N° 1213 - Rapport d'information de MM. Christophe Caresche, Bernard Deflesselles, Michel Herbillon et Jérôme Lambert déposé par la commission des affaires européennes sur l'Union européenne et le G20




No 1213

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2013

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
l’Union européenne et le G20

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Christophe CARESCHE, Bernard DEFLESSELLES,
Michel HERBILLON et Jérôme LAMBERT,

Députés

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Emeric BREHIER, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, M. Yves DANIEL, MM. Charles de LA VERPILLIÈRE, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Marc LAFFINEUR, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY, Mme Paola ZANETTI.

SOMMAIRE

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Pages

RESUME DU RAPPORT 11

REPORT SUMMARY 15

INTRODUCTION 19

PREMIÈRE PARTIE : MÊME SI LES PRÉSIDENCES FRANÇAISE ET MEXICAINE NE SE SONT PAS CONCLUES PAR DES IMPULSIONS RÉVOLUTIONNAIRES DANS LE CHAMP DE LA RÉGULATION ÉCONOMIQUE MONDIALE, ELLES ONT DONNÉ LIEU À DE NOUVELLES AVANCÉES NOTABLES ET ONT INSTALLÉ UN PEU PLUS ENCORE L’INSTITUTION DU G20 DANS LE PAYSAGE DES RELATIONS INTERNATIONALES 25

I. LES GRANDES AMBITIONS DE LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE 2011 SE SONT TRADUITES PAR DE NOUVELLES AVANCÉES CONCRÈTES 27

A. L’APPROFONDISSEMENT DES DOSSIERS TRADITIONNELS DU G20 27

1. La régulation des marchés financiers 27

a) Dérivés échangés de gré à gré 27

b) Intégrité et efficacité des marchés 28

c) Dérivés de matières premières 29

2. La régulation des activités bancaires 29

a) Régulation des banques de tous les pays 29

b) Encadrement des bonus 30

c) Traitement des institutions financières d’importance systémique 30

d) Système bancaire parallèle 31

3. La lutte contre les paradis fiscaux et juridictions non coopératives 32

a) Fiscalité 33

b) Réglementation et surveillance financières 34

c) Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme 34

d) Perspectives 34

4. La lutte contre la corruption 35

a) Progrès enregistrés 35

b) Nouveaux engagements 36

5. Le commerce international 36

a) Lutte contre le protectionnisme 36

b) Négociations de l’Organisation mondiale du commerce 37

c) Nouvelles régulations et renforcement de l’Organisation mondiale du commerce 37

d) Accession de la Russie à l’Organisation mondiale du commerce 37

B. LE CREUSEMENT DE NOUVEAUX SILLONS DE RÉGULATION 38

1. La refonte du système monétaire international 38

a) Accroître les bénéfices de l’intégration financière et la résilience à la volatilité des flux de capitaux pour favoriser la croissance et le développement 38

b) Refléter les changements d’équilibres économiques et l’émergence de nouvelles monnaies internationales 39

c) Améliorer la capacité de réponse du FMI et la surveillance qu’il exerce 39

(1) Améliorer la capacité collective de réponse aux crises 39

(a) Renforcement des filets de sécurité financière mondiaux 39

(b) Prévention et résolution des crises 40

(c) Augmentation des ressources du FMI 40

(2) Améliorer la surveillance exercée par le FMI 40

2. La régulation des marchés de matières premières 41

a) Priorité à l’agriculture 41

(1) Accroître durablement la production agricole mondiale 41

(2) Protéger contre l’instabilité des prix agricoles 41

(3) Constituer des réserves alimentaires d’urgence 42

b) Transparence sur les marchés de matières premières 43

(1) Renforcement de la transparence des marchés physiquesagricoles et énergétiques 44

(2) Renforcement de la transparence des marchés financiers de matières premières 45

3. Les financements innovants pour le développement 45

a) Investir dans les infrastructures des pays en développement 45

(1) Quatre priorités 45

(2) Onze projets 46

b) Dégager des financements innovants pour le développement et le climat 47

(1) Un concept évoqué pour la première fois au G20 47

(2) Des délivrables inspirés par deux rapports 48

4. La régulation sociale de la mondialisation 49

a) La volonté d’une inscription durable à l’agenda du G20 49

b) Des décisions concrètes pour renforcer la dimension sociale de la mondialisation 49

c) Un pas décisif vers l’instauration d’un dialogue social au niveau international 50

II. SOUS LA PRESSION DU CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER, LE G20 COURT INEXORABLEMENT APRÈS LA CRISE 51

A. LA PRÉSIDENCE MEXICAINE DU G20 EN 2012, UN MILLÉSIME MOINS AMBITIEUX QUE CELUI DE L’ANNÉE PRÉCÉDENTE 51

1. Des conditions d’organisation délicates 51

a) Malgré le contexte diplomatique, une transition avec la présidence française finalement assez efficace 51

(1) Les tensions nées de l’affaire Florence Cassez 51

(2) Une transition responsable 52

b) Une préparation en pleine campagne électorale 53

(1) Des priorités dans la continuité de la présidence française 53

(2) Une présidence très latino-américaine 54

(3) Un accent sur l’ouverture vers la société civile 54

c) La théorisation d’un repli sur deux filières 55

(1) La filière des sherpas 55

(2) La filière finances 56

2. Un bilan qui traduit une session de transition 57

a) Soutien à la stabilisation économique et à la reprise mondiale 57

b) Emploi et protection sociale 58

c) Commerce 58

d) Renforcement de l’architecture financière internationale 59

e) Réforme du secteur financier 59

f) Sécurité alimentaire et volatilité des prix des matières premières 60

g) Développement 61

h) Croissance verte et solidaire 61

B. UNE INSTITUTIONNALISATION EN MARCHE MAIS QUI DEMEURE RELATIVE 62

1. L’absence de secrétariat permanent 62

a) Répondre à une double problématique 62

(1) Créer un « fil rouge » entre présidences 62

(2) Exercer une veille sur les politiques nationales 63

b) Une ambition qui reste illusoire à ce jour 64

(1) Un souhait exprimé par plusieurs États membres, relayé avec force durant la présidence française 64

(2) Une majorité d’États membres du G20 pour le statu quo 65

(3) Un système de transmission d’expertise maintenant bien rodé 65

(a) La collaboration entre pays de la troïka 65

(b) Le suivi par les organisations internationales 67

(c) Une culture de coopération permanente entre administrations nationales 67

2. La « dictature de l’urgence » : le cas de la présidence française 68

a) Un début de sommet chaotique 68

b) Une prise de responsabilités collective 68

3. Les prochaines présidences 69

DEUXIÈME PARTIE : LA RELATION ENTRE L’UNION EUROPÉENNE ET LA RUSSIE, ESSENTIELLE POUR LA STABILITÉ CONTINENTALE ET MONDIALE, EST TROUBLÉE PAR DES DIVERGENCES ET DES INCOMPRÉHENSIONS QUE LE DIALOGUE SUR LES QUESTIONS ÉCONOMIQUES DANS LE CADRE DU G20 DOIT CONTRIBUER À
ATTENUER 71

I. LA RUSSIE, ÉCONOMIE EN TRANSITION ET PUISSANCE POLITIQUE, ASSUME LA CONFRONTATION AVEC L’UNION EUROPÉENNE 73

A. UNE ÉCONOMIE DE RENTE QUI A BESOIN D’UNE CROISSANCE SOUTENUE POUR RESTRUCTURER SON APPAREIL PRODUCTIF 73

1. La Russie, « pays-continent » 73

a) Neuvième marché et dixième puissance économique mondiale 73

b) L’enjeu de la croissance 74

2. Les défis à relever par l’économie russe pour achever sa transition 75

a) S’appuyer sur un environnement macroéconomique sain pour s’attaquer aux problèmes économiques fondamentaux 75

(1) Agrégats macroéconomiques 75

(2) Solidité des institutions financières 76

(3) Les défis russes 76

b) Actionner de nouveaux moteurs de croissance 77

c) Relancer la consommation 78

d) Réorienter les investissements 78

e) Sortir de la dépendance au pétrole 79

B. LES RELATIONS BILATÉRALES ENTRE L’UNION EUROPÉENNE ET LA RUSSIE, PERTURBÉES PAR DES DIVERGENCES CONJONCTURELLES ET SURTOUT DES INCOMPRÉHENSIONS DE FOND 80

1. La crise chypriote 81

a) La Russie impactée pour la première fois par une crise de dette souveraine européenne 81

b) Une crise désamorcée avec une relative facilité 81

2. Le partenariat commercial, économique et politique bilatéral 82

a) Les relations commerciales russo-européennes 82

(1) La Russie, troisième partenaire commercial de l’Union européenne 82

(2) Les mesures protectionnistes russes 83

b) Un accord de partenariat économique en négociation depuis 2008 84

c) Le partenariat pour la modernisation 85

3. Les problématiques énergétiques 85

a) Deux objectifs 85

(1) Ouverture et interconnexion du marché énergétique européen 86

(2) Sécurité des approvisionnements 86

b) La feuille de route de coopération à l’horizon 2050 87

4. Régime des visas versus données personnelles des passagers 88

5. L’Union eurasiatique, succédanée de l’Union soviétique ou préalable à un approfondissement des relations avec l’Union européenne, sur un pied d’égalité ? 89

a) Une dynamique économique 89

(1) Un futur grand pôle économique ? 89

(2) Les limites de la démarche 90

b) Une logique politique 91

(1) Un concept ancien 91

(2) Un dialogue d’égal à égal entre deux espaces régionaux 91

(3) Un espace tampon 91

6. La question syrienne 92

a) La position européenne 92

b) Une évolution de la situation sur le terrain qui ne contribue pas à faire converger les analyses 93

7. Les libertés publiques et les droits de l’Homme 94

a) La nouvelle législation fédérale sur les « agents étrangers » 94

b) Les autres motifs de crispation 95

c) Les quelques signaux d’assouplissement 95

II. LA PRÉSIDENCE RUSSE DU G20 DOIT ETRE SAISIE COMME UNE OPPORTUNITÉ POUR RÉAFFIRMER LA COMMUNAUTÉ DE DESTIN ENTRE LES ÉCONOMIES EUROPÉENNE ET RUSSE 97

A. UN AGENDA PRÉSIDENTIEL RESSERRÉ SUR SON « CœUR DE MÉTIER » POUR UN G20 PLUS EFFICACE 97

1. Une ligne de conduite : l’efficacité 97

a) Une question de prestige 97

b) Une réduction drastique du périmètre de travail du G20 pour éviter la dispersion des efforts 98

c) Une préparation soignée 99

(1) Répartition des tâches 99

(2) Outreach 100

(3) Invités 101

d) Et malgré tout, une baisse d’intensité qui se confirme 101

2. Une priorité : la croissance durable 101

a) La conviction que le déficit de croissance est le nœud de la crise 101

(1) L’Union européenne dans le viseur 101

(2) En phase avec le rejet de l’austérité prôné par la France 102

b) Trois grands objectifs articulés autour du concept de croissance 102

(1) Régulation 103

(2) Emploi et investissement 103

(3) Confiance et transparence 104

c) La croissance, une notion globalisante qui peut servir de cadre au traitement d’autres problématiques économiques 104

(1) Régulation financière 104

(2) Coordination des politiques économiques 105

(3) Commerce 105

(4) Système monétaire international 106

(5) Investissement 107

(6) Développement 107

B. LA NÉCESSITÉ D’OPTIMISER LES OUTILS COMMUNS DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE ET L’ÉVASION FISCALES 108

1. Le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, cheville ouvrière de la coopération internationale en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales 109

a) L’état des lieux des pratiques en matière de renseignements fiscaux 109

b) L’assistance administrative mutuelle 110

(1) La Convention multilatérale sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale 110

(2) L’échange automatique d’informations 111

(a) Des renseignements « en vrac » sur une masse d’opérations se chiffrant à plusieurs dizaines de milliards d’euros par an 111

(b) Un mécanisme qui tend à se généraliser, notamment en Europe 111

(c) Outil de défense contre les paradis fiscaux 112

2. La lutte contre l’érosion des bases et le transfert des bénéfices 113

a) Une pratique d’optimisation fiscale aux conséquences délétères 113

b) Le rapport de l’OCDE 114

c) Trois groupes de travail 114

d) La contribution de la société civile 115

e) Quel débouché politique ? 116

TRAVAUX DE LA COMMISSION 117

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION 123

CONCLUSIONS ADOPTED BY THE COMMITTEE 127

GLOSSAIRE 131

ANNEXES 137

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 139

ANNEXE 2 : RÉSOLUTION EUROPÉENNE SUR L’UNION EUROPÉENNE ET LE G20, CONSIDÉRÉE COMME DÉFINITIVE LE 20 NOVEMBRE 2011, EN APPLICATION DE L’ARTICLE 151-7 DU RÈGLEMENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE 143

ANNEXE 3 : COMMUNIQUÉ FINAL DU SOMMET DES CHEFS D’ÉTAT ET DE GOUVERNEMENT – CANNES, 3 ET 4 NOVEMBRE 2011 149

ANNEXE 4 : ORGANISATION EN DEUX FILIÈRES DE LA PRÉSIDENCE MEXICAINE 159

ANNEXE 5 : CALENDRIER DES RÉUNIONS DE LA PRÉSIDENCE RUSSE 161

ANNEXE 6 : MESSAGES-CLÉS DU B20 SOUS PRÉSIDENCE RUSSE – PROMOUVOIR UN NOUVEAU MODÈLE DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE 165

RÉSUMÉ DU RAPPORT

À défaut de déclarations fracassantes à destination de l’opinion publique, le G20 produit pas à pas des résultats tangibles démontrant son utilité dans la matrice des relations internationales contemporaines.

Le sommet de la présidence française du G20, qui s’est tenu à Cannes les 3 et 4 novembre 2011, a d’abord été l’occasion d’approfondir les dossiers de son « c
œur de métier », à savoir les questions économiques, qu’il s’agisse de la régulation des marchés financiers et des activités bancaires, de la lutte contre les paradis fiscaux et les juridictions non coopératives, de la lutte contre la corruption ou du commerce international. Tous ces sujets font notamment l’objet d’implémentations réglementaires des deux côtés de l’Atlantique.

Mais le volontarisme français a aussi permis, à cette occasion, de creuser de nouveaux sillons de régulation, à savoir la refonte du système monétaire international, la lutte contre la volatilité excessive des prix des matières premières – notamment agricoles, avec la création du Système d’information sur les marchés agricoles et du Forum de réaction rapide – et la recherche de financements innovants en faveur de l’aide au développement, sans oublier le début d’une réflexion commune sur l’harmonisation universelle des normes sociales.

Toutefois, sous la pression du contexte économique et financier, le G20 semble courir inexorablement après la crise qui sévit depuis sa création sous sa forme actuelle, en 2008. La présidence mexicaine de 2012 – un peu tronquée du fait de l’actualité politique intérieure – s’est avérée un millésime moins ambitieux que celui de l’année précédente et son bilan traduit une session de transition, avec l’appauvrissement du nombre de filières ministérielles actives.

Il faut dire que l’institutionnalisation du G20 demeure toute relative. L’absence de consensus sur l’intérêt qu’il y aurait à mettre en place un secrétariat permanent nuit à la continuité de l’
œuvre régulatrice et ne permet pas d’optimiser la veille à exercer sur les politiques nationales. En outre, les sommets annuels sont soumis à la « dictature de l’urgence », qui impose de prendre en compte l’actualité pour éviter la survenance de nouvelles crises systémiques.

La présidence russe de 2013 marque une nouvelle étape importante du G20 car c’est le premier membre des BRICS – groupe des grands émergents – à prendre cette responsabilité. Il s’agit, pour les deux partenaires que sont l’Union européenne et la Russie, de saisir cette opportunité pour réaffirmer leur communauté de destin.


L’enjeu est en effet particulier pour l’Union européenne, voisin immédiat de ce véritable « pays-continent », neuvième marché et dixième puissance économique mondiale, confronté au défi de la croissance pour parvenir à achever la transition amorcée il y a seulement deux décennies, notamment en relançant sa consommation intérieure, en attirant davantage d’investissements et en s’extrayant de la dépendance aux hydrocarbures.

La Russie poutinienne, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et du G8, grande puissance animée par des ambitions politiques à ses frontières et au-delà, assume une attitude de confrontation vis-à-vis de l’Occident, particulièrement de l’Union européenne, sur des sujets variés, plus ou moins structurels : crise chypriote et plus généralement gestion du problème des dettes souveraines européennes, échanges commerciaux, politique énergétique, régime des visas, données personnelles des passagers aériens, constitution d’un espace eurasiatique, guerre civile syrienne, libertés publiques et droits de l’Homme, etc.

Déterminée à réussir sa présidence du G20, la Russie a fait le choix de l’efficacité en recentrant son agenda sur les questions économiques, pour ne pas faire concurrence au G8 et à l’Organisation des Nations unies. Comme fil rouge de la session 2013 du G20, elle a imposé le thème de la croissance durable. Il s’agira par conséquent, au sommet de Saint-Pétersbourg des 5 et 6 septembre 2013, d’approfondir la régulation économique internationale, de promouvoir l’investissement et l’emploi, et d’instaurer un climat de confiance et de transparence.

Sous la pression des États-Unis ainsi que de l’Union européenne et de ses États membres, le problème de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales devrait aussi tenir une place importante dans les débats du sommet, avec notamment des mesures, proposées par l’OCDE, visant à généraliser l’échange automatique d’informations et à contrecarrer l’érosion des bases et le transfert des bénéfices.

REPORT SUMMARY

Even though it doesn’t make sensational declarations to the general public, the G-20 has been progressively producing tangible results demonstrating its usefulness in the matrix of contemporary international relations.

The French G-20 presidency summit held in Cannes on 3 and 4 November 2011 was primarily an opportunity to deepen the topics of the G-20’s ‘core activities’, in other words economic issues, from financial markets and banking activities regulation to struggle against tax havens and uncooperative jurisdictions, fighting against corruption and international trade. All these topics are the subject of regulatory implementations on both sides of the Atlantic.

Further, thanks to French voluntarism, new regulatory channels were also opened on that occasion, namely overhauling the international monetary system, combating the excessive volatility of the prices of raw materials – especially agricultural, with the creation of the Agricultural Market Information System and the Rapid Response Forum – and searching for innovative funding to promote development aid, without forgetting the beginning of a joint reflection on the universal harmonization of social standards.

However, under pressure from the economic and social context, the G-20 appears to be inevitably chasing after the crisis, on-going since it was started in its present form in 2008. The Mexican presidency of 2012 – somewhat curtailed owing to domestic political developments – proved to be a less ambitious edition than that of the previous year and its outcome testifies to a transitional session, with a decrease in the number of active ministerial tracks.

It must be admitted that the institutionalization of the G-20 remains quite relative. The lack of consensus on the interest of setting up a standing secretariat jeopardizes the continuity of the regulatory work and the scrutiny to be exercised over national policies cannot be optimized in such a context. Also the annual summits undergo the “dictatorship of urgency”, which imposes taking current developments into account to avoid the occurrence of new systemic crises.

The Russian presidency of 2013 marks an important new stage for the G-20 because it is the first member of the BRICS – the group of major emerging countries – to assume this responsibility. The two partners, European Union and Russia, must seize this opportunity to reaffirm their common destiny.


The challenge is indeed special for the European Union, an immediate neighbour of this real ‘continent-country’, the world’s ninth market and tenth economic power, which must achieve growth to succeed in completing the transition started only two decades ago, in particular by relaunching its domestic consumption, attracting more investments and shrugging off its dependence on hydrocarbons.

Poutin’s Russia
, a permanent member of the United Nations Security Council and of the G-8, a major power driven by political ambitions on its borders and beyond, is assuming an attitude of confrontation against the West, especially the European Union, on a variety of more or less structural topics: the Cypriot crisis and more generally the management of the problem of European sovereign debts, trade, energy policy, visa regime, personal data of air passengers, setting up of a Eurasian area, Syrian civil war, public freedoms and human rights, etc.

Intent on succeeding its G-20 presidency, Russia has made the choice of efficacy by refocusing its agenda on economic issues so as not to compete with the G-8 and the United Nations. It has laid down the topic of sustainable growth as the guideline of the 2013 session of the G-20. Consequently the Saint Petersburg summit on 5 and 6 September 2013 will deal with deepening international economic regulation, promoting investment and employment, and introducing a climate of confidence and transparency.

Under pressure from the United States as well as from the European Union and its Member States, the issue of combating tax avoidance and evasion should also occupy an important place in the summit debates, with in particular measures proposed by the OECD to generalize automatic information exchange and to counter base erosion and profit shifting.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

En 2011, la France, qui, d’une part, exerçait concomitamment la présidence du G20 et du G8, et, d’autre part, était le premier pays à se voir confier celle du G20 pour une année entière, avait l’objectif de faire du sommet de Cannes des 3 et 4 novembre 2011, rendez-vous final dans l’agenda international des chefs d’État et de gouvernement des vingt plus grandes puissances de la planète, un événement qui ferait date dans l’histoire de la régulation économique mondiale. Il s’agissait, comme il fut expliqué tout au long de la présidence française, de passer d’un G20 de gestion de crise à un G20 de construction à moyen terme et à long terme pour accompagner le mouvement économique global.

À cet effet, l’appareil politico-administratif français a été mobilisé, en deux phases.

D’abord, le Président Sarkozy a souhaité élaborer un programme adapté aux grands enjeux économiques du moment, c’est-à-dire innovant et embrassant un périmètre largement diversifié par rapport aux cinq présidences précédentes(2) – lesquelles avaient été essentiellement consacrées à la régulation financière –, avec :

- le dessein d’une réforme du système monétaire international ;

- la consécration de trois nouvelles filières de négociation :

• agriculture ;

• développement ;

• emploi.

Dans un second temps, la difficulté a consisté à convaincre les autres membres du G20 – et, au-delà, l’ensemble de la communauté internationale, à travers les organisations internationales(3), les alliances régionales et les coalitions catégorielles(4) – du bien-fondé de ce programme, dont certains volets suscitaient, au départ, des oppositions farouches.

Ces deux exercices de conception programmatique et de sensibilisation(5) ont été unanimement salués, de même que l’investissement du Président Sarkozy dans l’opération ; au final, l’ensemble de la communauté internationale s’est appropriée l’agenda de la présidence.

Hélas, en pleine préparation du sommet, le monde a été confronté de plein fouet à l’une des phases les plus critiques de la crise économique structurelle qu’il traverse depuis 2008, au point que l’ambition française a finalement due être revue à la baisse – d’autant que l’Union européenne était alors en pleine « crise grecque » et par conséquent « dans l’œil du cyclone ».

*

* *

Compte tenu du poids de l’Europe dans le G20(6), du rôle central que ce continent occupe dans les échanges internationaux – et, malheureusement, des déséquilibres mondiaux induits par les problèmes économiques aigus qu’il rencontre actuellement –, la Commission des affaires européennes a souhaité s’emparer du sujet durant la présidence française. Nous avons alors été nommés co-rapporteurs, en compagnie de notre collègue Robert Lecou, et deux rapports d’information ont été publiés, le 17 mai 2011(7) puis le 4 octobre 2011(8).

Le second – assorti d’une proposition de résolution européenne considérée comme adoptée par l’Assemblée nationale le 20 novembre 2011(9) – se décomposait en quatre parties pour dresser un panorama complet des enjeux sous-jacents au G20 :

- il expliquait comment l’histoire des « G », depuis 1975, a conduit à la création du G20 sous sa forme actuelle et décrivait son fonctionnement, son articulation avec les autres cénacles internationaux et ses limites ;

- il analysait les évolutions de la carte géoéconomique, notamment l’essor des grands émergents du Sud, et tirait un bilan positif des cinq sommets précédents(10), qui ont permis de faire évoluer les esprits afin d’améliorer la coopération économique internationale ;

- il prenait parti en faveur d’une régulation des marchés plus sévère, à travers les trois fronts de la réforme du système monétaire international, de l’encadrement et du contrôle des services financiers, et de la lutte contre la volatilité excessive des matières premières agricoles ;

- il avançait des pistes pour refonder la gouvernance du G20, par le biais, d’une part, de la constitution d’un secrétariat permanent léger et, d’autre part, d’une optimisation de la représentation européenne.

*

* *

Près de deux ans après et alors qu’une autre présidence annuelle, exercée par le Mexique, s’est écoulée entre-temps, le présent rapport d’information a été conçu et doit être lu en complément de ce premier exercice.

Il tient aussi compte de l’acquis du G20 : faute de régler tous les malheurs du monde et de convaincre le grand public de son utilité, celui-ci s’est imposé, au prix d’une énergie administrative et politique énorme, comme le format idoine pour améliorer le fonctionnement de la mondialisation. En effet, ses participants :

- sont en nombre réduit par rapport aux organisations internationales classiques ;

- produisent 80 % du PIB mondial ;

- représentant tous les continents et toutes les catégories de profils de développement économique.

En particulier, dans le secteur financier – porteur de risques de déstabilisation systémique majeurs –, ses travaux, quoique laborieux, se sont révélés productifs : en moins d’une décennie, les capitaux propres des banques de toute la planète ont été multipliés par cinq, la supervision des institutions financières a été universellement renforcée et des bases ont été posées pour une régulation coordonnée des produits et services financiers.

Les présidences française et mexicaine du G20 ont-elles fait évoluer le fonctionnement du G20 et son périmètre d’intervention ? La situation économique mondiale s’en est-elle trouvée sensiblement et durablement assainie et stabilisée ? Comment la Russie, grand pays animé par de fortes ambitions régionales et globales, entend-elle imprimer sa marque sur l’institution du G20 ? Comment l’Union européenne devra-t-elle aborder le sommet de Saint-Pétersbourg des 5 et 6 septembre prochains pour contribuer à en faire une étape utile supplémentaire dans le processus d’organisation de la régulation économique mondiale ? Telles sont les questions auxquelles nous avons jugé utile d’apporter une esquisse de réponse.

*

* *

La présidence russe du G20 nous invite aussi à un questionnement à plus long terme. Les relations internationales sont désormais conditionnées par l’évolution de l’équilibre entre coopération multipolaire et bipolarité Nord-Sud – laquelle est fondamentalement différente de la bipolarité Est-Ouest qui prévalait par le passé. Or cet équilibre dépend aujourd’hui essentiellement des choix stratégiques opérés par la Russie, la Chine et la Turquie. Alors, quelles relations la Russie entend-elle entretenir avec l’Occident, plus particulièrement avec l’Union européenne ?

Le positionnement de la Russie vis-à-vis du G20 et du G8, et la façon dont elle appréhende ses relations avec l’Union européenne dans ces cadres multilatéraux, ne peut être comprise qu’au regard de deux mutations.

Premièrement, le Président Poutine ne se trouve pas dans la même situation que durant ses deux premiers mandats, entre 2000 et 2008. Lorsqu’il est parvenu au pouvoir, la Russie subissait le déclin depuis dix ans et avait besoin d’un homme fort. Treize ans après, une classe moyenne a émergé, représentant environ 20 % de la population ; très dynamique, elle aspire au changement démocratique et supporte mal le surplace.

Deuxièmement, la crise économique de ces dernières années a entamé le prestige européen et plus généralement occidental. L’Union européenne comme idéal d’une intégration régionale réussie est remise en cause et les élites politiques russes en déduisent qu’elle n’a pas de leçons à donner à leur pays dans le domaine de la démocratie et des droits de l’Homme. C’est ce qui explique que l’eurasiatisme ait aujourd’hui le vent en poupe, alors que la vocation européenne de la Russie a longtemps paru évidente.

*

* *

Pour tenter de répondre à ces questions, vos rapporteurs ont procédé à deux séries d’auditions(11) :

- à Paris, ils se sont entretenus avec des acteurs français de premier plan dans le processus de négociation du G20 – en particulier le directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats, le directeur général du trésor et des membres du cabinet de la Présidence de la République – ainsi qu’avec l’ambassadeur de la Fédération de Russie à Paris ;

- à Moscou, outre les services de notre ambassade et de notre service économique régional, ils ont notamment rencontré le vice-président de la commission des affaires internationales de la Douma d’État, la sherpa du Président Vladimir Poutine, l’ambassadeur itinérant chargé du G20 au ministère des affaires étrangères russe, le vice-ministre des finances – équivalent de notre directeur général du trésor –, ainsi qu’une politologue pro-européenne, des économistes d’entreprise et des dirigeants patronaux.

Au terme de ces auditions, il nous semble que les discussions et les décisions du sommet de Saint-Pétersbourg devraient s’orienter prioritairement sur deux sujets, avec l’assentiment complet de la France(12) :

- le soutien à la croissance ;

- le renforcement de la lutte contre l’évasion fiscale.

PREMIÈRE PARTIE :
MÊME SI LES PRÉSIDENCES FRANÇAISE ET MEXICAINE
NE SE SONT PAS CONCLUES PAR DES IMPULSIONS RÉVOLUTIONNAIRES
DANS LE CHAMP DE LA RÉGULATION ÉCONOMIQUE MONDIALE,
ELLES ONT DONNÉ LIEU À DE NOUVELLES AVANCÉES NOTABLES
ET ONT INSTALLÉ UN PEU PLUS ENCORE L’INSTITUTION DU G20
DANS LE PAYSAGE DES RELATIONS INTERNATIONALES

I. LES GRANDES AMBITIONS DE LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE 2011 SE SONT TRADUITES PAR DE NOUVELLES AVANCÉES CONCRÈTES(13)

Le sommet de la présidence française, qui s’est tenu à Cannes les 3 et 4 novembre 2011(14), a tout d’abord été l’occasion d’approfondir les dossiers traditionnels traités depuis l’origine du G20, sur le « cœur de métier » du G20, à savoir les questions économiques, plus particulièrement financières, qui font notamment l’objet, des deux côtés de l’Atlantique, de travaux législatifs de grande ampleur, avec :

- le projet d’Union bancaire porté par le commissaire français Michel Barnier, qui comporte trois volets :

• la poursuite du durcissement et de l’harmonisation des règles applicables au secteur financier ;

• l’intégration de la surveillance bancaire, avec un mécanisme de surveillance unique (MSU) ;

• la prévention et l’aide à la résolution des défaillances bancaires.

- le Dodd-Frank Act américain, dont la déclinaison nécessite une multitude d’actes dérivés suscitant des batailles de tranchées institutionnelles entre l’administration Obama et le Congrès.

Quoique drainant les montants les plus élevés et concentrant des risques énormes, les marchés dérivés de gré à gré sont peu transparents et peu régulés. Lors du sommet de Pittsburgh, trois catégories de mesures avaient été décidées, à mettre en œuvre avant 2012 :

- dans une perspective de surveillance, l’obligation, pour les opérateurs financiers, de déclarer toutes leurs transactions sur produits dérivés ;

- dans un souci de renforcement de la sécurité des marchés de dérivés, l’obligation de faire passer les produits standardisés par des chambres de compensation et de les assortir de dépôts de garanties ;

- dans une optique de transparence des marchés de dérivés, l’obligation de négocier sur des marchés organisés.

À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement se sont solennellement engagés à mener à terme cette réforme emblématique du G20, très structurante pour les marchés financiers, et à faire converger au maximum les dispositifs nationaux pour éviter les arbitrages réglementaires. Ils ont ainsi décidé de lancer de nouveaux chantiers en matière :

- d’exigences de garanties financières applicables aux produits dérivés non compensés ;

- d’harmonisation des bases de données centrales et des modalités d’accès à ces données par les régulateurs.

Les marchés financiers, notamment les marchés d’actions, ont connu, ces dernières années, des changements technologiques considérables affectant l’efficacité des mécanismes de formation des prix, liés :

- au développement de nouvelles technologies comme les transactions algorithmiques et les transactions à haute fréquence(15), qui représentent 70 % des volumes d’échanges aux États-Unis et 40 % en Europe ;

- à la fragmentation des marchés et à l’augmentation du nombre de plateformes de négociation opaques(16).

Le sommet de Cannes a été l’occasion de reprendre les recommandations formulées par l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), relatives notamment au renforcement des obligations de transparence et de contrôle.

Les chefs d’État et de gouvernement ont aussi lancé deux nouveaux chantiers :

- une réflexion sur les moyens de réduire la nocivité des contrats d’échanges sur risque de crédit(17), instruments financiers dérivés fournissant une sorte d’assurance contre le risque de défaillance d’une obligation émise par une société ou un État, qui se caractérisent par une faible liquidité et une grande opacité ;

- la mise en place d’un Système mondial d’identifiant des contreparties financières(18).

Les marchés de matières premières sont de plus en plus financiarisés et atteignent une dimension mondiale : les volumes échangés sur les marchés financiers du pétrole, par exemple, sont trente-cinq fois supérieurs à ceux échangés sur les marchés physiques. Il ne s’agit plus, comme autrefois, d’outils de couverture du risque, mais de véritables nouvelles classes d’actifs.

À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement ont endossé les recommandations un cadre commun de régulation des marchés dérivés de matières premières appuyé sur les recommandations de l’OICV, incluant des mesures :

- d’amélioration de la transparence ;

- de renforcement de la surveillance ;

- de transfert de pouvoirs aux autorités de marché.

L’OICV préconise en particulier l’édiction de limites de positions ex ante pour limiter l’emprise qu’un investisseur peut exercer sur un marché donné et ainsi lutter efficacement contre certaines manipulations de marché.

