N° 2260 tome I - Rapport sur le projet de loi de finances pour 2015 (n°2234)




N
° 2260

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234)

TOME I

RAPPORT GÉNÉRAL

PAR Mme. Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

SYNTHÈSE 7

I. UNE VOLONTÉ DE SOUTIEN CONCOMITTANT DE L’OFFRE ET DE LA DEMANDE, CONSCIENTE DE LA CONTRAINTE D’ASSAINISSEMENT DES COMPTES PUBLICS 13

A. UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE PRÉPARANT L’AVENIR… 13

B. … DANS UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE GLOBAL DURABLEMENT DIFFICILE 15

II. UN PROJET DE LOI DE FINANCES QUI VISE LE SOUTIEN À LA CROISSANCE SANS ABANDONNER L’OBJECTIF DE RÉDUCTION DES DÉFICITS 18

A. UN OBJECTIF DE DÉFICIT DE 4,3 % EN 2015 : UN CHOIX DE SOUTIEN À LA CROISSANCE 18

B. UN PROJET DE LOI DE FINANCES SOUS LE REGARD DE NOS PARTENAIRES EUROPÉENS 19

C. UN AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE COORDONNÉ EN EUROPE LOURD DE MENACE POUR L’ÉCONOMIE DE L’UNION 20

III. UN PLAN D’ÉCONOMIES AMBITIEUX METTANT À CONTRIBUTION L’ENSEMBLE DE LA SPHÈRE PUBLIQUE 22

A. L’OBJECTIF D’ÉCONOMIES SUR L’ÉVOLUTION TENDANCIELLE
DE LA DÉPENSE PUBLIQUE ENTRE 2015 ET 2017
22

B. LA MISE EN œUVRE DE L’OBJECTIF SUR LES DÉPENSES DE L’ÉTAT ET DE SES OPÉRATEURS 24

1. L’objectif de réduction des dépenses de l’État sur la période 2015-2017 24

2. La déclinaison des mesures d’économies par missions 25

3. Les conséquences de ces mesures sur l’évolution des crédits des missions 27

4. Le renforcement du pilotage infra-annuel 34

IV. LES ÉCONOMIES RÉALISÉES PERMETTRONT DE FINANCER LES PRIORITÉS DE LA MAJORITÉ 35

A. LA PRIORITÉ DE LA MAJORITÉ EST LE SOUTIEN À L’EMPLOI 35

1. Le soutien à l’emploi 35

2. Le Plan de relance de l’apprentissage 36

B. LA JEUNESSE ET L’ÉDUCATION 38

C. LA MISE EN œUVRE DU PLAN DE RELANCE DU LOGEMENT 38

1. Soutenir la construction de logements 38

2. Encourager l’accession à la propriété 40

3. Engager la construction dans les secteurs du logement intermédiaire et social 40

D. LES MESURES EN FAVEUR DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE 40

E. LA POURSUITE DES INVESTISSEMENTS D’AVENIR 40

F. LE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORTS 41

AUDITION DE M. MICHEL SAPIN, MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, ET DE M. CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DU BUDGET 43

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES 73

ANNEXES 87

ANNEXE N° 1 : LE SOLDE PUBLIC EN 2014 ET 2015 87

ANNEXE N° 2 : LES RECETTES PUBLIQUES EN 2014 ET 2015 95

ANNEXE N° 3 LES PRÉVISONS D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE SUR LA LÉGISLATURE 99

ANNEXE N° 4 : LA STABILISATION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT ET DE SES OPÉRATEURS 105

ANNEXE N° 5 : LA CONTRIBUTION DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 113

ANNEXE N° 6 : LA CONTRIBUTION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 121

ANNEXE N° 7 : LA CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 127

ANNEXE N° 8 : LA CONTRIBUTION DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE ET DE L’UNÉDIC AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE 131

ANNEXE N° 9 : LA DETTE PUBLIQUE 137

ANNEXE N° 10 : LE CRÉDIT D’IMPÔT POUR LA COMPÉTITIVITÉ ET L’EMPLOI (CICE) 143

ANNEXE N° 11 : LA POURSUITE DES EFFORTS FISCAUX ENGAGÉS EN FAVEUR DE L’ENVIRONNEMENT 149

INTRODUCTION

Ce projet de loi de finances pour 2015 (PLF 2015) intervient dans un contexte économique hésitant. Sept ans après le début de la crise financière et économique, l’Europe dans son ensemble peine à retrouver le niveau de croissance économique qu’elle connaissait avant la crise, la France aussi. Bien sûr, il ne peut y avoir qu’une seule explication à cette situation et les causes sont sans doute multiples. Néanmoins, l’une semble prédominante sur les autres : il s’agit du recul de l’investissement des entreprises françaises observé depuis le début des années 2000. Aujourd’hui ce recul se traduit par un déficit d’activité économique.

Pour corriger cette situation et retrouver une activité économique dynamique, ce PLF 2015 affirme trois choix : soutien au pouvoir d’achat des ménages, nouveau soutien à l’activité économique via un plan important pour le bâtiment, poursuite de l’assainissement des finances publiques.

En matière de pouvoir d’achat, ce PLF 2015 concrétise l’engagement du Président de la République et du Gouvernement d’alléger la pression fiscale pour les ménages disposant de revenus modestes et pour autant assujettis à l’impôt sur le revenu (article 2). C’est ainsi que la première tranche d’impôt sur le revenu est supprimée et que la décote est revalorisée. Concrètement, ce sont 9 millions de foyers fiscaux qui vont pouvoir en bénéficier (d’après les estimations du ministère des finances et des comptes publics), soit un quart des foyers fiscaux français (pour mémoire un peu moins de la moitié d’entre eux ne paient d’ores et déjà aujourd’hui pas d’impôt sur le revenu). Cette mesure conduit à « faire enter plus tard les Français dans l’impôt » : ainsi, jusqu’à fin 2013 un célibataire commençait à payer de l’impôt sur le revenu s’il gagnait plus de 13 725 euros par an. Avec cette réforme, il commencera à en payer s’il gagne plus de 15 508 euros par an. Même observation pour un couple avec deux enfants : jusqu’à fin 2013 il commençait à payer de l’impôt sur le revenu s’il gagnait plus de 27 702 euros par an. Avec cette réforme il commencera à en payer s’il gagne plus de 39 959 euros par an. Cette entrée « plus tardive » dans l’impôt ne se fait pour autant pas au détriment des autres contribuables : les contribuables qui se trouvent aujourd’hui dans une tranche inférieure à 14 % paieront en 2015 moins d’impôt sur le revenu qu’en 2014 à revenus équivalents (réévalués avec l’inflation) ; ceux qui sont aujourd’hui dans une tranche supérieure à 14 % auront en 2015 un niveau d’imposition identique à celui de 2014 (à revenus constants réévalués de l’inflation).

Deuxième pilier de ce PLF 2015 : une politique de soutien à l’investissement. Après le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et le Pacte de responsabilité et de solidarité, c’est une nouvelle étape qui est affirmée par ce PLF avec un ambitieux plan de soutien au logement (articles 4 à 7). Si l’ensemble des dispositifs sont rapidement mobilisés, on peut espérer une relance du chiffre d’affaires de la rénovation estimée à 4/5 % (1) à très court terme.

Troisième pilier : la poursuite de l’assainissement de nos finances publiques. Relancer l’activité économique ne peut se faire au détriment de nos comptes publics, c’est-à-dire ne peut se faire en dégradant davantage le solde public. Assainir notre déficit passe soit par une augmentation des recettes (et dans la conjoncture actuelle, ceci se traduirait par une augmentation des impôts), soit par une réduction des dépenses publiques. Le Gouvernement a fait le choix de la deuxième option. Pour mémoire, les dépenses publiques (État, Collectivités locales et administrations de sécurité sociale) augmentaient chaque année, entre 2002 et 2007, de 37,5 milliards d’euros. Entre 2007 et 2012, elles augmentaient chaque année de 34,1 milliards d’euros. Entre 2013 et 2014, elles ont augmenté de 17 milliards d’euros, soit une baisse significative par rapport aux années précédentes. Le projet de loi de programmation pluriannuelle prévoit que sur les trois prochaines années, la dépense publique augmente chaque année de 20 milliards, soit deux fois moins que la tendance observée entre 2002 et 2012. C’est donc un effort sans précédent qui est engagé avec le plan d’économies de 50 milliards. 20 milliards d’euros d’économies sont programmés dès 2015 pour pouvoir donner un coup de frein à la hausse dite « spontanée » des dépenses publiques. Ce plan d’économies vise à rationaliser nos moyens publics, pas à les rationner. Ainsi, 12 missions publiques verront leur crédit progresser en 2015, 7 autres enregistreront une baisse de leur budget inférieure à 2 %. Dans ce plan global, la question de l’investissement des collectivités locales appelle toute notre vigilance. L’année qui suit les élections municipales voit généralement une baisse de l’investissement des collectivités locales. Pour 2015, cette baisse peut être estimée entre 4 et 5 milliards d’euros (sur un total d’investissements réalisé par les collectivités en 2013 de 50 milliards d’euros). Dès lors, il faudra éviter que la baisse de la dotation de l’État aux collectivités soit totalement répercutée sur l’investissement des collectivités, ce qui conduirait à accentuer la baisse « naturelle » déjà anticipée l’année post-élections municipales.

SYNTHÈSE

Le projet de loi de finances pour 2015 vise le soutien à la croissance en même temps que le redressement des comptes publics. En effet, en adaptant la trajectoire de retour à l’équilibre budgétaire, il préserve notre modèle social, soutient notre appareil productif pour développer l’emploi et l’investissement et redonne du pouvoir d’achat aux ménages notamment ceux aux revenus moyens et modestes.

Après la dégradation de 2014 du fait de la faiblesse de la croissance économique et de l’inflation, le déficit public effectif reprendra sa décrue en passant de 4,4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2014 à 4,3 % du PIB en 2015 alors que le déficit conjoncturel continuera de se situer à des niveaux élevés comme le montre le tableau suivant :

LE SOLDE STRUCTUREL
DE L’EXÉCUTION 2013 À LA PRÉVISION POUR 2015

(en % du PIB)

2013

2014

2015

Solde public (en %PIB)

– 4,1

– 4,4

– 4,3

Solde structurel (en % PIB potentiel)

– 2,5

– 2,4

– 2,2

Ajustement structurel

1,1

0,1

0,25

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

En 2015 comme en 2014, la réduction du déficit structurel reposera quasi exclusivement sur des économies demandées à l’ensemble des administrations publiques (APU). Pour parvenir à cet objectif, le Gouvernement annonce vouloir réaliser 21 milliards d’euros d’économies par rapport à l’évolution tendancielle des dépenses publiques dès cette année sur les 50 milliards d’euros prévus à horizon 2017. Ce plan permettra de ramener la croissance en valeur de la dépense publique à 1,1 % en 2015, puis à 1,8 % en moyenne sur les années 2016 et 2017.

Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement souhaite faire contribuer à l’effort l’ensemble des sous-secteurs d’administration publique. Le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 proposent donc, tout en préservant les priorités du Gouvernement et de la majorité, de réaliser 7,7 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs, 3,7 milliards d’euros d’économies sur les dépenses locales et 9,6 milliards d’euros d’économies sur les dépenses sociales. La contribution de chaque sous-secteur d’administration publique à l’effort de redressement budgétaire est commentée dans l’exposé général et détaillée en annexe.

TABLEAU DE SYNTHÈSE DES ÉCONOMIES
SUR LES DÉPENSES PUBLIQUES

(en milliards d’euros)

Type d’économies par rapport à la tendance

Montant

Dépenses de l’État

Dont modérations des rémunérations des agents de l’État

Dont économies sur les dépenses d’intervention de l’État

5,8

1,4

2,4

Dépenses des opérateurs

1,9

Dépenses locales

3,7

Dépenses des administrations de sociales et l’Unédic

Dont dépenses d’assurance maladie

Dont autres dépenses de sécurité sociale

9,6

3,2

6,4

TOTAL

21

Source : rapport annexé au présent projet de loi de finances.

Malgré l’effort structurel porté intégralement par la dépense de 0,5 % du PIB
– l’effort structurel en recettes est nul du fait des mesures de baisse des prélèvements obligatoires liées à la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et à la mise en œuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité qui viendraient en 2015 minorer l’ajustement structurel en dépenses –, les effets des mesures ponctuelles et temporaires liées aux contentieux communautaires, l’écart croissant entre le coût budgétaire et le coût en compatibilité nationale des crédits d’impôt et enfin l’atonie de la croissance spontanée des prélèvements obligatoires auraient un impact de - 0,3 % du PIB potentiel. Le déficit structurel serait donc réduit de 0,2 point du PIB potentiel en passant de 2,4 % du PIB potentiel en 2014 à 2,2 % du PIB potentiel en 2015.

*

* *

AIDE-MÉMOIRE

PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DE CADRAGE BUDGÉTAIRE

(en points de PIB)

 

2014

2015

2016

2017

Prélèvements obligatoires

44,7

44,6

44,5

44,4

Dépenses publiques hors crédit d’impôt

56,5

56,1

55,5

54,5

Dette publique

95,3

97,2

98,0

97,3

Dette publique hors engagements européens

92,1

94,0

94,9

90,2

Solde public (au sens de Maastricht)

– 4,4

– 4,3

– 3,8

– 2,8

Solde conjoncturel

– 1,9

– 2,0

– 1,7

– 1,4

Solde structurel

– 2,4

– 2,2

– 1,9

– 1,4

Ajustement structurel

0,1

0,2

0,3

0,5

dont effort en dépenses

0,2

0,5

0,4

0,6

Mesure ponctuelles et temporaires

0,0

– 0,1

– 0,1

0,0

PRÉVISION DE RECETTES FISCALES

(en milliards d’euros)

 

2014
(LFR 2014)

2014 révisé

2015

Total

279

273,2

278,8

Dont impôt sur le revenu

71,2

68,9

69,5

Dont impôt sur les sociétés

36

35,4

33,7

Dont taxe sur la valeur ajoutée

140

137,8

142,6

DÉCLINAISON DES 21 MILLIARDS D’EUROS
PAR SECTEUR D’ADMINISTRATION

(en milliards d’euros)

État

7,7

dont agences

1,9

Collectivités territoriales

3,7

Administrations de sécurité sociale

9,6

(dont 3,2 sur l’objectif national de dépenses d’assurance maladie – ONDAM – et 6,4 sur les autres dépenses de protection sociale)

Total

21

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

Crédits de paiement

LFI 2014
Format PLF 2015

PLF 2015

LPFP 2016

LPFP 2017

Dépenses du budget général (hors dette, pensions et mission Relations avec les collectivités territoriales – RCT)

204 225

203 496

203 262

202 719

Taxes affectées plafonnées et prélèvements exceptionnels

6 168

5 079

5 054

5 417

Total des dépenses des ministères et affectations de recettes plafonnées

210 393

208 575

208 316

208 136

Soit en écart à 2014

 

– 1 818

– 2 077

– 2 257

Prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne

20 224

21 042

22 801

21 481

Total des dépenses de l’État hors dette, pensions, dotations aux collectivités et prélèvements exceptionnels

230 617

229 617

231 117

229 617

Soit en écart de à 2014

 

– 1 000

500

– 1 000

Transferts aux collectivités locales (prélèvements sur recettes et mission RCT*)

56 863

53 196

49 530

45 863

Soit en écart de à 2014

 

– 3 667

– 7 333

– 11 000

Prélèvements sur fonds de roulement prévus en loi de finances pour 2014

– 481

     

Total des dépenses de l’État hors charge de la dette et pensions

286 999

282 813

280 647

275 480

Soit en écart de à 2014

 

– 4 186

– 6 352

– 11 519

Charge de la dette

46 654

44 337

47 696

50 093

Contributions au CAS Pensions

45 439

45 797

46 190

48 401

Total des dépenses de l’État hors dotation au mécanisme européen de stabilité et deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA)

379 092

372 947

374 533

373 975

(*) Hors réserve parlementaire, intégrée aux dépenses du budget général.

CAS Compte d’affectation spéciale.

Source : présent projet de loi de finances.

LES DÉPENSES PUBLIQUES SOUS NORME

(en milliards d’euros)

Administration publique (APU)

Norme

Montant normé

2014

Part dans la dépense publique

Exécution 2013

État

Norme « zéro volume »

371,5

31 %

368,1

Collectivité territoriales

Enveloppe normée

47,3

3,9 %

48,8

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

ONDAM

174,9

14,6 %

174

Total

594

49,5 %

590,9

ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE

(en %)

APU

2013

2014

2015

2016

2017

Dette/PIB

92,2

95,3

97,2

98

97,3

dont APUC

73,6

76,1

77,9

78,9

78,9

dont ASSO

10

10,3

10,4

10,1

9,4

dont APUL

8,6

8,8

8,9

9

9

APUC : administrations publiques centrales.

ASSO : administrations de sécurité sociale.

APUL : administrations publiques locales.

En juillet 2012, la nouvelle majorité a trouvé une situation dégradée sur plusieurs points : la compétitivité des entreprises reflétée par un déficit commercial record de 75 milliards d’euros, une consommation intérieure en berne avec la perspective d’un alourdissement du taux de TVA à 21,6 %, un déficit public inégalé, une dette publique qui avait considérablement grossi.

Le nouveau Gouvernement et la majorité ont décidé de fonder la politique de redressement sur un triptyque :

– un soutien aux entreprises : dès la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012, a été mis en place le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), puis, à la suite des annonces du Président de la République, le 14 janvier dernier, a été mis en œuvre le Pacte de responsabilité et de solidarité. En effet, la loi de finances rectificative et la loi de financement rectificative de la sécurité sociale adoptées en juillet 2014 et promulguées le 8 août ont traduit ces annonces en dispositions législatives – allégement des cotisations patronales, suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) – en faveur des entreprises pour un montant final de 41 milliards d’euros à horizon 2017. La montée en charge du CICE – pour un montant de 3,5 milliards d’euros en 2015 – va redonner des marges d’action aux entreprises.

Le présent projet de loi de finances pour 2015 s’inscrit dans ce cadre et prévoit notamment des mesures pour soutenir la compétitivité des entreprises situées dans les départements d’outre-mer (DOM) grâce aux majorations du CICE et du crédit d’impôt recherche (CIR) en faveur des entreprises. Ces mesures prendront effet à compter du 1er janvier 2015 et auront donc un impact à partir de 2016. Toutefois, l’investissement des entreprises, véritable talon d’Achille de l’économie française, ne repartira pas si la demande intérieure et internationale n’est pas mieux orientée. En effet, le CICE, qui ne peut donner sa pleine mesure que s’il y a un bénéfice fiscal sur lequel imputer un crédit d’impôt, et les autres mesures d’offre sont des mesures visant à accompagner et à amplifier une éventuelle reprise économique mais ne sont pas suffisants pour susciter un retournement de conjoncture économique, d’où l’importance capitale du second pilier ;

– un soutien à la consommation : la mise en place des 150 000 emplois d’avenir créés par la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 et celle des contrats de génération par la loi n° 2013-185 du 1er mars 2013 participent pleinement de cette politique de la demande. Le Pacte de responsabilité et de solidarité a prévu un volet en faveur des ménages pour un montant de 5 milliards d’euros. La loi de finances rectificative du 8 août 2014 a mis en place une mesure d’allégement exceptionnel d’impôt sur le revenu en faveur des ménages aux revenus modestes pour 1,3 milliard d’euros. Le présent projet de loi de finances propose une mesure pérenne de baisse d’impôt sur le revenu au profit des revenus modestes et moyens. La Rapporteure générale estime que ce soutien à la consommation, notamment au profit des ménages modestes et moyens qui épargnent le moins, est primordial et doit être porté au niveau européen, afin d’éviter un cycle déflationniste dévastateur en France et en Europe.

– enfin, un redressement des comptes publics : le déficit public est passé de – 5,2 % du produit intérieur brut (PIB) en 2011, à – 4,9 % en 2012 et à – 4,1 % en 2013 du fait d’un ajustement sans précédent en temps de crise économique, d’abord réalisé par une augmentation des prélèvements obligatoires (PO) sur les ménages les plus aisés et les grandes entreprises, puis, à partir de 2014, grâce à des économies en dépenses. C’est précisément le sens de l’annonce du plan d’économie de 50 milliards d’euros.

Le présent projet de loi de finances révise cependant la prévision de déficit public pour 2014 de – 3,8 % du PIB, selon la dernière prévision inscrite en loi de finances rectificative, à – 4,4 % du PIB, avant que ce déficit recommence à se résorber à – 4,3 % du PIB en 2015 du fait de la faiblesse de la croissance économique et de l’effondrement de l’inflation eu Europe.

Le respect de la trajectoire initialement prévue aurait signifié un ajustement structurel supplémentaire de 1,3 % de PIB en 2015, soit près de 30 milliards d’euros de hausse de prélèvements obligatoires et de baisse de dépenses publiques supplémentaires. Sacrifier le soutien à la croissance pour assainir rapidement les finances publiques se révèle toujours contre-productif, puisque sans croissance les recettes publiques diminuent, ce qui contraint à de nouvelles augmentations d’impôt pour tenter de compenser les moindres recettes, ce qui peut entraîner un cercle vicieux. La Rapporteure générale soutient donc ce report de deux années des objectifs de réduction du déficit.

Les finances publiques doivent aussi orienter favorablement l’investissement et notamment l’investissement public. La Rapporteure générale fera des propositions afin de ne pas sacrifier l’investissement des collectivités territoriales sur l’autel de l’assainissement budgétaire.

In fine, les choix faits par le Gouvernement et la majorité parlementaire sont des choix difficiles puisqu’ils se proposent de préparer notre appareil productif aux défis de demain, de susciter une reprise économique rapide tout en assainissant nos finances. C’est la feuille de route qu’il convient de suivre jusqu’à la fin du quinquennat.

 

2013

2014

2015

PIB

0,3

0,4

1

Déflateur de PIB

0,8

0,8

0,9

Indice des prix à la consommation

0,7

0,5

0,9

Masse salariale privée

0,8

1,6

2

Croissance potentielle

1,1

1

1

Écart de production (en % du PIB)

– 2,7

– 3,3

– 3,4

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

L’année 2013 a été une année de reprise de la croissance après la stagnation de l’économie enregistrée en 2012. En effet, la croissance du PIB pour l’année écoulée a atteint + 0,3 %. En prolongeant cette tendance, le Gouvernement avait retenu, dans son dernier programme de stabilité 2014-2017, comme hypothèses de croissance + 1 % pour 2014 et + 1,7 % pour 2015.

Toutefois, par rapport aux projections de moyen terme, présentées en avril dernier dans ce même programme de stabilité, le Gouvernement a décalé dans le temps son scénario de reprise et abaissé ses perspectives de croissance à court terme. La croissance était alors prévue à + 0,4 % du PIB en 2014 et + 1 % du PIB en 2015.

Le nouveau scénario repose sur un retour attendu de la confiance des entreprises. Ce mouvement devrait se renforcer avec la montée en charge du CICE et la mise en œuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité, qui devraient permettre de réduire globalement le coût du travail de 30 milliards d’euros et d’alléger la fiscalité sur les entreprises de 10 milliards d’euros. De ce fait, le Gouvernement retient des hypothèses de croissance de l’investissement des entreprises de + 0,9 % en 2015 avant que celui-ci n’accélère dans les années à venir. Ces hypothèses sont étayées par le maintien de conditions de financement des besoins publics très favorables grâce à la crédibilité dont jouit la politique économique de la France.

Les entreprises devraient donc être en mesure de répondre à la demande mondiale qui serait adressée à la France.

En zone euro, la reprise annoncée en 2013 a plutôt été décevante durant le premier semestre 2014. Le Gouvernement table tout de même sur l’accélération de la croissance économique et de l’activité grâce à l’apaisement des tensions financières, ponctué par un retour de l’Irlande, puis de la Grèce sur les marchés internationaux. La reprise en Italie et surtout en Espagne pourrait également profiter aux entreprises françaises. Enfin, la mise en place d’un salaire minimum en Allemagne devrait doper la consommation de ses ménages et amorcer un rééquilibrage commercial entre ce pays, qui relancerait ainsi sa consommation, et la France, qui met en place une politique favorable à l’investissement et à la productivité de ses entreprises.

Hors zone euro, les évolutions seraient également favorables. La croissance des économies anglo-saxonnes se confirmerait et celle des pays émergents demeurerait dynamique même si elle s’installe sur un sentier moins rapide.

L’économie française pourrait ainsi tirer profit de la situation internationale grâce aux mesures prévues dans le Pacte de responsabilité et de solidarité, qui amélioreraient sa compétitivité hors prix, ainsi qu’à la récente baisse du taux directeur de la Banque centrale européenne à 0,05 %, qui va permettre des conditions de financement plus favorables pour les ménages et les entreprises.

Toutefois, l’environnement international n’est pas dénué d’aléas potentiellement négatifs, recensés par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) dans son avis n° HCFP-2014-04 du 26 septembre 2014 :

– les risques géopolitiques en Ukraine pourraient avoir des incidences négatives sur les économies européennes et principalement sur l’économie allemande. De même, les tensions récurrentes en Méditerranée et au Moyen-Orient sont susceptibles de renchérir le coût de l’énergie ;

– la reprise du commerce mondial pourrait être moins rapide que prévu par le Gouvernement ;

– le Gouvernement parie sur un retour rapide de l’inflation au niveau des cibles de la Banque centrale européenne (BCE). Or, il n’est pas exclu que, tant que l’ensemble des pays de l’Union européenne mènent une politique concertée d’ajustement structurel bridant la demande au nom de la recherche de la compétitivité, l’inflation demeure durablement basse en dépit de la politique relativement expansive de la banque centrale ;

– le resserrement de la politique monétaire américaine pourrait, malgré la politique accommodante de la BCE, se traduire par une hausse des taux longs en zone euro ;

– les tensions sur les dettes souveraines de la zone euro pourraient réapparaître.

Côté consommation des ménages, le Gouvernement escompte pour 2014 une hausse de l’ordre de + 0,7% en 2014 (contre + 0,4% par an entre 2007 et 2012 et une tendance inférieure sur les premiers mois de l’année 2014). Aucune donnée n’a été transmise à la Rapporteure générale pour ce projet de loi de finances permettant de confirmer cette hypothèse.

Selon le Gouvernement, ce mouvement serait permis par la réduction de l’impôt sur le revenu en bas de barème et par l’amélioration du marché de l’emploi attendue à la suite des mesures d’offre prises en faveur des entreprises – explication robuste –, mais aussi par la dissipation des comportements d’épargne de précaution des ménages.

Au total, la Rapporteure générale n’est pas en mesure de confirmer les hypothèses de reprise de la consommation des ménages.

Les prévisions pour l’année 2015 demeurent atteignables pour autant que les acteurs économiques, et en particulier les entreprises, se saisissent de l’ensemble des outils créés pour soutenir l’activité, d’où l’importance des contreparties à demander en termes d’investissement et d’emploi.

Dans le présent projet de loi de finances, le Gouvernement a, en accordant plus de marge de manœuvre aux stabilisateurs automatiques, donné au pays la possibilité d’atteindre un tel niveau de croissance pour 2015.

 

2014

2015

Solde public effectif

– 4,4

– 4,3

Solde conjoncturel

– 1,9

– 2

Mesures ponctuelles et temporaires

0

– 0,1

Solde structurel (en % du PIB potentiel)

– 2,4

– 2,2

Dettes des APU

95,3

97,2

Dettes des APU hors soutien financier à la zone euro

92,1

94

Source : article 3 du présent projet de loi de finances.

Le présent rapport analysera dans les différentes annexes le solde public (annexe n°1), les recettes publiques (annexe n° 2), l’évolution de la dépense publique sur la législature (annexe n° 3), la contribution de l’État (annexe n° 5), des opérateurs de l’État (annexe n° 6), des collectivités territoriales (annexe n° 7) et des organismes de sécurité sociale et de l’Unédic (annexe n° 8) au redressement budgétaire, la dette publique (annexe n° 9), le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (annexe n° 10) et la poursuite des efforts fiscaux engagés en faveur de l’environnement (annexe n° 11).

En tout état de cause, piloter les finances publiques consiste, d’une part, à définir le triptyque de recettes, dépenses, dette/déficit publics en tenant compte du contexte économique et social et, d’autre part, à créer les conditions de soutien à la croissance économique.

Ce sont donc bel et bien les deux objectifs qu’il faut viser en même temps et qui sont par essence liés – une croissance économique élevée permet mécaniquement des recettes fiscales plus élevées. Abandonner l’objectif de réduction du déficit public serait contre-productif puisqu’à terme cela met le pays en situation de dépendance vis-à-vis d’investisseurs étrangers pour le financement de sa dette, ce qui finit par nuire à la création de croissance économique.

Avec ce projet de loi de finances, ce sont ces deux objectifs qui sont visés de manière concomitante. En adaptant le calendrier de retour de la France vers l’équilibre budgétaire à la situation économique et sociale de notre pays, le Gouvernement fait le choix de protéger la croissance.

Le b du 1 de l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG), signé à Bruxelles le 2 mars 2012, stipule que l’obligation pour les administrations publiques de présenter une situation budgétaire en équilibre ou en excédent est considérée comme respectée « si le solde structurel annuel des administrations publiques correspond à l’objectif de moyen terme spécifique à chaque pays, tel que défini dans le pacte de stabilité et de croissance révisé, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut au prix du marché ». Par ailleurs, il est prévu que « le calendrier de cette convergence sera proposé par la Commission européenne, compte tenu des risques qui pèsent sur la soutenabilité des finances publiques de chaque pays ».

L’article 5 du TSCG stipule qu’« une partie contractante qui fait l’objet d’une procédure concernant les déficits excessifs en vertu des traités sur lesquels l’Union européenne est fondée, met en place un programme de partenariat budgétaire et économique comportant une description détaillée des réformes structurelles à établir et à mettre en œuvre pour assurer une correction effective et durable de son déficit excessif… Leur présentation pour approbation au Conseil de l’Union européenne et à la Commission européenne ainsi que leur suivi auront lieu dans le cadre des procédures existantes », c’est-à-dire les procédures pour déficit excessif établies sur le fondement du traité de Maastricht. La procédure de déficit excessif est prévue par l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. La Commission évalue et le Conseil décide s’il existe un déficit excessif ou non. Le Conseil adresse d’abord des recommandations puis le cas échéant peut le mettre en demeure de prendre les mesures appropriées pour réduire son déficit. Il peut in fine appliquer des sanctions.

Chaque État membre doit donc fixer dans son programme de stabilité son objectif de moyen terme (OMT) transmis à la Commission européenne. En droit interne, l’OMT est fixé par la loi de programmation des finances publiques qui est discutée en même temps que le présent projet de loi de finances. Le Conseil de l’Union européenne examine l’OMT qui s’apprécie au regard de « la soutenabilité des finances publiques ou une progression rapide vers leur soutenabilité, tout en autorisant une marge de manœuvre budgétaire, en tenant compte notamment des besoins en investissements publics ». Néanmoins, le TSCG prévoit également qu’un État membre peut s’écarter de son OMT en cas de « circonstances exceptionnelles », définies comme « des faits inhabituels indépendants de la volonté de la partie contractante concernée et ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques ou à des périodes de graves récession économique ».

Au regard de ces dispositions, par rapport au dernier programme de stabilité transmis à la Commission européenne, le présent article décale dans le temps l’OMT de solde structurel de 2017 à 2019. Celui-ci est fixé à – 0,4 % du PIB potentiel à cette dernière date. En effet, la persistance d’une croissance économique atone, 0,4 % prévu pour 2014 et 1 % pour 2015, couplé avec une inflation très basse, 0,5 % en 2014 et 0,9 % en 2015, ne permettrait pas d’atteindre l’objectif de solde structurel de – 0,25 % du PIB en 2017 prévu par le programme de stabilité 2014-2017.

LE SOLDE STRUCTUREL
DE L’EXÉCUTION 2013 À LA PRÉVISION POUR 2015

 

2013

2014

2015

Solde public (en %PIB)

– 4,1

– 4,4

– 4,3

Solde structurel (en % PIB potentiel)

– 2,5

– 2,4

– 2,2

Ajustement structurel

1,1

0,1

0,25

Source : rapport annexé au présent projet de loi de finances.

Le Gouvernement n’a pas fait le choix de la facilité budgétaire pour autant, puisque l’ajustement structurel reste positif même s’il est moins important que prévu. Il entend réaliser cet ajustement exclusivement en dépenses. Ainsi, en raison de la mise en œuvre du plan d’économies de 50 milliards d’euros sur trois ans, cet effort représentera 0,5 point par an en moyenne sur la période. Il serait partiellement neutralisé par la baisse du taux de prélèvements obligatoires du fait de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et des mesures décidées dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité.

État

Solde public

Dette publique

2011

2012

2013

2011

2012

2013

Union européenne 28

– 4,4

– 3,9

– 3,3

82,4

85,2

87,1

Zone euro

– 4,1

– 3,7

– 3

87,4

90,7

92,6

Allemagne

– 0,8

+ 0,1

0

80

81

78,4

Belgique

– 3,8

– 4,1

– 2,6

99,2

101,1

101,5

Irlande

– 13,1

– 8,2

– 7,2

104,1

117,4

123,7

Grèce

– 9,6

– 8,9

– 12,7

170,3

157,2

175,1

Espagne

– 9,6

– 10,6

– 7,1

70,5

86

93,9

France

– 5,2

– 4,8

– 4,1

86,2

90,6

93,5

Italie

– 3,7

– 3

– 3

120,7

127

132,6

Pays-Bas

– 4,3

– 4,1

– 2,5

65,7

71,3

73,5

Royaume-Uni

– 7,6

– 6,1

– 5,8

84,3

89,1

90,6

Source : Eurostat.

Le Fonds monétaire international (FMI) estimait récemment que les pays connaissant un excédent budgétaire, comme le Luxembourg et surtout l’Allemagne, comme ceux proches de l’équilibre budgétaire, à l’instar de la Suède ou du Danemark, pouvaient consacrer jusqu’à 0,5 % de leur PIB pour stimuler l’investissement en Europe. Les chiffres de solde et de déficit ne sont pas connus pour 2014.

En revanche, les perspectives de croissance économique ont été revues à la baisse dans l’ensemble de la zone euro. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a récemment révisé sa prévision de la croissance dans la zone de – 0,4 point, à + 0,8 % du PIB pour l’ensemble de la zone. Pour 2015, l’OCDE ne prévoit désormais qu’une croissance de + 1,1 % du PIB, au lieu des + 1,7 % attendus jusque-là et ce malgré le soutien monétaire apporté par la BCE.

L’OCDE estime par ailleurs, qu’« au vu de la faiblesse de la demande, les pays européens doivent utiliser au maximum la flexibilité des règles budgétaires ». L’INSEE confirme cette analyse en considérant que « la reprise en zone euro se poursuit d’ici la fin de l’année, guidée avant tout par une amélioration progressive et persistante de la demande intérieure. Elle concernerait plus de secteurs et de pays qu’en 2013. Au total, la croissance du PIB augmenterait au deuxième trimestre de + 0,3 % » au lieu de 0 % en France. « Conséquemment, la croissance du PIB sur l’ensemble de l’année 2014 serait de + 1 %. » (2)

Ces analyses et la fragilité de la croissance dans la zone euro plaident en faveur d’un soutien plus franc à la demande intérieure et notamment dans les pays connaissant une situation budgétaire assainie mais également une stimulation de l’investissement privé et public. L’adaptation de la trajectoire de réduction des déficits publics s’inscrit dans cette démarche.

À sa lecture, on observe que :

– sur la période 2002-2007, la dépense publique a augmenté par an de 37,5 milliards d’euros, soit + 6,7 milliards d’euros pour la dépense de l’État, la 19,2 milliards pour les dépenses de sécurité sociale et 11,6 milliards pour la dépense locale ;

– sur la période 2007-2012, elle a augmenté de + 34,1 milliards d’euros par an, soit + 10,7 milliards d’euros pour la dépense de l’État, + 17,4 milliards pour les dépenses de sécurité sociale et + 6 milliards pour la dépense locale ;

– sur la période 2012-2014, cette progression annuelle ralentit à + 21,5 milliards d’euros par an, dont + 3 milliards d’euros pour les dépenses de l’État, + 12,9 milliards pour les dépenses de sécurité sociale et + 5,6 milliards pour les dépenses des collectivités territoriales.

La mise en œuvre du plan d’économies de 50 milliards d’euros sur la croissance tendancielle de la dépense publique pour les années 2015 à 2017 doit permettre à la fois de redresser nos finances publiques et de dégager des marges de manœuvre pour financer les mesures en faveur de l’investissement et de la reprise de l’emploi.

La construction de l’équilibre budgétaire de ce projet de loi de finances et les prévisions pour les années 2016 et 2017 reposent ainsi sur la capacité de nos administrations publiques à réaliser des économies substantielles sur toutes les catégories de dépenses, tout en préservant la qualité de leur action.

Ces économies rendent également nécessaire le renforcement des règles de gouvernance pour accompagner les changements qu’elles introduiront dans la conduite des politiques publiques.

Sur la période 2015-2017, les efforts en économies sur la croissance tendancielle des dépenses représenteront :

– 19 milliards d’euros pour l’État et ses opérateurs qui devraient compenser l’évolution spontanée de la dépense et permettre une baisse des crédits des ministères et des taxes affectées aux opérateurs en euros courants ;

– 11 milliards d’euros pour les collectivités territoriales à travers la baisse des concours financiers de l’État ;

– 10 milliards d’euros sur l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) du fait de la baisse de son taux d’évolution à + 2 %, au lieu de + 2,4 % en 2014 ;

– 10 milliards d’euros pour les autres dépenses de protection sociale.

La déclinaison de ces économies pour 2015 fait l’objet d’une présentation détaillée par secteur d’administration publique aux annexes nos 5 à 8 du présent rapport général. L’impact à la baisse qu’elles auront sur la dépense publique est également décrit à l’annexe n° 3. Par conséquent, les développements suivants se seront concentrés sur les mesures prévues par le présent projet de loi de finances pour assurer la réalisation des objectifs de dépenses portant sur l’État et ses opérateurs en 2015.

Dépenses de personnel

1,4

Dépenses de fonctionnement

1,6

Dépenses d’investissement

0,5

Dépenses d’intervention

2,4

Dépenses des opérateurs

1,9

TOTAL

7,7

Cet objectif d’économies donne une indication de l’ampleur de l’effort que représente la maîtrise des dépenses en euros courants sur l’année 2015 (soit des dépenses retenues pour déterminer le besoin de financement de l’État) au regard de ce qui serait advenu en l’absence de réformes.

Si cette indication est utile car elle permet de mieux identifier les postes sur lesquels porteront les économies, le résultat permettant d’apprécier l’effort réalisé est in fine le ralentissement de la croissance des dépenses en euros courants, voire leur réduction.

