N° 1881 - Avis de M. Christophe Cavard sur le projet de loi , adopté, par le Sénat, relatif à l'économie sociale et solidaire (n°1536)




N
° 1881

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 avril 2014.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LES ARTICLES 1er, 2, 5 A (nouveau), 5 B (nouveau), 5, 6, 9 A (nouveau), 9, 10, 11 A (nouveau), 11, 12,13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 23, 24, 25, 26, 27, 41, 42, 43, 44, 51 DU PROJET DE LOI (n° 1536), ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, relatif à l'économie sociale et solidaire,

PAR M. Christophe CAVARD

Député

——

Voir les numéros :

Sénat : 805 (2012-2013), 69, 70, 84, 85 et T.A. 29 (2013-2014).

Assemblée nationale : 1830, 1835, 1862, 1863, 1864.


SOMMAIRE

___

Pages

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS AU PROJET DE LOI PROPOSÉES PAR LA COMMISSION 9

INTRODUCTION 11

I. UN PROJET DE LOI AMBITIEUX POUR CONSOLIDER ET PROMOUVOIR L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE 12

A. L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE, UN MODÈLE ORIGINAL ET INNOVANT 12

1. Un dynamisme économique au service de valeurs spécifiques 12

a. Le poids croissant de l’économie sociale et solidaire 12

b. Une vision différente de l’économie 13

2. Des acteurs traditionnels rejoints par un nouveau type d’entrepreneurs 13

B. UN CHAMP DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE CLARIFIÉ PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI 14

C. UNE PROMOTION DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE ENCOURAGÉE PAR LA COMMISSION DES LOIS 16

II. UNE ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE ANCRÉE DANS LES TERRITOIRES ET SOUTENUE PAR LES POUVOIRS PUBLICS 17

A. UNE ASSISE REPOSANT SUR LES TERRITOIRES 17

1. Une approche territoriale à laquelle souscrit le projet de loi 17

2. Une dimension locale ayant vocation à être encore consolidée 17

B. DES ACTEURS PUBLICS INVESTIS D’UN RÔLE D’ENTRAÎNEMENT 18

1. De nouveaux outils offerts par le présent texte 18

2. Un pilotage public renforcé par la commission des Lois 18

III. L’ADAPTATION DU CADRE JURIDIQUE DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE 19

A. LA MODERNISATION DU DROIT DES COOPÉRATIVES 19

1. L’adaptation des statuts 19

2. La révision coopérative 20

3. L’adaptation du cadre juridique applicable à différentes formes de coopératives 21

a. Les sociétés coopératives de production 21

b. Les sociétés coopératives d’intérêt collectif 21

c. Les sociétés coopératives de commerçants détaillants 22

B. L’ADAPTATION DU DROIT DES ASSOCIATIONS 23

1. Un cadre juridique pour les fusions et scissions d’associations 23

2. Des capacités civiles accrues 23

DISCUSSION GÉNÉRALE 25

EXAMEN DES ARTICLES 27

TITRE IER – DISPOSITIONS COMMUNES 27

Chapitre Ier – Principes et champ de l’économie sociale et solidaire 27

Article 1er: Périmètre de l’économie sociale et solidaire 27

Article 2 : Définition des entreprises recherchant une utilité sociale 31

Chapitre II – Organisation et promotion de l’économie sociale et solidaire 33

Section 3 : Organisation et promotion de l’économie sociale et solidaire 33

Article 5 A (nouveau) : Élaboration d’une stratégie régionale de l’économie sociale et solidaire 33

Article 5 B (nouveau) : Organisation bisannuelle d’une conférence régionale de l’économie sociale et solidaire 34

Article 5 : Institution de pôles territoriaux de coopération économique 35

Article 6 (art. 21 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris) : Inclusion dans les contrats de développement territorial d’un volet consacré au développement de l’économie sociale et solidaire 36

Section 4 : (nouvelle) : Promotion de l’économie sociale et solidaire 37

Article 6 bis (nouveau) (art. 1679 A du code général des impôts) : Majoration de l’abattement de la taxe sur les salaires pour les entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire 37

Article 6 ter (nouveau) (art. L. 63236 du code du travail) : Mobilisation du compte personnel de formation pour les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire 39

Article 6 quater (nouveau) : Intégration des acteurs de l'économie sociale et solidaire dans les instances du dialogue social 40

Chapitre III – Les dispositifs qui concourent au développement des entreprises de l’économie sociale et solidaire 41

Section 3 : La commande publique 41

Article 9 A (nouveau) (art. 16 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics) : Marchés ou lots réservés 41

Article 9 : Adoption et publication par les acheteurs publics d’un schéma de promotion des achats socialement responsables 43

Article 10 (art. 10 A [nouveau] et 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) : Définition de la subvention publique 47

TITRE II – DISPOSITIONS FACILITANT LA TRANSMISSION D’ENTREPRISES À LEURS SALARIÉS 49

Article 11 A (nouveau) : Création d’un dispositif d’information régulière des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise 49

Article 11 (art. L. 141-23 à L. 141-30 [nouveaux] du code de commerce) : Création d’un dispositif d’information préalable des salariés en cas de cession d’un fonds de commerce 50

Article 12 (art. L. 239-6 à L. 239-15 [nouveaux] du code de commerce) : Création d’un dispositif d’information préalable des salariés en cas de cession de parts sociales, actions ou valeurs mobilières ouvrant accès à la majorité du capital d’une société 56

TITRE III – DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DES COOPÉRATIVES 59

Chapitre Ier – Dispositions communes aux coopératives 59

Section 1 : Développement du modèle coopératif 59

Article 13 (art. 1er, 3, 3 bis, 5 à 10, 18, 19 septies, 22, 23 et 25 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 et art. L. 512-36 du code monétaire et financier) : Simplification et modernisation du statut des coopératives 59

Section 2 : La révision coopérative 64

Article 14 (art. 19 quater, 19 duodecies, 25-1 à 25-5 [nouveaux], 27, 27 bis et 28 de la loi n° 47-1175 du 10 septembre 1947 ; art. 54 bis de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 ; art. 29 de la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983 ; art. L. 524-2-1, L. 527-1-2 [nouveau] et L. 931-27 du code rural et de la pêche maritime ; art. L. 422-3 et L. 422-12 du code de la consommation) : Création d’un régime général de révision coopérative 64

Chapitre II – Dispositions propres à diverses formes de coopératives 67

Section 1 : Les sociétés coopératives de production 67

Sous-section 1 : Le dispositif d’amorçage applicable aux sociétés coopératives de production 67

Article 15 (art. 49 ter et 52 bis [nouveaux] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Mise en place d’un dispositif d’amorçage pour la reprise d’entreprises en sociétés coopératives de production 67

Article 16 (art. 52 ter [nouveau] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Possibilité de rachat par les coopératives de parts sociales détenues par des associés non coopérateurs 68

Sous-section 2 : Les groupements de sociétés coopératives de production 69

Article 17 (art. 47 bis à 47 octies [nouveaux] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Groupements de sociétés coopératives de production 69

Sous-section 3 : Autres dispositions relatives aux sociétés coopératives et participatives 72

Article 18 (art. 1er, 4 et 54 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Modification de la dénomination des sociétés coopératives ouvrières de production 72

Article 19 (art. 5, 8, 15 à 18, 21, 28 et 51 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Ouverture du statut de société anonyme par actions aux sociétés coopératives de production 73

Article 20 (art. 6, 32, 35, 40 et 50 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978) : Modification de références devenues obsolètes 74

Section 2 : Les sociétés coopératives d’intérêt collectif 74

Article 21 (art. 19 quinquies, 19 septies, 19 terdecies [nouveau] et 19 quaterdecies de la loi n° 47-1775 du  septembre 1947) : Assouplissement du régime des sociétés coopératives d’intérêt collectif 74

Section 3 : Les sociétés coopératives de commerçants détaillants 77

Article 23 (art. L. 124-1 du code de commerce) : Création de sociétés financières par les coopératives de commerçants 77

Article 24 (art. L. 124-1 du code de commerce) : Extension de l’objet des coopératives de commerçants au commerce en ligne 78

Article 25 (art. L. 124 2 du code de commerce) : Assouplissement du principe d’exclusivisme au profit des coopératives de commerçants 79

Article 26 (art. L. 124-3, L. 124-5, L. 124-6, L. 124-6-1 [nouveau], et L. 124-8 à L. 124-12 du code de commerce) : Possibilité de constituer une coopérative de commerçants sous forme de SARL à capital variable 80

Article 27 (art. L. 124-4-1 [nouveau] du code de commerce) : Clause statutaire d’information et de négociation au profit d’une société coopérative de commerçants avec l’un de ses associés cessionnaire 81

TITRE V – DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DES ASSOCIATIONS 83

Article 41 (art. 9 bis et 12 [nouveaux] de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association) : Opérations de fusion et de scission des associations 83

Article 42 (art. 79-IV [nouveau] du code civil applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle) : Opérations de fusion et de scission des associations en Alsace-Moselle 85

Article 43 (art. 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association) : Capacité civile accrue des associations d’intérêt général 87

Article 44 (art. 11 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association) : Capacité civile accrue des associations reconnues d’utilité publique 88

TITRE VIII – DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES 90

Section 2 : Dispositions finales 90

Article 51 (art. 21 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association) : Habilitation à prendre par voie d’ordonnance les mesures d’application outre-mer 90

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 93


LES PRINCIPALES MODIFICATIONS AU PROJET DE LOI PROPOSÉES PAR LA COMMISSION

La commission des Lois a proposé, en adoptant plusieurs amendements du rapporteur pour avis, les principales modifications suivantes :

—  à l’article 1er, elle a inséré une mention prévoyant de manière expresse que les salariés figurent parmi les personnes devant participer aux réalisations de toute entreprise de l’économie sociale et solidaire ;

—  au même article 1er, elle a proposé que les sociétés commerciales qui souhaitent faire publiquement état de leur qualité d’entreprises de l’économie sociale et solidaire soient tenues de produire tous les cinq ans au greffe du tribunal de commerce les éléments établissant qu’elles en respectent toujours les conditions ;

—  à l’article 2, elle a souhaité supprimer la hiérarchie posée entre les objectifs sociaux et solidaires, d’un côté, et l’objectif de développement durable, de l’autre, et a fait de la contribution au développement durable une condition en soi ;

—  après l’article 6, elle a adopté un amendement portant article additionnel (article 6 bis [nouveau]) portant de 20 000 euros à 30 000 euros l’abattement sur la taxe sur les salaires acquittée par les entreprises qui relèvent de l’économie sociale et solidaire, compte tenu de leur utilité sociale et environnementale.

—  après l’article 6, elle a adopté un amendement portant article additionnel (article 6 ter [nouveau]), tendant à inscrire, parmi les formations éligibles au compte personnel de formation (CPF), les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire ;

—  après l’article 6 encore, elle a adopté un amendement portant article additionnel (article 6 quater [nouveau]), disposant que l’organisation professionnelle la plus représentative des employeurs de l’économie sociale et solidaire participerait de plein droit aux négociations du dialogue social se déroulant au niveau national et interprofessionnel ;

—  à l’article 9 A, elle a souhaité renvoyer à un décret en Conseil d’État le soin de définir la notion, trop imprécise du point de vue juridique, de « personne défavorisée » ;

—  à l’article 9, elle a proposé d’inclure l’État (et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial) dans la liste des pouvoirs adjudicateurs tenus d’adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsables ;

—  à ce même article 9, elle a précisé que les objectifs de passation de marchés publics définis par les schémas de promotion pouvaient comporter des éléments à caractère d’utilité sociale ;

—  à l’article 9 encore, elle a entendu supprimer la priorité donnée aux plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi (PLIE) et aux maisons de l’emploi (MDE) dans le processus de conclusion des conventions visées à cet article ;

—  à l’article 10, elle a souhaité définir et encadrer juridiquement la procédure d’« appel à initiatives ».

—  à l’article 13, elle a proposé d’encourager les salariés d’une coopérative à en acquérir des parts sociales. L’amendement adopté précise qu’ils pourront détenir jusqu’à 20 % des droits de vote.

—  à l’article 14, elle a entendu généraliser le principe alors que le projet de loi entendait en exclure les plus petites structures.

Mesdames, Messieurs,

La commission des Lois s’est saisie, pour avis, du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire que le Sénat a adopté le 7 novembre 2013. Notre Commission a décidé d’examiner plus précisément 31 articles (1) qui touchent essentiellement aux grands principes de l’économie sociale et solidaire (ESS), à la transmission des entreprises à leurs salariés et au droit des coopératives et des associations et ce, conformément au champ de ses compétences qui comprend en particulier le droit des sociétés.

Cinq autres commissions permanentes se sont saisies pour avis, ce qui montre à quel point le sujet de l’économie sociale et solidaire est important pour l’Assemblée nationale.

L’intervention du législateur est tout particulièrement nécessaire aujourd’hui pour offrir à l’économie sociale et solidaire les moyens d’un changement d’échelle.

Les entreprises de l’économie sociale et solidaire placent l’humain et le projet collectif au cœur de leur action. Fondées sur les réponses aux préoccupations et aux besoins de la population, ces entreprises – coopératives, mutuelles, ou associations – contribuent au développement de l’économie locale et couvrent des champs d’intérêt général et des secteurs très diversifiés. Elles développent des activités ou services à fort potentiel d’innovation sociale dans les domaines de l’environnement, de l’habitat, des services aux personnes et aux entreprises, du développement local, du patrimoine, des énergies renouvelables, de la santé, etc. Nous ne sommes donc pas dans une économie de la réparation, mais bien dans une économie de la transformation.

Les entreprises de l’économie sociale et solidaire proposent de nombreuses opportunités d’emploi et des carrières diversifiées. Au regard du développement des activités et de la pyramide des âges – en 2020, un salarié sur quatre de l’économie sociale et solidaire partira à la retraite –, les besoins y sont croissants. Un emploi sur cinq créé aujourd’hui l’est au sein de l’économie sociale et solidaire.

Ce pan de notre économie représente un chiffre d’affaires estimé en 2008 à 367 milliards d’euros. Dans le contexte actuel, il convient de conforter le dynamisme et l’inventivité de ces acteurs qui présentent le double avantage de ré-ancrer l’économie dans le réel et de contribuer au soutien des plus fragilisés parmi nos concitoyens.

Preuve de ce dynamisme, les acteurs du secteur ont particulièrement contribué à la richesse des travaux parlementaires. La densité des échanges avec les députés et les sénateurs est la démonstration d’une véritable culture participative et l’illustration d’un dialogue social effectif. En effet, l’économie sociale et solidaire se caractérise par sa capacité à mobiliser les citoyens, mobilisation que nous devons soutenir dans cette période où le repli sur soi fragilise nos démocraties.

La vitalité de l’économie sociale et solidaire se traduit aussi bien dans sa performance économique que dans les emplois qu’elle crée.

L’économie sociale et solidaire représente un chiffre d’affaires qui était estimé en 2008 à 366,6 milliards d’euros. Elle représente, d’après l’étude d’impact du projet de loi, 9,2 % des entreprises en France, et contribue approximativement à hauteur de 8 % au produit intérieur brut (PIB) (2).

Comprenant dans son périmètre 223 000 établissements employeurs, l’économie sociale et solidaire occupe de l’ordre de 10 % du total de l’emploi salarié public et privé en France. 17 % des cadres y travaillent. Elle est particulièrement puissante dans certains secteurs professionnels tels que les assurances (46 % des salariés), l’hébergement médico-social (55 %), les activités récréatives, sportives et de loisir (57 %) et l’action sociale sans hébergement (69 %) (3).

De 2001 à 2009, l’essor de la création d’emplois dans l’économie sociale et solidaire a été particulièrement soutenu. Le taux de croissance de l’emploi en moyenne annuelle s’est élevé à 2,6 % contre 1,1 % dans le secteur privé hors économie sociale et solidaire. Une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC) de janvier 2013 faisait état d’un potentiel d’embauches annuelles de jeunes peu qualifiés d’environ 114 000 (4). L’étude d’impact mentionne quant à elle 600 000 recrutements en perspective sur les sept années à venir, compte tenu des départs à la retraite qui sont prévus (5).

Malgré la diversité des types d’organisations présentes dans l’économie sociale et solidaire, plusieurs principes leur sont communs. On peut citer la recherche d’une conciliation entre efficacité économique et utilité sociale, la priorité donnée aux personnes engagées dans un projet par rapport à la recherche de profits ou à la détention de capital, le partage du pouvoir dans l’entreprise et le réinvestissement d’une fraction importante du résultat dans les projets.

L’économie sociale et solidaire comprend traditionnellement quatre acteurs classiques, dont les règles statutaires fondamentales ont été inscrites dans différents textes de loi. On y trouve tout d’abord les coopératives, régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Celles-ci peuvent être définies comme des sociétés qui, en assumant elles-mêmes des fonctions d’intermédiaires, réduisent le prix de revient de certains produits ou services et contribuent ainsi à la satisfaction des besoins et à la promotion des activités économiques et sociales de leurs membres.

On trouve en deuxième lieu les mutuelles et sociétés d’assurance mutuelle, régies respectivement par le code de la mutualité et par le code des assurances. Ce sont des personnes morales de droit privé, dénuées de but lucratif, dont les membres ou adhérents versent une cotisation en contrepartie de certains avantages ou de certaines sécurités en termes de prévoyance, de solidarité ou d’entraide.

Les fondations constituent la troisième catégorie d’acteurs traditionnels. Elles constituent des personnes morales de droit privé dépourvues de but lucratif, créées par un ou plusieurs donateurs (qui peuvent être des personnes physiques ou morales) pour réaliser une œuvre d’intérêt général. Leur régime est fixé par les articles 18 et suivants de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat.

On trouve enfin les associations dont l’article premier de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association rappelle qu’elles réunissent « plusieurs personnes [qui] mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices ». Il en existe aujourd’hui en France environ un million.

Ces quatre types de structures, en dépit de la diversité de leurs modes d’organisation et de leurs objectifs, ont pour dénominateurs communs les valeurs qui ont été rappelées plus haut. Elles partagent notamment le caractère « démocratique » de leur gouvernance et l’orientation fondamentale de leurs activités de production et de services vers l’utilité sociale.

Dans le sillage de ces acteurs classiques sont apparus ceux que l’on appelle les « entrepreneurs sociaux », qui se caractérisent avant tout par la finalité sociale, sociétale ou environnementale de leur action, mais qui gardent généralement la forme juridique de société commerciale.

Le présent projet de loi donne à l’économie sociale et solidaire un statut législatif à la fois cohérent et souple puisqu’il doit s’adapter à des acteurs très diversifiés.

L’article premier donne de l’économie sociale et solidaire une définition suffisamment large pour pouvoir englober des entités aux formes juridiques diverses. L’économie sociale et solidaire y est décrite comme « un mode d’entreprendre auquel adhèrent des personnes morales de droit privé » qui satisfont à trois conditions principales :

—  un but autre que le seul partage des bénéfices ;

—  une gouvernance démocratique prévoyant la participation des associés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise ;

—  un principe de « lucrativité » limitée.

La commission des Lois, sur un amendement de votre rapporteur pour avis, a inséré une mention prévoyant de manière expresse que les salariés figurent parmi les personnes devant participer aux réalisations et orientations de l’entreprise. Il était en effet difficilement imaginable, dans un article consacré à la gouvernance démocratique des entreprises de l’économie sociale et solidaire, de ne pas faire état des salariés. Ce sont bien eux qui, avant même les clients, les fournisseurs ou les autres parties prenantes, doivent être associés aux choix de l’entreprise dans ses actions et pour son développement. Ce souci premier des salariés est d’ailleurs bien dans l’esprit du présent texte qui, dans trois autres articles, organise l’information des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise.

L’article premier énumère ensuite les différentes personnes morales exerçant une activité dans le champ de l’économie sociale et solidaire, qu’il s’agisse des acteurs traditionnels dont il a été question plus haut ou de certaines sociétés commerciales satisfaisant à des critères précis.

L’article premier définit aussi les conditions dans lesquelles une entreprise peut faire publiquement état de sa qualité d’entreprise de l’économie sociale et solidaire et bénéficier des droits qui s’y attachent. Il lui faut, d’une part, répondre aux prescriptions fixées à l’article premier et, d’autre part, s’agissant d’une société commerciale, être immatriculée au registre du commerce et des sociétés en tant qu’entreprise de l’économie sociale et solidaire

Un amendement adopté par la commission des Lois, à l’initiative de votre rapporteur pour avis, prévoit que les sociétés commerciales qui souhaitent faire publiquement état de leur qualité d’entreprises de l’économie sociale et solidaire doivent produire tous les cinq ans au greffe du tribunal de commerce les éléments de nature à établir qu’elles en respectent toujours les conditions. Il s’agit évidemment ainsi de dissuader certaines sociétés commerciales de détourner le dispositif en se faisant immatriculer en tant qu’entreprises de l’économie sociale et solidaire, puis de se dispenser d’en respecter les conditions sans jamais régulariser leur situation.

