N° 2673 - Rapport de M. Olivier Véran, Mme Bernadette Laclais, M. Jean-Louis Touraine, Mme Hélène Geoffroy et M. Richard Ferrand sur le projet de loi , après engagement de la procédure accélérée, relatif à la santé (n°2302)



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N° 2673

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 mars 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI relatif à la santé,

PAR M. Olivier VÉRAN, Mme Bernadette LACLAIS,
M. Jean-Louis TOURAINE, Mme Hélène GEOFFROY

et
M. Richard FERRAND

Députés.

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Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2302, 2581 et 2592.

SOMMAIRE

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Pages

I. LA PRÉVENTION COMME ORIENTATION STRATÉGIQUE DE LA POLITIQUE DE SANTÉ 18

A. UNE POLITIQUE DE SANTÉ MIEUX DÉFINIE, UNE GOUVERNANCE CLARIFIÉE 18

1. La rénovation du cadre général de la politique de santé 18

2. Le renforcement des outils de coordination entre l’État et l’assurance maladie 19

a. L’amélioration de la politique de gestion du risque 19

b. L’affirmation en amont du rôle de l’État dans les négociations conventionnelles 20

3. La rénovation du système des agences et de la veille sanitaires et des agences 20

4. La simplification des outils de planification régionale. 21

B. LA PRÉVENTION, INSTRUMENT DE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS SOCIALES ET TERRITORIALES DE SANTÉ 22

1. La structuration de la prévention pour l’enfance et la jeunesse 23

2. La prévention, première arme contre les maladies non transmissibles 26

3. De nouveaux outils de prévention pour les publics les plus à risques 29

4. La mise en œuvre du plan national de réduction du tabagisme 30

II. L’AMÉLIORATION DE LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS 31

A. DES PARCOURS DE SANTÉ DÉCLOISONNÉS 32

1. La nécessaire coopération entre professionnels 32

a. Une coopération mise en œuvre à l’initiative des professionnels de santé 32

b. Le décloisonnement à l’œuvre dans le cadre de la psychiatrie de secteur 34

c. L’appui aux professionnels dans le cas des parcours complexes 36

B. L’ACCESSIBILITÉ AUX SOINS FACILITÉE 37

1. L’enjeu de l’accès aux soins de premier recours 37

2. La modernisation des professions de santé et les délégations d’actes 40

3. L’accompagnement des patients renforcé 42

4. Des outils de coordination au profit des professionnels 43

C. LA RÉNOVATION DE L’HÔPITAL PUBLIC 44

1. La réhabilitation du service public hospitalier (SPH) 44

2. La création des groupements hospitaliers de territoire 45

3. La question de l’attractivité des établissements publics de santé 47

III. L’AFFIRMATION DES DROITS ET L’ACCROISSEMENT DE LA PARTICIPATION DANS LE DOMAINE DE LA SANTÉ 48

1. Des avancées majeures pour la démocratie sanitaire 48

a. Au niveau local 48

b. Au sein des agences sanitaires et des établissements publics de santé 49

2. Des éléments de renforcement et de clarification des droits des usagers 51

a. La mise en place d’une action de groupe dans le domaine de la santé 51

b. La reconnaissance d’un « droit à l’oubli » 53

c. La clarification du droit entourant les prélèvements d’organes 53

3. Le dialogue social, au cœur du fonctionnement des établissements de santé 53

4. La création des conditions d’un accès ouvert aux données de santé 54

IV. LA SIMPLIFICATION DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ 55

TRAVAUX DE LA COMMISSION 61

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 61

II. EXAMEN DES ARTICLES 117

TITRE PRÉLIMINAIRE – RASSEMBLER LES ACTEURS DE LA SANTÉ AUTOUR D’UNE STRATÉGIE PARTAGÉE 117

Article 1er(art. L. 1411-1, L. 1411-1-1, L. 1411-2, L. 1411-3, L. 1411-4, L. 1431-2 du code de la santé publique, L. 111-2-1, L. 161-37 et L. 182-2 du code de la sécurité sociale) : Rénovation du cadre général de la politique de santé 117

Article 1erbis (art. L. 1411-9 [nouveau] du code de la santé publique) : Adaptation de la stratégie nationale de santé aux outre-mer 147

Après l’article 1er : bis 148

TITRE PREMIER – RENFORCER LA PRÉVENTION ET LA PROMOTION DE LA SANTÉ 149

Chapitre Ier – Soutenir les jeunes pour l’égalité des chances en santé 149

Avant l’article 2 149

Article 2 (art. L. 121-4-1 du code de l’éducation) : Politique de santé en milieu scolaire 151

Après l’article 2 157

Article 2 bis (art. L. 1111-5 et L. 1111-5-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Dérogation au consentement parental pour des actes de prévention et de soins réalisés par les sages-femmes ou les infirmiers 160

Article 2 ter (art. L. 114-3 du code du service national) : Test de dépistage de la surdité 161

Article 3 (art. L. 5134-1 du code de la santé publique) : Accès à la contraception d’urgence des élèves du second degré auprès de l’infirmerie scolaire 162

Après l’article 3 165

Article 3 bis (art.  L. 5134-1 du code de la santé publique) : Droit d’information sur les différentes méthodes contraceptives 166

Après l’article 3 bis 167

Article 4 (art. 225-16-1 et 227-19 du code pénal, L. 3342-1, L. 3353-3 et L. 3353-4 du code de la santé publique) : Lutte contre les pratiques d’alcoolisation massive des jeunes 169

Article 4 bis (art. L. 3323-3 du code de la santé publique) : Définition de la publicité en faveur d’une boisson alcoolique 176

Après l’article 4 bis 179

Article 5 (art. L. 3232-8 [nouveau] du code de la santé publique et L. 112-13 [nouveau] du code de la consommation) : Information nutritionnelle complémentaire par graphiques ou symboles 182

Après l’article 5 194

Article 5 bis (art. L. 2133-1 du code de la santé publique) : Messages publicitaires pour les aliments manufacturés et les boissons sucrées 201

Après l’article 5 : bis 203

Article 5 ter (art. L. 3232-4-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Promotion des modes de déplacement actifs par les campagnes d’information menées dans le cadre de la prévention de l’obésité et du surpoids 207

Après l’article 5 ter 207

Article 5 quater (art. L. 3232-9 du code de la santé publique) : Prévention précoce de l’anorexie mentale et lutte contre la valorisation de la minceur excessive 209

Après l’article 5 quater 209

Chapitre Ierbis – Lutter contre le tabagisme 215

Article 5 quinquies 216

Après l’article 5 quinquies 218

Article 5 sexies 228

Article 5 septies 231

Article 5 octies 232

Article 5 nonies 233

Après l’article 5 nonies 235

Article 5 decies 237

Article 5 undecies 239

Article 5 duodecies 242

Article 5 terdecies 243

Article 5 quaterdecies 244

Article 5 quindecies 244

Article 5 sexdecies 244

Après l’article 5 sexdecies 245

Chapitre II – Soutenir les services de santé au travail 251

Article 6 (art. L. 4623-1 du code du travail) : Exercice des fonctions de médecin du travail par un collaborateur médecin 251

Après l’article 6 256

Article 6 bis (art. L. 4612-1 du code du travail) : Mission de prévention du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail 258

Article 6 ter (art. L. 4624-1 du code du travail) : Production de données selon le sexe dans les rapports annuels des médecins du travail 258

Chapitre III – Soutenir et valoriser les initiatives des acteurs pour faciliter l’accès de chacun à la prévention et la promotion de la santé 260

Article 7 (art. L. 3221-2-2 [nouveau] et L. 6211-3 du code de la santé publique) : Facilitation du dépistage des maladies infectieuses transmissibles 260

Après l’article 7 265

Article 8 (art. L. 3121-4 et L. 3121-6 [nouveau] du code de la santé publique) : Réduction des risques en direction des usagers de drogues 266

Après l’article 8 278

Article 9 : Expérimentation de salles de consommation à moindre risque (SCMR) 280

Après l’article 9 295

Chapitre IV – Informer et protéger les populations face aux risques sanitaires liés à l’environnement 295

Article 10 (art. L. 221-6 du code de l’environnement) : Information du public sur les risques sanitaires liés à la pollution de l’air 295

Après l’article 10 299

Article 11 (art. L. 1334-14, L. 1334-15, L. 1334-16-1 [nouveau], L. 1334-16-2 [nouveau] et L. 1334-17 du code de la santé publique) : Renforcement de la protection contre l’exposition à l’amiante 305

Après l’article 11 312

Article 11 bis (art. L. 1311-7 du code de la santé publique) : Plans régionaux Santé et environnement 316

Après l’article 11 bis 317

Article 11 ter (art. L. 1336-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Prévention des risques liés au bruit 319

Après l’article 11 ter 320

Article 11 quater (art. L. 5231-2 du code de la santé publique) : Interdiction du Bisphénol A dans les jouets et amusettes 320

Après l’article 11 quater 321

Article 11 quinquies (art. L. 5232-1 du code de la santé publique) : Conception des appareils portables permettant l’écoute de son par l’intermédiaire d’écouteurs ou d’oreillettes 322

Après l’article 11 quinquies 323

TITRE II – FACILITER AU QUOTIDIEN LES PARCOURS DE SANTÉ 325

Chapitre Ier – Créer un service territorial de santé au public 325

Avant l’article 12 325

Article 12 (art. L. 1431-2, L. 1434-11, L. 1434-12, L. 1434-13, L. 1434-14, L. 1434-15 du code de la santé publique et L. 313-4 du code de l’action sociale et des familles) : Création du service territorial de santé au public 331

Après l’article 12 349

Article 12 bis (art. L. 1431-2, L. 1434-11, L. 1434-12 et L. 6324-4 du code de la santé publique) : Mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé 349

Article 12 ter (art. L. 1434-13 du code de la santé publique) : Pacte national de lutte contre les déserts médicaux 351

Après l’article 12 ter 352

Article 13 (art. L. 3211-1, L. 3211-2-3, L. 3221-1, L. 3221-2, L. 3221-3, L. 3221-4, L. 3221-4-1, L. 3222-1, L. 3222-1-1 A, L. 3311-1 et L. 6143-2 du code de l’action sociale et des familles) : Organisation territoriale de la santé mentale et de la psychiatrie 354

Article 13 bis (art. L. 3211-12-1 du code de la santé publique) : Modification du champ du contrôle judiciaire dans le cadre de l’hospitalisation sans consentement 373

Article 13 ter (art. L. 3211-12-2 du code de la santé publique) : Clarification du lieu de l’audience en cas de transfert de la personne faisant l’objet de soins psychiatriques postérieurement à la saisine judiciaire 374

Article 13 quater : Encadrement des pratiques de placement en chambre d’isolement et de contention 374

Article 13 quinquies : Rapport portant sur l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris 375

Article 14 (art. L. 1431-2, L. 6327-1 [nouveau], L. 6327-2 [nouveau] et L. 6327-3 [nouveau] du code de la santé publique) : Mission d’appui aux professionnels pour la coordination des parcours de santé complexes 375

Après l’article 14 385

Chapitre II – Faciliter l’accès aux soins de premier recours 385

Titre du : chapitre II 385

Article 15 (art. L. 6314-1 du code de la santé publique) : Régulation médicale de la permanence des soins ambulatoires 386

Après l’article 15 392

Article 16 (art. L. 162-5, L. 162-5-3, L. 162-26 du code de la sécurité sociale) : Médecin traitant des patients de moins de seize ans 394

Article 17 (art. L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale) : Clause d’examen des conventions médicales par les accords applicables aux centres de santé et modalités d’élaboration de ces accords 400

Article 17 bis (art. L. 2212-5 du code de la sécurité sociale) : Suppression du délai de réflexion préalable à une interruption volontaire de grossesse 404

Après l’article 17 bis 406

Chapitre III – Garantir l’accès aux soins 409

Article 18 (art. L. 133-4, L. 161-1-4, L. 161-36-3 et L. 161-36-4 [nouveaux], L. 162-5, L. 162-9, L. 162-14-1, L. 162-16-1, L. 162-32-1, L. 315-1, L. 322-1, L. 322-2 et L. 871-1 du code de la sécurité sociale) : Généralisation du tiers payant pour les consultations de ville 409

Après l’article 18 428

Article 19 (art. L. 4122-1 du code de la santé publique) : Évaluation par les conseils nationaux des ordres professionnels médicaux des situations de refus de soin illégitimes 429

Après l’article 19 436

Article 20 (art. L. 162-9 et L. 165-6 du code de la sécurité sociale) : Accès aux soins optiques, audioprothétiques et dentaires des bénéficiaires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé 438

Après l’article 20 444

Chapitre IV – Mieux informer, mieux accompagner les usagers dans leur parcours de santé 446

Article 21 (art. L. 1111-1-1 [nouveau] et L. 1431-2 du code de la santé publique) : Instauration d’un service public d’information en santé 446

Article 21 bis Mise en place d’un dispositif permanent d’accompagnement des personnes handicapées 453

Article 21 ter : Encadrement de la médiation sanitaire et de l’interprétariat linguistique 454

Article 22 : Expérimentation de dispositifs d’accompagnement des patients 455

Article 22 bis : Mise en place d’un dispositif de tiers payant pour certaines aides financées par la prestation de compensation du handicap 463

Après l’article 22 bis 464

Article 23 (art. L. 1111-3-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Information du patient sur le coût de son hospitalisation 464

Après l’article 23 469

Article 23 bis : Information préalable des patients faisant l’objet d’une évacuation sanitaire effectuée à l’initiative de l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna et de leurs accompagnateurs 470

Après l’article 23 bis 471

Chapitre V – Renforcer les outils proposés aux professionnels pour leur permettre d’assurer la coordination du parcours de leur patient 471

Article 24 (art. L. 1112-1 du code de la santé publique) : Lettre de liaison entre les services de soins en ville et à l’hôpital 471

Article 25 (art. L. 1110-4, L. 1110-4-1 [nouveau], L. 1110-12 [nouveau], L. 1111-8, L. 1111-14, L. 1111-15, L. 1111-16, L. 1111-17, L. 1111-18, L. 1111-19, L. 1111-20, L. 1111-21, L. 1111-22, L. 1111-23 et L. 1521-2 du code de la santé publique et articles, L. 161-36-1 A, L. 162-1-14, L. 162-5-3 et L. 221-1 du code de la sécurité sociale) : Échange, partage de données et dossier médical partagé 477

Après l’article 25 499

Chapitre VI – Ancrer l’hôpital dans son territoire 500

Article 26 A : Garantie apportée à chaque patient d’avoir un accès aux soins, notamment dans les établissements de santé, dans des délais raisonnables 500

Article 26 (art. L. 229-5-1 du code de l’environnement, art. L. 1 121-16-1, L. 1123-14, L. 1435-5-2, L. 1435-8, L. 2131-1, L. 2212-8, L. 4221-10, L. 4381-1, L. 5126-2, L. 5126-9, L. 6111-1, L. 6111-1-1 [nouveau], L. 6111-1-2 [nouveau], L. 6111-1-3 [nouveau], L. 6111-7, L. 6111-8 [nouveau], L. 6112-1, L. 6112-2, L. 6112-3, L. 6112-4, L. 6112-5, L. 6114-1, L. 6114-2, L. 6122-7, L. 6141-7-3, L. 6143-6, L. 6146-2, L. 6147-2, L. 6147-7, L. 6154-1, L. 6154-2, L. 6155-1, L. 6161-5, L. 6161-8, L. 6161-9, L. 6162-8 et L. 6213-2 du code de la santé publique et L. 162-22-13, L. 162-12-15, L. 162-22-19, L. 174-20 et L. 381-30-5 du code de la sécurité sociale) : Refondation du service public hospitalier 501

Après l’article 26 532

Article 26 bis : Encadrement du recours aux emprunts par les établissements publics de santé 532

Après l’article 26 bis 533

Article 26 ter : Remise d’un rapport portant sur les conditions de la mise en œuvre d’un financement des établissements de santé organisés pour fonctionner sans dépassement d’honoraires 534

Après l’article 26 ter 535

Article 27 (art. L. 1434-7, L. 6211-21, L. 6131-2, L. 6131-3, L. 6132-1, L. 6132-2, L. 6132-3, L. 6132-4, L. 6132-5, L. 6132-6, L. 6132-7, L. 6143-1 et L. 6161-8 du code de la santé publique, L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, et art. 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) : Création des groupements hospitaliers de territoire 535

Après l’article 27 556

Article 27 bis : Exploitation en commun par tous les membres d’un groupement de coopération sanitaire de moyens d’une autorisation détenue par l’un d’entre eux 557

TITRE III – INNOVER POUR GARANTIR LA PÉRENNITÉ DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ 557

Chapitre Ier – Innover en matière de formation des professionnels 557

Article 28  : (titre II du livre préliminaire de la quatrième partie, art. L. 4021-1, L. 4022-1, L. 4133-1, L. 4133-2, L. 4143-1, L. 4143-2, L. 4153-1, L. 4153-2, L. 4236-1, L. 4236-2, L. 4242-1 et L. 4382-1 du code de la santé publique) Développement professionnel continu des professionnels de santé 557

Après l’article 28 576

Article 28 bis (art. L. 632-2 et L. 632-4 du code de l’éducation) : Faciliter la réorientation des médecins en cours de carrière 576

Après l’article 28 bis 576

Article 29 (art. L. 4311-12 du code de la santé publique) : Diversification des lieux de stage pour les étudiants paramédicaux 577

Après l’article 29 580

Chapitre II – Innover pour préparer les métiers de demain 580

Article 30 (art. L. 4301-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Instauration d’un exercice en pratique avancée pour les professions paramédicales 581

Article 30 bis (art. L. 313-26 du code de l’action sociale et des familles) : Délégation d’actes de soins infirmiers à des professionnels des établissements et services médico-sociaux 587

Après l’article 30 bis 588

Article 30 ter (art. L. 4393-8 à L. 4393-15 [nouveaux] et art. L. 4393-4 [nouveau] du code de la santé publique) : Création du statut d’assistants dentaires 588

Article 31 (art. L. 2212-1, L. 2212-2, L. 2212-3, L. 2212-5 à L. 2212-8, L. 2212-10, L. 2213-2, L. 2222-2, L. 4151-1 et L. 4151-2 du code de la santé publique) : Délégation d’actes en faveur des sages-femmes en matière d’IVG médicamenteuse et de politique vaccinale 589

Après l’article 31 598

Article 32 (art. L. 5125-1-1 A et L. 5125-1-1 B [nouveau] du code de la santé publique) : Participation des pharmaciens à la politique vaccinale 599

Après l’article 32 603

Article 33 (art. L. 3511-10 [nouveau], L. 4154-4 et L. 4311-1 du code de la santé publique) : Prescription de substituts nicotiniques 604

Article 34 (art. L. 6143-7, L. 6146-3 [nouveau], L. 6152-1-1 [nouveau] et L. 6152-6 du code de la santé publique et L. 1251-60 du code du travail) : Encadrement du recours à l’intérim médical à l’hôpital 608

Article 34 bis : Assouplissement des règles relatives à la détention du capital des sociétés exploitant une officine 615

Après l’article 34 bis 616

Article 34 ter : Prolongation d’activité des personnels médicaux hospitaliers 616

Article 34 quater : Modification des dispositions relatives au cumul emploi retraite des personnels médicaux hospitaliers 617

Chapitre III – Innover pour la qualité des pratiques, le bon usage des médicaments et la sécurité des soins 617

Article 35 (art. L. 161-37 de la sécurité sociale) : Fiches de bon usage des médicaments 617

Après l’article 35 620

Article 35 bis (art. L. 5132-10 [nouveau] du code de la santé publique) : Lutte contre les résistances aux antibiotiques 621

Article 35 ter (art. L. 5211-4-1 [nouveau], L. 5212-2-1, L. 5112-2-2 [nouveaux], L. 5211-6, L. 5461-4-2 [nouveau], L. 5461-6-1 et L. 5431-6-2 [nouveaux], L. 5461-9 et L. 5471-1 du code de la santé publique) : Amélioration de l’information sur la performance et l’évaluation clinique des dispositifs médicaux 622

Après l’article 35 ter 623

Article 36 (art. L. 5111-4 et L. 5121-29 à L. 5121-34 [nouveaux], art. L. 5124-6, L. 5124-17-2, art. L. 5124-17-3 [nouveau], art. L. 5126-4 et art. L. 5423-8 du code de la santé publique) : Lutte contre les ruptures d’approvisionnement de produits de santé 624

Après l’article 36 632

Chapitre IV – Développer la recherche et l’innovation en santé au service des malades 633

Article 37 (art. L. 1121-13-1 [nouveau], L. 4211-9-1 et L. 5121-1 du code de la santé publique) : Mise en œuvre au sein des établissements de santé de recherches cliniques industrielles et autorisation de fabrication de médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement 633

Après l’article 37 639

Article 37 bis : Dialogue préalable entre la Haute autorité de santé et les entreprises porteuses de produits innovants 639

Après l’article 37 bis 640

TITRE IV – RENFORCER L’EFFICACITÉ DES POLITIQUES PUBLIQUES ET LA DÉMOCRATIE SANITAIRE 641

Chapitre Ier – Renforcer l’animation territoriale conduite par les ARS 641

Article 38 (art. L. 1434-1 à L. 1434-10, L. 1431-2, L. 1432-1, L. 1432-3, L. 1432-4, L. 1433-2, L. 1435-4-2, L. 1435-5-1, à L. 1435-5-4, L. 3131-7, L. 3131-8, L. 3131-11 du code de la santé publique ; art. 151 ter du code général des impôts ; art. L. 362-6 du code de l’éducation) : Simplification et assouplissement des programmes régionaux de santé 641

Article 38 bis (art. L. 1431-2 du code de la santé publique) : Élargir la qualité des acteurs consultés par les ARS 668

Après l’article 38 bis 668

Article 39 (art. L. 1431-2, L. 1435-12 [nouveau], L. 4001-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Renforcement des dispositifs d’alerte sanitaire 671

Après l’article 39 676

Chapitre II – Renforcer l’alignement stratégique entre l’État et l’assurance maladie 677

Article 40 (art. L. 182-2-1-1, L. 182-2-3, L. 182-2-4, du code de la sécurité sociale et L. 1431-2, L. 1433-1 du code de la santé publique) : Rénovation du cadre stratégique de la gestion du risque 677

Après l’article 40 683

Article 40 bis (art. L. 221-1 du code de la sécurité sociale) : Publication par la CNAMTS d’un rapport d’activité comportant des données sexuées 684

Article 41 (art. L. 162-5, art. L. 162-14-4 et L. 162-14-5 [nouveaux], art. L. 182-2-3 du code de la sécurité sociale, et L. 1432-2 du code de la santé publique) : Définition par l’État de principes cadres des négociations des conventions nationales et de leurs adaptations régionales 685

Après l’article 41 690

Chapitre III – Réformer le système d’agences sanitaires 691

Article 42 : Réforme par ordonnances du système d’agences, création d’un institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique, mesures de simplification et d’allégement de procédures 691

Après l’article 42 714

Article 42 bis (art. L. 1340-2 à L. 1340-6 [nouveaux], L. 1341-1, L. 1341-2,  L. 1341-3, L. 1342-1, L. 1413-4, L. 6141-4 du code de la santé publique) : Transfert à l’ANSES du pilotage de la toxicovigilance 715

Après l’article 42 bis 716

Article 42 ter (art. L. 1418-1, L. 5311-1, L. 5311-2 du code de la santé publique) : Transfert à l’agence de biomédecine de missions de biovigilance 716

Chapitre IV  – Associer les usagers à l’élaboration de la politique de santé et renforcer les droits 717

Article 43 A : Mise en place d’un libre choix du patient quant à son mode de prise en charge 717

Article 43 B : Droit à la formation des représentants d’usagers du système de santé 718

Avant l’article 43 718

Article 43 (art. L. 1142-22, L. 1222-5, L. 1413-8, L. 1417-6, L. 1418-3, L. 3135-2, L.5322-1 et L. 6113-10-1 du code de la santé publique) : Représentation des usagers au sein des agences sanitaires 719

Après l’article 43 726

Article 44 (art. L. 1112-3, L. 6144-1 et L. 6161-2 du code de la santé publique) : Remplacement de la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge des établissements de santé par la commission des usagers 728

Après l’article 44 735

Article 45 : (chapitre III et chapitre IV du titre IV du livre Ier de la première partie, art. L. 1143-1 à L. 1143-23 [nouveaux] et L. 1144-1 [nouveau] du code de la santé publique) Création de l’action de groupe pour la réparation des dommages causés par des produits de santé 735

Après l’article 45 766

Article 45 bis (art. L. 1142-24-5 du code de la santé publique) : Possibilité de réexamen de certaines demandes d’indemnisation des victimes du benfluorex 766

Article 45 ter (art. L. 1142-28 du code de la santé publique) : Modification des délais de prescription des demandes d’indemnisation présentées à l’ONIAM 767

Article 46 (art. L. 1110-4, L. 1111-5 et L. 1111-7 du code de la santé publique) : Clarification des conditions d’accès au dossier médical 768

Article 46 bis (art. L. 1141-5 et L. 1141-6 [nouveaux] du code de la santé publique) : Accès à l’assurance et à l’emprunt en cas de problème grave de santé 773

Après l’article 46 bis 774

Article 46 ter (art. L. 1232-1 du code de la santé publique) : Prélèvement d’organes sur une personne décédée 774

Chapitre V – Créer les conditions d’un accès ouvert aux données de santé 775

Article 47 (art. L. 1111-8-1, L. 1435-6, L. 1451-1, L. 1460-1 [nouveau], L. 1461-1 à L. 1461-7 [nouveaux], L. 1462-1 [nouveau], L. 5121-28 du code de la santé publique, L. 161-28-1, L. 161-29, L. 161-30, L. 161-36-5 du code de la sécurité sociale, L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales, art. 8, 22, 27, 53, 54, 55, 57, 61 et chapitre X de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) : Amélioration de l’accès aux données de santé médico-administratives 775

Chapitre VI – Renforcer le dialogue social 797

Article 48 (art. L. 6156-1 [nouveau], L. 6156-2 [nouveau], L. 6156-3 [nouveau], L. 6156-4 [nouveau], L. 6156-5 [nouveau], L. 6156-6 [nouveau] et L. 6156-7 [nouveau] du code de la santé publique) : Représentation des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques hospitaliers 797

Après l’article 48 804

Article 49 (art. L. 6143-2-1, L. 6143-7-3, L. 6143-7-5, L. 6144-2, L. 6146-1, L. 6161-1-1 [nouveau], L. 6161-2, L. 6161-2-1 [nouveau] et L. 6161-2-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Rénovation de la gouvernance des établissements de santé 804

Après l’article 49 815

TITRE V – MESURES DE SIMPLIFICATION 815

Article 50 : Habilitation à prendre par ordonnance des mesures de modernisation des groupements de coopération sanitaire 815

Article 51 bis (article L. 1435-5 du code de la santé publique) : Association des centres de santé à l’élaboration des modalités de la permanence des soins 846

Article 51 ter (art. L. 4351-1 du code de la santé publique) : Suppression de la condition de présence physique d’un médecin aux côtés du manipulateur d’électroradiologie 846

Après l’article 51 ter 847

Article 51 quater (article L. 6323-1 du code de la santé publique) : Dispositions relatives aux missions des centres de santé et aux conditions d’accès aux soins en leur sein 847

Après l’article 51  quater 849

Article 51 quinquies (art. 25 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Création d’un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps de catégorie A de la fonction publique hospitalière 850

Article 51 sexies : Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions du code civil et du code de la santé publique relatives aux personnes protégées 851

Article 51 septies : Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions relatives aux ordres des professions de santé 851

Article 52 : Encadrement des soins de conservation et obligation vaccinale du virus de l’hépatite B (VHB) pour les thanatopracteurs en formation et en exercice 852

Article 53 : Habilitation à prendre par ordonnance des mesures d’adaptation du droit national au droit européen et international 856

Article 53 bis (art. L. 1111-3-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Information du patient sur l’autorisation d’exercer et l’assurance des professionnels de santé 867

Article 54 (art. L. 5542-6-1 du code des transports) : Mise à disposition des gens de mer d’un exemplaire de leur convention collective 869

Article 54 bis (art. L. 231-2, L. 231-2-1, L. 231-2-2 et L. 231-2-3 du code du sport) : Assouplissement des conditions de renouvellement des certificats médicaux d’aptitude sportive 870

Article 55 : Habilitation du Gouvernement à prendre des mesures législatives favorisant la coopération entre l’offre de soins civile et le service de santé des armées ainsi que l’institution nationale des Invalides 871

Article 56 : Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions de la loi à l’outre-mer 885

Article 56 bis : Volet ultramarin des statistiques sanitaires 887

Article 57 : Habilitation à procéder par ordonnance aux coordinations nécessaires 888

Titre du projet de loi 889

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 890

INTRODUCTION

Très attendu, le projet de loi relatif à la santé a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le mercredi 15 octobre 2014.

Il s’inscrit dans la continuité des travaux relatifs à la stratégie nationale de santé (SNS) lancés le 8 février 2013. Sa principale ambition est de définir les contours de la politique de santé pour les années à venir. La réduction des inégalités sociales et territoriales de santé en matière d’accès à la prévention et aux soins, comme l’adéquation aux besoins des patients, en constituent l’épine dorsale. La SNS prend ainsi appui sur les trois axes prioritaires définis dans le rapport remis par M. Alain Cordier au nom du Comité des « sages » en juin 2013 (1) : la prévention, la révolution du premier recours et le renforcement des droits des patients.

Le projet de loi se situe ainsi dans la continuité des consultations lancées en novembre 2013 et organisées par la conférence nationale de santé (CNS) qui se sont traduites par une forte mobilisation : 25 000 participants en métropole et outre-mer, organisation de 160 débats et 600 heures de débats. Des attentes se sont exprimées sur la nécessité de définir une politique lisible et non plus seulement appréhendée au travers d’une juxtaposition d’objectifs. Les débats en région ont ainsi permis de faire progressivement émerger le souci d’élaborer une politique articulée et cohérente : si la dispensation de soins y tient une large part, doivent également y figurer la prévention, l’accompagnement des patients comme la prise en compte des déterminants de la santé. Il en résulte la nécessité de fonder la politique de santé sur une « approche en proximité », articulée autour des besoins des patients et la coordination des acteurs. Et la politique de santé doit également être fondée sur une « démarche populationnelle », destinée à garantir un égal accès aux soins.

Ce projet s’est enfin inspiré d’autres démarches et réflexions telles que le Pacte de confiance pour l’hôpital (2), le rapport remis par Mme Claire Compagnon sur la démocratie sanitaire (3) ou encore le rapport de Mme Bernadette Devictor (4) portant sur l’approche de la santé dans les territoires.

Le projet de loi de santé traduit ces orientations et propose des avancées concrètes. Le vieillissement de la population, l’enjeu de la démographie médicale, le développement des maladies chroniques et l’accroissement des inégalités de santé appellent en effet des orientations résolues et claires. Les attentes de nos concitoyens en la matière sont fortes.

La place transversale et déterminante, dans nos politiques publiques, de la prévention, dès l’enfance, et de l’éducation en santé, en particulier à l’école, est affirmée. Le projet de loi déploie des mesures structurantes pour lutter contre le développement des maladies non transmissibles, liées à l’alimentation ou aux facteurs environnementaux. Il fournit de nouveaux outils de lutte contre la diffusion des maladies infectieuses, au plus près des populations les plus à risques. Il donne un nouvel élan à la politique de lutte contre le tabagisme, qui doit rester une priorité absolue.

Ce projet de loi vise également à fonder le recours aux soins sur la notion de parcours, alliant ainsi proximité, accessibilité et continuité. Il propose à cet effet une approche de la prise en charge basée sur les besoins propres aux patients et organisée à partir de la coordination entre professionnels de santé. L’accessibilité aux soins se caractérise par la mise en place de mesures concrètes pour diminuer le renoncement aux soins, telle que la généralisation du tiers payant ou l’objectivation des refus de soins illégitimes. La proximité des soins se traduit par une refonte de l’organisation de l’hôpital public autour des groupements hospitaliers de territoire et la prééminence d’une approche organique de service public hospitalier.

Le projet de loi contribue à la modernisation des professions de santé, en prévoyant par exemple la création d’un exercice en pratique avancée pour les professions paramédicales. Il modernise également les outils de la planification sanitaire régionale pour les rendre plus cohérents et d’une utilisation plus souple et plus efficace. Il permettra une meilleure organisation du système d’agences sanitaires, avec la création d’un établissement public unique chargé d’un vaste ensemble de missions allant de la veille à l’intervention en santé.

Il ambitionne enfin une politique mobilisatrice, tenant compte tant de l’innovation en santé que du renforcement des droits des patients. Il crée par exemple les conditions d’un accès ouvert aux données de santé médico-administratives, afin d’en tirer pleinement parti en matière de recherche, d’évaluation et d’innovation en santé, tout en offrant les garanties de respect de la vie privée et du secret médical.

Le choix a été fait de transformer notre système en profondeur afin de répondre aux attentes de nos concitoyens. Il ne saurait toutefois être opéré sans lever les inquiétudes qui se sont fait jour. En concertation avec les professionnels de santé et sans remettre en question la cohérence du dispositif et les axes structurants du projet, des évolutions ont été décidées.

Des échanges ont ainsi eu lieu dans le cadre de groupes de travail constitués à l’initiative de la ministre de la santé. Leurs premières conclusions se sont traduites par le dépôt d’amendements gouvernementaux de réécriture des articles relatifs au tiers payant, au service territorial de santé au public, au service public hospitalier et aux groupements hospitaliers de territoire.

Les modalités techniques du tiers payant ont ainsi été précisées et ont abouti à une généralisation progressive à la médecine de ville assortie de garanties pour les professionnels de santé établies par la loi et de l’obligation, pour l’assurance maladie et pour les organismes complémentaires d’élaborer une solution technique commune, transparente pour les utilisateurs.

L’instauration du service territorial de santé au public a également été débattue : rôle du médecin généraliste, place de l’agence régionale de santé ou organisation jugée trop administrative du service territorial. Les échanges ont abouti à la mise en place d’un dispositif gradué reposant d’abord sur le médecin généraliste avec les équipes de soins primaires, puis les professionnels de santé avec les communautés professionnelles territoriales de santé, l’ARS intervenant dans le cadre du territoire de démocratie sanitaire de l’article 38.

Concernant la réinstauration d’un bloc de service public hospitalier, l’amendement déposé par le Gouvernement maintient le principe d’une approche organique et non plus matérielle mais lève toute ambiguïté : la règle aujourd’hui en vigueur selon laquelle l’appartenance au service public hospitalier n’a aucun impact sur les autorisations d’activités de soins figure expressément dans la loi.

Le dispositif des groupements hospitaliers de territoire a enfin fait l’objet du dépôt d’un amendement gouvernemental de rédaction globale. Il précise les modalités de gouvernance ainsi que la place des centres hospitalo-universitaires et des centres hospitaliers spécialisés, de l’hospitalisation à domicile et des établissements privés.

Si le projet répond aux attentes exprimées par les représentants des usagers ou aux questions soulevées par les professionnels de santé, il tient aussi compte du nécessaire travail de co-construction législative dans le cadre de l’examen du texte par les parlementaires.

Aux termes de 77 auditions et tables rondes organisées à l’Assemblée nationale, représentant un peu plus de 170 heures, vos rapporteurs ont souhaité améliorer le texte en plusieurs points. Face aux légitimes attentes exprimées par nos concitoyens, l’immobilisme n’est pas de mise. Il importe de trouver des solutions concrètes et opérantes dans un souci de juste équilibre. Les rapporteurs se félicitent à cet égard de l’accueil qui a été réservé à leurs propositions tant par leurs collègues que par le Gouvernement lors de l’examen par la commission : ils souhaitent approfondir ce travail lors de l’examen du texte en séance publique.

L’objectif de réduction des inégalités sociales et territoriales de santé constitue le fil conducteur des différentes mesures du projet de loi. Ce choix politique, manifesté de façon constante depuis le début de la législature au travers des différentes lois de financement de la sécurité sociale (LFSS), doit permettre de répondre aux nouveaux défis auxquels notre système de santé est confronté. En effet le développement des maladies chroniques et le vieillissement n’ont pas les mêmes incidences selon les situations socio-économiques.

La prévention constitue le premier levier en la matière : elle doit permettre, dès le plus jeune âge, de réduire les facteurs de risques qui pèsent durablement sur la santé tout au long du parcours de vie. La promotion de la santé doit donner de nouveaux outils, en particulier aux plus vulnérables, pour prendre soin de soi et des autres.

Le projet de loi pose les bases d’une orientation stratégique des différents acteurs du système de soins vers la prévention : à cette fin, il définit au préalable un nouveau cadre de gouvernance au moyen d’une « politique de santé » relevant sans ambiguïté de la responsabilité de l’État mais incluant l’ensemble des acteurs.

L’article premier du projet de loi modifie le cadre général de la politique de santé. Comme aujourd’hui, ce cadre continuera de relever du niveau national, mais il ne nécessitera plus la fixation, dans la loi, d’une liste d’objectifs assortis d’indicateurs, à l’instar du « rapport d’objectifs de santé publique » annexé à la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, comportant une centaine d’indicateurs, peu opérationnels et difficiles à adapter aux évolutions des besoins de santé.

La loi de 2004 prévoyait une révision de ces objectifs tous les cinq ans : ceci est rapidement apparu impraticable. L’article premier substitue à cette approche une « stratégie nationale de santé » (SNS) qui associe, de façon continue, consultation des différentes parties prenantes et évaluation au regard de finalités partagées et d’un petit nombre d’indicateurs susceptibles d’être appropriés par l’ensemble des acteurs. L’approche sectorisée « en silos » est remplacée par une définition transversale du contenu de la politique de santé.

Le pilotage de la SNS est confié à l’État : son domaine d’intervention n’est plus restreint à la « santé publique » mais couvre tout le champ de la santé : la prévention, la sécurité sanitaire et les établissements hospitaliers, comme précédemment, mais désormais, sans ambiguïté, également les champs relevant de la gestion du « risque santé », que le code de la sécurité sociale confiait aux organismes gestionnaires de l’assurance maladie, et qui recouvrent le pilotage des soins de ville et la couverture des dépenses des assurés.

En outre, la politique de santé comprendra l’organisation des parcours de santé qui passera par la coordination des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux, en lien avec les usagers et visant à garantir la continuité, l’accessibilité, la qualité, la sécurité et l’efficience de la prise en charge de la population. Les séparations habituelles entre les différents secteurs ont donc vocation à s’estomper.

Tous ces domaines relèveront désormais de la « politique de santé » dont l’article premier du projet de loi définit les différentes dimensions et prévoit qu’elle est régie, sous l’autorité de l’État, par les principes de concertation et de coordination de l’ensemble des politiques publiques. En outre la SNS donnera lieu, de manière régulière, à une consultation publique, dans des conditions définies par décret.

La Commission a adopté de nombreux amendements enrichissant le contenu de la politique de santé. Elle sera par exemple adaptée aux besoins des personnes en situation de handicap et de leurs aidants familiaux et la SNS devra comporter des objectifs propres aux outre-mer à partir d’une évaluation des données de santé et des risques sanitaires spécifiques à ces collectivités.

De même, sur proposition du rapporteur, la Commission a expressément prévu la contribution à la politique de santé des différents services de prévention collective, à savoir la protection maternelle et infantile, la santé scolaire et universitaire et la santé au travail, chacun dans le cadre des missions qui leur sont imparties.

Dans la droite ligne des principes établis par l’article premier, les articles 40 et 41 du projet de loi visent à dépasser le double pilotage de notre système de santé entre l’État et l’assurance maladie. En effet, les actions menées par ces deux grands acteurs souffrent d’un manque de coordination, au point de perdre en efficacité ou de conduire à des dépenses inutiles. Il faut donc poursuivre leur mise en cohérence. C’est pourquoi l’article 40 prévoit de rénover le cadre de gestion du risque maladie. Et l’article 41 permet aux ministres chargés de la santé et des affaires sociales de définir en amont les attentes de l’État pour la négociation des conventions nationales entre l’assurance maladie et les professionnels de santé.

L’article 40 traite de la gestion du risque par l’assurance maladie et l’État et concerne l’ensemble des mesures concourant à la maîtrise de l’évolution des dépenses de santé. Ces mesures sont destinées à maintenir ou à améliorer l’état de santé de la population. Elles couvrent un champ très vaste : prévenir les maladies, limiter leur aggravation, promouvoir un juste recours aux soins, proposer une offre de soins adaptée, maîtriser le coût de ces soins, etc.

Le projet de loi améliore la conduite des politiques de gestion du risque dans le domaine de la santé, en renforçant la coordination entre les actions menées par l’État et celles conduites par les caisses d’assurance maladie, réunies au sein de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM). Il propose en particulier de renouveler le cadre contractuel la régissant : les deux parties seront liées par un plan national de gestion du risque. Établi sur une courte durée, de deux ans, ce document aura une visée opérationnelle et sera décliné en programmes nationaux et régionaux.

L’article 41 poursuit cette logique en permettant à l’État de formuler ses attentes en amont des négociations conventionnelles entre les caisses d’assurance maladie et les professionnels de santé.

Les trois régimes d’assurance maladie gèrent leurs relations avec les médecins de façon indépendante, dans le cadre de conventions nationales, négociées sous la conduite du directeur de l’UNCAM. Or, à ce jour, les ministres ne disposent d’aucun moyen formel permettant d’orienter a priori la conclusion de ces conventions. Cette situation, dans laquelle le Gouvernement n’intervient qu’a posteriori pour contrôler la légalité des accords une fois qu’ils sont signés, n’est pas satisfaisante. De plus, ces documents s’inscrivent dans le cadre déterminé en amont par le Parlement, notamment dans le cadre des LFSS. Il est donc naturel que le ministre chargé de la santé puisse exprimer les attentes de l’État dès avant la phase de négociation.

Cette logique se vérifie également en ce qui concerne la mise en œuvre de ces conventions, le même article prévoit également que les agences régionales de santé jouent un rôle pilote dans la déclinaison régionale des mesures décidées par les conventions.

Les dispositions de l’article 41 traduisent donc très concrètement l’ambition de rénovation stratégique du projet de loi. Elles clarifient le rôle de chacun et affirment le rôle pilote de l’État, tant au niveau du ministre chargé de la santé que de celui des ARS.

Le système d’alerte sanitaire français souffre d’imperfections liées à la dispersion de ses acteurs. Son architecture s’est constituée par strates successives, bien souvent au rythme des crises. L’article 40 confère davantage de cohérence à l’ensemble. Il améliore la coordination des acteurs au niveau régional en prévoyant que les ARS constituent un réseau régional de vigilance et d’appui. Organisé autour d’un contrat liant ces organismes aux ARS, ce réseau regroupera l’ensemble de ces services régionaux de veille et d’appui et sera coordonné par les ARS.

Ce dispositif devrait permettre de coordonner leur action et d’agir en coordination avec les agences nationales responsables de vigilances spécifiques. En outre, les responsabilités et contributions de chacun des acteurs intervenant en région seront clarifiées.

À l’article 42, le projet de loi réforme le système des agences sanitaires. Il prévoit tout d’abord de renforcer la coordination entre les agences en affirmant le rôle de l’État. Surtout, il habilite le Gouvernement à créer par ordonnance un institut unique, nommé, sur proposition de la rapporteure, Santé publique France, regroupant les missions, moyens et compétences de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) et l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS). Cet établissement public dotera la France d’un organisme à forte visibilité nationale et internationale. Il permettra d’intervenir sur un spectre large, allant de la veille et la prévention à l’intervention en santé. Les synergies générées par le rapprochement permettront d’investir dans des champs nécessitant davantage d’investissements, en particulier l’intervention en santé.

Cet article autorise également le Gouvernement à prendre des mesures de simplification touchant à l’organisation et au fonctionnement des agences sanitaires. Certaines d’entre elles concernent la politique de collecte, de transformation et de distribution des produits sanguins.

L’article 38 du projet de loi réforme en profondeur les outils de planification sanitaire et médico-sociale régionale dont l’architecture est issue de la loi dite HPST (5).

Aujourd’hui l’action des ARS s’inscrit dans le cadre d’un « projet régional de santé » (PRS) qui rassemble des documents très différents. En haut de la pyramide, le plan stratégique régional de santé (PSRS) qui se décline en différents schémas couvrant plusieurs champs d’action appelés :

– schéma régional de prévention ;

– schéma régional de l’organisation des soins ;

– schéma régional d’organisation médico-sociale ;

Ces documents donnent lieu ensuite à différents programmes de mise en œuvre (programme régional de gestion de risque, de développement de la télémédecine, etc.).

Cette organisation répond à l’idée très positive de faire des ARS les pilotes et les responsables de la mise en cohérence de ces domaines d’actions interdépendants. Toutefois, la coexistence de documents multiples, et donc d’autant de procédures de définition, d’adoption ou de révision, a rendu le système trop rigide. Le caractère pyramidal partant de la définition d’un cadre stratégique à la déclinaison souple et transversale ne se justifie pas suffisamment. Il est donc proposé de réformer ce dispositif. L’article 38 prévoit de faire du PRS un document véritablement stratégique, fixant des orientations pour une période de dix ans. Il sera décliné en un document unique, transversal, le schéma régional de santé, défini sur cinq ans.

La territorialisation de la politique de santé repose sur la définition de zones et de territoires spécifiques dans lesquelles les ARS mènent leur action de régulation et d’organisation de l’offre de soins. Le projet de loi permettra d’assouplir la politique de territorialisation en simplifiant les conditions dans lesquelles les directeurs généraux d’ARS définissent les territoires de santé, qui correspondent à un bassin de vie sanitaire, ainsi que les zones de régulation de l’offre. Ces zones seront de deux types : celles spécifiques à l’offre en laboratoires de biologie médicale et celles distinguant les zones sous-denses et sur denses en offre de soins et en équipements. Elles seront définies par arrêté et deviendront donc un outil beaucoup plus souple d’emploi.

Dotée de ce nouveau cadre de gouvernance, la politique de santé peut mettre en œuvre l’objectif de réduction des inégalités sociales et territoriales de santé en accentuant la contribution des différents services de santé vers la prévention.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la prévention comme « l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire le nombre et la gravité des maladies, des accidents et des handicaps ». Or la gravité des maladies s’accroît avec les inégalités sociales : les plus défavorisés sont frappés plus tôt et plus durement par la maladie, les accidents et les handicaps. La précarité sociale est un facteur déterminant d’exposition aux différents risques pour la santé.

Une prévention efficace ne saurait encourager les comportements favorables pour la santé en faisant fi des libertés et des initiatives individuelles : la prévention n’est effective que lorsqu’elle est appropriée par les populations. Aussi, l’article premier du projet de loi définit pour la première fois, la « promotion de la santé » comme une composante de la politique de santé.

La promotion de la santé ne se confond pas avec le suivi sanitaire, ni même avec la prévention. Ce concept, établi par la Charte d’Ottawa adoptée le 12 novembre 1986 sous l’égide de l’OMS désigne les actions qui ont pour « but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l’améliorer ». Elle constitue donc un levier d’appropriation et de diffusion de la prévention en santé.

Elle doit être prise en compte dans l’ensemble des lieux de vie. Le lieu de travail n’y fait évidemment pas exception : aussi, en complément de l’article 6 du projet de loi qui donne un fondement légal à l’exercice des fonctions de médecin du travail par un collaborateur médecin, la Commission a adopté un article 6 bis qui consacre, à l’article L. 4624-1 du code du travail, la mission de prévention en santé exercée par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

La prévention en santé doit être précoce et toucher les personnes lors d’une phase décisive du parcours de vie : l’enfance, qui est aussi la période où les personnes sont le plus susceptibles de bénéficier de l’intervention des services de prévention collective. À ce titre, la politique de santé de l’enfant est apparue essentielle à la Commission.

La politique de santé de l’enfant mobilise de nombreux acteurs, placés sous l’autorité de plusieurs ministres : santé et affaire sociales, éducation nationale, sport, agriculture… Elle concerne différentes catégories de collectivités territoriales : les départements pour la protection maternelle et infantile, les communes et intercommunalités pour les activités périscolaires, les établissements d’accueil du jeune enfant, certains centres de santé ; elle relève également des organismes de sécurité sociale pour les branches famille et assurance maladie. Les actions sont de natures différentes : pour certaines individuelles, tels des examens de santé, des consultations de médecine préventive ou de médecine ambulatoire, pour d’autres collectives, en particulier à l’école. Ces actions sont parfois mal coordonnées ou mal actualisées au regard de la politique de santé, ou insuffisamment ciblées.

Aussi, la Commission a adopté plusieurs amendements à l’article premier visant à développer les grands principes d’une politique de santé de l’enfant et à les inscrire au cœur de la politique de santé dont l’État est le garant. Ainsi, la contribution du Haut conseil de la santé publique à la stratégie nationale de santé passera par l’évaluation des politiques de santé de l’enfant existantes et la formulation de propositions pour renforcer et améliorer leur coordination en vue du développement d’une politique de santé de l’enfant globale et concertée.

Cette politique doit prendre en compte les actions de prévention médico-sociale en faveur des enfants de moins de six ans menées par les services de la protection maternelle et infantile (PMI) et organisées par l’exécutif départemental. Or elles varient entre les territoires et ne font parfois l’objet d’aucune coordination avec les autres intervenants en santé publique présents sur un même territoire Ce constat a émergé au fil de nombreux rapports et contributions. Un avis du Conseil économique, social et environnemental du 14 octobre 2014 a notamment considéré que l’action sanitaire des PMI doit s’inscrire dans une stratégie nationale et a proposé « de repositionner la PMI comme un outil de mise en œuvre d’une stratégie nationale de santé qui donne la priorité à la prévention, à la proximité et à la réduction des inégalités ». Aussi, sur proposition du rapporteur, la Commission a établi, à l’article premier, dans le cadre de la politique de santé, une mission d’animation nationale par l’État des actions conduites par les services de la PMI.

Cette démarche s’inscrit en pleine cohérence avec l’article 16 du projet de loi qui prévoit en outre la désignation d’un médecin traitant pour les patients de moins de seize ans, dans un but de coordination des soins à destination de l’enfance et de l’adolescence. Ce médecin traitant pourra être un médecin spécialisé en médecine générale ou un médecin relevant d’une autre spécialité, par exemple un pédiatre. Il se trouvera ainsi dans un positionnement particulièrement adapté pour mettre en œuvre un suivi des parcours de santé des enfants dans un but de prévention et de meilleur accès aux soins, notamment pour les enfants vivant dans les familles les moins favorisées. La définition de ses missions particulières et des rémunérations associées seront précisées par les négociations conventionnelles qui définissent les relations entre l’assurance maladie et les médecins. La Commission a adopté un amendement de la rapporteure prévoyant la prise en compte des nouvelles missions de ce médecin traitant des patients de moins de 16 ans par les services de la protection maternelle et infantile et par les services de santé scolaire : à nouveau, la coordination des services de médecine préventive et des différents services de santé accessibles paraît essentielle.

Le parcours éducatif de santé

L’article 2 du projet visait à formaliser, dans le code de l’éducation, le lien entre la stratégie nationale de santé et les actions de promotion de la santé menées en milieu scolaire. La Commission a souhaité donner plus de portée à cette impulsion nouvelle de la politique de santé scolaire. À l’initiative du rapporteur et de Mme Martine Pinville, la Commission a adopté un amendement de réécriture globale de l’article 2 afin de définir un « parcours éducatif de santé », notion qui ne figure pas dans le code de l’éducation dans sa rédaction actuelle ni dans l’article 2 du projet de loi dans sa rédaction initiale.

Il s’agit d’inscrire l’ensemble des actions de promotion de la santé à l’école dans un cheminement cohérent, défini dans chaque établissement, avec la participation de l’ensemble des acteurs locaux concernés, comme les collectivités territoriales, et en pleine coordination avec les services de santé préventive. Cela permettra de proposer des actions ciblées, au cas par cas, groupées pour des classes d’élèves, mais aussi de permettre aux élèves de développer au cours de leur parcours scolaire des appétences particulières pour les problématiques de santé, afin de les inciter à prendre davantage soin d’eux-mêmes et à ne pas s’inscrire dans des démarches addictives, notamment à l’égard de l’alcool ou du tabac.

À nouveau, les liens entre les services de santé scolaire et ceux de la protection maternelle et infantile ainsi que les autres acteurs locaux dans le domaine de la santé sont renforcés.

Par ailleurs, l’article 3 du projet de loi vise à mieux prévenir les grossesses non désirées, en facilitant l’accès à la contraception d’urgence dans les établissements du secondaire. Les spécificités de cette consultation en matière de contraception doivent être prises en compte : elle permet en effet d’aider une jeune femme à faire le point sur ses pratiques et à prendre conscience des risques éventuels auxquels elle s’expose. Elle peut s’inscrire en cohérence avec des actions de promotion de la santé conduites dans le cadre du parcours éducatif de santé. La Commission a en outre adopté un amendement du rapporteur visant à favoriser la complémentarité de l’intervention des infirmiers scolaires avec celle des centres de planification et d’éducation familiale afin d’assurer l’accompagnement psychologique de l’élève et la mise en œuvre d’un suivi médical.

À l’article 2 bis, la Commission a par ailleurs étendu aux sages-femmes la dérogation, actuellement réservée aux médecins, à l’obligation d’information des titulaires de l’autorité parentale et de recueil de leur consentement, pour des actes pratiqués sur un mineur qui refuse que ses parents en soient informés. Cette dérogation concernera également les actes de prévention et de dépistage, et non plus les seuls traitements. Cette dérogation est également étendue aux infirmiers agissant sous la responsabilité d’un médecin, pour des actes de prévention, de dépistage ou de traitement lorsqu’ils s’imposent pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure de plus de quinze ans.

La prévention de l’alcoolisation des jeunes

La consommation d’alcool a des conséquences importantes sur le développement cérébral : retarder les consommations précoces de l’alcool et réduire les alcoolisations ponctuelles importantes des plus jeunes permet de limiter ces dommages, difficilement réversibles. De même, en cas de grossesses précoces associées à des épisodes d’alcoolisation, les risques de lésions fœtales sont importants, et peuvent entraîner des interruptions médicales de grossesses.

L’article 4 du projet de loi vise donc à mieux lutter contre les phénomènes d’alcoolisation massive, intense et répétée des plus jeunes. Dans ce but, l’éducation, la prévention et la prise en charge précoce et coordonnée des addictions sont les instruments prioritaires. Mais la répression pénale constitue également un outil. L’article 4 réprime cette alcoolisation dans le cadre de la répression du bizutage, redéfinit les différentes infractions en cas d’incitation directe à l’alcoolisation des mineurs et interdit la diffusion auprès des mineurs d’objets incitant directement à la consommation excessive d’alcool.

La Commission a renforcé cette orientation en prévoyant que les campagnes de lutte contre l’alcoolisme doivent également porter sur la prévention de la consommation excessive d’alcool chez les jeunes, en instituant pour la personne qui délivre une boisson alcoolique l’obligation d’exiger du client qu’il établisse la preuve de sa majorité et enfin en renvoyant la définition du contenu du message sanitaire devant figurer dans la publicité des boissons alcooliques à un arrêté du Ministre chargé de la santé : ceci permettra d’adapter le message aujourd’hui défini par la loi (« L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ») à l’évolution des politiques de prévention, par exemple en définissant des messages différents et en adaptant leur contenu en fonction des supports de communication, des produits et des publics.

Enfin parmi les mesures visant en particulier à protéger la santé des plus jeunes, la Commission a adopté un article 11 quinquies issu d’un amendement présenté par le Gouvernement renforçant les exigences applicables aux appareils permettant l’écoute de sons au moyen d’écouteurs ou d’oreillettes. Leur utilisation est actuellement en plein essor : plus de dix millions de casques sont vendus chaque année. Le critère actuel de puissance sonore maximale de sortie, qui prend insuffisamment en compte les différents risques, est remplacé par l’obligation pour ces appareils d’être conçus de façon à être sans danger pour l’audition de l’utilisateur dans des conditions normales d’utilisation ou d’utilisation raisonnablement prévisibles. En outre, à l’initiative de M. Gérard Bapt, un article 2 ter prévoit le dépistage de la surdité des jeunes adultes lors des Journées défense et citoyenneté.

Toute politique de santé doit prendre la mesure de l’explosion du problème du surpoids dans l’ensemble des pays développés ; la France ne fait pas exception à la règle. Le surpoids atteint aujourd’hui près d’un tiers des adultes et 15 % des enfants : il constitue le premier facteur de ce qu’il est convenu d’appeler « l’épidémie des maladies non transmissibles », comme le diabète ou l’hypertension artérielle ou certains cancers, pour lesquelles la prévention primaire au long cours, en adaptant les habitudes alimentaires, constitue pourtant un instrument efficace de protection.

Or les aliments ayant fait l’objet d’une transformation industrielle représentent aujourd’hui plus de 80 % des achats alimentaires. Aussi l’article 5 du projet de loi établit une signalétique simplifiée, complémentaire de la déclaration nutritionnelle, qui constitue un instrument de meilleure information du public, donc de meilleur choix nutritionnel, pour le plus grand nombre. L’affichage d’un score nutritionnel offrira à toutes les familles des repères simples, fondés sur des données scientifiques, solides, issues notamment des travaux du professeur Serge Hercberg, afin de pouvoir les orienter parmi les aliments et de prévenir le surpoids Cette démarche sera volontaire de la part des producteurs et des distributeurs : mais elle ne peut que répondre à une aspiration du plus grand nombre, à laquelle les grandes enseignes seront logiquement amenées à se rallier. Le projet de loi comporte ainsi une grande avancée potentielle dans la lutte contre l’obésité.

La Commission a notablement enrichi les mesures visant à renforcer la contribution de la nutrition à la santé. En cohérence avec la diversification et l’adaptation du message sanitaire figurant sur les publicités en matière d’alcool, la Commission a prévu, à l’article 5, à l’initiative du rapporteur, la révision régulière de l’information à caractère sanitaire figurant dans les messages publicitaires en faveur des boissons avec ajout de sucre et des produits alimentaires manufacturés. Le renouvellement des phrases-clés doit en effet contrer la baisse d’efficacité résultant de l’habitude de les voir. Plusieurs amendements adoptés par la Commission ont en outre établi un article 5 bis afin de soumettre à l’obligation de diffusion de ces messages sanitaires les publicités diffusées sur internet et afin d’augmenter significativement le montant de la contribution acquittée par les fabricants et distributeurs qui choisissent de ne pas afficher un tel message : cette contribution est affectée à l’INPES et contribue au financement des campagnes de prévention.

Un article 5 ter a en outre été adopté par la Commission pour prévoir que les campagnes d’information menées dans le cadre de la prévention de l’obésité et du surpoids doivent encourager l’activité physique régulière en intégrant un volet de promotion des modes de déplacements actifs, notamment le vélo et la marche. La mobilité quotidienne, vers l’école ou le travail, constitue en effet un gisement d’activité physique très important, souvent supérieur à la pratique d’un sport.

Enfin, la prévention en matière d’alimentation doit également prendre en compte les effets de l’anorexie mentale : la France compte 30 000 à 40 000 personnes souffrant de ce trouble du comportement alimentaire. L’anorexie mentale concerne 0,5 % des jeunes filles mais environ 20 % des jeunes filles adoptent des conduites de restriction et de jeûne à un moment de leur vie. Adopté par la Commission à l’initiative du rapporteur, l’article 5 quater établit, dans le code de la santé publique, à la suite des articles consacrés à la prévention de l’obésité et du surpoids, que la politique de santé contribue à la prévention de l’anorexie mentale et que la lutte contre la valorisation de la minceur excessive participe de cet objectif.

Les mesures en matière de santé environnementale

Le développement des affections non transmissibles procède également des effets délétères des expositions d’origines environnementales. La promotion de la santé environnementale doit figurer à la première place dans la politique de santé.

La Commission a ainsi consacré le concept d’exposome en prévoyant, à l’article premier, sa prise en compte pour l’analyse des risques, composante de la politique de santé. Par analogie avec le génome, l’exposome englobe l’ensemble des facteurs de risque non génétique et leurs interactions tout au long de la vie. Les expositions aux substances nocives pour l’organisme ne sont en effet pas seulement dangereuses par elles-mêmes : elles interagissent ce qui peut aggraver leurs effets. Inversement, une multitude de petits pas visant à diminuer l’exposition moyenne à différentes substances peuvent avoir des effets plus favorables et à moindre coût que la suppression de l’exposition à une seule substance. L’exposome constitue donc un guide pour la prévention, particulièrement en matière de santé environnementale. De même, l’exposome permet d’identifier les périodes cruciales du parcours de vie lors desquelles les expositions sont les plus dangereuses.

Le projet de loi prévoit également, à l’article 10, l’amélioration de l’information du public sur les risques sanitaires liés à la pollution de l’air dans le cadre des dispositifs de surveillance de la qualité de l’air et de ses effets sur la santé et sur l’environnement. La Commission a souhaité aller au-delà de cette amélioration de la gestion du dépassement des valeurs limites d’expositions aux substances surveillées et a assigné à l’État et aux collectivités territoriales un objectif d’abaissement de la moyenne annuelle des concentrations journalières des particules atmosphériques. Il devra être pris en compte dans le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie.

La Commission a également établi un article 11 bis qui inscrit dans la loi une déclinaison du plan national santé environnement (PNSE) en plans régionaux (PRSE) et qui en décrit la gouvernance régionale : ceci confortera la continuité de l’action interministérielle tant niveau national qu’au niveau régional.

Concernant les risques d’exposition à l’amiante, la Commission a renforcé le dispositif, établi à l’article 11 du projet de loi, qui donne au Préfet de nouvelles compétences pour faire cesser les expositions dans les immeubles bâtis ou à l’occasion d’activités actuellement non réglementées, telles les opérations « sauvage » de désamiantage conduites par des particuliers.

En outre la Commission a adopté un amendement du Gouvernement, établi à l’article 11 ter, qui pose, dans le code de la santé publique, le principe de la protection de la population contre les expositions sonores pouvant engendrer des dommages pour la santé et notamment celle des jeunes. L’exposition du public à des niveaux sonores de plus en plus élevés en discothèques, concerts ou festivals en plein air par exemple peut engendrer des effets irréversibles sur la santé. Dans un avis de septembre 2013 sur l’exposition aux niveaux sonores élevés, le Haut conseil de la santé publique recommande ainsi d’actualiser la réglementation existante afin de garantir une protection suffisante du public exposé à des hauts niveaux sonores. Il convient en outre de prendre en compte les impacts sanitaires extra-auditifs (hypertension artérielle, maladies cardiovasculaires, troubles psychologiques) en cas d’exposition répétée du voisinage aux troubles occasionnés par le bruit répété. L’action des pouvoirs publics, prévue par voie réglementaire, pourra donc se fonder sur ces nouvelles dispositions légales.

Enfin la Commission a souhaité accentuer les efforts engagés pour limiter les expositions aux perturbateurs endocriniens. Différentes directives européennes prévoient que les jouets peuvent contenir du Bisphénol A en concentration inférieure à 5 % depuis juillet 2013 et inférieure à 3 % à partir de juin 2015. Mais la réglementation européenne autorise la définition, au niveau national, de dispositions plus contraignantes, telles que celles prévues par l’article 2 de la loi n° 2012-1442 du 24 décembre 2012 visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du Bisphénol A, qui a prévu une interdiction complète dans les biberons, tétines et sucettes. Par cohérence et afin de renforcer la protection des enfants en bas âge, la Commission a donc prévu une interdiction complète du Bisphénol A dans l’ensemble des jouets et amusettes.

Le projet de loi apporte également des réponses concrètes, au plus près du terrain, pour lutter contre les infections épidémiques – VIH ou hépatites virales notamment – auprès des publics les plus à risque et des usagers de drogue.

L’article 7 du projet de loi vise à faciliter le dépistage précoce des maladies infectieuses, en particulier dans le but d’enrayer « l’épidémie cachée » du VIH : trop de personnes sont en effet dépistées aujourd’hui à un stade avancé de l’infection, ce qui traduit le fait qu’elles ont vécu avec le VIH sans le savoir pendant de nombreux mois ou des années. Or une personne non traitée est particulièrement susceptible de transmettre le virus ; a contrario, les traitements actuels, particulièrement s’ils sont précoces, réduisent considérablement le risque de transmission. Un dépistage précoce constitue la première arme pour casser la dynamique épidémique, en particulier dans les groupes à risque. L’article 7 du projet de loi vise en conséquence à permettre une large utilisation des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) du VIH et des hépatites virales, notamment par les associations qui sont au contact des populations les plus concernées.

L’article 7 permettra également la dispensation d’autotests de détection des maladies infectieuses, dans les pharmacies d’officine comme dans les centres de diagnostic et de prévention ou les structures associatives. La Commission a précisé les conditions de délivrance en prévoyant que la personne sera informée non seulement des conditions de réalisation du test et de ses conséquences mais également les conditions d’information et de conseil en matière de prévention, d’accompagnement et, le cas échéant, de prise en charge.

Afin de lever tous les obstacles au dépistage et au traitement précoce des maladies infectieuses, à l’initiative du rapporteur, la Commission a également prévu que l’ayant droit d’un assuré social peut demander que la prise en charge par les organismes d’assurance maladie des dépenses liées à certaines affections, par exemple le VIH, sera protégée par le secret et non visible sur les relevés de paiement du l’assureur. Cette mesure répond à une préconisation du Conseil national du SIDA dans un avis du 15 janvier 2015 qui relevait que, suite à un diagnostic de séropositivité au VIH, certains mineurs ont pu être amenés à différer une initiation de traitement par crainte de ne pas pouvoir, en pratique, conserver le secret sur cette affection à l’égard de leurs parents.

Les articles 8 et 9 du projet de loi visent par ailleurs à conforter la politique de réduction des risques infectieux et des dommages sanitaires et sociaux occasionnés par les produits stupéfiants : il s’agit de permettre aux toxicomanes de ne pas renoncer aux soins ce qui constitue un objectif partagé de l’ensemble des gouvernements depuis les années 1980 dans une logique pragmatique d’adaptation des actions de réduction des risques à l’évolution des besoins de santé. Pour la première fois, avec courage, cet objectif est affiché clairement dans un projet de loi de santé.

L’article 8 vise à clarifier le cadre juridique, actuellement mal établi, de cette politique menée au travers des centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogue (CAARUD) et à l’étendre, de manière adaptée, au milieu carcéral. Les amendements adoptés par la Commission ont complété la définition des actions entrant dans le cadre de cette « réduction des risques et des dommages », selon la nouvelle dénomination adoptée sur proposition du rapporteur.

Enfin l’article 9 offre la possibilité d’expérimenter un nouveau mode de prise en charge des usagers de drogue les plus éloignés des soins, en autorisant pendant une durée maximale de six ans, des salles de consommation à moindre risque : dans ces locaux gérés par les professionnels des CAARUD, la consommation des substances illicites sera autorisée, sous la supervision d’une équipe pluridisciplinaire. Mis en œuvre avec succès dans de nombreux pays comparables à la France, ces dispositifs permettront d’accueillir, de manière très encadrée, des personnes particulièrement vulnérables, hautement dépendantes aux stupéfiants, et les plus éloignées des soins. Le nouveau cadre permettra de créer avec ces usagers de drogues un rapport de confiance permettant de les orienter progressivement vers le soin.

La Commission a enrichi le texte d’origine d’un chapitre entier consacré à la lutte contre le tabagisme, qui est une priorité évidente dans la stratégie nationale de santé. Il faut rappeler que le tabac tue 73 000 personnes par an en France, soit 200 personnes par jour.

Treize des seize amendements à l’origine de ce nouveau chapitre Ier bis ont été déposés par le Gouvernement, et tendent pour l’essentiel à mettre en œuvre certaines des mesures du Programme national de réduction du tabagisme (PNRT), présenté en Conseil des ministres le 25 septembre 2014 par la ministre de la Santé, et qui s’inscrit lui-même dans le cadre du Plan cancer 2014-2019 (6). Le PNRT constitue à cet égard le premier plan ambitieux de lutte contre le tabagisme depuis 2008, et l’extension de l’interdiction de fumer dans les lieux publics fermés ; l’objectif est que les enfants nés dans vingt ans soient la première génération de non-fumeurs.

Quatre des dix mesures phares annoncées dans le PNRT ont ainsi été introduites dans le projet de loi : instauration du « paquet neutre », interdiction de fumer dans un véhicule en présence d’un enfant de moins de douze ans, encadrement du « vapotage » (restriction de la publicité et interdiction de l’usage de la cigarette électronique dans certains lieux publics), renforcement de l’encadrement des activités de lobbying de l’industrie du tabac.

Le nouveau chapitre Ier bis comporte également des mesures de transposition de la dernière directive « tabac » (7), en particulier l’interdiction dans les produits du tabac des arômes et des substances aux vertus supposément tonifiantes. Les autres mesures de cette directive seront transposées par ordonnance, l’article 53 habilitant le Gouvernement à cette fin.

Les initiatives du Gouvernement, qui ont toutes reçu le soutien du rapporteur, ont été complétées par celles des députés, qui ont fait adopter notamment l’interdiction des actions de mécénat de l’industrie du tabac dans le domaine de la santé (amendement du rapporteur), ou encore le renforcement de l’interdiction d’implantation de débits de tabac à proximité de certains lieux (amendement ayant pour première signataire notre collègue Michèle Delaunay).

L’amélioration de la prise en charge des patients constitue une caractéristique du projet de loi. Elle s’articule autour de deux pivots : dans le cadre de la médecine de ville avec la formalisation de parcours de santé et l’accès aux soins de premiers recours d’une part, dans le cadre des établissements de santé d’autre part.

Les articles 12 à 14 prévoient la mise en place de parcours du patient sans rupture de prise en charge. La coordination entre professionnels et le décloisonnement constituent les traits principaux des évolutions législatives proposées.

Dans la version initiale du projet, l’article 12 institue un service territorial de santé au public (STSP) dans les territoires de santé définis par les ARS. Ce service doit permettre d’améliorer la coordination des différents acteurs de la santé en vue d’améliorer l’état de santé de la population concernée. Ces orientations, par trop administratives, ont été modifiées à l’initiative du Gouvernement pour laisser davantage d’initiative aux professionnels de santé, notamment aux médecins généralistes, pour engager une démarche de coopération.

Le service territorial de santé au public dans la version initiale du projet de loi

Le STSP contribue à résorber les inégalités de santé à travers la poursuite d’objectifs définis au niveau du territoire à partir des besoins spécifiques identifiés, au niveau régional dans le cadre du plan régional de santé et au niveau national dans celui de la stratégie nationale de santé.

Le cadre du service territorial repose sur l’élaboration d’un diagnostic partagé. Les actions sont mises en œuvre par l’ARS en coordination avec les autres acteurs de santé sur la base d’un projet territorial et au sein d’un outil contractuel, le contrat territorial de santé.

Cette organisation fait suite au rapport de Mme Bernadette Devictor (8) portant sur l’élaboration d’un service public territorial de santé. Dans ce rapport, Mme Bernadette Devictor préconisait la mise en place d’un véritable service public doté des attributs dégagés par la jurisprudence administrative (égalité, continuité, neutralité et adaptabilité).

Le texte du projet de loi proposé n’a pas retenu ces propositions afin d’éviter toute confusion entre le STSP, qui implique que soit rendu un service à la population afin d’améliorer leur parcours de santé, et la notion de service public définie par la loi de Rolland. En effet, l’objectif est que le STSP puisse être réalisé par tous les acteurs du territoire, quel que soit leur statut (professionnels de santé libéraux, associations, établissements privés …). Il ne s’agit pas de réserver le STSP aux seules personnes morales de droit public, comme une vision restrictive du service public pourrait le laisser craindre.

En dépit de cet objectif, l’architecture retenue présentait quelques difficultés.

Le rapport de Mme Bernadette Devictor préconisait la mise en place d’un service selon une logique de « territorialisation ascendante ». La constitution d’un parcours de soins ne pouvait se comprendre qu’en tenant compte des besoins des usagers, des caractéristiques territoriales ou des données d’observations médicales et sociales. Force est de constater que la rédaction proposée ne traduit pas cette légitime attente. Il laisse place à une structuration de l’offre. Si le diagnostic territorial suppose une analyse des besoins, le dispositif ne propose aucun outil permettant d’y parvenir.

Dans le même ordre d’idée, la mise en place du projet territorial ne repose pas sur la coordination préalable des acteurs territoriaux de santé mais s’appuie sur une organisation « à la main » des ARS, ce qui a pu nourrir quelques craintes chez les professionnels de santé. Si tous les acteurs auditionnés s’accordent sur la nécessaire coordination, ils n’en soulignent pas moins l’application du principe de subsidiarité. La mise en place d’une coordination territoriale passe ainsi par la réflexion préalable des professionnels concernés, la mise en place d’un réseau par leurs soins, à charge ensuite pour l’ARS de s’assurer que l’ensemble du territoire est couvert.

L’infléchissement du dispositif

Quatre amendements déposés par le Gouvernement ont été adoptés par la Commission. Ils ont infléchi le dispositif, suivant en cela les travaux menés dans le cadre du groupe de travail sur l’organisation des soins de proximité dans les territoires animé par le docteur Jean-François Thebaut, membre du collège de la Haute autorité de santé (HAS), et par Mme Véronique Wallon, directrice générale de l’ARS Rhône-Alpes.

L’intitulé du chapitre Ier a fait l’objet d’une modification afin de mettre en évidence le rôle dimensionnant des acteurs de santé dans l’organisation des soins primaires et la structuration des parcours de santé.

La place du médecin généraliste est mieux affirmée avec l’instauration des équipes de soins primaires à l’article 12. Ces équipes contribueront à la structuration du parcours de santé des patients en coordination avec les acteurs du premier recours, dans une optique de prise en charge des besoins de soins non programmés et de coordination des soins.

La Commission a adopté un article 12 bis instituant une coopération entre professionnels avec la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé. Celles-ci seront le fruit de l’initiative de professionnels organisés en équipes de soins primaires, auxquels viendront s’adjoindre, selon les projets des fondateurs de la communauté, des acteurs du premier ou du second recours, ou des acteurs médico-sociaux et sociaux. Elles permettront de concourir à l’amélioration de la prise en charge des patients dans un souci de continuité, de cohérence, de qualité et de sécurité.

Ce double étage remplace le « service territorial de santé au public ». L’initiative de l’organisation des parcours de santé appartiendra en effet aux professionnels de santé eux-mêmes.

Les projets médicaux qui se mettent en place dans les territoires pour faciliter le parcours des patients seront pilotés par les professionnels présents sur le terrain et non par l’État, via les agences régionales de santé (ARS). Conséquence de ces orientations, la mise en place du diagnostic partagé ne se fera plus dans le cadre des « communautés professionnelles territoriales de santé ». Il sera élaboré par les ARS dans le cadre d’un territoire de démocratie sanitaire censé s’articuler avec les « communautés professionnelles territoriales de santé ». Il appartiendra aux ARS de s’assurer de l’accessibilité aux soins de l’ensemble des patients ressortissants de la région. Ces dispositions seront désormais prévues par l’article 38 du projet.

Enfin, afin de lutter contre la désertification médicale, le Gouvernement a également déposé un amendement visant à instituer un pacte national de lutte contre les déserts médicaux (article 12 ter). Partant du constat d’échec des mesures visant à lutter contre le désert médical (dispositifs isolés et sans cohérence), ce plan est articulé autour de trois points :

– changer la formation et faciliter l’installation des jeunes médecins ;

– transformer les conditions d’exercice dans le cadre des équipes de soins primaires et des communautés professionnelles de territoires ;

– investir dans les territoires isolés.

L’article 13 définit la politique de santé mentale à laquelle concourt la psychiatrie et réhabilite, par ailleurs, la psychiatrie de secteur. Dans la continuité des travaux du Pacte de confiance menés en 2013, les professionnels ont souligné la nécessité de concevoir une nouvelle organisation territoriale, prenant davantage en compte les besoins des usagers et favorisant une prise en charge coordonnée et pluri-professionnelle des patients.

Le texte proposé a fait l’objet d’améliorations substantielles. La Commission a ainsi souhaité renforcer le dispositif à l’initiative de la rapporteure sur plusieurs points.

L’organisation de la psychiatrie de secteur repose sur une mission de proximité. Celle-ci gagnera à être mieux remplie si le texte prévoit explicitement la coopération entre acteurs libéraux et hospitaliers. Cette dimension est essentielle pour la mise en œuvre et la réussite d’une politique décloisonnée.

Par ailleurs, l’ensemble des personnes auditionnées a fait part de la nécessité de préserver l’organisation actuelle de santé mentale. Les conseils locaux de santé mentale constituent à cet égard les instances idoines de concertation pour la mise en place des actions de prévention, de soins et d’insertion en termes de santé mentale et de psychiatrie. Il a ainsi été proposé de maintenir la situation existante en préservant les conseils locaux de santé mentale. Pour tenir compte de la diversité des territoires, le dispositif adopté par la Commission prévoit également la mise en place d’une commission spécialisée de santé mentale au sein des conseils territoriaux de santé.

La place de la psychiatrie infanto-juvénile occupe une place particulière au sein de la psychiatrie de secteur. Elle nécessite une prise en charge et une organisation adaptées. C’est la raison pour laquelle la Commission a souhaité lui accorder une attention particulière.

Enfin, la question de la prise en charge des personnes en situation de précarité requérant une réponse idoine, la Commission a souhaité prévoir organisation conforme aux attentes exprimées par nombre d’acteurs.