Le G20 s’est accordé sur un cadre rénové de règles applicables aux banques en réponse aux difficultés rencontrées par le secteur bancaire depuis 2007, comprenant :

- l’application obligatoire de l’accord de Bâle II relatif au capital des banques, qui, avant la crise, n’avait pas été mis en œuvre de façon homogène ;

- des exigences en capital renforcées sur les activités de marché et de titrisation(19), particulièrement impactées par la crise des subprimes ;

- de nouvelles règles tendant à améliorer à la fois la qualité et la quantité du capital des banques, grâce à :

• une définition plus stricte des fonds propres ;

• un rehaussement des exigences en fonds propres, passant de 8 % à une fourchette de 10,5 à 13 % ;

• de nouveaux ratios de liquidité et de levier.

À Cannes, les membres du G20 ont réaffirmé leur détermination à mener à bien la réforme coordonnée du système bancaire dans les délais prévus, la réalisation de l’objectif d’assainissement dépendant de la réalité et de la concomitance des réformes dans tous les pays du G20.

Le G20 de Pittsburgh en septembre 2009 a adopté des principes et standards régissant les rémunérations dans le secteur financier. Deux revues thématiques conduites depuis lors par le Conseil de stabilité financière (CSF) ont démontré l’existence de progrès dans la mise en œuvre de ces standards.

Toutefois, la moitié des juridictions du G20 n’ont pas encore transposé la totalité d’entre eux. De plus, le rapport final reconnaît l’existence de divergences dans l’interprétation des règles, notamment en matière d’appréciation des personnels concernés. Ces divergences peuvent conduire à des problèmes de concurrence, nuire à la mise en œuvre des standards et recréer des incitations à la distribution de bonus excessifs.

À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement, pour garantir une mise en œuvre complète et efficace des principes d’encadrement des rémunérations, ont demandé au CSF d’établir un dispositif de surveillance dédié à la mise en œuvre de ces standards, dont les résultats seront rendus publics. Ce dispositif reposera en particulier sur un mécanisme bilatéral d’examen, par les régulateurs, des difficultés concrètes de concurrence résultant de divergences d’interprétation des standards.

Sur cette base, le CSF élaborera des recommandations plus précises à propos de l’identification des personnels concernés par les principes et standards, et il procédera à un nouvel exercice de revue des pratiques.

Lors du sommet de Séoul, le G20 s’était engagé à adopter un cadre global de traitement des institutions financières dites « d’importance systémique »(20), c’est-à-dire celles dont les difficultés ou la défaillance éventuelle peuvent entraîner des conséquences insupportables pour le système financier.

À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement, au terme de travaux techniques très poussés au sein du CSF, ont consacré, pour la première fois, un cadre de traitement à trois volets :

- des obligations de supervision renforcées, avec notamment plus de contrôles sur place ;

- des obligations renforcées de résolution, qui contraignent :

• les États à se doter de régimes spéciaux de résolution des crises bancaires, incluant des pouvoirs préventifs et curatifs accrus pour les autorités de résolution ;

• les établissements d’envergure mondiale à soumettre aux superviseurs des plans de redressement et de résolution ainsi que des accords de coopération entre autorités de résolution, permettant de lever les obstacles opérationnels et légaux à la résolution des crises touchant un groupe international.

- pour les banques systémiques d’envergure mondiale, à partir de 2016, des surcharges en capital – entre 1 et 2,5 % des risques pondérés en plus des exigences de Bâle –, en vue de renforcer leur capacité à absorber des pertes plus importantes et de limiter leurs prises de risque.

Au sommet de Cannes, le CSF a publié, pour la première fois, la liste des vingt-neuf banques systémiques d’envergure mondiale.

Enfin, ce cadre de traitement sera étendu aux banques systémiques d’importance domestique ou nationale ainsi qu’aux institutions financières non bancaires – assureurs, chambres de compensation et fonds de gestion alternative(21) – d’importance systémiques.

Le système bancaire parallèle(22) regroupe l’ensemble des entités financières concourant à l’intermédiation du crédit sans être soumise ni aux règles ni à la surveillance propres au secteur bancaire régulé. Son développement rapide – 60 000 milliards de dollars d’actifs en 2010, contre 27 000 milliards de dollars en 2002 –, notamment aux États-Unis, a constitué l’une des causes majeures de la fragilité du système financier révélée pendant la crise.

Lors du sommet de Séoul, il avait été reconnu que le renforcement des règles applicables aux banques pouvait conduire à un transfert de risques vers le système bancaire parallèle. Un mandat de travail avait été confié au CSF pour renforcer sa régulation et sa surveillance.

À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement se sont accordés sur des premières recommandations en la matière :

- des règles plus strictes d’encadrement des relations financières des banques avec le système bancaire parallèle, notamment des contraintes renforcées en ce qui concerne la consolidation, dans le bilan des banques, de leurs expositions à cet environnement parallèle ;

- la régulation des fonds monétaires – 3 900 milliards de dollars d’actifs en 2010 –, qui jouent un rôle important dans le financement des institutions financières, afin de prévenir le risque de fuite des épargnants ;

- la régulation de la titrisation, pour promouvoir une approche harmonisée de la règle de rétention, qui impose à l’entité cédant le prêt de conserver à son bilan une partie des risques et l’incite par conséquent à s’assurer de la qualité dudit prêt ;

- la régulation des prêts et emprunts de titres – autres techniques de financement des institutions financières –, également pour sécuriser leur cadre d’exercice, sur la base de règles claires et strictes de partage des risques entre participants ;

- le cas échéant, des mesures supplémentaires de régulation des autres fonds intervenants au sein du système bancaire parallèle, comme les hedge funds.

Le G20 est, depuis 2008, la principale enceinte d’impulsion politique dans la lutte contre les paradis fiscaux et les juridictions non coopératives. La conférence internationale organisée par la France et l’Allemagne en octobre 2008 puis le sommet du G20 de Londres ont permis de franchir un grand pas, en affirmant pour la première fois que les juridictions non coopératives faisaient courir un risque au système financier international et aux finances publiques. Trois processus ont alors été mis sur pieds pour les identifier de façon objective et les pousser à se mettre en conformité avec les standards internationaux de transparence et d’échange d’informations.

Au sommet de Cannes, il a été procédé à une revue complète de ces processus, exercice extrêmement délicat car il implique de porter un jugement collectif sur certains pays, qui y sont évidemment très réticents.

Dans le domaine fiscal, l’action du G20 a conduit à un mouvement inédit de signatures de plus de 700 accords d’échange de renseignement fiscaux. Le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales est chargé d’évaluer dans chaque pays :

- l’existence d’un cadre juridique permettant l’échange d’information fiscale, revue dite « de phase 1 » ;

- l’effectivité de ce cadre juridique, revue dite « de phase 2 ».

Sur les cinquante-neuf juridictions évaluées :

- onze présentaient de sérieuses carences :

• Antigua-et-Barbuda, la Barbade, le Botswana, Brunei, le Panama, les Seychelles, Trinidad-et-Tobago, l’Uruguay et le Vanuatu ne s’étaient pas dotées d’un cadre juridique adapté à l’échange d’information fiscale et ne s’étaient pas qualifiées pour la revue de phase 2 ;

• la Suisse et le Liechtenstein, faute d’avoir remédié à certaines déficiences, n’étaient pas en mesure de se qualifier en phase 2 ;

- vingt-quatre présentaient plusieurs carences importantes, n’empêchant toutefois pas d’entamer la revue de phase 2 ;

- seize présentaient des carences de portée plus limitée ;

- les huit dernières(23) étaient exemptes de carences.

Lors de ces évaluations, le Forum mondial a formulé près de 400 recommandations, destinées à conduire les juridictions à engager les réformes nécessaires pour renforcer la transparence fiscale. Ainsi, la Belgique a levé le secret bancaire, les îles Caïman ont mis en place de nouvelles obligations comptables et les Îles Vierges britanniques ont renforcé les pouvoirs de leur administration fiscale. Ce combat de longue haleine doit être poursuivi sans relâche pour obtenir des résultats.

Le sommet de Cannes aura aussi permis de faire adhérer l’ensemble des pays du G20 à la Convention multilatérale sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, accord de nature à créer un nouvel effet d’entraînement, notamment en direction des pays en développement, car il donna accès à un réseau d’échange d’information fiscale incluant les plus grandes économies.

Dans le domaine de la réglementation et de la supervision financières – banques, assurances, marchés financiers –, le CSF évalue la conformité des pays à des standards internationaux en matière de coopération et d’échange d’informations entre autorités de surveillance. Il a ainsi analysé la situation des soixante et un pays dotés des systèmes financiers les plus importants, dont l’ensemble des membres du G20. Les travaux menés à ce jour révèlent que :

- quarante et un pays appliquaient de manière satisfaisante les standards internationaux;

- dix-huit pays étaient dans une situation intermédiaire, un ou plusieurs secteurs laissant apparaître des faiblesses en cours de correction ou bien l’évaluation étant incomplète ou non actualisée mais le pays coopérant afin de se mettre en conformité ;

- deux pays, la Libye – alors régie par les anciennes autorités – et le Venezuela, avaient refusé de dialoguer avec le CSF et étaient, à ce titre, qualifiés de juridictions non coopératives.

Le Groupe d’action financière (GAFI), organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, a identifié douze juridictions dont les déficiences stratégiques représentent une menace pour le système financier international à prendre en compte par les États :

- l’Iran et la Corée du Nord présentaient les carences les plus importantes, au point que le GAFI a appelé explicitement à prendre des contre-mesures contre ces juridictions non coopératives, dans le cadre des procédures de vigilance accrues des banques ;

- Cuba, la Bolivie, l’Éthiopie, le Kenya, le Myanmar, le Nigeria, Sao Tome-et-Principe, le Sri Lanka, la Syrie et la Turquie avaient accompli des progrès jugés insuffisants par le GAFI.

Dans un second document, le GAFI listait les vingt-huit pays présentant des déficiences stratégiques mais engagés avec lui dans un processus de résolution.

Au sommet de Cannes, les pays du G20 se sont solennellement réengagés à promouvoir la conformité aux standards internationaux d’échange d’informations fiscales et financières et à utiliser toutes les contre-mesures à leur disposition pour lutter contre les paradis fiscaux et les juridictions non coopératives qui ne les respectent pas.

En matière fiscale, les contre-mesures incluent notamment des pénalités fiscales à l’égard des contreparties à des transactions avec les paradis fiscaux.

Pour aller plus loin et mieux contrecarrer l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux, le G20 a appelé le GAFI et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à renforcer leurs travaux communs en matière de transparence des sociétés et des trusts.

Le G20 a accompli des progrès majeurs dans la lutte contre la corruption depuis le sommet de Séoul, poursuivis à Cannes. Des travaux y ont été entamés à propos du recouvrement des avoirs, de la lutte contre le blanchiment, de la protection des lanceurs d’alerte(24), du fonctionnement et de l’indépendance des agences anti-corruption, de la transparence dans le secteur public ou encore de la coopération internationale.

Les membres du G20 ont pris acte des de la progression dans la mise en œuvre des orientations décidées collectivement :

- l’Inde a ratifié la Convention des Nations unies contre la corruption ;

- la Russie a décidé de rejoindre la Convention de l’OCDE de lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales ;

- la Chine a adopté une loi criminalisant la corruption internationale ;

- la Commission européenne a présenté un paquet anti-corruption(25) ;

- la Corée du Sud a adopté une loi protégeant les lanceurs d’alerte ;

- l’Arabie saoudite a créé une agence nationale anti-corruption ;

- le Royaume-Uni a adopté une nouvelle loi relative à la corruption internationale ;

- les États-Unis ont adopté le Dodd-Frank Act.

Les pays du G20 se sont engagés à donner l’exemple de la transparence et de l’exhaustivité en associant la société civile aux revues par les pairs de la Convention des Nations unies contre la corruption.

Le G20 a aussi réaffirmé son soutien aux initiatives sectorielles en matière de transparence :

- dans les industries extractives, à travers l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) ;

- dans le secteur de la construction, à travers l’Initiative pour la transparence dans le secteur du transport (CoST(26)).

Ces initiatives volontaires, qui associent les acteurs du privé et du public, sont complétées par l’obligation légale, pour les entreprises, de publier ce qu’elles paient dans les pays dans lesquelles elles opèrent.

S’agissant des industries extractives :

- les États-Unis ont prévu une telle disposition dans le Dodd-Frank Act ;

- la Commission européenne a introduit une mesure de ce type dans le projet de révision de la directive transparence(27).

La participation du secteur privé aux efforts de lutte contre la corruption a aussi été assurée par des engagements pris par les entreprises du B20 qui se sont réunies à Cannes.

Les membres du G20 ont réaffirmé leur engagement de ne pas introduire de nouvelles mesures restreignant les échanges et de retirer toute mesure protectionniste déjà prise. L’Organisation mondiale du commerce (OMC) a été chargée, avec l’OCDE et la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), de dresser un bilan sur ce sujet, chaque semestre, pour le G20. Cette décision permet de prévenir les conflits entre les États à un moment où la coopération est absolument nécessaire.

Le G20 a rappelé son attachement aux négociations du cycle de Doha initiées en 2001. Les chefs d’État et de gouvernements ont cependant très clairement décidé que les négociations, en échec depuis dix ans, ne pouvaient plus être poursuivies selon les méthodes utilisées jusqu’alors. Ils ont décidé de mettre en œuvre de nouvelles approches de négociations pour renforcer le système commercial multilatéral et pour progresser dans les domaines intéressant les pays les plus pauvres.

Sous l’impulsion de la France, le G20 a lancé des travaux relatifs à de nouvelles régulations sur les questions posées par la crise, au-delà du mandat de Doha. Ce fut une avancée importante pour renforcer un système commercial multilatéral fondé sur des règles claires et partagées.

Par ailleurs, le G20 s’est accordé pour renforcer les instances multilatérales de l’OMC dans leurs fonctions de résolution des différends commerciaux en particulier, pour éviter que ceux-ci ne dégénèrent en oppositions entre États.

Le sommet du G20 de 2011 a salué l’accession prochaine de la Russie à l’OMC(28), grande opportunité pour ce pays, dernière grande économie à ne pas faire partie de cette organisation. La Russie pourra ainsi prendre pleinement sa place dans le système économique international.

Mais c’est aussi une grande opportunité pour les exportations des autres États du G20 : l’accès au marché russe sera significativement ouvert, dans de nombreux secteurs pour leurs produits agricoles et industriels ou en matière de services.

C’est enfin un signe concret et important de coopération entre la Russie et ses partenaires internationaux.

Conformément à la volonté affichée par la présidence française, l’édition de 2011 du G20 a aussi été l’occasion d’élargir le spectre de réflexion afin de creuser de nouveaux sillons de régulation, sur des sujets porteurs d’enjeux globaux majeurs.

Compte tenu du mode de fonctionnement du G20(29), les présidences successives lui donnent des tonalités variables, en fonction de leur sensibilité à certaines thématiques et de l’actualité économique. Certaines de ces évolutions peuvent enrichir durablement la culture du G20. C’est le cas de cet élargissement des sujets traités sous présidence française, qui peut être considéré, deux ans après, comme l’apport majeur de notre pays à l’histoire de la gouvernance économique mondiale. Outre l’intérêt intrinsèque des dossiers traités – dans l’optique de démultiplier les impulsions politiques de nature à réguler l’économie mondiale –, cette démarche innovante avait aussi pour but d’« humaniser » le G20.

Partant d’un constat commun sur les dysfonctionnements du système monétaire international actuel, les pays du G20 se sont accordés pour lancer sa réforme selon plusieurs axes.

Le G20 a adopté un cadre de référence pour améliorer la gestion des flux de capitaux. Il a reconnu que des mesures de gestion ou de contrôle des flux de capitaux pouvaient s’avérer légitimes. Intervenant en complément de politiques macroéconomiques saines, celles-ci doivent être mobilisables lorsque les flux de capitaux sont particulièrement élevés et volatiles. Elles ne sauraient être destinées, en revanche, à reporter des mesures d’ajustement nécessaires. Il a par ailleurs été demandé qu’elles fassent l’objet d’une évaluation régulière. Enfin, les pays dont les politiques économiques influencent l’ampleur ou la destination des flux de capitaux doivent en tenir compte dans leurs choix de politiques.

Le G20 a également adopté un plan d’action pour le développement des marchés obligataires en monnaie locale, contribuant à réduire la vulnérabilité externe des pays.

Les pays du G20 se sont engagés à adopter plus rapidement des régimes de taux de change flexibles, afin que les taux de change reflètent les fondamentaux de marché, ce qui permettra de réduire le rythme d’accumulation des réserves de change.

La Chine a accepté de laisser son taux de change s’apprécier de manière assez significative et les salaires y ont fortement augmenté. Ce rééquilibrage des facteurs de la croissance mondiale est essentiel.

L’objectif est un élargissement, d’ici à 2015, des droits de tirage spécial (DTS) du Fonds monétaire international (FMI) à de nouvelles monnaies, afin de s’assurer que la composition du panier de DTS reflète effectivement le poids des différentes devises dans le système monétaire internationale. Au préalable, le FMI a été invité à clarifier les critères d’admissibilité au sein du panier du DTS.

L’édification d’un système monétaire international plus stable et plus résilient est une entreprise de longue haleine. À Cannes, les chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à continuer d’œuvrer en faveur de la stabilité systémique de l’économie mondiale et d’une transition appropriée vers un système monétaire international reflétant mieux le poids accru des économies émergentes.

Dans le cadre de la réforme du système monétaire internationale, le G20 a décidé :

- de renforcer la capacité du FMI à répondre aux crises et à les prévenir ;

- d’améliorer la surveillance de ses membres et de l’économie mondiale.

Les chefs d’État et de gouvernement ont appuyé la proposition par le FMI d’une nouvelle ligne de liquidité de précaution, censée améliorer la réponse aux besoins de liquidité à court terme des pays frappés par des chocs exogènes quoique se caractérisant par des politiques et des fondamentaux sains.

Ils ont également soutenu la création d’une facilité unique de prêt d’urgence, utilisable en cas d’événement déstabilisant, notamment de catastrophe naturelle ou de transition politique.

Les pays du G20 se sont mis d’accord sur des principes de coopération entre le FMI et les accords financiers régionaux, pour tirer pleinement profit :

- de la compréhension, par les accords financiers régionaux, du fonctionnement des économies de leur zone ;

- de la plus grande capacité de surveillance du FMI, du fait de sa vision globale.

En temps de crise, une meilleure cohérence sera assurée entre les conditions de prêts accordés par les accords régionaux et le FMI, tout en assurant au FMI le statut de créditeur privilégié.

Pour faire face aux difficultés actuelles dans l’économie mondiale, le G20 s’est engagé à maintenir des ressources suffisantes au FMI, lui permettant d’assurer ses missions avec crédibilité, au bénéfice de l’ensemble de ses membres.

Diverses options ont été explorées, notamment :

- la mobilisation de prêts bilatéraux additionnels pour le FMI ;

- la création d’une structure spéciale au sein du FMI pour rendre possible le financement d’accords financiers régionaux.

Afin d’assurer une surveillance mieux intégrée et plus efficace tout en bénéficiant des progrès déjà réalisés en matière d’analyse des effets de contagion entre économies et de le veille sur le secteur financier, le G20 a souhaité que le FMI approfondisse son expertise en matière de suivi des flux de capitaux, de liquidité mondiale, de suivi des taux de change et de facteurs d’accumulation des réserves de change.

La surveillance par le FMI et son effet d’entraînement seront renforcés via une amélioration de son cadre juridique et une meilleure intégration entre ses outils de surveillance pays et de surveillance globale.

La croissance mondiale à venir dépendra de la capacité de la communauté internationale à relever le défi agricole et alimentaire mondial :

- en garantissant la sécurité alimentaire du monde entier, puisqu’une hausse de 70 % de la production agricole mondiale, d’ici à 2050, sera indispensable pour nourrir 9 milliards de personnes, 90 % de l’augmentation de la population étant concentrée dans les pays en développement ;

- en luttant contre une volatilité des prix particulièrement prononcée sur les marchés de matières premières agricoles, multipliée par trois au cours des vingt dernières aimées – la tonne de blé ayant déjà varié de près de 100 % en quelques semaines.

C’est pourquoi la France avait décidé de placer l’agriculture et la sécurité alimentaire au cœur des priorités du G20, avec une première : la réunion des ministres de l’agriculture du G20 avec les grandes organisations internationales chargées de la sécurité alimentaire, à commencer par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO(30)).

Le G20 a adopté un « plan d’action sur la volatilité des prix alimentaires et sur l’agriculture », apportant des solutions ambitieuses, concrètes et immédiates pour relever le défi agricole et alimentaire mondial, en vue d’accroître durablement la production agricole mondiale, notamment en passant à la vitesse supérieure en matière de coordination de la recherche agronomique internationale.

La première étape de cette nouvelle orientation passe par le développement de nouvelles variétés de blé, dans le cadre de l’Initiative internationale de recherche pour l’amélioration du blé(31).

La volatilité des prix pose d’importants problèmes aux pays en développement, en pénalisant les consommateurs lorsque les prix augmentent, les producteurs lorsque, au contraire, ils baissent et en créant une incertitude défavorable aux décisions d’investissements, à l’accroissement de la production et de la productivité et, en définitive, au développement agricole. La gestion du risque, particulièrement dans ces pays, doit également anticiper les conséquences de conditions climatiques extrêmes, impliquant sécheresse, inondations ou modifications climatiques.

Les outils de gestion du risque adossés au marché – comme les couvertures physiques ou financières du risque-prix des matières premières, les instruments d’assurance et de garantie ainsi que les prêts contra-cycliques – peuvent jouer un rôle important pour aider les pays et les populations les plus vulnérables à atténuer et à gérer ces risques. Pour autant, chaque pays, chaque entreprise, chaque exploitation doit faire face à une situation spécifique et il n’existe pas d’instrument unique capable de répondre à tous les besoins.

Le G20 a souhaité développer des mesures concrètes pour aider les pays et les populations les plus vulnérables :

- intégrer l’analyse et la gestion des risques aux politiques agricoles et de sécurité alimentaire, avec la mise en œuvre de la feuille de route ad hoc du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et le projet du Programme alimentaire mondial (PAM) de stratégie de gestion du risque prix ;

- développer des outils de gestion du risque, par le biais des banques multilatérales de développement(32), qui ont réalisé un état des lieux des instruments existants – stratégies de couverture des agences humanitaires, achats anticipés, mécanismes contra-cycliques, assurances climat, contractualisation, assurances récolte, etc. –, et en s’appuyant sur le projet pilote de la Société financière internationale (SFI), développé en Amérique latine ;

- mettre en place un mécanisme de conseil en gestion du risque pour les clients des pays en développement, géré par les banques multilatérales et régionales et les agences bilatérales de développement, afin de mettre en réseau les différents acteurs et leurs expériences, sur la base d’une plate-forme constituée dans un premier temps par la Banque mondiale, la BIAD, le Fonds international de développement agricole (FIDA) et l’Agence française de développement (AFD).

Pour les plus vulnérables, le G20 a initié la mise en place d’un système de stocks humanitaires d’urgence prépositionnés dans les pays de la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et a décidé, avec la Banque mondiale, de développer des instruments innovants d’assurance et de gestion des risques pour les plus pauvres, afin qu’ils se protègent des hausses de prix ou des événements affectant les récoltes.

La mise en place de ce système de réserves vise à permettre une réponse plus rapide et plus efficace aux crises alimentaires. Il s’agit de permettre aux pays les moins avancés de faire face à un déficit vivrier et d’accéder aux quantités de nourriture nécessaires pour couvrir les besoins des plus vulnérables en cas de choc lié à la volatilité des prix ou à d’autres événements.

Le plan d’action du G20 sur l’agriculture et la volatilité des prix agricoles, adopté le 23 juin 2011, a mandaté le PAM et les autres organisations internationales compétentes, comme l’Organisation des Nations unies (ONU) et la Banque mondiale, pour réaliser une étude de faisabilité sur la mise en place d’un tel système en Afrique, complémentaire aux réserves alimentaires nationales existantes. Avec les organisations régionales africaines, une étude de faisabilité a été menée.

Le système proposé respecte les règles de l’OMC car il n’intervient pas sur le marché et n’est en aucune manière semblable aux stocks de régulation.

La réunion du G20 consacrée au développement du 23 septembre 2011 a donc décidé d’appuyer le développement d’un projet pilote en Afrique de l’Ouest, piloté par la CEDEAO. De petite taille, fondé sur une approche régionale, ce système sera constitué :

- d’une réserve physique de 67 000 tonnes de riz, maïs, sorgho et mil pour trente jours de consommation pour les populations les plus vulnérables des onze pays les moins avancés et à déficit vivrier de la CEDEAO ;

- d’une réserve virtuelle équivalente à soixante jours de consommation, sur la base de divers instruments financiers.

Ces réserves permettront de donner le temps nécessaire à l’aide internationale pour être acheminée. Le système contribuera donc à une réponse plus rapide et plus efficace aux crises alimentaires.

Ce projet pilote répond aux besoins exprimés par la CEDEAO et s’insère dans sa politique agricole régionale. Un comité de pilotage associera l’ensemble des parties prenantes : organisations internationales, régionales, États et donateurs. Un conseil regroupera en outre des représentants des producteurs et des représentants de la société civile.

Afin de lutter contre la volatilité excessive des prix des matières premières, le G20 a pris à Cannes des engagements forts pour renforcer la transparence des marchés de matières premières, non seulement physiques – qu’il soit énergétiques ou agricoles – mais aussi financiers.

La volatilité des prix des matières premières résulte en partie de leur trop grande opacité, en particulier du manque d’informations sur les stocks et les transactions qui s’y déroulent chaque jour. Une information de qualité sur ces marchés est essentielle pour que ceux-ci jouent efficacement leur rôle au service des producteurs et des consommateurs et donc de la croissance. Afin de relever le défi de la transparence et d’assurer un fonctionnement plus sain et moins volatil des marchés de matières premières à l’échelle mondiale, le G20, qui représente 73 % de la consommation mondiale de pétrole et 80 % de la production mondiale de céréales, a pris deux grandes catégories de décisions au sommet de Cannes, tenant respectivement aux marchés physiques et aux marchés financiers.

Un système d’information sur les marchés agricoles (AMIS(33)) a été créé pour coordonner la collecte et l’analyse des principales données mondiales sur la production, la consommation et les stocks, et aider les pays en développement à renforcer leurs capacités d’analyse des marchés. La réunion de lancement s’est tenue le 15 septembre 2011, à Rome.

Cette base de données a vocation à améliorer à la fois la quantité et la qualité des informations disponibles sur ces marchés, particulièrement les niveaux de stocks et les prévisions de récolte. Elle se focalise sur le blé, le maïs, le riz et le soja, qui constituent les principales productions agricoles mondiales. L’AMIS, dont le secrétariat est hébergé par la FAO, remédie à l’éparpillement actuel des données en coordonnant leur collecte et leur analyse.

Un Forum de réaction rapide a également été mis sur pied pour prévenir et gérer les crises de marché de façon coordonnée. Sa première réunion s’est tenue le 16 septembre 2011, à Rome, sous l’égide la FAO.

Le G20 a enfin décidé d’exempter l’aide humanitaire du PAM de toutes restrictions aux exportations.

S’agissant des marchés énergétiques, la base de données similaire sur le pétrole (JODI(34)), gérée par le Forum international de l’énergie (FIE) et alimentée par l’engagement les membres du G20, doit être perfectionnée. À Cannes, le G20 a fixé à 2013 la date à laquelle l’ensemble des pays devront se conformer aux exigences de la base de données, en particulier en matière de transmission de données sur les stocks, afin de renforcer son exhaustivité. Le FIE évaluera de façon régulière la fiabilité de la base de données, sous le contrôle des ministres des finances du G20.

JODI sera étendue aux marchés du gaz, sous l’égide du FIE.

Le G20 a aussi décidé de poursuivre en 2012 ses travaux sur le renforcement de la transparence des marchés du charbon.

Le cadre adopté permettra aux superviseurs de disposer de l’ensemble des informations, en particulier sur les positions importantes prises sur les marchés dérivés, nécessaires pour surveiller et prévenir les abus et les manipulations de marché. L’OICV aura la responsabilité d’en assurer le suivi, notamment aux États-Unis et dans l’Union européenne.

Cette mesure vise surtout à lutter contre les abus de marché et les manipulations de cours sur les marchés financiers dérivés des matières premières agricoles.

Le G20 a repris les recommandations formulées par le panel de haut niveau d’experts du secteur privé, présidé par M. Tidjane Thiam, et par les banques de développement :

- renforcer les ressources humaines et les capacités des pays en développement pour préparer un plus grand nombre de projets d’infrastructures susceptibles d’attirer des financements privés ;

- améliorer la qualité des informations disponibles pour les investisseurs, à travers notamment l’extension de la Base de données sur les infrastructures en Afrique (AICD(35)) et le lancement de plateformes électroniques d’échange d’informations sur les projets d’infrastructure afin de mieux relier investisseurs et porteurs de projets ;

- améliorer la qualité de l’environnement des affaires pour les investisseurs, en renforçant la transparence dans le secteur de la construction, en prenant mieux en compte l’impact sur la dette et la croissance des pays en développement des projets d’infrastructure et en demandant aux banques de développement de progresser rapidement vers la reconnaissance mutuelle de leurs procédures, de passation de marché en particulier ;

- diversifier et mobiliser les financements pour les projets d’infrastructure en mettant l’accent sur le financement de la préparation des projets, le renforcement des marchés financiers et des institutions financières des pays en développement, et un usage accru d’outils de couverture des risques et de garantie.

Le G20 a demandé aux banques de développement et au panel de haut niveau d’identifier des projets, selon les critères suivants :

- leur impact pour l’intégration régionale ;

- le soutien politique dont ils jouissent ;

- leur impact transformationnel, en particulier en matière de développement durable ;

- leur maturité ;

- la capacité institutionnelle des porteurs de projets ;

- l’attractivité pour les investisseurs privés.

À l’issue de ce travail, le G20 a décidé de mettre en avant onze projets exemplaires, ambitieux et réalistes, dont la réalisation, si les pays et organisations régionales concernées le souhaitent, aura un effet décisif pour la croissance, l’intégration régionale et l’accès aux marchés mondiaux.

- cinq projets en Afrique subsaharienne :

• le site hydroélectrique d’Inga, en République démocratique du Congo ;

• le West African Power Pool, qui reliera les réseaux électriques sur 1 400 kilomètres entre quatre pays fragiles d’Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Libéria et le Sierra Leone ;

• l’Ethiopia-Kenya Interconnector, qui poursuit le même objectif sur 1 000 kilomètres entre deux pays d’Afrique de l’Est, l’Ethiopie et le Kenya ;

• le corridor Nord-Sud, reliant Dar-Es-Salaam en Tanzanie à Durban en Afrique du Sud, qui vise à fluidifier le trafic et à renforcer l’intégration commerciale régionale et la compétitivité du continent ;

• le chemin de fer Isaka-Kigali, qui reliera, par rail, le Rwanda et la Tanzanie ;

- deux projets dans la région Méditerranée :

• le Jordan Raihvay Project, qui vise à développer un nouveau réseau ferroviaire entre les grands centres, les ports et les points d’entrée de la Jordanie vers ses pays voisins ;

• le Plan solaire méditerranéen (PSM), qui permettra de développer le secteur l’énergie solaire et les exportations vers les marchés européens ;

- trois projets en Asie :

• le gazoduc entre le Turkménistan, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde ;

• l’extension de la production d’énergie propre à partir de la biomasse au Cambodge, au Laos et au Vietnam ;

• la mise en place d’un fonds innovant de financement des infrastructures, donnant la priorité aux projets régionaux ;

- un projet en Amérique Latine :

• le Corridor pacifique, l’un des cinq corridors prioritaires des routes mésoaméricaines reliant, sur plus de 3 000 kilomètres, sept pays d’Amérique latine, le Mexique, le Guatemala, le Salvador, le Nicaragua, le Costa Rica, Panama et le Honduras.

À Cannes, le G20 s’est, pour la première fois, mobilisé pour les financements innovants pour le développement et le changement climatique.

Les besoins en financement pour le développement et la lutte contre le changement climatique sont élevés. Les sources actuelles de financement mobilisées à ces fins par les pays en développement eux-mêmes et par les pays bailleurs de fonds n’y suffiront pas. Ainsi, le niveau d’aide publique au développement, quoique ayant atteint, en 2010, un niveau record de 129 milliards de dollars, n’est toujours pas en phase avec les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). L’engagement pris à Copenhague sur le financement du changement climatique suppose également de mobiliser un montant de 100 milliards de dollars, publics et privés, par an à partir de 2020.

Au vu de ces besoins, il faut repenser le modèle de financement du développement et du changement climatique. Les financements innovants, susceptibles de mobiliser le secteur privé comme le secteur public, doivent permettre d’atteindre ces objectifs. Une majorité de pays du G20 – la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, l’Australie, le Canada, l’Afrique du Sud, le Brésil, la Russie et la Corée du Sud – les utilisent déjà, en complément de leur aide traditionnelle, mais il faut aller plus loin pour répondre aux défis de la solidarité internationale.

