N° 1428 tome I - Rapport sur le projet de loi de finances pour 2014 (n°1395)




N
° 1428

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2014 (n° 1395)

TOME I

RAPPORT GÉNÉRAL

PAR M. Christian ECKERT

Rapporteur général,

Député

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

SYNTHÈSE 6

I. ASSAINIR LES FINANCES PUBLIQUES… 8

A. PERSÉVÉRER DANS LA RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC… 8

B. …DANS UN CONTEXTE DE CROISSANCE CERTES FAIBLE MAIS EN REBOND … 10

C. ... EN PRIVILÉGIANT LES ÉCONOMIES PLUTÔT QUE LES HAUSSES D’IMPÔTS 15

D. ... DANS UN CADRE BUDGÉTAIRE RENOUVELÉ, PLUS TRANSPARENT 21

II. … POUR PRÉSERVER NOTRE MODÈLE SOCIAL 24

A. LE NÉCESSAIRE REDÉPLOIEMENT DES DÉPENSES PUBLIQUES POUR UNE FRANCE PLUS SOLIDAIRE 24

1. Le soutien à l’emploi 25

2. Les mesures de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale 27

3. La jeunesse 29

4. Le renforcement des moyens en faveur de la justice et la sécurité 30

5. Engager la stratégie nationale de santé 31

B. RÉTABLIR LA PROGRESSIVITÉ DU SYSTÈME FISCAL 32

III. PRODUIRE EN FRANCE 34

A. UN PLAN D’INVESTISSEMENTS D’AVENIR DE 12 MILLIARDS D’EUROS POUR RENFORCER LA COMPÉTITIVITÉ AU SERVICE DE L’EMPLOI ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE 34

B. AMÉNAGER LA FISCALITÉ AU BÉNÉFICE DE LA PRODUCTION ET DE L’EMPLOI 39

IV. TOUT EN FACILITANT LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE 43

A. L’INTRODUCTION DE CRITÈRES D’ÉCO-CONDITIONNALITÉ DANS PLUS DE 50 % DES FINANCEMENTS DU PIA 2 43

B. UNE FISCALITÉ ÉCOLOGIQUE ASSUMÉE 44

AUDITION DE M. PIERRE MOSCOVICI, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES ET DE M. BERNARD CAZENEUVE, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DU BUDGET, SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014 47

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR L’AVIS DU HAUT CONSEIL SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014 77

ANNEXES 89

ANNEXE N° 1 : LE SOLDE PUBLIC EN 2013 ET 2014 89

ANNEXE N° 2 : LES RECETTES PUBLIQUES EN 2013 ET 2014 99

ANNEXE N° 3 : L’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE EN 2013 ET 2014 105

ANNEXE N° 4 : LA STABILISATION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT ET DE SES OPÉRATEURS 109

ANNEXE N° 5 : LA CONTRIBUTION DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 115

ANNEXE N° 6 : LA CONTRIBUTION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 133

ANNEXE N° 7 : LA CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 141

ANNEXE N° 8 : LA CONTRIBUTION DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE ET DE L’UNÉDIC AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 145

ANNEXE N° 9 : LA DETTE PUBLIQUE 153

ANNEXE N° 10 : LES MODALITÉS DE FINANCEMENT ET DE GOUVERNANCE DU 2ÈME PLAN D’INVESTISSEMENTS D’AVENIR 159

La politique budgétaire du Gouvernement et de la majorité poursuit quatre objectifs principaux.

Le premier est le rétablissement des finances publiques (I). Rendu nécessaire après une décennie de laisser-aller budgétaire, l’assainissement des comptes est non seulement un impératif économique – car le crédit qu’inspire l’État à ses créanciers profite à l’ensemble de l’économie – mais aussi un passage obligé pour renforcer la place de la France en Europe.

Le deuxième objectif est la préservation de notre modèle social (II). Le contexte budgétaire actuel offre une opportunité historique pour améliorer la redistribution opérée par l’État, en mettant prioritairement à contribution les ménages les plus aisés et en préservant, voire en augmentant, les dépenses qui bénéficient aux plus modestes et protègent leurs emplois.

Le troisième objectif de la politique budgétaire du Gouvernement et de la majorité d’inciter à produire en France (III). Pour cela, l’innovation – qui bénéficiera des investissements d’avenir – et les petites et moyennes entreprises
– dont la spécificité est prise en compte par les nouvelles mesures fiscales – bénéficient d’une attention particulière.

Enfin, le dernier objectif est de soutenir la transition énergétique (IV). Tant le second programme d’investissements d’avenir que les mesures fiscales prévues par le présent projet de loi tendent vers ce but.

Face au contexte économique troublé que nous connaissons aujourd’hui, le Gouvernement et la majorité ont mis la politique budgétaire au service d’une politique économique et sociale qui doit permettre demain, à chacun, de vivre de son travail et d’envisager plus sereinement l’avenir.

SYNTHÈSE

Le projet de loi de finances pour 2014 poursuit le redressement des finances publiques pour préserver notre modèle social, soutient l’appareil productif français pour développer l’emploi et l’investissement, afin de redonner du pouvoir d’achat aux ménages et de favoriser la transition écologique et énergétique.

Le déficit public effectif poursuit sa décrue et, après 4,8 % du PIB en 2012, il atteindrait 4,1 % du PIB en 2013 et 3,6 % du PIB en 2014. Cette diminution est permise par une baisse substantielle du déficit public structurel, de 5,1 % du PIB en 2011 à 1,7 % du PIB prévu en 2014.

ÉCART ENTRE SOLDE STRUCTUREL ET SOLDE EFFECTIF

(en % du PIB)

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

Solde structurel

– 5,1

– 3,9

– 2,6

– 1,7

Solde effectif

– 5,3

– 4,8

– 4,1

– 3,6

Il est vrai que le déficit structurel serait, en 2013, supérieur de 1 % du PIB à la prévision faite en loi de programmation des finances publiques.

SOLDE STRUCTUREL

(en % du PIB)

2012

2013 (p)

2014 (p)

Solde structurel prévu en LPFP

– 3,6

– 1,6

– 1,1

Solde structurel constaté ou révisé

– 3,9

– 2,6

– 1,7

Écart

– 0,3

– 1

– 0,6

Toutefois, cet écart serait dû à hauteur de seulement 0,4 % du PIB à un moindre effort structurel. Ce moindre effort serait compensé dès 2014, par un effort structurel de 0,9 % du PIB, contre 0,5 % du PIB prévu en loi de programmation. La réduction du déficit structurel, de 0,9 % du PIB, sera d’abord portée par les économies sur la dépense, pour 0,75 % du PIB, et, à titre subsidiaire, par les hausses d’impôts, pour seulement 0,15 % du PIB.

En 2014, la réduction du déficit structurel reposera donc l’an prochain à 80 % sur des économies demandées à l’ensemble des administrations publiques. Pour parvenir à cet objectif, le Gouvernement annonce vouloir réaliser près de 15 milliards d’euros d’économies par rapport à l’évolution tendancielle des dépenses publiques. Cela implique de réduire le rythme de croissance des dépenses publiques en volume à 0,4 % alors que celui-ci s’est élevé en moyenne sur la période 2010-2013 à 0,9 %. Concrètement, cela signifie que les dépenses publiques progresseraient de 5 milliards d’euros en volume entre 2013 et 2014 au lieu de 20 milliards d’euros en l’absence de mesures d’économies.

Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement souhaite faire contribuer à l’effort l’ensemble des sous-secteurs d’administration publique. Le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 proposent donc, tout en préservant les priorités du Gouvernement et de la majorité, de réaliser plus de 7 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs, 1,5 milliard d’euros d’économies sur les dépenses locales et près de 6 milliards d’euros d’économies sur les dépenses sociales. La contribution de chaque sous-secteur d’administration publique à l’effort de redressement budgétaire est commentée dans l’exposé général et détaillé en annexe.

TABLEAU DE SYNTHÈSE DES ÉCONOMIES SUR LES DÉPENSES PUBLIQUES EN 2014

(en milliards d’euros)

Types d’économies par rapport à la tendance

Montant des économies

Dépenses de l’État

6,0

dont stabilisation de la masse salariale

1,7

dont réduction des dépenses de fonctionnement courant

0,9

dont stabilisation des dépenses d’intervention

1,9

dont stabilisation des dépenses d’investissement

dont charge de la dette

dont PSR en faveur de l’Union européenne

0,7

0,5

0,3

Dépenses des opérateurs de l’État

1,1

dont baisse des subventions pour charges de service public

0,6

dont baisse des ressources affectées

0,5

Dépenses locales

Réduction des concours de l’État aux collectivités territoriales

1,5

1,5

Dépenses des administrations sociales et de l’Unedic

5,8

dont maîtrise des dépenses d’assurance maladie (ONDAM)

2,9

dont réforme des retraites de base et complémentaires

dont économies sur les prestations familiales

dont économies sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale

dont économies attachées à la négociation de la nouvelle convention d’assurance chômage

1,9

0,2

0,5

0,3

TOTAL

14,5

En matière de recettes, les mesures antérieures diminueraient le niveau des prélèvements obligatoires de 5,7 milliards d’euros. Les mesures prévues par le présent projet de loi et, à titre subsidiaire, par le projet de loi de financement de la sécurité sociale ont d’abord pour objet de compenser ces manques à gagner puis d’accroître de 2,7 milliards d’euros le niveau de prélèvements obligatoires.

L’EFFORT STRUCTUREL EN RECETTES EN 2014

(en milliards d’euros)

TOTAL

+ 2,7

Dont mesures antérieures

– 5,7

Dont mesures PLF 2014

+ 5,8

Dont lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales

+ 1,8

Dont mesures PLFSS

+ 0,8

*

* *

 

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

Solde structurel

– 5,1

– 3,9

– 2,6

– 1,7

Solde effectif

– 5,3

– 4,8

– 4,1

– 3,6

Écart structurel/effectif

0,2

0,9

1,5

1,9

Source : ministère de l’Économie et des finances ; article liminaire du présent projet de loi.

Le rapporteur général remarque que la réduction graduelle du déficit effectif ne doit pas conduire à ignorer la diminution nettement plus importante du déficit structurel.

L’écart entre déficit effectif et déficit structurel n’a, en effet, cessé de s’accroître depuis 2011, pour atteindre un niveau proche de 1,5 % du PIB en 2013, et qui pourrait s’élever encore en 2014, à hauteur de 1,9 %. Une telle évolution traduit la conduite d’efforts substantiels d’amélioration structurelle des comptes publics dans le contexte d’une croissance économique nulle en 2012 et probablement quasi-nulle en 2013.

Certes, comme l’illustre le tableau suivant, la diminution du solde structurel est, depuis 2012, inférieure aux prévisions faites en loi de programmation.

SOLDE STRUCTUREL

(en % du PIB)

 

2012

2013 (p)

2014 (p)

Solde structurel prévu en LPFP

– 3,6

– 1,6

– 1,1

Solde structurel constaté ou révisé

– 3,9

– 2,6

– 1,7

Écart

– 0,3

– 1

– 0,6

Source : ministère de l’Économie et des finances ; article liminaire du présent projet de loi.

Toutefois, l’analyse de ces écarts, éclairée par le tableau ci-après, conduit à nuancer ce constat sur deux points.

ÉCARTS ENTRE PRÉVISIONS EN LOI DE PROGRAMMATION
ET EXÉCUTION/PRÉVISIONS RÉVISÉES

(en % du PIB)

 

2012

2013 (p)

2014 (p)

Variation du solde structurel

– 0,3

– 1

– 0,6

Effort structurel

– 0,2

– 0,2

+ 0,4

Variation non discrétionnaire du solde structurel

+ 0,2

– 0,4

0

Effet base solde 2011

– 0,3

0

0

Source : d’après ministère de l’économie et des finances. Lecture : en 2012, le solde structurel a été inférieur de 0,3 % du PIB à la prévision faite en LPFP, l’effort structurel a été de 0,2 % du PIB, la variation non discrétionnaire du solde a eu un impact positif supérieur de 0,2 % aux prévisions et l’effet base lié au rebasage du solde en 2011 a un impact négatif de 0,3 % du PIB qui n’avait pas été anticipé.

D’une part, si les prévisions du Gouvernement pour 2013 et 2014 s’avèrent exactes, ces écarts seraient entièrement dus à des éléments non maîtrisés par les pouvoirs publics.

Ces écarts seraient dus, d’abord, à la variation non discrétionnaire du solde structurel. L’évolution du déficit structurel ne dépend pas, en effet, uniquement des décisions d’économies et de hausses d’impôts adoptées par les pouvoirs publics.

Le calcul du solde structurel nécessite de faire des hypothèses d’élasticité des prélèvements obligatoires et des dépenses d’indemnisation chômage, correspondant aux moyennes constatées sur les années passées. Or, l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance atteindrait 0,5 en 2013 (1) et serait donc inférieure à l’unité, qui correspond à sa moyenne de long terme. En conséquence, cette faible élasticité a conduit à la dégradation du déficit structurel, sans que celle-ci ne soit imputable aux décisions du Gouvernement et de la majorité.

Les écarts entre prévision et réalisation du solde structurel seraient dus, en second lieu, à la révision à la hausse du déficit structurel de 2011, pour 0,3 % du PIB.

D’autre part, le Gouvernement propose, pour 2014, d’accroître de 0,4 % du PIB l’effort structurel – la réduction du solde structurel dû aux décisions des pouvoirs publics – qui passerait de 0,5 % prévu en loi de programmation à 0,9 % du PIB. Cet effort supplémentaire permettrait de compenser entièrement les écarts, par rapport à la prévision, de 0,2 % du PIB constatés en 2012 et anticipés pour 2013.

En conséquence, sur la base des nouvelles prévisions du Gouvernement, l’écart qui devrait être constaté en 2014 entre la prévision de solde structurel de la loi de programmation et le solde structurel réalisé serait uniquement dû à des éléments ne dépendant pas du Gouvernement – la faible élasticité des prélèvements obligatoires en 2014, qui impacte la variation non discrétionnaire du solde, ainsi que la révision à la hausse du déficit structurel de 2011.

Compte tenu des résultats déjà obtenus en termes d’amélioration structurelle des finances publiques et de l’accroissement de l’effort structurel en 2014, nul ne peut aujourd’hui mettre sérieusement en doute la volonté du Gouvernement et de la majorité d’apurer sérieusement les passifs accumulés sur la décennie 2000.

Les prévisions macroéconomiques du présent projet de loi de finances pour les années 2013 et 2014 ont été révisées à la baisse par rapport à celles retenues en loi de programmation des finances publiques (LPFP) compte tenu de l’effondrement de la croissance en 2013. L’hypothèse retenue par le Gouvernement pour 2013 est de + 0,1 % (contre + 0,8 % en LPFP) et pour 2014 + 0,9 % (contre + 2 % en LPFP et + 1,2 % dans le programme de stabilité).

Néanmoins, le rapporteur général observe, au regard de la moyenne des prévisions des conjoncturistes réunis au sein du consensus Forecast, que la croissance économique française devrait connaître un rebond par rapport aux prévisions révisées de l’été. En effet, il ressort des prévisions du mois d’août 2013 que la croissance française était attendue à – 0,3 % en 2013 et à + 0,6 % en 2014. Toutefois, après avoir constaté le regain de croissance du deuxième trimestre 2013 (+ 0,5 %), la plupart des conjoncturistes ont révisé à la hausse leurs prévisions, la moyenne s’établissant, en septembre, à + 0,1 % en 2013 et + 0,8 % en 2014. Cette prévision moyenne est la même que celle retenue par le groupe technique au sein de la Commission économique de la Nation, réunie le 5 octobre 2013, pour confronter les prévisions de chaque organisme à celle du Gouvernement (2).

Les prévisions de croissance associées au projet de loi de finances pour 2014 sont très proches de cette moyenne, à savoir + 0,1 % en 2013 et + 0,9 % en 2014. L’ensemble de ces prévisions sont rappelées dans le tableau ci-après.

PRÉVISIONS DE CROISSANCE DU PIB

 

2013

2014

Prévisions associées à la loi de programmation des finances publiques de décembre 2012

0,8 %

2,0 %

Prévisions associées au programme de stabilité arrêt 2013

0,1 %

1,2 %

Prévisions moyenne du consensus Forecast août 2013

– 0,3 %

0,6 %

Prévisions moyenne du consensus Forecast septembre 2013

et du groupe technique de la Commission économique de la Nation

0,1 %

0,8 %

Prévisions associées au PLF 2014

0,1 %

0,9 %

Le rapporteur général se félicite du fait que le risque de récession pour 2013 soit enfin écarté et observe que la dernière prévision retenue dans le programme de stabilité par le Gouvernement pour 2013 est désormais partagée par la plupart des économistes de la place.

Il se félicite également du fait que sept conjoncturistes retiennent une hypothèse de croissance pour 2014 équivalente ou supérieure à celle retenue par le Gouvernement, l’OFCE, Barclays, UBS et la Deutsche Bank tablant sur une croissance de 1,0 à 1,3 % en 2014 comme le montre le graphique ci-après. Il souligne enfin que la fourchette de prévision de croissance pour 2014 est nettement plus resserrée que l’an dernier, ce qui conforte l’hypothèse d’un rebond possible.

CROISSANCE DU PIB EN FRANCE EN 2014

Prévision du gouvernement comparée aux prévisions du groupe technique (en %)

CROISSANCE DU PIB EN FRANCE EN 2014

Prévision du gouvernement comparée à une synthèse des prévisions du groupe technique (3)(en %)

Il ne pourra donc être reproché au Gouvernement de fonder son projet de budget sur des prévisions de croissance irréalistes. Le Haut Conseil des Finances publiques, dans son avis n° 2013-03 relatif aux projets de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 (4) a lui-même qualifié les prévisions de « plausibles » tant pour 2013 que pour 2014.

Sur le fond, ces prévisions sont fondées sur les observations suivantes. Malgré la contraction de l’activité l’hiver dernier (– 0,2 % au 4ème trimestre 2012 et au 1er trimestre 2013), l’orientation de l’activité apparaît maintenant nettement plus favorable (+ 0,5 % au 2ème trimestre 2013). Grâce à un environnement international plus attrayant, les entreprises françaises ont réussi à accroître leurs exportations de biens et services, ce qui a soutenu la production, et notamment l’industrie. Les ménages ont accru leurs dépenses de consommation (+ 0,4 % après – 0,1 % au 1er trimestre) tandis que les entreprises ont commencé à reconstituer leurs stocks (contribution de + 0,2 point de PIB à la croissance) et à stabiliser leurs investissements après une chute en 2012.

D’ici la fin de l’année 2013, le Gouvernement anticipe une croissance mondiale qui resterait modeste comme en 2012, et une activité toujours contractée en zone euro en raison de l’effort au désendettement public et privé et des problèmes de financement de l’économie dans des pays sous tension. C’est la raison pour laquelle il n’envisage pas, à ce stade, de réviser à la hausse l’hypothèse de + 0,1 % retenue dans le programme de stabilité.

Pour 2014, une accélération de l’activité est attendue aux États-Unis et dans la zone euro en raison du maintien de la politique monétaire accommodante de la FED et de la BCE et d’un effort de redressement des comptes publics plus modéré au sein de la zone euro. La demande mondiale adressée à la France se redresserait nettement (après + 0,7 % en 2013, elle passerait à + 4,8 %) entraînant une accélération des exportations des entreprises françaises.

Par ailleurs, l’ensemble des entreprises devrait bénéficier des premiers effets du CICE (crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi) qui favorise la compétitivité-prix tout en leur permettant de reconstituer leurs marges, affectées depuis la crise. Elles pourraient donc en profiter pour accroître leurs investissements sans creuser leur besoin de financement.

Le Gouvernement considère en outre que l’emploi repartirait progressivement. Il vise ainsi la création de 90 000 emplois marchands (après plus de 50 000 destructions en 2013 en glissement annuel) et la montée en charge des emplois d’avenir (100 000 fin 2013 et 150 000 fin 2014) ainsi que l’augmentation des volumes et des durées des contrats aidés dans le secteur non marchand. Enfin, il estime que la consommation des ménages repartirait en ligne avec le pouvoir d’achat en raison de l’amélioration progressive de l’emploi, des mesures de soutien votées par le Parlement dans le présent projet de loi de finances, ainsi que de la baisse des prix des produits importés et des services de télécommunication, notamment.

Ce cadrage macro-économique pour 2013 et 2014 est globalement en ligne avec la moyenne des prévisions du groupe technique participant à la Commission économique de la Nation, comme le montrent les graphiques suivants.

SCÉNARIO MACROÉCONOMIQUE EN FRANCE EN 2014

Prévisions du gouvernement comparées à une synthèse des prévisions du groupe technique (en %)

Consommation des ménages Investissement des entreprises (5) Demande mondiale adressée à la France

L’avis du HCFP observe toutefois que, dans le contexte de sortie de crise actuel, l’estimation des créations d’emplois retenue par le Gouvernement est « discutable », en particulier dans le secteur marchand, car la croissance pourrait se traduire davantage par un rattrapage de la productivité que par une augmentation de l’emploi, et les marges offertes par le CICE pourraient ne pas se traduire par de nouvelles créations d’emplois dans un premier temps. En outre, dans le secteur non marchand, l’hypothèse volontariste du Gouvernement, selon le HCFP, ne se réaliserait que si elle était parfaitement relayée par les employeurs locaux et associatifs. Le Haut Conseil en déduit un risque de surestimation de l’hypothèse de masse salariale, et par conséquent du rebond de la consommation des ménages et du niveau de recettes de CSG et de cotisations sociales.

Le Rapporteur général observe néanmoins que les prévisions du Gouvernement relatives aux créations d’emplois en 2014 sont, certes volontaristes, mais restent dans la fourchette des prévisions du groupe technique comme le montre les graphiques ci-dessous.

ÉVOLUTION DE L’EMPLOI TOTAL EN FRANCE EN 2014

Prévisions du gouvernement comparées aux prévisions du groupe technique (en %)

Le HCFP relève également des aléas à la baisse pesant sur la croissance (ralentissement observé dans les pays émergents, reprise des tensions financières dans la zone euro, hausse du prix du pétrole, incertitude de remontée des taux d’intérêt aux États-Unis) qui l’emporteraient sur les aléas à la hausse (amélioration des conditions de financement de l’économie européenne en raison de l’orientation annoncée de la BCE et avancée plus rapide en matière de gouvernance économique et financière européenne).

Le rapporteur général salue la prudence du HCFP et fait siennes l’ensemble des observations précitées. Toutefois, il constate que plusieurs conjoncturistes citent d’autres aléas à la hausse, non mentionnés par le HCFP, comme par exemple une reprise plus importante que prévue de l’investissement productif et de la reconstitution des stocks en raison de la reprise en cours et de l’augmentation de la demande mondiale adressée à la France. Un tel scénario pourrait alors compenser les incertitudes du HCFP pesant sur le redémarrage de l’emploi au niveau attendu par le Gouvernement.

VARIATION DES STOCKS EN FRANCE EN 2014

Prévisions du gouvernement comparées à une synthèse des prévisions du groupe technique (en %)

En conclusion, le rapporteur général considère que les prévisions de croissance et le scénario macro-économique sur lesquels sont fondés le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale sont réalistes, en étant tout à la fois prudent mais confiant dans la capacité de rebond de notre pays.

Conformément à la trajectoire annoncée lors de la présentation du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, le Gouvernement propose de redresser les comptes publics en 2014 en privilégiant les économies sur les dépenses plutôt que les hausses d’impôts.

Pour 2014, la réduction du déficit structurel atteindrait 18 milliards d’euros, soit 0,9 % du PIB (6), répartie :

– à hauteur de 15 milliards d’euros, soit 0,75 % du PIB, sur l’effort structurel en dépense ;

– à hauteur de 3 milliards d’euros, soit 0,15 % du PIB, sur l’effort structurel en recettes, contre 6 milliards d’euros, soit 0,3 % du PIB, prévu lors du débat d’orientation budgétaire des finances publiques de début juillet dernier.

● L’effort structurel en dépenses est prévu à 0,75 % du PIB en 2014, contre 0,1 % du PIB en 2012 et 0,2 % du PIB en 2013 selon les dernières estimations (7).

EFFORT STRUCTUREL EN DÉPENSE

(en % du PIB)

2012

2013 (p) 

2014 (p)

+ 0,1

+ 0,2

+ 0,75

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

En 2014, la réduction du déficit structurel – qui devrait passer de – 2,6 % du PIB à – 1,7 % du PIB – reposera donc à 80 % sur des économies demandées à l’ensemble des administrations publiques.

Pour parvenir à cet objectif, le Gouvernement annonce vouloir réaliser 15 milliards d’euros d’économies afin de limiter le rythme de croissance des dépenses publiques en volume à 0,4 % alors que celui-ci s’est élevé en moyenne sur la période 2010-2013 à 0,9 %.

La Cour des comptes considérait quant à elle, à l’occasion de son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques en juin 2013 (8), qu’il faudrait réaliser 13 milliards d’euros d’économies par rapport à la tendance, constatant que « Les économies réalisées en 2012 et prévues en 2013 représentent un montant total de 7 milliards d’euros chaque année. C’est donc un doublement qui est envisagé pour 2014 et 2015 ».

Comme d’habitude, la méthodologie utilisée pour évaluer l’effort d’économies sur les dépenses publiques repose sur la comparaison entre l’évolution tendancielle en volume de ces dépenses sur longue période (soit + 1,7 % par an en moyenne entre 2003-2012) et l’évolution en volume de ces dépenses telles qu’estimées par le Gouvernement compte tenu des mesures prévues en projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale (+ 0,4 %). Cette méthodologie, suivie par l’ensemble des gouvernements précédents, est celle traditionnellement prise en compte par la Commission européenne pour apprécier l’effort structurel en dépense d’un État. Concrètement, cela ne signifie pas que les dépenses publiques vont diminuer de 15 milliards d’euros par rapport à 2013, mais qu’elles progresseront beaucoup moins vite : si la croissance en volume des dépenses publiques est effectivement limitée à + 0,4 % en 2014 alors que le montant des dépenses publiques prévu pour 2013 s’élève à 1 181 milliards d’euros, celui-ci devrait progresser, hors inflation, de 5 milliards d’euros en 2014 au lieu de 20 milliards d’euros en l’absence de mesures d’économies.

Le rapporteur général considère que si l’on peut critiquer cette méthodologie pour son caractère théorique dans la mesure où elle dépend de l’hypothèse de croissance tendancielle retenue, l’on ne peut pas reprocher à l’actuel Gouvernement de la suivre puisqu’elle répond aux standards européens et permet en outre de comparer les efforts qu’il annonce avec ceux mis en exergue par les précédents gouvernements qui l’ont mise en œuvre.

Ainsi l’année 2014 constituerait en effet un tournant majeur dans l’histoire budgétaire française puisque, pour la première fois, le redressement des comptes publics reposerait à 80 % sur des économies en dépense. Rappelons que l’effort en dépense le plus élevé annoncé par le Gouvernement sous la précédente législature, a été celui énoncé dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, et ne s’élevait qu’à 55 % de l’effort structurel total (9). Cet objectif n’a d’ailleurs jamais été atteint puisque, en exécution, il est apparu que l’effort structurel réalisé en 2011 reposait presque exclusivement sur des hausses de prélèvements obligatoires comme l’a souligné la Cour des comptes (10).

Le partage de l’effort structurel entre recettes et dépenses en 2014 est conforme à la stratégie proposée par le Gouvernement et sa majorité dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 (11). Il a été collectivement fait le choix de privilégier d’abord un effort important en recettes en 2013, considéré par les économistes comme moins récessif qu’un ajustement abrupt sur les dépenses en période de stagnation, avant d’engager des réformes structurelles, source d’économies dès 2014, notamment dans le cadre de la modernisation de l’action publique (MAP).

Le partage de l’effort en dépense entre l’ensemble des sous-secteurs d’administration publique est également un point essentiel de la stratégie de retour à l’équilibre des comptes publics. C’est la raison pour laquelle le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 proposent plus de 7 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs, 1,5 milliard d’euros d’économies sur les dépenses locales et près de 6 milliards d’euros d’économies sur les dépenses sociales. Par rapport au DOFP, le Gouvernement retient donc 1 milliard d’euros d’économie supplémentaire sur les dépenses sociales.

Le détail de la contribution de chaque sous-secteur d’administration à l’effort de redressement des comptes publics est présenté en annexes mais le rapporteur général entend en souligner ici les principaux faits saillants :

– pour la première fois, l’ensemble des dépenses de l’État reculerait de 1,4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, en euros constants. Sous la précédente législature, elles progressaient en moyenne de 4,7 milliards d’euros par an, comme le montre le tableau ci-après. Sont néanmoins exclues de ce périmètre normé, les dépenses du deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA 2) et la contribution de la France au mécanisme européen de stabilité (MES), considérées comme des dépenses exceptionnelles dans la continuité de la pratique retenue par les précédents gouvernements.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SOUS PÉRIMÈTRE NORMÉ
ENTRE LA LOI DE FINANCES POUR 2013 ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014

(en milliards d’euros)

 

LFI 2013

LFI 2013

(format 2014)

PLF 2014

Écart

Dépenses nettes du budget général (1), hors dette et pensions, y compris taxes affectées aux opérateurs et organismes divers chargés d’une mission de service public, plafonnées en vertu de l’article 46 de la loi de finances pour 2012.

204,1

204,5

203,9

– 0,6

Prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne

19,6

19,6

20,1

+ 0,5

Prélèvement sur recettes en faveur des collectivités territoriales

55,7

55,7

54,3

– 1,5

Dépenses de l’État hors dette et pensions

279,4

279,8

278,4

– 1,5

Charge de la dette de l’État

46,9

46,9

46,7

– 0,2

Contribution CAS Pensions

45,2

45,2

45,4

+ 0,2

Dépenses nettes totales de l’État (hors MES et PIA 2)

371,5

371,9

370,5

– 1,4

(1) Dépenses du budget général de l’État hors crédits de la mission Remboursements et Dégrèvements.

ÉVOLUTION ANNUELLE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT
AU SEIN DU PÉRIMÈTRE NORMÉ DEPUIS 2007 (1)

(en milliards d’euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013 (p)

+ 0,8

+ 10,9

+ 1,3

+ 5,3

+ 5,2

– 0,256

+ 1,7

(1) Dépenses nettes totales du budget général et des prélèvements sur recettes en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales, hors dépenses exceptionnelles non comptabilisées dans la norme.

Source : rapports du Rapporteur général de l’Assemblée nationale sur les projets de loi de règlement depuis 2007.

– pour la première fois, les dépenses de l’État, hors charge de la dette et des pensions, reculeraient de 1,5 milliard d’euros alors qu’elles étaient simplement « gelées » depuis 2011. Il convient néanmoins de préciser que les chiffres présentés par le Gouvernement pour 2014 ne tiennent pas compte de la suppression d’une part de la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle en 2014 qui est compensée par un transfert de fiscalité de l’État vers les collectivités territoriales(12).

Compte tenu de la croissance tendancielle de ces dépenses (évaluées à environ 7 milliards d’euros), et de la nécessité de financer par redéploiements de crédits les priorités du Gouvernement, cela suppose de réaliser près de 9 milliards d’euros d’économies sur l’ensemble des concours de l’État, dont plus de 5 milliards d’euros sur les dépenses relevant des ministères (13).

Outre ces mesures d’économies, le Gouvernement a décidé de sécuriser la réalisation de cet objectif en portant le taux de mise en réserve des crédits hors titre 2 à 7 % contre 6 % en loi de finances initiale pour 2013 et un minimum de 5 % fixé par l’article 6 de la loi de programmation des finances publiques. La réserve de précaution s’élèverait ainsi à 7,6 milliards d’euros en crédits de paiement et 8,1 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Elle devrait donc permettre d’absorber « en gestion » les aléas à la hausse susceptibles de se produire au cours de l’année 2014, sans qu’il soit besoin de recourir à une loi de finances rectificative.

– pour la première fois, les concours de l’État aux collectivités territoriales (hors DGD relative à la formation professionnelle) seront réduits, au sein du périmètre normé, à hauteur de 1,5 milliard d’euros alors qu’ils étaient quasiment « gelés » depuis 2011 : la dotation globale de fonctionnement (DGF) sera ainsi diminuée de 588 millions d’euros pour les communes, de 252 millions d’euros pour les EPCI, de 476 millions d’euros pour les départements et de 184 millions d’euros pour les régions. Compte tenu des transferts de fiscalité prévus par ailleurs en faveur des départements et des régions (14), l’essentiel de l’effort de maîtrise de la dépense pèsera donc sur le bloc communal, dénoncé à multiples reprises pour son manque dans la gestion de ses dépenses de fonctionnement (15) ;

– conformément à l’engagement pris en loi de programmation des finances publiques, l’effort demandé aux opérateurs de l’État est accentué par rapport aux années précédentes puisqu’il s’élève à près de 1,2 milliard d’euros, dont 0,6 milliard d’euros affecté à la réduction du déficit budgétaire (16). Rappelons en effet que, comme l’a décrit le Conseil des prélèvements obligatoires dans un rapport publié le 4 juillet 2013 (17), sur la période 2007 à 2011, la croissance de la fiscalité affectée aux opérateurs de l’État s’est avérée particulièrement dynamique. Sur un périmètre constant, constitué des taxes affectées à la même entité
chaque année, la croissance de la fiscalité affectée s’est ainsi élevée à + 27,6 % (soit + 6,3 % par an) alors que l’ensemble des prélèvements obligatoires ont crû, pour leur part, de + 7 % sur la même période (soit + 1,7 % par an).

Dans un souci d’équité, le Gouvernement propose donc de faire peser sur les opérateurs de l’État une partie du financement de ses priorités grâce aux mesures d’économies suivantes : les subventions pour charges de service public, hors Universités et Pôle Emploi, sont globalement révisées à la baisse d’environ 0,6 milliard d’euros ; le mécanisme de plafonnement des taxes affectées prévu par l’article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 est étendu et le montant des plafonds abaissé jusqu’à 25 % pour certains opérateurs (18) ; enfin trois opérateurs ou organismes chargés d’une mission de service public subissent un prélèvement exceptionnel (90 millions d’euros pour le Centre national du cinéma et de l’image animée, 210 millions d’euros répartis entre les 6 agences de ressources de l’eau, et 170 millions d’euros prélevés sur les chambres de commerce et d’industrie de régions) (19). Au total, les ressources fiscales affectées aux opérateurs de l’État seraient réduites de 528 millions d’euros à périmètre constant ;

– enfin, des réformes structurelles sont engagées dans la sphère sociale et permettront de doubler l’effort proposé l’an passé : globalement, le Gouvernement propose de réaliser 5,8 milliards d’euros d’économie sur les dépenses sociales (au lieu de 4,9 milliards d’euros annoncés lors du DOFP). Cela implique de doubler l’effort de 2,4 milliards d’euros proposés en projet de loi de financement de la sécurité sociale l’an dernier.

Outre la réduction plus accentuée que prévu de l’ONDAM (2,4 % contre 2,6 % proposés en loi de programmation des finances publiques et 2,7 % en projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013) qui devrait permettre de réaliser une économie de 2,9 milliards d’euros par rapport à son évolution tendancielle sur les dix dernières années (+ 4,2 %), le Gouvernement anticipe une économie de 1,9 milliard d’euros lié aux réformes des retraites du régime général et des régimes complémentaires, ainsi que 0,5 milliard d’euros d’économies sur les dépenses de gestion des caisses du régime général, 0,3 milliard d’euros d’économies sur l’assurance-chômage après renégociation de la convention et 0,2 milliard d’euros sur les prestations familiales. Ces mesures sont analysées et commentées dans l’annexe 8.

TABLEAU DE SYNTHÈSE DES ÉCONOMIES SUR LES DÉPENSES PUBLIQUES EN 2014

Types d’économies par rapport à la tendance

Montant des économies

Dépenses de l’État

6,0

dont stabilisation de la masse salariale

1,7

dont réduction des dépenses de fonctionnement courant

0,9

dont stabilisation des dépenses d’intervention

1,9

dont stabilisation des dépenses d’investissement

dont charge de la dette

dont PSR en faveur de l’Union européenne

0,7

0,5

0,3

Dépenses des opérateurs de l’État

1,1

dont baisse des subventions pour charges de service public

0,6

dont baisse des ressources affectées

0,5

Dépenses locales

Réduction des concours de l’État aux collectivités territoriales

1,5

1,5

Dépenses des administrations sociales et de l’Unedic

5,8

dont maîtrise des dépenses d’assurance maladie (ONDAM)

2,9

dont réforme des retraites de base et complémentaires

dont économies sur les prestations familiales

dont économies sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale

dont économies attachées à la négociation de la nouvelle convention d’assurance chômage

1,9

0,2

0,5

0,3

TOTAL

14,5

En proposant de réaliser près de 15 milliards d’euros d’économies par rapport à la tendance, le Gouvernement se fixe donc un objectif volontariste mais atteignable qui doit mobiliser toute la sphère publique et permettra en conséquence d’alléger considérablement le recours à l’impôt pour résorber le déficit structurel.

La réalisation de cet objectif reste néanmoins soumise à certains aléas mis en évidence par le HCFP tenant notamment au rythme de croissance effectif de la dépense locale et à la stricte maîtrise de la masse salariale et des dépenses d’intervention de l’État par rapport aux prévisions.

● L’effort structurel en recettes est prévu à 2,7 milliards d’euros, soit 0,15 % du PIB, en 2014. Comme l’illustre le tableau suivant, il ressortirait en nette diminution par rapport aux années précédentes.

EFFORT STRUCTUREL EN RECETTES

(en % du PIB)

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

+ 0,7

+ 1,1

+ 1,5

+ 0,15

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

Le rapporteur général souligne que, si la charge fiscale reposant sur certains contribuables – en particulier les ménages les plus aisés – pourra augmenter en 2014, le niveau global des prélèvements est en voie de quasi-stabilisation en 2014.

Pour atteindre cet objectif, il est cependant nécessaire de compenser la disparition du produit de plusieurs impositions dont l’impact budgétaire était ponctuel et concentré sur l’exercice 2013. C’est pour cette raison que les mesures nouvelles prévues par le présent projet de loi présentent un rendement total net de l’ordre de 5 milliards d’euros, sensiblement supérieur aux 2,7 milliards d’euros de l’effort structurel en recettes.

Le projet de loi de finances pour 2014 s’inscrit pour la première fois dans le cadre budgétaire renouvelé par la loi organique n° 2012-1403 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques du 17 décembre 2012 (20).

Cette loi organique modifie la procédure budgétaire nationale conformément aux principes du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l’Union économique et monétaire du 2 mars 2012 (21) dont la ratification a été votée par le Parlement le 11 octobre 2012 (22).

Elle anticipe également la mise en œuvre du « two-pack » (23), entré en vigueur le 30 mai 2013, qui renforce la surveillance économique et budgétaire des États membres en fixant notamment un calendrier et des règles communes en matière budgétaire, plus contraignantes et plus transparentes, à savoir :

– l’obligation pour chaque État membre de transmettre son projet de budget à la Commission européenne avant le 15 octobre de l’année, celle-ci pouvant rendre un avis et formuler des propositions avant le 30 novembre, et l’ensemble du budget devant impérativement être voté avant le 31 décembre. Pour la première fois, l’avis de la Commission européenne permettra cette année d’alimenter les débats au sein du Parlement sur le bien-fondé des mesures proposées en 2014 pour atteindre la trajectoire de solde fixée dans le programme de stabilité et de croissance (24) ;

– l’obligation de créer une entité indépendante chargée de contrôler la solidité des procédures budgétaires nationales en obligeant notamment l’État membre concerné à fonder son projet de budget sur des prévisions macroéconomiques réalistes.

En France, le calendrier budgétaire imposé par le « two-pack » était d’ores et déjà respecté. En revanche, la loi organique précitée a introduit trois innovations procédurales majeures concernant l’élaboration du budget et le respect de la trajectoire de solde structurel :

– en vertu de l’article 7, le Gouvernement est désormais obligé de présenter dans le projet de loi de finances initiale, un article liminaire présentant les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques, et non plus s’en tenir à la présentation du seul déficit budgétaire de l’État. Elle permet de renforcer ainsi le contrôle par le Parlement des objectifs de finances publiques portant sur l’ensemble des acteurs de la dépense publique ;

– en vertu des articles 11 à 22, il est créé un Haut Conseil des finances publiques (HCFP), organisme indépendant placé auprès de la Cour des comptes. L’article 8 de la loi organique précitée précise que ce dernier est chargé d’évaluer les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de loi de finances de l’année (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année (PLFSS) d’une part, et d’apprécier, d’autre part, la cohérence de l’article liminaire du projet de loi de finances de l’année au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques ;

– l’article 23 de la même loi organique introduit enfin un mécanisme de correction à mettre en œuvre en cas d’écart important par rapport à la trajectoire de solde structurel (+ 0,5 point d’écart par rapport à l’annuité visée dans la loi de programmation des finances publiques ou + 0,25 point d’écart sur deux années consécutives). En tenant compte, le cas échéant, de circonstances exceptionnelles, le Haut conseil est chargé d’alerter publiquement le Parlement et le Gouvernement sur de tels écarts à l’occasion du projet de loi de règlement. Il appartient ensuite au Gouvernement d’en tenir compte au plus tard dans le prochain projet de loi de finances ou projet de loi de financement de la sécurité sociale en proposant dans un rapport annexé des mesures propres à y remédier.

Le présent projet de loi de finances est le premier à s’inscrire dans ce nouveau cadre procédural. Tant l’avis de la Commission européenne que l’avis du HCFP contribueront donc à rééquilibrer les rapports de force entre le Gouvernement et le Parlement, grâce à l’expertise et l’indépendance des économistes chargés d’apprécier le bien-fondé ou non des prévisions retenues par le Gouvernement et, partant, de sa capacité à respecter la trajectoire de solde structurel définie dans la loi de programmation des finances publiques ou le programme de stabilité.

En l’espèce, le rapporteur général se félicite du fait que le HCFP considère comme « plausibles » les prévisions de croissance sur lesquelles reposent le projet de loi de finances et le PLFSS et s’accorde sur le fait qu’en l’absence d’une nouvelle loi de programmation des finances publiques modifiant la trajectoire de solde structurel et de solde effectif actuellement en vigueur, la procédure de correction des écarts prévue par l’article 23 de la loi organique devrait être enclenchée à la mi-2014 (25).

Il observe cependant que la révision de cette trajectoire de solde est justifiée par le fait que le Conseil européen a décidé, sur proposition de la Commission européenne, d’accorder à la France, le 28 juin 2013, un délai de deux ans supplémentaire pour sortir de la procédure de déficit excessif afin de permettre au Gouvernement de mener une politique économique centrée sur le soutien à la production et la lutte contre le chômage (26).

Il en résulte que l’objectif de réduction du déficit effectif sous la barre des 3 % du PIB, qui devait être atteint en 2013 en application de la loi de programmation des finances publiques en vigueur, est désormais repoussé à 2015, et qu’en conséquence, le retour à l’équilibre structurel des comptes publics ne peut qu’être également repoussé au-delà de 2016, sauf à prendre des mesures d’ajustement structurel bien plus lourdes que prévu dès 2015.

La révision de la trajectoire de solde prévue par la loi de programmation des finances publiques a d’ores et déjà été annoncée par le Gouvernement dans le cadre du programme de stabilité transmis à la Commission européenne en avril 2013. Malgré un ajustement résultant de la révision à la baisse des prévisions de croissance et d’inflation depuis le mois d’avril, la trajectoire de réduction du déficit public et du déficit structurel proposée dans le présent projet de loi de finances est donc globalement cohérente avec celle présentée dans le cadre du programme de stabilité. Cette nouvelle trajectoire a le mérite de privilégier la consolidation du retour de la croissance en 2014 sur un ajustement plus drastique des finances publiques, afin de réduire le chômage en France tout en conservant des marges de manœuvre restreintes pour financer les priorités du Gouvernement, et en tout premier lieu la préservation de notre modèle social.

La pérennité du modèle social français repose d’abord sur un système de protection sociale financièrement soutenable.

C’est la raison pour laquelle le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 propose des mesures tendant à réduire de 3,4 milliards d’euros le déficit de la sécurité sociale ainsi que des réformes structurelles, sources d’économies et fondées sur davantage de justice sociale (27).

En parallèle, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale ont pour ambition d’accroître les moyens permettant de soutenir les priorités politiques du Gouvernement : l’emploi et le pouvoir d’achat, la jeunesse, la lutte contre la pauvreté, la santé, la sécurité et la justice. Dans le contexte budgétaire précédemment décrit, cela ne peut se faire que par une redistribution différente des richesses.

Les missions du budget de l’État portant les priorités politiques du Gouvernement voient globalement leurs crédits de paiement progresser, au détriment des autres missions moins précaires, comme le montre le graphique ci-après.

Le montant total des crédits nets du budget général apparaissant en baisse de 0,6 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 (hors dépenses exceptionnelles), c’est bien que le Gouvernement assume ses choix et redéploie ses moyens en fonction de ses priorités, comme le montre le graphique suivant.

De la même manière, les dépenses supplémentaires proposées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale en faveur de la stratégie nationale de santé notamment, devraient être compensées par les économies dégagées sur l’ONDAM, qui baisse globalement de 0,3 point par rapport à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DE L’ÉTAT ENTRE 2013 ET 2014 PAR MISSIONS

(Hors Remboursements et dégrèvement, programmes d’investissements d’avenir, charge de la dette et des pensions, MES)

Source : état B annexé au projet de loi de finances pour 2014.

Précisons, à titre liminaire, que le dynamisme des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État (+ 7,1 %) résulte essentiellement de l’organisation des élections municipales, européennes et sénatoriales qui se dérouleront en 2014. Le montant prévu intègre une économie de 28 millions d’euros permise par la dématérialisation de la propagande électorale aux élections européennes, dans le cadre d’une simplification et de la réduction de l’impact écologique de la vie publique.

La France se caractérise par un taux de chômage élevé depuis de nombreuses années, qui atteint 10,5 % (France métropolitaine) au deuxième trimestre 2013, et par un faible taux de participation des jeunes et des seniors au marché du travail.

Cette situation appelle aussi bien des mesures d’urgence à destination des personnes les plus démunies que des réformes en profondeur pour réduire la segmentation du marché du travail et accroître la participation des jeunes et des seniors, augmentant ainsi notre potentiel d’activité.

C’est pourquoi, il est proposé d’accroître de plus de 800 millions d’euros les crédits de la mission Emploi et Travail, soit une progression de + 6,7 % par rapport à la loi de finances pour 2013.

