N° 2129 - Rapport de MM. Pascal Popelin et Guillaume Larrivé déposé en application de l'article 145-7 alinéa 1 du règlement, par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République sur la mise en application de la loi organique n° 2013-402 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux et de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral




N
° 
2129 RECTIFIÉ

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 juillet 2014.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145-7 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE

sur la mise en application de la loi organique n° 2013-402 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux et de la loi n° 2013-403
du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux,
des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant
le calendrier électoral

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. Pascal POPELIN et Guillaume LARRIVÉ

Députés

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. L’APPLICATION DES NOUVELLES RÈGLES PRÉVUES POUR LES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET COMMUNAUTAIRES 7

A. L’ABAISSEMENT DU SEUIL D’APPLICATION DU SCRUTIN MAJORITAIRE DE LISTE PARITAIRE AVEC REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 7

B. LA SYSTÉMATISATION DE L’OBLIGATION DE DÉCLARATION DES CANDIDATURES DANS LES COMMUNES PRATIQUANT LE SCRUTIN MAJORITAIRE 8

C. L’ÉLECTION AU SUFFRAGE UNIVERSEL DES CONSEILLERS COMMUNAUTAIRES 8

D. L’ABSENCE D’OBLIGATION DE PRÉSENTATION D’UNE PIÈCE D’IDENTITÉ LIMITÉE AUX SEULES COMMUNES DE MOINS DE 1 000 HABITANTS 9

E. DE NOUVEAUX RÉGIMES D’INÉLIGIBILITÉS ET D’INCOMPATIBILITÉS À PRÉCISER 10

F. LES MODALITÉS DE REMPLACEMENT DES CONSEILLERS COMMUNAUTAIRES UNIQUES ÉLUS DANS LES COMMUNES DE PLUS DE 1 000 HABITANTS À CLARIFIER 11

G. LE CONTENTIEUX DES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET COMMUNAUTAIRES, ENCADRÉ PAR DES RÈGLES PRÉCISES, RESTE STABLE 12

II. LA PRÉPARATION DES PROCHAINES ÉLECTIONS DÉPARTEMENTALES 13

A. LA MISE EN PLACE DU NOUVEAU SCRUTIN BINOMINAL PARITAIRE 13

B. LE NOUVEAU DÉCOUPAGE CANTONAL 14

1. Une réduction de près de moitié du nombre de cantons 14

2. Les règles encadrant le redécoupage cantonal 15

3. Les décrets portant nouvelle délimitation des cantons 17

4. Le contentieux des décrets portant nouvelle délimitation des cantons 22

OBSERVATIONS COMPLÉMENTAIRES DE M. GUILLAUME LARRIVÉ, CO-RAPPORTEUR 27

EXAMEN EN COMMISSION 31

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 41

Mesdames, Messieurs,

Le cadre juridique régissant les élections locales a été profondément modifié par la loi organique n° 2013-402 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux et par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

Un peu plus d’une année après la promulgation de ces deux lois, le présent rapport tend à contrôler et à évaluer les conditions de leur mise en œuvre. Un relief particulier est donné à cet exercice par les derniers développements de la réforme territoriale en cours, récemment matérialisés par le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral et par le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, tous deux déposés au Sénat le 18 juin 2014.

La réforme législative de mai 2013 avait principalement trois objets.

En premier lieu, elle visait à revenir sur la création des conseillers territoriaux. La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales avait prévu qu’à compter de mars 2014, des conseillers territoriaux, appelés à siéger tant au niveau régional que départemental, se substitueraient aux actuels conseillers régionaux et généraux. L’article 48 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a abrogé l’ensemble des dispositions créant les conseillers territoriaux, ainsi que le tableau issu de la loi n° 2011-871 du 26 juillet 2011 fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région. En conséquence, les conseillers régionaux – dont le mandat a été prolongé de mars 2014 à mars 2015 (1) – demeurent élus au scrutin de liste à deux tours, mêlant représentation proportionnelle et prime majoritaire d’un quart des sièges.

En deuxième lieu, la loi organique n° 2013-402 et la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 ont apporté une série de modifications aux règles applicables aux élections municipales, notamment en étendant le scrutin proportionnel de liste paritaire – avec prime majoritaire de la moitié des sièges – aux communes de 1 000 habitants et plus (au lieu de 3 500 habitants et plus auparavant) et en rendant obligatoires les déclarations de candidature dans l’ensemble des communes. En outre, les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre sont désormais composés de « conseillers communautaires » élus au suffrage universel direct, concomitamment au scrutin municipal. Ces dispositions ont connu une première application à l’occasion des élections municipales et communautaires qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014.

En dernier lieu, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a modifié les modalités d’élection des conseillers généraux, qui seront dénommés « conseillers départementaux ». Ceux-ci sont désormais renouvelés intégralement tous les six ans et élus à l’issue d’un scrutin binominal paritaire, organisé dans des circonscriptions cantonales redéfinies. Afin notamment de mener à bien l’opération de redécoupage des cantons, la prochaine élection des conseillers généraux a été fixée à mars 2015, au lieu de mars 2014 (2).

En dehors des décrets procédant à ce redécoupage, qui ont tous été publiés avant le 1er mars 2014, la réforme législative de 2013 n’appelait qu’un seul décret d’application : il s’agit du décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral – décret publié au Journal officiel du 20 octobre 2013. Toutes les mesures réglementaires d’application des lois du 17 mai 2013 ont donc été prises.

Le présent rapport tend à faire le point sur l’application des nouvelles règles prévues pour les élections municipales et communautaires (I) et sur la préparation des prochaines élections départementales (II).

I. L’APPLICATION DES NOUVELLES RÈGLES PRÉVUES POUR LES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET COMMUNAUTAIRES

Le scrutin organisé les 23 et 30 mars 2014 a permis de renouveler les conseils municipaux et, pour la première fois, d’élire au suffrage universel direct les conseillers communautaires appelés à siéger au sein des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

Si les dispositions de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral ne nécessitaient pas formellement de mesures d’application pour pouvoir être mises en œuvre, le décret en Conseil d’État n° 2013-938 du 18 octobre 2013 précité a procédé à un certain nombre de modifications et de coordinations de nature réglementaire rendues nécessaires par les choix effectués par le législateur.

A. L’ABAISSEMENT DU SEUIL D’APPLICATION DU SCRUTIN MAJORITAIRE DE LISTE PARITAIRE AVEC REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE

L’article 2 de la loi organique n° 2013-402 et le titre II de la loi n° 2013-403 ont abaissé à 1 000 habitants l’application du mode de scrutin majoritaire de liste paritaire à participation proportionnelle. En 2014 seules les communes de moins de 1 000 habitants, regroupant au total 9,5 millions d’habitants, soit 14,7 % de la population des départements français, ont pratiqué le scrutin majoritaire plurinominal.

Selon les informations fournies par le bureau des élections du ministère de l’Intérieur, dans 59 % des 6 465 communes de 1 000 à 3 499 habitants, les élections de mars 2014 ont vu s’affronter au moins deux listes, montrant ainsi la vitalité de la démocratie locale ; une seule commune de plus de 1 000 habitants (3) n’a connu aucune liste déposée en vue du premier tour.

Au total, 21 186 listes ont été enregistrées dans les 9 734 communes de plus de 1 000 habitants, en progression par rapport à 2008, ce qui représente 926 068 candidatures enregistrées. Afin de faire face à ce surcroît de travail, les préfectures ont pu bénéficier d’une enveloppe de 3 millions d’euros afin de pouvoir recruter des vacataires pour enregistrer ces candidatures avant le 6 mars 2014.

Par ailleurs, la suppression des sections électorales dans les communes de moins de 20 000 habitants, décidée par la commission des Lois à l’initiative du Président Jean-Jacques Urvoas, a conduit à leur quasi-disparition : une seule section électorale (dans une commune de plus de 20 000 habitants) a subsisté, rendant le scrutin municipal plus simple et plus lisible.

B. LA SYSTÉMATISATION DE L’OBLIGATION DE DÉCLARATION DES CANDIDATURES DANS LES COMMUNES PRATIQUANT LE SCRUTIN MAJORITAIRE

À l’initiative de votre rapporteur et des commissaires membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen, l’article 25 de la loi n° 2013-403 a prévu, dans les communes élisant leurs conseillers municipaux au scrutin majoritaire, l’obligation du dépôt des candidatures dès le premier tour (article L. 255-4 du code électoral), tout en ouvrant la faculté de déposer de nouvelles candidatures au second tour lorsque le nombre de candidats au premier tour a été inférieur au nombre de sièges à pourvoir (article L. 255-4 du code électoral).

Selon le bureau des élections du ministère de l’Intérieur, seules 63 communes de moins de 1 000 habitants n’ont fait l’objet d’aucune candidature en vue du premier tour des élections municipales.

C. L’ÉLECTION AU SUFFRAGE UNIVERSEL DES CONSEILLERS COMMUNAUTAIRES

En application du chapitre II du titre II de la loi n° 2013-403, les représentants des communes au sein des EPCI à fiscalité propre (4), désormais dénommés « conseillers communautaires » ont été élus au suffrage universel direct par fléchage de certains candidats sur les listes aux élections municipales.

Si la complexité des règles applicables a nécessité un effort d’explication des préfectures, notamment pour assurer le respect des règles en cas de fusion de listes entre les deux tours, ces nouvelles règles n’ont pas posé de difficultés d’application.

Par ailleurs, l’article 14 du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (n° 636), déposé le 18 juin 2014 au Sénat, prévoit une refonte de la carte intercommunale resserrée autour des bassins de vie et axée à la fois sur un accroissement de la taille minimale des EPCI à fiscalité propre de 5 000 à 20 000 habitants et sur la réduction du nombre des structures syndicales. Les règles de l’article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales, complétées et précisées par l’article 37 de la loi précitée, permettront la sélection des conseillers communautaires afin de composer les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre issus de fusion en cours de mandat.

D. L’ABSENCE D’OBLIGATION DE PRÉSENTATION D’UNE PIÈCE D’IDENTITÉ LIMITÉE AUX SEULES COMMUNES DE MOINS DE 1 000 HABITANTS

Si cette modification, intervenue par décret, ne trouve pas son origine dans les deux lois promulguées le 17 mai 2013, elle n’en a pourtant représenté une innovation dans la tenue des élections municipales.

En application de l’article R. 60 du code électoral dans sa version précédente, seuls les électeurs des communes de 3 500 habitants et plus devaient présenter au président du bureau, au moment du vote, en même temps que la carte électorale ou l’attestation d’inscription en tenant lieu, un titre d’identité parmi ceux figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre de l’intérieur.

Le décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a entrepris de mettre en correspondance les seuils dans la partie réglementaire du code électoral et a ainsi modifié l’article R. 60 en étendant à tous les électeurs, y compris dans les communes de moins de 3 500 habitants, l’obligation de présenter au président du bureau de vote un titre d’identité. Cette modification poursuivait deux objectifs essentiels : garantir la sincérité du scrutin dans chaque commune mais aussi l’égalité de traitement entre tous les électeurs. La liste des pièces d’identité permettant aux électeurs de justifier de leur identité au moment du vote a parallèlement été élargie par arrêté du 12 décembre 2013 afin de faciliter l’exercice du droit de vote de tout électeur, en permettant aux personnes qui ne disposant pas forcément d’une carte nationale d’identité ou d’un passeport de présenter notamment la carte vitale avec photo et la carte famille nombreuse.

Le ministère de l’Intérieur a en outre prévu une campagne de communication à destination des communes et des électeurs afin de les informer de la nouvelle réglementation en la matière.

