N° 332 - Proposition de loi de M. Claude de Ganay visant à prévenir et lutter contre la violence en milieu scolaire



N° 332

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 octobre 2012.

PROPOSITION DE LOI

visant à prévenir et lutter contre la violence en milieu scolaire,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Claude de GANAY, Alain CHRÉTIEN, Alain SUGUENOT, Laurent FURST, Jean-Luc MOUDENC, Philippe GOSSELIN, Marc-Philippe DAUBRESSE, Marcel BONNOT, Thierry LAZARO, Jean-Pierre DOOR, Arlette GROSSKOST, Guy GEOFFROY, Bernard PERRUT, Christian ESTROSI, Lionnel LUCA, Jean-Luc REITZER, Bernard BROCHAND, Patrick BALKANY, Alain MOYNE-BRESSAND, Véronique BESSE, Denis JACQUAT, Sophie ROHFRITSCH, Julien AUBERT, Alain LEBOEUF, Guillaume CHEVROLLIER, Éric STRAUMANN, Jean-Pierre VIGIER, Damien MESLOT et Jean-Louis CHRIST,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans sa note d’information(1) relative à la période 2010-2011, la Direction de l’Évaluation de la Prospective et de la Performance (DEPP) chiffrait à 53,3 % la part des personnels victimes d’actes de violence recensés dans les établissements scolaires publics du second degré.

Ce chiffre, en hausse de 3,5 % par rapport à la période 2007-2008, nous interpelle et nous alarme sur la dégradation progressive de l’environnement de travail des enseignants et personnels des établissements scolaires.

Les violences, qu’elles soient verbales ou physiques, ne sont que trop rarement sanctionnées pénalement ; la gravité « relative » ne justifiant pas, pour de nombreuses victimes (élèves comme enseignants), le recours à un dépôt de plainte.

Ce phénomène ne peut que nourrir le sentiment d’impunité de certains élèves qui n’hésitent plus à graduer leurs actes d’agressions.

Face à ces dérives auxquelles les enseignants et personnels des établissements scolaires sont souvent impuissants, nous devons réaffirmer que le droit à l’éducation induit aussi, de la part des parents, le devoir d’être attentif à l’éducation de leur enfant.

Il est donc nécessaire de remettre la responsabilité parentale au cœur du contrat républicain qui lie l’enfant à l’école afin de lutter et prévenir la violence en milieu scolaire.

À ce titre, la mise en place du contrat de responsabilité parentale (CRP) en 2006 marque une avancée significative en matière d’accompagnement familial.

Ce contrat, qui induit la faculté de suspension et de suppression des allocations familiales, mérite d’être précisé et élargi dans son champ d’application aux actes de violence commis par des élèves comme il a en été, en 2010, le cas avec la proposition de loi de M. Éric Ciotti visant à lutter contre l’absentéisme scolaire.

L’objectif de cette proposition de loi est donc d’étendre cette faculté aux outrages ou atteintes répétés d’élève sur un autre élève, un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire ainsi qu’aux actes répétés de vol, de destruction, de dégradation ou de détérioration d’un bien appartenant à l’établissement d’enseignement scolaire ou appartenant à un élève.

Alerter, accompagner, soutenir et en dernier recours sanctionner financièrement les parents qui manqueraient à leurs responsabilités demeure l’esprit de cette proposition de loi.

L’article 1 instaure un dispositif graduel visant à responsabiliser les parents (alerte, proposition d’accompagnement parental et, en dernier recours, suspension ou suppression des allocations familiales) en élargissant le champ du dispositif du Contrat de Responsabilité Parentale lorsque :

1° L’enfant commet des outrages ou atteintes intentionnelles et répétés sur un élève, un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire ;

2° L’enfant commet, de façon intentionnelle, des actes répétés de vol, de destruction, de dégradation ou de détérioration d’un bien affectés à son établissement d’enseignement scolaire ou appartenant à un élève ;

Les articles 2, 3 et 4 visent à conformer le code de l’action sociale et de la famille ainsi que le code de la sécurité sociale aux dispositions introduites par l’article 1.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le titre VII du livre IV de la deuxième partie du code de l’éducation est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« CHAPITRE III