Or, comme le montre le tableau suivant, le plan d’économies aura pour effet de baisser sensiblement le niveau des dépenses de l’État en euros courants au cours de la période 2015-2017.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE DE L’ÉTAT SUR LA PÉRIODE 2015-2017

(en millions d’euros)

Crédits de paiement

LFI 2014

Format PLF 2015

PLF 2015

LPFP 2016

LPFP 2017

Dépenses du budget général (hors dette, pensions et mission RCT)

204 225

203 496

203 262

202 719

Taxes affectées plafonnées et prélèvements exceptionnels

6 168

5 079

5 054

5 417

Total des dépenses des ministères et affectations de recettes plafonnées

210 393

208 575

208 316

208 136

Soit en écart à 2014

 

– 1 818

2 077

– 2 257

Prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne

20 224

21 042

22 801

21 481

Total des dépenses de l’État hors dette, pensions, dotations aux collectivités et prélèvements exceptionnels

230 617

229 617

231 117

229 617

Soit en écart à 2014

 

– 1 000

500

– 1 000

Transferts aux collectivités locales (PSR et mission RCT*)

56 863

53 196

49 530

45 863

Soit en écart à 2014

 

– 3 667

– 7 333

– 11 000

Prélèvements sur fonds de roulement prévus en loi de finances pour 2014

– 481

     

Total des dépenses de l’État hors charge de la dette et pensions

286 999

282 813

280 647

275 480

Soit en écart à 2014

 

– 4 186

– 6 352

– 11 519

Charge de la dette

46 654

44 337

47 696

50 093

Contributions au CAS Pensions

45 439

45 797

46 190

48 401

Total des dépenses de l’État, hors dotation au mécanisme européen de stabilité et deuxième programme d’investissements d’avenir

379 092

372 947

374 533

373 975

.* Hors réserve parlementaire, intégrée aux dépenses du budget général.

Source : présent projet de loi de finances.

Pour parvenir à respecter ces objectifs de baisse de la dépense de l’État en exécution, le présent projet de loi prévoit :

– la déclinaison d’un programme d’économies portant sur les crédits de chacune des missions ;

– le renforcement du pilotage infra-annuel.

Mission

Mesures d’économies

Chiffrages

Action extérieure de l’État

– redéploiement des effectifs et des moyens vers les zones géographiques prioritaires

– rationalisation et valorisation du parc immobilier à l’étranger

– diminution du financement des organisations internationales

– diminution des moyens dévolus aux opérateurs

– 220 ETP

– 25 millions d’euros

Administration générale et territoriale de l’État

– rationalisation des dépenses de personnel et diminution des effectifs

– 265 ETP

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

– baisse des crédits budgétaires

– baisse des exonérations de charges sociales compensées à la Mutualité sociale agricole du fait de la mise en œuvre du Pacte de responsabilité et de solidarité

– mobilisation de la politique agricole commune (PAC) pour les aides agricoles (1er pilier)

– mobilisation de la PAC pour la gestion des risques agricoles (2e pilier)

– priorisation des dépenses d’investissement dans le cadre des dépenses financées par les programmes d’investissements d’avenir

– amélioration de l’efficience des fonctions support du ministère de l’agriculture se traduisant par une baisse de 7 % des crédits de fonctionnement

– effort des opérateurs

– 400 millions sur 3 ans

– 50 millions d’euros

– 66 millions d’euros

– 25 millions d’euros

– 240 ETP

Aide publique au développement

– économies à la suite de l’arrivée à échéance de dispositifs d’annulation de dettes

– concentration des dispositifs d’aides

– réforme de l’expertise technique (création de l’Agence française d’expertise technique internationale)

– 58 millions d’euros en 2015

– 11 millions d’euros

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

– baisse des dépenses de dette viagère (diminution du nombre de bénéficiaires)

– baisse de la dotation d’indemnisation des victimes de spoliations durant l’Occupation

– économies sur les dépenses de fonctionnement

– 150 millions d’euros

– 6 millions d’euros

Conseil et contrôle de l’État

– diminution de 0,5 % des crédits, hors dépenses de personnel

– dématérialisation des procédures

– réduction des dépenses de fonctionnement

 

Culture

– rationalisation des effectifs

– baisse des dépenses des opérateurs

– 45 ETP

– 47 ETP

Défense

– application des dispositions de la loi de programmation militaire 2014-2019

 

Direction de l’action du Gouvernement

– baisse des dépenses de fonctionnement

– baisse des effectifs

– 7 millions d’euros

– 35 ETP

Écologie, développement et mobilité durables

– baisse des recettes des agences de l’eau

– baisse des effectifs de la mission

– réduction des effectifs des opérateurs

– 175 millions d’euros

– 505 ETP

– 233 ETP

Économie

– diminution des crédits

– réduction des effectifs

– baisse de 2 % des subventions pour charges de service public

– baisse des taxes affectées

– 80 millions d’euros

– 143 ETP

– 691 millions d’euros

Égalité des territoires, logement et ville

– réforme des aides personnelles au logement

– réduction des effectifs de la mission et des opérateurs

– 319 ETP et 2 ETP

Enseignement scolaire

– baisse des dépenses de fonctionnement

– réduction des effectifs

– 38 ETP

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

– réduction des effectifs

– démarches d’amélioration de l’efficience de la dépense

– 2 491 ETP

– 60 millions d’euros

Immigration, asile et intégration

– réforme de la politique de l’asile

 

Justice

– baisse des dépenses de fonctionnement et modernisation des procédures

 

Médias, livre et industries culturelles

– réduction des effectifs des opérateurs

– 20 ETPT

Outre-mer

– réforme du dispositif de soutien à l’hôtellerie

– recentrage des crédits logement sur le logement social

– réforme de l’aide à la continuité territoriale

– 6 millions d’euros

Politique des territoires

– réforme de la prime à l’aménagement du territoire

– révision de la politique des zones prioritaires

 

Recherche et enseignement supérieur

– optimisation de la gestion financière

– réorientation de l’aide aux étudiants

– amélioration des fonctions support

– économies sur les aides à l’innovation (mise en œuvre par la banque publique d’investissement)

– 100 millions d’euros

– 14 millions d’euros

– 4 millions d’euros

– 23 millions d’euros

Régimes sociaux et de retraite

– baisse des frais de gestion

– réduction des effectifs

 

Relations avec les collectivités territoriales

– baisse des concours financiers de l’État

– 3,67 milliards d’euros

Santé

– baisse des moyens des opérateurs

– baisse des effectifs

– 14 millions d’euros

– 52 ETPT

Sécurités

– économies sur les dépenses de fonctionnement

– 120 millions d’euros

Solidarité, insertion et égalité des chances

– réduction des effectifs

– suppression de l’aide personnalisée de retour à l’emploi au bénéfice des aides mises en œuvre par Pôle emploi

– réduction des effectifs des agences régionales de santé

– 150 ETP

– 80 ETP

Sport, jeunesse et vie associative

– réduction des dépenses d’intervention

– baisse des crédits du centre national pour le développement du sport

– 4,7 millions d’euros

– 13 millions d’euros

Travail et emploi

– baisse progressive du volume des contrats aidés

– contribution du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées

– réduction des effectifs

– 29 millions d’euros

– 150 ETP

Avances à l’audiovisuel public

– stabilisation des ressources publiques

– baisse des effectifs de France Télévisions

 

Crédits budgétaires
(CP HCAS)

LFI
2014

Mesures de périmètre
2015

Mesures de transfert

2015

LFI 2014

(Format 2015

PLF 2015

PLF 2015 /LFI 2014

LFR 1 2014

(Format 2015

DOFP 2015

DOFP 2015

(Format 2015

PLF 2015 / DOFP 2015

Par mission

                   

Action extérieure de l’État

2 801

0

34

2 835

2 818

– 0,6 %

2 795

2 784

2 818

0

Administration générale et territoriale de l’État

2 197

0

– 26

2 171

2 172

0,1 %

2 157

2 198

2 172

0

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

2 929,1

1

0,0

2 929,7

2 683,4

– 8,4 %

2 900,9

2 653,8

2 654,3

29,0

Aide publique au développement

2 874

0

0

2 874

2 791

– 2,9 %

2 800

2 801

2 801

– 10

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 941

0

– 48

2 894

2 740

– 5,3 %

2 873

2 740

2 692

48

Conseil et contrôle de l’État

494

0

0

494

500

1,1 %

494

500

500

0

Culture

2 389

0

1

2 390

2 385

– 0,2 %

2 335

2 385

2 386

0

Défense

29 554

1

41

29 597

29 103

– 1,7 %

29 395

29 109

29 151

– 48

Direction de l’action du Gouvernement

1 129

3

9

1 141

1 177

3,1 %

1 111

1 164

1 177

0

Écologie, développement et mobilité durables

7 139

– 14

– 60

7 065

6 650

– 5,9 %

6 997

6 725

6 650

0

Économie

1 678

– 1

– 43

1 635

1 555

– 4,9 %

1 606

1 648

1 605

– 50

Égalité des territoires et logement

7 398

5 716

– 5

13 109

13 206

0,7 %

13 067

7 510

13 221

– 15

Engagements financiers de l’État

998

0

0

998

900

– 9,9 %

960

850

850

50

Enseignement scolaire

46 314

0

– 17

46 297

47 431

2,5 %

46 285

47 445

47 428

3

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8 697

0

1

8 697

8 554

– 1,6 %

8 616

8 544

8 544

10

Immigration, asile et intégration

659

0

– 8

651

666

2,3 %

641

674

666

0

Justice

6 270

0

7

6 276

6 376

1,6 %

6 202

6 369

6 376

0

Médias, livre et industries culturelles

811

0

1

812

714

– 12,1 %

801

731

732

– 18

Outre-mer

2 009

0

6

2 014

2 019

0,3 %

2 008

2 014

2 019

0

Politique des territoires

806

0

0

806

752

– 6,7 %

775

752

752

0

Pouvoirs publics

990

0

0

990

988

– 0,2 %

990

990

990

– 2

Provisions

132

0

0

132

165

25,4 %

132

145

145

20

Recherche et enseignement supérieur

25 726

– 7

12

25 731

25 702

– 0,1 %

25 331

25 695

25 701

1

Régimes sociaux et de retraite

6 513

0

0

6 513

6 414

– 1,5 %

6 498

6 429

6 429

– 15

Santé

1 295

– 137

11

1 170

1 205

2,9 %

1 122

1 330

1 205

0

Sécurités

12 121

0

25

12 147

12 174

0,2 %

12 080

12 148

12 174

0

Solidarité, insertion et égalité des chances

13 647

1 736

– 2

15 380

15 546

1,1 %

15 365

13 812

15 546

0

Sport, jeunesse et vie associative

446

0

0

447

434

– 2,8 %

440

431

431

3

Travail et emploi

10 783

642

– 11

11 415

11 068

– 3,0 %

11 286

10 437

11 068

0

Total missions hors mission RCT

201 741

7 940

– 71

209 610

208 888

– 0,3 %

208 061

201 013

208 882

6

Mission Relations avec les collectivités territoriales

2 614

0

64

2 678

2 680

0,1 %

2 627

2 618

2 681

– 1

Contributions au CAS Pensions

45 442

– 3

– 1

45 439

45 797

0,8 %

45 439

45 487

45 483

313

dont T2 CAS

40 041

– 3

15

40 054

40 405

0,9 %

40 054

40 079

40 092

314

dont T3 CAS

5 401

0

– 16

5 385

5 392

0,1 %

5 385

5 408

5 392

0

Charge de la dette

46 654

0

0

46 654

44 337

– 5,0 %

44 854

47 027

47 027

– 2 690

Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité

3 262

0

0

3 262

0

–100,0 %

3 262

0

0

0

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

0

0

0

0

0

0,0 %

0

0

0

0

Source : Gouvernement.

Les principales évolutions entre la loi de finances pour 2014 (format 2015) et le projet de loi de finances pour 2015

Certaines missions voient leurs crédits augmenter à l’instar de :

– la mission Enseignement scolaire (+ 1,1 milliard d’euros) notamment du fait de 9 561 postes supplémentaires ;

– la mission Justice (+ 99 millions d’euros) et la mission Sécurité (+ 27 millions d’euros) également du fait des 1 040 nouveaux postes qui sont introduits dans le présent projet de loi ;

– la mission Égalité des territoires et logement (+ 97 millions d’euros) et la mission Solidarité, insertion et égalité des chances (+ 166 millions d’euros) principalement du fait de l’augmentation des dépenses de guichet liées à la « rebudgétisation » des aides personnelles au logement (3).

D’autres missions, voient le montant de leurs crédits stabilisé soit à la suite d’engagements en ce sens du Gouvernement, à l’instar de la mission Culture et de la mission Recherche et enseignement supérieur, soit à la suite de la compensation de l’effort en économies par une hausse de leurs ressources (comme dans le cas des missions Sport, jeunesse et vie associative, Santé et Outre-mer).

Certaines missions au contraire voient leurs crédits baisser dont notamment :

– la mission Anciens combattants, mémoire et lien avec la Nation
(– 154 millions d’euros) en raison de la diminution du nombre de bénéficiaires des dispositifs financés par la mission ;

– la mission Écologie, développement et mobilités durables
(– 415 millions d’euros, soit une baisse de 5,9 %) au travers de la priorisation des investissements d’infrastructures. À ce stade, la Rapporteure générale n’a pas reçu davantage d’éléments permettant d’analyser cette baisse ;

– la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales
(– 246 millions d’euros) principalement en conséquence de la mobilisation de moyens communautaires pour financer certaines aides agricoles ;

– la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines de l’État sur laquelle est répercutée la suppression de 2 400 ETPT ;

– la mission Travail et emploi (– 346 millions d’euros) du fait de l’adaptation de ses moyens à l’amélioration de la situation de l’emploi, attendue des mesures de baisse du coût du travail. À ce stade, la Rapporteure générale n’a pas reçu d’éléments supplémentaires permettant d’analyser cette diminution ;

– la mission Médias, livre et industries culturelles (– 98 millions d’euros) du fait de la réorganisation des sociétés audiovisuelles, mais cette baisse est compensée par la progression des ressources issues de la contribution à l’audiovisuel public prévue à l’article 27 du présent projet de loi ;

– la mission Politique des territoires (– 54 millions d’euros) à la suite du lancement des nouveaux contrats de plan État-région qui permettront de mieux organiser le financement de cette politique et de recentrer certains dispositifs (arrêt des entrées dans le dispositif d’exonération de zone franche urbaine et de l’expérimentation des emplois francs au bénéfice de nouvelles initiatives mises en œuvre par Pôle emploi).

Par ailleurs, la Rapporteure générale souligne la création, au sein de la mission Engagements financiers de l’État, d’un nouveau programme 344 Fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des emprunts structurés, vers lequel sont transférés 50 millions d’euros de la mission Économie.

Présentation détaillée de l’évolution des crédits de la mission Défense

Les crédits budgétaires de la mission Défense proposés par le présent projet de loi de finances permettent a priori de mettre en œuvre la loi de programmation militaire (LPM) (4) pour les années 2014-2019.

Ils sont fixés à 29,1 milliards d’euros en 2015, hors contribution au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions, auxquels doivent s’ajouter pour 2015 :

– 1,7 milliard d’euros de recettes exceptionnelles prévues par la LPM ;

– 0,5 milliard d’euros de recettes exceptionnelles pour compenser la baisse de 500 millions d’euros de crédits budgétaires sur la mission Défense.

Ces 2,3 milliards d’euros sont composés de 2,1 milliards d’euros de crédits devant résulter de la cession de bandes hertziennes en 2015, prélevés sur le compte d’affectation spéciale Fréquences (5), et de 200 millions d’euros au titre de la cessions de biens domaniaux (6).

Ces ressources seront complétées en deuxième loi de finances rectificative pour 2014 par le redéploiement de 250 millions d’euros supplémentaires du programme d’investissements d’avenir (PIA) venant compléter un premier redéploiement de même montant adopté dans la première loi de finances rectificative pour 2014 pour compenser la baisse des crédits de la mission de 500 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION DÉFENSE HORS CHARGES DE PENSIONS PRÉVUE PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2015

(en milliards d’euros)

Type de crédits

LFI 2014
(format 2015)

PLF 2015

2016

2017

Crédits du budget général

29,6

29,1

29,6

30,1

Crédits du budget général et recettes exceptionnelles

31,4

31,4

31,6

CHRONIQUE DES DERNIÈRES MODIFICATIONS INTERVENUES SUR LES CRÉDITS
DE LA MISSION DÉFENSE














Cette diminution des crédits budgétaires de 500 millions d’euros pour 2015 sera reconduite pour 2016 et 2017. Au final, ce sont ainsi 1,5 milliard d’euros de crédits budgétaires en moins qui seront compensés par un même montant de recettes exceptionnelles. Le montant total de recettes exceptionnelles progresse ainsi de 6,1 à 7,6 milliards d’euros sur l’ensemble de la période 2014-2019, avec les fragilités que cela implique.

Les évolutions de crédits par ministères

Ces modifications de crédits sur les différentes missions impactent également la répartition des crédits par ministère comme l’indique le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE CRÉDITS PAR MINISTÈRE

(en milliers d’euros)

Crédits de paiement hors pensions

LFI 2014

(Format 2014

Mesures
de périmètre 2015

Mesures de transfert 2015

LFI 2014

(Format 2015)

Courant
2015

Évolu-tion 2015/
LFI

2014

LFR 1 2014

(Format 2015)

DOFP 2015

(Format LFI 2014)

DOFP 2015

(Format 2015)

Écart PLF 2015/DOFP

Par ministère

                   

Affaires étrangères et développement international

4 566

0

34

4 599

4 549

– 1,1 %

4 508

4 516

4 549

0

Affaires sociales, santé et droits des femmes

14 942

1 599

9

16 550

16 750

1,2 %

16 487

15 142

16 750

0

Agriculture, agroalimentaire et forêt

4 314

1

3

4 317

4 108

– 4,9 %

4 284

4 071

4 074

34

Culture et communication (yc P115)

3 315

0

2

3 317

3 217

– 3,0 %

3 247

3 233

3 235

– 18

Décentralisation et fonction publique

206

0

0

206

205

– 0,7 %

206

204

204

1

Défense

32 584

1

– 7

32 579

31 935

– 2,0 %

32 225

31 941

31 935

0

Écologie, développement durable et énergie

13 487

– 14

– 60

13 412

12 944

– 3,5 %

13 298

13 033

12 959

– 15

Économie, industrie et numérique

1 815

0

– 32

1 783

1 626

– 8,8 %

1 712

1 708

1 676

– 50

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

68 003

– 7

– 19

67 977

69 132

1,7 %

67 786

69 157

69 132

0

Finances et comptes publics

14 095

– 1

1

14 095

13 779

– 2,2 %

13 943

13 712

13 712

67

Intérieur

14 976

0

– 8

14 968

15 012

0,3 %

14 878

15 020

15 012

0

Justice

6 270

0

7

6 276

6 376

1,6 %

6 202

6 369

6 376

0

Logement égalité des territoires et ruralité

7 398

5 716

– 5

13 109

13 206

0,7 %

13 067

7 510

13 221

– 15

Outre-mer

2 009

0

6

2 014

2 019

0,3 %

2 008

2 014

2 020

0

Services du Premier ministre

2 533

3

9

2 545

2 528

– 0,6 %

2 484

2 516

2 528

0

Travail, emploi et dialogue social

10 783

642

– 11

11 415

11 068

– 3,0 %

11 286

10 437

11 068

0

Ville, jeunesse et sports

446

0

0

447

434

– 2,8 %

440

431

431

3

Total dépenses du BG hors mission RCT

201 741

7 940

-71

209 610

208 888

– 0,3 %

208 061

201 013

208 881

6

Mission Relations avec les collectivités territoriales

2 614

0

64

2 678

2 680

0,1 %

2 627

2 618

2 681

– 1

   

0

               

Contributions au CAS Pensions

45 442

– 3

– 1

45 439

45 797

1 %

45 439

45 487

45 483

313

dont T2 CAS

40 041

– 3

15

40 054

40 405

1 %

40 054

40 079

40 092

314

dont T3 CAS

5 401

0

– 16

5 385

5 392

0 %

5 385

5 408

5 392

0

Charge de la dette

46 654

0

0

46 654

44 337

– 5 %

44 854

47 027

47 027

– 2 690

Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité

3 262

0

0

3 262

0

– 100 %

3 262

     

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

0

0

0

 

0

0 %

0

     

Afin d’assurer la réalisation des économies prévues et de limiter les aléas en cours de gestion, il est proposé de renforcer le taux de mise en réserve sur les crédits des ministères.

Pour rappel, la mise en réserve de crédits permet de constituer une marge de précaution pour appliquer, en cours de gestion, le principe dit « d’auto-assurance », en vertu duquel les dépenses imprévues sont financées par un redéploiement de crédits au sein de la même mission, ou réaliser des économies supplémentaires.

En 2014, le taux de mise en réserve initiale était fixé à 0,5 % des crédits de dépenses de personnel (titre 2) et à 7 % des crédits des autres dépenses.

Afin d’assurer la réalisation des objectifs de dépenses pour 2015, le présent projet de loi propose de porter à 8 % la mise en réserve des crédits portant sur les dépenses autres que les dépenses de personnel.

ÉVOLUTION DU TAUX DE MISE EN RÉSERVE

Taux

PLF 2012

PLF 2013

PLF 2014

PLF 2015

Taux de mise en réserve des crédits hors titre 2

5 %

6 %

7 %

8 %

Taux de mise en réserve des crédits du titre 2

0,5 %

0,5 %

0,5 %

0,5 %

Montant de la réserve en début d’exercice (en milliards d’euros)

5,8

6,5

7,5

8

Cette hausse de 1 % du gel des crédits en début d’exercice devrait permettre de constituer une réserve de précaution équivalente à celle de l’année 2013, après adoption d’un « surgel » de 2 milliards d’euros en début d’année, soit d’un montant proche 8 milliards d’euros en crédits de paiement.

En 2014, le taux de chômage s’est stabilisé, mais à un niveau élevé : au deuxième trimestre, il s’élevait à 10,2 % de la population active en France (9,7 % en métropole), soit 0,1 point de moins qu’au deuxième trimestre 2013 (– 0,2 point pour la métropole) (7).

Dans un contexte budgétaire très contraint, le Gouvernement a néanmoins souhaité concentrer l’effort sur quelques priorités :

– la montée en charge de la Garantie Jeunes, dispositif permettant de verser à ceux des jeunes âgés entre dix-huit et vingt-cinq ans les plus éloignés du marché de l’emploi une allocation d’un montant équivalent au revenu de solidarité active (RSA) et de les accompagner dans la recherche d’un emploi ou d’une formation qualifiante. 100 millions d’euros supplémentaires (soit plus de 130 millions au total) permettront de soutenir 50 000 jeunes en 2015, contre 9 000 en 2014 ;

– toujours en faveur de l’emploi des jeunes, la progression des contrats de génération, qui permettent l’accès des moins de vingt-six ans au contrat à durée indéterminée, grâce à l’aménagement des conditions de travail des seniors jusqu’à leur retraite, lui-même soutenu dans les entreprises de moins de 300 salariés par une aide de 4 000 euros par an pendant trois ans. Après un démarrage progressif, le dispositif monte en puissance et ce sont 40 000 nouveaux contrats qui devraient être conclus en 2015, appelant une progression des crédits de plus de 40 % par rapport à 2014 (234 millions d’euros contre 165) ;

– la progression de l’enveloppe de financement des contrats aidés dans le secteur marchand (de 136 à 207 millions d’euros). 80 000 nouveaux contrats uniques d’insertion-contrats initiative emploi (CUI-CIE) sont prévus en 2015 ;

– la préservation des moyens du service public de l’emploi, accrus en 2014.

L’amélioration de la situation de l’emploi est par ailleurs un objectif central du Pacte de responsabilité et de solidarité. En effet, le CICE comme le dispositif dit « zéro charge » permettent d’alléger le coût du travail des salariés les moins bien rémunérés, la demande de travail étant réputée la plus élastique à son coût à ces niveaux de salaire. L’annexe n° 10 du présent rapport présente de façon détaillée ce crédit d’impôt et propose des éléments pour en établir un premier bilan.

La feuille de route de la Grande conférence sociale des 7 et 8 juillet 2014 comporte un Plan de relance de l’apprentissage, dont le Président de la République a réaffirmé l’objectif principal lors des Assises de l’apprentissage, qui se sont tenues le 19 septembre dernier à l’Élysée : porter à 500 000 le nombre d’apprentis dans notre pays en 2017. Les 415 000 jeunes en parcours d’apprentissage ou d’alternance étaient en 2013 deux fois moins nombreux, en proportion, qu’en Allemagne (un jeune sur huit contre un jeune sur quatre), et 3 % moins nombreux qu’en 2012. Afin d’inverser cette tendance et d’atteindre l’objectif fixé en 2017, d’importantes mesures financières ont été prises, et d’autres annoncées (8).

Les évaluations conduites dans le cadre de la modernisation de l’action publique (MAP) ont permis de constater que les différentes aides à l’apprentissage étaient insuffisamment ciblées sur les entreprises les plus susceptibles d’embaucher des apprentis. En conséquence, la loi de finances pour 2014 (9) a :

– recentré le crédit d’impôt apprentissage (10) sur les entreprises qui embauchent des apprentis dans la première année d’une formation conduisant à un diplôme n’excédant pas le niveau Bac + 2 (article 36) ;

– substitué à l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) une prime de 1 000 euros par apprenti et par année de formation, versée comme l’ICF par les régions (11), mais aux seules entreprises de moins de 11 salariés (article 140). Le financement de cette mesure – dont le coût est de 255 millions d’euros –, par l’affectation aux régions d’une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), est prévu par l’article 13 du présent projet de loi de finances.

Ces entreprises pourront combiner cette prime avec une autre prime du même montant, destinée à celles de moins de 250 salariés embauchant un apprenti supplémentaire (prime au recrutement, et non annuelle). À ce stade, seule est prévue une prime pour l’embauche d’un premier apprenti par les entreprises de moins de 50 salariés, dans le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 22 juillet dernier (effort évalué à 50 millions d’euros) (12).

L’extension de la prime à tous les apprentis nouvellement embauchés et aux entreprises jusqu’à 250 salariés, explicitement annoncée par le Gouvernement (13), n’a pas encore trouvé de traduction législative. Le financement de la mesure, vraisemblablement par l’affectation d’une nouvelle fraction de TICPE aux régions (14), devra également être organisé.

Ce projet de loi de finances constitue d’ailleurs une nouvelle étape – qu’il faut espérer ultime – dans la réforme du financement de l’apprentissage. Depuis la fin de l’année 2013, le Gouvernement s’est attelé à cette tâche ardue dans pas moins de quatre textes : la loi de finances pour 2014, la loi de finances rectificative pour 2013 (15), la loi relative à la formation professionnelle et la loi de finances rectificative pour 2014 (16).

Sans entrer dans des détails qui excèdent le cadre du rapport général, il faut retenir de cette réforme les éléments suivants, qui se caractérisent par l’affirmation de la place centrale des régions et l’augmentation de l’effort en direction des centres de formation d’apprentis (CFA) :

– la taxe d’apprentissage (0,5 % de la masse salariale) et la contribution au développement de l’apprentissage (0,18 % de la même assiette) ont été fusionnées en une taxe d’apprentissage unique, au taux de 0,68 % (pour un produit de 2,7 milliards d’euros) ;

– le produit de cette taxe est désormais affecté majoritairement (51 %) aux régions, et ne transitera plus à l’avenir par le compte d’affectation spéciale Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage (CAS FNDMA(17) ;

– le reste du produit de la taxe est partagé entre le « quota » (26 %) et le « hors-quota » (23 %). Le quota finance pour l’essentiel les CFA et les sections d’apprentissage des établissements d’enseignement ; le hors-quota permet le financement d’établissements de formation professionnelle initiale, sur la base de listes déterminées par les préfets ;

– le produit de la contribution supplémentaire à l’apprentissage (235 millions d’euros), taxe additionnelle à la taxe d’apprentissage qui pèse sur les entreprises de plus de 250 salariés, n’est plus affecté au CAS FNDMA, mais directement au financement des centres de formation des apprentis ;

– les ressources des régions destinées au financement de l’apprentissage sont maintenues au même niveau qu’avant la réforme, grâce à l’affectation d’une fraction de TICPE.

Le Président de la République a, par ailleurs, annoncé, au mois d’août dernier, une fusion prochaine de la prime pour l’emploi (PPE) et du RSA. Cette réforme, dont la complexité exige un temps de préparation suffisant, ne figure pas dans le présent projet de loi de finances. Le Gouvernement pourra s’appuyer utilement sur le diagnostic et les préconisations de notre collègue Christophe Sirugue, auteur en tant que parlementaire en mission d’un rapport sur la Réforme des dispositifs de soutien aux revenus d’activité modestes (18).

Ces mesures seront complétées par la mise en œuvre d’une nouvelle génération de contrats de plan État-régions 2014-2020, conclus à l’été 2014, dont la priorité transversale est l’emploi.

Si les derniers chiffres publiés par le Commissariat général au développement durable font état d’une faible augmentation du nombre de logements dont la construction est autorisée en août 2014, après leur diminution constante depuis 2013, le rythme des mises en chantier continue de diminuer. Ces données confirment que l’année 2014 sera globalement une année creuse pour la construction de logements. Elles indiquent également que les perspectives pour 2015 sont plus favorables du fait du léger ressaut constaté à la fin de l’été sur les autorisations de constructions.

NOMBRE MENSUEL DE LOGEMENTS

(en milliers de logements)

Source : Commissariat général au développement durable, Chiffres et statistiques, n° 560, septembre 2014.

Le plan de relance du logement devrait soutenir cette tendance pour 2015 grâce à l’introduction dans le présent projet de loi de finances les mesures suivantes :

– le nouveau dispositif « Pinel » qui se substituera au dispositif « Duflot » devrait permettre de relancer l’investissement locatif sur le marché du logement neuf en offrant notamment davantage de souplesse sur la durée de l’engagement locatif (19) et bénéficiera par ailleurs de l’assouplissement du zonage à compter du 1er octobre 2014 ;

– l’allégement de la fiscalité applicable aux plus-values de cessions des terrains à bâtir conduisant à l’exonération totale de ces plus-values après vingt-deux ans de détention sur le modèle de la fiscalité applicable aux plus-values sur les terrains bâtis (20) et l’introduction d’un abattement supplémentaire de 30 % sur les ventes conclues avant le 31 décembre 2015 ;

– l’exonération dans la limite de 100 000 euros des donations portant sur des terrains à bâtir sur lesquels le donataire s’engage à construire dans un délai de quatre ans (21) ;

– la simplification de la réglementation de la construction qui permettra également d’abaisser les coûts de la construction et facilitera la conception de nouveaux projets.

2. Encourager l’accession à la propriété

La construction de 30 000 logements intermédiaires en zone tendue devrait être financée par l’État et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) au cours des cinq prochaines années, s’ajoutant aux 10 000 logements que la CDC s’est déjà engagée à construire.

Dans le secteur du logement social, plusieurs mesures ont également été annoncées de manière à inciter les maires à respecter les obligations qui leur sont faites en matière de construction de logement social dont l’application des pénalités prévues par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) et, le cas échéant, la substitution du préfet au maire pour délivrer des permis de construire dans les communes dans lesquelles les logements sociaux font le plus défaut.

Les efforts de financement des grands projets d’aménagements concernant, d’une part, le Grand Paris et, d’autre part, le plan de modernisation du réseau ferroviaire mis en œuvre dans le cadre de la réforme ferroviaire sont maintenus.

Par ailleurs, l’Agence de financement des infrastructures de France (AFITF) devait bénéficier de deux nouvelles sources de financement, présentées dans l’annexe n° 11 du présent rapport :

– le péage de transit poids lourds introduit en loi de finances rectificative pour 2014, dont la ministre de l’écologie a toutefois annoncé la suppression lors d’une déclaration faite le 9 octobre dernier ;

– la majoration de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) de 2 centimes par litre de gazole dont le rendement attendu pour 2015 est de 800 millions d’euros (24).

AUDITION DE M. MICHEL SAPIN, MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, ET DE M. CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DU BUDGET, SUR LE PROJET DE LOI
DE FINANCES POUR 2015

Au cours de sa première séance du mercredi 1er octobre 2014, la Commission a entendu, en audition ouverte, M. Michel Sapin, ministre des Finances et des comptes publics, et M. Christian Eckert, secrétaire d’État au budget, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et le projet de loi de finances pour 2015.

M. le président Gilles Carrez. Avec cette audition, nous entamons le marathon budgétaire annuel, qui se poursuivra dès cet après-midi avec l’audition de M. Didier Migaud, en sa qualité de président du Haut Conseil des finances publiques, qui nous présentera les avis émis par ce dernier sur la loi de programmation des finances publiques, d’une part, et sur la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, d’autre part.

La Commission examinera le projet de loi de programmation le mardi 7 octobre et la première partie du projet de loi de finances le mercredi suivant. Quant à la discussion commune de ces deux textes en séance publique, elle débutera le mardi 14 octobre, après le vote solennel sur le projet de loi relatif à la transition énergétique.

Je souhaiterais faire deux observations sur nos conditions de travail. Une semaine seulement séparera la présentation du texte, ce matin, et la réunion de la Commission consacrée à l’examen des amendements. Nous avons obtenu du président de l’Assemblée le report de la date limite de dépôt des amendements au samedi 4 octobre à dix-sept heures, mais la charge de travail que représente l’étude de l’ensemble des dispositions est telle qu’il sera très difficile pour Mme la Rapporteure générale de nous présenter son rapport dans un délai aussi bref. C’est la première fois que l’examen du texte par la Commission suit d’aussi près sa présentation en Conseil des ministres, et je souhaiterais qu’un tel calendrier reste exceptionnel. Si nous voulons faire du bon travail, et si le Gouvernement veut éviter des déconvenues, il faut que notre commission puisse jouer son rôle de filtre et approfondir sa réflexion. Chacun sait que lorsque des dispositions sont adoptées trop rapidement, sans le délai d’analyse nécessaire, se produisent souvent des réactions en chaîne que l’on peine à maîtriser.

Par ailleurs, et je souhaiterais, là encore, que cela reste absolument exceptionnel, vous avez tenu une conférence de presse ce matin, avant de venir devant notre commission. Or nous avons ouvert à la presse nos réunions afin de faciliter le travail des médias, de sorte que nous nous trouvons dans une situation difficile. J’ai indiqué, lorsqu’on m’en a informé, qu’il serait préférable que cette conférence de presse se tienne en début d’après-midi, comme cela a toujours été le cas. Certes, vous étiez soumis à des contraintes particulières, mais je vous demande instamment que cela ne se reproduise pas, car c’est la négation du travail que nous essayons de mener dans une relation de confiance entre l’exécutif et la Commission.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le président de la Commission, nous vous devons des excuses ; je suis tout prêt à reconnaître que nous ne simplifions pas vos conditions de travail, mais l’élaboration de ces textes n’est pas simple. Quant à la conférence de presse, elle s’est tenue ce matin en raison de la séance de questions au Gouvernement de cet après-midi à laquelle nous devons participer. Au demeurant, le dossier de presse ne sera distribué aux journalistes qu’à l’issue de cette audition.

L’examen de ces deux projets de loi est une étape supplémentaire importante dans l’exécution des engagements pris par le Président de la République et le Gouvernement au printemps dernier. Les deux textes comportent, en effet, des mesures de maîtrise des dépenses et des mesures de nature à permettre à notre pays de retrouver plus de croissance et d’emploi. La situation est délicate en France et en Europe, et le seul moyen de traverser cette période difficile est de maintenir le cap qui a été défini. Je veux vous tenir un discours de vérité et de volonté.

Au plan européen, après avoir surmonté la crise du système bancaire puis celle de la dette, notre zone monétaire est aujourd’hui confrontée à une période de croissance beaucoup trop faible, alors qu’elle n’a toujours pas retrouvé le niveau d’activité qu’elle connaissait il y a six ans. L’inflation atteint ses plus bas niveaux historiques ; elle vient d’être évaluée, pour la zone euro, à 0,3 %, ce qui est extrêmement faible, et ne retrouvera qu’à l’horizon 2017 une cible proche de 2 %, en dépit des décisions bienvenues et sans précédent prises par la BCE. Cette croissance et cette inflation trop faibles pèsent sur la capacité de nos économies à résorber les déséquilibres économiques et à permettre aux acteurs économiques
– ménages et entreprises – de se désendetter dans de bonnes conditions. Par ailleurs, le taux de chômage reste à un niveau dramatiquement élevé, puisqu’il dépasse 10 %, et même 20 % chez les jeunes, dans la moitié des États membres. Enfin, de nouveaux risques géopolitiques se font jour qui peuvent ralentir la reprise économique. Je pense en particulier aux tensions entre l’Ukraine et la Russie dans l’est de l’Europe, qui pèsent sur une partie de la zone euro, notamment l’Allemagne. En revanche, la dépréciation de l’euro et la baisse du prix du pétrole vont dans le bon sens et peuvent nourrir un certain optimisme.

Dans ce contexte, quelle doit être la politique économique au niveau européen ? La politique monétaire doit continuer à soutenir la demande. Les réformes structurelles doivent continuer à accroître le potentiel de nos économies partout en Europe, particulièrement en France. Nous devons également soutenir le plan d’investissement proposé par M. Jean-Claude Juncker, le nouveau président de la Commission européenne – il y a souvent loin de l’annonce des chiffres à la réalisation concrète de ces plans d’investissement. Enfin, le rythme de consolidation budgétaire doit être adapté à la situation économique de chacun des pays européens. C’est ce que disent un grand nombre d’observateurs internationaux, notamment le Fonds monétaire international (FMI) ; c’est ce que j’ai entendu au cours du G20 qui s’est tenu en Australie, où tous les grands pays s’interrogent sur la croissance et l’inflation trop faibles en Europe, qui représentent un risque pour l’ensemble du monde. À ces conditions, la reprise en zone euro devrait être au rendez-vous cette année, après deux ans de récession, avec des conditions financières qui se sont assouplies et une consolidation budgétaire un peu plus réduite en 2014 qu’en 2013.

En ce qui concerne la France, nous avons voulu être prudents dans l’élaboration de notre scénario. En 2014, la croissance sera limitée à 0,4 % ; elle ne commencera à accélérer que très progressivement à partir de l’année prochaine : nous prévoyons 1 % en 2015. L’inflation, extrêmement faible en 2014 – on prévoit 0,5 % hors tabac –, devrait se redresser lentement pour atteindre 0,9 % en 2015.

S’agit-il, comme je peux l’entendre parfois, d’un scénario optimiste ? La prévision est toujours un art très difficile. En tout état de cause, ceux qui jugent élevée une prévision de 1 % pour 2015 estimaient, au printemps dernier, que la même pour 2014 ne l’était pas. Je me bornerai donc à signaler que ce scénario est strictement identique à celui de l’OCDE tel qu’il a été publié mi-septembre et qu’il est même inférieur au consensus des économistes publié au mois de septembre. Cette prévision n’est donc pas volontairement optimiste ; elle correspond à celles des observateurs de la situation française.