Des dispositions complémentaires adoptées en Commission

Ces dispositions ont été complétées par l’adoption de quatre amendements portant article additionnel après l’article 13.

L’article 13 bis vise tout d’abord à homogénéiser le traitement des situations des personnes faisant l’objet d’une hospitalisation sans consentement. La poursuite de l’hospitalisation complète est soumise au contrôle du juge des libertés et de la détention qui doit statuer dans un délai de six mois à compter de toute décision judiciaire prononcée à la suite d’un différend entre deux psychiatres et le préfet pour les patients relevant du droit commun de la levée des soins. Cet article tend à prévoir le report de ce délai en cas de décision consécutive au règlement des différends.

L’article 13 ter clarifie, quant à lui, les dispositions de l’article L. 3211-12-2 du code de la santé publique sur le lieu de l’audience en cas de transfert de la personne faisant l’objet de soins.

Par ailleurs, l’article 13 quater prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport consacré à l’organisation de l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de Police de Paris.

Enfin, l’article 13 quinquies affirme le caractère de dernier recours que devraient avoir isolement et contention pour répondre à l’importance croissante du recours à l’isolement et à la contention dans les services psychiatriques des hôpitaux généraux et dans les établissements publics de santé mentale (EPSM). ll encadre les mesures et prévoit un registre accessible aux tiers.

De nombreux patients se retrouvent dans une situation complexe à la fois médicale et psychosociale. L’association de plusieurs pathologies, leur degré de sévérité ou le recours à des hospitalisations répétées d’une part, l’isolement ou la vulnérabilité sociale, la situation de dépendance d’autre part justifient l’organisation d’un parcours adapté et centré sur le patient.

Plusieurs initiatives visant à une meilleure coordination des parcours ont déjà été prises. L’article 14 vise précisément à donner une base législative au concept de plateforme territoriale d’appui développé dans le cadre des expérimentations PAERPA.

Il met en place un service d’appui à la coordination des parcours complexes à destination des professionnels de santé. Piloté par les agences régionales de santé, ce service est institué en collaboration avec les collectivités territoriales, l’assurance maladie et les autres acteurs du territoire de santé.

Ces plateformes territoriales d’appui feront l’objet d’un diagnostic, animé par l’ARS, en concertation avec les acteurs du premier recours, les acteurs de la coordination et les usagers. Ce diagnostic permettra d’identifier les ressources, les points de rupture et les besoins des professionnels en matière d’appui à la coordination.

L’objet de la réforme consiste aussi à mieux structurer les organisations existantes dont la redondance nuit à une coordination optimale de la prise en charge des patients. Des conventionnements permettront d’améliorer les relations entre professionnels, de modifier les périmètres d’intervention des différents acteurs ou d’élargir le champ d’intervention des structures existantes.

Une cible d’environ 130 plates-formes est définie. Leur mise en place est associée à un objectif d’une économie pour l’ONDAM sous 5 ans.

Le Gouvernement a souhaité ajuster ce dispositif par le dépôt d’un amendement visant à définir les fonctions d’appui. Adopté en Commission, cet amendement précise le rôle pivot du médecin traitant dans la médecine de parcours. Point d’entrée du patient dans le système de santé, il lui revient de déclencher l’appui à la coordination. L’amendement précise aussi que l’organisation ressortissant aux ARS doit être pensée en coordination avec les professionnels et les usagers. Il précise enfin que les fonctions d’appui pourront être mises en œuvre par les équipes de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé.

Sur l’initiative de la rapporteure, le dispositif a été complété sur deux points.

Convaincue que la prise en compte du handicap relève du parcours complexe, la Commission a entendu préciser le dispositif pour tenir compte de la situation particulière de ces personnes. La prise en charge du handicap nécessite en effet l’intervention de plusieurs catégories de professionnels de santé, sociaux ou médico-sociaux.

La Commission a aussi entériné l’éligibilité des établissements d’hospitalisation à domicile (HAD) à la participation au fonctionnement d’une ou plusieurs plateformes territoriales d’appui. En effet, sur certains territoires, les établissements d’hospitalisation à domicile disposent d’une réelle compétence en matière de coordination médicale, soignante et psycho-sociale.

L’accessibilité aux soins se décline de plusieurs manières au sein du projet : l’accès aux soins de premier recours, la délégation d’actes ainsi que l’accompagnement des patients et des professionnels

S’agissant de l’accès aux soins de premier recours, le projet de loi prend appui sur une mesure phare, la généralisation du tiers payant pour la médecine de ville. S’y adjoignent d’autres dispositions dont l’objet vise à faciliter l’accès à une prise en charge de proximité.

La généralisation du tiers payant à la médecine de ville

L’article 18 dispense les assurés d’avancer les frais des consultations de médecine de ville à la hauteur des montants appelés à être remboursés par l’assurance maladie et par les organismes complémentaires. Il s’agit d’une technique de paiement du médecin, mais en aucun cas d’une « gratuité » des soins : le tiers payant ne couvre par exemple la part complémentaire au titre du ticket modérateur ou des éventuels dépassements qu’à la hauteur des garanties dont bénéficie l’assuré au titre de son contrat. Le tiers payant ne dispense en outre pas le patient du paiement direct des dépassements supplémentaires éventuellement pratiqués par le médecin : il constitue, à ce titre, un très bon révélateur de cet obstacle à l’accès aux soins, et devrait contribuer à en limiter la pratique. Enfin, il ne dispense pas non plus le patient de l’acquittement de la part des soins prise en charge par l’assurance maladie, au travers de ses cotisations ou des impôts affectés au financement de l’assurance-maladie. Il en est de même pour la part remboursée par les organismes complémentaires lorsqu’il cotise.

Le tiers payant permet de lever une contrainte de trésorerie et de faire régresser les situations de renoncement aux soins utiles. Il doit permettre à un plus grand nombre de nos compatriotes d’être soignés « au bon moment », ce qui évitera les coûts supplémentaires occasionnés par des soins tardifs, souvent effectués à l’hôpital. En outre, les spectres d’un nouveau nomadisme médical ou d’un recours inflationniste aux soins inutiles peuvent être réfutés : le tiers payant ne sera appliqué qu’en cas de respect du parcours de soins.

Les différents avantages de cette modalité de paiement du professionnel de santé expliquent pourquoi le tiers payant est d’ores et déjà très largement appliqué dans de nombreuses situations : il est de droit à l’hôpital, généralisé dans les laboratoires d’analyse médicale ou par les pharmacies d’officines selon le principe « tiers payant contre générique ». Le tiers payant constitue, à ce titre, un des facteurs d’attractivité du recours aux urgences hospitalières : sa généralisation à la médecine de ville sera donc en pleine cohérence avec l’effort engagé pour réussir le « virage ambulatoire » et orienter un plus grand nombre de patients vers les soins ambulatoires de premier recours. Et la « technique de paiement » que constitue le tiers payant n’aura d’incidence ni sur la liberté de prescription ni sur la liberté d’installation des médecins. Elle ne doit avoir aucune incidence sur la pratique médicale ni fragiliser le médecin dans sa relation à l’assurance maladie ou aux organismes complémentaires.

Mais les inquiétudes exprimées par de nombreux médecins sur la mise en œuvre sont légitimes et doivent être prises en compte : le tiers payant ne doit pas se traduire par des charges administratives et des frais supplémentaires ou avances de trésorerie pour les médecins. La rapporteure a affirmé le droit des professionnels de bénéficier du tiers payant en un seul geste : un « clic » doit suffire à garantir au médecin qu’il sera payé en temps et en heure.

Le texte du projet de loi envisageait la généralisation du tiers payant par la voie des conventions conclues entre les différentes professions et l’assurance maladie. Cette approche devait constituer une garantie d’appropriation du dispositif par les professionnels, mais il est apparu nécessaire d’apporter, dans la loi, des clarifications et des garanties supplémentaires. Il s’agit d’éviter tous risques de trésorerie pour les médecins, en raison de délais de paiement excessifs ; toutes difficultés d’identification des droits du patient et tous défauts de paiement des actes dispensés en cas de contestation ultérieure des droits du patient par l’organisme tiers payeur, et enfin les charges administratives liées à la gestion de la relation avec une pluralité d’organismes tiers payeurs.

Aussi, la Commission a adopté un amendement du Gouvernement qui précise le calendrier d’une généralisation par étapes du tiers payant et établit des obligations de résultat pour l’assurance maladie : le paiement au médecin ne pourra excéder sept jours et donnera lieu à des pénalités en cas de retard.

À l’initiative de votre rapporteure, la Commission a prévu la solution technique qui sera retenue conjointement par l’assurance maladie et par les organismes complémentaires assurant aux professionnels de santé, pour l’ensemble des paiements effectués par les tiers, la simplicité de l’utilisation, la lisibilité des droits et la garantie du paiement.

Les autres mesures améliorant l’accès aux soins

L’article 15 instaure ainsi un numéro national de permanence des soins ambulatoires (PDSA). Ce numéro simplifiera le maquis téléphonique actuel qui caractérise la régulation médicale de la PDSA. Hormis une amélioration rédactionnelle du dispositif, la Commission a souhaité réaffirmer le principe de la gratuité de l’accès à la PDSA et préciser que la régulation médicale doit être mieux articulée avec la psychiatrie d’urgence.

L’article 17 vise à renforcer la contribution des centres de santé à l’accès aux soins de premier recours. Bien que relevant du champ ambulatoire, les médecins de ces centres y sont salariés ; les tarifs facturés aux patients ne peuvent donner lieu à dépassement d’honoraires et le tiers payant y est d’ores et déjà pratiqué, de droit sur la part relevant de l’assurance maladie, et fréquemment sur la part complémentaire. Or les professionnels de santé des centres de santé ne bénéficient pas d’une équité de rémunération par rapport aux professionnels libéraux : les améliorations de rémunération consenties aux professionnels libéraux dans le cadre des conventions médicales liant l’assurance maladie aux représentants des différentes professions médicales ne sont pas automatiquement applicables aux professionnels exerçant dans les centres de santé. Aussi l’article 17 établit une clause d’examen régulier, lors des négociations des accords applicables aux centres de santé, des aides existantes pour les professionnels libéraux. La commission a souhaité garantir que les accords liant l’assurance maladie et les représentants des centres de santé devront prendre pleinement en compte la diversité de ces derniers en instituant une faculté d’opposition à l’accord, soit par la majorité des organisations représentatives des centres de soins infirmiers, soit par la majorité des organisations représentatives des centres de santé médicaux.

L’article 19 confie par ailleurs aux conseils nationaux de chacun des ordres professionnels médicaux une mission d’évaluation du respect, par les membres de ces ordres, du principe de non-discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins établi par l’article L. 1110-3 du code de la santé publique.

Les pratiques de refus de soins constituent un frein à l’accès aux soins mais sont aujourd’hui mal connues. Il est nécessaire d’objectiver les différentes formes de refus de soins illégitimes auxquels les patients peuvent être confrontés pour l’un des motifs discriminatoires définis par le code pénal ou parce qu’ils bénéficient d’un des dispositifs ne permettant pas au professionnel de santé d’appliquer un dépassement tarifaire.

Les ordres professionnels sont invités à se saisir de ce sujet et leur observation de ces pratiques doit pouvoir s’appuyer notamment sur des tests scientifiques. La Commission a approuvé ce choix de procéder par étapes et de responsabiliser les ordres professionnels. Elle a en outre adopté un amendement de la rapporteure prévoyant expressément la participation d’associations de patients agréés en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique aux observatoires professionnels de refus de soins établis par les conseils nationaux des ordres professionnels : il s’agit d’une garantie d’effectivité et d’appropriation par les ordres professionnels de la mission nouvelle qui leur est confiée. Il s’agit également d’une reconnaissance de la contribution des associations pour faciliter l’accès aux soins.

L’article 20 du projet, adopté par la Commission, va en outre permettre d’améliorer l’accès des populations précaires aux soins dentaires prothétiques et orthodontiques ainsi qu’aux dispositifs médicaux optiques et audioprothétiques. Pour ces soins qui occasionnent des restes élevés à charge des patients et des renoncements aux soins importants, un panier de soins à tarifs opposables sera constitué au profit des bénéficiaires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé (ACS) : les partenaires conventionnels pourront fixer des tarifs maxima applicables, à l’instar de ce qui est déjà appliqué en matière de couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C).

Cette mesure visant à lever les barrières financières à l’accès aux soins s’inscrit dans le prolongement de l’extension récente aux bénéficiaires de l’ACS de l’exonération de la participation forfaitaire et de la franchise médicale jusqu’alors prévue, à l’article L. 322-4 du code de la sécurité sociale pour les seuls bénéficiaires de la CMU-C (9).

En outre la Commission a réaffirmé la garantie apportée à chaque patient d’avoir un accès aux soins, notamment dans les établissements de santé, dans des délais raisonnables. L’article 26 A tient ainsi compte des territoires pour lesquels l’accessibilité peut être rendue malaisée en raison de particularités géographiques (montagne) ou touristiques.

Le projet de loi comporte des mesures de modernisation des professions de santé qui visent à la fois à adapter l’exercice de certains métiers, et à renforcer l’offre médicale.

La stratégie nationale de santé (SNS) a préconisé d’adapter le statut des auxiliaires médicaux. Il s’agit notamment de prévoir les cas de spécialisation de telle ou telle profession. C’est, par exemple, ce que le Président de la République a annoncé à l’occasion de la présentation du troisième plan Cancer (2014-2019), évoquant la création d’un statut d’infirmier clinicien en cancérologie.

Le projet de loi y pourvoit. Son article 30 instaure un exercice en pratique avancée des auxiliaires médicaux. Il se déroulera dans le cadre d’une équipe de soins en établissements de santé, coordonnée par un médecin. Un décret en Conseil d’État définira les domaines d’intervention ainsi que les conditions et les règles de l’exercice en pratique avancée. Les représentants des professionnels concernés ainsi que de l’Académie de médecine seront consultés pour avis avant la publication du décret de mise en œuvre. Le Gouvernement considère qu’entre un et trois pour cent de la profession sera concerné.

La Commission a aussi inséré un article additionnel après l’article 30. Il prévoit la création d’un statut d’assistant dentaire au sein du code de la santé publique.

L’assistant dentaire exercera sous la responsabilité et le contrôle d’un chirurgien-dentiste ou d’un médecin. Les conditions de diplôme ou de pratique permettant de prétendre à ce statut seront définies par voie réglementaire, en concertation avec les représentants des assistants dentaires ainsi que des médecins et chirurgiens-dentistes.

Le projet de loi permet également de lutter contre les difficultés d’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). L’article 31 prévoit que les sages-femmes pourront pratiquer directement l’IVG médicamenteuse. Cette disposition reconnaît l’implication des sages-femmes auprès des gynécologues, et apporte une réponse aux difficultés d’accès à des professionnels pratiquant l’IVG sur tout le territoire. Les sages-femmes seront mobilisées davantage encore dans le cadre de la politique de couverture vaccinale de la population. Le projet de loi les autorise à pratiquer la vaccination au profit de l’entourage de la femme enceinte et du nouveau-né.

Dans le même ordre d’idée, l’article 32 prévoyait d’autoriser les pharmaciens à pratiquer la vaccination, dans des conditions définies par voie réglementaire. Cette disposition n’a pas suscité l’adhésion des professionnels. Intégrée dans un projet de loi portant des réformes particulièrement ambitieuses, elle a donné le sentiment de modifier des équilibres sans fixer d’objectifs précis, ni indiquer clairement les conditions de mise en œuvre (en termes de formation, d’équipement, etc.). Sur proposition du rapporteur, la Commission a donc supprimé cet article.

Certains professionnels de santé verront également leur rôle renforcé dans la lutte contre le tabagisme. L’article 33 du projet de loi élargit la possibilité de prescrire des substituts nicotiniques notamment aux médecinx du travail et permet aux sages-femmes d’en prescrire à l’entourage de la femme enceinte. Les patients bénéficient d’une prise en charge de l’assurance maladie à hauteur de 50 euros, voire de 150 euros pour les femmes enceintes et les jeunes de moins de 25 ans, dans le cadre du forfait sevrage tabagique.

L’accessibilité à des soins de qualité passe par un meilleur accompagnement et une plus grande information des patients.

● Tel est l’objet de la mise en place, à l’article 21, du service public d’information en santé, qui consistera en une plateforme multimédia organisée par les ARS. La Commission a complété ce dispositif en insistant sur son accessibilité aux personnes handicapées.

Après l’article 21, ont également été adoptés deux amendements portant article additionnel.

L’article 21 bis prévoit la mise en place, sur décision de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), d’un groupe opérationnel de synthèse comprenant notamment une équipe pluri-professionnelle. Ce groupe est chargé de mettre en œuvre la réponse à la situation de la personne handicapée sur la base d’un plan d’accompagnement global défini à partir de ses besoins.

L’article 21 ter promeut la médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique, qui constituent des outils d’aide à l’accompagnement des publics vulnérables Au regard de pratiques hétérogènes, il s’agit en particulier de donner mission à la Haute autorité de santé d’élaborer ou de valider des référentiels de compétences et de formation et de préciser le cadre déontologique d’intervention.

L’information sur le coût de l’hospitalisation, à l’article 23, constitue un autre aspect de cette orientation avec l’obligation faite à tous les établissements de santé de délivrer au patient un document détaillant le coût de sa prise en charge. Ce dispositif a été complété par l’adoption d’un amendement portant article additionnel après l’article 23. L’article 23 bis précise à cet égard que, pour toute évacuation sanitaire programmée effectuée à l’initiative de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont les ressources ne permettent plus la prise en charge des patients, les personnes évacuées et leurs accompagnateurs reçoivent un document informant notamment des conséquences, financières, du transfert. Dans la majeure partie des cas, l’absence d’information laisse ces personnes esseulées, en proie à des difficultés tant financières que d’organisation du parcours de soins.

● L’article 22 instaure enfin une expérimentation visant à mieux accompagner les patients sujets à des maladies chroniques et dont le dispositif a été amélioré par la Commission. La rédaction du projet de loi privilégiant une approche médicalisée, la Commission a entendu davantage insister sur le caractère multidimensionnel de la prise en charge (dimension sanitaire, sociale et administrative) à l’initiative de la rapporteure. Le principe de la mise en place d’un plan personnalisé achevant l’édifice a également été approuvé par la Commission.

Avec l’adoption d’un amendement portant article additionnel après l’article 22, la Commission a entendu davantage faciliter l’accompagnement des personnes handicapées. L’article 22 bis vise à permettre au département de mettre en place un mécanisme de tiers payant pour l’achat des aides techniques, pour les dépenses d’aménagement du logement et du véhicule, ainsi que pour les aides exceptionnelles faisant l’objet d’un financement par la prestation de compensation du handicap, dès la décision d’attribution de l’aide prise par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées.

L’accessibilité aux soins se traduit aussi par l’instauration d’outils au profit des professionnels permettant d’assurer une meilleure coordination des soins.

L’article 24 instaure la systématisation des lettres de liaisons entre la médecine de ville, via le médecin traitant, et les établissements de santé. Cette lettre, qui pourra être dématérialisée, comportera les informations nécessaires à une meilleure prise en charge des patients.

Par ailleurs, l’article 25 constitue un virage majeur dans l’échange et le partage de l’information en lien avec l’article 47 relatif aux données de santé. Pour mémoire, ce dernier article prévoit que le numéro d’inscription au répertoire de l’INSEE sera utilisé comme identifiant de santé pour la prise en charge des personnes à des fins sanitaires et médico-sociales. Cette réforme permettra d’améliorer les parcours de soins des patients.

L’article 25 introduit la notion d’équipe de soins, constituée des professionnels de santé et médico-sociaux, au sein de laquelle pourront circuler les données nécessaires à la prise en charge du patient, dont le consentement est présumé. La définition de l’équipe de soins a été complétée par l’adoption d’un amendement visant à inclure les professionnels de santé très investis dans la prise en charge de la douleur.

Cet article refonde par ailleurs le DMP, désormais intitulé « dossier médical partagé » et dont la mise en œuvre ressortira à l’assurance maladie. L’accès permanent au DMP est réaffirmé au côté du possible masquage des données par le patient et de son accès à la liste des professionnels autorisés à le consulter. Plusieurs points ont été améliorés par la Commission parmi lesquels le contenu du DMP : il pourra inclure des volets relatifs aux dons d’organes, aux directives anticipées ou à la personne de confiance.

La rénovation de l’hôpital public est opérée au travers des articles 26 et 27 relatifs à la réintroduction du bloc de service public hospitalier d’une part et à l’instauration de groupement hospitalier de territoire d’autre part. Les articles 34 et 37 complètent ces orientations par des mesures d’attractivité des établissements publics de santé.

Dans la continuité du rapport remis par M. Couty (10), l’article 26 propose de renouer avec la tradition française du service public par le biais d’un rétablissement d’un bloc de compétences. Depuis la loi hôpital, patients, santé et territoire (HPST), le service public se caractérise par une approche matérielle résumée au travers de quatorze missions précisées à l’article L. 6112-1. Y concourent les établissements de santé, publics comme privés.

Si l’énumération des missions de service public permet d’identifier les missions principales de service public, elle ne constitue pas une liste exhaustive des obligations qui s’imposent au secteur non lucratif. Toujours selon le rapport Couty, 80 % des missions des activités de soins actuellement assumées par les établissements publics de santé ne sont pas incluses dans le champ de l’article L. 6112–1.

Les principales caractéristiques du SPH

L’article 26 précise les éléments de bases du SPH, tels que les activités de soins, de recherche et d’enseignement. Des obligations au titre du SPH sont par ailleurs définies, parmi lesquelles l’absence de dépassements d’honoraires.

La réaffirmation du SPH n’exclut pas de pouvoir reconnaître la participation du secteur privé dans la mesure où il offre des garanties identiques au secteur public. Pour les actuels établissements de santé privés d’intérêt collectif, une procédure d’habilitation de plein droit est prévue, les ESPIC étant aujourd’hui soumis à des règles très proches de ce que sera demain le SPH. Les établissements privés à but lucratif pourront aussi demander à être habilités.

Une nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement en Commission

Le rejet de la rédaction proposée par les cliniques privées s’est traduit par la mise en place d’un groupe de travail sur la rénovation du SPH. Les premières conclusions ont abouti à réaffirmer l’attachement au principe du non-dépassement d’honoraires pour les établissements privés habilités à participer au SPH. A été également réaffirmée, la règle aujourd’hui en vigueur selon laquelle l’appartenance au service public hospitalier n’a aucun impact sur les autorisations d’activités de soins.

Un amendement gouvernemental a ainsi proposé une nouvelle rédaction tenant compte de ces éléments. Cet amendement pérennise également la catégorie des ESPIC que le projet de loi avait initialement supprimée. La nouvelle rédaction réserve une place particulière aux établissements privés disposant d’une autorisation au titre de la médecine d’urgence. Ils se voient associés au SPH sous réserve de ne pas appliquer de dépassement d’honoraires pour les patients pris en charge en situation d’urgence ou dans le cadre de la permanence des soins, y compris pour les soins consécutifs.

Les améliorations apportées par la Commission

L’amendement déposé par le Gouvernement a fait l’objet d’améliorations substantielles à l’initiative des rapporteurs.

La Commission a ainsi précisé que les actions des établissements de santé doivent pouvoir être coordonnées avec les structures telles que les centres de santé ou les maisons de santé. La notion de parcours de soins implique en effet que les actions sanitaires puissent être envisagées de manière complémentaire et non exclusive.

Le développement des soins, notamment palliatifs, sous forme ambulatoire ou à domicile, en substitution à l’hospitalisation avec hébergement, contribue à la qualité et à l’efficience des soins. Dans son dernier rapport, la Cour des Comptes suggère une plus grande intervention des structures d’hospitalisation à domicile (HAD) en la matière. Un amendement a ainsi été adopté à l’initiative de la rapporteure pour tenir compte des modes de prise en charge, centrée autour du maintien au domicile notamment en matière de soins palliatifs et du retour précoce au domicile dès lors que l’état de santé du patient le permet.

L’article 27 instaure les groupements hospitaliers de territoire (GHT) en lieu et place des communautés hospitalières de territoire.

L’expérience a montré que les dynamiques de convergence les plus fortes entre établissements de santé ne passent pas nécessairement par la création d’une personnalité morale mais plutôt par la mise en place de directions communes selon des modalités conventionnelles. Ainsi, sur les 626 groupements de coopération sanitaires référencés, 22 sont des GCS-établissements de santé dotés de la personnalité morale.

La mise en place d’une coopération conventionnelle obligatoire

Le GHT constitue ainsi une nouvelle forme de coopération conventionnelle fondée sur une adhésion obligatoire des établissements publics de santé.

L’apport majeur de ce dispositif réside ainsi dans le caractère obligatoire, un établissement public ne pouvant par ailleurs être membre que d’un seul GHT. Des exceptions sont toutefois prévues pour tenir compte de la situation particulière des établissements (CHU, psychiatrie).

L’objet de la coopération consiste à définir une stratégie commune. À la différence des actuelles communautés hospitalières de territoire, les GHT devront également élaborer un projet médical partagé. Il convient en effet de garantir une égalité d’accès à des soins sécurisés et de qualité. Elle vise également à rationaliser les modes de gestion soit par une mise en commun de fonctions (achats, informatisation médicale, formation), soit par des transferts d’activités entre établissements. Un établissement support sera désigné pour assurer la gestion des fonctions mutualisées.

Le projet de loi définit également les modalités d’associations des établissements privés qui se voient reconnaître le statut d’établissements partenaires.

Une nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement en Commission

Le dispositif proposé a nourri quelques craintes et s’est traduit par le dépôt d’un amendement gouvernemental de rédaction globale de l’article adopté par la Commission. S’il ne remet pas en question le cœur même du dispositif (convention, caractère obligatoire pour les établissements publics, projet médical partagé), l’amendement précise le dispositif en plusieurs points :

– la place spécifique des CHU : tous les GHT seront associés à un CHU (pour les activités H-U que sont l’enseignement, la recherche, la prospective en matière de démographie médicale et le recours. Parallèlement, le CHU pourra être partie à un GHT à raison des soins de proximité qu’il assure. 80 % de l’activité d’un CHU consiste à assurer une prise en charge de proximité ;

– la place spécifique des centres hospitaliers spécialisés en leur permettant d’être associés à d’autres GHT compte tenu de la sectorisation ;

– la spécificité territoriale des établissements et services d’hospitalisation à domicile en leur permettant d’être associés à d’autres GHT compte tenu du principe d’exclusivité territoriale qui les caractérisent ;

– la clarification de la place des établissements privés en leur octroyant un statut de partenaire distinct du statut prévu pour les établissements publics de santé et médico-sociaux ;

– la mise en place de dispositions spécifiques à l’assistance publique- hôpitaux de Paris, aux hospices civils de Lyon ou à l’assistance publique- hôpitaux de Marseille, qui se caractérisent par une implantation multi-site dans des territoires d’une très grande hétérogénéité.

– l’introduction d’une démarche conjointe de certification des comptes.

Les améliorations apportées par la Commission

L’amendement déposé par le Gouvernement a fait l’objet d’améliorations substantielles à l’initiative de la rapporteure. Deux idées peuvent être retenues.

Un sous-amendement a complété la gouvernance du GHT en réservant une place particulière aux élus au sein d’un comité territorial. Composé des représentants des élus des collectivités territoriales aux conseils de surveillance des établissements parties au GHT, il est chargé d’évaluer les actions mises en œuvre par celui. Il peut émettre des propositions en ce sens et est informé des suites qui y ont été données. Ce comité territorial pourra avoir un rôle dans la désignation de l’établissement support de GHT.

Un deuxième sous-amendement précise également la mise en place du système d’information médicale du GHT. Il prévoit la mise en place d’un schéma directeur des systèmes d’information permettant l’interopérabilité des systèmes existants, leur remplacement à raison de l’obsolescence. L’objectif à terme vise à constituer progressivement un système unique pour l’ensemble du GHT.

Les mesures d’attractivité des hôpitaux publics tiennent compte de l’environnement concurrentiel auquel ils se trouvent confrontés. Le projet de loi entend doter les établissements publics des outils nécessaires au maintien d’une certaine activité dans le strict respect des missions de service public qu’ils doivent assumer.

L’article 34 vise ainsi à lutter contre les dérives de l’intérim médical, domaine sur lequel notre collègue Olivier Véran avait largement investigué. La mesure proposée vise à plafonner la rémunération des praticiens intérimaires ainsi que les frais afférents à leurs recrutements. Le système actuel est caractérisé par une concurrence acharnée entre établissements : rémunérations exorbitantes, dispositif réglementaire de rémunération litigieux. L’article prévoit la constitution sur la base du volontariat d’un volant de médecins hospitaliers chargé d’effectuer des remplacements au sein d’une région. Ces personnels seraient placés en position de praticiens remplaçants et relèveraient du centre national de gestion.

À l’article 37, le texte prévoit par ailleurs la mise en œuvre d’une recommandation du conseil stratégique des industries de santé. Il vise à réduire les délais de mise en place des recherches cliniques industrielles au sein des établissements de santé afin de renforcer l’attractivité et l’excellence de la recherche médicale française.

Le texte fait ainsi évoluer le dispositif des matériaux de thérapie innovante préparée ponctuellement (MTI PP). D’une part, il prévoit que les établissements de santé titulaires d’une autorisation au titre des tissus cellulaires et des préparations de thérapie cellulaires puissent obtenir l’autorisation de fabriquer des MTI PP. D’autre part, il autorise l’importation et l’exportation des MTI PP afin de ne pas pénaliser les travaux des chercheurs français dans le cadre de projets européens.

En Commission, le dispositif a été complété par voie d’amendement gouvernemental afin de permettre aux établissements de santé de préparer, dans le cadre des recherches biomédicales, des médicaments de thérapie innovante lorsque ces derniers sont destinés à être mis sur le marché dans les États membres. Ainsi, les établissements de santé déjà titulaires d’une autorisation d’unité de thérapie cellulaire pourront solliciter auprès de l’agence nationale de sécurité du médicament une autorisation complémentaire pour pouvoir préparer ces médicaments dans le cadre des recherches biomédicales.

Ce texte confère une nouvelle portée au principe de l’autonomie de la personne, d’affirmation de droits individuels, mais surtout collectifs, permettant aux représentants d’usagers de peser sur les politiques de santé et ce grâce à des dispositifs tels que l’accès à une information en santé ouverte mais sécurisée, le dispositif de l’action de groupe, l’association des usagers à l’élaboration de la politique de santé et au renforcement des droits.

Instaurées par la loi du 21 juillet 2009 précitée, deux enceintes permettent aujourd’hui l’expression des usagers et des professionnels de santé au niveau local.

Les conférences régionales de la santé et de l’autonomie (CRSA) assurent la représentation des acteurs du domaine de la santé et notamment des usagers. Elles peuvent formuler toute proposition aux directeurs généraux d’ARS et sont consultées sur les principaux documents de planification, dont les PRS. Elles organisent le débat public sur les questions de santé. Chaque CRSA publie un rapport annuel sur le respect des droits des usagers.

Dans les territoires de soins déterminés par les ARS, les conférences de territoire rassemblent des représentants des professionnels de santé, des élus, des représentants associatifs et des usagers. Elles participent à la définition des besoins locaux de santé, peuvent formuler des propositions au directeur général de l’ARS, contribuer à l’élaboration du PRS et signer des contrats locaux de santé avec l’ARS en fonction de problématiques locales.

Dans son rapport annuel sur l’exécution des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014, la Cour des comptes a souligné le bon fonctionnement des CRSA mais également mis en avant le relatif échec des conférences de territoire. Elle a relevé le caractère trop limité de ses missions, et une difficulté à mettre en place une organisation efficace.

Dans ce contexte, l’article 38 du projet de loi renforce les dispositifs de démocratie sanitaire. Il prévoit notamment de remplacer les conférences de territoire par des conseils territoriaux de santé (CTS). Il organise au sein d’une formation spécifique l’expression des usagers et pourra être saisi de demandes de médiation en santé. Le CTS participera à la réalisation du diagnostic territorial partagé. Comme la conférence de territoire, il contribue à l’élaboration du PRS, mais également à sa mise en œuvre, à son suivi ainsi qu’à son évaluation. À la suite de l’adoption d’un amendement de votre rapporteure, les CRSA pourront également être saisies de demandes de médiation dans le domaine de la santé.

Les articles 43 et 44 procèdent à l’amélioration de la place des usagers au sein des agences sanitaires et des établissements publics de santé.

L’article 43 met en œuvre les recommandations de la conférence nationale de santé en prévoyant une obligation légale de représentation des usagers dans les organes de gouvernance de toutes les agences sanitaires nationales. Les représentants devront faire partie des associations disposant d’un agrément en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique. Chaque agence procédera à un appel à candidature auprès des associations nationales pour la désignation de représentants. Ces agences prendront en charge le coût du remboursement des frais de déplacement, mais aussi de formation ainsi que les indemnités du congé de représentation.

Il semble cependant nécessaire de conforter davantage encore la présence des usagers.

La loi du 4 mars 2002 (11) a consacré la notion de droit des malades. Dans les auditions menées par vos rapporteurs, de nombreux interlocuteurs ont insisté sur la nécessité de mieux associer les usagers du système de santé à son organisation. Si des avancées ont été opérées, des améliorations substantielles mériteraient d’être adoptées par le législateur en vue d’un « An II de la démocratie sanitaire ». Mme Claire Compagnon, auteure d’un rapport sur la démocratie sanitaire, Mme Bernadette Devictor, auteure du rapport sur le service public territorial de santé ou encore les représentants du collectif interassociatif sur la santé ont tous insisté sur la nécessité de renforcer le dispositif du projet de loi en plusieurs points :

– la diversification des profils de représentants d’usagers nécessite l’instauration d’un statut leur permettant de se préparer à leur mandat : crédits de temps, décharge d’activité, protection au titre du mandat exercé mais aussi généralisation de la formation. La mission des représentants des usagers n’en sera que mieux affirmée ;

– le projet de loi de loi prévoit la généralisation de la participation des usagers dans un certain nombre d’instances de décisions d’autorités ou d’organismes sanitaires. Il serait à cet égard opportun d’en renforcer la présence au sein du comité économique des produits de santé. De même, s’affirme, de manière croissante, la nécessité d’une consultation systématique des usagers du système de santé sur l’accord conclu entre l’État et l’industrie pharmaceutique fixant les cadres de négociation des prix des médicaments et des produits de santé. Abordées en commission, ces questions devraient pouvoir trouver une réponse dans le cadre de l’examen du texte en séance publique ;

– l’idée d’un droit d’alerte des usagers sur les réunions du collège tend à émerger. Il s’agirait de renforcer la publicité de ses réunions sur des thèmes précis.

Les rapports Couty et Compagnon ont tous deux souligné la nécessité de renforcer la place de l’usager au sein des établissements de santé. L’article 44 modifie à cet égard les missions de la Commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC) des établissements de santé qui sera dorénavant appelée commission des usagers (CDU).

La commission est aujourd’hui consultée sur la politique de l’établissement en termes d’accueil et de prise en charge. Au terme du projet de loi, elle pourra l’être sur les questions de qualité, de sécurité des soins, d’organisation du parcours de soins et d’information sur les droits des usagers. La nouvelle rédaction introduit aussi la possibilité d’un droit de suite s’agissant des plaintes ou réclamations formées par les usagers.

La Commission a par ailleurs suivi les préconisations des rapporteurs sur ce point en adoptant ainsi trois amendements.

Plus qu’une chambre d’enregistrement des plaintes et des réclamations, la CDU est désormais investie d’un véritable pouvoir d’autosaisine sur tout sujet relatif à la politique de qualité et de sécurité de l’établissement ainsi que d’un véritable droit de suite portant sur les propositions qu’elle établit, sur les plaintes qu’elle instruit et sur les suites données par l’établissement en cas de survenue d’événements indésirables graves.

Pour que leur place et leur rôle soient mieux identifiés et reconnus, les CDU auront aussi vocation à être présidées par un représentant des usagers.

Enfin, un dernier amendement adopté vise à rétablir une disposition supprimée par le texte de loi. Le principe de la transmission du rapport présenté par la CDU portant sur les droits des usagers et la qualité de l’accueil et de la prise en charge sera comme aujourd’hui transmis à la CRSA et à l’ARS.

Renforcer les droits des usagers, c’est aussi leur faciliter l’accès à la justice. À cette fin, l’article 45 propose la création d’une action de groupe en santé, sur le modèle prévu en matière de consommation par la loi du 17 mars 2014 (12).

Jusqu’alors, les dommages corporels sériels causés par des produits de santé, qu’il s’agisse par exemple du Mediator ou des prothèses PIP, étaient réparés soit à l’issue de procédures juridictionnelles individuelles, soit par la mise en place de mécanismes ad hoc, faisant appel au moins transitoirement à la solidarité nationale, via l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM). L’instauration d’une procédure d’action de groupe doit permettre aux victimes d’unir leurs forces, afin que les responsables des dommages sériels, fort heureusement rares, assument directement la réparation des préjudices.

Les associations agréées d’usagers du système de santé, au niveau national comme au niveau régional, pourront introduire une action de groupe afin d’obtenir réparation de l’intégralité des préjudices résultant d’un dommage corporel causé par un produit de santé, entendu au sens large des produits soumis au contrôle de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Afin d’éviter tout conflit d’intérêts, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure, qui ferme l’action de groupe aux associations ayant une activité annexe de commercialisation de produits de santé.

La procédure se déroulera en deux phases.

Dans une première phase, le juge saisi de la demande devra s’assurer de sa recevabilité, constater la responsabilité du producteur, du fournisseur ou de l’utilisateur du produit de santé, et définir les critères permettant aux usagers de rejoindre l’action de groupe. Le délai de rattachement pourra atteindre cinq ans après mise en œuvre, par les responsables, des mesures de publicité décidées par le juge. Le fond du droit de la responsabilité n’étant pas modifié, les responsables devront avoir commis un manquement à leurs obligations légales ou réglementaires. Le texte ne désignant pas de juridiction spécifique, le juge saisi devra donc être celui qui est territorialement et sectoriellement compétent (juge judiciaire lorsque le responsable supposé est une personne privée, juge administratif lorsqu’il est une personne publique).

À l’initiative de la rapporteure, la Commission a prévu, comme dans l’action de groupe en consommation, la possibilité pour le juge de phase 1 de condamner les responsables au paiement d’une provision pour frais de justice, permettant à l’association d’assumer les coûts induits par la phase 2, notamment les frais de conseil.

Car, sur la base du jugement de phase 1, les usagers ayant décidé de rejoindre l’action de groupe solliciteront dans une seconde phase l’indemnisation des préjudices auprès des responsables. S’ils n’obtiennent pas satisfaction à l’amiable, la question pourra être portée devant un second juge, différent du premier. La spécificité de cette phase 2, en matière de santé, réside dans la nécessaire individualisation de l’indemnisation, les préjudices variant presque systématiquement d’une victime à l’autre.

Le texte prévoit la possibilité d’une médiation, décidée par le juge saisi en phase 1. À l’initiative de la rapporteure, la Commission a décidé que la médiation ne pourra intervenir qu’à la demande de l’ensemble des parties, et non d’une seule, comme prévu par le droit commun de la médiation, et dans le cadre de l’action de groupe en consommation. Le recours à la médiation doit en effet rester pleinement choisi : d’une part, pour en garantir les chances de succès ; d’autre part, car ses conséquences ne sont pas neutres. Ainsi, la convention de médiation peut déterminer les conditions de l’indemnisation sans pour autant désigner de responsable. Or, l’association à l’origine de l’action de groupe peut tenir à ce que le responsable soit jugé comme tel par un tribunal.

Contre l’avis du Gouvernement, la Commission a sensiblement modifié les modalités d’entrée en vigueur du dispositif. Le texte d’origine prévoyait que les dispositions introduites dans le code de la santé publique par l’article 45 ne soient pas applicables aux manquements ayant cessé avant leur entrée en vigueur. Cela signifie que des dommages nés ou à naître, mais résultant de produits qui ne seraient plus fabriqués, distribués ou prescrits à la date d’entrée en vigueur, ne pourraient pas faire l’objet d’une action de groupe. Cela nuirait à l’efficacité du dispositif, et c’est la raison pour laquelle il convenait de supprimer cette disposition. L’action de groupe entrera donc en vigueur au plus tard le 1er juillet 2016, ou à une date antérieure fixée par décret en Conseil d’État. Pourront faire l’objet d’une action de groupe les dommages non couverts par les règles classiques de prescription, qui ne sont pas modifiées par le projet de loi.

Enfin, la Commission a demandé que le Gouvernement remette au Parlement un rapport faisant le bilan de l’action de groupe en santé, trente mois au plus tard après son entrée en vigueur (soit le 1er janvier 2019).

La Commission a complété ces dispositions en adoptant article 46 bis visant à améliorer l’accès à l’assurance et à l’emprunt des personnes ayant eu un problème grave de santé : il instaure, pour les candidats à l’emprunt ayant eu des pathologies cancéreuses, un « droit à l’oubli », c’est-à-dire un délai au-delà duquel ils ne pourront se voir exiger aucune majoration de tarifs d’assurance ni d’exclusion spécifique de garanties.

La mise en place de ce droit a été annoncée par le Président de la République lors de la présentation du troisième plan Cancer. Le projet de loi permet de la concrétiser.

Un article 46 ter a également été intégré au projet de loi par la Commission. Sur proposition du rapporteur, il clarifie le droit applicable au prélèvement d’organes.

Cet article vise la clarification. Trop souvent en effet, les familles se trouvent désemparées, ne sachant que répondre aux équipes soignantes qui leur demandent si le défunt s’était opposé au prélèvement d’organes de son vivant. Cela la conduit bien naturellement à répondre avec prudence, empêchant la plupart du temps le prélèvement. Il convient donc de mieux organiser le traitement de cette question.

En premier lieu, il convient de rappeler que ce choix est un choix personnel qui relève de chacun. Il doit donc être formulé du vivant et le projet de loi prévoit son enregistrement sur un fichier national unique. Cela rend le droit clair et évite de faire des interrogations douloureuses sur les familles endeuillées.

Il est prévu ensuite de garantir le droit à l’information des proches qui doivent être informés des prélèvements envisagés.

Ces modifications préservent l’équilibre actuel de la législation. Elles se contentent de clarifier le dispositif, de le centrer sur les mineurs, et de décrire précisément les rôles et droits de chacun : patients, proches d’un patient décédé, équipes médicales.

Les articles 48 et 49 visent à améliorer la place du dialogue social au sein des établissements de santé.

L’article 48 dote les personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques hospitaliers d’une instance consultative nationale chargée d’examiner les projets de textes afférents à ces catégories de personnel. Il définit par ailleurs les critères de représentativité des organisations syndicales représentant ces personnels.

L’article 49 réintroduit le caractère médical de la gouvernance hospitalière. Il rénove l’organisation en pôle en la concentrant sur des établissements au-delà d’un seuil d’effectif exprimé en équivalent temps plein. Il réaffirme la possibilité de s’organiser au sein des pôles en services, unités ou départements. Il organise par ailleurs la concertation interne de pôles et prévoit que les grands principes du fonctionnement du pôle soient inscrits dans le règlement intérieur de l’établissement. Il renforce enfin la place du président de la conférence médicale d’établissement dans la désignation des chefs de pôles, dans la conclusion des contrats de pôles (cohérence avec le projet médical), dans la gouvernance (mise en place d’une charte) ou dans la désignation des médecins au sein du directoire de l’établissement.

L’article 47 du projet de loi définit un nouveau cadre d’accès aux données à caractère personnel figurant dans les bases dites « médico-administratives »  qui comportent l’ensemble des informations à caractère personnel sur les usagers des services de santé, recueillies dans le cadre du soin.

Les contenus de ces bases sont particulièrement riches : elles concernent l’ensemble des patients, sur tout le territoire et rassemblent les informations figurant, chaque année, dans 1,2 milliard de feuilles de soins, 500 millions d’actes médicaux et 11 millions de séjours hospitaliers. Ces informations doivent être valorisées à des fins de recherches, d’études et d’évaluations en santé mais dans le strict respect de la vie privée et du secret médical.

L’établissement d’un cadre juridique clair, ouvert à l’ensemble des acteurs publics comme privés est nécessaire, et appelle des modifications importantes des règles disparates actuellement définies dans le code de la santé publique et dans la loi Informatique et Libertés.

L’accès aux données de l’assurance maladie (le SNIIRAM) est par exemple interdit aujourd’hui aux opérateurs privés ; il sera désormais possible pour les entreprises, dans des conditions encadrées, par la constitution d’un « système national des données de santé », géré par la CNAM, et regroupant différentes bases médico-administratives existantes ou à créer.

Le texte initial du projet visait à transcrire les conclusions de la commission « open data » mais comportait de trop nombreuses imprécisions. Le Gouvernement a donc engagé un dialogue nourri et constructif avec les membres de la commission « open data » afin de clarifier la rédaction et de tenir compte d’attentes nouvelles apparues avec le dépôt du projet de loi.

La Commission a donc adopté plusieurs amendements du Gouvernement, confortés par des amendements ou des sous-amendements de la rapporteure, qui ont eu pour but d’améliorer l’équilibre entre la protection des données à caractère personnel et un accès ouvert et effectif aux bases de données et qui ont proposé de nombreuses mesures de simplification, sans affaiblissement du contrôle.

Ces différentes modifications ont conduit à mieux définir les principes fondamentaux de l’accès aux données et à mieux affirmer les obligations de respect de la vie privée. Deux finalités particulières sont identifiées, emportant une interdiction d’utiliser les données ; la prospection commerciale en direction des professionnels de santé ou d’établissements en santé et la sélection du risque en matière d’assurance. La mise à disposition en « open data » des données insusceptibles d’identifier les personnes sera gratuite. L’obligation, envisagée initialement, pour les acteurs privés de passer par des bureaux d’études pour traiter les données à caractère personnel est supprimée : cette obligation de recours à un intermédiaire n’est maintenue que pour les seuls acteurs susceptibles de poursuivre les finalités interdites par la loi.

Les conditions d’utilisation du numéro de sécurité sociale, le NIR, dans le cadre de recherches sont clarifiées : un tiers de confiance possédera les tables de correspondances afin de préserver l’anonymat, et le droit d’utiliser le NIR pour des recherches dans le domaine de la santé est confirmé.

Les missions de l’Institut national des données de santé (INDS) sont clairement définies : associant les différentes parties prenantes qui seront soumises à des obligations nouvelles de transparence, l’INDS constituera un « guichet unique » pour orienter les demandes d’autorisation d’accès aux données de santé.

Enfin des simplifications importantes sont apportées concernant les procédures d’autorisation par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) : elle pourra désormais accorder pour les données de santé, des autorisations dite « unique », valables pour plusieurs demandeurs, pour les traitements qui répondent à une même finalité ; de même elle pourra homologuer et publier des « méthodologies de référence » permettant de dispenser de l’autorisation des traitements des données personnelles de santé conformes à ces méthodologies. À toutes les étapes, la compétence d’avis de la CNIL est renforcée.

La complexité de notre système de santé appelle d’importantes mesures de simplification et d’harmonisation. Le titre V du projet de loi entend y procéder, essentiellement en habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relevant du domaine de la loi.

Si chacune des mesures ouvertes à l’habilitation devait faire l’objet d’une ordonnance spécifique (13), ce sont environ cinquante ordonnances qui pourraient être prises sur le fondement de ce projet de loi. Il n’est donc pas inutile de rappeler à ce stade quelques grands principes découlant de l’article 38 de la Constitution.

Article 38 de la Constitution

« Le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d’habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse.

À l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif ».

Il résulte de cet article que seul le Gouvernement peut solliciter l’habilitation, le Parlement n’étant pas autorisé à se dessaisir lui-même de sa propre compétence. Le Conseil constitutionnel a confirmé cette interprétation évidente du texte de l’article 38 (14).

La demande d’habilitation doit comporter deux délais : le délai d’habilitation (le temps de rédaction de l’ordonnance) et le délai de ratification (le temps de préparation du projet de loi demandant en quelque sorte au Parlement de « valider » l’ordonnance).

La demande d’habilitation ne peut être formulée par le Gouvernement que « pour l’exécution de son programme ». Le Conseil constitutionnel a jugé que « ce texte doit être entendu comme faisant obligation au Gouvernement d’indiquer avec précision au Parlement, lors du dépôt d’un projet de loi d’habilitation et pour la justification de la demande présentée par lui, quelle est la finalité des mesures qu’il se propose de prendre » (15; il vérifie dans son contrôle que « les précisions requises […] ont été dûment fournies par le Gouvernement au soutien de sa demande d’habilitation ».

Le Conseil a jugé que l’urgence à légiférer (16) ou encore l’encombrement de l’ordre du jour parlementaire (17) peuvent justifier, sous réserve des conditions de précision précitées, le recours aux ordonnances. En pratique, les ordonnances ont souvent pour objet des mesures d’une grande technicité.

Dans l’examen des articles du titre V sollicitant une habilitation à légiférer par ordonnance, le rapporteur a souhaité s’assurer que le Parlement ne se dessaisisse pas systématiquement de ses compétences :

– lorsque les mesures envisagées par ordonnance peuvent être directement inscrites dans la loi, notamment parce que leur niveau de technicité n’est pas très élevé ;

– lorsque d’autres vecteurs législatifs, annoncés ou réguliers, peuvent permettre au Gouvernement l’exécution de son programme ;

– lorsque ni l’exposé des motifs, ni l’étude d’impact, ni les réponses fournies aux questionnaires adressés au Gouvernement, ne permettent de comprendre les enjeux de la demande d’habilitation. À cet égard, les exigences du rapporteur sont modestes : il suffit, pour chaque mesure envisagée, de rappeler brièvement l’état du droit, la nécessité de le modifier, la substance générale des mesures envisagées et les raisons qui conduisent à privilégier pour ce faire le recours aux ordonnances.

Les deux derniers articles du texte ne posent à cet égard aucune difficulté. L’article 56 habilite le Gouvernement à adapter ou étendre par ordonnance les dispositions de la loi à l’outre-mer. L’article 57 l’habilite à prendre les mesures législatives de coordination qui s’imposeront.

L’article 50 habilite le Gouvernement à modifier la législation applicable aux groupements de coopération sanitaire (GCS). Il s’agit de mesures très générales, (par exemple adapter les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des GCS), mais aussi de mesures plus précises (par exemple pour faciliter la mise à disposition des fonctionnaires hospitaliers auprès des GCS).

L’article 51 est le plus composite de tous, impossible à présenter de manière synthétique. Il permet de simplifier et moderniser : le régime des établissements de santé ; le régime d’autorisations des pharmacies à usage intérieur ; la gestion des ressources humaines du système de santé ; la législation en matière de sécurité sanitaire ; le traitement des données personnelles de santé ; la législation sur les substances vénéneuses ; les régimes de sanction en matière de toxicovigilance ; la législation relative aux conditions d’implantation d’activités de soins et de matériels lourds ; l’accès aux soins de premier recours.

À l’initiative du rapporteur, la Commission a supprimé deux des habilitations prévues par l’article 51, afin d’inscrire « en dur » dans le projet de loi les dispositions que le Gouvernement entendait prendre par ordonnance :

– suppression de l’obligation, devenue obsolète de présence physique d’un médecin aux côtés du manipulateur d’électroradiologie (article 51 ter) ;

– création d’un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps de catégorie A de la fonction publique hospitalière, contre un par corps en l’état du droit (article 51 quinquies).

À l’initiative du Gouvernement, la Commission a également élargi le champ de l’habilitation à simplifier la législation relative aux implantations d’officines pharmaceutiques, dont le rapporteur a eu l’occasion de déplorer la complexité dans un récent rapport publié en qualité de parlementaire en mission (18).

La Commission a également adopté plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 51, dont deux sont destinés, à l’initiative du rapporteur, à préciser et renforcer les missions des centres de santé (articles 51 bis et 51 quater).

L’article 52 a pour objet de permettre au Gouvernement de mieux encadrer l’activité de thanatopraxie : en la définissant de manière plus précise, en prévoyant qu’elle ne puisse être réalisée ailleurs que dans des lieux dédiés, et en obligeant les praticiens à être vaccinés contre l’hépatite B. Cette dernière condition est un préalable à la levée de l’interdiction de soins sur les défunts de cette infection – et du VIH –, qui pourra donc être opérée par voie réglementaire.

Les dispositions envisagées étant peu complexes sur le plan technique, la Commission a décidé, à l’initiative du rapporteur, de les inscrire « en dur » dans le projet de loi.

L’article 53 habilite le Gouvernement à mettre notre droit en cohérence avec le droit international et européen. Il s’agit d’abord de transposer quatre directives : protection contre l’exposition aux rayonnements ionisants ; fabrication, présentation et vente des produits du tabac ; reconnaissance des qualifications professionnelles ; niveau minimal de formation des gens de mer. Il s’agit également d’adapter la législation nationale relative aux recherches biomédicales à un récent règlement européen. Cette demande d’habilitation n’est d’ailleurs pas justifiée de manière très précise. L’article prévoit enfin, entre autres mesures, d’adapter notre législation à certaines exigences du règlement sanitaire international.

À l’initiative du rapporteur, la Commission a inscrit « en dur » dans le projet de loi certaines des modifications envisagées en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles au sein de l’Union européenne (article 53 ter).

L’article 55 concerne quant à lui le service de santé des armées (le SSA) et l’institution nationale des Invalides (INI). Il habilite le Gouvernement à prendre des mesures de nature législative sur un champ très large, visant à modifier l’ensemble des codes concernés pour insérer ces organismes aux dispositifs du projet de loi qui les concernent.

En effet, dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, le SSA est engagé dans des restructurations importantes, qui comportent la poursuite de la déflation de ses effectifs et la réduction de ses capacités hospitalières. Ce plan se traduira notamment par la fermeture de l’hôpital d’instruction des armées (HIA) du Val-de-Grâce dès 2017. Les HIA restants seront organisés en deux catégories d’établissements, présentant tous deux un fonctionnement civilo-militaire : les hôpitaux-plateformes, qui concentreront un grand spectre de capacités et armeront directement les troupes en opération ; les hôpitaux hors plateformes seront plus en retrait des activités opérationnelles et s’intégreront davantage encore dans l’offre de soins locale.

Dans tous les cas, le SSA ne conçoit désormais plus l’avenir de ses emprises hospitalières qu’intégrées dans l’offre de soins civile. Cet objectif supposera de conférer aux ARS un pouvoir de pilotage de leur offre et de leur organisation. Il supposera également, en contrepartie, d’attribuer aux services du ministère de la santé et notamment aux ARS une responsabilité dans le domaine sanitaire de défense. Le recours aux ordonnances permettra au Gouvernement de mettre en place les outils juridiques pour y parvenir rapidement.

Des évolutions de la gouvernance et du statut de l’INI sont également envisagées. L’Institution trouvera une place plus importante dans la planification sanitaire et médico-sociale régionale et pourrait voir son activité explicitement centrée sur des missions en aval de celles assumées par le SSA.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission des affaires sociales examine le présent projet de loi au cours de ses séances des mardi 17, mercredi 18 et jeudi 19 mars 2015.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mes chers collègues, nous voici réunis pour l’examen d’un texte particulièrement attendu par tous et depuis longtemps : le projet de loi relatif à la santé. Déposé le 15 octobre dernier, ce texte de 57 articles, représentant 113 pages de dispositif, sera examiné en séance publique à partir du 31 mars prochain.

Mille sept cent soixante amendements ont été déposés, ce chiffre pouvant encore varier en fonction des retours des amendements que nous avons envoyés en recevabilité financière au titre de l’article 40. Il nous faudra donc, si nous voulons achever l’examen de ce texte dans des délais raisonnables, limiter nos interventions à ce qui est strictement nécessaire. Je me suis entretenue de ce sujet avec les responsables des différents groupes politiques et j’y reviendrai au moment où nous commencerons l’examen des articles : nous nous sommes entendus sur une méthode de travail. Pour l’heure, nous allons procéder à l’audition de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, que je remercie de sa présence et à qui je souhaite la bienvenue.

Après l’intervention de la ministre, interviendront les cinq rapporteurs pour cinq minutes chacun ; puis, les porte-parole des groupes pour sept minutes – le groupe UMP, qui a désigné deux orateurs, m’ayant demandé deux minutes supplémentaires, j’ai décidé d’accéder à cette demande et d’accorder le même temps à tous les groupes ; enfin, les autres orateurs auront droit à deux minutes chacun.

Je lèverai notre séance au plus tard à vingt heures et la ministre répondra à la reprise de nos travaux ce soir à vingt et une heures trente.

Une question d’actualité a été posée tout à l’heure, dénonçant le recours à la procédure accélérée.

Je rappelle que la loi HPST, qui est un parallèle de ce texte, avait été également examinée dans le cadre de la procédure accélérée. Il n’est pas non plus prévu de temps programmé pour ce texte : nous aurons donc le temps d’en débattre dans l’hémicycle.

Enfin, je tiens à dire quelque chose qui me tient vraiment à cœur. Nous vivons en démocratie et dans ce système, chacun a le droit d’avoir ses opinions et dispose de la liberté de les exprimer. Mais j’estime qu’il y a des limites à tout et je considère que toutes les insultes et injures à l’égard de la ministre sont scandaleuses. On peut avoir le droit de manifester ou d’être en désaccord, mais certains des propos tenus depuis des mois sur les réseaux sociaux ou affichés sur les banderoles des professionnels de santé sont inadmissibles. Madame la ministre, je crois pouvoir le dire au nom de la Commission : personne ici ne les accepte. (Applaudissements.) Merci, mes chers collègues, d’être au moins d’accord là-dessus. Notre démocratie mérite autre chose, surtout lorsqu’il est aussi question de causes aussi nobles que la santé de nos concitoyens et le bien-être des patients.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Madame la présidente, je vous remercie pour vos propos, et je remercie aussi tous ceux qui viennent de se manifester pour souhaiter que le débat, qui est légitime, nécessaire et toujours utile, se déroule de façon sereine.

Votre Commission entame aujourd’hui l’examen d’un texte particulièrement attendu par nos concitoyens. Parce qu’ils sont attachés à notre système de santé et savent combien il est devenu nécessaire de le moderniser pour lui permettre de répondre aux nouveaux défis auxquels il est confronté. Les cinq rapporteurs que vous avez désignés – dont je veux saluer le travail remarquable et que je veux remercier pour la qualité du dialogue que nous avons eu ensemble – ont mené des centaines d’auditions et préparé de nombreux amendements qui vont permettre d’aller de l’avant et d’enrichir ce texte.

Cet enrichissement passe d’abord par la consolidation de nos objectifs ; il suppose aussi, évidemment, de la souplesse et de la clarification lorsque c’est nécessaire et partout où c’est possible. Des amendements ont donc été déposés par le Gouvernement à cette fin.

Certains ont regretté que ce texte ne prenne pas d’engagement financier. Mais cette loi de modernisation de notre système de santé n’est pas un projet de loi de financement de la sécurité sociale, seul habilité à prévoir des mesures de ce type. Je recommanderai à ceux qui s’inquiètent des dérives financières de regarder les résultats de leurs propres pratiques et ne pas être trop impatients, d’autant que, dans quelques jours, nous aurons l’occasion de rendre publics les chiffres sur les comptes de la sécurité sociale pour 2014, qui montreront une amélioration plus importante que prévu. C’est donc une bonne nouvelle dont je ne doute pas que chacune et chacun ici ne manquera pas de se réjouir.

Les défis auxquels nous devons faire face ne sont pas nouveaux pour vous. Les débats qui nous ont rassemblés depuis trois ans ont montré qu’ils donnaient lieu à un consensus. Le vieillissement de la population, le développement des maladies chroniques et l’accroissement des inégalités de santé appelaient de notre part des réponses résolues. Les Français vivent ces réalités au quotidien et attendent des réponses concrètes.

Face à cela, je veux dire ma conviction : notre système doit se transformer en profondeur pour continuer à répondre aux attentes de nos concitoyens. L’immobilisme n’est pas une solution. Parce que ce choix-là a déjà été fait pendant trop longtemps, conduisant à une politique d’ajustements à la marge et de rustines.

Je n’ignore rien du contexte dans lequel se déroule le débat qui va nous occuper. S’il y a eu encore dimanche dernier l’expression d’inquiétudes, de doutes ou de préoccupations, je crois que c’est aussi parce que les professionnels de santé, les médecins en particulier, doutent de leur place dans le système de soins et la société et ont pour beaucoup le sentiment que l’immobilisme ne peut être la réponse aux transformations qu’ils rencontrent. Et ceux qui imaginent que le statu quo serait la meilleure façon d’aller de l’avant non seulement se trompent, mais ils induisent nos concitoyens dans l’erreur.

Si ces inquiétudes dépassent largement le cadre de ce projet de loi, une réforme offre une occasion de revendication, ce que j’entends.

Je veux le dire à nouveau : le Gouvernement prend en compte les inquiétudes des professionnels de santé et des jeunes en formation. Qu’elles portent sur certains articles du projet de loi ou sur la question – infiniment plus large – de leur rôle et de leur formation.

Sur le projet de loi, d’abord, les inquiétudes des médecins se concentrent sur quatre points. Non seulement je les ai entendues, mais j’y réponds précisément. J’ai eu l’occasion de m’exprimer la semaine dernière sur le sens des évolutions apportées au texte. J’aurai l’occasion d’y revenir en répondant à vos questions, puis en vous présentant les amendements qui viennent matérialiser ces changements.

Mais, concrètement, il y avait d’abord la crainte d’une étatisation du système de santé, avec un pouvoir de décision unilatéral, descendant des agences régionales de santé (ARS). Cela n’a jamais été mon intention. Les amendements déposés à l’article 12 apporteront toutes clarifications à cet égard. Ainsi, l’amendement AS972 créera un nouveau chapitre au projet de loi, intitulé « Promouvoir les soins primaires et favoriser la structuration des parcours de santé ». Cela permettra de répondre à l’attente d’une meilleure identification, dans la loi, du rôle des médecins traitants, des équipes de soins primaires et des médecins spécialistes. L’amendement AS975 indiquera que l’organisation des parcours sur le territoire est pilotée par les équipes de soins primaires, constituées autour des médecins généralistes de premier recours. L’amendement AS976 matérialisera cette évolution en remplaçant le terme de « service territorial de santé au public » par celui de « communauté professionnelle territoriale de santé ».

Il y avait ensuite la crainte que le rétablissement du service public hospitalier ne vienne remettre en cause la règle, actuellement en vigueur, selon laquelle l’appartenance ou non au service public conditionne les autorisations de soins ou d’équipements. L’amendement AS977, déposé à l’article 26, inscrit clairement cette règle dans la loi. Au-delà, la nature des obligations du service public hospitalier, notamment l’absence de dépassement d’honoraires, est réaffirmée.

Des craintes ont également été émises autour du métier médical.

Sur la question des pratiques avancées, l’amendement AS1505 réaffirmera le rôle du médecin en qualité de coordonnateur de l’équipe au sein de laquelle exercera le professionnel paramédical en pratique avancée ; il clarifiera les champs d’activité et précisera que les mesures réglementaires d’application seront mises en œuvre après concertation des représentants des professionnels concernés.

Quant à la possibilité donnée aux pharmaciens de pratiquer la vaccination, elle a fait craindre un démantèlement du métier du médecin. J’ai déjà annoncé que cette mesure ferait l’objet d’une expérimentation dans le cadre des dispositions existantes du code de la santé publique relatives à la coopération entre professionnels de santé. La mission confiée à votre collègue Sandrine Hurel permettra par ailleurs d’élaborer des pistes innovantes pour renforcer la couverture vaccinale, qui est ma préoccupation majeure.

Il y a la crainte, enfin, que l’extension du tiers payant à tous les Français ne se traduise par une charge administrative et des frais supplémentaires pour les médecins, ainsi que par une mainmise des organismes complémentaires sur leurs pratiques.

L’amendement AS1725, déposé à l’article 18, indiquera clairement les garanties apportées. Le paiement au médecin ne pourra excéder sept jours et donnera lieu à des pénalités en cas de retard.

J’ai pris en outre des engagements fermes sur le dispositif technique : les médecins n’auront à faire qu’un seul geste pour déclencher le paiement. L’amendement précise par ailleurs que l’extension du tiers payant inclut nécessairement le déploiement d’une solution technique commune à l’assurance maladie et aux organismes complémentaires. Ce dispositif, j’y insiste, permettra d’adresser aux médecins un flux unique de paiement. Le Gouvernement s’est engagé à ce que ce soit simple, la loi y répond.

Enfin, je veux redire explicitement qu’il ne s’agit en aucun cas de donner des leviers aux organismes complémentaires pour encadrer la pratique des médecins d’une quelconque manière. Je rappelle que ces organismes remboursent d’ores et déjà une partie des actes et que leur part de remboursement n’a cessé d’augmenter entre 2007 et 2012 au détriment de l’assurance maladie. Depuis 2012, au contraire, cette part n’a cessé de diminuer au profit de celle-ci, ce qui marque bien une orientation et une volonté de ce Gouvernement. Je veux le dire à nouveau clairement : ni la liberté de prescription ni la liberté d’installation ne sont et ne seront remises en cause par ce Gouvernement.

Vous le voyez : les évolutions annoncées il y a une semaine font l’objet d’amendements que je vous présente aujourd’hui. J’ai pris des engagements et je les tiens. Il y aura un avant et un après-commission des affaires sociales, puisque ces garanties seront, si vous les adoptez, inscrites dans le texte dont nous débattrons.

Sur la question plus large de la place des médecins dans notre système de santé, notamment des jeunes, le projet de loi n’a jamais eu pour objet de définir une réforme des études médicales. Les représentants des différentes organisations de jeunes eux-mêmes en conviennent. Cela étant, ils ont fait part de leurs inquiétudes et de leurs attentes quant à la réforme du troisième cycle des études médicales, dernière étape de leur formation initiale, qu’ils souhaitent voir encadrée et définie. Avec Najat Vallaud-Belkacem, nous leur avons formellement répondu hier.

D’abord, nous leur avons confirmé que le projet de réforme du troisième cycle consacrerait les internes comme des praticiens en formation. Ensuite, que cette réforme serait prise en charge par une commission unique commune aux étudiants en médecine, en pharmacie, en odontologie et en maïeutique – c’était aussi l’une de leurs demandes. Enfin, que la réforme s’attacherait clairement à préciser les conditions de la formation pratique en stage, qui est une de leurs préoccupations.

Au-delà de la formation, les représentants des médecins, et particulièrement des plus jeunes, ont souhaité une réflexion plus large sur l’avenir du métier médical et du mode d’exercice. Le Premier ministre a donc annoncé la semaine dernière la tenue, avant la fin de l’année, d’une grande conférence de la santé, dont il précisera prochainement les modalités de préparation et de mise en œuvre. Les travaux préparatoires débuteront très prochainement, en associant l’ensemble des acteurs. L’agenda de la conférence et sa feuille de route seront élaborés main dans la main avec les représentants des médecins, en particulier des jeunes.

Ce projet de loi est une étape majeure pour la modernisation du système de santé, qui s’inscrit dans la politique d’ensemble menée depuis trois ans. Le fil rouge de l’action que je mène est de faire reculer par tous les moyens les inégalités sociales et territoriales en matière de santé et de permettre une prise en charge coordonnée des patients : permettre à chacun de pouvoir se soigner, quel que soit son âge, son milieu social ou son territoire, est une politique de progrès et de justice.

Cette politique s’est d’abord traduite dans le Pacte Territoire-Santé, avec un investissement considérable dans les soins de proximité et le travail en équipe, pour lequel je viens de mettre en place une rémunération spécifique. Les résultats sont là : nous devons les amplifier – le débat parlementaire permettra sans doute de le rappeler.

Cette politique s’est ensuite traduite par la mise en place d’un dispositif de tarification adapté aux établissements de proximité, pour sortir du « tout T2A » et ne pas en rester à une tarification à l’activité qui pénalise nombre de nos hôpitaux locaux. Plus de 300 établissements seront concernés en 2015 par cette réorientation.

Mais pour aller plus loin dans la réduction des inégalités et dans la prise en charge coordonnée des Français, il faut une nouvelle étape. C’est le sens du projet de loi de modernisation du système de santé. Sa cohérence est forte : il met l’accent sur la prévention, qui est la meilleure arme pour faire reculer les inégalités sociales de santé ; il met l’accent sur le renforcement du rôle du médecin traitant, pour garantir un accompagnement de qualité aux patients sur tout le territoire ; il met l’accent enfin sur de nouveaux droits pour les malades.

Cette cohérence, il nous faut la préserver. L’examen du texte permettra évidemment de l’enrichir. Mais j’ai déjà eu l’occasion de dire que toute disposition relative à la santé n’a pas vocation à y figurer, ce projet poursuivant des objectifs spécifiques.

Prévention, proximité du médecin traitant et des soins primaires, droits des patients : les débats de ces dernières semaines et les inquiétudes légitimes des professionnels ne peuvent occulter les enjeux qui sont devant nous. J’ai entendu une partie de l’opposition appeler au retrait du projet de loi. Outre le fait que cette position n’est pas responsable, elle ne répond pas aux besoins des Français. Ceux qui font vivre notre système de santé au quotidien savent qu’il y a dans ce texte des mesures concrètes et attendues, dont certaines depuis trop longtemps.

Premièrement, des mesures pour renforcer la prévention.

Nous devons en effet encourager les comportements favorables à la santé. Parce que nombre de maladies pourraient être évitées et que les inégalités sociales pèsent. Moins on est riche, plus on risque d’être frappé tôt et durement par la maladie. Et plus on est précaire, plus on est exposé au risque.

Au cours de nos débats, je vous proposerai donc d’adopter par amendements les mesures issues du programme national de réduction du tabagisme, entre autres la mise en place du paquet neutre de cigarettes ou l’interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants. Cette stratégie coordonnée a été saluée unanimement par l’ensemble des associations antitabac.

Celle-ci viendra compléter les grands axes de prévention prévus dans le texte. Je pense notamment à la lutte contre l’obésité, avec la mise en place d’un logo nutritionnel sur les aliments, ou à la santé des jeunes, avec la création d’un délit d’incitation à l’alcoolisation excessive et la mise en place d’un parcours éducatif en santé ; mais aussi à la lutte contre les infections sexuellement transmissibles, en favorisant le dépistage, ainsi qu’à la santé environnementale, dont nous savons qu’il s’agit d’un enjeu majeur – vital même – pour les générations à venir. Le texte prévoit déjà plusieurs mesures à cet égard, notamment en termes d’information sur l’impact sanitaire de la pollution. À l’occasion de la conférence environnementale, j’ai indiqué ma volonté d’aller plus loin. Un travail a été engagé avec un certain nombre d’entre vous – dont votre rapporteur Olivier Véran et Jean-Louis Roumegas. Il doit se matérialiser par des amendements en commission puis en séance publique.

Deuxièmement, des mesures pour garantir la proximité des soins autour du médecin traitant et des équipes de soins primaires.

C’est une transformation majeure : il s’agit de passer d’un système centré sur l’hôpital à une médecine de proximité coordonnée par le médecin traitant autour du patient. C’est ce qu’attendent les Français et, là aussi, le projet de loi prévoit des mesures concrètes. Je pense par exemple à l’instauration du médecin traitant, généraliste ou pédiatre, pour les enfants de moins de seize ans, à la création d’un numéro national d’appel de garde et d’un service public d’information en santé, ou à l’obligation d’une lettre de liaison adressée par l’hôpital au médecin traitant le jour même de la sortie d’hospitalisation.

Je rappelle en outre les dispositions de l’article 12 relatives à l’organisation territoriale des soins, qui permet de mieux coordonner le parcours des patients et évoluera dans le sens que j’ai indiqué tout à l’heure.

Troisièmement, des mesures pour faire progresser les droits des patients. Parce que moderniser notre système de santé consiste aussi à faire progresser les droits des usagers, sachant qu’on ne peut se contenter de renforcer les droits existants. Il nous faut aller plus loin et ouvrir des champs nouveaux.

Nous renforçons ainsi le rôle des associations de patients et valorisons leurs initiatives sur le terrain. Nous instaurons aussi l’action de groupe en santé, qui va permettre aux patients de se défendre collectivement en cas de dommages subis.

Je vous présenterai par ailleurs un amendement visant à instaurer un droit à l’oubli pour d’anciens malades. L’objectif est de faire évoluer la convention AERAS, qui définit les dispositions applicables aux patients confrontés à des risques de santé aggravés, sachant que si, dans les jours qui viennent, un avenant à la convention devait être signé, cet amendement n’aurait plus lieu d’être ; mais si tel n’était pas le cas, il serait maintenu et le droit à l’oubli inscrit dans la loi.

Enfin, nous permettons à notre pays de rejoindre le large mouvement de l’open data. Il est de notre responsabilité de valoriser les données de santé pour l’intérêt collectif, dans le strict respect de la vie privée.

Ce projet de loi représente donc un ensemble de mesures très concrètes pour nos concitoyens et les professionnels de santé. Il s’agit de ne pas céder à la facilité, celle de l’immobilisme ou du statu quo.

Notre système doit être modernisé pour faire face aux défis qui bouleversent les équilibres sur lesquels il a été construit.

Je souhaite qu’au cours des prochains jours, nous parvenions à travailler ensemble pour enrichir ce projet de loi, avec détermination, en tout cas pour les ambitions qui sont les miennes, et évidemment beaucoup de souplesse partout où c’est nécessaire et possible.

Ces objectifs de justice et de progrès, qui animent le Gouvernement, feront en tout cas de ma part l’objet d’une détermination sans faille.

M. Olivier Véran, rapporteur. Ce texte a en effet donné lieu à de nombreux échanges et réflexions depuis trois ans : nous sommes ravis de pouvoir enfin l’examiner.

La stratégie nationale de santé a proposé pour la première fois de construire une loi de santé, non en la sectorisant « en silos », mais en la faisant reposer sur des objectifs de santé publique, tendant à mieux soigner les malades et à organiser l’ensemble du système de santé à cette fin.

Le titre premier du texte, dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur, porte sur la santé publique, la prévention, la promotion de la santé et l’éducation à la santé. Ce volet, très attendu par les Français et les professionnels de santé, est particulièrement dense en propositions.

Mais le Parlement sera aussi une force de proposition. J’en veux pour preuve notre souhait de prévoir, à l’article 2, l’instauration, à côté du parcours de santé scolaire, d’un parcours éducatif en santé à l’école, afin d’inscrire l’ensemble des actions de promotion de la santé à l’école dans un cheminement cohérent, défini dans chaque établissement, avec la participation de l’ensemble des acteurs locaux concernés, comme les collectivités territoriales, et en pleine coordination avec les services de santé préventive. Il s’agira de proposer des actions ciblées, au cas par cas, groupées pour des classes d’élèves, mais aussi de permettre aux élèves de développer au cours de leur parcours scolaire des appétences particulières pour les problématiques de santé, afin de les inciter à prendre davantage soin d’eux-mêmes et à ne pas s’inscrire dans des démarches addictives, notamment à l’égard de l’alcool ou du tabac.

Ce parcours éducatif devra être un levier déterminant de la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé.

La loi permettra également de mieux prévenir les grossesses non désirées dans les établissements scolaires, en facilitant l’accès à la contraception d’urgence dans les établissements du secondaire.

Madame la ministre, vous avez également souhaité mettre en place des mesures pour lutter contre ce fléau qu’est l’alcoolisation massive, intensive, voire chronique, de nos jeunes, notamment les mineurs ou les jeunes adultes – je pense notamment au binge drinking ou à la propension plus élevée de développer des pathologies addictives à l’alcool.

On ne peut aussi que constater l’explosion du problème du surpoids dans les civilisations occidentales ; la France ne fait pas exception à la règle. L’affichage d’un score nutritionnel autorisé offrira à toutes les familles des repères simples, fondés sur des données scientifiques, solides, issues notamment des travaux du professeur Serge Hercberg, afin de pouvoir les orienter parmi les aliments ayant fait l’objet d’une transformation industrielle - c’est-à-dire plus de 80 % des achats alimentaires. Si cette démarche sera volontaire de la part des producteurs et des distributeurs, elle ne peut que répondre à une aspiration du plus grand nombre, à laquelle il me semble que les grandes enseignes seront logiquement amenées à se rallier.

La loi apportera également des réponses concrètes, au plus près du terrain, aux besoins des associations qui s’engagent sans relâche, quotidiennement, pour lutter contre les infections épidémiques – VIH ou hépatites virales notamment – auprès des publics les plus à risque et des usagers de drogue. Je souhaite que nous puissions faire d’un consensus scientifique un consensus politique concernant la politique de réduction des risques à l’égard de ces usagers. Cette politique, qui s’est mise en place progressivement au cours des années 1990 et 2000, souvent avec retard par rapport à nos voisins européens, résulte généralement de l’intervention très pragmatique d’associations de terrain. Nous avons aujourd’hui la possibilité d’expérimenter un nouveau mode de prise en charge des usagers de drogue, notamment par voie intraveineuse, avec des salles de consommation à moindre risque. Je suis convaincu qu’un débat parlementaire serein permettra de trouver la voie d’un consensus.

Des mesures proposeront en outre une extension de la réduction des risques aux lieux de privation de liberté notamment.

De plus, nous proposerons de sécuriser le cadre juridique des acteurs de la prévention et de la réduction des risques, même si cette question est des plus délicates.

