N° 3919 - Rapport d'information de Mme Valérie Rabault déposé en application de l'article 145 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire préalable au débat d'orientation des finances publiques




N
° 
3919

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 juillet 2016.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
préalable au
débat d’orientation des finances publiques

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

A. LES DILEMMES DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE 7

B. LES ORIENTATIONS PRÉSENTÉES PAR LE GOUVERNEMENT PERMETTENT DE MAINTENIR L’OBJECTIF SUR LE SOLDE PUBLIC 9

FICHE 1 : LE CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE 13

I. EN 2015, L’ÉCONOMIE FRANÇAISE A ACCÉLÉRÉ 13

II. DES PRÉVISIONS DE REPRISE ÉCONOMIQUE CONFORTÉES POUR LA PÉRIODE 2016-2019 14

A. DE NOMBREUX SIGNAUX FAVORABLES 14

1. La prévision de croissance pour 2016 pourrait être dépassée 15

2. Une inflation toujours basse mais qui devrait repartir à la hausse à partir de 2017 grâce à la Banque centrale européenne 15

3. La persistance de taux d’intérêt faibles 18

B. UNE INCERTITUDE LIÉE AUX EFFETS DU « BREXIT » 18

FICHE 2 : LE SOLDE PUBLIC 21

I. LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC 21

A. UNE TRAJECTOIRE ÉLABORÉE À LA SUITE DE LA RECOMMANDATION DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE DU 10 MARS 2015 22

B. LA TRAJECTOIRE DU PROGRAMME DE STABILITÉ 23

II. LE DÉFICIT PUBLIC SE RÉDUIT PLUS VITE QUE PRÉVU 24

A. LE DÉFICIT PUBLIC DE L’ENSEMBLE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES 24

B. LE SOLDE DES DIFFÉRENTES CATÉGORIES D’ADMINISTRATION 26

1. Le déficit de l’État 26

2. Le déficit des organismes d’administrations centrales (ODAC) 27

3. Le déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO) 27

4. L’excédent des administrations publiques locales (APUL) 28

III. LES PERSPECTIVES DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC POUR 2016 À 2019 28

A. L’OBJECTIF POUR 2016 EST « ATTEIGNABLE » 29

B. DES RISQUES IMPORTANTS SUR LA RÉALISATION DES OBJECTIFS APRÈS 2017 29

IV. LE DÉFICIT STRUCTUREL 30

A. UN DÉFICIT STRUCTUREL RAMENÉ À 1,9 % DU PIB EN 2015 30

B. UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE STRUCTUREL PRÉVU POUR 2019 31

FICHE 3 : LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES ET LA MISE EN ŒUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ 33

I. L’ÉVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES JUSQU’EN 2015 33

II. LES PERSPECTIVES POUR 2016 À 2019 35

A. LES PERSPECTIVES POUR 2016 36

1. Les recettes de l’État 38

2. Les recettes des autres administrations publiques 38

B. LES PERSPECTIVES POUR 2017 À 2019 39

1. L’année 2017 marquera la dernière étape du pacte de responsabilité 39

2. Le CICE représentera au moins 20 milliards d’euros de réduction du coût du travail par an sur la période 2017-2019 42

3. Une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu envisagée pour 2017 45

FICHE 4 : LES DÉPENSES 47

I. LE RYTHME HISTORIQUEMENT BAS D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE POURSUIVI EN 2016 47

A. UN INFLÉCHISSEMENT NOTABLE DU RYTHME D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE DEPUIS LA PRÉSENTE LÉGISLATURE 47

B. UNE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE POURSUIVIE EN 2016 49

1. La maîtrise des dépenses de l’État en 2016 50

2. Les dépenses des organismes divers d’administration centrale (ODAC) 61

3. Les dépenses des administrations de sécurité sociale 62

4. Les dépenses des collectivités locales 64

II. UNE MAÎTRISE POURSUIVIE DES DÉPENSES PUBLIQUES PRÉVUE DE 2017 À 2019 64

A. UN RYTHME D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE IDENTIQUE EN 2017 64

B. UNE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE MAINTENUE EN 2018 ET 2019 66

FICHE 5 : LA DETTE PUBLIQUE 69

I. UNE DETTE PUBLIQUE EN VOIE DE STABILISATION 69

A. UN EXERCICE 2015 MARQUÉ PAR UNE FAIBLE PROGRESSION DE L’ENDETTEMENT PUBLIC 70

B. UNE STABILISATION DE L’ENDETTEMENT PUBLIC PRÉVUE EN 2017 71

1. La progression de la dette publique très limitée en 2016 71

2. La stabilisation de l’endettement public en 2017, avant un reflux à compter de 2018 71

II. UNE FAIBLE CHARGE D’INTÉRÊT COMPTE TENU DE L’ENCOURS DE LA DETTE PUBLIQUE 71

A. UNE RÉDUCTION DE LA CHARGE DE LA DETTE DEPUIS 2012 71

B. UNE REMONTÉE PROGRESSIVE DE LA CHARGE DE LA DETTE ANTICIPÉE 72

FICHE 6 : LES FINANCES LOCALES ET LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 75

I. LES RECETTES ET LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DIMINUENT CONFORMÉMENT À LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE 76

A. LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT AUGMENTENT DE 1,67 % EN 2015 76

B. LES RECETTES RÉELLES DE FONCTIONNEMENT AUGMENTENT PLUS QUE LES DÉPENSES 76

C. L’IMPACT DE LA BAISSE DES DOTATIONS EST ATTÉNUÉ PAR LA HAUSSE DE LA PÉRÉQUATION, EN PARTICULIER POUR LE BLOC COMMUNAL 81

II. LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT CONTINUENT DE RECULER EN 2015 TANDIS QUE L’ÉTAT RENFORCE SON SOUTIEN 82

A. LA BAISSE DE L’ÉPARGNE RALENTIT TANDIS QUE LES RECETTES D’INVESTISSEMENT AUGMENTENT 82

B. LA BAISSE DE L’INVESTISSEMENT LOCAL SE POURSUIT 82

C. LA CAPACITÉ D’AUTOFINANCEMENT S’AMÉLIORE 83

D. LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS CONNAÎT UNE FORTE HAUSSE DEPUIS 2012 84

III. LA STABILITÉ DES TRANSFERTS FINANCIERS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS DE 2012 À 2016 85

IV. LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS : UNE HAUSSE DE 9,8 % DE LA DETTE DEPUIS 2012 86

FICHE 7 : LES SUBVENTIONS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES POUR SOUTENIR LEURS INVESTISSEMENTS 87

I. LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS CONNAÎT UNE FORTE HAUSSE DEPUIS 2012 87

II. CE RENFORCEMENT DU SOUTIEN À L’INVESTISSEMENT DU BLOC COMMUNAL DOIT S’ACCOMPAGNER D’UNE RÉFORME DES DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT 89

A. DES SOLUTIONS POUR LEVER LES PRINCIPAUX POINTS DE BLOCAGE DE L’ARTICLE 150 89

1. Supprimer les « DGF négatives » en élargissant le support de la CRFP : le « rebasage » de la DGF pour plus de justice 89

2. Garantir une réforme lisible : des effets identifiables, des simulations pluriannuelles, une transition autofinancée 90

3. Des dotations de centralité indépendantes pour les communes et les EPCI : la fin de la « puissance 5 » 92

B. LE CHANTIER DES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION : UNE RÉPONSE AUX EFFETS CUMULÉS DE LA CRFP ET D’UNE RÉFORME DE LA DGF TELLE QUE PRÉVUE PAR L’ARTICLE 150 94

C. L’ÉCHELONNEMENT DES PROPOSITIONS DES GROUPES DE TRAVAIL 96

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES 99

EXAMEN EN COMMISSION 117

INTRODUCTION

La faculté d’organiser un débat d’orientation des finances publiques (DOFP) en vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année suivante est prévue par l’article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, présenté par le Gouvernement en application de l’article précité (LOLF), constitue le document de référence sur lequel se fonde le DOFP. Ce rapport comprend une analyse des évolutions économiques constatées, une description des grandes orientations de la politique économique et budgétaire de la France au regard de ses engagements européens, une évaluation à moyen terme des ressources de l’État ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions et, enfin, la liste des missions, des programmes et des indicateurs de performances associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l’année suivante.

À l’heure où ce rapport est mis sous presse, la Rapporteure générale ne dispose pas du document de référence du Gouvernement concernant l’évolution des ressources de l’État ni celle sur les dépenses.

La Cour des comptes publie également chaque année un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, prévu au 3° de l’article 58 de la LOLF. Ce rapport est destiné à contribuer au DOFP.

Le DOFP 2016 se déroule dans un contexte de reprise économique et d’amélioration de la situation de nos finances publiques, avec toutefois de sensibles dilemmes.

A. LES DILEMMES DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE

En matière de croissance française en 2015, « les impulsions extérieures et les facteurs internes se sont compensés ». Tel est le message délivré par l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) dans sa note de conjoncture de juin 2016.

Si l’INSEE observe bel et bien une reprise de la croissance en 2015 (1,2 % en 2015 après 0,7 % en 2014) et table sur une croissance de 1,6 % pour 2016, il pointe l’absence de convergence entre les différents facteurs susceptibles d’accélérer cette reprise. Ainsi :

§ les « impulsions extérieures » ont contribué en 2015 pour 0,5 point à la croissance économique : 0,3 point provenant de la baisse du prix du pétrole ; 0,2 point des taux d’intérêt bas ; 0,2 point du taux de change euro/dollar ; et − 0,1 point lié à une moindre demande mondiale ;

§ les facteurs proprement internes ont été plus difficiles à mobiliser, et auraient contribué à ralentir la croissance de 2015 à hauteur de 0,5 point (0,1 point provenant d’un redémarrage lent de l’investissement par les ménages et 0,4 point dû à la poursuite de la consolidation budgétaire).

À conjoncture externe inchangée, le défi de l’économie française pour 2016 et 2017 porte donc bien sur sa capacité collective à activer ses facteurs internes de création de richesse, tout en préservant l’objectif de poursuite de l’assainissement des finances publiques. Baisser les dépenses publiques peut conduire dans certains cas à affaiblir la croissance économique comme le relève l’INSEE. Ne pas le faire conduit à fragiliser la France tant cela induirait une perte de confiance de nos partenaires européens et des investisseurs finançant la dette publique.

Le seul moyen de contourner ce dilemme est de renforcer les leviers accélérateurs de croissance, et principalement l’investissement. D’après l’INSEE, l’investissement devrait continuer à augmenter en 2016 à hauteur de 13 milliards d’euros (passant de 450 milliards d’euros en 2015 à 463 milliards d’euros en 2016).

§ Les entreprises non financières représenteraient les principaux contributeurs à cette augmentation, avec 12 milliards d’euros de plus en 2016 (passant de 253 milliards d’euros à 265 milliards d’euros). Cette augmentation est permise grâce à la reconstitution du niveau de marge rendue possible depuis 2013, entre autres grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et au pacte de responsabilité.

§ Les ménages verraient leur investissement quasiment stable en 2016 (autour de 101 milliards d’euros). Ce levier de l’investissement est évidemment très corrélé à la situation de l’emploi et des perspectives que peuvent avoir les ménages, mais également aux politiques fiscales. C’est pourquoi la Rapporteure générale estime primordial de préserver à tout prix les ménages de tout impact sur leur fiscalité, et salue l’annonce du Président de la République d’envisager une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu.

§ Les administrations publiques augmenteraient leur investissement de 700 millions d’euros (à 73,4 milliards d’euros).

B. LES ORIENTATIONS PRÉSENTÉES PAR LE GOUVERNEMENT PERMETTENT DE MAINTENIR L’OBJECTIF SUR LE SOLDE PUBLIC

Dans sa communication sur les perspectives des finances publiques pour 2017, le Gouvernement propose :

§ de maintenir l’objectif de déficit public à 2,7 % du PIB ;

§ d’avoir une trajectoire sur le solde public qui respecte les objectifs de la dernière loi de programmation des finances publiques (1) et ceux du programme de stabilité présenté en avril 2016 ;

§ d’envisager en 2017 des dépenses nouvelles par rapport à ce qui était prévu dans le programme de stabilité à hauteur de 6,8 milliards d’euros (5,6 milliards d’euros de dépenses nouvelles et 1,2 milliard d’euros correspondant à une moindre baisse de dotation pour les collectivités locales) ;

ÉCART À FINANCER PAR RAPPORT AU PROGRAMME DE STABILITÉ
POUR L’ANNÉE 2017

(en milliards d’euros)

Collectivités territoriales

1,2

Dont réduction de moitié de la contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques

1

Dont abondement du fonds de soutien à l’investissement

0,2

Relèvement des crédits de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales

5,6

Total

6,8

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, pages 13 et 14.

§ de financer ces dépenses nouvelles par le décalage comptable des mesures en faveur des entreprises (4,2 milliards d’euros), un surcroît de rendement de recettes permis par la lutte contre la fraude fiscale (1,4 milliards d’euros), une baisse du coût anticipé des contentieux fiscaux (700 millions d’euros) et une réduction de la charge de la dette prévue (500 millions d’euros).

MESURES DE FINANCEMENT ANNONCÉES
POUR L’ANNÉE 2017

(en milliards d’euros)

Décalage des mesures en faveur des entreprises

4,2

Surcroît de rendement de la lutte contre la fraude

1,4

Baisse du coût des contentieux fiscaux

0,7

Réduction de la charge de la dette anticipée

0,5

Total

6,8

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, pages 13 et 14.

Néanmoins, ces nouvelles mesures, même financées, conduisent au relèvement de l’objectif de dépenses de l’État, hors charge de la dette et pensions, à hauteur de 3,3 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 (2).

ÉCARTS DE DÉPENSES 2017

(en milliards d’euros)

Écart de dépenses

Par rapport aux dépenses prévues pour 2017 dans le programme de stabilité

Par rapport aux dépenses prévues pour 2016 par la loi de finances initiale pour 2016

Crédits de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales

+ 5,6

+ 6,1

Dotations aux collectivités territoriales

+ 1,2

– 2,8

Total

+ 6,8

+ 3,3

Source : commission des finances, d’après le Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques.

Les objectifs présentés par le Gouvernement pour ces orientations tiennent compte de la nécessité de renforcer le soutien à la croissance économique. Ainsi, l’année 2017 marquera la dernière étape du pacte de responsabilité. 5 milliards d’euros d’allégements des prélèvements obligatoires sur les entreprises restent à adopter sur les 40 milliards d’euros prévus.

Les dernières mesures restant à adopter devaient bénéficier essentiellement aux grandes entreprises (suppression complète de la contribution sociale de solidarité sur le bénéfice des sociétés et baisse du taux de l’impôt sur les sociétés). Il est envisagé de les réorienter vers les PME et l’emploi.

Le Président de la République a, en effet, annoncé la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés en faveur des PME et l’augmentation du taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) (3), en lieu et place des mesures initialement envisagées, ce qui s’inscrit parfaitement dans la stratégie économique de soutien à l’investissement et à l’emploi. Cette annonce ne remet pas en cause la trajectoire de déficit dans la mesure où l’enveloppe globale du pacte de responsabilité restera fixée à 40 milliards d’euros.

Le Président de la République a également annoncé une prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 de la mesure de suramortissement de 40 % pour les investissements productifs.

Enfin, l’année 2017 visera à renforcer le soutien à l’investissement des collectivités locales qui jouent un rôle crucial dans la vie de nos concitoyens, et un rôle indispensable en matière d’investissement, et donc de commande publique.

Pour mener à bien ces missions, elles perçoivent des dotations de la part de l’État, à la fois en fonctionnement (DGF) et en investissement.

Compte tenu du rôle que la dotation globale de fonctionnement (DGF) joue dans les débats actuels sur les finances publiques, tant au regard de sa contribution à leur redressement qu’à celui de sa nécessaire réforme, la Rapporteure générale a souhaité présenter l’état de la question. Les travaux menés au sein de la commission des finances ont permis de mettre en évidence plusieurs points de blocage parmi les dispositions de l’article 150 de la loi n° 2015-1785 de finances pour 2016. Le Président de la République a annoncé le 2 juin 2016 un nouveau report de l’application d’une réforme d’ensemble. Des améliorations ponctuelles sont possibles dès le prochain projet de loi de finances. Elles sont d’autant plus nécessaires que le contexte budgétaire est contraint.

Le rapport examine également la situation des collectivités locales au regard de l’investissement.

La hausse des recettes de fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs groupements, plus importante en 2015 que celle de leurs dépenses de fonctionnement, contribue à une amélioration de la capacité d’autofinancement des collectivités.

Cette amélioration ne s’est toutefois pas traduite par une hausse de l’investissement. Bien au contraire, ce dernier a continué de baisser en 2015 à hauteur de − 3,6 % par rapport en 2014, et ce en dépit de la hausse des subventions de l’État en 2015 (+ 11,8 %).

FICHE 1 : LE CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE

Les perspectives en matière de finances publiques sont fortement dépendantes du contexte macroéconomique. Les objectifs de finances publiques doivent reposer sur un scénario macroéconomique crédible.

Le redémarrage de l’économie en 2015 est indéniable. Le contexte macroéconomique dans lequel se déroule le présent débat d’orientation des finances publiques s’est nettement amélioré au cours des douze derniers mois. Ce contexte macroéconomique favorable devrait contribuer au respect de la trajectoire de réduction du déficit public (I).

Le retour de la croissance et la persistance d’une inflation et de taux d’intérêt faibles sont les caractéristiques principales de notre environnement économique. Les prévisions du Gouvernement d’accélération de la croissance sur la période 2016-2019 sont dès lors confortées, malgré les incertitudes créées par le résultat du référendum du 23 juin dernier au Royaume-Uni (II).

I. EN 2015, L’ÉCONOMIE FRANÇAISE A ACCÉLÉRÉ

La croissance du produit intérieur brut (PIB) a marqué un coup d’arrêt brutal en 2008 avec la crise financière. Après une phase de rattrapage en 2010 et 2011, elle a fortement ralenti à partir de 2012.

En 2015, la croissance est revenue. Elle s’est élevée à 1,3 % au lieu de 1 % prévu en loi de finances. La croissance est désormais à son niveau le plus élevé depuis 2011.

CROISSANCE EN FRANCE DEPUIS 2002

(pourcentage d’évolution annuelle en volume du PIB)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

1,1

0,8

2,8

1,6

2,4

2,4

0,2

– 2,9

2,0

2,1

0,2

0,6

0,6

1,3

Source : INSEE.

Signe de l’amélioration de la compétitivité des entreprises, le déficit commercial s’est réduit de 12,5 milliards d’euros (30 milliards en 2015 au lieu de 42,5 milliards d’euros en 2014). Il contribue encore négativement à la croissance (– 0,3 point de PIB) mais moins qu’en 2014 (– 0,5 point de PIB).

L’amélioration du solde commercial est due, pour une part, à la baisse du prix des importations du fait de la chute du prix du pétrole et, pour une autre part, à la hausse des exportations des biens manufacturés (+ 6,9 % en volume) et des produits agricoles (+ 7,0 %). La hausse des exportations s’explique notamment par l’amélioration de la compétitivité-prix de la France permise par la dépréciation de l’euro (– 16,5 % en moyenne annuelle face au dollar) et par les premières mesures du pacte de responsabilité et de solidarité (24 milliards d’euros d’allégements de la fiscalité et des cotisations sociales des entreprises en 2015).

Le taux de chômage est resté stable en 2015 à 10,3 % de la population active en moyenne. Mais l’emploi total a progressé légèrement (+ 96 000 emplois en équivalent temps plein ce qui porte la population active à 25,8 millions emplois équivalent temps plein).

L’investissement global de l’ensemble de l’économie a augmenté en 2015 de 1,0 % en volume après une baisse de 0,3 % en 2014. Cette hausse est portée principalement par l’investissement des sociétés non financières qui a accéléré en 2015 (+ 2,8 % en 2015 après 1,6 % en 2014).

Au total, le contexte macroéconomique s’est amélioré ce qui a permis de réduire le déficit public à un rythme plus rapide qu’anticipé (4).

II. DES PRÉVISIONS DE REPRISE ÉCONOMIQUE CONFORTÉES POUR LA PÉRIODE 2016-2019

Le retour de la croissance, l’éloignement de la menace déflation et la persistance de taux d’intérêt bas sont autant de facteurs qui confortent les prévisions de reprise économique (A). La situation internationale et notamment les effets du « Brexit » sont, à l’inverse des facteurs d’incertitude qui peuvent peser sur la conjoncture (B).

A. DE NOMBREUX SIGNAUX FAVORABLES

Les prévisions de croissance du Gouvernement sont inchangées par rapport à celles présentées dans le programme de stabilité d’avril 2016 transmis à la Commission européenne.

PRÉVISION DE CROISSANCE DU GOUVERNEMENT

(en %)

Année

2016

2017

2018

2019

Croissance du PIB en volume

+ 1,5

+ 1,5

+ 1,75

+ 1,9

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Ces prévisions sont en ligne avec celles des principaux organismes internationaux et nationaux qui en publient.

PRÉVISIONS DE CROISSANCE EN VOLUME DU PIB POUR LA FRANCE

(en %)

Institutions

2016

2017

Gouvernement

(programme de stabilité 2016)

1,5

1,5

Fonds monétaire international (FMI)

(Prévisions Perspectives de l’économie mondiale, avril 2016)

1,1

1,3

Commission européenne

(Prévisions de printemps, 3 mai 2016)

1,3

1,7

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

(Perspectives économiques, juin 2016)

1,4

1,5

Banque de France

(Projections macroéconomiques pour la France établies par la Banque de France dans le cadre de l’Eurosystème, juin 2016)

1,4

1,5

Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

(Perspectives économiques du 12 avril 2016)

1,6

1,6

Source : commission des finances.

1. La prévision de croissance pour 2016 pourrait être dépassée

Dans son avis du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le Haut Conseil des finances publiques avait estimé que la prévision de croissance du Gouvernement, « tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable » (c’est nous qui soulignons) (5).

Au regard des premiers éléments connus à ce jour, il semblerait que la prévision de croissance sera non seulement atteinte mais dépassée. La croissance du PIB au premier trimestre (+ 0,6 %), mesurée par l’INSEE, conforte l’hypothèse retenue par le Gouvernement. L’acquis de croissance pour 2016 après le 1er trimestre s’élève à 1,1 %. L’INSEE a d’ailleurs revu à la hausse sa prévision de croissance pour l’année 2016 et anticipe désormais une croissance en volume de 1,6 % du PIB (6).

Côté entreprises, le taux de marge atteint son plus haut niveau depuis le quatrième trimestre 2008, à 32,1 % au premier trimestre 2016.

2. Une inflation toujours basse mais qui devrait repartir à la hausse à partir de 2017 grâce à la Banque centrale européenne

Entre 2002 et 2012, à l’exception de l’année 2009, l’inflation se situait dans une fourchette de 1,5 % à 2,8 %. Elle ralentit fortement depuis 2012 jusqu’à devenir nulle en 2015.

INFLATION EN FRANCE DEPUIS 2002

(% d’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

1,9

2,1

2,1

1,8

1,6

1,5

2,8

0,1

1,5

2,1

2,0

0,9

0,5

0,0

Source : INSEE.

Tout comme en 2015, l’inflation a été surestimée pour 2016. Le Gouvernement a revu à la baisse cette prévision d’inflation à 0,1 % dans le programme de stabilité d’avril 2016. Selon le Haut Conseil des finances publiques, la révision à la baisse opérée par le Gouvernement est « justifiée » (7).

Le Gouvernement a également revu à la baisse ces prévisions pour les années 2017 à 2019.

PRÉVISIONS D’INFLATION

(en %)

Année

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité de 2015

1

1,4

1,75

Programme de stabilité de 2016

0,1

1

1,4

1,75

La baisse de l’inflation provoque plusieurs effets sur les finances publiques, lesquels se compensent en partie. Elle entraîne une baisse de certaines recettes fiscales, en particulier de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Mais, dans le même temps, elle entraîne une baisse des dépenses publiques : les dépenses de fonctionnement des ministères peuvent être contenues, la progression des prestations indexées est limitée et la charge d’intérêts des obligations indexées sur l’inflation diminue.

Sur le plan macroéconomique, le ralentissement voire la disparition de l’inflation pouvait faire naître des inquiétudes sur une possible déflation.

Il est néanmoins toujours prévu une accélération de l’inflation à compter de 2017. La politique monétaire expansionniste de la Banque centrale européenne (BCE) devrait, en effet, susciter une reprise de l’inflation à compter de 2017.

L’assouplissement quantitatif (« quantitative easing »)

mis en place par la Banque centrale européenne

En octobre 2014, la Banque centrale européenne (BCE) a lancé un premier dispositif d’assouplissement quantitatif, sous la forme d’achat de titres.

En janvier 2015, le conseil des gouverneurs de la BCE a décidé d’étendre ce programme d’achats d’actifs, pour inclure les obligations du secteur public, afin de remédier à la période prolongée de faible inflation. Ce programme consistait en l’achat d’obligations souveraines, sur le marché secondaire, pour 60 milliards d’euros par mois.

Le 10 mars 2016, la BCE a étendu ce programme à d’autres actifs, notamment les obligations d’entreprises de bonne qualité, tout en augmentant les montants des achats à 80 milliards d’euros par mois. Ce programme d’achat d’actifs devrait être maintenu jusqu’en mars 2017, pour un montant global prévisionnel de 1 800 milliards d’euros (1).

La BCE a également abaissé son principal taux directeur de 0,05 % à 0 % et le taux de prêt marginal de 0,30 % à 0,25 %. Parallèlement, le taux de dépôt a été réduit de – 0,3 % à – 0,4 %.

Ces différentes mesures sont destinées à relancer l’activité économique et à lutter contre la faible inflation. Elles ont pour conséquence une réduction des taux de marché constatés sur les titres de dette française. À l’inverse, le taux d’inflation reste très faible, il est anticipé à 0,1 % en 2016 par le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

(1) Banque de France, Bulletin n° 205, mai-juin 2016.

La menace d’une déflation semble donc s’écarter. Les prévisions d’inflation du Gouvernement sont en ligne avec celles des principaux organismes internationaux et nationaux qui en publient.

PRÉVISIONS D’INFLATION POUR LA FRANCE

(en %)

Institutions

2016

2017

Gouvernement

(programme de stabilité 2016)

0,1

1,0

Fonds monétaire international (FMI)

(Prévisions Perspectives de l’économie mondiale, avril 2016)

0,4

1,1

Commission européenne

(Prévisions de printemps, 3 mai 2016)

0,1

1,0

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

(Perspectives économiques, juin 2016)

0,1

0,8

Banque de France

(Projections macroéconomiques pour la France établies par la Banque de France dans le cadre de l’Eurosystème, juin 2016)

0,2

1,1

INSEE

(Note de conjoncture INSEE - 16 juin 2016)

0,3

– 

Source : commission des finances.

3. La persistance de taux d’intérêt faibles

Les taux d’intérêt faibles ont un impact immédiat sur les finances publiques en ce qu’ils permettent de réduire la charge d’intérêts de l’État.

La charge de la dette recule fortement depuis 2012. Elle a ainsi reculé de 4,2 milliards d’euros en trois ans, passant de 46,3 milliards d’euros en 2012 à 42,1 milliards d’euros en 2015. Autrement dit, la charge d’intérêts ne représente plus que 1,9 % du PIB au lieu de 2,2 % en 2012.

CHARGES DE LA DETTE DE L’ÉTAT

Année

2012

2013

2014

2015

Montant en milliards d’euros

46,3

44,9

43,2

42,1

Montant en % du PIB

2,2

2,1

2

1,9

Source : commission des finances.

Les taux d’intérêt devraient poursuivre leur baisse en 2016. Le Gouvernement a ainsi revu à la baisse sa prévision de taux d’intérêt : alors que la loi de finances pour 2016 a été construite sur une hypothèse de taux pour les emprunts à dix ans de 1,9 %, le programme de stabilité retient désormais une hypothèse de 0,9 %. Une nouvelle économie de constatation devrait donc être enregistrée lors de l’examen de la loi de finances rectificative pour 2016 prévue en fin d’année.

B. UNE INCERTITUDE LIÉE AUX EFFETS DU « BREXIT »

Les conséquences macroéconomiques d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne sont à ce stade difficiles à mesurer. Cette incertitude constitue « sans doute le principal risque pour l’économie mondiale » selon le porte-parole du FMI (8).

À court terme, la baisse des marchés financiers peut avoir un impact sur le rendement de certains impôts (impôt de solidarité sur la fortune, impôt sur le revenu, droits de succession). De même, la baisse de la livre par rapport à l’euro peut avoir des conséquences sur la balance commerciale (9).

À plus long terme, le « Brexit » peut entraîner une récession au Royaume-Uni qui pénaliserait ses partenaires, dont la France. Elle peut à l’inverse présenter des effets positifs notamment pour la localisation des activités financières.

ESTIMATION DU COÛT BUDGÉTAIRE POUR LA FRANCE DU « BREXIT »

Lors du referendum organisé le 23 juin 2016, les Britanniques ont voté à 52 % des voix pour le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE). Cette décision, dont les conséquences précises ne sont pas encore véritablement définies, devrait entraîner à court terme l’arrêt du financement par le Royaume-Uni du budget de l’UE. La contribution du Royaume-Uni s’élevait à 14,07 milliards d’euros en 2014. En contrepartie, ce pays avait reçu 6,98 milliards d’euros de fonds européens. Ces différents éléments sont retracés dans le tableau suivant.

En milliards d’euros

2014

Contribution nationale théorique (A)

17,4

« Rabais britannique » (B)

6,06

Contribution nationale post-rabais (C = A – B)

11,34

Ressources propres traditionnelles (D)

2,73

Total des contributions (E = C + D)

14,07

Montants reçus (F)

6,98

Contribution nette (G = E – F)

7,09

Ce pays était contributeur net au budget de l’UE, à hauteur de 7,09 milliards d’euros. Les autres États membres devront nécessairement compenser l’arrêt de cette contribution. Le coût budgétaire pour la France peut être estimé, toutes choses égales par ailleurs, en prenant en compte sa part dans le financement du budget de l’UE, représentant 14,56 % en 2014 (soit 20,96 milliards d’euros pour un budget de l’UE de 143,9 milliards d’euros en 2014).

Dès lors, le coût budgétaire pour la France pourrait s’élever à 1,03 milliard d’euros par an au titre de la prise en charge de la contribution nette du Royaume-Uni perdue du fait de son retrait (14,56 % de 7,09 milliards d’euros).

FICHE 2 : LE SOLDE PUBLIC

Le rythme de réduction du besoin de financement des administrations publiques est au cœur du débat d’orientation des finances publiques, notamment en raison des engagements européens de la France. Il doit s’apprécier à l’aune de plusieurs trajectoires, dont celle figurant dans le programme de stabilité transmis à la Commission européenne (I).

LES TRAJECTOIRES DE SOLDE PUBLIC

(en % du produit intérieur brut)

Fondement

2015

2016

2017

2018

2019

Loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

– 4,1

– 3,6

– 2,7

– 1,7

– 0,7

Recommandations du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

– 4,0

– 3,4

– 2,8

Programme de stabilité d’avril 2015

– 3,8

– 3,3

– 2,7

– 1,9

– 1,2

Programme de stabilité d’avril 2016

– 3,3

– 2,7

– 1,9

– 1,2

Le déficit public (3,6 % du produit intérieur brut en 2015) se réduit plus vite que prévu par ces différentes trajectoires (II).

L’objectif de réduction du déficit public pour 2016 (3,3 % du produit intérieur brut) devrait être atteint. Le rapport de la Cour des comptes souligne toutefois que les objectifs pour les années 2017 à 2019 ne pourront être atteints à compter de 2017 (10) sans que de nouvelles mesures soient adoptées. Pour autant, le retour du déficit public sous la barre des 3 % du produit intérieur brut dès 2017 devrait se réaliser (III).

L’évolution du déficit structurel fait toujours débat en raison des problèmes d’évaluation de la croissance potentielle et de l’écart de production (IV).

I. LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC

La loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (LPFP 2014-2019) a fixé une trajectoire de réduction du déficit public moins contrainte que celle que le Gouvernement retient désormais pour l’élaboration des lois de finances.

La trajectoire de référence, plus ambitieuse, figure dans le programme de stabilité transmis en avril 2016 à la Commission européenne.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constitution et « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

A. UNE TRAJECTOIRE ÉLABORÉE À LA SUITE DE LA RECOMMANDATION DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE DU 10 MARS 2015

La recommandation du Conseil de l’Union européenne, en date du 10 mars 2015, a été rendue dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance dont l’objet est de prévenir et de corriger les déficits excessifs, d’une part, et de faire respecter les règles budgétaires (« règle d’or ») du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), d’autre part.

Les engagements européens de la France en matière de déficit

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qualifie le déficit public d’« excessif » lorsqu’il dépasse 3 % du produit intérieur brut (PIB).

En outre, l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) pose le principe de l’équilibre ou de l’excédent des budgets des administrations publiques. Il limite le déficit structurel autorisé à – 0,5 point de PIB pour les États membres, comme la France, dont la dette dépasse 60 % du PIB. Les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre
– 0,5 point de PIB et l’excédent. Ils doivent également définir une trajectoire d’ajustement en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

La France fait l’objet d’une procédure de déficit excessif (PDE) depuis le 27 avril 2009.

Dans sa recommandation du 10 mars 2015, le Conseil de l’Union européenne a donné à la France jusqu’en 2017 – au lieu de 2015 précédemment – pour ramener son déficit public sous les 3 % de produit intérieur brut (PIB) en lui recommandant de suivre la trajectoire de déficit suivante : 4 % en 2015, 3,4 % en 2016 et 2,8 % en 2017.

Le Conseil a également recommandé une réduction soutenue du déficit structurel de 0,5 point de PIB en 2015, puis 0,8 point en 2016 et 0,9 point en 2017.

B. LA TRAJECTOIRE DU PROGRAMME DE STABILITÉ

La recommandation du Conseil du 10 mars 2015 reposait sur un ajustement structurel trop important qui pouvait se traduire par un recul de la croissance économique. La Rapporteure générale a dès lors approuvé le choix du Gouvernement de retenir une trajectoire d’ajustement structurel moins pénalisante afin de ne pas brider l’activité économique (11).

AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

Ajustement structurel

0,4

0,5

0,5

0,3

Déficit structurel

1,3

0,8

0,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Ce choix de soutien à la croissance a permis au Gouvernement de définir une trajectoire de réduction du déficit nominal plus ambitieuse que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne. L’objectif est de ramener le déficit public à 3,3 % du PIB en 2016, et sous les 3 % dès 2017 à 2,7 %. Le déficit serait ensuite réduit à 1,9 % en 2018 et 1,2 % en 2019.

La trajectoire des finances publiques selon les hypothèses du programme de stabilité est récapitulée dans le tableau qui suit.

TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2015 À 2019

En milliards d’euros

(en % du PIB)

Agrégat

2015

2016

2017

2018

2019

Produit intérieur brut

2 181,1

+ 1,3 % 
en volume

2 243,0

+ 1,5 %
en volume

2 296,4

+ 1,5 %
en volume

2 368,0

+ 1,75 %en volume

ND

+ 1,9 %
en volume

Recettes publiques (1)

1 165,8

(53,2 %)

1 183,9

(52,8 %)

1 209,3

(52,7 %)

1 243,3

(52,5 %)

ND

(52,3 %)

Dont prélèvements obligatoires*

975,4

(44,7 %)

991,4

(44,2 %)

1 009,6

(44 %)

1 036,3

(43,8 %)

ND

(43,5 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en recettes

26,0

(1,2 %)

25,3

(1,1 %)

28,4

(1,2 %)

30,0

(1,3 %)

ND

(1,3 %)

Dont autres recettes

166,6

(7,6 %)

169,4

(7,6 %)

173,5

(7,6 %)

179,3

(7,6 %)

ND

(7,6 %)

Dépenses publiques

1 243,3

(57,0 %)

1 256,9

(56 %)

1 270,9

(55,3 %)

1 288,2

(54,4 %)

ND

(53,5 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en dépenses

31,8

(1,5 %)

31,5

(1,4 %)

31,8

(1,4 %)

31,2

(1,3 %)

ND

(ND)

Dont dépenses hors crédits d’impôts

1 211,5

(55,6 %)

1 225,4

(54,6 %)

1 239,1

(54 %)

1 257,0

(53,1 %)

ND

(ND)

Solde public

77,5

(3,6 %)

73,1

(3,3 %)

61,7

(2,7 %)

44,8

(1,9 %)

ND

(1,2 %)

Dette publique

2 096,9

(96,1 %)

2 156,7

(96,2 %)

2 216,9

(96,5 %)

2 259,6

(95,4 %)

ND

(93,3 %)

* les prélèvements obligatoires comprennent 2,2 milliards de prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne, lesquels ne sont pas comptabilisés dans les recettes totales.

** voir fiche 5 sur les recettes.

Source : INSEE pour 2015 ; données gouvernementales pour 2016 à 2019.

II. LE DÉFICIT PUBLIC SE RÉDUIT PLUS VITE QUE PRÉVU

A. LE DÉFICIT PUBLIC DE L’ENSEMBLE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

Le déficit public poursuit sa décrue. Le point le plus bas de solde effectif a été atteint en 2009, année qui a suivi la crise financière de 2008, avec un déficit record de 7,2 % du PIB. En 2011, le déficit public atteignait 5,1 % du PIB. En 2015, il a été ramené à 3,6 % du PIB. Le déficit public a ainsi été réduit de plus de 1,5 point de PIB depuis le début de la législature.

DÉFICIT PUBLIC DEPUIS 2009

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

En pourcentage du PIB

7,2 %

6,8 %

5,1 %

4,8 %

4 %

4 %

3,6 %

En milliards d’euros

138,9

135,8

105,0

100,4

85,4

84,8

77,4

Source : INSEE.

Surtout, la baisse du déficit public en 2015 intervient parallèlement à une baisse des prélèvements obligatoires, ce qui est inédit depuis l’année 2000.

Le déficit public est également meilleur que prévu en loi de finances initiale (4,1 % du PIB) et en loi de finances rectificative (3,8 % du PIB).

PRÉVISIONS SUCCESSIVES DE DÉFICIT PUBLIC POUR 2015

(en pourcentage de produit intérieur brut)

Texte

PLF 2015

1er octobre 2014

LFI 215

29 décembre 2014

PLFR 2015

13 novembre 2015

LFR 2015

29 décembre 2015

Déficit public 2015

– 4,3

– 4,1

– 3,8

– 3,8

Écart par rapport au déficit exécuté

– 0,7

– 0,5

– 0,2

– 0,2

PLF : projet de loi de finance.

LFI : loi de finances initiale.

PLFR : projet de loi de finances rectificative.

LFR : loi de finances rectificative.

Source : projets et lois de finances relatifs à l’année 2015.

Il se réduit à un rythme beaucoup plus rapide que celui prévu par la trajectoire retenue dans la LPFP 2014-2019. Le déficit public de 2015 a d’ores et déjà été ramené au niveau qui avait été escompté pour 2016.

Le déficit public est aussi inférieur pour 2015 de 0,4 point de PIB à celui recommandé par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015 dans le cadre de la procédure de correction du déficit excessif.

Enfin, le déficit public pour 2015 est en deçà de 0,2 point de PIB par rapport à ce qui avait été prévu dans le programme de stabilité présenté au mois d’avril 2015.

TRAJECTOIRE DE SOLDE PUBLIC

(en % du produit intérieur brut)

Fondement

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

– 4,4

– 4,1

– 3,6

– 2,7

– 1,7

– 0,7

Recommandations du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

– 4,3

– 4,0

– 3,4

– 2,8

Programmes de stabilité d’avril 2015

– 4,0

– 3,8

– 3,3

– 2,7

Déficit public constaté

– 4,0

– 3,6

Source : commission des finances.

B. LE SOLDE DES DIFFÉRENTES CATÉGORIES D’ADMINISTRATION

L’ensemble des catégories d’administrations publiques ont contribué à la réduction du besoin de financement public en 2015, à l’exception des organismes d’administrations centrales (ODAC). La contribution la plus forte provient des administrations publiques locales qui sont désormais excédentaires.

SOLDE PUBLIC PAR CATÉGORIES D’ADMINISTRATION

(en milliards d’euros)

Catégorie d’administrations publiques

Solde 2015

Solde 2014

Variation 2015/2014

État

– 71,3

– 75,3

+ 4,0

Organismes d’administrations centrales (ODAC)

– 1,1

+ 2,9

– 4,0

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

– 5,8

– 7,9

+ 2,1

Administrations publiques locales (APUL)

+ 0,7

– 4,6

+ 5,3

Total ensemble des administrations publiques (APU)

– 77,5

– 84,8

+ 7,3

Source : INSEE.

1. Le déficit de l’État

Le déficit de l’État représente 92 % du besoin de financement de l’ensemble des administrations publiques.

En comptabilité nationale, le déficit de l’État se réduit de 4 milliards d’euros. Depuis le début de la législature, le déficit de l’État a été réduit d’un peu plus de 20 milliards d’euros, soit 1,1 point de PIB, autrement dit dans une proportion équivalente à celle de la baisse du déficit en comptabilité budgétaire.

SOLDE DE L’ÉTAT EN COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE ET EN COMPTABILITÉ NATIONALE

Année

Comptabilité budgétaire

(en milliards d’euros)

Comptabilité nationale

(en milliards d’euros)

Comptabilité nationale (en pourcentage du produit intérieur brut)

2009

– 138,0

– 116,9

– 6,0

2010

– 148,8

– 121,7

– 6,1

2011

– 90,7

– 91,2

– 4,4

2012

– 87,2

– 81,6

– 3,9

2013

– 74,9

– 69,6

– 3,3

2014

– 85,6

– 75,3

– 3,5

2015

– 70,5

– 71,3

– 3,3

Source : lois de règlement, INSEE, et compte général de l’État.

2. Le déficit des organismes d’administrations centrales (ODAC)

Le solde des ODAC est déficitaire en 2015 de 1,1 milliard d’euros après avoir été excédentaire de 2,9 milliards d’euros en 2014. Il s’est ainsi dégradé de 4 milliards d’euros. Il s’ensuit que le solde de l’ensemble des administrations centrales (État + ODAC) est stable en 2015.

BESOIN DE FINANCEMENT DES ODAC

(en milliards d’euros)

Recettes 2015

Dépenses 2015

Solde 2015

Solde 2014

Écart 2015/2014

85,0

86,1

– 1,1

+ 2,9

– 4,0

Source : INSEE.

Cette dégradation résulte en partie du contrecoup du lancement du deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA). En 2014, les ODAC avaient bénéficié de transferts en capital en provenance de l’État qui ont amélioré provisoirement leur besoin de financement.

3. Le déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO)

Le déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO) se réduit de 2,1 milliards d’euros dans la mesure où leurs dépenses (+ 0,7 %) augmentent moins vite que leurs recettes (+ 1,1 %).

BESOIN DE FINANCEMENT
DES ADMINISTRATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

Recettes 2015

Dépenses 2015

Solde 2015

Solde 2014

Écart 2015/2014

573,1

579,1

– 5,8

– 7,9

+ 2,1

Source : INSEE.

Les dépenses entrant dans le champ de l’objectif national des dépenses de l’assurance maladie (ONDAM) ont quant à elles augmenté de 2 %. Le déficit du régime général a été divisé par deux depuis 2012, passant de 13,3 milliards d’euros à 6,8 milliards d’euros en 2015.

SOLDES PAR BRANCHES DU RÉGIME GÉNÉRAL ET DU FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE

(en milliards d’euros)

Branche

2012

2013

2014

2015

2016

prévision

Maladie

– 5,9

– 6,8

– 6,5

– 5,8

– 5,2

Accidents du travail

– 0,2

0,6

0,7

0,7

0,5

Retraite

– 4,8

– 3,1

– 1,2

– 0,3

0,5

Famille

– 2,5

– 3,2

– 2,7

– 1,5

– 1,0

Sous-total Régime général

– 13,3

– 12,5

– 9,7

– 6,8

– 5,2

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

– 4,1

– 2,9

– 3,5

– 3,5

– 3,9

Régime général + FSV

– 17,5

– 15,4

– 13,2

– 10,8

– 9,1

Source : Les comptes de la sécurité sociale, juin 2016.

4. L’excédent des administrations publiques locales (APUL)

L’amélioration du solde des administrations publiques locales (APUL) résulte d’une légère augmentation des recettes (+ 0,8 %) mais surtout d’une baisse des dépenses (– 1,3 %) concentrée sur l’investissement (– 9,7 %).

CAPACITÉ DE FINANCEMENT
DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES

(en milliards d’euros)

Recettes 2015

Dépenses 2015

Solde 2015

Solde 2014

Écart 2015/2014

249,9

249,2

+ 0,7

– 4,6

+ 5,3

Source : INSEE.

Les collectivités locales, qui constituent la sous-catégorie la plus importante des APUL, sont en excédent de 1,5 milliard d’euros.

III. LES PERSPECTIVES DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC POUR 2016 À 2019

Pour atteindre les objectifs fixés dans le programme de stabilité, le déficit public doit baisser de 4,4 milliards en 2016, puis de 11,4 milliards d’euros en 2017, de 16,9 milliards d’euros en 2018, et enfin de 15,4 milliards d’euros en 2019.

PRÉVISIONS DE SOLDE PUBLIC EN VALEUR

(en milliards d’euros)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Déficit nominal

77,4

73,1

61,7

44,8

29,4

Évolution du déficit par rapport à l’année précédente

– 4,3

– 11,4

– 16,9

– 15,4

Source : calculs de la commission des finances sur la base des données du programme de stabilité.

Pour repasser sous la barre des 3 % du PIB en 2017, le déficit doit être réduit de 8,6 milliards d’euros (12).

A. L’OBJECTIF POUR 2016 EST « ATTEIGNABLE »

L’objectif de déficit public fixé pour 2016, tant dans la loi de finances initiale que dans le programme de stabilité, est de 3,3 % du PIB. Pour être atteint, il supposerait une réduction du déficit de 0,3 point de PIB, ce que la Cour des comptes a qualifié de « modeste ». Cet objectif est pourtant plus ambitieux que celui recommandé par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015 (3,4 % en 2016).

La Cour des comptes considère que cet objectif est « atteignable ». Cet objectif devrait être atteint voire dépassé en raison de la reprise économique (13) et de l’absence de risques de surévaluation des recettes (14). La prévision de solde budgétaire de l’État a d’ailleurs été revue à la baisse dans le programme de stabilité par le Gouvernement par rapport à celle adoptée en loi de finances initiale (69,9 milliards d’euros au lieu de 70,5 milliards d’euros).

La Cour des comptes souligne cependant l’existence de certains risques liés à la dépense des ASSO, le respect de l’ONDAM (fixé à 1,75 % en 2016) étant soumis à de fortes tensions « notamment en raison de l’évolution des prescriptions de médicaments innovants et coûteux ». Elle estime également que le rendement des mesures relatives aux retraites complémentaires et à l’assurance chômage pourrait être moins élevé que prévu dans le programme de stabilité.

B. DES RISQUES IMPORTANTS SUR LA RÉALISATION DES OBJECTIFS APRÈS 2017

Il est prévu une réduction du déficit public à 2,7 % du PIB à compter de 2017. Le retour du déficit public sous la barre des 3 % du PIB en 2017 permettra à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dont elle fait l’objet depuis 2009.

La Cour des comptes considère cependant qu’il existe un risque que la trajectoire de déficit public ne soit pas respectée en raison de risques pesant sur la maîtrise des dépenses (15). Elle considère que l’objectif d’un déficit à 2,7 % du PIB en 2017 pourrait ne pas être atteint, mais ne se prononce pas sur le retour du déficit sous la barre des 3 % bien que celui-ci soit plus probable.

L’objectif final d’un déficit public de 1,2 % du PIB en 2019 supposerait, selon la Cour des comptes, « une maîtrise sans précédent des dépenses publiques ». Elle qualifie donc de « très importants » les risques qui pèsent sur la réalisation de la trajectoire du déficit public pour la période 2017-2019.

IV. LE DÉFICIT STRUCTUREL

Le rythme et la mesure de la trajectoire de réduction du déficit structurel (autrement appelé « ajustement structurel ») fait l’objet d’une discussion en raison des difficultés méthodologiques liées à son calcul.

A. UN DÉFICIT STRUCTUREL RAMENÉ À 1,9 % DU PIB EN 2015

Le solde structurel est le solde public corrigé des effets du cycle économique. Le calcul du déficit structurel repose sur les hypothèses de la loi de programmation des finances publiques.

Le déficit structurel de l’année 2015 s’élève à 1,9 % du PIB au lieu de 2,3 % du PIB en 2014. L’ajustement structurel a donc été de 0,4 point du PIB.

Le déficit structurel est inférieur de 0,2 point à celui prévu par la loi de programmation des finances publiques. Il est, en revanche, plus élevé que les objectifs des programmes de stabilité transmis en avril 2015 et avril 2016 à la Commission européenne (1,6 point de PIB dans les deux programmes).

Cela ne traduit pas une dégradation des finances publiques mais s’explique par des raisons essentiellement techniques qui tiennent aux modalités de calcul du déficit structurel.

Rappel du mode de calcul du déficit structurel

La quote-part du déficit structurel au sein du déficit nominal est déterminée en fonction de l’écart de production (« output gap » en anglais), c’est-à-dire de l’écart estimé entre le PIB effectif et le PIB potentiel.

À niveau de déficit nominal identique, plus l’écart de production est bas, plus la composante structurelle du déficit public est élevée.

L’écart de production sur lequel repose le calcul du déficit structurel est de – 2,8 % du PIB potentiel (16), alors qu’il se situe à – 3,3 % dans le programme de stabilité transmis en avril 2016 à la Commission européenne. Cette différence explique l’écart d’évaluation du déficit structurel.

B. UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE STRUCTUREL PRÉVU POUR 2019

Selon les hypothèses du programme de stabilité, le Gouvernement prévoit un retour à l’équilibre structurel en 2019.

TRAJECTOIRE DE DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

Déficit structurel

1,3

0,8

0,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Toutefois, pour la Cour des comptes, la croissance potentielle et l’écart de production sont surévalués par le Gouvernement. Au soutien de son argumentation, elle fait notamment valoir que la Commission européenne retient des hypothèses de croissance potentielle et d’écart de production moins importantes. Elle estime qu’avec des hypothèses d’écart de production « plus réalistes », le déficit structurel serait égal au déficit public, soit 1,2 % du PIB, en 2019.

Croissance potentielle

Le Gouvernement retient une hypothèse de croissance potentielle de 1,5 % pour 2016 et 2017. La Commission européenne estime la croissance potentielle de la France à un niveau légèrement inférieur pour ces deux années (1,1 % et 1,2 %).

Le Gouvernement avait estimé initialement la croissance potentielle à 1,3 % pour 2016 et 2017 dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, reprenant ainsi les estimations publiées par la Commission européenne dans ses prévisions économiques de printemps 2014, en date du 5 mai 2014.

Le Gouvernement a rehaussé sa prévision de croissance potentielle de 0,2 point lors de la présentation du programme de stabilité d’avril 2015 afin de tenir compte des effets du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), du pacte de responsabilité et de solidarité (PRS) et de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. À l’inverse, la Commission européenne a abaissé ses prévisions de croissance potentielle pour la France dans ses prévisions économiques d’hiver 2015. Ces mouvements inverses sur les prévisions expliquent l’écart entre l’hypothèse du Gouvernement et celle de la Commission.

À noter que le niveau de croissance potentielle retenu par le Gouvernement est en ligne avec le vote de la commission des finances de l’Assemblée nationale, lors de sa séance du 18 juin 2014, d’un amendement relatif à l’article liminaire du projet de loi de finances rectificative pour 2014. Cet amendement avait d’ailleurs été adopté par l’Assemblée nationale en première lecture lors de sa séance du 23 juin 2014 (la version initiale de l’article liminaire a cependant été rétablie en nouvelle lecture sur amendement du Gouvernement lors de la séance du 15 juillet 2014).

Dans son avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le Haut Conseil des finances publiques avait également jugé « peu vraisemblables » les hypothèses sur lesquelles repose le calcul du déficit structurel et de l’ajustement structurel.

Le Haut Conseil des finances publiques a relevé dans un autre avis (17) que « l’écart de production révisé présenté par le Gouvernement est encore sensiblement plus élevé que celui des organisations internationales ». Il estimait que « cet écart reste vraisemblablement surestimé, avec pour conséquence une majoration de la composante conjoncturelle du déficit et donc, mécaniquement, une sous-estimation du déficit structurel ».

L’opinion de la Cour des comptes et du Haut Conseil des finances publiques repose toutefois, en partie, sur les évaluations de la croissance potentielle de la Commission européenne. Or, la méthodologie de la Commission européenne pourrait évoluer prochainement.

Par courrier du 18 mai 2016 adressé au commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, à la fiscalité, et à l’union douanière, M. Pierre Moscovici, quarante parlementaires de différents États membres de l’Union européenne – dont la Rapporteure générale – ont invité la Commission européenne à revoir sa méthodologie de calcul de la croissance potentielle, notamment en prenant en compte un horizon temporel de quatre années au lieu de deux. Ceci permettrait de mieux prendre en compte les effets des réformes accomplies et de relever les hypothèses de croissance potentielle et d’écart de production.

Par courrier en réponse du 9 juin 2016, le commissaire européen a indiqué que la question soulevée méritait d’être étudiée soigneusement et serait discutée de nouveau à l’automne.

FICHE 3 : LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
ET LA MISE EN
ŒUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ
ET DE SOLIDARITÉ

L’évolution des recettes publiques au cours des dix dernières années est marquée par une augmentation des prélèvements obligatoires qui s’est interrompue sur la période 2013-2015 (I).

La trajectoire de déficit (18) prend en compte une baisse des prélèvements obligatoires, annoncée par le Gouvernement, qui permettra de soutenir l’investissement et de poursuivre la baisse du coût du travail. L’augmentation du taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), récemment annoncée par le Président de la République (19), s’inscrit parfaitement dans cette stratégie économique de soutien à l’investissement et à l’emploi. Elle ne remet pas en cause la trajectoire de déficit dans la mesure où l’enveloppe globale du pacte de responsabilité restera fixée à 40 milliards d’euros.

Les prévisions de recettes pour les années 2016-2019 sont prudentes. Compte tenu de l’amélioration de la situation économique, et en particulier de l’emploi, le niveau des recettes publiques pourrait s’avérer meilleur que prévu (II).

I. L’ÉVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES JUSQU’EN 2015

Les recettes des administrations publiques, y compris crédits d’impôt, ont atteint 53,5 % du produit intérieur brut (PIB) en 2015, en hausse de 3,8 points depuis 2007.

Cette hausse, qui a débuté en 2009, est davantage imputable à l’ancienne législature qu’à l’actuelle. En effet, les recettes publiques ont crû plus fortement au cours des trois dernières années de l’ancienne législature (+ 2,4 points de PIB de 2009 à 2012) qu’au cours des trois premières années de l’actuelle législature (+ 1,5 point de PIB de 2012 à 2015).

LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

En % du PIB

49,7

49,8

49,6

49,7

50,8

52,0

52,9

53,4

53,5

En milliards d’euros

966,7

994,1

961,7

992,2

1 046,6

1 085,6

1 119,9

1 141,8

1 165,8

Source : INSEE.

Les recettes publiques ont ainsi atteint 1 165,8 milliards d’euros en 2015 et se décomposent en prélèvements obligatoires, en crédits d’impôt (20) et en « autres recettes ».

DÉCOMPOSITION DES RECETTES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2012 À 2015

en milliards d’euros

(en % du PIB)

Agrégat

2007

2012

2013

2014

2015

Produit intérieur brut (PIB)

1 945,7

2 086,9

2 115,3

2 140,0

2 181,1

Recettes publiques

966,7

(49,7 %)

1 085,6

(52,0 %)

1 119,9

(52,9 %)

1 141,8

(53,4 %)

1 165,8

(53,5 %)

Dont prélèvements obligatoires*

819,5

(42,1 %)

914,7

(43,8 %)

946,7

(44,8 %)

958,5

(44,8 %)

975,4

(44,7 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en recettes

9,5

(0,5 %)

14,6

(0,7 %)

13,7

(0,6 %)

21,2

(1,0 %)

26,0

(1,2 %)

Dont autres recettes

139,5

(7,2 %)

158,4

(7,6 %)

161,6

(7,6 %)

164,2

(7,7 %)

166,6

(7,6 %)

* Les prélèvements obligatoires comprennent les ressources propres traditionnelles (RPT) au profit de l’Union européenne, lesquelles ne sont pas comptabilisées dans les recettes publiques totales (soit 1,8 milliard d’euros en 2007, 2,1 milliards d’euros de 2012 à 2014, et 2,2 milliards d’euros en 2015).

Source : INSEE.

Les recettes publiques sont composées pour l’essentiel de prélèvements obligatoires.

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

En % du PIB

42,1

41,9

41,0

41,3

42,6

43,8

44,7

44,8

44,7

En milliards d’euros

819,5

836,5

795,8

825,1

876,7

914,7

946,7

957,7

975,4

Source : INSEE.

Entre 2009 et 2013, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 3,8 points de PIB (de 41 % à 44,7 % du PIB). Durant cette période, le redressement des comptes publics a donc été réalisé essentiellement sur les recettes. La hausse avait été plus importante sous la législature précédente (2,6 points sur la période 2009-2011 au lieu de 2,2 points sur la période 2012-2015).

Depuis 2013, les prélèvements obligatoires sont stables et même en légère baisse. En 2015, les prélèvements obligatoires se sont élevés à 975,4 milliards d’euros soit 44,7 % du PIB (au lieu de 957,7 milliards d’euros en 2014, soit 44,8 % du PIB).

Le taux de prélèvement obligatoire par rapport au PIB diminue en 2015, et ce pour la première fois depuis 2009. Cette baisse des prélèvements obligatoires est concomitante à une baisse du déficit public, ce qui est inédit depuis l’année 2000. Désormais, le redressement des comptes publics ne repose donc plus sur une hausse des recettes mais sur un effort en matière de dépenses.

L’évolution spontanée des prélèvements obligatoires en 2015 est de 1,9 % soit une évolution identique à celle du PIB en valeur. Il s’ensuit que l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance est égale à l’unité, après 0,8 en 2014.

RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN 2015

(en milliards d’euros)

Sous-secteur

des administrations publiques

Montant

 

Catégorie

de prélèvements obligatoires

Montant

État

294,4

 

Impôts

608,9

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

16,8

 

Administrations publiques locales (APUL)

133,4

 
 

Cotisations sociales

366,5

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

528,6

 

Institutions et organes de l’Union européenne

2,2

 

Total

975,4

 

Total

975,4

Source : INSEE.

II. LES PERSPECTIVES POUR 2016 À 2019

Les recettes publiques comme les prélèvements obligatoires devraient baisser à compter de 2016. Les prévisions de recettes publiques qui ont servi à l’élaboration du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 sont récapitulées dans le tableau qui suit.

TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

en milliards d’euros

(en % du PIB)

Agrégat

2016

2017

2018

2019

Produit intérieur brut

2 243,0

2 296,4

2 368,0

ND

Recettes publiques

1 183,9

(52,8 %)

1 209,3

(52,7 %)

1 243,3

(52,5 %)

ND

(52,3 %)

Dont prélèvements obligatoires*

991,4

(44,2 %)

1 009,6

(44 %)

1 036,3

(43,8 %)

ND

(43,5 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en recettes

25,3

(1,1 %)

28,4

(1,2 %)

30,0

(1,3 %)

ND

(1,3 %)

Dont autres recettes

169,4

(7,6 %)

173,5

(7,6 %)

179,3

(7,6 %)

ND

(7,6 %)

* les prélèvements obligatoires comprennent 2,2 milliards au profit de l’Union européenne, lesquels ne sont pas comptabilisés dans les recettes totales.

Source : données gouvernementales.

A. LES PERSPECTIVES POUR 2016

Selon la Cour des comptes (21), la prévision de recettes publiques pour 2016 est plausible, dans la mesure où :

– elle repose sur « une base 2015 meilleure que prévu », les prélèvements obligatoires ayant rapporté 974,4 milliards d’euros au lieu de 970,5 milliards d’euros prévus lors de la présentation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 ;

– la prévision de croissance spontanée des prélèvements obligatoires est « sans biais manifeste », puisque celle-ci repose sur une hypothèse d’élasticité de 0,9 ce qui « ne paraît pas particulièrement élevé » ;

– et les mesures nouvelles sont « correctement estimées » avec un impact net de – 5,5 milliards d’euros.

PRINCIPALES MESURES NOUVELLES SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN 2016

(en milliards d’euros)

Mesures devant entraîner des baisses de prélèvements obligatoires

Effet

Baisse de l’impôt sur le revenu des ménages à revenus modestes

– 2,0

Suppression de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés

– 2,9

Abattement supplémentaire sur la contribution sociale de solidarité des sociétés

– 1,0

Allégements de cotisations patronales

– 3,2

Mesures devant entraîner des hausses de prélèvements obligatoires

Effet

Suppression de la prime pour l’emploi

+ 2,0

Hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

+ 1,5

Hausse des taxes sur l’électricité

+ 1,1

Hausse des taux des impôts locaux

+ 0,9

Poursuite de la hausse des cotisations retraite

+ 1,2

Source : Cour des comptes.

Les prévisions pour 2016 semblent également être confortées par les dernières estimations de l’évolution de la masse salariale, qui constitue l’assiette d’une part importante des prélèvements obligatoires (dont les cotisations sociales et la CSG-CRDS au titre de l’année N, et l’impôt sur le revenu au titre de l’année N + 1).

Certes, dans son avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le Haut Conseil des finances publiques avait jugé « un peu élevée la prévision du Gouvernement d’une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016 ».

Mais, selon la dernière note de conjoncture de l’INSEE (22), l’économie française devrait créer 139 000 emplois marchands en 2016, soit davantage que prévu initialement. Au deuxième trimestre, l’emploi progresserait un peu plus qu’anticipé dans la note de conjoncture de mars (+ 28 000 contre + 21 000). L’INSEE prévoit désormais, comme le Gouvernement, une croissance de la masse salariale de 2,3 % en 2016.

De même, selon la dernière publication de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) (23), la masse salariale progresse de 1,4 % au premier trimestre 2016, après + 0,5 % au trimestre précédent. Sur un an, elle augmenterait de 2,5 %.

Dans ces conditions, il est probable que la prévision du Gouvernement d’augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016 se réalise, voire soit dépassée.

La Cour des comptes en conclut qu’« au total, la prévision de recettes du Gouvernement ne paraît pas présenter de risque important de surévaluation ».

1. Les recettes de l’État

La dernière situation mensuelle de l’exécution du budget de l’État corrobore ce diagnostic. Au 30 avril 2016, les recettes fiscales nettes s’établissent à 94,5 milliards d’euros au lieu de 90 milliards d’euros à fin avril 2015, soit une hausse de 4,5 milliards. Cette évolution est cohérente avec la loi de finances initiale (LFI) pour 2016.

SITUATION MENSUELLE BUDGÉTAIRE AU 30 AVRIL 2016

(en millions d’euros)

Impôt

Exécution

2015

Prévision

LFI 2016

Niveau

à fin avril 2015

Niveau

à fin avril 2016

Impôt sur le revenu

69 327

72 143

27 605

27 758

Impôt sur les sociétés

33 549

32 843

6 978

6 832

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

13 774

15 854

3 425

4 843

Taxe sur la valeur ajoutée

141 786

144 616

45 900

48 060

Autres recettes fiscales nettes

21 696

22 405

6 125

7 022

Total

280 132

287 861

90 034

94 516

Source : direction du budget.

Le Gouvernement a toutefois légèrement révisé à la baisse sa prévision de recettes fiscales nettes pour 2016 en raison du ralentissement de l’inflation qui devrait réduire la croissance spontanée de la TVA d’environ un milliard d’euros. En LFI, la prévision était de 287,9 milliards d’euros. Elle a été actualisée à 287 milliards d’euros lors de la présentation du programme de stabilité d’avril 2016.

2. Les recettes des autres administrations publiques

Les prélèvements obligatoires perçus par les administrations publiques locales, qui s’étaient élevés à 133,4 milliards d’euros en 2015, devraient progresser de 3,4 milliards d’euros par l’effet de l’évolution spontanée (2,1 milliards d’euros), d’une hausse des taux d’imposition de 0,9 milliard d’euros, et d’une revalorisation des bases locatives supérieure à l’inflation (0,4 milliard d’euros).

Ces prévisions ont été élaborées à partir d’une hypothèse de stabilité du rendement des droits de mutation à titre onéreux. Dans son rapport, la Cour des comptes a qualifié de « prudente » cette hypothèse. La reprise du marché immobilier pourrait en effet venir soutenir le niveau des recettes publiques des administrations publiques locales.

Enfin, les prévisions de recettes des administrations de sécurité sociale ont également été élaborées à partir d’hypothèses prudentes : l’hypothèse de croissance spontanée a été fixée à 1,9 % alors même qu’il est acquis que la masse salariale – sur laquelle sont assises 60 % des recettes des administrations de sécurité sociale – devrait augmenter plus rapidement.

B. LES PERSPECTIVES POUR 2017 À 2019

Pour les années suivantes, la Cour des comptes estime que « le scénario retenu paraît évaluer correctement le montant de recettes ». Il suppose notamment une évolution spontanée des prélèvements obligatoires correspondant à une élasticité proche de l’unité, « en ligne avec la moyenne historique et qui ne présente pas donc pas de biais ».

TRAJECTOIRE DU TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Année

2016

2017

2018

2019

Taux (en % du PIB)

44,2

44,0

43,8

43,5

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

1. L’année 2017 marquera la dernière étape du pacte de responsabilité

La baisse des prélèvements obligatoires pour 2017 sera permise par la poursuite de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Annoncé le 14 janvier 2014 par le président de la République, le pacte de responsabilité constitue une enveloppe d’allégements de prélèvements obligatoires pour les entreprises de 40 milliards à l’horizon 2017, se répartissant en trois grandes catégories :

– 10 milliards d’euros d’allégements de cotisations sociales patronales ;

– 10 milliards d’euros de baisse de fiscalité sur l’impôt sur les sociétés (IS) et ses contributions additionnelles ;

– 20 milliards d’euros de crédit d’impôt sur la masse salariale au titre du CICE.

Le tableau qui suit récapitule l’ensemble des mesures envisagées dans le cadre de cette enveloppe, avec leur année d’entrée en vigueur.

MESURES ET CALENDRIER INITIAL DU PACTE DE RESPONSABILITÉ PAR CATÉGORIES

Catégorie de mesures

Mesures et évaluation initiale du montant
de l’allégement

Calendrier

10 milliards d’euros

Allégements de cotisations sociales patronales

4,5 milliards d’euros

Allégement de cotisations entre 1 et 1,6 SMIC

2015

4,5 milliards d’euros

Allégement de cotisations entre 1,6 et 3,5 SMIC

2016

1 milliard d’euros

Allégement des cotisations familiales des indépendants

2015

10 milliards d’euros

Allégements de fiscalité sur l’IS et ses contributions additionnelles

2,5 milliards d’euros

Suppression de la contribution exceptionnelle sur l’IS

2016

5,6 milliards d’euros

Suppression progressive de la contribution sociale
de solidarité des sociétés (C3S)

2015-2017

2 milliards d’euros

Baisse progressive du taux de l’IS à 28 %

2017-2020

20 milliards d’euros

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

20 milliards d’euros

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

2013

(montée en charge progressive jusqu’en 2017)

Source : commission des finances.

En 2016, le montant des allégements accordés devrait s’élever d’ores et déjà à plus de 32 milliards d’euros, dont :

– 18,7 milliards au titre du CICE ;

– 4,7 milliards au titre d’allégements de cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC (au lieu de 4,5 milliards évalués initialement) ;

− 3,1 milliards d’euros au titre de l’extension de la baisse des cotisations d’allocations familiales (1,8 point) pour tous les salaires inférieurs à 3,5 fois le SMIC à compter du 1er avril 2016 (qui représentera un coût en année pleine de 4,5 milliards d’euros à partir de 2017) ;

– un milliard d’euros au titre d’allégements de cotisations en faveur des travailleurs indépendants ;

– 2 milliards d’euros au titre des abattements de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) ;

− 2,9 milliards d’euros au titre de l’expiration de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés, au taux de 10,7 % (au lieu de 2,5 milliards d’euros évalués initialement).