Toutefois, une croissance de 1 % en 2015 est évidemment insuffisante. Retrouver plus de croissance pour créer plus d’emplois, c’est non seulement un impératif social et économique, mais aussi une nécessité pour réduire nos déficits et stabiliser notre dette. À ce propos, l’INSEE a publié hier des chiffres indiquant que notre dette publique a dépassé 2 000 milliards d’euros. À ceux qui jugent que nous sommes au bord d’un désastre financier, je rappelle que les taux auxquels nous empruntons n’ont jamais été aussi faibles et que l’écart de taux avec l’Allemagne est bien moindre qu’il ne l’a été récemment. Dois-je rappeler que la moitié des 2 000 milliards de dette publique que nous subissons aujourd’hui datent de la période 2002-2012 et que 600 de ces 1 000 milliards sont imputables à la seule période 2007-2012 ? Dois-je rappeler encore que nous avons trouvé, en 2012, un déficit public supérieur à 5 % et qu’il se serait maintenu à ce niveau si nous n’avions pas pris les mesures de redressement que la situation exigeait ? Bref, avec de tels niveaux de déficit, la dette ne peut diminuer toute seule !

Depuis le début de la législature, le Gouvernement et la majorité ont pris leurs responsabilités. Nous avons fait face, en adoptant une stratégie économique qui repose sur deux piliers. Le premier pilier est constitué des politiques d’emploi, d’investissement et de croissance. Nous avons agi sur tous les leviers, avec les emplois d’avenir, la loi de sécurisation de l’emploi, la réforme de la formation professionnelle – qui entrera en application le 1er janvier 2015 – et le nouveau programme d’investissements d’avenir (PIA) ; nous continuerons. Mais nos entreprises ont besoin d’être plus compétitives pour créer de l’emploi et investir. À ce titre, elles ont déjà bénéficié du CICE à hauteur de 11 milliards en 2014. En outre, votre assemblée a voté, avant l’été, la première étape du Pacte de responsabilité et de solidarité, qui se traduira, en 2015, par un allégement de 5,5 milliards d’euros du coût du travail et par une diminution de 1 milliard d’euros de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). La seconde tranche du CICE amplifiera l’effort, en augmentant les allégements de 12 milliards supplémentaires. Autant de marges qui permettront aux entreprises d’embaucher, de former et de moderniser leur outil de production. C’est maintenant à elles de passer à l’acte !

Le second pilier est l’assainissement de nos finances publiques, que nous menons parallèlement aux efforts consentis en faveur de la compétitivité. Les mesures que nous avons adoptées depuis 2012 ont déjà produit des effets, même si la faible croissance masque une partie des résultats obtenus. Le déficit structurel, qui traduit les déséquilibres profonds de nos comptes, corrigé du cycle économique aura été quasiment divisé par deux entre 2011 et 2014. Il atteint ainsi son plus bas niveau depuis 2001 ! Les efforts que nous avons demandés aux Français portent donc leurs fruits puisqu’en une demi-législature, nous avons résorbé les déséquilibres accumulés pendant dix ans, entre 2002 et 2012. C’est en cohérence avec cette stratégie que nous vous présentons le projet de loi de finances et la trajectoire pluriannuelle des finances publiques.

Dans un contexte économique difficile, le Gouvernement maintient scrupuleusement la stratégie économique qui a été présentée au printemps et respecte scrupuleusement ses engagements. L’effort de maîtrise de la dépense sera intégralement respecté grâce à un plan de 50 milliards d’économies sur 2015-2017, dont 21 milliards en 2015 que Christian Eckert vous détaillera. La dépense publique progressera à un rythme équivalent à celui prévu au printemps : 1,4 % en valeur en 2014, puis 1,1 % en 2015, contre plus de 3 % par an en moyenne entre 2002 et 2012. L’ensemble des mesures annoncées en faveur de la croissance, de la compétitivité et de l’emploi seront intégralement mises en œuvre selon le calendrier prévu – montée en charge du CICE, déploiement du Pacte de responsabilité – pour atteindre, à l’horizon de 2017, une baisse des prélèvements sur les entreprises de plus de 40 milliards, soit très exactement la somme nécessaire aux entreprises pour restaurer les marges qu’elles ont perdues entre 2007 et 2012. Dans le même temps, nous poursuivrons la baisse de l’impôt sur le revenu (IR) des ménages aux revenus modestes et moyens, comme nous nous y étions engagés.

Nous avons pris la décision, conformément au raisonnement portant sur les besoins de la zone euro, d’adapter le rythme de réduction des déficits à la situation macroéconomique du pays ; je m’en explique. Notre politique économique ne change pas ; le déficit se réduira plus lentement que prévu du fait des circonstances économiques. Nous ne cherchons pas à compenser à toute force les effets de cette croissance et de cette inflation trop faibles par de nouvelles mesures qui auraient des effets négatifs sur la croissance et peut-être également sur l’inflation en nourrissant un phénomène déflationniste. Les spécialistes pourront aussi noter que notre déficit structurel sera comptablement moindre qu’au printemps. Cet ajustement est aujourd’hui évalué à 0,2 point de PIB en 2015. Le Haut Conseil des finances publiques nous a fait remarquer que nous ne tenions pas l’engagement de l’améliorer de 0,8 point de PIB. C’est un fait qui traduit notre volonté d’adapter le rythme de réduction des déficits à la situation économique de l’Europe et de la France. Mais cette révision de l’effort structurel tient à la conjonction d’un certain nombre d’effets comptables : un changement du système de comptabilité européen, une révision de la croissance potentielle et la faible inflation. Faudrait-il, dans une situation économique difficile comme la nôtre, caractérisée notamment par une inflation trop faible, consentir davantage d’efforts parce que la mesure de nos efforts se dégrade ? J’aurai l’occasion d’en discuter avec nos partenaires européens dans les semaines qui viennent ; c’est un débat parfaitement légitime. Si nous assumons le sérieux budgétaire, nous refusons une austérité qui serait négative pour l’activité économique de notre pays.

Le déficit baissera : de 4,4 % en 2014, il passera à 4,3 % en 2015 et se situera au-dessous de 3 % en 2017. Le projet de loi de finances et le projet de loi de programmation des finances publiques qui l’accompagne tracent donc une perspective de réduction de nos déficits publics à un rythme qui prend en compte la croissance. Pour autant, ces perspectives et ces textes ne remettent pas en cause les objectifs d’économies que nous nous étions fixés : 21 milliards d’euros en 2015, 50 milliards d’euros sur trois ans.

Je veux insister sur l’importance de ces économies, car c’est grâce à elles que nous pouvons financer les baisses de prélèvements – en particulier la réforme du bas du barème de l’impôt sur le revenu que nous proposons –, redonner 3,2 milliards d’euros aux ménages moyens et modestes, faire bénéficier 9 millions de foyers fiscaux d’une baisse de leurs charges fiscales, et que nous ferons sortir de l’impôt 1 million de ménages qui y sont entrés au cours des dernières années. Ainsi, l’an prochain, pour la première fois depuis cinq ans, la part des prélèvements dans la richesse nationale baissera. C’est également grâce à ces économies que nous retrouvons des marges de manœuvre pour financer nos priorités : la jeunesse, l’avenir, l’emploi, la solidarité et la sécurité. J’ajoute que les engagements de la loi de programmation militaire dans leur ensemble sont respectés.

La bonne gestion de l’argent public est une obligation qui est due à tous les Français et plus particulièrement à ceux qui possèdent peu ou qui ne possèdent pas. Nous mettons donc en œuvre des choix stratégiques au travers des économies du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. L’État et les agences concourront à ces économies à hauteur de 19 milliards d’euros en trois ans, dont 7,7 milliards dès 2015 ; les dépenses des ministères diminueront ainsi de 1,8 milliard d’euros par rapport au budget initial pour 2014. Les collectivités locales contribueront à hauteur de 3,7 milliards d’euros par an, pour un total de 11 milliards et l’assurance maladie à hauteur de 3 milliards dès 2015 pour un total de 10 milliards d’euros. Enfin, les autres organismes de protection sociale apporteront le solde des économies pour plus de 6 milliards d’euros.

Les administrations de l’État montrent l’exemple. Pour l’État et ses agences, tous les leviers d’économies ont été mobilisés afin de parvenir à un résultat sans précédent : 1,4 milliard d’euros sur la masse salariale, 2,1 milliards d’euros sur les dépenses, essentiellement de fonctionnement à travers la rationalisation des achats et la politique immobilière de l’État, 2,4 milliards d’euros sur les dépenses dites « d’intervention », chaque économie traduisant un choix en matière de réforme de l’État et de modernisation du service public, et enfin 1,9 milliard d’euros sur les agences de l’État et les opérateurs. Ces économies sont décisives pour notre crédibilité vis-à-vis des Français et des observateurs étrangers, notamment de nos partenaires européens. Elles seront réalisées en totalité pour permettre la réduction du déficit et financer les baisses d’impôt.

Tels sont les engagements que nous avions pris devant vous, devant les Français et les Européens. L’orientation, que vous avez votée au printemps dernier se traduit dans ce projet de budget, malgré les difficultés de la conjoncture. Notre pays a besoin de préparer l’avenir, de financer ses priorités, de surmonter ses difficultés économiques, et c’est en tenant fermement le cap que nous avons fixé que nous lui permettrons d’y parvenir.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État au budget. Tout d’abord, je souhaiterais rappeler trois mesures relatives à la gouvernance de la loi de programmation des finances publiques, qui nous permettent d’assurer le respect de cette programmation mais qui sont souvent un peu occultées par la densité de nos travaux.

La première de ces trois mesures est la création d’un objectif indicatif d’évolution de la dépense locale. La loi de programmation fixe une prévision de croissance de la dépense locale qui servira de repère pour mieux appréhender la dynamique de celle-ci. Les objectifs budgétaires que vous votez portent, en effet, sur l’ensemble de la dépense publique, y compris celles des collectivités territoriales. Il est donc normal de perfectionner les outils d’observation et de pilotage, bien entendu dans le respect du principe de libre administration. La création de cet indice, qui n’aura aucun caractère normatif, nous permettra d’avoir un indicateur pour le suivi des dépenses des collectivités territoriales.

La deuxième mesure importante est l’institution d’une revue annuelle de certaines dépenses publiques, qui sera entamée dès le mois de septembre et dont le constat et les conclusions vous seront transmis avant le 1er mars, c’est-à-dire dans un délai de six mois. Je sais, compte tenu des fonctions que j’ai occupées antérieurement, que des travaux de ce type sont précieux pour le Parlement en amont des procédures budgétaires.

Enfin, la loi de programmation fixe un taux minimum de mise en réserve à la fois sur les crédits de l’État et sur l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Cette réserve dite « de précaution » est indispensable pour piloter la dépense en cours d’année. Cette année encore, elle sera mobilisée pour tenir la norme de dépense, comme cela a été le cas les années précédentes, et pour assurer une fin de gestion de qualité en couvrant certains dépassements budgétaires tels que ceux dus aux opérations extérieures (OPEX), par exemple. En 2015, nous prévoyons de porter ce taux de mise en réserve, qui était de 7 % en 2014, à 8 %.

J’en viens au plan d’économies qu’a évoqué le ministre des finances. Je ne détaillerai pas le volet concernant la protection sociale, qui a été présenté lundi dernier à l’occasion de la publication du rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale et qui sera examiné par votre commission des Affaires sociales. Il comporte des mesures, qui ont déjà été très largement commentées, s’inscrivant dans le champ de l’assurance maladie et dans celui de la politique familiale.

S’agissant des collectivités territoriales, le projet de loi prévoit une baisse des dotations de l’État, en l’espèce de la dotation globale de fonctionnement (DGF), de 3,67 milliards d’euros, baisse qui se poursuivra en 2016 et 2017 pour un total de 11 milliards d’euros. Ce montant de 11 milliards a été arrêté en vertu d’un principe de proportionnalité dans la dépense publique de chacun des secteurs concernés, c’est-à-dire l’État, les collectivités territoriales et la protection sociale dans son ensemble. Au demeurant, cette somme est inférieure au poids des dépenses des collectivités locales dans l’ensemble de la dépense publique. Par ailleurs, la répartition des économies a été organisée de façon uniforme sur trois ans. Je sais que les collectivités territoriales auraient souhaité un étalement différent. Néanmoins, j’observe qu’en 2015, nous prévoyons 21 milliards d’économies, c’est-à-dire que nous avons choisi d’accentuer l’effort sur la première année. Or ce n’est pas le cas pour les collectivités territoriales : si nous avions respecté les mêmes proportions, nous aurions diminué la DGF d’1 milliard supplémentaire en 2015.

Je signale que les dotations de l’État ne représentent en moyenne que 28 % de l’ensemble des recettes des collectivités territoriales, même si cette proportion varie selon les collectivités – les régions, par exemple, sont plus dépendantes des dotations de l’État, notamment depuis certaines réformes menées par nos prédécesseurs ; 60 % de leurs recettes sont issus de la fiscalité locale. Cela signifie que la progression naturelle de ces recettes, c’est-à-dire sans tenir compte de la modification des taux d’imposition correspondant aux revalorisations générales des bases que propose chaque année votre assemblée dans la loi de finances ni des variations physiques des bases qui consistent à prendre en compte les nouvelles constructions, est généralement plutôt assez largement supérieure à l’inflation. Si l’on totalise l’ensemble des recettes des collectivités locales, l’effort demandé en 2015 représentera 1,9 % de leurs recettes réelles de fonctionnement et 1,6 % de leurs recettes totales. C’est un effort mais, contrairement à ce que l’on entend, le traitement infligé, si j’ose dire, aux collectivités n’est pas plus dur que celui qui est réservé à l’État. Michel Sapin a rappelé que l’État diminuera en valeur ses dépenses de plus d’1 milliard d’euros l’année prochaine, alors que l’ensemble des recettes des collectivités locales continuera à progresser selon un taux proche de l’inflation. Du reste, si j’observe les évolutions passées, alors que la baisse des dotations avait déjà été entamée après un plafonnement, je constate que les recettes des collectivités ont progressé de 3,1 % en 2011, de 3 % en 2012 et de 3,2 % en 2013. Nous souhaitons donc contenir les dépenses des collectivités territoriales parce que les pourcentages de dépenses publiques sont toujours dénoncés comme excessifs dans notre pays et, si nous voulons être justes, nous ne pouvons pas ne pas tenir compte de ce phénomène.

Pour terminer sur ce point, je vous invite à mener un travail approfondi sur la réforme de la DGF, dont chacun mesure ici la complexité, l’injustice et la diversité. Nous souhaitons être en mesure de vous proposer, à la fin 2015, une réforme globale de cette dotation, que chacun appelle de ses vœux mais que personne n’a jamais eu le temps ou le courage de mener à son terme.

Par ailleurs, je voudrais vous indiquer la manière dont se décomposent les économies sur les dépenses de l’État. Le Gouvernement vous a présenté, lors du débat d’orientation sur les finances publiques, le budget triennal et les plafonds de crédits par mission pour 2015. Le projet de loi de finances est construit sur cette base. Nous avons, dans l’intervalle, procédé à une répartition plus fine des crédits et organisé quelques évolutions de périmètre en rebudgétisant certaines dépenses ou en transférant certaines recettes, notamment pour compenser à la sécurité sociale le coût du Pacte de responsabilité. Lors du même débat, le Gouvernement s’était également engagé à détailler les mesures permettant de documenter l’objectif d’économies. C’est cet engagement que nous tenons aujourd’hui, en détaillant les principales mesures qui conduiront à diminuer en valeur de 1,8 milliard d’euros les dépenses des ministères et les ressources affectées aux opérateurs en 2015, et donc à réaliser au total 7,7 milliards d’euros d’économies par rapport à la progression tendancielle des dépenses.

Sur les charges de personnel, l’économie attendue en 2015 s’élève à 1,4 milliard d’euros et résultera des mesures suivantes : maintien du gel du point d’indice ; stabilité des effectifs, comme en 2013 et 2014 – les créations de postes dans les ministères prioritaires seront intégralement compensées par les réductions sur les autres ministères, voire légèrement au-delà puisque nous prévoyons une baisse d’effectifs de 1 278 équivalents temps plein ; nouvelles réductions des enveloppes catégorielles, c’est-à-dire des mesures spécifiques à certaines catégories de fonctionnaires, à 245 millions d’euros en 2015, contre plus de 500 millions d’euros par an entre 2007 et 2012. Au total, la progression de la masse salariale sera limitée à 0,6 % seulement l’année prochaine, par le seul effet des progressions de carrières, soit une augmentation plus faible que la prévision d’inflation.

Ensuite, une économie de 2,1 milliards d’euros sera réalisée grâce aux mesures prises sur les dépenses de fonctionnement ainsi que sur certaines dépenses d’investissement. Sur le fonctionnement, les moyens sont déjà mobilisés mais nous allons amplifier cet effort, par la mutualisation renforcée des fonctions support, tout d’abord, notamment en matière d’achat, et la poursuite de la maîtrise des dépenses immobilières : plusieurs opérations de regroupement des implantations parisiennes des ministères progresseront fortement en 2015, et les produits des cessions immobilières, par ailleurs, dépasseront 500 millions d’euros. Second axe, le développement de l’administration numérique, déjà très avancé dans certains domaines, sera renforcé, par exemple dans les procédures fiscales ou douanières, mais elle concernera aussi des champs nouveaux.

Nous souhaitons préserver l’investissement autant que le permettent nos objectifs d’économies. Certaines lignes budgétaires sont en baisse : nous assumons une certaine sélectivité. Dans le même temps, nous mobiliserons les ressources nécessaires pour financer les investissements prioritaires. Ce sera, par exemple, le cas en matière de transport, avec l’affectation à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) du péage de transit poids lourds mais aussi d’une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). L’exécution du programme des investissements d’avenir sera poursuivie, avec un rythme de décaissement identique à celui de 2014, le Gouvernement restant exigeant dans le choix des projets soutenus. Enfin, 2015 sera la première année d’exécution de la nouvelle génération de contrats de plan État-région, à hauteur de 1,8 milliard d’euros ; nous souhaitons finaliser ces contrats d’ici à la fin de l’année.

S’agissant des interventions de l’État, vous en trouverez une liste à la page 17 de l’exposé général des motifs, qui documente une économie de 2,4 milliards d’euros en 2015. Les économies que nous proposons, ministère par ministère, suppriment l’accumulation de dispositifs : il s’agit, par exemple, de mieux articuler les aides à l’agriculture avec la politique agricole commune (PAC), de rationaliser les dépenses en faveur de l’outre-mer, qui bénéficie déjà de dépenses fiscales importantes, de travailler sur les exonérations de cotisations sociales dans les zones franches urbaines et autres zones, de réformer les aides aux entreprises, de cibler l’accession à la propriété sur le neuf, ou encore de stabiliser en valeur les concours à l’audiovisuel public. Certaines de ces mesures suscitent déjà des réactions, mais c’est la première fois qu’un plan d’économies aussi ambitieux est réalisé sur les dépenses d’intervention de l’État.

Les opérateurs et agences de l’État sont mis à contribution, pour un montant de 1,9 milliard d’euros, dont 1,1 milliard de réductions des taxes affectées. Vous connaissez la progression des dépenses des agences au cours de ces dix dernières années. Ces agences sont capables, dans la plupart des cas, de dégager des marges dans leur fonctionnement et leurs interventions ; des trésoreries excédentaires ont parfois même été accumulées, sur la base de recettes fiscales perçues. Ce type de situation ne saurait perdurer dans le contexte budgétaire actuel. De nombreux opérateurs seront mis à contribution : les chambres de commerce et d’industrie, les chambres d’agriculture, les agences de l’eau, mais aussi le Centre national pour le développement du sport (CNDS) et certaines autorités administratives indépendantes.

Au total, les dépenses des ministères et les affectations de recettes plafonnées diminueront de 1,8 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Il s’agit d’une baisse en valeur. En tenant compte du prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne, qui augmente, la baisse est de 1 milliard, alors que ces charges auraient progressé spontanément de 6 milliards.

Ce sont ces mesures d’économies qui permettent de financer nos priorités, en faveur de la jeunesse, de l’investissement ou de la transition énergétique. Je rappelle le renforcement du crédit d’impôt en faveur de la transition énergétique, dont le taux passe à 30 % et dont les conditions de recours sont assouplies. L’effort atteindra ainsi 700 millions d’euros.

Ces économies nous permettent également de baisser les prélèvements obligatoires. Comme l’a rappelé le ministre des finances, le taux de prélèvements obligatoires baissera en 2015, pour la première fois depuis cinq ans. Dans ce cadre général, les mesures du projet de loi de finances sont cohérentes avec l’objectif de justice fiscale qui a inspiré toutes nos lois de finances depuis 2012. Nous avons, dans un premier temps, demandé une contribution spécifique aux ménages aisés pour l’assainissement de nos comptes, avec le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), la revue des droits sur les successions et donations, la tranche à 45 % d’impôt sur le revenu et la baisse du plafond du quotient familial. Nous proposons aujourd’hui de passer à une nouvelle étape, avec un allégement de 3,2 milliards d’euros de l’impôt des ménages modestes et classes moyennes. L’article 2 du projet de loi prévoit une réforme du bas de barème de l’impôt sur le revenu, avec la suppression de la première tranche.

Ces 3,2 milliards ne sont pas financés par les uns pour les autres. Nous avons déjà pris une mesure de 1,3 milliard à l’été 2014. À quoi s’ajoute, après la censure du Conseil constitutionnel, la « non-dépense fiscale » liée à l’exonération des cotisations salariales, de l’ordre de 2 milliards d’euros.

La suppression de la première tranche ne profitera qu’aux classes moyennes et modestes, puisqu’un décalage concomitant de l’entrée dans les tranches supérieures établira les mêmes taux d’imposition pour les hauts revenus en 2015 qu’en 2014. Le barème d’ensemble de l’IR sera, en outre, revalorisé, comme nous l’avons déjà fait en 2014. Pour ne donner qu’un exemple, un couple d’actifs avec deux enfants, qui perçoit des salaires nets s’élevant au total à 3 160 euros par mois, verra son impôt sur le revenu passer de 744 euros en 2014 à zéro en 2015.

J’appelle votre attention sur la concentration de l’impôt sur le revenu. Les 10 % de ménages les plus aisés disposent de 34 % des revenus imposables et payent 70 % de l’impôt sur le revenu. Le dernier centile de ménages les plus aisés disposent de 8,4 % du revenu national et payent 31,5 % de l’impôt sur le revenu. L’impôt sur le revenu est progressif, oui, mais ce n’est pas le seul impôt payé par nos concitoyens. Il est faux de dire que les ménages modestes ne payent pas d’impôts : ils assument leur part du financement de la charge publique par le biais de la TVA et de la CSG, qui représentent à elles deux un quart des ressources de l’État. J’ai lu ce matin que certains proposent d’augmenter l’ensemble des taux de TVA de 3,5 points !

Au total, le déficit de l’État s’établit à 75,7 milliards d’euros en 2015, en diminution de 11,4 milliards d’euros par rapport à la prévision révisée de 87 milliards d’euros pour 2014. La dépense de l’État est parfaitement tenue. Elle sera revue à la baisse, je n’y reviens pas, et l’a déjà été, à hauteur de 1,7 milliard, du fait d’une moindre charge de la dette.

M. le président Gilles Carrez. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, expliciter les hypothèses qui sous-tendent votre appréciation de la croissance tendancielle ? Les 50 milliards d’économies prévues sur 2015, 2016 et 2017 résultent en effet d’un calcul basé sur ces hypothèses.

Ainsi que le répète constamment la Cour des comptes, et comme telle a été la philosophie de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques du 17 décembre 2012, dont vous avez été le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État, ce qui importe, c’est de comparer d’exécution à exécution. Sur le budget de l’État, alors que la charge des intérêts avait baissé, une augmentation de 2,5 milliards a été constatée d’exécution à exécution entre 2012 et 2013 ; de même, il semblerait, alors que les frais financiers baissent à nouveau, qu’une nouvelle augmentation soit constatée entre 2013 et 2014. C’est l’occasion de poser la question de l’opportunité d’une réforme méthodologique, par laquelle les économies seraient appréciées, non en fonction d’estimations complaisantes, mais comme dans le budget d’un ménage ou les comptes d’exploitation d’une entreprise.

Vous ne l’avez pas évoqué mais il semblerait que la dépense fiscale continue d’augmenter. Entre 2008 et 2010, la question du crédit d’impôt développement durable (CIDD) nous avait beaucoup préoccupés. Vous venez d’évoquer le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), appelé à remplacer le CIDD. Alors que les prévisions sur le CIDD en 2008 étaient de 800 ou 900 millions d’euros, la dépense en 2010 était de près de 3 milliards d’euros. Je vous invite donc à adopter une méthodologie beaucoup plus contraignante sur l’évolution des dépenses fiscales.

Enfin, M. Sapin a indiqué que nous avions franchi, il y a quelques jours, les 2 000 milliards d’euros de dette publique et que nous atteindrions un taux d’endettement de 100 % du PIB l’an prochain, tout en insistant, à juste titre, sur le fait que nos conditions d’emprunt n’ont jamais été aussi bonnes. Il semblerait toutefois – il n’a pas donné de chiffres – que le besoin de financement augmentera sensiblement, car il faudra financer non seulement l’écart entre les dépenses et les recettes, mais aussi le remboursement en capital d’emprunts particulièrement importants liés à la crise, comparables à ceux des autres pays européens en la circonstance. Comment appréciez-vous ce besoin de financement et comment nous situerons-nous par rapport aux autres pays européens ? Pouvons-nous d’ores et déjà dire que la France sera le premier emprunteur de la zone euro en 2015 ?

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. La priorité est le soutien à la croissance : c’est un constat partagé par l’ensemble des partenaires européens. Le PIB de la zone euro est encore inférieur à celui enregistré avant la crise. La baisse des prélèvements obligatoires est légère, certes, mais c’est tout de même une baisse.

Pour la plupart des missions, les efforts demandés sont raisonnables, avec même une augmentation des crédits pour l’égalité des territoires, le logement, la justice et l’enseignement scolaire. Pouvez-vous, messieurs les ministres, nous apporter des précisions sur la baisse, d’environ 300 millions, de la mission Agriculture, et sur celle de la mission Écologie ? Ces baisses ne s’entendent pas en tendance, mais bien en euros « sonnants et trébuchants ».

La moitié environ des dépenses de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales, soit 590 milliards d’euros, sont placées sous norme d’évolution. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le pilotage de cette masse de crédits ?

Pouvez-vous également apporter des précisions sur l’effort de 1,9 milliard demandé aux agences de l’État, rapporté à leur budget total ? C’est un effort inédit qui concernera environ un millier d’emplois.

Vous envisagez une diminution de 2 milliards d’euros sur la charge de la dette en 2015, ce qui est considérable. Parallèlement, l’inflation devrait un peu remonter. Pouvons-nous en savoir davantage sur les hypothèses de taux retenues, sachant que nous aurons à refinancer des prêts arrivant à échéance en 2015 ?

Un effort important est déployé sur le logement : 46 milliards d’euros d’argent public, dépenses sociales et dépenses de l’État confondues. Ce montant global est-il en augmentation ou en diminution ?

Enfin, vous avez longuement évoqué la baisse de la dotation de l’État aux collectivités territoriales. Il faut trouver un moyen de préserver l’investissement public de ces dernières, qui représente entre 45 et 48 milliards d’euros chaque année, à mettre en regard des 40 milliards d’euros que nous apportons aux entreprises avec le Pacte de responsabilité et de solidarité, et le CICE. Comment s’assurer, au moment où nous soutenons l’investissement privé, que, même si des économies doivent être réalisées sur le fonctionnement, l’investissement public sera préservé ?

M. Dominique Lefebvre. Le groupe socialiste fait sienne votre position de vérité et de volonté, messieurs les ministres. J’y ajoute une détermination sans faille à faire adopter par l’Assemblée les orientations que vous proposez et à veiller à leur mise en œuvre.

Nous devons la vérité à nos concitoyens sur la situation de notre pays et celle de l’Europe. Nous avons en France un problème ancien de compétitivité de nos entreprises et d’absence de maîtrise de la dépense publique et de la dette. En Europe, un débat a lieu sur la manière de relancer la croissance et d’écarter le risque de déflation. La stratégie que vous nous proposez suppose qu’un accord soit trouvé lors des Conseils européens d’octobre et novembre. Si nous voulons que l’Europe fasse ce qu’elle doit, comme la Banque centrale européenne a commencé à le faire, nous devons, de notre côté, déployer des efforts en cohérence avec cette action.

Le texte de programmation des finances publiques est au moins aussi important, si ce n’est plus, que le projet de loi de finances pour 2015. Cette programmation repose exclusivement sur une maîtrise de la dépense publique, alors que la précédente reposait pour moitié sur une augmentation des prélèvements obligatoires. Les mesures prises sur les ressources affectées et les dépenses fiscales mettent un terme aux contournements de la norme d’évolution des dépenses, ces errements du passé.

J’ai cru comprendre, en lisant le journal ce matin, que d’aucuns souhaitaient proposer aux Français de revenir sur la libre administration des collectivités locales. L’objectif d’évolution de la dépense locale globale, déclinée à partir de 2016 par type de collectivité, est une bonne chose pour mettre chacun devant ses responsabilités. L’effort doit être partagé par tous. On ne peut accepter, nonobstant les hurlements de ceux qui prétendent par ailleurs militer pour une baisse de la dépense publique et des prélèvements obligatoires, que cet effort ne soit supporté que par l’État.

Sur le projet de loi de finances pour 2015, je dirai quelles sont les quatre préoccupations du groupe socialiste. La première est la compétitivité et la relance de l’économie en France, ce qui passe par la confiance des entreprises et des ménages : il faut que les engagements du Pacte de solidarité – 41 milliards d’allégements pour les entreprises, 5 milliards pour les ménages – soient intégralement tenus, et que soient maintenues les priorités : défense, éducation, sécurité, justice, transition énergétique.

La deuxième préoccupation concerne les collectivités locales. En tant qu’élu local, je trouve parfaitement justifiée la démarche, et je considère comme irresponsables ceux qui, dans leurs conseils municipaux, ont adopté la motion de l’Association des maires de France (AMF). Il y a deux conditions au succès de cette démarche : un effort de péréquation qui préfigure une réforme plus importante de la DGF à partir de 2016, et une clarification entre l’État et les collectivités locales, car il ne faut pas que l’État impose, par la voie réglementaire, des charges nouvelles sous forme de normes.

La troisième préoccupation est celle du logement et de l’articulation entre les dispositions fiscales annoncées le 29 août par le Premier ministre pour relancer l’investissement locatif, et la nécessité de maintenir l’effort budgétaire en le rendant toujours plus efficace, à la fois sur la construction et la rénovation du logement social.

La quatrième préoccupation porte sur l’investissement public. L’augmentation de deux centimes de la fiscalité du diesel entre dans cette problématique : personne n’a proposé de solution alternative crédible pour financer le programme d’infrastructures nécessaire, qui soutiendra en outre l’activité. Comment l’État peut-il inciter les collectivités locales à agir à l’inverse de leur tendance spontanée, que j’ai toujours combattue quand j’étais maire, consistant à privilégier le fonctionnement sur l’investissement ? De ce point de vue, le fléchage des mesures de l’État sera important.

M. Hervé Mariton. Le ministre des finances a commencé par dire que le Gouvernement subissait la situation économique : nous avons connu des discours plus volontaristes ! Il nous a ensuite conduits en Europe, pour dégager les données communes de la zone euro. Il serait intéressant de disposer d’une comparaison de la situation budgétaire des différents pays européens ; cela apportera, je pense, quelques contrepoints intéressants aux propos du ministre, et nous rappellera que la France est aujourd’hui l’homme malade de l’Europe.

M. le secrétaire d’État a souligné que 75 milliards d’euros de déficit, en solde du budget général, c’était mieux que 87 milliards d’exécution probable en 2014. Cette progression est plus importante que ce qu’elle aurait été sans le dérapage de 2014, c’est-à-dire si l’année 2014 avait été conforme à la prévision et au vote de 81 milliards. Votre autosatisfaction doit donc être mitigée.

Les courbes du déficit public, sur vos documents, montrent une amélioration très modeste entre 2013 et 2016, puis une amélioration beaucoup plus sensible au-delà. Tout ira mieux après 2017 ! C’est une présentation assez usuelle mais un peu facile. Le Haut Conseil des finances publiques trouve vos prévisions de croissance exagérément optimistes. Vous avez apporté un élément de réponse ; nous interrogerons le Haut Conseil cet après-midi.

Le Président de la République s’est engagé pour un CICE majoré outre-mer. Or cette majoration ne différencie pas les secteurs d’activité. À droite comme à gauche, nous faisons des analyses sur les effets du CICE selon les secteurs. Au moment d’adopter une majoration, il est dommage que le Gouvernement n’ait pas affiné son dispositif par secteurs.

S’agissant du crédit d’impôt pour la transition énergétique, vous nous communiquez des évaluations sur les prochaines années, mais quelle est l’évaluation à moyen et long termes ? Sur des dispositifs comparables, nous avons déjà connu des dérapages budgétaires graves.

Nous sommes de ceux qui pensent que l’impôt sur le revenu est exagérément concentré. Une bonne réforme de cet impôt ne consiste pas à diminuer la proportion de Français qui l’acquittent. C’est malheureusement ce qui a été fait par à la fois par vos majorités et par les nôtres, en observation de ce qui est devenu une loi d’airain. Vous poursuivez dans cette voie ; c’est fâcheux.

Pourquoi ne clarifiez-vous pas la mise en œuvre du Pacte de responsabilité en inscrivant dans la loi de finances pour 2015, par anticipation, la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS) prévue dans ce Pacte ? Vous avez fait une promesse, qui n’a pas encore reçu un début de traduction législative. Vous pouvez encore vous rattraper.

Au titre des mesures fiscales, on ne trouve pas trace dans vos documents de la fiscalité du gazole, qui figure parmi les mesures budgétaires. C’est une ficelle un peu grosse. Si les mots ont un sens, il s’agit d’une augmentation d’impôt.

J’en viens aux crédits. Tout d’abord, 1 278 équivalents temps pleins en moins, c’est, au regard de la situation des finances publiques, très insuffisant. Ensuite, pourquoi certains opérateurs sont-ils épargnés par le plafonnement des taxes affectées ? S’agissant de la défense, quid de la prise en considération de l’évolution des opérations extérieures et du respect de la loi de programmation ? Quid de la réalité des recettes exceptionnelles ? Sur l’écologie, nous avons, avec notre collègue Marc Goua, présenté hier un rapport à la commission des Finances sur l’impact budgétaire de la loi de transition énergétique, en particulier eu égard aux fermetures de centrales. L’État payera une indemnité à EDF que nous avons évaluée à 2 milliards d’euros environ par réacteur fermé. Est-ce pris en compte dans votre trajectoire budgétaire ?

Enfin, la réforme de la propagande électorale en outre-mer, avec la disparition de la propagande écrite, préfigure-t-elle une évolution identique en métropole ?

M. Charles de Courson. Le Haut Conseil estime que même 1 % de croissance en 2015 est très optimiste. Chaque année, le Gouvernement essaie de s’en tirer – vous n’êtes pas les premiers – en affichant des taux plus élevés que la réalité. Il y a dix-huit mois, vous parliez encore de 1,8 % puis 2,5 %. Pensez-vous, comme le Haut Conseil, que 1 % est excessif ?

L’écart entre le solde effectif et le solde structurel ne cesse d’augmenter : 1,6 point de PIB en 2013, 1,9 en 2014 et 2 points en 2015. Cela est lié à vos hypothèses de taux de croissance structurel irréalistes. Bien que vous vous soyez ralliés à la position que je défends depuis deux ans en retenant, de manière plus réaliste, un taux de 1 % pour 2014 et 2015 et un taux de 1,2 % pour la période 2016-2019, sans doute s’agit-il d’hypothèses encore trop optimistes, puisque l’écart entre le solde effectif et le solde structurel continue de se creuser.

Après avoir augmenté de 56,4 % du PIB en 2013 à 56,5 % en 2014, la dépense publique devrait retomber en 2015 à 56,1 %. Mais il s’agit d’une prévision hors crédits d’impôt : qu’en est-il si ces crédits sont intégrés dans les dépenses ?

Par ailleurs, les 21 milliards d’économies dont vous parlez ne correspondent pas à la réalité. En effet, les 3,7 milliards concernant les collectivités locales ne constituent pas une baisse des dépenses mais une diminution de la dotation de l’État, la vraie question étant de savoir de combien vont réellement augmenter les dépenses des collectivités territoriales : vous tablez sur une augmentation de 0,3 %, hypothèse trop optimiste à laquelle personne ne peut croire ; elles augmenteront probablement de 1 ou 1,2 %.

De même, sur les 7,7 milliards d’économies réalisées par l’État et ses agences, 1,1 milliard concerne une diminution des recettes des agences : or ce n’est pas parce que vous diminuez les recettes que vous diminuez les dépenses.

Le plus gros morceau d’économies – 9,6 milliards d’euros – est prévu pour la sécurité sociale, dont 3,2 milliards sur l’assurance maladie, qui doivent provenir de la différence entre le taux d’évolution des dépenses de 2,1 % retenu pour 2015 et le taux d’évolution tendancielle qui s’établit à 3,9 %. En réalité pourtant, ce taux ne recouvre pas une croissance structurelle puisque nous connaissons, depuis quatre ans, un mouvement de décélération. Vous prévoyez aussi 700 millions d’économies sur la branche famille ; cela laisse 5,7 milliards d’économies à faire dans d’autres champs, où ce n’est pas vous qui décidez de l’essentiel mais les partenaires sociaux, qui gèrent les Assedic et le régime AGIRC-ARRCO.

Quant aux prélèvements obligatoires, vous avez peut-être compris qu’il ne fallait plus les augmenter mais, après être restés stables en 2014 à 44,7 % du PIB, ils devraient s’établir en 2015 à 44,6 %, ce qui ne constitue pas, à proprement parler, une véritable diminution.

Il faut donc en finir avec les discours qui parlent de 21 milliards d’économies et de baisse des prélèvements obligatoires : la vérité, c’est que nous dérapons.

Mme Eva Sas. La situation budgétaire extrêmement difficile dans laquelle nous nous trouvons résulte d’abord d’une diminution de nos recettes, laquelle est pour partie la conséquence de choix politiques comme le CICE. Elle marque également l’échec d’une politique qui a entraîné une baisse de l’activité économique et donc des recettes fiscales.

Je pense, comme la Rapporteure générale, que priorité doit être donnée à l’investissement et à l’emploi. Je souhaite donc m’assurer que, malgré la réduction des dépenses publiques, les investissements publics vont être maintenus, notamment en faveur de la transition énergétique, dont le Gouvernement a fait l’une de ses priorités.

À plusieurs reprises par le passé, qu’il s’agisse de la « niche Copé » ou des taux de TVA, des écarts importants ont été constatés entre les prévisions initiales et le coût réel des mesures adoptées. Cela me conduit donc à m’interroger, comme le président Gilles Carrez, sur la fiabilité de vos prévisions en matière de recettes et de dépenses fiscales.

Les écologistes notent avec satisfaction l’extension du CIDD. En revanche, certaines mesures incluses dans la loi sur la transition énergétique, comme le chèque énergie, n’apparaissent pas dans le projet de loi de finances pour 2015. Qu’en est-il ? La loi prévoit également un doublement du « Fonds chaleur » : est-ce parce qu’il est géré par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) qu’il ne fait l’objet d’aucune ligne de crédit dans la mission Écologie ?

