N° 1768 - Rapport d'information de MM. Gilles Savary et Arnaud Richard déposé par la commission des affaires européennes sur la proposition de directive relative aux concessions




N° 1768

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 février 2014

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

sur la réforme européenne des concessions : directive du Parlement européen et du Conseil sur l’attribution de contrats de concession

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Gilles SAVARY et Arnaud RICHARD

Députés

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La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.

SOMMAIRE

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Pages

1. Les ambitions de la Commission européenne 6

2. Les réticences du Gouvernement français vis-à-vis de la démarche 10

I. LE CONTENU DE LA PROPOSITION DE DIRECTIVE « CONCESSIONS » ET SON ÉVOLUTION AU COURS DU PROCESSUS LÉGISLATIF EUROPÉEN 13

A. LES AMBITIONS INITIALES DE LA COMMISSION EUROPÉENNE 14

1. L’amélioration du fonctionnement du marché intérieur 15

2. La sécurité juridique 15

3. La transparence 16

4. L’accès des PME aux marchés publics 16

B. LA POSITION FRANÇAISE : L’INQUIÉTUDE DEVANT LE TEXTE ORIGINEL 16

II. LE TEXTE ISSU DES TRAVAUX DU CONSEIL ET DU PARLEMENT 17

A. SPÉCIFICITÉ DE LA CONCESSION 17

B. DURÉE DE LA CONCESSION (ARTICLE 18) 18

C. CALCUL DE LA VALEUR DE LA CONCESSION (ARTICLE 8) 19

D. CRITÈRES D’ATTRIBUTION DES CONTRATS ET TRANSPARENCE (ARTICLE 41) 19

E. MODIFICATION DU CONTRAT EN COURS D’EXÉCUTION (ARTICLE 43) 22

F. EXCLUSIONS 23

1. La coopération public-public 24

2. Le « In House » ou quasi régie 25

3. Le secteur de l’eau 27

4. Les entreprises liées 27

5. Les considérations d’ordre public 28

III. UNE TRANSPOSITION EN DROIT INTERNE QUI IMPLIQUE UNE GRANDE VIGILANCE 29

A. UNE DIRECTIVE JURIDIQUEMENT CONFUSE 29

B. UN TEXTE ASYMÉTRIQUE QUI INTRODUIT UN BIAIS DANS LE MARCHÉ INTÉRIEUR EUROPÉEN AUX DÉPENS DES ETATS MEMBRES LES PLUS OUVERTS À LA CONCURRENCE 30

C. LES PRINCIPES DEVANT PRÉSIDER À UNE TRANSPOSITION APPROPRIÉE DE LA DIRECTIVE CONCESSIONS 31

D. LES POINTS DEMANDANT UNE VIGILANCE ACCRUE 32

1. Les seuils d’application de la directive 32

2. Les modifications des contrats en cours d’exécution 32

3. L’exclusion des entreprises liées 33

4. L’exclusion du « in house » ou « quasi régie » (article 17§1 à 17§3) et de la coopération horizontale (article 17§4) 34

5. La durée des concessions (article 18) 35

6. Les possibilités d’avenants aux concessions 37

CONCLUSION 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 43

RÉUNION DU 4 FÉVRIER 2014 43

RÉUNION DU 11 JUIN 2013 49

ANNEXES 53

ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 55

ANNEXE N° 2 : LA LOI SAPIN 57

ANNEXE N°3 : TABLEAU INDICATIF DE CONCORDANCE DIRECTIVE CONCESSIONS/DROIT INTERNE 65

ANNEXE N°4 : ARTICLE 5 DU REGLEMENT EUROPEEN N° 1370/2007/CE SUR LES OBLIGATIONS SUR SERVICES PUBLICS DANS LES TRANSPORTS 81

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La Commission européenne a voulu préciser les perspectives offertes par le marché unique à travers une communication intitulée « Vers un acte pour le marché unique », dont la proposition n° 17 prévoyait l’intervention, au plus tard en 2012, « de propositions législatives visant à simplifier et moderniser la réglementation des marchés publics, notamment pour faciliter l’usage des marchés publics comme instrument de soutien d’autres politiques européennes (aspects sociaux, innovation, aspects environnementaux) ».

Fin juin 2013, le Conseil de l’Union européenne, la Commission européenne et le Parlement européen ont conclu des accords provisoires relatifs aux « paquet marchés publics », qui devraient être définitivement adoptés dans les prochaines semaines.

La réforme est composée de trois propositions de directives européennes :

● la première proposition est d’ordre général et concerne, en particulier, les procédures de passation des marchés ;

● la deuxième devrait couvrir les services liés à l’énergie, aux transports et aux services postaux ;

● la troisième, objet du présent rapport, devrait régir les concessions de travaux et de services.

Ces trois directives devraient permettre aux autorités de se baser sur de nouveaux critères, notamment de nature environnementale ou financière, dans le but d’accepter l’offre la moins chère, mais aussi la plus innovante.

Afin d’éviter la pratique du « dumping » et la concurrence déloyale, ces nouveaux textes mettent en place des règles plus rigoureuses concernant la pratique des « offres anormalement basses ».

Pour encourager les soumissionnaires à proposer davantage de solutions innovantes, les directives prévoient également la mise en place de « partenariats d’innovation ». Ces derniers permettraient aux autorités d’avoir recours à la pratique des appels d’offre pour résoudre un problème spécifique. Une fois les propositions faites, les autorités et les entreprises pourraient alors négocier la proposition la plus adéquate.

Enfin, dans un but de simplification, un « document européen unique de marchés publics » serait fourni dans toutes les langues. Un système basé sur des auto-déclarations devrait être mis en place. Dans ce cas, ce n’est qu’une fois le contrat obtenu que le soumissionnaire devrait fournir les documents originaux. De nouvelles règles devraient permettre, en outre, la division des contrats en lots, afin d’améliorer l’accès aux marchés publics des petites et des moyennes entreprises.

S’ils partageaient ces objectifs généraux s’agissant des marchés publics, les pouvoirs publics français ont dès le départ fait part de leur hostilité à une réforme de la législation relative aux concessions. Ils estimaient en effet que ce texte n’était pas nécessaire, contrevenait au principe de subsidiarité et ne prenait pas assez en compte la spécificité du contrat de concession.

Votre Commission des affaires européennes avait estimé en 2012 (1) que l’harmonisation souhaitée pouvait s’effectuer sous la forme de lignes directrices mais non sous la forme d’une législation. Cette position a conduit les autorités françaises à aborder en reculant un projet, qui n’était pas satisfaisant, et a probablement affaibli la position de notre pays dans la négociation qui vient d’aboutir.

En effet, l’accord provisoire obtenu en trilogue avec le Conseil et la Commission européenne en juin a été validé en juillet par le Conseil et adopté par le Parlement européen le 15 janvier 2014.

La publication de ce texte devrait donc intervenir très rapidement : la directive entrera en vigueur 20 jours après la publication au Journal officiel de l’Union Européenne, après cette date, les États membres disposeront de 24 mois pour la transposer.

La France est le pays européen, et probablement du monde, qui a développé et poussé au plus haut degré de précision et de sophistication, le corpus juridique de la gestion déléguée de service public, héritage de l’empire romain, réapproprié par le colbertisme et la tradition juridique écrite française.

Ce mode de gestion des services publics est l’une des modalités de partenariats publics privés contractuels ; il se distingue de la régie directe, l’affermage, la concession, la régie intéressée et la gérance, ainsi que du contrat de partenariat institué plus récemment en France par l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004.

La Commission européenne, garante de la concurrence libre et non faussée au sein du marché intérieur, a progressivement développé un droit des marchés publics, à travers les directives de 2004 (2) et 2009 (3), de plus en plus détaillé pour harmoniser les règles essentielles de la commande publique entre les États membres, les pratiques et les droits internes étant très disparates en la matière.

Alors qu’une puissante économie se développait en France, et dans le monde, fondée sur la distinction entre marché public et délégation de service public, les décisions de l’Union européenne et la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), ont conduit à une grande confusion entre les deux concepts, et par conséquent à une insécurité juridique particulièrement inconfortable, tant pour les pouvoirs publics que pour les entreprises spécialisées dans la délégation de services publics, dont la France est l’un des leaders mondiaux (distribution d’eau, d’assainissement, de gestion d’infrastructures ou encore de restauration collective).

Ainsi, au cours des années 2000, la question d’une clarification juridique des notions de marché public et de délégation de service public, s’est-elle posée. La Commission européenne a entendu rationaliser et favoriser le recours aux concessions de services publics, par le biais d’une proposition de directive, publiée le 20 décembre 2011, spécifique à ce type de contrat de long terme par lesquels un pouvoir adjudicateur (État, collectivité locale ou entité investie d’une mission de service public) confie à un opérateur privé, la gestion d’un service public. Ce dernier doit en assumer les investissements et les risques de gestion et se rémunère grâce au prix payé par l’usager de ce service.

Jusqu’à présent la Commission européenne a procédé par des publications de doctrine, telles que la communication interprétative du 29 avril 2000 sur les concessions en droit communautaire (4) et la communication interprétative concernant l’application du droit communautaire des marchés publics et des concessions aux partenariats public-privé institutionnalisés (PPPI) du 12 avril 2008 (5). Ces éléments n’ont pas pour autant levé l’incertitude juridique qui découlait de la marge d’appréciation des juges qui ne sont pas liés par des textes non opposables.

La jurisprudence européenne a progressivement précisé, à la faveur des arrêts Teckal (6) et Telaustria (7) la notion de régie directe, définie par ailleurs dans un seul texte sectoriel, le règlement européen 1370/2007 sur les obligations de service public (OSP) dans les transports publics (8).

Elle a dégagé deux grandes caractéristiques de la régie directe (plus communément appelée « in house » au niveau européen).

Le principe de contrôle équivalent à un contrôle direct, par l’entité adjudicatrice, avec cependant une imprécision quant à l’intensité du contrôle exercé par l’entité adjudicatrice.

– soit un contrôle à 100 %, tel que précisé par l’arrêt Stadt Halle, confirmé par l’arrêt Parking Brixen (9) ;

– soit un contrôle majoritaire tel que défini par l’arrêt ASEMFO (10) l’entité ne devant avoir aucune autonomie dans son fonctionnement et dans son activité.

Ces tâtonnements de la jurisprudence ont débouché sur une exclusion de principe des sociétés d’économie mixte (SEM) du champ du « in house », et par conséquent sur une obligation générale de leur mise en concurrence. Sur ces bases nouvelles :

- l’Union européenne a publié de son côté une communication qui préconisait une spécialisation des SEM par mission élémentaire, avec mise en concurrence, non pas de l’objet du travail public mais du partenaire privé associé à la SEM pour le conduire, cette doctrine alimente actuellement en France les débats sur la SEM « contrat », encore appelé SEM à opération unique ;

- par ailleurs la France a pris acte de cette libéralisation de l’environnement des SEM en créant la nouvelle catégorie juridique des sociétés publiques locales (11) de droit privé, intégralement contrôlées par les collectivités publiques adjudicataires en vue de réaliser pour leur compte des missions publiques « in house ».

Malgré tout, le droit européen, outre une jurisprudence instable, complexe et parfois contradictoire, ne distinguait pas fondamentalement la nature juridique entre le marché public et la délégation de service public.

Le marché public résulte d’une commande publique pour le compte de l’entité adjudicatrice qui se traduit par un achat de bien ou de service, sur la base d’une mise en concurrence des offres, avec pour contrepartie un prix versé par l’adjudicataire (le client) au titulaire du marché (le fournisseur).

La délégation de service public est un transfert négocié et contractualisé, sur la base d’un cahier des charges, de la réalisation ou de la gestion d’un travail ou d’une mission de service public à un délégataire privé, ce dernier se rémunérant principalement sur un droit d’usage acquitté par l’usager final. Éventuellement il peut exister un versement de redevance contractuelle à l’adjudicataire public.

Finalement, la distinction juridique entre les marchés publics et les délégations de service public est apparue à ce point confuse, que la Commission européenne a accédé à une demande de clarification, à travers une proposition de directive sur les concessions, c’est-à-dire par l’élaboration d’un droit positif européen opposable, objet de la directive que le présent rapport analyse.

Aujourd’hui, les contentieux pouvant survenir conduisent les autorités européennes à analyser les concessions à partir des réglementations applicables aux marchés publics ou aux services d’intérêts généraux. Or ces deux cadres ne prennent pas en compte la spécificité des concessions qui couvrent des secteurs généralement liés aux infrastructures (eau, déchets, transport, routes) ou à la fourniture des services d’intérêt économique général (énergie, santé, distribution et traitement d’eau, déchets, etc...).

Le projet de directive a pour ambition de pallier aux principales failles mises en lumière par la Commission européenne dans son analyse d’impact relative aux concessions : l’insécurité juridique liée à l’absence de régime juridique applicable à la concession, ainsi que l’existence de barrières à l’entrée sur le marché.

Pour cela la proposition de directive prétend harmoniser, augmenter la transparence et clarifier le cadre juridique de ce type de contrat. Pour la Commission européenne « la directive constitue un guide pour les personnes publiques et privées. Ce cadre permettra de recourir plus largement aux concessions et ainsi de contribuer à la croissance économique et à l’innovation ». Ce texte devrait à ses yeux encourager les investissements publics dans les infrastructures et les services stratégiques en garantissant la transparence, l’équité et la sécurité juridique. De plus, le projet rompt avec les directives relatives aux marchés publics, car il s’intéresse à l’ensemble du cycle de vie de la concession, de sa passation à sa résiliation.

La proposition de directive élaborée par la Commission a beaucoup évolué. Initialement, il était reproché au texte de trop s’inspirer des directives relatives aux marchés publics, mais grâce, en particulier, aux travaux du rapporteur du Parlement européen M. Philippe Juvin, le texte a été profondément amendé.

Néanmoins la nécessité d’une réglementation européenne en matière de concession n’était pas apparue évidente, aux autorités françaises.

La position française vis à vis de ce paquet marché public était la suivante.

Le précédent Gouvernement considérait que toute modification de législation applicable aux marchés publics ne pouvait être envisagée qu’au terme d’une évaluation juridique et économique précise, qui n’a pas, aux yeux de vos rapporteurs, été véritablement réalisée par la Commission européenne.

Enfin, pour les autorités françaises toute initiative visant à la modernisation de ces règles devra se faire en conformité avec les règles sectorielles existantes notamment en matière de transports, d’énergie et de services en réseaux. Nous verrons que la directive sur les concessions ne respecte que très partiellement cette exigence française.

Par contre, la France accordait une importance particulière à deux grandes orientations suggérées par la Commission : la simplification des directives « marchés publics » à condition, toutefois, de garantir un niveau de sécurité juridique élevé pour les pouvoirs adjudicateurs, à la lumière des évolutions jurisprudentielles de la Cour de justice de l’Union européenne et des pratiques actuelles des autorités publiques ; en second lieu, nous soutenions fortement l’utilisation des marchés publics en faveur des politiques sectorielles dans le cadre de la Stratégie Europe 2020, notamment en offrant au pouvoir adjudicateur la souplesse nécessaire à la prise en compte de ses objectifs dans la commande publique.

Les efforts doivent donc porter en priorité sur la création d’un instrument européen qui permette d’assurer une symétrie dans l’accès à ces marchés.

Extrait de la réponse française au Livre vert sur les marchés publics de 2011 :

La modernisation des règles relatives aux marchés publics devraient comporter six priorités :

Pour atteindre ces objectifs, les autorités françaises souhaiteraient que les modifications législatives ne portent atteinte, ni à la stabilité actuelle du champ d’application de la directive 2004/18/CE, ni aux notions fondamentales du droit européen des marchés publics, bien connues des acheteurs.

1. La France considère qu’il est particulièrement souhaitable, pour des motifs d’efficacité économique, de faire de la procédure négociée avec publication d’un avis de marché une procédure de passation de droit commun, au même titre que les procédures d’appel d’offre ouvert et restreint. Cela permettrait également de répondre aux exigences de simplification des procédures pour les petits pouvoirs adjudicateurs. Par ailleurs, les autorités françaises sont favorables à l’introduction de plus de souplesse dans l’organisation des étapes de la procédure notamment en autorisant l’inversion des phases d’examen des offres et des candidatures. Cette possibilité d’assouplissement, qui serait facultative dans le droit de l’Union, pourrait être prévue par la législation nationale lorsqu’elle est adaptée aux besoins du pouvoir adjudicateur et à l’objet du marché.

2. La France serait également favorable, d’une part, à la possibilité pour l’acheteur de formuler son besoin également au regard des conditions de production ou de prestation des biens ou services qu’il achète, et d’autre part, à un assouplissement du lien entre les critères de sélection et d’attribution et l’objet du marché. Un tel assouplissement permettrait de répondre aux objectifs de la stratégie Europe 2020 en favorisant la prise en compte des aspects sociaux, environnementaux et en stimulant l’innovation dans les procédures de marchés publics. Enfin, les autorités françaises sont attachées à l’absence de dispositions relatives à l’exécution du contrat dans les directives « marchés publics ».

3. Les autorités françaises considèrent qu’il n’est ni utile ni souhaitable de prendre des dispositions législatives concernant les possibilités de coopération public-public au niveau européen. La définition des critères de chacune des formes que peut prendre ce type de coopération doit continuer à procéder de la construction jurisprudentielle effectuée par la Cour de justice à partir des cas concrets qui lui sont soumis.

4. La question de l’amélioration de l’accès des PME aux marchés publics est également une priorité de la France, dans la lignée des efforts fournis dans le cadre du « Small Business Act ». De nouvelles mesures pourraient être introduites. Celles-ci viseraient à réduire les charges administratives liées à la fourniture des certificats et attestations.

5. La France souhaite également affirmer son attachement particulier aux services sociaux. Elle considère que l’Union et les États membres doivent collaborer à l’élaboration d’un environnement juridique propice au développement de ces services et s’efforcer de garantir leur qualité.

6. Concernant la dimension externe des marchés publics, les autorités françaises constatent que les mécanismes prévus par les articles 58 et 59 de la directive 2004/17/CE ne sont pas à la hauteur des enjeux de l’ouverture réciproque des marchés publics de l’Union et des pays tiers.

Adoptée par le collège des commissaires européens le 20 décembre 2011, en même temps que les propositions de révision des textes dits « marchés publics » (12), la proposition de directive relative à l’attribution des contrats de concession, vise à pallier l’absence de cadre juridique stabilisé au niveau européen et à garantir aux entreprises européennes un accès transparent et équitable aux marchés des concessions. (13)

Cette proposition de directive, qui comprend 53 articles, poursuit un objectif très explicite de simplification et de clarification du droit européen. Il s’agit d’un texte particulièrement dense, complexe, et étoffé, composé de nombreuses dispositions techniques qui entrent dans les plus fins détails des différentes étapes administratives constitutives d’une procédure d’attribution d’un contrat de concession.

