lié à la nécessité de renforcer les exigences d’exemplarité de la très haute fonction publique grâce à trois mesures qui n’ont finalement pas été retenues :

– approfondir le rapprochement déjà engagé entre l’École nationale d’administration et l’Institut national des études territoriales ;

– détacher la haute fonction publique du statut de la fonction publique ;

– imposer à tout fonctionnaire élu député ou sénateur qui a déjà exercé un mandat législatif de choisir, une fois réélu, entre son deuxième mandat législatif et son appartenance à la fonction publique.

Si le rapprochement entre l’ENA et l’INET est engagé depuis 2015, le Gouvernement ne souhaite pas fusionner ces deux écoles ni envisager la fusion de la très haute fonction publique d’État et de la fonction publique territoriale.

Il a par ailleurs retenu d’autres options que celles proposées par votre rapporteur pour renforcer les exigences d’exemplarité des plus hauts fonctionnaires dans le cadre de :

– la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. En effet, en vertu du VII et du X de l’article 2 de cette loi, tout fonctionnaire élu député ou sénateur lors du prochain renouvellement de l’Assemblée nationale ou d’une série du Sénat suivant la publication de cette loi) sera « placé d’office, pendant la durée de son mandat, en position de disponibilité ou dans la position équivalente prévue par son statut ne lui permettant pas d’acquérir de droits à l’avancement et de droits à pension », sauf lorsqu’il occupe un emploi public mentionné aux 1° ou 2° de l’article LO 142 ;

– la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, dans la mesure où elle étend à de nombreux hauts fonctionnaires l’obligation de présenter une déclaration d’intérêt et/ou une déclaration de patrimoine et instaure un collège de déontologie dans les juridictions administratives et financières.

Dans son avis sur les crédits du programme Fonction publique pour 2015, votre rapporteur s’était interrogé sur les voies et moyens pour concilier l’objectif de redressement des comptes publics avec celui de l’amélioration de la qualité de vie au travail de plus de cinq millions de fonctionnaires, en partant de l’idée qu’aucune piste de réflexion ne devait être écartée a priori pour faire évoluer les effectifs, les rémunérations et l’organisation du travail dans la fonction publique d’ici 2019. Dans son avis sur les crédits pour 2016 dédiés au même programme, il s’était également positionné en faveur d’une facilitation du cumul d’emplois des agents publics dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

Sur l’ensemble de ces thématiques, il avait formulé 22 propositions dont la mise en œuvre est globalement satisfaisante puisque 9 d’entre elles ont d’ores et déjà été traduites soit dans les textes législatifs ou réglementaires, soit dans les actions menées par l’administration ; 9 autres sont en cours de mise en œuvre ou soumises à l’étude des partenaires sociaux ; enfin, 4 propositions ont été écartées par le Gouvernement.

Après avoir constaté l’augmentation des effectifs d’agents publics dans les trois versants de la fonction publique depuis l’an 2000 et salué l’objectif de stabilisation des effectifs de l’État fixé par la loi de programmation des finances publiques 2012-2017, votre rapporteur avait rappelé la nécessité de respecter deux étapes préliminaires avant toute réflexion sur les effectifs : définir les missions du service public – qui relève de chaque Gouvernement – et se doter d’un outil statistique fiable et commun aux trois versants de la fonction publique.

● Sa première proposition consistait donc à confier à la formation « connaissances statistiques et évolution de l’emploi public » du Conseil commun de la fonction publique (CCFP) la mission de définir des indicateurs communs de gestion des ressources humaines dans les trois versants de la fonction publique en 2015, donnant lieu à la remise d’un rapport annuel au Parlement avant le 1er octobre.

Le Gouvernement considère que la formation spécialisée « connaissance statistique et évolution de l’emploi » du Conseil commun de la fonction publique joue effectivement ce rôle. Elle se réunit plusieurs fois par an pour échanger sur les résultats statistiques et les systèmes de recueil d’information relatifs aux évolutions de l’emploi public, à la politique des retraites dans la fonction publique et à la connaissance statistique de la situation, de la rémunération et des pensions des agents publics. Les indicateurs destinés à alimenter les bilans sociaux, les rapports de situation équilibrée ou les bilans hygiène et sécurité ou tout autre bilan statistique transverse ont vocation à y être présentés et débattus, en complément de leur discussion dans les formations ad hoc.

À titre d’exemple, en 2015 – 2016, l’ordre du jour des réunions a plutôt porté sur les indicateurs de rémunérations (deux réunions) qui ont abouti à refondre la présentation de cette partie dans le rapport annuel sur l’état de la fonction publique. Selon les informations transmises par le Gouvernement, en 2016-2017, les indicateurs et travaux statistiques ainsi que les méthodes de recueil en matière de temps de travail et facteurs de variation du temps effectif travaillé seront proposés à la discussion à la formation du CCFP après la conduite d’un groupe de travail associant la DGAFP, l’INSEE, la DARES, la DREES et la DGCL.

Votre rapporteur salue le travail d’ores et déjà réalisé et l’enrichissement du rapport annuel sur l’état de la fonction publique, qui regroupe, dans sa partie « faits et chiffres », l’ensemble des données et indicateurs statistiques disponibles ou construits dans les trois versants de la fonction publique. Ce rapport est présenté à la formation spécialisée du CCFP chaque année et y fait l’objet d’un débat avant sa publication et son appropriation par le Parlement notamment.

Il regrette néanmoins que cette formation spécialisée du CCFP se réunisse relativement peu et qu’elle n’ait pas suffisamment les moyens, à ce jour, de créer, de développer et surtout d’assurer le suivi et la diffusion d’un outil statistique fiable et commun aux trois versants de la fonction publique sur l’ensemble de la politique des ressources humaines. Il observe également que les données sur l’état de la fonction publique ne sont jamais à jour, les statistiques présentées ayant systématiquement deux à trois ans de retard par rapport à l’année de publication.

● Sa seconde proposition dans le champ statistique concernait l’amélioration de la connaissance du nombre d’agents publics, globalement et dans chaque versant de la fonction publique, exerçant une activité privée lucrative ou non ou exerçant une autre activité dans la fonction publique.

Le Gouvernement a indiqué que l’INSEE avait constitué depuis quelques années, et plus particulièrement depuis 2011, un panel regroupant les déclarations annuelles de données sociales (DADS) du secteur privé, les éléments des fichiers de paie de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et les DADS des employeurs publics hors employeurs couverts par la paie de la DGFiP. Ce fichier, transmis à la DGAFP depuis 2016, lui permettrait désormais de conduire les travaux sur le cumul d’activité et de revenus salariés (en assimilant les fonctionnaires à des salariés). Il serait ainsi possible de connaître le nombre d’agents publics de chaque versant et en fonction de son statut et de bien d’autres caractéristiques démographiques (sexe, âge par exemple) ainsi que la répartition des revenus selon les différents types d’employeurs. Toutefois l’expertise de cet outil est encore à développer notamment parce que les périodes d’emploi ne sont pas détaillées si bien que l’outil ne permet pas toujours de distinguer aisément les postes occupés simultanément des postes successifs au cours de l’année. De plus, les activités bénévoles ou exercées sous statut d’indépendant (autoentrepreneur ou autre) ne sont pas recensées dans ce fichier.

Il convient de noter, par ailleurs, que, depuis janvier 2015, le secrétariat de la commission de déontologie de la fonction publique est doté d’un outil informatique permettant d’enregistrer les demandes de cumuls d’activités pour création ou reprise d’entreprise formulées par les agents des trois versants de la fonction publique. Depuis 2007, date de création de ce type particulier de cumuls d’activités, la commission de déontologie est en effet dans ce cas obligatoirement saisie. Les données statistiques ainsi collectées devraient donc fournir un aperçu de ce que représente, en termes quantitatifs, ce type de cumuls d’activités dans l’ensemble de la fonction publique.

● Sa dernière proposition, en lien avec la précédente, visait à élaborer un questionnaire commun aux trois versants de la fonction publique, à remplir par tout agent en cas de cumul d’activités, pour procéder à une évaluation qualitative du cumul d’activités des agents publics.

Ce questionnaire n’existe pas actuellement. En effet, si le formulaire de demande d’exercice d’une activité privée pose des questions assez précises sur la situation de l’agent dans l’administration (service d’appartenance, grade détenu, fonctions exercées en précisant, le cas échéant, les activités ou secteurs professionnels dont l’agent a le contrôle ou la surveillance, quotité demandée pour le temps partiel), ou sur son projet de création ou de reprise d’entreprise (secteur et branche d’activités de l’entreprise, forme de l’entreprise, fonction ou activité exercée au sein de l’entreprise, nature et montant des subventions publiques dont l’entreprise bénéficiera, le cas échéant), il ne permet pas de connaître, notamment, les principales motivations de l’agent ou la quotité horaire consacrée à cette nouvelle activité.

Un effort supplémentaire mériterait donc d’être engagé pour que la fonction publique soit irréprochable sur ce sujet également : les employeurs publics doivent connaître beaucoup plus précisément les cumuls d’activités de leurs agents et s’assurer qu’ils sont autorisés ou exercés en conformité avec l’autorisation donnée. Ils doivent également pouvoir apprécier les marges de manœuvre susceptibles d’être accordées aux agents pour leur permettre de s’épanouir dans le secteur privé ou associatif.

Votre rapporteur en conclut que si des progrès ont été enregistrés pour améliorer les données statistiques relatives aux effectifs de la fonction publique, des efforts plus importants doivent être engagés pour disposer d’un outil statistique fiable, à jour et commun aux trois versants de la fonction publique, retraçant les indicateurs RH les plus importants.

Dès 2015, votre rapporteur a encouragé le Gouvernement à promouvoir le développement de l’apprentissage dans la fonction publique à travers la mise en œuvre d’une politique d’inclusion positive des jeunes de 16 à 25 ans qui prenne en compte l’ancienneté des apprentis dans le service public pour leur permettre d’accéder aux concours internes de la fonction publique et rénover le parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d’État (Pacte). L’objectif de cette proposition était d’attirer de nouveaux talents, d’horizons divers, afin de redynamiser la fonction publique et de réduire la moyenne d’âge dans les trois versants tout en luttant contre les discriminations à l’embauche.

Il se félicite que le Gouvernement ait totalement fait sienne cette proposition à travers l’engagement du Président de la République de recruter 10 000 nouveaux apprentis en 2015 / 2016 et l’instauration, dans le projet de loi égalité et citoyenneté (PLEC), de plusieurs mesures destinées à tenir compte de l’ancienneté des apprentis dans le service public pour leur permettre d’accéder aux concours de la fonction publique ou au Pacte (27).

À la suite des auditions menées par votre rapporteur fin 2014, il lui est apparu souhaitable de promouvoir « une politique de substitution de certains actes médicaux vers des professionnels paramédicaux dont les compétences seraient définies par mission et non plus par acte, afin de réduire les coûts et améliorer l’accès à l’offre de soins ».

Il faut en effet rappeler qu’avec la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, les professionnels de santé ont pu s’engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération ayant pour objet d’opérer des transferts d’activités ou d’actes de soins ou de réorganiser leurs modes d’intervention auprès des patients. Depuis la mise en œuvre opérationnelle de ce dispositif à la fin 2010, les coopérations entre professionnels de santé ont connu une montée en charge régulière. Ainsi, au 1er juin 2016, 268 protocoles avaient été examinés ou étaient en cours d’examen par le Collège de la Haute autorité de la santé. Ils ont abouti à 51 autorisations et à 220 protocoles dupliqués autorisés. Au total, 2 738 professionnels paramédicaux, regroupés au sein de 539 équipes, ont adhéré à ces protocoles de coopération.

L’ensemble de ces protocoles permettent d’opérer des transferts d’actes qui contribuent in fine à enrichir les tâches des professionnels paramédicaux et à dégager du temps médical, à l’hôpital, pour recentrer l’activité des médecins délégants sur la prise en charge des cas de patients les plus complexes.

C’est la raison pour laquelle votre rapporteur a soutenu cette démarche et encourage le Gouvernement à la développer. Il se félicite donc du fait que la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé se soit engagée dans cette voie en enrichissant les actes susceptibles d’être pratiqués par des orthophonistes, des masseurs-kinésithérapeutes, des pédicures-podologues, des opticiens lunetiers, des orthoptistes, des sages-femmes et des manipulateurs d’électroradiologie médicale à la place des médecins.

Il salue également le fait que cette même loi ait créé un exercice en pratique avancée des auxiliaires médicaux (à commencer par les infirmiers). L’exercice en pratique avancée permettra au professionnel d’aborder des situations de prise en charge complexes et transposables, quelle que soit la pathologie du patient, lesquelles justifient un suivi régulier et de proximité. Les domaines d’intervention des infirmiers (et à terme des auxiliaires médicaux en pratique avancée) pourront concerner :

– des activités d’orientation/de prévention/de dépistage, la réalisation d’actes d’évaluation et de conclusion cliniques, actes techniques, de surveillance clinique et paraclinique ;

– la prescription de certains produits de santé, d’examens complémentaires, visant à renouveler ou adapter les prescriptions médicales.

Cette modalité d’exercice contribuera, elle-aussi, à améliorer la réponse aux besoins de santé notamment des personnes atteintes de pathologies chroniques, des personnes âgées et des personnes en situation de handicap, tout en libérant du temps médical à l’hôpital pour la prise en charge des cas de patients les plus complexes.

Compte tenu de l’objectif de redressement des comptes publics qui doit être partagé par l’ensemble des administrations publiques, votre rapporteur pour avis considérait qu’à missions constantes, tous les employeurs publics devaient viser un objectif de stabilisation de leurs effectifs à l’instar de l’objectif assigné à l’État et ses opérateurs sur la période 2012 à 2017.

Pour ce faire, il préconisait d’introduire davantage de souplesse dans la gestion des effectifs publics à travers la remise en cause du statut de fonctionnaire, sur la base du volontariat, en :

– introduisant une possibilité de rupture conventionnelle du statut de fonctionnaire à la charge des employeurs publics, présentant des garanties équivalentes à celles prévues par le code du travail dans le secteur privé ;

– assouplissant la réglementation relative aux dispositifs de départ volontaire, éventuellement couplée à l’augmentation du montant de l’indemnité.

Le Gouvernement n’a pas souhaité remettre en cause le statut général de la fonction publique, en introduisant un dispositif de rupture conventionnelle ou en privilégiant le recrutement de nouveaux agents publics par la voie contractuelle.

Le statut reste donc la règle et le contrat l’exception. Au demeurant, le Gouvernement a fait valoir qu’introduire une dimension contractuelle dans la relation de travail dans la fonction publique pourrait se faire au détriment des intérêts de l’employeur public, qui ne pourrait plus modifier les conditions d’emploi de son agent sans passer par une négociation sur la modification des termes de son contrat.

Par ailleurs, il considère que si le mécanisme de rupture conventionnelle d’un contrat de travail a pu faire ses preuves dans le secteur privé, ses avantages semblent bien moindres dans le secteur public. En effet, pour les fonctionnaires, les mécanismes de mobilité, de disponibilité et de démission volontaire leur permettent une évolution professionnelle variée avec les garanties de leur statut. Tous ces mécanismes constitueraient autant d’outils pour les collectivités publiques employeurs, dans l’objectif d’une adéquation entre les besoins en compétences et les profils disponibles dans le secteur public.

Il n’a pas souhaité non plus procéder à un assouplissement de la règlementation relative aux dispositifs de départ volontaire, éventuellement couplé à une augmentation du montant de l’indemnité. Il a toutefois indiqué à votre rapporteur que cette augmentation mériterait d’être expertisée au regard du contexte budgétaire actuel.