L’article 2 indique à quelles conditions une entreprise peut être considérée comme « recherchant une utilité sociale ». Cette notion trouve donc une consécration législative et une définition précise reposant sur trois conditions :

—  le soutien à des personnes en situation de fragilité ;

—  la contribution notamment à la préservation et au développement du lien social (ainsi qu’à la lutte contre les exclusions et inégalités) ;

—  le fait de concourir au développement durable, sous réserve que l’activité de l’entreprise puisse se rattacher à l’une des deux premières conditions.

La commission des Lois, sur un amendement de votre rapporteur pour avis, a supprimé la hiérarchie posée par l’article 2 entre les objectifs sociaux et solidaires, d’un côté, et l’objectif de développement durable, de l’autre. Elle a donc fait de la contribution au développement durable une condition à part entière, en supprimant toute réserve. Elle a également mieux défini le « développement durable » en précisant qu’il repose sur quatre piliers : économique, social, environnemental et participatif. Elle a en outre fait référence à la notion d’utilité environnementale, en l’intégrant à celle d’utilité sociale. Cet amendement visait à remédier, dans une certaine mesure, à une relative insuffisance du projet de loi dans la prise en compte de la dimension environnementale de l’économie sociale et solidaire, point pourtant essentiel.

Les articles 11 A à 12 du projet de loi organisent l’information des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise. Ainsi, l’article 11 A institue, dans les sociétés employant moins de deux cent cinquante salariés, un dispositif d’information, au moins tous les trois ans, des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise et sur les dispositifs d’aide auxquels ils ont droit.

L’article 11 prévoit, au sein du code de commerce, un dispositif d’information préalable des salariés en cas d’intention de cession d’un fonds de commerce, pour qu’ils puissent présenter une offre de reprise.

L’article 12 institue un dispositif similaire en cas d’intention de cession d’une participation majoritaire dans une société.

La commission des Lois a adopté trois amendements de votre rapporteur pour avis, portant articles additionnels après l’article 6 et tendant, au-delà des avancées déjà remarquables contenues dans le texte transmis, à mieux promouvoir encore l’économie sociale et solidaire.

Un premier amendement (article 6 bis [nouveau]) a pour objet de soutenir les entreprises de l’économie sociale et solidaire en augmentant leur abattement sur la taxe sur les salaires. L’article 1679 A du code général des impôts prévoit en effet pour les entreprises qui ne relèvent pas de l’impôt sur les sociétés – et qui ne peuvent donc pas bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) (6) – l’application d’un abattement de 20 000 euros sur le montant de la taxe sur les salaires qu’elles acquittent. Le présent amendement porte cet abattement à 30 000 euros pour les entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire, compte tenu de leur utilité sociale et environnementale.

Un deuxième amendement (article 6 ter [nouveau]) fait figurer, parmi les formations éligibles au compte personnel de formation (CPF) mis en place par loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, « les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire ». Les salariés comme les personnes en recherche d’emploi pourront ainsi acquérir les compétences nécessaires pour porter un projet en lien avec l’économie sociale et solidaire (formation à l’utilité sociale et environnementale, aux techniques managériales de l’économie sociale et solidaire, à la reprise d’entreprise, etc.). Il s’agit également ainsi d’impulser le développement de l’offre de programmes de formations professionnelles en ce sens.

Un troisième amendement (article 6 quater [nouveau]) vise à mieux associer les acteurs de l’économie sociale et solidaire au dialogue social, par exemple dans le cadre des accords nationaux interprofessionnels. Il est ainsi prévu que l’organisation professionnelle la plus représentative des employeurs de l’économie sociale et solidaire participe de plein droit aux négociations réunissant l’État, les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel et les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel.

L’article 5 A prévoit l’élaboration par chaque région d’une « stratégie régionale de l’économie sociale et solidaire », ayant vocation à s’inscrire au sein de son schéma régional de développement économique (SRDE).

L’article 5 B prévoit l’organisation tous les deux ans d’une conférence régionale de l’économie sociale et solidaire, réunissant notamment les membres de la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, les réseaux locaux d’acteurs, les représentants des collectivités territoriales et les partenaires sociaux.

L’article 5 consacre dans la loi l’existence de « pôles territoriaux de coopération économique » (PTCE). Ces pôles réunissent des entreprises de l’économie sociale et solidaire, d’autres entreprises « classiques », des collectivités territoriales, des centres de recherche et des organismes de formation. Ils ont pour objet la mise en œuvre d’une stratégie de mutualisation au service de projets économiques socialement innovants et porteurs d’un développement local durable.

L’article 6 complète la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris. Il dispose que les contrats de développement territorial (CDT), conclus entre le préfet de la région Île-de-France et les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), devront désormais inclure un volet consacré au développement de l’économie sociale et solidaire.

La dimension territoriale de l’économie sociale et solidaire est encore susceptible d’être renforcée. Dans les années qui viennent, on pourrait ainsi envisager, à titre d’illustration, de rendre plus pérennes les financements apportés par les régions aux chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CRESS), d’autant plus nécessaires que celles-ci sont chargées de la mise en œuvre de dispositions réglementaires prévues par le projet de loi.

Par ailleurs, les prochaines évolutions législatives en matière de décentralisation devront être pensées en lien avec le changement d’échelle de l’économie sociale et solidaire, qui s’intègre tout particulièrement dans les projets de territoire.

En ce sens, le présent projet de loi ne doit donc pas être conçu comme un point d’arrivée, mais comme un point de départ.

L’article 9 A porte sur les marchés ou lots réservés. Il modifie l’article 16 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. Dans sa rédaction en vigueur, cet article 16 prévoit que certains marchés peuvent être octroyés, sans mise en concurrence, à des entreprises adaptées ou à des établissements et services d’aide par le travail (ESAT), lorsque la majorité des travailleurs concernés sont des personnes handicapées. La nouvelle rédaction de cet article en élargit la portée puisque désormais les organismes soumis à l’ordonnance pourront passer des marchés réservés à des structures dont « plus de 30 % des travailleurs concernés [sont] des personnes handicapées ou défavorisées ». Le but est ici d’amplifier les actions contribuant à l’accès ou au retour à l’emploi des personnes qui en sont le plus éloignées.

L’article 9 fait obligation aux collectivités territoriales et aux autres acheteurs publics de statut législatif d’adopter et de publier un schéma de promotion des achats publics socialement responsables. Il prévoit aussi la signature, dans chaque région, d’une convention entre le représentant de l’État et un ou plusieurs organismes dont le but est de faciliter le recours aux clauses concourant à l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés.

L’article 10 insère dans la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (dite loi « DCRA ») une définition de la subvention publique. De nombreuses collectivités territoriales (et établissements publics) craignent aujourd’hui d’utiliser la subvention, par crainte de la voir requalifiée par le juge en marché public. La définition, dans la loi, de la notion de subvention sera un facteur de sécurité juridique et devrait encourager les collectivités à y recourir lorsque la procédure des marchés publics n’est pas nécessaire, et ceci afin de préserver les facultés d’innovation et d’initiative des acteurs de l’économie sociale et solidaire.

La commission des Lois a adopté plusieurs amendements de votre rapporteur pour avis tendant à renforcer le rôle de l’État et des autres acteurs publics dans le soutien à l’économie sociale et solidaire :

—  à l’article 9 A, elle a souhaité renvoyer à un décret en Conseil d’État le soin de définir la notion de « personne défavorisée », juridiquement imprécise et donc source possible de contentieux ;

—  à l’article 9, elle a proposé d’inclure l’État (et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial) dans la liste des donneurs d’ordre tenus d’adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsables ;

—  à ce même article, elle a également précisé que les objectifs de passation de marchés publics déterminés par ces schémas sont invités à comporter des éléments à caractère d’utilité sociale. Il est ainsi utilement fait référence à cette notion explicitée à l’article 2 du projet de loi ;

—  à l’article 10, elle a entendu définir la procédure d’« appel à initiatives » au sein d’un nouvel article créé dans la loi précitée du 12 avril 2000, et lui confère un cadre juridique plus sûr.

Notre pays compte environ 21 000 coopératives qui emploient près d’un million de salariés. Les entreprises coopératives produisent les deux tiers du chiffre d’affaires de l’économie sociale et solidaire, soit 288 milliards d’euros de chiffre d’affaires, filiales comprises, et sont présentes dans de très nombreux secteurs d’activité, tels que l’agriculture et l’agroalimentaire, l’artisanat, la banque, le commerce, la culture, l’éducation, l’industrie, le logement, les technologies de l’information, la pêche, la recherche, ou encore les transports. Ces entreprises représentent 28 % du commerce de détail, 40 % de l’agroalimentaire et 60 % des banques de détail.

Les entreprises coopératives se sont développées au cours des dernières années à un rythme supérieur à la moyenne du marché en termes d’emploi et d’activité économique dans plusieurs secteurs d’activité. En 2010, ces coopératives, avec 750 000 emplois, représentaient 3 % de l’emploi salarié en France.

Le projet de loi entend moderniser la loi n° 47-1175 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération pour favoriser la création de nouvelles entreprises coopératives.

L’article 13 propose de moderniser la définition de la coopérative. En effet, les dispositions figurant à l’article premier de la loi de 1947 sont inspirées du modèle dominant de coopérative au moment de sa rédaction – la coopérative de consommation – et ne reflète pas la réalité du mouvement coopératif français contemporain, les opportunités qu’elles offrent dans le contexte économique actuel, et le dynamisme des leurs parties prenantes. La nouvelle définition de la coopération apporte des précisions destinées à en faciliter l’utilisation par des porteurs de projet. Elle met en avant les principes fondateurs du statut coopératif qui sont :

—  le principe d’exclusivisme et de satisfaction des besoins, non seulement économiques mais aussi sociaux, des coopérateurs ;

—  le principe de gestion démocratique, qui, en fonction de l’adage « une personne, une voix », implique que chaque coopérateur dispose d’une voix dans les instances de la coopérative, quel que soit le nombre de parts sociales détenues ;

—  le principe de « lucrativité » limitée de la coopérative. Les éventuels excédents donnent lieu à des ristournes en fonction de l’activité de l’associé et non pas au versement de dividendes en fonction du capital détenu ; ces excédents alimentent également les réserves de la coopérative.

Ce même article 13 propose de généraliser à l’ensemble des coopératives la possibilité, actuellement prévue pour certaines catégories d’entre elles seulement, de déroger au principe d’exclusivisme en exerçant une partie de leur activité avec des tiers. Une telle possibilité permettra aux coopératives, en accroissant leur activité, d’augmenter leur chiffre d’affaires afin d’obtenir des « ristournes » plus importantes ou d’accumuler davantage de réserves pour pérenniser l’activité de la société.

La commission des Lois a également souhaité, sur l’initiative de son rapporteur pour avis, encourager les salariés d’une coopérative à en acquérir des parts sociales. L’amendement adopté précise qu’ils pourront détenir jusqu’à 20 % des droits de vote.

La révision coopérative est un examen analytique de la situation d’une coopérative visant à s’assurer du respect des principes et des règles propres à cette catégorie de sociétés à évaluer la qualité de sa gestion et à proposer des améliorations. L’article 19 duodecies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération pose le principe de la révision coopérative et renvoie ses modalités à un décret (7).

L’article 14 propose d’instaurer, dans la loi, un régime général de révision, qui serait inséré dans la loi du 10 septembre 1947.

Loin d’être une entrave, votre rapporteur pour avis estime que la révision est un outil essentiel d’assistance aux coopératives, favorisant ainsi leur développement. La commission des Lois a d’ailleurs adopté un amendement en généralisant le principe alors que le projet de loi entendait en exclure les plus petites structures.

L’article 18 propose que, dans tous les codes et dispositions législatives en vigueur, la dénomination : « sociétés coopératives ouvrières de production » devienne : « sociétés coopératives de production ». L’acronyme « SCOP » pourrait être maintenu dans le langage courant.

Les SCOP sont des coopératives dont le statut est régi par une loi spécifique (8). Elles prennent la forme de sociétés anonymes ou de sociétés à responsabilité limitée dont les salariés sont les associés majoritaires : ils détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote.

Les articles 15 et 16 mettent en place un dispositif d’amorçage pour la reprise d’entreprises en sociétés coopératives de production. Afin de faciliter la transformation de sociétés en SCOP, l’article 15 permet à des associés non coopérateurs de détenir plus de la moitié du capital pour une durée de sept ans, et aux associés coopérateurs de leur racheter ces parts à l’issue de ce délai. L’article 16 ouvre la possibilité aux coopératives de racheter les parts sociales souscrites par des associés non coopérateurs dans le cadre de la transformation d’une société en SCOP.

L’article 17 permet aux sociétés coopératives de production de créer des groupements. En effet, le droit en vigueur ne permet pas à un coopérateur associé de prendre des parts sociales dans le capital d’une autre SCOP que la sienne, sauf à être considéré comme associé extérieur de cette SCOP. En conséquence, il ne peut participer pleinement au fonctionnement de cette SCOP, à la différence d’un salarié coopérateur.

L’article 19 vise à permettre aux SCOP de revêtir la forme de la société par actions simplifiée (SAS), qui semble adaptée aux SCOP. En effet, la SAS est à la fois une société de capitaux, ce qui la rapproche de la société anonyme, et une société de personnes, ce qui en fait une société mixte. Les principales différences avec la société anonyme résident dans le fait que ce sont les associés – et non la loi – qui fixent les règles de fonctionnement interne que cette forme sociale permet de dissocier la détention du capital des conditions d’exercice du pouvoir, un associé pouvant exercer certaines prérogatives indépendamment de l’importance de ses parts sociales. Cette nouvelle possibilité devrait permettre de favoriser le développement des SCOP.

Les sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) ont été créées par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel et ont pour objet « la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale » (9).La France comptait 300 SCIC en 2012, dont l’effectif moyen était de 12 salariés et le chiffre d’affaires moyen à 625 000 euros.

L’article 21 propose d’assouplir leur régime juridique afin d’en favoriser le développement. Il sera ainsi permis de constituer des SCIC sous forme de sociétés par actions simplifiées, à l’instar de ce que l’article 19 du présent projet de loi permet, de manière générale, aux coopératives. De même, des SCIC pourront être mises en place sans qu’un salarié ne soit, au départ, associé.

Votre rapporteur pour avis aurait aimé conforter le développement des SCIC en apportant des garanties à leurs dirigeants. Il avait ainsi déposé, devant la commission des Lois, un amendement assimilant ces dirigeants de sociétés à des salariés, afin de garantir leur statut. Cet amendement a cependant été déclaré irrecevable au regard des dispositions de l’article 40 de la Constitution.

Les sociétés coopératives de commerçants détaillants sont régies par les articles L. 124-1 à L. 124-16 du code du commerce. Elles constituent une forme juridique d’organisation de commerçants ou de prestataires de service (tels que des magasins, des hôtels, etc.). Selon l’article L. 124-1 du même code, elles ont pour objet d’« améliorer par l’effort commun de leurs associés les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leur activité commerciale », que ce soit par la mutualisation d’outils ou d’actions (tels que des centrales d’achat, une gestion commune de la communication, une logistique commune, etc.).

Ces sociétés coopératives de commerçants détaillants sont très présentes dans les différents secteurs du commerce. Parmi les plus connues, on peut citer, s’agissant de la grande distribution, « Système U » ou encore « E. Leclerc ». Les sociétés coopératives de commerçants détaillants réalisent 123,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires (en 2012) et emploient 470 000 salariés.

Les articles 23 à 27 du projet de loi entendent réformer leur cadre juridique.

L’article 23 vise à permettre la création de sociétés financières par des coopératives de commerçants. Il s’agit non pas de favoriser l’action d’investisseurs extérieurs mais de permettre, entre commerçants coopérateurs, d’assurer le développement de leurs activités par des moyens financiers.

L’article 24 étend l’objet des coopératives de commerçants au commerce en ligne. L’article 25 assouplit le principe d’exclusivisme dans les mêmes conditions que celles prévues, dans le cas général des coopératives, à l’article 13 du projet de loi. L’article 26 permet de constituer une coopérative de commerçants sous forme de SARL à capital variable et non pas seulement de SA à capital variable. L’article 27 propose de donner à une coopérative de commerçants un droit prioritaire d’information et de négociation en cas de cession d’un fonds de commerce d’un de ses associés.

Les articles 41 à 44 figurent dans un titre V spécifiquement consacré au droit des associations. En effet, elles jouent un rôle fondamental dans l’économie sociale et solidaire. Pour autant, les modifications prévues par le projet de loi s’appliqueront à l’ensemble des associations, y compris celles qui n’entrent pas dans le champ de l’économie sociale et solidaire au sens de l’article premier du projet de loi.

L’article 41 propose de fixer dans la loi les règles aujourd’hui jurisprudentielles en matière de fusion et de scission d’associations. En effet, si une association ne peut pas poursuivre une activité lucrative, en application de l’article premier de la loi du 1er juillet 1901, la jurisprudence a admis de longue date qu’elle puisse mener une activité économique. En matière de fusion ou de scission, en l’absence de dispositions législatives adaptées, les associations ne bénéficient pas aujourd’hui d’un régime juridique sûr dans ce domaine. La majorité de la doctrine suggère de leur appliquer les principes généraux du droit relatifs aux contrats et aux obligations. La jurisprudence tend pour sa part à les soumettre aux règles figurant dans le code de commerce.

En établissant un cadre juridique précis pour les fusions et les scissions d’associations, inspiré de la jurisprudence actuelle, le projet de loi permet d’assurer la sécurité juridique de ces opérations.

L’article 42 étend ces nouvelles règles, avec les adaptations nécessaires, aux associations relevant du régime d’Alsace-Moselle.

Le projet de loi tend à lever les restrictions à la capacité civile des associations posées en 1901 par le législateur. C’est ainsi que l’article 43 étend à toutes les associations la possibilité d’accepter les libéralités entre vifs ou testamentaires et leur ouvre la capacité de « posséder et administrer tous immeubles acquis à titre gratuit ».

En application de l’article 44, les associations reconnues d’utilité publique (10) se verraient reconnaître l’ensemble des attributs attachés à la personnalité juridique pour la gestion de leur patrimoine. Sous réserve des limitations prévues par leurs statuts, elles pourraient ainsi librement administrer et disposer de leur patrimoine dans le respect de la législation et de la réglementation et, dès lors, acquérir, administrer et aliéner à titre onéreux ou gratuit des immeubles.

DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du mardi 15 avril 2014, la Commission examine pour avis, sur le rapport de M. Christophe Cavard, le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l’économie sociale et solidaire (n° 1536).

Après l’exposé du rapporteur pour avis, une discussion générale s’engage.

Mme Cécile Untermaier. Le groupe SRC est particulièrement satisfait de ce projet de loi, traduction d’un engagement du président Hollande. Son premier mérite est de braquer les projecteurs vers le domaine de l’économie sociale et solidaire, secteur trop longtemps délaissé par les pouvoirs publics depuis son apparition au XIXe siècle.

Ce fait est pour le moins paradoxal à un moment où les entreprises sociales et solidaires françaises, c’est-à-dire celles qui contribuent à une mission d’intérêt général, qui n’ont pas d’objectif de rentabilité et qui sont gérées selon le principe participatif « une personne vaut une voix », pèsent 8 % du produit intérieur brut et 10 % de l’emploi salarié global. Aujourd’hui, près de 2,3 millions de salariés travaillent dans les services d’aide à la personne, l’agroalimentaire ou les banques satisfaisant aux critères de l’économie sociale et solidaire.

Partant de cette analyse, ce projet de loi comporte une série de dispositions visant à assurer une pleine reconnaissance de l’économie sociale et solidaire en France.

Il tend d’abord à unifier un secteur qui a toujours été très éclaté, en mentionnant expressément les formes juridiques susceptibles d’entraîner la qualification d’entreprise de l’économie sociale et solidaire. Cette homogénéisation du secteur permettra de lui apporter la sécurité juridique nécessaire à son développement. Rappelons que l’expansion de l’économie sociale et solidaire est à l’heure actuelle un impératif, ce domaine économique constituant un important vivier d’emplois tant les structures de cette nature recrutent.

Le développement du secteur sera en outre largement favorisé par les dispositions relatives à son financement. Dorénavant, notamment grâce à la définition juridique de la notion de subvention publique, les apports financiers à ces structures seront sécurisés, ce qui favorisera l’investissement. En outre, un accès facilité de ces structures à l’agrément « entreprises solidaires d’utilité sociale » leur permettra de bénéficier des financements de la Banque publique d’investissement.

La promotion par ce projet de loi des modes alternatifs de gestion des entreprises, et notamment du modèle coopératif, sera utile à l’ensemble de l’économie.