Deux travaux ont fait avancer la réflexion en 2011 et ont été rendus publics à l’occasion du sommet de Cannes :

- le rapport préparé par Bill Gates à propos du financement du développement, qui liste :

• les contributions sur les activités mondialisées, à l’instar de la taxe sur les billets d’avion déjà en place dans certains pays ;

• les garanties d’achats futurs, qui peuvent accélérer la recherche en matière de vaccins, comme ce fut le cas pour la pneumonie ;

• d’autres mécanismes de marché, comme le financement en aval, à l’image de ce qui est fait en G20 pour la recherche en agriculture tropicale ;

• les obligations destinées aux diasporas pour mobiliser l’épargne des migrants et l’orienter sur des investissements dans leur pays d’origine ;

- le rapport relatif au financement du changement climatique, élaboré par la Banque mondiale, le FMI, l’OCDE et les banques régionales de développement, en collaboration avec l’Organisation maritime internationale (OMI) et l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), qui approfondit les travaux conduits en 2010 dans le cadre des Nations unies et établit, entre autres sources, la faisabilité technique d’une contribution des secteurs maritime et aérien.

Une approche sous la forme d’un menu d’options a été retenue par les chefs d’État et de gouvernement, avec l’engagement de membres du G20 d’aller de l’avant parmi ces différentes options. Il a été décidé que les ministres des finances du G20 poursuivront en particulier leurs travaux sur la taxation du secteur financier et sur le financement du développement et de la lutte contre le changement climatique.

Pour sa part, la France a confirmé sa volonté d’instaurer, avec d’autres pays, une taxe sur les transactions financières. Cette mesure, promue par le Président François Hollande auprès de ses homologues européens, fait désormais l’objet d’un projet de coopération renforcée à onze pays(36), susceptible d’entrer en vigueur dès le 1er janvier 2014 pour une assiette large de transactions, aux taux de :

- 0,1 % pour celles portant sur des actions et obligations ;

- 0,01 % pour les produits dérivés.

En 2011, la présidence française du G20, avec le soutien de l’Allemagne, des États-Unis et des pays latino-américains, a inscrit la dimension sociale de la mondialisation à l’agenda du G20, pourtant enceinte d’inspiration libérale. Les ministres du travail et de l’emploi du G20 se sont réunis pour la première fois, les 26 et 27 septembre, à Paris.

À Cannes, les chefs d’État ont reconnu qu’il était essentiel que la dimension sociale soit durablement à l’agenda du G20. Ils ont décidé :

- qu’une réunion des ministres du travail et de l’emploi se tiendrait à nouveau en 2012, sous présidence mexicaine ;

- qu’une task force sur l’emploi serait mise en place, associant les organisations internationales, au premier rang desquelles l’Organisation internationale du travail (OIT) et l’OCDE, ainsi que les partenaires sociaux. Elle accordera une attention particulière à l’emploi des jeunes ;

- que l’OIT rejoigne les autres organisations internationales participant de façon continue aux travaux du G20.

La notion de « socles mondiaux de protection sociale » promue par la France s’est révélée beaucoup trop audacieuse pour des pays comme l’Inde, qui se disent incapables, dans l’état actuel de leur marché du travail, de ratifier la totalité des huit conventions internationales de l’OIT, comme celles concernant le travail des enfants ou le droit de grève.

À Cannes, les chefs d’État se sont engagés à :

- mettre l’emploi au cœur des politiques pour renouer avec la croissance et la confiance ;

- mettre en œuvre des socles de protection sociale définis nationalement, afin de garantir, dans chaque État, des prestations sociales minimales, en matière d’accès aux soins, de garantie de revenus pour les personnes âgées et handicapées, d’octroi de prestations pour enfants à charge ou de garantie de revenus pour les chômeurs et les travailleurs pauvres ;

- promouvoir l’application effective des droits sociaux et du travail, grâce à la ratification et à l’application des huit conventions fondamentales de l’OIT ;

- renforcer la cohérence de l’action des organisations internationales en améliorant leur coordination et en conférant davantage de poids à l’OIT dans la gouvernance mondiale.

Dès le début de la présidence française du G20, le Président Sarkozy a souhaité que les partenaires sociaux soient pleinement associés aux travaux du G20. Les ministres du travail et de l’emploi du G20 ont échangé avec eux, le 26 septembre, pendant la matinée. Le Président Sarkozy les a reçus, le 2 novembre, pour recueillir leurs recommandations avant le sommet de Cannes.

La présidence française a soutenu l’organisation du L20(37), réunion des représentants des salariés, et du B20(38), réunion des représentants des entreprises, qui se sont tenus à Cannes les 2 et 3 novembre.

Le L20 et le B20 ont adopté une déclaration commune, remise par Laurence Parisot, présidente du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), et Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI), à Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, puis transmise aux chefs d’État et de gouvernement.

L’association des partenaires sociaux tout au long de la présidence française et les travaux du L20 et du B20 démontrent l’émergence, pour la première fois au niveau du G20, d’un véritable dialogue social international, dont les chefs d’État et de gouvernement ont, dans leur déclaration finale, salué l’importance.

II. SOUS LA PRESSION DU CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER, LE G20 COURT INEXORABLEMENT APRÈS LA CRISE

Exercer la responsabilité de l’animation du G20, pour un pays comme le Mexique, quatorzième puissance économique mondiale, a constitué un moment exceptionnel – d’autant qu’il ne s’agissait que du second pays du Sud, après la Corée du Sud en 2010, à être choisi par ses pairs. Le Mexique, du fait de sa situation géographique dans l’aire d’influence prioritaire des États-Unis et de sa dépendance économique par rapport à ce grand voisin – avec lequel il partage une frontière de plus de 3 000 kilomètres –, n’est en effet pas une puissance régionale. En outre, n’appartenant pas au G8 et n’étant pas membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, ce pays n’a guère l’occasion d’apparaître comme un acteur mondial de premier plan.

Eu égard à son passé récent, le Mexique est parfaitement conscient des conséquences dévastatrices qu’une mondialisation non maîtrisée peut avoir sur une économie nationale : ce fut en effet le pays latino-américain le plus touché par la crise de 2009 et par les effets de la pandémie grippale, qui, à elle seule, lui a fait perdre environ 1 point de PIB. Au total, la production de richesses a reculé de 6,1 % en 2009, contre une moyenne latino-américaine de plus 3 %.

Le fonctionnement du G20 prévoit, en principe, le travail dit « en troïka » entre le pays exerçant la présidence, son prédécesseur et son successeur. Compte tenu de l’absence de secrétariat permanent, les relations avec la présidence précédente sont particulièrement importantes afin d’assurer la passation des dossiers dans de bonnes conditions et d’assurer une prise en compte du retour d’expérience politico-administrative.

Or, en 2011, les relations diplomatiques entre le France et le Mexique étaient encore empoisonnées par l’affaire Florence Cassez, qui avait notamment conduit à l’annulation de l’année du Mexique en France prévue en 2011 et à une crispation extrême de l’opinion publique mexicaine – jalouse de l’indépendance de sa justice et très sensible aux affaires d’enlèvements – ainsi que d’une partie de l’entourage du président Felipe Calderón contre notre pays. Cela dit, pas moins que 120 événements culturels ont été organisés en France en 2011 et les relations commerciales bilatérales n’ont pas pâti des dissensions diplomatiques – les investissements français au Mexique, notamment, sont restés très dynamiques.

La France, toujours très soucieuse de contribuer à la réussite du G20, exercice qu’elle juge indispensable pour construire la stabilité économique mondiale, s’est montrée déterminée à assurer la meilleure transition possible. Il s’agissait en effet de démontrer qu’il n’est pas seulement utile aux vieilles puissances économiques et que les grands émergents y ont toute leur place.

Le Mexique, de son côté, conscient de l’intérêt qu’il y avait à s’appuyer sur l’expérience française, n’a pas fait obstacle à une coopération efficace. D’autant que, comme M. Carlos De Icaza, alors ambassadeur du Mexique à Paris, en a témoigné devant les rapporteurs de la Commission des affaires européennes, le Mexique a jugé la présidence française « exemplaire » et même « magnifique », après avoir craint qu’elle ne fût « trop ambitieux ».

Sur le fond des sujets traités dans le cadre du G20, le Mexique s’était toutefois montré assez critique vis-à-vis de la gestion de la crise des dettes souveraines par les Européens, estimant insuffisante leur résolution à la combattre.

Au plus haut niveau politique, durant toute la phase de préparation du sommet, le passage du témoin a été assuré entre Xavier Musca et Jean-David Levitte – alors secrétaire général de la Présidence de la République pour le premier et conseiller diplomatique et sherpa du Président de la République pour le second – et Lourdes Arranda, secrétaire d’État aux affaires étrangères, sherpa mexicaine. En effet, traditionnellement, au Mexique, le sherpa n’appartient pas au cabinet de la Présidence de la République mais à l’administration du ministère des affaires étrangères, qui détient très clairement la responsabilité en matière de gestion des grands événements internationaux, contrairement à ce qui se fait en France et dans la plupart des autres pays membres du G20. Cette compétence vaut d’ailleurs aussi bien pour le leadership sur les prises de position de fond que pour les aspects organisationnels – secrétariat, logistique et protocole –, à l’exception de la sécurité.

Ce profil de sherpa spécifique, ajouté au fait que le Mexique n’appartient pas au cénacle du G8 – censé être compétent sur les questions stratégiques –, explique peut-être que la présidence mexicaine ait tenu à organiser une réunion des ministres des affaires étrangères, les 18 et 19 février 2012, à Los Cabos, dans un format étrange, avec onze pays supplémentaires, dont l’Algérie, l’Azerbaïdjan ou encore l’Autriche. Les sujets abordés ont été de la gouvernance mondiale à la croissance verte en passant par le climat. Cette novation ne semble pas devoir être pérennisée, en tout cas sous présidence russe, nous y reviendrons. D’autant que le Mexique lui-même, conscient de la « transgression » qu’a représenté cette réunion, a finalement pris soin d’en relativiser la portée.

Quoi qu’il en soit, sur le plan de la gouvernance, le Mexique semble avoir sous-estimé la difficulté de la gestion du G20. La présidence mexicaine a d’ailleurs délégué de nombreuses tâches aux présidents des groupes de travail thématiques.

La préparation du G20 sous présidence mexicaine s’est déroulée dans un contexte politique intérieur particulier puisque le pays était alors en pleine campagne pour les élections fédérales. La date du 1er juillet 2012 avait en effet été retenue pour l’élection du Président et le renouvellement des deux chambres du Congrès du Mexique, en vue d’une prise de fonction des nouvelles assemblées législatives en septembre 2012 et du nouvel exécutif en décembre 2012. Le Président n’étant pas rééligible, Felipe Calderon a souhaité organiser le sommet du G20 avant le scrutin : il s’est tenu les 18 et 19 juin à Los Cabos, c’est-à-dire en milieu d’année, alors que ce rendez-vous est censé constituer le point final des présidences, désormais calées sur les années civiles.

Le sommet n’a sans doute guère influé sur le scrutin. En effet, au Mexique, les questions internationales interfèrent peu sur les débats politiques domestiques. En outre, le G20 n’a pas passionné les médias généralistes et l’opinion publique ; seuls se sont montrés intéressés la classe politique, les économistes et la presse spécialisée.

Cette décision de circonstance a en revanche quelque peu perturbé l’organisation du G20 : le sommet de Los Cabos n’a pas pu, comme d’ordinaire, marquer l’apogée de la présidence mexicaine, qui a dû, par la suite, organiser des réunions ministérielles de suivi des dossiers ; la présidence mexicaine s’en est trouvée un peu tronquée.

Pour l’essentiel, la présidence mexicaine s’est inscrite dans la continuité par rapport à l’agenda français, avec un degré d’intensité moindre, toutefois, pour s’emparer des dossiers.

Les priorités suivantes ont été affichées :

- stabilisation de l’économie et mise en œuvre de réformes structurelles pour favoriser la croissance et l’emploi ;

- renforcement des systèmes financiers et optimisation de l’inclusion financière afin de favoriser la croissance économique ;

- amélioration de l’architecture monétaire internationale – notamment via la consolidation du FMI, de son rôle de surveillance et de ses ressources – afin d’aboutir à une économie mondiale intégrée ;

- atténuation des effets de la volatilité des prix des matières premières, en particulier ceux affectant la sécurité alimentaire, et augmentation de la production et de la productivité agricoles ;

- promotion du développement durable par l’établissement d’un agenda d’infrastructures, efficacité énergétique, promotion de la croissance verte et recherche de financements innovants pour lutter contre le changement climatique(39).

En 2012, les six pays invités par la présidence tournante furent :

- l’Espagne, invitée permanente, en sa qualité de douzième puissance économique mondiale ;

- le Bénin, qui exerçait alors la présidence de l’Union africaine (UA) ;

- le Cambodge, qui exerçait la présidence de l’Association des nations du Sud-Est asiatique (ASEAN) ;

- l’Ethiopie, qui exerçait alors la présidence du NEPAD ;

- le Chili ;

- la Colombie.

Ces deux derniers pays, latino-américains, ont été sélectionnés sur une base de préférence régionale, au détriment de représentants potentiels du Conseil de coopération des États arabes du Golfe (CCG) ou des puissances moyennes du 3G, en vertu du principe selon lequel le pays exerçant la présidence a toute latitude pour choisir les invitations. Il s’agissait notamment de contrebalancer la représentation européenne au G20, parfois considérée, parmi les pays émergents, comme excessive.

La présidence mexicaine s’est montrée très soucieuse d’ouvrir le G20 sur la société civile, à travers deux initiatives :

- elle a tout d’abord souhaité enrichir le dialogue par les contributions des instituts académiques, think tanks et autres centres de recherches, en organisant pour la première fois un T20(40), afin de valoriser et d’introduire les réflexions des chercheurs et experts, travaillant dans les champs d’intervention du G20 ;

- elle a aussi inventé le C20(41), rassemblant des représentants des organisations non gouvernementales (ONG).

Les Mexicains ont en outre donné une plus grande envergure au Y20(42), qui réunit des jeunes des États membres du G20. Le sommet du Y20 a eu lieu du 9 au 11 mai 2012 à Puebla. Chaque pays membre du G20 a sélectionné et envoyé une délégation de sept étudiants, afin de donner à la jeunesse la possibilité de discuter des priorités de la présidence mexicaine ainsi que de l’avenir du multilatéralisme. Les 128 jeunes délégués ont rédigés une déclaration assortie de recommandations.

Ces diverses initiatives, qui s’ajoutent aux rendez-vous désormais institutionnalisés du L20 et du B20, présentent l’intérêt d’améliorer l’outreach vers les diverses composantes de la société civile.

Alors que la France, en élargissant le champ des thématiques abordées dans le cadre du G20, avait délibérément ouvert de nouvelles filières ministérielles susceptibles de raffermir les liens politico-administratifs entre États membres et de forger une culture de travail en commun, le Mexique a théorisé un repli du travail sur deux filières(43), sans doute inspiré pour partie par la nécessité d’organiser le sommet de façon précipitée.

La filière des sherpas se concentre sur les questions politiques et non financières, comme l’emploi, l’agriculture, l’énergie, le développement et la lutte contre la corruption. Les sherpas assurent des tâches importantes de planification, de négociation et d’exécution au cours de tout le processus de préparation et d’organisation du sommet. Ils coordonnent l’ordre du jour, recherchent le consensus au niveau politique le plus élevé et aident à négocier les positions des chefs d’État et de gouvernement.

À la fin du processus, avec les suppléants des ministres des finances, ils préparent la déclaration finale et les autres documents de conclusion du sommet.

La filière des sherpas délègue les analyses techniques et politiques à une série de groupes de travail, composés de fonctionnaires de chaque pays membre et de représentants des organisations internationales concernées.

L’ordre du jour du sommet est préparé par des réunions des ministres, des séminaires d’experts et d’autres rendez-vous.

Les sherpas ont également la responsabilité de tenir des réunions fréquentes avec d’autres parties prenantes, comme les milieux d’affaires, les institutions académiques et les jeunes, afin de faciliter un dialogue inclusif.

La filière finances se concentre sur les questions financières et économiques :

- solutions aux problèmes économiques d’actualité ;

- stabilisation de l’économie et réformes structurelles ;

- amélioration de la coordination internationale pour la prévention des crises ;

- correction des déséquilibres commerciaux, fiscaux et financiers ;

- fourniture de ressources pour accroître la liquidité globale ;

- renforcement du système financier international.

La filière finances est animée par les ministres des finances des pays du G20 et les gouverneurs des banques centrales, qui se réunissent régulièrement, au cours de l’année, afin de débattre des problèmes économiques mondiaux et d’adopter des actions coordonnées en vue de leur trouver des solutions. Ces réunions sont également suivies par les organisations internationales intervenant dans le champ économique et financier, comme la Banque mondiale, le FMI, l’OCDE et le CSF.

Sur le plan administratif, la filière fonctionne par le biais de groupes de travail instaurés formellement par le G20, qui travaille également en collaboration étroite avec les organisations internationales.

La présidence mexicaine a constitué sept groupes de travail relevant de la filière finances :

- cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée, groupe de travail coprésidé par le Canada et l’Inde ;

- régulation financière ;

- inclusion financière, éducation financière et protection des consommateurs ;

- architecture financière internationale, groupe de travail coprésidé par l’Australie et la Turquie ;

- énergie et marchés de matières premières, groupe de travail coprésidé par l’Indonésie et le Royaume-Uni :

• sous-groupe marchés de matières premières, co-présidé par le Brésil et le Royaume-Uni ;

• sous-groupe énergie et croissance, co-présidé par la Corée du Sud et les États-Unis ;

- gestion des risques de catastrophe ;

- finances de l’action pour le climat, groupe de travail coprésidé par la France et l’Afrique du Sud.

Dans le contexte de tensions renouvelées sur les marchés, les pays du G20 membres de la zone euro ont dû, de nouveau, rassurer leurs partenaires. Ils ont ainsi réaffirmé qu’il était indispensable de prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver l’intégrité et la stabilité de la zone, améliorer le fonctionnement des marchés financiers et rompre l’interaction entre les finances souveraines et les banques.

À cet effet, le G20 s’est prononcé en faveur de mesures concrètes pour mieux intégrer l’architecture financière, incluant la surveillance des établissements et des marchés, l’organisation de la résolution des crises et la recapitalisation des banques. Les membres de la zone euro ont également été appelés à procéder à des ajustements internes, par des réformes structurelles visant à renforcer la compétitivité dans les pays déficitaires et à promouvoir la demande et la croissance dans les pays excédentaires.

Les pays du G20 se sont en outre accordés sur les mesures nécessaires pour renforcer la croissance mondiale et rétablir la confiance. Les pays industrialisés ont été invités à faire en sorte que le rythme de la consolidation budgétaire soit à même de soutenir la reprise, en tenant compte de la situation propre à chaque pays et tout en répondant aux inquiétudes relatives à la soutenabilité budgétaire à moyen terme.

Il a été décidé que les économies industrialisées et émergentes disposant d’une marge budgétaire laisseraient jouer les stabilisateurs automatiques en fonction de la situation nationale et des conditions de la demande. En cas de nouvelle aggravation importante de la situation économique, les pays disposant d’une marge budgétaire suffisante se sont engagés à se concerter et à mettre en œuvre des mesures, à leur discrétion, afin de soutenir la demande intérieure en tant que de besoin.

Les chefs d’État et de gouvernement se sont aussi déclarés vigilants face à l’évolution des prix du pétrole et des matières premières, et prêts à mener de nouvelles actions si nécessaire, notamment à obtenir l’engagement des pays producteurs de continuer à garantir un niveau d’offre adéquat, correspondant à la demande.

Le Président de la République François Hollande s’est félicité du consensus obtenu à propos du soutien à la croissance, « la plus importante, à [ses] yeux », du sommet de Los Cabos.

Les chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à lutter de toute urgence contre le chômage, au moyen de mesures adéquates concernant le marché du travail et en encourageant la création d’emplois décents et de qualité, notamment pour les jeunes et les autres catégories vulnérables, durement frappés par la crise économique. De plus, ils ont réaffirmé l’engagement de faciliter les jeunes l’accès à des emplois de qualité qui leur ouvriront des perspectives d’avenir.

L’importance d’établir des socles de protection sociale définis nationalement a été soulignée. Les États membres du G20 doivent ensuite continuer à promouvoir la cohérence, la coordination, la coopération et le partage des connaissances au niveau international et entre institutions, pour aider les pays à faible revenu à renforcer leurs capacités de mise en place de socles de protection sociale définis au niveau national.

La présidence mexicaine a suivi l’exemple français en dialoguant avec les partenaires sociaux par la voie des consultations du B20 et du L20.

Les membres du G20 se sont montrés vivement préoccupés par le regain de protectionnisme à travers le monde. Ils ont réaffirmé les engagements pris à Cannes contre toutes les mesures contraires au commerce et à l’investissement, y compris les restrictions aux importations et les encouragements aux exportations contraires aux règles de l’OMC. Le mandat du cycle de Doha et la volonté de mettre en œuvre des approches nouvelles et crédibles pour faire progresser les négociations commerciales dans tous les secteurs ont été réaffirmés.

Les engagements pris à Los Cabos permettront d’accroître les ressources du FMI de plus de 450 milliards de dollars, en plus de l’augmentation des quotes-parts prévue par la réforme de 2010. Ces ressources, qualifiées d’« actifs de réserve », seront transférées au compte des ressources générales du FMI par le biais de prêts bilatéraux et d’investissements comme les accords d’achat d’obligations, selon les modalités approuvées par le conseil d’administration du FMI. L’objectif est de préserver le système financier international et de renforcer le rôle du FMI dans la prévention et le règlement des crises.

L’amélioration du cadre de surveillance du FMI passe notamment par une meilleure intégration de la surveillance bilatérale et multilatérale, en se concentrant sur la stabilité financière internationale et nationale, notamment sur les retombées des politiques nationales.

À Los Cabos, les chefs d’État et de gouvernement ont également souligné l’importance d’une surveillance rigoureuse des politiques de change et soutenu l’idée d’une couverture plus large des activités de surveillance, le cas échéant, en particulier concernant les liquidités mondiales, les flux de capitaux, les mesures du compte de capital et les politiques budgétaire, monétaire, financière et de réserve susceptibles d’avoir des effets sur la stabilité extérieure.

Le G20 a réaffirmé que tous les contrats de produits dérivés de gré à gré normalisés doivent être échangés via des plateformes d’échanges ou des plateformes de négociation électronique et compensés par des contreparties centrales.

Il a aussi rappelé les objectifs :

- d’enregistrement des échanges de produits dérivés de gré à gré dans des bases de données centrales ;

- de soumission des contrats ne faisant pas l’objet d’une compensation centralisée à des exigences de fonds propres plus rigoureuses.

Les membres du G20 se sont félicités des progrès accomplis dans la mise en œuvre des normes de Bâle II et de Bâle III, et ont demandé aux juridictions de s’y conformer dans les délais prévus.

En outre, ils se sont mis d’accord pour mettre leurs régimes nationaux de résolution en conformité avec les éléments essentiels des régimes de résolution efficaces, de telle sorte qu’aucune banque et aucune institution financière ne reste « trop grosse pour faire faillite(44) ». À cette fin, ils ont également soutenu l’élaboration en cours de plans de reprise et de résolution ainsi que d’accords de coopération transfrontalière spécifiques pour l’ensemble des SIFIs.

En matière fiscale, l’objectif demeure le renforcement de la transparence et l’échange global d’informations. La nécessité de prévenir l’érosion de l’assiette fiscale et le transfert de bénéfices a également été réaffirmée.

Au sommet de Los Cabos, le G20 a accentué sa volonté d’abolir les restrictions aux exportations et les taxes extraordinaires pesant sur les denrées alimentaires achetées par le PAM à des fins humanitaires. Il a encouragé la mise en œuvre des directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts, dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale.

Les chefs d’État et de gouvernement se sont accordés sur la nécessité d’adapter l’agriculture au changement climatique et ont reconnu qu’il était important d’améliorer durablement l’efficacité de l’utilisation de l’eau et des sols. À cette fin, ils se sont dits favorables à un recours plus courant à des techniques et pratiques bien connues comme l’amélioration de la fertilité des sols, le travail minimum du sol et l’agroforesterie, et ont demandé aux organisations internationales d’établir un rapport définissant des options fondées sur des données scientifiques pour améliorer l’efficacité de l’utilisation de l’eau dans l’agriculture de manière particulièrement adaptée aux petites exploitations.

Ils ont mentionné l’importance de la stabilité des marchés internationaux de matières premières afin de maintenir la reprise économique mondiale.

Ils ont insisté sur l’importance de la transparence et du bon fonctionnent des marchés physiques et financiers de matières premières ainsi que de la réduction de la volatilité excessive des cours afin de parvenir à la sécurité alimentaire et à une croissance forte, durable et solidaire.

La volatilité excessive des prix des matières premières énergétiques étant une source importante d’instabilité économique, ils ont décidé de continuer à travailler pour améliorer la régularité, l’exhaustivité et la fiabilité de la base de données JODI sur le pétrole et sur le gaz.

Au sommet de Los Cabos, les chefs d’État et de gouvernement ont approuvé les analyses du groupe de travail sur le développement, appuyées sur les travaux des présidences précédentes du G20, qui a articulé ses travaux autour de trois priorités :

- la sécurité alimentaire ;

- les infrastructures ;

- la croissance verte et solidaire.

Tout en reconnaissant que les financements publics des projets de développement des infrastructures dans les pays en développement demeurent essentiels, les membres du G20 ont considéré que ceux-ci doivent être complétés par des investissements du secteur privé.

Il est essentiel d’investir dans les infrastructures pour assurer une croissance économique soutenue, lutter contre la pauvreté et créer des emplois. Ainsi, les progrès importants accomplis dans le cadre du plan d’action pluriannuel, dans la mise en œuvre des recommandations formulées par les banques multilatérales de développement dans leur plan d’action et par le panel de haut niveau pour l’investissement dans les infrastructures ont été valorisés.

Sous la présidence mexicaine, le G20 a réaffirmé son engagement à lutter contre le changement climatique. Ainsi, les membres se sont déclarés déterminés à mettre pleinement en œuvre les conclusions des Conférences des parties de Cancun et de Durban.

La création du groupe d’étude du G20 sur le financement du climat, afin d’examiner comment mobiliser effectivement des ressources en tenant compte des objectifs, dispositions et principes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), dans le prolongement de l’accord de Cancun, a été accueillie favorablement. De plus, le G20 a soutenu la mise en œuvre opérationnelle du Fonds vert pour le climat(45).

Le G20 continuera d’étudier des mécanismes efficaces permettant de mobiliser des fonds publics et privés pour investir en faveur de la croissance verte et solidaire dans les pays en développement, y compris par le biais de la plateforme de dialogue public-privé sur l’investissement vert solidaire.

La mutation opérée par le G20 en 2008 – avec l’organisation de sommets des chefs d’État et de gouvernement, qui se concluent par des déclarations finales à forte résonance politique – a induit des améliorations incontestables en matière de gouvernance économique mondiale. En outre, grâce aux efforts d’outreach menés par les présidences successives auprès des 174 États qui n’en sont pas membres – directement ou via l’ONU et les autres organisations internationales –, la reconnaissance dont jouit ce cénacle tend à devenir universelle.

L’institutionnalisation du G20 est cependant bloquée par deux facteurs.

Premièrement, en l’absence de secrétariat permanent, le suivi de l’application des décisions prises lors des sommets souffre d’un certain déficit. Ce suivi, assuré de façon éclatée par diverses organisations internationales spécialisées, s’avère en outre insuffisamment injonctif, ce qui retarde la mise en œuvre coordonnée de nouvelles politiques.

Deuxièmement, la relative liberté de la présidence pour imprimer sa marque sur la session annuelle dont elle a la responsabilité entraîne des ruptures dans les priorités et nuit par conséquent à la continuité du processus de régulation. Ce phénomène est renforcé par la nécessité, année après année, de traiter l’urgence pour permettre au système économique mondial de résister à la crise systémique qu’il traverse.

Un secrétariat éphémère est fourni par la présidence en exercice, dans le cadre de la troïka. Les administrations des trois pays concernées – notamment celles des ministères des finances, la filière finances étant la plus ancienne et surtout la plus sollicitée – se coordonnent en permanence, à tous les niveaux hiérarchiques, afin de piloter l’élaboration des délivrables susceptibles d’être examinés lors du sommet.

Ce système, censé assurer la continuité entre les dossiers suivis, a de fait relativement bien fonctionné jusqu’à présent : il s’agit d’assurer la continuité des ordres du jour et d’éviter que les présidences successives ne sautent d’une priorité à l’autre, en fonction de la sensibilité nationale de la présidence en cours à tel ou tel sujet.

En outre, le G20 est une opération de plus en plus complexe, du fait non seulement de la lourdeur administrative croissante du procès de préparation des sommets mais aussi de l’élargissement du panel de sujets traités. Les débats du G20 deviennent trop importants et lourds de conséquences pour risquer de connaître des hauts et des bas en fonction du poids politique du pays exerçant la présidence et de l’investissement personnel de son chef d’État ou de gouvernement.

Des pays moins rompus que la France aux exercices de ce type n’en seront pas moins amenés automatiquement à présider le G20, par le jeu des présidences tournantes. Or tous ne possèdent pas les trois attributs qui permettent de faire fonctionner le G20 :

- le poids politique ;

- l’expertise technico-administrative ;

- les capacités organisationnelles.

S’agissant du poids politique, il faut être en mesure de convaincre, autrement dit de s’imposer, au début de l’exercice, pour l’établissement de l’agenda, puis à chaque réunion ministérielle de l’année, pour faire sortir des propositions délivrables, et enfin lors du sommet, pour emporter la décision.

L’appareil administratif doit faire preuve d’excellence pour piloter les groupes de travail de fonctionnaires et faire émerger des solutions acceptables par tous, utiles pour l’économie mondiale et applicables sur toute la planète. Il doit donc avoir une compétence pluridisciplinaire et une grande expérience des négociations multilatérales.

Enfin, des capacités organisationnelles de grande ampleur sont indispensables pour organiser les grands rendez-vous – notamment les réunions ministérielles et surtout le sommet. Il convient tout d’abord de disposer de services de sécurité opérationnels, incluant un quadrillage terrestre, des surveillances aériennes et des protections maritimes. Et les infrastructures en hôtellerie et en salles de réunion doivent être suffisantes pour accueillir plusieurs milliers de personnes.

Un secrétariat permanent permettrait d’assister les présidences successives, notamment les présidences faibles, dépourvues d’un, de deux ou de ces trois attributs.

Le second enjeu consiste, pour le G20, à être en mesure de suivre les politiques nationales, afin de contrôler la déclinaison juridique des orientations politiques fixées par les sommets et de vérifier que les délais prévus sont appliqués. Un secrétariat permanent pourrait tenir un tableau de bord, point par point, et le mettre à la disposition de la présidence, afin que celle-ci, à chaque réunion ministérielle ou sommet, soit en mesure de donner de nouvelles impulsions pour rappeler à l’ordre les pays retardataires et faire avancer les dossiers en souffrance.

Le temps de latence entre les négociations et l’exercice démocratique peut en effet être long, sous l’influence du jeu politique domestique et des groupes de pression locaux. En l’absence de structure investie d’un pouvoir de contrôle, chaque pays suit les avancées des autres de façon informelle. Cette évaluation par les pairs désordonnée est assez inefficace et source de tensions politiques contreproductives.

Un secrétariat permanent jouerait, en quelque sorte, un rôle d’« autorité notariale », qui se porterait garante des actes passés sous seing du G20.

L’hypothèse de l’instauration d’un secrétariat permanent sui generis du G20 a régulièrement été avancée, par des pays comme l’Australie, la Corée du Sud, l’Inde, l’Indonésie, la Turquie ou la France. Du côté de ces cinq premiers pays, puissances moyennes n’appartenant pas aux cercles très fermé du noyau permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et du G8, la volonté de s’extraire d’une certaine marginalité sur la scène internationale conduit naturellement à souhaiter l’institutionnalisation du G20, dont ils font partie.

Cette idée figurait surtout, en bonne place, dans l’agenda de la présidence de 2011, symbolisant le volontarisme français pour faire passer un cap à la régulation économique mondiale ; la Commission des affaires européennes l’a d’ailleurs soutenue dans son rapport d’information d’octobre 2011(46).

Hélas, au vu de l’opposition d’une majorité d’États et du manque de capacité d’entraînement des puissances européennes en pleine crise grecque, aucune évolution n’a pu être enregistrée sur ce sujet. Le projet d’institutionnalisation du G20 n’est pas même mentionné dans la déclaration finale des chefs d’État et de gouvernement.

Les détracteurs d’un éventuel secrétariat permanent objectent que le G20 doit rester un objet politique souple, maniable et informel, qu’un secrétariat permanent le dénaturerait. La ligne de fracture se situe d’ailleurs entre certaines très grandes puissances et les autres pays. L’Allemagne, le Brésil, la Chine et les États-Unis, à des degrés divers, ont fait état de leurs réticences ; ils redoutent essentiellement de perdre le contrôle de l’agenda au profit d’un organe où se cristalliseraient des enjeux de pouvoir.

Et, au-delà du principe, se posent également de multiples questions pratiques :

- où le secrétariat permanent serait-il localisé ?

- serait-il doté de compétences au fond ou uniquement de pouvoirs organisationnels ?

- quel degré d’autorité les États du G20 lui conféreraient-ils ?

- quel serait son mode de recrutement ?

- avec combien d’agents fonctionnerait-il ?

- de quels moyens financiers serait-il doté ?

