N° 1888 - Projet de loi autorisant la ratification de la convention n°188 de l'Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche



N° 1888

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 avril 2014.

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la convention n° 188
de l’Organisation internationale du travail
relative au
travail dans la pêche,

(Procédure accélérée)

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. Manuel VALLS,

Premier ministre,

par M. Laurent FABIUS,

ministre des affaires étrangères
et du développement international.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La Conférence internationale du travail (CIT) a adopté, lors de sa 96e session, le 14 juin 2007, la convention sur le travail dans la pêche, 2007, et la recommandation n° 199 sur le travail dans la pêche.

Cette convention propose une approche innovante et globale du sujet dans le contexte de la mondialisation dans le secteur maritime.

Avec la convention du travail maritime, 2006, également adoptée par l’Organisation internationale du travail (OIT), maintenant ratifiée par la France et qui entrera en vigueur pour notre pays le 28 février 2014, elle représente un véritable code du travail mondial, pour les gens de mer et pour les pêcheurs.

La convention sur le travail dans la pêche rassemble l’intégralité des conventions de l’OIT concernant la pêche. Elle vise à offrir des conditions décentes d’emploi, de travail et de vie à bord des navires de pêche dans un secteur qui se caractérise par des conditions de travail dures et dangereuses ainsi que par la coexistence de petites entreprises artisanales ou familiales avec des sociétés pratiquant la pêche industrielle.

L’approche globale et intégrée proposée par cette convention répond aux défis posés par la mondialisation qu’engendrent la disparité des conditions de vie et de travail à bord des navires, ainsi que celle des normes de sécurité et de contrôle. Cette convention s’inscrit également dans la logique du développement durable en liant l’harmonisation sociale et la préservation de la sécurité et de l’environnement au niveau mondial.

Ainsi, elle garantit aux pêcheurs des conditions de vie et de travail décentes, une meilleure information sur leurs droits et des moyens renforcés de les faire respecter. Elle présente l’avantage pour les armateurs de faire obstacle au « dumping social » en instaurant une concurrence loyale sur la base de règles communes et contrôlées et en rejetant dans la marginalité les navires hors normes.

Pour les États contractants, cet instrument intègre la dimension humaine dans les contrôles et participe, ainsi, à l’amélioration de la sécurité en mer. En effet, il est admis que 80 % des accidents maritimes résultent d’erreurs humaines, le non-respect des normes sociales allant généralement de pair avec le non-respect des normes techniques.

Enfin, plus spécifiquement, la convention sur le travail dans la pêche pourra concourir à la lutte contre la pêche illégale dans le contexte mondial de raréfaction de la ressource. À cet égard, elle pourra être annexée aux accords de pêche tels que ceux conclus entre l’Union européenne et des pays tiers qui prennent déjà en compte les normes de l’OIT.

La convention sur le travail dans la pêche est complétée par la recommandation n° 199 sur le travail dans la pêche qui propose des orientations pour adapter la législation des États Parties.

La convention comprend les neuf titres suivants :

I. – Définitions et champ d’application.

II. – Principes généraux.

III. – Conditions minimales requises pour le travail à bord des navires de pêche.

IV. – Conditions de service.

V. – Logement et alimentation.

VI. – Soins médicaux, protection de la santé et sécurité sociale.

VII. – Respect et application.

VIII. – Amendements des annexes I (équivalence pour le mesurage), II (accord d’engagement du pêcheur) et III (logement à bord des navires de pêche).

IX. – Dispositions finales.

L’article 1erest consacré aux définitions et l’article 2 au champ d’application. Cet article pose le principe selon lequel la convention s’applique à tous les pêcheurs et à tous les navires de pêche engagés dans des opérations de pêche commerciale. Elle comporte certaines obligations plus contraignantes pour les navires d’une longueur supérieure à vingt-quatre mètres.

Ainsi, la convention couvre l’ensemble des pêcheurs, rémunérés à la part ou non, de même que les travailleurs indépendants. Dès lors, elle prend en considération la diversité des situations des pêcheurs dans le monde.

L’article 3 précise les conditions dans lesquelles certaines catégories limitées de pêcheurs ou de navires de pêches peuvent être exclus.