La proposition initiale a été enrichie par la procédure législative arrivée à son terme avec le vote du Parlement européen le 15 janvier 2014.

Au départ la Commission européenne a proposé de retenir une architecture semblable à celle des directives marchés publics. Elle estime créer ainsi « un cadre assez souple tenant compte de la flexibilité nécessaire à ces contrats complexes et de long terme qui soit à même d’assurer une interprétation identique dans toute l’UE et intégrant les apports de la jurisprudence ». Vos rapporteurs ne sont pas persuadés que ces objectifs aient été atteints, mais il convient de les rappeler :

Ils visent :

● un objectif de sécurité juridique en précisant les concepts et les modifications possibles des contrats en cours d’exécution ;

● la garantie d’un accès effectif du marché des concessions à toutes les entreprises, particulièrement les PME, à travers des obligations de publication dans le Journal Officiel de l’Union européenne au-delà d’un seuil de 5 millions d’euros. Les critères d’attribution sont précisés et un délai de soumission de 52 jours est imposé, pour éviter les discriminations et les risques de fraude. Aucune procédure d’attribution spécifique n’est proscrite, ou privilégiée, mais l’accent est mis sur la définition de garanties générales pour assurer la transparence et l’égalité de traitement avec un encadrement de la phase de négociation.

La Commission précise qu’elle n’entend pas favoriser la libéralisation de certains secteurs relevant des services d’intérêt économique général (énergie, transports…) ou imposer un mode de gestion, elle laisse ce choix aux États membres.

La Commission n’a sans doute pas intégré dans son projet les spécificités françaises, en particulier le partage du risque, et tend à considérer les concessions comme une modalité particulière de marché public. Comme nous le verrons, à travers les développements qui suivent, cette méconnaissance qui rejaillit sur le texte de la directive peut être à la source de malentendus et de difficultés d’exécution.

Selon l’analyse d’impact réalisée par la Commission, l’insécurité juridique est à l’origine d’inefficacités économiques car elle augmente le risque d’annulation ou de résiliation anticipée des contrats. Il existerait à ses yeux un grand nombre de lacunes concernant les contrats de concession. Par exemple, les obligations de transparence et de non-discrimination découlant des traités demeurent imprécises. Pour la Commission européenne « la directive doit combler ces vides afin de soutenir l’activité économique ». Cet argument aux yeux de vos rapporteurs n’est absolument pas pertinent pour la France.

À travers son projet, la Commission indique qu’elle souhaite également apporter une définition précise des contrats de concession afin de les en distinguer des marchés publics et par la même, d’installer de la sécurité juridique.

Pour définir les concessions, la Commission utilise la notion de « risque opérationnel (14) ». Sur la proposition du rapporteur devant le Parlement européen, Philippe Juvin, cette notion a été remplacée par celle de « risque d’exploitation » (15). En outre, la Commission définit les contrats de concession comme « un accord contractuel entre l’autorité publique et un opérateur économique dans le cadre duquel ce dernier fournit des services ou effectue des travaux ou les services » (16).

Pour la Commission européenne « l’absence, au niveau de l’Union, de règles claires régissant l’attribution de contrats de concession crée une insécurité juridique et des entraves à la libre prestation des services et provoque des distorsions dans le fonctionnement du marché intérieur. De ce fait, des opérateurs économiques, et notamment de petites et moyennes entreprises (PME), sont privés de leurs droits de concourir au sein du marché intérieur et voient leur échapper d’importantes opportunités commerciales, tandis que les pouvoirs publics ne peuvent déterminer les solutions optimales pour utiliser les deniers publics de manière à offrir aux citoyens de l’Union des services de qualité aux meilleurs prix. L’existence d’un cadre juridique approprié, équilibré et flexible pour l’attribution de concessions assurerait un accès effectif et non discriminatoire au marché pour tous les opérateurs économiques de l’Union, ainsi qu’une sécurité juridique, favorisant ainsi les investissements publics dans les infrastructures et les services stratégiques pour le citoyen… ».

Cette présentation a été combattue par les pouvoirs publics français et nous pouvons estimer qu’elle ne concerne pas la France.

Il existe actuellement deux régimes dans le droit européen :

● l’attribution de concessions de travaux publics est actuellement soumise aux règles de base de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil (17) ;

● l’attribution de concessions de services présentant un intérêt transnational est soumise aux principes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, (de libre circulation des marchandises, de liberté d’établissement et de libre prestation de services, ainsi qu’aux principes qui en découlent comme l’égalité de traitement, la non-discrimination, la reconnaissance mutuelle, la proportionnalité et la transparence).

Pour la Commission européenne, il existe un risque d’insécurité juridique lié aux divergences d’interprétation des principes du traité par les législateurs nationaux, et à l’existence de fortes disparités entre les législations des différents États membres. Elle souligne également que la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne n’a traité que partiellement certains aspects de l’attribution des contrats de concession.

Cette analyse est peut être exacte au niveau européen, elle ne l’est sans doute pas dans le contexte français, basé sur des références juridiques solides.

En prévoyant une publication au journal officiel et des délais de procédure nous ne pouvons qu’améliorer les conditions formelles de la transparence.

Le texte impose donc des obligations de publication dans le Journal Officiel de l’Union européenne au-delà d’un seuil de 5 millions d’euros avec précision des critères d’attribution, un délai de soumission de 52 jours pour éviter les discriminations et les risques de fraude observés en cas d’absence de règles nationales sur les concessions.

Aucune procédure d’attribution spécifique n’est proscrite ou privilégiée mais l’accent est mis sur la définition de garanties générales pour assurer la transparence et l’égalité de traitement avec des précisions sur la phase de négociation.

L’exécutif européen souhaite garantir l’accès effectif au marché des concessions à toutes les entreprises, y compris les PME, en vue de stimuler le développement des partenariats public-privé, dont les concessions représentent 60 %.

Les personnes auditionnées par vos rapporteurs ont souligné les incertitudes et les conséquences du projet initial, eu égard à la remise en cause du régime français des concessions, en particulier dans le secteur de la distribution de l’énergie.

En effet, la situation de monopole, en particulier dans le gaz, qui est fondée sur l’octroi de droits exclusifs conformes aux traités européens, permet en France une péréquation tarifaire sur l’ensemble du territoire.

Cette dernière qui est nécessaire à l’accomplissement de missions de service public, ne serait plus garantie en cas de remise en cause des législations sectorielles, ce qui était le cas de la proposition initiale de la Commission européenne.

Les inquiétudes que soulevait le premier projet ont pu être levées. En particulier pour le secteur de l’énergie qui en est exclu.

Nous devons regretter toutefois la multiplication des exclusions prévues dans le texte définitif (dérogations « entreprises liées » et « in house ») pour des secteurs qui, à l’inverse de la distribution de gaz, ne sont pas couverts par d’autres directives spécifiques.

Le texte issu des travaux du Parlement européen et du Conseil est substantiellement modifié par rapport au texte initial de la Commission européenne. Cette ultime version lève certaines craintes mais pas toutes et demande un fin travail d’analyse en vue de sa transposition.

Le texte de compromis issu des débats a clarifié la définition de la concession et sa spécificité par rapport au marché public, qui doit désormais remplir les conditions suivantes :

i) transfert d’une mission dont le concédant a la responsabilité à un opérateur économique tiers ;

ii) transfert de risque du concédant vers le concessionnaire ;

iii) transfert au concessionnaire d’un droit d’exploitation des travaux ou des services faisant l’objet de la concession ;

iv) paiement du concessionnaire fondé sur l’exploitation des travaux ou des services ;

v) existence d’un risque économique lié à l’exploitation des travaux ou des services, supporté par le concessionnaire.

La référence à la notion de risque opérationnel demeure essentielle. Une concession de travaux ou de services est définie comme un contrat conclu par écrit et à titre onéreux au terme duquel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices confient l’exécution de travaux ou la prestation et la gestion d’un service à un ou plusieurs opérateurs économiques. La rémunération du concessionnaire provient du droit d’exploiter les ouvrages qui font l’objet du contrat.

La notion de risque opérationnel a été considérablement amendée. Désormais « l’attribution d’une concession de travaux ou d’une concession de services implique le transfert au concessionnaire d’un risque d’exploitation lié à l’exploitation de ces travaux ou services, comprenant le risque lié à la demande, le risque lié à l’offre ou les deux. Le concessionnaire est réputé assumer le risque d’exploitation lorsque, dans des conditions d’exploitation normales, il n’est pas certain d’amortir les investissements qu’il a effectués ou les coûts qu’il a supportés lors de l’exploitation des ouvrages ou services qui font l’objet de la concession. La part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, telle que toute perte potentielle estimée qui serait supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement nominale ou négligeable ».

Seuil d’application (articles 8 et 9)

La directive s’applique aux contrats de concessions ( travaux et services ) d’une valeur de 5 millions d’euros ( hors taxes ) ou plus. Ce point sera révisé trois ans après l’entrée en vigueur de la directive afin de constater les effets sur le marché intérieur.

La durée de la concession était initialement limitée au laps de temps jugé nécessaire pour permettre au concessionnaire de recouvrer les investissements effectués lors de l’exploitation des travaux ou des services et de lui assurer une rémunération raisonnable du capital investi. Toutefois, la proposition de compromis du Conseil obtenu sous la présidence chypriote a limité implicitement à cinq ans la durée des concessions dépourvues d’investissement (18). Ainsi, l’article 18 de la directive adoptée en première lecture par le Parlement européen stipule que :

« 1. La durée des concessions est limitée. Le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice en estime la durée sur la base des travaux ou des services demandés.

2. Pour les concessions d’une durée supérieure à cinq ans, la durée maximale de la concession n’excède pas le temps raisonnablement escompté par le concessionnaire pour qu’il recouvre les investissements réalisés pour l’exploitation des ouvrages ou services avec un retour sur les capitaux investis, compte tenu des investissements nécessaires pour réaliser les objectifs contractuels spécifiques. Les investissements pris en considération aux fins du calcul comprennent tant les investissements initiaux que ceux réalisés pendant la durée de la concession. »

La concession a une durée limitée. Cette durée sera calculée par rapport aux coûts des investissements mais pas seulement puisqu’elle prendra également en compte les investissements nécessaires pour réaliser les objectifs contractuels spécifiques et le coût de personnel entre autres.

Toutefois, vos rapporteurs souhaitent que, lors de la transposition en droit national de ce texte, le législateur intègre la reprise d’une définition large des investissements qui implique :

● d’inclure explicitement les charges de gros entretien-renouvellement ;

● et au minimum les éléments qui figurent dans le considérant 52 de la directive, c’est à dire, outre les dépenses liées aux infrastructures, les dépenses liées aux brevets, à la logistique, au recrutement et à la formation professionnelle, et les frais initiaux de mise en place de la concession.

La méthode de calcul proposée repose essentiellement sur le chiffre d’affaires hors taxe de la concession, cumulé sur toute la durée du contrat.

Le texte exige que les autorités publiques prennent en compte le critère de l’offre économique la plus avantageuse dans le processus d’attribution. Néanmoins, il autorise l’insertion de critères environnementaux, sociaux, d’égalité hommes-femmes, ou d’innovation.

Les autorités publiques pourront refuser d’attribuer un contrat de concession à des opérateurs économiques qui, à plusieurs reprises, ne les ont pas respectés. Cette disposition est extrêmement importante pour vos rapporteurs car elle peut permettre de lutter contre les entreprises coutumières du non-respect de la législation sociale.

Pour faire tomber les barrières à l’entrée sur le marché, la Commission européenne prévoit de clarifier les critères d’attribution des contrats de concession.

Pour Bruxelles, une liste des critères d’attribution permettra de « renforcer la transparence, de rendre effectif la non-discrimination et l’égalité de traitement. L’établissement de critères d’attribution permet d’empêcher toutes prises de décisions arbitraires et favoritisme national dans la procédure d’attribution des contrats de concession. Ces critères guideront la collectivité dans la sélection du meilleur candidat. »

Selon la directive, la personne publique devra détailler ses exigences en fonction de critères « objectifs » tels que le prix et la qualité. Les membres du Parlement européen ont également inclus une disposition autorisant l’insertion de critères environnementaux, sociaux, ou relatifs à l’innovation dans le processus d’attribution. De plus, le texte encadre la détermination des critères d’attribution du contrat en prévoyant qu’ils doivent être « liés à l’objet du contrat », ce qui limite le choix de la collectivité.

Le texte final ( contrairement aux souhaits du Parlement européen ) impose une hiérarchisation des critères dans l’avis de concession émis par l’entité adjudicatrice mais aucune pondération ne sera exigée. L’objectif est de « ne pas conférer une liberté de choix illimitée au pouvoir adjudicateur ou à l’entité adjudicatrice (19) ».

La hiérarchisation devra être indiquée dans l’avis de concession ou les documents de la consultation. Ainsi, les critères d’évaluation seront mieux connus des candidats, renforçant ainsi la transparence, l’égalité de traitement et la non-discrimination.

Désormais la procédure de passation des contrats de concession s’articule autour de deux étapes : l’annonce de la concession et des critères utilisés au début de la procédure puis, l’annonce du choix du concessionnaire. Entre ces deux étapes, les personnes publiques demeurent libres de recourir à la négociation sous réserve du respect des critères établis lors de l’annonce de la concession.

La Commission rappelle que la directive ne restreint pas la liberté qu’ont les pouvoirs adjudicateurs de recourir ou non à la concession pour la réalisation de leurs travaux et services. À titre d’exemple, les considérants précisent désormais la possibilité pour les pouvoirs adjudicateurs d’exclure des opérateurs économiques de l’attribution des contrats de concession si ceux-ci se sont avérés être peu fiables ou ne respectant pas les règles de la concurrence (20).

Concernant le champ d’application matériel de la directive, des services de nature spécifique font l’objet d’une exclusion (gaz, eau…).

La transparence sera également assurée par la publication obligatoire au Journal Officiel de l’Union européenne (JOUE) des avis de contrats de concession de services d’une valeur, calculée sur le cycle de vie de la concession, égale ou supérieure à 5 millions d’euros (seuil désormais fixé à 5,186 millions d’euros), comme cela s’applique aux concessions de travaux publics (21. L’autorité adjudicatrice devra rédiger cet avis en décrivant précisément ce qu’elle attend : objet du service ou des travaux, calendrier, montant de la concession (22).

En revanche, le Parlement a introduit à l’article 31 paragraphe 4 plusieurs dérogations lorsque les travaux ou les services ne peuvent être fournis que par un opérateur économique particulier pour une raison précise : acquisition d’une œuvre d’art ou d’une performance artistique à caractère unique, l’existence d’un droit exclusif, la protection de droits de propriété intellectuelle, ou encore si un nouvel avis de concession fait suite à un avis infructueux, à condition que les conditions initiales du contrat ne soient pas substantiellement modifiées. Dans ce dernier cas la Commission européenne peut demander qu’il lui soit communiqué un rapport.

Enfin, il convient de souligner que les pouvoirs et entités adjudicateurs devront désormais informer dans les meilleurs délais (48 heures), les candidats des décisions prises les concernant, y compris les motifs pour lesquels ils ont décidé de renoncer à attribuer un contrat pour lequel il y a eu publication d’un avis de concession. Un avis d’attribution devra également être publié au JOUE. La version du texte votée par le Parlement européen en première lecture prévoit cependant une dérogation pour les services sociaux et les services visés par l’annexe IV de la directive. Ces avis peuvent être regroupés par trimestre.

Enfin, il convient de noter que le texte final autorise la publication d’avis de concession ou d’attribution de concessions au niveau national avant leur publication par l’Office des publications de l’Union européenne, si celle-ci n’a pas eu lieu 48 heures après que l’Office ait confirmé la réception de l’avis (Article 33 paragraphe 4).

Un délai minimum de 52 jours pour les manifestations d’intérêt lors des procédures d’attribution de concession est institué. Le délai pour la réception des offres peut toutefois être réduit de cinq jours si l’entité adjudicatrice accepte que les offres puissent être soumises électroniquement (23). Ce délai minimum a été abaissé à 30 jours (à compter de la date d’envoi de l’avis de concession). En outre, il est prévu que lorsque la procédure se déroule par phases successives, ce délai est de 22 jours. En revanche, l’article 39 de la proposition de directive adoptée par le Parlement européen ne revient pas sur la réduction du délai de cinq jours.

Des obligations quant aux critères de sélection utilisés par les pouvoirs adjudicateurs ou les entités adjudicatrices attribuant des concessions sont instituées : la proposition de directive limite les critères de sélection à la capacité économique, financière et technique du soumissionnaire, de même qu’elle restreint l’étendue des critères d’exclusion acceptables. La liste de ces derniers a cependant été largement complétée au cours du processus législatif puisque peuvent être exclus les opérateurs économiques qui ont fait l’objet d’une condamnation définitive pour financement de terrorisme, travail des enfants ou autres formes de traite d’être humain, ou si « le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice peut démontrer par tout moyen approprié que l’opérateur économique a manqué à ses obligations relatives au paiement d’impôts et taxes ou de cotisations de sécurité sociale, qu’il a commis une faute professionnelle grave, ou qu’il a conclu des accords avec d’autres opérateurs en vue de fausser la concurrence... » (24).

L’obligation d’appliquer des critères d’attribution objectifs qui soient liés à l’objet de la concession est renforcée pour assurer le respect des principes de transparence, de non-discrimination et d’égalité de traitement et garantir l’appréciation des offres dans des conditions de concurrence effective. Ces critères censés empêcher l’arbitraire des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices, devront être publiés par avance et listés par ordre d’importance décroissante.

Le Parlement européen a complété ce dispositif en précisant à l’article 41 de la directive qu’ils peuvent inclure des critères environnementaux, sociaux ou relatifs à l’innovation. De même, elle indique que « lorsque le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice reçoit une offre proposant une solution innovante présentant des performances fonctionnelles d’un niveau exceptionnel, qui n’aurait pas pu être prévue malgré la diligence du pouvoir adjudicateur ou de l’entité adjudicatrice, le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice peut, à titre exceptionnel, modifier l’ordre des critères d’attribution afin de tenir compte de cette solution innovante. Dans ce cas, le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice informe tous les soumissionnaires de la modification de l’ordre d’importance de ces critères et publie une nouvelle invitation à présenter une offre, dans le respect des délais minimaux visés à l’article 39, paragraphe 4. Lorsque les critères d’attribution ont déjà été publiés au moment de la publication de l’avis de concession, le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice publie un nouvel avis de concession ».

