N° 3791 - Proposition de loi de M. Édouard Courtial visant à instaurer un « pass permis citoyen »



N° 3791

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 mai 2016.

PROPOSITION DE LOI

visant à instaurer un « pass permis citoyen »,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Édouard COURTIAL, Damien ABAD, Élie ABOUD, Yves ALBARELLO, Julien AUBERT, Sylvain BERRIOS, Marcel BONNOT, Jean-Claude BOUCHET, Bernard BROCHAND, Dominique BUSSEREAU, Philippe BRIAND, Luc CHATEL, Jean-Louis CHRIST, Dino CINIERI, Jean-Michel COUVE, Marie-Christine DALLOZ, Olivier DASSAULT, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Pierre DECOOL, Lucien DEGAUCHY, Julien DIVE, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Daniel FASQUELLE, Marie-Louise FORT, Laurent FURST, Guy GEOFFROY, Bernard GÉRARD, Charles-Ange GINESY, Philippe GOSSELIN, Michel HEINRICH, Patrick HETZEL, Guillaume LARRIVÉ, Laure de LA RAUDIÈRE, Charles de LA VERPILLÈRE, Pierre LELLOUCHE, Véronique LOUWAGIE, Lionnel LUCA, Jean-François MANCEL, Thierry MARIANI, Alain MARLEIX, Jean-Claude MATHIS, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Jacques MYARD, Bernard PERRUT, Josette PONS, Jean-Luc REITZER, Martial SADDIER, Paul SALEN, Jean-Marie SERMIER, Fernand SIRÉ, Thierry SOLÈRE, Claude STURNI, Alain SUGUENOT, Guy TEISSIER, Catherine VAUTRIN, Jean-Pierre VIGIER, Philippe VITEL, Michel VOISIN, Éric WOERTH et Marie-Jo ZIMMERMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le permis de conduire est souvent considéré comme le premier pas vers l’indépendance et l’autonomie. S’il permet de se déplacer plus facilement, mais également plus librement, un double constat s’impose.

Pour les jeunes, il est un outil souvent indispensable et un atout incontestable pour décrocher un emploi.

Mais force est de constater que son coût d’environ 1 045 euros en moyenne sur le territoire national ne le rend pas, dans de nombreux cas, accessible aux jeunes disposant dans la majorité des cas de revenus modestes, n’étant pas encore entrés dans la vie active. Or, pour y entrer, le permis de conduire est justement demandé par certains employeurs ou nécessaire pour les trajets domicile-travail. C’est donc pour certains jeunes un véritable parcours du combattant pour faire face à ce serpent qui se mord la queue.

Il en résulte que de nombreux candidats renoncent à le passer et ainsi parfois à répondre à une offre d’emploi ou conduisent sans permis créant ainsi des situations extrêmement dangereuses pour l’ensemble des usagers de la route.

Il est donc urgent que l’État apporte une solution concrète et opérationnelle à cette situation qui peut prendre la forme d’une aide financière.

Cette subvention, à plus forte raison lorsqu’elle est financée par l’impôt, doit avoir une contrepartie. En effet, si cette aide devient un droit, il doit également s’accompagner d’un devoir. L’un ne va pas sans l’autre. Un acte de solidarité de la collectivité au bénéfice d’une personne implique nécessairement un engagement de cette dernière envers elle.

Alors que les Français expriment leur désintérêt de l’action publique, voire un sentiment de défiance à son encontre, il semble nécessaire de redonner du sens aux actions mises en place par la collectivité au bénéfice de chacun, en réaffirmant la dimension républicaine de l’action publique. Celle-ci se traduit par une contrepartie au service de l’intérêt général.

C’est justement ce que l’auteur de cette proposition de loi a mis en place dans le département de l’Oise avec le Pass permis citoyen qui connaît un large succès avec plus de 1 800 jeunes inscrits en dix mois. Le Pass permis citoyen est accessible uniquement au primo candidat au permis de conduire et n’est pas cumulable avec d’autres aides en la matière. Contrairement à l’ancien dispositif qui ne concernait que 20 % des Oisiens, car il était soumis à des conditions de ressources, le Pass permis s’adresse, quant à lui, à tous les jeunes sans distinction à condition de consacrer un peu de son temps aux autres.