Environ 3 milliards d’euros d’allégements supplémentaires interviendront en 2017 sans qu’un nouveau vote du Parlement soit nécessaire, au titre de la montée en charge de plusieurs dispositifs déjà adoptés dont la montée en charge du CICE (0,5 milliard) et l’exonération en année pleine de cotisations patronales d’allocations familiales (1,8 point) pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC (1,1 milliard d’euros).

Au total, 35 milliards d’euros d’allégements sur les 40 milliards d’euros du pacte de responsabilité ont été adoptés en faveur des entreprises et seront effectifs en 2017.

Il reste dès lors 5 milliards d’euros à adopter pour la mise en œuvre de la dernière étape du programme de responsabilité. Celle-ci devrait être modifiée par rapport à ce qui était prévu initialement.

a. La dernière étape du pacte de responsabilité telle qu’elle était prévue initialement

Dans le programme de stabilité d’avril 2016, le Gouvernement avait indiqué que les deux dernières mesures devant être mises en œuvre en 2017 consistaient en la suppression complète de la C3S et une réduction du taux de l’IS de 33,33 % à 28 %, soit :

– 3,5 milliards d’euros au titre de la suppression complète de la C3S ;

– et 1,5 milliard d’euros au titre de la réduction du taux de l’IS.

Ces deux mesures devaient être incluses dans le projet de loi de finances pour 2017.

Le tableau qui suit récapitule le suivi de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et actualise l’évaluation des différentes mesures selon la dernière étape du pacte de responsabilité prévue par le programme de stabilité.

SUIVI DE LA MISE EN ŒUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ

(en milliards d’euros)

Mesures/année

2015

2016

2017

Allégements de cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC

4,6

4,7

4,9

Allégements de cotisations patronales entre 1,6 et 3,5 SMIC

3,1

4,2

Allégements de cotisations en faveur des indépendants

1

1

1

Abattement de contribution sociale sur l’IS

1

2

5,5

Suppression de la contribution exceptionnelle sur l’IS

2,9*

3,3*

CICE

17,2

18,7

19,2

Réduction du taux de l’IS

2,5

Total

23,8

32,4

39,7

* selon les dernières données gouvernementales.

Source : calcul commission des finances.

b. La dernière étape du pacte de responsabilité telle qu’annoncée par le Président de la République

Le 30 juin 2016, le Président de la République a annoncé vouloir réorienter les dernières mesures du pacte de responsabilité en faveur de l’emploi et des petites et moyennes entreprises (24), tout en conservant l’enveloppe de 5 milliards d’euros restant à adopter en faveur des entreprises.

Il est ainsi envisagé, d’une part, de relever d’au moins un point le taux du CICE (lequel passerait ainsi de 6 % de la masse salariale éligible à 7 %), et d’autre part, de baisser l’impôt sur les sociétés applicable aux PME. Il est également prévu une mesure d’allégement pour les artisans qui ne bénéficient pas du CICE.

Le Président de la République a également annoncé une prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 de la mesure de suramortissement de 40 % pour les investissements productifs.

L’ensemble de ces mesures est chiffré à 0,8 milliard d’euros en comptabilité nationale pour 2017.

Le renforcement envisagé du CICE démontre le succès de ce dispositif de soutien à l’emploi et à l’investissement.

2. Le CICE représentera au moins 20 milliards d’euros de réduction du coût du travail par an sur la période 2017-2019

La création du CICE a été annoncée dès les premiers mois du quinquennat, le 6 novembre 2012, peu après la remise du rapport sur la compétitivité française de M. Louis Gallois. Institué par l’article 66 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (25), le CICE est entré en vigueur le 1er janvier 2013.

Il s’agit d’un crédit d’impôt qui porte sur la masse salariale des salariés dont les rémunérations brutes n’excèdent pas 2,5 fois le montant annuel du SMIC. Il bénéficie à toutes les entreprises relevant de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu d’après leur bénéfice réel. Son taux, qui était de 4 % pour les salaires versés en 2013, a été relevé à 6 % pour les salaires versés à compter de 2014 (9 % dans les départements d’outre-mer à compter des salaires versés en 2015).

a. Une baisse du coût du travail pour les entreprises

Le CICE a représenté pour les entreprises une baisse du coût du travail de 11,3 milliards d’euros en 2013, et de 16,1 milliards d’euros en 2014 selon les dernières données publiées par le ministère de l’économie et des finances. Au titre des salaires versés en 2015 et 2016, les prévisions de créances globales de CICE dont bénéficieront les entreprises ont été arrêtées à 18,6 milliards et 19,4 milliards d’euros. Le CICE devrait ensuite atteindre les 20 milliards d’euros au titre des salaires versés en 2017.

EXÉCUTION ET PRÉVISIONS DE CRÉANCES EN FAVEUR DES ENTREPRISES
SELON LES MILLÉSIMES DE CICE

(en milliards d’euros)

Millésime

Montant de créances

CICE millésime 2013

(exécution)

11,3

CICE millésime 2014

(exécution)

16,1

CICE millésime 2015

(prévision)

18,6

CICE millésime 2016

(prévision)

19,4

CICE millésime 2017

(prévision)

20,0

Source : ministère des finances.

Les entreprises n’ont toutefois pas immédiatement bénéficié de ces montants. Trois séries de raisons peuvent l’expliquer.

Tout d’abord, la nature fiscale du dispositif induit un décalage d’une année par rapport à l’année du versement du salaire. En d’autres termes, la créance de CICE relative aux salaires versés en 2013 n’a bénéficié aux entreprises qu’en 2014.

Ensuite, si elles peuvent imputer leur créance de CICE sur leur impôt, les entreprises ne peuvent pas – sauf exception – en obtenir une restitution immédiate lorsque le montant de leur impôt est inférieur au montant de leur créance de CICE. Dans ce cas, la créance de CICE est reportée l’année suivante. Ce n’est qu’à l’issue d’un délai de trois ans que le montant de créance de CICE non imputé est restitué par l’État à l’entreprise. Par exception, les PME, les jeunes entreprises innovantes, les entreprises nouvelles et les entreprises en difficultés peuvent demander une restitution immédiate.

Enfin, certaines entreprises ont mis un peu de temps pour s’approprier le dispositif et pour déclarer leur créance de CICE à l’administration fiscale. Cette phase d’apprentissage est terminée : selon France Stratégie, dans son rapport de septembre 2015, « tout indique que (les entreprises) ont maintenant une bonne connaissance des implications comptables du dispositif, de son fonctionnement et des obligations déclaratives qu’il comporte » (26).

b. Un impact désormais limité sur le solde de l’État

La montée en charge du CICE ne devrait plus peser substantiellement sur le solde budgétaire de l’État et le solde public dans les années à venir.

Par ailleurs, l’augmentation de son taux annoncée par le Président de la République ne pèsera pas sur le déficit en 2017, le surcroît de créance fiscale ainsi créé ne pouvant être utilisé qu’en 2018.

i. Le coût en comptabilité budgétaire

Le coût budgétaire du CICE correspond au montant décaissé chaque année par l’État, sous forme de restitutions ou sous forme d’imputations. Le surcoût d’une année sur l’autre vient dégrader le solde budgétaire de l’État.

La chronique du coût budgétaire du CICE, avant le relèvement d’au moins un point envisagé, est récapitulée dans le tableau qui suit.

COÛT BUDGÉTAIRE DU CICE

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Montant

6,6

12,0

12,7

16,0

18,6

19,6

Surcoût par rapport à l’année précédente

+ 6,6

+ 5,4

+ 0,7

+ 3,3

+ 2,6

+ 1,0

Source : actualisation calculée par la commission des finances sur la base des dernières données gouvernementales communiquées.

L’essentiel du coût du CICE a été absorbé par le solde budgétaire sur les années 2014 et 2015. En 2016, le CICE ne devrait dégrader le solde budgétaire de l’État que de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2015. En 2017, par rapport à 2016, le solde devrait se dégrader de 3,3 milliards d’euros.

Le relèvement envisagé d’au moins un point du taux du CICE ne pèsera pas sur le solde budgétaire de l’État en 2017 puisque le surcroît de créance ainsi acquis ne pourra être imputé ou restitué qu’en 2018.

En 2018, par rapport à 2017, la dégradation du solde inhérente au CICE devait être limitée à 2,6 milliards d’euros, avant l’annonce du relèvement d’au moins un point du taux du CICE. Enfin, en 2019 par rapport à 2018, la dégradation du solde devait être limitée à un milliard d’euros, avant l’annonce du relèvement du taux du CICE. Le relèvement d’au moins un point annoncé par le Président de la République devrait augmenter le coût budgétaire du CICE pour un montant qu’il est difficile d’évaluer à ce stade compte tenu des règles de report précédemment décrites.

ii. Le coût en comptabilité nationale

Le coût en comptabilité nationale, qui sert de base à la comptabilité « maastrichtienne » pour le calcul du solde public, correspond à l’ensemble des créances déclarées par les entreprises, y compris les créances faisant l’objet d’un report.

La chronique du coût en comptabilité en nationale devrait normalement suivre, avec une année de décalage, la chronique des millésimes de CICE. Toutefois, la chronique du coût en comptabilité nationale diffère légèrement par rapport à la chronique des millésimes car le crédit d’impôt ne constitue un coût en comptabilité nationale qu’à partir du moment où il est déclaré par l’entreprise créancière. Or, selon les règles du droit commun fiscal, les entreprises disposent de trois années pour procéder à cette déclaration. Ainsi, une entreprise peut déclarer jusqu’en 2016 une créance de CICE relative à l’année 2013.

La chronique du coût en comptabilité nationale du CICE, avant le relèvement d’au moins un point envisagé, est récapitulée dans le tableau qui suit.

COÛT EN COMPTABILITÉ NATIONALE DU CICE

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Montant

10,6

17,2

18,7

19,2

19,9

20,7

Surcoût par rapport à l’année précédente

+ 10,6

+ 6,6

+ 1,5

+ 0,5

+ 0,7

+ 0,8

Source : actualisation calculée par la commission des finances sur la base des dernières données gouvernementales communiquées.

L’essentiel du coût du CICE a été absorbé par le solde public au cours des années 2014 et 2015. La montée en charge du CICE ne devait peser que faiblement sur le déficit public (1,5 milliard d’euros en 2016 par rapport à 2015, 0,5 milliard d’euros en 2017 par rapport à 2016, et 0,7 milliard d’euros en 2018 par rapport à 2017).

Le relèvement d’au moins un point annoncé par le Président de la République devrait augmenter le coût du CICE en comptabilité nationale d’environ 3 milliards d’euros à compter de 2018.

3. Une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu envisagée pour 2017

Après une phase d’augmentation de la fiscalité pesant sur les ménages rendue nécessaire en raison de l’état des finances publiques hérité en 2012, le Gouvernement s’est engagé depuis 2014 dans un processus de baisse de l’impôt sur le revenu en faveur des ménages aux revenus modestes et moyens.

Trois mesures ont ainsi été adoptées en ce sens.

En premier lieu, l’article 1er de la première loi de finances rectificative pour 2014 (27) a institué une réduction d’impôt exceptionnelle d’un montant maximal de 350 euros pour un contribuable célibataire et de 700 euros pour un couple. Cette mesure a permis de rendre non imposables à l’impôt sur le revenu 2 millions de contribuables. Son coût budgétaire a été évalué à 1,3 milliard d’euros. Cette réduction d’impôt, applicable pour les seules impositions des revenus de 2013, a été soumise à des conditions de revenus afin qu’elle bénéficie exclusivement aux classes moyennes imposées dans les premières tranches de l’impôt sur le revenu.

En deuxième lieu, l’article 2 de la loi de finances pour 2015 (28) a supprimé la première tranche d’impôt sur le revenu à 5,5 %. Cette mesure, dont le coût budgétaire a été évalué à environ 2,8 milliards d’euros, a bénéficié à plus de 9 millions de ménages.

En troisième lieu, la loi de finances pour 2016 (29) a poursuivi et amplifié l’allégement de l’imposition des ménages aux revenus modestes et moyens.

Ainsi, son article 2 a institué une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu de 2 milliards d’euros, bénéficiant à 8 millions de foyers pour un gain moyen de 252 euros (de 200 à 300 euros par célibataire, et de 300 à 500 euros par couple). Parmi eux, 3 millions n’avaient pas bénéficié des précédentes mesures de baisse.

Au total, 12 millions de foyers fiscaux ont bénéficié de ces baisses d’impôt depuis 2014 pour un montant global de 5 milliards d’euros par an qui viennent soutenir le pouvoir d’achat des ménages aux revenus modestes et moyens.

Le Président de la République a annoncé qu’un nouveau geste fiscal serait réalisé en faveur de ces ménages, à hauteur d’au moins 2 milliards d’euros, si le retour de la croissance était confirmé pour 2017 à hauteur de 1,7 % (30).

FICHE 4 : LES DÉPENSES

Lors du programme de stabilité pour les années 2014 à 2017, le Gouvernement a annoncé une nouvelle trajectoire des finances publiques centrée sur la maîtrise de la dépense publique. Cette trajectoire a été confirmée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (31), avec un taux de croissance de la dépense publique historiquement bas, illustré par le graphique suivant.

TAUX DE CROISSANCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE, HORS CRÉDITS D’IMPÔTS

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

I. LE RYTHME HISTORIQUEMENT BAS D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE POURSUIVI EN 2016

A. UN INFLÉCHISSEMENT NOTABLE DU RYTHME D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE DEPUIS LA PRÉSENTE LÉGISLATURE

Le taux de croissance annuel de la dépense publique en valeur, hors crédits d’impôt, s’établit en moyenne à 1,2 % depuis 2013, au lieu de 3,6 % entre 2002 et 2012. Ce fort ralentissement de la croissance des dépenses publiques, hors crédits d’impôt, correspond à une augmentation de 34 milliards d’euros entre 2002 et 2012 à 14 milliards d’euros entre 2013 et 2015.

Cette évolution de la dépense publique est similaire en intégrant les crédits d’impôt, qui sont désormais comptabilisés comme des dépenses au sens des nouvelles normes de comptabilité nationale européennes SEC 2010 (32). Le rythme de progression de la dépense publique, y compris crédits d’impôt, s’élevait en moyenne à 35,2 milliards d’euros entre 2002 et 2012, au lieu de 18,1 milliards d’euros sur la période 2013-2019.

ÉVOLUTION DU NIVEAU DE DÉPENSES PUBLIQUES, Y COMPRIS CRÉDITS D’IMPÔT

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances à partir des données INSEE.

Cette rupture de tendance de la progression de la dépense publique a pour effet de réduire les deux ratios de dépenses publiques – hors et y compris crédits d’impôt – rapportées au produit intérieur brut (PIB) à compter de 2015, établis respectivement à 55,3 et 56,8 points de PIB.

RATIO DE DÉPENSES PUBLIQUES / PIB

(en %)

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

La maîtrise de la dépense publique porte sur les différents secteurs des administrations publiques.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE, PAR SOUS-SECTEUR DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

(moyenne annuelle, en valeur hors crédits d’impôt et en %)

Secteur

2014

2015

2016

2017

État

– 0,4

– 1,6

0,7

– 0,6

Administrations publiques locales (APUL)

0,2

– 1,3

1,2

1,6

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

2,3

1,5

1,3

1,2

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

4,1

1,7

1,7

1,2

Administrations publiques

1,0

0,9

1,1

1,1

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

B. UNE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE POURSUIVIE EN 2016

La loi de finances pour 2016 anticipait une progression en valeur de la dépense publique, hors crédits d’impôt, légèrement plus dynamique en 2016 à 1,3 %, en lien avec une reprise de l’inflation et le cycle électoral.

Cette augmentation a été revue à la baisse à 1,1 % en 2016 (hors crédits d’impôt et en valeur) à l’occasion du programme de stabilité en avril 2016, en raison de prévisions d’inflation abaissées de 1 % à 0,1 %.

L’exercice 2016 bénéficie notamment de la mise en œuvre pour la première année des revues de dépenses permettant de documenter près de 500 millions d’euros d’économies.

1. La maîtrise des dépenses de l’État en 2016

Les objectifs de maîtrise de la dépense de l’État sont encore ambitieux en 2016, avec une diminution des deux normes de dépense par rapport à 2015.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SOUS NORME

(en milliards d’euros)

Dépenses

Exécution 2015

(format LFI 2016)

LFI 2016

Écart LFI 2016 – Exécution 2015

Crédits des ministères hors concours aux collectivités locales

218,2

216,1

– 2,1

Taxes affectées plafonnées

8,4

8,6

0,3

Prélèvement sur recettes (PSR) au profit de l’Union européenne

19,7

20,2

0,5

Concours aux collectivités locales (PSR et mission RCT*)

53,0

50,3

– 2,7

Norme de dépenses hors charge de la dette et pensions

299,3

295,2

– 4,1

Charge de la dette

42,1

44,5

2,3

Contributions au CAS Pensions

45,5

46,2

0,8

Norme de dépenses y compris charge de la dette et pensions

386,9

385,9

– 1,0

* RCT : mission Relations avec les collectivités territoriales.

Source : Cour des comptes, données issues de la direction du budget.

a. Le décret d’avance du 2 juin 2016

Le Gouvernement a pris un décret d’avance le 2 juin 2016 (33) destiné à financer de nouvelles dépenses par redéploiement de crédits entre missions du budget général et comptes d’affectation spéciale. Ce décret a ouvert 1,45 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 988,45 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Il a pour objet le financement :

– du plan d’urgence pour l’emploi annoncé le 18 janvier 2016 par le Président de la République, avec une ouverture de CP à hauteur de 766 millions d’euros ;

– de l’allocation pour les demandeurs d’asile à hauteur de 158 millions d’euros en CP ;

– des retraites des vétérinaires et un plan de soutien aux éleveurs pour faire face à des risques sanitaires pesant sur le monde agricole (crise aviaire en particulier), pour 64,45 millions d’euros en CP.

Les annulations de crédits ont porté sur soixante-quatre programmes de vingt-trois missions du budget général, ainsi que sur un programme d’un compte d’affectation spéciale. Par ailleurs, le Gouvernement a adjoint à ce décret d’avance un gel supplémentaire de dépenses à hauteur de 64,35 millions d’euros. L’ensemble de ces mouvements est retracé dans le tableau suivant par mission, avec les résultats d’exécution constatés depuis 2012.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

(en millions d’euros
en crédits de paiement)

Missions

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

LFI 2016

Crédits ouverts = LFI + reports + concours
[A]

"Crédits gelés" avant le DA
[B]

Crédits utilisables avant le DA = Crédits ouverts - Crédits gelés
[C]= [A]-[B]

DA : annulations de crédits, au sein de crédits déjà gelés
[D]

DA : annulations de crédits, au sein de crédits "utilisables" (pas gelés initialement)
[E]

DA : ouvertures de crédits [F]

Nouveau gel de crédits (non inscrit dans le DA mais confirmé par le Gouver-nement)
[G]

Après DA : crédits ouverts
[H] = [A] -[D] -[E] +[F]

Après DA "Crédits gelés"
[I] = [B]-[D]+[G]

Après DA Crédits utilisables
[J] = [H]-[I]

Crédits utilisables après DA / Crédits utilisables avant DA

Crédits utilisables après DA / Crédits ouverts

Action extérieure de l’État

2768,4

2987,4

2782,4

2949,4

3193,2

3430,1

367,1

3062,9

 

30,8

 

 

3399,3

367,1

3032,1

99%

88%

Administration générale et territoriale de l’État

2735,0

2607,2

2713,4

2788,7

2549,1

2772,1

36,0

2736,0

 

36,7

 

 

2735,4

36,0

2699,3

99%

97%

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3838,8

3315,2

3616,3

3995,9

2717,2

2747,6

143,5

2604,1

 

42,9

64,5

 

2769,1

143,5

2625,6

101%

96%

Aide publique au développement

3042,0

2966,8

2752,8

2655,2

2510,4

2609,7

280,8

2328,9

 

0,0

 

45,2

2609,7

326,0

2283,7

98%

88%

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

3123,3

3014,0

2945,9

2719,7

2613,0

2621,4

212,9

2408,5

 

0,0

 

 

2621,4

212,9

2408,5

100%

92%

Conseil et contrôle de l’État

607,9

610,5

616,7

622,9

639,4

654,4

5,8

648,6

 

4,0

 

 

650,3

5,8

644,5

99%

98%

Culture

2650,2

2618,1

2554,8

2601,3

2750,1

2786,6

105,6

2681,0

6,0

11,0

 

6,0

2769,6

105,6

2664,0

99%

96%

Défense

38876,0

38959,9

39871,0

40982,9

39689,4

40549,1

2788,2

37760,9

 

0,0

 

 

40549,1

2788,2

37760,9

100%

93%

Direction de l’action du Gouvernement

1062,5

1128,2

1227,0

1140,5

1346,1

1406,8

75,1

1331,7

 

23,8

 

 

1383,0

75,1

1307,9

98%

93%

Écologie, développement et mobilité durables

10948,1

10280,0

11591,3

9672,2

9164,0

9464,3

545,5

8918,8

24,5

238,4

 

8,6

9201,3

529,6

8671,8

97%

92%

Économie

2025,7

2210,7

3798,2

1852,1

1700,6

1877,1

128,6

1748,5

0,9

8,1

 

 

1868,2

127,8

1740,4

100%

93%

Égalité des territoires, logement et ville

7937,6

7618,0

7614,9

12803,4

18153,0

18308,0

1317,2

16990,8

 

0,0

 

 

18308,0

1317,2

16990,8

100%

93%

Engagements financiers de l’État

56370,1

53895,9

47095,4

42725,1

45159,0

45274,8

150,9

45123,9

11,2

30,8

 

 

45232,8

139,7

45093,1

100%

100%

Enseignement scolaire

62344,9

63436,3

65111,4

66395,3

67069,5

67101,6

549,6

66552,0

10,0

3,9

 

 

67087,7

539,6

66548,1

100%

99%

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11524,7

11395,6

11263,2

11111,8

10930,5

11076,9

336,8

10740,1

8,0

58,0

 

 

11010,9

328,8

10682,1

99%

96%

Immigration, asile et intégration

734,2

705,0

727,2

677,5

804,1

833,9

67,3

766,6

 

10,0

158,0

 

981,9

67,3

914,6

119%

110%

Justice

7300,2

7574,3

7661,2

7849,6

8193,2

8252,5

348,6

7903,8

50,0

0,0

 

 

8202,5

298,6

7903,8

100%

96%

Médias, livre et industries culturelles

1267,4

1197,7

788,9

697,5

561,1

570,0

43,3

526,7

2,1

2,0

 

 

565,9

41,1

524,7

100%

92%

Outre-mer

2024,4

2102,5

2038,1

1992,4

2061,5

2095,4

174,2

1921,2

 

31,0

 

 

2064,4

174,2

1890,2

98%

90%

Politique des territoires

303,3

302,1

306,0

698,8

704,6

733,9

37,1

696,9

 

18,4

 

4,6

715,5

41,7

673,9

97%

92%

Pouvoirs publics

991,2

989,0

990,0

988,0

987,7

987,7

0,0

987,7

 

0,0

 

 

987,7

0,0

987,7

100%

100%

Recherche et enseignement supérieur

25279,1

25795,5

30554,2

26006,1

26189,3

26364,9

769,5

25595,4

45,7

76,3

 

 

26108,9

723,8

25385,1

99%

96%

Régimes sociaux et de retraite

6711,4

6438,2

6506,3

6451,6

6320,4

6320,4

505,1

5815,3

 

0,0

 

 

6320,4

505,1

5815,3

100%

92%

Relations avec les collectivités territoriales

2661,4

2720,6

2738,0

2747,6

3034,0

3054,5

257,2

2797,3

 

21,0

 

 

3033,5

257,2

2776,3

99%

91%

Santé

1317,3

1379,0

1389,9

1251,5

1250,6

1269,0

88,7

1180,3

13,9

10,1

 

 

1245,0

74,8

1170,2

99%

92%

Sécurités

17499,1

17951,5

18096,5

18313,1

18733,3

18816,7

300,3

18516,4

 

33,1

 

 

18783,6

300,3

18483,4

100%

98%

Solidarité, insertion et égalité des chances

12782,5

13422,6

14322,6

16274,9

18358,0

18405,0

1378,3

17026,7

11,6

66,1

 

 

18327,2

1366,7

16960,5

100%

92%

Sport, jeunesse et vie associative

464,4

499,2

534,9

504,2

616,9

624,4

44,6

579,8

15,0

3,0

 

 

606,4

29,6

576,8

99%

92%

Travail et emploi

10344,3

10527,1

10674,0

12105,3

11701,3

11776,3

874,1

10902,2

 

30,0

766,0

 

12646,3

874,1

11772,2

108%

100%

Crédits non répartis

0,0

0,0

0,0

0,0

35,4

35,4

0,0

35,4

 

 

 

 

35,4

0,0

35,4

100%

100%

TOTAL

299535,3

298648,1

302882,6

301574,5

309735,8

312820,5

11932,1

300888,4

198,9

789,6

988,5

64,4

312820,5

11797,5

301022,9

 

 

Source : Gouvernement

b. Les mises en réserve de crédits

Pour l’exercice 2016, le Gouvernement a décidé de maintenir un niveau exceptionnellement élevé de mise en réserve des crédits. La réserve de précaution initiale est fixée à 8 % pour les crédits autres que de personnel et 0,5 % pour les crédits de personnel. Ce niveau de réserve est supérieur aux seuils prévus par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (respectivement 6 % et 0,5 %) (34). La Rapporteure générale a été informée, par un courrier du secrétaire d’État chargé du budget en date du 15 janvier 2016, de cette mise en réserve initiale.

Pour la première fois, le Gouvernement a décidé en avril de geler les crédits reportés de 2015 à 2016, pour un montant de 1,8 milliard d’euros en CP (35). En mai 2016, la réserve de précaution a été majorée de 470 millions d’euros en AE et en CP portant uniquement sur le programme 146 Équipement des forces de la mission Défense. Le 6 juin 2016, le Gouvernement informait la Rapporteure générale d’une nouvelle majoration de la réserve de précaution correspondant au montant des annulations du décret d’avance, hors annulations portant sur les crédits déjà mis en réserve (199 millions d’euros en AE et en CP). Par ailleurs, la mise en réserve complémentaire de 64,35 millions d’euros en AE et en CP, annoncée au moment du décret d’avance, a été réalisée lors de cette majoration de réserve. Enfin, une partie des crédits est redevenue disponible (opération dénommée « dégel de crédits ») pour les gestionnaires de programme, à hauteur de 225 millions d’euros en CP.

Dès lors, la réserve de précaution s’établit début juillet 2016 à 10,7 milliards d’euros en CP hors dépenses de personnel, soit un niveau de réserve après « surgels » (36) supérieur aux années précédentes (en moyenne, elle s’est établie à 8,7 milliards d’euros de 2012 à 2015).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DISPONIBLES ET MIS EN RÉSERVE, HORS DÉPENSES DE PERSONNEL

(en euros, en crédits de paiement)

Mission

LFI (CP, hors titre 2)

Crédits ouverts: LFI + reports + concours

Mise en réserve initiale

Mise en réserve des reports de crédits

Annulation décret d’avance sur crédits en réserve

Autres « dégels » / « surgels »

Mise en réserve des crédits au 1er juillet

Crédits disponibles au 1er juillet

Action extérieure de l’État

2 306 386 294

2 514 988 155

157 970 690

221 058 236

−           16 341 101

362 687 825

2 152 300 330

Administration générale et territoriale de l’État

578 850 545

770 438 948

45 279 616

99 780 732

−         124 745 022

20 315 326

750 123 622

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

1 857 256 330

1 911 129 098

121 804 386

17 419 888

139 224 274

1 771 904 824

Aide publique au développement

2 314 842 158

2 414 149 069

185 051 981

94 792 202

45 200 000

325 044 183

2 089 104 886

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 611 210 992

2 619 691 969

204 435 166

8 473 735

212 908 901

2 406 783 068

Conseil et contrôle de l’État

97 726 019

107 397 801

7 798 082

11 691 926

−           16 377 556

3 112 452

104 285 349

Culture

2 081 399 679

2 101 759 735

125 692 010

26 855 788

6 000 000

−           61 254 968

85 292 830

2 016 466 905

Défense

20 548 669 031

21 385 284 696

1 625 657 606

596 863 735

470 000 000

2 692 521 341

18 692 763 355

Direction de l’action du Gouvernement

911 434 669

951 548 598

70 123 911

15 634 988

−           13 025 868

72 733 031

878 815 567

Écologie, développement et mobilité durables

7 178 484 045

7 437 614 576

515 798 557

15 969 677

24 519 677

8 550 002

515 798 559

6 921 816 017

Économie

767 798 911

946 482 774

54 753 304

69 203 025

860 000

123 096 329

823 386 445

Égalité des territoires, logement et ville

17 387 455 809

17 542 691 769

1 315 246 599

1 991 657

−           20 000 000

1 297 238 256

16 245 453 513

Engagements financiers de l’État

45 158 990 000

45 232 844 500

46 559 200

104 354 500

11 170 000

139 743 700

45 093 100 800

Enseignement scolaire

5 108 465 559

5 183 071 824

215 451 071

24 325 981

10 000 000

229 777 052

4 953 294 772

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

2 303 063 074

2 394 330 350

179 953 277

113 682 126

7 970 000

−           39 000 000

246 665 403

2 147 664 947

Immigration, asile et intégration

804 121 320

985 343 279

60 498 177

6 779 042

−                             2

67 277 217

918 066 062

Justice

3 118 668 248

3 129 726 235

246 040 645

54 131 881

50 000 000

−           96 900 000

153 272 526

2 976 453 709

Médias, livre et industries culturelles

561 066 129

565 879 845

34 322 013

8 928 277

2 136 311

41 113 979

524 765 866

Outre-mer

1 916 996 252

1 923 205 214

152 733 452

20 763 026

173 496 478

1 749 708 736

Politique des territoires

660 847 039

674 491 250

51 525 931

16 898 772

−           26 979 312

41 445 391

633 045 859

Pouvoirs publics

987 745 724

987 745 724

987 745 724

Provisions

24 000 000

24 000 000

24 000 000

Recherche et enseignement supérieur

25 384 304 586

25 442 648 174

647 704 998

135 372 517

45 747 121

−           21 196 819

716 133 575

24 726 514 599

Régimes sociaux et de retraite

6 320 354 974

6 320 354 974

505 072 470

−                             1

505 072 469

5 815 282 505

Relations avec les collectivités territoriales

3 033 952 954

3 024 169 525

235 656 886

21 553 944

−           10 277 263

246 933 567

2 777 235 958

Santé

1 250 555 111

1 244 576 916

88 226 756

457 167

13 874 756

74 809 167

1 169 767 749

Sécurités

2 740 569 303

2 798 613 300

218 012 181

2 279 033

220 291 214

2 578 322 086

Solidarité, insertion et égalité des chances

17 627 188 320

17 597 337 815

1 368 626 547

6 045 813

11 616 705

−                 591 278

1 362 464 377

16 234 873 438

Sport, jeunesse et vie associative

616 866 626

604 779 934

45 505 754

6 732 968

15 000 000

−             7 612 301

29 626 421

575 153 513

Travail et emploi

11 075 966 637

11 886 788 222

806 568 619

64 393 907

−         294 448 144

576 514 382

11 310 273 840

Total

187 335 236 338

190 723 084 269

9 332 069 885

1 766 434 543

198 894 570

−224 999 633

10 674 610 225

180 048 474 044

Source : Gouvernement.

c. Les économies complémentaires prévues par le programme de stabilité

Le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 a abaissé la prévision d’inflation de 1 % à 0,1 % pour l’année 2016. Cette réduction de l’inflation a pour effet mécanique de réduire l’efficacité d’un certain nombre de mesures d’économies. Ainsi, la non-revalorisation de prestations sociales permet en situation normale d’inflation de générer des économies par rapport à une évolution desdites prestations liée à l’indice des prix. En revanche, la non-revalorisation de ces prestations ne produit aucune économie en cas d’inflation nulle.

Dès lors, le Gouvernement a intégré un effort d’économies complémentaires d’un milliard d’euros en 2016 sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs pour compenser l’absence d’inflation. Au total, l’État réalisera 4,6 milliards d’euros d’économies en 2016 par rapport à l’évolution tendancielle de ses dépenses.

d. Le financement des mesures nouvelles annoncées par le Gouvernement depuis le début de l’année

En avril 2016, la Rapporteure générale a publié à l’occasion du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 un recensement des mesures nouvelles annoncées par le Gouvernement depuis le 1er janvier 2016.

Celui-ci a confirmé le principe de compensation systématique, garantissant le financement des mesures nouvelles par de nouvelles économies. Cette règle a pour objet le respect de la trajectoire de redressement des finances publiques, notamment à travers les cibles de solde public.

Ce rapport permet d’actualiser cette liste des nouvelles mesures – qui n’a pas véritablement évolué – portant sur le budget des administrations publiques, annoncées depuis le début de l’année 2016.

NOUVELLES MESURES ANNONCÉES PAR LE GOUVERNEMENT EN 2016

Mesures annoncées

Date de l’annonce

Coût estimé pour 2016 (en milliards d’euros)

Financement envisagé des mesures*

Prime à l’embauche*

18 janvier 2016

1

− Redéploiements sous la norme de dépense : 0,9 milliard d’euros

− Diminution des décaissements PIA : 0,4 milliard d’euros

− Économies sur les administrations de sécurité sociale : 0,3 milliard d’euros

Formation de 500 000 chômeurs supplémentaires*

18 janvier 2016

0,6

Plan de soutien exceptionnel à l’élevage**

11 février 2016

0,4

Redéploiement sous la norme de dépense

Baisse de cotisations sociales pour les agriculteurs**

11 février 2016

0,5

Redéploiement sous la norme de dépense

Fonds de financement de la transition énergétique**

8 mars 2016

0,3

− Gel du report de crédits de 2015 à 2016 : 1,8 milliard d’euros

Hausse de 1,2 % du point d’indice des fonctionnaires**

17 mars 2016

0,6

Prolongement d’un an de la mesure de suramortissement

31 mars 2016

0,4

Mesures en faveur des jeunes**

11 avril 2016

0,2

Indemnité en faveur des enseignants du primaire**

3 mai 2016

0,075

Total

(toutes administrations publiques)

 

4,1

4,2

* Programme de stabilité 2016, page 31.