Il s’agit de prendre en compte la nécessité de modifier des contrats de concession, souvent de longue durée, du fait de l’importance des investissements consentis. Les contrats de concession doivent évoluer selon les mutations liées au service public et aux besoins des parties au contrat.

Pour renforcer la sécurité juridique des avenants, il a semblé nécessaire à la Commission européenne d’établir un cadre juridique concernant les éventuelles modifications du contrat de concession en cours d’exécution. Pour les opérateurs économiques, il n’est pas possible de rester figé, pendant une dizaine d’année, sur les mêmes dispositions contractuelles sans pouvoir les modifier. La directive impose qu’une « modification substantielle » du contrat initial entraîne la passation d’un nouveau contrat (25). La directive introduit de la souplesse en codifiant des règles de la jurisprudence et ajoute de la sécurité juridique en se référant à des seuils, créant ainsi un cadre juridique pour les avenants, mais ces derniers apparaissent peu réalistes.

La directive prévoit qu’en cas de modification non substantielle du contrat en cours, il n’y a pas de remise en concurrence du contrat dès lors que le montant de la modification est inférieur au seuil de 5 millions d’euros et qu’il ne dépasse pas 10 % du montant de la concession initiale. Si l’un des seuils est franchi, il faut appliquer la directive et soumettre le contrat à une nouvelle mise en concurrence. Ces seuils apparaissent beaucoup trop bas aux personnes auditionnées par vos rapporteurs.

En revanche, si les modifications sont substantielles, alors il est possible de dépasser ces seuils à condition d’effectuer une nouvelle procédure d’attribution du contrat. La directive définit en son article 43 paragraphe 4 ce qu’elle entend par « modification substantielle » ; il peut s’agir, par exemple, « de conditions qui auraient permis l’admission de candidats autres que ceux initialement admis ». Toutefois, cette règle admet quelques exceptions. Par exemple, l’article 43 paragraphe 1 permet de modifier le contrat sans remise en concurrence lorsque les modifications ont été prévues « dans les documents de concession initiaux ». De plus, pour les travaux ou services supplémentaires réalisés par le concessionnaire, le plafond du montant des modifications est fixé à 50 % de la valeur initiale du contrat. Cette limite s’applique pour le montant de chaque modification.

Des modifications demeurent cependant possibles au-dessus de ces seuils dans des secteurs spécifiques comme celui des infrastructures de sport de montagne. De même, si des travaux supplémentaires ne peuvent être assurés par un autre concessionnaire pour des raisons économiques ou techniques, il n’est pas besoin de procéder à une nouvelle procédure d’attribution quel qu’en soit le montant dans les secteurs listés dans l’annexe II. Enfin, s’agissant des activités hors du champ d’application de la directive, le seuil fixé est de 50 % du montant du contrat initial.

En prenant en compte la théorie de l’imprévision, le texte permet d’éviter certains mécanismes corruptifs, à savoir partir d’une base contractuelle et ensuite la modifier en fonction d’avenants modifiant la nature du contrat. Ces mécanismes sont à prohiber car ils faussent la transparence initiale et annihilent l’intérêt de l’appel d’offre pour y substituer des négociations uniquement bilatérales.

Les dispositions de la directive ne s’appliqueront qu’aux concessions attribuées après son entrée en vigueur, conformément aux arrêts de la CJUE en matière de modification des contrats. En outre, sont exclus du champ d’application de la directive les concessions de services relatives :

- au droit exclusif / infrastructures de réseaux,

- à la législation sectorielle sans obligation de transparence,

- aux accords et organisations internationaux,

- à l’acquisition ou location de terrains, bâtiments existants ou autres biens immeubles,

- aux programmes de radiodiffusion,

- à l’arbitrage et conciliation,

- à certains services financiers,

- au transport aérien,

- au service public de transport de voyageurs au sens du règlement CE/1370/2007 du Parlement européen et du Conseil,

- à certaines communications électroniques.

Le Parlement a, en outre, introduit dans cette liste : le secteur de l’eau potable ( article 12 ) incluant la production, le transport et la distribution ainsi que les équipements y afférents ; les services confiés sur la base d’un droit exclusif reconnu par la loi, le règlement ou acte administratif à un opérateur économique pour certaines activités de réseau ( gaz et électricité ) et les loteries, les services de défense ou de protection civile fournis par des organisations à but non lucratif ( à l’exception des services ambulanciers de transports de patients ), les services liés aux campagnes politiques, les prêts liés ou non à l’émission, à la vente, à l’achat ou au transfert de valeurs mobilières.

À ces exclusions sectorielles s’ajoutent des exemptions liées à la nature juridique du concessionnaire.

Les coopérations entre les organismes publics, ou dans les secteurs de réseaux entre une entreprise liée et une entité publique sont exclues du champ d’application de la directive.

Ces exclusions sont applicables, même en cas de présence minoritaire de capitaux privés si celle-ci est prévue par la loi nationale ( SEM ).

La directive encadre de manière stricte les hypothèses d’exclusions au titre de la régie (« in house ») et de la coopération public-public, qui relèvent actuellement de la jurisprudence. Sont ainsi exclus les contrats de concessions attribués à :

■ des co-entreprises, définies à l’article 14, à condition qu’elles aient été constituées dans le but de poursuivre une activité précise pendant une période d’au moins trois ans et que l’instrument constituant la co-entreprise stipule que les entités adjudicatrices qui la composent en feront partie intégrante pendant au moins la même période.

■ des entreprises liées, définies à l’article 13, c’est-à-dire :

- toute entreprise sur laquelle l’entité adjudicatrice peut exercer, directement ou indirectement, une « influence dominante » (26) ;

- toute entreprise qui peut exercer une « influence dominante » sur l’entité adjudicatrice,

- toute entreprise qui, comme l’entité adjudicatrice, est soumise à « l’influence dominante » d’une autre entreprise.

Toutefois, les contrats entre l’entreprise liée et l’entité adjudicatrice ne sont exclus du champ d’application de la directive que si au moins 80 % du chiffre d’affaires de l’entreprise liée, au cours des trois dernières années, proviennent des prestations de services, ou de l’exécution des travaux, réalisés par l’entreprise liée pour le compte de l’entité adjudicatrice. Cette précision a été ajoutée suite aux travaux du Parlement européen.

Sont enfin exclus les contrats de concessions attribués par un pouvoir adjudicateur ou une entité adjudicatrice à une autre personne morale (« in house ») sous réserve qu’elle soit sous son contrôle, détenue à 100 % par des personnes publiques, que cette personne morale réalise au moins 80 % de ses activités pour ce pouvoir adjudicateur (ce seuil était initialement de 90 %) et celle-ci ne comporte pas de participation directe de capitaux privés (à l’exception de celles sans capacité de contrôle ou de blocage requises par des dispositions législatives nationales qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée, précise la nouvelle version du texte). L’article 17 adopté par le Parlement opère ainsi un décantonnement du « in house » à hauteur de 20 % du chiffre d’affaires de la personne morale, ce qui n’est pas sans créer une certaine confusion avec la notion d’entreprise liée précédemment explicitée.

La directive prévoit la possibilité pour les États membres d’exclure de son champ d’application les contrats dits « in-house », les « coopérations horizontales » entre entités publiques ainsi que les contrats passés avec des « entreprises liées », à des conditions plus souples que ce que prévoit la loi française sur les sociétés publiques locales, la jurisprudence du Conseil Constitutionnel ou encore la récente jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Cette disposition, marquant une absence de cohérence, est le fruit d’un compromis politique dominé par les puissantes sociétés publiques locales mixtes allemandes.

Il conviendra au législateur français de ne pas aller aussi loin que la directive le permet et de s’en tenir aux règles en vigueur actuellement en France, plus claires et compatibles avec les principes du Traité. C’est non seulement le droit des législateurs nationaux d’aller plus loin que les dispositions prévues par la directive dès lors qu’ils poursuivent des objectifs de transparence. Il est également de leur intérêt de fixer des dérogations à ces objectifs qui soient plus strictes, compte tenu des risques de contentieux nationaux comme communautaires pesant sur ces dispositions peu claires et par certains aspects juridiquement incohérentes. De surcroît, économiquement, les règles en vigueur favorisent une meilleure gestion de l’argent public.

En effet, la dérogation accordée aux contrats « in-house » qui découle de la jurisprudence constante « Teckal » de la CJUE, a été codifiée de manière extensive dans le texte de la directive.

Les trois premiers alinéas de l’article 17 de la directive imposent la réunion de trois conditions pour que les différentes formes de contrats conclus par une entité publique avec une personne morale de droit privé ou public soient exclues du champ de la directive et donc dispensées de mise en concurrence :

- les collectivités publiques doivent exercer un contrôle analogue à leurs propres services, et ont une influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes sur l’entité « in-house », directement ou à travers une autre personne juridique, seule ou avec d’autres autorités ;

- plus de 80 % des activités de l’entité « in-house » sont exercés pour l’exécution des missions confiées par l’autorité de contrôle ;

- il n’y a pas de participation directe de capitaux privés dans l’entité contrôlée à l’exception des participations non bloquantes ou non contrôlantes qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée et requise par une loi nationale.

La directive prévoit également la possibilité pour plusieurs collectivités de coopérer ensemble pour la gestion de leur service public. Elles doivent pour cela poursuivre des objectifs communs. L’accord de coopération doit être guidé par l’intérêt général et les entités concernées peuvent réaliser jusqu’à 20 % de leurs activités sur le marché ouvert à la concurrence dans le cadre de cet accord.

Cette exclusion s’applique aussi aux contrats accordés par l’autorité contrôlée à son autorité de contrôle ou à une personne légale contrôlée par la (les) même(s) autorité(s) de contrôle.

La coopération public-public est aussi exclue du champ de la directive dès lors qu’il y a des objectifs communs à réaliser, que la coopération ne répond qu’à des considérations d’intérêt public (avec possibilité pour la coopération de réaliser 20 % des activités sur le marché libre).

Cette disposition est en contradiction avec la loi française relative aux Sociétés publiques locales (SPL) qui impose des conditions plus strictes : elle prévoit que les entités « in house » doivent exercer leur activité uniquement pour le compte de l’autorité de contrôle. La loi française sur les SPL ajoute en plus une condition de territorialité et interdit toute participation privée.

Le maintien de ces conditions en droit français se justifie : ce sont des règles plus claires (l’appréciation de la notion de 20 % du marché libre engendrerait inévitablement des contentieux nationaux), connues des acteurs impliqués et en ligne avec la jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne.

En outre, certaines sociétés allemandes ont un chiffre d’affaires considérable et le seuil de 20 % leur permettrait de prospecter des marchés étrangers de manière significative.

Le secteur de l’eau, à l’exception de l’assainissement lorsque ce dernier fait l’objet d’une concession spécifique, est également exclu du champ d’application de la directive. L’accord prévoit néanmoins d’évaluer l’impact de cette exclusion trois ans après la transposition de cette directive en droit national.

Vos rapporteurs notent que cette exclusion ne figurait pas dans le texte initial. Le commissaire Michel Barnier a proposé d’exclure le secteur de l’eau de la directive à la fin de juin 2013. Cette exclusion, qui n’allait pas de soi, résulte d’un très fort lobbying allemand. Vos rapporteurs considèrent qu’elle vide de sens une grande partie de la directive en conférant à ce secteur un caractère protégé en Allemagne, incompatible avec le marché unique.

En outre, les activités d’assainissement et d’eau potable seront dissociées, la directive ne s’appliquant qu’aux activités d’assainissement, ce qui risque d’être difficile à mettre en œuvre et source de contentieux.

L’article 13 de la directive exclut de son champ d’application les concessions attribuées à une entreprise liée.

Les entreprises liées sont des entreprises ayant leurs comptes consolidés avec ceux d’une entité adjudicatrice. L’entreprise liée est placée sous « l’influence dominante » de cette entité et réalise 80 % de son chiffre d’affaires (toutes activités confondues) avec l’entreprise ou l’entité adjudicatrice. Il s’agit du chiffre d’affaires de toutes les activités de l’entreprise y compris les activités qui ne sont pas des activités de réseau.

Les contrats passés entre une entreprise et l’entité à laquelle elle est liée sont exclus du champ d’application de la directive. Cette dérogation permet à des autorités concédantes d’octroyer, sans mise en concurrence, une concession à des entreprises qui leur sont « liées ». Habituelle, dans les activités de réseaux, cette exception permet aux entreprises de ne pas mettre en concurrence leurs filiales qui interviennent dans le secteur privé.

Cette disposition aura un impact négatif très fort sur le droit français en donnant la possibilité à une SEM d’être dispensée de mise en concurrence pour les contrats conclus avec une collectivité actionnaire (en contradiction avec la jurisprudence européenne et française). Elle permettra aux États membres de retenir une définition très large des entreprises liées dont l’attribution d’une concession (pour les activités dites « en réseau ») échapperait aux règles de transparence et de mise en concurrence fixées par la directive. La directive élargit ainsi la possibilité d’attribution de gré à gré de contrats à ou par des entreprises liées.

D’autres services de nature spécifique tels que les activités de jeux d’argent et de hasard résultant de droits exclusifs, la défense et la protection civiles, certains services d’urgence, d’associations sans but lucratif et des services de médias, financiers ou juridiques sont également exclus du champ d’application.

Par ailleurs, le texte adopté par le Parlement européen introduit de nouveaux articles relatifs :

- à la reconnaissance du droit de libre administration des États membres et des collectivités qui y sont rattachées (article 2) ainsi que le droit de constituer des contrats de coopération public-public entre pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices,

- aux principes d’égalité de traitement, de non-discrimination et de transparence (article 3 qui se substitue à l’article 7 initialement proposé),

- à la liberté de définition des services d’intérêt économique général (article 4),

- à la révision du seuil et des méthodes de calcul de la valeur estimée des concessions (article 9),

- aux contrats mixtes notamment ceux comportant des aspects ayant trait à la défense ou à la sécurité (articles 20 à 23),

- à la possibilité pour la Commission européenne de demander tous les trois ans aux États membres un rapport sur les contrats de concession (article 45).

Le Parlement a également considérablement renforcé les dispositions relatives à la sous-traitance. Ainsi, outre la possibilité donnée aux États membres d’exiger du pouvoir adjudicateur ou de l’entité adjudicatrice de demander au soumissionnaire la part de la concession qu’il entend sous-traiter à des tiers et de proposer des sous-traitants dans son offre, le texte final prévoit notamment que les concessions devant être réalisées dans les locaux du pouvoir adjudicateur ou de l’entité adjudicatrice sous sa surveillance, après l’attribution de la concession et, au plus tard, au début de l’exécution de la concession, ce dernier exige du concessionnaire qu’il lui indique le nom, les coordonnées et les représentants légaux de ses sous-traitants dans la mesure où ces informations sont connues à ce stade. Tout changement en cours d’exécution du contrat doit être signalé. Enfin, les sous-traitants sont soumis aux mêmes règles d’exclusion de la commande publique que les co-contractants.

La transposition en droit français de la directive concessions devra aboutir à l’existence d’une législation reposant à la fois sur la loi de transposition de la directive et sur la loi Sapin en vigueur.

La directive concessions ne doit pas entrainer de modifications importantes, non souhaitables, du droit français. Pour cela, le législateur français doit saisir les opportunités laissées ouvertes par la directive et ne pas s’en tenir à une retranscription passive.

Il conviendra au législateur de ne pas aller aussi loin que la directive le permet et de s’en tenir aux règles en vigueur, plus claires et compatibles avec les principes des traités européens.

À cet égard, l’orientation générale obtenue par le Conseil compétitivité du 11 décembre 2012 et l’accord en COREPER du 17 juillet 2013, qui ont fait l’objet d’un accord en trilogue entériné le 15 janvier par le Parlement européen (27), passe très largement à côté de l’objectif initial de clarification juridique. En particulier, le texte ne distingue pas, à l’instar du droit français, les deux types fondamentaux de contrats qui différencient la concession de l’affermage, qui ne comporte pas d’investissement initial lourd, amortissable sur une durée variable en fonction du type d’investissement et de son temps de retour.

Dès lors, la directive semble couvrir, sans le nommer, l’affermage, mais avec une durée maximale de concession de cinq ans, qui méconnaît les investissements immatériels d’apprentissage, d’organisation, d’adaptation nécessaires à la mise en œuvre d’une concession ; elle apparaît de nature à décourager l’offre et pourrait conduire l’affermage à une disparition programmée.

Surtout le texte ajoute une confusion supplémentaire par rapport à la jurisprudence établie sur le « in house » ainsi que sa définition dans le règlement OSP (obligation de service public), en introduisant la possibilité d’un « in house » (exclu du droit de la concurrence) pouvant réaliser 20 % de chiffre d’affaires commercial hors du ressort géographique de l’entité adjudicatrice.

Ce faisant, il réintroduit un acteur proche d’une SEM dans le jeu non concurrentiel, et pose, pour la France, la question de la pertinence et de l’intérêt des sociétés publiques locales, dès lors qu’elles peuvent être concurrencées par des entités de nature mixte disposant d’un chiffre d’affaires commercial non cantonné géographiquement.

Il s’agit d’un retour en arrière dommageable sur une jurisprudence constante, à laquelle les collectivités locales s’étaient laborieusement adaptées.

En introduisant la notion d’entreprise liée, exclue de l’obligation de mise en concurrence, il permet à des filiales de grands groupes d’être assimilées à ces groupes, et d’échapper ainsi à des mises en concurrence internes, encourageant l’éviction d’entreprises de petite taille de nombreux marchés de sous-traitance.

Enfin, les règles régissant les avenants aux contrats de concession, et en particulier les seuils, réintroduisent des rigidités qui soumettent les concessions à une vision proche des marchés publics, particulièrement rigide, qui contredit la volonté initiale de distinction entre marchés publics, légitiment rigides, et délégation de service public, dont la souplesse d’adaptation à l’évolution du service délégué constitue la plus-value essentielle par rapport à celui d’un marché.

Ce n’est pas le moindre paradoxe de ce texte, piloté par la direction générale du marché intérieur, que d’introduire, dans le droit positif européen, des critères qui instaurent une concurrence notoirement inégale en faveur de certains États membres, en l’occurrence, aux dépens de l’industrie française.

