N° 4230 - Proposition de loi de M. Pierre Morel-A-L'Huissier visant à revaloriser la rémunération des personnels infirmiers de la fonction publique et du secteur privé



N° 4230

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 novembre 2016.

PROPOSITION DE LOI

visant à revaloriser la rémunération des personnels infirmiers
de la
fonction publique et du secteur privé,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, François SCELLIER, Jean-Marie TÉTART, Véronique LOUWAGIE, André SCHNEIDER, Camille de ROCCA SERRA, Philippe VITEL, Jean-Marie SERMIER, Yves FOULON, Dominique LE MÈNER, Lucien DEGAUCHY, Didier QUENTIN, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Virginie DUBY-MULLER, Fernand SIRÉ, Jean-Claude BOUCHET, Josette PONS, Martial SADDIER, Jean-Pierre DOOR, Daniel FASQUELLE, Claude GOASGUEN, Antoine HERTH, Valérie LACROUTE, Marie-Christine DALLOZ, Marine BRENIER, Damien ABAD, Dominique NACHURY, Lionel TARDY, Damien MESLOT, Geneviève LEVY, Jean-Claude GUIBAL, Marc LE FUR et Pierre MORANGE,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La profession infirmière traverse une crise grave, qui a eu des conséquences dramatiques au cours de l’été 2016 : cinq infirmières se sont donné la mort, le 13 juin à Toulouse, le 24 juin au Havre, le 30 juin à Saint-Calais, le 23 juillet à Reims, et le 13 août une nouvelle fois à Reims.

Cette situation catastrophique résulte de plusieurs facteurs : de très lourdes responsabilités qui pèsent sur les épaules des infirmiers, des rythmes de travail trop soutenus du fait d’un manque d’effectifs et des salaires trop bas qui ne sont pas en adéquation avec la forte implication tant physique que psychologique que nécessite l’exercice de la profession infirmière.

Avec un salaire d’environ 1 600 euros brut en début de carrière dans la fonction publique, et de 1 600 euros à 2 100 euros brut dans le privé, la rémunération du personnel infirmier français se situe 10 % en dessous du salaire moyen français selon un rapport de l’OCDE publié en 2013. Ceci, alors même que dans la plupart des pays membres de l’OCDE, les infirmiers sont rémunérés en moyenne 10 % de plus que le salaire moyen du pays.

Début septembre 2016, les infirmières se sont mises en grève pour dénoncer leurs conditions de travail qui se dégradent, les sous-effectifs permanents qui les obligent à enchaîner les gardes, l’accroissement des violences à l’hôpital, avec notamment 14 500 cas d’agressions recensées en 2014, la pression physique et psychologique permanente à laquelle ils sont soumis, et les salaires largement sous-évalués par rapport à la difficulté du métier.

À la fois soignantes, psychologues et travailleuses sociales, les infirmières sont « des héroïnes du quotidien qui se donnent à fond pour 1 600 euros par mois » a très justement résumé la chroniqueuse Anne Roumanoff.

Si le gouvernement a attendu que des drames surviennent pour agir et annoncer quelques mesures visant à arrêter les diminutions d’effectifs et à mettre en place une prévention des risques psychosociaux, cela est loin d’être suffisant. Tous ces efforts seront vains tant que les personnels infirmiers ne bénéficieront pas de la reconnaissance et du pouvoir d’achat qu’ils méritent à travers une revalorisation salariale forte.

Une revalorisation de 0,6 % point d’indice dans la fonction publique est certes prévue pour février 2017, mais cela est dérisoire et ne concerne pas spécifiquement les personnels infirmiers. Par ailleurs, rien n’est prévu pour les infirmiers du secteur privé.

Parce qu’il est urgent de traduire notre reconnaissance pour le personnel infirmier par une rémunération à la hauteur de leurs responsabilités, de leur engagement et de leur implication, nous proposons d’instituer une « indemnité forfaitaire d’expertise et d’engagement professionnel » dont bénéficieront tous les infirmiers de la fonction publique et du secteur privé, quels que soient leur ancienneté, leur grade, leur niveau de rémunération.

Afin de favoriser encore davantage les personnels infirmiers aux plus petits salaires, cette indemnité ne sera pas proportionnelle mais forfaitaire, c’est-à-dire de montant égal pour tous, indépendamment de leur rémunération préalable. Son montant, dont la fixation relève du domaine réglementaire, est envisagé à 150 euros net mensuels.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er 

Après l’article 64 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, il est inséré un article 64 ter ainsi rédigé :

« Art. 64 ter. – Les fonctionnaires personnels infirmiers bénéficient d’une indemnité forfaitaire d’expertise et d’engagement professionnel dont les modalités sont déterminées par décret. »

Article 2

Après l’article 78-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, il est inséré un article 78-2 ainsi rédigé :

« Art. 78-2. – Les fonctionnaires personnels infirmiers bénéficient d’une indemnité forfaitaire d’expertise et d’engagement professionnel dont les modalités sont déterminées par décret. »

Article 3

Les personnels infirmiers du secteur privé bénéficient d’une indemnité forfaitaire d’expertise et d’engagement professionnel à la charge de leur employeur dans des conditions déterminées par décret.

Article 4

La perte de recette pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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