N° 4125 annexe 32 - Rapport de M. Jean-Marie Beffara sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).



N
° 4125

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2017 (n° 4061),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 32

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES

AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

Rapporteur spécial : M. Jean-Marie BEFFARA

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

CHAPITRE PREMIER : UNE HAUSSE DES CRÉDITS FAVORABLE À LA MISE EN œUVRE DE PROJETS AMBITIEUX DANS LE DOMAINE DES MEDIAS, DU LIVRE ET DES INDUSTRIES CULTURELLES 11

I. LE PROGRAMME 180 PRESSE ET MEDIA 11

A. LES AIDES À LA PRESSE : HORS RELATIONS FINANCIÈRES AVEC L’AFP, UN NIVEAU D’AIDE STABILISÉ PAR RAPPORT À 2016 11

1. La situation financière fragile du secteur de la presse 11

2. La réforme des aides à la presse : une meilleure efficacité à coût constant 14

a. Les réformes des aides à la presse mise en œuvre lors du quinquennat : un enjeu majeur dont s’est saisi la majorité actuelle 14

b. Le montant des aides à la presse et à l’Agence France Presse (AFP) 16

c. Focus sur le « fonds Google » : un bilan positif selon l’AIPG 18

3. L’abandon de la catégorie de presse « de la connaissance et du savoir » : une décision préjudiciable pour la presse professionnelle 19

a. La situation de la presse professionnelle, dans un contexte de concentration des aides sur la presse IPG 19

b. Le cas des tarifs postaux : un manque de transparence important et des distorsions de concurrence difficilement justifiables 21

B. DES AIDES EN AUGMENTATION POUR LES AUTRES MÉDIAS 23

1. La hausse attendue des crédits du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER) réalisée dans le PLF 2017 23

2. La Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT) et les medias de proximité 24

II. LE PROGRAMME 334 LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES 25

A. DES CRÉDITS EN HAUSSE POUR LES DEUX ACTIONS DU PROGRAMME 25

1. L’action livre et lecture : des crédits en hausse, principalement en faveur de la Bibliothèque nationale de France 26

2. L’action industries culturelles : une hausse de 1 million d’euros par rapport à 2016 27

III. LE LEVIER DE LA DÉPENSE FISCALE : ÉTAT DES LIEUX ET PISTES D’AMÉLIORATION 29

A. ÉTAT DES LIEUX DES DÉPENSES FISCALES SUR LES IMPÔTS D’ÉTAT 29

1. Les principales dépenses fiscales de la mission Médias : un soutien déséquilibré largement favorable au cinéma et à l’audiovisuel 29

2. Les évolutions possibles en faveur de la presse spécialisée : l’extension du dispositif fiscale de déduction des provisions à la presse professionnelle 31

B. L’AIDE AU DISTRIBUTEUR DE PRESSE : L’EXONÉRATION TOTALE DE CONTRIBUTION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE COMPENSÉE PAR L’ÉTAT DÈS 2017 32

1. Description du dispositif d’exonération fiscale 32

2. L’évolution prévue en 2017 : une exonération systématisée et compensée par l’État aux collectivités territoriales 34

C. LE CRÉDIT D’IMPÔT JEUX VIDÉO : UNE AIDE FISCALE EN FAVEUR D’UN SECTEUR DYNAMIQUE ET POURVOYEUR D’EMPLOI 34

1. Le secteur du jeu vidéo et les aides existantes 35

a. Un secteur très dynamique et en pleine expansion 35

b. Les aides existantes, hors crédit d’impôt 36

2. Le crédit d’impôt jeux vidéo : un dispositif efficace mais insuffisamment incitatif au regard des évolutions du secteur 36

a. Présentation du crédit d’impôt jeux vidéo (CIJV) : un effet de levier important 36

b. Un soutien moins important en France qu’à l’international : une vraie faiblesse face à la révolution technologique que constitue la réalité virtuelle 39

c. Le renforcement de l’attractivité du crédit d’impôt jeu vidéo : une proposition forte du Rapporteur spécial 40

CHAPITRE 2 : UN BILAN POSITIF DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC, TANT SUR LE PLAN DES CONTENUS QUE SUR CELUI DE LA MAÎTRISE DE LA DÉPENSE 43

I. LES RESSOURCES DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC : EN FINIR AVEC L’AUGMENTATION DE LA CONTRIBUTION AUDIOVISUELLE PUBLIQUE AU-DELÀ DE L’INFLATION ET AFFIRMER UN NOUVEAU MODÈLE DE FINANCEMENT DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC 43

A. LA HAUSSE CONTROVERSÉE DE 2 EUROS PRÉVUE À L’ARTICLE 20 DU PLF POUR 2017 43

1. Un euro supplémentaire qui vise à maintenir le rendement de la CAP entre 2016 et 2017 44

a. Un « effet assiette » en chute libre 44

b. Un nouveau constat qui plaide en faveur d’une réforme rapide de l’assiette de la contribution à l’audiovisuel public 48

B. LA CONSOLIDATION DE L’AFFECTATION DE LA TAXE TÉLÉCOM À FRANCE TÉLÉVISIONS : UNE MESURE BÉNÉFIQUE POUR L’AUDIOVISUEL PUBLIC 50

1. Historique de l’affectation de la taxe sur les opérateurs de communication électronique à l’audiovisuel public 50

2. L’article 48 de la loi de finances initiale pour 2016 : la disparition des crédits budgétaires et un premier fléchage au profit de France Télévisions 51

3. La transformation en taxe affectée et plafonnée à l’article 17 du PLF pour 2017 et la hausse de la part affectée pour compenser la suppression de l’euro supplémentaire 51

II. LE BILAN DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC À L’ISSUE DU QUINQUENNAT : DES PROJETS AMBITIEUX, DES COMPTES ASSAINIS ET DES PERFORMANCES D’AUDIENCE CONFIRMÉES 53

A. LES RESSOURCES DES OPÉRATEURS DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC EN 2017 : UN BUDGET FAVORABLE AUX PROGRAMMES ET AUX PROJETS AMBITIEUX 54

1. Des dotations en hausse en 2017 et des projections financières pluriannuelles réalistes 54

a. Le budget 2017 se veut moteur d’une nouvelle dynamique 54

b. Des prévisions financières réalistes dans le cadre des contrats d’objectifs et de moyens 2016-2020 55

2. L’audiovisuel public en action : un budget au service de l’ambition des contenus 56

a. L’audiovisuel public à l’heure des projets 56

b. La formalisation de nouvelles obligations déontologiques : le devoir d’exemplarité des programmes du service public 59

B. LA NETTE AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC EN 2016 61

1. France Médias Monde et Arte : une bonne gestion confirmée de longue date et des hausses d’audiences significatives sur les programmes audiovisuels et le numérique 61

a. Arte : un budget à l’équilibre depuis 2015 et des audiences en hausse 61

b. France Medias Monde : des hausses d’audience fulgurantes dans un cadre budgétaire maîtrisé 62

2. France Télévisions : des comptes à l’équilibre en 2016, un défi réussi 63

a. Un retour à l’équilibre des comptes de France Télévisions fin 2016 : un engagement tenu qui couronne les efforts de gestion entrepris depuis 2012 63

b. Des dépenses de programme qui sont restées prioritaires et des audiences qui confirment la place de leader du groupe de l’audiovisuel public 66

c. La diversification des ressources : un enjeu clé pour l’avenir 67

3. La rigidité des charges à Radio France rend plus difficile l’évolution de sa gestion 69

a. Un retour à l’équilibre encore incertain malgré un effort important en gestion 69

b. Des résultats d’audiences satisfaisants 70

4. L’Institut national de l’audiovisuel : une situation financière équilibrée au service de projets ambitieux 71

EXAMEN EN COMMISSION 75

ANNEXE : PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 77

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2016, 75 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.

 

LFI 2016

PAP 2017

Écart LFI 2016/PAP 2017

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 180 Presse et Media

255,3

255,3

294,3

294,3

15,28 %

15,28 %

Programme 334 Livre et industries culturelles

266,1

276,5

278,9

276,9

4,8 %

0,1 %

Programme 313 Contribution à l’audiovisuel public et à la diversité radiophonique

29,25

29,25

       

TOTAL Mission

550,65

561,05

573,2

571,2

4,1 %

1,8 %

Source : projet annuel de performances 2017.

Si l’évolution globale de la mission est pertinente, celle de chaque programme est en revanche peu significative en raison des importantes évolutions de périmètre que connaît la mission Medias entre la LFI pour 2016 et le PLF pour 2017. En effet, le programme 313 Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique a disparu, et, concomitamment, le programme 180 désormais intitulé Presse et médias et le programme 334 Livre et industries culturelles ont connu une reconfiguration partielle.

Sous l’impulsion du Rapporteur spécial, l’extinction progressive de la dotation sur crédits budgétaires de France Télévisions, qui faisait l’objet de l’action 1 du programme 313, a été achevée en 2016 et non en 2017 comme le prévoyait initialement le Gouvernement (1). Dès lors, le programme 313 ne portait plus que les crédits du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER), pour un montant de 29,25 millions d’euros en LFI pour 2016, ce qui apparaissait peu pertinent. Il a été décidé de regrouper au sein du programme 180, désormais intitulé Presse et médias :

– les crédits dédiés à l’Agence France Presse (AFP), qui restent inscrits à l’action 1 du programme ;

– les crédits dédiés aux aides à la presse écrite, qui restent inscrits à l’action 2 du programme ;

– les crédits dédiés au soutien aux médias de proximité, anciennement inscrits à l’action 3 du programme 334 Livre et industries culturelles, qui font désormais l’objet de l’action 5 du programme 180 ;

– les crédits du FSER, anciennement inscrits à l’action 10 du programme 313, qui font désormais l’objet de l’action 6 du programme 180 ;

– les crédits dédiés à la Compagnie internationale de radio et télévision (CIRT), anciennement inscrits à l’action 4 du programme 334, qui font désormais l’objet de l’action 7 du programme 180.

Le programme 334 Livre et industries culturelles est ainsi rétabli dans sa configuration antérieure à la LFI pour 2016, avec les deux seules actions Livre et lecture (action 1) et Industries culturelles (action 2), en cohérence avec son intitulé. Si cette rationalisation de la maquette de la mission est utile, et s’ajoute depuis l’année dernière à l’extinction des transferts entre la mission et le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public, il est désormais nécessaire de pérenniser autant que possible le périmètre de chaque programme de la mission Medias, afin de renforcer la lisibilité des évolutions d’une année sur l’autre.

Concernant le compte de concours financier Avances à l’audiovisuel public, il intègre les remboursements d’avances correspondant au produit de la contribution à l’audiovisuel public (CAP), déduction faite des frais d’assiette et de recouvrement et du montant des intérêts, auxquels s’ajoute le montant des dégrèvements de CAP pris en charge par le budget général de l’État. S’ajoute, depuis 2016, la part de taxe sur les opérateurs de communication électronique (TOCE) affectée à France Télévisions.

CHAPITRE PREMIER : UNE HAUSSE DES CRÉDITS FAVORABLE À LA MISE EN œUVRE DE PROJETS AMBITIEUX DANS LE DOMAINE DES MEDIAS, DU LIVRE ET DES INDUSTRIES CULTURELLES

Actions

LFI 2016

PLF 2017

Écart

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1. Relations financières avec l’AFP

127,5

127,5

132,4

132,4

3,8 %

3,8 %

2. Aides à la presse

127,8

127,8

127,8

127,8

0,0 %

0,0 %

5. Soutien aux médias de proximité*

1,38

1,38

1,58

1,58

14,5 %

14,5 %

6. Soutien à l’expression radiophonique**

29

29

30,75

30,75

6,0 %

6,0 %

7. Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT)*

1,65

1,65

1,7

1,7

3,0 %

3,0 %

TOTAL 2015

255,3

255,3

260,2

260,2

1,92 %

1,92 %

* Antérieurement dans le programme 334.

** Antérieurement dans le programme 313, supprimé dans le PLF pour 2017.

Source : projets annuels de performances pour 2016 et pour 2017.

Jusqu’en 2016, le programme Presse était composé de deux actions, consacrées respectivement aux relations financières avec l’AFP et aux aides à la presse. Les trois nouvelles actions résultent des changements de maquette de la mission, tels qu’explicités dans l’introduction du présent rapport.

Cette situation de baisse tendancielle et continue depuis 2007 du chiffre d’affaires de la presse s’explique par plusieurs facteurs concomitants :

− d’une part, la baisse des ventes, engendrée par la modification des usages et le développement d’internet. Le chiffre d’affaires de la vente par abonnement a commencé à diminuer en 2013, mais de manière encore mesurée
(– 1,9 % entre 2013 et 2015). Celui de la vente au numéro est plus durement touché et depuis plus longtemps : une baisse massive de 30 % est constatée sur la période 2005-2015 ;

− d’autre part, la baisse du chiffre d’affaires publicitaire. Il s’agit du principal facteur de déstabilisation de la presse, dans un contexte où les investissements publicitaires média et hors média des annonceurs sont en baisse, notamment du fait de la conjoncture économique. La presse est de surcroît le média traditionnel le plus touché par le morcellement du marché publicitaire et des audiences, ainsi que par la montée en charge de la publicité digitale. Le léger redressement du marché publicitaire constaté notamment sur le secteur de la télévision au premier semestre 2016 ne semble pas, pour le moment, bénéficier au secteur de la presse.

Le tableau suivant détaille la baisse des recettes subie par la presse, en distinguant les recettes de vente et les recettes publicitaires.

ÉVOLUTION DES RECETTES DU SECTEUR DE LA PRESSE SUR LA PÉRIODE 2005-2015

(en euros)

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Évolution sur 10 ans

Recettes de ventes

5 997 149

5 983 248

6 033 418

5 886 208

5 755 273

5 671 016

5 482 574

5 477 514

5 300 982

5 244 977

5 121 928

– 15 %

Ventes au numéro

3 694 690

3 594 285

3 560 908

3 465 818

3 236 467

3 092 013

2 922 505

2 861 469

2 663 568

2 625 958

2 530 971

– 31 %

Vente par Abonnement

2 302 459

2 388 963

2 472 589

2 420 390

2 518 806

2 579 003

2 560 069

2 616 045

2 637 414

2 619 019

2 590 957

13 %

Recettes de publicité

4 582 256

4 679 540

4 828 420

4 564 359

3 880 110

3 658 985

3 483 790

3 241 342

2 854 785

2 497 868

2 385 402

– 48 %

Publicité commerciale

3 637 160

3 731 087

3 892 112

3 677 736

3 189 026

3 007 349

2 859 154

2 659 912

2 317 110

2 010 094

1 910 270

– 47 %

Petites annonces

945 096

948 453

936 228

886 623

691 084

651 635

624 636

581 430

537 675

487 774

475 132

– 50 %

Source : ministère de la culture

Les aides à la presse demeurent donc une intervention incontournable en faveur de ce média fortement fragilisé, mais essentiel à la dynamique démocratique et culturelle de notre pays.

Les réformes successives et complémentaires des aides à la presse se sont appuyées, au commencement, sur les conclusions du rapport remis au ministre de la Culture et de la communication par M. Roch-Olivier Maistre en mai 2013.

Les évolutions se sont traduites par plusieurs mesures législatives, dont plusieurs d’initiative parlementaire, ou réglementaires, démontrant ainsi l’implication majeure du Gouvernement et de l’actuelle majorité face à l’enjeu que représente un secteur de la presse dynamique et innovant :

− Le décret n° 2013-933 du 17 octobre 2013 instituant une aide exceptionnelle au bénéfice de certains diffuseurs de presse indépendant, suite au mouvement social de la société Presstalis (720 000 euros hors frais de gestion) ;

− la loi n° 2014-237 du 27 février 2014 harmonisant les taux de TVA applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne à 2,1 %, et ce malgré le non-aboutissement des négociations avec l’Union européenne sur ce point ;

− le décret n° 2014-659 du 23 juin 2014 portant réforme des aides à la presse, qui s’est effectuée à enveloppe constante. Les évolutions se sont traduites par quatre mesures principales :

● la gestion du fonds, avec la fusion des anciennes sections, afin d’unifier et de simplifier l’examen des demandes d’aide. Il est à noter que les décisions d’attribution d’une aide sont prises par le ministre de la Culture et de la communication. Pour les dossiers demandant une aide (avance remboursable ou subvention) égale ou supérieure à 50 000 euros, ces décisions sont prises après avis d’un comité d’orientation ;

● la priorité affirmée du soutien à l’innovation et aux projets mutualisés. L’innovation à l’échelle de l’entreprise devient le premier critère d’éligibilité au soutien du fonds. Par ailleurs, les taux bonifiés de soutien à 50 % sont désormais réservés aux projets présentant une innovation pour le secteur dans son ensemble et, comme avant, aux projets collectifs ;

● la prise en compte des dépenses internes pour les projets de développement informatiques, qui répond à une demande récurrente de la presse ;

● une nouvelle conditionnalité du soutien aux projets comprenant l’acquisition ou la location de matériels liés à l’impression : pour bénéficier du soutien du fonds à partir de 2016, les éditeurs devront démontrer l’absence de surcapacité d’impression dans la zone de production concernée, répondant à des besoins équivalents.