Tout agent public qui démissionne de la fonction publique peut donc continuer à percevoir une indemnité de départ volontaire s’il est fonctionnaire titulaire, ouvrier de l’État ou agent contractuel en contrat à durée indéterminée, s’il est à plus de cinq ans de l’âge ouvrant droit à pension de retraite – ce délai tombe à deux ans si le départ de l’agent est lié à la suppression de son poste ou à sa réorganisation dans le cadre de la réforme territoriale de 2015 – et, si l’agent qui a signé un engagement à servir l’État à l’issue d’une période de formation, a accompli la totalité du service auquel il s’est engagé. Le dispositif existant – certes différent selon les versants (28) – est souple et peu contraignant pour les agents.

Dans son avis budgétaire sur les crédits du programme Fonction publique pour 2015, votre rapporteur estimait nécessaire d’encourager la modération des effectifs dans la fonction publique territoriale à travers le non remplacement d’une part des départs en retraite prévus et les gains liés à la mutualisation générée à moyen terme par la réforme territoriale.

Il invitait donc le Gouvernement à moduler la dotation globale de fonctionnement (DGF) versée par l’État aux collectivités territoriales en fonction du comportement vertueux ou non desdites collectivités : ainsi, la baisse de la DGF – d’un montant global de 11 milliards d’euros d’ici 2017 – pourrait-elle ne pas s’imputer sur les collectivités qui auraient gelé ou réduit leurs effectifs par rapport à l’année précédente. En revanche, cette baisse pèserait plus lourdement sur les collectivités qui n’auraient pas fait d’effort pour limiter la croissance de leurs effectifs sur la même période.

Là encore, votre rapporteur regrette que cette proposition n’ait pas été mise en œuvre à l’époque, le Gouvernement ayant indiqué qu’ « elle n’était plus d’actualité dans le contexte de non réforme de la DGF ».

La masse salariale des agents publics a progressé de 0,5 % par an en moyenne en volume depuis 2002. Toutefois, au cours de cette période, les dépenses de personnel des administrations publiques locales et de sécurité sociale ont augmenté respectivement de 2,8 % et de 1,2 % par an en volume alors que celles des administrations centrales ont connu une baisse annuelle de 0,1 %. Votre rapporteur a donc fait sienne la conclusion de la Cour des comptes selon laquelle « l’État a fait beaucoup plus d’efforts que les collectivités locales et les hôpitaux pour maîtriser sa masse salariale » (29). Il a formulé plusieurs propositions destinées à mieux maîtriser l’évolution des dépenses de rémunération dans la fonction publique territoriale et hospitalière.

La première proposition tendait à introduire une obligation de motivation de toute décision d’avancement d’échelon à la durée minimale par les élus, assortie d’une publication régulière de ces décisions dans chaque collectivité territoriale.

Il faut en effet rappeler que, dans la fonction publique territoriale, l’avancement d’échelon à la durée minimale (deux ans) était devenue la règle si bien que la progression des rémunérations était beaucoup plus rapide que dans la fonction publique hospitalière (avancement à la durée normale en général, 3 ans) ou dans la fonction publique de l’État (avancement à la durée maximale, 4 ans).

Or, comme cela a déjà été indiqué dans la première partie du présent rapport, le protocole d’accord PPCR a prévu la suppression des dispositifs d’avancements minimum dans les trois versants de la fonction publique et instauré une cadence unique d’avancement, mise en place dès le 1er janvier 2016 pour les corps de catégorie B (avec période de transition jusqu’au 1er juillet 2016) et au 1er janvier 2017 pour les autres catégories. Il en résulte que, dans les collectivités territoriales, les rémunérations liées à l’avancement d’échelon seront nécessairement ralenties, et ce de manière bien plus systématique que ne le proposait votre rapporteur.

S’agissant de la politique d’avancement dans la fonction publique hospitalière, la Fédération hospitalière de France (FHF) avait en outre proposé à votre rapporteur, en 2014, d’instaurer un dispositif de déroulement de carrière permettant un avancement en lien avec la valeur professionnelle (suppression du système de notation actuelle), facteur de motivation des agents hospitaliers, laissé à l’appréciation du directeur ou de son représentant (sur proposition de l’encadrement), ce qui impliquerait la suppression de l’avis des commissions administratives paritaires dans ce cas.

Après avoir constaté que l’article 44 de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social permettait déjà d’expérimenter un tel dispositif, votre rapporteur avait proposé de le généraliser dès le 1er janvier 2015. Toutefois, tel n’a pas été le cas, le Gouvernement faisant état de « l’absence d’un bilan satisfaisant de l’expérimentation ».

La deuxième proposition relative à la fonction publique territoriale visait à instaurer une obligation de mobilité professionnelle, hors de la collectivité de titularisation dans le premier grade, pour l’accès au deuxième grade de la catégorie A+ dans les filières techniques ainsi qu’une obligation de mobilité interne au sein de la collectivité pour le principalat ou le deuxième grade de tous les cadres d’emplois de catégorie A et B dans toutes les filières.

Votre rapporteur se félicite du fait que le premier aspect de cette proposition ait été mis en œuvre de manière à harmoniser les cadres d’emplois d’ingénieurs en chef à parité avec ceux de la filière administrative. En effet, les administrateurs territoriaux sont soumis à une obligation de mobilité professionnelle pour passer du premier au deuxième grade de la catégorie A+ depuis le décret n° 87-1097 du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d’emplois des administrateurs territoriaux. Or, il aura fallu attendre l’article 21 du décret n° 2016-200 du 26 février 2016 pour que cette obligation soit étendue au cadre d’emploi d’ingénieur en chef territorial. Une dernière étape devra encore être franchie pour l’étendre au cadre d’emploi d’ingénieur territorial. Il réitère également sa proposition de poursuivre dans cette voie en imposant une obligation de mobilité interne au sein des collectivités territoriales pour le principalat ou le deuxième grade de tous les cadres d’emplois de catégorie A et B dans toutes les filières.

Au-delà de la nécessaire maîtrise de l’évolution des rémunérations dans la fonction publique, votre rapporteur avait constaté que le tassement des grilles de rémunération, dans les trois versants de la fonction publique, s’était largement accentué avec la revalorisation du minimum de traitement et la mise en place de la garantie individuelle de pouvoir d’achat : l’écart entre le bas de la grille C (agents peu qualifiés) et celui de la grille A (cadres) a été divisé par deux depuis 2002, certains agents de catégorie C ayant une rémunération inférieure au SMIC. Il avait donc préconisé de recréer des espaces indiciaires suffisants pour rendre attractives les carrières et harmoniser les rémunérations accessoires et les régimes indemnitaires, pour davantage de justice, dans les trois versants de la fonction publique d’ici 2017. Or, il observe que le Gouvernement s’est résolument engagé dans l’harmonisation et la mise en cohérence des grilles et régimes indemnitaires des trois versants de la fonction publique depuis 2015 dans le cadre de la mise en œuvre du protocole PPCR et de la généralisation du RIFSEEP (voir supra, partie I, C).

Dans son avis sur les crédits du programme 148 Fonction publique dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, votre rapporteur avait étudié l’évolution du temps de travail dans la fonction publique et formulé les trois propositions suivantes :

– demander un rapport au Gouvernement procédant à l’évaluation de la durée et de l’aménagement du temps de travail dans les trois versants de la fonction publique qui devra être rendu au Parlement avant le 1er octobre 2015 ;

– imposer aux collectivités territoriales et aux établissements du secteur hospitalier public ayant un régime de travail inférieur à la durée légale de 1 607 heures de le modifier dans le cadre de la négociation collective avant le 31 décembre 2015. À défaut, supprimer la base légale de ces accords dérogatoires dès le 1er janvier 2016 ;

supprimer le 4° de l’article 59 de la loi du 26 janvier 1984 qui permet à l’exécutif local de distribuer des autorisations spéciales d’absence n’entrant pas en compte dans le calcul des congés annuels dès 2016, à défaut de l’adoption d’un décret en Conseil d’État encadrant ses modalités d’application en 2015.

Il constate aujourd’hui que si la première de ces propositions a bien été suivie d’effet, les deux autres mériteraient d’être mises en œuvre au plus vite par le Gouvernement et le Parlement dans la mesure où elles ont été reprises dans le rapport de M. Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, chargé par le Premier ministre d’une mission d’évaluation du temps de travail dans les trois versants de la fonction publique en juillet 2015. Ce rapport a été remis le 26 mai 2016 à Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, et présenté au Conseil commun de la fonction publique le 27 juin 2016 (30). Il présente un état des lieux du temps de travail dans les trois versants de la fonction publique et formule 34 recommandations construites autour de quatre axes :

– fixer la moyenne effective de travail dans la fonction publique à 1 607 heures ;

– moderniser les organisations de travail pour mieux s’adapter aux besoins des usagers (annualisation, moins de cycles, forfait...) ;

– garantir plus d’équité entre fonctions publiques et entre agents placés dans des situations comparables (astreintes, autorisations spéciales d’absence, compensation des sujétions...) ;

– assurer un meilleur suivi du temps de travail et une plus grande transparence (labellisation, bilans sociaux...).

Ce rapport confirme notamment que, si le temps de travail annuel moyen dans la fonction publique est de 1584 heures (inférieur de 1,4 % à la durée règlementaire), cette moyenne inclut tous les régimes dérogatoires – légaux ou non – et tous les types d’absence, y compris pour raisons de santé. Cette situation s’explique principalement par la nature des missions confiées aux agents publics. En effet, les exigences du service public entraînent des contraintes spécifiques (travail de nuit, de week-end).

Pour autant, les propositions n° 6 et 23 du rapport reprennent exactement celles formulées par votre rapporteur.

Or, le Gouvernement a indiqué qu’afin d’analyser plus précisément chacune de ces propositions, une réflexion avec les employeurs publics et les organisations syndicales des trois versants de la fonction publique a été engagée par la ministre de la fonction publique au cours du second semestre 2016. Des groupes de travail se réunissent actuellement et devraient permettre de partager les constats établis par la mission et d’analyser l’ensemble des recommandations formulées par le rapport, au regard des besoins d’organisation actuels des services et de ceux des usagers du service public.

Votre rapporteur estime néanmoins que le constat étant désormais partagé et parfaitement connu, il devient urgent de modifier les dispositions législatives permettant encore aux collectivités territoriales de déroger à la durée légale de 1 607 heures et d’harmoniser le régime des autorisations spéciales d’absences dans les trois versants de la fonction publique.

Dans son avis sur les crédits du programme 148 Fonction publique dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, votre rapporteur avait proposé de « lancer une grande campagne de lutte contre l’absentéisme dans la fonction publique, tant il est un indicateur pertinent du mal-être au travail, un facteur de désorganisation des équipes et qu’il représente un coût considérable pour l’État, les collectivités territoriales et le secteur hospitalier, qui supportent à la fois la rémunération de l’agent absent et le coût de son remplacement ».

Dans ce cadre, il invitait le Gouvernement à :

– charger la formation « connaissances statistiques et évolution de l’emploi public » du Conseil commun de la fonction publique, de définir des indicateurs simples permettant de mesurer clairement l’absentéisme dans les trois versants de la fonction publique, en s’appuyant sur les départements statistiques ministériels compétents ;

– introduire une journée de carence d’ordre public, en cas de congé maladie ordinaire, dans le secteur public et le secteur privé afin d’assurer une parfaite égalité de traitement entre les travailleurs ;

– présenter un bilan complet de l’application du décret n° 2014-1133 du 3 octobre 2014 relatif à la procédure de contrôle des arrêts de maladie des fonctionnaires avant le 4 octobre 2016.

Malgré les efforts du Gouvernement pour obtenir des données claires, complètes et fiables dans les trois versants de la fonction publique sur la question de l’absentéisme, la situation ne s’est pas améliorée. Le Conseil commun de la fonction publique est bien chargé de définir des indicateurs communs de gestion des ressources humaines mais, en 2015-2016, l’ordre du jour de ses réunions a plutôt porté sur les indicateurs de rémunération que sur ceux relatifs au temps de travail et à l’absentéisme. De plus, les données chiffrées transmises à votre rapporteur en réponse au questionnaire budgétaire, comme celles présentées dans le rapport annuel sur l’état de la fonction publique 2015, ne portent que sur la période 2004-2013 et ne permettent donc pas de dresser un état des lieux pertinent du phénomène d’absentéisme dans la fonction publique et dans le secteur privé.

De plus, le bilan de l’application du décret n° 2014-1133 du 3 octobre 2014 relatif à l’expérimentation de la délégation du contrôle des arrêts de maladie par les caisses primaires d’assurance maladie limitée aux services déconcentrés de l’État, aux établissements publics locaux d’enseignement, aux établissements publics locaux d’enseignement agricole, aux écoles élémentaires et maternelles des départements des Alpes-Maritimes, du Bas-Rhin, d’Ille-et-Vilaine, du Puy-de-Dôme et du Rhône ainsi que des services de l’administration centrale de Bercy à Paris (hors direction générale des finances publiques), est mitigé.

Rappelons que ce décret a été adopté en contrepartie de la suppression de la « journée de carence » dans la fonction publique et prévoyait que les fonctionnaires concernés, d’ores et déjà soumis à une obligation de transmission de leurs arrêts de travail dans un délai de 48 heures, verraient leur rémunération réduite de moitié si, par deux fois sur une période de 24 mois, ils ne respectaient pas ce délai de transmission.

Au 30 juin 2015, seuls 63 440 fonctionnaires de l’État étaient concernés par l’expérimentation pour un total de 275 474 arrêts de maladie. Selon les réponses au questionnaire budgétaire, 15 077 contrôles ont été effectués (taux de contrôle de 5,5 %). De plus, ce dispositif nécessitant, dans un premier temps, un arrêt tardif afin d’ouvrir la période de 24 mois pendant laquelle chaque arrêt tardif conduit à la mise en œuvre de la réduction de moitié de la rémunération, cette mesure n’a pas encore pleinement produit ses effets quantitatifs.

De juin à décembre 2015, 4,7 agents ont été sanctionnés en moyenne par mois dans le champ de la paie assurée par la direction générale des finances publiques concernant 6,3 arrêts maladie et pour un montant mensuel moyen par agent sanctionné de 190 euros. En 2016, sur la période de janvier à août, cela a concerné 10,3 agents en moyenne par mois pour 14,8 arrêts maladie et un montant mensuel moyen de retenue sur salaire de 243 euros. Ce nombre relativement faible peut être le signe de l’effet dissuasif de la mise en garde de réduction de la moitié de la rémunération qui est transmise à l’agent par son administration lors du premier envoi tardif constaté. Il peut aussi résulter de l’insuffisance des contrôles menés et du caractère trop restrictif de l’expérimentation.

En tout état de cause, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu’il envisageait de présenter d’autres mesures dans le cadre du PLF pour 2017. Pour autant, il écarte la proposition consistant à introduire un jour de carence d’ordre public, en cas de congé maladie ordinaire, dans le secteur public et le secteur privé, considérant qu’il s’agirait « d’un recul social évident pour les salariés du secteur privé qui sont pour une partie importante d’entre eux indemnisés au titre de leur couverture complémentaire (64 % des salariés et 75 % de ceux relevant d’entreprises de plus de 250 salariés) » (31). Ce refus est également fondé sur une étude de janvier 2015 de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, qui montre que les salariés du privé dont les jours de carence sont pris en charge ont tendance à moins recourir aux arrêts maladie. L’indemnisation du délai de carence n’aurait donc pas d’effet significatif sur la probabilité d’avoir au moins un arrêt dans l’année. A contrario, selon cette étude, la prise en charge du délai de carence tend à réduire la durée totale des arrêts ainsi que les effets liés au présentéisme (le fait de venir travailler en étant malade), lui-même source de coûts indirects (contagion, perte de productivité, dégradation de l’état de santé découlant in fine sur des arrêts plus longs) (32).