Cependant, à la demande de l’association des maires de France, cet article R. 60 a été une nouvelle fois modifié par le décret n° 2014-532 du 19 mars 2014 relatif à la vérification de l’identité des électeurs. Cet article prévoit désormais que les électeurs doivent présenter une pièce d’identité exclusivement dans les communes de 1 000 habitants et plus. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, l’article L. 62 du code électoral prévoit qu’« à son entrée dans la salle du scrutin, l’électeur, après avoir fait constater son identité suivant les règles et usages établis ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production d’une décision du juge du tribunal d’instance ordonnant son inscription ou d’un arrêt de la Cour de cassation annulant un jugement qui aurait prononcé sa radiation, prend, lui-même, une enveloppe ». Dès lors, dans ces communes, le contrôle de l’identité de l’électeur peut être effectué par tout moyen propre à emporter la conviction du président du bureau de vote sur l’identité de celui-ci.

E. DE NOUVEAUX RÉGIMES D’INÉLIGIBILITÉS ET D’INCOMPATIBILITÉS À PRÉCISER

L’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires a justifié une précision des règles d’inéligibilités et d’incompatibilités. La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales avait d’ores et déjà rendu inéligibles les directeurs de cabinets et les directeurs des services des EPCI à fiscalité propre pour les élections municipales au sein des communes membres de ces EPCI.

En réécrivant le 8° de l’article L. 231 du code électoral, l’article 22 de la loi n° 2013-403 a rationalisé la définition des fonctions de direction au sein d’une collectivité territoriale ou d’un EPCI rendant inéligible aux élections municipales organisées dans leur ressort, en limitant notamment les emplois de cabinet rendant inéligibles aux seuls intéressés ayant reçu délégation de signature.

Par ailleurs, le régime d’incompatibilité prévu par l’article L. 237-1 du code électoral a été précisé afin de rendre incompatible un mandat de conseil communautaire avec tout emploi au sein de l’EPCI ou d’une des communes membres de cet établissement.

Cependant, selon divers témoignages portés à la connaissance de votre rapporteur et de votre co-rapporteur, l’élargissement du champ des inéligibilités semble avoir fait l’objet d’une interprétation très extensive de la part de l’autorité préfectorale, en divers endroits du territoire national, alors que comme toute disposition restreignant une liberté fondamentale, les dispositions législatives définissant une inéligibilité doivent faire l’objet d’une interprétation stricte. Ainsi, nombre d’agents publics occupant des fonctions non explicitement ciblées par ces dispositions auraient été contraints, dans certains départements, de renoncer à leur engagement citoyen à l’occasion des élections municipales du mois de mars 2014.

Le législateur avait pourtant, à dessein, pris la précaution d’établir une liste très précise des situations professionnelles donnant lieu à une inéligibilité afin d’une part, d’éviter toute difficulté de lecture et d’appréciation de ces nouvelles restrictions et d’autre part, garantir une application uniforme de ces règles sur l’ensemble du territoire national, conformément au principe d’égalité aux fondements de notre République.

Aussi, une fois établie la jurisprudence sur l’application de ces nouvelles dispositions, une circulaire pourrait-elle utilement préciser l’interprétation à faire par les préfectures des dispositions relatives aux régimes d’inéligibilités et d’incompatibilités.

Par ailleurs, il serait souhaitable qu’un prochain texte réformant les modes électoraux se penche sur une harmonisation de ces régimes applicables aux différentes élections organisées au sein de la République.

F. LES MODALITÉS DE REMPLACEMENT DES CONSEILLERS COMMUNAUTAIRES UNIQUES ÉLUS DANS LES COMMUNES DE PLUS DE 1 000 HABITANTS À CLARIFIER

À l’initiative du Sénat, l’article L. 273-10 du code électoral, inséré par l’article 33 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013, prévoit qu’en cas de vacance d’un siège de conseiller communautaire, pour quelque cause que ce soit, le remplaçant doit actuellement être le conseiller municipal suivant sur la même liste de candidat aux sièges de conseiller communautaire et du même sexe que la personne cessant l’exercice de son mandat.

Or, lorsque la commune ne dispose que d’un seul siège au sein de l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre, le candidat au conseil communautaire est forcément la tête de liste des candidats au conseil municipal en application de l’article L. 273-9 du même code.

La combinaison de ces dispositions aboutit à des difficultés particulières d’application pour les communes pratiquant le scrutin majoritaire de liste paritaire et disposant d’un seul siège de conseiller communautaire.

D’une part, la liste des candidats au conseil communautaire comprend deux noms de personnes devant obligatoirement être de sexe différent, mais dont la seconde ne pourra jamais siéger à ce conseil, puisque le remplaçant du conseiller communautaire qui figure en tête de cette liste ne peut être que du même sexe. Cette conséquence apparaît manifestement contraire à l’objectif même de l’instauration du fléchage, qui était de rendre plus lisible la liste de candidats au conseil communautaire.

D’autre part, sauf à ce que le maire n’apparaisse pas en tête de liste lors des élections municipales, ce qui pose la même difficulté de lisibilité politique, une commune ne pourra jamais être représentée au conseil communautaire par un élu de sexe différent de cette tête de liste. Or les fonctions de maire sont occupées à 87 % par des hommes.

Si cela ne soulève pas de difficultés pratiques – le siège étant pourvu par le premier conseiller municipal de même sexe élu sur la même liste et n’exerçant pas de mandat intercommunal – cette disposition pose un réel problème en aboutissant à un résultat contraire à celui défendu par ses auteurs.

Aussi, à l’initiative de son rapporteur, M. Sébastien Denaja, la commission des Lois de l’Assemblée nationale a-t-elle inséré un article additionnel au sein du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, actuellement en cours d’examen, afin de prévoir que, lorsqu’un seul siège de conseiller communautaire est attribué à la commune, le remplaçant du conseiller communautaire démissionnaire est le suivant de liste, nécessairement de sexe différent.

G. LE CONTENTIEUX DES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET COMMUNAUTAIRES, ENCADRÉ PAR DES RÈGLES PRÉCISES, RESTE STABLE

Les recours contre les opérations électorales dans le cadre des élections municipales doivent être déposés en préfecture ou sous-préfecture ou portés devant le tribunal administratif compétent territorialement. L’article R. 119 du code électoral prévoit que les recours doivent ainsi être formulés dans les cinq jours du procès-verbal, sauf en ce qui concerne les recours des préfets disposant d’un délai de quinze jours à compter de la réception du procès-verbal (5). En application de l’article R. 120 du code électoral, le tribunal administratif doit statuer dans un délai de trois mois à compter de l’enregistrement de la réclamation au greffe (en cas de renouvellement général des conseils municipaux). Le recours éventuel contre la décision du tribunal administratif doit être porté devant le Conseil d’État, dans le délai d’un mois à partir de la notification de la décision (article R. 123 du code électoral).

Selon les données collectées par la section du contentieux du Conseil d’État, au 13 juin 2014, 4 853 recours avaient été déposés devant les tribunaux administratifs du fait des élections municipales de mars 2014. Si ce chiffre est en hausse par rapport à 2008, où 3 697 recours avaient été enregistrés, c’est parce qu’il comprend un certain nombre de recours déposés par les préfets du fait d’erreur dans le nombre de candidats proclamés élus comme conseillers communautaires ; dans ce cadre, seule l’annulation de cette proclamation permettra de la rectifier.

Par ailleurs, un contentieux lié à l’obligation de dépôt et à la vérification par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques des comptes de campagne des candidats présents dans les communes de plus de 9 000 habitants en application de l’article L. 52-4 du code électoral est encore attendu dans les mois qui viennent.

Aussi, si le Conseil d’État n’a été saisi que de 22 recours en appel au 13 juin 2014, il s’attend à devoir traiter entre 500 et 600 recours, ces affaires étant généralement jugées dans le semestre suivant leur enregistrement.

II. LA PRÉPARATION DES PROCHAINES ÉLECTIONS DÉPARTEMENTALES

Les prochaines élections départementales donneront lieu, pour la première fois, à l’élection de binômes de candidats, composés d’une femme et d’un homme (A). Au préalable, les cantons, qui demeurent le cadre de ces élections, font l’objet d’une vaste opération de redécoupage (B).

A. LA MISE EN PLACE DU NOUVEAU SCRUTIN BINOMINAL PARITAIRE

Alors que, depuis la loi du 22 juin 1833, un conseiller général est élu dans chaque canton, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 prévoit que, dans chaque canton, seront désormais élus une conseillère départementale et un conseiller départemental. Les candidatures prendront la forme de « binômes », nécessairement composés d’une femme et d’un homme (6).

Par parallélisme, le suppléant de chaque membre du binôme sera de même sexe que celui ou celle qu’il pourra être amené à remplacer en cours de mandat. L’exigence paritaire est également étendue aux élections aux fonctions exécutives, c’est-à-dire aux vice-présidences et à la commission permanente de chaque conseil départemental.

Le mode de scrutin proprement dit est, en revanche, inchangé : l’élection des binômes de candidats au conseil départemental se déroulera au scrutin majoritaire à deux tours. Alors que le projet de loi prévoyait initialement de l’abaisser à 10 % des électeurs inscrits, le seuil pour pouvoir se présenter au second tour est finalement demeuré fixé à 12,5 % des inscrits.

Les deux candidats membres du binôme seront solidaires devant le scrutin :

– l’un ne pourra pas être élu sans l’autre ;

– les règles de financement de la campagne électorale s’imposeront à eux de manière indissociable ;

– l’annulation de l’élection de l’un (par exemple en raison d’une inéligibilité) vaudra annulation de l’élection du binôme entier.

Le titre Ier du décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 (7) a tiré les conséquences réglementaires du nouveau dispositif binominal, notamment en matière de bulletins de vote, de dépenses de campagne, de propagande et de modalités de vote.

Une fois élus, les conseilleurs départementaux issus d’un même binôme exerceront leur mandat indépendamment. Par exemple, la vacance d’un seul des deux sièges du canton, survenant lorsque le suppléant n’est pas en mesure d’y pourvoir, n’entraînera pas la fin du mandat de l’autre membre du binôme. À propos de cette dernière hypothèse, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition qui prévoyait de laisser le siège vacant jusqu’au prochain renouvellement général du conseil départemental (8). L’article 9 du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral tend à tirer les conséquences de cette décision, en prévoyant que le siège vacant sera pourvu grâce à l’organisation d’une élection départementale partielle, qui se déroulera alors au scrutin uninominal. Cette élection sera ouverte aux candidats des deux sexes.

B. LE NOUVEAU DÉCOUPAGE CANTONAL

1. Une réduction de près de moitié du nombre de cantons

Afin de maintenir leur nombre à un niveau proche de celui des actuels conseillers généraux – soit aujourd’hui 3 971 élus (voir le tableau ci-après), la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a prévu de réduire de près de moitié le nombre de cantons.

Le nouvel article L. 191-1 du code électoral dispose que le nombre de cantons est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existants au 1er  janvier 2013, arrondi à l’unité impaire supérieure si ce nombre n’est pas entier. Dans les départements comptant entre 150 000 et 500 000 habitants, le nombre de cantons ne peut être inférieur à treize (9). Dans ceux de plus de 500 000 habitants, le nombre de cantons ne peut être inférieur à dix-sept (10).

L’application de ces règles devait avoir pour effet de ramener le nombre de cantons de 3 971 à 2 068.

Toutefois, la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles a prévu la création, à compter du 1er janvier 2015, de la métropole de Lyon, collectivité territoriale à statut particulier appelée à se substituer à la communauté urbaine de Lyon et, dans les limites territoriales précédemment reconnues à celle-ci, au département du Rhône (11). En conséquence, le nouveau découpage cantonal dans le département du Rhône ne porte plus que sur le territoire situé hors de cette métropole, ce qui ramène à 13 le nombre de cantons dans ce département (au lieu de 27 cantons attendus lors du vote de la loi du 17 mai 2013) (12).

