N° 435 - Rapport d'information de MM. François Cornut-Gentille et Christian Eckert déposé en application de l'article 146-3 du règlement, par le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques sur la mise en oeuvre des conclusions du rapport d'information (n° 4019) du 1er décembre 2011 sur l'évaluation de la révision générale des politiques publiques (RGPP)



N° 435

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 novembre 2012.

RAPPORT D'INFORMATION

déposé

en application de l'article 146-3, alinéa 8, du Règlement

par le comité d’évaluation et de contrôle
des politiques publiques

sur la mise en œuvre des conclusions du rapport d’information (n° 4019)
du 1er décembre 2011 sur l’
évaluation de la révision générale
des
politiques publiques (RGPP)

et présenté

par MM. François CORNUT-GENTILLE et Christian ECKERT,

Députés.

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INTRODUCTION 7

SYNTHÈSE : PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS ET RECOMMANDATIONS DES RAPPORTEURS 9

PREMIÈRE PARTIE : LE GOUVERNEMENT A MIS FIN À LA RGPP, SANS REMETTRE EN CAUSE LES MESURES QUI EN SONT ISSUES 13

I.– L’ABANDON DE LA MÉTHODE DE LA RGPP 13

A.– LA MISSION D’INSPECTION CONFORTE LA PLUPART DES CONSTATATIONS ÉTABLIES PAR LES RAPPORTEURS 13

1.– Les constats communs 13

2.– La RGPP a-t-elle accru la responsabilisation des états-majors déconcentrés ? 14

3.– Le rapport d’inspection illustre le déficit de la RGPP en matière de gestion des ressources humaines 15

4.– Le manque de fiabilité des constats et programmations d’économies liées à la RGPP 16

a) Les constats et objectifs d’économies ont été largement influencés par la programmation pluriannuelle des dépenses de l’État 17

b) Des mesures au statut incertain contribuent substantiellement à justifier les économies prévues et constatées 18

c) Au total, de nombreux éléments confirment le manque de crédibilité des constats et programmations d’économies 19

B.– LES DÉCISIONS DU GOUVERNEMENT 20

1.– La clôture de la RGPP 20

2.– La fin de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » 21

a) L’exercice 2012 marqué par la « règle du un sur deux » malgré la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 21

b) La quasi-stabilisation des effectifs des agents de l’État prévue en 2013 22

c) Des effets encore ténus sur l’évolution de la masse salariale 23

II.– VERS UNE STABILISATION DES ORGANISATIONS ADMINISTRATIVES ISSUES DE LA RGPP 25

A.– LES CONSTATATIONS ÉTABLIES PAR LES RAPPORTEURS SONT CONFIRMÉES PAR PLUSIEURS TRAVAUX RÉCENTS 25

1.– Les constats et observations de la mission d’inspection 25

2.– Les observations de l’OCDE sur la RGPP 25

B.– DES ÉVALUATIONS RÉCENTES APPORTENT DES ÉCLAIRAGES CONTRASTÉS SUR CERTAINES MESURES EMBLÉMATIQUES DE LA RGPP, SANS PRÉCONISER DE LES MODIFIER SUBSTANTIELLEMENT 26

1.– La création des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) 27

2.– La fusion des réseaux de la comptabilité publique et des impôts au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP) 28

3.– La réforme de la carte judiciaire 29

4.– La mise en place des bases de défense 31

C.– LES PRINCIPALES MESURES MISES EN œUVRE AU TITRE DE LA RGPP SONT MAINTENUES MOYENNANT DES ADAPTATIONS PONCTUELLES 32

DEUXIÈME PARTIE : LA « MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE » S’APPUIERA SUR CERTAINS ACQUIS DE LA RGPP TOUT EN MARQUANT UNE RÉELLE RUPTURE AVEC ELLE 35

I.– CERTAINS ACQUIS DE LA RGPP CONTRIBUERONT À LA MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE 35

A.– LE MAINTIEN D’UNE IMPLICATION DIRECTE DU PREMIER MINISTRE 35

B.– LE RENFORCEMENT DE L’INTERMINISTÉRIALITÉ 37

1.– La création d’un secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) va conforter la dimension interministérielle des administrations centrales en charge de la réforme de l’État 37

2.– Le renouvellement et le développement des missions des administrations centrales 38

a) Vers une identification plus précise des missions transverses de la DIMAP (ex-DGME) 38

b) La poursuite de la gestion par la DIMAP des marchés passés par l’État avec certains cabinets d’audit 39

c) L’installation de la DISIC dans le paysage de la réforme de l’État 42

II.– LE GOUVERNEMENT PROPOSE UNE NOUVELLE MÉTHODE DE « MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE » (MAP) 44

A.– UN CADRE PLUS LARGE : UNE REVUE DES POLITIQUES PUBLIQUES LIÉE NOTAMMENT À LA NOUVELLE ÉTAPE DE LA DÉCENTRALISATION 44

1.– Vers une revue des politiques publiques par vagues successives 44

a) Le schéma retenu par le Gouvernement : enclencher un processus durable d’examen des politiques publiques, de réformes et de suivi de leur mise en œuvre 44

b) L’anticipation par le Gouvernement de la réflexion portant sur la cartographie des missions de l’État 44

2.– Les conditions à réunir pour procéder à une réelle revue des politiques publiques 45

a) Mettre en œuvre des principes et une méthode efficaces 45

b) Associer le Parlement à la démarche de modernisation de l’action publique 48

3.– L’extension de la modernisation de l’action publique à l’ensemble des acteurs publics 50

a) Une recommandation fondamentale de la mission d’inspection 50

b) La question de l’implication des collectivités territoriales 51

c) La programmation d’un chantier consacré aux opérateurs de l’État 52

d) La question de l’implication des organismes de sécurité sociale et du secteur hospitalier 52

B.– DES ACTEURS CONFORTÉS : UNE MÉTHODE S’APPUYANT SUR LES AGENTS ET LES USAGERS 53

1.– Des agents publics au cœur et à l’origine des réformes ? 53

a) Les propositions des rapports d’inspection pour modifier la gestion des ressources humaines dans le cadre de la modernisation de l’action publique 53

b) L’action et les projets du Gouvernement 55

c) La prise en compte des propositions de réforme des agents 56

2.– Des modalités diversifiées d’association des usagers 57

a) Poursuivre une démarche de simplification administrative s’appuyant sur l’analyse des besoins des usagers 57

b) Améliorer le baromètre des services publics 58

c) De nouveaux moyens d’association des usagers ? 59

3.– Vers la création d’une instance de dialogue, de réflexion prospective et d’expertise sur les politiques publiques 59

C.– UNE ARTICULATION RENOUVELÉE AVEC LES OBJECTIFS DE LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE 60

1.– L’organisation gouvernementale a modifié le lien institutionnel entre la réforme de l’État et la politique budgétaire 60

2.– Le maintien du lien entre réforme de l’État et trajectoire des finances publiques est incontournable 61

a) La position de la mission d’inspection : un processus institutionnel itératif liant la réforme de l’État et ses impacts budgétaires 61

b) La trajectoire de redressement de nos finances publiques doit résolument s’appuyer sur la modernisation de l’action publique 61

EXAMEN PAR LE COMITÉ 63

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 79

INTRODUCTION

Le 1er décembre 2011, le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) autorisait la publication du rapport initial des rapporteurs intitulé « Une évaluation de la RGPP : méthodes, contenu, impacts financiers » (n° 4019, XIIIe législature).

Un peu moins d’un an après cette date, sous une autre législature et alors que les Français ont choisi une nouvelle majorité, les rapporteurs proposent par le présent rapport de suivi d’étudier dans quelle mesure leurs constats et recommandations relatifs à la révision générale des politiques publiques – RGPP –ont été pris en compte par le Gouvernement.

*

* *

Pour procéder au présent travail de suivi, les rapporteurs ont pu constater les intentions et actions du Gouvernement à l’occasion de plusieurs étapes :

– le Premier ministre a annoncé la clôture de la RGPP dès la fin du mois de juin 2012 ;

– le 6 juillet 2012, le Premier ministre a demandé aux trois inspections générales de l’administration, des finances et des affaires sociales de dresser un bilan de la RGPP et de faire des propositions pour le lancement d’un processus nouveau de modernisation de l’action publique. Ce rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS lui a été remis le 25 septembre 2012(1) ;

– la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 et le projet de loi de finances pour 2013 ont acté la fin de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire de l’État sur deux partant à la retraite (« règle du un sur deux ») ;

– le Gouvernement a tenu un séminaire le 1er octobre 2012 relatif à la modernisation de l’action publique (« MAP »), à la suite duquel a été établie une feuille de route identifiant le contenu et le calendrier de lancement de la MAP ;

– le conseil de ministres du 31 octobre 2012 a donné lieu à une intervention Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, relative au lancement de la MAP et à l’adoption de deux décrets en dessinant les contours institutionnels.

Les rapporteurs ont par ailleurs souhaité compléter leur information :

– en interrogeant par écrit – le 26 juillet 2012 – deux ministres, Mme Marylise Lebranchu et M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre chargé de l’économie et des finances, chargé du budget ;

– en procédant à l’audition de responsables administratifs : M. Jérôme Filippini, secrétaire général pour la modernisation de l’action publique depuis le 2 novembre 2012, M. Julien Dubertret, directeur du budget, M. Jean Marimbert, secrétaire général des ministères de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur, et M. Didier Lallement, secrétaire général du ministère de l’Intérieur ;

– en procédant à l’audition de membres de la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS évoquée supra.

Au surplus, depuis la publication du rapport initial, des travaux, bilans, analyses et évaluations ont porté sur certaines des mesures les plus structurantes et emblématiques de la RGPP : unification des réseaux des impôts et de la comptabilité publique au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP), réforme de la carte judiciaire, création des bases de défense, mise en place des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) via la réforme de l’administration territoriale (Réate). Le présent rapport de suivi fait référence à certaines de leurs observations et conclusions, quand elles complètent ou éclairent celles que les rapporteurs avaient pu émettre initialement.

*

* *

Le présent rapport de suivi propose, en s’appuyant sur l’ensemble de ces éléments d’informations et d’analyse, d’articuler la réflexion des rapporteurs autour des points suivants :

– le Gouvernement a mis fin à la RGPP, sans remettre en cause les mesures qui en sont issues (I) ;

– le Gouvernement a commencé à mettre en œuvre un nouveau processus de réformes – appelé « modernisation de l’action publique » ou « MAP » – qui, en s’appuyant sur certains acquis de la RGPP, marquerait une rupture réelle avec elle (II).

SYNTHÈSE :
PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS ET RECOMMANDATIONS
DES RAPPORTEURS

1. Un constat partagé sur le bilan de la RGPP

Les constats établis en 2011 par les rapporteurs sur la méthode, les mesures et les impacts financiers de la RGPP sont désormais largement admis. Ainsi, le rapport des inspections générales, rendu public le 25 septembre 2012, consacré au bilan de la RGPP et aux conditions de réussite d’une nouvelle politique de réforme de l’État reprend largement les analyses et conclusions du rapport du CEC. La méthode de travail du CEC consistant, sur chaque thème, à demander à deux rapporteurs – l’un de la majorité, l’autre de l’opposition – de dresser des constats et recommandations partagés, en disposant du temps nécessaire pour ce faire, s’en trouve validée et confortée.

Le Gouvernement a choisi dès le mois de juin 2012 de mettre fin à la RGPP et à la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Suivant les préconisations du rapport d’inspection du 25 septembre 2012, il a décidé de maintenir la plupart des organisations administratives issues de la RGPP, qui seront, le cas échéant, ponctuellement améliorées. La « modernisation de l’action publique » – dite « MAP » – s’appuiera sur l’impulsion politique et les arbitrages du Premier ministre, via un comité interministériel et un secrétariat général placé sous son autorité. Seront ainsi préservés l’implication directe du Premier ministre et le recours à une procédure interministérielle de mise en œuvre et de suivi des réformes de l’action publique.

2. Un défi à relever : dépasser la seule pression financière

La MAP a pour ambition de faire précéder ces réformes d’un examen évaluatif systématique des politiques publiques, ouvert aux partenaires publics de l’État, aux agents publics, aux usagers (particuliers et entreprises) et au Parlement. Cette nouvelle méthode propose ainsi, de façon opportune, d’ouvrir la réforme de l’action publique et de la mettre « à l’endroit », en faisant publiquement se succéder les constats, les scénarios, les décisions et le suivi des mesures.

La réussite de ce processus suppose à la fois qu’y soit consacré le temps suffisant et que s’exerce l’autorité nécessaire à la décision. Il s’agit de la condition sine qua non pour documenter intelligemment la trajectoire des finances publiques définie par le budget triennal 2013-2015. Cela passe par la capacité des acteurs publics – les ministères, les opérateurs de l’État, les collectivités territoriales et les organismes sociaux – à se soumettre à un exercice extrêmement difficile, auquel ils ont échappé durant la RGPP, en raison précisément de son caractère abrupt, hiérarchique et confiné. L’enjeu est que la MAP conduise à une réelle amélioration consentie de l’efficience et de l’efficacité de l’action publique, en se distinguant d’un exercice avant tout budgétaire, dominé par les schémas d’emplois, le budget triennal et, in fine, des baisses de dépenses appliquées « au forfait ».

Alors que sont déjà fixés les grandes lignes du budget pour 2013 et le budget triennal 2013-2015, les acteurs de la MAP doivent donc s’engager sans délai dans le passage en revue des politiques publiques. Dans cet esprit, il importe que le calendrier d’examen du futur projet de loi de décentralisation et celui de mise en œuvre de la MAP soient compatibles, afin d’éviter de transférer aux collectivités territoriales des politiques publiques qui n’auraient pas été préalablement passées en revue et évaluées.

Au total, il serait naïf d’imaginer que la suppression du non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux fasse disparaître la pression budgétaire. Imposer une autre logique demandera en effet un effort exceptionnel d’expertise de la dépense publique et de mise en cohésion du calendrier de réforme (effort qui avait d’ailleurs été voulu à l’origine par les initiateurs de la RGPP puis rapidement abandonné).

3. Le Parlement doit devenir un acteur majeur de la réforme de l’État

Bâtir une nouvelle logique de réforme suppose une nouvelle approche au sein du Gouvernement et des ministères. Mais cela n’est pas suffisant. Il faut également une (ou plusieurs) pression s’exerçant depuis l’extérieur sur la machine gouvernementale et administrative. Les rapporteurs ont en effet la conviction que, pour réaliser l’objectif – ambitieux tant sur la méthode à mettre en œuvre que sur les résultats à atteindre – assigné à la MAP, le Parlement doit devenir un des moteurs de la réforme. Les personnes qu’ils ont auditionnées en conviennent au demeurant volontiers.

Cependant, s’il y a consensus sur le sujet, aucune méthodologie n’est proposée. C’est à cette fin que les rapporteurs ont pris l’initiative, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, de prévoir que le Parlement sera destinataire d’une information complète et régulière de la part du Gouvernement sur l’avancement de la MAP. Il s’agit d’inciter les commissions à s’impliquer résolument dans ce chantier.

Ainsi, les rapporteurs proposent que l’Assemblée nationale puisse s’emparer de cette réflexion en travaillant dans deux directions.

D’abord, dans l’esprit de l’amendement évoqué précédemment, engager le Parlement dans une démarche de suivi « en direct » de la réforme de l’État.

Ensuite, comme le prévoyaient d’ailleurs les auteurs de la LOLF, il faut faire progresser d’une manière plus générale en quantité et en qualité le travail parlementaire sur l’efficacité de la dépense publique. Dans cet esprit, on doit concevoir et mettre en place de nouvelles procédures permettant de faire monter en puissance et d’améliorer les débats autour de la loi de règlement. En effet, cette loi de règlement apparaît aux rapporteurs bien plus adaptée que le débat budgétaire pour ces travaux d’évaluation.

4. La nécessaire prise en compte des citoyens

Gouvernement et administration reconnaissent un rôle important aux usagers à travers différents outils (sondages, baromètres, panels d’usagers, groupes qualitatifs…). La MAP se propose à juste titre d’aller plus loin dans ce domaine. Les rapporteurs observent néanmoins que jusqu’à présent la parole des usagers demeure extrêmement encadrée par l’administration, notamment à travers la maîtrise des questionnaires permettant de juger son action. Il y a de ce fait un biais potentiel qui mérite d’être corrigé. Un pas décisif dans le sens de l’indépendance et de l’objectivité pourrait être accompli en confiant au Défenseur des droits une partie des instruments de suivi d’images et d’évaluation des services publics. Par sa position, le Défenseur des droits est en effet particulièrement bien placé pour se faire l’écho des préoccupations des usagers dont il centralise les réclamations.

PREMIÈRE PARTIE :
LE GOUVERNEMENT A MIS FIN À LA RGPP,
SANS REMETTRE EN CAUSE LES MESURES
QUI EN SONT ISSUES

I.– L’ABANDON DE LA MÉTHODE DE LA RGPP

A.– LA MISSION D’INSPECTION CONFORTE LA PLUPART DES CONSTATATIONS ÉTABLIES PAR LES RAPPORTEURS

1.– Les constats communs

Le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 établit un bilan de la méthode de la RGPP. Le tableau suivant met en parallèle les principaux constats émis par les rapporteurs et certains développements issus de ce rapport d’inspection.

Principaux constats des rapporteurs

Avis du rapport d’inspection

Le lancement de la RGPP a été marqué par une commande hiérarchique ignorant agents publics et usagers du service public.

Le rythme [de la RGPP] n’était compatible ni avec une association des acteurs et des usagers, ni avec une préparation suffisante des réformes envisagées. (Synthèse)

Le Parlement n’a été informé qu’au travers d’une vision comptable, essentiellement lors des sessions budgétaires. 

Le Parlement a été absent au moment de la prise de décision et son information limitée dans la phase de mise en œuvre. (rapport, p. 69)

Le fort portage politique de la RGPP a largement contribué à la rapidité de sa mise en œuvre, ainsi qu’à son caractère général, durable et opérationnel.

La méthode se caractérise principalement par un portage politique fort, un processus de décision rapide […]. (Synthèse)

[Le] portage politique de la RGPP a cependant souffert de n’être relayé que par des rapports publics « anonymes », incapables d’engendrer un réel débat public, a fortiori au-delà du périmètre de l’administration.

Passage cité par le rapport d’inspection, p. 69.

Le rôle d’accompagnateur des réformes tenu par la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) a globalement été apprécié par les ministères.

La DGME a développé un rôle d’appui et de conseil aux administrations pour leurs actions de modernisation et de simplification. Si certains ministères n’ont pas donné suite à ses propositions, les trouvant inadaptées sur le fond ou la méthode, la plupart des utilisateurs qui en ont bénéficié en reconnaissent la pertinence et la qualité. (rapport, p. 36)

En outre, la DGME a mis en place et fait vivre des méthodes de consultations des usagers, certes perfectibles, sur l’image et l’évaluation du service public.

Enfin, à partir de la fin de l’année 2009, la DGME a conduit des actions intéressantes de simplification, avec des approches innovantes de la relation entre l’État et les usagers (« événements de vie », baromètre de satisfaction…). Si l’impact de ces modernisations est considéré comme positif par les entreprises, il est plus complexe à mesurer sur les autres usagers. (Synthèse)

La communication officielle sur la RGPP (notamment les rapports publics accompagnant les CMPP et d’étape) est caractérisée par une forme d’“hagiographie” peu crédible, un simplisme de la présentation et une ergonomie de lecture déficiente.

La communication s’est révélée à la fois lénifiante et trop technique. (Synthèse)

La RGPP a accru le recours à des cabinets privés d’audit pour accompagner la réforme de l’État, systématisant l’approche par des audits de modernisation, alternative aux initiatives antérieurement fondées sur des rapports administratifs.

Le recours massif à des consultants, parfois peu au fait des réalités du secteur public, a été mal compris. (Synthèse)

Le lancement de la RGPP n’a pas incarné et n’a pas porté un projet mobilisateur pour les agents publics en matière de définition du service public.

À tort ou à raison, elle correspond aujourd’hui et de manière durable, pour un grand nombre d’agents publics et toutes les organisations syndicales, à un « repoussoir » ou à ce qu’il ne faut pas faire, malgré un consensus désormais acquis sur la nécessité de réformer l’État.

La gestion des ressources humaines n’a pas été à la hauteur de l’enjeu.

la RGPP a été mal vécue par de nombreux agents de l’État. (Synthèse)

À l’exception notable du secteur de la défense, [la RGPP] n’a en outre que très rarement été l’objet de mesures d’accompagnement des personnels, que ce soit en termes de mobilité, de formation ou de conditions financières.

Les moyens mobilisés pour accompagner les restructurations ont été limités, à l’exception de quelques grosses opérations.

[L’une des orientations proposées par la mission est de] faire de l’amélioration de la gestion des ressources humaines un chantier prioritaire, afin de se donner les moyens d’accompagner les futures réformes.

NB : les constats des rapporteurs figurent pages 19 et 20 de leur rapport initial.

On constate l’identité d’une grande partie des constats établis sur la méthode de la RGPP par les rapporteurs et la mission d’inspection.

Au total, la mission d’inspection confirme l’un des constats généraux établis par les rapporteurs : « la mise en œuvre de la RGPP a négligé la réflexion sur la conduite du changement, sur les missions à exercer et les conditions de leur exercice. » (2)

2.– La RGPP a-t-elle accru la responsabilisation des états-majors déconcentrés ?

Les rapporteurs ont considéré dans leur rapport initial que la RGPP, « initialement strictement confinée et descendante, […] a pu néanmoins conduire, dans certains secteurs, à une responsabilisation accrue et opportune d’états-majors administratifs déconcentrés dans les choix de gestion » (3). Ils s’appuyaient notamment sur les témoignages recueillis par écrit auprès des recteurs d’académie (4).

Le Gouvernement, via les réponses transmises par Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, considère qu’il convient de nuancer ce constat « dans la mesure où les réorganisations de services ne se sont pas accompagnées de modifications dans l’architecture des programmes budgétaires, restée verticale et relativement centralisée. La capacité de marge de manœuvre des chefs de service déconcentrés et leur possibilité de faire de véritables choix de gestion n’ont guère, de ce point de vue, été accrues ».

Le rapport d’inspection du 25 septembre 2012 ne confirme pas le constat établi par les rapporteurs, sans explicitement le démentir. Les rapporteurs notent que la mission d’inspection s’est appuyée sur des retours du « terrain » visiblement très largement issus des services administratifs déconcentrés de l’État sous autorité préfectorale (5).