Dans ces circonstances, votre rapporteur ne peut que réitérer la nécessité pour le Gouvernement de lancer un vaste plan de lutte contre l’absentéisme avant la fin du quinquennat pour envisager, avec les organisations syndicales, les différents leviers susceptibles de prévenir et endiguer le phénomène d’absentéisme.

À cet égard, votre rapporteur souligne qu’il existe d’ores et déjà d’excellentes études sur le sujet qui mettent en évidence les leviers suivants (33) :

– la nécessité de déterminer un taux d’absentéisme commun et de créer un tableau de bord permettant les comparaisons dans le temps et entre entités ;

– utiliser les leviers managériaux : impliquer et responsabiliser la chaîne hiérarchique ; systématiser l’entretien de retour après maladie ; conforter le bien-être et mieux prendre en compte les conditions de travail ; améliorer la relation et la coordination entre suivi médical et attentes de services de l’employeur ;

– utiliser les leviers incitatifs et de contrôle : valorisation du régime indemnitaire en fonction de la présence ; modulation de l’étendue de la couverture en cas d’arrêt ; faire procéder au contrôle des motifs pour apprécier médicalement l’opportunité des arrêts pour envoyer un signal fort en direction des agents ;

– modifier le cadre règlementaire pour repenser la relation et les missions de la chaîne médicale notamment entre médecine de ville, médecins agréés et représentants de la collectivité / de l’hôpital / ou des services de l’État ; envisager un plafonnement du report du droit à congés acquis pendant un arrêt maladie…

Dans son avis sur les crédits du programme 148 Fonction publique dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, votre rapporteur avait invité le Gouvernement à :

– instaurer une démarche de management des ressources humaines participative et collective au sein de chaque service, fondée notamment sur le développement de la pratique des « boîtes à idées » ;

– introduire, dans tout projet de réforme organisationnelle, un plan d’accompagnement des personnels dans la conduite du changement, dont la mise en œuvre devra être concertée avec les institutions représentatives du personnel au niveau territorial pertinent ;

– dans le cadre de la réforme territoriale proposée par le Gouvernement, définir, en amont, une norme nationale précisant les modalités d’alignement des conditions de rémunération et de durée du travail applicables aux agents concernés par cette réorganisation des services publics ainsi que les conditions de prise en charge des conséquences matérielles en résultant. 

Votre rapporteur est satisfait de constater que ces trois propositions ont été mises en œuvre ou sont en cours de mise en œuvre par le ministère de la fonction publique.

En premier lieu, l’instauration d’une démarche de management participative et collective a été engagée par le ministère de la fonction publique dans le cadre du renforcement de la politique de gestion managériale des cadres de la fonction publique, du développement de nouveaux outils managériaux à leur disposition et de la formation (voir supra, I, A et C). Les journées de l’École du management et des ressources humaines organisées dans toute la France à l’automne 2016 abordent également cette question de la prise en compte de l’expression des agents dans la mise en œuvre des politiques publiques. De plus, la consultation lancée par la ministre de la fonction publique intitulée « Ma fonction publique se réinvente », également basée sur la prise en compte des propositions des agents, portera sur les nouveaux modes d’organisation du travail et notamment les modes participatifs afin d’aboutir à des propositions concrètes d’ici décembre 2016.

En second lieu, à l’occasion de la réforme des services régionaux de l’État, une circulaire de la Ministre de la fonction publique du 9 septembre 2015 a fixé les directives pour accompagner les personnels dans la conduite de cette réforme et leur proposer des garanties quant à leur situation personnelle (34). Treize engagements ont été pris pour garantir un dialogue approfondi avec les personnels tout au long de la réforme ; un accompagnement individualisé et collectif des agents des services régionaux de l’État ; un traitement identique des agents, quelle que soit leur appartenance ministérielle ; un accompagnement particulier des cadres dans la conduite du changement.

En conclusion, votre rapporteur est satisfait d’avoir pu contribuer utilement à la modernisation de la fonction publique ces dernières années et remercie le Gouvernement pour avoir pris en considération plus des trois-quarts de ses propositions durant ce quinquennat.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du vendredi 4 novembre 2016 la Commission procède, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, et de M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics auprès du ministre de l’Économie et des Finances, sur les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2017.

M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, nous sommes très heureux d’accueillir Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, et, à nouveau, M. Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, que nous voyons presque tous les jours, soit parce qu’il est directement concerné par les missions que nous examinons, soit parce qu’il supplée des ministres en déplacement. C’est le sort d’un ministre du budget que d’être taillable et corvéable à merci, et vous êtes toujours le bienvenu ici, monsieur le secrétaire d’État.

Nous sommes réunis cet après-midi pour vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2017 consacrés aux missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », « Crédits non répartis » et « Régimes sociaux et de retraite » ainsi que sur les comptes spéciaux qui y sont associés.

Je rappelle que, selon les règles de nos commissions élargies, je donnerai d’abord la parole, pour cinq minutes, à chacun de nos rapporteurs, puis, après vos réponses, aux représentants des groupes, pour cinq minutes également. Enfin, ceux de nos collègues qui le souhaitent disposeront de deux minutes pour vous interroger.

Je passe maintenant la parole au président de la commission des lois, avec qui j’ai le plaisir de coprésider cette commission élargie.

M. le président Dominique Raimbourg. Le plaisir est partagé, mon cher collègue. Je suis également heureux de vous accueillir, madame la ministre de la fonction publique, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget. Puisque nous sommes vendredi après-midi, je ne serai pas plus long et je vous propose que nous entendions sans plus attendre nos rapporteurs.

Mme Karine Berger, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits relatifs à la conduite et au pilotage des politiques économiques et financières. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, après avoir étudié, au cours des années précédentes, le pilotage des recettes fiscales et celui de dépenses, nous nous sommes interrogés cette année sur le point de savoir si les règles budgétaires européennes facilitaient ou non le pilotage des finances publiques.

Nous avons donc, tout d’abord, retracé l’évolution de ces règles, du Pacte de stabilité et de croissance jusqu’au Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), en passant par les deux réformes du Pacte de stabilité et de croissance, le « Two Pack » et le « Six Pack ». Qu’avons-nous découvert ? Premièrement, la progression de la dette publique de l’Union européenne – « l’éléphant dans la pièce » – accumulée au cours des vingt dernières années et qui atteint aujourd’hui un montant considérable n’a jamais été stoppée par l’application des règles budgétaires européennes, quelles qu’elles soient. Nous illustrons ce constat en citant certains chiffres qui montrent que même la dette publique de l’Allemagne est restée, pendant de très nombreuses années, supérieure à la limite de 60 % du PIB qui avait été fixée dans le traité de Maastricht.

Deuxièmement – et c’est peut-être l’élément le plus important de ce rapport –, ces règles n’ont jamais été appliquées au sens juridique du terme, car on en a fait progressivement une lecture politique. De fait, à chaque fois que leur application posait problème, il s’est trouvé des pays européens pour bâtir au sein du Conseil européen, sinon un consensus, du moins une majorité claire afin d’écarter les recommandations de la Commission en la matière. Les règles budgétaires européennes ne sont donc pas tant « stupides », comme les avait qualifiées Romano Prodi en 2002, qu’extrêmement politiques.

Troisièmement, le TSCG repose sur une notion très théorique, celle de croissance potentielle et de solde structurel, de sorte que nous collaborons, ou non, avec la Commission européenne sur le fondement de chiffres très difficiles à établir de manière transparente et qui, en tout état de cause, ne font pas l’objet d’un consensus. À preuve, nous avons comparé, page 29 de notre rapport, les dernières estimations, par le Gouvernement et par la Commission, des écarts de production et de solde structurel de la France. En 2015, la croissance potentielle de notre pays telle qu’évaluée par le Gouvernement est de 1,1 point de PIB alors qu’elle est, selon la Commission, de 0,8 ; quant au solde structurel qui en résulte, il est de moins 1,9 selon le Gouvernement et de moins 2,4 selon la Commission. En 2016, l’écart entre les deux évaluations s’accroît, puisqu’il est d’un demi-point s’agissant de la croissance potentielle et de 0,8 point s’agissant du solde structurel.

Comment est-il possible d’avoir un débat politique sur la situation de la France dans le cycle économique si les chiffres calculés selon les règles des traités ne font pas l’objet d’un consensus ? Nous rappelons, du reste, d’une part, que M. Padoan et un certain nombre d’autres ministres des finances européens ont entrepris une démarche pour remettre en cause le mode de calcul de la croissance potentielle et, d’autre part, que plusieurs membres de la Commission des finances ont demandé à Pierre Moscovici de revoir cette évaluation. J’en viens donc à ma première question, monsieur le secrétaire d’État. Comment peut-on piloter correctement les finances publiques de notre pays si nous ne sommes pas d’accord avec la Commission européenne sur les évaluations ?

Quatrièmement, il est fait une application très politique des règles budgétaires européennes. Nous avons en effet découvert que, contrairement à une idée reçue, il existe différentes façons d’écarter l’application stricte de ces règles. Ainsi, lorsque le Conseil européen considère que certains faits exceptionnels, qu’il s’agisse de la situation dans le cycle économique ou de chocs très particuliers, affectent l’Europe, un consensus politique se forme pour ne pas appliquer les règles. C’est ce que le Président de la République a résumé, dans son discours du 16 novembre 2015 devant le Congrès, à Versailles, en déclarant : « Le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité. » Un certain nombre de pays européens, notamment la Belgique et l’Italie, ont ainsi sollicité, au cours des derniers mois, la non-application de ces règles en raison de la crise migratoire et de la crise liée au terrorisme. En revanche, nous avons découvert, lors des auditions – et cela été confirmé à la fois par la direction du Trésor, la direction du budget et le cabinet de M. Sapin – que la France n’avait pas demandé que soient écartées les dépenses supplémentaires, évaluées à 1,5 milliard par la direction du budget, qu’elle a engagées en raison de ces deux crises. Pourtant, dans un contexte où l’Union européenne est fragilisée, le fait de considérer qu’un consensus politique émerge pour écarter les règles budgétaires à des moments critiques serait un merveilleux message adressé aux peuples européens.

J’en viens donc à ma seconde question, qui est une question politique car elle n’a pas de réponse juridique : pourquoi la France n’a-t-elle pas saisi l’opportunité d’avoir une lecture politique des traités européens dans le cadre du budget 2017 ?

M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits relatifs à la gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, et à la facilitation et à la sécurisation des échanges. Messieurs les présidents, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai suivi, en tant que rapporteur spécial, les crédits de la Direction générale des finances publiques – DGFIP – et ceux de la Direction générale des douanes et droits indirects – DGDDI – sur l’ensemble de la législature. L’examen du budget de l’année 2017 offre une excellente occasion de faire le point sur l’action de ces administrations, leurs moyens et leurs résultats car, sur cette période, les directions à réseau du ministère des finances et des comptes publics ont mené des plans d’économies ambitieux.

J’ai soutenu la révision générale des politiques publiques initiée par la précédente majorité, qui a permis de réels gains d’efficience au sein des administrations publiques, notamment grâce à d’importantes économies de personnel. La fusion des services a contribué à améliorer la productivité et à maintenir la qualité du service sans abandonner aucune mission. La création de la DGFIP, issue de la fusion des anciennes directions générales des impôts et de la comptabilité publique, en est un excellent exemple. Sous la législature actuelle, le Gouvernement a continué sur cette lancée. Entre 2008 et 2015, la DGFIP et la DGDDI auront ainsi supprimé près de 20 000 postes, soit près de 15 % de leur effectif total.

Néanmoins, le budget 2017, dernier budget du quinquennat, est en décalage par rapport aux précédents, et les crédits de paiement repartent à la hausse pour les deux programmes. Les gisements de productivité semblent donc taris. À la DGFIP, les suppressions de postes sont moins importantes que par le passé, car il faut accompagner la mise en œuvre du prélèvement à la source. La DGDDI, de son côté, a bénéficié d’une rallonge budgétaire et de créations de postes dans le contexte sécuritaire et migratoire actuel. Les résultats de ces deux administrations sont satisfaisants. Le volume des droits recouvrés et des saisies effectuées par la DGDDI est en hausse, et la DGFIP a bénéficié de rentrées fiscales importantes, notamment grâce à la « manne » du Service de traitement des déclarations rectificatives, le STDR.

Certes, la DGFIP et la DGDDI sont toutes deux engagées dans une profonde dynamique de modernisation : elles ont revu leur organisation, ont développé de nouvelles méthodes de contrôle et de ciblage et ont porté des projets de dématérialisation ambitieux. Je salue la capacité d’adaptation de ces administrations, que j’ai pu mesurer, notamment lorsque j’ai eu la chance de visiter les locaux du nouveau Service d’analyse de risque et de ciblage des douanes, le SARC, qui permet de professionnaliser l’analyse de risque. Je continue néanmoins de m’interroger sur la capacité de nos administrations à maintenir la qualité du service public et à préserver l’ensemble de leurs missions alors que, sur une longue période, leurs moyens ont diminué.

Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais vous poser cinq questions.

La première concerne le programme 156. L’année 2017 sera marquée par la mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Je salue le travail considérable accompli par les services pour préparer la réforme, même si je ne cache pas mon opposition à ce projet, serpent de mer de la réforme du mode de recouvrement. Quelles seront les conséquences de cette réforme sur l’organisation des services ? Pourriez-vous nous indiquer son coût estimé pour les entreprises, qui s’occuperont de collecter l’impôt et de le reverser à l’État ? Enfin, la qualité du recouvrement sera-t-elle assurée ?

La deuxième concerne le programme 302. Plus de 500 créations nettes de postes ont été annoncées sur deux ans, en 2016 et 2017. Je me réjouis de ces créations, qui sont nécessaires dans le contexte actuel et permettront de mieux assurer la sécurité de nos concitoyens ainsi qu’une meilleure protection de nos frontières. L’administration fait du mieux qu’elle peut pour former ces nouvelles recrues dans un délai très court. Pouvez-vous nous indiquer quand celles-ci seront opérationnelles ?

Troisièmement, je souligne dans mon rapport que, concernant la rallonge de 45 millions d’euros, hors titre 2, accordée aux douanes au titre du plan de lutte antiterroriste, seuls 4 % des crédits de paiement avaient été consommés au 31 juillet 2017, ce dont je m’inquiète. Qu’en est-il actuellement ?

Cette question fait écho à une interrogation que j’avais formulée l’année dernière : les moyens matériels de la douane sont vieillissants, ce qui ne facilite pas l’accomplissement de ses missions de surveillance et de lutte contre les trafics. Ainsi, en Méditerranée, le nombre de navires inspectés par la direction garde-côtes de Marseille a diminué de près de 40 % entre 2012 et 2015. Pouvez-vous m’assurer que cette diminution ne se traduit pas par une baisse de la qualité de la surveillance de cette zone ? Concernant le SARC, les plans de formation proposés aux agents répondent-ils aux besoins de ce nouveau service ?

Enfin, je me réjouis d’apprendre qu’après plusieurs mois de retard, la société Safran a finalement livré le pilote opérationnel permettant la mise en service du projet Passenger name record. Pouvez-vous nous dire quand ce projet, qui vise à améliorer la sécurité des passagers aériens, sera totalement opérationnel ?