− le décret n° 2014-1080 du 24 septembre 2014 portant réforme du fonds d’aide au portage de la presse. Cette réforme a été mise en œuvre afin d’éviter l’effet d’aubaine qu’ont pu représenter pour certains éditeurs les aides au flux et aides aux stocks qui existaient jusqu’en 2014. Les deux sections du dispositif sont désormais fonction d’une part, du taux de progression du nombre d’abonnés portés entre les années n–1 et n, et d’autre part en fonction de la progression du taux de portage multi-titres entre les années n–2 et n ;

 la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 rectificative pour 2014, ayant instauré la faculté pour les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) d’exonérer de contribution économique territoriale (CET) les diffuseurs de presse. Cette disposition sera plus amplement abordée dans le cadre des développements ultérieurs relatifs aux dépenses fiscales du présent rapport ;

 la loi n° 2015-433 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse issue de la proposition de loi de M. Michel Françaix, qui a permis la création du statut d’entreprise solidaire de presse d’information (ESPI), et a introduit plusieurs mesures d’aides fiscales (3) ;

− le décret n° 2015-1392 du 30 octobre 2015 relatif au soutien de l’État au pluralisme de la presse : ce décret étend les aides au pluralisme en mettant fin à la distinction de périodicité en faveur des publications relevant de l’information politique et générale à faibles ressources publicitaires ;

− le décret n° 2016-1161 du 26 août 2016 relatif au soutien à l’émergence et à l’innovation dans la presse et réformant les aides à la presse. Ce décret concrétise trois évolutions énoncées en décembre dernier par le Gouvernement :

● la création d’un fonds pérenne de soutien à l’émergence et à l’innovation, doté de 5 millions d’euros dans le PLF pour 2017 ;

Le fonds de soutien à l’émergence et à l’innovation dans la presse

« Ce fonds prévoit la création d’une bourse pour les entreprises de presse émergentes d’un montant pouvant atteindre 50 000 euros dans le but de soutenir le lancement d’entreprises de presse. Ce nouveau dispositif permettra notamment à de jeunes entreprises de presse qui ne disposent pas encore d’un agrément accordé par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) de bénéficier d’un accompagnement financier et d’un suivi administratif leur offrant les moyens de faire face à leurs premières dépenses et de développer leur concept éditorial et leur plan d’affaires. Ce dispositif est également ouvert aux médias émergents disposant d’un numéro de CPPAP.

« En parallèle, le fonds de soutien à l’émergence et à l’innovation prévoit également le lancement d’appels à projets pour des programmes d’incubation, dédiés aux médias émergents, visant à renforcer le dynamisme et l’attractivité de l’entrepreneuriat de presse. Ces programmes d’incubation seront très attentifs aux moyens d’hébergement, mais aussi de conseil et de formation aux entrepreneurs dans les médias, entendus au sens le plus large (titres de presse papier, sites de presse en ligne, mais aussi radios, télévisions, web radios, webtélés…).

« Des appels à projets portant sur la réalisation de programmes de recherche innovants, définis avec les acteurs du secteur de la presse, pourront également être lancés. Ils permettront de développer une expertise sur des thèmes au cœur des mutations du secteur (monétisation de l’information, big data…) et aux retombées positives sur l’ensemble des acteurs de la presse.

« L’ensemble de ces actions sera mené par le Club des innovateurs, qui rassemble les professionnels de la presse, des experts de l’innovation et des représentants de l’État. »

Source : PAP 2017.

● la poursuite du ciblage du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), en s’adaptant aux nouveaux besoins du secteur. Cela se traduit notamment par un taux de subvention des projets éligibles au fonds passant de 30 à 40 % des dépenses éligibles.

− la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, déposée par M. Patrick Bloche et adoptée en lecture définitive par l’Assemblée nationale le 6 octobre 2016 (4: cette proposition de loi a notamment été l’occasion de préciser la notion d’information politique et générale (IPG) et son application aux dispositifs fiscaux issus de la loi de M. Michel Françaix.

Dans le domaine de la presse, la hausse des crédits se concentre sur l’action 1 ayant pour objet les relations financières de l’État avec l’AFP. Depuis 2015, le versement distingue d’une part les abonnements commerciaux de l’État (21,7 millions d’euros pour 2017) et d’autre part la compensation des missions d’intérêt général (110,8 millions d’euros dans le PLF pour 2017), conformément aux obligations exprimées par la Commission européenne. Cette dernière dotation a été réévaluée de 5 millions d’euros dans le PLF pour 2017, le contrat d’objectif et de moyens (COM) de l’AFP prévoyant par ailleurs pour l’exercice à venir une dotation inférieure, d’un montant de 106,2 millions d’euros. Cette augmentation vise à faire face à la situation économique difficile de l’agence, ainsi que, comme le précise le projet annuel de performance, à des besoins de régularisation de certaines situations fiscales et sociales dans les bureaux à l’étranger.

Parallèlement, le montant des aides à la presse est maintenu entre 2016 et 2017. Le tableau suivant récapitule l’évolution de cette enveloppe, par type d’aides, en en précisant, par ailleurs, le poids relativement au total des aides.

ÉVOLUTION ET VENTILATION DES AIDES À LA PRESSE 2016-2017

Aide à la presse

LFI 2016

PLF 2017

Évolution

Part de l’aide/total PLF 2017

Sous-action 1 : Aide à la diffusion

56,7

52,96

– 8,2 %

41,4 %

Aide au portage de la presse

36

36

0,0 %

28,2 %

Exonération de charges pour les vendeurs-colporteurs

20,7

16,96

– 21,8 %

13,3 %

Sous action 2 : Aide au pluralisme

15,5

16,03

3,4 %

12,5 %

Aide aux quotidiens nationaux d’IPG à faibles ressources publicitaires

12,65

13,16

4,0 %

10,3 %

Aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d’IPG à faibles ressources de petites annonces

1,4

1,4

0,0 %

1,1 %

Aide à la presse hebdomadaire régionale

1,42

1,47

3,5 %

1,1 %

Sous-action 3 : Aide à la modernisation

55,6

58,86

5,9 %

46,0 %

Aide à la modernisation sociale de presse IPG

3,4

1,6

– 52,9 %

1,3 %

Aide à la modernisation de la distribution de la presse

18,85

18,85

0,0 %

14,7 %

Aide à la modernisation des diffuseurs de presse

3,7

6

62,2 %

4,7 %

Fonds stratégique pour le développement de la presse

29,6

27,41

– 7,4 %

21,4 %

Fonds de soutien à l’émergence et à l’innovation dans la presse (nouveau)

 

5

 

3,9 %

TOTAL

127,8

127,8

0 %

 

Source : projets annuels de performances pour 2016 et 2017.

Le meilleur ciblage qu’ont effectué les réformes successives depuis 2013 a permis de renforcer l’efficacité de ces aides, tout en permettant de raisonner à enveloppe quasi-constante. En effet, la baisse constatée notamment entre 2015 et 2016 (130,1 millions de crédits dans le PLF pour 2015) est largement imputable à la baisse tendancielle de l’aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne IPG (sous-action 3-1) : cette dernière est une dépense de guichet en faveur des imprimeries, créée par la loi de finances rectificative pour 2004, et dont le nombre de bénéficiaires diminue sous l’effet des départs à la retraite.

Le fonds pour l’innovation numérique de la presse (FINP), ou « fonds Google » est né au deuxième semestre 2013, à la suite de négociations entre Google et l’association de la presse d’information politique et générale (AIPG). Il est une réponse au constat que les moteurs de recherche Internet comme Google utilisent des contenus produits par la presse sans les rémunérer, et en tire des revenus publicitaires conséquents. L’accord entre Google et l’AIPG comprend deux mesures principales : la mise en place d’un fonds abondé par Google d’un total de 60 millions d’euros sur trois ans pour « faciliter la transition de la presse vers le monde numérique », et la mise en place d’une coopération en matière de régie publicitaire en ligne. L’État n’est en aucun cas partie prenante à cet accord privé, les financements acquis de ce cadre ne constituant pas une alternative à l’action des pouvoirs publics. Le fonds est dirigé par les parties prenantes à l’accord, à savoir l’AIPG et Google. Le conseil d’administration attribue le soutien après examen des dossiers présentés par les sites de presse en ligne.

Seuls sont éligibles les services de presse en ligne d’information politique et générale agréés par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), bi médias ou tout en ligne. Pour être éligibles, les projets doivent avoir pour objectif direct de créer de nouvelles sources de revenus pour les éditeurs de presse, ou de promouvoir de nouveaux modèles économiques. L’ensemble des dépenses du projet sont éligibles, avec un double plafond de 2 millions d’euros et 60 % des dépenses engagées.

Concernant l’articulation du fonds pour l’innovation numérique de la presse avec le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), le principe est celui de la non-interférence. Ainsi, le premier s’interdit de soutenir un projet ayant reçu un financement du second, et réciproquement.

Le bilan depuis 2013 est le suivant :

– en 2013, trente-neuf projets avaient été présentés, et vingt-trois soutenus, pour un total de 16,4 millions d’euros ;

– en 2014, sur quarante-quatre projets présentés, trente ont été retenus pour un total de 16,1 millions d’euros ;

– en 2015, sur cinquante-quatre projets examinés, trente-sept ont été retenus pour un total de 15,3 millions d’euros.

D’importants projets ont été menés depuis trois ans grâce au financement de ce fonds, dont notamment : la mise en place d’une plateforme nationale de service pour les entreprises par Les Échos (2 millions d’euros), la collecte de données utilisateur (1,7 million d’euros) ou la mise en place d’une offre vidéo en direct pour le mobile et le numérique (1,1 million d’euros) pour Le Figaro, ou encore le « Digital newsmag 360 », hebdomadaire augmenté du Point (1,4 million d’euros). La diversité des groupes de presse ayant bénéficié des aides est importante : en dehors des grands titres de presse, ont également reçu des financements, le site Rue89, Jeune Afrique, Nice Matin, les Inrocks. Au total, c’est près de cinquante titres différents qui ont été sélectionnés ces trois dernières années.

L’audiovisuel public y a eu également recours puisque le service numérique d’information « Mashable » de France 24 a bénéficié d’une aide de 980 000 euros émanant du « fonds Google ».

Le bilan de ce fonds est globalement très positif, comme l’ont confirmé les représentants de l’AIPG lors des auditions menées par le Rapporteur spécial. Le fonds devrait prendre fin en 2017, et se contenter du suivi des dossiers existants. Il laisse place au Digital New Initiative, inspiré de l’expérience française mais de dimension européenne puisqu’il s’agit d’un partenariat entre Google et des éditeurs de presse français, allemands, anglais, néerlandais, espagnols et italiens. Le projet est accompagné d’un fonds de 150 millions d’euros sur trois ans, ayant le même objectif de soutien à l’innovation numérique.

À ce jour, les aides budgétaires directes à la presse sont ciblées à 96 % sur la presse IPG : le ciblage est complet pour l’aide à la modernisation et les trois aides au pluralisme. Il est presque complet pour l’aide au portage, également ouverte aux quotidiens sportifs généralistes.

Dans le cadre du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), le ciblage est désormais moins marqué pour les services de presse en ligne (SPEL), les aides pouvant également être attribuées à la « presse du savoir et de la connaissance ». Le décret du 23 juin 2014 précisait que les services de presse en ligne (SPEL) d’information pratique du public ne sont plus éligibles. Par ailleurs, l’article 40 du même décret prévoyait l’éligibilité uniquement en 2014 et 2015 des services de presse en ligne qui développent l’information professionnelle ou qui favorisent l’accès au savoir et à la formation, la diffusion de la pensée, du débat d’idées, de la culture générale et de la recherche scientifique. Le décret de 2016 est revenu sur cette restriction, qui remettait en cause l’équilibre concurrentiel entre les différents types de presse, et poursuit après 2016 l’éligibilité des aides du fonds stratégique en matière de développement numérique.

Le Rapporteur spécial se félicite de ce maintien, qui apparaît vital au maintien de la presse spécialisée, dans un contexte de crise structurelle du secteur.

La presse spécialisée est en effet dans une situation économique globale compliquée, comme l’a souligné la Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS) lors des auditions menées par le Rapporteur spécial. Ce secteur plaçait ses attentes dans la création annoncée d’une catégorie de presse « du savoir et de la connaissance ».

En effet, lors de la conférence des éditeurs du 2 juin 2015, la ministre de la Culture et de la communication Mme Fleur Pellerin avait en effet annoncé son intention d’identifier une nouvelle catégorie de presse : celle de la « connaissance et du savoir », qui serait éligible aux aides à la presse, tandis que la presse de divertissement en serait pleinement écartée. Cette catégorie recouvre une grande partie des services de presse qui développent l’information professionnelle ou qui favorisent l’accès au savoir et à la formation, la diffusion de la pensée, du débat d’idées, de la culture générale et de la recherche scientifique.

Cette nouvelle catégorie, bien que n’ayant pas fait l’objet d’une disposition réglementaire explicite, est citée dans le préambule du décret n° 2016-1161 du 26 août 2016 réformant les aides à la presse, afin de prolonger l’éligibilité des services de presse en ligne rattachés aux dispositifs du FSDP. Elle n’est a contrario pas retenue dans le cadre de la fixation des tarifs postaux, ces derniers recouvrant pourtant une importance stratégique majeure pour la presse spécialisée, le transport postal étant le deuxième poste de dépenses de cette presse, dont la vente se fait à 92 % par abonnement.

L’aide au transport postal versée à la Poste : un manque de transparence qui se confirme

Le principe de l’aide au transport postal repose sur un tarif postal privilégié, compensé par l’État via subvention à La Poste au titre de la mission de service public qu’elle accomplit en distribuant les titres de presse à moindre coût. Le postage constitue le deuxième mode de diffusion après la vente au numéro.

Cette aide est désormais entièrement intégrée au programme 134 Développement des entreprises de la mission Économie et n’est plus prise en compte dans la présentation des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles. Au terme des accords Schwartz 2009-2015, la contribution de l’État pour la dernière année de ces accords devait être de 180 millions d’euros. Cependant, comme cela avait été le cas en 2014, le montant de la contribution de l’État est diminué de 50 millions d’euros par rapport au niveau fixé dans les accords de 2008 : elle a été ramenée à 130 millions d’euros pour 2015 au lieu de 150 millions d’euros en 2014 et 200 millions d’euros en 2013. La baisse de la subvention publique avait vocation à être compensée par le montant du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), qui s’élève pour La Poste à 300 millions d’euros. En 2016, le projet de loi de finances prévoyait encore 119 millions d’euros de crédits. Ce montant a été reconduit dans le PLF 2017, au sein de la mission Économie.

Cette aide budgétaire, en lien direct avec les aides à la presse, amène le Rapporteur spécial a posé plusieurs problématiques non résolues :

− la présence de ces aides au sein de la mission Économie, et non au sein de la mission Médias, et ce malgré les recommandations réitérées de la Cour des comptes. Cette affectation nuit à la lisibilité des aides à la presse, le transport postal représentant un enjeu de taille, en premier lieu pour la presse spécialisée. Elle ne fait par ailleurs l’objet d’aucun développement ni d’aucune justification au sein de la mission à laquelle elle est rattachée ;

− à ce jour, l’extinction de cette dotation budgétaire qui devait accompagner la sortie des accords Schwartz n’est pas planifiée. Destinée à compenser des surcoûts difficilement évaluables à ce jour, elle apparaît peu transparente.

Le Rapporteur spécial alerte vivement le Gouvernement sur l’absence totale d’évaluation autour de cette aide, dont le montant est, selon les réponses au questionnaire parlementaire elles-mêmes, « forfaitaire », et « sans lien avec les volumes réellement transportés ».

Suite à l’attente du rapport de M. Alexandre Jevakhoff relatif à la complémentarité des modes de distribution (portage, postage, vente au numéro, auxquels il faudrait ajouter la diffusion numérique), qui n’a finalement jamais vu le jour, le Gouvernement a confié à l’été 2015 à M. Emmanuel Giannesini, conseiller-maître à la Cour des comptes et président du comité d’orientation du fonds stratégique, une mission sur les scénarios d’avenir des relations État-Presse-La Poste. Ce rapport n’a jamais été rendu public, et n’a pas été communiqué à l’ensemble des organisations de presse, notamment la Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS). Il a pourtant servi de fondement à la détermination des tarifs postaux, enjeu majeur pour cette catégorie de presse. Le Rapporteur spécial n’a pas non plus été destinataire de ce rapport. Là encore, le manque flagrant de transparence sur les décisions prises porte préjudice à la légitimité de ces dernières.

Après une communication tardive sur les tarifs appliqués en 2016, à propos de laquelle le Rapporteur spécial avait d’ailleurs interpellé la ministre lors de la commission élargie du 2 novembre 2015, la question de l’équité des tarifs postaux restera prégnante pour les années à venir. Les projections sont mieux définies : elles prévoient une hausse continue des tarifs postaux à la charge des éditeurs de presse sur la période 2016-2020. Cette hausse sera de 3 % par an pour la presse spécialisée, contre 1 % pour la presse IPG.

La baisse des tarifs d’affranchissement postal envisagée dans un premier temps pour la presse « du savoir et de la connaissance », permettant un alignement avec les tarifs appliqués à la presse IPG, a été abandonnée. Selon la Fédération nationale de la presse spécialisée, cette décision entraînera un creusement de l’écart entre les deux types de presse de 100 % sur l’ensemble des tarifs, alors même que la presse IPG est le premier bénéficiaire de l’aide au portage. Les raisons invoquées par le Gouvernement pour expliquer cet abandon sont triples (6) :

– la primauté de la presse IPG serait justifiée, car elle est la presse qui contribue le plus directement au pluralisme du débat public ;

– « un risque de fragilisation de l’équilibre du transport postal de la presse dans leur ensemble », faisant sans doute référence à l’équilibre financier de la Poste. Cette question est en lien direct avec les questionnements du Rapporteur spécial relatifs à la dotation budgétaire en faveur de la Poste ;

– une définition encore floue des contours de la presse de la connaissance et du savoir, qui poseraient des « difficultés juridiques sérieuses, la mise en œuvre de cette recatégorisation constituant un défi au plan administratif, alors même que les frontières entre catégories ne sont pas toujours évidentes ».

Ce dernier argument amène à s’interroger sur la cohérence des aides à la presse, étant donné qu’une référence explicite à cette catégorie de presse a été insérée dans le décret du 26 août 2016 relatifs aux aides octroyées dans le cadre du fonds stratégique, et ce alors même qu’aucune définition de périmètre n’a été effectuée.