Ce budget est, par ailleurs, en recul de 410 millions d’euros par rapport à 2014. Comptez-vous compenser cette baisse grâce aux recettes affectées, et notamment grâce à l’augmentation de deux centimes de la taxe sur le diesel, dont devrait bénéficier l’AFITF ? Pouvez-vous nous rassurer sur les moyens consacrés à l’écologie et, plus précisément, à la transition énergétique, d’une part, et à la politique des transports, d’autre part ?

Le budget de l’AFITF est passé de 2,1 milliards d’euros en 2012 à 1,8 milliard en 2014, alors que Jean-Marc Ayrault avait évalué à 2,5 milliards la somme nécessaire à l’engagement d’un plan d’investissement et de modernisation des transports en France. Quel sera donc précisément le budget de l’AFITF en 2015 ? Retrouvera-t-il son niveau de 2012 ?

J’attire ici votre attention sur la situation des transports en Île-de-France et sur les risques que survienne un nouvel accident comme celui de Brétigny. Un amendement de notre collègue Olivier Faure, qui visait à financer les transports franciliens grâce à la taxe de séjour, a finalement été retiré du projet de loi de finances rectificative en échange de l’engagement pris par le Gouvernement de trouver des financements de substitution. Il est primordial que le Gouvernement respecte cet engagement.

M. Nicolas Sansu. La situation de nos finances publiques est largement due à de mauvais choix économiques, budgétaires et fiscaux. Elle découle également du péché originel que constitue la non-renégociation du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) en 2012.

Dans un contexte marqué par l’explosion du chômage et des besoins sociaux, le choix de privilégier quasi exclusivement une politique de l’offre, si elle peut se justifier dans certains secteurs économiques, se révèle globalement inefficace. Personne ne conteste qu’il faille maîtriser certaines dépenses, mais il existe aussi des gisements de recettes que ce projet de budget ne semble pas explorer. Je pense notamment à l’évasion et à la fraude fiscales : si une série de mesures ont été prises concernant les particuliers, nous restons très en deçà de ce qui pourrait être fait à l’encontre des grands groupes et des entreprises, même si je suis conscient que cela nécessite une harmonisation avec nos partenaires européens. Dans le même registre, qu’en est-il de la proposition faite par la ministre de l’écologie de prélever une partie des milliards de bénéfices réalisés par les sociétés d’autoroute ?

Ce projet de loi de finances va être l’occasion d’un débat sur la suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu. Si personne ne peut être contre le fait que les ménages modestes regagnent un peu de pouvoir d’achat, on doit néanmoins s’interroger sur l’architecture fiscale qui prévaudra à terme. En effet, les mesures retenues aboutissent à diminuer la part de l’impôt progressif dans les recettes fiscales globales. Il faut revoir aujourd’hui les impôts directs et indirects, les prélèvements sociaux et les niches fiscales, les taux, les tranches, les barèmes et les assiettes. C’est la seule manière de garantir le consentement à l’impôt et d’éviter une diabolisation dangereuse de la dépense publique et de la dépense sociale, qui résulte du fait qu’aujourd’hui notre fiscalité n’est ni juste, ni efficace, ni lisible.

Quant aux prélèvements obligatoires, ils reflètent nos choix de société et nos arbitrages entre ce qui relève du financement collectif ou du financement individuel : à titre d’exemple, un étudiant français achève ses études avec 800 euros de dettes en moyenne, contre 20 000 euros pour un étudiant américain.

En ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, il semble que la Commission européenne autorise la modulation du CICE par secteur. Tenir compte de cet avis dans le projet de loi de finances permettrait d’éviter les effets indésirables du dispositif et d’avoir un impôt sur les sociétés qui, avec un taux exceptionnellement haut et un rendement inférieur à 30 milliards d’euros, ne ressemble plus à rien. J’ajoute que, selon le rapport à paraître de notre mission d’information sur le CICE, si le dispositif rapporte 0,5 % de croissance, il en coûte 1 % à la nation.

Si je fais partie des irresponsables qui ont voté la motion de l’AMF, c’est que la baisse des dotations aux collectivités aura des conséquences terribles, non seulement sur les services publics locaux, mais également sur les investissements publics : un sénateur du Rhône, président du Grand Lyon, a annoncé hier que les investissements publics de la communauté urbaine allaient passer de 450 millions d’euros à 250 millions, tandis que, dans mon département, le Cher, un grand plan de licenciement se prépare dans les PME du BTP. J’estime impossible d’engager la transition énergétique en entreprenant la rénovation des bâtiments publics dans ces conditions. Je vous incite donc à vous interroger sur l’économie réelle que représente cette baisse de 3,7 milliards des dotations aux collectivités, qui jouent aujourd’hui un vrai rôle d’amortisseurs de la crise.

M. le ministre. Ceux qui nous reprochent d’être passifs confondent passivité et lucidité. Regarder les choses en face n’est pas être passif, c’est se donner la capacité d’être volontaire. Évoquer l’Europe n’est nullement une manière de ne pas assumer nos responsabilités mais de se référer à notre socle commun. Si certains de nos voisins sont dans une situation plus avantageuse que la nôtre en termes de déficits publics, c’est l’inverse en matière de dette. Au-delà des cas particuliers, quoi qu’il en soit, la plupart des pays de la zone euro connaissent une activité économique extrêmement inquiétante – PIB négatif pour l’Allemagne au cours du deuxième trimestre, récession en Italie –, et c’est à cette situation qu’il nous faut remédier, en ajustant notamment notre politique budgétaire.

Le débat sur les hypothèses macroéconomiques retenues ne date pas d’hier. Le Haut Conseil prévoyait pour cette année 1 % de croissance ; nos prévisions étaient identiques. Nous sommes en réalité à 0,4 %, mais personne ne pouvait anticiper l’évolution de l’activité et de l’inflation dans la zone euro, évolution qui a conduit la BCE à réagir avec autant de détermination. Une des raisons pour lesquelles les recettes n’ont pas été au niveau escompté tient évidemment au faible niveau d’inflation, qui fait baisser nominalement le niveau de ces recettes.

Nous avons travaillé à partir des hypothèses les plus réalistes possibles et nous sommes alignés pour cela sur les modes de calcul, plus pessimistes, de la Commission européenne. Ce n’était pas le cas pour le budget précédent, d’où certaines différences en termes d’ajustements structurels. Nous avons également retenu un taux d’élasticité de la recette par rapport à l’activité économique le plus faible possible, renonçant aux astuces qui permettent d’afficher un niveau de recettes supérieur à celui escompté. Nos prévisions de recettes sont donc aussi réalistes que possible.

Pour ce qui concerne la dépense publique, les conventions statistiques y intègrent désormais les crédits d’impôt. Compte tenu de ces nouvelles normes, elle s’établit à 57,1 % du PIB pour 2013, à 57,7 % pour 2014 et à 57,6 % pour 2015, soit un chiffre stable ou en très légère baisse.

Si nous n’inscrivons pas dès à présent dans le projet de loi de finances pour 2015 les mesures fiscales favorables aux entreprises programmées pour 2016 et 2017 dans le Pacte de responsabilité, c’est pour ne pas faire injure au principe d’annualité budgétaire. Cela ne m’empêche pas de penser que les entreprises doivent s’inscrire dans cette perspective, et c’est la raison pour laquelle nous avons inscrit dans la loi de programmation des finances publiques les diminutions d’impôt et de cotisations concernant les entreprises. Maintenir ce cap est indispensable au retour de la confiance.

En 2015, le besoin de financement de l’État sera supérieur à 190 milliards d’euros, dont 75 milliards consacrés au financement du déficit et 120 milliards affectés au remboursement des tombées de dettes des années 2008 et 2009, certes dans des conditions plus avantageuses qu’à l’époque. Nous émettrons pour 188 milliards d’obligations, procéderons à des ventes d’actifs et à la mobilisation d’un certain nombre de liquidités. Cela représente certes un montant élevé mais inférieur à ce que nous avons pu connaître à d’autres moments de notre histoire, et qui nous classe derrière l’Italie.

De son côté, l’Allemagne a un très gros passif, avec un montant de dette plus élevé que le nôtre qu’elle doit aussi refinancer. Nous sommes dans des conditions d’appel au marché qui doivent nous permettre, dès lors que nous conservons notre crédibilité, de bénéficier de taux d’intérêt très faibles – le taux à dix ans est aujourd’hui de 1,3 % et nous avons travaillé sur l’hypothèse réaliste qu’il ne dépasserait pas 2,2 % dans les années à venir.

M. le secrétaire d’État. Le montant des dépenses exécutées, sous la norme « zéro valeur », s’établissait à 281 milliards d’euros en 2011, à 278,9 milliards en 2012, à 280 milliards en 2013. Pour 2014, il était de 278,5 milliards en loi de finances initiale et de 276,9 milliards en loi de finances rectificative. Pour 2015, le montant prévu est de 274,3 milliards d’euros.

L’exposé général des motifs du projet de loi de finances fournit, page 14, une définition détaillée de l’évolution tendancielle des dépenses de l’État ; c’est également le cas pour l’ONDAM. Je rappelle, par ailleurs, que la progression spontanée de la dépense publique en volume pour 2015-2017 est évaluée à 1,7 % par an.

Je suis en désaccord avec le président Carrez selon qui la loi organique privilégierait la prise en compte du déficit nominal. C’est faux : elle privilégie la prise en compte du déficit structurel, qui est l’indicateur d’abord retenu par nos partenaires européens et par les observateurs internationaux.

M. le président Gilles Carrez. Nous nous sommes mal compris.

M. le secrétaire d’État. Les dépenses des agences ont progressé de plus de 15 % entre 2007 et 2012. Leur budget global est de l’ordre de 33 milliards d’euros, chiffre auquel il faut rapporter le 1,1 milliard de baisse des ressources fiscales affectées. Cela représente une baisse des dotations ou des transferts de l’État au titre des taxes affectées de l’ordre de 3 %, mais certaines de ces agences ont, par ailleurs, des recettes commerciales.

La baisse de 250 millions du budget de l’agriculture représente une économie réelle, mais supportable si on la replace dans le champ plus large des dispositifs de la PAC, dont on attend 100 millions d’euros supplémentaires, des allégements de charges d’un montant de 50 millions d’euros liés au Pacte de responsabilité, des 50 millions d’euros de crédits dédiés à l’agriculture au sein du PIA, et de quelques autres mesures dites « de rationalisation ».

Le projet de loi de finances comporte plusieurs mesures en faveur du logement, qui s’ajoutent à celles déjà adoptées, comme la TVA à 5,5 % sur le logement social. Ces mesures représentent au total un effort de 3,3 milliards d’euros.

En ce qui concerne la maîtrise de la dépense fiscale, elle s’élevait, hors CICE, à 70,9 milliards d’euros en 2013 – notre objectif était de ne pas dépasser 70,8 milliards. Pour 2014, elle pourrait s’établir à 70,7 milliards d’euros et pour 2015, selon nos prévisions, à 70,6 milliards d’euros. Nous avons pris un certain nombre de mesures, force est de constater que leurs effets sont, pour l’instant, assez mesurés.

Je m’étonne des reproches qui nous sont faits au sujet du nombre de foyers imposables. Alors que l’an dernier, le Gouvernement avait été vilipendé pour avoir fait entrer des « cohortes » de ménages dans l’impôt sur le revenu, on nous fait cette année le procès inverse. En 2008, le nombre de foyers fiscaux imposables était de 43,4 % ; il était de 46 % en 2009, de 46,6 % en 2010, de 49,9 % en 2011, de 52,3 % en 2012 et il s’établirait pour 2013 à 48,5 %, ce qui nous laisse encore loin des chiffres de 2008.

M. Mariton nous fait un mauvais procès à propos de notre présentation de la taxe sur le gazole. Sans doute nos concitoyens ne sont-ils pas précisément au fait de l’endroit du projet de loi de finances où est inscrite cette mesure, en revanche, ils sont parfaitement informés de l’augmentation de deux centimes de cette taxe.

La sous-estimation des opérations extérieures est un phénomène récurrent, quand bien même leur niveau de dépenses a été régulièrement réévalué ces dernières années, insuffisamment toutefois pour atteindre le niveau des dépenses constatées. Par définition, ni le nombre ni la durée, ni le coût des OPEX ne sont prévisibles. Néanmoins, les réserves de précaution ont toujours permis de couvrir leur financement, chaque ministère apportant sa contribution.

En ce qui concerne le crédit d’impôt pour la transition énergétique, il sera temps, au vu de l’activité dans le secteur, de reconduire ou non cette mesure au-delà du 31 décembre 2015. Nos chiffrages évaluent le coût de la mesure à 230 millions en 2015 et à 700 millions d’euros en 2016.

Quant à la sélectivité et la majoration du CICE outre-mer, nous en reparlerons. Les dispositions qui concernent les outre-mer prennent en considération les contraintes européennes.

Sur la progression de l’ONDAM et la réalité des économies, il ne faut pas oublier que les Français sont de plus en plus nombreux – nous gagnons 200 000 habitants chaque année, quand les Allemands en perdent 200 000. De plus, ils vivent de plus en plus vieux, ce qui est heureux. Cette population plus nombreuse et plus âgée a besoin de plus de soins. Or ceux-ci sont aussi de plus en plus coûteux : nous avons, par exemple, maintenant le bonheur de pouvoir soigner l’hépatite C, mais c’est une dépense d’environ 1 milliard d’euros chaque année. L’augmentation naturelle des dépenses d’assurance maladie peut donc être estimée à 3,9 % ou 4 %. S’en tenir à une croissance de 2,1 %, c’est un effort important.

Le projet de loi prévoit que l’AFITF sera dotée cette année d’un budget de 1,9 milliard d’euros, comparable à celui de l’année en cours.

Sur les budgets consacrés à l’environnement et aux transports, vous avez cité l’augmentation de deux centimes de la TICPE sur le diesel, mais il y aura des transferts dans la subvention de l’État. Ce sera précisé au cours de nos discussions.

Mme Karine Berger. La commission des Finances avait adopté, lors de l’examen du dernier projet de loi de finances rectificative, un amendement fixant le déficit conjoncturel à 1,9 % du PIB en 2014 : c’est finalement le chiffre que vous avez choisi, et nous nous en félicitons.

C’est le déficit conjoncturel le plus élevé des dix dernières années : le décalage conjoncturel est plus fort et notre situation économique plus dégradée qu’en 2009 ou en 2010. Dans le même temps, alors qu’en 2009 le déficit public s’élevait à 7,5 % du PIB, nous ne sommes qu’à 4 % cette année. Nous avons donc un vrai problème de soutien de la croissance économique.

Entre 2007 et 2012, les dépenses de l’État ont augmenté de 7 milliards par an, alors qu’elles ont, au contraire, diminué au cours des trois dernières années. Monsieur le président, je ne comprends donc pas votre question : la baisse est très nette par rapport à la tendance constatée entre 2007 et 2012.

Enfin, le Gouvernement pourrait-il nous communiquer les montants de crédits d’impôts prévus pour la période de 2015 à 2017 ?

M. Jean-François Lamour. J’en reviens au budget de la défense. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d’État, on ne peut pas estimer le coût des OPEX au 1er janvier ; mais convenez que partir d’un plancher de 450 millions pour atteindre 1,2 milliard n’est pas raisonnable.

En 2014, vous avez déclenché la clause de sauvegarde à 500 millions ; vous avez versé 250 millions, et devez encore verser la deuxième tranche. Vous avez utilisé les ressources exceptionnelles du programme d’investissements d’avenir pour financer les salaires du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) pour 2013. C’est une exécution chaotique.

Pour 2015, l’incertitude sur les ressources exceptionnelles est totale. Vous semblez ouvrir la possibilité de vendre des fréquences, mais tous les experts nous disent que ces ventes ne seront pas réalisées en 2015. Il manque donc au moins, si je lis bien, 1,8 milliard d’euros et, à cette somme, il faut encore ajouter une ressource exceptionnelle de 500 millions. Sans ces 2,3 milliards, nous ne bouclerons pas le budget de la défense. Or nos forces sont de plus en plus souvent projetées sur des théâtres d’opérations à l’extérieur de nos frontières. Ces budgets représentent aussi des emplois dans l’industrie et dans la recherche duale.

Je n’ai pas trouvé à ces questions de réponse satisfaisante dans vos documents.

M. Laurent Grandguillaume. Les politiques de désinflation compétitive aujourd’hui menées en Europe ne peuvent que conduire à la situation macroéconomique que nous connaissons aujourd’hui. Je n’y reviens pas : je voudrais plutôt vous parler de femmes et d’hommes que de chiffres.

Le Gouvernement a annoncé une réforme du crédit d’impôt développement durable, qui prend effet dès le 1er septembre 2014. C’est une bonne mesure, mais personne – à commencer par les artisans eux-mêmes – ne sait comment elle s’applique.

Les efforts du Gouvernement en faveur des entreprises vont dans le bon sens. Mais si la C3S et les cotisations sociales vont diminuer, de nombreuses micro-entreprises vont devoir payer la cotisation foncière des entreprises (CFE), pour des montants de 400 à 600 euros, alors que leur chiffre d’affaires est inférieur à 10 000 euros par an. Je ne crois donc pas qu’il faille écarter l’idée de modifier à nouveau le mode de calcul de la CFE, notamment pour les niveaux de chiffre d’affaires les plus bas. Cela touche des personnes qui prennent des risques, qui investissent, qui innovent : il faut les aider.

Le statut unique de l’entrepreneur individuel, avec une protection du patrimoine de celui-ci et une distinction entre les revenus de l’entreprise et ceux de l’entrepreneur, a été annoncé pour 2015. Quel est le budget prévu pour cette mesure, qui intéresse tous les artisans et entrepreneurs individuels ?

Quant au régime social des indépendants (RSI), il me semblerait pertinent d’en envisager une réforme structurelle, et notamment la fusion de la dizaine de caisses différentes qui existent aujourd’hui : comment justifier cette multiplicité et les coûts qu’elle entraîne ?

Vous prévoyez un prélèvement de 500 millions d’euros sur le fonds de roulement des chambres de commerce et d’industrie (CCI). Ne serait-il pas possible d’entamer un dialogue avec les CCI ? Partout, cette mesure les amène à supprimer des emplois ; cela aura des conséquences sur le suivi de l’apprentissage et l’accompagnement des entreprises. Ne serait-il pas préférable de prendre un peu plus de temps et de mener une réforme structurelle, en mettant en place des coopérations entre les chambres d’agriculture, de commerce, des métiers, de l’artisanat ? Le changement doit être accompagné. Je ne suis pas frondeur, mais il est peut-être temps de reconstruire la gauche…

Quant aux heures supplémentaires défiscalisées, leur suppression n’a pas créé d’emplois mais a permis des économies en rectifiant certaines déviances. Mais des ouvriers, des employés, des salariés des catégories populaires et des classes moyennes ont été touchés. Il faudrait revenir sur cette question, d’autant que beaucoup de nos concitoyens ont vu cette année leurs impôts augmenter.

Enfin, les efforts, louables, en faveur des entreprises doivent aller de pair avec un soutien apporté aux plus pauvres. En matière de lutte contre la pauvreté, quels sont les engagements du Gouvernement ? Quels sont les moyens prévus ? La réponse à cette question conditionnera la position que je prendrai, à titre individuel, sur l’ensemble du projet de loi de finances. Je soutiendrai le Gouvernement, mais sur certains articles, le débat doit avoir lieu.

Mme Valérie Pécresse. S’agissant de la méthodologie employée, le calcul en tendance – dont l’utilisation a bien sûr précédé votre arrivée au pouvoir – est devenu systématique. Mais avec une croissance plate et une inflation nulle, une hausse des dépenses de 1,7 % en tendance paraît pour le moins curieuse, voire tout à fait incompréhensible. Je ne suis pas économiste, mais je ne peux que constater que plus personne ne croit à ces chiffres. Il faut abandonner ce thermomètre, comme on a abandonné la mesure des faits constatés en matière de délinquance.

En matière budgétaire, la prévision de croissance est toujours source de conflits. Pourquoi ne pas faire du Haut Conseil une autorité indépendante, chargée de fixer le taux de croissance qu’utiliserait le Gouvernement pour construire son budget ? Ce serait une dépossession des politiques, c’est vrai, mais on éviterait ainsi bien des critiques et bien des interrogations sur la sincérité du budget.

Quant au budget lui-même, c’est, à mon sens, un budget pour rien. Les impôts baissent de 2 milliards : on est dans l’épaisseur du trait ; il en va de même pour la réduction du déficit. Il y a, je le note au passage, un renseignement bien caché dans votre document : entre 2011 et 2014, les dépenses n’ont cessé d’augmenter dans notre pays. Autrement dit, les hausses de recettes ont été utilisées non pas pour réduire le déficit mais pour augmenter nos dépenses ; c’est un problème.

Cette année, les dépenses diminuent, je vous en donne acte ; mais, pour cela, vous avez choisi la méthode du rabot généralisé, plutôt que de mener une vraie réforme structurelle. Comment garantissez-vous que les collectivités locales, à qui vous allez imposer une économie de 3,7 milliards, ne répercuteront pas cette somme sur les impôts locaux ?

Enfin, le Premier ministre a promis au président de la région Île-de-France 150 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires pour financer les transports. Où sont ces ressources nouvelles ? Comment allez-vous financer les transports en Île-de-France ?

M. Pierre-Alain Muet. Un éditorial du New York Times prévenait au mois d’août : « Personne ne devrait être surpris que la zone euro retombe dans le marasme. C’est le résultat entièrement prévisible des politiques erronées que les dirigeants européens s’entêtent à poursuivre, bien qu’il soit évident qu’elles constituent de mauvais remèdes. » Ce jugement américain est partagé par beaucoup d’économistes, et rejoint ce que disait M. le ministre des Finances.

Ces politiques erronées, c’est un cocktail de coupes massives dans les dépenses et d’allégements du coût du travail – allégements de cotisations, voire, dans les pays du Sud, des baisses de salaire. Cette politique pourrait fonctionner si elle n’était suivie que par un seul pays, qui profiterait alors de la croissance de ses voisins. Mais, quand tout le monde fait la même chose, l’effet dépressif est si fort que les déficits ne se réduisent pas ; en revanche, la dépression est bien là. De même, les pays n’améliorent pas leur compétitivité, mais il y a bien une désinflation, qui devient progressivement une déflation. C’est ce que nous vivons aujourd’hui.

J’ai écouté attentivement votre présentation du budget. Vous annoncez 21 milliards de réductions de dépenses, 12 milliards d’allégements de prélèvements sur les entreprises, 3 milliards sur les ménages. Cela ressemble au cocktail que j’évoquais. Il faut se poser la question de la cohérence entre un discours juste sur les politiques européennes et la politique réellement menée en France.

Que pouvons-nous faire aujourd’hui ? Il me semble qu’il faudrait reprendre l’objectif du Président de la République d’inversion de la courbe du chômage, en agissant massivement sur les emplois aidés et sur l’apprentissage. Ces mesures, qui ne sont pas très coûteuses, produisent très rapidement des effets. La baisse du chômage permettrait que certains reprennent confiance dans l’avenir ; de plus, ces politiques ont au moins le mérite de donner un revenu, même faible, à ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire les jeunes au chômage. En la matière, que prévoit le projet de loi de finances ?

M. Éric Alauzet. J’aimerais que nous disposions de davantage d’informations précises sur les conséquences des mesures adoptées, et surtout de simulations sur les conséquences cumulées de l’ensemble des mesures prises, pour les ménages comme pour les entreprises. De la même façon, pour éviter les malentendus, il nous faudrait un bilan clair et exhaustif de l’ensemble des mesures budgétaires prises dans le champ de l’écologie : budget du ministère, crédit d’impôt, prêt à taux zéro, investissements d’avenir et autres.

Enfin, s’agissant des aides aux entreprises, il faut – si nous voulons réconcilier la gauche et tous nos concitoyens avec l’entreprise – qu’elles soient utilisées de façon judicieuse. Il ne s’agit pas de dire aux entreprises ce qu’elles doivent faire, mais ce qu’elles ne doivent pas faire. Comment renforcer les moyens pour être certains que l’argent est bien utilisé ?

Mme Christine Pires Beaune. Merci de cette présentation claire, concise et lucide. Nul ne peut se satisfaire d’un déficit à 4,4 %, surtout quand il aurait dû s’élever à 3,6 % : cela prouve qu’il faut être plus prudent dans les prévisions de recettes, et c’est ce que vous faites dans ce projet de loi de finances.

S’agissant des recettes des collectivités locales, l’effort qui leur est demandé en 2015 est moindre que celui consenti par l’État. Dont acte. Mais il ne faut pas oublier que, sur les 3 % d’augmentation des dépenses locales en moyenne sur les trois dernières années, la moitié étaient dus à des décisions prises par l’État. L’effort demandé est légitime mais il faudra s’assurer que les économies portent sur le fonctionnement, et que l’investissement continue d’être soutenu : c’est l’emploi qui est en jeu.

Notre dépense publique est trop élevée, chacun en convient. Je forme le vœu que nous ayons le courage de débattre enfin d’une meilleure façon de hiérarchiser nos besoins, et donc de répartir nos dépenses publiques, sans s’accuser mutuellement de vouloir mettre à mal notre modèle social ou de tuer les collectivités.

Je ne remets pas en cause le niveau global du prélèvement sur les CCI. Mais sa répartition me semble contestable : ainsi, le prélèvement est de 18 millions pour le Puy-de-Dôme, qui a pourtant déjà rationalisé son budget et qui a épargné pour construire une école de commerce. L’appel d’offres est lancé, mais le chantier est arrêté, à cause de ce prélèvement. Il faut avoir le courage de mettre en place une péréquation entre les différentes chambres !

Pour finir, je veux relever l’engagement de travailler enfin sur une refonte globale de la DGF, sur les valeurs locatives et sur l’encadrement des normes, qui seraient une vraie source d’économies pour nos collectivités.

M. Jean Launay. Le projet de loi de finances pour 2015 évoque le respect de la trajectoire de dépenses prévue par la loi de programmation militaire (LPM), et c’est un bon début. Néanmoins des questions demeurent.

Quel est le calendrier prévu pour les recettes exceptionnelles ? Tout laisse à penser que la bande de fréquences hertziennes des 700 MHz ne sera pas vendue en 2015 ; il faut d’ailleurs s’interroger sur le moment à choisir pour obtenir le montant le plus élevé. Combien coûteront les OPEX ? Le report de charges est déjà conséquent, et l’on ne saurait l’aggraver sans compromettre le respect de la trajectoire de dépenses prévue par la LPM.

Comment, dès lors, prévoyez-vous de sanctuariser les 31,4 milliards d’euros du budget de la défense ? La solidarité interministérielle jouera-t-elle, et dans quelle mesure ?

Les opérateurs de l’État sont également mis à contribution : en particulier, les agences de l’eau perdent 175 millions d’euros, et il en sera de même pour trois exercices consécutifs. Un prélèvement de 220 millions d’euros avait déjà été effectué en 2014 sur leur budget ; il avait considérablement affecté les fonds de roulement et les trésoreries des agences. Certaines ont déjà dû revoir leur programme d’intervention – c’est-à-dire leurs investissements, dans un moment où le risque de déflation est réel. Cette mesure affecte le principe « l’eau paye l’eau ».

Pas plus que mon collègue Grandguillaume, je n’ai l’âme d’un frondeur ; mais ces questions me paraissent graves.

Mme Monique Rabin. L’heure est grave, c’est vrai, et le Gouvernement fait preuve d’un volontarisme qui devrait être partagé par tous. Je ne suis pas sûre de comprendre les propositions de nos collègues de l’opposition, qui paraissent souvent contradictoires. J’entends parler de 110 milliards d’économies : ce serait vraiment l’austérité, cette fois-ci. Votre projet est tout différent.

L’Europe ne doit pas servir à esquiver les problèmes franco-français. L’Allemagne a réussi son redressement économique – mais avec quel bilan social ! – en dix ans : il n’est pas raisonnable de nous demander de réussir en deux ans.

Toutes les économies réalisées doivent préserver l’emploi ; nous devons investir et mener les grands chantiers qui nous feront entrer dans le XXIsiècle. Celui du canal Seine-Nord-Europe commencera en 2017 ; celui de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes pourrait permettre un plus grand développement de l’ouest de notre pays, et offrirait de nombreux emplois non délocalisables.

Vous consolidez les fonctions régaliennes, et il faut mieux le faire savoir à nos concitoyens.

S’agissant des CCI, je ne remets pas en cause les efforts à faire, mais j’aimerais connaître les critères qui ont été utilisés. Certaines chambres se sont modernisées, regroupées, ont rationalisé leurs dépenses ; ces efforts ne semblent pas avoir été pris en considération. En mai 2013, Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, avait lancé une feuille de route pour une réforme structurelle des CCI et de leurs missions : il serait sans doute judicieux de la reprendre.

Quant aux collectivités locales, il faudra absolument éviter toute démagogie facile à l’approche des échéances de 2015. Il est indispensable d’éviter toute dérive des dépenses de fonctionnement, tout en permettant aux collectivités de continuer à investir. Il faut également renvoyer les collectivités territoriales à leurs responsabilités : il n’est pas normal que l’État fasse un effort particulier sur la DGF quand certaines se targuent de ne pas avoir augmenté les impôts locaux depuis dix ou quinze ans. Les efforts fiscaux locaux doivent être pris en considération de manière plus pertinente dans les critères d’attribution des dotations.

Je vois, enfin, avec satisfaction la mise en place de l’objectif d’évolution de la dépense publique locale, fixé à 0,3 % pour 2015. Cela ne concerne, j’espère, que le fonctionnement.

M. Olivier Faure. Monsieur le président, vous avez tout à l’heure regretté que la conférence de presse des ministres ait eu lieu avant la présentation du projet de loi de finances à notre commission ; vous avez raison. Souvent, nos débats seraient plus clairs si nous disposions de tous les éléments, et c’est vrai aussi pour l’opposition : pendant notre réunion, M. Fillon a présenté à la presse un contre-plan d’économies budgétaires, et si les commissaires de l’opinion assumaient ces propositions ici même, nos échanges en seraient éclairés.

Ainsi, M. Mariton regrette la concentration de l’impôt sur le revenu sur un nombre trop restreint de contribuables ; au-delà du fait qu’il disait le contraire l’année passée, ce qui est troublant, on ne comprend vraiment son propos qu’en écoutant M. Fillon, qui a le mérite d’aller jusqu’au bout de la logique en proposant de répartir la charge fiscale aujourd’hui supportée par les plus aisés sur le plus grand nombre. Il propose donc de supprimer les droits de mutation et l’ISF et d’augmenter la TVA de 3,5 points pour les deux taux les plus élevés. Voilà qui est limpide.

Madame Pécresse, vous parlez d’un rabot généralisé et d’absence de réformes structurelles. Mais vous gagneriez en clarté à dire ce que vous entendez par là ! M. Fillon, que vous soutenez, nous l’apprend : report de l’âge de la retraite à soixante-cinq ans ; abandon de la prise en considération de la pénibilité pour les retraites ; alignement du public sur le privé ; capitalisation et système de retraite à points ; dégressivité des allocations chômage ; restriction de l’aide médicale d’État, et j’en passe. Voilà des réformes que vous devriez avoir le courage de soutenir ici.

J’en viens à l’Île-de-France. Nous avons longuement débattu de l’écotaxe poids lourds. La commission présidée par notre collègue Jean-Paul Chanteguet n’a pas été suivie par le Gouvernement, qui a choisi d’instaurer plutôt un péage de transit pour les poids lourds et perdu, au passage, deux tiers de la recette initialement prévue. Vous proposez aujourd’hui, messieurs les ministres, de compenser cette perte, loin d’être négligeable, par une hausse de deux centimes de la TICPE sur le diesel. Nous sommes passés d’une assiette qui visait les poids lourds, notamment étrangers, à un prélèvement sur les contribuables français. Le Gouvernement, comme l’opposition qui avait pourtant fait voter l’écotaxe, sont responsables de cette situation parfaitement absurde.

Nous allons débattre du plan de mobilisation pour les transports en Île-de-France, pour lequel il faut trouver 140 millions d’euros. Là encore, la majorité et l’opposition sont responsables de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Gilles Carrez propose, depuis longtemps, de taxer les nuitées d’hôtel pour financer une partie de ce plan. Lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative, nous avons retiré l’amendement allant dans ce sens, afin de pouvoir en rediscuter. Nous entendons systématiquement dire que cette perte de recettes sera compensée, mais j’aimerais être sûr que cette compensation ne viendra pas d’impôts qui toucheraient les Franciliens !

Ce matin, je lis d’ailleurs que M. Fillon veut supprimer le versement transport. Attention à ce que nous faisons : les transports franciliens sont très dégradés, et méritent mieux que la lâcheté et la démagogie dont certains font preuve. Cela vaut pour tout le monde.

M. le ministre. Les questions sont nombreuses, et c’est bien naturel.

S’agissant du débat sur l’évolution des dépenses en tendance, la règle, reconnaissez-le, n’a pas changé ; c’est la règle qui s’applique partout, et qu’applique la Commission européenne. On peut discuter de son bien-fondé, mais elle est rigoureuse.

Regardons l’évolution de la dépense publique en volume : de 2002 à 2011, elle a augmenté de 2 % par an en moyenne ; en 2013, de 1,3 % ; en 2014, de 0,9 % ; en 2015, elle devrait augmenter de 0,2 %. Personne ne pourra dire que nous ne maîtrisons pas l’évolution des dépenses publiques.

Cette action demande un effort considérable. Le Président de la République l’a dit : il n’y a pas d’économies indolores. Dans les CCI, dans les collectivités territoriales, mais aussi à la sécurité sociale, beaucoup voient que les économies que nous faisons sont bien réelles.

Nous maîtrisons donc l’évolution des dépenses, mais dans des proportions qui nous paraissent compatibles avec le soutien de l’activité. Je comprends bien les remarques qui ont été faites sur la situation macroéconomique de l’Europe et sur les politiques budgétaires menées ; nous essayons, vous le savez, de faire progresser notre raisonnement au niveau européen sur ce sujet, afin qu’il y ait une bonne adéquation entre la politique monétaire et la politique budgétaire, au niveau européen et dans chacun des pays.

M. Alauzet m’a interrogé sur l’effet des différentes décisions que nous prenons sur le pouvoir d’achat des ménages. En réalité, celui-ci a baissé en 2012 et stagné en 2013, il a augmenté de 0,7 % en 2014 et il est prévu qu’il augmente de 0,9 % en 2015. Parmi les facteurs qui expliquent cette évolution, on peut citer la fiscalité – qui a joué un rôle en 2012 et 2013 mais qui n’aura aucune influence en 2014 et 2015 – mais aussi la très faible inflation et l’augmentation moyenne des salaires, en dépit d’un contexte peu favorable pour les entreprises.

Par ailleurs, comment faire pour que les décisions que nous prenons aient des effets sur l’évolution des dépenses des collectivités locales plutôt que sur le niveau de leurs investissements ? Si tout le monde s’accorde à reconnaître que ceux-ci ne doivent pas diminuer excessivement, on sait cependant que les dépenses d’investissement – notamment celles du bloc communal, qui est le plus important – augmentent toujours dans les deux années qui précèdent l’élection et diminuent l’année de l’élection et l’année suivante. Ainsi je peux d’ores et déjà vous annoncer que les investissements ont baissé en 2014 et qu’ils baisseront en 2015, indépendamment de l’évolution des recettes. C’est la réalité des choses. En outre, de nombreux changements d’équipes étant intervenus dans le bloc communal cette année, il est probable que les nouveaux élus s’interrogeront sur les investissements décidés par leurs prédécesseurs et donc que le rythme de ces derniers sera plus faible.

Toujours est-il que, pour avoir été responsable de différentes collectivités locales, du conseil régional à ma petite commune, je sais que nos dépenses de fonctionnement ont considérablement augmenté ces dernières années, beaucoup plus que celles de l’État et parfois même davantage que celles de la sécurité sociale. Certes, il s’agissait de répondre à des besoins, par exemple de crèches et de haltes-garderies, néanmoins, il est évident qu’il faut maîtriser les dépenses de fonctionnement. Comment faire, sachant que le principe de libre administration des collectivités territoriales s’applique et qu’il est impossible de supprimer une catégorie de collectivité sans modifier la Constitution ?

Nous essayons d’agir par la persuasion, en diminuant les recettes provenant de l’État sans pour autant que l’ensemble des ressources des collectivités territoriales diminuent. Nous prenons également des mesures dans le cadre de la partie de la loi de programmation des finances publiques consacrée à la gouvernance. Ces mesures peuvent être améliorées : vos propositions sont les bienvenues. Dans le cadre de la future conférence des finances publiques, nous allons essayer de fixer, en accord avec les collectivités territoriales, un taux d’évolution. Il ne sera pas aussi contraignant que la norme de l’État ou que l’ONDAM, mais il peut être utile d’un point de vue pédagogique. Cette mesure avait d’ailleurs été préconisée dans le rapport de MM. Lambert et Malvy. Encore une fois, le dispositif peut être amélioré, mais la gouvernance des finances publiques m’apparaît comme un élément absolument indispensable, quels que soient ceux qui ont à exercer les responsabilités, pour mieux maîtriser l’ensemble de dépenses publiques.

M. le secrétaire d’État. Je voudrais dire à Laurent Grandguillaume que, s’agissant du Plan pauvreté, ni la revalorisation du RSA, ni la garantie jeunes, ni le principe de l’accueil inconditionnel des SDF ne sont remis en cause par le présent projet de loi de finances. La discussion parlementaire permettra de préciser certains points sur lesquels il souhaiterait revenir.

En ce qui concerne les questions liées au transport, j’ai pris l’engagement, au nom du Gouvernement et avec l’aval, voire sur la consigne du Premier ministre, que 140 ou 160 millions d’euros seraient consacrés aux transports franciliens. Nous veillerons à ce que ces engagements soient tenus. Quant à la taxe de séjour, elle fait actuellement l’objet d’une concertation ; le texte ne comporte pas de disposition en la matière. Hier soir, des propositions ont été faites, des communiqués de presse publiés. Nous verrons de quelle manière le texte peut être amendé de façon à répondre à une question qui semble aujourd’hui un peu plus consensuelle.

Enfin, sur les chambres de commerce et d’industrie, la concertation peut avoir lieu, à condition d’être deux à vouloir dialoguer. Des dispositions sont prises, le dispositif est décrit, et nous verrons si la discussion parlementaire permet, sur ce point et sur d’autres, de faire avancer les choses.

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AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR L’AVIS DU HAUT CONSEIL
SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2015

Au cours de sa seconde séance du mercredi 1er octobre 2014, la Commission a entendu, en audition ouverte à la presse, M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, sur les avis du Haut Conseil relatifs, d’une part, au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et, d’autre part, aux projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques. Je vous remercie d’avoir bien voulu m’inviter devant votre commission, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, pour vous présenter les principales conclusions des deux avis qu’il a transmis au Gouvernement. La préparation concomitante de ces avis a fortement mobilisé les membres du Haut Conseil. Un séminaire sur la croissance potentielle avait été organisé dès le mois de juin et de nombreuses auditions ont été conduites au mois de septembre.