Par ailleurs, on ne peut que se féliciter de présenter dans cette loi le plan le plus ambitieux en matière de lutte contre le tabac – en dehors de mesures budgétaires qui ne relèvent pas de ce texte. La mise en place du paquet anonyme ou neutre dérange, c’est certain, mais elle permettra d’enregistrer des résultats significatifs dans ce domaine. J’ai déposé d’ailleurs un amendement faisant suite à la proposition du plan tabac, tendant à lever une contribution pour financer des actions de prévention.

Enfin, la santé environnementale est un sujet d’ampleur qui, j’espère, nous mobilisera sur tous les bancs au cours des débats à venir.

Mme la présidente Catherine Lemorton. On vient de me signaler un tweet qui vient d’être envoyé de la commission par un des porte-parole des groupes d’opposition. Cela va à totalement à l’encontre de ce que j’ai dit tout à l’heure sur le respect que nous devons à la ministre et n’est pas à la hauteur de la fonction que les Français nous ont confiée. Je vous demande donc d’arrêter ce genre de pratique. Sinon, je ferai connaître le nom de son auteur ainsi que son contenu, car c’est un pur scandale.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le titre II du projet de loi, que j’ai l’honneur de rapporter, est consacré à des mesures tendant à simplifier le parcours de santé des patients.

Quatre des seize articles qu’il comporte ont mobilisé toutes les attentions. Ils se sont traduits par des évolutions qui ne remettent pas en question l’objectif principal : l’amélioration de l’accès aux soins.

À l’article 18, le tiers payant a suscité bien des débats ainsi que des oppositions. Certains ont évoqué le risque de la gratuité et d’un recours inflationniste aux soins inutiles. On sait pourtant que le tiers payant ne sera appliqué qu’en cas de respect du parcours de soins. Il vise à faire diminuer les renoncements aux soins et à permettre à un plus grand nombre de nos compatriotes d’être soignés « au bon moment ».

Les inquiétudes sur la mise en œuvre sont légitimes et doivent être prises en compte. Vous avez, madame la ministre, entendu la demande des professionnels qui ont le droit de bénéficier du tiers payant en un seul geste : un « clic » doit suffire à garantir au médecin qu’il sera payé en temps et en heure. Vous avez par ailleurs déposé un amendement qui institue des obligations de résultat pour l’assurance maladie. Mais je souhaiterais savoir quelle sera la situation du côté des organismes complémentaires. Le tiers payant n’est transparent que si le professionnel n’a pas à se soucier de la différence entre les deux. Les mêmes obligations doivent être appliquées à tous les payeurs : simplicité de l’utilisation, lisibilité des droits et garantie du paiement.

À l’article 12, l’instauration du service territorial de santé au public a également été beaucoup débattue. Si tous s’accordent sur la nécessité de décloisonner les pratiques et de mieux se coordonner, des inquiétudes ont été soulevées sur le rôle du médecin généraliste, la place de l’agence régionale de santé (ARS) au regard du principe de subsidiarité ou l’architecture trop administrative du service territorial. Les amendements déposés par le Gouvernement ont donc infléchi le dispositif. La place du médecin généraliste est mieux affirmée, avec l’instauration des équipes de soins primaires, et la coopération entre professionnels consacrée avec la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé. Le rôle de l’ARS est, quant à lui, mieux identifié : l’agence doit s’assurer de l’égalité et de la continuité de la prise en charge des patients, en liaison avec les acteurs du système de santé, dans le cadre du territoire démocratique sanitaire de l’article 38. Les améliorations que je souhaite apporter à l’article 12, notamment la question de la prise en compte des soins palliatifs sur le territoire, seront donc logiquement discutées au titre IV.

La réinstauration d’un bloc de service public hospitalier (SPH) à l’article 26 a aussi beaucoup été commentée. L’approche matérielle du service public répartie entre quatorze missions a vécu. Le service public, dont la quintessence relève des fameuses lois de Rolland, ne saurait se réduire à un choix à la carte. Je rappelle que le rapport Couty évaluait à 80 % l’activité de service public assurée par les hôpitaux et ne relevant pas des quatorze missions décrites par le code de la santé publique. Alors qu’elle fait l’objet d’exigences exorbitantes du droit commun, il ne m’apparaît pas anormal de considérer que la mission de SPH relève avant tout de l’hôpital public. Mais parce que notre tradition de service public autorise aussi l’association du secteur privé, il ne m’apparaît pas non plus anormal d’y associer ce dernier dans le respect des mêmes exigences. L’amendement déposé par le Gouvernement réaffirme ce principe et procède à des améliorations bienvenues. Je propose cependant d’aller plus loin afin que l’accès à des soins palliatifs puisse être amélioré par la mise en place de solutions sans hébergement via l’hospitalisation à domicile. La coopération des établissements de santé du SPH avec les centres de santé gagnerait aussi à être davantage soulignée.

Dernier enjeu, et non des moindres : la mise en place des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Le GHT constitue une nouvelle forme de coopération conventionnelle fondée sur une adhésion obligatoire des établissements publics de santé, un projet médical partagé et une mutualisation de fonctions. Or le dispositif proposé a nourri quelques craintes et s’est traduit par le dépôt d’un amendement gouvernemental de rédaction globale. Celui-ci précise l’architecture sur plusieurs points : gouvernance, place des centres hospitaliers universitaires (CHU) et des centres hospitaliers spécialisés, de l’hospitalisation à domicile, et clarification de la place des établissements privés. Pour ma part, je considère que le dispositif pourrait être amélioré en précisant notamment la place particulière des élus au sein de la gouvernance. J’ajoute qu’il aurait paru pertinent que la loi permette, par option, d’aller plus loin, c’est-à-dire, pour ceux qui le souhaitent, jusqu’à la fusion.

Les douze autres articles de ce titre du projet de loi ont été beaucoup moins commentés. Ils n’en sont pas moins importants, car ils visent à améliorer l’accessibilité aux soins.

Celle-ci passe par une meilleure organisation des soins. L’article 13 vise ainsi à définir la politique de santé mentale, dont la psychiatrie de secteur constitue un volet important. Tous les professionnels ont souligné la nécessité de concevoir une nouvelle organisation territoriale de proximité fondée sur les besoins des usagers. Je proposerai quelques améliorations à la commission, comme la prise en compte du caractère pluriprofessionnel de la prise en charge des patients ou la préservation des conseils locaux de santé mentale, dont l’apport est largement reconnu.

Enfin, l’article 25 constitue un virage majeur dans l’échange et le partage de l’information. Il introduit la notion d’équipe de soins, constituée des professionnels de santé et médico-sociaux, au sein de laquelle pourront circuler les données nécessaires à la prise en charge du patient, dont le consentement est présumé. La définition de l’équipe de soins pourrait être complétée afin d’inclure les professionnels de santé, très investis dans la prise en charge de la douleur. Cet article refonde par ailleurs le DMP, désormais intitulé « dossier médical partagé » et dont la mise en œuvre relèvera de l’assurance maladie. L’accès permanent au DMP est réaffirmé à côté du possible masquage des données par le patient et de son accès à la liste des professionnels autorisés à le consulter. Plusieurs points mériteraient d’être améliorés, parmi lesquels le contenu du DMP – dons d’organes et directives anticipées pourraient figurer dans ce dossier – ou le droit à l’oubli, dont je ne méconnais pas les difficultés que son instauration peut poser pour les professions médicales.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je vais vous présenter les dispositions du titre III « Innover pour garantir la pérennité de notre système de santé ». Il porte sur la modernisation des formations et des métiers, sur la qualité des pratiques et des soins, ainsi que sur le bon usage des médicaments, la recherche et l’innovation.

L’article 28 a pour objet de fixer les grandes lignes d’une réforme du développement professionnel continu (DPC) des professionnels de santé.

La loi HPST a unifié les divers dispositifs de formation continue préexistants et centralisé la gestion en une entité unique, l’Organisme gestionnaire du développement professionnel continu. Or, à l’occasion d’un contrôle récent de cet organisme, l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a pointé de nombreux dysfonctionnements du DPC et de sa gestion : contenu imprécis de l’obligation de formation ; absence de sanction en cas de manquement à cette obligation ; financements insuffisants ; évaluation insatisfaisante des organismes formateurs et du contenu des formations.

L’article 28 prévoit donc de recentrer les objectifs du DPC sur le cœur de métier, d’associer les universités à la dimension pédagogique et de mettre en place un cadre plus adapté au contrôle de la qualité des formations.

Mais ces dispositions restent très générales, l’essentiel relevant du domaine réglementaire. Par ailleurs, depuis le dépôt du projet de loi, une vaste concertation a été organisée, afin de définir plus précisément le contenu de l’obligation du DPC, les moyens de le rendre contraignant et les outils d’évaluation adaptés. La ministre pourra sans doute nous informer des conclusions de cette concertation.

L’article 29 participe également à la rénovation des professions de santé en élargissant les cadres dans lesquels les étudiants infirmiers peuvent effectuer leurs stages : opérer le virage ambulatoire, c’est aussi favoriser la diffusion d’une culture commune, y compris pendant la période des études.

Surtout, l’article 30 comporte des dispositions très attendues : il permet de créer un exercice en pratique avancée pour les professions paramédicales. Annoncée par le Président de la République, la création de ce statut modernisera les pratiques et permettra d’adapter au mieux l’offre de prise en charge proposée aux patients. Il concernera 1 à 3 % de ces professionnels. Je proposerai un sous-amendement pour compléter le dispositif du Gouvernement afin de garantir la consultation des professionnels concernés avant la mise en place réglementaire de ce statut.

L’article 31 prévoit des délégations d’actes pour les sages-femmes en matière de pratique d’interruption volontaire de grossesse (IVG) et de vaccination.

L’article 32 a quant à lui suscité de nombreux débats : il prévoit la possibilité pour les pharmaciens d’officine de pratiquer la vaccination. Après un travail de concertation, le Gouvernement propose un cadre plus clair et limité, pendant les quatre prochaines années, avec une expérimentation dans certaines pharmacies. Je soutiens le retrait de cet article 32 afin de procéder à cette expérimentation par voie réglementaire.

L’article 33 me tient particulièrement à cœur : il porte sur la prescription de substituts nicotiniques, qui seront ouverts à la prescription des médecins, des sages-femmes et des infirmiers. Mais, avec de nombreux collègues, nous jugeons pertinent d’élargir cette faculté aux chirurgiens-dentistes : le Gouvernement pourrait-il appuyer cette proposition ? Nous pourrions alors proposer de l’introduire en séance publique.

En ce qui concerne les pharmaciens, il existe désormais un consensus pour que l’Académie nationale de pharmacie devienne une personne morale de droit public à statut particulier, à l’exemple de l’Académie nationale de médecine. Le soutien du Gouvernement est là encore nécessaire à cet égard.

S’agissant du tabac enfin, je sollicite également l’avis du Gouvernement sur le fait de proposer systématiquement à toute femme enceinte une consultation en tabacologie afin de lui proposer un accompagnement vers le sevrage.

Le titre III comporte d’autres mesures de modernisation des professions de santé, comme la publication par la Haute autorité de santé de fiches pratiques sur les stratégies thérapeutiques ainsi que sur le bon usage des médicaments. Il renforce et inscrit aussi dans la partie législative du code de la santé, à l’article 36, des dispositions ambitieuses de lutte contre les ruptures d’approvisionnement.

L’article 34 vise à lutter contre les dérives de l’intérim médical, domaine sur lequel notre collègue Olivier Véran avait largement travaillé et proposé des solutions. La mesure prévue vise à plafonner la rémunération des praticiens ainsi que les frais afférents à leur recrutement. Le système actuel est en effet caractérisé par des rémunérations exorbitantes, une concurrence acharnée et un dispositif réglementaire litigieux. L’article prévoit par ailleurs la constitution, sur la base du volontariat, d’un corps de médecins hospitaliers chargé d’effectuer des remplacements au sein d’une région.

Enfin, le texte prévoit à l’article 37 la mise en œuvre d’une recommandation du Conseil stratégique des industries de santé. Il vise à réduire les délais de mise en place des recherches cliniques industrielles au sein des établissements de santé, ce qui devrait renforcer l’attractivité et l’excellence de la recherche médicale française. Il fait également évoluer le dispositif des matériaux de thérapies innovantes préparées ponctuellement (MTIPP).

En dehors du titre III, je soutiendrai plusieurs amendements qui me tiennent à cœur.

Je vous présenterai d’abord une série d’amendements de lutte contre le tabagisme, visant à prévoir un message de prévention anti-tabac avant la diffusion de toute œuvre cinématographique contenant une séquence de promotion du tabac et à interdire la vente de tabac à proximité des établissements scolaires.

Surtout, je souhaite vous proposer de proscrire à partir du 1er janvier 2017 la distribution de tabac aux jeunes nés à compter du 1er janvier 2001. Il s’agit d’une disposition audacieuse permettant d’espérer des résultats significatifs contre ce fléau.

Enfin, je vous proposerai un amendement visant à simplifier le don d’organes afin de répondre à la crise que nous connaissons et qui requiert des mesures urgentes.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Le titre IV rassemble différentes mesures visant à renforcer l’efficacité des politiques publiques et la démocratie sanitaire. Progressivement, la participation des citoyens, qu’ils soient professionnels de santé, usagers ou patients, aux côtés des institutions devient une nécessité, afin d’élaborer, de partager ou d’évaluer les politiques publiques. C’est bien l’enjeu de ce titre IV : redonner à nos politiques publiques de santé toute leur crédibilité.

La législation a progressivement reconnu le droit du consentement au soin. À travers ce texte, il est donné une nouvelle portée au principe d’autonomie de la personne, d’affirmation de droits individuels, mais aussi collectifs, permettant aux représentants d’usagers de peser sur les politiques de santé, grâce à des dispositifs tels que l’accès à une information en santé ouverte et sécurisée, l’action de groupe et l’association des usagers à l’élaboration de la politique de santé.

Faire vivre la démocratie sanitaire, c’est promouvoir la concertation, mais aussi améliorer l’efficacité du système de santé. Il faut donc renforcer la démocratie locale à travers les conseils territoriaux de santé, qui réunissent les parties prenantes du territoire.

L’article 38 permet de réformer les outils de planification sanitaire et médico-sociale dans les régions, mais comporte également des mesures touchant à la démocratie locale ainsi qu’à l’organisation sanitaire dans des situations exceptionnelles. Compte tenu de la nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement afin d’enrichir la version initiale de l’article, je proposerai de sous-amender ce projet pour consolider notamment le fonctionnement des futurs conseils territoriaux de santé.

Faisant notamment suite au rapport de Jean-Yves Grall, l’article 39 renforce les dispositifs d’alerte sanitaire. Madame la ministre, pourriez-vous nous donner quelques précisions sur le portail de déclaration simplifiée que le Gouvernement entend mettre en place ?

Les articles 40 et 41 rénovent le cadre stratégique de la gestion de risque pour renforcer la cohérence des objectifs et des actions que partagent l’État et l’assurance maladie, tout en permettant à l’État de formuler ses attentes en amont des négociations conventionnelles.

L’article 42 vise quant à lui à réformer le système d’agences par voie d’ordonnances. Il prévoit notamment de créer un institut national de veille, de prévention et d’intervention en santé publique ainsi qu’une demande d’habilitation pour réformer la politique de collecte, de transformation et de distribution des produits sanguins. Compte tenu de la complexité de cette question ainsi que des évolutions récentes du secteur, je souhaiterais, madame la ministre, appeler votre attention sur le fait que ce projet de loi doit être l’occasion pour nous de réaffirmer notre attachement aux principes éthiques qui ont fait la force du système français.

Je souhaiterais aussi interroger le Gouvernement sur la possibilité de prendre des engagements pour mettre fin aux dispositions réglementaires malheureuses qui posent a priori une interdiction de don du sang à l’encontre des hommes déclarant une pratique homosexuelle.

S’agissant de la démocratie sanitaire, deux volets peuvent être soulignés : la place des usagers et l’amélioration du dialogue au sein des établissements de santé.

Les articles 43 et 44 procèdent à l’amélioration de la place des usagers et prévoient notamment une obligation légale de représentation dans les organes de gouvernance. La place de l’usager au sein du système de santé doit, à mon sens, être davantage reconnue, notamment en travaillant à l’instauration d’un statut lui permettant de mieux préparer son mandat et offrant un profil plus divers.

Il serait aussi opportun de s’interroger sur sa présence au sein du comité économique des produits de santé. Nous sommes à cet égard favorables à l’idée d’un droit d’alerte des usagers sur les réunions du collège de la Haute autorité de santé.

Les missions de la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC) des établissements de santé, qui sera dorénavant appelée commission des usagers (CDU), seront modifiées par ce texte. Or plusieurs points mériteraient toutefois d’être approfondis, comme l’instauration d’un véritable pouvoir d’auto-saisine sur tout sujet relatif à la politique de qualité et de sécurité de l’établissement ou la prise en compte de son rôle dans le suivi des événements indésirables graves.

L’article 45, quant à lui, propose une disposition nouvelle qui témoigne de l’ambition de ce texte : pouvoir permettre à des associations agréées d’introduire une action de groupe. Je vous proposerai plusieurs amendements afin de renforcer l’efficacité de la procédure prévue. L’un d’eux concerne le régime d’entrée en vigueur, puisque le texte prévoit que la procédure ne s’applique pas aux manquements ayant cessé avant cette entrée en vigueur – ce qui amoindrirait sensiblement l’intérêt du dispositif. Quel est votre avis à ce sujet ?

Par ailleurs, le titre IV traite, à l’article 47, de l’open data en santé. La réalisation de ce « système national des données de santé » est attendue par nos entreprises : je rappelle que l’accès aux données de l’assurance maladie est aujourd’hui interdit aux opérateurs privés et que la réforme que vous proposez supprime cette anomalie.

Madame la ministre, vos services ont engagé un dialogue nourri et constructif avec les membres de la commission « open data » afin de clarifier la rédaction de cet article, ce dont je me félicite. Mais il nous sera peut-être possible d’améliorer l’équilibre entre la protection des données à caractère personnel et un accès ouvert et effectif aux bases de données.

Enfin, les deux derniers articles du titre IV visent à améliorer la place du dialogue social au sein des établissements de santé et à rénover la gouvernance hospitalière.

Si les droits des malades et la qualité du système de santé ont été modifiés par la loi du 4 mars 2002, reconnaître des droits individuels et collectifs à l’usager, qui devient un véritable acteur du système de santé, est l’objectif vers lequel tend ce texte. Je pense que nous pourrions être ensemble au rendez-vous de l’an II de la démocratie sanitaire.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Le titre V du projet de loi est consacré à des mesures de simplification et d’harmonisation de la législation sanitaire.

Sept des huit articles qu’il comporte proposent d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance. Et le seul article « en dur » devra être supprimé, car il a déjà été adopté dans le cadre d’un amendement au projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques : il s’agit de l’article 54, qui prévoit que les gens de mer puissent disposer à bord des navires d’un exemplaire de leur convention collective. Cet article n’avait du reste pas sa place dans un texte relatif à la santé.

Sur la base des autres articles du titre V, ce sont environ cinquante ordonnances qui pourraient être prises, même s’il est vraisemblable que plusieurs mesures seront rassemblées dans la même ordonnance.

Il est donc important que le Parlement, avant de se dessaisir de sa compétence, puisse prendre la bonne mesure de la portée des habilitations. Le Conseil constitutionnel vérifie d’ailleurs dans son contrôle que « les précisions requises […] ont été dûment fournies par le Gouvernement au soutien de sa demande d’habilitation ».

Les exigences en la matière ne sont d’ailleurs pas très élevées. Il suffit en effet au Gouvernement de présenter brièvement le droit existant, les problèmes qu’il pose, les modifications envisagées pour y remédier et les raisons pour lesquelles il est souhaitable de procéder par ordonnance.

Mais force est de constater que la lecture de l’exposé des motifs et de l’étude d’impact ne permet pas toujours de répondre parfaitement à ces questions simples. J’ai donc adressé une série de questionnaires au Gouvernement, auxquels j’ai obtenu des réponses, au moins partielles.

Par ailleurs, je vous proposerai de rédiger « en dur » dans le projet de loi un certain nombre de mesures qui, à mon sens, ne justifient pas le recours aux ordonnances.

Après ces questions de méthode, j’en viens à une brève présentation des articles.

Je commencerai par les deux derniers articles du texte, qui ne posent aucune difficulté. L’article 56 tend à habiliter le Gouvernement à adapter ou étendre par ordonnance les dispositions de la loi à l’outre-mer et l’article 57, à prendre les mesures législatives de coordination qui s’imposeront.

L’article 50 vise, quant à lui, à habiliter le Gouvernement à modifier la législation applicable aux groupements de coopération sanitaire (GCS). Il s’agit de mesures très générales – par exemple adapter les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des GCS –, mais aussi de mesures plus précises, destinées par exemple à faciliter la mise à disposition des fonctionnaires hospitaliers auprès de ces groupements.

L’article 51 est le plus composite de tous. Il est impossible de le présenter de manière synthétique ici. Il permet de simplifier et moderniser le régime des établissements de santé, le régime d’autorisation des pharmacies à usage intérieur, la gestion des ressources humaines du système de santé, la législation en matière de sécurité sanitaire, le traitement des données personnelles de santé, la législation sur les substances vénéneuses, les régimes de sanction en matière de toxicovigilance, la législation relative aux conditions d’implantation d’activités de soins et de matériels lourds et l’accès aux soins de premier recours.

L’article 52 est à l’inverse très circonscrit : il s’agit de mieux encadrer l’activité de thanatopraxie en la définissant de manière plus précise, en prévoyant qu’elle ne puisse être réalisée ailleurs que dans des lieux dédiés et en obligeant les praticiens à être vaccinés contre l’hépatite B. Cette dernière condition est un préalable à la levée de l’interdiction de soins sur les défunts de cette infection – et du VIH –, qui pourra donc être opérée par voie réglementaire. Les dispositions envisagées étant peu complexes sur le plan technique, je vous proposerai là encore de les inscrire « en dur » dans le texte.

L’article 53 habilite le Gouvernement à mettre notre droit en cohérence avec le droit international et européen.

Il s’agit d’abord de transposer quatre directives relatives respectivement à la protection contre l’exposition aux rayonnements ionisants, à la fabrication, la présentation et la vente des produits du tabac, à la reconnaissance des qualifications professionnelles et au niveau minimal de formation des gens de mer.

Il s’agit également d’adapter la législation nationale relative aux recherches biomédicales à un récent règlement européen. Cette demande d’habilitation n’est d’ailleurs pas justifiée de manière très précise.

Il est enfin prévu, entre autres mesures, d’adapter notre législation à certaines exigences du règlement sanitaire international.

L’article 55 concerne quant à lui des acteurs de santé fort anciens et relevant d’autres ministères : le service de santé des armées (SSA) et l’Institution nationale des Invalides (INI). Il y est proposé d’habiliter le Gouvernement à prendre des mesures législatives sur un champ très large, visant à modifier l’ensemble des codes concernés pour insérer ces organismes aux dispositifs du projet de loi qui les concernent.

Il s’agit surtout de permettre au Gouvernement de modifier le droit encadrant leur activité afin de mieux les insérer dans l’offre de soins civile. Il sera notamment prévu des évolutions de gouvernance et de statut pour l’INI, l’insertion de ces organismes dans les documents de planification sanitaire régionale, le changement de statut des hôpitaux d’instruction militaires et l’attribution aux services du ministère de la santé, notamment aux ARS concernées, d’une responsabilité dans le domaine sanitaire de défense.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je remercie Mme la présidente d’avoir accepté que la Délégation aux droits des femmes se saisisse de ce texte. En effet, deux dispositions concernent directement les femmes et les jeunes filles, l’une sur la contraception, l’autre sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG), qui confortent les mesures que vous avez prises depuis 2012, madame la ministre, en particulier le remboursement à 100 % de l’IVG. La Délégation proposera plusieurs amendements visant à renforcer l’offre de l’IVG, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif, et à lever les freins qui obligent encore aujourd’hui des femmes à partir à l’étranger pour avoir accès à l’IVG. Le programme d’action que vous avez présenté le 15 janvier avec Mme Boistard prévoit la formalisation d’un plan pour l’accès à l’avortement dans chaque région, sur le modèle du projet FRIDA (Favoriser la réduction des inégalités d’accès à l’avortement) de l’Ile-de-France ; je pense qu’il s’agit d’une bonne voie.

Mais au-delà de ces dispositions liées à la santé sexuelle et reproductive, la Délégation a souhaité adopter une approche globale sur la santé des femmes, comme l’y invite ce texte. La santé des femmes offre un portrait contrasté et des enjeux spécifiques : leur espérance de vie est supérieure à celle des hommes, mais elles perçoivent leur santé de manière plus négative que les hommes. L’obésité progresse chez les femmes, tout comme le tabagisme, si bien que la courbe descendante des cancers du sein va rejoindre, pour la première fois cette année, la courbe ascendante du cancer du poumon chez les femmes. Les femmes présentent une vulnérabilité plus grande face aux accidents du travail. Surtout, elles sont victimes d’inégalités sociales en matière santé, inégalités que vous souhaitez combattre, madame la ministre. En effet, la précarité concerne davantage les femmes, en particulier les familles monoparentales, qui sont surreprésentées parmi les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et plus nombreuses à renoncer aux soins. En outre, de fortes inégalités territoriales existent en termes de suivi de grossesse, d’obésité et de dépistage du cancer féminin. C’est pourquoi la Délégation soutient le tiers payant, qui devrait être mis en place le plus rapidement possible. Si les inégalités face à la santé reculent, les femmes en seront les premières bénéficiaires.

Par ailleurs, le projet de loi conforte des mesures qui n’apparaissent pas comme spécifiques aux femmes, mais qui auront un impact très positif, comme vous l’avez souligné lors de votre audition devant notre Délégation, madame la ministre.

Je vous renvoie donc, chers collègues, aux 21 recommandations du rapport de la Délégation aux droits des femmes, présenté par Catherine Quéré et moi-même, intitulé « L’égalité réelle passe aussi par la santé », en référence à la loi fondatrice du 4 août 2014 « pour l’égalité réelle entre les femmes et des hommes ».

La Délégation aux droits des femmes attend beaucoup de ce projet de loi important et de ses trois axes : prévenir avant d’avoir à guérir, faciliter la santé au quotidien, innover pour conforter l’excellence du système de santé.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour la Délégation aux outre-mer. Madame la ministre, la santé est un problème majeur qui concerne aussi les territoires d’outre-mer où il se pose parfois de façon particulière. Malgré les efforts déployés, de graves et persistantes inégalités y demeurent par rapport à l’hexagone. Ce disant, je m’appuie sur un rapport de la Cour des comptes de juin 2014, qui met en avant les nombreuses disparités et les retards importants, mais également sur les indices de développement humain des territoires d’outre-mer, en particulier l’indice santé : on relève des écarts de douze à vingt-huit ans entre les territoires ultramarins et ceux de la Métropole.

Malgré quelques rattrapages, le chantier reste vaste. Quatre exemples sont particulièrement illustratifs du chemin qui reste à parcourir.

D’abord, les taux de mortalité infantile, de grossesses précoces et de recours à l’IVG dans les outre-mer sont deux fois plus élevés que dans la Métropole, et les causes restent non identifiées en raison d’un manque de données sur ces sujets.

Ensuite, certaines pathologies sont inconnues en métropole, donc spécifiques aux territoires ultramarins – dengue, chikungunya, paludisme… D’autres ont une prévalence particulière, telles que l’infection à VIH, les hépatites virales, le diabète ou encore l’obésité. Or ces pathologies méritent une prévention accrue ou un dépistage précoce pour une meilleure prise en charge.

Le troisième exemple est celui des conduites addictives spécifiques. En effet, le plan de lutte contre les drogues 2013-2017 a noté dans les DOM une précocité de consommation, notamment de l’alcool, chez les jeunes et une polyconsommation des différentes substances. Lors de la présentation de mon rapport sur la santé à la Délégation aux outre-mer, de nombreux députés ultramarins m’ont fait part de leurs inquiétudes sur ce sujet. Nous devons prévenir plus efficacement ces conduites addictives, qui sont souvent source de violences diverses. Madame la ministre, vous êtes engagée dans la lutte contre le tabac, mais l’alcool, qui tue beaucoup plus dans nos territoires, doit aussi être un combat que vous devez mener à nos côtés.

Enfin, le dernier exemple est celui de la faible densité médicale dans les DOM. Ce constat est valable pour les praticiens hospitaliers, mais aussi pour les médecins exerçant la médecine libérale.

Face à l’ensemble de ces fléaux, le projet de loi relatif à la santé apporte un certain nombre de réponses.

Il convient d’observer, tout d’abord, que la plupart des mesures contenues dans le projet de loi, même si elles ne visent pas expressément les DOM, ont vocation à s’y appliquer. Il s’agit des articles 3, 4, 7, 26, 37 et 56, ce dernier visant spécialement les outre-mer. Néanmoins, ces mesures peuvent paraître générales et insuffisamment ciblées sur les questions spécifiques qui se posent dans les collectivités ultramarines.

Plusieurs de mes amendements sont de nature à apporter des remèdes aux problèmes rencontrés dans les territoires. La plupart ont été repris par mon groupe, ce dont je me félicite.

Le premier amendement prévoit l’intégration, de manière expresse, des problèmes ultramarins dans la stratégie nationale de santé.

Le deuxième tend à créer des pôles d’excellence en matière de recherche et de médecine tropicale dans les territoires ultramarins. Je propose que le Gouvernement favorise l’émergence de pôles d’excellence en matière de recherche et de médecine tropicale dans une ou deux zones géographiques concernant tout particulièrement les outre-mer.

Troisièmement, je propose de favoriser l’essor de la télémédecine à Wallis-et-Futuna. Compte tenu de l’éloignement du territoire et de sa faible densité médicale, il s’agirait là d’un moyen très opérant pour améliorer tant la prévention que l’offre de soins. Avec mon collègue Napole Polutélé, je propose également que l’ARS de Wallis-et-Futuna, en cas d’évacuation sanitaire du patient, transmette un document à sa signature et à la personne accompagnante, les informant des modalités et des conséquences, notamment financière, de ce transfert.

Le cinquième amendement prévoit l’obligation de faire figurer des données chiffrées concernant les départements ou collectivités d’outre-mer dans toute statistique déclinée au niveau local.

Le sixième amendement propose la remise d’un rapport par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, indiquant les modalités selon lesquelles il serait possible d’instaurer à Mayotte la CMU-C.

Enfin, un amendement prévoit la possibilité pour les centres hospitaliers de développer des actions de santé visant à améliorer l’accès et la continuité des soins, ainsi que des actions liées à des risques spécifiques, dans les territoires de santé isolés ultramarins.

Je souhaite par ailleurs, madame la ministre, insister sur trois amendements d’appel sur lesquels j’aimerais que nous débattions.

Le premier tend à limiter la taille des surfaces publicitaires en faveur de l’alcool.

Le deuxième vise à améliorer les études statistiques concernant la santé dans les DOM.

Le troisième concerne l’interdiction de l’affichage publicitaire en faveur des boissons alcoolisées à moins de deux cents mètres des établissements scolaires.

Je souhaiterais conclure mon propos en vous demandant, madame la ministre, de prendre un engagement solennel en promettant à la représentation nationale que le Gouvernement procédera bien prochainement par ordonnance pour mettre en place un plan de rattrapage décliné dans chaque territoire ultramarin.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vais maintenant donner la parole aux orateurs des groupes.

Mme Martine Pinville. Je tiens tout d’abord à souligner le travail important réalisé par nos collègues rapporteurs, mais aussi à saluer les propos de Mme la ministre, qui nous a permis de resituer l’objet de ce projet de loi avec la cohérence politique qui l’a porté, en se basant sur les conclusions de la stratégie nationale de santé.

Le travail parlementaire qui est désormais le nôtre est attendu. Il est attendu d’abord par tous les Français dont une des principales préoccupations est la santé. Ils attendent de nous des réponses capables de préserver l’avenir de notre système de santé, qui présentent des difficultés importantes. Il est très attendu aussi par les professionnels de santé, en particulier les médecins. Nous connaissons leurs inquiétudes concernant certaines dispositions prévues initialement dans ce projet de loi. Une large concertation a eu lieu, des groupes de travail ont été constitués, dont les conclusions ont été prises en compte par le Gouvernement, qui a déposé de nombreux amendements dont nous aurons à débattre.

Le malaise perçu ces derniers mois, je pense notamment aux médecins généralistes, va bien au-delà du texte abordé aujourd’hui. Sans doute une plus ample réflexion sur la définition des conditions d’exercice de leurs professions s’impose-t-elle. L’annonce d’une conférence sur la santé va dans ce sens ; cela nous permettra d’apporter des réponses complémentaires aux professions concernées.

Pour en venir plus précisément au fond du projet de loi, je tiens à souligner la volonté politique forte qui s’exprime pour mener à bien la réduction des inégalités sociales et territoriales que subissent de trop nombreux Français en matière de santé. Compte tenu de la nécessaire maîtrise des finances publiques, dont personne ici ne peut nier l’évidence et le bien-fondé, il nous a fallu imaginer de nouvelles formes d’organisation et d’intervention, toujours plus efficientes, pour mener à bien cet ambitieux projet. Je pense bien évidemment à la généralisation du tiers payant qui constituera, à terme, une avancée sociale pour tous les assurés sociaux, à commencer par les plus en difficulté. C’est tout à l’honneur du Gouvernement et de la majorité réunie de porter ce marqueur de gauche à son terme. Nous ne pouvons pas laisser de nombreuses familles renoncer aux soins pour des raisons financières : renoncer à une consultation de 23 euros pour son enfant, c’est tout à la fois inacceptable et intolérable.

Par ailleurs, nous allons, pour la première fois, mettre en avant et donner corps dans la loi à la mise en œuvre d’une véritable politique de prévention en santé publique. La prévention doit intervenir tout au long de la vie, et c’est le sens que nous allons lui donner dans ce projet de loi. Ainsi, tous les acteurs, que ce soit la protection maternelle et infantile, la médecine scolaire, la santé au travail, la médecine de ville, la médecine hospitalière, doivent être concernés. Nous le savons, les politiques de prévention – faire attention à soi, à sa santé, à celles des autres – évitent, dans la plupart des cas, le recours aux soins, à l’intervention, aux actes curatifs. Pour ne citer qu’un seul exemple, j’évoquerai la prévention contre le tabagisme, qui génère chaque année plusieurs milliers de décès et contre lequel une mobilisation générale est nécessaire.

Enfin, le développement des soins de proximité, en recentrant le système autour du médecin traitant et en engageant le virage ambulatoire, la création de nouveaux droits pour les patients ou encore une meilleure prise en charge des maladies chroniques, sont également des axes forts de ce texte.

Ainsi, au nom des députés du groupe SRC, je tiens à saluer l’esprit dont a fait preuve le Gouvernement dans l’élaboration de ce projet de loi. Je forme le vœu que l’ensemble des députés travaillent à enrichir ce texte : c’est cet esprit constructif que les Français attendent de nous.

M. Jean-Pierre Door. Depuis des semaines, voire des mois, un conflit grave oppose, comme jamais auparavant, le Gouvernement à la quasi-totalité du monde médical. Madame la ministre, nous étions ensemble il y a une semaine face à un auditoire d’un millier d’étudiants et d’internes ; vous aviez annoncé des assouplissements sur les points les plus contestés du texte, ainsi que de nouvelles propositions issues des groupes de travail orchestrés dans votre ministère. Quel fut le résultat ? La surdité gouvernementale a déclenché la grande manifestation de dimanche dernier. Même le président du conseil de l’ordre est en colère, si bien qu’il vous a demandé de réécrire le texte, sinon de le reporter, ce que vous avez refusé.

Aujourd’hui, nous nous apprêtons à travailler sur un texte qui n’est plus d’actualité, puisque vous avez décidé d’y apporter nombre d’amendements, qui sont apparus ce week-end et dont vous venez de nous donner la primeur. Notre travail de député est bafoué, madame la ministre, ce qui ne s’est jamais vu – même certains collègues de votre majorité sont abasourdis, m’ont-ils confié. Et que dire du choix de la date d’examen de ce texte, à quelques jours d’un scrutin national ? Était-ce un choix délibéré, afin de faire passer en force ce projet de loi ? La question est posée. Quant à la procédure accélérée annoncée hier, il s’agit ni plus ni moins d’un déni de démocratie.

Madame la ministre, le groupe UMP s’opposera à la généralisation du tiers payant, par des amendements que nous défendrons à l’article 18.

Nous refuserons la création d’un service territorial de santé au public, centré sur un modèle étatisé, quelle que soit la réécriture de l’article 12.

Nous discuterons avec vous de l’accès aux données de santé – l’open data –, mal maîtrisé techniquement, tel qu’il est prévu à l’article 47.

Nous nous opposerons à votre réforme de la médecine de ville, à l’article 38, parce qu’elle néglige la crise profonde que traverse la médecine générale sur tout le territoire.

Enfin, nous nous opposerons évidemment à l’expérimentation des salles de shoot, prévue à l’article 9.

D’autres points seront abordés par mes collègues.

En définitive, non seulement ce projet de loi n’est pas crédible, mais il est, contrairement à ce que vous prétendez, totalement irresponsable. Beaucoup mieux que cet entêtement du Gouvernement, il aurait mérité de prendre la forme d’une réforme structurelle, élaborée en concertation avec tous les acteurs de la santé. Au surplus, il est pour le moins paradoxal que ce texte soit examiné avant la mise en place d’une « conférence de la santé » annoncée récemment. Voilà pourquoi de nombreux amendements seront soumis par mon groupe à la commission dès ce soir.

M. Arnaud Robinet. Madame la ministre, le groupe UMP souhaite soulever trois questions.

Où est le respect du Parlement ? Chacun le sait, le Parlement est le parent pauvre de la Ve République. Dans le Parlement rationalisé, le Gouvernement détient les clés de la discussion des projets de loi. Ici, cette logique est malheureusement poussée à l’extrême, d’une part, parce que des amendements ont été déposés par le Gouvernement à la veille du week-end dernier sur les articles majeurs du texte, alors que les députés n’avaient plus la possibilité de proposer des modifications, et, d’autre part, parce que la procédure accélérée a été annoncée hier dans les médias, soit la veille de l’examen de ce texte en commission. Quelle leçon de démocratie pour un texte qui comporterait, aux dires du Gouvernement, une avancée citoyenne avec l’article 47 sur l’open data santé !

Où est le dialogue ? La rigidité gouvernementale s’explique par votre sens du dialogue très limité. On ne compte plus les interlocuteurs privés ou associatifs qui n’ont pas été reçus par votre cabinet uniquement par principe. Et il y aurait beaucoup à dire sur l’écoute du Gouvernement face aux travaux de la commission « open data santé » ou encore face aux professionnels. Si le Gouvernement était si ouvert au dialogue, pourquoi n’avez-vous pas décidé de convoquer une « conférence de la santé » pour relancer la concertation sur les professions médicales, après l’examen de cette loi censée traiter cette question ? Madame la ministre, votre idée du dialogue est malheureusement dépassée.

Où est la vision du Gouvernement ? Cette rigidité s’explique par l’absence de cap du Gouvernement sur sa politique de santé. Pas de réforme de fond, pas de réforme structurelle ; alors qu’elle était promise au tout début du quinquennat, le Gouvernement a d’abord reporté la loi de santé, avant de naviguer sur des sujets aussi majeurs que le tiers payant, l’open data, la réforme de l’hôpital, la démographie médicale, l’information nutritionnelle, les paquets neutres, etc. Ainsi, quelques jours avant les élections départementales, le Gouvernement a besoin de généraliser le tiers payant pour afficher un marqueur supposément de gauche. On peut se demander où sont les vraies convictions et la vraie stratégie du Gouvernement sur la santé. Avec des mesures démagogiques, coûteuses et relevant souvent du domaine réglementaire, ce projet de loi fourre-tout est en deçà des attentes des professionnels de santé. Cette improvisation est dangereuse. Nous avons besoin de réponses, notamment sur la notion de droit à la santé.

Concernant le tiers payant, sur lequel nous n’avons pas de position dogmatique, comment comptez-vous procéder pour mettre en place sa généralisation, madame la ministre ?

Au chapitre de l’offre de soins, que deviennent l’assurance maladie et les professionnels de santé, en particulier le médecin traitant, dans le cadre de la refonte du parcours de soins ou encore de la gestion de crise ? Quelle est votre vision de l’hôpital, alors que vous envisagez à la fois une reprise en main par les ARS et des suppressions de postes massives ?

Par ailleurs, à quel moment la punition prend-elle le relais de la prévention dans le domaine notamment de l’alimentation ?

Enfin, pouvez-vous nous éclairer sur la position du Gouvernement à propos de la législation sur le vin ?

Telles sont, parmi d’autres, les questions pour lesquelles nous attendrons des réponses au cours des débats de la commission.

M. Arnaud Richard. Madame la ministre, c’est avec stupéfaction que j’ai pris connaissance de ce projet de loi relatif à la santé et de ses évolutions.

Stupéfaction d’abord, parce que cette « grande loi de santé publique » ne répond que partiellement, pour parler en langage diplomatique, à nombre des enjeux cruciaux auquel le système de santé français est confronté, alors que nous nous sommes attachés depuis deux ans dans cette enceinte à formuler des propositions, en particulier sur le « virage » ambulatoire, la sécurité sanitaire ou encore la démographie médicale.

Stupéfaction ensuite, parce que vous parvenez à cette prouesse de déposer plus de cinquante amendements sur un texte que vous préparez depuis maintenant deux ans… Sans parler du titre V qui fera l’objet de cinquante ordonnances.

Comment une telle absence de méthode est-elle possible au sein d’un gouvernement ? Comment une réforme aussi majeure peut-elle faire l’objet d’une concertation improvisée, en urgence, et après le dépôt du projet de loi à l’Assemblée nationale ? Je tiens à vous décerner un satisfecit, madame la ministre : vous êtes le premier ministre de la santé, depuis bien longtemps, à avoir réussi à mobiliser l’ensemble des professionnels de santé contre un projet de loi, alors que celui-ci n’a pourtant rien de révolutionnaire…

Le groupe UDI attendait, pour sa part, une réforme ambitieuse, s’attaquant de front aux questions aussi essentielles que la désertification médicale, le rapprochement entre le secteur public et le secteur privé, la carte hospitalière, la répartition territoriale équitable des établissements de santé et leur nécessaire modernisation, la sécurité sanitaire, l’innovation et la recherche. Au surplus, nous venons d’apprendre que vous comptez mettre en œuvre, après l’examen de ce texte, une « grande conférence de la santé » ! Autrement dit, pardonnez-moi l’expression, on est cul par-dessus tête !

Avec ce projet de loi, vous faites du tiers payant l’étendard de votre combat en faveur de l’accès aux soins. Or la généralisation du tiers payant ne peut constituer la seule réponse à la question fondamentale de l’accès aux soins, car elle ne résoudra en rien le problème du reste à charge qui atteint parfois des niveaux insoutenables pour les familles de ce pays.

Néanmoins, je tiens à souligner – car qui aime bien châtie bien ! – les points positifs de ce projet de loi : le renforcement de la prévention, avec des actions en faveur de la jeunesse, le soutien au service de santé au travail, l’information et la protection du public face aux risques sanitaires liés à l’environnement. J’ajoute que le droit à l’oubli permettra aux anciens malades contractant un prêt immobilier ou un crédit à la consommation, de ne plus mentionner dans leurs antécédents médicaux le cancer dont ils ont souffert.

Nous vous ferons, madame la ministre, plusieurs propositions fortes pour dessiner les contours d’un système de santé organisé autour du patient et de son intérêt. Nous porterons notamment un amendement visant à défendre la convergence tarifaire entre le public et le privé – à l’encontre de votre décision de baisser les tarifs du privé de 2,5 %, ce qui aboutira à mettre 15 % des cliniques en déficit et menacera 10 000 emplois.

Nous proposerons également une véritable refonte de la carte hospitalière, plus ambitieuse que le hasardeux service public hospitalier que vous proposez de mettre en œuvre.

Enfin, je proposerai un amendement qui me tient particulièrement à cœur, visant à affirmer le principe – qui a fait l’objet d’un engagement du candidat François Hollande – selon lequel nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle.

M. Gérard Sebaoun. Très bien.

M. Arnaud Richard. En conclusion, les timides avancées de ce texte ne masquent pas le manque d’ambition du Gouvernement quant à la nécessaire réforme de notre système de santé. C’est pourquoi nous nous engageons sans réserve afin d’amplifier les quelques avancées qu’il contient et de répondre aux nombreuses carences qui le caractérisent.

M. Jean-Louis Roumegas. Madame la ministre, au terme de deux années de travail et de concertation avec les associations d’usagers, de professionnels ou de victimes, les écologistes sont plus que jamais attentifs aux questions de santé, qui constituent un droit fondamental en particulier en période de crise.

En nous appuyant, en particulier, sur le troisième plan national santé environnement (PNSE 3), pour lequel, au sein du groupe de travail santé environnement présidé par notre collègue Gérard Bapt, nous nous sommes mobilisés pour rétablir le socle de discussions santé environnement au sein de la conférence environnementale. Dans ce cadre, nous avons apprécié que la France soit à l’avant-garde dans l’interdiction du bisphénol A dans les contenants alimentaires et dans la définition d’une stratégie nationale en matière de perturbateurs endocriniens. Nous devons persévérer dans cette voie, et c’est d’ailleurs l’engagement qui a été pris lors de la conférence environnementale. Nous attendons des réponses concrètes à nos propositions.

La notion d’« exposome », c’est-à-dire ce qui ne relève non pas du patrimoine génétique, mais de l’exposition à un environnement dégradé et à la prolifération de substances chimiques, porte un nouveau modèle sanitaire. Il s’agit d’imposer une véritable mutation des politiques de santé, à l’heure où les maladies chroniques explosent. Le coût de l’inaction représente des chiffres astronomiques : pour les perturbateurs endocriniens en Europe, par exemple, il a été chiffré à 150 milliards d’euros par an.

Les inégalités d’accès aux soins s’amplifient, et le renoncement aux soins est patent. Le non-recours aux soins s’établit autour de 6 milliards par an. Certains pourraient y voir une économie, mais c’est un phénomène inquiétant, surtout s’il se conjugue avec des comportements de refus de soins : il y a là un risque majeur de voir des pans entiers de la population renoncer à se soigner et une dette sanitaire incompressible se profiler.

Nous sommes donc confrontés à un défi de société. Il s’agit de garantir les soins malgré des budgets contraints et simultanément de faire face à une crise sanitaire majeure.

Comment préserver le socle de solidarité issu du consensus hérité du Conseil national de la Résistance ? « Chacun contribue en fonction de ses moyens et reçoit en fonction de ses besoins. » À cet égard, nous saluons un certain nombre d’avancées de la loi.

La première est la généralisation du tiers payant, en commençant par les plus démunis, avec une application progressive à l’horizon de janvier 2017. Nous soutenons cette option en souhaitant son accélération. Nous veillerons à ce que le panier de soins, déjà très contraint – surtout pour l’optique et les soins dentaires – ne soit pas dégradé. Nous contestons en outre l’hypothétique report sur les mutuelles complémentaires. Cela mérite des arbitrages forts.

Les agences sanitaires sont en voie de réorganisation, leur mission est clarifiée et la maîtrise des conflits d’intérêts avance. Mais il convient d’aller aller plus loin, en irriguant l’ensemble des dispositifs d’expertise, de veille sanitaire, d’alerte et de qualification des professionnels de santé au regard des enjeux de la santé environnementale. Une avancée claire et ferme sur ces sujets serait un message fort.

Assainir les rentes des industries pharmaceutiques, sortir du tout-médicament, bonifier les conditions de production des bases alimentaires en réduisant la part de la chimie et donc de la mal-bouffe, appliquer le principe pollueur-payeur aux industries du tabac, autant de voies à explorer pour nous donner des marges et restaurer la démocratie sanitaire. Nous avons déposé de nombreux amendements dans ce sens.

L’ambition de fédérer les professionnels de la santé de nos territoires, au plus près des populations et de manière décentralisée via de nouvelles missions confiées aux ARS, en favorisant la multidisciplinarité, va dans le bon sens.

Nous souscrivons au développement de l’ambulatoire. Ce virage doit s’appuyer en amont sur une meilleure maîtrise des risques et une politique de santé primaire affirmée, en même temps que sur la prise en compte des aidants et accompagnateurs polyvalents et multidisciplinaires et sur leur juste reconnaissance. L’innovation thérapeutique et technologique ne peut se substituer à la force et au soutien de la relation humaine.

Nous prenons acte de l’institution d’une action de groupe. Nous avons été entendus dans la poursuite de nos arguments lors de l’examen de la loi Hamon, mais limiter cette action de groupe aux dommages corporels liés aux produits de santé, comme le prévoit l’article 45 du projet de loi, nous semble restrictif. Nous vous proposerons de l’étendre.

En effet, nous souhaitons sortir d’une société ou les contentieux se multiplient. Nous devons tirer les leçons des crises sanitaires. L’amiante doit devenir une grande cause nationale, tout comme la lutte contre les pesticides, les particules fines du diesel, et l’ensemble des expositions nocives qui dégradent, par leurs effets délétères, nos comptes publics tout autant que la santé de la population.

La loi sur la biodiversité, en débat actuellement, nous rappelle l’équilibre fragile qui existe entre l’état de nos écosystèmes et la santé de ceux qui y vivent. De nombreux citoyens se tournent vers des médecines complémentaires et préventives : il faut entendre ces choix comme le droit et le devoir de chacun à se ressaisir de son capital santé par des voies douces privilégiant la prévention.

Nous approuvons le choix de sécuriser les comportements addictifs, avec l’expérimentation de salles de consommation. Il s’agit de prendre en charge, de façon sanitaire et sociale, ce qu’il faut bien considérer comme des pathologies. D’autre part, le cannabis thérapeutique ne doit plus être un sujet tabou dans la mesure où il peut soulager des douleurs chroniques et que de nombreux pays l’ont adopté avec succès.

Enfin, le libre choix thérapeutique dans le domaine de la vaccination doit mieux prendre en compte la voix des victimes des adjuvants à base d’aluminium, face au déni des industriels en particulier.

En conclusion, la loi de santé proposée doit marcher sur deux jambes : le curatif, mais aussi un socle de prévention primaire fort. Ce choix fondera les marges d’économies de demain et nous amènera vers une société de plus grand bien-être, sans exclusive. Nous sommes prêts, madame la ministre, à enrichir le débat de manière constructive et pragmatique. Nous attendons vos réponses.

Mme Dominique Orliac. Madame la ministre, le texte que vous présentez à la représentation nationale était attendu depuis très longtemps. Nous avions nourri beaucoup d’espoir à son sujet, mais il suscite aujourd’hui de nombreuses craintes, alors que la santé devrait faire l’objet d’un consensus national.

La santé, telle qu’elle est définie aujourd’hui par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), est un état général de bien-être mental et physique ; c’est probablement ce que nous avons de plus précieux.

Et pourtant, pour des raisons économiques, certains de nos concitoyens sont amenés à renoncer aux soins. D’autres, toxicomanes, pour des raisons liées au poids du regard, à la stigmatisation, y renoncent, faute de salles de consommation à moindres risques. D’autres encore, praticiens comme usagers ou associations de patients, comptent sur la mise en œuvre tant attendue d’expérimentations pour élaborer, dans les meilleures conditions, notamment de sécurité juridique, les bonnes pratiques de demain et des prises en charge spécifiques.

Il faut reconnaître que tant l’organisation que la complexité du système de soins - disons-le, sa « technocratisation » – transforment trop souvent le parcours de soins en parcours du combattant, excluent certains de ses acteurs, pourtant indispensables, et épuisent les professionnels de santé en faisant d’eux des agents administratifs alors que ce n’est ni leur métier ni leur vocation.

Madame la ministre, le système de santé doit être pensé autour de trois piliers : les usagers, les professionnels et les structures de soins et d’accueil. Pour cela, il faut une loi qui apporte un nouveau souffle, un souffle fort et ambitieux. Une loi pragmatique, résolument orientée vers le développement des soins primaires, le dépistage, la prévention et l’éducation à la santé.

Oui, la santé a besoin d’un souffle nouveau, mais pas d’un vent qui risque de tout déraciner et arracher ; il nous faut un vent porteur pour la prévention et la santé publique, sans tabou, sans préjugés, qui apportent enfin les outils de cohérence qui lui manquent tant. C’est tout le sens des amendements que j’ai déposés, notamment celui qui propose un grand plan de prise en charge de l’enfant et de l’adolescent, pour insuffler une stratégie de santé de l’enfant et de l’adolescent. C’est souvent à cet âge que se déterminent les addictions à l’alcool, au tabac, aux produits stupéfiants, ainsi que les « addictions sans substance » comme les jeux vidéo. Là aussi, il y a des enjeux de santé majeurs qu’il nous faut courageusement prendre en charge.

Les plus vulnérables doivent être aidés et soignés, car les virus, les bactéries, la souffrance ne connaissent pas les passeports. Ainsi, en fusionnant les régimes de l’AME et de la CMU, comme je vous le propose, c’est une meilleure protection des plus faibles au bénéfice de la santé de tous que nous réaliserons.

De même, et c’est tous le sens de certains de mes amendements que je porte pour le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste, à l’heure où les médias relaient le rôle stratégique des conditions de détention dans la réinsertion des personnes détenues, condition nécessaire pour lutter contre la récidive et pour la paix publique, il est indispensable que les lieux de privation de libertés soient une cible prioritaire des campagnes de prévention, d’éducation à la santé et de réduction des risques. Les radicaux de gauche y tiennent.

Il faut ensuite de l’air pour les professionnels de santé, surtout les médecins. Ils en ont besoin. La loi doit avant tout simplifier leur exercice, leur permettre de dégager du temps médical, du temps de soins, du temps de formation continue, et non les noyer dans des démarches administratives. Cet air nouveau doit leur permettre de retrouver une confiance dans ce système dont ils sont la cheville ouvrière. Ce système doit être élaboré et gouverné avec eux, et non contre eux. Cet air nouveau doit aussi éclaircir l’avenir des étudiants et internes qui, aujourd’hui, sont plus que pessimistes.

Il faut réconforter les médecins généralistes, qui sont la porte d’entrée dans le parcours de soins, le socle de notre médecine, les artisans des soins primaires et du dépistage. Ils se sentent mal-aimés, peu entendus, quelquefois même méprisés. Quand on sait leur temps de travail hebdomadaire, leur implication pour la santé de leurs patients, le niveau de leur qualification, madame la ministre, leur rôle pour la qualité de notre médecine doit être consacré.

La généralisation du tiers payant, qui fait tant parler, si elle est un des leviers d’accès aux soins, ne doit pas détruire le temps médical. Pourquoi ne pas proposer un serveur unique de paiement, qui rémunère le professionnel en une fois, lui garantit le règlement immédiat, et assure ensuite le recouvrement des sommes avancées auprès du régime obligatoire et du régime complémentaire ? En tout état de cause, il faudra veiller à ce que le nouveau dispositif ne se traduise pas par une augmentation des cotisations des patients, notamment auprès des organismes complémentaires.

Je pense aussi aux pharmacies d’officine. Elles sont souvent, surtout dans les territoires ruraux ou à faible densité médicale, une étape déterminante de la prise en charge. Ainsi, je vous propose d’encadrer et de développer la médication officinale de premier recours. Celle-ci permettra de reconnaître la place stratégique de ces acteurs de santé, de simplifier la vie du patient et de sécuriser la dispensation des médicaments sans prescription, car rien ne saurait remplacer le conseil du professionnel de santé.

Le service public hospitalier, qui repose sur des établissements tant publics que privés, ne doit exclure aucun de ses acteurs. Il n’en a pas les moyens. Plus encore, exclure certains de ces établissements en raison de leur caractère privé ou public, voire de leur politique de tarification, c’est remettre en cause le libre choix du médecin par le patient. Or ce choix, les Françaises et les Français y sont viscéralement attachés.

Il faut, en outre, un espoir pour l’organisation de la santé à l’échelon territorial, laquelle a tendance à ne plus bouger, souffrant de son obésité administrative. Ainsi, pour les ARS et les super-ARS à venir, notre système doit être effectivement piloté sur un territoire, et le pilote disposer des pouvoirs qui lui permettent de mener à bien sa mission. Mais dans une démocratie comme la nôtre, il n’existe pas de pouvoir sans contre-pouvoir.

Cette loi devra donc aménager un véritable contre-pouvoir au sein des territoires. Je vous propose donc de mettre en place une représentation effective de tous les acteurs de la démocratie sanitaire : les patients, les médecins libéraux comme hospitaliers, les pharmaciens, les autres professionnels de santé, les structures de soins. Ce système ne doit pas privilégier un tel ou un tel. Il ne doit pas opposer, mais réunir, fédérer. Ce système ne doit pas organiser des féodalités tenues par les directeurs généraux des ARS. Il ne s’agit pas de créer un contre-pouvoir simplement pour un contre-pouvoir ; il s’agit de mettre en place une représentation de tous, dotée de pouvoirs effectifs, pour accompagner les directeurs généraux d’ARS avec un seul objectif : une meilleure gouvernance de la santé dans les territoires.

Oui, madame la ministre, nous ne pouvons pas faire l’économie du savoir empirique de ceux qui vivent la santé au quotidien, et laisser son pilotage à quelques hauts fonctionnaires, entourés de quelques directeurs de CHU. Les ARS, si elles impulsent la stratégie de santé dans nos territoires, doivent avant tout accompagner les acteurs de soins, être un véritable soutien logistique.

Cette loi devra aussi, et il s’agit du respect des libertés fondamentales, s’assurer que l’exercice indispensable de la santé mentale puisse reposer sur des textes clairs, et c’est l’objet de certains des amendements que je porte au nom de mon groupe.

Plus encore, dans une démocratie moderne comme la République française, on ne peut plus tolérer l’existence de vestiges de structures honteuses, comme l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris. Cette zone de quasi-non-droit est insoutenable, et c’est malheureusement en vain que les associations de patients et des associations de défense des droits de l’Homme demandent sa suppression. C’est l’objet d’un amendement que j’ai déposé, pour que soient détaillées rapidement les conditions de son retour dans le régime du droit commun. Madame la ministre, une ministre de gauche, défenseure des droits de l’Homme, doit s’engager avec conviction dans cette nécessaire transformation et elle a, à cet égard, une obligation de résultat.

Madame la ministre, les Radicaux de gauche seront vigilants et exigeants. Au nom des valeurs d’humanisme et de liberté qui fondent leur engagement politique, ils font des points que j’ai soulevés les conditions de leur vote. Comme je vous l’ai dit, il faut tenir compte des trois piliers, les usagers, les professionnels et les structures de soins, qui sont intimement liés. Cette grande loi de santé publique, faisons-la ensemble, faisons-la avec tous et pour tous.

En conclusion, je citerai Nelson Mandela qui disait : « Tout ce qui est fait pour moi, sans moi, est fait contre moi ».

Mme Jacqueline Fraysse. Le groupe GDR partage l’ambition déclarée de ce projet de loi : moderniser notre système de santé pour en garder l’excellence et affronter les nouveaux enjeux. Pas d’immobilisme, pas de statu quo, avez-vous dit, madame la ministre ; nous partageons cette volonté. Mais force est de constater que le contenu de ce texte est loin de répondre aux objectifs affichés. Ce n’est pas vraiment une surprise dans la mesure où ce projet de loi s’inscrit dans un contexte de réduction du budget de la santé, de 10 milliards d’euros d’ici à deux ans, dont 3 milliards pour les hôpitaux. Ce qui, bien sûr, interdit une « grande loi de santé », audacieuse, c’est-à-dire à la mesure des enjeux de notre pays et de notre temps. C’est donc un texte qui aménage à la marge ce qui existe déjà, et cela est fort dommage.

Certaines mesures sont indiscutablement positives, comme le renforcement de la prévention, la généralisation du tiers payant ou encore la possibilité d’initier des actions de groupe. Mais au-delà du manque d’ambition, ce qui nous frappe et nous préoccupe, c’est l’accentuation de l’autoritarisme des agences régionales de santé, véritables instruments de réduction drastique des moyens.

Dans le domaine de la prévention, on peut s’étonner que le texte ne dise pas un mot sur la protection maternelle et infantile, surtout au moment où s’accentue la précarité de tant de familles et de femmes seules avec des enfants. Quant à la santé scolaire, si elle est abordée, rien n’est proposé pour la revaloriser, la renforcer et la moderniser, alors que chaque médecin a en charge plus de 10 000 élèves.

La démocratie sanitaire est le point qui nous préoccupe le plus. Certes, à l’article 1er, une consultation publique est prévue préalablement à l’adoption ou à la révision de la stratégie nationale de santé. Nous souhaiterions d’ailleurs savoir qui sera consulté et sous quelle forme. Mais ce qui frappe tout au long de ce texte, c’est le rôle considérable, sinon démesuré, qu’il attribue aux agences régionales de santé. Cela est tellement flagrant que, pour rassurer, vous avez décidé de remplacer « service territorial de santé au public » par « communautés professionnelles territoriales de santé ». Certes, la terminologie est meilleure. Mais cela change-t-il les choses sur le fond, sachant que, aux termes la loi HPST, à laquelle vous vous étiez opposée mais que désormais vous confortez, ce sont les ARS qui in fine disposent de tous les pouvoirs ?

Si le texte prévoit, à l’article 12, que le projet territorial de santé sera élaboré sur la base d’un diagnostic partagé, ce qui est très bien, je note cependant que – comme d’habitude – c’est l’ARS qui arrête le diagnostic et le projet de santé – certes, après avis, mais seulement avis, d’un conseil territorial dont on ignore la composition. Plus encore, le texte précise que diagnostic et projet pourront être, à tout moment, modifiés par le seul directeur de l’ARS. C’est donc bien l’ARS qui, comme d’habitude, décidera seule quelle activité sera pratiquée ou refusée et par quel établissement.

C’est la même chose à l’article 27, à propos duquel on peut s’interroger sur les critères qui régiront la création des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Intérêt des patients ou économies financières à tout prix ? Qui participera à ces choix ? Qui rédigera les conventions portant création des GHT : les directeurs d’établissement, les présidents de commission médicale d’établissement (CME) ? Quelle place auront les usagers et les représentants des collectivités territoriales ? Jusqu’où l’ARS sera-t-elle légitime pour imposer un GHT ? Qui autorisera les dérogations ? De quelle nature et de quels critères s’agira-t-il ? Autant de questions auxquelles le texte ne répond pas et qui, de toute évidence, seront tranchées autoritairement, on peut le craindre, par les ARS.

Par ailleurs, concernant l’article 42, madame la ministre, pouvez-vous clarifier ce que vous entendez par la décision, je cite, de « fluidifier le fonctionnement de l’établissement français du sang au regard des exigences de l’Union européenne » ?

À l’article 47, concernant la création d’un système national des données de santé (SNDS), s’il est utile que les données anonymes puissent servir à la recherche, nous nous interrogeons sur les modalités d’accès offertes au privé, notamment aux entreprises pharmaceutiques, au prétexte ou par le biais de recherches menées par les laboratoires.

Enfin, concernant le tiers payant, je note qu’aucune obligation n’est mentionnée dans le texte à l’égard des médecins. Pourront-ils refuser de l’appliquer ? Dans ce cas, on pourrait s’interroger sur le terme de « généralisation ».

En conclusion, nous défendrons des amendements avec la volonté d’améliorer le projet de loi sur toutes ces questions.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vais maintenant donner la parole aux orateurs inscrits, pour deux minutes chacun.

M. Philip Cordery. Cette grande loi de santé publique se fixe un triple objectif : améliorer la prévention, réorganiser le système de soins pour le rendre plus accessible, garantir de nouveaux droits aux malades grâce à l’innovation. À mon tour, je tiens à saluer le travail réalisé par Mme la ministre et les rapporteurs.

L’une des avancées majeures de ce texte est la généralisation du tiers payant, qui sera effective dès 2017. Cette mesure est un immense soulagement pour nombre de nos concitoyens, qui n’ont pas les moyens d’attendre les remboursements. Le tiers payant ne s’appliquera pas au détriment des médecins, puisqu’il sera mis en place progressivement. S’il suscite des craintes, il suffit pour se rassurer de constater que vingt-quatre des vingt-huit pays de l’Union européenne le pratiquent déjà.

Je souhaite évoquer la problématique des zones transfrontalières, au sujet de laquelle j’ai déposé des amendements. Le projet de loi a pour but d’améliorer l’accès aux soins de proximité, de répondre au problème de la démographie médicale et d’élever le niveau de qualité des soins par la mise en place d’un projet régional de santé décliné au niveau des territoires et des groupements hospitaliers de territoire. Afin que ces avancées bénéficient de manière optimale aux habitants des bassins de vie transfrontaliers, ces derniers doivent être en mesure d’accéder à l’offre de soins la plus proche, même si celle-ci se situe de l’autre côté de la frontière. C’est pourquoi les nouveaux outils mis en place par la loi devraient comporter cette dimension transfrontalière, en prenant en compte l’offre et la demande de soins disponibles de l’autre côté de la frontière, ainsi que les coopérations existantes. Il existe de nombreuses coopérations hospitalières qui fonctionnent très bien, comme celle entre Tourcoing et Mouscron, à la frontière franco-belge. Ces coopérations répondent à une demande de la population, et le projet de loi devrait par conséquent les accompagner et les favoriser.

M. Bernard Perrut. Prévu en janvier, repoussé jusqu’à ce jour, et non achevé - puisque les amendements du Gouvernement vont encore le modifier –, ce texte suscite les inquiétudes, le désaccord et la colère. Après la manifestation de dimanche, le Syndicat national des jeunes médecins généralistes vient d’annoncer que les jeunes généralistes feront grève jeudi prochain.

La généralisation du tiers payant n’est pas acceptable pour les médecins car, malgré vos engagements, Madame la ministre, sa mise en œuvre, avec plus de 500 complémentaires, est impossible. Le paiement au médecin ne pourra excéder sept jours, les médecins n’auront qu’un seul geste à faire pour déclencher le paiement, promettez-vous. Mais quel dispositif efficace permettra réellement de respecter votre vœu ? Et nous ne pouvons ignorer l’inflation des soins et des coûts qui découlera de cette mesure.

L’inquiétude porte aussi sur l’organisation des soins dans les territoires. On peut voir dans l’article 12, qui crée un service territorial de santé au public, une étatisation de la médecine libérale, en donnant des pouvoirs accrus aux ARS. Une bureaucratisation et une suradministration de notre système de santé sont à craindre, l’article 41 renforçant ce sentiment.

Au titre de la prévention, on peut s’interroger sur l’étiquetage nutritionnel prévu à l’article 5. Nous y reviendrons.

Enfin, prenons garde de ne pas accepter des amendements qui remettraient en cause l’équilibre trouvé entre la protection des consommateurs et des publics à risque, d’un côté, et le développement économique et la promotion de nos territoires viticoles, de l’autre. Car si nous sommes favorables à la consommation responsable, à l’éducation et à la prévention, nous nous opposerons aux atteintes qui seraient portées à la communication sur internet, à la publicité, à l’information journalistique. Nous préférons la responsabilité, l’éducation et la prévention à toute prohibition.

Mme Michèle Delaunay. La loi de santé est très attendue des Français. Si la maladie relève d’abord des soignants, la santé est avant tout politique. Nous devons savoir politiser la santé pour ne pas avoir, demain, à privatiser la maladie.

La prévention constitue désormais la clé du système de santé. L’impact financier, sanitaire et social des addictions sous toutes leurs formes, du tabac aux drogues, est très lourd. Nous risquons, si nous ne prévenons pas fortement les cancers évitables, de ne pas pouvoir demain payer les molécules et les techniques innovantes qui guérissent de plus en plus de cancers.

C’est pourquoi nous soutenons l’application du principe pollueur-payeur à l’écologie de l’homme aux fabricants et consommateurs de produits de mort, tels que le tabac.

Nous vous accompagnerons, madame la ministre, dans l’ensemble de ces actions.

M. Élie Aboud. Madame la présidente, nous ne proférerons pas d’insultes. Nous souhaitons un débat apaisé, même si mon groupe est opposé à ce projet de loi.

Nous allons adopter une opposition pragmatique. Mes collègues ont parlé de la prévention, de la santé durable, du droit à l’oubli, autant d’avancées sur lesquelles nous pourrons vous accompagner. Mais pour ce qui est de l’esprit du texte, nous y sommes opposés pour trois raisons.

Pour commencer, les vrais sujets – formation, installation, démographie médicale, consolidation de l’hospitalisation à domicile et de la télésanté, etc. – ne sont pas traités.

Ensuite, alors que nous étions parvenus à apaiser le climat entre l’hospitalisation privée et l’hospitalisation publique en mettant en place une organisation et même des passerelles, on sent revenir, que vous le vouliez ou non, un clivage et une stigmatisation d’une partie des acteurs de santé.

Enfin, vous n’avez de cesse de répéter aux médias que 55 % des Français sont pour le tiers payant généralisé ; je suis étonné qu’ils ne soient pas plus nombreux ! Qui serait opposé à la gratuité de l’eau ou de l’électricité ? S’ils ne sont pas à 100 % pour le tiers payant, c’est parce qu’ils savent que votre loi pose problème. Le tiers payant n’est que la partie émergée de l’iceberg : ce texte ne fait que complexifier les choses et renforcer le caractère administratif de la santé de ce pays.

M. Gérard Sebaoun. Madame la ministre, je soutiens la direction que vous proposez pour rénover notre système de santé et en réduire les inégalités.

Je dis oui à l’affirmation de la place primordiale de la prévention, au-delà des vœux pieux trop longtemps réitérés. Oui à la mise en place progressive du tiers payant d’ici à 2017, même si j’entends la nécessité pour les professionnels de disposer d’un outil simple et fiable.

Mais soyons clairs : l’instrumentalisation du texte par ceux qui hurlent pour dénoncer la fin de la liberté d’installation ou de prescription n’a qu’un seul but : jouer sur les peurs de nos concitoyens et, plus grave, jouer sur les peurs des jeunes professionnels en formation. J’y vois surtout un immobilisme extrêmement néfaste et un conservatisme dangereux.

Je dis oui encore à la définition de territoires de santé inclusifs.

Néanmoins, le dépôt d’un amendement gouvernemental à l’article 6 suscite mon inquiétude. Cet amendement vise à légiférer par ordonnance sur le vaste champ de la médecine du travail, avec dans le viseur les notions d’aptitude et d’inaptitude. Il reprend l’énoncé de l’article 90 du projet de loi Macron, article retiré avant la tenue de la commission spéciale. Dans le droit fil de l’excellent rapport d’information de Michèle Delaunay et Guy Lefrand sur la mise en œuvre de la loi du 20 juillet 2011 relative à l’organisation de la médecine du travail, et dans l’attente de la mission de Michel Issindou, je souhaite que nous laissions la loi prendre son essor. Comme l’ensemble des syndicalistes du champ médical, je ne suis pas favorable à ce que le Parlement soit dessaisi, du fait de la procédure des ordonnances, sous prétexte de simplification.

Celles et ceux qui suivent ces dossiers connaissent bien la genèse de la demande : elle vient de la volonté de l’organisme central qui regroupe les services de santé au travail interentreprises, le CISME (Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise). Madame la ministre, j’en appelle à votre sagesse. Vous avez su proposer aux soignants la concertation dans le cadre de la loi santé ; j’espère que vous aurez la même attitude sur ce sujet.

M. Rémi Delatte. Madame la ministre, l’examen d’une loi de santé engendre toujours beaucoup d’intérêt. L’annonce et le dépôt, déjà ancien, de votre projet de loi attisent encore cette attente, d’autant que les défis liés à la santé publique sont nombreux.

Ainsi, compléter certaines dispositions de la loi HPHT, six ans plus tard, est fort utile.

Adapter notre système de soins aux évolutions technologiques et aux attentes des patients, personne ne conteste cette nécessité.

Lutter contre les déserts médicaux, contre les difficultés d’accès aux soins, relève du bon sens.

Amplifier l’effort de prévention et accroître la part des crédits de prévention dans le budget de santé est tout à fait indispensable.

En revanche, notre engouement disparaît au vu du contenu de votre projet de loi, tant il est à l’opposé de ce que nous pouvions en attendre. Personne ne s’y résout : la mobilisation exceptionnelle des professionnels de santé de dimanche dernier en est la preuve.

Au fond, l’idéologie domine une nouvelle fois : d’abord avec la généralisation du tiers payant, et son improbable gestion par les médecins et la déresponsabilisation des patients ; ensuite, avec l’opposition du public et du privé, alors qu’il faut au contraire développer leur convergence. Quant à l’expérimentation des salles de shoot, cela va à l’inverse des ambitions et des exigences éducatives d’une société moderne. Enfin, votre organisation territoriale a des relents d’étatisation d’un autre temps.

Bref, ce débat s’engage sous de curieux auspices, d’autant que le Premier ministre vient d’annoncer une « grande conférence de la santé » pour jeter les bases d’une véritable réforme de notre système de santé. Or vous nous dites qu’il ne faut pas retirer ce projet de loi. Tout cela n’est pas clair et sonne comme une défiance à notre endroit.

Mme Sylviane Bulteau. Madame la ministre, je me réjouis, comme mes collègues de la majorité, de ce projet de loi relatif à la santé.

Vous avez souligné que l’un des défis sera de faire reculer les inégalités, en particulier les inégalités territoriales dont on a le sentiment qu’elles ne cessent d’augmenter. Les élus ruraux mais aussi urbains, les usagers, les associations et les syndicats de médecins s’inquiètent de la désertification médicale qui touche 2 millions de Français. Certes, depuis votre arrivée, beaucoup de choses ont été mises en place, comme le Pacte territoire santé. Ce dispositif commence à porter ses fruits, mais il faudra les amplifier.

Quelles sont les grandes avancées de ce texte dans le domaine de la lutte contre les déserts médicaux ?

M. Gilles Lurton. Madame la ministre, vous avez dit dans tous les médias que le présent projet de loi a fait l’objet d’une large concertation ; or les principaux concernés soutiennent qu’il n’y en avait pas eu. Qui a tort, qui a raison ? M. Macron, à qui je faisais la même remarque sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, m’avait répondu que ce n’est pas parce que les intéressés n’ont pas obtenu satisfaction qu’il n’y a pas eu de concertation. J’imagine que vous me ferez la même réponse aujourd’hui… Cela devrait peut-être conduire le Gouvernement à revoir sa méthode de concertation.

Depuis maintenant deux ans et demi, nous avons vu se créer des groupes de travail sur les sages-femmes, les greffes d’organes, les personnes dialysées, les soins palliatifs, etc. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, tant en commission qu’en séance publique, vous nous avez à chaque fois répondu que ces sujets seraient examinés dans le cadre du projet de loi relatif à la santé. Or nous ne retrouvons rien, hormis l’extension des compétences des sages-femmes en matière de vaccination.

Le sujet qui me semble provoquer le plus de débats – mais nous verrons au cours de la discussion qu’il y en a beaucoup d’autres – reste la généralisation du tiers payant dont les professionnels contestent fortement la mise en place prévue à l’article 18 du chapitre III. Vous venez de nous dire qu’un seul geste suffira pour déclencher le paiement ; le Gouvernement s’était engagé à mettre en place un dispositif simple et la loi devait répondre à cette nécessité. Permettez-moi une question très concrète : nous avons tous une carte Vitale que nous rechargeons régulièrement. Que se passera-t-il quand un patient ira consulter un médecin sans avoir mis à jour sa carte Vitale ? Comment le médecin sera-t-il remboursé ? Le fait de ne plus avoir à régler une somme d’argent au médecin déresponsabilisera les patients qui ne se sentiront plus obligés de mettre régulièrement à jour leur carte Vitale.

M. Michel Liebgott. Je me félicite que le Gouvernement recherche en permanence l’égalité des citoyens devant la mort. Je rappelle que nous venons de voter par 436 voix la proposition de loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. L’égalité doit se faire également devant la maladie. Malheureusement, un tiers de la population n’a pas accès aux soins les plus élémentaires, en particulier aux spécialités tout simplement parce qu’elle ne peut pas faire l’avance de fonds. Aussi le débat autour de la généralisation du tiers payant est-il complètement tronqué et particulièrement injuste quand on sait la précarité de nos populations, dans certaines régions en particulier. Il est absolument nécessaire de tenir bon et de faire en sorte que le tiers payant soit étendu. Comme l’a dit M. Cordery, cela n’a rien d’exceptionnel. En Allemagne, par exemple, cela fonctionne très bien. Je crois d’ailleurs que cela rendra plus visibles certains dépassements d’honoraires, pas forcément justifiés. Il nous faut être au service de la santé pour le plus grand nombre.

En tant qu’élu d’une région industrielle, la Lorraine, je veux également relever les actions nécessaires en direction des maladies professionnelles comme la silicose, les cancers liés à l’amiante, etc. et saluer l’introduction des actions de groupe, qui seront tout à fait bienvenues.

Enfin, il me paraît indispensable que les ARS jouent tout leur rôle, comme cela a été fait dans le bassin sidérurgique où certains hôpitaux locaux qui étaient en déficit ont été rattachés à un centre hospitalier régional qui a rétabli la situation sur le plan financier et ouvert l’offre de santé.

Quelles mesures spécifiques proposez-vous au niveau transfrontalier ?