Enfin, et ce sera ma dernière remarque, je souhaite appeler votre attention sur le fait que certaines réponses au questionnaire budgétaire ont été transmises longtemps après la date butoir du 10 octobre, alors que les services avaient fourni un excellent travail et avaient rendu leurs réponses à temps.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits relatifs à la politique immobilière de l’État et au compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Messieurs les présidents, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’année 2016 a été marquée, s’agissant de la gestion du patrimoine immobilier de l’État, par la transformation du service général en une Direction de l’immobilier de l’État (DIE) et par la création d’une Conférence nationale de l’immobilier public. Cette réforme, qui a permis de supprimer – c’est suffisamment rare pour être souligné – cinq instances, traduit un réel effort de professionnalisation des missions et de simplification des procédures. Je regrette néanmoins que la DIE ne soit pas directement rattachée au ministre, lequel pourrait ainsi être chargé non seulement du domaine mais aussi du contrôle et de l’évaluation et disposer, face à ses collègues et aux opérateurs de l’État, d’une autorité politique qui permettrait d’améliorer les bilans annuels.

À ce propos, je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d’État, dans quelles conditions vous pourrez nous présenter dorénavant un bilan synthétique des progrès enregistrés dans la gestion de l’immobilier de l’État. En effet, les recettes du compte d’affectation spéciale sont évaluées à 585 millions d’euros, dont 500 millions tirés du produit des cessions et 85 millions seulement liés au produit des redevances domaniales. On n’atteint même pas 100 millions ! Il convient donc d’aller beaucoup plus loin, d’autant que, si les règles de fonctionnement d’un compte d’affectation spéciale sont plus protectrices que celles d’un programme, la contribution du budget général ne peut excéder 10 % des recettes du compte. Celles-ci doivent donc couvrir durablement les dépenses.

Une réflexion sur les modes de financement de la politique immobilière de l’État me paraît donc incontournable, les biens cessibles de grande valeur étant de moins en moins nombreux. Ils subissent, en outre, de plus en plus de pertes de valeur en raison d’étiquetages municipaux indiquant qu’ils ne peuvent être vendus à l’encan au meilleur prix. Certes, cette perte de valeur peut s’expliquer également – dans ce cas, c’est pour une bonne cause – par la décote appliquée pour le logement locatif social. Néanmoins, il faut être très vigilant quant à ces décotes, à leur application et aux opérateurs qui en bénéficient. En effet, que fera l’État si ceux-ci ont, plus tard, la capacité de déconventionner le logement locatif social et de vendre le bien ? Je sais que des précautions existent, mais votre rapporteur s’interroge sur la réalité juridique du contrôle effectif à venir. Les enjeux financiers étant particulièrement importants dans les grandes métropoles, particulièrement celle de la capitale, nous devons nous entourer de toutes garanties.

Par ailleurs, j’avais déposé, en première partie du projet de loi de finances, deux amendements que je n’ai malheureusement pas pu défendre. Le premier visait à affecter, à l’instar des redevances domaniales, les revenus des loyers budgétaires au CAS. Êtes-vous favorable à cette proposition, monsieur le secrétaire d’État ?

Le second amendement portait sur l’extension du dispositif des loyers budgétaires aux établissements publics nationaux soumis à convention d’utilisation. Je sais que la mise en œuvre d’une telle mesure peut être un peu lourde et discutée – elle est, du reste, parfois discutable. Mais il me paraît important que chacun des occupants d’un immeuble en connaisse le coût. Cela pourrait conduire à mener une réflexion plus approfondie, et les Schémas pluriannuels de stratégie immobilière – SPSI – pourraient mieux prendre en compte la réalité financière des coûts et les éventuelles recettes.

Je veux évoquer enfin la question du ratio plafond de douze mètres carrés de surface utile nette par poste de travail. Cette estimation semble encore considérée comme ne devant pas toujours être prise en compte. Pourtant, le respect de ce plafond entraînerait une économie de 1,9 million de mètres carrés dans les services centraux où, on le sait, certains bureaux sont inoccupés. Il convient donc de rappeler à chaque ministre et à chaque opérateur ses responsabilités en la matière.

En conclusion, j’ai suivi un des indicateurs de performance relevant de l’optimisation du parc immobilier de l’État ; il s’agit de la durée de la vente des biens cessibles dont l’inutilité est avérée. Cette durée s’établit toujours à seize mois. Or, lorsqu’une maison d’arrêt déménage, par exemple, cela signifie qu’un immeuble a été construit dont les travaux ont démarré à une date donnée et ont été achevés à une date que l’on peut connaître. Il y a donc encore beaucoup, beaucoup à faire pour améliorer la gestion de l’immobilier de l’État, et votre rapporteur souhaiterait être entendu de temps à autre.

M. Alain Chrétien, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits relatifs à la mission « Régimes sociaux et de retraite » et au compte d’affectation spéciale « Pensions ». Mes chers collègues, le rapport que vous m’avez confié porte sur les crédits relatifs aux régimes sociaux et de retraite, principalement sur les pensions versées par l’État à ses agents retraités, ainsi que sur les subventions d’équilibre accordées à certains régimes spéciaux. Les six programmes concernés totalisent près de 64 milliards d’euros, soit près de 15 % de dépenses du budget général. Parmi ces 64 milliards, 57,7 milliards concernent les pensions des fonctionnaires et 6,3 milliards les subventions d’équilibre, versées principalement aux régimes de la SNCF et de la RATP.

Il convient tout d’abord de relever que les dépenses du compte d’affectation spéciale « Pensions », créé en 2006, ont progressé trois fois plus vite que celles du budget général. Ainsi, entre 2006 et 2015, ce sont plus de 10 milliards d’euros de dépenses, qui représentent le tiers des dépenses supplémentaires de l’État. Les estimations du projet de loi de finances font apparaître une relative stabilité pour l’année prochaine et un solde cumulé confortable, de l’ordre de 2,2 milliards. Toutefois, sur le long terme, le poids des retraites publiques continuera de peser lourdement sur le budget de l’État, qui contribue, rappelons-le, à hauteur de 73 % aux recettes du compte d’affectation spéciale.

Le pilotage du système de retraite publique et son architecture méritent donc réflexion, d’autant que la Cour des comptes, dans son rapport d’octobre 2016, incite les pouvoirs publics à engager des actions rapides afin de poursuivre ces réformes. En effet, les mesures de convergence prises depuis 2010 – augmentation du taux et allongement de la durée de cotisation, décalage de la borne d’âge – devraient alléger la charge du compte d’affectation spéciale de près de 3 milliards d’euros en 2017.

L’alignement public-privé à un horizon défini doit être un objectif central afin de permettre l’égalité des Français devant la retraite et de contribuer à la réduction des prélèvements obligatoires, indispensable à la compétitivité de notre économie.

Le service des retraites de l’État, récemment créé, doit disposer de moyens supplémentaires pour accélérer l’activation escomptes individuels de retraite dont seulement 11 % des effectifs lui ont été transférés.

L’État, dans un rapport de l’Inspection générale de l’administration et de l’Inspection générale des affaires sociales, a lui-même reconnu qu’il était dans l’incapacité de mettre en œuvre le compte pénibilité qu’il impose pourtant aux entreprises privées. La classification « active » et « super-active » paraît, par ailleurs, de plus en plus archaïque. Il est donc indispensable de construire un système harmonisé de reconnaissance de la pénibilité, afin de mettre un terme à ce que la Cour des comptes considère, dans la synthèse de son rapport, comme des « différences peu justifiables s’agissant de certains métiers, comme celui d’aide-soignante, exercés à la fois dans le secteur public et le secteur privé ».

La création d’une véritable caisse de retraite des agents de l’État constitue donc une étape indispensable vers l’alignement public-privé. Elle renforcera la transparence des comptes et la gestion exhaustive des personnels de l’État. Rappelons enfin que le compte général de l’État fait apparaître un niveau d’engagement des retraites hors bilan d’environ 1 535 milliards d’euros à la fin 2015.

La mission « Régimes sociaux et de retraite » retrace également la contribution du budget de l’État à neuf régimes spéciaux de retraite, principalement ceux de la SNCF, pour 4 milliards d’euros, et de la RATP, pour 600 millions d’euros. Ces régimes en déséquilibre démographique sont financés aux deux tiers par le budget de l’État. Ils ont fait l’objet de mesures de convergence avec le régime de la fonction publique, mais force est de constater que des disparités subsistent, notamment en ce qui concerne l’âge moyen de départ à la retraite. Il est aujourd’hui très difficile de mesurer l’impact de la réforme de 2008 sur ces régimes. Les mesures consenties par les entreprises publiques pour les accompagner en ont fortement réduit les impacts sur le court terme.

Quoi qu’il en soit, la subvention des régimes spéciaux pèsera encore longtemps dans les comptes de l’État, faute d’une accélération de la convergence avec le régime de la fonction publique puis, à terme, avec celui du régime général. La perspective d’un régime universel de retraite par points basé sur les métiers et non sur les statuts, tenant compte de manière harmonisée de la pénibilité, est un objectif indispensable pour assurer l’égalité des Français face à la retraite. Cette égalité nécessite de prendre en compte l’ensemble des régimes spéciaux. Le régime des députés, par exemple, présente d’importantes similitudes avec ceux de la RATP et de la SNCF, notamment parce qu’il bénéficie, lui aussi, d’une subvention d’équilibre représentant 60 % du budget.

L’acceptabilité d’une réforme maintes fois repoussée nécessite une exemplarité de la part de ceux qui devront la défendre. Comment exiger des cheminots la convergence de leur régime avec celui de leurs compatriotes si, dans le même temps, les parlementaires continuent de s’exonérer de cette démarche ? Alors, oui, il faut éteindre les régimes spéciaux de retraite, y compris celui des parlementaires, députés et sénateurs. Nous devons en effet consentir les mêmes efforts que ceux que nous demandons aux Français.

Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement compte-t-il continuer à prendre des mesures qui vont dans le sens de cette convergence entre public et privé, dans l’objectif d’assurer l’égalité de tous les Français face à la retraite ?

M. Michel Pajon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les crédits relatifs à la fonction publique et les crédits non répartis. Mon rapport présente l’analyse des crédits du programme 148 intitulé « Fonction publique » d’une part, et de la mission « Crédits non répartis » d’autre part. Je tiens d’emblée à remercier les membres de la direction générale de l’administration et de la fonction publique qui, au fil de leurs auditions, ont complété les éléments inscrits dans le projet annuel de performance.

Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une augmentation de 4,7 % des crédits du programme 148, qui atteindront 245 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cette augmentation bénéficiera aux actions « Apprentissage » et « Formation des fonctionnaires ». Les crédits de l’action sociale interministérielle, qui représentent la moitié du programme 148, seront quant à eux préservés en 2017, avec 126,44 millions d’euros prévus en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

L’action 3, relative à l’apprentissage, traduit l’objectif fixé par le Président de la République en 2014 de recruter 10 000 apprentis dans la fonction publique d’État d’ici à la fin du quinquennat. Elle est dotée de 35 millions d’euros pour 2017, soit 5 millions de plus que l’an dernier en raison de la montée en charge du dispositif. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si vous envisagez de développer des passerelles afin de permettre aux jeunes ayant donné satisfaction pendant leur apprentissage d’intégrer plus facilement la fonction publique ?

J’en viens aux crédits relatifs à la formation des fonctionnaires, qui étaient en baisse depuis 2012. Ils augmenteront de près de 5 millions d’euros en 2017 pour s’établir à plus de 83 millions en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cet effort budgétaire permettra notamment d’augmenter de 110 postes la promotion des instituts régionaux d’administration, répondant ainsi à une demande récurrente des ministères.

Des crédits supplémentaires seront également alloués aux dispositifs visant à favoriser la diversité des recrutements dans la fonction publique comme les classes préparatoires intégrées, dont les effectifs passeront de sept cents à la rentrée 2016 à mille à la rentrée 2017 ; ils auront ainsi doublé par rapport à 2015.

Le projet de loi de finances prévoit en outre la création d’un fonds d’innovation ressources humaines qui sera doté de 1 million d’euros en 2017. Pouvez-vous, madame la ministre, nous en préciser les missions ?

Permettez-moi quelques mots sur les chantiers d’envergure que conduit le ministère de la fonction publique afin de moderniser la fonction publique. La mise en œuvre du protocole relatif aux parcours professionnels, aux carrières et aux rémunérations, qui doit aboutir à l’unification des dispositions statutaires et des rémunérations dans les trois fonctions publiques, a débuté en 2016 et se poursuivra en 2017. La nouvelle politique de rémunération instaurée par ce protocole privilégie les revalorisations de nature indiciaire plutôt que la revalorisation et la création de primes, la rémunération indemnitaire étant devenue trop complexe, inéquitable et difficilement lisible. Le protocole précité prévoit également l’octroi de points d’indice supplémentaires pour les trois catégories de la fonction publique, afin d’en renforcer l’attractivité tout en différenciant davantage les niveaux de recrutement. Enfin, un cadencement unique d’avancement d’échelon a été instauré afin de renforcer l’unité de la fonction publique en levant l’un des principaux obstacles à la mobilité des fonctionnaires.

Parallèlement à la mise en œuvre de ce protocole, le Premier ministre a annoncé son souhait de créer une véritable direction des ressources humaines de l’État destinée à devenir un levier de la modernisation de l’action et de l’organisation de l’État. Une stratégie pluriannuelle de modernisation des politiques des ressources humaines a donc été élaborée et des axes stratégiques ont été définis, comme une plus grande déconcentration de la gestion des ressources humaines, un pilotage renforcé des emplois et des compétences ou encore le développement de la culture managériale au sein de la fonction publique dans le cadre des plans managériaux ministériels.

Au terme de ce quinquennat, grâce aux efforts conjugués des ministres de la fonction publique et des organisations syndicales, la fonction publique aura donc été modernisée, les outils de gestion des ressources humaines rénovées et les valeurs du service public réaffirmées.

M. Alain Tourret, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour les crédits relatifs à la fonction publique. La fin de la législature approchant, nous pouvons désormais soulever certains problèmes en prenant du champ par rapport à la situation qui prévalait en 2012. Tout d’abord, la décision de recruter 10 000 apprentis est excellente, et je tiens comme M. Pajon à souligner l’amélioration qui s’est produite en la matière année après année.

Ensuite, la fonction publique se doit d’être exemplaire. La certitude de conserver son emploi est un avantage extraordinaire, dans une période où le nombre de chômeurs atteint cinq ou six millions ; la fonction publique, au contraire, embauche. Avec votre prédécesseur et vous-même, madame la ministre, j’ai tâché d’analyser cette exemplarité dans plusieurs domaines. En premier lieu, de grands progrès ont incontestablement été accomplis dans la lutte contre toutes les discriminations, qu’elles concernent l’emploi, la rémunération, le sexe, le handicap. Je tiens à souligner les efforts considérables qui ont été accomplis pour parvenir à attribuer 40 % des postes à responsabilité à des femmes, conformément à l’objectif fixé dans la loi Copé-Zimmermann. Autre élément important : l’article 88 de la loi de modernisation de la justice du XXIsiècle instaure une action de groupe.

En revanche, trois autres mesures n’ont pas été retenues. J’ai cru que nous parviendrions à fusionner l’École nationale d’administration (ENA) avec l’Institut national des études territoriales (INET), car Mme Lebranchu y était très favorable, mais nous sommes restés l’arme au pied. Deuxième point : le détachement de hauts fonctionnaires hors statut. Je demeure convaincu que les deux ou trois mille hauts fonctionnaires concernés devraient être recrutés par des contrats de droit privé et ne pas dépendre d’un statut de la fonction publique, et que leur rémunération devrait être fixée selon leurs fonctions et les résultats qu’ils obtiennent. Enfin, lorsqu’un fonctionnaire est élu parlementaire, il me semble indispensable qu’il ait à choisir au terme de son deuxième mandat entre la fonction publique et son mandat électif, conformément à la proposition formulée dans le Livre blanc de l’ENA.