La possibilité d’échapper à une mise en concurrence, pour des entités publiques dont 20 % du chiffre d’affaires pourrait être de nature commerciale, constitue un avantage concurrentiel pour des entités publiques de grande taille par rapport à des entités publiques de petite taille. À cet égard la taille et l’étendue des missions des « Stadtwerke » allemandes, leur permettra tout à la fois de protéger leurs marchés non négligeables à l’échelle du marché intérieur, et de se porter candidates à des concessions sur le marché intérieur européen.

À titre d’exemple, la « Stadtwerke » de Munich, dont le chiffre d’affaires est évalué à 4 milliards d’euros, sera autorisée à réaliser 800 millions d’euros de chiffre d’affaire commercial en Europe, quand des régies de petite taille ne pourront prétendre à de tels niveaux d’activité commerciale. La « Stadtwerke » de Munich sera en tout état de cause assurée de protéger un marché infiniment plus substantiel de toute mise en concurrence.

Par cette asymétrie, particulièrement regrettable, on peut penser que la présente directive entre en contradiction avec les principes essentiels de concurrence libre et non faussée au sein du marché intérieur européen.

Une transposition appropriée de cette disposition est primordiale, en particulier pour les concessions de service et les contrats d’affermage.

La question de la transposition en droit national interne de la directive concessions se pose en France au regard de la loi, dite Sapin, n° 93-122 du 29 janvier 1993, unanimement appréciée pour sa souplesse et son impartialité concurrentielle.

Les multiples auditions que nous avons effectuées, concluent à un souhait quasi unanime des opérateurs français de tous secteurs, d’une transposition la plus proche possible de l’actuelle loi Sapin.

S’il apparaît légitime de supprimer de la loi française le principe de l’intuitu personae qui l’expose à un soupçon d’arbitraire dans le choix des candidats à une concession, alors qu’il est par ailleurs très largement tombé en désuétude, vos rapporteurs préconisent que la France conserve l’essentiel de l’architecture et des principes des règles actuelles.

La France est en effet plus ouverte au marché intérieur européen et aux principes généraux de la concurrence dont la Commission européenne est garante, sous le régime de la loi Sapin reconduite, qu’elle ne le serait par une stricte application de la directive concessions et de ses multiples dispositions d’exclusion ou de dérogation.

À nos yeux, la loi de transposition de la directive concessions doit concerner uniquement les contrats d’un montant supérieur au seuil d’application de la directive ( 5 millions d’euros ).

La loi Sapin doit continuer de s’appliquer à tous les secteurs, pour les contrats d’un montant inférieur au seuil d’application de la directive.

La loi Sapin doit également continuer de s’appliquer aux contrats conclus dans le domaine de l’eau potable, quel que soit le montant du contrat : la directive ayant exclu le secteur de l’eau potable de son champ d’application et la loi Sapin assurant une ouverture effective à la concurrence du secteur de l’eau potable, il n’est pas nécessaire d’anticiper la mise en œuvre de la directive tant que d’autres États membres, comme l’Allemagne, s’y refusent.

La transposition de la directive concessions permettra, de cette façon, de maintenir les acquis de la pratique de la loi Sapin pour les contrats non couverts par la directive. Ainsi la transposition de la directive concessions préserverait-elle les avancées de la loi Sapin, tout en garantissant la conformité du droit français au droit de l’Union européenne.

Les points qui nous semblent devoir faire l’objet d’une vigilance toute particulière sont détaillés dans les paragraphes qui suivent.

Sur ce point la Commission européenne a réalisé un copié-collé des dispositions correspondantes de la directive marchés publics qui ne tient pas compte de la spécificité des concessions et de l’amortissement des investissements.

Les concessions sont des contrats complexes qui doivent pouvoir s’adapter :

○ aux évolutions réglementaires et technologiques, (par exemple : directive et circulaire tunnels, nouvelles normes dans le domaine de l’eau),

○ ainsi qu’aux exigences du service public (principe de mutabilité du service public, nouvelles exigences des collectivités et des usagers, modifications de périmètre).

Les contrats de concession s’inscrivent dans la durée et sont « incomplets » par nature, aussi le double seuil de minimis en deçà duquel une modification est considérée comme n’étant pas substantielle pose-t-il plusieurs problèmes :

- le seuil en valeur absolue ( 5 millions d’euros ) est sans lien avec le montant initial du contrat et n’a pas la même portée selon le type de concession concernée, pénalisant ainsi les contrats les plus importants ;

- le seuil de 10 % de la valeur de la concession initiale est facilement atteignable compte tenu de la durée des contrats, d’autant que les modifications se cumulent.

Néanmoins, la précision quant à l’application à chaque modification du plafond de 50 % de la valeur de la concession initiale actualisée marque un progrès. Il faudra veiller à ce que ceci soit maintenu lors de la transposition.

La notion de « valeur actualisée » (ou du « montant » actualisé) n’étant pas précisée, il faudra également être vigilant sur ce point lors de la transposition, car l’encadrement excessif de la durée (safe harbour fixé discrétionnairement à cinq ans) est problématique :

● il ne prend pas en compte la diversité des concessions ;

● il est susceptible de remettre en cause les concessions de services et notamment les contrats d’affermage ;

● il favorise le recours au marché public au détriment de la concession ;

● il multiplie les mises en concurrence en provoquant une augmentation des coûts ;

● il favorise le sortant : une mise en concurrence trop fréquente peut dissuader de nouveaux entrants ;

● il prive la collectivité du bénéfice de plans d’amélioration de performance, d’engagements de rénovation et de renouvellement, lesquels sont entrepris pendant la durée d’exécution de la concession.

La dérogation accordée aux entreprises liées est contraire en l’état au droit français, qui impose la mise en concurrence pour l’attribution de contrats à des Sociétés d’Économie Mixte (décision n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 du Conseil Constitutionnel).

La transposition de la directive concessions devrait se limiter aux entités adjudicatrices qui ne sont pas des pouvoirs adjudicateurs au sens de la directive.

Sur le terrain, la dérogation accordée aux entreprises liées pourrait permettre à des entités multi-activités (eau, gaz, électricité, etc.) de type « Stadtwerke » d’échapper aux principes de transparence et d’égalité de traitement pour l’attribution et la gestion de leur contrat. Elle va clairement à l’encontre de l’objectif initial de transparence affiché par la Commission européenne.

Non seulement les opérateurs historiques de réseau en bénéficieraient (ce qui correspond à l’esprit de la directive sur les marchés publics dite « en réseau »), mais aussi les autorités publiques concédantes, ce qui permettrait l’attribution de gré à gré de concessions à des opérateurs privés ou semi-privés.

Cette dérogation n’est ainsi pas cohérente avec l’article 17 de la même directive puisqu’elle étend implicitement le champ de la dérogation « in house » ; de ce fait, elle n’est pas conforme à l’esprit de la jurisprudence de la Cour de justice, qui interdit l’attribution de contrats hors mise en concurrence à des entités comportant des capitaux privés.

À cet effet, vos rapporteurs préconisent que la France adopte et précise dans son droit interne une définition restrictive du « in house », transposée de la jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne, autour de ses deux principes cardinaux :

- une entité contrôlée à 100 % par une entité publique sans interférence d’un actionnariat privé, ni d’activités commerciales sur le marché ;

- un strict cantonnement géographique de ses activités dans le ressort de l’entité adjudicatrice, qui exclut qu’une entité « in house » puisse à la fois protéger son monopole local et participer au marché concurrentiel par ailleurs.

Cette acception est moins protectrice, et plus respectueuse d’une concurrence équitable sur les marchés que la future directive en cours, en cela qu’elle ne crée aucune asymétrie concurrentielle, et éviterait que des entités étrangères, non « challengeables » chez elles, puissent « challenger » nos délégations de service public.

Il s’agit d’un principe dont vos rapporteurs préconisent une défense ferme et sans concession.

La dérogation accordée à la coopération horizontale public-public découle de l’arrêt Hambourg du 9 juin 2009 de la Cour de justice de l’Union européenne, mais elle fait l’objet d’une codification extensive dans la directive, en contradiction avec les principes jurisprudentiels dégagés (arrêt Teckal, Stadt Halle notamment). Ces dispositions élargissent considérablement le champ du « in-house » et donc des exclusions à la mise en concurrence :

- en créant un seuil d’activité sur le marché libre de 20 % ;

- en autorisant des formes de participations privées au sein des entités contrôlées.

En cela, les dispositions de la directive vont également au-delà de la jurisprudence, pourtant récente (arrêts de la CJUE Lecce du 19 décembre 2013 et Piepenbrock du 13 juin 2013), faisant peser un risque d’incompatibilité entre le traité tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union Européenne et l’article 17§4 de la directive. Néanmoins il pourrait être soutenu que la mention de deux conditions supplémentaires, à savoir l’implication de droits et obligations mutuelles et la limite de transferts financiers aux seuls remboursements des coûts, éliminerait ce risque.

Le compromis interinstitutionnel a entraîné l’omission de plusieurs critères que la Cour avait mentionnée. La directive dispose que les États peuvent prévoir que les contrats seront exclus de son champ d’application quand :

- ils mettent en place une coopération dans le but d’assurer que les services dont ils ont la responsabilité sont fournis afin de réaliser des objectifs poursuivis en commun ;

- la coopération est menée uniquement par des considérations relatives à l’intérêt public ;

- moins de 20 % des activités concernées peuvent être réalisées sur un marché ouvert.

En conclusion, vos rapporteurs sont favorables à la non-reprise en droit interne des dispositions relatives au « in house » et aux entreprises liées, les dispositions du droit français étant plus strictes que celles de la directive.

Vos rapporteurs attirent spécifiquement votre attention sur les durées maximales de concession, et les seuils d’avenant aux contrats de concession en cours d’exécution, qui limite à cinq ans maximum la durée des contrats.

● Le premier critère, s’il devait être confirmé, serait de nature à rendre infructueuse de nombreuses délégations d’affermage, jugées légitimement trop risquées et insuffisamment incitatives par les opérateurs, avec pour résultat une contradiction caractérisée avec le principe constitutionnel français de l’article 72, instaurant la libre administration des collectivités locales, et par conséquent, le libre choix du mode de gestion de leurs services publics, qui limite les avenants cumulés à un coût déterminé de cinq millions d’euros.

● Le second critère expose les maîtres d’ouvrage à la nécessité de multiplier les obligations de remise en concurrence de l’intégralité du marché. Il introduit une insécurité contractuelle et une inflation de coûts et de charges administratives, de nature à dissuader de recourir à la concession, et avec lui, les facilités et souplesses de gestion existant dans le droit des délégations de service public.

Pour permettre une remise en concurrence plus fréquente des contrats de concession, la Commission prévoit que la durée du contrat de concession soit limitée à cinq ans.

Une telle limitation permet d’assurer l’effective contestabilité du marché de concession. La durée des contrats doit être limitée au temps nécessaire pour que le prestataire amortisse les investissements effectués au profit des travaux ou services demandés par la collectivité.

Suite aux débats du Parlement européen, le considérant 52 fut inséré afin de permettre d’allonger la durée du contrat de concession jugée trop restrictive et ne prenant pas assez en compte l’amortissement des investissements liés à l’exécution du contrat de concession.

La durée du contrat sera estimée par le pouvoir adjudicateur en fonction des travaux et services demandés. Elle ne pourra excéder cinq ans pour les contrats nécessitant peu d’investissement.

Au-delà de cinq ans, le considérant 52 prévoit que la durée du contrat ne devra pas excéder le temps nécessaire pour amortir les investissements réalisés pour d’atteindre les objectifs fixés par le contrat. Les investissements pris en compte pour le calcul de la durée sont « les dépenses et investissements initiaux et ultérieurs ». Peuvent être inclus dans le calcul des investissements, les droits d’auteur, le recrutement ou la formation du personnel, la construction d’infrastructures, etc.

En pratique, pour les concessions de service, les investissements sont faibles, la durée du contrat pourra être limitée à cinq ans. En revanche, la lourdeur des investissements dans les concessions de travaux permettra d’allonger la durée de ces concessions.

La force juridique du considérant n’est pas la même que le dispositif du texte de la directive ; il n’a pas de force obligatoire en droit de l’Union européenne, de même qu’en droit national.

La Commission considère elle-même, dans une déclaration qui sera publiée parallèlement à la publication de la directive au JOUE, que l’intégration dans le droit national de la définition d’investissement donnée par le considérant 52 est nécessaire pour garantir une application uniforme de la directive au sein de l’Union (voir projet de déclaration de la Commission jointe, déclaration demandée et obtenue par les autorités françaises).

L’impact de la directive sur le droit français sera limité. L’ordonnance du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics, qui transpose la directive 2004/18/CE ne comporte aucune disposition en matière de durée.

En pratique, la transposition de la directive ne devrait cependant pas impacter les concessions de travaux stricto sensu, puisque celles-ci comportent par hypothèse des investissements, et ne sont dès lors pas concernées par le « safe harbour » de cinq ans.

En matière de concessions de services la transposition des dispositions de l’article 18 aura un impact sur la durée de ces dernières qui sont aujourd’hui régies par la loi Sapin.

Or, la loi du 29 janvier 1993 ne fixe pas de durée maximale (28) mais précise que la durée d’un contrat est déterminée « en fonction des prestations demandées au délégataire » et que « lorsque des installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée de la nature et du montant de l’investissement à réaliser et ne peut en aucun cas dépasser la durée normale d’amortissement des installations mises en œuvre ».

Aussi, au regard de la durée moyenne des contrats de concession en France ( onze à douze ans dans le secteur de l’eau ), l’établissement d’un seuil de cinq ans – sous lequel aucune justification n’est imposée – pour les contrats de concession constitue un « safe harbour » et non pas un plafond : la définition de la notion d’investissement demeure le principal enjeu de la transposition de l’article 18.

Il convient donc, à des fins de sécurité juridique, de maintenir, dans le corps de la loi française, une définition large de la notion d’investissement et de celle des objectifs contractuels. Une formulation de la disposition sur la durée des concessions dans la loi de transposition pourrait être comme suit :

« Les concessions sont limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par les autorités concédantes en fonction des prestations demandées au concessionnaire.

Au-delà de cinq ans, la durée des concessions prend en compte le temps nécessaire à l’amortissement des investissements financiers, humains et de recherche mis en œuvre par le concessionnaire afin de remplir ses objectifs contractuels spécifiques.

Les investissements pris en compte à cet effet sont les investissements initiaux et ceux intervenus en cours d’exécution du contrat. »

Les conditions déterminant les possibilités d’avenants aux concessions sans remise en concurrence sont traitées dans l’article 43 de la directive. Il convient de reprendre cette disposition dans la loi de transposition de manière exhaustive afin de garantir une certaine flexibilité aux parties devant modifier une concession en cours d’exécution.

L’article 43 de la directive dispose qu’une nouvelle procédure de mise en concurrence n’est pas nécessaire dans chacun des cas suivants :

a) la modification a été prévue par une clause contractuelle claire et limitée dans les documents de concession initiaux ;

b) des travaux ou services supplémentaires sont apparus nécessaires et leur réalisation par un autre opérateur est impossible ou présente un inconvénient majeur, ou entrainerait une multiplication substantielle des coûts, dans le respect d’un seuil de 50 % de la valeur de concession initiale, hors secteur « réseau » ;

c) des circonstances imprévisibles rendent la modification nécessaire, sans que celle-ci ne modifie la nature globale de la concession dans le respect d’un seuil de 50 % de la valeur de concession initiale, hors secteur « réseau » ;

d) le concessionnaire initial doit être remplacé, en raison d’une clause contractuelle ou à la suite d’une restructuration de l’entreprise, tant que le nouvel opérateur répond aux critères qualitatifs initiaux de sélection ;

e) la modification n’est pas substantielle, c’est-à-dire qu’elle n’altère pas le résultat de la procédure initiale, ne change pas l’équilibre économique du contrat et n’étend pas de manière considérable le champ d’application de la concession.

D’autre part, des modifications mineures demeurent toujours possibles, si leur montant reste inférieur à 5 millions d’euros et 10 % du montant du contrat initial.

Les dispositions prévues par l’article 43 de la directive sont plus contraignantes que le droit français, mais les points b. et c. apportent aux contractants une base juridique solide pour les avenants nécessaires à la bonne exécution des contrats de concession. Il est donc souhaitable que les législateurs transposent tel quel l’article 43 dans le droit national, en maintenant notamment la précision selon laquelle, pour les secteurs concernés, le plafond de 50 % de la valeur de la concession initiale s’applique à chaque modification.

CONCLUSION

Notre pays est entré à reculons dans la négociation de la directive concession et a, à l’évidence, moins bien défendu ses intérêts que nos partenaires allemands.

Compte tenu des éléments développés précédemment, nous sommes favorables à une transposition sur le strict champ de la directive :

- en dessous du seuil et hors champ d’application de la directive ( contrats qui ne reflètent pas un intérêt transnational manifeste ) nous défendons le maintien de la loi Sapin ( qui répond parfaitement aux exigences de mise en concurrence de transparence, d’égalité des candidats et qui est maitrisée par les collectivités, toutes tailles confondues ) ;

- dans le champ d’application de la directive nous souhaitons également le maintien de la loi Sapin, lorsque cela est possible au regard des traités européens, en particulier lorsqu’elle favorise la concurrence par rapport à la directive. Aussi nous ne souhaitons pas que certaines facultés ouvertes par le texte européen (« in house » et « entreprises liées ») soient introduites en France.

Afin de simplifier la production juridique européenne, jugée parfois trop complexe, inapplicable ou indûment coûteuse pour les agents économiques, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a introduit une procédure dite « best regulation » visant à toiletter la législation européenne, et le cas échéant à interrompre une procédure législative en cours ( comme par exemple le règlement interdiction de circulation des poids lourds retiré par la Commission européenne entre la première lecture et la seconde en 2004 ).

Il apparaît à vos rapporteurs que les contradictions et complexités juridiques introduites par la directive concessions en première lecture, et les graves inégalités concurrentielles qu’elle introduit au sein du marché intérieur européen, en particulier, aux dépens des entreprises françaises de délégation de service public (DSP) qui constituent des fleurons mondiaux, devraient justifier une initiative. Mais l’accord entre le Parlement européen et le Conseil avant le renouvellement du Parlement européen rend peu réaliste une telle option.

Si la nécessité de clarifier juridiquement les DSP, en les distinguant précisément des marchés publics dans le droit positif européen, n’est pas remise en question, force est de constater que le texte existant, va à l’encontre, en son état actuel.

En particulier, il est clair que son impact n’a pas été évalué de façon suffisamment impartiale pour éviter qu’il résulte d’obscurs rapports de force et de lobbying qui ne devraient pas prévaloir dans l’élaboration d’un droit positif conforme aux principes essentiels des traités de l’Union.