Concrètement, en échange d’un engagement de 70 heures dans une association agrée par le département ou une collectivité, le jeune, âgé de dix-huit ans ou dix-neuf ans, bénéficie d’une aide de 600 euros pour passer son permis de conduire (type permis B).

Il lui appartient de prendre contact avec la structure choisie pour en arrêter les modalités (lieu, calendrier, mission) avant le dépôt de sa candidature. Le bénéficiaire dispose d’un délai d’un an pour effectuer son action citoyenne qui pourra être fractionnée dans l’organisme d’accueil. L’aide est versée une fois la contribution citoyenne effectuée et après production de l’attestation de fin de mission par le bénéficiaire à une auto-école.

Accompagner les jeunes en facilitant leur mobilité et donc leur insertion professionnelle tout en renforçant l’esprit citoyen et en développant du lien social voilà l’ambition du Pass permis citoyen. En créant un droit il y associe un devoir, tel est le cœur de l’action mise en place dans le département de l’Oise. C’est une expression de l’Oise des droits et des devoirs.

Contrairement aux idées reçues, les jeunes sont volontaires, dynamiques et responsables pour préparer leur avenir. Cette mesure sans condition de ressources et accessible à tous, remet l’effort et le travail au centre de l’action en faveur des jeunes leur permettant de valoriser leur curriculum vitae grâce à une action qu’ils choisissent et dont ils peuvent être fiers. Il s’agit donc d’un système gagnant-gagnant ou chacun y trouve son compte : le jeune qui reçoit une aide non négligeable pour obtenir un outil indispensable à sa rentrée dans la vie active, l’association et les collectivités qui bénéficient d’une aide précieuse dans un contexte de raréfaction de l’argent public.

L’objet de la présente proposition de loi est donc d’étendre à l’ensemble du territoire national ce dispositif innovant, répondant à une véritable demande des jeunes adultes mais également des associations et des communes, partenaires à part entière de cette mesure.

À l’échelle nationale, il est proposé de confier l’exécution et le contrôle de ce dispositif aux départements, échelon de proximité mais aussi garant d’un maillage territorial efficace.

Si l’on sait que 703 500 candidats se sont présentés aux épreuves du baccalauréat à la session de juin 2015, le Pass permis citoyen représente un coût pour l’État estimé à 423 millions d’euros.

Son financement serait assuré par un double gage permettant que ce dispositif ne constitue pas une charge supplémentaire pour les départements, déjà durement touchés par la baisse importante des dotations de l’État et la forte augmentation des dépenses sociales non compensées par lui. Pour y faire face, il est donc proposé d’augmenter les prélèvements sur les recettes de l’État au profit des départements et corrélativement pour l’État d’augmenter les prélèvements sur les jeux et paris en ligne.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Au début du chapitre Ier du titre Ier du livre 2est inséré un article L. 211-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 211-1 A. - I. – Toute personne âgée de dix-huit ou dix-neuf ans à son inscription, résidant en France depuis plus de trois ans, souhaitant passer pour la première fois son permis de conduire de catégorie B, peut demander une subvention de 600 euros en contrepartie d’une contribution de soixante-dix heures au service d’une collectivité ou d’une association reconnue d’utilité publique.

« II. – L’aide est versée une fois la contribution citoyenne effectuée et après production de l’attestation de fin de mission par le bénéficiaire à une auto-école agrée, choisie par lui. Elle ne peut être cumulée avec une autre aide ayant le même objet.

« III. – Le bénéficiaire dispose d’un délai d’un an pour effectuer son action citoyenne qui pourra être fractionnée dans l’organisme d’accueil.

« IV. – L’exécution et le contrôle du présent article sont confiés aux conseils départementaux.

« V. – Les modalités du présent article seront définies par décret en Conseil d’État. »

Article 2

Les charges pour les collectivités territoriales sont compensées à due concurrence par une augmentation des prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales, et corrélativement pour l’État par l’augmentation des taux des prélèvements mentionnés aux articles 302 bis ZH et 302 bis ZI.


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