** Réponse du Gouvernement au questionnaire de la Rapporteure générale.

Source : commission des finances et programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Seule une nouvelle dépense en faveur des enseignants du premier degré a été annoncée depuis l’examen du programme de stabilité.

e. L’analyse des risques de dépassement réalisée par la Cour des comptes

La Cour des comptes procède chaque année dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques (37) à une analyse des risques pesant sur l’exécution en cours. Cette analyse est réalisée sur la base des informations d’exécution de l’année antérieure et des prévisions d’exécution et décisions de dépense de l’année en cours.

RISQUES DE DÉPASSEMENT SUR LA NORME « ZÉRO VALEUR » IDENTIFIÉS
PAR LA COUR DES COMPTES

(en milliards d’euros)

Missions

Hypothèse

basse

Hypothèse

haute

Hypothèse centrale

Administration générale et territoriale de l’État (AGTE)

0,15

0,15

0,15

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

0,7

1,1

0,9

Défense

0,5

0,8

0,65

Écologie, développement et aménagement durables

0,0

0,5

0,25

Égalité des territoires, logement, ville

0,2

0,4

0,3

Enseignement scolaire

0,1

0,4

0,25

Immigration, asile et intégration

0,1

0,2

0,15

Santé

0,0

0,1

0,05

Sécurité

0,1

0,3

0,2

Travail et emploi

1,7

2,4

2,0

Solidarité, insertion et égalité des chances

0,4

0,6

0,5

Point fonction publique

0,1

0,25

0,2

Total

4,0

7,2

5,6

Marge liée à la sous-consommation des crédits*

– 0,8

– 0,8

– 0,8

Total sur « norme zéro valeur »

3,2

6,4

4,8

* Cette marge statistique résulte d’une hypothèse de sous-consommation des crédits, estimée à 800 millions d’euros en 2016, qui permet de gager spontanément une partie des dépassements constatés en cours de gestion.

Source : Cour des comptes.

Les risques identifiés par la Cour des comptes portent principalement sur les missions :

– Travail et emploi, du fait du plan d’urgence pour l’emploi et la dynamique des contrats aidés ;

– Défense, en raison de la sous-estimation récurrente en loi de finances initiale du coût des opérations extérieures ;

– Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, du fait des refus d’apurement communautaire ;

– Solidarité, insertion et égalité des chances, du fait de la dynamique du taux de recours ;

– Enseignement scolaire, en raison de revalorisations catégorielles.

2. Les dépenses des organismes divers d’administration centrale (ODAC)

La progression en valeur de la dépense des ODAC est fixée à 1,7 % par le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019. Elle intègre une diminution des décaissements des opérateurs au titre du programme d’investissements d’avenir (PIA), à hauteur de 400 millions d’euros. Cette diminution des décaissements a été présentée par le Gouvernement comme une mesure de compensation du plan d’urgence pour l’emploi.

L’exercice 2016 est marqué par un accroissement du champ des taxes plafonnées de 3,5 milliards d’euros. Par ailleurs, la contribution au service public de l’électricité (CSPE) a été intégrée au budget de l’État (38), cette dépense dynamique ne pèsera donc plus sur le niveau de dépenses des ODAC.

3. Les dépenses des administrations de sécurité sociale

Le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 prévoit une progression en valeur des dépenses des administrations de sécurité sociale de 0,5 %. Cette évolution intègre d’importantes mesures de périmètre résultant principalement de la montée en charge du pacte de responsabilité et de solidarité. Ainsi, les organismes de sécurité sociale subissent en 2016 une nouvelle perte de recettes évaluée à 5,3 milliards d’euros, compensée essentiellement par le budget de l’État (à hauteur de 5,1 milliards d’euros).

PERTES DE RECETTES POUR LES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (2016)

(en milliards d’euros)

Création d’un nouvel abattement à l’assiette de C3S*

1

Extension du taux réduit de cotisations patronales d’allocations familiales

3,075

Mesures adoptées au sein de la loi croissance, activité et égalité des chances économiques

0,193

Compensation de la disparition progressive de la recette issue de la mesure caisse de congés payés

1,02

Total

5,288

* Contribution sociale de solidarité des sociétés.

Source : étude d’impact annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Les mesures de compensation prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (39) sont les suivantes.

MESURES DE COMPENSATION DES PERTES DE RECETTES
DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (2016)

(en milliards d’euros)

Transfert à l’État de l’allocation de logement familiale (ALF)

4,691

Prise en charge de la protection juridique des majeurs

0,390

Compensation liée à la création de l’ARFS*

0,060

Financement d’emplois à la charge des organismes de sécurité sociale

0,005

Augmentation de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale

0,142

Total

5,288

* Aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens travailleurs migrants.

Source : étude d’impact annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

La Cour des comptes relève qu’à périmètre constant (sans les mesures de périmètre précédemment présentées) la progression des dépenses des administrations de sécurité sociale s’élèverait à 1,3 % en 2016 (40).

Le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 prévoit des économies complémentaires pour compenser les effets d’une inflation plus faible, à hauteur d’un milliard d’euros sur les dépenses de santé et de protection sociale. Le détail de ces économies complémentaires est le suivant :

– 500 millions d’euros, du fait d’un effet de base favorable (les dépenses 2015 du régime général ont été plus faibles que prévu) ;

– 150 millions d’euros au titre de la réduction des coûts de gestion administrative ;

– 150 millions d’euros issus de la lutte contre la fraude ;

– 100 millions d’euros d’économies de constatation sur les prestations familiales.

La faible inflation constatée au cours du premier semestre 2016 a pour effet de limiter le niveau de dépenses des organismes de sécurité sociale. Les prestations de la branche famille ont été revalorisées seulement de 0,1 % le 1er avril 2016, les prestations des régimes de base de retraite ne le seront que faiblement en octobre prochain (41). Sous réserve d’un objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) respecté – fixé à un niveau historiquement faible de 1,75 % – la Cour des comptes considère que les dépenses des régimes de sécurité sociale pourraient être « en ligne avec la prévision du Programme de stabilité ». Le Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie a estimé le 27 mai dernier que l’ONDAM fixé pour 2016 devrait pouvoir être respecté (42).

En revanche, l’échec des négociations concernant une nouvelle convention relative à l’indemnisation du chômage le 16 juin dernier ne devrait pas permettre d’obtenir l’économie de 800 millions d’euros en 2016 inscrite dans le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 (1,6 milliard d’euros d’économies attendues en année pleine) (43).

4. Les dépenses des collectivités locales

Les dépenses des collectivités locales devraient progresser de 1,2 % en 2016, après une baisse de 1,3 % en 2015 et une stabilité en 2014 (+ 0,2 %). Le suivi infra-annuel de ces dépenses est difficile, cependant la Cour des comptes note que « les évolutions retenues par le Gouvernement apparaissent plausibles » (44).

II. UNE MAÎTRISE POURSUIVIE DES DÉPENSES PUBLIQUES PRÉVUE DE 2017 À 2019

A. UN RYTHME D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE IDENTIQUE EN 2017

Comme en 2016, le taux de croissance de la dépense publique en valeur, hors crédits d’impôt, devrait être de 1,1 % en 2017, selon le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019. Il s’agit d’un taux d’évolution sensiblement abaissé par rapport à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (45), qui prévoyait un taux de 1,9 % en 2017.

Toutefois, le Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques prévoit un relèvement de l’objectif de dépenses en 2017 par rapport au programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, à hauteur de 6,8 milliards d’euros. Les crédits de l’État seront relevés d’environ 5,6 milliards d’euros et la baisse des concours de l’État aux collectivités territoriales sera réduite de 1,2 milliard d’euros.

ÉCART À FINANCER PAR RAPPORT AU PROGRAMME DE STABILITÉ
POUR L’ANNÉE 2017

(en milliards d’euros)

Relèvement des crédits de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales

5,6

Collectivités territoriales

1,2

Dont réduction de moitié de la contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques

1

Dont abondement du fonds de soutien à l’investissement

0,2

Total

6,8

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, pages 13 et 14.

Le relèvement des dépenses sur le périmètre de l’État en 2017 résulte du financement des priorités du Gouvernement, à hauteur de :

− 2 milliards d’euros en faveur de la priorité pour l’emploi (notamment le plan d’urgence pour l’emploi et le prolongement de la prime à l’embauche en 2017 annoncé récemment par le Président de la République (46)) ;

− 2 milliards d’euros en faveur de la priorité pour la sécurité (renforcement des moyens de la défense, de la police, de la gendarmerie nationale et de la justice) ;

− 3 milliards d’euros en faveur de l’éducation et de la jeunesse (renforcement des moyens de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et du service civique).

Au niveau des dépenses de l’État, ces moyens supplémentaires seront compensés en 2017, selon le rapport du Gouvernement :

− pour partie par des économies réalisées sur les ministères non prioritaires ;

− et par la baisse spontanée de 1,1 milliard d’euros du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne.

Au total, après ces mesures de compensation, les crédits de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales, sont relevés d’environ 5,6 milliards d’euros par rapport au niveau planifié à l’occasion du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

S’agissant des concours aux collectivités territoriales, le Président de la République a annoncé le 2 juin dernier, lors du congrès des maires et présidents d’intercommunalité de France, deux mesures :

− une diminution de moitié de la contribution au redressement des finances publiques demandée aux communes et intercommunalités pour un milliard d’euros ;

− l’abondement du fonds de soutien à l’investissement à hauteur de 200 millions d’euros.

Au total, la baisse des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales sera réduite en 2017 de 1,2 milliard d’euros par rapport au niveau prévu dans le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019. Cette baisse des dotations s’élèvera ainsi à 2,8 milliards d’euros par rapport aux crédits votés pour 2016 en loi de finances initiale.

Le Gouvernement prévoit une compensation équivalente de ces mesures à financer, détaillée dans le prochain projet de loi de finances pour 2017.

MESURES DE FINANCEMENT ANNONCÉES POUR L’ANNÉE 2017

(en milliards d’euros)

Décalage des mesures en faveur des entreprises

4,2

Surcroît de rendement de la lutte contre la fraude

1,4

Baisse du coût des contentieux fiscaux

0,7

Réduction de la charge de la dette anticipée

0,5

Total

6,8

Source : Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, pages 13 et 14.

In fine, la dépense totale de l’État, hors charge de la dette et pensions, devrait augmenter de 3,3 milliards d’euros par rapport aux crédits prévus pour 2016 en loi de finances initiale pour 2016. Le tableau suivant synthétise les deux présentations proposées par le Gouvernement dans le Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, qui fait alternativement référence aux prévisions 2017 du programme de stabilité et aux crédits prévus pour 2016 en loi de finances initiale pour 2016.

ÉCARTS DE DÉPENSES 2017

(en milliards d’euros)

Écart de dépenses

Par rapport aux dépenses prévues pour 2017 dans le programme de stabilité

Par rapport aux dépenses prévues pour 2016 par la loi de finances initiale pour 2016

Crédits de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales

+ 5,6

+ 6,1

Dotations aux collectivités territoriales

+ 1,2

– 2,8

Total

+ 6,8

+ 3,3

Source : commission des finances, d’après le Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques.

B. UNE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE MAINTENUE EN 2018 ET 2019

La dépense publique en valeur, hors crédits d’impôt, devrait progresser de 1,4 % en 2018 et de 1,8 % en 2019. Cette trajectoire s’inscrit dans une prévision de remontée progressive du taux d’inflation et des taux d’intérêt.

PRÉVISIONS DES TAUX D’INFLATION ET TAUX D’INTÉRÊT

(en pourcentage)

Indicateur

2018

2019

Taux d’inflation

1,40

1,75

Taux courts (BTF 3 mois)

0,70

1,50

Taux longs (OAT à 10 ans)

2,75

3,50

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Cependant, la Cour des comptes relève que ce scénario signifie que la dépense publique, hors charge d’intérêt et hors crédits d’impôt, devrait diminuer en volume en 2018 et 2019. Elle juge ces prévisions « ambitieuses », les mettant en parallèle avec le taux de croissance moyen de la dépense en volume établi à 1 % depuis 2012.

En outre, la France pourrait être confrontée au cours des exercices 2018 ou 2019 à des dépenses nouvelles, comme l’illustre par exemple le résultat du référendum sur une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (47).

FICHE 5 : LA DETTE PUBLIQUE

I. UNE DETTE PUBLIQUE EN VOIE DE STABILISATION

Le niveau de la dette publique est en voie de stabilisation en 2015 à 2 096,9 milliards d’euros, soit 96,1 % du produit intérieur brut (PIB), après 95,3 % en 2014.

TRAJECTOIRE DE L’ENDETTEMENT PUBLIC

(en % du PIB)

Fondement

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

95,2

97,1

97,7

97

95,1

92,4

Projet de loi de finances pour 2016

95,6

96,3

96,5

96,5

95,2

93,2

Programme de stabilité d’avril 2016

95,3

95,7

96,2

96,5

95,4

93,3

Endettement public constaté

95,3

96,1

-

-

Source : commission des finances.

Les engagements les plus récents du Gouvernement prévoient un niveau d’endettement plus faible que celui anticipé par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (48). En revanche, l’atteinte du niveau plafond de la dette publique a été décalée d’une année, soit en 2017. La dette publique devrait refluer à compter de l’exercice 2018.

ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE

(en % du PIB)

Source : INSEE, comptes nationaux – base 2010, à partir de 2016 programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

A. UN EXERCICE 2015 MARQUÉ PAR UNE FAIBLE PROGRESSION DE L’ENDETTEMENT PUBLIC

Au cours de l’exercice 2015, la dette publique s’est accrue seulement de 0,8 point de PIB, après une augmentation significative en 2014 de 2,9 points de PIB. Cette faible progression de l’endettement public résulte d’une reprise de l’activité en valeur (2,3 % contre 1,2 % en 2014) – effet dénominateur – et une réduction du déficit public (à 3,6 % contre 4 % en 2014) – effet numérateur. Le solde stabilisant de la dette publique (49) s’établit désormais à – 2,2 % du PIB en 2015, au lieu de – 1,1 % en 2014.

L’exercice 2015 bénéficie également d’un niveau élevé de primes à l’émission, à hauteur de 22,7 milliards d’euros. Celles-ci représentent des ressources de trésorerie limitant le besoin de financement. Ces primes résultent de l’émission d’obligations à partir de souches anciennes, offrant des taux d’intérêt faciaux plus élevés que les taux de marché. En contrepartie de l’acquisition de ces titres, les investisseurs versent à l’État une prime au moment de l’émission de ces titres, correspondant à la différence entre le taux d’intérêt facial et le taux issu de l’adjudication. Cette politique de gestion active de la dette n’entraîne pas d’augmentation du coût total de celle-ci, seulement une modification de sa répartition dans le temps.

La dette « maastrichtienne » est comptabilisée à sa valeur nominale de remboursement à échéance. Par conséquent, les émissions de titres à partir de souches anciennes sont comptabilisées en intégrant les primes à l’émission, soit à leur niveau de taux issu de l’adjudication.

La Cour des comptes relève dans son rapport (50) que la dette publique « aurait augmenté de 1,8 point de PIB en l’absence de ces primes à l’émission ». Cette appréciation apparaît surprenante car, comme l’a relevé le Gouvernement dans sa réponse au rapport de la Cour des comptes, cette pratique existe depuis 2008 en France. Elle relève de la gestion normale de la dette publique menée par l’Agence France Trésor (AFT). Les émissions à partir de souches anciennes avaient d’ailleurs représenté 40,5 % des émissions de moyen et long terme en 2011 (hors titres indexés), au lieu de 33,9 % en 2015. Ce niveau élevé de primes à l’émission résulte des conditions exceptionnelles de marché constatées en 2015, avec une partie des taux d’intérêt en territoire négatif.

Le niveau des primes à l’émission s’élève à 1 % du PIB en France, soit un niveau équivalent à d’autres États européens, comme l’Espagne (1,2 % du PIB), ou le Royaume-Uni (0,9 %).

B. UNE STABILISATION DE L’ENDETTEMENT PUBLIC PRÉVUE EN 2017

1. La progression de la dette publique très limitée en 2016

La progression de l’endettement public serait contenue à 0,4 point de PIB en 2016, soit 96,2 %. Cette évolution bénéficierait d’un approfondissement de la reprise d’activité (croissance du PIB en volume de 1,5 %) et d’une décrue du déficit public à 3,3 %. L’écart au solde stabilisant continuerait de se réduire (à 1 point de PIB), compte tenu de la conjonction de ces facteurs positifs.

La loi de finances pour 2016 a par ailleurs prévu la cession d’actifs pour 2 milliards d’euros destinée au désendettement public.

La Cour des comptes relève que les émissions de dette du premier semestre 2016 ont conduit de nouveau à d’importantes primes à l’émission, qui devraient limiter l’augmentation de la dette publique en-deçà du niveau prévu dans le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

2. La stabilisation de l’endettement public en 2017, avant un reflux à compter de 2018

En 2017, la dette publique augmenterait de 0,4 point de PIB par rapport à 2016, atteignant 96,5 % du PIB. Le déficit public s’élèverait à 2,7 % et la croissance de l’activité en valeur à 2,4 %. L’écart au solde stabilisant se réduirait à 0,4 point de PIB.

L’endettement public atteindrait donc son point haut en 2017, avant un recul à compter de 2018 à 95,4 %, soit une réduction d’un point de PIB. Cette baisse de la dette publique s’amplifierait en 2019 avec un recul de 2,1 points de PIB, portant le ratio à 93,3 %.

II. UNE FAIBLE CHARGE D’INTÉRÊT COMPTE TENU DE L’ENCOURS DE LA DETTE PUBLIQUE

A. UNE RÉDUCTION DE LA CHARGE DE LA DETTE DEPUIS 2012

Depuis 2012, la charge de la dette diminue malgré un encours en constante augmentation. Ainsi, la charge de la dette s’établit à 42,1 milliards d’euros en 2015, soit une baisse de 4,2 milliards d’euros par rapport à 2012. À l’inverse, l’encours de la dette publique s’était accru de 227,4 milliards d’euros (2 096,9 milliards d’euros au lieu de 1 869,5 milliards d’euros en 2012, selon les données de l’INSEE).

ÉVOLUTION DE LA CHARGE DE LA DETTE

(en milliards d’euros)

Charge de la dette

2012

2013

2014

2015

Exécution

46,3

44,9

43,2

42,1

Source : lois de règlement.

Cette évolution de la charge de la dette résulte de deux facteurs :

– un environnement historiquement bas des taux d’intérêt, pour partie en territoire négatif (les titres à court terme – BTF – sont ressortis en moyenne à 
– 0,19 % en 2015, les taux des titres à plus d’un an se sont établis à 0,63 %) ;

– un niveau très faible d’inflation (le taux d’inflation a été nul en 2015, il devrait s’élever à 0,1 % en 2016).

L’AFT a par exemple évalué les effets favorables de ces deux éléments pour l’exercice 2015 :

– l’absence d’inflation aurait réduit la charge de la dette de 1,4 milliard d’euros par rapport aux prévisions ;

– les conditions de financement favorables auraient permis un allégement de 700 millions d’euros.

B. UNE REMONTÉE PROGRESSIVE DE LA CHARGE DE LA DETTE ANTICIPÉE

Le Gouvernement a prévu une remontée progressive de la charge de la dette à compter de 2016, liée à une augmentation du taux d’inflation et à une normalisation de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Ainsi, la loi de finances pour 2016 (51) a prévu une charge de la dette établie à 44,5 milliards d’euros, soit une hausse de 2,4 milliards d’euros par rapport à 2015.

Cependant, le Gouvernement, dans le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, a constaté une moindre charge sur les intérêts de la dette à hauteur de 1,8 milliard d’euros pour 2016, soit une charge de la dette établie à 42,7 milliards d’euros. Le Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques prévoit pour 2017 une charge de la dette établie à 42,2 milliards d’euros inscrite au prochain projet de loi de finances. La remontée de la charge de la dette pour les années postérieures n’est pas encore certaine, comme le souligne la Cour des comptes qui considère que l’évolution des taux d’intérêt est très aléatoire (52).

PRÉVISION DE TAUX D’INFLATION ET DE TAUX D’INTÉRÊT

(en %)

Prévisions

2016

2017

2018

2019

Taux d’inflation

0,1

1

1,4

1,75

Taux courts (BTF 3 mois)

0,4

0,1

0,7

1,50

Taux longs (OAT à 10 ans)

1*

1,75*

2,75

3,50

* Nouvelle prévision issue du rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques.

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Le niveau de la charge de la dette est susceptible d’augmenter en raison d’un cumul de trois facteurs :

– un accroissement de l’encours de la dette en valeur ;

– une augmentation du taux d’inflation ;

– une remontée des taux d’intérêt.

La Cour des comptes a estimé le coût budgétaire d’une remontée des taux d’intérêt plus rapide que les prévisions contenues dans le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019. Elle conclut qu’un accroissement d’un point de tous les taux d’intérêt représenterait une charge supplémentaire pour le budget de l’État de 2,1 milliards d’euros la première année, 4,9 milliards d’euros la deuxième et 6,9 milliards d’euros la troisième. À l’horizon de dix ans, cette charge d’intérêts supplémentaire s’élèverait à 16,5 milliards sur le budget de l’État et à 20 milliards d’euros pour l’ensemble des administrations publiques.

La Rapporteure générale considère que la remontée anticipée de la charge de la dette doit surtout convaincre de la nécessité de garantir la soutenabilité de la dette publique. Le contexte macroéconomique et financier actuel ne doit pas occulter l’impératif de réduction du déficit public afin de rétablir une trajectoire de nos finances publiques viable et compatible avec une reprise dynamique de la croissance économique.

FICHE 6 : LES FINANCES LOCALES ET LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le 2 juin 2016, au congrès de l’Association des maires de France, le Président de la République a annoncé que la contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques (CRFP) serait réduite de moitié en 2017 pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Cette contribution devait s’élever à 3,67 milliards d’euros pour l’ensemble des collectivités, dont 2 milliards d’euros pour le bloc communal comme en 2016 et 2015, conformément à l’article 14 de la loi n° 2014–1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, qui fixe la trajectoire maximale suivante, pour l’ensemble des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, à périmètre constant. Parallèlement, le Président de la République a annoncé la majoration à 1,2 milliard d’euros du Fonds de soutien à l’investissement local (FSIL) en 2017.

PLAFOND FIXÉ PAR LA LPFP POUR LES CONCOURS FINANCIERS DE L’ÉTAT
AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

(en milliards d’euros courants)

2014

2015

2016

2017

Évolution 2017/2014

56,87

53,45

49,79

46,12

– 18,9 %

Source : loi de programmation pour les finances publiques 2014–2019.

Prélevée sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) des collectivités territoriales et des EPCI, qui constitue le principal concours financier de l’État, la CRFP est assise sur les recettes réelles de fonctionnement (RRF) des collectivités, constatées dans le budget principal des derniers comptes de gestion disponibles. Lors de sa séance du 25 juin 2013, le Comité des finances locales a en effet proposé que la répartition de l’effort entre les trois catégories de collectivités territoriales se fasse au prorata des recettes totales. Ainsi, la contribution est répartie au prorata des RRF au sein du bloc communal, en fonction d’un critère de ressources et de charges pour les départements et au prorata des recettes totales pour les régions. En 2016, la CRFP des communes représente 1,87 % de leurs RRF de 2014.

La réduction de la CRFP en 2017 vient répondre à une forte demande des élus et traduit la volonté du Gouvernement et de la majorité de soutenir l’investissement des collectivités et de leurs groupements, parallèlement à la réduction de leurs dépenses de fonctionnement, dans le cadre de la politique menée pour la réduction du déficit public.

I. LES RECETTES ET LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DIMINUENT CONFORMÉMENT À LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE

A. LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT AUGMENTENT DE 1,67 % EN 2015

Les dépenses de fonctionnement des collectivités ont augmenté de 1,67 % en 2015. Cette hausse est nettement moindre qu’en 2014 (+ 2,53 %). Ce ralentissement peut être attribué notamment à la faiblesse de l’inflation et à celle des prix de l’énergie, ainsi qu’à l’évolution des charges de personnel : celles-ci ont progressé moins vite en 2015 (+ 1,9 %) qu’en 2014 (+ 4,1 %).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DE L’ENSEMBLE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

Dépenses

2012

Évolution
2013/2012

2013

Évolution
2014/2013

2014

Évolution
2015/2014

2015 (1)

Dépenses totales

226,4

+ 3,5 %

234,3

– 0,2 %

233,8

+ 0,2 %

234,2

Dépenses totales hors remboursements de dette

213,3

+ 3,8 %

221,5

– 0,2 %

221,0

– 0,4 %

220,3

Dépenses de fonctionnement

158,0

+ 3,0 %

162,8

+ 2,5 %

166,9

+ 1,7 %

169,7

Dépenses de fonctionnement hors frais financiers

153,5

+ 3,1 %

158,2

+ 2,5 %

162,2

+ 1,2 %

164,1

dont achats et charges externes

30,0

+ 3,2 %

31,0

– 0,4 %

30,8

– 1,5 %

30,4

dont frais de personnel

54,9

+ 3,2 %

56,6

+ 4,1 %

59,0

+ 1,9 %

60,1

dont dépenses d’intervention

63,7

+2,7 %

65,4

+ 2,6 %

67,1

+ 1,9 %

68,4

(1) Résultats provisoires.

Source : ministère des finances.

B. LES RECETTES RÉELLES DE FONCTIONNEMENT AUGMENTENT PLUS QUE LES DÉPENSES

• Une hausse des recettes réelles de fonctionnement (RRF) de 1,73 % en 2015

Les recettes réelles de fonctionnement des collectivités et de leurs groupements ont augmenté de 1,73 % en 2015, malgré la baisse de 3,67 milliards d’euros de la DGF. Cette progression est globalement supérieure à celle des dépenses de fonctionnement des collectivités.

ÉVOLUTION DES RRF 2016/2015

(en %)

Communes

EPCI

Départements

Régions

Ensemble

1,7

2,8

1,3

2

1,73

Source : ministère des finances.

ÉVOLUTION DES RECETTES DE FONCTIONNEMENT DE L’ENSEMBLE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

Recettes

2012

Évolution 2013/2012

2013

Évolution 2014/2013

2014

Évolution 2015/2014

2015*

Évolution 2015/2012

Recettes de fonctionnement

189,0

+ 1,7 %

192,2

+ 1,0 %

194,1

+ 1,7 %

197,5

+ 4,5 %

dont impôts et taxes

113,8

+ 2,1 %

116,2

+ 3,0 %

119,6

+ 5,1 %

125,7

+10,5 %

– impôts locaux

72,3

+ 4,8 %

75,8

+ 0,8 %

76,4

+ 4,4 %

79,7

+ 10,2 %

– autres impôts et taxes

41,5

– 2,6%

40,4

+ 7,0 %

43,2

+ 6,3 %

46,0

+ 10,8 %

dont concours de l’État

52,4

– 0,7 %

52,0

– 5,3 %

49,3

– 9,0 %

44,8

– 14,5 %

– DGF

41,2

+ 0,4 %

41,3

– 3,3 %

40,0

– 8,6 %

36,5

– 11,4 %

– autres dotations

3,7

+ 0,3 %

3,7

– 32,3 %

2,5

– 35,8 %

1,6

– 56,8 %

– péréquation et compensations fiscales

7,5

– 7,5 %

7,0

– 3,0 %

6,7

– 1,3 %

6,7

– 10,7 %

*Résultats provisoires

Source : ministère des finances.

● L’évolution des dotations et subventions de fonctionnement versées par l’État aux collectivités reflète leur contribution au redressement des finances publiques

DOTATIONS ET SUBVENTIONS DE FONCTIONNEMENT

(montants votés en loi de finances initiale en millions d’euros)

Transfert

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/2012

Dotation globale de fonctionnement totale

41 390

41 505

40 121

36 607

33 222

– 19,7 %

Dotation spéciale instituteurs

24

22

21

19

17

– 29,2 %

Dotation élu local

65

65

65

65

65

0 %

Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

500

500

500

500

500

0 %

Total

41 979

42 092

40 707

37 191

33 804

– 19,5 %

Source : direction générale des collectivités locales (DGCL).

● L’augmentation des recettes fiscales en 2015 ne relève que partiellement de la hausse des taux

La hausse des recettes réelles de fonctionnement s’explique par une hausse du produit de la fiscalité locale, laquelle résulte davantage du dynamisme des bases que de la politique de taux décidée par les collectivités.

S’agissant du produit des impôts directs locaux, il augmente de 2,6 milliards d’euros en 2015. Cette croissance résulte pour moitié de la variation physique des bases, pour un quart de la revalorisation forfaitaire annuelle des bases prévue par l’article 63 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 (521 millions d’euros) et pour un quart de la hausse des taux (726 millions d’euros). La hausse des taux de taxe d’habitation et de taxe foncière en 2015 est trois fois moindre qu’en 2009, seconde année du mandat municipal précédent.

PRODUITS D’IMPOSITION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
ET DE LEURS GROUPEMENTS

(en millions d’euros)

Impôt

2012

2013

2014**

2015***

Communes

       

Taxe d’habitation

13 403

13 785

13 864

14 616

Taxe sur le foncier bâti

14 813

15 313

15 684

16 263

Taxe sur le foncier non bâti (1)

793

805

811

830

Cotisation foncière des entreprises (CFE)

1 466

1 353

1 175

1 181

Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) (2)

1 063

1 080

899

969

Imposition forfaitaire pour les entreprises de réseaux (IFER)

148

143

128

129

Taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM)

134

129

105

104

Secteur communal : commune + groupements (3)

       

Taxe d’habitation

19 525

20 248

20 556

21 679

Taxe sur le foncier bâti

15 776

16 356

16 820

17 507

Taxe sur le foncier non bâti (1)

982

1 002

1 014

1 040

CFE

6 662

6 935

6 974

7 234

CVAE (2)

4 024

4 325

4 218

4 406

IFER

488

509

533

548

TASCOM

648

708

712

737

Départements

       

Taxe sur le foncier bâti

11 581

12 194

12 492

12 922

CVAE (2)

7 363

7 916

7 720

8 064

IFER

239

248

260

263

Régions

       

CVAE (2)

3 795

4 081

3 979

4 157

IFER

643

655

655

657

Toutes collectivités

       

Taxe d’habitation

19 525

20 248

20 556

21 679

Taxe sur le foncier bâti

27 357

28 549

29 312

30 429

Taxe sur le foncier non bâti (1)

982

1 002

1 014

1 040

CFE

6 662

6 935

6 974

7 234

CVAE (2)

15 182

16 323

15 917

16 627

IFER

1 370

1 412

1 447

1 467

TASCOM

648

708

712

737

** Instauration de la fiscalité directe locale de droit commun à Mayotte.

*** Les impôts économiques de la métropole de Lyon (244,20 millions d’euros pour le foncier bâti, 383,30 millions d’euros pour la CVAE et 6,90 millions d’euros pour les IFER) sont ventilés entre le secteur communal et le niveau départemental.

(1) Y compris la taxe additionnelle sur le foncier non bâti à partir de 2011.

(2) CVAE due + CVAE dégrevée.

(3) Groupements : EPCI à fiscalité propre et syndicats intercommunaux à contributions fiscalisées.

Source : direction générale des finances publiques (DGFiP), fichier de recensement des éléments d’imposition à la fiscalité directe locale (REI) ; calculs DGCL.

TAUX MOYENS D’IMPOSITION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
ET DE LEURS GROUPEMENTS

(en %)

Impôt

2012

2013

2014 (3)

2015(4)

Communes

 

Taxe d’habitation

16,36

16,26

16,15

16,31

Taxe sur le foncier bâti

18,82

18,82

18,84

19,06

Taxe sur le foncier non bâti (1)

41,65

41,68

41,27

41,75

Cotisation foncière des entreprises

20,28

19,84

19,50

19,61

Secteur communal : communes + groupements (2)

Taxe d’habitation

23,84

23,88

23,95

24,19

Taxe sur le foncier bâti

20,04

20,11

20,20

20,52

Taxe sur le foncier non bâti (1)

48,79

48,93

48,53

49,15

Cotisation foncière des entreprises

25,59

25,69

25,76

25,95

Départements

       

Taxe sur le foncier bâti

14,92

15,20

15,21

15,34

(1) Non compris la taxe additionnelle instaurée en 2011 et qui ne donne pas lieu à un vote de taux.

(2) Groupements : EPCI à fiscalité propre et syndicats intercommunaux à contributions fiscalisées.

(3) 2014 : année de l’instauration de la fiscalité directe locale de droit commun à Mayotte.

(4) 2015 : le taux moyen du foncier bâti départemental a été calculé en incluant les bases et les produits de la métropole de Lyon.

Source : DGFiP, REI ; calcul DGCL.

● Le montant des compensations d’exonérations fiscales diminue depuis 2012, celui des dégrèvements augmente et le coût restant à la charge des collectivités est mal connu

Le coût des exonérations de fiscalité directe locale est partagé entre l’État et les collectivités territoriales et leurs groupements. Le coût des exonérations décidées sur délibération des collectivités est normalement à leur charge. Celui des exonérations obligatoires prévues la loi est partiellement pris en charge par l’État, mais le taux de compensation diminue souvent avec le temps. En effet, la plupart des compensations sont calculées sur la base de taux figés, afin de ne pas mettre à la charge de l’État le coût de la politique de taux des collectivités. De plus, certaines compensations font l’objet d’une minoration dont l’ampleur est prévue en loi de finances, afin de financer notamment l’augmentation de la péréquation dite verticale (dotation de solidarité urbaine et dotation de solidarité rurale au sein de la dotation globale de fonctionnement).