Vos rapporteurs suggèrent qu’une étude d’impact impartiale et documentée, en particulier sur le paysage européen des entreprises « in house » au sens de la directive et sur l’évaluation des biais éventuels qu’elle pourrait introduire au sein du marché intérieur européen des concessions de service public, soit mise en œuvre sans délai, avant même la transposition de la directive concessions.

En l’état, la directive, pour nécessaire qu’elle puisse paraître à une clarification du droit européen de la commande publique, introduit plus de confusions et d’incertitudes que de sécurité et de robustesse juridique.

● En premier lieu, elle ne distingue par clairement la concession ( qui intègre les investissements ) de l’affermage ( qui ne les intègre pas ) et confère à ce dernier une durée maximale de 5 ans absolument irréaliste, qui risque de le faire tomber en désuétude. C’est a minima une période contractuelle de 8 ans qui conviendrait aux affermages.

● En second lieu, les seuils d’avenant au contrat initial ( 10 % ou 5 millions d’euros ) apparaissent très insuffisants pour des contrats importants, et inenvisageables à mettre en œuvre sans affaiblir l’intérêt même des concessions.

● Enfin, et surtout, cette directive introduit dans le droit de la commande publique européen, des facteurs particulièrement manifestes et inconcevables d’asymétrie concurrentielle, que ce soit par l’étendue de ses exclusions sectorielles, qui visent à protéger certains marchés nationaux, ou par les libertés accordées aux entreprises liées, aux co-entreprises et aux entreprises « in house » à activité mixte.

À cet égard, il s’agit d’une des très rares productions législatives de l’Union européenne qui organise et encadre un recul du marché intérieur, et inscrit le protectionnisme « en menu » des États membres, dans la légalité européenne.

De la même façon, et selon le même principe de « plus grande ouverture européenne », il apparaît légitime qu’à partir de seuils significatifs de marché et d’affaires, les filiales de monopoles locaux (entreprises liées) ne bénéficient pas, par extension, d’une exception de mise en concurrence équitable.

Pour conclure, vos rapporteurs suggèrent très fortement une action urgente de la France visant :

- à exiger sans attendre une renégociation des points de faiblesse du texte, par la mise à l’agenda européen d’un texte de révision de la directive concessions, avant même sa transposition ;

- à défaut, à effectuer un recours devant la CJUE contre les dispositions les plus inéquitables et les plus anti-concurrentielles du texte.

Par ailleurs, vos rapporteurs pensent qu’une transposition sur la base de la loi Sapin, à peine adaptée, doit être envisagée par la France dans les plus brefs délais à des fins de sécurisation juridique des donneurs d’ordre et des opérateurs économiques.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 4 février 2014, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

M. Arnaud Richard, co-rapporteur. Fin juin 2013, le Conseil de l'Union européenne, la Commission européenne et le Parlement européen ont conclu des accords provisoires relatifs au « paquet marchés publics », qui devraient être définitivement adoptés dans les semaines qui viennent.

Cette réforme était composée de trois propositions de directives européennes : la première directive est d'ordre général et concerne en particulier les procédures de passation des marchés ; la deuxième devrait couvrir les services liés à l'énergie, aux transports et aux services postaux ; la troisième, objet du présent rapport, devrait régir les concessions de travaux et de services, sujet complexe.

Ces trois directives devraient permettre aux autorités de se baser sur de nouveaux critères, notamment de nature environnementale ou financière, dans le but d'accepter l'offre la moins chère, mais aussi la plus innovante.

Afin d'éviter la pratique du « dumping » et la concurrence déloyale, les nouvelles directives devraient mettre en place des règles plus rigoureuses concernant la pratique des « offres anormalement basses ».

S’ils partageaient ces objectifs généraux s’agissant des marchés publics, les pouvoirs publics français - Gouvernement, Assemblée Nationale et Sénat - ont dès le départ fait part de leur hostilité à une réforme de la législation relative aux concessions, estimant que ce texte n’était pas nécessaire, contrevenait au principe de subsidiarité et ne prenait pas assez en compte la spécificité française du contrat de concession.

Votre Commission des affaires européennes avait considéré en 2012 que l’harmonisation souhaitée pouvait s’effectuer sous la forme de lignes directrices, mais non sous la forme d’une législation. Cette position a conduit les autorités françaises à aborder en reculant un projet, qui n’était pas satisfaisant, et a probablement affaibli la position de notre pays dans la négociation qui vient d’aboutir.

En effet, l’accord provisoire obtenu en trilogue avec le Conseil et la Commission européenne, en juin a été validé en juillet par le COREPER et adopté par le Parlement européen le 14 janvier dernier.

La publication de ce texte devrait donc intervenir très rapidement. La directive entrera en vigueur 20 jours après la publication au Journal Officiel de l'Union Européenne, après cette date, les États membres disposeront de 24 mois pour la transposer.

Quelles étaient les ambitions de la Commission européenne ? Elle a entendu rationaliser et favoriser le recours aux concessions de services publics, par le biais d’une proposition, publiée le 20 décembre 2011.

En l’absence de normes européennes, les contentieux pouvant survenir conduisaient les autorités européennes à traiter les concessions à l’aide des réglementations applicables aux marchés publics ou aux services d’intérêts généraux, ces deux cadres ne prenant pas en compte la spécificité des concessions.

La directive a pour ambition de pallier aux principales failles mises en lumière par la Commission européenne dans son analyse d’impact relative aux concessions : l’insécurité juridique liée à l’absence de régime juridique applicable à la concession, ainsi que l’existence de barrières à l’entrée sur le marché.

Le projet élaboré par la Commission a beaucoup évolué. Initialement, il lui était reproché de trop s’inspirer des directives relatives aux marchés publics. Grâce, en particulier, aux travaux du rapporteur devant le Parlement européen, M. Philippe Juvin, le texte a été profondément amendé.

Dans sa dernière mouture, il s’accorde mieux avec les spécificités du contrat de concession. Les nouvelles règles s'appliqueraient aux contrats publics d'une valeur de 5 millions d'euros ou plus ; elles permettront aux autorités de choisir l'offre la plus intéressante du point de vue financier, environnemental ou social.

Mais, mes chers collègues, sous la pression allemande, les nouvelles règles relatives aux contrats de concession ne devraient finalement pas concerner le secteur de l’eau, qui est extrêmement important. Il faut relever que les coopérations entre entités publiques (régies) ; entre une entreprise liée et une entité publique ; ou entre organismes de droit public qui, de par la loi nationale, ont une partie minoritaire de capitaux privés, sont exclues également du champ d’application de la directive.

Je vais exprimer maintenant les réticences du gouvernement français vis-à-vis de la démarche. Le précédent gouvernement considérait que toute modification de législation applicable aux marchés publics ne pourrait être envisagée qu’au terme d’une évaluation juridique et économique précise, qui n’a pas, à mes yeux, été véritablement réalisée par la Commission européenne.

Enfin, pour le Gouvernement toute initiative visant à la modernisation de ces règles devait se faire en conformité avec les règles sectorielles existantes notamment en matière de transports, d’énergie et de services en réseaux. Nous verrons que la directive sur les concessions ne respecte que très partiellement cette exigence spécifique française.

Dans sa proposition initiale la Commission européenne a proposé une architecture semblable à celle des directives marchés publics.

Elle vise un objectif de sécurité juridique en précisant les concepts et les modifications possibles de concessions en cours d’exécution. Elle souhaite également garantir l’accès effectif du marché des concessions à toutes les entreprises, et particulièrement les PME, des obligations de publication dans le Journal Officiel de l’Union européenne au-delà d’un seuil de 5 millions d’euros sont ainsi imposées. Les critères d’attribution sont précisés, un délai de soumission de 52 jours est imposé pour éviter les discriminations et les risques de fraude observés, en cas d’absence de règles nationales sur les concessions. Aucune procédure d’attribution spécifique n’est proscrite, ou privilégiée, mais l’accent est mis sur la définition de garanties générales pour assurer la transparence et l’égalité de traitement avec un encadrement de la phase de négociation.

La Commission précise, c’est très important, qu’elle n’entend pas favoriser la libéralisation de certains secteurs relevant des services d’intérêt économique général (énergie, transports…) ou imposer un mode de gestion, elle laisse ce choix aux États membres, qui, s’ils décident d’en externaliser certains, doivent alors se soumettre aux règles des concessions.

Les personnes que nous avons auditionnées ont souligné les incertitudes et les conséquences du projet initial, eu égard à la remise en cause du régime français des concessions, en particulier dans le secteur de la distribution de l’énergie.

En effet, la situation de monopole, en particulier dans le gaz, qui est fondée sur l’octroi de droits exclusifs conformes aux traités européens, permet en France une péréquation tarifaire sur l’ensemble du territoire.

Cette dernière qui est nécessaire à l’accomplissement de missions de service public, ne serait plus garantie en cas de remise en cause des législations sectorielles, ce qui était le cas de la proposition initiale de la Commission européenne.

Les inquiétudes que soulevait le premier projet ont pu être levées. En particulier pour le secteur de l’énergie qui en est exclu.

Nous devons regretter toutefois la multiplication des exclusions prévues dans le texte définitif - dérogations « entreprises liées » et « in house » - pour des secteurs qui, à l’inverse de la distribution de gaz, ne sont pas couverts par d’autres directives spécifiques.

M. Gilles Savary, co-rapporteur. Cette directive, vous l’avez compris, nous apparaît assez curieuse. Il y avait la nécessité de clarifier la distinction entre concession et marché public et la France ne pouvait pas y être hostile puisque nous sommes les champions des délégations de service public, qui bénéficient à des grandes entreprises françaises de niveau mondial.

Elle porte sur beaucoup de sujets sur lesquels la France a engagé des réformes, telles que les sociétés d’économies mixtes, ou les régies, qui ne peuvent plus participer à des appels d’offres aujourd’hui mais pourraient revenir dans le jeu sur la base de cette directive à concurrence de 20 % de leur chiffre d’affaires.

En fait, ce qui nous inquiète dans ce texte est le fait qu’il ait été « lobbyé » par nos partenaires allemands et qu’il affaiblit la compétitivité française.

En résumé, les Allemands disent qu’une régie municipale est exemptée de concurrence chez elle, mais peut aller prospecter d’autres marchés alors que cela était impossible. Par exemple le « Stadtwerke » de Munich qui réalise un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros, pourrait soumissionner sur des marchés extérieurs à concurrence de 800 millions d’euros.

Nous avons trouvé des acteurs surpris et inquiets du résultat auquel nous avons abouti, car ce texte exclut tous les points forts français ouverts à la concurrence, par exemple, l’eau, le gaz et l’électricité.

Nous nous trouvons dans une situation où l’Allemagne protège son marché et ses « Stadtwerke », mais où nos grandes entreprises de service public sont prises à revers, ce qui est très inquiétant. Tous les opérateurs que nous avons rencontrés sont stupéfaits de ce résultat, qui à mon avis est attaquable devant la Cour de justice au titre du marché intérieur du fait des inégalités de concurrence ainsi créées.

L’élaboration de la directive concession a été laborieuse ; elle entraîne la disparition de l’affermage, du fait de la réduction à cinq ans des concessions courtes, dépourvues d’investissement. Cette directive exige également que les avenants ne dépassent pas 5 millions d’euros sur la durée de la concession, ce qui n’est rien pour les grosses concessions.

Bref, voilà un texte « baroque », déséquilibré, protecteur d’un des États qui devrait être le plus ouvert au marché, ce qui est difficilement admissible. Je le dis comme je le pense, un peu brutalement.

Je propose que dans la transposition, la France colle le plus possible à la loi Sapin.

Nous préconisons d’abandonner peut-être l’intuitu personae, mais la loi Sapin est un très bon texte qui permet de négocier des concessions à géométrie variable selon le montant des investissements, leur nature et le temps de retour. Il permet de faire du dialogue compétitif ou de conclure des avenants en cas de problème lourd, sans remise en cause de la concession. On le voit tous les jours, par exemple dans les transports publics avec une concurrence ouverte et un vrai pilotage par la puissance publique à travers le cahier des charges.

Il nous semble que la France doit réitérer sa conception de la régie, qui est celle de la jurisprudence européenne, c’est-à-dire l’impossibilité pour une régie d’aller faire des affaires ailleurs, de façon à ce que nous ne nous fassions pas chalenger par des « Stadtwerke » monstrueuses protégées chez elle. Cela nous paraît sain et de jurisprudence constante.

Nous préconisons également une acception large de l’investissement, du fait de la durée réduite, afin de favoriser l’amortissement, en particulier des investissements matériels lourds.

M. Jacques Myard. À vous entendre, Messieurs les rapporteurs, j’aimerais savoir quelle est l’utilité d’une directive dans ce domaine-là ? Nous avons des principes généraux, notamment en matière de non-discrimination et d’égalité de traitement, qui devraient suffire. Cela étant, nous savons tous qu’il y a une méthode pour contourner les règles envisagées : une régie peut toujours créer une société pour conduire des affaires au niveau international dans le cadre du droit commun international et européen.

Par ailleurs, il faut avoir à l’esprit que nous avions, en matière d’électricité, une entreprise publique totalement intégrée, EDF, qui a été cassée sous les coups de boutoir européens, parce que les Allemands avaient peur d’EDF, qui avait une réelle puissance d’action, alors que chez eux le marché de l’électricité était et demeure scindé par Land et par ville. Lorsque vous voulez pénétrer le marché, vous vous heurtez à une multitude de réseaux qui appartiennent aux districts ou aux Länder. Nous sommes les dindons de la farce.

Mme Sandrine Doucet. Je suis tout à fait d’accord.

La Présidente Danielle Auroi. Je rappelle qu’EDF a fait en Argentine ce que l’on ne veut pas que les « Stadtwerke » fassent aujourd’hui en Europe. Les bonnes et les mauvaises pratiques sont partagées par les États. La recommandation faite par les rapporteurs de s’appuyer sur la loi Sapin me semble être un bon point d’équilibre, que je vous propose de retenir.

M. Jacques Myard. Pourquoi a-t-on calé sur ce texte ?

M. Gilles Savary, co-rapporteur. On demande une transposition la plus proche possible de la loi Sapin, mais soyons clairs. Nous suggérons très fortement une action urgente de la France visant à exiger sans attendre une renégociation des points de faiblesse du texte avec la mise à l’agenda européen d’un texte de révision de la directive concessions et, à défaut, à effectuer un recours auprès de la DG concurrence contre les dispositions les plus inéquitables et les plus anti-concurrentielles du texte.

Je dois avouer que je n’ai jamais vu ça. Quand on demande aux Allemands de réduire les normes d’émission de CO2 des voitures, ils refusent catégoriquement, car ils produisent des grosses cylindrées, et ils parviennent à leurs fins. En France, nous ne sommes pas capables de faire ça. En tout état de cause, ce texte appelle une réaction vigoureuse de l’Assemblée nationale.

La Commission s’était également réunie le 11 juin 2013, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner la communication de M. Gilles Savary sur la proposition de directive relative aux contrats de concession.

M. Gilles Savary. Je vais essayer d’être simple sur un sujet hyper technique. Il s’agit du premier projet de directive sur les concessions de service public initiées en France depuis très longtemps. Colbert en a été le champion.

L’Union européenne a longtemps confondu les concessions avec les marchés publics, d’où une énorme confusion dans la jurisprudence qui ne disposait que de textes sur les marchés publics et non sur les concessions.

Aussi, la Commission a-t-elle rédigée une communication interprétative en 2000 pour distinguer marchés et concessions de service public. La France dispose d’un droits très précis et très sophistiqué sur ce sujet. L’Europe a toujours été taraudée par cette question, les Allemands ne comprenant pas vraiment cette notion.

Aussi a-t-il été décidé de mettre au point une directive qui n’est pas simple puisqu’elle fait 51 pages. Des interlocuteurs m’ont alerté sur la complexité et la difficulté de mise en œuvre de ce texte que j’ai examiné en toute indépendance pour arriver au même constat d’extrême complexité.

La jurisprudence de la Cour de justice était arrivée à des choses assez claires. En particulier, elle avait défini les régies directes, en jargon anglais « in house », qui par nature excluent l’appel d’offres. Mais la jurisprudence implique que la structure soit détenue à 100 % par l’autorité adjudicatrice, elle doit être cantonnée géographiquement, ce qui pourrait poser problème en France où des ports autonomes ou des administrations d’État vendent des prestations ailleurs. Cela est interdit par la jurisprudence qui est très stabilisée et a obligé les SEM à passer à un système concurrentiel et a obligé la France à créer les délégations de service public. Le texte sur les concessions est alambiqué car travaillé par des « secousses techniques » successives de lobbying qui commencent à nous dire que le « in house » n’est plus défini de la même façon, que nous pouvons avoir des régies qui ont 10 % de leur activité à l’extérieur et être exonérées d’appel d’offre.

Le texte permet également à une SEM réalisant 20 % de son chiffre d’affaires à l’extérieur d’être dispensée d’appel d’offre. On crée également la notion de co-entreprises, c’est-à-dire de SEM appartenant à plusieurs collectivités locales.

Bref, il s’agit d’un texte d’une assez grande confusion et il est très ambigu sur le partenariat public-public, car il a tendance à assimiler une structure inter-communale à un prestataire de services, alors qu’elle n’est que le prolongement organique de la commune. Il est totalement baroque de penser qu’une commune devrait recourir à des appels d’offre pour confier des tâches à l’intercommunalité à laquelle elle appartient.

Voilà un texte pour lequel je vous propose donc de dire qu’il crée de la confusion et devrait être récrit pour pouvoir être accepté. Je ne suis pour autant pas hostile à un texte sur les concessions ; mais je suis hostile à la définition suivante prévue par la proposition de directive : « un contrat à titre onéreux conclu par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou une ou plusieurs entités adjudicatrices, dont l’objet est la fourniture de services ou de travaux, la contrepartie de ces services ou travaux étant soit uniquement le droit d’exploiter les services qui font l’objet du contrat, soit ce droit accompagné d’un paiement. Le concessionnaire est réputé assumer l’essentiel du risque opérationnel qui peut être lié à l’utilisation des travaux ou à la demande de fourniture du service, ou lié à la disponibilité de l’infrastructure mise à disposition par le concessionnaire ou utilisée pour la fourniture du service aux usagers. »

Cette définition est inacceptable car elle crée une confusion avec la concession qui implique la délégation à une personne privée qui perçoit une redevance de la part des usagers. Il ne s’agit pas de l’acquisition de travaux. L’Europe n’a pas encore intégré la délégation de service public.

C’est pourquoi cette directive, opportune dans son principe, doit être réécrite.