Conformément aux engagements du Président de la République, un effort total de 3,6 milliards d’euros est donc engagé pour financer :

– le déploiement des 100 000 contrats de génération, dont la finalité est de permettre l’accès des jeunes de moins de 26 ans (ou 30 ans pour un travailleur handicapé) à l’emploi par le CDI et l’aménagement des conditions de travail des seniors jusqu’à leur retraite en contrepartie d’une aide de 4 000 euros (28). Six mois après l’entrée en vigueur de la loi, seuls 10 624 contrats de ce type ont cependant été signés. Outre un déficit de notoriété, il semble que l’une des difficultés constatées est liée au fait que les entreprises comprenant entre 50 et 300 salariés doivent préalablement négocier un accord collectif « intergénérationnel » (29) pour pouvoir bénéficier de l’aide, dans le cadre du recrutement d’un jeune et du maintien en emploi d’un senior. Il convient donc de promouvoir davantage ce dispositif auprès des entreprises de taille moyenne car les crédits sont disponibles ;

– le déploiement des 150 000 emplois d’avenir en 2014 (après un objectif de 100 000 en 2013 dont 6 000 dans l’Éducation nationale) qui doivent permettre à des jeunes de 16 à 25 ans dépourvus de tout diplôme et qualification de trouver un emploi d’une durée maximale de trois ans, comportant une exigence de formation(30). Pour les jeunes installés en zone urbaine sensible (ZUS), une dérogation permet d’ouvrir ces emplois d’avenir aux diplômés jusqu’à BAC + 3. Lors d’un comité interministériel en février 2013, le gouvernement a décidé de réserver 20 % de ces contrats aux jeunes résidant en ZUS en 2013 et 30 % en 2014. La prévision d’exécution pour 2013 montre qu’à la date de rédaction du présent rapport, près de 60 000 contrats ont été signés (dont près de 3 200 dans l’éducation nationale) depuis le début de l’année de sorte que l’objectif de 100 000 contrats fin 2013 paraît désormais plausible. Il conviendra néanmoins de promouvoir davantage encore ce dispositif pour atteindre l’objectif de 150 000 emplois d’avenir en 2014 ;

– l’allongement de la durée des contrats aidés : les contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) réservés au secteur non marchand sont passés de 340 000 en loi de finances initiale pour 2013 à 432 000 en cours d’année tandis que les contrats initiative emplois (CIE) réservés au secteur privé s’élèvent à 50 000 en loi de finances initiale pour 2013 mais pourraient s’avérer plus nombreux en exécution 2013, ces nouveaux contrats étant majoritairement financés grâce à la mobilisation du surgel de crédits réalisés fin janvier 2013. La durée moyenne de ces contrats aidés est actuellement d’environ 7 mois mais le Gouvernement espère inciter les employeurs à prolonger ces contrats jusqu’à 12 mois en insistant sur l’amélioration de la qualité de la formation suivie par les bénéficiaires, et par ce biais à maximiser leur chance d’insertion professionnelle durable.

Parallèlement, 100 millions d’euros supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 sont prévus pour faciliter l’activité partielle et financer le contrat de sécurisation professionnelle afin de faire face aux mutations économiques tout en renforçant l’accompagnement des victimes de licenciement économique vers le retour à l’emploi.

Enfin, conformément à l’engagement du Président de la République, les moyens du service public de l’emploi sont renforcés pour financer la création de 2 000 nouveaux CDI au sein de Pôle Emploi, les 2/3 étant financés sur le budget de l’État et le solde par Pôle Emploi lui-même dans le cadre de la nouvelle offre de service « Pôle Emploi 2015 » (31). Le rapporteur général se félicite du fait que le Gouvernement poursuive l’effort engagé en 2013 en portant à + 4 000 CDI les effectifs de Pôle Emploi sur deux ans car le retour à l’emploi dépend aussi de la qualité de l’accompagnement vers l’emploi des personnes éloignées du marché du travail.

Répondant à un engagement du Président de la République et du Premier ministre, le plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, adopté le 21 janvier 2013, introduit de nombreuses mesures en faveur des plus démunis afin d’améliorer leur pouvoir d’achat, leurs conditions d’accueil et de logement ou encore leur accès à la santé. Le présent projet de loi de finances en est la traduction financière.

● Soutenir le pouvoir d’achat des plus modestes, et en particulier des familles

Le Gouvernement propose de soutenir le pouvoir d’achat des ménages les plus vulnérables à travers les mesures suivantes :

– la poursuite de la revalorisation du RSA « socle » pour qu’il retrouve son niveau cible de 50 % du SMIC (+ 10 % en sus de l’inflation d’ici 2017) : le présent projet de loi de finances intègre ainsi la compensation aux départements du premier coup de pouce du SMIC de 2 % au-delà de l’inflation intervenu au 1er septembre 2013, pour un montant de 0,6 milliard d’euros conformément au pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités territoriales (32) ; s’ajoute à cela une réflexion en cours (33) en vue d’une réforme du RSA « activité », financé par les crédits de la mission Solidarité, insertion, égalité des chances, en raison du taux de non-recours record dont il souffre (68 %), en lien avec la prime pour l’emploi ;

– l’élargissement du bénéfice des tarifs sociaux du gaz et de l’électricité à 3 millions de foyers contre 1 million actuellement pour un coût de 0,4 milliard d’euros ;

– l’amélioration de la prise en charge des personnes en situation de handicap grâce à une augmentation de 2,4 % des crédits destinés au financement de l’allocation adulte handicapé (AAH) et de l’allocation supplémentaire d’invalidité au sein de la mission Solidarité, insertion, égalité des chances.

Au-delà de ces mesures généralistes, le Gouvernement propose de soutenir en particulier les familles les plus modestes à travers une restructuration de l’architecture des prestations familiales, conformément aux objectifs de la mission confiée, dans le cadre de la MAP, à M. Bertrand Fragonard.

Outre la revalorisation de 25 % sur cinq ans de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) versée sous conditions de ressources aux familles ayant au moins un enfant âgé de 6 à 18 ans, le Gouvernement propose dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 :

– une augmentation de 50 % en 5 ans du complément familial et de 25 % en 5 ans de l’allocation de soutien familial (+ 0,5 milliard d’euros en 2014) ;

– un recentrage de la prestation d’accueil des jeunes enfants (PAJE) et du complément familial (CF) à travers un abaissement des plafonds de ressources des bénéficiaires ;

– la révision du montant du complément au libre choix d’activité (CLCA), désormais le même pour tous, supprimant ainsi la majoration en faveur des parents dont les ressources sont supérieures au plafond de ressources de l’allocation de base de la PAJE (16 % des familles).

● Améliorer l’accueil et l’hébergement des personnes en situation de rupture ou d’exclusion

L’amélioration de l’offre de logement dans les zones où la demande est la plus forte et les loyers les plus élevés fait également partie des priorités du Gouvernement. Plusieurs mesures sont donc mises en œuvre afin de favoriser l’accès dans et vers le logement ainsi que pour améliorer l’accueil des étrangers, à travers :

– le financement de la création de 500 000 nouveaux logements par an dont 150 000 logements sociaux, dont la construction bénéficiera du taux réduit de TVA en application de l’article 19 du présent projet de loi de finances ;

– l’augmentation des aides personnelles au logement versées sous conditions de ressources pour un montant de 173 millions d’euros ;

– l’augmentation de 110 millions d’euros des crédits en faveur de l’hébergement d’urgence pour les sans-abris (+ 5 000 places) et de l’offre de logements adaptés (+ 7 000 solutions d’intermédiation locative) ;

– la création de 2 000 places supplémentaires dans les centres d’accueil pour les demandeurs d’asile (+ 15 millions d’euros) et la réforme de la procédure du droit d’asile pour réduire de moitié les délais de traitement des demandes par l’OFPRA, et par conséquent le coût des dispositifs spécifiques d’hébergement d’urgence en résultant ;

– un programme immobilier de réhabilitation et de construction des centres de rétention administrative (+ 13 millions d’euros).

● Réduire les freins financiers à l’accès à la santé

Le reste à charge est un facteur majeur de renoncement aux soins, pour l’ensemble des publics précaires et notamment pour les populations immigrées. L’accès à une complémentaire santé permet de réduire ce reste à charge. C’est pourquoi il est proposé de consacrer 170 millions d’euros pour offrir à tous les Français en dessous du seuil de pauvreté (soit 750 000 personnes) d’être éligibles aux dispositifs de CMU-C et de l’ACS (aide à l’acquisition d’une complémentaire santé) grâce au relèvement de 7 % (en sus de l’inflation) du plafond de ressources y ouvrant droit.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit en outre une mise en concurrence des organismes de protection complémentaire pour améliorer le rapport qualité-prix pour les bénéficiaires de l’ACS et une simplification du dispositif pour les étudiants précaires et isolés bénéficiant de certaines aides sociales, pour un coût supplémentaire de 27 millions d’euros en 2014.

Outre la création des 150 000 emplois d’avenir et 100 000 contrats de génération destinés à faciliter l’entrée des jeunes actifs sur le marché du travail, le Gouvernement propose de renforcer les moyens en faveur de l’enseignement scolaire et universitaire ainsi que les places offertes dans le cadre du service civique.

Cela se traduit tout d’abord par une augmentation de 0,6 milliard d’euros des moyens de l’enseignement scolaire permettant de financer la création de 8 804 postes supplémentaires au sein du ministère de l’Éducation nationale, principalement au sein de l’enseignement primaire, et de 180 postes supplémentaires en faveur de l’enseignement agricole. Depuis la rentrée scolaire 2012, ce seront donc 24 773 postes supplémentaires qui auront été créés dans le cadre de la priorité à l’enseignement scolaire (auxquels s’ajoutent 2 000 postes d’assistants d’éducation créés par les EPLE) (34). S’ajoute à cela un objectif de 30 000 contrats aidés supplémentaires pour améliorer l’accompagnement des élèves, et spécifiquement des élèves handicapés. Il faut par ailleurs rappeler que les efforts en faveur de la formation des jeunes enseignants seront poursuivis au sein des écoles supérieures du professorat créées depuis la rentrée 2013. Enfin, le présent projet de loi de finances assure la revalorisation des rémunérations des professeurs des écoles au travers d’une prime annuelle de 400 euros. Au total, les crédits de la mission Enseignement scolaire progressent donc de 1,3 %.

S’agissant du renforcement des moyens destinés aux étudiants,
il faut souligner la création de 1 000 postes supplémentaires au sein des universités (soit 2 000 créations de postes depuis 2013) ainsi que la réforme des aides sociales aux étudiants qui permettra d’augmenter les bourses sur critères sociaux pour environ 100 000 étudiants dès la rentrée 2013 (+ 0,2 milliard d’euros). Au total, les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur bénéficie d’une progression de 0,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2013.

Par ailleurs, le service civique continue sa montée en charge en 2014 puisque 31 000 volontaires pourront bénéficier de ce dispositif l’an prochain pour un coût de 0,15 milliard d’euros. Instauré par la loi du 10 mars 2010, le service civique concerne les jeunes âgés de 16 à 25 ans qui acceptent de travailler de six à douze mois dans une entreprise certifiée par l’État, pour un montant mensuel de 573 euros. Depuis sa création, ce dispositif a attiré plus de 46 000 personnes, dont plus de 20 000 en 2013.

Enfin, il faut souligner la création d’une « garantie jeunes » dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Une expérimentation a été lancée sur dix territoires en septembre 2013, afin d’assurer aux jeunes les plus en difficulté un soutien financier à hauteur du revenu de solidarité active, un accompagnement intensif vers le retour à l’emploi et des propositions régulières d’emploi ou de formation.

La justice et la sécurité sont des politiques prioritaires du Gouvernement et bénéficient à ce titre de moyens supplémentaires dans le présent projet de loi de finances (respectivement + 0,2 % et + 1 %).

● Une amélioration de l’accès et du service de la justice

Dans le cadre de la nouvelle politique pénale axée sur la réinsertion et la prévention de la récidive et la modernisation de l’organisation du service de la justice, le présent projet de loi de finances propose :

– de créer 555 postes supplémentaires, dont 432 pour les services pénitentiaires (dont 300 nouveaux conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation pour prévenir la récidive), 45 pour les services judiciaires permettant notamment la mise en place d’un parquet financier, et 78 pour les services de protection judiciaire de la jeunesse ;

– de supprimer la contribution pour l’aide juridictionnelle de 35 euros qui pénalisait les justiciables les plus vulnérables en rendant payant l’accès au juge alors que leur revenu était inférieur au seuil de pauvreté. Cette charge de près de 90 millions d’euros est désormais assumée par l’État ;

– de rénover et d’étendre le parc carcéral afin d’atteindre 63 500 places fin 2014 de manière à résorber progressivement le manque de places constamment dénoncé faute d’investissements suffisants les années précédentes (le nombre de détenus dans les prisons françaises a atteint début juillet 2013 un nouveau record à raison de 68 569 détenus pour seulement 57 320 places).

● Un renforcement des effectifs de la police et de la gendarmerie nationales

Les effectifs de la police et de la gendarmerie nationales seront augmentés de 405 postes afin de renforcer les forces de sécurité dans les zones de délinquance les plus sensibles, en particulier dans les zones de sécurité prioritaires ainsi qu’à Marseille et en Corse. Au total, il faut néanmoins constater que les effectifs de l’ensemble de la mission Sécurités diminueront de 74 ETP en 2014 en raison d’un allègement des missions considérées comme moins opérationnelles (comme par exemple les brigades nautiques de la Gendarmerie nationale).

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 met en œuvre les premières mesures définies par la ministre des Affaires sociales et de la santé le 23 septembre 2013 dans le cadre de la stratégie nationale de santé (SNS).

Lancée par le Premier ministre à Grenoble le 8 février dernier, la SNS a pour ambition de définir un cadre pour l’action publique pour les années qui viennent, visant à combattre les injustices et inégalités de santé et d’accès au système de soins et adapter le système de santé français aux besoins des patients, ainsi qu’aux lentes mais profondes mutations qui sont à l’œuvre (vieillissement de la population, développement des maladies chroniques, diversification des risques sanitaires…). Elle intègre les travaux engagés par le Gouvernement depuis un an, notamment le Pacte de confiance à l’hôpital et le Pacte territoire santé.

La stratégie nationale de santé repose sur trois piliers :

– faire le choix de la prévention et agir tôt et fortement sur tout ce qui a une influence sur notre santé ;

– organiser les soins autour des patients et en garantir l’égal accès à travers le déploiement des soins de premier recours : le projet de loi de financement de la sécurité sociale propose quatre mesures dans ce cadre pour un coût global de 20 millions d’euros environ : développer la rémunération d’équipe de soins sur le territoire pour un déploiement rapide, améliorer le financement des coopérations entre les professionnels de santé, accélérer le déploiement de la télémédecine et améliorer la couverture des professionnelles de santé en cas de grossesse pathologique ;

– approfondir la démocratie sanitaire et miser sur la déconcentration : à cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale propose de confier le pilotage de l’effort d’investissement hospitalier au Comité de la performance et de la modernisation des soins (COPERMO), lequel pourrait apporter une aide sur un nombre limité de projets particulièrement structurants dans les territoires, pour un montant de 0,3 milliard d’euros par an. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale propose également d’engager une réforme du financement des établissements de santé grâce à l’expérimentation de tarifications au parcours pour améliorer les prises en charges et assurer un financement adapté des activités isolées permettant le maintien, lorsque cela est nécessaire, d’une offre hospitalière de proximité. Le coût de cette expérimentation est évalué à 26 millions d’euros en 2014.

TOTAL NET MESURES MÉNAGES

+2 997

TOTAL mesures d’allègement

– 893

Indexation du barème de l’impôt sur le revenu et de la taxe d’habitation

– 700

Revalorisation de la décote

– 193

TOTAL mesures de rendement

+ 3 890

Abaissement du plafond du quotient familial

+ 1 030

Suppression de l’avantage en faveur des contrats de prévoyance d’entreprise

+ 960

Suppression de l’avantage en faveur des majorations de pensions

+ 1 200

Taxe exceptionnelle sur les hauts revenus

+ 260

Suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité

+ 440

Autres mesures

Nc

Transformation de l’avantage fiscal pour l’investissement outre-mer

Nc

Les mesures d’allègement de l’imposition directe des ménages profiteraient prioritairement aux ménages moyens et moins favorisés.

Ainsi, la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu, qui avait été gelée par la majorité précédente, profiterait certes à l’ensemble des personnes assujetties à ces impôts mais plus particulièrement aux ménages moyens. La revalorisation de la décote est, quant à elle, ciblée spécifiquement sur les plus défavorisés.

Le rapporteur général soutient, en complément des propositions du Gouvernement, une mesure de pouvoir d’achat au bénéfice des salariés dont les revenus sont les plus faibles. Une telle mesure pourrait passer par un aménagement de la prime pour l’emploi ou par une surindexation du seuil de revenu fiscal de référence qui gouverne l’exonération totale ou partielle de divers impôts locaux, de la contribution à l’audiovisuel public, de la contribution sociale généralisée et de la contribution au remboursement de la dette sociale.

Par ailleurs, le rapporteur général soutient la demande du groupe majoritaire de revenir sur la suppression de la réduction d’impôt sur le revenu pour frais de scolarité, qui pèserait indistinctement sur un grand nombre de ménages moyens.

Le rapporteur général rappelle que la modification des taux de taxe sur la valeur ajoutée, prévue par la loi de finances rectificative pour 2012, tend également à protéger les ménages les plus modestes. Ainsi, les produits de première nécessité, dont le poids dans le revenu de ces ménages est proportionnellement plus important que celui constaté dans le revenu des ménages aisés, devraient, en principe, être soumis, en 2014, à la taxe sur la valeur ajoutée à un taux de 5 %, contre 5,5 % aujourd’hui.

Toutefois, il pourrait être plus efficace, économiquement et socialement, de privilégier une réduction du taux de TVA sur les travaux liés à la transition énergétique, de façon à en réduire la facture pour les ménages tout en soutenant le secteur du bâtiment.

Au final, les mesures du projet de loi, ainsi complétées dans le cadre de la discussion parlementaire, tendraient donc à soutenir le pouvoir d’achat et la consommation des ménages moyens et modestes.

Comme l’illustre le tableau précédent, hors le cas particulier de la taxation exceptionnelle des hauts revenus, les mesures accroissant l’imposition directe des ménages répondraient à deux caractéristiques :

– elles cibleraient l’impôt sur le revenu, qui est supporté par seulement la moitié des foyers fiscaux et dont la moitié du rendement est produit par les 10 % plus aisés des ménages ;

– elles tendraient à réduire des dépenses fiscales et ainsi à mettre fin à des lignes de fuite de l’impôt, qui peuvent poser des problèmes d’équité fiscale.

Ainsi, du fait de la nature même de cette imposition, la suppression des exonérations sur les majorations de retraites et les cotisations versées en matière de prévoyance ainsi que l’abaissement du plafond du quotient familial devraient peser prioritairement sur les ménages les plus aisés. Le rendement total de ces mesures atteindrait 3,2 milliards d’euros, soit près des deux tiers du produit net total du volet fiscal du présent projet de loi de finances.

Par ailleurs, les niches fiscales en faveur de l’investissement outre-mer, qui constituent une source majeure de l’optimisation fiscale bénéficiant aux plus aisés, seraient transformées en réduction ou crédit d’impôt sur les sociétés. Une telle évolution permettrait de préserver l’avantage fiscal et le volume des investissements dont bénéficient ces territoires, tout en supprimant cette ligne de fuite de l’impôt sur le revenu.

Enfin, compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2013, le Gouvernement propose un nouveau dispositif de taxation des revenus supérieurs à 1 million d’euros. En raison des contraintes découlant de la jurisprudence constitutionnelle, cette imposition temporaire pèserait sur les entreprises, et non sur les particuliers. Elle devrait contribuer à modérer les rémunérations qu’elles versent à leurs salariés en renchérissant de 50 % la fraction des rémunérations supérieure au million d’euros et à faire contribuer significativement à l’effort de redressement des comptes publics les entreprises qui ne renonceront pas à verser ces rémunérations excessives.

Le Premier ministre a annoncé, le 9 juillet 2013, un programme d’investissement pour la France (PIA 2) de 12 milliards d’euros. Celui-ci a vocation à prendre le relais du premier PIA, d’un montant de près de 35 milliards d’euros, créé par la loi n° 2010-937 de finances rectificative du 9 mars 2010.

Rappelons qu’au 30 juin 2013, 28,5 milliards d’euros ont été engagés au titre du premier PIA, 4,4 milliards d’euros étaient en cours d’attribution et 2,2 milliards d’euros ont fait l’objet d’une réorientation par rapport à leur destination initiale, par décision du Premier ministre rendue le 21 janvier 2013, pour tenir compte des priorités définies dans le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi. Ces 2,2 milliards d’euros ont ainsi été réorientés vers les actions suivantes (35) :

– soutien à l’innovation et aux filières : industrialisation des pôles de compétitivité (110 millions d’euros), fonds multithématique de capital-risque/développement (590 millions d’euros), soutien à l’innovation de rupture (150 millions d’euros), appel à projet pour l’économie sociale et solidaire (20 millions d’euros) ;

– développement et diffusion des technologies génériques : soutien à la recherche technologique des PME par les instituts Carnot (150 millions d’euros), développement de la R&D dans la filière numérique (150 millions d’euros), prêt numérique à destination des entreprises (300 millions d’euros) ;

– formation partenariale pour les métiers de demain (100 millions d’euros) et stimulation de l’offre e-éducation (15 millions d’euros) ;

– transition énergétique par le lancement de nouveaux appels à projets via l’ADEME, dont les énergies marines (300 millions d’euros) ;

– développement de l’économie du vivant et de la santé à travers le programme « Territoire de santé numérique) à l’hôpital (80 millions d’euros) ;

– et réorientation de 420 millions d’euros vers des actions existantes dans l’aéronautique et le financement des entreprises.

Le PIA 2, d’un montant de 12 milliards d’euros inscrit à l’état B du présent projet de loi de finances, s’inscrit dans cette direction et poursuit trois objectifs :

– soutenir la recherche et l’université : dans le contexte d’une économie où la valeur ajoutée provient des compétences des salariés et de la capacité des entreprises à innover, l’infrastructure constituant le socle de la création de valeur est le système d’enseignement supérieur et de recherche. Intervenir à ce niveau revient donc à apporter un soutien potentiel à l’ensemble des secteurs d’activité et à faciliter le passage de l’ensemble du tissu productif vers une spécialisation plus intensive en innovation grâce à la formation d’un capital humain de qualité ;

– accompagner la transition énergétique et écologique et la construction urbaine durable : dans un monde où la préservation de notre patrimoine et de nos ressources naturelles et énergétiques est indispensable pour permettre aux générations futures de vivre dans de bonnes conditions, l’État doit prendre ses responsabilités pour inciter les ménages et les entreprises de notre pays à consommer mieux et à produire en utilisant les technologies les plus respectueuses de l’environnement ;

– encourager l’innovation et la recherche dans les filières industrielles, qui portent la croissance économique française. Par rapport au PIA 1, les moyens seront davantage concentrés sur la filière avale de la recherche et l’innovation industrielle, car l’expérience des trois dernières années montre une faiblesse majeure à ce niveau de la chaîne de valeur alors que paradoxalement cette étape est fondamentale pour assurer une croissance durable et développer l’emploi.

Ces trois objectifs se déclinent autour de la définition de 8 priorités stratégiques et 25 actions auxquelles seront donc consacrés les 12 milliards d’euros d’investissement d’avenir, comme le montrent le schéma et le tableau ci-après :

RÉPARTITION DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR PAR PRIORITÉS STRATÉGIQUES

(en milliards d’euros)

Source : PLF 2014.

RÉPARTITION DES CRÉDITS DU PIA 2 PAR MISSIONS,
PROGRAMMES, ACTIONS ET OPÉRATEURS

(en millions d’euros)

Mission

Programme

Intitulé des actions

Opérateur

Crédits

Écologie, développement et aménagement durables

Innovation pour la transition écologique et énergétique

Énergies nouvelles, économie circulaire, rénovation thermique, biodiversité

ADEME

800

 

Innovation pour la transition écologique et énergétique

Transport de demain

ADEME

300

 

Ville durable

Ville durable

ANRU

335

 

 

Projets territoriaux intégrés pour la transition énergétique

CDC

35

 

Projets industriels pour la transition énergétique

Projets industriels de filière

BPI

400

 

Projets industriels pour la transition énergétique

Entreprises sobres (prêts verts)

BPI

70

Économie

Projets industriels

Projets industriels de filières

BPI

360

 

Projets industriels

Usine du futur - robotisation

BPI

60

 

Innovation

Fonds national Innovation

BPI

240

 

Innovation

Innovation de rupture

BPI

150

 

Innovation

Projets Structurants des Pôles de Compétitivité

BPI

300

 

Économie numérique

Quartiers numériques

CDC/BPI

215

 

Économie numérique

Usages et Technologies du numérique

BPI

350

Recherche et enseignement supérieur

Écosystèmes d’excellence

IDEX

ANR

3 100

 

Écosystèmes d’excellence

Equipex

ANR

365

 

Écosystèmes d’excellence

Soutien aux technologies génériques

ANR

150

 

Écosystèmes d’excellence

Santé - Développement des DHU et des démonstrateurs

ANR

400

 

Écosystèmes d’excellence

Espace

CNES

50

 

 

Développement R&D de supercalculateur

CEA

50

 

Recherche dans le domaine de l’aéronautique

Démonstrateurs technologiques aéronautiques

ONERA

1 220

Travail - Emploi

Formation et mutations économiques

Partenariaux territoriaux pour la formation et l’emploi

CDC

150

Enseignement scolaire

Internats de la réussite

Internats de la réussite

ANRU

150

Jeunesse

Projets innovants en faveur de la jeunesse

Projets innovants en faveur de la jeunesse

CDC

100

Direction de l’action du Gouvernement

Modernisation de l’action publique

Transition numérique de l’État et modernisation de l’action publique

CDC

150

Défense

Excellence technologique des industries de défense

Excellence technologies des industries de défense

CNES / CEA / ONERA

1 500

CCF Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

Prêts aux petites et moyennes entreprises

Prêts aux petites et moyennes entreprises (à diviser en autant d’actions que de types de prêts prévus)

BPI

1 000

TOTAL

 

 

 

12 000

Le rapporteur général se félicite de l’instauration d’un PIA 2 et de la réorientation choisie par le Premier ministre qui devrait contribuer à accélérer la transition de notre économie vers un nouveau modèle de croissance, plus écologique et créateur d’emplois de qualité.

En effet, il ne peut y avoir de politique économique efficace sans un soutien public majeur en faveur de projets de recherche ou de projets industriels innovants, sélectionnés avec rigueur en fonction de priorités claires, et susceptibles d’entraîner un effet de levier important sur l’investissement privé. C’est tout le rôle dévolu au commissariat général à l’investissement (CGI) selon les modalités prévues par l’article 42 du présent projet de loi de finances pour 2014 (36).

Le bilan du PIA 1 au 30 juin 2013 démontre son efficacité puisque sur les 28,5 milliards d’euros engagés au titre du PIA 1, il a été possible de collecter 22,5 milliards d’euros de cofinancements, dont 16,8 milliards d’euros en provenance d’investisseurs privés, 3,8 milliards d’euros émanant des collectivités territoriales et 1,7 milliard d’euros émanant d’autres organisations publiques (opérateurs, organisations internationales…). L’objectif initial selon lequel l’investissement total résultant du PIA pourrait dépasser 60 milliards d’euros paraît donc atteignable. Si l’on se fixe un objectif équivalent dans le cadre du PIA 2, cela signifierait que l’investissement total réalisé en France pour les 8 priorités stratégiques du Gouvernement pourrait avoisiner 25 milliards d’euros à l’horizon 2025.

Au total, grâce aux dispositifs de cofinancement, le PIA 1 et le PIA 2 devraient permettre d’accroître l’effort d’investissement public et privé en France de l’ordre de 85 milliards d’euros à l’horizon 2025. Cela représente un effort de 4,3 points de PIB sur la période et donc de 5 milliards d’euros environ par an (+ 0,25 point de PIB).

Le rapporteur général estime qu’il conviendra néanmoins d’être particulièrement vigilant sur l’utilisation des fonds du PIA 2 par les opérateurs en vérifiant notamment qu’ils ne serviront qu’à financer des investissements répondant aux nouvelles priorités stratégiques du Gouvernement, sur la base d’appels à projet nouveaux. Il s’interroge par exemple sur le risque de débudgétisation – consistant à transférer une dépense relevant traditionnellement d’une mission du budget général vers un financement extrabudgétaire, comme celui du PIA 2 – de certains investissements prévus dans les domaines de la défense et de l’aéronautique notamment.

Le débat en séance publique sur les investissements d’avenir, prévu le 4 novembre prochain à la demande de la commission des Finances et notamment de son rapporteur général, devrait permettre d’aborder l’ensemble de ces questions, tout en étant éclairé par les divers travaux d’évaluation et de contrôle disponibles sur ce thème.

Le Gouvernement et la majorité se sont engagés à soutenir la production en France et la réindustrialisation du territoire. L’outil fiscal constitue un moyen important pour atteindre ce but et le présent projet de loi en est la preuve.

Parce que la priorité du Gouvernement et de la majorité est l’emploi, la mesure fiscale la plus massive adoptée depuis le début de la législature est le crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi (CICE), dont le premier impact budgétaire serait ressenti en 2014 à hauteur de 9,8 milliards d’euros. D’un montant total annuel, à l’horizon de l’année 2017, d’environ 20 milliards d’euros, il devrait permettre un allègement substantiel de la taxation du travail et ainsi inciter la production en France. Son barème, qui profite aux salaires moyens, jusqu’à 2,5 SMIC, devrait bénéficier aux entreprises du secteur industriel.

Le rapporteur général a sollicité, au premier semestre de cette année, un échantillon d’entreprises et de fédérations d’entreprises afin d’évaluer les effets potentiels du CICE. Les réponses qui lui ont été transmises permettent de tirer d’ores et déjà plusieurs conclusions.

En premier lieu, le CICE devrait bénéficier proportionnellement davantage aux PME dont la structure de rémunération des salariés est généralement plus orientée vers les salaires moyens et modestes que celle des grandes entreprises. Toutefois, en valeur absolue, les gains perçus par les grandes entreprises ne seraient pas négligeables puisqu’il pourrait dépasser, pour certaines d’entre elles, 100 millions d’euros.

Mécaniquement, le CICE bénéficierait proportionnellement davantage aux secteurs comprenant de nombreuses PME – par exemple, le bâtiment – ainsi que, au sein des filières industrielles, aux sous-traitants plutôt qu’aux donneurs d’ordres.

En deuxième lieu, l’utilisation, par les entreprises, du gain retiré du CICE pourrait être multiple et semble dépendre principalement du degré de concurrence auxquelles elles font face. Les entreprises faisant face à une concurrence modérée, par exemple dans le secteur de la grande distribution, pourraient recourir à une utilisation variée de ce gain – baisse des prix, recrutements et ralentissement de l’automatisation ou investissements – en fonction probablement des nécessités de leurs implantations locales. Inversement, les entreprises faisant face à une concurrence particulièrement vive – par exemple, dans le transport aérien – ou subissant une crise de longue durée – par exemple, dans la construction – auraient tendance à considérer le CICE comme une « bouffée d’oxygène », qui leur permettrait de limiter leurs pertes, d’absorber la hausse de la TVA ou, le cas échéant, de baisser leurs prix afin de conserver leurs parts de marché.

En troisième lieu, plusieurs entreprises mettent en lumière le fait que leur charge fiscale globale pourrait ne pas diminuer compte tenu d’augmentations en parallèle de certaines impositions. Un tel constat n’est pas contradictoire avec les effets recherchés par la politique fiscale du Gouvernement et de la majorité car cette politique cherche à favoriser certaines assiettes – par exemple, le travail avec le CICE – et à peser sur d’autres pour décourager certains comportements – par exemple, la taxe de 3 % sur les dividendes qui vise à donner la priorité aux investissements sur les distributions de dividendes.

En quatrième lieu, le secteur des cinémas français souligne qu’il serait nettement perdant à la réforme puisque, étant peu intensif en travail, son gain découlant du CICE serait inférieur au poids découlant de la hausse de la TVA. La baisse à 5 % de la TVA sur les places de cinéma, prévue par le présent projet de loi, devrait compenser cette situation.

Enfin, le rapporteur général remarque que, sur les 32 contributions reçues d’entreprises et de fédérations sectorielles, et dont il les remercie, une seule mentionne la complexité du dispositif comme obstacle à sa mise en œuvre. En d’autres termes, il semble que la question de la complexité ne soit perçue comme un problème que par une très petite minorité d’entreprises.

La même préoccupation en faveur de l’emploi explique la décision du Gouvernement de compenser la hausse des cotisations patronales en matière de vieillesse prévue par la réforme du financement des retraites en cours de discussion parlementaire par une diminution à due concurrence des cotisations en matière de famille. Cette mesure fait l’objet, dans le présent projet de loi, d’un article 39 qui transfert à la sécurité sociale une quote-part de TVA nette couvrant notamment le manque à gagner, de l’ordre de 1,05 milliard d’euros, résultant de cette baisse de cotisations familiales. Cette mesure devrait, à compter de 2015, être compensée sur la base des recommandations attendues d’un groupe de travail consacré à la réflexion sur les ressources de la branche Famille.

De manière certes plus limitée que le CICE, l’article 34 du présent projet de loi de finances prévoit également de restituer aux entreprises le montant de la taxe additionnelle à la CVAE qu’elles verseraient aux chambres de commerce et d’industrie régionales au-delà du plafond arrêté par ledit article, et pour un volume global de 100 millions d’euros.

Les petites et moyennes entreprises constituant un élément moteur de la croissance en France, le volet fiscal du présent projet de loi de finances prend en compte leurs particularités et tend à aménager le système fiscal en leur faveur.

Le tableau suivant récapitule l’ensemble des mesures du projet de loi destinées à avantager les PME.

MESURES FISCALES DU PROJET DE LOI
AU BÉNÉFICE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

Article 10

Exonération de la contribution sur l’excédent brut d’exploitations des entreprises réalisant moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires

Article 12

Amortissements accélérés des robots acquis par les PME

Article 53

Réforme du plan d’épargne en actions (PEA) au bénéfice des PME

Article 57

Aménagement de la cotisation foncière des entreprises due par les petites entreprises

Le nouvel impôt sur l’excédent brut d’exploitation serait assorti d’un seuil de 50 millions d’euros excluant les PME de son assujettissement. En conséquence, les PME seraient entièrement exonérées de l’effort demandé aux entreprises afin de participer à l’assainissement des finances publiques.

L’éventuel remplacement de ce nouvel impôt par un relèvement de la surtaxe exceptionnelle de l’impôt sur les sociétés épargnerait également les PME, ces dernières en étant exonérées.

Le rapporteur général rappelle que la plupart des mesures fiscales adoptées depuis le début de la législature ont été calibrées de manière à en limiter, voire à en annuler, l’impact financier sur les PME. Il en va ainsi, les mesures prévues par la loi de finances pour 2013 qui avaient pour objet principal de limiter les principales sources d’optimisation de l’IS auxquelles recourent les grandes entreprises – niche « Copé », déductibilité des intérêts d’emprunt, modalités d’imputation des déficits reportés.

Le financement des PME sera également favorisé par l’instauration d’un régime fiscal favorable au titre des plans d’épargne en actions bénéficiant aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Si la production industrielle est une priorité du Gouvernement, la production de logements fait également l’objet de dispositions favorables car son soutien tend, à la fois, à renforcer la croissance du PIB et à faciliter l’accès au logement des classes moyennes et modestes.

Le tableau suivant récapitule les mesures de soutien à la production de logement prévues par le présent projet de loi et montre que l’effort fiscal pérenne en matière de production de logements s’établirait à près de 600 millions d’euros.

MESURES FISCALES DU PROJET DE LOI SOUTENANT LA PRODUCTION DE LOGEMENTS

(en millions d’euros)

 

2013

2014

2015

2016

TOTAL pérenne

TOTAL

– 260

– 570

+ 395

– 160

– 595

Réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières

– 260

– 215

+ 400*

0

– 75

Abaissement du taux de TVA – logements sociaux

0

– 355

+ 40

– 160

– 475

Soutien à l’investissement institutionnel dans le logement intermédiaire

0

0

– 45

0

– 45

*Ce produit correspond à la suppression d’un avantage fiscal incitant à la rétention de terrains non bâtis.

La réforme de la taxation des plus-values immobilières aurait pour principal objet de fluidifier le marché du logement, de réduire la pression sur le foncier et de faciliter l’accès à la propriété des ménages.

Le présent projet de loi tend également à favoriser l’accès au logement des classes moyennes et modestes en favorisant la construction de logements sociaux – par l’abaissement du taux de TVA sur la construction et la rénovation des logements sociaux – et en instaurant un régime fiscal spécifique destiné à soutenir l’investissement dans le logement intermédiaire.

Le rapporteur général se réjouit de la baisse du taux de TVA au bénéfice du logement social car cette mesure devrait, à la fois, soutenir la production de logement et renforcer l’accès des ménages les plus modestes au logement. Il se félicite également de l’instauration de la catégorie du logement intermédiaire, dont la construction bénéficiera, conformément à un engagement du Président de la République, du taux intermédiaire de TVA de 10 % au lieu du taux normal de 20 %, ainsi que d’une exonération de taxe sur le foncier non bâti, compensée aux collectivités territoriales, à compter de 2015.

Par ailleurs, le rapporteur général souhaite que le secteur du bâtiment puisse bénéficier du taux réduit de TVA pour la réalisation de travaux liés à la transition énergétique.

Enfin, parce que la confiance est un élément, certes immatériel, mais néanmoins central pour investir et recruter, le Gouvernement propose une réforme de l’imposition des plus-values mobilières qui tend à mettre fin aux incompréhensions face au régime instauré en loi de finances pour 2013. S’il est vrai qu’il n’est guère satisfaisant de mettre ainsi à mal la stabilité de la norme fiscale, puisque le régime fiscal adopté avec difficulté à l’automne 2013 pour 2014 en sera en réalité jamais appliqué, une telle évolution semblait néanmoins indispensable pour mettre fin à un climat de tension qui est préjudiciable à l’ensemble de la société.

La confiance ainsi témoignée est un acte raisonné justifié par la poursuite de l’intérêt général et non un acte de foi aveugle. Ainsi, cette réforme des plus-values mobilières s’accompagne de plusieurs mesures destinées à faire face à l’optimisation, voire à la fraude fiscale des entreprises. La mise à contribution de l’ensemble des forces de la Nation au service du redressement budgétaire requiert en effet une sévérité accrue contre de tels comportements.

Le tableau suivant récapitule ces mesures de lutte contre la fraude et l’optimisation fiscale.

MESURES DU PROJET DE LOI TENDANT À LUTTER CONTRE LA FRAUDE ET L’OPTIMISATION FISCALE DES ENTREPRISES

Article 14

Lutte contre l’optimisation fiscale au titre des produits hybrides et de l’endettement artificiel

Article 15

Lutte contre la fraude et l’évasion fiscales : prix de transfert

Article 16

TVA bâtiment : réaction rapide en cas de fraude et principe de l’autoliquidation

La transition écologique et énergétique est au cœur de la réorientation du PIA 1 et du nouveau PIA : au-delà de la part très importante des crédits destinés à financer directement des investissements consacrés à la transition énergétique (2,3 milliards d’euros), le nouveau PIA introduit des critères d’éco-conditionnalité dans la majorité de ses domaines d’intervention. Ainsi, plus de la moitié des 12 milliards d’euros du PIA 2 seront soumis à de tels critères.

Selon l’exposé des motifs du présent projet de loi de finances, ces critères seront régis par trois grands principes :

– la simplicité et la lisibilité pour les porteurs de projet, qui doivent pouvoir fournir les informations relatives à ces critères à un niveau proportionné et nécessaire de détail ;

– la capacité de l’État, des opérateurs et des experts à analyser les informations fournies par les porteurs de projet, à les évaluer et à les suivre au cours de la réalisation du projet ;

– enfin, l’éco-conditionnalité doit pouvoir se traduire dans l’évaluation ex-post du PIA.

Cela justifierait donc de se concentrer sur deux ou trois critères dans le cahier des charges de chaque appel à projets. Fondés sur un référentiel commun d’analyse rendu public, ces critères seront ensuite déterminés et déclinés par action en fonction des spécificités de chaque appel à projet.

L’éco-conditionnalité emporterait trois conséquences possibles :

– d’une part, elle pourrait permettre d’écarter de la sélection des dossiers aboutissant à une dégradation significative et non compensée de l’environnement ;

– d’autre part, elle pourrait venir s’ajouter aux critères habituels définis dans le cadre du PIA 1 ;

– enfin, elle pourrait, dans certains cas, constituer un critère de bonification du soutien financier apporté aux projets.

Le rapporteur général ne peut qu’encourager le Gouvernement dans la démarche d’éco-conditionnalité des investissements d’avenir même si, à la date du présent rapport, il ne dispose d’aucune information complémentaire, ni sur la méthode de détermination de tels critères ni sur le contenu éventuel de ces critères. Un éclaircissement rapide sur ce point paraît donc nécessaire pour assurer la crédibilité et la faisabilité de l’objectif annoncé.

 

2014

2015

2016

TOTAL pérenne

TOTAL

282

2 205

1 620

4 107

Création d’un impôt sur le carbone

340

2 160

1 500

4 000

Modification du barème du malus automobile

103

0

0

103

Élargissement de la taxe générale sur les activités polluantes

4

0

0

4

Maintien transitoire de la défiscalisation en faveur des bio-carburants

– 165

+ 45

+ 120

0

Réforme du crédit d’impôt en faveur du développement durable (CIDD) et de l’éco-PTZ

0

0

0

0

L’imposition de la consommation de carbone constitue une inflexion notable de la fiscalité, destinée à décourager la consommation des produits énergétiques responsables du réchauffement climatique. Elle monterait en puissance progressivement pour atteindre son régime de croisière en 2016, à hauteur de 4 milliards d’euros par an.

Comme annoncé par le Gouvernement au moment de l’examen du projet de loi de finances rectificative de fin d’année 2012, le produit de cette nouvelle imposition aurait vocation à financer l’allègement du coût du travail permis par le crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi (CICE). Cette affectation répond à la logique de « double dividende », qui permet de mobiliser l’outil fiscal pour décourager les comportements portant atteinte à l’environnement et, dans le même temps, pour encourager l’emploi et réduire le chômage.

Le projet du Gouvernement répond à la volonté exprimée par le groupe Socialiste, républicain et citoyen et par le groupe Écolo à travers la proposition de résolution pour une fiscalité écologique au cœur d’un développement soutenable, déposée le 8 avril 2013 et adoptée, sur le fondement de l’article 34-1 de la Constitution, le 4 juin 2013. Cette résolution demande une évolution du système fiscal, dès le projet de loi de finances pour 2014, conduisant à le faire reposer sur un « quatrième pilier, celui des ressources naturelles et des pollutions », qui compléterait les assiettes existantes. En proposant l’instauration de cet élément fondateur d’une nouvelle fiscalité écologique, le Gouvernement répond donc aux souhaits émis par la majorité et permet de franchir un pas important vers la transition énergétique.

La définition des caractéristiques de cette nouvelle imposition écologique repose sur les travaux préparatoires menés par M. Christian de Perthuis. En particulier, le tarif de la tonne de carbone en 2014 serait fixé à 7 euros, conformément aux recommandations faites par M. de Perthuis. Il augmenterait à 14,5 euros en 2015 puis à 22 euros en 2016.

Le dispositif proposé par le Gouvernement consiste en une hausse des taux des taxes intérieures sur la consommation des produits fossiles, et non en une taxe additionnelle à ces taxes – qui était le schéma retenu en loi de finances pour 2010 et déclaré non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Il paraît donc juridiquement plus solide que celui suivi par la précédente majorité dans sa tentative avortée d’instauration d’une fiscalité écologique.

En définitive, alors que la précédente majorité avait adopté avec hésitation une « taxe carbone » finalement censurée par le Conseil constitutionnel, le Gouvernement et la majorité s’engagent sur la voie d’une nouvelle fiscalité écologique qui montera progressivement en charge sur la législature.

Le « verdissement » de la fiscalité serait complété par des mesures ciblées spécifiquement sur l’utilisation des véhicules les plus polluants.

L’article 37 du présent projet prévoit ainsi le renforcement du « malus » automobile afin de décourager l’achat des véhicules les plus polluants au bénéfice de véhicules dont les émissions de carbone sont moins importantes.

Le rapporteur général estime que, en cohérence avec l’évolution ainsi proposée par le Gouvernement, le barème de la taxe sur les véhicules de société (TVS) devrait être revu dans le même objectif de réduction des émissions de carbone. C’est pourquoi la commission des Finances a adopté un amendement tendant à « verdir » ce barème et d’affecter le produit de cette mesure au budget de l’État.

Par ailleurs, conformément aux engagements pris par le Président de la République en ouverture de la Conférence environnementale pour la transition écologique, un effort national en faveur de la rénovation thermique devrait traduire, à nouveau, la volonté du Gouvernement et de la majorité à mettre en œuvre, dès maintenant, la transition écologique.

L’article 56 du présent projet de loi a ainsi pour objet de recentrer le crédit d’impôt en faveur du développement durable (CIDD) et l’éco-PTZ afin de favoriser les rénovations lourdes et de soutenir en particulier les travaux d’isolation thermique.

La mise en œuvre des engagements du Président de la République requiert, par ailleurs, de compléter le projet de loi en prévoyant la baisse de 10 % à 5,5 % du taux de taxe sur la valeur ajoutée sur les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des logements, pour un coût de l’ordre de 500 millions d’euros.

Enfin, le rapporteur général estime nécessaire d’exclure du bénéfice du taux intermédiaire de TVA la consommation d’engrais et produits assimilables, afin d’en limiter l’utilisation. Une telle évolution, en augmentant le coût de la consommation finale de ces produits, limiterait l’utilisation excessive d’engrais et de pesticides qui peuvent être à l’origine de dommages environnementaux et susceptibles de porter atteinte à la santé humaine. Les produits utilisables en agriculture biologique seraient, en revanche, soumis au taux de 10 %.

AUDITION DE M. PIERRE MOSCOVICI, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES ET DE M. BERNARD CAZENEUVE, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DU BUDGET, SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014

Au cours de sa séance du mercredi 25 septembre 2013, la Commission a entendu, en audition ouverte à la presse, M. Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des finances, et M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget, sur le projet de loi de finances pour 2014 (n° 1395).

M. le président Gilles Carrez. Cette réunion est la première du marathon budgétaire qui va nous occuper jusqu’au 20 décembre au moins ; dès cet après-midi, nous entendrons d’ailleurs M. Didier Migaud : ce sera la première audition d’un président du Haut Conseil des finances publiques sur un projet de loi de finances initiale.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’Économie et des finances. Le projet de loi de finances initiale pour 2014 que nous venons vous dévoiler poursuit deux ambitions : stimuler la croissance et dynamiser l’emploi.

Je commencerai par un constat tout simple : nous ne sommes plus dans la situation où nous nous trouvions l’année dernière. La loi de finances pour 2013 était marquée par la contrainte : comme l’a dit le Premier ministre, nous devions défendre notre souveraineté dans un contexte difficile pour la zone euro tout entière, en proie à de violentes attaques spéculatives au point qu’on s’interrogeait sur son avenir, comme pour notre pays, observé de près par les marchés financiers.

Depuis un an, nous avons travaillé à desserrer l’étau et de façon méthodique engagé le redressement du pays.

Nous étions confrontés à un triple déficit : tout d’abord à un déficit structurel qui grevait nos finances publiques, entamant notre crédibilité ; nous avons immédiatement réagi en entreprenant de le réduire dans des proportions tout à fait inédites et nous avons réformé la gouvernance de nos finances en mettant en place l’autorité indépendante qu’est le Haut Conseil des finances publiques.

Nous souffrions également d’un déficit de compétitivité, auquel nous avons répondu par l’arsenal de mesures puissantes qu’est le « pacte de compétitivité », mais aussi par la réforme du marché du travail – la loi sur la sécurisation de l’emploi a recueilli un large consensus – et par la réforme en profondeur du financement de l’économie ; j’ai ainsi défendu devant vous la création de la Banque publique d’investissement et une réforme bancaire très novatrice.

Enfin, nous souffrions d’un déficit de la demande privée : le pacte de croissance européen que nous avons négocié a dynamisé l’investissement, grâce notamment aux moyens nouveaux accordés à la Banque européenne d’investissement, dont le capital a été augmenté au semestre dernier de 10 milliards d’euros. Afin de soutenir la consommation, nous avons pris des mesures de soutien au pouvoir d’achat des ménages – coup de pouce au SMIC, revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire… Le pilotage rigoureux mais pragmatique de notre effort de redressement budgétaire a évité de déprimer à l’excès la demande privée ; nous commençons à récolter les fruits de cette politique économique, et le projet de loi de finances pour 2014 vise à amplifier ces progrès.