À cet égard, les détracteurs d’un secrétariat permanent craignent que celui-ci ne soit créé selon un petit format, concentré, dans un premier temps, sur l’organisation, pour se transformer progressivement en grosse machine bureaucratique, bloquant la prise de décision opérationnelle et mue par ses propres intérêts et ceux de ses responsables plutôt que par la recherche de solutions profitables à l’économie mondiale.

Force est de constater que l’absence de secrétariat permanent est compensée par des mécanismes de mise en commun d’expertise et de suivi des orientations qui s’avèrent relativement efficaces.

D’abord, le système de la troïka, aussi imparfait soit-il, a jusqu’à présent plutôt apporté satisfaction. Compte tenu des divergences d’intérêts économiques et du manque de culture de négociation commune, les passations de flambeau entre pays du Nord et du Sud, d’un continent à l’autre, étaient redoutées ; or, entre les États-Unis et la Corée du Sud puis entre la Corée du Sud et la France, elles se sont finalement bien passées, augurant positivement de la pérennité et de l’efficacité du G20. Même des pays en délicatesse diplomatique, comme la France et le Mexique, nous l’avons vu, ont su mettre de côté leurs divergences sur d’autres sujets pour assurer la transition de la présidence du G20 dans des conditions acceptables. Elle donne aussi à la présidence sortante les moyens de s’assurer que les dossiers qu’elle a portés, à défaut d’être défendus avec autant d’énergie, ne soient pas trop délaissés par l’État qui lui succède.

La troïka réunit des pays de trois continents et de profils économiques différents. Elle permet par conséquent de procéder à des échanges en comité restreint afin de tester l’acceptabilité par l’ensemble des États membres du G20 des propositions que la présidence a la responsabilité de leur soumettre, sur les sujets suivants :

- programme des discussions ;

- enchaînement des réunions ;

- communiqués finaux.

C’est ainsi que la sherpa mexicaine s’est régulièrement déplacée à Paris, fin 2011 et début 2012, afin d’assurer la continuité avec les impulsions données au terme de la présidence de 2011. De même, la Russie a associé l’Australie à son travail – y compris à la fixation de l’ordre du jour de sa présidence – dès le début de 2013.

Et la troïka n’est pas exclusive : la transmission d’expertise et de savoir-faire peut aussi se faire, en souplesse, entre deux présidences plus espacées : le directeur général du trésor australien est ainsi venu à Paris, en mai 2013, pour préparer le travail de la filière finances de la présidence de 2014.

En outre, le fait que les groupes de travail techniques soient présidés ou coprésidés par d’autres pays – ayant exercé la présidence précédemment ou appelés à le faire dans l’avenir – garantit une certaine continuité des travaux.

Enfin, les affectations croisées de diplomates ou de fonctionnaires d’échange permettent d’injecter de l’huile dans les rouages du G20. Elle est toutefois exceptionnelle car elle se heurte à de multiples obstacles politiques et administratifs.

L’autorité de la troïka, qui s’est construite pragmatiquement, pourrait aussi être institutionnalisée, avec un système de secrétariat permanent très léger, constitué d’un nombre restreint – cinq, par exemple – de fonctionnaires de chacun des trois pays.

Ensuite, les organisations internationales spécialisées dans les domaines intéressant la gouvernance économique mondiale – FMI, CSF, Comité de Bâle sur le contrôle bancaire(47), Banque mondiale, OCDE, OMC, FAO, OIT, etc. – sont mises à contribution en permanence, au point qu’elles sont devenues des rouages quasi organiques du G20.

La solution consistant à confier le secrétariat permanent à une de ces organisations internationales revient donc dans le débat de façon récurrente. Mais aucune d’entre elle ne réunirait les conditions requises :

- les Chinois ou les Brésiliens ne sauraient accepter que l’OCDE, institution dans laquelle ils ne sont pas représentés, prenne davantage de pouvoir ;

- si tous les pays du G20 siègent au sein des organisations spécialisées des Nations unies, ils ne sont pas omniscients, leurs prérogatives étant réduites à un secteur donné, par exemple les questions monétaires pour le FMI ou agricoles pour la FAO.

Le CSF et le BCBS disposent en outre de leurs propres mécanismes internes de suivi et cette ressource est mise à la disposition des divers groupes de travail du G20.

Le cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée héberge aussi un système de suivi des engagements – sauf sur les déficits, qui ont explosé –, avec un système de feux tricolores.

En fin de présidence mexicaine, en guise d’alternative au secrétariat permanent, le Mexique avait proposé des mécanismes de suivi plus charpentés, voire fusionnés en un seul instrument, mais cette suggestion fut refusée par la Chine et les autres émergents.

Les automatismes qui se construisent année après année dans les relations entre hauts fonctionnaires permettent non seulement d’établir un climat de confiance réciproque utile lors des réunions du G20, à tous les étages techniques et politiques de négociation, mais aussi de prendre à bras-le-corps, en urgence, des situations d’urgence exceptionnelles.

Ainsi, immédiatement après les catastrophes naturelles et nucléaires qui frappèrent le Japon en mars 2011, des réunions téléphoniques furent organisées très rapidement pour apporter une aide logistique coordonnée et rassurer autant que faire se pouvait les marchés.

La préparation d’un sommet durant des mois, aussi méticuleuse soit-elle, n’immunise pas la présidence contre la nécessité de traiter prioritairement l’urgence économique qui s’impose au moment du sommet. Cette réalité démontre l’utilité du G20, voire son caractère irremplaçable : en effet, quelle autre instance, réunissant au plus haut niveau politique les principales puissances économiques mondiales, pourrait s’emparer des questions mettant en péril les grands équilibres ?

Il n’en demeure pas moins que la continuité du travail du G20 en pâtit. Ainsi le sommet de Cannes a-t-il été parasité par la crise des dettes souveraines européennes, en particulier de son volet grec. En dépit des mesures volontaristes prises dans le cadre du Mécanisme européen de stabilité (MES), doté d’un capital de 750 milliards d’euros, les quinze pays non européens du G20 ont fait grief à la zone euro des risques qu’elle faisait peser sur la croissance mondiale en réglant avec trop peu de détermination et de crédibilité les problèmes soulevés par ses dettes publiques excessives. La réaction des pays émergents, en particulier, traduisait une crainte justifiée : ce qu’ils considéraient comme des tergiversations risquait de conduire à un effondrement de la confiance et par conséquent des marchés financiers mondiaux, entraînant l’amorçage d’une spirale récessive.

Le sommet de Cannes a donc débuté dans une atmosphère délétère, l’agenda propre du G20 semblant, dans un premier temps, remis en cause par l’actualité européenne.

La veille, le plan de sauvetage de la Grèce élaboré au sommet européen des 26 et 27 octobre 2011 était remis en cause par l’annonce d’un référendum en Grèce. Le Président Nicolas Sarkozy et la chancelière Angela Merkel menaçaient alors de suspendre l’octroi d’une tranche de prêt de 8 milliards d’euros promis à la Grèce, ce qui l’aurait mise en situation de défaut de paiement mi-décembre. L’idée du référendum était abandonnée et le premier ministre grec, Georges Papandréou, présentait sa démission, ouvrant la voie à la constitution d’un gouvernement d’union nationale.

Parallèlement, les marchés italiens entraient en panique, craignant une contagion à cause de l’ampleur de la dette publique du pays – 1 900 milliards d’euros, soit 120 % du PIB. Or, eu égard à la taille de l’économie italienne – la quatrième de l’Union européenne –, le MES n’aurait pas les moyens de la sauver de la banqueroute.

Une position médiane sur la crise européenne a finalement été retenue : il revient à l’Union européenne elle-même d’accomplir le travail de fond pour assainir les finances publiques de ses États membres ; si elles ne sauraient sacrifier en faveur du vieux continent leurs gains de croissance, les autres grandes puissances doivent apporter une contribution dans leur propre intérêt, pour ne pas mettre en péril un ensemble économique essentiel à la stabilité mondiale.

Les pays émergents ont évidemment conscience des avantages qu’ils ont à retirer d’une contribution financière au renflouement des comptes publics européens :

- l’Union européenne constitue leur premier marché d’exportation et la crise qui y sévit pèse sur leur croissance domestique et sur le taux d’activité de leur salariat ;

- l’écroulement de l’euro réduirait à néant les perspectives de diversification des devises structurant le système monétaire international ;

- l’Europe s’ouvrira davantage aux flux d’investissements de leurs entreprises.

Ainsi, malgré les avancées indéniables obtenues à Cannes, que nous avons commentées dans le détail, aussi bien dans le champ d’intervention traditionnel du G20 que sur de nouvelles matières, la crise des dettes souveraines de la zone euro a passablement éclipsé l’agenda de la présidence française. De fait, les leaders de l’Union européenne, la France la première, n’étaient pas dans la position la plus confortable pour prétendre incarner une dynamique de sortie de crise à l’échelle mondiale.

La question de la continuité entre présidences successives et les interrogations sur le bon fonctionnement de la troïka ne manqueront pas de continuer à se poser à l’avenir. Les pays qui exerceront prochainement la présidence du G20 seront :

- l’Australie en 2014 ;

- la Turquie en 2015.

La déclaration finale de Cannes comporte en outre des précisions sur le mode de désignation des pays chargés de la présidence du G20 : à partir de 2016, ils seront choisis au sein de sortes de caucus régionaux, en commençant par le groupe asiatique, qui comprend la Chine, la Corée du Sud, l’Indonésie et le Japon.

La Corée du Sud ayant déjà été servie en 2010, les deux puissances asiatiques majeures, la Chine et le Japon, sont immédiatement entrées en compétition, dans un contexte de tensions régionales très fortes entre les deux pays. Le 13 mai 2013, après plusieurs autres incidents intervenus ces derniers mois en mer de Chine orientale, qui ont suscité un raidissement politico-médiatique dans les deux camps, trois navires chinois ont passé une demi-journée au large des îles de Senkaku, que la Chine connait sous le nom de Diaoyutai et revendique toujours depuis leur cession au Japon par les États-Unis en 1972. Les enjeux sont à la fois territoriaux et économiques – dans les secteurs hydrocarbure et halieutique.

La décision quant à l’attribution de la présidence du G20 pour 2016 devra être prise et annoncée en 2014.

Le Japon, qui a très tôt fait valoir sa candidature, dispose d’un atout : cette année-là, il présidera aussi le G8 et pourrait ainsi, comme la France en 2011, assurer une parfaite cohérence entre les agendas et les discussions des deux cénacles.

Mais la Chine, pays émergent, pourra se prévaloir, en dehors de son groupe régional, du soutien des autres BRICS. Si sa candidature est retenue, elle devra s’engager davantage dans la communauté économique internationale, au sein de laquelle elle se comporte un peu comme un « passager clandestin » – même si elle a revalorisé son taux de change, c’est davantage parce qu’elle en a décidé ainsi pour des motifs intérieurs que pour satisfaire à la pression internationale. En effet, la présidence du G20, si elle offre un avantage au pays qui la détient en termes de capacité d’initiative politique et d’organisation des travaux, lui impose aussi d’accepter d’être le réceptacle de toutes les pressions et de ne pas bloquer le processus de recherche du compromis.

DEUXIÈME PARTIE :
LA RELATION ENTRE L’UNION EUROPÉENNE ET LA RUSSIE,
ESSENTIELLE POUR LA STABILITÉ CONTINENTALE ET MONDIALE,
EST TROUBLÉE PAR DES DIVERGENCES ET DES INCOMPRÉHENSIONS
QUE LE DIALOGUE SUR LES QUESTIONS ÉCONOMIQUES
DANS LE CADRE DU G20 DOIT CONTRIBUER À ATTENUER

I. LA RUSSIE, ÉCONOMIE EN TRANSITION ET PUISSANCE POLITIQUE, ASSUME LA CONFRONTATION AVEC L’UNION EUROPÉENNE

Si la Russie possède d’énormes atouts économiques et si la situation sur son marché de l’emploi apparaît enviable pour ses partenaires européens, le pays n’en est pas moins sujet à des difficultés économiques, dont les pouvoirs publics sont pleinement conscients. Ces difficultés sont liées au double profil de la Russie : économie en transition et économie de rente, elle a besoin d’une croissance soutenue pour achever la restructuration de son appareil productif, qui, une bonne vingtaine d’années seulement après le changement radical de régime politique et de système économique, a déjà évolué de façon remarquable.

La Russie est une République fédérale constituée de 83 « sujets de la Fédération ». C’est le pays le plus vaste du monde : il s’étend sur un territoire de 17 millions de kilomètres carrés, soit trente-trois fois la France. Avec 143 millions d’habitants, vivant principalement dans les grandes villes de la partie européenne du pays, la Russie est le neuvième marché du monde.

Elle dispose des ressources naturelles considérables. Dans le domaine des hydrocarbures, elle est la deuxième exportatrice mondiale de pétrole et de gaz. Elle recèle aussi d’immenses réserves de charbon, d’or, de nickel, de cobalt, de diamant ou encore de bois. L’exportation de ses matières premières représente les deux tiers des exportations totales de la Russie. Hors hydrocarbures, les spécialisations industrielles de la Russie résultent essentiellement de l’héritage du complexe militaro-industriel soviétique : métallurgie, spatial, nucléaire et armement. Au cours des années deux mille, les secteurs de services ont toutefois connu un essor remarquable.

La priorité économique du Président Poutine est d’accélérer la diversification du tissu économique, d’accroître les investissements et d’améliorer l’attractivité de la Russie – qui demeure au 112e rang du classement Ease of Doing Business de la Banque mondiale.

Les autorités russes reconnaissent par ailleurs la nécessité de moderniser l’économie, de restructurer les secteurs souffrant d’un retard technologique et de revoir les modalités de financement des entreprises – plutôt sur le marché domestique et avec un effet de levier moindre. La présence de l’État dans l’économie reste cependant massive – environ 50 % du PIB.

Enfin, le réseau d’infrastructures de transports – routes, autoroutes, aéroports, liaisons ferroviaires – existant requiert un effort énorme de réhabilitation et de nouveaux investissements très lourds, notamment dans la perspective des Jeux olympiques de Sotchi de 2014 et de la coupe du monde de football de 2018. En dépit de l’immensité du territoire, le nombre de kilomètres des routes russes équivaut à celui de la France.

En 2011, avec un PIB de 1 812 milliards de dollars, la Russie était la dixième puissance économique mondiale et son PIB par habitant à parité de pouvoir d’achat (PPA) s’élevait à 16 736 dollars.

Son taux d’inflation atteignait 6,1 %. Son taux de chômage était seulement de 6,6 %. S’il est encore plus faible à Moscou ou Saint-Pétersbourg, poumons économiques du pays, il atteint jusqu’à 40 % dans certaines zones d’Extrême-Orient. En outre, dans un pays où le salaire minimum est inférieur au seuil de pauvreté, le phénomène des travailleurs pauvres est très répandu.

Toujours en 2011, la balance commerciale russe présentait un excédent de 101,2 milliards de dollars. Les principaux clients de la Russie étaient les Pays-Bas, l’Allemagne, la Chine et l’Italie. Ses principaux fournisseurs étaient la Chine, l’Allemagne, l’Ukraine, le Japon et les États-Unis. La France était son huitième fournisseur et son troisième fournisseur européen.

Conséquences directes de son excédent commercial structurel, la Russie est installée au quatrième rang mondial pour les réserves d’or et de change – derrière la Chine, le Japon et l’Arabie saoudite –, avec un stock de 518 milliards de dollars, et sa dette publique est très modérée puisqu’elle est contenue à 9 % du PIB.

Depuis 2006, grâce à la suppression totale du contrôle des changes, à la libre convertibilité du rouble et au développement de zone offshore ou à fiscalité attractive, les flux d’investissements directs étrangers ont progressé à un rythme soutenu, pour s’établir, en stock, à environ 500 milliards de dollars.

Après une décennie 1990-1999 difficile, compte tenu de la remise à plat des fondamentaux économiques et d’une certaine instabilité politique liée à l’éclatement de l’empire soviétique, qui s’est achevée par un état de cessation de paiement, la Russie a connu un taux de croissance moyen de 7 à 8 % par an entre 2000 et 2008. Elle a ensuite été durement touchée par la crise, avec une récession de 8 % en 2009, puis a renoué très rapidement à la croissance, autour de 4 % par an entre 2010 et 2012.

Alors que le Président Poutine, à l’instar des économistes, évalue à 5 % le taux de croissance nécessaire pour assainir l’économie russe, les derniers chiffres traduisent une atonie inquiétante. La situation s’est tellement détériorée que le spectre du scénario de 2008-2009 réapparaît : la crise mondiale et la chute des cours du pétrole avaient alors entraîné le pays dans le marasme. La croissance, déjà tombée à 3,4 % en 2012, a encore chuté à 1,1 %, au premier trimestre 2013, en glissement annuel. Malgré un taux de chômage toujours très faible, la production industrielle s’est contractée pour la première fois depuis 2009 et la consommation des ménages a subi un coup de frein. Le gouvernement a ramené sa prévision de croissance pour 2013 de 3,6 à 2,4 %, loin des taux enregistrés annuellement durant les deux premiers mandats de Vladimir Poutine, entre 2000 et 2008.

Le trend de croissance économique constaté ces derniers mois, sous la barre des 2 % en glissement annuel, peut être considéré comme normal eu égard aux réalités économiques actuelles.

Plusieurs facteurs impliquent une absence de risque de surchauffe et permettent d’envisager des changements structurels :

- les exportations stagnent ;

- l’évolution de la consommation s’avère étroitement corrélée à celle des revenus ;

- le taux de progression des salaires est similaire dans le secteur public et dans le secteur privé ;

- le niveau d’investissement demeure faible ;

- l’inflation s’est durablement stabilisée, à un niveau assez élevé, toutefois, entre 6 et 7 %, dans la mesure où la baisse constante de l’inflation monétaire est compensée par l’indexation des prix(48) ;

- le taux de change du rouble est relativement stable.

Les indicateurs-clés du FMI et des agences de notation sur la solidité financière des organismes de dépôt sont positifs :

- les ratios de levier, autour de 10 à 12 %, sont environ deux fois plus bas que dans les économies occidentales ;

- le marché financier russe n’est pas exposé au risque systémique qu’ont fait peser sur d’autres pays les institutions financières grecques, portugaises, irlandaises ou espagnoles(49) ;

- les ratios réglementaires sont fixés à des niveaux supérieurs à ceux imposés par les accords de Bâle I ;

- l’implication russe au plus haut niveau politique pour que le pays devienne partie prenante au système financier international se concrétise par des mesures tangibles, à l’instar de la libéralisation en cours du marché domestique des obligations.

Quant aux obligations souveraines, elles sont rémunérées à des taux intéressants pour les comptes nationaux : moins de 1 % pour les titres à dix ans. De fait, les excédents de la balance commerciale et les excédents des comptes publics qui en découlent limitent le risque de refinancement externe.

Dans ce contexte, la Russie se voit confrontée aux problématiques suivantes :

- le taux de change du rouble face aux autres devises étrangères reflète les prix du pétrole plus que la santé économique du pays ;

- le degré d’indexation des prix, dans les secteurs des monopoles naturels, nourrit une forte inflation, réduisant les profits disponibles pour l’investissement ;

- le fonctionnement administratif est défavorable au développement des affaires ;

- les budgets d’équipement subissent des coupes sévères ;

- les ressources consacrées à l’investissement à long terme sont limitées, d’autant que la réforme en cours des retraites fait baisser le taux d’épargne-retraite.

Les perspectives de croissance modérée de la Russie sont dues, notamment, à la faiblesse des sources potentielles de croissance.

L’atonie de la croissance chez les grands partenaires commerciaux de la Russie et la faible diversité des produits qu’elle propose à l’export contraignent la croissance des exportations. Sur la période 2011-2012, la croissance économique a été générée, pour l’essentiel, par l’expansion du crédit, les dépenses publiques et le renchérissement du prix du pétrole. En 2013, tous les autres moteurs économiques ont accusé un recul ; il n’y a donc aucune raison, pour l’heure, d’anticiper un taux de croissance aussi élevé que par le passé.

Historiquement, les dépenses mondiales en pétrole n’ont constitué plus de 7 % du PIB mondial que lors de la crise de 1979-80, provoquée par la révolution iranienne. La surchauffe avait alors conduit à l’escalade de l’inflation et, au milieu des années 1980, à une chute sensible de la demande de pétrole et du prix du baril.

La situation actuelle suggère que le « moteur pétrole » ne sera pas, à lui seul, en mesure de générer des taux de croissance stables et élevés. La forte dépendance de la Russie aux fluctuations sur le marché des hydrocarbures contraint la croissance des revenus et souligne le besoin de changements structurels.

Compte tenu de l’environnement économique mondial, un grand besoin d’investissements et de consommation se fait sentir. Il convient par conséquent d’améliorer les conditions d’investissement et de développer le secteur financier pour favoriser les emprunts privés.

La croissance actuelle est essentiellement générée par le secteur des services, qui, en Russie, est surtout :

- non exposé, puisqu’il s’agit de vente au détail et de services financiers ;

- poussé par des revenus et profits provenant d’autres secteurs.

Les services ne sauraient donc constituer, dans l’immédiat, une base de croissance durable pour la Russie et il faut s’attendre, dans les années à venir, à le voir reculer.

En 2012, deux facteurs ont contribué à une croissance rapide de la consommation des ménages :

- l’indexation des salaires sur les prix dans le secteur public et parapublic ;

- le boom des emprunts à la consommation, dont la part dans le pouvoir d’achat des ménages a atteint le niveau d’avant-crise.

En 2013, l’impact de ces deux facteurs va diminuant et le taux d’augmentation des dépenses des ménages s’en ressent : il se rapproche du niveau de progression des revenus dans le secteur privé, soit 3 à 4 % en glissement annuel.

Cette pente descendante de la croissance des dépenses de consommation a toutefois deux conséquences macroéconomiques positives :

- la réduction des importations ;

- l’amélioration de la compétitivité grâce à des salaires contenus.

Il n’en demeure pas moins que le respect de l’orthodoxie budgétaire met la Russie sur une trajectoire de réduction des dépenses publiques fédérales : la part de ces dernières dans le PIB devrait chuter de 21 à 18 % en seulement trois exercices budgétaires – entre 2012 et 2015 –, avec un effort essentiellement porté sur la masse salariale de l’État et les dépenses en faveur du développement économique. En effet, selon le ministère du développement économique, le maintien de la structure budgétaire actuelle rendrait très incertain tout espoir de croissance élevée, c’est-à-dire supérieure à 6 %.

Mais une question reste à trancher : convient-il d’investir ou d’accumuler les recettes excédentaires ? jusqu’à quel point est-il nécessaire d’accumuler des rentes pétrolières ?

Le taux d’investissement n’est que de 20 % environ, contre un étiage de 30 à 40 % dans les autres puissances émergentes.

Les investissements en fonds propres dans le capital des grandes et moyennes entreprises ont atteint environ 14 % du PIB. Les dynamiques d’investissement sont toutefois hétérogènes selon les secteurs :

- stabilité dans le secteur public ;

- en diminution dans le secteur des matières premières ;

- en hausse dans le secteur privé, notamment dans la production gazière et pétrolière(50).

La part des investissements financés sur fonds propres a grimpé de 36 à 45 % entre 2010 et 2012 – de 5,4 à 6,4 % du PIB. Les tendances à la hausse des investissements dans le secteur privé et à l’usage des fonds propres pour les financer suggèrent que le climat du pays est à la stabilisation de l’investissement.

D’un autre côté, le bon niveau de retour sur investissement constaté traditionnellement en Russie ne suffise pas pour attirer plus d’investissements directs étrangers. En 2012, au contraire, le montant des investissements directs étrangers se chiffrait à 1,4 % du PIB, contre 3,7 % en 2007-2008. Toutefois, si la propension à l’investissement des acteurs privés continuait d’augmenter, les flux de capitaux pourraient être redirigés vers la Russie.

Dans sa campagne présidentielle, Vladimir Poutine a beaucoup communiqué sur la nécessité d’améliorer la qualité de la formation et le niveau des qualifications, dans une optique de sortie de l’économie de rente et de montée en gamme de l’appareil productif.

Le secteur des hydrocarbures représente 28 % du PIB et 65 % des exportations, chiffres parfaitement stables depuis 2008. La part des ressources budgétaires fédérales provenant de la rente pétrolière a même bondi de 37 à 51 %.

Le taux de change du rouble dépend davantage du prix du pétrole que de la compétitivité de l’économie russe. Or, si la valeur du rouble reste stable, le déficit de la balance commerciale hors secteur pétrolier n’a jamais été aussi bas depuis 1990 – il frôle désormais 15 % du PIB –, au point que l’excédent commercial global a fondu de six septièmes, chutant à son plus bas niveau, à 2,5 %.

Le poids des ressources naturelles et hydrocarbures, particulièrement du pétrole, dans l’économie russe permet au pays d’obtenir de résultats exceptionnels en matière de comptes et d’endettement publics, au contraire de la quasi-totalité des autres membres du G20 :

- le pays présente un léger excédent budgétaire ;

- la dette publique rapportée au PIB est la plus faible du G8 et des BRICS.

Pour les années à venir, les réserves immenses en hydrocarbures et autres richesses minières ouvrent de bonnes perspectives de croissance à la Russie, entamées, toutefois, par la stagnation mondiale. En outre, la résilience de l’économie aux chocs pétroliers et financiers s’améliore manifestement. Si les arbitrages macroéconomiques des pouvoirs publics russes restent dictés par les anticipations sur le marché du pétrole, ils sont conscients de la nécessité de réduire la dépendance du pays aux hydrocarbures en diversifiant ses activités productives.

L’objectif du gouvernement est notamment de passer du 120e au 20e rang mondial, en cinq ans, dans le classement Ease of Doing Business de la Banque mondiale, alors que le rythme actuel des restructurations ne permettrait d’atteindre ce résultat qu’en dix à douze ans. Il s’agit d’ouvrir graduellement à l’investissement étranger les secteurs de la finance et des services.

La complexité du rapport de la Russie à l’Europe – et, plus généralement, à l’Occident – ne peut être comprise qu’en prenant en considération les trois dimensions internationales qui structurent sa politique étrangère :

- membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et du G8(51), elle entend continuer à jouer un rôle géostratégique de premier plan ;

- ancien foyer impérial, elle est jalouse de son statut de puissance régionale et s’efforce de conserver une relation politique et économique privilégiée avec son voisinage immédiat ;

- cofondatrice des BRICS, elle est résolue à utiliser ce regroupement comme contrepouvoir face aux vieilles puissances industrielles.

Cette matrice stratégique a fait florès depuis que la Russie s’est extirpée du marasme des années quatre-vingt-dix, qui s’était conclu, en 1998, par une quasi-banqueroute. Cela dit, si nombre de nos interlocuteurs russes ont regretté, voire vilipendé, la propension de l’Union européenne à vouloir imposer ses schémas politiques et sociaux, nous avons pu constater l’intérêt suscité par le modèle d’intégration économique qu’elle a su inventer.

De son côté, l’Europe reste méfiante vis-à-vis de la Russie, pays qui lui proche géographiquement et suscite par conséquent beaucoup d’attention et de réactions. En outre, les Européens, particulièrement les Français, ne comprennent pas le schéma patriote ou national qui structure encore aujourd’hui la pensée et la parole politiques russes.

Le 31e sommet annuel entre l’Union européenne et la Russie, qui s’est tenu les 3 et 4 juin à Iekaterinbourg(52) a mis en évidence la difficulté à lever les incompréhensions de fond qui perturbent les relations bilatérales.

La Russie, jusqu’à cette année, compte tenu de sa faible exposition aux marchés financiers européens, n’était pas particulièrement impactée par les crises des dettes souveraines européennes. À l’instar des autres grands émergents, elle n’a eu motif à intervenir, lors des sommets du G20 de Cannes puis de Los Cabos, que dans un souci de stabilisation globale et afin de souligner ce qui, de leur point de vue, peut être désigné comme le symptôme d’une mauvaise gestion économique et financière par les pouvoirs publics de l’Union européenne et de ses États membres.

La crise chypriote a bouleversé la donne, puisque les quelque 40 000 Russes expatriés sur l’île ont été les principales victimes de l’opération de sauvetage européenne : après un premier plan qui prévoyait de ponctionner l’ensemble des comptes bancaires, le MES de l’Eurogroupe a consenti une aide de 10 milliards d’euros – 9 milliards abondés par la Banque centrale européenne (BCE) et 1 milliards par le MES –, à condition que le gouvernement chypriote restructure en profondeur son système bancaire et impose une taxe allant jusqu’à 60 % sur les seuls dépôts supérieurs à 100 000 euros(53). Ce plan a été adopté par le parlement chypriote, le 30 avril 2013, à une très courte majorité. Or, d’après l’agence de notation Moody’s, les ressortissants russes disposaient de quelque 31 milliards de dollars placés dans les banques chypriotes – un montant qui, selon d’autres évaluations, approcherait même 50 milliards de dollars.

Après avoir envisagé de se substituer à l’Union européenne en engageant un vaste plan alternatif reposant sur l’octroi d’un nouveau crédit de 10 milliards d’euros en contrepartie d’actifs chypriotes dans les secteurs bancaire et gazier, la Russie a finalement décidé de n’intervenir qu’en soutien du plan de sauvetage européen. Elle a ainsi revu les conditions du prêt de 2,5 milliards de dollars qu’elle avait accordé à l’île en 2011 et dont le remboursement était prévu d’ici à 2016. Cette solution médiane a été motivée par le pragmatisme, les autorités russes étant conscientes de la difficulté qu’elles auraient à récupérer leurs fonds.

L’élite économique russe s’est sentie spoliée, d’autant que ses placements massifs dans les banques chypriotes n’étaient, pour l’essentiel, pas motivés par le dessein de blanchir de l’argent provenant de l’économie parallèle mais par le souci de mettre des avoirs familiaux en sécurité, en bénéficiant d’un environnement juridique et technique fiable, compte tenu de l’appartenance de Chypre à l’Union européenne.

La facilité relative avec laquelle l’Union européenne a désamorcé la crise(54) a néanmoins mis en évidence la volonté de la Russie de rapatrier des avoirs qui avaient été placés à l’étranger – notamment dans les secteurs financier et immobilier – au détriment de la modernisation de l’économie nationale.

La Russie, au final, se montre moins préoccupée par les conséquences de la crise chypriote que par le spectre d’une croissance molle, avec une deuxième année de récession dans la zone euro.

En 2011, la Russie était le troisième partenaire commercial de l’Union européenne, après les États-Unis et la Chine :

- les Européens y avaient exporté pour 66 milliards d’euros, soit 6 % de ses exportations, la Russie figurant au quatrième rang de ses clients ;

- les Européens y avaient importé pour 115 milliards d’euros, soit 9,6 % de ses importations, la Russie figurant au troisième rang de ses fournisseurs.

La Russie est surtout le premier fournisseur de produits énergétiques de l’Union européenne. Elle couvre notamment plus de 25 % de la consommation européenne de pétrole et de gaz. Effet de miroir, l’Europe est aussi la première destination d’exportation des produits énergétiques russes : 88 % de ses exportations de pétrole, 70 % de ses exportations de gaz et 50 % de ses exportations de charbon sont destinées à notre marché. L’exportation des matières premières au sens large vers l’Union européenne pèse pour près de 40 % dans le budget russe.

Les relations commerciales sont aussi sous-tendues par des relations bilatérales académiques et scientifiques soutenues, au bénéfice des deux partenaires, compte tenu, d’un côté, de l’excellence scientifique des institutions de recherche russes, mais de l’autre, de leur grande faiblesse en matière de continuum recherche-innovation.

Malgré la stagnation – voire la récession – de l’économie européenne, nos échanges commerciaux avec la Russie, ces dernière années, ont continué de croître à un rythme exceptionnel. Mais le développement des affaires est handicapé par la corruption, surtout pour les petites et moyennes entreprises – qu’elles soient étrangères ou russes, d’ailleurs –, les grandes entreprises bénéficiant plus facilement d’une protection dans la sphère politique.

La Russie est par ailleurs l’un des pays tiers les plus investis dans les programmes-cadres de recherche et développement technologiques (PCRDT) pluriannuels de l’Union européenne : plus de 400 équipes de recherche russes ont participé aux travaux financés par le 7e PCRDT – notamment dans le champ énergétique –, qui s’achèvera le 31 décembre 2013. L’année 2014, premier exercice du 8 PCRDT, rebaptisé « Horizon 2020(55) », sera l’année de la science entre la Russie et l’Union européenne.

Enfin, signalons que les flux des échanges d’étudiants sont insuffisants.

Malgré son adhésion à l’OMC l’été dernier, la Russie continue de dresser de multiples barrières commerciales contre les produits européens, visant soit l’ensemble des États membres, soit certains d’entre eux, afin de les diviser.

Sur le marché automobile – premier visé car premier poste de ses importations en provenance de l’Union européenne(56) –, elle a introduit une « taxe de recyclage » applicable aux producteurs européens, s’élevant à quelque 6 %, alors qu’elle s’était au contraire engagée à réduire d’au moins 25 %, dans un premier temps, les taxes sur les véhicules importés. En outre, depuis le 16 juin 2013, des droits antidumping frappent les véhicules commerciaux légers des constructeurs Fiat, Volkswagen et Mercedes, aux taux de 26 % pour le premier et de 29,6 % pour les deux autres. Bien que l’Union européenne ait entamé une procédure à ce sujet devant l’OMC, il n’a pas été possible d’en débattre lors du sommet UE-Russie d’Iekaterinbourg.