Si le montant des compensations d’exonérations prises en charge par l’État, en diminution de 18,6 % depuis 2012, et celui des dégrèvements, en hausse de 9 %, sont connus, le coût total des exonérations restant à la charge des collectivités au niveau national, plusieurs fois demandé par la Rapporteure générale, ne lui a pas été communiqué.

COMPENSATIONS D’EXONÉRATIONS ET DE DÉGRÈVEMENTS LÉGISLATIFS

(montants votés en loi de finances initiale en millions d’euros)

Compensation

2012

2013

2014

2015

2016

Compensation des pertes de contribution économique territoriale (CET) et de redevances des mines

59

52

25

25

25

Dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle (DUCSTP)

447

370

292

193

163

Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale

1 848

1 831

1 751

1 826

1 637

Dotation pour transferts de compensation d’exonération de fiscalité directe locale

875

814

744

655

629

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants

 

4

4

4

4

Dotation de compensation de la réforme de la fiscalité à Mayotte

   

83

83

83

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

     

7

7

Compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport

       

79

Compensations d’exonérations

3 229

3 071

2 899

2 793

2 627

Coût des exonérations restant à la charge des collectivités territoriales

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

Contrepartie de divers dégrèvements législatifs

10 310

9 805

9 744

10 612

11 241

Total

13 539

12 876

12 643

13 405

13 868

Source : DGCL.

C. L’IMPACT DE LA BAISSE DES DOTATIONS EST ATTÉNUÉ PAR LA HAUSSE DE LA PÉRÉQUATION, EN PARTICULIER POUR LE BLOC COMMUNAL

La CRFP est prélevée sur la part forfaitaire de la DGF. Pour chaque catégorie de collectivités, et en particulier pour le bloc communal, la hausse des dotations de péréquation verticale, renforcée par la péréquation horizontale, permet d’atténuer les effets de la CRFP pour les collectivités les plus fragiles.

Pour la dotation de solidarité urbaine (DSU), dont la progression depuis 2012 est la plus forte, la dotation moyenne s’élève en 2016, hors garantie, à 70,26 euros par habitant pour les communes de plus de 10 000 habitants et à 100,19 euros pour les communes de moins de 5 000 à 9 999 habitants.

DGF DES COMMUNES

(en millions d’euros)

Dotation

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/12

Dotation forfaitaire

13 497

13 269

12 492

10 819

8 478

– 37,2 %

DSR

844

917

1 008

1 125

1 242

+ 47,2 %

DSU

1 370

1 490

1 550

1 730

1 910

+ 39,4 %

DNP

764

774

784

794

794

+ 3,9 %

Total dotations de péréquation

2 978

3 181

3 343

3 650

3 946

+ 32,5 %

Total*

16 475

16 450

15 835

14 469

12 424

– 24,6 %

* Total y compris garanties.

Source : DGCL.

DGF DES EPCI

(en millions d’euros)

Dotation

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/12

Dotation d’intercommunalité

2 627

2 702

2 540

1 998 

1 568

– 40,3 %

Dotation de compensation

4 512

4 526

4 620

4 548

5 170

+ 14,6 %

Total*

7 139

7 228

7 160

6 546

6 738

– 5,6 %

* Total y compris garanties.

Source : DGCL.

La péréquation entre collectivités, dite « horizontale » et dont le coût pour l’État est nul, a très fortement augmenté depuis 2012 pour le bloc communal. Le montant du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) a été multiplié par 6,7. En 2016, 55 % des territoires (EPCI et communes isolées) et 53 % de la population sont bénéficiaires nets du FPIC. Le montant prélevé moyen est de 25,34 euros par habitant, tandis que le montant reversé moyen est de 26,62 euros par habitant. L’Île-de-France contribue à hauteur de 43 % au financement du FPIC et la métropole du Grand Paris à hauteur de 33 %. Elles bénéficient respectivement de 8 % et de 4 % des montants reversés. Depuis 2012, le montant du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) a été multiplié par 1,3.

ÉVOLUTION 2012-2016 DES PRINCIPAUX FONDS DE PÉRÉQUATION HORIZONTALE
ÉVOLUTION DES MONTANTS DU FPIC

(en millions d’euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/2012

150

360

570

780

1 000

+ 566,7 %

Source : DGCL.

ÉVOLUTION DES MONTANTS DU FSRIF

(en millions d’euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/2012

210

230

250

270

270

+ 28,6 %

Source : DGCL.

II. LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT CONTINUENT DE RECULER EN 2015 TANDIS QUE L’ÉTAT RENFORCE SON SOUTIEN

A. LA BAISSE DE L’ÉPARGNE RALENTIT TANDIS QUE LES RECETTES D’INVESTISSEMENT AUGMENTENT

ÉVOLUTION DE L’ÉPARGNE ET DES RECETTES D’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

Ressource

2012

13/12

2013

14/13

2014

2015/
2014

2015 (a)

Épargne brute

31,0

– 4,9 %

29,5

– 7,7 %

27,2

+ 2,1 %

27,8

Épargne nette

17,9

– 7,1 %

16,7

– 13,5 %

14,4

– 4,1 %

13,8

Recettes d’investissement

38,4

– 0,7 %

38,1

– 2,2 %

37,3

+ 5,2 %

39,2

Recettes d’investissement hors emprunts

20,5

+ 4 %

21,3

– 1,5 %

21,0

+ 3,1 %

21,6

* dont FCTVA

4,9

+ 2,2 %

5,0

+ 6,8 %

5,3

– 5,0 %

5,1

* dont autres dotations et subventions

10,4

+ 3,5 %

10,8

+ 0,8 %

10,9

– 2,4 %

10,6

(a) Résultats provisoires.

Source : ministère des finances.

B. LA BAISSE DE L’INVESTISSEMENT LOCAL SE POURSUIT

L’investissement des collectivités accuse en 2014 et 2015 une baisse plus marquée que lors des cycles électoraux antérieurs. Celle-ci atteint 7,8 % en 2014 et 6,6 % en 2015 hors remboursements d’emprunts. Elle atteint 6,4 % en 2014 et 3,6 % en 2015, y compris remboursements d’emprunts. Toutefois, le ministère des finances a constaté une hausse particulièrement marquée (+ 15 %) des dépôts des collectivités sur le compte du Trésor (de 30,6 milliards à 35,1 milliards d’euros).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES D’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

 

Montant 2012

Évolution 2013/12

Montant 2013

Évolution 2014/13

Montant 2014

Évolution 2015/14

Montant 2015(a)

Évolution 2015/2012

Ensemble

               

Dépenses d’investissement

68,35

+ 4,6 %

71,52

– 6,4 %

66,92

– 3,6 %

64,51

– 5,62 %

Dépenses d’investissement hors
remboursements

55,28

+ 6,2 %

58,71

– 7,8 %

54,15

– 6,6 %

50,57

– 8,53 %

* dont subventions d’équipement

13,17

+ 4,2 %

13,72

– 1,4 %

13,53

– 5,1 %

12,83

– 2,53 %

* dont dépenses d’équipement

39,13

+ 7,5 %

42,07

– 9,8 %

37,94

–11,0 %

33,76

– 13,71 %

Communes

               

Dépenses d’investissement

30,99

+ 8,3 %

33,56

– 11,8 %

29,59

– 6,4 %

27,69

–10,65 %

Dépenses d’investissement hors
remboursements

25,16

+ 9,2 %

27,47

– 14,0 %

23,63

– 9,7 %

21,33

– 15,21 %

* dont subventions d’équipement

1,51

– 3,1 %

1,46

+ 4,6 %

1,53

– 18,3 %

1,25

– 17,20 %

* dont dépenses d’équipement

22,59

+ 10,4 %

24,94

– 15,2 %

21,15

– 13,4 %

18,31

– 18,96 %

EPCI

               

Dépenses d’investissement

11,19

+ 7,3 %

12,01

– 2,9 %

11,66

– 4,7 %

10,48

– 6,35 %

Dépenses d’investissement hors
remboursements

9,45

+ 8,3 %

10,24

– 4,4 %

9,79

– 9,3 %

8,42

– 10,93 %

* dont subventions d’équipement

1,65

+ 9,9 %

1,81

– 4,3 %

1,73

– 1,7 %

1,62

– 1,76 %

* dont dépenses d’équipement

6,94

+ 7,7 %

7,48

– 4,7 %

7,12

– 15,8 %

5,71

– 17,79 %

Départements

               

Dépenses d’investissement

15,35

– 3,5 %

14,81

– 3,9 %

14,23

– 2,6 %

14,27

– 7,09 %

Dépenses d’investissement hors
remboursements

11,87

+ 0,7 %

11,95

– 5,5 %

11,30

– 5,3 %

10,95

– 7,78 %

* dont subventions d’équipement

4,64

– 0,1 %

4,63

– 8,2 %

4,26

– 7,7 %

3,97

– 14,51 %

* dont dépenses d’équipement

6,76

+ 1,7 %

6,87

– 2,1 %

6,73

– 4,2 %

6,61

– 2,25 %

Régions

               

Dépenses d’investissement

10,80

+ 3,1 %

11,14

+ 2,8 %

11,45

+ 5,4 %

12,07

11,68 %

Dépenses d’investissement hors
remboursements

8,80

+ 2,9 %

9,06

+ 4,1 %

9,43

+ 4,7 %

9,87

12,12 %

* dont subventions d’équipement

5,37

+ 8,2 %

5,81

+ 3,4 %

6,01

– 0,1 %

6,00

11,70 %

* dont dépenses d’équipement

2,83

– 1,8 %

2,78

+ 6,0 %

2,95

+ 6,4 %

3,14

10,81 %

(a) Résultats provisoires.

Source : ministère des finances.

C. LA CAPACITÉ D’AUTOFINANCEMENT S’AMÉLIORE

En 2015, la capacité d’autofinancement des collectivités évolue globalement de façon positive. Toutefois, ce chiffre recouvre des situations très différentes selon les catégories de collectivités.

CAPACITÉ OU BESOIN D’AUTOFINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS
ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

Collectivité

2012

2013

2014

2015 (1)

Ensemble

– 3,83

– 7,97

– 5,98

– 1,18

Communes

– 0,65

– 3,57

– 1,12

+ 1,88

EPCI

– 0,97

– 1,48

– 1,30

– 0,19

Départements

– 1,02

– 1,63

– 1,41

– 0,63

Régions

– 1,18

– 1,29

– 2,15

– 2,24

(1) Données provisoires.

Source : ministère des finances.

D. LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS CONNAÎT UNE FORTE HAUSSE DEPUIS 2012

Les dotations et subventions d’équipement de l’État connaissent une forte hausse depuis 2012. Celle-ci est essentiellement imputable aux mesures prévues par les deux dernières lois de finances : majoration de 200 millions d’euros de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) en 2015, reconduite en 2016 et dotation de 800 millions d’euros pour le Fonds de soutien à l’investissement local (FSIL) en 2016, qui devraient être portées à 1,2 milliard d’euros en 2017, extension de l’éligibilité au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) des dépenses d’entretien de la voirie et des bâtiments publics ainsi que des dépenses d’infrastructures numériques dans le cadre du plan France très haut débit.

DOTATIONS ET SUBVENTIONS D’ÉQUIPEMENT DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

Dotation

LFI 2012

2012

LFI 2013

2013

LFI 2014

2014

LFI 2015

2015

LFI 2016

Évolution LFI2016/ LFI2012

Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) (AE)

616

606

616

606

616

606

815

802,5

815

+ 32,3 %

Dotation exceptionnelle de soutien à l’investissement (AE)

               

800

 

Fonds de compensation pour la TVA

5 507

5 492

5 627

5 549

5 769

5 917

5 961

5 589

6 047

+ 9,8 %

Produit des amendes
forfaitaires de la circulation

662

595

687

673

680

633,5

667

641

672

+ 1,5 %

Dotation politique de la ville (ex-DDU)

50

50

75

75

100

100

100

100

100

+ 100 %

Total

6 835

6 743

7 005

6 903

7 165

7 256,5

7 543

7 132,5

8 434

+ 23,4 %

Source : ministère des finances.

III. LA STABILITÉ DES TRANSFERTS FINANCIERS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS DE 2012 À 2016

Dans son rapport sur Le budget de l’État en 2015, résultats et gestion, la Cour des Comptes constate la stabilité des transferts financiers de l’État aux collectivités de 2012 à 2016.

Si les prélèvements sur recettes de l’État (PSR) au profit des collectivités territoriales diminuent conformément à la programmation pluriannuelle des finances publiques, cette diminution est compensée par une progression des autres transferts financiers.

ÉVOLUTION DES TRANSFERTS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

(en milliards d’euros)

Transfert

2013

2014

LFI 2015

2015

PSR au profit des collectivités territoriales

55,6

54,4

50,7

50,5

Mission Relations avec les collectivités territoriales

2,6

2,6

2,7

2,7

Dégrèvements d’impôts locaux

10,5

10,7

10,6

10,9

Autres missions budget général

3,3

2,5

2,5

2,7

Comptes d’affectation spéciale

1,4

1,5

2,2

2,1

Fiscalité transférée

26,4

27,9

28,8

29,6

Frais de gestion rétrocédés

2,2

3,7

3,9

4,3

Transferts de l’État aux collectivités territoriales

101,9

103,3

101,3

102,8

Source : Cour des comptes (données : direction du budget).

La progression de la fiscalité résulte notamment du dynamisme des droits de mutation à titre onéreux du fait de la reprise du marché immobilier et de l’augmentation des taux décidée par certains départements et de l’augmentation des affectations de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) aux régions pour financer l’apprentissage et la formation professionnelle qui viennent, pour une part, se substituer à des crédits budgétaires existants en 2014 à hauteur de 338 millions d’euros.

IV. LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS : UNE HAUSSE DE 9,8 % DE LA DETTE DEPUIS 2012

ENDETTEMENT DES COLLECTIVITÉS ET DE LEURS GROUPEMENTS À FISCALITÉ PROPRE

(en milliards d’euros)

Dette

2012

2013

2014

2015(a)

Évolution de la dette

       

* remboursements de dette

13,1

12,8

12,8

13,9

* emprunts

17,9

16,8

16,3

17,6

* emprunts - remboursements de dette

4,9

4,0

3,5

3,7

Dette totale au 31/12

132,8

137,5

141,9

145,8

Ratios

       

Taux d’épargne de gestion

18,8 %

17,7 %

16,4 %

16,9 %

Taux d’épargne brute

16,4 %

15,3 %

14,0 %

14,1 %

Dette au 31/12 / recettes de fonctionnement

70,3 %

71,5 %

73,1 %

73,9 %

Annuité / recettes de fonctionnement

9,3 %

9,0 %

9,0 %

9,9 %

Source : ministère des finances.

Selon les indications transmises à la Rapporteure générale, le nombre de communes suivies dans le réseau d’alerte des ministères de l’intérieur et des finances est le suivant.

NOMBRE DE COMMUNES INSCRITES DANS LE RÉSEAU D’ALERTE

Campagne 2012

Campagne 2013

Campagne 2014

Campagne 2015

1 646

1 466

1 262

1 691

Source : ministère des finances.

Font l’objet de ce suivi les communes dont quatre ratios sont particulièrement dégradés. Ceux-ci concernent l’autofinancement courant, la rigidité des charges structurelles, l’endettement et la mobilisation du potentiel fiscal.

FICHE 7 : LES SUBVENTIONS DE L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES POUR SOUTENIR LEURS INVESTISSEMENTS

I. LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS CONNAÎT UNE FORTE HAUSSE DEPUIS 2012

Les dotations et subventions d’équipement de l’État connaissent une forte hausse depuis 2012. Celle-ci est essentiellement imputable aux mesures prévues par les deux dernières lois de finances : majoration de 200 millions d’euros de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) en 2015, reconduite en 2016 et dotation de 800 millions d’euros pour le Fonds de soutien à l’investissement local (FSIL) en 2016, qui devraient être portées à 1,2 milliard d’euros en 2017, extension de l’éligibilité au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) des dépenses d’entretien de la voirie et des bâtiments publics ainsi que des dépenses d’infrastructures numériques dans le cadre du plan France très haut débit.

DOTATIONS ET SUBVENTIONS D’ÉQUIPEMENT DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

Dotation

LFI 2012

2012

LFI 2013

2013

LFI 2014

2014

LFI 2015

2015

LFI 2016

Évolution LFI2016/ LFI2012

Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) (AE)

616

606

616

606

616

606

815

802,5

815

+ 32,3 %

Dotation exceptionnelle de soutien à l’investissement (AE)

               

800

 

Fonds de compensation pour la TVA

5 507

5 492

5 627

5 549

5 769

5 917

5 961

5 589

6 047

+ 9,8 %

Produit des amendes
forfaitaires de la circulation

662

595

687

673

680

633,5

667

641

672

+ 1,5 %

Dotation politique de la ville (ex-DDU)

50

50

75

75

100

100

100

100

100

+ 100 %

Total

6 835

6 743

7 005

6 903

7 165

7 256,5

7 543

7 132,5

8 434

+ 23,4 %

Source : ministère des finances.

La carte suivante présente l’évolution moyenne, par département, des montants des dotations et subventions d’équipement versées par l’État aux communes et aux EPCI entre 2012 et 2015 (53). Ces subventions sont constituées de la DETR, du FCTVA, des amendes de police et de la dotation politique de la ville (DPV). Elles n’incluent pas le programme Territoires à énergie positive pour la croissance verte (TEP-CV), doté de 250 millions d’euros en 2015 comme en 2016, qui a été mis en place par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Près des trois quarts des départements de métropole ont vu ces dotations et subventions, d’investissement, versées au bloc communal, augmenter. Ainsi, tous les départements apparaissant en vert (du clair au foncé) sur la carte ont connu une augmentation, entre 2012 et 2015, du montant total de subventions d’investissement versées par l’État aux communes et EPCI. Cette tendance devrait se confirmer et se renforcer en 2016 avec la mise en œuvre du Fonds de soutien à l’investissement local doté d’un milliard d’euros, qui sera prolongé en 2017 et augmenté à 1,2 milliard d’euros.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS ET SUBVENTIONS D’INVESTISSEMENT DE L’ÉTAT
AU BLOC COMMUNAL 2012-2015

© CGET 2016 - IGN GéoFla

Source : données du ministère des finances, carte réalisée par la commission des finances.

Données prises en compte : DETR (AE), FCTVA (estimations), amendes de police relatives à la circulation, DPV (ex DDU).

II. CE RENFORCEMENT DU SOUTIEN À L’INVESTISSEMENT DU BLOC COMMUNAL DOIT S’ACCOMPAGNER D’UNE RÉFORME DES DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT

Compte tenu du rôle que la dotation globale de fonctionnement (DGF) joue dans les débats actuels sur les finances publiques, tant au regard de sa contribution à leur redressement qu’à celui de sa nécessaire réforme, la Rapporteure générale a souhaité présenter l’état de la question.

L’article 150 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 qui prévoit une réforme d’ampleur de la dotation globale de fonctionnement (DGF) dans ses différentes composantes, est applicable au 1er janvier 2017. Si le projet de loi présenté par le Gouvernement prévoyait une application au 1er janvier 2016, la mise en œuvre de la réforme a été décalée en raison de la refonte de la carte intercommunale et des difficultés constatées au cours du débat budgétaire. Les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont mis à profit ce délai d’un an pour étudier des améliorations possibles. Elles ont fait le choix d’une méthode de travail originale, en constituant deux groupes de travail, qui ont mené une réflexion commune, afin de présenter des analyses et des propositions, étayées par des simulations pluriannuelles.

Le groupe de travail de l’Assemblée nationale a été constitué le 9 mars 2016. Nos collègues Christine Pires Beaune et Véronique Louwagie, qui ont été désignées rapporteures d’information, ont présenté le 29 juin 2016 un premier bilan et des propositions visant à lever les quatre points de blocage de l’article 150 précité. Ces points de blocage avaient été relevés par la Rapporteure générale lors de la réunion constitutive du groupe de travail.

A. DES SOLUTIONS POUR LEVER LES PRINCIPAUX POINTS DE BLOCAGE DE L’ARTICLE 150

1. Supprimer les « DGF négatives » en élargissant le support de la CRFP : le « rebasage » de la DGF pour plus de justice

Le prélèvement de la contribution des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au redressement des finances publiques a fait apparaître le problème dit « des DGF négatives ». La contribution au redressement des finances publiques (CRFP) est assise sur les recettes réelles de fonctionnement des communes et des EPCI, à hauteur de 1,87 % en 2016 et de 1,84 % en 2015 pour les communes. Elle est toutefois prélevée sur la dotation forfaitaire des communes et la dotation d’intercommunalité des EPCI.

Certains d’entre eux, qui disposent de recettes autres que la DGF dans des proportions importantes, perçoivent un montant de dotation forfaitaire ou d’intercommunalité inférieur au montant de la contribution à opérer. Le solde est alors prélevé sur les compensations d’exonération de fiscalité locale. C’est le cas pour 59 communes et 58 EPCI en 2015 (pour un montant de prélèvement de 10,5 millions d’euros) et pour 168 communes et 174 EPCI en 2016 (pour un montant de 38 millions d’euros). À droit constant, 465 communes seraient concernées en 2017.

Cette situation, qui prend de l’ampleur, pose problème à plusieurs titres. Elle exonère ces communes et EPCI du financement des emplois internes et de la hausse de la péréquation, puisque celui-ci est actuellement calculé en proportion de la dotation forfaitaire ou d’intercommunalité.

La solution prévue par l’article 150 précité n’est pas satisfaisante : ces communes bénéficieraient d’une résurgence de dotation forfaitaire plafonnée à 50 % de la dotation spontanée. Par ailleurs, la CRFP due par une commune ou un EPCI ne pourrait représenter plus de 50 % de sa dotation forfaitaire ou d’intercommunalité. Les communes et EPCI ne bénéficiant pas de ce cliquet contribueraient davantage que leur CRFP initiale pour financer la CRFP totale.

Les groupes de travail proposent de faire reposer la CRFP sur d’autres vecteurs que la DGF et de définir une dotation de référence pour chaque commune ou EPCI. L’élargissement résulterait de la fusion de la DGF et de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) d’une part, du transfert aux EPCI de la DCRTP des communes et de la compensation part salaire (CPS) des communes, quel que soit le statut fiscal de l’EPCI dont elles sont membres. Pour les communes isolées et les EPCI, le solde de CRFP serait, si nécessaire, prélevé sur l’attribution au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR). La neutralité de ce rebasage pour les communes et les EPCI serait assurée à travers des attributions de compensation.

2. Garantir une réforme lisible : des effets identifiables, des simulations pluriannuelles, une transition autofinancée

● Un « rebasage » de la DGF permettrait de mesurer l’impact spécifique de la réforme

L’architecture de la DGF prévue par l’article 150 de la loi de finances pour 2016 entraîne une consolidation de l’impact de la réforme et de celui de la CRFP. Le rebasage initial de la DGF, à partir de la dotation forfaitaire 2014 actualisée 2017, et déduction faite des CRFP successives, permettrait de mesurer les seuls effets de la réforme.

Ce mécanisme serait également budgétairement neutre pour l’État.

NEUTRALITÉ BUDGÉTAIRE POUR L’ÉTAT DU REBASAGE DE LA DOTATION FORFAITAIRE

Source : groupe de travail sur la DGF des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat.

● Des simulations pluriannuelles tenant compte des nouveaux périmètres intercommunaux

L’absence de simulations pluriannuelles de l’impact du projet de loi de finances pour 2016 s’est avérée problématique. Compte tenu de l’annonce, par le Président de la République, le 2 juin 2016 au Congrès des maires, d’un nouveau report de la réforme d’ensemble de la DGF, les groupes de travail de l’Assemblée nationale et du Sénat n’ont pas souhaité présenter de scénario chiffré détaillé, mais l’outil d’analyse de données dont ils se sont dotés a permis d’étayer les différentes étapes de leur réflexion. Tout projet de réforme, gouvernemental ou parlementaire, devra le moment venu être accompagné de simulations permettant d’apprécier les équilibres pluriannuels, comme de réaliser des analyses par catégories de territoires préalablement à son adoption.

● La cible de la réforme devrait être atteinte en dix ans

L’article 150 précité prévoit plusieurs mécanismes de garantie (la dotation forfaitaire ne peut évoluer de plus de 5 % par an), ainsi qu’un coefficient d’ajustement. La somme des dotations forfaitaires spontanées calculées pour chaque commune est égale à 7,3 milliards d’euros, alors que la masse totale à répartir au titre de la dotation forfaitaire (avant financement de la péréquation et CRFP) s’élève à 10,1 milliards d’euros. La différence est partagée entre les communes au prorata de leur dotation forfaitaire spontanée, ce qui revient à appliquer un coefficient de majoration proportionnel et unique à toutes les dotations forfaitaires des communes. Les effets de la réforme sont différés : 25 251 communes percevraient un montant de DGF (hors CRFP) supérieur la première année. En 2019, si la réforme avait été appliquée dès 2016, 23 % des communes de 5 000 à 100 000 habitants se verraient encore appliquer le mécanisme de transition pour plus de dix ans.

Afin de garantir à toutes les communes et à tous les EPCI des perspectives financières prévisibles, les groupes de travail proposent que la cible de la réforme soit atteinte en dix ans.

● Le lissage de la réforme doit être autofinancé

Le « tunnel » de plus ou moins 5 % proposé par l’article 150 précité avait trois défauts : les garanties n’étaient pas automatiquement financées par les écrêtements, ce qui rendait nécessaire le maintien d’une composante « majoration et tunnel » dans la dotation forfaitaire ; une commune dont la dotation aurait dû à terme augmenter de 50 % avait le même gain la première année qu’une commune dont la dotation aurait dû à terme augmenter de 5 % ; la réforme n’était entièrement mise en œuvre qu’au bout de quarante ans.

Il est proposé de mettre en place une transition progressive sur dix ans : la première année, la réforme serait appliquée sur 10 % du montant total, puis sur 20 %, etc.

3. Des dotations de centralité indépendantes pour les communes et les EPCI : la fin de la « puissance 5 »

● Une dotation de centralité pour les seules communes

L’article 150 précité instaure une dotation forfaitaire des communes reposant sur trois piliers : une dotation de base identique pour toutes les communes (montant de 75,72 euros par habitant), une dotation de ruralité pour les communes ayant la plus faible densité et une dotation de centralité affectée aux territoires intercommunaux, partagée entre les EPCI et leurs communes membres.

Le montant de la dotation de centralité se serait élevé en 2016 à 2,3 milliards d’euros (653 millions d’euros pour les EPCI et 1,65 milliard d’euros pour les communes).

Cette dotation de centralité serait répartie au sein de chaque ensemble intercommunal en fonction du coefficient d’intégration fiscale (CIF) dans la limite de 0,4 puis entre les communes membres en fonction de leur poids démographique porté à la puissance 5. Ces dispositions conduiraient à affecter aux communes-centres des EPCI la quasi-totalité de la part communale de la dotation.

C’est pourquoi il est proposé de maintenir les trois enveloppes proposées pour la dotation forfaitaire des communes, tout en remaniant profondément la dotation de centralité.

La dotation de base demeure calculée à partir d’un montant par habitant unique, quelle que soit la population de la commune.

La dotation de ruralité serait toujours répartie en fonction de la sous-densité de la commune.

Deux enveloppes distinctes seraient déterminées nationalement pour la centralité, l’une destinée aux communes – la dotation de centralité – et une destinée aux EPCI – la dotation territoriale. La répartition entre communes de la dotation de centralité ne ferait plus appel à la « puissance 5 », critère inadapté aux territoires polycentrés. Elle serait répartie en fonction de la population pondérée par un coefficient logarithmique majoré en fonction du poids démographique de la commune dans le département pour prendre en compte les charges des communes les plus peuplées.

S’y ajouterait une enveloppe indépendante correspondant à la part « bourg-centre » de la dotation de solidarité rurale (DSR), qui prend également en compte les charges de centralité mais en zone rurale.

● Une dotation communautaire attribuée sur des critères territorialisés mais réservée aux EPCI

L’article 150 précité, qui fusionne progressivement la dotation d’intercommunalité et la dotation de compensation, tout en supprimant les catégories juridiques d’EPCI, a des effets redistributifs importants pour les métropoles et les communautés urbaines.

Les groupes de travail proposent que la dotation de compensation abonde progressivement sur dix ans la dotation d’intercommunalité : les garanties dont elle se compose financeraient l’augmentation de la seconde, qui repose sur des critères objectifs. La progressivité du transfert joue le rôle d’une garantie.

La dotation d’intercommunalité serait composée de trois enveloppes (intégration, péréquation, territoriale). La dotation d’intégration pourrait reposer sur le coefficient d’intégration fiscale. La dotation de péréquation serait répartie en fonction du CIF, de l’effort fiscal agrégé et du potentiel fiscal. La dotation territoriale prendrait en compte des critères du territoire : revenu par habitant, effort fiscal, potentiel fiscal ou financier, logements sociaux, voirie, élèves scolarisés.

B. LE CHANTIER DES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION : UNE RÉPONSE AUX EFFETS CUMULÉS DE LA CRFP ET D’UNE RÉFORME DE LA DGF TELLE QUE PRÉVUE PAR L’ARTICLE 150

Les dotations de péréquation verticale représentent en 2016 un montant total de 3,95 milliards d’euros, soit 32 % de la DGF des communes. Elles comprennent :

– la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) d’un montant de 1,91 milliard d’euros ;

– la dotation de solidarité rurale (DSR) pour 1,19 milliard d’euros ;

– la dotation nationale de péréquation (DNP) pour 794 millions d’euros.

● L’augmentation des dotations de péréquation verticales permet d’atténuer l’impact de la CRFP voire de l’annuler pour les communes les plus défavorisées

Avec une application de l’article 150 précité en 2016, 5 415 communes auraient enregistré une progression de leur DGF malgré la CRFP et 31 329 communes une baisse de leur DGF. Parmi elles, 20 897 communes auraient enregistré une baisse de leur DGF inférieure ou égale à 1,84 % de leurs recettes réelles de fonctionnement. Ainsi, pour 72 % des communes, la progression de la péréquation et la réforme de la DGF du bloc communal permettraient de réduire leur CRFP.

● Un dispositif très centré sur les communes cibles qui ne permet pas de traiter les écarts modérés

Dès lors que la dotation de base absorbe les trois quarts de la dotation forfaitaire et qu’elle est répartie à l’habitant, les communes qui ne bénéficieront pas de la péréquation verticale seront pratiquement traitées de façon identique entre elles, alors que les différences de richesse peuvent être considérables.

● Face à une dotation forfaitaire prenant en compte des charges, établir des dotations de péréquation liées aux ressources

Alors que l’article 150 précité prévoit de supprimer la DNP en intégrant la masse correspondante à la DSU et à la DSR, les groupes de travail ont souhaité maintenir une dotation de péréquation générale, correspondant à la dotation de base, en miroir de la dotation forfaitaire. Deux scénarios ont été étudiés :

– la reconduction dans la DGP du montant de la DNP ;

– un fort recentrage de la DSU et de la DSR sur les communes les plus vulnérables, alimentées par les montants de la DSR cible (167 millions d’euros) et de la DSU cible cumulée (658 millions d’euros) tandis que les autres communes en difficulté bénéficieraient d’une dotation générale de péréquation (DGP), au spectre large ;

– dans les deux cas les montants de la DSR bourg-centre (440 millions d’euros) seraient cristallisés au sein de la dotation forfaitaire.

● Éviter le saupoudrage de la DSU et limiter les effets de seuil

Le groupe de travail propose de recentrer l’éligibilité à la DSU des communes de plus de 10 000 habitants des trois premiers quarts aux deux premiers tiers (soit de 751 à 667 communes) comme le prévoit l’article 150 précité.

Il conviendrait également de répartir l’augmentation annuelle de la DSU sur les 667 communes éligibles et non pas seulement sur les 250 premières, dites « cibles ». Cette répartition pourra être affectée d’un coefficient multiplicateur pour tenir compte des écarts de ressources et de charges.

La création en 2009 d’une DSU cible, comportant à l’origine les 150 premières communes classées suivant un indice synthétique puis les 250 premières, a permis un rattrapage important au bénéfice de ces communes. 85 communes « cibles » perçoivent plus de 200 euros par habitant au titre de la DSU et 10 communes plus de 390 euros par habitant en 2016. Ce mode de fonctionnement, qui allie cristallisation des augmentations annuelles et concentration de fortes augmentations (180 millions d’euros en 2015 et en 2016) sur 250 communes, ne paraît plus justifié aujourd’hui.

● Rendre plus équitable le financement de la péréquation verticale

Les « emplois internes de la DGF » (coût de l’augmentation de la population notamment) ainsi que la moitié de la hausse de la péréquation verticale sont traditionnellement financés par un prélèvement sur la dotation forfaitaire. Depuis 2015, cet écrêtement fait l’objet d’une péréquation (en fonction du potentiel fiscal par habitant) pour les communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur à 75 % du potentiel fiscal par habitant moyen et plafonné à 3 % de la dotation forfaitaire.

La dotation forfaitaire diminue du fait de la CRFP : plus une commune a de recettes réelles de fonctionnement (RRF), plus son écrêtement diminue. Les 168 communes qui n’ont plus de dotation forfaitaire ne contribuent plus du tout au financement de la hausse de la péréquation.

Il en résulte un report croissant de la charge du financement de la hausse de la péréquation verticale sur les communes dont l’écrêtement n’est pas plafonné. En 2016, d’après les chiffres de la direction générale des collectivités locales (DGCL), ce sont 51 millions d’euros qui ont ainsi été reportés, soit un tiers du total. Entre 2013 (dernière année avant la CRFP) et 2015 plus de 10 000 communes ont vu leur prélèvement augmenter plus que proportionnellement à la hausse globale du prélèvement ; pour plus de 7 000 communes, ce prélèvement a augmenté de plus de 50 % et de plus de 100 % pour 4 500 communes.

Il pourrait être envisagé de faire évoluer le plafonnement, en le supprimant ou en en augmentant progressivement le taux.

C. L’ÉCHELONNEMENT DES PROPOSITIONS DES GROUPES DE TRAVAIL

À la suite de l’annonce du report de la réforme à 2018 par le Gouvernement, le groupe de travail a proposé de remédier dès 2017 aux problèmes urgents posés par la DGF actuelle et de définir les principes pouvant constituer le socle d’une future réforme de la DGF à partir de 2018.