Enfin, la différenciation des tarifs se pose de manière prégnante pour les types de presse hybride, comme les suppléments (7). En effet, cette catégorie liée à la presse IPG, mais proche dans son contenu de la presse spécialisé serait de nature à fausser les équilibres concurrentiels s’il lui est appliqué, comme cela a été le cas jusqu’à aujourd’hui, le tarif réservé à la presse IPG. La facture différenciée est en cours de réalisation, afin d’aligner par décret le statut du supplément sur celui du magazine.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, le Rapporteur spécial alerte encore une fois le Gouvernement sur le caractère peu transparent de l’organisation globale de l’aide au transport postal, ainsi que son manque de cohérence avec les autres dispositifs existants. La presse du savoir et de la connaissance demeure un élément essentiel du paysage médiatique français, qu’il serait préjudiciable d’affaiblir durablement par une distorsion de concurrence trop appuyée avec la presse IPG.

Chaque année, près de 700 radios associatives bénéficient de l’aide du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (665 en 2015), les aides représentant en moyenne 40 % de leur ressource.

La réforme du fonds, effective depuis l’année 2015 (8) a visé à renforcer dans un contexte budgétaire contraint le caractère incitatif et la sélectivité du dispositif, avec une part plus large consacrée à la subvention sélective, laquelle sera attribuée sur la base de critères plus exigeants. L’objectif est donc d’éviter un « saupoudrage » de la subvention sélective en augmentant le montant moyen de cette subvention et en la réservant aux radios les plus engagées dans la communication sociale de proximité. Ainsi, l’indicateur 1.1 Contribution des subventions sélectives à l’expression radiophonique locale affiche pour 2015 une réalisation de 56,4 %, contre une réalisation 2014 supérieure à 90 % : l’effet des nouvelles sur le caractère sélectif des aides est ainsi très largement confirmé. Les prévisions actualisées 2016 et 2017 maintiennent cet objectif de 60 %. Le décret du 22 octobre 2014 a également renforcé les contrôles relatifs à l’utilisation des crédits alloués aux radios associatives dans le cadre du fonds de soutien.

Conformément aux demandes des radios associatives, les crédits du fonds ont été augmentés de 1,5 million d’euros (+ 5 %), pour atteindre 30,8 millions d’euros dans le PLF pour 2017. Cette hausse des moyens du fonds de soutien a pour objectif de maintenir l’effort en faveur du soutien aux radios associatives, tout en faisant face à l’augmentation du nombre de demandes de subventions de fonctionnement. Le syndicat national des radios libres (SNRL), rencontré dans le cadre des auditions, s’est félicité de cette hausse, qui sera réservée à la sélectivité des programmes en priorité.

Plusieurs points d’attention doivent cependant demeurer sur le volet de l’expression radiophonique :

– le maintien de cette hausse en exécution, se traduisant par une absence de gel résultant de la gestion budgétaire infra-annuelle ;

– une réflexion approfondie sur la complexité administrative des dossiers étudiés dans le cadre du FSER doit être menée ;

– enfin, et surtout, le déploiement de la radio numérique terrestre (RNT) qui peine à se mettre en œuvre en dehors de la zone Paris-Nice-Marseille. Le 10 décembre 2015, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a publié un calendrier de mise en œuvre pour poursuivre le déploiement de la RNT, deux après que celui-ci ait été effectué dans les trois grandes villes précitées. Les appels d’offres devraient ainsi se poursuivre jusqu’en 2023.

Comme évoqué lors de l’introduction, le programme se voit également ajouter deux nouvelles actions, au volume modeste :

− l’action soutien aux médias de proximité, qui incluent un nombre important de médias se développant sur des supports numériques (web radios, webtélés, webzines, etc.). Elle contribue ainsi à l’adaptation numérique du secteur. Suite à un appel à projets doté de 1 million d’euros en 2015 (affecté à la mission Culture) ayant rencontré un succès notable, le choix a été fait de pérenniser le dispositif en créant, au sein de la mission Media, livre et industries culturelles, un fonds de soutien spécifique. Les crédits alloués ont été majorés de 500 000 euros, pour atteindre 1,5 million d’euros en 2016. En exécution, la dotation du fonds s’est élevée à 1,38 million d’euros : 296 demandes ont été reçues dont 108 ont d’ores et déjà obtenu une subvention, soit un taux de 40 %. La dotation pour le fond est rehaussée en 2017 à 1,58 million d’euros ;

− l’action visant à financer la Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT), qui relevait jusqu’en 2014 de l’action 115 Action audiovisuelle extérieure ayant disparu concomitamment à la mise en œuvre d’un financement intégral par la contribution à l’audiovisuel public (CAP) en 2015. Aucun crédit n’ayant été alloué à la CIRT en 2015, l’action a donc été inscrite au programme 334 pour la première fois dans le PLF pour 2016, avant d’être intégrée dans le PLF pour 2017 au programme 180 renommé Presse et Medias. Les crédits alloués pour 2017 s’élèvent à 1,66 million d’euros, stable par rapport à 2016. La dotation permet d’assurer la couverture des coûts salariaux des quatorze journalistes français travaillant à Médi1.

Actions

LFI 2016

PLF 2017

Écart

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1. Livre et lecture

246,9

257,3

262,02

260

6,1 %

1,0 %

2. Industries culturelles

16

16

16,9

16,9

5,6 %

5,6 %

3. Soutien aux médias de proximité *

1,5

1,5

       

4. Compagnie internationale de radio et télévision (CIRT)*

1,65

1,65

       

TOTAL 2015

266,05

276,45

278,92

276,9

4,8 %

0,2 %

* Actions faisant partie du programme 180 dans le PLF pour 2017.

Source : PLF pour 2017.

Comme précisé précédemment, la structure de ce programme a évolué : les actions 3 et 4 ont été intégrées au programme 180 dans le PLF 2017, recentrant ainsi le programme 380 sur son périmètre d’avant 2016. À périmètre constant, la hausse des crédits du programme est de 6,1 % en AE et 1,3 % en CP.

Cinq opérateurs sont rattachés au programme 334. Deux d’entre eux bénéficient de subventions pour charge de service public : la Bibliothèque nationale de France (BnF) et la Bibliothèque publique d’information (BPI). Les deux autres principaux opérateurs sont financés par le biais de taxes affectées : le Centre national du livre (CNL) et le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) − ce dernier étant également le destinataire de crédits budgétaires issus de d’autres missions. S’ajoute enfin la cinémathèque française, dont le financement est assuré par une subvention émanant du CNC.

Ils s’élèvent dans le PLF pour 2017 à 8,7 millions d’euros en AE, contre 500 000 euros en 2016, et à 6 millions d’euros en CP, contre 9,9 en 2016. La hausse des AE s’inscrit dans le projet de financement des travaux, le coût global de ces derniers étant encore conforme à la dernière réévaluation de juillet 2015.

Le projet de rénovation du quadrilatère Richelieu sous maîtrise d’ouvrage de l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) est financé à 80 % par le ministère de la culture et de la Communication (comprenant la contribution de 12 millions d’euros de la Bibliothèque nationale de France) et à 20 % par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. La convention de mandat du 13 novembre 2006 faisait état d’un coût des travaux de 149,14 millions d’euros sur la base d’une actualisation des prix de 2,5 % par an.

L’enveloppe financière prévisionnelle de l’opération est portée par le dernier avenant n° 9 en date de juillet 2015 à un total actualisé de 232,4 millions d’euros, la réévaluation du montant de la phase étant de 14,2 millions d’euros. La participation du ministère de la culture et de la communication, qui s’élève à 189,74 millions d’euros, est financée sur le programme 334 Livres et industries culturelles à hauteur de 155,25 millions d’euros, et sur le programme 175 Patrimoines, pour la partie monuments historiques, à hauteur de 34,49 millions d’euros. Selon l’échéancier présenté dans le projet annuel de performance, devront être budgétés après 2017 encore 4,2 millions d’euros en AE et 52,6 en CP.

La problématique amiante et plomb a entraîné un accroissement des coûts de 6,47 millions d’euros, ainsi qu’un retard de chantier de vingt-sept mois lors de la phase 1, dont la livraison a eu lieu le 25 mai 2016.

Une fois exclus l’effet des révisions de prix et l’effet de périmètre lié au regroupement des trois volets de l’opération sur une seule convention de mandat, et en partant donc du montant de 2011, le coût de l’opération a évolué de 7,6 % par rapport au coût d’objectif initial. Cependant, le projet annuel de performance pour 2017 précise par ailleurs que « de nouveaux coûts, correspondant en particulier à de nouvelles dépenses sur des parties classées du bâtiment, sont actuellement en cours de chiffrage. Un financement par le mécénat sera à privilégier. »

Cette précision amène le Rapporteur spécial à s’interroger sur un possible accroissement supplémentaire des coûts pour le ministère de la culture, dans l’hypothèse où le mécénat ne parviendrait pas à absorber l’ensemble des surcoûts – le recours au mécénat ne semblant pas par ailleurs acquis, mais seulement « privilégié ».

Les subventions pour charge de service public des deux opérateurs du programme financés par dotation budgétaire s’élèvent à 219 millions d’euros en AE et 219,7 en CP pour 2017, contre 214 millions d’euros en AE et 215 millions d’euros en CP pour 2016. La subvention pour charge de service public de la Bibliothèque nationale de France représente 96 % du total des crédits, et est en hausse de 1,6 % entre 2016 et 2016. La hausse constatée est principalement affectée au volet de fonctionnement de la subvention, dont le montant s’élève à 186,1 millions d’euros pour 2017, contre 183,4 millions d’euros en 2016 : elle doit permettre d’absorber les tensions sur la masse salariale, liées notamment à la revalorisation du point d’indice de la fonction publique et à l’application de l’accord relatif aux parcours professionnels, carrière et rémunération des fonctionnaires, mais également à la prise en charge des surcoûts liés aux mesures de sécurité mise en place depuis cette année.

A contrario, concernant la bibliothèque publique d’information (Bpi), la part de fonctionnement est en légère augmentation, la principale hausse se concentrant sur la part investissement de la subvention (+ 1,7 million d’euros en AE), notamment afin de réaliser des travaux de réhabilitation des locaux.

Au regard de l’ensemble des quatre sous-actions, l’ensemble des crédits apparaissent stables ou en hausses par rapport à 2017, conformément à l’effort global consenti aux politiques culturelles dans le PLF pour 2017.

Le Bureau export de la musique : un point d’attention pour le Rapporteur spécial

Suite à l’audition du syndicat national de l’édition phonographique (SNEP) et de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), le Rapporteur spécial tient à attirer l’attention sur les crédits dédiés au Bureau export de la musique, au sein de cette sous-action. Dans le budget pour 2017, ils s’élèvent à 1,36 million d’euros émanant du ministère de la culture (+ 500 000 euros par rapport à 2016), auxquels s’ajoutent 267 750 euros issus du budget du ministère des affaires étrangères. La hausse de la contribution du ministère de la Culture s’effectue sous réserve d’un apport complémentaire à due concurrence de la filière. Par ailleurs, la SACEM précise qu’une baisse de la contribution directe du ministère des affaires étrangères serait à prévoir, sans que la proportion de cette diminution leur ait été précisée.

Le Bureau export bénéficiera d’un budget total d’environ 4 millions d’euros en 2017, dont la moitié du financement émane des divers acteurs de la filière. Le Bureau prévoit la distribution de 1,2 million d’euros d’aides directes aux entreprises du secteur musical en 2017 (812 000 euros en 2016). À titre comparatif, la Grande-Bretagne affecte 6 millions d’euros de fonds publics à l’exportation musicale. Par ailleurs, le budget du ministère de la culture dans le PLF pour 2017 consacre 9 millions d’euros au rayonnement international du cinéma français, soit 85 % de plus qu’en 2016. La puissance à l’export du secteur musical et le rayonnement culturel de la France qu’il représente ne semblent pas justifier un tel écart de soutien budgétaire, de surcroît au regard du plan d’actions ambitieux du Bureau export.

Le Rapporteur spécial préconise que cette question face l’objet d’une étude approfondie, par exemple sous forme d’un rapport, sur le potentiel de l’industrie musicale française à l’exportation. Cette étude comprendrait notamment un bilan des aides dont bénéficie ce secteur mais également une évaluation des effets de levier que pourrait représenter un renforcement de ces dernières. Des mesures nouvelles pourraient également être envisagée, telles que la mise en place d’obligations de diffusion par les opérateurs de l’audiovisuel public, notamment au bénéfice des nouveaux artistes, la visibilité télévisuelle et radiophonique demeurant l’un des moteurs essentiels à la notoriété de ces derniers, y compris à l’international.

− le soutien dans le domaine du cinéma, équivalent à 2016 à hauteur de 2,6 millions d’euros. Le soutien total au cinéma tel que présenté dans le dossier de presse du ministère de la culture pour le PLF 2017 s’élève à 707 millions d’euros, soit une hausse de 35 millions d’euros par rapport à 2016 (+ 5 %) ;

− les crédits à destination de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), augmentent de 500 000 euros par rapport à 2016 pour atteindre 9 millions d’euros afin de lui donner les moyens de prendre en charge l’indemnisation des fournisseurs d’accès à internet au titre des surcoûts résultant du traitement des demandes d’identification d’internautes ayant procédé à des téléchargements illégaux.

Ces crédits, qui assurent le fonctionnement minimal de la Haute autorité, ne semble cependant pas adapté à la réalité de sa mission : depuis sa création il y a sept ans, l’évolution des pratiques et des modes de consommation numérique ont mécaniquement engendré de nouvelles formes de piratage auxquelles l’HADOPI peine à faire face. Lors des auditions menées par le Rapporteur spécial, le Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP) a évoqué l’exemple du développement du Stream ripper, permettant notamment une conversion de vidéo YouTube en fichier numérique MP3 audio ou vidéo grâce à des convertisseurs accessibles gratuitement sur internet.

Les pouvoirs publics ne pourront faire l’économie d’une réflexion à court terme sur d’une part sur le maintien de la HADOPI dans sa structure actuelle, et sur l’évolution de ses missions d’autre part.

Nature de l’aide

2015

2016

2017

Taux de TVA super réduit à 2,1 % (article 298 septies du CGI)

165

165

165

Régime spécial des provisions pour investissement (article 39 bis A du CGI)

0

moins de 0,5

moins de 0,5

Réduction d’impôt des particuliers pour souscription au capital des sociétés de presse (article 199 terdecies-0 C du CGI)

Non chiffré

Non chiffré

Non chiffré

Réduction d’impôt des particuliers pour dons effectués en faveur des entreprises de presse (article 200 du CGI)

Non chiffré

Non chiffré

Non chiffré

Réduction d’impôt pour souscription au capital des sociétés de presse (article 220 undecies du CGI)

Dispositif supprimé depuis 2014

TOTAL Presse

165

165

165

Crédit d’impôt cinéma (article 220 sexies, 220 F)

66

70

120

Crédit d’impôt audiovisuel (article 220 sexies, 220 F)

61

64

110

Crédit d’impôt pour les dépenses de production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de productions exécutives (220 quaterdecies)

12

9

52

Réduction d’impôt pour souscription en numéraire au capital de sociétés anonymes agréées ayant pour seule activité le financement d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelle- SOFICA (article 199 unvecies du CGI)

20

21

21

Crédit d’impôt pour la production phonographique (article 220 octies du CGI)

8

8

8

TOTAL industries culturelles

167

172

311

TOTAL des dépenses fiscales de la mission

332

337

476


Source : projet annuel de performances pour 2017.

Les dépenses fiscales en faveur de des industries cinématographiques et audiovisuelles représentent 63,5 % du total, déduction faite au sein des dépenses fiscales rattachées au programme 334 du crédit d’impôt pour la production phonographique de 8 millions d’euros. En plus de leur nette prédominance en volume, les aides fiscales en faveur de ces industries sont également les plus dynamiques, grâce aux évolutions successives votées par le législateur. Ainsi, le crédit d’impôt cinéma a vu son coût presque doublé entre 2015 et 2017 grâce à de larges extensions de ses conditions d’éligibilité et de taux en 2015 et 2016 (9), le crédit d’impôt audiovisuel réformé en 2013 est également monté en charge. C’est également le cas du crédit d’impôt pour les dépenses de production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de production, dont le coût a quadruplé en trois ans – la fin de l’incidence budgétaire étant 2016.

Le crédit d’impôt en faveur des sociétés de financement du cinéma (SOFICA) s’est maintenu sur cette période. Cependant cette aide fiscale devrait monter en puissance dès 2017 : en effet, un amendement déposé lors de la discussion en première partie du PLF pour 2017 et adopté en séance a porté le taux du crédit d’impôt de 36 % à 48 %, pour une perte de recettes estimée à 7 millions d’euros par an (10).

Demeure le crédit d’impôt phonographique, créé en 2006, et qui ne présente pas de renforcement récent de son dispositif, avec une dépense fiscale stabilisée à 8 millions d’euros depuis 2015. La loi de finances rectificative pour 2014 a néanmoins prolongé le dispositif pour les investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2018, contre le 31 décembre 2015 précédemment.

Une réflexion pourrait être engagée sur l’opportunité d’élever le taux de ce crédit d’impôt de 15 à 20 %, concomitamment à un rehaussement du plafond annuel par entreprise et par an de 1,1 à 1,3 million d’euros. Au regard de l’importance stratégique de ce secteur au sein des industries culturelles, le Rapporteur spécial serait favorable à cette évolution.

Concomitamment, les dépenses fiscales en faveur de la presse, dont une seule d’entre elle est évaluée (le taux de TVA réduit), s’élèvent à 165 millions d’euros (34,5 % du total) – la perte de recettes étant stabilisée depuis 2015 et constituant la principale mesure fiscale de la mission au regard de son coût. Les autres dispositifs en faveur de la presse semblent dépourvus de tout dynamisme, et représentent en tout état de cause un coût très marginal au regard des dispositifs variés en faveur des industries culturelles.