Ce modèle est utile ; il doit rester exemplaire. De ce point de vue, la généralisation de l’obligation de révision quinquennale à toutes les entreprises coopératives garantira la pérennité et l’excellence de leur mode de gestion participative.

Je tiens enfin à souligner l’utilité d’introduire la dimension environnementale dans la définition de cette économie.

Nous vous proposerons de rendre possible la valorisation des acquis de l’expérience pour les bénévoles des associations. Cette disposition favoriserait l’expansion de l’économie sociale et solidaire en encourageant des citoyens qui ont tendance à s’éloigner du bénévolat à se lancer dans l’engagement associatif.

La Commission en vient à l’examen des articles du projet de loi dont elle s’est saisie pour avis.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
DISPOSITIONS COMMUNES

chapitre ier
Principes et champ de l’économie sociale et solidaire

Article 1er
Périmètre de l’économie sociale et solidaire

Le I de l’article 1er du projet de loi donne de l’économie sociale et solidaire une définition à la fois souple et suffisamment large pour pouvoir englober des entités aux formes juridiques diverses. L’économie sociale et solidaire constitue « un mode d’entreprendre auquel adhèrent des personnes morales de droit privé » qui remplissent une série de conditions :

—  (1°) la poursuite d’un but autre que le seul partage des bénéfices ;

—  (2°) une gouvernance démocratique, organisée par les statuts, prévoyant la participation des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise ;

—  (3°) une gestion conforme à deux principes essentiels : (a) l’affectation majoritaire des bénéfices à l’activité (et non aux associés) et (b) la constitution de réserves obligatoires dites « impartageables ».

Deux amendements ont été adoptés par la commission des Affaires économiques du Sénat concernant le I du présent article. Le premier précise que les conditions énumérées sont cumulatives. Le second, présenté par son rapporteur, M. Marc Daunis, indique, dans un souci de clarté, que la gouvernance de la personne morale doit être démocratique « ou participative ».

L’article 1er ayant été adopté par la commission saisie au fond, plusieurs amendements adoptés en séance publique par le Sénat ont par la suite modifié à nouveau le I de cet article. Ainsi, un premier amendement, proposé par M. Jacques Mézard, précise que le mode d’entreprendre de l’économie sociale et solidaire est « adapté à tous les domaines de l’activité humaine ».

Un deuxième amendement, présenté par M. Gérard Le Cam et sous-amendé par M. Marc Daunis, réécrit de façon plus précise l’alinéa consacré à la « gouvernance démocratique ». Il écarte le qualificatif de « participative » et insiste sur le fait que « la participation (…) des associés et parties prenantes aux réalisations de l’entreprise » ne saurait être « seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière ».

Un troisième amendement, présenté par M. Jacques Mézard et sous-amendé par M. Marc Daunis, substitue l’expression « boni de liquidation » à celle d’« actif net » dans l’alinéa consacré aux réserves obligatoires (b du 3°). S’agissant des règles applicables à la dévolution en cas de liquidation ou de dissolution, l’utilisation de l’« actif net », qui correspond en droit des sociétés aux capitaux propres, n’est pas exacte. Il faut lui préférer celle de « boni de liquidation », qui se réfère aux sommes que les associés se partagent à la suite de la dissolution de la société, après que les actifs ont été réalisés, que les créanciers et le personnel ont été payés et que les apports ont été repris.

Le II de l’article 1er énumère les différentes personnes morales exerçant une activité dans le champ de l’économie sociale et solidaire.

Il s’agit, d’une part (1°), des quatre acteurs traditionnels de ce secteur que sont les coopératives (11), les mutuelles (12) et sociétés d’assurance mutuelle (13), les fondations (14) et les associations (15). Un amendement, présenté par M. Roland Courteau et adopté par la commission des Affaires économiques du Sénat, ajoute les unions de mutuelles à cette énumération.

Il s’agit, d’autre part (2°), de certaines sociétés commerciales dès lors qu’elles satisfont aux critères suivants :

—  elles respectent les conditions fixées au I du présent article et « poursuivent un objectif d’utilité sociale » au sens de l’article 2 du projet de loi ;

—  les bénéfices de chaque exercice (diminués le cas échéant des pertes antérieures) sont consacrés pour au moins 10 % (et pour au moins 15 % s’agissant des sociétés à responsabilité limitée et des sociétés par actions) à un fonds de réserve (dit « réserve statutaire ») et pour au moins 50 % au report bénéficiaire ;

—  leurs statuts prohibent le rachat d’actions ou de parts sociales, sauf lorsque ce rachat intervient dans des situations prévues par décret.

Deux amendements ont été adoptés par la commission des Affaires économiques du Sénat concernant les sociétés commerciales entrant dans le champ de l’économie sociale et solidaire. Un premier, présenté par le rapporteur, M. Marc Daunis, fait passer de 10 % à 15 % la fraction minimale des bénéfices annuels nets que les sociétés commerciales, quelle que soit leur forme juridique, doivent affecter à la « réserve statutaire ».

Un second, également présenté par le rapporteur, M. Marc Daunis, précise la rédaction de l’alinéa consacré à l’interdiction du rachat d’actions ou de parts sociales par la société elle-même. Un décret pourra prévoir non seulement les situations, mais aussi plus généralement les « conditions » de nature à permettre, par exception, un tel rachat. M. Marc Daunis, dans son rapport, cite, à titre d’illustration, un cas où une telle exception pourrait utilement être admise : « les fonds qui investissent dans des entreprises solidaires, par exemple, ont parfois besoin de demander à ces entreprises de racheter leurs actions afin de respecter certains quotas ou de récupérer des liquidités (16) ».

Plusieurs amendements adoptés en séance publique par le Sénat ont modifié le II de cet article. Un amendement de M. Jean-Pierre Godefroy a précisé que le champ de l’économie sociale et solidaire, loin de se restreindre à la production de biens et de services, incluait les activités « de distribution, d’échange et de consommation ».

Un amendement de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, a clarifié la présentation des différents critères que doit respecter une société commerciale, dans ses statuts, pour être reconnue comme entreprise de l’économie sociale et solidaire.

Un amendement de M. Gérard Le Cam a porté à 20 % le prélèvement minimum des bénéfices annuels nets que les sociétés commerciales doivent affecter à la réserve statutaire si elles souhaitent figurer parmi les acteurs de l’économie sociale et solidaire.

Un amendement présenté par M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques, prévoit que l’obligation d’affectation à la réserve statutaire s’éteint lorsque « les diverses réserves totalisées (…) atteignent (…) le montant du capital social ». En effet, la finalité qui justifie cette obligation, qui est de faire en sorte qu’une part importante des fonds propres provienne de l’activité de l’entreprise et non pas seulement du capital apporté par les associés, est ainsi suffisamment atteinte. Il serait absurde de contraindre l’entreprise à accumuler des réserves illimitées. L’entreprise demeure libre, bien entendu, de poursuivre la mise en réserve au-delà du montant du capital social si elle le juge opportun.

Le III dispose que les personnes morales de droit privé peuvent, à deux conditions, faire publiquement état de leur qualité d’entreprises de l’économie sociale et solidaire et bénéficier des droits qui s’y attachent (17). D’une part, elles doivent répondre aux prescriptions fixées au présent article. D’autre part, s’agissant des sociétés commerciales, elles doivent être immatriculées auprès de l’autorité compétente en tant qu’entreprises de l’économie sociale et solidaire.

À l’occasion de l’examen de l’article 1er en séance publique, le Sénat a adopté un amendement de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, précisant que cette immatriculation devait se faire « au registre du commerce et des sociétés avec la mention de la qualité d’entreprise de l’économie sociale et solidaire » et que les statuts des sociétés concernés devaient être conformes au 2° du II du présent article. Le greffier du tribunal de commerce, chargé de la tenue du registre et du contrôle des informations qui y sont portées, vérifiera ainsi la conformité des statuts de la société aux critères qu’impose la loi pour être admis dans le périmètre de l’économie sociale et solidaire.

Le IV de l’article 1er renvoie à un décret la fixation de ses conditions d’application. Un tel renvoi au pouvoir réglementaire paraît particulièrement opportun tant il semble difficile de prévoir, au sein d’un unique article de loi, des règles précises de gouvernance pour les acteurs multiples et diversifiés qui interviennent dans le champ de l’économie sociale et solidaire.

À la suite de l’adoption en séance publique de l’ensemble des amendements décrits plus haut, le Sénat a adopté l’article 1er ainsi modifié.

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis visant à mentionner expressément les salariés parmi les personnes devant participer aux réalisations d’une entreprise relevant de l’économie sociale et solidaire. L’une des caractéristiques de cette économie, du point de vue de la gouvernance, est bien en effet d’assurer une meilleure intégration des salariés aux décisions de l’entreprise, quelle que soit sa taille.

Elle a également adopté un second amendement de votre rapporteur pour avis prévoyant que les sociétés commerciales devraient, dans des conditions prévues par décret, produire tous les cinq ans au greffe du tribunal de commerce les éléments de nature à établir qu’elles respectent toujours les conditions leur permettant de faire publiquement état de leur qualité d’entreprises de l’économie sociale et solidaire. Il paraît important en effet de dissuader certaines sociétés commerciales de détourner le dispositif en se faisant immatriculer en tant qu’entreprises de l’économie sociale et solidaire, puis en se dispensant d’en respecter les conditions sans jamais régulariser leur situation au registre du commerce et des sociétés.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL4 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à préciser explicitement que tous les salariés de l’entreprise relevant de l’économie sociale et solidaire doivent être associés à ses décisions.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL8 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à permettre de vérifier qu’une société immatriculée au registre du commerce et des sociétés en tant qu’entreprise de l’économie sociale et solidaire satisfait bien dans la durée aux critères requis pour bénéficier de ce statut.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1ermodifié.

Article 2
Définition des entreprises recherchant une utilité sociale

L’objet de l’article 2 est de définir à quelles conditions une entreprise peut être considérée comme « recherchant une utilité sociale ». Une telle définition s’impose dans la mesure où cette recherche constitue l’une des conditions pour qu’une société commerciale puisse se voir reconnaître la qualité d’entreprise de l’économie sociale et solidaire.

Dans la version initiale du projet de loi présenté par le Gouvernement, une entreprise, pour pouvoir être considérée comme poursuivant un objectif d’utilité sociale, devait avoir un objet social :

—  soit (1°) ayant pour but d’apporter un soutien à des personnes (salariés, clients, membres, adhérents ou bénéficiaires) en situation de fragilité (du fait de leur situation économique ou sociale ou de leur situation personnelle) ;

—  soit (2°) ayant pour objectif de contribuer à la préservation et au développement du lien social, au maintien et au renforcement de la cohésion territoriale ou de concourir au développement durable.

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté, sur la proposition de son rapporteur M. Marc Daunis, un amendement précisant la définition de la recherche d’utilité sociale. L’entreprise qui recherche une telle utilité est celle dont l’objet social satisfait à l’une au moins parmi trois conditions :

—  la première (1°) reprend pour l’essentiel la première condition énoncée plus haut, en insistant toutefois sur le fait que les personnes soutenues peuvent se trouver en situation de fragilité du fait « de leur état de santé ou de leurs besoins d’accompagnement social ou médico-social » ;

—  la deuxième (2°) reproduit en grande partie la seconde condition énoncée à l’origine, en ajoutant cependant un objectif de « lutte contre les inégalités sanitaires, sociales et économiques » et en supprimant la référence au développement durable ;

—  la troisième (3°), nouvelle condition créée par l’amendement, prévoit que les entreprises peuvent être considérées comme recherchant une utilité sociale si « elles concourent au développement durable, sous réserve que leur activité soit liée à l’un des objectifs mentionnés aux 1° et 2° ».

La commission des Affaires économiques du Sénat a ensuite adopté l’article 2 ainsi modifié.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté un amendement présenté par le Gouvernement et portant sur la deuxième condition susmentionnée. Il ajoutait au critère de la lutte contre les inégalités sanitaires, sociales et économiques celui de la « lutte contre les exclusions ». Le Sénat a ensuite adopté l’article 2 ainsi modifié.

Il convient de noter que la rédaction de l’article 2 établit désormais une certaine hiérarchie entre les conditions énumérées. Chacune des deux premières se suffit à elle-même alors que la troisième, celle qui concerne la contribution au développement durable, n’est recevable que si l’activité de l’entreprise entre dans le champ d’une des deux premières. La rédaction de l’article 2 fait d’ailleurs ressortir une certaine contradiction puisque le premier alinéa requiert que l’objet social de l’entreprise satisfasse « à l’une au moins des trois conditions » (ce qui signifie qu’elles sont alternatives) alors que la troisième d’entre elles exige que l’une des deux autres soit simultanément remplie.

Votre rapporteur pour avis a déposé un amendement réécrivant, selon les termes suivants, la troisième condition nécessaire pour que des entreprises soient considérées comme recherchant une utilité sociale : « Elles concourent au développement durable dans ses dimensions économique, sociale, environnementale et participative. En conséquence, elles démontrent une utilité dans le soutien qu’elles apportent aux espaces en fragilité. » Adopté par la commission des Lois, cet amendement présente l’avantage de supprimer la hiérarchie entre les trois objectifs. La contribution au développement durable devient une condition à part entière, sans aucune réserve. Par ailleurs, le développement durable est mieux défini, par référence aux quatre piliers sur lesquels il repose : économique, social, environnemental et participatif. Enfin, la notion d’utilité environnementale est intégrée à celle d’utilité sociale.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL2 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les entreprises sont considérées comme recherchant une utilité sociale lorsqu’elles satisfont au moins l’une des trois conditions posées par l’article 2. Je propose que la troisième de ces conditions soit énoncée comme suit : « Elles concourent au développement durable dans ses dimensions économique, sociale, environnementale et participative. En conséquence, elles démontrent une utilité dans le soutien qu’elles apportent aux espaces en fragilité. » Dans la rédaction initiale, le respect de cette troisième condition était subordonné à la satisfaction de l’une des deux autres. Avec cette nouvelle rédaction, nous supprimons cette hiérarchie. D’autre part, nous précisons la définition de « développement durable », en indiquant que celui-ci repose sur quatre piliers : économique, social, environnemental et participatif.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

Chapitre II
Organisation et promotion de l’économie sociale et solidaire

Section 3
Organisation et promotion de l’économie sociale et solidaire

Article 5 A (nouveau)
Élaboration d’une stratégie régionale de l’économie sociale et solidaire

Fruit d’un amendement adopté par la commission des Affaires économiques du Sénat (18), l’article 5 A prévoit l’élaboration par la région d’une « stratégie régionale de l’économie sociale et solidaire », appelée à trouver place au sein de son schéma régional de développement économique (SRDE).

Le même article additionnel prévoit aussi que la région pourra contractualiser avec les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre pour la mise en œuvre des stratégies concertées et le déploiement de l’économie sociale et solidaire sur le territoire régional.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté d’abord un amendement rédactionnel de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois du Sénat. Il a également adopté un second amendement, présenté par M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques, précisant que l’élaboration de la « stratégie régionale » visée plus haut devait se faire en concertation avec la chambre régionale d’économie sociale et solidaire (CRESS) ainsi qu’avec les organismes et entreprises de l’économie sociale et solidaire. Ceux-ci sont en effet concernés au premier chef par la mise en œuvre des stratégies régionales dans ce domaine. Les associer à la phase d’élaboration de ces stratégies ne peut que contribuer à rendre celles-ci plus cohérentes et plus adaptées aux besoins identifiés. Le fait de les inclure dans le processus d’élaboration est d’autant plus logique que l’article 5 B du projet de loi prévoit par ailleurs de les inviter à la conférence régionale de l’économie sociale et solidaire qu’il institue.

Le Sénat a ensuite adopté l’article 5 A ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 A sans modification.

Article 5 B (nouveau)
Organisation bisannuelle d’une conférence régionale de l’économie sociale et solidaire

Introduit par la commission des Affaires économiques du Sénat (19), cet article additionnel prévoit, dans un I, l’organisation tous les deux ans d’une conférence régionale de l’économie sociale et solidaire, réunissant notamment les membres de la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, les réseaux locaux d’acteurs, les représentants des collectivités territoriales et les partenaires sociaux.

Le II du même article précise que cette conférence sera l’occasion de débattre des orientations, des moyens et des résultats des politiques locales de développement de l’économie sociale et solidaire et de présenter l’évaluation de la délivrance de l’agrément « entreprises solidaires d’utilité sociale (20) ».

La commission des Affaires économiques du Sénat, puis le Sénat lui-même, ont adopté cet article ainsi rédigé.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 B sans modification.

Article 5
Institution de pôles territoriaux de coopération économique

S’inspirant du succès rencontré par les pôles de compétitivité, le I de l’article 5 inscrit dans la loi l’existence de « pôles territoriaux de coopération économique » (PTCE) associant des entreprises de l’économie sociale et solidaire avec d’autres entreprises, des collectivités territoriales, des centres de recherche et des organismes de formation. Leur finalité est de « mettre en œuvre une stratégie commune et continue de mutualisation au service de projets économiques innovants socialement et porteurs d’un développement local durable ».

Ces pôles existent déjà dans la pratique. Ils interviennent dans des domaines tels que l’insertion, la petite enfance, les énergies renouvelables, le recyclage ou encore l’agriculture biologique. La mise en commun de locaux, de services ou de compétences manifeste la vitalité de l’économie sociale et solidaire et encourage les acteurs à se rapprocher de ce modèle.

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté, sur la proposition de son rapporteur M. Marc Daunis, un amendement prévoyant que le regroupement des entreprises au sein du pôle se fait « en lien » avec les collectivités territoriales et les autres personnes physiques ou morales concernées, alors que la rédaction initiale du texte évoquait simplement une association « le cas échéant » avec celles-ci.

Par ailleurs, dans la version initiale du projet de loi présenté par le Gouvernement, le II de l’article 5 se contentait de renvoyer à un décret la procédure et les critères de sélection des projets. Modifiant cette rédaction, l’amendement précité a, d’une part, souligné le rôle de l’État dans la désignation des PTCE (les pôles sont désignés, dans le cadre d’appels à projet, « par un comité interministériel, après avis de personnalités qualifiées ») et, d’autre part, renvoyé à un décret en Conseil d’État la fixation des modalités d’application de l’article 5.

La commission des Affaires économiques du Sénat a ensuite adopté l’article 5 ainsi modifié.

Plusieurs autres amendements ont été adoptés à l’occasion de l’examen du texte en séance publique. Le premier, présenté par Mme Marie-Noëlle Lienemann, prévoyait que les « établissements d’enseignement supérieur et de recherche » figurent parmi les organismes susceptibles de nouer un lien avec les membres fondateurs d’un PTCE et insistait sur la nature sociale et, le cas échéant, sur la dimension d’innovation technologique, des projets que les PTCE devaient contribuer à promouvoir.

Le Sénat a aussi adopté un amendement présenté par M. Martial Bourquin, précisant que la désignation des PTCE devrait être effectuée après consultation des représentants des collectivités territoriales, et notamment des conseils régionaux.

Il a enfin adopté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Godefroy (21), indiquant que le décret en Conseil d’État mentionné au II du présent article devra préciser les « modalités d’accompagnement » des projets sélectionnés. À défaut, la complexité propre à la création et au développement d’un PTCE pourrait décourager certains acteurs et les dissuader de répondre aux appels à projet.

Le Sénat a ensuite adopté l’article 5 B ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 sans modification.

Article 6
(art. 21 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris)

Inclusion dans les contrats de développement territorial d’un volet consacré au développement de l’économie sociale et solidaire

L’article 21 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris prévoit que des contrats de développement territorial (CDT) peuvent être conclus entre le préfet de la région Île-de-France, d’une part, et les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), d’autre part. Ces contrats sont des outils de planification et de programmation en matière de développement économique, urbain et social de territoires définis comme stratégiques sur le périmètre du Grand Paris. Ils définissent « les objectifs et les priorités en matière d’urbanisme, de logement, de transports, de déplacements et de lutte contre l’étalement urbain, d’équipement commercial, de développement économique, sportif et culturel, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et des paysages et des ressources naturelles (22) ». Chaque contrat « porte sur le développement d’un territoire inclus dans un ensemble de communes d’un seul tenant et sans enclave (23) ».

Dans sa version initiale, l’article 6 du projet de loi imposait à ces contrats, dans un nouvel alinéa créé au sein de l’article 21 de la loi précitée, de « prendre en compte » les entreprises de l’économie sociale et solidaire de leur territoire.

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté, sur la proposition de son rapporteur M. Marc Daunis, un amendement prévoyant, de manière plus large, que les contrats en cause devraient inclure « un volet visant au développement de l’économie sociale et solidaire sur leur territoire ». Dans un souci de sécurité juridique, il était aussi précisé que la nouvelle disposition ne serait pas applicable aux contrats conclus avant la promulgation de la loi, mais qu’en revanche le premier avenant conclu devrait intégrer un tel volet. Ces dispositions figurent dans un complément apporté au quatrième alinéa du I de l’article 21 de la loi précitée.