« Dispositions diverses

« Art. L. 472-1-1. – Le directeur ou la directrice de l’établissement d’enseignement saisit l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation afin qu’elle adresse un avertissement aux personnes responsables de l’enfant, leur rappelant les sanctions administratives et pénales applicables et les informant sur les dispositifs d’accompagnement parental auxquels elles peuvent avoir recours :

1° Lorsque l’enfant commet des outrages ou atteintes intentionnels et répétés sur un élève, un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire ;

2° Lorsque l’enfant commet, de façon intentionnelle, des actes répétés de vol, de destruction, de dégradation ou de détérioration d’un bien affecté à son établissement d’enseignement scolaire ou appartenant à un élève ;

L’autorité de l’État compétente en matière d’éducation saisit sans délai le président du conseil général du cas des enfants pour lesquels un avertissement est intervenu en vue de la mise en place d’un contrat de responsabilité parentale ou de toute autre mesure d’accompagnement que le président du conseil général peut proposer aux familles en application de l’article L. 222-4-1 du code de l’action sociale et des familles.

Elle communique au maire la liste des enfants domiciliés dans la commune pour lesquels un avertissement tel que défini au présent article a été notifié.

Les informations communiquées au maire en application du présent article sont enregistrées dans le traitement prévu à l’article L. 131-6 du présent code.

Dans le cas où, au cours d’une même année scolaire, un nouveau fait mentionné au 1° ou au 2° est réitéré après l’avertissement mentionné au premier alinéa par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation, cette dernière, après avoir mis les personnes responsables de l’enfant en mesure de présenter leurs observations, saisit le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales qui suspend immédiatement le versement de la part des allocations familiales dues au titre de l’enfant en cause, calculées selon les modalités prévues à l’article L. 552-3-2 du code de la sécurité sociale. Le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales informe l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation ainsi que le président du conseil général de la date de mise en œuvre de cette suspension. Il informe les personnes responsables de l’enfant de cette décision et des dispositifs d’accompagnement parental auxquels elles peuvent avoir recours.

Le versement des allocations familiales n’est rétabli que lorsque l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation a signalé au directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales qu’aucun défaut de comportement défini au 1° ou 2° n’a été constaté pour l’enfant en cause pendant une période de deux mois de scolarisation, éventuellement interrompu par des vacances scolaires, depuis le mois au titre duquel le versement des allocations familiales a été suspendu.

Le rétablissement du versement des allocations familiales est rétroactif. Si, depuis les actes ayant donné lieu à la suspension, de nouveaux faits ont été constatés, à la demande de l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation et après que les personnes responsables de l’enfant ont été mises en mesure de présenter leurs observations, aucun versement n’est dû au titre du ou des mois au cours desquels ces nouveaux faits sont intervenus.

La suspension des allocations familiales ne peut prendre effet qu’à une date permettant de vérifier sous deux mois la condition de l’abandon de la procédure prévue au premier alinéa.

Article 2

L’article L. 222-4-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots : « l’éducation, » sont insérés les mots : « , ou quand ont été commis les actes mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 472-1-1 du même code » ;

2° Le septième alinéa est complété par les mots : « ou en cas de commission des actes mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 472-1-1 du même code. » ;

Article 3

Après l’article L. 552-3-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 552-3-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 552-3-2. – Dans le cas où, au cours d’une même année scolaire, un acte mentionné aux 1° et 2° de l’article L. 472-1-1 du code de l’éducation est commis après l’avertissement mentionné au premier alinéas du même article, le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales suspend sur demande de l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation le versement de la part des allocations familiales due au titre de l’enfant à l’origine des faits dans les conditions définies à l’article L. 472-1-1 précité. Le rétablissement des allocations familiales s’effectue selon les modalités précisées à ce même article. Les modalités de calcul de la part due au titre de l’enfant en cause sont définies par décret en Conseil d’État. »

Article 4

Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 262-3, après la référence : « L. 131-8 » sont insérés les mots : « ou de l’article L. 472-1-1 » ;

2° L’article L. 262-10 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, la part des allocations familiales dont le versement fait l’objet d’une mesure de suspension ou de suppression en application de l’article L. 472-1-1 du code de l’éducation demeure prise en compte pour déterminer le montant des ressources servant au calcul de l’allocation. »

1 () Direction de l’évaluation de la prospective et de la performance (depp) – les actes de violence recensés dans les établissements publics du second degré- note d’information – n° 11.13 – octobre 2011.


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