M. Dominique Dord. Madame la ministre, vous avez su nous dire ce que votre texte n’était pas : que ce n’était pas une loi de financement de la sécurité sociale. Mais il est plus difficile de dire ce qu’il est vraiment, d’autant que son titre est général et ambitieux. Notre commission des affaires sociales a toute une série de demandes plus ponctuelles qui ne figurent pas nécessairement dans le texte. Pour ma part, j’en ajouterai trois.

Premièrement, vous donnez des responsabilités supplémentaires aux sages-femmes, mais votre texte n’apporte rien de nouveau quant à leur statut.

Deuxièmement, nous venons d’avoir un débat très intéressant sur les soins palliatifs. On aurait pu penser trouver dans ce projet de loi un chapitre visant à garantir les orientations prises en matière de généralisation des soins palliatifs. Mais ce n’est pas le cas.

Ma dernière question sera un plaidoyer pro domo. Le titre premier concerne le renforcement de la prévention. Un chapitre est dédié aux actions en faveur de la jeunesse. Mais il ne faut pas oublier non plus un autre problème de santé publique important, celui du vieillissement de la population. Peut-être aurions-nous pu trouver dans ce titre premier une nouvelle orientation en matière de thermalisme…

Mme Fanélie Carrey-Conte. Madame la ministre, pour ma part, je reviendrai sur la lutte contre les inégalités sociales de santé par le développement de l’accès aux soins. Ce texte porte en effet plusieurs dispositions concrètes pour favoriser l’accès aux soins de nos concitoyens. J’insisterai plus particulièrement sur trois points.

La généralisation progressive du tiers payant tout d’abord. Les questions réelles de mise en œuvre technique ne sauraient servir de prétexte pour refuser l’application de ce nouveau droit. Les craintes d’inflation des soins ne sont pas fondées, comme l’ont démontré plusieurs études : il a ainsi été prouvé que l’élévation des plafonds des bénéficiaires de la CMU-C et de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS) n’a pas entraîné une surconsommation des soins des personnes qui entraient dans ces dispositifs.

L’appui aux centres de santé ensuite : ceux-ci jouent un rôle majeur dans les territoires en termes d’accès aux soins mais également de développement de la prévention et de l’éducation à la santé, en particulier en direction de nos concitoyens les plus fragiles. Le texte vise à renforcer leur place en permettant la transposition aux centres de santé des modes de rémunération prévus par les conventions des professionnels libéraux.

La lutte contre les refus de soins enfin. On sait que ceux-ci existent, notamment pour les patients bénéficiant de la CMU, CMU-C ou de l’aide médicale d’État (AME). Il est temps de mettre en œuvre des dispositions permettant une objectivation et une lutte efficace contre ces pratiques. Il est très bien que l’article 19 s’empare du sujet, même si j’estime qu’il le fait de façon insuffisante et qu’il faudra très certainement aller plus loin. J’aurai l’occasion d’y revenir dans la suite de la discussion.

Mme Véronique Massonneau. Je partage, bien évidemment, les remarques de mon collègue Roumegas. Je présenterai plusieurs amendements afin d’enrichir le projet de loi, notamment en faveur des personnes en situation de handicap dont l’adaptation de nos parcours de soins ne tient pas toujours compte, en insistant notamment sur les spécificités qui sont les leurs.

Lutter contre les discriminations est un engagement des écologistes qui se traduira par des amendements pour mettre fin à certaines d’entre elles qui persistent envers les homosexuels et les personnes atteintes du sida – je pense aux dons du sang et aux soins funéraires.

Je défendrai aussi plusieurs propositions afin de renforcer la prise en charge de la lutte contre la douleur dans nos politiques de santé publique. J’espère ainsi renforcer la place des soins palliatifs qui doivent s’étendre à l’ensemble des professions médicales et mieux informer le public sur l’importance des directives anticipées en écho au texte qui vient d’être voté.

Je tiens enfin, madame la ministre, à vous faire part de ma satisfaction en apprenant l’initiative du Gouvernement de soutenir une modification de notre droit afin de reconnaître le droit à l’oubli, proposition qui figure parmi celles que nous défendons.

J’attends de ce débat un véritable dialogue et j’espère que nous saurons répondre aux attentes des personnels de santé, des usagers et de tous nos concitoyens et faire reculer, grâce à ce projet de loi, des inégalités qui sont d’autant plus insupportables qu’elles concernent la santé.

M. Fernand Siré. On ne fait pas la médecine sans les médecins. Sur le terrain, on s’aperçoit que les vieux médecins ne veulent plus exercer et qu’ils se dépêchent de cesser leur activité, que les jeunes médecins ne veulent plus s’installer, et que les étudiants en médecine sont très inquiets et peu motivés pour poursuivre leurs études. Qui plus est, à cause d’un numerus clausus totalement absurde, nos enfants qui ont vraiment la vocation sont obligés de partir faire leurs études en Roumanie, en Belgique ou en Espagne. Le système est complètement dépassé.

Si tout cela arrive, c’est à cause d’un manque total de confiance dans les politiques menées jusqu’à présent. Les conventions médicales n’ont été respectées par aucun gouvernement et le montant des honoraires est ridicule.

Cela fait très longtemps que le tiers payant est utilisé par les médecins pour les allocataires de la CMU, pour ceux qui bénéficient d’une prise en charge à 100 %, etc. Avant de préparer une loi sur la santé, il aurait fallu voir ce que les médecins proposaient. Mais cela n’a pas été le cas. Et vous essayez maintenant de négocier avec eux. Bref, vous avez fait les choses à l’envers. Vous ne ferez jamais un texte de loi sur la santé sans les médecins ni les autres professionnels de santé.

M. Denys Robiliard. Madame la ministre, lorsque j’ai vu arriver vos amendements, en bon Français qui se respecte, j’ai râlé. Mais quand on est dans l’opposition, je ne vois pas comment on peut à la fois mettre en avant les reproches que font les professionnels de santé à ce projet de loi et se plaindre que des amendements viennent concrétiser la reprise de la concertation dans le cadre des groupes de travail.

Le présent projet est intéressant en matière de prévention, de renforcement de la démocratie sanitaire et de lutte contre les inégalités.

S’agissant de la santé mentale, je me réjouis que l’article 13 réaffirme le secteur qui avait été contesté, notamment lors du vote de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) – quand on supprime deux tiers des occurrences du mot « secteur » dans le code de la santé publique, ce n’est pas un hasard… Le secteur reste nécessaire compte tenu de la chronicité de la maladie, de l’importance de ne pas déraciner le patient, de la nécessité de mobiliser des moyens médicaux mais aussi médico-sociaux et sociaux.

Au cours de la discussion, nous reviendrons sans doute sur la gouvernance du secteur, ou sur la question de la santé mentale dans le cadre du territoire de santé de façon plus générale, à travers la notion de Conseil local de santé mentale (CLSM) dans lequel sont représentés les usagers et présents les élus du territoire, ce qui est important pour mobiliser les moyens du droit commun et comme facteur de déstigmatisation en matière de santé mentale.

Enfin, je veux insister sur l’importance en matière psychiatrique des pratiques avancées, bien évidemment pour les infirmiers, mais peut-être également pour d’autres personnels.

M. Gérard Bapt. Contrairement à M. Siré, j’estime qu’une loi est nécessaire car il faut adapter notre législation – il n’y a pas eu de loi de santé publique depuis 2004 –, prendre en compte notamment la dimension nouvelle très prégnante de la santé environnementale et adapter notre offre de soins au virage ambulatoire.

Je souhaiterais, madame la ministre, vous interroger sur l’article 47 relatif à l’accès aux données de santé, encore communément appelées open data. C’est un des articles sur lesquels vous avez rouvert la concertation. Les amendements que vous proposez répondent amplement aux préoccupations dont je m’étais fait parfois le messager auprès de vos collaborateurs.

Je poserai deux questions précises.

Premièrement, le comité des experts sera-t-il situé dans l’Institut national des données de santé ou au sein du ministère ?

Ma seconde question vise à relayer une préoccupation de l’Association des journalistes de l’information sociale. Ces journalistes bénéficieront-ils toujours d’un accès aisé aux données compte tenu du caractère d’intérêt public de leurs fonctions, bien entendu dans le respect du code de déontologie journalistique et des règles imposées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ?

M. Jacques Krabal. Je ne reviendrai pas sur l’excellente intervention de Mme Orliac au nom du groupe RRDP.

Mon propos concernera plus particulièrement l’article 4 et la lutte contre l’alcoolisme. Vous formulez des propositions qui s’appuient sur un constat édifiant : la consommation de vin a baissé tandis que les ivresses sont en hausse. Vous reconnaissez que la législation n’est peut-être pas adaptée. Mieux réprimer, condamner les infractions, protéger la jeunesse contre les addictions à travers un parcours éducatif de santé, par l’intermédiaire du Programme national nutrition santé (PNNS), autant de propositions intéressantes.

Pour autant, vous n’abordez pas la question de la publicité en faveur de l’alcool qu’il nous apparaît nécessaire aujourd’hui de remettre sur le métier. Il n’y a pas de sujets tabous, il faut faire bouger les choses, dites-vous ; et lorsque l’on voit les condamnations des journalistes qui traitent de l’œnotourisme alors qu’il s’agit du vin en tant que produit culturel, cela paraît effectivement s’imposer… Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas lutter contre l’alcoolisme, mais il ne faut surtout pas tout mélanger. L’œnotourisme, comme le disent Matthias Fekl, Laurent Fabius et Stéphane le Foll, est une forme de tourisme qu’il faut promouvoir. Nous défendrons donc un amendement qui vise à définir précisément ce qu’est la publicité au regard de la filière viti-vinicole. En même temps, le groupe RRDP a par ailleurs déposé un amendement tendant à promouvoir les jus de fruit et les jus de légume afin de développer les circuits courts.

M. Bernard Accoyer. Ce texte est un saut dangereux vers l’étatisation de notre système de santé avec notamment le tiers payant généralisé pour les médecins, l’étranglement de l’hospitalisation privée, le monopole donné à grands frais à l’hôpital public et le pouvoir exorbitant confié aux ARS.

Vous conduisez, madame la ministre, un véritable coup de force contre la quasi-unanimité des professionnels de santé, avec une procédure qui est une insulte aux professionnels, aux malades et aux parlementaires : faux-semblant de concertation, calendrier d’examen calé au lendemain même d’une manifestation majeure, procédure accélérée, cinquante amendements du Gouvernement déposés à la dernière minute.

Contre 90 % des médecins, vous voulez imposer le tiers payant à marche forcée. Un sondage annonçant la gratuité en quoi que ce soit sera toujours positif ; cela n’a pas de sens. Le tiers payant est ingérable pour les médecins – d’ailleurs, ceux-ci sont au bord de la désespérance. Il est coûteux pour l’assurance maladie par l’inflation de la consommation, comme on l’a observé lors de l’instauration du tiers payant en pharmacie. Il interdit les franchises, l’utilisation d’un ticket modérateur, bref tout mécanisme responsabilisant et permettant de maîtriser les dépenses de santé. Vous n’avez prévu aucun financement de ce dispositif.

Les attaques contre l’hospitalisation privée et les professionnels qui y exercent sont insupportables. Elles correspondent à votre volonté de donner un monopole à l’hôpital public. Quand vous aurez tué l’hospitalisation privée, où sera la liberté de choix, où sera la qualité des soins et comment pourrez-vous vous étonner des files d’attente ?

Madame la ministre, on ne réforme pas un domaine tel que la santé contre ceux qui en sont au cœur. Or tel est bien le cas de ce texte auquel nous ne pourrons que nous opposer.

M. Jean-Louis Bricout. Madame la ministre, un comité interministériel auquel vous avez assisté, consacré aux ruralités s’est tenu vendredi dernier à Laon dans mon département, l’Aisne, tant prisé d’ailleurs par le Front national. D’importantes mesures y ont été mises en œuvre afin de lutter contre les déserts médicaux.

Je voudrais saluer les médecins qui s’engagent, aux côtés des collectivités, dans les maisons de santé pluridisciplinaires, outil indispensable à la ruralité, ce qui prouve une certaine conscience territoriale. Le travail s’y effectue en réseau, on mutualise les moyens, on met en place de vrais projets de santé et des actions de prévention.

Pourtant, comment peut-on attirer des médecins dans des maisons de santé lorsqu’on est à proximité d’une zone franche, avec tous les avantages fiscaux qui en découlent ?

Pour aller plus loin en matière de services, il est nécessaire d’organiser des consultations avancées de spécialistes et même d’y installer la télémédecine, à condition d’avoir accès au haut débit. Comment comptez-vous mettre en place ces contrats entre les hôpitaux de proximité et les maisons de santé pour permettre des consultations avancées ?

Malgré cet outil qui paraît indispensable pour nos territoires, on peut se heurter au problème de fond du manque d’attractivité. Faut-il songer à des méthodes plus coercitives ? Pour ma part, je n’y suis pas favorable. Que pensez-vous d’un dispositif sur le modèle des anciennes écoles normales qui viserait à créer un ascenseur social permettant aux enfants des familles modestes de ces territoires d’accéder aux professions médicales tout en s’engageant à exercer sur le territoire ?

Mme Annie Le Houerou. À mon tour, je tiens à vous féliciter, madame la ministre, pour le travail que vous avez réalisé depuis plusieurs mois avec votre ministère, mais également les parlementaires. Ce texte très attendu est riche et dense.

Ce travail a permis de rechercher les meilleures réponses aux objectifs que vous avez cités dans votre présentation, aux enjeux de la promotion de la santé mais aussi aux défis à relever de l’accessibilité aux soins et aux services de prévention pour tous. Tenez bon sur le tiers payant, les Français vous soutiennent ! Quand j’entends les députés de l’opposition parler de mesure qui déresponsabiliserait les patients, je ne comprends pas : ce sont les médecins qui prescrivent, et eux seuls sont les prescripteurs.

Je m’interroge toutefois – mais je ne demande qu’à être convaincue – sur la pertinence de vos propositions pour résoudre le problème du manque de médecins et plus largement de personnels de santé dans certains territoires. C’est une angoisse pour de nombreux habitants de ma circonscription qui n’ont plus de médecin traitant, et la moyenne d’âge des médecins est élevée.

S’agissant de l’exercice de la médecine en zone sous-dense, vous avez pris de bonnes mesures mais je crains que, sans politique plus volontariste de formation, d’obligation de stage en zone sous-dense, nous ayons du mal à bien répartir l’offre de soins en fonction des besoins et les maisons de santé resteront dépourvues de médecins.

Toujours sur cette question des zones géographiques dépourvues d’un nombre suffisant de professionnels de santé spécialisés, vous proposez de développer des coopérations entre les établissements de santé et les groupements hospitaliers de territoire. Ceux-ci sont incontournables. Cette coopération et importante, y compris avec les établissements médico-sociaux, mais je ne souhaite pas que cet objectif de mutualisation des équipes et des outils se traduise par une centralisation de tous les services autour d’un seul pôle de référence au détriment d’une bonne répartition de l’offre sur le territoire, accentuant encore les déserts médicaux. Le développement de l’ambulatoire va aussi de pair avec un bon maillage sur le territoire.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Je tiens à saluer le travail qui a permis d’avancer sur ce texte très attendu et qui répond à de nombreuses et très fortes demandes.

J’aborderai deux sujets.

Le premier concerne les parcours de santé scolaire qui proposent des actions ciblées sur les problématiques de santé. C’est une première étape dans le parcours de santé qui permettra de lutter contre les inégalités dès le plus jeune âge. Je veux insister sur l’importance de mettre en place des dépistages le plus tôt possible, afin d’éviter des handicaps et des pathologies quelques années plus tard. Comment s’organiseront les concertations et les coopérations dans les territoires entre les différents acteurs, en particulier avec l’éducation nationale ?

Le second concerne l’amélioration de l’accès aux soins des personnes handicapées, suite au rapport de Pascal Jacob qui vous a été remis l’année dernière. Quelles missions seront confiées aux ARS pour que la logique de parcours soit privilégiée en associant secteur sanitaire et médico-social afin d’éviter les ruptures, les retards ou les renoncements aux soins ? Un certain nombre d’amendements reviendront sur ces sujets, mais aussi sur d’autres, qui compléteront ainsi les propositions de ce texte.

M. Dominique Tian. Les cinquante-sept articles de ce projet de loi sont rejetés par les professionnels de santé alors que c’est un système conventionnel. Les 40 000 personnes qui ont manifesté dimanche dernier ont bien montré que le monde médical ne voulait pas de votre texte.

La généralisation du tiers payant représenterait une mise sous tutelle des médecins libéraux. Cette décision est d’autant plus absurde que les populations fragiles, en l’occurrence les allocataires de la CMU et de l’ACS, bénéficient déjà du tiers payant. Les médecins ont raison de s’inquiéter d’une telle décision. On est parfaitement soigné en France, même quand on n’a pas de revenus.

Les hôpitaux vont voir leur prix de journée baisser de 1 % dans quelques jours et les cliniques de 2,5 %. Beaucoup d’hôpitaux vont donc voir leur situation s’aggraver et beaucoup de cliniques seront carrément en péril. Autrement dit, une grande casse va se produire dans le monde de la santé. Cette situation est vécue difficilement par les professionnels.

L’article 34 montre bien vos incohérences. Vous proposez l’introduction d’une plus grande transparence dans le recrutement des praticiens temporaires en plafonnant leur rémunération. Le but, dites-vous, est de limiter le coût de l’intérim médical à l’hôpital, ce qui veut dire que vous allez empêcher le recrutement des médecins. Pourquoi avoir pris cette décision absurde de renoncer au jour de carence qui avait permis, aux dires mêmes des directeurs d’hôpitaux publics, d’économiser 70 millions d’euros ? Cette maltraitance des établissements publics et privés de notre pays et les mesures absurdes que vous prenez laissent augurer une situation extrêmement difficile dans les mois qui viennent.

M. Christian Hutin. Mon intervention est empreinte d’un certain nombre de discussions que j’ai pu avoir avec mes confrères.

Un certain nombre de médecins pratiquent le refus de soins, et c’est dramatique. Je ne pense pas qu’ils fassent partie de la majorité du genre, comme eût dit Michel Audiard dans les films où l’on fumait beaucoup, mais ils existent.

Il y a aussi des médecins, et ils sont plus nombreux qu’on le croit, qui pratiquent les actes gratuits. Or on a tendance à les oublier totalement alors que c’est une pratique traditionnelle, et même un usage en médecine. Ces actes gratuits sont réalisés quand le patient n’a pas les moyens de payer ou lorsque le médecin considère que son acte ne mérite pas paiement – et c’est tout à son honneur – ou qu’il est pris d’un délire hippocratique, ce qui peut encore arriver.

Autrefois, ces actes étaient répertoriés par les caisses d’assurance maladie car le médecin écrivait sur la feuille de soins papier « acte gratuit ». Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Pourtant, il me paraît essentiel de répertorier ces actes gratuits, ne serait-ce que pour en avoir connaissance en matière de santé publique et pour la reconnaissance du travail d’un médecin et ses qualités professionnelles et humaines.

Aussi, j’ai déposé un amendement visant à ce que le relevé SNIR, système national inter-régimes, que reçoivent les médecins comptabilise les actes gratuits. Il ne s’agit pas de rechercher une récompense, mais une connaissance. Il faut savoir que toutes les études sont complètement faussées car 80 % des certificats médicaux sont délivrés sans acte médical. Un clic pour être payé, oui, mais un « clic hippocratique » pour les actes gratuits ce serait bien aussi.

Mme la ministre. Je vais commencer par répondre aux interpellations politiques, car la santé est bel et bien un sujet politique.

La question de l’organisation de notre système de soins, la manière dont nous prenons en charge la situation de nos concitoyens sont des enjeux éminemment politiques. C’est parce que notre système de santé a besoin d’être modernisé que ce projet de loi vous est proposé. D’ailleurs, un amendement vous sera présenté afin d’en modifier le titre qui deviendrait « projet de loi de modernisation de notre système de santé » : ainsi les enjeux apparaîtront clairement et de manière identifiée.

Je comprends qu’il y ait des discussions car nous pouvons avoir des appréciations différentes. Au sein même d’une famille politique, la manière de hiérarchiser les priorités peut varier. Mais il est une chose que je comprends mal : le ton sur lequel certaines contestations sont formulées. Je veux bien que des excuses me soient faites ici. Mais quand on a une responsabilité en tant que parlementaire ou, en tant que professionnel de santé, à l’égard de ses patients, il y a des formulations, des slogans, des banderoles à éviter. Je reçois les professionnels de santé. Ceux avec lesquels j’échange, je parle sont des femmes et des hommes qui défendent des idées, des perspectives. À l’exception de quelques-uns, leur discours est mesuré. Je ne vois pas ce que nous avons à gagner à employer des formulations dont la violence qui me sidère. Si un responsable gouvernemental se permettait le dixième, le centième de la virulence des propos qui sont tenus à mon égard, on dirait qu’il perd le nord, qu’il perd le sens des responsabilités, que la responsabilité d’un ministre impose de ne pas insulter, de ne pas ajouter de la violence à l’inquiétude, de ne pas ajouter des reproches ou des formulations inadaptées au débat de fond. Et l’on aurait raison.

Pour ma part, je me suis toujours obligée à la plus grande retenue. Par moments, je me suis demandé comment il était possible d’employer certaines formulations. Certains courriels qui ont été adressés étaient d’une virulence qui renvoie à des époques que l’on croyait révolues ou à des démarches partisanes que l’on ne voudrait plus jamais revoir.

Jusqu’à présent, je ne me suis pas exprimée sur ce point. Si je le fais maintenant, c’est que, parfois, la coupe est pleine. Je tourne la page. Je me suis exprimée avec de la colère. Par moments, j’ai aussi ressenti une forme d’émotion. Car, au fond, qui sont ceux qui se permettent de parler de moi de cette manière ? J’ai droit, en tant que personne, en tant que femme, en tant que ministre, au respect, comme toute personne y a droit dans ce pays. (Applaudissements.)

J’ai beau être décrite comme froide et glaciale, imperméable à tout ce qui se dit, à tout ce qui s’écrit, je ne suis ni imperméable, ni sourde, ni aveugle sur ce qui circule, se dit et se fait dans les manifestations. Lorsque cela gagne le Parlement, j’en suis estomaquée, même si je prends acte des excuses qui me sont adressées.

Revenons maintenant au fond du débat.

Certains s’interrogent sur la cohérence de ce projet de loi. Je réaffirme que l’on ne peut pas y trouver l’ensemble des dispositions qui peuvent, à un moment ou un autre, se rattacher aux enjeux de santé. D’abord parce que son organisation, sa structuration doit nous donner le plus de leviers possible pour faire reculer les inégalités de santé et d’accès aux soins. Le premier levier, et vous avez été nombreux à le dire, c’est la prévention. Et c’est la raison pour laquelle la prévention figure dans le titre premier.

La deuxième manière de faire reculer les inégalités de santé, c’est de garantir l’accès à des soins de proximité, ce qui implique de les réorganiser pour que le médecin traitant soit la porte d’entrée de notre dispositif et que l’accès à ce médecin traitant ne soit pas entravé par des obstacles, y compris financiers. D’où des mesures de réorganisation territoriale et de garanties d’accès financier aux professionnels de santé.

Faire reculer les inégalités, c’est aussi valoriser, favoriser – les deux mots sont valables et s’ajoutent – les droits des patients, les droits des représentants des patients, d’où des mesures de démocratie sanitaire.

C’est cela, je le répète, la cohérence de cette loi. Et si certaines mesures n’y figurent pas, c’est qu’elles ne s’inscrivent pas dans cette démarche centrale, ou qu’elles sont de nature réglementaire. C’est le cas du statut des sages-femmes, monsieur Dord : le décret relatif à l’organisation du nouveau statut des sages-femmes a été publié. Il ne manque qu’un volet, celui qui organise les fonctions d’encadrement auxquelles pourront accéder certaines sages-femmes. Il avait été annoncé et les dispositions vont être prises prochainement.

J’ai, une fois de plus, entendu l’opposition reprocher au Gouvernement de dépenser sans compter, d’engager des mesures irresponsables sur le plan financier. On nous propose de revoir la carte hospitalière – ce qui, en français courant, veut dire supprimer des hôpitaux de proximité ou des plateaux techniques. Il faut que ceux qui défendent ce genre de mesures, monsieur Richard, les assument : « refondre la carte hospitalière de manière plus vigoureuse » signifie supprimer des capacités à l’hôpital. Et c’est là un choix que nous ne faisons pas.

À ceux qui me disent que le Gouvernement propose des mesures qui entraînent des dépenses supplémentaires, ou qui voudraient introduire dans le texte des dispositions à caractère financier, je rappelle que ce projet de loi n’est pas une loi de financement de la sécurité sociale. Cela étant, je soutiens que l’on peut moderniser, réformer, améliorer les droits de nos concitoyens tout en faisant diminuer le déficit de la sécurité sociale. Je vous ai dit tout à l’heure que les chiffres seraient bons ; très concrètement, les dépenses d’assurance maladie devraient sans doute être inférieures de 300 millions à ce qui avait été envisagé, alors que nous n’avons renoncé à aucune mesure, que nous avons garanti une meilleure prise en charge des patients à travers le remboursement de l’hépatite C, mis en place des dispositifs améliorant la santé des femmes notamment, qui ont exigé des financements complémentaires, et garanti nos structures hospitalières. De manière générale, le déficit de la sécurité sociale va repasser sous la barre des 10 milliards d’euros, ce que nous n’espérions pas nécessairement en préparant le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’année prochaine. Ce sont des bonnes nouvelles alors que, dans le même temps, nous avons mis en place des mesures positives en direction de la population.

Que me propose l’UMP ? M. Door, de manière très courtoise, comme il le fait toujours, s’est déclaré d’accord pour transformer un certain nombre de choses, mais contre la réorganisation territoriale, contre la généralisation du tiers payant, contre une partie des mesures de prévention. On se demande donc ce qu’il reste… Si ce n’est pas de l’immobilisme ou du refus de toute réforme, je ne sais pas ce que c’est. Je regrette qu’en dehors de mesures visant à supprimer une partie des hôpitaux ou des services hospitaliers, l’opposition n’ait fait aucune proposition tendant à améliorer la prise en charge et la santé de nos concitoyens.

Les autres interpellations que j’ai entendues portaient principalement sur la prévention et l’organisation des soins et les droits des patients en matière de données de santé. Je n’ai, sauf erreur de ma part, entendu aucune remise en cause majeure de la partie « démocratie sanitaire ».

Madame Orliac, le système de santé repose en effet sur le triptyque : usager, professionnel, établissement. Je ne sais pas si l’on peut présenter les choses uniquement de cette façon, mais la loi est faite pour les usagers, elle ne peut pas se faire sans les professionnels, ce qui suppose aussi une évolution des pratiques des professionnels. La loi doit se faire également dans la reconnaissance de la diversité des modes d’exercice. C’est ce que j’entends derrière le terme « établissement » : établissements publics, établissements privés, pratique libérale, pratique publique. Cette diversité des pratiques doit rester une réalité d’avenir pour les jeunes générations. Il n’est pas question, je le répète, de remettre en cause l’exercice libéral. Au contraire, le titre II a pour ambition de favoriser et de renforcer l’exercice libéral de premier recours dans nos territoires. Quant à la réaffirmation du service public hospitalier, elle ne peut en aucun cas être interprétée comme une négation du service rendu par les établissements privés. Des obligations particulières pèsent sur les épaules, si j’ose dire, du service public hospitalier ; il est normal de le reconnaître. Mais pour le reste, il n’y a aucune remise en cause des établissements privés.

Au demeurant, la préoccupation avancée par les représentants de la fédération des établissements privés ne porte pas sur le projet de loi en lui-même, puisque celui-ci va jusqu’à affirmer, ce qui jusqu’à présent n’était pas fait, que l’appartenance au service public hospitalier ne conditionne pas l’accès à des autorisations de soins ou de matériels. Je comprends que le débat porte sur les tarifs hospitaliers et sur la différence des tarifs hospitaliers ; il me paraît légitime, je le redis, que les baisses de cotisations sociales dont bénéficient les établissements privés au titre du pacte de responsabilité et du CICE soient répercutées dans les tarifs pratiqués – on ne me fera pas croire que les établissements de soins sont en compétition avec des établissements à l’étranger, alors que les baisses de cotisations avaient pour but de favoriser la compétitivité de nos entreprises sur le marché international et sur le marché national face à des concurrents étrangers qui pourraient bénéficier de situations plus favorables. Grâce à cette politique, même si certains ici la contestent, notre niveau de compétitivité est redevenu équivalent à celui de l’Allemagne ; mais cet enjeu de compétitivité ne peut évidemment être invoqué pour les cliniques privées. Les tarifs de départ étant strictement équivalents pour l’hôpital public et pour les cliniques privées, il était logique que les baisses de cotisations dont celles-ci auront bénéficié donnent lieu à compensation. Si nous les avions répercutés intégralement et immédiatement, on aurait abouti à une diminution supplémentaire de 1,76 % du prix de journée ; nous l’avons limitée à 1,5 %. Si les établissements privés contestent cette démarche, c’est à regretter d’avoir cherché à l’étaler dans le temps !

S’agissant de la prévention, je suis d’accord, madame Orliac, pour que soit mieux identifié le parcours de l’enfant. Le lien avec le parcours éducatif est l’une des portes d’entrée de la loi. C’est, entre autres, ce qui explique que certaines mesures de prévention figurent dans la loi tandis que d’autres n’y sont pas : l’idée de départ est qu’il faut donner le plus de chances possible aux enfants et aux jeunes en cherchant à améliorer leurs conditions de vie et d’environnement dès le plus jeune âge.

Comme je l’ai dit lors de la conférence environnementale, la notion d’exposome me paraît plus qu’intéressante en ce qu’elle représente un changement de perspectives et amène à réfléchir, à penser différemment la manière dont s’articulent les relations entre des facteurs environnementaux et la prise en charge sanitaire. Je vous confirme donc que je suis favorable à ce que la notion d’exposome et sa prise en compte implique figurent dans la loi, en particulier pour ce qui touche à la composition d’un certain nombre de produits en direction des enfants. La question de la présence de certains produits dans les jouets, bisphénol A et autres, a été évoquée. Je considère que tout ce que vient améliorer, favoriser l’environnement des enfants est doublement nécessaire. Les enfants doivent être protégés encore plus que les autres car on sait qu’ils accumulent un certain nombre de facteurs de risques dès le plus jeune âge.

Je suis sensible à la préoccupation exprimée par M. Sebaoun sur la médecine du travail. L’amendement qui introduisait la réorganisation ou les évolutions de la médecine du travail sera retiré afin de répondre à sa demande.

Je vois bien comment la question de l’alcool pourrait donner lieu à une avalanche d’interventions, d’interpellations, d’amendements dans tous les sens : il y aura ceux qui voudront durcir la réglementation actuelle et ceux qui voudront l’adapter, autrement dit l’assouplir… Je veux vous livrer la position que j’aimerais qui prévale lors de la discussion, en laissant de côté la question ultramarine, tout à fait spécifique. L’équilibre réglementaire doit être absolument préservé : on ne comprendrait pas ce qui serait perçu comme un assouplissement. Si le texte prévoit deux grandes avancées en ce qui concerne les plans globaux de santé publique s’agissant du tabac et la lutte contre l’obésité, il ne comporte aucune disposition tendant à durcir la réglementation sur l’alcool, si ce n’est sur un point : le phénomène de l’alcoolisation rapide excessive des jeunes, tout à fait préoccupant. Le texte propose des mesures spécifiques qui paraissent rassembler assez largement les parlementaires. C’est cela qui est mis en débat, rien d’autre.

Un mot sur le tabac. Certains amendements étaient attendus depuis longtemps. Lorsque j’ai présenté le programme national de réduction du tabagisme, j’avais indiqué que les articles législatifs qui le composent figureraient dans la loi de santé. D’ailleurs, j’ai vu que certains amendements visent à supprimer certaines mesures de lutte contre le tabac. Il faudra bien à un moment ou un autre que chacun assume ses responsabilités vis-à-vis des jeunes et des moins jeunes générations, sachant que l’enjeu est de leur éviter d’entrer dans le tabac, et de tout faire pour que ceux qui fument puissent en sortir. Lorsque l’on sait que chaque année 73 000 personnes meurent à cause du tabac, donner le sentiment que l’on peut aménager, adoucir, assouplir les règles en la matière ne me semble pas de bonne politique.

Mme Orphé a mis en avant plusieurs demandes pour l’outre-mer, notamment dans le domaine de la prévention. Un article d’habilitation prévoit, bien sûr, d’adapter aux territoires ultramarins les dispositions de la loi. Je réaffirme par ailleurs mon engagement et celui de la ministre chargée des outre-mer quant à la mise en place d’une stratégie nationale de santé spécifique à l’outre-mer. Le travail a été engagé et il se poursuivra. Je serai attentive, tout au long de la discussion, à ce que des amendements spécifiques puissent trouver dès maintenant leur place dans la loi afin de répondre à des préoccupations immédiates.

Madame Coutelle, le projet de loi comporte des dispositions spécifiques en direction des femmes, notamment pour ce qui touche à la contraception d’urgence. J’appelle votre attention sur le fait qu’il est souhaitable de ne pas faire des propositions qui aboutiraient à multiplier des évaluations ou des approches catégorie par catégorie. Les femmes ne sont pas une catégorie. Nous disposons déjà d’analyses statistiques sur la situation des femmes par rapport à celle des hommes en matière de santé ; j’appelle à ne pas alourdir chaque article ou chaque démarche en introduisant systématiquement une classification homme-femme. Par définition, il s’agit d’une démarche transversale qui est portée par les politiques publiques.

Plusieurs interventions ont porté sur l’organisation dans les territoires. Un orateur a indiqué ne pas comprendre l’organisation que je propose. Je ne dis pas qu’elle est simple, mais elle vient bouleverser la réalité d’aujourd’hui. Actuellement, le système est structuré autour de l’hôpital, ce qui a constitué l’une des grandes avancées du système de santé français que nous devons conserver pour ce qu’il est : il s’agit de définir un premier recours, un deuxième recours et un troisième recours, même si les choses ne sont pas nécessairement inscrites avec ces mots-là.

Nous devons faire en sorte que le premier recours soit clairement identifié : c’est le médecin traitant, principalement le médecin généraliste, avec les équipes de soins primaires. La coopération entre le médecin généraliste et les professions paramédicales est le centre de notre dispositif. Bien sûr, ils travaillent intimement, si j’ose dire, avec le deuxième recours que sont les médecins spécialistes auxquels sont adressés les patients et avec lesquels les médecins de premier recours travaillent très régulièrement. L’hôpital, amené lui-même à se structurer pour tenir compte des réalités de territoire, ne doit pas être la porte d’entrée première. C’est en quelque sorte le troisième recours : on se rend à l’hôpital en cas d’urgence réelle et lorsqu’on présente des pathologies qui ne peuvent pas être prises en charge par les médecins libéraux en ambulatoire. Le tiers payant a aussi pour but de faire en sorte que les femmes et des hommes ne soient plus incités à aller aux urgences pour ne pas faire l’avance des frais, et qu’ils soient orientés dorénavant vers leur médecin de premier recours.

Cette organisation des soins se trouvera structurée avec d’un côté les communautés hospitalières de santé dans les territoires, et de l’autre les groupements hospitaliers de territoire. Ces derniers, les GHT ont pour ambition de faire travailler ensemble des établissements hospitaliers qui interviennent sur un même territoire de santé à partir d’un projet de santé structuré. Il s’agit de favoriser les coopérations entre ces établissements, de faire en sorte que l’on puisse, là encore, identifier l’hôpital de proximité, l’établissement de premier recours si j’ose dire, qui est essentiel, notamment dans les territoires ruraux, comme j’ai eu l’occasion de le dire il y a quelques jours dans le département de l’Aisne ; nous avons absolument besoin de ces hôpitaux de proximité, qui restent des établissements de premier recours où personne ne s’attend à trouver des plateaux techniques comparables à ceux des établissements hospitalo-universitaires. Ce sont deux réalités différentes.

Les groupements hospitaliers de territoire améliorent l’organisation du système de soins. Madame Fraysse, il ne s’agit pas d’un enjeu financier mais d’organisation territoriale. Dès lors que la référence de l’organisation est le territoire, il est normal que cela vaille à la fois pour les soins ambulatoires et les soins hospitaliers. Et c’est là qu’interviennent les agences régionales de santé (ARS).

Que ceux qui ont toujours été opposés aux ARS continuent de l’être, c’est normal, c’est cohérent. Mais lorsque ceux qui les ont proposées expliquent maintenant que les ARS sont le bras armé de l’étatisation du système de santé, j’ai un peu de mal à comprendre ! Je rappelle que c’est la majorité précédente qui a créé les ARS – ce qui me pose d’autant moins de difficulté que c’est le seul chapitre de cette loi que nous avons approuvé. Les agences régionales de santé doivent permettre une meilleure organisation dans les territoires de l’offre de soins. Il s’agit maintenant de faire évoluer ces agences qui existent depuis six ans – elles ont bientôt l’âge de raison – pour tenir compte de l’évolution de notre système de santé. Les ARS sont en quelque sorte les animatrices des territoires et elles n’ont à intervenir qu’en cas de défaillance d’une offre de soins : elles sont là pour s’assurer que l’égalité de l’offre de soins est bien respectée sur le territoire. Mais la réécriture de l’article 12 a précisément pour but de lever toute ambiguïté sur le sujet : l’organisation des soins sur le territoire ne vient pas des agences régionales de santé, mais des professionnels eux-mêmes. Il appartient aux ARS pour ce qui est de leur responsabilité, en lien avec l’assurance maladie pour ce qui est de sa responsabilité et du réseau des caisses primaires, de garantir que l’offre de soins est équilibrée, bien répartie sur les territoires. Les maisons de santé sont créées en lien avec les ARS qui apportent des financements avec les collectivités – la région, le conseil général, parfois les communautés de communes –, et l’assurance maladie. Si deux projets de maisons de santé se montent à cinq kilomètres de distance, il est normal que l’agence régionale de santé demande à leurs promoteurs de réfléchir à leur articulation : c’est cela, le rôle d’animateur du territoire. J’ai souhaité, à travers la nouvelle rédaction de l’article 12 que je propose, désamorcer les inquiétudes qui ont pu se faire jour à ce sujet.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Une question d’ordre général, souvent posée par l’opposition, a porté, de façon faussement ingénue, sur la place de la Conférence nationale de la santé qui a été annoncée : pourquoi la réunir seulement une fois la loi votée ? Il y a deux ans a été lancée la stratégie nationale de santé, à laquelle il est fait référence dans l’article 1er du projet de loi ; elle porte sur l’ensemble des évolutions nécessaire à notre système de santé. Un certain nombre d’actions ont été engagées dans ce cadre : le pacte territorial de santé, la réorganisation du financement hospitalier, et maintenant les dispositions du présent projet qui visent à mettre un terme à l’aggravation constatée des inégalités devant la santé.

D’autres problématiques demeurent, qui n’ont cependant pas vocation à être traitées par ce texte. Elles concernent notamment la pratique de l’exercice médical dans quelques années, le mode de rémunération des professionnels, y compris hors hôpital, l’articulation de la formation avec les différentes formes d’activité. C’est pourquoi, à la demande des jeunes professionnels en particulier, la Conférence nationale de la santé sera organisée.

Mme Fraysse a souligné l’importance de la protection maternelle et infantile (PMI) et relevé l’absence de sa mention dans le texte. Nous avons souhaité combler cette lacune : trois amendements ont été déposés concernant la contribution de la PMI à la politique de santé, son lien avec le médecin traitant, la clarification de son rôle dans le parcours scolaire, particulièrement dans le primaire, et je donnerai un avis favorable à l’adoption de ces amendements.

Mme Geoffroy s’est interrogée sur le dispositif public d’information sur la santé. Nous envisageons la création d’un portail public d’information qui rassemble les renseignements existants, facilite l’orientation des citoyens, et ce dans un langage accessible à tous, car ce qui existe aujourd’hui est trop souvent rédigé dans une langue soit administrative, soit technique. Nos concitoyens attendent quelque chose qui épouse leur point de vue ; à cet égard, je vous renvoie au site de l’Institut national du cancer (INCa), qui est un exemple à suivre.

D’autres préoccupations ont été exprimées, par des acteurs d’horizons très divers, sur l’open data, visé à l’article 47 ; plusieurs amendements de réécriture, déposés par M. Gérard Bapt notamment, y répondent. Le comité d’experts sera nommé par le ministère dans des conditions qui garantiront son indépendance, et sera installé dans les locaux de l’Institut des données de santé (IDS) afin de faciliter son travail. La question a été posée aussi de savoir si les organes de presse, généralistes ou spécialisés, qui publient régulièrement des « palmarès » auront toujours les moyens de le faire. L’accès des journalistes, particulièrement ceux qui sont impliqués dans le domaine social, aux données hospitalières, sera maintenu, dans des conditions déterminées par le projet de loi. Le comité d’experts sera saisi de toute nouvelle demande d’accès et émettra un avis qui sera transmis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Je précise en revanche, notamment à l’attention de Mme Fraysse qui s’en était inquiétée, qu’aucun laboratoire pharmaceutique, ni d’ailleurs quiconque, ne pourra consulter de renseignements nominatifs. Il s’agit de données confidentielles, déjà protégées par la loi au titre de la protection de la vie privée.

Plusieurs questions importantes ont été posées quant aux conditions dans lesquelles on peut donner son sang. Dès mon arrivée au ministère, j’ai clairement indiqué que l’orientation sexuelle ne saurait constituer un critère d’exclusion. Je rappelle que les conditions du don du sang, la qualité des donneurs, les questions qui leur sont posées, ne relèvent pas de la loi mais d’un simple arrêté. Le Conseil de l’Europe a formulé un certain nombre de recommandations, dont celle de collecter des données épidémiologiques relatives à l’incidence et à la prévalence des infections sexuellement transmissibles parmi les donneurs, notamment parmi les personnes ayant des comportements sexuels à risque, l’objectif étant de s’appuyer sur les informations recueillies pour définir des critères de sélection des donneurs de sang.

J’ai saisi le Comité consultatif national d’éthique quant à la pertinence, de son point de vue, de faire évoluer les formulaires, et à la pratique – dont je rappelle qu’il s’agit d’une pratique et non d’une règle de droit – de restrictions pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes au vu des données scientifiques disponibles et du débat existant au sein de la société. Dans ce contexte, où le risque sanitaire, la responsabilité individuelle et sociale des donneurs, les pratiques potentiellement discriminatoires sont en cause, le Comité doit me rendre son avis dans les prochains jours.

Par ailleurs, j’ai mis en place un groupe de travail composé d’experts de l’Institut de veille sanitaire (InVS), de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de l’Établissement français du sang (EFS) pour étudier les risques liés à une éventuelle ouverture du don du sang aux hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes. La question porte aussi sur l’évolution du risque liée à une exclusion temporaire du don lié à des comportements sexuels dans la période précédant celui-ci. Les premières conclusions du groupe ont abouti à un accord pour modifier le questionnaire en supprimant la mention de l’orientation sexuelle et en ne retenant que les comportements sexuels à risque. Il appartient désormais aux experts – qui devront se prononcer dans les prochains jours – d’évaluer la modification du risque transfusionnel résiduel selon la période d’exclusion du don : portera-t-elle sur douze mois, six ou quatre mois après un rapport sexuel à risque ?

En résumé, le dispositif ne relève pas de la loi mais d’un arrêté, et la décision est d’ores et déjà prise de modifier les termes du questionnaire préalable au don et, le cas échéant, de fixer le nombre minimum de mois devant s’être écoulés entre un comportement à risque et le don – point sur lequel nous attendons encore que les experts se prononcent. Voilà la position du Gouvernement ; j’espère avoir répondu aux attentes et aux préoccupations. Si le débat devait avoir lieu dans l’hémicycle, je demanderais le retrait des amendements éventuels, ce sujet ne ressortissant pas au domaine législatif.

À Jean-Louis Touraine, je réponds que je suis favorable à la prescription des substituts nicotiniques par les chirurgiens-dentistes. Je suis également favorable à l’évolution du recueil du consentement au don d’organes, mais il reste à préciser la proposition ; à cet égard, les travaux conduits avec l’Agence de la biomédecine ont permis de progresser de façon significative.

À Philip Cordery et à d’autres, enfin, je précise que les amendements relatifs aux coopérations transfrontalières recevront un avis favorable du Gouvernement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mes chers collègues, je vous rappelle que de plus 1 700 amendements ont été déposés, et tiens à remercier au passage les rapporteurs ainsi que les services de la Commission, qui ont accompli un travail considérable afin de nous permettre de travailler dans les meilleures conditions possible. Au titre de l’article 40 de la Constitution, j’ai transmis au président de la Commission des finances, M. Gille Carrez, 246 de ces amendements, dont 145 ont été déclarés irrecevables. Par ailleurs, j’ai moi-même déclaré irrecevables neuf amendements qui visaient à étendre le champ des ordonnances prévues par le projet de loi, pratique que le Conseil constitutionnel censure avec constance.

Ce très grand nombre d’amendements nous oblige à organiser un peu plus strictement nos débats. C’est pourquoi j’ai convenu avec les responsables des différents groupes de recourir aux dispositions de l’article 100, alinéa 7, de notre Règlement, qui s’appliquent à la séance publique. Ainsi, pour chaque amendement, ne pourront intervenir, outre l’auteur ou l’un des auteurs, le seul rapporteur et un orateur contre, et ce pour deux minutes chacun ; le Gouvernement interviendra sur ses propres amendements. C’est la seule solution que nous avons trouvée pour, tout en laissant la place aux échanges nécessaires, terminer l’examen du texte dans des délais permettant à chacun d’être présent sur son territoire pour les échéances électorales de dimanche prochain.

La Commission en vient à l’examen des articles

TITRE PRÉLIMINAIRE
RASSEMBLER LES ACTEURS DE LA SANTÉ
AUTOUR D’UNE STRATÉGIE PARTAGÉE

Article 1er
(art. L. 1411-1, L. 1411-1-1, L. 1411-2, L. 1411-3, L. 1411-4, L. 1431-2 du code de la santé publique, L. 111-2-1, L. 161-37 et L. 182-2 du code de la sécurité sociale)

Rénovation du cadre général de la politique de santé

Le titre liminaire du projet de loi comporte un article unique destiné à rénover le cadre de général de l’action publique en affirmant la responsabilité de l’État, en définissant le domaine de la politique de santé et sa mise en œuvre autour d’une « stratégie nationale de santé » (SNS).

Le contenu de la politique de santé

Le I de l’article premier modifie plusieurs articles du livre quatrième, relatif à l’administration générale de la santé, de la première partie du code la santé publique. Le du I modifie l’intitulé du premier chapitre de ce titre et y substitue l’appellation de « politique de santé » à celle de politique de santé publique.

Le modifie l’article L. 1411-1 qui définit actuellement le domaine de cette politique de santé publique de façon cloisonnée : soit trop détaillée, soit trop restreinte, et insuffisamment transversale pour prendre en compte les différents déterminants de l’état de santé ou les différents intervenants des parcours de soins tout au long de la vie.

L’affirmation actuelle selon laquelle « la Nation définit sa politique de santé » est reprise mais associée à une finalité : « garantir le droit à la protection de la santé de chacun ». Il est indiqué que cette « politique de santé » relève de la responsabilité de l’État.

Le troisième alinéa de l’article L. 1411-1, dans sa nouvelle rédaction, détaille les finalités de cette politique : « assurer la promotion de conditions de vie favorables à la santé, l’amélioration de l’état de santé de la population, la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé et garantir la meilleure sécurité sanitaire possible et l’accès effectif de la population à la prévention et aux soins ».

Votre rapporteur relève que la prise en compte des inégalités sociales et territoriales de santé est appréhendée comme une dimension intrinsèque de toute politique de santé. L’approche diffère nettement du droit existant qui ne la distingue pas en tant que telle : le 7° de l’article L. 1411-1 dans sa rédaction actuelle vise certes la « réduction des inégalités de santé » mais sans en identifier la dimension sociale et uniquement sous l’angle de la promotion de la santé et du développement de l’accès aux soins et aux diagnostics sur l’ensemble du territoire. En outre, la loi de 2004 précitée a mentionné, à l’article L. 1411-2, « l’accès à la prévention et aux soins des populations fragilisées » comme un objectif prioritaire pris en compte par les programmes de santé publique mis en œuvre par l’État ainsi que par les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie. Mais cette mention spécifique avait pour effet de scinder la définition d’une politique de santé d’ordre « sanitaire » et une politique de réduction des inégalités ou de « prise en compte » des populations défavorisées, d’ordre social. La nouvelle rédaction supprime cette séparation.

Les dix alinéas suivants de l’article L. 1411-1 listent les différents domaines d’action publique qui sont compris dans la politique de santé.

Il s’agit ainsi d’abord de la compétence historique de surveillance et l’observation de l’état de santé de la population : une part est faite à l’identification des principaux déterminants de santé liés aux conditions de vie et de travail.

Le 2° de l’article L. 1411-1 mentionne la « promotion de la santé », dans tous les milieux de vie, aux côtés des actions visant la réduction des risques pour la santé liés à des facteurs d’environnement et des conditions de vie susceptibles de l’altérer.

Cette dimension se traduit en premier lieu dans l’éducation pour la santé, qui ne figure pas à l’article L. 1411-1 dans sa rédaction actuelle mais qui est désormais consacrée au 3° qui mentionne l’éducation pour la santé au titre de la prévention collective et individuelle.

Il est précisé que la prévention doit concerner non seulement les maladies mais également les traumatismes et les pertes d’autonomie, ce qui traduit une approche large de la santé, au-delà des barrières habituelles entre les secteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux.

Dans le même esprit, le 4° identifie de façon novatrice, dans le domaine de la politique de santé, l’organisation de « parcours de santé coordonnés », visant à combattre les cloisonnements et à éviter les ruptures de soins. Il est indiqué qu’ils doivent assurer l’accessibilité, la qualité, la sécurité des soins et des services et produits de santé, ainsi que l’efficience de leur utilisation en médecine ambulatoire et en établissement, pour la population sur l’ensemble du territoire.

Le rapporteur estime cependant cette rédaction perfectible : la coordination des acteurs et la continuité des prises en charges ne sont pas mentionnées de façon explicite et les trois secteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux ne sont pas identifiés en tant que tels alors que leurs acteurs concourent à la prise en charge des patients.

Le 5° de l’article L. 1411-1 acte le fait que la politique de santé inclue désormais également la gestion du « risque santé » par l’assurance maladie, donc « la prise en charge collective des conséquences financières et sociales de la maladie et de l’accident par le système de protection sociale ». La référence à la « protection sociale » et non à la seule « sécurité sociale » permet d’englober les organismes de couverture maladie complémentaire.

Aussi, la contribution des organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie est précisée dans la nouvelle rédaction de l’article L. 1411-2 établi par le du I de l’article premier : ils concourent à la mise en œuvre de la politique de santé et des plans et programmes de santé qui en résultent, dans le cadre de leurs compétences et dans le respect des conventions les liant à l’État, ce qui renvoie aux conventions d’objectif et de gestions établies avec les caisses nationales.

Cette action se décline, au niveau territorial, par la poursuite des objectifs, définis par l’État et précisés par les agences régionales de santé, visant la continuité, la coordination et la qualité des soins offerts aux assurés, ainsi qu’une répartition territoriale homogène de l’offre de services de prévention et de soins. 

Par coordination avec les dispositions figurant dans le code de la sécurité sociale, le II de l’article premier modifie l’article L. 111-2-1 de ce code qui définit les missions des organismes gestionnaires des régimes d’assurance-maladie : un renvoi est opéré à l’article L. 1411-2 du code de la santé publique. Il est en outre précisé que ces organismes concourent à la mise en œuvre de la politique nationale de santé « en partenariat avec les professionnels de santé et les associations agréées dans le domaine de la santé ».

Les 6° à 8° de l’article L. 1411-1 recoupent les autres domaines d’intervention de la politique de santé : la préparation et la réponse aux alertes et crises sanitaires ; la production, l’utilisation et la diffusion des connaissances utiles à son élaboration et à sa mise en œuvre ; la promotion des activités de formation, de recherche et d’innovation dans le domaine de la santé.

Enfin le 9° vise l’information de la population et consacre le principe de sa participation, directe ou par l’intermédiaire d’associations, aux débats publics sur les questions de santé et de risques sanitaires ainsi qu’aux processus d’élaboration et de mise en œuvre de la politique de santé.

Une définition des objectifs stratégique plus souple et mieux concertée.

En établissant les dispositions déjà mentionnées relatives aux régimes d’assurance maladie, le du I de l’article premier supprime la rédaction actuelle de l’article L. 1411-2 du code de la santé publique selon laquelle la loi est censée définir tous les cinq ans les objectifs de la politique de santé publique sur la base d’un rapport annexé au projet de loi précisant les objectifs de sa politique et les principaux plans d’action qu’il entend mettre en œuvre.

Les limites de cette approche ne font aujourd’hui pas de doute : le renvoi à une « future loi de santé publique » a freiné, pendant dix années, toutes démarches de concertation sur les objectifs.

On peut également mesurer la fragilité de certains des indicateurs retenus en 2004. Par exemple, en matière de prévention des risques liés à l’alcool, la loi a fixé un objectif de santé publique qui visait une consommation annuelle moyenne d’alcool pur de 11,5 litres par habitant âgé de 15 ans ou plus à partir de 2008 : d’une part l’objectif n’a pas été atteint puisque la consommation est de 11,7 litres en 2013 mais surtout l’indicateur lui-même n’est pas le plus pertinent. Il ne distingue pas les différents modes de consommation et ne renseigne pas sur leurs effets : une baisse de la consommation moyenne par habitant, tous âges et toutes catégories socio-professionnelles confondues, peut ainsi être constatée sur la longue durée, mais elle masque de nouveaux risques sanitaires, à l’exemple de la pratique d’alcoolisation massive chez les plus jeunes. Cet indicateur ne renseigne pas sur l’évolution de la morbidité, qui indique la part de la population atteinte de maladies liées à l’alcool, ou l’évolution de la mortalité directement ou indirectement liée à l’alcool.

Figure au demeurant à l’article L. 1411-2, dans sa rédaction actuelle, la mention de « l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé » reconnu compétent pour faire « à tout moment » une « évaluation globale ou partielle » de la mise en œuvre de ces objectifs. Or cet office parlementaire, anciennement défini à l’article L. 2214-5 du code de la santé publique, a été supprimé par la loi n° 2009-689 du 15 juin 2009 tendant à modifier l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. Ses missions sont désormais exercées directement par les commissions des affaires sociales de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Ainsi, le troisième alinéa de l’article L. 1411-1 dans sa nouvelle rédaction prévoit que la politique de santé est désormais « conduite dans le cadre d’une stratégie nationale de santé définie par le Gouvernement dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ». La stratégie nationale de santé détermine, de manière pluriannuelle, des domaines d’action prioritaires et des objectifs d’amélioration de la santé et de la protection sociale contre la maladie.

Dans ce cadre, il pourra être prévu que le Haut conseil de la santé publique (HCSP) évaluera, en continu, les effets de la SNS au regard d’un petit nombre d’objectifs plus lisibles, comme le décrit l’encadré ci-après.

En février 2014, la ministre de la santé a chargé le HCSP d’élaborer un tableau de bord synthétique de l’état de santé de la population et du fonctionnement du système de santé, à l’intention des acteurs du pilotage interministériel de la SNS mais également d’une communication annuelle auprès du public.

Le HCSP a proposé un tableau de bord synthétique avec un choix restreint d’indicateurs de processus et de résultats, permettant le suivi régulier des domaines d’action ou reflétant les principaux déterminants de santé, selon les sept dimensions suivantes :

1– État de santé ou résultat de santé (mesuré en moyenne et en dispersion) ;

2– Réactivité du système en réponse aux attentes de la population ;

3– Réduction des disparités sociales, géographiques et financières en santé ;

4– Qualité et sécurité des soins délivrés aux patients (dans un sens technique) ;

5– Coordination et continuité des prises en charges, notamment des soins de proximité (dans un sens organisationnel) ;

6– Participation des usagers ;

7– Qualité de la prévention et de l’action sur les déterminants la santé au sens large (dont la santé dans toutes les politiques).

Les quinze indicateurs envisagés sont les suivants :

– Taux de mortalité prématurée « évitable » par la prévention ;

– Espérance de vie sans incapacité à 50 ans ;

– Temps d’attente moyen dans les services hospitaliers d’accueil des urgences ;

– Taux de renoncement aux soins (soins courants) ;

– Taux de familles vivant dans des logements indignes ;

– Accessibilité des soins de ville ;

– Taux de prescriptions inadéquates de psychotropes chez le sujet âgé ;

– Maintien et retour à l’emploi des personnes souffrant de maladie chronique ;

– Prévalence du surpoids et de l’obésité des enfants et des adolescents ;

– Prévalence du tabagisme quotidien ;

– Délai d’attente avant un traitement spécifique suite au diagnostic d’un cancer ;

– Prescription médicamenteuse appropriée après un infarctus du myocarde ;

– Suivi approprié du diabète de type I et II ;

– Nombre de personnes exposées à des dépassements des seuils réglementaires annuels pour les polluants atmosphériques majeurs ou à défaut niveaux moyens annuels de ces polluants (PM10, PM2,5, NO2 et ozone) ;

– Exposition aux conditions de travail favorisant les troubles musculo-squelettiques.

Ce meilleur partage d’une information mieux définie constitue une garantie d’effectivité du principe de concertation affirmé à l’avant dernier alinéa de l’article L. 1411-1 selon lequel « préalablement à l’adoption ou à la révision de la stratégie nationale de santé, le Gouvernement procède à une consultation publique (qui) porte sur les objectifs et les priorités du projet de stratégie nationale de santé. »

Les modalités de cette consultation seront définies par un décret en Conseil d’État.

En outre, à l’article L. 1411-1-1 par le  du I de l’article premier il est prévu que « les actions de promotion de la santé reposent sur la concertation et la coordination de l’ensemble des politiques publiques ». Ce principe vise à favoriser « à la fois le développement des compétences individuelles et la création d’environnements physiques, sociaux et économiques favorables à la santé ».

Par ailleurs, différentes dispositions d’harmonisation et de coordination figurent à la fin du II de l’article premier : le supprime la référence à la « préparation du projet de loi définissant les objectifs de la politique de santé publique », à l’article L 1411-3 du code de la santé publique relatif aux compétences de la Conférence nationale de santé, organisme consultatif de concertation placé auprès du ministre chargé de la santé. Et le opère une coordination du même ordre concernant le Haut conseil de la santé publique désormais chargé de contribuer à l’élaboration, au suivi annuel et à l’évaluation pluriannuelle de la stratégie nationale de santé.

Enfin, le actualise des références figurant à l’article L. 1431-2 du code de la santé publique relatif aux agences régionales de santé ; le du II modifie en ce sens le treizième alinéa de l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale qui définit les missions de la Haute autorité de santé (HAS), et le du II fait de même à l’article L. 182-2 concernant les compétences de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM).

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté vingt-cinq amendements à l’article premier visant à enrichir la définition du contenu de la politique de santé, ainsi que trois amendements de portée rédactionnelle.

Plusieurs amendements du rapporteur, de Mme Martine Pinville et des commissaires SRC ainsi que des commissaires du groupe RRDP, ont établi à l’article premier les grands principes d’une politique globale de santé de l’enfant : ils prévoient qu’un volet de la stratégie nationale de santé détermine les priorités de la politique de santé de l’enfant ; ils identifient, au 3° de l’article L. 1411-1, « un parcours éducatif de santé de l’enfant » distinct de l’éducation pour la santé tout au long de la vie ; enfin ils précisent à l’article L. 1411-4 du code de la santé publique que la contribution du Haut conseil de la santé publique à la stratégie nationale de santé passe également par l’évaluation des politiques de santé de l’enfant existantes et la formulation de propositions pour renforcer et améliorer leur coordination en vue du développement d’une politique de santé de l’enfant globale et concertée. De même, le 2° de l’article L. 1411-1 a été complété afin d’identifier l’éducation parmi les principaux déterminants de l’état de santé de la population, en cohérence avec la définition d’une politique de santé de l’enfant.

Sur proposition de M. Bapt et de Mme Errante, à l’article L. 1411-1, l’identification des risques pour la santé, composante de la politique de santé, pourra s’appuyer le concept d’exposome entendu comme l’intégration de l’ensemble des expositions pour la vie entière, donc l’ensemble des facteurs non génétiques qui peuvent influencer la santé humaine. Un amendement des commissaires du groupe Écolo a en outre ajouté, à l’article L. 2111-1 du code de la santé publique, que les services de la protection maternelle et infantile mènent des actions de prévention et d’information sur les risques pour la santé liés à des facteurs d’environnement sur la base de ce concept d’exposome.

Sur proposition du rapporteur et des commissaires du groupe RRDP, la Commission a indiqué, à l’article L. 1411-1, que parmi les « lieux de vie » dans lesquels la santé doit être promue, figurent les établissements d’enseignement et les lieux de travail. La Commission a en outre rappelé que la politique de santé comprend la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé.

Sur proposition de Mme Véronique Massonneau et des commissaires du groupe Ecolo, la prévention de la douleur a été incluse dans le champ de la politique de santé, au même titre que la prévention des maladies.

Sur proposition de Mme Valérie Fourneyron et des commissaires du groupe SRC, le développement de la pratique régulière d’activités physiques et sportives à tous les âges a été identifié comme un instrument de prévention collective et individuelle.

Sur proposition du rapporteur, la Commission a établi, dans le cadre de la politique de santé, une mission d’animation nationale par l’État des actions conduites par les services de la protection maternelle et infantile (PMI). De même, un article L. 1411-9, nouveau, a été inséré dans le code de la santé publique afin de prévoir que les différents services de prévention collective mentionnés à l’article L. 1411-8, à savoir la protection maternelle et infantile, la santé scolaire et universitaire et la santé au travail, contribuent, chacun dans le cadre des missions qui leur sont imparties, à la politique de santé.

Un amendement du Gouvernement a mieux défini les contours de l’organisation des parcours de santé, au 4° de l’article L. 1411-1 en prévoyant que celle-ci passe par la coordination des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux, en lien avec les usagers et qu’elle vise à garantir la continuité, l’accessibilité, la qualité, la sécurité et l’efficience de la prise en charge de la population.

La Commission a également adopté un amendement des commissaires des groupes UMP et UDI prévoyant que la politique de santé implique l’adéquation entre la formation initiale des professionnels de santé et leurs exercices ultérieurs en responsabilité propre.

Enfin, la Commission a adopté un amendement des commissaires du groupe Ecolo prévoyant que la politique de santé doit être adaptée aux besoins des personnes en situation de handicap et de leurs aidants familiaux.

*

La Commission examine en discussion commune les amendements identiques AS662 de M. Bernard Accoyer et AS1040 de Mme Valérie Boyer, ainsi que l’amendement AS394 de M. Dominique Tian.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement touche au cœur du problème posé par le projet de loi : l’étatisation forcenée. Au lieu d’écrire au quatrième alinéa de l’article 1er : « La politique de santé relève de la responsabilité de l’État », nous privilégions la coopération des professions de santé, des hôpitaux publics et privés et des associations d’usagers.

Mme Valérie Boyer. Tous les acteurs du système de santé contribuent à la politique de santé de la nation. Je crois qu’il est important de faire vivre la démocratie sanitaire, de développer la concertation et le débat public, d’améliorer la participation de tous les acteurs de santé et des usagers dans la gouvernance du système de santé et de promouvoir les droits individuels et collectifs des usagers. Toutes les parties prenantes du système de santé, usagers comme professionnels, sont concernées ; je suis donc surprise que, dans ce titre préliminaire, ils ne soient même pas évoqués et que l’on se contente d’une vision étatisée de la santé, alors même qu’on prétend l’ouvrir à la société civile. La loi doit renforcer la cohésion de notre système de santé et favoriser l’efficacité de la réponse aux besoins de santé de l’ensemble de la population tout en garantissant la liberté de choix.

M. Élie Aboud. Il existe aujourd’hui un système en réseau dont tous les acteurs de terrain favorisent l’émergence. Le législateur doit encourager ce mouvement en reconnaissant que d’autres acteurs que l’État sont susceptibles de jouer un rôle majeur dans le domaine de la santé publique.

M. Olivier Véran, rapporteur pour le titre préliminaire et le titre premier. Ces amendements sont pleinement satisfaits par la rédaction du projet de loi. C’est d’ailleurs la première fois que les associations de patients sont érigées par la loi en composante à part entière de la construction de la politique de santé publique. Si vous lisez l’article jusqu’au bout, vous constaterez que la Conférence nationale de santé et les conférences régionales de santé participent à la conception, à l’élaboration, mais aussi à la révision des structures nationales de santé, et que les territoires pourront participer à l’établissement des projets régionaux de santé. Je suis donc défavorable à ces amendements.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS395 de M. Dominique Tian.

M. Élie Aboud. Il s’agit de préciser que ce sont les établissements de santé publics et privés ainsi que les professionnels de santé libéraux qui contribuent à la mise en œuvre de la politique de santé pour assurer l’équilibre de l’offre de soins dans les territoires.

M. Olivier Véran, rapporteur. Ce serait restreindre la participation des acteurs aux seuls professionnels et établissements de santé. Il faut les citer tous ou n’en citer aucun. En l’occurrence, ils sont tous inclus dans les conférences de santé mentionnées dans cet article. Avis défavorable, donc.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS369 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Le terme « promotion » n’appartient pas au vocabulaire de la santé. Nous faisons de la protection, non de la promotion.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je me bornerai à vous remémorer l’intitulé de la Charte d’Ottawa, adoptée le 21 novembre 1986 à l’issue de la première Conférence internationale pour la promotion de la santé. Avis défavorable par conséquent.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS1075 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Cet article vise à déterminer le périmètre de la politique de santé, le rôle des acteurs, les conditions dans lesquelles elle est élaborée, ainsi que ses objectifs. Nous considérons que la rédaction est étriquée et ne répond pas à nos conceptions.

Nous proposons, pour notre part, cinq finalités : garantir des taux de prise en charge des soins satisfaisant pour toutes et tous, sans conditions de revenus ; assurer aux professionnels et aux professionnelles de santé des revenus attractifs, sans lesquels le niveau d’excellence de recrutement et les obligations liées à ce domaine d’activité ne pourraient être maintenus ; définir cette prise en charge de manière à ce qu’elle soit financièrement supportable ; revenir à un déficit nul de l’assurance maladie ; favoriser la recherche et l’innovation et l’accès au progrès thérapeutique et répondre à l’exigence d’efficacité et de proximité.

M. Gérard Bapt. Je suis surpris par cet amendement. La finalité d’une politique de santé est-elle d’obtenir un déficit nul de l’assurance maladie ? Ce sont deux choses différentes que l’équilibre des comptes et la politique de santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous pourrions en débattre. Toutefois, la partie de l’article qu’il nous est proposé de modifier a pour objet non pas de décrire un monde idéal, mais de détailler l’objectif d’amélioration de l’état de santé de la population. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine les amendements identiques AS1212 de Mme Dominique Orliac, AS1483 de Mme Martine Pinville et AS1563 du rapporteur.

Mme Dominique Orliac. La politique de santé est tellement transversale qu’elle mobilise de nombreux acteurs sur le terrain. Beaucoup d’enfants ne bénéficient aujourd’hui ni de dépistage ni de soins. Il est donc important que la stratégie nationale de santé prenne en compte et détermine les priorités de la politique de santé de l’enfant.

Mme Martine Pinville. Il serait utile de compléter cet article en rappelant que la santé de l’enfant doit demeurer prioritaire, et la politique qui s’y attache plus cohérente. On sait que c’est dans les premières années de la vie que se déterminent les comportements psychosociaux et que beaucoup d’acteurs sont susceptibles d’intervenir : la sécurité sociale, l’Éducation nationale, ou encore les collectivités territoriales à travers les services de PMI.

M. Olivier Véran, rapporteur. Trois amendements ont été déposés, qui tendent à définir les principes d’une politique de santé de l’enfant dans sa globalité afin d’inscrire ceux-ci au cœur des politiques publiques dont l’État est garant. Ce premier amendement prévoit qu’un volet de la stratégie nationale de santé détermine les priorités de la politique de santé de l’enfant.

La Commission adopte les amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS140 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’inscrire dans la politique de santé un objectif de réduction du taux de maladies chroniques, qui ne cesse de croître, au point que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé l’alerte en 2011. Or on ne fait jamais référence à cet objectif, sauf dans des plans spécifiques, comme pour le cancer, mais pas de façon globale. Pour nous, une des façons de réduire ces taux est de développer la santé environnementale. Les maladies chroniques sont le problème de santé numéro un, qui pèse sur les comptes de la sécurité sociale et que la politique de santé ne parvient toujours pas à enrayer.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je partage pleinement cette préoccupation, mais il serait très compliqué de définir un taux de réduction, et c’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement. Mieux vaut donner de vraies compétences et de vrais moyens aux systèmes de santé, car l’objectif de la stratégie nationale de santé est de mieux soigner les maladies chroniques et, en agissant sur la prévention, de réduire leur évolution.

M. Jean-Pierre Door. Je m’interroge sur la pertinence de cet amendement. Les maladies chroniques sont diverses et multiples, trente et une sont répertoriées ; comment résoudre un tel problème en fixer un taux de réduction arbitraire de 25 % ?

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement AS370 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Il convient de ne pas s’arrêter à l’identification des déterminants, notamment ceux qui sont liés aux conditions de vie et de travail, mais d’engager des initiatives concrètes agissant sur l’ensemble des conditions environnementales ou socio-économiques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je ne suis pas favorable à votre proposition, qui supprimerait la mission d’identification des politiques de santé, notamment celles liées aux conditions de vie et à l’âge. Cela signifierait, en quelque sorte, que l’on agirait à l’aveugle, et je ne pense pas que ce soit ce que vous souhaitez.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS239 de Mme Martine Pinville et AS1213 de Mme Dominique Orliac.

Mme Martine Pinville. Le huitième alinéa de cet article mentionne « la surveillance et l’observation de l’état de santé de la population et l’identification de ses principaux déterminants, notamment ceux liés aux conditions de vie et de travail ». Nous proposons d’y ajouter l’éducation, puisqu’il s’agit de l’ensemble du parcours de vie des personnes.

Mme Dominique Orliac. L’éducation constitue en effet l’un des principaux déterminants de l’état de santé de la population.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte ces amendements.

Elle aborde ensuite l’amendement AS371 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Cet amendement, dans la ligne des précédents, complète l’alinéa concerné par la mention des conditions socio-économiques, car la santé ne s’arrête pas aux conditions de vie et de travail.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre proposition sera tout à l’heure satisfaite par l’amendement AS241 qui mentionne, parmi les « lieux de vie », les établissements d’enseignement et les lieux de travail, et donc, par ricochet, les conditions socio-économiques.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS373 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. L’aspect environnemental est-il, lui aussi, mentionné dans l’amendement AS241, monsieur le rapporteur ? Si tel est le cas, je suis prêt à retirer le mien.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS736 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je propose, par cet amendement, de changer de paradigme en ce qui concerne l’analyse de la prévalence de nombreuses maladies chroniques, en prenant en considération l’ensemble de l’exposome, c’est-à-dire des facteurs non génétiques, notamment environnementaux et comportementaux, qui peuvent influer sur la santé humaine tout au long de la vie.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le principe de reconnaissance du risque, notamment à des âges sensibles de la vie, comme l’exposition à des substances ou à des polluants, constitue un concept intéressant, d’ailleurs retenu par l’OMS. Je m’interroge cependant : quelle garantie avons-nous que l’exposome ne sera pas utilisé à des fins de sélection du risque, par exemple par des sociétés d’assurances ? Nous demandera-t-on un jour de produire notre « carte d’exposome » ?

M. Bernard Accoyer. Je suis défavorable à cet amendement. M. Bapt devrait se méfier de cette sienne tendance à se défier de tout ce qu’il respire, de tout ce qu’il voit, de tout ce qu’il côtoie et, finalement, de tout ce qu’il redoute.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis pour ma part, somme toute, favorable à l’amendement, et je salue au passage le combat extrêmement utile de notre collègue Gérard Bapt contre les phtalates et les bisphénols. On ne saurait lui reprocher d’avoir été toujours vigilant sur ces sujets de santé publique extrêmement importants pour nos concitoyens !

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS241 du rapporteur et AS1214 de Mme Dominique Orliac.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement, dont j’ai parlé voici un instant, précise que, parmi les « lieux de vie » dans lesquels la santé doit être promue, figurent notamment les établissements d’enseignement et les lieux de travail. La définition du parcours éducatif en santé sera évoquée plus loin.

Mme Dominique Orliac. L’amendement, en outre, évoque la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, ce qui est essentiel pour une approche globale de la politique de santé.

La Commission adopte les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AS240 du rapporteur.

Elle est saisie de l’amendement AS758 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Il s’agit de mentionner les liens pouvant exister entre notre état de santé et la préservation des écosystèmes dont font partie les éléments relevant de la biodiversité. Cette novation apparaît dans le troisième Plan national santé environnement (PNSE 3), adopté par le Gouvernement et actuellement débattu dans l’hémicycle s’agissant de ses dispositions relatives à la biodiversité.

M. Olivier Véran, rapporteur. La notion de biodiversité pouvant se retrouver dans celle de « facteurs d’environnement » qui figure au neuvième alinéa de l’article, votre proposition paraît restrictive, et je vous suggère de retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS141 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. La notion d’exposome a été reconnue par des scientifiques de nombreux pays et figure dans le PNSE 3, auquel d’aucuns gagneraient à participer. Il s’agit de maîtriser les risques liés aux expositions et de préciser ceux-ci : alimentation ; mode de vie et risque chimique.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement, car la notion d’exposome vient justement d’être introduite dans le texte par l’amendement AS736 de M. Bapt. Une nouvelle mention, redondante, nuirait à la lisibilité du texte.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission étudie l’amendement AS1442 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Quéré. L’article 1er du projet de loi bâtit le cadre de la politique nationale de santé ; cet amendement vise à y intégrer des objectifs spécifiques à la santé des femmes. Si ces dernières bénéficient d’une espérance de vie supérieure à celle des hommes, la comparaison de leur santé respective offre un tableau contrasté, avec des enjeux spécifiques ainsi que la persistance d’inégalités sociales devant la santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cette précision n’a pas sa place à cet endroit du texte, où il est question des domaines d’intervention des politiques de santé. À la rigueur pourriez-vous, puisque la politique de santé de l’enfant a été introduite à l’alinéa 6, retirer votre amendement et le redéposer en séance à cet alinéa ?

Mme Catherine Quéré. Nous le redéposerons, mais je ne vois pas pourquoi on nous mélange avec les enfants.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il ne s’agit pas de mélanger les femmes avec les enfants. L’alinéa 6 définit le cadre global dans lequel est construite la stratégie nationale de santé, tandis que nous sommes après l’alinéa 9, qui vise à identifier les domaines d’intervention de la politique de santé.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS527 de M. Fernand Siré.

M. Bernard Perrut. L’exposé des motifs du projet de loi souligne la nécessité de donner la priorité à la prévention et à l’action sur les déterminants de la santé. En effet, les maladies chroniques non transmissibles constituent la première cause de mortalité à l’échelle de la planète. Leur prévalence ne cesse d’augmenter et leurs conséquences sont graves non seulement pour les individus, mais également en termes de dépenses de santé et de productivité. Je vous épargnerai les chiffres, et insisterai seulement sur les coûts causés par la prise en charge du diabète, de l’obésité et des maladies cardio-vasculaires. Ces maladies chroniques, dans lesquelles des facteurs nutritionnels sont impliqués, constituent des enjeux majeurs de santé publique. L’amendement précise qu’il convient de promouvoir l’équité dès le départ, et à ce titre, de mettre l’accent sur les actions auprès des jeunes.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement est satisfait, et j’y suis donc défavorable, puisque la politique de santé de l’enfant est désormais prise en compte. Si nous limitions la prévention en y adjoignant l’adjectif « précoce », nous exclurions de son champ les personnes âgées qui, elles aussi, ont besoin d’une politique de prévention, qui inclut notamment la vaccination annuelle, obligatoirement proposée, contre la grippe.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS142 de Mme Véronique Massonneau.

M. Jean-Louis Roumegas. Dans le prolongement de nos débats sur la fin de vie et le manque de soins palliatifs, nous demandons que les grands principes de la politique de santé incluent le traitement de la douleur.

M. Arnaud Robinet. L’amendement est précisément satisfait par le projet de loi relatif aux nouveaux droits des personnes en fin de vie que l’Assemblée a adopté cet après-midi.

M. Olivier Véran, rapporteur. Mon avis est favorable. Il faut prévenir la douleur au même titre qu’on prévient la maladie, les traumatismes et les pertes d’autonomie. C’est une question très importante.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS1564 du rapporteur, AS1566 de Mme Dominique Orliac et AS1568 de Mme Martine Pinville.

M. Olivier Véran, rapporteur. Ce troisième et dernier amendement auquel j’ai fait allusion tout à l’heure tend à instituer, à côté du parcours de santé scolaire de l’enfant, un parcours éducatif en santé, élaboré de façon concertée, avec une réflexion générale sur les compétences à acquérir à chaque étape de l’enseignement. L’objectif est que l’enfant puisse apprendre à prendre soin de lui-même au cours de sa scolarité, et qu’il sorte de celle-ci avec un bagage de connaissances qui permettra notamment de prévenir le risque d’addiction à l’alcool, au tabac, etc.