3.– Le rapport d’inspection illustre le déficit de la RGPP en matière de gestion des ressources humaines

Le rapport d’inspection du 25 septembre 2012 illustre les raisons pour lesquelles la RGPP a constitué, selon le terme des rapporteurs, un « repoussoir » pour une grande partie des agents publics. Comme l’indique le tableau précédent, la mission d’inspection considère que la gestion des ressources humaines dans le cadre de la RGPP « n’a pas été à la hauteur des enjeux » ; elle précise qu’« au stade de la conception de la réforme […] les mesures RGPP ont été élaborées sans analyse suffisante de leur incidence RH et sans estimation du coût des mesures d’accompagnement » (6).

La mission d’inspection évoque les dispositions financières d’incitation à la mobilité. Elle constate qu’en théorie ces dispositions auraient pu accompagner de façon pertinente les réorganisations administratives ; celles-ci n’ont cependant « pas bénéficié des moyens financiers nécessaires » (7). Elle souligne que la prime de restructuration des services – d’un montant pouvant aller jusqu’à 15 000 euros par agent – n’a pas été utilisée en faveur des agents concernés par la Réate alors qu’elle a été amplement utilisée dans le cadre de la création de la DGFiP, et considère que ces « inégalités de traitement […] découlent du manque de pilotage interministériel de la mise en œuvre du dispositif d’aide à la mobilité, la qualification de l’opération ouvrant droit aux dispositifs indemnitaires comme le montant des indemnités versées restant de la seule responsabilité des ministères » (8).

Ces inégalités de répartition de moyens financiers d’accompagnement – en tout état de cause globalement insuffisants – ont contribué, pour la mission d’inspection, à l’aggravation des « problèmes d’allocation des effectifs qui existaient dans les services déconcentrés bien avant la RGPP ». En effet, les mesures d’accompagnement associées à la RGPP n’ont pas permis de surmonter ou contourner certains éléments récurrents de la gestion des ressources humaines à l’origine de ces problèmes d’allocation. Pour la mission d’inspection, ces éléments sont (9) :

« – le compromis tacite dans la fonction publique consistant à ne pas imposer de mobilité géographique aux agents ;

« – les difficultés » qui entravent « la mobilité fonctionnelle […] : système des corps et des classifications, mécanisme des plafonds d’emplois par ministère, antagonismes entre les modalités d’application de la LOLF et l’interministérialité, écarts indemnitaires entre ministères, insuffisant investissement de l’État dans la construction des carrières et des filières professionnelles, tendance des services à freiner les départs en période de réduction d’effectif ».

La mission en conclut que « la réallocation des effectifs au bénéfice des régions les moins attractives a été médiocre » (10). Elle montre que cette difficulté a été logiquement plus aiguë là où les suppressions d’effectifs ont été les plus fortes, c’est-à-dire à l’échelon départemental. Ce dernier point constitue au demeurant un élément d’information que les rapporteurs avaient pressenti sans pouvoir l’illustrer précisément ; la mission d’inspection l’a clairement et statistiquement établi (11).

La mission IGA/IGF/IGAS complète son analyse en décrivant l’insuffisance du « tournant » de l’interministérialité de la gestion des ressources humaines. Alors que l’interministérialité a « rendu plus visibles les inégalités au sein de la fonction publique » (12) suite aux efforts accomplis en matière de fusion de corps et de services, elle note – par exemple – que « les plates-formes régionales d’appui à la gestion des ressources humaines (PFRH), créées en 2010 pour développer la mobilité interministérielle en région, se sont heurtées à la réduction des postes et à la réticence des ministères à entrer dans une gestion interministérielle des RH » (13). Elle souligne les initiatives prises et les efforts accomplis pour accroître l’interministérialité de la gestion des ressources humaines, mais considère qu’ils « demeurent en-deçà des évolutions nécessaires pour apporter à la fonction publique de l’État plus d’unité, de fluidité et de compétences stratégiques à moyen terme » (14).

Au total, la mission IGA/IGF/IGAS estime que « le rejet » des agents publics envers la RGPP « risque d’avoir des effets durables » (15).

4.– Le manque de fiabilité des constats et programmations d’économies liées à la RGPP

Dans leur rapport initial, les rapporteurs n’avaient pas repris à leur compte les constats et programmations d’économies – ventilées en dépenses de personnel, de fonctionnement et d’intervention – engendrées par la RGPP, telles que présentés par le Gouvernement. Les rapporteurs constataient que « le bilan budgétaire de la RGPP (personnel, intervention et fonctionnement) demeure dans l’ensemble une énigme, tant les informations, difficiles à obtenir sur ce sujet, semblent discutables et parcellaires. La sincérité du bilan budgétaire de la RGPP est parasitée par une volonté de justifier les chiffres globaux initialement affichés et d’éluder les coûts associés aux réformes » (16).

Dans sa synthèse, la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS se borne à mentionner l’évaluation actualisée réalisée par la direction du budget à la mi-2012. Elle précise ainsi que « sur le plan budgétaire, le sixième rapport du CMPP a affiché un objectif d’économies de 15 milliards d’euros sur la période 2009-2013, dont 12,3 milliards d’euros à échéance de fin 2012. Selon la direction du budget, le montant des économies réalisées à cette échéance devrait finalement être de 11,9 milliards d’euros » (17).

La mission d’inspection détaille en revanche de nombreux éléments – recoupant largement ceux évoqués par les rapporteurs dans leur rapport initial – qui la conduisent à considérer avec prudence à la fois les constats ex post d’économies pour les exercices budgétaires échus et les actualisations les plus récentes présentées par le Gouvernement concernant les économies programmées jusqu’à la fin 2012.

Les rapporteurs considèrent que leurs doutes concernant les montants d’économies associées par le Gouvernement à la RGPP sont en grande partie confirmés par le rapport IGA/IGF/IGAS.

a) Les constats et objectifs d’économies ont été largement influencés par la programmation pluriannuelle des dépenses de l’État

La mission IGA/IGF/IGAS confirme le « scénario » envisagé par les rapporteurs (18) d’un rapprochement progressif – et opportun – des objectifs d’économies a) inscrits dans les budgets triennaux et b) associés à la RGPP. Selon la mission, l’objectif – encore évoqué en décembre 2011 dans le rapport associé au sixième CMPP (cf. supra) – d’un montant d’économies de 15 milliards d’euros pour la RGPP sur 2009-2013 « figure dans un cadrage initial de 2008. Il s’agit d’une cible à caractère budgétaire, qui aurait été la même sans la RGPP » (19).

La mission d’inspection observe que les économies associées ex ante à la RGPP ont dans un premier temps permis de « documenter » les objectifs pluriannuels d’économies programmés pour l’ensemble du budget de l’État ; puis les deux catégories d’objectifs ont fini par coïncider dans leur montant. La mission souligne que « pour les responsables budgétaires, la RGPP […] a offert un mode de pilotage inespéré pour tenter d’obtenir des résultats conformes à la programmation. Le lien s’est encore renforcé lorsque les CMPP ont affiché, concernant la RGPP, des objectifs d’économies proches du montant total des économies à réaliser dans la sphère de l’État » (20).

b) Des mesures au statut incertain contribuent substantiellement à justifier les économies prévues et constatées

La mission IGA/IGF/IGAS confirme que, pour justifier les montants d’économies associées à la RGPP, il a été nécessaire de compléter les mesures qui la composaient officiellement par un ensemble d’autres mesures au statut incertain. La mission relève que « des mesures issues des audits RGPP, suivies par la direction du budget dans le cadre du triennal mais non présentées en CMPP ont été intégrées dans le bilan des économies réalisées grâce à la RGPP » (21). Elle les désigne comme des mesures « non numérotées », compte tenu de la numérotation propre aux mesures officielles de la RGPP dûment décidées en CMPP.

La mission d’inspection confirme les observations des rapporteurs concernant ces mesures non numérotées :

– leur importance budgétaire au sein des économies programmées au titre de la RGPP pour l’ensemble de la période 2009-2013 : « les mesures non numérotées sont porteuses de fortes économies potentielles […] les gains attendus hors titre 2 [au titre des mesures non numérotées] représentent 32 % du total (20 % des gains en fonctionnement et 39 % des gains sur les dépenses d’intervention) » (22) ;

– la concentration des économies qui en sont issues sur la fin de la période 2009-2013, ce qui ne permet pas – à ce stade – des vérifications ex post : « toutes ces mesures [non numérotées] sont récentes (2011), avec plus du tiers des gains associés attendus en 2012-2013 » (23) ;

– l’information à tout le moins lacunaire quant à leurs contenu et portée (ceux-ci faisant d’ailleurs l’objet de désaccords entre la direction du budget et les ministères concernés) : « [les mesures non numérotées se caractérisent par la] rareté des documents, [des] divergences entre la direction du budget et les ministères sur certains chiffrages. […] S’agissant des mesures [non numérotées] relatives aux dépenses d’intervention, leur libellé est souvent large, leur contenu moins documenté que celui des mesures RGPP classiques et leur probabilité de réalisation, incertaine. [La mission] met en lumière le caractère aléatoire de ces mesures, non soumises au processus de validation en CMPP et qui peuvent revêtir une forte sensibilité politique » (24).

La dominante budgétaire de ces mesures, afin – au moins optiquement – de répondre aux objectifs globaux d’économies assignées à la RGPP, est confirmée par la mission. Celle-ci précise ainsi que les mesures non numérotées, « inégalement connues de la DGME, ont été discutées en bilatéral avec les ministères dans le cadre de la procédure budgétaire ou suivies par la seule direction du budget en raison de leur nature transverse » (25).

Au demeurant, l’hypothèse d’une mobilisation « après-coup » de ces mesures non numérotées afin de crédibiliser autant que faire se pouvait les objectifs d’économies associées ab initio à la RGPP est confortée par le différentiel constaté ex post entre économies programmées et économies réalisées. La mission précise que « la comparaison entre les prévisions de gains en 2011 sur les mesures décidées en 2008 (RGPP 1) et leur actualisation à fin 2011-début 2012 fait apparaître un taux de perte de 68 % hors titre 2 et de 38 % en emplois. En d’autres termes, si un audit RGPP 1 a chiffré en 2008 une économie possible de 100 millions d’euros ou de 100 ETP à horizon 2011, la prévision de gain actualisée début 2012 est de 32 millions d’euros ou de 62 ETP » (26).

c) Au total, de nombreux éléments confirment le manque de crédibilité des constats et programmations d’économies

On observe ainsi :

– une tendance à faire opportunément coïncider les objectifs pluriannuels d’économies concernant le budget de l’État (inscrits dans les budgets triennaux) et les économies attendues au titre de la RGPP ;

– la prise en compte – pour le calcul des économies engendrées par la RGPP – de « mesures » qui n’ont pas suivi le processus classique et dont le contenu réel est incertain. Les économies substantielles qui leur sont associées sont concentrées sur la fin de la période de la RGPP et leur montant semble peu fiable. La mission IGA/IGF/IGAS note ainsi, s’agissant de la récente minoration –11,9 milliards d’euros contre 12,3 milliards d’euros – des gains attendus de l’ensemble de la RGPP à fin 2012, que « l’essentiel de la révision à la baisse (94 %) concerne des mesures non numérotées portant sur des crédits d’intervention » (27).

La mission IGA/IGF/IGAS relève d’autres éléments confirmant le manque de crédibilité des objectifs d’économies associées à la RGPP :

– l’absence de consensus sur les montants d’économies détaillés par mesure entre la direction du budget et les ministères a également concerné les plus anciennes d’entre elles, officiellement « labellisées » RGPP : « l’absence de vision partagée entre la direction du budget et certains ministères [s’opposent] à tout décompte précis et incontesté » (28) ;

– une économie a pu être effectivement réalisée par un ministère, sans lien effectif avec la mise en œuvre de la mesure RGPP qui aurait dû l’engendrer, et ce en mobilisant des marges de manœuvre « à disposition » de ce ministère : « s’agissant de la période 2009-2011, de nombreux ministères indiquent qu’une part substantielle des gains réalisés a dû l’être par des économies de substitution, les montants attendus mesure par mesure pouvant être irréalistes dans leur quantum ou leur calendrier ; dans ce cas, la “documentation” d’une économie par une mesure RGPP est purement optique » (29) ;

– la concentration d’une partie des gains attendus de la RGPP sur 2012 et 2013 rend aléatoire le résultat global ex post : « ces gains à venir [2012-2013] représentent plus du tiers du total annoncé en CMPP 6 (5,5 milliards d’euros). Le bilan final est donc incertain. […] il convient de garder en mémoire le fait que les économies attendues relatives à l’année 2012 restent à confirmer en fin d’exercice. Elles représentent environ un cinquième du total » (30).

B.– LES DÉCISIONS DU GOUVERNEMENT

1.– La clôture de la RGPP

Lors de son discours du 10 juillet 2012 prononcé en clôture de la grande conférence sociale, M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, a déclaré avoir « décidé de mettre un terme à la méthode dite de la RGPP (la Révision générale des politiques publiques) ». Sans évoquer les mesures achevées ou en cours de la RGPP, le Premier ministre a considéré que sa « méthode a profondément déstabilisé nos services publics et leurs agents ».

La feuille de route sociale établie par le Gouvernement à l’issue de la grande conférence sociale – sur la base des échanges auxquels elle a donné lieu entre partenaires sociaux notamment (31) – précise qu’« il est nécessaire de conduire une concertation large sur le rôle des services publics et les missions de la puissance publique. […] Après plusieurs années de réforme menée de manière souvent technocratique et non concertée, il est temps de réaffirmer la place et les principes de l’action publique et de nos services publics dont le rôle est plus que jamais indispensable pour le redressement de notre pays, la cohésion sociale et l’égalité des territoires. Dans les mois à venir, une concertation doit être menée avec les agents et leurs représentants, permettant de concilier le maintien de services publics efficaces et réactifs avec les exigences de redressement des finances publiques ».

La feuille de route sociale présente les chantiers prioritaires répondant aux constats qu’elle énumère. Parmi ces chantiers, elle précise que « dès l’automne, le Gouvernement proposera un espace de concertation dont la composition et le fonctionnement seront discutés avec les organisations syndicales et les employeurs publics. C’est dans ce cadre que seront notamment analysés le bilan de la RGPP, les orientations destinées à rendre l’action publique plus efficace et plus lisible et pour en évaluer les effets. Dans ce cadre, seront également discutés les travaux à engager sur les missions des services publics, leur l’organisation territoriale (accessibilité, égalité entre les territoires, déconcentration, adéquation des effectifs et des qualifications aux missions du service public) et les perspectives d’une nouvelle étape de décentralisation.

« Cette concertation sera déclinée sur le territoire, selon des formules souples et adaptées aux besoins locaux, de manière à associer étroitement les agents et leurs représentants au diagnostic sur la situation de nos services publics et à la définition d’une nouvelle étape de modernisation. »

La seconde partie du présent rapport de suivi est précisément consacrée à l’appréciation des intentions et premières réalisations du Gouvernement correspondant à ces orientations, inscrites dans la feuille de route sociale qu’il a établie.

2.– La fin de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux »

a) L’exercice 2012 marqué par la « règle du un sur deux » malgré la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012

L’exercice budgétaire 2012 demeure en grande partie caractérisé par la mise en œuvre de la « règle du un sur deux », dans les conditions définies par la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances initiale pour 2012. Le schéma d’emplois prévu par la LFI pour 2012 prévoyait une baisse des effectifs des agents de l’État de 30 401 équivalents temps plein (ETP).

L’article 27 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a prévu – outre la création de 50 ETP au ministère de l’agriculture – le relèvement du plafond des autorisations d’emplois pour le ministère l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, à raison de 1 507 ETPT. Ces 1 507 « temps pleins travaillés » correspondent aux recrutements – pour le dernier tiers de l’année 2012 – de 1 000 professeurs des écoles, 100 conseillers principaux d’éducation et 1 500 auxiliaires de vie scolaire individualisée.

S’ajoutent à ces recrutements (32) :

– des décharges provisoires de service au bénéfice des enseignants titulaires nouvellement recrutés, à raison de 641 ETPT ;

– et la création de 2 500 postes d’assistants d’éducation dans les établissements publics locaux d’enseignement (EPLE), financés par des crédits de fonctionnement – hors titre 2 – affectés à ces EPLE.

Au total, compte tenu de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, le schéma d’emplois pour 2012 prévoit une baisse des effectifs des agents de l’État de 26 123 ETP (33).

b) La quasi-stabilisation des effectifs des agents de l’État prévue en 2013

Le PLF 2013 prévoit une baisse de 1 287 emplois pour les effectifs de l’État, soit une quasi-stabilisation.

Ce solde, légèrement négatif, est caractérisé par la création de 11 011 emplois dans les secteurs prioritaires :

– la « priorité enseignement » correspond à la création de 10 011 emplois, notamment dans l’éducation nationale et les universités ;

– la « priorité sécurité et justice » correspond à la création de 1 000 emplois, notamment dans la police, la gendarmerie et la magistrature.

En revanche, le schéma d’emplois pour 2013 prévoit des baisses d’effectifs à hauteur de 12 298 emplois dans les autres ministères « participant à l’effort de stabilisation de l’emploi public » (34). Deux d’entre eux concentrent 78 % de ces baisses d’effectifs, soit le ministère de la Défense pour 7 234 emplois et le ministère de l’Économie et des finances pour 2 353 emplois.

Si les comparaisons doivent être appréhendées avec prudence (35), on observe que les suppressions d’emplois dans les ministères non prioritaires de 2013 se sont élevées en 2010 – dans le cadre de la « règle du un sur deux » – à 15 198 (36). Cet effort en 2010 était donc à la fois supérieur et assez comparable à celui programmé pour les mêmes ministères en 2013.

c) Des effets encore ténus sur l’évolution de la masse salariale

La modification sensible de la politique des effectifs de l’État – par l’abandon de la « règle du un sur deux » et la programmation de la stabilisation de ces effectifs – correspondrait en 2013 à une augmentation de la masse salariale de 170 millions d’euros pour le budget général, soit de 0,2 % par rapport à 2012 (compte tenu de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012).

Le tableau suivant retrace les composantes de l’évolution de la masse salariale pour les années 2011 à 2013.

FACTEURS D’ÉVOLUTION DE LA MASSE SALARIALE

(En millions d’euros)

 

2011 RAP

2012 PAP

2013 PAP

Loi de finances initiale année n-1 (1)

 

81 132

80 425

Mesures de transfert et de périmètre (2)

- 1 516

- 396

- 425

Schémas d’emplois année n-1 en année pleine

- 452

- 510

- 307

Schémas d’emplois année n

- 474

- 450

- 129

Mesures catégorielles

562

522

311

Impact de la hausse du point fonction publique

186

0

0

Mesures bas salaires

31

54

81

Glissement vieillesse technicité (solde)

158

91

219

Autres variations T2 HCAS

 

126

- 4

Exécution 2011*, PLF 2012 et PLF 2013 (3)

81 352

80 569

80 170

Variation à périmètre constant [(3)-(2)]-(1)

 

-167

170

Source : Direction du budget à partir des rapports annuels de performance (RAP) pour 2011 et projets annuels de performance (PAP) pour 2012 et 2013

*Hors fonds de concours

Note 1 : les amendements adoptés expliquent le passage du PLF 2012 à la LFI 2012.

Note 2 : les autres variations du titre 2 hors pensions au titre du PLF 2013 incluent l’intégralité des effets de la LFR du 16 août 2012.

Ce tableau montre que la fin de la « règle du un sur deux » a des effets perceptibles en 2013 sur l’évolution de la masse salariale. La somme des deux lignes portant sur les effets a) en année pleine du schéma d’emplois de l’année n-1 et b) du schéma d’emplois de l’année n s’élève à - 436 millions d’euros pour l’exercice 2013, contre - 926 et - 960 millions d’euros respectivement en 2011 et 2012. L’augmentation modérée de la masse salariale en 2013 résulte notamment d’une baisse de l’enveloppe des mesures catégorielles par rapport aux années précédentes (311 millions d’euros pour 2013, contre 562 et 522 millions d’euros respectivement en 2011 et 2012).

En tout état de cause, compte tenu de l’objectif de stabilisation des effectifs de l’État à moyen terme, les effets budgétaires des schémas d’emplois à compter de 2014 devraient tendre vers 0.

Il restera, pour la période couverte par le budget triennal 2013-2015, à articuler cette évolution et le respect de la règle d’évolution « 0 valeur » appliquée au budget de l’État hors dette et pensions, soit un périmètre dans lequel figure la masse salariale (37). Au demeurant, il s’agit précisément d’un des principaux enjeux de la modernisation de l’action publique.

II.– VERS UNE STABILISATION DES ORGANISATIONS ADMINISTRATIVES ISSUES DE LA RGPP

A.– LES CONSTATATIONS ÉTABLIES PAR LES RAPPORTEURS SONT CONFIRMÉES PAR PLUSIEURS TRAVAUX RÉCENTS

1.– Les constats et observations de la mission d’inspection

Le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 établit un bilan des mesures mises en œuvre dans le cadre de la RGPP. Le tableau suivant met en parallèle les principaux constats émis par les rapporteurs et certains développements issus du rapport d’inspection.

Constats des rapporteurs

Avis du rapport d’inspection

La RGPP a constitué une révision générale substantielle de l’organisation des services centraux et déconcentrés de l’État, au demeurant partiellement masquée par l’incarnation de la RGPP comme processus de réalisation d’économies.

La RGPP a permis le lancement effectif de nombreuses réformes administratives parfois bloquées depuis plusieurs années.

Les réorganisations réalisées dans les services de l’État ont été d’une ampleur sans précédent. Le nombre de directions d’administration centrale a été sensiblement réduit. Une profonde refonte des services territoriaux, en projet depuis vingt ans, a été menée à bien, entraînant la suppression de centaines de structures : réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE), réforme de la carte judiciaire, création des agences régionales de santé (ARS), constitution du réseau unifié de la direction générale des finances publiques (DGFiP), création des bases de défense…(Synthèse)

La RGPP n’a pas conduit à la revue et à la réflexion, d’ensemble et de détail, pourtant annoncées à son lancement, sur l’opportunité des missions de l’État.

