N° 198 - Projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques



N° 198

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 septembre 2012.

PROJET DE LOI ORGANIQUE

relatif à la programmation et à la gouvernance
des
finances publiques,

(Procédure accélérée)

(Renvoyé à une commission spéciale.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. Jean-Marc AYRAULT,

Premier ministre,

par Pierre MOSCOVICI,

ministre de l’économie et des finances

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le Conseil européen de juin 2012 a fixé un cap qui doit permettre à l’Union européenne de surmonter durablement les difficultés rencontrées depuis le déclenchement de la crise économique et financière de 2007.

Suivant le souhait qui avait été exprimé par le Président de la République, il a entériné une approche combinant le nécessaire redressement des comptes publics avec le soutien à la croissance. C’est à la combinaison de ces deux termes que se sont attachés les chefs d’État et de Gouvernement en adoptant en juin 2012 un pacte pour la croissance et l’emploi, venu compléter le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire.

1° Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (ci-après, le traité) a été signé le 2 mars 2012 à Bruxelles par les chefs d’État ou de Gouvernement de vingt-cinq États membres de l’Union européenne (tous sauf la République tchèque et le Royaume-Uni).

Il prend la forme d’un accord intergouvernemental régi par le droit international.

Il contient une série d’engagements pris par les États contractants afin « de renforcer le pilier économique de l'Union économique et monétaire en adoptant un ensemble de règles destinées à favoriser la discipline budgétaire au moyen d'un pacte budgétaire, à renforcer la coordination de leurs politiques économiques et à améliorer la gouvernance de la zone euro, en soutenant ainsi la réalisation des objectifs de l'Union européenne en matière de croissance durable, d'emploi, de compétitivité et de cohésion sociale.(1) »

2° Dès leur prise de fonctions et conformément aux engagements pris devant les Français, le Président de la République et le Gouvernement ont agi pour un rééquilibrage de la politique européenne. Ils ont demandé à cet effet que le traité soit complété par un pacte pour la croissance et l’emploi adopté à l’occasion de la réunion des chefs d’État et de Gouvernement de la zone euro des 28 et 29 juin 2012.

Les chefs d’État ou de Gouvernement ont ainsi décidé de l’adoption d’un pacte pour la croissance et l’emploi. Celui-ci prévoit en particulier la mobilisation de 120 Md€, soit 1 % du PIB européen, en faveur de la croissance : augmentation du capital libéré de la Banque européenne d’investissement, qui permettra d’augmenter la capacité de prêts de l’institution ; accélération de la mise en œuvre des « obligations de projet » pour un niveau d’investissements estimé à 4,5 Md€ ; redéploiement des crédits de la politique structurelle non utilisés, en faveur du soutien aux petites et moyennes entreprises et à l'emploi des jeunes.

En outre, sous l’impulsion de la France, le pacte pour la croissance et l’emploi prévoit la mobilisation de l’ensemble des politiques de l’Union pour favoriser la production en Europe, et, en particulier, de la politique de l’innovation, dans une perspective de compétitivité industrielle.

Par ailleurs, l’engagement a été pris d’établir une taxe sur les transactions financières, dans le cadre d’une coopération renforcée, avant la fin de l’année 2012. La mise en place d’une telle taxe permettra à la fois de dégager de nouvelles ressources destinées notamment au soutien de la croissance et de mettre à contribution le secteur financier, et ainsi, dissuader la spéculation.

S’agissant du renforcement de la stabilité financière, un engagement a été pris de mettre en place, d’ici la fin de l’année 2012, une supervision intégrée des banques de la zone euro, impliquant la Banque centrale européenne. Cette supervision intégrée ouvrira la voie à la création d’un instrument de recapitalisation directe des banques par le mécanisme européen de stabilité.

Une perspective d’intégration renforcée et d’approfondissement de l’Union économique et monétaire à moyen et long terme a par ailleurs été ouverte. Le président du Conseil européen a présenté sur ce point un rapport mettant en avant plusieurs objectifs : un cadre financier intégré ; un cadre budgétaire intégré ; un cadre intégré pour la politique économique ; un renforcement de la légitimité démocratique.