La commission des Affaires économiques du Sénat, puis le Sénat lui-même en séance publique, ont ensuite adopté l’article ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 sans modification.

Section 4 (nouvelle)
Promotion de l’économie sociale et solidaire

Cette section nouvelle résulte de l’adoption par la commission des Lois d’un amendement de votre rapporteur pour avis. Cette nouvelle section comprendrait trois articles, tous issus d’amendements du même auteur.

*

* *

La Commission adopte l’amendement CL13 du rapporteur pour avis portant sur l’insertion de la section 4 dans le chapitre II du titre Ier du projet de loi.

Article 6 bis (nouveau)
(art. 1679 A du code général des impôts)

Majoration de l’abattement de la taxe sur les salaires pour les entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire

Le présent article est issu d’un amendement de votre rapporteur pour avis, adopté par la commission des Lois.

L’article 1679 A du code général des impôts prévoit pour les entreprises qui ne relèvent pas de l’impôt sur les sociétés – et qui ne peuvent donc pas bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (24) prévu à l’article 244 quater C du code général des impôts (25) – de voir le montant de la taxe sur les salaires qu’elles acquittent faire l’objet d’un abattement de 20 000 euros.

Le présent amendement portant article additionnel, qui se placerait dans une nouvelle section 4 intitulée « Promotion de l’économie sociale et solidaire », propose de porter cet abattement à 30 000 euros pour les entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire, compte tenu de leur utilité sociale et environnementale.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL14 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les entreprises de l’économie sociale et solidaire ne relèvent pas de l’impôt sur les sociétés et ne peuvent donc pas bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Elles subissent ainsi une forme de distorsion de concurrence. À titre de compensation, je propose qu’elles bénéficient d’un abattement de 30 000 euros sur le montant de la taxe sur les salaires qu’elles acquittent.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Monsieur le rapporteur pour avis, cette proposition a-t-elle été discutée avec les autres commissions saisies du projet de loi et fait-elle l’objet d’un accord ? Cet amendement sera-t-il défendu par d’autres commissions ou seulement par la nôtre ?

M. le rapporteur pour avis. Dans cette version, il n’est soumis qu’à notre Commission. Mais d’autres commissions examineront des amendements équivalents. Cette disposition est appelée à évoluer en fonction du débat que nous aurons avec le Gouvernement en séance publique.

M. Daniel Gibbes. Les entreprises de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ne bénéficient pas non plus du CICE, car elles ne sont pas soumises à l’impôt sur les sociétés. J’ai posé une question écrite à ce sujet ; on m’a répondu que le CICE n’était pas applicable à Saint-Martin, parce que la collectivité se trouvait hors du dispositif fiscal métropolitain. En toute logique, la proposition que vous faites, monsieur le rapporteur pour avis, devrait être rejetée. Si elle était acceptée, les entreprises de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy devraient pouvoir bénéficier d’un avantage fiscal équivalent.

Mme Cécile Untermaier. L’amendement est-il recevable au titre de l’article 40 de la Constitution ?

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il est gagé et jugé recevable par le président de la commission des Finances.

M. le rapporteur pour avis. Nous ne créons pas de nouvelle exonération. Un abattement de 20 000 euros est déjà prévu par le code général des impôts pour les associations, les syndicats professionnels et certaines mutuelles. Nous proposons de le porter à 30 000 euros pour les entreprises de l’économie sociale et solidaire.

M. Daniel Gibbes. Si nous ouvrons cette porte, nous pourrons en ouvrir une deuxième.

La Commission adopte l’amendement.

Article 6 ter (nouveau)
(art. L. 6323
6 du code du travail)
Mobilisation du compte personnel de formation pour les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire

Ce deuxième article de la nouvelle section 4 est également issu d’un amendement de votre rapporteur pour avis, adopté par la commission des Lois. Il vise à compléter le I de l’article L. 63236 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Cette loi a créé le « compte personnel de formation » (CPF), appelé à remplacer le « droit individuel à la formation » (DIF) au 1er janvier 2015. Ce nouvel article inscrit, parmi les formations éligibles au CPF, « les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire ». Ces formations permettront aux personnes ayant un emploi ou à la recherche d’un emploi de pouvoir ensuite porter un projet en lien avec l’économie sociale et solidaire (formation à l’utilité sociale et environnementale, aux techniques managériales de l’économie sociale et solidaire, à la reprise d’entreprise, etc.).

*

* *

La Commission examine l’amendement CL11 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rendre les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’économie sociale et solidaire éligibles au compte personnel de formation. Diriger une association ou reprendre une entreprise sous forme de société coopérative, cela s’apprend.

La Commission adopte l’amendement.

Article 6 quater (nouveau)
Intégration des acteurs de l'économie sociale et solidaire dans les instances du dialogue social

Fruit lui aussi d’un amendement de votre rapporteur pour avis, adopté par la commission des Lois, le troisième article de la nouvelle section 4 vise à mieux intégrer les acteurs de l'économie sociale et solidaire dans les instances du dialogue social. Dans ce but, il prévoit que « l’organisation professionnelle la plus représentative des employeurs de l’économie sociale et solidaire » participe de plein droit, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, aux négociations réunissant l’État, les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel et les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel.

*

* *

La Commission en vient à l’amendement CL12 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à mieux intégrer les acteurs de l’économie sociale et solidaire dans les instances du dialogue social. Il prévoit que l’organisation professionnelle la plus représentative des employeurs de l’économie sociale et solidaire participe de plein droit aux négociations au niveau national. Actuellement, la représentation patronale du secteur fait encore l’objet d’un débat, et l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES) n’est pas considérée comme représentative au niveau national et interprofessionnel au sens de la loi.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Nous sommes nombreux à avoir reçu des délégations d’employeurs dans nos permanences respectives. Les structures patronales existent, et il est légitime qu’elles trouvent leur place dans le dialogue social au niveau national.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre III
Les dispositifs qui concourent au développement des entreprises de l’économie sociale et solidaire

Section 3
La commande publique

Article 9 A (nouveau)
(art. 16 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics)

Marchés ou lots réservés

L’article 9 A du projet de loi est un article additionnel issu d’un amendement, présenté par M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques du Sénat, et adopté par celle-ci.

Il modifie l’article 16 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. Cet article 16 prévoit déjà, dans sa rédaction actuelle, que certains marchés peuvent être confiés, sans mise en concurrence, à des entreprises adaptées ou à des établissements et services d’aide par le travail (ESAT), lorsque la majorité des travailleurs concernés sont des personnes handicapées.

Dans la nouvelle rédaction prévue par le présent article, l’article 16 va plus loin puisqu’il dispose que les organismes soumis à l’ordonnance précitée peuvent passer des marchés réservés à des structures dont « plus de 30 % des travailleurs concernés [sont] des personnes handicapées ou défavorisées ». L’on passe donc d’un critère unique de handicap à deux critères alternatifs de handicap ou de situation défavorisée. On passe aussi d’une condition de majorité à un pourcentage de seulement 30 % des salariés. L’objet d’une telle évolution est bien entendu d’amplifier les actions contribuant à l’accès ou au retour à l’emploi des personnes qui en sont le plus éloignées.

Outre des raisons de fond, M. Marc Daunis a également mis en avant, pour justifier l’introduction de cet article additionnel, l’utilité de transposer dans les meilleurs délais une proposition de directive européenne du Parlement européen et du Conseil sur la passation des marchés publics (26), comme il s’en explique dans son rapport : « L’article 17 de la proposition de directive européenne du Parlement européen et du Conseil (COM(2011)896) sur la passation des marchés publics étend cette possibilité : désormais la procédure de passation de marchés publics pourra être réservée à ce type d’organisme à condition que plus de 30 % du personnel soient des travailleurs handicapés ou défavorisés. Si la directive n’est pas encore publiée, il a paru opportun (…) d’en reprendre cette disposition. En effet, il paraît probable qu’elle le sera avant la promulgation de la présente loi. Son insertion dans le présent projet de loi permettra la transposition de cet article de la directive, et donc son entrée en vigueur, la plus rapide possible (27). » La directive en cause a depuis lors été publiée au Journal Officiel de l’Union Européenne du 28 mars 2014 (28). Le dispositif auquel il était fait référence se trouve au 1 de l’article 20 (intitulé « Marchés réservés ») de la directive publiée, qui dispose : « Les États membres peuvent réserver le droit de participer aux procédures de passation de marchés publics à des ateliers protégés et à des opérateurs économiques dont l’objet principal est l’intégration sociale et professionnelle de personnes handicapées ou défavorisées, ou prévoir l’exécution de ces marchés dans le contexte de programmes d’emplois protégés, à condition qu’au moins 30 % du personnel de ces ateliers, opérateurs économiques ou programmes soient des travailleurs handicapés ou défavorisés. »

La commission des affaires économiques du Sénat, puis le Sénat lui-même en séance publique, ont adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Auditionné par votre rapporteur pour avis, M. Bertrand du Marais, conseiller d’État et professeur de droit public, a souligné que l’expression « personnes défavorisées » était juridiquement imprécise et donc, potentiellement, source de contentieux. Il a donc suggéré de renvoyer à un décret le soin de préciser la définition de cette expression, par exemple par référence à la définition du seuil de pauvreté. On pourrait aussi, de façon alternative, faire référence à l’article 2 du présent projet de loi qui évoque les « personnes en situation de fragilité soit du fait de leur situation économique ou sociale, soit du fait de leur situation personnelle et particulièrement de leur état de santé ou de leurs besoins d’accompagnement social ou médico-social ».

Optant pour la première option, votre rapporteur pour avis a déposé un amendement, adopté par la commission des Lois, renvoyant à un décret en Conseil d’État le soin de préciser « les conditions d’application du présent article, et notamment les critères définissant la notion de personne défavorisée. »

*

* *

La Commission examine l’amendement CL5 du rapporteur pour avis.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit de l’amendement que vous avez annoncé dans votre propos introductif, monsieur le rapporteur. Il vise à ce que la notion de « personnes défavorisées » soit précisée par un décret en Conseil d’État.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 A modifié.

Article 9
Adoption et publication par les acheteurs publics d’un schéma de promotion des achats socialement responsables

Le I de l’article 9 impose aux collectivités territoriales et aux autres acheteurs publics dont le statut est de nature législative d’adopter et de publier un schéma de promotion des achats publics socialement responsables.

Sont concernés les collectivités territoriales et les établissements publics locaux (mentionnés au 2° de l’article 2 du code des marchés publics), d’une part, et les pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices de statut législatif visés aux articles 3 et 4 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 (29), d’autre part, dès lors que le montant total annuel des achats effectués excède un montant fixé par décret. Comme le note M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois du Sénat, « l’intervention du législateur se justifie, conformément à l’article 34 de la Constitution, pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics dans la mesure où elle apporte une limitation au principe de libre administration (30) ».

Le schéma détermine des objectifs de passation de marchés publics comportant des éléments à caractère social visant à concourir à l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés, ainsi que les modalités de mise en œuvre et de suivi de ces objectifs. Le I de l’article 9 du projet de loi n’apporte pas davantage de précisions sur le contenu du schéma et ne renvoie pas non plus à un décret en la matière. Une assez grande marge de manœuvre est donc laissée au pouvoir adjudicateur ou à l’entité adjudicatrice. Ce qui est exigé de ce pouvoir ou de cette entité, c’est une forme d’engagement public sur des objectifs en matière d’achats socialement responsables.

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois du Sénat, relève le caractère essentiellement incitatif de la disposition prévue par le I de l’article 19 puisque « le non-respect de cette obligation d’élaboration et de publication du schéma ne serait assorti d’aucune sanction pour le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice (31) » et que « ce schéma ne constituerait pas un acte opposable au pouvoir adjudicateur ou à l’entité adjudicatrice, ce qui exclut qu’il puisse être invoqué devant le juge saisi d’un recours contre un marché public ultérieur (32) ».

On notera que le code des marchés publics autorise déjà, sous certaines conditions, la prise en compte d’éléments d’ordre social ou environnemental dans la passation des marchés publics. Ainsi, son article 14 dispose que « les conditions d’exécution d’un marché ou d’un accord-cadre peuvent comporter des éléments à caractère social ou environnemental qui prennent en compte les objectifs de développement durable en conciliant développement économique, protection et mise en valeur de l’environnement et progrès social ». Quant à l’article 15, il énonce que « certains marchés ou certains lots d’un marché peuvent être réservés à des entreprises adaptées ou à des établissements et services d’aide par le travail (…), ou à des structures équivalentes, lorsque la majorité des travailleurs concernés sont des personnes handicapées qui, en raison de la nature ou de la gravité de leurs déficiences, ne peuvent exercer une activité professionnelle dans des conditions normales ».

Pourtant, malgré l’adaptation des outils réglementaires, le recours aux clauses sociales demeure aujourd’hui trop peu développé, comme le souligne l’étude d’impact : « Si, pour les collectivités territoriales, la moyenne des marchés à clause sociale a atteint 5,5 % en 2011, pour l’État elle s’est établie à 1,7 %. Même si l’on retire les quelques très gros marchés peu adaptés à la mise en œuvre de clauses sociales, le taux des marchés de l’État comportant de telles clauses n’a pas dépassé en 2011 les 2,5 % (33) ».

L’obligation d’élaborer le schéma prévu au présent article devrait inciter les collectivités à développer une vision non pas exclusivement financière, mais globale (incluant donc une dimension sociale) de leur politique d’achats. Cela passera concrètement par l’introduction accrue de clauses sociales dans les cahiers des charges, de manière à encourager l’activité des structures d’insertion employant des personnes handicapées ou défavorisées.

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis ayant pour objet d’inclure l’État (et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial) dans la liste des pouvoirs adjudicateurs (ou entités adjudicatrices) devant adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsables.

Un autre amendement, lui aussi adopté par la commission des Lois à l’initiative de votre rapporteur pour avis, précise que les objectifs de passation de marchés publics déterminés par ces schémas peuvent comporter des éléments à caractère « d’utilité sociale ». Il est ainsi fait référence à la notion dégagée et explicitée par l’article 2 du projet de loi.

Le II de l’article 9 est issu d’un amendement présenté par Mme Christiane Demontès, rapporteur au nom de la commission des Affaires sociales, et adopté par la commission des Affaires économiques du Sénat. Il prévoit la signature, dans chaque région, d’une convention entre le représentant de l’État et un ou plusieurs organismes dont le but est de faciliter le recours aux clauses concourant à l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés. Il précise que les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices mentionnés au I de l’article 9 peuvent être parties à cette convention.

La commission des Affaires économiques du Sénat a ensuite adopté l’article 9 ainsi modifié.

Lors de la séance publique, le Sénat a examiné un amendement présenté par M. Roland Courteau, précisant que les organismes appelés à conclure une convention avec le représentant de l’État en vertu du II de l’article 9 devaient être « en priorité les maisons de l’emploi et les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi ayant la fonction de facilitateurs ». Les auteurs de l’amendement avaient fait valoir que les maisons de l’emploi (MDE) et les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi (PLIE) étaient à l’origine de la clause et de la fonction de « facilitateurs (34) ». Ils avaient aussi rappelé que ces organismes portaient le guichet unique partenarial permettant aux chefs d’entreprise d’avoir un interlocuteur unique et aux maîtres d’ouvrage d’harmoniser leurs pratiques (en termes d’insertion de clauses sociales dans les marchés). Aussi, à leurs yeux, était-il opportun qu’ils soient cités dans la loi.

Le Sénat a adopté cet amendement, puis l’article 9 ainsi modifié.

À l’avenir, la création de modalités de suivi ou de contrôle de la mise en œuvre des clauses sociales d’un point de vue qualitatif pourrait se révéler particulièrement utile. On pourrait étudier les moyens de faire de la qualité des mesures d’insertion proposées un véritable critère dans l’attribution des marchés publics. Il convient à cet égard de noter qu’en application de l’article 67 de la directive 2014/24/UE (35), dans le but de de choisir l’offre économiquement la plus avantageuse, les pouvoirs adjudicateurs doivent déjà tenir compte des « aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux liés à l’objet du marché » dans la détermination du rapport qualité-prix, les « caractéristiques sociales » faisant partie de la qualité (36).

Il est par ailleurs permis d’observer que la mise en avant des maisons de l’emploi et des PLIE dans le processus de conclusion des conventions entre l’État et les organismes facilitateurs est sujette à discussion. L’efficacité réelle de ces organismes, comparée à l’ampleur de leurs moyens, a en effet été mise en question par plusieurs analystes (37).

C’est pourquoi votre rapporteur pour avis a déposé un amendement visant à supprimer la mention expresse des PLIE et des maisons de l’emploi dans le II de l'article 9. Cet amendement a été adopté par la commission des Lois.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL16 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à inclure l’État et ses établissements publics autres que ceux qui ont un caractère industriel et commercial dans la liste des donneurs d’ordres qui devront adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsables.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL10 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à préciser que les objectifs de passation de marchés publics déterminés par les schémas de promotion des achats publics socialement responsables peuvent comporter des éléments non seulement « à caractère social », mais aussi « à caractère d’utilité sociale ». La notion d’« utilité sociale » est définie à l’article 2 du projet de loi.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL3 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Aux termes d’un amendement adopté par le Sénat, une convention devra être conclue, dans chaque région, entre le préfet et les organismes dont le but est de faciliter le recours aux clauses concourant à l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés. Il est prévu que ces conventions soient conclues en priorité avec les maisons de l’emploi (MDE) et les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi (PLIE). Je propose de supprimer cette dernière disposition. Il ne s’agit nullement d’exclure les MDE et les PLIE du dispositif, mais de laisser au préfet de région le soin de choisir le ou les organismes les plus appropriés.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 modifié.

Article 10
(art. 10 A [nouveau] et 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations)

Définition de la subvention publique

Le 1° de l’article 10 du projet de loi introduit dans la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (dite loi « DCRA ») une définition de la subvention publique.

Aux termes du nouvel article 9-1 ainsi créé, inséré au début du chapitre III (38) du titre Ier (39) de cette loi, « constituent des subventions les contributions facultatives de toute nature, sous forme pécuniaire ou en nature, dont le montant est évalué dans l’acte d’attribution, attribuées par les autorités administratives (40) et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la conduite d’une action ou au financement de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire ». Les principaux critères de la subvention publique sont ainsi le motif d’intérêt général, la nature privée de l’organisme bénéficiaire et le caractère facultatif de la contribution accordée.

Il est également précisé que l’action ou l’activité en cause doit provenir de l’initiative de l’organisme de droit privé bénéficiaire et que les contributions attribuées ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités qui les accordent. La subvention publique est ainsi clairement distinguée de la commande publique.

M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques du Sénat, a mis en évidence les bénéfices apportés par cette définition : « Cette définition de la subvention [vient] combler un véritable manque. De nombreuses collectivités hésitent à utiliser la subvention, perçue comme risquée sur le plan juridique, et recourent à la procédure des marchés publics dans des cas où cela ne devrait pas être nécessaire. Or la subvention, telle qu’elle est encadrée par la loi du 12 avril 2000, présente des avantages qui devraient, grâce à la sécurisation apportée par le présent article, justifier son utilisation plus large — sans que cela signifie un accroissement des dépenses publiques, puisque celles-ci prennent sans cela la voie des marchés publics, avec la lourdeur et les frais de gestion y afférents (41). » En d’autres termes, de nombreuses collectivités territoriales (et établissements publics) qui ont aujourd’hui recours, par prudence, à la procédure de passation des marchés publics, seront confortées, lorsqu’elles le jugeront pertinent, dans leur volonté de se tourner vers le mécanisme de la subvention publique, sans avoir à craindre de la part du juge une requalification de l’aide ainsi apportée en marché public. Le fait de préciser ainsi dans la loi la notion de subvention publique constitue une reconnaissance de l’utilité et de la qualité des services rendus par de nombreux organismes de droit privé et, en particulier, par des associations œuvrant dans le domaine de l’économie sociale et solidaire.

La commission des Lois a adopté, sur proposition de votre rapporteur pour avis, un amendement définissant la procédure d’« appel à initiatives » et donnant à celle-ci les garanties nécessaires en termes de sécurité juridique. Il crée pour cela un nouvel article 10 B au sein de la loi du 12 avril 2000. L’appel à initiatives y est défini comme « une procédure facultative par laquelle des autorités administratives invitent des organismes de droit privé à proposer des projets en cohérence avec les spécificités d’un territoire mises en évidence par l’établissement d’un diagnostic préalable partagé ». Un décret déterminera le contenu du diagnostic préalable et les modalités de mise en œuvre de la procédure. Il est également précisé dans l’article en cause que les organismes de droit privé peuvent remettre, à l’appui de leurs projets, une demande de subventions et que, dans ce cas, une convention de subvention doit être établie.