La Présidente Danielle Auroi. Cette proposition de résolution intervient à mon sens soit trop tard dans la mesure où les discussions sur la proposition de directive sont déjà engagées dans le cadre des trilogues, soit trop tôt car notre commission n’est pas en mesure de formuler des propositions alternatives à celles de la Commission européenne. Le Sénat a affirmé son opposition politique, souhaitant de simples recommandations à ce projet de directive. En février 2012, notre commission des affaires européennes avait pris position sur le sujet dans une forme différente. Une vision complémentaire est nécessaire car on peut certes avoir une grille de lecture à travers ce que qui est appliqué en France comme les régies, les sociétés d’économie mixte ou les sociétés publiques locales, mais il faudrait aussi comparer avec d’autres formes juridiques comme les Staatwerke allemandes, qui sont une forme de régie. Afin de donner une assise technique à un choix politique, qui est celui qu’a fait le Sénat , il serait souhaitable que nous fassions des propositions afin de répondre aux critiques émises à l’encontre de la proposition de directive. Je ne suis pas favorable à l’adoption à ce stade d’une proposition de résolution. Il faudrait effectuer un travail en amont afin de tirer les conséquences techniques de notre position politique et affiner ce que nous souhaitons en matière de partenariat public-privé. Il faudrait notamment intégrer la logique des collectivités locales et faire la part de la pression des lobbys de l’environnement.

M. Gilles Savary, rapporteur. La France n’a pas défini une position claire sur ce sujet. La proposition qui émane du commissaire français au marché intérieur Michel Barnier semble être le résultat de strates successives découlant de l’intervention croisée de différents lobbys. Michel Barnier a toutefois eu raison de faire une proposition en la matière. Sur ce point, je ne suis pas d’accord avec le Sénat qui fait valoir le principe de subsidiarité. Dans la mesure où il y a une jurisprudence qui se développe, ce qui crée une insécurité juridique, il faut réglementer. Mais du fait de la pression, notamment des staatwerke, la proposition telle qu’elle est présentée conduirait à des imbroglios juridiques, par exemple sur les entreprises liées. Je regrette qu’après la lumineuse communication qu’elle a faite en 2008 sur les partenariats public-privé, la Commission européenne sombre dans la complexité sur ce sujet. Il faudrait donc que notre commission des affaires européennes intervienne assez rapidement et je serais favorable à la constitution d’un groupe de travail chargé de faire des propositions afin de réécrire la proposition de directive.

La Présidente Danielle Auroi. Notre démarche se situerait dans une logique de réécriture d’une réglementation qui correspond à un besoin. La position du Sénat a toutefois l’avantage de se situer dans une logique de prudence, qui l’a conduit à refuser un texte inacceptable en l’état.

M. Michel Piron. Notre commission pourrait refuser la proposition de directive dans l’attente d’une réécriture.

M. Gilles Savary, rapporteur. Il faut souligner sur ce sujet les différences d’approche de l’Association publique des SPL, anciennement associations des Sociétés d’économie mixte ( SEM ) et l’Institut de gestion déléguée. Ce dernier ne serait pas défavorable à un texte mais craint la mise en concurrence avec les Staatwerke qui pourraient s’implanter en France. Notons que les sociétés locales allemandes sont bien plus puissantes qu’en France où seules pèsent les entités nationales. Elles peuvent très facilement s’adapter aux marchés locaux.

La Présidente Danielle Auroi. Je vous propose d’adopter les deux derniers points comme conclusions et de mettre parallèlement sur pied un groupe de travail, ainsi que nous l’avons fait s’agissant de la directive détachement.

M. Yves Daniel. Un travail complémentaire est en effet indispensable pour définir les objectifs que nous souhaitons atteindre tant au niveau national pour clarifier les outils dont nous disposons, qu’au niveau européen, afin de poser les conditions d’une harmonisation et d’une concurrence loyale.

La Présidente Danielle Auroi. Je vous propose donc d’adopter des conclusions, qui reprennent les derniers paragraphes de la proposition du rapporteur, et de constituer un groupe de travail dont les rapporteurs seront Gilles Savary et Arnaud Richard, et qui pourra être éventuellement élargi.

La Commission avait ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le Traité sur l’Union européenne,

Vu la proposition de directive du Parlement et du Conseil sur l’attribution de contrat de concession 2011/0437 ( COD ),

Estime utile l’intervention d’une législation européenne relative à l’attribution de contrats de concession ;

Regrette la trop grande complexité du texte proposé ;

Estime que la portée de ce projet de directive est affaibli par ses trop nombreuses imprécisions juridiques et confusions conceptuelles, qui l’exposent à des mises en application inégales au sein des États membres et de leurs collectivités locales, mais aussi à des recours contentieux ;

Considère par conséquent qu’une réécriture simplifiée et clarifiée de ce texte, conforme au principe de proportionnalité est absolument nécessaire aux objectifs de simplification et de sécurisation juridique qu’il poursuit, et, à défaut, s’interroge sur sa valeur ajoutée par rapport à la situation présente. »

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

Ø Institut de la gestion déléguée :

- M. Hubert du Mesnil, président

- M. Pierre-Emeric Chabanne, délégué général

- M. Laurent Richer, professeur agrégé de droit public

Ø Ministère de l’économie et des finances

- M. Fabrice Aubert, conseiller juridique

- M. Jean Maïa, directeur service juridique

- Mme Catherine Delort, sous-directrice, droit de la commande publique

Ø Secrétariat général des affaires européennes :

- M. Bertrand Jéhanno, chef du secteur marché intérieur, consommateurs, concurrence, aides d’État et armement

Ø Maître Gregory Berkovicz, avocat

Ø Association des Maires de France

- Mme Annick Pillevesse, responsable du département conseils juridiques

- Mme Nathalie Fourneau, conseillère technique au sein de ce département

Ø Entreprises Publiques Locales

- M. Alexandre Vigoureux, responsable juridique

- Mme Julia Hagen, responsable Europe

Ø Transdev

- M. Michel Quidort, directeur des relations institutionnelles

- M. Pierre Marty, directeur juridique

- M. Laurent Bougard, directeur droit des transports et des affaires réglementaires à la Direction juridique

Ø Eiffage TP

- M. Max Roche, directeur général adjoint

- M. Elie Spiroux, directeur délégué aux Pouvoirs Publics et Collectivités locales

Ø FNCCR (Fédération nationale des collectivités concédantes et régies)

- M. Pascal Sokoloff, directeur général

- M. David Beauvisage, chargé de mission

Ø Veolia

- M. Rainier d’Haussonville, directeur des affaires publiques

- Mme Marie-Thérèse Suart-Fioravante, directeur des relations institutionnelles

Ø La FP2E

- M. Tristan Mathieu, délégué général de la FP2E

- M. Didier Paris, directeur des affaires publiques et de la communication du groupe SAUR

- M. Nicolas de Saint Martin, membre de la FP2E

- M. Jean-Paul Ducharne, membre de la FP2E

Ø UNSPIC

- Mme Marie Dubois, déléguée générale

- Mme Brigitte Simon, représentante de la commission juridique

ANNEXE N° 2 : LA LOI SAPIN

La loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite loi « Sapin », fait l’objet d’un rare consensus si bien qu’elle n’a subi que de très peu de modifications au cours des vingt dernières années. Son chapitre IV encadre les DSP dans le respect des principes d’égalité de traitement et de transparence, tout en laissant aux autorités délégantes la liberté de négocier avec les candidats de leur choix, pourvu que leurs offres correspondent au cahier des charges.

Plus précisément, pendant la phase de passation, le pouvoir adjudicateur est soumis à une obligation de mise en concurrence, ( procédures de publicité ; une présélection des candidats et des offres par une commission d’ouverture des plis, transmission aux soumissionnaires un document de consultation définissant les caractéristiques techniques des prestations attendues, rédaction d’un rapport sur les différentes offres ). La loi prévoit cependant le maintien du principe l’intuitus personae en vertu duquel la décision finale de l’autorité responsable qui engage en toute liberté des négociations avec les entreprises, peut s’écarter des conclusions de la commission.

S’agissant de l’exécution des contrats, la loi prévoit à son article 40 une limitation de la durée des conventions, en fonction de la durée d’amortissement des investissements et encadre les possibilités de prolongation. De même, elle précise les modalités de fixations de montants des droits d’entrée et de redevance versés par le délégataire au pouvoir adjudicateur.

Enfin, la loi et les dispositions réglementaires qui en sont issues, renforcent les contrôles externes : (transmission de la convention au préfet dans un délai de quinze jours, création d’un référé précontractuel et d’un déféré suspensif, droit d’enquête sur pièce et sur place des magistrats des juridictions financières auprès des entreprises délégataires…) et instaure des infractions pénales : concussion, corruption passive et trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, délit de favoritisme, atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les délégations de service public, autrement appelé délit de favoritisme Enfin, l’article 40-l prévoit des obligations d’information du public : le délégataire doit produire chaque année, avant le 1er juin un rapport « comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la délégation de service public et une analyse de la qualité du service ».

LOI

Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques

NOR : PRMX9200148L

Texte consolidé

Extraits

CHAPITRE IV : Délégations de service public

§ Section I : Dispositions générales

Art. 38. - Les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l’autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’État.

La collectivité publique dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l’égalité des usagers devant le service public.

La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s’il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l’usager.

Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l’autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire.

Art. 39. - L’article 52 de la loi d’orientation n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République est abrogé.

Art. 40. - Les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l’investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d’amortissement des installations mises en œuvre.

Une délégation de service ne peut être prolongée que :

a) Pour des motifs d’intérêt général. La durée de la prolongation ne peut alors excéder un an ;

b) Lorsque le délégataire est contraint, pour la bonne exécution du service public ou l’extension de son champ géographique et à la demande du délégant, de réaliser des travaux non prévus au contrat initial, de nature à modifier l’économie générale de la délégation et qui ne pourraient être amortis pendant la durée de la convention restant à courir que par une augmentation de prix manifestement excessive. [ Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 ]

Si la délégation a été consentie par une personne publique autre que l’Etat, la prolongation mentionnée au a ou au b ne peut intervenir qu’après un vote de l’assemblée délibérante.

Les conventions de délégation de service public ne peuvent contenir de clauses par lesquelles le délégataire prend à sa charge l’exécution de services ou de paiements étrangers à l’objet de la délégation.

Les montants et les modes de calcul des droits d’entrée et des redevances versées par le délégataire à la collectivité délégante doivent être justifiés dans ces conventions.

Les modalités d’application du présent article sont fixées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.

Art. 41. - Les dispositions du présent chapitre ne s’appliquent pas aux délégations de service public :

a) Lorsque la loi institue un monopole au profit d’une entreprise ;

b) Lorsque ce service est confié à un établissement public. [ Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 ] et à condition que l’activité déléguée figure expressément dans les statuts de l’établissement. [ Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 ].

Section 2

Dispositions applicables aux collectivités territoriales, aux groupements de ces collectivités et à leurs établissements publics

Art. 42. - Les assemblées délibérantes des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics se prononcent sur le principe de toute délégation de service public local. Elles statuent au vu d’un rapport présentant le document contenant les caractéristiques des prestations que doit assurer le délégataire.

Art. 43. - Après décision sur le principe de la délégation, il est procédé à une publicité et un recueil d’offres dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article 38.

Les plis contenant les offres sont ouverts par une commission composée :

a) Lorsqu’il s’agit d’une région, de la collectivité territoriale de Corse, d’un département, d’une commune de 3 500 habitants et plus et d’un établissement public, par l’autorité habilitée à signer la convention de délégation de service public ou son représentant, président, et par cinq membres de l’assemblée délibérante élus en son sein à la représentation proportionnelle au plus fort reste ;

b) Lorsqu’il s’agit d’une commune de moins de 3 500 habitants, par le maire ou son représentant, président, et par trois membres du conseil municipal élus par le conseil à la représentation proportionnelle au plus fort reste.

Il est procédé, selon les mêmes modalités, à l’élection de suppléants en nombre égal à celui de membres titulaires.

Le comptable de la collectivité et un représentant du ministre chargé de la concurrence siègent également à la commission avec voie consultative.

Au vu de l’avis de la commission, l’autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre. Elle saisit l’assemblée délibérante du choix de l’entreprise auquel elle a procédé. Elle lui transmet le rapport de la commission présentant notamment la liste des entreprises admises à présenter une offre et l’analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l’économie générale du contrat.

Art. 44. - Deux mois au moins après la saisine de la commission mentionnée à l’article 43, l’assemblée délibérante se prononce sur le choix du délégataire et le contrat de délégation.

Les documents sur lesquels se prononce l’assemblée délibérante doivent lui être transmis quinze jours au moins avant sa délibération.

Art. 45. - Le recours à une procédure de négociation directe avec une entreprise déterminée n’est possible que dans le cas où, après mise en concurrence, aucune offre n’a été proposée ou n’est acceptée par la collectivité publique.

Art. 46. - I. Dans le premier alinéa de l’article L. 314-1 du code des communes, après les mots : « Aux conventions de marché », sont insérés les mots : « et de délégation de service public ».

II. - Le deuxième alinéa de l’article L. 314-1 du code des communes est ainsi rédigé :

« Elle certifie, par une mention apposée sur la convention notifiée au titulaire du marché ou de la délégation, que celle-ci a bien été transmise, en précisant la date de cette transmission. »

III. - Dans le dernier alinéa de l’article L. 314-1 du code des communes, les mots : « ce marché » sont remplacés par les mots : « cette convention ».

IV. - Les dispositions de la présente section s’appliquent aux groupements des collectivités territoriales et aux autres établissements publics de ces collectivités.

Art. 47. - Les dispositions des articles 38 et 42 à 46 de la présente loi sont applicables aux conventions dont la signature intervient à compter du 31 mars 1993.

Elles ne sont pas applicables lorsque, avant la date de publication de la présente loi, l’autorité habilitée a expressément pressenti un délégataire et que celui-ci a, en contrepartie, engagé des études et des travaux préliminaires.

o CHAPITRE V : Marchés publics

Art. 48. - I. - Les contrats des travaux, d’études et de maîtrise d’œuvre conclus pour l’exécution ou les besoins du service public par les sociétés d’économie mixte, en leur nom ou pour le compte de personnes publiques, sont soumis aux principes de publicité et de mise en concurrence prévus par le code des marchés publics dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

[Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 92-316 DC du 20 janvier 1993.]

II. - Il est inséré au chapitre III du titre III du livre IV du code de la construction et de l’habitation un article L. 433-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 433-1. - Les contrats conclus par les organismes privés d’habitations à loyer modéré sont soumis aux principes de publicité, de mise en concurrence et d’exécution prévus par le code des marchés publics dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

III. - Le titre VIII du livre IV du code de la construction et de l’habitation est complété par un article L. 481-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 481-4. - Les contrats conclus par les sociétés d’économie mixte exerçant une activité de construction ou de gestion de logements sociaux sont soumis aux principes de publicité, de mise en concurrence et d’exécution prévus par le code des marchés publics dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

o CHAPITRE VI : Dispositions communes aux délégations de service public et aux marchés publics

Art. 49. - I. - Le premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence est ainsi rédigé :

« Il est créé une mission interministérielle d’enquête sur les marchés et les conventions de délégation de service public, chargée de procéder à des enquêtes portant sur les conditions de régularité et d’impartialité dans lesquelles sont préparés, passés ou exécutés les marchés et les conventions de délégation de service public de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics [ Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 ] des sociétés d’économie mixte d’intérêt national chargées d’une mission de service public et des sociétés d’économie mixte locales. »

II. - Le premier alinéa de l’article 2 de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 précitée est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les enquêtes sont diligentées à la demande du Premier ministre, ou du ministre chargé de l’économie et des finances, ou pour son département, les établissements et les sociétés d’économie mixte placés sous sa tutelle à la demande de chaque ministre ou du chef de la mission lorsque l’enquête sur un marché ou une convention de délégation de service public fait présumer des irrégularités dans d’autres marchés ou conventions.

« Elles peuvent être diligentées à la demande du préfet lorsqu’elles concernent des marchés ou des conventions de délégation de service public passés par les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les sociétés d’économie mixte locales. »

III. - A l’article   de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 précitée, au premier alinéa, après les mots : « dans les marchés » et au second alinéa, après les mots : « sur les marchés », sont insérés les mots : « et les conventions de délégation de service public ».

Art. 50. - I. - Les cinq premiers alinéas de l’article L. 22 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président du tribunal administratif, ou son délégué, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et des conventions de délégation de service public. »

II. - Le sixième alinéa de l’article L. 22 du même code est ainsi rédigé :

« Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement, ainsi que le représentant de l’État dans le département dans le cas où le contrat est conclu ou doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local. »

III. - A l’avant-dernier alinéa du même article L. 22, les mots : « mentionnées ci-dessus a été commise » sont remplacés par les mots : « de publicité et de mise en concurrence d’origine communautaire, a été commise ».

ANNEXE N°3 :
TABLEAU INDICATIF DE CONCORDANCE DIRECTIVE CONCESSIONS/DROIT INTERNE


Tableau indicatif et non exhaustif de concordance, directive concessions/droit interne

Dispositions de la directive

Dispositions législatives en vigueur susceptibles d’être modifiées

Observations

TITRE I : OBJET, CHAMP D'APPLICATION, PRINCIPES ET DÉFINITIONS

CHAPITRE I : Champ d'application, principes généraux et définitions

SECTION I : OBJET, CHAMP D'APPLICATION, PRINCIPES GÉNÉRAUX, DÉFINITIONS ET SEUIL

Article premier : Objet et champ d'application

La directive établit les règles applicables aux procédures de passation de contrats de concession dont la valeur est estimée atteindre ou dépasser le seuil de 5 186 000 euros.

Délégation de service public (DSP) :

Loi n°93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (dite Loi Sapin), article 38, et article L1411-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Concessions de travaux publics :

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics : articles 2 et 4.

Extension du champ d’application aux entités adjudicatrices (EA) de la législation interne sur les concessions. La directive rend applicable les règles de passation des concessions de services aux contrats passés par certaines personnes morales de droit privé ainsi qu’aux entreprises publiques ou entités bénéficiant de droits exclusifs.

La loi Sapin est applicable aux contrats passés par les personnes morales de droit public, pour des services dont elles ont la responsabilité. Sont exclues du champ de la loi Sapin les personnes privées qui répondent à la qualification d’ « organismes de droit public », ainsi que les personnes privées répondant à la qualification d’entités adjudicatrices.