Au total, le nombre de cantons est donc ramené à 2 054, soit 4 108 conseillers départementaux.

NOMBRE TOTAL DE CANTONS APRÈS LA RÉFORME

Départements

Avant la réforme

Après la réforme

Métropole (hors Paris)

3 863

1 995

Guadeloupe

40

21

La Réunion

49

25

Mayotte

19

13

Total

3 971

2 054

2. Les règles encadrant le redécoupage cantonal

La mise en œuvre des lois du 17 mai 2013 aboutit à un remodelage de l’ensemble des cantons que compte notre territoire, opération qui n’avait jamais été réalisée depuis la création des cantons en 1789. Les limites territoriales de près de 60 % des cantons n’avaient même jamais fait l’objet de modifications depuis l’établissement initial de la carte des cantons, résultant d’une série d’arrêtés des consuls pris au cours de l’an X (1801-1802), sur le fondement de la loi du 8 pluviôse an IX (28 janvier 1801) portant réduction du nombre des justices de paix.

L’article 46 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a fixé les règles applicables à cette opération de redécoupage.

D’une part, la procédure applicable est celle prévue à l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, selon lequel « les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d’État après consultation du conseil général ». La loi du 17 mai 2013 a ajouté que le conseil général devait se prononcer dans un délai de six semaines, à défaut de quoi son avis est « réputé rendu ».

D’autre part, la délimitation des cantons doit respecter trois exigences :

– la continuité territoriale de chaque canton ;

– l’insertion dans un seul et même canton de toute commune de moins de 3 500 habitants ;

– la définition du territoire de chaque canton « sur des bases essentiellement démographiques ». La version initiale du projet de loi prévoyait que la population de chaque canton ne pourrait être ni supérieure, ni inférieure de plus de 20 % à la population moyenne des cantons du département. Cet écart maximal avait été porté à plus ou moins 30 % au cours de la navette parlementaire. Craignant une censure du Conseil constitutionnel sur le fondement du principe d’égalité devant le suffrage, le Gouvernement a fait adopter par l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, un amendement supprimant toute référence à un écart chiffré. En pratique, pour élaborer les décrets en Conseil d’État pris sur le fondement des nouvelles dispositions législatives, le Gouvernement s’est astreint à respecter l’écart maximal de plus ou moins 20 %.

L’article 46 de la loi du 17 mai 2013 prévoit, toutefois, qu’il peut être apporté à ces trois règles « des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d’autres impératifs d’intérêt général ».

Au cours des débats parlementaires, le législateur avait précisé et élargi ces possibles tempéraments apportés à la stricte logique démographique, mais le Conseil constitutionnel les a déclarés contraires à la Constitution dans sa décision du 16 mai 2013 : « si le législateur peut tenir compte de considérations géographiques, au nombre desquelles figurent l’insularité, le relief, l’enclavement ou la superficie, ainsi que d’autres impératifs d’intérêt général susceptibles d’atténuer la portée de la règle de l’égalité devant le suffrage, il ne saurait le faire que dans une mesure limitée ; (…) par leur généralité, les exceptions prévues (…) pourraient donner lieu à des délimitations arbitraires de circonscriptions ; (…) par suite, les mots "d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental ; d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton" sont contraires à la Constitution » (13).

3. Les décrets portant nouvelle délimitation des cantons

Compte tenu du report à mars 2015 des élections départementales décidé dans la loi du 17 mai 2013, la nouvelle délimitation des cantons devait être achevée avant le 1er mars 2014, en vue de respecter le principe – de rang législatif – selon lequel aucun redécoupage des circonscriptions électorales ne peut avoir lieu dans l’année précédant le scrutin (14).

L’ensemble des décrets en Conseil d’État portant nouvelle délimitation des cantons ont effectivement été publiés avant le 1er mars 2014 (voir le tableau ci-après). Postérieurement, deux décrets, l’un du 19 mars, l’autre du 13 mai, ont corrigé certaines erreurs matérielles (15).

Auparavant, l’article 8 du décret n° 2014-112 du 6 février 2014 portant différentes mesures d’ordre électoral avait précisé que les chiffres de la population municipale à prendre en compte pour l’élaboration des décrets portant nouveau découpage canton sont ceux mentionnés dans le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d’outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon (16).

Département

Nombre de cantons avant la réforme

Décret

Nombre de cantons après la réforme

Ain

43

n° 2014-147 du 13 février 2014

23

Aisne

42

n° 2014-202 du 21 février 2014

21

Allier

35

n° 2014-265 du 27 février 2014

19

Alpes-de-Haute-Provence

30

n° 2014-226 du 24 février 2014

15

Hautes-Alpes

30

n° 2014-193 du 20 février 2014

15

Alpes-Maritimes

52

n° 2014-227 du 24 février 2014

27

Ardèche

33

n° 2014-148 du 13 février 2014

17

Ardennes

37

n° 2014-203 du 21 février 2014

19

Ariège

22

n° 2014-174 du 18 février 2014

13

Aube

33

n° 2014-216 du 21 février 2014

17

Aude

35

n° 2014-204 du 21 février 2014

19

Aveyron

46

n° 2014-205 du 21 février 2014

23

Bouches-du-Rhône

57

n° 2014-271 du 27 février 2014

29

Calvados

49

n° 2014-160 du 17 février 2014

25

Cantal

27

n° 2014-149 du 13 février 2014

15

Charente

35

n° 2014-195 du 20 février 2014

19

Charente-Maritime

51

n° 2014-269 du 27 février 2014

27

Cher

35

n° 2014-206 du 21 février 2014

19

Corrèze

37

n° 2014-228 du 24 février 2014

19

Corse-du-Sud

22

n° 2014-229 du 24 février 2014

11

Haute-Corse

30

n° 2014-255 du 26 février 2014

15

Côte-d’Or

43

n° 2014-175 du 18 février 2014

23

Côtes-d’Armor

52

n° 2014-150 du 13 février 2014

27

Creuse

27

n° 2014-161 du 17 février 2014

15

Dordogne

50

n° 2014-218 du 21 février 2014

25

Doubs

35

n° 2014-240 du 25 février 2014

19

Drôme

36

n° 2014-191 du 20 février 2014

19

Eure

43

n° 2014-241 du 25 février 2014

23

Eure-et-Loir

29

n° 2014-231 du 24 février 2014

15

Finistère

54

n° 2014-151 du 13 février 2014

27

Gard

46

n° 2014-226 du 24 février 2014

23

Haute-Garonne

53

n° 2014-152 du 13 février 2014

27

Gers

31

n° 2014-254 du 26 février 2014

17

Gironde

63

n° 2014-192 du 20 février 2014

33

Hérault

49

n° 2014-258 du 26 février 2014

25

Ille-et-Vilaine

53

n° 2014-177 du 18 février 2014

27

Indre

26

n° 2014-178 du 18 février 2014

13

Indre-et-Loire

37

n° 2014-179 du 18 février 2014

19

Isère

58

n° 2014-180 du 18 février 2014

29

Jura

34

n° 2014-165 du 17 février 2014

17

Landes

30

n° 2014-181 du 18 février 2014

15

Loir-et-Cher

30

n° 2014-213 du 21 février 2014

15

Loire

40

n° 2014-260 du 26 février 2014

21

Haute-Loire

35

n° 2014-162 du 17 février 2014

19

Loire-Atlantique

59

n° 2014-243 du 25 février 2014

31

Loiret

41

n° 2014-244 du 25 février 2014

21

Lot

31

n° 2014-154 du 13 février 2014

17

Lot-et-Garonne

40

n° 2014-257 du 26 février 2014

21

Lozère

25

n° 2014-245 du 25 février 2014

13

Maine-et-Loire

41

n° 2014-259 du 26 février 2014

21

Manche

52

n° 2014-246 du 25 février 2014

27

Marne

44

n° 2014-208 du 21 février 2014

23

Haute-Marne

32

n° 2014-163 du 17 février 2014

17

Mayenne

32

n° 2014-209 du 21 février 2014

17

Meurthe-et-Moselle

44

n° 2014-261 du 26 février 2014

23

Meuse

31

n° 2014-166 du 17 février 2014

17

Morbihan

42

n° 2014-215 du 21 février 2014

21

Moselle

51

n° 2014-183 du 18 février 2014

27

Nièvre

32

n° 2014-184 du 18 février 2014

17

Nord

79

n° 2014-167 du 17 février 2014

41

Oise

41

n° 2014-196 du 20 février 2014

21

Orne

40

n° 2014-247 du 25 février 2014

21

Pas-de-Calais

77

n° 2014-233 du 24 février 2014

39

Puy-de-Dôme

61

n° 2014-210 du 21 février 2014

31

Pyrénées-Atlantiques

52

n° 2014-248 du 25 février 2014

27

Hautes-Pyrénées

34

n° 2014-242 du 25 février 2014

17

Pyrénées-Orientales

31

n° 2014-262 du 26 février 2014

17

Bas-Rhin

44

n° 2014-185 du 18 février 2014

23

Haut-Rhin

31

n° 2014-207 du 21 février 2014

17

Rhône

54

n° 2014-267 du 27 février 2014

13

Haute-Saône

32

n° 2014-164 du 17 février 2014

17

Saône-et-Loire

57

n° 2014-182 du 18 février 2014

29

Sarthe

40

n° 2014-234 du 24 février 2014

21

Savoie

37

n° 2014-272 du 27 février 2014

19

Haute-Savoie

34

n° 2014-153 du 13 février 2014

17

Seine-Maritime

69

n° 2014-266 du 27 février 2014

35

Seine-et-Marne

43

n° 2014-186 du 18 février 2014

23

Yvelines

39

n° 2014-214 du 21 février 2014

21

Deux-Sèvres

33

n° 2014-176 du 18 février 2014

17

Somme

46

n° 2014-263 du 26 février 2014

23

Tarn

46

n° 2014-170 du 17 février 2014

23

Tarn-et-Garonne

30

n° 2014-273 du 27 février 2014

15

Var

43

n° 2014-270 du 27 février 2014

23

Vaucluse

24

n° 2014-249 du 25 février 2014

17

Vendée

31

n° 2014-169 du 17 février 2014

17

Vienne

38

n° 2014-264 du 26 février 2014

19

Haute-Vienne

42

n° 2014-194 du 20 février 2014

21

Vosges

31

n° 2014-268 du 27 février 2014

17

Yonne

42

n° 2014-156 du 13 février 2014

21

Territoire de Belfort

15

n° 2014-155 du 13 février 2014

9

Essonne

42

n° 2014-230 du 24 février 2014

21

Hauts-de-Seine

45

n° 2014-256 du 26 février 2014

23

Seine-Saint-Denis

40

n° 2014-217 du 21 février 2014

21

Val-de-Marne

49

n° 2014-171 du 17 février 2014

25

Val-d’Oise

39

n° 2014-168 du 17 février 2014

21

Guadeloupe

40

n° 2014-235 du 24 février 2014

21

La Réunion

49

n° 2014-236 du 24 février 2014

25

Mayotte

19

n° 2014-157 du 13 février 2014

13

TOTAL

3 971

 

2 054

Conformément à l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, les conseils généraux ont été consultés sur les projets de décret portant nouvelle délimitation des cantons.

Sur les 98 conseils généraux consultés, 40 d’entre eux (soit 41 %) ont émis un avis favorable, tandis que 58 (soit 59 %) ont rendu un avis défavorable sur le projet de redécoupage (voir le tableau ci-après).