La crise a apporté une preuve supplémentaire de la nécessité, pour l’Union économique et monétaire, de renforcer la coordination des politiques macroéconomiques, avec une régulation financière commune et des politiques économiques convergentes et coordonnées.

Le président du Conseil européen a été chargé, en collaboration avec les présidents de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne et de l’Eurogroupe, de préparer un premier rapport intermédiaire en vue du Conseil européen d’octobre puis un rapport final en décembre. La France entend promouvoir dans ce cadre la notion « d’intégration solidaire », dans laquelle à chaque étape de l’intégration doit correspondre un approfondissement de la solidarité. Elle veillera également à ce que les procédures de décision en matière économique et budgétaire fassent l’objet de contrôles démocratiques adéquats qui donnent toute sa place au Parlement européen et respectent pleinement les prérogatives des parlements nationaux.

3° La réorientation de l’Europe vers la croissance, la stabilité financière et la solidarité étant ainsi engagée, le Gouvernement propose au Parlement d’autoriser la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, qui vise principalement à renforcer la maîtrise des finances publiques dans les États signataires.

Comme précisé dans l’étude d’impact jointe au présent projet de loi organique, le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire comporte des stipulations appelant la modification des procédures budgétaires et du droit national les encadrant.

– Le traité énonce tout d’abord une règle relative à l’équilibre structurel de la situation budgétaire des administrations publiques, règle considérée comme respectée si « le solde structurel annuel des administrations publiques correspond à l’objectif à moyen-terme (OMT) spécifique à chaque pays », « avec une limite inférieure de déficit structurel de -0,5 % de PIB » pour les États dont la dette est supérieure à 60 % du PIB (et jusqu’à -1 % pour les autres).

– Il prévoit également qu’un « mécanisme de correction est déclenché automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à l’OMT ou à la trajectoire propre à permettre sa réalisation » ; le droit actuel ne prévoit pas une telle procédure. Il convient donc de l’organiser.

– Il prévoit enfin l’intervention d’institutions indépendantes chargées de vérifier le respect de ces règles. Les principes communs définis par la Commission européenne et validés par le Conseil européen recommandent, pour la création de ces institutions, de privilégier un niveau législatif ou supra législatif.

Ces différents éléments appellent une évolution du droit national propre à permettre au Gouvernement et au Parlement de disposer de nouveaux instruments de programmation et de gouvernance des finances publiques.

Ils n’en commandent pas entièrement les modalités juridiques puisque l’article 3, paragraphe 2 du traité prévoit que ces nouvelles règles « prennent effet dans le droit national des parties contractantes au plus tard un an après l’entrée en vigueur du présent traité, au moyen de dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles, ou dont le plein respect et la stricte observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque autre façon ».

Dans sa décision n° 2012-653 DC du 9 août 2012, le Conseil constitutionnel a établi que la ratification du traité et sa mise en œuvre, notamment l’inscription de la règle relative à l’équilibre budgétaire dans le droit national, ne nécessitaient pas de révision de la Constitution.

En revanche, la modification de la procédure d’élaboration et du contenu de la loi de programmation des finances publiques et des projets de lois financières implique de prendre des dispositions de nature organique. C’est l’objet du présent projet de loi.

4° Ce projet est composé de 17 articles répartis en quatre chapitres.

4.1 Le premier chapitre concerne le contenu des lois de programmation des finances publiques, des lois de finances et de financement de la sécurité sociale.

Les cinq premiers articles visent à préciser le contenu des lois de programmation des finances publiques. Ces lois de programmation(2) reposent actuellement sur l’avant-dernier alinéa de l’article 34 de la Constitution introduit par la réforme constitutionnelle de 2008. Leur contenu n’avait pas été jusqu’à présent précisé au niveau organique.