Le Rapporteur spécial se félicite que la dépense fiscale apparaisse comme un levier essentiel de l’aide au secteur de la production cinématographique et audiovisuel, avec le renforcement constaté depuis 2015. Il est cependant nécessaire de ne pas laisser de côté l’incitation fiscale en faveur de la presse, au regard de la situation particulièrement fragile de ce secteur. Cela est d’autant plus vrai pour la presse spécialisée, qui ne bénéficie que d’une très faible part des aides budgétaires, largement ciblées sur la presse d’information politique et générale (IPG) comme cela a été exposé précédemment dans le présent rapport.

Les trois dispositifs fiscaux de soutien à la presse suivants sont entièrement ciblés sur la presse d’information politique et générale (IPG) :

− l’article 39 bis A du code général des impôts : il institue une déduction spéciale sur l’impôt sur les sociétés des provisions pour investissement. Sont éligibles les entreprises exploitant soit un journal quotidien, soit une publication de périodicité au maximum mensuelle consacrée pour une large part à l’information politique et générale, soit un service de presse en ligne également consacré pour une large part à l’IPG ;

− l’article 199 terdecies-0 C institue une réduction d’impôt des particuliers pour souscription au capital des sociétés de presse, et est réservé aux mêmes entreprises que l’article 39 bis A ;

− la réduction d’impôt des particuliers pour dons effectués en faveur des entreprises de presse (dit « amendement Charb » déposé dans le cadre de la proposition de loi de notre collègue M. Michel Françaix (11)), qui est également réservée à ces mêmes entreprises.

Le Rapporteur spécial propose d’étendre l’ensemble de ces dispositifs fiscaux « aux entreprises de presse développant l’information professionnelle ou favorisant l’accès au savoir et à la formation, la diffusion de la pensée, du débat d’idées, de la culture générale et de la recherche scientifique », et déposera à cette fin un amendement à l’occasion de la discussion de la seconde partie du PLF pour 2017.

Cette mesure s’inscrit par ailleurs en cohérence avec le décret du 26 août 2016, qui prévoit l’éligibilité de l’ensemble des services de presse en ligne au fonds stratégique de développement de la presse (FSDP), qu’il traite de l’information générale et politique ou qu’ils relèvent de l’information professionnelle. Il s’agit d’une disposition dont le caractère équitable est double : équité entre les catégories de presse d’une part, et équité entre les différents volets de la politique culturelle en faveur des médias d’autre part, face aux dépenses fiscales dynamiques du cinéma et de l’audiovisuel. Enfin, l’utilité d’une telle disposition pour les services de presse spécialisée est reconnue par les professionnels du secteur.

Le coût de cette mesure devrait être très faible au regard du chiffrage actuel de la mesure, inférieur à 500 000 euros, et du nombre réduits d’éditeurs concernés.

Le Rapporteur spécial avait d’ores et déjà exposé de manière détaillée la situation difficile des diffuseurs de presse lors de son précédent rapport spécial (12), et se félicitait à cette occasion de l’aboutissement de la réforme de leur rémunération. Le réseau des diffuseurs de presse est marqué par une double tendance, de perte de sa densité et de perte de sa qualité. Entre décembre 2009 et décembre 2015, on constate une baisse de près de 5 000 points de vente (– 17 %). On comptait 24 877 points de vente actifs fin 2015, 990 de moins qu’en 2014 (– 3,8 %). La fermeture de points de vente engendre un effet de concentration du réseau, et par voie de conséquence sa fragilisation et sa précarisation.

Depuis 2004 et la mise en place de l’aide à la modernisation des diffuseurs de presse, les soutiens de l’État en faveur de ce secteur sensible ont été maintenus – via des aides exceptionnelles à l’exploitation entre 2009 et 2014, et un nouveau plan de soutien public au réseau de marchands de journaux est présenté en 2016 qui inclut la généralisation du dispositif d’exonération de contribution économique territoriale (CTE) évoquée ci-dessous.

Il s’agit d’une dépense fiscale sur un impôt local, qui n’apparaît donc pas dans le projet annuel de performances de la mission Medias, livre et industrie culturelle.

Le 1 de l’article 2 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, codifié à l’article 1447-0 du code général des impôts, a supprimé la taxe professionnelle à compter du 1er janvier 2010 et a instauré en remplacement la contribution économique territoriale (CET), qui est un impôt local composé de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Dans un premier temps, l’abattement applicable en matière de taxe professionnelle avait été reconduit à l’identique pour la CFE (13). Ainsi, les personnes physiques ou morales qui vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits au Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) pouvaient, sous réserve d’une délibération prise par les collectivités territoriales ou leur groupement dotés d’une fiscalité propre, bénéficier d’une réduction d’un montant égal à 1 600, 2 400 ou 3 200 euros sur la base de la CFE de leur établissement principal.

L’article 25 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 a abrogé l’article 1469 A quater du code général des impôts à compter des impositions établies au titre de 2015. Corrélativement, le même article instaure une exonération facultative de CFE en faveur des établissements qui vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits au CSMP et qui revêtent la qualité de diffuseurs de presse spécialiste (14).

Codifiée à l’article 1464 L du code général des impôts, cette exonération s’applique à compter des impositions de CFE pour 2015 sous réserve que les communes et leurs groupements à fiscalité propre aient pris une délibération en ce sens avant le 1er octobre 2014.

Concernant la CVAE, les diffuseurs de presse bénéficiant de l’exonération de CFE prévue à l’article 1464 L du CGI peuvent bénéficier d’une exonération conformément à l’article 1586 ter du même code. Ainsi, dès lors qu’une commune ou un groupement a pris une délibération en faveur de l’exonération de CFE, cette délibération entraîne l’application de l’exonération correspondante en matière de CVAE. Les départements et les régions doivent, quant à eux, prendre une délibération pour que l’exonération de CVAE pour la part leur revenant soit applicable, quelle que soit la décision prise par la commune ou le groupement.

Le tableau suivant présente le coût de cette exonération supportée par les collectivités territoriales concernées en 2013 et 2014.

COÛT DE L’EXONÉRATION DE CONTRIBUTION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE 2013 ET 2014

(en euros)

 

2013

2014

Montant

Bases exonérées

Nombre de communes/EPCI

Coût de l’exonération

Coût de l’exonération

Communes

166 900

103

40 200

41 900

EPCI

2 337 100

1 310

647 300

675 800

Total

2 504 000

 

687 500

717 700

Source : DGMIC - réponse au questionnaire parlementaire.

Il a été constaté que la faculté d’exonération n’est que peu pratiquée par les communes et les EPCI, d’ores et déjà fragilisés financièrement. Il apparaît donc nécessaire de transformer cette exonération, actuellement volontaire et optionnelle et de ce fait non compensée par l’État, en dispositif généralisé et obligatoire, et donnant lieu à une compensation par le budget de l’État.

Cette aide serait ciblée sur les diffuseurs indépendants spécialistes de presse, ce périmètre englobant 11 500 points de vente. Les premiers chiffrages font apparaître un effort supplémentaire de 7,5 millions d’euros en faveur de ce secteur fragilisé.

Attentif depuis longtemps à l’évolution de la situation économique des diffuseurs de presse comme en témoignent ses précédents rapports, le Rapporteur spécial se félicite de l’arbitrage gouvernemental positif dont a fait l’objet cette mesure. Une imprécision demeure cependant sur le calendrier de cette réforme, qui devrait se concrétiser par une disposition gouvernementale, soit lors de la discussion du présent projet de loi, soit en loi de finances rectificative pour 2016.

Bien que les actions en faveur du jeu vidéo entrent dans le champ de la mission Medias, livre et industries culturelles, au sein du programme 334, le crédit d’impôt en faveur des industries du jeu vidéo s’insère au sein de la mission Économie. Ce choix de rattachement nuit à la visibilité de ce dernier, qui aurait toute sa place au sein de la mission Medias. Le Rapporteur spécial préconise donc en perspective du PLF pour 2018 un rattachement de l’ensemble des actions en faveur du jeu vidéo au sein de la mission Médias, livre et industries culturelles.

Le Rapporteur spécial a ainsi fait le choix de s’intéresser à cette problématique rarement abordée dans le cadre de la discussion budgétaire. Il a souhaité dans ce cadre découvrir l’entreprise Ubisoft située à Montreuil, afin de rencontrer le principal acteur français du secteur, également numéro trois mondial. Cette visite lui a fait prendre la pleine mesure du potentiel de cette industrie, dont le dynamisme est entièrement porté par sa capacité d’innovation. Cette dernière repose à la fois sur des investissements importants et sur la captation des talents, tant dans le domaine informatique que créatif.

Le jeu vidéo, dont l’expansion a commencé dans les années 1970 en France, a désormais acquis une place essentielle dans le paysage culturel français : il s’agit de la deuxième industrie culturelle après le livre en France (15). La montée en puissance et la place désormais prépondérante des pratiques en lien avec le jeu vidéo sont illustrées par les données chiffrées suivantes :

Source : Syndicat des entreprises de logiciel de loisirs (SELL).

À mi-chemin entre le bien culturel et le bien technologique, le jeu vidéo a largement été porté par le développement des pratiques numériques. Les résultats 2015 de cette industrie, tous secteurs confondus (création de jeu, mais également vente de consoles et d’accessoires), confirme cette tendance positive, qui se traduit par une croissance de + 6 % du marché, pour atteindre 2,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires. La croissance est tirée par la vente de jeux et d’accessoires. Les ventes de jeux progressent de 7 % à 1,6 milliard d’euros et les accessoires ont généré plus de 300 millions d’euros.

Le jeu vidéo représente en France plus de 5 000 emplois, et 10 000 si l’on considère la création numérique au sens large. Il s’agit d’emplois hautement qualifiés, issus des grandes écoles françaises, et d’une population jeune puisque la moyenne d’âge des effectifs du secteur est de trente ans.

Les aides existantes dont bénéficie le secteur du jeu vidéo sont assez limitées, en dehors des aides fiscales. Il s’agit des dispositifs conduits par le fonds d’aide au jeu vidéo (FAJV) : doté en moyenne de 3 millions d’euros (3,8 en 2015 pour quarante-sept projets soutenus) et géré par le CNC, il a pour objectif de soutenir la recherche et le développement, l’innovation et la création dans le secteur du jeu vidéo.

Il recouvre deux dispositifs principaux :

● l’aide à la pré-production, plafonnée à 35 % des dépenses de pré-production du jeu jusqu’à la réalisation d’un prototype non-commercialisable. Elle prend la forme d’une avance remboursable pour 50 % du montant de l’aide, le reste étant attribué sous forme de subvention. Elle a représenté 1 million d’euros en 2015, au bénéfice de neuf projets ;

● l’aide à la création de propriétés intellectuelles (2 millions d’euros au bénéfice de 33 projets en 2015), qui est une aide sélective mise en place en 2010. Elle prend la forme d’une subvention plafonnée à 50 % du coût du projet et ne peut dépasser 200 000 euros sur trois ans par entreprise bénéficiaire.

Par ailleurs, La Banque publique d’investissement (Bpifrance) et l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) ont mis en place une convention de partenariat afin de faciliter l’accès au financement et au crédit des entreprises culturelles. En parallèle, ce dernier a créé le 28 octobre 2015 un fonds d’avances participatives en faveur du jeu vidéo : d’ores et déjà doté de 5 millions d’euros par le CNC, ce fonds devrait à terme atteindre 20 millions d’euros grâce à un abondement supplémentaire provenant du fonds pour la société numérique (FSN), opéré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dans le cadre du Programme des investissements d’avenir (PIA). Ce nouvel outil devrait permettre la consolidation de la structure financière des studios de production et des éditeurs de jeux vidéo éligibles aux dispositifs d’aides gérés par le CNC, en visant un double effet de levier, sur les investissements privés et la dette bancaire.

Après le choc lié à l’éclatement de la « bulle Internet » en 2001, la mise en place du Crédit d’impôt jeux vidéo (CIJV) en 2008 a constitué une première étape importante vers un redéveloppement de la filière de la création de jeux vidéo en France.

Son taux actuel est de 20 %, les dépenses éligibles étant listées au IV l’article 220 terdecies du code général des impôts : il s’agit globalement de l’ensemble des dépenses affectées directement à la création du jeu vidéo et effectuées en France ou dans un État membre de l’Union européenne. Par ailleurs, le crédit d’impôt est plafonné pour chaque entreprise à 3 millions d’euros par exercice.

La procédure d’obtention du crédit d’impôt implique par ailleurs un agrément en deux étapes : un agrément provisoire, délivré par le CNC, qui doit être demandé avant l’achèvement du jeu et un agrément définitif, qui doit être présentée après l’achèvement du jeu vidéo, dans un délai de trente-six mois suivant la date d’agrément provisoire. À défaut, la part de crédit d’impôt obtenue fait l’objet d’un reversement.

Les conditions d’éligibilité au crédit d’impôt jeux vidéo

Le jeu vidéo doit, pour être agréé et éligible à l’aide fiscale :

− avoir un coût de développement supérieur ou égal à 100 000 euros ;

− être destiné à une commercialisation effective auprès du public ;

− être réalisé principalement avec le concours d’auteurs et de collaborateurs de création qui sont soit de nationalité française, soit ressortissants d’un autre État membre de l’Union européenne, ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale. Les étrangers, autres que les ressortissants européens précités, ayant la qualité de résidents français sont assimilés aux citoyens français ;

− contribuer au développement de la création française et européenne en matière de jeux vidéo ainsi qu’à sa diversité en se distinguant notamment par la qualité, l’originalité ou le caractère innovant du concept et le niveau des dépenses artistiques ;

− ne pas comporter de séquences à caractère pornographique ou de très grande violence. Cependant, les jeux vidéo spécifiquement destinés à un public adulte et qui sont commercialisés comme tels ouvrent droit au crédit d’impôt dès lors que leur contribution au développement et à la diversité de la création française et européenne en matière de jeux vidéo présente un niveau particulièrement significatif déterminé au moyen d’un barème de points.

Source : Centre national du cinéma et de l’image animée.

La réforme de 2013, en rendant le dispositif accessible aux productions internationales destinées à un public adolescent et adulte (16), a d’ores et déjà permis de relocaliser d’importants projets en France (par exemple : « Ghost Recon Wildlands », employant plus de deux cents personnes sur quatre ans chez Ubisoft). Les engagements de croissance d’emplois pris à cette occasion par la filière ont été largement dépassés (17).

L’évaluation du dispositif réalisée en 2010 par le CNC (18) démontre que les retombées fiscales nettes du crédit d’impôt pour l’État sont positives, malgré le faible montant des crédits d’impôt effectivement distribués. Cette analyse a été confortée par l’étude comparative menée par Ernst and Young pour le CNC en octobre 2014 (19) : pour chaque euro de crédit d’impôt, c’est a minima 1,8 euro de recettes fiscales supplémentaires générées au profit du budget de l’État.

Son coût est évalué à 17 millions d’euros en 2017, contre 6 en 2015 et 10 en 2016. Cette montée en charge s’explique par l’extension aux jeux pour adulte, à partir de 2014, du périmètre des jeux éligibles à l’aide fiscale.

Il est important de souligner que les entreprises du jeu vidéo ne bénéficient pas ou peu du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), les rémunérations moyennes dans ce secteur dépassant majoritairement le plafond de 2,5 SMIC. Cette aide fiscale, qui vise à abaisser le coût du travail en réduisant le poids des charges sociales est un élément essentiel au service de la compétitivité des entreprises françaises. Si le plafonnement de cette aide est justifié tant dans ses objectifs qu’au regard des finances publiques, il exclut de fait des secteurs à forte valeur ajoutée comme celui du jeu vidéo, et qui subissent pour autant une forte concurrence de l’étranger.

Face à l’inapplicabilité des allégements généraux, il apparaît d’autant plus légitime de renforcer − à moindre coût pour les finances publiques − les aides fiscales ciblées sur ces secteurs d’avenir.

Le Canada a instauré une politique fiscale attractive pour inciter les développeurs de jeux vidéo à s’y installer, et est devenu une référence dans le secteur. Il se positionne aujourd’hui comme le troisième employeur mondial du secteur derrière les États-Unis et le Japon. Certains éditeurs s’attendent à une croissance de plus de 25 % au cours des deux prochaines années.

Selon les données de l’Association canadienne du logiciel de divertissement (ACLD), 472 studios de développement (+ 143 depuis 2013) employaient en 2015 20 400 personnes, chiffre en hausse de 24 % par rapport à 2013. A ce chiffre peuvent être ajoutés les emplois indirects générés par le secteur canadien du jeu vidéo (36 500). Le Québec est en tête du secteur canadien du jeu vidéo, avec plus de la moitié des emplois du secteur dans le pays. Le secteur du jeu vidéo au Québec s’appuie sur un crédit remboursable pouvant couvrir 37,5 % des dépenses salariales admissibles. Le champ des salaires éligibles au crédit d’impôt est très large : le plafond est constitué des salaires d’un montant supérieur 73 900 euros annuels, et de surcroît assorti d’une exception de taille, puisque jusqu’à 20 % des employés de l’entreprise peuvent être exemptés de ce plafond.

Aux États-Unis, où le marché du jeu vidéo représenterait 23,5 milliards de dollars en 2015, des crédits d’impôts différenciés sont mis en place dans chaque État. Ils sont globalement très incitatifs, et s’élèvent jusqu’à 40 % de crédits d’impôt sur les salaires et les coûts de production.