Toutefois, je dois signaler que le Haut Conseil n’a pu bénéficier, comme l’an passé pour la préparation de l’avis relatif aux projets de loi de finances et de financement pour 2014, d’échanges préalables dès le mois de juillet. Alors qu’il devait rendre deux avis concomitants cette année, il regrette de n’avoir, en amont de la saisine, disposé d’aucune possibilité d’échange substantiel avec les administrations concernées et d’avoir dû concentrer son analyse et ses travaux dans le délai minimal d’une semaine prévu par la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

M. le président Gilles Carrez. Nous partageons ces difficultés, monsieur le président.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. J’aborderai successivement les deux avis, en commençant par celui relatif au projet de loi de programmation.

Aux termes de l’article 13 de la loi organique, la mission du Haut Conseil est triple : il doit apprécier l’estimation du PIB potentiel sur laquelle repose le projet de loi de programmation ; il doit se prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées ; il doit examiner la cohérence de la programmation envisagée au regard de l’OMT retenu et des engagements européens de la France.

Permettez-moi d’évoquer tout d’abord l’estimation de PIB potentiel. Le Haut Conseil devait se prononcer à ce sujet pour la première fois. C’est normal car, dans la mesure où il a été installé le 21 mars 2013, il n’avait pas pu rendre un avis sur la précédente loi de programmation du 31 décembre 2012.

Le PIB potentiel se définit usuellement comme la production soutenable, c’est-à-dire celle pouvant être réalisée sans entraîner de tensions sur les prix. Chacun connaît les fragilités de cette notion qui est pourtant devenue centrale en matière de gouvernance des finances publiques. Il ne s’agit pas de données statistiques ou comptables, mais du résultat d’un modèle économique, ce qui rend l’estimation du PIB potentiel à la fois difficile et incertaine. Sa mesure est rendue encore plus difficile par la crise économique que nous connaissons. En particulier, les chocs subis par l’économie française depuis 2008 ont vraisemblablement eu un impact pour partie transitoire et pour partie pérenne sur le niveau du PIB potentiel, sans qu’il soit toutefois possible d’estimer leur part respective avec précision.

L’écart de production, qui est la différence entre la production effective et la production potentielle, renseigne sur la capacité de rebond d’un pays quand il est négatif, ce qui est le cas actuellement, ou sur le risque de ralentissement quand il est positif. Pour ce qui nous concerne, il permet surtout d’identifier la composante conjoncturelle du déficit effectif et de mesurer, par différence, le solde structurel, qui est devenu un outil essentiel de pilotage des finances publiques à l’échelle européenne.

Le Gouvernement a retenu, pour le présent projet de loi, l’écart de production tel qu’estimé par la Commission européenne. Dans les estimations de la Commission, l’écart de production de l’économie française s’établit à – 2,7 % du PIB potentiel pour l’année 2013.

Le Haut Conseil constate que cette estimation se situe au centre de la large fourchette des estimations disponibles, notamment celles des organisations internationales, Fonds monétaire international – FMI – et Organisation de coopération et de développement économiques – OCDE –, et celles de l’INSEE, qui se situe entre – 2 % et – 3,5 %. Un tel écart suggère que l’économie française dispose d’une forte capacité de rebond. Le scénario retenu par le Gouvernement, comme par les organisations internationales, est donc celui d’un rattrapage, avec une fermeture progressive de l’écart de production. Cependant, ce rattrapage ne serait pas tout à fait achevé à l’horizon de la programmation.

La position du Haut Conseil est plus réservée. Dans son avis, il considère en effet qu’un écart de production plus faible et, partant, une moindre capacité de rebond, ne peuvent être exclus.

Il note en particulier que l’économie française connaît un écart de production fortement négatif depuis plusieurs années, alors qu’en principe un tel écart est supposé se résorber rapidement. Cela conduit à s’interroger sur l’existence même d’un potentiel de rebond substantiel.

La prise en compte d’une telle hypothèse, qui, selon nous, mériterait d’être étudiée, se traduirait par un déficit structurel plus dégradé tout au long de la période de programmation et pourrait conduire à des prévisions de croissance plus faibles.

S’agissant de la croissance potentielle, le Haut Conseil considère que l’estimation de 1 % en 2014 et 2015 et de l’ordre de 1,2 % en moyenne pour les années 2016 à 2019 constitue une hypothèse acceptable.

Ces estimations, qui sont également reprises de la Commission européenne, sont plus basses que celles retenues dans la loi de programmation du 31 décembre 2012 et dans les programmes de stabilité et lois de finances ultérieurs, puisque la croissance potentielle était auparavant estimée entre 1,5 % et 1,6 % sur la période 2014-2017. Les présentes estimations sont proches des dernières estimations du FMI et de l’INSEE, inférieures à celles publiées par l’OCDE, mais plus élevées que celles de la Banque de France.

J’en viens à présent aux prévisions macroéconomiques associées au projet de loi, qui portent sur l’horizon de la programmation, c’est-à-dire la période 2014-2019. Permettez-moi d’aborder directement le moyen terme, car je reviendrai sur les années 2014 et 2015 à propos des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Par rapport aux prévisions associées en avril dernier au programme de stabilité, le Haut Conseil note que le Gouvernement a décalé dans le temps son scénario de reprise de l’environnement international et revu à la baisse les perspectives de croissance à court terme. Ce scénario est ainsi moins optimiste que celui présenté en avril dans le programme de stabilité, qui reposait, comme le Haut Conseil l’avait noté dans son avis, sur la réalisation simultanée de plusieurs hypothèses favorables qui ne se sont pas matérialisées.

À moyen terme, ses prévisions pour 2016 et 2017 – respectivement 1,7 % et 1,9 % – reposent toutefois encore sur des hypothèses favorables quant à l’environnement extérieur et à l’effet des politiques économiques sur la compétitivité des entreprises françaises, l’investissement et l’emploi.

Le scénario reste entouré d’un certain nombre d’aléas, majoritairement orientés à la baisse, qui sont liés notamment à l’environnement international et à l’investissement. En particulier, la reprise du commerce mondial pourrait être moins rapide que prévu. Sans doute avez-vous vu les derniers chiffres publiés par l’Organisation mondiale du commerce – OMC – à ce sujet. De même, la reprise de l’investissement pourrait être moins marquée si les entreprises choisissaient de limiter leur endettement plutôt que d’investir, dans un contexte où l’amélioration de leur taux de marge serait lente. À l’inverse, le scénario du Gouvernement pourrait être conforté par une baisse de l’euro et, à moyen terme, par la mise en place d’un plan d’investissement européen.

J’en viens enfin à la cohérence de la programmation présentée par rapport à l’OMT et aux engagements européens de la France. Le Haut Conseil observe que cette programmation n’est pas cohérente avec les engagements européens de la France. Dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, la France s’est engagée, à l’occasion du programme de stabilité adressé aux autorités européennes en avril 2014, à ramener son déficit en deçà de 3 % du PIB d’ici 2015 et à améliorer son solde structurel de 0,8 point de PIB en 2014 et en 2015.

Or, dans la programmation présentée, le déficit effectif se maintiendrait au-delà de 4 % du PIB entre 2013 et 2015 et ne reviendrait pas sous le seuil de 3 % avant 2017.

L’ajustement structurel, c’est-à-dire la variation du solde structurel pour chacune des années 2014 et 2015, est nettement inférieur au rythme annuel de 0,8 point de PIB prévu dans le programme de stabilité d’avril 2014. Il serait de 0,1 point en 2014 et de 0,2 point en 2015. Pour 2016 également, l’objectif a été revu à la baisse, à 0,3 point contre 0,5 point selon le programme de stabilité. Ce dernier constitue pourtant notre point de référence obligé, puisqu’il a été présenté par la France après avoir reçu l’avis favorable du Parlement.

La France ne réaliserait donc pas l’ajustement structurel annoncé, et ce pour plusieurs raisons. La plus substantielle, c’est le caractère relativement modéré de l’effort en dépense. Cet effort est en effet réduit par rapport au programme de stabilité, les objectifs de croissance en valeur n’ayant pas été ajustés à la faible inflation sur les années 2014 à 2016. La baisse des hypothèses de croissance potentielle, qui se répercute mécaniquement sur l’ajustement structurel, constitue la deuxième raison. D’autres effets jouent enfin à la marge, concernant notamment la croissance spontanée des recettes qui reste inférieure à celle de l’activité en 2014 et en 2015.

Le respect des traités entraîne d’autres obligations, comme la convergence vers l’objectif de moyen terme ou le retour à un déficit effectif en deçà de 3 % du PIB. Pour la première, en raison du faible rythme d’ajustement structurel, la réalisation de l’OMT, qui a été revu à la baisse à – 0,4 % du PIB, est reportée à 2019 alors que le programme de stabilité prévoyait 2017. Pour le second, le programme de stabilité l’annonçait pour 2015, il serait désormais reporté à 2017.

En outre, si cette nouvelle trajectoire est moins ambitieuse que les précédentes, son respect n’est pas acquis, car cela supposerait d’infléchir fortement – et sur toute la période de programmation – la croissance de la dépense publique. Pour cela, les efforts déjà réalisés depuis 2011 en matière de croissance en volume de la dépense publique doivent être accentués. Or, une partie des dépenses programmées repose sur des économies à réaliser par des administrations dont l’État ne maîtrise pas les leviers, notamment les collectivités territoriales, l’Unédic ou les régimes complémentaires de retraite, même s’il est prévu de renforcer quelque peu les règles de gouvernance.

Aussi, en l’état des mesures annoncées, le Haut Conseil identifie-t-il un risque de déviation par rapport à la trajectoire vers l’objectif de moyen terme, trajectoire elle-même sensiblement décalée par rapport à la précédente loi de programmation et au dernier programme de stabilité.

Le Haut Conseil était également appelé à se prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015 ainsi que sur la cohérence de ces projets avec les orientations pluriannuelles de solde structurel. Conformément à l’article 23 de la loi organique, il lui était également demandé de formuler une appréciation sur les mesures de correction présentées par le Gouvernement à la suite du déclenchement du mécanisme de correction en mai 2014. Pour le présent avis, le cadre de référence reste bien la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, toujours en vigueur avant l’adoption, par le Parlement, d’une nouvelle programmation.

J’en viens directement aux principales conclusions de cet avis, s’agissant des prévisions macroéconomiques tout d’abord.

Pour 2014, au vu d’un acquis de croissance à la fin du premier semestre aujourd’hui estimé à 0,3 % et des dernières informations conjoncturelles disponibles, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance de 0,4 % est réaliste.

S’agissant de 2015, la prévision de croissance de 1 % est selon nous optimiste. Elle suppose en effet un redémarrage rapide et durable de l’activité, ce que ne suggèrent pas les derniers indicateurs conjoncturels.

Ce scénario présente par ailleurs plusieurs éléments de fragilité, qui concernent à la fois la demande mondiale et la demande intérieure. L’environnement international pourrait se révéler moins porteur, comme en attestent les dernières prévisions de croissance du commerce mondial de l’OMC, qui sont inférieures à celles du Gouvernement. La reprise de l’investissement productif pourrait être retardée compte tenu du faible taux d’utilisation des équipements, de perspectives d’activité incertaines et de la faiblesse des taux de marge sur lesquels le CICE n’a eu, pour l’instant, qu’un impact limité. Le rebond de la consommation des ménages pourrait être de moindre ampleur, l’absence persistante d’amélioration sur le marché du travail pouvant en particulier conduire les ménages à ne pas diminuer leur épargne de précaution.

Le scénario présenté par le Gouvernement est entouré, par ailleurs, d’un certain nombre d’aléas qui concernent notamment l’environnement international et la demande interne.

J’en viens maintenant à la cohérence des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

Dans son avis relatif au solde structurel des administrations publiques de 2013 rendu public en mai dernier, le Haut Conseil avait identifié un écart, qualifié d’important, de 1,5 point de PIB par rapport à la trajectoire définie dans la loi de programmation, ce qui a déclenché le mécanisme de correction. Aux termes de l’article 23 de la loi organique, le Gouvernement doit tenir compte de cet écart au projet de loi de finances pour 2015 en prenant des mesures adéquates.

Le Haut Conseil constate que le Gouvernement ne corrige pas l’écart important par rapport à cette loi. Au contraire, celui-ci s’accroît en prévision pour 2014 et 2015.

Plutôt que de corriger cet écart, le Gouvernement fait le choix de définir une nouvelle trajectoire, intégrant les déviations passées et fixant de nouveaux objectifs dont l’ambition est revue à la baisse.

Ainsi, en 2015, l’ajustement structurel – ou l’amélioration du solde structurel – serait de 0,2 point de PIB (contre 0,8 point précédemment), porté par un effort en dépense de 0,5 point. Cet effort se traduit, dans la nouvelle loi de programmation, par un objectif de progression de la dépense de 1,1 % en valeur, qui équivaut – compte tenu de l’inflation estimée à 0,9 % – à 0,2 % en volume.

Au vu des mesures présentées par le Gouvernement, le Haut Conseil, qui n’en a pas eu le détail exhaustif, estime que cet objectif de 1,1 % risque de ne pas être atteint, pour des raisons liées notamment à la masse salariale des administrations publiques et aux dépenses publiques locales, dont l’inflexion dépendra du comportement des assemblées locales en réaction à la baisse des dotations de l’État.

Par ces deux avis, le Haut Conseil envoie un message d’alerte au Gouvernement. Alors que la France s’était engagée à réduire son déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2015 et à atteindre son OMT en 2017, ces engagements sont décalés dans le temps et sensiblement revus à la baisse en raison notamment d’un ajustement structurel réduit. La faiblesse de cet ajustement structurel et son report dans le temps font peser un risque sur la trajectoire de la dette publique qui continuera à augmenter.

M. le président Gilles Carrez. Je formulerai pour ma part trois observations.

La prévision est un art difficile, comme le prouvent les hésitations sur le taux de croissance. L’objectif de 0,4 % en 2014 vous semble aujourd’hui réaliste, tandis que celui de 1 % pour 2015 vous paraît optimiste. La meilleure solution, dirai-je avec quelque malice, ne serait-elle pas que le Haut Conseil fixe lui-même le niveau à retenir comme hypothèse de travail ? Accepteriez-vous cette responsabilité ? Ce pourrait être, j’en conviens, un cadeau empoisonné : en avril, quand nous avons examiné le programme de stabilité, l’objectif de 1 % vous semblait réaliste pour cette année… Je crois que nous pouvons tous en tirer une leçon d’humilité.

Depuis 2012, la loi de programmation prévoit la correction des écarts à la trajectoire qu’elle définit. Or, cette année, pour éviter de prendre de telles mesures, c’est la trajectoire qu’on modifie ! Pour faire baisser la fièvre des déficits, on casse le thermomètre… C’était pourtant l’occasion d’enclencher pour la première fois le mécanisme de correction.

L’objectif global de progression des dépenses publiques de 1,2 % en valeur paraît extrêmement ambitieux compte tenu de leur volume total, qui s’élève à 1 200 milliards d’euros. Vous avez exprimé des doutes sur la possibilité d’un tel ralentissement, notamment pour ce qui est de la masse salariale. Pouvez-vous préciser votre pensée ?

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Vous avez fait référence aux données européennes, sans mentionner la menace de la déflation que tout le monde redoute si les dépenses publiques sont réduites dans tous les États membres à la fois. Le terme même de déflation ne me semble pas figurer pas dans votre propos, alors qu’il fut employé à maintes reprises lors de la réunion des commissions des Finances des parlements nationaux et du Parlement européen, qui s’est tenue hier à Rome. Étant donné l’impact que le contexte européen peut avoir sur notre économie, jugez-vous que le projet de loi de finances soit à la hauteur de la situation ?

D’autre part, c’est bien l’ensemble du déficit qui doit être financé sur les marchés internationaux, mais la distinction entre déficit structurel et déficit conjoncturel n’en demeure pas moins primordiale. Convenez-vous que la part du déficit conjoncturel est de plus en plus importante, et qu’elle s’établit à 1,9 % du PIB ?

M. Éric Woerth. Les avis du Haut Conseil se suivent et se ressemblent. Je perçois une certaine prudence, ou un certain pessimisme, devant ces prévisions officielles révisées sans cesse. Compte tenu de la fragilité des hypothèses de croissance retenues, notamment pour 2016 et 2017, quel peut être, selon vous, en cas de dérapage, le niveau de déficit auquel il faut s’attendre à cet horizon : 4,1 % ? 4,2 % ? 4,4 % ? L’objectif des 3 % est repoussé sans cesse, jusqu’en 2019 désormais : autant dire aux calendes grecques !

M. Dominique Lefebvre. Je salue le travail du Haut Conseil, qui s’inscrit dans le cadre des dispositions de la loi organique de décembre 2012, et je partage globalement ses constats et observations, y compris ses interrogations sur les prévisions pour l’après-2015. Je soulignerai cependant que celles contenues dans le projet de loi de programmation et dans les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015 sont en parfaite cohérence. Je laisserai aux économistes le privilège de débattre des concepts, pour m’intéresser surtout à une question que l’avis du Haut Conseil laisse ouverte : comment envisager le redressement des finances publiques en se fondant sur des hypothèses qui ne tiennent pas compte des politiques européennes de croissance ? Nous savons bien, en effet, que seul le retour à la croissance permettra de résorber les déficits et la dette. Il n’est donc pas infondé d’intégrer les effets de ces possibles politiques dans la mise en œuvre éventuelle du mécanisme de correction. En pratique, les gouvernants sont condamnés à un policy mix qui contribue à relancer l’activité. Quelles sont, dans ces conditions, les réformes structurelles à entreprendre ?

M. Charles de Courson. J’adore cette discussion sur le thème de la « croissance potentielle ». La Commission européenne l’avait estimée, voici deux ans déjà, à 1,2 % du PIB, et je constate avec satisfaction que le Gouvernement reprend désormais cette hypothèse. Mais la croissance potentielle n’est rien d’autre, en réalité, que l’écart entre déficit effectif et déficit structurel, écart qu’elle est censée permettre de mesurer... Or, ce dernier stagne autour de 2 % sans jamais se réduire. Le concept ne me semble donc plus du tout adapté à la période de crise que nous connaissons, et j’estime qu’il faut en revenir tout bonnement à l’observation du déficit effectif.

Par ailleurs, quelles sont les sanctions que l’Union européenne est susceptible de prendre à l’égard de la France pour la non-correction des écarts par rapport à sa trajectoire de réduction du déficit ?

M. le président Gilles Carrez. Karine Berger pourra vous répondre, forte d’avoir eu raison sur l’évaluation à 1,9 % du déficit conjoncturel, comme l’a reconnu le Gouvernement ce matin...

Mme Karine Berger. Ce n’est pas moi qui avais raison, mais notre assemblée, qui avait adopté l’amendement de notre Commission au projet de loi de finances rectificative, amendement malheureusement abandonné en nouvelle lecture...

Nous assistons pour la première fois au processus politique de suivi du déficit structurel au niveau européen, tel que prévu par le traité budgétaire. Le traité met l’accent sur le déficit structurel et non sur le déficit nominal, conformément, d’ailleurs, à la volonté des négociateurs français. Mais le déficit conjoncturel, qui s’obtient par déduction du déficit structurel, livre en vérité une information-clef, puisqu’il indique à quel point du cycle économique le pays se situe, en l’occurrence le point le plus bas depuis dix ans, plus bas encore qu’en 2009 ou en 2010. Le Haut Conseil reconnaît-il cet état de fait et, si oui, quelles mesures préconisent-t-il de prendre ?

M. Charles de Courson. Il n’y a plus de cycles !

Mme Karine Berger. La prévision budgétaire n’est pas un simple exercice de comptabilité ex ante, et l’absence de mesures contre le déficit conjoncturel aggrave encore le déficit structurel de l’année suivante. Vous dites, monsieur le président Migaud, que le Gouvernement ne prend pas de mesures correctrices, mais admettez-vous que la baisse du déficit conjoncturel pourrait avoir un impact récessif sur la situation économique, aggravant encore le déficit structurel de l’an prochain ?

M. Éric Alauzet. À l’origine, les 50 milliards d’euros d’économies annoncés devaient être affectés à la réduction des déficits ainsi que, pour 10 milliards, au financement du CICE. Puis le pacte de responsabilité est arrivé, non ou mal financé, reposant sur le pari d’une augmentation induite de la croissance de 0,5 point. Celle-ci n’a pas eu lieu, tout au contraire. La baisse de la dépense publique ne sert donc plus aujourd’hui à résorber le déficit, mais à financer le pacte de responsabilité dans toutes ses dimensions.

De cette expérience, il faut tirer la leçon que la croissance ne se décrète pas, que les politiques de relance se heurtent à l’inertie du système et qu’il est illusoire de compter sur un électrochoc de confiance, mais aussi qu’une récession continentale entraîne avec elle l’économie française.

J’ajoute cependant que le calcul de la croissance inclut de plus en plus d’éléments négatifs, comme des activités engendrant des maladies dégénératives, au traitement très coûteux, le chômage ou la dégradation de l’environnement, dont le coût est très élevé aussi, tandis que ne sont pas prises en compte des activités contribuant au bien-être et tombant dans le champ de l’économie collaborative ou de l’économie familiale.

M. Olivier Carré. Ou du travail au noir !

M. Éric Alauzet. Il faut s’interroger sur les effets néfastes de la crise et réfléchir à de nouveaux indicateurs qui peuvent nous permettre de sortir de l’ornière.

M. Pascal Cherki. La langue du président Migaud, déployant une grande subtilité, peut être sujette à plusieurs interprétations. Il écrit notamment : « Toutefois cette prévision d’un rattrapage a été annoncée par les pouvoirs publics plusieurs fois sans jamais se réaliser, le scénario de reprise étant décalé d’année en année. Il en résulte, malgré les révisions à la baisse successives de la croissance potentielle, une très longue période d’écart de production fortement négatif. Celle-ci conduit à s’interroger sur l’existence même d’un potentiel de rebond substantiel. »

M. Yves Censi. C’est sans ambiguïté !

M. Pascal Cherki. Est-ce à dire qu’il faille relancer la croissance par un ajustement structurel sévère et une baisse des dépenses publiques ? Ne faut-il pas envisager au contraire un rebond, en intégrant davantage le paramètre de l’environnement européen et en mettant en corrélation les efforts nécessaires en France et la politique qui pourrait être menée au niveau européen ?

M. Christophe Caresche. Je relève un paradoxe entre l’avis de l’an dernier, qui attribuait à la réduction de la dépense publique un caractère récessif – ce qui avait suscité un long débat – et l’avis d’aujourd’hui, qui insiste beaucoup plus sur le problème de la réduction du déficit. Mais peut-être le paradoxe n’est-il qu’apparent et le président Migaud pourra-t-il nous éclairer.

M. Philippe Vigier. Plutôt que d’enclencher le mécanisme de correction, le Gouvernement a préféré, dans sa programmation pluriannuelle, changer la trajectoire même de réduction des déficits, dont l’avis juge au demeurant le succès non garanti. Quant aux 50 milliards d’euros d’économies inscrits dans le programme de stabilité, il n’en dit rien, alors que l’effort constaté semble bien différent de celui annoncé. Quelles réactions faut-il attendre de la part des autres États membres, dont certains, comme la Grèce, ont été contraints de prendre des mesures d’ajustement fortes ?

M. Olivier Carré. Monsieur le président, votre propos laisse songeur, quand on considère l’écart constant entre les déficits annoncés et les déficits exécutés. Le remède choisi, à savoir l’augmentation des impôts, n’a-t-il pas affecté la capacité de croissance de notre économie et partant, sa capacité de résorption des déficits ? Vous connaissez l’effet Laffer, qui veut que « trop d’impôt tue l’impôt »...

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Je ne pourrai répondre en détail à toutes les questions...

La France a retenu une conception minimaliste du comité budgétaire indépendant dont le traité budgétaire a rendu obligatoire la mise en place dans tous les États membres. Dans d’autres pays, comme l’Espagne ou le Royaume-Uni, il revient en effet à ce comité de fixer l’hypothèse de croissance servant de base aux projets de loi de finances. Mais la mission de notre Haut Conseil est strictement définie, de sorte que vous ne pouvez attendre que nous fournissions les réponses aux questions qui vous sont directement posées. De même, je peux seulement vous rappeler les textes, qui prévoient que le Conseil européen décide à la majorité qualifiée des sanctions à infliger.

Le Haut Conseil n’a pas pour mandat de proposer une autre politique économique. Je porte au demeurant une parole collégiale, et il n’y a pas eu de débat en son sein à ce sujet.

À propos des prévisions de croissance, je vous confirme qu’une augmentation du PIB de 0,4 % en 2014 me paraît réaliste, sachant que l’acquis de croissance est aujourd’hui de 0,3 % et qu’une hausse de 0,1 % au dernier trimestre semble crédible. Pour 2015, nous n’avons pas varié en jugeant optimiste l’hypothèse retenue par le Gouvernement. Nous étions-nous trompés sur 2014 ? J’admets que nous avons cru au scénario présenté par le Gouvernement, mais il faut aussi tenir compte de ce qui s’est passé depuis : nous l’avons fait, mais ce n’est pas le cas de tout le monde...

Pour 2015, nous confirmons notre jugement de prudence, sans pouvoir développer nos propres capacités d’analyse économique, mais en nous appuyant sur des enquêtes de conjoncture faites par d’autres. À la lumière de ces dernières, rien n’indique un redémarrage rapide de l’activité.

De même, aucune certitude n’existe quant au fait que le cycle économique serait aujourd’hui à son point le plus bas. Les hypothèses de croissance n’ont cessé d’être corrigées à la baisse. Il serait utile, quand un scénario central est proposé, que des scénarios alternatifs soient également avancés. Nous avons regretté que ce ne soit pas le cas.

Quand nous nous penchons sur la trajectoire de réduction des déficits publics, nous raisonnons par rapport aux engagements que le Gouvernement a fixés et que le Parlement a approuvés. Si un écart est constaté, notre mission est de le dire. Aujourd’hui, plutôt que de corriger les écarts, le Gouvernement propose une nouvelle trajectoire. Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur son choix. Il ne nous revient pas non plus de nous substituer au Conseil européen ou à la Commission européenne pour dire comment les Européens apprécieront cette nouvelle trajectoire, alors que la précédente ne remonte qu’au mois d’avril dernier.

Sur les dépenses, nous constatons un effort réel. La dépense publique est davantage maîtrisée depuis 2011. Mais d’autres pays l’ont réduite, sans se contenter d’en freiner l’augmentation. Cela a-t-il un effet récessif ? Je crois – et c’est plutôt en tant que Premier président de la Cour des comptes que je m’exprime – que vous devez vous interroger sur l’efficacité de la dépense publique. Alors que le chômage est structurel et la formation professionnelle déficiente, tout l’argent employé dans les politiques publiques correspondantes est-il utilement dépensé ? Non, catégoriquement non. La dépense supplémentaire ne couvre pas forcément le besoin supplémentaire lorsque le besoin actuel n’est pas suffisamment couvert. Ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi sont ceux qui bénéficient le moins de la politique de formation professionnelle, pourtant dotée de plus de 30 milliards d’euros. Derrière chaque euro mal dépensé se cache cependant généralement quelqu’un qui en bénéficie, et c’est l’intérêt général qu’il faut avoir en tête.

Vous me dites que la réduction de la dépense peut avoir un effet récessif. Pour ma part je pose la question autrement : n’y a-t-il pas des marges permettant de rendre l’action publique plus efficace et plus pertinente au regard des crédits qui lui sont consacrés ? Plus on est attaché à l’action publique, plus on doit être attaché aussi à sa pertinence et à son efficacité. L’indifférence par rapport à l’absence de résultats est absolument choquante, dans un contexte où l’argent manque et où le niveau des prélèvements obligatoires est déjà élevé. Le sujet n’est pas facile ; il y a des réticences, des résistances. Pour avoir suivi vos débats tout à l’heure, j’ai pu vérifier que, chaque fois qu’une économie est proposée, il y a quelqu’un pour demander quelles en seront les conséquences. C’est pourquoi il faut replacer le sujet dans un contexte plus large.

Si l’on raisonne d’un point de vue purement franco-français, on peut dire que, par rapport au passé, l’effort est réel et ambitieux. Mais, comparé à celui consenti par d’autres pays, il ne l’est pas. L’État, le Gouvernement, les pouvoirs publics ont-ils la pleine capacité de maîtriser l’évolution de la dépense et à faire respecter les objectifs fixés ? Nous nous interrogeons. S’agissant, par exemple, des dépenses de personnel, l’État parvient pour sa part à les maîtriser, mais ce n’est pas le cas au niveau des collectivités territoriales et du secteur hospitalier.

Ce n’est pas le Haut Conseil des finances publiques ni la Cour des comptes qui dit que les dépenses de personnel ne doivent pas augmenter de plus de 200 millions d’euros d’une année sur l’autre : c’est vous-mêmes qui avez fixé cet objectif. Vous nous demandez de vérifier dans quelle mesure vous êtes capables de le respecter, sachant que l’État n’est pas en situation de s’engager pour les autres acteurs de la dépense publique, comme les collectivités territoriales, la sécurité sociale, l’Unédic, l’AGIRC ou l’ARRCO. Nous avons écrit que le scénario du Gouvernement reposait principalement sur la maîtrise des dépenses de personnel. Si celles-ci ne sont pas maîtrisées, ce scénario risque fort de ne pas être respecté.

Vous avez vu, d’autre part, que beaucoup d’institutions internationales ont révisé à la baisse leurs estimations de la demande mondiale. L’OMC a revu très sensiblement ses prévisions pour 2014 et 2015. Nous nous demandons si le Gouvernement en a parfaitement tenu compte.

Autre interrogation : quelle est la capacité de nos entreprises à répondre à l’augmentation éventuelle de la demande, compte tenu du problème de compétitivité qui se pose à elles ? Ce que je dis vous paraît peut-être hallucinant, mais il s’agit d’une analyse partagée par d’autres. Personne ne détient la vérité absolue en la matière, et les économistes eux-mêmes ont des points de vue divergents. J’ai l’honneur de présider une instance au sein de laquelle peuvent s’opposer des sensibilités différentes – mais c’est justement tout l’intérêt de la discussion. Nous essayons de vous exprimer un avis aussi unanime que possible, afin de vous apporter le meilleur éclairage compte tenu des missions qui sont les nôtres.

M. le président Gilles Carrez. Comme l’a dit la Rapporteure générale, vous n’abordez pas du tout la question du risque de déflation. Pourtant, il me semble que cela pose un problème par rapport aux prévisions macroéconomiques. Je souhaite que vous répondiez aussi sur ce point.

M. Guillaume Bachelay. Monsieur le président Migaud, vous écrivez avoir consulté un certain nombre d’organismes et d’institutions en vue de l’élaboration de votre avis. J’imagine que la Commission européenne, l’OCDE ou encore l’Observatoire français des conjonctures économiques – OFCE – ont évoqué avec vous ce qu’ils pointent dans leurs propres avis, à savoir la déflation dans laquelle pourrait entrer durablement la zone euro. De la même façon que la France doit emprunter un chemin national pour opérer des réformes afin d’améliorer sa compétitivité, l’Union européenne doit soutenir la croissance pour assurer la relance. Pouvez-vous nous donner votre interprétation, même minimaliste, de la conjoncture européenne telle que vous la percevez, car il me semble qu’on ne peut distinguer cet examen de l’avis que vous émettez par ailleurs ?

M. Olivier Carré. La BCE a des indications lourdes sur la politique qu’elle met en œuvre. On sait que depuis deux ans, elle est à la manœuvre pour parer au risque déflationniste dans la zone euro et respecter l’objectif, encore éloigné, de 1,5 % à 2 % d’inflation annuelle. Le président de la BCE insiste toujours sur l’adéquation nécessaire entre les politiques budgétaires et la politique monétaire. De ce point de vue, pensez-vous que le budget préparé par le gouvernement français est en phase avec la politique monétaire de M. Draghi ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Il y a, bien entendu, des liens entre les politiques conduites au niveau national et celle menée au niveau européen, laquelle peut avoir des conséquences sur les résultats de notre pays. D’ailleurs, nous indiquons clairement que le scénario du Gouvernement pourrait être conforté par une baisse de l’euro. Le Gouvernement, pour sa part, s’est fondé sur une parité de l’euro qui peut être considérée aujourd’hui comme élevée : 1,34 dollar, alors qu’il est descendu depuis lors à 1,25 dollar. On peut donc penser que le scénario est susceptible d’être conforté par cette baisse de l’euro et, à moyen terme, par la mise en œuvre – souhaitable – d’un plan européen d’investissements.

Nous relevons aussi que la BCE a décidé de prendre en considération le risque déflationniste et qu’elle mène une politique qui vise à l’éviter. La BCE et le Gouvernement français estiment que leur politique peut avoir des effets positifs et faire repartir quelque peu l’inflation. Les hypothèses du Gouvernement sont tout à fait plausibles, mais le risque existe que l’inflation reste durablement basse, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner. Il est souhaitable que la politique menée par la BCE ait des effets positifs, mais cela nécessitera un peu de temps. Tout dépendra des réactions et des anticipations des agents économiques.

En tout état de cause, nous reconnaissons naturellement que la politique européenne a des conséquences sur la situation française.

Nous considérons pour notre part que nous vivons une période de faible inflation plutôt que de déflation, même si le risque de déflation doit être pris en considération. Et je ne suis pas surpris qu’il y ait des échanges sur ce sujet entre parlementaires de la zone euro.

*

* *

ANNEXES

ANNEXE N° 1
LE SOLDE PUBLIC EN 2014 ET 2015

 

Exécution 2013

Prévision pour 2014 associée
au présent projet de loi

Solde structurel

– 2,5

– 2,4

Solde conjoncturel

– 1,6

– 2

Solde effectif

– 4,1

– 4,4

Source : ministère des finances et des comptes publics.

Par rapport à 2013, si le solde structurel continue à baisser, la solde effectif ressort en légère dégradation comme l’illustre le tableau précédent.

En raison d’une croissance de PIB prévue à 0,4 % en volume pour 2014, au lieu des 1 % initialement visés, et par conséquent encore plus éloignée du potentiel de croissance estimé à 1 %, le déficit public conjoncturel se creuserait d’environ 0,4 % du PIB. Une telle évolution serait principalement liée aux manques à gagner en recettes résultant de la faible activité économique mais aussi cette année par un ralentissement marqué de l’inflation, qui reste très éloignée de l’objectif fixé par la Banque centrale européenne à 0,5 % et qui tend de ce fait à limiter également le dynamisme des recettes publiques.

L’ajustement structurel, qui était de 1,1 point en 2013, sera en 2014 de 0,1 point (au lieu des 0,8 point prévus en loi de finances rectificative pour 2014) et se fera uniquement en dépenses. La France a donc fait le choix de ne pas prendre des mesures supplémentaires de hausse de prélèvements obligatoires ni de baisse de dépenses publiques au-delà des 50 milliards d’euros d’économies annoncés et qui ont reçu l’approbation du Parlement lors de la présentation du programme de stabilité 2014-2017.

La Rapporteure générale estime plus efficace économiquement et plus juste socialement d’adapter notre stratégie de consolidation budgétaire, qui demeure l’objectif, à la réalité économique dégradée de l’ensemble de la zone euro et ce, afin d’éviter d’entrer dans un cycle déflationniste désastreux. Elle salue donc le choix de laisser plus de latitude aux stabilisateurs automatiques.

Malgré cette hausse prévisible du déficit public effectif, le déficit structurel continuera à se réduire pour atteindre 2,4 % du PIB contre 2,5 % en 2013. Comme l’illustre le tableau suivant, la diminution du déficit structurel par rapport à 2013 serait due à un effort structurel de 0,4 %, partiellement compensé, à hauteur de 0,1 % du PIB, par la « composante non discrétionnaire » et de 0,1 % du PIB par la « clé en crédits d’impôts » du solde.

LA RÉDUCTION DU DÉFICIT STRUCTUREL EN 2014

(en % du PIB)

Solde structurel 2013

– 2,5

Effort structurel

0,4

Dont effort en recettes

0,1

Dont effort en dépenses

0,2

Composante non discrétionnaire du solde structurel

– 0,1

Clé en crédits d’impôts

– 0,1

Solde structurel 2014

– 2,4

L’effort structurel, qui traduit la diminution du déficit structurel due à des mesures adoptées par les pouvoirs publics, reposerait, pour la première année, plus sur l’effort en dépenses que sur l’effort en recettes – c’est-à-dire le produit net des mesures nouvelles relatives aux prélèvements obligatoires – évalués seulement à 0,1 % du PIB contre 1,5 % du PIB en 2013.

Les mesures en dépenses sont précisées dans le commentaire relatif à cet effort dans le présent rapport (annexe n° 3 notamment).

La variation non discrétionnaire du solde est liée à des éléments qui ne dépendent pas des pouvoirs publics et qui ont néanmoins une incidence sur le niveau du solde structurel. Cette variation serait négative, à hauteur de 0,1 % du PIB, en raison d’une élasticité des prélèvements obligatoires nettement inférieure à l’unité.

Par rapport à la dernière prévision, tant le solde effectif que le solde structurel sont revus à la hausse, comme l’illustre le tableau suivant.

LES PRÉVISIONS SUCCESSIVES DU SOLDE PUBLIC EN 2014

(en % du PIB)

 

LFI pour 2014

LFR pour 2014

Prévision associée au présent projet de loi

Solde structurel

– 1,7

– 2,3

– 2,4

Solde conjoncturel

– 1,8

– 1,5

– 1,9

Mesures ponctuelles et temporaires

– 0,1

0

0

Solde effectif

– 3,6

– 3,8

– 4,4

Source : d’après ministère des finances et des comptes publics.

Après – 1,7 % du PIB en loi de finances initiale pour 2014 et – 2,3 % du PIB en loi de finances rectificative pour 2014, la prévision de déficit public structurel pour 2014 s’établit à – 2,4 % du PIB dans le présent projet de loi.

La prévision de déficit public conjoncturel s’établirait donc pour 2014 à 2 % du PIB, soit un taux plus proche de celui de 1,9 % du PIB adopté en commission des Finances lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative que des 1,5 % adoptés in fine par le Parlement sur proposition du Gouvernement.

Cet agrégat montre que notre économie a encore une capacité de rebond importante et valide la stratégie consistant à ne pas prévoir de mesures d’ajustement structurel supplémentaire dans ce qui s’apparenterait à une politique procyclique dangereuse à terme.