Aujourd’hui, nos perspectives de croissance sont conditionnées par l’évolution de la conjoncture globale. L’économie mondiale va nettement mieux que l’an dernier : au premier semestre, la croissance américaine a été forte ; grâce à la politique dite « des trois flèches », le Japon a maintenu une croissance solide ; après six semestres de contraction de l’activité, la zone euro est sortie de la récession au second semestre de 2013. Il est encore trop tôt pour savoir si cette reprise sera durable – des freins à la croissance demeurent et le mouvement de désendettement pèse encore fortement sur la demande – mais je constate aujourd’hui que les politiques européennes sont davantage tournées vers le soutien à la croissance que marquées par un attachement absolu aux cibles nominales de déficit – ce que j’appellerai le nominalisme. Nous avons la volonté de réduire les déficits, y compris les déficits nominaux, et nous le faisons à un rythme soutenu, négocié avec la Commission européenne, mais à un rythme compatible avec la croissance et surtout en insistant sur la réduction des déficits structurels.

Nous ne pouvons pas ignorer les risques qui continuent de menacer l’économie mondiale – je pense notamment à l’évolution de la situation économique des pays émergents et aux tensions géopolitiques au Proche et au Moyen-Orient. Mais cette économie est bel et bien engagée dans un mouvement de reprise, qui doit gagner en ampleur.

Quant à notre pays, il n’a pas été épargné par le ralentissement généralisé de la fin de 2012 et du début de 2013. L’embellie actuelle reste à confirmer, mais il faut déjà constater que la France a mieux résisté que ses partenaires, et que nous avons presque retrouvé notre niveau de PIB d’avant la crise. À l’hiver dernier, tous les grands pays de la zone euro ont connu une baisse prononcée de leur activité ; la France, avec – 0,2 % au quatrième trimestre de 2012 et au premier trimestre de 2013, a évité un lourd décrochage : si l’on prend en considération ces deux trimestres, nous avons même fait un peu mieux que l’Allemagne, qui a souffert, il est vrai, de circonstances climatiques exceptionnelles.

Au second semestre de 2013, la France et l’Allemagne ont joué un rôle moteur, avec une croissance respectivement de 0,5 % et 0,7 %, contre 0,3 % pour l’ensemble de la zone euro. Cette relativement bonne tenue s’explique notamment par notre choix de laisser jouer au moins en partie, dans ce contexte de forte dégradation, les stabilisateurs économiques, et, en tout cas, de ne pas raidir à l’extrême la pente du redressement budgétaire tout en tenant nos objectifs de réduction du déficit structurel. Notre pilotage fin et notre refus, malgré certaines objurgations, d’ajouter l’austérité à la stagnation, nous ont évité la récession. Le brutal tour de vis que réclamait l’opposition aurait eu l’effet inverse : nos choix étaient, j’en suis convaincu, économiquement responsables et socialement justes.

Enfin, le dialogue intense et fructueux que nous avons mené avec la Commission européenne a débouché sur un report de deux ans de l’exigence d’un déficit nominal à 3 % du PIB, ce qui a nous a permis de mener notre effort de réduction des déficits tout en soutenant la croissance. Mais ce dialogue n’a pu aboutir que parce que notre politique était par ailleurs crédible. La Commission européenne n’a pas fait preuve d’indulgence : nous avons su faire évoluer le débat européen et marqué notre volonté de redressement.

Sans méconnaître les risques qui demeurent, nous voyons apparaître des signes de reprise encourageants : l’évolution du climat des affaires et de la confiance des ménages est mieux orientée depuis plusieurs mois ; l’indice de confiance des directeurs d’achat pour la France, le purchasing managers’ index (PMI), qui est très suivi, signale une amélioration pour la première fois depuis février 2012. Ce matin même ont été publiées les enquêtes de conjoncture mensuelle de l’INSEE, qui sont favorables pour le mois de septembre : l’indicateur de retournement de conjoncture, calculé pour détecter les phases de reprise économique, est passé pour la première fois depuis le début de l’année 2011 en zone favorable. Beaucoup reste à faire pour que la reprise soit solide et durable, mais le mieux est incontestable.

Sur ces bases, nos prévisions de croissance pour 2013 et 2014 reflètent notre choix d’être à la fois confiants et prudents.

Pour 2013, le programme de stabilité prévoyait une croissance de 0,1 % – notons qu’avant l’été, la Commission européenne, l’OCDE et les instituts de conjoncture prévoyaient tous une performance moindre – soit un recul de 0,1 % du PIB pour la première et de 0,3 % pour les seconds. Le Haut Conseil des finances publiques avait pour sa part estimé que notre scénario « était entouré d’un certain nombre de risques baissiers » et jugeait qu’un taux de croissance négatif ne pouvait pas être exclu. Je confirme aujourd’hui notre prévision pour 2013 d’une progression de 0,1 % du PIB, car les chiffres satisfaisants du deuxième trimestre ont conforté notre acquis de croissance, qui est d’ores et déjà de 0,1 % ; ce taux m’apparaît donc comme un minimum, que nous conservons cependant par souci de prudence.

Pour 2014, le projet de loi de finances est élaboré sur la base d’une prévision de croissance du PIB de 0,9 %. Avant l’été, le consensus s’établissait plutôt à 0,6 % ; aujourd’hui, il est plutôt de 0,8 % ou 0,9 %, mais certains organismes prévoient une croissance supérieure. Nous campons donc là encore sur position voie médiane, entre confiance et prudence.

Notre économie dispose d’un fort potentiel de rebond et de grandes ressources ; elle est résistante, résiliente. Ne tombons pas dans le French bashing : la France est un grand pays, son économie est la cinquième du monde et la deuxième d’Europe. Elle est respectée comme telle et nous ne devons pas l’affaiblir.

Je retiens enfin que le Haut Conseil des finances publiques, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2014, juge ce scénario macro-économique « plausible », tant pour 2013 que pour 2014 ; le Haut Conseil ayant jugé nos prévisions précédentes trop optimistes, je lis dans cet avis une reconnaissance de notre sincérité, comme d’ailleurs une confiance dans la solidité de l’économie française.

Ce projet de loi de finances est donc bâti sur ce scénario confiant et prudent : il décrit une reprise naissante, mais qui doit être soutenue, entretenue, amplifiée.

Soutenir la croissance, c’est d’abord s’assurer que l’effort d’ajustement des comptes publics est compatible avec la reprise. Le sérieux budgétaire et la volonté d’atteindre l’équilibre structurel sont des acquis que nous devons à tout prix préserver. Nous poursuivons donc le redressement des comptes publics à un rythme soutenu, mais pas excessif – « Tout ce qui est excessif est insignifiant », disait Talleyrand dans une formule trop souvent citée.

Pour 2013, le déficit public devrait s’établir à 4,1 % du PIB, c’est-à-dire au-delà de la prévision initiale du programme de stabilité, qui était de 3,7 %, et au-delà de la prévision de la Commission européenne, qui était à l’été de 3,9 %. Ce dépassement tient pour une très large part aux effets de l’environnement économique et de la faible inflation sur les recettes fiscales ; les dépenses de l’État et de l’assurance maladie – celles qui sont sous notre contrôle – sont maîtrisées. L’effort structurel est donc extrêmement important, et même sans précédent puisqu’il s’élève à 1,7 point de PIB, après 1,3 point en 2012.

Pour 2014, notre objectif de déficit nominal sera de 3,6 %, ce qui est cohérent avec nos engagements européens ; l’effort structurel représentera encore 0,9 point de PIB, soit un rythme globalement inchangé par rapport à celui que prévoyait le programme de stabilité transmis à la Commission européenne au printemps, mais légèrement ralenti par rapport à 2013, conformément aux recommandations de cette même Commission, afin de préserver la croissance.

L’évolution du déficit va dans le bon sens : en 2011, il s’établissait à 5,3 % du PIB ; en 2012, nous l’avons ramené à 4,8 % du PIB alors que, hors correction, il était de nouveau, tendanciellement, à 5,3 % ; en 2013, il sera de 4,1 % ; à la fin de l’année 2014, sur la base de nos prévisions de croissance, il sera à 3,6 %. La tendance à l’amélioration apparaît plus nettement encore lorsqu’on s’intéresse à l’évolution du solde structurel : en 2011, il s’élevait à 5,1 % du PIB ; nous le ramènerons à 1,7 % en 2014. Ce gouvernement consent donc un effort de réduction du déficit structurel extraordinairement important.

Un ajustement bien calibré, c’est aussi un ajustement qui repose presque exclusivement sur des économies. À cet égard, l’effort se montera au total à 18 milliards d’euros, dont 2 milliards provenant de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales et 15 milliards provenant d’économies de dépenses publiques par rapport à leur évolution spontanée – 9 milliards d’économies sur les dépenses de l’État, des collectivités territoriales et des agences, et 6 milliards d’économies dans le champ social. Cela revient à diviser par quatre le rythme d’évolution de la dépense publique par rapport à la tendance des dix dernières années : c’est donc un effort absolument sans précédent, un bouleversement complet par rapport aux choix qui ont prévalu au cours de la décennie précédente.

Par volonté d’efficacité économique, nous avons choisi de concentrer la hausse des prélèvements obligatoires sur la période 2012-2013 : notre analyse est qu’à court terme, notamment dans le contexte d’une stagnation de l’activité, la baisse des dépenses publiques risquait de peser plus lourdement sur la croissance qu’une hausse des prélèvements obligatoires. Pour 2014 et les années suivantes, nous privilégions les économies : elles représenteront en 2014 80 % de l’effort structurel, contre 20 % pour les prélèvements obligatoires ; en 2015, ce sera 100 %.

Ce choix inédit a bien sûr des conséquences directes sur le niveau des prélèvements obligatoires : ceux-ci ont augmenté de 3,5 % au cours des années précédentes ; ils augmenteront cette année de 0,15 % seulement, et même de 0,05 % si on défalque les sommes tirées de la lutte contre la fraude fiscale. Ils sont donc quasiment stables.

Pour stimuler la croissance, nous consentons donc d’abord un effort de redressement budgétaire finement calibré et largement fondé sur des économies. Mais nous voulons aussi continuer d’améliorer la compétitivité de nos entreprises en soutenant par tous les moyens l’investissement productif.

L’investissement privé est un moteur essentiel de la croissance, et c’est celui qui est aujourd’hui le plus à la peine en France, même s’il résiste un peu mieux que dans le reste de la zone euro. C’est pourquoi nous avons choisi d’appuyer fortement la demande privée, grâce à une large palette de mesures destinées à améliorer la compétitivité des entreprises, dans la ligne de l’action que nous menons depuis seize mois mais en approfondissant encore le sillon.

L’année 2014 verra d’abord l’arrivée à maturité du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE –, dont le taux atteindra 6 %. Le projet de loi de finances pose également les bases d’une réforme de l’imposition des entreprises, afin que la fiscalité pèse moins sur les facteurs de production et qu’elle prenne davantage en compte le résultat économique de l’entreprise : nous proposons en effet la suppression d’un impôt « imbécile », l’imposition forfaitaire annuelle – IFA –, créée en 1974 et maintenue malgré certaines promesses, et nous créons un nouvel impôt sur le résultat des grandes entreprises, une contribution de 1 % de l’excédent brut d’exploitation – EBE. M. Bernard Cazeneuve vous en parlera plus longuement, car il a beaucoup soutenu ce projet.

Le soutien à la création d’entreprises sera également renforcé par la réforme de l’imposition des plus-values mobilières, annoncée lors des assises de l’entrepreneuriat. Enfin, le projet de loi de finances comporte plusieurs mesures de soutien à l’investissement et à l’innovation. Ainsi, nous créons le plan d’épargne en actions pour les petites et moyennes entreprises – PEA-PME – dont j’ai présenté les grandes lignes il y a quelques semaines ; il est destiné à favoriser le financement en fonds propres de l’entreprise et à garantir aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire – ETI – un accès plus aisé à l’épargne des particuliers. Cette mesure, vous le savez, était très attendue. Le champ des dépenses éligibles aux exonérations de charges sociales liées au statut des jeunes entreprises innovantes – JEI – est en outre étendu, et les petites entreprises bénéficieront d’un nouvel amortissement dégressif pour favoriser les investissements dans des équipements robotiques.

Ces mesures fiscales viennent compléter un arsenal déjà très complet de mesures destinées à rétablir notre compétitivité. Il faut enfin compter avec le choc de simplification, qui créera un environnement plus favorable pour les entreprises, et avec la réorganisation du financement de l’économie. Notre démarche est globale et cohérente : elle ne se limite pas à l’impulsion fiscale, même si celle-ci est nécessaire.

En termes de coûts du travail, le CICE permettra d’accélérer la convergence en cours avec l’Allemagne. Évidemment, nous ne baissons pas le coût du travail d’un côté pour l’augmenter de l’autre : les prélèvements obligatoires sur les entreprises seront donc stables en 2013 et 2014, hors CICE. De plus, point tout à fait décisif, l’effet favorable de ce crédit d’impôt sur le coût du travail sera intégralement préservé. Avec ce budget, nous travaillons donc résolument en faveur de l’offre productive, de la compétitivité et de l’investissement : en un mot, en faveur de la croissance.

C’est aussi un budget qui vise à faire redémarrer l’emploi – c’est notre priorité absolue, et c’est à ses résultats sur le chômage qu’une politique se juge. Je ne reviens à cet égard sur le CICE que pour dire qu’il devrait permettre au cours de la législature la création de 300 000 emplois salariés dans le secteur marchand. Cette politique structurelle doit s’accompagner d’un soutien conjoncturel : comme Michel Sapin et moi-même l’avons déjà dit, nous n’avons pas l’emploi aidé honteux ! Quand des hommes et des femmes, jeunes ou moins jeunes, restent exclus du marché du travail, on doit mettre en place pour les aider des politiques spécifiques : toutes les majorités l’ont fait.

Dynamiser l’emploi, c’est donc aussi soutenir activement ceux qui en sont le plus éloignés – les jeunes, les seniors, les moins bien formés. Ce projet de loi de finances propose ainsi la création, d’ici à la fin de l’année 2014, de 150 000 emplois d’avenir, la signature de 100 000 contrats de génération et la consolidation de 340 000 emplois aidés non marchands. Il propose également la création d’un nouveau contingent de 2 000 postes à Pôle Emploi, après les 2 000 déjà créés en 2013, car nous avons besoin d’un service public de l’emploi qui fonctionne.

Le soutien au pouvoir d’achat passera également par des mesures complémentaires en faveur des classes populaires et moyennes.

Le soutien aux plus modestes s’incarnera dans le ciblage des politiques volontaristes de l’emploi, mais aussi dans la traduction budgétaire du « plan pauvreté », qui comprend des mesures comme la revalorisation du revenu de solidarité active – RSA – ou la « garantie jeunes », et qui sera financé par redéploiement. Quant aux classes moyennes, elles bénéficieront de la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu sur le coût de la vie, après les deux années de gel décidées par le précédent gouvernement : cette mesure de justice fiscale permettra de réduire, à compter de 2014, l’imposition des contribuables dont les revenus réels n’ont pas augmenté, et de préserver les plus modestes. Au-delà de cette mesure générale, ces mêmes classes moyennes vont également bénéficier d’une décote renforcée, permettant de retarder et d’atténuer les effets de l’entrée dans le barème progressif de l’impôt sur le revenu : 6,9 millions de contribuables sont concernés. Avec ces deux mesures, ce sont 900 millions d’euros qui sont rendus aux ménages.

Le dégel du barème est la seule mesure générale concernant tous les ménages qui figure dans le projet de loi de finances, en dehors de la réforme de la TVA votée il y a près d’un an et qui entrera en vigueur au 1er janvier 2014, et de l’impact de la réforme des retraites sur les cotisations salariales.

En revanche, je veux le souligner, ce projet de loi de finances comporte aussi des hausses ciblées, au service de nos objectifs économiques et de la justice sociale : les plus hautes rémunérations seront mises à contribution, dans un objectif de solidarité, avec la création d’une taxe exceptionnelle à 75 %, à la charge des entreprises, tandis que la progressivité de l’impôt sera renforcée à travers la réduction de niches fiscales.

Le cap reste donc bien mis sur l’équilibre structurel des comptes publics en 2016, conformément à l’engagement européen de la France. Nous prévoyons d’atteindre cet équilibre grâce à une modernisation en profondeur de l’action publique – processus qui commence à porter ses fruits : près de cinquante évaluations de politiques publiques ont été lancées à ce jour, couvrant environ 20 % de la dépense publique. Nous comptons nous y impliquer plus fortement encore dans les années à venir. En 2014, le taux de prélèvements obligatoires sera globalement stabilisé, et le déficit ramené à 3,6 % du PIB. En 2015, grâce à un effort structurel de 0,9 point de PIB reposant exclusivement sur la maîtrise des dépenses publiques, le déficit nominal sera ramené en deçà de 3 % et la courbe de la dette devrait alors s’inverser.

Préparer l’avenir, c’est aussi l’objet du nouveau programme d’investissements d’avenir, qui contribuera à réaliser l’ambition du Gouvernement pour la France de 2025. Le Premier ministre a annoncé que 12 milliards d’euros seront investis entre 2014 et 2024, au service du rétablissement de notre compétitivité et de la transition écologique et énergétique, qui sera au cœur de ce nouveau programme.

Enfin, nous allons consolider notre modèle social grâce à deux réformes majeures : la réforme de la politique familiale et la réforme des retraites. Cette dernière a été conduite alors même que la France se trouve dans une situation nettement plus favorable que la plupart de ses partenaires en termes de perspectives démographiques comme de coût attendu du vieillissement ; l’effort de redressement sera partagé entre économies et prélèvements et couvrira les besoins de financement de notre système de retraites ; il contribuera à renforcer l’équilibre de nos finances publiques. Cette réforme structurelle constitue un véritable pacte intergénérationnel qui vient conforter l’assise de notre système par répartition.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du Budget. Je ne saurais trop insister sur les objectifs assignés à ce projet de budget pour 2014 : il vise avant tout à permettre l’inversion de la courbe du chômage, grâce à des mesures favorisant la croissance. Son succès au service de la croissance et donc de l’emploi exige la réunion de plusieurs conditions.

Tout d’abord, nous devons poursuivre l’effort de redressement des comptes publics. Par le passé, tous les pays qui ont renoncé à cet effort ont vu leur situation sur les marchés se dégrader, les taux d’intérêt qui leur étaient consentis augmenter et leur économie en a pâti. Nous continuerons donc de travailler en 2014 à la réduction de nos déficits, ce qui passe par d’importantes économies en dépenses.

Mais renouer avec la croissance exige aussi, en deuxième lieu, que nous n’alourdissions pas à l’excès la pression qui s’exerce sur les ménages. Comme l’a indiqué le ministre de l’Économie, les économies en dépenses atteindront en 2014 un niveau historique : 15 milliards d’euros – 9 milliards sur les dépenses de l’État et 6 milliards sur les dépenses sociales. Quant à la pression fiscale, elle augmentera moins que ne le prévoyait le programme de stabilité : nous nous étions engagés à la contenir dans la limite de 0,3 point, elle ne croîtra que de 0,15 point – et même, si l’on fait abstraction du produit de la lutte contre la fraude fiscale, de 0,05 point.

Troisième condition à laquelle doit satisfaire un budget au service de la croissance : il faut moderniser la fiscalité des entreprises de manière à restaurer la compétitivité de notre appareil productif et à diminuer le coût du travail et, dans le même temps, préserver la demande privée de sorte que la consommation soit au rendez-vous – c’est pourquoi ce projet de loi de finances ne comporte pas de mesures générales de nature à alourdir la pression fiscale sur les ménages : celles que nous avons prévues ne visent qu’à ramener à l’équilibre des comptes qui s’étaient dégradés et à financer des politiques nouvelles et elles s’accompagnent en outre de dispositions en faveur du pouvoir d’achat, en particulier au profit des ménages les plus modestes et des classes moyennes.

La réduction des déficits se poursuit donc. En 2014, celle des déficits nominaux sera de 0,5 point puisqu’ils devraient passer de 4,1 % du PIB à 3,6 %. Elle fera suite à une diminution de 0,5 point entre 2011 et 2012 et de 0,7 point entre 2012 et 2013, ces déficits s’étant établis à 5,3 % du PIB en 2011, à 4,8 % en 2012 et à 4,1 %, comme je l’ai dit, en 2013. Même si certains – qui avaient contribué par le passé à les creuser – jugent qu’ils ne diminuent pas assez vite ou regrettent qu’ils ne le fassent pas aussi vite qu’ils avaient crû auparavant, le fait est là : ils diminuent et l’évolution prévue pour 2014 s’inscrit dans une séquence continue de réduction. Celle-ci est le fruit d’efforts structurels importants : de 1,2 % du PIB en 2012 et de 1,7 % en 2013, en attendant 1 % en 2014. Nous tenons donc, année après année, les objectifs que nous nous sommes assignés, conformément à notre volonté de rétablir les comptes publics.

Notre solde budgétaire s’améliorera en 2014 : hors les décaissements de 12 milliards d’euros destinés au programme d’investissements d’avenir – dont on a toujours fait abstraction dans la mesure où ils ne font sentir leurs effets qu’une fois ces sommes mobilisées par les opérateurs qui en bénéficient –, il sera négatif de 70,2 milliards d’euros, contre 71,9 milliards cette année, soit une diminution de 1,65 milliard. Cette évolution résulte de plusieurs mouvements. Tout d’abord, d’une diminution de 1,5 milliard des dépenses de l’État, hors dette et pensions : autrement dit, nous ne nous contentons pas d’absorber par les économies en dépenses le tendanciel d’augmentation des dépenses de l’État. En second lieu, d’une baisse des recettes fiscales de 3,2 milliards, du fait d’évolutions contradictoires : l’augmentation tendancielle de ces recettes, évaluée à 8,6 milliards, est en effet contrariée par le coût du CICE et par le remboursement de certains contentieux fiscaux hérités de la période antérieure.

La charge de la dette s’élèvera en 2014 à 46,7 milliards d’euros : c’est le premier poste de dépenses de l’État devant l’éducation nationale, dont le budget s’établit à 46,3 milliards. Si nous insistons tant sur la nécessité d’un redressement des comptes, c’est parce que nous sommes convaincus qu’aussi longtemps que nous devrons supporter un niveau de dette aussi important, nous ne disposerons pas des marges de manœuvre nécessaires pour effectuer des choix souverains. Nous sommes donc résolus à faire en sorte que la trajectoire de la dette s’inverse, grâce à des efforts de maîtrise des déficits. Je rappelle que la charge de la dette après révision se monte pour 2013 à 45 milliards, cependant que les dépenses de pensions sont en augmentation de 1,2 milliard. L’an prochain, 200 millions seront économisés sur ce dernier poste, grâce au report de la réindexation des pensions.

Les économies dans la sphère de la protection sociale s’élèveront à 6 milliards. Je souhaite ici en préciser les contours afin de lever tout doute sur le soin méticuleux
qui a présidé à notre démarche. Ces économies porteront d’abord pour 3 milliards d’euros sur les dépenses d’assurance maladie, dont le coefficient d’augmentation sera ramené à 2,4 % en 2014 alors que, sur les dix dernières années, il a été en moyenne de 4 %. Depuis notre arrivée aux responsabilités, cette augmentation est maîtrisée : en 2012, la dépense est restée d’un milliard en deçà de l’objectif fixé par le précédent gouvernement et la dernière réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale permet d’anticiper une exécution du budget de 2013 inférieure de quelque 500 millions à ce que nous avions prévu. Les 3 milliards d’économies comprennent donc 2,5 milliards au titre de la maîtrise des dépenses, dont la progression est contenue à 2,4 %, et 500 millions au titre de l’exécution 2013.

Deux autres milliards d’euros d’économies sont escomptés à peu près à parts égales des résultats de la négociation menées par les partenaires sociaux sur les retraites complémentaires AGIRC et ARRCO et des décisions que nous avons nous-mêmes prises dans le cadre de la réforme des retraites. Enfin, 500 à 600 millions d’euros seront obtenus par la renégociation des contrats d’objectifs et de gestion des organismes de sécurité sociale. Toutes ces économies pourront être précisées à l’occasion de l’examen par la représentation nationale du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

S’agissant des économies sur le budget de l’État, je souhaite souligner qu’elles sont d’abord révélatrices d’un changement de méthode et je tiens à remercier à ce propos mes collègues ministres pour l’esprit dans lequel ils ont mené les discussions avec nous. Nous avons refusé la méthode du rabot qui a parfois présidé aux économies d’antan et qui, sans discernement et sans considération de priorité politique, affectait indistinctement toutes les administrations en les obligeant à ne pas compenser un départ en retraite sur deux. Il nous est certes arrivé d’appliquer nous-mêmes cette méthode parce que nous manquions d’éléments d’analyse, la modernisation de l’action publique – MAP – n’étant pas encore à l’œuvre, mais nous avons rompu avec de telles pratiques cette année. La discussion avec l’ensemble des membres du Gouvernement a porté sur la possibilité d’économies résultant d’une modification des organisations, des structures et des politiques publiques : autrement dit d’économies structurelles susceptibles d’avoir des effets sur toute la durée du quinquennat, dans la mesure où l’argent public restera rare dans les années à venir.

La MAP a donné de premiers résultats dès cette année. En matière d’aides aux entreprises, 50 % des préconisations qui en sont issues seront appliquées dès ce budget : ainsi les chambres consulaires verront leurs ressources diminuer de 305 millions d’euros, du fait du plafonnement des taxes qui leur sont affectées et d’un prélèvement sur leur fonds de roulement, cependant que le Centre national du cinéma et de l’image animée – CNC – subira un prélèvement de 90 millions d’euros par le biais d’un plafonnement identique. Enfin, le recentrage des exonérations sur les bas salaires outre-mer procurera une économie de 90 millions d’euros. La MAP a vocation à monter en puissance afin d’analyser et d’étayer les économies que peuvent apporter des réformes d’organisation et de structure, de préférence à un simple coup de rabot.

Comment se répartissent les 9 milliards d’économies qui seront réalisées sur les dépenses de l’État ? Pour 2,5 milliards, elles proviendront des administrations centrales, en premier lieu grâce à des mesures à caractère général concernant la fonction publique : le gel du point d’indice est maintenu pour une année supplémentaire cependant que le niveau des mesures catégorielles est divisé par deux par rapport au précédent quinquennat. Nous assumons devant la représentation nationale ce choix d’une maîtrise de la masse salariale qui exige des efforts de tous. En deuxième lieu, les effectifs nets seront stabilisés : si 10 979 recrutements sont prévus au bénéfice des missions prioritaires que sont l’éducation nationale, la justice et la sécurité – ce qui portera à près de 29 000 le nombre d’emplois créés depuis le début du quinquennat dans ces secteurs prioritaires qui ne sont pas pour autant exemptés d’économies –, 13 123 postes seront supprimés, les deux principaux contributeurs à cet effort étant le ministère de la Défense, à hauteur de 7 800 postes, et le ministère de l’Économie et des finances, à hauteur de 2 500 postes.

L’action sur les dépenses de fonctionnement est une dernière source d’économies substantielles, permises par la MAP et par sa déclinaison en programmes ministériels de modernisation et de simplification. J’en donnerai trois exemples. Au ministère de la Justice qui, bien que prioritaire, n’est pas, comme je l’ai dit, dispensé d’efforts, 45 millions d’euros d’économies seront dégagés grâce à une modernisation des procédures bénéfique pour le pilotage de la dépense publique et des frais de justice : il s’agit de la réforme des circuits comptables au bénéfice des juridictions et de leurs prestataires, de la renégociation de marchés pour les analyses des traces – pour 8 millions – et de la mise en place de la plateforme nationale d’interceptions judiciaires – pour près de 20 millions dès 2014. Au ministère de l’Économie et des finances, la dématérialisation de la déclaration de revenus et d’autres procédures classiques permettra d’économiser 50 millions d’euros ; la division par deux du volume des documents budgétaires transmis au Parlement y contribue. Au ministère des Affaires étrangères, la rationalisation du fonctionnement des postes à l’étranger, la vente de locaux et le regroupement de services généreront une économie de 20 millions d’euros qui a vocation à se poursuivre au cours des prochaines années.

Nous avons eu l’occasion de préciser lors de la dernière réunion du Comité des finances locales la répartition des économies de 1,5 milliard d’euros à la charge des collectivités territoriales : les communes et les intercommunalités supporteront 56 % de la diminution des dotations, soit 840 millions d’euros ; les départements, 32 %, soit 476 millions, et les régions, 12 %, soit 184 millions.

Compte tenu des dépenses très contraintes auxquelles les départements sont confrontés et de l’effet de ciseau qui compromettait la stabilité à long terme de leurs finances – et par conséquent leur capacité à faire face aux dépenses de solidarité qui leur incombent et à leurs dépenses d’investissement – , il a été décidé de leur rétrocéder 827 millions d’euros de recettes pour frais de gestion, dans le cadre du pacte de confiance entre l’État et les collectivités territoriales. De même, pour les régions, la suppression de la dotation globale de décentralisation consacrée au financement de la formation professionnelle sera compensée par un panier de recettes fiscales constitué de frais de gestion d’impôts locaux et d’une fraction supplémentaire de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE. Ces mesures permettront aux collectivités de faire face à leurs obligations dans le respect du coefficient d’autonomie défini par la loi de 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Quant aux opérateurs de l’État, dont les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 15 % et les dépenses de personnel de 6 % au cours du précédent quinquennat, le projet de budget prévoit une diminution de 4 % de leurs dépenses de fonctionnement grâce à une gestion très rigoureuse de leurs effectifs. Près de 1 200 emplois seront supprimés cette année après 1 300 autres l’année précédente, soit 2 500 emplois depuis 2012. Des efforts de rationalisation et de mutualisation seront en outre entrepris, en particulier grâce à des regroupements : dans le secteur de la jeunesse, un opérateur unique sera mis en place, permettant d’économiser 25 équivalents temps plein ; en matière de biodiversité, la création en 2015 d’une agence unique rassemblant l’ensemble des opérateurs existants est en préparation ; enfin, l’Agence nationale pour l’indemnisation des Français d’outre-mer est supprimée, ses missions étant reprises par d’autres opérateurs.

La baisse des dépenses d’intervention de l’État contribue aussi à l’objectif d’économies. Nous renonçons à des projets d’investissement somptuaires comme le musée de l’histoire de France, dont la réalisation coûterait 150 millions d’euros et le fonctionnement 15 millions d’euros supplémentaires par an. Le bonus-malus automobile est réorienté et les aides personnalisées au logement cessent d’être indexées. Cette dernière mesure, qui représente une économie de 180 millions d’euros, tient compte des bénéfices attendus de l’encadrement des loyers et de la garantie universelle des loyers tels que les organise la future loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Enfin, nous souhaitons redéfinir nos relations avec certains acteurs – par exemple, nous revenons sur l’indemnité de 16 millions d’euros versée au Stade de France pour compenser l’absence d’un club résident.

J’en viens à une brève revue des mesures fiscales. Pour les entreprises, l’ambition du Gouvernement est de parvenir à l’issue du quinquennat – mais nous nous y attellerons dès 2014 – à une fiscalité simplifiée, stabilisée et mise au service de la croissance. La volonté de simplification se traduira l’an prochain par une réforme destinée à taxer moins la production et davantage le résultat. Il s’agit d’une démarche au long cours, qui demande donc du temps mais aussi de la concertation et nous entendons par conséquent la conduire en étant à l’écoute des interrogations des entreprises. Cette concertation ainsi que la collaboration étroite avec le Parlement permettront de faire évoluer une réforme qui doit monter en puissance tout en tenant compte des stratégies d’investissement des entreprises, afin de créer ensemble les conditions de la croissance et d’une inversion durable de la courbe du chômage.

D’autres mesures bénéficieront à ceux qui prennent des risques afin que l’appareil de production français innove, monte en gamme et organise le transfert de technologies. Pour les jeunes entreprises innovantes, conformément aux attentes qu’elles ont exprimées lors des assises de l’entrepreneuriat, nous proposons un dispositif d’exonération plus favorable que le régime dégressif conçu par un gouvernement précédent et nous étendons le champ du crédit d’impôt recherche. Enfin, nous réformons la taxation des plus-values mobilières en instaurant un régime plus incitatif : ceux qui accepteront de prendre des parts dans le capital des PME et des ETI innovantes pourront bénéficier d’un abattement de 85 % à partir d’une durée de détention de huit ans, contre 65 % dans le régime de droit commun.

Enfin, le projet de budget pour 2014 comporte un ensemble de mesures favorables à la croissance et à l’emploi qui concernent particulièrement le domaine du logement. Ainsi la baisse de la TVA sur la construction et la réparation de logements sociaux répond-elle à un triple objectif : créer des logements sociaux dans les zones tendues, soutenir le secteur du bâtiment dont nous connaissons le rôle de locomotive de la croissance et être en mesure de fixer, dans les zones tendues, un loyer qui n’obère pas le pouvoir d’achat des ménages comme c’est le cas actuellement en raison du déficit de l’offre.

Une refonte importante du régime des plus-values immobilières sera également menée afin de revenir sur la réforme très contestée de 2011, qui incitait à la rétention de propriétés foncières. Pour les terrains à bâtir, tous les abattements à raison de la durée de détention seront supprimés afin de fluidifier le marché. Pour les résidences secondaires, un dispositif d’abattement linéaire sera mis en place et la durée de détention à partir de laquelle l’exonération intervient est ramenée de trente à vingt-deux ans. Ces mesures visent à créer un choc d’offre que nous confortons pour la période de septembre 2013 à septembre 2014 par l’instauration d’un abattement exceptionnel de 25 %. Ces mesures devraient être de nature à faciliter la reprise du marché immobilier, à contribuer à la réussite de notre politique du logement et à conforter l’activité économique.

Je rappelle que le projet de budget prévoit également la montée en puissance de la contribution climat-énergie, destinée à rendre plus vertueux les comportements des entreprises et des particuliers mais aussi à nous permettre de financer le CICE. Les 10 milliards d’allégements nets de charges afférents à ce crédit d’impôt seront en effet financés à hauteur de 3 milliards par cette contribution et, plus largement, par la fiscalité écologique.

Dans le même souci de préserver l’environnement, nous élargissons également l’assiette de la taxe générale sur les activités polluantes – TGAP – air à d’autres produits.

Je terminerai en évoquant les mesures prises en faveur du pouvoir d’achat, essentielles au succès de ce budget dont le but, je le répète, est d’inverser la courbe du chômage et de ramener la croissance en France.

Ces mesures sont rendues possibles par nos efforts d’économies en dépense. Certaines concernent directement l’emploi : nous finançons 340 000 contrats non marchands, 150 000 contrats d’avenir, 100 000 contrats de génération. Cette dépense de 1,7 milliard d’euros permet à des Français qui, jusqu’à présent, ne pouvaient construire un projet de vie et se dessiner un avenir, d’avoir enfin accès à l’emploi et à la consommation. Ces emplois qui offrent une première chance à des jeunes ne sont pas des emplois honteux, ce sont des emplois que nous assumons : lorsque le chômage est là, qui ronge des vies et des destins, il est normal que la mobilisation soit générale pour offrir un contrat de travail aux personnes menacées de relégation sociale.

Mais bien d’autres mesures contribueront à soutenir le pouvoir d’achat : nous relevons par exemple le plafond de la couverture maladie universelle – CMU – afin de permettre à tous les Français de se soigner ; nous mobilisons 400 millions d’euros au titre du tarif social de l’électricité, en sorte que la dépense d’énergie ne vienne plus grever lourdement le budget des ménages les plus modestes ; nous finançons 55 000 bourses destinées aux jeunes de familles modestes et de la classe moyenne ; nous lançons une nouvelle politique du logement. En outre, nous rétablissons l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur les prix et nous accompagnons cette réindexation d’une décote, car la non-indexation du barème et la suppression de la demi-part supplémentaire accordée aux veuves et veufs avaient conduit à soumettre à l’impôt des ménages qui n’auraient pas dû l’être. Ce sont 138 000 foyers qui deviendront ainsi non imposables et 200 000 non imposés en 2014.

Le coût de ces dispositifs sera couvert par des mesures de justice : taxation à 75 % des très hauts revenus, réforme des droits de succession, prélèvements sociaux sur les produits de placements. Dans le même temps, nous confortons notre modèle social grâce à la disposition relative au quotient familial, à la fiscalisation des majorations de pension ou encore à la suppression, préconisée par le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, de la niche bénéficiant aux contrats collectifs de complémentaire santé, de manière que le rétablissement de nos comptes sociaux et les mesures en faveur des Français qui en ont le plus besoin soient finançables et financés.

M. le président Gilles Carrez. Le Haut Conseil des finances publiques juge plausibles les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fonde ce budget, notamment la prévision d’une croissance de 0,9 %. Je m’interroge toutefois sur la prévision d’évolution du pouvoir d’achat des ménages et, par suite, de la consommation, compte tenu de l’importance de la ponction fiscale que ceux-ci subiront en 2014.

Je souhaiterais à cet égard que vous confirmiez ou que vous infirmiez l’évaluation suivante : si l’on additionne l’augmentation des prélèvements de 6 milliards d’euros au titre de la TVA ; l’augmentation de 1,8 milliard d’euros au titre de la réforme des retraites, se répartissant entre une hausse des cotisations salariales de 0,15 point et l’assujettissement à l’impôt sur le revenu de la majoration de 10 % pour les personnes ayant élevé trois enfants ou plus ; l’augmentation d’environ 3,5 milliards de l’impôt sur le revenu du fait de l’abaissement du plafond du quotient familial, de la suppression de l’exonération sur une partie des versements aux complémentaires santé, de la suppression de la réduction d’impôt pour les enfants scolarisés et de la refiscalisation des heures supplémentaires – qui, il est vrai, résulte de textes antérieurs mais qui fera désormais sentir ses effets en année pleine – ; enfin, l’augmentation que l’on peut évaluer à 1 milliard d’euros au titre de la marge de manœuvre supplémentaire donnée aux départements en matière de droits de mutation à titre onéreux, n’arrive-t-on pas à un total de 12 milliards d’euros, soit une augmentation supérieure à celle de 2013, qui était de 10 milliards ?

D’autre part, pouvez-vous indiquer le nombre de ménages qui paient l’impôt sur le revenu en 2013 alors qu’ils ne le payaient pas en 2012 et faire d’ores et déjà une évaluation pour 2014 ? Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut s’attendre à ce qu’un nombre considérable de foyers entre dans l’impôt l’année prochaine, et ce en dépit de la majoration de la décote.

En matière de fiscalité des entreprises, la nouvelle taxe sur l’excédent brut d’exploitation, qui devrait rapporter 2,5 milliards d’euros, est assise sur le résultat majoré des amortissements et des frais financiers. Elle affectera donc directement l’investissement et touchera au premier chef les entreprises qui investissent beaucoup, c’est-à-dire les entreprises industrielles, alors même que ce sont celles qui bénéficient le moins du CICE. Ne craignez-vous pas qu’elle aille à l’encontre de l’objectif de renforcement de la compétitivité assigné au CICE dans la ligne du rapport Gallois ?

S’agissant des dépenses, une partie des économies que vous venez de détailler, monsieur le ministre délégué, ne sont-elles pas en trompe-l’œil ? Par exemple, il se trouve que la diminution nominale de 1,5 milliard d’euros des dépenses hors dette et pensions que vous annoncez correspond exactement au montant de la diminution des dotations aux collectivités locales. Au Comité des finances locales qui vous en faisait hier la remarque, vous avez objecté que l’État rendait 827 millions d’euros aux départements dans le cadre du pacte de confiance et de solidarité – puisqu’il abandonne une partie des frais d’assiette et de recouvrement – et que la baisse des dotations n’était donc en réalité que de 700 millions. Le problème est que l’on ne trouve pas trace, dans le projet de loi de finances, de ces 827 millions de dépenses supplémentaires pour l’État et qu’ils ne sont pas dans la norme de dépense.

Autre exemple : celui de l’ONDAM, dont la progression en exécution ces dernières années est descendue à 2,4 ou 2,5 %. Vous prévoyez du reste une hausse de 2,4 % pour 2014, mais l’économie de 2,5 milliards d’euros dont vous vous prévalez est calculée par rapport à une tendance de progression de 4,1 % totalement artificielle. Plus la tendance de référence est élevée, plus l’économie présentée est virtuelle. Pourquoi, tant qu’on y est, ne pas se référer aux progressions de dépenses d’assurance maladie de 7 ou 8 % par an que nous avons connues lorsque la ministre chargée des affaires sociales s’appelait Martine Aubry ?

En ce qui concerne maintenant l’exécution de la loi de finances pour 2013, le 25 juin dernier, je tenais avec mes collègues de l’UMP et de l’UDI une conférence de presse pour indiquer que, faute de projet de loi de finances rectificative, nous étions conduits à estimer le déficit pour 2013 à 4 points de PIB au moins. Cela nous a valu l’après-midi même des attaques violentes de votre part, monsieur le ministre de l’Économie et des finances, et de la part du rapporteur général. Or, le Gouvernement a annoncé il y a quinze jours un déficit pour 2013 de 4,1 % ! Pourriez-vous nous donner aujourd’hui vos prévisions de recettes fiscales d’ici à la fin de l’année ?

Vous avez beaucoup insisté, dans votre exposé liminaire, sur la notion de solde structurel. Mais c’est le solde nominal qui nous préoccupe car en dépend notre capacité d’emprunt, et avec ce solde le problème de la dette, que vous n’avez évoqué à aucun moment. Vous vous êtes ainsi bien gardé de fournir un tableau de l’évolution de l’endettement, qui devrait atteindre 95 % du PIB à la fin de 2014. Je souhaite donc que vous nous indiquiez comment vous envisagez de mieux maîtriser cette évolution.

Je constate enfin que l’exécutif n’applique pas la loi fiscale que nous avons votée. Cette remise en cause des prérogatives du Parlement et, singulièrement, de la commission des finances est inquiétante. Par exemple, l’administration a publié début août au Bulletin officiel des finances publiques une instruction fiscale qui modifie radicalement le régime des plus-values immobilières et met en place un système complexe d’exonération fiscale au bout de vingt-deux ans et d’exonération sociale au bout de trente ans. Ce dispositif est contraire à la loi votée. J’estime que le Parlement aurait dû en être saisi.

On se souvient aussi qu’à la suite de l’affaire dite des « pigeons », le rapporteur général avait dû réécrire complètement l’article relatif aux plus-values mobilières du projet de loi de finances pour 2013 et que le Parlement avait adopté cette rédaction. Or, le Président de la République a annoncé en avril dernier, lors des assises de l’entrepreneuriat, qu’un autre système s’appliquerait. Depuis lors, les services fiscaux répondent aux entreprises qui les interrogent à ce sujet que ce n’est pas le dispositif résultant de la loi de finances qui s’applique, mais cet autre système – qui a d’ailleurs été introduit dans le présent projet de loi de finances.

D’autre part, comme le relève le rapporteur général dans son rapport d’information sur l’application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances, l’exécutif a publié le 14 juin dernier une instruction fiscale contraire, selon de nombreux juristes, à la décision du Conseil constitutionnel censurant la réforme des modalités de calcul du plafonnement de l’impôt sur la fortune. Le rapporteur général estime à juste titre qu’il est curieux, et même anormal, de publier une telle instruction la veille de la date limite fixée pour la déclaration de l’ISF.

J’espère, messieurs les ministres, que vous montrerez un plus grand souci de transparence et un plus grand respect de nos prérogatives lors de l’exercice 2014, en nous tenant informés de l’évolution des comptes et en appliquant effectivement les dispositions fiscales votées par le Parlement.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je souhaite relayer la question du président Carrez sur le nombre de foyers fiscaux qui seraient entrés dans l’impôt sur le revenu, mais en l’étendant aux années antérieures. Vous vous êtes engagé, monsieur le ministre délégué, à livrer des chiffres précis sur le sujet ; il serait normal que vous les communiquiez à la commission des Finances.

Quels sont, pour le Gouvernement, les aléas qui peuvent encore peser sur la prévision du déficit effectif en 2013 ? À ce propos, je tiens à préciser au président Carrez – qui, selon la casquette qu’il porte, a tendance à parler un jour de l’un, un jour de l’autre – que le déficit structurel et le déficit nominal diminuent tous les deux. Je lui fais aussi observer que le débat budgétaire ne fait que commencer et que nous aurons très certainement des précisions sur l’évolution de la dette dans les prochains jours.

Je souhaiterais également savoir, messieurs les ministres, quelle est la progression attendue de la masse salariale de l’État en 2013 – cette masse salariale que la précédente majorité a laissé largement augmenter avant d’affirmer, il y a un an, que nous allions la faire exploser !

En matière fiscale, et pour répondre par avance à ceux qui nous reprocheraient un prétendu déficit de réformes structurelles, je relève la différence de méthode avec le précédent gouvernement. Beaucoup de réformes accomplies ou en cours sont le fruit de discussions et de négociations avec les partenaires sociaux – transposition de l’accord national interprofessionnel, réformes des retraites et du financement de la politique familiale – ou avec les acteurs concernés – c’est le cas de la question des plus-values mobilières, discutée dans le cadre des Assises de l’entrepreneuriat, ou des dispositions relatives à la transition énergétique, issues des travaux de la Conférence environnementale. Le projet de loi de finances « balaie », quitte à trier, et met à jour toutes les mesures ainsi discutées.

Je souhaiterais avoir des précisions sur l’assiette de la contribution sur l’excédent brut d’exploitation qui remplacera l’impôt forfaitaire annuel, et sur la proportion des entreprises qui gagneront ou perdront à cette réforme. Comment essayer d’approfondir cette évolution ? On a beaucoup parlé d’une baisse possible de la contribution sociale de solidarité des sociétés – C3S – et d’un aménagement concomitant de l’impôt sur les sociétés…

Ces questions, vous le voyez, sont plus techniques que polémiques, loin des caricatures auxquelles je crains que le débat ne donne lieu et dont nous venons d’avoir, malheureusement, un avant-goût.

M. Dominique Lefebvre. Un dialogue constant et transparent a prévalu entre les commissaires aux finances du groupe SRC et les ministres et leurs équipes pour la préparation de ce projet de loi de finances. Aussi partageons-nous entièrement le double choix dont procède ce budget : la priorité de court terme, qui impose de tout faire pour soutenir la croissance et faire redémarrer l’emploi, et la stratégie de moyen terme visant à rétablir l’équilibre de nos finances publiques. La discussion parlementaire nous donnera l’occasion de soutenir, d’expliquer et de conforter ces choix politiques, conjuguant les objectifs de croissance, de restauration de la compétitivité, de développement de l’emploi et d’amélioration du pouvoir d’achat.

Mon propos portera sur la trajectoire budgétaire. Il faut en effet mettre en perspective ce projet de loi de finances en le rapportant à la fois à la situation qui nous a été laissée et aux mesures que nous avons votées depuis l’été 2012 et que nous assumons pleinement. Les dispositions d’urgence prises pour casser la spirale du déficit et de l’endettement, absolument nécessaires à la préservation de notre souveraineté, se sont soldées par des efforts structurels sans précédent. Le cap mis dans ce projet de loi de finances sur la croissance et l’emploi donne aujourd’hui toute leur signification aux importants efforts que nous avons alors demandés aux Français.

À ce propos et à la suite du rapporteur général, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de clore la polémique sur les nouveaux imposables. Nous avons fait le choix de rétablir nos finances publiques : il était donc nécessaire de faire appel à l’impôt et nous l’avons fait de manière juste !

Ce projet de loi de finances repose sur quelques « fondamentaux » : la stabilisation des prélèvements obligatoires en pourcentage du PIB et la baisse de la dépense publique, qui avait augmenté de trois points sous le précédent quinquennat. Après le vote de la loi de programmation des finances publiques en décembre 2012, vous avez présenté à la Commission européenne, au printemps, un programme de stabilité et vous êtes convenu avec celle-ci d’une adaptation de notre trajectoire budgétaire dans le but de soutenir la croissance et l’emploi. Compte tenu de cette inflexion que nous approuvons, ne vous paraît-il pas nécessaire de revenir sur la loi de programmation ? Je ne vois pas, en effet, le Haut Conseil des finances publiques, dont nous recevrons tout à l’heure le président, dire autre chose que ce que disent le droit et les traités, notamment en termes d’ajustement.