Le du même article du projet de loi procède à des adaptations de l’article 10 de la loi du 12 avril 2000.

D’une part, il précise que la convention dont la conclusion est obligatoire, dans les hypothèses où la subvention accordée excède 23 000 euros (42), doit mentionner non seulement son objet, son montant et ses conditions d’utilisation, mais aussi sa durée de versement.

D’autre part, il étend les dispositions relatives aux modalités d’attribution et de suivi des subventions (fixées à l’alinéa 6 de l’article 10 de la loi du 12 avril 2000), non plus aux seules autorités administratives, mais aussi aux organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial.

Après avoir adopté un amendement rédactionnel, la commission des Affaires économiques du Sénat a adopté l’article 10 ainsi modifié (43).

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté un amendement de simplification et de précision rédactionnelle, présenté par M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, puis a adopté l’article 10 ainsi modifié.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL17 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à définir l’appel à initiatives. Par cette procédure, les collectivités publiques peuvent inviter les organismes de droit privé, les associations par exemple, à proposer des projets pour répondre à un besoin préalablement défini en commun. Les autres commissions saisies du projet de loi formuleront probablement des propositions distinctes sur ce point. Le rapporteur de la commission saisie au fond, en particulier, cherche à élargir les possibilités d’accès aux subventions publiques, dans le respect du droit européen, très strict en la matière.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 modifié.

TITRE II
DISPOSITIONS FACILITANT LA TRANSMISSION D’ENTREPRISES À LEURS SALARIÉS

Article 11 A (nouveau)
Création d’un dispositif d’information régulière des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise

L’article 11 A est un article additionnel résultant d’un amendement proposé par M. Marc Daunis, rapporteur de la commission des Affaires économiques du Sénat. Il prévoit un dispositif d’information, au moins triennale, des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise et sur les dispositifs d’aide dont ils peuvent bénéficier.

Ce dispositif est appelé à ne concerner que les sociétés employant moins de deux cent cinquante salariés et soumises au livre II du code de commerce (44). Le contenu et les modalités de l’information doivent être définis par décret.

La commission des Affaires économiques du Sénat, puis le Sénat lui-même en séance publique, ont adopté cet article additionnel.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 A sans modification.

Article 11
(art. L. 141-23 à L. 141-30 [nouveaux] du code de commerce)

Création d’un dispositif d’information préalable des salariés en cas de cession d’un fonds de commerce

L’article 11 du projet de loi prévoit une information obligatoire des salariés, en cas de projet de cession d’un fonds de commerce, afin de leur permettre de présenter une offre de reprise. M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques du Sénat, a souligné à juste raison l’apport pédagogique de cette disposition : « Le propriétaire, sachant qu’il devra prévenir ses salariés deux mois avant la cession effective, a tout intérêt à les associer plus longtemps à l’avance à son projet ou à la vie de l’entreprise. Une telle mesure doit permettre de faciliter l’identification des salariés qui auraient la capacité et le désir d’assumer la charge de la reprise de l’entreprise (45) ».

L’article 11 crée deux nouvelles sections (3 et 4) au sein du chapitre Ier  (46) du titre IV (47) du livre Ier (48) du code de commerce.

1.  Dans les entreprises de moins de cinquante salariés

La section 3 (articles L. 141-23 à L. 141-26) porte sur les entreprises employant moins de cinquante salariés et non soumises, par conséquent, à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en vertu de l’article L. 2322-1 du code du travail (49). Un mécanisme d’information est prévu au bénéfice du personnel afin de lui permettre de présenter une offre en cas de cession du fonds de commerce.

L’article L. 141-23 prévoit que le propriétaire d’un fonds de commerce doit notifier à ses salariés, au moins deux mois à l’avance, son intention de vendre celui-ci, afin de permettre à un ou plusieurs d’entre eux de présenter une offre d’acquisition. Si le propriétaire du fonds ne l’exploite pas lui-même, la notification doit être effectuée auprès de l’exploitant du fonds à qui il incombe, aux termes de l’article L. 141-24, de la porter à la connaissance du personnel. Le délai de deux mois peut être abrégé dès lors que les salariés ont fait connaître au cédant leur décision de ne pas présenter d’offre. Faute d’information des salariés, la cession encourt l’annulation, à leur demande. L’action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de l’avis de cession du fonds.

L’article L. 141-24 dispose que l’information des salariés peut être effectuée selon tout moyen et impose à l’exploitant (qui peut, le cas échéant, être le propriétaire lui-même) de préciser aux salariés qu’ils peuvent lui présenter une offre de rachat. Le même article met à la charge des salariés une obligation de discrétion.

L’article L. 141-25 précise que, si la cession n’est pas intervenue au terme d’un délai de deux ans (courant à compter de la fin du délai de deux mois), la notification et l’information doivent être renouvelées.

L’article L. 141-26 indique que le dispositif n’est pas applicable, d’une part, en cas de transmission dans un cadre familial (succession, liquidation du régime matrimonial ou cession du fonds à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant) et, d’autre part, aux sociétés faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.

2.  Dans les entreprises de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés

La section 4 (articles L. 141-27 à L. 141-30) porte sur les entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés et soumises, par conséquent, à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail. Un dispositif d’information anticipée est là aussi prévu en faveur du personnel afin de lui permettre, en cas de cession du fonds de commerce, de présenter une offre.

Aux termes de l’article L. 141-27, il appartient au cédant de notifier à l’exploitant son intention de vendre. À son tour, l’exploitant doit porter cette intention de cession à la connaissance des salariés en même temps que, en application de l’article L. 2323-19 du code du travail (50), il informe et consulte le comité d’entreprise. L’exploitant doit préciser aux membres du personnel qu’ils peuvent présenter au cédant une offre de rachat. Le non-respect des règles posées à l’article L. 141-27 expose la cession à une annulation par la juridiction civile ou commerciale compétente, saisie par les salariés.

L’article L. 141-28 prévoit que l’exploitant (qui peut, le cas échéant, être le propriétaire lui-même) informe les salariés qu’ils peuvent lui présenter une offre de reprise. Le même article met à la charge des salariés une obligation de discrétion.

L’article L. 141-29 précise que, si la cession n’est pas intervenue au terme d’un délai de deux ans, la notification et l’information doivent être renouvelées. La saisine du comité d’entreprise en vue de sa consultation sur un projet de cession en application de l’article L. 2323-19 du code du travail entraîne la suspension de ce délai de deux ans.

Aux termes de l’article L. 141-30, le dispositif n’est pas applicable en cas de cession dans le cadre familial ou de procédure collective en cours. Le même article exclut également du champ du dispositif les « sociétés qui dépassent, à la clôture d’un exercice social, les seuils définissant les petites et moyennes entreprises prévus à l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises (51) ».

3.  Les modifications apportées par la commission des Affaires économiques du Sénat

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté trois amendements de fond. Le premier, présenté par le Gouvernement, prévoit, dans un but de sécurité juridique tant pour le chef d’entreprise que pour les salariés, que l’information de ceux-ci peut se faire par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par les intéressés.

Le deuxième, également présenté par le Gouvernement, précise que l’obligation de discrétion des salariés suit le même régime que celui applicable aux membres des comités d’entreprise en vertu de l’article L. 2325-5 du code du travail (52).

Le troisième, présenté par Mme Christiane Demontès au nom de la commission des Affaires sociales du Sénat, apporte des précisions sur les conditions de suspension du délai de deux ans au terme duquel une cession doit de nouveau être soumise au dispositif d’information.

La commission des Affaires économiques du Sénat a ensuite adopté l’article 11 ainsi modifié.

4.  Les modifications apportées par le Sénat en séance publique

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a d’abord adopté un amendement présenté par M. Jacques Mézard, modifié par un sous-amendement de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois. L’expression « intention de céder », juridiquement floue et donc sujette à interprétation, se voit remplacée en plusieurs occurrences par celle de « volonté de céder » (étant rappelé que, en application du nouvel article L. 141-24, « l’information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers »). Il était d’autant plus nécessaire d’assurer la sécurité juridique du dispositif sur ce point que la notification de cette volonté marque le point de départ de la procédure d’information préalable des salariés. Par ailleurs, le champ d’application du dispositif « dans les entreprises soumises à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail » (entreprises de cinquante salariés et plus mais de moins de deux cent cinquante salariés) est mentionné au début de l’article L. 141-27 du code de commerce. La lisibilité de la section 4 en est accrue. Enfin, la mention réservant l’application du dispositif aux petites et moyennes entreprises est modifiée sans que cela ne change rien sur le fond. L’alinéa de l’article L. 141-30 faisant référence à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 est supprimé. En revanche, il est précisé à l’article L. 141-27 que sont concernées par le dispositif les entreprises « se trouvant, à la clôture du dernier exercice, dans la catégorie des petites et moyennes entreprises au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (53) ».

Un deuxième amendement, adopté sur la proposition de M. Alain Anziani, porte sur l’article L. 141-23 (entreprises de moins de cinquante salariés) et sur l’hypothèse où, le propriétaire étant aussi l’exploitant du fonds, il doit notifier sa volonté de céder aux salariés. Il est précisé que le délai de deux mois avant l’expiration duquel la cession du fonds de commerce ne peut pas intervenir (afin de laisser aux salariés intéressés la possibilité de présenter une offre), commence à courir « à compter de la date de cette notification », et non plus à partir de « la date à laquelle tous les salariés ont reçu cette notification », formule qui aurait pu poser des problèmes de preuve et se révéler source d’incertitude sur la date effective de commencement du délai.

Un troisième amendement, présenté par M. Alain Anziani et modifié par un sous-amendement du Gouvernement, concerne le cas où le délai de deux mois peut être abrégé (article L. 141-23). Il prévoit que chaque salarié individuellement fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre alors que la rédaction antérieure, mentionnant une « décision unanime », pouvait laisser entendre que celle-ci devait être collective.

Un quatrième amendement, également adopté à l’initiative de M. Alain Anziani, est relatif à l’action en nullité de la cession du fonds de commerce, en cas de méconnaissance de l’obligation d’information préalable des salariés (articles L. 141-23 et L.  141-27). Il est précisé qu’une telle action peut être engagée par « tout salarié » et non plus par « des salariés ». Chaque salarié individuellement peut en effet souhaiter engager une telle action, dans la mesure où il a été lésé de ne pas pouvoir présenter une offre. L’amendement supprime par ailleurs la mention selon laquelle l’action est introduite devant « la juridiction civile ou commerciale compétente », qui n’apporte rien au droit positif (au demeurant, la compétence éventuelle de la juridiction civile est relativement marginale puisqu’elle ne concerne que la cession d’un fonds en location-gérance).

Un cinquième amendement, adopté sur proposition de M. Gérard Le Cam, insère, dans une optique de renforcement de l’accompagnement des salariés, un nouvel article L. 141-23-1 au sein de la section 3, et un nouvel article L. 141-27-1 au sein de la section 4. Chacun de ces articles, identiquement rédigé, prévoit que les salariés, s’ils le souhaitent, peuvent se faire assister par un représentant de la chambre de commerce et de l’industrie régionale, de la chambre régionale d’agriculture, de la chambre régionale de métier et de l’artisanat territorialement compétentes en lien avec les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire et par toute personne de leur choix, dans des conditions définies par décret.

Un sixième amendement, présenté par M. Alain Anziani et modifié par un sous-amendement de M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques, précise la portée de l’obligation de discrétion à laquelle les salariés sont tenus s’agissant des informations reçues dans le cadre du présent dispositif. Les salariés sont déliés de cette obligation à l’égard des personnes qui peuvent les aider dans l’élaboration de leur offre de rachat du fonds (banquiers, experts-comptables, membres de la famille prêtant des fonds, notaires, etc.), étant précisé que les professionnels auxquels il peut être fait appel sont de leur côté soumis à l’obligation de secret propre à leur statut. Le sous-amendement de M. Marc Daunis maintient l’expression d’« obligation de discrétion » (figurant déjà à l’article L. 2325-5, alinéa 2, du code du travail), alors que M. Alain Anziani aurait souhaité y substituer celle d’ « obligation de confidentialité ».

Un septième amendement, présenté par M. Alain Anziani, remplace en deux occurrences le terme de « sociétés » par celui d’« entreprises », au motif que le présent dispositif inclut dans son champ les entreprises individuelles.

Un huitième amendement, présenté par Mme Christiane Demontès, rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires sociales, insère un nouvel alinéa au sein de l’article L. 141-27, dans la section 4 consacrée à la cession de fonds de commerce dans les entreprises employant entre cinquante et deux cent quarante-neuf salariés. Ce nouvel alinéa dispose qu’« en cas d’absences concomitantes du comité d’entreprise et de délégué du personnel, constatées conformément aux articles L. 2324-8 (54) et L. 2314-5 (55) du code du travail, la cession est soumise au délai prévu au premier alinéa de l’article L. 141-23 ». Il est donc renvoyé au délai de deux mois prévu par l’article L. 141-23 pour les entreprises employant moins de cinquante salariés. Cette précision vise à combler le vide juridique pouvant résulter d’une volonté de cession qui serait notifiée dans une situation de carence du comité d’entreprise, coïncidant avec une absence de délégués du personnel. Comme le souligne l’exposé sommaire de l’amendement, « les études de la Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques (DARES) montrent en effet qu’il ne s’agit pas d’une hypothèse d’école puisque, selon une publication datée d’avril 2013, 6 % des établissements de plus de cinquante salariés ne disposaient d’aucune institution représentative du personnel en 2010-2011 ».

Après avoir adopté un neuvième amendement, de nature rédactionnelle, le Sénat a adopté l’article 11 ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 sans modification.

Article 12
(art. L. 239-6 à L. 239-15 [nouveaux] du code de commerce)

Création d’un dispositif d’information préalable des salariés en cas de cession de parts sociales, actions ou valeurs mobilières ouvrant accès à la majorité du capital d’une société

1.  Les dispositions du texte initial du projet de loi

L’article 12 du projet de loi transpose la procédure énoncée (en matière de cession de fonds de commerce) à l’article 11 à l’hypothèse d’une cession de parts sociales, d’actions ou de valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d’une société. Il met donc en place un dispositif d’information préalable du personnel lorsque le propriétaire d’une participation majoritaire (au capital d’une société à responsabilité limitée ou d’une société par actions) manifeste l’intention de la céder, de manière à permettre aux salariés, si tel est leur souhait, de présenter une offre d’achat de celle-ci.

À cette fin est créé, au sein du titre III (56) du livre II (57) du code de commerce, un chapitre X (nouveau), intitulé « De l’information des salariés en cas de cession de leur société ». Ce chapitre X est lui-même divisé en deux sections, l’une (section 1) portant sur les sociétés de moins de cinquante salariés (articles L. 240-1 à L. 240-5), l’autre (section 2) relative aux sociétés de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés (articles L. 240-6 à L. 240-10).

Les dispositions de l’article 12 reprennent pour l’essentiel celles qui figurent à l’article 11. Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, le propriétaire d’une participation majoritaire (58) notifie à la société son intention de vendre. Puis le représentant légal de la société porte cette notification à la connaissance des salariés. Dans les entreprises de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés, le cédant notifie à la société son intention de cession. Puis le chef d’entreprise porte ensuite cette intention de cession à la connaissance des salariés en même temps qu’il procède à l’information et à la consultation du comité d’entreprise sur le fondement de l’article L. 2323-19 du code du travail. Dans les deux cas, le personnel est informé de la possibilité de présenter une offre de rachat. Les salariés sont tenus à une obligation de discrétion. Une cession intervenue en méconnaissance des nouvelles règles ainsi posées encourt l’annulation. Si la cession n’est pas intervenue au terme d’un délai de deux ans, l’information doit être renouvelée. Enfin, le dispositif n’est pas susceptible de recevoir application en cas de cession dans le cadre familial ou de procédure collective en cours (le dispositif ne s’applique pas non plus, s’agissant des entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés, aux sociétés qui dépassent les seuils définissant les petites et moyennes entreprises prévus à l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 précitée (59)).

Une spécificité distingue toutefois l’article 12 de l’article précédent. Aux termes des nouveaux articles L. 240-3 et L. 240-8, si une réglementation particulière prescrit que tout ou partie du capital de la société doit être détenu par un ou plusieurs associés ou actionnaires répondant à certaines conditions en termes notamment de qualification professionnelle, il est nécessaire de s’assurer que l’un au moins des salariés pouvant présenter l’offre d’achat remplisse les conditions requises.

2.  Les modifications apportées par la commission des Affaires économiques du Sénat

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté (60) trois amendements de fond analogues à ceux adoptés concernant l’article 11. Le premier, présenté par le Gouvernement, prévoit, dans un souci de sécurité juridique pour toutes les parties concernées, que l’information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers.

Le deuxième amendement, également présenté par le Gouvernement, dispose que l’obligation de discrétion des salariés obéit aux mêmes règles que celles déjà en vigueur pour les membres des comités d’entreprise.

Le troisième amendement, présenté par Mme Christiane Demontès, rapporteur au nom de la commission des Affaires sociales du Sénat, fournit des précisions sur le déroulement du délai de deux ans au terme duquel une cession doit de nouveau être soumise au dispositif d’information.

Les nouveaux articles L. 240-1 à L. 240-10 ont par ailleurs été renumérotés en articles L. 239-6 à L. 239-15.

La commission des Affaires économiques du Sénat a ensuite adopté l’article 12 ainsi modifié.

3.  Les modifications apportées par le Sénat en séance publique

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté, outre un amendement rédactionnel particulier, un certain nombre d’amendements similaires à ceux adoptés concernant l’article 11.

Le Sénat a ainsi adopté un amendement de M. Jacques Mézard, modifié par un sous-amendement de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, faisant état d’une volonté plutôt que d’une intention de céder, supprimant la référence à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 et mentionnant le champ d’application du dispositif d’information (applicable aux entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés) dès le premier article du code de commerce instituant celui-ci (article L. 239-11).

Un amendement, présenté par M. Alain Anziani et modifié par un sous-amendement du Gouvernement, prévoit, à l’article L. 239-6, que le délai de deux mois peut être abrégé dès lors que chaque salarié individuellement fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre.

Un amendement de M. Alain Anziani reprend des dispositions analogues à celles figurant dans l’amendement modifiant l’article 11, décrit plus haut, s’agissant de l’engagement par « tout salarié » de l’action en nullité et de la suppression de la référence à « la juridiction civile ou commerciale compétente ».

Un amendement, adopté sur la proposition de M. Gérard Le Cam, insère un nouvel article L. 239-6-1 au sein de la section 1, et un nouvel article L. 239-11-1 au sein de la section 2, portant sur la possibilité pour les salariés de se faire assister par certaines personnalités qualifiées, appartenant notamment à certaines chambres professionnelles.

Un amendement, présenté par M. Alain Anziani et modifié par un sous-amendement de M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques, prévoit que les salariés sont déliés de leur obligation de discrétion à l’égard des personnes qui peuvent les aider dans l’élaboration de leur offre de rachat du fonds.

Un dernier amendement enfin, présenté par Mme Christiane Demontès, rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires sociales, insère un nouvel alinéa au sein de l’article L. 239-11, dans la section 2 consacrée à la cession de parts sociales, actions ou valeurs mobilières dans les entreprises employant entre cinquante et deux cent quarante-neuf salariés, afin de répondre au cas d’absence simultanée de comité d’entreprise et de délégué du personnel. Le délai d’information alors applicable est celui prévu pour les entreprises de moins de cinquante salariés.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 sans modification.

TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DES COOPÉRATIVES

Chapitre Ier
Dispositions communes aux coopératives

Section 1
Développement du modèle coopératif

Article 13
(art. 1er, 3, 3 bis, 5 à 10, 18, 19 septies, 22, 23 et 25 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 et art. L. 512-36 du code monétaire et financier)

Simplification et modernisation du statut des coopératives

Le présent article modifie la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération dans le but de simplifier et de moderniser le cadre juridique applicable aux coopératives.

● Les dispositions de la loi du 10 septembre 1947 que le projet de loi entend modifier

La loi du 10 septembre 1947 fixe un cadre général pour les coopératives, tout en prévoyant que d’autres lois puissent apporter des particularités au fonctionnement de certaines coopératives. L’article 2 de la loi du 10 septembre 1947 dispose ainsi que les coopératives « sont régies par la présente loi sous réserve des lois particulières à chaque catégorie d’entre elles ».

L’article premier de cette même loi pose le principe selon lequel les coopératives sont des sociétés dont les objets essentiels sont de satisfaire les besoins des associés coopérateurs, que ce soit en réduisant le prix de revient et de vente de certains produits et services, ou en améliorant la qualité de ces derniers. Ce principe régissant les coopératives est appelé principe d’exclusivisme.

L’article 3 de la loi de 1947 prévoit la possibilité de dérogations à ce principe d’exclusivisme dans le cas où des lois particulières à certaines catégories de coopératives en ont disposé ainsi.