D’autres mesures commerciales défensives pénalisent les exportations européennes, notamment dans les secteurs du papier ou de l’agroalimentaire.

Un projet d’accord de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et la Russie, qui vise à se substituer à celui signé le 24 juin 1994 à Corfou, est en négociation depuis 2008. Il a vocation à régir la coopération politique, le dialogue sectoriel ainsi que les relations commerciales et d’investissement mais tarde à être conclu, du fait d’un désaccord sur la philosophie du document. Dans un premier temps, la Russie a temporisé pour une raison objective, l’attente de son admission au sein de l’OMC ; elle préfère depuis lors attendre d’évaluer l’impact de son adhésion et d’absorber les contraintes qui en découlent avant de libéraliser les accès réciproques aux marchés.

Les Russes sont favorables à l’établissement d’un simple accord-cadre, à compléter ultérieurement par des accords sectoriels, tandis que l’Union européenne veut un accord global, couvrant l’ensemble des relations bilatérales, y compris les aspects commerce et investissement, incluant l’énergie. Il s’agit d’une ligne rouge pour l’Union européenne, représentée dans cette négociation par la Commission européenne : découpler les négociations entre les différents secteurs serait préjudiciable à la cohérence de la position européenne – et à sa cohésion interne. Il est de notre intérêt de négocier dans le cadre d’un paquet, d’un accord couvrant la relation dans sa globalité.

S’agissant du volet commerce et investissements, la Russie soutient qu’elle ne saurait accorder à l’Union européenne des concessions supplémentaires à ce qui a été négocié en vue de son accession à l’OMC ; elle soupçonne les Européens de chercher à obtenir ce qu’ils ont échoué à gagner dans ce cadre. De son côté, l’Union européenne souligne qu’elle n’attend aucune concession supplémentaire en termes d’accès au marché, mais des progrès sur l’amélioration du climat des affaires, en particulier la protection des droits de propriété intellectuelle, les normes et les règlements techniques(57).

En mars 2013, José Manuel Barroso a fait part de sa volonté de conclure l’accord en 2014, c’est-à-dire d’ici à la fin de son mandat à la présidence de la Commission européenne, mais il est aléatoire d’anticiper une date d’adoption définitive – pour mémoire, les négociations d’adhésion de la Russie à l’OMC ont pris dix-huit ans.

Lors du sommet annuel UE-Russie, à Iekaterinbourg, si Russes et Européens ont échoué à s’accorder sur une déclaration conjointe à propos de la reprise de la négociation de cet accord, ils ont effectivement souligné la volonté commune de conclure cette négociation d’ici à l’échéance de 2014, année qui marquera les vingt ans de l’accord de partenariat et de coopération actuellement en vigueur. Dans son intervention publique, Vladimir Poutine a repris cet objectif à son compte mais en invitant la Commission européenne à engager des contacts directs et étroits avec l’Union douanière et la Commission économique eurasiatiques(58). Le mandat de négociation de la Commission européenne ne porte cependant que sur une négociation avec la seule Russie ; les contacts informels noués avec le regroupement eurasiatique, au niveau technique, ne sauraient aller au-delà, faute de violer ce mandat, la Russie l’a parfaitement compris.

Le partenariat pour la modernisation, lancé à l’occasion du sommet bilatéral UE-Russie de Rostov-sur-le-Don des 31 mai et 1er juin 2010, englobe l’ensemble de la coopération de l’Union européenne avec la Russie et fournit, à l’occasion de chaque rencontre de haut niveau, un sujet de congratulations mutuelles. Apprécié par la partie russe, il constitue le versant radieux de nos relations bilatérales : manifestation d’une collaboration concrète de terrain et outil de convergence réglementaire – notamment en matière commerciale – et législative, il contribue à réduire la visibilité des inévitables divergences politiques. Cet accord sert en outre de canal pour apporter, avec le tact nécessaire dans un pays très sensible aux ingérences étrangères, notre appui à une société civile en cours de maturation et d’autonomisation.

L’ambassadeur de Russie à Paris, Alexandre Orlov, a pourtant souligné que le piétinement des relations entre l’Union européenne et à la Russie est dû à l’absence d’objectif stratégique commun et a émis de ses vœux la constitution d’« un espace économique commun sur le modèle du traité de Rome, en vue d’établir la libre circulation des biens et services ».

S’agissant de l’énergie, l’Union européenne poursuit deux objectifs dans ses relations avec la Russie :

- un marché européen de l’énergie ouvert et interconnecté ;

- la sécurité des approvisionnements par la diversification des sources et des routes d’acheminement en hydrocarbures.

Le troisième paquet énergie, adopté par l’Union européenne en 2009, concerne notamment, dans le domaine du gaz, la séparation(59) effective entre, d’une part, la gestion des réseaux de transport et, d’autre part, les activités de fourniture et de production. Cette clause ainsi que celle de l’accès des tiers au réseau européen cristallisent les critiques de la partie russe, qui les juge discriminatoires et dirigées contre le gazier Gazprom, détenteur du monopole de l’exportation du gaz russe. Il convient de noter que les difficultés du dialogue énergétique avec la Russie sont renforcées par les relations très tendues avec certains États membres, qui ont une approche maximaliste de ce dossier.

Contrairement à ce que la Russie s’est efforcée de faire, il lui est impossible de négocier bilatéralement avec chacun des États membres dominants de l’Union européenne, dans la mesure où la réglementation communautaire s’impose aux législations énergétiques domestiques.

Par ailleurs, la direction générale concurrence de la Commission européenne a ouvert, en septembre 2012, une enquête contre le monopole semi-public de Gazprom, pour abus de position dominante et entrave à la concurrence de certaines de ses filiales d’Europe centrale.

Aux fins d’améliorer sa sécurité énergétique, l’Union européenne cherche depuis des années à diversifier ses sources d’approvisionnement en gaz, regardant du côté de la mer Caspienne et, dans une moindre mesure, du Proche-Orient – plus précisément de l’Azerbaïdjan et du Turkménistan, voire du Kurdistan irakien et de l’Iran. Dans cette optique, elle soutenait le projet de gazoduc Nabucco, qui aurait permis de s’approvisionner auprès de ces pays en faisant transiter le gaz par la Turquie, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et l’Autriche.

En réponse, les Russes promeuvent le « South Stream » – gazoduc traversant la mer Noire, qui devrait être opérationnel dès 2014 –, militant pour que celui-ci obtienne le statut de « projet prioritaire d’intérêt européen ». La Commission européenne objecte que ce projet entraînerait certes une diversification des routes d’acheminement mais non des sources d’approvisionnement, au bénéfice du gaz russe.

En définitive, le consortium international exploitant le gigantesque gisement de Shah Deniz(60) a sélectionné, le 28 juin 2013, le tracé alternatif à Nabucco dans le « corridor sud-européen » : le gazoduc transadriatique (TAP(61)), qui passera par la Turquie, la Grèce, l’Albanie et l’Italie. Plus court et moins cher que Nabucco, le TAP pourra supporter un flux de 10 milliards de barils par an à partir de 2019, en attendant une seconde tranche de travaux en vue de faire passer cette capacité à 16 milliards de mètres cubes par an.

Moscou s’oppose également avec virulence au projet de gazoduc transanatolien (TANAP(62)), qui constituera le premier maillon du « corridor sud-européen » pour acheminer le gaz d’Azerbaïdjan et du Turkménistan jusqu’à l’entrée des tuyaux du TAP.

Selon toute probabilité, la stratégie russe de négociation séparée d’un accord d’exemption générale pour les projets russes pilotés par Gazprom est donc plus que jamais vouée à l’échec.

Le 19 avril, le ministre russe de l’énergie, Alexandre Novak, et le commissaire européen chargé de l’énergie, Günther Oettinger, ont signé une feuille de route de coopération énergétique entre la Russie et l’Union européenne à l’horizon 2050, qui ne contient aucune disposition contraignante mais traduit l’existence d’un objectif stratégique commun : mettre en place, d’ici au milieu du XXIe siècle, un « espace énergétique paneuropéen », dans lequel les infrastructures et les marchés ouverts et concurrentiels seront interconnectés.

Pour ce faire, l’Europe et la Russie devront :

- faire converger leurs législations ;

- rapprocher leurs systèmes énergétiques ;

- lever les obstacles commerciaux dans le secteur des hydrocarbures.

La plupart du document est consacré au commerce gazier. Il dispose en particulier que l’Union européenne informera la Russie des modifications de sa demande de gaz et des mesures qu’elle prendra pour réduire sa consommation d’hydrocarbures. Moscou pourra ainsi éviter des investissements dans des actifs risquant de s’avérer non rentables.

Par ailleurs, il prévoit :

- avant 2020, le soutien aux grands projets d’infrastructure gazière que les parties reconnaîtront comme « projets prioritaires d’intérêt commun » ;

- avant 2030, le rapprochement de la régulation des marchés ;

- avant 2050, l’élimination de toutes les barrières commerciales.

Enfin, des potentialités de coopération en matière de rendement énergétique et de développement d’énergies renouvelables sont identifiées. Le renchérissement des prix de l’électricité stimule en effet le développement de programmes en vue d’inciter entreprises et consommateurs individuels à économiser l’énergie. Le marché de l’énergie russe, à cet égard, offre d’excellentes opportunités.

La Russie proteste aussi contre le régime des visas de l’Union européenne vis-à-vis de ses ressortissants, qu’elle juge trop sévère. D’après les services de notre ambassade à Moscou, la situation, depuis quelques années, s’est pourtant nettement améliorée pour les touristes, alors même que l’Union européenne peut légitimement craindre l’afflux d’immigrants économiques, notamment de ressortissants de pays d’Asie centrale.

Quoi qu’il en soit, un processus de révision de l’accord de 2006 sur la facilitation des visas est en cours.

De surcroît, le sommet bilatéral annuel UE-Russie de Bruxelles, en décembre 2011, a adopté une liste d’« étapes communes » dont la mise en œuvre ouvrira la voie à une négociation sur la levée des visas de court séjour. L’ouverture de cette négociation ne sera toutefois pas automatique lorsque les « étapes communes » auront été mises en œuvre ; elle dépendra d’une décision politique du Conseil, qui n’est pas garantie.

D’un autre côté, les compagnies aériennes européennes seront théoriquement interdites de vol en Russie, à partir du 1er juillet 2013, si elles ne fournissent pas aux autorités russes les données personnelles de leurs passagers, dites « PNR(63) ». Cette mesure, réclamée par Moscou dans le cadre de sa lutte contre le terrorisme, aurait des répercussions négatives sur la mise en place d’un espace commun de mobilité des personnes. En outre, si les compagnies aériennes s’y soumettaient, elles se mettraient en contravention avec le droit communautaire, qui protège les données personnelles et encadre leur transfert vers des pays tiers.

La Commission européenne, le 3 juin 2013, a demandé un moratoire sur ce projet de la Russie, à propos duquel, par ailleurs, la Commission des libertés civiles du Parlement européen a exprimé ses inquiétudes le 10 juin 2013.

Un accord simplifiant le régime des visas serait imminent – il ne reste plus à régler que des aspects techniques –, pour peu que la Russie abandonne ses prétentions concernant les PNR.

Les relations entre la Russie et les anciennes républiques soviétiques ont suivi un mouvement de balancier : une fois passée la soif d’émancipation consécutive à l’éclatement de l’empire, qui fut commune à toutes les nations périphériques, la vitalité des échanges économiques et la réalité des liens culturels et linguistiques s’impose ici et là, suscitant des rapprochements plus ou moins résolus.

La volonté de structurer des liens économiques entre anciens membres du Conseil d’assistance économique mutuelle(64) (COMECON) s’est manifestée dès 2000, avec la création de la Communauté économique d’Eurasie (CEEA), projet d’union douanière à cinq États(65). Cet ensemble est toutefois resté, jusqu’à présent, une coquille vide.

Le 4 octobre 2011, alors premier ministre, Vladimir Poutine a appelé à une relance de cette dynamique, avec le projet d’Union eurasiatique, « modèle d’unification puissant et supranational capable de devenir l’un des pôles du monde contemporain ». Il s’agit d’institutionnaliser de nouveaux liens dans une optique double :

- constituer un partenariat susceptible de rivaliser avec les autres grands pôles de puissance économique et ainsi de peser dans la bataille de la mondialisation ;

- offrir à ces pays une alternative par rapport au rapprochement avec l’Union européenne, vers laquelle il s’avère difficile d’exporter des biens de consommation, compte tenu des normes techniques très restrictives qui y ont cours.

À cet effet, l’union douanière signée en janvier 2012 entre la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan(66) prévoit l’entrée en vigueur d’un code douanier commun aux trois pays afin de former un espace économique uni.

La deuxième étape consistera – normalement en 2015 – à passer à une réelle union économique, en s’inspirant du modèle de l’Union européenne, avec, en particulier, la nécessité de « muscler » la Commission économique, investie du pouvoir exécutif.

Si l’idée d’Union eurasiatique progresse indéniablement, elle est handicapée par des limites intrinsèques qui rendent hasardeuse cette comparaison avec l’Union européenne.

Outre leur faible poids politique, les partenaires que la Russie a agrégés autour d’elle sont d’une échelle économique et démographique négligeable par rapport à sa propre puissance ; ils furent et demeurent ses satellites.

En outre, gouvernés par des régimes de nature autoritaire, ils se montreront peu enclins à abandonner une partie de leurs prérogatives au profit d’une entité supranationale ; le degré d’intégration de l’Union eurasiatique ne pourra par conséquent pas atteindre celui de l’Union européenne.

Bref, pour eux, il s’agit surtout d’une opportunité d’accès à l’immense marché russe.

Les deux autres pays de la CEEA, le Kirghizstan ou le Tadjikistan, ont également manifesté leur intérêt pour cette démarche, de même que l’Arménie – le Kirghizstan, dans lequel le Président Poutine s’est rendu le 28 mai 2013, s’apprêterait à adhérer formellement à la nouvelle union douanière.

L’Union eurasiatique, dans l’esprit de son créateur, a vocation à s’élargir aussi à tous les voisins de la Russie, notamment du côté de l’Europe orientale – les pays baltes, membres de l’Union européenne depuis le 1er mai 2004 ne sont évidemment pas concernés, et l’Ouzbékistan, qui faisait initialement partie de la CEEA mais y a suspendu sa participation, a déclaré ne pas être intéressé par le projet.

L’Ukraine, compte tenu de sa taille et des liens noués avec l’Union européenne dans le cadre du Partenariat oriental, constitue la cible principale de Moscou. Dans un premier temps, elle a refusé d’intégrer cette entité, préférant privilégier le renforcement de ses liens avec l’Europe ; elle en est cependant membre observateur depuis le 23 avril 2013, sans pour autant considérer cet acte comme une alternative radicale à son intégration européenne – d’autant qu’elle s’apprête à signer un accord d’association.

Ce projet de partenariat concurrent n’est pas négligeable pour les Européens car les pays concernés disposent d’une superficie immense, de 33 % des réserves de gaz mondiales ainsi que du contrôle stratégique sur l’océan Arctique, la mer Caspienne et la mer Noire. Cependant, selon une estimation du FMI de 2011, la compétitivité économique de cet espace eurasiatique est à relativiser : son PIB s’élève seulement à 2,56 milliards de dollars pour 288 millions d’habitants, quand celui de l’Union européenne atteint 17 milliards de dollars pour 500 millions d’habitants.

Le concept d’eurasiatisme, remis au goût du jour par le Président Poutine, est apparu dans les années vingt. Ce fut alors une « idéologie de secours », très populaire parmi la jeunesse libérale de la population russe émigrée, qui y voyait une alternative au modèle bolchevique comme à la société occidentale.

Mais l’Union eurasiatique répond aussi – et peut-être surtout – à une logique politique d’endiguement. C’est un projet très personnel de Vladimir Poutine, dont l’avenir à dix ans est assez imprévisible mais qui, en tout état de cause, sera porté avec détermination par la présidence. Il convient donc d’en tenir compte dans l’appréciation des rapports entre l’Union européenne et la Russie.

La Russie a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne pouvait plus négocier seule certains points de l’accord de partenariat et de coopération avec l’Union européenne, qui seraient désormais de la compétence de la Commission économique de l’Union eurasiatique ou de la communauté douanière sous-jacente. Même si ces entités n’ont pas encore noué de relations officielles avec le reste du monde, il faut donc en tenir compte avec pragmatisme.

L’Union eurasiatique donne aussi une base à un raisonnement idéologique selon lequel l’Union européenne ne constituerait pas le modèle économique et politique absolu : si l’universalité des droits de l’Homme est reconnue, ils ne sont pas forcément interprétés uniformément.

La prospérité de l’Union européenne étant indispensable à la bonne santé de la Russie, l’idée est d’emprunter au modèle bruxellois sans le calquer trait pour trait, afin de créer un espace de Lisbonne à Vladivostok, régi par des négociations d’égal à égal entre deux espaces économiques l’espace eurasiatique, plutôt que dans le cadre d’une confrontation inégale entre un pays isolé et un ensemble régional.

La Russie est également animée par la volonté de faire obstacle à la pression exercée à ses frontières par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), qui, après la chute de l’Union soviétique, a très rapidement intégré la totalité de ses anciens satellites centre-européens. La défiance vis-à-vis des « révolutions de couleur » – porteuses de changements de régime soupçonnés, depuis Moscou, d’être suscités à partir de l’étranger –, procède de ce raisonnement.

L’intervention de la Russie dans le conflit territorial entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan à propos du Haut-Karabakh ou encore les mouvements russophiles de sécession de parties des territoires de la Moldavie et de la Géorgie(67) – Transnistrie pour la première, Abkhazie et Ossétie du Sud pour la seconde – s’expliquent par cette crainte.

Le cas de la Géorgie est éclairant. Historiquement, la Russie a trois capitales : Moscou, Saint-Pétersbourg et Sotchi. Or la frontière géorgienne se situe à seulement sept kilomètres de Sotchi – où seront organisés les Jeux olympiques d’été de 2014. La quasi-annexion de l’Abkhazie permet à la Russie de sécuriser son territoire en repoussant la frontière d’un État potentiellement hostile, dans la mesure où le gouvernement précédent avait formulé la volonté de rejoindre l’OTAN.

De son côté, l’Europe craint de voir surgir un nouvel empire russe dans l’ex-espace soviétique. Ces deux phobies symétriques conduisent à créer un climat défavorable à la bonne entente entre Européens et Russes.

À cet égard, au moins du point de vue russe, un espace eurasiatique intégré pourrait jouer un rôle de tampon, ayant une vertu stabilisatrice entre l’OTAN et la Russie, qui craint par-dessus tout qu’un système de défense anti-missiles déployé à ses frontières ne sape son statut de puissance nucléaire.

Sur la guerre civile syrienne, les positions de l’Union européenne et de la Russie sont antagonistes, et les derniers événements tendent encore à renforcer les divergences d’analyses et de comportement face au régime de Bachar el-Assad.

En effet, le 27 mai 2013, au terme d’âpres discussions entre les vingt-sept ministres des affaires étrangères, l’Union européenne a non seulement reconduit pour un an, à partir du 1er juin, ses sanctions à l’encontre du pouvoir syrien, mais aussi levé l’embargo communautaire sur les armes destinées à l’opposition. Le dossier est renationalisé : le choix de lever ou non cet embargo est désormais de la responsabilité des États membres ; il s’agit donc d’une position médiane.

« Les États membres peuvent prendre des décisions différentes mais cela ne signifie pas que nous avons perdu notre capacité à avoir une politique étrangère commune », a pourtant déclaré Catherine Ashton. Dans une déclaration commune, les États membres se sont au demeurant engagés à ne pas livrer d’équipements létaux, en attendant un réexamen de la situation, après le 1er août 2013. Il s’agissait clairement de donner aux États membres la flexibilité nécessaire pour réagir rapidement en cas de modification de la situation sur le théâtre des combats.

C’est précisément ce qui vient de se passer : les présomptions convergentes de l’utilisation de gaz sarin pourrait conduire la France et certains de ses partenaires européens – voire les États-Unis, le Président Barack Obama ayant parlé, au sujet de l’usage d’armes biologiques, de « ligne rouge à ne pas franchir » – à ouvrir les vannes des livraisons d’armements au profit de l’opposition syrienne, dès lors que la traçabilité des filières d’acheminement sera assurée, afin de s’assurer que les matériels seront bien gérés par l’Armée syrienne libre (ASL) et qu’ils ne pourront être récupérés par des groupes anti-occidentaux.

Dans une communication du 24 juin 2013(68), la Commission européenne identifie quatre objectifs :

- soutenir la recherche d’une solution politique durable ;

- prévenir toute déstabilisation régionale ;

- s’occuper des problèmes humanitaires des populations locales ;

- répondre aux conséquences du conflit sur l’Union européenne.

Dès le lendemain de la timide inflexion de la politique européenne, les autorités annonçaient le déblocage de la livraison à Damas de missiles sol-air – dont le déploiement et la mise en condition opérationnelle prendra plus d’un an –, afin de signifier clairement aux Occidentaux qu’elles s’opposent à toute velléité d’intervention étrangère. Le Président Poutine semble cependant être revenu sur cette décision, afin de ne « pas rompre l’équilibre des forces dans la région ».

Outre les liens économiques et stratégiques qui l’unissent depuis des décennies à la Syrie – client traditionnel de son conglomérat militaro-industriel depuis l’ère soviétique –, la Russie craint que la chute du régime entraîne une mainmise de l’islam sunnite radical sur le Proche-Orient, avec un risque de contagion à sa périphérie et sur son territoire même, notamment en Tchétchénie, au Daghestan et dans le reste du Caucase du Nord.

Au sommet d’Iekaterinbourg, les présidents José Manuel Barroso, Herman Van Rompuy et Vladimir Poutine ont constaté la persistance de leur désaccord et n’ont pu qu’apporter un soutien commun à la conférence de Genève II. Les États-Unis en ont acté le principe le 8 mai 2013 mais sa tenue a déjà été plusieurs fois reportée et il semble désormais improbable qu’elle soit organisée cet été.

De même, au sommet du G8 de Lough Erne, en Irlande du Nord, les 17 et 18 juin 2013, les grandes puissances ont pris acte de l’impasse à propos de la Syrie, compte tenu du fossé entre les analyses de la Russie d’un côté, des pays occidentaux de l’autre, au point que le premier ministre canadien, Stephen Harper, a parlé de « G7+1 » pour caractériser cette rencontre. Les huit chefs d’État et de gouvernement se sont tout de même dits « déterminés à travailler ensemble pour arrêter l’effusion de sang […] et soutenir le peuple syrien à établir la paix et la stabilité par des moyens politiques » et se sont entendus sur le déblocage d’1,5 milliard de dollars supplémentaires pour répondre aux besoins humanitaires en Syrie et dans les pays voisins impactés accueillant des cohortes de réfugiés.

La législation fédérale russe sur les organisations non gouvernementales, entrée en vigueur le 21 novembre 2012, constitue l’un des principaux points d’incompréhension actuels dans les relations entre l’Union européenne et la Russie. Les organisations non gouvernementales exerçant des activités politiques et bénéficiant d’un financement étranger sont désormais soumises à un régime juridique particulier qui prévoit, en cas d’infraction, de lourdes amendes et des peines de prison. Elles sont notamment obligées de se faire enregistrer comme « agents étrangers », ce qui sonne comme une référence à l’époque soviétique.

De multiples enquêtes et inspections administratives ont été diligentées dans tout le pays, à l’encontre des petites comme des grandes organisations non gouvernementales. Certaines d’entre elles, jugeant qu’elles ne peuvent plus travailler convenablement, s’apprêtent à se dissoudre ou à fermer leurs bureaux en Russie.

Le ministère russe de la justice a annoncé, le 25 juin 2013, que les activités de l’organisation non gouvernementale Golos, spécialisée dans la surveillance de la régularité du cadre électoral et des opérations de vote, était suspendues pour six mois. Golos avait déjà été condamnée, le 25 avril, à une amende de 7 400 euros pour avoir refusé de se faire enregistrer comme « agent étranger ».

L’Union européenne est aussi préoccupée par l’adoption à la Douma, le 11 juin 2013, d’une loi fédérale relative à la « propagande de relations sexuelles non traditionnelles à l’égard des mineurs ». Cette loi, qui institue une infraction administrative passible de lourdes amendes pour les particuliers et les organisations non gouvernementales, tend, en réalité, à renforcer la discrimination contre les homosexuels, en contravention des engagements nationaux et internationaux pris par la Russie, signataire de la Convention européenne des droits de l’Homme. Dans le même esprit, la Douma a approuvé en troisième lecture, le 21 juin 2013, une loi fédérale interdisant l’adoption d’enfants russes par les couples homosexuels ou les célibataires dans les pays ayant légalisé les unions entre couples de même genre.

D’autres motifs de crispation portent sur le renforcement de l’encadrement et de la répression des manifestations publiques, et sur les pressions exercées sur les opposants politiques ou les activistes associatifs.

L’affaire des Pussy Riot arrêtées après avoir effectué un happening punk dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou, est emblématique du décalage de valeurs entre la Russie et l’Union européenne. Les trois jeunes femmes ont en effet été condamnées, le 17 août 2012, à deux ans de détention en camp pour « vandalisme motivé par la haine religieuse ». Alexandre Romanovitch, vice-président de la Commission des affaires internationales de la Douma et membre du parti social-démocrate autorisé Russie juste, que nous avons rencontré à Moscou, a convenu que, si l’opinion publique juge très majoritairement répréhensible cette action des Pussy Riot et attendait une sanction, le tribunal a tout de même eu la main lourde… Au demeurant, depuis l’affaire, en mai 2013, le parlement russe a adopté une loi contre les actes portant atteinte aux convictions religieuses, lesquels sont désormais passibles d’une peine inférieure à celle qui a été prononcée dans le cas particulier des Pussy Riot.

Plusieurs institutions publiques comme le Conseil présidentiel des droits de l’Homme, la Chambre sociale ou le Médiateur des droits de l’Homme œuvrent néanmoins comme relais entre le pouvoir et la société civile. Des progrès concrets ont été constatés en matière de respect des droits de l’Homme :

- assouplissement des mesures de détention provisoire pour les personnes soupçonnées pour la première fois de délits à caractère économique ;

- prolongement du moratoire sur la peine de mort ;

- ratification du protocole n° 14 à la Convention européenne des droits de l’Homme, relatif aux règles procédurales présidant à son contrôle.

Si le sommet d’Iekaterinbourg s’est révélé parfaitement stérile sur ce sujet, le président Poutine, au Forum économique de Saint-Pétersbourg, le 21 juin 2013, a annoncé une amnistie sous condition des personnes primo-délinquantes emprisonnées pour des crimes économiques, afin d’améliorer le climat des affaires et ainsi de contribuer au soutien à la croissance.

II. LA PRÉSIDENCE RUSSE DU G20 DOIT ETRE SAISIE COMME UNE OPPORTUNITÉ POUR RÉAFFIRMER LA COMMUNAUTÉ DE DESTIN ENTRE LES ÉCONOMIES EUROPÉENNE ET RUSSE

Comme nous l’a expliqué le vice-ministre des finances Serguei Storchak, la France et la Russie ont entamé leurs présidences de façons très différentes : la France s’était d’emblée fixé pour ambition de s’intéresser au système économique mondial, tandis que la Russie, cette année, cherche à faire émerger des solutions à ses problèmes internes – certains d’entre eux étant partagés avec d’autres membres de la communauté internationale, d’autres lui étant spécifiques.

De ce point de vue, la préoccupation majeure de la Russie est l’atonie de la croissance, plus précisément la nécessité de trouver les moyens de financer la croissance économique malgré la persistance des tensions budgétaires et des difficultés des pouvoirs publics pour financer des investissements à long terme.

Cette thématique, il faut en convenir, est particulièrement adaptée à la situation de l’Union européenne et de la zone euro, partie du monde la plus frappée par la chute de la croissance. Au quatrième trimestre 2012, elle a même subi un recul de 0,6 % de son PIB, soit la récession la plus marquée depuis 2009, année de déprime mondiale. Ce mouvement n’a épargné aucun pays : moins 0,3 % pour la France, moins 0,6 % pour l’Allemagne et même moins 0,9 % pour l’Italie, par exemple.

La Russie, comme le Mexique, nous l’avons vu, et l’ensemble des autres pays du G20, a salué l’énergie de la présidence française, qualifiée par l’ambassadeur à Paris, Alexandre Orlov, de « belle présidence, qui a donné des impulsions qui perdurent ».

La Russie, quoique également animée par l’envie de faire de son sommet une vitrine internationale et un rendez-vous prestigieux rappelant à son opinion publique le passé glorieux de l’Union soviétique sur la scène internationale, aborde l’exercice de façon radicalement différente, avec une ligne de conduite inébranlable : plutôt que de chercher à ouvrir une multitude de fronts de négociation, se montrer efficace sur le « cœur de métier » ou l’« ADN du G20(69) », à savoir les questions purement économiques et financières, en exploitant au maximum la latitude laissée à la présidence pour organiser les travaux préparatoires conditionnant les orientations délivrables lors du sommet.

À quelques rares rendez-vous près, le ministère des finances est le seul à être impliqué dans la préparation du G20. C’est ainsi que les Russes ont pris le parti :

- de renoncer purement et simplement à la filière agriculture(70) – hormis une conférence et un séminaire –, ouverte par la France avec un certain succès puis reprise par le Mexique, qui a pourtant permis de traiter des problèmes impactant lourdement les équilibres économiques mondiaux ;

- de s’opposer à la tenue d’une réunion des ministres des affaires étrangères, innovation mexicaine(71) qui, du point de vue russe, empiète sur les prérogatives du G8, risque de « gâcher la bonne volonté politique en injectant des sujets controversés, susceptibles de susciter des confrontations » et, surtout, « constitue un attentat contre les prérogatives du Conseil de sécurité », selon le diplomate russe Vadim Loukov ;

- de faire baisser en intensité le travail de la filière emploi et travail, qui, outre quatre rendez-vous de la task force dédiée, ne fera plus l’objet, au niveau ministériel, que d’une session, les 18-19 juillet 2013, comprenant une séance de travail commune avec les ministres des finances(72), et qui devrait être focalisée sur l’emploi des jeunes et des personnes non qualifiées ;

- de réduire un peu la voilure, également, des travaux relatifs au développement, qui firent l’objet d’une filière à part entière sous présidence française et ne seront plus, cette année, que traités dans les instances techniques consacrées à la sécurité alimentaire.

La logique est claire : le G20 ne doit pas être investi d’une compétence dans le champ de la politique stratégique ou de sécurité, prérogative du Conseil de sécurité des Nations unies et du G8, instances plus restreintes où la Russie est assise autour de la table.

Cette priorité à l’économie procède aussi, peut-être, d’un tropisme idéologique explicable par l’histoire récente du pays. Paraphrasant Lénine, qui écrivit que « la politique est l’expression concentrée de l’économie », la politologue pro-européenne Nadia Arbatova estime que, dans la Russie-post-soviétique, « l’économie est devenue l’expression concentrée de la politique ».

En outre, la Russie est engagée dans la coordination entre BRICS et s’attache, par conséquent, à éviter de mettre l’accent sur les sujets de la libéralisation du commerce mondial ou de l’action pour le climat, dont la seule évocation déplaît particulièrement au Brésil pour le premier, à la Chine pour le second. À Los Cabos, les observateurs ont noté que la coordination entre BRICS était assez efficace : elle ne débouche pas sur des prises de position communes positives mais garantit qu’aucun des membres de ce regroupement ne s’impliquera pour défendre des orientations susceptibles de nuire à ses partenaires.

Ramon Fernandez, directeur général du trésor – et à ce titre adjoint(73) de Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, dans les réunions de la filière finances –, a convenu que la réduction du spectre des thématiques abordées, si elle se traduisait par une plus grande efficacité sur les dossiers de prédilection du G20, répondait à une certaine logique.

Le sommet de Saint-Pétersbourg est préparé avec soin – mieux que ne le fut celui de Los Cabos, ont témoigné plusieurs officiels auditionnés –, en s’appuyant sur la troïka, et les réunions préparatoires qui se sont tenues jusqu’à présent(74) ont été jugés consistantes sur le fond, qu’il s’agisse des rencontres ministérielles, des échanges à distance et des sessions techniques préparatoires – qui mettent en réseau une multitude de hauts fonctionnaires – ou des séminaires, conférences et groupes de travail thématiques.

La répartition du travail entre la présidence de la Fédération, le ministère des finances et le ministère des affaires étrangères s’effectue ainsi, autour de deux filières, sur le modèle mexicain que nous avons analysé précédemment :

- le ministère des finances – dont la compétence est reconnue parmi les autres membres du G20 – est clairement leader sur les questions économiques de nature technique, ses services constituant la source d’inspiration pour ce qui concerne le cadre de croissance forte durable et équilibrée ou encore l’établissement des normes de régulation financière et bancaire ;

- la sherpa de la présidence, Ksenia Yudaeva, suit en priorité les dossiers non financiers comme l’énergie, le développement ou la lutte contre la corruption ;

- le ministère des affaires étrangères est responsable de la stratégie d’outreach et participe aux réunions concernant le développement(75).

Le programme du sommet est préparé par une task force administrative dédiée que la Russie a réuni en février et en juin. Entre deux réunions, des échanges quotidiens ont lieu entre administrations nationales pour procéder aux ajustements rendus nécessaires pour parvenir au consensus et/ou s’adapter à l’actualité.