Beaucoup a déjà été fait et je tiens à en féliciter la ministre. On pourrait néanmoins réfléchir à nouveau sur la rupture conventionnelle et le recrutement par voie contractuelle. Il n’est pas insultant d’évoquer la possibilité d’aller plus loin. Mme Lebranchu était d’accord avec ce point de vue, mais elle manquait de fonds pour négocier les ruptures conventionnelles.

D’autre part, le temps est venu de réfléchir aux conséquences du rapport Laurent, enfin paru alors que nous l’attendions depuis près de dix-huit ans et la publication du rapport Roché. Je note que mes demandes réitérées n’ont jamais abouti ; il a fallu que le Premier ministre en personne demande ce rapport pour l’obtenir – preuve que notre démocratie bégaie, puisque le pouvoir législatif est dans l’impossibilité d’obtenir un rapport du pouvoir exécutif. Quoi qu’il en soit, nous pouvons désormais nous réjouir de la parution de ce rapport très circonstancié et, en même temps, très modéré, qui rappelle plusieurs principes.

Tout d’abord, un fonctionnaire doit travailler trente-cinq heures – soit 1 607 heures par an – lorsqu’il ne relève pas d’un régime dérogatoire. Pourquoi n’en est-il pas ainsi ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour répondre aux demandes de M. Philippe Laurent et ainsi parvenir à ces 1 607 heures travaillées ?

Ensuite, les fonctionnaires ne doivent pas être plus absents que les autres. L’absentéisme est une véritable plaie dans de nombreuses parties des trois fonctions publiques ; on ne peut plus l’admettre. Plusieurs mesures pourraient pourtant être prises : détermination d’un taux d’absentéisme commun, création d’un tableau de bord comparatif entre les différentes entités, utilisation des leviers managériaux et des leviers incitatifs et de contrôle, voire modification du cadre réglementaire.

Si la fonction publique n’est pas exemplaire, je crains pour elle dans les années à venir. J’entends certains candidats de droite proposer la suppression du statut de la fonction publique, d’autres la suppression de toutes les activités non régaliennes, d’autres encore la suppression de la fonction publique territoriale, et ainsi de suite. Je crois au contraire à la nécessité de disposer d’une fonction publique, mais celle-ci ne pourra être acceptée dans un pays qui connaît un chômage de masse que si elle remplit cet objectif d’exemplarité. Voilà pourquoi je vous demande, madame la ministre, quelles solutions vous comptez proposer en harmonie avec les préconisations du rapport Laurent. Cela étant dit, je voterai en faveur des crédits de cette mission.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. En 2017, le programme 148 sera doté de 245,14 millions d’euros, soit une dotation en hausse de 4,5 %, c’est-à-dire 10,77 millions, par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2016. Il comporte trois actions : la formation des fonctionnaires, l’action sociale et l’apprentissage – l’objectif étant en la matière de recruter 10 000 apprentis dans la fonction publique d’ici à la fin du quinquennat, ce qui sera fait puisque ce nombre est déjà presque atteint.

Comme l’a voulu le Président de la République, j’ai fait de la jeunesse dans la fonction publique l’une de mes priorités. Le projet de loi sur l’égalité et la citoyenneté prévoit que l’apprentissage – mais aussi tout autre type d’engagement des jeunes, qu’il s’agisse du volontariat international ou du service civique, par exemple – soit pris en compte pour ouvrir l’accès à la troisième voie, et que le temps correspondant soit comptabilisé, le cas échéant, pour la suite de la carrière de fonctionnaire. De surcroît, en découvrant la fonction publique de l’intérieur, les apprentis ont accès à des formes de préparation aux concours, y compris au moyen des classes préparatoires intégrées dont le nombre doublera en 2017.

Nous avons voulu ouvrir la fonction publique à la jeunesse dès le plus jeune âge, en particulier dès les stages de troisième, en faisant en sorte que la fonction publique entre dans les établissements scolaires et que les conseillers d’orientation soient formés, la priorité étant naturellement donnée aux élèves boursiers.

Autre objectif : la diversité du recrutement des fonctionnaires. Il subsiste en effet des discriminations dans la fonction publique, monsieur Tourret. Nous avons fixé vingt-deux critères de discrimination. D’ici à la fin de l’année, l’ensemble des ministères auront pris des mesures en vue d’obtenir le label Diversité pour enclencher une nouvelle dynamique dans la fonction publique – à ce stade, ce label a déjà été décerné à deux ministères et tous devraient l’avoir obtenu avant la fin de l’année.

Vous regrettez, monsieur le député, que la fusion entre l’ENA et l’INET n’ait pas eu lieu. Nous devons en effet envisager la fonction publique de demain. J’ai lancé une réflexion intitulée « Ma fonction publique se réinvente » non seulement avec l’ensemble des agents des trois fonctions publiques, mais aussi avec le Conseil économique, social et environnemental. C’est dans le cadre de cette vision de notre fonction publique en 2025 qu’il nous faudra revoir le fonctionnement des organismes de formation. L’ENA et l’INET accomplissent déjà des travaux communs dans le cadre de cycles de formation partagés ; à terme, la fusion aura lieu, mais nous devons nous donner les moyens de réinventer le système pour mieux répondre aux besoins.

S’agissant du détachement hors statut de hauts fonctionnaires, je défends le statut de la fonction publique qui impose des devoirs et accorde des droits, et que la loi relative à la déontologie a replacé au cœur du sujet. La haute fonction publique est déjà exemplaire. Je souhaite aborder avant la fin de l’année la question du temps passé dans la fonction publique à la sortie de l’ENA : je constate en effet qu’à l’issue d’une formation d’exception dans un établissement dont nous devons être fiers – j’ai pu, dans mes fonctions précédentes, mesurer à quel point il était admiré partout dans le monde –, les hauts fonctionnaires ne servent pas l’État assez longtemps. Le contrat décennal doit être appliqué. Les élèves de l’ENA ont un coût, en effet – de l’ordre de 83 000 euros par élève et par an. Chacun est naturellement libre de quitter la fonction publique, mais il faut alors, le cas échéant, rembourser le coût de la formation reçue. Rappelons une fois de plus, néanmoins, que la fonction publique est déjà exemplaire.

Nous nous sommes saisis avec les organisations syndicales de la question du temps de travail soulevée dans le rapport de M. Laurent, et plusieurs propositions ont été soumises au Premier ministre. Hors exceptions, les fonctionnaires doivent travailler 1 607 heures par an, soit 35 heures par semaine. Précisons néanmoins que selon le rapport Laurent, ce sont les fonctionnaires qui travaillent le plus le dimanche et les fins de semaine. Malheureusement, le critère du temps de travail a souvent été utilisé comme variable d’ajustement des ressources humaines lorsque les moyens financiers venaient à manquer. C’est une erreur managériale qu’il faudra résoudre – hors exceptions, encore une fois.

Il en va de même pour la question de l’absentéisme : plusieurs propositions sont en cours de formulation et je sais, monsieur Tourret, que vous rédigez actuellement des amendements sur ce sujet. Nous devons en effet lutter contre les abus. Je défends certes la fonction publique lorsqu’elle est attaquée, ce qui arrive souvent puisqu’il est proposé ici et là de supprimer des postes – contrairement à ce qu’a fait le Gouvernement – voire le statut de fonctionnaire ; en contrepartie, cependant, il est normal d’exiger une exemplarité totale.

Le fonds d’innovation est doté d’un million d’euros. J’ai lancé un processus d’innovation dans la fonction publique, notamment en matière de ressources humaines, car il faut progresser sur ces questions. L’innovation existe déjà en la matière, et ce dans les trois fonctions publiques ; il faut la rendre plus visible et la généraliser. Parallèlement, pour enclencher une nouvelle dynamique, ce fonds d’innovation permettra de financer des expérimentations et l’extension d’innovations existantes et de bonnes pratiques dans les trois fonctions publiques, en particulier la fonction publique d’État. Ces expérimentations ont lieu non seulement en métropole, mais aussi dans des milieux isolés en outre-mer : j’ai par exemple souhaité que la loi sur l’égalité réelle en outre-mer confie davantage de possibilités aux préfets exerçant dans les petites collectivités ultramarines en matière de gestion des services déconcentrés de l’État. Cette expérimentation aura lieu entre 2017 et 2020, suite à quoi nous verrons comment étendre ce type de gestion au plus près des territoires, qu’il est plus aisé de commencer à expérimenter dans des territoires de petite dimension.

La politique de ressources humaines de la fonction publique de demain devra gagner en cohérence. Le protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) était un premier pas allant dans le sens d’une plus grande mobilité des fonctionnaires d’un ministère à l’autre – un mécanisme fort complexe. Il est indispensable, en effet, que l’État dispose d’une solide fonction de ressources humaines. C’est pourquoi les moyens humains de la DGAFP seront renforcés afin de coordonner les directions des ressources humaines de l’ensemble des ministères, de sorte que la gestion des agents publics de l’État soit plus cohérente et qu’elle approfondisse le dispositif PPCR. La mutualisation des formations est importante : je plaide en faveur de la multiplication des formations transversales et interministérielles.

Nous devons aussi envisager la mobilité entre les trois versants de la fonction publique et approfondir les passerelles. Le récent comité interministériel de la mer a ainsi abordé cette question, compte tenu des compétences maritimes de l’État et du souhait qu’ont les collectivités de renforcer les leurs. De même, je plaide – et je ne m’en cache pas – en faveur de la multiplication des passerelles entre le secteur public et le secteur privé dès lors que l’expérience acquise dans ce dernier peut être exploitée dans la fonction publique pour l’enrichir.

Je ne partage pas votre point de vue, monsieur Tourret, sur la rupture conventionnelle – un sujet que nous avons souvent évoqué. La fonction publique se porterait mieux si l’on y faisait preuve de courage managérial ; là encore, c’est une question de formation et d’accompagnement. On exagère souvent en prétendant que les fonctionnaires, employés à vie, se mettent en quelque sorte en pilotage automatique jusqu’à la retraite : c’est faux. Les femmes et les hommes qui exercent dans la fonction publique sont très impliqués dans leurs missions, même s’il se produit là comme ailleurs des erreurs de casting, ou si certains agents souhaitent quitter la fonction publique, ce qui est déjà possible. Quoi qu’il en soit, je ne suis pas favorable à la rupture conventionnelle.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Le ministère de l’économie et des finances a constamment été au premier rang du programme de modernisation de l’action publique défendu par le Gouvernement, l’objectif étant de concilier la qualité du service avec la recherche d’économies budgétaires. La tâche n’est pas toujours aisée vis-à-vis de nos agents, de nos partenaires sur les territoires et des autres ministères. Toutefois, ces réformes ont été poursuivies à un rythme soutenu et, de ce point de vue, l’année 2016 est particulièrement riche.

La direction générale des finances publiques (DGFIP) poursuit depuis de nombreuses années un mouvement de dématérialisation qui concerne autant les missions fiscales que la chaîne de la dépense de l’État et de la dépense locale. Cette orientation bien connue mérite d’être rappelée. La dématérialisation ne saurait certes résoudre tous les problèmes, mais personne ne se plaint des avancées considérables que constituent la télédéclaration et le télépaiement de l’impôt – sauf lorsqu’ils deviennent obligatoires, s’entend. Pourtant, ces avancées qui simplifient profondément les démarches des usagers sont appréciées de nos concitoyens. Parallèlement, elles permettent à certains agents de passer de postes de saisie à des missions plus valorisantes d’accueil ou de conseil. Le contact humain demeure naturellement nécessaire dans nos services : l’accueil reste une mission clé de la DGFIP, même si son organisation évolue. C’est pourquoi nous privilégions une approche pragmatique en faisant évoluer le réseau, pour constituer de solides structures déconcentrées qui soient capables de remplir leurs missions et de répondre aux attentes des usagers. Ainsi, les fermetures de trésoreries font l’objet d’une démarche concertée qui associe tous les acteurs et tient compte des différents contextes territoriaux. S’il apparaît que l’implantation d’un service ne répond plus aux attentes des différents publics ou si sa taille ne lui permet pas – comme c’est souvent le cas – d’offrir une qualité de service suffisante, son regroupement avec une autre unité peut être envisagé. Deux trésoreries regroupées valent souvent mieux qu’une petite trésorerie à deux agents, tant du point de vue du service au public que de la sécurité des agents.

Nous tenons également compte des missions et des réformes en préparation pour adapter les moyens de la DGFIP. Dans cette optique, nous avons décidé de ralentir les suppressions d’emplois en 2017 afin que les particuliers et les entreprises soient accompagnés au mieux lors de la mise en œuvre du prélèvement à la source. C’est pourquoi le nombre de postes supprimés dans le présent projet de loi de finances est inférieur de 25 % à celui qui était prévu en 2016, passant de 2 000 à 1 500 environ. D’autre part, si la mise en œuvre du prélèvement à la source justifie un infléchissement temporaire des réductions d’emplois, elle ne modifie cependant pas de manière substantielle l’organisation actuelle de la DGFIP ; ce n’est qu’à terme qu’elle pourrait permettre d’alléger les tâches.

En ce qui concerne maintenant la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), ses volumes de recrutement ont été augmentés de 500 postes en 2016 par rapport à la trajectoire initiale. Cette augmentation sera reconduite en 2017 avec un nombre de postes équivalents ouverts aux concours, conformément aux annonces du Président de la République au congrès de Versailles, cela afin de rendre efficient notre plan de lutte contre le terrorisme. Il en résulte un schéma d’emplois positif de 250 emplois en 2017. Et, comme nous l’avions annoncé, un plan de renforcement des équipements, notamment des unités de surveillance terrestre, a aussi été lancé début 2016.

Face aux évolutions de la menace terroriste, la douane se mobilise et renforce les contrôles aux frontières – c’est l’une de ses missions majeures.

Elle poursuit également la mise en œuvre de son projet stratégique, dont la quasi-totalité des actions sont désormais engagées. Les décisions d’évolution des implantations territoriales sont désormais prises et vont être mises en œuvre progressivement en accordant aux personnels les garanties prévues par l’accord collectif signé avec plusieurs syndicats début 2015.

J’en profite pour mentionner l’accord que j’ai pu conclure ce matin avec la confédération des buralistes. La rémunération des buralistes sera augmentée dès 2017 et jusqu’à 2021. Dans le même temps, les aides budgétaires prévues par le programme 302 seront réformées avec un ciblage beaucoup plus étroit sur les zones géographiques prioritaires et les professionnels connaissant de réelles difficultés. Cela permettra des économies budgétaires substantielles par rapport aux crédits actuellement prévus.

Permettez-moi à présent de dire quelques mots du programme 218, « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières ». Placé sous la tutelle du secrétariat général du ministère, il est concerné par deux réformes majeures : la création de la direction des achats de l’État (DAE), dont on ne parle pas suffisamment, et la mise en place prochaine de l’Agence française anticorruption (AFA).

La DAE a été créée par un décret de mars 2016 par transformation et renforcement du service des achats de l’État. La gouvernance de la fonction « achats de l’État » est également réformée. L’objectif visé est d’amplifier les économies d’achats réalisées chaque année et de les faire progressivement passer de 500 à 700 millions d’euros par an pour l’ensemble du périmètre de l’État et ses opérateurs. Je vous invite avec insistance à examiner, dans le cadre de vos prérogatives, les économies d’échelle qu’il est possible de réaliser grâce à la mutualisation, à la mise en commun d’un certain nombre de marchés ou, tout simplement, de bonnes pratiques, mais aussi grâce au travail en commun sur la négociation des baux – M. Dumont y est toujours sensible. Nous avons réalisé là des opérations des plus intéressantes, ce qui, j’y insiste, n’est pas suffisamment dit.