AVIS DES CONSEILS GÉNÉRAUX SUR LES PROJETS DE DÉCRET PORTANT NOUVELLE DÉLIMITATION DES CANTONS

Ain

favorable

Aisne

défavorable

Allier

défavorable

Alpes-de-Haute-Provence

défavorable

Hautes-Alpes

défavorable

Alpes-Maritimes

défavorable

Ardèche

favorable

Ardennes

défavorable

Ariège

favorable

Aube

défavorable

Aude

favorable

Aveyron

défavorable

Bouches-du-Rhône

défavorable

Calvados

défavorable

Cantal

défavorable

Charente

favorable

Charente-Maritime

défavorable

Cher

défavorable

Corrèze

défavorable

Corse-du-Sud

défavorable

Haute-Corse

favorable

Côte-d’Or

défavorable

Côtes-d’Armor

favorable

Creuse

défavorable

Dordogne

favorable

Doubs

favorable

Drôme

favorable

Eure

défavorable

Eure-et-Loir

défavorable

Finistère

favorable

Gard

favorable

Haute-Garonne

défavorable

Gers

favorable

Gironde

favorable

Hérault

défavorable

Ille-et-Vilaine

favorable

Indre

défavorable

Indre-et-Loire

favorable

Isère

favorable

Jura

favorable

Landes

favorable

Loir-et-Cher

défavorable

Loire

défavorable

Haute-Loire

favorable

Loire-Atlantique

favorable

Loiret

défavorable

Lot

favorable

Lot-et-Garonne

favorable

Lozère

défavorable

Maine-et-Loire

défavorable

Manche

défavorable

Marne

défavorable

Haute-Marne

défavorable

Mayenne

défavorable

Meurthe-et-Moselle

favorable

Meuse

défavorable

Morbihan

défavorable

Moselle

défavorable

Nièvre

défavorable

Nord

favorable

Oise

favorable

Orne

défavorable

Pas-de-Calais

favorable

Puy-de-Dôme

défavorable

Pyrénées-Atlantiques

favorable

Hautes-Pyrénées

défavorable

Pyrénées-Orientales

favorable

Bas-Rhin

défavorable

Haut-Rhin

défavorable

Rhône

favorable

Haute-Saône

favorable

Saône-et-Loire

favorable

Sarthe

défavorable

Savoie

défavorable

Haute-Savoie

défavorable

Seine-Maritime

favorable

Seine-et-Marne

défavorable

Yvelines

défavorable

Deux-Sèvres

favorable

Somme

défavorable

Tarn

favorable

Tarn-et-Garonne

défavorable

Var

défavorable

Vaucluse

favorable

Vendée

défavorable

Vienne

défavorable

Haute-Vienne

favorable

Vosges

défavorable

Yonne

défavorable

Territoire de Belfort

favorable

Essonne

favorable

Hauts-de-Seine

défavorable

Seine-Saint-Denis

défavorable

Val-de-Marne

favorable

Val-d’Oise

défavorable

Guadeloupe

défavorable

La Réunion

défavorable

Mayotte

défavorable

Auditionnés par vos rapporteurs en tant que représentants de l’Association des départements de France (ADF), M. Bruno Sido, sénateur, président du conseil général de la Haute-Marne, et M. Yves Krattinger, sénateur, président du conseil général de la Haute-Saône, ont porté des jugements contradictoires sur ces consultations : si, pour le premier, elles sont demeurées purement formelles, elles ont parfois permis, pour le second, d’apporter des modifications aux projets initiaux du Gouvernement.

Les projets de décret ont ensuite été soumis pour avis au Conseil d’État, en formation consultative. Sur les 98 projets de décret, 66 ont fait l’objet de propositions de modification du Conseil d’État, qui ont systématiquement été suivies par le Gouvernement.

Au total, sur les 2 054 nouveaux cantons, seuls 29 cantons (1,4 %) sont en « exception démographique », c’est-à-dire que leur population excède l’écart de plus ou moins 20 % par rapport à la population moyenne des cantons du département, au nom de « considérations géographiques » ou d’ « autres impératifs d’intérêt général ».

Selon les chiffres communiqués à vos rapporteurs par la direction de la modernisation et de l’action territoriale (DMAT) du ministère de l’Intérieur, 497 cantons (soit 24,2 % du total) sont situés au-delà de 15 % d’écart à la moyenne départementale. Parmi eux, 70 cantons (soit 3,4 % du total) sont très proches – entre 19 % et 20 % – de la borne démographique.

Ce nouveau découpage cantonal entraînera la perte de la qualité de chef-lieu pour certaines communes, en raison des regroupements de cantons.

On relèvera que les 98 décrets en Conseil d’État portant délimitation des cantons ont défini des « bureaux centralisateurs », et non des chefs-lieux (17), dès lors que la seule obligation en matière électorale est la détermination de la commune chargée de centraliser les opérations de vote (18). Ces bureaux centralisateurs ont généralement été fixés dans la commune la plus peuplée du nouveau canton, sauf lorsque ses limites territoriales n’ont pas changé par rapport à l’ancien canton – auquel cas le bureau centralisateur est l’actuel chef-lieu.

Le législateur a prévu que la qualité de chef-lieu sera « maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d’une modification des limites territoriales des cantons (…) jusqu’au prochain renouvellement général des conseils départementaux », c’est-à-dire jusqu’en 2015 (19).

Cette qualité permet à une commune de bénéficier de certaines dispositions prévues par le code général des collectivités territoriales : possible vote par le conseil municipal de majorations d’indemnités de fonction de ses membres (article L. 2123-22) ; éligibilité de la commune à la première fraction – dite « bourg-centre » – de la dotation de solidarité rurale (article L. 2334-21) ; possibilité pour la communauté de communes dont est membre la commune de prétendre, sous certaines conditions, à une majoration de la dotation globale de fonctionnement (article L. 5214-23-1).

En pratique, l’impact sur l’attribution de la dotation de solidarité rurale sera perceptible à compter de 2017, l’éligibilité à cette dotation étant appréciée au regard des données connues au 1er janvier de l’année précédant celle de sa répartition. Quant à la majoration des indemnités de fonction, sa pérennisation est prévue par l’article 1er de la proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat, en instance de deuxième lecture par l’Assemblée nationale (20).

4. Le contentieux des décrets portant nouvelle délimitation des cantons

Les décrets en Conseil d’État adoptés en février 2014 portant délimitation des cantons ont fait l’objet d’une importante série de recours.

Le ministère de l’Intérieur a reçu plus d’un millier de recours gracieux. Au 18 juin 2014, aucun n’avait donné lieu à une suite favorable aux requérants.

Au 9 juillet 2014, le Conseil d’État a, quant à lui, enregistré 2 558 recours contentieux contre des décrets portant nouvelle délimitation des cantons. À cette date, trois départements concentraient à eux seuls plus d’un millier de recours : l’Isère (443 requêtes), la Vendée (383 requêtes) et le Loiret (242 requêtes).

Les recours émanent, pour la plupart, d’élus opposés à l’actuelle majorité gouvernementale. Leur point de vue a été exposé à vos rapporteurs par M. Bruno Sido, sénateur, représentant de l’ADF, ainsi que par les représentants de l’Association de soutien pour l’exercice des responsabilités départementales et locales (ASERDEL) – M. Benoît Huré, sénateur, président du conseil général des Ardennes et M. Pierre Monzani, directeur (21).

Les principales critiques émises par les opposants à ces décrets portent sur le caractère supposé partisan du nouveau découpage, qui avantagerait la majorité actuelle lors des prochaines élections, ainsi que sur les atteintes portées à la ruralité, en raison de la très vaste superficie de certains cantons et du grand nombre de communes dans certains d’entre eux.

À l’inverse, M. Yves Krattinger, sénateur, également entendu par vos rapporteurs au titre de l’ADF, a pris position en faveur du nouveau découpage cantonal. Il a souligné, en particulier, que le principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage obligeait, en tout état de cause, à remodeler les cantons – même dans l’hypothèse où aurait été conservé le mode de scrutin uninominal antérieur à la loi du 17 mai 2013.

Les représentants de l’ASERDEL ont, par ailleurs, mis en cause la double compétence – à la fois consultative et contentieuse – du Conseil d’État à l’égard des décrets délimitant les cantons, au motif qu’elle pourrait être de nature à faire douter de son impartialité, notamment au regard de la Convention européenne des droits de l’homme. Il convient de signaler que le Conseil d’État a rejeté une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) formée à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir contre un décret délimitant les cantons de la Gironde, QPC qui contestait la constitutionnalité de cette double compétence (22).

Selon les indications données à vos rapporteurs par M. Bernard Stirn, président de la section du contentieux du Conseil d’État, au 9 juillet 2014, 981 requêtes avaient déjà été traitées et toutes rejetées, soit sous forme d’ordonnances (923 requêtes) (23), soit sous forme de décisions rendues par des formations collégiales (58 requêtes).

À ce stade, quatre décisions significatives du Conseil d’État peuvent être mentionnées.

En premier lieu, dans la décision « Hyest » du 21 mai 2014 (n° 376166), le Conseil d’État juge que le nouveau découpage cantonal n’est pas tenu de coïncider avec les périmètres d’autres circonscriptions électorales ou de subdivisions administratives.

Selon le Conseil d’État, aucun « texte non plus qu’aucun principe n’imposent au Premier ministre de prévoir que les limites des cantons, qui sont des circonscriptions électorales, coïncident avec les limites des circonscriptions législatives, les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale figurant dans le schéma départemental de coopération intercommunale ou les limites des " bassins de vie" définis par l’Institut national de la statistique et des études économiques ; (…) de même, si l’article L. 192 du code électoral, dans sa rédaction antérieure à l’intervention de la loi précitée du 17 mai 2013, relatif aux modalités de renouvellement des conseils généraux, faisait référence aux arrondissements, aucun texte en vigueur à la date du décret contesté ne mentionne ces arrondissements, circonscriptions administratives de l’État, pour la détermination des limites cantonales ».

En deuxième lieu, dans la décision « ASERDEL » du 26 mai 2014 (n° 376548), le Conseil d’État rejette un recours pour excès de pouvoir contre le décret n° 2014-112 du 6 février 2014 précité, qui prévoit que le découpage cantonal s’appuie sur les chiffres de population authentifiés par le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 précité.

Alors que l’association requérante estimait qu’un décret plus récent (24) aurait dû être pris en compte, le Conseil d’État juge qu’il appartient « au Gouvernement de retenir les chiffres de population les plus récents auxquels il est susceptible de se référer en tenant compte de la date des prochaines échéances électorales ainsi que des exigences d’une bonne administration, au nombre desquelles figure notamment le respect des contraintes et délais de consultation inhérents au processus d’élaboration et d’adoption des nouvelles délimitations ». Or, « la délimitation des nouvelles circonscriptions cantonales devait, conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi du 11 juillet 1990, être effectuée au plus tard un an avant le mois de mars 2015 ».

En conséquence, « dans les circonstances de l’espèce, eu égard, d’une part, aux délais inhérents à l’élaboration de l’ensemble des projets de décrets de délimitation des circonscriptions cantonales, à la consultation des conseils généraux et à la saisine pour avis du Conseil d’État, d’autre part, à la circonstance que la déclinaison à l’échelon infra-communal des chiffres de population applicables à compter du 1er janvier 2014, nécessaire à la délimitation de certains cantons, n’était pas disponible à la date à laquelle devait être entreprise la délimitation des nouvelles circonscriptions cantonales, les dispositions attaquées du décret du 6 février 2014 ont pu légalement prévoir que le chiffre de population municipale auquel il convenait de se référer était le chiffre authentifié par le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 et non celui que prévoit le décret n° 2013-1289 du 27 décembre 2013, qui authentifie les chiffres de population auxquels il convient, en principe, de se référer pour l’application des lois et règlements à compter du 1er janvier 2014 ».