M. Dominique Tian. Cette disposition ne tombe-t-elle pas sous le coup de l’article 40 de la Constitution ? Il s’agit en effet de dépenses supplémentaires. Nous connaissons la situation catastrophique de la médecine scolaire française, qui est la pire d’Europe, et qui est due au fait qu’il n’y a pas de médecins scolaires. Cela se traduit notamment, hélas, par un taux de suicide parmi les plus élevés d’Europe. Il n’est pas acceptable de voter de telles mesures d’affichage en l’absence de moyens.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Cet amendement, monsieur Tian, a été déclaré recevable par le président de la Commission des finances.

Mme Martine Pinville. Je souhaite préciser que, dans la loi de refondation de l’école, nous avions fait adopter des dispositions relatives à l’éducation à la santé et la promotion de celle-ci. Cela est déjà inscrit dans la loi et nous devons préciser ici ce que peut être le parcours éducatif de santé.

M. Bernard Accoyer. Alors que nous sommes censés écrire la loi, nous nous contentons en réalité de rédiger un catalogue de bonnes intentions. Je redoute que les puristes, parmi lesquels le Conseil constitutionnel, n’émettent quelques critiques, car cela ne relève pas du domaine législatif. Il est singulièrement préoccupant que nous ajoutions encore d’innombrables pages au code de la santé publique, qui n’ont pas de portée normative.

M. Dominique Tian. Si nous devions prendre une décision utile, ce serait de confier la médecine scolaire aux collectivités territoriales. Lors de l’adoption des lois de décentralisation, l’État a reçu cette charge qu’il n’assume absolument plus. Voilà qui, au moins, ne serait pas du verbiage.

La Commission adopte les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS1477 de Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Merci, madame la présidente, de m’accueillir dans cette Commission dont je ne suis pas membre et de me donner la parole. Je propose de compléter cette partie du texte, qui a trait à la prévention collective et individuelle des maladies, par la mention de la pratique physique et sportive à tous les âges et de sa contribution à la santé publique. Toutes les études épidémiologiques démontrent en effet que cette pratique constitue un facteur de prévention primaire, secondaire et tertiaire à tous les âges de la vie. Il suffit de se rappeler le coût du traitement de l’obésité en France ou le nombre des chutes des personnes âgées.

M. Guillaume Larrivé. Merci, madame la présidente, de laisser également le membre de la Commission des lois que je suis participer à cette discussion. La manière dont ce projet de loi est rédigé et amendé sera digne d’être enseigné dans les cours de droit, particulièrement à Sciences po. Vous êtes en train de vous payer de mots, et pourriez aussi bien écrire que l’eau bout à cent degrés et que la gymnastique doit être pratiquée le matin par les hommes, les femmes et les enfants. Tout cela n’a aucun sens, et je m’étonne que la ministre laisse faire autant de malfaçons législatives, dénoncées par toutes les autorités légistiques depuis trente ans.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Vous n’avez pas à vous adresser ainsi à la ministre : le débat se déroule entre députés, sur un amendement d’origine parlementaire. Monsieur Accoyer, je ne puis vous redonner la parole, car M. Larrivé s’est déjà exprimé contre l’amendement.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je rappelle que nous parlons de politique de santé, de prévention collective et individuelle, et d’objectifs de prévention que nous reconnaissons tous comme très importants. Or, à entendre certains, on ne devrait pas parler d’éducation à la santé parce que cela coûterait cher, ni d’éducation physique et sportive comme facteur de maintien en bonne santé. Les critiques de forme que je viens d’entendre me paraissent mal venues, et je suis très favorable à l’amendement de Mme Fourneyron.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS242 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est proposé de créer une animation nationale des actions conduites dans le cadre des services de PMI. Chaque territoire peut établir sa politique de santé et de suivi des enfants dans ce domaine sans que cela remette en cause la coordination nationale que nous appelons de nos vœux. Celle-ci serait fondée sur l’expertise du Haut Conseil de la santé publique et du futur Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique. Il ne s’agit pas de retirer aux départements la possibilité d’organiser la PMI comme ils le souhaitent, mais d’en avoir une vision appuyée sur une expertise nationale.

M. Bernard Accoyer. Je souhaite sous-amender l’amendement précédent puisque je n’ai pas eu la parole. Je proposerais donc qu’il soit précisé qu’il faut faire de la gymnastique le matin et de la gymnastique d’assouplissement. La qualité du texte que nous rédigeons doit nous rappeler que les Français ont un problème avec le travail qu’effectuent les élus de la République et que nous avons le devoir de nous interroger sur ce que nous faisons.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Accoyer, je mets cet instant à profit pour vous rappeler les règles dont nous sommes convenus avec les responsables des groupes quant au déroulement de nos débats. Chaque amendement est défendu par l’un de ses signataires, après quoi, outre le rapporteur, une personne et une seule peut s’exprimer contre. Notre collègue Larrivé ayant exprimé cette position défavorable, vous n’aviez plus la possibilité de prendre la parole sur l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1654 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il est nécessaire de préciser que les parcours de santé ont pour enjeu la mise en œuvre de la coordination des acteurs non seulement sanitaires, mais aussi sociaux et médico-sociaux, et ce en lien avec les usagers.

M. Olivier Véran, rapporteur. J’y suis favorable, car la rédaction initiale ne mentionne pas les acteurs sociaux et médico-sociaux, non plus que les usagers et la continuité de la prise en charge.

La Commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. L’adoption de l’amendement du Gouvernement fait tomber les amendements identiques AS936 et AS1076.

Mme Valérie Boyer. Je souhaite cependant transformer mon amendement AS936 en sous-amendement à l’amendement du Gouvernement. Il s’agit de faire en sorte que l’organisation du parcours de santé, qui repose par définition sur une approche transversale aux champs sanitaire, social et médico-social, assure non seulement l’accessibilité et la qualité des soins, mais encore celles de l’accompagnement social et médico-social, et que le domicile soit visé comme lieu de soins et d’accompagnement à prendre en compte dans le parcours de santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Et dire que l’on nous reproche de faire des lois bavardes !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Ces amendements ne peuvent s’inscrire dans la nouvelle rédaction qui vient d’être adoptée à l’initiative du Gouvernement.

Les amendements identiques AS936 de Mme Valérie Boyer et AS1076 de M. Arnaud Richard tombent, de même que l’amendement AS696 de Mme Martine Pinville.

La Commission examine l’amendement AS776 de M. Rémi Delatte.

M. Rémi Delatte. Cet amendement prend en compte le cas particulier des malades handicapés et des personnes dépendantes, car, pour que l’égalité devant la santé soit effective, il est nécessaire que chaque axe de la politique de santé soit décliné au regard des besoins spécifiques des publics considérés. Or, leur mention est absente du projet de loi.

M. Olivier Véran, rapporteur. Si j’étais taquin, j’aurais presque envie d’entendre la réaction de M. Accoyer, car l’amendement est pleinement satisfait par les objectifs généraux de la stratégie de santé mentionnés à cet article. Mon avis est donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Ensuite, elle examine l’amendement AS466 de M. Yves Daniel.

M. Yves Daniel. L’égalité de traitement des citoyens, où qu’ils soient sur le territoire, est l’un des fondements de la politique de santé, comme le rappelle l’alinéa 6 de cet article. En inscrivant clairement la lutte contre les déserts médicaux dans le texte, notre amendement garantit la mise en œuvre effective et la traduction concrète de ce principe, dans la continuité des efforts déjà entrepris par le Gouvernement.

M. Élie Aboud. Nous voulons tous lutter contre les déserts médicaux, mais quelle est l’action concrète proposée ? Et le sujet doit-il être abordé ici, ou dans la partie du texte consacrée à la stratégie territoriale ?

M. Olivier Véran, rapporteur. La nouvelle rédaction de l’alinéa 11 devrait satisfaire les auteurs de l’amendement, notamment en termes d’accessibilité et de continuité des soins. Je leur suggère donc de le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS384 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. L’alinéa 12 mentionne la prise en charge collective des conséquences financières et sociales de la maladie et de l’accident par le système de l’assurance sociale. Qu’est-ce que cela veut dire ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Si je comprends bien l’amendement, il s’agit de remettre en cause la notion même de loi de financement de la sécurité sociale et, au-delà, la sécurité sociale elle-même… Mon avis ne peut donc être que défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS386 de M. Élie Aboud et AS762 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Il faut rappeler que notre système de santé est fondé sur la solidarité puisqu’il restitue à tous, en fonction de ses besoins, ce qui a été mis en commun en fonction des moyens de chacun.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le premier des deux amendements tend à supprimer cette notion de solidarité, le second à la réaffirmer. J’ai tendance à en conclure que la rédaction actuelle du texte est équilibrée, et à émettre, par conséquent, un avis défavorable à l’un comme à l’autre.

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS763 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Le présent amendement a pour objet de mentionner explicitement la prise en charge du handicap par le système de protection sociale, la réécriture proposée de l’article L. 14-11-1 du code de la sécurité sociale ne le mentionnant plus.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cette précision n’est pas utile à cet endroit du texte, car la prise en charge collective du handicap par la nation est solennellement affirmée par la loi de 2005. Je vous propose de vous rallier à l’amendement 144 qui devrait vous satisfaire, faute de quoi, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine l’amendement AS143 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Il s’agit de prendre en compte la douleur dans la recherche en santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous souhaitons tous lutter contre la douleur et améliorer la recherche comme les thérapeutiques, mais nous risquerions, en énumérant tous les thèmes de recherche possibles, de produire plus de confusion que de clarté. Avis défavorable.

M. Dominique Tian. Nous attachons beaucoup d’importance, pour notre part, à la lutte contre la douleur.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS438 de M. Jean-Pierre Door, AS473 de M. Bernard Accoyer, AS680 de M Guillaume Larrivé et AS1077 de M. Arnaud Richard.

M. Jean-Pierre Door. Les futurs jeunes médecins ont noté une absence de coopération entre le ministère de l’enseignement supérieur et le ministère de la santé. Or, une telle coopération est fondamentale. Nous souhaitons donc créer les conditions favorables à la familiarisation de ces futurs praticiens avec l’activité professionnelle de médecin.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Cette précision est utile, compte tenu des difficultés qui existent lorsque l’on souhaite s’informer sur les différents métiers de la santé.

La Commission adopte les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AS244 du rapporteur.

Elle aborde ensuite l’amendement AS374 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. À l’alinéa 5, nous souhaitions garantir que les associations d’usagers agréées par les agences régionales de santé (ARS) soient davantage impliquées dans la gestion de la politique de santé, ce que le rapporteur a refusé. Or, à l’alinéa 16 sont évoquées l’information de la population et sa participation, directe ou par l’intermédiaire des associations. De deux choses l’une : soit ces associations sont impliquées avec l’État dans la gestion de la politique de santé publique, soit elles ne le sont pas.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Ce que nous souhaitons, c’est faire participer la population et assurer sa pleine information, et non pas seulement garantir la transparence des décisions prises par l’administration ou par les médecins. Notre rédaction va donc plus loin que la vôtre.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS145 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Les médecines dites complémentaires jouent un rôle significatif dans le dispositif de santé. D’ailleurs, une grande majorité des Français y a recours. Cet amendement a donc pour objectif de mieux les intégrer dans le panier de soins.

Ces médecines, qui complètent l’offre de soins apportée par la médecine conventionnelle, répondent à plusieurs objectifs : prévention, responsabilisation du patient, alternative en cas d’intolérance ou d’échec des traitements classiques, limitation des effets secondaires, réduction des coûts de notre système de soins. Nous proposons que l’observation de ces médecines complémentaires soit l’un des objectifs de notre politique de santé, afin de mieux connaître leurs indications, leurs usages, leur évaluation, la formation de leurs praticiens et la cotation de leurs actes et de leur donner la place qui leur revient.

M. Élie Aboud. Comment définissez-vous ces « médecines complémentaires » ?

M. Éric Alauzet. Ce terme désigne les médecines alternatives telles que l’acupuncture, l’homéopathie, l’ostéopathie, la phytothérapie, etc.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement est satisfait dans la mesure où nous avons introduit à l’alinéa 9 la notion d’innovation et de recherche sur les pratiques. Les médecines complémentaires, en outre, sont étudiées par un groupe d’appui technique créé il y a quelques années et géré directement par le directeur général de la santé. L’une des missions de ce groupe est la coordination de l’évaluation scientifique de ces pratiques. À partir de ces évaluations et d’une revue complète de la littérature internationale, il est prévu que la direction de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) formule des propositions afin d’intégrer ces pratiques dans le système de santé et réfléchisse au moyen d’améliorer l’articulation entre les différentes formes de médecine sur la base de résultats scientifiques dûment validés.

M. Bernard Accoyer. Nous voterons contre cet amendement. On fait naître beaucoup d’espérances et l’on trompe bien du monde avec ce type de médecines prétendument alternatives ou douces. La réponse du rapporteur n’apaise nullement nos craintes et ne manquera pas d’inquiéter les médecins, les professionnels et les universitaires.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie les amendements identiques AS72 de M. Jean-Pierre Door, AS849 de Mme Bérengère Poletti, AS890 de M. Dominique Tian et AS1398 de Mme Valérie Boyer.

M. Arnaud Robinet. Le présent projet de loi, en modifiant la définition de la politique de santé, a fait disparaître les mentions du handicap figurant actuellement à l’article L. 1411-1 du code de la santé publique. Or, l’accès aux soins des personnes handicapées ne va pas de soi, car le monde de la santé s’y adapte difficilement. Par ailleurs, plus de huit millions d’aidants non professionnels, souvent familiaux, jouent aujourd’hui un rôle central dans l’aide et l’accompagnement d’un proche dépendant pour les actes de la vie quotidienne. La fatigue physique et psychique, les enjeux affectifs, l’isolement et le stress qu’implique cette fonction majeure, ont de vives répercussions sur leur propre santé. Pour que l’égalité des chances en matière de santé soit effective, il est nécessaire que chaque axe de la politique de santé soit décliné au regard des besoins spécifiques de ces publics.

M. Jean-Pierre Door. Aujourd’hui, en effet, plus de huit millions d’aidants familiaux non professionnels jouent un rôle central dans l’aide et l’accompagnement d’un proche dépendant de son entourage pour les actes de la vie quotidienne, en raison d’un handicap ou d’une maladie. Ces aidants familiaux subissent une fatigue physique et psychique certaine.

M. Olivier Véran, rapporteur. Si l’objectif est louable, je vous propose de retirer vos amendements au profit de l’amendement AS144 du groupe écologiste, plus général car il vise la politique de santé dans sa globalité.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement AS144 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Il est essentiel que la situation des personnes handicapées et de leurs aidants familiaux soit prise en compte dans chaque dispositif. La réécriture proposée par le projet de loi faisant disparaître du droit l’objectif de prise en compte des besoins des personnes en situation de handicap, nous souhaitons le réintroduire.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement allant dans le même sens que nos précédents amendements, nous le soutenons, et demandons même à le cosigner.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous ne m’avez pas fait confiance lorsque je vous ai dit que cet amendement satisferait à votre objectif, et voilà que vous voulez le cosigner ! J’émets un avis favorable, sous réserve d’une rectification visant à supprimer les mots « l’ensemble de », qui sont superflus.

La Commission adopte l’amendement AS144 ainsi rectifié.

Puis elle aborde l’amendement AS375 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Dans la discussion générale, il a été affirmé que le Premier ministre et la ministre de la santé allaient organiser une Conférence nationale de santé. Or, à l’alinéa 17 est annoncée une stratégie nationale de santé sans contenu, sous prétexte qu’il faudra par la suite organiser une consultation afin d’en définir les objectifs et les priorités. Il me semble que cela aurait pu être fait auparavant.

M. Olivier Véran, rapporteur. Sont d’abord définis à l’article 1er les domaines compris dans la politique de santé puis ensuite la manière de procéder pour élaborer notre stratégie nationale de santé. Cela me paraît plus réaliste et plus responsable que la démarche d’affichage retenue dans la loi du 9 août 2004, qui énonçait de multiples objectifs et prévoyait la révision des lois de santé publique tous les cinq ans – révision qui ne s’est jamais produite. J’émets donc un avis défavorable à la suppression de l’alinéa 17.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine en discussion commune les amendements identiques AS436 de M. Jean-Pierre Door et AS681 de M. Guillaume Larrivé, ainsi que l’amendement AS500 de M. Bernard Accoyer.

M. Jean-Pierre Door. Nous souhaitons que la consultation prévue à l’alinéa 17, préalable à la révision de la stratégie nationale de santé, implique également le Conseil national consultatif des personnes handicapées.

M. Guillaume Larrivé. Vous prévoyez, madame la ministre, que les modalités de la consultation publique prévue à cet article seront précisées par décret en Conseil d’État. Or, nous estimons que cette consultation doit impliquer des représentants des usagers, des professionnels de santé et du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Si vous vous engagez à ce que tel soit bien le cas, nous pourrons retirer notre amendement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je crains fort qu’en énumérant une liste de personnes ou d’instances à consulter, on n’en oublie certaines.

M. Olivier Véran, rapporteur. Que diront en effet celles qui ne seront pas citées ? C’est au décret de définir les modalités de cette consultation publique, non à la loi. Avis défavorable.

Mme la ministre. Puisque M. Larrivé se dit prêt à retirer son amendement, je veux le rassurer : les personnalités et instances citées dans son amendement sont évidemment incontournables dans le cadre de la consultation qui sera organisée en vue de la mise en place et du déploiement, étape par étape, de la stratégie nationale de santé. En revanche, je ne puis affirmer à ce stade que ces groupes seront les seuls à être consultés.

Je rappelle que la stratégie nationale de santé est le cadre d’ensemble dans lequel seront définies les grandes orientations de la politique de santé. Au sein de cette stratégie nationale s’intègrent des actions publiques, de nature réglementaire ou législative, et il appartiendra aux différentes parties prenantes de lui assigner régulièrement de nouveaux objectifs. Ainsi nous donnons-nous aujourd’hui pour priorités, par exemple, la prévention ou la réorganisation des soins en territoire autour du médecin traitant. La consultation sera publique et associera en particulier les représentants des usagers, ce qui est une grande nouveauté.

M. Jean-Pierre Door. C’est un sujet sensible, au point que des amendements ultérieurs proposeront également la consultation obligatoire du CNCPH, conformément au souhait exprimé par les associations de personnes handicapées lorsque nous les avons auditionnées. Puisque vous vous engagez à ce que le CNCPH participe à la révision de la stratégie nationale de santé, je suis prêt à retirer celui-ci.

Les amendements sont retirés.

Les amendements identiques AS231 de M. Jean-Pierre Door, AS887 de Mme Martine Carrillon-Couvreur, AS889 de Mme Bérengère Poletti et AS891 de M. Dominique Tian sont également retirés.

La Commission en vient à l’amendement AS1215 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Les associations d’usagers du système de santé ont été mises à l’écart du processus d’élaboration de la stratégie nationale de santé. Il paraît donc indispensable que la loi apporte des garanties quant à l’inclusion de l’ensemble des parties prenantes dans la consultation publique, le suivi annuel et l’évaluation annuelle de cette stratégie.

M. Olivier Véran, rapporteur. Pour toutes les raisons évoquées précédemment, et parce que la notion d’« ensemble des parties prenantes » me paraît sans portée juridique, je vous propose de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS146 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Cet amendement a pour objet d’assurer que la stratégie nationale de santé publique prendra bien en compte les besoins des personnes en situation de handicap. C’est pourquoi nous avons souhaité associer le CNCPH à la consultation publique préalable.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je formulerai la même demande que précédemment.

Mme la présidente Catherine Lemorton. L’amendement est en effet satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement AS892 de M. Dominique Tian, les amendements identiques AS73 de M. Jean-Pierre Door, AS850 de Mme Bérengère Poletti et AS888 de Mme Martine Carrillon-Couvreur, et l’amendement AS147 de Mme Véronique Massonneau.

M. Jean-Pierre Door. Je retirerai les amendements AS73 et AS850, compte tenu des engagements pris par Mme la ministre.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. J’insiste sur la nécessité de faire appel à l’expertise des associations représentant les personnes handicapées dans l’élaboration de notre politique de santé. Cela étant, je retire mon amendement.

Mme Véronique Massonneau. Le système de santé est parfois peu accessible aux personnes en situation de handicap. Faire appel à l’expertise des associations de personnes handicapées pour définir, réviser, suivre ou évaluer les politiques de santé publique est donc l’une des conditions préalables à l’adaptation du système de santé aux besoins spécifiques des personnes handicapées. L’amendement AS147 vise donc à prendre en compte l’avis du CNCPH.

M. Olivier Véran, rapporteur. Dans la mesure où nous avons créé un volet handicap et où le CNCPH est un acteur essentiel en la matière, ces amendements sont redondants avec l’état actuel des pratiques, ou du moins avec les nouvelles pratiques instaurées dans le cadre de la stratégie nationale de santé.

Les amendements AS892, AS73, AS850 et AS888 sont retirés.

La Commission rejette l’amendement AS147.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques AS74 de M. Jean-Pierre Door et AS851 de Mme Bérengère Poletti, ainsi que l’amendement AS148 de Mme Véronique Massonneau.

M. Jean-Pierre Door. La nouvelle rédaction de l’article L. 1411-1 du code de la santé publique fait disparaître toute mention de la prise en compte des populations fragilisées parmi les actions de promotion de la santé. Cela va à l’encontre de l’objectif annoncé, qui vise à promouvoir l’accès de tous aux soins.

M. Bernard Perrut. Afin de renforcer l’égalité des chances des personnes handicapées, notamment scolarisées, en matière de santé, je propose de rendre obligatoire la prise en compte de ces populations fragilisées.

Mme Véronique Massonneau. Les actions de promotion de santé doivent prendre en compte les spécificités requises afin d’en assurer la bonne compréhension par les personnes en situation de handicap, et notamment de handicap mental.

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous venons d’adopter un amendement précisant que la politique de santé tout entière est adaptée aux personnes en situation de handicap et que les actions de promotion de la santé recouvrent le développement des compétences individuelles. Ces amendements sont donc satisfaits et je vous propose de les retirer.

Les amendements sont retirés.

Puis la Commission examine l’amendement AS708 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Cet amendement définit, en cohérence avec le projet de loi, la logique inhérente à la coopération sanitaire, sociale et médico-sociale des personnes malades, des personnes handicapées, des personnes âgées et des personnes en situation d’exclusion sociale. En ce sens, il conforte la mission du service public territorial de santé au public dans sa mission de coordination de l’offre territoriale, extraterritoriale, voire extrarégionale.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est satisfait par la nouvelle rédaction de l’alinéa 11 que nous venons d’adopter par amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS452 de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. La prévention et la promotion de la santé doivent être abordées de manière transversale et pluridisciplinaire. Je vous propose donc que tout projet de loi fasse l’objet d’une réflexion préalable sur l’insertion de dispositions relatives à la prévention en matière de santé. Ainsi, un projet de loi relatif au logement pourrait-il comprendre des éléments concernant la prévention en matière d’intoxication, d’accidents domestiques ou de pollution intérieure. L’objectif est de renforcer l’efficacité de la loi en obligeant l’administration, le Gouvernement et le Parlement à y prévoir des dispositions spécifiques en matière de prévention.

M. le rapporteur. Avis défavorable : si cette disposition était adoptée, cela fragiliserait la consultation publique ad hoc envisagée, alors que de nombreux pays ont recours à cette méthode. Et, surtout, cela ne lierait pas le législateur, qui ne pourrait l’être que par une loi organique ou constitutionnelle. Prévoir que chaque loi doit envisager son objet sous l’angle sanitaire paraît à la fois trop compliqué et inadapté ; en revanche, l’article 1er prévoit déjà de favoriser systématiquement la promotion de la santé dans le cadre de l’élaboration des politiques publiques.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS387 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. L’alinéa 23, qui dispose que les organismes gestionnaires de l’assurance maladie poursuivent les objectifs déclinés par les ARS visant à garantir la continuité des soins, est-il compatible avec la liberté d’installation des médecins ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. La notion de continuité des soins s’entend du point de vue du patient, non du médecin.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable à l’amendement. Les ARS ont pour mission de décliner dans les territoires les politiques publiques déterminées par l’État après consultation de tous les acteurs concernés.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Si la question est de savoir si les ARS exerceront une forme de coercition sur les médecins souhaitant s’installer, la réponse est non.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il ne s’agit en effet nullement d’exercer une coercition ni d’imposer un Gosplan médical, mais simplement de rappeler que l’ARS est l’organe déconcentré de l’État qui a compétence en matière d’organisation des soins.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Quant à la liberté d’installation des médecins, elle n’est nullement remise en cause. N’est-ce pas, monsieur le rapporteur ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous la réaffirmons en effet.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS437 de M. Jean-Pierre Door, AS474 de M. Bernard Accoyer, AS682 de M. Guillaume Larrivé et AS1078 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Robinet. Le projet de loi prévoit la création d’un « service territorial de santé au public » afin d’organiser de manière administrée la coopération entre les professionnels libéraux dans les territoires. Il est donc indispensable de réaffirmer avec fermeté le principe de la liberté d’installation mentionnée dans le code de la santé publique.

M. Bernard Accoyer. Les déclarations et propositions de plusieurs membres de la majorité vont dans le sens d’une restriction de la liberté d’installation des médecins, qui ne seraient autorisés à s’installer que dans les zones en tension. Il convient donc de réaffirmer le principe de liberté d’installation.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Une proposition de loi en ce sens avait été déposée par votre groupe…

M. Bernard Accoyer. Je ne l’ai pas signée !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Certes, mais cela montre que, tout comme au sein de votre groupe, des membres de la majorité peuvent très bien prendre des positions qui leur sont propres. La ministre, en revanche, a réaffirmé à maintes reprises le maintien du principe de libre installation, ce que vous confirmera le rapporteur.

M. Guillaume Larrivé. Le projet de loi prévoit que les organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie doivent poursuivre les objectifs définis par l’État et déclinés par les ARS, visant à assurer plusieurs objectifs, dont ceux de continuité, de coordination, de qualité des soins ainsi qu’une répartition territoriale homogène de l’offre de services de prévention et de soins. Ces objectifs m’agréent, notamment en tant que député rural. Mais il me paraît important de prévoir expressément que c’est dans le respect du principe de libre installation des médecins qu’il convient de les atteindre. Si les engagements qui viennent d’être rappelés sont fermes, j’imagine que le Gouvernement sera favorable aux amendements du groupe UMP sur cette question importante.

M. Arnaud Richard. Notre groupe, madame la ministre, vous accordera le bénéfice du doute, considérant qu’il s’agit là d’une distraction de plume, mais il ne nous paraît pas normal que, dans cette rédaction nouvelle des dispositions relatives aux schémas régionaux d’organisation des soins (SROS), la mention de la liberté d’installation ait été supprimée. Cette erreur matérielle pourra donc être corrigée grâce à notre amendement.

Mme la ministre. Il est vrai que, dans la rédaction des dispositions relatives aux SROS, la référence à la liberté d’installation a été, selon le terme consacré, « écrasée ». Nous proposerons donc un amendement afin de la rétablir, mais à l’article 38 qui a précisément trait aux SROS.

M. Olivier Véran, rapporteur. La vigilance de l’opposition était donc manifestement utile.

M. Arnaud Richard. Je remercie Mme la ministre pour la précision qu’elle vient de nous apporter. Cela dit, il est inquiétant que ce point précis ait été « écrasé » dans la réécriture du dispositif en vigueur, et c’est pourquoi nous maintenons nos amendements.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle aborde l’amendement AS1443 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Pour assurer le pilotage et le renforcement de l’action publique, il faut posséder des données précises. Or, les données sexuées relatives à la santé des femmes sont éparses et parfois anciennes : celles relatives à la situation contraceptive des femmes ayant recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) datent de 2007, celles relatives aux femmes qui renoncent aux soins remontent à 2006. Nous demandons donc qu’un baromètre de la santé des femmes soit publié tous les deux ans, afin de mener une politique qui soit au plus près de leurs besoins en matière de santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Tout d’abord, pourquoi prévoir dans la loi des priorités spécifiques aux femmes, alors même que l’élaboration de la stratégie nationale de santé permettra de les mettre en lumière ? En outre, figer des priorités assorties d’objectifs et d’indicateurs serait une erreur, comme le montre l’expérience de la loi du 9 août 2004. Enfin, le Haut Conseil de la santé publique a déjà compétence pour réaliser des études et suivre des indicateurs « genrés » lorsque c’est nécessaire.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques AS1208 du rapporteur, AS1565 de Mme Dominique Orliac et AS1567 de Mme Martine Pinville.

M. Olivier Véran, rapporteur. Comme deux amendements précédemment adoptés, l’amendement AS1208 vise à mieux structurer la politique de santé de l’enfant. Après avoir défini celle-ci comme une composante de la stratégie de santé et identifié un parcours éducatif de santé, je propose de préciser que le Haut Conseil de la santé publique, lorsqu’il contribue à la stratégie nationale de santé, pourra également contribuer à l’élaboration d’une politique de santé de l’enfant qui soit globale et concertée. Il pourra notamment évaluer les politiques de santé de l’enfant aujourd’hui conduites par différents acteurs et formuler des propositions pour renforcer et améliorer leur coordination.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1565 vise à prendre en compte la politique de santé de l’enfant dans les politiques publiques menées par l’État.

Mme Martine Pinville. Le parcours éducatif en santé de l’enfant visera à ce que, dans chaque établissement, soit élaborée de façon concertée une réflexion globale sur les compétences à acquérir à chacune des étapes de la scolarité.

M. Dominique Tian. Encore une fois, vous rendez la loi inutilement bavarde. Le vrai problème est un problème de compétences respectives de l’État et des collectivités territoriales. Mieux vaudrait prévoir des dispositions précises, visant les rectorats, voire le ministère de l’éducation nationale.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je suis étonnée, monsieur Tian, que vous souhaitiez étatiser à ce point le système de santé…

La Commission adopte les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1609 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement de cohérence vise à établir un lien entre la PMI, la santé scolaire et universitaire et la santé au travail.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement AS152 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à insister sur l’importance des actions de prévention et d’information sur les questions environnementales, et de leur impact sur la petite enfance. En effet, ce sont les femmes enceintes et les enfants en bas âge qui sont les plus vulnérables aux facteurs environnementaux. Je pense bien sûr aux perturbateurs endocriniens, mais aussi à certains produits alimentaires. Il existe d’ailleurs parfois déjà des affichages volontaires pour déconseiller aux femmes enceintes la consommation de certains produits.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je n’étais pas sûr d’avoir compris l’amendement, mais, à l’écoute de votre argumentation et compte tenu des enjeux de santé publique en la matière ainsi que des études, réalisées partout dans le monde, qui montrent bien que l’exposition à des perturbateurs endocriniens peut, à ces âges fragiles, avoir des conséquences sévères et parfois désastreuses sur la santé, j’émets un avis favorable.

M. Dominique Tian. Je note que le rapporteur se dit favorable à un amendement qu’il n’a pas compris – et qui est effectivement incompréhensible. Visiblement, certains de doute nos collègues du groupe écologiste se sont rendus à des colloques à New York et au Japon… Je n’ai pas très bien compris, en particulier, en quoi cet amendement pourrait nous faire économiser 20 milliards d’euros !

M. Jean-Louis Touraine. Vous confondez avec l’amendement suivant !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS151 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à prolonger le délai d’entrée en application du troisième Plan national santé environnement (PNSE 3), le PNSE 2 n’ayant pas encore trouvé à s’appliquer pleinement.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je viens de comprendre que l’intervention de M. Tian ne portait pas sur l’amendement précédent, mais sur celui que nous examinons à présent. Monsieur Roumegas, les objectifs du PNSE 3 contribueront à la stratégie nationale de santé en fonction de la consultation qui sera organisée. Par ailleurs, pourquoi mentionner la date de 2020, alors que l’on ne fixe généralement de date qu’une fois connue celle de fin du plan précédent ? En outre, l’alinéa 20 prévoit aussi la coordination de l’ensemble des politiques publiques. J’émets donc un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AS475 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement vise à préciser que le Gouvernement doit traiter avec les organisations représentatives des professions de santé et non pas choisir les interlocuteurs qui l’arrangeraient pour conduire des politiques publiques qui l’arrangeraient également.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le texte vise les professionnels de santé en général, ce qui n’exclut nullement les organisations représentatives. Par contre, votre amendement restreindrait le champ du partenariat, en excluant notamment la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM).

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS245 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS940 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Il s’agit de faire en sorte que les centres de santé puissent être pleinement acteurs de la politique nationale de santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Si l’on cite les centres de santé, il faut aussi mentionner les réseaux de santé, les pôles de santé, les maisons de santé, les établissements publics de santé et les établissements privés de santé, tous essentiels au fonctionnement de notre système sanitaire. Lorsque l’on mentionne les « professionnels », cela n’exclut en rien les centres de santé.

Mme Valérie Boyer. Dans ce cas, pourquoi vise-t-on explicitement les associations agréées ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Il s’agit des associations de patients.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 1ermodifié.

*

Article 1erbis
(art. L. 1411-9 [nouveau] du code de la santé publique)

Adaptation de la stratégie nationale de santé aux outre-mer

Sur proposition de Mme Monique Orphée et des commissaires du groupe SRC, la Commission a adopté un article additionnel prévoyant que la stratégie nationale de santé prévue à l’article L. 1411-1 du code de la santé publique comporte des objectifs propres aux outre-mer à partir d’une évaluation des données de santé et des risques sanitaires spécifiques aux collectivités d’outre-mer. L’État pourra en outre proposer à la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie de s’associer, par convention et dans le respect de leurs compétences, aux actions conduites dans le cadre de la stratégie nationale de santé.

*

La Commission examine l’amendement A1458 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Malgré les efforts déployés par le Gouvernement, la situation sanitaire outre-mer se caractérise par des difficultés persistantes. Si nombre de problèmes sont communs à ceux de la métropole, d’autres y sont spécifiques. Il apparaît donc nécessaire d’adopter une stratégie qui tienne compte de ces spécificités. On peut regretter cependant que l’article 1er du projet de loi ne vise pas les outre-mer. Pour corriger cette situation, le présent amendement prévoit que la stratégie nationale de santé se décline en des programmes spécifiques destinés aux collectivités ultramarines. Le texte précise également que la politique de santé doit prévoir une approche des spécificités propres aux collectivités ultramarines sur la base de données d’évaluation spécifiques.

Dans l’amendement que j’avais rédigé initialement, j’avais proposé que soit mentionné Wallis-et-Futuna. Ce territoire ne figurant pas dans la rédaction que nous examinons, je vous propose de l’y rajouter.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

*

Après l’article 1erbis

La Commission examine l’amendement AS435 de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. La loi du 9 août 2004 prévoit la consultation des acteurs majeurs de notre système de santé, tels que l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), l’Union nationale des organismes complémentaires d’assurance maladie (UNOCAM) et l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS). Or, nous souhaitons renforcer la participation des usagers et de leurs représentants. Je propose donc, d’une part, d’intégrer l’organisation représentative des associations d’usagers agréées conformément à l’article L. 1114-1 du code de la sécurité sociale – ce qui satisferait à l’une des dix-neuf propositions du Comité des sages, qui tend à accroître le rôle et l’implication des usagers dans l’amélioration du système de santé ainsi que leur participation à la définition des politiques publiques – et, d’autre part, d’améliorer le cadre de la concertation et la méthode retenue pour l’organisation de celle-ci, sur le modèle de la concertation organisée avec les partenaires sociaux.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Si l’on élabore une loi relative au médicament, il ne sera peut-être pas indispensable d’auditionner l’UNOCAM au préalable. Surtout, lorsqu’une loi ou un dispositif traite de la santé, il est évident que les principaux organismes sont consultés. Ce fut le cas s’agissant de la stratégie nationale de santé, mais aussi de la rédaction du présent projet de loi. Enfin, le cadre de la consultation publique prévue à cet article sera défini par décret. Bref, non seulement votre amendement est satisfait, mais il est restrictif au regard de ce que nous avons proposé précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS921 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Il a été constaté à différentes reprises une aggravation de la situation des jeunes enfants. L’UNICEF explique les difficultés rencontrées par les enfants qui vivent sous le seuil de pauvreté. Quant au SAMU social de Paris, il a reconnu que plus de 80 % des familles sont aujourd’hui en grande difficulté. Ces différents constats rendent nécessaire la conduite d’actions à l’égard des parents et des enfants avant leur scolarisation. Ces actions doivent être reconnues et soutenues en tant que telles, ce à quoi vise cet amendement.

M. le rapporteur. Cet amendement est satisfait, la PMI étant reconnue à l’article 1er. Quant à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), il s’agit d’un organisme de sécurité sociale. Or tous les organismes de protection sociale sont désormais rattachés à la stratégie nationale de santé et tous interviennent dans le champ dont vous parlez. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

*

TITRE PREMIER
RENFORCER LA PRÉVENTION ET LA PROMOTION DE LA SANTÉ

Chapitre Ier
Soutenir les jeunes pour l’égalité des chances en santé

Avant l’article 2

La Commission aborde l’amendement AS663 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Cet amendement vise à assurer la prévention pendant les neuf mois de grossesse des femmes enceintes et les deux premières années de la vie de l’enfant. On sait en effet que dans cette période, la façon d’alimenter les enfants a des répercussions toute leur vie sous forme de maladies chroniques, de diabète, de maladies cardiovasculaires et de troubles métaboliques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement n’apporte aucune précision utile par rapport à l’article L. 2111-1 du code de la santé publique, qui prévoit déjà que les services de protection maternelle et infantile (PMI) conduisent des actions de prévention pendant les phases cruciales du développement de l’enfant au travers de mesures de prévention en faveur des futurs parents, des enfants de moins de six ans, des femmes enceintes et des jeunes mères. Je ne sais pas ce qu’est la période « périconceptionnelle » mais j’imagine qu’elle est incluse dans les dispositions de l’article que je viens de citer.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS153 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à permettre aux caisses d’allocations familiales (CAF) et aux services départementaux de PMI de réaliser une expérimentation de promotion de la santé avant l’âge de la préscolarisation, pour les enfants de moins de trois ans. Un décret précisera les conditions d’application de cette disposition. On vise un âge où l’information sur les questions de santé et d’environnement est essentielle au bon développement des enfants.

M. Olivier Véran, rapporteur. Même argumentaire que précédemment : c’est déjà la mission de la PMI et des centres sociaux relevant des CAF. L’amendement est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS697 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Je propose que, dans les douze mois suivant la promulgation de la loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport visant à expliciter les principaux déterminants des inégalités en matière de santé chez les enfants et les jeunes, et à évaluer l’ampleur de ces inégalités en France.

En effet, nous constatons, lorsque nous voulons mener une politique de santé de l’enfant, que les données disponibles en matière d’inégalités sociales de santé n’intègrent que rarement une perspective différentielle par groupes d’âge. Or, dans le cas de l’enfance et de l’adolescence, une telle perspective est indispensable. En effet, la façon dont s’organisent les déterminants macroéconomiques et environnementaux à ce moment du parcours de vie est particulière. L’impact de certains de ces déterminants y est plus fort mais aussi plus durable. Pour renforcer les mesures visant à repérer et à protéger les enfants et les adolescents les plus à risque et adapter la politique nationale de santé de l’enfant en conséquence, il faut disposer de données précises et globales sur le sujet.

M. Olivier Véran, rapporteur. La stratégie nationale de santé comprendra une analyse des déterminants de santé, mais elle peut difficilement constituer le cadre de l’analyse de déterminants socio-économiques et des inégalités. Si je comprends et approuve la motivation de votre amendement, je vous suggère de le retirer afin d’en retravailler la rédaction d’ici à l’examen du texte en séance publique ?

Mme Martine Pinville. Volontiers.

L’amendement est retiré.

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Article 2
(art. L. 121-4-1 du code de l’éducation)

Politique de santé en milieu scolaire

L’article 2 s’inscrit dans le prolongement des acquis de la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République qui a cherché à mieux définir, dans le code de l’éducation, les contours des actions de promotion de la santé conduites à l’école.

L’école est en effet un lieu essentiel de la promotion de la santé à destination des plus jeunes. Les actions menées vont des visites médicales et des dépistages, pour certains obligatoires, à l’acquisition de savoirs fondamentaux et aux gestes et comportements promus par des activités collectives. Les champs de la santé concernés sont nombreux : hygiène de vie et éducation nutritionnelle, éducation à la sexualité – de l’accès à la contraception à la prévention des infections –, prévention des différentes conduites addictives, prévention ou identification du mal-être, formation aux gestes de premier secours.

Les effets favorables interviennent à un moment décisif du parcours de vie. Et il est établi que les actions de promotion de la santé des enfants conduites à l’école sont susceptibles de produire des effets sur l’ensemble d’une famille. La promotion de la santé à l’école contribue donc à réduire les inégalités sociales de santé.

La mise en œuvre relève principalement des équipes enseignantes, au premier rang desquelles figurent les médecins et infirmiers scolaires, mais elle mobilise également de nombreux autres acteurs au niveau de l’État ainsi que différents niveaux de collectivités et des organismes de sécurité sociale. Elle est une composante de la politique de santé, dont l’article premier a redéfini le cadre national de gouvernance. L’article 2 vise donc à formaliser, dans le code de l’éducation, le lien des actions menées à ce titre en milieu scolaire avec la coordination de l’ensemble des politiques publiques par la stratégie nationale de santé.

1.  La promotion de la santé à l’école définie par la loi du 8 juillet 2013

L’article 12 de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école précitée a introduit, à la suite du I de l’article L. 121-4-1 du code de l’éducation consacré à la mission d’éducation à la citoyenneté, un II qui définit le champ de la mission de promotion de la santé à l’école. Ces dispositions couvrent de façon large les différentes missions susceptibles d’être menées en la matière par les établissements d’enseignement.

Elles comprennent tout d’abord, au 1° du II de l’article L. 121-4-1, la mise en place d’un environnement scolaire favorable à la santé, ce qui recouvre tant les obligations de sécurité sanitaire pour les chefs d’établissement que la promotion du bien-être des élèves dans l’exercice même des missions d’enseignement.

Le 2° prévoit des programmes d’éducation à la santé visant à développer les connaissances des élèves à l’égard de leur santé et également de celle des autres. Le 3° assigne une mission de participation à la politique de prévention sanitaire. Le 4° se rapporte à la réalisation d’examens médicaux et de bilans de santé. Le 5° mentionne la détection précoce des problèmes de santé ou des carences de soins pouvant entraver la scolarité. Le 6° envisage l’accueil, l’écoute, l’accompagnement et le suivi individualisé des élèves. Enfin le 7° attribue à l’école une mission de participation à la veille épidémiologique par le recueil et l’exploitation de données statistiques.

Le dernier alinéa de l’article L. 121-4-1 indique que ces différentes composantes de la promotion de la santé à l’école relèvent en priorité des médecins et infirmiers de l’éducation nationale.

La description des actions de promotion de la santé figure à l’article L. 541-1 du code de l’éducation, modifié par l’article 6 de la loi du 8 juillet 2013.

Au nombre des actions de promotion de la santé des élèves, dont il est précisé qu’elles font partie des missions de l’éducation nationale et sont en priorité assurées par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale, cet article cite « les actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistage obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire ». Ces actions doivent favoriser la réussite scolaire des élèves et la réduction des inégalités en matière de santé. L’article L. 541-1 confie ensuite au pouvoir réglementaire la définition de la périodicité et du contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage, à l’exception d’une visite obligatoire au cours de la sixième année, prévue par la loi, comprenant un dépistage des troubles spécifiques du langage et de l’apprentissage.

Ces dispositions sont reproduites à l’article L. 2325-1 code de la santé publique

Enfin l’article 11 de la même loi a précisé, à l’article L. 121-5 du code de l’éducation, que l’éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuent non seulement à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l’échec scolaire et à la réduction des inégalités sociales et culturelles mais également à « l’éducation à la santé et à la citoyenneté ».

Les apports de la loi du 8 juillet 2013 sont donc importants mais ils n’indiquent pas les conditions de conduite, dans chaque établissement, d’actions de promotion de la santé liées à des orientations stratégiques et coordonnées avec les actions conduites par d’autres acteurs. Le code de l’éducation définit donc aujourd’hui le contenu de la mission de promotion de la santé de l’école, à l’article L. 121-4-1, mais sans préciser les modalités de son pilotage ; il définit également un « parcours de santé dans le système scolaire », mais au détour de dispositions largement consacrées aux seuls bilans de santé obligatoires.

2.  Définir l’articulation avec la stratégie nationale de santé afin de développer un véritable « parcours éducatif en santé »

L’article 2 du projet de loi articule donc les dispositions du code de l’éducation avec le nouveau cadre de la politique de santé dans le but de leur conférer une plus grande effectivité.

Cette démarche se fonde sur de nombreux travaux qui ont cherché à améliorer la contribution de l’école à la politique de santé de l’enfant : ainsi du rapport d’information sur la médecine scolaire déposé par les députés Gérard Gaudron et Martine Pinville en novembre 2011 (19) dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques et comportant une contribution de la Cour des comptes ; ou des premières conclusions, communiquées à votre rapporteur, de la mission sur la santé des enfants et des adolescents en milieu scolaire confiée par les ministres chargés de la santé et de l’éducation nationale aux professeurs Didier Jourdan et Pierre Lombrail.

Il s’agit de définir le cadre de la conduite des missions de promotion de la santé, afin d’identifier le niveau de la mise en œuvre et les autorités responsables du pilotage.

Les deux alinéas de l’article 2 complètent l’article L. 121-4-1 du code de l’éducation et indiquent que la promotion de la santé à l’école « est conduite, dans tous les établissements d’enseignement conformément aux priorités de la politique de santé ».

Cet article précise que les actions sont conduites « par les autorités académiques en lien avec les agences régionales de santé (ARS) » : un lien est donc formalisé entre les autorités relevant du ministère de l’éducation nationale (ou, pour l’enseignement agricole, du ministère de l’agriculture) et des services rattachés au ministère de la santé.

Un renvoi direct est opéré à l’article L. 1411-1-1 du code de la santé publique, établi par l’article premier du projet de loi, qui prévoit que « les actions de promotion de la santé reposent sur la concertation et la coordination de l’ensemble des politiques publiques pour favoriser à la fois le développement des compétences individuelles et la création d’environnements physiques, sociaux et économiques favorables à la santé ». Il s’agit donc bien d’envisager, au niveau de l’État, une action conduite de façon interministérielle, et de proposer, sur les territoires, la participation des différents acteurs concernés par la politique de santé scolaire.

Le rapporteur considère donc que la loi pourrait mentionner un plus grand nombre d’acteurs avec lesquels les autorités académiques pourraient être amenées à formaliser des liens, au regard de leurs compétences respectives : ainsi des organismes locaux d’assurance maladie ou des collectivités territoriales.

Le rapport précédemment mentionné des députés Gérard Caudron et Martine Pinville sur la médecine scolaire préconisait par exemple la création, au niveau rectoral, d’observatoires régionaux d’épidémiologie scolaire réunissant tous les acteurs, notamment les ARS et les collectivités territoriales, pour élaborer des diagnostics et engager des actions communes.

L’apport de l’article 2 consiste également à identifier clairement « l’établissement » comme le lieu de mise en œuvre. Chaque chef d’établissement devra donc rendre compte de la mise en œuvre de ces actions.

Mais l’ambition semble plus importante : l’exposé des motifs ainsi que l’étude d’impact joints au projet de loi évoquent l’émergence d’un « parcours éducatif en santé », au niveau de chaque établissement.

Il s’agirait d’associer l’ensemble de l’équipe éducative, en complément des actions menées par les services de santé scolaire, afin de définir les compétences à acquérir à chacune des étapes de la scolarité et au moyen d’actions individuelles et collectives de promotion de la santé.

Par exemple, à partir d’un diagnostic de la situation propre à un établissement ou à certaines classes d’âge, la communauté éducative pourra se saisir d’une question spécifique : alcoolisation, prévention de l’obésité… Aux différents stades de ce parcours éducatif, pourraient par exemple être définies les conditions de participation des élèves, ainsi que des intervenants extérieurs, à la promotion de l’activité physique et du « bien manger ». Ces actions peuvent ainsi compléter et renforcer les interventions des médecins et infirmiers de l’éducation nationale. Or la notion de « parcours éducatif en santé » ne figure pas dans le code de l’éducation dans sa rédaction actuelle ni dans l’article 2 du projet de loi.

Si l’article 2 du projet de loi vise à inscrire la mission de promotion de la santé à l’école en relation avec la stratégie nationale de santé et prévoit sa définition par les autorités académiques en lien avec les agences régionales de santé, le rapporteur propose de donner plus de portée à l’impulsion que le Gouvernement donne, depuis le début de la législature, à la politique de santé scolaire.

Le rapporteur estime donc nécessaire d’indiquer sans ambiguïté que l’établissement doit définir un parcours éducatif en santé qui ne se réduit pas aux dépistages obligatoires et auquel participera l’ensemble de la communauté éducative. Il considère que les actions de promotion de la santé à l’école doivent être conduites par les autorités académiques non seulement en lien avec les agences régionales de santé mais également avec les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie concernés. Le rapporteur propose également de mieux définir dans le code de l’éducation les modalités de promotion des liens entre les services de santé scolaire et les différents acteurs locaux dans le domaine de la santé, en particulier, pour les enfants de moins de six ans, les services de la protection maternelle et infantile.

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Sur propositions du rapporteur, de Mme Martine Pinville et des commissaires du groupe SRC, ainsi que des commissaires du groupe RRDP, la Commission des affaires sociales a adopté des amendements identiques de réécriture globale de l’article 2 du projet de loi.

Ces amendements, indiquent, à l’article L. 121-4-1 du code de l’éducation que les programmes d’éducation à la santé doivent également développer les connaissances des élèves à l’égard des services de santé. Ils prévoient également la promotion des liens entre les services de santé scolaire, les services de la protection maternelle et infantile ainsi que les autres acteurs locaux dans le domaine de la santé. Au même article, la modification apportée par l’article 2 dans sa rédaction initiale est maintenue mais la conduite de la promotion de la santé à l’école par les autorités académiques se fera en lien non seulement avec les ARS mais également avec les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie concernés.

Enfin, à l’article L. 541-1 du code de l’éducation, et à l’article L. 2325-1 du code de la santé publique qui en reproduit les dispositions, l’article 2 indique désormais que certaines des actions de promotion de la santé constitueront un « parcours éducatif de santé ».

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La Commission est saisie des amendements identiques AS246 du rapporteur, AS1217 de Mme Dominique Orliac et AS1484 de Mme Martine Pinville.

M. Olivier Véran, rapporteur. À la suite des auditions menées à l’Assemblée nationale, et inspirés par nos collègues Martine Pinville et Gérard Gaudron ainsi que par les conclusions de la mission confiée aux professeurs Didier Jourdan et Pierre Lombrail, nous proposons de réécrire l’article 2 de façon à faire émerger un parcours éducatif de santé au niveau de chaque établissement
– dans le cadre d’une réflexion concertée sur les compétences à acquérir à chacune des étapes de la scolarité. Il s’agit d’apprendre aux enfants à prendre soin d’eux-mêmes et d’autrui et à prévenir les conduites à risque dans le cadre des actions individuelles et collectives de promotion de la santé qui vont être menées et auxquelles seront associés l’ensemble de la communauté éducative ainsi que des intervenants extérieurs.

Cette notion ne figurant pas en tant que telle dans le code de l’éducation ni dans la rédaction actuelle de l’article 2, nous proposons de l’y introduire. La modification apportée par l’article 2 dans sa rédaction initiale est maintenue, mais la promotion de la santé à l’école par les autorités académiques se fera en lien avec les ARS, les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladies concernés. Il s’agit d’un projet ambitieux qui nous permettra de mener des actions de prévention et de promotion de la santé et d’éducation à tous les âges de la scolarité. Il importe de permettre aux jeunes de mieux prendre soin d’eux-mêmes et d’acquérir davantage de connaissances en matière de santé. Cela évitera aussi que se développent à l’adolescence certaines conduites à risque – addictives, notamment. Il est plus efficace, par exemple, d’expliquer pourquoi fumer tue que d’adopter une position moraliste. Et si, dans une classe, on identifie par exemple une prévalence très élevée de l’obésité, on pourra mener des actions en lien avec les parents, les enseignants et des intervenants extérieurs – tels que des professionnels de santé – de façon à sensibiliser tout le monde au problème et à éviter chez les élèves concernés l’apparition de problèmes de santé par la suite.

Mme Dominique Orliac. Cette nouvelle rédaction globale de l’article 2, à laquelle se trouvera intégrée la notion de parcours éducatif en santé, vise à prendre en compte la lutte contre les inégalités de santé à différents échelons de l’éducation, à renforcer les liens entre les services de santé scolaire, ceux de la PMI et les autres acteurs locaux dans le domaine de la santé, et à préciser que les élèves pourront bénéficier d’actions de promotion de la santé constituant un parcours éducatif en santé.

Mme Martine Pinville. Cette réécriture de l’article 2 est l’aboutissement de travaux ayant donné lieu à plusieurs rapports, dont celui que j’ai publié avec Gérard Gaudron et celui réalisé par les professeurs Jourdan et Lombrail dans le cadre d’une mission relative à la santé des enfants et des adolescents en milieu scolaire. C’est une avancée importante que d’organiser ce parcours éducatif en santé et de préciser en quoi consistera la promotion de la santé à l’école en lien avec la stratégie nationale de santé et avec tous les acteurs de santé.

Tout à l’heure, M. Tian nous interpellait en réclamant des dispositions précises. Or, nous énonçons ici comment sera organisé ce parcours avec tous les acteurs, qu’il s’agisse des professionnels, de la PMI ou des acteurs de santé qui interviennent à l’école. Sachant que les comportements psychosociaux des enfants se déterminent avant l’âge de dix ans, c’est à ce moment-là qu’il faut intervenir.

M. Dominique Tian. Nous sommes sur la même longueur d’ondes. Je faisais simplement remarquer que la médecine scolaire française est très pauvre et très en retard sur celles de nos voisins européens.

Je suis d’autant plus favorable à cet amendement qu’il permettra aux collectivités locales d’intervenir. J’aurais certes préféré qu’on leur confie entièrement cette compétence puisqu’elles s’occupent déjà des collèges et des lycées, mais il s’agit d’une avancée, puisque les collectivités pourront apporter des financements qui nous permettront peut-être de disposer enfin d’une médecine scolaire digne de ce nom. La catastrophe actuelle est notamment due au fait que l’on n’arrive plus à recruter de médecins ni d’infirmières, les salaires proposés étant trop faibles.

La Commission adopte les amendements et l’article 2 est ainsi rédigé.

En conséquence, deviennent sans objet les amendements AS513 de M. Fernand Siré, AS467 de M. Yves Daniel, AS372 de M. Denis Baupin, AS1079 de M. Arnaud Richard, AS1349 et AS1350 de M. Francis Vercamer, les amendements identiques AS234 de M. Jean-Pierre Door et AS476 de M. Bernard Accoyer, les amendements AS388 de M. Élie Aboud, AS730 de Mme Anne-Yvonne Le Dain, AS340 de Mme Chantal Guittet, AS154 de M. Jean-Louis Roumegas, les amendements identiques AS953 de M. Gérard Bapt, AS986 de M. Arnaud Robinet et AS1216 de Mme Dominique Orliac, les amendements AS1205 de M. Serge Letchimy et AS389 de M. Élie Aboud, ainsi que les amendements identiques AS156 de M. Jean-Louis Roumegas et AS339 de Mme Chantal Guittet.

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Après l’article 2

La Commission examine les amendements identiques AS532 de M. Fernand Siré et AS807 de M. Bernard Accoyer.

M. Fernand Siré. Cet amendement vise à prendre en compte, dans le cadre de la prévention, la période de conception de l’enfant ainsi que les deux premières années de sa vie. Vous semblez affirmer, monsieur le rapporteur, que ces missions de prévention sont assurées par la PMI et par les CAF, mais, compte tenu la manière dont elles procèdent pour donner des conseils de prévention aux femmes et du faible nombre d’enfants suivis par la PMI, permettez-moi d’être suspicieux à l’égard de leurs actions de prévention. Celles-ci sont plus souvent menées par les pédiatres et les généralistes que par la PMI.

M. Olivier Véran, rapporteur. Monsieur Siré, nous nous trouvons après l’article 2, une vingtaine d’amendements étant tombés à la suite de l’adoption de nos amendements de réécriture globale de l’article. L’amendement que vous auriez dû présenter insistant sur l’hydratation, j’y suis défavorable car cette notion est incluse dans celle d’alimentation.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques AS531 de M. Fernand Siré et AS806 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Perrut. Il s’agit de rétablir l’association des mots « hydratation » et « alimentation » dans l’article L. 312-7-3 du code de l’éducation, afin que les deux puissent être intégrés au « parcours éducatif en santé » prévu dans l’article 2 du projet de loi.

Nous voulons prémunir les enfants et les adolescents contre les risques liés à la déshydratation, encore trop fréquente en milieu scolaire : selon une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC), 90 % des enfants et 86 % des adolescents français ne boivent pas assez d’eau.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous évoquez dans l’exposé sommaire « l’indissociable association des termes hydratation et alimentation » ; or, le mot « alimentation » inclut déjà l’hydratation. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS157 de Mme Brigitte Allain.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement vise à ce que le code de l’alimentation insiste bien sur le lien de l’alimentation avec la santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement étant déjà satisfait, je vous invite à le retirer.

L’amendement AS157 est retiré.

Puis la Commission examine l’amendement AS155 de Mme Laurence Abeille.

M. Jean-Louis Roumegas. Il arrive que des groupes d’intérêts privés participent à des actions de sensibilisation et d’éducation en promouvant la consommation de certains produits : c’est ainsi que le Centre d’études du sucre (CEDUS), lobby de l’industrie sucrière, a participé à de telles actions.

Notre amendement vise à ce que de tels partenariats soient validés par les ARS lorsqu’ils sont conclus avec un établissement d’enseignement et par le ministère de la santé lorsqu’ils sont conclus avec le ministère de l’éducation nationale.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vous remercie, monsieur Roumegas, d’avoir rappelé ce partenariat conclu entre le CEDUS et l’éducation nationale en 2013, c’est-à-dire, hélas, sous la présente majorité.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le premier alinéa de l’amendement est satisfait par la nouvelle rédaction de l’article 2, qui prévoit que les actions de promotion de la santé à l’école seront conduites par les autorités académiques en lien avec les ARS.

Le second alinéa de l’amendement me paraît plus relever de la coordination ministérielle que de la loi. Avis défavorable, donc.

Mme la ministre. Je comprends votre préoccupation, monsieur Roumegas. Je ne pense pas, toutefois, qu’il appartienne au ministère de la santé d’évaluer l’ensemble des partenariats : ce serait un travail gigantesque.

L’exigence de transparence me paraît préférable puisqu’elle conduit à interroger les pratiques : on peut légitimement douter qu’un partenariat similaire à celui que vous avez évoqué soit de nouveau conclu.

Votre amendement ne me paraît pas apporter la bonne réponse.

M. Arnaud Robinet. Les collectivités locales jouent déjà un rôle en la matière : les contrats locaux de santé signés avec l’ARS et la caisse d’assurance maladie permettent de conduire, notamment dans le cadre des nouveaux rythmes scolaires, des actions de sensibilisation des jeunes à l’équilibre alimentaire ou à l’hydratation. N’en demandons pas trop au ministère de la santé !

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe ensuite à l’amendement AS381 de Mme Véronique Louwagie.

M. Gilles Lurton. Cet amendement consiste à introduire l’éducation à l’alimentation, à la santé et aux règles essentielles d’hygiène de vie dans l’élaboration des programmes scolaires dès la maternelle et à les intégrer dans le cadre des projets éducatifs territoriaux, afin notamment de lutter contre l’obésité dès le premier âge.

À l’occasion de la journée de l’enseignement agricole lors du salon international de l’agriculture, le 24 février dernier, Mme Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, et M. Le Foll, ministre de l’agriculture, ont réaffirmé l’importance de l’éducation à l’alimentation des jeunes.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement est satisfait par la nouvelle rédaction de l’article 2.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission examine l’amendement AS1459 de Mme Seybah Dagoma.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement vise à permettre aux élèves présentant des signes d’addiction à l’alcool ou à la drogue de bénéficier d’une aide psychologique appropriée en créant une disposition du code de l’éducation prévoyant que tous les membres du personnel des établissements d’enseignement et d’éducation devront orienter ces élèves vers le médecin scolaire.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Bien que j’aie cosigné l’amendement, je m’aperçois seulement maintenant que sa rédaction n’est pas satisfaisante, le mot « drogue » étant trop imprécis : il conviendrait plutôt de parler de « substances psychoactives ».

M. Olivier Véran, rapporteur. J’ai également cosigné cet amendement : or j’ai désormais un doute sur la mesure même qu’il vise à instaurer.

En effet, l’orientation vers le médecin scolaire d’élèves soupçonnés de conduite addictives relève de l’attention qui est due à chaque élève par l’ensemble des personnels chargés de leur éducation : ajouter que cela constitue une obligation légale ne laisse pas de m’interroger, puisque le code de l’éducation prévoit déjà que le médecin scolaire travaille en lien avec l’équipe éducative, les professionnels de santé et les parents pour chaque enfant et non pour les seuls enfants suspects de conduite addictive.

Il convient de revoir la rédaction de l’amendement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. L’erreur est humaine !

M. Dominique Tian. Cet amendement est dangereux pour les libertés individuelles. Il faut non pas dénoncer un enfant en le signalant à la médecine scolaire, mais avertir ses parents de ses problèmes supposés.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je retire l’amendement pour le retravailler d’ici à la séance publique.

L’amendement AS1459 est retiré.

La Commission examine ensuite AS1017 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Il s’agit d’insérer pleinement les programmes et la vie scolaires dans la prévention des comportements alimentaires à risque en tenant compte du contexte local : les collectivités territoriales doivent être pilotes de cette mobilisation pour l’éducation alimentaire, en lien avec le corps professoral et avec les ARS dans le cadre des contrats locaux de santé.

M. Olivier Véran, rapporteur. La nouvelle rédaction de l’article 2 satisfait votre amendement.

L’amendement AS1017 est retiré.

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Article 2 bis
(art. L. 1111-5 et L. 1111-5-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Dérogation au consentement parental pour des actes de prévention et de soins réalisés par les sages-femmes ou les infirmiers

Établi par un amendement présenté par Mme Annie Le Houerou et les commissaires du groupe SRC, l’article 2 bis modifie l’article L. 1111-5 du code de la santé publique afin d’étendre aux sages-femmes la dérogation, actuellement réservée aux médecins, à l’obligation d’information des titulaires de l’autorité parentale et de recueil de leur consentement, pour des actes pratiqués sur un mineur qui refuse que ses parents en soient informés. Cette dérogation est en outre étendue aux actes de prévention et de dépistage, et non plus aux seuls traitements.

Dans le même but de faciliter l’accès aux soins et à la prévention, cet article additionnel établit un article L. 1111-5-1, nouveau, qui étend cette même dérogation aux infirmiers agissant sous la responsabilité d’un médecin, pour des actes de prévention, de dépistage ou de traitement lorsqu’il s’imposent pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure de quinze ans ou plus.

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La Commission examine l’amendement AS1485 de Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. S’agissant des jeunes filles mineures, l’article L. 1111-5 du code de la santé publique comporte déjà une dérogation à l’information et au recueil du consentement parental, prévus à l’article 371-2 du code civil, pour la prescription de la contraception et la réalisation d’une interruption volontaire de grossesse. Dans ces deux cas, la jeune fille n’a pas à obtenir le consentement de ses parents et le secret médical doit être gardé.

Ces dispositions ne couvrant pas toutes les situations auxquelles sont confrontés aujourd’hui les professionnels de santé, l’amendement AS1485 vise à étendre cette dérogation aux sages-femmes ainsi qu’aux actes de prévention et de dépistage pratiqués chez un mineur et à permettre que cette dérogation soit étendue aux infirmiers, agissant sous la responsabilité d’un médecin, pour la réalisation d’actes de prévention, de dépistage, voire l’administration d’un traitement, lorsqu’il s’impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure de quinze ans et plus.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable à cet amendement, qui permet d’améliorer la prévention et les soins en direction des personnes mineures qui souhaitent conserver le secret vis-à-vis de leurs parents, notamment en matière de santé sexuelle et reproductive.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 2 ter
(art. L. 114-3 du code du service national)

Test de dépistage de la surdité

Établi par un amendement présenté par M. Gérard Bapt et Mme Sophie Errante, sur avis de sagesse du rapporteur, l’article 2 ter instaure, à l’article L. 114-3 du code du service national, un test de la surdité lors des Journée défense et citoyenneté (JDC). Votre rapporteur observe que ce test interviendrait sans doute de façon trop tardive, car postérieurement à la période des apprentissages. Une information des jeunes participant aux JDC sur les risques liés au bruit paraît, en tous les cas, opportune.

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La Commission examine l’amendement AS738 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. La surdité risque d’être le problème de la jeune génération. C’est pourquoi l’amendement prévoit la réalisation, au cours de la Journée défense et citoyenneté (JDC), d’un test de dépistage de la surdité.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les jeunes sont convoqués à la JDC vers dix-huit ans : c’est trop tard pour dépister chez eux de tels troubles et trop tôt pour les dépister chez les personnes âgées. Il conviendrait de réaliser ce dépistage plus tôt dans le parcours éducatif : les troubles de l’audition doivent en effet être dépistés avant et non pas après la période des apprentissages.

Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. Élie Aboud. Nous sommes favorables à l’amendement de M. Bapt. Des consultations de psychiatrie sont liées à des déficits auditifs qui n’ont pas été détectés. Le contexte de la JDC se prête bien à un tel dépistage.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 3
(art. L. 5134-1 du code de la santé publique)

Accès à la contraception d’urgence des élèves du second degré
auprès de l’infirmerie scolaire

L’article 3 vise à faciliter l’administration de contraceptifs d’urgence dans les lycées, auprès des infirmiers scolaires, en levant les restrictions actuellement définies à l’article L. 5134-1 du code de la santé publique.

Il s’agit d’une mesure de prévention des grossesses non désirées ainsi que des interruptions volontaires de grossesses, qui complète celles prises depuis le début de la législature afin de faciliter la maîtrise par les jeunes femmes de leur fécondité : l’article 52 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 a ainsi prévu la gratuité de la contraception pour les assurées mineures de plus de 15 ans à l’article L. 322-3 du code de la sécurité sociale, et l’a complétée par une garantie de secret à l’article L. 5134-1 du code de la santé publique ; de même l’article 55 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a mis en place le tiers-payant pour les consultations et examens préalables à la contraception chez les mineures d’au moins 16 ans, aux articles L. 162-4-5 et L. 162-8-1 du code de la sécurité sociale.

La contraception d’urgence ne saurait se substituer à une contraception régulière : elle constitue une méthode de rattrapage en cas d’échec ou d’absence de contraception exposant au risque d’une grossesse non désirée. La contraception d’urgence relève donc de la prévention secondaire et permet d’éviter le recours éventuel à l’interruption volontaire de grossesse.

Une première contraception d’urgence est constituée par la pose d’un dispositif intra-utérin dans les cinq jours après la date estimée de l’ovulation. Cette méthode, très efficace, peu connue et peu utilisée, fournit ensuite une couverture contraceptive fiable pendant plusieurs années. Mais elle suppose une intervention médicale.

La forme la plus connue de la contraception d’urgence est la contraception d’urgence hormonale, la « pilule du lendemain ». Son efficacité dépend de sa rapidité d’utilisation : elle est estimée à 95 % dans les 24 heures suivant le rapport, à 85 % entre 24 heures et 48 heures, à 58 % entre 49 heures et 72 heures. À la différence de la contraception hormonale régulière, la contraception hormonale d’urgence est accessible sans prescription médicale. La France est le premier pays à avoir autorisé sa délivrance en pharmacie sans ordonnance, dès 1999.

Un tiers des jeunes femmes de 15 à 24 ans sexuellement actives déclaraient l’avoir utilisée au moins une fois, contre un sur sept dans l’ensemble des femmes de 15 à 54 ans.

La progression du nombre de boîtes remboursées par l’assurance maladie s’explique essentiellement par celle des boîtes délivrées gratuitement aux mineures en pharmacie qui constituent aujourd’hui 90 % du total des remboursements.

Dans sa rédaction actuelle, issue de l’article 1er de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à la contraception d’urgence, et de l’article 24 de la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, l’article L. 5134-1 du code de la santé publique autorise les infirmiers des établissements du second degré à administrer aux élèves mineures et majeures une contraception d’urgence mais sous plusieurs réserves : « si un médecin, une sage-femme ou un centre de planification ou d’éducation familiale n’est pas immédiatement accessible », « à titre exceptionnel » et en cas de « détresse caractérisée ».

Un protocole national sur la contraception d’urgence en milieu scolaire annexé au décret n° 2001-258 du 27 mars 2001 pris en application de la loi du 13 décembre 2000 précitée prévoit que l’infirmier doit proposer à l’élève d’entrer en contact avec ses parents mais que l’élève peut refuser.

Ces dispositions restrictives expliquent largement le constat de l’augmentation des contraceptifs d’urgence délivrés dans les pharmacies d’officines par contraste avec une stabilité de la délivrance par les infirmiers scolaires depuis 2003. Les jeunes filles scolarisées ont moins recours à l’infirmier scolaire, alors même qu’il est susceptible d’offrir un accompagnement dans une situation difficile.

L’article L. 5134-14 précise en effet que les infirmiers s’assurent, après avoir administré la contraception d’urgence, de l’accompagnement psychologique de l’élève et veillent à la mise en œuvre d’un suivi médical. La consultation médicale ou paramédicale à visée contraceptive constitue en effet un moment privilégié pour aider une jeune femme à faire le point sur ses pratiques et à prendre conscience des risques éventuels auxquels elle s’expose : il peut s’agir tout autant de sa santé sexuelle que de la prise en charge d’addictions éventuelles. Cette démarche peut en outre s’inscrire dans la continuité des actions qui doivent être conduites à l’école, conformément à l’article L. 312-16 du code de l’éducation qui prévoit « qu’une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène ».

L’alinéa unique de l’article 3 modifie donc le troisième alinéa de l’article L. 5134-1 du code de la santé publique afin de prévoir que les infirmiers scolaires peuvent, dans les cas d’urgence, administrer aux élèves, mineures et majeures, une contraception d’urgence. Leur compétence n’est plus subordonnée à la double condition d’absence d’accessibilité immédiate d’un médecin, d’une sage-femme ou d’un centre de planification ou d’éducation familiale et de situation de détresse caractérisée.

Le rapporteur se félicite de cette nouvelle avancée. Il s’agit au demeurant d’une indéniable mesure de clarification du droit. L’exigence d’absence d’un professionnel médical ou d’un centre de planification ou d’éducation familiale « immédiatement accessible » est une source manifeste de disparités d’application sur le territoire et l’appréciation de la condition « détresse caractérisée » paraît propice à l’arbitraire.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté un amendement du rapporteur complétant l’intitulé de la deuxième partie du code de la santé publique afin d’y reprendre, la formule complète préconisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : « santé sexuelle et reproductive » et de souligner l’importance, en matière de promotion de la santé maternelle et infantile, de la continuité des questions de santé dans le domaine de la sexualité et dans celui de la reproduction.

De même, la Commission a adopté un amendement du rapporteur visant à favoriser la complémentarité de l’intervention des infirmiers scolaires avec celle des centres de planification et d’éducation familiales prévoyant, à l’article L. 5134-1 du code de la santé publique, que lorsque les infirmiers « s’assurent de l’accompagnement psychologique de l’élève et veillent à la mise en œuvre d’un suivi médical », ils peuvent le faire « notamment en orientant l’élève vers un centre de planification ou d’éducation familiale ».

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La Commission examine l’amendement AS1610 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. La modification que je propose constitue le point d’aboutissement de la réforme engagée par l’article 23 de la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui a modifié une première fois la dénomination : « Santé de la famille, de la mère et de l’enfant ».

La deuxième partie du code de la santé publique sera intitulée : « Santé sexuelle et reproductive, droits de la femme et protection de la santé de l’enfant ».

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1708 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’article 3 vise à faciliter l’accès à la contraception d’urgence au sein de l’établissement scolaire en autorisant l’infirmier scolaire à l’administrer. Or l’administration de la contraception d’urgence doit constituer la première étape d’un accompagnement, notamment psychologique, de l’élève.

C’est pourquoi l’amendement AS1708 prévoit que l’infirmier scolaire, après avoir administré une contraception d’urgence, peut orienter l’élève vers un centre de planning familial.

M. Dominique Tian. La disposition prévue par l’amendement peut difficilement passer pour un progrès puisqu’elle sanctionne l’absence de médecins scolaires.

Cet amendement est un aveu du triste état dans lequel se trouve la médecine scolaire en France.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

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Après l’article 3

La Commission examine l’amendement AS1150 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Quelque 36 % des femmes sont fumeuses avant le début de leur grossesse, dont la moitié continuera de fumer durant la grossesse : ainsi près de 20 % des enfants sont soumis in utero au tabagisme de leur mère.

Cet amendement vise à introduire l’évaluation de l’addiction tabagique, le sevrage et l’accompagnement à l’arrêt, dans le cadre de l’examen prénatal et lors du suivi postnatal. Cet accompagnement pourra également être proposé au père.

Il convient d’éviter que l’enfant, avant ou après sa naissance, soit exposé au tabagisme passif.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement est déjà satisfait dans les textes.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 3 bis
(art.  L. 5134-1 du code de la santé publique)

Droit d’information sur les différentes méthodes contraceptives

L’article 3 bis a été inséré par un amendement présenté par Mme Maud Olivier et plusieurs commissaires SRC.

Il vise à améliorer l’information sur les méthode contraceptive en établissant, à l’article L. 5134-1 du code de la santé publique, relatif à la délivrance des contraceptifs, le droit de toute personne d’être informée sur les méthodes contraceptives et de voir sa liberté de choix préservée. Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Il est précisé que seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser.

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La Commission examine ensuite l’amendement AS1176 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement vise à assurer une information exhaustive sur les méthodes contraceptives, condition sine qua non d’un choix libre et éclairé.

Un rapport remis par Mme Poletti sous la précédente législature indiquait que les femmes ne recevaient le plus souvent, en la matière, qu’une information orientée vers la seule pilule.

M. Gérard Bapt. Ne conviendrait-il pas de préciser que toute personne a le droit d’être informée non seulement sur les méthodes contraceptives, mais également sur leurs risques ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Un professionnel de santé doit présenter à ses patients les effets secondaires de ses prescriptions.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cela fait partie de ses obligations médico-légales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 3 bis

La Commission examine l’amendement AS158 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Afin de favoriser la prévention en matière de santé reproductive et de répondre aux questions des adolescents en matière de sexualité, nous demandons que soit obligatoirement proposée à tout jeune de seize ans – âge moyen des premiers rapports sexuels – une consultation auprès d’une sage-femme, qui porte notamment sur la contraception, la prévention, les infections sexuellement transmissibles et le fonctionnement de l’appareil reproducteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable.

L’âge de seize ans est un âge moyen : cette consultation interviendrait donc dans de nombreux cas en aval des premiers rapports sexuels. C’est pourquoi un tel âge ne me paraît pas pertinent pour une consultation systématique de prévention.

De plus, la prévention en matière de santé reproductive fait partie des missions intégrantes des médecins gynécologues ou généralistes, des sages-femmes ainsi que des intervenants médicaux et paramédicaux. Elle s’inscrit déjà dans la pratique courante du suivi de la santé des femmes.

De nombreuses structures, qui existent sur tout le territoire – centres de planification et d’éducation familiale, établissements d’information, centres gratuits de dépistage et de diagnostic – remplissent déjà des missions en termes de programmes de préparation et d’accompagnement à la sexualité, dans le cadre notamment de consultations gratuites pour adolescentes.

Les consultations systématiques de prévention n’ont jamais eu, de manière générale, le succès escompté.

Mme la présidente Catherine Lemorton. L’âge de seize ans auquel l’amendement se réfère est peut-être lié au fait que c’est également à cet âge que les jeunes reçoivent leur première carte Vitale.

M. Dominique Tian. Il s’agit d’un excellent amendement permettant de favoriser la prévention en milieu scolaire en direction des garçons comme des filles, dans le cadre d’un rendez-vous personnalisé obligatoire, qu’il serait même possible d’avancer à quinze ans. N’oublions pas le taux de suicide élevé des adolescents !

M. Arnaud Richard. Comment un tel amendement a-t-il pu franchir la barrière de l’article 40 de la Constitution ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. M. Carrez, président de la Commission des finances, a considéré qu’il était recevable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS1444 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. L’amendement AS1444 demande à la Haute Autorité de santé (HAS) de réaliser une étude sur la pertinence d’une éventuelle mise en vente libre des microprogestatifs dans les pharmacies. Il convient d’y voir clair, compte tenu des avis divergents sur la question.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les microprogestatifs sont des médicaments hormonaux qui ne sont pas dénués d’effets indésirables : leur prescription requiert le passage chez le médecin ou la sage-femme pour notamment détecter les contre-indications.

Les conditions de prescription et de délivrance de ces produits doivent relever des compétences de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), qui est chargée de la pharmacovigilance.

Mme Catherine Coutelle. Il convient alors de demander cette étude à l’ANSM.