Dans un premier temps, dès la loi de finances pour 2017, il conviendrait de remédier à quatre problèmes posés par la DGF actuelle :

– « rebaser » la DGF en élargissant le support de la CRFP, afin notamment de supprimer les « DGF négatives » ;

– permettre un financement équitable de la péréquation verticale en réformant le dispositif de plafonnement de 3 % de l’écrêtement de la dotation forfaitaire des communes ;

– réformer la DSU pour éviter son saupoudrage et limiter les effets de seuil ;

– remédier aux effets de transfert de DGF des EPCI liés aux changements de catégories juridiques.

Dans un deuxième temps, il conviendra de fixer les principes permettant une réforme plus large de la DGF du bloc communal :

– dotation forfaitaire des communes : fixer les montants de dotation de centralité et de dotation de ruralité et faire de la dotation de base un solde ; abandonner la territorialisation de la dotation de centralité et la « puissance 5 » ; créer une dotation de consolidation pour compenser les effets de la suppression des « garanties justes » ;

– dotations de péréquation : conserver une dotation globale de péréquation ; recentrer la DSU et la DSR ; intégrer la DSR bourg-centre à la dotation forfaitaire tout en sanctuarisant son montant ;

– DGF des EPCI : envisager une DGF composée de trois parts : une dotation d’intégration, une dotation de péréquation, une dotation territoriale calculée en fonction de critères relatifs à l’ensemble intercommunal.

Enfin, il conviendra de renforcer l’articulation de la réforme de la DGF avec d’autres volets des finances locales :

– actualiser la définition de plusieurs indicateurs (potentiel fiscal, potentiel financier, effort fiscal, coefficient d’intégration fiscale) utilisés pour déterminer l’éligibilité à certaines dotations et leur répartition ;

– analyser les effets de la péréquation verticale (DSU, DSR et DNP) cumulés avec ceux du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) pour la péréquation horizontale ;

– élargir et affiner l’appréhension des charges des collectivités, qui passe souvent par des indices synthétiques et des logarithmes par l’étude de besoins de financement standard.

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PREMIER PRÉSIDENT
DE LA COUR DES COMPTES

Au cours de sa séance du mercredi 29 juin 2015, la commission a entendu M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, sur le rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques.

M. le président Gilles Carrez. Je souhaite la bienvenue à M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, qui vient nous présenter, comme chaque année, le rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques, qui vient d’être adopté par la Cour et qui est rendu public aujourd’hui.

Ce rapport est établi en application du 3° de l’article 58 de la loi organique relative aux lois de finances – LOLF – et doit servir de base à nos prochains débats sur l’orientation des finances publiques, qui auront lieu le mardi 5 juillet à seize heures en commission, puis le jeudi matin 7 juillet en séance publique.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. C’est toujours avec plaisir que je suis auditionné par votre commission. Il s’agit aujourd’hui de vous présenter le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, prévu par la LOLF afin que vous puissiez préparer du mieux possible votre débat d’orientation sur les finances publiques.

Ce rapport examine les finances publiques françaises à l’aune des objectifs fixés et des engagements pris par les pouvoirs publics. Le rôle de la Cour – je veux insister sur ce point – est d’apprécier les résultats obtenus au regard de ces objectifs et de ces engagements, lesquels ne sont en rien déterminés par la Cour.

Ce rapport complète l’analyse des finances publiques qui vous a été présentée à l’occasion de la publication d’autres rapports de la Cour – je pense notamment au rapport sur le budget de l’État en 2015. Il concerne en effet l’ensemble des administrations publiques, y compris la sécurité sociale et les administrations publiques locales. Il analyse la trajectoire d’évolution des finances publiques à l’horizon 2019. Il tient compte par ailleurs des travaux du Haut Conseil des finances publiques, notamment sur les prévisions de croissance associées au programme de stabilité.

Pour vous présenter ce rapport, j’ai à mes côtés Raoul Briet, président de chambre, qui préside la formation interchambres chargée de sa préparation, Christian Charpy, conseiller maître, contre-rapporteur de ce rapport, Éric Dubois, conseiller maître, Vianney Bourquard et Aurélia Lecourtier, conseillers référendaires, rapporteurs devant la formation collégiale.

Dans ce rapport, la Cour dresse trois constats principaux : premièrement, le mouvement de réduction du déficit public a repris en 2015, mais la situation des finances publiques de la France reste en décalage avec la moyenne de l’Union européenne ; deuxièmement, l’objectif de réduction du déficit public pour 2016, plus modeste que pour l’année précédente, est atteignable, en dépit des risques qui pèsent sur les dépenses de l’État et sur les dépenses sociales ; troisièmement, en l’état des décisions connues, l’atteinte de l’objectif 2017 est très incertaine et le respect de la trajectoire 2017-2019 des finances publiques peu réaliste.

Selon notre premier constat, la situation des finances publiques s’est donc légèrement améliorée en 2015. La Cour le reconnaît. Mais cette situation reste en décalage avec la situation de la plupart des autres pays de l’Union européenne.

Interrompu entre 2013 et 2014, le mouvement de réduction du déficit public a repris en 2015. Cette légère amélioration est plus rapide que prévu dans la loi de programmation des finances publiques : le déficit public, qui devait être de 4,1 points de PIB en 2015, a finalement été de 3,6 points de PIB. La Cour observe que cette amélioration de 0,5 point de PIB avait déjà été largement acquise en 2014, avec 0,4 point de déficit en moins que programmé.

Cette amélioration doit néanmoins être nuancée à plusieurs titres. D’une part, le déficit public reste à un niveau élevé en 2015, et sa réduction est concentrée sur les collectivités territoriales, qui ont significativement infléchi leurs dépenses de fonctionnement (+ 1,0 % en 2015 après + 2,7 % en 2014) et diminué de manière marquée leurs dépenses d’investissement pour la deuxième année consécutive. Une situation légèrement moins dégradée des comptes sociaux contribue également de manière plus marginale au résultat.

D’autre part, l’amélioration des déficits publics a bénéficié de phénomènes qui ne sont pas forcément récurrents. La modération des dépenses a en effet été facilitée par la baisse des charges d’intérêts et par la chute de l’investissement local. Or ces évolutions ne peuvent pas être considérées comme pérennes. La dette publique continue d’augmenter, ce qui conduira les charges d’intérêts à croître si les taux d’intérêt remontent. La chute de l’investissement local, qui résulte en partie du cycle électoral, devrait cesser de favoriser la baisse des dépenses en 2016.

Par ailleurs, si nous examinons, comme chaque année, la situation de nos finances publiques au regard de celle de nos voisins, plusieurs constatations s’imposent.

En premier lieu, le niveau du déficit public est toujours élevé en France, par rapport à celui de ses voisins. Seuls quatre pays de l’Union européenne conservent un déficit effectif plus dégradé que celui de la France : la Grèce, l’Espagne, le Portugal et le Royaume-Uni.

Cet écart touche également le déficit structurel. La France continue d’accuser un décalage par rapport aux autres économies européennes dans l’ajustement de ses finances publiques. Quatre pays seulement ont un déficit structurel plus élevé que celui de la France : le Royaume-Uni, l’Espagne, la Slovénie et la Belgique.

La réduction du déficit public en France, de l’ordre de 0,5 point de PIB en 2015, étant à peu près équivalente à celle observée en moyenne au sein de la zone euro et de l’Union européenne, cela signifie que la France doit poursuivre ses efforts de réformes structurelles, si elle souhaite mettre fin au décalage observé aujourd’hui avec les autres pays européens ou a minima le réduire significativement.

En deuxième lieu, les dépenses publiques en France ont continué d’augmenter en volume, à un rythme supérieur à celui de la plupart des autres pays de l’Union européenne. Si la maîtrise de la dépense fait désormais partie de la stratégie gouvernementale pour redresser les finances publiques, cette stratégie apparaît cependant moins marquée que dans d’autres pays, même si certains, comme l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne, ont également accru en 2015 leurs dépenses publiques. Si l’on s’intéresse cependant à l’ensemble de la période 2010-2015, l’Allemagne est le seul de ces pays à avoir connu une dynamique de la dépense publique supérieure à celle de la France depuis 2010, mais la situation des finances publiques y est nettement plus favorable.

En troisième lieu, la trajectoire d’endettement de la France diverge désormais non seulement de celle de l’Allemagne, mais aussi de celle de la moyenne des pays de la zone euro. Alors que le poids de la dette publique a diminué en moyenne dans la zone euro de
– 1,3 point de PIB et dans l’Union européenne de – 1,6 point de PIB, il a continué à augmenter en France de 0,4 point de PIB.

De manière à infléchir la dépense publique, le Gouvernement a annoncé un plan de 50 milliards d’euros d’économies de dépenses sur la période 2015 à 2017. La Cour a examiné la mise en œuvre de ce plan pour 2015.

Lors de son annonce, le Gouvernement avait réparti les économies sur les trois années 2015 à 2017, avec une première tranche de 21 milliards d’euros d’économies en 2015, puis deux tranches de 14,5 milliards d’euros d’économies chacune, en 2016 et 2017. Cette répartition a été modifiée progressivement au cours de l’année 2015 jusqu’au programme de stabilité d’avril 2016. Dans ce document, le montant d’économies a été révisé à la baisse pour 2015 et 2016, l’effort le plus important étant reporté à 2017.

La Cour observe que le montant des économies correspond à un effort par rapport à une évolution tendancielle des dépenses publiques. Or l’examen des hypothèses retenues par le Gouvernement révèle qu’elles reposent sur une évaluation plutôt élevée de la croissance tendancielle et comportent donc un biais majorant d’autant les économies affichées.

La première tranche d’économies de plus de 18 milliards d’euros en 2015 a été examinée. Même si l’effort des pouvoirs publics est réel, la Cour estime que le montant d’économies s’élève plutôt à 12 milliards d’euros, du fait essentiellement d’une moindre contribution de l’État. Les dépenses de l’État – hors prélèvements sur recettes, hors charge d’intérêts et hors pensions – ont en effet continué d’augmenter de 3,2 milliards d’euros entre 2014 et 2015, alors qu’elles auraient dû diminuer de près d’un milliard d’euros.

De surcroît, certaines mesures d’économies présentées par le Gouvernement ne peuvent pas être comptabilisées comme des économies réelles. En particulier, le ralentissement de la dépense des programmes d’investissements d’avenir (PIA) correspond davantage à des décalages de paiements qu’à une vraie économie. En effet, la dépense est reportée dans le temps et non pas annulée : les crédits totaux destinés aux PIA affectés aux opérateurs restent en effet inchangés.

Au total, l’effort porté sur les dépenses publiques en 2015 a été réel, mais moindre que celui correspondant aux engagements vis-à-vis de Bruxelles. L’effort structurel qui aurait permis de respecter les engagements européens de la France est de 0,5 point de PIB par an ; or l’effort structurel tel qu’évalué par le Gouvernement, compte tenu des hypothèses de croissance potentielle qu’il a retenu, n’est que de 0,3 point de PIB hors charge d’intérêts, et ne serait que de 0,2 point de PIB si l’on retient les hypothèses de croissance potentielle des organisations internationales. L’effort structurel en dépenses réalisé en 2015 est donc inférieur à ce qu’affiche le Gouvernement.

Pour ce qui concerne l’objectif de réduction du déficit public pour 2016, plus modeste qu’en 2015, il est atteignable, en dépit des risques qui pèsent sur les dépenses de l’État et sur les dépenses sociales ; c’est le deuxième constat de la Cour.

Dans la loi de programmation des finances publiques de décembre 2014, le déficit public prévu pour 2016 était de 3,6 points de PIB. Dans le programme de stabilité d’avril 2016, transmis par le Gouvernement à la Commission européenne, cette prévision a été abaissée à 3,3 % du PIB. Les résultats meilleurs que prévu en 2014 et en 2015, associés à une conjoncture économique orientée plus favorablement, sous réserve des effets possibles du résultat du référendum au Royaume-Uni, permettent ainsi d’envisager une situation financière un peu améliorée en 2016.

Les risques apparaissent limités sur les prélèvements obligatoires. La prévision de recettes repose sur un scénario de croissance du PIB et d’inflation jugé réaliste par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sur le programme de stabilité d’avril 2016. Les indicateurs de conjoncture publiés depuis cet avis le confortent, sous réserve toujours des conséquences éventuelles du « Brexit ».

Les recettes publiques apparaissent correctement calibrées. Elles devraient progresser en 2016 au rythme d’une croissance économique en amélioration par rapport à 2015, comme le retient la prévision du Gouvernement, là encore sous réserve des conséquences éventuelles du « Brexit ».

Si le scénario relatif aux recettes publiques apparaît relativement prudent, la trajectoire de déficit ne saura cependant être durablement respectée sans une maîtrise rigoureuse des dépenses.

Des tensions fortes existent, qui pèsent notamment sur l’évolution des dépenses de l’État. Elles sont plus importantes en 2016 qu’en 2015. Les risques de dépassement pourraient représenter en 2016 entre 3,2 et 6,4 milliards d’euros contre des risques estimés entre 1,8 et 4,3 milliards d’euros à la même époque, l’année dernière.

Ces dépassements sont avant tout liés aux annonces de mesures nouvelles et aux sous-budgétisations. Les annonces nouvelles recensées par la Cour pourraient conduire à accroître les dépenses de l’État de 2,5 milliards d’euros. Cet accroissement serait principalement le fait du plan d’urgence pour l’emploi, des aides accordées aux agriculteurs et aux éleveurs ainsi que de la hausse des dépenses du ministère de la défense. Les sous-budgétisations représenteraient environ 2 milliards d’euros en 2016, soit un ordre de grandeur comparable à celui observé en 2015. Elles concernent en particulier les missions Défense, Travail et emploi et Solidarité, insertion et égalité des chances. Ces sous-budgétisations récurrentes nuisent à la sincérité du vote du Parlement sur la loi de finances et rognent, dès le début de l’année, les marges de manœuvre nécessaires pour maîtriser l’exécution de la dépense budgétaire.

Par ailleurs, la masse salariale de l’État, hors contributions au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions, devrait progresser de 1 à 1,5 % en 2016, contre 0,4 % en 2015. Il faut remonter à 2007 pour retrouver un tel rythme d’évolution. Les trois facteurs qui avaient permis de modérer la masse salariale de l’État depuis près de dix ans contribuent maintenant à cette accélération : d’une part, les effectifs augmentent depuis 2015 ; d’autre part, la valeur du point de la fonction publique sera majorée au 1er juillet 2016 puis au 1er février 2017 ; par ailleurs, le Gouvernement a annoncé de nouvelles mesures catégorielles depuis le début de l’année 2016.

Le Gouvernement a accentué en début d’exercice la réserve de précaution pour tenir l’objectif de dépense de l’État. Il a décidé de geler les reports de crédits de manière transversale, pour la première fois depuis la mise en œuvre de la LOLF en 2006. Par ailleurs, la mise au point en juin 2016 du premier des trois décrets d’avance prévus dans l’année a déjà donné lieu à des arbitrages difficiles, le Gouvernement ayant renoncé à certaines des annulations prévues initialement.

Au regard de l’ampleur des risques de dépassement de crédits, le respect de l’objectif de dépenses incluses dans la norme de dépenses en valeur sera particulièrement difficile en 2016. À titre de comparaison, malgré des risques de dépassement moindres en 2015, la norme de dépenses n’avait été respectée que facialement, grâce à la baisse du prélèvement sur recettes destiné à l’Union européenne et à des contournements notables, de l’ordre de 3 milliards d’euros. La tenue de l’objectif pourrait devenir impossible, si de nouvelles dépenses supplémentaires venaient à être décidées d’ici à la fin de l’année.

Des risques de moindre ampleur pèsent également sur les dépenses des administrations de sécurité sociale, notamment, l’économie de 800 millions d’euros attendue en 2016 de la renégociation de la convention de l’Unédic, qui paraît désormais hors d’atteinte, suite à l’échec de cette négociation.

Au total, si l’objectif, plus modeste qu’en 2015, de réduction du déficit reste atteignable, il exigera une gestion très stricte des moyens. Il ne laisse aucune place à des décisions nouvelles conduisant à des hausses de dépenses. Les annonces successives de nouvelles dépenses publiques, qui ne sont, en l’état de nos connaissances aujourd’hui, ni financées ni gagées par des économies pérennes, font peser un risque sur les finances publiques en 2016, mais plus encore sur les années suivantes. Parmi les dépenses supplémentaires annoncées au cours de l’année 2016, celles concernant la masse salariale pèseront en effet essentiellement à partir de 2017 et continueront de monter en charge dans les années suivantes.

J’en arrive au troisième et dernier constat de la Cour : en l’état des décisions connues, l’atteinte de l’objectif pour 2017 est très incertaine et le respect de la trajectoire 2017-2019 des finances publiques peu réaliste, au regard des nouveaux engagements pris.

Pour les années 2017 à 2019, le programme de stabilité d’avril 2016 prévoit une trajectoire de redressement des finances publiques, revue à la baisse. L’amélioration du déficit public est en effet moindre que celle présentée dans la loi de programmation des finances publiques de décembre 2014, alors même que le déficit de 2015 est d’un demi-point inférieur. Le résultat meilleur que prévu n’est donc pas mis à profit pour réduire plus rapidement le déficit public et infléchir nettement la trajectoire de dette.

Le Gouvernement a, dès le programme de stabilité d’avril 2015, révisé à la hausse la croissance potentielle pour 2016 et 2017 : elle se situe désormais à un niveau sensiblement supérieur à celui retenu par les organisations internationales. La différence n’est pas neutre, car cela permet ainsi au Gouvernement d’afficher un solde structurel à l’équilibre en 2019, malgré un déficit effectif s’élevant encore à 1,2 point de PIB. Avec les estimations de PIB potentiel des organisations internationales, un tel déficit laisserait encore un déficit structurel supérieur à 1 point de PIB. Sur la base d’hypothèses de croissance potentielle plus prudentes que celles du Gouvernement, une trajectoire de maîtrise des finances publiques plus ambitieuse sera donc nécessaire pour respecter, en 2019, l’objectif de moyen terme de solde structurel fixé à
– 0,4 point de PIB par la loi de programmation.

L’analyse du programme de stabilité montre en outre que l’atteinte d’une cible de déficit effectif de 1,2 point de PIB en 2019 suppose une maîtrise sans précédent du volume de la dépense publique, compte tenu de la baisse visée du taux de prélèvements obligatoires de 0,2 point par an. La dépense publique en volume – c’est-à-dire hors charges d’intérêts – devrait être stable en 2017, puis baisser légèrement en 2018 et en 2019. Cela devrait impliquer un effort nettement accru par rapport à la période récente, puisque cette dépense en volume a progressé en moyenne de 1,1 % entre 2010 et 2015 – ce qui témoigne d’une plus grande maîtrise de la dépense qu’entre 2000 et 2009 où elle a progressé en moyenne de 2,6 %.

Or le Gouvernement ne propose pas de réformes à la hauteur de ces enjeux et à l’appui du programme de stabilité, alors même que les politiques mises en œuvre ces dernières années ne sont guère porteuses d’économies à moyen terme. Au contraire, la hausse programmée des dépenses militaires, les mesures annoncées en début d’année concernant l’emploi, la modération de l’effort demandé aux communes et intercommunalités et, surtout, la progression de la masse salariale vont pousser les dépenses à la hausse, à hauteur d’environ 0,3 point de PIB en 2017, soit environ 6 milliards d’euros

La masse salariale des administrations en particulier, qui représente près du quart des dépenses publiques, augmentera, dès 2017, à un rythme marquant une rupture forte avec les évolutions constatées depuis dix ans. Aucun des trois leviers – stabilité des effectifs, gel du point et limitation des mesures catégorielles – qui avaient permis de maîtriser l’évolution de la masse salariale publique au cours des dix dernières années ne sera plus actif. De ce fait, la masse salariale de l’État pourrait progresser en 2017 à un rythme supérieur à celui enregistré au total sur l’ensemble de la période 2009-2015, soit plus de 2 %.

La réforme des grilles salariales négociée dans le cadre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » va également entraîner une hausse des dépenses de personnel. Sa montée en charge progressive représenterait à l’horizon 2020 entre 2 et 2,5 milliards d’euros pour la seule fonction publique d’État, et entre 3,5 et 4,5 milliards d’euros pour l’ensemble des composantes de la fonction publique.

Les travaux de la Cour montrent donc que les risques pesant sur la réalisation de la trajectoire envisagée dans le programme de stabilité sont très importants, puisque le respect de l’objectif implique un effort supplémentaire en matière de maîtrise de la dépense, alors mêmes qu’un certain nombre de dépenses supplémentaires ont été annoncées, qui viennent compliquer le respect de l’objectif.

Avant de conclure, je veux enfin évoquer la gouvernance des finances publiques. Encadrée par les règles européennes, elle peut encore être renforcée. La crise financière de 2008, puis celle des dettes souveraines ont conduit les États membres de l’Union européenne, en particulier ceux de la zone euro, à revoir leur gouvernance budgétaire. Plusieurs textes visant à renforcer les règles du pacte de stabilité et de croissance ont été adoptés dans ce sens entre 2012 et 2013. Ils prévoient trois innovations : une règle d’équilibre structurel ; l’instauration d’un mécanisme de correction automatique ; la création d’institutions budgétaires indépendantes.

Les textes européens imposent désormais la fixation d’un objectif d’équilibre de moyen terme, défini en termes structurels, qui ne peut pas être supérieur à 0,5 point de PIB.

Le pilotage de la politique budgétaire à partir d’un objectif de solde structurel, plutôt que nominal, est, dans son principe, économiquement souhaitable : il permet de limiter le risque d’une politique budgétaire trop relâchée en période de croissance forte ou trop rigoureuse en période de récession ; il permet aussi de refaire de la politique budgétaire un instrument contracyclique.

En France, cet objectif est inscrit dans les lois de programmation des finances publiques, qui sont révisables à tout moment et ne lient donc pas le législateur financier que vous êtes.

Le mécanisme de correction automatique, qui impose une correction en cas de déviation significative de la trajectoire, n’a en pratique pas fonctionné dans notre pays en 2014. Ce mécanisme a été déclenché au printemps 2014, mais le Gouvernement, plutôt que de revenir sur la trajectoire de finances publiques de la loi de programmation alors en vigueur, a choisi de modifier la trajectoire de finances publiques en présentant une nouvelle programmation pluriannuelle.

Les nouvelles règles de gouvernance ont enfin imposé la création d’organismes budgétaires indépendants. En France a ainsi vu le jour le Haut Conseil des finances publiques. Les organisations internationales considèrent qu’en France comme ailleurs, ces institutions ont conduit les pouvoirs publics à davantage de prudence dans l’estimation de leurs recettes publiques – élément-clef pour le respect des trajectoires de solde – et l’élaboration de leurs hypothèses macroéconomiques.

Il paraît possible d’améliorer encore cette gouvernance dans le cadre institutionnel actuel. D’abord, il nous paraît nécessaire de mieux objectiver la croissance potentielle – ce qui est difficile, tous les économistes en conviennent. Et, dès lors que l’on révise la croissance potentielle, il serait pertinent que la nouvelle évaluation soit soumise à l’examen formel d’une autorité indépendante comme le Haut Conseil des finances publiques.

Nous considérons également que l’élaboration du programme de stabilité annuel, pierre angulaire du dialogue avec l’Union européenne et, à bien des égards, plus structurant que les lois de programmation, devrait donner lieu à un examen plus approfondi par le Parlement et le Haut Conseil des finances publiques.

Ensuite, les règles européennes de gouvernance budgétaire pourraient être simplifiées. Si la référence au solde structurel permet de vérifier la soutenabilité de long terme de la politique budgétaire et doit donc être conservée dans son principe, elle gagnerait à être complétée par une règle de dépense, plus facile à expliciter ex ante et à vérifier ex post.

Une telle règle pourrait prendre la forme d’un objectif de dépenses décliné annuellement pour l’ensemble des administrations publiques, fixé en euros courants, en fonction d’une cible de solde structurel compatible avec le respect de l’objectif structurel de moyen terme, un tel schéma impliquant de réfléchir à un mode de gouvernance associant l’État, les administrations de sécurité sociale et les collectivités territoriales.

Je veux conclure en rappelant d’abord que la Cour ne méconnaît pas les efforts réalisés ces dernières années par les pouvoirs publics pour procéder au redressement des finances publiques. Pour autant, nous pouvons redouter que l’amélioration de la conjoncture conduise une nouvelle fois à interrompre ce mouvement.

Les travaux de la Cour, en mettant notamment en lumière les expériences de nos voisins européens, montrent au contraire que l’effort structurel ne doit pas être relâché au moment où les pouvoirs publics bénéficient d’une conjoncture économique plus favorable et de taux d’intérêt extrêmement bas, les ajustements structurels des finances publiques qui doivent intervenir dans des phases de conjoncture moins favorables étant généralement beaucoup plus douloureux.

En dépit des progrès réalisés dans la période récente, la politique de maîtrise de la dépense menée jusqu’à présent a davantage visé à contenir cette dernière. Les résultats ne sont pas complètement au rendez-vous, alors que les travaux des juridictions financières soulignent les marges d’efficacité et d’efficience de l’action publique dans notre pays. Faire des choix explicites, s’attaquer aux principales sources d’inefficacité de la dépense, réexaminer les missions des administrations publiques prises dans leur ensemble et mieux cibler les dépenses d’intervention : tout cela aiderait à mieux maîtriser les dépenses publiques, tout en permettant l’affirmation des priorités politiques voulues par les pouvoirs publics.

M. Dominique Lefebvre. Il est important de ne jamais perdre de vue la réalité, et c’est en cela que la Cour des comptes, en nous rappelant quelle est la situation réelle de nos finances publiques et comment elle évolue, a un rôle important à jouer – je le souligne pour celles et ceux qui estimeraient que nous pouvons engager des politiques économiques et budgétaires qui aggraveraient l’état des finances publiques au lieu de le redresser.

Néanmoins, la réalité est multiple et elle englobe, en l’occurrence, le contexte dans lequel évolue notre pays et les enjeux auxquels il est confronté. Or on comprend bien, à la lecture du rapport que la Cour – et c’est sa mission – fait prévaloir l’objectif de redressement des finances publiques sur tous les autres paramètres.

Dès le début de votre intervention, vous avez choisi, monsieur le Premier président, d’écarter toutes les questions relatives aux choix faits par le Gouvernement et le Parlement en matière de politique économique et budgétaire, la ligne directrice sous-jacente de votre rapport étant qu’il faudrait en faire davantage et plus encore en matière de maîtrise de la dépense publique, ce qui vous pousse à mettre l’accent sur ce qui n’a pas été fait plutôt que sur ce qui a été fait.

De ce point de vue je m’inscris en faux contre la critique implicite que vous nous adressez à propos de la gouvernance, en estimant que la révision de la loi de programmation est le signe que les mécanismes de gouvernance n’ont pas fonctionné. La question en effet n’est pas de savoir si la loi de programmation a été modifiée mais pourquoi elle l’a été et si cela a été fait de manière pertinente.

En l’occurrence, nous assumons pleinement la politique de redressement progressif mise en place depuis 2012 dans une double perspective : le retour de la croissance et le maintien de la cohésion sociale. Si nous avons ajusté nos choix au fil du temps, c’est pour tenir compte du contexte économique et social, estimant qu’un effort plus brutal aurait des conséquences négatives non seulement sur la croissance mais également sur la cohésion sociale.

En ce qui concerne l’évolution de notre déficit, de nombreux journaux titraient ce matin sur le risque de dérapage de 3 à 6 milliards de nos dépenses, alors même que la Cour juge que l’objectif pour 2016 de réduction du déficit à 3,3 % du PIB pourrait être atteint. Tout réside donc dans l’approche que l’on privilégie.

La réalité, pour nous, c’est la baisse de 4 milliards d’euros du déficit en comptabilité nationale, ce qui est une bonne nouvelle pour le pays, même si nous pouvons toujours regretter ne pas avoir fait mieux. Ainsi, 2015 est la première année depuis longtemps où l’on réduit le déficit et les prélèvements obligatoires, et où la croissance repart, ce qui laisse penser que la politique menée nous conduit sur la bonne trajectoire. Ceux qui affirment qu’il faudrait procéder autrement devraient préciser quelles seraient les conséquences, notamment à court terme, d’efforts d’ajustement plus importants – indépendamment du débat sur le bon emploi des deniers publics.

Pour ce qui est des économies réalisées, la réalité, c’est que la dépense publique n’a jamais aussi peu évolué depuis quinze ans : avec ce résultat, on aura du mal à convaincre nos compatriotes que les mesures d’économie qui avaient été annoncées n’ont pas été mises en œuvre – alors même que le déficit public et les prélèvements obligatoires sont en baisse. Si je trouve justifié que la Cour des comptes nous appelle à la vigilance pour atteindre nos objectifs dans les années à venir, je m’étonne qu’elle communique ce matin sur le thème d’un dérapage du déficit en 2016, évalué entre 3 et 6 milliards d’euros. S’il faut d’ores et déjà se donner rendez-vous en 2017 – dès le mois de mars, puis lors de l’examen de la prochaine loi de règlement – afin de voir quelles mesures doivent être prises, nous sommes actuellement en mesure de tenir l’objectif de 3,3 % de déficit pour 2016. Pour ce qui est de 2017, au vu des informations que nous possédons actuellement, le Gouvernement n’a pas l’intention de s’écarter de l’objectif d’un déficit public limité à 2,7 %, ce qui signifie que des mesures seront prises, en recettes ou en dépenses, pour tenir cet objectif.

M. le Premier président de la Cour des comptes. J’appelle votre attention sur le fait que je ne suis engagé que par les travaux écrits de la Cour des comptes, et que je ne m’exprime évidemment pas sur les interprétations et les commentaires qui en sont faits. Par ailleurs, la Cour ne demande pas que l’on fasse davantage et plus encore : elle raisonne uniquement dans le cadre des choix budgétaires et de politique économique que vous avez vous-mêmes faits. Ainsi, estimant que la loi de programmation prévoyait un rythme de redressement des finances publiques peut-être trop élevé, vous avez modifié celui-ci, notamment au moyen du programme de stabilité. Je le répète, c’est en se référant au contexte que vous avez vous-mêmes défini que la Cour indique ce qu’elle estime possible ou non : de votre côté, vous restez souverains pour déterminer et éventuellement modifier les objectifs.

M. Hervé Mariton. Nous entendons bien ce que dit la Cour des comptes au sujet de la nécessité d’assainir les finances publiques dans la durée, y compris quand la conjoncture s’améliore, et il est particulièrement intéressant de le souligner dans la période post-« Brexit » que nous traversons, où les critiques relatives à la gestion des finances publiques se multiplient. Avant-hier, le ministre des finances nous a expliqué que le fait que le Royaume-Uni sorte de l’Union européenne n’aurait pas de conséquences budgétaires. Le Premier président peut-il nous préciser quel est l’ordre de grandeur retenu par la Cour pour les conséquences budgétaires du « Brexit » ?

Par ailleurs, je m’étonne du fait que le montant des économies à réaliser reste fixé à 50 milliards d’euros, alors même que des dépenses supplémentaires ont été annoncées par le Gouvernement. Soit les mesures de régulation suffisent à répondre aux dépenses nouvelles, soit elles n’y suffisent pas. Dans la seconde hypothèse, quel montant d’économies à effectuer devrait-on retenir pour rester sur la trajectoire des objectifs retenus ?

Enfin, monsieur le Premier président, vous avez évoqué à plusieurs reprises les efforts nécessaires pour respecter la trajectoire 2014-2019, en les exprimant à chaque fois sous forme de pourcentages. Pouvez-vous nous préciser quel est le montant d’économies à réaliser d’ici à 2019 en valeur absolue ?

M. Charles de Courson. Pour ce qui est de 2015, il serait bon que nous nous mettions d’accord sur une règle simple de calcul. La comptabilité nationale est une chose, mais les dépenses effectivement engagées dans le cadre des programmes d’investissements d’avenir en sont une autre : avec les PIA 1, 2 et 3, nous en prenons pour quinze ans de perturbation du solde ! Fixer pour principe de retenir les dépenses effectives permettrait, à mon sens, d’assurer une certaine stabilité.

Il est frappant de constater que l’amélioration des finances publiques en 2015 est liée, comme le montre un tableau figurant dans votre rapport, à 70 % aux collectivités locales et pour environ un quart à la sécurité sociale. Je rappelle que le déficit des administrations publiques centrales – État et organismes divers d’administration centrale (ODAC) –, qui s’élevait à 72,4 milliards d’euros en 2014, est resté exactement au même niveau en 2015 : on ne constate donc aucune amélioration pour ce qui est de l’État. Je trouve dommage que vous ne fassiez jamais la différence entre les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’investissement, car l’amélioration constatée est massivement liée à la baisse des investissements, ce qui est catastrophique. Enfin, globalement, nous assistons à une légère accélération de la dépense publique en volume entre 2014 et 2015.

Pour 2016, vous nous avez livré une analyse intéressante de l’ensemble des décisions prises depuis le 1er janvier et n’ayant pas été budgétées, en distinguant l’hypothèse basse de l’hypothèse haute – vous parvenez ainsi à un point moyen situé aux alentours de 4,8 milliards d’euros. Je regrette cependant que vous n’ayez pas appliqué la même analyse aux organismes de sécurité sociale et aux collectivités locales. Avec quelques collègues, je me suis livré à des calculs montrant que l’ensemble des dépenses non budgétées se rapportant au budget de l’État, mais aussi à celui des administrations de sécurité sociale et à celui des collectivités territoriales, atteindrait un montant de plus de 6 milliards d’euros pour 2016 – en estimation moyenne, à comparer avec les 4,8 milliards d’euros que vous retenez.

En ce qui concerne les perspectives, il semble évident que nous ne parviendrons pas à tenir les promesses, au demeurant modestes, qui avaient été faites dans le cadre de la loi de programmation : nous serons un peu en dessous, en dépit des efforts – réels, et que je ne songe pas à contester – qui ont été faits. Les mesures annoncées sont donc insuffisantes pour atteindre les objectifs votés par la majorité, à savoir une courbe de redressement qui nous permettrait de ramener le déficit à 2,7 % du PIB en 2017 – il serait d’ailleurs intéressant que vous nous disiez quel montant d’économies il faudrait réaliser pour espérer atteindre cet objectif, mais j’ai tendance à penser que celui-ci est tout à fait inaccessible, a fortiori au cours d’une année électorale.