En troisième lieu, dans une décision « Commune de Dieuze » du 4 juin 2014 (n° 377663), relative au département de la Moselle, le Conseil d’État apporte des précisions quant à l’intensité de son contrôle des décrets délimitant les cantons :

– le rattachement d’une commune à un canton plutôt qu’à un autre fait l’objet d’un contrôle restreint, consistant à vérifier l’absence d’ « erreur manifeste d’appréciation » ;

– le moyen tiré d’un écart important entre la population d’un nouveau canton et la population moyenne du département, alors même qu’il est inférieur à 20 % (en l’espèce, plus de 19 %), est examiné par le Conseil d’État, qui contrôle les justifications de cet écart et vérifie que celles-ci ne revêtent pas un « caractère arbitraire » (25).

En outre, complétant la décision « Hyest » précitée, cette décision du 4 juin 2014 énonce qu’aucun texte « non plus qu’aucun principe n’imposent au pouvoir réglementaire de prendre comme critères de délimitation [des cantons] les limites des anciens cantons, la proximité géographique des communes ou l’absence de disparité de superficie entre cantons ».

En quatrième lieu, dans une décision du 27 juin 2014 (n° 380636), le Conseil d’État a statué sur les conséquences d’une éventuelle annulation, totale ou partielle, d’un décret portant délimitation des cantons, au regard de la règle législative selon laquelle aucun redécoupage des circonscriptions électorales ne peut avoir lieu dans l’année précédant le scrutin – règle prévue à l’article 7 de la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 précitée. Il y est jugé que cette règle n’entacherait pas d’illégalité un nouveau décret de délimitation des cantons, rendu nécessaire par l’annulation d’un premier décret par le Conseil d’État.

Selon le juge administratif, les dispositions de la loi du 17 mai 2013 « impliquaient qu’il fût procédé à une nouvelle délimitation de l’ensemble des circonscriptions cantonales et font obstacle à ce que l’élection des conseillers départementaux puisse avoir lieu dans le cadre des cantons tels qu’ils étaient délimités avant le 1er janvier 2013 ». En conséquence, « dans le cas où le Conseil d’État, au cours de l’année précédant le prochain renouvellement général des assemblées départementales, fixé à la date de la présente décision au mois de mars 2015, prononcerait l’annulation rétroactive d’un décret ayant procédé à une nouvelle délimitation des cantons d’un département en application de la loi du 17mai 2013, il incomberait au Premier ministre, en l’état du droit applicable et sans qu’y fassent obstacle, dans ces circonstances particulières, les dispositions de l’article 7 de la loi du 11 décembre 1990, de prendre un nouveau décret respectant l’autorité de la chose jugée pour combler le vide résultant d’une annulation rétroactive, afin de permettre, avec le cas échéant toute autre mesure utile, la tenue de l’élection des conseillers départementaux de ce département dans le respect de l’exigence de sincérité du suffrage ».

Parmi les prochains points de droit que pourrait avoir à trancher le Conseil d’État lors de l’examen des autres requêtes contre les décrets redécoupant les cantons, peut notamment être mentionnée la question de l’étendue du contrôle qu’opérera le juge administratif sur des décrets prévoyant, pour des motifs d’intérêt général, des dérogations à la règle de l’écart de plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne départementale.

OBSERVATIONS COMPLÉMENTAIRES DE M. GUILLAUME LARRIVÉ,
CO-RAPPORTEUR

Les lois du 17 mai 2013 s’inscrivent dans la longue liste des lois électorales que l’actuelle majorité a votées hier, débat aujourd’hui ou envisage pour demain, lors d’un quinquennat marqué par d’incessantes remises en cause des modes de scrutin.

Au-delà des aspects techniques de leur application, exposés ci-avant, ces lois appellent deux séries de remarques.

En premier lieu, l’application des dispositions relatives aux élections des conseils municipaux et des conseils communautaires suscite une interrogation, quant aux modalités d’élection des exécutifs des communes et des intercommunalités.

Ces lois, d’une part, n’ont pas modifié le mode d’élection du maire, qui est élu par les conseillers municipaux et non par les citoyens eux-mêmes, contrairement à ce que nos compatriotes croient le plus souvent.

Ces dispositions, d’autre part, ont entendu permettre aux citoyens de choisir un peu plus directement que par le passé les élus siégeant au sein des intercommunalités. Pour autant, elles ne leur donnent pas le droit de choisir eux-mêmes le président de l’intercommunalité, qui demeure élu par les conseillers communautaires. Certains observateurs ont pu noter que ce mode de désignation laisse parfois une certaine part à des tractations de couloirs, notamment à des échanges sur l’attribution de vice-présidences permettant l’obtention d’indemnités. C’est une réalité qui a parfois pu aboutir, dans certaines communautés urbaines ou certaines communautés d’agglomération, à l’élection d’un président dont la sensibilité politique ne semble pas être celle de la majorité des électeurs de l’intercommunalité.

Dans ces conditions, il serait plus démocratique, c’est-à-dire plus lisible, plus clair, plus transparent, que les maires et les présidents d’intercommunalité soient élus, demain, au suffrage universel direct.

Cette réflexion mériterait d’alimenter de futurs débats sur l’amélioration de notre démocratie locale.

En second lieu, les dispositions applicables aux régions et aux départements, qui constituent le cœur des lois du 17 mai 2013, appellent un diagnostic plus brutal : ces lois sont mort-nées.

Tout d’abord, la modification du calendrier électoral, décidée en 2013, est déjà caduque puisque le gouvernement propose, dans un projet de loi en cours de débat au Parlement (26), de reporter à décembre 2015 les élections départementales et régionales qui avaient déjà été reportées de mars 2014 à mars 2015.

L’on ne peut que regretter cet ajustement permanent du calendrier électoral, décidé par la majorité du moment, qui fixe les dates des élections à sa guise.

Dans une démocratie avancée, de telles pratiques devraient être évitées : une modification du calendrier électoral ne devrait être décidée que si elle est approuvée par une majorité des trois cinquièmes des membres de l’Assemblée nationale.

Ensuite, en abrogeant les dispositions de la loi du 16 décembre 2010 qui créaient les conseillers territoriaux, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a eu pour principal objet de mettre fin au rapprochement des régions et des départements, qui aurait dû intervenir dès mars 2014.

Cette loi de 2013 a entendu rétablir, ainsi, une sorte d’étanchéité institutionnelle entre les régions et les départements. Le Gouvernement nous invite pourtant, désormais, à voter des textes organisant l’absorption progressive des départements par les régions (27). La cohérence de cette orientation nouvelle avec celle retenue voici quelques mois dans les lois de 2013 n’apparaît pas spontanément à l’esprit.

Enfin, les lois de 2013 organisent un scrutin départemental qui ne peut qu’aggraver la défiance de nos concitoyens à l’endroit de la vie politique.

La mise en place du nouveau scrutin binominal paritaire et le redécoupage suscitent une opposition très vive dans nos territoires.

D’une part, 57 des 98 conseils généraux concernés par une nouvelle délimitation des cantons, soit 58 % d’entre eux, ont voté contre la proposition de redécoupage présentée par le Gouvernement – dont 39 conseils généraux de droite et 18 conseils généraux de gauche.

D’autre part, les décrets de redécoupage sont massivement contestés : le Gouvernement a reçu plus d’un millier de recours gracieux et 2 558 recours pour excès de pouvoir ont été adressés au Conseil d’État.

La loi n° 2013-403 du 17 mai 2013, telle qu’elle a été promulguée après son examen par le Conseil constitutionnel, a laissé au Gouvernement une très large marge de manœuvre pour procéder à ce redécoupage, selon des considérations d’opportunité qui échappent à tout contrôle juridictionnel effectif dès lors que les équilibres démographiques sont, en apparence, respectés.

Une analyse des écarts à la moyenne départementale dans différents départements démontre en effet que, lorsque c’était possible, le Gouvernement a cherché à augmenter le nombre des cantons susceptibles de voter à gauche, qu’il s’agisse de cantons urbains ou de cantons ruraux, comme l’a excellemment démontré l’étude publiée en mars dernier par notre collègue François Sauvadet sous le titre « Livre noir sur le redécoupage des cantons de France » (28).

L’on se bornera ici à un seul exemple, en comparant le Gard – dont le président du conseil général est membre du PS – et le Morbihan – dont le président du conseil général est membre de l’UMP. Le Gouvernement y a fait des choix d’écarts à la moyenne contraires : la préservation des zones rurales ne l’a préoccupé que lorsque celles-ci lui sont supposées favorables.

Ainsi, la plupart des cantons ruraux du Gard, majoritairement à gauche, présentent un écart à la moyenne départementale de – 15 %. À l’inverse, les cantons ruraux du Morbihan, majoritairement à droite, ont un écart qui dépasse de + 10 % la moyenne départementale.

Le même constat s’impose à propos des cantons urbains : majoritairement à droite, les cantons urbains de Nîmes excèdent tous la moyenne départementale d’environ + 15 %, alors que ceux de Lorient, majoritairement à gauche, sont inférieurs de – 13 % à la moyenne.

Au total, le redécoupage effectué dans le Gard vise, en préservant un nombre plus important de cantons en zone rurale, à permettre à l’actuelle majorité d’éviter de perdre trop de sièges lors des prochaines élections. Dans le Morbihan, il s’agit au contraire de favoriser l’alternance, en diminuant le nombre de cantons ruraux, davantage favorables à la droite.

Cet exercice de redécoupage de tous les cantons de France est d’autant plus contestable qu’il aboutira à faire élire, en 2015, des assemblées départementales privées de l’essentiel de leurs compétences, puisque le Gouvernement souhaite les « dévitaliser », ainsi que l’a annoncé M. André Vallini, secrétaire d’État chargé de la Réforme territoriale.

En conclusion, l’on ne peut que relayer les déclarations du sénateur socialiste de la Haute-Saône, M. Yves Krattinger, lors de son audition par vos rapporteurs : « la réforme votée en 2013 n’a plus aucun sens. Les candidats au conseil départemental, en 2015, pourront dire : "je n’ai pas de programme puisque mon programme c’est d’être un syndic de liquidation." C’est une impasse. L’opinion publique est désorientée. Qui ira voter ? »

Un tel réquisitoire est un excellent résumé de ces lois mal pensées, mal appliquées et, au total, mort-nées.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa séance du mercredi 16 juillet 2014, la Commission examine le rapport sur la mise en application de la loi organique n° 2013-402 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux et de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, présenté en application de l’article 145-7 du Règlement (M. Pascal Popelin, rapporteur, et M. Guillaume Larrivé, co-rapporteur).

M. Pascal Popelin, rapporteur. Le cadre juridique régissant les élections locales a été profondément modifié par la loi organique et la loi du 17 mai 2013.

Un peu plus d’une année après la promulgation de ces deux textes, sur la suggestion de notre collègue Guillaume Larrivé, co-rapporteur pour la mise en application, nous nous sommes attachés à contrôler et à évaluer les conditions de leur mise en œuvre, en application de l’article 145-7 du Règlement de notre Assemblée.

Notre premier élément d’évaluation a concerné la publication des décrets d’application prévus. En dehors des décrets relatifs au redécoupage des cantons, qui ont tous été publiés avant le 1er mars 2014 et sur lesquels je reviendrai, ces deux lois n’appelaient qu’un seul décret d’application : il s’agit du décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013. Toutes les mesures réglementaires d’application des lois du 17 mai 2013 ont donc bien été prises.