Enfin, au Royaume-Uni, le tournant a eu lieu en 2014, lorsque le pays a décidé d’étendre son dispositif de crédit d’impôt audiovisuel et cinéma au jeu vidéo : le taux de base est de 20 %, mais est élevé à 25 % dès lors que le projet présente des dépenses supérieures à 20 millions de livres. Le plafonnement est également moins contraignant, puisqu’il s’élève à 80 % des dépenses totales réalisées dans le pays.

L’industrie de la création numérique est en train de connaître un nouveau bouleversement : l’arrivée des premières plates-formes de réalité virtuelle grand public, qui se définit comme un nouveau média interactif, mobile, multi-utilisateurs et haute définition.

Ces nouveaux usages vont avoir deux impacts à court et moyen terme : tout d’abord, ils sont à même de créer un important appel d’air en termes de nouveaux contenus innovants et spécifiques pour ces plates-formes, générant ainsi de nombreuses créations d’emplois pour les économies les mieux positionnées pour les capter. Dans un second temps, ils auront pour conséquence de gommer d’autant plus les frontières entre jeux vidéo, création audiovisuelle et applications éducatives, provoquant de profondes réorganisations de ces filières et apportant potentiellement de nombreuses retombées positives pour des secteurs tels que le tourisme ou bien la défense. Ces nouveaux débouchés viendront en complément de la croissance organique du secteur du jeu vidéo liée aux jeux multi-joueurs et mobiles.

Face au tournant technologique que va constituer le développement de la réalité virtuelle, le France doit être capable de positionner son industrie face à la concurrence internationale en favorisant l’émergence de nouveaux acteurs mais également en consolidant ses champions nationaux dans le secteur.

Au regard de ces éléments, le renforcement de la compétitivité du crédit d’impôt en faveur de la création de jeux vidéo apparaît nécessaire afin de faire face à la concurrence internationale et de préserver le dynamisme de ce secteur porteur de croissance et d’emploi. Comme explicité précédemment, ce secteur se situe à un moment stratégique où l’Europe, et la France particulièrement au regard de ses performances, ont la possibilité d’appuyer leur leadership dans le domaine de la production de jeux vidéo, grâce à l’émergence de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée.

L’insuffisance du dispositif est double :

− le taux actuel (20 %) ne constitue pas une incitation suffisante pour les acteurs nationaux et internationaux souhaitant créer de nouveaux sites de production et conduit les acteurs les plus fragiles de la filière à recourir à la sous-traitance dans des territoires à bas coûts (Chine, Canada, Singapour, Malaisie…). Contrairement au Royaume-Uni, il est inférieur au taux du crédit d’impôt cinéma (30 % depuis 2016) ;

− le plafonnement à 3 millions d’euros par société par an est également une barrière importante à l’investissement dans des productions françaises de taille internationale (le budget moyen d’un jeu « AAA » étant d’environ 80 millions d’euros).

La préservation du caractère sélectif du dispositif, qui se traduit par nécessité d’un agrément initial puis d’un agrément définitif en fin de projet, constitue un garde-fou essentiel en faveur du fléchage qualitatif de la dépense fiscale. Le Rapporteur spécial n’est pas favorable à une évolution allant vers un dispositif non sélectif, quand bien même elle constituerait une contrainte procédurale forte pour les sociétés de jeu vidéo. Un relèvement du taux du crédit d’impôt ne saurait s’affranchir parallèlement de cette obligation d’agrément.

Le Rapporteur spécial propose de modifier par voie d’amendement l’article 220 terdecies du code général des impôts afin de relever le taux du crédit d’impôt jeux vidéo de 20 à 30 %, et de rehausser en cohérence le plafond du crédit d’impôt par société et par an de 3 à 6 millions d’euros.

Les effets attendus de cette réforme sont en premier lieu un renforcement du caractère incitatif de l’aide fiscale, notamment du point de vue des acteurs étrangers. Mais outre l’impact sur les grands acteurs étrangers, certains acteurs français de petite ou moyenne taille ont déjà évoqué la possibilité de ne plus recourir à la sous-traitance asiatique en cas de rehaussement du taux à hauteur de 30 %. Les professionnels du secteur projettent ainsi un impact positif à court terme : en matière d’emplois tout d’abord, avec une perspective de hausse de 35 à 40 % à l’échéance de quatre ans, soit 1 500 à 2000 emplois, mais d’autre part avec un investissement de douze à quinze projets supplémentaires en France.

Le coût de la mesure est évalué à environ 8 millions d’euros en tendance annuelle.

CHAPITRE 2 : UN BILAN POSITIF DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC, TANT SUR LE PLAN DES CONTENUS QUE SUR CELUI DE LA MAÎTRISE DE LA DÉPENSE

Ressources

2013

2014

2015

2016

2017 (prévisions)

Encaissements bruts de redevance

2 986,20

3 072,20

3 181,34

3 243,75

3 253,34

Évolution N/N-1

 

2,9 %

3,6 %

2,0 %

0,3 %

Frais d’assiette et de recouvrement

28,20

28,40

28,20

28,20

28,63

Coûts de trésorerie

0,50

0,50

0,50

1,00

0,00

Encaissements nets de redevance

2 957,50

3 043,30

3 144,70

3 214,57

3 224,71

Évolution N/N-1

 

2,9 %

3,3 %

2,2 %

0,3 %

Compensation pour dégrèvement

490,20

507,80

522,10

513,79

567,26

Dotations aux organismes publics (TTC)

3 447,70

3 551,10

3 666,80

3 728,36

3 791,97

Évolution N/N-1

 

3,0 %

3,3 %

1,7 %

1,7 %

Dotations aux organismes publics (HT)

3 377,20

3 478,60

3 591,40

3 651,67

3 713,97

Évolution N/N-1

 

3,0 %

3,2 %

1,7 %

1,7 %

Source : réponses au questionnaire parlementaire.

L’article 18 du PLF pour 2017 propose une hausse de deux euros de la contribution à l’audiovisuel public, dont 1 euro au titre de l’inflation et 1 euro supplémentaire. Cette mesure porterait le montant de la CAP à 139 euros en métropole, et à 88 euros en Outre-mer. Cette augmentation, qui n’a pas eu lieu en 2016, a fait fortement débat : elle était en effet en contradiction avec la promesse gouvernementale de ne pas procéder de nouveau à une nouvelle hausse au-delà de l’indexation sur l’inflation.

Le tableau suivant récapitule la tendance à la hausse du montant unitaire de la contribution depuis 2009, en indiquant également pour la métropole la hausse qui aurait été constatée si seule l’indexation sur l’inflation avait été appliquée. Le Gouvernement a en effet procédé à trois augmentations supplémentaires avant 2017, en 2010 (2 euros), 2013 (4 euros) et 2015 (2 euros) sur la CAP en métropole. Le prix unitaire de la redevance a donc augmenté à hauteur de 18 % pour les contribuables métropolitains depuis 2009, alors que la hausse aurait été de 10 % en application de la seule indexation, soit presque le double d’augmentation sur la période.

MONTANT DE LA CONTRIBUTION À L’AUDIOVISUEL PUBLIC DEPUIS 2009

Cependant, cette hausse d’un euro supplémentaire ne semble pas avoir pour objectif de renforcer les moyens de l’audiovisuel public, mais bien de maintenir un rendement équivalent entre 2016 et 2017, à celui constaté entre 2015 et 2016. En effet, l’évolution de l’encaissement net entre l’exercice 2015 et la LFI pour 2016 était de + 62 millions d’euros, pour un seul euro d’augmentation conforme à l’indexation. La répartition entre l’effet taux, c’est-à-dire la variation selon les taux d’inflation sous-jacents aux différents PLF et aux revalorisations supplémentaires, et l’effet assiette, qui est induit par la progression du nombre de foyers assujettis et par d’autres effets (frais de gestion, reprévision recouvrées au titre des exercices précédents, CAP perçues par les professionnels…) était la suivante en 2016 :

– un effet assiette de + 37 millions d’euros, avec une prévision de hausse de 1 % du nombre de foyers assujettis, de 27,25 millions de foyers à 27,52 ;

– un effet taux de + 25 millions d’euros, induit par l’euro supplémentaire (le rendement de chaque euro supplémentaire étant évalué à 25 millions d’euros, indépendamment de l’effet assiette).

Entre la LFI pour 2016 et le PLF pour 2017, l’évolution prévisionnelle de l’encaissement net de la CAP est de + 64 millions d’euros, soit un montant quasi-équivalent à celui de 2016, mais cette fois pour 2 euros d’augmentation. Le tableau suivant indique la répartition de l’effet taux et de l’effet assiette depuis 2011 dans les évolutions d’encaissements nets de redevance.

VARIATION DE L’ENCAISSEMENT NET DE CONTRIBUTION À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

 

2011

2012

2013

2014

2015

LFI 2016

PLF 2017

Variation N/N-1

141

88

170

86

109

62

64

dont effet assiette

91

38

20

36

34

37

14

dont effet taux

50

50

150

50

75

25

50

Augmentation de la CAP

2 euros

2 euros

6 euros

2 euros

3 euros

1 euro

2 euros

Source : réponse au questionnaire parlementaire.

Il apparaît ainsi que la dynamique baissière des encaissements bruts résulte directement d’une diminution historique de l’effet assiette à + 14 millions d’euros, soit moins de la moitié que celui prévu entre 2015 et 2016. La hausse de l’effet taux, sous l’effet de l’euro additionnel, permet ainsi de compenser partiellement cette perte de ressources.

Les facteurs explicatifs de cette variation sont doubles :

− l’effet assiette est inférieur aux années précédentes car la progression de l’assiette a été revue à la baisse en reprévision 2016 par rapport à la LFI, au regard des données de l’exécution 2015 qui n’étaient pas connues au moment du dépôt du PLF pour 2016 : la hausse du nombre de foyers assujettis initialement envisagée était de + 1 %, contre + 0,7 % en reprévision. Cette prévision d’évolution de + 0,7 % a été reconduite dans le PLF pour 2017. Pour rappel, en 2012, la dynamique était supérieure à 1 % ;

− si les encaissements bruts et nets de redevance entre 2016 et 2017 n’évoluent que de + 0,3 %, contre respectivement + 2 % et + 2,2 % entre 2015 et 2016, l’évolution de la dotation aux organismes publics évoluent quant à elle de 1,7 % tant en 2016 qu’en 2017 : cette stabilité dans l’évolution de la dotation malgré la hausse bien plus modérée des encaissements nets se justifie par l’accroissement massif de la compensation pour dégrèvements versée par l’État. Ainsi, le montant des dégrèvements compensés a bondi de 53,47 millions d’euros entre 2016 et les prévisions 2017, grevant d’autant les encaissements nets de redevance. Cette hausse de 10 % est très nettement supérieure aux années précédentes, dont le montant total était de surcroît en diminution depuis 2014 (– 0,6 % entre 2015 et 2016).

MONTANT VERSÉS AU TITRE DES DÉGRÈVEMENTS 2012-2017

(en millions d’euros)

Source : commission des finances à partir des réponses aux questionnaires parlementaires.

Le dégrèvement en faveur des personnes modestes a conservé sur la période une tendance à la hausse, mais a évolué de manière modérée : + 8 millions d’euros entre 2014 et 2015, et + 7 entre 2015 et 2016. L’accroissement des dégrèvements dans les prévisions 2017 prend en compte les dispositions prévues à l’article 75 de la loi de finances initiales pour 2016.

Les effets des mesures de lissage des impôts locaux de 2014 et 2015
sur le paiement de la contribution à l’audiovisuel public

L’article 28 de la première loi de finances rectificative pour 2014 (1) a maintenu l’exonération de taxe d’habitation en 2014, pour les contribuables de plus de soixante ans, ainsi que pour les veufs et veuves, qui étaient exonérés en 2013 à raison de leur niveau de revenu fiscal de référence (RFR), en application du 2° du I de l’article 1414 du code général des impôts. Cet article a également prévu le maintien du dégrèvement de la CAP en 2014, pour ces mêmes contribuables.

Le maintien de l’exonération de taxe d’habitation et de contribution à l’audiovisuel public a bénéficié en 2014 à 662 000 redevables. Toutefois, la mesure prévue par l’article 28 précité n’ayant qu’un caractère temporaire, à l’automne 2015, un certain nombre de contribuables âgés se sont trouvés assujettis à la taxe d’habitation et à la contribution à l’audiovisuel public, alors qu’ils en étaient exonérés jusqu’alors.

Afin de remédier à cette situation, l’article 75 de la loi de finances pour 2016 précitée a permis la mise en place de ce qu’il est désormais convenu d’appeler une « clause de grand-père » en deux volets :

– le premier volet permet de maintenir les droits acquis des personnes exonérées en 2013, en pérennisant les effets de l’exonération prévue par l’article 28 précité, lorsqu’elles ont perdu le bénéfice de l’exonération du fait de la fiscalisation des majorations de pension et de la réforme de la demi-part « vieux parents ». À cet effet, les seuils du revenu fiscal de référence (RFR) conditionnant l’exonération de la taxe d’habitation ont été rehaussés pour ces seuls redevables ;

– le second volet, qui concerne l’ensemble des contribuables, vise à lisser les effets de seuil lors de l’entrée dans l’imposition locale grâce à la mise en place d’un dispositif « en sifflet ». En effet, lorsqu’un contribuable perd son exonération de taxe d’habitation, de taxe foncière et de CAP, les montants d’imposition à acquitter du fait de cette perte peuvent être considérables, souvent supérieurs à la hausse de revenu ayant généré cette perte.

L’article 75 permet donc aux contribuables ayant perdu le bénéfice de l’exonération de taxe d’habitation prévue en faveur des personnes aux revenus modestes de plus de soixante ans, veufs ou veuves, ou titulaires de l’allocation adulte handicapé (AAH), de conserver pendant deux ans le bénéfice de cette exonération, à laquelle est associé le dégrèvement de CAP. Il en est de même pour les contribuables bénéficiant de l’exonération de taxe foncière prévue en faveur des personnes aux revenus modestes de plus de soixante-quinze ans ou titulaires de l’AAH.

À l’issue de cette période de deux ans, la valeur locative utilisée pour établir la taxe foncière et la taxe d’habitation est réduite de deux tiers l’année suivante et d’un tiers l’année d’après. Ce dernier dispositif est toutefois sans impact sur le paiement de la CAP, dont la personne redevient redevable pour l’intégralité de son montant.

(1) Loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014.

Source : rapport général sur le PLF 2017- commentaire de l’article 18.

Bien que le ralentissement du rendement de la CAP soit en partie lié à des facteurs conjoncturels, la reprévision à la baisse du nombre de foyers assujettis sous la barre des 1 %, ainsi que l’ampleur de la décroissance de l’effet tôt dans les prévisions 2017 doivent amener à s’interroger sur la réforme de l’assiette de la CAP. L’évolution des pratiques et des modes de consommation audiovisuelle, multimédia et multi-écrans, constitue une donnée structurelle et irréversible qui compromet toute évolution dynamique d’une taxe dont le fait générateur est encore la possession d’un téléviseur. L’histogramme suivant illustre ce développement des nouveaux modes de consommation audiovisuelle, avec une hausse spectaculaire de 217 % de l’usage de la tablette et de 44 % du smartphone sur la période.

ÉVOLUTION DE L’ÉQUIPEMENT DES FOYERS 2012-2016

Cette réforme est une proposition forte du Rapporteur spécial, largement argumentée dans le cadre de ses précédents rapports spéciaux ainsi que dans le rapport d’information consacré au financement public de l’audiovisuel (20). Il proposait dans le cadre de ce dernier d’étendre l’assiette à tous les supports (soit 720 000 foyers supplémentaires), mais également d’instaurer un demi-tarif pour les jeunes redevables jusqu’à 24 ans, non rattachés au foyer fiscal de leurs parents. Il s’agit d’une évolution allant dans le sens d’un approfondissement de la justice fiscale, puisqu’à ce jour, un million de jeunes paie la CAP à taux plein. Elle ne remettrait par ailleurs pas en cause les mesures de dégrèvements existantes, le principe de compensation par l’État rendant ces dispositions neutres pour les opérateurs de l’audiovisuel public.

Les modalités de la réforme de l’assiette pourraient être les suivantes :

– serait intégré le redevable de la taxe d’habitation dont le foyer est équipé d’au moins un support (poste de télévision, smartphone, tablette) permettant la réception en illimité du service public audiovisuel (entendu comme les services offerts par les bénéficiaires de la contribution : France Télévisions, Arte-France, Radio France, l’audiovisuel extérieur de la France, Institut national de l’audiovisuel), à l’exclusion des postes de radio qu’il en soit ou non propriétaire ;

– peu importe le nombre de supports et de résidences, le redevable ne paierait qu’une seule contribution ;

– le paiement de la CAP figurerait toujours sur l’avis d’imposition relatif à la taxe d’habitation et serait liquidé en même temps que cette dernière.

À court terme, la recette supplémentaire escomptée est de 98 millions d’euros (720 000 foyers supplémentaires), à laquelle sont soustraits 68 millions d’euros liés au demi-tarif jeunes. In fine, le produit supplémentaire attendu serait de 30 millions d’euros. Cette réforme n’a pas pour objectif d’augmenter significativement le rendement de la CAP, mais de le sécuriser sur le long terme.

La dissociation entre l’affectation de la ressource et son fait générateur est accentuée par la mise en œuvre, depuis le 1er septembre 2016, de l’offre d’information en continu « France Info : » pilotée par France Télévisions, et associant Radio France, France Medias Monde et l’INA. Cette offre prend en compte les changements à l’œuvre dans la consommation des medias en général, et de l’information en particulier : construite sur une logique de média global, elle combine à la fois une diffusion hertzienne, qu’il serait certes prématuré de négliger, et une solide offre numérique. Cette dernière s’appuie à la fois sur les sites existants de l’audiovisuel public, à savoir Francetvinfo le site d’information de France Télévisions, et franceinfo.fr le site de la station France info, et se veut connectée en permanence aux réseaux sociaux. Elle se présente également comme une offre « mobile first », particulièrement adaptée à la consommation en mobilité et multi-support, ce qui la distingue de ses concurrents. Cette offre globale se veut donc en phase avec un public large, et jeune, pour qui la consommation d’informations se passe des grands rendez-vous quotidiens qu’incarnait le 20 heures.