La RGPP a été novatrice par sa volonté de s’interroger sur la pertinence des politiques publiques : elle reposait à l’origine sur le questionnement des finalités mêmes de ces politiques, de leur efficacité, de leur financement et de leur évolution possible. [Sa] méthode s’est révélée inconciliable avec l’ambition initiale de révision des politiques publiques. (Synthèse).

La RGPP a constitué une réelle mise en œuvre dans l’administration de l’État du « faire mieux avec moins », qui la définissait en partie lors de son lancement.

Une grande partie de l’effort a porté sur des restructurations et des rationalisations de services et de processus. (Synthèse)

L’adossement de la RGPP à une baisse des moyens a, à la fois, contraint à des choix rapides et, pour une part, pertinents en termes d’efficience, mais conduit à l’assimilation, peut-être durable, de la réforme de l’État à une simple recherche d’économies.

L’exercice s’est focalisé sur la recherche d’économies rapides. (Synthèse)

NB : les constats des rapporteurs figurent page 22 de leur rapport initial.

Là encore, les appréciations portées par la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS et par les rapporteurs sont très comparables.

2.– Les observations de l’OCDE sur la RGPP

Certains développements d’un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) rendu public en février 2012 recoupent ces appréciations. Ce rapport précise que les mesures portant sur les interventions de l’État « ne constituent pas le cœur de la RGPP, qui reste avant tout une réforme d’optimisation du fonctionnement des administrations et de la fourniture des services. […] La RGPP a comblé un retard des réorganisations administratives – fusions, changements d’affectation ou de missions des services – visant à améliorer l’efficacité de l’État. […] Les réformes de rationalisation des fonctions supports par leur mutualisation entre ministères et au niveau de l’administration déconcentrée de l’État, ainsi que les avancées en matière de gouvernance des opérateurs de l’État, placent la France dans les pays avancés dans ces domaines » (38).

Ce rapport de l’OCDE note – comme l’ont fait les rapporteurs dans leur rapport initial – que la RGPP a également porté, dans une moindre mesure mais de façon croissante avec le temps, sur des mesures de simplification des procédures administratives et d’accroissement de la qualité de service. Il précise que « la qualité des services publics est l’une des priorités de la RGPP. L’orientation de la RGPP vers des grandes réformes de structure organisationnelle au départ, même avec un objectif d’amélioration de la qualité, à quelque peu occulté cet objectif. Celui-ci est devenu plus évident avec la mise en œuvre, dans un deuxième temps, de réformes qui ont un lien plus clair avec l’amélioration de la qualité de service ».

B.– DES ÉVALUATIONS RÉCENTES APPORTENT DES ÉCLAIRAGES CONTRASTÉS SUR CERTAINES MESURES EMBLÉMATIQUES DE LA RGPP, SANS PRÉCONISER DE LES MODIFIER SUBSTANTIELLEMENT

Les développements suivants, s’appuyant sur des travaux récents portant sur certaines mesures parmi les plus importantes et emblématiques de la RGPP, permettent de compléter les analyses – souvent descriptives compte tenu du caractère récent des réformes correspondantes – présentées par les rapporteurs dans leur rapport initial (39).

L’appréciation portée par ces travaux sur l’efficacité et l’efficience des mesures de la RGPP est contrastée, étant précisé qu’ils ne proposent pas de les remettre en cause. Ils ont en commun d’adhérer à tout ou partie des constats suivants :

– les mesures de réorganisation administrative de la RGPP ont été marquées par leur ampleur et leur rapidité de mise en œuvre ;

– malgré des résultats parfois discutables liés notamment à des lacunes substantielles en matière de préparation et de concertation, ces mesures sont considérées comme irréversibles, à la fois parce qu’il convient de faire une « pause » dans la conduite du changement et parce que les organisations nouvelles constituent souvent une plus-value qu’il convient de préserver ;

– il convient de conforter et d’accompagner les mesures achevées a) par des progrès en matière de gestion des ressources humaines et d’organisation des systèmes d’information et b) par une réflexion approfondie sur les métiers et le sens de l’action publique compte tenu de ses nouvelles modalités d’organisation.

1.– La création des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte)

La mise en place des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), dans le cadre de la Réate, a fait l’objet d’une évaluation achevée en février 2012 par trois corps d’inspection (l’IGF, le Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies – CGIET – et l’IGAS) (40).

Le rapport d’évaluation des inspections illustre les difficultés propres à la mise en place de la Réate et, malgré celles-ci, l’acquis organisationnel induit par sa réalisation.

L’encadré suivant, qui reprend une partie de la synthèse du rapport d’inspection, met en perspective ces deux niveaux d’analyse.

Extrait de la synthèse du rapport d’inspection IGF/CGIET/IGAS de 2012
sur l’évaluation de la mise en place des Direccte

La création des Direccte a été – et reste pour partie – confrontée à de nombreuses difficultés : grande disparité entre les directions et services regroupés, différences de « cultures » et de métiers (contrôle, animation, gestion des soutiens publics), nombre important de donneurs d’ordre nationaux (sept directions métier et un service relevant de deux ministères) aux pratiques fort différentes, complexité singulière dans l’organisation budgétaire (deux missions, sept programmes LOLF, huit BOP) et l’allocation des moyens, nombre élevé d’implantations immobilières, systèmes d’information multiples (plus de 150) et peu compatibles, cohabitation de près de trente corps de fonctionnaires et de cadres d’emploi de contractuels, avec des statuts et des modes de gestion différents et relevant de six directions ou services gestionnaires de ressources humaines.

Pourtant deux ans après leur création, elles sont installées et reconnues dans le nouveau paysage administratif régional.

L’interlocuteur unique est en place : les préfets, les partenaires institutionnels portent un regard positif sur cette réforme, en termes de lisibilité et de capacité d’intégration de compétences larges, autrefois dispersées.

Des synergies sont engagées au sein des DIRECCTE. […]

Les agents concernés se sont impliqués dans ces premiers résultats mais sont dans l’attente de progrès qui restent à réaliser en termes de développement d’une culture commune à tous et d’harmonisation des conditions de travail et d’emploi.

À la suite de ces constats, le rapport d’inspection émet des préconisations tendant à conforter les acquis issus de la création des Direccte. Il s’agit en premier lieu d’inciter les ministères ayant autorité sur les Direccte à s’adapter au caractère interministériel de ces directions déconcentrées, ce caractère constituant le sens même de leur création. La mission d’inspection propose d’assouplir la gestion des ressources humaines pour permettre à la direction régionale d’établir une meilleure adéquation entre ses besoins et ses moyens. Elle suggère que les nombreux systèmes d’information existants – legs des outils propres aux anciennes directions régionales fusionnées dans les Direccte – convergent vers des outils communs. Elle propose des rapports plus efficaces entre les unités territoriales et le siège régional des Direccte, afin que les ressources « métiers » du siège puissent être mobilisées par ces unités en fonction de leurs besoins.

Le rapport d’inspection IGF/CGIET/IGAS s’inscrit ainsi dans un processus de « bonification » des acquis de la Réate, considérée de facto comme irréversible. La feuille de route relative à la modernisation de l’action publique – établie suite au séminaire que le Gouvernement a tenu sur le sujet le 1er octobre 2012 –, semble s’inscrire dans cette perspective, étant précisé que le Gouvernement « n’entend pas remettre en cause dans la précipitation l’organisation de l’administration territoriale de l’État. L’année 2013 sera mise à profit pour identifier les pistes d’amélioration et répondre aux dysfonctionnements constatés ».

2.– La fusion des réseaux de la comptabilité publique et des impôts au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP)

Le rapport initial des rapporteurs évoquait la communication adressée en octobre 2011 à la commission des finances du Sénat concernant un premier bilan de la fusion des réseaux de la comptabilité publique et des impôts au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP)(41). Ce premier bilan constatait la réussite du processus de fusion administrative mis en œuvre, dans une période difficile pour les services marquée par la mise en place du logiciel Chorus pour la comptabilité de l’État, ainsi que par un surcroît d’activité lié aux mesures fiscales décidées dans le cadre du Plan de relance de l’économie. La Cour constatait – sans pouvoir précisément l’évaluer – le coût élevé de la fusion, en termes de mesures financières liées aux restructurations immobilières et d’accompagnement en direction des agents.

En s’appuyant, entre autres, sur cette communication, la Cour des comptes a rendu publique en février 2012 une évaluation portant sur les relations de l’administration fiscale avec les particuliers et les entreprises (42).

La Cour conclut cette évaluation en précisant que la création de la DGFiP, administrativement achevée et largement intégrée par les agents, doit être suivie d’une réflexion plus large sur les modalités d’exercice et le sens des « métiers » de l’administration fiscale. La Cour évoque notamment les problématiques suivantes concernant les enjeux à venir pour l’activité de la DGFiP :

– l’évaluation des innovations permettant une identification simplifiée de la matière imposable et un paiement spontané de l’impôt (téléprocédures, déclarations préremplies…) ;

– une prise en compte plus précise des conséquences de ces innovations sur l’organisation de l’administration fiscale et l’allocation de ses moyens ;

– la nécessité d’une auto-évaluation de l’activité de l’administration fiscale, s’appuyant sur l’exploitation pertinente de « remontées » statistiques systématiques (y compris issues d’une comptabilité analytique qui reste à mettre en mettre en place) ;

– la possibilité d’une réflexion sur la pertinence des modalités actuelles de contact et de relation avec l’usager (en distinguant les cas où celui-ci est de bonne foi ou non).

3.– La réforme de la carte judiciaire

Un rapport d’information – publié en juillet 2012 – des sénateurs Nicole Borvo Cohen-Seat et Yves Détraigne a établi un bilan de la réforme de la carte judiciaire (43).

Ce rapport considère que cette réforme a été mise en œuvre selon une méthode contestable ; il évoque des insuffisances et défauts de conception souvent associés à la RGPP dans son ensemble : manque de concertation, décisions centralisées – prises rapidement pour une mise en œuvre sans délai ou presque – critères de choix discutables (s’appuyant quasi exclusivement en l’espèce sur le volume d’activité des juridictions), isolement de la réforme par rapport à la Réate, absence de prise en compte des autres réformes mises en œuvre par le ministère (réforme de la tutelle des majeurs, création des pôles de l’instruction…).

Le rapport d’information du Sénat précise que « le montant total de l’accompagnement immobilier, social et financier mis en place dans le cadre de la réforme, devrait s’élever à 367 millions d’euros, se décomposant en 340 millions d’euros pour les opérations immobilières, 18 millions d’euros pour les mesures sociales en faveur des personnels et près de 20 millions d’euros à destination des avocats » (44). S’agissant du volet immobilier de la réforme, les sénateurs observent que ce coût est deux à trois fois inférieur aux prévisions initiales, mais qu’il est au moins légèrement minoré, puisqu’il ne tient pas compte du coût a) de certains travaux engagés peu avant l’abandon des bâtiments concernés et b) de certaines locations rendues nécessaires après le regroupement de certaines juridictions. La réforme de la carte judiciaire montre ainsi que les coûts initiaux des mesures de la RGPP, même ponctuels, peuvent avoir été non négligeables.

Le rapport d’information du Sénat relève que la baisse d’un tiers du nombre des juridictions (819 contre 1206 avant la réforme) a correspondu à une rationalisation réelle de l’organisation de la justice, même si cette réforme a conduit à certaines situations géographiques non pertinentes, des populations étant désormais éloignées des tribunaux dans des proportions qui permettent d’évoquer l’existence de « déserts judiciaires ». Les regroupements de juridictions ont donné lieu à des baisses d’effectifs, modérées pour les magistrats et plus marquées pour les fonctionnaires rattachés aux juridictions.

Sans conclure de façon trop définitive, le rapport d’information du Sénat établit un lien – peut-être conjoncturel – entre la réforme de la carte judiciaire et a) l’allongement du délai de traitement des affaires civiles et b) la baisse des recours contentieux dans certains endroits du territoire (du fait de l’éloignement des lieux où le dépôt d’un recours est possible).

En conclusion, le rapport d’information du Sénat considère que « ce qui a manqué à la réforme, c’est une réflexion d’ensemble sur la proximité judiciaire dont le justiciable a besoin et sur l’organisation judiciaire qui en découle » (45). Il estime qu’une « pause » dans la réorganisation territoriale de la justice est nécessaire, même si certains aménagements territoriaux et matériels peuvent être envisagés à court terme. À plus long terme, le rapport évoque quelques pistes de réflexion concernant l’organisation judiciaire, afin de « remettre à l’endroit » la conduite du changement ; il considère en effet que « la réforme de la carte judiciaire laisse le sentiment d’une occasion manquée. Dès sa conception, elle a été fragilisée par la méthode retenue, sa précipitation et l’impression qu’elle a laissée que tout avait été décidé à l’avance. Par défaut de perspective, elle a été conduite à l’envers : la réflexion sur les implantations judiciaires a précédé celle sur les missions de la justice et l’organisation judiciaire » (46).

4.– La mise en place des bases de défense

Un rapport d’information – publié en juillet 2012 – des sénateurs Gilbert Roger et André Dulait dresse un bilan de la mise en place des bases de défense (47) .

Ce rapport dresse un bilan contrasté, sinon sévère, de cette mise en place. Sa synthèse considère qu’« initiée dans un cadre budgétaire contraint, la réforme des bases de défense, qui tendait à économiser sur le soutien pour préserver l’opérationnel et les équipements, a mis en place une organisation particulièrement complexe. Bouleversant le quotidien de tous les agents du ministère, l’irruption d’une organisation matricielle dans un univers hiérarchique, combinée à la réorganisation concomitante des chaînes « métiers » du ministère, a créé une impression de désorganisation généralisée. Un nouveau rapport au territoire s’est installé, avec l’apparition de déserts militaires. Son résultat, bien que tangible (6,6 milliards d’euros économisés de 2008 à 2015), est peu lisible ; les coûts d’accompagnement social, immobilier et territorial grèvent son bilan » (48).

Ce constat étant dressé, les sénateurs considèrent qu’il convient non pas de remettre en cause la réforme, mais de l’approfondir et de la conforter. Ils proposent cinq pistes pour ce faire, qui figurent dans l’encadré ci-après.

Extrait de la synthèse du rapport d’information du Sénat n° 660
[session extraordinaire 2011-2012] du 11 juillet 2012
sur la mise en place des bases de défense

Le rapport identifie les cinq vrais enjeux (49) pour approfondir la réforme et en consolider les résultats :

– les états-majors de soutien défense, échelons intermédiaires du soutien, comportent un risque de suradministration, et il faudra réévaluer fin 2012 la pertinence de leur existence ;

– le socle budgétaire des bases doit être redéfini : le rapport chiffre à 130 millions d’euros l’impasse budgétaire sur 2012, soit un quart de l’enveloppe totale : aucun crédit n’est plus disponible en base de défense à partir de septembre 2012 ;

– le chantier de la simplification des procédures doit être lancé, en particulier en matière de ressources humaines et de zonages d’intervention ;

– l’éclatement des systèmes d’information, véritables talon d’Achille de la réforme, constitue un verrou puissant à faire sauter pour permettre l’harmonisation et la mutualisation des procédures ;

– la « civilianisation » du soutien doit être poursuivie, dans une approche qui concilie les impératifs de gestion de carrières des personnels civils comme militaires.

Les problématiques relatives à la gestion des ressources humaines (simplification des procédures et « civilianisation ») et à l’amélioration des systèmes d’information semblent, là encore, constituer des éléments fondamentaux pour conforter la réforme engagée.

C.– LES PRINCIPALES MESURES MISES EN œUVRE AU TITRE DE LA RGPP SONT MAINTENUES MOYENNANT DES ADAPTATIONS PONCTUELLES

Dans leur rapport initial, les rapporteurs considéraient qu’« afin d’ouvrir une période de stabilité, y compris pour les agents publics, il serait opportun de stabiliser à moyen terme les nouvelles organisations de l’administration centrale et déconcentrée de l’État issues de la RGPP, nonobstant d’éventuels ajustements ponctuels » (50).

Le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 considère, lui aussi, que « dans les secteurs fortement restructurés pendant la RGPP, une période de stabilisation des organisations est nécessaire » (51). Le même rapport met en garde contre « toute décision hâtive qui conduirait à une succession de réorganisations, travers reproché à la RGPP à juste titre » ; il précise en revanche que « la concrétisation des synergies attendues peut nécessiter des ajustements fonctionnels. […] Stabilité des structures ne veut pas dire immobilisme » (52).

Le Gouvernement tend à adopter une attitude pragmatique concernant les mesures achevées – y compris les plus emblématiques – de la RGPP. Les nouvelles organisations administratives semblent devoir être maintenues au moins à moyen terme, le cas échéant en leur apportant certaines modifications ponctuelles. La feuille de route établie à l’issue du séminaire gouvernemental sur la modernisation de l’action publique du 1er octobre 2012 précise qu’il convient de « stabiliser l’organisation de l’administration territoriale de l’État et [d’] identifier les solutions pour répondre aux dysfonctionnements constatés ».

Lors d’un débat au Sénat portant sur le rapport d’information évoqué supra concernant la réforme de la carte judiciaire, Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux et ministre de la Justice, a indiqué qu’« il n’est pas question de réformer à nouveau la carte judiciaire. […] Cette réforme a en effet laissé de mauvais souvenirs aux magistrats, aux greffiers, aux fonctionnaires, aux élus et aux justiciables. Ils ont été tellement bousculés qu’ils demandent eux-mêmes une pause. Reste qu’il faut étudier les ajustements nécessaires dans chaque ressort. […] Il nous faut […] revoir cette carte, ressort par ressort, faire remonter les besoins, les difficultés et apporter des réponses » (53).

Dans le même esprit, M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, a précisé lors d’une visite le 8 octobre 2012 sur le site de la base de défense d’Orléans-Bricy que le Gouvernement ne reviendrait « pas sur le principe de la réforme [et] sur la séparation du soutien et de l’opérationnel. Mais il faudra plus de souplesse et de pragmatisme. […] Le nombre de bases existantes n’est pas figé dans le marbre » (54).

Le rapport IGA/IGF/IGAS aborde par ailleurs le sujet du sort des mesures de la RGPP non achevées à ce jour, en distinguant « quelques mesures RGPP […] en déshérence, soit parce qu’elles ont été mal étudiées au départ, soit parce qu’elles ne présentent pas ou plus d’intérêt » et les « autres mesures, […] porteuses d’économies intégrées dans les hypothèses budgétaires pour 2013 ou [correspondant] à des actions de simplification qui ne sont contestées par personne ». Le rapport préconise d’achever les mesures RGPP en cours de réalisation, « sauf exception. […] Des arbitrages interministériels pourraient ainsi établir la liste des mesures inactives ou sans objet, lever des blocages éventuels, les autres mesures étant menées à leur terme » (55).

En réponse aux rapporteurs, le Gouvernement précise qu’« il a été demandé à chaque ministre de faire un point sur les mesures RGPP en cours de mise en œuvre ou projetées. Dès la fin du mois d’octobre [2012], le gouvernement statuera, ministère par ministère, sur le devenir de ces mesures ».

DEUXIÈME PARTIE :
LA « MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE »
S’APPUIERA SUR CERTAINS ACQUIS DE LA RGPP
TOUT EN MARQUANT UNE RÉELLE RUPTURE AVEC ELLE

Comme les rapporteurs l’on mentionné supra, le Gouvernement a établi une feuille de route concernant la modernisation de l’action publique (désignée par l’acronyme « MAP », en tant que méthode se substituant à la RGPP), suite au séminaire qu’il a tenu sous la présidence du Premier ministre le 1er octobre 2012. Cette feuille de route prévoit que la MAP se déclinera en quatre axes : assurer dans la durée la cohérence et l’efficacité de l’action publique, partir des besoins des citoyens et des usagers, restaurer la responsabilité des acteurs de l’action publique et faire confiance aux capacités d’innovation des agents publics.

La présente partie a pour objet de procéder à une analyse des projets et des premières réalisations du Gouvernement dans le cadre de la MAP, en identifiant quels acquis de la RGPP seront mobilisés pour procéder au lancement de cette méthode nouvelle, qui tend à marquer une réelle rupture avec elle.

I.– CERTAINS ACQUIS DE LA RGPP CONTRIBUERONT
À LA MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE

A.– LE MAINTIEN D’UNE IMPLICATION DIRECTE DU PREMIER MINISTRE

Dans leur rapport initial, les rapporteurs précisaient que « la réforme de l’État pourrait utilement continuer à s’appuyer sur un portage politique au plus haut niveau de l’exécutif, garant de l’efficacité de la prise des décisions et de leur mise en œuvre » (56). Les rapporteurs souhaitaient non pas nécessairement le maintien du dispositif propre à la RGPP, impliquant au sein du CMPP à la fois le Président de la République et le Premier ministre. En revanche, il leur est apparu nécessaire de mobiliser au bénéfice de la réforme de l’action publique un niveau politique interministériel – c’est-à-dire relevant au moins du Premier ministre –, garant de l’autorité et de la cohérence nécessaires au dispositif de décision.

Le rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 souhaite également « le maintien d’un pilotage interministériel fort » et – de façon plus opérationnelle – propose que se réunisse régulièrement à cet effet « un comité interministériel de rénovation de l’action publique (CIRAP) présidé par le Premier ministre, où seraient prises les décisions les plus importantes, cadrées et lancées les revues de politiques et assuré le suivi des décisions arrêtées » (57).

Dans le schéma proposé par la mission d’inspection, les fonctions de rapporteur général du CIRAP seraient exercées par la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique. La mission d’inspection précise aussi qu’un « pré-CIRAP », présidé par le directeur de cabinet du Premier ministre, aurait pour charge de préparer les décisions du CIRAP et d’arbitrer les décisions qui n’en relèveraient pas. Ce schéma – à l’exception de l’implication du Président de la République – n’est pas sans rappeler le fonctionnement de la RGPP, structurée par les réunions des CMPP et des comités de suivi, présidés par le secrétaire général de l’Élysée et le directeur de cabinet du Premier ministre.

La feuille de route établie à l’issue du séminaire gouvernemental sur la modernisation de l’action publique du 1er octobre 2012 atteste que le Gouvernement a choisi de s’inscrire dans le schéma envisagé par la mission d’inspection. Cette feuille de route prévoit que « le Premier ministre réunira chaque trimestre un comité interministériel de modernisation de l’action publique, rassemblant l’ensemble des ministres, afin d’arrêter les orientations de la nouvelle politique de modernisation et d’en suivre la mise en œuvre. La ministre en charge de la réforme de l’État en sera le rapporteur général ».