L’article 1er prévoit que ces lois de programmation des finances publiques doivent définir l’objectif à moyen terme de solde structurel auquel fait référence le traité, dans le respect de l’objectif, déjà inscrit au niveau constitutionnel, d’équilibre des comptes des administrations publiques (article 34 de la Constitution). Elles définissent également la trajectoire pour atteindre l’OMT sous la forme d’un solde structurel défini pour chaque année de la programmation et pour l’ensemble des administrations publiques conformément à l’exigence posée à l’article 3 du traité ; elles déterminent aussi l’évolution de la dette publique. Il est précisé que ces lois présentent en outre la décomposition des soldes effectifs par sous-secteur des administrations publiques.

L’article 2 énonce une liste d’autres dispositions devant ou susceptibles de figurer dans les lois de programmation des finances publiques. Au nombre des dispositions obligatoires figurent notamment des plafonds de dépenses pour l’État, les objectifs de dépenses pour les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, l’objectif national des dépenses d’assurance maladie et les planchers de mesures nouvelles, législatives ou prises par voie réglementaire par le Gouvernement, en recettes fiscales et sociales. Il en est de même de l’indication de l’ampleur et du calendrier des mesures de correction pouvant être mises en œuvre en cas d’écart important au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel.

L’article 3 dispose que la loi de programmation des finances publiques couvre une période d’au moins trois ans.

L’article 4 ouvre la possibilité d’inscrire dans la loi de programmation des finances publiques, de manière distincte des orientations pluriannuelles des finances publiques, des règles relatives à la gestion des finances publiques qui ne relèveraient pas du domaine exclusif des lois de finances ou lois de financement de la sécurité sociale, ainsi que des règles relatives à l’information et au contrôle du Parlement dans ce domaine.

L’article 5 prévoit l’inscription dans un rapport annexé aux lois de programmation d’une série d’éléments, dont, à l’instar des nouvelles exigences européennes pour les programmes de stabilité, l’évolution des finances publiques à politique inchangée, au sens de la directive 2011/85/UE. Combiné à ceux inscrits dans le corps de la loi de programmation, ces éléments permettront d’apporter davantage de transparence dans le débat parlementaire.

L’article 6 prévoit l’introduction dans les lois de finances initiales et rectificatives d’un article liminaire approuvant un tableau de synthèse retraçant l’état des prévisions, pour l’année sur laquelle elles portent, de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques. Dans la loi de finances de l’année, ce tableau présentera également l’exécution pour la dernière année écoulée et la prévision d’exécution pour l’année en cours. Ce tableau permettra au Parlement d’identifier les éventuels écarts à la trajectoire définie dans la loi de programmation des finances publiques.

L’article 7 précise que des rapports annexés aux projets de loi de finances de l’année et de financement de la sécurité sociale comprendront, pour l’année auxquelles elles se rapportent, respectivement, l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel et du solde effectif de l’ensemble des administrations publiques avec une décomposition par sous-secteur et l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

4.2 Le chapitre II crée un Haut conseil des finances publiques et définit les modalités de son intervention.

Le traité appelle la mise en place d’institutions indépendantes « chargées, au niveau national, de vérifier le respect des règles »(3) qu’il définit.

L’article 8 institue un Haut conseil des finances publiques, auquel, suivant la procédure déterminée par les articles suivants du projet de loi organique, il reviendra d’éclairer le législateur, par des avis rendus publics, sur les hypothèses macroéconomiques retenues dans les projets de textes financiers et le respect de la trajectoire de finances publiques de la France, le cas échéant en alertant publiquement le Gouvernement et le Parlement sur la nécessité de déclencher le mécanisme de correction (cf. infra). L’article 8 dispose que le Haut conseil est placé auprès de la Cour des comptes et présidé par son premier président. Il en définit la composition et énonce un ensemble de règles propres à garantir l’indépendance de ses membres.