L’accès multi-écrans à cette offre renforce l’incohérence d’un financement exclusivement assis sur la détention d’un téléviseur.

• une taxe sur les opérateurs de communication électronique (TOCE), codifiée à l’article 302 bis KH du code général des impôts. Il s’agit d’une taxe dont le taux s’élevait à l’origine 0,9 % sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications, ce dernier ayant été porté à 1,3 % dans la LFI pour 2016 ;

• une taxe sur la publicité diffusée par les éditeurs de service de télévision, codifiée à l’article 302 bis KG du code général des impôts. Elle représente une imposition de 3 % sur les sommes versées par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires sur les services de télévision, justifiée par l’effet d’aubaine que devait constituer l’arrêt de la publicité sur France Télévisions pour les groupes de l’audiovisuel privé. Un abattement permet d’exempter de ces taxes les plus petits opérateurs.

Le produit de ces taxes devait revenir à France Télévisions via la dotation budgétaire allouée dans le cadre de la mission Médias, livre et industries culturelles. La dotation s’est élevée à 415 millions d’euros en 2009 et 423 en 2010, soit la compensation estimée de la perte de recettes de France Télévisions générée par l’arrêt partiel de la publicité. Entre 2009 et 2015, la moyenne annuelle du produit de la « taxe télécom » a été de 220 millions d’euros. Ajoutées à la taxe sur la publicité, dont le rendement est d’environ 15 millions d’euros depuis 2011, ces taxes n’ont pas permis, sur l’ensemble de la période, de compenser intégralement les transferts budgétaires en faveur de France Télévisions.

Cependant, ces taxes ont été versées au budget général, sans faire l’objet d’une affectation directe et visible à France Télévisions. Ce choix budgétaire, guidé par ailleurs par la volonté de ne pas réveiller un contentieux auprès de la Commission européenne en matière d’aide d’État, a brouillé la lisibilité du financement de l’audiovisuel public.

La loi de finances pour 2016 a constitué une avancée majeure, en proposant l’affectation d’une part de la taxe sur les opérateurs de communication électronique (TOCE) sur le programme 841 du compte Avances à l’audiovisuel public. Initialement prévue dans le PLF pour 2016 à hauteur de 75 millions d’euros, la part de TOCE attribuée à France Télévisions s’est finalement élevée à 140,5 millions d’euros, permettant ainsi de procéder à la suppression des derniers crédits budgétaires contenus dans la mission Medias, livre et industrie culturelle à destination de France Télévisions. Comme souligné à maintes reprises par le Rapporteur spécial, sous l’impulsion duquel a d’ailleurs été votée la hausse de la part de TOCE affectée, la dualité des sources de financement d’un opérateur, dont les ressources représentent plus de 65 % de l’ensemble des crédits publics dédiés à l’audiovisuel public, demeurait un facteur majeur de déstabilisation de l’ensemble du secteur.

La ressource dédiée à France Télévisions a par ailleurs été augmentée de 25 millions d’euros, afin de permettre à cette dernière de présenter des comptes à l’équilibre à l’horizon fin 2016 – engagement qui a été tenu.

Afin de ne pas engendrer une perte de recettes pour le budget de l’État, la suppression des crédits budgétaires ainsi que la hausse de 25 millions d’euros a été financée par une majoration de la « taxe télécom » de 0,1 point, portant son taux à 1,3 %, contre 0,9 % en 2015.

Le Rapporteur spécial, s’il ne s’est pas opposé à cette solution globalement favorable à l’équilibre financier de l’audiovisuel public, avait néanmoins souligné que le rendement de la taxe était suffisant pour absorber la part dédiée à France Télévisions, sans nécessité d’en augmenter le taux− de surcroît à hauteur de + 44 %. Il avait par ailleurs regretté que la TOCE ne soit pas formellement identifiée comme une taxe affectée à France Télévisions et plafonnés. Cette dernière était en effet intégrée pour un an au compte de concours financiers, laissant craindre qu’il ne s’agisse que d’une disposition isolée et non pérenne.

Le PLF pour 2017 prévoit à son article 17 de formaliser l’affectation et le plafonnement de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) à France Télévisions en intégrant cette dernière au tableau de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. Le Rapporteur spécial se félicite de cette mesure, qui sécurise cette part des ressources de l’audiovisuel public. Si le niveau du plafond est modulable chaque année, contrairement au produit de la contribution à l’audiovisuel public (CAP), ce mode de financement met à l’abri l’opérateur d’une quelconque régulation budgétaire en cours d’exercice, comme cela était couramment pratiqué jusqu’en 2015 au détriment de la dotation budgétaire intégrée à la mission Medias, livre et industrie culturelle.

Par ailleurs, la modulation du plafond peut être également revue à la hausse, comme le démontre d’ailleurs l’issue du vote des articles 17 et 18 à l’Assemblée nationale lors de la discussion de la première partie du PLF pour 2017. En effet, la vive opposition suscitée par l’euro additionnel de la CAP s’est traduite en commission par l’adoption d’un amendement déposé par notre Rapporteure générale Mme Valérie Rabault visant à supprimer l’augmentation de la CAP au-delà de l’inflation et à compenser la perte de recette pour l’audiovisuel par une hausse de la part de TOCE affectée à France Télévisions – amendement identique à celui déposé par le Rapporteur spécial. Un second amendement de la Rapporteure générale, également adopté en commission des finances, procédait en cohérence à une augmentation de 0,1 % de la taxe télécom, afin de ne pas impacter le budget de l’État.

Ce vote a été réitéré lors de la discussion en séance, et ce malgré l’avis défavorable du Gouvernement. La solution finalement approuvée par notre Assemblée et avalisée par le Gouvernement supprime l’augmentation exceptionnelle de CAP, et compense à due concurrence la perte de recette par une hausse du plafond d’affectation de la TOCE, sans pour autant en augmenter le taux. Il s’agit de la solution privilégiée par le Rapporteur spécial, qui considère que les opérateurs de communications électroniques ne devraient pas subir, autant que possible, un alourdissement répété de leur taxation.

Cette hausse de la part affectée à hauteur de 25 millions d’euros, soit un total de 165,5 millions d’euros, afin de compenser l’effet assiette de l’euro supplémentaire, se justifie par ailleurs par le rendement croissant de la taxe suite à la hausse de 0,4 % du taux votée en 2016, et qui a engendré une progression de plus de 100 millions d’euros de son produit.

PRODUITS DES TAXES SUR LA PUBLICITÉ ET SUR LES SERVICES FOURNIS
PAR LES OPÉRATEURS DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

(en millions d’euros)

Taxe

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016 (prévisions)

Taxe sur la publicité

27,7

17,8

13,2

13

14

15,3

15,3

15

TOCE

185,9

255

251

179,7

253,9

212,7

201

306

Total

213,6

272,8

264,2

192,7

267,9

228

228

321

Source : réponse au questionnaire parlementaire.

À titre de comparaison, l’État percevait un substrat de 40 millions d’euros en 2015 – 200 millions d’euros de produits de TOCE dont étaient soustraits 160 millions d’euros de dotation budgétaire – contre un gain net en faveur du budget de l’État de 140 millions d’euros environ prévu en 2017, sous réserve d’un produit de TOCE de 306 millions d’euros équivalent à celui de 2016 et d’une fraction de 165 millions d’euros affectée à France Télévision.

Le processus d’élaboration du budget n’ayant pas encore abouti, il ne s’agit pour le moment que d’un équilibre provisoire qui demande à être confirmé. Cependant, le Rapporteur spécial se félicite de ces évolutions, qui tendent vers un modèle de financement de l’audiovisuel public conforme aux propositions développées dans le cadre du rapport d’information précité d’octobre 2015 (21).

Opérateurs

2012

2013

2014

2015

2016

PLF 2017

Évolution 2012-2016 (en volume et en %)

France Télévisions

CAP

2091,8

2253,4

2382,3

2320,6

2370,7

2408,6

278,9

13,3%

TOCE

0

0

0

0

139,1

139,1

139,1

 

Subvention

435,9

248,8

103,6

160,4

0

0

– 435,9

 

TOTAL

2527,7

2502,2

2485,9

2481

2509,8

2547,7

– 17,9

– 0,7%

ARTE France

CAP

262,7

262,6

260,5

261,8

264,3

274,3

1,6

0,6%

Radio France

CAP

610,2

605,5

600,4

601,8

606,8

612,3

– 3,4

– 0,6%

Soutien à l’expression radiophonique locale

Subvention

27,5

29

29

29,1

29

30,7

1,5

5,5 %

Audiovisuel extérieur (France Medias Monde depuis 2014)

CAP

168

165,8

165,9

242

244

251,5

76

45,2 %

Subvention

158,6

148,2

74,4

0

 

 

– 158,6

 

TV5 Monde

CAP

 

 

 

76,1

76,9

78,4

 

 

Subvention

 

 

76,2

 

 

 

 

 

 

Total

326,6

314

316,5

318,1

320,9

329,9

– 5,7

– 1,7 %

Institut national de l’audiovisuel

CAP

90,5

89,9

69,5

89

89

89

– 1,5

– 1,7%

TOTAL Audiovisuel public

CAP

3223,2

3377,2

3478,6

3591,43

3651,7

3714

428,5

13,3%

TOCE

0

0

0

0

139,1

139,1

139,1

 

Subvention

622

426

283,2

189,6

29

30,7

– 593

– 95,3%

 

 Total

3845,2

3803,2

3761,8

3781

3819,8

3883,8

– 25,4

– 0,7%

Évolution N/N-1

 

 

– 1,1 %

– 1,1 %

0,5 %

1,0 %

1,7 %

 

 

Source : réponse au questionnaire parlementaire.

Le budget pour 2017 se traduit ainsi par des hausses substantielles des dotations en faveur des opérateurs de l’audiovisuel public, ce dont se félicite le Rapporteur spécial :

● + 38 millions d’euros au profit de France Télévisions (+ 1,5 % par rapport à 2016), dont 20 fléchés exclusivement sur les dépenses de programmation ;

● + 10 millions d’euros pour Arte (+ 3,8 % par rapport à 2016), intégralement affectés à la programmation, auxquels s’ajoutera un prélèvement de 3 millions d’euros issu du fonds de roulement de la chaîne. L’effort total de la chaîne en faveur des programmes s’élèvera alors à 143 millions d’euros, notamment au service d’un nouvel élan éditorial pour les programmes en journée ;

● + 5,5 millions d’euros pour Radio France (+ 0,9 % par rapport à 2016) : cette dotation est constituée de la dotation d’investissement destinée au financement des travaux de la Maison de la radio (5 millions d’euros), et de la compensation de la perte de ressources publicitaires numériques suite à la mise en œuvre de l’offre d’information en continu France Info exempte de toute publicité, contrairement à l’offre numérique antérieure de Radio France (+ 0,5 million d’euros). Aucune dotation de fonctionnement n’est budgétée ;

● + 7,5 millions d’euros pour France Medias Monde (+ 3,1 % par rapport à 2016), afin de financer la nouvelle chaîne en espagnol ;

La dotation à destination de l’INA est restée stable par rapport à 2016 à 89 millions d’euros, tandis que celle de TV5 Monde n’a augmenté que de 1 million d’euros. Il s’agit donc d’une programmation budgétaire ambitieuse visant à financer le développement et la qualité des programmes de l’audiovisuel public, sans pour autant remettre en cause le mouvement de rationalisation des dépenses de fonctionnement mis en œuvre ces dernières années.

Le Rapporteur spécial tient à souligner que ce dernier projet de loi de finances pour 2017 incarne également la reconnaissance du chemin parcouru par l’audiovisuel public, et la volonté de favoriser l’émergence de nouveaux projets dans un cadre financier désormais sous contrôle.

Dans le cadre du rapport d’information sur le financement public de l’audiovisuel précité (22), le Rapporteur spécial avait pointé le caractère inopérant des trajectoires financières prévues dans les précédents contrats d’objectifs et de moyens (COM). Pour rappel, dans le cas d’Arte, l’écart cumulé de redevance sur la période 2012-2015 par rapport aux prévisions initiales du COM est de 104,5 millions d’euros (soit 42 % du budget total de 2016), sans que ce dernier ait fait l’objet d’un avenant comme ce fut le cas en 2013 pour France Télévisions.

L’ensemble des opérateurs de l’audiovisuel public ont renouvelé leur contractualisation avec la tutelle il y a peu ou sont en cours de signature : les trajectoires financières des COM 2016-2020 de France Télévisions, Arte et France Media Monde sont en cours de finalisation et intègre les dotations prévues au PLF pour 2017. Les premiers retours recueillis auprès des opérateurs par le Rapporteur spécial font état de trajectoires réalistes et soutenables, le budget 2017 constituant un point de départ conforme aux attentes de ces derniers.

Dans le cas de France Télévisions, la hausse importante – en volume du moins, puisqu’en proportion, il s’agit de la plus faible évolution après celle de Radio France – proposée dans le PLF pour 2017 ne sera pas reconduite : il s’agit d’un apport exceptionnel intégrant une enveloppe de 20 millions d’euros exclusivement ciblée sur les dépenses de programmes, auxquels s’ajoutent les crédits visant à faire face à l’évolution tendancielle des charges à hauteur de 18 millions d’euros (+ 0,8 % par rapport à 2016). Selon le plan d’affaire du COM présenté dans le projet annuel de performances, l’évolution des ressources publiques devrait être de 17 millions d’euros en 2018, 4 en 2019 et 4 en 2020.

Pour Radio France, la dotation proposée au PLF pour 2017 est conforme au plan d’affaires du COM 2015-2019. Elle s’établit à 612,3 millions d’euros (+ 5,5 millions d’euros ou + 0,9 % par rapport à la LFI pour 2016), contre 611,8 millions d’euros prévus au COM pour l’année 2017. Le supplément de 500 000 euros correspond à la compensation des pertes de recettes publicitaires évoquées précédemment dans le cadre de l’offre numérique d’information en continu. La dotation proposée au PLF pour 2017 de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) est également conforme aux prévisions du COM 2015-2019. Elle s’établit à 89 millions d’euros, en stabilité avec la dotation de 2016.

Comme l’a longuement démontré le Rapporteur spécial dans son rapport sur la nouvelle chaîne d’information en juillet dernier (23), il s’agit d’un projet majeur, à la fois sur le fond comme sur la forme. Sur le fond, car il apparaît essentiel que la voix du service public se saisisse du décryptage de l’information. Sur la forme ensuite, car il s’agit d’une collaboration inédite entre quatre opérateurs de l’audiovisuel public – peut-être cinq si Arte intègre le projet − qui ont su chacun mettre en avant leur savoir-faire.

Les premiers retours à l’issue des deux premiers mois de diffusion de la chaîne sur le canal 27 de la TNT, ainsi que sur la mise en œuvre d’une offre numérique commune à France Télévisions et Radio France, sont unanimement positifs. Il semble que la volonté de différenciation de la chaîne soit réussie. Comme espéré, elle incarne également un facteur de mutation interne à chaque opérateur et de valorisation des marques du service public audiovisuel.

Des incertitudes demeurent quant à l’évaluation de son coût, le suivi dont il doit faire l’objet et les potentiels risques de dérapages financiers que ce projet comporte : l’ensemble de ces éléments ont été également exposés en détail dans le rapport d’information précité du Rapporteur spécial (24). Ces questionnements sont relayés dans le récent rapport de la Cour des comptes sur France Télévisions (25). Ils ne doivent cependant en aucun cas faire oublier la réussite qu’incarne ce projet ambitieux mis en œuvre en à peine un an, et dans le cadre d’un partenariat qui valorise l’ensemble de l’audiovisuel public français.

Parmi les trois priorités stratégiques présentées dans le projet de COM 2016-2020 de France Télévisions figure le développement d’une nouvelle plateforme vidéo, qui concentrera les développements numériques de l’entreprise, permettant de répondre à tous les usages des publics. Les contours du projet, et notamment les modalités d’articulation gratuit/payant, seront présentés à l’État et aux instances de gouvernance en 2017. L’objectif serait à terme de construire une plateforme unique, articulée avec l’actuelle Pluzz VaD (vidéo à la demande) de France télévisions et permettant de basculer de l’offre gratuite à l’offre payante.

Demeure également la question de l’inclusion d’un ou plusieurs autres opérateurs de l’audiovisuel public dans le projet, et les modalités de cette éventuelle nouvelle opportunité de collaboration – notamment avec l’INA, qui possède d’ores et déjà une plateforme numérique payante (INA Premium), ou encore avec Arte, qui bénéficie d’une ouverture européenne du fait de son identité franco-allemande.

À l’aire du développement numérique et de l’essor des services de vidéos à la demande, il s’agit là d’un projet clef pouvant représenter à la fois un outil de valorisation des contenus existants, une source de recettes potentielles pour l’audiovisuel public et un moyen de renforcer la visibilité de l’audiovisuel public. La nécessité d’un développement numérique croissant, et en tout ou partie monétisé, était évoquée dans le rapport de M. Marc Schwartz sur l’avenir de France Télévisions (26) : « Le développement de l’offre numérique est une priorité pour France Télévisions, qui a vocation à amplifier la déclinaison de ses programmes sur Internet, le développement des services sur les différentes plateformes et à préparer l’essor des télévisions connectées. Les recettes numériques pourraient atteindre 30 à 35 millions d’euros d’ici 2020 selon le groupe. Le maintien à l’horizon de 2020 d’investissements et de charges élevés appelle à des efforts de transparence sur le coût des développements numériques, mais aussi à s’interroger sur la manière de mieux monétiser l’offre. »

Conformément au contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2013-2015, France Médias Monde (FMM), a travaillé à l’élaboration d’une version hispanophone de France 24. Après avoir réalisé une étude de faisabilité, elle a proposé aux ministères de tutelle un projet de diffusion de France 24 en espagnol dans le cadre des négociations du COM 2016 - 2020.