Le décret n° 2012-1199 du 30 octobre 2012 a créé le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP), présidé par le Premier ministre, réunissant tous les ministres et le ministre délégué chargé du budget, et dont le rapporteur général sera le ministre chargé de la réforme de l’État.

L’encadré suivant reprend l’article 1er du décret du 30 octobre 2012 instituant le CIMAP.

Décret n° 2012-1199 du 30 octobre 2012 portant création du CIMAP

Article 1er

Le comité interministériel de la modernisation de l’action publique fixe les orientations de la politique gouvernementale tendant à :

1° Améliorer l’organisation et le fonctionnement des services et des établissements publics de l’État, et veiller à l’articulation de leurs missions avec celles des autres administrations publiques ; à cette fin il décide et coordonne les évaluations de politiques publiques, notamment partenariales ;

2° Améliorer le service rendu par les administrations publiques en prenant mieux en compte les attentes des usagers et partenaires de l’administration, développer la simplification des normes et des procédures et évaluer la qualité du service ;

3° Mieux associer les agents publics à la modernisation de l’action publique et à la qualité du service rendu.

Les rapporteurs relèvent que le CIMAP, s’il a vocation à fixer des orientations de la politique gouvernementale, est chargé d’une fonction opérationnelle et concrète, tendant à décider et coordonner les évaluations de politiques publiques.

B.– LE RENFORCEMENT DE L’INTERMINISTÉRIALITÉ

La RGPP a correspondu à une prise en charge interministérielle croissante de la modernisation de l’action publique :

– le pilotage de la Réate a été assuré par le secrétariat général du Gouvernement (SGG) ;

– la réforme de l’administration territoriale a au demeurant consisté en la création de directions départementales interministérielles, dont une partie de la gestion – notamment en matière de ressources humaines – relève désormais du SGG sous l’autorité du Premier ministre ;

– la création de la direction interministérielle des systèmes d’information et de communication de l’État (Disic) – placé auprès du Premier ministre et dont le premier directeur fut parallèlement adjoint au SGG – a répondu à la nécessité de conforter le niveau interministériel de la réforme de l’État.

Cette tendance semble devoir se poursuivre dans le cadre du lancement de la MAP.

1.– La création d’un secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) va conforter la dimension interministérielle des administrations centrales en charge de la réforme de l’État

La feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 prévoit qu’« un secrétariat général pour la modernisation de l’action publique [SGMAP] sera créé avant la fin du mois d’octobre [2012], placé auprès du Premier ministre et mis à disposition de la ministre de la réforme de l’État […] ». Dans ses réponses aux questions des rapporteurs, le Gouvernement précise que le SGMAP « regroupera sous son autorité l’actuelle DGME et la DISIC », confirmant une organisation institutionnelle envisagée par la feuille de route du 1er octobre 2012.

Le SGMAP a été créé par le décret n° 2012-1198 du 30 octobre 2012. Ce décret précise que celui-ci :

– est placé sous l’autorité du Premier ministre et rattaché au SGG ;

– comprend la direction interministérielle pour la modernisation de l’action publique – la DIMAP qui « prend la suite » de la DGME – et la DISIC (58).

Le décret du 30 octobre 2012 créant le CIMAP précise que le SGMAP assure le secrétariat du comité interministériel.

L’action du Gouvernement répond aux suggestions des rapporteurs qui, dans leur rapport initial, avaient proposé qu’« une réflexion [soit] menée sur l’opportunité de placer la DGME auprès du secrétariat général du Gouvernement, pour renforcer encore l’interministérialité de la réforme de l’État […] » (59).

La mission d’inspection IGA/IGF/IGAS a pour sa part suggéré, dans sa synthèse, « un renforcement de la coordination interministérielle auprès du secrétariat général du Gouvernement », sans proposer la création d’une structure ad hoc. Le schéma proposé par la mission d’inspection se distinguait au demeurant de celui que le Gouvernement a mis en œuvre par la création du SGMAP, puisqu’elle proposait « la création d’un comité technique de coordination interministérielle auprès du SGG [qui réunirait] à géométrie variable selon les sujets abordés […], outre le ou les ministères concernés, l’ensemble des directions transversales, en tant que de besoin : DGME, DB, DGAFP, DISIC, DGCL, DSS, France Domaine… » (60). Auditionnés par les rapporteurs, les membres de la mission d’inspection considèrent néanmoins que les choix du Gouvernement correspondent en la matière à l’esprit des préconisations qu’elle a émises.

2.– Le renouvellement et le développement des missions des administrations centrales

a) Vers une identification plus précise des missions transverses de la DIMAP (ex-DGME)

Dans leur rapport initial, les rapporteurs considéraient que la DGME devait « encourager les ministères à progresser davantage dans la prise en compte des attentes des usagers du service public » (61), ce qui correspondait à leurs constats – évoqués supra – portant sur le bien-fondé de la mesure de la satisfaction des usagers engagée par la DGME et sur la plus-value apportée par cette direction auprès des ministères dans la conduite de la réforme de l’État.

La mission IGA/IGF/IGAS a pour sa part constaté que « fortement critiquée au départ, la DGME a su évoluer vers un positionnement apprécié de prestataire de service » (62) et a suggéré qu’elle assume les tâches suivantes :

– en tant qu’« ensemblier », la DGME préparerait les comités interministériels présidés par le Premier ministre et veillerait à la mise en œuvre de ses décisions ;

– en tant que « prestataire », la DGME veillerait à capitaliser et diffuser les bonnes pratiques de modernisation de l’action publique dans les ministères, animerait le réseau des praticiens ministériels de la réforme de l’État, contribuerait à la formation des cadres administratifs à la conduite du changement au niveau déconcentré et gérerait les crédits affectés à l’achat des prestations de service proposées par des consultants privés ;

– la DGME veillerait à l’évaluation des mesures de modernisation de l’action publique, en mobilisant l’ensemble des outils à la disposition du Gouvernement en la matière ;

– la DGME poursuivrait sa tâche de promotion de la simplification administrative, en proposant, élaborant et accompagnant en continu de nouvelles mesures. Du côté « usagers », la DGME propose, selon la mission IGA/IGF/IGAS, « que la gestion du baromètre de la qualité du service public et de la satisfaction des usagers soit confiée à une instance indépendante, une fois sa méthodologie et son contenu stabilisés » (63).

Le décret du 30 octobre 2012 portant création du SGMAP s’inscrit dans le cadre de ces préconisations, faisant de la DIMAP le principal « bras armé » du secrétariat général en matière d’actions relatives à la modernisation des politiques publiques. Son article 3 précise les missions de la DIMAP – dans des termes au demeurant assez proches de ceux du décret n° 2005-1792 du 30 décembre 2005 créant la DGME. Ces missions sont les suivantes :

– coordonner les travaux d’amélioration de l’action des administrations au profit des usagers ;

– favoriser le développement de l’administration numérique ;

– animer, avec la direction du budget, la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), les travaux de modernisation de la gestion publique ;

– animer et coordonner les travaux d’audit et d’évaluation des politiques publiques ;

– coordonner et animer les actions de communication et de formation dans le domaine de la modernisation de l’action publique.

b) La poursuite de la gestion par la DIMAP des marchés passés par l’État avec certains cabinets d’audit

Comme évoqué précédemment, la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS a considéré opportun que la DGME demeure une interface entre les ministères responsables de la mise en œuvre des mesures de modernisation de l’action publique et les consultants privés susceptibles de leur apporter leurs compétences et savoir-faire en la matière. La mission d’inspection considère qu’une telle assistance externe et privée est envisageable « de préférence sur des sujets précis, opérationnels ou managériaux » (64). Les rapporteurs avaient pour leur part, dans leur rapport initial, relevé le « retour » favorable de certains ministères quant à l’accompagnement dont ils avaient bénéficié au titre d’un des lots des deux marchés – gérés par la DGME – notifiés en novembre 2007 puis janvier 2011 au titre de l’assistance à la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP (65).

Le Gouvernement, dans ses réponses aux rapporteurs, précise que le marché notifié en janvier 2011 est « en vigueur jusqu’à la mi-janvier 2013 et peut être renouvelé pour une année supplémentaire, encore deux fois, soit pour un total maximum de deux années » jusqu’au début de l’année 2015. La décision de prolonger ce marché au-delà de janvier 2013 devait être prise, selon le Gouvernement, « avant la mi-novembre 2012 ».

Il apparaît que le Gouvernement envisage à tout le moins une prolongation d’au moins un an de ce marché. Dans ses réponses aux rapporteurs, il précise que ce marché « permettra de mettre en œuvre les chantiers de rénovation de l’action publique pour accompagner au niveau transversal les administrations et leurs opérateurs sur l’ensemble des actions en matière de transformations organisationnelles, d’amélioration du service aux usagers et d’évaluation des politiques publiques ». D’après les informations recueillies par les rapporteurs, la DIMAP considère pouvoir s’appuyer sur le marché en cours pour satisfaire les besoins définis par le Gouvernement dans le cadre de la MAP. Les consultants demeureraient ponctuellement appelés à épauler les ministères dans l’accompagnement technique de certaines réformes. Les chantiers portant sur les systèmes d’information requièrent aussi des compétences qu’il est parfois plus aisé de mobiliser en s’appuyant sur des entreprises privées.

Le Gouvernement a transmis aux rapporteurs des évaluations actualisées des autorisations d’engagement et crédits de paiement consommés et programmés au titre de ces marchés pour les exercices 2011, 2012 et 2013. Ces évaluations ont été établies à partir de l’hypothèse du renouvellement pour 2013 du marché notifié en janvier 2011. Elles figurent dans le tableau suivant.

CONSTATS ET PROGRAMMATIONS DE CONSOMMATION DES CRÉDITS
CONCERNANT LES MARCHÉS GÉRÉS PAR LA DIMAP

(En millions d’euros)

 

2011

Prévision 2012

Prévision 2013

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Marché RGPP – lot 1 – notifié en novembre 2007

Groupement McKinsey - Accenture

-

2,8

-

-

-

-

Marché RGPP – lot 2 – notifié en novembre 2007

Groupement Capgémini - BCG

-

1,5

-

-

-

-

Marché RGPP – lot 3 – notifié en novembre 2007

Groupement Ernst and Young/Roland Berger/Bearing Point

-

0,9

-

-

-

-

Marché d’AMO, d’évaluation des politiques publiques, d’audit et d’accompagnement – lot 1 – notifié en janvier 2011

Groupement McKinsey-Accenture

7,1

6,6

5,6

5,5

4,5

4,4

Marché d’AMO, d’évaluation des politiques publiques, d’audit et d’accompagnement – lot 2 – notifié en janvier 2011

Groupement Roland Berger-Ineum

5,1

4,0

5,0

5,0

4,5

4,4

Marché d’évaluation des politiques publiques, d’audit et d’accompagnement – lot 3 – notifié en janvier 2011

Groupement Capgémini-BCG-Mazars

5,5

4,5

5,0

5

4,3

4,3

Définition des mesures d’amélioration des services aux usagers – lot 4 – notifié en 2011

Bain et compagnie

1,1

1,1

1,2

1,1

1,1

1,0

TOTAL

18,8

21,4

16,8

16,6

14,4

14,1

Source : Chorus

Ce tableau confirme la baisse, pressentie par les rapporteurs, des dépenses finançant des prestations de cabinets d’audit dans le cadre du marché notifié en janvier 2011, par rapport aux paiements effectués les années précédentes : 28,3 millions d’euros en 2008, 21,3 millions d’euros en 2009 et 21,7 millions d’euros en 2010 (66).

c) L’installation de la DISIC dans le paysage de la réforme de l’État

La création de la DISIC par le décret n° 2011-193 du 21 février 2011, placée auprès du Premier ministre, a constitué la mise en œuvre d’une mesure de la RGPP et a illustré la nécessité d’une approche interministérielle de la question des systèmes d’information et de communication dans le cadre d’un processus continu de modernisation de l’État.

Le décret du 30 octobre portant création du SGMAP pérennise la DISIC en prévoyant qu’elle y soit intégrée – à l’instar de la DGME devenue DIMAP. Il semble justifié de conforter le regard global, cohérent et normé que la DISIC porte sur les systèmes d’information et de communication de l’État, étant entendu que ceux-ci peuvent constituer tout aussi bien un accélérateur qu’un frein à une modernisation réussie de l’État. L’encadré suivant, issu des réponses du Gouvernement aux rapporteurs, décrit les missions concrètes de la DISIC.

Extrait des réponses du Gouvernement aux questions des rapporteurs

Les missions de la DISIC

La DISIC est […] amenée à jouer, de trois manières complémentaires, un rôle dans l’audit et le pilotage de projets informatiques de l’État :

– d’une manière stratégique, en contribuant à fixer les objectifs de transformation du système d’information de l’État sous forme de cibles à atteindre et de dispositifs à mettre en œuvre ;

– d’une manière performante et sécurisée, en éclairant au plus haut niveau les choix stratégiques en matière de projets SIC et en rendant plus transparentes les conditions dans lesquelles ces derniers sont lancés puis conduits, tout en s’assurant de l’efficacité des dispositifs de maîtrise des risques et de gestion des ressources humaines ;

– d’une manière exemplaire, à travers la conduite de trois projets informatiques emblématiques : la mise en place du futur réseau interministériel de l’État (RIE), l’évolution des systèmes d’information et de communication territoriaux incluant la création des services interministériels départementaux des systèmes d’information et de communication (SID SIC) et la transformation des centres informatiques de l’État (TCI).

Le Premier ministre – sur la suggestion de la DISIC – a saisi l’IGF et le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGIET) fin août 2011 sur la question du pilotage et de l’audit des grands programmes informatiques de l’État. Dans son rapport (n° 2011-M-057-02/IGF et n° 2011/28/CGIET/SG) (67) remis au Premier ministre en mars 2012, la mission d’inspection émet une série de préconisations de nature technique, qui illustrent la nécessité stratégique d’un pilotage interministériel des systèmes d’information de l’État. Ces préconisations – qui s’appuient sur un examen des pratiques publiques à l’étranger et privées au sein de grandes entreprises – ont été regroupées par la mission d’inspection au sein de trois axes qu’elle présente dans ces termes :

« – l’adoption de principes de gouvernance forts et structurés […] constitue un facteur clef pour la réussite des grands programmes en favorisant une implication des décideurs publics et des responsables opérationnels ;

– l’élaboration de règles de conduite de programme traduit une volonté généralisée de concevoir autrement les grands programmes et de développer une externalisation mieux maîtrisée. En la matière la DISIC pourrait jouer un rôle d’accompagnement méthodologique ;

– la mise en œuvre d’une véritable gestion des hommes et des compétences est un domaine dans lequel toutes les organisations consacrent de nombreux efforts. »

Le Gouvernement a indiqué aux rapporteurs que « sur la base de ces recommandations, la DISIC a réalisé une analyse des actions déjà entreprises et de celles restant à entreprendre. Cette analyse a été présentée aux secrétaires généraux et directeurs des systèmes d’information ministériels en mai 2012 ».

II.– LE GOUVERNEMENT PROPOSE UNE NOUVELLE MÉTHODE DE « MODERNISATION DE L’ACTION PUBLIQUE » (MAP)

A.– UN CADRE PLUS LARGE : UNE REVUE DES POLITIQUES PUBLIQUES LIÉE NOTAMMENT À LA NOUVELLE ÉTAPE DE LA DÉCENTRALISATION

1.– Vers une revue des politiques publiques par vagues successives

a) Le schéma retenu par le Gouvernement : enclencher un processus durable d’examen des politiques publiques, de réformes et de suivi de leur mise en œuvre

La mission d’inspection IGA/IGF/IGAS propose un schéma de revue par vagues successives des politiques publiques, dont l’essentiel des étapes et modalités a été repris par le Gouvernement dans sa feuille de route du 1er octobre 2012.

Le Gouvernement entend ainsi – en premier lieu – établir « une “cartographie” des politiques publiques présentant l’ensemble des moyens budgétaires et fiscaux, les leviers règlementaires associés, ainsi que les partenaires impliqués » (68).

Le Gouvernement souhaite sur la base de cette cartographie réaliser « un examen des politiques, en plusieurs vagues, en commençant par les politiques dont il est envisagé la décentralisation (exemple de la formation professionnelle et de l’apprentissage), qui comportent un enjeu de clarification des relations entre l’État, les collectivités locales, des organismes sociaux et des opérateurs, ou encore, de forts enjeux financiers ».

Le passage en revue d’une politique publique conduirait à l’identification de scénarios et de mesures à mettre en œuvre pour concrétiser chacun de ces scénarios. Le Gouvernement, via les décisions prises par le CIMAP, choisirait un scénario de réforme. Le CIMAP serait amené par la suite à apprécier la mise en œuvre des mesures associées au scénario choisi et s’engagerait ainsi dans un processus évaluatif continu de réforme de l’action publique.

b) L’anticipation par le Gouvernement de la réflexion portant sur la cartographie des missions de l’État

Comme le précise la feuille de route du Gouvernement du 1er octobre 2012 – « le Premier ministre a demandé [le 1er août 2012] à l’ensemble des ministres de conduire une réflexion sur les missions qui leur sont confiées, en identifiant celles qui doivent rester de la responsabilité de la puissance publique, et, en leur sein, celles qui doivent demeurer de la responsabilité de l’État et des opérateurs, et celles dont le transfert aux collectivités territoriales pourrait être pertinent ».

Si cette démarche s’inscrit dans la préconisation – qui lui est postérieure –du rapport d’inspection relative à l’élaboration d’une cartographie des politiques publiques par ministère, sa portée est un peu différente. Chaque ministre doit, selon le courrier qui lui a été adressé par le Premier ministre le 1er août 2012, se prononcer sur l’opportunité a) de maintenir les missions dont il est responsable dans la sphère publique et b) de décentraliser les missions considérées comme relevant de cette sphère. Selon les informations recueillies par les rapporteurs, les réponses des ministres adressées au Premier ministre sont en cours d’analyse par ses services, afin précisément de préparer les décisions qui seront prises par le CIMAP de décembre 2012, notamment relatives à la détermination des politiques publiques concernées par la première vague d’évaluation.

Le Gouvernement précisait dans sa feuille de route du 1er octobre 2012 que « plusieurs “revues” débuteront dès l’automne [2012] », soit avant la première réunion du CIMAP prévue en décembre.

Le lancement précoce « des premiers cycles d’examen des politiques publiques partenariales » (69) pouvait s’expliquer par le calendrier d’élaboration du projet de loi sur la décentralisation, dont l’adoption par le conseil des ministres a été initialement envisagée en novembre 2012. Le report de cette adoption au mois de janvier 2013 explique sans doute en partie que l’anticipation du passage en revue de certaines politiques publiques ne soit plus à l’ordre du jour.

Le premier CIMAP pourrait donc, en décembre 2012 :

– identifier les politiques publiques de la première vague d’examen (70) ;

– acter les principes et les modalités pratiques de son action, afin que, comme le précise la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012, « le Premier ministre [définisse à son issue], en cohérence avec la loi de programmation des finances publiques, le plan d’action 2013/2015 pour la modernisation de l’action publique ».

2.– Les conditions à réunir pour procéder à une réelle revue des politiques publiques

a) Mettre en œuvre des principes et une méthode efficaces

La mission d’inspection IGA/IGF/IGAS a considéré que « ce qui faisait l’ambition et la singularité du projet initial de la RGPP – à savoir la revue des politiques et des dépenses publiques, l’interrogation sur la pertinence des missions de l’État – a été compromis par les facteurs mêmes qui devaient garantir l’efficacité du processus de décision et la rapidité de mise en œuvre » (71). Pour la mission d’inspection, ces facteurs furent le choix de s’appuyer sur des audits confidentiels, un mode de gouvernance mettant en première ligne le Président de la République, la focalisation du processus sur la réalisation d’économies, le défaut d’articulation des nombreux chantiers ouverts et l’horizon temporel – souvent de court terme – de ce processus.

Il convient en premier lieu de ne pas réitérer certaines erreurs. Les rapporteurs considèrent qu’il faut consacrer le temps nécessaire à la construction des scénarios d’évolution des politiques publiques examinées, ce qui pose la question de l’articulation temporelle entre la décentralisation envisagée de certaines compétences de l’État dans un avenir proche et le travail d’évaluation portant sur les politiques publiques correspondantes.

Ces scénarios doivent procéder d’une réflexion audacieuse, où les « sujets qui fâchent » doivent être abordés et mis sur la table, sans se priver par exemple d’envisager de profondes réformes des organisations existantes. À ce titre, l’examen évaluatif d’une politique publique gagnerait à être conduit par des personnalités – ou chefs de file – extérieures aux parties prenantes (administrations, partenaires de l’État, syndicats…), disposant d’une légitimité auprès d’elles fondée sur leur autorité, leur hauteur de vue, leur ouverture d’esprit et leur volontarisme.

La revue d’une politique publique doit au demeurant être effectivement et résolument conduite, pour éviter l’ensablement, en particulier dans les cas où des acteurs et partenaires – n’ayant pas acquis le niveau de maturité nécessaire pour procéder à un tel exercice – trouveraient, le cas échéant, intérêt au statut quo. Un « diagnostic partagé » peut parfois relever d’une confrontation assumée de points de vue parfois incompatibles. Au total, s’il est nécessaire qu’un temps suffisant soit consacré à l’expression des points de vue et à la réflexion collective, il faut aussi que ce temps soit compté.

Selon les informations recueillies par les rapporteurs, le Gouvernement pourrait considérer raisonnable une durée d’environ six mois pour opérer l’évaluation d’une politique publique. Au-delà de la question de la durée des évaluations, le Premier ministre a chargé le 26 octobre 2012 les chefs des inspections générales des finances, de l’administration et des affaires sociales d’une mission tendant à définir le cadre méthodologique des évaluations des politiques publiques partenariales dans le cadre de la MAP. Les inspections devront aider « à formaliser les éléments de méthode communs qui permettront aux départements ministériels concernés d’engager et de conduire de la meilleure façon [ces évaluations] » (72). Le Premier ministre indique souhaiter disposer du rapport définitif de la mission d’inspection le 30 novembre 2012, dans l’optique du lancement de la première vague d’évaluations des politiques publiques par le CIMAP de décembre 2012.