L’article 9 précise les modalités d’intervention du Haut conseil concernant les projets de lois de programmation des finances publiques, par la voie d’un avis portant sur les prévisions macroéconomiques et sur la cohérence de la programmation envisagée au regard de l’objectif à moyen terme retenu et des engagements européens de la France.

L’article 10 traite de son rôle concernant les projets de loi de finances de l’année et les projets de loi de financement de la sécurité sociale de l’année. L’avis rendu par le Haut conseil sur chacun de ces textes porte sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles il repose et sa cohérence avec la trajectoire définie dans la programmation. Les avis sont joints aux projets de loi lors de leur transmission au Conseil d’État puis rendus publics lors du dépôt de ces textes au Parlement.

L’article 11 prévoit que, pour les projets de loi de finances rectificatives et les projets de lois de financement de la sécurité sociale rectificatives, le Haut conseil peut donner un avis sur les hypothèses de croissance. Il n’y est pas obligé. Cette disposition vise à faire face à des situations d’urgence qui ne permettraient pas d’organiser la remise d’un avis officiel.

L’article 12 prévoit que le Gouvernement saisit le Haut conseil s’il entend réviser les hypothèses macroéconomiques lors de la phase d’élaboration ou d’examen parlementaire d’un projet de loi de finances ou d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L’article 13 prévoit que le Haut conseil se prononce sur les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles est fondé le programme de stabilité.

L’article 14 précise que le Haut Conseil peut forger ses avis au moyen de l’audition des administrations compétentes, de demandes d’information au Gouvernement ou en faisant appel à des organismes ou des personnalités extérieures à l’administration.

L’article 15 indique que les modalités de fonctionnement du Haut conseil peuvent être précisées par décret en Conseil d’État.

4.3 Le chapitre III est relatif au mécanisme de correction.

Ce mécanisme est prévu à l’article 3 du traité, qui stipule qu’« un mécanisme de correction est déclenché automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à l’objectif de moyen terme ou à la trajectoire propre à permettre sa réalisation ».

L’article 16 précise qu’il revient au Haut conseil d’identifier dans un avis rendu public, en vue de la présentation par le Gouvernement du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, les éventuels écarts à la trajectoire constatés pour l’année écoulée. Cet avis tient compte, le cas échéant, des circonstances exceptionnelles, définies par le traité, de nature à justifier l’écart constaté. Le Gouvernement doit alors expliquer les raisons de ces écarts et, en cas d’écart important, défini par des critères identiques à ceux retenus au niveau européen, en tenir compte au plus tard lors de l’élaboration du plus prochain projet de loi de finances de l’année ou projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un rapport annexé à ces projets de loi analyse en ce cas les mesures envisagées en vue du retour à la trajectoire des finances publiques fixée par la loi de programmation des finances publiques.

4.4 Le chapitre IV est relatif aux dispositions transitoires et finales.

L’article 17 prévoit l’entrée en vigueur du nouveau dispositif organique à compter du 1er mars 2013 ou, si cette entrée en vigueur est plus tardive, un mois après l’entrée en vigueur du traité. Il énonce les mesures transitoires nécessaires au maintien de la loi de programmation en application au moment de l’entrée en vigueur de la loi organique.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l’économie et des finances,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre de l’économie et des finances, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

CHAPITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES
À LA PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES

Article 1er

Dans le respect de l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques énoncé à l’article 34 de la Constitution, la loi de programmation des finances publiques fixe l’objectif à moyen terme des administrations publiques mentionné à l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire signé le 2 mars 2012 à Bruxelles.

Elle détermine, en vue de la réalisation de cet objectif à moyen terme et conformément aux stipulations du traité mentionné à l’alinéa précédent, la trajectoire des soldes structurels et effectifs annuels successifs des comptes de l’ensemble des administrations publiques au sens de la comptabilité nationale, avec l’indication des calculs permettant le passage des uns aux autres, ainsi que l’évolution de la dette publique. Le solde structurel est le solde corrigé des variations conjoncturelles et déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires.

