N° 3697 - Proposition de loi de M. Élie Aboud instituant un service citoyen universel



N° 3697

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 avril 2016.

PROPOSITION DE LOI

instituant un service citoyen universel,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Élie ABOUD,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays vit des moments historiques avec les vagues d’attentats terroristes. Cela nous appelle à l’unité. Pourtant, la Nation ne s’est jamais montrée aussi en crise, divisée, fracturée. Il y a donc un véritable danger pour notre cohésion.

Comment agir ?

La jeunesse représente l’avenir de notre Nation. Elle a besoin d’être unifiée et sensibilisée davantage aux valeurs républicaines. Je propose donc d’instaurer un service citoyen universel (SCU) de deux mois (modulable). Ce temps doit permettre de renforcer le sentiment d’appartenance nationale. Il est obligatoire pour tous les jeunes Français et Françaises.

Cette transmission de valeurs doit se faire dans un cadre militaire, car c’est le cadre le plus naturel à l’émergence du sentiment patriotique. Ce service citoyen doit être ponctué de cérémonie militaire, de cours de défense et d’activités sportives et scolaires. Il doit aussi être le lieu de pérennisation de nos valeurs et, par extension, de lutte contre la radicalisation et le terrorisme. Il nous faut refonder le creuset de l’intégration citoyenne. Le coût d’un tel service est estimé entre 500 millions et 1 milliard d’euros par an pour une tranche d’âge.

Au regard de la quasi-concomitance entre la suppression du service militaire et l’envolée de la délinquance à partir des années 2000 (de 1996 à 2006 plus 4,7 %), on peut en espérer une baisse d’environ 5 % de la délinquance. En effet, celle-ci, coûte chaque année 150 milliards d’euros à l’État. Les détenus étant pour 50 % des moins de 30 ans, une structure collective et éducative de cette nature doit contribuer à faire diminuer les délits mineurs et les délits dus à l’incivisme.

De plus, cette proposition de loi peut rentrer dans le cadre de la prévention contre le tabagisme, l’alcoolémie chez les jeunes, ainsi que la consommation de drogues dites « douces ». Le coût social du tabac et de l’alcool étant de 250 milliards d’euros par an, le service citoyen universel est le moment opportun pour faire vivre aux jeunes Français deux mois sans tabac, sans alcool et sans stupéfiant.

En outre, la mise en place de ce service citoyen entraîne de facto la suppression de « la journée du citoyen » qui coûte 135 millions d’euros par an à l’État avec des résultats décevants. Le service civique non obligatoire coûte 150 millions d’euros par an. Avec cette proposition, il n’a plus vocation à exister. On peut néanmoins envisager une extension du service citoyen universel dans le cadre associatif.

Au delà d’une formation civique visant à renforcer l’adhésion à la communauté nationale, la France doit impérativement transmettre à ses enfants une sensibilisation à la conscience environnementale et à la vie dans la nature. Le service citoyen universel, s’inscrit donc dans la modernité et prépare les jeunes aux défis du XXIème siècle.

Il comporte également des temps permettant de préparer de manière équitable nos futurs bacheliers. Des procédures d’orientation, pour une meilleure insertion professionnelle, peuvent être également proposées, elles aussi, lors de ce service citoyen universel. La détection et l’aide aux jeunes illettrés (4 % des 16-25 ans selon l’ALNCI) et lacunaires en français sera aussi une priorité du service citoyen universel.

L’encadrement des jeunes devra être coordonné par des militaires, ainsi que par des bénévoles. Un investissement personnel au sein du service citoyen universel (entretien, cuisine, etc.) sera attendu de tous les jeunes dans le but de les responsabiliser.

Un uniforme non militaire devra être porté par tous, pour gommer toutes les disparités sociales le temps des deux mois. Le but de ce service citoyen universel n’étant pas de faire de nos jeunes exclusivement, dans une Europe pacifiée, des futurs mobilisables, le cadre militaire doit être d’abord ici celui de l’accompagnement pour encadrer les jeunes et pour susciter éventuellement des vocations dans l’armée.

Selon un sondage effectué en janvier 2015, 80 % des Français se déclarent favorables à un nouveau service national. Cette proposition de loi s’inscrit dans cette perspective. Elle a été élaborée dans un souci d’unité et de consensus national. La jeunesse étant le bien le plus précieux de toutes les sociétés, il convient de faire de celle-ci un élément à part entière de la communauté nationale et de lui consacrer toute notre attention. La période de deux mois ici proposée, semble suffisante, ce délai correspond à une réelle volonté d’insertion sans préjudice pour les emplois du temps des jeunes.

Dans l’esprit de la Vème République, ce service citoyen est universel, solidaire et rassembleur.

Le dispositif lui-même se substitue à celui aujourd’hui prévu pour l’organisation de la journée défense et citoyenneté.

Les dispositions actuelles du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code du service national sont remplacées par les articles consacrés à la définition et à l’établissement du service citoyen universel, donnant son intitulé au chapitre ainsi nouvellement rédigé.

La proposition de loi pourrait être ainsi rédigée :

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code du service national est ainsi rédigé :


« Chapitre IV


« Le service citoyen universel

« Art. L. 114-1. – Le service citoyen universel, d’une durée de deux mois, est obligatoire pour toutes les Françaises et tous les Français. Il se déroule entre leur dix-huitième et leur vingt-et-unième anniversaire.

« À l’issue de ce service, il est délivré un certificat individuel de participation.