Les rapporteurs considèrent que ce cadrage méthodologique doit contribuer à surmonter certaines difficultés identifiées par le rapport d’inspection du 25 septembre 2012, susceptibles de rendre ardu l’exercice envisagé par le Gouvernement : « difficulté de construction de consensus ; poids des groupes d’intérêts dans les politiques sectorielles ; faible culture de l’évaluation ; dictature de l’urgence… » (73). La mission d’inspection considère au demeurant que seules « la construction de choix collectifs à moyen terme par politique publique [et une] vision partagée des enjeux à moyen terme, éclairant les choix d’orientation de l’action, de répartition des rôles entre acteurs publics et d’allocation des ressources publiques » sont susceptibles de conduire à une modernisation efficace et efficiente de l’action publique.

Le Gouvernement semble faire le pari de la capacité des acteurs publics à élaborer des « constats partagés » à moyen terme par politique publique. La feuille de route du 1er octobre 2012 envisage que chaque ministre, pour les politiques publiques qui le concernent, soit responsable de la « réalisation d’un diagnostic partagé et [de la] construction de scénarios pour améliorer les résultats de la politique publique en cause (meilleur service rendu aux usagers, équité, efficacité économique, efficience de la dépense publique) sous contrainte de ressources sur une trajectoire de moyen et de long terme ». Le ministre organiserait ensuite le « partage du diagnostic et des scénarios avec tous les acteurs de la politique publique concernée ainsi que les partenaires sociaux », afin d’aboutir à l’« identification de propositions d’amélioration et de rationalisation » (74).

Il appartiendrait in fine au CIMAP d’arbitrer entre les scénarios d’évolution des politiques publiques.

Les rapporteurs considèrent qu’il conviendra de veiller à ce que cette procédure d’arbitrage demeure opérationnelle dans la durée :

– le placement du SGMAP auprès du Premier ministre doit correspondre au maintien d’une capacité pleine et entière d’arbitrage de celui-ci entre les positions – parfois divergentes – des ministères ou partenaires ;

– la modernisation de l’action publique implique de la constance dans les choix et un suivi réel et exigeant des mesures qui en découlent. Le CIMAP doit arbitrer tout autant les mesures à mettre en œuvre que les décisions à prendre « en aval » une fois les mesures lancées, dans le cadre du suivi.

b) Associer le Parlement à la démarche de modernisation de l’action publique

Les rapporteurs considèrent que le Parlement doit contribuer à la réalisation de constats – au moins en partie – partagés sur les politiques publiques et à l’élaboration de scénarios de réforme. La représentation nationale, parce qu’elle est l’expression des débats qui traversent le pays, légitime les constats portés sur les politiques publiques, et les scénarios qui en découlent. Au demeurant, les parlementaires sont bien placés pour apporter, au cours de la concertation préalable à l’élaboration de ces constats, des éléments concrets et pratiques issus du lien de proximité qu’ils entretiennent avec les usagers du service public et, plus largement, les citoyens.

Les rapporteurs approuvent ainsi l’esprit des suggestions de la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS en matière d’association du Parlement à la MAP. La mission d’inspection propose en effet que des parlementaires soient « associés aux comités d’examen chargés des revues de politiques publiques, soit en tant que spécialiste du sujet soit en tant que rapporteur spécial ». Le Gouvernement – même si la feuille de route du 1er octobre n’y fait pas référence – semble partager cette orientation. Dans ses réponses aux rapporteurs, il estime « souhaitable que des parlementaires soient associés au travail d’analyse qui va s’engager, politique publique par politique publique. »

L’association des parlementaires aux travaux d’évaluation des politiques publiques peut s’appuyer, comme le suggère la mission IGA/IGF/IGAS, sur la participation directe de certains d’entre eux à ces travaux. Les rapporteurs considèrent que cette association doit respecter la pluralité des points de vue représentés au sein des assemblées parlementaires. En tout état de cause, les groupes de travail amenés à examiner les politiques publiques – dans le cadre de la programmation définie par le CIMAP – devraient auditionner les parlementaires auteurs des travaux d’information, d’enquête, de contrôle et d’évaluation concernant précisément ces politiques publiques. La mobilisation de ce volet – méconnu – de l’activité parlementaire paraît opportune au moment où doit s’engager une réflexion portant sur le bilan, le sens et les perspectives propres à chaque politique publique.

La mission d’inspection suggère par ailleurs « l’organisation d’un débat annuel d’orientation de l’action publique (et non pas de l’action du seul État). Il serait structuré autour des politiques soumises à revue et des principales réformes en cours ». Un tel débat annuel pourrait légitimement trouver sa place :

– dans le cadre des semaines de séance réservées par priorité, en application de l’alinéa 4 de l’article 48 de la Constitution, au contrôle de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques ;

– dans le cadre de l’examen des projets de loi de règlement, auxquels sont annexés les rapports annuels de performance qui documenteront l’articulation entre la mise en œuvre des mesures de réforme de l’action publique et le respect de la trajectoire des finances publiques (75).

La mission d’inspection souligne que le travail législatif du Parlement pourrait aborder plus avant les questions relatives aux modalités et à la modernisation de l’action publique « s’il pouvait se fonder sur des études d’impact améliorées comportant une réelle appréciation sur la charge des services induite par les projets de loi ainsi que les mesures mises en œuvre pour dégager les moyens correspondants (suppression de mission corrélative ou accroissement de moyens) ». Il existe une marge de progression pour le Gouvernement en matière de qualité des études d’impact accompagnant ses projets de loi. Les rapporteurs considèrent qu’il a tout intérêt à l’exploiter, dans l’optique de la modernisation de l’action publique.

Pour aller plus loin et placer la réflexion et l’action du Parlement à la fois sur chaque politique publique passée en revue et l’ensemble du processus de la MAP – y compris dans sa dimension budgétaire –, les rapporteurs ont proposé un article additionnel au projet de loi de finances pour 2013 tendant à définir des obligations d’informations du Parlement par le Gouvernement à l’occasion des CIMAP. Cet article, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, est reproduit dans l’encadré ci-après.

Article additionnel au projet de loi de finances pour 2013, adopté à l’initiative des rapporteurs par l’Assemblée nationale en première lecture

Article 59 decies

I. – Au moins quinze jours avant chaque réunion du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, le Gouvernement peut transmettre aux commissions chargées des finances et aux autres commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat l’ordre du jour détaillé, ainsi que tout élément d'information mentionné au II disponible à cette date.

II. – Au début de chaque trimestre, le Gouvernement transmet aux commissions chargées des finances et aux autres commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat les éléments utiles faisant état :

1° Des résultats des évaluations réalisées ;

2° Du suivi de la mise en œuvre des réformes précédemment décidées et leur incidence constatée sur les dépenses et les emplois publics ;

3° Des décisions prises et de leur incidence sur les emplois et les dépenses publics ;

4° Des modalités d’association des agents publics et des usagers des services publics.

III. – Les commissions parlementaires concernées peuvent adresser au Premier ministre et au ministre chargé de la réforme de l’État toutes observations qui leur paraissent utiles.

Ces éléments peuvent donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat.

IV. – L’article 122 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est abrogé.

Aux termes de cette disposition, les commissions permanentes du Parlement – en tant qu’elles sont concernées par les politiques publiques à l’ordre du jour des CIMAP – seraient destinataires de rapports trimestriels portant sur les évaluations, les scénarios de réforme, les mesures mises en œuvre et les modalités d’association des agents publics et des usagers. Le dispositif prévoit que les commissions permanentes peuvent faire part de leurs observations au Premier ministre et au ministre chargé de la réforme de l’État sur la base de ces rapports et que ceux-ci peuvent donner lieu à des débats en séance publique.

Il s’agit – plus largement – d’encourager les assemblées et leurs commissions permanentes à se saisir pleinement des sujets liés à la modernisation de l’action publique. Cette saisine peut prendre des formes diverses. À titre d’exemple, on peut évoquer les contributions écrites aux évaluations de politiques publiques (via par exemple des missions d’information), les auditions publiques des responsables politiques et administratifs (le secrétaire général de la modernisation de l’action publique, les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d’administration centrale ou déconcentrée) chargés de la mise en œuvre des réformes, ou encore l’organisation de tables rondes publiques thématiques associant les agents publics et les usagers.

3.– L’extension de la modernisation de l’action publique à l’ensemble des acteurs publics

a) Une recommandation fondamentale de la mission d’inspection

Le rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 suggère que la modernisation de l’action publique soit désormais mise en œuvre « sur un périmètre élargi à l’ensemble des acteurs considérés – outre l’État et ses opérateurs, les collectivités territoriales, les organismes de protection sociale, le secteur hospitalier » (76).

La mission d’inspection constate que de nombreuses politiques publiques sont partenariales, impliquant à ce titre l’État et d’autres acteurs publics ; ces politiques publiques ne peuvent être examinées et, le cas échéant, réformées que si l’ensemble des acteurs publics concernés sont mobilisés pour y procéder. Du point de vue budgétaire, la mission d’inspection précise qu’ « en aucun cas l’État ne pourra supporter à lui seul le fardeau de la restauration des équilibres financiers qui doit être partagé et assumé par l’ensemble des acteurs publics. Il est nécessaire que tous les porteurs de politiques publiques prennent leur part dans l’effort et que la répartition de celui-ci soit clairement affichée. »

Au regard de ces suggestions – justifiées aux yeux des rapporteurs puisqu’elles tendent à pallier une lacune structurelle de la RGPP –, il convient de préciser les intentions du Gouvernement.

b) La question de l’implication des collectivités territoriales

Les rapporteurs ont évoqué supra le lien que le Gouvernement souhaite établir entre les nouvelles modalités de modernisation de l’action publique et le futur projet de loi portant un nouvel « acte » de la décentralisation. La feuille de route du 1er octobre 2012 envisage que les premières politiques publiques passées en revue au titre de la MAP soient celles susceptibles d’être concernées par leur transfert – via ce projet de loi – de l’État aux collectivités territoriales. Concrètement, la feuille de route évoque l’« exemple de la formation professionnelle et de l’apprentissage ».

Il apparaît justifié que la première vague de politiques publiques passées en revue concernent les politiques qui pourraient être décentralisées, afin de s’inscrire dans le calendrier propre à ce projet de loi. En revanche, la nécessité – évoquée supra par les rapporteurs – de consacrer le temps nécessaire à cet exercice s’impose aussi pour ces politiques publiques. L’annonce par le Gouvernement de l’adoption par le conseil des ministres de ce projet de loi au début de l’année 2013 – et non en novembre 2012 – peut contribuer à une démarche plus raisonnable en la matière. Les rapporteurs souhaitent donc que le Gouvernement prenne le temps d’une réflexion partagée avec tous les acteurs.

Il conviendra également de veiller à ce que le nouvel acte de la décentralisation ne relève pas d’un transfert aux collectivités territoriales impliquant de facto, qu’au regard des moyens dont elles disposeraient pour assumer leurs nouvelles compétences, elles n’auraient pas d’autre choix que de procéder aux suppressions d’effectifs que l’État ne souhaite plus assumer.

Ces éléments portant sur le futur projet de loi relatif à la décentralisation n’épuisent pas le sujet de l’implication réelle et systématique des collectivités territoriales dans l’examen des politiques publiques dont elles sont responsables et partenaires. En la matière, il reste à concevoir une architecture nécessitant l’expertise de la direction générale des collectivités locales (DGCL) et l’implication résolue des associations d’élus locaux. L’enjeu n’est pas négligeable. L’exercice doit pouvoir contribuer à « objectiver » et – peut-être – dépasser le « dialogue de sourds » entre des collectivités territoriales qui mettent en avant leur obligation de voter des budgets à l’équilibre et l’État qui considère, via les dotations qu’il leur verse, prendre mécaniquement en charge une partie de leurs choix de dépenses.

c) La programmation d’un chantier consacré aux opérateurs de l’État

La feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 prévoit que les regroupements d’opérateurs ou la « ré-internalisation de certaines politiques » pourraient constituer des mesures de simplification dans le cadre de la modernisation de l’action publique. Selon la même feuille de route, chaque politique publique passée en revue donnera lieu, si elle s’y prête, à un examen de la « question du rôle des opérateurs, de leurs missions, de leur périmètre et de leur gouvernance ». En octobre ou novembre 2012, il aura été procédé à l’« engagement d’un chantier transversal sur les opérateurs ».

L’implication résolue des opérateurs dans l’exercice général de modernisation de l’action publique est incontournable, le budget triennal leur imposant – tout autant qu’à l’État – la stabilisation de leurs effectifs et de leurs crédits en valeur. Un tel chantier impliquera que soit abordée la question du financement – pour certains d’entre eux – via des taxes affectées (77).

d) La question de l’implication des organismes de sécurité sociale et du secteur hospitalier

L’introduction de la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 fait référence aux organismes de sécurité sociale comme acteurs publics concernés par la nouvelle « approche transversale » envisagée pour passer en revue et réformer les politiques publiques. Il s’agit cependant de la seule référence de ce document faite à ces organismes. Or, l’implication réelle des organismes de sécurité sociale dans le cadre de la MAP constitue un chantier lui aussi incontournable.

Les rapporteurs notent que cette feuille de route ne mentionne pas le secteur hospitalier, alors que des questions portant sur l’efficience de l’action publique dans ce domaine doivent être reposées, dans le contexte de la remise en cause de la convergence tarifaire entre secteurs hospitaliers public et privé et d’un questionnement sur la tarification à l’activité (T2A) comme fondement du financement des établissements hospitaliers.

Dans son rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 (assurance maladie et accidents du travail), M. Christian Paul émet de nombreuses critiques concernant à la fois la convergence tarifaire et la T2A. Il n’en relève pas moins que « faire davantage de qualité à des coûts compatibles avec l’état de nos finances publiques suppose non seulement de suivre attentivement la situation financière des hôpitaux, mais également de continuer à dégager des marges d’efficience au sein de ces établissements. Les économies à réaliser devront toutefois être réalisées en concertation avec les représentants des fédérations et des personnels concernés, et non pas imposées de manière arbitraire, comme cela a été trop souvent le cas par le passé. En effet, l’expérience montre que lorsque les restructurations ne sont pas le fruit d’un diagnostic et d’un projet partagés suscitant l’adhésion des acteurs de terrain appelés à les mettre en œuvre, celles-ci sont généralement vouées à l’échec » (78). Ce constat montre la nécessité d’un examen évaluatif approfondi du secteur hospitalier, dans le cadre d’un processus effectif et réellement partenarial de modernisation de l’action publique.

B.– DES ACTEURS CONFORTÉS : UNE MÉTHODE S’APPUYANT SUR LES AGENTS ET LES USAGERS

1.– Des agents publics au cœur et à l’origine des réformes ?

a) Les propositions des rapports d’inspection pour modifier la gestion des ressources humaines dans le cadre de la modernisation de l’action publique

Le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, constatant les carences de la RGPP en la matière, propose une modification en profondeur de la gestion des ressources humaines dans le contexte de la MAP.

À l’instar de certains responsables administratifs entendus par les rapporteurs, la mission d’inspection propose un renforcement des prérogatives de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), dotée d’une « dimension plus stratégique, plus opérationnelle et plus déconcentrée » en matière de GRH (79). La DGAFP serait ainsi chargée de la mise en œuvre d’un plan interministériel approuvé par le Premier ministre en matière de GRH, plan dont l’élaboration s’appuierait sur un processus d’unification de la fonction GRH dans chaque ministère.

La mission IGA/IGF/IGAS propose que la GRH de l’État soit moins consacrée à la gestion statutaire des personnels et plus à la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC), qui serait encore insuffisamment développée dans certains ministères et aux échelons locaux. L’allègement de la gestion statutaire passe, pour la mission d’inspection, par la poursuite de la baisse du nombre des corps (pour parvenir à 230 corps en 2015), ainsi que par la clarification et la simplification des règles relatives aux actes de gestion (notamment les actes complexes, portant sur l’articulation des niveaux national et déconcentrés ou concernant plus d’un budget opérationnel de programme – BOP).

Afin d’identifier les sources d’allègement de la gestion statutaire, la mission d’inspection propose que la DGAFP – appuyée par la DGME – mette en place des « ateliers ressources humaines chargés de proposer concrètement des réformes ou des adaptations dans un délai de six mois » (80). Ces ateliers rassembleraient des gestionnaires des ressources humaines de l’État aux niveaux central et déconcentrés.

La mission d’inspection IGA/IGF/IGAS propose que la convergence indemnitaire, « nécessaire pour faciliter les mobilités, mais aussi pour rétablir une équité minimale au sein des communautés de travail », fasse l’objet d’une action à la fois résolue pour donner la visibilité nécessaire aux agents concernés et pluriannuelle pour ménager son impact sur les finances publiques.

La même mission insiste sur l’attention à porter à l’accompagnement des réformes en matière de GRH. Elle propose une professionnalisation accrue de cette fonction, une intégration de la question de la GRH dès la conception des réformes et la mise en réserve des enveloppes budgétaires nécessaires au financement de l’accompagnement au changement en matière de personnels.

Au total, la mission IGA/IGF/IGAS propose, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, la mise en place d’une GRH de l’État réellement pilotée au niveau interministériel (y compris aux niveaux déconcentrés) et résolument simplifiée aux niveaux des ministères et des échelons locaux (s’agissant notamment de la gestion statutaire des personnels).

Le souhait d’une interministérialité accrue de la GRH – et de la fonction publique elle-même – fait écho aux constats d’un rapport de l’IGF rendu public en février 2011, présentant une étude des stratégies de réforme de l’État à l’étranger (81). Illustrant l’un des trois « leviers de réforme de l’État particulièrement innovants » recensés par l’équipe d’inspection, ce rapport précise qu’« aux Pays-Bas, l’organisation même de l’État se trouve repensée à travers une dynamique de décloisonnement administratif conduisant à l’émergence d’une administration centrale “unifiée”, interopérable, et ainsi plus à même de conduire ses réformes, [ceci] soulevant à terme la possibilité d’une disparation des entités ministérielles en tant que telles. »

Au demeurant, les rapporteurs avaient dans leur rapport initial relevé le regard relativement bienveillant porté par certains représentants syndicaux sur le décloisonnement de la GRH dans la fonction publique, à la fois entre ministères et entre les trois fonctions publiques (82).

b) L’action et les projets du Gouvernement

Comme en témoigne l’encadré suivant, la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 tient compte du calendrier défini à l’issue de la grande conférence sociale des 9et 10 juillet 2012 et s’inscrit dans les préconisations faites par le rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012.

Extrait de la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012

« Rénover la gestion des ressources humaines »

À l’issue des concertations ouvertes à la suite de la grande conférence sociale sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations des agents publics, la ministre en charge de la fonction publique préparera un plan d’action destiné à :

– simplifier la gestion statutaire pour redonner toute sa place à la gestion des ressources humaines ;

– favoriser la convergence interministérielle et le rapprochement entre les trois versants de la fonction publique ;

– faire vivre concrètement la mobilité notamment au niveau des bassins d’emploi ;

– donner aux DRH les moyens d’accompagner le changement.

Dans ses réponses adressées aux rapporteurs, le Gouvernement précise deux des points en rapport avec la MAP qui sont abordés lors de la concertation – ouverte le 10 octobre 2012 – sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations des agents publics.

Il s’agit en premier lieu de la prime de fonctions et de résultats (PFR) versée à certains fonctionnaires de l’État (150 000 fin 2011) (83). Selon le Gouvernement, « la concertation avec les organisations syndicales […] permettra de faire le bilan de la PFR et d’en tirer les conséquences ».

En second lieu, le Gouvernement présente concrètement ses projets concernant la poursuite de la fusion des corps de fonctionnaires et de la création de corps interministériels (projets soumis eux aussi à la concertation avec les organisations syndicales sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations des agents publics). Le Gouvernement note en réponse aux rapporteurs que « le développement de ces deux outils de simplification devrait être poursuivi, mais dans le cadre d’une concertation syndicale approfondie ».

La feuille de route gouvernementale du 1er octobre prévoit deux éléments de calendrier concernant la GRH de l’État, de nature à préciser ses intentions à court terme :

– une évaluation des plates-formes régionales d’appui interministériel à la gestion des ressources humaines (PFRH) sera lancée en décembre 2012. Les PFRH ont été créées dans le cadre de la RGPP et ont en principe pour objet, auprès des secrétaires généraux pour les affaires régionales (SGAR), d’assurer une présentation régionalisée de l’offre de formation, de recenser les métiers et compétences disponibles, de conseiller les agents en matière de mobilité et de gérer dans chaque région une bourse régionale interministérielle de l’emploi public (BRIEP). Le rapport IGA/IGF/IGAS a a) constaté que les PFRH s’étaient installées avec difficulté dans le paysage administratif français – dans le contexte de la réduction des effectifs – et b) préconisé que les PFRH deviennent des relais régionaux plus puissants d’une DGAFP engageant « une vraie gouvernance régionale interministérielle des ressources humaines » (84) ;

– plus largement, « une feuille de route sur la rénovation de la gestion des ressources humaines à l’issue de la concertation menée avec les organisations syndicales » devrait être établie au premier semestre de l’année 2013.

c) La prise en compte des propositions de réforme des agents

La mission d’inspection IGA/IGF/IGAS estime nécessaire, dans le cadre d’une démarche différente de celle qui a présidé au lancement de la RGPP, « de donner désormais la parole aux services. […] Les agents, l’encadrement intermédiaire et les responsables de services déconcentrés sont souvent les mieux placés pour identifier incohérences, lourdeurs et tâches inutiles dans le fonctionnement des services, y compris les fonctions support ». Pour ce faire, la mission d’inspection propose que soient associés à une démarche nouvelle – à la fois souple pour la validation et la mise en œuvre locales des préconisations les plus simples et suffisamment encadrée pour permettre la remontée rapide des propositions les plus structurantes – les « agents de tous grades et de tous services » (85).

Le Gouvernement envisage de mettre en œuvre cette préconisation ; « faire confiance aux capacités d’innovation des agents publics » constitue au demeurant à soi seul l’un des quatre chapitres de la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012. L’encadré précise les modalités pratiques envisagées par le Gouvernement pour ce faire.

Extrait de la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012

« Associer les agents à la modernisation de l’action publique »

Sur la base des orientations qui leur seront adressées en novembre [2012] et qui seront présentées aux organisations syndicales représentatives, les ministres, les préfets et les chefs de service déconcentrés organiseront des réunions de concertation avec les agents sur le terrain pour identifier les pistes opérationnelles d’amélioration des conditions de travail au quotidien, de simplification ou de réorganisation des processus administratifs et d’allègement des circuits d’instruction et de remontée d’information. Cette démarche associera tous les agents quels que soient leurs responsabilités et leurs métiers. Elle sera menée en lien étroit avec les représentants des personnels.