La loi de programmation des finances publiques présente également la décomposition des soldes effectifs par sous-secteur des administrations publiques.

Article 2

Outre celles mentionnées à l’article 1er, les orientations pluriannuelles des finances publiques définies par la loi de programmation des finances publiques comprennent, pour chacune des années auxquelles elles se rapportent :

1° Un montant maximal pour les crédits du budget général de l’État, pour les prélèvements sur les recettes de l’État ainsi que pour les créations, suppressions ou modifications d’impositions de toutes natures affectées à des personnes publiques ou privées autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale ;

2° L’objectif de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurance maladie de l’ensemble de ces régimes ;

3° L’incidence minimale des dispositions nouvelles, législatives ou prises par le Gouvernement par voie réglementaire, relatives aux impositions de toutes natures et aux cotisations sociales ;

4° Les plafonds de crédits alloués aux missions du budget général de l’État ;

5° L’indication de l’ampleur et du calendrier des mesures de correction pouvant être mises en œuvre en cas d’écarts importants au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel, au sens du II de l’article 16, ainsi que les conditions de prise en compte, le cas échéant, de circonstances exceptionnelles telles que définies à l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire signé le 2 mars 2012 à Bruxelles.

La loi de programmation des finances publiques peut comporter des orientations relatives à l’encadrement des dépenses, des recettes et du solde ou au recours à l’endettement de tout ou partie des administrations publiques.

La loi de programmation des finances publiques précise le champ des crédits, prélèvements et impositions mentionnés au 1°. Les montants et objectifs mentionnés aux 1° et 2° s’entendent à périmètre constant.

Article 3

La loi de programmation des finances publiques précise, pour chacune des orientations pluriannuelles qu’elle définit, la période de programmation couverte. Cette période est d’au moins trois années civiles.

Article 4

La loi de programmation des finances publiques peut en outre comporter des règles relatives à la gestion des finances publiques ne relevant pas du domaine exclusif des lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale ainsi qu’à l’information et au contrôle du Parlement dans ce domaine. Ces règles peuvent en particulier avoir pour objet d’encadrer les dépenses, les recettes et le solde ou le recours à l’endettement de tout ou partie des administrations publiques.

Les dispositions mentionnées ci-dessus sont présentées de manière distincte des orientations pluriannuelles des finances publiques.

Article 5

Dans un rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques sont présentés :

1° Les hypothèses et méthodes retenues pour établir la programmation ;

2° Pour chacun des exercices de la programmation, les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des sous-secteurs des administrations publiques, exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale ;

3° Les réformes et mesures de nature à garantir le respect de la programmation ;

4° Toute autre information utile au contrôle du respect des plafonds et objectifs mentionnés aux 1° et 2° de l’article 2, notamment les principes permettant de comparer les montants que la loi de programmation des finances publiques prévoit avec les montants figurant dans les lois de finances de l’année et les lois de financement de la sécurité sociale de l’année ;

5° Les projections de finances publiques à politique inchangée, au sens de la directive 2011/85/UE du 8 novembre 2011, et la description des politiques envisagées pour réaliser l’objectif à moyen terme au regard de ces projections ;

6° L’effort structurel au titre de chacun des exercices de la programmation, entendu comme l’incidence des mesures nouvelles sur les recettes et l’analyse de la contribution des dépenses à l’évolution du solde structurel, ainsi que la décomposition de cet effort par sous-secteur des administrations publiques et les éléments permettant la correspondance entre la notion d’effort structurel et celle de solde structurel ;

7° Les hypothèses de croissance potentielle sous-jacentes à la programmation des finances publiques.

Article 6

La loi de finances de l’année et les lois de finances rectificatives comprennent un article liminaire approuvant un tableau de synthèse retraçant l’état des prévisions, pour l’année sur laquelle elles portent, de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication des calculs permettant le passage de l’un à l’autre.

Le tableau de synthèse de la loi de finances de l’année indique en outre les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de la dernière année écoulée et des prévisions d’exécution de l’année en cours.