Par ailleurs, en application de l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil des finances publiques a constaté le déclenchement du mécanisme de correction des écarts en mai 2014 (25). Cependant, la loi organique ne fait pas obligation au Gouvernement de présenter des mesures de correction. En effet, en raison du dépôt simultané du projet de loi de finances pour 2015 et d’un projet de loi de programmation pour les années 2014 à 2019 qui modifie la trajectoire pluriannuelle, les prévisions de solde structurel pour les années 2014 et 2015 retracés dans l’article liminaire du projet de loi de finances sont, par construction, identiques aux nouvelles orientations pluriannuelles

Comme l’illustre le tableau suivant, le Gouvernement revoit à la baisse l’ajustement structurel à 0,1 point de PIB en 2014. Ce moindre ajustement vient en particulier d’une baisse de l’effort en dépenses, dans un contexte d’inflation plus faible. Alors que les cibles fixées en valeur restent quasiment inchangées, soit 1,4 % en 2014, la croissance de la dépense en volume est revue à la hausse (0,9 % en 2014 contre 0,3 % prévu dans la loi de finances rectificative du 8 août 2014). Par ailleurs, le Gouvernement retient désormais, par convention, la même hypothèse de croissance potentielle de la Commission européenne, qui est plus faible que la croissance potentielle précédemment retenue – 1 % au lieu de 1,4 % pour 2014 – or pour un montant d’économie donné, l’effort structurel en dépense est d’autant plus faible que la croissance potentielle est basse.

LES PRÉVISIONS SUCCESSIVES DES DIFFÉRENTES COMPOSANTES
DE LA VARIATION DU SOLDE STRUCTUREL EN 2014

(en % du PIB)

 

LFI 2014

LFR 2014

Prévision associée au présent projet de loi

Variation prévue du solde structurel

+ 0,9

+ 0,8

+ 0,1

Effort structurel

0,9

0,8

0,1

Dont effort en recettes et autres éléments non discrétionnaires

0,2

0,1

– 0,1

Dont effort en dépenses

0,7

0,7

0,2

Source : d’après ministère des finances et des comptes publics.

Le tableau suivant détaille la prévision, pour 2014, des soldes par sous-secteurs d’administration publique.

LE SOLDE PAR SOUS-SECTEURS D’ADMINISTRATION PUBLIQUE EN 2014

(en % du PIB)

 

2013

Révisé 2014

Solde public

– 4,1

– 4,4

État

– 3,3

– 3,6

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

+ 0,1

0

Administrations publiques locales (APUL)

– 0,4

– 0,3

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

– 0,5

– 0,5

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Le solde de l’État est présenté dans les observations de la Rapporteure générale sur l’article d’équilibre (article 31 du présent projet de loi de finances).

Estimé, pour 2014, à 87 milliards d’euros en comptabilité budgétaire, il ressortirait à 76,9 milliards d’euros en comptabilité nationale en raison des retraitements exigés pour le passage de l’une à l’autre.

Le solde des organismes divers d’administration centrale (ODAC) serait proche de l’équilibre en 2014, notamment en raison de la reprise de la dette de l’Établissement public de financement et de restructuration (EPFR) en loi de finances rectificative pour 2013 (26).

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDE DES ODAC

(en % du PIB, sauf mention contraire)

 

2013

Révisé 2014

Dépenses

3,8

4

Recettes

3,9

4,4

Solde

0,1

0

Solde (en milliards d’euros)

1,3

0,8

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Le déficit des administrations publiques locales (APUL) passerait de
– 0,4 point de PIB en 2013 à – 0,3 point de PIB. Une telle évolution serait cohérente avec le cycle électoral, qui suppose le gel de nombreux projets d’investissement – donc la baisse des dépenses associées – avec le début d’une nouvelle mandature au printemps 2014. L’année 2014 a en effet été marquée par un recul de l’investissement de 5 %. La Rapporteure générale souligne toutefois le risque de voir les collectivités territoriales geler les projets d’investissement indépendamment du cycle électoral. En effet, la baisse des dotations publiques couplée avec la rigidité des dépenses de fonctionnement fait peser un risque non négligeable sur les dépenses d’investissement local. Elle fera, par conséquent, des propositions pour redonner des marges de manœuvre aux collectivités territoriales.

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDE DES APUL

(en % du PIB sauf mention contraire)

 

2013

Révisé 2014

Dépenses

11,9

11,9

Recettes

11,5

11,6

Solde

– 0,4

– 0,3

Solde en milliards d’euros

– 9,2

– 7,2

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Enfin, en dépit du produit des mesures nouvelles, les administrations de sécurité sociale (ASSO) verraient leur déficit légèrement se creuser en 2014 d’un montant de 500 millions d’euros en raison d’une dynamique de dépenses – en particulier les dépenses d’indemnisation du chômage et les dépenses de pensions – supérieures à celle des recettes – assises principalement sur la masse salariale privée qui croîtrait de seulement 0,75 % en 2014.

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDES DES ASSO

(en % du PIB sauf mention contraire)

 

2013

Révisé 2014

Dépenses

26,6

26,9

Recettes

26,2

26,4

Solde

– 0,5

– 0,5

Solde en milliards d’euros

– 10,6

– 10,6

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

 

Prévision pour 2014 associée au présent projet de loi

Prévision pour 2015

Solde structurel

– 2,5

– 2,4

Solde conjoncturel

– 1,9

– 2

Mesures ponctuelles et temporaires

0

– 0,1

Solde effectif

– 4,4

– 4,3

Source : d’après ministère des finances et des comptes publics.

LA RÉDUCTION DU DÉFICIT STRUCTUREL EN 2015

(en % du PIB)

Solde structurel 2014

– 2,4

Effort structurel

0,5

Dont effort en recettes

0

Dont effort en dépenses

0,5

Variation non discrétionnaire du solde structurel

– 0,2

Solde structurel 2015

– 2,2

Cette évolution serait due, à titre principal, à un effort structurel en dépense, porté par les premiers effets du plan d’économies de 50 milliards d’euros, de 0,5 % du PIB, qui est détaillé par ailleurs.

En revanche, les mesures de baisse des prélèvements obligatoires réduiraient l’ajustement structurel. En effet, plusieurs mesures, en particulier le CICE mais aussi les mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité présentées dans les lois financières votées à l’été 2014 – allégement des cotisations patronales et des travailleurs indépendants, réduction de la C3S et réduction de l’impôt sur le revenu des ménages à revenus modestes –, donneront leurs premiers effets. Ces effets seraient compensés par une croissance spontanée des PO à hauteur de 0,1 point de PIB.

La variation non discrétionnaire du solde structurel réduirait également l’effort structurel. En particulier, l’élasticité des prélèvements obligatoires qui resterait inférieure à l’unit, conduisant à ce que la composante non discrétionnaire continue à peser sur l’ajustement structurel.

En raison d’une croissance du PIB estimée à 1 % en 2015, le déficit conjoncturel poursuivrait sa progression pour atteindre 2 % du PIB.

Enfin, les mesures ponctuelles et temporaires, correspondant aux versements effectués dans le cadre des contentieux fiscaux, dégraderaient le solde de 0,1 % du PIB du fait des dépenses liées au contentieux OPCVM – 1,8 milliards d’euros – et de celles liées au contentieux du précompte mobilier – 0,4 milliard d’euros.

Compte tenu de ces éléments et sur la base d’une hypothèse de déficit effectif de 4,4 % du PIB en 2014, le déficit effectif atteindrait 4,3 % du PIB en 2014.

La trajectoire de solde structurel prévue par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 se substituera, une fois approuvée par le Parlement et publiée, à celle prévue par la loi n° 2012 – 1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances pour les années 2012 à 2017.

Cette trajectoire servira dorénavant de référence, d’une part pour apprécier la cohérence des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale au regard des orientations pluriannuelles de finances publiques et, d’autres part, pour examiner les résultats de l’exécution dans le cadre du mécanisme de correction.

La prévision de solde est par conséquent identique à celle du projet de loi de programmation 2014 – 2019. Toutefois, aux termes des dispositions de l’article 14 de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) doit apprécier la cohérence entre l’article liminaire du projet de loi de finances et les orientations pluriannuelles de solde structurel toujours en vigueur. Par ailleurs, en application de l’article 23 de la loi organique, le HCFP doit également examiner les mesures de correction envisagées par le Gouvernement à la suite du déclenchement du mécanisme de correction en mai 2014. Le Gouvernement n’a cependant pas présenté de mesures de corrections du fait du dépôt d’un nouveau projet de loi de programmation plus adapté au contexte économique et social.

Le tableau suivant détaille la prévision, pour 2015, de solde par sous-secteurs d’administration publique.

LE SOLDE PAR SOUS-SECTEURS D’ADMINISTRATION PUBLIQUE
EN 2015

(en % du PIB)

 

Révisé 2014

PLF 2015

Solde public

– 4,4

– 4,3

État

– 3,6

– 3,7

ODAC

0

0

APUL

– 0,3

– 0,3

ASSO

– 0,5

– 0,3

Le solde de l’État est présenté dans les observations du rapporteur général sous l’article d’équilibre (article 31 du présent projet de loi de finances).

Le solde des ODAC redeviendrait, en 2015, déficitaire du fait d’un déficit structurel dû aux investissements d’avenir, dont l’impact atteindrait 4,5 milliards d’euros. En effet, les ODAC ont perçu pour 4,6 milliards d’euros de recettes exceptionnelles provenant du deuxième programme d’investissements d’avenir, qui expliquent l’absence de déficit en 2014 mais ce dernier réapparaît à mesure que les décaissements ont lieu.

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDE DES ODAC

(en % du PIB, sauf mention contraire)

 

Révisé 2014

PLF 2015

Dépenses

4

3,9

Recettes

4,4

3,9

Solde

0

– 0,1

Solde (en milliards d’euros)

0,8

– 1,3

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Le déficit des administrations publiques locales (APUL) se résorberait en 2015, en passant de – 7,2 milliards d’euros à – 6,1 milliards d’euros. En lien avec le cycle électoral, les dépenses d’investissement local seraient en net recul de – 6 % par rapport en 2014, année déjà en retrait de 5 % par rapport à l’année précédente, tandis que les ressources seraient fortement limitées du fait du plan d’économies.

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDE DES APUL

(en % du PIB, sauf mention contraire)

 

Révisé 2014

PLF 2015

Dépenses

11,9

11,7

Recettes

11,6

11,5

Solde

– 0,3

– 0,3

Solde (en milliards d’euros)

– 7,2

– 6,1

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Le déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO) serait en nette baisse en 2015 et atteindrait – 0,3 % du PIB. Cette diminution serait permise par un effort supplémentaire d’économies sur l’ensemble des risques couverts 
– vieillesse avec la réforme des retraites et l’accord sur les régimes complémentaires, assurance maladie avec un objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) réduit à 2 %, réforme du financement de la branche famille – dans le cadre du plan d’économies de 50 milliards d’euros dont 20 milliards d’euros sur les ASSO.

DÉPENSES, RECETTES ET SOLDE DES ASSO

(en % du PIB, sauf mention contraire)

 

Révisé 2014

PLF 2015

Dépenses

26,9

26,6

Recettes

26,4

26,3

Solde

– 0,5

– 0,3

Solde (en milliards d’euros)

– 10,6

– 6,5

Source : Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

 

2013

révisé 2014

PLF 2015

Taux de prélèvements obligatoires

44,7

44,7

44,6

Source : d’après ministère des finances et des comptes publics.

Cette baisse des prélèvements obligatoires de 0,1 point en 2015 après les quatre années successives de hausse entre 2010 et 2013 serait portée essentiellement par la montée en charge du CICE et des mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité annoncé par le Président de la République le 14 janvier dernier et dont les premières mesures ont été adoptées en juillet 2014 en loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale rectificatives (27).

La baisse des PO au titre du Pacte atteindra 26 milliards d’euros à horizon 2017 auxquels il convient d’ajouter les effets budgétaires du CICE évalués à 10,8 milliards d’euros en 2015. Ce serait donc au final, 46 milliards d’euros qui seraient consacrés au rétablissement de notre appareil productif et à la restitution de pouvoir d’achat ciblée en priorité sur les ménages aux revenus les plus modestes. La Rapporteure générale a déjà évalué les effets attendus de ces mesures lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative en juin 2014 (28) et du débat d’orientation des finances publiques en juillet 2014 (29).

En dépit des mesures massives de baisse de prélèvements obligatoires qui représentent à horizon 2017, environ de 2,5 points de PIB, le taux de PO ne baisserait in fine que de 0,1 point de PIB et ce, en dépit d’une hypothèse d’évolution spontanée des prélèvements obligatoires à législation constante qui serait encore inférieure à l’unité en 2015 à 0,9 au lieu de 0,5 en 2014. Cette évolution serait liée à la faiblesse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de l’IS, que la Rapporteure générale présente dans ses observations sous l’article d’équilibre du présent projet de loi. Elle serait également due au fait que la masse salariale, sur laquelle est assise la plus grande part des prélèvements affectés à la sécurité sociale, évoluerait moins vite que le PIB.

Il n’est cependant pas exclu que cette élasticité reste durablement et plus largement inférieure à l’unité et, dans ce cas, le taux de PO pourrait baisser plus fortement que ne le prévoient les hypothèses du Gouvernement.

L’élasticité des prélèvements obligatoires au PIB

L’élasticité des prélèvements obligatoires au PIB est le coefficient par lequel il faut multiplier la croissance du PIB en valeur pour obtenir la croissance « spontanée » des prélèvements obligatoires (c’est-à-dire avant les modifications du droit, appelées « mesures nouvelles »), l’année considérée.

Sur longue période, les prélèvements obligatoires « spontanés » tendent à augmenter à la même vitesse que le PIB. On dit alors que leur élasticité au PIB est égale à 1.

En revanche, il arrive fréquemment à court terme que cette élasticité s’éloigne de l’unité. Ainsi, certaines années (en général quand la croissance du PIB est forte), les prélèvements obligatoires augmentent plus rapidement que le PIB : leur élasticité au PIB est alors supérieure à 1. D’autres années (en général quand la croissance du PIB est faible), les prélèvements obligatoires au PIB augmentent moins rapidement que le PIB : leur élasticité au PIB est alors inférieure à 1.

D’autres déterminants liés à la situation économique, à l’évolution usuellement constatée des taux d’impôts locaux peuvent également avoir pour conséquence une baisse de taux de PO plus marquée que prévu.

Toutefois, la baisse relativement modeste du taux de prélèvements obligatoires, compte tenu des mesures de baisse de prélèvements obligatoires, s’explique également par les effets des mesures des lois financières précédentes, adoptées avant ou après mai 2012.

Le tableau suivant montre les effets des mesures prises après mai 2012 sur l’année 2013, 2014 et 2015.

TRAJECTOIRE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
DU FAIT DES MESURES PRISES DEPUIS 2012

(en % du PIB)

 

2013

2014

2015

Mesure en PO

1,4

1,4

1,1

Source : d’après ministère des finances et des comptes publics.

Les principales mesures affectant le taux de PO en 2015 sont :

– à la hausse : la fiscalité écologique pour 2 milliards d’euros, la limitation de la déductibilité des charges financières pour 1,3 milliard d’euros, l’effet de la réduction d’impôt sur le revenu exceptionnel pour 1,3 milliard d’euros, l’effet en impôt sur le revenu et sur les sociétés des mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité pour 800 millions d’euros.

– à la baisse : la montée en charge du CICE pour 3,5 milliards d’euros.

Pour 2014, les recettes fiscales nettes s’établiraient à 273,2 milliards d’euros. Les recettes fiscales ont été révisées à la baisse de 5,8 milliards d’euros à la suite de la loi de finances rectificative d’août 2014.

En 2015, les recettes fiscales nettes attendues seraient de 278,9 milliards d’euros, soit une augmentation de 5,6 milliards d’euros par rapport à 2014, soit + 1,7 %. Cette hausse est due à l’hypothèse d’un rebond de l’évolution spontanée de l’impôt sur le revenu (IR) pour 1,8 milliard d’euros et à un retour de la croissance spontanée de la TVA pour 1,9 milliard d’euros. Cette hypothèse n’est pas vérifiable puisqu’aucune explication convaincante n’a été présentée sur les déterminants des moins-valuesenregistrées ces dernières années aussi bien sur l’IR que sur la TVA.

PRÉVISION DE RECETTES FISCALES EN 2014 ET 2015

 

2014
(LFR 2014)

2014 révisé

2015

Total

279

273,2

278,8

Dont IR

71,2

68,9

69,5

Dont IS

36

35,4

33,7

Dont TVA

140

137,8

142,6

Le Gouvernement a cependant pris les estimations plus prudentes que les années précédentes après les critiques formulées par le Haut Conseil des finances publiques. Dans son avis sur le projet de loi de règlement 2013, le Haut Conseil ne signalait d’ailleurs plus aucun aléa susceptible d’affecter les recettes fiscales en 2014 ou en 2015.

Plusieurs remarques peuvent être faites à partir des éléments de ce tableau :

– le produit de l’impôt sur le revenu s’élèverait à 68,9 milliards d’euros en 2014 après une révision supplémentaire de 1,8 milliard d’euros par rapport à la loi de finances rectificative pour 2014 du fait de la dégradation de l’évolution spontanée de – 1 % contre + 3,8 % prévus en loi de finances initiale. Cette dégradation de l’évolution spontanée pose question : assiste-t-on à un écrasement de la distribution des salaires avec une sortie de l’IR par le bas ? Ces moins-values sont-elles dues à la mauvaise tenue des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou existe-il d’autres raisons pour expliquer cette difficulté ? Tant que ces questions n’auront pas trouvé de réponse robuste, il sera difficile de parier sur un rebond de l’évolution spontanée de l’IR ;

– l’impôt sur les sociétés ne baisserait que de 600 millions d’euros, nonobstant la montée en charge du CICE porté en grande partie par l’IS. Il existe un aléa baissier lié à l’incertitude sur le bénéfice fiscal des entreprises dans un contexte de faible croissance économique. Toutefois, cet aléa est compensé par la minoration de la montée en charge du CICE par rapport à la prévision. En générant une créance reportable sur les exercices suivants, le CICE pourrait conduire à ce que le produit de l’IS baisse fortement dès la reprise économique amorcée. Cette mesure, qui a un impact direct sur le produit de l’IS, a un effet procyclique important.

Les principales mesures fiscales du présent projet de loi de finances sont :

– la baisse de l’impôt sur le revenu des ménages à revenus modestes et moyens pour 3,2 milliards d’euros ;

– la mise en place d’un crédit d’impôt pour la transition énergétique pour 700 millions d’euros ;

– la réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières de cession de terrain à bâtir pour 39 millions d’euros ;

– l’aménagement de la réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement locatif intermédiaire pour 110 millions d’euros ;

– l’application du taux réduit de 5,5 % de la TVA aux opérations d’accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour 10 millions d’euros ;

– la suppression de taxes à faibles rendements pour 22 millions d’euros.

L’incidence budgétaire totale des mesures prévues par le présent projet de loi de finances atteindrait plus de 4 milliards d’euros. Elle serait compensée par l’effort de réduction de la dépense publique dont le présent projet de loi est la première traduction législative.

ANNEXE N° 3
LES PRÉVISONS D’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
SUR LA LÉGISLATURE

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

dépense publique

833,8

864,3

898,6

937,0

972,8

1 016,2

1 057,6

1 100,6

1 128,0

1 151,5

1 185,4

Progression (en %)

3,7

4,0

4,3

3,8

4,5

4,1

4,1

2,5

2,1

2,9

Source : INSEE.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
PAR SOUS-SECTEURS D’ADMINISTRATION PUBLIQUE

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

APU

833,8

864,3

898,6

937,0

972,8

1 016,2

1 057,6

1 100,6

1 128,0

1 151,5

1 185,4

État

364,7

367,6

388,6

398,7

395,4

398,0

421,3

433,5

482,5

445,3

451,3

ODAC

51,2

52,5

50,9

55,7

56,3

65,3

60,9

68,1

75,7

75,9

78,4

APUL

155,8

164,7

179,7

188,4

199,8

213,9

223,2

230,7

229,8

235,3

243,8

ASSO

367,0

386,3

406,3

426,6

440,4

462,9

476,2

497,1

515,6

532,4

550,1

Source : INSEE.

2. Entre 2012 et 2014, la dépense publique a cru moins vite qu’au cours du quinquennat précédent

Entre 2012 et 2014, cette progression annuelle ralentit à + 21,5 milliards d’euros par an, dont + 3 milliards d’euros pour les dépenses de l’État, + 12,9 milliards pour les dépenses de sécurité sociale et + 5,6 milliards pour les dépenses des collectivités territoriales.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution de l’ensemble des dépenses publiques entre 2002 et 2014 (État, administrations de sécurité sociale et collectivités locales).

Pour les années de 2002 à 2013, il reprend les dépenses en exécution.

Pour l’année 2014, il s’appuie sur l’estimation d’exécution pour 2014 présentée par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances.

Enfin, il présente les objectifs du gouvernement de maîtrise de la croissance de la dépense publique pour les années 2016 et 2017.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES PAR SOUS-SECTEUR D’ADMINISTRATION

(en milliards d’euros)

APU

Norme

Exécution 2013

Montant normé

2014

Part de la dépense normée dans la dépense publique

État

Norme
« zéro volume »

368,1

371,5

31 %

Collectivités territoriales

Enveloppe normée

48,8

47,3

3,9 %

ASSO

ONDAM

174

174,9

14,6 %

TOTAL

594

590,9

49,5 %

3. Le renforcement du pilotage de la dépense publique

Ces dépenses qui évoluent sous une norme contraignante sont les seules dépenses directement pilotables.

Les autres dépenses sont toutefois soumises à un pilotage indirect de leurs dépenses par l’État notamment en ce qui concerne :

– les dépenses des organismes divers d’administration centrale (ODAC) dont une partie des ressources provient de l’État (subvention pour charges de service public et fiscalité affectée) et dont le fonctionnement est régulièrement contrôlé par ce dernier, ce qui justifie d’ailleurs que les économies que devront réaliser les ODAC dans le cadre du plan d’économies de 50 milliards d’euros soient prises en comptes dans les économies réalisées par l’État (soit 1,9 milliard d’euros pour les ODAC entrant dans les 7,7 milliards d’euros d’économies de l’État en 2015) ;

– les dépenses hors assurance maladie qui relèvent de la loi de financement de la sécurité sociale (les régimes obligatoires de base, les fonds concourant à leur financement, la Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES et le fonds de réserve des retraites – FDR). L’État partage néanmoins ce pilotage avec les partenaires sociaux ;

Au-delà de ces dépenses, le pilotage se fait en concertation avec les autres parties prenantes à la dépense publique, au premier titre desquelles les collectivités territoriales et les partenaires sociaux.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2014-2019 respecte cet équilibre institutionnel en réaffirmant d’une part les normes contraignantes applicables aux dépenses relevant exclusivement du pilotage de l’État et en proposant des objectifs indicatifs d’évolution pour les autres dépenses afin d’inciter les acteurs de la sphère publique à participer le plus étroitement possible à l’effort de réduction de la dépense publique.

4. Les efforts entrepris depuis la loi de finances pour 2014

Depuis la loi de finances pour 2014, cet effort d’économies sur la dépense est en effet devenu la condition incontournable du redressement de nos finances publiques et du financement de nos priorités.

Au titre de cette année, les 15 milliards d’euros d’économies prévus par la loi de finances initiale doivent permettre d’abaisser encore le taux de croissance de la dépense publique à + 1,4 %. Cet effort repose sur l’ensemble des administrations publiques :

– la contribution de l’État aux économies à réaliser en 2014 a été renforcée par l’abaissement de 1,6 milliard d’euros de la norme de dépense en valeur en loi de finances rectificative pour 2014. Les dépenses normées devraient ainsi diminuer de 3,2 milliards d’euros par rapport à l’exécution 2013 ;

– les opérateurs de l’État ont été mis à contribution par le biais du renforcement du plafonnement des taxes affectées et de prélèvements exceptionnels sur leurs fonds de roulement ;

– les concours financiers des collectivités territoriales ont été réduits de 1,5 milliard d’euros dans le cadre de la mise en œuvre du Pacte de confiance et de responsabilité établi entre l’État et les collectivités territoriales le 16 juillet 2013 ;

– les administrations de sécurité sociale ont engagé des mesures d’économies pour respecter l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM), dont le taux de croissance a été abaissé à 2,4 % en 2014. Elles mettent également en œuvre les dispositions adoptées dans le cadre de la réforme de la politique familiale de 2013 et de la réforme du système de retraite de 2014.

Le plan d’économies proposé pour les années 2015 à 2017 vise à accentuer l’effort en dépenses afin de rétablir les finances publiques tout en dégageant des marges pour continuer à financer les priorités du quinquennat. Il fait l’objet d’une présentation détaillée par sous-secteurs d’administration publique aux annexes nos 5 à 8 du présent projet de loi de finances.

Ce plan se décline comme suit :

PLAN D’ÉCONOMIES POUR LA PÉRIODE 2015-2017

(en milliards d’euros)

Programme d’économie

2015

2015-2017

État et agences

7,7

19,0

Collectivités locales

3,7

11,0

Protection sociale

9,6

20,0

dont dépenses d’assurance maladie

3,2

10,0

dont autres dépenses de protection sociale

6,4

10,0

TOTAL

21,0

50,0

Source : présent projet de loi de finances.

L’effort de 21 milliards d’euros réalisé dès 2015 sera poursuivi en 2016 et 2017 à hauteur de 14,5 milliards d’euros d’économies par an.

Ce plan permettra de ramener la croissance en valeur de la dépense publique à 1,1 % en 2015, puis à 1,8 % en moyenne sur les années 2016 et 2017.

CROISSANCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE EN VALEUR PAR SOUS-SECTEUR

 

2013

2014

2015

2016

2017

Administrations publiques hors crédits d’impôt

2,0

1,4

1,1

1,9

1,8

Administrations publiques y.c. crédits d’impôt

1,9

2,3

1,6

2,0

2,0

Dont administrations publiques centrales hors crédits d’impôt

0,5

0,4

0,3

0,8

0,4

Dont administrations publiques centrales y.c. crédits d’impôt

0,3

2,6

1,4

1,1

0,8

Dont administrations publiques locales

3,4

1,2

0,3

1,8

1,9

Dont organismes de sécurité sociale

2,3

2,3

0,8

2,1

2,3

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Par conséquent, le ratio de la dépense publique par rapport au PIB devrait progressivement décroître sur cette même période.

ÉVOLUTION DU RATIO DÉPENSES PUBLIQUE/PIB

 

2013

2014

2015

2016

2017

Ratio de dépenses publiques, hors crédits d’impôt

56,4 %

56,5 %

56,1 %

55,5 %

54,5 %

Source : rapport annexé au projet de loi de programmation pour les années 2014 à 2019.

ANNEXE N° 4
LA STABILISATION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT
ET DE SES OPÉRATEURS

L’article 9 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2014 à 2019 maintient l’objectif de stabilisation des effectifs de l’État et de ses opérateurs sur toute la période de la programmation (30).

Cet objectif traduit l’un des engagements du Président de la République pour le quinquennat.

Il s’inscrit également dans le plan d’économies de 50 milliards d’euros engagé pour la période 2015-2017, au titre duquel l’État et ses opérateurs seront mis à contribution à hauteur de 19 milliards d’euros.

La stabilisation des effectifs repose sur la compensation de l’augmentation des effectifs dans les secteurs jugés prioritaires (éducation, sécurité, justice et emploi) par la réduction des effectifs dans les autres secteurs.

Le projet de loi de finances pour 2015 s’inscrit pleinement dans la poursuite des objectifs de créations de postes dans certains secteurs considérés comme prioritaires depuis 2012 (sont notamment prévues 60 000 créations de postes dans l’enseignement et 5 000 créations de postes dans les secteurs de la justice et de la sécurité).

Depuis août 2012, 28 768 nouveaux postes ont ainsi été créés, dont 26 773 postes dans l’enseignement et 1 995 dans les secteurs de la sécurité et de la justice.

Le présent projet de loi prévoit quant à lui la création de :

– 10 561 ETP (31) dans l’enseignement, dont 9 421 ETP au sein du ministère de l’éducation nationale, 140 ETP pour l’enseignement agricole et 1 000 ETP dans les universités ;

– 405 ETP dans la police et la gendarmerie ;

– 635 ETP dans le secteur de la justice, dont 300 postes destinés aux services pénitentiaires d’insertion et de probation et 35 postes au sein des juridictions administratives.

CRÉATIONS D’EMPLOIS DANS LES SECTEURS PRIORITAIRES 2012-2015

(en unités)

Secteur prioritaire

LFR du
16 août 2012

LFI 2013

LFI 2014

PLF 2015

Créations dans l’éducation nationale

6 728

8 781

8 804

9 421

dont État

4 228

8 781

8 804

9 421

dont établissements publics locaux d’enseignement (EPLE)

2 500

Créations dans l’enseignement agricole

50

230

180

140

dont État

50

200

150

140

dont EPLE

30

30

Créations dans les universités

1 000

1 000

1 000

TOTAL « priorité enseignement »

6 778

10 011

9 984

10 561

Police et gendarmerie

480

405

405

Justice

520

590

635

dont ministère de la justice

480

555

600

dont juridictions administratives

40

35

35

TOTAL « priorité sécurité et justice »

1 000

995

1 040

Total des créations en faveur des priorités gouvernementales :

Solde annuel

6 778

11 011

10 979

11 601

dont État (hors universités)

6 778

10 011

9 979

10 601

Cumul

17 789

28 768

40 369

dont État (hors universités)

16 789

26 768

37 369

Source : présent projet de loi de finances.

Pour compenser ces créations de postes, 11 879 ETP sont supprimés dans les secteurs non prioritaires.

Ministère

SE
LFI 2013
(ETP)

SE LFI 2014
(ETP)

SE PLF 2015
(ETP)

Plafond d’emplois PLF 2015
(ETPT)

Affaires étrangères et développement international

– 184

– 196

– 220

14 235

Affaires sociales, santé et droits des femmes

– 186

– 223

– 150

10 305

Agriculture, agroalimentaire et forêt

– 80

– 81

– 25

31 035

Enseignement agricole (y. c. supérieur)

200

150

140

14 987

Hors Enseignement agricole

– 280

– 231

– 165

16 048

Culture et communication

– 15

– 83

15

10 961

Défense

– 7 234

– 7 881

– 7 500

265 846

Écologie, développement durable et énergie

– 614

– 522

– 515

33 763

Économie, industrie et numérique

– 49

– 24

– 55

6 467

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

8 781

8 804

9 421

983 831

Finances et comptes publics

– 2 313

– 2 542

– 2 491

139 504

Intérieur

– 134

– 289

116

278 591

Mission Sécurité (police + gendarmerie)

480

405

405

242 412

Hors mission Sécurité

– 614

– 694

– 289

36 179

Justice

480

555

600

78 941

Logement, égalité des territoires et ruralité

– 662

– 697

– 319

12 807

Outre-mer

0

0

2

5 309

Services du Premier ministre

34

142

94

10 284

Travail, emploi et dialogue social

– 141

– 137

– 150

9 750

TOTAL Budget général

– 2 317

– 3 174

– 1 177

1 891 629

Contrôle et exploitation aériens

– 100

– 100

– 100

10 827

Publications officielles et information administrative

1

– 6

– 1

782

TOTAL Budgets annexes

– 99

– 106

– 101

11 609

TOTAL GÉNÉRAL

– 2 416

– 3 280

– 1 278

1 903 238


Source : présent projet de loi de finances.

Le solde net des créations et suppressions d’ETP portant sur le budget général de l’État s’élève ainsi à – 1 177 ETP en 2015 contre – 3 174 ETP en 2014, ce qui correspond à un taux d’effort de réduction des effectifs de 0,06 % sur l’ensemble des ministères et de 2 % les ministères non prioritaires.

TAUX D’EFFORT DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS PAR MINISTÈRE EN 2015

Ministères (budget général)

Plafonds des autorisations d’emploi (PAE) 2015 courant (ETPT)

SE 2015

(ETP)

Taux d’effort

Affaires étrangères et développement international

14 235

– 220

– 1,55

Affaires sociales, santé et droits des femmes

10 305

– 150

– 1,46

Agriculture, agroalimentaire et forêt

31 035

– 25

– 0,08

Enseignement agricole (y. c. supérieur)

14 987

140

0,93

Hors Enseignement agricole

16 048

– 165

– 1,03

Culture et communication

10 961

15

0,14

Défense

265 846

– 7 500

– 2,82

Écologie, développement durable et énergie

33 763

– 515

– 1,53

Économie, industrie et numérique

6 467

– 55

– 0,85

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

983 831

9 421

0,96

Finances et comptes publics

139 504

– 2 491

– 1,79

Intérieur

278 591

116

0,04

Mission Sécurité (police + gendarmerie)

242 412

405

0,17

Hors mission Sécurité

36 179

– 289

– 0,80

Justice

78 941

600

0,76

Logement, égalité des territoires et ruralité

12 807

– 319

– 2,49

Outre-mer

5 309

2

0,04

Services du Premier ministre

10 284

94

0,91

Travail, emploi, dialogue social et relations professionnelles

9 750

– 150

– 1,54

TOTAL

1 891 629

– 1 177

– 0,06 %

HORS PRIORITAIRES

593 950

– 1 177

– 2 %

Source : présent projet de loi de finances.

TAUX D’EFFORT DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS PAR MINISTÈRE EN 2015

Ministère de tutelle

LFI 2014
(ETPT)

Schéma d’emplois 2015

Affaires étrangères et développement international

6 756

– 3

Affaires sociales, santé et droits des femmes

11 499

– 153

Agriculture, agroalimentaire et forêt

16 170

– 277

Culture et communication

18 877

– 47

Décentralisation et fonction publique

1 359

– 5

Défense

6 033

– 40

Écologie, développement durable et énergie

26 885

– 343

Économie, industrie et numérique

5 542

– 30

Éducation nationale

4 413

– 38

Enseignement supérieur et recherche

241 297

1 000

dont universités et assimilés

142 490

1 000

Intérieur

1 928

48

Justice

513

– 4

Logement, égalité des territoires et ruralité

275

– 2

Outre-mer

131

– 2

Service du premier ministre

630

– 6

Travail, emploi et dialogue social

48 017

– 17

dont Pôle emploi

46 742

0

Ville, jeunesse et sports

1 814

– 9

TOTAL

392 139

72

Total hors universités

249 649

– 928

Source : présent projet de loi de finances.

Au total, le taux d’effort de réduction des effectifs est donc de + 0,02 % sur l’ensemble des opérateurs et de – 0,4 % sur les opérateurs non prioritaires.

 

Plafonds d’emplois 2014

Plafonds d’emplois 2015

Écart

Budget général

1 894 670

1 891 629

3 041

Budget total (y. c. les budgets annexes)

1 906 424

1 903 238

3 186

Source : présent projet de loi de finances.

Ce plafond est inférieur de 3 186 ETPT à celui fixé dans la loi de finances initiale pour 2014 et de 1 263 ETPT à périmètre constant (c’est-à-dire hors mesures de transfert, de périmètre et de corrections techniques), comme l’explicite le tableau ci-après.

LES AJUSTEMENTS DU PLAFOND D’EMPLOIS DES MINISTÈRES EN 2015

(y compris budgets annexes ; en ETPT)

Plafond des autorisations d’emploi 2014

1 906 424

Solde des créations et suppressions d’emplois

– 1 263

Correction technique du plafond

– 600

Transferts et décentralisation

– 833

Mesures de périmètre

– 490

Plafond des autorisations d’emplois 2015

1 903 238

Source : présent projet de loi de finances.

Parallèlement, le plafond des autorisations d’emplois rémunérés par les opérateurs de l’État et soumis à approbation parlementaire (article 37 du présent projet) est de 392 139 ETP pour 2015.

ÉVOLUTION DES PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS
ENTRE LE PLF 2014 ET LE PLF 2015

(en ETPT)

Plafonds d’emplois 2014

Plafonds d’emplois 2015

Écart

392 139

397 664

5 525

Source : présent projet de loi de finances.

Ce plafond est supérieur de 5 525 ETPT à celui fixé dans la loi de finances initiale pour 2014, et de 72 ETPT à périmètre constant (c’est-à-dire hors mesures de transfert, de périmètre et de corrections techniques), comme l’explicite le tableau ci-après.

Il convient néanmoins de préciser que les opérateurs ont la possibilité de recruter du personnel en dehors des plafonds d’emplois fixés par la loi de finances dès lors que ceux-ci correspondent à des contrats aidés ou lorsqu’ils sont entièrement financés par des ressources propres.

ANNEXE N° 5
LA CONTRIBUTION DE L’ÉTAT AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Les mesures d’économies présentées dans le présent projet de loi de finances confirment le fort engagement de tous les services de l’État dans l’effort de redressement des finances publiques. Cet effort se traduit par la mise en œuvre d’un plan d’économies de 50 milliards d’euros qui s’impute sur la croissance tendancielle de la dépense publique pour les années 2015 à 2017. Sur cette période, l’État et ses opérateurs sont appelés à réaliser 19 milliards d’euros d’économies, dont 7,7 milliards au titre de l’année 2015.

La croissance tendancielle de l’État étant estimée à 5,4 milliards d’euros, une économie de 7,7 milliards d’euros, répartie à hauteur de 7,2 milliards sur le budget général de l’État et de 500 millions d’euros sur les investissements d’avenir permet de réaliser une économie en euros courant de 1,8 milliard d’euros entre la loi de finances pour 2014 (format 2015) et le projet de loi de finances pour 2015.

Croissance tendancielle de la dépense de l’État

5,4

Économies prévues sur le budget général (hors PIA)

7,2

Économies LFI 2014/PLF2015

– 1,8

Évolution
hors investissements d’avenir

Assiette
PLF 2014

Croissance spontanée

Économies

Évolution des crédits
2014
ð 2015

Dépenses des ministères (yc ressources affectées aux agences)

201,4

+ 5,4

– 7,2

– 1,8

Masse salariale

80,4

+ 1,9

– 1,4

+ 0,5

Fonctionnement et investissement

31,5

+ 1,0

– 1,6

– 0,6

Subventions aux opérateurs et taxes affectées

27,5

+ 0,8

– 1,9

– 1,1

Interventions

71,0

+ 1,7

– 2,4

– 0,7

Source : dossier de presse du présent projet de loi de finances.

NB : il faut ajouter au 1,6 milliard d’économies de fonctionnement les 500 millions d’économies sur le PIA pour obtenir les 7,7 milliards d’économies sur l’État.

Ces économies sont définies au regard de l’estimation de la croissance tendancielle des dépenses de l’État.

Sur le périmètre des dépenses de l’État hors dette, pensions et transferts en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales, la croissance tendancielle de la dépense est estimée à 5,4 milliards d’euros par an, soit :

– 1,9 milliard d’euros pour la masse salariale, dont 1 milliard d’euros au titre de revalorisation du point de la fonction publique au niveau de l’inflation moyenne anticipée pour la période 2015-2017 (soit 1,35 %) et 500 millions au titre de diverses mesures catégorielles ;

– 500 millions d’euros au titre des dépenses de fonctionnement et 500 millions d’euros au titre des dépenses d’investissement sur le fondement d’estimations différenciées selon la nature de la dépense (fonctionnement courant, dépenses d’équipement, etc.) ;

– 800 millions d’euros au titre des opérateurs ;

– 1,7 milliard d’euros au titre des dépenses d’intervention et notamment des dépenses dites « de guichet » correspondant aux aides versées automatiquement sous réserve que les critères d’éligibilité soient remplis.