Quant à l’Agence française anticorruption, dont la création est prévue par le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, que vous avez adopté en nouvelle lecture le 29 septembre dernier, ses effectifs compteront à terme 70 personnes environ, le PLF pour 2017 prévoyant à cet égard la création de 60 emplois auxquels s’ajouteront 10 postes transférés depuis le ministère de la justice. Ce nouveau service sera placé sous l’autorité conjointe du ministère de l’économie et des finances et de celui de la justice.

C’est aussi le programme 218 qui prévoit les crédits de l’Agence pour l’informatique financière de l’État, l’AIFE, qui pilote notamment – et là encore on n’en parle pas suffisamment – le projet de dématérialisation des factures de l’ensemble du secteur public – cette dématérialisation sera une obligation pour les plus grandes entreprises dès le 1er janvier 2017. Ce sera une étape majeure, utile pour les entreprises comme pour l’État et les collectivités territoriales.

Je m’arrête un instant sur la politique immobilière de l’État telle qu’elle vient d’être redéfinie et qui fera aussi l’objet de plusieurs questions. Le Gouvernement a souhaité renforcer l’autorité et la visibilité de l’État propriétaire en créant, par décret du 21 septembre dernier, la direction immobilière de l’État, rattachée à la direction générale des finances publiques (DGFIP). Ce passage d’un service, connu sous le nom de « France Domaine », à une véritable direction doit être perçu comme une transformation d’envergure qui renforce de manière significative la stratégie immobilière de l’État.

En effet, le patrimoine immobilier représente un actif majeur pour l’État – environ 60 milliards d’euros. Cet actif est un bien commun qu’il faut entretenir pour en conserver la valeur – un « bien commun », monsieur Dumont, c’est-à-dire que ce ne sont pas les ministères, et encore moins les ministres, qui sont propriétaires de leur patrimoine, mais bien l’État. Or c’est une vraie révolution.

Vous avez largement contribué, mesdames et messieurs les députés, à cette transformation, en soutenant l’action de l’État propriétaire et en faisant acte de pédagogie auprès des administrations occupantes – et non propriétaires. Je ne doute pas à présent de votre soutien pour aider la jeune direction à passer de l’étape pionnière à celle de la maturité.

Dans un contexte de dépense publique contrainte, la maîtrise des coûts immobiliers n’est pas chose accessoire. La densification des occupations – respect de la norme de douze mètres carrés de surface utile nette par poste de travail –, la performance énergétique des bâtiments – insuffisamment prise en considération –, comme la renégociation des baux, sont autant de leviers pour contribuer à contenir ce poste de dépense, tout en améliorant les conditions de travail des agents publics et en garantissant aux usagers un accueil de qualité. J’aurais pu également évoquer l’accessibilité.

Soyons-en convaincus : l’immobilier n’est pas qu’une « politique support », c’est aussi le support de différentes politiques publiques. C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité réaffirmer le caractère transversal et interministériel de la politique immobilière de l’État, en renforçant le pilotage stratégique de cette mission et en adaptant la structure budgétaire dès 2017. Dans cette perspective, le CAS « Immobilier » est réformé : il reprend le financement du gros entretien précédemment prévu par le programme 309 qui est supprimé ; la part autrefois affectée au désendettement de l’État lors des cessions de biens est supprimée, sauf de manière ponctuelle pour certaines cessions à l’étranger ; enfin, les redevances domaniales sont désormais affectées en recettes du CAS « Immobilier ».

Grâce à cette vision d’ensemble, le financement de la dépense immobilière se trouvera simplifié et la stratégie immobilière de l’État n’en sera que plus cohérente et lisible.

J’en viens aux questions qui m’ont été posées.

Mme Berger reprend, certes sous un autre angle, des débats que nous avons régulièrement dans l’hémicycle. Elle se demande ainsi dans quelle mesure les règles européennes sont mises en œuvre en France. Elles découlent bien sûr des traités, en particulier du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), et s’appliquent dans l’ensemble des États. On peut réfléchir à leur évolution, reste que notre année est rythmée par des règles communautaires comme celle commandant le dépôt du programme de stabilité avant, à l’automne, l’examen du budget. Ces règles ne sont-elles pas appliquées ? Je ne le pense pas : elles sont complexes, parfois difficiles à débrouiller – vous avez pointé du doigt la traditionnelle différence entre l’évaluation de la croissance potentielle par la Commission européenne et notre propre évaluation. Nous nous étions posé la question, au moment de l’élaboration de la loi organique de décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, de savoir s’il fallait préciser de quelle croissance potentielle il était question et quelles méthodes employer pour l’évaluer. Quitte à me montrer caricatural, j’ai le sentiment que nous avons reculé devant la difficulté. Nous avons donc peu précisé la notion de croissance potentielle et la réalité qui s’impose à nous est la méthode de calcul de la Commission puisque c’est elle qui évalue et qui ensuite apprécie. Comment pourrait-elle fonder ses calculs sur une croissance potentielle qu’elle n’aurait pas déterminée elle-même pour rendre ses avis ? Cette question est légitime et je suis disposé à en reparler même si c’est plutôt mon ministre de tutelle qui en débat avec la Commission.

La question de la prise en compte des dépenses exceptionnelles a déjà été évoquée par votre collègue Valérie Rabault. Vous avez déclaré, madame Berger, qu’il n’y avait pas de raisons juridiques pour choisir de s’écarter des règles budgétaires européennes. Nous estimons pour notre part que ces raisons juridiques existent, et le Gouvernement a choisi, conformément aux règles européennes, de s’appuyer sur la notion de déficit nominal, pour revenir à moins de 3 % du PIB – c’est pourquoi la Commission européenne nous a accordé des délais. Seulement, le 24 mai 2016, la Commission a transmis aux États membres une note précisant les modalités de prise en compte des dépenses à caractère exceptionnel. Or, pour les États situés dans le volet correctif et qui ont adopté, comme nous l’avons fait, une stratégie fondée sur le respect de la notion de déficit nominal, il n’y a pas de marge de manœuvre, cela en application de l’article 2 du règlement 1467/97, qui dispose qu’aucun facteur pertinent ne doit être pris en compte dans le cadre de l’abrogation d’une procédure de déficit public excessif – ce qui est notre cas. La note de la Commission confirme qu’aucune flexibilité n’est autorisée dans ce cas, quand bien même le manquement du seuil de 3 % du PIB serait intégralement expliqué par les dépenses liées à la lutte contre le terrorisme. Aussi, la seule marge de manœuvre disponible pour un État membre devant sortir de cette procédure de déficit public excessif, mais qui dépasse le seuil de 3 % du fait de dépenses exceptionnelles, serait d’obtenir un report de la date de correction du déficit sans durcissement de la procédure.

Monsieur de Rocca Serra, vous voulez d’ores et déjà lancer le débat sur le prélèvement à la source. Vous me demandez quelles en seront les conséquences sur les personnels, sur les entreprises et sur la qualité du recouvrement. Commençons par le plus simple : la qualité du recouvrement. Les entreprises, les collecteurs recouvrent, avec les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF), les cotisations sociales. Or le mode de recouvrement sera sensiblement le même. Aujourd’hui, le taux de recouvrement des cotisations sociales est supérieur à celui de l’impôt sur le revenu qui est pourtant conduit par l’excellente direction générale des finances publiques.

M. le président Gilles Carrez. Quels sont ces taux ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Dans les deux cas ils dépassent 98 %. Reste que le fait que le taux de recouvrement des cotisations sociales soit supérieur à celui de l’impôt sur le revenu signifie qu’il y a peu de raisons de s’inquiéter. Certains avancent même que le prélèvement à la source pourrait éviter que certains revenus ne soient pas soumis à l’impôt. Aussi, j’y insiste, ne suis-je pas du tout inquiet en la matière.

J’en viens au coût pour les entreprises. L’objection consiste à soutenir que les voies dématérialisées existantes, avec la déclaration sociale nominative, vont rendre terrible le travail de recouvrement. J’ai rencontré il y a peu les représentants du groupement d’intérêt public « Déclaration sociale nominative » (GIP-DSN). J’en profite pour vous confirmer que la montée en puissance de la DSN suit son cours : il y aura probablement, à la fin du mois, plus d’un million d’entreprises qui y auront recours, soit plus de 80 % des salariés. Je confirme la possibilité du recours aux échanges dématérialisés automatisés entre les entreprises et la DGFIP afin que l’entreprise reçoive automatiquement le taux du prélèvement à la source calculé par la DGFIP et renvoie l’information du montant du revenu imposable – déjà calculé par tous les employeurs – qui figure sur les fiches de paie, multiplié par le taux transmis de façon dématérialisée par le biais de la DSN. On informe ensuite du produit de cette difficile multiplication et l’on retient la somme correspondante sur le compte bancaire. Nous avons fait réaliser une étude auprès des entreprises et des experts-comptables et les responsables du GIP-DSN m’ont confirmé qu’il n’y avait pas d’obstacle, pas de difficulté particulière, n’était un délai qui, concernant une expérimentation, sera peut-être un peu serré. Mais pour peu que le texte soit voté et promulgué à la fin de l’année, nous disposerons d’un an pour affiner le dispositif et tout devrait se passer tout à fait correctement.

Reste la question des personnels. Nous avons dialogué avec eux à plusieurs reprises. La plupart des organisations syndicales nous ont signifié leur désaccord avec le prélèvement à la source, souvent pour des raisons de principe qui sont parfois les mêmes que celles qu’évoque ici ou là tel ou tel responsable politique. Ensuite, une fois la décision prise – elle devrait l’être prochainement –, tout le monde se mettra en ordre pour travailler et se structurer en conséquence. Quelques métiers vont changer, certains vont se créer. Ainsi, il faudra veiller, pour les entreprises, à récupérer le montant calculé et transmis du prélèvement à la source. D’autres fonctions vont être allégées : le traitement des chèques ou des paiements des particuliers va être minimisé. Les services d’accueil devront pour leur part être renforcés, notamment pendant les premières années. C’est pourquoi j’ai évoqué des suppressions d’effectifs moins importantes qu’on ne pourrait le craindre.

Donc, je le répète, nous nous mettons en ordre de marche et les systèmes informatiques seront structurés comme il se doit. À ce propos, vous m’avez demandé combien coûterait le renouvellement de ces derniers – il faut également compter la formation du personnel mais aussi les campagnes d’information et d’appui aux entreprises qu’il implique. Tout cela va coûter peut-être quelques petites dizaines de millions d’euros – et quand on dit « quelques », chez nous en Lorraine, c’est rarement plus que trois ou quatre. Bien sûr la direction en demande toujours davantage mais nous devrions contenir la dépense dans l’ordre de grandeur indiqué.

L’augmentation des crédits, que vous avez qualifiée d’inflexion par rapport aux années antérieures prend en compte deux éléments : le prélèvement à la source, je viens de m’exprimer sur ce point, ainsi que la revalorisation du point d’indice. Or nous avons beaucoup de fonctionnaires à la DGFIP et à la douane. À quoi s’ajoute le dispositif parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) qui, dans un premier temps, va un peu alourdir les dépenses des nomenclatures T2, notamment du fait de la revalorisation des salaires en début de carrière – à la DGFIP comme ailleurs. J’entends dire qu’il s’agit de dépenses non prévues… Or leur financement est bien prévu par le PLF. La plupart des crédits ministériels ont augmenté cette année, notamment dans les ministères où la part des crédits T2 est importante : c’est le cas du ministère de l’éducation nationale, de celui des finances… Cela parce que nous avons tenu compte du dispositif PPCR et de l’augmentation du point d’indice – c’est le résultat de l’équilibre général du budget.

Vous vous interrogez ensuite, concernant le programme 302, sur l’opérationnalité des nouveaux personnels des douanes. Je me suis rendu récemment à La Rochelle, à l’École nationale des douanes, j’ai rencontré par ailleurs plusieurs promotions d’agents, j’ai même, comme je visite assez régulièrement les brigades, rencontré les nouveaux personnels affectés qui sortaient de la promotion de La Rochelle... Or je constate que tout se fait au rythme prévu, monsieur le rapporteur spécial. Ainsi les 500 promus de 2016 seront opérationnels, pour leur grande majorité, à la fin de l’année 2016.

En ce qui concerne les crédits supplémentaires, 37 % des autorisations d’engagement, fin octobre, et 20 % des crédits de paiement ont été consommés. Globalement, la consommation de ces crédits est en bonne voie puisque 100 % des autorisations de paiement de fonctionnement seront consommées. Je rappelle que ces crédits, pour plus de 20 millions d’euros, sont destinés à renforcer les moyens de la surveillance terrestre. La programmation des opérations immobilières – qui prennent un certain temps à être déclenchées –, destinées à renforcer ou sécuriser différentes implantations, est en cours. Les équipements en moyens radio INPT (Infrastructure nationale partagée des transmissions) vont équiper les brigades et permettre de renforcer les dispositifs informatiques de lutte contre la fraude. S’ils ne sont consommés, ces crédits seront intégralement reportés et s’ajouteront aux 15 millions d’euros prévus pour le PLF pour 2017. Reste qu’il est tout de même rare que l’on ne consomme pas des crédits annoncés par le Président de la République en congrès à Versailles.

Vous avez en outre évoqué le PNR. Plusieurs grandes compagnies, c’est le cas d’Air France, sont déjà raccordées à ce système et peuvent ainsi contrôler et surveiller l’identité des voyageurs de manière sécurisée. Ce n’est pas Safran qui a conçu le système mais l’entreprise Morpho qui était jusque-là une filiale du groupe Safran. Il est vrai que du retard avait été pris mais mon administration et le cabinet du Premier ministre lui-même ont veillé à ce qu’il soit résorbé. Reste à raccorder au dispositif quelque 230 compagnies aériennes. Nous avons commencé par les plus importantes et notamment les compagnies françaises parce que ce sont les plus actives sur nos aéroports. Le dispositif se met progressivement en place, encore une fois sous une surveillance étroite – nous avons nous-mêmes lancé des signaux d’alarme, les uns et les autres se renvoyant les responsabilités des dysfonctionnements, mais les choses sont rentrées dans l’ordre. J’ai rendu visite aux services douaniers de l’aéroport de Roissy il y a un mois et demi et j’ai pu constater que le dispositif, très protecteur, fonctionnait très bien : l’entrée dans le système, suivant qu’on est policier, douanier ou autre, est sécurisée, garantissant les libertés et permettant le bon déroulement des procédures judiciaires.

J’en viens aux moyens accordés aux services garde-côtes en Méditerranée, qui vous sont chers autant qu’à nous, monsieur de Rocca Serra. La DGDDI achève la réforme de sa façade maritime avec une réduction du nombre de ses brigades mais le renouvellement de son parc naval, avec le remplacement des vedettes de Bastia – il me semble bien que ce soit en Corse, monsieur le rapporteur spécial – et de celles de Sète, pour 2017 et au-delà. En outre, la DGDDI s’est dotée, depuis juillet 2015, d’un nouveau patrouilleur de 43 mètres qui renforce considérablement la capacité opérationnelle de la douane en Méditerranée. Enfin, une nouvelle vedette garde-côte sera livrée d’ici à la fin du premier semestre 2017 à Nice. Vous pouvez noter que nous n’avons pas relâché – au contraire – notre effort d’investissement dans le parc naval. Une fois ces opérations achevées, les capacités opérationnelles seront renforcées en Méditerranée. J’ajoute que cette mobilisation de la douane est particulièrement active au profit des missions de l’Agence européenne Frontex : en 2016, nous avons déployé nos patrouilleurs pendant trente jours dans le cadre de l’opération Triton qui a permis, entre autres, le sauvetage de 200 migrants.