M. Hervé Mariton. Tous les gouvernements recourent à des astuces de présentation pour défendre leurs projets de loi de finances. Je salue votre performance en la matière, messieurs les ministres, mais en cette matière seulement : vos concepts fluctuants et vos mots qui tournent en rond trahissent une grande difficulté à donner de la substance aux économies annoncées. Pourquoi, par exemple, présenter un tableau d’emplois des opérateurs hors universités, sachant que, si l’on additionne les emplois de tous, on aboutit au mieux à une stabilisation, plus probablement à la poursuite de l’augmentation des effectifs de la fonction publique ? S’agissant des recettes, votre séquence sur la « pause fiscale » montre à quel point vous pratiquez l’antiphrase et la restriction mentale.

Une remarque en passant sur la modification de la jaquette du projet de loi de finances, que l’on a choisi cette année d’orner de l’effigie figurant sur le nouveau timbre de La Poste. Les Français trouveront sans doute superflue cette mise en avant des « Femen » !

M. Olivier Faure. Décidément, c’est une obsession !

M. Hervé Mariton. Par ailleurs, je souhaite comme Dominique Lefebvre que le Gouvernement nous dise comment il a compris l’avis du Haut Conseil des finances publiques, dont nous recevrons tout à l’heure le président, et ce qu’il compte en faire.

Monsieur le ministre, vous vous êtes flatté de la réussite de votre stratégie économique et de l’amélioration de la conjoncture. Comment expliquez-vous alors que le solde conjoncturel des finances publiques s’aggrave, passant de – 1,4 % à – 1,8 % du PIB entre 2013 et 2014 ? Au passage, je crains que ce qu’a dit le rapporteur général sur ce sujet ne soit faux. De même, pourquoi le solde structurel des finances publiques est-il beaucoup plus élevé que celui prévu en loi de programmation? L’écart, de – 1,1 % à – 1,7 %, est tellement fort que Dominique Lefebvre, lucide, annonce quasiment que le Gouvernement sera dans l’obligation de présenter au Parlement une modification de la loi de programmation.

M. le rapporteur général. C’est prévu pour la fin 2014 !

M. Hervé Mariton. Quel aveu d’échec !

Concernant les dépenses, messieurs les ministres, il serait souhaitable que nous ayons accès aux maquettes qui permettent au Gouvernement de tracer les évolutions tendancielles. La plupart des économies que vous présentez sont artificielles ; elles correspondent seulement à des moindres plus-values. Nous lisons dans les documents que vous venez de faire distribuer que les dépenses, qui s’élevaient à 375,4 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2013, atteindront 379,9 milliards en 2014. Nous avons du mal à considérer qu’il s’agit d’économies impressionnantes ! Même si elles portent sur des sujets dignes d’intérêt, celles que vous avez citées, monsieur le ministre délégué, restent, reconnaissez-le, quantitativement assez modestes. Même l’ajustement des dotations aux collectivités locales ne constitue pas une économie réelle – une telle mesure aurait pourtant constitué une solution intelligente susceptible de recueillir notre soutien. En fait, vous proposez là une aggravation de l’impôt des collectivités, en particulier avec la disposition relative aux droits de mutation. Nous sommes très loin des 15 milliards d’euros annoncés ! Pour ce qui concerne le budget de l’État, M. Moscovici évoquait une économie plus modeste d’1,5 milliard, mais il n’y a aucune raison de ne pas tenir compte des investissements d’avenir. Au final, il y a donc bel et bien une augmentation de la dépense.

M. le rapporteur général. Ces propos sont scandaleux !

M. Hervé Mariton. Ce sont les faits !

La dette augmente pour atteindre 95,1 % du PIB et la progression des prélèvements obligatoires se poursuit dans une mesure considérable.

S’agissant des recettes, est-il cohérent et raisonnable de taxer l’EBE, autrement dit l’investissement, à hauteur de 2,5 milliards d’euros alors que l’on prétend mener une stratégie de renforcement de la compétitivité des entreprises ?

Dix pages sont consacrées dans le projet de loi de finances à l’aménagement de la TICPE, mais ce document ne comporte qu’une demi-page d’exposé des motifs sur le sujet et les conséquences de cette mesure ne sont pas évaluées produit par produit. Ce n’est pas convenable ! La TICPE étant fondée sur les émissions de CO2,ce choix infirme l’idée selon laquelle le nucléaire financerait la transition énergétique ; êtes-vous sûr que toutes les composantes de la majorité s’y rallieront ?

Vous avez confirmé que ce budget aggrave de façon considérable la fiscalité des ménages et, en particulier, celle des familles. Le quotient familial est à nouveau remis en cause. Le Gouvernement pourrait-il nous donner une indication claire sur ses choix idéologiques en la matière ? Quand prendra fin la diminution régulière et systématique du quotient familial ? Sa suppression est-elle prévue pour 2015 ? À cela s’ajoute une taxation des avantages familiaux profondément injuste. Nous avons certes compris que, dans le cours de la discussion budgétaire, vous reviendrez sur la suppression des réductions d’impôt accordées à raison des enfants poursuivant leurs études, mais ce sera une bien modeste amélioration d’un texte où vous vous montrez, globalement, ignorants de la réalité économique et où, inconscients de l’ampleur des économies nécessaires, vous persistez dans le matraquage fiscal. Bref, nous sommes ici devant un projet plutôt irresponsable !

M. Charles de Courson. Pourquoi existe-t-il un écart croissant entre le taux de déficit public dit « structurel » et le taux réel ? En 2014, l’écart est de 1,9 point – avec un taux de 3,6 % en réel et de 1,7 % en structurel – mais, en 2013, il était de 1,5 point et, en 2012, de 0,9 point. Je crains que vous ne continuiez à fonder vos calculs sur des taux de croissance potentielle surévalués.

Selon vos propres documents, le déficit effectif de l’État s’élèvera en 2014 à 82 milliards d’euros contre 72 milliards en estimation/réalisation pour 2013. Cependant, vous prétendez qu’il ne s’agit pas d’un déficit supplémentaire de 10 milliards, mais plutôt d’une réduction de ce déficit de 1 à 2 milliards parce qu’il faudrait faire abstraction des 12 milliards du fonds d’intervention des investissements d’avenir. Mais, ces 12 milliards étant composés pour presque un tiers de subventions, la soustraction doit être limitée à 8 milliards. En conséquence, le déficit effectif au sens maastrichtien reste en progression. Envisagez-vous sérieusement que l’analyse de Bruxelles puisse être différente ?

Ce projet de loi de finances est massivement dirigé contre les familles. Selon mes calculs, vous accroissez la pression fiscale qui pèse sur elles de près de 11 milliards d’euros : aux 6 milliards d’euros d’augmentation de la TVA, il faut en effet ajouter 140 millions au titre de la suppression des réductions d’impôt pour frais de scolarité, 960 millions au titre de la suppression des exonérations liées à la prise en charge par l’employeur d’une partie des cotisations de prévoyance complémentaire santé, 1,2 milliard au titre de l’imposition des majorations de retraite pour enfant, 1 milliard au titre de l’abaissement du quotient familial, 1,1 milliard au titre du relèvement des cotisations de retraite versées par les salariés, sans compter l’augmentation, non évaluée, des droits de mutation à titre onéreux, qui pourrait atteindre facilement 700 à 800 millions. Pouvez-vous nous donner des chiffres précis en la matière ? Entendez-vous renoncer, comme cela est annoncé dans la presse, à la suppression du crédit d’impôt pour frais de scolarité des enfants ?

D’autre part, vous inventez un impôt fou : la taxation de 1 % de l’EBE, qui rapportera 2,5 milliards d’euros. Cette somme devait être compensée par la suppression de l’IFA, qui rapportait 500 millions d’euros, et de la C3S. Mais la C3S n’est finalement pas supprimée et l’équilibre que vous invoquiez est remis en cause. Comment cette nouvelle taxe pourrait-elle selon vos propres termes « favoriser la croissance et l’emploi » ?

Quelle est la réalité des 14,8 milliards d’économies que vous annoncez ? Selon vous, elles seraient réalisées pour 2,9 milliards sur l’ONDAM. Or, pour afficher une telle performance, vous vous appuyez sur l’écart entre la progression moyenne de cet objectif entre 2002 et 2011 et l’objectif affiché pour l’année prochaine. Ce n’est pas sérieux ! Il faut comparer d’une année à l’autre. Le même procédé vous permet de parler d’économies au sujet de l’indice de la fonction publique, alors qu’il était gelé lors de l’exercice précédent. Vous vous attribuez aussi en quelque sorte des économies dues aux décisions prises par les partenaires sociaux – 1 milliard sur les retraites complémentaires et 300 millions qui sont d’ailleurs toujours en négociation… Vous prenez également en compte une économie de constatation de 500 millions sur les intérêts de la dette, alors que la plus grande prudence s’imposerait quand on laisse l’État endetté de 82 milliards. J’ajoute que vous avez multiplié les mesures « à un coup » : vous ne pourrez pas décaler deux fois la revalorisation des retraites du 1er avril au 1er octobre ni les petits hold-up traditionnels suggérés par la direction du budget comme les prélèvements sur les chambres consulaires et sur le Centre national du cinéma…

En définitive, que reste-t-il des 14,8 milliards prétendument économisés ? Moins de 7 milliards d’euros. Nous assistons en fait à une incroyable hausse des dépenses publiques. Je rappelle qu’en 2013, le Gouvernement frise la médaille d’or : les dépenses équivalent à 57,1 % du PIB. L’augmentation est de 0,5 point par rapport à 2012, soit 10 milliards d’euros. Où sont les économies du même montant promises l’année dernière pour 2013 ? Vous nous annoncez maintenant pour 2014 un taux de dépenses de 56,7 %, soit moins 8 milliards par rapport à la croissance du PIB. Qu’en comprendre, sinon que vous faites une présentation erronée et falsifiée des réalités budgétaires ?

Mme Eva Sas. Je note tout d’abord que, hors investissements d’avenir, la mission « Écologie » voit son budget diminuer de 500 millions d’euros, soit de 6,5 %, et qu’elle perd 522 emplois. Comment expliquez-vous que cette mission ne soit pas prioritaire ?

L’évolution de son budget devrait selon vous être analysée en tenant compte de l’écotaxe poids lourds. Or, la création de cette dernière a été reportée et nous disposons pour toute information de votre affirmation selon laquelle « [s]a mise en place (…) et l’augmentation de la redevance domaniale permettent d’investir durablement dans les infrastructures de transport ». Quelles seraient les recettes prévisionnelles de cette écotaxe ? Quels moyens seront consentis en 2014 à l’Agence de financement des infrastructures de transport – AFITF ?

Je m’étonne aussi de ne pas retrouver dans ce projet de loi de finances certaines des mesures précédemment annoncées. Qu’en est-il du maintien du budget de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME– promis par le ministre de l’Écologie lors des journées d’été d’Europe Écologie Les Verts, de la baisse de la TVA applicable aux travaux de rénovation thermique, de l’augmentation de la TVA sur les engrais et de la contribution du parc nucléaire français à la transition énergétique ?

Nous nous réjouissons de l’instauration d’une contribution climat-énergie sous forme de l’intégration d’une assiette carbone dans la TICPE, mesure ambitieuse qui va même au-delà des préconisations du comité présidé par Christian de Perthuis. Les écologistes souhaitent cependant que cette mesure fasse l’objet – en particulier à partir de 2015, car le prélèvement s’élèvera alors à 2,5 milliards d’euros – d’une compensation à destination des ménages les plus modestes et des ménages du monde rural, afin d’éviter qu’ils ne soient pénalisés. Sachant, par ailleurs, que la transition écologique ne sera réellement engagée qu’à ces conditions, nous insistons sur la nécessité de baisser la TVA sur les transports collectifs, au lieu de la porter de 7 à 10 % comme il est prévu aujourd’hui, et de dégager de nouvelles ressources afin de développer ces transports dans toute la France – nous proposerons pour ce faire la création d’un versement transport additionnel destiné aux régions.

L’augmentation de la TVA prévue dans le budget pour 2014 pèsera sur tous les ménages : cela apparaît d’autant moins acceptable que les entreprises bénéficient d’effets d’aubaine décrits par la Cour des comptes mais auxquels le Gouvernement ne s’attaque pas : le crédit d’impôt recherche est ainsi utilisé par certaines comme un outil d’optimisation fiscale, permettant aux groupes du CAC 40 de capter un milliard d’euros !

M. Thierry Robert. Lors d’une récente rencontre avec les élus d’outre-mer, dont je fais partie, M. Victorin Lurel, ministre des Outre-mer, a affirmé que la défiscalisation dont bénéficient nos territoires serait maintenue dans le projet de loi de finances pour 2014 et que le budget de son ministère bénéficierait d’une légère hausse. Dans la majorité comme dans l’opposition, certains députés s’opposent à cette défiscalisation qu’ils considèrent comme une niche fiscale ; quelle est la position du Gouvernement à cet égard ?

M. Nicolas Sansu. Ce débat est un peu surréaliste ! La France compte plus de trois millions de chômeurs, l’industrie nationale dépérit depuis plus de trente ans, les inégalités s’accroissent, il y a toujours plus de pauvres, et nous nous demandons comment trouver 800 millions par-ci, 26 millions par-là. Je suis très surpris.

Le Président de la République a été élu en mai 2012 avec toutes les voix de la gauche, y compris de celle qui voulait une véritable rupture avec la politique des années passées. Or, la toute-puissance des marchés financiers se lit clairement dans ce projet de loi de finances. L’obsession de la compétitivité n’a jamais été si grande que, ce matin, dans cette salle. Nous assistons à la conversion assumée du Gouvernement et du Président de la République à la politique de l’offre réclamée à cor et à cri par le patronat. Je ne comprends d’ailleurs pas que l’UMP critique tant un projet qui consacre au CICE 20 milliards, soit dix fois le coût des 60 000 postes promis dans l’éducation nationale !

Aucune question n’est posée ; aucune discussion n’a lieu sur le bien-fondé de ce choix et sur ce qui pénalise notre pays et le continent européen. Est-ce vraiment le coût du travail ? Ne serait-ce pas plutôt celui du capital ? Rappelons que le coût salarial unitaire pondéré de la productivité a baissé de 0,5 % par an depuis quinze ans en France sans aucune répercussion sur l’emploi. Faut-il continuer dans cette voie ? En revanche, alors que les salaires ont augmenté de 81 % en vingt ans, les dividendes ont progressé de 365 %. Cette « vampirisation » des richesses par la sphère financière tue notre économie. Les dépenses de recherche et développement représentaient 44 % des dividendes versés en 1992 ; en 2008, la proportion n’est plus que de 25 %. Ce qui est récupéré par certains doit bien être pris à d’autres ; nos concitoyens en prennent conscience aujourd’hui en découvrant leur avis d’imposition dans leur boîte aux lettres. Les ménages sont mis à contribution par le gel du barème adopté par la droite : un million de foyers non imposés sur le revenu le sont désormais, et cessent de ce fait d’être exonérés de la taxe d’habitation. Tous sont frappés par les hausses de TVA, l’impôt le plus injuste qui soit.

Messieurs les ministres, pouviez-vous faire un autre choix que celui de ce budget d’austérité ? Les députés du Front de gauche pensent que oui. Où est la réforme fiscale attendue ? Il faut rendre l’impôt plus simple et plus progressif. Le montant des niches fiscales et sociales s’élève à 200 milliards d’euros et on nous parle de déficit des comptes publics ! C’est un maquis qui devrait être débroussaillé. Il faut aussi modifier le partage de la valeur ajoutée en faveur du travail et en défaveur du capital. Cela passe par une modulation de l’impôt sur les sociétés de manière à favoriser l’emploi, l’innovation et l’investissement, et non la rémunération de la rente. Où est d’autre part la relance promise de l’investissement public ? Les 12 milliards d’investissements d’avenir ne pèsent pas lourd rapportés au PIB : à peine 0,6 %, ce qui n’est manifestement pas à la hauteur des enjeux.

La France est un grand pays quand il se rassemble, avez-vous dit, monsieur le ministre. Nous avons besoin d’un nouveau pacte de développement. Nous devons revenir aux fondamentaux défendus en 2012 par tous les candidats de la gauche, notamment par l’actuel Président de la République. Peut-être suis-je le seul à y avoir cru mais, pour ma part, je pense vraiment que l’ennemi, c’est la finance. La répartition actuelle des richesses en France est néfaste à l’emploi, au pouvoir d’achat et au pays lui-même.

M. le ministre de l’Économie et des finances. Monsieur le président Carrez, je vous confirme la quasi-stabilisation des prélèvements obligatoires, toutes mesures confondues, y compris celles déjà votées comme la création du CICE et le relèvement de la TVA. La décélération est manifeste par rapport aux années précédentes ; elle se poursuivra. Elle résulte d’un choix politique effectué par le Gouvernement.

Le constat vaut aussi pour les entreprises, hors CICE. Les mesures exposées par M. Bernard Cazeneuve ont été élaborées en concertation avec toutes les organisations patronales qui, sans les approuver toutes, ont reconnu la qualité du dialogue engagé. Celui-ci ne s’arrêtera pas, pas plus que nous ne toucherons au CICE. À Vierzon, il y a peu, au conseil général, lors d’une rencontre avec des entrepreneurs à laquelle vous assistiez, monsieur Sansu, j’ai entendu ces derniers donner un avis positif sur ce dispositif qu’ils souhaitaient voir développer. Il faut donc le conserver, d’autant que c’est maintenant qu’il doit produire son plein effet. Et il est faux, monsieur le président Carrez, d’affirmer que ce crédit d’impôt ne profite pas à l’industrie…

M. le président Gilles Carrez. Elle en profite moins que les autres secteurs !

M. le ministre. La mesure a été « ciblée » pour avoir un effet favorable à la fois à l’emploi et à la compétitivité.

À l’égard des ménages, notre préoccupation de justice est constante et nous a conduits à revenir sur la hausse généralisée de TVA précédemment prévue.

Les entreprises font toutefois l’objet de mesures nouvelles. La nouvelle contribution de 1 % assise sur l’EBE – soit la valeur ajoutée, déduction faite des salaires et des impôts – constitue une réforme structurelle qui a vocation à s’étendre. À la différence de l’IFA et de la C3S, qui souffre du même biais et à laquelle nous n’ajoutons donc pas, l’EBE reflète en effet le résultat des entreprises. Celles qui ont les taux de marge les plus élevés seront le plus fortement sollicitées ; les autres seront ménagées. En tout état de cause, cette assiette est beaucoup plus favorable à l’industrie que celles qui prennent en compte le chiffre d’affaires et reviennent à taxer les matières premières et les salaires. Cette mesure devrait permettre d’amorcer une baisse significative de la fiscalité sur le chiffre d’affaires, qui ne tient pas compte des réalités économiques.

Combien d’entreprises y gagneront et combien y perdront, avez-vous demandé, monsieur le rapporteur général. Nous estimons que 8 000 grandes entreprises seront redevables de cette nouvelle contribution tandis qu’y échapperont 18 000 PME et ETI alors même qu’elles cesseront de payer l’IFA – celles-ci seront donc pleinement gagnantes.

Je ne reprends pas ici toutes les mesures prises en matière de fiscalité des entreprises ; je n’évoquerai ni les gagnants du CICE – qui bénéficie à l’ensemble des entreprises qui ont des salariés, avec un seuil à 2,5 SMIC, soit 80 % des salariés – ni les gagnants de la baisse de la fiscalité sur le chiffre d’affaires que nous entendons mener dans les prochaines années. Mais, vous le voyez, progressivement, nous adaptons nettement la fiscalité des entreprises – au bénéfice de l’emploi. De ce point de vue, je suis toujours mal à l’aise lorsque j’entends opposer fiscalité des entreprises et fiscalité des ménages : en définitive, la principale source de pouvoir d’achat, c’est l’emploi ! Lorsque nous prenons des mesures en faveur des entreprises, c’est pour qu’elles investissent et qu’elles embauchent.

Monsieur le président, non, notre scénario macro-économique n’est en rien biaisé. L’amélioration du pouvoir d’achat que nous prévoyons pour 2014 s’explique principalement par la hausse attendue des revenus d’activité et par la modération de l’inflation, en dépit de la réforme de la TVA, grâce au CICE. L’évolution de la fiscalité directe sur les ménages contribue certes, vous avez raison, à réduire le pouvoir d’achat agrégé ; vous reconnaîtrez toutefois que ces prélèvements ne sont pas répartis de façon uniforme : ils contribuent à renforcer la justice sociale et les deux premiers éléments que j’ai cités l’emportent sur celui-ci. Notre prévision d’une hausse de 0,8 % du pouvoir d’achat en 2014, s’ajoutant à celle de 0,3 % enregistrée en 2013, me paraît donc tout à fait réaliste.

Le rapporteur général m’a interrogé sur le dérapage du déficit observé en 2013, malgré une prévision de croissance inchangée par rapport au programme de stabilité. À ce propos d’ailleurs, monsieur le président, je relève dans votre propos une petite erreur de méthode : plutôt qu’avec le déficit voté en loi de finances initiale alors que la zone euro entrait en récession, notre prévision de 4,1 % doit être comparée avec celle qui figure dans le programme de stabilité, c’est-à-dire 3,7 %, ce d’autant que le débat sur ces matières a beaucoup évolué en un an. Mais, pour répondre à la question du rapporteur général, je dirai que l’écart s’explique essentiellement – pour les trois quarts – par des moins-values de recettes fiscales au cours du premier semestre : la faible inflation a des conséquences sur la TVA et l’impôt sur les sociétés réagit fortement lors des phases de ralentissement économique.

S’agissant des prélèvements sur les ménages, je trouve paradoxal que ceux-là même qui avaient voté un taux de TVA à 21,2 % viennent nous reprendre ! Il n’est nul besoin d’un grand effort d’imagination pour comprendre quels auraient été les effets sur les ménages d’une telle hausse.

La dette publique s’est établie en 2012 à 90,2 % du PIB, après une augmentation de 4,4 points ; en 2013 et 2014, ce ratio continue à augmenter, mais à un rythme qui se ralentit progressivement : il atteindra 93,4 % en 2013 et 95,1 % en 2014, la progression tombant à 3,2 points, puis à 1,7 point. Cette évolution s’explique par le niveau de déficit nominal, qui demeure incontestablement élevé, et par la faiblesse de la croissance, qui joue sur le dénominateur. Mais la poursuite de nos efforts permettra de ramener le déficit en deçà de 3 % et, en 2015, la courbe de la dette devrait s’inverser. Nous ferons évidemment preuve de transparence et de vigilance sur ces questions importantes. Je souligne également que le soutien financier aux États de la zone euro pèse sur ce ratio ; si on l’exclut du calcul, le poids de la dette rapporté au PIB descend à 90,4 % pour 2013 et à 91,8 % pour 2014.

Enfin, monsieur le rapporteur général, ce budget reflète, et je voudrais que chacun en convienne, des efforts considérables en faveur de la transition énergétique, qui bénéficie d’une réelle priorité. Je n’hésite pas à dire qu’il comporte des mesures de portée historique, notamment avec la contribution énergie-climat, c’est-à-dire avec l’introduction d’une composante carbone dans notre fiscalité, à la suite des travaux du comité présidé par M. de Perthuis. Le programme d’investissements d’avenir est d’ailleurs axé sur la transition écologique. De ce point de vue, ce budget est plus qu’irréprochable : il est remarquable !

Monsieur Lefebvre, la trajectoire pluriannuelle a été très légèrement ajustée depuis le programme de stabilité, pour tenir compte des effets de la moindre croissance mais aussi pour tirer les bénéfices des nouvelles recommandations de la Commission européenne. Il ne faut surtout pas pénaliser la croissance ! Certains, à droite, nous demandaient un collectif budgétaire : nous n’en avons pas fait, refusant comme je l’ai dit d’ajouter l’austérité à la stagnation, et nous avons eu raison comme l’a montré notre niveau de croissance par la suite. Nous nous sommes engagés à maintenir une trajectoire pluriannuelle de réduction du déficit structurel qui est connue : c’est cohérent avec nos objectifs – stabilisation des prélèvements obligatoires et économies sur les dépenses publiques – et se fait au service de nos priorités qui sont la croissance et l’emploi.

Monsieur Mariton, l’écart que vous soulignez avec le niveau de solde structurel prévu par la loi de programmation des finances publiques est dû, d’une part, à la révision des comptes nationaux par l’INSEE pour l’année 2011 et, d’autre part, à la sur-réaction des recettes fiscales à une conjoncture défavorable. Nous avons abondamment débattu de ces points avec le Haut Conseil des finances publiques, qui reconnaît ces facteurs. Nous avons fait le choix de ne pas prendre de mesures additionnelles pour combler cet écart, mais nous avons renforcé l’effort en 2014 par rapport à ce qui était inscrit dans la loi de programmation des finances publiques. L’écart se résorbe donc progressivement : de 1 point en 2013, il ne sera plus que de 0,6 point l’an prochain. Cette convergence continuera.

Pour ce qui est du Haut Conseil, je retiens d’abord l’existence de cette autorité indépendante exigée par les traités. Je retiens ensuite qu’il travaille avec notre ministère dans des conditions satisfaisantes et reconnaît la qualité des échanges, même s’il souhaite quelques améliorations, dont nous sommes naturellement disposés à débattre. Je retiens enfin et surtout qu’il juge le scénario macro-économique que nous présentons « plausible » et conforme au consensus des principales organisations internationales. Évidemment, la prévision économique n’est pas une science exacte – le Haut Conseil lui-même en a fait l’expérience l’an dernier puisqu’il avait jugé très peu probable une croissance positive en 2013. Les aléas existent, mais les derniers indicateurs me rendent plutôt optimiste.

S’agissant des lois de programmation, je voudrais seulement souligner que, quels que soient les ajustements que nous pouvons être amenés à faire par rapport à la loi de programmation des finances publiques, il s’est passé quelque chose depuis l’adoption de celle-ci, qui est d’une grande importance politique, mais aussi technique et juridique : c’est la recommandation de la Commission européenne, qui nous a donné deux années supplémentaires et sur laquelle nous nous calons. Il faut la prendre en considération.

Nous respectons donc l’avis du Haut Conseil et poursuivons notre dialogue, parfois de façon critique, avec cette institution.

M. le ministre délégué chargé du Budget. Je voudrais relever certaines inexactitudes dans les propos tenus par MM. Mariton et de Courson, ainsi que par le président Carrez, à propos de notre calcul des économies réalisées. Je vois poindre un raisonnement nouveau : une économie par rapport à une trajectoire tendancielle ne serait pas une économie. Or, je veux rappeler que la totalité des discussions nouées avec la Commission européenne sur les économies réalisées par les États dans le cadre du semestre européen reposent sur un raisonnement par rapport au tendanciel de l’évolution des dépenses.

Je veux d’ailleurs reprendre ici un compte rendu d’une réunion de la commission des finances du Sénat en date du 11 avril 2012. Mme Pécresse, ministre du Budget, y parlait d’un « effort en dépenses de 75 milliards ». « Pour ce qui reste à trouver », disait-elle, « nous fixons une norme, qui nous lie et, j’y insiste, que nous ne ferons pas varier selon la conjoncture : 0,4 % de croissance des dépenses publiques en volume ». Mme Bricq, rapporteure générale du budget, formulait alors exactement la même critique que celle que nous venons d’entendre, et voici la réponse de Mme Pécresse : « En 2012, pour l’ONDAM, nous avions un tendanciel de 4,4 % que nous faisons passer à 2,5 %, ce qui correspond à deux points de moins. Pour le budget de l’État, nous avons les mêmes hypothèses que vous : 2 %, que nous faisons passer à 0,4 %. » Ce raisonnement est-il suspect lorsque nous l’employons, alors qu’il constituait la forme chimiquement pure de l’honnêteté intellectuelle lorsque vous l’utilisiez ?

Mme Valérie Pécresse. Vous déformez mes propos ! Cette présentation est fallacieuse, je n’ai pas dit que nous diminuions les dépenses !

M. le ministre délégué. En général, quand Mme Pécresse s’énerve, c’est que l’argument est d’une grande force…

Mme Valérie Pécresse. C’est de la malhonnêteté !

M. le ministre délégué. Vocifération n’est pas raison !

M. Hervé Mariton. Oh ! Ces propos ne sont pas convenables !

M. le ministre délégué. La malhonnêteté est de votre côté et je ne puis accepter de ne pas pouvoir répondre sans être interrompu. Monsieur Mariton, je n’ai aucune raison de me laisser agresser de la sorte.

Le raisonnement tenu par MM. Mariton et de Courson n’est pas exact : l’ensemble des économies réalisées par le précédent gouvernement ont été calculées par rapport à un tendanciel ; c’était également le cas des 75 milliards d’économies que vous entendiez réaliser entre 2012 et 2016 et que vous aviez présentés dans le cadre du programme de stabilité. L’ensemble des normes utilisées par la Commission européenne pour mesurer l’effort structurel des États membres se réfèrent de même au tendanciel.

Cependant, il est faux d’affirmer, comme vous le faites, que les économies que nous proposons se limitent à compenser l’augmentation tendancielle des dépenses de l’État. Nous faisons plus que cela : elles se monteront à 9 milliards d’euros alors que cette augmentation est de 7,5 milliards d’euros, soit comme nous l’avons dit une économie nette de 1,5 milliard. Par souci d’honnêteté intellectuelle et de rigueur, je souhaiterais, messieurs Mariton et de Courson, madame Pécresse, que les règles et les raisonnements qui s’appliquaient hier continuent à prévaloir aujourd’hui. Il n’est pas convenable, sous prétexte d’être dans l’opposition, de changer des règles qui convenaient à la majorité d’hier.

Vous ne pouvez pas nier, monsieur le président Carrez, qu’entre 2002 et 2012 les dépenses publiques ont augmenté de plus de 2 %. En 2012, elles ont crû de 0,9 %. Le budget que nous présentons prévoit pour 2014 une augmentation de 0,4 %. Autrement dit, en dix-huit mois, nous avons divisé par quatre le rythme auquel croît la dépense publique.

D’autre part, au cours du précédent quinquennat, la moyenne des déficits nominaux était de 5 % du PIB. De 5,3 % en 2011, ce déficit nominal est passé à 4,8 % en 2012 et tombera à 4,1 % en 2013 et à 3,6 % en 2014. Lorsqu’on a creusé de 2 points le déficit structurel entre 2007 et 2012 et que la moyenne des déficits nominaux pour la même période n’a jamais été au-dessous de 5 %, il est audacieux de s’indigner aujourd’hui que les déficits diminuent moins vite qu’ils n’ont augmenté lorsque vous étiez aux responsabilités !

Je veux répondre avec la plus grande précision et la plus grande rigueur à la campagne qui est actuellement menée sur l’impact des mesures fiscales prises au cours des derniers mois, et qui inspire certaines questions posées. Cette campagne tend à faire accroire que les impôts ont commencé à augmenter en 2012 et que cette hausse a conduit à une entrée massive des Français dans l’impôt depuis cette date. Je dirai les choses telles qu’elles sont, avec le souci de la vérité et non de la politique. Le volume des prélèvements obligatoires était en 2011 de 20 milliards d’euros et en 2012 de 21 milliards, vous en convenez sans doute. Le montant de ceux dont nous sommes responsables, sur un semestre de 2012 et sur 2013, s’élève à 30 milliards d’euros. Nous sommes par conséquent à égalité. Vous ne pouvez donc, à la suite de certains journaux, incriminer une politique fiscale qui aurait subitement commencé en 2012, comme si auparavant aucun impôt n’avait jamais été décidé. Quant au nombre de foyers fiscaux entrés dans l’impôt, il était de 2,2 millions en 2008 et en 2009, de 3,3 millions en 2010, de 3,1 millions en 2011, de 2,9 millions en 2012 et il sera de 2,6 millions cette année – soit 300 000 de moins qu’en 2012.

M. le président Gilles Carrez. Ces chiffres n’ont strictement aucun intérêt.

Mme Valérie Pécresse. Ces chiffres ne veulent rien dire. Tout dépend de l’évolution des salaires.

M. le ministre délégué. Vous m’avez posé une question précise, à savoir quel était le nombre de Français entrés dans l’impôt chaque année : je vous donne ces chiffres. Vous auriez dû vous abstenir de les demander si vous considérez qu’ils n’ont aucune signification. Je me serais volontiers dispensé de cette énumération.

Nous savons qu’en 2013, 92 % de ces entrées dans l’impôt sont dues à une augmentation du revenu des intéressés. Pour ce qui est des 8 % restants, j’ai demandé aux services du ministère de procéder à des investigations complémentaires pour déterminer si cette entrée dans l’impôt résultait d’une modification de la situation personnelle des intéressés ou de la remise en cause de niches fiscales.

M. le président Gilles Carrez. C’est la question que nous nous posions.

M. le ministre délégué. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas eu d’entrée massive de Français dans l’impôt en 2013 et leur nombre est même notablement moins élevé, je le répète, qu’en 2012. Les investigations complémentaires que j’ai demandées permettront à la commission des Finances de disposer, en toute transparence, de l’ensemble des éléments qu’elle est en droit d’attendre du Gouvernement.

Certains orateurs ont affirmé que les dépenses augmenteraient entre 2013 et 2014. Si l’on neutralise l’effet du programme d’investissements d’avenir, comme vous l’avez vous-mêmes fait lorsque vous étiez au pouvoir, on constate qu’elles s’établissaient à 375 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2013 et qu’elles se monteront à 368 milliards en 2014. Les chiffres qui ont été donnés ne sont donc pas exacts.

Monsieur Mariton, il est également faux de dire que nous ne tenons pas compte des effectifs des universités pour déterminer la masse salariale et l’évolution des effectifs de l’État.

M. Hervé Mariton. Je n’ai pas parlé de masse salariale. Soyez rigoureux !

M. le ministre délégué. Je vous réponds rigoureusement, monsieur Mariton, en vous livrant des chiffres précis. Les effectifs globaux des agents de l’État, universités comprises, diminuent de 2 144 unités. Si l’on prend en compte les 2 000 postes créés à Pôle Emploi et les 1 229 postes supprimés chez les autres opérateurs, cette diminution porte sur 1 373 emplois. Je réponds par là même à la préoccupation exprimée par le rapporteur général quant à notre capacité à maîtriser les effectifs et la masse salariale.

Monsieur Robert, vous avez raison de souligner que les régimes de défiscalisation outre-mer ont été critiqués. Leur principal défaut est de coûter plus aux finances publiques qu’ils ne rapportent aux économies d’outre-mer. Afin d’y remédier, nous proposons une réforme, définie en lien avec M. Victorin Lurel, introduisant, de manière progressive et à titre expérimental, de nouveaux outils de soutien en prise directe avec les économies locales. Les outils existants, qui sont maintenus pour ne pas déstabiliser ces économies, sont néanmoins améliorés, notamment grâce à l’introduction d’un mécanisme de pilotage de la dépense fiscale en faveur du logement social. En tout état de cause, le Gouvernement est déterminé à maintenir un soutien fiscal aux économies d’outre-mer.

Enfin, madame Sas, la hausse du taux de TVA sur les engrais annoncée par le Premier ministre lors de la conférence environnementale sera introduite par voie d’amendement, de même que l’application du taux réduit de TVA aux travaux de rénovation thermique.

M. Guillaume Bachelay. Parce que la mémoire peut servir le débat, je rappelle que les entrepreneurs comme maints intervenants dans nos débats budgétaires ont souvent souligné par le passé le caractère inefficace et inéquitable de l’IFA, qui tient à deux raisons : d’une part, cette imposition pèse sur le travail et sur les matières premières et, d’autre part, elle est d’autant plus lourde que le chiffre d’affaires est faible. J’imagine que ce sont ces raisons qui avaient conduit la majorité précédente à annoncer la suppression de l’IFA en 2007, avant de repousser cette réforme pour les PME en 2011 et de finir par la reporter à 2014. Je me réjouis qu’une décision plus favorable soit prise aujourd’hui, au bénéfice des PME et des ETI !

M. Éric Woerth. L’utilisation du tendanciel ayant été très contestée, y compris par vous, il conviendrait de préciser en toute transparence la façon dont il est calculé. Je doute qu’on l’ait fait devant le Haut Conseil des finances publiques. Ne pas augmenter le point d’indice de la rémunération des fonctionnaires, par exemple, ou ralentir l’exécution de la loi de programmation militaire, ne constitue pas une économie : ce sont là des choix politiques.

Je constate d’autre part que le déficit public que vous affichez aujourd’hui est à peu près le même que celui que vous affichiez l’année dernière. Cet immobilisme ne laisse pas de m’inquiéter pour l’année prochaine ! Et vous ne pouvez plus invoquer la crise et la récession passées : même si vous persistez à le nier, c’est nous qui avons eu à les affronter. Vous n’êtes pas aux prises, comme nous l’étions, avec un trou d’air majeur, mais seulement avec une atonie de l’économie.

Abstraction faite du tendanciel, les dépenses se stabilisent un peu. Je ne conteste pas l’effort de 1,5 milliard d’euros, même si l’on n’y inclut pas le programme d’investissements d’avenir – mais je me souviens que vous nous aviez reproché d’en faire abstraction, ce qui devrait vous amener soit à reconnaître que vous n’aviez pas raison à l’époque, soit à considérer que vous avez tort aujourd’hui et que notre pratique était plus vertueuse que vous ne le disiez !

En matière de dépenses sociales, le tableau des économies que vous nous soumettez est extraordinairement flou. Comment arrive-t-on, par exemple, au montant de 1,9 milliard d’euros d’économies sur les retraites ?

J’admire M. Pierre Moscovici qui annonçait à la télévision, la semaine dernière, 50 millions d’euros d’économies sur le budget de son ministère, et hier 120 millions. Mais je note qu’il a mentionné à ce propos les dépenses d’investissement en baissant la voix alors qu’il avait cité très clairement les dépenses de fonctionnement… Quoi qu’il en soit, ces sommes sont plutôt dérisoires au regard des enjeux, et elles ne sont nullement stabilisées. Il s’agit bien, contrairement à ce que soutient le rapporteur général, d’un rabot. Faire une liste d’économies est un effort louable, mais il faudrait dans ce cas en produire une liste complète – comme c’est le cas pour la liste des taxes – et non quelques exemples. De même, le Président de la République devrait bien dresser la liste des économies qui résulteraient des réformes structurelles réclamées instamment par l’Europe, sachant que ces réformes sont la condition du délai que nous avons obtenu pour le retour aux 3 % de déficit.

M. Thierry Mandon. Que représente, en termes budgétaires et en année pleine, la réforme bienvenue du régime des plus-values de cession ? Il est heureux, soit dit en passant, que le dispositif précédemment voté ne soit pas appliqué.

M. le président Gilles Carrez. Certes, mais j’aurais préféré qu’un collectif le permette !

M. Thierry Mandon. Le ministre pourrait-il aussi apporter des précisions quant à la nature de la concertation relative à l’évolution de la fiscalité des entreprises ? Cette concertation se poursuit-elle, comme j’ai cru le déduire de son propos ?

Mme Valérie Pécresse. Si je me suis emportée tout à l’heure contre M. Cazeneuve, c’est parce qu’il a semblé mettre en cause mon intégrité en tant que ministre chargée du Budget. Nous avons toujours raisonné par rapport à un tendanciel de dépense mais, pour ce qui nous concerne, nous reconnaissions une augmentation de 0,4 % de la dépense en volume. La baisse de 1,5 milliard d’euros que vous annoncez, monsieur le ministre délégué, est calculée par rapport au tendanciel. Alors dites-le, et ne nous faites pas croire qu’il y a 15 milliards de baisse des dépenses ! Si vous parlez comme je parlais à l’époque, notre Commission retrouvera calme et harmonie !

Mais je voudrais aussi évoquer des sujets absents de votre présentation. Confirmez-vous, monsieur le ministre de l’Économie et des finances, que la dette de la France continuera de croître jusqu’en 2017, atteignant à cette date à peu près 100 % du PIB ? Où situez-vous un éventuel point de retournement de la courbe ? Bizarrement, vos documents n’en font pas mention.

En outre, ne craignez-vous pas qu’un scénario de croissance faible, sans création d’emplois marchands, ne compromette toutes vos prévisions de retour à l’équilibre des finances sociales ? Je trouve très optimistes les baisses de dépenses d’assurance maladie que vous avancez, notamment les 500 millions d’euros d’économies de gestion sur les caisses de sécurité sociale. Je vois mal comment cela est possible sans réformes structurelles.

Je m’interroge aussi sur les transferts de dépenses de l’État, qui font douter de la réalité de la baisse de 1,5 milliard. D’abord sur les transferts vers le programme des investissements d’avenir : les dépenses de recherche, qu’il s’agisse de l’Agence nationale de la recherche ou encore de l’immobilier, dépenses récurrentes, seraient rangées sous la rubrique de la dépense « non maastrichtienne ». Ensuite sur les transferts vers la fiscalité locale. La baisse de 3 % des dépenses de fonctionnement de l’enseignement scolaire est-elle liée à la réforme des rythmes scolaires et à la hausse de 3 % des budgets locaux qui en résultera ? Vous annoncez également la création de 100 000 places supplémentaires en crèche, mais l’on sait que le coût en est supporté à 50 % par les communes. Parallèlement, vous procédez à une hausse des droits de mutation à titre onéreux au bénéfice des départements. Au total, la baisse des dépenses de l’État ne masque-t-elle pas un simple transfert de charges organisé à travers la fiscalité locale ? Dès lors, les impôts locaux ne vont-ils pas augmenter ?

Enfin, est-il logique qu’un budget censé donner la priorité à l’emploi supprime la prime d’apprentissage pour les entreprises de plus de dix salariés alors que celles-ci accueillent 50 % des apprentis et que M. Louis Gallois s’est inquiété ici même de la très forte baisse du nombre de ces apprentis depuis un an ?

Mme Karine Berger. Le taux de prélèvements obligatoires passera en 2014 de 46,5 % à 46,1 % : il sera donc moins élevé, dans ce budget que nous assumons, que ce que prévoyait le programme de stabilité.

Je relève que le produit prévu de l’impôt sur les sociétés chutera, de 53,5 milliards d’euros à 36,2 milliards, ce qui est considérable. J’entends bien que le CICE pèse pour 13 milliards dans cette évolution, mais qu’en est-il des presque 5 milliards restants, étant entendu que les mesures très louables de lutte contre la fraude fiscale que prévoit ce projet peuvent aussi y contribuer ? En tout cas, contrairement à ce qu’affirmait hier en « une » un grand quotidien du soir, il y a bien une évolution à la baisse de la fiscalité sur les entreprises.

S’agissant enfin du produit de la TVA, je me demande comment on passe de 141 milliards en 2013 à 139 milliards en 2014, alors que l’on prévoit plus d’inflation, plus de consommation et un taux un peu plus élevé.

M. Régis Juanico. Le budget pour 2014 poursuit deux objectifs politiques et économiques : conforter les perspectives de reprise de la croissance et inverser la courbe du chômage. Au-delà des efforts faits en faveur du budget du travail et de l’emploi, en augmentation de 4 milliards – soit d’un milliard de plus que ne le prévoyait la programmation triennale –, dont 1,7 milliard pour l’emploi des jeunes, la montée en puissance de différents dispositifs confortera la croissance et créera des emplois. C’est le cas du CICE et du programme d’investissements d’avenir, mais aussi des mesures de soutien au pouvoir d’achat, comme l’application du taux réduit de TVA à la rénovation et à la construction de logements sociaux ou encore aux travaux de rénovation thermique.

Concernant le gel du barème de l’impôt sur le revenu, les chiffres livrés par M. Cazeneuve sont éclairants. Le mécanisme de décote que nous avions mis au point l’an dernier n’a peut-être pas fonctionné aussi bien que nous le souhaitions, mais il a fonctionné puisque 300 000 foyers fiscaux environ ne sont pas entrés dans l’impôt sur le revenu. J’aimerais, à cet égard, que le Gouvernement confirme que la mesure de pouvoir d’achat consistant à rendre un milliard d’euros aux ménages en 2014 via la levée du gel et le mécanisme de décote se traduira bien par une diminution de l’impôt sur le revenu pour 7 millions de foyers, tandis que 200 000 autres deviendront non imposés et 138 000 non imposables.

M. Éric Alauzet. Je m’associe aux collègues qui ne souhaitent pas remettre en cause la réduction d’impôt pour enfant scolarisé. Malgré notre volonté d’organiser le redressement des comptes dans la justice, les mesures que nous avons prises l’année dernière ont eu quelques effets aux marges qui ont touché les classes moyennes – ce fut par exemple le cas de la nécessaire refiscalisation des heures supplémentaires et du maintien du gel du barème. Ce serait un mauvais signal de toucher à cette réduction. S’il fallait la compenser, mieux vaudrait regarder du côté du quotient familial.

D’autre part, je souscris à la volonté commune de soutenir les entreprises, mais à la condition que ceux qui tirent des profits importants de l’activité économique, sous forme de salaires très élevés ou de revenus des capitaux, contribuent à la hauteur de ce qui est nécessaire. De ce point de vue, je crois qu’il nous faudrait retravailler sur la progressivité de l’impôt sur le revenu.

Concernant la transition écologique, nous devons trouver un système de compensation qui évite d’exclure certains secteurs de la taxe carbone, de manière, là aussi, à ne pas envoyer un mauvais signal. Il faut que chacun, partout, paie le vrai prix du carbone, quitte à trouver d’autres moyens pour soutenir les secteurs économiques qui pourraient être mis en difficulté.

M. Laurent Grandguillaume. L’année 2014 sera aussi celle de la montée en puissance de la BPI, dont le Parlement a élargi le champ d’intervention aux très petites entreprises. Ces TPE représentant plus de 90 % des entreprises, il est essentiel que la BPI s’y intéresse davantage.

Dans le cadre de la réforme du PEA en vue de financer les PME – au sens communautaire –, il me paraît pertinent de s’interroger sur une éventuelle intégration des entreprises de taille intermédiaire au projet. On pourrait, dans le même esprit, suggérer l’extension à ces mêmes ETI de la disposition en faveur de l’amortissement accéléré des robots acquis par les PME.

Enfin, la taxe sur l’EBE me semble marquer une évolution intelligente, dans la mesure où elle aura moins d’impact que l’IFA sur la masse salariale. Au rebours de l’opposition, qui avait fait l’erreur de réintégrer dans la cotisation sur la valeur ajoutée
– CVAE – la part « salaires » de l’ancienne taxe professionnelle, le Gouvernement choisit une logique qui va dans le bon sens et qui renforce la compétitivité de nos entreprises.

M. Olivier Faure. Pour ma part, je comprends que toutes les économies prévues dans ce budget ne soient pas « documentées ». Il arrive en effet que trop de précision nuise : de la même façon que l’on trouve « un chien derrière chaque niche », il y aura toujours quelqu’un pour se battre contre telle ou telle économie.

Messieurs les ministres, vous avez tous deux été titulaires du portefeuille des affaires européennes, je ne doute donc pas que vous mesuriez l’enjeu que constitue l’élection européenne. À l’approche d’un scrutin décisif, traditionnellement caractérisé par un taux de participation remarquablement faible, la suppression de la dépense de 28 millions d’euros consacrée au document distribué à nos concitoyens ne me semble guère pertinente. J’espère qu’il sera possible de revenir sur cette décision afin de ne pas laisser penser que la prochaine échéance électorale européenne serait secondaire.

M. Gaby Charroux. Messieurs les ministres, quelles garanties pouvez-vous apporter concernant le fonctionnement et les moyens du service public, local et national ? Je pense en particulier au service des douanes, extrêmement utile pour lutter efficacement contre la fraude fiscale. Les compressions d’effectifs résultant de la révision générale des politiques publiques se poursuivent et, sur le terrain, l’émotion est vive.