La Russie, à l’instar de la France en son temps, accorde une grande importance à l’outreach.

L’implication des organisations internationales a été préservée, notamment celle de l’OCDE – bien que le pays n’en fasse pas partie, il pourrait y adhérer dès 2014 ou 2015 –, sans oublier le FMI, l’OMC, l’OIT, la Banque mondiale et surtout l’ONU. En outre, le dialogue avec le 3G s’est poursuivi.

Surtout, Vadim Loukov, coordinateur du ministère des affaires étrangères pour le G20, a effectué un tour du monde des capitales, en s’appuyant sur la richesse du réseau diplomatique russe, pour associer un maximum de pays extérieurs au G20 à la réflexion sur les dossiers traités sous présidence russe. Fin mai 2013, il a organisé un briefing avec les ambassadeurs à Moscou des pays de la Ligue arabe, lesquels ont manifesté un grand intérêt pour les questions traitées dans le cadre du G20 et ont beaucoup apprécié cette démarche de consultation.

Enfin, la présidence russe a beaucoup misé sur l’ouverture vers la société civile, avec une prédilection pour le B20(76) – sous la houlette de l’Union russe des entrepreneurs et des industriels (RSPP) – et, dans une moindre mesure, sur le Y20. Le L20 et le C20, davantage susceptible d’offrir une tribune à l’opposition citoyenne russe, prendront manifestement moins d’ampleur cette année.

Autre prérogative présidentielle, la Russie a choisi sept invités, dont les deux derniers ne participeront qu’à certaines réunions :

- l’Espagne, invitée permanente ;

- Brunei, au titre de la présidence de l’ASEAN ;

- l’Éthiopie, au titre de la présidence de l’UA ;

- le Sénégal, au titre de la présidence du NEPAD ;

- le Kazakhstan, partenaire privilégié ;

- Singapour, au titre du Comité monétaire et financier international (CMFI), qu’il préside, et officieusement en tant que représentant du 3G ;

- la Suisse, uniquement pour les réunions ministérielles finances consacrées à l’évasion fiscale.

En dépit de ce souci d’exemplarité, qui sied à un pays comme la Russie, aux ambitions internationales assumées, la baisse d’intensité dans les travaux du G20 enregistrée en 2012 se confirme, faute, pour les dirigeants des grandes puissances, d’avoir trouvé les instruments adéquats pour répondre à la crise. La présidence russe, de ce point de vue, reste un cran en-deçà de ce que l’on pouvait en attendre.

Les autorités russes font l’analyse que la crise n’est pas derrière nous, qu’elle est de nature systémique et par conséquent plus profonde que prévu. Elles voient dans les événements intervenus depuis 2008 une crise du concept même de libéralisme économique inspiré par les pays anglo-saxons – les premiers chocs sont du reste venus des États-Unis – et s’interrogent sur le bon modèle de développement économique et sociétal à construire.

La Russie voit aussi dans la situation actuelle une crise de la société consommation à outrance, qui fait vivre les États au-dessus de leurs moyens, avec des dettes avoisinant ou dépassant 100 % du PIB dans certains pays.

L’Union européenne, qui peine à gérer les conséquences du creusement de ses dettes souveraines, est certes un peu moins incriminée que par le passé dans les discussions pour sa responsabilité dans l’atonie de la croissance, mais la Russie ne ménage toujours pas ses critiques sur ce sujet et le FMI parle encore d’une croissance à trois vitesse, distinguant :

- grands émergents ;

- États-Unis ;

- Europe.

La situation est évidemment de nature à inquiéter particulièrement la Russie, dont 40 % des réserves de change sont en euros, dans un souci de diversification monétaire.

Quoi qu’il en soit, cette orientation en faveur d’une croissance rejoint la ligne fixée par François Hollande, que Pierre Moscovici avait ainsi résumée, le 16 février 2013, au terme de la première ministérielle finances de la présidence russe : « Quand les conditions économiques deviennent plus dures, il faut que nous puissions en prendre acte et en tenir compte, c’est me semble-t-il l’esprit du G20 », qui doit « permettre de ne pas ajouter l’austérité à la récession ».

Deux mois plus tard, le 19 avril 2013, la deuxième session ministérielle finances se concluait par une prise de position très nette de rejet d’une rigueur excessive, qui priverait les pouvoirs publics de la possibilité de mettre en œuvre des mesures contra-cycliques. Pierre Moscovici a alors estimé que « les esprits [avaient] beaucoup évolué ».

Au fur et à mesure que s’approche le sommet de Saint-Pétersbourg, la présidence russe a donc pour cap de plus en plus évident de continuer à faire vivre le débat de politique économique afin de conditionner une croissance mondiale et européenne plus forte. À cet effet, elle a fixé trois grands objectifs, dont la formulation, insistant sur la croissance, apparaît très clairement en tête de son site Internet(77).

La croissance passe tout d’abord par la mise en œuvre d’une régulation effective :

- renforcer la régulation financière ;

- favoriser les échanges multilatéraux ;

- développer les énergies durables :

La croissance est ensuite conditionnée par l’offre d’emplois de qualité et l’investissement :

- définir les objectifs et limites du cadre pour une croissance forte, équilibrée et durable ;

- financer de nouveaux investissements ;

- améliorer la situation du marché du travail et créer des emplois :

• lutte contre le chômage structurel ;

• emploi des personnes vulnérables ;

- assurer le développement pour tous, dans les domaines :

• de la sécurité alimentaire ;

• des infrastructures ;

• du capital humain ;

• de l’inclusion financière ;

• de la projection post-OMD.

La croissance dépend enfin de l’instauration d’un climat de confiance et de transparence :

- conduire la réforme de l’architecture financière internationale :

• quotas du FMI et réforme de la gouvernance financière ;

• emprunts nationaux et soutenabilité des dettes publiques ;

- combattre la corruption.

Comme l’a souligné malicieusement l’ambassadeur Vadim Loukov : « La présidence n’est pas une dictature : 70 % de l’agenda est formé par le portefeuille hérité de la présidence précédente, qui découlait elle-même des précédentes ; il faut respecter cet héritage, ce patrimoine opérationnel. »

La déclinaison par la présidence russe de l’objectif stratégique du soutien à la croissance montre au demeurant qu’elle entend poursuivre le travail engagé les années précédentes sur la plupart des dossiers économiques, même si elle préfère légitimement afficher une orientation précise – et du reste adaptée aux enjeux géoéconomiques actuels.

L’implication de la Russie dans le champ de la régulation des services et des produits financiers a toujours été extrêmement faible : dans les négociations multilatérales, la partie russe, assez suiviste, a rarement fait émerger des idées nouvelles.

Sur ce dossier emblématique pour le G20, pour lequel la mécanique de négociation est bien rodée – et qui, accessoirement porte la marque de la présidence de 2011 –, la France juge essentiel de maintenir la pression. Lors de la dernière Conférence des ambassadeurs, le 27 août 2012, le Président François Hollande a ainsi déclaré : « La crise financière, économique a montré les limites des institutions actuelles. Le G20, qui avait permis de répondre dans l’urgence à la crise bancaire, doit de nouveau réfléchir sur son rôle, car nous sommes bien loin de la régulation financière indispensable. »

La présidence russe compte prendre appui sur les tableaux de suivi du CSF pour cocher les avancées, pays par pays, ainsi que sur les groupes techniques assurant une revue par les pairs, à l’instar de ceux qui suivent la mise en œuvre des mesures normatives définies par le BCBS, compétent en matière de supervision bancaire.

Les normes de Bâle III, précisément, devraient entrer en vigueur début 2014 aux États-Unis – quatorze membres du G20 s’y sont déjà conformés – mais la première puissance financière mondiale ne soumettra à ces standards que ses banques principales, au regard de la taille de leur bilan, alors que tous les établissements européens seront concernés.

La question du shadow banking figure toutefois à l’agenda de la présidence russe.

S’agissant des agences de notation, la présidence russe entend aller au-delà des principes intérimaires élaborés jusqu’à présent, investis d’un caractère de recommandations. Elle souhaiterait que les capacités dont disposent les agences de notation soient utilisées au profit de l’ensemble de la communauté économique mondiale et non pas dans l’intérêt d’acteurs particuliers.

Le ministère des finances russe se montre aussi attentif à l’amélioration de la formation et de l’information financières, afin de mieux protéger les intérêts des consommateurs de services financiers.

Lorsque fut conçu le cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée, en septembre 2009, à Pittsburgh, les États du G20 s’étaient engagés à réduire de moitié leurs déficits publics d’ici à 2015 et de commencer à faire décroître leurs dettes avant 2020. Mais les objectifs chiffrés fixés en juin 2010 pour crédibiliser l’action à moyen et long terme en matière de maîtrise des trajectoires de finances publiques, dits « cibles de Toronto pour 2016 », n’ont pas pu être repris dans l’agenda du G20 de 2013, malgré l’insistance des pays accumulant les excédents comme la Chine et l’Allemagne, à cause du refus des États-Unis, qui les jugent intenables.

Le seul consensus porte sur la volonté commune de s’attaquer aux déficits structurels – c’est-à-dire en neutralisant les effets de la conjoncture sur les comptes publics – plutôt qu’aux déficits nominaux. Il reste toutefois à se mettre d’accord sur la notion de déficits structurels, ce qui s’avère aussi compliqué au G20 qu’entre partenaires européens…

Dans les débats sur le bon équilibre entre consolidation et croissance, les pays ont certes tendance à se réduire à leur caricature mais les analyses convergent doucement. Dans ce contexte, la Russie va s’efforcer de trouver de nouveaux indicateurs pour inciter les pays en situation budgétaire critique à s’inscrire dans une trajectoire d’assainissement.

Alors que les chefs d’État et de gouvernement, l’an dernier, à Los Cabos, s’étaient une nouvelle fois prononcés contre les restrictions aux échanges afin de libérer une dynamique de croissance mondiale, un rapport de l’OMC publié le 17 juin 2013 établit que les vingt, à eux tous, depuis lors :

- n’ont supprimé que 19 % des mesures protectionnistes qu’ils avaient mises en place depuis la crise de 2008 ;

- ont adopté plus de cent nouvelles mesures protectionnistes, ayant un impact sur près de 0,5 % de leurs importations de marchandises, soit près de 0,4 % de la totalité des importations mondiales, avec un impact évalué à 16 milliards de dollars.

Moins de deux mois après la désignation du nouveau directeur général de l’OMC, il est difficile de prévoir qu’elle ligne elle suivra. Roberto Azevêdo est en effet originaire d’un pays particulièrement protectionniste, le Brésil, et la montée en puissance des émergents dans la gouvernance commerciale mondiale fait peser une incertitude sur des dossiers comme ceux de l’exception culturelle ou de la politique agricole. Les grands acteurs des échanges internationaux n’attendent certes pas grand-chose des négociations en cours à l’OMC mais celle-ci reste une instance cruciale pour l’élaboration du corpus juridique en matière commerciale.

Lors des deux premières réunions ministérielles finances, en février et avril 2013, la question n’a pas été abordée en profondeur – voire pas du tout en avril.

La réforme de 2010 des quotes-parts dans les institutions monétaires internationales n’est toujours pas ratifiée par le Congrès américain, ce qui bloque toute nouvelle avancée et constitue un facteur de frustration pour les pays émergents et la Russie ; or il n’y plus aucune chance d’aboutir avant le sommet de Saint-Pétersbourg. La Russie déplore que les États-Unis, actionnaire principal du FMI, se trouvent dans l’incapacité de payer des parts de capital qu’ils ont pourtant souscrites.

La nouvelle présidente sud-coréenne, Park Geun-hye, élue le 25 février 2013, est attentive aux conséquences sur le won de la nouvelle politique de facilité monétaire japonaise extrêmement agressive. Le sujet devrait être évoqué dans le cadre du G20, plusieurs autres économies d’Asie-Pacifique, notamment l’Australie – qui, rappelons-le, présidera le G20 en 2014 –, étant aussi impactée. Serguei Storchak nous a expliqué que la Russie juge préférable de confier ce sujet au G7, qui regroupe les pays dans lesquels la guerre des devises est la plus virulente ; dans un second temps, le G20 pourrait s’appuyer sur le compromis trouvé au G7.

Les banques comme les gouvernements éprouvent des difficultés à dégager des financements à long terme. Ce constat devrait conduire la Russie à orienter aussi les travaux du G20 dans les directions suivantes :

- identification par chacun des vingt pays membres de ses freins internes aux investissements ;

- étude du rôle des marchés d’obligations en monnaie locale dans le financement des investissements, en vue de les faire évoluer pour mieux assurer le financement, notamment, des petites et moyennes entreprises ;

- analyse du rôle du secteur privé, particulièrement des investisseurs institutionnels, qui ont accumulé des ressources susceptibles d’être mieux employées pour financer la croissance et la création d’emplois ;

- amélioration de l’efficacité et de la rentabilité des dépenses publiques liées aux investissements d’infrastructure, trop souvent sujettes à des dérives budgétaires par rapport aux prévisions initiales ;

- examen de la régulation financière sous l’angle opposé à celui généralement retenu, à savoir l’évaluation de ses effets sur le financement des investissements à long terme.

Le groupe de travail développement est censé se réunir à quatre reprises en 2013 : en février, mai, juillet et octobre. L’enjeu consiste à préserver les acquis obtenus sous présidence française : l’AMIS et le Forum de réaction rapide. Mais la Russie, qui a pratiquement abandonné tout investissement politique et économique en Afrique durant les vingt années consécutives à la chute de l’Union soviétique et la redécouvre aujourd’hui – davantage, du reste, dans une logique d’exploitation des richesses naturelles que de coopération –, éprouve quelques difficultés à gérer les discussions multilatérales sur ce sujet. En outre, la Russie ne veut pas perturber les travaux du groupe de haut niveau sur les OMD, patronné par le Secrétaire général de l’ONU.

L’année 2013 marque l’expiration du plan d’action trisannuel défini à Séoul, composé de quatre volets :

- sécurité alimentaire ;

- encouragement des investissements à long terme dans la production, via les partenariats public-privé ;

- aide au développement du capital social ;

- inclusivité financière, c’est-à-dire élargissement de l’accès des populations à la micro-finance.

La Russie juge formidable la démarche imaginée par la Corée du Sud mais estime que le G20 a fait preuve de trop d’enthousiasme en fixant onze axes d’action, alors que les sources de financement du Nord s’épuisaient.

La sherpa du Président Poutine, Ksenia Youdaeva, a également insisté sur le travail préparatoire mené en commun avec le Commonwealth et l’Organisation internationale de la francophonie (OIF).

À l’heure où tous les pays font face à une conjoncture économique difficile et où la taille de leurs assiettes fiscales tend à se réduire, ils sont contraints d’ajuster leur budget ; la fraude et l’évasion fiscales sont donc devenues des sujets majeurs de politique économique, l’érosion des bases et du produit de l’imposition faisant peser des menaces réelles sur l’équité entre contribuables, les recettes budgétaires des pays qui en sont les victimes et même leur souveraineté. Or ni les États membres de l’Union européenne, ni la Russie n’en sont exempts.

Rien qu’au niveau européen, selon les estimations de la Commission européenne, le manque à gagner se chiffrerait à 1 000 milliards d’euros par an.

S’agissant de la Russie, Sergueï Gouriev(79), ancien recteur de la Nouvelle école d’économie de Moscou, a estimé que la moitié des sorties nettes annuelles de capitaux – soit une cinquantaine de milliards de dollars – sont opérées illégalement, par le biais d’une myriade de sociétés, dont des centaines de sociétés financières.

Le président Poutine lui-même, bien qu’il ne soit pas soumis aux mêmes pressions sociétales que ses partenaires sur ce sujet, a fixé deux objectifs allant de pair avec la restauration de l’attractivité de la Russie et qui sont en phase avec le dessein du G20 d’optimiser les outils de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales :

- la « désoffshorisation » des capitaux ;

- la renationalisation des élites.

La Russie n’a pas pris formellement date quant à sa volonté de mettre ce thème au cœur des travaux de sa présidence et, de fait, les officiels russes rencontrés par vos rapporteurs ne l’ont guère évoqué lors de leurs entretiens à Moscou. Il lui est cependant délicat de faire fi de l’insistance de ses partenaires américains, allemands et français – qui a d’ores et déjà permis d’obtenir une avancée, au sommet du G8 de Lough Erne, à propos des échanges d’informations fiscales.

En novembre 2012, les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales des pays membres du G20 ont demandé au Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales(80) de dresser, avant avril 2013, un état des lieux des pratiques en matière d’échanges de renseignements fiscaux. Cette demande a été réitérée en février 2013, pour encourager le Forum mondial à poursuivre son travail d’évaluation et de suivi de la mise en œuvre des normes internationales édictées en matière d’échange de renseignements.

Pour l’heure, le Forum mondial a mis sur pied 100 évaluations par les pairs(81). Maintenant que les normes juridiques d’une grande majorité de ses membres ont été examinées, il est davantage question, pour le Forum mondial, d’analyser les pratiques juridiques en la matière, ce qui a déjà été effectué pour trente pays.

Depuis que le Forum mondial a répondu à l’appel du G20 visant à ce que les normes internationales en matière de transparence et d’échange de renseignements soient mises en œuvre au plus vite – en 2009 –, outre la centaine d’évaluations par les pairs, il a formulé 600 recommandation à des fins d’amélioration, dont plus de 300 ont été prises en considération.

Le nombre d’États membres qui ont rejoint le Forum mondial et se sont engagés à se soumettre aux normes internationales a beaucoup augmenté : depuis le sommet de Cannes, il est passé de 105 à 119. Du reste, 1 100 nouvelles manifestations d’intérêt(82) pour des échanges de renseignements ont été émises. Les travaux du Forum mondial sont donc en bonne voie pour davantage de transparence, un réseau d’échange de renseignements plus efficace et un cadre légal mieux adapté aux nouvelles réalités.

Mais il ne sera démontré que le Forum mondial aura réellement atteint ses objectifs que lorsque les meilleures pratiques en matière de transparence et de transfert de renseignements seront généralisées. Le résultat-clé de l’étude des pratiques sera en effet l’établissement d’une cote d’évaluation, pour les États membres parties au Forum mondial comme pour les autres pays, pour mieux mettre en évidence les progrès concrets accomplis par chacun et mieux identifier ceux qui ne joueront pas le jeu de l’échange d’informations.

La Convention multilatérale sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale est un instrument juridique toujours plus influent en matière de coopération fiscale et d’échange de renseignements. Elle constitue une base commune pour contrer la fraude fiscale et l’évasion fiscale internationale, en offrant plusieurs possibilités d’assistance administrative en matière d’échange automatique de renseignements :

- l’échange d’informations sur demande ;

- l’échange automatique d’informations ;

- la participation aux contrôles mis en œuvre à l’étranger ;

- les contrôles fiscaux simultanés ;

- les audits conjoints ;

- l’entraide en matière de recouvrement des créances fiscales.

La Convention a été révisée après l’appel lancé par le G20, en avril 2009, lors du sommet de Londres, afin de la mettre en conformité avec les standards internationaux d’échange de renseignement et de l’ouvrir à tous les pays, en particulier pour que les pays en développement puissent bénéficier de ce nouvel environnement plus transparent.

La Convention a été ouverte aux signatures le 1er juin 2011. Depuis lors, de nombreux pays, comptant parmi eux tous les membres du G20, l’ont signée ou se sont engagés à le faire :

- tous les membres du G20 lors du sommet de Cannes de 2011 ;

- cinquante-trois pays – parmi lesquels plusieurs pays en développement – au Cap, le 26 octobre 2012 ;

- douze nouveaux pays – dont l’Autriche, le Luxembourg et Singapour, trois États dans lesquels la tradition de secret bancaire est bien ancrée(83) –, à l’occasion de la réunion ministérielle annuelle de l’OCDE, le 29 mai 2013.

Plus de soixante pays développés et en développement ont donc désormais signé la Convention ou se sont engagés à le faire. Cela n’aurait probablement pas été possible sans le support constant des membres du G20, qui se sont liés à la Convention et ont constamment encouragé leurs partenaires à en faire autant – y compris, cette année, lors de la réunion ministérielle finances des 15 et 16 février. La plupart des paradis fiscaux restent cependant en dehors.

Les chefs d’État et de gouvernement du G20 ont remis en évidence l’importance d’un échange généralisé d’informations. Lors de leur réunion d’avril 2012, les ministres des finances et les gouverneurs de banques centrales ont demandé à l’OCDE d’élaborer un rapport provisoire relatif aux progrès accomplis en la matière, qui a été présenté au sommet de Los Cabos.

L’OCDE a pour cheval de bataille de faciliter toutes les formes d’échange d’informations, notamment d’un système automatisé d’échange pour les États qui témoignent de l’intérêt envers cette idée, et le G20 apporte un soutien constant à ses travaux dans ce domaine.

L’échange automatique d’informations implique la transmission systématique et périodique de renseignements « en vrac » à propos de certains contribuables, depuis le pays d’origine jusqu’au pays de résidence, sur la base de traités fiscaux bilatéraux ou bien de la Convention. Pour veiller à ce que les informations privées sur les contribuables soient maintenues confidentielles, l’OCDE et le Forum mondial ont jugé primordial de publier, en 2012, un vade mecum.

Les travaux de l’OCDE font d’ores et déjà état d’une utilisation généralisée de l’échange automatique d’informations, quels que soient les pays, les types de revenus, la valeur des transactions et les projets d’échanges visés. Voici les principales constatations :

- nombre de pays, membre ou non de l’OCDE, reçoivent automatiquement des informations de la part des états signataires du traité ;

- 85 % des pays sondés envoient automatiquement des informations aux autres états signataires du traité ;

- la valeur annuelle des transactions signalée dans la plupart des pays se mesure en milliards d’euros et cinq pays reçoivent même des informations portant sur plus de 15 milliards d’euros.

Une proposition de directive de la Commission européenne(84), qui tend à étendre progressivement à de nouvelles catégories de revenus, à compter du 1er janvier 2015, l’application obligatoire de l’échange automatique d’informations bancaires et fiscales entre États membres, a reçu un accueil favorable de la part du Conseil Ecofin, lors de sa réunion du 21 juin 2013. Ce texte a vocation à être le pendant du Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) américain.

Dans une lettre commune adressée le 9 avril 2013 à Algirdas Šemeta, commissaire européen chargé de la fiscalité et de l’union douanière, de l’audit et de la lutte antifraude, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne ont fait part à la Commission européenne de leur souhait de transposer le FATCA à l’échelle de l’Union européenne, afin de favoriser l’émergence d’un « système global d’échange automatique d’informations », voué à devenir « un nouveau standard international ». Les cinq pays annoncent le lancement d’une initiative pilote, à titre d’amorçage du futur dispositif communautaire. En marge du Conseil Ecofin du 14 mai 2013, douze autres pays – la Belgique, le Danemark, la Finlande, l’Irlande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Suède et la République tchèque – ont rejoint cette initiative pilote.

Les échanges automatiques, considérés comme un outil de défense face aux résistances des paradis fiscaux, présentent un certain nombre d’avantages.

Ils permettent tout d’abord d’informer de manière précise et en temps réels de toute situation d’évasion fiscale non conforme à la réglementation, si un retour sur investissement est camouflé ou si la valeur d’un capital est sous-évaluée. Des cas de fraude peuvent être détectés même s’ils ne l’ont pas été par l’administration fiscale.

Le système a aussi un effet dissuasif : il incite au respect de la législation en vigueur, encourageant les contribuables à divulguer tout renseignement nécessaire.

L’échange automatique d’informations étant devenu une pratique de plus en plus utilisée, l’OCDE a redoublé ses efforts afin de faire face aux défis et d’offrir à tous les pays qui le désirent une plateforme multilatérale, automatique et standardisée pour un processus de communication plus efficace. En travaillant avec ses pays membres, l’OCDE avance rapidement dans la création d’un modèle commun d’échange automatique très sécurisé, notamment quand il est question d’informations bancaires détenues par les institutions financières soumises à un devoir de diligence. Les objectifs sont donc :

- d’offrir une plus grande sécurité aux pays de résidence, assurés de la conformité de la transmission de données aux libertés fondamentales ;

- de réduire les coûts pour les institutions financières ;

- de détenir toutes les garanties nécessaires au développement d’un cadre normatif, préférable à une prolifération normative.

Profitant de la mondialisation, les multinationales ont mis en place des mécanismes d’optimisation sophistiqués leur permettant d’échapper aux règles fiscales locales. Dans le cadre du G20, la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ont présenté une initiative conjointe de lutte contre ces stratégies fiscales agressives tendant à transférer leurs bénéfices vers les États où la fiscalité est plus avantageuse – il peut s’agir, selon les cas, de pays développés ou en développement.

La planification fiscale internationale des grandes entreprises conduit souvent à une double soustraction à la taxation : les revenus des entreprises ne sont imposés ni dans le pays d’origine du contribuable, ni dans son pays de résidence. Cette pratique d’optimisation fiscale, dite d’ « érosion des bases et de transfert de bénéfices(85) » a des conséquences délétères de trois ordres :

- elle altère les choix d’investissement au détriment des petites et moyennes entreprises ;

- elle ampute substantiellement les revenus d’importation des juridictions nationales ;

- elle participe à la défiance des citoyens envers l’intégrité du système fiscal dans son ensemble et risque d’inciter les autres contribuables à des comportements illicites.

Ces dernières années, alors que la crise s’éternisait, un débat s’est ouvert à propos de la pertinence des règles fiscales internationales et l’OCDE, forte du soutien des membres du G20, a initié un travail afin de donner un débouché concret aux questions soulevées en son sein. Le 12 février 2013, elle a ainsi publié un rapport consacré à cet enjeu(86), qui appelle au développement d’un plan d’action global afin :

- d’identifier les actions souhaitables ;

- de fixer des dates limites pour leur mise en œuvre ;

- d’identifier les ressources nécessaires et la méthodologie à suivre.

En plus de la coopération en matière d’apport d’informations et autres données, le rapport préconise les dispositions suivantes :

- des instruments neutralisant toute stratégie d’arbitrage réglementaire ;

- la clarification de la législation sur les prix dans les juridictions où elle laisse actuellement libre court à des situations politiquement indésirables ;

- l’actualisation de la législation, notamment dans la sphère des biens et services numériques ;

- l’amélioration des mesures nationales faisant obstacle à l’évasion ;

- l’édiction de normes relatives au traitement des transactions financières intragroupe ;

- le renforcement de la transparence pour mieux identifier les régimes nuisibles.

Afin de progresser dans l’élaboration du plan d’action, trois groupes de travail temporaires ont été créés, auxquels ont été invités à participer tous les membres de l’OCDE ainsi que les pays ne siégeant qu’à son Comité des affaires fiscales (CAF) :

- le groupe « contrer l’érosion des bases » s’occupe principalement des mesures antifraudes, visant à supprimer les effets négatifs de l’asymétrie entre systèmes d’impôts et les pratiques fiscales nuisibles ;

- le groupe « compétence fiscale » traite des questions relatives aux législations existantes en matière de coopération commerciale transfrontalière, avec une attention particulière portée sur l’économie numérique ;

- le groupe « prix de transfert » s’intéresse à la juste tarification des transactions intergroupes.

Les travaux des groupes de travail serviront de base à l’élaboration d’un plan d’action destiné à apporter des solutions concrètes pour aligner les standards internationaux sur les nouvelles réalités économiques.

Le travail de l’OCDE sur l’érosion des bases et le transfert des bénéfices se nourrit également de contributions de la société civile et du monde économique. Plusieurs réunions avec les parties concernées ont déjà été organisées.

Les milieux d’affaires reconnaissent généralement qu’il est nécessaire de restaurer la confiance dans le système fiscal international en adaptant la réglementation. Ils soulignent que la législation actuelle est assez efficace dans la plupart des pays mais que des réaménagements sont nécessaires dans d’autres, en particulier dans ceux où elle a été modifiée récemment dans un sens divergent par rapport au reste du monde. Ils ont confirmé l’importance de la notion de « substance économique » et appelé l’OCDE à la définir. Ils ont par ailleurs suggéré la création d’un groupe de travail spécialisé dans l’économie numérique. Pour finir, ils ont approuvé l’idée de l’établissement par l’OCDE d’une législation internationale commune sur le régime des sociétés sous contrôle étranger.

Quant à la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC(87)), elle se montre très favorable à l’initiative sur les BEPS. Son objectif principal est l’élimination de la « double non-imposition » et l’édiction d’une réponse plus agressive à la planification fiscale internationale. La TUAC aimerait aussi que la portée du projet BEPS soit étendue à la question de la transparence des entreprises multinationales, avec un état des lieux fiscal pays par pays. Elle considère qu’il conviendrait d’accorder davantage d’attention à la lutte contre l’usage spéculatif des ressources financières provenant de la fraude fiscale.

Les organisations non gouvernementales ont également exprimé un soutien appuyé au rapport de l’OCDE sur les BEPS et présenté un document d’orientation approuvé par cinquante-huit d’entre elles. Elles jugent que les comptes consolidés mondiaux des multinationales pourraient être utilisés comme socle pour mettre en œuvre la lutte contre l’érosion des bases et le transfert des bénéfices.

L’OCDE travaille activement afin d’être en mesure de remettre son plan d’action aux membres du G20 lors de la réunion des ministres des finances et des gouverneurs de banque centrale des 19 et 20 juillet 2013. Le projet BEPS a besoin d’un soutien politique résolu et continu pour aboutir à un consensus sur des solutions précises et opportunes afin de conduire les actions requises.

Même si aucun des vingt sherpas n’a soulevé d’objections face au projet de lutte contre les BEPS, la Russie ne l’a guère repris à son compte. Or sa position est d’autant plus importante qu’elle présidera le G8 l’année prochaine et que la coordination entre ces deux instances multilatérales est impératives pour mener à bien de tels chantiers, nécessitant le consensus entre grandes puissances économiques.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie les 2 et 3 juillet 2013, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information et adopter les conclusions.

Le 2 juillet 2013

L’exposé des rapporteurs a été suivi d’un débat.

M. Joaquim Pueyo. Avant d’être député, j’ai toujours pensé que le G20 était inutile ; ces grand-messes médiatiques sont vraiment en décalage avec l’opinion publique.

Je suis déçu que le G20 n’aborde pas des sujets qui intéressent l’Union européenne et la France, notamment celui de l’agriculture.

Sur les droits de l’Homme, la Russie n’est vraiment pas exemplaire. Il conviendrait de réfléchir à la situation des droits de l’Homme dans les pays du G20.

En Russie, la corruption est généralisée et atteint le plus haut niveau de l’État. Croyez-vous en la sincérité du gouvernement russe sur les dossiers de la corruption et de la lutte contre la fraude fiscale ?

La Présidente Danielle Auroi. Je ne suis pas convaincue non plus ; ce qui se prépare, à Saint-Pétersbourg, c’est l’autocélébration du Président Poutine.

Je sais que le G20 est consacré aux questions économiques, mais avez-vous rencontré des organisations non gouvernementales œuvrant en Russie ?

En matière de diplomatie, l’axe Russie-Chine existe, à propos de la Syrie ou de l’Iran, par exemple.

Au cours de vos rencontres, avez-vous évoqué les questions énergétiques ?

Je suis désolée que la politique agricole soit évacuée des débats.

Enfin, je ne suis pas sûre que les grandes entreprises russes respectent toujours les règles de l’Organisation internationale du travail. Un pays qui se moque de ces normes a-t-il la légitimité pour présider le G20 ?

M. Pierre Lequiller. J’ai cru comprendre que la Russie n’entendait pas s’engager résolument dans le G20 et y prendre des initiatives. Comment utilise-t-elle l’arme de l’énergie, face à une Union européenne incapable de se montrer unie ?

Quels pays vise-t-elle en priorité pour rejoindre son projet eurasiatique ?

Lors de votre déplacement, avez-vous eu l’occasion d’aborder le sujet des droits de l’Homme ?

Mme Marietta Karamanli. Les États-Unis plaident pour un desserrement de la contrainte budgétaire afin de relancer la croissance, y compris en Europe, via les salaires et l’accession à la propriété. Cela ne doit-il pas nous conduire à repenser l’ordre des priorités budgétaires ? Quelle position la Commission européenne défend-elle sur cette question ?

Un mouvement international apparaît en faveur de la lutte contre la soustraction des contribuables à l’imposition du bénéfice des sociétés. Comment l’Union européenne porte-t-elle cette idée dans le G20, notamment à la lumière de la crise chypriote ?

M. Gilles Savary. La Russie, traditionnellement, pratique le multilatéralisme comme les Horaces pratiquent les Curiaces : ils posent sur la photo des sommets mais préfèrent les discussions à la carte. Nous connaissons maintenant l’agenda russe mais comment les autres parties procèdent-elles pour demander à traiter de tel ou tel sujet ?

Le dernier G20 a été créé pour gérer des crises systémiques brûlantes. Or, aujourd’hui, la crise systémique brûlante est celle que traverse la Syrie. Elle n’est certes pas d’ordre économique mais je vois mal comment elle pourrait être tue à Saint-Pétersbourg. L’intérêt même du G20 s’en trouverait considérablement affaibli.

Quant au sujet énergétique, il devrait tout de même intéresser nos amis de l’Union européenne.

Le G20 n’est-il pas finalement une mise en scène, personnalisée autour de celui qui le pilote ?