L’article 3 bis de cette même loi assouplit les conditions de recours des sociétés coopératives à des capitaux extérieurs afin de permettre de financer leur nécessaire développement. Cet article permet d’ouvrir à des associés non coopérateurs la possibilité de réaliser des apports au capital social, en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de la société. Ces associés ne peuvent utiliser les produits et services fournis par la société ni être intéressés aux bénéfices éventuels. Pour autant, ils bénéficient du droit de vote au sein des instances de la société, dans des conditions strictement encadrées, afin qu’ils ne soient pas en mesure de prendre à eux seuls des décisions engageant cette société. Ils ne peuvent comptabiliser plus de 35 % de l’ensemble des droits de vote ou 49 % lorsque l’un des associés est une société coopérative.

L’article 5 de la loi de 1947 permet aux coopératives de se regrouper afin de constituer des sociétés coopératives appelées « unions de coopératives ».

Son article 6 indique que les coopératives sont administrées par des mandataires, nommés pour six ans, au plus, par leur assemblée générale et révocables par elle. Cet article ne prévoit pas que ces mandataires puissent être indemnisés au titre de cette fonction. Pourtant, les dispositions spécifiques régissant les sociétés coopératives agricoles, de commerçants, de production et certaines sociétés coopératives bancaires le permettent.

L’article 7 fixe la liste des éléments devant figurer dans les statuts des coopératives.

L’article 8 dispose que l’assemblée générale se réunit au moins une fois par an pour prendre notamment connaissance du compte rendu de l’activité de la société, approuver les comptes de l’exercice écoulé et procéder, s’il y a lieu, aux élections d’administrateurs ou gérants et de commissaires aux comptes. Le compte rendu d’activité comporte les informations prévues par le cinquième alinéa de l’article L. 225-102-1 du code de commerce reflétant la manière dont la coopérative prend en compte les conséquences sociales et environnementales de son activité, ainsi que sur ses engagements sociétaux en faveur du développement durable et de la lutte contre les discriminations et la promotion des diversités.

L’article 9 est relatif au droit de vote des associés ; il fixe le principe de gestion démocratique des coopératives résumé par la formule « un homme, une voix ».

L’article 10 autorise les statuts des coopératives à prévoir le vote par correspondance dans les assemblées générales, en plus du vote physique le jour même de son déroulement.

L’article 18 détermine les droits des associés se retirant de la coopérative ou qui en sont exclus.

L’article 19 septies précise que les statuts encadrent les conditions d’acquisition et de perte de la qualité d’associé.

L’article 22 fixe les mentions qu’une coopérative doit obligatoirement faire figurer dans les documents qu’elle produit ou publie. Elle doit ainsi faire apparaître son statut coopératif et l’objet de son activité. La sanction encourue en cas de non-respect de cette obligation, aux termes du 3° de l’article 131-13 du code pénal, est une contravention de troisième classe (450 euros).

L’article 23 prévoit que les coopératives doivent fournir tous justificatifs requis par les agents publics procédant à leur contrôle.

L’article 25 précise enfin les conditions de sortie du statut coopératif. Une telle éventualité n’est permise que pour assurer la survie ou le développement de la coopérative, sur autorisation de l’autorité administrative et après avis du Conseil supérieur de la coopération.

● Les modifications proposées

Le 1° du I du présent article modifie l’article premier de la loi du 10 septembre 1947 pour y regrouper les grands principes fondateurs du modèle coopératif. Il s’agit :

—  du principe d’exclusivisme et de satisfaction des besoins économiques et sociaux des coopérateurs dont les modalités de mise en œuvre sont renvoyées à l’article 3 de la loi du 10 septembre 1947 ;

—  du principe de gestion démocratique, selon lequel chaque membre coopérateur détient, en principe, une voix à l’assemblée générale, qui figure actuellement à l’article 9 de la même loi ;

—  du principe selon lequel les coopératives ont un caractère lucratif limité. Il implique que leurs excédents éventuels sont reversés aux associés uniquement sous forme de « ristournes » en fonction de leur activité coopérative ou bien mis en réserve.

La commission des Affaires économiques du Sénat a précisé que les coopératives devaient également respecter le principe d’une adhésion volontaire et ouverte à tous. En outre, elle a précisé que le membre coopérateur pouvait être dénommé « associé » ou « sociétaire ».

Le 2° du I du présent article réécrit l’article 3 de la loi du 10 septembre 1947 afin de généraliser à l’ensemble des coopératives la possibilité, actuellement prévue pour certaines catégories d’entre elles seulement, de déroger au principe d’exclusivisme en exerçant une partie de leur activité avec des tiers.

Une telle possibilité permettra aux coopératives, en accroissant leur activité, d’augmenter leur chiffre d’affaires afin d’obtenir des « ristournes » plus importantes ou d’accumuler davantage de réserves pour pérenniser l’activité de la société.

Pour éviter que les coopératives ne concentrent leur activité en direction de tiers, le présent article encadre strictement cette possibilité de dérogation, en la limitant à 20 % du chiffre d’affaires réalisé.

Le 3° du I renforce la possibilité pour les sociétés coopératives de recourir à des associés n’ayant pas le statut de coopérateurs. Il introduit dans l’article 3 bis de la loi du 10 septembre 1947 la notion d’« associé coopérateur », qui n’était mentionnée jusqu’alors que dans certains textes particuliers, tels que celui relatif aux sociétés coopératives agricoles. De plus, il permet que les apports puissent se faire non seulement sous forme de capitaux mais aussi en nature ou en industrie (travail, conseils, locaux, etc.).

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis tendant à insérer un 3° bis dans le I du présent article. Il s’agit d’introduire, dans la loi du 10 septembre 1947, un nouvel article 3 ter destiné à encourager les salariés d’une coopérative à acquérir des parts sociales de leur coopérative.

Dans les cas où des dispositions statutaires prévoient que les non coopérateurs votent proportionnellement au capital détenu, la faible part du capital qu’ils détiennent par rapport aux coopérateurs, rendrait leur droit de vote symbolique. Cette situation est de nature à décourager le sociétariat des salariés et leur implication dans la vie de la coopérative, ce qui serait source de frustration. À l’inverse, sans une disposition statutaire spécifique, les associés salariés étant des sociétaires non coopérateurs, ils disposeraient d’une voix en assemblée générale comme les autres associés et pourraient ainsi devenir majoritaires tout en détenant une faible part du capital. C’est pourquoi l’amendement adopté par votre Commission propose de concilier ces deux dimensions en prévoyant que les salariés sociétaires pourront détenir jusqu’à 20 % des droits de vote.

Le 4° du I étend, à l’article 5 de la loi du 10 septembre 1947, l’objet des unions de coopératives. Outre la gestion des intérêts communs de leurs membres, leur objet pourra inclure le développement d’activités propres à ces membres. Le présent article permet aussi aux membres, sauf dans le cas des coopératives agricoles ou de leurs unions, de bénéficier directement des services de ces unions, ou de contribuer à la réalisation de leurs activités.

Le 5° du I complète l’article 6 de la loi du 10 septembre 1947 pour permettre à toutes les coopératives d’octroyer à leurs mandataires sociaux n’exerçant pas de fonctions de direction une indemnité compensant le temps passé à administrer la société. Aujourd’hui, les sociétés coopératives artisanales, les sociétés coopératives de transport et les sociétés coopératives maritimes ne bénéficient d’aucune dérogation en la matière. De telles indemnités ne pourront être mises en place qu’avec l’accord de l’assemblée générale. En outre, le maintien du principe de gratuité des fonctions doit prémunir les coopératives contre la fixation d’indemnités excessives.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement précisant que les fonctions concernées ne pouvaient pas être assimilées à un « travail ».

Le 6° du I modifie l’article 7 de la loi du 10 septembre 1947 pour prévoir une nouvelle modalité de sortie des associés : la radiation. Elle permettra d’éviter le recours à la procédure d’exclusion, jugée stigmatisante. Elle nécessitera le constat de la perte des qualités requises pour être associé, par exemple si l’associé concerné n’a plus d’activité avec la coopérative.

Le 7° du I modifie l’article 8 de la loi du 10 septembre 1947 pour limiter l’obligation de mentionner dans le compte rendu présenté à l’assemblée générale certaines informations sur l’action de la coopérative en matière de développement durable aux coopératives dépassant certains seuils attestant de leur importance. Cette précision permet d’éviter de soumettre à des contraintes importantes des coopératives de petite taille.

Le Sénat a adopté un amendement de M. Jacques Mézard prévoyant la vérification des informations sociales et environnementales figurant dans le rapport de gestion des sociétés coopératives par un organisme tiers indépendant. Le Sénat a adopté un sous-amendement du Gouvernement précisant que cette vérification serait une simple faculté et non une obligation.

Le 8° du I supprime le premier alinéa de l’article 9 de la loi du 10 septembre 1947 puisque le principe selon lequel chaque coopérateur dispose d’une voix à l’assemblée générale est repris à l’article premier de la loi de 1947, comme le prévoit le 1° du I du présent article du projet de loi

Le 9° du I modifie l’article 10 de la loi du 10 septembre 1947 pour autoriser les coopératives à recourir aux techniques permettant d’assister à l’assemblée générale à distance et d’y voter.

Les 10° et 11° du I procèdent à des coordinations au sein des articles 18 et 19 septies de la loi du 10 septembre 1947.

Le 12° du I modifie, à l’article 22 de la loi du 10 septembre 1947, l’obligation pour les coopératives de faire figurer certaines mentions dans les documents émanant d’elles. Il est ainsi prévu de limiter l’obligation de publicité à leur seule nature coopérative, sans mention de la nature des opérations qu’elles conduisent. En cas de non-respect de ces obligations, le président du tribunal compétent, statuant en référé sur une demande du ministère public ou de toute personne intéressée, pourra enjoindre à la coopérative de respecter ses obligations légales, éventuellement sous astreinte.

Le 13° du I modifie les sanctions pénales prévues à l’article 23 de la loi du 10 septembre 1947, en cas de manquement par les coopératives à leur obligation de fournir les documents nécessaires au contrôle. Cette infraction sera d’une amende de 450 euros.

Le 14° du I adapte les conditions de sortie du statut coopératif prévues à l’article 25 de la loi du 10 septembre 1947. Il prévoit un nouveau cas de figure : la méconnaissance des principes coopératifs constatée lors de la procédure de révision (61) , prévue par l’article 14 du présent projet de loi.

Le II du présent article propose la suppression du second alinéa de l’article L. 512-36 du code monétaire et financier. Cette modification résulte de l’adoption, par le Sénat, d’un amendement du Gouvernement. Il s’agit de supprimer la disposition spécifique applicable au seul Crédit agricole en matière d’indemnisation des membres des conseils d’administration. Ainsi, le Crédit agricole sera soumis, comme les autres coopératives, aux dispositions du 5° du I du présent article qui complète l’article 6 de la loi de 1947 et harmonise le régime d’indemnisation des membres des conseils d’administration de toutes les coopératives.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL6 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement à encourager les salariés d’une coopérative à acquérir des parts sociales de celle-ci, afin qu’ils puissent contribuer à la définition de ses orientations. Cela correspond à une demande formulée par les représentants des coopératives eux-mêmes au cours des auditions que nous avons menées. Toutefois, il s’agirait non pas d’une obligation, mais d’une simple faculté – ce point a fait l’objet de débats au cours des auditions. En outre, les salariés ne pourraient pas détenir ensemble plus de 20 % des droits de vote dans les assemblées générales.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 modifié.

Section 2
La révision coopérative

Article 14
(art. 19 quater, 19 duodecies, 25-1 à 25-5 [nouveaux], 27, 27 bis et 28 de la loi n° 47-1175 du 10 septembre 1947 ; art. 54 bis de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 ; art. 29 de la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983 ; art. L. 524-2-1, L. 527-1-2 [nouveau] et L. 931-27 du code rural et de la pêche maritime ; art. L. 422-3 et L. 422-12 du code de la consommation)

Création d’un régime général de révision coopérative

Le présent article prévoit un régime général de révision des sociétés coopératives.

La révision coopérative est un examen analytique de la situation d’une coopérative visant à s’assurer du respect des principes et des règles propres à cette catégorie de sociétés à évaluer la qualité de sa gestion et à proposer des améliorations. L’article 19 duodecies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération pose le principe de la révision coopérative et renvoie ses modalités à un décret (62).

Le du présent article instaure un régime général de révision, inséré dans la loi du 10 septembre 1947.

Les 1° et 2° du I modifient les articles 19 quater et 19 duodecies de la loi du 10 septembre 1947, relatifs aux unions d’économie sociale et à la révision des sociétés coopératives, afin de prévoir leur soumission aux dispositions nouvelles des articles 25-1 à 25-5.

Le 3° du I introduit les articles 25-1 à 25-5 dans la loi du 10 septembre 1947.

—  Le nouvel article 25-1 pose le principe de la révision coopérative et prévoit ses modalités de mise en œuvre. Le texte adopté par le Sénat prévoit que les coopératives et unions de coopératives dont l’activité dépasse des seuils d’activité et de salariés fixés par décret en Conseil d’État seront concernées par la révision. La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteur pour avis supprimant les seuils d'activité à partir desquels la révision coopérative sera applicable. En effet, votre rapporteur pour avis estime que la révision est une aide apportée aux coopératives. Il convient donc de ne pas en priver certaines coopératives, fussent-elles de petite taille.

La révision pourra être demandée par l’autorité administrative ayant compétence pour octroyer l’agrément coopératif, par le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire ou par celui compétent à l’égard de la coopérative visée.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de M. Jacques Mézard, avec un avis de sagesse du Gouvernement, précisant que la révision avait notamment pour but de vérifier que l’organisation et le fonctionnement d’une coopérative étaient conformes « à l’intérêt des adhérents ».

La commission des Affaires économiques du Sénat a précisé que la procédure de révision n’avait pas pour principal but de contrôler le fonctionnement et la gestion des coopératives ou de les sanctionner mais qu’elle s’inscrivait plutôt dans une démarche constructive d’accompagnement de la société dans son évolution. C’est pourquoi le présent article mentionne explicitement que la procédure doit permettre de proposer aux coopératives des « mesures correctrices », car la révision coopérative a bien pour objectif d’assister les coopératives, concourant ainsi à leur développement.

En séance publique, le Sénat a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, un autre amendement de M. Jacques Mézard ajoutant que le rôle du réviseur était aussi d’assister les coopératives dans la mise en œuvre de ces mesures correctrices.

Le Sénat a également adopté un amendement de la commission des Affaires économiques tendant à faire du nombre d’associés d’une coopérative, en plus du nombre de salariés, un critère de fixation des seuils de révision.

—  Le nouvel article 25-2 confie l’activité de révision à un réviseur agréé. Il prévoit également, qu’à la demande de toute personne intéressée ou du ministère public, le président du tribunal, statuant en référé, peut enjoindre sous astreinte au dirigeant de la société de provoquer la désignation du réviseur afin d’effectuer la révision coopérative.

—  Le nouvel article 25-3 prévoit les conditions dans lesquelles les coopératives doivent donner suite aux recommandations du réviseur, en cas de carence persistante, avant que l’autorité administrative ne soit saisie. Les pouvoirs du réviseur sont par ailleurs renforcés. Il se voit conférer un véritable rôle de veille, proche de celui des commissaires aux comptes ; mais, à la différence de ces derniers, il ne connaît que les irrégularités se rapportant à sa propre mission.

—  Le nouvel article 25-4 prévoit les sanctions en cas de manquement persistant de la société à ses obligations coopératives.

—  Le nouvel article 25-5 renvoie à un décret en Conseil d’État les modalités d’application des articles 25-1 à 25-4. La commission des Affaires économiques du Sénat a souhaité que ce décret en Conseil d’État tienne compte « des dérogations et adaptations nécessaires » afin de respecter, notamment, les particularités des sociétés coopératives ouvrières de production.

Le 4° du I procède, au sein de l’article 27 de la loi du 10 septembre 1947, à la mise à jour de références obsolètes et à des suppressions de dispositions devenues caduques. En outre, il prévoit une procédure de dissolution judiciaire des petites coopératives, à la demande du ministère public ou de toute personne intéressée, sauf à ce qu’un délai soit accordé par le tribunal pour régularisation de la société. Par coordination, le 5° du I propose d’abroger les articles 27 bis et 28 de la loi du 10 septembre 1947.

Les II à V du présent article soumettent les différentes catégories de coopératives au régime général de révision prévu par le I, avec les adaptations nécessitées par les particularités de chacune d’elles. Le II concerne les sociétés coopératives ouvrières de production (SCOP), le III les sociétés coopératives artisanales, le IV les sociétés coopératives agricoles et maritimes et le V les sociétés anonymes coopératives d’habitations à loyer modéré.

S’agissant des SCOP, la commission des Affaires économiques du Sénat a ouvert à celles qui ne bénéficient pas, de plein droit, des analyses périodiques d’un commissaire aux comptes, la possibilité de solliciter du réviseur qu’il conduise également un examen de la situation financière et de la gestion de la coopérative.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL7 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer les seuils d’activité à partir desquels la révision coopérative sera applicable. De nombreuses coopératives considèrent cette procédure non pas comme une contrainte, mais comme un soutien. Dès lors, il est souhaitable que toutes les coopératives y aient accès.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 modifié.

*

* *

Chapitre II
Dispositions propres à diverses formes de coopératives

Section 1
Les sociétés coopératives de production

Sous-section 1
Le dispositif d’amorçage applicable aux sociétés coopératives de production

Article 15
(art. 49 ter et 52 bis [nouveaux] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Mise en place d’un dispositif d’amorçage pour la reprise d’entreprises en sociétés coopératives de production

Le présent article vise à permettre à des associés non coopérateurs de détenir plus de la moitié du capital pour une durée de sept ans, et aux associés coopérateurs de leur racheter ces parts à l’issue de ce délai, afin de faciliter la transformation de sociétés en SCOP.

La reprise par des salariés de leur entreprise sous forme de SCOP est un outil très utile dans l’objectif de maintien de l’activité et de l’emploi. Mais, en application de l’article 26 bis de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production, ces sociétés ne peuvent bénéficier d’avantages fiscaux que si leurs associés détiennent plus de 50 % du capital.

Dans les faits, les salariés intéressés par la reprise de leur entreprise n’ont souvent pas les moyens d’acquérir, dès le départ, une moitié de son capital social. C’est pourquoi ce même article 26 bis prévoit que ce principe ne s’applique pas pendant les sept premières années de la transformation d’une entreprise en SCOP.

En conséquence, pendant ces sept années, le capital peut être détenu majoritairement par des associés non coopérateurs, sous réserve que les parts soient cédées aux coopérateurs avant la fin de cette période.

Le du présent article prévoit, dans un nouvel article 49 ter de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978, les modalités de transmission des titres provisoirement détenus par les associés non coopérateurs aux associés coopérateurs en cas de transformation d’une société en SCOP. Ils doivent ainsi s’engager à céder suffisamment de titres pour que les associés coopérateurs redeviennent majoritaires, au plus tard le 31 décembre de la septième année suivant la transformation en SCOP.

Le du présent article permet, dans un nouvel article 52 bis de la même loi, d’accorder, si les statuts de la coopérative en disposent ainsi, une rémunération spécifique pour les porteurs provisoires de titres. Ceux-ci deviennent alors cessibles à la société ou à l’un de ses salariés majorés par un « coût de détention temporaire », dont le mode de calcul doit figurer dans les statuts.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 sans modification.

Article 16
(art. 52 ter [nouveau] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Possibilité de rachat par les coopératives de parts sociales détenues par des associés non coopérateurs

Le présent article vise à permettre aux coopératives de racheter les parts sociales souscrites par des associés non coopérateurs dans le cadre de la transformation d’une société en SCOP.

Il vient compléter le dispositif prévu à l’article 15 du présent projet de loi qui permet le rachat, durant la période d’amorçage d’une durée de sept ans, par les associés coopérateurs de parts sociales détenues provisoirement par des investisseurs non coopérateurs.

Cependant, une autre difficulté peut être rencontrée durant cette même période de sept ans. En effet, si les parts des investisseurs non coopérateurs peuvent être rachetées, encore faut-il que les associés coopérateurs disposent des fonds nécessaires.

L’article 34 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production prévoit déjà que l’assemblée des associés peut décider la transformation en parts sociales de tout ou partie des excédents nets de gestion distribuables aux associés.

Le présent article proposait, dans sa version initiale, de compléter cet article 34 de la loi du 19 juillet 1978 pour autoriser une coopérative à utiliser ses réserves légales pour acheter les parts sociales issues de la transformation des excédents bruts de gestion. En adoptant un amendement de sa commission des Lois, le Sénat a souhaité placer ces dispositions non pas au sein de l’article 34 de cette loi mais dans un nouvel article 52 ter de la même loi.