L’article 4 prévoit la possibilité pour les États de mettre en œuvre progressivement certaines dispositions en cas de difficultés particulières mais encadre cette possibilité.

En application de l’article 7, les États doivent désigner une (ou plusieurs) autorité(s) compétente(s) et établir entre elles une coordination.

L’article 8 fixe les responsabilités respectives des armateurs à la pêche, des patrons et des pêcheurs. Le patron a la responsabilité de prendre les mesures relatives à la sécurité des pêcheurs, du navire et l’armateur a l’obligation de lui fournir les moyens nécessaires pour lui permettre de s’acquitter de ses obligations.

Les conditions minimales requises pour le travail à bord des navires de pêches sont fixées aux articles 9 (âge minimum) et 10 (aptitude médicale attestée par un certificat médical).

La convention met à la charge des États l’obligation d’établir dans son droit interne (loi, règlement ou toute autre mesure) un certain nombre de garanties concernant, notamment (articles 13 à 28) :

– l’effectif minimal ;

– la durée minimum de repos ;

– l’accord d’engagement du pêcheur ;

– le rapatriement ;

– le recrutement et le placement des pêcheurs ;

– le paiement mensuel ou à intervalles réguliers des salaires des pêcheurs ;

– le logement et l’alimentation ;

– l’hygiène à bord.

Sur le plan médical, les États doivent adopter une législation portant non seulement sur la fourniture de soins médicaux adaptés (articles 29 et 30) mais également sur la prévention, la garantie de la sécurité et la santé au travail (articles 31 à 33) et sur le principe d’une couverture sociale (articles 34 à 39). L’approche globale de la santé des pêcheurs représente un progrès notable.

Le dispositif de contrôle (articles 40 à 43) est similaire à celui de la convention du travail maritime avec la mise en place d’un système de certification sociale et l’application du contrôle de l’État du port.

L’extension du principe du contrôle de l’État du port à la pêche, qui est en vigueur depuis longtemps à la marine marchande, constitue une avancée dans la lutte contre les navires « sous normes » et s’inscrit dans le processus de lutte contre la pêche illégale.

L’article 44 introduit le principe du traitement pas plus favorable selon lequel un navire de pêche battant pavillon d’un État qui n’a pas ratifié la convention ne peut bénéficier d’un traitement plus favorable que celui accordé à un navire battant pavillon d’un État qui l’a ratifié. Ainsi, lors des contrôles par l’État du port, les navires de ces États seront soumis aux mêmes contrôles et pourront y être immobilisés s’ils ne satisfont pas aux normes de la convention.

Les dernières dispositions (articles 46 à 54) sont classiquement consacrées aux clauses procédurales (entrée en vigueur, révision, dénonciation).

La convention sur le travail dans la pêche entrera en vigueur douze mois après sa ratification par dix États dont huit côtiers. Ces exigences sont relativement modérées et les conditions de son adoption (quatre cent trente-sept voix pour, deux contre et vingt-deux abstentions) laissent présager une entrée en vigueur dans un délai raisonnable. La ratification de cette convention permettant de couvrir, avec la convention du travail maritime, l’ensemble du secteur maritime permettra à la France de confirmer son rôle moteur dans le processus d’élaboration et d’adoption des instruments au sein de l’OIT.

Cette ratification bénéficie du soutien des partenaires sociaux du secteur maritime et des organisations professionnelles nationales, ces dernières ayant été consultées le 20 mai 2008 par le ministre chargé du travail.

Enfin sur le plan international, cette ratification enverra un signal fort aux autres États membres afin qu’ils engagent ou poursuivent le processus de ratification de cette convention. Il est de l’intérêt de la communauté internationale qu’elles entrent en vigueur rapidement afin de mettre en place un socle minimum de droits sociaux au niveau mondial dans le secteur maritime.

Telles sont les principales observations qu’appellent la convention sur le travail dans la pêche, 2007, qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement, conformément à l’article 53 de la Constitution.


PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et du développement international,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification de la convention n° 188 de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères et du développement international, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention n° 188 de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche, adoptée à Genève le 14 juin 2007 et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 16 avril 2014.

Signé : Manuel VALLS

Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères
et du développement international


Signé :
Laurent FABIUS


© Assemblée nationale