Sur un périmètre plus large intégrant les transferts en faveur de l’Union européenne, l’évolution tendancielle de la dépense est en moyenne de 5,8 milliards d’euros sur la période 2015-2017.

L’écart entre la croissance tendancielle des dépenses de l’État (+ 5,4 milliards d’euros) et les économies proposées pour 2015 (7,2 milliards d’euros hors investissement d’avenir) représentent l’économie en euros courants proposée sur le budget de l’État, soit 1,8 milliard d’euros.

L’annexe n° 6 du présent rapport général détaillant les 1,9 milliard d’euros d’économies devant être réalisés par les opérateurs, cette annexe présente uniquement les efforts à réaliser par l’État.

Les économies proposées sur la masse salariale poursuivent les mesures de stabilisation de cette dépense engagées depuis le début de la législature. Les dépenses des ministères liées à la masse salariale (80 milliards d’euros) ont ainsi été quasi stables en 2012, puis ont diminué de 135 millions d’euros en 2013, pour augmenter en loi de finances pour 2014 de 0,3 % (+ 230 millions d’euros).

Le présent projet de loi de finances prévoit la poursuite de l’augmentation en euros courants des dépenses de la masse salariale (+ 478 millions d’euros, soit une augmentation de 0,6 %) mais à un rythme inférieur à celui de l’inflation (+ 720 millions d’euros, soit une augmentation de 0,9 %) et a fortiori de la croissance tendancielle annuelle de ces dépenses (+ 1,9 milliard d’euros).

Pour atteindre cet objectif de 478 millions d’euros de hausse par rapport à une croissance tendancielle de 1,9 milliard d’euros, une série de mesures sont proposées pour réaliser 1,4 milliard d’euros d’économies, soit :

– la non-revalorisation du point de la fonction publique sur l’inflation pour une économie de 1 milliard d’euros par rapport à l’inflation moyenne sur la période 2015-2017 (1,35 %). Seuls 720 millions seront toutefois réalisés en 2015 du fait d’une prévision d’inflation limitée à 0,9 % ;

– la réduction des mesures catégorielles de 300 millions d’euros ; la progression des rémunérations liée aux mesures catégorielles sera ainsi ramenée de 245 millions d’euros contre 500 millions d’euros constatés entre 2007 et 2012 ;

– la réduction des effectifs de l’État, hors secteurs prioritaires de l’éducation, de la sécurité et de la justice, pour une économie de 400 millions d’euros représentant une baisse de – 1 278 équivalents temps plein (ETP). Cette mesure est présentée dans l’annexe n° 4 du présent rapport général.

RÉCAPITULATIF DES MESURES D’ÉCONOMIES
SUR LA MASSE SALARIALE

Mesures

Économies

Gel du point d’indice

700

Mesures catégorielles

300

Réduction des effectifs

400

Total

1 400

Source : présent projet de loi de finances.

Ces trois leviers d’économies seront à nouveau mobilisés en 2016 et 2017.

Modernisation de l’action de l’État

Ministère des finances :

– priorité au numérique ;

– adaptation du réseau territorial du ministère ;

– baisse de la dotation à la Banque de France

– 38

– 11

Ministère de la justice :

– réduction des dépenses d’entretien ou de maintenance ;

– réduction des frais de justice

– 10

– 30

Politique immobilière

Cessions immobilières 

– 521

Renégociation des baux privés

– 30

Réduction des concessions de logement

– 15

Politique d’achat

Élargissement des compétences du service des achats de l’État

– 2

● Les économies liées à la stabilisation du rythme de décaissement des investissements d’avenir (500 millions d’euros)

Les dépenses d’investissement devraient faire l’objet d’une « sélection accrue » selon l’exposé général du présent projet de loi de finances de manière à financer les projets les plus porteurs en termes économiques. Par conséquent, les dépenses d’investissement devraient être stabilisées par rapport à 2014, ce qui permet de réaliser une économie de 500 millions d’euros tout en améliorant l’allocation des ressources publiques.

Cette sélection accrue ne remettra toutefois pas en cause le financement par l’État en 2015 :

– des infrastructures de transports par l’affectation à l’Agence de financement des infrastructures de transport en France (AFITF) du produit du péage de transit poids lourds et du produit du relèvement du prix du gazole de deux euros par hectolitre ;

– des investissements militaires qui bénéficieront en 2015 de 500 millions d’euros supplémentaires dans le respect des engagements pris par la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019.

Mutualisation de certaines dépenses d’intervention

Mobilisation des moyens communautaires au titre des aides en matière d’agriculture

– 91

Contribution de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) au financement du logement social

– 120

Substitution d’aides territorialisées de Pôle emploi à l’aide personnalisée de retour à l’emploi (APRE)

– 35

Financement d’une partie des contrats aidés pour les travailleurs handicapés par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées (AGEFIPH)

– 29

Rationalisation du rôle de l’État en matière d’aides aux entreprises

– 8

Financement de dépenses d’innovation par les programmes d’investissements d’avenir (PIA)

– 100

Amélioration de l’efficience de la dépense

Révision des contrats vendanges

– 37

Stabilisation des concours à l’audiovisuel public

n.c.*

Réforme des aides à la presse

– 20

Réforme du fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC)

n.c.

Réforme des aides personnalisées au logement

n.c.

Révision du dispositif des zones franches urbaines

n.c.

Recentrage des primes à l’aménagement du territoire

n.c.

Suppression des aides au départ à la retraite pour certaines professions

– 7

Révision des aides en matière d’hôtellerie touristique en outre-mer

n.c.

Réforme de l’aide à la continuité territoriale en outre-mer

n.c.

Réforme de la politique de l’asile

n.c.

* non chiffré

Source : présent projet de loi de finances.

Crédits de paiement

LFI 2014
Format PLF 2015

PLF 2015

LPFP 2016

LPFP 2017

Dépenses du budget général (hors dette, pensions et mission RCT)

204 225

203 496

203 262

202 719

Taxes affectées plafonnées et prélèvements exceptionnels

6 168

5 079

5 054

5 417

Total des dépenses des ministères et affectations de recettes plafonnées

210 393

208 575

208 316

208 136

Soit en écart à 2014

 

– 1 818

– 2 077

– 2 257

Prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne

20 224

21 042

22 801

21 481

Total des dépenses de l’État hors dette, pensions, dotations aux collectivités et prélèvements exceptionnels

230 617

229 617

231 117

229 617

Soit en écart de à 2014

 

– 1 000

500

– 1 000

Transferts aux collectivités locales (PSR et mission RCT*)

56 863

53 196

49 530

45 863

Soit en écart de à 2014

 

– 3 667

– 7 333

– 11 000

Prélèvements sur fonds de roulement prévus en loi de finances pour 2014

– 481

     

Total des dépenses de l’État hors charge de la dette et pensions

286 999

282 813

280 647

275 480

Soit en écart de à 2014

 

– 4 186

– 6 352

– 11 519

         

Charge de la dette

46 654

44 337

47 696

50 093

Contributions au CAS Pensions

45 439

45 797

46 190

48 401

Total des dépenses de l’État hors dotation au mécanisme européen de stabilité et deuxième programme d’investissements d’avenir

379 092

372 947

374 533

373 975

(*) Hors réserve parlementaire, intégrée aux dépenses du budget général.

Source : présent projet de loi de finances.

Par rapport au budget de l’État exécuté en 2013, et sans prendre en compte les différences de périmètre entre les exercices 2013 et 2015, les dépenses augmentent de manière limitée :

– de 5,5 milliards d’euros sur les dépenses des ministères, y compris les taxes affectées (soit une augmentation annuelle de 1,35 %) ;

– de 3,5 milliards sur les dépenses contenue sous l’enveloppe « zéro valeur » (soit une augmentation annuelle de 1,2 %).

En neutralisant les différences de périmètre, les dépenses de l’État en euros courants diminuent chaque année entre 2015 et 2017, comme l’indique le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SUR LA PÉRIODE 2007-2017

(en milliards d’euros courants)

Évolution en programmation
(LFI, Md€ courants,
périmètre PLF 2015)

2007

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Dépenses des ministères
(y.c. taxes affectées)

hors transferts à l’UE, aux collectivités, hors dette et pensions

208,8

213,2

212,1

211,2

210,4

208,6

208,3

208,1

Variation par rapport à 2011

+ 4,4

– 1,1

– 2,0

– 2,8

– 4,6

– 4,9

– 5,1

Dépenses des ministères
(y.c. taxes affectées et transferts à l’UE, aux collectivités)

hors dette et pensions

282,3

286,1

290,0

289,9

287,0

282,8

280,6

275,5

Variation par rapport à 2011

+ 3,8

+ 3,9

+ 3,8

+ 0,9

– 3,3

– 5,5

– 10,6

Dépenses totales de l’État y compris dette et pensions

355,6

375,5

379,7

380,7

379,1

372,9

374,5

374,0

Variation

+ 20,0

+ 4,2

+ 5,2

+ 3,5

– 2,6

–1,0

– 1,6

Source : dossier de presse du projet de loi de finances 2015.

ANNEXE N° 6
LA CONTRIBUTION DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT
AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

La maîtrise des dépenses engagées par les opérateurs de l’État a fait l’objet de nombreux travaux au cours des dernières années. Dans son rapport de mars 2012 (32), l’Inspection générale des finances (IGF) soulignait ainsi « l’enjeu déterminant de gestion et de finances publiques » que représentaient les opérateurs de l’État.

L’augmentation de leurs moyens sur la période 2007-2012 illustre la nécessité de rationaliser le recours aux opérateurs et à la fiscalité affectée :

– les effectifs des opérateurs ont augmenté de 6,1 % entre 2007 et 2012 (417 296 à 442 830 agents) alors que ceux de l’État décroissaient de 6 % sur la même période ;

– leurs moyens financiers ont augmenté de 15 %, soit quatre fois plus que ceux de l’État, pour atteindre 50 milliards d’euros en 2012. Les taxes affectées ont ainsi connu une croissance de 4,5 % par an sur le dernier quinquennat.

Ce constat justifie l’effort engagé depuis plusieurs années pour réduire les dépenses des opérateurs par le biais de l’encadrement de leurs ressources. À ce titre, les principales mesures mises en œuvre ont consisté à :

– introduire un plafonnement global des taxes affectées à l’article 46 de la loi de finances pour 2012 qui prévoit un écrêtement des recettes supérieures au plafond fixé pour chacune des taxes au profit du budget de l’État ;

– intégrer les montants des recettes affectées ainsi plafonnées dans la norme de dépense du budget de l’État ;

– réaliser des prélèvements exceptionnels sur les fonds de roulement des opérateurs constitués au cours des années par les surplus perçus de taxes affectées par rapport aux besoins de leur activité.

Plusieurs dispositions sont prises par le présent projet de loi de finances de manière à réduire de 1,1 milliard d’euros les recettes des opérateurs et les inciter à abaisser d’autant leurs dépenses :

– l’article 15 renforce le plafonnement des taxes affectées prévu à l’article 46 de la loi de finances pour 2012 en élargissant son périmètre et en modifiant les plafonds individuels de certaines taxes. Il abaisse notamment le plafond des taxes affectées aux chambres de commerce et d’industrie (CCI) de 213 millions d’euros et aux chambres d’agriculture de 15 millions d’euros ;

– l’article 16 introduit un prélèvement exceptionnel de 175 millions d’euros sur le fonds de roulement des agences de l’eau au profit du budget général de l’État ;

– l’article 17 prévoit également prélèvement exceptionnel de 500 millions sur le fonds de roulement des chambres de commerce et d’industrie (CCI) au profit du budget de l’État ;

– l’article 18 prévoit un prélèvement de 45 millions d’euros sur le fonds de solidarité et de péréquation des chambres d’agriculture créé par cet article au profit du budget de l’État.

Ces articles font l’objet d’une présentation détaillée dans le tome II du présent rapport.

A.– IMPOSITION ou ressource affectée

B.– Personne affectataire

PLAFOND
ou montant (milliers €)

Article 302 bis ZB du code général des impôts

Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF)

561 000

Article 232 du code général des impôts

Agence nationale de l’habitat (ANAH)

51 000

1° de l’article L. 342-21 du code de la construction et de l’habitation

Agence nationale de contrôle du logement social

7 000

2° de l’article L. 342-21 du code de la construction et de l’habitation

Agence nationale de contrôle du logement social

12 300

V de l’article 43 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999)

Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA)

100 000

Article 1628 ter du code général des impôts

Agence nationale des titres sécurisés

10 000

Article 46 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 (I de l’article 953 du code général des impôts)

ANTS

118 750

Article L. 612-20 du code monétaire et financier

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

195 000

Articles L. 621-5-3 et suivants du code monétaire et financier

Autorité des marchés financiers (AMF)

74 000

Article L. 2132-13 du code des transports

Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF)

11 000

Article 1609 nonies G du code général des impôts

Caisse de garantie du logement locatif social

45 000

Article 224 du code des douanes

Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL)

36 260

F de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Centre d’étude et de recherche de l’industrie du béton (CERIB) ; Centre technique de matériaux naturels de construction (CTMNC)

14 500

Article 1609 tricies du code général des impôts

Centre national pour le développement du sport (CNDS)

34 600

Premier alinéa de l’article 1609 novovicies du code général des impôts

CNDS

170 500

Article 1604 du code général des impôts

Chambres d’agriculture

282 000

2 du III de l’article 1600 du code général des impôts

Chambres de commerce et d’industrie

506 117

Article 1601 du code général des impôts et article 3 de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle

Chambres de métiers et de l’artisanat

244 009

E de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Centres techniques des industries mécaniques (CETIM, Centre technique de l’industrie du décolletage, Centre technique industriel de la construction métallique, Centre technique des industries aérauliques et thermiques, Institut de soudure)

70 500

I du A de l’article 73 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003)

Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes

8 500

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Lorraine

25 300

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Normandie

22 100

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de l’Ouest Rhône-Alpes

30 600

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Provence-Alpes-Côte d’Azur

83 700

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de la région Ile-de-France

125 200

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier des Hauts-de-Seine

27 100

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier des Yvelines

23 700

Articles 1607 ter du code général des impôts et L321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier du Val d’Oise

19 600

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Poitou Charentes

12 100

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Languedoc Roussillon

31 800

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Bretagne

21 700

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier de Vendée

7 700

Articles 1607 ter du code général des impôts et L. 321-1 du code de l’urbanisme

Établissement public foncier Nord-Pas-de-Calais

80 200

Article L. 2221-6 du code des transports

Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF)

10 500

Article 1601 B du code général des impôts

Fonds d’assurance formation des chefs d’entreprise inscrits au répertoire des métiers visés au III de l’article 8 de l’ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003

54 000

I de l’article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005

Fonds de solidarité pour le développement (FSD)

130 000

Article L. 121-16 du code de l’énergie

Médiateur national de l’énergie

6 860

Article L. 423-27 du code de l’environnement

Office national de la chasse et de la faune sauvage

67 620

C du I de l’article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010

Société du Grand Paris (SGP)

375 000

Article L. 4316-3 du code des transports

Voies navigables de France (VNF)

139 748

Article 1609 quatervicies A du code général des impôts

Personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes

48 000

Ces baisses de plafonds devraient se poursuivre en 2016 à hauteur de 195 millions d’euros et en 2017 à hauteur de 142 millions d’euros.

Par ailleurs, l’article 16 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 prévoit d’étendre le périmètre du plafonnement des taxes à l’ensemble des taxes affectées à compter du 1er janvier 2016 et de procéder, le cas échéant, à des « rebudgétisations » à compter du 1er janvier 2017.

Les subventions versées aux opérateurs sont globalement stabilisées par la mise en œuvre de procédures de modernisation et de mutualisation du fonctionnement des opérateurs, sur le modèle des démarches initiées en ce sens au sein des administrations de l’État.

Le montant d’économies attendu de ces mesures est de 700 millions d’euros, dont :

– 123 millions d’euros au titre de la réorganisation du mode d’allocation des moyens des universités ;

– 14 millions d’euros au titre de la suppression de doublons administratifs que permettra la création d’un institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique dans le cadre de la future loi de santé ;

– 33 millions d’euros au titre d’un recentrage des dépenses d’intervention du Centre national pour le développement du sport (CNDS).

Par ailleurs, les effectifs des opérateurs seront quasiment stables entre 2014 et 2015 du fait de la création de 1 000 postes supplémentaires au profit des universités. En dehors de cette mesure, les effectifs des opérateurs diminuent de 928 équivalents temps plein (ETP) comme présenté à l’annexe n° 4 du présent rapport.

Les autres mesures envisagées par le Gouvernement n’ont pas fait l’objet d’une présentation ou d’un chiffrage à la date de la rédaction de ce rapport.

ANNEXE N° 7
LA CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2015 prévoit la participation des collectivités territoriales à la mise en œuvre du plan d’économies de 50 milliards d’euros sur lequel repose le redressement des finances publiques à l’horizon de 2017.

Dans le cadre de ce plan, les collectivités territoriales devront réaliser 11 milliards d’euros d’économies sur trois ans, soit 22 % de l’effort total en dépenses sur le triennal.

Au titre de 2015, l’économie que devront réaliser les collectivités territoriales doit atteindre 3,67 milliards d’euros. Cet effort sera reconduit à l’identique en 2016 et 2017.

Pour rappel, cette mesure s’ajoute à celles adoptées lors de l’examen des précédentes lois de finances, soit :

– le gel en valeur des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales en loi de finances initiale pour 2013 ;

– la baisse de 1,5 milliard d’euros des dotations des collectivités territoriales adoptées en loi de finances initiale pour 2014 dans le cadre du Pacte de confiance et de responsabilité établi entre l’État et les collectivités territoriales le 16 juillet 2013 (33).

L’économie de 3,67 milliards d’euros prévue en 2015 portera uniquement sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) dont le montant est fixé à l’article 9 du présent projet de loi à 36,6 milliards d’euros pour l’année prochaine.

Cette économie est répartie entre les collectivités au prorata de leurs recettes totales, selon les mêmes modalités que celles retenues pour répartir la baisse de 1,5 milliard d’euros de la DGF adoptée dans la loi de finances pour 2014, ce qui représente :

– une réduction de 2 071 millions d’euros des concours de l’État à destination du bloc communal (56 %), dont 621 millions d’euros pour les groupements de communes ;

– une réduction de 1 148 millions d’euros des concours de l’État aux départements (32 %) ;

– et une réduction de 451 millions d’euros des concours aux régions (12 %).

La portée de cet effort ainsi que les mesures visant à accompagner sa mise en œuvre par le renforcement substantiel de la péréquation verticale (+ 228 millions d’euros en 2015) et de la péréquation horizontale (+ 230 millions d’euros en 2015) sont détaillées dans le commentaire de l’article 9 du présent projet de loi.

Du fait du dynamisme des ressources fiscales perçues par les collectivités territoriales, l’effort qui leur est demandé au titre de 2015 devrait conduire à une évolution de la dépense publique locale égale à la progression de l’inflation.

2014

2015

2016

2017

1,2 %

0,3 %

1,8 %

1,9 %

Si cet objectif n’est qu’indicatif, il n’en demeure pas moins ambitieux, notamment pour l’année prochaine puisque le taux de croissance de la dépense publique locale en valeur doit baisser à 1,2 % en 2014, puis 0,3 % en 2015, contre 3,2 % en 2013.

Cette prévision repose sur une anticipation de la baisse des dépenses d’investissement en 2015 à la suite de celle constatée en 2014, avant une reprise progressive à partir de 2016. Elle semble en cela conforme aux enseignements tirés de l’observation des conséquences du cycle électoral sur la dépense publique locale.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE LOCALE ENTRE 2002 ET 2013

(en milliards d’euros)

ANNEXE N° 8
LA CONTRIBUTION DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE
ET DE L’UNÉDIC AU REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE

Les dépenses de protection sociale sont celles sur lesquelles sera réalisé l’effort le plus important au cours de la période 2015-2017. Le plan d’économies de 50 milliards d’euros mis en œuvre sur cette période prévoit, en effet, que 20 milliards d’euros d’économies devront être réalisés sur la sphère sociale, soit 40 % du total des économies prévues.

L’importance donnée au rétablissement des comptes sociaux tient au fait que les dépenses sociales constituent des dépenses courantes qui ne peuvent à ce titre est reportées indéfiniment sur les générations futures.

Cet effort en économies est d’autant plus nécessaire que la Cour des comptes, dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2014 (34), souligne le faible infléchissement de la croissance des dépenses sociales entre 2013 (+ 2,9 %) et 2014 (+ 2,7 %).

DÉPENSES DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

Variation
(en %)

2013

Variation
(en %)

Charges totales du régime général

318,4

327,5

+ 2,9

336,5

+ 2,7

dont prestations légales

283,6

292,4

+ 3,1

300,8

+ 2,9

Charges nettes des branches

       

Maladie

156,8

160,9

+ 2,6

164,8

+ 2,4

AT-MP

11,6

11,7

+ 1,2

11,3

– 3,1

Famille

54,6

56,3

+ 3,1

57,8

+ 2,8

Vieillesse

106,5

110,2

+ 3,5

114,6

+ 3,9

Source : Cour des comptes, septembre 2014.

La réduction du déficit de la sécurité sociale a par ailleurs été révisée à la baisse en loi de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) pour 2014 pour s’établir à – 13,6 milliards d’euros au lieu de – 13,2 milliards d’euros prévus dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, soit une baisse de 2,4 milliards d’euros par rapport au déficit de 2013.

DÉFICITS DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE
ET DU FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE (FSV)

(en milliards d’euros)

Branche

2013

LFSS 2014

LFRSS
2014

Variation
LFRSS
2014/2013

Maladie

– 6,8

– 6,0

– 6,1

+ 0,7

AT-MP

+ 0,6

+ 0,1

+ 0,3

– 0,3

Famille

– 3,2

– 2,3

– 2,8

+ 0,4

Vieillesse

– 3,1

– 1,2

– 1,3

+ 1,8

Régime général

– 12,5

– 9,5

– 9,8

+ 2,7

FSV

– 2,9

– 3,4

– 3,5

– 0,6

Vieillesse +  FSV

– 6,0

– 4,6

– 4,8

+ 1,2

Régime général et FSV

– 15,4

– 12,9

– 13,3

+ 2,1

Régimes obligatoires de base et FSV

– 16,0

– 13,2

– 13,6

+ 2,4

Source : Cour des comptes, états financiers, LFRSS 2014.

Ce constat appelle d’autant plus à la vigilance que la part des dépenses pilotables contenues dans le périmètre de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), qui s’établit à 174 milliards d’euros en exécution 2013, n’a permis de maîtriser l’évolution des dépenses que partiellement, notamment parce que son niveau est fixé en intégrant des marges non négligeables de précaution. Il fait ainsi l’objet d’une sous-exécution depuis 2010.

ÉVOLUTION DE L’OBJECTIF DE DÉPENSES DEPUIS 2008

(évolution de la croissance du PIB en valeur et de l’ONDAM, base 100 en 2008)

Source : Cour des comptes.

L’ONDAM EN 2014 ET 2015

(en milliards d’euros)

 

LFSS 2014

LFRSS 2014

LFSS 2015

Soins de ville

81,1

80,7

80,9

Établissements de santé

75,5

75,3

75,1

Établissement et services médico-sociaux

17,6

17,6

17,5

Fonds d’intervention régional

3,2

3,1

3,0

Autres prises en charge

1,7

1,7

1,7

TOTAL

179,1

178,3

178,3

Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

 

2015

2016

2017

Taux moyen sur la période 2015-2017 et montant de l’économie attendue

Taux d’évolution (en %)

2,1 %

2 %

1,9 %

2 %

Économie attendue (en milliards d’euros)

3,2

3,3

3,4

10

Source : projet de loi de finances pour 2015.

Pour réaliser cet objectif d’économies de 3,2 milliards d’euros en 2015, le projet de loi de financement de la sécurité sociale présentera les mesures à prendre en cohérence avec la Stratégie nationale de santé adoptée en septembre 2013. Ces mesures s’articulent autour de quatre principaux axes :

– le renforcement de l’efficacité de la dépense hospitalière (500 millions d’euros) ;

– le développement des soins ambulatoires (400 millions d’euros) ;

– l’accroissement du recours aux médicaments génériques (1,1 milliard d’euros);

– la rationalisation du recours au système de soins (1,2 milliard d’euros au titre de la réduction des actes inutiles et des prescriptions de médicaments, optimisation du transport des patients, etc.).

Les économies attendues en 2015 sur les dépenses autres que celles relatives à l’assurance maladie ont déjà été engagées à hauteur de 4 milliards d’euros au travers :

– de la réforme des retraites (et notamment la mesure de gel des pensions jusqu’au 1er octobre 2015) ;

– des accords des partenaires sociaux sur les modalités de revalorisation des pensions versées au titre des régimes complémentaires de retraite ;

– de la réforme de la politique familiale de 2013.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 complètera ces mesures par :

– la modulation de la prime à la naissance en fonction du rang de l’enfant ;

– le report de quatorze à seize ans de la majoration des allocations familiales ;

– la création d’une quatrième tranche de revenu pour le versement du complément mode de garde (CMG) ;

– l’alignement de la date de versement de l’allocation de base de la PAJE sur celle de la majorité des autres prestations familiales ;

– la réforme du Complément de libre choix d’activité avec la création de la prestation partagée d’éducation de l’enfant.

L’ensemble de ces mesures représentera une économie d’environ 700 millions d’euros en 2015 sur les dépenses de la branche famille.

En complément, des mesures d’économies seront réalisées sur les frais de fonctionnement des organismes de protection sociale, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des conventions d’objectifs et de gestion (COG), pour une économie de l’ordre de 0,5 milliards d’euros en 2015.

Par ailleurs, en matière d’assurance chômage, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014-2019 prévoit que l’Unédic transmettra au Gouvernement au plus tard le 30 juin, ses perspectives financières triennales et une analyse de sa situation financière.

Sur le fondement de cette information, le Gouvernement transmettra à son tour au Parlement et aux partenaires sociaux un rapport sur l’équilibre financier de l’assurance chômage avant le 31 décembre.

ANNEXE N° 9
LA DETTE PUBLIQUE

À la fin du deuxième trimestre 2014, la dette publique au sens de Maastricht, soit de l’ensemble des administrations publiques, s’établit à 2 023,7 milliards d’euros.

Son évolution entre 2013 et 2014 confirme la tendance observée au cours des dernières années d’un accroissement rapide de l’endettement des administrations publiques.

Pour rappel, la dette publique a doublé entre 2002 et 2012, passant ainsi de 907,2 milliards d’euros en 2002 (soit 59,8 % du PIB) à 1 822 milliards en 2012 (89,2 % du PIB).

ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE ENTRE 2002 ET 2012

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Source : INSEE.

Selon le Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances, cette augmentation rapide se poursuit entre 2013 et 2014. La dette publique a ainsi augmenté de 3 points de PIB en 2013 pour atteindre 92,2 % du PIB et de 3,1 points supplémentaires en 2014, pour se fixer à 95,3 % du PIB.

Cette dynamique devrait toutefois ralentir à compter de 2015 (+ 1,9 point) du fait de l’amélioration de la conjoncture économique et du solde public. La dette atteindrait 97,2 % du PIB en 2015, puis 98 % en 2016 avant de décroître par rapport au PIB.

ESTIMATION DE L’ÉVOLUTION DU RATIO DE LA DETTE
SUR LA PÉRIODE 2013-2019

(en % de PIB)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Ratio d’endettement /PIB

92,2

95,3

97,2

98

97,3

95,6

92,9

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Comme l’indique le tableau suivant, cette augmentation découle principalement de la dégradation du besoin de financement de l’État, et notamment des besoins supplémentaires liés à l’amortissement de sa dette négociable à long terme du fait de l’arrivée à échéance des emprunts liés à la crise financières de 2008 et 2009.

RÉPARTITION DE LA DETTE PUBLIQUE ENTRE SOUS-SECTEURS
D’ADMINISTRATION PUBLIQUE

(en % de PIB)

 

2013

2014

2015

Ratio d’endettement au sens de Maastricht

92,2

95,3

97,2

dont administrations publiques centrales (État +  ODAC)

73,6

76,1

77,9

dont administrations de sécurité sociale

10,0

10,3

10,4

dont administrations publiques locales

8,6

8,8

8,9

Toutefois, une légère amélioration est attendue en 2015 du fait de l’amélioration de la croissance et de la baisse de l’écart au solde stabilisant la dette (– 0,8 point).

Au-delà des efforts budgétaires engagés, seul un niveau de croissance soutenu permettra une véritable réduction de la dette publique. Lors de son audition devant la commission des Finances sur le rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques, le 17 juin 2014, M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, indiquait qu’un niveau de croissance en volume de 2,3 % était nécessaire pour amorcer une réduction significative du niveau de la dette.

LES FACTEURS D’ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE ENTRE 2013 ET 2015

(en % de PIB)

Toutes administrations publiques

2013

2014

2015

Croissance nominale du PIB (en %)

1,1

1,2

1,9

Écart au solde stabilisant la dette

3,2

3,3

2,5

Solde public effectif

– 4,1

– 4,4

– 4,3

Solde stabilisant le ratio d’endettement (1)

– 1,0

– 1,1

– 1,8

Flux de créances (2)

– 0,2

– 0,2

– 0,6

dont soutien financier à la zone euro

0,7

0,3

0,0

Variation du ratio d’endettement

3,0

3,1

1,9

(en milliards d’euros)

 

Août 2013

Août 2014

Encours de la dette négociable

BTF

BTAN et OAT

dont titres indexés

1 442,7

179,5

1 263,2

168,6

1 523,7

190,1

1 333,6

186,0

Comme cela a été constaté au titre des années passées, cette augmentation n’a pas eu de conséquence sur le solde budgétaire, la charge de la dette continuant de diminuer principalement du fait du maintien des taux à des niveaux historiquement bas.

b. La baisse de la charge de la dette (– 2,3 milliards d’euros)

La première loi de finances rectificative pour 2014 (36) a intégré dans la révision du solde public une première baisse de 1,8 milliard d’euros sur la charge de la dette. Une baisse supplémentaire de 535 millions d’euros devrait être constatée sur la charge de la dette négociable, sur laquelle s’impute l’augmentation de 22 millions d’euros des charges de trésorerie. Par conséquent, la baisse globale de la charge de la dette qui sera constatée en loi de finances rectificative de fin d’année devrait être de 2,3 milliards d’euros.

ÉVOLUTION DE LA CHARGE TOTALE DE LA DETTE DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

 

2013

exécution

2014

LFI

2014

LFR

2015

PLF

Charge de la dette négociable

BTF – intérêts

BTAN et OAT – intérêts nets

BTAN et OAT indexés – provision indexation

43 778

158

41 849

1 772

45 634

1 127

41 666

2 841

43 834

627

41 366

1 841

43 299

427

40 997

1 875

Charge des dettes reprises (nette) et autres charges

198

106

106

103

Trésorerie (charge nette)

rémunération des fonds « investissements d’avenir »

solde des autres dépenses et recettes

909

667

242

914

711

203

914

711

203

936

751

185

Charge totale

44 886

46 654

44 854

44 337

BAISSE DE LA CHARGE DE LA DETTE ENTRE LA LFI 2014 ET LE PLF 2015

(en millions d’euros)

 

LFR 2014 (I)/LFI 2014

LFR 2014 (II)/LFI 2014

Quasi-stabilité de la charge des BTF (effet « taux »)

– 500

– 700

baisse des taux faisant plus que compenser la hausse des encours de moyen et long terme (effet « taux »)

– 300

– 669

Baisse de l’inflation (effet « inflation »)

– 1 000

– 966

Baisse des charges de reprises

0

– 3

Hausse des charges de trésorerie

0

+ 22

Total

1 800

2 317

La première loi de finances rectificative pour 2014 a permis de constater une augmentation de 1,9 milliard d’euros du besoin d’endettement de l’État, liée à l’aggravation du déficit par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2014. Ce besoin supplémentaire a été financé par l’augmentation de l’endettement de court terme, soit par des émissions de bons du Trésor à taux fixe (BTF) (37).

La dégradation du besoin de financement entre la loi de finances pour 2014 et le présent projet de loi de finances est très supérieure à cette première révision puisqu’elle représente 20,2 milliards d’euros. Elle s’explique principalement par l’augmentation du volume d’amortissement de titres à moyen et long terme pour 2015 (+ 15,7 milliards d’euros) et par une nouvelle dégradation du déficit (+ 5,1 milliards d’euros).

Ce besoin de financement sera financé par l’affectation de 4 milliards d’euros issus de cessions de participations à la Caisse de la dette publique et par le basculement sur 2015 de la contribution des disponibilités du Trésor prévue pour le mois de janvier 2016 au cours duquel aucun titre ne devrait être amorti.

TABLEAU DE FINANCEMENT POUR 2014 (LFI ET LFR) ET 2015 (PLF)

(en milliards d’euros)

 

2014

LFI 2014

2014

LFR 2014

2015

PLF 2015

Besoin de financement

     

Amortissement de la dette à moyen et long terme

103,8

103,8

119,5

Dont amortissement de la dette à long terme (nominal)

41,8

41,8

76,9

Dont amortissement de la dette à moyen terme (nominal)

62

62

40,2

Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

0

0

2,4

Amortissement des autres dettes

0,2

0,2

0,1

Déficit à financer

70,6

71,9

75,7

Dont déficit budgétaire

82,6

83,9

75,7

Dont dotation budgétaire du PIA 2

– 12

– 12

0

Autres besoins de trésorerie

1,8

2,4

1,3

TOTAL

176,4

178,3

196,6

       

Ressources de financement

     

Émission de dette à moyen et long terme nette des rachats

173,0

173,0

188,0

Ressources affectées à la CDP et consacrées au désendettement

1,5

1,5

4,0

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

0,0

1,9

0,0

Variation des dépôts des correspondants

0,0

0,0

0,0

Variation des disponibilités du Trésor à la banque de France et des placements de trésorerie de l’État

1,4

1,4

4,1

Autres ressources de trésorerie

0,5

0,5

0,5

TOTAL

176,4

178,3

196,6

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

30/08/14

Durée de vie avant swaps

6 ans 292 j.

6 ans 246 j.

7 ans 68 j.

7 ans 57 j.

7 ans 37 j.

7 ans 5 j.

6 ans 350j

Durée de vie après swaps

6 ans 276 j.

6 ans 233 j.

7 ans 60 j.

7 ans 52 j.

7 ans 34 j.

7 ans 2 j.

6 ans 348j

Afin de remédier à la dégradation de la compétitivité des entreprises françaises, constatée dans le rapport remis au Premier ministre par M. Louis Gallois en novembre 2012 (38), l’article 66 de la dernière loi de finances rectificative (LFR) pour 2012 (39) – résultant de l’adoption d’un amendement gouvernemental – a instauré un CICE.

Le coût de ce qui est devenu la première dépense fiscale de l’État (20 milliards d’euros en régime de croisière) est compensé par le relèvement du taux intermédiaire et du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) (7 milliards d’euros) (40), la mise en place d’une contribution climat-énergie (4 milliards d’euros) (41) et la réalisation d’économies budgétaires à hauteur d’une dizaine de milliards d’euros.

Les entreprises dont les bénéfices sont imposés selon un régime réel – via l’impôt sur les sociétés (IS) ou l’impôt sur le revenu (IR) – sont éligibles à ce crédit d’impôt, assis sur les salaires compris entre 1 et 2,5 SMIC versés au cours de l’année civile, au taux de 6 % (4 % pour les salaires versés en 2013).

Si le montant du crédit d’impôt excède celui de l’impôt dû, le solde de la créance est imputé sur l’impôt dû par l’entreprise les trois années suivantes, et le cas échéant restitué au terme de cette période. Certaines entreprises, dont les PME au sens du droit de l’Union européenne, bénéficient toutefois de la restitution immédiate de la créance. La créance « en germe », résultant d’une évaluation du montant de CICE sur la base de l’assiette de l’année N-1, peut par ailleurs être cédée ou nantie à un établissement de crédit dès l’année N ; ce mécanisme original de préfinancement est propre au CICE.

La loi fixe des objectifs au CICE, qui ne sont toutefois pas des conditions de son octroi ; elle entend également prohiber certains usages, sans prévoir cependant de sanction (cf. encadré infra).

Les objectifs du CICE : extraits de l’article 244 quater C
du code général des impôts

Le crédit d’impôt a pour objet « le financement de l’amélioration de [la] compétitivité [des entreprises] à travers notamment des efforts en matière d’investissement, de recherche, d’innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement. […] Le crédit d’impôt ne peut ni financer une hausse de la part des bénéfices distribués, ni augmenter les rémunérations des personnes exerçant des fonctions de direction dans l’entreprise ».

Pour s’assurer du respect de ces objectifs, plusieurs outils sont prévus :

– un suivi des emplois du CICE par chaque entreprise, qui doit figurer « dans ses comptes annuels » ;

– l’institution d’un comité de suivi au niveau national et dans chaque région ;

– la possibilité d’adopter une loi précisant les conditions d’information du Parlement et des partenaires sociaux, ainsi que les modalités de contrôle par ces derniers de l’utilisation du crédit d’impôt (cf. encadré infra).

Les dispositions de l’article 8 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013
relative à la sécurisation de l’emploi

Le comité d’entreprise doit être informé et consulté, avant le 1er juillet de chaque année, sur l’utilisation par l’entreprise du CICE. Les sommes reçues par l’entreprise au titre du crédit d’impôt et leur utilisation doivent être retracées dans la base de données économiques et sociales, créée par le même article.

Lorsque le comité d’entreprise constate que tout ou partie du crédit d’impôt n’a pas été utilisé conformément à ses objectifs, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications. Si le comité d’entreprise n’a pu obtenir d’explications suffisantes de l’employeur ou si celles-ci confirment l’utilisation non conforme de ce crédit d’impôt, il établit un rapport, qui est transmis à l’employeur et au comité de suivi régional, qui adresse une synthèse annuelle au comité national.

Au vu de ce rapport, le comité d’entreprise peut décider de « saisir de ses conclusions l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance dans les sociétés ou personnes morales qui en sont dotées, ou d’en informer les associés dans les autres formes de sociétés ou les membres dans les groupements d’intérêt économique ».

Dans les entreprises de moins de 50 salariés, les délégués du personnel sont informés et consultés sur l’utilisation du crédit d’impôt selon les mêmes modalités.

Afin d’assurer l’information du Parlement sur l’utilisation du crédit d’impôt par les entreprises et le fonctionnement de ce mécanisme d’alerte, la loi prévoit également la remise par le Gouvernement d’un rapport avant le 30 juin 2015, rapport qui devra être actualisé chaque année.

2.  Premiers éléments de bilan

Le comité national de suivi, institué au sein de France Stratégie, a publié ses deux premiers rapports annuels en octobre 2013 (42) et septembre 2014 (43). En outre, la Conférence des Présidents de l’Assemblée nationale a créé, en mai dernier, une mission d’information sur le CICE, dont les conclusions viennent d’être rendues (44). Sur la base de ces travaux, il est possible de dresser un premier bilan d’étape du CICE, même si le manque de recul et de données empêche la réalisation, à ce stade, d’une évaluation économique digne de ce nom.

a.  Une créance et une consommation budgétaire révisées à la baisse

Les premières estimations de l’impact financier du CICE ont été réalisées fin 2012 sur la base des données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et de la Mutualité sociale agricole (MSA), puisque l’assiette de CICE doit être déclarée aux organismes chargés du recouvrement des cotisations patronales de sécurité sociale. Ces estimations faisaient état d’une créance totale de 13 milliards d’euros au titre des rémunérations versées en 2013.