M. Pascal Terrasse. Ce budget vise à rendre à notre pays la compétitivité qu’il a perdue. Alors qu’en Allemagne, 24 % des actifs travaillent dans l’industrie, ils ne sont que 12 % dans ce cas en France. En la matière, notre pays fait moins bien que l’Italie, que l’Espagne ou même que la Grande-Bretagne qui s’est pourtant orientée vers les emplois de service. Nous devons nous réindustrialiser !

Monsieur Cazeneuve, pouvez-vous nous donner des détails sur les mesures relatives aux plus-values de cession pour les terrains à bâtir, destinées à créer le choc de d’offre que vous avez évoqué ?

Des travaux menés depuis de nombreuses années par des parlementaires de toutes tendances politiques évaluent l’évasion fiscale à environ 60 milliards d’euros. Une partie de ce montant pourra-t-elle être rapatriée en 2014, grâce à une action menée dans le cadre communautaire ? La semaine dernière, la Commission européenne a sacré la France championne d’Europe du détournement de TVA pour un montant supérieur à 30 milliards d’euros. Le Gouvernement s’engage-t-il à faire reculer cette fraude ?

M. le ministre de l’Économie et des finances. Monsieur Mandon, la concertation a été approfondie avec les représentants des entreprises – MEDEF, AFEP et CGPME – pour examiner les différents scénarios en vue de ce projet de loi de finances. En tout état de cause, même si nos interlocuteurs n’approuvent pas les résultats de nos réflexions, ils conviennent de la qualité du dialogue engagé. Le président de la CGPME, M. Jean-François Roubaud, a même souligné que, jusqu’à ce jour, aucun gouvernement n’avait été aussi attentif que le nôtre aux PME. Nous poursuivrons dans cette voie.

En fin de compte, ce travail commun a eu des effets sur nos choix. Une réforme structurelle des impôts sur les entreprises est amorcée afin de privilégier les facteurs de production plutôt que le chiffre d’affaires, critère peu « intelligent » sur le plan économique. D’ici à la fin du quinquennat, le processus de concertation en cours doit permettre des baisses significatives d’impôt et une taxation de la production plus satisfaisante.

Je remercie M. Éric Woerth de suivre attentivement mes apparitions à la télévision. L’économie concernant Bercy se monte bien à 120 millions d’euros en équipement et en investissement. Quant au chiffre de 50 millions d’euros, il concernait le seul périmètre de la direction générale des finances publiques.

Madame Pécresse, s’agissant de l’évolution de la dette, c’est bien à partir de 2015 qu’un retournement pourra être observé, avec une stabilisation puis une inversion de tendance. Vous vous inquiétez de la faiblesse de la croissance, mais ce budget a précisément pour objectif de muscler cette dernière ainsi que l’emploi. Ne soyez pas pessimiste !

M. le ministre délégué chargé du Budget. M. Woerth a raison : il faut nous mettre d’accord sur les critères et les concepts que nous utilisons – notamment en ce qui concerne l’évolution du tendanciel. C’est ce que nous avons fait l’an dernier avec la Cour des comptes et je vous renvoie sur ce point au compte rendu de ces échanges.

Madame Pécresse, je n’ai jamais dit que nous diminuions la dépense de l’État de 15 milliards d’euros ; j’ai affirmé que nous faisions 15 milliards d’économies qui permettent d’absorber l’évolution tendancielle de la dépense de l’État et au-delà, à hauteur de 1,5 milliard. La dépense de l’État peut ainsi reculer de ce même montant. Compte tenu de l’évolution naturelle de la dépense publique, liée au vieillissement de la population et aux besoins sociaux résultant de la crise, il n’est possible d’enregistrer des diminutions de dépenses nettes qu’après absorption des dépenses en tendanciel.

Monsieur Terrasse, en matière de plus-values de cession de terrains, nous avons supprimé les abattements pour durée de détention afin de fluidifier le marché. Nous avons linéarisé les dispositifs d’abattement pour les résidences secondaires en ramenant de trente à vingt-deux ans la durée de détention permettant une exonération. Ces mesures prises par voie d’instructions sont inscrites dans le projet de loi de finances ; vous pourrez donc en débattre.

Le cabinet d’études mandaté par la Commission européenne, selon lequel 32 milliards d’euros de TVA échapperaient tous les ans à notre pays, a employé une méthodologie opaque et insuffisamment précise, qui aboutit à des résultats sans commune mesure avec le chiffre de 11 milliards d’euros fourni par l’INSEE. Les dispositions que nous avons prises relativement aux carrousels de TVA nous permettent de lutter contre cette évasion, et nous mettons actuellement en place des mesures par secteur afin de mettre fin à ces pratiques.

Monsieur Juanico, l’augmentation de 9 % de la décote l’année dernière a permis de rendre non imposés 366 000 ménages ; pour 2014, celle de 5 % en sus de l’inflation, qui s’ajoute à la levée du gel du barème, aura le même effet pour 200 000 autres ménages.

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AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR L’AVIS DU HAUT CONSEIL SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014

Au cours de sa séance du mercredi 25 septembre 2013, la Commission a entendu, en audition ouverte à la presse, M. Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, président du Haut Conseil des finances publiques, sur l’avis du Haut Conseil sur le projet de loi de finances pour 2014.

M. Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, président du Haut Conseil des finances publiques. Je vous remercie d’avoir bien voulu m’inviter devant votre Commission, en ma qualité de président du Haut Conseil des finances publiques, pour vous présenter les principales conclusions de l’avis relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014. Je suis accompagné des membres du secrétariat permanent du Haut Conseil : M. Jean-Philippe Cotis, rapporteur général ; MM. Philippe Ravalet et Boris Melmoux-Eude, rapporteurs généraux adjoints ; Mmes Nathalie Georges et Annabelle Mourougane, rapporteurs. Tout à l’heure, le ministre de l’Économie et des finances et le ministre délégué chargé du Budget vous ont présenté le projet de loi de finances pour 2014. Celui-ci est accompagné pour la première fois de l’avis du Haut Conseil des finances publiques.

Comme vous le savez, la France s’est engagée vis-à-vis de ses partenaires européens à atteindre l’équilibre structurel des comptes publics en 2016. Cet engagement a été traduit dans la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017. Si les ministres des finances de l’Union européenne se sont accordés, en juin, pour desserrer le calendrier en matière de déficit nominal, ils ont maintenu l’échéance de 2016 pour le retour à l’équilibre structurel des comptes publics.

Il revient au Haut Conseil d’émettre un avis en toute indépendance sur les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Sa mission est, en réalité, double. Premièrement, le Haut Conseil doit se prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Il ne produit pas ses propres prévisions, mais s’appuie sur les statistiques disponibles, ainsi que sur les prévisions et les analyses d’un ensemble d’organismes tels que l’INSEE, la Banque de France, la Banque centrale européenne, le FMI et l’OCDE.

Deuxièmement, le Haut Conseil doit examiner la « cohérence » de l’article liminaire du projet de loi de finances de l’année « au regard » des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation. Pour la première fois en effet, le projet de loi de finances contient un article liminaire qui présente les prévisions de solde effectif et de solde structurel des administrations publiques, pour l’année en cours et l’année à venir.

À ce stade, je souhaite apporter trois précisions sur la notion de « cohérence ». Il s’agit d’abord d’une notion difficile à appréhender. Selon le dictionnaire d’Émile Littré, est cohérent « ce qui tient réciproquement ensemble ». La mission du Haut Conseil ne peut se limiter à une simple vérification de la concordance des chiffres entre le tableau présenté à l’article liminaire et celui arrêté dans la loi de programmation. Il serait inutile de disposer d’un Haut Conseil à cette seule fin. Il ne peut s’agir non plus d’un examen « ligne à ligne », en recettes et en dépenses, des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Le Haut Conseil doit analyser les prévisions de solde des administrations publiques au vu des prévisions macroéconomiques du Gouvernement et des éléments qui lui ont été communiqués sur les principales dispositions des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale, et les comparer aux objectifs fixés dans la loi de programmation.

Au-delà du respect formel de la trajectoire, il revient donc au Haut Conseil d’apprécier le degré de robustesse et les éventuels éléments de fragilité du scénario de finances publiques et, en particulier, de la trajectoire du solde structurel, compte tenu des informations dont il dispose.

Ensuite, la trajectoire de référence utilisée pour examiner la cohérence de l’article liminaire doit être remise en perspective. Les dispositions de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques nous invitent à identifier les écarts avec les orientations pluriannuelles de solde structurel arrêtées dans la dernière loi de programmation, c’est-à-dire, en l’espèce, celle qui a été promulguée le 31 décembre 2012. Depuis son adoption, le contexte a pu toutefois évoluer. Nous devons en tenir compte et donc ne pas nous contenter de nous livrer à une analyse statique des données fournies.

Enfin, cette analyse de cohérence nécessite des informations nombreuses et donc des délais d’examen raisonnables, comme l’avait souligné le rapporteur général de votre Commission dans son rapport rédigé au nom de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi organique.

Je souhaite saluer la qualité des informations qui ont été communiquées au Haut Conseil dès le mois de juillet par le ministère de l’Économie et des finances sur le scénario macroéconomique et de finances publiques. Des réponses détaillées ont ensuite été adressées aux demandes des membres, ce qui a permis de premiers échanges fructueux entre le Haut Conseil et les administrations compétentes. Cela constitue un progrès notable par rapport aux deux derniers exercices auxquels s’était livré le Haut Conseil.

Ces efforts doivent être poursuivis afin d’améliorer le cadre des échanges qui se prolongent au mois de septembre. En particulier, la saisine du Premier ministre, intervenue le 13 septembre, ne contenait pas formellement tous les éléments permettant au Haut Conseil d’apprécier la cohérence de l’article liminaire avec les orientations pluriannuelles. Les éléments concernant notamment les finances publiques étaient peu développés. Ils ont dû être précisés par la suite, laissant peu de temps au Haut Conseil pour les analyser.

Comme votre Assemblée l’a souhaité, il est indispensable que le Haut Conseil dispose d’un délai d’au moins une semaine pour examiner de façon satisfaisante le contenu des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Il serait donc souhaitable que, à l’avenir, la saisine du Premier ministre contienne tous les éléments nécessaires à la préparation de l’avis, à supposer que tous les arbitrages soient rendus à cette date.

J’en viens aux trois principales conclusions de cet avis.

S’agissant tout d’abord des prévisions macroéconomiques, le Haut Conseil considère que les prévisions de croissance sont plausibles. Le scénario du Gouvernement, qui repose sur une reprise modérée de l’activité – avec une croissance de 0,1 % en 2013 et de 0,9 % en 2014 – semble raisonnable. Pour 2013, la prévision est confortée par l’amélioration, au cours de l’été, des perspectives économiques à court terme. Pour 2014, la prévision de croissance se situe dans le consensus des économistes, dont la moyenne s’établit à 0,8 %.

Le Haut Conseil a toutefois identifié des éléments de fragilité ainsi que des aléas entourant le scénario macroéconomique du Gouvernement. Ceux-ci sont globalement orientés à la baisse pour 2014.

Parmi les éléments de fragilité de ce scénario, le Haut Conseil juge les prévisions d’emploi optimistes. Je souhaiterais à cet égard attirer l’attention de votre Commission sur l’importance des prévisions d’emploi, au même titre que celles de croissance qui focalisent le débat public. Comme vous le savez, l’évolution de l’emploi exerce des effets importants à la fois sur le dynamisme de l’activité économique et sur l’équilibre des comptes publics. Des hypothèses trop favorables peuvent conduire, d’une part, à une surestimation de la masse salariale et, partant, des recettes de cotisations sociales et de CSG et, d’autre part, à une sous-estimation des dépenses d’assurance chômage. Or, le Gouvernement anticipe des créations d’emplois particulièrement vigoureuses dans les secteurs marchand et non marchand.

Ce scénario de forte reprise de l’emploi suscite trois interrogations. S’agissant du secteur non marchand, la forte croissance de l’emploi en moyenne annuelle repose sur une hypothèse volontariste de montée en charge des dispositifs d’emplois aidés – contrats d’avenir et autres – à la fin de l’année 2013 et tout au long de l’année 2014.

S’agissant du secteur marchand, le contenu de la croissance en emplois anticipé par le Gouvernement paraît élevé, même avant la prise en compte des effets du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE. Le Haut Conseil considère en effet que, compte tenu du faible niveau de productivité consécutif à la crise majeure que nous venons de connaître, la reprise de la croissance pourrait se traduire, dans l’immédiat, davantage par un rattrapage de productivité que par une augmentation des embauches.

En outre, les effets attendus par le Gouvernement du CICE semblent surestimés. D’une part, à l’inverse de ce que fait le Gouvernement, le Haut Conseil considère que le CICE ne peut pas être purement assimilé, sur le plan économique, à une baisse de charges sur les salaires. D’autre part, dans le contexte de faible niveau des marges que connaissent les entreprises, une baisse des charges d’exploitation risque d’avoir, à court terme, moins d’impact sur l’emploi que ne l’escompte le Gouvernement.

Le Haut Conseil a également identifié un certain nombre d’aléas qui entourent la prévision de croissance du Gouvernement. Ils portent essentiellement sur l’environnement extérieur de la France et sont globalement orientés à la baisse. En particulier, un environnement international moins porteur ou l’assainissement différé du secteur bancaire européen pourraient peser sur les perspectives de croissance pour 2014. À l’inverse, des avancées plus rapides qu’attendu en matière de gouvernance économique et financière européenne pourraient conduire à un rebond plus marqué de l’activité en 2014.

En définitive, le Haut Conseil estime que la prévision de croissance qui vous est présentée est plausible, mais que le scénario macroéconomique présente des éléments de fragilité, notamment sur les prévisions d’emploi.

J’en viens aux conclusions de l’avis sur la cohérence de l’article liminaire avec les orientations pluriannuelles de solde structurel. Un premier constat s’impose : le déficit structurel prévu tant pour 2013 que pour 2014 est significativement supérieur à celui de la loi de programmation. Selon l’article liminaire présenté par le Gouvernement, le solde structurel s’établirait à – 2,6 % du PIB en 2013 et à – 1,7 % en 2014 contre, respectivement, – 1,6 % et – 1,1 % dans la loi de programmation. Les écarts s’élèveraient donc à 1 point en 2013 et encore à 0,6 point en 2014.

S’agissant de 2013, il convient de distinguer ce qui est hérité du passé et ce qui résulte d’un ajustement structurel – c’est-à-dire d’une amélioration du solde structurel – inférieur à ce qui était initialement prévu. Une partie de l’écart – 0,3 point – est héritée de celui constaté en 2012 par le Haut Conseil dans son avis du 23 mai 2013. Une large part de cet écart était imputable à des révisions des comptes nationaux de 2011 par l’INSEE, portant sur le PIB comme sur le déficit public. Le reste de l’écart – 0,7 point – est imputable à un ajustement structurel moins rapide que prévu en raison d’une surestimation, dans le projet de loi de finances pour 2013 et dans la loi de programmation pour l’année concernée, du dynamisme des recettes par rapport à la croissance du PIB. L’élasticité globale des recettes serait en effet de 0,5 contre 1 initialement prévu. Cette différence d’élasticité se traduit par un moindre ajustement structurel de 0,4 point de PIB sur l’écart total de 0,7 point propre à 2013.

L’ajustement structurel est également moins rapide qu’escompté en raison d’un rendement moindre que prévu de certaines mesures nouvelles votées en loi de finances pour 2013 – de l’ordre de 0,1 point – et d’une évolution plus rapide des dépenses en
volume – de l’ordre de 0,1 point –, compte tenu de la révision de la prévision d’inflation, d’une dynamique un peu plus forte de la dépense locale, ainsi que d’un versement supplémentaire de 1,8 milliard d’euros au budget de l’Union européenne.

S’agissant de 2014, l’effort supplémentaire prévu par le Gouvernement – 0,4 point – ne permettrait de rattraper qu’une partie du retard accumulé en 2013 – 1 point –, conduisant ainsi à un écart prévu de 0,6 point. De surcroît, le Haut Conseil estime que cette prévision de déficit structurel pour 2014 est optimiste. Il a notamment identifié, sans les chiffrer, quatre facteurs qui conduisent à penser que ce déficit structurel pourrait être sous-estimé.

S’agissant tout d’abord des recettes, les hypothèses d’élasticité du Gouvernement – qui mesurent la réactivité des recettes fiscales et sociales à la croissance du PIB – paraissent optimistes. Le Gouvernement anticipe une augmentation, à législation constante, proche de celle du PIB, c’est-à-dire une élasticité comprise entre 0,9 et 1. Pour sa part, le Haut Conseil estime que les rentrées fiscales de 2014 pourraient encore subir les effets négatifs de la mauvaise conjoncture de 2013, notamment en raison des décalages temporels entre le calcul de l’assiette et la perception de certains impôts.

D’autre part, le rendement des mesures nouvelles, annoncé par le Gouvernement à hauteur de 9,5 milliards d’euros, n’a pu être expertisé par le Haut Conseil. Cela concerne en particulier la cotisation sur l’excédent brut d’exploitation, qui doit en principe rapporter 2,5 milliards d’euros. En outre, le Haut Conseil n’a pas été destinataire du détail des mesures nouvelles concernant la fiscalité écologique et la sécurité sociale. Enfin, le rendement attendu d’un renforcement de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales – 1,8 milliard d’euros – est incertain et une partie pourrait ne pas être pérenne, dans la mesure où il s’agirait d’une mesure ponctuelle et temporaire.

En ce qui concerne les dépenses, des facteurs d’incertitude ont été identifiés dans le périmètre des dépenses de l’État et des collectivités territoriales. L’effort sur les dépenses de l’État est conditionné à une stricte maîtrise de la masse salariale – qui est bien prévue – et au ralentissement effectif des dépenses d’intervention. La réduction des concours de l’État aux collectivités territoriales à hauteur de 1,5 milliard d’euros ne se traduira pas nécessairement par une économie à due concurrence sur la dépense locale.

Par ailleurs, je rappelle que les prévisions de solde structurel reposent sur les hypothèses de croissance potentielle retenues dans la loi de programmation. Le Haut Conseil n’a pas été amené à se prononcer sur ces hypothèses dans la mesure où sa création est postérieure à l’adoption de la dernière loi de programmation. Il s’interroge néanmoins sur l’ampleur de l’écart de production, estimé à 3,5 points en 2014. En effet, dans le contexte de crise financière majeure que nous venons de connaître, la persistance d’un déficit d’activité devrait s’accompagner de pertes définitives de capacités productives, pesant in fine sur la croissance potentielle.

Or, un écart surévalué entre le PIB effectif et le PIB potentiel conduit à surestimer la composante conjoncturelle et, par voie de conséquence, à sous-estimer le déficit structurel, qui constitue la référence principale retenue pour le pilotage de nos finances publiques dans le cadre européen. Si cette hypothèse se vérifiait, les efforts d’ajustement budgétaire à réaliser pour atteindre l’équilibre structurel seraient plus importants que prévu. Le Haut Conseil ne pourra se prononcer sur cette question qu’à l’occasion du prochain projet de loi de programmation des finances publiques qui lui sera présenté, mais il lui a semblé utile de relever ce point pour permettre une appréhension d’ensemble de la situation de nos finances publiques.

Enfin, après un premier écart de 0,3 point en 2012 constaté par le Haut Conseil, le solde structurel s’écarterait significativement, dès 2013, de la trajectoire programmée, ce qui rendra vraisemblablement nécessaire le déclenchement du mécanisme de correction au mois de mai 2014.

Aux termes de l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012, le mécanisme de correction est déclenché si le Haut Conseil identifie un « écart important » entre les résultats de l’année écoulée et les orientations pluriannuelles de solde structurel définies par la loi de programmation. Deux critères alternatifs permettent de déterminer si un écart est important ou non : soit s’il représente au moins 0,5 point de PIB sur une année donnée ; soit s’il représente au moins 0,25 point de PIB en moyenne sur deux années consécutives.

Dans son avis du 23 mai 2013, le Haut Conseil avait déjà constaté un écart de 0,3 point en 2012. Devant cette même Commission, j’avais souligné que cet écart présentait un risque s’agissant du respect futur de la trajectoire. Ce risque se confirme avec le projet de loi de finances qui vous est présenté. Si les prévisions du Gouvernement se réalisent, le mécanisme de correction sera déclenché en mai 2014, sauf si l’on modifie la loi de programmation et le calendrier de redressement des finances publiques.

La capacité de la France à atteindre l’équilibre structurel des finances publiques en 2016, objectif sur lequel elle s’est engagée, dépend ainsi, d’une part, de l’atteinte de l’objectif de solde structurel fixé en 2014 – ce qui n’est pas évident à ce stade compte tenu des hypothèses optimistes qui ont été retenues – et, d’autre part – quand bien même cet objectif serait respecté – de la réalisation, en 2015 et 2016, d’efforts plus importants que ceux prévus par la loi de programmation. En effet, celle-ci prévoyait un ajustement de 1,1 point de PIB sur les deux années. C’est désormais un ajustement de 1,7 point – soit 0,85 point par an – qui serait nécessaire pour atteindre l’équilibre structurel – là aussi, sauf si l’on modifie la loi de programmation et le calendrier de retour à l’équilibre structurel. Je rappelle que la loi organique oblige le Haut Conseil à raisonner par rapport à la dernière loi de programmation et non par rapport aux éventuels compromis passés entre la Commission européenne, le Conseil et un pays donné après l’adoption de ladite loi.

Le Haut Conseil des finances publiques a été créé pour développer une expertise indépendante sur les textes financiers, préalablement à leur présentation au Parlement. Il a ainsi pour mission d’éclairer vos débats sur les moyens mis en œuvre par la France pour respecter ses engagements en matière de finances publiques. J’espère que le présent avis y contribuera.

M. le président Gilles Carrez. Je vous remercie, monsieur le président. La notion de solde structurel est en effet difficile à manier.

Le Haut Conseil ayant, semble-t-il, travaillé vendredi dernier jusqu’à trois heures et demie du matin, je suppose que chaque mot de son avis a été pesé. Je m’interroge néanmoins sur une des formulations employées : « Le Gouvernement estime que le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) entraînerait la création de 90 000 emplois supplémentaires, en assimilant ses effets à celui des allégements de charges sociales. Cette hypothèse est discutable à court terme dans la mesure où le CICE ne peut pas être purement assimilé à une baisse de charges. » Est-ce à dire que le CICE serait moins efficace qu’une baisse directe des charges au regard de l’objectif de création d’emplois à court terme ?

D’autre part, le Haut Conseil s’interroge « sur l’ampleur de l’écart de production qui, reposant sur ces prévisions de croissance potentielle, se creuserait jusqu’à 3,5 points de PIB dans le scénario proposé ». Nous avons interrogé les ministres à ce propos tout à l’heure. La composante conjoncturelle semble avoir été surestimée. De ce fait, des efforts accrus d’ajustement structurel risquent d’être nécessaires. Vous venez d’indiquer, monsieur le président, que le Haut Conseil n’y verrait plus clair qu’à la fin de l’année. Pouvez-vous néanmoins développer ce point ?

Enfin, comme vous l’avez indiqué, il est aujourd’hui presque certain que le Haut Conseil sera amené à constater que l’écart entre le solde structurel effectif et celui prévu dans la loi de programmation des finances publiques est « important » au sens de la loi organique. Or, l’article 23 de cette loi dispose que « le Gouvernement tient compte d’un écart important au plus tard dans le prochain projet de loi de finances de l’année ou de loi de financement de la sécurité sociale de l’année ». L’autre possibilité est de modifier la loi de programmation des finances publiques. Nous n’avons pas obtenu tout à l’heure de réponse à ce sujet de la part des ministres. Comment le Haut Conseil envisage-t-il les choses pour sa part ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous dites, monsieur le président du Haut Conseil, ne pas avoir toujours obtenu en temps voulu du Gouvernement les éléments nécessaires à votre réflexion. Je remercie néanmoins le Haut Conseil d’exister ! Grâce à vous, j’ai pu disposer d’éléments précis plus tôt que mes prédécesseurs : le Gouvernement a été obligé de divulguer non seulement ses hypothèses macroéconomiques mais également un certain nombre de dispositions du projet de loi de finances de manière anticipée par rapport aux années précédentes. Cependant, cela a également donné un tour différent au débat public : certains commentaires mal informés laissent le sentiment – quelque peu irritant – que la procédure budgétaire serait déjà arrivée à son terme, alors que les débats législatifs ne font que commencer. Nous devons réfléchir à cette situation.

J’en viens aux deux points principaux traités par le Haut Conseil.

Premièrement, vous avez estimé que les prévisions de croissance du Gouvernement étaient plausibles. On pourrait même dire qu’elles sont prudentes, notamment au regard des pratiques antérieures. D’autant que la mise en réserve concernera 7 % des crédits, contre 5 puis 6 % auparavant. Ces éléments sont de nature à nous rassurer.

Deuxièmement, s’agissant du déficit structurel, vous avez logiquement pris pour point de référence les orientations pluriannuelles fixées dans la loi de programmation des finances publiques, comme vous y oblige la loi organique. Cependant, nous devons tenir compte des événements qui se sont produits depuis l’adoption de cette loi. En effet, à la suite d’une discussion avec nos partenaires européens et compte tenu de l’avis d’autres organismes internationaux, notre trajectoire de retour à l’équilibre des comptes publics a été modifiée : si l’objectif reste le même, le calendrier est quelque peu différent.

Dès lors, convient-il d’adopter une nouvelle loi de programmation des finances publiques et à quel moment le faire ? Selon moi, le prochain budget triennal, que nous devrons adopter à la fin de l’année 2014 et qui portera sur les exercices 2015 à 2017, pourrait être l’occasion de coller à nouveau à la réalité. J’ai évoqué cette question avec le Gouvernement, mais aucune décision n’a été prise à ce stade. Nous ne pouvons pas non plus passer notre temps à voter des lois de finances rectificatives. Compte tenu de l’encombrement de l’ordre du jour législatif et de la lourdeur de la procédure, il convient de trouver la bonne mesure.

J’en viens à des questions plus précises. Vous considérez, monsieur le président, que le Gouvernement surestime les créations d’emplois à venir. Selon vous, quels sont les chiffres les plus plausibles en la matière dans les secteurs public, marchand et non marchand ? Vos analyses rejoignent celles de plusieurs économistes s’agissant du secteur marchand. En revanche, certains de ces économistes apparaissent plus optimistes que vous en ce qui concerne le secteur non marchand. Les créations d’emplois dans ce secteur pourraient même compenser le faible dynamisme du secteur marchand.

D’autre part, vous avez évoqué les aléas à la baisse. Il convient en effet de le faire dans un souci d’objectivité et de transparence. Cependant, plusieurs organismes ont publié des prévisions de croissance supérieures à celles retenues par le Gouvernement. Certains vont même jusqu’à évoquer un chiffre de 1,3 % pour 2014 et mettent en avant des aléas à la hausse : un retour de l’investissement privé plus important que prévu et la reconstitution des stocks. Quel est votre avis sur ce point ?

En outre, vous estimez que le Gouvernement surévalue la croissance potentielle. Quelle hypothèse conviendrait-il, selon vous, de retenir en la matière ? En s’appuyant sur quels arguments ? De combien de points de PIB faudrait-il dès lors relever la prévision de déficit structurel pour 2013 et 2014 ?

S’agissant des éventuelles mesures correctrices en recettes et en dépenses que vous évoquez, quelle est la procédure la plus appropriée ? La loi organique prévoit qu’elles doivent intervenir « dans le prochain projet de loi de finances de l’année ». Elles pourraient donc, en l’espèce, être inscrites dans la loi de finances initiale pour 2015. Néanmoins, nous aurons certainement un débat sur l’opportunité d’adopter une loi de finances rectificative. Je souhaite, pour ma part, que nous évitions de multiplier les textes.

Enfin, l’inflation constatée à ce stade en 2013 – de l’ordre de 0,8 % – est sensiblement inférieure à la prévision. Quel est l’impact éventuel de cet écart sur le calcul du solde structurel à partir du solde nominal ?

M. Hervé Mariton. Modifier la loi de programmation après avoir constaté un « écart important » serait-il conforme à la lettre et à l’esprit de la loi organique ? Selon moi, celle-ci vise à ce que les trajectoires soient effectivement suivies. Bien sûr, des circonstances exceptionnelles peuvent justifier que l’on modifie la trajectoire : une crise peut frapper d’obsolescence les hypothèses sur lesquelles repose une loi de programmation. En revanche, il ne devrait pas être question, chaque fois que l’on constate un écart par rapport à la trajectoire, c’est-à-dire un dérapage, de modifier la loi de programmation. Cela dispenserait le Gouvernement de faire jouer le mécanisme de correction à l’occasion de la prochaine loi de finances de l’année ou d’une loi de finances rectificative. La modification de la loi de programmation est un outil lourd qui doit être utilisé dans des circonstances lourdes. En l’absence de telles circonstances, il convient non pas de modifier le cadre, mais d’apporter des correctifs pour s’y conformer.

Mme Karine Berger. Le Haut Conseil fait l’hypothèse que la croissance potentielle est affaiblie par la crise. Or, elle peut également l’être par des réductions de déficit structurel : il est souvent risqué de revenir à l’équilibre structurel lorsque l’écart de production – output gap – n’est pas comblé. Vous avez insisté sur la nécessité d’accroître les efforts en matière d’ajustement structurel. Quel est, selon vous, l’impact de la réduction du déficit structurel sur la croissance potentielle ?

Dans certains de vos travaux, monsieur le rapporteur général du Haut Conseil, vous avez rappelé que la baisse des cotisations patronales et la réduction de l’impôt sur les sociétés avaient le même effet en termes d’incitation des entreprises à créer des emplois. Vous avez d’ailleurs été le premier à évoquer la notion de « coin fiscalo-social ». Pour ma part, je ne pense pas que la baisse des cotisations patronales favorise les créations d’emplois : ce serait même plutôt l’inverse. Quoi qu’il en soit, je suis très étonnée que, dans son avis, le Haut Conseil distingue l’effet d’une baisse des cotisations patronales de celui d’une diminution de l’impôt sur les sociétés au moyen du CICE. La littérature économique suggère généralement que cette distinction n’a pas lieu d’être. Enfin, monsieur le président, je suppose que le Haut Conseil a souhaité écrire, dans son avis, non pas « charges » mais « cotisations » sociales.

M. Charles de Courson. Dans son avis, le Haut Conseil indique : « Une grande prudence est requise dans l’évaluation de la composante conjoncturelle du déficit public afin de ne pas sous-estimer le déficit structurel. » Or, depuis trois ans, l’écart entre le déficit effectif et le déficit structurel est croissant : 0,8 point de PIB en 2012, 1,5 en 2013 et 1,8 en 2014. Pour certains, dont je fais partie, la raison en est la suivante : le Gouvernement nous fait croire que le déficit structurel se réduit fortement en fixant des hypothèses de croissance élevée – de 1,5 à 2,5 % –, qui sont d’ailleurs démenties a posteriori, alors même que la Commission européenne estime la croissance potentielle de la France à environ 1,1 % – chiffre réaliste selon moi. Comment expliquer, monsieur le président, l’écart croissant entre déficit effectif et déficit structurel ?

D’autre part, s’agissant de l’évolution assez décevante du produit de la TVA, le Haut Conseil précise qu’elle « reste en partie inexpliquée ». Avez-vous pu néanmoins approfondir votre réflexion sur ce point ? Est-ce à dire que la consommation chute fortement ?

Enfin, selon le Haut Conseil, « des interrogations subsistent sur les hypothèses d’évolution des dépenses des collectivités territoriales. En particulier, la réduction des concours de l’État ne se traduira pas nécessairement par une diminution à due concurrence de la dépense locale. » Vous mettez le doigt sur un véritable problème ! S’agissant des conseils généraux, l’État va réduire leur dotation globale de fonctionnement de 476 millions d’euros. Mais, en contrepartie, il va leur transférer 827 millions d’euros correspondant aux frais d’assiette et de recouvrement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et leur permettre d’augmenter le taux des droits de mutation à titre onéreux de 3,8 à 4,5 %. Si tous les départements utilisent cette possibilité, ils percevront 1,2 à 1,3 milliard d’euros supplémentaires. On pourrait faire un raisonnement analogue pour les régions et les communes. Quelle est votre analyse sur ce point ?

M. Éric Alauzet. Vous avez indiqué, monsieur le président, qu’on s’achemine vers le déclenchement du mécanisme de correction, sauf si l’on modifie la loi de programmation des finances publiques. Cependant, nous ne pouvons pas nous arrêter à ce constat. Dès lors que l’Union européenne a validé un assouplissement de notre trajectoire de réduction des déficits – avec une différence de 1,1 point en 2013 et de 1,4 point en 2014, d’ailleurs répartie de façon assez équitable entre le déficit conjoncturel et le déficit structurel –, nos partenaires européens et nous-mêmes devons en tirer les conséquences. Il convient donc, de toute évidence, de réviser la loi de programmation. C’est pourquoi je n’ai pas très bien compris votre présentation.

En outre, vous semblez sous-estimer les recettes supplémentaires que l’on peut tirer de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. C’est pourtant, selon moi, une piste essentielle. Aujourd’hui, les États européens sont divisés à propos des régimes d’imposition et de la trajectoire de réduction des dépenses publiques. Seule la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance financière internationale semble faire consensus entre eux. Or, elle peut faciliter le rééquilibrage des dépenses publiques et constituer une bouffée d’oxygène pour les économies. Certes, on peut estimer qu’elle ne rapportera pas autant qu’on le souhaite. Mais c’est également le cas des autres mesures. Il convient donc d’afficher une réelle volonté politique en la matière. Je souhaite que la Cour des comptes se saisisse pleinement de la question de la lutte contre la fraude fiscale au même titre que de la réduction de la dépense publique et de la modération de l’impôt.

S’agissant du CICE, je souscris aux propos de Karine Berger. Il est exact que le CICE ne constitue pas à proprement parler une réduction des charges. Mais il diminue le coût du travail de 6 %. Jusqu’à preuve du contraire, son effet est donc le même que celui d’une baisse des charges.

Mme Valérie Pécresse. Monsieur le président, le Gouvernement prétend effectuer d’importantes économies en matière de dépenses publiques – celles de l’État, des administrations de la sécurité sociale et des collectivités territoriales – par rapport à l’évolution tendancielle de celles-ci. Il nous est difficile d’évaluer l’intensité de l’effort produit, puisque nous ne connaissons pas cette progression tendancielle : le Haut Conseil des finances publiques pourrait-il l’estimer ?

M. le président Gilles Carrez. Cette question s’est posée lors de l’élaboration et du suivi du projet de loi de finances pour 2013 : le Gouvernement évaluait à 10 milliards d’euros la croissance tendancielle des dépenses de l’État, alors que la Cour des comptes la situait à 6 milliards et que vous-même, monsieur le rapporteur général de la Commission des finances, la mesuriez à 7,5 milliards d’euros – chiffre auquel je souscrivais.

Le travail du Haut Conseil s’avère très utile : avant sa création, nous rencontrions de grandes difficultés à connaître l’élasticité des recettes – et donc leur montant, ce que j’appelais la « boîte noire ». Il conviendrait néanmoins, comme vient de le souligner Valérie Pécresse, que ce travail soit étendu à la dépense tendancielle.

M. Patrick Ollier. Eu égard à la prévision de croissance, le Haut Conseil pourrait-il quantifier la sous-estimation des pertes de l’assurance chômage et la surestimation des recettes de l’État, ces deux phénomènes contribuant à la dégradation des finances publiques ?

M. Éric Woerth. Lorsque le Gouvernement décide de ne pas augmenter le point d’indice des fonctionnaires, il ne réalise pas une économie, mais il refuse de procéder à une dépense supplémentaire que la loi ne le contraint pas à engager : il s’agit donc d’une décision politique qui n’induit pas de baisse des dépenses. Or, ces choix entrent dans le calcul de l’évolution tendancielle des dépenses, qui se trouve au cœur du débat budgétaire : nous avons donc besoin d’une méthode d’évaluation de cette progression.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. La loi organique dispose que le Haut Conseil donne un avis – fondé sur les éléments portés à sa connaissance – sur les hypothèses de croissance et le scénario macroéconomique retenus par le Gouvernement, mais elle ne confie pas au Haut Comité la mission d’élaborer lui-même des prévisions. Chacun doit rester dans le cadre de la tâche que lui confère la loi.

Nous estimons les hypothèses de croissance plausibles et nous les distinguons du scénario macroéconomique ; en effet, ce dernier repose sur un rebond d’une croissance qui serait plutôt riche en emplois, alors que celle-ci pourrait être nourrie par une augmentation des exportations ou par une reprise plus marquée de l’investissement des entreprises qui ne se traduiraient pas forcément pas une augmentation substantielle de la création d’emplois.

Le CICE constitue-t-il un allégement de charges ? Qu’il puisse y être assimilé ou non, il ne générera pas forcément d’importantes créations d’emplois, compte tenu de la faiblesse des marges des entreprises. Celles-ci pourraient en effet êtres tentées de les reconstituer plutôt que d’embaucher. La contribution du CICE sera néanmoins positive, car il soutiendra la profitabilité des entreprises et évitera des faillites.

La crise affecte négativement la croissance potentielle, car des entreprises ont disparu, des emplois ont été détruits et des dépenses de recherche et développement ont été gelées ; le potentiel doit donc se trouver aujourd’hui à un niveau inférieur à celui affiché il y a cinq ans. Les notions de croissance potentielle et d’écart de production s’avèrent intéressantes pour s’abstraire de la conjoncture, mais leur définition varie souvent.

La faible inflation possède un impact neutre sur le solde structurel ou nominal, mais la révision à la baisse de la prévision de la progression des prix en 2013 gonfle mécaniquement la dépense en volume, puisque les normes de l’État et de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie – ONDAM – sont fixées en valeur dans la loi de finances initiale. La revalorisation des prestations sociales en avril a tenu compte de la plus faible inflation, qui induit par ailleurs des économies sur la charge de la dette indexée : l’effet haussier sur les dépenses sera donc atténué.

La prévision d’évolution de l’emploi dans le secteur non marchand repose sur une hypothèse volontariste, mais tout dépendra du montant des crédits que vous voterez, mesdames et messieurs les députés, et de leur déploiement sur le terrain.

Nous avons identifié des aléas pouvant améliorer ou dégrader le scénario macroéconomique ; sur le plan international, les aléas sont plutôt baissiers, mais de bonnes surprises peuvent, comme cette année, intervenir. Dans l’avis exprimé sur les années 2013 et 2014, le Haut Conseil ne s’était d’ailleurs pas autant trompé que le ministre de l’Économie et des finances l’a affirmé ce matin ; le Gouvernement a ainsi retenu une hypothèse de croissance inférieure à 1,2 %, prévision privilégiée par le Haut Conseil. Monsieur le rapporteur général de la commission des Finances, les instituts qui tablent sur une croissance de 1,3 % sont peu nombreux, à l’exception de l’OFCE qui gèle les effets récessifs – très forts dans son modèle – dus aux mesures de restriction budgétaire du fait de leur étalement dans le temps.

Monsieur Mariton, le Haut Conseil ne propose pas de modification de la loi de programmation des finances publiques, mais il constate des écarts entre la prévision contenue dans cette loi et la réalisation. Ainsi, si la loi n’est pas mise à jour pour prendre en compte le desserrement du calendrier de redressement des finances publiques françaises accepté par l’Union européenne, nous serons conduits à relever que le mécanisme de correction doit jouer. Par ailleurs, l’Union n’a pas renoncé à son objectif de voir les administrations publiques atteindre l’équilibre structurel en 2016. Cela nous obligera à fournir le même effort structurel en 2015 et en 2016 que celui prévu par le projet de loi de finances pour 2014, sachant que ce niveau – situé à 0,85 point d’ajustement – excède celui affiché par la loi de programmation – établi à 0,6 point en 2015 et à 0,5 point en 2016 –, puisque le projet de loi de finances pour 2014 prévoit un déficit structurel de 1,7 % l’année prochaine quand la loi de programmation ne l’évaluait qu’à 1,1 % du PIB potentiel.

M. Jean-Philippe Cotis, rapporteur général du Haut Conseil des finances publiques. La crise a entraîné une très forte baisse de la demande globale des biens et des services – de l’ordre de 3 à 4 points en France, chiffre comparable à celui observé chez nos voisins –, qui induit des effets collatéraux sur l’offre – faillites d’entreprises et exclusion de nombreuses personnes du marché du travail. Cet enchaînement fait repartir la croissance d’un point plus bas que celui qu’elle avait atteint avant la crise ; il faut donc revenir à une croissance plus forte, ce qui exige d’appuyer la demande et de mettre en œuvre des politiques d’offre visant à accroître le progrès technique et à favoriser les créations d’emplois.

La baisse des cotisations patronales crée de l’emploi, car elle diminue le coût du travail, protège le profit – faible dans de nombreuses entreprises – et évite des faillites. La diminution de l’impôt sur les sociétés, en soutenant la profitabilité, renforce l’incitation des entreprises à se développer, ce qui stimule les investissements et l’emploi.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Monsieur Alauzet, nous comprenons que le Gouvernement affiche un objectif volontariste en matière d’intensification de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales, mais nous nous interrogeons sur sa capacité à l’atteindre, sachant qu’une partie des 1,8 milliard d’euros que cette politique doit parvenir à collecter est uniquement conjoncturelle – ce que le Gouvernement reconnaît lui-même. Nous manquons d’éléments pour répondre à cette question et pour lever les incertitudes qu’implique toute prévision.

L’État a décidé de réduire ses dotations aux collectivités locales, mais cela ne signifie pas que celles-ci choisiront de diminuer leurs dépenses à due concurrence – ne serait-ce que parce que des mesures de compensations ont été prises pour les départements et que les collectivités peuvent augmenter la fiscalité.

Nous sommes nombreux – la Cour des comptes et le ministère de l’Économie et des finances, notamment – à nous interroger sur le rendement plus faible qu’escompté de la TVA. Nous devons identifier les causes de cet écart important, car il pourrait se reproduire en 2014.

Madame Pécresse et monsieur Woerth, les budgets ont toujours été construits sans que soit précisément connue l’évolution tendancielle des dépenses, mais, pour évaluer l’ampleur des économies réalisées, tout dépend du niveau de référence que l’on choisit. La Cour des comptes peut contribuer à ce travail d’analyse, et elle a d’ailleurs déjà formulé dans le passé des observations sur le point de départ retenu pour apprécier la tendance. Ce sujet concerne aussi bien les dépenses de l’État que celles de la sécurité sociale : quand l’ONDAM croît de 2,4 %, cela reste une augmentation – même si elle ralentit – et l’on ne peut pas parler de réduction des dépenses de santé, même si celles-ci peuvent progresser pour d’excellentes raisons.

*

* *

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
LE SOLDE PUBLIC EN 2013 ET 2014

 

Exécution 2012

Prévision pour 2013 associée au présent projet de loi

Solde structurel

– 3,9

– 2,6

Solde conjoncturel

– 0,8

– 1,4

Mesures ponctuelles et temporaires

– 0,1

0

Solde effectif

– 4,8

– 4,1

Source : ministère de l’Économie et des finances.

En raison d’une croissance du PIB prévue à 0,1 %, éloignée du potentiel de croissance estimé à 1,4 %, le déficit public conjoncturel se creuserait d’environ 0,6 % du PIB en 2013. Une telle évolution serait principalement liée aux manques à gagner en recettes résultant de la faible activité économique.

On estime en effet que le déficit conjoncturel se creuse de 0,5 % du PIB quand la croissance effective est inférieure de 1 % au niveau estimé de la croissance potentielle. Cette évaluation suppose que l’évolution des principales assiettes fiscales – revenus et consommation – est corrélée à celle du PIB et que, dès lors que les prélèvements obligatoires représentent un peu moins de 50 % du PIB, les manques à gagner liés à la mauvaise conjoncture représentent moins de la moitié du « manque à gagner en croissance » – une telle évaluation étant nécessairement approximative du fait de l’absence de prise en compte des impôts, comme l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, assis sur les revenus de l’année précédente.

Malgré cette très faible croissance du PIB, le déficit public effectif serait en net retrait et passerait de 4,8 % du PIB en 2012 à 4,1 % du PIB en 2013.

Cette diminution du déficit effectif serait due à une forte réduction du déficit structurel, de l’ordre de 1,3 % du PIB. Comme l’illustre le tableau suivant, la diminution du déficit structurel par rapport à 2012 serait due à un effort structurel de 1,7 %, partiellement compensé, à hauteur de 0,4 % du PIB, par la « variation non discrétionnaire » du solde.

LA RÉDUCTION DU DÉFICIT STRUCTUREL EN 2013

(en % du PIB)

Solde structurel 2012

– 3,9

Effort structurel

1,7

Dont effort en recettes

1,5

Dont effort en dépense

0,2

Variation non discrétionnaire du solde structurel

– 0,4

Solde structurel 2013

– 2,6

L’effort structurel, qui traduit la diminution du déficit structurel due à des mesures adoptées par les pouvoirs publics, reposerait, à titre principal, sur l’effort en recettes – c’est-à-dire le produit net des mesures nouvelles relatives aux prélèvements obligatoires – évalué à 1,5 % du PIB et, à titre subsidiaire, sur l’effort en dépense évalué à 0,2 % du PIB.

Le détail des mesures en recettes a été fourni par le rapporteur général dans le tome I du rapport relatif au projet de loi de finances pour 2013 (37). Il est précisé ci-après dans le développement relatif à l’écart entre prévision initiale et prévision révisée du solde en 2013.

Les mesures en dépenses sont précisées dans le commentaire relatif à cet effort dans le présent rapport (annexe n° 3 notamment).

La variation non discrétionnaire du solde est liée à des éléments qui ne dépendent pas des pouvoirs publics et qui ont néanmoins une incidence sur le niveau du solde structurel. Cette variation serait négative, à hauteur de 0,4 % du PIB, en raison d’une élasticité des prélèvements obligatoires, de l’ordre de 0,5 seulement, soit nettement inférieure à l’unité (38).

 

LPFP 2012-2017

PSTAB 2013-2017

Prévision associée au présent projet de loi

Solde structurel

– 1,6

– 2

– 2,6

Solde conjoncturel

– 1,2

 1,6

 1,4

Mesures ponctuelles et temporaires

– 0,2

 0,1

0

Solde effectif

– 3

– 3,7

– 4,1

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

Après – 1,6 % du PIB en loi de programmation des finances publiques (LPFP) et – 2 % du PIB en programme de stabilité (PSTAB), la prévision de déficit public structurel pour 2013 s’établit à – 2,6 % du PIB dans le présent projet de loi.

Si cet écart de 1 % du PIB par rapport à la prévision faite en loi de programmation était vérifié en exécution, il est probable que la procédure de correction des écarts, prévue par l’article 23 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, soit enclenchée sur la base de l’avis du Haut conseil des finances publiques sur le projet de loi de règlement pour 2013.

Pour mémoire, la révision à la hausse de la prévision en programme de stabilité avait été justifiée par la nécessité de prendre en compte, à hauteur de 0,3 % du PIB, l’effet base dû à un déficit structurel plus important que prévu en 2012 et, à hauteur de 0,2 % du PIB, par une variation non discrétionnaire négative liée, comme indiqué plus haut, à la faiblesse des recettes (39).

Comme l’illustre le tableau suivant, la révision à la hausse, de 0,6 % du PIB, de la prévision de déficit structurel associée au présent projet de loi serait due à deux éléments principaux.

