N° 2217 - Proposition de loi de M. Jean-François Mancel visant à rendre obligatoire le travail en détention



N° 2217

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 septembre 2014.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre obligatoire le travail en détention,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-François MANCEL,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Force est de constater que la charge financière que font peser les détenus sur les finances publiques de notre pays devient considérable. En effet, c’est près de 69 000 personnes qui sont aujourd’hui incarcérées dans les prisons françaises, ce qui représente un coût de moyen de 32 000 euros annuels par détenu. En 2012, le budget de l’administration pénitentiaire s’élevait à 2,39 milliards d’euros soit la moitié du budget du ministère de la justice.

Or, il n’est pas acceptable que les dépenses consacrées aux détenus soient intégralement financées par les contribuables, alors que ces derniers ont été appelés à réaliser des efforts supplémentaires ces dernières années.

Dès lors, il est nécessaire de demander aux détenus qu’ils participent aux frais de leur incarcération, ce qui semble être la moindre des choses puisque leur situation ne résulte que d’un comportement répréhensible sanctionné par les juridictions françaises au nom du peuple français. Cette participation se fera par une obligation au travail en détention, la rémunération de ce travail étant affectée directement à l’administration pénitentiaire. Ledit travail pourra se faire soit au sein de l’établissement dans lequel le détenu purge sa peine, soit à l’extérieur, sous la surveillance d’agents de l’administration pénitentiaire.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire, le travail des détenus n’est plus obligatoire en France, même si le code de procédure pénale prévoit que toutes les dispositions sont prises pour assurer une activité professionnelle aux personnes incarcérées qui le souhaitent.

Ajoutons que les textes européens ne sont pas en contradiction avec une telle initiative puisque l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’homme ne considère pas comme un travail forcé ou obligatoire « tout travail requis normalement d’une personne soumise à la détention dans les conditions prévues par l’article 5 de la Convention », c’est-à-dire « si elle est détenue régulièrement après condamnation par un tribunal compétent ». D’ailleurs, certains de nos partenaires européens ont déjà adopté l’obligation de travailler en prison. C’est le cas de l’Allemagne, de l’Angleterre, des Pays-Bas, du Pays de Galles et de l’Italie.

Cette proposition de loi repose sur deux fondements.

D’une part, comme cela a été exposé précédemment, faire participer les prisonniers au financement des frais engendrés par leur mise en détention. Mais les revenus générés par l’activité des détenus seront prioritairement affectés à l’indemnisation de la victime ou des victimes des méfaits du détenu. Aujourd’hui, les victimes ne peuvent saisir la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (Civi) que lorsqu’elles ne peuvent être indemnisées par l’auteur ou par d’autres organismes. La victime doit ensuite répondre à de nombreuses conditions pour obtenir une telle indemnisation, notamment des conditions de ressources, ce qui tend à la rendre totalement illusoire aux yeux de la victime et renforce chez elle le sentiment d’injustice.

D’autre part, le travail réalisé par les détenus pourra leur permettre de se former à certains savoir-faire, ce qui ne leur sera que bénéfique en vue de leur réinsertion.

Par conséquent, l’article 1er de cette proposition de loi tend à répondre à ces deux objectifs par l’instauration d’un principe d’obligation au travail pour les détenus.

L’article 2 prévoit qu’un décret fixera les conditions d’application de l’article premier.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article 717-3 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 717-3. – Les personnes régulièrement détenues après condamnation par un tribunal compétent ont l’obligation d’effectuer un travail.

« Les revenus générés par leur activité seront affectés en priorité à l’indemnisation de la victime ou des victimes de l’infraction pour laquelle elles ont été condamnées, puis au remboursement des frais engendrés par leur incarcération. »

Article 2

Les conditions d’application de l’article premier de la présente loi sont fixées par décret.


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