« Art. L. 114-2. – L’aptitude à accomplir le service citoyen universel est médicalement constatée.

« Art. L. 114-3. – Le service citoyen universel contribue à renforcer l’adhésion des jeunes Françaises et Français à la communauté nationale en renforçant leur mobilité sociale et géographique et leur adhésion à une citoyenneté dans un cadre républicain commun.

« Ils reçoivent, lors de l’accomplissement de leur service, un enseignement adapté à leur niveau de formation et respectueux de l’égalité entre les sexes, qui permet de présenter les enjeux et les objectifs généraux de la défense nationale, les moyens civils et militaires de la défense et leur organisation, le service civique et les autres formes de volontariat ainsi que les périodes militaires d’initiation ou de perfectionnement à la défense nationale et les possibilités d’engagement dans les forces armées et les forces de réserve.

« Ils sont sensibilisés aux droits et devoirs liés à la citoyenneté et aux enjeux du renforcement de la cohésion nationale et de la mixité sociale. La charte des droits et devoirs du citoyen français mentionnée à l’article 21-24 du code civil leur est remise, présentée et développée à cette occasion. Ils bénéficient également d’une sensibilisation à la sécurité routière et d’une formation au code de la route. Une formation à la conduite des véhicules à moteur peut leur être proposée.

« Sont organisés des tests d’évaluation des apprentissages fondamentaux de la langue française ainsi que des connaissances générales ou spécialisées permettant de conseiller aux participants une orientation et des formations à l’issue de leur service

« Il est délivré une information générale sur le don de sang, de plaquettes, de moelle osseuse, de gamètes et sur le don d’organes à fins de greffe. S’agissant du don d’organes, une information spécifique est dispensée sur la législation en vigueur. Une présentation de la possibilité de rédiger des directives anticipées relatives à sa fin de vie est également proposée.

« Par ailleurs, une information est dispensée sur la prévention des conduites à risque pour la santé, notamment celles susceptibles de causer des addictions et des troubles de l’audition. La prévention du tabagisme, de l’alcoolémie et de la toxicomanie est particulièrement prise en compte par des actions adaptées.

« Art. L. 114-4. – Les objectifs du service citoyen universel tels qu’ils sont définis à l’article L. 114-3 sont organisés suivant deux modules d’un mois chacun. Le premier, commun à l’ensemble des participants, comprend les tests, les enseignements et les formations générales aux notions de défense. Le second propose des activités spécifiques adaptées aux besoins et aux compétences qui auront été déterminées pour chaque participant. Le cadre de vie, en dehors des activités spécifiques à chaque module et la pratique régulière des activités physiques et sportives restent communs.

« Art. L. 114-5. – Les Français choisissent parmi trois périodes au moins proposées par l’administration chargée du service national celle à laquelle ils participent au service citoyen universel.

« Art.  L. 114-6. – Les Français qui n’ont pas pu participer au service citoyen universel avant la date de leur vingt-et-unième anniversaire peuvent demander à régulariser leur situation jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans. Ils sont alors convoqués par l’administration chargée du service national dans un délai de trois mois pour accomplir cette obligation.

« Art. L. 114-7. – Pour être autorisée à s’inscrire aux examens et concours soumis au contrôle de l’autorité publique, la personne assujettie à l’obligation de participer au service citoyen universel doit, sauf cas de force majeure, être en règle avec cette obligation.

« Art. L. 114-8. – Ne sont pas soumises à l’obligation de participer au service citoyen universel les personnes atteintes d’un handicap les y rendant définitivement inaptes. Elles peuvent cependant, si elles le souhaitent, y participer sous une forme adaptée.

« Art. L. 114-9. – Les Français établis hors de France âgés de moins de vingt-et-un ans participent, sous la responsabilité du chef du poste diplomatique ou consulaire accrédité, au service citoyen universel, soit en France, soit sur place en fonction des accords passés avec leur pays de résidence.

« Art. L. 114-10. – Les Français majeurs âgés de moins de vingt-cinq ans, non inscrits sur les listes de recensement sur lesquelles ils auraient dû figurer, sont convoqués pour accomplir leur service citoyen universel dans un délai de six mois suivant la découverte de l’omission et dans les conditions fixées à l’article L. 114-5.

« Art. L. 114-11. – Les Français appelés à accomplir leur service citoyen universel ont la qualité d’appelés du service national.

« Ils sont placés sous la responsabilité de l’État.

« Les personnes victimes de dommages corporels subis lors de l’accomplissement du service citoyen universel peuvent, ainsi que leurs ayants droit, obtenir de l’État une réparation destinée à assurer l’indemnisation intégrale du préjudice subi, calculée suivant les règles de droit commun.

« Aucune action récursoire ne peut être engagée contre les personnes morales propriétaires des locaux d’accueil.

« Art. L. 114-12. – Les responsables d’établissements d’accueil du service citoyen universel passent, avec l’administration chargée du service national, des conventions fixant les modalités de mise à disposition de leurs locaux.

« Art. L.114-13. – Les Français peuvent, sur leur demande, prolonger leur service citoyen universel par une période militaire d’initiation ou de perfectionnement à la défense nationale complémentaire d’une durée de six mois.

« Art. L.114-14. – L’encadrement du service national universel est assuré par des personnels sous statut militaire.

« Art. L.114-15. – Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. En ce qui concerne les Français établis hors de France, ces modalités sont prises après avis de l’Assemblée des Français à l’étranger ou de son bureau dans l’intervalle des sessions du conseil. »

Article 2

Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxes additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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