La directive a un champ d’application organique plus large que celui de la loi Sapin. Elle est applicable aux contrats de concession de services passés par les pouvoirs adjudicateurs qui répondent à la qualification d’ « organismes de droit public » en droit de l’Union européenne, des entreprises publiques, ainsi que par des entités adjudicatrices qui ne sont ni un pouvoir adjudicateur (PA), ni une entreprise publique mais une entité bénéficiant de droits spéciaux. La définition de la concession de services, en particulier, l’absence d’éléments sur la dévolution d’un service dont le PA doit être responsable, combiné à un tel champ d’application personnel, conduira à rendre applicables les règles de passation de la directive aux contrats de subdélégation des entreprises publiques ou des personnes privées répondant à la qualification d’organisme de droit public ou bénéficiant de droits exclusifs.

Article 5 : Définitions

La présente directive entend par « concessions » : des concessions de travaux publics, de travaux ou de services.

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 – Article 1er et article L. 1415-1 CGCT :  « Les contrats de concession de travaux publics sont des contrats administratifs passés par une collectivité territoriale ou un établissement public local dont l'objet est de faire réaliser tous travaux de bâtiment ou de génie civil par un concessionnaire dont la rémunération consiste soit dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix. »

 

Article 5-1-a : Définitions

La concession de travaux est un « contrat conclu par écrit et à titre onéreux par lequel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices confient l'exécution de travaux à un ou plusieurs opérateurs économiques, la contrepartie consistant soit uniquement dans le droit d'exploiter les ouvrages qui font l'objet du contrat, soit dans ce droit accompagné d'un prix. »

La définition de « concession de travaux » retenue par la directive impliquera d’étendre, en droit interne, le champ de la législation sur les concessions de travaux aux entités adjudicatrices.

 

Article 5-1-b : Définitions

La concession de services est un « contrat conclu par écrit et à titre onéreux par lequel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices confient la prestation et la gestion de services autres que l'exécution de travaux visée au point a) à un ou plusieurs opérateurs économiques, la contrepartie consistant soit uniquement dans le droit d'exploiter les services qui font l'objet du contrat, soit dans ce droit accompagné d'un prix. »

Art 38 de la Loi Sapin ou L. 411-1 du CGCT « Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service [] ».

La définition de la concession de services prévue par la directive ne recoupe pas les éléments de définition issus du droit national, concernant les conditions relatives à son objet et à la rémunération du concessionnaire.

Article 6 : Pouvoirs adjudicateurs

« Aux fins de la présente directive, on entend par " pouvoirs adjudicateurs " l'État, les autorités régionales ou locales, les organismes de droit public ou les associations formées par une ou plusieurs de ces autorités ou un ou plusieurs de ces organismes de droit public, autres que les autorités, organismes ou associations qui exercent l'une des activités visées à l'annexe II, et qui attribuent une concession ayant pour objet l'exercice d'une de ces activités. »

Article L. 1415-1 CGCT : « Les contrats de concession de travaux publics sont des contrats administratifs passés par une collectivité territoriale ou un établissement public local dont l'objet est de faire réaliser tous travaux de bâtiment ou de génie civil par un concessionnaire dont la rémunération consiste soit dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix. »

Le champ de la loi Sapin et des textes relatifs aux concessions de travaux devra être étendu aux organismes de droit public qui ne sont pas des personnes morales de droit public et qui n’exercent aucune des activités visées à l’annexe II de la directive.

Le champ des concessions de travaux en droit interne est plus restrictif que celui des concessions de travaux prévu par la proposition de directive car il ne couvre pas les organismes de droit public qui peuvent être des personnes de droit privé (sauf pour les établissements publics locaux).

En outre, le champ organique de la loi Sapin est limité aux « personnes morales de droit public » qui ne recouvrent pas nécessairement le champ des « organismes de droit public » mentionnés par la directive. À titre d’exemple, une société anonyme n’est pas une personne morale de droit public mais peut être un organisme de droit public.

Les États ont la possibilité d’étendre le champ des autorités régionales à des entités plus petites, telles, en France, que les communes et les EPCI.

Article 8 : Seuil et méthodes de calcul de la valeur estimée des concessions

« La présente directive s'applique aux concession dont la valeur est égale ou supérieure à 5 186 000 euros. »

DSP :

Article 41 de la loi Sapin ou L. 1411-12 CGCT : « Les dispositions des articles L. 411-1 à L. 1411-11 ne s'appliquent pas aux délégations de service public : […]

c) Lorsque le montant des sommes dues au délégataire pour toute la durée de la convention n'excède pas 106 000 euros ou que la convention couvre une durée non supérieure à trois ans et porte sur un montant n'excédant pas 68 000 euros par an. Toutefois, dans ce cas, le projet de délégation est soumis à une publicité préalable ainsi qu'aux dispositions de l'article L. 1411-2. Les modalités de cette publicité sont fixées par décret en Conseil d'État. »

Le seuil de 5 186 000 euros fixé par la directive devra être intégré au droit des DSP, si l’on décide de mettre en œuvre un régime plus souple sous les seuils européens.

SECTION II : EXCLUSIONS

Article 10 : Exclusions applicables aux concessions attribuées par des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices

« La présente directive ne s'applique pas aux concessions de services attribuées à un pouvoir adjudicateur ou une entité adjudicatrice au sens de l'article 7, paragraphe 1, point a), ou à une association de tels pouvoirs ou entités, sur la base d'un droit exclusif. »

DSP :

Article 41 de la loi Sapin : « Les dispositions des articles L. 1411-1 à L. 1411-11 ne s'appliquent pas aux délégations de service public :

a) Lorsque la loi institue un monopole au profit d'une entreprise ; »

Concessions de travaux publics :

Article 4 de l’ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 et article L. 1415-3 CGCT : « Les dispositions du présent titre ne s'appliquent pas :

2° Aux contrats conclus par un pouvoir adjudicateur avec un autre pouvoir adjudicateur bénéficiant, sur le fondement d'une disposition légalement prise, d'un droit exclusif ; »

D’une manière générale sur les exclusions, le droit interne devra être adapté afin d’intégrer les nouvelles exclusions prévues par la directive et de supprimer celles prévues par le droit interne et qui ne sont pas reprises dans la directive.

Sur les droits exclusifs, les conditions posées par la directive fragilisaient l’exclusion de la loi Sapin en matière de monopole et imposerait la suppression des exclusions concernant les contrats exigeant le secret ou dont l’exécution est légalement soumise à des mesures particulières de sécurité.

La directive prévoit des exclusions différentes de celles prévues en droit interne :

- En matière de droits exclusifs et spéciaux, la directive limite fortement la possibilité de s’en prévaloir pour échapper à l’application de la directive ;

- Elle comporte des exclusions relatives aux entités en situation de quasi-régie et à celles bénéficiant de droits exclusifs ;

- Elle comporte en outre des exclusions qui ne sont pas prévues en droit interne : concessions ayant pour objet le domaine des communications électroniques, concessions relatives à l’arbitrage et aux contrats d’emplois, concessions spécifiques aux entités adjudicatrices (entreprises liées, coentreprise), etc. Il sera nécessaire d’ajouter des dispositions nouvelles dans la législation interne.

Article 13 : Concessions attribuées à une entreprise liée

L’article 13 de la directive exclut de son champ d’application les concessions attribuées à une entreprise liée.

DSP : Aucune disposition

Concessions de travaux publics :

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 article 12 : « On entend par entreprise liée toute entreprise sur laquelle le concessionnaire peut exercer, directement ou indirectement, une influence dominante, toute entreprise qui peut exercer une influence dominante sur le concessionnaire, ou toute entreprise qui, comme le concessionnaire, est soumise à l'influence dominante d'une autre entreprise du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent. L'influence dominante est présumée lorsqu'une entreprise, directement ou indirectement, détient la majorité du capital souscrit d'une autre entreprise, dispose de la majorité des voix attachées aux parts émises par elle, ou peut désigner plus de la moitié des membres de son organe d'administration, de direction ou de surveillance. »

Il sera nécessaire d’étendre la définition d’entreprises liées aux DSP et de modifier celle applicable aux concessions de travaux publics afin de rendre celle-ci conforme à la directive.

La notion d’entreprise liée existe en droit interne. Elle est toutefois définie de manière beaucoup plus précise dans la directive et donc plus encadrée qu’en droit français des concessions de travaux publics.

Article 17 : Concessions entre entités dans le secteur public

La directive prévoit l’exclusion des concessions attribuées par un pouvoir adjudicateur ou une entité adjudicatrice à une autre personne morale dès lors que :

a) le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice exerce sur la personne morale concernée un contrôle analogue à celui qu'il ou elle exerce sur ses propres services ; et

b) plus de 80 % des activités de cette personne morale contrôlée sont exercées dans le cadre de l'exécution des tâches qui lui sont confiées par le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice qui la contrôle ou par d'autres personnes morales que ce pouvoir adjudicateur ou cette entité adjudicatrice contrôle ; et

c) la personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés à l'exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par les dispositions législatives nationales, conformément aux traités, qui ne permettent pas d'exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée. »

DSP :

Article 41 de la loi Sapin

Concessions de travaux publics :

Article 4 de l’ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 et l’article L. 1415-3 CGCT :

« Les dispositions du présent titre ne s'appliquent pas :

1° Aux contrats conclus entre un pouvoir adjudicateur et un cocontractant sur lequel il exerce un contrôle comparable à celui qu'il exerce sur ses propres services et qui réalise l'essentiel de ses activités pour lui, à condition que ce cocontractant soit détienne la qualité de pouvoir adjudicateur, soit applique, pour répondre à ses besoins propres, les règles de passation des contrats prévues par la présente ordonnance, par le code des marchés publics ou par l'ordonnance du 6 juin 2005 susvisée ; »

Les conditions actuelles de recours à l’exclusion liée à la quasi-régie dans le cadre de concessions de travaux publics et de service devront être restreintes par l’ajout des deux conditions suivantes :

- Au moins 80 % des activités de cette personne morale sont exercées pour le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice qui la contrôle ou pour d’autres personnes morales que ce pouvoir ou cette entité contrôle ;

- La personne morale contrôlée ne fait l’objet d’aucune participation privée.

En matière de quasi-régie, la loi Sapin et les dispositions relatives aux concessions de travaux publics reprennent les éléments dégagés par la jurisprudence de la CJUE (coopération verticale : CJUE, 21 juillet 2005, Coname ; CJUE, 13 octobre 2005, Parking Brixen GmbH. Coopération horizontale : CJUE, 9 juin 2009, Commission contre Allemagne).

Les dispositions de la directive s’écartent sur certains aspects de la jurisprudence communautaire (notamment, le seuil de 80 % de l’essentiel de l’activité).

SECTION III : DISPOSITIONS GENERALES

Article 18 : Durée de la concession

La durée des concessions est limitée à 5 ans.

« Pour les concessions d'une durée supérieure à cinq ans, la durée maximale de la concession n'excède pas le temps raisonnablement escompté par le concessionnaire pour qu'il recouvre les investissements réalisés pour l'exploitation des ouvrages ou services avec un retour sur les capitaux investis, compte tenu des investissements nécessaires pour réaliser les objectifs contractuels spécifiques.

Les investissements pris en considération aux fins du calcul comprennent tant les investissements initiaux que ceux réalisés pendant la durée de la concession. »

DSP :

Article 40 de la loi Sapin et L. 1411-2 du CGCT : «Les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l'investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d'amortissement des installations mises en œuvre. Dans le domaine de l'eau potable, de l'assainissement, des ordures ménagères et autres déchets, les délégations de service public ne peuvent avoir une durée supérieure à vingt ans sauf examen préalable par le trésorier-payeur général, à l'initiative de l'autorité délégante, des justificatifs de dépassement de cette durée. »

Il est nécessaire d’étendre ces dispositions aux concessions de travaux publics.

La loi Sapin encadre la durée de la DSP, quel que soit son montant. Elle doit être fixée en fonction de la nature des prestations déléguées. Lorsque des installations sont à la charge du délégataire, la durée du contrat tient compte de la nature du montant de l’investissement à réaliser et ne peut pas dépasser la durée normale d’amortissement des installations. Dans le domaine de l’eau potable, de l’assainissement, des ordures ménagères et autres déchets, les DSP ne peuvent pas en principe avoir une durée supérieure à 20 ans. Toutefois, cette durée ne coïncide pas nécessairement avec l’amortissement comptable des investissements.

Aucune disposition n’encadre la durée des concessions de travaux publics en droit interne.

Les dispositions de la directive sur la durée rejoignent celles de la loi Sapin sur le principe de la limitation de la durée et sur le fait que cette durée doit prendre en compte, pour son calcul le montant des investissements confiés au concessionnaire.

Toutefois, la directive se distingue de la loi Sapin en ce qu’elle ne prend pas en compte le cas de l’affermage où la réalisation d’investissements n’est pas mise à la charge du concessionnaire mais est assurée par la personne publique.

Le calcul de la durée prévu par la directive est problématique pour le contrat d’affermage qui est un des modes de gestion déléguée prévu par la loi Sapin, et dans lequel le concessionnaire n’est pas en charge de la réalisation d’investissements servant de support à l’activité de service public.

CHAPITRE II : Principes

Article 26 : Opérateurs économiques

La loi Sapin et les dispositions relatives aux concessions de travaux publics devront être complétées de dispositions relatives à la forme des opérateurs économiques qui se portent candidats à l’attribution d’un contrat de concession.

Le droit interne ne contient pas de disposition encadrant le choix par la collectivité publique de la forme des opérateurs économiques.

La directive prévoit que la forme de groupement éventuel ne peut être imposée, sauf si cela est nécessaire à la bonne exécution du marché, et qu’une candidature ne peut être rejetée au motif qu’elle est présentée par une personne morale ou par une personne physique.

TITRE II RÈGLES RELATIVES À L'ATTRIBUTION DE CONCESSIONS : PRINCIPES GÉNÉRAUX ET GARANTIES DE PROCÉDURE

CHAPITRE I Principes généraux

Article 31 : Avis de concession

« Les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices qui souhaitent attribuer une concession font connaître leur intention au moyen d'un avis de concession. »

DSP :

Article 38 de la loi Sapin : « Les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État. »

De plus, l’article 41 de la loi Sapin et l’article L. 1411-12 CGCT devront être modifiés.

Concessions de travaux publics :

Article 8 de l’ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 et article L. 1415-7 CGCT : « La passation des contrats de concession de travaux publics est soumise à des obligations de publicité dans les conditions et sous réserve des exceptions définies par voie réglementaire. »

L’exigence de publication des concessions est plus étendue en droit interne que dans la directive en ce qui concerne les DSP puisqu’elle s’applique sans seuil.

Article 31-5 : Avis de concession

« Par dérogation, le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice n'est pas tenu de publier un nouvel avis de concession lorsqu'aucune candidature, aucune offre ou aucune offre appropriée n'a été déposée en réponse à une procédure de concession antérieure.

Aux fins du premier alinéa, une offre n'est pas considérée comme appropriée dès lors qu'elle est sans rapport avec la concession parce qu'elle n'est manifestement pas en mesure, sans modifications substantielles, de répondre aux besoins et aux exigences du pouvoir adjudicateur ou de l'entité adjudicatrice spécifiés dans les documents de concession.

Aux fins du premier alinéa, une candidature n'est pas considérée comme appropriée dès lors que :

a) le candidat concerné est ou peut être exclu en vertu de l'article 38, ou ne remplit pas les critères de sélection établis par le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice en vertu de l'article 38 ;

b) la candidature comporte des offres qui ne sont pas appropriées au sens du deuxième alinéa. »

Les articles 45 et L. 1411-8 CGCT devront être modifiés : « Le recours à une procédure de négociation directe avec une entreprise déterminée n'est possible que dans le cas où, après mise en concurrence, aucune offre n'a été proposée ou n'est acceptée par la collectivité publique. »

La loi Sapin prévoit la possibilité pour les collectivités territoriales, les groupements de ces collectivités et leurs établissements publics de négocier directement avec une entreprise déterminée en cas d’infructuosité ou lorsque l’offre n’est pas acceptée par la collectivité publique.

La directive prévoit cette possibilité, mais elle comporte une définition précise de la notion d’offre non appropriée. En outre, elle permet une dérogation à l’obligation de publicité lorsqu’un seul opérateur économique est à même d’assurer la gestion du service.

CHAPITRE II Garanties de procédure

Article 38-1 : Sélection et évaluation qualitative des candidats

« Les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices vérifient les conditions de participation relatives aux capacités professionnelles et techniques et à la capacité économique et financière des candidats ou des soumissionnaires, sur la base de déclarations sur l'honneur, ainsi que la ou les références à présenter comme preuve conformément aux exigences spécifiées dans l'avis de concession qui sont non discriminatoires et proportionnées à l'objet de la concession. Les conditions de participation sont liées et proportionnées à la nécessité de garantir la capacité du concessionnaire d'exploiter la concession, compte tenu de l'objet de la concession et de l'objectif d'assurer une concurrence effective. »

DSP :

Article 38 et L. 1411-1 du CGCT : « Les garanties professionnelles sont appréciées notamment dans la personne des associés et au vu des garanties professionnelles réunies en son sein. Les sociétés en cours de constitution ou nouvellement créées peuvent être admises à présenter une offre dans les mêmes conditions que les sociétés existantes.

La commission mentionnée à l'article L. 1411-5 dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières, de leur respect de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés prévue aux articles L. 5212-1 à L. 5212-4 du code du travail et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public. »

La loi Sapin devra être modifiée afin d’imposer la publicité des conditions de participation à l’attribution de la concession (capacités des candidats).

Les dispositions relatives aux DSP ne prévoient pas l’obligation de donner les conditions de participation dans l’avis de publicité, tandis que des décrets le prévoient pour les concessions de travaux publics.

Articles 38-4, 38-5, 38-6, 38-7 : Sélection et évaluation qualitative des candidats

Article L. 8272-4 du Code du travail

Concessions de travaux publics :

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009, Article 9 et article L1415-8 CGCT

Article 131-39 du Code pénal

Article 8 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés publics passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.

Les interdictions de soumissionner en DSP devront être complétement refondues. Il conviendra d’étendre la liste des interdictions de soumissionner pour les concessions de travaux publics en ajoutant par exemple une interdiction qui résulte d’un manquement grave à des dispositions du droit de l’Union ou du droit national visant à protéger des intérêts publics compatibles avec le traité.

La loi Sapin ne contient pas de dispositions sur les interdictions de soumissionner. En outre, l’article 131-39 du code pénal qui prévoit l’exclusion des marchés publics des auteurs de crime ou de délit n’est pas applicable aux DSP. Cependant, l’article L. 8272-4 du code du travail exclut de la procédure d’attribution des DSP les personnes ayant commis l’une des infractions suivantes : travail dissimulé, marchandage, prêt illicite de main d’œuvre ou emploi d’étranger sans titre de travail.

