N° 2400 - Proposition de loi de M. Jean-Christophe Lagarde visant à étendre la déchéance de la nationalité française à tout individu portant les armes ou assistance aux côtés de terroristes



N° 2400

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2014.

PROPOSITION DE LOI

visant à étendre la déchéance de la nationalité française
à tout individu portant les armes ou assistance
aux côtés de terroristes,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-Christophe LAGARDE,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis une dizaine d’années avec la multiplication des conflits religieux menés notamment par les intégristes islamistes, au premier rang desquels Al Qaïda et Daesh, on constate que des citoyens français s’engagent de plus en plus nombreux aux côtés des terroristes islamistes.

Ces individus français n’hésitent pas à prendre les armes et rejoindre des pays étrangers où se développent des conflits armés afin de combattre aux côtés des terroristes, parfois même l’armée française, comme c’est le cas en Afghanistan ou plus récemment au Mali.

De plus, depuis ces dernières années, un phénomène particulièrement inquiétant se développe menaçant la sécurité de notre pays. En effet, ces jeunes citoyens français qui prennent les armes afin de partir faire « le Jihad », en Syrie par exemple, reviennent en Europe « programmés avec une expérience militaire inquiétante et une idéologie chargée de haine envers l’Occident », selon Samuel Laurent, auteur d’ « Al Qaïda en France ».

On aboutit ainsi à la multiplication des filières terroristes en Europe, comme l’a illustré de façon tragique l’affaire Nemmouche.

Aujourd’hui, on estime que plus de 1 100 Français combattent ou ont combattu en Syrie aux côtés des terroristes.

Il convient donc de réagir avec la plus grande fermeté à ce phénomène qui menace les fondements et la sécurité de nos sociétés occidentales.

Cette proposition de loi a donc pour objet de répondre en partie à ce phénomène et d’étendre la déchéance de la nationalité française à tout ressortissant officiellement reconnu comme Français, ayant participé, directement ou indirectement, à des opérations armées aux côtés de terroristes, en France ou à l’étranger.

Les dispositions actuelles des articles 25 et 25-1 du code civil permettent déjà de déchoir de la nationalité française ces individus, identifiés ou appréhendés dans le cadre d’opérations armées, uniquement si ces derniers accomplissent leurs actes au profit d’un État étranger (cas prévu par l’article 25 4° du code civil). Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque ces actes se font au profit de groupes terroristes.

La présente proposition de loi envisage donc de pallier à cette carence en permettant la déchéance automatique de la nationalité française de ces individus qui auront été précisément identifiés en portant les armes aux côtés de terroristes. Cette sanction ultime sera prononcée par décret pris sur avis simple du Conseil d’État conformément aux engagements internationaux de la France afin de ne pas les rendre apatrides.

De plus, dans le cas présent, la déchéance de nationalité pourra être prononcée à tout moment :

– sans que lui soit applicable le délai de dix ans après l’acquisition de la nationalité prévu par le premier alinéa de l’article 25-1 du code civil

– et également à l’encontre de tout citoyen français, même né en France, à condition que ce dernier bénéficie d’une autre nationalité (principe de la double nationalité).

Enfin, afin de répondre à la situation des citoyens nés français et qui ne bénéficient pas de la double nationalité, la présente proposition de loi prévoit que ces français, garderont leur nationalité afin de ne pas les rendre apatrides, mais se verront suspendre leur droit d’accès au territoire de notre République. Quand bien même elle serait française, la personne soupçonnée de s’être engagée dans des groupes terroristes à l’étranger devra demander, à son retour, une autorisation au ministère de l’intérieur. L’État pourra ainsi refuser l’accès au territoire, contrôler les conditions d’un retour et imposer un processus de déradicalisation pour les éventuels repentis.

Telles sont les principales orientations de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

La section 3 du chapitre IV du titre Ier du code civil est complétée par un article 25-2 ainsi rédigé :

« Art. 25-2. – I. – Tout Français qui aura été arrêté, surpris ou identifié, portant les armes ou se rendant complice par fourniture de moyens, au profit de groupes terroristes, est déchu de la nationalité française par décret pris après avis simple du Conseil d’État, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride.

« II. – Le premier alinéa de l’article 25-1 n’est pas applicable au cas prévu au présent article.

« III. – Tout Français né en France et ne bénéficiant d’aucune autre nationalité, qui aura été arrêté, surpris ou identifié, portant les armes ou se rendant complice par fourniture de moyens, au profit de groupes terroristes, sera soumis à une autorisation du ministre de l’intérieur avant toute entrée sur le territoire français.

« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. »


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