Elle se déroulera à partir du début du mois de novembre et sur une période de trois mois. Les propositions issues de ces travaux donneront lieu, lorsqu’elles ne pourront être mises en œuvre directement au niveau local, à un examen interministériel accéléré sous l’égide du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique pour permettre leur éventuelle généralisation immédiate.

Il conviendra de veiller au caractère opérationnel de l’ensemble du processus – notamment en garantissant que la parole soit donnée aux agents à titre individuel, dans le respect des modalités proposées d’intervention des organisations syndicales et des représentants du personnel.

2.– Des modalités diversifiées d’association des usagers

a) Poursuivre une démarche de simplification administrative s’appuyant sur l’analyse des besoins des usagers

Le Gouvernement a choisi – dans le cadre de la MAP – de poursuivre la mise en œuvre de mesures de simplification administrative s’appuyant sur l’analyse des besoins des usagers du service public, via les « évènements de vie » (tels que « je vais aux urgences » ou « je crée une entreprise »).

La DGME avait conduit une telle démarche dans le cadre de la RGPP et l’exercice a été considéré comme méritant d’être amplifié par le rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012. Il s’agit au demeurant d’une modalité de conception des réformes administratives considérée comme innovante par le rapport de l’IGF d’avril 2011 consacré aux stratégies de réforme de l’État à l’étranger. La synthèse de ce rapport indique que plusieurs pays – dont le Canada, l’Italie et les Pays-Bas – ont lancé une « nouvelle dynamique de simplification […] en basculant d’une logique descendante vers une logique ascendante, axée sur l’identification des principaux motifs de complexité perçus par les usagers (entreprises comme particuliers) » (86).

Dans ses réponses aux rapporteurs, le Gouvernement inscrit son action dans ce type de démarche. Il souligne que « pour améliorer la qualité du service rendu aux citoyens, il est essentiel d’en adopter le point de vue par la prise en compte de ses interactions avec les différents organismes publics. Cela permet de comprendre dans quelle mesure la complexité ressentie est en grande partie due au manque de cohérence du parcours “inter-administrations” : redondance des informations demandées, contradictions éventuelles, difficulté à s’orienter ».

Le Gouvernement ajoute que « pour aller plus loin dans la réduction de l’insatisfaction, un travail sur l’analyse des moteurs de la satisfaction sur une vingtaine de critères de la qualité de service auprès des particuliers (délai, amabilité de l’interlocuteur, information, etc.) sera conduit. Ce dernier pourra permettre de construire des scénarios précis qui permettent de faire baisser l’insatisfaction ou monter la satisfaction grâce à la mise en place d’actions précises sur ce qui compte vraiment aux yeux de leurs usagers ».

La feuille de route du 1er octobre 2012 précise que de nouveaux chantiers prioritaires « d’analyse des besoins des usagers, de simplification des démarches et de dématérialisation » – cinq pour les particuliers et cinq autres pour les entreprises – seront confiés au SGMAP. Selon les informations recueillies par les rapporteurs, certains des chantiers à venir porteront :

– pour les particuliers, sur les démarches administratives effectuées par les personnes les plus fragilisées et précarisées, par les jeunes à l’entrée dans la vie étudiante et la vie active, par les nouveaux arrivants en France et par les particuliers subissant la perte d’un proche ;

– pour les entreprises, sur les simplifications susceptibles de contribuer à leur compétitivité et sur la mise en œuvre effective de la disposition légale selon laquelle une entreprise (et au demeurant tout usager) n’est tenue de fournir un renseignement qu’une seule fois pour l’ensemble des administrations intéressées (87).

Selon le Gouvernement, en plus de ces chantiers transversaux, « chaque ministère sera invité à proposer un plan d’amélioration de simplification et d’amélioration de la qualité de service basé sur une analyse des attentes prioritaires des usagers et une démarche participative avec les agents ».

b) Améliorer le baromètre des services publics

Dans leur rapport initial (88), les rapporteurs avaient salué le principe de la publication régulière d’une mesure de la satisfaction des usagers des services publics. Le baromètre des services publics leur semblait un dispositif s’inscrivant dans cette démarche, avec les limites suivantes :

– la confection du baromètre relevait de la DGME, alors que la crédibilité d’un tel outil implique qu’il soit conçu, établi et présenté dans un souci d’indépendance par rapport à l’administration ;

– le baromètre doit s’appuyer à la fois sur des indicateurs objectifs – bâtis sur des critères transparents et raisonnables – de la qualité des services publics, et sur une mesure de la satisfaction des usagers.

Conformément à l’esprit des observations des rapporteurs, la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 prévoit qu’« un baromètre indépendant de la qualité des services publics perçue par l’usager et de la confiance des citoyens sera mis en place ». Dans ses réponses aux rapporteurs, le Gouvernement précise que ce baromètre sera conçu comme un levier de modernisation de l’administration et que ses indicateurs devront « à la fois mesurer la qualité des services publics (indicateurs de prestation) et la perception de la qualité des services publics par les usagers (indicateurs de satisfaction) ».

Le Gouvernement indique que la gouvernance du baromètre sera renouvelée et, plus précisément, que « la mise en place d’une instance de gouvernance indépendante va être étudiée afin de garantir l’indépendance, la transparence et la robustesse des indicateurs sélectionnés ». Le Gouvernement ne semble pas à ce stade privilégier une option particulière concernant la gouvernance du baromètre. Eu égard à son rôle de porte-voix des usagers et des citoyens et compte tenu de son indépendance à l’égard de l’administration, le Défenseur des droits pourrait utilement participer à cette gouvernance, voire la conduire.

c) De nouveaux moyens d’association des usagers ?

Le rapport d’inspection IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012 suggère que la prise en compte des constats et propositions des usagers dans le cadre de la modernisation de l’action publique soit mise en œuvre de façon à la fois pragmatique et organisée.

Le rapport d’inspection considère qu’« il n’existe pas une solution “standard” » pour procéder à cette mise en œuvre et suggère que des solutions différentes soient utilement choisies selon la politique publique considérée : mobilisation de groupements d’acteurs représentatifs, création non pérenne de groupes thématiques expérimentaux, usage des panels établis par la DGME ou réalisation d’enquêtes. En revanche, la mission souligne qu’il convient « d’éviter la multiplication d’initiatives parallèles de consultation aux contours et aux publics mal définis » (89).

Les modalités de la participation des usagers à l’examen évaluatif des politiques publiques – dans le cadre des vagues successives d’évaluation – gagneront effectivement à être définies au cas par cas. La feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 prévoit en tout état de cause que « l’évaluation de l’action publique par les canaux numériques sera renforcée par la mise à disposition d’applications et de sites dédiés au recueil des avis et idées des usagers ». Le même document envisage par ailleurs une participation – plus indirecte – des usagers via « la capacité des agents à analyser [leurs] besoins […] et à proposer des réponses adaptées à des territoires ».

3.– Vers la création d’une instance de dialogue, de réflexion prospective et d’expertise sur les politiques publiques

Conformément aux propos tenus par le Premier ministre le 10 juillet 2012 lors de la clôture de la grande conférence sociale, la feuille de route gouvernementale du 1er octobre 2012 prévoit la création d’« une instance de dialogue, de réflexion prospective et d’expertise sur les politiques publiques [afin] de disposer d’un lieu d’évaluation, de dialogue et de prospective sur les enjeux de moyen et long terme qui s’attachent à l’action publique ».

Au préalable, le Premier ministre a chargé le 14 septembre 2012 Mme Yannick Moreau (90), présidente de section au Conseil d’État, d’animer un groupe de travail chargé d’envisager les conditions de la création de cette instance.

La lettre de mission adressée par le Premier ministre à Mme Yannick Moreau indique que la nouvelle instance – « lieu de dialogue, de réflexion prospective et d’expertise sur les politiques publiques ouvert à l’ensemble des acteurs sociaux » – se substituera « notamment au Centre d’analyse stratégique ». La même lettre précise que la réflexion du groupe de travail doit porter « sur les conditions à réunir et la méthode à suivre pour que [cette instance] soit effectivement en prise sur les processus de décision » liés à la MAP. Le souhait du Premier ministre est que le champ de compétences de la nouvelle instance comprenne les questions sociales, relatives au travail et à l’emploi, liées à l’économie et aux investissements publics, ainsi que celles qui touchent aux enjeux du développement durable et à la qualité de l’action publique. Les travaux du groupe de travail doivent être achevés le 30 novembre 2012.

C.– UNE ARTICULATION RENOUVELÉE AVEC LES OBJECTIFS DE LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE

1.– L’organisation gouvernementale a modifié le lien institutionnel entre la réforme de l’État et la politique budgétaire

La composition du Gouvernement et les attributions des ministres ont conduit, dès le mois de mai 2012, à mieux séparer la réforme de l’État – désormais confiée au ministère chargé de la décentralisation et de la fonction publique – et la politique budgétaire. S’agissant des trois directions d’administration centrale dont le placement sous l’autorité du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État a caractérisé la RGPP, on relève que :

– la direction du budget demeure sous l’autorité de M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, et à la disposition de M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget ;

– la DIMAP (ex-DGME) est placée sous l’autorité de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique. Il a été précisé supra que la DIMAP constitue un élément clé du SGMAP placé sous l’autorité du Premier ministre et mis à la disposition de la ministre chargée de la réforme de l’État ;

– la DGAFP est placée sous l’autorité conjointe de M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, et de Mme Marylise Lebranchu.

Il apparaît que cette organisation gouvernementale traduit moins une rupture du lien entre la réforme de l’État et les questions budgétaires que l’affirmation de la dimension interministérielle de la modernisation de l’action publique.

2.– Le maintien du lien entre réforme de l’État et trajectoire des finances publiques est incontournable

a) La position de la mission d’inspection : un processus institutionnel itératif liant la réforme de l’État et ses impacts budgétaires

Le rapport d’inspection du 25 septembre 2012 constate que « le contexte de très forte contrainte budgétaire » (91) conduira au maintien d’un lien entre réforme de l’État et trajectoire des finances publiques. Au demeurant, en matière de modernisation de l’action publique, il « préconise un renforcement du suivi budgétaire, complémentaire des rendez-vous budgétaires habituels ».

La mission d’inspection suggère que ce suivi budgétaire soit effectué dans le cadre d’un comité interministériel budgétaire (CIB), dont le rapporteur serait le ministre chargé du budget. La mission d’inspection propose que chaque ministre présente devant le CIB « les voies et moyens par lesquels il entend respecter le cadrage pluriannuel qui lui a été notifié par les lettres-plafonds du triennal 2013-2015 mais aussi la traduction budgétaire des décisions prises » par le CIMAP.

La mission d’inspection propose ainsi un encadrement interministériel, via l’alternance des CIMAP et des CIB, du processus itératif mettant en relation les éléments du triennal propres à chaque ministère et les mesures de réforme dont il est responsable au titre de la modernisation de l’action publique.

b) La trajectoire de redressement de nos finances publiques doit résolument s’appuyer sur la modernisation de l’action publique

Le Gouvernement n’a pas annoncé à ce stade la mise en place d’une instance comparable au CIB, tel qu’il est proposé par la mission d’inspection IGA/IGF/IGAS. Dans le contexte de la clôture de la RGPP, il a sans doute souhaité mettre l’accent sur les « fondamentaux » d’une modernisation de l’action publique s’appuyant sur un examen évaluatif des politiques publiques associant l’État, ses partenaires publics, les agents publics, les usagers et le Parlement.

Il n’en reste pas moins, quelles que soient les modalités institutionnelles et pratiques que le Gouvernement choisira, que la dimension budgétaire de la modernisation de l’action publique demeure incontournable. Le respect par chaque ministère du triennal 2013-2015 passe par la mise en œuvre, dans chaque ministère, de mesures de réforme de l’action publique. Plus encore, l’examen évaluatif effectif des politiques publiques puis le choix de mesures de réforme de l’action publique constituent les conditions sine qua non d’une mise en œuvre « documentée » – ou « intelligente » – de la trajectoire de redressement de nos finances publiques. Ce processus doit permettre d’éviter que cette mise en œuvre s’appuie sur des pratiques forfaitaires de diminution des dépenses publiques, mises en œuvre sans vision pluriannuelle de l’évolution de l’action publique.

La « documentation » – via des réformes administratives bien conçues –des économies prévues par le triennal 2013-2015 doit au demeurant être engagée sans délai. Il faut à la fois a) prendre le temps nécessaire à l’évaluation partagée des politiques publiques et aux choix de mesures de réforme et b) agir suffisamment rapidement pour des effets concrets et budgétaires dès l’exercice 2013.

Cette tâche – nécessitant à la fois courage, rapidité, clairvoyance et ingéniosité – sera ardue pour tous les ministères, y compris ceux conduisant des politiques publiques jugées prioritaires par le Gouvernement. Le secrétaire général des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur et de la recherche – auditionné par les rapporteurs – a témoigné de l’ampleur de cette tâche. Le ministère de l’Éducation nationale doit absorber une baisse de 10 % de ses crédits de fonctionnement au cours du triennal 2013-2015 – après une baisse constatée de 20 % sur cinq ans –, dans un contexte où la réforme de la formation des enseignants conduira à l’apparition de besoins nouveaux en fonctionnement. La RGPP ayant duré cinq ans, l’effort d’économies à documenter pour l’avenir intervient – pour tous les ministères – à un moment où les « gisements » d’économies qui demeurent disponibles ne sont ni les plus aisés à mettre en œuvre, ni les plus « rentables ».

Il serait enfin illusoire de penser que la difficulté de l’exercice liant la modernisation de l’action publique et le respect de nos engagements budgétaires pourrait être contournée par la découverte de missions qu’une revue des politiques publiques conduirait à supprimer. La MAP n’échappera pas à l’un des principaux constats de la mission IGF d’avril 2011 portant étude des stratégies de réforme de l’État à l’étranger : « Au-delà des spécificités institutionnelles ou culturelles inhérentes à chaque pays, la réforme de l’État s’est traduite au cours de la décennie 2000-2010 par plusieurs évolutions convergentes : […] tout d’abord, les stratégies engagées ont quasiment toutes été conduites à périmètre inchangé : la sphère publique n’a pas abandonné de missions […]. »

EXAMEN PAR LE COMITÉ

Au cours de la séance du 22 novembre 2012, le Comité examine le présent rapport de suivi.

M. le président Claude Bartolone. Notre ordre du jour appelle l’examen du rapport de suivi de l’évaluation de la RGPP réalisée à la fin de la précédente législature, qui a été présentée au Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) le 1er décembre 2011. Il a été préparé par les deux auteurs du rapport initial, M. François Cornut-Gentille et M. Christian Eckert. Après les avoir entendus, nous réfléchirons aux suites à donner à leur remarquable travail.

M. Christian Eckert, rapporteur. Le rapport consistant que nous avons réalisé au mois de décembre 2011 avait été élaboré de façon consensuelle entre les deux rapporteurs, dont il ne vous a pas échappé qu’ils ne partagent pas la même sensibilité politique.

La réorganisation de notre assemblée et le travail assez substantiel qui m’a été confié en tant que rapporteur général m’ont conduit à déléguer à François Cornut-Gentille l’élaboration du rapport de suivi. J’ai en effet participé à peu d’auditions et, pour la suite éventuelle de nos travaux, sans doute sera-t-il utile qu’un collègue me remplace. Cela ne nous a pas empêché de travailler en bonne entente, comme lors de l’élaboration du rapport initial, et de formuler aujourd’hui un constat partagé.

En tant que parlementaires, il nous est apparu que l’une des raisons de l’échec ou, à tout le moins, de la mauvaise image de la RGPP s’explique par la non association du Parlement à cette politique. La réussite de la modernisation de l’action publique (MAP) doit en revanche reposer sur la participation des parlementaires et, bien évidemment, des usagers ainsi que des personnels. Ainsi, un amendement au PLF pour 2013 a été adopté en première lecture afin de créer les conditions d’une telle association ou, si j’ose dire, d’une « navette » entre ceux qui sont chargés de la MAP au sein du Gouvernement et nous autres, parlementaires. Si vous en êtes d’accord, nous devrons nous appuyer sur cet élément créant les conditions d’une bonne information du Parlement.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Je vous remercie, cher Christian Eckert, pour vos propos.

Je me consacrerai essentiellement à l’exposé des conclusions du rapport afin que nous puissions débattre. Vous l’avez reçu il y a quelques jours mais, si vous n’avez pas eu le temps de le lire, vous pouvez vous reporter au sommaire ou aux slides qui viennent de vous être distribués.

Les conclusions que nous avons formulées concernent la réforme de l’État elle-même, objet de la RGPP – la MAP aujourd’hui –, ainsi que le rôle du Parlement. Je soutiens la thèse – que vous partagerez, je l’espère – selon laquelle le Parlement peut et doit devenir un moteur de la réforme de l’État. Il s’agit même d’une condition de sa réussite, mais cela suppose une évolution assez profonde du travail parlementaire, que la méthode de travail au sein du CEC peut en partie préfigurer.

En effet, nous travaillons sur le long terme. Voilà à peu près deux ans que Christian Eckert et moi-même réfléchissons sur le thème qui nous réunit ce matin. Si, parfois, le travail parlementaire est un peu superficiel puisqu’il nous arrive de passer d’un sujet à l’autre, tel n’est pas en l’occurrence le cas. Sur une telle période, même si chacun a gardé ses convictions, nos idées sur la réforme de l’État ont évolué, se sont affinées et approfondies.

De plus, comme l’a dit Christian Eckert, nous n’avons pas la même sensibilité politique. Le changement de majorité a inversé nos rôles, et c’est très bien. Ces regards croisés dans la durée permettent de travailler d’une manière un peu différente et de nourrir une vision sans doute moins manichéenne. Nous nous approchons ainsi de ce que doit être un véritable travail parlementaire, sans complaisance ni vindicte, mais visant à éclairer et à faire comprendre les choix qui s’offrent à nous. C’est ainsi que l’on pourra proposer des solutions.

La tonalité de notre rapport de 2011, dans un contexte préélectoral, était quelque peu critique. Nous avons formulé un certain nombre de points de vue désagréables, et sur la violence de la RGPP ainsi que du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, et sur le fait que les agents de la fonction publique ont plus subi cette politique qu’ils ne l’ont accompagnée. Nous avons aussi souligné certains acquis : une volonté politique forte, une action déterminée, un travail sur les fonctions de soutien des ministères, une meilleure réactivité de la part de ces derniers. Ainsi, si la MAP rompt avec le « un sur deux », elle préserve des acquis ou des réformes de base de la RGPP.

Le rapport que nous présentons aujourd’hui permet d’aller plus loin.

Le Gouvernement avait demandé à dix inspecteurs issus de trois inspections de réaliser un audit de la RGPP, lequel valide globalement l’ensemble du travail que nous avons réalisé et sur lequel le Gouvernement s’est appuyé pour mettre en place la MAP. Nous avons donc été entendus. Le Gouvernement essaie d’atténuer la violence de la RGPP, met en place un certain nombre de mécanismes permettant de favoriser la participation des fonctionnaires et, enfin, se montre attentif à la gestion des ressources humaines, domaine dans lequel l’État a des progrès à accomplir. Il s’est donc saisi de tous les points sur lesquels nous l’avions alerté.

Néanmoins, il ne suffit pas d’affirmer que la RGPP est morte et de supprimer le « un sur deux » pour s’abstraire de la pression financière, qui reste extrêmement forte. Si je ne doute pas de la volonté du Gouvernement de réfléchir profondément à la réforme de l’État, elle se heurte néanmoins – comme ce fut le cas autrefois pour les promoteurs de la RGPP – aux contraintes financières. Je le répète : la pression demeure forte au sein des ministères et peut-être empêchera-t-elle la réflexion d’aller aussi loin qu’il serait souhaitable.

Afin de sortir d’une telle situation, il convient de trouver d’autres mécanismes permettant d’impulser la réforme de l’État. Deux directions nous semblent en l’occurrence devoir être explorées : l’action parlementaire, je l’ai dit, ainsi que celle des citoyens et des usagers.

Ce dernier point faisait déjà partie des objectifs de la RGPP mais la MAP vise à faire mieux, dans un contexte où nous nous heurtons à de nombreuses difficultés. Qui sont, au fond, les usagers ? Leurs associations sont-elles représentatives et unies ? Les ministères font quant à eux de grands efforts afin de réaliser des enquêtes de satisfaction, mais ils sont à la fois juge et partie. Même si les fonctionnaires sont très consciencieux, il est probable que les attentes du public se heurtent à une stratégie de communication qui peut susciter parfois quelques doutes. Nous envisageons donc de faire en sorte qu’une partie des outils visant à déterminer les attentes des usagers devienne indépendante des ministères et soit confiée au Défenseur des Droits. Réceptionnant toutes les plaintes et les doléances des administrés, il se montrerait impartial pour gérer ces outils et mieux refléter les attentes de nos concitoyens. Si une telle idée ne devait pas être retenue, nous serions néanmoins dans l’obligation de promouvoir une approche plus objective et impartiale de la détermination des attentes de nos concitoyens.

Le Parlement, quant à lui, doit être le moteur de la réforme de l’État afin que ce dernier puisse bénéficier d’une analyse plus fine et d’un regard extérieur. D’une façon peut-être techniquement utile mais politiquement et « managerialement » maladroite, la RGPP avait accordé une grande importance aux audits privés. Or, malgré les éclairages apportés, imposer de but en blanc à l’administration la vision du secteur privé soulevait un certain nombre de problèmes. En revanche, la pression et les audits du Parlement, avec sa légitimité démocratique, peuvent être une force afin de faire avancer la réforme de l’État. Le rapport de la mission d’inspection allait dans ce sens-là mais ne formulait pas vraiment de propositions opérationnelles. Nous proposons quant à nous de travailler dans deux directions.

Tout d’abord, donc, une association directe du Parlement à la réforme de l’État. Nous avons fait adopter en commission des Finances puis lors de la discussion budgétaire un amendement demandant au Gouvernement, chaque fois qu’il met en œuvre une nouvelle étape de modernisation de l’État, d’indiquer au Parlement quels sont ses constats et ses objectifs. Le Parlement pourra ainsi poser des questions, émettre des recommandations et suivre « en direct » le mouvement de réforme.

