N° 2610 - Proposition de résolution de Mme Valérie Boyer tendant à la création d'une commission d'enquête relative à la dégradation et à la profanation des lieux de culte et des cimetières en France



N° 2610

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 mars 2015.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

((Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Mme Valérie BOYER, Isabelle LE CALLENNEC, Patrick HETZEL, Philippe VITEL, Didier QUENTIN, Céleste LETT, Lionnel LUCA, Jean-Luc REITZER, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Éric CIOTTI, Alain MARLEIX, Bernard GERARD, Nicolas DHUICQ, Claude STURNI, Bernard PERRUT, Paul SALEN, Bernard DEBRÉ, Alain MOYNE-BRESSAND, Jean-Pierre DECOOL, Franck MARLIN, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Damien ABAD, Dino CINIERI, Jérôme CHARTIER, Jean-Claude BOUCHET, Jean-Pierre BARBIER, Axel PONIATOWSKI, Dominique DORD, Michel HERBILLON, Josette PONS, Jean-Michel COUVE, Guy GEOFFROY, Michel HEINRICH, Guy TEISSIER, Laurent FURST, Annie GENEVARD, Daniel FASQUELLE, Christian KERT, Philippe GOSSELIN, François de MAZIÈRES, Patrice VERCHÈRE,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La profanation, le 15 février 2015 du cimetière juif de Sarre-Union, par sa grande ampleur et le fait qu'elle s’inscrit dans un phénomène d’augmentation des actes antisémites, a suscité une vive indignation chez chacun d’entre nous.

Le ministère de l’intérieur présentait alors quelques chiffres sur le recensement des profanations en 2014 dont personne ne connaît la réelle provenance, les dernières statistiques « fiables » émanant d’un rapport parlementaire daté de 2011 du groupe d’étude parlementaire sur la politique de prévention et de lutte contre les profanations dans les lieux de culte et les cimetières.

D’après les statistiques produites par les représentants du ministère de l’intérieur pour l’année 2010, 621 profanations ont été dénombrées. Elles se répartissaient de la manière suivante :

– 522 sites chrétiens : 214 cimetières (contre 189 en 2009), 308 lieux de culte (contre 209 en 2009) : soit 272 églises et chapelles, 26 monuments aux morts et 10 calvaires ;

– 57 sites musulmans (contre 18 en 2009) : 50 mosquées et 7 cimetières ;

– 42 sites israélites : 30 lieux de culte (surtout des synagogues) et 12 cimetières.

Qu’elle vise les lieux de culte ou les cimetières, quelle que soit la religion, la profanation ne constitue jamais et ne saurait être tenue pour une infraction ordinaire.

Elle représente un acte inqualifiable qui, dans l’interminable litanie des faits divers, nous offre le reflet sans doute grossissant d’une distance croissante avec des traits pourtant fondateurs de notre civilisation : le questionnement nourri par l’idée d’une transcendance ; le respect des morts et l’aspiration de certains d’entre nous à l’immortalité de l’esprit malgré la déchéance des corps.

L’histoire de l’espèce humaine en atteste : il existe entre la mort et la recherche du sacré des liens indissolubles et les anthropologues considèrent généralement que l’apparition de véritables rituels funéraires marque l’une des étapes décisives du passage à la civilisation.

À cette aune, il faut se représenter la gravité même des actes sur lesquels repose la définition de profanation.

Les profanations se présentent comme un fléau persistant, fruit d’égarements individuels et, parfois, d’une perte des repères collectifs ; elles soulèvent une question de société qui ne peut durablement trouver de réponses que dans la réaffirmation de principes de civilisation et la protection de l’intégrité des lieux de culte et du séjour des défunts.

Depuis 2008, cependant, nous assistons à une recrudescence des actes de profanation.

De fait, il ressort des éléments recueillis par le groupe d’études sur la politique de prévention et de lutte contre les profanations dans les lieux de culte et les cimetières, que le recensement des profanations repose sur des instruments d’évaluation et des signalements encore très insatisfaisants car ne permettant pas une estimation exacte de la gravité de ces actes.

Cette situation tient, d’une part, à la relative imprécision en la matière de l’appareil statistique des services de police et de justice. En l’état actuel, les profanations n’apparaissent pas, en effet, en tant que telles, de manière isolée, dans les données collectées pour le suivi de la délinquance. Il faut dire que cette notion recouvre des faits et des atteintes très divers. Dans les cimetières, les profanations consistent ainsi souvent en des saccages, des bris de sépulture, des actes de vandalisme prenant pour cible des accessoires, des plaques funéraires, des inscriptions, des bris d’emblèmes, la destruction de plantations. Dans les lieux de culte ou encore les cimetières et les nécropoles militaires, elles prennent également la forme de vols, de destructions ou de dégradations aux motivations variées.

Appréhender les profanations au plan judiciaire se révèle ainsi problématique parce que, d’autre part, de tels actes ne donnent pas nécessairement lieu à un signalement aux forces de l’ordre et à la justice.

On touche là aux difficultés redoutables que représente l’existence, dans certaines franges de la population, d’un relatif scepticisme quant à l’intérêt et l’efficacité d’un dépôt de plainte.

En conséquence, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, d’adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres relative à la dégradation et à la profanation des lieux de culte et des cimetières en France.


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