M. Michel Herbillon, co-rapporteur. L’on ne peut demander au G20 de jouer un rôle qui n’est pas le sien : il ne saurait se substituer à l’Organisation des Nations unies, au Fonds monétaire international, à l’Organisation de coopération et de développement économiques, à la Banque mondiale et à l’Union européenne ! D’autant que chaque organisation internationale est extrêmement soucieuse de ses prérogatives et ne souhaite pas voir le G20 tenter de se substituer à elle.

Que se passerait-il si le G20 n’existait pas ? Telle est la vraie question. Année après année, ce forum, qui réunit les vieilles puissances économiques et les grands émergents, a démontré son utilité pour traiter en permanence des questions économiques auxquelles nous sommes confrontés depuis la crise de 2008.

Lors des auditions, nous avons certes évoqué les questions de sécurité internationale et de droits de l’Homme, mais le G20 est avant tout un forum économique.

Le Président Poutine fera sa propre mise en scène, comme chaque chef d’État ou de gouvernement de pays hôte. Mais cela ne signifie pas que les conclusions des sommets sont inutiles : souvenez-vous que celui de Cannes a contribué à régler la crise grecque.

S’agissant de l’emploi et du travail, je précise que la question n’a pas été totalement évacuée : d’ici au sommet, la task force dédiée se sera réunie quatre fois ; en outre, une session ministérielle se tiendra à propos de l’emploi des jeunes et des personnes non qualifiées.

M. Jérôme Lambert, co-rapporteur. Nous avons pu observer que l’ordre du jour d’un sommet du G20, quoique toujours préparé avec soin, est systématiquement bouleversé par l’actualité : six mois avant le sommet de Cannes, par exemple, la crise grecque n’était pas prévue. Le G20 est donc une organisation souple, en mesure de s’adapter à la situation du moment.

Le programme de la présidence russe tient en trois points : approfondir la régulation économique internationale ; promouvoir l’investissement et l’emploi ; instaurer un climat de confiance et de transparence. C’est déjà pas mal ! Pour traiter de la Syrie, il existe d’autres instances, à commencer par le Conseil de sécurité des Nations unies – et la Russie, comme d’autres pays, est très attentive à ce ne pas affaiblir le rôle de ce dernier.

Il est évidemment regrettable que certaines questions, comme l’énergie ou l’agriculture, manquent au programme, mais rien ne dit qu’elles ne seront pas abordées à Saint-Pétersbourg.

Le rôle de l’Union européenne nous a semblé très ténu cette année : ni la Commission européenne, ni le Conseil européen ne se sont signalés, dans la préparation du sommet, par la voix de leurs présidents respectifs ; ils donnent l’impression d’être préoccupés par d’autres sujets…

Quant à l’eurasiatisme, concrètement, il se borne aujourd’hui à un regroupement de trois pays : la Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie.

M. Bernard Deflesselles, co-rapporteur. Nous ne sommes pas allés à Moscou pour faire la leçon à la Russie ! Nous n’avons guère abordé les questions relatives aux droits de l’Homme et à la politique internationale car les compétences de nos interlocuteurs étaient centrées sur les thématiques économiques.

Par ailleurs, à Moscou, sévit un climat de défiance vis-à-vis de l’Union européenne, marquée par l’absence de croissance et la progression du chômage, deux phénomènes inconnus en Russie.

Je rappelle aussi que le G20 est présidé pour la première fois par un membre des BRICS. Les Européens et les Anglo-Saxons devront s’y habituer ! Les problèmes récurrents de l’Union européenne ne seront pas réglés dans le cadre du G20.

Nous n’avons pas encore parlé du B20 – pour « Business 20, c’est-à-dire la réunion des représentants des entreprises des vingt principales puissances économiques mondiales. La présidence russe prête beaucoup d’importance à cette instance.

M. Michel Herbillon, co-rapporteur. Je rappelle aussi que l’Union européenne, représentée par les présidents de la Commission européenne et du Conseil, est formellement membre du G20.

La Présidente Danielle Auroi. L’importance du poids du B20 donne une idée de la place que l’on veut laisser aux États : les chefs d’État et de gouvernement ne sont-ils pas réduits à la fonction de voyageurs de commerce des multinationales ? Mettons-nous à la place de nos concitoyens !

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. Les lacunes du G20 ne doivent pas être minimisées. Il fait partie de cette diplomatie de connivence, qui ne repose pas sur le suivi d’engagements : c’est une instance informelle, qui fonctionne pas consensus et laisse de côté les problèmes faisant l’objet d’un clivage.

Cela dit, il n’existe pas d’instance alternative : le G20 comble un vide. Et son utilité est indéniable, quel que soit le pays qui le préside : des équipes de tous les pays du monde commencent à bien se connaître et travaillent efficacement, secondées par les organisations internationales.

M. Michel Herbillon, co-rapporteur. Plusieurs de nos interlocuteurs ont souligné le rôle central joué par la direction générale du trésor française dans ces travaux préparatoires.

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. Il en résulte un processus d’homogénéisation des analyses, sensible depuis 2008, et un déclenchement de dynamiques.

L’autre problème, c’est que les pays en développement perçoivent le G20 – dans lequel l’Europe, notamment, est surreprésentée – comme une machine de guerre dirigée contre eux, avec l’imposition de normes internationales pour freiner leur développement. La présidence russe, de ce point de vue, est intéressante. En 2016, après l’Australie et la Turquie, il est possible que la Chine prenne le relais, ce qui la contraindrait à prendre de nouvelles responsabilités dans la recherche de l’équilibre économique mondial.

La Russie effectue plutôt bien son travail et essaie de faire progresser les dossiers mis en avant par la France ou les États-Unis, c’est l’essentiel. Mais le problème syrien posera peut-être des difficultés.

M. Gilles Savary. Ne vivons-nous pas les prémices d’un nouveau directoire mondial, intégrant les grands émergents ?

Les questions monétaires sont-elles abordées au G20 ?

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. Oui, la guerre des monnaies est au centre des questions du G20. Cette année, c’est surtout le problème du yen qui sera soulevé.

Le 3 juillet 2013

La Présidente Danielle Auroi. À la suite de notre débat d’hier, je vous propose d’adopter les conclusions proposées par les rapporteurs.

La Commission a adopté les conclusions à l’unanimité.

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION

La Commission des affaire européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les déclarations finales des sommets du G20 de Cannes des 3 et 4 novembre 2011 et de Los Cabos des 18 et 19 juin 2012,

Vu le rapport d’information no 3443 du 17 mai 2011 de la Commission des affaires européennes, intitulé « L’Union européenne et le G20 : répondre aux enjeux de la régulation mondiale »,

Vu le rapport d’information no 3784 du 4 octobre 2011 de la Commission des affaires européennes, intitulé « L’Union européenne au c
œur du projet de régulation mondiale porté par le G20 »,

Vu la résolution européenne sur l’Union européenne et le G20, considérée comme définitive le 20 novembre 2011 en application de l’article 151-7 du Règlement par l’Assemblée nationale,

Considérant que l’économie mondialisée requiert plus que jamais une régulation organisée au niveau planétaire pour prévenir l’éclatement de nouvelles crises systémiques,

Considérant que la coordination des politiques économiques ébauchée au sein du G20 a certainement contribué à amortir la crise traversée par le monde depuis cinq ans et à conjurer les effets systémiques de ses épisodes les plus périlleux,

Considérant que l’effort de sensibilisation consenti vers le reste du monde – États et organisations internationales – par les membres du G20 qui se sont succédé à sa présidence a permis de renforcer la crédibilité de cette instance,

1. Réaffirme que le G20 constitue le format idoine pour réguler l’économie mondialisée, dès lors que ses membres sont en nombre réduit par rapport aux organisations internationales classiques, produisent 80 % du PIB mondial et représentant tous les continents et toutes les catégories de profils de développement économique ;

2. Salue les avancées obtenues lors des sommets de Cannes et de Los Cabos, notamment dans les champs :

a) de la résorption des déséquilibres macroéconomiques internationaux ;

b) de l’encadrement et de la surveillance des établissements, produits et services financiers et bancaires ;

c) de la lutte contre la volatilité excessive des prix des matières premières agricoles ;

3. Estime que l’opportunité de la constitution d’une structure légère de secrétariat permanent doit continuer à être explorée pour institutionnaliser le G20 et l’ancrer définitivement dans le paysage des relations internationales ;

4. Reconnaît la pertinence du thème de la croissance, identifié par la présidence russe comme la clé pour traiter les problèmes économiques mondiaux actuels, à travers trois axes d’action :

a) la mise en
œuvre d’une régulation effective ;

b) la création d’emplois de qualité et le soutien à l’investissement ;

c) l’instauration d’un climat de confiance et de transparence ;

5. Encourage la démarche du G20 consistant à s’appuyer sur l’expertise et le savoir-faire de l’Organisation de coopération et de développement économiques pour optimiser les mécanismes multilatéraux de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, aux fins, en particulier, de contrer le phénomène d’érosion des bases et de transfert des bénéfices ;

6. Souhaite que la session du G20 de 2013 soit l’occasion de raffermir les relations entre l’Union européenne et la Russie, actuellement en désaccord sur nombre de sujets politiques et économiques mais liées par une communauté de destin, du fait de leur proximité géographique et de la richesse de leurs échanges commerciaux.

CONCLUSIONS ADOPTED BY THE COMMITTEE

The European Affairs Committee,

Having regard to Article 88-4 of the Constitution,

Having regard to the final declarations of the G-20 summits of Cannes on 3 and 4 November 2011 and of Los Cabos on 18 and 19 June 2012,

Having regard to the information report no. 3443 of 17 May 2011 of the European Affairs Committee, entitled ‘The European Union and the G-20: meeting the issues of global regulation’,

Having regard to the information report no. 3784 of 4 October 2011 of the European Affairs Committee, entitled ‘The European Union at the heart of the global regulation project borne by the G-20’,

Having regard to the European resolution on the European Union and the G-20, considered as adopted on 20 November 2011 pursuant to Article 151-7 of the Rules of Procedure of the National Assembly,

Considering that organized regulation worldwide is required more than ever by the globalized economy to prevent the occurrence of new systemic crises,

Considering that the coordination of economic policies outlined in the G-20 has certainly contributed to cushioning the crisis crossed by the world over the past five years and averting the systemic effects of its most perilous episodes,

Considering that the outreach effort to the rest of the world – States and international organizations – made by the members of the G-20 which have successively been holding its presidency has strengthened the credibility of this body,

1. Reaffirms that the G-20 forms the proper format to regulate the globalized economy as its members are in a limited number compared with the traditional international organizations, produce 80% of world GDP and represent all the continents and all the categories of economic development profiles,

2. Welcomes the advances achieved at the Cannes and Los Cabos summits, especially as regards the:

a) Gradual reduction in international macroeconomic imbalances;

b) Framing and supervision of financial and banking establishments, products and services;

c) Fight against the excessive volatility of the prices of agricultural commodities;

3. Considers that the opportunity to set up a standing secretariat with a light structure should continue to be explored to institutionalize the G-20 and embed it definitely in the landscape of international relations;

4. Recognizes the relevance of the topic of growth, identified by the Russian presidency as pivotal in addressing the world’s present economic problems, through three lines of action:

a) Implementation of effective regulation;

b) Creation of quality jobs and support for investment;

c) Introduction of a climate of confidence and transparency;

5. Encourages the approach of the G20 consisting in basing itself on the expertise and know-how of the Organisation for Economic Co-operation and Development to optimize the multilateral mechanisms to combat tax avoidance and evasion, for the purposes, in particular, of countering the phenomenon of base erosion and profit shifting;

6. Desires that G20 session of 2013 should be the opportunity to strengthen the relations between the European Union and Russia, currently in disagreement on a number of political and economic topics but tied by a common destiny owing to their geographic proximity and the abundance of their trade.

GLOSSAIRE

AFD : Agence française de développement

AICD : Africa Infrastructure Country Diagnostic (ou Base de données sur les infrastructures en Afrique)

AMIS : Agricultural Market Information System (ou Système d’information sur les marchés agricoles)

ASEAN : Association of Southeast Asian Nations (ou Association des nations du Sud-Est asiatique)

ASL : Armée syrienne libre

BCE : Banque centrale européenne

BAfD : Banque africaine de développement

BAsD : Banque asiatique de développement

BCBS: Basel Committee on Banking Supervision (ou Comité de Bâle sur le contrôle bancaire)

BIaD : Banque interaméricaine de développement

BEaD : Banque eurasiatique de développement

BEPS : Base Erosion and Profit Shifting (ou érosion des bases et transfert des bénéfices)

BERD : Banque européenne de reconstruction et de développement

BIsD : Banque islamique de développement

BIT : Bureau international du travail

BRICS : Brazil, Russia, India, China, South Africa (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud)

B20 : Business 20 (ou G20 des patrons)

CAEM : Conseil d’aide économique mutuelle

CAF : Comité des affaires fiscales de l’OCDE

CCNUCC : Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

CEEA : Communauté économique d’Eurasie

CCG : Conseil de coopération des États arabes du Golfe

CDS : credit default swap (ou contrat d’échange sur risque de crédit)

CEDEAO : Communauté des États d’Afrique de l’Ouest

CMFI : Comité monétaire et financier international

CNUCED : Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement

COMECON : Conseil d’assistance économique mutuelle Conseil d’assistance économique mutuelle (ou CAEM, Conseil d’aide économique mutuelle)

CoST : Construction Sector Transparency Initiative (ou Initiative pour la transparence dans le secteur du transport)

CSF : Conseil de stabilité financière (ou FSB, Financial Stability Board)

CSI : Confédération syndicale internationale

C20 : Civil 20 (ou G20 des organisations non gouvernementales)

DTS : droits de tirage spéciaux

EOI : Expression of Interest

FAO : Food and Agriculture Organization (ou OAA, Organisation pour l’alimentation et l’agriculture)

FATCA : Foreign Account Tax Compliance Act

FIDA : Fonds international de développement agricole

FIE : Forum international de l’énergie

FMI : Fonds monétaire international

GAFI : Groupe d’action financière (ou FATF, Financial Action Task Force)

GLEIS : Global Legal Entity Identifer System (ou Système mondial d’identifiant des contreparties financières)

GMEP : Global Marine Environment Protection Initiative (Initiative de protection mondiale de l’environnement marin)

HFT : high frequency trading (transactions à haute fréquence)

IRIWI : International Research Initiative for Wheat Improvement (ou Initiative international de recherché pour l’amélioration du blé)

ITIE : Initiative pour la transparence dans les industries extractives

JODI : Joint Oil Data Initiative (ou Initiative conjointe sur les données relatives au pétrole)

L20 : Labour 20 (ou G20 social)

MEDEF : Mouvement des entreprises de France

MES : Mécanisme européen de stabilité

MSU : Mécanisme de surveillance unique

NEPAD : New Partnership for Africa’s Development (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique)

OACI : Organisation de l’aviation civile internationale

OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques

OICV : Organisation internationale des commissions de valeurs (ou IOSCO, International Organization of Securities Commissions)

OIF : Organisation internationale de la francophonie

OIT : Organisation internationale du travail

OMC : Organisation mondiale du commerce

OMD : Objectifs du millénaire pour le développement

OMI : Organisation maritime internationale

ONU : Organisation des Nations unies

OSCE : Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

OTAN : Organisation du Traité de l’Atlantique Nord

PAM : Programme alimentaire mondial

PCRDT : Programme-cadre de recherche et développement technologique

PNR : Passenger Name Record (ou données personnelles des passagers)

PPA : parité de pouvoir d’achat

PSM : Plan solaire méditerranéen

RSPP : Union russe des entrepreneurs et des industriels

SFI : Société financière internationale

SIFI : systemically important financial institutions (ou institutions financières d’importance systémique)

TANAP : Trans Anatolian Pipeline (ou gazoduc transanatolien)

TAP : Trans Adriatic Pipeline (ou gazoduc transadriatique)

TUAC: Trade Union Advisory Committee (ou Commission consultative syndicale auprès de l’OCDE)

T20 : Think 20 (ou G20 des think tanks)

UA : Union africaine

UE : Union européenne

Y20 : Youth 20 (ou G20 des jeunes)

3G : Global Governance Group (Groupe de gouvernance mondiale ou G27)

ANNEXES

ANNEXE 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Union européenne

Délégation à Moscou

S.E.M. Fernando M. VALENZUELA, ambassadeur, chef de la délégation

M. Guillaume DURAND, conseiller économique

Administration française

Présidence de la République

M. Matthieu PEYRAUD, conseiller G8-G20 et enjeux globaux

M. Bernard RULLIER, conseiller relations avec le Parlement

Ministère des affaires étrangères

Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats

M. Jean-Baptiste MATTEI, directeur général

Mme Clarisse GERARDIN, chargée de mission auprès du directeur des affaires économiques et internationales

Ambassade de France à Moscou

S.E.M. Jean de GLINIASTY, ambassadeur

M. Nicolas de LACOSTE, premier conseiller

Mme Catherine DISPARTI, deuxième conseillère, chargée des questions européennes

Mme Marie KEIRLE, conseillère pour les affaires sociales

Mme Marie PARET, deuxième secrétaire, chargée du suivi du G20

Ministère de l’économie et des finances

Cabinet de M. le ministre de l’économie et des finances

Mme Muriel LACOUE-LABARTHE, conseillère chargée des affaires européennes et financières internationales

Mme Maëva LEVEL, conseillère parlementaire

Direction générale du trésor

M. Ramon FERNANDEZ, directeur général, adjoint G20 au ministère de l’économie et des finances

M. Christophe BORIES, chef du bureau système financier international et préparation des sommets

Service économique régional de Moscou

M. Daniel MAITRE, chef du service économique, ministre-conseiller pour les affaires économiques et financières

Mme Nathalie DIERYCKXVISSCHERS, conseillère financière adjointe pour la Communauté des États indépendants et la Géorgie

Administration russe

Présidence de la République

Mme Ksenia YOUDAEVA, sherpa G20

Mme Svetlana LOUKACHE, conseillère G20

Ministère des affaires étrangères

Administration centrale

S.E.M. Vadim LOUKOV, ambassadeur chargé du G8-G20

M. Dimitri MIKHAILOV, rédacteur France

Ambassade de la Fédération de Russie à Paris

SEM. Alexandre ORLOV, ambassadeur

M. Igor NOSKOV, conseiller financier

Ministère des finances

M. Serguei STORCHAK, vice-ministre des finances, adjoint G20 au ministère des finances

Douma d’État

M. Alexandre ROMANOVITCH, député (groupe Russie juste), vice-président de la Commission des affaires internationales

M. Alexandre TARNAVSKI, député (groupe Russie juste), vice-président de la Commission des associations et des organisations religieuses

Société civile

Think tank

Mme Nadia ARBATOVA, cheffe du Département d’études sur la politique européenne de l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales (IMEMO) de l’Académie des sciences, directrice de la Fondation pour l’intégration européenne

Entreprises

Union des entrepreneurs et industriels russes (RSPP)

M. Oleg PREKSINE, vice-président, sherpa B20

M. Mikhail SMIRNOV, conseiller au département des affaires internationales

Gazprom-Bank

M. Richard CLEMENT, chargé des relations clients

M. Maxime PETRONEVICH, expert économiste principal

ANNEXE 2 :
RÉSOLUTION EUROPÉENNE SUR L’UNION EUROPÉENNE ET LE G20,
CONSIDÉRÉE COMME DÉFINITIVE LE 20 NOVEMBRE 2011,
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 151-7 DU RÈGLEMENT
DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les déclarations finales du sommet du G20 de Washington du 15 novembre 2008, du sommet du G20 de Londres du 3 avril 2009, du sommet du G20 de Pittsburgh du 25 septembre 2009, du sommet du G20 de Toronto du 27 juin 2010 et du sommet du G20 de Séoul du 12 novembre 2010,

Considérant que l’économie mondialisée requiert une régulation organisée au niveau planétaire ;

Considérant que les cinq premiers sommets du G20 n’ont abordé les questions relatives à la réforme du système monétaire international et à la résorption des déséquilibres macroéconomiques que superficiellement, que la première étape de cette réforme doit être accomplie dès le sommet de Cannes mais qu’elle ne saurait être finalisée avant plusieurs années ;

Considérant que la crise systémique dans laquelle l’économie mondiale est plongée prend des proportions de plus en plus alarmantes et que les orientations adoptées lors des cinq premiers sommets du G20 doivent être pleinement mises en œuvre et complétées dans les délais les plus brefs ;

Considérant que la sécurité alimentaire est un enjeu de premier ordre pour la stabilité mondiale et que la volatilité excessive des prix des matières premières agricoles provoque une incertitude insupportable tant pour les producteurs que pour les consommateurs, particulièrement dans les pays en voie de développement ;

Considérant que l’Union européenne, compte tenu de sa culture régulatrice, de la crise qui la frappe et de l’attribution de la présidence du G20 à l’un de ses États membres pour la première fois depuis 2009, est investie, cette année, d’une responsabilité particulière et doit, de ce fait, jouer un rôle d’initiative prépondérant ;

Considérant que la France, qui préside concomitamment le G20 et le G8 en 2011, bénéficie d’une opportunité exceptionnelle pour faire avancer la régulation mondiale ;

1. D’un point de vue général :

a) Prend acte des attentes placées dans le G20 pour prévenir la survenance de nouvelles crises systémiques ;

b) Salue l’engagement politique des grandes puissances mondiales au sein du G20, en particulier de l’Union européenne et de la France, pour prendre résolument en compte des problématiques économiques actuelles et s’efforcer d’apporter des solutions profitables à l’ensemble de la communauté internationale ;

c) Apporte son soutien aux priorités retenues par la présidence française du G20 ;

2. S’agissant des grands équilibres monétaires et macroéconomiques mondiaux :

a) Invite les États membres du G20 à adopter un plan d’action ambitieux destiné à corriger les déséquilibres macroéconomiques et à entraîner une croissance mondiale plus vigoureuse, plus stable et plus équilibrée ;

b) Suggère que les modalités de ce plan soient fixées dès l’ultime réunion du G20 finances, les 14 et 15 octobre 2011, afin que le sommet soit en mesure de se prononcer sur des propositions solides ;

c) Juge nécessaire la fixation de seuils d’alerte communs, notamment en matière de taux de change effectifs réels, de flux de capitaux et de balance des paiements, au-delà desquels des mesures volontaristes d’amortissement pourront être prises ;

d) Se prononce pour l’élaboration d’un code international de bonne conduite pour contrecarrer les tentations nationales non coopératives de manipulation du taux de change ou de fermeture des frontières ;

e) Propose que soit confiée aux organisations financières internationales la mission d’assurer une veille vis-à-vis de l’évolution de la liquidité mondiale

f) Appelle de ses vœux une coordination multilatérale des politiques monétaires ;

g) Souligne l’exigence de tisser des filets de sécurité financière, en passant d’une logique de prêts à une logique plus structurée de gestion des chocs systémiques mettant en réseau les dispositifs du FMI et les mécanismes de financement régionaux ;

h) Prône, d’une part, la diversification de la composition du panier des DTS en y incluant des devises de pays émergents et, d’autre part, l’accroissement de la part des DTS dans les réserves souveraines afin d’envisager, à un horizon plus lointain, l’émergence d’une unité monétaire de référence stable ;

i) Insiste sur la nécessité d’amener les pays émergents à renforcer progressivement la flexibilité de leurs taux de change et d’obtenir de leur part des engagements fermes quant à leur volonté de parvenir, à terme, à une convertibilité pleine et entière ;

j) Recommande à la communauté internationale de repositionner le mandat du FMI en renforçant son pouvoir de surveillance stratégique multilatérale ;

k) Préconise la suppression du droit de veto en vigueur au FMI, fixé à 15 % des quotes-parts, afin d’atténuer le caractère censitaire de son fonctionnement ;

3. S’agissant de la régulation des marchés et des produits bancaires et financiers :

a) Estime qu’il convient de renforcer la coopération transatlantique en matière de réglementation financière, afin de ne pas donner prise aux arbitrages réglementaires des agents économiques et de montrer la voie aux autres membres du G20 ;

b) Prie les États membres du G20 de poursuivre et d’achever les programmes législatifs nationaux entamés grâce aux précédents G20, notamment à travers l’agenda de la Commission européenne, pour ce qui concerne l’Union européenne, et le Dodd-Frank Act, pour ce qui concerne les États-Unis ;

c) Appelle à la création d’un observatoire international du risque systémique, couvrant l’ensemble des pays du G20 ;

d) Souhaite l’institution de stress tests communs, appliqués aux principaux établissements bancaires du G20, retenant des critères harmonisés suffisamment exigeants afin d’identifier les banques trop fragiles pour résister aux chocs ;

e) Conseille d’interdire ou de restreindre les opérations de gestion pour compte propre ou bien de séparer juridiquement et comptablement les activités de détail et d’investissement ;

f) Est favorable à l’application à la lettre de l’intégralité des modalités des accords de Bâle III, dans tous les pays du G20 ;

g) Soutient l’idée de l’interdiction d’acquérir à nu des CDS souverains ;

h) Considère que les rémunérations variables doivent être plus fermement encadrées, à travers des standards internationaux de plafonnement, à un niveau n’encourageant pas les prises de risques excessives ;

i) Émet le vœu que le G20 prenne date en faveur de la création d’une taxe universelle sur les transactions financières ;

j) Souligne que les acteurs économiques devraient être surveillés et régulés non pas selon leur statut juridique mais selon leur fonction dans le système financier, en incluant les banques, les compagnies d’assurance, les établissements de crédit et les fonds spéculatifs ;

k) Se déclare favorable à un encadrement effectif de la pratique du trading haute fréquence ;

l) Suggère que soit banni tout référencement des agences de notation dans les réglementations financières ;

m) Préconise que soient prohibées les notations souveraines pour les pays suivant un programme de soutien international ;

n) Appelle les autorités publiques à exiger des échelles de notation différentes pour les produits structurés et les instruments de dette simple ;

o) Invite l’Union européenne à créer une agence de notation européenne ;

4. S’agissant des marchés de matières premières agricoles :

a) Se félicite que la France soit parvenue à convaincre ses partenaires du G20 de la nécessité d’entreprendre une action conjointe pour réduire la volatilité des prix agricoles ;

b) Approuve les dispositions adoptées lors de la réunion des ministres de l’agriculture du G20 des 22 et 23 juin 2011 ;

c) Estime qu’il serait utile de prévoir des clauses de rendez-vous pour sécuriser le programme adopté par les ministres de l’agriculture ;

d) Recommande que toutes les transactions sur produits dérivés négociés de gré à gré soient enregistrées, transitent par des chambres de compensation et soient soumises à une autorité de marché ;

e) Propose que soient imposées des limites de position et des dépôts minimaux au prorata du montant des transactions ;

f) Souhaite que les pays du G20, à Cannes, initient la même démarche coopérative pour réduire la volatilité des prix des différentes catégories de matières premières minérales ;

5. S’agissant des modalités de la gouvernance mondiale :

a) Se déclare partisane de la création d’un secrétariat permanent, structure légère hébergée par les services de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), travaillant en étroite collaboration avec les autres organisations internationales ;

b) Est sensible à l’attente, exprimée par les États de l’Union européenne extérieurs au G20, d’une concertation communautaire aussi poussée que possible ;

c) S’associe à l’idée d’une fusion, à terme, des fonctions de président de la Commission européenne et de président permanent du Conseil européen ;

d) Juge réaliste que soit maintenu, dans l’immédiat, une représentation nationale au sein du G20, de préférence à un système par circonscriptions régionales ;

e) Préconise que l’Union africaine et le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique soient intégrés au G20 en tant que membres à part entière ;

6. En ce qui concerne la crise de la zone euro :

a) Encourage vivement l’Union européenne et la zone euro à poursuivre leurs efforts en vue d’accroître l’intégration économique et financière ;

b) Invite les institutions européennes à recourir à l’article 219, alinéas 1 et 2, du TFUE afin d’instituer une véritable politique de change au niveau de la zone euro, à travers notamment le renforcement de la gouvernance ;

c) Attire l’attention sur l’impérieuse nécessité que l’Union européenne convainque les grandes puissances extra-européennes de s’associer à ses efforts et à ceux de la zone euro en vue de restaurer la confiance des marchés.

ANNEXE 3 :
COMMUNIQUÉ FINAL
DU SOMMET DES CHEFS D’ÉTAT ET DE GOUVERNEMENT

CANNES, 3 ET 4 NOVEMBRE 2011

1. Nous, chefs d’État et de gouvernement du G20, nous sommes réunis à Cannes les 3 et 4 novembre 2011.

2. Depuis notre dernier sommet, la reprise mondiale s’est essoufflée, notamment dans les pays développés, le chômage atteignant des niveaux inacceptables. Dans ce contexte, les tensions sur les marchés financiers se sont accentuées, essentiellement en raison des risques liés aux dettes souveraines en Europe. Par ailleurs, des signes clairs de ralentissement de la croissance apparaissent dans les marchés émergents. Les fluctuations des prix des matières premières ont compromis la croissance. Les déséquilibres mondiaux persistent.

3. Aujourd’hui, nous réaffirmons notre engagement à travailler ensemble et nous avons pris des décisions visant à redynamiser la croissance économique, à créer des emplois, à assurer la stabilité financière, à favoriser l’intégration sociale et à mettre la mondialisation au service des besoins des populations.

Une stratégie mondiale pour la croissance et l’emploi

4. Pour relever les défis immédiats qui se posent à l’économie mondiale, nous nous engageons à coordonner nos actions et nos politiques. Chacun d’entre nous jouera son rôle.

5. Nous sommes convenus d’un Plan d’action pour la Croissance et l’Emploi destiné à remédier à certaines fragilités à court terme et à renforcer les fondements de la croissance à moyen terme.

• Les pays développés s’engagent à adopter des politiques de nature à renforcer la confiance et à soutenir la croissance, et à mettre en œuvre des mesures claires, crédibles et ciblées pour rééquilibrer leurs finances publiques. Nous saluons les décisions prises par les chefs d’État et de gouvernement européens le 26 octobre 2011 pour rétablir la viabilité de la dette en Grèce, renforcer les banques européennes, mettre en place des dispositifs de protection contre la contagion et jeter les bases d’une réforme vigoureuse de la gouvernance économique dans la zone euro, et nous appelons de nos vœux leur mise en œuvre rapide. Nous soutenons les mesures présentées par l’Italie au Sommet de la Zone euro et l’accord sur l’évaluation et la surveillance détaillée de la Commission européenne. Dans ce contexte, nous saluons la décision de l’Italie d’inviter le FMI à procéder à une vérification publique de la mise en œuvre de ses politiques sur une base trimestrielle.

• En fonction de leur situation nationale, les pays dont les finances publiques demeurent solides s’engagent à laisser fonctionner les mécanismes de stabilisation automatiques et à prendre des mesures discrétionnaires pour soutenir la demande intérieure si la situation économique devait s’aggraver fortement. Les pays affichant des excédents courants importants s’engagent à mettre en œuvre des réformes destinées à accroître la demande intérieure, associées à une plus grande flexibilité des taux de change.

• Nous nous engageons tous à renforcer les réformes structurelles pour augmenter la production dans nos pays.

• Les politiques monétaires préserveront la stabilité des prix à moyen terme et continueront de soutenir la reprise économique.

6. Nous sommes résolus à renforcer la dimension sociale de la mondialisation. Nous sommes fermement convaincus que l’emploi et l’intégration sociale doivent être au cœur de nos actions et de nos politiques afin de restaurer la croissance et la confiance. Par conséquent, nous décidons de mettre en place un groupe de travail du G20 qui s’intéressera prioritairement à l’emploi des jeunes. Nous reconnaissons qu’il est important d’investir dans des socles de protection sociale qui soient adaptés à chaque situation nationale. Nous encourageons l’OIT à continuer de promouvoir la ratification et l’application des huit conventions fondamentales garantissant les principes et les droits fondamentaux au travail.

7. Convaincus du rôle essentiel du dialogue social, nous nous félicitons des résultats du B20 et du L20 et de leur communiqué conjoint.

Vers un système monétaire international plus stable et plus résilient

8. Nous avons progressé sur la voie de la réforme du système monétaire international pour le rendre plus représentatif, plus stable et plus résilient. Nous sommes convenus d’actions et de principes qui contribueront à recueillir les fruits de l’intégration financière et à renforcer la résilience à la volatilité des flux de capitaux internationaux. Ceci comprend des conclusions cohérentes pour nous guider dans la gestion des flux de capitaux, des principes communs de collaboration entre le FMI et les accords financiers régionaux et un plan d’action concernant les marchés obligataires en monnaie locale. Nous reconnaissons que la composition du panier du DTS doit continuer à refléter le rôle respectif des devises dans le système commercial et financier international. L’évaluation de la composition du DTS devra être fondée sur les critères existants et nous demandons au FMI de les clarifier davantage. Pour tenir compte de l’évolution au fil du temps du rôle et des caractéristiques des devises, la composition du panier du DTS sera révisée en 2015, ou plus tôt, au fur et à mesure que les devises respecteront les critères définis pour intégrer le panier. Nous sommes également déterminés à progresser davantage vers une surveillance mieux intégrée, plus équitable et plus efficace du FMI, et à mieux identifier et traiter les effets de contagion. Tout en poursuivant nos efforts pour renforcer la surveillance, nous reconnaissons qu’il est nécessaire de mieux intégrer les surveillances bilatérale et multilatérale et nous attendons les propositions du FMI concernant une nouvelle décision intégrée sur la surveillance au début de l’année prochaine et une appropriation et des effets d’entraînement renforcés.