LES PRÉVISIONS SUCCESSIVES DES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DE LA VARIATION
DU SOLDE STRUCTUREL EN 2013

(en % du PIB)

 

LPFP 2012-2017

PSTAB 2013-2017

Prévision associée au présent projet de loi

Variation prévue du solde structurel

+ 2

+ 1,6

+ 1,3

Effort structurel

1,9

1,9

1,7

Dont effort en recettes

1,6

1,6

1,5

Dont effort en dépense

0,3

0,3

0,2

Variation non discrétionnaire du solde

0

– 0,2

– 0,4

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

● D’une part, la très faible élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance, désormais estimée à 0,5, conduirait à une dégradation du solde structurel de 0,4 % du PIB, contre 0,2 % du PIB prévu en programme de stabilité (40).

● D’autre part, l’effort structurel atteindrait 1,7 % du PIB, contre 1,9 % du PIB prévu jusqu’à présent.

En recettes, deux éléments principaux tendent à minorer d’environ 0,1 % du PIB le rendement des mesures qui avaient été présentées dans le projet de loi de finances pour 2013.

En premier lieu, la décision du Conseil constitutionnel sur ce dernier texte, qui a censuré certains dispositifs générateurs de recettes, ainsi que le rendement moindre qu’escompté de la taxe sur les transactions financières entraîneraient un manque à gagner de l’ordre de 1,5 milliard d’euros.

En second lieu, une partie du rendement de la barémisation des revenus du capital serait reportée, à hauteur de 0,6 milliard d’euros, sur l’exercice 2014 car les versements effectués au titre du mois de décembre 2013 ne seraient perçus qu’en janvier 2014. Ce dernier élément peut être assimilé à une erreur dans la prévision initiale.

Selon les informations transmises au rapporteur général, le rendement des autres mesures nouvelles en recettes impactant l’exercice 2013 serait soit conforme aux attentes soit encore impossible à évaluer.

En dépenses, les opérations exceptionnelles décrites par ailleurs, en particulier le surcoût lié au financement du budget de l’Union européenne, expliqueraient un moindre effort d’environ 0,1 % du PIB.

Compte tenu de cette révision à la hausse du déficit structurel et en dépit d’une révision à la baisse, de 0,2 % du PIB, du déficit conjoncturel, la prévision de déficit effectif passe de 3,7 % du PIB, prévu en programme de stabilité, à 4,1 % du PIB dans le cadre du présent projet de loi.

À noter enfin que le coût des mesures ponctuelles et temporaires – à savoir les dépenses liées aux condamnations de l’État dans des contentieux fiscaux – serait inférieur aux prévisions.

S’agissant de l’affaire dite du précompte mobilier, la décision du Conseil d’État, favorable à l’État, aurait fait l’objet d’un recours par les contribuables concernés, ce qui suspendrait tout versement. La dépense devrait donc être probablement nulle en 2013.

S’agissant de l’affaire dite des OPCVM, l’engorgement du tribunal administratif de Montreuil, qui traite les demandes, conduirait à ce que la dépense soit plus lente que prévu. Le traitement des dossiers les plus importants pourrait toutefois entraîner des dépenses substantielles pour l’État.

Enfin, il avait été anticipé une dépense au titre d’une éventuelle condamnation de l’État pour l’instauration de la taxe sur les opérateurs Internet. La Cour de justice de l’Union européenne ayant jugé ce dispositif conforme au droit communautaire, une dépense de plus d’un milliard d’euros, incluse dans la prévision initiale, est donc évitée.

Au total, les dépenses au titre des contentieux fiscaux pourraient être limitées à 1 milliard d’euros en 2013, contre 4,85 milliards d’euros initialement prévus, et concerneraient uniquement l’affaire des OPCVM.

 

2012

Révisé 2013

Solde public

– 4,8

– 4,1

État

 3,9

 3,2

ODAC

 0,1

0

APUL

 0,2

 0,2

ASSO

 0,6

 0,7

 

LPFP

PSTAB

Révisé 2013

Solde public

– 3

 3,7

– 4,1

APUC

 2,7

– 2,9

 3,2

APUL

– 0,1

– 0,2

 0,2

ASSO

– 0,2

– 0,6

 0,7

Source : rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi.

Le solde de l’État est présenté dans les observations du rapporteur général sur l’article d’équilibre (article 43 du présent projet de loi de finances).

Estimé, pour 2013, à 71,9 milliards d’euros en comptabilité budgétaire, il ressortirait à 66,4 milliards d’euros en comptabilité nationale en raison des retraitements détaillés dans le tableau suivant.

PRINCIPAUX RETRAITEMENTS PERMETTANT LE CALCUL DU SOLDE DE L’ÉTAT
EN COMPTABILITÉ NATIONALE EN 2013

(en milliards d’euros)

 

Solde en comptabilité budgétaire

– 71,9

Comptabilité en droits constatés

Primes et décotes à l’émission

+ 0,9

Amende perçue – appel pendant

 2,2

Investissement en partenariat public-privé

 0,7

Prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne

+ 0,6

Dépenses de matériels militaires

 0,2

Opérations budgétaires traitées en opérations patrimoniales

Dotation au Mécanisme européen de stabilité

+ 6,5

Dotation à la Banque européenne d’investissement

+ 1,6

Versements aux organismes internationaux

+ 0,6

Prêts aux États étrangers

+ 0,4

Prise en compte d’opérations non budgétaires

Reprise de dette de l’EPFR

 4,5

Dépenses d’investissements d’avenir (CDC)

 0,6

Remise de dette – Nouvelle Calédonie

 0,3

 

Solde en comptabilité nationale

– 66,4

Source : d’après rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi.

Habituellement déficitaire, le solde des ODAC serait proche de l’équilibre en 2013 en raison de la reprise de la dette de l’EPFR (41), qui est, en comptabilité nationale, comptabilisée en recette des ODAC et en dépense de l’État. D’un montant de 4,5 milliards d’euros, cette recette purement comptable viendrait compenser le déficit structurel des ODAC, dû en particulier aux investissements d’avenir dont l’impact sur le solde public serait de l’ordre de 3 milliards d’euros.

Le déficit des administrations publiques locales (APUL) passerait de 3,1 milliards d’euros en 2012 à 5 milliards d’euros. Une telle augmentation serait cohérente avec le cycle électoral, qui suppose l’aboutissement des projets d’investissement – donc la hausse des dépenses associées – avant la fin de la mandature au printemps 2014 ainsi qu’une modération des hausses de taux des impôts locaux.

Enfin, en dépit du produit des mesures nouvelles, les administrations de sécurité sociale (ASSO) verraient leur déficit se creuser en 2013 en raison d’une dynamique de dépenses – en particulier les dépenses d’indemnisation du chômage et les dépenses de pensions – supérieure à celle des recettes – assises principalement sur la masse salariale privée qui croîtrait de seulement 1,3 % en 2013. L’écart de 0,5 % du PIB entre la prévision révisée et la prévision de la loi de programmation serait principalement dû à la faiblesse des recettes dans le contexte de faible croissance caractérisant l’année 2013.

 

Prévision pour 2013 associée au présent projet de loi

Prévision pour 2014

Solde structurel

– 2,6

– 1,7

Solde conjoncturel

– 1,4

 1,8

Mesures ponctuelles et temporaires

0

 0,1

Solde effectif

– 4,1

– 3,6

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

Le déficit structurel se réduirait de 0,9 % du PIB en 2014 pour atteindre 1,7 % du PIB.

LA RÉDUCTION DU DÉFICIT STRUCTUREL EN 2013

(en % du PIB)

Solde structurel 2012

– 2,6

Effort structurel

0,9

Dont effort en recettes

0,15

Dont effort en dépense

0,7

Variation non discrétionnaire du solde structurel

0

Solde structurel 2013

– 1,7

Cette évolution serait due, à titre principal, à un effort structurel en dépense de 0,7 % du PIB, qui est détaillé par ailleurs.

L’effort structurel en recettes atteindrait 0,15 % du PIB. Comme indiqué dans l’annexe du présent rapport relative aux prélèvements obligatoires, il suppose d’abord de compenser le manque à gagner net découlant des mesures antérieures et ensuite de dégager pour 2,7 milliards d’euros de ressources supplémentaires.

La variation non discrétionnaire du solde structurel serait nulle. En particulier, l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance serait comprise entre 0,9 et 1. L’élasticité étant prévue à un niveau très proche de l’unité, elle aurait une incidence très limitée sur la variation non discrétionnaire du solde structurel.

En raison d’une croissance du PIB estimée à 0,9 % en 2014, soit un niveau inférieur de 0,6 % du PIB à celui de la croissance potentielle anticipée en 2014, le déficit conjoncturel poursuivrait sa progression pour atteindre 1,8 % du PIB.

Enfin, les mesures ponctuelles et temporaires, correspondant aux versements effectués dans le cadre des contentieux fiscaux, dégraderaient le solde de 0,1 % du PIB du fait des dépenses liées au contentieux OPCVM – 2 milliards d’euros – et de celles liées au contentieux du précompte mobilier – 0,7 milliard d’euros.

Compte tenu de ces éléments et sur la base d’une hypothèse de déficit effectif de 4,1 % du PIB en 2013, le déficit effectif atteindrait 3,6 % du PIB en 2014.

 

LPFP 2012-2017

PSTAB 2013-2017

Prévision associée au présent projet de loi

Solde structurel

– 1,1

– 1

– 1,7

Solde conjoncturel

 1

 1,8

 1,8

Mesures ponctuelles et temporaires

 0,1

 0,1

 0,1

Solde effectif

– 2,2

– 2,9

– 3,6

La prévision de solde effectif se situe à un niveau supérieur à la prévision en raison, à hauteur de 0,6 % du PIB, d’un solde structurel plus élevé que prévu et, à hauteur de 0,8 % du PIB, d’un déficit conjoncturel en creusement, reflétant la faible croissance économique.

La prévision de solde effectif est néanmoins en ligne avec les recommandations des institutions communautaires, faites dans le cadre du « semestre européen », qui demandent une diminution du déficit effectif en deçà du seuil des 3 % du PIB en 2015.

Le solde structurel atteindrait 1,7 % du PIB en 2014 contre 1,1 % du PIB prévu en loi de programmation. Le tableau suivant illustre les écarts entre prévision initiale et prévision révisée des différentes variables influant sur le solde structurel en 2014.

LES PRÉVISIONS SUCCESSIVES DES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DE LA VARIATION DU SOLDE STRUCTUREL EN 2014

(en % du PIB)

 

LPFP 2012-2017

PSTAB 2013-2017

Prévision associée au présent projet de loi

Variation prévue du solde structurel

+ 0,5

+ 1

+ 0,9

Effort structurel

+ 0,5

+ 1

+ 0,9

Dont effort en recettes

– 0,1

+ 0,3

+ 0,15

Dont effort en dépense

+ 0,6

+ 0,6

+ 0,7

Variation non discrétionnaire du solde

0

0

0

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

Plusieurs éléments, non anticipés par la loi de programmation, sont venus accroître le déficit structurel prévu pour 2014 :

– le déficit structurel de 2012 a été supérieur de 0,3 % du PIB aux attentes, ce qui s’est répercuté, par effet base, sur les exercices suivants ;

– la variation non discrétionnaire serait, en cumulé sur les exercices 2012 et 2013, supérieure de 0,2 % du PIB à la prévision, en raison de la très faible élasticité des prélèvements obligatoires prévue en 2013 (évaluée à 0,5) ;

– les efforts structurels de 2012 et 2013 seraient inférieurs, en cumulé, de 0,4 % du PIB aux prévisions (42).

Ces éléments seraient partiellement compensés par un effort structurel de 0,9 % du PIB, supérieur de 0,4 % du PIB à la prévision, détaillé dans les annexes du présent rapport relatives aux dépenses et aux prélèvements obligatoires. Cette accélération de la réduction du déficit structurel, proposée par le Gouvernement, nécessiterait un effort supplémentaire, par rapport à la prévision faite en loi de programmation, de 0,25 % du PIB sur les recettes et de 0,1 % du PIB sur les dépenses.

Enfin, compte tenu des écarts entre prévision et réalité de la croissance du PIB, détaillée dans le tableau suivant, le déficit conjoncturel atteindrait 1,8 % du PIB en 2014, contre 1 % prévu en prévision. Comme l’illustre le tableau suivant, on constate un « manque à gagner en croissance », de l’ordre de 2 % du PIB en cumulé sur les années 2012 à 2014, qui explique le creusement du déficit conjoncturel par rapport à la prévision faite en loi de programmation.

LA PRÉVISION DE CROISSANCE DU PIB

(en % du PIB)

 

2012

2013

2014

Prévision LPFP

0,3

0,8

2

Écart : Réalisation pour 2012 / Prévision actualisée pour 2013 et 2014

0

0,1

0,9

 

Révisé 2013

PLF 2014

Solde public

– 4,1

– 3,6

État

 3,2

 3,2

ODAC

0

0

APUL

 0,2

 0,2

ASSO

 0,7

 0,3

 

LPFP

PSTAB

PLF 2014

Solde public

– 2,2

– 2,9

– 3,6

APUC

 2,1

 2,3

 3,2

APUL

 0,1

 0,2

 0,2

ASSO

0

 0,5

 0,3

Le solde de l’État est présenté dans les observations du rapporteur général sous l’article d’équilibre (article 43 du présent projet de loi de finances).

Estimé, pour 2014, à 82,2 milliards d’euros en comptabilité budgétaire, il ressortirait à 67,2 milliards d’euros en comptabilité nationale en raison des retraitements détaillés dans le tableau suivant.

PRINCIPAUX RETRAITEMENTS PERMETTANT LE CALCUL DU SOLDE DE L’ÉTAT
EN COMPTABILITÉ NATIONALE EN 2013

(en milliards d’euros)

 

Solde en comptabilité budgétaire

– 82,2

Comptabilité en droits constatés

Primes et décotes à l’émission

2,5

Décalage TVA

0,5

Investissement en partenariat public-privé

 0,2

Dépenses de matériels militaires

0,5

Opérations budgétaires traitées en opérations patrimoniales

Dotation au Mécanisme européen de stabilité

3,2

Investissements d’avenir

7,5

Versements aux organismes internationaux

0,6

Prêts aux États étrangers

0,8

 

Dépenses d’investissements d’avenir (CDC)

 0,5

 

Solde en comptabilité nationale

– 67,2

Source : d’après rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi.

Le solde des ODAC serait, en 2014, proche de l’équilibre en dépit d’un déficit structurel dû aux investissements d’avenir, dont l’impact atteindrait 4,5 milliards d’euros. Les ODAC percevraient, en effet, pour 5,5 milliards d’euros de recettes exceptionnelles provenant du deuxième programme d’investissements d’avenir, qui expliqueraient l’absence de déficit en 2014.

Le déficit des administrations publiques locales (APUL) se résorberait en 2014, en passant de 5 milliards d’euros à 3,3 milliards d’euros. En lien avec le cycle électoral, les dépenses d’investissement local seraient en net repli – leur croissance passant de + 2,8 % en 2013 à + 1,2 % en 2014 – et les hausses de taux d’impôts locaux seraient fortement limitées. Leurs ressources seraient, par ailleurs, contraintes par la baisse de 1,5 milliard d’euros des dotations de l’État.

Le déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO) serait en nette baisse en 2014 et atteindrait 0,3 % du PIB. Cette évolution concentrerait la quasi-totalité de la baisse du déficit public en 2014. Elle serait permise par un effort supplémentaire d’économies sur l’ensemble des risques couverts – vieillesse avec la réforme des retraites et l’accord sur les régimes complémentaires, assurance-maladie avec un ONDAM à 2,4 %, famille – ainsi que par les mesures nouvelles en recettes prévues dans le cadre de la réforme des retraites et des économies en matière de prestations familiales.

ANNEXE N° 2 :
LES RECETTES PUBLIQUES EN 2013 ET 2014

 

PLF 2013

Prévision associée au présent projet de loi

Taux de prélèvements obligatoires en 2012

44,9

45

Effort structurel en recettes

1,6

1,5

Effet de l’élasticité

0

– 0,4

Taux de prélèvements obligatoires en 2013

46,3

46

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

L’effort structurel en recettes atteindrait 1,5 % du PIB, contre 1,6 % du PIB prévu initialement (43). Comme indiqué dans l’annexe relative au solde, cette évolution serait liée à deux éléments.

En premier lieu, la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2013, qui a censuré certains dispositifs générateurs de recettes, ainsi que le rendement moindre qu’escompté de la taxe sur les transactions financières entraînerait un manque à gagner de l’ordre de 1,5 milliard d’euros.

En second lieu, une partie du rendement de la barémisation des revenus du capital serait reportée, à hauteur de 0,6 milliard d’euros, sur l’exercice 2014 car les versements effectués au titre du mois de décembre 2013 ne seraient perçus qu’en janvier 2014. Ce dernier élément peut être assimilé à une erreur dans la prévision initiale.

L’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance serait de seulement 0,5, entraînant une baisse d’environ 0,4 % du PIB du taux de prélèvements obligatoires. Cette évolution serait liée à la faiblesse de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les sociétés, que le rapporteur général présente dans ses observations sous l’article d’équilibre du présent projet de loi. Elle serait également due au fait que la masse salariale, sur laquelle est assise la plus grande part des prélèvements affectés à la sécurité sociale, évoluerait moins vite que le PIB.

Comme l’illustre le tableau ci-après, les prélèvements obligatoires passeraient de 46 % en 2013 à 46,1 % en 2014.

TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN 2014

(en % du PIB)

Taux de prélèvements obligatoires en 2013

46

Effort structurel

0,15

Effet de l’élasticité

0

Taux de prélèvements obligatoires en 2014

46,1

L’élasticité des prélèvements à la croissance serait comprise entre 0,9 et l’unité. Aucun rebond des recettes publiques ne serait donc constaté en 2014 du fait de la langueur persistante des impositions assises sur les revenus de 2013 – impôt sur les sociétés et impôt sur le revenu. Cette faiblesse serait toutefois partiellement compensée, selon le Gouvernement, par une hausse des droits de mutation à titre onéreux liée à un pic de transactions immobilières dues aux mesures fiscales proposées en la matière.

L’effort structurel en recettes atteindrait 0,15 % du PIB et serait donc supérieur à l’objectif de – 0,1 % du PIB fixé en loi de programmation en raison de la volonté du Gouvernement d’accélérer en 2014 la réduction du déficit structurel. Cet effort en recettes prévu pour 2014 est détaillé dans la sous-partie suivante.

TOTAL

– 6,4

Mesures prévues par le PLF

– 5,6

Imposition au barème des revenus du capital

– (1)

Prélèvement exceptionnel des entreprises d’assurance

– 0,9

Limitation de la déductibilité des charges financières

– 1,2

Application de la quote-part pour frais et charges sur les plus-values de long terme à la plus-value brute, et non plus nette

– 1

Limitation de l’imputation des déficits (IS)

– 0,5

Réforme du cinquième acompte

– 1

Mesures adoptées dans le cours de la discussion parlementaire

– 0,8

Disparition de la contribution exceptionnelle d’IS (prolongée sur 2013)

– 0,8

(1) Le manque à gagner découlant de la disparition du versement de l’acompte prévu en 2013 s’établit à 1,6 milliard d’euros. Il est partiellement compensé par un montant de 0,6 milliard d’euros correspondant au fait que l’impôt dû au titre de décembre 2013 serait versé en janvier 2014, ce qui réduit le rendement de la mesure en 2013 et l’augmente en 2014.

Ces mesures ponctuelles peuvent être classées en trois catégories différentes.

En premier lieu, certaines tendent à générer, sur un même exercice, un produit correspondant à deux exercices du fait de l’imposition des revenus de deux années successives – « petite rétroactivité » : imposition au barème des revenus du capital, limitation de la déductibilité des charges financières, imposition des plus-values de long terme.

D’autres sont des mesures de trésorerie dont le rendement s’estompe, en tout ou partie, à compter de 2014 – limitation de l’imputation des déficits à l’impôt sur les sociétés, réforme du cinquième acompte.

Les dernières, enfin, sont des impositions ponctuelles qui disparaissent en 2014 - prélèvement sur les entreprises d’assurances, contribution exceptionnelle d’impôt sur les sociétés.

Par ailleurs, pour apprécier l’impact total sur 2014 des mesures antérieures au projet de loi de finances pour 2014, il importe notamment de prendre en compte :

– le rendement net supplémentaire découlant des mesures prévues par la loi de finances rectificative de juillet 2012 – en particulier la montée en charge de la fiscalisation des heures supplémentaires – et par la loi de financement pour 2013 – en particulier la hausse du taux de cotisation à la CNRACL et la montée en charge de la contribution des retraités pour l’autonomie –, soit un produit net estimé à 2,5 milliards d’euros en 2014 ;

– en matière de retraites, le rendement de la hausse des cotisations aux régimes complémentaires de retraites, pour 0,5 milliard d’euros, ainsi qu’un produit de 1 milliard d’euros découlant de la réforme des retraites, correspondant à 2 milliards d’euros de hausse des cotisations retraite et 1 milliard d’euros de baisse des cotisations famille ;

– le coût du crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi (CICE), partiellement compensé par la hausse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), pour un montant net de l’ordre de 4,2 milliards d’euros à ce stade, décomposé en un coût de 9,8 milliards d’euros sur le CICE et un rendement d’environ 5,6 milliards d’euros sur la TVA ;

– enfin, sur les ODAC, la poursuite de la montée en charge de la contribution pour le service public de l’électricité (CSPE), pour 1 milliard d’euros, ainsi que la mise en œuvre de la taxe « poids lourd », pour 0,8 milliard d’euros.

Au total, les mesures antérieures aux textes financiers de l’automne tendraient à diminuer d’environ 5,7 milliards d’euros le niveau des prélèvements obligatoires en 2014, récapitulés dans le tableau suivant.

IMPACT 2014 DES MESURES ANTÉRIEURES AU PLF 2014

(en milliards d’euros)

TOTAL

– 5,7

Dont mesures « one-shot » de la LFI 2013

– 6,4

Dont mesures LFR juillet 2012 et LFSS 2013

+ 2,5

Dont mesures Agirc-Arrco et réforme des retraites

+ 1,5

Dont coût net du CICE

– 4,2

Dont autres

+ 0,9

Source : d’après rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi.

TOTAL

4 780

Imposition directe des ménages

2 997

Indexation du barème de l’impôt sur le revenu et de la taxe d’habitation

– 700

Revalorisation de la décote

– 193

Taxe exceptionnelle sur les hauts revenus

260

Suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité

440

Suppression de l’avantage en faveur des contrats de prévoyance d’entreprise

960

Abaissement du plafond du quotient familial

1 030

Suppression de l’avantage en faveur des majorations de pensions

1 200

Imposition directe des entreprises

1 965

Réforme de l’imposition des plus-values mobilières

– 350

Maintien transitoire de la défiscalisation en faveur des bio-carburants

– 165

Exonération de la contribution sur l’excédent brut d’exploitations des entreprises réalisant moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires

2 480

Fiscalité indirecte

– 182

Abaissement du taux de TVA – logements sociaux

– 355

Réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières

– 215

Abaissement du taux de TVA – entrées dans les salles de cinéma

– 55

Modification du barème du malus automobile

103

Création d’un impôt sur le carbone

340

À ces mesures s’ajouteraient notamment :

– pour 1,8 milliard d’euros de recettes supplémentaires perçues par l’État, résultant de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales – une telle prévision étant fragile du fait de la difficulté à anticiper le rendement de telles mesures ;

– pour 0,8 milliard d’euros de recettes nouvelles prévues en projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le rendement serait réparti entre la sécurité sociale et les ODAC.

Le tableau suivant récapitule les différentes composantes de l’effort structurel en recettes prévu pour 2014.

L’EFFORT STRUCTUREL EN RECETTES EN 2014

(en milliards d’euros)

TOTAL

+ 2,7

Dont mesures antérieures

– 5,7

Dont mesures PLF 2014

+ 5,8 (*)

Dont lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales

+ 1,8

Dont mesures PLFSS

+ 0,8

(*) Cette évaluation diffère de celle du tableau précédent car elle est faite en comptabilité nationale.

Source : d’après rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi.

 

2012

2013 (p)

2014 (p)

LPFP 2012-2017

0,4 % (p)

0,9 %

0,4 %

PLF 2014

1,0 % (r)

1,7 %

0,4 %

Écart prévision actualisée / LPFP

+ 0,6 % (r)

+ 0,8 %

-

Source : INSEE, Comptes nationaux base 2005 (réalisé 2012) et prévisions du Gouvernement (p).

Le taux de dépenses publiques atteindrait 57,1 %, soit un niveau jamais égalé, contre une prévision de 56,9 % dans le programme de stabilité.

TAUX DE DÉPENSES PUBLIQUES

(en % du PIB)

 

2012

2013 (p)

2014 (p)

Prévision actualisée

56,6

57,1

56,7

PSTAB 2013-2017

56,6

56,9

56,4

LPFP 2012-2017

56,3

56,3

55,4

Écart prévision actualisée / PSTAB

0

+ 0,6

+ 0,3

Écart prévision actualisée /LPFP

+ 0,3

+ 0,8

+ 1,3

Deux raisons principales expliquent l’accroissement du taux de dépenses publiques / PIB en 2013 par rapport à la prévision en loi de finances initiale :

● La dégradation de la conjoncture économique par rapport aux prévisions initiales explique l’essentiel de la dérive (+ 0,6 point) :

D’une part, la révision à la baisse de la croissance du PIB (+ 0,8 % en loi de programmation des finances publiques contre + 0,1 % aujourd’hui) conduit à une dégradation mécanique du ratio de dépenses publiques sur PIB par rapport à la prévision ;

D’autre part, la révision à la baisse de l’inflation pèse sur le ratio dépenses publiques sur PIB. En effet, l’inflation était estimée en loi de finances initiale pour 2013 et en loi de programmation des finances publiques à 1,75 %. Elle a ensuite été révisée à 1,2 % dans le programme de stabilité et serait finalement attendue à 0,8 % en exécution. Or, à l’inverse, les dépenses indexées (prestations sociales, retraites…) ont été revalorisées au mois d’avril 2013 sur la base d’un taux de 1,3 % (taux d’inflation prévisionnel de + 1,2 % auquel s’ajoutait + 0,1 % lié au rattrapage d’inflation 2012) alors que l’inflation réelle serait de 0,8 %, ce qui a eu pour effet de majorer artificiellement ces dépenses. Il y aura néanmoins, l’an prochain, un rattrapage mécanique pour « récupérer » ce surcroît de dépense par rapport à l’inflation réelle (44).

● L’émergence de dépenses non prévues au moment du programme de stabilité pour un montant de près de 3 milliards d’euros, soit 0,15 % point de PIB. Ces dépenses sont les suivantes :

– 1,8 milliard d’euros sur le budget rectificatif de l’UE au titre de l’obligation de verser les crédits de paiements correspondant à des autorisations d’engagements contractées sur la période 2007-2013 et systématiquement retardée. Ce versement fait suite à un accord européen décidé après le programme de stabilité et trop tardivement pour être absorbé en gestion par les ministères dont les crédits avaient déjà été délégués ;

– 0,6 milliard d’euros de dépenses correspondant à la reconnaissance d’une dette de l’État au titre des intérêts passés dus à EDF au titre de la CSPE : en pratique, l’État ne devrait pas verser de « crédits » car cette dette devrait être financée via une augmentation de la CSPE. Toutefois, le comptable national a estimé récemment qu’il fallait décompter les intérêts passés comme une dépense en comptabilité budgétaire ;

– 0,3 milliard d’euros d’abandon de créance à l’égard de la Nouvelle-Calédonie décidé récemment ;

– enfin, les dépenses des collectivités locales seraient un peu plus dynamiques que prévu.

● Ces événements ne remettent pas en cause le fait que les dépenses directement maîtrisables seraient bien tenues en 2013 :

– les dépenses sous ONDAM devraient être sous exécutées d’environ 0,5 milliard d’euros selon le comité d’alerte de l’ONDAM ;

– les dépenses de l’État hors dette et pensions sont gelées en valeur et cette norme devrait être respectée en exécution malgré les aléas classiques de fin de gestion liés à certaines dépenses d’intervention ou à des engagements nouveaux du Gouvernement (au titre du plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale par exemple). Les économies constatées en gestion et la réserve de précaution constituée en début d’année (surgel de 2 milliards d’euros compris) devraient permettre de faire face à ces aléas.

– la charge de la dette est révisée à la baisse dans le présent projet de loi de finances pour un montant de 1,2 milliard d’euros (qui s’ajoute à l’économie de 0,7 milliard d’euros déjà anticipée au moment du programme de stabilité) ;

– enfin, les dépenses de pensions seraient révisées à la baisse à hauteur de 1,2 milliard d’euros en raison d’une moindre revalorisation qu'anticipé en loi de finances initiale compte tenu de la révision à la baisse de l'inflation et d’un nombre de nouveaux retraités plus faible que prévu à la LFI (45).

PRÉVISION D’EXÉCUTION DES DÉPENSES DU PÉRIMÈTRE NORMÉ EN 2013

(en millions d’euros)

 

LFI 2013

Prévision 2013

Écart à la norme 2013

Norme "zéro valeur"

279 394

279 394

0

Dette

46 895

44 963

– 1 932

Pensions (État et opérateurs)

45 237

44 083

– 1 154

Dépenses totales*

371 526

368 440

– 3 086

* Hors dépenses exceptionnelles (MES, BEI, budget rectificatif de l’Union européenne et autres dépenses imprévues)

Source : ministère du budget.

● En conclusion, dans la mesure où l’effort structurel en dépense est mesuré par l’écart entre le niveau de dépense réel (+ 1,7 %) et le niveau qui serait constaté si les dépenses croissaient au rythme de la croissance potentielle du PIB en valeur (évaluée à 1,4 % en 2013), il apparaît que l’effort structurel en dépense de 0,4 point visé dans le programme de stabilité ne pourra pas être atteint en 2013.

Le Gouvernement a néanmoins précisé que l’indice de prix du PIB (retenu pour calculer la croissance potentielle du PIB) étant supérieur à l’indice des prix à la consommation hors tabac (retenu pour calculer le montant en valeur des dépenses publiques), cela aurait mécaniquement pour effet d’atténuer la réduction de l’effort structurel en dépense par rapport à la prévision. En effet, bien que la dépense publique en volume progresse de 1,7 % en 2013 lorsqu’elle est déflatée par l’IPC hors tabac (inflation de 0,8 %), son évolution n’est plus que de 0,9 % une fois déflatée par le prix du PIB (qui s’établit à + 1,6 % en 2013), à comparer avec une croissance potentielle de 1,4 % en 2013 (46). Les dépenses représentant environ la moitié du PIB, l’effort structurel en dépense serait d’environ 0,2 point.

En 2014, la progression des dépenses publiques serait divisée par 4, pour s’établir à + 0,4 % conformément à la prévision du programme de stabilité. L’effort structurel en dépense serait de 0,75 point de PIB grâce à la réalisation de 15 milliards d’euros d’économies réparties sur l’ensemble des administrations publiques (voir les annexes relatives à la contribution de chaque sous-secteur d’administration).

En outre, ce ralentissement du rythme de croissance de la dépense publique en 2014 refléterait également le contrecoup liés à la disparition des éléments ponctuels et temporaires constatés en 2013 (deuxième budget rectificatif européen exceptionnel, mécanisme de correction de la surprise d’inflation qui joue sur certaines prestations…), ainsi que le ralentissement de l’investissement local l’année des élections et de celui des prestations chômage en raison de l’amélioration de la situation de l’emploi.

La contribution de chaque sous-secteur d’administration publique au ralentissement de la croissance de la dépense publique serait la suivante :

TAUX DE CROISSANCE EN VOLUME
DES DÉPENSES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

 

2013

2014

Administrations publiques

1,7

0,4

État

0,0

– 0,1

ODAC

0,3

0,1

Administrations de sécurité sociale

1,0

0,4

Administrations locales

0,4

0,0

Les évolutions en euros constants sont déflatées par l’indice des prix à la consommation hors tabac

Source : rapport économique, social et financier annexé au PLF 2014, tome 1, page 75.

Ce ralentissement marqué de la croissance des dépenses publiques permettrait une baisse du taux de dépenses publiques de 57,1 % du PIB en 2013 à 56,7 % en 2014.

Cet objectif ambitieux dépendra toutefois de la capacité de l’État et de ses opérateurs à réduire leurs dépenses conformément aux objectifs fixés dans le présent projet de loi de finances mais il reste surtout conditionné à la bonne volonté des collectivités territoriales de tirer les conséquences de la réduction des concours de l’État pour réduire effectivement leurs dépenses par rapport à 2013 et à l’amélioration de la situation sur le marché du travail en 2014.

*

* *

ANNEXE N° 4 :
LA STABILISATION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT
ET DE SES OPÉRATEURS

● L’article 7 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoit que les effectifs de l’État et de ses opérateurs soient stabilisés sur la période de programmation au niveau autorisé par la loi de finances initiale pour 2012 afin d’accroître les effectifs dans les secteurs jugés prioritaires, en contrepartie d’une réduction des effectifs dans les autres secteurs.

Le projet de loi de finances pour 2014 contribue à cet objectif à travers :

– la création de 8 984 équivalents temps plein (47) dans l’enseignement (dont 150 ETP relevant du budget général et 30 ETP financés par les établissements publics locaux d’enseignement dans les établissements d’enseignement technique agricole) ;

– la création de 405 emplois dans la police (+ 243 ETP) et la gendarmerie (+ 162 ETP) ;

– la création de 590 d’emplois pour les justices judiciaire (+ 555 ETP) et administrative (+ 35 ETP) ;

– 13 123 suppressions d’emplois dans les ministères non prioritaires.

Le solde des créations / suppressions nettes de postes au sein du budget général de l’État en 2014 s’élèverait donc à – 3 174 ETP.

De plus, au sein des opérateurs de l’État, il est prévu :

– la création de 2 000 CDI au sein de Pôle Emploi ;

– la création de 1 000 emplois au sein des Universités ;

– la suppression de 1 229 ETP au sein des autres opérateurs ;

Par conséquent, le solde des créations / suppressions nettes de postes au sein du plafond d’autorisations d’emplois des opérateurs de l’État en 2014 s’élèverait + 1 771 ETP.

● La répartition des créations / suppressions de postes par ministères, selon qu’elles pèsent sur les ministères eux-mêmes ou sur les opérateurs dont ils ont la tutelle est présentée dans le tableau ci-après.

RÉPARTITION DES CRÉATIONS / SUPPRESSIONS DE POSTES ENTRE LES MINISTÈRES
ET LEURS OPÉRATEURS EN 2014

(en ETP)

Schémas d’emplois 2014, en ETP

Ministères (BG)

Opérateurs

Affaires étrangères

– 196

– 9

Affaires sociales et santé

– 223

– 203

Agriculture, agroalimentaire et forêt

– 81

– 238

dont enseignement agricole (y. c. supérieur)

150

 

Culture et communication

– 83

 

Défense

– 7 881

– 59

Écologie, développement durable, énergie

– 522

– 552

Égalité des territoires

– 697

16

Économie et finances

– 2 564

– 70

Éducation nationale

8 804

– 32

Enseignement supérieur et recherche

0

1 000

dont universités et assimilés

 

1 000

Intérieur

– 289

– 7

dont mission sécurité

405

 

Justice

555

– 6

Outre-mer

 

– 3

Redressement productif

– 2

– 5

Services du Premier ministre

142

– 12

dont juridictions administratives

35

 

Sports, jeunesse, éducation populaire et vie associative

 

– 25

Travail, emploi, dialogue social et relations professionnelles

– 137

1 976

dont Pôle emploi

 

2 000

TOTAL

– 3 174

1 771

dont priorités

9 949

3 000

dont hors priorités

– 13 123

– 1 229

Source : Direction du budget.

Au total, 10 979 ETP seront ainsi créés au service des politiques prioritaires de l’enseignement, de la sécurité et de la justice portant à 28 768 ETP (48) le nombre de créations de postes dans ces secteurs depuis la loi de finances initiale pour 2012. En contrepartie, 13 123 ETP seront supprimés dans les autres secteurs portant à 25 421 le nombre de suppressions de postes depuis la loi de finances initiale pour 2012.

Le solde des créations / suppressions nettes de poste depuis la loi de finances initiale pour 2012 s’élèverait donc fin 2014 à + 3 347 ETP.

Comme le montre le tableau ci-après, l’évolution des effectifs de l’État implique une réduction moyenne des postes dans les ministères non prioritaires de – 2,2 % par rapport à leur plafond d’autorisation d’emplois à périmètre courant en 2014 (contre – 2 % en loi de finances initiale pour 2013).

TAUX D’EFFORT DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS PAR MINISTÈRES EN 2014

(en ETP)

Ministères (BG)

PAE 2014
courant

SE 2014

Taux d’effort

Affaires étrangères

14 508

– 196

– 1,4 %

Affaires sociales et santé

10 944

– 223

– 2,0 %

Agriculture, agroalimentaire et forêt

30 938

– 81

– 0,3 %

Enseignement agricole (y. c. supérieur)

17 452

150

0,9 %

Hors enseignement agricole

13 486

– 231

– 1,7 %

Culture et communication

10 878

– 83

– 0,8 %

Défense

275 569

– 7 881

– 2,9 %

Écologie, développement durable, énergie

37 651

– 522

– 1,4 %

Égalité des territoires

13 515

– 697

– 5,2 %

Économie et finances

147 268

– 2 564

– 1,7 %

Éducation nationale

964 374

8 804

0,9 %

Enseignement supérieur et recherche

11 253

0

0,0 %

Intérieur

278 214

– 289

– 0,1 %

Mission sécurité

240 959

405

0,2 %

Hors mission sécurité

37 255

– 694

– 1,9 %

Justice

77 951

555

0,7 %

Outre-mer

5 307

0

0,0 %

Redressement productif

1 267

– 2

– 0,2 %

Services du Premier ministre

9 689

142

1,5 %

Conseil d’État

3 738

35

0,9 %

Travail, emploi, dialogue social et relations professionnelles

9 887

– 137

– 1,4 %

TOTAL

1 899 213

– 3 174

– 0,2 %

HORS PRIORITAIRES

583 486

– 13 123

– 2,2 %

Source : Direction du budget.

TAUX D’EFFORT DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS PAR MINISTÈRES EN 2014

Le rapporteur général observe que le ministère subissant la restriction d’effectifs la plus importante est le ministère de l’Égalité des territoires (5,2 %) même si le nombre de postes supprimés reste d’une ampleur limité (697 ETP).

Le ministère de la Défense, qui reste le plus gros contributeur en nombre de suppressions de postes (– 7 881 ETP), subit proportionnellement une restriction deux fois moins importante (– 2,9 % de ses effectifs).

En outre, s’il est vrai que le ministère des Finances est également un gros contributeur en termes de nombre de postes supprimés (– 2 564 ETP), l’effort qui lui est demandé (– 1,7 %) reste néanmoins inférieur à l’effort moyen sur l’ensemble des ministères non prioritaires.

Il faut enfin souligner l’accroissement des effectifs au sein du service du Premier ministre qui résulte du recrutement de 35 magistrats administratifs supplémentaires dans le cadre de la priorité accordée à la justice, du recrutement de 84 ETP affectés à l’agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d'Information (ANSSI) et du Réseau interministériel de l’État (RIE), du recrutement de 20 ETP au sein de la haute autorité de transparence de la vie publique, du recrutement de 35 ETP au sein de la Cour des comptes et de 7 ETP à la CNIL. En contrepartie, 39 ETP sont supprimés ramenant le solde à 142 créations de postes.

L’effort au sein des opérateurs de l’État non prioritaires, dont les effectifs s’élèveraient à 202 406 ETP en 2014 (– 1 229 ETP), est quant à lui plus limité que l’effort moyen demandé aux ministères (– 0,6 % contre – 2,2 %) et s’avère légèrement inférieur à celui engagé en loi de finances initiale pour 2013 (– 1 303 ETP). Il représente néanmoins une avancée considérable dans le rééquilibrage des efforts entre les services de l’État au sens strict et ses opérateurs puisqu’il faut rappeler qu’entre 2007 et 2012, les effectifs des opérateurs ont progressé de 6 % quand ceux de l’État ont régressé d’autant.

● La traduction de la maîtrise des effectifs est soumise à l’approbation du Parlement dans le cadre du vote sur les plafonds d’autorisation d’emplois.

Compte tenu de cette évolution des effectifs, le plafond des autorisations d’emplois rémunérés par l’État soumis à approbation parlementaire est de 1 906 007 équivalent temps plein travaillés (ETPT) pour 2014, dont 1 894 253 ETPT hors budgets annexes (article 48 du présent projet).

Ce plafond est inférieur de 8 914 ETPT à celui fixé dans la loi de finances initiale pour 2013, et de 1 410 ETPT à périmètre constant (c’est-à-dire hors mesures de transfert, de périmètre et de corrections techniques), comme l’explicite le tableau ci-après.

DU PLAFOND D’EMPLOIS DES MINISTÈRES 2013 AU PLAFOND D’EMPLOIS 2014

(y compris budgets annexes ; en ETPT)

PAE 2013

1 914 921

Solde des créations et suppressions d’emplois

– 1 410

Correction technique du plafond

– 2 582

Transferts et décentralisation

– 4 801

Mesures de périmètre

– 121

PAE 2014

1 906 007

Source : Direction du budget.

Parallèlement, le plafond des autorisations d’emplois rémunérés par les opérateurs de l’État et soumis à approbation parlementaire (article 49 du présent projet) est de 397 770 ETP pour 2014.

Ce plafond est supérieur de 6 169 ETP à celui fixé dans la loi de finances initiale pour 2013, et de 1 771 ETP à périmètre constant (c’est-à-dire hors mesures de transfert, de périmètre et de corrections techniques) comme l’explicite le tableau ci-après.

DU PLAFOND D’EMPLOIS DES OPÉRATEURS 2013 AU PLAFOND D’EMPLOIS 2014

(en ETP)

PAE 2013

385 601

Solde des créations et suppressions d’emplois

+ 1 771

Transferts

+ 4 802

Mesures de périmètre

– 404

PAE 2014

391 770

Source : Direction du budget.

Il convient néanmoins de préciser que les opérateurs ont la possibilité de recruter du personnel en dehors des plafonds d’emplois fixés par la loi dès lors que ceux-ci correspondent à des contrats aidés ou lorsqu’ils sont entièrement financés par des ressources propres. En 2014, la prévision d’emplois hors plafond s’établit à 51 938 ETP, soit une progression de + 2 729 ETP par rapport à 2013 (+ 5,5 %).

Cette progression s’explique en grande partie par des créations d’emplois répondant aux priorités gouvernementales en faveur de l’enseignement (+ 1 418 ETP) ainsi que par la progression des contrats aidés (+ 294 ETP). Cette progression s’explique également par une correction technique de 113 ETP concernant l’office national des forêts qui a conduit à reclasser des contrats d’apprentissage depuis le plafond législatif vers la catégorie de contrats aidés. Au total, il apparaît que 93 % des emplois hors plafond sont concentrés sur quatre missions : Recherche et enseignement supérieur (+ 2 070 ETP, soit 76 % des créations hors plafond (49)), Action extérieure de l’État, Travail et Emploi, et Écologie, développement et mobilité durable.

Enfin, le rapporteur général observe que les plafonds d’autorisations d’emplois des établissements à autonomie financière (EAF) et des autorités publiques indépendantes (API), soumis à autorisation parlementaire aux articles 50 et 51 du présent projet, baissent de 10 % à périmètre constant, contribuant ainsi à l’effort de redressement budgétaire :

– suppression de 36 ETPT au sein des EAF par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 ;

– suppression de 20 ETP au sein des API, principalement en raison d’une baisse des effectifs de 5 % au sein de la Haute autorité de santé (– 17 ETP) et
de – 8,9 % au sein du Médiateur national de l’énergie (– 5 ETP).

*

* *

ANNEXE N° 5 :
LA CONTRIBUTION DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Selon le Gouvernement, les dépenses de l’État, hors charge de la dette et de pensions, baisseront de 1,5 milliard d’euros en 2014, soit une économie de 8,5 milliards d’euros par rapport à la progression tendancielle des dépenses. Cet effort sera réparti en trois tiers, portant respectivement sur :

– les dépenses de fonctionnement de l’État ;

– les dépenses d’interventions et les investissements de l’État (hors PIA) ;

– les moyens que l’État alloue aux collectivités territoriales et à ses opérateurs.

Cette annexe propose dans un premier temps de se concentrer exclusivement sur les économies réalisées par l’État, entendu au sens strict – c’est-à-dire hors évolution des concours aux opérateurs et collectivités territoriales qui sont détaillées dans les annexes n°s 6 et 7. Par rapport à l’évolution tendancielle de ses dépenses, l’État réaliserait 6 milliards d’euros d’économies (A).

Cette annexe propose dans un second temps d’analyser l’évolution des crédits budgétaires soumis à l’approbation du Parlement pour 2014 par rapport aux ouvertures de crédits proposées en loi de finances initiale pour 2013, en distinguant la situation en fonction des différents canaux de la dépense de l’État (budget général, budgets annexes, comptes spéciaux). Il apparaît que ces dépenses baissent globalement d’environ 1,2 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 à périmètre constant (B).

La masse salariale de l’État progresse tendanciellement de 2,2 milliards d’euros par an, soit près de 3 % par an (50), hors contributions au CAS Pensions. Le Gouvernement s’est engagé à limiter cette progression à 1 % au total entre 2012 et 2015, ce qui représente une inflexion très sensible de la tendance. Ceci représente donc une économie de 1,7 milliard d’euros par rapport au tendanciel retenu par le Gouvernement.

En 2014, la masse salariale de l’État ne progresserait que de 0,2 % par rapport à l’exécution 2012. Le montant prévisionnel de la masse salariale de l’État s’élèverait à 81,4 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2014 à périmètre courant (80,6 milliards d’euros à périmètre constant).

Cette prévision de la croissance de la masse salariale inclut en outre le coût résultant de l’abrogation du « jour de carence » dans la fonction publique proposée à l’article 67 du présent projet de loi de finances : ce coût de masse salariale est évalué à 60,8 millions d’euros pour l’État (soit 0,075 %), sans compter les économies générées par l’amélioration du dispositif de contrôle des arrêts maladie proposé par le Gouvernement (51).

Cette prévision est fondée sur :

– la réduction nette des effectifs de l’État de 3 174 ETP (52) ;

– la stabilité du point d’indice de la fonction publique en 2014 ;

– la maîtrise des enveloppes catégorielles, recentrées sur les plus modestes et limitées à 270 millions d’euros en 2014 (contre 550 millions d’euros en moyenne entre 2008 et 2012 et 310 millions d’euros en 2013).

Comme le montre le tableau ci-après, ces enveloppes catégorielles concernent principalement les personnels des ministères de l’éducation nationale (en hausse de 4 % par rapport à la loi de finances pour 2013), de l’intérieur (malgré une baisse de 1,8 %), et de la défense (malgré une baisse de 4 %) ;

MESURES CATÉGORIELLES PRÉVUES PAR MINISTÈRE EN 2014

Ministère

en millions d'euros

en %

Écart à la LFI 2013

BUDGET GÉNÉRAL

 

 

 

Affaires étrangères

3,5

1,3 %

+ 0,2%

Affaires sociales et santé

3,0

1,1 %

– 0,3%

Agriculture, agroalimentaire et forêt

5,0

1,8 %

+ 0,2%

Culture et communication

2,2

0,8 %

+ 0,4%

Défense

41,4

15,1 %

– 4,3%

Écologie, développement durable et énergie

11,1

4,0 %

– 0,2%

Économie et finances

30,5

11,1 %

– 0,3%

Éducation nationale

90,0

32,8 %

+4,0 %

Égalité des territoires et logement

3,9

1,4 %

– 0,1%

Enseignement supérieur et recherche

0,0

0,0 %

0,0 %

Intérieur

60,1

21,9 %

– 1,8%

Justice

9,8

3,6 %

– 0,4%

Outre-mer

0,2

0,1 %

0,0 %

Redressement productif

0,1

0,0 %

0,0 %

Réforme de l'État, décentralisation et fonction publique

0,0

0,0 %

0,0 %

Services du Premier ministre

2,4

0,9 %

+ 0,1 %

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

4,5

1,6 %

+ 0,7 %

Total BUDGET GÉNÉRAL

267,8

97,6 %

– 1,9 %

BUDGETS ANNEXES

 

 

0,0 %

Contrôle et exploitation aériens

6,4

2,3 %

+ 1,9 %

Publications officielles et information administrative

0,1

0,0 %

– 0,1 %

Total BUDGETS ANNEXES

6,5

2,4 %

+ 1,9 %

TOTAL DE L'ÉTAT

274,3

100,0 %

0,0 %

– 150 millions d’euros au titre de la garantie individuelle du pouvoir d’achat contre 70 millions d’euros en 2013 ;

– 80 millions d’euros au titre des mesures bas salaires, comme en 2013 ;

– un GVT solde de 160 millions d’euros (contre 220 millions d’euros en 2013), résultant d’un GVT positif de 1 140 millions d’euros et d’un GVT négatif de 980 millions d’euros ;

– 40 millions d’euros au titre de diverses mesures qui pourraient s’avérer plus coûteuses que prévu (retenues pour grève, jour de carence...), contre 46 millions d’euros en 2013.