Elles ont été revues légèrement à la baisse lorsque les données de masse salariale ont été actualisées : l’assiette théoriquement éligible s’élève à 306 milliards d’euros, soit une créance de 12,3 milliards par application du taux de 4 %. L’assiette effectivement déclarée est de 301 milliards d’euros, soit une créance de 12 milliards ; l’écart constaté pourrait s’expliquer par la nouveauté du dispositif, certaines entreprises ayant pu omettre de déclarer de l’assiette éligible.

Le montant de la créance globale, inscrit en comptabilité nationale, doit être distingué du coût budgétaire annuel, inscrit en loi de finances. Le premier est supérieur au second, du fait des modalités d’imputation du CICE, en principe sur trois ans. Les estimations initiales reposaient sur l’hypothèse d’une consommation de la créance acquise en 2013 à hauteur de 75 %, par imputation sur l’impôt ou par restitution immédiate ; le coût budgétaire pour 2014 – année de liquidation de l’impôt dû au titre de 2013 – était donc évalué à 9,8 milliards d’euros.

La prévision actualisée est désormais de 6,5 milliards d’euros, ce qui peut s’expliquer par une série de facteurs :

– la réévaluation de la créance totale déclarée à l’administration fiscale, qui serait inférieure à celle inférée des déclarations réalisées auprès des organismes sociaux (10,8 milliards d’euros). Cet écart, que les rapports précités peinent à expliquer, pourrait résulter d’un comportement de sous-déclaration des entreprises, qui n’est toutefois pas documenté à ce stade ;

– la surestimation du taux de conversion de la créance en consommation budgétaire, qui serait plutôt de l’ordre de 60 % ;

– le choix de certaines entreprises d’imputer prioritairement d’autres crédits d’impôt, mieux connus d’elles, comme le crédit d’impôt recherche ;

– un niveau d’IS plus faible qu’attendu, ne permettant pas, par construction, d’imputer dès 2014 le montant anticipé de CICE.

La montée en puissance du CICE sur le plan budgétaire est présentée dans le tableau suivant, extrait du rapport précité de la mission d’information. Le coût de croisière (environ 20 milliards d’euros, modulo l’évolution spontanée de la masse salariale) sera atteint à compter de 2017, année de remboursement des premières créances – celles de 2013 – non encore imputées.

PRÉVISION ACTUALISÉE DU COÛT DU CICE

(en milliards d’euros)

   

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

A

Créance des entreprises vis-à-vis de l’État

10,8

16,6

18,0

19,8

20,6

21,5

22,4

 

Consommation des créances de CICE (décaissements budgétaires par imputations et restitutions)

B

Créance 2013

6,5

0,8

0,0

3,3

0,2

C

Créance 2014

9,2

1,3

0,0

5,9

0,3

D

Créance 2015

10,0

1,4

0,0

6,4

E

Créance 2016

10,9

1,5

0,0

F

Créance 2017

11,3

1,6

G

Créance 2018

11,8

I

Coût budgétaire total [B+ C + ... + G]

0

6,5

10,0

11,2

15,6

18,9

20,1

Trajectoire des finances publiques

 

Coût en comptabilité nationale (SEC 2010)

0

10,8

16,6

18,0

19,8

20,6

21,5

Source : direction générale des finances publiques.

b.  Une répartition sans surprise des gains du CICE

Sur la seule base ACOSS, l’assiette éligible est de 292 milliards d’euros, soit 65 % de la masse salariale totale. 76 % des établissements du secteur privé ont déclaré de l’assiette ; c’est dans les entreprises de moins de dix salariés que la part de l’assiette éligible dans la masse salariale totale est la plus élevée (79 %).

Sur le plan sectoriel, ce ratio est le plus élevé dans les secteurs qui servent les salaires les moins élevés ; il atteint ainsi 89 % dans l’hébergement et la restauration. La part des secteurs les plus intensifs en main-d’œuvre dans l’assiette du CICE dépasse leur part dans l’assiette salariale totale : il en est ainsi de l’industrie (respectivement 19,4 % au lieu de 18,3 %), du commerce (19,4 % au lieu de 15,6 %) et des activités de services administratifs et de soutien (10,5 % au lieu de 7,6 %).

L’analyse des données fiscales confirme logiquement ces clés de répartition. L’industrie représente environ 20 % de la créance totale, le commerce 18,5 % et les activités de services administratifs et de soutien près de 12 %. Le montant moyen de créance est, assez logiquement, proportionnel à la taille de l’entreprise, variant de 2 753 euros pour les micro-entreprises à 12,4 millions pour les grandes.

c.  Des premiers effets positifs sur le coût du travail

Selon l’INSEE (45), le CICE a permis de contenir la hausse du coût du travail en 2013, à 0,4 %, alors que les salaires progressaient dans le même temps de 2 %. Si le lien entre coût du travail et emploi n’est pas absolument mécanique, il faut cependant relever que l’INSEE attribue aux « effets d’enrichissement de la croissance en emplois que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi entraînerait » (46) un effet modérateur sur le chômage ; le chef du département de la conjoncture indiquait récemment dans la presse que « sans le CICE, la hausse du chômage aurait été plus importante étant donné la conjoncture dégradée » (47).

d.  Des intentions d’utilisation du CICE conformes aux objectifs fixés par la loi

Faute de recul suffisant, le suivi de l’utilisation des fonds libérés au profit des entreprises par le CICE n’a pu être réalisé que sur la base des déclarations d’intention faites ex ante par les bénéficiaires, soit auprès des institutions représentatives du personnel dans le cadre de la procédure d’information-consultation mise en place par la loi relative à la sécurisation de l’emploi (48), soit à l’occasion d’études qualitatives.

La source la plus représentative – quoique reposant sur les quelque 50 % des 8 000 entreprises interrogées qui ont répondu – est sans doute l’enquête de conjoncture de l’INSEE, qui comporte depuis janvier une série de questions sur le CICE. Il résulte de l’analyse des réponses de l’enquête de juillet 2014 (49) que :

– plus de la moitié des entreprises (52 % dans les services, 58 % dans l’industrie) déclarent que le CICE servira prioritairement à l’investissement ;

– 48 % des entreprises de services et 34 % des entreprises industrielles indiquent que le CICE aura un impact sur l’emploi ;

– l’effet attendu sur les salaires est plus important dans les services (41 %) que dans l’industrie (26 %) ;

– la baisse des prix est, parmi les affectations sur lesquelles les entreprises sont interrogées, celle qui recueille le moins de réponses positives (respectivement 32 % et 30 %).

Ces premiers éléments, purement déclaratifs, devront être confirmés ultérieurement, lorsqu’il sera possible de procéder à une véritable évaluation du CICE.

ANNEXE N° 11
LA POURSUITE DES EFFORTS FISCAUX ENGAGÉS
EN FAVEUR DE L’ENVIRONNEMENT

Adoptée voici bientôt dix ans, la Charte de l’environnement du 1er mars 2005 (50) avait déjà, sur le plan des principes, donné un socle constitutionnel à la fiscalité écologique dans notre pays, en consacrant le « principe pollueur-payeur », selon lequel « toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». Le travail de réflexion mené à partir du mois de septembre 2007 dans le cadre du « Grenelle de l’environnement » n’avait pas été entièrement mis à profit sous la législature précédente, en particulier sur le plan fiscal en raison de l’abandon, en 2010, de la « taxe carbone ». Si l’on considère l’évolution sur une plus longue période, de 1995 à 2012, on peut constater, contrairement à une idée reçue, qu’en France comme dans l’Union européenne en général, le poids de la fiscalité environnementale, rapporté à la richesse nationale, a assez sensiblement diminué : il a été ramené de 2,5 à 1,8 % du PIB en France, et de 2,7 % à 2,4 % dans l’Union européenne.

ÉVOLUTION COMPARÉE DU POIDS DE LA FISCALITÉ ENVIRONNEMENTALE RAPPORTÉ AU PIB EN FRANCE ET DANS L’UNION EUROPÉENNE DEPUIS 1995

(en % du produit intérieur brut)

État

1995

2000

2005

2010

2012

France

2,5

2,2

1,9

1,8

1,8

Allemagne

2,2

2,4

2,5

2,2

2,2

Espagne

2,2

2,2

1,9

1,7

1,6

Italie

3,6

3,2

2,8

2,6

3

Royaume-Uni

2,8

3

2,5

2,6

2,6

Union européenne (51)

2,7

2,7

2,5

2,4

2,4

Source : Commission européenne, Tendances de la fiscalité dans l’Union européenne, édition 2014 (p. 40-41). (52)

En comparaison des autres pays européens, la France accuse un retard sensible quant au niveau de sa fiscalité écologique, que son produit soit rapporté à la richesse nationale ou aux prélèvements obligatoires dans leur ensemble. Ainsi, selon le Commissariat général au développement durable, les taxes environnementales ne représentaient, en 2011, que 4,2 % des prélèvements obligatoires en France, contre 6,2 % en moyenne au niveau européen.

Pour autant, il faut reconnaître que des dépenses importantes ont été engagées au niveau national depuis une décennie pour la protection de l’environnement : en 2012, l’ensemble de ces dépenses représentaient en France 47,5 milliards d’euros, et ces dépenses ont augmenté en moyenne de 4,4 % par an à partir de l’année 2000, au lieu d’une hausse annuelle moyenne de 2,9 % pour le produit intérieur brut sur la même période (53). Une impulsion a été donnée par les pouvoirs publics à cette mobilisation écologique depuis deux ans, comme vient en témoigne l’examen en cours du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

Le projet de loi de finances pour 2015 confirme, lui aussi, l’engagement durable de notre pays en faveur d’une meilleure protection de l’environnement, qu’il s’agisse de prendre en compte le caractère non renouvelable de certaines ressources, les atteintes à la qualité des milieux naturels ou la nécessité de limiter l’impact des activités humaines sur le réchauffement de la planète. Intégrer ces enjeux aux décisions publiques est un impératif moral vis-à-vis des générations futures et peut, en outre, favoriser l’émergence de nouvelles activités économiques porteuses de croissance et d’emploi. Dans ce contexte, au-delà des nécessités de la réglementation, la fiscalité doit bien être considérée comme un outil souple et adapté pour faire progressivement évoluer les comportements des acteurs économiques vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement.

L’article 32 de la loi de finances pour 2014 (54) a procédé à une importante réforme des taxes intérieures de consommation (TIC), qui taxent les produits issus d’énergies fossiles en fonction de la masse ou du volume des produits consommés, et non de leur prix.

– la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE), auparavant dénommée taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), qui pèse sur les consommateurs de produits pétroliers destinés à être utilisés comme carburant ou combustible (taxe qui a rapporté, en 2012, 24,6 milliards d’euros, dont 13,6 milliards d’euros pour l’État, et 11 milliards pour les régions et les départements) ;

– la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel destiné à être utilisé comme combustible (TICGN), créée en 1986 (alors sous la forme d’une imposition commune avec le fioul lourd) et qui pèse sur les personnes achetant ou important du gaz auprès d’un fournisseur, lequel collecte la taxe dont il est redevable (taxe qui a apporté 263,5 millions d’euros à l’État en 2012) ;

– la taxe intérieure sur la consommation de charbon (TICC), créée en 2007 et qui pèse sur les importateurs ou fournisseurs de houilles, lignites et cokes destinés à être utilisés comme combustibles (taxe qui a apporté 7,6 millions d’euros à l’État en 2012).

Plutôt que de créer de toutes pièces une nouvelle imposition comme la « taxe carbone » qui avait été proposée en 2009, le choix a été fait, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, d’aménager le barème des TIC existantes afin de prendre en compte l’impact de la consommation des énergies fossiles sur le réchauffement climatique. Conformément à une proposition faite par la Commission européenne aux États membres le 13 avril 2011 et pour faire suite aux travaux du Comité pour la fiscalité écologique présidé par M. Christian de Perthuis, le principe de la réforme a été de préserver les assiettes existantes, mais de moduler les tarifs de TIC de façon à ce que chaque type de produit énergétique soit d’autant plus taxé que sa consommation émet du dioxyde de carbone.

La modification des tarifs des TIC décidée par l’article 32 de la loi de finances pour 2014 a été effectuée en estimant la valeur de la tonne de carbone à 7 euros en 2014, 14,5 euros en 2015 et 22 euros en 2016.

ÉVOLUTION DU TARIF DES PRINCIPALES COMPOSANTES DE LA TICPE, DE LA TICGN ET DE LA TICC PRÉVUE EN LOI DE FINANCES POUR 2014

(en euros par unité de perception)

TIC concernée

2013

2014 (1)

2015

2016

TICPE – essence SP 95 (par hectolitre)

60,69

60,69

62,41

64,12

TICPE – gazole (par hectolitre)

42,84

42,84

44,82

46,81

TICPE – carburant super-éthanol E 85 (par hectolitre)

17,29

12,40

12,62

7,96

TICPE – carburant GPL (par tonne)

107,6

107,6

130

152,4

TICPE – fioul domestique (par hectolitre)

5,66

5,66

7,64

9,63

TICGN (2) (par mégawattheure)

1,19

1,41

2,93

4,45

TICC (par mégawattheure)

1,19

2,29

4,75

7,21

(1) Nouveau taux applicable seulement depuis le 1er avril 2014 (le taux de 2013 étant resté applicable du 1er janvier au 31 mars 2014).

(2) Les taux indiqués sont les taux prévus par la loi. Toutefois, le ministère chargé du budget a décidé, par une circulaire du 17 février 2014, une modification du mode de calcul de la TICGN (établissement de la facturation en fonction du pouvoir calorifique supérieur, comme habituellement pour cette taxe, et non du pouvoir calorifique inférieur). Celle devrait aboutir à abaisser d’environ 10 % les tarifs tels qu’ils avaient été fixés pour 2014, 2015 et 2016 – ce qui donne un tarif de 1,27 à partir du 1er avril 2014, de 2,64 en 2015, puis de 4,01 euros par mégawattheure en 2016.

Source : loi de finances pour 2014 (article 32) et articles 265, 266 quinquies et 266 quinquies B du code des douanes.

Ce « verdissement » des TIC, s’il s’inscrit avant tout dans une logique de lutte contre le réchauffement climatique, devrait bien sûr avoir aussi un effet positif sur les recettes de l’État, évalué à environ 2,4 milliards d’euros pour l’année 2015 et 4 milliards d’euros pour l’année 2016. Cet effort supplémentaire rend possible l’allégement d’autres impôts dont le produit est alloué à l’État (55)
– ce qui est le cas, par exemple, de la TVA en matière de rénovation énergétique.

En ce qui concerne l’impact prévisible de la hausse du tarif de la TICPE frappant le gazole et l’essence utilisés par les particuliers pour leurs déplacements, l’évaluation préalable jointe au projet de loi de finances pour 2014 avait estimé que l’impact, en 2015 et 2016, ne dépasserait pas quelques dizaines d’euros par an :

– pour l’essence, la hausse de la TICPE renchérirait en moyenne les dépenses annuelles des ménages de 5,1 euros en 2015 et de 10,1 euros en 2016 (en moyenne 5,8 euros pour les ménages du premier décile de niveau de vie, contre 15,1 euros pour les ménages du dernier décile, c’est-à-dire les plus aisés) ;

– pour le gazole, la hausse de la TICPE aboutirait pour les ménages à des dépenses accrues en moyenne 11,2 euros en 2015 et de 22,4 euros en 2016 (en moyenne 12,8 euros pour les ménages du premier décile de niveau de vie, contre 27,9 euros pour ceux du dernier décile).

L’article 54 de la loi de finances pour 2014 a poursuivi l’adaptation du mécanisme de bonus/malus automobile, afin de préserver son équilibre financier et de renforcer son efficacité écologique – le but du dispositif étant de lutter contre le réchauffement climatique favorisé par les émissions de gaz à effet de serre dans les transports routiers.

Le volet « bonus », dont le barème est fixé par le décret n° 2007-1873 du 26 décembre 2007, permet de minorer le prix d’acquisition des véhicules automobile neufs dont les émissions de dioxyde de carbone (CO2) sont les plus faibles. Il constitue en réalité une dépense budgétaire et non une incitation fiscale ; son actualisation est régulièrement effectuée par voie réglementaire. Depuis le 1er novembre 2013, le montant de cette aide :

– s’élève à 3 300 euros pour l’acquisition d’un véhicule hybride (c’est-à-dire combinant l’énergie électrique et une motorisation à l’essence ou au gazole) émettant moins de 110 grammes de CO2 par kilomètre (56) ;

– est compris entre 150 et 6 300 euros pour les véhicules utilisant comme carburant l’essence ou le gazole, à condition qu’ils émettent au maximum 90 grammes de CO2 par kilomètre.

Seul le volet malus relève de la fiscalité, et prend la forme d’une taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules (dite taxe sur les « cartes grises »), qui est prévue à l’article 1011 bis du code général des impôts. Rappelons que cette taxe, due sur le premier certificat d’immatriculation délivré en France pour un véhicule de tourisme, avait été instauré à compter du 1er janvier 2008, par la loi de finances rectificative pour 2007.

L’article 54 de la loi de finances pour 2014 a abaissé de 5 grammes de CO2 par kilomètre l’ensemble des tranches du barème du malus à compter du 1er janvier 2014, afin de l’adapter aux évolutions des véhicules mis sur le marché, et préserver l’équilibre financier du dispositif, qui avait accusé en 2013 un déficit de 100 millions d’euros.

ÉVOLUTION DU BARȆME DU MALUS À L’ACHAT DE VÉHICULES AUTOMOBILES DEPUIS 2012

Taux d’émission de dioxyde de carbone

(en grammes par kilomètre parcouru)

Tarif en 2012

(en euros)

Tarif en 2013

(en euros)

Tarif en 2014

(en euros)

Moins de 130

0

0

0

130 < taux ≤ 135

150

135 < taux ≤ 140

100

250

140 < taux ≤ 145

200

300

500

145 < taux ≤ 150

400

900

150 < taux ≤155

500

1 000

1 600

155 < taux ≤ 175

750

1 500

2 200

175 < taux ≤ 180

2 000

3 000

180 < taux ≤ 185

1 300

2 600

3 600

185 < taux ≤ 190

3 000

4 000

190 < taux ≤ 200

2 300

5 000

6 500

200 < taux ≤ 230

6 000

8 000

Plus de 230

3 600

Source : Rapport sur le projet de loi de finances pour 2014, tome II, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 1428, 10 octobre 2013.

La nécessité de mettre à jour régulièrement ce barème témoigne de la grande efficacité de ce dispositif pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre émises par les nouveaux véhicules. En effet, le désir des acheteurs d’éviter le malus et de rechercher le plus possible à bénéficier d’un bonus, lors de l’achat, a évidemment conduit les constructeurs automobile à accélérer leurs efforts et la recherche de progrès technologiques afin de diminuer la consommation et les émissions des nouveaux modèles de véhicules qu’ils produisent.

Les interventions législatives récentes, permettant de mieux prendre en compte les émissions provenant du transport routier, ne se sont pas limitées aux véhicules légers. En effet, l’ancien dispositif dit de l’écotaxe poids lourds, qui n’avait jamais pu être appliqué depuis sa création en 2008, a été révisé, voici seulement deux mois, par la loi de finances rectificative pour 2014 du 8 août 2014 (57), afin d’en corriger les imperfections et d’en améliorer l’acceptation. Ces changements ont rendu possible, sur le plan législatif, une mise en œuvre en 2015 de la taxe rénovée (et désormais couramment nommée « péage de transit poids lourds »), après une période de test « à blanc », c’est-à-dire sans paiement effectif.

Les principaux changements effectués à cette occasion, et destinés à remédier aux critiques émises à l’encontre de l’ancien projet d’écotaxe poids lourds, ont alors consisté à :

– limiter le réseau des autoroutes et routes nationales taxables au strict nécessaire : il s’agit désormais uniquement de celles qui ne sont pas actuellement soumises à péage et sont « intégrées à des itinéraires à fort trafic journalier de [poids lourds de plus de 3,5 tonnes] », la liste des routes et autoroutes concernées devant être précisée par décret, ce qui vient d’être effectué par un décret du 29 septembre 2014 (58). Il s’agissait ainsi de concentrer l’assiette de la taxe sur les grands axes de circulation, sur lesquels le trafic de proximité est plus faible et qui sont davantage empruntés par des poids lourds, notamment étrangers, qui effectuent de longs trajets à travers notre territoire. Le Gouvernement avait alors rendu publiques des cartes présentant ses projets et annoncé que la fixation d’un seuil de circulation de 2 500 poids lourds conduirait à limiter le réseau taxable à environ 3 800 kilomètres ;

– étendre légèrement la liste des activités économiques particulières qui sont exemptées du paiement de la taxe. Il a ainsi été prévu une exemption de taxe au profit des poids lourds transportant uniquement des équipements destinés à des cirques ou fêtes foraines, ou encore des « déchets d’animaux ou des carcasses non destinés à la consommation humaine ». Cette exemption, qui était justifiée par la nature particulière de ces activités et des déplacements correspondants, qui sont habituellement courts mais fréquents, est ainsi venue compléter celles déjà prévues par la loi au profit de des véhicules agricoles ou de transports laitiers appelés à effectuer de nombreux trajets sur de courtes distances, ainsi qu’au profit de véhicules d’intérêt général prioritaire, véhicules affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes et véhicules militaires, qui jouent pour la collectivité nationale un rôle indispensable ;

– améliorer les modalités de lutte contre la fraude, en prévoyant que le tarif maximal de la taxe serait appliqué aux véhicules dont le poids total autorisé en charge n’aura pas pu être justifié.

Rappelons qu’en revanche, la taxe n’a pas été modifiée quant au tonnage des poids lourds concernés et à ses tarifs. Ainsi, seuls les véhicules pesant plus de 3,5 tonnes entrent dans le champ de la taxe, dont le taux varie en fonction de la classe d’émission des véhicules (ceux des classes les plus anciennes et les plus polluants étant taxés à un taux plus élevé). Le taux de la taxe doit demeurer compris, conformément au 3 de l’article 275 du code des douanes, entre 0,025 et 0,2 euro par kilomètre parcouru – sachant que le taux kilométrique moyen prévu par le Gouvernement s’établit à 0,13 euro.

Sur la base d’une estimation effectuée pour une collecte débutant, comme cela avait alors été annoncé par le Gouvernement, le 1er janvier 2015, le produit brut attendu de cette nouvelle taxe devrait atteindre environ 550 millions d’euros, soit près de la moitié de ce qui était attendu de l’écotaxe poids lourds. Cette recette n’étant pas suffisante pour donner à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), les ressources dont elle a besoin afin de construire et entretenir les infrastructures de transport, conformément aux contrats de plan État-régions 2014-2020, il avait alors été indiqué que des recettes complémentaires devraient être trouvées à partir de 2015.

Cette nécessaire recherche de financements complémentaires pour l’AFITF s’impose, en effet, avec d’autant plus de force depuis l’annonce par la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Mme Ségolène Royal, le 9 octobre dernier, de la suspension de la mise en œuvre de ce dispositif de péage de transit poids lourds.

À l’heure où nous finalisons ce rapport, le Gouvernement n’a pas encore indiqué par quoi serait remplacé ce péage de transit.

L’assiette et les taux de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) ont, depuis 2012, fait l’objet d’une série d’adaptations qui en ont renforcé l’efficacité écologique.

La TGAP, créée par la loi de finances pour 1999 (59) et dont le régime est codifié aux articles 266 sexies à 266 terdecies du code des douanes, constitue l’un des piliers de notre fiscalité écologique. Elle a rapporté près de 830 millions d’euros en 2013, reversés essentiellement à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME). La TGAP comprend de nombreuses composantes, dont les assiettes et les taux sont très variables, car elle regroupe une série de taxes fiscales et parafiscales créées avant 1999 et frappant, en proportion de l’importance des dommages causés à l’environnement, diverses substances ou matériaux polluants (telles que les déchets, les émissions polluantes, les huiles usagées et produits lubrifiants, les lessives et les matériaux d’extraction).

La taxe de la composante de la TGAP portant spécifiquement sur les émissions atmosphériques (« TGAP air ») est due par tout exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) dont la puissance thermique maximale, la capacité d’incinération d’ordures ménagères, ou le poids des substances polluantes émises, dépasse certains seuils fixés par décret en Conseil d’État.

Jusqu’à la fin de l’année 2012, n’entraient dans l’assiette de la « TGAP air » que les substances suivantes : les oxydes de soufre et autres composés soufrés, les oxydes d’azote et autres composés oxygénés de l’azote, l’acide chlorhydrique, les hydrocarbures non méthaniques, les solvants et autres composés organiques volatils, ainsi que les poussières en suspension.

Afin de mieux protéger la qualité de l’air respiré par nos concitoyens, cette liste a été complétée par la loi de finances pour 2013, qui a procédé aux ajustements suivants :

– l’assiette de la TGAP a été étendue à cinq nouvelles substances dont l’émission est susceptibles de causer des pollutions atmosphériques : le benzène, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), l’arsenic, le mercure et le sélénium ;

– les tarifs de la TGAP ont été augmentés pour les émissions d’oxyde de soufre et d’azote et autres composés, les composés organiques volatiles non méthaniques (COVNM), ainsi que les poussières en suspension ;

– enfin, le seuil d’application de la TGAP a été abaissé de 50 à 5 tonnes par an pour les poussières en suspension.

L’article 33 de la loi de finances pour 2014 a élargi l’assiette de TGAP à sept nouvelles substances émises dans l’air : le plomb, le zinc, le chrome, le cuivre, le nickel, le cadmium et le vanadium, afin de répondre aux objectifs de la directive 2008/50/CE du Parlement du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et de réduire les nuisances liées à l’émission de ces polluants.

L’article 30 de la même loi de finances a amélioré la cohérence écologique et sanitaire de la taxe sur véhicules de sociétés (TVS), en la complétant par une composante liée aux émissions de polluants atmosphériques, laquelle repose sur un barème différencié en fonction du type de motorisation dont sont équipés les véhicules.

Cette taxe, prévue à l’article 1010 du code général des impôts et qui devrait rapporter près de 900 millions d’euros à la branche famille de la sécurité sociale en 2014, est acquittée chaque année par les sociétés, en fonction du nombre de véhicules de tourisme qu’elles utilisent, possèdent ou louent. Le barème antérieur taxait les véhicules les plus anciens (acquis par la société avant l’année 2006) en fonction de leur puissance fiscale, en leur appliquant des tarifs compris entre 750 et 4 500 euros, tandis que les autres étaient taxés uniquement en fonction de leurs taux d’émissions de dioxyde de carbone, le tarif le plus élevé atteignant 27 euros par gramme, pour les véhicules émettant plus de 250 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre.

Ce barème, s’il était pertinent au regard de l’objectif de lutte contre le réchauffement climatique, avait l’inconvénient de ne pas prendre spécifiquement en compte la problématique de la pollution atmosphérique engendrée beaucoup plus par les véhicules diesel par les véhicules fonctionnant à l’essence. Or, il est essentiel de mieux prendre en compte les graves problèmes sanitaires posés, notamment dans les zones urbaines, par les particules fines et les oxydes d’azote émis par les moteurs diesel.

Pour remédier à cette incohérence, un barème adapté a donc été créé pour cette composante « air » de la TVS, avec une application dès le 1er octobre 2013. Ce barème a logiquement conduit à taxer plus lourdement les véhicules utilisant comme carburant le gazole plutôt que l’essence, tout en conservant le principe d’une taxation d’autant plus lourde que le véhicule concerné est ancien. Ainsi, les véhicules les plus anciens (mis en circulation avant 1997) sont soumis à une taxe trois fois et demie fois plus élevée que les véhicules récents (mis en circulation à partir de 2011) s’ils utilisent l’essence, et quinze fois plus lourde s’ils fonctionnent au gazole. Ce nouveau barème présente l’avantage d’être incitatif, sans toutefois peser sur les ménages ni être excessif dans ses montants, puisque la taxe due est comprise entre 20 et 40 euros pour les véhicules récents (60).

BARÈME DE LA NOUVELLE COMPOSANTE DE LA TVS
PRENANT EN COMPTE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE DES VÉHICULES

(en euros par an)

Année de première mise en circulation du véhicule

Tarif applicable aux véhicules essence et assimilés

Tarif applicable aux véhicules diesel et assimilés

1996 ou antérieure

70

600

De 1997 à 2000

45

400

De 2001 à 2005

45

300

De 2006 à 2010

45

100

2011 ou postérieure

20

40

Source : Légifrance.

Type de carburant

Gazole

Essence (SP 95)

Prix de vente moyen hors taxe

0,6419

0,6367

TICPE (1)

0,4409

0,6133

TVA

0,2166

0,2500

Total des taxes

0,6575

0,8633

Prix de vente moyen TTC

1,2994

1,5000

Part des taxes dans le prix de vente

50,6 %

57,6 %

(1) TICPE soumise à régionalisation moyenne pondérée.

Source : Bulletin mensuel du Comité des professionnels du pétrole (n° 632 du 18 septembre 2014).

Cette différence de traitement, qui incite les consommateurs à s’équiper de véhicules diesel pour réduire leurs factures de carburant, apparaît aujourd’hui d’autant moins justifiée que la combustion du gazole engendre des émissions atmosphériques particulièrement nocives pour la santé humaine. Ainsi, les particules émises par les moteurs diesel, dont les probables effets sanitaires avaient été identifiés dès la fin des années 1980, sont classées comme « cancérogènes certains » par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 2012. Le Commissariat général au développement durable indique que ces particules, qui pénètrent dans les bronches d’autant plus profondément qu’elles sont fines, seraient à l’origine chaque année dans notre pays de plus de 40 000 décès prématurés et de plus de 20 000 cas de bronchite chronique.

L’orientation fiscale ancienne en faveur du gazole, dont les effets ont été encore accentués, à partir de 2007, par la prise en compte d’un unique critère de dioxyde de carbone dans les émissions des véhicules pour le barème du bonus-malus à l’achat des véhicules neufs, explique largement que la France soit progressivement devenue l’un des pays où la proportion de diesels dans les ventes automobiles est la plus élevée au monde (67 % des ventes en 2013, contre 53,3 % en moyenne dans l’Union européenne, mais seulement 1 % aux États-Unis comme au Japon). Il est donc souhaitable de corriger progressivement cette situation, en resserrant l’écart de taxation entre ces deux types de carburant. Ce résultat ne sera que très marginalement obtenu, en 2015 et 2016, par la hausse de TICPE résultant de l’article 32 de la loi de finances pour 2014, car le relèvement alors décidé était fondé uniquement sur les émissions de dioxydes de carbone. Ainsi, le tarif de la TICPE devrait, d’ici 2016, augmenter de 9,3 % pour le gazole et de 5,7 % pour l’essence.

L’article 20 du présent projet de loi prend en compte cette problématique sanitaire, en renchérissant en 2015 de 2 centimes d’euros par litre le tarif de la TICPE applicable au gazole. Ainsi, cette taxation du gazole s’élèvera, à compter du 1er janvier 2015, à 0,4682 euro par litre, alors qu’il était jusqu’ici prévu qu’elle soit portée à 0,4482 euro par litre (contre 0,4284 euro par litre actuellement).

Les prix de vente au détail du gazole ont baissé en France, au cours des deux dernières années, de 13 centimes d’euro par litre. En conséquence, on peut penser que le marché est actuellement plutôt bien orienté pour absorber la hausse proposée de 2 centimes d’euro par litre pour l’année 2015, même si elle s’ajoute à la hausse de 1,98 centimes d’euro résultant de la loi de finances pour 2014 – ce qui, si l’on ajoute la TVA, portera au total la hausse de taxation à 4,78 centimes d’euros par litre pour le gazole.

Par ailleurs, le relèvement limité résultant de l’article 20 du projet de loi n’aura aucun impact sur la situation économique de la plupart des professionnels qui exercent un métier lié au transport routier. En effet, les exploitants de taxis, de tracteurs et véhicules routiers de plus de 7,5 tonnes et de transports public routier en commun bénéficient d’une procédure de remboursement, prévue aux articles 265 sexies, 265 septies et 265 octies du code des douanes, qui repose sur un tarif de TICPE inférieur, lequel n’est pas modifié. En conséquence, ces secteurs économiques, fortement exposés à la concurrence internationale, ne subiront pas d’augmentation de leurs coûts liés à l’évolution du tarif de droit commun de la TICPE.

L’impact de la hausse prévue à l’article 20 sur le budget de carburant des ménages qui utilisent un véhicule fonctionnant au gazole (soit un peu plus de la moitié des ménages) devrait être limité l’an prochain à quelques dizaines d’euros par an en moyenne, en fonction du profil de consommation des ménages concernés. Il convient notamment de souligner que le montant de la taxation supplémentaire résultant de la mesure devrait être deux fois plus élevé pour les ménages du décile le plus aisé que pour les ménages du décile le plus modeste, et que, d’un point de vue géographique, les habitants des zones périurbaines devraient être les plus concernés en raison de leurs dépenses de carburant plus élevées que la moyenne des ménages (61).

Enfin et surtout, cette mesure permettra de dégager des ressources supplémentaires pour l’AFITF, pour déployer sur le territoire national de nouveaux moyens de transport utiles à la croissance économique et respectueux de l’environnement. En effet, le projet de loi de finances prévoit d’affecter à l’AFITF, en 2015, une fraction de la TICPE égale à 807 millions d’euros, ce qui correspond aux recettes supplémentaires attendues l’an prochain du relèvement de 2 centimes d’euro du tarif de la TICPE applicable au gazole. Ce montant, ajouté aux 550 millions d’euros de recettes brutes attendues en 2015 de la mise en œuvre du péage de transit poids lourds précédemment évoqué, permettra ainsi d’éviter tout retard dans la mise en place du volet mobilité des contrats de plan État-régions couvrant la période 2014-2020.

Afin de réduire le coût des travaux de rénovation thermique des logements, et d’encourager ainsi nos concitoyens à y recourir rapidement, l’article 9 de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, résultant d’amendements de la Commission, a prévu que le taux de TVA applicable à ces travaux, ainsi qu’à ceux qui leur sont « indissociablement liés », serait ramené à 5,5 % à compter du 1er janvier 2014. Si cette disposition spécifique n’avait pas été adoptée, le taux de TVA applicable à ces travaux serait, au contraire, passé de 7 % à 10 % à la même date, du fait du relèvement du taux intermédiaire de TVA résultant de l’article 68 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (62).

En application du nouvel article 278-0 ter alors inséré dans le code général des impôts, les logements concernés par cette mesure sont les logements d’habitation achevés depuis plus de deux ans, et les travaux concernés sont ceux qui incluent la pose, l’installation et l’entretien des matériaux et équipements éligibles au « crédit d’impôt développement durable » (CIDD) prévu à l’article 200 quater du même code. Selon cet article, sont éligibles au CIDD, moyennant parfois certaines limites ou conditions plus détaillées :

– l’acquisition de chaudières à condensation ;

– l’acquisition de matériaux d’isolation thermique des parois vitrées, de volets isolants ou de portes d’entrée donnant sur l’extérieur ;

– l’acquisition et la pose de matériaux d’isolation thermique des parois opaques ;

– l’acquisition de matériaux de calorifugeage de tout ou partie d’une installation de production ou de distribution de chaleur ou d’eau chaude sanitaire ;

– l’acquisition d’appareils de régulation de chauffage ;

– l’acquisition de certains équipements de production d’énergie utilisant une source d’énergie renouvelable, ainsi que, dans certaines limites, la pose de l’échangeur de chaleur souterrain des pompes à chaleur géothermiques ;

– l’acquisition d’équipements de raccordement à un réseau de chaleur, alimenté majoritairement par des énergies renouvelables ou par une installation de cogénération ;

– et, enfin, les dépenses engagées pour les chaudières à micro-cogénération gaz d’une puissance de production électrique inférieure ou égale à 3 kilovolt-ampères par logement.

Par ailleurs, afin d’éviter toute ambiguïté sur la nature des travaux « indissociablement liés » à cette rénovation thermique, les modalités d’application de la mesure ont été précisées par l’ajout, le 25 février 2014, d’une nouvelle section au sein du Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) (63). Il a notamment été indiqué à cette occasion que ces travaux induits doivent porter sur la même pièce que les travaux de rénovation énergétique auxquels ils sont liés, ou sur « les éléments du bâti directement affectés » par ces travaux, ce qui est logique. Le BOFiP dresse une liste détaillée de la dépose des équipements antérieurs et des travaux induits qui, pour chaque type de travaux de rénovation énergétique, peuvent être considérés comme éligibles au taux réduit de TVA.

Selon les indications alors fournies par le secrétariat d’État chargé du budget, le coût total de cette mesure pour les finances publiques devrait avoisiner, en année pleine, 675 millions d’euros. Ce changement, qui n’est encore applicable que depuis quelques mois, favorisera les économies d’énergie dans le bâtiment et ne peut que contribuer à atteindre l’objectif gouvernemental de rénovation thermique de 500 000 logements par an.

Afin de conforter encore les incitations fiscales en faveur des travaux destinés à améliorer les performances énergétiques des habitations achevées depuis plus de deux ans, l’article 3 du présent projet de loi de finances pour 2015 propose de transformer l’actuel crédit d’impôt développement durable (CIDD) en un « crédit d’impôt pour la transition énergétique » (CITE), dont les conditions seront plus favorables.

Le renforcement du dispositif concerne d’abord le taux du crédit d’impôt sur le revenu accordé sur le fondement de l’article 200 quater du code général des impôts. Alors que les taux, issus des réformes successives du CIDD depuis 2005, s’étageaient entre 10 % et 34 % selon les équipements, la loi de finances pour 2014 avait fixé à 15 % le taux applicable à toutes les dépenses réalisées pour une seule catégorie de travaux et à 25 % le taux applicable aux dépenses engagées dans le cadre de « bouquets de travaux ». Le projet de loi de finances propose de porter ce taux à 30 % pour les dépenses engagées à compter du 1er septembre 2014, qu’elles soient ou non réalisées dans le cadre d’un bouquet de travaux. Il lève donc également l’exigence, à laquelle étaient jusqu’à présent soumis les ménages non modestes (64), de conduire des travaux relevant au moins de deux catégories de dépenses pour pouvoir bénéficier du crédit d’impôt, est donc levée.

Par ailleurs, les dépenses éligibles au crédit d’impôt sont étendues à deux nouveaux équipements : les compteurs individuels pour le chauffage et l’eau chaude dans les copropriétés et les bornes de recharges des véhicules électriques.

Cette disposition représente, là encore, un nouvel effort financier considérable accompli en faveur de l’environnement. En effet, le montant de la dépense fiscale résultant du CIDD a été estimé à 673 millions d’euros pour l’année 2013, alors que le coût en année pleine du nouveau CITE peut être estimé à 1,36 milliard d’euros, soit 700 millions d’euros de plus.

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