Enfin, vous n’avez pas évoqué la question de l’évolution des effectifs de l’État, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Lors des années précédentes, vous aviez montré que certaines annonces de créations de postes n’étaient pas suivies d’effet, ce qui correspond aux chiffres qui nous ont été donnés tout à l’heure par la Rapporteure générale, selon lesquels les effectifs de la fonction publique de l’État n’ont quasiment pas augmenté. Il serait intéressant de savoir pourquoi il y a un tel écart entre les effectifs votés et ce qui est effectivement réalisé. S’agit-il d’une politique délibérée – que je connais bien, pour avoir occupé durant plusieurs années un poste à la direction du budget –, consistant à diminuer le nombre de postes offerts par concours et à prendre toutes sortes de mesures techniques destinées à freiner la création des emplois votés par le Parlement ? J’aimerais que la Cour des comptes nous éclaire sur ce point.

Mme Véronique Louwagie. Le rapport de la Cour des comptes montre que la dépense publique a continué à augmenter en volume en 2015 ; de même, la dette publique a progressé de 0,4 point en France, alors qu’elle a baissé en Allemagne – de 3,5 points – et dans l’ensemble de la zone euro.

Pour 2016, vous avez émis des doutes et même des craintes. Vous évoquez notamment un risque de dépassement de la masse salariale de l’État, hors contribution au financement des pensions. En 2015, on constate une augmentation de l’exécuté beaucoup plus importante que ce qui avait été prévu dans la loi de finances initiale. Par ailleurs, les dépenses budgétées pour 2016 risquent d’être dépassées compte tenu de l’accroissement observé en 2015, puisqu’il faudrait limiter l’augmentation de la masse salariale 2015 à exécution 2016 à 0,8 milliard d’euros.

Vous avez évoqué les accords de février 2016 relatifs au dégel du point d’indice de la fonction publique, dont les effets n’ont pas été provisionnés dans la loi de finances initiale, et indiquez que « ce dépassement qui n’a pas été anticipé en LFI pour 2016 pourrait être en partie compensé au sein de certaines missions, par exemple par de moindres recrutements ». J’aimerais savoir si l’emploi du conditionnel équivaut à une recommandation de votre part, ou à des compensations que vous auriez constatées au cours du premier semestre 2016. En effet, comme l’a souligné Charles de Courson, on constate une certaine sous-consommation au niveau des emplois, l’année 2015 étant celle où l’on constate l’écart le plus important entre les plafonds d’emplois qui étaient prévus en LFI ou loi de finances rectificative (LFR) et la consommation réelle qui en est faite.

M. Pierre-Alain Muet. La mesure de la croissance potentielle fait effectivement l’objet d’une grande incertitude. Mais une chose est sûre : l’Europe s’est beaucoup trompée dans son diagnostic de politique économique au cours des quatre dernières années, en grande partie parce qu’elle a tendance à assimiler la croissance potentielle à la croissance effective. Elle a considéré qu’il fallait continuer à mettre en œuvre des politiques de réforme structurelle, visant à la réduction des déficits structurels, sans tenir compte du fait que nous étions en pleine récession. L’application de ces mesures de politique économique, qui pouvait être pertinente pour un État, était absurde à grande échelle, et a été à l’origine d’une récession européenne.

Les estimations de croissance potentielle qui sont actuellement faites par le ministère des finances sont nettement plus raisonnables, me semble-t-il, que celles publiées par nombre d’organisations internationales. La Rapporteure générale et quarante députés représentant douze pays européens ont écrit à la Commission européenne afin de demander à ce que soit effectuée une étude sérieuse de la mesure de la croissance potentielle. En effet, la Commission la mesure actuellement sur deux années, là où toutes les autres institutions le font habituellement sur une période de quatre ou cinq ans, correspondant mieux à la durée des cycles économiques. C’est une question importante, car je suis persuadé que la meilleure façon de réduire les déficits consiste à ne pas aller trop loin dans la réduction des déficits structurels, contrairement à ce qui a été fait en Europe au cours de ces dernières années : il est temps, désormais, de laisser la croissance exprimer son potentiel, et je pense que la politique actuelle du Gouvernement relative aux prévisions est sans doute mieux adaptée que ce que préconise la Cour des comptes.

Mme Claudine Schmid. Monsieur le Premier président, vous avez appelé notre attention sur les annonces, ni financées ni gagées, faites par le Gouvernement. J’aimerais connaître votre avis au sujet de ces annonces de dépenses en faveur de l’emploi : sont-elles susceptibles d’avoir des effets positifs significatifs sur l’emploi et peuvent-elles faire décroître le taux de chômage ? En d’autres termes, ces annonces sont-elles justifiées en matière budgétaire ?

Par ailleurs, quelles seraient les conséquences sur la croissance de la fin de la trêve fiscale qui était pourtant censée se poursuivre jusqu’en 2017, avec la création, entérinée par le Premier ministre, d’une nouvelle taxe d’équipement régionale, payable par les entreprises et les ménages ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Dominique Lefebvre a fait part d’une certaine satisfaction par rapport à la baisse des déficits et des prélèvements obligatoires. En réalité, certaines dépenses sont mises sous le tapis en attendant les prochaines élections, comme le montre l’exemple de l’évolution de la masse salariale, qui devrait progresser de 2,4 milliards d’euros dès 2017 : dans ces conditions, il sera difficile de nous faire admettre qu’une excellente gestion des finances publiques par le Gouvernement va lui permettre de garantir pour l’avenir une maîtrise réelle des dépenses.

J’ai compris, monsieur le Premier président, que même si vous notiez une amélioration du déficit, le niveau élevé de ce déficit par rapport à celui de la moyenne des autres pays de la zone euro était peu rassurant – de ce point de vue, les efforts constatés restent en deçà de ce qui pouvait être attendu. Je pense que les réformes fondamentales qui auraient dû être mises en œuvre ne l’ont pas été et je regrette que nous ayons manqué le rendez-vous de la réduction du déficit. Le tableau figurant à la page 127 du rapport fait apparaître les mesures d’économies pour 2015 du plan de 50 milliards d’euros présenté par le Gouvernement. Il en ressort qu’aujourd’hui, nous sommes loin de ce qui était initialement prévu, et que le seul chiffre resté constant entre la prévision et la réalisation est celui des collectivités territoriales, ce qui s’explique par le fait qu’elles ont été très largement mises à contribution pour le redressement des finances publiques. C’est un peu facile pour l’État, qui impose aux collectivités territoriales des mesures qu’il n’a pas été capable de mettre en œuvre lui-même !

Pour ce qui est de la norme des dépenses de l’État, vous avez évoqué la dérive qui pourrait résulter de l’annonce de mesures nouvelles, relatives notamment au plan d’urgence pour l’emploi et aux aides accordées aux agriculteurs. Cependant, vous n’avez pas abordé le problème des dépenses de guichet, qui donnent lieu à des sous-budgétisations flagrantes. Avez-vous des précisions chiffrées à nous donner sur ce point ?

Par ailleurs, si nous avons bénéficié de certaines mesures exogènes telles que la baisse des intérêts d’emprunts ou la réduction de notre contribution au Mécanisme européen de stabilité, vous ne dites rien de la stratégie qui a été mise en œuvre au sujet des émissions de dettes, consistant à racheter des dettes anciennes et se traduisant par une modification de la répartition entre la dette à court terme et la dette à moyen et long terme. Cette politique de rachat active des titres pour 22,6 milliards d’euros appelle une explication sur une technique budgétaire qui nous a permis, certes, de ne pas aggraver le ratio entre l’encours de la dette et le PIB, mais qui aura des conséquences sur les prochains budgets.

M. le président Gilles Carrez. Pour ma part, monsieur le Premier président, j’aimerais vous interroger sur une proposition que vous formulez en matière d’amélioration de la gouvernance des finances publiques, qui me paraît intéressante en raison de sa simplicité. Il semble qu’il y ait aujourd’hui une certaine convergence entre la majorité et l’opposition sur l’idée qu’il est impossible de solliciter davantage les prélèvements obligatoires, ainsi que sur celle qu’il n’est pas raisonnable de continuer à laisser la dette progresser.

Notre Rapporteure générale nous avait fait, il y a deux ans, une présentation montrant l’évolution en valeur courante de la dépense publique dans toutes ses composantes depuis une dizaine d’années : si j’ai bonne mémoire, nous sommes passés de 30 ou 40 milliards d’euros par an en valeur courante, non corrigée de l’inflation, à une vingtaine de milliards d’euros aujourd’hui. Puisque nous nous accordons sur le fait que la maîtrise de la dépense publique constitue une priorité, je me demande si nous ne pourrions pas faire évoluer notre système de gouvernance, comme le suggère la Cour des comptes. Alors qu’aujourd’hui, nous nous appuyons sur des trajectoires fixées à partir du programme de stabilité, avec des notions de croissance potentielle et de seuils structurels très difficiles à appréhender, vous évoquez la possibilité de retenir un objectif de dépenses décliné annuellement pour l’ensemble des administrations publiques, fixé en euros courants par rapport à une cible structurelle – sur ce dernier point, je me demande si nous n’aurions pas au contraire intérêt à autonomiser l’objectif.

Cette proposition me paraît intéressante à plusieurs titres. D’abord, elle constitue un objectif simple, à un moment où l’inflation est assez contenue : si les dépenses publiques s’élèvent actuellement à 1 250 milliards d’euros, elles seront sans doute à 1 260 milliards d’euros l’année prochaine. Elle permettrait également de nous éviter les débats que nous venons d’avoir au sujet du plan d’économies de 50 milliards d’euros, ainsi que de voir surgir des propositions, semblables à celles émises du côté de l’opposition et que je me garde bien de reprendre, consistant à affirmer que des économies de 85, 100 ou 120 milliards d’euros seraient possibles, sans prouver en aucune manière la faisabilité de ces mesures, ce qui me paraît tout à fait irresponsable, pour ne pas dire infantile, dans le contexte actuel !

Fixer un objectif d’évolution de la dépense publique serait moins anxiogène que l’annonce d’économies fixées par rapport à des tendances que chacun se garde bien d’expliciter.

M. Hervé Mariton. D’où l’intérêt d’exprimer les objectifs en valeur absolue plutôt qu’en pourcentage !

M. le président Gilles Carrez. Exactement, et c’est bien le sens de la proposition de la Cour des comptes, consistant à ce que l’on détermine un objectif en euros courants.

Pour ce qui est de la méthode, vous vous souvenez peut-être de la mise en place, il y a quelques années, de la conférence annuelle des finances publiques, qui obligeait à confronter, pour apprécier une évolution de la dépense, l’ensemble des responsables de cette dépense réunis autour d’une table : l’État, mais aussi les collectivités territoriales et les présidents des différentes branches de sécurité sociale et y compris celui de l’assurance chômage.

Le discours que tiennent actuellement les collectivités territoriales a ses limites. Certes, l’évolution de leurs dépenses est la seule à avoir été évoquée en valeur courante, mais le budget de l’État comporte aujourd’hui toute une série de dépenses qui relevaient initialement de leur responsabilité et ont été transférées à l’État, qui s’est substitué au contribuable local – ce qui a d’ailleurs permis aux collectivités de continuer à augmenter leurs dépenses.

Je me demande si, sans s’engager dans un processus trop technocratique, on ne pourrait pas aller un peu plus loin en répartissant l’objectif en très grandes masses, telle la masse salariale, qui se voit appliquer des politiques d’effectifs solidaires : cela permettrait d’éviter que l’on voie mettre en œuvre, comme cela a été le cas au cours des vingt dernières années, des politiques d’effectifs radicalement différentes entre l’État, qui réduit sensiblement son budget salarial, et les collectivités territoriales, qui affichent une progression énorme dans ce domaine. Les transferts sociaux, le vieillissement de la population et la part de l’investissement sont autant de questions supplémentaires pouvant justifier que l’on mette en place une méthodologie plus simple et des règles de gouvernance plus accessibles.

Une telle mesure présenterait également l’intérêt d’imposer la référence à une règle nationale, et non plus bruxelloise : ainsi, le respect des objectifs que nous fixerions en matière de déficit relèverait uniquement de notre responsabilité, et nous n’aurions plus à en rendre compte qu’au niveau national.

Mme la Rapporteure générale. Vous indiquez en page 27 de votre rapport que s’il n’y avait pas eu d’émissions sur des souches anciennes, la dette aurait progressé de 1,8 % du PIB au lieu de 0,8 % en 2015. Faut-il en déduire que vous contestez cette pratique mise en œuvre depuis 2007 qui, si elle ne change rien au coût global de ce que représente l’émission
– la dette ne coûtera pas plus cher –, modifie sa répartition dans le temps ?

M. le président Gilles Carrez. La prime d’émission est calculée pour cela.

Mme la Rapporteure générale. Exactement. J’aimerais donc savoir ce que vous pensez de cette technique, et si vous souhaiteriez éventuellement voir son étendue limitée.

Ma deuxième question portait sur la croissance potentielle mais, ce sujet ayant été abordé par Pierre-Alain Muet, je n’y reviendrai pas. En tout état de cause, la Commission européenne nous a indiqué, sinon qu’elle modifierait sa méthodologie, du moins qu’elle tiendrait compte des remarques, qui ont été également formulées par un certain nombre de ministres de l’économie et des finances de l’Union.

Troisièmement, vous constatez, dans votre rapport, qu’en 2015, l’épargne brute des collectivités locales s’améliore mais que leurs investissements ont chuté. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?

Quatrièmement, vous consacrez un paragraphe à la situation financière, mesurée en comptabilité générale, des hôpitaux publics. Or, je ne suis pas d’accord avec la Cour, et je l’assume, sur son utilisation de la comptabilité.

Enfin, dans le tableau de la page 127 consacré à l’examen des mesures d’économies présentées par le Gouvernement pour 2015, vous estimez que la baisse des crédits des ministères et l’abaissement de la norme en valeur ont produit, non pas 7,4 milliards mais 3,3 milliards d’économies. Cet écart s’explique-t-il uniquement par la prise en compte de la baisse de l’inflation ?

M. Charles de Courson. Je souhaiterais compléter la première question de Mme la Rapporteure générale. La traduction comptable des émissions sur les souches anciennes est-elle correcte, selon la Cour des comptes ? Cette pratique revient en effet à imputer sur les exercices futurs des charges d’intérêts afin que la dette soit plus faible aujourd’hui. Mais, dans une telle situation, le commissaire aux comptes d’une entreprise privée demanderait une provision. Notre système comptable vous paraît-il adapté ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. Si le chiffre de 50 milliards d’économies n’a pas changé, c’est parce que le Gouvernement a modifié ses hypothèses d’évaluation de l’augmentation tendancielle de la dépense afin de retomber sur ses pieds. Néanmoins, nous sommes entrés dans son raisonnement, en retenant son estimation du montant des économies et son évaluation de l’augmentation tendancielle de la dépense. Selon nous, la maîtrise de la dépense participe de la stratégie actuelle des pouvoirs publics ; elle est plus forte aujourd’hui qu’elle ne l’était hier – puisque le rythme de progression de la dépense a ralenti au cours des dernières années – mais, pour respecter les objectifs affichés dans le programme de stabilité, un effort supplémentaire sera vraisemblablement nécessaire. D’autant qu’ont été annoncées un certain nombre de dépenses supplémentaires, que nous évaluons à environ 0,3 point de PIB, soit 6 milliards d’euros – évaluation qui n’est, du reste, pas très éloignée, me semble-t-il, de celle de votre Rapporteure générale. Le coût de ces dépenses supplémentaires n’a pas été, pour le moment, pris en compte.

Je rappelle que le respect de l’objectif d’un déficit de 2,7 % en 2017 implique une non-augmentation en volume de la dépense. Or, en 2015 et en 2016, celle-ci augmente. Un effort supplémentaire de maîtrise est donc nécessaire, et il l’est d’autant plus que nous ne tenons pas compte ici des dépenses supplémentaires annoncées. C’est pourquoi nous estimons que le respect de l’objectif fixé pour 2017 nous paraît incertain et très difficile, à moins que le financement des économies supplémentaires soit bien documenté.

Par ailleurs, le Gouvernement a inclus dans ses hypothèses une augmentation des dépenses de personnel. Cela dit, ces dépenses ne peuvent pas être tenues dès lors que tous les leviers qui permettaient de les stabiliser disparaissent. Je pense au gel du point d’indice, qui ne pouvait être éternel, et au mouvement de réduction des effectifs, que le Gouvernement s’était engagé à maintenir mais qui a été stoppé, à quoi s’ajoutent diverses mesures catégorielles. Ces trois types de mesures vont contribuer à une augmentation de la masse salariale plutôt qu’à sa stabilisation, ce qui accentue les difficultés rencontrées pour respecter les objectifs.

J’ajoute que le fait que les effectifs réels ne correspondent pas aux plafonds d’emploi est pratiquement structurel, même si l’écart peut s’amplifier à certaines périodes. Les notes sur les missions et les programmes que nous vous transmettons lors de l’examen du budget de l’État comportent une analyse des crédits qui permet d’élaborer un schéma d’emploi dans le cadre du plafond d’emploi. De fait, les crédits ne sont pas suffisants pour atteindre ce plafond – y compris à la Cour des comptes, du reste. En tout état de cause, la Cour ne formule pas de recommandations en la matière ; ses estimations se fondent sur la pratique et sur ses constats.

Par ailleurs, nous prenons en compte les conséquences possibles de l’augmentation de l’indice au niveau de la sécurité sociale ; l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) devrait permettre d’absorber ces dépenses.

En ce qui concerne les collectivités territoriales, le rapport sur les finances locales, qui paraîtra en octobre, apportera un certain nombre d’éléments de réponse complémentaires aux questions que vous pouvez vous poser, notamment sur l’investissement et les dépenses de fonctionnement.

Je ne reviens pas sur la question de la croissance potentielle. L’initiative qui a été prise pour amener la Commission européenne à s’interroger sur ce concept nous paraît tout à fait utile, dans la mesure où il faut pouvoir s’entendre sur un calcul de la croissance potentielle à partir d’éléments plus objectifs. Nous estimons cependant que, si la référence au structurel est apparue nécessaire en période de récession, elle ne doit pas être oubliée dès lors que l’on constate une reprise de la croissance.

Nous croyons dans la proposition que nous faisons, monsieur le président, et nous sommes prêts à continuer à y travailler avec vous. Elle pourrait en effet simplifier la définition des objectifs et leur vérification. Mais cela doit se faire dans le cadre d’un mode de gouvernance révisé : des échanges, à tout le moins, sont nécessaires avec les représentants des collectivités territoriales et l’ensemble de la sphère sociale.

Par ailleurs, le rapport n’évalue pas les effets plus ou moins positifs des politiques de l’emploi ; nous constatons simplement les dépenses supplémentaires effectuées dans ce domaine. Des travaux sont en cours qui portent sur l’impact des mesures de soutien à l’emploi, dont on peut globalement estimer que le rapport coût-efficacité n’est pas très satisfaisant. Nous avons, là aussi, des marges de progression – tous les travaux de la Cour notamment le démontrent.

Quant aux sous-budgétisations, nous les évaluons à 2 milliards d’euros. Cette estimation est à peu près constante. Bien entendu, nous n’apprécions guère cette pratique, qui porte presque toujours, du reste, sur les mêmes crédits. Si des « opérations vérité » sont menées dans ce domaine, nous ne pourrons que les approuver car ces sous-budgétisations nuisent un peu au suivi de l’exécution des dépenses. Elles sont tellement évidentes que l’on sait qu’il faudra de toute façon les compléter.

S’agissant des émissions de dette, nous ne contestons pas l’utilisation par l’Agence France Trésor des émissions sur souche ancienne ; ce n’est pas le problème. Mais, dès lors qu’elles font apparaître une évolution de notre endettement inférieure au montant du déficit – ce qui peut paraître surprenant –, nous avons souligné qu’il fallait prendre garde de ne pas interpréter cette pratique comme une amélioration de notre situation d’endettement. Quant à la question de savoir si la comptabilité générale apprécie correctement ce type de mouvement, nous ne pouvons pas y répondre car nous ne sommes pas entrés dans ce raisonnement. Toutefois, cette pratique n’est pas propre à notre pays, même si, en 2015, elle a pris, en France, des proportions beaucoup plus importantes que les années précédentes et qu’elle a tout de même un effet sur le montant total de notre dette. Ce que nous disons, c’est qu’il ne faut pas se tromper sur la signification du ralentissement de l’augmentation de la dette.

Enfin, nous n’avons évidemment pas pris en compte ni chiffré le « Brexit », puisque notre rapport a été approuvé avant le référendum britannique ; au reste, ce n’est pas à la Cour d’apprécier ses conséquences. Cependant, beaucoup d’économistes estiment que celles-ci peuvent être négatives pour le niveau de la croissance au Royaume-Uni et dans les pays proches, en particulier en France, donc pour le mouvement de reprise que l’on pouvait espérer en 2017 et 2018 et, par conséquent, pour le montant des recettes. Mais il semble que le processus soit long ; ces conséquences ne se feront donc pas forcément sentir dès 2016, voire en 2017. En somme, il est encore trop tôt pour apprécier les conséquences du « Brexit » sur notre schéma de finances publiques.

M. Raoul Briet, président de la première chambre. S’agissant de 2015, l’impact du PIA sur les soldes a été une nouvelle fois évoqué. Ce point, qui passionne, a été examiné dans le rapport sur le budget de l’État. Dès lors que l’on est en comptabilité budgétaire, l’année où il existe un PIA, le solde budgétaire apparent se dégrade fortement, et il s’améliore par contraste l’année suivante, en l’absence d’un tel programme. Mais tout cela procède, pour l’essentiel, d’un versement de l’État à des opérateurs publics et n’implique pas une sortie de fonds de la part du Trésor public. C’est pourquoi nous avons choisi, dans le rapport sur le budget de l’État, de retraiter les résultats apparents pour neutraliser l’impact du PIA d’une année sur l’autre. La comptabilité nationale induit moins en erreur à cet égard, puisqu’elle neutralise cette opération en faisant apparaître un enrichissement des ODAC quand l’État paraît s’appauvrir. Ainsi, on voit bien qu’en 2015 l’amélioration du solde État-ODAC est bien plus faible que celle du seul solde budgétaire de l’État, qui tenait compte du non-renouvellement du PIA d’une année sur l’autre.

J’ajoute que cette question a également une incidence sur le programme d’économies. On prête notamment au PIA la vertu d’échapper à la régulation budgétaire. Or, dans son plan d’économies, le Gouvernement propose de réaliser des économies sur le rythme de ses décaissements – économies qui n’en sont pas puisque les crédits restent ouverts et sont uniquement reportés. D’une certaine manière, les ressources des opérateurs au titre du PIA échappent au cadre du budget général, mais elles n’échappent pas à la régulation budgétaire.

M. le président Gilles Carrez. Nous avons observé, dans le décret d’avance, une connexion entre les redéploiements budgétaires et l’utilisation des lignes des PIA : la perméabilité est de plus en plus importante.

M. le président de la première chambre. Certes. S’agissant de 2016, nous avons évalué les économies en fonction de la situation de chacune des grandes administrations publiques. En ce qui concerne les collectivités territoriales, nous démontrons le caractère conventionnel du postulat du Gouvernement, selon lequel la baisse des dotations globales conduit à une baisse équivalente des dépenses des collectivités. Au vu de 2015, nous n’avons pas de raison d’en douter ; nous l’avons donc considéré ainsi dans les mesures d’économie de cette année. En ce qui concerne les administrations de sécurité sociale, la récente Commission des comptes n’a pas émis de doutes sur les équilibres prévisionnels de 2016, notamment sur l’ONDAM, qui devrait pouvoir supporter le relèvement de la valeur du point. Nous relevons, en revanche, un manque d’économies sur l’Unédic. En ce qui concerne l’État, nous raisonnons sur la dépense sous enveloppe ou sous norme en valeur d’une manière, je crois, très documentée et précise. Vous observerez du reste que, dans la réponse du Gouvernement, ce point ne donne lieu à aucune remarque ou contre-argumentation spécifique. Nous estimons ainsi que, globalement, l’effort d’économie est réel, mais qu’il représente les deux tiers de celui qui est affiché.

S’agissant de la dette, nous ne contestons pas le bien-fondé de la politique d’émission ; nous exposons les conséquences du ressaut qu’elle a connu en 2015, et qui s’atténuera probablement en 2016. En comptabilité budgétaire, cette pratique conduit à reporter les charges d’intérêts sur les exercices ultérieurs ; en revanche, en comptabilité nationale, la totalité du coût est pris en charge sur l’exercice – il n’y a donc pas de biais. Cependant, le stock de dette diminue à la fin de 2015, du fait de ce recours accru à la politique de prime à l’émission.

Enfin, je veux rappeler que le programme de stabilité prévoit, pour 2017, une dépense publique stable – zéro volume – alors que, selon la tendance, elle augmenterait de 1 %. Passer de 1 % à zéro nécessitera des efforts d’autant plus importants qu’il faudra financer des mesures supplémentaires d’un montant de 6 milliards. Telle est l’équation budgétaire de la loi de finances pour 2017 : nous ne disons rien de moins et rien de plus.

M. Charles de Courson. Si la Cour analyse de manière réaliste l’écart existant entre le chiffrage gouvernemental et les économies réelles en ce qui concerne l’État et les ODAC, en revanche, il me semble qu’elle commet une erreur de méthode s’agissant des collectivités territoriales, puisqu’elle a considéré que les 3,5 milliards d’économies étaient réalisées.

M. le Premier président de la Cour des comptes. Non, nous avons usé d’une petite précaution de langage à ce sujet.

M. Charles de Courson. Toujours est-il que, dans le tableau qui figure page 127 du rapport, l’estimation de la Cour est de 3,5 milliards, alors que l’ordre de grandeur des économies réelles est plus proche d’1,2 ou 1,3 milliard.

M. le Premier président de la Cour des comptes. Nous avons toujours dit qu’une réduction de 3,5 milliards des dotations n’entraînait pas automatiquement une réduction équivalente de la dépense.

M. le président de la première chambre. La baisse que le Gouvernement avait prévue dans le budget de l’État se vérifie. Or, il a toujours fait le choix de mesurer l’effort à travers ce budget plutôt qu’à travers l’impact de la baisse des dotations sur les dépenses des collectivités. Il se trouve qu’en 2015, l’investissement local a continué de baisser et que les dépenses de fonctionnement ont progressé moins rapidement. Cela ne paraît donc pas complètement déraisonnable.

M. le président Gilles Carrez. Parmi les éléments concernant l’objectif d’évolution de la dépense locale (ODEDEL) qui nous ont été présentés hier au Comité des finances locales, l’évolution des dépenses de fonctionnement en valeur courante par rapport à 2014 est de plus 1,7 % – la prévision était de 2 %. Pourquoi l’estimez-vous, dans votre rapport à 1 % ?

M. Éric Dubois, conseiller maître à la Cour des comptes. Nous considérons ces dépenses en comptabilité nationale, c’est-à-dire que nous ne prenons en compte que la masse salariale et les achats de biens et de services.

M. le Premier président de la Cour des comptes. En effet, le périmètre n’est pas le même ; nous y reviendrons dans le rapport sur les finances locales.

M. le président Gilles Carrez. C’est un point très important, car on espérait plus ou moins que la baisse des dotations pèserait sur les dépenses de fonctionnement. Il semble que cette mesure ait eu quelque efficacité de ce point de vue ; il faudrait bien l’expliciter.

M. le Premier président de la Cour des comptes. En effet, cela joue un peu, y compris sur les dépenses de personnel.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 5 juillet 2016, la commission examiné un rapport d’information sur le débat d’orientation des finances publiques (Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale).

M. le président Gilles Carrez. Nous sommes réunis pour examiner le rapport d’information relatif au débat d’orientation des finances publiques de notre Rapporteure générale. Au vu du rapport qu’elle nous a présenté la semaine dernière sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015, celui-ci devrait être excellent.

Je n’ai toujours pas vu le rapport du Gouvernement ! Il me semble pourtant qu’il devait, en vertu de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), être remis avant la fin de la session ordinaire.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Je vais en parler, monsieur le président.

M. le président Gilles Carrez. Rappelons que l’Assemblée nationale a adopté hier soir le projet de loi de règlement pour 2015.

Mercredi dernier, nous avons entendu le Premier président de la Cour des comptes s’exprimer à propos de la situation et des perspectives des finances publiques. Le Gouvernement devrait pour sa part nous remettre un rapport dans les prochaines heures. En attendant, c’est notre Rapporteure générale qui sera la première – je l’en remercie et l’en félicite – à présenter un rapport sur la question. Peut-être le Gouvernement va-t-il s’en inspirer !

Mme Marie-Christine Dalloz. Peut-être même attendait-il le rapport de Mme la Rapporteure générale pour établir le sien… !

M. Charles de Courson. Un délai est-il prévu pour le dépôt du rapport du Gouvernement ?

M. le président Gilles Carrez. La Rapporteure générale va aborder ce point dans un instant.

Mme la Rapporteure générale. Effectivement, nous n’avons pas reçu le rapport du Gouvernement ; je préfère donc éviter de vous distribuer des documents aujourd’hui – je ne voudrais pas que des chiffres non stabilisés soient diffusés. Cependant, je vous le confirme, l’article 48, alinéa 1er, de la LOLF dispose qu’« en vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année suivante par le Parlement, le Gouvernement présente, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques ».

M. Dominique Lefebvre. Un rapport sur l’évolution de l’économie nationale a été déposé : je l’ai lu !

Mme la Rapporteure générale. Vous parlez d’une annexe du rapport établie par l’INSEE ; ce n’est pas le rapport du Gouvernement proprement dit.

M. Charles de Courson. Le débat d’orientation budgétaire ne donnant pas lieu à un vote, un recours est-il possible ? Autrement dit, le Gouvernement peut très bien ne pas respecter l’article 48… Nous soulèverons la question à la fin de l’année, lorsque nous saisirons le Conseil constitutionnel de la loi de finances initiale pour 2017 ; ce sera amusant…

Mme la Rapporteure générale. Je vous propose d’avancer, même en l’absence de rapport du Gouvernement. Le Parlement est toujours libre de débattre de l’orientation des finances publiques à partir de ses propres éléments.

Le premier tableau que je vous présente récapitule l’évolution de l’ensemble des paramètres depuis 2012, constatés en exécution ou, pour l’exercice budgétaire 2016, tels qu’ils ressortent de la loi de finances initiale et des hypothèses qui la fondent : le niveau du déficit exprimé en points de produit intérieur brut (PIB) qui est réduit de 3,6 % en exécution 2015 à 3,3 % dans la loi de finances pour 2016 ; le montant des dépenses publiques qui est passé, sur la même période, de 1 243 milliards d’euros à 1 257 milliards ; celui des recettes publiques qui a progressé de 1 166 milliards d’euros à 1 184 milliards ; le solde des finances publiques s’est établi ainsi à 77,5 milliards d’euros en exécution en 2015 et a été fixé à 73,1 milliards dans la loi de finances pour 2016 ; le taux de croissance du PIB a atteint 1,3 % en 2015, il devrait être de 1,5 % en 2016 ; le taux d’inflation était nul en 2015, il est prévu à 1 % par la loi de finances pour 2016.

Les hypothèses retenues pour construire cette dernière ne sont plus toutes d’actualité. Les principaux changements concernent les dépenses, puisque nous avons dû intégrer un certain nombre de dépenses nouvelles, et l’inflation, puisque nous avions retenu l’hypothèse qu’elle serait de 1 %. Évidemment, cela a quelques conséquences sur la situation des finances publiques.

Pour atteindre nos objectifs de déficit public, le pilotage se fait essentiellement via la dépense publique : je le rappelle, 1 257 milliards d’euros de dépenses publiques, dont 504 milliards d’euros pour l’État et ses opérateurs, 525,2 milliards d’euros pour les administrations de sécurité sociale et 227,6 milliards d’euros pour les collectivités locales. Ce qui est pilotable, ce sont les crédits ouverts pour l’État, hors dépenses de personnel, qui représentent 190,7 milliards d’euros.

Au 1er juillet 2016, sur ces 190,7 milliards d’euros, 10,7 milliards d’euros étaient mis en réserve : 9,3 milliards d’euros ont été mis en réserve initialement ; 1,8 milliard d’euros de crédits reportés ont été gelés au mois d’avril dernier ; 198,9 millions d’euros de crédits mis en réserve ont été définitivement annulés par le dernier décret d’avance ; 225 millions d’euros ont fait l’objet de dégels en cours de gestion. Sont ainsi disponibles 180 milliards d’euros, comme l’indique le tableau qui récapitule, mission par mission, les crédits de paiement votés en loi de finances initiale, les crédits ouverts et les crédits disponibles au 1er juillet, tableau que vous retrouverez, en détail, dans mon rapport écrit.

Quelles sont nos perspectives pour 2017 ? Nos hypothèses – en fait, celles du programme de stabilité – sont globalement en ligne avec celles des principales institutions et des principaux organismes de prévision : l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Fonds monétaire international (FMI), l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la Banque de France, etc.

Je ne suis pas certaine que les différents organismes confirment tous leurs prévisions ; ainsi, la Commission européenne vient de revoir les siennes. Cela étant, nous restons en ligne avec le consensus des différents organismes.

La note de conjoncture de l’INSEE parue au mois de juin laisse supposer que la baisse du chômage et la hausse du taux de marge des entreprises se poursuivront.

J’en viens à nos calculs pour 2017 ; l’exercice est plus périlleux, puisque nous essayons de nous projeter à la fin de cette année 2016 pour anticiper ce que seront alors les perspectives pour l’année 2017. Des mesures nouvelles de baisse des recettes sont annoncées à hauteur de 8,4 milliards d’euros, tandis que les dépenses seraient supérieures de 4,3 milliards d’euros en 2017.

Les mesures nouvelles de baisse d’impôt s’expliquent à hauteur de 5 milliards d’euros à terme, en comptabilité nationale, par les mesures prévues dans le cadre du pacte de responsabilité, déjà annoncées mais pas encore votés, et de 2,4 milliards d’euros par des mesures hors pacte.