Est présenté, le cas échéant, l’écart aux soldes prévus par la loi de programmation des finances publiques.

Article 7

I. – Un rapport annexé au projet de loi de finances de l’année présente, pour l’année à laquelle il se rapporte, et pour l’ensemble des administrations publiques, l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel, tel que défini au 6° de l’article 5, et l’évaluation prévisionnelle du solde effectif, avec leur décomposition par sous-secteur des administrations publiques, ainsi que les éléments permettant la correspondance entre la notion d’effort structurel et celle de solde structurel.

II. – Un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année présente, pour l’année à laquelle il se rapporte, l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel, tel que défini au 6° de l’article 5, des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

CHAPITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES
AU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

Article 8

Le Haut conseil des finances publiques, organisme indépendant, est placé auprès de la Cour des comptes. Il est présidé par le premier président de la Cour des comptes.

Outre son président, le Haut conseil des finances publiques comprend huit membres :

1° Quatre magistrats de la Cour des comptes en activité à la Cour, désignés par le premier président de la Cour des comptes ;

2° Quatre membres nommés, respectivement, par le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, en raison de leurs compétences dans le domaine des prévisions macroéconomiques et des finances publiques; ces membres ne peuvent exercer de fonctions publiques électives nationales.

Les membres du Haut conseil des finances publiques sont nommés pour cinq ans ; le mandat des membres mentionnés au 2° n’est pas renouvelable. Lors de leur nomination, les membres mentionnés aux 1° et 2° remettent au premier président de la Cour des comptes une déclaration d’intérêts.

Dans l'exercice de leurs missions, les membres du Haut conseil des finances publiques ne peuvent solliciter ou recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée.

En cas de décès ou de démission d’un membre ou, s’agissant d’un magistrat de la Cour des comptes, de cessation de l’activité à la Cour, il est pourvu à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. S’agissant des membres mentionnés au 2°, si cette durée est inférieure à un an, le mandat est renouvelable.

Il ne peut être mis fin en cours de mandat aux fonctions d'un membre du Haut conseil des finances publiques que dans les formes de sa nomination, sur avis conforme émis à la majorité des autres membres constatant qu'il n'est plus à même de siéger du fait d'une incapacité ou d'un manquement grave à ses obligations empêchant la poursuite de son mandat.

Article 9

Le Haut conseil des finances publiques est saisi par le Gouvernement des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de loi de programmation des finances publiques. Il est rendu destinataire par le Gouvernement des éléments lui permettant d’apprécier la cohérence de la programmation envisagée au regard de l’objectif à moyen terme retenu et des engagements européens de la France.

Le Haut conseil rend un avis sur l’ensemble des éléments mentionnés ci-dessus. Cet avis est joint au projet de loi de programmation des finances publiques lors de sa transmission au Conseil d’État. Il est joint au projet déposé au Parlement et rendu public lors de ce dépôt.

Article 10

Le Haut conseil des finances publiques est saisi par le Gouvernement des prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de loi de finances de l’année et le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année. Il est rendu destinataire par le Gouvernement des éléments lui permettant d’apprécier la cohérence du projet de loi de finances de l’année, notamment son article liminaire, au regard des orientations pluriannuelles relatives au solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques.

Le Haut conseil rend un avis sur l’ensemble des éléments mentionnés ci-dessus. Cet avis est joint au projet de loi de finances de l’année lors de sa transmission au Conseil d’État. Il est joint au projet déposé au Parlement et rendu public lors de ce dépôt.

Article 11

En cas de dépôt au Parlement d’un projet de loi de finances rectificative ou d’un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, le Gouvernement informe sans délai le Haut conseil des finances publiques des prévisions macroéconomiques sur lesquelles il entend se fonder pour l’élaboration de ce projet. Le Haut conseil peut rendre un avis public sur ces prévisions.