Les dispositions relatives aux concessions de travaux renvoient à l’article 8 de l’ordonnance du 6 juin 2005 qui comporte une liste plus substantielle qu’en DSP d’interdiction de soumissionner et à laquelle renvoie également le code des marchés publics.

La directive prévoit d’étendre les interdictions de soumissionner prévues en marché public aux concessions. Il est obligatoire d’exclure les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation pour avoir participé à une organisation criminelle, pour corruption, pour fraude, pour infraction terroriste, pour blanchiment de capitaux ; ou lorsque celle-ci n’a pas rempli ses obligations fiscales. Il est possible de prévoir l’exclusion des opérateurs qui ont commis un manquement grave au droit de l’Union, qui sont en état de faillite ou de liquidation, ou qui ont commis des erreurs graves ou persistantes lors de précédentes concessions.

Article 41 : Critères d'attribution

La loi Sapin et le droit interne relatif aux concessions de travaux publics devront encadrer le choix des critères d’attribution en prévoyant qu’ils soient liés à l’objet du contrat, ce qui limitera le choix de la collectivité y compris, dans le recours à des éléments de la candidature. En outre, elle devra imposer aux collectivités d’annoncer dans l’avis de concession ou les documents de la consultation les modalités de mise en œuvre des critères d’attribution, c’est-à-dire leur hiérarchisation.

La loi Sapin ne prévoit rien concernant la détermination des critères d’attribution et leurs modalités de mise en œuvre (pondération ou hiérarchisation). Le juge administratif a précisé que si ces critères devaient faire l’objet de mesures de publicité, il n’en était pas de même de leurs modalités de mise en œuvre. La collectivité doit pouvoir porter une appréciation globale de ces critères (CE, 23 décembre 2009, Établissement public du musée et du domaine national de Versailles).

Le dispositif de droit interne relatif aux concessions de travaux publics prévoit l’indication des critères dans l’avis de concession, sans toutefois imposer l’indication, ni encadrer leur détermination.

La directive encadre la détermination des critères d’attribution en prévoyant qu’ils soient liés à l’objet du contrat. En outre, elle impose leur hiérarchisation, qui devra être indiquée dans l’avis de concession ou les documents de la consultation. Elle prévoit notamment que les États membres peuvent imposer aux PA ou EA de se fonder sur le critère de l’offre économiquement la plus avantageuse. Dans ce cas, la directive liste les critères pouvant figurer comme critère d’attribution.

TITRE III RÈGLES RELATIVES À L'EXÉCUTION DES CONTRATS DE CONCESSION

Article 42 : Sous-traitance

DSP : Aucune disposition

Concessions de travaux publics :

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009, article 7

Article L. 415-6 CGCT : « La collectivité territoriale ou l'établissement public local peut :

1° Soit imposer aux candidats de sous-traiter à des tiers un pourcentage au moins égal à 30 % de la valeur globale des travaux faisant l'objet du contrat ;

2° Soit inviter les candidats à indiquer dans leurs offres s'ils entendent confier à des tiers une part des travaux faisant l'objet du contrat et, dans l'affirmative, le pourcentage qu'elle représente dans la valeur globale des travaux.

L'exigence mentionnée au 1° ou l'invitation mentionnée au 2° doivent être indiquées dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation. »

La loi Sapin devra être complétée des dispositions sur la sous-traitance qui seront choisies lors de la transposition.

La loi Sapin ne contient aucune disposition sur la sous-traitance. En outre, la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance n’est pas applicable aux DSP.

Le dispositif national relatif aux concessions de travaux publics est plus complet que ce prévoit la directive puisqu’il permet aux PA d’imposer aux candidats un pourcentage de sous-traitance au moins égale à 30% de la valeur globale des travaux faisant l’objet du contrat.

La directive prévoit la possibilité pour les collectivités, ou l’obligation, si l’État membre l’exige, de demander aux candidats de préciser dans leur offre la part du contrat qu’ils ont l’intention de confier à des sous-traitants, ce qui n’est actuellement pas prévu par la loi Sapin. Cette possibilité ne recoupe pas la notion de sous-traitance prévue par la loi de 1975 qui ne prévoit pas le cas des marchés publics dans lesquels la personne publique assure la maîtrise d’ouvrage.

Article 43 : Modification de contrats en cours

DSP :

Article 40 de la loi Sapin et L1411-2 CGCT : « Une délégation de service ne peut être prolongée que :

a) Pour des motifs d'intérêt général. La durée de la prolongation ne peut alors excéder un an ;

b) Lorsque le délégataire est contraint, à la demande du délégant, de réaliser des investissements matériels non prévus au contrat initial de nature à modifier l'économie générale de la délégation et qui ne pourraient être amortis pendant la durée de la convention restant à courir que par une augmentation de prix manifestement excessive. »

Article L. 1411-6 CGCT : « Tout projet d'avenant à une convention de délégation de service public entraînant une augmentation du montant global supérieure à 5% est soumis pour avis à la commission visée à l'article L. 1411-5. L'assemblée délibérante qui statue sur le projet d'avenant est préalablement informée de cet avis. »

Article L. 1411-5 CGCT

Les conditions de prolongation de la durée de la DSP prévues par la loi Sapin pour des motifs d’intérêt général ou lorsque des investissements supplémentaires sont nécessaires à la bonne exécution du service public seraient remises en cause, de même que les avenants portant sur d’autres éléments de la concession dont l’évolution dans le temps est parfois nécessaire compte tenu de la durée très longue des concessions ou en vue de respecter le principe de continuité du service public.

Les avenants en concession de travaux publics, hors travaux complémentaires, devront être davantage encadrés, en particulier par la prise en compte de la notion de « modification substantielle » et par la limitation du montant de l’avenant à 5 % du montant du contrat initial.

La loi Sapin prévoit des conditions de passation des avenants de prolongation de durée de la DSP, en particulier :

- Pour des motifs d’intérêt général (dans la limite d’une année),

- Lorsque le délégataire est contraint, à la demande du délégant, de réaliser des investissements matériels non prévus au contrat initial, mais qui peuvent être justifiés par la bonne exécution du service, et de nature à modifier l’économie générale de la délégation, et qui ne pourraient être amortis pendant la durée de la convention restant à courir que par une augmentation de prix manifestement excessive.

Les dispositions de la directive encadrent strictement la passation des avenants, sans prendre en compte l’intérêt du service public et les principes connus en droit français d’égalité et de continuité du service public. La directive pose le principe de l’interdiction de passer un avenant sans publicité ni mise en concurrence dès lors qu’il constitue une modification substantielle de la concession. Le texte prévoit quelques cas de dérogations dans lesquelles une modification substantielle ne nécessite pas une remise en concurrence, mais les conditions qui doivent être cumulativement remplies sont extrêmement restrictives compte tenu en particulier de l’interprétation qui peut être faite des notions de « circonstances qu'un pouvoir adjudicateur diligent ou une entité adjudicatrice diligente ne pouvait pas prévoir » et de « nature globale de la concession ».

Les dispositions en droit interne relatives à la passation des concessions de travaux publics, sont similaires en ce qui concerne les travaux complémentaires mais sont de nature à laisser davantage de liberté que ce que prévoit la directive en ce qui concerne la passation d’autres types d’avenants. La notion de « modification substantielle », strictement définie par la directive est ainsi de nature à restreindre le champ des avenants. Est par exemple considéré comme une modification substantielle le remplacement du concessionnaire, alors que le droit interne n’encadre pas expressément ce point.

Les articles concernant les « Concessions attribuées à une coentreprise ou à une entité adjudicatrice faisant partie d'une coentreprise », les « Informations notifiées par les entités adjudicatrices » et l’ « Exclusion des activités directement exposées à la concurrence » devront faire l’objet de dispositions nouvelles.

Il en va de même pour les dispositions relatives aux « services sociaux », les « concessions mixtes », les « concessions concernant plusieurs activités » et les « concessions réservées ».

Les règles relatives à la nomenclature utilisée dans le cadre de l’attribution de concessions, à la confidentialité et les règles applicables aux communications devront faire l’objet d’ajout de dispositions nouvelles.

ANNEXE N°4 :
ARTICLE 5 DU REGLEMENT EUROPEEN N° 1370/2007/CE SUR LES OBLIGATIONS SUR SERVICES PUBLICS DANS LES TRANSPORTS

Article 5

Attribution des contrats de service public

1. Les contrats de service public sont attribués conformément aux règles établies dans le présent règlement. Toutefois, les marchés de services ou marchés publics de services, tels que définis par la directive 2004/17/CE ou par la directive 2004/18/CE, pour les services publics de transport de voyageurs par autobus ou par tramway sont attribués conformément aux procédures prévues par lesdites directives lorsque ces contrats ne revêtent pas la forme de contrats de concession de services tels que définis dans ces directives. Lorsque les contrats sont attribués conformément à la directive 2004/17/CE ou à la directive 2004/18/CE, les paragraphes 2 à 6 du présent article ne s’appliquent pas.

2. Sauf interdiction en vertu du droit national, toute autorité locale compétente, qu’il s’agisse ou non d’une autorité individuelle ou d’un groupement d’autorités fournissant des services intégrés de transport public de voyageurs, peut décider de fournir elle-même des services publics de transport de voyageurs ou d’attribuer directement des contrats de service public à une entité juridiquement distincte sur laquelle l’ autorité locale compétente ou, dans le cas d’un groupement d’autorités, au moins une autorité locale compétente, exerce un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services. Lorsqu’une autorité locale compétente prend une telle décision, les dispositions suivantes s’appliquent :

a) aux fins de déterminer si l’autorité locale compétente exerce un tel contrôle, il est tenu compte d’éléments tels que le niveau de représentation au sein des organes d’administration, de direction ou de surveillance, les précisions y relatives dans les statuts, la propriété ainsi que l’influence et le contrôle effectifs sur les décisions stratégiques et sur les décisions individuelles de gestion. Conformément au droit communautaire, la détention à 100 % du capital par l’autorité publique compétente, en particulier dans le cas de partenariats publics-privés, n’est pas une condition obligatoire pour établir un contrôle au sens du présent paragraphe, pour autant que le secteur public exerce une influence dominante et que le contrôle puisse être établi sur la base d’autres critères ;

b) le présent paragraphe est applicable à condition que l’opérateur interne et toute entité sur laquelle celui-ci a une influence, même minime, exercent leur activité de transport public de voyageurs sur le territoire de l’autorité locale compétente, nonobstant d’éventuelles lignes sortantes et autres éléments accessoires à cette activité se prolongeant sur le territoire d’autorités locales compétentes voisines, et ne participent pas à des mises en concurrence concernant la fourniture de services publics de transport de voyageurs organisés en dehors du territoire de l’autorité locale compétente ;

c) nonobstant le point b), un opérateur interne peut participer à des mises en concurrence équitables pendant les deux années qui précèdent le terme du contrat de service public qui lui a été attribué directement, à condition qu’ait été prise une décision définitive visant à soumettre les services de transport de voyageurs faisant l’objet du contrat de l’opérateur interne à une mise en concurrence équitable et que l’opérateur interne n’ait conclu aucun autre contrat de service public attribué directement ;

d) en l’absence d’autorité locale compétente, les points a), b) et c) s’appliquent à une autorité nationale agissant au bénéfice d’une zone géographique qui n’est pas nationale, à condition que l’opérateur interne ne participe pas à des mises en concurrence concernant la fourniture de services publics de transport de voyageurs organisés à l’extérieur de la zone pour laquelle le contrat de service public a été attribué ;

e) si la sous-traitance au titre de l’article 4, paragraphe 7, est envisagée, l’opérateur interne est tenu d’assurer lui-même la majeure partie du service public de transport de voyageurs.

3. Toute autorité compétente qui recourt à un tiers autre qu’un opérateur interne attribue les contrats de service public par voie de mise en concurrence, sauf dans les cas visés aux paragraphes 4, 5 et 6. La procédure adoptée pour la mise en concurrence est ouverte à tout opérateur, est équitable, et respecte les principes de transparence et de non-discrimination. Après la soumission des offres et une éventuelle présélection, la procédure peut donner lieu à des négociations dans le respect de ces principes, afin de préciser les éléments permettant de répondre au mieux à la spécificité ou à la complexité des besoins.

4. Sauf interdiction en vertu du droit national, les autorités compétentes peuvent décider d’attribuer directement des contrats de service public dont la valeur annuelle moyenne est estimée à moins de1 000 000 EUR ou qui ont pour objet la fourniture annuelle de moins de 300 000 kilomètres de services publics de transport de voyageurs.

Lorsqu’un contrat de service public est attribué directement à une petite ou moyenne entreprise n’exploitant pas plus de vingt-trois véhicules, les plafonds susmentionnés peuvent être relevés à une valeur annuelle moyenne estimée à moins de 2 000 000 EUR ou à une fourniture annuelle de moins de 600 000 kilomètres de services publics de transport de voyageurs.

5. En cas d’interruption des services ou de risque imminent d’apparition d’une telle situation, l’autorité compétente peut prendre une mesure d’urgence. Cette mesure d’urgence prend la forme d’une attribution directe ou d’un accord formel de prorogation d’un contrat de service public ou de l’exigence de l’exécution de certaines obligations de service public. L’opérateur de service public a le droit de former un recours contre la décision lui imposant l’exécution de certaines obligations de service public. L’attribution ou la prorogation d’un contrat de service public par mesure d’urgence ou l’imposition d’un tel contrat ne dépasse pas deux ans.

6. Sauf interdiction en vertu du droit national, les autorités compétentes peuvent décider d’attribuer directement des contrats de service public de transport par chemin de fer, à l’exception d’autres modes ferroviaires tels que le métro ou le tramway. Par dérogation à l’article 4, paragraphe 3, la durée de tels contrats ne dépasse pas dix ans, sauf lorsque l’article 4, paragraphe 4, s’applique.

7. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les décisions prises en application des paragraphes 2 à 6 puissent être réexaminées efficacement et rapidement, sur demande de toute personne ayant ou ayant eu intérêt à obtenir un contrat particulier et ayant été lésée par une infraction alléguée ou risquant de l’être, au motif que lesdites décisions sont contraires au droit communautaire ou aux règles nationales d’exécution de celui-ci. Si les organes chargés des procédures de réexamen n’ont pas un caractère judiciaire, leurs décisions sont toujours motivées par écrit. En outre, dans ce cas, des mesures sont prises pour que toute mesure illégale alléguée émanant de l’organe de réexamen ou toute allégation d’irrégularité dans l’exercice des compétences qui lui sont conférées puissent faire l’objet d’un contrôle judiciaire ou d’un contrôle par un autre organe, celui-ci devant être une juridiction au sens de l’article 234 du traité et indépendant à la fois de l’autorité contractante et de l’organe de réexamen.

1 () Cf. Commission des affaires européennes, compte rendu n° 243 du 28 février 2012.

2 () Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ; Directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux.

3 () Directive 2009/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés de travaux, de fournitures et de services par des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les domaines de la défense et de la sécurité, et modifiant les directives 2004/17/CE et 2004/18/CE.

4 () Journal officiel 2000/C 121/02 du 29 avril 2000.

5 () Journal officiel 2008/C 91/02 du 12 avril 2008.

6 () CJCE, 18 novembre 1999, affaire C-107/98, Teckal Srl c/ Comune di Viano et Azienda Gas-Acqua Consorziale (AGAC) di Reggio Emilia cons. 50.

7 () CJCE, 7 décembre 2000, affaire C-324/98, Telaustria et Telefonadress.

8 () Règlement (CE) n° 1370/2007 du parlement européen et du conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) no 1191/69 et (CEE) no 1107/70 du Conseil.

9 () CJCE, 11 janvier 2005, Affaire C-26/03, Stadt Halle cons. 49. - CJCE, 13 octobre 2005, Parking Brixen GmbH, C-458/03, cons. 65.

10 () CJCE, 19 avril 2007, affaire C-295/05, ASEMFO cons. 60.

11 () Les sociétés publiques locales d’aménagement (SPLA) ont été créées par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. Initialement créées à titre expérimental pour une durée de cinq ans, ces sociétés ont été pérennisées par la loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales qui a étendu, par ailleurs, leur champ de compétence et leur a conféré des droits nouveaux.

12 () Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux. COM (2011) 895 FINAL.

13 () Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la passation des marchés publics COM (2011) 896 FINAL.

14 () Considérant 7 de la proposition de directive du Parlement Européen et du Conseil sur l’attribution de contrats de concession (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE) {SEC(2011) 1588 final} {SEC(2011) 1589 final}.

15 () Considérant 8 de la résolution législative du Parlement européen du 15 janvier 2014 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'attribution de contrats de concession (COM(2011)0897 – C7-0004/2012 – 2011/0437(COD)).

16 () Résumé de l'analyse d'impact accompagnant la proposition de directive du Parlement Européen et du Conseil sur l'attribution de contrats de concession.

17 () Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L. 134 du 30.4.2004, p. 114).

18 () Proposition de compromis du Conseil. Version du 31 octobre 2012.

19 () Considérant 73 de la Résolution législative du Parlement européen du 15 janvier 2014 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'attribution de contrats de concession (COM(2011)0897 – C7-0004/2012 – 2011/0437(COD)).

20 () Considérant 70 de la Résolution législative du Parlement européen du 15 janvier 2014 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'attribution de contrats de concession (COM(2011)0897 – C7-0004/2012 – 2011/0437(COD)).

21 () Articles 5 et 6 et 40 de la version initiale.

22 () Article 26 de la version initiale.

23 () Article 36.

24 () Pour tous les cas d’exclusion, se référer à l’article 38 de position du Parlement européen arrêtée en première lecture le 15 janvier 2014 en vue de l’adoption de la directive 2014/.../UE du Parlement européen et du Conseil sur l'attribution de contrats de concession.

25 () CJCE 19 juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur GmbH, aff. C-454/06 et CJUE 13 avril 2010, Wall AG, aff. C-91/08.

26 () L’article 7 définit la notion d’influence dominante, elle est « présumée dans l’un des cas suivants, lorsque les pouvoirs adjudicateurs, direction ou indirectement :

a) détiennent la majorité du capital souscrit de l’entreprise ;

b) disposent de la majorité des voix attachées aux parts émises par l’entreprise ;

c) peuvent désigner plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de l’entreprise »

27 () Résultat des votes : 598 pour, 60 contre, 18 absentions

28 () A l’exception des secteurs de l’eau potable, de l’assainissement, des ordures ménagères et autres déchets (limitation à vingt ans).