M. le président Gilles Carrez. Vous raisonnez donc en comptabilité nationale, pas en termes budgétaires.

Mme la Rapporteure générale. Je m’en tiendrai à la comptabilité nationale, sans m’aventurer dans les sables mouvants de la comptabilité budgétaire, car j’ai un peu de mal à m’y repérer.

M. le président Gilles Carrez. Ces sables mouvants ne se traduiront pas moins par de nombreux décaissements en 2018 !

Mme la Rapporteure générale. Je détaille donc les raisons pour lesquelles les recettes seraient moindres : la hausse du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui serait porté à au moins 7 % de la masse salariale, conformément à un engagement présidentiel, mais je parle là en comptabilité nationale ; une baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) acquitté par les PME ; une mesure d’allégement pour les artisans qui ne bénéficient pas du CICE ; une baisse de l’impôt sur le revenu pour les ménages d’un montant de 2 milliards d’euros – hypothèse haute – si la croissance est de 1,7 % ; une prolongation du suramortissement ; une moindre contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques, annoncée au dernier congrès des maires.

M. Philippe Vigier. Cette baisse de 2 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu, si la croissance est de 1,7 % en 2017, ne pourra être constatée qu’à la fin de l’année 2017. C’est un peu alambiqué…

Mme la Rapporteure générale. C’est bien pour cela que j’ai prévenu que l’exercice était périlleux… J’ai repris ce qui avait été annoncé dans une interview, qui parlait d’une prévision de croissance. Maintenant, si vous le souhaitez, vous pouvez soustraire ces 2 milliards et considérer que les recettes seront moindres de 6,4 milliards d’euros.

M. Philippe Vigier. Il n’y avait rien de polémique dans ma remarque.

Mme Véronique Louwagie. Vous dites que les moindres recettes s’expliquent à hauteur de 5 milliards d’euros par les mesures prévues dans le cadre du pacte de responsabilité, déjà annoncées mais pas encore votés, et de 2,4 milliards d’euros par des mesures hors pacte. Cela fait 7,4 milliards d’euros, il manque un milliard d’euros.

Mme la Rapporteure générale. Parce que j’ai pris en compte la moindre contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques.

M. le président Gilles Carrez. La contribution au redressement des finances publiques est un prélèvement sur recettes.

Mme la Rapporteure générale. En effet, et elle serait d’un milliard d’euros au lieu de 2 milliards d’euros pour le bloc communal. J’ai donc ajouté ce montant d’un milliard d’euros aux autres pour parvenir à un total de 8,4 milliards d’euros.

M. Dominique Lefebvre. À quoi correspondent les 2,4 milliards d’euros hors pacte ?

Mme la Rapporteure générale. Il pourrait s’agir de la baisse de l’impôt sur le revenu et de la prolongation du suramortissement, qui représente 400 millions d’euros.

M. Dominique Lefebvre. Qu’est-ce qui vous permet de dire que ce sera en dehors des 5 milliards d’euros prévus dans le cadre du pacte de responsabilité ? Rien…

Mme la Rapporteure générale. J’ai bien précisé, en préambule, que faute d’informations du Gouvernement…

M. Dominique Lefebvre. J’en profite pour préciser que le problème s’est posé l’année dernière. Nous avions notamment mis en place le suramortissement. Aussi, pour respecter l’enveloppe prévue, nous avons différé de trois mois l’allégement des cotisations familiales. Autrement dit, cette possibilité a déjà été utilisée.

Mme la Rapporteure générale. Je le répète : tout mon propos est au conditionnel, et repose sur des hypothèses qui peuvent évoluer. Je ne peux donc vous répondre plus avant sur ce point.

M. Dominique Lefebvre. Je m’arrête sur un point important pour la bonne compréhension de notre discussion. Si l’on en croit l’excellent entretien accordé par le Président de la République aux Échos, finalement, la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) serait abandonnée au profit d’une hausse du CICE. On voit très bien ce que cela fait en comptabilité budgétaire, mais, en comptabilité nationale, une hausse du CICE aurait-elle un impact en 2017 ou en 2018 ?

Mme la Rapporteure générale. En 2018.

M. Dominique Lefebvre. C’est bien ce que je dis.

M. Charles de Courson. En comptabilité budgétaire.

M. Dominique Lefebvre. Non, en comptabilité nationale, c’est bien en 2018, je viens de le vérifier avec Bercy, et c’est important par rapport à la trajectoire des déficits publics.

M. le président Gilles Carrez. C’est un point très important. Le remplacement d’une perte de recettes immédiate, en comptabilité nationale mais aussi en comptabilité budgétaire, à savoir la suppression de la dernière tranche de C3S, par une augmentation du CICE a un double avantage. Premièrement, il n’y a aucune sortie d’argent en cash en 2017. Deuxièmement, en comptabilité nationale, ce serait donc – je le découvre – reporté en 2018, ce qui va permettre de loger d’autres mesures, notamment le suramortissement, qui, s’il est compté en comptabilité nationale, a également un effet budgétaire dès 2017. Comme il reste encore de la place pour d’autres mesures, je pense que c’est là que seront logés les 2 milliards d’euros de la baisse de l’impôt sur le revenu. Grâce à un crédit d’impôt qui, en fait, affecte les années ultérieures, on loge des baisses effectives, en cash, immédiates. Je livre cependant une réflexion à la sagacité de Dominique Lefebvre : encore faut-il que ces 2 milliards d’euros de baisse de l’impôt sur le revenu fassent l’objet d’une mesure effective avant le 15 avril 2017. Il serait vraiment dommage que cela n’arrive qu’en septembre 2017…

M. Dominique Lefebvre. Merci de ce conseil politique…

Mme la Rapporteure générale. Les nouvelles mesures annoncées pourraient avoir un impact de 8 milliards d’euros en 2017. Le coût des mesures pour 2016 atteindrait 4,1 milliards d’euros et le coût additionnel total pour 2017 par rapport à 2016 4,3 milliards d’euros.

Mme Marie-Christine Dalloz. À combien avez-vous estimé le coût de la revalorisation des rémunérations des fonctionnaires ?

Mme la Rapporteure générale. À 1,6 milliard d’euros.

Mme Marie-Christine Dalloz. La Cour des comptes retient le chiffre de 2,4 milliards d’euros.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons retenu 600 millions d’euros en 2016 et 1,6 milliard d’euros de plus en 2017, soit un total de 2,2 milliards d’euros. C’est le chiffre du Gouvernement.

M. Marc Goua. Le suramortissement a un effet sur l’impôt sur les sociétés de 2018. Il n’aura pas d’effet en 2017.

Mme la Rapporteure générale. Effectivement, nous pourrions présenter ces dépenses supplémentaires en distinguant comptabilité nationale et comptabilité budgétaire, en tenant compte de toutes les possibilités d’étalement, jusqu’à trois ans.

M. Charles de Courson. Parlez-vous des dépenses de toutes les administrations publiques : l’État, la sécurité sociale, les collectivités locales ?

Mme la Rapporteure générale. Oui. Nous pourrions effectivement préciser pour chaque dépense de quel côté elle tombe.

L’objectif de déficit public a été fixé à 2,7 % du PIB dans le programme de stabilité. Le déficit doit donc baisser de 15,9 milliards d’euros par rapport à celui constaté en 2015 pour que l’objectif de 2017 soit atteint.

Mme Marie-Christine Dalloz. Les dépenses publiques repartent à la hausse…

Mme la Rapporteure générale. Non. Cela ne représente que 1 % en volume.

M. Charles de Courson. Pour votre projection 2017 sur les recettes, vous retenez une élasticité de 1 ?

Mme la Rapporteure générale. Oui.

Je souhaite faire un point plus précis, à la suite d’une demande qui avait été formulée par Christine Pires Beaune, sur les dotations de fonctionnement et d’investissement des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), et la variation, depuis 2012, du montant globalement perçu, ainsi, par eux. Nous connaissons la part forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation de solidarité urbaine (DSU), la dotation de solidarité rurale (DSR) et la dotation nationale de péréquation (DNP). N’oublions pas, en ce qui concerne les investissements futurs, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et un certain nombre de subventions. Nous avons additionné tout ce que reçoivent les communes et les EPCI, en termes de péréquation, via le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), et de dotations versées par l’État, pour voir, département par département, ce que cela donnait.

Nous sommes ainsi parvenus à établir une carte des variations de 2012 à 2015, vous la trouverez dans mon rapport écrit. En vert, seront figurés les départements qui perçoivent globalement plus ; en violet, ceux qui perçoivent moins. Les communes et intercommunalités d’une grande majorité de départements métropolitains – nous n’avons pas reçu à ce stade de données fiables pour les départements et collectivités d’outre-mer – ont vu leurs dotations d’investissement significativement augmenter, ce qui a atténué la baisse des dotations de fonctionnement. Vous m’objecterez que nous additionnons des choux et des carottes…

Mme Marie-Christine Dalloz. Effectivement, ce n’est pas la même chose. Mélanger l’investissement et le fonctionnement en comptabilité publique…

Mme la Rapporteure générale. Je suis d’accord, madame Dalloz, mais les deux s’achètent toujours avec des euros ! Cela donne une vision des montants versés par l’État aux communes et aux intercommunalités dans les différents départements. Un tableau détaillé vous permettra, chers collègues, de prendre connaissance de la situation de toutes les communes et intercommunalités de vos départements respectifs. Avec un milliard d’euros supplémentaires injecté en 2016 dans l’économie française, grâce au Fonds de soutien à l’investissement public local (FSIL), cette carte de France devrait « verdir » un peu plus. Toutes les données vous seront communiquées, une fois que nous aurons vérifié certains points.

M. le président Gilles Carrez. Je vous annonce que pendant que la Rapporteure générale présentait ces éléments, nous avons reçu le rapport du Gouvernement. Il est en cours de distribution.

L’intérêt de cette présentation est de nous permettre de poser des questions précises au ministre lors du débat prévu jeudi matin, notamment sur l’effet budgétaire de la transformation en CICE de certaines mesures.

Mme la Rapporteure générale. J’ai bien fait de ne pas vous distribuer les diapositives de ma présentation, car là où j’indiquais 5 milliards de mesures nouvelles pour les entreprises, il nous est proposé, en comptabilité nationale, 0,8 milliard pour la seule année 2017…

M. le président Gilles Carrez. Je constate que la Rapporteure générale travaille dans des conditions de plus en plus difficiles !

M. Dominique Lefebvre. Il est vrai que recevoir à l’instant le rapport n’offre pas les conditions idéales pour débattre en commission. Ce document a manifestement été retravaillé suite aux importantes annonces du Président de la République sur les orientations prises.

Notre débat jeudi sera alimenté par celui qui s’est tenu hier sur la loi de règlement et par nos échanges sur l’exécution budgétaire de 2016. Il s’articulera autour des hypothèses macroéconomiques ; la Rapporteure générale nous a donné les éléments actuels du consensus, sachant que les hypothèses effectives seront établies au mois de septembre, au moment du débat sur le projet de loi de finances. Manifestement, il n’y a aucune raison de remettre en cause la prévision de croissance de l’INSEE pour 2016. Pour 2017, nous nous demandons si la croissance sera de 1,5 %, 1,6 % ou 1,7 % ; c’est ce qui déterminera les marges de manœuvre.

Dans notre situation, viser toutes les cibles en même temps conduirait probablement à les rater toutes. Lors de ce débat budgétaire, j’attends du Gouvernement qu’il hiérarchise les priorités et nous indique comment il entre dans l’exercice. Je me félicite que le Président de la République ait indiqué dans Les Échos que l’objectif de déficit nominal pour 2017 sera de 2,7 % du PIB. La priorité absolue est de tenir cet objectif de déficit nominal et de respecter la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques.

Cette priorité étant arrêtée, d’autres questions se posent. Tout d’abord, certaines annonces qui auront un impact en 2016 et 2017 doivent être intégrées en dépenses, ainsi que les engagements de baisse des prélèvements obligatoires. Il faut aller au terme du pacte de responsabilité et tenir l’objectif de 41 milliards de baisses de charges, quitte à évoluer dans la manière de l’atteindre, car la contrainte budgétaire reste forte, ainsi que la nécessité de redresser les finances publiques.

Que les 5 milliards prévus pour 2017 intègrent les mesures prolongées telles que les suramortissements ou les mesures nouvelles du type de la prime à l’embauche, et que l’on s’appuie sur le CICE – un outil qui a fait ses preuves – me paraît de bonne politique, nonobstant l’impact en comptabilité nationale, qui ne prête pas à débat. Une baisse du CICE ne pourrait s’envisager sans poursuite et amplification du mouvement, structurel, de baisse de l’imposition sur les entreprises, dont la Rapporteure générale a bien fait apparaître les effets sur leurs taux de marge.

Si la croissance s’avère plus élevée que celle prévue dans la loi de programmation, les débats porteront sur l’utilisation qui en sera faite : accélérer le désendettement ou réduire davantage le déficit. Il sera difficile d’expliquer que les efforts que nous avons demandés aux Français ne doivent pas faire l’objet d’une restitution lorsque les choses vont mieux. Le débat porte bien sur la pente de la trajectoire et sur la manière dont les résultats – retour de la croissance, augmentation des recettes – doivent être distribués.

Une fois ces choix hiérarchisés – objectifs de déficit à 2,7 % du PIB et baisse des prélèvements obligatoires, car la situation l’exige, et s’améliore –, restera le débat sur l’évolution des dépenses dans la norme et hors de la norme. Je ne sais si nous saurons à la fois tenir le déficit nominal à 2,7 %, baisser les prélèvements obligatoires, et tenir les objectifs de norme en dépenses, en particulier compte tenu des exigences du moment : défense, sécurité, crise migratoire.

Le débat aura lieu, et lorsque nous ferons le bilan, au terme de ce quinquennat, du respect des normes de dépenses et de l’évolution de la dépense publique, nous constaterons qu’il y a bien eu une rupture et un réel ralentissement de la dépense publique. C’est le rythme de ce ralentissement qui fera débat.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je voudrais souligner l’ingéniosité de notre Rapporteure générale ! Rédiger un rapport sans avoir celui du Gouvernement, en partant du programme de stabilité, qui a tout de même évolué au fil des lois de finances, c’est intéressant !

Il n’y a pas grand-chose à dire sur le taux de croissance : il paraît raisonnable de l’inscrire à 1,5 % en 2017, et nous allons tous espérer des recettes supplémentaires.

Ma grande crainte porte sur les 8,4 milliards de recettes en moins prévues en 2017. J’ai bien compris que c’était une erreur et qu’il ne fallait pas tenir compte de ce chiffre ; le Gouvernement nous en annoncera un nouveau, mais nous sommes habitués à ces « tripatouillages »… Le secrétaire d’État n’a pas du tout aimé que j’utilise ce terme lors du débat hier soir ; reste que l’on arrange les chiffres en fonction de ce que l’on veut leur faire dire.

Je crains fort que les dépenses supplémentaires dépassent largement les 4,3 milliards annoncés, car il ne se passe pas quinze jours sans que nous n’apprenions une nouvelle annonce par voie de presse… Il faudrait que nous les passions toutes en revue et que nous additionnions le coût de ces cadeaux préélectoraux.

Je signe des deux mains pour un déficit à 2,7 % en 2017, mais je n’y crois pas une seconde, et personne ne peut y croire. On ne cesse d’escamoter des dépenses. Madame la Rapporteure générale, les 22,5 milliards de coupons de dette que nous avons rachetés cette année sont-ils pris en compte dans les dépenses ? On nous annonce tellement de choses que plus personne ne s’y retrouve…

L’élasticité de 1 sur les recettes paraît plausible ; il y a donc des choses que nous pouvons valider… Mais nous avons de sérieux doutes sur la crédibilité des chiffres pour 2017.

Quant à votre travail sur les départements, j’étais presque sûre que vous alliez montrer qu’il y avait plus d’argent – plus d’investissements – pour une majorité des territoires. Vous additionnez les sommes qui ont été transférées aux départements via les communes, pour l’investissement. Aujourd’hui, la réalité est que toutes les communautés de communes, les communes et les départements, du fait de la contribution au redressement des finances publiques, sont mises à contribution dans des proportions difficiles à soutenir pour les départements. Nous aurons des surprises en 2016, et plus encore en 2017. Certains départements ne pourront plus faire face à leurs dépenses, ne serait-ce que pour financer le revenu de solidarité active (RSA), dépense obligatoire, je le rappelle.

Parallèlement, tous les préfets disent ne jamais avoir eu autant de moyens au titre de la DETR. C’est un vrai paradoxe : on déshabille Pierre pour habiller Paul. Les préfets ont des marges supplémentaires significatives pour la DETR. La chute de l’investissement est une réalité, mais il faut faire attention : les financements dans le cadre des fléchages DETR pour de l’investissement, ce n’est pas de la recette de fonctionnement permettant d’assurer le quotidien des communes et le remboursement des prêts contractés pour réaliser ces investissements.

M. Charles de Courson. Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants n’a pas critiqué les hypothèses macroéconomiques du Gouvernement pour 2016 ; elles nous paraissaient raisonnables en l’état actuel des connaissances. Il en va de même pour 2017, l’ordre de grandeur de la croissance sera de 1,4 % ou 1,5 %.

En revanche, l’inflation a été très surestimée pour 2015, puisqu’elle est pratiquement de zéro alors que nous avions retenu une hypothèse de 1 %. L’hypothèse implicite derrière la prévision d’inflation à 1 % en 2016 et 2017, c’est la remontée du prix de l’énergie. Je suppose que c’est celle que retiendra le Gouvernement ; je n’ai pas d’observations particulières là-dessus.

En revanche, comment justifier une remontée de moitié du taux de décroissance de la dotation globale de fonctionnement du bloc communal et maintenir à 9 % ou 10 % les départements et les régions, sachant que les départements sont ceux qui sont les plus en difficulté ? Il y a des communes et des intercommunalités en difficulté, mais le phénomène devient massif pour les départements.

Je ne sais pas si la Rapporteure générale a eu le temps de se pencher sur la question, mais constitutionnellement, réduire la baisse des dotations de ceux qui ont la plus grande autonomie fiscale et qui sont le moins en difficulté tout en maintenant à 10 % l’effort exigé des départements, qui sont le plus en difficulté, pourrait constituer une rupture d’égalité.

Il ne suffit pas de dire que l’on baisse les dotations aux collectivités territoriales de 3,5 milliards d’euros pour que cela devienne une économie. C’est une économie pour l’État, mais en est-ce pour les collectivités territoriales ? Pourrions-nous avoir, madame la Rapporteure générale, l’analyse entre les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’investissement du bloc communal ? En comptabilité nationale, ce n’est pas très difficile : sur les 77 milliards de déficit dans l’exécution du budget de l’État et des organismes divers d’administration centrale (ODAC), 52 à 53 milliards correspondent à du déficit de fonctionnement. Et pour la sécurité sociale, c’est à 100 % du déficit de fonctionnement…

Depuis quelques mois, nous voyons se multiplier les chèques sans provision, ou une forme encore plus subtile : les chèques différés, autrement dit des traites que l’on paiera plus tard. C’est le cas du CICE ; loin de moi l’idée de critiquer le passage de 6 % à 7 %, mais ce fonctionnement est aberrant.

J’espère que la Rapporteure générale évoquera également tout le volet des sous-évaluations systématiques d’un certain nombre de dotations budgétaires. Depuis des années, la commission des finances demande au Gouvernement de doter correctement les opérations extérieures (OPEX), les centres d’hébergement d’urgence, mais chaque année, il manque 2 ou 3 milliards.

M. le président Gilles Carrez. C’est en effet l’estimation de la Cour des comptes pour 2016.

M. Charles de Courson. Enfin, je voudrais être éclairé sur la dette publique. La comptabilité « maastrichtienne » retient la valeur de remboursement, mais en comptabilité nationale, comment la réémission des coupons anciens est-elle traitée ? Il me semble nécessaire de passer des provisions, car nous perturbons complètement les indicateurs.

M. Marc Goua. Je remercie Marie-Christine Dalloz d’avoir finalement rendu hommage à l’action du Gouvernement… Ce pays a un problème d’investissement, tant au niveau des entreprises, de l’État que des collectivités. Nous avons presque toujours privilégié les dépenses de fonctionnement, alors que nous connaissons les soucis que cela pose. Qu’une orientation ait été donnée afin de privilégier les économies de fonctionnement et dégager des moyens pour l’investissement me semble pertinent pour l’avenir. Je crois que ce virage, bien que difficile, est vertueux.

Mme Véronique Louwagie. Madame la Rapporteure générale, vous avez comparé 2017 à ce qui a été voté en loi de finances pour 2016. En revanche, pour le déficit, vous nous avez présenté l’objectif 2017 par rapport au déficit 2015, indiquant que le déficit doit baisser de 15,9 milliards d’euros pour atteindre l’objectif de 2017. En rapportant 2017 à 2016, la diminution du déficit devrait atteindre 11,5 milliards d’euros. Il faut établir les comparaisons sur les mêmes années.

Il a beaucoup été question de l’effet différé de décisions prises, d’impacts qui ne seront pas mesurés en 2017 mais pourraient avoir des effets sur les années ultérieures. Il serait intéressant d’avoir une projection chiffrée de tous ces impacts au 31 décembre 2015, au 31 décembre 2016, au 31 décembre 2017 et au 31 décembre 2018.

Vous avez estimé les dépenses supplémentaires à 4,3 milliards d’euros pour 2017. J’ai bien entendu que d’autres éléments figurent dans le rapport du Gouvernement ; mais si j’ai bien compris, ils concernent les recettes. Cette prévision d’évolution des dépenses me laisse dubitative. Rappelons que les mesures d’économies pour 2015 avaient été chiffrées à 18,1 milliards ; or la Cour des comptes les a finalement estimées à seulement 12 milliards, soit les deux tiers du total escompté.

De plus, vous n’abordez pas le déficit de la convention sur l’assurance chômage de l’Unédic, qui représente 800 millions d’euros pour 2016 et qui aura également des effets en 2017.

M. Éric Woerth. Comme pour les prévisions météo à plus d’une semaine, faire un débat d’orientation budgétaire pour une année d’élection présidentielle est d’une grande audace. Les questions que nous soulevons sont majeures et concernent, comme toujours, les hypothèses macroéconomiques. Le taux de croissance retenu est plutôt prudent. S’agissant de l’inflation, l’action de la Banque centrale européenne (BCE) finira bien par se traduire par une inflation plus élevée, mais je ne sais pas quel sera l’impact du « Brexit ».

Tout cela est très incertain, l’univers macroéconomique est extrêmement instable, et le contexte politique rend ce débat d’orientation budgétaire pratiquement impossible. Nous voyons dans les prévisions que des dépenses supplémentaires – je ne sais pas si l’on peut appeler cela des cadeaux – sont prévues. Qu’il s’agisse de dépenses fiscales ou de dépenses directes, il est très difficile d’en évaluer le coût. Vous les estimez à 8 milliards, nous ne savons pas si c’est le bon chiffre, mais vous avez au moins le mérite de tenter de les évaluer. Mais nous voyons aussi que le débat, un peu technique, sur le CICE et la C3S aura un impact considérable.

La réduction du déficit et la baisse des dépenses ont leurs limites. Les politiques qui ont été employées, faute de mieux, tendent à serrer les dépenses. Je ne dis pas que le ministère du budget n’est pas honnête : il essaie vraiment de le faire par tous les moyens possibles. Mais le train de l’État va vite, et ses dépenses ne peuvent être réduites uniquement en allant chercher des réductions ici ou là ou en gelant ou « sur-gelant » les dépenses. Il est évident qu’il faut réformer les politiques elles-mêmes, et nous voyons bien que nous atteignons très vite ces limites.

Nous pouvons débattre indéfiniment, la seule clé pour réduire durablement le niveau de dépenses publiques est le périmètre, le contenu de la dépense. Aujourd’hui, nous nous livrons à un exercice conjoncturel et politique.

M. Éric Alauzet. Madame la Rapporteure générale, la différence entre votre estimation du coût des nouvelles mesures annoncées – 8 milliards en 2017 – et celle du Gouvernement – moins d’un milliard – doit avoir une explication simple. Ainsi, les 5 milliards de C3S étaient déjà annoncés et pris en compte dans l’objectif de déficit de 2,7 %.

M. le président Gilles Carrez. Si ce n’est que l’on annonce toujours 5 milliards pour les entreprises… Autrement dit, le chiffre global de 41 milliards reste inchangé, mais, par miracle, en 2017, la mesure ne coûte plus 5 milliards, mais 800 millions !

M. Dominique Lefebvre. On ne change pas une équipe qui gagne…

M. le président Gilles Carrez. On ne change pas un CICE qui gagne, j’ai bien compris !

M. Éric Alauzet. On ne cesse de marteler le chiffre de 50 milliards d’euros de baisse de la dépense publique sur trois années, 2014 excepté. Mais en réalité, où en sommes-nous réellement ? Ce n’est pas si simple. Du côté des collectivités locales, il y a une baisse nette des dépenses, mais du côté de l’État et des dépenses de solidarité, c’est une baisse corrigée de l’évolution naturelle de la dépense.

Mais, depuis quatre ans, des ajustements ont régulièrement été décidés en cours d’année, parce que les recettes fiscales n’étaient pas au rendez-vous lors des premières années, ou parce que l’inflation est faible ces dernières années. Cela oblige à prévoir des dépenses supplémentaires en cours d’année. J’aimerais savoir quel est l’impact de ces réductions de dépenses supplémentaires au regard des 50 milliards. Quelle a été la réalité sur les trois exercices passés, et quelle sera-t-elle pour 2017 ?

Je souhaite aussi interroger nos collègues de l’opposition sur les 100 milliards de baisses des dépenses qu’ils promettent. Dans quelles conditions ce chiffre est-il calculé ? S’agit-il de réductions nettes des dépenses pour les collectivités locales ? Et pour le budget de l’État et les dépenses sociales, prennent-ils également en compte les évolutions de dépenses naturelles, alors qu’ils ont régulièrement critiqué cette méthode ? S’agit-il de 100 milliards nets, pour toutes les dépenses ? Un minimum de transparence s’impose…

M. Éric Woerth. Nous avons toujours tendance à nous focaliser sur la valeur en euros de la réduction ; on peut aussi raisonner en pourcentage de PIB, ce qui permet d’intégrer la croissance et de se comparer avec les autres pays.

M. Patrick Hetzel. Le document de base sur lequel nous pouvons nous appuyer aujourd’hui est le rapport de la Cour des comptes que nous avons eu la semaine dernière. Il y est indiqué que les économies en dépenses sont nettement inférieures à ce qui avait été envisagé.

M. le président Gilles Carrez. Nous en avons débattu hier dans le cadre de l’examen du projet de loi de règlement, et le ministre a essayé de répondre à ces questions.

M. Patrick Hetzel. Une autre question importante concerne les objectifs de dépenses retenus pour 2017. Ils supposent une maîtrise sans précédent des dépenses publiques, que les mesures mises en œuvre à ce jour ne permettent pas d’atteindre. Madame la Rapporteure générale, pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Par ailleurs, nos comptes publics sont plus dégradés que la moyenne de l’Union européenne. Comment expliquez-vous cela ?

Enfin, la possibilité d’une évolution des taux d’intérêt est totalement passée sous silence. S’ils venaient à augmenter, le tableau que vous nous présentez va singulièrement se dégrader. Que proposez-vous pour y faire face ?

M. le président Gilles Carrez. Monsieur Hetzel, chacun des points que vous soulevez a été évoqué au cours du débat hier en séance publique. Force est de constater qu’il y a des divergences entre l’analyse du Gouvernement et celle de la Cour des comptes.

Mme Christine Pires Beaune. Je remercie la Rapporteure générale de cet exercice, même si j’ai cru comprendre que les recettes d’investissement par département restent à affiner. J’aurais aimé aller plus loin, et connaître le différentiel entre fonctionnement et investissement. En 2015, certaines collectivités ont vu leur dotation de fonctionnement augmenter, dans tous les départements. Je souhaite savoir quels sont les départements qui globalement ont perdu et ceux qui ont gagné.

Pour 2017, je crois savoir que le RSA est évalué à 17 milliards d’euros. Je rappelle qu’une proposition a été faite, et que l’Association des départements de France l’a majoritairement refusée – pour une histoire d’année de référence, semble-t-il. Le Gouvernement proposait de se fonder sur l’année N–1, comme cela se fait d’habitude. Certains départements ont donc des moyens puisqu’ils se permettent de refuser cela. Il s’agissait tout de même d’un bol d’air de 700 millions d’euros pour les départements.

Le Premier ministre a également évoqué un fonds d’urgence pour les départements les plus en difficulté, comme nous l’avions fait l’année dernière.

Enfin, madame Dalloz, ce qui a été ajouté à la DETR n’a pas été pris ailleurs aux départements ou aux régions. C’est du supplément qui a été donné aux communes. Je pense que c’est utile, car sur vos départements, la quasi-totalité de l’enveloppe est engagée.

M. le président Gilles Carrez. Je remercie tous les intervenants. Je ne sais si la Rapporteure générale peut répondre à ce stade, puisque nous ne pouvons pas nous appuyer sur des documents du Gouvernement.

Il semble que dans le programme de stabilité, la tranche 2017 du pacte de responsabilité ait été évaluée, en comptabilité nationale, à 5 milliards d’euros : 3,5 milliards au titre de la dernière tranche de suppression de la C3S, et 1,5 milliard au titre de l’impôt sur les sociétés. Et cela devient 800 millions d’euros. Tout en restant à 41 milliards pour les entreprises. Je dis bravo !

M. Charles de Courson. Champions !

M. Dominique Lefebvre. Mais c’est inscrit dans les comptes des entreprises !

M. le président Gilles Carrez. Ce sont les miracles de la comptabilité…

Nous devons maintenant décider l’autorisation de la publication du rapport de la Rapporteure générale.

M. Charles de Courson. J’y suis favorable, en soulignant que nous l’autorisons par anticipation…

La commission autorise la publication du rapport.

1 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

2 () Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, page 14.

3 () Les Échos, 30 juin 2016.

4 () Voir fiche 2.

5 () Avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

6 () INSEE, Informations rapides n° 141 du 30 mai 2016 : http://www.insee.fr/fr/themes/info-rapide.asp?id=26&date=20160530.

7 () Avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

8 () Point presse du 30 juin 2016 : http://www.imf.org/external/mmedia/view.aspx?vid=5012553394001.

9 () Les exportations françaises en direction du Royaume-Uni se sont élevées à 31,5 milliards d’euros en 2015 tandis que les importations se sont limitées à 19,5 milliards d’euros selon des informations publiées sur le site internet de la direction des douanes : http://lekiosque.finances.gouv.fr/pays/frame_pays.asp.

10 () Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2016.

11 () Valérie Rabault, Rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 et le programme national de réforme, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2740, 22 avril 2015 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2740.asp.

12 () Soit un déficit public inférieur à 69,9 milliards d’euros.

13 () Voir fiche 1.

14 () Voir fiche 3.

15 () Voir fiche 4.

16 () La LPFP 2014-2019 prévoyait initialement un écart de production de – 3,4 % du PIB potentiel en 2015. Cet écart de production est moins important que prévu puisqu’il ressort à – 2,8 % du PIB. En effet la croissance effective du PIB en volume a été plus élevée que prévu sur la période 2013-2015. La LPFP 2014-2019 prévoyait une croissance du PIB en volume de 0,3 % en 2013, 0,4 % en 2014 et de 1 % en 2015. Or, la croissance effective en volume du PIB a été de 0,6 % en 2013 et 2014, et 1,3 % en 2015.

17 () Avis n° HCFP-2016-2 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2015.

18 () Voir fiche 2.

19 () Les Échos, 30 juin 2016.

20 () Les crédits d’impôts dits « restituables », c’est-à-dire ceux qui présentent la forme d’une créance et peuvent donner lieu à un versement de la part du Trésor public en cas de dépassement de l’impôt dû, sont intégralement comptabilisés en tant que recettes et dépenses publiques. Cela a pour effet de relever à la fois les recettes et les dépenses publiques.

21 () Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2016.

22 () INSSE, Note de conjoncture, juin 2016 : http://www.insee.fr/fr/themes/theme.asp?theme=17&sous_theme=3&page=note.htm.

23 () ACOSS, Stat n° 232, Juin 2016 : http://www.acoss.fr/home/observatoire-economique/publications/acoss-stat/acoss-stat-n232.html.

24 () Les Échos, 30 juin 2016.

25 () Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

26 () http://www.strategie.gouv.fr/publications/rapport-2015-comite-de-suivi-credit-dimpot-competitivite-lemploi.

27 () Loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014.

28 () Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

29 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

30 () Les Échos, 30 juin 2016.

31 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

32 () Règlement (UE) n° 549/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux.

33 () Décret n° 2016-732 du 2 juin 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance.

34 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, article 12.

35 () L’information de cette mise en réserve a été délivrée à la Rapporteure générale par courrier daté du 6 avril 2016.

36 () Les « surgels » désignent les mises en réserve complémentaires intervenues en cours de gestion.

37 () Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2016, page 71.

38 () Au sein du nouveau programme Service public de l’énergie, porté par la mission Écologie, développement et mobilité durables.

39 () Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.

40 () Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2016, page 76.

41 () La revalorisation de ces prestations est déterminée sur la base de l’évolution des prix enregistrée en moyenne annuelle en juillet de l’année considérée.

42 () Avis du Comité d’alerte n° 2016-2 sur le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, 27 mai 2016.

43 () Programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, page 30.

44 () Rapport précité, page 79.

45 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

46 () Les Échos, 30 juin 2016.

47 () Voir la fiche sur le contexte macroéconomique du présent rapport.

48 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

49 () Le solde stabilisant de la dette publique représente le déficit public, exprimé en part de PIB, qui permet de stabiliser le poids de la dette publique dans le PIB.

50 () Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2016, page 27.

51 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

52 () Rapport précité, page 96.

53 () La répartition par département n’étant disponible que pour le montant global du FCTVA, il a été appliqué à ces données un ratio de 76,6 %, correspondant à la part du bloc communal dans les remboursements du FCTVA.


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