Article 12

Lorsque, en cours d’examen par le Parlement d’un projet de loi de finances ou d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement entend réviser les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposait initialement son projet, il informe sans délai le Haut conseil des finances publiques du nouvel état de ses prévisions. Le Haut conseil peut rendre un avis public sur celles-ci.

Article 13

Le Haut conseil des finances publiques est saisi par le Gouvernement des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité établi au titre de la coordination des politiques économiques des États membres de l’Union européenne. Son avis sur ces prévisions est rendu public et joint au programme de stabilité lors de sa transmission au Conseil et à la Commission européenne.

Article 14

Le Haut conseil des finances publiques peut procéder à l’audition des représentants de l’ensemble des administrations compétentes dans le domaine des finances publiques, de la statistique et de la prévision économique.

Il peut faire appel à des organismes ou des personnalités extérieurs à l'administration.

Le Gouvernement répond aux demandes d’information que lui adresse le Haut conseil dans le cadre de la préparation de ses avis.

Article 15

Les modalités de fonctionnement du Haut conseil des finances publiques peuvent être précisées par décret en Conseil d'État.

CHAPITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AU MÉCANISME DE CORRECTION

Article 16

I. – En vue de la présentation par le Gouvernement du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, le Haut conseil des finances publiques rend un avis identifiant, le cas échéant, les écarts importants, au sens du II ci-après, que font apparaître les résultats de l’exécution de l’année écoulée au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies par la loi de programmation des finances publiques.

Cet avis est rendu public. Il tient compte, le cas échéant, des circonstances exceptionnelles de nature à justifier les écarts constatés, telles que définies à l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire signé le 2 mars 2012 à Bruxelles.

Lorsque l’avis du Haut conseil comporte la mention de tels écarts, le Gouvernement expose les raisons de ces écarts ainsi que les mesures de correction envisagées lors du débat au Parlement sur ce rapport ou, en l’absence d’un tel débat, dans un document transmis à chaque assemblée et rendu public.

II. – Un écart est considéré comme important au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel de l’ensemble des administrations publiques définies par la loi de programmation des finances publiques lorsqu’il représente au moins 0,5 % du produit intérieur brut sur une année donnée ou au moins 0,25 % du produit intérieur brut par an en moyenne sur deux années consécutives.

III. – Il est tenu compte par le Gouvernement d’un écart important au plus tard lors de l’élaboration du plus prochain projet de loi de finances de l’année ou projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année.

Un rapport annexé au plus prochain projet de loi de finances de l’année et au plus prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année analyse les mesures envisagées, qui peuvent porter sur l’ensemble des administrations publiques ou sur certains sous-secteurs seulement, en vue du retour aux orientations pluriannuelles de solde structurel définies par la loi de programmation des finances publiques. Le cas échéant, ce rapport expose et justifie les différences apparaissant, dans l’ampleur et le calendrier de ces mesures, avec les indications figurant dans la loi de programmation des finances publiques en application du 5° de l’article 2.

L’avis du Haut conseil des finances publiques mentionné à l’article 10 comporte une appréciation de ces mesures et, le cas échéant, de ces différences.

CHAPITRE IV

DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES

Article 17

Les dispositions de la présente loi organique s’appliquent à compter du 1er mars 2013 ou, si cette entrée en vigueur est plus tardive, un mois après l’entrée en vigueur du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire signé le 2 mars 2012 à Bruxelles.

Jusqu’à la publication de la première loi de programmation des finances publiques adoptée postérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, les orientations pluriannuelles des finances publiques s’entendent, pour l’application des articles 6, 7, 10 et 15, de celles définies par la loi de programmation des finances publiques applicable à cette date.

Fait à Paris, le 19 septembre 2012.

Signé : Jean-Marc AYRAULT

Par le Premier ministre :
Le ministre de l’économie et des finances


Signé :
Pierre MOSCOVICI

1 () Cf. article 1er, paragraphe 1 du traité.

2 () Deux lois de programmation ont été adoptées (début 2009 et fin 2010).

3 Cf. article 3-2 du traité.


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