Notre deuxième élément d’évaluation a porté sur l’application des nouvelles règles prévues pour les élections municipales, à partir des enseignements que les élections des 23 et 30 mars derniers ont permis de tirer.

Dans 59 % des 6 465 communes comptant de 1 000 à 3 499 habitants, dans lesquelles le scrutin majoritaire de liste paritaire avec représentation proportionnelle a remplacé l’ancien système majoritaire plurinominal avec possibilité de panachage, les élections de mars 2014 ont vu concourir au moins deux listes. Une seule commune, Gironde-sur-Dropt, commune comptant 1 136 habitants en Gironde, a été confrontée à l’absence de liste. Toutefois, l’organisation d’une élection partielle le 5 mai 2014 a finalement suscité des vocations, avec le dépôt de trois listes ayant permis l’élection d’un conseil municipal. Au total, 21 186 listes ont été enregistrées dans les 9 734 communes de plus de 1 000 habitants, chiffre en progression par rapport à 2008, ce qui représente 926 068 candidatures enregistrées.

Au-delà de l’intérêt des Français pour la démocratie locale et de la vitalité de l’engagement citoyen dont ces chiffres attestent, il me semble donc possible d’affirmer, à la lueur de ces éléments, que les craintes exprimées par certains de nos collègues lors des débats, s’agissant de la capacité à former des listes paritaires, ou du risque de politisation d’un scrutin qui n’a pas forcément cette dimension dans les communes peu peuplées, ne se sont pas avérées fondées.

Nous nous sommes aussi intéressés au bilan de l’élection, pour la première fois au suffrage universel direct, des conseillers communautaires. Il s’agissait en effet là d’une des autres innovations importantes des lois du 17 mai 2013.

Si le nouveau mécanisme du fléchage ne semble pas avoir posé de difficulté particulière, il apparaît nécessaire que certaines précisions soient apportées sur deux sujets connexes.

L’article 22 de la loi a en effet rationalisé la définition des fonctions de direction au sein d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dont les titulaires sont, de ce fait, inéligibles aux élections municipales organisées dans leur ressort. Cependant, selon divers témoignages portés à notre connaissance, l’élargissement du champ des inéligibilités semble avoir parfois fait l’objet d’une interprétation très extensive de la part de l’autorité préfectorale. Ainsi, certains agents publics occupant des fonctions non explicitement ciblées par ces dispositions auraient été contraints de renoncer à leur engagement citoyen à l’occasion de la séquence électorale de mars 2014. Le rapport préconise donc la publication d’une circulaire rappelant et déclinant ces principes, pour contribuer à leur application homogène sur l’ensemble du territoire de la République.

Les modalités de remplacement des conseillers communautaires uniques élus dans les communes de plus de 1 000 habitants doivent aussi être clarifiées. L’article L. 273-10 du code électoral qui prévoit les modalités de remplacement en cas de vacance d’un siège de conseiller communautaire, modifié à l’initiative du Sénat, vient en effet contredire l’article L. 273-9 du même code. Si cela ne soulève pas de difficultés pratiques, cette forme d’incohérence aboutit à un résultat inverse aux objectifs de parité recherchés. Aussi, à l’initiative de son rapporteur, notre collègue Sébastien Denaja, un article additionnel a-t-il été inséré dans le projet de loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, actuellement en cours d’examen, afin de prévoir que, lorsqu’un seul siège de conseiller communautaire est attribué à la commune, le remplaçant du conseiller communautaire démissionnaire est le suivant de liste, nécessairement de sexe différent. Cet amendement permet d’en revenir à l’intention qui nous avait alors animés.

Pour conclure sur la mise en œuvre du volet communal et intercommunal de ces lois, le rapport précise que le contentieux des scrutins des 23 et 30 mars derniers est demeuré stable, comparativement aux précédentes élections municipales : 4 853 recours ont été déposés devant les tribunaux administratifs.

J’en viens maintenant au volet départemental des lois du 17 mai 2013. Comme chacun peut aisément en comprendre les raisons, notre évaluation n’a pu porter que sur les modalités de mise en œuvre du nouveau découpage cantonal.

L’article 46 de la loi a fixé les règles applicables à cette opération de redécoupage. La délimitation des cantons doit respecter trois exigences : la continuité territoriale, l’insertion dans un seul et même canton de toute commune de moins de 3 500 habitants et la définition du territoire de chaque canton « sur des bases essentiellement démographiques ». Il prévoit toutefois qu’il peut être apporté à ces trois règles « des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d’autres impératifs d’intérêt général ». Au cours des débats parlementaires, beaucoup de nos collègues se sont essayés à préciser et élargir ces possibles tempéraments apportés à la stricte logique démographique. Comme je l’avais pressenti à l’époque lors de nos échanges, le Conseil constitutionnel a déclaré tous ces ajouts contraires à la Constitution dans sa décision du 16 mai 2013.

L’ensemble des décrets en Conseil d’État portant nouvelle délimitation des cantons ont été publiés avant le 1er mars 2014. Postérieurement, deux décrets, l’un du 19 mars, l’autre du 13 mai, ont corrigé certaines erreurs matérielles.

Conformément à l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, les conseils généraux ont été consultés sur les projets de décret portant nouvelle délimitation des cantons. Sur les 98 conseils généraux, 41 ont émis un avis favorable, tandis que 57 ont rendu un avis défavorable. Les projets de décret ont ensuite été soumis pour avis au Conseil d’État, en formation consultative. Sur les 98 projets, 66 ont fait l’objet de propositions de modification du Conseil d’État, qui ont systématiquement été suivies par le gouvernement.

Sur les 2 054 cantons ainsi découpés, seuls 29 (soit 1,4 %) sont en « exception démographique », c’est-à-dire que leur population excède l’écart de plus ou moins 20 % par rapport à la population moyenne des cantons du département. Je rappelle que cet écart à la moyenne, qui a lui aussi fait l’objet de nombreux débats lors de l’examen de ces textes, ne figure pas dans la version finale de la loi. Il s’agit néanmoins d’une contrainte constante de la jurisprudence constitutionnelle en la matière, réaffirmée avec de plus en plus de fermeté depuis plus de 25 ans.

Les décrets en Conseil d’État portant délimitation des cantons ont fait l’objet d’une importante série de recours. Le ministère de l’Intérieur a reçu plus d’un millier de recours gracieux. Au 18 juin 2014, aucun n’avait donné lieu à une suite favorable aux requérants. Au 9 juillet 2014, le Conseil d’État a, quant à lui, enregistré 2 558 recours contentieux. Les principales critiques émises portent sur le caractère estimé partisan du nouveau découpage, ainsi que sur les atteintes qui seraient portées à la ruralité, en raison de la très vaste superficie de certains cantons et du grand nombre de communes dans certains d’entre eux.

Certains ont, par ailleurs, mis en cause la double compétence – à la fois consultative et contentieuse – du Conseil d’État à l’égard des décrets délimitant les cantons, au motif qu’elle pourrait être de nature à faire douter de son impartialité, notamment au regard de la Convention européenne des droits de l’homme. Il convient toutefois de signaler que le Conseil d’État a rejeté le renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) formée à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir contre un décret délimitant les cantons de la Gironde, qui contestait la constitutionnalité de cette double compétence.

Au 9 juillet 2014, 981 requêtes avaient déjà été traitées et toutes rejetées, 58 sous forme de décisions rendues par des formations collégiales et 923 sous forme d’ordonnances découlant d’une décision prise sur le fond.

À ce stade, je veux simplement mentionner plusieurs décisions significatives du Conseil d’État.

En premier lieu, dans la décision « Hyest » du 21 mai 2014, le Conseil d’État juge que le nouveau découpage cantonal n’est pas tenu de coïncider avec les périmètres d’autres circonscriptions électorales ou de subdivisions administratives. Nous n’avions effectivement pas inscrit ces contraintes dans la loi.

En deuxième lieu, dans la décision « Aserdel » du 26 mai 2014, le Conseil d’État rejette un recours pour excès de pouvoir contre le décret du 6 février 2014, qui a prévu que le découpage cantonal s’appuie sur les chiffres de population authentifiés fin 2012.

En troisième lieu, dans une décision « Commune de Dieuze » du 4 juin 2014, relative au département de la Moselle, le Conseil d’État apporte des précisions quant à l’intensité de son contrôle des décrets délimitant les cantons : le rattachement d’une commune à un canton plutôt qu’à un autre fait l’objet d’un contrôle restreint, consistant à vérifier l’absence d’ « erreur manifeste d’appréciation » ; le moyen tiré d’un écart important entre la population d’un nouveau canton et la population moyenne du département, alors même qu’il est inférieur à 20 % – en l’espèce, plus de 19 % –, est examiné par le Conseil d’État, qui contrôle les justifications de cet écart et vérifie que celles-ci ne revêtent pas un « caractère arbitraire ».

Enfin, dans une décision du 27 juin 2014, le Conseil d’État considère que la règle législative selon laquelle aucun redécoupage des circonscriptions électorales ne peut avoir lieu dans l’année précédant le scrutin n’entache pas d’illégalité un nouveau décret de délimitation des cantons, rendu nécessaire par l’éventuelle annulation contentieuse d’un premier décret par le Conseil d’État.

Ainsi, sans présumer de l’issue de l’ensemble des contentieux restant à traiter, il ne semble pas imprudent de considérer que peu d’entre eux sont voués à prospérer.

Pour terminer cette présentation d’un rapport qui se veut essentiellement factuel, puisque tel est l’objet de ce type de travail, je rappellerai que le Conseil constitutionnel a censuré une disposition de la loi qui prévoyait de laisser vacant jusqu’au prochain renouvellement général du conseil départemental un siège qui ne pourrait plus être pourvu ni par le titulaire élu, ni par son suppléant de même sexe. L’article 9 du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, en cours de discussion dans l’hémicycle dès aujourd’hui, a pour objet de proposer un dispositif de nature à régler cette difficulté, en prévoyant que le siège vacant sera pourvu grâce à l’organisation d’une élection départementale partielle, qui se déroulera alors au scrutin uninominal et sera ouverte aux candidats des deux sexes.

M. Guillaume Larrivé, co-rapporteur d’application. Les lois du 17 mai 2013 s’inscrivent dans la longue liste des lois électorales votées hier, débattues aujourd’hui ou préparées demain par l’actuelle majorité.

Au-delà des aspects techniques de l’application de la loi que le rapporteur a exposés, je ferai deux séries de remarques.

Quelques mots, d’abord, sur l’application des dispositions relatives aux élections des conseils municipaux et des conseils communautaires. Je souhaite vous faire part d’une interrogation, s’agissant des modalités d’élection des exécutifs des communes et des intercommunalités.

Ces lois de 2013, d’une part, n’ont pas modifié le mode d’élection du maire, qui est élu, comme chacun le sait ici, par les conseillers municipaux et non pas par les électeurs eux-mêmes, contrairement à ce que nos concitoyens croient le plus souvent.

Les lois de 2013, d’autre part, ont entendu permettre aux citoyens de choisir un peu plus directement que par le passé les élus siégeant au sein des intercommunalités ; mais elle ne leur donne pas le droit de choisir eux-mêmes le président de l’intercommunalité, qui est élu par les conseillers communautaires. Certains observateurs ont pu noter, en avril dernier, que ce mode de désignation laisse une certaine part à des tractations de couloirs et à des échanges sur l’attribution de vice-présidences permettant parfois l’obtention d’indemnités. C’est une réalité qui a parfois pu aboutir, dans certaines communautés urbaines ou certaines communautés d’agglomération, à l’élection d’un président dont la sensibilité politique ne semble pas être celle de la majorité des électeurs de l’intercommunalité.