Le Président de la République a annoncé le 24 février 2016, lors de sa visite d’État en Argentine que France 24 lancerait sa version en espagnol courant 2017. Le projet est inscrit parmi les priorités stratégiques de France Médias Monde identifiées dans le COM 2016 – 2020, dont le projet vient d’être approuvé par son conseil d’administration le 13 octobre 2016.

Ce projet repose sur un financement public supplémentaire de 7,3 millions d’euros en année pleine, et de 2,9 millions d’euros en 2017. France 24 diffusera à destination de l’Amérique latine un troisième signal à côté des signaux francophone et anglophone déjà présents, et proposera une offre de six heures quotidiennes en espagnol, complétée par ses programmes en français ou en anglais. Les 6 heures de programmes en espagnol s’articuleront autour de deux heures le matin et quatre heures le soir. Compte tenu du décalage horaire avec Paris, ce schéma permet de s’appuyer plus encore sur la production réalisée à Paris, et de favoriser ainsi les mutualisations.

La diffusion de France 24 en espagnol profitera notamment des accords de distribution déjà noués pour les chaînes en français et en anglais en Amérique Latine, mais devrait également pouvoir s’appuyer sur l’extension de son réseau de distribution. L’objectif exprimé dans le projet de COM est de parvenir à une distribution des chaînes de France 24 dans six millions de foyers dans les Amériques à l’horizon 2020.

La rédaction sera localisée à Bogota en Colombie. Elle sera composée d’une équipe de 28 ETP recrutée localement. Une équipe de six ETP basée à Paris accompagnera la rédaction espagnole, et sera chargée des contenus « France » et « International », et bénéficiera des moyens de France 24 déployés à Paris ainsi que de l’extension de la rédaction de Radio France international (RFI) en espagnol. Le lancement est prévu à l’automne 2017.

Les préconisations du CSA en matière de traitement éthique de l’information

Dans le cadre de son avis n° 2016-9 du 4 mai 2016 relatif à la modification des cahiers des charges des sociétés nationales de programme France Télévisions, Radio France et France Médias Monde, le conseil supérieur de l’audiovisuel a présenté les préconisations suivantes :

« Le conseil estime que le cahier des charges de France Télévisions gagnerait à être complété : il considère en effet que celui-ci présente des insuffisances en matière de respect des droits et libertés, au regard des conventions des chaînes privées d’information en continu. Le Conseil propose ainsi que soient ajoutées des dispositions précises relatives :

« – à la nécessaire prudence requise lors de la diffusion d’informations ou d’images concernant une personne en situation de péril ;

« – au fait de veiller à ne pas inciter à des pratiques ou des comportements délinquants ou inciviques. Dans ce cadre, l’article 35 du décret fixant le cahier des charges de France Télévisions pourrait être complété comme suit : « La société veille dans ses programmes à ne pas inciter à des pratiques ou comportements délinquants ou inciviques ».

« Le 1er alinéa de l’article 36 du cahier des charges de France Télévisions pourrait être également complété par l’ajout, après « France Télévisions veille au respect de la personne humaine et de sa dignité », des mots suivants : « La société respecte les droits de la personne relatifs à sa vie privée, son image, son honneur et sa réputation tels qu’ils sont définis par la loi et la jurisprudence.

« La société veille en particulier :

« – à ce qu’il soit fait preuve de retenue dans la diffusion d’images ou de témoignages susceptibles d’humilier les personnes ;

« – à éviter la complaisance dans l’évocation de la souffrance humaine, ainsi que tout traitement avilissant ou rabaissant l’individu au rang d’objet ;

« – à ce que le témoignage de personnes sur des faits relevant de leur vie privée ne soit recueilli qu’avec leur consentement éclairé. Elle fait preuve de mesure lorsqu’elle diffuse des informations ou des images concernant une victime ou une personne en situation de péril ou de détresse. »

Source : CSA.

Dans la prolongation de cette démarche, plusieurs actions sont en cours de concrétisation et devraient être finalisées au plus tard au début de l’année 2017 :

− le 25 octobre 2016, le CSA a publié un « guide de bonnes pratiques » (28) à destination des acteurs de l’audiovisuel contenant des précautions relatives à la couverture audiovisuelle d’actes terroristes articulées autour de quatre items : précautions nécessaires vis-à-vis des investigations judiciaires et de l’action des forces de sécurité, précautions à prendre vis-à-vis de la présentation des terroristes et du traitement des images de propagande, précautions à prendre vis-à-vis des victimes, et enfin précautions à prendre pour renforcer la fiabilité des informations diffusées ;

− la proposition de loi déposée par notre collègue M. Bruno Leroux visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias adoptée définitivement par l’assemblée nationale le 6 octobre dernier (29) contient deux mesures qui s’imposent aux opérateurs de l’audiovisuel :

• la création d’un « comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes » composé de personnalités indépendantes. Ce comité est institué « auprès de toute personne morale éditrice d’un service de radio généraliste à vocation nationale ou de télévision qui diffuse, par voie hertzienne terrestre, des émissions d’information politique et générale. Chargé de contribuer au respect des principes énoncés au troisième alinéa de l’article 3-1, il peut se saisir ou être consulté à tout moment par les organes dirigeants de la personne morale, par le médiateur lorsqu’il existe ou par toute personne. Il informe le Conseil supérieur de l’audiovisuel de tout fait susceptible de contrevenir à ces principes. Cette information est transmise concomitamment aux organes dirigeants de la personne morale éditrice. Il rend public son bilan annuel » ;

• de plus, les conventions conclues entre le CSA et les éditeurs de services diffusés par câble, satellite et ADSL devront intégrer les mesures à mettre en œuvre pour garantir le respect des principes de pluralisme, d’honnêteté et d’indépendance des médias. Le CSA sera en charge de contrôler le respect de ces engagements, dont la violation pourra engendrer la cessation de l’autorisation d’usage de la ressource radioélectrique les services diffusés par voie hertzienne terrestre (30;

L’ensemble de ces nouvelles mesures se traduit concrètement par des modifications du cahier des charges et la mise en œuvre d’une « charte d’éthique » interne à chaque opérateur de l’audiovisuel public.

Dans le cas de France Télévisions, le projet de modification du cahier des charges a désormais été approuvé par le conseil d’administration du 14 octobre 2016 et le décret correspondant est sur le point d’être publié. Lors de ce même conseil d’administration, a également été approuvée par anticipation la mise en place du « comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes ». Le comité des rémunérations sera en charge de proposer la composition de ce nouveau comité, le mode de fonctionnement de ce dernier devant être fixé ultérieurement dans le cahier des charges.

En matière d’éthique, la transparence en gestion peut incarner le pendant nécessaire de l’exigence déontologique dans les programmes. C’est pourquoi France Télévisions s’est parallèlement engagé dans une démarche de renforcement de la transparence dans ses procédures d’appel d’offres (31), et d’un approfondissement de son contrôle interne. Enfin, le choix a été fait de publier les notes de frais du comité exécutif de l’entreprise.

B. LA NETTE AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC EN 2016

En dépit du décalage important évoqué précédemment entre la trajectoire du COM et la dotation versée à la chaîne, Arte a su préserver au maximum ses investissements dans les programmes. En 2016, le niveau de ces investissements est équivalent à celui de 2012, soit 133,1 millions d’euros : il s’agissait d’un objectif affiché de la chaîne. La part des dépenses de programmes est stable et représente 78 à 79 % des dépenses totales.

Les résultats d’audience d’Arte démontrent l’efficacité de cette stratégie éditoriale : en 2015, les audiences sont au plus haut en France, à hauteur de 2,2 % et en Allemagne à hauteur de 1 %. Depuis 2011, l’audience a augmenté de 50 % (de 1,5 % à 2,2 %) en France et 30 % en Allemagne. Parallèlement, Arte a été l’une des premières entreprises audiovisuelles à se doter d’une stratégie multi-support et multimédia : avec une moyenne de 14,7 millions de visites mensuelles sur l’année 2015, soit le double du niveau de 2011, un âge moyen de 45 ans sur internet et de 35 ans sur les réseaux sociaux, Arte confirme l’attrait de son offre numérique sur le web comme en mobilité.

Grâce à d’important effort en gestion, le résultat budgétaire d’Arte est demeuré sous contrôle tout au long de la période, avec une forte optimisation de ses charges hors programme. La société affichait un résultat net négatif à hauteur de − 2 millions d’euros après impôts en 2014. La mobilisation du fonds de roulement net disponible a été nécessaire à hauteur de 2,58 millions d’euros en plus de la maîtrise des charges courantes, afin de maintenir ses investissements dans les programmes dont le montant (130,8 millions d’euros) a été augmenté de 1,1 million d’euros par rapport à 2013. À partir de 2015, Arte présente un résultat budgétaire à l’équilibre, avec des recettes et des charges équivalentes à hauteur de 268 millions d’euros en 2015, 270,2 millions d’euros en 2016 et 280,3 millions d’euros en prévisionnel pour 2017. L’exécution 2016 fait de surcroît apparaître des charges de personnels (22,28 millions d’euros et des frais de structure (9,37 millions d’euros) en baisse de 210 000 euros et 550 000 euros par rapport à la trajectoire du COM.

Les dépenses de fonctionnement (frais de structure) sont maîtrisées, grâce à l’optimisation des procédures d’appels d’offres, la modération dans les dépenses courantes (missions, transports, consommables…) et la mise en place progressive de systèmes d’information plus modernes et performants. La part des frais généraux au sein des charges d’exploitation devrait se limiter en 2017 à 2,4 %, comme en 2015 et 2016. Sur la période 2017-2021, cette démarche de modération des coûts de gestion sera poursuivie, tout en permettant d’accompagner les salariés d’Arte France dans leur évolution et sans remettre en cause les capacités d’investissements dans la sécurisation et la modernisation des systèmes informatiques.

Comme Arte, France Médias Monde se caractérise par des résultats d’audience positifs, qui se traduisent également dans l’environnement numérique :

− concernant France 24, la distribution de la chaîne s’est accrue de 50 % en trois ans, avec une audience mondiale en hausse de 22 % sur cette même période : c’est 50,9 millions de téléspectateurs qui regardent la chaîne chaque semaine, avec une place de plus en plus affirmée de la chaîne en arabe au Proche et Moyen-Orient et une position de leader sur le secteur des chaînes d’information dans toutes les capitales d’Afrique francophone ;

− concernant RFI, l’audience mondiale est en hausse de 16 % sur les trois dernières années, tandis que celle de Monte Carlo Doualiya s’est accrue de 9 % en deux ans (7,3 millions d’auditeurs mesurés dans le monde arabe) ;

− sur le volet numérique, France 24 et RFI sont numéro 1 tout média français confondu sur Facebook, avec 17,4 millions d’abonnés pour France 24 et 11,9 millions pour RFI. On constate également une forte augmentation du trafic sur les sites et les applications mobiles des trois médias de France Medias Monde, à l’instar du site de France 24 qui reçoit une moyenne de 16,3 millions de visites en moyenne chaque mois, soit une hausse de 51 % par rapport à 2012. Le site de RFI a vu son nombre de visites augmenter pour sa part de 94 % depuis 2012, jusqu’à atteindre 13,2 millions de visites.

Ces excellentes performances se sont par ailleurs réalisées dans un cadre budgétaire sain, puisque les résultats d’exécution 2015, le budget 2016 et les révisions 2017 confirment le caractère équilibré du résultat net de l’entreprise. Tant les charges de personnel, qui représente près de 55 % des charges d’exploitations, que les frais généraux, dont la part au sein des charges d’exploitation est en baisse entre 2015 et 2016 (de 18,9 % à 17,4 %), font l’objet d’une maîtrise en gestion. La légère hausse anticipée du poids de la masse salariale en 2017 s’explique intégralement par la progression inévitable du fait des glissements, et par le développement des nouveaux projets, comme la nouvelle chaîne France Info.

La situation financière de France Télévisions est demeurée instable jusqu’à l’année dernière. L’entreprise a tout d’abord été affaiblie par une baisse récurrente de ses recettes publicitaires depuis 2009, en raison notamment de l’essoufflement des investissements publicitaires constaté sur l’ensemble des acteurs historiques, dans un contexte de détérioration de la conjoncture économique, de poursuite de la montée en puissance des nouvelles chaînes de la TNT et de concentration des investissements sur une ou deux régies puissantes. France Télévisions souffre également d’un affaiblissement de sa compétitivité sur le marché publicitaire par rapport aux autres chaînes historiques, lié à l’absence d’écran en prime time (20 h 00-22 h 00) dans son offre globale. Ce phénomène a été analysé en détail dans le rapport de la mission d’information sur le financement public de l’audiovisuel (32).

L’avenant au contrat d’objectif et de moyens 2013-2015 prévoyait un retour vers l’équilibre des comptes en 2015. France Télévisions clôturait l’exercice 2014 avec un résultat net de – 38,4 millions d’euros cependant meilleur que les prévisions l’établissant à – 40,5 millions d’euros, et ce malgré des ressources en baisse, une annulation de 7 millions d’euros de crédits et une forte activité (jeux olympiques et élections municipales) qui a mécaniquement fait augmenter le coût des programmes. Ce résultat confirmait paradoxalement l’effort de gestion dans lequel est engagée l’entreprise depuis 2012.

France Télévisions a clôturé ensuite l’exercice 2015 avec un résultat net de 200 000 euros, en très large amélioration par rapport à l’année précédente et alors même que ses ressources pour 2015 se plaçaient en retrait de 30 millions d’euros par rapport à l’avenant au contrat d’objectifs et de moyens 2013-2015. Cette baisse a été générée par un montant de ressources publiques inférieur de 5 millions d’euros et des recettes publicitaires amputées à hauteur de 25 millions d’euros. De plus, ce résultat était meilleur que prévu par rapport au budget initial (– 9,8 millions d’euros), mais également par rapport à la nouvelle prévision en cours d’exercice (− 9,6 millions d’euros), et ce malgré une perte de près de 19 millions d’euros de recettes publicitaires par rapport au budget initial. Le résultat d’exploitation demeurait cependant très dégradé, à – 30,1 millions d’euros (33).

Le budget 2016 de France Télévisions prévoit un résultat d’exploitation de + 3,5 millions d’euros et un résultat net à l’équilibre (+ 300 000 euros) : il s’agit d’une véritable évolution par rapport à la situation financière antérieure de la société. Cette amélioration a été en partie rendue possible par l’adoption en loi de finances initiale d’un amendement gouvernemental, sous l’impulsion du Rapporteur spécial, qui accroît de 25 millions d’euros la dotation globale en faveur de France Télévisions pour 2016, sans pour autant nuire à l’équilibre financier des autres acteurs. La direction de France Télévisions s’était engagée fermement à mener, à l’occasion de ce « coup de pouce » budgétaire, une stratégie offensive en matière d’économie des coûts permettant un retour à l’équilibre dès la fin de l’année 2016. Force est de constater que l’engagement a été respecté à la lettre.

Le résultat d’exploitation de France Télévisions s’est donc amélioré de 41,9 millions d’euros en trois ans, alors même que ses ressources publiques en 2016 sont inférieures de 17,9 millions d’euros à celles de 2012. Cette résorption du déficit n’est pas liée à une hausse des recettes, qu’il s’agisse de la ressource publique ou de la ressource publicitaire, l’une et l’autre étant en diminution sur la période comme le montre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES RESSOURCES DE FRANCE TÉLÉVISIONS 2012-2017

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016 (prévisions)

PLF 2017

évolution 2012-2016 (en volume et en %)

évolution 2016-2017

CAP

2 091,8

2 253,4

2 382,3

2 320,6

2 370,7

2 408,6

278,9

13,3 %

1,6 %

TOCE

0

0

0

0

139,1

139,1

139,1

   

Subvention

435,9

248,8

103,6

160,4

0,0

0,0

– 435,9

   

Total subvention

2 527,7

2 502,2

2 485,9

2 481

2 509,8

2 547,7

– 17,9

– 0,7 %

1,5 %

recettes publicitaires

372,2

333,1

317,8

320,9

329,7

334,7

– 42,5

– 11,4 %

1,5 %

Total ressources brutes (34)

2 903,8

2 838,9

2 806,5

2 805,1

2 842,9

2 885,8

– 60,9

– 2,1 %

1,5 %

Total ressources nettes (35)

2 561,7

2 507,6

2 483,9

2 482,2

2 511,1

2 548

– 50,6

– 2,0 %

1,5 %

Source : projet annuel de performances pour 2017.

L’amélioration de la situation financière de France Télévisions résulte ainsi d’une accélération depuis quatre ans des mesures d’économies, notamment en matière de maîtrise de la masse salariale. L’avenant au COM 2013-2015 reposait sur une hypothèse de réduction du volume de l’emploi total (permanent et non permanent) de 650 ETP nets à l’horizon de la fin 2015, par rapport au niveau d’emploi prévu au budget 2012. En réel, la baisse aura atteint tout de même 558 ETP entre l’exécution 2012 (10 490 ETP) et la fin 2015 (9 932 ETP), le plan de départs volontaires n’ayant pas été réalisé en totalité au 31 décembre 2015. Il est également important de noter une baisse très significative du recours à l’emploi non permanent, dont la part dans l’emploi total est passée de 18,2 % en 2012 à 14,1 % en 2015.

Ainsi, la mise en œuvre d’une dynamique vertueuse se confirme sur la période 2012-2016, la baisse des charges opérationnelles ayant été plus rapide que celle des recettes.