Les dépenses de fonctionnement de l’État s’élèvent en loi de finances initiale pour 2013 à 18,9 milliards d’euros et progressent tendanciellement de 0,5 milliard d’euros par an (+ 2,7 %).

Le Gouvernement propose de réaliser 0,9 milliard d’euros d’économies de fonctionnement en 2014 grâce à la recherche permanente de gains d’efficience prévus notamment par PMMS, mis en place dans le cadre de la MAP. Une stabilisation en euros courant des dépenses de fonctionnement des ministères permettrait de réaliser 0,5 milliard d’euros d’économies par rapport à la tendance (– 2,7 %).

Toutefois, il est proposé d’aller au-delà en réalisant 0,4 milliard d’euros d’économies supplémentaires par rapport à 2013 (soit – 2,3 % en euros courants). Les exemples présentés par le Gouvernement permettent d’ores et déjà de documenter 0,383 milliard d’euros d’économies nouvelles et pérennes par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, soit 96 % de l’objectif affiché.

ÉCONOMIES NETTES PRÉVUES SUR LES DÉPENSES DES MINISTÈRES

(en millions d’euros)

Missions

Mesures

Économies

Action extérieure de l'État

Rationalisation et valorisation du parc immobilier

22

Administration générale et territoriale de l'État

Baisse des dépenses de fonctionnement des services centraux et préfectoraux

Dématérialisation de la propagande des élections européennes

7

28

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

Optimisation des dépenses de fonctionnement du ministère

6

Défense

Baisse des dépenses de fonctionnement permise par la rationalisation des structures, l’optimisation de l’organisation et des économies sur les frais de déplacement et la communication

100

Direction de l'action du Gouvernement

Baisse des dépenses de fonctionnement

20

Enseignement scolaire

Baisse des dépenses de fonctionnement de 3 % tout en préservant les dépenses d’assistance éducative

11

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Baisse des dépenses d’entretien immobilier de l’Etat

Baisse de 10 % du fonctionnement courant en administration centrale, cabinet ministériels, (abonnements presse, fournitures…), réduction des budgets de communication et de déplacement,

Dématérialisation progressive des déclarations d’impôts sur le revenu

Rationalisation des impressions des documents budgétaires

35

47

4

1

Justice

Optimisation des frais de justice

45

Recherche et enseignement supérieur

Optimisation des fonctions support de l’administration centrale et de certains opérateurs de la recherche

50

Sécurités

Rationalisation des dépenses de fonctionnement

7

TOTAL

 

383

Source : ministère du budget.

Le terme « interventions » de l’État couvre une très grande variété de dispositifs, de publics bénéficiaires et de modalités de gestion. Comme les facteurs d’évolution et les leviers de réforme ne sont pas les mêmes, l’on distingue traditionnellement au sein de ces dispositifs, les interventions dites de « guichet », qui sont versées automatiquement dès lors que le bénéficiaire répond à des conditions définies par des textes, et les interventions « hors guichet », pour lesquelles le niveau de la dépense peut être piloté de manière discrétionnaire par les services de l’État. Au total, l’on estime la croissance tendancielle des dépenses d’intervention de l’État à + 1,7 milliard d’euros.

En projet de loi de finances pour 2014, les interventions de « guichet » s’élèveraient à 38,9 milliards d’euros. Elles financent essentiellement les minima sociaux (22 milliards d’euros), les régimes spéciaux de retraites (7 milliards d’euros), des compensations d’exonérations de charges sociales (3,5 milliards d’euros), les bourses (2,6 milliards d’euros) et des prestations diverses (3,7 milliards d’euros). Pour la première fois, les dépenses d’intervention de l’État sont détaillées dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2014 (tableau ci-après).

Les dépenses d’intervention « hors guichet » présentent en revanche un caractère discrétionnaire plus fort, permettant un pilotage annuel s’appuyant sur la fixation a priori d’objectifs de réduction de la dépense. Les leviers à activer par les gestionnaires sont très variables, à l’image des dispositifs eux-mêmes (meilleur ciblage, priorisation, recentrage des interventions, amélioration du fonctionnement et accroissement de la productivité des structures financées par l’État, notamment). Ces dépenses d’intervention de l’État, d’un montant de 18,5 milliards d’euros sont stables entre la loi de finances initiale pour 2013 et le projet de loi de finances pour 2014 à périmètre constant.

Comme le rapporteur général l’a mentionné dans le corps du présent rapport, une partie des dépenses d’intervention de « guichet » sont majorées en 2014 dans le cadre des priorités du Gouvernement en faveur des plus modestes et des jeunes. Néanmoins, pour absorber la croissance tendancielle de ces dépenses et faire face aux nouveaux besoins (+ 0,2 milliard d’euros), le Gouvernement propose de réformer les dispositifs les moins efficaces afin de dégager environ 1,9 milliard d’euros d’économies.

Les exemples figurant dans le document de présentation du projet de loi de finances pour 2014 et reproduits ci-après permettent de documenter 1,7 milliard d’euros d’économies nouvelles et pérennes par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, soit 94 % de l’objectif affiché.

LES DÉPENSES D’INTERVENTION DE L’ÉTAT EN PLF 2014

Le Gouvernement évalue la croissance tendancielle des investissements de l’État, hors programme d’investissements d’avenir, à 0,7 milliard d’euros par an. Stabiliser cette dépense en euros courant en 2014 revient donc à réaliser une économie de 0,7 milliard d’euros par rapport à la tendance.

Pour ce faire, le Gouvernement a engagé un processus de décision des investissements publics rénové afin de mettre en œuvre, avec une contre-expertise du commissariat général à l’investissement, le dispositif d’évaluation socio-économique préalable prévu par l’article 17 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

Les premiers résultats sont tangibles puisque, à la suite d’expertise, le Gouvernement a considéré qu’il était justifié d’arrêter certains projets de grands chantiers, qui avaient été lancés mais n’étaient pas financés, comme celui de la Maison de l’histoire par exemple (– 55 millions d’euros).

Le Gouvernement envisage également d’améliorer le pilotage du calendrier de réalisation de la programmation immobilière pénitentiaire sans revenir sur l’objectif de 63 500 places d’une part (– 12 millions d’euros) et de la programmation immobilière du ministère de la Recherche d’autre part
(– 30 millions d’euros).

Il prévoit enfin de renégocier le contrat de concession du Stade de France (– 16 millions d’euros).

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013(p)

Charge de la dette

37,3

37,8

38,4

38,4

39,3

44,3

37,5

40,1

46,3

46,3

45,0

Variation en Mds€

– 0,6

+ 0,5

+ 0,6

+ 0,0

+ 0,9

+ 5,0

– 6,8

+ 2,6

+ 6,1

+ 0,0

– 1,3

Source : lois de règlement, prévision révisée pour 2013.

L’évolution des concours en faveur de l’Union européenne (- 0,3 milliard d’euros)

Pour 2014, la contribution de la France au budget de l’Union européenne est évaluée à 20,1 milliards d’euros, en baisse par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale pour 2013 (20,4 milliards d’euros), et par rapport au montant révisé pour 2013 (22,2 milliards d’euros).

Le budget européen 2014 s’inscrit dans le nouveau cadre financier pluriannuel, sur lequel les vingt-sept chefs d’État et de Gouvernement se sont accordés lors du Conseil européen des 7 et 8 février 2013. Cet accord prévoit des plafonds annuels de crédits de paiement sur la période 2014-2020 pour un montant total de 1 024 milliards d’euros pendant sept ans. Il vise à financer les politiques de l’Union européenne, notamment les politiques en faveur de la recherche et des entreprises, la politique agricole commune, la politique de cohésion et l’action extérieure de l’Union européenne.

Le prélèvement sur recettes est évalué en fonction des prévisions de recettes et de dépenses du budget de l’Union européenne pour 2014 ainsi que du solde du budget européen pour 2013.

S’agissant des recettes, les montants des ressources assises sur la TVA et le revenu national brut ainsi que de la correction britannique de 2013 payée en 2014 reposent sur les données prévisionnelles de la Commission européenne, issues du comité consultatif des ressources propres réuni à Bruxelles en mai 2013.

S’agissant des dépenses, l’estimation est fondée sur les données issues de la position adoptée par le Conseil en juillet 2013 relative au projet de budget de la Commission pour l’année 2014. Cette position limite la hausse des crédits de paiement à 1,6 % par rapport au budget initial de 2013, pour atteindre un montant de 135 milliards d’euros. Le niveau des crédits d’engagement a été fixé à 142,2 milliards d’euros, soit une baisse de 5,7 % par rapport à 2013.

Le Gouvernement indique que, par rapport à l’évolution tendancielle du prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne, le montant prévu en 2014 se traduirait par une économie de 0,3 milliard d’euros.

Aux termes de l’article 44 et de l’état B du présent projet, le montant des crédits bruts ouverts sur le budget général est fixé à 410,5 milliards d’euros d’autorisation d’engagement et à 407,4 milliards d’euros de crédits de paiement.

Hors Remboursements et dégrèvements, l’ensemble des dépenses nettes du budget général de l’État s’élève à 308,6 milliards d’euros en autorisation d’engagement et 305,469 milliards d’euros en crédits de paiement. Dès lors que le montant du PIA 2 s’élève à 11,935 milliards d’euros, les dépenses nettes de l’État hors PIA s’élèvent à 296,954 milliards d’euros.

Ce montant doit être comparé à celui figurant à l’article d’équilibre de la loi de finances initiale pour 2013 qui fixe à 299,320 le montant des dépenses nettes de l’État prévu pour 2013. Il s’ensuit que, hors dépenses d’investissement d’avenir, l’État devrait réduire ses dépenses de – 1,9 % par rapport à l’an passé
(– 3,6 milliards). Compte tenu d’une hypothèse d’inflation de + 1,3 % en 2014, ceci signifie que les dépenses nettes de l’État baisseraient à périmètre courant de
– 3,2 % en volume par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, ce qui ne s’est jamais produit.

À titre d’illustration, l’on peut rappeler que malgré l’effort d’économie de 10 milliards d’euros engagé en loi de finances initiale pour 2013, les dépenses nettes de l’État entre la loi de finances initiale pour 2012 et le projet de loi de finances pour 2013 devaient progresser de 8,7 milliards d’euros (+ 2,97 %), principalement en raison de la contribution de la France au MES (6,5 milliards d’euros) et au capital de la banque européenne d’investissement (1,65 milliard d’euros). Néanmoins, même en déduisant ces dépenses exceptionnelles, les dépenses nettes de l’État en projet de loi de finances pour 2013 s’avéraient encore supérieures de 0,5 milliard d’euros à celles prévues en loi de finances initiale pour 2013 (+ 0,17 %), si bien que, compte tenu d’une hypothèse d’inflation prévisionnelle de 1,75 %, la diminution en volume des dépenses de l’État n’était attendue qu’à hauteur de – 1,59 % (contre – 3,2 % dans le présent projet de loi de finances pour 2014).

L’analyse par titre de l’évolution des dépenses de l’État entre la loi de finances initiale pour 2013 et le projet de loi de finances pour 2014 est rendue mal aisée en raison des dépenses d’investissement d’avenir qui majorent les dépenses de fonctionnement, d’intervention, d’investissement ainsi que les dépenses d’opérations financières pour un montant global de 11,935 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013.

Le tableau présentant l’évolution des dépenses de l’État par titre à périmètre courant en 2013 et 2014 fait partie des informations annexes du projet de loi de finances pour 2014 (53).

Hors PIA 2, l’évolution par titre des dépenses de l’État montre que :

– les dotations aux pouvoirs publics continuent de diminuer de 0,13 % après une baisse de 0,6 % engagée en projet de loi de finances pour 2013, traduisant la volonté du Gouvernement en faveur d’un État exemplaire ;

– les dépenses de personnel connaîtraient une progression de 0,25 % conforme à la cible fixée en loi de programmation des finances publiques.

Entre la loi de finances initiale pour 2012 et le projet de loi de finances pour 2013, la progression des dépenses du titre 2 était attendue à un niveau supérieur (+ 1,79 %), principalement en raison de l’augmentation des dépenses au titre des cotisations et contributions sociales au CAS Pensions (+ 4,9 %). Pour faire face à cette augmentation des dépenses de pensions, il était en revanche prévu de diminuer légèrement les rémunérations d’activité (– 0,03 %) et de baisser franchement les prestations et allocations sociales diverses (– 24 %).

Pour 2014, la répartition de l’effort est nettement plus équilibrée entre les trois composantes des dépenses de personnel comme le montre le tableau suivant.

CRÉDITS DE PAIEMENTS DU TITRE 2 : DÉPENSES DE PERSONNEL

(en milliards d’euros)

 

LFI 2013

PLF 2014

évolution

Dépenses de personnel

120,161

120,461

+ 0,3 %

Rémunérations d’activité

68,301

68,567

+ 0,4 %

Cotisations et contributions sociales

51,108

51,135

+ 0,05 %

Prestations sociales et allocations diverses

0,752

0,758

+ 0,8 %

Source : ministère du budget.

Cette situation s’explique notamment par le fait que les dépenses de pensions seraient inférieures de 1,2 milliard d’euros à la prévision retenue en loi de finances initiale pour 2013 et que les recettes du CAS pensions seraient en revanche supérieures à la prévision si bien que le solde du CAS serait en excédent de 0,4 milliard d’euros. Le Gouvernement a donc décidé de réduire le taux de CAS pensions pour 2014 afin de maintenir le solde positif sans pour autant créer de réserve inutile.

– les dépenses de fonctionnement de l’État, hors Remboursements et dégrèvements et hors PIA 2 imputées sur le titre 3 devraient diminuer en raison de la réduction globale de 2 % des dépenses de fonctionnement des ministères et de la réduction de 1 % des subventions pour charge de service public versées aux opérateurs de l’État

– la charge de la dette en 2014 continue de diminuer (– 0,5 %), et en particulier les intérêts de la dette financière de l’État en raison des très bonnes conditions de financement de la France. Ainsi, alors que la charge de la dette en loi de finances initiale pour 2013 était attendue à 46,895, elle s’établirait en 2014 à 46,654 milliards d’euros, sur la base d’une hypothèse de remontée prudente des taux d’intérêt. Par rapport à la prévision retenue en loi de programmation des finances publiques pour l’annuité 2014 (soit 48,368 milliards d’euros), la charge de la dette serait réduite de 1,7 milliard d’euros. Elle constitue néanmoins le premier poste budgétaire de l’État si on la compare aux dépenses des autres missions hors contributions au CAS Pensions.

– les dépenses d’investissement retracées sur le titre 5 seraient en baisse hors PIA 2 à périmètre courant, pour s’établir autour de 10 milliards d’euros (contre 11 milliards d’euros en loi de finances pour 2013) traduisant les choix du Gouvernement d’arrêter certains grands chantiers et de rationaliser le calendrier des paiements ;

– les dépenses d’intervention hors R&D, retracées sur le titre 6, seraient en baisse de 0,6 % pour s’établir à 165,6 milliards d’euros en crédits de paiement.

– enfin, il convient de souligner la diminution majeure des dépenses d’opérations financières, hors PIA (– 30 %), en raison de la non reconduction des dépenses exceptionnelles liées à la contribution de la France au MES et à la BEI.

La direction générale de l’Aviation civile (DGAC), dont les activités sont financées par le budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA), se distingue des autres administrations par ses activités en grande partie commerciales (prestations de services aux acteurs du transport aérien) principalement financées par des taxes et redevances.

Son budget s’élèvera en 2014 à 2,155 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), contre 2,095 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2013, soit une progression de 2,9 % (contre + 2,6 % entre 2012 et 2013).

En 2014, le BACEA devrait présenter un excédent d’exploitation, évalué à 49,7 millions d’euros, contre un déficit de 21,5 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013. Il résulte essentiellement de la conjonction de trois facteurs :

– la mise en œuvre d’économies en matière de fonctionnement et de dépenses de personnel générant une diminution des dépenses d’exploitation ;

– la dégradation des recettes d’exploitation, principalement des recettes de navigation aérienne ;

– l’ajustement des dotations aux amortissements, qui passe de 192 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013 à 165,5 millions d’euros en projet de loi de finances pour 2014, en raison des retards pris dans l’exécution de la programmation des investissements, suite à la crise et aux mesures de régulation budgétaire associées.

Malgré l’amélioration du résultat d’exploitation, et par conséquent de la capacité d’autofinancement du BACEA, il resterait nécessaire de recourir à l’emprunt pour financer les investissements et équilibrer le budget annexe. L’autorisation d’emprunt inscrite dans le présent projet de loi de finances s’élève ainsi à 267,7 millions d’euros, soit 19,7 millions d’euros de plus qu’en loi de finances pour 2013, et 36,9 millions d’euros de plus que la programmation triennale pour 2014. Cet emprunt doit permettre de financer en priorité l’investissement productif et de rembourser les prêts arrivant à échéance.

Une analyse plus approfondie de l’évolution des crédits du BACEA est présentée dans le rapport spécial de M. Jean-Claude Fruteau (annexe n° 16).

● Les moyens du budget annexe Publications officielles et information administrative diminueraient de 3,3 % en crédits de paiement.

La direction de l’information légale et administrative (DILA), regroupant les anciennes directions de la documentation française et des journaux officiels, dont les activités sont financées par le budget annexe Publications officielles et information administrative, exerce principalement des activités commerciales.

Après une forte progression de ses moyens en loi de finances initiale pour 2013 (+ 16 %), la DILA devrait faire face à une réduction de 3,3 % de ses crédits de paiement en 2014, qui atteindrait 205 millions d’euros (contre 213 millions d’euros en 2013 et 187 millions d’euros en 2012).

Ces réductions de dépenses porteront à hauteur de 5,7 millions d’euros sur le fonctionnement de la DILA sur lequel l’effort d’économies mis en œuvre par la DILA depuis plusieurs exercices budgétaires sera encore accentué en 2014. Elles affecteront l’investissement à hauteur de 6 millions d’euros. Certains nouveaux projets d’évolution prévus sur les bases de données ou applications seront décalés dans le temps.

L’évolution des crédits de ce budget annexe est présentée de manière plus détaillée dans le rapport spécial de Mme Marie-Christine Dalloz (annexe n° 12).

CRÉDITS INITIAUX DES BUDGETS ANNEXES

(hors fonds de concours, en millions d’euros)

 

LFI
2010

LFI
2011

LFI
2012

LFI
2013

PLF 2014

Évolution 2014/2013

Contrôle et exploitation aériens …

1 937,5

1 998,8

2 044,8

2 094,9

2 155,6

+ 2,9 %

Publications officielles et information administrative

192,9

193,2

187,1

212,5

205,2

– 3,4 %

Dépenses totales

2 130,3

2 192,0

2 231,9

2 307,5

2 370,8

+ 2,8 %

Au sens de l’article 20 de la LOLF, les comptes dotés de crédits sont les comptes d’affectation spéciale et les comptes de concours financiers. Leurs crédits pour 2014 sont proposés à l’article 46 et à l’état D du présent projet de loi.

Après avoir été légèrement excédentaire en loi de finances initiale pour 2013 (+ 307 millions d’euros), le solde des comptes spéciaux devrait se creuser de 1 milliard d’euros pour atteindre – 774 millions d’euros en 2014.

Cette dégradation par rapport à la loi de finances pour 2013 résulte :

– du creusement du solde des comptes dotés de crédits – le rétablissement d’un excédent des CAS (+ 495 millions d’euros) n’ayant pas suffi à faire face à un nouveau déficit des comptes de concours financiers (– 1 438 millions d’euros) ;

– et du solde des comptes dotés de découvert que sont les comptes de commerce (+ 117 millions d’euros) et les comptes d’opérations monétaires (+ 52 millions d’euros).

Comme le montre le tableau ci-après, le solde des CAS s’améliore nettement en 2014 passant d’un déficit de – 213 millions d’euros à un excédent de 495 millions d’euros, compte tenu de deux mouvements principaux :

– une dégradation du solde du CAS « Participation de la France au désendettement de la Grèce » (– 0,5 milliard d’euros) conformément à la mise en œuvre pour la période 2013-2020 des engagements pris par la France ;

– une amélioration du solde du CAS « Pensions » (+ 0,1 milliard d’euros) liés à de moindre départs en retraites et des rentrées fiscales plus importantes ;

– une amélioration du solde du CAS « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » (+ 1,1 milliard d’euros), qui avait été ponctuellement déséquilibré en 2013.

OPÉRATIONS DES COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE EN 2012 ET 2013

(en millions d’euros)

 

Recettes

Crédits

Soldes

 

2013

2014

2013

2014

2013

2014

Aide à l’acquisition de véhicules propres

403,6

269,9

403,6

269,9

0

0

Contrôle de la circulation et du stationnement routier

1 417

1 402,4

1 417

1 402,4

0

0

Développement agricole et rural

110,5

125,5

110,5

125,5

0

0

Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

377

377,0

377

377,0

0

0

Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

688

774,0

825

865,8

– 137

– 91,8

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

500

470,0

575

550,0

– 75

– 80

Gestion et valorisation du spectre hertzien

90

11,0

1 157

11,0

– 1 067

0

Participations de la France au désendettement de la Grèce

555,6

399,0

149

500,8

406,6

– 101

Participations financières de l’État

13 140

10 011

13 140

10 011

0

0

Pensions

56 764

57 256

56 105

56 488

659

768

Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs

325

309,0

325

309,0

0

0

Total

74 372

71 406,5

74 585

70 911,3

– 213

495

Le solde des comptes de concours financiers (CCF) se dégrade en revanche nettement en 2014 puisqu’après avoir été prévu en excédent en loi de finances initiale pour 2013 (+ 363 millions d’euros), il présenterait un déficit de – 1,4 milliard d’euros en 2014, principalement en raison :

– d’une dégradation du solde du CCF « Avances aux collectivités territoriales » (– 0,4 milliard d’euros) en raison de la disparition progressive des recettes de taxe professionnelle ;

– d’une dégradation du solde du CCF « Prêts aux États étrangers » en raison du programme prévisionnel d’opérations de refinancement (- 0,4 milliard d’euros) ;

– d’une dégradation du solde du CCF « Prêts et avances aux particuliers ou à des organismes privés » (– 1 milliard d’euros) en raison du décaissement en 2014 de 1 milliard d’euros au titre du deuxième programme d’investissements d’avenir.

OPÉRATIONS DES COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS EN 2013 ET 2014

(en millions d’euros)

 

Recettes

Crédits

Soldes

 

2013

2014

2013

2014

2013

2014

Accords monétaires internationaux

0

0

0

0

0

0

Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

7 505

7 548

7 525

7 542

– 20

+ 6

Avances à l'audiovisuel public

3 397

3 551

3 397

3 551

0

0

Avances aux collectivités territoriales

94 144

98 047

93 406

97 707

+ 738

+ 340

Avances aux organismes de sécurité sociale

9 303

12 692

9 303

12 692

0

0

Prêts à des États étrangers

670

700

1 027

1 493

– 357

– 793

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

12,9

19,3

10,3

1 010,5

+ 2,6

– 990,7

Total

115 033

122 558

114 670

123 996

+ 363

– 1 438

Il convient néanmoins d’analyser ces prévisions avec prudence compte tenu des évolutions possibles en cours d’année, comme le montre la comparaison entre les prévisions et les résultats d’exécution depuis 2008, qui diffèrent très sensiblement pour chacun de ces cinq derniers exercices en particulier s’agissant des crédits.

OPÉRATIONS DES COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

A.– Prévisions des lois de finances initiales

 

Crédits

93 965

99 436

72 153

105 045

106 945

114 670

122 559

Recettes

93 248

98 506

76 623

101 794

102 840

115 033

123 997

Solde

– 718

– 930

+ 4 470

– 3 251

– 4 217

+ 363

– 1 438

B.– Résultats d’exécution

 

Crédits

90 793

105 969

80 035

102 458

99 503

 

Recettes

90 670

95 679

74 063

100 018

98 375

 

Solde

– 123

– 10 290

+ 5 471

– 2 240

– 1 128

 

Les comptes spéciaux dotés de découvert font l’objet de l’article 47 et de l’état E annexé au présent projet, qui détermine la répartition des autorisations de découvert. Seul le découvert fixé pour chacun de ces comptes a un caractère limitatif selon les articles 22 et 23 de la LOLF (54).

Dans le tableau d’équilibre, leurs opérations sont donc décrites par les seules mentions, d’une part, du solde des comptes de commerce et, d’autre part, du solde des comptes d’opérations monétaires.

SOLDES DES COMPTES DOTÉS DE DÉCOUVERT

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution 2014/2013

 

A.– Prévisions des lois de finances initiales

Commerce

+ 18

+ 246

– 32

+ 114

+ 99

+ 117

+ 18 %

Opérations monétaires (a)

+ 82

+ 68

+ 57

+ 68

+ 73

+ 52

– 28 %

 

B.– Résultats d’exécution

Commerce

+ 358

+ 5 471

+ 217

+ 83

Opérations monétaires (a)

+ 60

+ 115

+ 58

+ 69

(a) Le compte Opérations avec le Fonds monétaire international ne fait pas l’objet de prévision en loi de finances

Les autorisations de découvert liées aux opérations des comptes de commerce sont inférieures de 151 millions d’euros à l’an passé en raison de deux mouvements contraires :

– l’augmentation de 99 millions d’euros de l’autorisation de découvert du compte Couverture des risques financiers de l’État (après + 172 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013) compte tenu de l’augmentation des contributions aux opérations de maintien de la paix et de contributions internationales payées en devises couvertes par achats de devises à terme ;

– la non reconduction de l’autorisation de découvert du compte Gestion des actifs carbone d’un montant de 250 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013 en raison de la fin du plan national d’affectation des quotas pour la période 2008-2012.

Les comptes d’opérations monétaires appellent peu de commentaires, dès lors que les mouvements du compte Opérations avec le Fonds monétaire international n’apparaissent qu’en exécution. Leur excédent serait en baisse en 2014, à 52 millions d’euros (contre 73 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013), probablement du fait de moindres recettes liées à l’émission des monnaies métalliques.

*

* *

ANNEXE N° 6 :
LA CONTRIBUTION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT
AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Outre la réduction des effectifs sous plafond des opérateurs de l’État non prioritaires déjà décrite à l’annexe 3, le projet de loi de finances pour 2014 propose, d’une part, de réduire de 1 % en moyenne les subventions pour charges de service public qui leur sont versées (1), et d’autre part, d’exercer une contrainte supplémentaire sur leurs ressources à travers une régulation du produit des taxes qui leur sont affectées ou un prélèvement exceptionnel sur leur fonds de roulement, afin de les inciter à dépenser moins, conformément aux principes posés par l’article 8 de la loi de programmation des finances publiques (2), et aux pistes de réforme évoquées par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) dans son rapport sur la fiscalité affectée en juillet 2013 (3).

Au total, la contribution des opérateurs et agences de l’État au redressement budgétaire s’élèverait à près de 1,2 milliard d’euros en 2014, ce qui représente une réduction moyenne de 4 % des moyens consacrés aux opérateurs non prioritaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2013. La moitié de ces économies serait consacrée au financement des priorités du Gouvernement et l’autre moitié à la réduction nette des dépenses sous le périmètre normé.

Les dotations aux opérateurs, hors Pôle emploi et universités, qui évoluaient tendanciellement de plus de 2 % en moyenne (+ 0,4 milliard d’euros) diminueraient de 1 %, ce qui représenterait 0,6 milliard d’euros d’économies.

Les subventions pour charges de service public (SCSP) s’élèvent en projet de loi de finances pour 2014 à 26,5 milliards d’euros contre 26,1 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2013 (+ 1,5 %). Hors SCSP versées à Pôle Emploi (1,5 milliard d’euros) et aux universités (10,5 milliards d’euros), le montant global des SCSP des opérateurs s’élèverait à 14,5 milliards d’euros.

Les exemples figurant dans le document de présentation du projet de loi de finances pour 2014 et reproduits dans le tableau ci-après permettent de documenter 85 % de l’objectif affiché, soit 504 millions d’euros d’économies.

Ils démontrent également que l’effort est réparti en fonction des capacités contributives et des missions de chaque opérateur et non en fonction d’un « rabot » appliqué aveuglément à tous les opérateurs de l’État, ce qui est de bonne méthode.

ÉCONOMIES PRÉVUES SUR LES DÉPENSES DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT

Missions

Mesures prévues

Montant

Action extérieure de l’État

Diminution globale de 2 % des SCSP versées à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, Campus France et l’Institut français

11,4

Administration générale et territoriale de l’État

Absorption du surcoût lié à la reprise des permis de conduire par l’Agence nationale des titres sécurisés

8,7

Aide publique au développement

Meilleur ciblage des investissements

Réduction de 8 % des moyens dévolus à Canal France et de 5 % au GIP ESTHER

2

1,3

Économie

Réduction de 7 % en moyenne des SCSP dont :

baisse de la rémunération versée à la banque de France

Suppression de l’agence nationale des services à la personne

315

2,8

Enseignement scolaire

Réduction de 4 % des frais de structure des opérateurs (CNED, CERD…)

2

Immigration, asile et intégration

Suppression des doublons dans les dispositifs d’intégration financés par l’État

2

Médias

Réduction de 1 % des SCSP aux opérateurs du secteur et de 25 % de la dotation de Hadopi

38

Outre-Mer

Réduction de 5 % de la SCSP de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité

0,4

Recherche et enseignement supérieur

Réduction de la dotation à l’ANE grâce au recentrage des interventions et une meilleure coordination avec le programme H2020

Effort d’efficience sur la restauration universitaire

81

10

Régimes sociaux de retraite

Révision à la baisse des frais de gestion des régimes spéciaux de retraite (marine, SNCF, mines)

10

Santé

Réduction des dépenses de fonctionnement

10

Sports et Jeunesse

Plan de redressement du CNDS

10

TOTAL

 

504,6

Globalement, les ressources des opérateurs seraient réduites de plus de 10 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 (– 0,54 milliard d’euros), grâce à deux types de mesures :

– l’élargissement du champ du mécanisme de plafonnement des taxes affectées et l’abaissement des plafonds de ressources d’une part (article 31 du projet de loi de finances) ;

– et des prélèvements exceptionnels sur le fonds de roulement de certains opérateurs ou sur les ressources des chambres de commerce et d’industrie d’autre part (articles 32 à 34 du projet de loi de finances).

Dès lors que ces articles sont commentés de façon détaillée dans le tome 2 du présent rapport, le rapporteur général rappellera simplement, dans la présente annexe, les grandes lignes de réforme proposées par le Gouvernement et leur impact financier sur les opérateurs concernés.

Le Gouvernement propose tout d’abord d’abaisser les plafonds de 26 taxes affectées pour un montant global de 431 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 à périmètre constant. Cette baisse est toutefois partiellement compensée par une augmentation globale de 223 millions d’euros des plafonds des taxes affectées à trois opérateurs conformément aux engagements du Gouvernement à leur égard (55). Au total, la réduction nette des plafonds des taxes affectées s’élèverait donc à 208 millions d’euros à périmètre constant. C’est un effort de modération de la dépense des opérateurs par la régulation de leurs ressources trois fois plus important que celui prévu par l’article 12 de la loi de programmation des finances publiques (74 millions d’euros).

Si cela représente une réduction moyenne de 11 % ressources affectées aux opérateurs faisant l’objet d’un écrêtement, cela se traduit en pratique par un effort très différencié selon les opérateurs, comme le montre le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES PLAFONDS DE TAXES AFFECTÉES AUX OPÉRATEURS

Imposition ou ressource affectée

Personne affectataire

Plafond 2013

Mesures 2014

Plafond 2014

Effort 2014/2013

 

Article L. 131-5-1 du code de l’environnement

Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

498 600

– 49 900

448 700

– 10 %

Taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus (art. 1 605 nonies du CGI)

Agence de service et de paiements

20 000

– 5 000

15 000

– 25 %

Article 134 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2008

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

12 500

– 1 250

11 250

– 10 %

Article 12 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine (supprimé)

Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU)

95 000

– 95 000

– 

– 

Article 46 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 (I de l’article 953 du code général des impôts)

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

107 500

– 10 750

96 750

– 10 %

Article 46 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 (IV et V de l’article 953 du code général des impôts)

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

16 100

– 1 610

14 490

– 10 %

Article 135 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS)

43 000

– 4 300

38 700

– 10 %

Article 77 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Association pour le soutien du théâtre privé

9 000

– 1 000

8 000

– 11 %

Article L. 2132-13 du code des transports

Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF)

11 000

– 11 000

0

– 100 %

Imposition ou ressource affectée (suite)

Personne affectataire

Plafond 2013

Mesures 2014

Plafond 2014

Effort 2014/2013

Article 302 bis ZI du code général des impôts (supprimé et rebudgétisé)

Centre des monuments nationaux

8 000

– 3 000

-

-

Article 76 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV)

27 000

– 3 000

24 000

– 11 %

E de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

CETIM, CTI du décolletage, CTI de la construction métallique, CTI aérauliques et thermiques, Institut de soudure

70 200

– 200

70 000

0 %

Taxe additionnelle à la CVAE (Article 1600 du code général des impôts)

Chambres de commerce et d’industrie

819 000

– 100 000

719 000

– 12 %

Taxe additionnelle à la CFE (Article 1601 du code général des impôts)

Chambres de métiers et d’artisanat

280 000

– 35 000

245 000

– 13 %

D de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Comité de développement et de promotion de l’habillement (DEFI)

10 000

– 500

9 500

– 5 %

C de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Francéclat

13 500

– 500

13 000

– 4 %

A de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

CODIFAB ; FCBA ; (CETIM)

16 500

– 2 500

14 000

– 15 %

Article L. 2221-6 du code des transports

Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF)

17 500

- 1 700

15 800

– 10 %

Taxe sur les transactions financières (I de l’article 22 de la LFR 2005)

Fonds de solidarité pour le développement

60 000

+ 40 000

100 000

+ 67 %

Taxe d’abattage (Article 1609 septvicies du CGI) (supprimée)

France Agri Mer

84 000

– 84 000

-

-

Article 75 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

FranceAgriMer

4 500

– 400

4 100

– 9 %

Article L. 642-13 du code rural et de la pêche maritime

Institut national de l’origine et de la qualité (INAO)

6 000

+ 1 000

7 000

+ 17 %

Article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII)

108 000

- 10 000

98 000

– 9 %

Redevances cynégétiques

Office national de la chasse et de la faune sauvage

72 000

– 3 000

69 000

– 4 %

Article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010

Société du Grand Paris (SGP)

168 000

+ 182 000

350 000

+ 108 %

Article L. 4316-3 du code des transports

Voies navigables de France (VNF)

148 600

– 6 000

142 600

– 4 %

TOTAL

 

+ 2 741 800

– 207 910

+ 2 528 890

 

Le Gouvernement propose ensuite d’élargir le champ du plafonnement prévu par l’article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 à trois nouvelles taxes affectées représentant un produit global sous plafond de 283 millions d’euros. Il entend ainsi mettre en œuvre certaines des préconisations du rapport de la mission confiée par le Premier ministre le 23 janvier 2013 au Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) sur les constats, enjeux et réformes des taxes affectés.

Seraient désormais inclus dans le champ de l’article 46 de la loi de finances initiale pour 2012, la majoration de taxe d’aviation civile affectée au Fonds de solidarité pour le développement (+ 210 millions d’euros), le prélèvement exceptionnel transitoire sur les jeux de loterie affecté au Centre national de développement du sport (+ 24 millions d’euros) et la taxe sur les nuisances aériennes affectée aux exploitants privés ou publics d’aérodromes (+ 49 millions d’euros). Le niveau du plafond retenu ne devrait toutefois pas conduire à un écrêtement en 2014 car il correspond globalement au produit prévisionnel attendu, à l’exception du plafond de la taxe sur les nuisances sonores évaluées à 51 millions d’euros en 2014.

Enfin, le Gouvernement propose de procéder à plusieurs prélèvements sur le fonds de roulement d’opérateurs de l’État pour un montant global de 470 millions d’euros dont 210 millions d’euros sur les agences de l’eau (article 32 du PLF), 90 millions d’euros sur le Centre national du cinéma (article 33 du PLF), et 170 millions d’euros sur les chambres de commerce et d’industrie de région (article 34 du PLF), qui s’ajoute, pour ces dernières à la réduction du plafond de leurs taxes affectées (– 100 millions d’euros).

L’impact global de ces mesures sur le champ de la norme de dépenses de l’État, hors charge de la dette et des pensions, s’élèverait donc à 538 millions d’euros à périmètre courant comme le résume le tableau suivant :

Source : Voies et Moyens, tome 1, p ; 136.

En application de l’article 21 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, le Gouvernement a confié au Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) le soin de réaliser un rapport sur les impositions de toute nature affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale. Ce rapport, publié le 4 juillet 2013, devait évaluer le rendement, la pertinence de l’affectation de ces impositions et l’opportunité de réintégrer la ressource correspondante au sein du budget général de l’État.

Ses conclusions principales sont les suivantes (56) :

● La fiscalité affectée, aux contours mal définis, est une pratique ancienne et dérogatoire : faute d’une définition juridique précise, la fiscalité affectée est un phénomène mal connu. Pourtant, elle constitue aujourd’hui une importante catégorie de prélèvements : le CPO décompte, pour l’année 2011, près de 309 taxes affectées d’un rendement agrégé de 112 milliards d’euros (soit 5,2 % du PIB et 13 % des prélèvements obligatoires). En excluant les impôts « sociaux » (CSG, CRDS et forfait social) et les taxes bénéficiant aux collectivités territoriales, le périmètre retenu comprend, pour 2013, 214 taxes affectées à 453 organismes bénéficiaires pour un rendement total de 28 milliards d’euros.

● Afin de clarifier ce concept, le CPO propose une définition « positive » des impositions affectées fondée sur quatre critères simples :

– être juridiquement une imposition de toute nature au sens de l’article 34 de la Constitution, c’est-à-dire un prélèvement obligatoire qui n’ouvre droit ni à une contrepartie équivalente, ni à des prestations sociales ; ou, de manière plus marginale, une contribution rendue obligatoire par un acte législatif ou réglementaire ;

– être affectée à une entité, dotée ou non de la personnalité morale, et non au budget de l’État ;

– financer une mission d’intérêt général ;

– ne pas voir sa suppression ou son remplacement par une dotation budgétaire interdite en application d’une règle constitutionnelle (comme par exemple les ressources affectées aux collectivités territoriales).

● À partir de cette définition, le CPO estime que la fiscalité affectée a connu un développement significatif ces dernières années et se concentre sur un nombre restreint de secteurs d’activités. Il s’agit pour l’essentiel des taxes bénéficiant aux agences de l’État (14,6 milliards d’euros), aux chambres consulaires (1,9 milliard d’euros), aux organismes techniques ou professionnels (1,4 milliard d’euros) et aux dispositifs de solidarité nationale tels que la contribution au service public de l’électricité, le fonds national d’aide au logement ou le fonds national des solidarités actives (10 milliards d’euros).

● Le CPO ajoute que le développement de la fiscalité affectée a fini par créer des difficultés budgétaires et économiques.

Les taxes affectées constituent des prélèvements particulièrement dynamiques : la fiscalité affectée a connu, entre 2007 et 2011, une croissance de 27,6 %, près de quatre fois plus importante que celle de l’ensemble des prélèvements obligatoires (7 %).

En moyenne, le CPO observe une tendance des bénéficiaires de taxes à mener une politique essentiellement pilotée par le niveau de leurs recettes. Ainsi, les dépenses des opérateurs financés par taxes affectées ont augmenté, entre 2007 et 2012, de 4,5 % par an, contre 2,4 % par an pour les opérateurs non financés par taxes affectées et 1,2 % par an pour le budget de l’État.

● Le CPO observe en outre que le foisonnement de taxes affectées semble surtout traduire des phénomènes de débudgétisation afin de contourner les normes de dépenses. Il en déduit que le respect des principes budgétaires et fiscaux fondamentaux doit conduire à réaffirmer le caractère exceptionnel de la fiscalité affectée, sous la forme d’une stratégie de rebudgétisation ambitieuse.

Dans cette attente, les taxes affectées devraient, selon lui, faire l’objet d’un contrôle budgétaire systématique, notamment sous la forme d’une généralisation du plafonnement de leur produit tel qu’il est prévu par l’article 46 de la loi de finances initiale pour 2012.

La collecte devrait être organisée par l’État, sauf lorsque l’affectataire est plus efficient. Dans les cas où une taxe affectée est maintenue, de strictes modalités de contrôle devraient être mises en place.

La suppression de certaines « micro-taxes » à la collecte coûteuse, ou de certaines taxes particulièrement distorsives, pourrait également être envisagée.

À moyen terme, une modification de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) permettrait de mieux encadrer les affectations externes au budget général.

En conclusion, le CPO considère que seules les taxes affectées remplissant l’une des fonctions suivantes seraient justifiées :

– constituer une contrepartie de la production d’un service directement rendu par l’affectataire, sous la forme de droits ou de quasi-redevances. Dans ce cas, le montant de la contribution perçue par l’affectataire doit pouvoir s’apprécier sur des bases objectives ;

– contribuer au financement, au sein d’un secteur d’activité, d’actions de mutualisation ou de solidarités sectorielles. Pour ces affectataires, dont les missions sont éloignées du service public, la contribution n’a pas de logique fiscale et le rôle de l’État n’est pas justifié. Dès lors, une évolution de ces taxes vers une forme de contribution volontaire apparaîtrait souhaitable (Centres techniques industriels et CPDE notamment) ;

– contribuer au financement de fonds d’assurance ou d’indemnisation, pour lesquels la constitution de réserves financières par des cotisants sur une base régulière apparaît nécessaire.

● Dans cette perspective, le CPO recommande la mise en œuvre d’un processus de rebudgétisation suivant un calendrier en deux étapes :

– la première étape consisterait à rebudgétiser rapidement 33 taxes, d’un rendement agrégé total de plus de 2,2 milliards d’euros, et à généraliser le plafonnement de 127 autres taxes pour un enjeu financier représentant 5,9 milliards d’euros ;

– la seconde étape aurait pour objet, à moyen terme, de rebudgétiser 47 taxes supplémentaires, représentant un volume de 20 milliards d’euros, qui, après réforme structurelle, auraient vocation à être remplacées par des dotations budgétaires. Il s’agit de 32 taxes affectées à des agences de l’État (5,6 milliards d’euros), de six taxes affectées à des chambres consulaires (1,9 milliard d’euros), de quatre taxes affectées à des dispositifs de solidarité (6,3 milliards d’euros) et de cinq taxes affectables à un compte spécial du Trésor (6,2 milliards d’euros).

Les autres taxes resteraient affectées mais seraient plafonnées : il s’agit pour l’essentiel des taxes assurantielles ou relevant d’une logique de quasi-redevances (67 taxes, 2 milliards d’euros) et des taxes affectées aux organismes techniques ou professionnels (68 taxes, 1,3 milliard d’euros).

Dans le présent projet de loi de finances, le Gouvernement propose donc de mettre en œuvre plusieurs recommandations du CPO afin de faire contribuer davantage les opérateurs de l’État à l’effort de redressement des comptes publics, que ce soit à travers l’élargissement du plafonnement des taxes affectées ou la rebudgétisation de certaines de ces taxes (articles 31), ou l’instauration de prélèvements sur le fonds de roulement de certains organismes chargés d’une mission de service public (articles 32 à 34).

Le Premier ministre a également indiqué au rapporteur général, dans le courrier qui accompagnait la transmission officielle du rapport du CPO, son souhait que le Parlement se saisisse des propositions de ce rapport.

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* *

ANNEXE N° 7 :
LA CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Le projet de loi de finances pour 2014 met en œuvre les principales conclusions du Pacte de confiance et de responsabilité établi entre l’État et les collectivités territoriales le 16 juillet 2013 (57) .

Les concours financiers de l’État recouvrent des transferts financiers de nature budgétaire différente :

– des prélèvements sur recettes dont le montant total pour 2014 sera de 54,329 milliards d’euros, à périmètre courant contre 55,693 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2013 à périmètre courant ;

– et crédits budgétaires inscrits sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dont le montant pour 2014 est fixé à 2,594 milliards d’euros (hors crédits DGCL et TDIL), en baisse de 5 % par rapport au montant ouvert en loi de finances initiale pour 2013, à périmètre courant.

L’ensemble de ces concours sont inclus dans une enveloppe normée dont le montant (hors DGD formation professionnelle) doit être réduit de 1,5 milliard d’euros en 2014 et de 1,5 milliard d’euros supplémentaires en 2015, conformément à l’article 13 de la loi de programmation des finances publiques, à l’exception :

– du fonds de compensation de la TVA (FCTVA), dont le montant serait en progression de 130 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, pour atteindre 5,758 milliards d’euros ;

– des dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle dont le montant total s’élèverait à 3,860 milliards d’euros comme l’an passé.

Le Gouvernement a choisi d’imputer exclusivement la baisse de 1,5 milliard d’euros prévue pour 2014 sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) et de la répartir entre les collectivités au prorata de leurs recettes totales, conformément aux préconisations du Comité des finances locales, ce qui représente :

– une réduction de 840 millions d’euros des concours de l’État à destination du bloc communal (56 %) ;

– une réduction de 476 millions d’euros des concours de l’État aux départements (32 %) ;

– et une réduction de 184 millions d’euros des concours aux régions (12 %).

L’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales étant commentée de manière détaillée sous les articles 24 à 30 du présent projet de loi de finances, la présente annexe entend simplement remettre en perspective la contribution des collectivités territoriales au redressement budgétaire au regard des autres mesures proposées par le Gouvernement.

Ainsi, la réduction de 1,5 milliard d’euros des concours de l’État ne se traduira pas nécessairement par une réduction à due concurrence des dépenses locales pour au moins deux raisons :

– d’une part, en vertu du principe constitutionnel de libre administration, les collectivités territoriales, qui disposent d’un pouvoir fiscal – notamment les communes et intercommunalités – auront toujours la possibilité d’accroître la pression fiscale pour reconstituer leurs ressources ou s’endetter davantage pour financer des investissements ;

– d’autre part, en vertu du Pacte de confiance et de responsabilité établi entre l’État et les collectivités territoriales, les départements et les régions bénéficieront d’importantes ressources fiscales nouvelles.