Enfin, sur le calendrier des recrutements, je précise encore que, le 6 juin, la première promotion a sorti 237 agents de constatation et 236 agents le 16 août ; en ajoutant les autres effectifs affectés à d’autres services, nous parvenons au chiffre de 500 agents.

J’en viens à l’intervention de M. Chrétien qui nous propose un véritable programme de réforme des retraites, citant un rapport de la Cour des comptes qui ne dit pas toujours des choses fausses, mais qui ne dit pas toujours des choses justes non plus. Dans celui que vous avez évoqué, je n’ai pas été frappé par le même aspect que vous : d’abord, la Cour reconnaît que le service des retraites de l’État a beaucoup progressé dans sa structuration, en matière d’efficacité, de rendement, si j’ose dire ; ensuite, et cela mérite d’être souligné, une harmonisation des systèmes de retraite du public et du privé, que vous présentez toujours comme une convergence, ne se ferait pas forcément à l’avantage de ceux qu’on croit. Un certain nombre de fonctionnaires, par exemple, gagneraient à ce que leur système de retraite soit aligné sur celui du secteur privé, notamment en ce qui concerne la question des primes, non intégrées dans les revenus. Dans un souci de justice, le PPCR va améliorer la situation et c’est tant mieux. Mais, contrairement à ce que tout le monde semble dire et croire, l’alignement ou la convergence, si vous préférez, des régimes de retraite du privé et du public ne conduirait pas forcément à voir les retraités de la fonction publique perdants.

M. Alain Chrétien, rapporteur spécial pour les crédits relatifs à la mission « Régimes sociaux et de retraite » et au compte d’affectation spéciale « Pensions ». Ce n’est pas ce que j’ai dit.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. C’est ce que vous avez laissé entendre, en tout cas c’est ainsi que je l’ai entendu.

Je vous laisse par ailleurs la responsabilité d’affirmer qu’il faut créer un régime universel de retraite par points mais je mets tout de même en garde sur la manière dont il faudrait assurer la transition entre les deux systèmes. Le système par répartition tel qu’il existe a la vertu d’être opérationnel, avec ses qualités et ses défauts …

M. Alain Chrétien, rapporteur spécial pour les crédits relatifs à la mission « Régimes sociaux et de retraite » et au compte d’affectation spéciale « Pensions ». J’ai évoqué une retraite par points et par répartition.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Monsieur Chrétien, nous irons à la buvette, si vous voulez dialoguer. Je dois ici répondre aux autres rapporteurs.

J’en viens aux nombreuses questions de M. Dumont sur l’immobilier de l’État.

Est-il nécessaire de dresser un bilan des progrès en ce domaine ? Les documents budgétaires sont déjà nombreux. Vous recueillez vous-même, monsieur le rapporteur spécial, de nombreuses informations à ce sujet en tant que président du Conseil de l’immobilier de l’État.

L’important est de changer d’approche en opérant une véritable révolution. La gestion du patrimoine immobilier de l’État doit être centralisée et véritablement pilotée au lieu de varier au gré de la volonté ou des besoins de tel ou tel ministère qui, pour avoir des recettes, vendra tel bâtiment en gardant le produit de l’opération ou bien décidera de construire. Nous devons nous appuyer sur une bonne connaissance du parc immobilier, laquelle a déjà progressé depuis quelques années. Les logiciels prennent désormais en compte des aspects non seulement quantitatifs mais aussi qualitatifs – isolation thermique, accessibilité, état général du bâtiment –, ce qui nous permet d’établir des priorités dans les actions à mener. Il faudra se saisir de toutes les opportunités et j’espère que nous ne manquerons pas celle de la fusion des régions. Certaines directions régionales seront appelées à déménager et il m’a paru utile que les préfets disposent d’informations précises sur l’immobilier de l’État pour décider de leur relocalisation. Les disponibilités peuvent en effet être l’un des paramètres à prendre en compte dans l’organisation territoriale de l’État.

En matière de « pastillage » des biens, question qui se pose surtout à Paris, et de mise en œuvre des systèmes de décote, nous avons là encore progressé. Avec les préfets concernés, nos services ont passé des accords avec la Ville de Paris de façon à rendre possible certains transferts sur des biens faisant l’objet d’une pastille, dans des conditions financières respectant les intérêts de l’État. Vous connaissez bien ces situations. Il reste encore beaucoup de biens de ce type et les progrès doivent se poursuivre. Vous avez évoqué la surveillance des décotes accordées. Vous savez qu’il existe des clauses que j’appellerai pour simplifier de retour à bonne fortune. Elles doivent être appliquées quand les conditions ne sont plus conformes à celles qui avaient justifié la décote. C’est l’un des travaux qu’aura à mener la direction de l’immobilier de l’État qui a récemment vu le jour.

Vous m’avez interrogé sur l’affectation des loyers budgétaires au compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Cela représenterait 1 milliard d’euros supplémentaires, ce qui me paraît excessif, d’autant que ces sommes seraient alors dépensées.

M. le président Gilles Carrez. Mieux vaut qu’elles restent virtuelles.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Je dois dire que je continue à m’interroger sur les loyers budgétaires sur lesquels les avis restent très partagés.

Vous évoquez dans le même ordre d’idée la généralisation à l’ensemble des opérateurs de l’État. Mon avis est là encore réservé. Cela me permet néanmoins de dire que ceux-ci sont au moins aussi importants que l’État. L’État a commencé à vendre des biens patrimoniaux qui ne correspondaient plus aux besoins mais je ne suis pas certain que certains opérateurs soient prêts à faire de même, je pense en particulier à SNCF Réseau qui possède encore des patrimoines importants en région parisienne qui ne sont pas mis sur le marché à un rythme suffisant.

Sur le délai moyen de seize mois, je vais vous dire franchement ce que je pense. Si l’on pouvait vendre tous les bâtiments dans ce laps de temps, ce ne serait pas si mal, compte tenu du temps nécessaire pour procéder aux évaluations, sélectionner des candidats, rédiger de bons appels d’offres en évitant tous les pièges existant en la matière dans des domaines que nous savons sensibles. La professionnalisation de nos équipes, qui est l’une des raisons d’être de la création de la direction de l’immobilier de l’État, et le recours à des prestataires extérieurs pour nous aider pour certaines missions très spécifiques contribueront à réduire les délais actuels.

J’espère, mesdames, messieurs les députés, avoir répondu au mieux aux questions que vous m’avez posées.

Mme Françoise Descamps-Crosnier. Messieurs les présidents, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est une mission budgétaire essentielle que nous examinons : celle qui permet à une partie des « services supports » de l'appareil d'État de fonctionner. Nous sommes au cœur de la machine, si je puis dire : direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), direction générale des finances publiques (DGFIP) direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), direction du budget. C'est Bercy dans ses différentes composantes dont nous sommes amenés à évaluer le budget et les orientations.

Les crédits de la mission budgétaire restent relativement stables par rapport à l'année dernière, où ils avaient connu une baisse notable par rapport à l'année antérieure. La maîtrise des dépenses publiques s’affirme donc. La répartition des crédits proposée permet le financement de priorités portées par la majorité depuis plusieurs années comme le chantier de la simplification. Aussi le groupe Socialiste, écologiste et républicain émettra-t-il un vote favorable.

En tant que membre de la commission des lois, je vais concentrer mon propos et mes questions sur le programme « Fonction publique » qui nous intéresse de très près. Je ferai auparavant quelques observations sur d'autres aspects de la mission budgétaire. Je veux notamment saluer l'action de la douane française dont j'ai eu l'occasion d'apprécier, ces dernières années, le haut niveau de professionnalisme et d'engagement dans l’accompagnement des entreprises françaises sur les marchés étrangers. Je m'étais inquiétée l'année dernière de la perspective de l'entrée en vigueur du nouveau code des douanes de l'Union européenne qui renforce, via le dédouanement centralisé, la concurrence entre plateformes de dédouanement européennes. Le document de la mission budgétaire indique que « l'année 2017 sera consacrée à la consolidation du processus de mise en œuvre » de ce nouveau code qui est bel et bien rentré en application, comme prévu, le 1er mai dernier. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous fournir davantage de précisions sur ce point ? Comment nos services opèrent-ils pour accompagner la mise en place de ce nouveau cadre ?

Le budget du programme « Fonction publique » est marqué par des changements majeurs : évolution législative et réglementaire du statut de la fonction publique à la suite de la loi du 20 avril 2016 ; renouvellement de la gestion des ressources humaines de l'État qui voit la DGAFP jouer un rôle de pilotage et de coordination beaucoup plus structuré qu'auparavant, celui d'une direction des ressources humaines d'État. À cela s’ajoute la mise en œuvre du protocole portant sur les parcours professionnels, des carrières et des rémunérations des fonctionnaires (PPCR) ainsi que la poursuite de la refonte du régime indemnitaire, le RIFSEEP – régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel.

À l’issue de ces différents chantiers, c'est une fonction publique rénovée et modernisée qui poursuivra son travail au service de l'intérêt public. Je tiens à saluer cette réforme.

Beaucoup a été fait et beaucoup est encore fait en ce moment même, des décrets d'application au suivi de dispositifs déjà mis en place depuis plusieurs années, comme celui des nominations équilibrées, qui produisent pleinement leurs effets ou le feront à très brève échéance.

Ces points de progrès ont notamment été mis en avant dans le rapport de mon collègue Alain Tourret. Je veux saluer avec lui le chantier du positionnement stratégique de la DGAFP qui est amorcé par le Gouvernement. C'est une orientation forte pour un meilleur pilotage des ressources humaines de l'État, lesquelles constituent avec les finances l’un des deux piliers essentiels de l’action publique, au cœur de cette mission budgétaire.

Cette orientation est appelée à se concrétiser par un texte réglementaire d'organisation attendu pour la fin de l'année. J'encourage le Gouvernement dans sa démarche et appelle l'attention de nos collègues sur tous les bancs sur la nécessité, dans les années à venir, de poursuivre dans cette voie qui permettra de conduire plus puissamment des politiques publiques transversales, communes à l'ensemble de la fonction publique d'État demain et à l'ensemble de la fonction publique tout court, après-demain.

Je rejoignais à l'instant notre collègue Alain Tourret sur ce point précis de son rapport ; c'est également le cas sur plusieurs autres points comme l'amélioration de la statistique relative à la fonction publique ou bien encore le développement de l'apprentissage. Je ne le surprendrai pas en lui disant que je ne partage pas l'ensemble de ses propositions.

Notre fonction publique est capable de se réformer, d'évoluer et de se moderniser : les nombreux chantiers que je viens d'évoquer le prouvent à l'envi. Se moderniser ne signifie pas pour autant dénaturer le statut qui est là avant tout, je le rappelle, pour assurer que la fidélité première des agents publics va à la République et que leur action est dirigée vers l'intérêt général. Le faire évoluer pour encourager toujours plus son ouverture à la jeunesse et à la diversité de la société française, pour assurer l'égalité entre les femmes et les hommes, pour que notre organisation puisse mieux répondre aux attentes des administrés – ce que fait la majorité – d'accord ! L’assouplir pour l'assouplir, sans objectifs sous-jacents, sous le prétexte qu'il serait devenu trop « rigide » me paraît relever à la fois d'un diagnostic erroné et d'une démarche qui laisse trop de prise aux analyses de certains instituts qui ne s'intéressent à l'administration que pour mieux en organiser la mise à mort. Je ne saurai souscrire, par exemple, à un dispositif de rupture conventionnelle ou à l'encouragement au recrutement de nouveaux agents publics par la voie contractuelle plutôt que par la voie statutaire.

Au-delà de ces aspects, quelques questions peuvent toutefois se poser sur le volet « Fonction publique » de cette mission budgétaire. Le Gouvernement peut-il nous préciser les orientations qui seront retenues par le futur décret relatif à l'organisation de la nouvelle direction des ressources humaines de l'État ? Un projet de décret paru dans la presse laissait apparaître une section entière intitulée « Missions de pilotage et de coordination des politiques communes à l'ensemble de la fonction publique ». En ce cas, il me paraîtrait pertinent de soumettre ce texte au Conseil commun de la fonction publique.

Madame la ministre, compte tenu de l'ampleur des changements que j'ai eu l'occasion d'évoquer, prévoyez-vous, afin de mieux apprécier les effets que ceux-ci induisent, la mise en place de nouveaux indicateurs dans le programme budgétaire ?

Enfin, vous avez récemment pris une circulaire fixant de nouvelles priorités en matière de formation : pouvez-vous nous la présenter et surtout nous indiquer comment les crédits de formation présents dans le programme budgétaire répondront à cette nouvelle orientation ?

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Madame Descamps-Crosnier, je dois vous répondre rapidement, compte tenu des impératifs qui s’imposent aux membres de la commission des lois. Je vous ferai parvenir quelques documents complémentaires, s’il le faut.

Les fonctionnaires sont les sentinelles de la République. Ils défendent tous les jours ses valeurs. Ce ne sont pas des salariés comme les autres, ils sont engagés au service des usagers, qu’il s’agisse des entreprises, des associations ou des citoyens. C’est pour cela qu’un statut spécifique leur est réservé.

La formation professionnelle est pour moi une priorité, notamment pour améliorer la gestion des ressources humaines et rendre la fonction publique plus efficace. Les priorités, telles que je les ai formulées dans une circulaire récente, sont les suivantes : déploiement de l’école du management et des ressources humaines, mutualisation des formations transversales, prévention des discriminations, réaffirmation de la laïcité, à laquelle je suis très attachée. J’ai mis en place la commission « Laïcité et fonction publique » présidée par Emile Zuccarelli, qui rendra ses conclusions d’ici au début du mois de décembre. Sur le terrain, nous avons pu constater que les agents de la fonction publique n’étaient pas équipés pour répondre aux problématiques liées à la laïcité, ce qui suscite chez certains un mal-être.

Il importe également de développer les compétences managériales, essentielles pour accroître l’efficacité de la fonction publique. L’accompagnement des agents publics, notamment des N+1 ou des N+2, doit aboutir à un mieux-être au travail, qui constitue l’une de mes priorités.

Vous m’avez demandé si le décret relatif à la nouvelle direction des ressources humaines de l’État, qui doit être publié avant la fin de l’année, serait soumis au Conseil commun de la fonction publique. Vous savez combien je suis ouverte à la discussion, nous pourrons en débattre ensemble. Je crois beaucoup au dialogue social, aux échanges avec les employeurs de la fonction publique. Ce n’est que par cette voie que nous pouvons progresser et faire partager nos conclusions et nos projets.

C’est le dernier budget de la législature et j’aimerais souligner combien nous nous sommes impliqués pour une meilleure reconnaissance des agents de la fonction publique. Celle-ci s’est d’abord traduite par une reconnaissance financière : revalorisation des agents de catégorie C, dégel du point d’indice, qui connaîtra une nouvelle augmentation en février 2017, après une première en juillet 2016. Elle s’est aussi manifestée par la mise en place du protocole relatif aux parcours professionnels, carrières et rémunérations, dont le coût est fixé pour l’année 2017 à 686 millions. Il permet de multiples avancées : renforcement de l’unité de la fonction publique, meilleure reconnaissance du mérite – important critère à prendre en compte–, revalorisation des grilles statutaires mais aussi allongement des carrières alors qu’aujourd’hui, la plupart des fonctionnaires n’ont plus, à quarante ans, de possibilités de progression.

Nous sommes aux côtés des agents de la fonction publique qui, au quotidien, assurent le rôle de rempart contre la fracture sociale.

