N° 451 - Proposition de loi de M. Thierry Lazaro visant à commercialiser les oeufs dans des boîtes génériques



N° 451

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 novembre 2012.

PROPOSITION DE LOI

visant à commercialiser les œufs dans des boîtes génériques,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Thierry LAZARO,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Une étude canadienne récente montre que le cholestérol du jaune d’œuf aurait quasiment les mêmes effets sur les artères que la cigarette.

S’il est riche en oméga-3, en vitamines et en antioxydants, le jaune d’œuf l’est également en cholestérol, ce qui le rend aussi nocif pour les artères que la cigarette. Ainsi le Professeur en neurologie David Spence, qui a mené sa recherche sur 1 231 patients, a permis de démontrer qu'une consommation trop importante de jaunes d'œuf conduirait à une accélération de l’effet de l’athérosclérose, qui se traduit par la formation d'un amas de graisse et de cellules qui obstruent les artères. La formation de ces plaques s'accélèrerait nettement chez les sujets de plus de 40 ans qui consommeraient régulièrement des jaunes d'œufs lors de leurs repas.

Au regard de la dangerosité de ce produit courant, nous souhaitons proposer que les œufs soient désormais commercialisés dans des boîtes neutres – des boîtes génériques – afin de rendre ce produit moins attractif. Nous avons un temps envisagé de proposer une taxe sur les poules, qui sont les véritables responsables de la consommation des œufs, mais nous avons préféré proposer cette réforme qui nous parait plus efficace, même si nous n’avons conduit aucune étude sur le sujet.

Cette proposition de loi pourrait paraître absurde. Pourtant, elle ne l’est pas davantage que l’idée proposée par les associations anti-tabac, récemment reprise par le ministre des affaires sociales et de la santé, de proposer de commercialiser les cigarettes dans des paquets génériques afin de lutter contre le tabagisme.

L’auteur de cette proposition de loi rappelle qu’il a co-rédigé en octobre 2011, avec ses collègues députés Jean-Louis Dumont et Jean-Marie Binetruy, un rapport d’information parlementaire n° 3786 intitulé « Le trafic illicite du tabac : un coût social et économique insupportable pour la France ». Ce rapport exhaustif, qui a nécessité six mois de recherches et l’audition de dizaines d’experts, a été salué par toutes les parties prenantes.

Dans ce rapport parlementaire d’information, nous établissons que le tabac a rapporté, TVA comprise, 13,6 milliards d’euros en 2011, il a coûté 6,8 milliards d’euros (chiffres de la CNAMTS), et le manque à gagner généré par le commerce illicite, conséquence de la différence des prix entre la France et les autres pays, notamment limitrophes, est proche des 3 milliards d’euros chaque année.

Nous avons également étudié différents aspects liés au tabagisme, et aux moyens permettant d’en réduire le danger. Parmi ces mesures, nous avons étudié l’idée du paquet neutre. Nous avons conclu, et il s’agit de notre Recommandation n° 8, qu’il convient de « refuser les propositions de création du paquet génériques de cigarettes, ainsi que de ventes sous le comptoir, qui paraissent de nature à favoriser les trafics illicites ».

Ainsi que nous l’avons écrit à la ministre des affaires sociales et de la santé le 4 septembre 2012, cette solution, si elle était retenue, n’aurait en réalité qu’un seul effet : le développement de la contrebande et de la contrefaçon, véritable fléau pour nos finances publiques et en termes de santé publique (cf. la page 5 de notre rapport sur les conséquences du commerce illicite sur les mineurs). Une telle mesure facilitera le commerce illicite du tabac dans notre pays, déjà estimé entre 20 et 25 % du marché et en forte progression depuis ces dernières années. Rappelons que la position de la DGDDI au sujet du paquet générique est très claire : « Sans préjuger de l'intérêt d'une telle mesure dans le cadre de la politique de santé publique, la mise en place d'un tel paquet semble de nature à complexifier la lutte contre la fraude. Dès lors, ce projet suscite une réserve inspirée par la prudence ». Une position d’ailleurs partagée par exemple par la criminologue Alain Bauer, dans le Journal du Dimanche, le 26 août 2012. Imagine-t-on de faire imprimer des billets de banque génériques, sans risques d’explosion de la fausse monnaie ?!

Au-delà du manque de considération pour les travaux du Parlement, le ministère de la santé devrait réfléchir à deux fois avant de se prononcer sur un sujet aussi complexe.

Une étude très récente menée au sein de l’Union européenne pour le compte de la DG SANCO démontre que seuls 3 % des fumeurs européens sont influencés par la présentation du paquet et seulement 2 % des Français fumeurs interrogés. Il en découlerait un violent impact économique sur le secteur et nombreuses seraient les pertes d’emplois qui en résulteraient. En France, plus de 110 000 emplois sont concernés, notamment dans le réseau de distribution et la tabaculture.

Enfin et peut-être surtout, une telle mesure de standardisation créerait un précédent juridique et sociétal dont l’impact économique serait néfaste aux entreprises et à l’emploi. Elle pourrait mettre en péril de nombreux autres secteurs économiques français et européens tels que, par exemple, l’agroalimentaire dans un contexte économique déjà fortement dégradé. En effet, la multiplication des messages de prévention ou d’alerte sur des comportements alimentaires ou sociaux, compte-tenu de leurs impacts sur la santé prétendus ou des risques qu’ils feraient courir aux consommateurs, sont de nature à élargir ce type de mesure à d’autres produits que le tabac.

Une étude réalisée par des chercheurs d’Oxford (voir La Tribune datée du 16 novembre 2005) montre que le coût social de la « malbouffe » est quatre fois supérieur à celui du tabac, soit pour la France, quelques 25 milliards d’euros. Cela veut-il dire que les boissons gazeuses ou sucrées, les confiseries, les hamburgers, les pizzas, les surgelés, etc… doivent être également conditionnés dans des boîtes ou paquets neutres ?

Une autre étude indique que le diesel causerait, chaque année, la mort de plusieurs milliers de personnes, ce qui a amené notre collègue député de Paris Jean-Marie Le Guen à demander, mercredi 12 septembre 2012, l’interdiction des véhicules diesel à Paris (étonnamment pas sur tout le territoire national). Cela veut-il dire que l’on doive légiférer demain, au paroxysme de la crise du secteur automobile, pour que tous les véhicules diesel aient la même forme, la même couleur, avec des photographies de poumons atrophiés sur les portières ?

Lorsqu’un gouvernement ne sait pas résoudre les problèmes importants comme le chômage ou les déficits, il s’attaque à la vie quotidienne des gens. L’ancien Président de la République Georges Pompidou l’avait d’ailleurs bien compris, lui qui répétait à l’envi à son gouvernement et à ses ministres : « arrêtez d’emmerder les Français ! ».

Il convient de se méfier des fausses bonnes idées, et de s’interroger sur leur généralisation ainsi que sur leurs conséquences.

Tel est le sens de la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après l’article L. 1171-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1171-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 1171-2. – Chaque boîte d’œufs ne peut porter sur un fond uniforme que :

« 1° La marque dénominative, sans adjonction d’élément figuratif ou semi-figuratif ;

« 2° Un message général et un message spécifique de caractère sanitaire sur au moins 50 % des deux surfaces les plus visibles ;

« 3° Les éléments de traçabilité et d’identification du produit ;

« 4° La quantité de produit.

« Un arrêté du ministre de la santé fixe les modalités du fond uniforme, d’inscription de ces mentions obligatoires et les méthodes de vérification de l’exactitude des mentions portées sur les paquets. »


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