Les parts sociales ainsi acquises par la société seront soit :

—  annulées, ce qui aura pour effet de diminuer le capital social et donc d’augmenter la proportion relative des parts détenues par les coopérateurs au sein de ce capital social ;

—  soit attribuées aux salariés.

Ce faisant, le présent article permet d’encourager la transformation d’une société en SCOP en limitant les risques que les associés coopérateurs ne puissent pas, à l’issue de la période d’amorçage, détenir suffisamment de parts sociales.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 sans modification.

Sous-section 2
Les groupements de sociétés coopératives de production

Article 17
(art. 47 bis à 47 octies [nouveaux] de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Groupements de sociétés coopératives de production

Le présent article permet aux sociétés coopératives de production de créer des groupements.

Selon les informations figurant dans l’étude d’impact jointe au projet de loi, les dix plus importantes coopératives françaises, qui réalisent plus de 830 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel, détiennent plus d’une centaine de filiales non coopératives employant plus de 3 700 salariés. Le développement de groupements de SCOP permettrait de consolider leur situation, de mutualiser leurs moyens et donc de pérenniser les emplois qu’elles créent.

En effet, le droit en vigueur ne permet pas à un coopérateur associé de prendre des parts sociales dans le capital d’une autre SCOP que la sienne, sauf à être considéré comme associé extérieur de cette SCOP. En conséquence, il ne peut participer pleinement au fonctionnement de cette SCOP, à la différence d’un salarié coopérateur.

Le présent article introduit donc huit nouveaux articles au sein de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production pour prévoir le principe des groupements de SCOP mais également les conditions de leur constitution ou de leur transformation.

—  Le nouvel article 47 ter de la loi du 19 juillet 1978 définit le groupement de SCOP comme étant le regroupement d’au moins deux sociétés de ce type, régies par la loi du 19 juillet 1978. Sa création est décidée à l’unanimité des sociétés fondatrices, de même que son statut. C’est ainsi que les règles relatives à l’appartenance au groupement, l’admission et la perte de la qualité d’associé et les conditions de répartition des excédents aux salariés sont décidées à l’unanimité. Chaque société membre du groupement doit adopter en assemblée générale extraordinaire les ajustements de ses propres statuts qu’implique l’adhésion au groupement et en informer les autres sociétés membres.

La demande d’entrée dans un groupement formulé par une SCOP doit être portée à la connaissance de chacun de ses membres qui doivent y être unanimement favorables. Parallèlement, la sortie du groupement requiert une autorisation de l’assemblée générale extraordinaire de la société concernée. De plus, chaque société membre doit être informée au moins six mois à l’avance.

—  Le nouvel article 47 quater de la même loi dispose que les salariés employés par une des sociétés membres du groupement sont assimilés à des coopératives pour le calcul des limitations de droits de vote en application de l’article 3 bis de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.

—  Le nouvel article 47 quinquies disposait, dans sa version initiale, que lorsqu’une SCOP fait partie d’un groupement, les associés employés d’une des sociétés membres du groupement, les sociétés coopératives et les associés personnes physiques ou morales non employés par la société ne peuvent détenir ensemble plus de 49 % du total des droits de vote, sans que les droits de vote des associés non employés d’une société membre du groupement et qui ne sont pas des coopératives ne puissent excéder 35 %. En outre, toujours lorsqu’une SCOP fait partie d’un groupement, la limite du total des droits de vote pouvant être détenus par les autres sociétés coopératives de production du groupement était portée de 49 % à 51 %.

Ces dispositions ont été réécrites par un amendement de Mme Marie-Noëlle Lienemann, que le Sénat a adopté avec l’avis favorable du Gouvernement et de la commission des Affaires économiques.

Il prévoit désormais que, par dérogation aux règles générales de la coopération, une société membre d’un groupement de SCOP peut, par principe, détenir jusqu’à 51 % des droits de vote au sein des autres sociétés du groupement – contre 49 % dans le texte initial – à condition que les salariés employés par ces autres sociétés détiennent ensemble un pourcentage des droits de vote au sein de cette société supérieur à un seuil fixé par les statuts des sociétés membres du groupement.

Sous la même condition, cette société peut également détenir, à l’issue du délai de dix ans, jusqu’à 51 % du capital de ces sociétés.

Apparemment, cet amendement qui permet de réduire la proportion des droits des salariés au sein d’une SCOP de 51 % à 49 % (puisque la SCOP « mère » pourra atteindre 51 %) pourrait leur sembler défavorable. Selon l’auteure de l’amendement, le dispositif leur est au contraire doublement bénéfique. Ce serait le cas en termes de gouvernance, avec une participation aux prises de décisions de leur société qui, fût-elle cantonnée à 49 % des droits de vote, sera bien plus importante que dans une société commerciale classique.

—  Le nouvel article 47 sexies prévoyait, dans sa version initiale, qu’un vote de l’assemblée générale extraordinaire d’une SCOP détenue majoritairement par une autre SCOP et appartenant à un groupement était nécessaire pour décider, tous les cinq ans, de son maintien dans le groupement. Seuls sont habilités à y prendre part ses associés salariés, la décision de sortie étant effective six mois après.

Compte tenu de l’adoption de l’amendement précité, le nouvel article 47 sexies prévoit désormais que lorsqu’une SCOP qui détient la majorité des droits de vote au sein d’une société décide la transformation de celle-ci en SCOP, elle peut conserver, au terme d’un délai de dix ans, jusqu’à 51 % du capital et des droits de vote. L’objectif poursuivi est donc de favoriser la transformation des filiales de SCOP en SCOP en permettant à la SCOP « mère » de conserver le contrôle de sa filiale.

—  Le nouvel article 47 septies prévoyait une dérogation aux dispositions de l’article 47 bis, en ce qui concerne la distribution aux salariés d’excédents nets de gestion. Compte tenu de la modification que l’amendement de Mme Marie-Noëlle Lienemann a opérée à l’article 47 quinquies, qui permet à la SCOP « mère » de détenir la majorité des parts d’une SCOP, les dispositions du nouvel article 47 septies ne sont plus nécessaires. Les excédents de gestion seront donc répartis en application des principes généraux fixés à l’article 33 de la loi de 1978, selon lesquels 25 %, au moins, de ceux-ci doivent être versés aux salariés. En conséquence, dans le texte adopté par le Sénat, il n’est plus proposé de créer un nouvel article 47 septies.

—  Le nouvel article 47 octies ne soumet pas les SCOP dont le capital est majoritairement détenu par une autre SCOP, dans les conditions définies par l’article 47 quinquies – et, compte tenu de l’adoption de l’amendement de Mme Marie-Noëlle Lienemann, l’article 47 sexies – à deux dispositions de la même loi de 1978 introduites par l’article 15 du présent projet de loi. Il s’agit des dispositions du nouvel article 49 ter de la loi de 1978, qui conditionne l’octroi aux SCOP d’avantages fiscaux à la détention de plus de 50 % du capital par leurs associés et de celles du nouvel article 52 bis de la même loi qui permet d’accorder, si les statuts le permettent, une rémunération spécifique pour les porteurs provisoires de titres. En effet, ce dernier dispositif permet à des associés non coopérateurs d’aider à la mise en place d’une SCOP « d’amorçage ». Dans le cas où une SCOP voit son capital majoritairement détenu par une autre SCOP, il n’est pas utile de prévoir une rémunération pour ces associés qui ne peuvent, par définition, pas détenir la majorité du capital.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 sans modification.

Sous-section 3
Autres dispositions relatives aux sociétés coopératives et participatives

Article 18
(art. 1er, 4 et 54 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Modification de la dénomination des sociétés coopératives ouvrières de production

Le présent article propose que, dans tous les codes et dispositions législatives en vigueur, la dénomination : « sociétés coopératives ouvrières de production » devienne : « sociétés coopératives de production ». L’acronyme « SCOP » pourrait être maintenu dans le langage courant.

La mention de la notion d’ouvrier au sein de la dénomination des SCOP, qui date de l’adoption de la loi du 19 juillet 1978 ne reflète plus la réalité économique puisque de nombreuses SCOP relèvent des services.

Malgré la modification de l’appellation législative des SCOP, rien n’empêchera une société coopérative de production de se qualifier de société coopérative ouvrière de production.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de sa commission des Lois visant à tirer les conséquences du changement de la dénomination des SCOP, en supprimant les répétitions qui en résulteraient dans la loi du 19 juillet 1978, tout en maintenant la possibilité d’utiliser l’appellation historique de société coopérative ouvrière de production pour les sociétés qui le souhaiteraient.

L’amendement adopté par le Sénat procède également à une coordination dans la loi du 19 juillet 1978 pour prévoir qu’une SCOP peut user de l’appellation de « société coopérative et participative », prévue par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 18 sans modification.

Article 19
(art. 5, 8, 15 à 18, 21, 28 et 51 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Ouverture du statut de société anonyme par actions aux sociétés coopératives de production

Le présent article vise à permettre aux SCOP de revêtir la forme de la société par actions simplifiée (SAS).

En application de l’article 3 de la loi du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production, les SCOP sont aujourd’hui constituées sous forme soit de sociétés anonymes (SA), soit de société à responsabilité limitée (SARL), à l’exclusion de toute autre forme juridique.

Pourtant la forme de la société par actions simplifiée pourrait être adaptée aux SCOP. En effet, la SAS est à la fois société de capitaux, ce qui la rapproche de la société anonyme, et société de personnes, ce qui en fait une société mixte. Les principales différences avec la SA résident dans le fait que ce sont les associés – et non la loi – qui fixent les règles de fonctionnement interne et qu’elle permet de dissocier la détention du capital des conditions d’exercice du pouvoir, un associé pouvant exercer certaines prérogatives indépendamment de l’importance de ses parts sociales.

Le présent article permet aux SCOP d’adopter le statut de SAS. À cette fin, il propose de modifier les articles 5 et 16 de la loi du 19 juillet 1978 pour y introduire une mention de la SAS.

Dans sa version en vigueur, l’article 5 de la loi de 1978 prévoit le nombre minimal de salarié que les SCOP doivent employer. Ce nombre est de deux lorsqu'elles sont constituées sous la forme de société à responsabilité limitée et de sept lorsqu'elles sont constituées sous la forme de société anonyme. Le présent article prévoit un nombre minimal de deux salariés pour les SCOP prenant la forme de SAS.

L’article 16 de la loi de 1978 prévoit que, lorsque la SCOP est constituée sous la forme d'une société à responsabilité limitée, les gérants sont nommés par l'assemblée des associés, pour une durée qui ne peut excéder quatre ans. Le présent article prévoit qu’il en est de même pour les SCOP prenant la forme de SAS.

En outre, il substitue, dans les articles 8, 15, 16, 17, 18, 21, 28 et 51 de la même loi, la référence à un « organe de direction » aux références à l’assemblée générale ou l’assemblée des associés, aux gérants, aux membres du conseil de surveillance, d’administration ou du directoire. Cette modification permettra de rendre ces articles également applicables aux SCOP qui prendront la forme de SAS.

Le Sénat a adopté un amendement de clarification rédactionnelle de la commission des Affaires économiques.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 sans modification.

Article 20
(art. 6, 32, 35, 40 et 50 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978)

Modification de références devenues obsolètes

Le présent article vise à procéder à des modifications de références obsolètes au sein de la loi du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production.

Les modifications proposées ont pour objet de prendre en compte les modifications apportées au code du travail par la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008 ratifiant l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail ou de corriger des erreurs de références.

Le présent article a été adopté sans modification par le Sénat.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

Section 2
Les sociétés coopératives d’intérêt collectif

Article 21
(art. 19 quinquies, 19 septies, 19 terdecies [nouveau] et 19 quaterdecies de la loi n° 47-1775 du  septembre 1947)

Assouplissement du régime des sociétés coopératives d’intérêt collectif

Le présent article vise à assouplir le régime juridique des sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) afin d’en favoriser le développement.

Ces sociétés ont été créées par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel et ont pour objet « la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale » (63).

La France comptait 300 SCIC en 2012, dont l’effectif moyen était de 12 salariés et le chiffre d’affaires moyen à 625 000 euros.

Les SCIC reposent sur un système de décision démocratique et leur mode de fonctionnement ne privilégie pas la recherche du profit.

Les deux principales différences entre les SCIC et les SCOP se trouvent :

—  à l’article 19 sexies de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, qui prévoit que « les tiers non sociétaires peuvent bénéficier des produits et services de la société coopérative d’intérêt collectif » ;

—  à l’article 19 septies de la même loi, qui prévoit que cinq catégories de personnes peuvent être associées d’une SCIC : les salariés de la coopérative ; les bénéficiaires à titre gratuit ou onéreux des activités de la coopérative ; toute personne physique souhaitant participer bénévolement à son activité ; des collectivités publiques et leurs groupements ; toute personne physique ou morale qui contribue par tout autre moyen à l’activité de la coopérative.

Les SCIC sont donc un outil particulièrement adapté au développement de projets associant salariés, collectivités territoriales et usagers.

Le présent article propose d’adapter le statut des SCIC pour favoriser leur développement.

Le modifie l’article 19 quinquies de la loi de 1947 pour permettre aux SCIC d’adopter le statut de société par actions simplifiée (SAS), à l’instar de ce que l’article 19 du présent projet de loi permet aux coopératives.

Le modifie l’article 19 septies de la loi du 10 septembre 1947 pour permettre aux personnes productrices de biens et services de devenir associés d’une SCIC. Cette formulation permettra de constituer une SCIC sans qu’un salarié ne soit associé.

Ce même 2° élargit aux établissements publics – et non plus les seules collectivités et leurs groupements – la possibilité de s’associer à une SCIC afin de faciliter des opérations de développement local. En outre, la part maximale du capital détenue par une ou plusieurs personnes publiques est portée de 20 % à 50 %.

Dans sa version initiale, le présent article précisait que cette intervention d’une personne publique était subordonnée au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) aux aides de minimis.

En effet, l’article 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne stipule que toute aide d’État (toute aide publique, de manière générale) doit être notifiée à la Commission européenne afin de vérifier sa compatibilité avec les règles européennes, fixées à l’article 107 du traité. La règle de minimis précise que les aides accordées sur une période de trois ans et n’excédant pas un plafond de 200 000 euros sont exemptées de cette obligation de notification.

Le Sénat a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, un amendement de Mme Marie-Noëlle Lienemann supprimant cette précision.

Son auteur a estimé que les apports réalisés par les personnes publiques dans des SCIC ne pouvaient être considérés comme des aides d’État car ils sont réalisés dans des conditions normales de marché et n’accordent aucun privilège aux investisseurs publics qui courent les mêmes risques que n’importe quel investisseur privé. De plus, les apports peuvent être remboursés puisque les SCIC sont à capital variable : les entrées et les sorties du capital sont facilitées.

En outre, l’auteur de l’amendement a estimé que la soumission de ces apports au régime des aides de minimis provoquerait l’effet inverse que celui recherché par le projet de loi, puisque les interventions des personnes publiques, assorties de lourdes procédures, seraient freinées, limitant ainsi la mise en place des projets de co-construction territoriale.

Le  introduit un article 19 terdecies dans la loi de 1947 pour prévoir que le rapport de gestion annuel de l’entreprise contiendra des informations relatives à l’évolution du projet coopératif. Cette disposition devrait permettre à tous les associés d’être informés de l’évolution de ce projet et d’en discuter au sein de l’assemblée générale.

Le  précise, au sein de l’article 19 quaterdecies de la même loi, qu’une société peut être transformée en SCIC sans qu’une personne morale nouvelle ne soit créée.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 sans modification.

Section 3
Les sociétés coopératives de commerçants détaillants

Les sociétés coopératives de commerçants détaillants sont régies par les articles L. 124-1 à L. 124-16 du code du commerce. Elles constituent une forme juridique d’organisation de commerçants ou de prestataires de service (tels que des magasins, des hôtels, etc.). Selon l’article L. 124-1 du même code, elles ont pour objet d’« améliorer par l’effort commun de leurs associés les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leur activité commerciale », que ce soit par la mutualisation d’outils ou d’actions(tels que des centrales d’achat, une gestion commune de la communication, une logistique commune, etc.).

Ces sociétés coopératives de commerçants détaillants sont très présentes dans les différents secteurs du commerce. Parmi les plus connues, on peut citer, s’agissant de la grande distribution, « Système U » ou encore « E. Leclerc ». Les sociétés coopératives de commerçants détaillants réalisent 123,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires (en 2012) et emploient 470 000 salariés.

Article 23
(art. L. 124-1 du code de commerce)

Création de sociétés financières par les coopératives de commerçants

Le présent article vise à permettre la création de sociétés financières par des coopératives de commerçants.

Les coopératives de commerçants ne sont aujourd’hui pas présentes sur les marchés financiers car leur attrait, du point de vue d’éventuels investisseurs, est presque nul. En effet, les investisseurs ne peuvent escompter qu’une rémunération minime du capital investi et ne peuvent espérer détenir une majorité des droits de vote puisque le statut même des coopératives ne le permet pas.

Cette situation ne permet donc pas aux coopératives de commerçants d’asseoir leur développement sur des outils financiers.

Le présent article propose de permettre, à l’article L. 124-1 du code de commerce, aux sociétés coopératives de commerçants détaillants, d’organiser une coopération financière.

Le présent article ne propose donc pas de favoriser l’action d’investisseurs extérieurs mais de permettre, entre commerçants coopérateurs, d’assurer le développement de leurs activités par des moyens financiers.

Cette coopération prendrait la forme soit d’une entité dédiée, soit de la fourniture de services par la coopérative elle-même.

Cette dernière solution permet aisément de s’assurer de l’application du principe coopératif d’exclusivisme, puisque ces services financiers ne pourront être destinés qu’à ses seuls membres.

Quelle que soit la forme retenue, la coopération financière prendra la forme d’un fonds alimenté par les adhérents, à travers des cotisations supplémentaires ou un pourcentage du chiffre d’affaires, par exemple.

Ces structures pourraient en outre être habilitées par leurs membres à passer des conventions avec des organismes bancaires et financiers, à assister leurs membres dans la préparation de dossiers de financement, voire à leur accorder des prêts.

La coopération financière serait doublement encadrée :

—  en premier lieu, elle aurait vocation à compléter les services bancaires, et non à s’y substituer. En conséquence, si une coopérative devait se livrer à des activités bancaires, elle devrait obtenir le statut d’établissement de crédit et être agréée par l’Autorité de contrôle prudentiel, se soumettant ainsi à la réglementation prudentielle et financière. La lourdeur de ce processus devrait logiquement limiter le risque que des coopératives de commerçants n’utilisent les dispositions du présent article pour réaliser des activités bancaires complexes. De même, le montant des concours financiers serait limité, en proportion des projets financés, afin là aussi, de ne pas se substituer au système bancaire ;

—  en deuxième lieu, le présent article prévoit que le capital destiné à la coopération financière est majoritairement détenu et conservé par les coopératives et associés coopérateurs. Des investisseurs extérieurs peuvent donc, de manière minoritaire, y participer mais le contrôle de ces entités financières demeurera, en toute hypothèse, aux mains des coopérateurs.

Le présent article a été adopté sans modification par le Sénat.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 23 sans modification.

Article 24
(art. L. 124-1 du code de commerce)

Extension de l’objet des coopératives de commerçants au commerce en ligne

Le présent article propose d’élargir l’objet des sociétés coopératives de commerçants détaillants au commerce en ligne

L’article L. 124-1 du code de commerce permet à ces coopératives d’exercer directement ou indirectement pour le compte de leurs associés les activités de centralisation des achats, de négoce, de conseil juridique, d’opérations publicitaires, etc.

Des coopératives de commerçants ne peuvent pas mettre en œuvre, en l’état du droit, de plateforme de commerce en ligne.

Le présent article étend à « l’élaboration et la gestion d’une plate-forme de vente en ligne » la liste des activités que peuvent pratiquer les coopératives de commerçants en vertu de l’article L. 124-1. L’activité de vente en ligne ainsi doit évidemment être réalisée au profit des associés, et donner lieu à une répartition équitable des bénéfices entre ces derniers.

Le présent article a été adopté sans modification par le Sénat.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 24 sans modification.

Article 25
(art. L. 124 2 du code de commerce)

Assouplissement du principe d’exclusivisme au profit des coopératives de commerçants

Le présent article vise à assouplir l’application du principe d’exclusivisme pour les sociétés coopératives de commerçants détaillants.

Ces sociétés coopératives ne bénéficient pas d’une disposition législative spécifique leur permettant de déroger au principe général d’exclusivisme qui régit les coopératives, ce que rappelle le premier alinéa de l’article L. 124-2 du code de commerce. Elles ne peuvent donc pas faire bénéficier leur activité à des tiers non associés.

Le deuxième alinéa de ce même article L. 124-2 prévoit tout de même exception destinée à permettre le concours de coopératives de pharmaciens d’officine au traitement de malades en cas d’urgence.