Il me semble qu’il serait plus démocratique, c’est-à-dire plus lisible, plus clair, plus transparent, que les maires et les présidents d’intercommunalité soient élus, demain ou après-demain, au suffrage universel direct. Cette préconisation vaut également pour Paris : contrairement au mode de scrutin actuel, les Parisiens devraient pouvoir élire directement leur maire.

C’est une première réflexion que je souhaitais, très librement, soumettre à notre Commission.

J’en viens maintenant aux dispositions applicables aux régions et aux départements, c’est-à-dire au cœur des lois du 17 mai 2013. Disons les choses comme elles sont : ces lois sont mort-nées.

Je ferai, à cet égard, trois observations.

Premièrement, la modification du calendrier électoral, décidée par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013, est déjà caduque puisque le Gouvernement propose, dans un projet de loi débattu cette semaine dans l’hémicycle, de reporter à décembre 2015 les élections départementales et régionales qui avaient déjà été reportées de mars 2014 à mars 2015.

Je regrette, pour ma part, cet ajustement permanent du calendrier électoral, décidé par la majorité du moment, qui fixe les dates des élections à sa guise.

D’autres majorités l’ont fait dans le passé, je le sais, mais il me semble que, dans une démocratie avancée, de telles pratiques devraient être évitées. Il conviendrait de prévoir qu’une modification du calendrier électoral nécessite une approbation à la majorité qualifiée, par exemple une majorité des trois cinquièmes des membres de l’Assemblée nationale.

Deuxièmement, en abrogeant les dispositions de la loi du 16 décembre 2010 qui créaient les conseillers territoriaux, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 a eu pour principal objet de mettre fin au rapprochement des régions et des départements, qui aurait dû intervenir dès mars 2014.

Cette loi a entendu rétablir, ainsi, une sorte d’étanchéité institutionnelle entre les régions et les départements. Le Gouvernement nous invite pourtant, désormais, à voter des textes organisant l’absorption progressive des départements par les régions. La cohérence de cette orientation nouvelle avec celle retenue voici quelques mois par la loi de 2013 n’apparaît pas spontanément à l’esprit : vue de Sirius, la logique d’ensemble n’est pas évidente à percevoir ; il est à craindre qu’il en aille de même pour nos concitoyens.

Troisièmement, les lois du 17 mai 2013 organisent un scrutin départemental qui ne peut qu’aggraver la défiance de nos concitoyens à l’endroit de la vie politique.

La mise en place du nouveau mode de scrutin binominal paritaire et le redécoupage suscitent une opposition très vive dans nos territoires. 57 des 98 conseils généraux concernés par une nouvelle délimitation des cantons, soit 58 % d’entre eux, ont voté contre la proposition de redécoupage présentée par le Gouvernement – dont 39 conseils généraux de droite et 18 conseils généraux de gauche.

Les décrets de redécoupage sont massivement contestés : plus d’un millier de recours gracieux ont été reçus par le Gouvernement, qui y a répondu de façon extrêmement succincte, et 2 558 recours contentieux ont été adressés au Conseil d’État. Ce dernier a choisi de procéder très rapidement à l’examen de ces recours, ce dont témoigne le grand nombre de décisions rendues sous forme d’ordonnance ou par une sous-section jugeant seule : on est parfois proche d’une forme d’ « abattage », qui ne permet pas réellement d’aller au fond des sujets.

En outre, la loi de 2013, telle qu’elle a été promulguée après son passage au Conseil constitutionnel, a laissé au Gouvernement une très large marge de manœuvre pour procéder à ce redécoupage selon des considérations d’opportunité qui échappent à tout contrôle juridictionnel effectif dès lors que les équilibres démographiques sont, en apparence, respectés.

Une analyse des écarts à la moyenne départementale dans différents départements démontre en effet que, lorsque c’était possible, le Gouvernement a cherché à augmenter le nombre des cantons susceptibles de voter à gauche, qu’il s’agisse de cantons urbains ou de cantons ruraux, comme l’a excellemment démontré l’étude publiée en mars dernier par notre collègue François Sauvadet, député bourguignon, sous le titre Livre noir sur le redécoupage des cantons de France ou encore les travaux réalisés par nos collègues Pierre Morel-A-L’Huissier et Dominique Bussereau.

Je ne prendrai qu’un seul exemple, en comparant le Gard (dont le président du conseil général est membre du Parti socialiste (PS)) et le Morbihan (dont le président du conseil général est membre de l’Union pour un mouvement populaire (UMP)). Le Gouvernement y a fait des choix d’écarts à la moyenne contraire : la préservation des zones rurales ne l’a préoccupé que lorsque celles-ci lui sont supposées favorables.

Ainsi, la majorité des cantons ruraux du Gard, majoritairement à gauche, ont un écart à la moyenne de – 15 %. À l’inverse, les cantons ruraux du Morbihan, qui sont majoritairement à droite, ont un écart qui dépasse de 10 % la moyenne départementale.

Autre « heureux hasard », les cantons urbains de Nîmes, majoritairement à droite, dépassent tous la moyenne départementale d’environ + 15 %, tandis que ceux de Lorient, majoritairement à gauche, sont inférieurs de – 13 % à la moyenne.

On pourrait citer à l’envi d’autres exemples de redécoupages de ce type, favorables à l’actuelle majorité.

Cet exercice de redécoupage est d’autant plus contestable qu’il aboutira à faire élire des assemblées départementales dont le rôle doit être « dévitalisé », ainsi que l’a annoncé M. André Vallini, secrétaire d’État chargé de la Réforme territoriale.

Je conclurai ces quelques remarques en partageant avec vous ce que le sénateur socialiste de la Haute-Saône, Yves Krattinger a déclaré lors de son audition : « la réforme votée en 2013 n’a plus aucun sens. Les candidats au conseil départemental, en 2015, pourront dire : "je n’ai pas de programme puisque mon programme c’est d’être un syndic de liquidation." C’est une impasse. L’opinion publique est désorientée. Qui ira voter ? »

Cette remarque, en forme de réquisitoire, me semble un excellent résumé de ces lois mal pensées, mal appliquées et, au total, mort-nées.

M. Patrick Devedjian. Est-ce que les deux co-rapporteurs ont vérifié si des membres du Conseil d’État ayant participé à la formation administrative ayant rendu l’avis sur l’un des projets de décrets litigieux ont ensuite siégé au contentieux pour participer au jugement des recours dirigés contre l’acte en cause ? Si oui, combien de membres sont-ils dans cette situation ?

Par ailleurs, quelle est votre appréciation sur l’intérêt du redécoupage des cantons et des départements alors que le Gouvernement a annoncé la suppression des départements en 2020 ou 2021 ?

M. Pascal Popelin. La seconde question me paraît appeler plutôt à des débats dans l’hémicycle, tout à l’heure, lors de l’examen du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, qu’à une réponse dans le cadre de l’examen de ce rapport d’information.

Sur la première question, je laisserai M. Guillaume Larrivé – qui connaît bien cette institution – répondre. Les formations administratives et contentieuses du Conseil d’État fonctionnent dans une totale étanchéité.

M. Guillaume Larrivé. Le cumul des deux fonctions, consultative et juridictionnelle, du Conseil d’État, appelle à une réflexion. Celle-ci est menée depuis de nombreuses années, dans la lignée de la revue Commentaire notamment. Le constituant a apporté une réponse claire s’agissant de la constitutionnalité de ce cumul, puisque, depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, la Constitution confie ces deux missions au Conseil d’État.

Au sein du Conseil d’État, la manière dont ces deux fonctions sont exercées a évolué, sous l’influence de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme – mais aussi d’une prise de conscience de l’institution. Jusqu’à une période relativement récente, les textes n’interdisaient pas expressément aux membres d’une formation consultative de siéger au contentieux lors du jugement d’un acte pris après leur avis. Aujourd’hui, les membres du Conseil d’État qui participent au jugement des recours dirigés contre des actes pris après avis de celui-ci ne peuvent même pas prendre connaissance de ces avis, dès lors qu’ils n’ont pas été rendus publics, ni des dossiers des formations consultatives relatifs à ces avis. Il y a désormais une réelle étanchéité entre les formations consultatives et juridictionnelles. Le Conseil d’État a pris les mesures qui devaient l’être pour séparer, organiquement, les deux fonctions, comme l’imposait la jurisprudence européenne.

J’ai déjà répondu par anticipation à la seconde question dans mon intervention. La disparition annoncée par le Gouvernement des conseils départementaux rend les élections départementales de 2015 sans objet. Comment peut-on attendre de nos concitoyens qu’ils se mobilisent pour ces élections dans de telles conditions ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. J’ai noté des observations intéressantes sur le Conseil d’État  de la part des deux co-rapporteurs : l’un se limitant à rappeler que 2558 recours ont été déposés pour dénoncer l’absence de prise en considération de la problématique de la ruralité, la vaste superficie retenue, et l’autre qui pose la question de l’étanchéité entre la section du contentieux et la section administrative et donc de l’impartialité de la juridiction. J’ai noté que M. Larrivé, bien qu’il ait employé des mots choisis, a néanmoins parlé d’« abattage ». Je pense en effet que l’on ne pourra pas faire l’économie d’une interrogation sur le rôle du Conseil d’État dans ce dossier. Cela va vite : Quid du contradictoire ? Quid du respect des droits de la défense ? Le Conseil d’État a déjà été amené, par le passé, à revoir son mode d’organisation pour respecter le droit à un procès équitable en supprimant par exemple la présence du rapporteur public au délibéré. J’estime que d’autres évolutions sont nécessaires compte tenu de la dualité des missions du Conseil d’État et de ses implications sur ce dossier en particulier. Par conséquent, la Cour européenne des droits de l’homme sera saisie de l’ensemble de ce dossier car nous estimons que l’impartialité n’est pas tout à fait au rendez-vous.

M. Patrick Devedjian. Je souhaite reformuler ma question car il n’y a pas été répondu. M. Guillaume Larrivé nous a indiqué qu’une nouvelle règle avait été instaurée pour faire en sorte qu’un membre de la section administrative qui a eu à connaître d’un dossier ne puisse examiner ce même dossier au sein de la section du contentieux. Mais ma question est la suivante : un membre de la section administrative a-t-il siégé au sein de la section du contentieux dans ce dossier ?

M. Guillaume Larrivé. Nous n’avons pas les pouvoirs d’investigation permettant de faire des enquêtes sur place et sur pièces mais à ma connaissance, et en l’absence de preuve contraire, tel n’est pas le cas.

M. Pascal Popelin. Nous avons auditionné M. Bernard Stirn, président de la section du contentieux du Conseil d’État, qui nous a affirmé que cela n’était pas le cas. J’observe simplement qu’une mauvaise habitude se répand au sein du personnel politique depuis quelque temps consistant à critiquer le fonctionnement de la Justice chaque fois qu’une décision qui ne lui convient pas est rendue et je le regrette, mais je reconnais à chacun la possibilité d’émettre une telle opinion.

M. Patrick Devedjian. Si la commission des Lois ne se permet pas de critiquer le fonctionnement de la Justice, qui le fera ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Respectez la liberté d’expression !