9. Nous nous engageons à nous orienter plus rapidement vers des régimes de change davantage liés au marché, à accroître la flexibilité des taux de change pour refléter les fondamentaux économiques sous-jacents, à éviter les désalignements persistants des taux de change et à nous abstenir de procéder à des dévaluations compétitives des monnaies. Nous sommes résolus à concrétiser nos engagements en faveur des réformes des taux de change énoncés dans notre Plan d’action pour la Croissance et l’Emploi pour remédier à certaines fragilités à court terme, rétablir la stabilité financière et renforcer les fondements de la croissance à moyen terme. Nos actions contribueront à relever les défis résultant de l’évolution de la liquidité mondiale et de la volatilité des flux de capitaux, facilitant ainsi de nouveaux progrès dans les réformes des taux de change et réduisant l’accumulation excessive de réserves.

10. Nous sommes convenus de poursuivre nos efforts pour renforcer les filets de sécurité financière mondiaux et nous soutenons la proposition du FMI de créer la nouvelle ligne de liquidité et de précaution pour offrir au cas par cas de la liquidité de court terme en quantité plus abondante et selon des modalités plus souples aux pays qui appliquent des politiques rigoureuses et ont des fondamentaux solides mais subissent des chocs exogènes. Nous soutenons également la proposition du FMI de mettre en place une facilité unique afin de répondre aux besoins d’aide d’urgence de ses membres. Nous demandons au FMI de discuter de ces deux propositions et de les finaliser dans les meilleurs délais.

11. Nous nous félicitons de l’adoption du plan global pour la zone euro et nous demandons sa mise au point et sa mise en œuvre rapides, ainsi que des réformes nationales. Nous nous félicitons de la détermination de la zone euro à apporter toutes ses ressources et toute sa capacité institutionnelle pour rétablir la confiance et la stabilité financière et pour assurer le bon fonctionnement des marchés monétaires et financiers.

Nous veillerons à ce que le FMI continue de disposer des ressources nécessaires pour jouer son rôle systémique au profit de l’ensemble de ses membres, en nous appuyant sur les ressources substantielles que nous avons déjà mobilisées depuis Londres en 2009. Nous sommes disposés à faire en sorte que des ressources supplémentaires puissent être mobilisées rapidement et nous demandons à nos Ministres des finances de travailler d’ici leur prochaine réunion au déploiement d’un éventail d’options comprenant des contributions bilatérales au FMI, des DTS et des contributions volontaires à une structure spéciale du FMI, par exemple un compte administré. Nous mettrons en œuvre rapidement et dans sa totalité la réforme des quotes-parts et de la gouvernance du FMI décidée en 2010.

Réformer le secteur financier et renforcer l’intégrité du marché

12. À Washington, en 2008, nous nous étions engagés à faire en sorte que tous les marchés, produits et acteurs financiers soient soumis à une régulation ou à une supervision adaptées. Nous tiendrons nos engagements et poursuivrons la réforme du système financier.

13. Nous sommes convenus d’un ensemble de mesures qui visent à ce qu’aucun établissement financier ne puisse être considéré comme « trop important pour pouvoir faire faillite » et à éviter au contribuable d’assumer le coût de la résolution des banques. Le Conseil de stabilité financière (CSF) publie aujourd’hui une première liste d’établissements financiers d’importance systémique mondiale. Ces établissements seront soumis à une supervision renforcée, à une nouvelle norme internationale pour les régimes de résolution et, à partir de 2016, à des ratios de fonds propres plus élevés. Nous sommes disposés à identifier les entités financières non bancaires d’importance systémique.

14. Nous avons décidé de renforcer la régulation et la supervision du système bancaire parallèle. Nous développerons la réglementation concernant l’intégrité et l’efficacité des marchés, notamment en faisant face aux risques posés par les transactions à haute fréquence et la liquidité opaque. Nous avons chargé l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) d’évaluer le fonctionnement des marchés de contrats d’assurance des risques de défaut. Nous avons arrêté des principes visant à protéger les consommateurs de services financiers.

15. Nous ne tolèrerons pas un retour des comportements observés dans le secteur financier avant la crise, et nous contrôlerons étroitement la mise en œuvre de nos engagements concernant les banques, les marchés dérivés de gré à gré et les pratiques de rémunération.

16. Compte tenu des résultats déjà obtenus, nous sommes convenus de réformer le CSF pour améliorer sa capacité à coordonner et à contrôler notre programme de régulation financière. Cette réforme suppose de le doter de la personnalité morale et d’une autonomie financière plus importante. Nous remercions M. Mario Draghi pour le travail accompli et saluons la nomination de M. Mark Carney, gouverneur de la Banque centrale du Canada, au poste de président du CSF, et de M. Philip Hildebrand, président de la Banque nationale suisse, au poste de vice-président.

17. Nous appelons toutes les juridictions à adhérer aux normes internationales dans le domaine fiscal et prudentiel et dans celui de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Nous sommes prêts à utiliser nos contre-mesures existantes, si nécessaire. En matière fiscale, nous nous félicitons des progrès réalisés et nous appelons toutes les juridictions à prendre les mesures nécessaires pour remédier aux défaillances constatées grâce aux analyses menées par le Forum mondial. Ceci concerne notamment les onze juridictions dont le cadre a été jugé insuffisant par le Forum mondial. Nous soulignons l’importance de systèmes d’échanges d’informations fiscales complets et nous encourageons les travaux du Forum mondial visant à définir les moyens d’améliorer ces échanges. Nous nous félicitons de l’engagement que nous avons tous pris de signer la Convention multilatérale concernant l’assistance administrative en matière fiscale et nous encourageons vivement d’autres juridictions à adhérer à cette convention.

S’attaquer à la volatilité des prix des matières premières
et promouvoir l’agriculture

18. Dans le cadre de notre programme de régulation financière, nous entérinons les recommandations de l’OICV pour l’amélioration de la régulation et de la supervision des marchés de dérivés de matières premières. Nous convenons que les régulateurs de marché doivent être dotés de réels pouvoirs d’intervention pour prévenir les abus de marché. En particulier, ils devraient, entre autres pouvoirs d’intervention, disposer et faire usage de leurs pouvoirs de contrôle des positions, y compris établir des limites de position ex ante en tant que de besoin.

19. Promouvoir la production agricole est essentiel pour nourrir la population mondiale. A cette fin, nous décidons d’agir dans le cadre du Plan d’action sur la volatilité des prix alimentaires et sur l’agriculture approuvé par nos Ministres de l’agriculture en juin 2011. En particulier, nous décidons d’investir dans la recherche et développement en matière de productivité agricole et de la soutenir. Nous avons lancé le « Système d’information sur les marchés agricoles » (SIMA) pour accroître la transparence sur les marchés des produits agricoles. Pour renforcer la sécurité alimentaire, nous nous engageons à élaborer les instruments appropriés pour la gestion des risques et des situations humanitaires d’urgence. Nous décidons que les denrées alimentaires achetées par le Programme alimentaire mondial à des fins humanitaires non commerciales ne seront pas soumises à des restrictions aux exportations ou à des taxes extraordinaires. Nous nous félicitons de la création d’un « Forum de réaction rapide » afin d’améliorer la capacité de la communauté internationale à coordonner les politiques et à élaborer des réponses communes en cas de crises des marchés.

Améliorer les marchés de l’énergie
et poursuivre la lutte contre le changement climatique

20. Nous sommes déterminés à renforcer le fonctionnement et la transparence des marchés de l’énergie. Nous nous engageons à améliorer la régularité, l’exhaustivité et la fiabilité de la base de données sur le pétrole JODI-Oil et à traiter la base de données JODI-gaz suivant les mêmes principes. Nous souhaitons qu’un dialogue régulier sur les perspectives et prévisions à court, moyen et long terme concernant les hydrocarbures et le charbon ait lieu chaque année entre les producteurs et les consommateurs. Nous demandons aux organisations compétentes d’émettre des recommandations sur le fonctionnement et le contrôle des agences d’évaluation des prix. Nous réaffirmons notre engagement en faveur de la rationalisation et de l’abandon progressif à moyen terme des subventions inefficaces aux énergies fossiles qui encouragent la surconsommation, tout en apportant aux plus pauvres un soutien ciblé.

21. Nous sommes déterminés à assurer le succès de la prochaine Conférence de Durban sur le changement climatique et nous soutenons l’Afrique du Sud, qui est le nouveau président de la Conférence. Nous appelons de nos vœux la mise en œuvre des accords de Cancun et de nouveaux progrès dans tous les domaines de négociation, notamment la mise en œuvre opérationnelle du Fonds vert pour le climat dans le cadre d’un paquet de mesures équilibré lors de la Conférence de Durban. Nous avons débattu du rapport des institutions financières internationales sur le financement du climat et nous avons demandé à nos Ministres des finances de poursuivre leurs travaux en la matière, dans le respect des objectifs, des dispositions et des principes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.

Éviter le recours au protectionnisme
et renforcer le système commercial multilatéral

22. Alors que l’économie mondiale traverse une période critique, il est important de souligner les mérites du système commercial multilatéral pour éviter le protectionnisme et le repli sur soi. Nous réaffirmons nos engagements de statu quo jusqu’à la fin de 2013, comme décidé à Toronto, et nous nous engageons à retirer toutes les nouvelles mesures protectionnistes qui auraient pu apparaître, y compris les nouvelles restrictions aux exportations et les mesures d’encouragement des exportations qui seraient contraires aux règles de l’OMC. Nous demandons à l’OMC, à l’OCDE et à la CNUCED de continuer à assurer le suivi de la situation et de rendre compte publiquement tous les semestres.

23. Nous restons attachés au mandat du programme de Doha pour le développement (PDD). Toutefois, il est clair que nous ne conclurons pas le PDD si nous continuons à conduire les négociations comme par le passé. Nous reconnaissons les progrès accomplis jusqu’ici. Pour contribuer à restaurer la confiance, nous devons mettre en œuvre en 2012 des approches neuves et crédibles pour faire progresser les négociations, notamment en ce qui concerne les préoccupations pour les pays les moins avancés et, s’ils peuvent aboutir, les éléments restants du mandat de Doha. Nous demandons à nos Ministres de travailler sur ces approches lors de la conférence ministérielle qui se tiendra prochainement à Genève, ainsi que d’ouvrir des discussions sur les défis et opportunités pour le système commercial multilatéral dans une économie mondialisée, et d’en faire rapport d’ici au sommet du Mexique.

24. Par ailleurs, à titre de contribution à un système commercial basé sur des règles, plus efficace, nous sommes favorables au renforcement de l’OMC qui doit jouer un rôle plus actif dans l’amélioration de la transparence des relations et des politiques commerciales et dans celle du fonctionnement du mécanisme de règlement des différends.

Faire face aux défis du développement

25. Reconnaissant que les chocs économiques affectent les plus vulnérables de manière disproportionnée, nous nous engageons à assurer une croissance plus résiliente qui profite à tous.

26. La crise humanitaire dans la Corne de l’Afrique souligne l’impérieuse nécessité de renforcer l’intervention d’urgence et de long terme pour remédier à l’insécurité alimentaire. Nous soutenons les initiatives concrètes mentionnées dans la Déclaration finale de Cannes, en vue de renforcer les investissements dans le secteur agricole et d’atténuer les effets de la volatilité des prix, notamment dans les pays à faible revenu et dans l’intérêt des petits exploitants. Nous nous félicitons de l’initiative prise par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour créer un projet pilote de système régional ciblé de réserves alimentaires humanitaires d’urgence et de l’initiative ASEAN+3 concernant une réserve d’urgence en riz.

27. Reconnaissant que dans de nombreux pays en développement, le manque d’infrastructures limite considérablement le potentiel de croissance, notamment en Afrique, nous entérinons les recommandations du groupe de haut niveau et des BMD et nous mettons l’accent sur onze projets d’infrastructures exemplaires. Nous appelons également les BMD, en coopération avec les pays concernés, à poursuivre la mise en œuvre des projets répondant aux critères fixés par le groupe de haut niveau.

28. Nous soulignons le rôle crucial de l’aide publique au développement pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement. Les engagements pris par les pays développés en matière d’aide doivent être honorés. Les pays émergents s’engageront à accroître le niveau de leur aide à d’autres pays en développement ou continueront à le faire. Nous reconnaissons également qu’au fil du temps, de nouvelles sources de financement doivent être trouvées pour répondre aux besoins de développement et faire face au changement climatique. Nous avons discuté d’un ensemble d’options de financements innovants, mises en évidence par M. Bill Gates. Certains d’entre nous ont mis en œuvre ou sont prêts à étudier certaines de ces options. Nous reconnaissons les initiatives prises dans certains de nos pays pour taxer le secteur financier à des fins diverses, dont une taxe sur les transactions financières entre autres pour soutenir le développement.

Intensifier notre lutte contre la corruption

29. Nous avons réalisé des progrès significatifs dans la mise en œuvre du plan d’action sur la lutte contre la corruption, la promotion de l’intégrité des marchés et le soutien à l’instauration d’un climat des affaires sain. Nous soulignons la nécessité de mettre rapidement en œuvre un cadre législatif international fort, d’adopter des mesures nationales en matière de prévention et de lutte contre la corruption et la corruption d’agents étrangers, de renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre la corruption et de concevoir des initiatives conjointes dans ce domaine entre les secteurs public et privé.

Réformer la gouvernance mondiale pour le XXIe siècle

30. Nous nous félicitons du rapport du Premier Ministre britannique David Cameron sur la gouvernance mondiale. Nous sommes d’accord sur le fait que le G20 doit demeurer un groupe informel. Nous décidons d’officialiser la troïka. Nous poursuivrons notre dialogue permanent et efficace avec les non membres, parmi lesquels l’Organisation des Nations Unies, et nous nous réjouissons par avance de leurs contributions à nos travaux.

31. Nous réaffirmons que l’esprit fondateur du G20, qui consiste à réunir les grandes économies sur un pied d’égalité pour favoriser l’action, est essentiel, et nous décidons donc de mettre notre volonté politique collective au service de notre programme d’action économique et financier, et de la réforme et de l’efficacité accrue des institutions internationales concernées. Nous soutenons les réformes qui seront menées au sein de la FAO et du CSF. Nous nous sommes engagés à renforcer notre cadre commercial multilatéral. Nous appelons les organisations internationales, notamment les Nations Unies, l’OMC, l’OIT, la Banque mondiale, le FMI et l’OCDE à renforcer leur dialogue et leur coopération, notamment sur l’impact social des politiques économiques, ainsi qu’à intensifier leur coordination.

32. Le 1er décembre 2011, le Mexique prendra la présidence du G20. Nous nous réunirons en juin 2012 à Los Cabos, Basse-Californie, sous la présidence du Mexique. La Russie présidera le G20 en 2013, l’Australie en 2014 et la Turquie en 2015. Nous avons aussi convenu que, en tant que composante de nos réformes du G20, après 2015 les présidences annuelles du G20 seront choisies à partir de groupes régionaux tournants, en commençant par le groupe asiatique qui comprend la Chine, la Corée, l’Indonésie et le Japon.

33. Nous remercions la France pour sa présidence du G20 et pour l’organisation du Sommet de Cannes, qui a été couronné de succès.

ANNEXE 4 :
ORGANISATION EN DEUX FILIÈRES DE LA PRÉSIDENCE MEXICAINE

Source : site web de la présidence mexicaine :
http://www.g20mexico.org/index.php/en/mexican-presidency-of-the-g20

ANNEXE 5 :
CALENDRIER DES RÉUNIONS DE LA PRÉSIDENCE RUSSE

Sherpas (11-12 décembre 2012, Moscou)

Think 20 (11 décembre 2012, Moscou)

Business 20 (12 décembre 2012, Moscou)

Civil 20 (12 décembre 2012, Moscou)

Conférence sur le programme de la présidence russe, « Favoriser la croissance économique durable » (13 décembre 2012, Moscou)

Cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée (14-15 janvier 2013, New Delhi)

Groupe de travail architecture financière international (13 février 2013, Moscou)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (14-15 février 2013, Moscou)

G20 Finances – Ministres des finances et gouverneurs des banques centrales (15-16 février 2013, Moscou)

Groupe de travail énergie durable (19-20 février 2013, Moscou)

Task Force emploi (21-22 février 2013, Moscou)

Groupe de travail anti-corruption (25-26 février 2013, Moscou)

Groupe de travail développement (26-27 février 2013, Moscou)

Sherpas (3-4 mars 2013, Moscou)

Séminaire sur la gestion des dettes publiques (2-3 avril 2013, Moscou)

Cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée (10-11 avril 2013, Paris)

Séminaire sur le rôle des mécanismes financiers régionaux dans l’architecture financière internationale et sur leur coopération avec le FMI (17 avril 2013, Washington)

Groupe de travail architecture financière international (17 avril 2013, Washington)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (18 avril 2013, Washington)

G20 Finances – Ministres des finances et gouverneurs des banques centrales (18-19 avril 2013, Washington)

Conférence sur les femmes et la finance (21 avril 2013, Washington)

Groupe de travail régulateurs nationaux de l’énergie – Niveau experts (25 avril 2013, Paris)

Conférence anti-corruption de haut niveau G20-B20 (25-26 avril 2013, Paris)

Sherpas (11-12 mai 2013, Saint-Pétersbourg)

Groupe de travail développement (15-17 mai 2013, Moscou)

Séminaire sur la transparence des marchés de matières premières « une information effective pour des marchés efficaces » (28 mai 2013, Genève)

Séminaire sur le commerce (29 mai 2013, Paris, OCDE)

Groupe de travail investissements dans le secteur de l’énergie (1er-30 juin 2013, Washington)

Table-ronde des régulateurs nationaux de l’énergie (3-4 juin 2013, Kazan)

Task Force emploi (3-4 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Séminaire de haut niveau sur les agences de notation (4-5 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Task Force emploi et adjoints de la filière finances (5 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Groupe de travail anti-corruption (Ottawa, 6-7 juin 20103)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (6-7 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Conférence « Amélioration la documentation financière et les systèmes de protection des consommateurs de produits et services financiers » (13-14 juin 2013, Moscou)

Sommet Civil 20 (13-14 juin 2013, Moscou)

Sommet Youth 20 (18-21 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Sommet Business 20 (20-21 juin 2013, Saint-Pétersbourg)

Cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée (3-4 juillet 2013, Moscou)

Conférence sur les marchés de matières premières et de l’énergie (8 juillet 2013, Saint-Pétersbourg)

Groupe de travail développement (8-10 juillet 2013, Moscou)

Groupe de travail énergie durable (9-10 juillet, Saint-Pétersbourg)

Task force emploi (17 juillet 2013, Moscou)

Partenaires sociaux – B20 et L20 (17 juillet 2013, Moscou)

Ministres du travail et partenaires sociaux (18 juillet 2013, Moscou)

Ministres du travail (18-19 juillet 2013, Moscou)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (18-19 juillet 2013, Moscou)

G20 Finances – Ministres des finances et ministres du travail (19 juillet 2013, Moscou)

G20 Finances – Ministres des finances et gouverneurs des banques centrales (19-20 juillet 2013, Moscou)

Sherpas (25-26 juillet, Saint-Pétersbourg)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (2-5 septembre 2013, Saint-Pétersbourg)

Sherpas (2-5 septembre 2013, Saint-Pétersbourg)

Sherpas et adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (2-5 septembre 2013, Saint-Pétersbourg)

SOMMET DES CHEFS D’ÉTAT ET DE GOUVERNEMENT (5-6 septembre 2013, Saint-Pétersbourg)

Task force emploi (1er-31 octobre 2013, Genève, OIT)

Groupe de travail anti-corruption (1er-31 octobre 2013, lieu à préciser)

Groupe de travail architecture financière internationale (8-9 octobre 2013, Washington)

G20 Finances – Adjoints des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales (9-10 octobre 2013, Washington)

G20 Finances – Ministres des finances et gouverneurs des banques centrales (10-11 octobre 2013, Washington)

Partenariat mondial pour l’inclusion financière – Séminaire (21-22 octobre 2013, Saint-Pétersbourg)

Groupe de travail développement (22-23 octobre 2013, Moscou)

Sherpas (23-24 octobre 2013, Moscou)

Plénière du Conseil de stabilité financière (17-18 novembre 2013, Moscou)

ANNEXE 6 :
MESSAGES-CLÉS DU B20 SOUS PRÉSIDENCE RUSSE

PROMOUVOIR UN NOUVEAU MODÈLE DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE

Investissements et infrastructures

→ Investissements transfrontaliers : identifier et supprimer les restrictions à la liberté des flux de capitaux pour renforcer les investissements transfrontaliers qui soutiennent la croissance économique

→ Investissement dans les infrastructures : stimuler l’investissement privé dans les infrastructures et les autres atouts économiques des différents pays

→ Productivité de l’investissement : encourager l’application des meilleures pratiques afin d’accroître la productivité des investissements dans les infrastructures et l’énergie verte

Système financier – Restaurer la confiance et la croissance

→ Régulation financière : calibrer et échelonner des réformes contribuant à sécuriser une « croissance soutenable, inclusive et équilibrée »

→ Inclusion financière : offrir une assistance financière au secteur des PME et des régimes de garantie partiels incitant les institutions financières à octroyer des crédits

→ Infrastructure de marchés financiers : créer une infrastructure de marchés financiers fiable et résistante au stress, notamment sur les marchés émergents

Le commerce comme moteur de croissance

→ Protectionnisme : reporter l’échéance du moratoire après 2014 puis consolider le système de suivi et explorer des voies pour revenir sur les mesures protectionnistes en vigueur

→ Facilitation du commerce : s’investir dans l’accord sur la facilitation du commerce de l’OMC

→ Accords commerciaux préférentiels (ACP) : encourager l’OMC à assumer le rôle de leader dans l’établissement des principes guidant la conception des ACP, y compris en concevant un cadre de bonnes pratiques

L’innovation et le développement comme priorité globale

→ Propriété intellectuelle : soutenir la flexibilité croissante du régime de propriété intellectuelle et promouvoir la compétition juste sur les marchés innovants

→ Énergie : promouvoir l’accès à des sources énergétiques abordables à travers l’accélération du développement des technologies renouvelables, l’accent sur le gaz naturel et le gaz de schiste, le financement des technologies vertes et la libéralisation du commerce des produits verts

→ Biotechnologies : ériger l’espérance de vie en bonne santé en priorité des politiques nationales de santé publique et réorienter les dépenses de santé vers le développement et la diffusion de solutions nouvelles

→ Technologies de l’information et de la communication (TIC) : promouvoir un Internet ouvert et interconnecté afin de tirer la production industrielle, de favoriser l’essor de nouveaux modèles économiques d’entreprise, de rendre le haut débit accessible à tous et d’accroître la productivité agricole grâce à l’accès aux TIC

Création d’emplois et investissements dans le capital humain

→ Employabilité : assurer l’accès universel à une éducation obligatoire et de haute qualité, garantissant l’apprentissage d’un noyau de connaissances, particulièrement dans les matières littéraires, scientifiques et techniques

→ Entreprises et entrepreneuriat : établir un environnement favorable à l’entrepreneuriat et à la création d’emplois, générant une variété de types d’emplois et permettant aux entreprises d’embaucher le plus rapidement possible

→ Défi démographique : adapter les systèmes de retraite de façon à stabiliser le taux de dépendance des séniors, à élever le nombre de travailleurs âgés et à ajuster les politiques d’immigration pour les mettre en adéquation avec les besoins du marché du travail

Transparence et lutte contre la corruption

→ Dialogue G20-B20 et rôle du B20 : organiser régulièrement des réunions de fond entre la task force du B20 et le groupe de travail anti-corruption du G20

→ Pots-de-vin : garantir l’équité et la transparence des marchés publics

→ Formation continue dans les entreprises, les PME et la fonction publique : mettre en œuvre des programmes annuels de mise à niveau sur la législation nationale et internationale

→ Action collective et lutte anti-corruption au niveau mondial et dans chaque pays du G20 : créer ou soutenir des plates-formes d’action collective et des centres d’excellence anti-corruption

Dialogue G20-B20

→ Actions du B20 : s’accorder sur une stratégie de moyen terme pour garantir la consistance des programmes de travail annuels du B20 ainsi que la continuité entre les présidences et l’alignement de leurs priorités respectives sur les priorités centrales de long-terme

→ Actions du G20 : inviter le B20 à un dialogue structuré au sein des mécanismes formels du G20, notamment à travers des groupes de travail conjoints G20-B20

→ Actions G20-B20 : développer et mettre en place, d’ici à 2015, un mécanisme de coordination effectif et réaliste

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 () L’Organisation des Nations unies (ONU) et les grandes organisations spécialisées.

3 () Qu’il s’agisse du club des cinq grands émergents – le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud (BRICS) –, des vingt-huit puissances moyennes regroupées au sein du Global Governance Group (3G) ou du G77 et du G24, émanation des pays du Sud dans le cadre de l’architecture des Nations unies.

4 () Exercées successivement, entre 2008 et 2010, par les États-Unis, le Royaume-Uni, de nouveau les États-Unis, le Canada puis la Corée du Sud.

5 () Parmi ses vingt membres, on compte quatre pays du continent – l’Allemagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni – plus l’Union européenne, qui y siège en tant que telle.

6 () « L’union européenne et le G20 : répondre aux enjeux de la régulation mondiale » (no 3443).

7 () « L’Union européenne au cœur du projet de régulation mondiale porté par le G20 » (no 3784).

8 () Ou outreach.

9 () Voir l’annexe 2.

10 () Washington en novembre 2008, Londres en avril 2009, Pittsburgh en septembre 2009, Toronto en juin 2010 et Séoul en novembre 2010.

11 () Voir l’annexe 1.

12 () Le 18 juin 2013, au terme du sommet des chefs d’État et du gouvernement du G8 de Lough Erne, le Président de la République François Hollande a souligné l’importance de ces deux thèmes pour la régulation économique mondiale.

13 () Les différents points de cette section font écho au rapport d’information no 3784 d’octobre 2011 de la Commission des affaires européennes, qui décrivait dans le détail le programme de la présidence française (voir pages 163 à 227).

14 () Voir, en annexe 3, le communiqué final.

15 () Ou HFT, pour high frequency trading.

16 () Ou darkpools.

17 () Ou CDS, pour credit default swap.

18 () Ou GLEIS, pour Global Legal Entity Identifier System.

19 () Opération consistant à transformer un prêt en titre financier échangeable.

20 () Ou SIFI, pour systemically important financial institutions.

21 () Ou hedge funds.

22 () Ou shadow banking system.

23 () La France fait partie de ce groupe.

24 () Ou whistleblowers.

25 () Incluant notamment la communication COM (2011) 308 du 6 juin 2011 de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen « La lutte contre la corruption dans l’Union européenne ».

26 () Construction Sector Transparency Initiative.

27 () Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil COM (2011) 683 du 25 octobre 2011 modifiant la directive 2004/109/CE sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et la directive 2007/14/CE de la Commission.

28 () Celle-ci s’est finalement concrétisée le 22 août 2012, après dix-huit ans de négociations.

29 () Voir les pages 71 et suivantes du rapport d’information no 3784 d’octobre 2011 de la Commission des affaires européennes.

30 () Pour Food and Alimentation Organization of the United Nations.

31 () Ou IRIWI, pour International Research Initiative for Wheat Improvement.

32 () Banque mondiale, Banque africaine de développement (BAfD), Banque asiatique de développement (BAsD), Banque eurasiatique de développement (BEaD), Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), Banque interaméricaine de développement (BIaD) et Banque islamique de développement (BIsD).

33 () Pour Agricultural Markets Information System.

34 () Pour Joint Oil Data Initiative.

35 () Pour Africa Infrastructure Country Diagnosis.

36 () Proposition de directive du Conseil COM (2013) 712 du 14 février 2013 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financières.

37 () Labour 20.

38 () Business 20.

39 ()Le sommet de Los Cabos s’est tenu quelques jours avant celui de Rio+20.

40 () Think 20.

41 () Civil 20.

42 () Young 20.

43 () Voir l’annexe 4.

44 () Dites « Too big to fail ».

45 () Mécanisme financier rattaché à la CCNUCC qui vise à aider les pays les plus vulnérables à mettre sur pied des projets pour combattre les effets des changements climatiques.

46 () Voir les pages 231 à 243 du rapport d’information ainsi que le point 5.a) de la résolution européenne du 20 novembre 2011.

47 () Ou BCBS, pour Basel Committee on Banking Supervision.

48 () La Banque centrale de la Fédération de Russie mise sur le conservatisme en mettant en œuvre une politique monétaire prudente, alors qu’il existe un potentiel d’augmentation du crédit domestique.

49 () Voir les développements ci-dessous relatifs à la crise à Chypre, État membre de l’Union européenne qui constitue un cas particulier pour la Russie.

50 () La part des investissements absorbés par le secteur productif est repartie à la hausse en 2012, pour la première fois depuis la crise de 2008.

51 () Rappelons que le président Boris Eltsine avait érigé la mutation du G7 en G8 en priorité stratégique et que sa concrétisation, au sommet de Denver, en juin 1997, marque le grand retour de la Russie sur la scène internationale. La Russie assumera la présidence tournante du G8 à compter du 1er janvier 2014.

52 () L’Union européenne y était représentée par le président de la Commission européenne, José Barroso, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, le commissaire européen chargé de l’énergie, Günther Oettinger, et la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton.

53 () Afin de respecter le principe de garantie des dépôts bancaire n’excédant pas ce plafond, prévu dans la législation européenne et qui doit être conforté dans le cadre de l’Union bancaire.

54 () Dans un premier temps, car le président chypriote vient de réclamer aux dirigeants européens une nouvelle aide afin de venir en aide à Bank of Cyprus, le principal établissement du pays.

55 () Voir, à ce sujet, le rapport d’information no 1009 de Mme Audrey Linkenheld et M. Jacques Myard, présenté devant la Commission des affaires européennes le 24 avril 2013.

56 () Les constructeurs français, en particulier, fournissent environ un tiers des automobiles mises en circulation, avec une croissance annuelle de 10 % de leurs exportations.

57 () Dispositions dites « OMC + ».

58 () Voir la section ci-dessous consacrée à l’Union eurasiatique.

59 () Ou unbundling.

60 () Consortium constitué de quatre compagnies : la Britannique BP, l’Azerbaïdjanaise Socar, la française Totale et la norvégienne Statoil.

61 () Pour Trans Adriatic Pipeline.

62 () Pour Trans Anatolian Pipeline.

63 () Pour Passenger Name Record.

64 () Ou Conseil d’aide économique mutuelle (CAEM).

65 () Biélorussie, Kazakhstan, Kirghizstan, Russie et Tadjikistan.

66 () Notons que ni la Biélorussie, ni le Kazakhstan ne sont membres de l’OMC.

67 () Tous ces conflits ont été évoqués lors du sommet UE-Russie d’Iekaterinbourg.

68 () Communication conjointe du 24 juin 2013 de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions « Vers une approche globale de l’UE face à la crise syrienne » (COM [2013] 22).

69 () Pour reprendre une formule employée au cabinet de la Présidence de la République.

70 () Avec plus de la moitié des terres fertiles de la planète, la Russie possède un potentiel agricole énorme.

71 () Lors de cette réunion organisée par le Mexique, des dossiers comme le Haut-Karabakh ou la Syrie avaient été évoqués.

72 () Dans un premier temps, la Russie voulait même supprimer aussi ce volet du G20. La France a milité activement pour qu’il, en soit autrement. Le ministre français du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Michel Sapin, s’est déplacé à Moscou, en décembre 2012, pour plaider auprès de son homologue Maxime Topiline en faveur de l’organisation d’au moins une réunion ministérielle travail. Il a effectué une seconde visite, en mai 2013, au cours de laquelle il s’est longuement entretenu avec Olga Golodets, vice-première ministre pour les affaires sociales.

73 () Ou deputy.

74 () Voir, en annexe 5, le calendrier des réunions de la présidence russe.

75 () Avec une quinzaine de partenaires, allant du Secrétaire général de l’ONU aux responsables des organismes de coopération régionale et – innovation russe – des représentants de la « deuxième corbeille » de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), à savoir son comité économique et social.

76 () Voir, en annexe 6, les messages-clés du G20 sous présidence russe.

77 () http://en.g20russia.ru/

78 () Pour Global Marine Environment Protection.

79 () Cet économiste renommé s’est réfugié en France, fin mai 2013 – lorsque vos rapporteurs étaient à Moscou. Il craint en effet d’être mis en cause par la justice russe dans le cadre de l’affaire Ioukos, ayant fait partie d’un comité d’experts indépendant qui a jugé infondées une partie des poursuites intentées contre Mikhaïl Khodorkovski, ancien patron du groupe pétrolier.

80 () Organisme dédié à la transparence fiscale, rattaché à l’OCDE.

81 () Ou peer reviews.

82 () Ou EOI, pour Expression of Interest.

83 () Plus l’Arabie saoudite, le Belize, le Burkina-Faso, le Chili, l’Estonie, la Lettonie, le Nigéria, le Salvador et la Slovaquie.

84 () Proposition de directive du Conseil COM (2013) 348 du 12 juin 2013 modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal.

85 () Ou BEPS, pour Base Erosion and Profit Shifting.

86 () « Lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices ».

87 () Pour Trade Union Advisory Committee.