Le présent article propose de supprimer le premier alinéa de l’article L. 124-2 du code de commerce. Cette modification aura pour effet de soumettre les sociétés coopératives de commerçants détaillants au principe d’exclusivisme prévu à l’article 3 de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Mais l’article 13 du présent projet de loi entend modifier ce dernier article pour permettre aux coopératives d’admettre des tiers non sociétaires à bénéficier de leurs activités dans la limite de 20 % de leur chiffre d’affaires, selon des conditions fixées par décret. Le présent article aura donc pour effet de faire bénéficier de ces dispositions les sociétés coopératives de commerçants détaillants.

Le second alinéa de l’article L. 124-2 du code de commerce serait maintenu, ce qui aurait pour effet de continuer à permettre aux coopératives de pharmaciens d’officine de concourir au traitement de malades en cas d’urgence, sans qu’il soit besoin de vérifier la proportion de ce concours au regard du chiffre d’affaires de la coopérative concernée.

Le présent article a été adopté sans modification par le Sénat.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 25 sans modification.

Article 26
(art. L. 124-3, L. 124-5, L. 124-6, L. 124-6-1 [nouveau], et L. 124-8 à L. 124-12 du code de commerce)

Possibilité de constituer une coopérative de commerçants sous forme de SARL à capital variable

Le présent article vise à permettre de constituer une coopérative de commerçants sous forme de SARL à capital variable et non pas seulement de SA à capital variable.

Les coopératives de commerçants ne peuvent recourir, en vertu de l’article L. 124-3 du code de commerce, qu’au statut de SA à capital variable (64). La lourdeur du statut de société anonyme peut apparaître rédhibitoire pour des commerçants désireux de s’associer.

C’est pourquoi le  du présent article propose de permettre la constitution de coopératives de commerçants sous forme de SARL.

Le  du présent article modifie l’article L. 124-5 du même code pour fixer des règles dérogatoires en faveur des coopératives de commerçants, par dérogation aux règles générales d’organisation des SA et des SARL. Le nombre des associés peut être inférieur à sept si elle revêt la forme d’une SA, ce qui est d’ailleurs déjà le cas actuellement ; il est de quatre s’il s’agit d’une SARL.

Le  du présent article crée un nouvel article L. 124-6-1 dans le code de commerce pour préciser le nombre requis des administrateurs ou membres du directoire et du conseil de surveillance des coopératives de commerçants détaillants.

Outre un amendement rédactionnel, la commission des Affaires économiques du Sénat a adopté un amendement de son rapporteur tendant à adapter la rédaction du 4° et du 6° du présent article aux SARL. Elle a ainsi souhaité conférer au conseil de gérance des coopératives de commerçants constituées sous forme de SARL le même pouvoir que celui détenu par le conseil d’administration dans les coopératives constituées sous forme de SA, s’agissant de l’exclusion d’un associé en cas de faute grave.

Les 3°, 5°, 6°, 7° et du présent article procèdent à de coordinations rendues nécessaires par la possibilité nouvelle de créer une coopérative de commerçants sous forme de SARL.

Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement de coordination avec l’amendement adopté par sa commission des Affaires économiques. Le Gouvernement a estimé que la commission a souhaité conférer (au 4° du présent article) au conseil de gérance des coopératives de commerçants constituées sous forme de SARL le même pouvoir que celui détenu par le conseil d’administration dans les coopératives constituées sous forme de SA, sans pour autant prévoir que, dans le cas de la SARL, la décision puisse être soumise au contrôle de l’assemblée des associés (alors même que cette possibilité existe dans le cas des SA).

La rédaction finalement adoptée par le Sénat établit donc un parallélisme entre les SARL et les SA, afin que tout associé exclu puisse en appeler à l’assemblée des associés.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 sans modification.

Article 27
(art. L. 124-4-1 [nouveau] du code de commerce)

Clause statutaire d’information et de négociation au profit d’une société coopérative de commerçants avec l’un de ses associés cessionnaire

Le présent article propose de donner à une coopérative de commerçants un droit prioritaire d’information et de négociation en cas de cession d’un fonds de commerce d’un de ses associés.

La solidarité entre commerçants est l’un des fondements des coopératives qu’ils peuvent créer entre eux. Lorsque l’un d’eux cède son fonds de commerce ou décède, il est cependant fréquent que l’acheteur soit un réseau intégré, disposant des fonds nécessaires à une acquisition rapide. La multiplication de cessions de ce type est de nature à fragiliser des réseaux coopératifs.

Aujourd’hui, de nombreuses coopératives de commerçants mettent en place des « pactes de préférence » entre leurs membres, qui permettent de racheter les fonds de commerce des associés quittant leur coopérative, dans l’attente d’une éventuelle rétrocession à un autre membre, qui peut être d’ailleurs un futur associé.

Le présent article prévoit, dans un nouvel article L. 124-4-1 du code de commerce une période de négociation exclusive au profit de la coopérative dont l’un des membres souhaite céder son fonds.

Les coopératives de commerçants pourront donc prévoir, dans leurs statuts, une clause obligeant tout associé souhaitant quitter la coopérative – soit en cédant son fonds de commerce, soit en cédant plus de la moitié des parts sociales ou actions de la société l’exploitant, soit en cédant le bien immeuble dans lequel il réalise son activité – à l’en informer.

Dans un délai de trois mois, la coopérative peut alors proposer de racheter le fonds de commerce, les parts et actions, ou le bien immobilier. En cas de non-respect de cette obligation d’information, la vente peut être annulée par le juge.

Il convient de souligner que ce dispositif ne porte pas atteinte au droit de propriété puisque le commerçant coopérateur a toujours la possibilité de sortir du réseau ou de poursuivre son activité sous une autre enseigne. En toute hypothèse, le commerçant concerné n’est jamais obligé de vendre son fonds à la coopérative : la seule obligation est de l’informer en cas d’intention de cession et d’attendre l’expiration du délai s’il cède son bien à un tiers.

Le présent article ne vise ni le cas où la vente a lieu à cause du décès du coopérateur, ni le cas de la liquidation du régime matrimonial ni le cas d’une cession à un conjoint, un ascendant ou un descendant.

Le présent article a été adopté sans modification par le Sénat.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 27 sans modification.

TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DES ASSOCIATIONS

Article 41
(art. 9 bis et 12 [nouveaux] de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association)

Opérations de fusion et de scission des associations

1.  L’encadrement juridique des fusions et des scissions d’associations

Le I de l’article 41 du projet de loi introduit un article 9 bis au sein de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. Cet article 9 bis définit les règles applicables en cas de fusion ou de scission d’associations. En effet, contrairement aux sociétés commerciales (65), les associations ne bénéficient pas aujourd’hui d’un régime juridique sûr dans ce domaine. La majorité de la doctrine suggère de leur appliquer les principes généraux du droit relatifs aux contrats et aux obligations. La jurisprudence tend pour sa part à les soumettre aux règles figurant dans le code de commerce.

Cette absence est source de difficultés pour les associations qui souhaitent fusionner afin de développer leurs moyens d’action. Ces difficultés sont d’autant plus aiguës que les structures en cause sont importantes du point de vue du nombre de membres, de la taille des effectifs et du volume des moyens financiers. Il existe en effet dans de tels cas des enjeux en termes de transparence tant pour les salariés et les adhérents que pour les créanciers (les dirigeants ou les organes délibérants omettant parfois de les informer en totalité), sans compter les interrogations purement techniques que peut susciter le passage d’une personne morale à une autre.

Comme le résume M. Marc Daunis, rapporteur au nom de la commission des Affaires économiques du Sénat, « le développement [des associations] dans le domaine économique et social les amène à disposer, pour certaines d’entre elles, de revenus, de patrimoines et de dettes, mais aussi d’agréments, d’autorisations administratives, qu’il est nécessaire de transférer à l’association absorbante ou de répartir entre les associations résultant de la scission (66) ».

Le volume d’opérations concernées n’est nullement négligeable. D’après l’étude d’impact, « sur un plan statistique, on estime à environ 200 les opérations de fusion, absorption ou apport partiel d’actifs réalisées chaque année concernant des associations qui doivent faire appel à un commissaire aux comptes (67) ».

L’élaboration d’un cadre juridique précis pour les fusions et les scissions d’associations, inspiré de la jurisprudence actuelle, est à même de garantir la sécurité juridique de ces opérations.

Le I du nouvel article 9 bis précise les modalités des fusions et des scissions.

Il est prévu que la fusion de plusieurs associations résulte de délibérations concordantes qu’elles adoptent dans les conditions prévues par leur statut pour leur dissolution. Lorsque la fusion est réalisée par voie de création d’une nouvelle association, le projet de statuts de la nouvelle association est approuvé par délibérations concordantes de chacune des associations qui disparaissent, et il n’y a pas lieu à approbation de l’opération par la nouvelle association.

La scission d’une association est décidée dans les conditions prévues par son statut pour sa dissolution. Lorsque la scission est réalisée par apport à une nouvelle association, le projet de statuts de la nouvelle association est approuvé par délibération de l’association scindée et il n’y a pas lieu à approbation de l’opération par la nouvelle association.

Les associations participantes établissent un projet de fusion ou de scission qui est publié sur un support habilité à recevoir des annonces légales, dans des conditions et des délais déterminés par voie réglementaire.

Au-delà d’un montant d’apports défini par voie réglementaire, les délibérations précitées doivent être précédées de l’examen d’un rapport établi par un commissaire à la fusion ou à la scission désigné d’un commun accord par la ou les associations qui procèdent à l’apport. Le rapport se prononce sur les méthodes d’évaluation et sur la valeur de l’actif et du passif des associations en cause et expose les conditions financières de l’opération

Selon le II du nouvel article 9 bis, la fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des associations qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux associations bénéficiaires. Les membres des associations qui disparaissent acquièrent la qualité de membres de l’association résultant du groupement ou de la scission. S’agissant de l’effet sur la validité des créances ou des dettes à l’égard des tiers, il est renvoyé aux articles L. 236-14, L. 236-20 et L. 236-21 du code de commerce.

Le III du nouvel article 9 bis précise la date d’effet de la fusion ou de la scission. En cas de création d’une ou plusieurs associations nouvelles, il s’agit de la date de publication au Journal officiel de la déclaration de la nouvelle association ou de la dernière d’entre elles. Lorsque l’opération entraîne une modification statutaire soumise à une approbation administrative, c’est la date d’entrée en vigueur de celle-ci qui est retenue. Dans les autres cas, on se réfère à la date de la dernière délibération ayant approuvé l’opération.

Le IV du nouvel article 9 bis prévoit une forme de rescrit administratif. Ainsi, si la fusion ou la scission concerne « une association bénéficiant d’une autorisation administrative, d’un agrément, d’un conventionnement ou d’une habilitation », celle-ci peut, avant l’engagement de l’opération, interroger l’autorité administrative sur le point de savoir si l’association résultant de la fusion ou de la scission continuera à bénéficier de cette autorisation spécifique. Cette procédure de rescrit ne s’applique pas à la reconnaissance d’utilité publique, qui doit être réitérée.

Enfin, le V du nouvel article 9 bis renvoie à un décret en Conseil d’État le soin d’en fixer les modalités d’application.

2.  Le régime juridique de la dissolution d’une association reconnue d’utilité publique

Le II de l’article 41 du projet de loi rétablit un article 12 dans la loi du 1er juillet 1901. Il dispose que, lorsqu’une association reconnue d’utilité publique disparaît en raison d’une fusion ou d’une scission, sa dissolution sans liquidation est approuvée par décret en Conseil d’État. Le décret en cause abroge par le fait même le décret de reconnaissance d’utilité publique de l’association absorbée.

3.  L’examen de l’article 41 par le Sénat

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté l’article 41 sans modification.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté un amendement de M. Alain Anziani, rapporteur au nom de la commission des Lois, distinguant explicitement (68), à l’instar du code de commerce, le cas de l’apport partiel d’actif de celui de la scission (69). Le Sénat a ensuite adopté l’article 41 ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 41 sans modification.

Article 42
(art. 79-IV [nouveau] du code civil applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle)

Opérations de fusion et de scission des associations en Alsace-Moselle

L’article 42 du projet de loi étend à l’Alsace-Moselle les modifications prévues à l’article 41 concernant les associations établies sur le reste du territoire national. Il insère, à cet effet, un nouvel article 79-IV dans le code civil applicable dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle.

Le régime juridique des associations ayant leur siège en Alsace ou en Moselle est en effet toujours fixé aujourd’hui par les articles 21 à 79-III du code civil local, la loi du 1er juillet 1901 ayant été promulguée alors que ces départements n’étaient pas soumis au droit français. Ainsi, les associations font l’objet non pas d’une « déclaration (…) à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l’arrondissement (70) », mais d’une « inscription au registre des associations du tribunal d’instance compétent (71) ». Les statuts, signés par sept membres au moins (72), sont déposés au greffe du tribunal d’instance, à charge pour ce dernier d’en vérifier la régularité formelle (73). Si la déclaration est admise, le tribunal d’instance doit la communiquer au préfet, lequel dispose d’un délai de six semaines pour faire opposition à l’inscription si l’association poursuit des buts contraires aux lois réprimant les crimes et délits ou tendant à porter atteinte à l’intégrité du territoire ou à la forme républicaine du Gouvernement (74).

Le nouvel article 79-IV reproduit pour l’essentiel les dispositions du nouvel article 9 bis de la loi du 1er juillet 1901 concernant les fusions et les scissions (décrites plus haut (75)), moyennant quelques adaptations en fonction des spécificités du droit alsacien-mosellan.

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté l’article 42 sans modification.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté un amendement de M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, prévoyant expressément (76), pour les associations d’Alsace-Moselle, le cas de l’apport partiel d’actif, distinct de celui de la scission. Le Sénat a ensuite adopté l’article 42 ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 42 sans modification.

Article 43
(art. 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association)

Capacité civile accrue des associations d’intérêt général

Le I de l’article 43 modifie le dernier alinéa de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association afin de conférer une capacité civile accrue à certaines associations.

L’article 6 précité permet à toute association régulièrement déclarée d’ester en justice, de recevoir des dons manuels ainsi que des dons d’établissements d’utilité publique, de percevoir les cotisations de ses membres et enfin d’acquérir, de posséder et d’administrer un local de réunion ou des immeubles strictement nécessaires à l’accomplissement du but qu’elle se propose.

Dans sa rédaction actuelle, le dernier alinéa du même article 6 dispose que « les associations déclarées qui ont pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance, la recherche scientifique ou médicale peuvent accepter les libéralités entre vifs ou testamentaires ».

Le I de l’article 43 du projet de loi élargit notablement le champ de cette dernière disposition. L’autorisation d’accepter des libéralités entre vifs ou testamentaires est désormais étendue à toutes les associations dites d’intérêt général, c’est-à-dire celles « entrant dans les prévisions du b du 1 de l’article 200 du code général des impôts ». Cette dernière référence renvoie aux « œuvres ou organismes d’intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l’achat d’objets ou d’œuvres d’art destinés à rejoindre les collections d’un musée de France accessibles au public, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ». Le I de l’article 43 précise que cette acceptation est régie par l’article 910 du code civil, dont le troisième alinéa dispose : « Si le représentant de l’État dans le département constate que l’organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu’il n’est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d’effet ».

Par ailleurs, le I de l’article 43 ouvre aux mêmes associations d’intérêt général la capacité de « posséder et administrer tous immeubles acquis à titre gratuit ».

Afin de limiter les risques de fraude (par la création, par exemple, d’une association sans activité réelle dans le seul but d’attirer des donations) ou de mauvaise gestion due à l’inexpérience, le texte limite ces nouvelles possibilités aux associations d’intérêt général déclarées depuis trois ans au moins.

Cette condition d’ancienneté n’est pas requise des « associations ayant pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance ou la recherche scientifique ou médicale déclarées avant la date de promulgation de la loi (…) et qui avaient à cette même date accepté une libéralité ou obtenu une réponse favorable à une demande faite sur le fondement du V de l’article 111 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures (77) ».

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté un amendement rédactionnel portant sur ces dispositions.

Le II de l’article 43, introduit par un amendement adopté par la commission des Affaires économiques du Sénat, opère une simple coordination dans la loi précitée du 12 mai 2009.

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté l’article 43 ainsi modifié.

Le Sénat en séance publique a ensuite adopté l’article 43 sans lui apporter de nouvelles modifications.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 43 sans modification.

Article 44
(art. 11 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association)

Capacité civile accrue des associations reconnues d’utilité publique

L’article 44 modifie les dispositions de l’article 11 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association qui portent sur la possession d’immeubles ou de valeurs mobilières.

Dans sa rédaction actuellement en vigueur, l’article 11 accorde aux associations reconnues d’utilité publique la possibilité de faire tous les actes de la vie civile qui ne sont pas prohibés par leurs statuts mais leur fait interdiction de « posséder ou acquérir d’autres immeubles que ceux nécessaires au but qu’elles se proposent », à l’exception des « bois, forêts ou terrains à boiser ». Par ailleurs, toutes leurs valeurs mobilières doivent être placées en titres nominatifs, en titres pour lesquels est établi un bordereau de références nominatives ou en valeurs admises par la Banque de France en garantie d’avances.

En cohérence avec les modifications prévues à l’article 43 du projet de loi, le présent article supprime ces règles spécifiques devenues aujourd’hui inadaptées (78). En élargissant ainsi la possibilité octroyée aux associations reconnues d’utilité publique de faire tous les actes de la vie civile qui ne sont pas interdits par leurs statuts, notamment en ce qui concerne l’acquisition (à titre gratuit ou onéreux) et la gestion d’immeubles, il renforce leur liberté patrimoniale.

Cette liberté ne sera pas pour autant absolue, pour deux raisons.

D’une part, dans un souci d’encadrer les placements opérés par les fonds de ces associations, l’article 44 précise que les actifs éligibles sont ceux autorisés par le code de la sécurité sociale pour la représentation des engagements réglementés des institutions et unions exerçant une activité d’assurance.

D’autre part, comme le relève M. Alain Anziani, rapporteur pour avis au nom de la commission des Lois, « ces associations restent soumises à un contrôle administratif susceptible, le cas échéant, de conduire l’administration à vérifier l’usage qui est fait de cette nouvelle faculté et de sa compatibilité avec la reconnaissance d’utilité publique dont bénéficie cette association (79)  ».

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté cet article sans modification.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté un amendement, présenté par M. Alain Anziani, ajoutant à l’article 11 un troisième alinéa qui dispose : « Les associations reconnues d’utilité publique peuvent accepter les libéralités entre vifs et testamentaires dans les conditions fixées par l’article 910 du code civil. » L’amendement prévoit donc, pour les associations reconnues d’utilité publique, la garantie que représente la capacité pour l’autorité administrative de former opposition à la libéralité si elle estime que l’organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées. Le parallélisme est ainsi assuré avec ce qui est prévu par le I de l’article 43 pour les associations d’intérêt général.

Le Sénat a ensuite adopté l’article 44 ainsi modifié.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 44 sans modification.

TITRE VIII
DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES

Section 2
Dispositions finales

Article 51
(art. 21 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association)

Habilitation à prendre par voie d’ordonnance les mesures d’application outre-mer

Le présent article propose d’autoriser le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures permettant de rendre applicables les dispositions de la présente loi dans les départements et les collectivités d’outre-mer ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie.

Cette ordonnance devra être prise dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la loi. Un projet de loi de ratification de cette ordonnance devra être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

En premier lieu, le I du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures pour rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française pour celles qui relèvent de la compétence de l'État ;

En deuxième lieu, le I du présent article habilite le Gouvernement à procéder aux adaptations nécessaires pour l’application de la loi dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, pour ces trois collectivités, si les articles LO. 6213-1, LO. 6313-1 et LO. 6413-1 du code général des collectivités territoriales prévoient respectivement que les dispositions législatives et réglementaires y sont applicables de plein droit, leur adaptation à l'organisation particulière de ces collectivités est toujours possible.

Enfin, le I du présent article habilite le Gouvernement à procéder, par voie d’ordonnance, à l’adaptation des dispositions de la présente loi dans les départements d’outre-mer relevant de l’article 73 de la Constitution.

Le II du présent article adapte des références obsolètes concernant Mayotte.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 51 sans modification.

*

* *

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, sous réserve des modifications apportées par les amendements qu’elle a adoptés.

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

—  M. Patrick Lenancker, président

—  Mme Patricia Lexcellent, déléguée générale

• Croix Rouge Française

—  M. Frank Delaval, directeur de cabinet du président et du directeur général

—  M. Jean Gouzi, responsable de la trésorerie et des placements

—  M. Samuel Attemene de la direction financière

• M. Bertrand du Marais, conseiller d’État, en détachement en qualité de professeur de droit public, Université Paris Ouest Nanterre La Défense, co-directeur des masters 2 droit - économie

© Assemblée nationale