M. Olivier Véran, rapporteur. Une telle demande n’est pas d’ordre législatif. La ministre peut au demeurant saisir l’Agence si elle le souhaite. Avis défavorable, donc.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS555 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Par cet amendement, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement avant le 30 juin 2016 un rapport évaluant les conséquences à court, moyen et long terme des traitements liés à l’assistance médicale à la procréation (AMP) sur la santé des femmes et sur leur environnement professionnel.

Il faut savoir en effet que 23 800 enfants sont nés en 2012 grâce à l’AMP : or il s’agit là d’un parcours difficile et éprouvant à la fois pour la femme et son conjoint.

M. Olivier Véran, rapporteur. La loi prescrit déjà à l’Agence de la biomédecine d’assurer l’information permanente du Parlement et du Gouvernement sur ces sujets : je vous invite à aller visiter son site internet très complet à l’adresse suivante : procreation-medicale.fr.

Avis défavorable.

Mme Catherine Coutelle. Vous ne répondez pas à la préoccupation de l’amendement qui vise la protection des femmes qui ont recours à l’AMP.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’Agence de la biomédecine rend déjà accessibles les informations visées par l’amendement aux publics qui souhaitent les obtenir.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS814 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Les études statistiques concernant la santé outre-mer et publiées de manière régulière sont actuellement fort peu nombreuses. Les études explicatives sur les particularismes des questions sanitaires et sociales dans les départements d’outre-mer sont même tout à fait déficientes.

C’est pourquoi l’amendement AS814 a pour objet d’améliorer non seulement la connaissance statistique des questions sanitaires et sociales outre-mer, mais aussi la connaissance des causes liées aux phénomènes ainsi quantifiés : mortalité infantile ou grossesses précoces dans les territoires ultramarins. Celles-ci, en effet, qui constituent une donnée extrêmement préoccupante, doivent être précisément documentées.

Les ARS, par leur connaissance des collectivités où elles opèrent, paraissent compétentes pour procéder à de telles études.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les ARS sont déjà compétentes, y compris outre-mer, pour organiser l’observation de la santé : elles s’appuient à cette fin sur les observatoires régionaux de la santé.

Si je partage l’objectif de votre amendement, je tiens à souligner qu’il est déjà satisfait.

L’amendement AS814 est retiré.

*

Article 4
(art. 225-16-1 et 227-19 du code pénal, L. 3342-1, L. 3353-3 et L. 3353-4
du code de la santé publique)

Lutte contre les pratiques d’alcoolisation massive des jeunes

L’article 4 vise à moderniser les dispositions pénales figurant dans le code pénal et dans le code de la santé publique afin de mieux lutter contre les phénomènes d’alcoolisation massive, intense et répétés des plus jeunes.

La répression de l’alcoolisation par la qualification de bizutage

Le I de l’article 4 apporte des modifications au livre II du code pénal relatif aux crimes et délits contre les personnes.

Le 1° modifie l’article 225-16-1 figurant dans le chapitre V consacré aux atteintes à la dignité des personnes dans la section 3 bis qui réprime spécifiquement le bizutage.

Cette pratique, distincte des cas de violences, de menaces ou d’atteintes sexuelles, est définie comme le fait pour une personne d’amener autrui, contre son gré ou non, à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants, lors de manifestations ou de réunions liées aux milieux scolaire et socio-éducatif.

Elle est punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

Le 1° de l’article 4 complète la définition du bizutage : le fait d’amener autrui, contre son gré ou non, « à consommer de l’alcool de manière excessive » lors de manifestations ou de réunions liées aux milieux scolaire et socio-éducatif, est désormais également réprimé au titre du bizutage et passible d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

Le législateur est donc invité à affirmer qu’amener autrui à consommer de l’alcool de manière excessive, dans ce cadre, est de même nature et emporte la même sanction pénale que le fait de faire subir ou commettre des actes humiliants ou dégradants.

Conformément à l’article 225-16-2 du code pénal, la peine est aggravée et passible d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende lorsque l’infraction est commise sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.

Si, dans le cadre de la répression du bizutage, la qualité de mineur n’emporte pas, par elle-même, aggravation de la sanction, la vulnérabilité due à l’âge peut avoir, pour des victimes mineures, le même effet.

Les cas de provocation directe à l’alcoolisation des mineurs

Les autres dispositions de l’article 4 visent spécifiquement la situation des mineurs. Elles modernisent les qualifications pénales et adaptent les sanctions définies à la fois dans le code pénal, dans le chapitre précédemment mentionné mais dans sa section visant la « mise en péril des mineurs », et dans le code de la santé publique, aux articles L. 3342-1 et suivants relatifs à la protection des mineurs par la prévention de l’alcoolisme.

Deux infractions pénales sont actuellement définies. L’article L. 3353-4 du code de la santé publique, vise « le fait de faire boire jusqu’à l’ivresse un mineur » et le punit de 7 500 euros d’amende. L’article 227-19 du code pénal réprime par ailleurs l’infraction consistant à « provoquer directement un mineur à la consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques » : elle est punie de deux ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Or l’une et l’autre de ces infractions ont un champ excessivement restreint.

Pour être constituée, l’infraction définie par le code pénal nécessite de satisfaire deux conditions cumulatives : le caractère excessif et le caractère habituel de la consommation de boissons alcooliques. De même, le fait de faire boire jusqu’à l’ivresse un mineur implique la présence constante et la participation directe, active et décisive, d’une autre personne.

Ces qualifications pénales ne peuvent pas saisir les différentes formes d’incitation à l’alcoolisation des jeunes qui se développent, par exemple sur internet, par la diffusion de vidéos d’alcoolisation massive et de défis adressés aux membres d’un réseau social, appelés « net nominations ».

L’article 4 substitue à ces deux infractions : d’une part la provocation directe à la consommation excessive, punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ; et, d’autre part, la provocation directe à la consommation habituelle, dont la peine est plus lourde : deux ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Le du I opère cette modification à l’article 227-19 du code pénal et le du II, au dernier alinéa de l’article 4, modifie dans le même but l’article L. 3353-4 du code de la santé publique, en y opérant au demeurant un renvoi à l’article 227-19 du code pénal (20).

La hiérarchie des peines envisagée paraît justifiée à votre rapporteur, la provocation directe à la consommation habituelle traduisant le caractère répété de l’infraction ou manifestant l’intervention de l’entourage de la victime mineure, donc de la famille.

Mais votre rapporteur relève que l’article 4 ne modifie pas le dernier alinéa de l’article 227-19, qui vise les situations dans lesquelles la victime est un mineur de quinze ans ou des faits commis dans des établissements d’enseignement ou d’éducation ou dans les locaux de l’administration, ainsi que lors des entrées ou sorties des élèves ou du public ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements ou locaux.

Une aggravation de sanction est justifiée dans ce cas : or le dernier alinéa de l’article 227-19, dans sa rédaction actuelle, vise « l’infraction définie par le présent article » sans coordination avec le fait que le 2° de l’article 4 a établi deux infractions distinctes. Dans la rédaction actuelle, la peine, unique, est portée à trois ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. L’aggravation de la sanction ne distingue donc pas entre les deux infractions différentes établies par le projet de loi alors qu’une hiérarchie est établie entre elles.

Afin de maintenir la hiérarchie des peines projetée par l’article 4, votre rapporteur propose donc de remplacer la peine unique de trois ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende par le fait de porter au double le maximum des peines encourues, donc au maximum à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende en cas de provocation directe à la consommation excessive et au maximum quatre ans d’emprisonnement et 90 000 euros d’amende en cas de provocation directe à la consommation habituelle, sous réserve que soient réunies les conditions de cette aggravation.

Les objets incitant directement à la consommation excessive

Le du II complète l’article L. 3342-1 du code de la santé publique dont l’alinéa premier définit la première, et principale, mesure de protection instituée à l’intention des mineurs : l’interdiction de vente des boissons alcooliques à des mineurs et l’interdiction de l’offre de ces boissons à titre gratuit dans les débits de boissons et tous commerces ou lieux publics, assortis de la faculté pour la personne qui délivre la boisson d’exiger du client qu’il établisse la preuve de sa majorité.

Un alinéa 2, nouveau, est inséré qui interdit « la vente à des mineurs de tout objet incitant directement à la consommation excessive ». Les types et caractéristiques de ces objets seront définis par un décret en Conseil d’État. Il s’agirait par exemple de jeux de société dont les règles prévoient que les joueurs rivalisent de consommations d’alcool ainsi que de logos ou de slogans qui ont le même effet.

La répression de cette infraction nouvelle est établie par le a) du du III du présent article qui la mentionne à l’article L. 3353-3 du code de la santé publique qui prévoit, pour les infractions définies à l’article L. 3342-1, une peine de 7 500 euros d’amende.

Votre rapporteur relève que, pour ces objets, seul le cas de la vente est envisagé, alors que pour les boissons alcooliques, l’article L. 3342-1 interdit également l’offre à titre gratuit. Votre rapporteur propose donc d’opérer le même élargissement et d’interdire l’offre à un mineur de ces objets, à titre onéreux ou gratuit.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté deux amendements du rapporteur découlant des observations figurant au commentaire du présent article: l’article 227-19 du code pénal est modifié afin de maintenir, en cas de circonstances aggravantes, la hiérarchie des peines distinguant l’incitation directe à la consommation habituelle et l’incitation à la consommation excessive ; et, à l’article L. 3342-1 du code de la santé publique, la mise disposition des mineurs de tout objet incitant directement à la consommation excessive d’alcool est interdite à titre onéreux comme à titre gratuit.

En outre, la Commission a adopté un amendement présenté par Mme Seybah Dagoma qui précise, à l’article L. 3311-3 du code de la santé publique, que les campagnes de lutte contre l’alcoolisme doivent également porter sur la prévention de la consommation excessive d’alcool chez les jeunes.

La Commission a également adopté un amendement présenté par plusieurs commissaires du groupe UMP prévoyant, à l’article L. 3342-1 du code de la santé publique, une obligation pour la personne qui délivre la boisson alcoolique d’exiger du client qu’il établisse la preuve de sa majorité.

Enfin la Commission a adopté un amendement du rapporteur qui modifie l’article L. 3323-4 du code de la santé publique afin de mieux adapter le contenu du message sanitaire devant figurer dans la publicité des boissons alcooliques à l’évolution des politiques de prévention : alors que ce message est aujourd’hui défini par la loi (« L’abus d’alcool est dangereux pour la santé »), la définition de son contenu est renvoyée à un arrêté du Ministre chargé de la Santé qui pourra ainsi définir des messages différents et adapter leur contenu en fonction des supports de communication, des produits et des publics.

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M. Arnaud Richard. L’article 4 vise à lutter contre les nouvelles pratiques de la jeunesse en matière d’alcoolisation massive. Il faut se rappeler, en effet, que l’alcool est la deuxième cause de mortalité évitable en France.

L’article crée une infraction générale visant la provocation à la consommation excessive d’alcool, infraction qui concerne à la fois les majeurs et les mineurs avec une majoration de peine pour les mineurs.

Le fait de provoquer directement un mineur à la consommation excessive d’alcool est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Le fait de provoquer directement un mineur à la consommation habituelle d’alcool est puni de deux ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Les amendements AS1082 et AS1083 visent à doubler ces amendes.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vos amendements vont à l’encontre du principe de proportionnalité des peines. La vente d’alcool à un mineur est déjà punie, en effet, d’une amende de 7 500 euros. Avis défavorable aux deux amendements.

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Elle passe ensuite à l’examen de l’amendement AS1305 de M. Serge Letchimy.

Mme Monique Orphé. L’amendement AS1305 tend à compléter l’arsenal répressif visé à l’article 4 par un versant éducatif, en favorisant, d’une part, la prise de conscience des conséquences potentiellement dramatiques associées à la consommation d’alcool, et en permettant, d’autre part, au juge de mobiliser un dispositif alternatif à la prison ou à la sanction pécuniaire dans le cas de personnes sans ressources.

Les travaux d’intérêt général s’effectuant au profit soit d’une personne morale de droit public, soit d’une personne morale de droit privé chargée d’une mission de service public ou d’une association habilitée à mettre en œuvre des travaux d’intérêt général, il pourrait être envisagé de réaliser cette peine au sein de centres de cure ambulatoire en alcoologie, de centres conventionnés de soins spécialisés en alcoologie, d’associations de victimes agréées et de centres de désintoxication alcoolique.

Nous proposons d’inscrire cette possibilité dans la loi pour rappeler au juge que cette alternative est disponible.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’article 131-8 du code pénal prévoyant déjà la mesure que vous préconisez, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement AS1305 est retiré.

Puis la Commission adopte l’amendement de cohérence AS798 du rapporteur.

M. Arnaud Richard. J’observe que l’amendement AS798 revient à doubler les peines, comme le proposaient les amendements AS1082 et AS1083, qui ont été rejetés.

M. Olivier Véran, rapporteur. Contrairement à vos amendements, il ne prévoit ce doublement qu’en cas de circonstances aggravantes.

La Commission examine ensuite l’amendement AS1167 de Mme Seybah Dagoma.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement AS1167 vise à renforcer la dimension de prévention de l’article 4 en proposant que, dans le cadre des campagnes d’information prévues à l’article L. 3311-3 du code de la santé publique, un volet soit systématiquement dédié à la prévention en direction des jeunes.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement est redondant avec la rédaction initiale de l’article, mais la lutte contre la consommation excessive d’alcool chez les jeunes justifie une telle insistance. En effet, 28 % des jeunes de dix-sept ans déclaraient avoir déjà été ivres trois fois au moins dans l’année en 2011 contre 26 % en 2008, et 10 % de ces mêmes jeunes sont des consommateurs réguliers d’alcool.

Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS247 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. C’est la loi qui définit aujourd’hui le contenu du message sanitaire devant figurer dans la publicité des boissons alcooliques : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ».

Afin de mieux adapter le contenu du message à l’évolution des politiques de prévention, l’amendement AS247 renvoie la définition de son contenu à un arrêté de la ministre de la santé.

L’arrêté pourra ainsi définir des messages différents : leur alternance et leur diversité seront plus efficaces en matière de prévention.

M. Arnaud Robinet. L’UMP est totalement opposée à l’amendement du rapporteur, tout d’abord parce qu’il remet en cause le message fixé par le législateur en 1991, qui est en totale cohérence avec l’objectif de la loi Evin : la lutte contre l’excès.

De plus, il supprime le message actuel qui est simple, lisible et compréhensible par tous et qui fait autorité dans l’esprit des consommateurs.

Il laisse en outre, au détriment du législateur, toute latitude à l’administration pour fixer le message, avec le risque d’aboutir à la remise en cause de toute notion de modération. Il risque d’enfermer la politique de santé dans une logique prohibitionniste, en écho à la volonté de l’administration de supprimer les repères de consommation et de stigmatiser la consommation elle-même et non plus l’excès de consommation.

Il ouvre enfin la possibilité de modeler le message sanitaire sur la lutte contre le tabagisme en ouvrant la boîte de Pandore des avertissements visuels et de l’étiquette neutre sur les bouteilles. Il rendra inaudibles pour les consommateurs les messages auxquels ils pourront être confrontés.

S’il est adopté, il conviendrait, en tout état de cause, de prévoir une campagne d’information d’ampleur nationale et d’associer notamment les filières à la définition des messages.

Cet amendement, j’y insiste, brouille totalement le message relatif à l’excès de la consommation d’alcool.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS235 de M. Jean-Pierre Door et AS478 de M. Bernard Accoyer.

M. Jean-Pierre Door. La vente de boissons alcooliques aux mineurs étant interdite, notre amendement vise à rendre obligatoire en France le contrôle de l’âge des acheteurs.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Trop nombreux sont les débitants qui délivrent des boissons à des mineurs. Si les contrôles doivent s’accroître, l’obligation de présenter un document prouvant la majorité est nécessaire.

Je tiens personnellement à saluer les débitants qui prennent au sérieux leur rôle en la matière.

La Commission adopte les amendements.

Puis la Commission examine les amendements identiques AS248 du rapporteur et AS1460 de Mme Françoise Dumas.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’article 4 interdit la vente à des mineurs de tout objet incitant directement à la consommation excessive d’alcool.

L’amendement AS248 vise à interdire également la mise à disposition de ces objets à titre gratuit.

M. Dominique Tian. Qu’est-ce qu’un objet faisant l’apologie de l’ivresse ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il peut s’agit de tee-shirts, bien sûr, mais aussi de verres en plastique faisant la promotion d’une boisson alcoolique : ils sont parfois offerts à des mineurs par des débitants.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

*

Article 4 bis
(art. L. 3323-3 du code de la santé publique)

Définition de la publicité en faveur d’une boisson alcoolique

Établi par un amendement présenté par M. Denys Robiliard et plusieurs commissaires SRC, adopté par la Commission des affaires sociales malgré les avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement, l’article 4 bis modifie l’article L. 3323-3 du code de la santé publique afin de réduire le champ d’application de l’article L. 3323-4 qui définit de manière limitative le contenu de la publicité autorisée en faveur d’une boisson alcoolique. Il s’agit de préciser le champ d’application de cette règlementation afin d’éviter une interprétation extensive par les tribunaux, par exemple élargie aux publications de presse faisant référence au vin et à sa culture.

La publicité directe est donc définie comme tout « acte de promotion effectué en faveur d’un produit ou service, relevant de l’activité d’une personne ayant un intérêt à la promotion dudit produit ou service et susceptible d’être perçu comme un acte de promotion par un consommateur d’attention moyenne » et l’article 4 bis prévoit que les restrictions définies à l’article L. 3323-4 ne s’appliquent qu’aux éléments de publicité indirecte qui « rappellent effectivement ou ont pour but de rappeler une boisson alcoolique».

*

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement AS1218 de M. Jacques Krabal et l’amendement AS1207 de M. Denys Robiliard.

M. Jacques Krabal. Loin de nous la volonté d’ouvrir la boîte de Pandore, comme l’a redouté Mme la ministre. Toutefois, un bilan de la loi Evin relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, qui a vingt-cinq ans, nous permettrait d’aborder en toute quiétude la question de la publicité dans la lutte contre l’alcoolisme.

Cette loi avait en effet pour objectif de lutter contre les excès de consommation d’alcool et de protéger les populations à risques, notamment les jeunes. Or les jeunes continuent de consommer de l’alcool, mais dans des conditions différentes – cela a déjà été souligné.

Si la consommation d’alcool a été réduite de plus de moitié ces dernières années - elle est passée de 26 à 11,9 litres par an et par habitant –, c’est la consommation du vin qui s’est écroulée – elle n’est plus que de 6,9 litres –, en raison du raccourcissement du temps des repas et du changement du statut du vin – de vin-aliment il est devenu vin-plaisir –, sans oublier l’engagement de la filière en faveur de la modération et de la consommation responsable – les jeunes exceptés, 17 % des Français en sont aujourd’hui consommateurs.

S’il faut continuer de lutter contre l’alcoolisme, notamment chez les jeunes, force est de reconnaître que la loi Evin est construite sur un vide juridique qui va s’amplifiant. En l’absence de définition claire de la publicité applicable aux boissons alcooliques, les juges se sont substitués au législateur et ont défini cette publicité comme : « Tout acte en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique », selon l’arrêt de la Cour de Cassation du 3 novembre 2004.

Cette assimilation d’un contenu journalistique, culturel ou artistique à de la « publicité » a entraîné une forte autocensure des médias et lorsqu’ils traitent de sujets liés au vin, c’est dans le cadre d’une insécurité juridique permanente.

Il convient donc de clarifier les frontières entre ce qui relève, d’une part, de la publicité et, d’autre part, de l’information journalistique, de la création artistique et culturelle, en définissant ce qu’est la publicité.

Tel est l’objet de l’amendement AS1218.

M. Denys Robiliard. Il faut rappeler que la loi Evin n’entendait pas interdire toute publicité. Du reste, le Conseil constitutionnel a jugé le 8 janvier 1991 que l’objectif de cette loi est de « lutter contre les excès de consommation d’alcool et de protéger les populations à risque », ajoutant que « le législateur, qui a entendu prévenir une consommation excessive d’alcool, s’est borné à limiter la publicité en ce domaine, sans la prohiber de façon générale et absolue ».

Les problèmes existants proviennent du fait que la loi du 10 janvier 1991 n’a pas défini ce qu’elle entendait par la publicité. Face à ce vide, les juges se sont substitués au législateur et ont donné leur propre interprétation de ce qui relevait de la publicité. C’est ainsi qu’en 2004 la Cour de Cassation a défini la publicité de manière très large : « Tout acte en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique. »

Une définition aussi large entraîne de fait l’assimilation d’un contenu journalistique, culturel ou artistique à de la publicité, la jurisprudence faisant tomber sous le coup de la loi de simples articles rédactionnels écrits en dehors de toute commande intéressée.

C’est ainsi qu’en 2007 le journal Le Parisien a été condamné pour un article sur l’exportation du champagne illustré par la photographie d’une bouteille de champagne. De même, en 2013, le journal Paris Match était condamné pour un article de critique cinématographique faisant état d’un lien entre l’alcool et le film, au motif suivant : « Il suffit que l’article mette en valeur une boisson alcoolisée […] en associant l’alcool à un contexte festif ou à des personnalités valorisantes pour que l’infraction aux dispositions légales soit constituée ». Or à aucun moment le législateur de la loi Evin n’avait envisagé qu’une critique cinématographique puisse tomber sous le coup de la loi !

Ma circonscription comprend la commune et le château de Cheverny : si je fais de la publicité pour l’une ou l’autre, je peux tomber sous le coup de la loi puisque je rappellerai ipso facto le vin de Cheverny. Ce n’est pas acceptable.

Il est donc nécessaire de définir le champ d’application de la loi et donc la notion de publicité au sens strict du terme. Tel est l’objet de l’amendement AS1207.

M. Olivier Véran, rapporteur. Ces deux plaidoiries ne peuvent pas laisser insensible.

Nous avons auditionné des représentants des lobbies alcooliers venus se plaindre de cette insécurité juridique : ils fondaient leurs propos sur des exemples.

La loi doit-elle définir un cadre total tenant compte de toutes les situations pour éviter des jurisprudences aberrantes, sur lesquelles, toutefois, il ne nous appartient pas de porter un jugement puisqu’il s’agit de décisions de justice ? Devons-nous ouvrir la publicité ou au contraire la supprimer totalement en revenant sur les dispositions de la loi Bachelot dont l’examen avait soulevé de nombreux débats ?

Modifier la loi Evin sur ce point risquerait de menacer un équilibre qui, tout imparfait qu’il soit, a le mérite d’exister. Je ne suis pas certain du reste qu’une modification de la loi n’engendre pas d’autres difficultés.

Avis défavorable à ces deux amendements.

Mme la ministre. Ce débat est récurrent.

Le Gouvernement ne souhaite pas une remise en cause du cadre de la loi Evin. Si tel était le cas, en effet, c’est tout un ensemble de dispositions qui serait menacé.

À cette heure tardive de la nuit, je me refuse à engager un débat de fond sur le sujet. Nous l’aurons ultérieurement.

La loi Evin constitue un cadre protecteur qui garantit un point d’équilibre. À ceux qui le jugent insatisfaisant car trop rigide, je tiens à rappeler que d’autres souhaitent encore le durcir. Nous avons collectivement intérêt à ne pas y toucher.

M. Arnaud Richard. Je suis défavorable à ces deux amendements, qui ne sont pas bienvenus dans le texte.

Il conviendra de procéder à un bilan de la loi Evin, c’est indéniable. Les difficultés juridiques qu’elle soulève ont été très bien soulignées par M. Robiliard. Toutefois, il ne me paraît pas concevable d’adopter ce type de disposition dans le cadre de ce texte.

La Commission rejette l’amendement AS1218.

Elle adopte ensuite l’amendement AS1207.

*

Après l’article 4 bis

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette l’amendement AS893 de M. Dominique Tian.

Elle examine ensuite l’amendement AS1089 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. L’amendement AS1089 vise à interdire la pratique du free refill qui consiste, pour une enseigne, à proposer des sodas à volonté.

Cette pratique, qui commence à se développer en France, va à l’encontre des préconisations en matière de santé publique et met en danger les populations, souvent les plus défavorisées, qui sont touchées par l’obésité.

Les calories nombreuses de ces sodas favorisent en effet le surpoids, l’obésité et les pathologies nutritionnelles comme le diabète et l’hypertension.

Je rappelle que notre pays a été pionnier dans le monde en matière de politique de santé publique nutritionnelle effective et durable au travers du lancement, en 2001, du premier Programme national nutrition-santé (PNNS).

M. Olivier Véran, rapporteur. Si je suis favorable à l’objet poursuivi par votre amendement, s’agissant des sodas notamment, je note toutefois qu’il vise toute l’offre de boissons en libre-service, y compris l’eau.

M. Arnaud Richard. Vous avez raison, monsieur le rapporteur : sa rédaction mérite d’être précisée.

M. Olivier Véran, rapporteur. La disposition sera de toute façon très difficile à appliquer.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Cet amendement se justifie par un problème réel : lorsque les boissons sont en libre-service, les enfants ne se jettent pas sur l’eau minérale, mais sur les boissons sucrées !

Quant aux boissons recourant aux édulcorants, elles posent un problème équivalent, puisqu’elles habituent au goût sucré et éloignent de l’eau. Il en est de même des jus de fruits donnés aux très jeunes enfants.

M. Arnaud Richard. Je retire l’amendement pour le récrire d’ici à la séance publique avec, je l’espère, le concours bienveillant de Mme la ministre.

L’amendement AS1089 est retiré.

La Commission examine ensuite les amendements AS815 et AS816 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. L’article 4 du projet de loi vise à lutter contre la consommation excessive d’alcool, notamment de la part des plus jeunes.

Or l’on constate actuellement dans les agglomérations, notamment ultramarines, la présence de très nombreux panneaux publicitaires vantant les mérites de l’alcool.

À La Réunion, l’alcool cause un grand nombre de dégâts, dont sont victimes les populations les plus fragiles. C’est la deuxième cause de mortalité. Il est également impliqué dans plus de 60 % des accidents mortels, contre 30 % dans l’Hexagone. Il est présent dans une proportion importante des faits délictueux et criminels, notamment dans les cas de violences intrafamiliales. Le taux d’arrestation pour ivresse sur la voie publique est le plus élevé du territoire national. Qui plus est, les campagnes publicitaires sont souvent attractives et judicieuses : des slogans aguicheurs cherchent à ancrer les produits fabriqués localement dans l’identité réunionnaise. La publicité est aujourd’hui un des moyens les plus puissants pour inciter les personnes à modifier leur comportement.

Je tiens également à rappeler que la publicité pour l’alcool à proximité des établissements scolaires ou d’autres établissements spécifiquement destinés à la jeunesse n’est pas interdite en France.

Pour accroître la portée de l’article 4 du projet de loi et éviter la multiplication des affiches de quatre mètres sur trois mètres vantant les mérites de l’alcool, l’amendement AS815 vise à réduire de moitié les surfaces autorisées en matière d’affichage, lorsque la publicité a trait à des boissons alcoolisées.

Il vise également à interdire la présence d’enfants ou d’adolescents mineurs comme faire-valoir sur les affiches publicitaires ayant trait à l’alcool, comme a pu en voir notre collègue Gabriel Serville en Guyane.

Quant à l’amendement AS816, il prévoit l’interdiction de tout affichage publicitaire en faveur des boissons alcoolisées à moins de 200 mètres d’une école.

M. Bernard Perrut. Nous ne sommes pas favorables à l’amendement AS815 qui ne repose sur aucune étude d’impact, alors que, sous l’égide de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, différents opérateurs de l’État et différents professionnels travaillent actuellement sur le sujet.

Prendre une décision en la matière serait donc prématuré. De plus, la disposition prévue est inapplicable, du fait que les entreprises de publicité extérieure ne commercialisent pas un réseau spécialement destiné à l’alcool et au vin. Les formats ne sauraient donc dépendre du contenu du message publicitaire diffusé d’une semaine à l’autre.

Cette mesure durcirait par ailleurs considérablement la loi Evin en excluant la publicité pour les boissons alcoolisées du droit commun de la publicité par affichage. Elle ne pourrait pas être prise en compte dans le code de l’environnement, qui ne permet pas de réglementer les dispositifs publicitaires en fonction du message qu’ils diffusent.

Elle nuirait enfin à l’image de la filière viticole, qui a pris des engagements responsables en matière de modération de la consommation, et à l’œnotourisme, développé par un grand nombre de communes : l’affichage publicitaire lie très souvent la vision d’une collectivité locale, d’un château et d’un paysage au vin, qui fait aussi partie du patrimoine culturel de la France.

Attendons les résultats des études en cours.

M. Élie Aboud. Madame Orphé, la loi Evin interdit déjà la présence d’enfants ou d’adolescents mineurs sur des affiches publicitaires ayant trait à l’alcool.

Au plan technique, les entreprises d’affichage, qui sont généralistes, ne pourraient pas appliquer la mesure que prévoit l’amendement.

Enfin, une telle disposition nuirait aux politiques locales en matière d’œnotourisme et de culture identitaire.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je confirme que la loi interdit déjà la présence de mineurs sur les affiches publicitaires visant les boissons alcooliques.

Le principal est de veiller à ce que le message d’avertissement rappelant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé ne soit pas dissimulé ou parasité par d’autres éléments publicitaires.

Enfin, l’emplacement des débits de boisson à proximité des écoles est déjà encadré. Il conviendrait peut-être de s’en inspirer, s’agissant de l’affichage publicitaire.

Je vous propose de retirer vos amendements pour les retravailler d’ici à la séance publique : il convient de mieux les intégrer dans les politiques existantes de prévention et de limitation de la publicité.

Les amendements AS815 et AS816 sont retirés.

*

Article 5
(art. L. 3232-8 [nouveau] du code de la santé publique
et L. 112-13 [nouveau] du code de la consommation)

Information nutritionnelle complémentaire par graphiques ou symboles

L’article 5 du projet de loi établit dans les codes de la santé publique et de la consommation une disposition du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, dit « règlement INCO », entré en vigueur le 14 décembre 2014.

Les articles 9, 16 et 30 de ce règlement définissent les mentions devant obligatoirement figurer sur la plupart des denrées alimentaires faisant l’objet d’une transformation industrielle : dénomination de la denrée, liste et quantité des ingrédients, durabilité et déclaration nutritionnelle obligatoire. Cette dernière inclut la valeur énergétique ainsi que la quantité de graisses, acides gras saturés, glucides, sucres, protéines et de sel. Les articles 32 à 34 du règlement listent différentes modalités de présentation de la déclaration nutritionnelle obligatoire : préférentiellement sous forme de tableau, exprimées pour 100 grammes ou 100 millilitres ou exprimées par portion ou par unité de consommation.

L’article 35 de ce règlement accorde aux producteurs et distributeurs la possibilité, de faire figurer, sur l’emballage des denrées alimentaires, des « formes d’expression et de présentation » complémentaires de la déclaration nutritionnelle obligatoire, « au moyen de graphiques ou symboles ». Elles doivent « faciliter la compréhension par le consommateur de la contribution de la denrée alimentaire à l’apport en énergie et en nutriments » de son régime alimentaire.

L’article 35 définit également une compétence, pour l’État membre, de recommandation aux exploitants du secteur alimentaire d’utiliser un ou plusieurs de ces graphiques ou symboles nutritionnels.

Sur le fondement de ces dispositions, l’article 5 du projet de loi traduit l’intention du Gouvernement de procéder à une telle recommandation et de faire de la signalétique simplifiée un instrument de meilleure information du public, donc de meilleur choix nutritionnel, pour le plus grand nombre, afin de lutter contre le surpoids.

Un droit nouveau pour les exploitants du secteur alimentaire, encadré par le règlement européen

Le I de l’article 5 établit, dans le code de la santé publique, un article L. 3232-8, nouveau, dans le titre unique, consacré à la nutrition et à la santé, du livre II bis sur la lutte contre les troubles du comportement alimentaire, de la troisième partie, relative à la maladie et aux dépendances.

Cet article indique qu’« afin de faciliter l’information du consommateur et pour l’aider à choisir en toute connaissance de cause », la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le règlement européen « peut être accompagnée d’une présentation ou d’une expression complémentaires au moyen de graphiques ou symboles, dans les conditions prévues par l’article 35 du même règlement ».

Le II de l’article 5 établit une disposition-miroir dans le code de la consommation, au chapitre II, relatif aux modes de présentation et inscriptions, du titre Ier et du livre Ier, consacrés à l’information des consommateurs : un article L. 112-13, nouveau, qui autorise les producteurs et distributeurs, auxquels la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le règlement européen est applicable, à accompagner cette dernière « d’une présentation ou d’une expression complémentaire », dans les conditions fixées à l’article L. 3232-8 du code de la santé publique.

Mais l’article 35 du règlement définit précisément les conditions de validité de ces formes d’expression complémentaires : elles ne sont pas retranscrites dans les codes de la santé publique et de la consommation, mais le I de l’article 5 y renvoie sans ambiguïté. Elles sont reproduites dans l’encadré ci-après.

Article 35 du règlement européen
Formes d’expression et de présentation complémentaires

1) (…) la valeur énergétique et les quantités de nutriments (…) peuvent être exprimées sous d’autres formes et/ou présentées au moyen de graphiques ou symboles en complément des mots ou chiffres, pour autant que les exigences suivantes soient respectées :

a) ces formes se fondent sur de solides études auprès des consommateurs, scientifiquement valides, et n’induisent pas le consommateur en erreur ;

b) leur mise au point est le résultat de la consultation d’un large éventail de groupes d’intérêts ;

c) elles visent à faciliter la compréhension par le consommateur de la contribution de la denrée alimentaire à l’apport en énergie et en nutriments d’un régime alimentaire, ou de l’importance, à cet égard, de la denrée considérée ;

d) elles sont étayées par des éléments scientifiquement valides prouvant que le consommateur moyen comprend la façon dont l’information est exprimée ou présentée ; (…)

f) elles sont objectives et non discriminatoires ; et

g) leur mise en œuvre ne fait pas obstacle à la libre circulation des marchandises.

Des producteurs ou distributeurs sont donc habilités à prendre l’initiative d’élaborer une signalétique nutritionnelle simplifiée, moyennant le respect de l’ensemble des critères établis par le règlement.

L’article 35 du règlement européen prévoit en conséquence que les États membres assurent un suivi approprié des formes d’expression ou de présentation complémentaires de la déclaration nutritionnelle qui sont utilisées sur le marché de leur territoire. À cette fin, ils peuvent demander aux exploitants du secteur alimentaire qui mettent sur le marché des denrées alimentaires sur lesquelles sont apposées de telles informations, de démontrer qu’ils respectent les exigences fixées par le règlement.

La possibilité pour l’État membre de recommander une forme d’information complémentaire

Le 2 de l’article 35 du règlement européen autorise les États membres à recommander aux exploitants du secteur alimentaire d’utiliser une ou plusieurs formes d’expression ou de présentation complémentaires de la déclaration nutritionnelle « dont ils estiment qu’elles satisfont le mieux aux exigences fixées au paragraphe 1 ».

Les États membres doivent communiquer à la Commission les modalités de ces formes d’expression ou de présentation complémentaires et « sur la base de l’expérience acquise », la Commission devra présenter au Parlement européen et au Conseil, au plus tard le 13 décembre 2017, un rapport sur l’utilisation des formes d’expression et de présentation complémentaires, sur leur effet sur le marché intérieur et sur l’opportunité de poursuivre leur harmonisation.

Le I de l’article 5 établit également un deuxième alinéa de l’article L. 3232-8, nouveau, qui indique que « les modalités selon lesquelles les recommandations de l’autorité administrative prévues au 2 de l’article 35 sont établies et font l’objet d’une évaluation, sont définies, après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), par décret en Conseil d’État ».

Le vecteur du « score » nutritionnel

La recommandation de l’autorité publique pourrait prendre, selon les intentions du Gouvernement, la forme d’une échelle simple, compréhensible par tous, colorielle, indiquant cinq classes de qualité nutritionnelle (par exemple vert-jaune-orange-rose-rouge), à partir du score obtenu par chaque aliment. Ce score nutritionnel est promu en particulier par le Professeur Serge Hercberg, Président du programme national nutrition santé. La recommandation devra en tout état de cause être confirmée par un avis de l’ANSES qui devra notamment vérifier la pertinence de la méthode de cotation des aliments ainsi que des seuils et des frontières entre les couleurs.

La recommandation ne saurait être contraignante : l’État membre ne peut, aujourd’hui, imposer un affichage nutritionnel complémentaire de la déclaration obligatoire, ni interdire sur son territoire une forme complémentaire alternative qui respecterait les conditions établies par le règlement. La concertation avec les opérateurs du secteur est donc nécessaire.

Mais le pari peut également être fait de l’attractivité du score nutritionnel, qui répond à une demande réelle de la population et à un enjeu majeur de santé publique. Les aliments ayant fait l’objet d’une transformation industrielle représentent aujourd’hui plus de 80 % des achats alimentaires. Leur consommation contribue au surpoids qui atteint aujourd’hui près d’un tiers des adultes et 15 % des enfants. L’offre de repères simples, mais fondés sur des données scientifiques solides et bénéficiant d’une recommandation des pouvoirs publics, ne peut que répondre à une aspiration du plus grand nombre, à laquelle les distributeurs et producteurs seront logiquement amenés à se rallier.

Outre un guide simple et fiable, pour aider à équilibrer son alimentation, le « score nutritionnel » a également pour ambition d’orienter le choix des consommateurs, à produits identiques, vers ceux dont le contenu nutritionnel serait le meilleur : ainsi, deux plats de lasagnes surgelées, de prix comparables, peuvent présenter des scores différents, en fonction de leurs ingrédients. On pourrait donc en attendre une amélioration progressive la qualité nutritionnelle de l’ensemble des aliments faisant l’objet d’une transformation industrielle.

Le Gouvernement a par ailleurs indiqué à votre rapporteur qu’il fera examiner les conséquences de l’étiquetage nutritionnel complémentaire sous forme d’un symbole tant en terme d’impact social, sur les comportements d’achat, qu’au regard des effets économiques et de l’évolution des prix des aliments par type de logo.

Enfin, votre rapporteur estime que la mise en place de l’information nutritionnelle complémentaire devra être articulée avec des campagnes de santé publique en matière d’alimentation : or celles-ci sont devenues rares, depuis plusieurs années, en raison des diminutions de crédits alloués à l’Institut national de prévention et d’éducation en santé (INPES) tant par le budget de l’État que par les concours de l’assurance maladie.

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté, outre un amendement de précision du rapporteur, un amendement présenté par le rapporteur ainsi que par Mme Dominique Orliac et les commissaires RRDP modifiant l’article L. 2133-1 du code de la santé publique afin de prévoir la révision régulière de l’information à caractère sanitaire figurant dans les messages publicitaires en faveur des boissons avec ajout de sucre et des produits alimentaires manufacturés.

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La Commission est saisie de l’amendement AS817 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. L’information nutritionnelle pourrait paraître un sujet simple, appelant de nombreuses initiatives. Mais les bonnes intentions peuvent avoir des effets pervers.

Aucun consensus scientifique véritable n’existe sur l’étiquetage supplémentaire. Une habile stratégie médiatique, même mise en œuvre par des personnalités qui ont un passé scientifique significatif, ne doit pas suffire à imposer une législation. En instaurant un système graphique supplémentaire, la France imposerait à ses seules entreprises et à ses seuls salariés des contraintes insupportables sans qu’elles aient d’effet sur la nutrition : en réalité, l’état de santé dépend de l’éducation de chacun. Tant que nous ne l’aurons pas compris, toute mesure sera vouée à l’échec.

Accepterons-nous, encore une fois, de sur-transposer les obligations imposées par les directives européennes ? Cette attitude entraîne une montée du chômage en France et met en danger la survie de notre économie dans un monde de concurrence !

Supprimons cet article : il n’apporte rien sur le plan de la santé, il empêche au contraire la poursuite de l’éducation à la santé, et il ne manquerait pas d’avoir des conséquences désastreuses pour notre secteur agricole et agro-alimentaire, qui reste l’un des rares dont la balance commerciale est positive, et qui emploie près d’un million de personnes.

M. Jean-Louis Roumegas. Les consommateurs, monsieur Accoyer, sont inondés d’informations fausses sur l’alimentation, et la publicité les incite tous les jours à consommer de façon complètement déséquilibrée. Pour une fois, ils pourront bénéficier d’une information lisible : cet article est donc très utile, et peut-être même insuffisant !

M. Olivier Véran, rapporteur pour le titre Ier. Avis défavorable. Le surpoids est un problème majeur dans notre société : un tiers des adultes et 15 % des enfants souffrent de troubles nutritionnels. Monsieur Accoyer, il y a non seulement un consensus scientifique – je vous renvoie à l’excellent rapport du professeur Serge Hercberg –, mais aussi un consensus politique à l’échelle européenne pour nous encourager à développer des signalétiques alimentaires.

Nous avons auditionné des industriels du secteur agro-alimentaire, mais aussi des représentants de la grande distribution ; un grand nombre d’entre eux, et pas les moindres, se sont dits très partants pour expérimenter, voire généraliser ce système.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS249 du rapporteur et AS1219 de Mme Dominique Orliac.

M. Olivier Véran, rapporteur. À l’instar de ce que nous avons voté pour l’alcool hier, cet amendement introduit la possibilité de réviser régulièrement l’information à caractère sanitaire qui, notamment, accompagne les spots publicitaires en faveur des boissons sucrées et des produits alimentaires manufacturés. En effet, des études sociologiques montrent qu’un message toujours identique perd de sa force. En l’adaptant, on gagnerait certainement en efficacité.

M. Dominique Tian. C’est tout le contraire, monsieur le rapporteur ! Un message martelé systématiquement sera bien plus efficace : cette instabilité marketing va, tous les professionnels le disent, provoquer des difficultés économiques et diminuer l’efficacité de ces messages. Ceux qui sont diffusés aujourd’hui ont été réfléchis, par le Gouvernement comme par les publicitaires : ils sont marquants. Il serait dommage de les modifier.

M. Jacques Krabal. Je rejoins le rapporteur pour dire qu’il serait judicieux de revoir régulièrement ces messages, non pas pour les remettre en cause mais pour prendre en considération des éléments nouveaux.

M. Arnaud Robinet. J’approuve entièrement les arguments de M. Tian.

Les amendements sont adoptés.

La Commission est saisie de l’amendement AS530 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Notre corps est formé à 80 % d’eau. Nous avons besoin d’en boire, et c’est un produit très peu cher, surtout pris au robinet. Il serait donc bon de délivrer un message sur la quantité minimale d’eau que doivent boire les enfants, les adultes et les personnes âgées pour une bonne hydratation. Nous avons vu les ravages que peut causer en période de canicule une mauvaise hydratation.

M. Olivier Véran, rapporteur. Parlez-vous d’eau avec ou sans bulles ?

Plus sérieusement, votre amendement propose de remplacer l’ensemble de la déclaration nutritionnelle prévue par le texte par une information sur la quantité d’eau qu’il faut boire. Avis nécessairement défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS390 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à clarifier la différence entre l’information nutritionnelle obligatoire – sur les calories, notamment – et l’information complémentaire. Il ne faut pas perdre le consommateur dans un océan de chiffres.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je comprends, en lisant votre amendement, l’inverse de ce que vous dites. Quoi qu’il en soit, la présentation graphique complémentaire prévue par le texte vise à faciliter la compréhension des informations déjà données, et non à apporter de nouvelles informations, sur d’autres nutriments par exemple.

J’ajoute que l’Union européenne nous invite à mettre en place une signalétique nutritionnelle, mais n’autorise pas les affichages complémentaires, encore moins à les rendre obligatoires.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement de précision AS1313 de M. Olivier Véran, rapporteur.

M. Bernard Accoyer. Nous sommes en train d’imposer des charges supplémentaires à nos PME, qui n’en peuvent plus. Je souhaite proposer un sous-amendement qui consisterait à ajouter au texte de l’amendement les mots suivants : « la totalité du coût de ces mesures sera prise en compte par la grande distribution ».

M. Olivier Véran, rapporteur. Le dispositif proposé ici est facultatif, même si nous espérons qu’il rencontrera une large adhésion chez les industriels. Il ne coûtera rien aux PME qui décident de ne pas l’utiliser.

Avis défavorable au sous-amendement.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS1313.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1220 de Mme Dominique Orliac et AS341 de Mme Chantal Guittet.

M. Jacques Krabal. Pour que la déclaration nutritionnelle soit efficace, la présentation complémentaire sous forme de graphiques ou de symboles doit être obligatoire et non facultative.

M. Olivier Véran, rapporteur. La déclaration nutritionnelle elle-même est déjà obligatoire. Le règlement européen prévoit la possibilité d’un affichage complémentaire par un logo ou un symbole, mais cette présentation graphique est obligatoirement facultative. Le projet de loi est donc conforme au droit européen, tout en confortant la déclaration obligatoire qui existe déjà en droit français.

Je propose le retrait de ces amendements.

L’amendement AS341 est retiré.

La Commission rejette l’amendement AS1220.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques AS379 de Mme Véronique Louwagie et AS1018 de M. Arnaud Robinet, et l’amendement AS1351 de M. Francis Vercamer.

M. Gilles Lurton. L’amendement AS379 vise à prévoir une expérimentation des graphiques et symboles qui seront utilisés, afin que les producteurs n’aient pas à changer les étiquettes en permanence. Il sera ainsi possible de vérifier l’absence d’effets contraires aux objectifs de santé publique, notamment en matière de peurs alimentaires, d’interdits alimentaires et de troubles du comportement alimentaire.

Le Fonds français pour l’alimentation et la santé (FFAS) a recommandé cette démarche : il faut d’abord vérifier l’efficacité de notre système. Toutes les étiquettes ont dû être changées après le vote de la loi sur la consommation ; veillons aux charges que nous imposons à nos entreprises.

M. Élie Aboud. De même qu’on parle de « médecine fondée sur des preuves », il doit s’agir ici d’un affichage fondé sur des preuves et sur une vraie étude d’impact. La vérité est très labile en ces domaines : il faut d’autant plus nous appuyer sur des bases scientifiques solides que certaines entreprises utilisent un affichage fantaisiste, complètement faux.

M. Francis Vercamer. Si nous soutenons l’idée d’une meilleure information des consommateurs, à défaut d’une éducation à l’alimentation, il nous semble important d’expérimenter d’abord ce dispositif, qui pourrait entraîner des conséquences financières importantes pour les entreprises françaises. Les entreprises étrangères, elles, ne sont pas soumises à ce même dispositif. Nous demandons donc une étude d’impact solide, pour mesurer le coût et la réalité des effets d’une telle mesure.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable à ces amendements.

Tout d’abord, de nombreux travaux scientifiques, en France comme à l’étranger, montrent qu’un système graphique a un impact extrêmement favorable sur les comportements alimentaires et réduit le risque de présenter des troubles nutritionnels, et en particulier de devenir obèse. Les études sociologiques sur ce point sont très intéressantes et nous fournissent une base solide – la loi précise d’ailleurs que le dispositif doit s’appuyer sur une base scientifique solide.

Ensuite, le système n’étant pas obligatoire, prévoir une simple expérimentation n’aurait pas vraiment de sens.

L’État émet une recommandation, mais n’interdit pas sur son territoire une forme différente d’expression de la signalétique nutritionnelle, dès lors que le règlement européen est respecté. La concertation est de toute façon nécessaire.

Enfin, l’article prévoit bien une évaluation du dispositif.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1352 de M. Francis Vercamer et AS441 de M. Jean-Pierre Door.

M. Francis Vercamer. J’entends bien que cette signalétique sera facultative, mais en pratique, la pression des médias et des grandes surfaces la rendront obligatoire. Vous ne voulez pas d’expérimentation : appuyons-nous au moins sur les études des agences françaises et non des agences étrangères. Nous demandons donc que l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) se prononce sur la pertinence et l’intérêt scientifique d’une telle mesure.

M. Jean-Pierre Door. Il n’y a pas de dispositif idéal, et celui-ci, qui propose un code très simplifié, présente évidemment des biais importants. Il faut les analyser, et cet amendement propose de préciser clairement les étapes d’évaluation des différents systèmes et leur intérêt respectif pour le consommateur. Il faut aller plus loin que la simple saisine de l’ANSES qui a précédé nos travaux.

M. Olivier Véran, rapporteur. Chers collègues de l’opposition, vous me semblez bien frileux sur cette question de l’étiquetage : vous êtes passés de la tentative de suppression à la tentative d’expérimentation, et maintenant à la tentative de sur-évaluation.

Les travaux de l’ANSES permettront de juger de la capacité globale du système à permettre une estimation de la qualité nutritionnelle. Le Haut Conseil de la santé publique a, pour sa part, été saisi pour évaluer la pertinence des différents systèmes de différenciation.

Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je ne reviendrai pas ici sur l’intérêt du logo nutritionnel, qui a été démontré par de nombreux travaux scientifiques, notamment français – ces derniers, qui sont nos bases de travail, servant d’ailleurs souvent de référence à l’étranger. Ce débat est tranché.

S’agissant de la procédure de mise en place et du choix du logo nutritionnel, je réunirai les scientifiques qui proposent le logo qui a été vu dans la presse, avec différentes couleurs, mais aussi les distributeurs et producteurs, qui peuvent avoir d’autres idées, ainsi que les associations de consommateurs, qui sont très fortement mobilisées sur ces questions. Nous essaierons ainsi de forger un consensus. C’est ensuite évidemment l’ANSES qui se prononcera définitivement, dans des délais courts, car nous espérons aboutir rapidement.

Encore une fois, l’intérêt du logo nutritionnel est clair ; nous devons maintenant nous interroger sur sa nature exacte.

La Commission en vient aux amendements identiques AS443 de M. Jean-Pierre Door et AS685 de M. Guillaume Larrivé.

M. Arnaud Robinet. Je rappelle que le règlement européen relatif à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, adopté il y a trois ans et destiné à éclairer les choix des consommateurs, est entré en vigueur depuis le 13 décembre dernier.

Au-delà de ce rappel, l’amendement AS443 vise à demander, en sus de l’avis de l’ANSES, celui du Conseil national de l’alimentation, qui développe une approche socio-économique tout à fait intéressante.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Mme la ministre vient de décrire la procédure de concertation sur la signalétique, qui vise à aboutir à un consensus. Qui plus est, le Conseil national de l’alimentation est certes une instance reconnue, mais pas scientifique.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS377 de Mme Véronique Louwagie.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à rappeler dans la loi l’importance du modèle alimentaire français. Reconnu sur le plan de la santé publique, fondé sur la diversité, la convivialité et le plaisir, il se caractérise par un équilibre nutritionnel et il est construit sur les principes de quatre repas par jour, de portions raisonnables, d’un équilibre sur plusieurs jours. Il mérite d’être préservé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Ni l’excellence du modèle alimentaire français ni notre filière alimentaire ne sont menacés. Il ne s’agit pas ici d’imposer des normes d’alimentation et de convivialité ou de modifier le cours des repas dans les familles françaises, mais seulement de délivrer une information claire, lisible, importante pour ceux qui font leurs courses. Ils pourront ainsi constater, devant deux marques de céréales dont l’une se présente comme faisant presque maigrir si l’on en mange beaucoup alors que l’autre paraît calorique et sucrée, qu’elles ont un score nutritionnel identique. De tels exemples ne manquent pas, Mme la ministre en a cité, et l’UFC-Que choisir a publié sur ce thème un article récent. La filière alimentaire française ne sera absolument pas pénalisée, et chacun, je crois, en est d’ailleurs conscient.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS520 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Cet amendement tend à demander une comparaison entre les différents systèmes d’information nutritionnelle existant en France et dans le monde, ainsi qu’une expérimentation sur certains produits. Une mauvaise alimentation peut être à l’origine de diabète, d’obésité, de cancers et autres, et ce phénomène touche notamment les populations défavorisées.

Le dispositif proposé ici est très attendu des consommateurs, mais il devra être simple et compréhensible par tous. Il faut donc s’inspirer des modèles déjà utilisés, en gardant notamment à l’esprit la question des populations défavorisées. Par ailleurs, ce système ne sera efficace que si l’ensemble des parties prenantes – industriels, distributeurs, consommateurs, scientifiques et sociologues – travaillent ensemble de façon transparente et sur la base des recommandations faites par l’ANSES en toute indépendance.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS162 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous soutenons l’article 5. Cet amendement, conforme aux possibilités ouvertes par la réglementation européenne, vise à étendre les informations complémentaires aux additifs alimentaires. C’est là une demande de certains distributeurs, qui nous semble intéressante. Il s’agit d’une information très importante pour les consommateurs : aujourd’hui, beaucoup d’études montrent le rôle, dans la propagation de l’obésité, des additifs, et notamment de certains édulcorants, qui peuvent par exemple dérégler les systèmes hormonaux.

M. Élie Aboud. L’amendement vise-t-il à rendre ces informations obligatoires ? Elles figurent déjà souvent sur les emballages.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agirait d’une information facultative.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le score nutritionnel porte sur les informations déjà présentes – et essentielles : c’est une façon d’exposer de façon simple et intelligible pour le grand public des informations dont la déclaration est déjà obligatoire.

Vous parlez ici plutôt d’allégations nutritionnelles, sans que ce terme revête une valeur péjorative. Ces informations ne peuvent pas s’intégrer au score nutritionnel tel qu’il existe, ni dans le cadre du règlement européen, ni dans ce projet de loi.

Les additifs sont, du reste, déjà réglementés et les informations nécessaires à leur identification doivent déjà être présentes. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Roumegas. Votre réponse n’est pas correcte, monsieur le rapporteur. Nous proposons un système tout à fait parallèle au vôtre, mais pour les additifs. Le règlement européen permet, comme pour les valeurs nutritionnelles, un étiquetage complémentaire plus simple. Encore une fois, certains fabricants souhaitent simplifier l’étiquetage.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous pouvez juger que ma réponse n’est pas correcte, mais le lancement d’une opération « coccinelle » sur les produits alimentaires ne me paraît pas une bonne idée : la juxtaposition de multiples codes couleurs, même compatibles avec le dispositif que promeut la loi, ne ferait que rendre l’information moins lisible.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1461 de Mme Monique Orphé.

M. Serge Letchimy. Il nous semble très important de mettre l’accent sur la sensibilisation en milieu scolaire, et en particulier sur le rôle du sucre dans la propagation du diabète. Le développement d’une pédagogie efficace est nécessaire pour former les enfants, futurs consommateurs. Cela permettrait aussi de toucher les familles.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement est, je crois, satisfait par l’article 2, examiné hier soir, qui crée un parcours éducatif de santé.

L’amendement AS1461 est retiré.

La Commission adopte l’article 5 modifié.

*

Après l’article 5

La Commission examine l’amendement AS523 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Bien qu’il soit la première pierre de l’édifice qui mène à l’équilibre alimentaire et nutritionnel, le petit-déjeuner est de plus en plus négligé, notamment par les enfants, les adolescents et les personnes défavorisées. À cet égard, la dernière étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (CREDOC) est inquiétante. En dix ans, deux fois plus d’adultes et trois fois plus d’enfants ont cessé de prendre un petit-déjeuner chaque jour, 29 % des enfants sautent au moins un petit-déjeuner par semaine contre 11 % il y a encore dix ans.

Le petit-déjeuner rompt le jeûne de la nuit, reconstitue les réserves glucidiques épuisées et contribue aux apports énergétiques de la journée à hauteur de 20 à 25 % en moyenne. Il permet aussi de se réhydrater et d’apporter une part significative de plusieurs nutriments nécessaire pour la matinée et même le début de l’après-midi. Les nutritionnistes rappellent qu’il apporte en moyenne 25 % des besoins en calcium et qu’il représente la première source de vitamine C pour les enfants et la deuxième pour les adultes.

C’est pourquoi la prise d’un petit-déjeuner équilibré, associée à un régime alimentaire de qualité et varié, améliore les capacités cognitives – mémorisation et concentration – et la résistance à la fatigue de nos enfants. Cette habitude favorise leur croissance.

M. Olivier Véran, rapporteur. C’est l’ami Siré, l’ami du petit-déjeuner ! Le petit-déjeuner est extrêmement important et, de la même façon, on pourrait sans doute préciser que bien mâcher est essentiel pour commencer correctement sa digestion. Mais traiter du rôle du petit-déjeuner dans la loi ne me semble pas une bonne idée. Avis défavorable.

M. Fernand Siré. C’est la deuxième fois que vous vous moquez de moi ! J’ai soixante-dix ans. Je suis un vieux médecin. Soyez un rapporteur honnête et veuillez ne pas vous moquer d’un député !

M. Olivier Véran, rapporteur. Telle n’était pas mon intention, mon cher collègue, et, si vous l’avez compris ainsi, je vous prie de m’en excuser.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS524 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt définit de nouvelles priorités pour le programme national pour l’alimentation (PNA). Le présent amendement propose que ce programme s’appuie sur le modèle alimentaire français qui doit être protégé et valorisé, alors même qu’il est remis en question par des habitudes de consommation qui se déstructurent.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le PNA contient déjà des objectifs de politique de l’alimentation, et il me semble superflu de rajouter cette précision dans la loi. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendement AS522 de M. Fernand Siré et l’amendement AS444 de M. Jean-Pierre Door.

M. Fernand Siré. Comme les précédents, cet amendement vise à promouvoir une alimentation saine et répartie en trois repas, en particulier auprès des populations défavorisées qui sont les plus concernées par les mauvaises habitudes alimentaires : elles remplacent des repas par des jus de fruit, des sodas, des barres chocolatées, etc. La prise de repas normaux et équilibrés favorise le bien-être de la population et limite les risques de maladies cardio-vasculaires et coronariennes et de diabète.

M. Arnaud Robinet. L’étiquetage que souhaite développer Mme la ministre est inspiré de modèles anglo-saxons. Or les Français s’alimentent d’une manière bien spécifique, très ritualisée, autour de repas structurés et pris à heures fixes. Au moment d’aborder le débat sur les moyens d’améliorer l’information du consommateur, il semble judicieux de rappeler l’importance et les atouts du modèle alimentaire français.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Le programme national nutrition santé (PNNS) traite de la structuration de l’alimentation, de façon très globale. Rien ne va l’encontre de la signalétique alimentaire, bien au contraire : plus on éclaire les consommateurs sur le choix des aliments, plus on participe à la promotion d’un modèle alimentaire français équilibré qui favorise la bonne santé des consommateurs.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle passe à l’amendement AS517 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. L’idée est toujours la même : inciter les gens à prendre un bon petit-déjeuner.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS525 de M. Fernand Siré.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS133 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à donner un caractère obligatoire aux recommandations relatives à la nutrition en restauration scolaire, afin d’améliorer, à coût constant, la qualité nutritionnelle des repas servis. Rappelons quelques chiffres : 6 millions d’élèves fréquentent la cantine ; de la maternelle au lycée, 1 milliard de repas sont servis chaque année dans les restaurants scolaires ; au terme de sa scolarité, un demi-pensionnaire pourra y avoir mangé plus de 2 000 fois. La restauration scolaire peut et doit jouer un rôle important dans l’éducation nutritionnelle des enfants, surtout si cette dernière est également présente dans les enseignements obligatoires, comme la mission d’information le propose. Pour beaucoup d’enfants, quel que soit leur milieu social, le déjeuner à la cantine est le seul repas équilibré de la journée.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Madame Boyer, je voudrais rappeler le travail que vous aviez fait sous la précédente législature sur ce problème de santé publique.

M. Olivier Véran, rapporteur. J’approuve votre objectif de privilégier le bio, les circuits courts, les produits locaux, la bonne alimentation. J’appelle toutefois votre attention sur une loi de juillet 2010 qui modifie le code rural et de la pêche maritime, et qui fixe déjà des obligations de fonctionnement aux services de restauration collective, y compris scolaire, en matière de qualité nutritionnelle des repas. L’article L.230-5 de ce code précise donc que les gestionnaires doivent « privilégier, lors du choix des produits entrant dans la composition de ces repas, les produits de saison » et que « les règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas sont publiées sous la forme d’une charte affichée dans les services concernés. » Il est aussi prévu que « les ingénieurs du génie sanitaire, les ingénieurs d’études sanitaires, les techniciens sanitaires, les inspecteurs et les contrôleurs des agences régionales de santé veillent au respect des règles fixées en application du présent article ».

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le code rural et de la pêche maritime ne fait pas forcément l’objet d’une discussion continue dans notre commission.

Mme Valérie Boyer. Pourquoi ces dispositions ne figurent-elles pas dans le code de la santé publique ? Ne pourrait-on pas les transposer dans le chapitre que nous sommes en train d’examiner ? Le code rural et de la pêche maritime ne semble pas forcément le plus indiqué pour régir les cantines scolaires.

M. Olivier Véran, rapporteur. Tout ce qui a trait à l’alimentation – qui vient de la terre, des paysans – figure dans le code rural.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS163 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Depuis le début de l’examen de ce texte, nous y avons introduit des principes de santé environnementale. Cet amendement vise à passer à des mesures concrètes, tout en tenant compte du rythme d’élaboration de la législation en la matière. En ce qui concerne les perturbateurs endocriniens, la France a adopté une stratégie nationale tandis que des règles européennes sont en cours d’élaboration.

Sur la base de la stratégie nationale française et des expertises menées notamment par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), nous pouvons commencer à agir de façon concrète.

Dans cet amendement, nous proposons d’introduire un avertissement pour protéger un public particulièrement vulnérable aux perturbateurs endocriniens : les femmes enceintes. L’ANSES construisant son expertise et continuant à évaluer des substances, nous souhaitons mettre en place une signalétique qui tienne compte de ces évaluations. Il s’agit de déconseiller aux femmes enceintes les produits contenant ces substances identifiées comme perturbatrices endocriniennes.

Une telle mesure serait conforme à la réglementation européenne qui autorise des signalétiques supplémentaires quand elles s’appuient sur des expertises scientifiques.

M. Élie Aboud. Comme vous, mon cher collègue, je me préoccupe de santé environnementale. J’ai déposé une proposition de loi sur l’indice PBT (persistance, bioaccumulation et toxicité), qui classe les médicaments en fonction de leur dangerosité pour le milieu aquatique quand ils s’y retrouvent sous forme de résidus : le groupe écologiste n’a pas voulu la signer. La mesure proposée part d’une intention louable, mais elle est difficile à concrétiser dans la mesure où la science n’a pas encore identifié toutes les molécules qui peuvent entraîner des perturbations. Comment faire pour que la loi puisse s’adapter ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Les produits cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques avérés sont déjà interdits. Les produits cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques suspectés font l’objet d’un étiquetage réglementaire défini au niveau européen : le règlement classification, étiquetage et emballage (CLP 1272/2008) qui reprend des dispositions harmonisées au niveau international par l’Organisation des nations unies (ONU), notamment en ce qui concerne les pictogrammes, phrases de danger et conseils de prudence.

Les perturbateurs endocriniens reconnus comme tels sont déjà classés parmi les cancérogènes ou les reprotoxiques, et ils ne sont pas autorisés dans les produits destinés à la vente au grand public.

Pour les produits cosmétiques, les critères d’étiquetage et les symboles utilisés sont définis par le règlement CE 1223/2009. Les mentions d’avertissement destinées aux populations fragiles – femmes enceintes, enfants de moins de trois ans – peuvent être apposées après évaluation par un comité scientifique européen pour la sécurité des consommateurs, qui prend spécifiquement en compte le risque d’exposition via les produits cosmétiques.

Il n’est donc pas nécessaire d’avoir une réglementation nationale spécifique au regard de la législation européenne. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement AS255 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement propose un étiquetage volontaire portant la mention « sans perturbateur endocrinien », ce que demandent certains distributeurs et fabricants. Cet étiquetage s’appuierait sur la liste de l’ANSES, qui est appelée à évoluer au fur et à mesure des évaluations. J’admets que la liste ne sera jamais complète, mais, si l’on attend qu’elle le soit, on n’agira jamais. Des dizaines de perturbateurs endocriniens vont être expertisées tous les ans, mais l’industrie va en fabriquer des milliers au cours des années à venir. Veut-on agir au moins par le biais d’un étiquetage volontaire pour informer les populations, en attendant des réglementations interdisant certains produits ?

M. Bernard Accoyer. Notre collègue Roumegas multiplie les initiatives dans un domaine où les preuves scientifiques font défaut. Rappelons qu’aucun travail scientifique de grande ampleur n’a démontré ce qui est redouté pour le bisphénol A, même si certains points doivent être éclaircis.

M. Gérard Bapt. C’est incroyable d’entendre cela !

M. Bernard Accoyer. Rappelons aussi que la peur qui est entretenue à l’égard de certains produits conduit à des remplacements hasardeux. Pour le bisphénol A, la preuve scientifique est en train d’éclater. J’appelle à une certaine prudence tant que la communauté scientifique n’est pas unanimement convaincue qu’il faut lancer des alertes et procéder à des changements de pratiques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable pour les raisons que vous avez évoquées vous-même, monsieur Roumegas. Mettons-nous à la place du consommateur. Comment peut-on lui garantir un produit « sans perturbateur endocrinien » alors que personne n’est capable de dresser la liste des substances qu’il cherche à éviter ? Ce serait quasiment de l’information trompeuse.

Dans le cadre de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, la France a demandé l’adoption d’une définition harmonisée au niveau européen. À l’initiative de la France, un travail a été engagé pour les identifier et permettre de les signaler. Comme vous, monsieur Roumegas, je pense qu’il faut davantage les identifier et les signaler, voire les traquer quand ils risquent de toucher les personnes les plus fragiles. Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’il était sage d’interdire les biberons au bisphénol. Mais il reste beaucoup de choses à découvrir et il faut sans doute avoir un peu plus de gages scientifiques avant de pouvoir se déclarer totalement rassuré sur un produit.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS109 de Mme Valérie Boyer et AS813 de M. Bernard Accoyer.

Mme Valérie Boyer. Je propose qu’il soit porté dans le carnet de santé une mention sur les repères quantitatifs de consommation d’eau. D’une manière générale, le carnet de santé ne comporte pas assez d’indicateurs nutritionnels à destination des parents. Il faudrait aller plus loin que les courbes de poids et de taille.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Il est déjà indiqué, dans le carnet de santé, qu’il faut boire de l’eau à volonté et limiter la consommation de boissons sucrées. Cela a été établi par l’ANSES au terme d’une concertation scientifique qui n’a pas fixé de repères quantitatifs. Les législateurs que nous sommes ne disposent pas des éléments scientifiques qui permettraient de déterminer le niveau de consommation idéal pour la santé.

M. Bernard Accoyer. En même temps que cet amendement AS813, je défendrai toute une série d’amendements sur l’importance de l’éducation sanitaire et diététique à l’hydratation. Il faut insister sur le volume, mais aussi sur la nature du liquide, et apprendre aux enfants à boire de l’eau. Je ne dis pas cela pour faire plaisir à mes amis – dont certains sont cosignataires de cet amendement – qui sont élus de régions où il y a des sources thermales. Il faut éduquer les enfants à la saveur de l’eau et ne pas leur donner l’habitude des boissons sucrées ou aromatisées qui ont des conséquences néfastes sur la santé publique : elles favorisent le surpoids, l’obésité, le diabète, mais aussi l’addiction et, d’une certaine façon, une attitude qui, à terme, peut conduire à l’alcoolisme.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques AS111 de Mme Valérie Boyer et AS810 de M. Bernard Accoyer, et les amendements identiques AS110 de Mme Valérie Boyer et AS812 de M. Bernard Accoyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement AS111 propose d’introduire dans le programme national nutrition santé (PNNS) un repère quantitatif en matière de consommation quotidienne d’eau.

M. Bernard Accoyer. Mes deux amendements sont défendus.

Mme Valérie Boyer. Mon second amendement tend aussi à remplacer le repère nutritionnel actuel du PNNS – boire de l’eau à volonté – par un indicateur quantitatif précis.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Permettez-moi d’apporter une précision concernant la recommandation de boire de l’eau à volonté. Une personne atteinte de potomanie trouve normal d’absorber trois ou quatre litres d’eau par jour pendant des jours, voire des semaines ou des mois. En fait, c’est le signe d’un début de diabète.

M. Bernard Accoyer. La potomanie, c’est tout autre chose : c’est un besoin irrépressible de boire constamment, sans pouvoir se maîtriser.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS802 de M. Bernard Accoyer.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS533 de M. Fernand Siré et AS809 de M. Bernard Accoyer.

M. Fernand Siré. Il s’agit d’associer l’hydratation à la nutrition. La promotion de l’hydratation n’est pas assez présente dans les politiques de santé publique, alors qu’une consommation d’eau insuffisante peut être grave pour les enfants, les adolescents et surtout les vieillards.

M. Bernard Accoyer. Mon amendement est défendu.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis elle en vient à l’amendement AS114 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. La mesure proposée s’inscrit dans le cadre du plan d’action de lutte contre l’obésité infantile de l’Union européenne. L’amendement vise à améliorer l’information des parents et des personnels médicaux sur l’importance du dépistage précoce de l’obésité ou du risque d’obésité. Les pédiatres soulignent le rôle crucial du dépistage précoce pour éviter que l’obésité ne s’installe à plus ou moins long terme. Il est donc essentiel de mieux informer les parents, les enfants et les professionnels de santé sur cet enjeu.

La priorité absolue est de réduire la prévalence de la surcharge pondérale chez les enfants et les jeunes, sachant que 80 % des enfants obèses à dix ans le resteront à l’âge adulte. Cela passe par des actions coordonnées, cohérentes et durables d’éducation à la santé et d’enseignement nutritionnel pratique – cours de cuisine, activité physique –, par un dépistage systématique pendant toute la scolarité, et par une prise en charge rapide lorsque cela est nécessaire.

À l’heure actuelle, la notion de rebond d’adiposité ne figure pas dans le carnet de santé, alors que les spécialistes de l’obésité et du surpoids estiment qu’il s’agit d’une information nécessaire. C’est au moment du rebond d’adiposité que l’information des parents et la prise en charge médicale sont primordiales.

M. Olivier Véran, rapporteur. À nouveau, madame Boyer, je vous retrouve pleinement sur le fond. Cependant, s’agissant du carnet de santé, ce qui relève de la loi, c’est : la délivrance gratuite d’un carnet aux parents à la naissance de l’enfant ; la fixation, par arrêté ministériel, du modèle et du mode d’utilisation de ce carnet ainsi que la mention des examens médicaux obligatoires. Tout le reste relève de l’arrêté ministériel, notamment ce qui concerne l’information donnée aux parents par les professionnels de santé. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS803 de M. Bernard Accoyer.

*

Article 5 bis
(art. L. 2133-1 du code de la santé publique)

Messages publicitaires pour les aliments manufacturés et les boissons sucrées

L’article L. 2133-1 du code de la santé publique prévoit que les messages publicitaires en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés doivent contenir une information à caractère sanitaire mais que les annonceurs et les promoteurs peuvent déroger à cette obligation sous réserve du versement d’une contribution dont le produit est affecté à l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). L’article L. 2133-1 prévoit que le montant de cette contribution est égal à 1,5% du montant annuel des sommes destinées à l’émission et à la diffusion de ces messages hors remise, rabais, ristourne et taxe sur la valeur ajoutée, payées par les annonceurs.

Inséré par un amendement de Mme Valérie Boyer, sur avis favorable du rapporteur, l’article 5 bis porte le montant de la contribution à 5 % du montant annuel des sommes consacrés aux messages dépourvus de message sanitaire.

En outre, un amendement présenté par Mme Chaynesse Khirouni, adopté par la Commission sur avis favorable du rapporteur étend le champ d’application de cette obligation aux messages publicitaires diffusés sur internet.

Le produit de cette contribution s’est élevé, en 2014, à 0,4 million d’euros. Le rapporteur estime que la hausse importante du taux de la contribution pourra avoir un effet direct de rendement, bienvenu pour financer les campagnes de prévention de l’INPES, qui sera éventuellement compensé par une baisse du nombre de redevables, s’il incite un plus grand nombre d’annonceurs à se soumettre à l’obligation de diffuser un message sanitaire, ce qui correspond également à un des buts recherchés par la mesure.

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La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1223 de Mme Dominique Orliac, AS205 et AS138 de Mme Valérie Boyer.

Mme Dominique Orliac. La surcharge pondérale et l’obésité sont de réels problèmes de santé publique. Afin de financer des actions de prévention, que ce soit par de l’information ou de l’éducation au « bien et mieux manger », cet amendement introduit le principe d’une contribution sur l’ensemble des messages de mercatique concernant les produits pouvant mener au surpoids et à l’obésité.

Mme Valérie Boyer. L’amendement AS205 vise à supprimer la possibilité laissée aux annonceurs de messages publicitaires concernant les aliments manufacturés et les boissons sucrées, de s’exonérer de l’obligation d’ajouter une information à caractère sanitaire – « manger, bouger », « cinq fruits et légumes par jour » – moyennant le versement d’une taxe de 1,5 % qui est affectée à l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), et à rendre obligatoire l’assujettissement à cette taxe.

La suppression de la possibilité de déroger à l’obligation d’information sanitaire permettra de renforcer l’information en matière d’équilibre nutritionnel, d’éducation à la santé et de prévention de l’obésité. Cela contribuera à rééquilibrer l’information sur les produits alimentaires transformés. Dans ce même esprit, l’obligation d’acquitter la taxe permettra d’accroître les moyens d’information et de prévention de l’INPES.

Quant à l’amendement AS138, il vise à porter de 1,5 % à 5 % le taux de la taxe sur les messages publicitaires concernant les aliments manufacturés et les boissons sucrées, qui est affectée à l’INPES pour financer des actions de prévention.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis défavorable aux deux premiers amendements qui veulent imposer à la fois les messages sanitaires et une contribution financière qui serait, en fait, une taxe nouvelle. En revanche, je suis favorable à l’amendement AS138 qui propose de tripler le taux de la taxe en cas de non-application du message de prévention sanitaire. En effet, notre but n’est pas de prélever la taxe, mais de conduire les industriels à diffuser le message sanitaire, ce qu’une hausse du taux peut les inciter à faire davantage.

La Commission rejette successivement les amendements AS1223 et AS205 puis adopte l’amendement AS138.

Puis elle en vient à l’amendement AS507 rectifié de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Nous savons aujourd’hui qu’en classe de CM2 les enfants d’ouvriers sont dix fois plus victimes d’obésité que les enfants de cadres. Les messages publicitaires en faveur de boissons avec ajout de sucres, de sel, d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés doivent contenir une information à caractère sanitaire. Le présent amendement vise à étendre aux messages diffusés en ligne cette obligation qui s’applique déjà aux messages télévisés et radiodiffusés, à l’instar de ce qui est déjà en vigueur pour le contrôle de la publicité pour l’alcool.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 5 bis

La Commission passe à l’amendement AS125 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise aussi à lutter contre l’obésité.

Dans son dernier rapport de février 2015, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) alerte une fois de plus sur les effets néfastes pour l’enfant du marketing d’aliments hautement énergétiques, riches en matières grasses, en sucre ou en sel, qui entraînent une propension à préférer les aliments et modes d’alimentation peu sains et favorisent l’obésité.

L’influence de ces publicités, dont le PNNS recommande la limitation, doit être régulée par la loi. Il convient d’éloigner les enfants des messages publicitaires qui nuisent à leur santé, comme on les éloigne de la pornographie ou des images violentes. La France n’est en effet plus épargnée par la pathologie de l’obésité qui constitue une menace pour notre système de protection sociale et une souffrance pour les personnes qui en sont victimes.

Rappelons que l’obésité infantile reste la plus problématique, à une époque où 60 % des enfants regardent le petit écran tous les jours en rentrant de l’école, les trois quarts d’entre eux avouant préférer les produits promus à la télévision plutôt que ceux ne bénéficiant d’aucune publicité. Plus de 80 % des parents achètent des produits vus à la télévision et réclamés par les enfants. La charte d’engagement des régies publicitaires n’offre aucune protection pour les enfants : elle ne propose que des spots de sensibilisation à caractère très général sans imposer la moindre limitation aux publicités pour les produits les plus caloriques.

Cet amendement vise à renforcer la protection des enfants et des adolescents par l’encadrement strict de la publicité en faveur des produits à forte teneur en sucres ou en matières grasses. Cet encadrement sera bénéfique à la fois pour les enfants qui seront encouragés à manger des produits plus sains, pour l’industrie alimentaire qui sera fortement incitée à améliorer les recettes des produits les plus déséquilibrés, et pour les chaînes de télévision qui verront une pérennisation de leurs recettes publicitaires issues de l’agroalimentaire.

Cet amendement ne cherche en aucun cas à opposer l’agroalimentaire aux consommateurs ; son but est de promouvoir les produits qui n’obèrent pas la santé des plus jeunes.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Sur le fond, je suis tout à fait favorable à l’idée de limiter l’exposition des enfants aux publicités pour des produits qui peuvent entraîner des troubles alimentaires, en tout cas du surpoids et de l’obésité. En revanche, le passage à la pratique me semble compliqué. Il existe une charte de bonnes pratiques, mais je ne sais pas si l’on sait définir dans la loi ce que sont les émissions « dont une part importante du public est constituée d’enfants ou d’adolescents ».

Mme Valérie Boyer. On le sait parfaitement : certains programmes sont ainsi qualifiés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et les « écrans jeunesse » sont précisément définis.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Il y a quelques années, madame la députée, vous aviez été amenée à retirer les amendements que vous aviez présentés, au profit de la mise en place d’une charte signée par les industries de l’agroalimentaire et les chaînes de télévision. Christine Kelly, qui était alors membre du CSA, a beaucoup œuvré en faveur de cette charte, dont une nouvelle version, qui vient d’être signée, comporte des engagements et des développements nouveaux. Il me semble qu’il faut laisser prospérer cette démarche, qui porte ses fruits.