Mme Karine Berger, rapporteure spéciale pour les crédits relatifs à la conduite et au pilotage des politiques économiques et financières. Je remercie M. le secrétaire d’État pour ses clarifications. J’aimerais revenir sur un point qui ne suscite pas à ce stade mon adhésion : la décision de la France ne pas recourir à la clause de flexibilité du Pacte de stabilité. J’ai dit dans mon exposé qu’une telle décision ne pouvait être motivée par une raison juridique. Ce n’est pas par hasard : Pierre Moscovici lui-même, que nous avons auditionné pour la préparation du rapport, l’a affirmé. Si vos services disposent d’une réponse de la Commission européenne n’allant pas dans le même sens que les déclarations du commissaire européen aux affaires économiques, je serais très intéressée d’en prendre connaissance. J’ai regardé dans le détail les aspects juridiques de la question et je crois pouvoir convaincre vos services qu’aucune raison de cette nature ne s’oppose à cette demande.

Je vais poser la question autrement, de la manière la plus politique possible : si nous nous mettons d’accord, après échange de courriers, sur le fait qu’il n’y a pas d’obstacle juridique, la France pourra-t-elle dans les jours qui viennent, dans la droite ligne des déclarations du Président de la République le 16 novembre 2015, demander officiellement à la Commission européenne d’écarter certaines dépenses liées à la crise terroriste et à la montée des migrations dans notre pays ? Je vous remercie par avance de votre réponse.

M. Alain Chrétien, rapporteur spécial pour les crédits relatifs à la mission « Régimes sociaux et de retraite » et au compte d’affectation spéciale « Pensions ». Madame la ministre, je reste sur ma faim s’agissant de certaines inégalités de traitement. Cela ne vous choque-t-il pas que la pénibilité ne soit pas reconnue de la même manière dans le secteur public et dans le secteur privé ? Cela ne vous choque-t-il pas qu’une aide-soignante travaillant dans le privé ne bénéficie pas des mêmes mesures s’agissant de la pénibilité et donc de la retraite qu’une aide-soignante travaillant dans le public ? N’y a-t-il pas là une grande injustice ?

La question de la pénibilité dans la fonction publique nécessite d’être revue. Les catégories « actifs » et « super-actifs » sont utilisées de manière aléatoire, voire relèvent de l’archaïsme. J’ai eu l’occasion d’évoquer cette question avec les représentants du service des retraites de l’État et des régimes de retraite de la RATP et de la SNCF. Entre le compte de prévention de la pénibilité hyper-complexe exigé des entreprises et une classification qui n’a pas évolué, selon mes sources, depuis un arrêté de 1979, n’y a-t-il pas matière à harmonisation ? La pénibilité au travail doit être reconnue de la même manière dans le public et dans le privé.

M. le président Gilles Carrez. J’aimerais connaître la position du secrétaire d’État au budget sur la proposition que notre collègue Jean-Louis Dumont a formulée dans un amendement, visant à fixer des plafonds de surface immobilière pour l’État, ministère par ministère, et pour les opérateurs. Je m’interroge sur son caractère opérationnel.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. La question de la pénibilité se pose, en effet, et j’ai souhaité que nous l’abordions avec les organisations syndicales. Je reste persuadée que nous avons des passerelles à construire entre le public et le privé. Les jeunes n’ont pas envie d’entrer dans la fonction publique pour être sous pilote automatique jusqu’à la retraite. Ils conçoivent leur vie autrement. Actuellement, la fonction publique ne compte que 8 % de personnes de moins de vingt-huit ans. Si elle veut recruter des jeunes créatifs et innovants, il faudra qu’elle travaille à son attractivité.

Tous les droits attachés à la personne doivent être comparables dans le privé et dans le public. Le compte personnel d’activité doit être appliqué dans la fonction publique. Il comportera un compte de formation et des droits concernant la prévention de la pénibilité mais nous ne serons pas en mesure, dans un premier temps, d’y intégrer un compte personnel de prévention de la pénibilité. Le Gouvernement a commandé un rapport à ce sujet, qui a montré que cette évolution était souhaitable mais qu’elle n’était pas réalisable pour l’instant. Nous devons mener un dialogue avec les organisations syndicales, notamment à propos des catégories d’« actifs » ou de « super actifs ». Le travail sur la traçabilité des facteurs de pénibilité dans la fonction publique est lancé mais il est loin d’être achevé.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. J’aimerais revenir sur la question de Mme Descamps-Crosnier sur le nouveau code des douanes de l’Union européenne. La France avait anticipé un certain nombre de dispositions et son entrée en application se déroule normalement. Au niveau réglementaire, toutes les instructions ont été données pour nous mettre en conformité. Au niveau opérationnel, nous avons mis en œuvre le dédouanement centralisé depuis le 1er mai 2016, qui permet d’effectuer les procédures déclaratives auprès d’un seul bureau de douane alors même que les marchandises sont destinées à être acheminées vers plusieurs points du territoire. À la mi-octobre, soixante grands comptes à l’international ont déposé une demande de dédouanement centralisé. Ils viennent s’ajouter à ceux qui bénéficiaient déjà de la procédure de dédouanement unique (PDU). Nous avons lancé une grande campagne de communication autour du nouveau code des douanes de l’Union européenne, à travers notamment un « Tour de France des experts ». Nous remportons plusieurs succès. Certaines opérations d’accompagnement des opérateurs ont déjà permis de rapatrier sur le territoire national plusieurs flux de marchandises qui étaient auparavant traités dans les grands ports de la Mer du Nord, notamment à Anvers, et qui passent maintenant par des ports français comme Le Havre – je ne peux citer de noms ici mais je pourrai vous les communiquer en privé.

Madame Berger, nous sommes en désaccord sur l’analyse juridique. Je ne veux pas contredire le commissaire, je ne me suis pas entretenu directement de cette question avec lui. Je maintiens la position qui est la nôtre. Nous pourrons revenir sur ce point de manière plus approfondie en séance publique, si vous le souhaitez. Ce n’est de toute façon pas moi qui pourrai vous dire ce qui doit être fait, si l’argument juridique n’est pas fondé.

Quant à instaurer un plafond de surface par opérateur, cela me paraît relever de l’usine à gaz. Il y a beaucoup d’opérateurs. Nous disposons déjà de schémas d’emplois et de budgets spécifiques. Nous n’allons pas y ajouter d’autres dispositifs. Je préférerais que soient d’abord digérés les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI), qui sont sur la bonne voie, ainsi que les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR), désormais généralisés à toute la France. Il faut laisser aux systèmes informatiques le temps de prendre en compte toutes les données nécessaires.

M. le président Gilles Carrez. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, nous vous remercions.

*

* *

À l’issue de l’audition de Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, et de M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics auprès du ministre de l’Économie et des Finances, la Commission examine, pour avis, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2017 (M. Alain Tourret, rapporteur pour avis « Fonction publique »).

Conformément aux conclusions de M. Alain Tourret, rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2017.

PERSONNES ENTENDUES

● Ministre de la fonction publique

— Mme Annick GIRARDIN, ministre de la fonction publique

— M. Sylvain LAVAL, chef adjoint de cabinet, conseiller parlementaire

— M. Marc GAZAVE, conseiller fonction publique de l’État, questions budgétaires et transversales

— M. Olympio KIPRIANOU-PERRIMOND, conseiller technique en charge des relations avec les élus et le Parlement

● Direction générale de l’administration et de la fonction publique

— M. Thierry LE GOFF, directeur général de l’administration et de la fonction publique

— Mme Estelle DENIS, directrice de cabinet

● Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale

— M. Philippe LAURENT, président

— M. Jean-Robert MASSIMI, directeur général

● Fondation IFRAP

 Mme Agnès VERDIER-MOLINIÉ, directrice

 M Frédéric SERVIERE, expert des questions sociales

ÉTAT DE LA MISE EN œUVRE DES 34 PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR DEPUIS 2012

16 propositions ont déjà été mises en œuvre par le Gouvernement

11 propositions sont en cours de mise en œuvre ou d’expertise

7 propositions n’ont pas été retenues par le Gouvernement

La lutte contre les discriminations dans la fonction publique

 

Proposition n° 1.1 : instituer un observatoire des discriminations dans la fonction publique.



Proposition n° 1.2 : instituer auprès de chaque employeur public un comité des rémunérations, compétent pour engager, le cas échéant, une procédure tendant à résorber les écarts salariaux injustifiés.

Proposition n° 1.3 : consacrer une part de 10 % du volume horaire de la formation initiale et continue des fonctionnaires à l’apprentissage de la gestion des situations de discrimination dans les trois versants de la fonction publique.


Proposition n° 1.4 : transmettre chaque année à l’Assemblée nationale et au Sénat le bilan détaillé de la mise en œuvre du dispositif de nomination d’un pourcentage minimal de personnes de chaque sexe dans l’encadrement supérieur des collectivités publiques.

Proposition n° 1.5 : annuler toutes les nominations qui seront intervenues en méconnaissance de l’exigence de parité dans l’encadrement supérieur de la fonction publique telle qu’elle figure dans la loi du 12 mars 2012.


Proposition n° 1.6 : garantir aux personnes en situation de handicap un droit effectif de saisine directe du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique.

Proposition n° 1.7 : approfondir le rapprochement déjà engagé entre l’école nationale d’administration et l’institut national des études territoriales.


Proposition n° 1.8 : engager une concertation sociale sur l’inclusion dans le statut général de la fonction publique d’un nouveau critère de discrimination, la « situation de famille ».

Proposition n° 1.9 : détacher la haute fonction publique du statut de la fonction publique.

Proposition n° 1.10 : prévoir que tout fonctionnaire élu député ou sénateur qui a déjà exercé un mandat législatif doit choisir, une fois réélu, entre son deuxième mandat législatif et son appartenance à la fonction publique.

Proposition n° 1.11 : instituer une procédure d’action de groupe pour la réparation des préjudices causés par des faits de discrimination au bénéfice des agents de la fonction publique.

Proposition n° 1.12 : consacrer la lutte contre les discriminations comme l’un des thèmes systématiquement abordés au cours des concertations annuelles organisées entre le Gouvernement et les organisations représentatives.

La politique des effectifs, de rémunération et d’organisation du travail au sein des trois versants de la fonction publique d’ici 2019

 

a. Propositions concernant les effectifs

 

Proposition n° 2.1 : confier à la formation « connaissances statistiques et évolution de l’emploi public » du Conseil commun de la fonction publique la mission de définir des indicateurs communs de gestion des ressources humaines dans les trois versants de la fonction publique en 2015, donnant lieu à la remise d’un rapport annuel au Parlement avant le 1er octobre.


Proposition n° 2.2 : se doter d’outils statistiques afin de connaître le nombre d’agents publics, globalement et dans chaque versant de la fonction publique, exerçant une activité privée lucrative ou non ou exerçant une autre activité dans la fonction publique.

Proposition n° 2.3 : élaborer un questionnaire commun aux trois versants de la fonction publique à remplir par tout agent en cas de cumul d’activités pour connaître ses principales motivations, le secteur concerné par la nouvelle activité et la quotité horaire consacrée à cette activité afin de pouvoir procéder à une évaluation qualitative de ce phénomène.

Proposition n° 2.4 : inciter les collectivités territoriales à geler ou réduire leurs effectifs à travers une exonération totale ou partielle de la baisse de la DGF l’année suivante.

Proposition n° 2.5 : introduire une possibilité de rupture conventionnelle du statut de fonctionnaire à la charge des employeurs publics, présentant des garanties équivalentes à celles prévues par le code du travail dans le secteur privé.

Proposition n° 2.6 : assouplir la réglementation relative aux dispositifs de départ volontaire, éventuellement couplée à l’augmentation du montant de l’indemnité.


Proposition n° 2.7 : promouvoir le développement de l’apprentissage dans la fonction publique afin d’engager une politique d’inclusion positive des jeunes de 16 à 25 ans en prenant en compte l’ancienneté des apprentis dans le service public pour leur permettre d’accéder aux concours internes de la fonction publique et rénover le parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d’État (pacte).

Proposition n° 2.8 : favoriser une politique de substitution de certains actes médicaux vers des professionnels paramédicaux dont les compétences seraient définies par mission et non plus par acte, afin de réduire les coûts et améliorer l’accès à l’offre de soins.

b. Propositions concernant les rémunérations et les carrières

 

Proposition n° 2.9 : introduire une obligation de motivation de toute décision d’avancement d’échelon à la durée minimale par les élus, assortie d’une publication régulière de ces décisions dans chaque collectivité territoriale.

Proposition n° 2.10 : instaurer une obligation de mobilité professionnelle, hors de la collectivité de titularisation dans le premier grade, pour l’accès au deuxième grade de la catégorie a+ dans toutes les filières ainsi qu’une obligation de mobilité interne au sein de la collectivité pour le principalat ou le deuxième grade de tous les cadres d’emplois de catégorie a et b dans toutes les filières.

Proposition n° 2.11 : généraliser l’expérimentation de l’entretien professionnel conduit par le supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire dans la fonction publique hospitalière dès le 1er janvier 2015.

Proposition n° 2.12 : réviser les grilles indiciaires afin de recréer des espaces indiciaires suffisants pour rendre attractives les carrières et harmoniser les rémunérations accessoires et les régimes indemnitaires, pour davantage de justice, dans les trois versants de la fonction publique d’ici 2017.

Proposition n° 2.13 : éviter toute mesure nouvelle conduisant à une hausse des taux de cotisations sociales et autres contributions à la CNRACL et l’IRCANTEC d’ici 2017.

c. Propositions concernant l’organisation du travail

 

Proposition n° 2.14 : imposer aux collectivités territoriales et aux établissements du secteur hospitalier public ayant un régime de travail inférieur à la durée légale de 1 607 heures de le modifier dans le cadre de la négociation collective avant le 31 décembre 2015. À défaut, supprimer la base légale de ces accords dérogatoires dès le 1er janvier 2016.

Proposition n° 2.15 : supprimer le 4° de l’article 59 de la loi du 26 janvier 1984 qui permet à l’exécutif local de distribuer des autorisations spéciales d’absence n’entrant pas en compte dans le calcul des congés annuels dès 2016, à défaut de l’adoption d’un décret en conseil d’état encadrant ses modalités d’application en 2015.

Proposition n° 2.16 : introduire une journée de carence d’ordre public, en cas de congé maladie ordinaire, dans le secteur public et le secteur privé.

Proposition n° 2.17 : présenter un bilan complet de l’application du décret n° 2014-1133 du 3 octobre 2014 relatif à la procédure de contrôle des arrêts de maladie des fonctionnaires avant le 4 octobre 2016.

Proposition n° 2.18 : instaurer une démarche de management des ressources humaines participative et collective au sein de chaque service, fondée notamment sur le développement de la pratique des « boîtes à idées ».

Proposition n° 2.19 : introduire, dans tout projet de réforme organisationnelle, un plan d’accompagnement des personnels dans la conduite du changement, dont la mise en œuvre devra être concertée avec les institutions représentatives du personnel au niveau territorial pertinent.

Proposition n° 2.20 : dans le cadre de la réforme territoriale proposée par le Gouvernement, définir, en amont, une norme nationale précisant les modalités d’alignement des conditions de rémunération et de durée du travail applicables aux agents concernés par cette réorganisation des services publics ainsi que les conditions de prises en charge des conséquences matérielles en résultant.

Proposition n° 2.21 : inscrire le projet de loi n° 1278 relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans les plus brefs délais.

Proposition n° 2.22 : changer de paradigme pour promouvoir le principe de la liberté, pour tout fonctionnaire, de cumuler plusieurs activités professionnelles sauf si cela a pour effet de porter atteinte à l’intérêt du service public et sous réserve d’être dûment autorisé.

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