En premier lieu, le Gouvernement propose en effet de tirer les conséquences du constat dressé notamment par la Cour des comptes, de l’existence d’un effet ciseau entre les ressources des conseils généraux et les dépenses liées aux trois allocations individuelles de solidarité qui ne cessent de croître dans le contexte économique actuel. Cet effet de ciseaux est renforcé en 2012 du fait de la diminution des DMTO. Les départements bénéficieront donc d’une compensation financière, qui garantira, à compter de 2014, le financement du revenu de solidarité active (RSA), de la prestation compensatoire du handicap (PCH) et de l’allocation pour adultes (APA). L’État transférerait à ce titre, à un fonds de péréquation départemental, la totalité́ des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, évaluée à environ 830 millions d’euros (article 26 du PLF). Il donnerait également aux départements une marge de manœuvre concernant le tarif des droits de mutation à titre onéreux à travers le relèvement de 0,7 point du taux plafond applicable, entre le 1er mars 2014 et le 29 février 2016. Selon l’évaluation préalable annexée au projet de loi de finances, cette mesure pourrait, au maximum, accroître de 930 millions d’euros les ressources fiscales des départements en 2014 (article 58 du PLF).

En second lieu, le Gouvernement propose de renforcer l’autonomie fiscale des régions dans le cadre de la réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Il s’agirait de remplacer la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle, rattachée jusqu’alors à la mission Travail et emploi, par des ressources fiscales dynamiques (article 25).

Cela se traduirait, à hauteur des deux tiers, par un transfert des frais de gestion aujourd’hui perçus par l’État au titre de la taxe d’habitation, de la cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, et pour le tiers restant, par un transfert de fractions supplémentaires de TICPE. Le montant global de ces ressources fiscales est évalué à 901 millions d’euros en 2014 et serait réparti entre les régions au prorata de ce que chaque région perçoit au titre de ses compétences en matière de formation professionnelle et d’apprentissage en 2013. Cette mesure permettrait ainsi d’élever le ratio d’autonomie financière des régions à 57,9 % (soit + 3,6 points).

Selon l’évaluation préalable de l’article 25, cette mesure serait neutre budgétairement en 2014. Toutefois, force est de constater que cette hypothèse dépend fondamentalement de la façon dont évolueront effectivement les composantes du panier de recettes transférées aux régions. Or, si celle-ci conduit les régions à bénéficier de recettes fiscales supérieures à 901 millions d’euros, cette mesure aura nécessairement conduit à une perte de recettes pour l’État, qui ne se serait pas produite si l’on avait maintenu une dotation budgétaire fixe, intégrée au périmètre normé.

Il en résulte que l’accroissement des ressources fiscales des départements et des régions pourrait les conduire, dans une hypothèse maximaliste, à dépenser plus qu’en 2013.

La réduction des concours de l’État aux collectivités territoriales serait donc, in fine, principalement supportée par les communes et les EPCI
(– 840 millions d’euros), sans qu’il puisse être exclu qu’ils augmentent également la pression fiscale sur leur territoire pour ne pas réduire d’autant leurs dépenses. Ce risque demeure néanmoins théorique en 2014 sous l’effet du cycle électoral communal.

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ANNEXE N° 8 :
LA CONTRIBUTION DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE
ET DE L’UNÉDIC AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Les dépenses de Sécurité sociale sont des dépenses courantes : il est injustifié d’en reporter le financement sur les générations futures. Assurer la pérennité de notre système de protection sociale passe par le retour à l’équilibre des comptes sociaux.

Le redressement des comptes sociaux, engagé depuis la loi de finances rectificative d’août 2012, et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ont permis de réduire le déficit de la sécurité sociale (16,2 milliards d’euros pour le régime général et le fonds de solidarité vieillesse (FSV) fin 2013, contre 20,9 milliards d’euros fin 2011) grâce à d’importants efforts de maîtrise des dépenses de santé notamment : 2,4 milliards d’euros d’économies ont été réalisées. Les dépenses de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) seront même inférieures de 500 millions d’euros en exécution 2013.

En 2014, le Gouvernement propose d’accentuer ces efforts de redressement en réalisant près de 6 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de la sphère sociale. Sont ici visées les dépenses mises en œuvre par les organismes de sécurité sociale et par l’Unédic au titre de l’indemnisation chômage. Ces économies reposeraient tout d’abord sur la réforme des retraites des régimes de base et sur celle des retraites complémentaires (– 1,9 milliard d’euros), puis sur les efforts opérés sur le champ des dépenses de l’assurance maladie, avec une progression de l’Ondam limitée à 2,4 %, soit le taux le plus bas proposé au vote depuis 1998 (– 2,9 milliards d’euros). Elles résulteraient enfin d’un effort supplémentaire par rapport aux annonces du Gouvernement à l’occasion du débat d’orientation des finances publiques, portant principalement sur des économies sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale, les prestations familiales et l’assurance chômage (– 1 milliard d’euros).

Le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 18 septembre 2013 (58). Parmi les nombreuses mesures proposées, il prévoit de restaurer l’équilibre du régime général et les régimes alignés à l’horizon 2020, sous réserve des hypothèses de croissance du PIB retenues.

La soutenabilité de notre système de retraite devrait ainsi être assurée par l’allongement de la durée de cotisation, qui permet de réduire les besoins de financement des régimes de retraite de 10,4 milliards d’euros à l’horizon 2040. Cet effort est constitué pour l’essentiel des économies liées au décalage des départs en retraite. La durée d’assurance requise pour liquider une pension sans décote, augmentera donc progressivement d’un trimestre toutes les trois générations. Elle sera ainsi portée de 41,75 ans (génération 1958) à 43 ans (génération 1973).

À court terme, le décalage de six mois de la revalorisation des pensions (du 1er avril au 1er octobre) applicable à tous, à l’exception des retraités les plus modestes ou vulnérables (minimum vieillesse, pensions d’invalidité, allocation supplémentaire d’invalidité et rentes ATMP) permettra de modérer l’évolution des dépenses de pensions, produisant une économie d’environ 800 millions d’euros en 2014.

La réforme du financement des régimes de retraite complémentaire

Les partenaires sociaux ont également pris des décisions visant à réduire le déficit des régimes de retraites complémentaires.

L’accord interprofessionnel du 13 mars 2013 conclu par les partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO prévoit trois mesures qui devraient permettre de réduire de moitié les déficits projetés desdits régimes d’ici à 2020 :

– une augmentation des taux de cotisation contractuels de 0,2 point ;

– une revalorisation des pensions limitée en 2013 à 0,5 % (AGIRC) et 0,8 % (ARRCO) puis à l’évolution de l’inflation moins 1 point en 2014 et 2015 ;

– une valeur d’achat du point suivant les règles de la valeur de service du point en 2014 et 2015.

Cumulées, ces mesures devraient réduire le déficit de 1 milliard d’euros en 2014 et de 4,4 milliards d’euros en 2020.

Note de lecture : sur l’axe de gauche, taux d’évolution de l’ONDAM ; sur l’axe de droite, montant du dépassement de l’ONDAM réalisé par rapport à l’ONDAM voté exprimé en milliard d’euros.

Source : Les chiffres de la sécurité sociale 2012 et le budget de la sécurité sociale 2014 en chiffres.

Cela représente un effort de 2,4 milliards d’euros d’économies par rapport à l’évolution tendancielle sur la période 2002-2011 (+ 4,2 %).

La maîtrise durable des dépenses d’assurance maladie repose exclusivement sur des gains d’efficience : la stratégie nationale de santé, en optimisant le parcours de soins des patients, contribuera à cette logique d’efficience au cœur de l’organisation de notre système de soins.

Comme l’an passé, la maîtrise des dépenses ne reposera donc pas sur des mesures de désengagement de l’assurance-maladie qui se réduiraient à transférer des charges vers les ménages sans maîtriser la dépense globale de santé, au risque de fragiliser l’accès aux soins.

Au contraire, le rapporteur général souhaite rappeler que l’accès aux soins de tous les Français est une des priorités du Gouvernement. Il sera donc amélioré par la généralisation de la couverture complémentaire santé : la régulation des contrats responsables sera renforcée pour en améliorer la qualité et l’accès des plus démunis à la couverture maladie universelle complémentaire ou à l’aide à la complémentaire santé serait facilité (59).

Pour les soins de ville, les mesures d’économie représenteront un montant de 1,76 milliard d’euros. Elles résulteront :

– d’évolutions du prix des médicaments, à hauteur de 870 millions d’euros (optimisation du prix des génériques, convergences de prix au sein du répertoire, baisses de prix de médicaments sous brevet) ;

– d’évolutions du prix des dispositifs médicaux, à hauteur de 70 millions d’euros ;

– d’actions de maîtrise médicalisée des dépenses, visant à une plus juste prescription, à hauteur de 600 millions d’euros ;

– de mesures de baisse tarifaire pour certains professionnels de santé (biologistes, radiologues) à hauteur de 130 millions d’euros ;

– de l’effet sur 2014 de mesures engagées en 2013, à hauteur de 90 millions d’euros.

Pour les établissements de santé, les mesures d’économies représenteront 577 millions d’euros. Elles résulteront :

– d’économies sur les produits de santé de la liste en sus, dont l’évolution en 2013 est particulièrement dynamique, à hauteur de 138 millions d’euros (88 millions d’euros pour les médicaments et 50 millions d’euros pour les dispositifs médicaux) ;

– de mesures d’efficience à l’hôpital, notamment par le biais de la politique des achats et du renforcement de la pertinence des prises en charge.

Enfin, pour le secteur médico-social, un prélèvement de 70 millions d’euros sur les réserves de la CNSA, compte tenu du fonds de roulement prévisionnel de celle-ci à la fin de l’année 2013, permettra de générer une économie du même montant sur le secteur médico-social sans obérer les engagements pris sur le secteur. Ce prélèvement permettra de réduire le taux d’évolution de l’ONDAM médico-social de 3,4 à 3 %.

La reprise en construction de la sous-exécution 2013 permettra en outre de contribuer à hauteur de 500 millions à la maîtrise des dépenses de santé.

Les mesures d’économies proposées par le Gouvernement sont résumées de manière synthétique dans le tableau ci-après.

MESURES D'ÉCONOMIE 2014

(en millions d’euros)

Champ ONDAM

(M€)

Effet report de mesures 2013 (hors baisses de prix de produits de santé)

90

Baisses de tarifs professionnels libéraux (radiologues, biologistes)

130

Actions de maîtrise médicalisée des dépenses

600

Baisses de prix de médicaments (ville et hôpital)

960

dont baisses de prix de médicaments ayant perdu leur brevet

245

dont optimisation de la tarification des génériques

165

dont opérations de convergence de prix dans le répertoire selon les orientations ministérielles

200

dont baisses de prix de médicaments sous brevet

260

dont baisses de prix à l'hôpital

90

Baisses de prix de DM (ville et hôpital)

120

dont ville

70

dont hôpital

50

Efficience à l'hôpital

440

Dont économies relatives aux achats

300

Dont amélioration de l'efficience et de la pertinence des prises en charge

140

Abondement de l'OGD par prélèvement sur les réserves de la CNSA

70

Sous-total « ONDAM à 2,4 % »

2 410

Débasage sous-exécution 2013

500

Total :

2 910

Source : dossier de presse du PLFSS 2014.

Alors que le Gouvernement avait annoncé vouloir réaliser 14 milliards d’euros d’économies au moment du débat d’orientation des finances publiques, il propose désormais d’accroître cet effort d’un milliard d’euros supplémentaires à travers trois mesures :

– une économie de 200 millions d’euros sur les prestations familiales, par une mise à contribution mesurée des familles les plus aisées, pour financer l’augmentation de certaines prestations en faveur des familles les plus modestes ou les plus vulnérables d’une part et contribuer d’autre part au rétablissement de l’équilibre de branche famille (60) ;

– une économie de 500 millions d’euros sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale dans le cadre de la renégociation des conventions d’objectifs et de gestion (COG).

Les COG conclues entre l’État et la sécurité sociale visent à fixer les objectifs stratégiques du service public de la sécurité sociale et les moyens de fonctionnement afférents pour une période de 4 à 5 ans.

Cette ambition serait renforcée via la nouvelle génération de COG, récemment renégociées ou en passe de l’être par la poursuite de la modernisation et de la simplification de l’offre de service en direction des assurés, ainsi que par le renforcement de la maîtrise des coûts des organismes (optimisation des réseaux, des politiques immobilières et des achats,…).

Le rapporteur général observe toutefois que les dépenses de gestion du régime général de la sécurité sociale, hors investissement, s’élèvent à 10,2 milliards d’euros en 2012 et progresse de 1 % chaque année en moyenne, malgré des efforts sur la masse salariale (61). Par conséquent, l’objectif du Gouvernement suppose de réaliser 5 % d’économies nettes en 2014 sur ces dépenses.

Dans le contexte actuel de réformes susceptibles d’accroître le coût de gestion de certaines politiques sociales, comme par exemple le transfert de la gestion du « compte personnel de prévention de la pénibilité » (62) aux caisses nationale d’assurance vieillesse, le rapporteur général considère que l’effort requis auprès des caisses de sécurité sociale, s’il est nécessaire, reste un objectif ambitieux. À titre de comparaison, l’exécution 2012 a montré que les dépenses de fonctionnement de l’État ont diminué de 2,8 % par rapport à 2011. En outre, si l’objectif d’économie brute à réaliser sur les dépenses de fonctionnement des ministères est bien de – 5 % par rapport au tendanciel en 2014, l’économie nette attendue ne s’élève qu’à – 2,3 % par an.

– une économie de 300 millions d’euros sur les dépenses d’indemnisation chômage

Le Gouvernement espère également trouver 300 millions d’euros d’économies sur l’assurance-chômage, à la suite de la discussion par les partenaires sociaux sur le renouvellement de la convention d’assurance-chômage pour la période 2014-2015, qui fixera les conditions d’indemnisation des demandeurs d’emploi. L’objectif d’économie retenu pour 2015, c’est-à-dire en année pleine, est d’un milliard d’euros.

Le rapporteur général observe néanmoins que la réalisation de cet objectif est soumise à plusieurs aléas. D’une part, le principal enjeu sera de financer la création des « droits rechargeables » prévus par la loi sur la sécurisation de l’emploi, dont le coût était évalué de la part de l’Unédic à 750 millions d’euros par an, sans creuser la dette de l’assurance chômage, qui devrait atteindre 18,5 milliards fin 2013 et 24,1 milliards d’euros fin 2014.

D’autre part, la réalisation de cet objectif d’économie dépendra de l’aboutissement des négociations entre les partenaires sociaux et de la date à laquelle la nouvelle convention entrera en vigueur. Or, il semble qu’en raison de l’embouteillage des dossiers sociaux depuis le début de l’année 2013 (accord national interprofessionnel, retraites…), le démarrage des négociations soit déjà repoussé d’octobre à décembre 2013, de sorte qu’une entrée en vigueur en 2014 ne pourrait intervenir qu’après plusieurs mois, limitant l’impact des éventuelles mesures décidées.

*

* *

 

2012

2013

2014

Administrations publiques

– 4,8

– 4,1

– 3,6

Administrations centrales (État + ODAC)

– 4,0

– 3,2

– 3,1

Administrations de sécurité sociale

– 0,6

– 0,7

– 0,3

Administrations locales

– 0,2

– 0,2

– 0,2

Source : rapport économique, social et financier annexé au PLF 2014.

Ce tableau montre une prévision de stabilité du besoin de financement des collectivités territoriales entre 2012 et 2014 limité à – 0,2 point de PIB ; une réduction de celui des administrations sociales en 2014 pour atteindre – 0,3 point de PIB sous l’effet de la poursuite de la maîtrise de la dépense sociale, de l’amélioration de la conjoncture économique et de nouvelles mesures en recettes (après la dégradation constatée en 2013). Enfin, il permet de constater que le besoin de financement de l’État est le principal facteur d’évolution du besoin de financement des administrations publiques étant donné son ampleur. Il mérite donc d’être analysé plus en détail.

Le besoin de financement de l’État serait en hausse de 14,5 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 compte tenu de deux facteurs :

– la dégradation du déficit budgétaire de l’État de près de 10 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, lequel atteindrait donc 71,9 milliards d’euros, pour les raisons exposées précédemment (63) ;

– et l’opération, normalement prévue pour décembre 2013 (sous réserve de l’adoption de la loi de finances rectificative de fin d’année), consistant à reprendre et à amortir immédiatement 4,5 milliards d’euros d’emprunts de l’Établissement public de financement et de restructuration (EPFR). Rappelons à cet égard que l’EPFR a été créé par l’État pour exercer la tutelle du Consortium de réalisation (CDR), qui lui-même avait été créé comme structure de défaisance du Crédit lyonnais, dont il était filiale. L’EPFR a donc souscrit auprès du Crédit Lyonnais un prêt de 130 milliards de francs français, qui devait être remboursé grâce à des cessions d’actifs opérées par le CDR. Celles-ci ayant été insuffisantes, le montant des produits n’a pas permis de couvrir les financements, dont il appartient à l’actionnaire de l’EPFR, c’est-à-dire l’État, de combler. Or, l’EPFR doit faire face à une échéance de dette d’environ 4,5 milliards d’euros en 2014.

Ce besoin supplémentaire devrait être principalement couvert par un léger surcroît d’émissions de BTF (leur part dans la dette totale en fin d’année resterait toutefois stable, à 12 %). Dans une moindre mesure, il devrait être couvert par un volume notable de primes nettes à l’émission, par une contribution positive et non plus négative du solde du compte du Trésor (il n’est plus nécessaire de maintenir aussi haut que prévu ce solde à la fin de l’année 2013 grâce à une diminution de la toute première échéance d’amortissement de 2014) et par l’augmentation des dépôts des correspondants attendue du fait du rapatriement sur le compte de l’État de trésoreries publiques.

L’encours des BTF devrait donc augmenter de 8,1 milliards d’euros, à comparer à la quasi-stabilité prévue en loi de finances initiale. En termes de charge de la dette, ce surcroît d’émissions de BTF aura un impact très limité en 2013 : avec un taux moyen de l’ordre de 0,1 %, 8 milliards d’euros d’émissions supplémentaires réparties sur l’année représentent un supplément de charge de l’ordre de 4 millions d’euros. Mais cette dette supplémentaire devra être refinancée via des titres à moyen/long terme, ce qui pourrait représenter à terme, en supposant que les taux retrouvent leur niveau moyen d’avant crise (4,15 % pour les titres MLT sur la période 1998-2007) une charge annuelle de l’ordre de 350 millions d’euros.

L’évolution du besoin de financement de l’État en 2014 : + 5,7 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 et – 8 milliards d’euros par rapport au révisé 2013

Après consolidation des 12 milliards d’euros de dotations budgétaires sur les comptes destinés au financement de la nouvelle tranche d’investissements d’avenir, le déficit à financer reculerait de 1,7 milliard en 2014, à 70,2 milliards d’euros.

Les amortissements de titres à moyen et long termes seraient légèrement inférieurs à l’an passé (104,8 milliards d’euros contre 106,7 milliards d’euros) ce qui permettrait de contenir à 174 milliards d’euros le programme d’émissions à moyen et long terme en 2014 (contre 169 milliards d’euros en 2013).

TABLEAU DE FINANCEMENT 2013-2014

(en milliards d’euros)

 

2013
Lfi

2013
Révisé

PLF 204

     

Besoin de financement

 

 

 

Amortissement de dette à moyen et long terme

107,9

106,7

104,8

Amortissement de la dette à long terme (nominal)

58,3

57,7

42,2

Amortissement de la dette à moyen terme (nominal)

46,5

46,1

62,6

Suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés)

3,1

2,9

-

Amortissement des autres dettes

1,6

6,1

0,2

Déficit à financer

62,3

71,9

70,2

Déficit budgétaire

62,3

71,9

82,2

Dotation budgétaire du PIA 2

-

-

-12

Autres besoins de trésorerie

Ajustements au titre des opérations sans impact en trésorerie

Décaissements au titre des investissements d’avenir

0,5

-3,1

3,6

1,1

-1,8

2,9

1,8

-2.8

4,6

TOTAL

172,3

185,8

177,0

 

 

 

 

Ressources de financement

 

 

 

Émission de dette à moyen et long terme nette des rachats

170,0

169,0

174,0

Ressources affectées à la CDP et consacrées au désendettement

4,0

0,0

1,5

Variation nette de l'encours des titres d'Etat à court terme

-0,3

8,1

-

Variation des dépôts des correspondants

0,3

2,2

-

Variation du compte du Trésor

-2,5

2,0

1,0

Autres ressources de trésorerie

Suppléments d’indexation perçus à l’émission (titres indexés)

Primes et décotes à l’émission

Profits et pertes sur rachats de titres

0,8

0,8

-

-

4,5

0,5

4,6

-0,6

0,5

TOTAL

172,3

185,8

177,0

Une nouvelle estimation détaillée de la charge de la dette en 2013 sera, comme il est d’usage, présentée dans la loi de finances rectificative présentée en fin d’année. La charge de la dette, imputée au budget général sur le programme 117, devrait être révisée à la baisse par rapport à l’évaluation de la loi de finances initiale (46,9 milliards d’euros), aux alentours de 45,0 milliards d’euros.

Le tableau ci-dessous récapitule, pour la partie prépondérante représentée par la dette négociable (OAT, BTAN et BTF ; donc hors dette non négociable et charges de trésorerie), les écarts par rapport à 2012 et leur décomposition selon les différents facteurs d’évolution de la charge de la dette.

En dehors des ajustements à la marge liés à la révision de la « base » 2012, deux « effets » principaux expliquent la révision à la baisse de 1,9 milliard d’euros de la charge de la dette attendue en 2013 :

– un effet « inflation » encore plus important qu’attendu (– 1,9 milliard d’euros, contre – 0,6 milliards d’euros en loi de finances initiale) du fait du ralentissement sensible de l’inflation en 2013 ;

– un effet « taux » pour les BTF proche de zéro (contre + 0,7 milliard d’euros en loi de finances initiale) du fait du maintien des taux courts à très bas niveau (une remontée était anticipée en loi de finances initiale).

FACTEURS D’ÉVOLUTION DE LA CHARGE DE LA DETTE EN 2013

 

LFI 2013

Révisé 2013

Charge nette de la dette négociable (OAT, BTAN et BTF)
2013
variation par rapport à 2012 (45,2 milliards d’euros)


45,7
+ 0,5


43,8
– 1,4

Effet « volume »
dette moyen/long terme (OAT et BTAN)
dette court terme (BTF)


+2,1
– 0,1


+2,0
0,0

Effet « taux »
dette moyen/long terme (OAT et BTAN)
dette court terme (BTF)


– 1,6
+ 0,7


– 1,6
0,0

Effet « inflation »

– 0,6

– 1,9

Effet « calendaire »

0,0

+ 0,1

Nota : les écarts observés pour les effets « volume » et « calendaire » sont faibles et donc peu significatifs à ce stade (ils peuvent encore changer en exécution).

Source : Agence France Trésor.

● L’évolution de la charge de la dette en 2014

En 2014, la charge de la dette (hors trésorerie) atteindrait 45,7 milliards d’euros, soit à peine 0,3 milliard d’euros de plus que la charge enregistrée en 2012 compte tenu :

– d’un effet « volume » restant défavorable (+ 1,3 milliard d’euros), concentré sur la dette à moyen et long terme et lié à la progression de l’encours (l’encours des BTF devrait, quant à lui, rester quasiment stable) ;

– un effet « taux » toujours favorable (– 0,9 milliard d’euros), mais moins qu’en 2013, le gain supplémentaire attendu sur la dette à moyen et long terme (impact différé des très faibles taux faciaux des titres créés en 2013, en particulier) étant en partie compensé par la remontée attendue des taux courts ;

– un effet « inflation » défavorable (+ 1 milliard d’euros), en lien avec le retour attendu de l’inflation à un niveau moins inhabituel que celui de 2013 (1,3 % au lieu de 0,9 % en 2013).

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

+ 4,6

+ 59

+ 107

+ 174

+ 98

+ 126

+ 117

+ 100

+ 80

L’augmentation de la dette négociable de l’État constitue le principal facteur d’évolution de la dette publique en 2013 (+ 73,3 milliards d’euros) et en 2014 (+ 70 milliards d’euros).

● L’évolution de la dette publique en 2013

En 2013, l’augmentation de l’endettement public serait moins élevée qu’en 2012 (+ 3,2 points de PIB, portant la dette publique au sens de Maastricht à 93,4 % du PIB).

Ce ralentissement serait imputable à la baisse du déficit public (passant de 4,8 % du PIB en 2012 à 4,1 % du PIB en 2013) ainsi qu’à des flux de créances (64) légèrement plus faibles avec principalement une moindre contribution du soutien à la zone euro (+ 0,7 point de PIB après + 0,9 point de PIB en 2012).

Avec une croissance nominale de l’activité légèrement supérieure (croissance du PIB en valeur de 1,8 % en 2013, contre 1,5 % en 2012), le solde stabilisant la dette diminuerait quelque peu mais resterait relativement élevé
(– 1,6 % du PIB). Néanmoins, la baisse du déficit public permettrait de réduire l’écart du solde public au solde stabilisant la dette (2,5 % du PIB, contre 3,5 % en 2012) comme le montre le tableau ci-après.

La variation de la dette publique (+ 3,2 points de PIB) serait imputable essentiellement aux administrations publiques centrales (à hauteur de 2,6 points de PIB), du fait d’un besoin de financement de l’État relativement important au regard du solde stabilisant, associé à des flux de créances portés par le soutien à la zone euro. Les autres sous-secteurs y contribueraient essentiellement via leur besoin de financement.

● L’évolution de la dette publique en 2014 

En 2014, la dette passerait de 93,4 % à 95,1 % du PIB. Cette augmentation de 1,7 point de PIB, sensiblement inférieure à celle de l’année précédente serait le résultat d’un écart au solde stabilisant beaucoup plus faible, ainsi qu’à des flux de créances anticipés faibles (0,2 point de PIB). En effet, la reprise de l’activité (2,3 % de croissance nominale, contre 1,8 % en 2013) permettrait une baisse importante du solde stabilisant (– 2,1 % du PIB, contre – 1,6 % en 2013). Cette augmentation serait essentiellement imputable à l’État qui présente un besoin de financement équivalent à celui de 2013.

Source : rapport économique, social et financier annexé au PLF 2014.

Hors engagements européens, la dette publique en France s’élèverait à 91,8 % du PIB en 2014. Au total, l’ensemble des soutiens financiers de la France augmenterait la dette publique de 68,7 milliards d’euros soit 3,3 % du PIB environ, comme le récapitule le tableau ci-après.

ESTIMATION D’IMPACT CUMULÉ SUR LA DETTE AU SENS DE MAASTRICHT

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

 

4,4

14,5

48,1

62,5

68,7

68,7

67,5

67,5

Impact cumulé des programmes (hors MES)

4,4

14,5

41,6

49,5

52,4

52,4

51,2

51,2

dont Grèce (prêts bilatéraux)

4,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

dont Grèce via le FESF

   

23,6

29,1

31,6

31,6

31,6

31,6

dont Irlande via le FESF

 

1,6

2,6

3,8

3,8

3,8

3,1

3,1

dont Portugal via le FESF

 

1,5

4,0

5,1

5,6

5,6

5,1

5,1

dont capitalisation du MES

   

6,5

13,0

16,3

16,3

16,3

16,3

À l’instar de la mise en place du PIA 1, le projet de loi de finances pour 2014 propose de créer 14 programmes budgétaires spécifiques dédiés au financement des investissements d’avenir, dont 13 sont inscrits au sein des missions traditionnelles du budget général (État B) et 1 au sein de la mission Prêts et avances à des organismes publics et privés, qui est un compte de concours financiers (État C).

Le Gouvernement fait expressément le choix, dans l’exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2014, de ne pas compter dans la norme d’évolution des dépenses de l’État celles liées à la mise en œuvre des investissements d’avenir. Deux raisons majeures expliquent ce choix :

– d’une part, le caractère exceptionnel de ces crédits (12 milliards d’euros soit plus de 4 % des dépenses nettes de l’État en 2014) ; les programmes budgétaires sur lesquels sont inscrits ces crédits sont d’ailleurs créés pour la seule année 2014 afin de permettre le versement des fonds aux opérateurs chargés de la mise en œuvre du PIA, en vertu des conventions qui seront signées avec l’État en 2014 ;

– d’autre part, la nécessité de « sanctuariser » ces crédits aux seules fins de l’investissement. L’objectif est en effet d’éviter que des crédits destinés à l’investissement dans la recherche et l’innovation pour améliorer la compétitivité française, ne soient utilisés pour compenser des dérapages de dépenses de l’État, qu’il s’agisse de dépenses de fonctionnement ou de dépenses d’intervention, par le « jeu des vases communiquant » applicable au sein de la norme de dépense. Le transfert de la totalité des crédits aux opérateurs chargés de la mise en œuvre du PIA répond à l’objectif du Gouvernement d’assurer l’étanchéité et l’efficacité de ces dépenses d’investissement.

Le rapporteur général respecte ce choix, qui ne doit toutefois pas l’empêcher d’évaluer chaque année l’évolution de l’ensemble des dépenses de l’État dans le cadre de l’agrégat élargi qu’il a proposé au Gouvernement à l’occasion de son rapport sur le projet de loi de règlement 2012 et qui tient compte des décaissements annuels des dotations consommables ainsi que du montant annuel des intérêts versés au titre du PIA (65).

72,5 % des dépenses du PIA 2, soit 8,7 milliards d’euros, seraient destinés à financer la formation d’actifs financiers ayant vocation à générer des revenus pour la puissance publique, le solde (3,3 milliards d’euros) étant versé sous forme de subventions – assimilable à une dépense budgétaire classique.

La notion d’actifs peut recouvrir plusieurs sortes de marchandises. Dans le cadre du présent plan d’investissement, elle recoupe en effet quatre réalités différentes :

● la constitution d’actifs « non consomptibles » pour un montant de 3,3 milliards d’euros. Elle assure la sécurisation, sur longue période, d’une source de revenus réguliers pour les opérateurs qui en bénéficient (universités, centres de recherche publique), puisque les fonds sont conservés sur un compte du Trésor et produit des intérêts annuels qui leur sont reversés. L’actif est caractérisé par un risque nul, accompagné d’une rémunération nulle pour les administrations publiques – hormis l’économie réalisée par l’État du fait de la diminution de son besoin de trésorerie.

● Environ 4,8 milliards d’euros seraient affectés à la constitution d’actifs utilisés comme outils d’intervention publique. Ce montant reste toutefois indicatif, car plusieurs actions pourront être mises en œuvre par ce biais mais également par l’octroi de subventions, une telle ventilation étant laissée à l’appréciation de l’administration et des opérateurs. Ces actifs se distingueraient entre eux par leur nature et par le risque porté par la puissance publique :

– les prêts ou les garanties de prêts – environ 1 milliard d’euros à destination des PME – apparaissent comme les actifs les plus sûrs. Le remboursement et la rémunération de la puissance publique sont, en principe, garantis. Le risque porté est celui du défaut de l’entreprise ;

– les prises de participation – environ 1,7 milliard d’euros – apparaissent plus risquées. Au-delà du fait que, en cas de faillite, l’actionnaire est remboursé après tous les créanciers, ce mode d’action publique serait concentré sur des petites entreprises récemment créées ou sur des entreprises dont les projets ne trouvent pas de financement privé. Le fonds national d’innovation par exemple correspond à cette modalité d’intervention. À noter que, en l’état des informations disponibles, il semble difficile d’apprécier l’appartenance des futures sociétés de valorisation de la recherche publique au secteur marchand et donc leur capacité à générer des dividendes. Dans ce cas, la limite entre la constitution d’actif et la dépense classique semble ténue ;

– les avances remboursables – de l’ordre de 2,1 milliards d’euros – seraient les actifs le plus risqués. En effet, leur remboursement et, à plus forte raison, la rémunération qui pourrait être perçue par l’État – royalties sur les ventes générées par le produit par exemple – seraient conditionnés, par exemple, à la réussite du projet. Le risque porté par la puissance publique est donc celui du projet – et non le risque de défaut de l’entreprise comme dans le cas d’un prêt. Les objectifs de remboursement, qui reflètent le risque associé à ces actifs, ne sont toutefois pas précisés dans les documents budgétaires associés au PIA 2.

Une telle approche, déjà mise en œuvre dans le cadre du PIA 1, tend à préserver les intérêts financiers de l’État et à permettre une sélection adéquate des projets à financer.

Les montants mentionnés ci-dessus doivent toutefois être pris avec prudence pour deux raisons. D’une part, la ventilation exacte entre les différents types de dépenses sera décidée en exécution – dans les conventions liant les opérateurs à l’État ou dans les cahiers des charges définis par le Premier ministre – et non dans le présent projet de loi. D’autre part, au sens de la comptabilité maastrichtienne, la distinction entre actifs et dépenses est faite selon la réalité économique de l’opération – l’État se comporte-t-il en « investisseur avisé » ? – et non selon la forme qu’elle emprunte – prêt, prise de participation… Or, l’estimation indiquée ci-dessus se fonde uniquement sur ce dernier critère. L’évaluation de la part exacte des actifs constitués par le présent plan d’investissement ne pourra donc être réalisée qu’une fois connus précisément les projets financés.

En tout état de cause, les objectifs poursuivis par chaque catégorie d’actifs contribuent à la bonne gestion du plan d’investissement. En effet, l’intéressement de la puissance publique à la réussite des projets, via l’octroi de prêts, la prise de participation ou le financement de démonstrateurs, semble constituer une garantie de la bonne utilisation des fonds, c’est-à-dire de leur orientation vers des projets économiquement viables. Le soutien de l’État à des projets industriels a pu, par le passé, se traduire par des échecs, du fait notamment du manque de débouchés commerciaux. L’attente d’un retour financier pour la sphère publique semble constituer une modalité d’action propre à éviter la dilapidation de l’argent public.

Au-delà de la question de la constitution d’actifs et de la rentabilité financière des opérations financées par l’État, les gains financiers que la puissance publique pourrait retirer de ce plan d’investissement s’apprécient surtout sur le long terme et dépendent de la réussite des projets d’innovation qui seront menés. Celle-ci dépend, en tout premier lieu, du mode de sélection des projets et du suivi de leur mise en œuvre.

Le caractère pluriannuel de l’effort d’investissement public est une condition de la réussite du PIA. Il est tout d’abord garanti par la nature des dépenses provenant du placement d’actifs mais également par le mode de gouvernance choisi, et dont les principales caractéristiques sont les suivantes :

– octroi de la totalité des crédits ouverts en projet de loi de finances pour 2014 à des opérateurs de l’État, chargés de mettre en place des procédures d’appels à projets pour sélectionner les meilleurs projets innovants, au terme d’une analyse indépendante menée par un collège d’experts internationaux. Ces derniers devront notamment rechercher les co-investissements avec effet de levier sur les investissements privés, pour permettre l’optimisation du retour sur investissement pour l’État et la collectivité en termes d’activité, d’environnement, d’emplois… La qualité de la procédure de sélection des projets sera garantie par le CGI et le choix du projet relèvera toujours du Premier ministre, sur avis du CGI ;

– obligation de conclure une convention entre l’État et les opérateurs chargés de la gestion des fonds, précisant notamment le calendrier de décaissements des fonds, les indicateurs de performance ainsi que les conditions du retour sur investissement pour l’État ;

– obligation pour certains opérateurs de déposer les fonds qui leur sont délégués sur un compte du Trésor, ce qui permet d’améliorer d’autant la trésorerie de l’État.

La reconduction de ce mode de gouvernance atypique de la dépense publique se justifie d’abord par le fait qu’elle semble avoir démontré son efficacité et parce qu’elle permet à l’État d’assurer une continuité avec les redéploiements du PIA 1 engagés depuis le 21 janvier 2013.

Il ressort en effet du rapport annuel 2013 établi par le comité de surveillance des investissements d’avenir que les résultats attendus sont désormais presque atteints, malgré des débuts plutôt difficiles.

Le rapporteur général entend enfin souligner que quelques ajustements sont introduits par l’article 42 du projet de loi de finances par rapport au mode de gouvernance applicable au PIA 1 :

– d’une part, désormais tous les opérateurs sont soumis à l’obligation de déposer les fonds qui leur sont délégués sur un compte du Trésor, ce qui permet d’améliorer d’autant la trésorerie de l’État et de réduire, en conséquence, ses émissions de dette et – par tant – la charge des intérêts annuels de la dette ;

– d’autre part, la durée maximale prévue pour les conventions conclues entre l’État et les organismes gestionnaires des fonds est portée de 10 à 15 ans pour les deux PIA. Cet allongement est nécessaire pour permettre que les crédits portés par le PIA 2 puissent abonder des actions reposant sur des conventions déjà conclues au titre du PIA 1 ;

– enfin, il est évidemment prévu d’adapter le périmètre de l’annexe « jaune » du projet de loi de finances concernant les investissements d’avenir ainsi que la période pendant laquelle le rapport sur la mise en œuvre du PIA sera présenté, afin d’inclure les actions du PIA 2 et permettre ainsi au Parlement d’exercer sa vigilance sur l’utilisation de l’ensemble des dépenses des deux PIA, passées et à venir. Le rapporteur général souligne à cet égard la nécessité de préciser dans le prochain « jaune » les critères d’éco-conditionnalité qui seront retenues par le CGI pour mettre en œuvre l’engagement du Premier ministre de consacrer plus de 50 % du PIA 2 à des projets consacrés à la transition écologique et énergétique.

Prévu à 70,2 milliards d’euros en 2014, le déficit de l’État en comptabilité budgétaire s’établirait, après prise en compte de l’ouverture de crédits au titre du PIA 2, à 82,2 milliards d’euros. Les investissements d’avenir ont donc un impact immédiat sur le déficit budgétaire en 2014.

Néanmoins, l’impact des investissements d’avenir sur le déficit doit s’apprécier au regard des règles de la comptabilité nationale, et non de la comptabilité budgétaire, car une grande part de ces dépenses a vocation à constituer des actifs et à être exécutée sur plusieurs années. Ces deux caractéristiques tendent à la fois à minorer l’impact du plan d’investissement sur le déficit en comptabilité nationale et à l’étaler dans le temps.

Alors que la comptabilité budgétaire est une comptabilité de caisse, la comptabilité nationale, en droits constatés se fixe notamment pour objectif d’estimer l’appauvrissement ou l’enrichissement de l’État. Les différences de solde entre la comptabilité nationale et la comptabilité budgétaire s’expliquent par :

– les corrections des droits constatés qui visent à rattacher les flux financiers à l’exercice auxquels ils se rapportent ; ces corrections portent, par exemple, sur les impôts qui sont recouvrés et/ou remboursés plus tard que la période à laquelle ils se rapportent ou sur des dépenses dues au titre d’années précédentes, comme les remboursements de dettes dus par l’État à la sécurité sociale ;

– les retraitements des opérations budgétaires en « opérations financières » : la comptabilité nationale retraçant les flux, toute recette ou dépense budgétaire qui engendre une augmentation de l’actif ou du passif est annulée ; c’est le cas par exemple des recettes de privatisation, des rachats de dettes ou des dépenses affectées à la constitution d’un actif ;

– la prise en compte des opérations réelles du Trésor : ce sont les opérations sans contrepartie budgétaire qui se traduisent par une augmentation du passif ou de l’actif ; c’est le cas par exemple des remises de dettes.

La comptabilité maastrichtienne reprend les principes de la comptabilité nationale, qu’elle complète par des retraitements relatifs aux opérations de gestion active de la dette.

Les retraitements des opérations budgétaires en opérations financières et l’application des corrections en droits constatés ont des conséquences non négligeables quant à l’impact des investissements d’avenir sur le déficit en comptabilité nationale. La dégradation du solde serait en effet réduite substantiellement et est estimée à 6 milliards d’euros entre 2014 et 2017, soit un montant annuel moyen de l’ordre de 1,5 milliard d’euros (1,7 milliard d’euros en 2014, soit à moins de 0,1 % de PIB).

● En premier lieu, du fait du retraitement en opérations financières des dépenses conduisant à la constitution d’actifs, au moins 72,5 % des crédits mobilisés dans le cadre du présent plan d’investissement n’auraient pas d’impact sur le solde au sens de la comptabilité nationale. Les dotations non consomptibles – environ 3,3 milliards d’euros – ainsi que les prêts et prises de participations – de l’ordre de 2,7 milliards d’euros – ne constitueraient pas un appauvrissement de l’État. L’impact des avances remboursables serait, en revanche, plus incertain car leur remboursement est soumis à conditions – par exemple, la réussite d’un projet d’innovation. D’après les informations transmises au rapporteur général, la qualification de ces dépenses, dont le montant est estimé à 2,1 milliards d’euros, serait appréciée au cas par cas, en fonction des conditions encadrant leur remboursement.

En conséquence, seules les subventions, d’un montant de 3,3 milliards d’euros ainsi que les dépenses liées à la rémunération par l’État des dotations non consommables – non prises en comptes dans la norme de dépense –, dégraderaient de façon certaine le déficit au sens de la comptabilité nationale. L’impact total des investissements d’avenir sur le solde serait ainsi compris entre 3,3 et 5,5 milliards d’euros, soit 28 % à 45 % du montant total du plan, selon le mode de comptabilisation des avances remboursables et le montant annuel de la rémunération versée par l’État.

Cette évaluation repose toutefois sur l’hypothèse selon laquelle l’État se comporterait en investisseur avisé attendant un retour financier de son investissement pour l’ensemble des actifs constitués au titre du PIA – seul critère pris en considération en comptabilité nationale pour échapper à sa comptabilisation dans le déficit public.

● En second lieu, le principe de comptabilisation en droits constatés tend à étaler la prise en compte des dépenses sur plusieurs années car elles doivent être comptabilisées sur l’exercice où elles sont effectivement dépensées. L’administration ne dispose pas d’un schéma précis de consommation des crédits par les opérateurs, ce qui s’expliquerait par l’incertitude inhérente au financement de projets. L’hypothèse sur laquelle elle s’est fondée pour calculer l’impact annuel de ces dépenses est une consommation linéaire étalée sur quatre ans.

Sur cette base, le solde serait dégradé de 1,5 milliard d’euros par an en moyenne. Cette évaluation neutralise l’impact des gains ou coûts tirés des actifs car elle ne prend en compte ni les éventuels retours financiers des investissements réalisés par l’État ni les pertes qui pourraient être constatées du fait de dépréciations d’actifs.

Cette prévision demeure soumise à de nombreux aléas, liés notamment aux délais de contractualisation entre les opérateurs et les bénéficiaires finaux. Elle permet tout de même d’estimer l’impact des investissements d’avenir sur les finances publiques.

Par prudence, il n’a pas été tenu compte à ce stade d’éventuelles recettes générées par les investissements effectués (intérêts, dividendes, vente de licences, etc.). Compte tenu des caractéristiques des projets financés et des modalités d’intéressement de l’État aux résultats, les retours ne seront significatifs qu’à compter de 2016-2017.

Besoin de financement

 

Amortissement de la dette à moyen et long terme

104,8

dont amortissement de la dette à long terme

42,2

dont amortissement de la dette à moyen terme

62,6

dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

 

Amortissement des autres dettes

0,2

Déficit à financer

70,2

dont déficit budgétaire

82,2

dont dotation du 2e PIA

-12,0

Autres besoins de trésorerie

1,8

Total

177,0

 

 

Ressources de financement

 

Émission de dette à moyen et long terme nette des rachats

174,0

Ressources affectées par la CDP et consacrées au désendettement

1,5

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

 

Variation des dépôts des correspondants

 

Variation des comptes du Trésor

1,0

Autres ressources de trésorerie

0,5

Total

177,0

En raison de l’obligation de dépôt des fonds versés aux opérateurs au titre des investissements d’avenir sur le compte du Trésor, seule la partie effectivement décaissée des investissements d’avenir en 2014 constituera un besoin de financement. Selon le Gouvernement, ces décaissements s’élèveraient à environ 1,7 milliard d’euros au titre du PIA 2 auquel s’ajouteraient 2,9 milliards d’euros de décaissements au titre du PIA 1. Ces décaissements sont comptabilisés sous la rubrique « Autres besoins de trésorerie ». Toutefois, l’exposé des motifs de l’article d’équilibre précise qu’il faut déduire de ce montant l’annulation des opérations budgétaires sans impact en trésorerie : il s’agit principalement de la charge d’indexation du capital des titres indexés, qui s’élève à 2,8 milliards d’euros. Il s’ensuit que le PIA 2 n’aurait qu’un effet très limité sur le besoin de financement de l’État en 2014.

● L’impact sur la charge de la dette

La mesure proposée se traduit, en premier lieu, par un coût pour l’État qui pèse sur la charge de la dette, lié à la rémunération des fonds non consommables, obligatoirement conservés sur le compte du Trésor pour produire intérêt. Ce coût est estimé à 41 millions d’euros en 2014 et à 82 millions d’euros en 2015.

L’évaluation repose sur un encours de 3,3 milliards, rémunéré à 2,5 % par an, selon une hypothèse purement conventionnelle fournie à titre illustratif par l’évaluation préalable de l’article 42 du projet de loi de finances pour 2014. Il est par ailleurs fait l’hypothèse, d’une part, qu’une telle rémunération concernera uniquement les trois derniers trimestres de l’année 2014 afin de tenir compte du temps nécessaire à la préparation et la signature des conventions, et d’autre part que la rémunération du dernier trimestre 2014 sera versée budgétairement au premier trimestre 2015.

Le Gouvernement estime en second lieu que l’absence d’appel aux marchés pour financer les 3,3 milliards d’euros de fonds non consommables engendrerait un gain qui, conventionnellement, peut être évalué au même niveau que la rémunération versée.

S’agissant des autres fonds (8,7 milliards d’euros), le Gouvernement estime que la limitation des charges de trésorerie jusqu’à leur décaissement se traduit par un « gain » de l’ordre de 135 millions d’euros en 2014. Cette évaluation repose sur deux hypothèses : un paiement total des fonds par l’État en 2014 et une consommation de ces fonds à hauteur de 1,5 milliard d’euros en 2014.

Le Gouvernement estime donc que le gain net sur la charge de la dette découlant du PIA 2 s’élèverait à 93 millions d’euros en 2014 (soit 135 – 41 millions d’euros).

Le rapporteur général observe néanmoins que la rémunération des fonds non consommable sera en réalité fixée au cas par cas par arrêté des ministres en charge de l’économie et du budget, et son impact sur la charge de la dette dépendra du calendrier de décaissement effectivement mis en œuvre. Il en est d’ailleurs de même s’agissant des autres fonds, pour lesquels le rythme de décaissement dépendra essentiellement du calendrier de contractualisation des conventions entre l’État et les opérateurs. Il ne peut donc qu’être sceptique sur l’hypothèse d’un gain net sur la charge de la dette en 2014.

En tout état de cause, l’évaluation du Gouvernement repose sur une comparaison entre ce qui est prévu et ce qu’aurait coûté le PIA 2 en l’absence de dépôt obligatoire des fonds versés aux opérateurs sur un compte au Trésor. Dans cette hypothèse, il aurait fallu le financer par un appel aux marchés en bons du Trésor à taux fixe (BTF), accroissant alors la charge de la dette compte tenu du niveau des taux d’intérêts attendus sur ces titres en 2014. Ce raisonnement, s’il ne peut être contesté, demeure cependant théorique.

● L’impact sur la dette publique

Outre l’accroissement du déficit public notifié résultant du PIA 2, évalué à 1,5 milliard d’euros par an en moyenne entre 2014 et 2017, il convient de prendre en compte certaines sorties en trésorerie de fonds consommables qui, si elles ne constituent pas des subventions publiques, pèseront malgré tout sur la dette publique.

C’est le cas par exemple des prêts et des prises de participation qui, à moins qu’ils soient accordés à une autre administration publique, sont inclus dans la dette publique en comptabilité « maastrichtienne » – laquelle oblige à raisonner en termes de dette « brute » (66).

Ce phénomène devrait donc jouer au maximum à hauteur de 2,7 milliards d’euros imputables aux prises de participation et aux prêts et à hauteur de 2,1 milliards d’euros imputables aux avances remboursables.

Au-delà de 2014, l’effet pluriannuel sur la dette publique des 12 milliards d’euros d’investissements d’avenir dépendra du rythme annuel des décaissements des fonds consommables et de la nature des dépenses effectuées.

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