Mme la présidente Catherine Lemorton. À titre personnel, je voterai en faveur de cet amendement. D’une part, il me semble possible d’identifier les programmes, puisque la charte nouvellement révisée indique un pourcentage d’enfants de moins de douze ans qui regarderaient certaines émissions. D’autre part, cette charte n’étant pas opposable, les industriels font ce qu’ils veulent.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS1206 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement vise à combattre les troubles alimentaires tels que l’anorexie – qui touche des femmes dans 90 % des cas – en encadrant les photographies de mannequins utilisées dans la publicité et dans la mode. M. le rapporteur a déposé un amendement un peu équivalent au nôtre sur l’incitation à la maigreur.

L’amendement propose que les photographies de mannequins dont l’apparence corporelle a été modifiée par un logiciel de traitement d’image soient accompagnées de la mention « photographie retouchée ».

Mme Valérie Boyer. Cet amendement reprend quasiment mot pour mot une proposition de loi que j’avais déposée en 2008, à la suite d’un rapport sur l’obésité. J’en approuve l’esprit, mais pas la forme : il faudrait le compléter pour élargir le champ des images retouchées. On ne combat pas l’anorexie avec ce genre de mesure, mais il est important d’informer les gens quand la photographie d’un mannequin a été retouchée par logiciel, parce qu’ils n’en ont pas toujours conscience.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’enjeu est important. Mais comment détermine-t-on en aval que la photographie a été retouchée et qu’il aurait fallu le signaler ? Y aura-t-il un comité de censure en amont ? Je ne crois pas que ce soit possible. Qui va faire l’évaluation a posteriori et sur quels critères ? Il faut aussi que nous précisions la taille du message. Un consensus peut se dessiner, si j’en juge par l’implication des uns et des autres sur ce sujet depuis des années. Nous pouvons donc reprendre le texte et présenter en séance une formulation qui soit inattaquable sur la forme.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS130 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement concerne l’allaitement maternel dont il est établi qu’il présente de nombreux avantages : qualité du lien mère-enfant, réduction de la fréquence des infections chez les nourrissons, gratuité. L’allaitement maternel prolongé, pendant au moins six mois, a également un rôle protecteur contre l’obésité. Il est donc essentiel de développer l’allaitement maternel dès la naissance et de le prolonger aussi longtemps que possible. C’est pourquoi je propose qu’une information sur les vertus de l’allaitement maternel soit systématiquement délivrée aux parents dans les maisons d’enfants à caractère sanitaire.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’allaitement maternel a progressé de 50 % en vingt ans en France : le pourcentage des mères qui le pratiquent est passé de 50 % à 74 %. Nous pouvons en déduire que l’information sur les vertus de l’allaitement maternel ne circule pas mal. Votre amendement, madame Boyer, me pose deux problèmes : d’une part, vous restreignez la mesure à des maisons d’enfants à caractère sanitaire ; d’autre part, vous insérez cette disposition dans un code de la santé publique qui traite des lactariums. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS129 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à créer une obligation pour les crèches de nourrir les nourrissons au lait maternel lorsque les parents le souhaitent. Il s’agit de favoriser la poursuite de l’allaitement le plus longtemps possible, autant que les parents le souhaitent, en particulier dans les structures d’accueil collectif. Il faut faire en sorte que le règlement intérieur de ces établissements n’interdise pas, comme cela a malheureusement été bien souvent le cas, le recours à l’allaitement maternel.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Une telle mesure est inapplicable, car elle suppose que toutes les crèches et tous les conseils généraux de France soient équipés de moyens de stockage de lait maternel en quantité suffisante. Je suis surpris que l’amendement n’ait pas été déclaré irrecevable en application de l’article 40.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS463 de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. La politique nutritionnelle nécessite la mobilisation des acteurs majeurs de la santé que sont les organismes complémentaires de l’assurance maladie, même si l’État en reste le pilote. Cet amendement, qui tend à renforcer la démocratie sanitaire, propose la concertation préalable de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) et de l’Union nationale des organismes complémentaires d’assurance maladie (UNOCAM) dans l’établissement du PNNS.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. La proposition est redondante avec les dispositions prévues dans la stratégie nationale de santé.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 5 ter
(art. L. 3232-4-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Promotion des modes de déplacement actifs par les campagnes d’information menées dans le cadre de la prévention de l’obésité et du surpoids

Établi par un amendement présenté par M. Denis Baupin et les commissaires du groupe Écolo, l’article 5 ter insère dans le titre unique relatif à la nutrition et à la santé du livre II bis consacré à la lutte contre les troubles du comportement alimentaire de la troisième partie du code de la santé publique un article L. 3232-4-1, nouveau, qui prévoit que les campagnes d’information menées dans le cadre de la prévention de l’obésité et du surpoids doivent encourager l’activité physique régulière en intégrant un volet de promotion des modes de déplacement actifs, notamment le vélo et la marche. 

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La Commission examine l’amendement AS376 de M. Denis Baupin.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à promouvoir le vélo et la marche comme une activité physique régulière, notamment lors des mobilités quotidiennes. Cette mesure permet de faire d’une pierre deux coups : on évite de rejeter dans l’air des polluants qui sont nocifs pour la santé ; on améliore sa condition physique et donc son état de santé, comme le démontrent de nombreuses études de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable sous réserve d’en modifier quelque peu la rédaction en remplaçant « modes actifs » par « modes de déplacement actifs ».

L’amendement rectifié est celui-ci : « Après l’article L. 3232-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232-4-1 ainsi rédigé : « Art. L. 3232-4-1. – Ces campagnes doivent intégrer un volet de promotion des modes de déplacement actifs, notamment le vélo et la marche, dans l’encouragement de l’activité physique régulière. »

M. Jean-Louis Roumegas. J’approuve cette modification.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

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Après l’article 5 ter

La Commission examine l’amendement AS1673 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement vise à interdire aux agences d’employer sur le territoire français des mannequins dont la santé serait mise en danger par un état de dénutrition tel que défini par l’OMS.

L’exercice d’une activité de mannequin serait interdit à « toute personne dont l’indice de masse corporelle (IMC), établi en divisant son poids par sa taille élevée au carré, serait inférieur à un niveau défini par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail, après avis de la Haute autorité de santé (HAS). » En dessous de ce niveau, l’état de santé du mannequin serait jugé incompatible avec l’exercice d’un travail.

Les employeurs qui ne veilleraient pas au respect de cette interdiction pourraient encourir une peine allant jusqu’à six mois de prison et 75 000 euros d’amende.

Nous reviendrons plus tard sur les troubles du comportement alimentaire, notamment l’anorexie. Cet amendement, qui a suscité beaucoup de commentaires, ne vise pas à punir, à guérir ou à empêcher l’anorexie. Mais nous constatons que l’anorexie est malheureusement fréquente dans un milieu professionnel où elle résulte souvent de pressions très fortes sur les mannequins. À l’instar de ce qui a été fait en Espagne, en Italie, en Israël ou en Belgique, nous voulons modifier le code du travail pour mettre fin à ces pratiques.

M. Élie Aboud. J’approuve l’esprit de cet amendement, mais sa rédaction me gêne, car l’anorexie mentale ne se définit pas que par l’IMC. Sur le plan scientifique, cela me dérange beaucoup que l’on en vienne à associer le diagnostic d’anorexie mentale à un chiffre précis.

M. Olivier Véran, rapporteur. En fait, je voulais proposer de remplacer « un niveau » par « des niveaux ». Le début de l’article L. 712321 serait donc ainsi rédigé : « L’exercice d’une activité de mannequin est interdit à toute personne dont l’indice de masse corporelle, établi en divisant son poids par sa taille élevée au carré, est inférieur à des niveaux définis par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail, après avis de la Haute autorité de santé. » Le niveau de l’IMC peut en effet varier selon les âges.

Monsieur Aboud, nous parlons d’état nutritionnel mettant en danger la santé, voire la vie, des personnes qui travaillent, pas d’anorexie. L’OMS définit trois stades de dénutrition qui correspondent à des niveaux d’IMC ; ce sont des indicateurs reconnus dans de nombreux pays pour déterminer l’état de santé.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement m’inquiète, car il établit une discrimination morphologique dans le droit du travail. Nous avons tous dans notre entourage des personnes d’une grande maigreur. Imaginez l’effet d’un tel amendement sur cette catégorie de nos compatriotes. La loi va définir un poids, un tour de taille et bientôt une longueur de fémur. Revenons sur terre !

La Commission rejette l’amendement.

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Article 5 quater
(art. L. 3232-9 du code de la santé publique)

Prévention précoce de l’anorexie mentale
et lutte contre la valorisation de la minceur excessive

Établi par un amendement du rapporteur et de Mmes Coutelle, Olivier et Doucet, l’article 5 quater insère, dans le livre II bis consacré à la lutte contre les troubles du comportement alimentaire de la troisième partie du code de la santé publique, un article L. 3232-9, nouveau, qui prévoit que la politique de santé contribue à la prévention et au diagnostic précoce de l’anorexie mentale et des troubles des conduites alimentaires. Il précise en outre que la lutte contre la valorisation de la minceur excessive participe de cet objectif.

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La Commission examine l’amendement AS1674 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il s’agit d’affirmer dans le code de la santé publique, à la suite des articles consacrés à la prévention de l’obésité et du surpoids, que la politique de santé contribue à la prévention de l’anorexie mentale et que la lutte contre la valorisation de la minceur excessive participe de cet objectif.

M. Jean-Pierre Door. J’interviens sur cet amendement faute d’avoir pu le faire sur le précédent. On ne peut que s’opposer à l’emploi de jeunes femmes anorexiques, extrêmement maigres, par les agences de mannequins, mais les mesures proposées dans ces amendements ne relèvent pas de la loi. En revanche, la HAS pourrait définir précisément l’anorexie mentale et le morphotype secondaire lié à cette maladie, se prononcer sur sa compatibilité avec l’exercice d’un travail, et nous conseiller sur la marche à suivre.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 5 quater

La Commission examine l’amendement AS1179 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. L’UMP avait déposé une proposition de loi sur le sujet en 2008, mais le texte est resté dans les tiroirs de l’Assemblée nationale, n’allant même pas jusqu’au Sénat. Rien ne nous empêche d’y revenir aujourd’hui pas le biais d’amendements à ce projet de loi sur la santé. Cet amendement vise à combattre l’incitation ou la provocation à la maigreur excessive via tout type de supports, notamment ces sites internet connus sous le nom de « pro-ana ». Il s’agit de créer un nouveau délit dans le code pénal, permettant de faire condamner ceux qui incitent à la maigreur excessive.

M. Bernard Accoyer. Chacun sait que l’anorexie mentale est une maladie psychogène grave, voire fatale. Lutte-t-on contre une maladie par la loi ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Tout le monde est conscient de l’importance de l’enjeu : il s’agit de lutter contre toutes les formes de pression sociale qui peuvent entraîner les adolescents – des adolescentes dans 90 % des cas – dans des troubles de dénutrition qui peuvent mettre leur vie en danger. On estime que 30 000 à 40 000 personnes souffrent d’anorexie.

Nous venons d’adopter un amendement très important qui intègre la lutte contre l’anorexie dans les objectifs de santé publique. Tout ce qui peut permettre de protéger des personnes en situation de fragilité face au risque de survenue de troubles des conduites alimentaires doit être examiné. En revanche, les études sociologiques montrent que s’attaquer à des sites internet ou à des blogs – tenus pour la plupart par des jeunes filles qui souffrent d’anorexie et qui y trouvent en moyen d’expression – n’est pas une solution adaptée.

L’amendement que nous venons d’adopter nous permet d’identifier les vecteurs de communication qui pourraient être dangereux en termes de signaux envoyés au jeune public et il nous offre la possibilité d’agir. L’amendement sur le mannequinat, qui sera rediscuté en séance, prévoit de sanctionner des employeurs qui pousseraient à la dénutrition excessive des personnes sous contrat.

Celui dont nous débattons s’établit dans un article du code pénal qui contient une disposition sur le délaissement d’une personne hors d’état de se protéger. Continuons à y travailler, sur la forme et sur le fond, afin de parvenir à une situation d’équilibre qui nous permettrait d’avancer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS261 rectifié de Mme Brigitte Allain.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement porte sur un problème qui concerne encore plus de personnes que le précédent : la dénutrition des personnes âgées. La dénutrition est un état pathologique qui touche près de 800 000 personnes en France et constitue l’un des principaux facteurs de perte d’autonomie chez les personnes âgées. Il s’agit d’inscrire clairement cette priorité dans la politique de santé publique et de commencer à y travailler sérieusement.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avec cet amendement, nous courons encore le risque d’additionner les déclarations de caractère prioritaire dans une thématique donnée. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS128 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement vise à prévoir l’indication du contenu calorique des produits alimentaires transformés dans les messages publicitaires. Il s’agit d’améliorer l’information des consommateurs, afin de leur permettre d’effectuer des choix éclairés favorables à l’équilibre nutritionnel. C’est un moyen de renforcer la prévention en matière de santé en portant sa part dans les dépenses de santé de 6,5 % à 10 %, et de faire de la lutte contre l’obésité une priorité de santé publique.

Je propose donc que soient insérés les mots « et l’indication dans les messages publicitaires du contenu calorique des produits pour les produits alimentaires transformés » après le mot « publicité » dans l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Dans un autre amendement, qui s’inscrit dans la même logique, je propose que le contenu calorique des produits transformés soit indiqué sur le devant du paquet et pour 100 grammes.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’apport énergétique d’un aliment n’est que l’une des composantes de l’impact sur la santé, et le score nutritionnel paraît plus pertinent. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS132 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement prévoit l’obligation pour l’ensemble des chaînes publiques et privées de radio et de télévision de diffuser gratuitement les messages de l’INPES.

M. Arnaud Robinet. C’est déjà le cas. Les messages de prévention de l’INPES, sur l’alimentation notamment, sont diffusés sur les chaînes jeunesse.

Mme Valérie Boyer. Mais cette diffusion est payante.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS150 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement prévoit que les conventions conclues entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et les opérateurs privés comportent des dispositions en faveur du respect de la diversité corporelle. Les médias valorisent parfois de manière excessive un idéal de minceur qui peut induire des troubles du comportement alimentaire et accentuer le mal-être des personnes obèses.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS137 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Les conventions conclues entre le CSA et les opérateurs privés doivent également porter sur les mesures en faveur de l’information, l’éducation à la santé, l’équilibre nutritionnel ainsi que la lutte contre l’obésité et le surpoids.

Je reviens sur l’amendement précédent. Je ne comprends pas pourquoi l’INPES est obligé de payer pour que ses messages de santé publique à l’adresse des jeunes soient diffusés sur les chaînes publiques. Les moyens de l’INPES sont très loin d’égaler ceux dont dispose l’industrie agroalimentaire pour vanter ses produits.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS149 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement impose aux sociétés du secteur public de la communication audiovisuelle de mettre en œuvre des actions en faveur de la diversité corporelle.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

La Commission examine l’amendement AS136 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Ces sociétés doivent également mener des actions en faveur de l’information, l’éducation à la santé, l’équilibre nutritionnel ainsi que la lutte contre l’obésité et le surpoids.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS134 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement prévoit l’utilisation d’une partie du temps d’antenne libéré par la suppression de la publicité sur les chaînes de télévision publiques pour diffuser des messages ou programmes d’information et d’éducation à la santé relatifs à la lutte contre l’obésité et le surpoids, l’équilibre nutritionnel et la promotion de l’activité physique. Ces messages pourraient faire l’objet d’une labellisation par l’INPES. Cette mesure, qui n’occasionne aucun coût supplémentaire, permettrait de faire connaître au public les objectifs de santé publique et de valoriser le travail de l’INPES.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AS1221 de M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. La consommation de fruits et légumes par les enfants et les adolescents demeure insuffisante. La suppression des distributeurs automatiques de boissons sucrées et de barres chocolatées dans les établissements scolaires était une mesure judicieuse pour lutter contre l’obésité. Mais, afin de favoriser la consommation de fruits et légumes, il est proposé d’autoriser les distributeurs pour la vente de ces derniers, entiers ou transformés, sans adjonction de sucre ni d’additifs ou de conservateurs.

M. Arnaud Robinet. En la matière, les collectivités locales peuvent agir. Dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, la mairie de Reims a ainsi décidé d’offrir à tous les enfants un goûter, établi avec une nutritionniste et composé de produits régionaux.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Les distributeurs ont été supprimés en 2004 pour lutter contre le grignotage des élèves. Il ne semble pas opportun de les réintroduire, quel que soit le produit consommé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS139 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement entend faire de la lutte contre l’épidémie d’obésité et de surpoids la grande cause nationale 2016.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cela ne relève pas de la loi. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS161 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Aux termes de cet amendement, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) doit mener des études sur les discriminations à l’égard des personnes obèses.

Cette question n’est pas marginale puisqu’un Français adulte sur deux, soit environ 25 millions de personnes, est en surcharge pondérale, et que plus d’un adulte sur six est obèse, soit environ 8 millions de personnes. Or les représentants d’associations de personnes obèses qui ont été auditionnés par la mission d’information ont fait état de nombreuses discriminations dans l’emploi et dans l’accès au crédit, à l’assurance, aux soins, aux transports, aux salles de sport.

Malgré quelques travaux universitaires, il est encore difficile de prendre la mesure réelle des discriminations dont sont victimes les personnes obèses ou en surpoids. Il serait souhaitable que la HALDE les étudie.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est difficile de demander à une institution qui a été supprimée de se mobiliser. Le Défenseur des droits, qui a pris sa succession, est déjà compétent à l’égard de toutes les discriminations, y compris celles liées à l’obésité.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS258 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport sur l’application de la réglementation européenne sur les nanomatériaux. Ces matériaux sont massivement utilisés dans l’industrie
– 400 000 tonnes en 2014 –, y compris dans des produits de consommation quotidienne, comme les cosmétiques. L’obligation d’information des consommateurs n’est, semble-t-il, pas toujours respectée par les fabricants. Nous souhaitons que le Gouvernement s’engage à étudier ce problème.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Le recours aux nanomatériaux est déjà soumis à des obligations déclaratives.

La Commission rejette l’amendement.

Mme la ministre. Avant d’en venir aux articles relatifs au développement du dépistage et à la lutte contre les addictions, je souhaite répondre à la question posée par M. Accoyer : peut-on lutter contre la maladie par la loi ? Après l’examen de dizaines d’amendements, je tiens à rappeler la logique dans laquelle s’inscrit le Gouvernement. Le Gouvernement s’engage avec force à faire de la prévention un axe majeur de la politique de santé. Et, monsieur Accoyer, cela passe par la loi.

Contrairement à la loi de 2004, le Gouvernement n’entend pas multiplier les objectifs, plus ou moins louables, au risque de perdre de vue les priorités. La priorité réside dans la lutte contre les inégalités de santé dès le plus jeune âge. C’est la raison pour laquelle nous mettons l’accent sur la lutte contre le tabagisme, l’alcoolisation excessive, l’obésité et l’exposition aux risques environnementaux.

Il ne s’agit pas de nier l’existence d’autres objectifs susceptibles d’être poursuivis. Mais nous avons délibérément choisi de restreindre leur nombre et de nous concentrer sur les politiques, les outils et les systèmes d’évaluation qui doivent être mis en place.

La série d’amendements qui viennent d’être présentés, pour certains très intéressants, obéit à la logique de la loi de santé publique de 2004 consistant à établir des plans – plus d’une centaine sont répertoriés aujourd’hui. J’ai souhaité rompre avec cette logique pour mieux afficher nos priorités. Ce choix justifie les avis que j’exprimerai en séance publique sur les amendements. À partir de la colonne vertébrale que constitue la lutte contre les inégalités, je privilégie l’efficacité des outils plutôt que la richesse des objectifs.

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Chapitre Ierbis
Lutter contre le tabagisme

La Commission des affaires sociales a adopté seize amendements portant articles additionnels après l’article 5, constituant désormais un chapitre Ier bis au sein du titre Ier, intitulé « Lutter contre le tabagisme ».

Treize de ces amendements ont été déposés par le Gouvernement, et tendent pour l’essentiel à mettre en œuvre certaines des mesures du Programme national de réduction du tabagisme (PNRT), présenté en Conseil des ministres le 25 septembre dernier par la ministre de la Santé, et qui s’inscrit lui-même dans le cadre du Plan cancer 2014-2019 (21). Il faut rappeler que le tabac tue 73 000 personnes par an en France, soit 200 personnes par jour. Le PNRT constitue à cet égard le premier plan ambitieux de lutte contre le tabagisme depuis 2008, et l’extension de l’interdiction de fumer dans les lieux publics fermés ; l’objectif est que les enfants nés dans vingt ans soient la première génération de non-fumeurs.

Quatre des dix mesures phares annoncées dans le PNRT ont ainsi été introduites dans le projet de loi : instauration du « paquet neutre », interdiction de fumer dans un véhicule en présence d’un enfant de moins de douze ans, encadrement du « vapotage » (restriction de la publicité et interdiction de l’usage de la cigarette électronique dans certains lieux publics), renforcement de l’encadrement des activités de lobbying de l’industrie du tabac.

Le nouveau chapitre Ier bis comporte également des mesures de transposition de la dernière directive « tabac » (22), en particulier l’interdiction dans les produits du tabac des arômes et des substances aux vertus supposément tonifiantes. Les autres mesures de cette directive seront transposées par ordonnance, l’article 53 habilitant le Gouvernement à cette fin.

Les initiatives du Gouvernement, qui ont toutes reçu le soutien du rapporteur, ont été complétées par celles des députés, qui ont fait adopter notamment l’interdiction des actions de mécénat de l’industrie du tabac dans le domaine de la santé (amendement du rapporteur), ou encore le renforcement de l’interdiction d’implantation de débits de tabac à proximité de certains lieux (amendement ayant pour première signataire notre collègue Michèle Delaunay).

Article 5 quinquies

● L’article 5 quinquies, introduit à l’initiative du Gouvernement, transpose en droit interne l’article 7 de la directive 2014/40 sur les produits du tabac. Il s’agit pour l’essentiel d’interdire les arômes dans les cigarettes, le tabac à rouler, les filtres et le papier à cigarettes.

Sera également interdite la présence de colorants et de composants aux vertus énergisantes (vitamines, taurine), qui laissent croire que le tabac peut avoir un effet bénéfique.

Ces dispositions entreront en vigueur le 20 mai 2016, date limite de transposition de la directive. Cette date est toutefois repoussée de quatre ans pour les produits aromatisés représentant plus de 3 % des ventes dans leur catégorie (c’est-à-dire le menthol).

Sur le plan légistique, cela se traduit par la suppression du dernier alinéa de l’article L. 3511-2 du code de la santé publique – qui interdit les cigarettes aromatisées dont la teneur en ingrédients donnant une saveur sucrée ou acidulée dépasse des seuils fixés par décret – et le rassemblement en un nouvel article L. 3511-2-3 des nouvelles dispositions, beaucoup plus ambitieuses.

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La Commission examine, en présentation commune, les amendements AS1402, AS1406 et AS1408 du Gouvernement.

Mme la ministre. La lutte contre le tabagisme est l’une de nos priorités de santé publique, et j’ai présenté au mois de septembre dernier le programme national de réduction du tabagisme (PNRT).

Je ne reviens pas ici sur les chiffres, même s’ils justifieraient que l’on s’y arrête. Mais je veux insister sur le fait que la France est l’un des plus mauvais élèves de l’Europe en matière de lutte contre le tabagisme. Les arguments que j’entends aujourd’hui reviennent pourtant à laisser perdurer une situation à laquelle nous ne pouvons pas nous résoudre. De fait, 73 000 morts par an, cela peut paraître abstrait. Disons alors très concrètement que ce sont 200 personnes qui meurent chaque jour : si, chaque matin, la radio et la télévision annonçaient la mort de 200 personnes dans un accident quelconque, l’émotion serait immense. C’est exactement ce qui se passe.

Le paquet neutre, que nous voulons introduire en France, entraînera des changements significatifs. Il s’inscrit dans le cadre d’une politique d’ensemble : nous ne lutterons pas contre le tabac par une seule mesure, mais nous devons changer de braquet.

L’Australie a lancé le paquet neutre avec, contrairement à ce que j’entends, des résultats tout à fait significatifs. En Grande-Bretagne, le Parlement a adopté hier le paquet neutre, et la notification européenne a été faite. L’Irlande a également notifié aux institutions européennes sa volonté de passer au paquet neutre. D’autres pays qui ne sont pas membres de l’Union, comme la Norvège, vont adopter la même démarche. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) devrait faire connaître dans les tout prochains jours son intérêt.

Je suis évidemment prête à répondre à des questions précises sur les résultats de l’introduction du paquet neutre, notamment en Australie.

M. Denis Jacquat. Pourquoi, madame la ministre, introduire cette mesure par amendement plutôt que par des articles du projet de loi ? Le sujet est important.

Nous souhaitons, pour notre part, une transposition des directives européennes : pourquoi aller plus loin quand la loi Évin est encore mal appliquée dans notre pays ? Il est interdit de fumer dans les gares, et l’on y voit pourtant des employés de la SNCF même fumer…

On peut également s’étonner que les excellentes propositions des deux rapports que Jean-Louis Touraine et moi-même avons rédigés, et qui ont été adoptés à l’unanimité, ne soient pas reprises par le Gouvernement. En particulier, notre pays détient le record d’Europe de femmes enceintes qui fument, surtout au dernier trimestre de grossesse, alors que l’on sait parfaitement que des pathologies graves peuvent en découler.

S’agissant enfin du paquet neutre, le second de ces rapports estimait qu’il fallait plus de recul, afin d’analyser cette mesure et ses conséquences de la façon la plus objective possible.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Si je puis me permettre, si ces amendements sont votés, ils deviendront des articles de la loi.

M. Olivier Véran, rapporteur. Mme la ministre a donné toutes les explications nécessaires. Avis favorable aux trois amendements.

M. Élie Aboud. Nous sommes tous pour la santé publique. Mais il existe une directive européenne : respectons-la. Nous manquons de recul sur l’expérience australienne : pourquoi nous différencier des autres pays européens ?

Nous estimons même, pour notre part, que les surtaxes sur le tabac devraient être fléchées et leur recette aller à la prévention en matière de santé publique, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

La Commission adopte successivement les amendements (23).

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Après l’article 5 quinquies

La Commission est saisie de l’amendement AS113 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement vise à transposer les nouvelles exigences imposées par la directive 2014/40/UE concernant l’aspect et le contenu des paquets de cigarettes et de tabac à rouler.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je pense que vous pourriez retirer cet amendement : nous venons d’adopter le paquet neutre, ce qui devrait combler vos attentes, puisque cela va au-delà de ce que vous proposez.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS5 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement vise à réécrire l’article L. 3511-6 du code de la santé publique, afin de prendre en compte les modifications apportées par la directive européenne 2014/40/UE déjà citée, et donc de supprimer l’étiquetage relatif aux teneurs en goudron, nicotine et monoxyde de carbone sur les paquets.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable, comme à toute la série d’amendements visant à transposer cette même directive.

M. Jean-Louis Roumegas. Il faut repousser cet amendement, qui se retranche derrière la directive, laquelle ne nous interdit pas les étiquetages complémentaires, pour réduire l’information sur les dangers du tabac. Je le dis au nom d’un groupe de travail réunissant des députés de tous bords politiques qui se sont penchés sur ces questions. On se demande d’ailleurs d’où viennent ces amendements.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, vous dites que le paquet neutre a fait ses preuves en Australie. Cette mesure a-t-elle été accompagnée par d’autres ? De plus, l’Australie est un pays très isolé, ce qui n’est pas le cas du nôtre. Quelles que soient les mesures que vous prendrez en France, elles seront vaines si elles ne s’inscrivent pas dans un mouvement européen. Élue d’un département frontalier, je peux vous assurer que les gens iront acheter leurs cigarettes hors de nos frontières. C’est au niveau européen qu’il faut agir.

Mme la ministre. Je ne voudrais pas caricaturer vos propos, mais si l’on vous suit, alors il ne faudrait rien faire ! Oui, l’Australie a accompagné l’introduction du paquet neutre d’autres mesures, tout comme nous le faisons. Nous agissons notamment contre les trafics et contre l’achat frauduleux de cigarettes sur internet. Les douanes font leur travail. Contrairement à la recommandation de la Commission européenne, d’ailleurs, nous avons plafonné le nombre de cartouches de cigarettes qui peuvent être importées pour la consommation individuelle. Notre politique tient compte de la situation de notre pays. La Grande-Bretagne, la Norvège, l’Irlande vont s’engager dans la même démarche, dont nous pensons qu’elle s’imposera progressivement en Europe.

Nous pouvons être pionniers et montrer la voie en matière de santé publique.

M. Denis Jacquat. J’ajoute aux propos de Mme la ministre que l’Australie a augmenté de façon extrêmement importante le prix du paquet de cigarettes.

M. Dominique Tian. Je ne suis pas favorable au paquet neutre, qui n’est pour moi qu’une façon pour la ministre de faire du marketing sanitaire, de faire croire qu’elle agit. En vérité, nous sommes face à un échec français : celui de la prévention et de la médecine scolaire. Les adolescents boivent de plus en plus et fument de plus en plus. Les mineurs n’ont pas le droit d’acheter des cigarettes, mais ils envoient un adulte : celui-ci saura déjà quelle marque il doit acheter ! Notre politique de prévention est lamentable, notre médecine scolaire est l’une des plus mauvaises d’Europe, et l’on veut maintenant faire porter le chapeau de cet échec aux buralistes. La France est la lanterne rouge de l’Europe pour l’information et la prévention. Rien ou presque n’est fait pour les adolescents. Ce n’est pas aux buralistes de payer le prix de l’échec de la médecine scolaire !

M. Jean-Louis Touraine. J’irai dans le sens de M. Tian : nous constatons ici l’échec du mandat précédent, durant lequel la politique de lutte contre le tabac s’est effondrée dans notre pays, avec des résultats pitoyables.

S’agissant du paquet neutre, j’entends ici quelques arguments que j’avais déjà entendu développer par l’industrie du tabac lorsque j’ai présenté une proposition de loi sur le paquet neutre, il y a un peu plus de quatre ans. À ce moment, nous aurions véritablement été des pionniers. Or l’argument de l’industrie du tabac, et de ceux qui relayent ses arguments, c’est qu’il ne fallait pas être le premier pays au monde : l’expérience devait d’abord être menée ailleurs. Aujourd’hui, l’Australie s’est lancée, nous allons le faire en même temps que l’Irlande et la Grande-Bretagne. Je suis très fier que nous soyons tout de même dans le peloton de tête des pays qui prennent des mesures responsables.

M. Bernard Accoyer. Je souhaite proposer un sous-amendement à l’amendement AS5 de M. Cinieri, qui consisterait à ajouter : « Toute mesure allant au-delà des dispositions de la directive européenne visée ne sera mise en œuvre qu’après que la France ait entrepris des démarches auprès de la Commission pour viser à l’harmonisation européenne dans la lutte contre le tabagisme. » Nous constatons tous les jours les conséquences sur notre économie, sur nos entreprises de la sur-transposition des directives européennes. Nous faisons comme si nous n’appartenions pas maintenant à une communauté ! La France s’honorerait à mener un combat qui irait bien au-delà de ses frontières contre la consommation de tabac.

Nombre d’entre nous sont élus dans des départements frontaliers : nous constatons que les trafics deviennent un vrai problème, et que la consommation augmente du fait même de la multiplication des restrictions – les plus jeunes veulent souvent braver les interdits. La France s’honorerait en cessant de donner des leçons au monde entier et en entraînant l’Europe dans une démarche commune, qui serait évidemment beaucoup plus puissante.

M. Jean-Louis Roumegas. Je suis opposé à ce sous-amendement. Il faut, c’est vrai, travailler à une harmonisation européenne, mais celle-ci doit se faire par le haut. Aujourd’hui, elle n’existe pas, et les différences de prix sont importantes – or c’est contre celles-ci qu’il faudrait lutter pour défendre les buralistes. Le principal problème qu’ils rencontrent, en effet, ce n’est pas la contrefaçon, qui n’existe quasiment pas, mais la contrebande, c’est-à-dire la revente de paquets de cigarettes achetés moins chers dans d’autres pays européens. Or le paquet neutre rendra la vente de produits de contrebande beaucoup plus visible : c’est donc plutôt une bonne nouvelle pour les buralistes français.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le débat est riche et intéressant. Toutefois, j’ai du mal à déterminer si certains arguments visent à défendre la santé publique et les consommateurs ou plutôt une industrie et l’économie. Nous sommes en commission des affaires sociales pour débattre d’une loi relative à la santé : fixons-nous l’objectif d’améliorer la santé de nos concitoyens, et concentrons-nous là-dessus au lieu de nous intéresser à la santé économique des cigarettiers ou des buralistes – même si ces derniers, vous le savez bien, monsieur Tian, sont l’objet de toutes les attentions.

Le commissaire européen à la santé a exprimé son plus vif intérêt pour le paquet neutre tel que le propose la France, et notre pays peut s’enorgueillir d’être innovant, à la pointe de la lutte contre le tabac, rejoint d’ailleurs par la Grande-Bretagne. Le paquet neutre fait consensus sur le plan scientifique. Parlons de santé, et soyons attentifs à nos propos, car les Français nous écoutent.

Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de débattre plus longtemps de la mesure que nous venons d’adopter sur le paquet neutre.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle rejette l’amendement AS5.

Elle en vient à l’amendement AS6 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement propose une standardisation des paquets telle qu’elle est prévue par la directive européenne déjà citée, qui devra être transposée dans les législations nationales avant le 20 mai 2016.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AS12, également de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement important vise à inscrire dès à présent dans la loi les principales caractéristiques du paquet de tabac dit « paquet directive », des précisions pouvant ensuite être apportées par ordonnance.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS323 de Mme Martine Carrillon-Couvreur, AS334 de M. Jean-Pierre Door et AS502 de M. Dominique Tian.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Les contrebandes et trafics divers constituent effectivement un problème important. Dans un département voisin du mien, je sais qu’il existe des transports réguliers de cigarettes de contrebande.

Depuis plusieurs années, la France a mené des politiques de lutte contre le tabagisme ; elles ont permis d’avancer, mais tout n’est pas résolu. L’éducation, la prévention, l’accompagnement, à destination des jeunes en particulier, sont essentiels. Nous devons nous demander comment établir un compromis entre les exigences de santé publique et la protection des libertés fondamentales. Sur la question du paquet neutre, les photos et dessins que l’on y voit m’ont choquée, car ils sont terribles. Le paquet européen me paraît une bonne idée. Nous devons également nous demander comment faire prendre conscience, notamment aux jeunes, des risques reconnus par tous du tabac consommé avec excès.

M. Jean-Pierre Door. Mon amendement est identique. La lutte contre le tabagisme est évidemment une nécessité – et nous avons été confrontés pendant des dizaines d’années au tabagisme dans le milieu professionnel. En revanche, madame la ministre, la raison doit prévaloir lorsque des mesures ne s’appuient pas sur des démonstrations scientifiques solides. Même Mme Carrillon-Couvreur signale dans l’exposé des motifs de son amendement que les résultats australiens sont trop mal connus pour dire que tout va bien du côté du Pacifique. Hier, le parlement belge a refusé la mise en place du paquet neutre pour privilégier le paquet « directive », c’est-à-dire transposer purement et simplement la directive. Vous avez d’ailleurs signé, je crois, madame la ministre, un arrêté qui confirme que la France mettra en place ce paquet dès mai 2016, comme tous les pays de l’Union. C’est une alternative au paquet neutre, et ce sera un pas décisif.

M. le secrétaire d’État au budget a, hier, présenté les résultats du travail des douanes en 2014 et noté que le programme national de réduction du tabagisme va porter atteinte aux efforts français en augmentant la contrefaçon et le marché parallèle. Ce n’est pas moi qui le dis ! Même en Australie, le marché parallèle a augmenté, atteignant près de 15 %. Nous sommes à 25 %. Or c’est un véritable fléau.

À mon sens, le paquet neutre n’est pas la solution. Je suis en revanche favorable au paquet « directive ». Nous voterons donc l’amendement de Mme Carrillon-Couvreur.

M. Dominique Tian. Je retire bien volontiers mon amendement, pour m’associer à celui de Mme Carrillon-Couvreur, qui est à mon sens un amendement d’équilibre, qui peut recueillir un vote unanime.

L’amendement AS502 est retiré.

Mme Michèle Delaunay. Je suis choquée que l’on évoque les libertés fondamentales quand le seul but des fabricants de cigarettes est de faire entrer les consommateurs en addiction et de les y maintenir. De plus, ces deux amendements nous font perdre la possibilité de traçabilité par l’identification du paquet neutre français, différent de celui de nos voisins européens. Ne reculons sur aucun point : nous serons un jour comptables de ce que nous avons et n’avons pas fait !

M. Bernard Accoyer. Le sous-amendement que je propose pourrait mettre tout le monde d’accord. Il viendrait compléter le II de l’amendement de Mme Carillon-Couvreur, par les mots suivants : « après que la France ait engagé des démarches auprès de la Commission pour qu’elle aille plus loin dans un plan européen de lutte contre le tabagisme ». Ainsi se trouveraient réunis l’objectif du Gouvernement, qui souhaite aller plus loin que la directive européenne, les exigences de réalisme qui viennent d’être rappelées par les déclarations du ministre chargé du budget, mais aussi les problèmes de contrebande ou d’achats légaux à l’étranger.

Dans mon département, la Haute-Savoie, un habitant peut ramener, à chaque passage de la frontière – quotidien pour 100 000 d’entre eux – trois cartouches de cigarettes. Cette pratique, qui relève de la libre circulation des biens et des personnes, n’a rien d’un trafic illégal. Il est dommage que le Gouvernement choisisse d’ignorer la démarche européenne alors que c’est à ce niveau que nous pourrons franchir, dans bien des domaines, y compris celui de la santé publique, des obstacles qui handicapent notre pays.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mon département, frontalier de l’Espagne, fait face au même problème. Le paquet neutre révèlera si les cigarettes ont été achetées en contrebande ou chez un buraliste.

M. Bernard Accoyer. Non, l’achat à l’étranger est légal !

M. Jean-Louis Roumegas. S’il faut rechercher une harmonisation par le haut en Europe, utiliser cet argument pour négliger les possibilités que nous offre la législation nationale constitue une erreur. Le paquet neutre permettra bel et bien de mieux lutter contre les ventes illégales : s’il est permis d’acheter les cigarettes à la frontière, il est interdit de les revendre, ce qui est pourtant une pratique très courante. Le paquet neutre rendra plus visible l’origine des paquets achetés, et les buralistes l’ont bien compris.

M. Olivier Véran, rapporteur. Un arrêté datant d’il y a quinze jours se met en conformité avec l’exigence de recouvrir 65 % de la surface du paquet par les avertissements sanitaires. Avec la mise en place du paquet neutre, la taille de ces informations de signalétique évoluera ; vous pouvez donc, Mme Carillon-Couvreur, retirer votre amendement.

Mme Martine Carillon-Couvreur. Compte tenu des explications du rapporteur, je retire l’amendement. J’espère toutefois que la présentation du paquet neutre ne sera pas aussi traumatisante que ce que l’on a pu voir. Ce n’est pas ainsi que l’on aidera les jeunes à arrêter de fumer.

L’amendement AS323 est retiré.

M. Jean-Pierre Door. Le groupe UMP maintient l’amendement AS334. Outre la rectification proposée par M. Bernard Accoyer, il faudrait d’ailleurs également mentionner une harmonisation de la fiscalité et des prix à l’échelle européenne, afin d’aller le plus loin possible.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable au sous-amendement.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle rejette l’amendement AS334.

Elle en vient à l’amendement AS9 de M. Dino Cinieri.

M. Dominique Dord. Il s’agit de transposer dans la législation française les nouvelles exigences relatives à l’étiquetage, prévues par la directive européenne 2014/40/UE. Certes, les dispositions de l’amendement se rapprochent de mesures réglementaires tant elles vont dans le détail, mais nous souhaitons les livrer au débat.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je m’étonne de la vigueur avec laquelle l’opposition lutte contre le programme de réduction du tabagisme introduit dans la loi. Si, hier, certains d’entre vous ont défendu la loi Évin, aujourd’hui vous combattez tous ce programme de toutes vos forces.

Avis défavorable à l’amendement.

M. Jean-Pierre Door. Depuis hier, le climat de nos débats était serein, l’opposition tombant d’accord avec la majorité sur certains points ; aussi le groupe UMP est-il surpris des propos du rapporteur. Pour franchir ainsi la ligne jaune, a-t-il perdu ses nerfs ou cherchait-il à provoquer la suspension de séance pour passer des coups de téléphone en vue de retrouver une majorité ? Monsieur Véran, vous n’étiez pas là sous les précédentes législatures, mais l’ex-majorité a beaucoup fait pour la lutte contre le tabac. C’est d’ailleurs l’un de ses membres qui a mis en œuvre l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Vous n’avez donc pas le droit de tenir ce genre de propos déplacés, et devriez les regretter ; n’instaurez pas un climat délétère dans cette commission !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Les propos proférés hier à l’encontre de Mme la ministre étaient d’une toute autre ampleur que ceux du rapporteur. Ayant accompli un travail important sur ce texte, comprenez que nous puissions être émus par certains amendements de l’opposition derrière lesquels se trouvent les lobbies de la viticulture ou de l’industrie de la cigarette.

La Commission rejette l’amendement AS9.

Elle discute ensuite de l’amendement AS8 de M. Dino Cinieri.

M. Dominique Dord. Je ne comprends pas en quoi l’amendement précédent irait à l’encontre du programme national de réduction du tabagisme (PNRT). Les réponses du rapporteur relevant de la mauvaise foi, il ne faut pas vous étonner de notre réaction. En effet, l’amendement propose de rappeler, sur les paquets de cigarettes : « Fumer tue », « La fumée du tabac contient plus de 70 substances cancérigènes », de donner à ces avertissements une visibilité totale et d’obliger à ce que le message d’information couvre plus de 50 % des surfaces. Chacun devrait modérer ses propos afin de ne pas dégrader le climat de travail de notre commission.

Mme Michèle Delaunay. L’émotion ne vient pas seulement de la pression des lobbies, mais également de la gravité des problèmes sanitaires en question. M. Véran est médecin et très engagé dans ce combat.

M. Olivier Véran, rapporteur. Restons-en aux faits : le PNRT introduit le paquet neutre ; une série d’amendements que vous défendez visent, directement ou non, à en amoindrir l’effet. En proposant de diminuer la taille des messages sanitaires et de sortir du mode d’application du paquet neutre, ils s’opposent aux objectifs du plan.

Pour les mêmes raisons que j’ai émis et émettrai un avis défavorable aux amendements de cette teneur, je donne un avis défavorable à l’amendement AS8.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS10 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Je ne pensais pas que mes amendements allaient déclencher une tempête ! L’amendement AS10 vise à introduire les nouvelles règles d’étiquetage prévues par la directive européenne 2014/40/UE sur les produits du tabac autres que les cigarettes, le tabac à rouler et le tabac pour pipe à eau.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS112, également de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement tend à transposer dans notre droit, conformément à la même directive, les règles relatives à la présentation des produits du tabac.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement est satisfait par ceux du Gouvernement qui interdisent d’évoquer les arômes ou de mettre en avant les propriétés énergisantes, ainsi que par l’instauration du paquet neutre qui empêchera la ressemblance entre un paquet de cigarettes et un produit cosmétique. Peut-être pourriez-vous le retirer.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS1084 de M. Arnaud Richard, AS1318 de M. Jean-Louis Touraine, AS236 de M. Jean-Pierre Door et AS1156 de Mme Michèle Delaunay.

M. Arnaud Richard. Le tabagisme est responsable de la mort de 73 000 personnes chaque année en France, soit 200 personnes par jour. La politique de lutte contre ce fléau est un échec avéré et passer de 65 à 100 % de la surface du paquet dévolue aux avertissements n’y changera rien, les succès du paquet neutre étant liés à des mesures budgétaires.

L’objet de l’amendement, comme d’ailleurs celui du programme national de réduction du tabagisme, est de protéger les jeunes en les empêchant d’entrer dans le tabagisme. Il est l’expression d’un compromis entre les exigences de santé publique et la protection des libertés fondamentales. Considérant que le meilleur moyen d’arrêter de fumer est de ne pas commencer, nous proposons d’interdire aux mineurs de fumer et d’obliger les vendeurs de tabac à exiger un justificatif de l’âge de l’acheteur.

M. Jean-Louis Touraine. Nous proposons d’interdire aux personnes nées après le 1er janvier 2001 d’acheter du tabac. Si cette substance avait été découverte aujourd’hui, sa vente libre aurait été illicite puisqu’il n’existe aucun autre poison aussi mortel. Les derniers chiffres publiés dans la presse scientifique internationale de haut niveau montrent qu’il est responsable non de 73 000, mais de 90 000 morts chaque année en France, car il accroît l’incidence des cancers du sein ou de la prostate en plus de ceux du poumon et de la sphère ORL, sans parler de l’infarctus du myocarde ou des accidents vasculaires cérébraux. Aux États-Unis, ce sont près de 500 000 personnes qui meurent chaque année du tabac. Les deux tiers – et non la moitié – des fumeurs de longue durée mourront des conséquences de leur tabagisme : il n’y a donc pas de cause plus importante pour la santé publique que sa réduction.

L’OMS et la Ligue nationale contre le cancer ont formulé des propositions pour une évolution vers un monde sans tabac. Pour atteindre cet objectif, il est difficile, malgré les aides au sevrage, d’amener les fumeurs actuels à sortir de l’addiction ; en revanche, ceux qui n’ont pas commencé pourraient échapper à cette dépendance regrettable. N’ayant pas connu le tabac, ils ne seront pas privés du fait de son interdiction et continueront à rester à l’écart du maléfice que représente le tabagisme.

À ceux qui jugeraient cette mesure utopique, je rappelle que c’est ainsi qu’avait été qualifiée la proposition de loi sur le paquet neutre que j’avais déposée il y a quatre ans ; depuis, l’Australie a légiféré, l’Irlande, la Grande-Bretagne et aujourd’hui notre commission en font de même. La Chambre des communes anglaise discute d’une proposition identique ; quant aux Américains, ils envisagent de relever la majorité du tabac de dix-huit à vingt et un ans. L’utopie devient donc réalité. Cette mesure serait de nature à atteindre les objectifs du PNRT qui propose de réduire, dans un avenir proche, la part des jeunes fumeurs à 5 %.

M. Arnaud Robinet. M. Touraine évoque le recul de l’âge de la majorité pour acheter du tabac aux États-Unis, mais son amendement tel qu’il est rédigé tend purement et simplement à interdire la vente du tabac en France dans les années à venir. S’il ne s’agit pas d’un problème de rédaction, la majorité actuelle doit assumer sa volonté de prohiber totalement le tabac !

M. Élie Aboud. Si les amendements présentés en discussion commune visent tous à protéger les jeunes, ils sont très différents. Ainsi, la proposition d’Arnaud Richard d’inclure les cigarettes électroniques parmi les articles qu’il serait interdit de vendre aux mineurs mérite un débat. Pour ce qui est de l’amendement AS236, il propose que le jeune doive prouver sa majorité dans un bureau de tabac.

Mme Michèle Delaunay. Selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), 62 % des buralistes vendent du tabac aux mineurs, ce qui constitue un chiffre spectaculaire. L’amendement AS1156 vise à leur retirer l’excuse de la difficulté à évaluer l’âge du client : seule la carte d’identité fera désormais foi. Il permettra, en outre, de responsabiliser le consommateur : alors que deux fumeurs sur trois meurent des conséquences de leur tabagisme, cet achat ne peut pas être considéré comme anodin.

M. Dominique Tian. Monsieur Richard, interdire la vente de cigarettes électroniques à des mineurs alors qu’elles constituent un moyen d’éviter ou de diminuer la consommation de tabac ne me semble pas constituer une bonne mesure.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les sanctions prévues par l’amendement AS1084 à l’encontre d’un mineur surpris à fumer me semblent difficiles à mettre en œuvre ; je doute de leur pertinence. Indépendamment du fond, la rédaction de l’amendement en appelle le rejet : vous avez, sans doute par erreur, réécrit l’article L. 3511-2 en reproduisant les dispositions de l’article L. 3511-2-1, ce qui a pour effet mécanique d’écraser le L. 3511-2 qui comporte des dispositions importantes relatives à l’interdiction de certains produits ou certains modes de débit de tabac. Je vous suggère donc de le retirer.

Au-delà de la question de principe et des enseignements à tirer de l’expérience de la prohibition aux États-Unis, l’amendement AS1318 se heurte sans doute à une question de constitutionnalité, la différence de traitement selon la date de naissance étant difficilement justifiable. Avis défavorable.

Quant aux deux amendements suivants, je rejoins l’objectif de conditionner la vente de tabac au principe de contrôle de majorité. En effet, 80 % des fumeurs ont commencé à fumer avant l’âge de dix-huit ans, alors même que la vente de tabac est interdite aux mineurs. En revanche, il faudrait retravailler la rédaction afin de la rendre compatible avec le droit ; en l’occurrence, il conviendrait de préciser que c’est le vendeur qui exige du client qu’il prouve sa majorité, afin de ne pas faire porter la charge de la preuve sur le mineur. Si leurs auteurs acceptaient de les retirer, nous pourrions tous tomber d’accord sur une version consensuelle.

M. Arnaud Richard. Avoir présenté ces quatre amendements très différents en discussion commune ne favorise pas la compréhension mutuelle et le débat éclairé. Quoi de commun entre la proposition de M. Touraine de prohiber totalement le tabac en France, la mienne d’interdire aux mineurs de fumer et d’instaurer le contrôle de majorité, et celle de Mme Delaunay, qui insiste uniquement sur ce dernier point ?

Les arguments de M. Tian relatifs à la cigarette électronique m’apparaissent fondés, tout comme ceux du rapporteur sur la réécriture de l’article du code de la santé publique en question. Je retire donc mon amendement tout en insistant sur la nécessité de ne pas nous interdire, sachant que 80 % des fumeurs ont commencé à fumer avant dix-huit ans, d’explorer cette piste.

M. Jean-Louis Touraine. Les arguments du rapporteur sur l’inégalité entre générations ne tiennent pas : différentes générations ne jouissent pas de la même longévité, ni ne bénéficient des mêmes taux de pension de retraite. Néanmoins, je retire l’amendement pour le réécrire en insistant sur sa compatibilité avec notre droit, de façon à pouvoir le présenter en séance avec le soutien du rapporteur.

Les amendements AS1084, AS1318 et AS1156 sont retirés.

La Commission rejette l’amendement AS236.

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Article 5 sexies

● L’article 5 sexies apporte trois dispositions nouvelles, rassemblées pour des raisons légistiques en un article unique, car elles modifient toutes l’article L. 3511-3 du code de la santé publique.

Le et le a du du I, introduits à l’initiative du Gouvernement, étendent l’interdiction générale de publicité et de distribution gratuite des produits du tabac à la cigarette électronique et à ses recharges, qu’elles contiennent ou non de la nicotine. Cette interdiction connaîtra les mêmes exceptions que les autres produits du tabac (publicité permise dans la presse spécialisée, notamment). S’agissant pour l’essentiel (24) de la transposition du point 5 de l’article 20 de la directive, ces dispositions entreront en vigueur le 20 mai 2016 (III).

Le du I, introduit à l’initiative du Gouvernement, modifie le deuxième alinéa de l’article L. 3511-3, qui autorise les affichettes à l’intérieur des débits de tabac, par exception au principe général d’interdiction de la publicité pour les produits du tabac. Il s’agit ici de supprimer cette dérogation, qui peut inciter à la consommation les clients des débits de tabac, potentiellement venus acheter d’autres produits (presse, confiserie, etc.). Par coordination, le II abroge l’article 573 du code général des impôts, qui fonde la réglementation de la publicité à l’intérieur des débits de tabac. L’entrée en vigueur est immédiate, et non à la date du 20 mai 2016 ; cela résulte du fait que la réglementation de la publicité par affichage est laissée à l’appréciation des États membres, et donc non régie par la directive.

Le b du du I, introduit à l’initiative de notre collègue Michèle Delaunay et d’une trentaine de députés membres de la majorité (avec un avis de sagesse du rapporteur), modifie le 1° de l’article L. 3511-3 du code de la santé publique, qui prévoit que l’interdiction générale de propagande en faveur du tabac ne s’applique pas aux publications professionnelles. Il s’agit ici de supprimer cette dérogation pour les publications diffusées ou accessibles au-delà du réseau professionnel, ou ne respectant pas les avertissements sanitaires en vigueur. L’introduction de cette disposition est nourrie de l’expérience partagée des parlementaires, qui reçoivent régulièrement les publications des industries du tabac, bien que n’appartenant nullement à leur réseau professionnel.

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La Commission en vient à l’amendement AS1404 du Gouvernement.

Mme la ministre. Une des propositions du programme national de réduction du tabagisme, qui transpose pour l’essentiel la directive européenne, propose d’interdire la publicité pour la cigarette électronique à l’intérieur et à l’extérieur des points de vente. Un encadrement, que j’ai mis en application l’année dernière, interdit d’ores et déjà toute comparaison entre la cigarette électronique et le tabac ; il s’agit maintenant d’aller plus loin.

M. Dominique Tian. Cette proposition me paraît étonnante : alors que le tabac fait des ravages, le corps médical voit dans la cigarette électronique une bonne solution pour les fumeurs. Pourquoi en interdire la publicité ? Si les chiffres du tabagisme sont si mauvais en France, essayons toutes les pistes susceptibles d’en favoriser l’arrêt.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Il ne s’agit pas de statuer sur le caractère bénéfique ou nuisible du vapotage dans l’aide au sevrage, mais d’interdire des campagnes de publicité qui risquent d’en faire un mode d’entrée dans le tabagisme. On ne parle pas là d’un produit de consommation courante, mais d’une substance qui reste psychoactive, car la plupart des cigarettes électroniques contiennent de la nicotine. En autoriser la publicité pose un problème.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements AS1405 du Gouvernement et AS1149 de Mme Michèle Delaunay.

Mme la ministre. L’amendement AS1405 tend à interdire la publicité du tabac à l’intérieur des lieux de vente afin de lutter contre les achats impulsifs.

Pour revenir à la cigarette électronique, certains suggèrent en effet, puisqu’elle peut aider à sortir du tabac, de faire preuve d’une liberté totale à son égard. Cependant, si la plupart des experts français et internationaux considèrent qu’il faut en encourager l’utilisation par ceux qui souhaitent arrêter de fumer, ils pointent également la possibilité d’entrer dans le tabac par ce biais. Une étude de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) est en cours sur le sujet. En somme, la cigarette électronique est certes meilleure que le tabac, mais mieux vaut encore ne rien utiliser. Qui plus est, on peut supposer que les fumeurs majeurs savent comment se procurer des cigarettes électroniques, qu’elles fassent ou non l’objet de publicité.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Les experts du Réseau français de réduction des risques soulignent que le geste compte beaucoup dans l’addiction. On parle ainsi d’injecteurs compulsifs pour les héroïnomanes qui s’administrent des substances de substitution : le geste est consubstantiel de leur comportement et de leur addiction chimique au produit, faisant partie d’un même cercle infernal. Dans cette perspective, le fait d’utiliser des cigarettes électroniques constitue déjà un pas vers un tabagisme plus nocif.

M. Bernard Accoyer. Nous voterons contre cet amendement en espérant ne pas être traités de suppôts d’un prétendu lobby du tabac ! En l’absence de résultats dans d’autres domaines, le Gouvernement veut faire croire qu’il lutte efficacement contre tel ou tel problème de santé publique. Or sa proposition d’interdire de communiquer à l’intérieur même des bureaux de tabac nous fait glisser vers une politique de prohibition. Si vous accordiez la même attention à la lutte contre les drogues dures ou le cannabis – dont le paquet est par définition neutre –, nous pourrions comprendre votre démarche. Mais tel n’est pas le cas, et nous ne nous laisserons pas abuser par ce semblant de politique sanitaire.

La Commission adopte l’amendement AS1405.

En conséquence, l’amendement AS1149 tombe.

La Commission est saisie de l’amendement AS1160 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Monsieur Accoyer, il n’est pas question de prohibition, mais il est important d’assumer d’ores et déjà un objectif de sortie du tabac.

L’amendement AS1160 part du constat que les revues et magazines spécialisés négligent régulièrement d’afficher les mentions sanitaires indispensables et qu’ils sont largement diffusés en dehors du milieu professionnel, en particulier auprès des parlementaires. Je suggère que cette diffusion soit désormais prohibée.

M. Dominique Tian. Interdire la publicité à l’intérieur même des débits de tabac est absurde ! Pourquoi ne pas bander les yeux au client ? Certes, les débitants n’arrivant plus à gagner leur vie, on leur a permis de vendre d’autres produits ; on peut donc craindre que des clients venant acheter autre chose ne s’aperçoivent qu’ils sont entrés dans un débit de tabac. Quel danger, en effet !

M. Olivier Véran, rapporteur. Replaçons le débat sur l’amendement de Mme Delaunay. Le code de la santé publique prévoit que l’interdiction générale de propagande en faveur du tabac ne s’applique pas aux publications professionnelles. L’amendement propose de supprimer cette dérogation pour les publications diffusées en dehors du réseau professionnel ou ne respectant pas les avertissements sanitaires en vigueur.

Cette précision me paraît redondante s’agissant des avertissements sanitaires. La loi est déjà très claire puisque leur non-respect constitue une infraction réprimée par le droit commun. En revanche, la mise à disposition des revues professionnelles du tabac en dehors du réseau de distribution professionnel classique est plus problématique. Il nous arrive, en effet, d’en recevoir au Parlement.

Par conséquent, je donne un avis de sagesse.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 5 septies

● L’article 5 septies, introduit à l’initiative de notre collègue Michèle Delaunay et des mêmes cosignataires, interdit d’ouvrir ou de transférer un débit de tabac à proximité de certains lieux « protégés ».

L’article L. 3511-2-2 du code de la santé publique prévoit que les dispositions de l’article L. 3335-1, encadrant l’installation de débits de boissons à proximité de certains lieux, sont applicables aux débits de tabac. L’article 5 septies introduit dans le code de la santé publique un nouvel article L. 3511-2-4, qui reprend et adapte les dispositions de l’article L. 3335-1, rendant de ce fait inutile le L. 3511-2-2.

Le nouvel article L. 3511-2-4 prévoit que le représentant de l’État dans le département détermine par arrêtés les distances minimales entre les débits de tabac et une liste d’édifices et établissements. Comme dans le droit existant, en matière de débit de boissons comme de tabac, le préfet ne peut porter atteinte aux droits acquis. Pour le dire clairement, un débit de tabac déjà installé ne sera pas interdit, même s’il se situe trop près de l’un des lieux concernés.

La principale nouveauté réside dans la compétence liée du préfet, qui devra nécessairement prendre les arrêtés ; la rédaction retenue impose bien une obligation, alors que le texte de l’article L. 3335-1 fait état d’une simple faculté. Le texte précise par ailleurs la distance minimale entre un débit de tabac et l’un des lieux protégés, prévue par voie réglementaire s’agissant des débits de boisson. Cette distance est, bien logiquement, croissante selon la taille de la commune (de 25 mètres dans les communes de moins de 1 000 habitants à 150 mètres dans celles de plus de 20 000 habitants).

La liste des lieux protégés est la même que celle prévue pour les débits de boisson, à l’exception des cimetières, qui ne figurent pas dans le nouvel article : lieux de culte ; établissements de santé et assimilés ; écoles, collèges et lycées ; installations sportives ; établissements pénitentiaires ; bâtiments militaires ; bâtiments affectés au fonctionnement des entreprises publiques de transport.

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La Commission en vient à l’amendement AS1162 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Cet amendement pondéré vise à appliquer à tout nouveau débit de tabac les mêmes règles qu’aux établissements vendant de l’alcool en matière d’installation à proximité des établissements scolaires.

M. Dominique Tian. Ce que vous proposez n’est tout simplement pas possible. Marseille compte, par exemple, plus de 800 établissements scolaires : aucun débit de tabac n’existerait plus si l’on devait appliquer votre amendement ! Vous ne tenez compte ni de l’histoire de ces commerces présents depuis longtemps sur notre territoire ni du droit de propriété !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Tian, l’amendement ne vise que les nouveaux débits de tabac.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Dans la mesure où nous mettons en place un plan très offensif de lutte contre le tabac, il est difficile de s’opposer à un amendement visant à empêcher l’installation de nouveaux bureaux de tabac à proximité des écoles. Sa rédaction méritera sans doute d’être revue, notamment en ce qui concerne la définition des périmètres.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 5 octies

● L’article 5 octies, introduit à l’initiative du rapporteur, complète l’article L. 3511-3 du code de la santé publique, afin d’interdire aux fabricants, importateurs et distributeurs de produits du tabac de pratiquer le mécénat dans le domaine de la santé.

Le dernier alinéa de cet article du code interdit toute opération de parrainage « lorsqu’elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité directe ou indirecte en faveur du tabac ». Mais ces dispositions n’interdisent pas aux industriels du tabac d’effectuer des dons sans contrepartie sous couvert de « responsabilité sociale des entreprises », y compris dans le secteur de la santé. Les dommages sanitaires causés par l’industrie du tabac doivent lui interdire de prétendre soutenir ou influencer la moindre initiative dans ce domaine ; il est dès lors logique d’empêcher par la loi leurs actions de mécénat.

Par coordination, l’article L. 3512-2 est également modifié, afin de rendre applicables, en cas de manquement à cette nouvelle interdiction, les sanctions prévues par cet article (amende de 100 000 euros pouvant être portée à 50 % du montant des dépenses consacrées à l’opération illégale).

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS955 du rapporteur et AS1158 de Mme Michèle Delaunay.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le PNTR et les amendements déposés par le Gouvernement prévoient d’interdire la publicité par les fabricants, importateurs et distributeurs de tabac, ainsi que les opérations de parrainage. Je propose d’interdire également les activités de mécénat lorsqu’elles ont trait au domaine de la santé.

Mme Michèle Delaunay. Notre amendement va dans le même sens, mais élargit l’interdiction à toute forme de mécénat. En effet, celui-ci permet aux cigarettiers de se refaire une virginité et de se donner un visage honorable.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Autant interdire les activités de mécénat de la part des industries de tabac dans le domaine de la santé constitue un message fort mais acceptable, autant les prohiber dans tous les domaines me semble excessif.

La Commission adopte l’amendement AS955.

En conséquence, l’amendement AS1158 tombe.

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Article 5 nonies

● L’article 5 nonies, introduit à l’initiative du Gouvernement, crée dans le code de la santé publique un nouvel article L. 3511-3-1, inspiré du « Sunshine Act » instaurant la transparence entre les professionnels de santé et les industries pharmaceutiques (25).

Les industriels du tabac (fabricants, importateurs et distributeurs) et les personnes morales les représentant (entreprises, organisations professionnelles ou associations) devront remettre chaque année au ministre de la santé un rapport détaillant :

– d’une part, l’ensemble de leurs dépenses de publicité, de propagande et de promotion réalisées en France ou à l’égard de personnes résidant en France, telles qu’elles sont définies par les articles L. 3511-3 et L. 3511-4 (26) du code de la santé publique (même si ces dépenses sont résiduelles du fait du principe général d’interdiction) ;

– d’autre part, et c’est là l’avancée principale, l’ensemble de leurs dépenses de lobbying (« dépenses liées à des activités d’influence ou de représentation d’intérêts »).

La liste de ces dépenses est fixée de manière précise et extensive, sachant que tous les bénéficiaires devront être nommément désignés :

– rémunérations du personnel employé directement par l’entreprise ;

– prestations de conseils payées à des cabinets extérieurs ;

– avantages en nature ou en espèces excédant dix euros, procurés aux membres du Gouvernement et des cabinets ministériels, et aux personnes (y compris aux experts) intervenant dans la prise de décision publique relative aux produits du tabac. À l’initiative du rapporteur et avec l’avis favorable du Gouvernement, cette liste a été élargie aux parlementaires, qui n’y figuraient pas dans l’amendement originel ;

– contributions au financement de l’activité politique.

Les conditions d’application de cet article sont renvoyées à un décret en Conseil d’État, auquel reviendra notamment le soin de définir précisément les conditions de publicité des informations contenues dans les rapports. Devant la Commission des affaires sociales, la ministre de la Santé a évoqué clairement leur publication sur un site Internet dédié, administré par le Gouvernement.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1410 du Gouvernement.

Mme la ministre. Les amendements relatifs au mécénat marquent une orientation forte de la Commission. Il faudra veiller aux modalités de l’application de ces dispositions, qui risque de s’avérer délicate.

À l’occasion de la présentation du programme national de réduction du tabagisme, j’avais annoncé vouloir mieux connaître et encadrer les pratiques de promotion et de lobbying des industriels du tabac afin de contrer plus efficacement leur influence dans la définition et la conduite des politiques publiques liées au tabac. Ce n’est faire injure à personne que de dire que les industriels cherchent à faire pression sur les auteurs des politiques publiques susceptibles de les affecter ; l’enjeu est de connaître les personnes concernées. Nous proposons, par l’amendement AS1410, de mettre en place pour les industriels du tabac l’équivalent du Sunshine Act instauré pour l’industrie pharmaceutique. Il s’agit ici de définir le principe – un décret en Conseil d’État devant en préciser les modalités – de la transmission par l’industrie du tabac des informations qui doivent être rendues publiques. Le Gouvernement entend créer un site internet accessible à tous sur lequel ces industriels devront indiquer l’ensemble des actions de promotion qu’ils mènent et des financements qu’ils engagent. Cet amendement nous semble de nature à garantir une transparence absolue sur les agissements de l’industrie du tabac, condition de l’efficacité des politiques publiques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Les parlementaires font-ils partie des personnes concernées par la mesure ?

Mme la ministre. Ils ne figurent pas dans le texte de l’amendement, mais il serait logique qu’ils soient concernés.

M. Olivier Véran, rapporteur. Dans ce cas, je propose d’ajouter, après les mots « des membres des cabinets ministériels ; », les mots « les parlementaires ; ».

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS1410 ainsi rectifié.

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Après l’article 5 nonies

La Commission en vient à l’amendement AS1159 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. C’est un amendement de repli par rapport à la proposition précédente. Il stipule que si un organisme ou une action bénéficiant d’un financement public ou parapublic reçoit le soutien de l’industrie du tabac, le financement public devient caduc.

M. Élie Aboud. Qu’entendez-vous par financement parapublic ?

Mme Michèle Delaunay. Il peut s’agir du financement par une collectivité, une association relevant d’une collectivité ou une fondation.

M’avisant que la rédaction manque de précision, je retire l’amendement pour le retravailler en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1161 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Cet amendement important vise également à éliminer toute possibilité de conflit d’intérêt, ou de rendre celui-ci transparent. Nous proposons que les fabricants, importateurs, distributeurs et détaillants de tabac communiquent chaque année au ministère des affaires sociales et au ministère des finances toutes les sommes et affectations effectuées de nature à contrevenir aux dispositions du code de la santé publique ou susceptibles de les placer en conflit d’intérêt. Les subventions et les soutiens que les buralistes reçoivent de la part des industriels du tabac doivent être connus du grand public et de nos services.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Je partage l’objectif de l’amendement, mais celui-ci répond aux mêmes intentions que l’équivalent du Sunshine Act proposé par le Gouvernement, que nous venons de voter et qui me paraît, en outre, juridiquement plus solide.

Mme Michèle Delaunay. Mon amendement concerne un autre problème et ne cible pas la même population. Les distributeurs de tabac doivent eux aussi faire œuvre de transparence et rendre publiques toutes les subventions qu’ils reçoivent.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1157 également de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Le code de la santé publique permet aux chaînes de télévision française de retransmettre des compétitions sportives qui se déroulent dans des pays où la publicité pour le tabac est autorisée. En n’interdisant pas la retransmission d’événements qui le valorisent, je pense en particulier aux compétitions de sports mécaniques, nous nous privons d’une arme dans la lutte contre le tabac. L’amendement tend donc à supprimer cette autorisation.

M. Arnaud Robinet. En arriver à interdire les retransmissions d’événements sportifs, c’est totalement absurde ! Quand ciblerez-vous internet et la publicité pour l’alcool ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Avant d’adopter une telle mesure, il faudrait mener une concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. Il semble difficile de priver les téléspectateurs français de tout accès à la retransmission de compétitions sportives qui se dérouleraient dans des pays n’ayant pas adopté la même législation que la nôtre en matière de tabac.

La Commission rejette l’amendement.

Elle discute ensuite de l’amendement AS1319 de M. Jean-Louis Touraine.

M. Jean-Louis Touraine. Mon amendement ne vise pas à nuire à la liberté de création : il ne saurait être question d’empêcher qu’au cinéma Churchill fume son cigare ou Gainsbourg ses Gitanes. Nous savons, en revanche, que l’industrie du tabac finance des producteurs de films, de séries télévisées et de pièces de théâtre. En France, aucune poursuite judiciaire n’est jamais engagée contre eux alors qu’aux États-Unis, des producteurs, des metteurs en scène et des acteurs ayant fait la promotion du tabac ont été très lourdement condamnés.

Je ne propose pas d’en arriver là, mais seulement de rendre obligatoire la diffusion d’un message préventif anti-tabac, avant toute œuvre cinématographique, théâtrale et télévisuelle comportant une séquence de valorisation du tabac.

Mme Michèle Delaunay. Dans 80 % des films français, des séquences de tabagisme ne se justifient pas ! La loi Évin n’est pas appliquée !

M. Élie Aboud. Tout cela est surréaliste ! Comment appliquer une telle mesure aux films étrangers ? Voulez-vous vraiment diffuser un message dès lors qu’une cigarette apparaît à l’écran ? Comment comptez-vous faire ? Quel sera le contenu de ce message ?

Mme Michèle Delaunay. C’est la loi Évin !

M. Olivier Véran, rapporteur. La notion de valorisation du tabac dans une série, un film ou une pièce de théâtre me paraît difficile à définir avec précision : lorsque Frank Underwood, le personnage principal d’une célèbre série américaine, fume à sa fenêtre, le tabac est-il valorisé ou dénigré ? Quelle forme prendrait un message sanitaire concernant une pièce de théâtre ? L’objectif général de l’amendement est louable, mais la mesure semble difficilement applicable. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 5 decies

● L’article 5 decies, introduit à l’initiative du Gouvernement, instaure ce qu’il est convenu d’appeler le « paquet neutre », par la création dans le code de la santé publique d’un nouvel article L. 3511-6-1.

La France ne serait pas le premier pays à instaurer le paquet neutre, déjà en vigueur en Australie depuis le 1er décembre 2012. Les premiers résultats, évoqués dans le PNRT, sont encourageants, la prévalence du tabac étant passée de 15,1 % en 2010 à 12,8 % en 2013. La même source relève également qu’ « une étude observationnelle avant/après a montré qu’après l’introduction du paquet neutre, les clients fumeurs des cafés avaient moins tendance à fumer en extérieur et à laisser leurs paquets en évidence à la vue de tous ». L’un des objectifs du paquet neutre est en effet d’ôter le caractère « identitaire » aux conditionnements des produits du tabac, que l’industrie tend à renforcer depuis l’interdiction générale de la publicité. En effet, comme le souligne encore le PNRT, « à travers ses logos, ses couleurs (rose, blanche, noire etc.), ses visuels (paquet phosphorescent, paquets collector…), sa forme (d’étui à rouge à lèvres ou de cigarettes « slim »), les mentions qui y sont écrites, le paquet véhicule une image attractive qui incite à fumer, en particulier les jeunes et les femmes très sensibles au design du produit, induit en erreur les consommateurs sur la nocivité des produits, et entretient l’image de la marque de tabac » (27).

Ce nouvel encadrement des produits du tabac impose en fait, comme le montre le texte, non seulement la neutralité (pas de signe distinctif autre que la marque), mais aussi l’uniformité (identité de taille, de forme et de texture). Seront concernés toutes les unités de conditionnement des cigarettes et du tabac à rouler, mais également le papier lui-même. La définition précise des notions de neutralité et d’uniformité est renvoyée à un décret en Conseil d’État.

Si la directive du 3 avril 2014 n’impose pas le paquet neutre, elle en permet néanmoins l’instauration. Le point 2 de son article 24 permet en effet aux États membres d’ « instaurer de nouvelles exigences [...] en ce qui concerne la standardisation des conditionnements des produits du tabac, lorsque cela est justifié pour des motifs de santé publique ». Le dispositif prévu va donc au-delà des stipulations de la directive, qui exige des mesures d’uniformisation – par exemple l’interdiction des paquets de cigarettes imitant des produits cosmétiques – sans aller jusqu’à la neutralité. À ce titre, le dispositif a été notifié à la Commission européenne, comme le prévoit le droit de l’Union. Il entrera en vigueur le 20 mai 2016.

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La Commission est saisie de l’amendement AS4 de M. Dino Cinieri.

Mme Bérengère Poletti. Cet amendement propose que, « dans un délai d’un an suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l’efficacité du paquet neutre sur la prévalence tabagique ».

M. Olivier Véran, rapporteur pour le titre I. Les amendements tabac, c’est tabou, et nous en viendrons à bout dans les délais. Il existe déjà une dizaine de rapports sur l’évaluation du plan tabac et il n’est pas nécessaire d’en prévoir d’autres. Le dispositif présenté par le Gouvernement en matière de lutte contre le tabac prévoit une évaluation à laquelle le Parlement pourra participer. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS15 de M. Dino Cinieri et AS338 de M. Jean-Pierre Door.

Mme Bérengère Poletti. Il s’agit aussi d’une demande de rapport au Gouvernement, cette fois-ci pour établir « un bilan des effets induits par l’interdiction d’achat de tabac sur internet et des moyens qui pourraient être mis en place pour lutter contre la vente et l’achat de tabac en ligne ».

M. Jean-Pierre Door. Il s’agit de lutter contre le développement du marché parallèle, c’est-à-dire les achats frontaliers ou sur internet et la contrebande. La vente et l’achat de tabac sur internet sont interdits en France, mais la réaffirmation de ce principe, à l’occasion des débats budgétaires en 2014, n’a pas été suivie d’effets.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis, elle examine les amendements AS195 et AS160 de M. Jean-Louis Roumegas, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Jean-Louis Roumegas. Ces amendements de repli demandent des rapports relatifs au commerce illicite des produits du tabac, l’un sur l’amélioration de la traçabilité et l’autre sur les soupçons d’entente illicite entre fabricants.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques AS13 de M. Dino Cinieri et AS335 de M. Jean-Pierre Door.

Mme Bérengère Poletti. Par l’amendement AS13, nous demandons que, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’opportunité de modifier les modes de calcul de la richesse nationale par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), afin qu’ils intègrent le commerce illicite de tabac et définisse les modalités selon lesquelles ces informations pourraient être prises en compte.

M. Élie Aboud. Notre amendement AS335 est défendu.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis elle en vient à l’amendement AS556 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Des prix élevés permettent d’obtenir une baisse significative de la consommation de tabac, mais il faut compter avec une concurrence qui joue sur les différences de fiscalités entre pays. C’est pourquoi nous demandons un rapport sur les différences de fiscalités appliquées au tabac dans l’Union européenne et sur les initiatives que la France pourrait prendre afin de tendre vers une harmonisation fiscale.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Article 5 undecies

● L’article 5 undecies, introduit à l’initiative du Gouvernement, interdit l’usage de la cigarette électronique dans certains lieux publics, par la création d’un nouvel article L. 3511-7-1 dans le code de la santé publique.

Sont concernés par cette interdiction : les établissements scolaires et plus généralement les établissements d’accueil des mineurs ; les transports collectifs ; les lieux de travail fermés à usage collectif. Des emplacements réservés aux vapoteurs devront être mis à disposition dans les lieux concernés. Leurs modalités d’aménagement, comme du reste les conditions d’application de cet article, sont renvoyées à un décret en Conseil d’État.

On relèvera que l’interdiction ainsi posée n’est pas aussi générale que celle de fumer, compte tenu de l’absence de certitude sur les méfaits sanitaires du vapotage passif. Il s’agit plutôt, comme le soulignait l’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement, d’éviter l’incitation à fumer que peut représenter le geste de vapoter, et plus généralement de « maintenir l’acceptation sociale de l’interdiction de fumer dans les lieux publics ».

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS1148 de Mme Michèle Delaunay, AS1393 de M. Jean-Louis Touraine et AS1413 du Gouvernement.

Mme Michèle Delaunay. L’usage de la cigarette électronique doit être limité dans les mêmes conditions que celui de la cigarette, car le geste lui-même peut être inducteur.

M. Jean-Pierre Door. Avec votre amendement, qui interdit de simuler l’acte de fumer, on n’aurait plus le droit de faire quoi que ce soit à l’extérieur. Aurai-je encore le droit de porter la main à mon visage ou à la bouche ? Est-ce cela que vous réglementez ? C’est grotesque !

Mme Michèle Delaunay. Je retire mon amendement au profit de celui défendu par le Gouvernement.

L’amendement AS1148 est retiré.