Ensuite, il nous a semblé utile d’essayer de faire monter en puissance les débats portant sur la loi de règlement. Chaque année, le débat budgétaire dure deux mois à l’automne et mobilise l’ensemble des parlementaires et des ministres. Il est pourtant un peu virtuel et artificiel puisque la majorité a tendance à faire des louanges des intentions du Gouvernement quand l’opposition préfère se montrer suspicieuse. En revanche, l’examen de la loi de règlement, qui pourrait devenir une analyse du budget effectivement réalisé – lequel diffère souvent de la loi de finances initiale –, occupe seulement pendant deux heures un hémicycle clairsemé. Or, si nous organisions un certain nombre de discussions et d’audits autour de la loi de règlement, notre travail parlementaire serait plus documenté, plus intéressant, plus efficace, plus valorisant. Nos questionnements pourraient être en effet beaucoup plus affinés : vous aviez prévu de dépenser telle somme pour tel programme ? Avez-vous changé d’avis ? Sont-ce les structures et l’organisation gouvernementales qui n’ont pas fonctionné ? Il est également possible, dans un tel cadre, de prendre date pour la loi de finances à venir.

Je le répète : un travail plus approfondi qui s’inspirerait de celui mené au sein du CEC aurait des incidences positives sur la qualité des débats budgétaires. C’est en tout cas l’hypothèse que je formule et c’est la direction dans laquelle je souhaiterais que nous nous engagions. J’insiste : un questionnement intense autour de la loi de règlement ferait que, lorsque le ministre de l’économie et des finances présente le PLF, nous ne nous contenterions pas de dire si nous sommes d’accord ou non. Nous lui rappellerions les questions que nous lui aurions posées sur l’exécution du budget précédent, nous lui dirions que nous souhaitons connaître les raisons des succès et des échecs. Un tel travail parlementaire dans la durée, assorti d’un regard croisé de la majorité et de l’opposition, serait à mon sens beaucoup plus utile à notre pays.

Tout cela m’a conduit à me demander pourquoi la LOLF n’a pas permis la révolution qu’elle avait annoncée. C’est d’abord parce qu’elle est restée, si j’ose dire, prisonnière de la commission des Finances. Cette dernière peut être un fer de lance dans la mise en place des nouvelles pratiques que nous voulons initier, mais si ces dernières ne sont pas partagées par l’ensemble de nos collègues, elles demeureront marginales. Il faut que les parlementaires, toutes commissions confondues, s’approprient cette nouvelle façon de travailler.

En outre, nous avons voulu changer nos méthodes de travail du jour au lendemain. Des collègues prestigieux ont formulé des recommandations très intéressantes qui demeurent d’ailleurs à ce jour assez valables, mais qui supposaient une évolution plus profonde de notre travail. Or, un changement de comportement ne se décrète pas par des textes. Je suggère donc de promouvoir une approche très expérimentale. Progressivement, avec des collègues issus de différentes commissions, nous devons essayer d’examiner comment il est possible d’enrichir nos débats. Une généralisation sera envisageable lorsque la preuve d’un bon fonctionnement aura été apportée.

Je ne vous propose pas une option de travail parmi d’autres. Je ne vous dis pas que la réforme de l’État fonctionnera un peu mieux si le Parlement s’en occupe. Ma conviction, c’est qu’elle ne sera effective que si le Parlement, aiguillon indispensable, se l’approprie. Cela implique que le Gouvernement comprenne cette démarche. Oui, un travail parlementaire plus approfondi peut aider à la réforme. Il ne se résume pas à poser de temps en temps des questions « enquiquinantes » mais il suppose que les parlementaires se saisissent de certains sujets et acceptent de travailler un peu autrement que par le passé.

M. Christian Eckert, rapporteur. Je partage l’analyse de François Cornut-Gentille quant à l’importance de la loi de règlement, à laquelle la loi organique que nous avons très récemment adoptée confère d’ailleurs plus d’importance que par le passé, notamment s’agissant de la vérification de la concordance de l’exécution budgétaire par rapport aux lois pluriannuelles encadrant l’évolution des finances publiques.

La MAP doit immanquablement impliquer – sans doute avons-nous été un peu timides à ce sujet pendant ces premiers mois – une analyse et une réforme des agences et des opérateurs de l’État. Lors du dernier débat budgétaire, les propositions volontaristes qui ont été formulées n’ont pas toujours été suffisamment suivies. Je les réitérerai donc, notamment celles qui concernent des plafonnements ou des contraintes à faire peser sur certains opérateurs de l’État.

Enfin, il me semble qu’il est impossible de déconnecter la MAP de l’acte III de la décentralisation – il en est un peu question dans le rapport – qui, s’agissant de la répartition et de l’exercice des compétences, doit intégrer le travail propre à la réforme de l’État.

M. Jacques Myard. Je vous ai écoutés avec beaucoup d’intérêt.

Il a été grandement question de méthode. Première remarque d’un député de base : pour que le Parlement remplisse sa mission de contrôle, il faut poser la question des moyens dont il dispose et dont disposent les députés. Or, nous sommes des artisans et nous avons peu de moyens. Si la loi sur le non cumul des mandats est votée, il faudra les renforcer. Vous savez comment nous travaillons et combien nous manquons de collaborateurs par rapport à ceux dont disposent des collègues dans d’autres démocraties.

De plus, je suis un peu surpris qu’une mission de contrôle de la réforme de l’État soit confiée au Défenseur des Droits. Ce dernier pointe un dysfonctionnement singulier dans un service public et la conclusion ne manque pas de tomber : il faut plus de moyens ! Il n’est jamais question de faire mieux ou de rationaliser.

Par ailleurs, que pensez-vous, messieurs les rapporteurs, de deux points qui me paraissent soulever de sacrés problèmes quant au fonctionnement de l’État : d’une part, la multiplication des agences indépendantes, qui engendre une totale irresponsabilité démocratique – ces pseudo autorités administratives, dont la seule fonction est de remettre un rapport, échappent quasiment à tout contrôle –, et, d’autre part, la démultiplication des normes, laquelle engendre une certaine pesanteur ? Ainsi, le concessionnaire VEOLIA est-il intervenu avec un peu de retard dans ma commune de Maisons-Laffitte suite à un problème de canalisation et mes concitoyens n’ont pas manqué de se demander ce que c’était que ce service public à l’américaine ! Nous sommes donc pris entre, d’une part, une demande forte de nos compatriotes qui veulent plus de service public tout en voulant payer moins d’impôt et, d’autre part, sous la pression d’un certain nombre de lobbies, une multiplication des normes. Or, qui dit réglementation dit contrôle, fonctionnaires, agences... Une réflexion approfondie s’impose donc.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. La question des moyens est évidemment fondamentale et si nous voulons que le Parlement travaille d’une manière un peu différente, elle ne manquera pas de se poser. Travaillant avec Christian Eckert, je constate que le rapporteur général qu’il est dispose certes de quelques moyens, mais que, par rapport à la masse de travail effectué, ils sont faibles. Le parlementaire de base, monsieur Myard, n’est pas le seul à être concerné par ce problème que vous avez eu tout à fait raison de souligner. Nous devons toutefois apporter la preuve qu’il est possible de faire mieux afin que les moyens suivent, et pas l’inverse.

S’agissant du Défenseur des Droits, je n’ai peut-être pas été suffisamment clair. Mon idée n’est pas qu’il contrôle les ministères et les organismes publics mais qu’il soit responsable des baromètres d’image et de satisfaction pour s’assurer que les bonnes questions sont posées et que les attentes des usagers sont vraiment prises en compte. Quoi qu’il en soit, si le Défenseur des Droits ne devait pas être le bon interlocuteur, je suis persuadé qu’il faut sortir ces études du périmètre des ministères. Peut-être l’ex-direction générale de la modernisation de l’État (DGME) pourrait-elle aussi jouer ce rôle ou d’autres organismes mais, eux aussi ayant intérêt à montrer que leurs réformes sont efficaces, sans doute serait-il préférable de confier un tel travail à une autorité indépendante.

Christian Eckert, rapporteur. Lors de l’élaboration du notre rapport initial, nous avions auditionné le Médiateur de la République, qui, lui-même, avait publié un rapport qui avait eu un peu de retentissement. Qu’il ait été le révélateur d’un certain nombre de dysfonctionnements de nos services publics nous avait alors paru enrichissant.

François Cornut-Gentille a apporté les précisions qu’il fallait : le Défenseur des Droits ne doit pas avoir une fonction de contrôle mais, en quelque sorte, de « thermomètre » afin de mesurer ce qui se passe, même si nous avons par ailleurs nous-mêmes un certain nombre de retours dans nos permanences.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. En matière de contrôle, les termes de notre débat sont encore superficiels : l’État doit-il ou non conserver telle ou telle mission, à qui doit-il la confier ? Nous ne sommes pas encore parvenus à nous interroger sur le sens de ces missions ou de leur organisation : c’est cela qui explique la multiplication des organismes et des normes.

Les organismes prétendument indépendants ont été créés afin de bénéficier d’un peu de la souplesse dont nous ne disposions pas sur un plan administratif. S’interroger sur les missions permettra également de nous interroger sur leur raison d’être. Il est très frappant de constater que les grandes politiques nouvelles que nous avons menées comme le grand emprunt – début d’une politique industrielle –, ou l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) – début d’une politique de la ville après les Grands projets de ville (GPV) –, ont suscité la création d’un nouvel instrument. C’est donc bien la question des missions que le Parlement doit approfondir.

M. le président Claude Bartolone. Il faudra revenir sur ce problème fondamental des moyens évoqué par M. Myard. Ou la fin du cumul des mandats est suivie d’une revalorisation du Parlement et de l’organisation d’un nouveau mode de fonctionnement, ou les électeurs se demanderont à quoi nous servons.

M. Jacques Myard. Ils se posent déjà la question.

M. le président Claude Bartolone. À partir des documents annexés au PLF pour 2013, j’ai dénombré 668 comités « Théodule ». Certes, tous n’ont pas la même importance mais je ne comprends pas pourquoi une partie de leurs travaux n’est pas rapatriée au sein du Parlement.

M. Jacques Myard. C’est évident.

M. le président Claude Bartolone. J’ai eu l’occasion de m’adresser au Président de la République et au Premier ministre et je formulerai une série de propositions, mais il n’est pas possible de prétendre vouloir revaloriser le rôle du Parlement tout en externalisant une partie de son action.

Mme Claude Greff. On est d’accord.

M. le président Claude Bartolone. Cela dit, je reconnais qu’il s’agit là d’un sujet différent de celui qui nous réunit aujourd’hui, mais il faudra y revenir.

Mme Marianne Dubois. Comment mieux associer les usagers à l’évaluation des politiques publiques afin qu’ils puissent devenir une véritable force de propositions ? Comment aller au-delà du forum d’échanges existant ?

Mme Catherine Coutelle. J’ai presque terminé la lecture de ce rapport qui me paraît d’autant plus intéressant que j’ai moi-même souhaité que nous réalisions avant la fin de l’année un bilan de l’influence de la RGPP sur les délégations régionales aux droits des femmes et à l’égalité.

Les contraintes financières nous obligent à une rationalisation qui, si j’ai bien compris, continuera sous la forme de la MAP, mais nous avons besoin d’autres moteurs.

L’implication des agents me semble à cet égard essentielle. Ils ont en effet été bousculés par la RGPP sans toujours comprendre où ils allaient et quelles missions on voulait leur donner. Ils ne savent plus ni où se situe leur périmètre d’action, ni que ce que l’on attend d’eux, mais ils sont évalués en permanence. L’« évaluationnite aiguë » règne. Le recteur de l’académie de Poitiers m’a ainsi confié qu’il disposait de pas moins de huit personnes qui se consacrent exclusivement à faire remonter des statistiques qui ne servent à rien puisqu’elles ne sont pas retournées aux intéressés. Je gage qu’elles sont aussi nombreuses au sein d’autres inspections académiques. Imaginez combien cela est « chronophage » pour les directeurs d’écoles et les proviseurs !

J’attire également votre attention sur le public. Le rapport du Médiateur Delevoye, auquel il vient d’être fait allusion, avait dénoncé la scission qui sépare le public et les administrations, due à une tension et à une incompréhension très fortes, notamment dans les préfectures et en particulier au sein des services dédiés aux étrangers. Les chartes en direction du public qui avaient été mises en place au sein des préfectures existent-elles toujours et sont-elles appliquées ?

S’agissant des usagers, il convient de distinguer les associations, le public, les différents partenaires et les collectivités. Avec la diminution des crédits de l’État et des collectivités, nous avons transformé en appels d’offres annuels le financement des associations importantes qui travaillent à des missions d’intérêt général. Des représentantes d’associations dédiées aux droits des femmes me disent ainsi qu’elles constituent de nombreux dossiers chaque année pour obtenir ici 2 000, là 5 000, là 10 000 euros. Une fois encore, de telles pratiques sont « chronophages » et inefficaces. Une simplification des procédures s’impose donc. Peut-être pourrait-on envisager un renouvellement des engagements financiers tous les trois ans ?

Mme Claude Greff. Il est important que nous puissions bénéficier d’évaluations.

Mme Catherine Coutelle. Pourquoi pas tous les trois ans, au moins pour les associations les plus importantes ?

En outre, nous avons l’impression qu’il existe des doublons entre l’administration centrale et les collectivités. L’acte III de la décentralisation permettra-t-il de clarifier les compétences des uns et des autres ? Lorsque l’État a transféré une mission, qu’il ne cherche pas à s’y cramponner ! Cela ne signifie pas qu’il ne doit pas jouer son rôle de stratège ou d’aménageur du territoire mais les doublons doivent être éliminés !

S’agissant des délégations régionales aux droits des femmes, nous rendrons notre rapport dans quelque temps mais nous constatons d’ores et déjà que l’administration centrale n’a pas changé alors que nous disposons désormais d’un ministère des droits des femmes. De plus, sur le terrain, l’organisation des services est compliquée puisque, sur le plan régional, elle dépend du Secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) et, sur le plan départemental, de la cohésion sociale. Entre les deux, on ne peut que constater la souffrance des personnels. Le public, quant à lui, ne parvient plus à percevoir les politiques qui sont mises en place.

Enfin, à un certain niveau de direction, les personnels dont disposent les SGAR sont tenus à une mobilité tous les six ans, laquelle s’appliquera aux déléguées régionales des droits des femmes (DRDF), qui sont souvent des contractuelles. Que va-t-on faire d’elles alors que leur efficacité est tributaire de leur connaissance des situations locales ? La mobilité, peut-être, mais pour qui et pour quelle efficacité ?

M. Jean-Christophe Fromantin. Je vous remercie, messieurs les rapporteurs, pour ce travail et les premiers éléments, très intéressants, dont vous nous avez fait part.

Nous avons tendance à faire de l’usager un évaluateur. Dans l’un des slides que vous nous avez remis, vous écrivez qu’il convient de « poursuivre les simplifications administratives en analysant les parcours des usagers ». Or, je me demande à quel point ces parcours ne devraient pas en fait constituer un point de départ. Avec l’accueil du public, l’État et les collectivités disposent en effet d’un élément d’évaluation très intéressant.

Lorsque j’ai voulu travailler à l’amélioration des procédures dans ma ville, j’ai demandé qu’un point soit réalisé sur les politiques publiques territoriales qui accueillent le plus de monde – état-civil, sport, urbanisme etc. Nous avons ensuite repris chacun de ces parcours. Sans doute serait-il donc utile de commencer par considérer les différentes missions de l’État, le public accueilli dans les différents guichets des agences, des collectivités, des administrations puis, à partir de là, de reconstruire des parcours. Nous nous mettrions ainsi dès le départ dans la situation de ceux pour lesquels on travaille, ce qui permettrait d’avoir une approche extrêmement transversale et non plus par silos. C’est ainsi que nous pourrions moderniser le service public.

N’y aurait-il pas moyen de procéder à une évaluation des politiques publiques en retraçant des parcours hiérarchisés à l’aune de l’accueil du public tel qu’il est pratiqué aujourd'hui dans l’ensemble du secteur public ? Ce travail aurait le mérite de partir de la perception des services publics qu’ont les usagers.

Le deuxième élément, c’est le caractère bidimensionnel de la modernisation de l’action publique : optimisation financière et amélioration du service rendu. Quel sens y a-t-il à faire du « zéro valeur », à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux si les objectifs à atteindre n’ont pas été préalablement définis ? Aucune entreprise ne réduit les coûts sans avoir auparavant défini son projet stratégique dans un environnement concurrentiel nouveau. Or l’objectif de la RGPP ou de la MAP semble porter sur les moyens plutôt que sur le service, alors que c’est celui-ci qui donne tout son sens à l’action publique.

Le troisième élément concerne les leviers. La difficulté propre à un tel exercice d’évaluation est de réussir à passer d’une démarche verticale à une démarche transversale, en vue d’élargir les marges de manœuvre de l’évolution des politiques publiques. L’acte III de la décentralisation pourrait être le moyen de réallouer les compétences dans la perspective d’une plus grande proximité. Le tout est de réussir l’articulation entre l’objectif de l’évaluation et celui de la réallocation des compétences, ce qui suppose de redéfinir les parcours sans aucun préjugé et d’accepter que certains puissent être territorialisés et d’autres recentralisés, en raison notamment des évolutions technologiques.

La France est au vingtième rang des pays ayant intégré dans leurs politiques publiques les effets de levier des technologies numériques, alors même que les modèles d’organisation, notamment économiques, des entreprises reposent aujourd'hui sur une connaissance de plus en plus affinée, permise par l’évolution technologique, des comportements individuels. Si la modernisation de l’action publique prenait mieux en compte les leviers numériques, un tel bouleversement des modèles pourrait conduire les politiques publiques à réaliser des économies considérables en s’ajustant aux comportements des usagers.

M. Régis Juanico. Les rapporteurs ont évoqué l’amendement au projet de loi de finances qu’ils ont fait adopter, visant à une meilleure information des commissions permanentes du Parlement sur le processus de modernisation de l’action publique. Cette initiative prouve – et je m’en réjouis – que les préconisations des rapports du CEC aboutissent. M. Michel Heinrich et moi-même avons également fait adopter un amendement au projet de loi de finances tendant à une meilleure information du Parlement sur l’expérimentation sociale – égalité hommes-femmes, inclusion sociale. Ainsi, les rapports de suivi ont une traduction concrète, laquelle permet de mieux associer les parlementaires à l’amélioration des politiques publiques.

En tant que rapporteur spécial du budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », je tiens à souligner les effets conjugués à la fois de la RGPP et de la RéATE – réforme de l’administration territoriale de l’État – sur les personnels jeunesse et sport, non seulement en termes de réduction des effectifs, avec un taux de non-remplacement de deux sur trois en 2010 – 1 330 emplois perdus en trois ans sur quelque 6 500 –, mais également en termes de réorganisation. Les personnels jeunesse et sport, qui avaient une très forte identité professionnelle, ont en effet été absorbés par les directions départementales ou régionales relevant de la cohésion sociale ou de la protection des populations, qui regroupent les personnels des politiques sanitaires et sociales – les vétérinaires, par exemple.

Toutefois, chacun admet le caractère désormais quasi irréversible des changements réalisés dans le cadre de la RGPP et de la RéATE. En dépit de la demande des personnels jeunesse et sport d’être rapprochés du pôle éducatif plutôt que de rester au sein des directions sanitaires et sociales, il sera très difficile de faire machine arrière. C’est pourquoi, même si la modernisation de l’action publique telle qu’elle est conduite à partir d’aujourd'hui doit intégrer toutes les critiques formulées à l’encontre de la RGPP, je pense que les décideurs politiques hésiteront, non sans raison, à provoquer de nouveaux bouleversements.

M. Christian Eckert, rapporteur. M. Juanico a raison : on ne saurait procéder tous les deux ans à des restructurations d’ensemble. Ce constat ne doit pas, cependant, nous conduire à l’immobilisme.

Il convient de souligner la rupture de méthode entre la révision générale des politiques publiques et la modernisation de l’action publique : le secrétariat général pour la MAP relève des services du Premier ministre et non plus de ceux de Bercy. C’est le signe fort qu’une vision structurante au profit des usagers sera désormais préférée à la seule vision comptable, ce qui permettra de redonner toute leur place aux personnels et aux usagers ainsi que de revaloriser le rôle du Parlement en matière de portage de la réforme.

M. François Brottes. Les missions de service public peuvent être exercées soit directement par les pouvoirs publics, soit par des entités privées auxquelles elles sont déléguées, soit dans un cadre concurrentiel. Il convient de distinguer ces modes d’approche.

On ne saurait non plus oublier le fait que les directives européennes, sur lesquelles nous n’avons aucune marge de discussion, encadrent nos politiques publiques. Or ces directives imposent très souvent la création d’entités indépendantes, qui ont vidé de toute sa substance l’expertise de l’État. Il faut être lucide : l’Assemblée nationale ne peut pas revenir sur ces directives. Du reste, chercher à le faire serait contre-productif.

Je tiens également à déplorer qu’il ne soit de la culture ni de la commission des Finances ni de Bercy de chercher à savoir si les mesures d’économies qui sont adoptées permettent, au bout du compte, de réaliser de véritables économies. Avec eux, c’est toujours combien on gagne, mais jamais combien on perd ! Un bilan en la matière serait nécessaire et nous devrions nous imposer une réflexion en ce sens, par exemple au sujet de l’outre-mer.

Je prendrai un exemple : la RGPP s’est accompagnée trop souvent d’un grand mépris à l’égard des agents de la fonction publique d’État dont on a fermé les services. Certains d’entre eux, notamment à la défense nationale, se sont même retrouvés sans plus rien avoir à faire ! C’est là une vraie gabegie financière, qui s’est accompagnée d’un immense gâchis humain et professionnel.

M. Christian Eckert, rapporteur. Le fil directeur de notre premier rapport a été de suggérer de définir avant toutes choses des compétences précises et de chercher à savoir qui les exercerait au mieux, de l’État ou des autres acteurs – opérateurs externes, agences ou collectivités locales –, ce qui n’avait pas été fait dans le cadre de la RGPP.