ÉVOLUTION DES RESSOURCES ET DES CHARGES DE FRANCE TÉLÉVISIONS

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016 (prévisions)

évolution 2012-2016 (en volume et en %)

Total ressources nettes

2 561,7

2 507,6

2 483,9

2 482,2

2 511,1

– 50,6

– 2,0 %

Total charges opérationnelles

2 581,8

2 551

2 548,3

2 524,6

2 522,1

– 59,7

– 2,3 %

Source : PAP 2017.

Le plan d’affaires du COM 2016-2020 soumis à la consultation du Parlement fait apparaître une évolution des résultats d’exploitation (36) et des résultats nets (37) à l’équilibre sur la période du contrat, démontrant le caractère structurel du retour à l’équilibre financier de l’entreprise.

La priorité donnée aux programmes a été préservée en dépit des ressources en baisse. En 2015, le coût de grille représentait 81,1 % des dépenses totales de France Télévisions, conformément à la cible fixée à l’avenant au COM.

Après avoir perdu son rang de premier groupe audiovisuel français en audience en 2013, et l’avoir reconquis en 2014 grâce à l’intégration des audiences de France Ô, le groupe France Télévisions renforce depuis 2015 son statut de leader dans le secteur de l’audiovisuel français.

En 2014, l’intégration du score de France Ô (0,5 point sur l’ensemble de l’année) permet à France Télévisions de redevenir premier groupe audiovisuel en audience, avec 28,8 % de part d’audience, avec un 0,1 point d’avance sur le groupe TF1. En 2015, France Télévisions, premier groupe audiovisuel avec 29,2 % de part d’audience, creuse l’écart avec le groupe TF1 (+ 1,5 point). Au premier semestre 2016, France Télévisions réunit 28,5 % de part d’audience. Bien qu’en recul de 0,4 point par rapport à janvier-juin 2015, le groupe résiste mieux que TF1 à la montée en puissance des chaînes de la TNT diffusant en haute définition et conforte ainsi l’écart avec le groupe TF1 (1,3 point contre 1 point un an plus tôt à période équivalente).

Concernant les audiences numériques, le déploiement d’une stratégie numérique complète constituait un axe central du COM 2011-2015, confirmé et renforcé dans l’avenant 2013-2015. Cet axe est maintenu et renforcé dans le COM à venir. En 2015, le nombre de visites des sites internet de France Télévisions atteint chaque mois en moyenne 54 millions, pour un objectif fixé par le COM à 50 millions. Cette performance est en hausse de plus de 7 % par rapport à 2014 et de 43 % par référence à 2011 (38 millions) (38).

La diversification des ressources propres, en dehors des recettes publicitaires, demeure un enjeu de taille pour France Télévisions comme l’a démontré le rapport d’information précité sur le financement public de l’audiovisuel (39). Les recettes commerciales apportées par cette diversification sont évaluées par la direction de France Télévisions à environ 15 millions d’euros à l’horizon 2020 : elles résulteraient simultanément d’une meilleure valorisation des investissements dans la production audiovisuelle, d’un approfondissement de la stratégie de distribution par les filiales commerciales du groupe, notamment France Télévisions Distribution, et de la mise en œuvre de la plateforme SVoD évoquée précédemment.

Concernant le premier volet relatif à la valorisation des investissements de France Télévisions dans la production audiovisuelle, qui s’élèvent à 400 millions d’euros, le rapport d’information précité préconisait un rééquilibrage dans les relations diffuseurs-producteurs, afin de rendre plus transparentes et plus efficientes les remontées de recettes au profit des diffuseurs. À la suite de la publication du rapport, des discussions ont été engagées avec les diffuseurs et les organisations de producteurs afin de faire évoluer la réglementation dans le sens d’une meilleure structuration du secteur et d’une clarification des modèles de production.

Des évolutions notables depuis 2015 dans les relations entre diffuseurs et producteurs

Les questions relatives au niveau et à la nature de la part dépendante, ainsi qu’à l’amélioration de la flexibilité des droits, sont au cœur de ces discussions. France Télévisions a ainsi conclu, le 10 décembre 2015, avec certaines organisations de producteurs audiovisuels (40), un accord établissant un nouvel équilibre avec les producteurs indépendants dans le but de mieux structurer le secteur et de clarifier les modèles de production.

Cet accord répond à la nécessité pour le service public de mieux protéger et de mieux valoriser ses programmes. Il autorise, au sein de la contribution de France Télévisions, une part de production dépendante de 25 % (au lieu de 5 % précédemment), qui permettra notamment au groupe public de recourir davantage à sa filiale de production Multimédia France Productions (MFP). Le décret n° 2016-752 du 6 juin 2016 a modifié le cahier des charges de France Télévisions afin de permettre la mise en œuvre de cet accord.

À son tour, TF1 a conclu un accord le 24 mai 2016 avec des organisations de producteurs (41) . Sur le modèle de l’accord de France Télévisions, il prévoit à titre principal une hausse de la part de production dépendante (de 26 à 36 % de l’obligation), en contrepartie de son encadrement (limitation de la part réservée à la filiale et des droits d’exploitation).

Afin de permettre à cet accord de trouver application, le décret n° 2010-747 du 2 juillet 2010 qui fixe les règles en matière de contribution à la production des éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre, doit être modifié.

Une consultation publique a été menée en juillet 2016 afin de recueillir l’avis des professionnels du secteur sur des propositions de modification de ce décret. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et le Conseil d’État doivent ensuite être saisis pour avis. L’entrée en vigueur des modifications du décret peut être envisagée à la fin de l’année 2016.

Pour leur part, M6 et Canal + ont récemment entamé des discussions avec les producteurs, qui pourraient aboutir à la conclusion d’accords avant la fin de l’année 2016.

Enfin, France Télévisions et TF1 ont conclu le 24 mai 2016 un accord avec des organisations de producteurs et de distributeurs (42) précisant les conditions équitables, transparentes et non discriminatoires de négociation des mandats et droits secondaires ainsi que les conditions dans lesquelles les mandats peuvent leur être cédés lorsque le producteur dispose d’une capacité de distribution, interne ou par l’intermédiaire d’une filiale, ou d’un accord-cadre conclu avec une entreprise de distribution. Ces conditions ont été négociées en application du décret n° 2015-483 du 27 avril 2015, qui a autorisé les chaînes à détenir des parts de coproduction pour les œuvres qu’elles financent de manière substantielle dans la part indépendante de leur obligation de contribution et qui a encadré les conditions dans lesquelles ces chaînes peuvent alors détenir des mandats de commercialisation sur ces œuvres.

Ces stipulations contractuelles feront l’objet d’une prochaine traduction par le Gouvernement dans le cahier des charges de France Télévisions et par le CSA dans la convention avec TF1.

Source : réponse au questionnaire parlementaire.

La situation financière de Radio France est désormais la plus fragile de l’audiovisuel public. De 2004 à 2013 les résultats de l’entreprise demeurent bénéficiaires, affichant par ailleurs une trésorerie positive. C’est ce qui explique l’absence de réaction, avant la dégradation perceptible dès 2013 avec un résultat proche de zéro, confirmé en 2014 puisque Radio France affiche un résultat d’exploitation de – 14 millions d’euros et un résultat net de – 2 millions d’euros. Cette dégradation brutale coïncide avec le décrochage non anticipé de la ressource publique, associé à des charges rigides et non maîtrisées sur le long terme. Cette concomitance de facteurs a logiquement engendrée un effet de ciseau néfaste à la situation financière de Radio France.

Radio France affiche en 2015 un résultat net de – 13 millions d’euros, en très forte dégradation par rapport à l’exercice précédent. Son résultat d’exploitation est négatif à hauteur de − 16,5 millions d’euros. La santé financière de Radio France est en partie affaiblie par le surcoût engendré par le chantier de la Maison de la radio, qui a constitué un facteur d’augmentation de 6,1 millions d’euros des dotations aux amortissements et aux provisions, ainsi qu’un facteur de diminution de 14 millions d’euros de la trésorerie nette, qui s’établit désormais à – 5,5 millions d’euros.

En 2016, le résultat prévisionnel devrait se stabiliser à – 13 millions d’euros, contre – 16,5 dans le budget prévisionnel. Cette légère amélioration est cependant imputable à deux éléments conjoncturels : un retard pris dans l’application des accords collectifs (+ 3,8 millions d’euros) et le décalage dans le temps du recours à l’emprunt ayant entraîné un rehaussement du résultat financier de l’entreprise.

Si cette configuration peut s’avérer inquiétante pour 2017, les dernières perspectives devraient cependant être partiellement sécurisées grâce à l’économie structurelle attendue suite à l’arrêt de la diffusion sur les ondes longues, après l’arrêt des ondes moyennes en 2015, l’économie globale se chiffrant à 13 millions d’euros en année pleine. Il est à noter que la dotation publique de Radio France est exclusivement composée en 2015 comme en 2016 et 2017 d’une dotation d’investissement (5 millions d’euros), visant à accompagner le programme de réhabilitation de la Maison de la radio. Enfin, l’évolution du régime publicitaire de Radio France en avril 2016 devrait participer à la stabilisation des ressources à hauteur de 40 millions d’euros en année pleine, mais ne constituera pas une source de recettes supplémentaires, afin de préserver l’environnement concurrentiel du marché publicitaire.

De l’aveu de la direction de l’entreprise, l’objectif affiché dans le COM établissant un résultat prévisionnel de – 6,5 millions d’euros à l’issue de l’année 2017 sera très difficile à réaliser, et ce malgré une intensification des efforts en matière de masse salariale. L’entreprise s’est en effet engagée cette année dans un plan de non-remplacement d’un départ naturel sur deux sur trois ans. La prévision s’établissait à 180 départs en 2016, soit 90 suppressions nettes de poste. Cependant, pour cette année, la réalisation est inférieure à la cible, avec 65 suppressions nettes. Les prévisions du plan projettent 80 nouvelles suppressions nettes l’année prochaine, et enfin 150 suppressions la dernière année. Radio France a indiqué que l’absence de mesures incitatives au départ est un facteur majeur de ralentissement du processus. Par ailleurs, il semble que la direction se soit enfin saisie de la question de la rationalisation des coûts liés aux Orchestres, ce dont se félicite le Rapporteur spécial.

Engagé depuis peu dans une stratégie d’ampleur de réduction des coûts, il est important de relever que Radio France supporte des charges dont la rigidité est particulièrement prégnante. On peut notamment évoquer :

− le dérapage du coût des travaux de réhabilitation de la Maison de la radio, le coût final estimé étant de 430 millions d’euros, soit une hausse de 19 % par rapport au coût initial. Par ailleurs, ce chiffrage n’inclut pas la rénovation des studios moyens, qui seront financés par l’emprunt à hauteur de 67 millions d’euros, fragilisant encore l’équilibre financier global de l’entreprise. Enfin, le retard pris dans les travaux implique pour Radio France des coûts supplémentaires puisqu’il nécessite la location de locaux extérieurs (1,5 million d’euros par an, jusqu’à fin 2019), et constitue par ailleurs une perte de recettes puisque la location des locaux de la Maison de la Radio est parallèlement compromise ;

− une rigidité importante des dépenses de personnel, qui constitue 57,5 % des charges totales d’exploitation. Cette rigidité s’explique tout d’abord par le fait que, contrairement à France Télévisions, Radio France se caractérise par une activité de production interne. Par ailleurs, les marges de manœuvre demeurent réduites, notamment dans le réseau France Bleue, constitué de petites entités. Plus globalement, le climat social de radio France tend à complexifier la mise en œuvre de réformes d’ampleur, comme l’a notamment démontré la grève de vingt-huit jours en mars-avril 2015.

L’Agence de Radio France : une réussite sans conteste au cœur de la nouvelle chaîne d’information

Radio France a mis en place au début de l’année 2016 un nouveau service, qui se présente comme une agence d’information interne à Radio France – qui n’est pas sans rappeler le modèle belge – permettant de centraliser le traitement de l’information et de la fiabiliser. Cette information peut, en effet, émaner de diverses sources comme l’antenne de France Info, des informations récoltées par les journalistes de terrain et les antennes décentralisées de France Bleu, ou encore de l’action de veille des journalistes sur les réseaux sociaux, l’Agence France presse (AFP), ou les chaînes concurrentes… Composée d’une dizaine de journalistes issus de la radio et du web, elle a vocation à alimenter à la fois les autres rédactions de Radio France, l’univers numérique du groupe (site et application), et bien entendu les écrans de la nouvelle chaîne d’information publique.

Les deux premiers mois de diffusion de la chaîne « France Info » ont confirmé le caractère particulièrement efficace et central de cette cellule.

Le financement public de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) se distingue de celui des autres acteurs de l’audiovisuel public, puisque cet institut se caractérise par une part plus élevée de ressources propres, à hauteur de près de 30 %. Le résultat net de l’institut est positif depuis 2013, à l’exception de l’exercice 2014 où la dotation publique a été beaucoup plus faible (69,5 millions d’euros hors taxe, contre 90 millions d’euros en 2013) : 854 000 euros en 2015, 186 000 euros en 2016 et un résultat à l’équilibre en 2017.

À partir de 2015, la part de contribution à l’audiovisuel public attribuée à l’INA a été maintenue à son niveau de 2013, soit 89,9 millions 2015, 2016 et en prévision pour 2017. Dans le PLF pour 2017, celle-ci se décompose entre une dotation de fonctionnement à hauteur de 83,75 millions d’euros et une dotation d’investissements de 5,25 millions d’euros. La situation financière de l’institut demeure ainsi saine, et la gestion des charges maîtrisées. Dans son COM 2015-2019, l’INA s’est engagé à limiter le niveau de sa masse salariale à 67,5 millions d’euros par an sur toute la durée du contrat.

Les recettes commerciales ont été estimées à 38,09 millions d’euros dans le budget initial 2016, mais revues à la baisse à 37,2 millions d’euros dans le budget rectificatif pour 2016. Ce dernier volume de recettes est supérieur de près de 1 million par rapport au réalisé 2015 mais en retrait de plus de 2 % par rapport au budget initial. 2016. Cette baisse est due essentiellement à la diminution des ventes de contenu, notamment sur les vidéos et les intégrales pour le marché français ainsi qu’un décalage de certains projets à l’international par l’allongement des délais liés à des négociations préalables complexes avec les ayants droit. Cette activité est également affectée par une progression plus faible qu’anticipée du marché des éditions physiques.

Néanmoins, les résultats à la fin du premier semestre 2016 confirment une nette évolution des attendus de recettes qui, associés à la mise en œuvre au dernier trimestre 2016 du nouveau projet stratégique d’entreprise orienté vers l’augmentation de la valeur commerciale et scientifique des contenus et services proposés, doivent permettre de maintenir l’objectif de chiffre d’affaires conforme à la trajectoire budgétaire du COM 2015-2019, à hauteur de 39 millions d’euros.

Enfin, il est important de souligner que le lancement de l’offre d’information en continu en septembre dernier a incarné pour l’INA, peut-être encore davantage que pour les autres partenaires, un puissant levier d’évolution interne : l’INA doit désormais produire dans une logique de flux et non plus seulement dans celle de la « rétro-actualité », comme c’était exclusivement le cas auparavant. Par ailleurs, les modules de décryptages historiques fournis par l’Institut, qui constitue l’un des éléments essentiels de la différenciation de « France Info : » par rapport aux chaînes privées d’information en continu, ont permis à l’INA de renforcer sa visibilité. En devenant une vitrine pour l’institut, cette exposition permettra peut-être à terme d’attirer le monde de l’entreprise par le biais des démarches de « brand content » (43), génératrice de nouvelles ressources potentielles pour l’INA.

Le succès du lancement de la plateforme INA Premium

L’INA a lancé le 30 septembre 2015 « INA Premium », qui est un service de vidéo à la demande par abonnement (SVOD). Il a nécessité un investissement de 1,5 million d’euros sur deux ans. L’offre INA Premium a vocation à mettre en valeur des programmes patrimoniaux, complémentaires des offres existantes, pour un tarif accessible à tous.

Le service propose un accès illimité en streaming à plus de 20 000 programmes vidéo et audio. Les principaux objectifs du projet sont :

• de repenser l’offre payante existante en téléchargement uniquement pour s’adapter aux nouveaux usages ;

• de faire cohabiter efficacement les propositions gratuites et payantes sur le site grand public de l’Institut ;

• de générer de nouveaux revenus par de nouvelles formes d’exploitation des contenus.

Les principaux marqueurs de l’offre sont :

• un catalogue très riche de plus de 20 000 programmes audio et vidéo couvrant tous les grands genres de la production audiovisuelle (émissions 40 %, séries et fictions 17 %, documentaires 10 %, musique 12 %, sport 8 %, jeunesse 7 %, humour et spectacle vivant 3 %) ;

• des contenus rares intéressant potentiellement toutes les générations ;

• un abonnement à 2,99 euros/mois avec le premier mois offert, sans engagement de durée ;

• pas de publicité pour les abonnés ;

• une accessibilité sur PC, tablettes et smartphones.

Les principaux développements envisagés pour le deuxième semestre 2016 et 2017 sont tournés vers le déploiement du service chez des partenaires (FAI et/ou plateformes Over-the-top ou encore offres couplées avec sites web).

Des discussions sont engagées et en cours avec plusieurs opérateurs et sites internet intéressés par la reprise du service tels que la plateforme Molotov.tv, ainsi qu’avec France Télévisions dans le cadre de son projet de future offre de vidéo à la demande par abonnement.

Source : réponses au questionnaire parlementaire.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication (voir le compte rendu de la commission élargie du 8 novembre 2016 à 9 heures (44)), la commission examine les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles et du compte spécial Avances à l’audiovisuel public.

La commission, suivant l’avis favorable de M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial, adopte les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles et du compte spécial Avances à l’audiovisuel public.

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ANNEXE :
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Institut National de l’Audiovisuel (INA)

© Assemblée nationale