M. Pascal Popelin. Je respecte votre liberté d’expression mais je fais simplement part de mon point de vue. Sur le fond, nous avons interrogé le président de la section du contentieux pour comprendre la manière dont sont traités ces contentieux et connaître la nature de ces contentieux. Ce qui nous a été expliqué c’est que si dans certains départements, l’on compte un ou deux recours, il existe d’autres départements où l’on dénombre des centaines de contentieux. Dans ce dernier cas, la section du contentieux du Conseil d’État rend un jugement en formation collective sur l’un de ces recours qui est ensuite décliné, par voie d’ordonnances, pour tous les autres recours dans lesquels les mêmes moyens sont soulevés. C’est la raison pour laquelle, dans le rapport, nous nous sommes attachés à traiter quatre éléments marquants des décisions rendues depuis le mois de mai car de ces éléments, vont découler toute une série d’ordonnances qui seront prises. Or, il y a encore quelques points de droit à regarder. Mais pour ma part, je ne considère pas qu’il faille remettre en cause systématiquement l’impartialité de la juridiction administrative. J’avais moi-même déclaré dans la presse, au moment de l’adoption de la loi, que les moyens qui étaient annoncés avaient peu de chances d’aboutir en cas de contentieux contre les décrets. Je constate aujourd’hui, au regard des premières décisions du Conseil d’État, que je n’avais pas tort. De la même manière, le fait d’exciper durant les débats en séance publique de l’inconstitutionnalité des dispositions que nous souhaitions adopter s’est avéré inefficace puisque l’essentiel de la loi a été déclaré conforme à la Constitution. J’observe d’ailleurs que parmi les dispositions qui ont été censurées figurent certaines dispositions introduites par les mêmes que ceux qui ont déposé le recours devant le Conseil constitutionnel.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Si l’on ne peut plus dire ce que l’on pense des procédures juridictionnelles et de contentieux importants au sein de la commission des Lois, où va-t-on ? Je suis très surpris de la manière dont la juridiction administrative a traité ces recours. Je n’ai même pas reçu, par exemple, d’accusé de réception de la requête que j’ai déposée, ce qui est inhabituel. Nous saisirons la Cour européenne des droits de l’homme, car nous ne sommes pas satisfaits de la manière dont le Conseil d’État a examiné ces recours. 

M. Guillaume Larrivé. Selon un adage anglais, « justice must not only be done, but must also be seen to be done ». C’est ce qu’on appelle, en français, la théorie des apparences c’est-à-dire que la justice doit non seulement être rendue mais qu’elle doit sembler l’avoir été manifestement. À cet égard, le Conseil d’État n’a peut-être pas été suffisamment précautionneux, compte tenu de la sensibilité politique de ces dossiers et du nombre très élevé de recours, dans son traitement de ces requêtes. Il aurait sans doute été préférable de les confier à des formations plus élevées que de simples sous-sections jugeant seules et de leur consacrer plus de temps. À la décharge du Conseil d’État, le législateur lui avait imposé un calendrier très contraignant, puisqu’il lui fallait avoir jugé avant mars 2015.

La Commission autorise la publication du rapport d’information.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

● Conseil d’État

– M. Bernard Stirn, président de la section du contentieux

● Ministère de l’Intérieur

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

– M. Thomas Fauconnier, chef du bureau des structures territoriales

Direction de la modernisation et de l’action territoriale (DMAT)

– M. Yves Le Breton, adjoint à la directrice de la modernisation et de l’action territoriale

– M. Marc Tschiggfrey, chef du bureau des élections et des études politiques

● Assemblée des départements de France (ADF)

– M. Yves Krattinger, vice-président de l’ADF, sénateur, président du conseil général de la Haute-Saône

– M. Bruno Sido, secrétaire général de l’ADF, sénateur, président du conseil général de la Haute-Marne

● Association de soutien pour l’exercice des responsabilités départementales et locales (ASERDEL)

– M. Benoît Huré, sénateur, président du conseil général des Ardennes

– M. Pierre Monzani, directeur de l’ASERDEL

1 () Le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral prévoit de reporter les élections régionales au mois de décembre 2015, en vue de tenir compte de la nouvelle délimitation territoriale des régions qui y est proposée.

2 () Le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral prévoit de reporter les élections départementales au mois de décembre 2015, en vue de maintenir la concomitance avec l’élection des conseils régionaux. L’exposé des motifs du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République évoque, quant à lui, la perspective, au terme d’une révision constitutionnelle à venir, de la « suppression des conseils départementaux à l’horizon 2020 ».

3 () Gironde-sur-Dropt, commune de 1 136 habitants en Gironde ; l’organisation d’une élection partielle le 5 mai 2014 a suscité le dépôt de trois listes et a ainsi débouché sur l’élection d’un conseil municipal.

4 () Communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines, métropoles mais aussi syndicats d’agglomération nouvelle.

5 () « Les réclamations contre les opérations électorales doivent être consignées au procès-verbal, sinon être déposées, à peine d’irrecevabilité, au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit l’élection, à la sous-préfecture ou à la préfecture. Elles sont immédiatement adressées au préfet qui les fait enregistrer au greffe du tribunal administratif.

« Les protestations peuvent également être déposées directement au greffe du tribunal administratif dans le même délai.

« Le recours formé par le préfet en application de l'article L. 248 doit être exercé dans le délai de quinzaine à dater de la réception du procès-verbal. »

6 () Articles L. 191 et suivants du code électoral. Toutes les dispositions législatives en question entrent en vigueur à compter de la première élection des conseillers départementaux.

7 () Décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

8 () « Les dispositions de l’article 15 de la loi déférée peuvent aboutir à ce que plusieurs sièges demeurent vacants dans un conseil départemental, sans qu’il soit procédé à une élection partielle lorsque, pour chacun de ces sièges, le conseiller départemental puis son remplaçant ont démissionné, sont décédés ou ont été déclarés inéligibles pour une cause qui leur est propre ; (…) cette vacance peut durer jusqu’à six ans ; (…) nonobstant le caractère limité des hypothèses dans lesquelles une telle vacance peut survenir, sans qu’il soit procédé à une élection partielle, les modalités retenues par le législateur pourraient laisser plusieurs sièges vacants pendant toute la durée du mandat ; (…) dans certains cas, le dispositif prévu par la loi pourrait conduire à ce que le fonctionnement normal du conseil départemental soit affecté dans des conditions remettant en cause l’exercice de la libre administration des collectivités territoriales et le principe selon lequel elles s’administrent librement par des conseils élus » (décision n° 2013-667 DC du 16 mai 2013, Loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral).

9 () Ce plancher a, à ce jour, un effet utile dans le département de l’Ariège.

10 () Ce plancher a, à ce jour, un effet utile dans le département du Vaucluse.

11 () Article L. 3611-1 du code général des collectivités territoriales, résultant de l’article 26 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

12 () Avant le nouveau découpage, le département du Rhône comportait 54 cantons, dont 31 entièrement inclus dans le futur territoire de la métropole de Lyon. Les règles prévues à l’article L. 191-1 précité s’appliquent donc à 23 cantons actuels, ce qui aboutit à 13 nouveaux cantons.

13 () Décision n° 2013-667 DC du 16 mai 2013, Loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

14 () Article 7 de la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux.

15 () Décret n° 2014-351 du 19 mars 2014 portant correction d’erreurs matérielles dans les décrets délimitant les cantons de divers départements ; décret n° 2014-481 du 13 mai 2014 portant correction d’erreurs matérielles dans le décret n° 2014-217 du 21 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Seine-Saint-Denis.

16 () Le décret du 6 février 2014 modifie l’article 71 du décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

17 () Dans une décision « Commune de Cysoing » du 23 juin 2014, n° 375929, le Conseil d’État a clairement distingué les deux qualifications : « si l’article R. 112 du [code électoral], dans sa version actuellement en vigueur, prévoit que le recensement général des votes est fait par le bureau du chef-lieu de canton, la version de cet article issue du décret du 18 octobre 2013 portant application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, qui est applicable, comme le décret attaqué, à compter du prochain renouvellement général des assemblées départementales, confie ce rôle au bureau centralisateur du canton ; (…) ainsi, la qualité de bureau centralisateur d’un canton sera, à compter de l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, dépourvue de tout lien avec celle de chef-lieu de canton ; (…) dès lors, en désignant les bureaux centralisateurs des nouveaux cantons, les décrets portant délimitation des cantons d’un département n’ont ni pour objet ni pour effet de procéder au transfert du siège des chefs-lieux de canton ».

18 () En application de l’article R. 69 du code électoral, lorsque les électeurs de la commune sont répartis en plusieurs bureaux de vote, le bureau centralisateur est chargé d’opérer le recensement général des votes en présence des présidents des autres bureaux.

19 () II de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, résultant de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013.

20 () Proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat, adoptée avec modifications en deuxième lecture par le Sénat le 22 janvier 2014, texte adopté n° 67. L’article en question a été adopté « conforme » par les deux assemblées.

21 () Présidée par M. Éric Doligé, sénateur et président du conseil général du Loiret, l’ASERDEL regroupe 37 des 40 départements dirigés par l’opposition.

22 () Conseil d’État, 12 juin 2014, n° 380636 : « s’agissant des dispositions du I de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, (…) il résulte des termes mêmes de la Constitution, et notamment de ses articles 37, 38, 39 et 61-1 tels qu’interprétés par le Conseil constitutionnel, que le Conseil d’État est simultanément chargé par la Constitution de l’exercice de fonctions administratives et placé au sommet de l’un des deux ordres de juridiction qu’elle reconnaît ; (…) ces dispositions n’ont ni pour objet ni pour effet de porter les avis rendus par les formations administratives du Conseil d’État à la connaissance de ses membres siégeant au contentieux ; (…) au demeurant, les membres du Conseil d’État qui ont participé à un avis rendu sur un projet d’acte soumis par le Gouvernement ne participent pas au jugement des recours mettant en cause ce même acte ; (…) enfin, il appartient au surplus à toute partie qui s’y croit fondée de faire verser au dossier les pièces permettant de s’assurer de la régularité des consultations des formations administratives du Conseil d’État ; (…) il s’ensuit que la question de constitutionnalité invoquée à l’encontre du I de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, qui n’est pas nouvelle, ne présente en tout état de cause pas un caractère sérieux ; (…) par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de ce I portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu’être écarté, sans qu’il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée à son encontre ». Les mêmes motifs figuraient déjà dans la décision « Association Alcaly » du 16 avril 2010 (n° 320667).

23 () En application du deuxième alinéa de l’article L. 122-1 du code de justice administrative, « le président de la section du contentieux, les présidents adjoints de la section du contentieux et les présidents de sous-section peuvent, par ordonnance, régler les affaires dont la nature ne justifie pas l’intervention d’une formation collégiale ».

24 () Décret n° 2013-1289 du 27 décembre 2013 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d’outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

25 () « Pour mettre en œuvre les critères définis au III de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, le décret attaqué a procédé à la délimitation des vingt-sept nouveaux cantons du département de la Moselle en se fondant sur une population moyenne et en rapprochant la population de chaque canton de cette moyenne ; (…) si, comme le soutiennent les requérantes, le canton de Thionville a une population supérieure à la moyenne départementale de 19,29 % et celui du Saulnois a, quant à lui, une population inférieure de 19,21 % à cette moyenne, il ressort des pièces du dossier que ces écarts sont justifiés, dans le premier cas, par un souhait de respecter l’unité territoriale de la commune de Thionville et, dans le second, par celui d’éviter de créer un canton dont la superficie serait trop étendue ; (…) de telles considérations, qui sont dépourvues de caractère arbitraire, n’ont pas conduit, en l’espèce, à méconnaître l’obligation, énoncée au a) du III de l’article L. 3113-2, de définir le territoire de chaque canton sur des bases essentiellement démographiques »

26 () Projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, adopté en première lecture par le Sénat le 4 juillet 2014.

27 () Outre le projet de loi précité, le conseil des ministres a adopté, le 18 juin 2014, un projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, en instance de première lecture au Sénat.

28 () M. François Sauvadet, Les territoires de France sacrifiés. Livre noir sur le redécoupage des cantons de France, mars 2014 : http://www.francois-sauvadet.net/Donnees/Structures/83292/Upload/488550.pdf


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