Pour ce rapport de suivi, j’ai demandé à M. François Cornut-Gentille de ne revenir que sur deux de ses recommandations, dont celle qui visait à retarder l’acte III de la décentralisation en vue de donner plus de temps à une analyse approfondie des compétences et de leur attribution. Je pense en effet qu’il faut trouver un juste milieu entre la brutalité dont s’est accompagnée la RGPP et une trop grande retenue, laquelle conduirait à rallonger les délais de manière excessive. En tant que rapporteur général, j’ai par ailleurs veillé, aux côtés de M. François Cornut-Gentille, à refuser toute orientation strictement comptable de la MAP.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Ce rapport m’a rappelé mes trente années passées dans la fonction publique. La France s’attelle depuis longtemps à la réforme de l’État. M. Pierre Mauroy avait publié une circulaire en ce sens, suivi par M. Anicet Le Pors, son ministre de la fonction publique. Auparavant déjà, Jacques Chaban-Delmas, Premier ministre, s’était attelé à la réforme du statut juridique de l’usager. La France, entre-temps, a subi la mondialisation et a été prise dans le grand vent de la nouvelle gestion publique, d’inspiration anglo-saxonne, dont les objectifs, qui ont apporté des idées de bon sens, ont également fait des ravages.

L’intérêt de ce rapport de suivi est de montrer que la France, avec retard, a succombé à certains effets de mode, dont l’« évaluationnite » aiguë, au moment où le Royaume-Uni en sortait. Notre pays a également eu tendance à se culpabiliser tout en accusant ses fonctionnaires d’incompétence. Depuis une dizaine d’années, la haute fonction publique est touchée par un profond désarroi. Or les bonnes réformes consistent, non à culpabiliser, mais à bien évaluer les défauts et à les contrebalancer en prenant appui sur les qualités.

Nous arrivons aujourd'hui à une synthèse sur l’idée de service public, ce que ne montre peut-être pas suffisamment le rapport. La réforme de l’État doit être guidée par l’idée d’un service public justement délivré aux usagers, avec une participation de leur part, dans des conditions compatibles avec des finances saines de l’État. Il ne faut pas séparer le cadre dans lequel s’exerce l’action de l’État et le contenu des réformes. C’est ainsi que le rapport fait une analyse approfondie de la réforme de la carte judiciaire, rejoignant celle du Sénat, qui était également celle du Conseil d’État : si cette réforme était nécessaire, la précipitation a été mauvaise conseillère, le seul critère choisi, celui du chiffre, conduisant à la création de véritables déserts judiciaires. La réforme des cadres retentit sur les contenus, et réciproquement.

Enfin, la politique des partenariats public-privé doit être révisée dans le cadre de la MAP afin d’assainir la situation. Chacun le reconnaît aujourd'hui, ces partenariats sont une très mauvaise affaire pour la puissance publique : le service public n’y gagne pas, les finances y perdent, mais d’autres y gagnent beaucoup... Je plaide pour une réflexion approfondie sur le sujet afin d’éviter de nouvelles pertes financières.

La crise a imposé dans le monde entier un retour du service public. Tout élément de réflexion sur la réforme de l’État doit intégrer les critères suivants : la participation et la satisfaction de l’usager, la place de l’agent public, une mobilité suffisante permettant d’assurer le service public. L’évaluation doit avoir pour objectif de déterminer si les politiques publiques voulues démocratiquement par le Gouvernement et le Parlement sont bien menées.

M. Jacques Myard. Nous sommes victimes d’une idéologie ambiante, occidentale et eurobéate, selon laquelle seuls les organismes privés seraient bien gérés. S’il est vrai que leur gestion est souvent plus rationnelle que celle de l’administration, penser que le service public est une notion obsolète est une grave erreur distillée par Bruxelles, qui veut remplacer le service public – répondant ainsi à une volonté politique – par le service d’intérêt général, dont l’objet est simplement de pallier les manques du marché.

Il faut revenir aux fondements du service public, lequel structure les sociétés. Nous sommes, en ce domaine, en porte-à-faux par rapport à l’idéologie bruxelloise.

Mme Catherine Coutelle. Il ne faut pas calquer la réforme du service public sur l’entreprise, sous peine d’échouer, car une entreprise peut être bien gérée sur le plan économique mais très mal gérée sur le plan humain. Il est vrai que la fonction publique a, elle aussi, bien du mal à gérer les ressources humaines !

Les suppressions de postes dans l’éducation n’ont, en termes comptables, généré aucunes économies, du fait de l’augmentation concomitante des heures supplémentaires.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. En cette affaire, comment ne pas penser à la LOLF, elle aussi fruit d’une démarche conjointe de la majorité et de l’opposition de l’époque –Didier Migaud et Alain Lambert étant les pères de cette loi –, qui avait pour ambition de moderniser le fonctionnement du Parlement et de l’État en matière de lois de finances ? Or les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes. Pourquoi ? Tout simplement parce que la LOLF reposait sur une meilleure définition des missions de service public et que cette condition a été très vite oubliée, en raison de l’identification, dans les indicateurs de l’administration, des missions aux structures administratives qui les portent. Cette confusion a faussé le débat entre la gauche et la droite, qui commettaient la même erreur, celle de confondre la structure administrative avec la mission de service public, alors que ce n’est pas la même chose. La gauche a défendu les structures contre toute baisse budgétaire tandis que la droite, qui accusait ces mêmes structures de lourdeur, soulignait la nécessité de les dégraisser pour faire des économies.

Il faut vraiment repartir des missions de service public : seule une grille d’analyse reposant sur celles-ci nous évitera de commettre les mêmes erreurs et nous permettra de résoudre les problèmes, notamment le malaise des fonctionnaires. Travailler dans une structure qui n’est plus adaptée ne peut que provoquer de la frustration. L’absence de réflexion sur les missions se lit dans les indicateurs fournis par les administrations. Comment un rectorat peut-il employer huit agents à faire des statistiques, alors qu’il s’agit le plus souvent d’un travail inutile ? Un tel gâchis des compétences ne peut que susciter le plus profond malaise chez des fonctionnaires consciencieux.

De surcroît, on ne saurait confier à des audits privés une réflexion en profondeur sur les missions parce qu’ils n’ont pas la culture de service public. Seul le Parlement a la légitimité pour la mener.

M. le président Claude Bartolone. J’adresse tout d’abord mes plus vifs remerciements aux deux rapporteurs pour la qualité de leur travail. À plusieurs égards, la méthode retenue offre une illustration exemplaire de ce que peut et doit être le travail du Parlement. M. Eckert et M. Cornut-Gentille ont conduit une évaluation précise et apaisée, trans-partisane de la RGPP, alors qu’elle était un sujet d’affrontement compte tenu de la manière dont elle a été menée.

Le deuxième point qui illustre pour moi la qualité de ce travail, c'est que l'Assemblée nationale n'a pas produit là un « énième rapport ». Au contraire, les constats émis par les rapporteurs en décembre 2011 sont désormais largement admis. En septembre dernier, les trois inspections générales – IGF, IGAS et IGA – ont remis au Premier ministre un état des lieux sur la RGPP qui confirme très largement les conclusions du CEC.

Donc, très logiquement, une année après, nous nous retrouvons pour exercer « un droit de suite ». C'est là encore pour moi un point fort : nous disposons d'un rapport qui est utile à l'exécutif pour bien orienter ses priorités et aux députés pour bien exercer leur mission d'évaluation des politiques publiques.

Si cette méthode offre un bon modèle, la modernisation des politiques publiques constitue également un enjeu dont l'Assemblée nationale doit s'emparer à bras-le-corps.

Si la RGPP est finie, la majorité n'a pas pour autant abandonné l'exigence qui s'attache à moderniser l'État, et plus largement la nécessité de moderniser l'action publique dans son ensemble, qu'elle soit mise en œuvre par les services de l'État, par ses opérateurs, par les collectivités locales ou par les organismes de sécurité sociale. Elle devra prendre en considération les conséquences des décisions prises par chacun de ces acteurs sur les autres. Je prendrai l’exemple – quasi caricatural – de la décision, prise par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), d’autoriser au nom de la concurrence l’arrivée d’un nouvel opérateur dans le secteur des télécommunications sans prendre en considération le fait qu’il appartiendra à d’autres opérateurs ou à certains services de l’État d’affronter les conséquences de cette décision en termes de suppressions d’emplois ou de baisse des investissements dans un secteur capital pour sortir de la crise.

La situation des finances publiques exige de nous des changements en profondeur. Le général de Gaulle parlait de la planification à la française comme d'une « ardente obligation ». Eh bien, je crois qu'aujourd'hui notre ardente obligation est de réussir à moderniser l'action publique.

L'exercice est certes difficile et pose la question du rôle des parlementaires et de leur mode de travail concentré sur deux jours – durée insuffisante pour influencer les politiques. De plus, dans toute structure, les résistances au changement sont fortes. Pour que l'État s'adapte, se transforme, s'allège ici et se remuscle là, bref, pour qu'il soit agile et réponde aux attentes des nos concitoyens, il lui faut un aiguillon. Cet aiguillon, c'est le Parlement.

La RGPP avait trop peu associé le Parlement. J'adhère donc pleinement aux recommandations des rapporteurs. Je procéderai dans les jours qui viennent à la nomination de deux députés, l'un de la majorité – sachant que Christian Eckert ne pourra pas assumer cette tâche –, l'autre de l'opposition, pour qu'ils rendent opérationnelles les recommandations de ce rapport. Je pense que la loi de règlement que nous examinerons courant 2013 offrira l'occasion d'une première expérimentation de ce que doit être ce travail d'évaluation.

Le Comité autorise la publication du présent rapport de suivi.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

– M. Julien Dubertret, directeur du budget, et M. Édouard Bloch-Escoffier, adjoint au chef du bureau de la politique budgétaire (23 octobre 2012) ;

– M. Jérôme Filippini, secrétaire général pour la modernisation de l’action publique (25 octobre 2012) ;

– Mme Sophie Delaporte, inspectrice générale de l’administration, Mme Martine Marigeaud, inspectrice générale des finances et Mme Nathalie Destais, inspectrice générale des affaires sociales, membres de la mission d’inspection sur le bilan de la RGPP et les conditions de réussite d’une nouvelle politique de réforme de l’État (25 octobre 2012) ;

– M. Jean Marimbert, secrétaire général du ministère de l’Éducation nationale, et M. Éric Becque, chef du service de l’action administrative et de la modernisation (SAAM) (30 octobre 2012) ;

– M. Didier Lallement, secrétaire général du ministère de l’Intérieur, Mme Isabelle Rueff, chargée de mission « modernisation de l’action publique » au cabinet du secrétaire général, et M. Julien Charles, sous-directeur de l’administration territoriale (7 novembre 2012).

1 ()  Bilan de la RGPP et conditions de réussite d’une nouvelle politique de réforme de l’État, Inspection générale de l’administration (IGA – rapport n° RM 12-082/12-064/01), Inspection générale des finances (IGF – rapport n° 2012-M-058-01) et Inspection générale des affaires sociales (IGAS – rapport n° RM 2012-121). Rapport établi par Marianne Bondaz, Sophie Delaporte, Werner Gagneron, Philippe Rey et Cyrille Bret pour l’IGA, par Martine Marigeaud et Pierre Deprost pour l’IGF, et par Nathalie Destais, Yves Rabineau et Michel-Henri Mattera pour l’IGAS.

2 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 20.

3 ()  Ibid.

4 ()  Ibid, p. 73-75.

5 ()  Cf. l’annexe 2 « liste des personnes rencontrées » du rapport IGA/IGF/IGAS, p. 4-6. Parmi les dizaines d’agents des administrations déconcentrées de l’État interrogés dans le cadre de la mission d’inspection, un seul exerce dans le cadre administratif académique.

6 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 21.

7 ()  Ibid., p. 18.

8 ()  Ibid., p. 18.

9 ()  Ibid., p. 19.

10 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 19.

11 ()  Ibid., p. 20.

12 ()  Ibid., p. 23.

13 ()  Ibid., p. 22.

14 ()  Ibid., p. 22.

15 ()  Ibid., p. 23.

16 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 23.

17 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, synthèse.

18 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 163-169.

19 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 39.

20 ()  Ibid.

21 ()  Ibid.

22 ()  Ibid., p. 42.

23 ()  Ibid.

24 ()  Ibid., p. 40, 42, 43.

25 ()  Ibid., p. 41.

26 ()  Ibid., p. 49.

27 ()  Ibid., p. 43.

28 ()  Ibid., p. 39.

29 ()  Ibid., p. 41.

30 ()  Ibid, p. 41, 43.

31 ()  L’introduction de la feuille de route sociale précise le statut des éléments qui la composent, en indiquant qu’elle est « le fruit des travaux de la grande conférence […] ainsi que de tous les échanges qui les ont précédés. Si chacune des organisations participantes conserve naturellement ses attentes et priorités propres, et portera dans la suite du processus ses positions et propositions, la présente feuille de route exprime des constats et objectifs pour l’essentiel partagés, et les éléments de méthode et de calendrier débattus que le Gouvernement entend retenir à l’issue de la grande conférence sociale. »

32 ()  La loi de finances rectificative pour 2012 du 16 août 2012 a aussi prévu 12 000 contrats aidés supplémentaires dans l’éducation nationale. Pour le détail de ces rectifications budgétaires portant sur l’exercice 2012, cf. le rapport n° 79 (XIVe législature) fait par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012 et présenté par Christian Eckert, rapporteur général, p. 30-34.

33 ()  Ce chiffre s’appuie sur le schéma d’emplois prévu par la loi de finances initiale pour 2012 (- 30 401 ETP) et les ETP créés par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 dans les ministères de l’Éducation nationale et de l’Agriculture (+ 4 278 ETP). Les 2 500 postes d’assistants d’éducation créés par la LFR du 16 août 2012 ne sont pas inclus dans ce calcul, puisqu’ils sont financés sur des crédits hors titre 2.

34 ()  Selon la terminologie du dossier de présentation – « les chiffres clés » – du PLF 2013 établi par le Gouvernement.

35 ()  La présentation par le Gouvernement de sa politique en matière d’emplois pour 2013 « scinde » des ministères ; si le ministère de l’Intérieur est prioritaire au titre de la police et de la gendarmerie (+ 480 emplois), 614 emplois devraient y être supprimés par ailleurs.

36 ()  Ce chiffre est issu des rapports annuels de performance pour 2010.

37 ()  Selon les termes de l’article 5 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, ce périmètre « 0 valeur » comprend donc les dépenses de personnel (hors pensions), les autres dépenses du budget général (hors remboursements et dégrèvements), les prélèvements sur les recettes de l’État en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales et le produit plafonné des taxes affectées aux opérateurs de l’État.

38 ()  Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, France, une perspective internationale sur la révision générale des politiques publiques, p. 15.

39 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 132-139.

40 ()  Évaluation de la mise en place des Direccte, Inspection générale des finances (IGF – rapport n° 2011-M-61-04), Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGIET – rapport n° 2011/10/CGIET/CI) et Inspection générale des affaires sociales (IGAS – rapport n° RM2012-014P). Ce rapport a été établi par Bertrand Brassens et Remi Toussain pour l’IGF, Didier Laval, Jean-François Magana et Françoise Trassoudaine pour le CGIET, et Philippe Blanchard et Myriam Mesclon-Ravaud pour l’IGAS.

41 ()  Communication de la Cour des comptes à la commission des Finances du Sénat en application des articles 58-2° de la LOLF et L. 132-4 du code des juridictions financières, « La fusion de la direction générale de la comptabilité publique et de la direction générale des impôts : un premier bilan », octobre 2011. Cf. la synthèse de cette communication, p. 9-15.

42 ()  Rapport public thématique portant sur l’évaluation d’une politique publique « Les relations de l’administration fiscale avec les particuliers et les entreprises », février 2012. Cf. notamment la conclusion générale de l’évaluation, p. 155, 156.

43 ()  Rapport d’information du Sénat n° 662 (session extraordinaire de 2011-2012) déposé le 11 juillet 2012 fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Yves Détraigne sur la réforme de la carte judiciaire. Le titre de ce rapport est : « La réforme de la carte judiciaire : une occasion manquée ».

44 ()  Cf. le rapport d’information du Sénat n° 662, juillet 2012, p. 50.

45 ()  Ibid, p. 115.

46 ()  Ibid, p. 119.

47 ()  Rapport d’information du Sénat n° 660 (session extraordinaire de 2011-2012) déposé le 11 juillet 2012 fait au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées par MM. Gilbert Roger et André Dulait sur la mise en place de la réforme des bases de défense. Le titre de ce rapport est : « Bases de défense, une réforme à conforter ».

48 ()  Cf. le rapport d’information du Sénat n° 660, juillet 2012, p. 3.

49 ()  Les enjeux ainsi définis ne recoupent qu’en partie ceux identifiés par la Cour des comptes dans un référé n° 60366 adressé le 7 mars 2011 au ministre de la Défense et des anciens combattants. Dans ce référé, la Cour suggérait de baisser drastiquement le nombre des bases de défense (en passant à 20 bases environ au lieu des 60 existantes), de supprimer les états-majors de soutien défense (suggestion qui se rapproche du premier enjeu présenté par les sénateurs) et de renforcer les pouvoirs hiérarchiques des commandants des bases de défense. La Cour considérait que la mise en œuvre de ces suggestions était nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction d’emplois liés à la mise en place des bases de défense.

50 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 22.

51 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, synthèse.

52 ()  Ibid, p. 57.

53 ()  Journal officiel de la République française, session ordinaire de 2012-2013, compte rendu intégral des débats du Sénat, séance du lundi 1er octobre 2012, p. 3361-3362.

54 ()  Les propos tenus par le ministre à cette occasion ont été rapportés par la presse.

55 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 58.

56 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 20.

57 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, synthèse.

58 ()  Le même décret prévoit que le SGMAP comprend aussi deux missions rattachées au SGG, à savoir a) celle qui a coordonné au niveau interministériel la mise en œuvre de la Réate et b) celle chargée de faciliter la mise à disposition des données publiques (dite mission Etalab).

59 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 21.

60 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 67.

61 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 21.

62 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 68.

63 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 68. Une telle évolution de la méthodologie et du « lieu d’émission » du baromètre de la qualité des services publics serait sans doute de nature à répondre aux observations critiques des rapporteurs dans leur rapport initial (cf. ce rapport, p. 161-162) sur les éditions rendues publiques à ce stade de ce baromètre.

64 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 68.

65 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 65.

66 ()  D’éventuels reliquats de crédits de paiement en 2012 et 2013 sur les lots du marché notifié en novembre 2007 ne remettraient pas en cause la tendance observée sur l’ensemble du poste de dépenses.

67 ()  Ce rapport a été établi par Pierre Lepetit, Pascale Dugos, Emmanuel Saliot et Jérôme Thomas pour l’IGF, ainsi que par François Cholley, Marc Meyer et Françoise Trassoudaine pour le CGIET.

68 ()  Le Gouvernement ajoute dans sa feuille de route du 1er octobre 2012 que l’élaboration de cette cartographie doit s’appuyer « lorsque cela est pertinent, sur la maquette des missions de la LOLF ».

69 ()  Cf. la feuille de route du Gouvernement relative à la modernisation de l’action publique du 1er octobre 2012.

70 ()  Et ce conformément à l’article 1er du décret n° 2012-1199 du 30 octobre instituant le CIMAP, qui précise que celui-ci « décide et coordonne les évaluations de politiques publiques, notamment partenariales ».

71 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 12.

72 ()  On note que le Premier ministre envisage, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, un usage élargi des méthodes pratiquées par les inspections générales saisies ; il indique ainsi que « tout en veillant à l’adapter au champ étendu de la modernisation de l’action publique et au besoin d’association des différentes parties prenantes, ce cadrage pourra s’appuyer sur les travaux de méthode existant dans vos inspections générales. »

73 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, page 60.

74 ()  On peut relever que la méthode envisagée par la feuille de route du Gouvernement est marquée, à ce stade, par une incertitude quant au moment du « partage » du diagnostic et des scénarios qui lui sont associés, soit pendant l’élaboration de ce diagnostic, soit une fois celui-ci fixé.

75 ()  On observe au demeurant que l’article 16 du projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques prévoit qu’« en vue du dépôt du projet de loi de règlement, le Haut Conseil des finances publiques rend un avis identifiant, le cas échéant, les écarts importants […] que fait apparaître la comparaison des résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel. […] Lorsque l’avis du Haut Conseil identifie de tels écarts, le Gouvernement expose les raisons de ces écarts lors de l’examen de la loi de règlement par chaque assemblée ». Une disposition analogue concernant le Gouvernement figure à l’article 4 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012-2017 dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture le 23 octobre 2012.

76 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 74.

77 ()  Pour les règles pluriannuelles relatives à l’évolution des effectifs et des crédits des opérateurs de l’État, cf. les articles 6 et 7 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale le 23 octobre 2012. Ces règles sont explicitées dans le rapport n° 246 du 4 octobre 2012 fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur ce projet de loi par Christian Eckert, rapporteur général, pages 60 à 77. Elles s’inscrivent au demeurant dans la logique des préconisations du rapport n° 2011-M-044-01 de mars 2012 de l’inspection générale des finances « l’État et ses agences », établi par Jean-François Juéry, Léonore Belghiti, Victoire Paulhac, Benjamin Huteau et Perrine Barre, avec l’assistance de Charles de Fréminville et sous la supervision de Thierry Wahl.

78 ()  Cf. le rapport du 17 octobre 2012, n° 302, fait au nom de la commission des Affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 – assurance maladie et accidents du travail – par M. Christian Paul, p. 52.

79 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 63.

80 ()  Ibid.

81 ()  Étude des stratégies de réforme de l’État à l’étranger, Inspection générale des finances (rapport n° 2010-M-098-02), avril 2011, établi par Maud Bailly, Jérôme Itty, Victoire Paulhac, Deborah Lévy (commissaire contrôleur des assurances), avec l’assistance de Matthieu Hybert et sous la supervision d’Anne Paugam.

82 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 100-111.

83 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 101-103.

84 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 22, 63.

85 ()  Ibid, pages 58-60.

86 ()  Cf. le rapport portant étude des stratégies de réforme de l’État à l’étranger, Inspection générale des finances (rapport n° 2010-M-098-02), avril 2011, p. 4.

87 ()  Cf. le II de l’article 16 A de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

88 ()  Cf. le rapport initial des rapporteurs, n° 4019, XIIIe législature, p. 158-162.

89 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, page 71.

90 ()  Le groupe de travail présidé par Mme Yannick Moreau est notamment composé de Mme Marion Guillou et de MM. Philippe Aghion, Henri Rouilleault, Pierre Rosanvallon et Louis Schweitzer.

91 ()  Cf. le rapport IGA/IGF/IGAS du 25 septembre 2012, p. 66.


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