M. Jean-Louis Touraine. L’un des objectifs du programme national de réduction du tabagisme est de protéger les jeunes et d’éviter l’entrée dans le tabagisme. En introduisant l’interdiction de fumer aux abords des enceintes scolaires et sportives, mon amendement contribuerait à préserver les enfants et les adolescents du tabac.

Sachant qu’il y a 32 % de fumeurs chez les 15-19 ans et que la majorité des fumeurs commence à fumer au moment de l’entrée au collège, éviter que les jeunes puissent fumer à proximité des collèges, s’entraînant les uns les autres, et ne plus voir non plus les enseignants leur donner un très mauvais exemple enverrait un bon signal.

Le périmètre visé par cette interdiction serait déterminé par décret en Conseil d’État.

Mme la ministre. L’amendement du Gouvernement tend à encadrer la pratique du vapotage en l’interdisant dans certains lieux à usage collectif.

Je ne reviens pas sur le débat relatif à la pertinence de l’interdiction de la cigarette électronique, car rien ne démontre aujourd’hui que son usage pourrait entraîner des dommages de santé publique collatéraux. En revanche, il est apparu clairement que l’imitation du geste du fumeur constituait un risque de voir se développer ce geste considéré comme valorisant. Par ailleurs, dans un certain nombre de lieux publics, la distance rend parfois difficile de faire la différence entre cigarette et cigarette électronique, notamment dans les transports en commun.

Le Gouvernement a consulté le Conseil d’État, lui demandant sur quels principes pouvait être fondée l’interdiction du vapotage sans qu’il y ait entrave aux libertés individuelles. Dans son avis, qui a été rendu public, le Conseil propose que l’interdiction soit mise en œuvre dans les établissements scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la formation et à l’hébergement des mineurs, dans les moyens de transport collectifs fermés, et sur les lieux de travail fermés et couverts à usage collectif. L’amendement s’en tient à ces préconisations.

M. Gérard Sebaoun. S’agissant des lieux de travail couverts, les grandes entreprises disposent parfois de patios où les salariés peuvent fumer. S’ils sont couverts, sera-t-il interdit d’y vapoter ?

Mme la ministre. Il n’y aura aucun problème dans un patio ouvert, mais cela sera plus difficile pour un lieu couvert.

Mme Sylviane Bulteau. Monsieur Touraine, en prohibant la cigarette dans les lieux où les jeunes rencontrent des adultes qui peuvent discuter avec eux, notamment des méfaits de la cigarette, ne craignez-vous pas qu’ils continuent de fumer mais en s’isolant loin des éducateurs, des adultes ou des parents ?

M. Jean-Louis Touraine. Nous voulons éviter que les jeunes s’agglutinent aux portes des collèges, pour limiter l’effet d’attraction en particulier sur les non-fumeurs. En ce sens, l’amendement ne peut qu’avoir un effet bénéfique. Qu’ils puissent fumer ailleurs, c’est une autre affaire. J’ajoute qu’il n’est pas utile d’attendre de les voir fumer pour leur parler des dangers du tabac. Des cours dispensés par des professionnels sont d’ailleurs prévus à cet effet, qui s’adressent à tous les élèves, qu’ils soient fumeurs ou non.

M. Dominique Tian. Le message de prévention touchera mieux les jeunes s’ils sont visibles à proximité des établissements que s’ils sont obligés de se cacher. En posant un interdit supplémentaire, vous incitez à la transgression qui est le propre des adolescents. En traitant les fumeurs en pestiférés, vous en faites des héros !

M. Olivier Véran, rapporteur. J’étais, à l’origine, favorable à l’amendement de M. Touraine, mais nos échanges m’amènent à réviser mon jugement, car l’interdiction de fumer à proximité des enceintes scolaires et sportives pourrait avoir des conséquences sur le comportement des jeunes. Je suis donc défavorable à l’amendement AS1393 et favorable à l’amendement AS1413 du Gouvernement.

La Commission rejette l’amendement AS1393.

Puis elle adopte l’amendement AS1413.

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Article 5 duodecies

● L’article 5 duodecies, introduit à l’initiative du Gouvernement, interdit à tous les occupants d’un véhicule de fumer en présence d’un enfant de moins de douze ans (nouvel article L. 3511-7-1 du code de la santé publique).

Cette interdiction concernerait donc tous les occupants du véhicule, pas seulement le conducteur. L’âge de douze ans a été retenu car le Gouvernement considère qu’au-delà, la question de l’usage du tabac peut faire l’objet d’une discussion entre enfants et adultes.

Cette mesure forte de lutte contre les ravages du tabagisme passif a déjà été mise en œuvre, depuis 2007, dans plusieurs États d’Australie, du Canada et des États-Unis.

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La Commission examine l’amendement AS1415 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement vise à interdire de fumer dans un véhicule en présence d’un enfant de moins de douze ans. Il s’agit d’une mesure de bon sens pour éviter le tabagisme passif.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable, mais il me semble que la référence de l’article inséré dans le code de la santé publique devrait être rectifiée.

M. Élie Aboud. Le groupe UMP adhère à l’esprit de l’amendement, mais il s’interroge sur les sanctions que vous entendez mettre en place. Surtout, comment pourrez-vous sanctionner un comportement donné dans un lieu privé ? Pourquoi ne pas interdire de fumer au domicile tant que l’on y est ?

Mme la ministre. Les sanctions prises seront celles qui s’appliquent déjà dans les lieux où il est interdit de fumer.

M. Bernard Accoyer. Quelle différence juridique faites-vous entre le domicile et la voiture, les deux étant des lieux privés ?

Mme la ministre. La disposition s’insérera dans le code de la route, qui contient déjà des mesures permettant d’intervenir dans l’espace privé que constitue un véhicule. Elle n’a pas été considérée comme non conforme à la Constitution ou comme attentatoire aux libertés individuelles.

Mme la présidente Catherine Lemorton. De fait, on ne contrôle pas l’alcoolémie des personnes à leur domicile mais on le fait quand elles sont au volant.

M. Jean-Louis Touraine. De même, il est interdit d’utiliser le téléphone portable en voiture.

Madame la ministre, accepteriez-vous de modifier votre amendement en portant de douze à quatorze ans l’âge des mineurs concernés ? Le tabagisme passif est aussi particulièrement dangereux pour les jeunes de treize et quatorze ans, âges auxquels ils sont par ailleurs particulièrement séduits par la cigarette.

Mme la ministre. Je préfère que nous en restions à la rédaction de l’amendement. Il s’agit surtout d’un moyen de faire prendre conscience aux adultes qu’on ne fume pas en présence d’un enfant. La référence à un âge précis compte moins que l’interdiction qui se veut dissuasive.

Par ailleurs, il convient, en effet, de rectifier l’amendement en précisant que l’article additionnel doit être inséré dans le code de la santé publique sous la référence L. 3511-7-2 et non pas L. 3511-7-1.

La Commission adopte l’amendement AS1415 ainsi rectifié.

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Article 5 terdecies

● L’article 5 terdecies, introduit à l’initiative du Gouvernement, assortit d’une sanction le fait de ne pas respecter l’obligation de neutralité du paquet.

L’article L. 3512-2 du code de la santé publique sanctionne les infractions aux règles prévues en matière d’interdiction de vente de certains produits du tabac, d’interdiction de publicité et de teneurs maximales en substances toxiques. Dans la généralité des cas, la peine prévue est une amende de 100 000 euros. Cet article ajoute à la liste des infractions ainsi réprimées le fait de ne pas respecter l’obligation de paquet neutre. L’entrée en vigueur est donc prévue pour le 20 mai 2016.

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La Commission en vient à l’amendement AS1403 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement tend à prévoir une sanction en cas d’infraction aux règles relatives au paquet neutre.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Article 5 quaterdecies

● L’article 5 quaterdecies, introduit à l’initiative du Gouvernement, sanctionne le défaut de remise du rapport exigé par le Sunshine Act, ou le caractère incomplet des données fournies. Le nouvel article L. 3512-2-1 du code de la santé publique punit ces infractions d’une amende de 45 000 euros.

Article 5 quindecies

● L’article 5 quindecies, introduit à l’initiative du Gouvernement, complète le premier alinéa de l’article L. 3512-3 du code de la santé publique, afin de prévoir la responsabilité pénale des personnes morales ne respectant pas le Sunshine Act. Ces personnes pourraient donc se voir appliquer les dispositions du nouvel article L. 3512-2-1.

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La Commission est saisie des amendements AS1412 et AS1411, tous deux du Gouvernement, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme la ministre. Il s’agit d’introduire les sanctions pour infraction au Sunshine Act à la française. Le premier amendement concerne les personnes physiques, le second les personnes morales.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte successivement les amendements.

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Article 5 sexdecies

● L’article 5 sexdecies rassemble deux mesures introduites à l’initiative du Gouvernement, pour des raisons légistiques (deux modifications apportées à l’article L. 3512-4 du code de la santé publique).

Le est une mesure de coordination, qui confie aux agents chargés de s’assurer du respect de l’interdiction de fumer le soin de s’assurer du respect de l’interdiction de vapoter.

Le a pour objet d’asseoir les pouvoirs de la police municipale en matière de contrôle des infractions à la législation sur le tabac. Les policiers municipaux et assimilés (gardes-champêtres, agents de surveillance de Paris) ne sont pas mentionnés dans la liste des agents chargés de constater les infractions à l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Seul le règlement les y habilite. Il s’agit ici de porter cette habilitation au niveau législatif, mais aussi de permettre à ces agents de contrôler le respect de l’interdiction de vente aux mineurs (au besoin en demandant la production d’une pièce d’identité). Par coordination, ils seraient également chargés de contrôler le respect de l’interdiction de vapoter. Aucun acte d’enquête ne doit cependant être nécessaire, ces agents n’étant pas officiers de police judiciaire.

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La Commission examine ensuite l’amendement AS1409 du Gouvernement.

Mme la ministre. Celui-ci prévoit que les policiers municipaux pourront constater les infractions à la législation du tabac et produits connexes, en particulier le fait de fumer dans des aires de jeux pour enfants ou en voiture, ou de vapoter dans certains lieux publics. Il s’agit de démultiplier les corps habilités à pratiquer ces contrôles.

M. Bernard Accoyer. Les polices municipales sont déjà débordées en essayant d’assurer la sécurité de nos concitoyens. Cette nouvelle tâche nous paraît superfétatoire.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Suivant un avis similaire du rapporteur, elle adopte également l’amendement de coordination AS1414 du Gouvernement.

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Après l’article 5 sexdecies

La Commission est saisie de l’amendement AS1151 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. La vente au public des produits destinés au sevrage tabagique, non soumis à prescription médicale, doit être autorisée afin que les buralistes puissent s’en saisir.

M. Dominique Tian. Madame Delaunay, vous avez déjà permis que soit accordé un avantage exceptionnel aux propriétaires de bureau de tabac en créant, en leur faveur, une sorte de numerus clausus. Dès lors qu’il sera désormais quasiment impossible d’ouvrir un débit de tabac, la valeur des fonds de commerce va exploser. Et vous voulez maintenant en rajouter ? Vous devriez réfléchir aux effets secondaires des mesures que vous proposez.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Les substituts nicotiniques destinés au sevrage tabagique restent des médicaments. Introduire une dérogation signifierait que leur mauvais usage n’aurait pas d’impact sanitaire. Pour la santé et la sécurité des Français, il est plus sage de conserver le monopole pharmaceutique pour tous les produits de santé, au premier titre desquels se rangent les médicaments.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS194 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Le commerce illicite du tabac nuit aux politiques de lutte contre le tabagisme, mais aussi aux buralistes qui devraient être considérés comme nos alliés dans ce combat. À partir du moment où ils jouent le jeu de la vente légale, nous devrions les protéger. L’amendement propose que l’enregistrement et la traçabilité des données liées aux opérations d’importation et de commercialisation de produits du tabac soient contrôlés par un tiers indépendant. Cette proposition est conforme à la convention-cadre pour la lutte anti-tabac de l’OMS, signée par la France.

M. Dominique Tian. Il est temps que l’on défende les buralistes dont la profession est autorisée par l’État !

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. L’administration des douanes exerce aujourd’hui le contrôle qu’évoque M. Roumegas. Devons-nous demander à un évaluateur externe d’apprécier le travail des douanes ? Je n’en suis pas certain. Sur quels critères le ferait-il ?

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS196 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’améliorer la traçabilité des produits du tabac et d’établir un reporting afin de lutter contre la fraude.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’idée de traquer les éventuels transferts de bénéfices d’un pays à l’autre par les entreprises françaises implantées à l’étranger me plaît. Il semble toutefois difficile d’introduire une disposition aussi importante pour l’ensemble de l’industrie au détour d’un amendement au projet de loi relatif à la santé. Je suis, en conséquence, défavorable à l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS159 également de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Chaque augmentation des droits de perception donne lieu à une entente illicite des fabricants qui opèrent un lissage des prix afin d’atténuer les effets de la hausse. L’amendement vise à empêcher ce phénomène.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le prix du tabac n’est pas fixé par le Gouvernement, contrairement à ce que laisse entendre le dispositif de votre amendement qui n’est pas très clair. Je crains surtout qu’il ne produise pas l’effet recherché. À défaut d’un retrait, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1088 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. En février 2014, lors de la présentation du troisième plan cancer, le Président de la République indiquait que l’expérience « nous enseigne que les seules baisses significatives – elles ont été rares – de la consommation de tabac, se sont produites après des augmentations fortes du prix des cigarettes ». Cet amendement propose, en conséquence, de créer un fonds dédié aux actions de lutte contre le tabagisme, ce qui est prévu par le programme national de réduction du tabagisme, et de le financer grâce à une augmentation des taxes sur le tabac.

M. Olivier Véran, rapporteur. D’une façon générale, je demande le retrait des amendements tendant à augmenter la fiscalité sur le tabac. Bien qu’ils visent un objectif de santé publique partagé par tous, ils devraient s’inscrire dans un texte budgétaire, comme le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) que nous examinons tous les ans. Je signale d’ailleurs que le PNTR ne comporte pas de mesures portant augmentation de la fiscalité. À défaut d’un retrait de l’amendement, j’y serai défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en présentation commune, les amendements AS1152 et AS1153 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. M. Richard a eu raison de citer le Président de la République. Seule une augmentation significative et rapide des prix peut entraîner une diminution notable de la consommation, ce que confirme la tribune de l’épidémiologiste Catherine Hill, publiée le mois dernier par le journal Le Monde. En même temps qu’elle introduisait le paquet neutre, l’Australie procédait à cette autre mesure forte qu’est l’augmentation notable du prix.

Par ailleurs, pour avoir consulté sur le sujet, j’affirme qu’une mesure fiscale peut parfaitement être prise en dehors des textes budgétaires lorsqu’elle correspond à l’objet du texte dans laquelle elle est votée. Plusieurs amendements du Gouvernement au projet de loi Macron avaient un caractère fiscal, et personne n’y a rien trouvé à redire parce qu’ils étaient opportuns dans ce texte.

L’amendement AS1152 vise à alourdir la fiscalité sur le tabac ; l’amendement AS1153 vise spécifiquement le tabac à rouler dont le prix pousse les jeunes à la consommation.

M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, nous allons clairement vers la prohibition du tabac. Assumez-le ! Avec ces hausses et les mesures que vous proposez, seuls ceux qui ont des moyens pourront continuer de fumer. Dès lors, nous nous interrogeons sur la sincérité de votre discours, vous qui en appelez en permanence à la justice sociale.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis défavorable aux deux amendements. J’ai déjà dit ce que je pensais d’une évolution de la fiscalité dans un texte non budgétaire. Madame Delaunay, j’appelle par ailleurs votre attention sur le fait qu’en augmentant uniquement les droits proportionnels sans toucher aux droits fixes, vous augmenterez le prix des cigarettes les plus chères, ce qui amènera seulement les consommateurs à acheter des produits meilleur marché. De nombreuses études considèrent que l’effet d’une telle mesure serait neutre.

Mme la ministre. Ne faisons pas dire au Président de la République ce qu’il n’a pas dit. Il a surtout indiqué que les nouvelles augmentations éventuelles devraient être affectées à des politiques de santé publique. Cela nécessiterait l’élaboration d’un fonds spécifique, ce à quoi nous travaillons.

Il est possible d’introduire dans une loi non financière des mesures fiscales, si le Gouvernement le souhaite et non sans avoir obtenu un accord de dérogation au plus haut niveau, validé par le conseil des ministres. L’objectif est de conserver aux lois financières leur spécificité, et d’éviter que soit modifié en permanence l’équilibre des finances publiques, sans pouvoir le maîtriser. Oui, l’augmentation de la fiscalité est un facteur important pour empêcher la diffusion du tabac ; elle l’a été et le sera encore probablement en France. Néanmoins, le programme national de réduction du tabagisme a été élaboré pour être un ensemble cohérent de mesures équilibrées parmi lesquelles ne figurent pas de dispositions fiscales. Dans le cadre de ce projet de loi relatif à la santé, je défends ce PNTR tel que je l’ai présenté au mois de septembre dernier, et je ne souhaite pas l’introduction de mesures fiscales.

La Commission rejette successivement les amendements AS1152 et AS1153.

Elle examine ensuite les amendements AS1154 et AS1155, tous deux de Mme Michèle Delaunay, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Michèle Delaunay. Afin de rester cohérent en matière de lutte contre les ventes illicites et la contrebande, il importe d’harmoniser la fiscalité du tabac applicable à la Corse. Les cigarettes y sont 30 % moins chères que sur le continent ; les cancers du poumon et les décès liés au tabac y sont 30 % plus nombreux.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle en vient à l’amendement AS979 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement tend à introduire un mécanisme inédit dans ce domaine mais qui existe dans d’autres secteurs. Il consiste à assigner chaque année un taux de décroissance pour la consommation de tabac. Si la décroissance n’était pas constatée en fin d’exercice, une contribution sur le chiffre d’affaires des cigarettiers serait fixée, à lever dans le cadre d’un prochain texte budgétaire, projet de loi de finances ou PLFSS.

Je propose de fixer ce taux à 3 %. Si la baisse de la consommation de tabac constatée est moindre, alors nous aurons une contribution à lever dans le prochain exercice budgétaire, que nous pourrons consacrer au financement des campagnes de prévention contre le tabagisme, devenues rares ces dix dernières années. Celles-ci seraient conduites par l’Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique, créé dans un article ultérieur.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le dispositif peut être rapproché de la régulation pour les innovations thérapeutiques, que nous avons adoptée dans le PLFSS pour 2015.

Mme la ministre. Nous ne sommes pas exactement dans le même domaine.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement. Comme je l’ai déjà indiqué, nous ne souhaitons pas que ce projet de loi donne lieu à la mise en place de nouvelles taxes. Par ailleurs, nous nous interrogeons sur ce qui serait taxé. Le siège social des entreprises concernées ne se trouvant pas en France, il serait vain de vouloir taxer leur chiffre d’affaires.

M. Arnaud Richard. Si la démarche du rapporteur me paraît innovante, la position de la ministre m’inquiète, car elle renvoie aux calendes grecques les augmentations de taxes et la création d’un fonds. Ce dernier sera-t-il créé dans le prochain PLFSS ?

Mme la ministre. Le fonds ne doit pas nécessairement être créé par la loi ; il peut être identifié au sein du budget de l’État. Pour l’alimenter, nous sommes nombreux à avoir l’idée de mettre à contribution le chiffre d’affaires des fabricants. Mais à partir du moment où les sièges sociaux et les chiffres d’affaires ne sont pas localisés en France, la base de contribution est extrêmement difficile à identifier – pour ceux qui sont en France, elle pourrait être considérée comme confiscatoire au sens que donne à ce terme le Conseil constitutionnel. Nous cherchons à constituer ce fonds au sein du budget de la sécurité sociale et à l’alimenter par des recettes liées au tabac.

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous n’envisageons pas de taxer les bénéfices des fabricants ; nous souhaitons prélever une contribution sur le chiffre d’affaires. Dans le dispositif applicable à l’industrie pharmaceutique adopté dans le PLFSS, le taux L s’applique aux laboratoires fussent-ils anglo-saxons ou allemands.

Je relève également que le financement des campagnes de prévention représente des coûts minimes en comparaison d’une évolution de la fiscalité du tabac. D’un côté, on parle d’une vingtaine de millions d’euros, de l’autre, de milliards. Les montants relativement faibles de la contribution ne pèseraient ni sur les ménages ni sur les buralistes.

J’entends néanmoins que le Gouvernement ne souhaite pas de nouvelle mesure fiscale, aussi je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements AS1086 et AS1085, tous deux de M. Arnaud Richard, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Arnaud Richard. Ces amendements visent à alourdir les sanctions prévues en cas de fabrication illicite de tabac ou de vente frauduleuse, y compris à distance, pour le premier, et en cas de contrebande pour le second.

M. Olivier Véran, rapporteur. La contrebande de produits dangereux pour la santé est déjà punie de dix ans de prison et d’une amende pouvant atteindre cinq fois la valeur du produit concerné. L’amendement AS1085 porte la peine de prison à vingt ans, et l’amende à cinquante fois la valeur, ce qui paraît excessif. Quant à l’amendement AS1086, il quintuple la peine de prison prévue en cas de fabrication illicite ou de vente à distance. Le trop est peut-être l’ennemi du bien.

Avis défavorable.

M. Arnaud Richard. Je retire les deux amendements.

Les amendements AS1086 et AS1085 sont retirés.

La Commission examine les amendements identiques AS337 de M. Jean-Pierre Door et AS504 de M. Dominique Tian.

M. Jean-Pierre Door. Le marché parallèle du tabac est un véritable fléau contre lequel il faut lutter en renforçant les missions de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude. Celle-ci devra publier un bilan annuel chiffré rendant compte de la réalisation des objectifs de saisie afin que nous soyons régulièrement informés.

Mme Michèle Delaunay. Je rappelle que les buralistes reçoivent tous les ans une compensation de 300 millions d’euros par an, soit la moitié de la somme consacrée au vieillissement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le versement aux buralistes est inéquitable. Ceux qui ne sont pas touchés par l’existence des marchés parallèles reçoivent les mêmes montants que ceux qui sont les plus exposés : on a vu des chiffres d’affaires dans la Creuse bondir de 143 % alors que, dans les zones frontalières, les buralistes voient les leurs baisser de 15 %. Peut-être les débitants de tabac devraient-ils mieux se répartir ces compensations.

M. Dominique Tian. D’autant qu’en interdisant aux buralistes de s’installer un peu partout, Mme Delaunay va créer des déserts de bureaux de tabac tout en supprimant toute concurrence dans le secteur. Les débitants la remercient pour cette preuve d’amour !

M. Olivier Véran, rapporteur. Le PNTR ne vise pas à pénaliser les buralistes qui tiennent un commerce légal et rencontrent souvent des difficultés. Ceux-ci sont parfaitement conscients des enjeux, et ils ont engagé une réflexion en vue de la reconversion de tout ou partie de leur activité. Compte tenu de la taille moyenne de leurs commerces, souvent insuffisante pour vendre autre chose que du tabac ou la presse, la question n’est d’ailleurs pas simple. Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics se préoccupent de la situation des buralistes, car, à mesure que le tabagisme doit se réduire, il faut évidemment songer à des reconversions professionnelles. Il ne s’agit pas de pénaliser ce secteur.

Confier à la Délégation nationale à la lutte contre la fraude le soin de coordonner l’ensemble des actions des services de l’État en matière de lutte contre la contrebande de tabac me paraît un peu compliqué, sachant qu’elle ne dispose que de douze salariés. À moins que vous ne souhaitiez créer massivement des emplois publics dans cette administration, je vous invite à retirer les amendements, faute de quoi je serai contraint d’émettre un avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Chapitre II
Soutenir les services de santé au travail

Article 6
(art. L. 4623-1 du code du travail)

Exercice des fonctions de médecin du travail par un collaborateur médecin

L’article 6 du projet de loi s’inscrit dans le prolongement de la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l’organisation de la médecine du travail qui a établi des services de santé au travail constitués en équipes pluridisciplinaires, animées et coordonnées par le médecin du travail : elles comprennent des médecins du travail, des intervenants en prévention des risques professionnels et des infirmiers et peuvent être complétées par des assistants de services de santé au travail et des « professionnels recrutés après avis des médecins du travail ».

Sur la base de ces dispositions, les décrets n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation de la médecine du travail et n° 2014-798 du 11 juillet 2014 portant diverses dispositions relatives à la médecine du travail ont prévu que le service de santé au travail, ou l’employeur, peuvent « recruter des collaborateurs médecins ».

Il s’agit de médecins qui s’engagent à suivre une formation en vue de l’obtention de la qualification en médecine du travail « encadrés par un médecin qualifié en médecine du travail qu’ils assistent dans ses missions » (article R. 4623-25 du code du travail).

Afin de consolider ce dispositif prometteur, l’article 6 du projet de loi établit, dans la partie législative du code du travail relative à la médecine du travail, une compétence de ces médecins pour exercer des missions qui relèvent de la seule compétence du médecin du travail.

La définition réglementaire des compétences actuelles

Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, on décompte, au 31 décembre 2013, 154 collaborateurs médecins exerçant dans un service de santé au travail, correspondant à 144 équivalents temps plein.

Ces salariés ont un âge moyen de 50 ans et viennent à 59 % de la médecine générale. Il s’agit donc d’une voie supplémentaire d’accès à la spécialité de médecine du travail qui peut répondre à des aspirations de reconversion ou de diversification des parcours professionnels.

Dans le cadre de la promotion de la santé au travail, ces médecins sont habilités à prescrire ou réaliser des examens médicaux, à orienter les salariés vers un médecin et à assumer les protocoles d’urgence dans les entreprises. Mais ils ne sont pas habilités à prononcer des avis d’aptitude ou d’inaptitude des salariés à leurs postes de travail. En pratique, un avis peut être rendu sur la base d’un rapport établi par le collaborateur médecin, mais sous la seule responsabilité du médecin spécialiste en médecine du travail.

La définition actuelle des missions du collaborateur médecin

Article R. 4623-14

Le médecin du travail assure personnellement l’ensemble de ses fonctions, dans le cadre des missions définies à l’article R. 4623-1. Elles sont exclusives de toute autre fonction dans les établissements dont il a la charge et dans le service interentreprises dont il est salarié. Toutefois, le médecin du travail peut confier certaines activités, sous sa responsabilité, dans le cadre de protocoles écrits, aux collaborateurs médecins, aux internes, aux candidats à l’autorisation d’exercice, aux infirmiers, aux assistants de service de santé au travail ou, lorsqu’elle est mise en place, aux membres de l’équipe pluridisciplinaire.

Article R. 4623-15

Le médecin du travail peut être remplacé durant son absence. Lorsque la durée de l’absence excède trois mois, son remplacement est de droit. Lorsque la durée de l’absence est inférieure à trois mois, le médecin du travail peut être remplacé par un médecin du travail, par un collaborateur médecin ou par un interne en médecine du travail dans les conditions mentionnées à l’article R. 4623-28.

Article R. 4623-25

Le service de santé au travail ou l’employeur peut recruter des collaborateurs médecins. Ces médecins s’engagent à suivre une formation en vue de l’obtention de la qualification en médecine du travail auprès de l’ordre des médecins. Ils sont encadrés par un médecin qualifié en médecine du travail qu’ils assistent dans ses missions.

Article R. 4623-25-1

Le collaborateur médecin remplit les missions que lui confie le médecin du travail qui l’encadre, dans le cadre du protocole écrit prévu par l’article R. 4623-14 et validé par ce dernier, en fonction des compétences et de l’expérience qu’il a acquises. Ce protocole définit les examens prévus à la section 2 du chapitre IV du présent titre auxquels le collaborateur médecin peut procéder. Dans ce cas, les avis prévus à l’article R. 4624-34 sont pris par le médecin du travail sur le rapport du collaborateur médecin.

Article R. 4623-25-2

Le collaborateur médecin dispose du temps nécessaire et des moyens requis pour exercer ses missions et suivre la formation mentionnée à l’article R. 4623-25. Il ne peut subir de discrimination en raison de l’exercice de ses missions.

L’alinéa premier de l’article L. 4623-1 du code de travail prévoit en effet qu’un diplôme spécial est obligatoire pour l’exercice des fonctions de médecin du travail : la qualification en médecine du travail est exigée pour exercer les fonctions de médecin du travail. L’alinéa 2 de cet article prévoit une dérogation, à titre temporaire, pour un interne de la spécialité exerçant sous l’autorité d’un médecin du travail expérimenté.

La définition des conditions d’exercice de compétences nouvelles

L’article 6 modifie donc l’article L. 4623-1 du code du travail et y établit un troisième alinéa afin de prévoir une nouvelle dérogation à cette règle : il fixe dans la loi une définition du collaborateur médecin : « médecin non spécialiste en médecine du travail et engagé dans une formation en vue de l’obtention de cette qualification auprès de l’ordre des médecins » et étend son champ d’intervention en prévoyant qu’un décret définit les conditions dans lesquelles il « exerce sous l’autorité d’un médecin du travail d’un service de santé au travail et dans le cadre d’un protocole écrit et validé par ce dernier, les fonctions dévolues aux médecins du travail ».

Ce protocole devra donc établir les conditions dans lesquelles le médecin non spécialiste en médecine du travail peut être amené à prendre les décisions qui relèvent de la seule prérogative des médecins du travail et qui sont relatives à l’aptitude médicale des salariés à leurs postes de travail.

Le rapporteur attire l’attention sur le fait que les médecins du travail bénéficient, au titre de ces missions particulières, de protections définies aux articles L. 4623-4 et suivants du code du travail : le licenciement comme la rupture ou l’arrivée à terme d’un contrat de travail à durée déterminée doivent être autorisés par l’inspecteur du travail qui s’assure que ces décisions ne sont pas en lien avec l’exercice des missions de médecin du travail.

Les médecins non spécialistes en médecine du travail recrutés par un service de santé au travail ou par l’employeur pourraient donc se trouver dans la situation de subir une sanction de la part de l’employeur motivée par l’exercice de fonctions dévolues aux médecins du travail. Cependant l’article R. 4623-25-2 du code du travail prévoit que le collaborateur médecin « ne peut subir de discrimination en raison de l’exercice de ses missions ».

*

La Commission examine l’amendement AS392 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Cet amendement propose de supprimer l’article 6. J’aurais préféré que le projet de loi comporte un dispositif susceptible d’encourager la filière de la médecine du travail qui souffre.

Je désapprouve l’utilisation du terme de collaborateur pour désigner des personnes qui sont médecins salariés. En outre, l’article prévoit que ces collaborateurs sont placés sous l’autorité du médecin du travail. Comment cette autorité s’exercera-t-elle ?

M. Gérard Sebaoun. Je suis opposé à votre amendement. La notion de collaborateur de médecin n’est pas inconnue dans le milieu libéral ; elle est même consacrée dans un décret de janvier 2012. Elle n’a rien de péjoratif, dans la mesure où ce médecin est embauché par un service de santé au travail, est tutoré par un médecin du travail et doit s’engager sur un cursus de quatre ans à l’issue duquel sa qualification est reconnue par le Conseil de l’ordre. Aujourd’hui, cela concerne souvent des médecins en voie de reconversion : l’âge moyen des médecins collaborateurs, aujourd’hui au nombre de 154 équivalents temps plein annuel travaillé, est de cinquante ans. Face à la baisse du nombre de médecins du travail, la voie proposée par l’article 6 me semble raisonnable et légitime.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Nous parlons de médecins qui s’engagent à suivre une formation en vue de l’obtention de la qualification de médecin du travail. Ils ont en moyenne cinquante ans, sont médecins généralistes dans près de 60 % des cas. L’article 6 offre une voie d’accès supplémentaire à la spécialité de médecine du travail, qui peut répondre à des aspirations de reconversion ou de diversification des parcours professionnels. Il consolide le dispositif en permettant à ces médecins d’exercer des missions qui relèvent de la seule compétence du médecin du travail, sous l’autorité d’un médecin du travail, dans le cadre d’un protocole écrit et validé par ce dernier.

La Commission rejette l’amendement.

Les amendements AS1709 et AS1710 du rapporteur sont retirés.

M. Bernard Accoyer. Je suis préoccupé par le contenu de l’article 6 et par la volte-face du rapporteur, qui est revenu sur son intention bien fondée de supprimer les mots « collaborateur médecin » – il n’existe que des docteurs en médecine. Cette expression, particulièrement malvenue, stigmatise des professionnels qui viennent pallier les carences sérieuses de la médecine du travail. Pourquoi, monsieur le rapporteur, avoir décidé de retirer ces amendements ? Vous devriez revenir, comme vous l’avez fait à plusieurs reprises, sur cette décision intempestive afin de conserver leur dignité à ces professionnels qui assurent chaque jour une mission difficile.

La Commission est saisie de l’amendement AS1354 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Les médecins du travail sont confrontés à la baisse sévère des effectifs de médecine du travail qui se poursuit et devrait être accentuée par les nombreux départs à la retraite attendus, avec de fortes disparités régionales. Dans le même temps, le nombre de places offertes dans la spécialité n’augmente pas. Des mesures urgentes s’imposent pour compenser le déficit démographique de médecins du travail et renforcer l’attractivité de la profession.

Le rapport de M. Christian Dellacherie suggérait notamment deux pistes : l’autorisation de prescrire, d’une part, et l’autorisation d’un exercice mixte de cette spécialité, d’autre part. L’amendement propose de poursuivre le travail de réflexion engagé.

M. Gérard Sebaoun. L’activité mixte est déjà une réalité mesurée par l’INSEE : 83 médecins ont une activité mixte, soit une très faible proportion des 5 007 médecins répertoriés. Cette voie nouvelle ouverte à des personnes désireuses d’acquérir la qualification de médecin du travail m’apparaît être la bonne méthode.

Le médecin du travail peut prescrire à titre exceptionnel, mais ce n’est pas son rôle. Il ne me paraît pas opportun de le modifier.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Il est inutile de prévoir un nouveau rapport puisque celui dont nous disposons est récent. En outre, l’article 6 a précisément pour but de consolider un dispositif qui favorise la reconversion dans la médecine du travail.

M. Bernard Accoyer. Je souhaite sous-amender l’amendement afin de supprimer l’expression de « collaborateur médecin » comme l’avait envisagé le rapporteur. Cette suppression ne modifie en rien le dispositif : elle permet d’éviter la stigmatisation d’une catégorie et de rassurer des professionnels contrariés par cette formulation pour le moins maladroite.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il ne s’agit pas d’un sous-amendement, monsieur Accoyer, mais d’un amendement à part entière pour lequel le délai de dépôt est dépassé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 6 sans modification.

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Après l’article 6

La Commission examine l’amendement AS1353 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Le rapport de M. Dellacherie recommandait de développer les relations entre les spécialités. Il regrettait ainsi que la loi ne facilite pas l’accès du médecin du travail au dossier médical personnel. Cet amendement tend à lever cet obstacle, sous réserve du consentement préalable du patient.

M. Olivier Véran, rapporteur. Permettre l’accès aux données médicales pourrait être pertinent. Mais l’article L. 1111-18 l’interdit expressément pour le médecin du travail. Cette mesure suscite des inquiétudes compréhensibles. Je suggère donc d’approfondir cette question. Dans cette attente, j’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS952 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à assurer l’indépendance des médecins du travail. La rédaction ambiguë de l’article R. 4126-1 du code de la santé publique rend possible le dépôt d’une plainte par une entreprise auprès du conseil de l’ordre contre un médecin du travail qui aurait établi par écrit un lien entre l’organisation du travail et la santé psychique des salariés. L’un des médecins qui ont fait l’objet d’une telle plainte a été condamné en première instance.

L’article dispose en effet que l’action disciplinaire contre un médecin peut être introduite par l’ordre des médecins agissant de sa propre initiative ou à la suite de plaintes, « formées notamment par les patients, les organismes locaux d’assurance maladie obligatoires », etc. Avant l’introduction du terme « notamment » par un décret de mars 2010, seules les personnes physiques ou morales mandatées par des patients pouvaient poursuivre un médecin devant le conseil de l’ordre. Cet ajout a permis aux employeurs de s’engouffrer dans une brèche pour remettre en cause des certificats médicaux attestant d’un lien de causalité entre l’état de santé psychique du salarié et son travail.

Il est abusif qu’un employeur en conflit avec ses salariés se revendique de l’intérêt de ces derniers pour attaquer les médecins qui les défendent.

Faute de pouvoir amender le décret, l’amendement propose une nouvelle rédaction de l’article sur lequel la disposition réglementaire s’appuie.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’indépendance du médecin du travail doit être garantie par des protections légales et des exigences déontologiques. Exclure les employeurs et eux seuls d’un recours devant une instance ordinale serait une mesure discriminatoire et disproportionnée par rapport au but recherché.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS131 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. L’amendement crée une obligation pour l’employeur d’informer les salariées, à leur retour de congé maternité, sur les règles en vigueur dans l’entreprise concernant l’allaitement maternel.

Les dispositions prévues par le code du travail – droit de disposer d’une heure par jour pour allaiter, droit d’allaiter dans l’établissement, locaux dédiés à l’allaitement dans les entreprises de plus de cent salariés – peuvent être complétées par des mesures plus favorables prévues par les conventions collectives et les accords collectifs de branche ou d’entreprise. Mais souvent, faute d’information, les mères de retour dans l’entreprise après le congé maternité ignorent l’existence de ces dispositions et interrompent l’allaitement maternel.

Il est essentiel de développer l’allaitement maternel dès la naissance et de le prolonger aussi longtemps que possible. Le renforcement de l’information des femmes sur le droit d’allaiter sur le lieu de travail devrait y contribuer.

Puisque nous sommes tous ici sensibles à la cause des femmes qui travaillent, je vous invite à voter cet amendement qui leur permet de ne pas avoir à choisir entre leur enfant et leur travail.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le droit des femmes à allaiter sur leur lieu de travail est reconnu par le code du travail. Instaurer une obligation d’information semble trop formel et surtout incontrôlable dans la pratique.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 6 bis
(art. L. 4612-1 du code du travail)

Mission de prévention du comité d’hygiène, de sécurité
et des conditions de travail

Provenant d’un amendement présenté par M. Gérard Sebaoun et plusieurs commissaires SRC, l’article 6 bis modifie l’article L. 4624-1 du code du travail qui définit le rôle du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) afin de reconnaître la prévention comme l’une de ses missions. De fait, le champ d’action des CHSCT en matière de prévention a été étendu à des domaines aussi divers que le harcèlement sexuel ou moral, la prévention des risques psychosociaux ou encore la prévention de la pénibilité au travail : préciser à l’article L. 4624-1 qu’il contribue non seulement à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement mais également « à la prévention » constitue donc une mesure de clarification.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS944 de M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Cet amendement souligne le rôle des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en matière de prévention, en ajoutant cette dernière à leurs missions définies par le code du travail. Alors que son rôle est actuellement sujet à débat, cette instance, qui s’est beaucoup développée, fait montre d’une expérience et d’une expertise en matière de prévention qui doivent être reconnues par la loi.

M. Gérard Cherpion. Il ne me semble pas opportun d’ajouter cette nouvelle mission qui ne relève pas selon moi des CHSCT.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Article 6 ter
(art. L. 4624-1 du code du travail)

Production de données selon le sexe dans les rapports annuels
des médecins du travail

Découlant d’un amendement présenté par Mme Catherine Coutelle et plusieurs commissaires SRC, l’article 6 ter modifie l’article L. 4624-1 du code du travail, relatif aux compétences du médecin du travail, afin d’instituer une obligation de production de données selon le sexe dans les rapports annuels des médecins du travail. Il s’agit de développer le recueil et la publication régulière de données établies selon le sexe en matière de santé au travail, en s’appuyant sur les rapports annuels des médecins du travail, afin d’améliorer la prévention de la sinistralité spécifique touchant les femmes.

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La Commission examine l’amendement AS1445 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Quéré. Cet amendement vise à développer le recueil et la publication régulière de données sexuées en matière de santé au travail en s’appuyant sur les rapports annuels des médecins du travail.

Si les accidents du travail ont globalement baissé entre 2001 et 2012, ils progressent nettement pour les femmes (+ 20,3 %). Les dispositions actuelles du code du travail ne prévoient pas d’obligation concernant la production de données selon le sexe dans les rapports annuels des médecins du travail. Pour pallier cette lacune, il convient de modifier l’article L. 4624-1 du code du travail relatif aux missions du médecin du travail.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS380 de M. Denis Baupin.

Mme Véronique Massonneau. Cet amendement prévoit une sensibilisation des médecins à la mobilité active afin d’encourager l’usage de ce mode de déplacement entre domicile et travail.

M. Bernard Accoyer. C’est faire injure aux médecins que de penser qu’ils ignorent les vertus de l’activité physique. Je suis résolument contre cet amendement inutile.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le degré de précision de l’amendement lui confère un caractère réglementaire. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Chapitre III
Soutenir et valoriser les initiatives des acteurs pour faciliter l’accès de chacun
à la prévention et la promotion de la santé

Article 7
(art. L. 3221-2-2 [nouveau] et L. 6211-3 du code de la santé publique)

Facilitation du dépistage des maladies infectieuses transmissibles

En dépit d’une activité de dépistage importante en France, avec 5,2 millions de tests de sérologie au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) réalisées en 2014, près d’un tiers des personnes diagnostiquées séropositives sont dépistées à un stade avancé de la maladie.

Le dépistage tardif contribue ainsi à la dynamique persistante de l’épidémie : on diagnostique entre 7 000 et 8 000 nouveaux cas chaque année.

Les personnes sans prise en charge médicale sont en effet beaucoup plus susceptibles de transmettre le virus que celles qui bénéficient d’un traitement, ce qui accroît la dynamique épidémique parmi les groupes à risques, et parmi les populations les plus éloignées de la prévention et des soins. Les constats sont comparables concernant les hépatites virales, en particulier le virus de l’hépatite C (VHC) pour lequel les usagers de drogues sont les plus à risques.

Aussi l’article 7 vise à faciliter l’utilisation de deux techniques innovantes de dépistage : les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD), dont les conditions de réalisation sont précisées, et les autotests, dont la délivrance, élargie, est autorisée. Il s’agit dans les deux cas de soutenir les intervenants de proximité, notamment associatifs, qui sont en mesure d’« aller vers » les populations à risques, de leur proposer un dépistage et, le cas échéant, une orientation vers des soins adaptés.

Les tests rapides d’orientation diagnostique

L’article L. 6211-3 du code de la santé publique définit le test rapide d’orientation diagnostique et le soustrait à la catégorie des « examens de biologie médicale », définie à l’article L. 6211-1.

Cet article indique que ne constituent pas un examen de biologie médicale un test, un recueil et un traitement de signaux biologiques, à visée de dépistage, d’orientation diagnostique ou d’adaptation thérapeutique immédiate. Les TROD fournissent en effet un premier résultat en moins d’une demi-heure : ils orientent vers un diagnostic qu’ils ne réalisent pas par eux-mêmes, puisque leurs résultats doivent être confirmés par un examen de biologie médicale, mais ils offrent, par leur simplicité et souplesse d’utilisation, la possibilité d’aller à la rencontre des populations les plus concernées.

Un arrêté du ministre chargé de la santé établit la liste de ces tests et détermine les catégories de personnes pouvant les réaliser. Environ 56 000 TROD pour le VIH ont été réalisés en 2014, essentiellement par des associations.

Dans sa rédaction actuelle, cet arrêté ne vise que le VIH et pas les hépatites virales. Le I de l’article 7 complète l’article L. 6211-3 afin de préciser le contenu de cet arrêté : le dépistage des « maladies infectieuses transmissibles » est mentionné, ce qui ouvre la voie aux TROD de l’hépatite C.

L’arrêté doit également définir les conditions dans lesquelles le dépistage peut être effectué par un professionnel de santé ou par du personnel relevant de structures de prévention ou associatives. Cette dernière mention sécurise l’activité des professionnels associatifs, qui animent des structures de prévention et de dépistage.

Ce personnel doit alors avoir reçu une formation adaptée. Enfin l’article 7 dispose que l’arrêté doit également préciser « les conditions particulières de réalisation de ces tests ainsi que les modalités dans lesquelles la personne est informée de ces conditions et des conséquences du test. »

Les autotests de maladies infectieuses transmissibles

La perspective de confronter une personne, seule, à un auto-diagnostic de séropositivité sans accompagnement médical a longtemps constitué un frein à l’autorisation des autotests des maladies infectieuses transmissibles. Mais deux recommandations successives du Conseil national du sida en 2012 et du Comité consultatif national d’éthique en 2013, ont conclu en faveur de leur diffusion. Les risques occasionnés par les possibilités, minimes, de « faux résultats négatifs » paraissent grandement contrebalancés par les gains attendus : des populations qui se détournent des centres de dépistage habituels pourront plus facilement connaître leur sérologie ce qui contribuera à diminuer le nombre de personnes qui vivent avec le VIH sans le savoir.

Aussi, le II de l’article 7 insère un article L. 3121-2-2, nouveau, dans la partie du code de la santé publique consacrée à la lutte contre le virus de l’immunodéficience humaine et les infections sexuellement transmissibles.

Cet article établit un nouveau cas de dérogation au monopole pharmaceutique prévu par l’article L. 4211-1, dont le 8° vise « la vente au détail et toute dispensation de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DMDIV) destinés à être utilisés par le public, à l’exception des tests destinés au diagnostic de la grossesse ainsi que des tests d’ovulation ».

Les autotests de détection des maladies infectieuses transmissibles figureront donc au nombre des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro qui pourront être fournis en dehors des seules pharmacies d’officines, mais que ces dernières continueront à dispenser.

Un renvoi est opéré aux règles d’autorisation de mise sur le marché figurant au titre II du livre II de la cinquième partie du code de la santé publique ainsi qu’à la directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1988 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.

La liste de ces autotests de maladies infectieuses transmissibles sera fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

L’article L. 3121-2-2 liste les organismes habilités à effectuer cette délivrance parallèle au réseau officinal.

En premier lieu sont cités des établissements de santé et les organismes habilités en application de l’article L. 3121-2 : ce sont les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (CEGIDD) établis par l’article 47 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015, par fusion des centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) et des centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissible (CIDDIST). Mais la mesure n’entre en vigueur que le 1er janvier 2016 : aussi le 2° mentionne encore les établissements ou organismes habilités en application de l’article L. 3121-1 ou de l’article L. 3121-2-1, par référence aux dispositions, applicables jusqu’au 1er janvier 2016, relatives aux CDAG et CIDDIST.

Les organismes de prévention sanitaire habilités à réaliser des TROD pour le VIH pourront aussi délivrer des autotests. Enfin, les différentes structures d’accueil et d’accompagnement des personnes victimes d’addictions sont mentionnées : les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) et les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (CAARRUD) ainsi que les « appartements de coordination thérapeutique » mentionnés au 9° de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles.

Comme pour les tests rapides d’orientation diagnostique, l’arrêté devra préciser les conditions particulières de la délivrance ainsi que les modalités selon lesquelles la personne est informée des conditions de réalisation du test et de ses conséquences.

Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, les autotests seront en vente libre dans les pharmacies d’officine, à la charge financière exclusive de l’usager, pour un prix d’environ vingt euros. Les structures de prévention sanitaire et associative pourraient mettre à disposition à titre gratuit environ 30 000 autotests, pour un coût évalué à 600 000 euros par an.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté plusieurs amendements identiques présentés par des commissaires des groupes SRC, Ecolo et RRDP visant à ce que l’arrêté relatif aux conditions de réalisation des TROD, prévu par l’article L. 6211-3 du code de la santé publique, prévoie, par dérogation à l’article 371-1 du code civil, les conditions dans lesquelles le recueil du consentement des titulaires de l’autorité parentale n’est pas requis pour la réalisation du TROD sur un mineur qui s’opposerait à un tel recueil du consentement.

La Commission a également adopté un amendement du rapporteur qui établit dans le code de la sécurité sociale un article L. 162-1-18-1, nouveau, qui prévoit que lorsqu’un ayant droit mineur a fait usage, pour certains actes et prestations, du droit de dispense du recueil du consentement des titulaires de l’autorité parentale, défini au premier alinéa de l’article L. 1111-5 du code de la santé publique, la prise en charge par les organismes d’assurance maladie de certaines dépenses est protégée par le secret. En outre, ce secret est également protégé, dans les mêmes conditions, pour l’ayant droit majeur qui le demande. Dans ce cas, les remboursements d’un montant élevé n’apparaîtront pas sur les relevés adressés à l’assuré social dont le mineur est l’ayant droit. Cette mesure de secret sera sans incidence sur les modalités préexistantes de prise en charge. La liste des affections ainsi que des actes et prestations concernés sera définie par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, ce qui permettra d’inclure le VIH tout en permettant d’introduire d’autres pathologies dans ce champ.

La Commission a également adopté un amendement présenté par M. Arnaud Richard et les commissaires du groupe UDI qui prévoit que lors de la délivrance des autotests de détection des maladies infectieuses, la personne sera informée non seulement des conditions de réalisation du test et de ses conséquences mais également des conditions d’information et de conseil en matière de prévention, d’accompagnement et, le cas échéant, de prise en charge.

La Commission a enfin adopté un amendement de précision du rapporteur et deux amendements du rapporteur qui harmonisent, dans le code de la santé publique, la dénomination des virus de l’immunodéficience humaine et des hépatites virales.

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La Commission examine les amendements identiques AS238 de Mme Véronique Massonneau, AS818 de Mme Monique Orphé, AS1224 de Mme Dominique Orliac et AS1343 de M. Jean-Pierre Le Roch.

Mme Véronique Massonneau. Le combat contre l’épidémie de sida passe d’abord par le dépistage. Or certains mineurs peuvent renoncer à ce dépistage de peur de devoir évoquer avec leurs parents leurs éventuelles prises de risques. Cet amendement vise donc à garantir l’anonymat pour les mineurs lors du dépistage.

Mme Monique Orphé. Le consentement des titulaires de l’autorité parentale est requis pour pratiquer un test rapide d’orientation diagnostique (TROD) pour un mineur. Seul un médecin peut le pratiquer à titre exceptionnel sans ce préalable. Or seul le TROD non médicalisé permet aujourd’hui de dépister certaines communautés ou de développer la prophylaxie dans certains territoires. C’est le cas notamment des mineurs en Guyane.

Cet amendement, qui rejoint par ailleurs l’avis du Conseil national du sida du 15 janvier 2015, permet d’anticiper une situation paradoxale dans laquelle une personne mineure aurait accès aux autotests, mais non aux TROD qui obéissent pourtant à un cahier des charges incluant notamment un entretien sur les pratiques et les risques par rapport au VIH et aux hépatites.

Mme Dominique Orliac. Même argumentation.

M. Michel Liebgott. Il est important de s’adresser à ces jeunes qui pourraient penser que le VIH est en recul et que les progrès médicaux en font une maladie banale.

M. Olivier Véran, rapporteur. J’attire votre attention sur la fragilité du dispositif qui prévoit un simple arrêté pour déroger à une règle établie par le code civil. Malgré cet obstacle juridique, j’émets un avis favorable, car je partage l’intention de ces amendements.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, les amendements AS432 de M. Élie Aboud et AS165 de Mme Véronique Massonneau tombent.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS257 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS393 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. L’amendement autorise tout professionnel de santé
– médical et paramédical – à utiliser les TROD.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est satisfait.

L’amendement est retiré.

L’amendement AS1301 de Mme Véronique Massonneau est également retiré.

Puis la Commission adopte les amendements rédactionnels AS1627 et AS1672 du rapporteur.

L’amendement AS166 de M. Jean-Louis Roumegas est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS1091 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Cet amendement précise que la mise à disposition d’autotests de détection pour les personnes les plus exposées aux maladies infectieuses transmissibles va de pair avec l’accompagnement, le conseil et la prise en charge de la personne.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission examine l’amendement AS1320 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement concerne les mineurs diagnostiqués séropositifs qui ne souhaitent pas révéler leur état à leurs parents. Il permet à ces mineurs, ainsi qu’aux ayants droit majeurs qui le demandent, d’obtenir le secret pour les dépenses inhérentes au traitement. Les remboursements figurent aujourd’hui sur les relevés de sécurité sociale des parents et plusieurs cas de renoncement aux soins pour ce motif nous ont été signalés.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte enfin l’article 7 modifié.

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Après l’article 7

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS1321 du rapporteur, AS1090 de M. Arnaud Richard et AS229 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement propose une actualisation régulière des critères conduisant à une contre-indication au don du sang. La première actualisation devra intervenir au plus tard trois mois après la promulgation de la loi. Il s’agit de lever les obstacles pouvant être considérés comme discriminatoires à l’accès au don du sang.

Mme la présidente Catherine Lemorton. La ministre a rappelé dans la discussion générale l’actualisation des formulaires pour les donneurs sans discrimination liée à l’orientation sexuelle.

M. Arnaud Richard. Je remercie la ministre d’avoir abordé ce sujet dans son propos liminaire. Le Président de la République lui-même considère qu’aucune justification scientifique ne fonde la discrimination actuelle. Il est nécessaire de tourner la page d’une histoire, commencée en 1983, de stigmatisation à l’égard d’un certain nombre de nos compatriotes. Nous proposons donc de mettre fin à la contre-indication permanente au don du sang qui vise certains groupes de personnes en raison de leur orientation sexuelle, et de réserver cette dernière aux comportements à risques.

Mme Véronique Massonneau. Il s’agit d’instaurer un principe de non-discrimination pour le don du sang en raison de son origine, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son identité de genre ou de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je retire mon amendement et vous propose d’en faire de même au bénéfice des explications données par la ministre précédemment.

M. Arnaud Richard. J’accepte de retirer l’amendement. J’ai confiance dans le comité d’éthique dont Mme la ministre a annoncé la saisine. Je ne doute pas que le Gouvernement tirera les conséquences de l’avis qui sera rendu.

Mme Véronique Massonneau. Je retire l’amendement.

Les amendements sont retirés.

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Article 8
(art. L. 3121-4 et L. 3121-6 [nouveau] du code de la santé publique)

Réduction des risques en direction des usagers de drogues

La politique de réduction des risques en direction des usagers de drogue est une composante essentielle, aux côtés de la prévention, du versant sanitaire de la lutte contre les usages de drogues illicites.

Il s’agit d’une politique ancienne, conduite par les différents gouvernements, dès les années 1980, en réponse à la crise sanitaire occasionnée par la transmission du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) parmi les usagers de drogues injectées par voie intraveineuse : les pouvoirs publics ont soutenu ou suscité des initiatives de médecins et d’associations allant au contact des usagers de drogue pour ne pas ajouter de nouveaux risques sanitaires aux dommages inhérents aux addictions (28).

La diminution spectaculaire de la transmission du VIH parmi les usagers de drogues témoigne de la pleine réussite de ces initiatives. La proportion d’usagers de drogues contaminés par le VIH est ainsi passée de 30 % dans les années 1990 à 10 % en 2011, et ils ne représentent plus que 1 % des diagnostics de séropositivité, ce qui constitue néanmoins un facteur de risque quarante fois supérieur à la moyenne. En revanche, l’incidence de l’infection par le virus de l’hépatite C continue d’être très élevée.

Mais les assises juridiques de cette politique sont fragiles au regard des interdictions définies dans le code de la santé publique et dans le code pénal concernant l’usage illicite des produits stupéfiants, depuis la loi n° 70-1320 du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l’usage illicite des substances vénéneuses.

Jusqu’en 2004, la plupart des dispositifs de réduction des risques en direction des usagers de drogues n’avaient de fondements que réglementaires, et reposaient parfois sur de simples circulaires. (29) Les dispositions aujourd’hui applicables, les articles L. 3121-3 à L. 3121-5 du code de la santé publique, ont d’ailleurs été insérées, en janvier 2004, en première lecture, dans le texte du projet de loi relative à la politique de santé publique, par un amendement du Gouvernement déposé au Sénat : lors de la discussion de l’amendement, le ministre avait précisément avancé la nécessité de sécuriser le dispositif et de mentionner dans la loi les missions des centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogue (CAARUD).

Or ces dispositions, établies dans l’urgence, et codifiées dans le titre II, relatif aux infections par le virus de l’immunodéficience humaine et les infections sexuellement transmissibles, du livre 1er, relatif à la lutte contre les maladies transmissibles, de la troisième partie de ce code sur la lutte contre les maladies et les dépendances, continuent d’être fragiles.

Article 12 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique

« Après l’article L. 3121-2 du code de la santé publique, sont insérés trois articles L. 3121-3 à L. 3121-5 ainsi rédigés :

Art. L. 3121-3. – La définition de la politique de réduction des risques en direction des usagers de drogue relève de l’État.

Art. L. 3121-4. – La politique de réduction des risques en direction des usagers de drogue vise à prévenir la transmission des infections, la mortalité par surdose par injection de drogue intraveineuse et les dommages sociaux et psychologiques liés à la toxicomanie par des substances classées comme stupéfiants.

Art. L. 3121-5. – Les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue relèvent du 9° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles et concourent, avec les autres dispositifs, à la politique de réduction des risques. Leurs missions sont définies par décret en Conseil d’État.

Les dépenses afférentes aux missions des centres visés par le présent article sont prises en charge par l’État, sans préjudice d’autres participations, notamment des collectivités territoriales.

Les actions de réduction des risques sont conduites selon les orientations définies par un document national de référence approuvé par décret. Les personnes accueillies dans les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue bénéficient d’une prise en charge anonyme et gratuite. »

Saisi, par le Gouvernement, le 14 août 2013, d’un projet de décret visant à autoriser l’ouverture, à Paris, d’une salle de consommation à moindre risque, le Conseil d’État, par un avis non rendu public du 8 octobre 2013, a considéré que les articles L. 3121-3 à L. 3121-5 du code de la santé publique fournissent une base légale trop imprécise, au regard de la force des dispositions prohibant l’usage illicite des stupéfiants.

Or le Gouvernement a engagé un plan ambitieux de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017, publié en septembre 2013, dont plusieurs mesures visent à améliorer la prise en charge des personnes victimes d’addictions aux produits stupéfiants. Il s’agit, outre l’expérimentation de salles de consommation à moindre risque, de l’expérimentation de programmes d’échange de seringues (PES) pour les personnes en détention ou encore de l’expérimentation de PES par voie postale. Des évolutions des pratiques de prise en charge sont également envisagées, par exemple en matière de traitements de substitution aux opiacés.

Pour tenir compte de l’ensemble de ces éléments, l’article 8 améliore, dans le code de la santé publique, la définition de la politique de réduction des risques afin de donner, enfin, un fondement juridique adapté à une politique qui a fait ses preuves et qui doit être développée. Cet article est donc indissociable de l’autorisation, par l’article 9 du projet de loi, de l’expérimentation d’une salle de consommation à moindre risque.

La rédaction actuelle de l’article L. 3121-3 qui fait relever de l’État la politique de réduction des risques en direction des usagers de drogue n’est pas modifiée. Ceci est bien conforme avec l’affirmation de l’article premier, faisant de la politique de santé une responsabilité de l’État.

Le 1° de l’article 8 substitue sept alinéas à l’alinéa unique de l’article L. 3121-4 dont la rédaction actuelle mentionne seulement l’objectif de prévenir « la transmission des infections, la mortalité par surdose par injection de drogue intraveineuse et les dommages sociaux et psychologiques liés à la toxicomanie par des substances classées comme stupéfiants ».

Un I est d’abord inséré à l’article L. 3121-4 afin d’actualiser la définition des objectifs : il vise donc « la prévention des dommages sanitaires, psychologiques et sociaux » ce qui paraît suffisamment large, ainsi que « la transmission des infections » et « la mortalité par surdose » qui n’est plus seulement attribuée aux injections intraveineuses mais, plus largement « à la consommation de substances psychoactives ou classées comme stupéfiants ».

Les textes réglementaires pris sur le fondement de l’article L. 3121-4 précisent le contenu des actions relevant de la réduction des risques : elles visent le « soutien aux usagers dans l’accès aux soins de première nécessité, proposés de préférence sur place » et « la mise à disposition de matériels de prévention des infections » (article R. 3121-33-1).

Le référentiel de la réduction des risques prévu par l’article L. 3121-5 rappelle que « les besoins fondamentaux en matière de santé doivent être correctement couverts (hygiène, soins) » et que les matériels de prévention doivent permettre la « prévention des risques infectieux » ainsi que « l’adaptation des outils aux nouveaux usages » (article D. 3121-33 et annexe).

Enfin, la circulaire de la Direction générale de la santé (DGS) du 2 janvier 2006 sur les CAARUD indique qu’ils s’adressent « à des personnes qui ne sont pas encore engagées dans une démarche de soins ou dont les modes de consommation ou les produits qu’ils consomment les exposent à des risques majeurs, qu’ils soient infectieux, accidentels, psychiatriques ». Elle leur confie aussi le soin de « réduire, en s’adaptant aux besoins locaux, les effets négatifs liés à la consommation de stupéfiants » et « d’améliorer la situation sanitaire et sociale de ces consommateurs ».

Surtout, le II définit précisément les actions que « comprend et permet » la mise en œuvre de la politique de réduction des risques, actuellement définies seulement par des textes réglementaires.

Un 1° invite les professionnels des CAARUD à « délivrer des informations sur les risques associés à l’usage de substances psychoactives ou classées comme stupéfiants » ; le 2° indique que l’accompagnement consiste à orienter les usagers de drogues vers les services sociaux, les services de soins généraux ou de soins spécialisés « afin de mettre en œuvre un parcours de soins adapté à leur situation spécifique et d’améliorer leur état de santé physique et psychique ».

Le 3° autorise les professionnels à « promouvoir et distribuer des matériels destinés à la réduction des risques ».

Le 4° indique que la politique de réduction des risques consiste à « promouvoir et superviser les comportements, les gestes et les procédures de prévention des risques ». Cette définition vise à prémunir les intervenants d’éventuelles poursuites pour les infractions de provocation au délit d’usage illicite de stupéfiants, définies aux articles L. 3421-1 et L. 3421-4 du code de la santé publique. Il est précisé que la « supervision consiste à mettre en garde les usagers contre les pratiques à risques, à les accompagner et leur prodiguer des conseils relatifs aux modalités de consommation, afin de prévenir ou de réduire les risques de transmission des infections et les autres complications sanitaires ». Il est enfin affirmé que la supervision « ne comporte aucune participation active aux gestes de consommation ».

L’article L. 3121-4 est en outre complété d’un III qui prévoit l’extension de la politique de réduction des risques au milieu carcéral, selon des modalités adaptées. Il est en effet indispensable de développer ces mesures dans les lieux privatifs de liberté, par exemple les programmes d’échanges de seringues : la prévalence du VIH y est dix fois supérieure à celle de la population générale ; et la prévalence de l’hépatite C atteint près de 4,8 %.

Enfin, le 2° de l’article 8 établit un article L. 3121-6, nouveau, afin de prévoir, que, sauf dispositions contraires, les modalités d’application sont déterminées par décret en Conseil d’État.

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté plusieurs amendements du rapporteur et de Mme Catherine Lemorton visant à retenir la dénomination de « réduction des risques et des dommages » (RDRD) afin de souligner qu’en cas de consommation de produits stupéfiants, la survenue de dommages n’est pas seulement un risque, donc un éventualité, mais qu’elle est certaine et que l’action des pouvoirs publics doit chercher à la réduire.

Un amendement du rapporteur a visé à mieux définir la portée de l’activité menée dans le cadre de la réduction des risques et des dommages : au-delà d’une simple orientation, il s’agit d’un accompagnement des usagers de drogues non seulement dans un parcours de soin, à visée curative, mais dans un parcours de santé visant à les rendre plus autonomes, au plan physique et psychique, et donc à améliorer leur insertion sociale.

Un amendement de Mme Dominique Orliac et des commissaires RRDP a fait expressément entrer dans le champ de la mise en œuvre de la réduction des risques et des dommages, la promotion et la distribution de « produits de santé » destinés à la réduction des risques, ce qui recouvre à la fois les matériels, seuls mentionnés initialement, mais aussi des médicaments, à l’exemple de la naloxone, qui est un médicament antagoniste morphinique qui a démontré son efficacité dans la réduction des  cas d’overdose.

Un amendement de M. Letchimy et de plusieurs commissaires du groupe SRC a précisé que la réduction des risques et des dommages vise également à « participer à l’analyse, la veille et l’information, à destination des pouvoirs publics et des usagers, sur la composition, les usages en matière de transformation et de consommation, et la dangerosité des substances consommées ».

Enfin, outre deux amendements rédactionnels du rapporteur, la Commission a adopté un amendement du rapporteur transférant les articles applicables à la réduction des risques et des dommages, actuellement codifiée dans la troisième partie du code de la santé publique, dans le livre premier relatif à la lutte contre les maladies transmissibles et dans son titre II relatif aux infections aux VIH et aux infections sexuellement transmissible (IST), dans de nouveaux articles L. 3411-6 à L. 3411-9, situés dans  la même partie du code mais dans son livre IV relatif à la lutte contre la toxicomanie. Cet amendement y établit ainsi un nouveau chapitre I bis intitulé: « Réduction des risques et des dommages ». La codification proposée traduit le fait qu’il ne saurait y avoir d’opposition entre les actions de promotion des gestes et procédures de prévention d’une part et la politique de lutte contre les addictions d’autre part.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS439 de M. Jean-Pierre Door.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement vise à supprimer l’article 8 qui lève le tabou de l’interdiction d’injection de drogue par intraveineuse et infléchit le périmètre de la mission de santé publique en réécrivant l’article L. 3121-4 du code de la santé publique relatif à la politique de réduction des risques. Cet article rompt avec les politiques de santé publique et de lutte contre la drogue menées en France depuis vingt ans par tous les gouvernements. Il marque un véritable retour en arrière en abandonnant les usagers à leurs addictions au lieu de tout mettre en œuvre pour les en extraire, et en effaçant du code de la santé publique la lutte contre la mortalité par surdose par injection de drogue, pour, au contraire, l’encourager par les salles de shoot dans l’article 9.

La France est le seul pays en Europe à avoir inscrit dans la loi le principe de réduction des risques en 2004. D’autres pays ont choisi de privilégier la consommation à moindre risque avec de piètres résultats.

Les six pays qui ont mis en place les salles de shoot – lesquelles sont pourtant déconseillées par les Nations unies – font état de résultats peu probants. La prévalence de consommation d’héroïne est quatre fois plus élevée en Suisse qu’en France, deux fois plus en Espagne. L’Allemagne a vu croître en 2011 de 15 % le nombre de consommateurs. Les pays ayant installé ces salles de shoot y renoncent peu à peu. En Australie, il a été calculé que le risque d’overdose était trente-six fois plus important dans la salle qu’alentour. Les Suisses ont décidé de restreindre l’accès aux salles. Quant au Canada, il vient de renoncer à poursuivre l’expérimentation.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le réseau de réduction des risques appréciera votre utilisation des chiffres…

M. Olivier Véran, rapporteur. Nous aurons l’occasion de discuter de ce sujet avec l’article 9. Il faut être attentif aux mots qui sont employés : nous ne parlons pas de salle de shoot – qui renvoie à l’interdit, au vice et à la violence –, mais de salle de consommation à moindre risque – qui renvoie à l’accompagnement et à la prise en compte du fait qu’il n’existe pas de société sans drogue. Les politiques publiques qui ont été mises en place, avec retard par rapport à nos voisins, ont permis de sauver des vies. Ce n’est qu’en 1987 que l’échange des seringues a été autorisé – 14 millions de seringues ont été échangées à ce jour – ; je ne pense pas qu’on puisse remettre en question cette politique. En 1993, la prescription de méthadone a été autorisée avant la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché. En 2004, les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogue (CAARUD) ont été créés, en catimini.

L’article 8 sécurise les interventions des personnes accompagnant la réduction des risques chez les usagers de drogue. Les textes sont aujourd’hui trop fragiles au regard des missions qu’elles exercent. Il est important de les adapter aux évolutions des pratiques, aux dangers nouveaux ainsi qu’aux innovations dans la prise en charge.

Avec cet article, nous arrêtons de nous cacher derrière notre petit doigt. Nous reconnaissons la réduction des risques comme une politique de santé publique à part entière.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1711 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement peut susciter un débat. À la demande de plusieurs acteurs de la lutte contre la toxicomanie, il propose de retenir la dénomination : « réduction des risques et des dommages ». La notion actuelle de « réduction des risques » présente l’inconvénient de faire du danger ou du dommage une éventualité. Or, en cas de consommation de drogue, le dommage n’est pas éventuel.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS169 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1225 de Mme Dominique Orliac.

Mme Véronique Massonneau. Cette modification vise à donner une base légale au testing des produits afin de disposer d’informations sur la qualité et la composition des produits. L’objectif est de pouvoir informer les consommateurs sur les risques pour la santé et d’éviter les surdosages. L’évaluation des produits permettrait également de prendre en compte les nouveaux produits de synthèse dans la politique de réduction des risques.

Mme Dominique Orliac. Même argumentation.

M. Bernard Accoyer. Je suis surpris que cet amendement ait franchi le cap de l’article 40 alors que les évaluations envisagées ont un coût.

En outre, alors que nous venons d’adopter des mesures pour lutter contre la consommation de tabac, vous proposez une mesure qui sécurise, voire favorise la consommation de drogue dont nous savons les ravages qu’elle cause. Je suis donc fermement opposé à cet amendement.

Mme Valérie Boyer. Je m’étonne de l’incohérence de nos travaux. Les messages que vous défendez sur le tabac ne vaudraient pas pour la drogue ? D’un côté, vous prônez l’interdiction du tabac et même celle de la cigarette électronique ; de l’autre, vous faites la promotion des salles de shoot et du testing des drogues. Je ne comprends pas la logique de cette loi. Les bras m’en tombent.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il existe deux niveaux de prévention : la prévention primaire qui consiste à déconseiller ou à interdire l’usage de certains produits à la nocivité avérée ou illicites ; la prévention secondaire qui s’adresse à ceux qui souffrent déjà d’une addiction. Nous ne favorisons pas l’utilisation de substances illicites. Nous sommes guidés par un principe de réalité qu’a bien compris M. Juppé, maire de Bordeaux, qui est volontaire pour ouvrir une salle de consommation à moindre risque.

Mme Martine Pinville. Nous sommes tous d’accord sur la nécessité de la prévention. Mais j’abonde dans le sens de la présidente sur la prévention secondaire à laquelle s’ajoute la nécessaire protection des personnes. Ces politiques ont tout à fait leur place dans une loi de santé.

M. Bernard Accoyer. Tirant les conséquences de votre démonstration, madame la présidente, je propose un sous-amendement prescrivant une radio des poumons annuelle à tous les fumeurs.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis défavorable à ces amendements. Il importe de faire la part des choses entre la prévention et l’information d’une part, et le test de produits, d’autre part. Par ailleurs, ces amendements soulèvent un problème de rédaction. Il paraît inapproprié de faire référence à la qualité du produit pour une substance psychoactive.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS1728 et AS1328 du rapporteur.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1226 de Mme Dominique Orliac, AS104 du rapporteur et AS634 de M. Élie Aboud.

Mme Dominique Orliac. Aujourd’hui, les acteurs de la réduction des risques vont au-delà de l’orientation des usagers de drogue pour les accompagner dans leur parcours de santé. Cet amendement vise à prendre en compte cette dimension de leur mission.

Il s’agit en outre de renforcer le lien avec le titre II de la loi en promouvant une approche globale qui s’intéresse également à la situation sociale des personnes prises en charge.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement souligne que les interventions des CAARUD dépassent la visée curative pour s’intéresser à l’état de santé physique et psychique ainsi qu’à l’insertion sociale de l’usager de drogue. Sa rédaction paraît plus complète que celle de l’amendement précédent.

M. Élie Aboud. L’amendement est défendu.

La Commission rejette l’amendement AS1226.

Elle adopte l’amendement AS104.

En conséquence, l’amendement AS634 tombe.

La Commission est saisie de l’amendement AS1227 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. La référence aux produits de santé, introduite par l’amendement, permet d’inclure, dans la mise en œuvre de la réduction des risques, la promotion et la distribution de produits de substitution ou des produits comme la Naloxone qui réduit les risques d’overdose. L’ensemble de la palette d’outils peut ainsi être utilisé aux fins de réduction des risques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis favorable à cet amendement qui lève une ambiguïté. La Naxolone a démontré son efficacité dans la réduction des cas d’overdose. C’est un sujet très important. Je sais que le ministère travaille à améliorer sa disponibilité pour les usagers et leurs proches.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1228 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement précise les visées éducative et thérapeutique de la réduction des risques.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS345 de Mme Chantal Guittet et AS1533 de Mme Dominique Orliac.

M. Gérard Sebaoun. Cet amendement propose de préférer l’expression « faire prendre conscience » à celle de « mettre en garde », plus culpabilisante.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1533 est défendu.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’expression « mettre en garde » comporte une dimension objective, alors que la référence à une prise de conscience semble imposer une obligation de résultat qui risque de fragiliser le dispositif. Avis défavorable.

L’amendement AS345 est retiré.

La Commission rejette l’amendement AS1533.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS915 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS1310 de M. Serge Letchimy.

Mme Monique Orphé. L’article 8 ne mentionne pas les actions de veille et d’information sur la nature et la composition des substances utilisées par les consommateurs, alors qu’il s’agit pourtant d’une des missions des CAARUD.

Cette mission de veille et d’information apparaît d’autant plus déterminante que les risques associés à la consommation de substances psychoactives varient en fonction de la composition des produits et de leurs modalités de transformation et d’utilisation. À titre d’illustration, le crack, deuxième drogue la plus consommée dans les départements et régions d’outre-mer, est le résultat de la purification par salification de cocaïne dans de l’ammoniaque, du bicarbonate de soude ou de l’éther éthylique, chacun des modes de transformation présentant un degré de dangerosité différent. Il apparaît pertinent de contribuer à l’information, à l’analyse et à la veille afin de donner aux consommateurs la possibilité d’être eux-mêmes les acteurs de la réduction des risques.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cette mission est primordiale au regard de l’évolution de plus en plus rapide des usages de substances psychoactives. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1712 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les modalités de l’immunité pénale couvrant les actions des professionnels de soins dans le cadre de l’accompagnement d’usagers de drogue. Ce sujet complexe mérite d’être débattu en séance afin de répondre à l’inquiétude exprimée par les professionnels de terrain tout en évitant d’adopter un dispositif susceptible de créer de l’insécurité juridique. Je suis prêt à le retirer.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il est important de sécuriser le travail des personnels afin d’éviter qu’ils ne soient accusés d’inciter à la consommation alors qu’ils ont pour mission d’accompagner la réduction des risques et de faire en sorte que la personne rejoigne le droit commun de la prévention.

Mme la ministre. Le Gouvernement partage cet objectif : il convient de protéger tous ceux qui s’engageront dans la mission de réduction des risques. Les travaux se poursuivent avec la Chancellerie pour aboutir à un dispositif sûr.

Un dispositif trop spécifique risque de fragiliser certaines catégories de personnels, de ne pas couvrir l’ensemble des situations ou d’en oublier certaines, au risque de voir cet oubli mal interprété.

Je demande donc le retrait de cet amendement afin de nous permettre d’approfondir le cadre juridique qui pourrait être proposé.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1464 de Mme Françoise Dumas.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Cet amendement propose d’étendre la politique de réduction des risques à tous les lieux privatifs de liberté, afin d’inclure notamment les centres de rétention et les différents dispositifs d’enfermement, qui ne correspondent pas nécessairement au milieu carcéral.

M. Fernand Siré. Je suis opposé à tout système qui permettrait l’introduction en prison de drogues et en favoriserait le trafic. Il me paraît bien plus intelligent d’accompagner les personnes concernées dans un centre de désintoxication que de leur distribuer des seringues au moyen desquelles elles s’injecteraient des drogues qu’elles se seraient procurées en douce au parloir. Nous priverions ainsi les trafiquants de drogue de financement. Il convient de traiter les gens qui se trouvent dans les établissements pénitentiaires, car, quand ils sont en manque, ils sont dangereux. Il faut donc leur fournir les produits nécessaires, les prendre en charge et les désintoxiquer.

M. Olivier Véran, rapporteur. La notion de « lieux privatifs de liberté » recouvre des réalités très différentes : zones d’attente dans les ports, dans les aéroports, dans les gares, mais aussi les centres de rétention administrative, les secteurs psychiatriques délivrant des soins sous contrainte, les dépôts de tribunaux, les locaux de garde à vue… Les modalités de la politique de réduction des risques ne pouvant donc être les mêmes pour toutes ces structures, j’émets un avis défavorable, même si le principe reste louable.

L’amendement est retiré.

La commission en vient aux amendements identiques AS171 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1229 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Roumegas. Je réaffirme notre soutien à la rédaction proposée pour le III de l’article L. 3121-4 du code de la santé publique. Il est en effet important que la politique de réduction des risques s’applique aux populations carcérales – on sait la gravité de la toxicomanie dans ce milieu. Nous proposons néanmoins une simplification : la suppression, à la fin de l’alinéa 9, des mots : « selon des modalités adaptées au milieu carcéral », qui pourraient donner l’impression qu’on appliquera cette politique de façon moins volontaire ici. Il s’agit donc de lever toute ambiguïté et de supprimer ce qui va de soi.

Mme Dominique Orliac. Il s’agit en effet de supprimer la dernière partie de l’alinéa 9 qui pourrait motiver une application beaucoup plus restrictive de la loi en milieu carcéral. L’application du dispositif prévu en détention n’en devra pas moins faire l’objet de débats plus larges au Parlement pour marquer une véritable volonté politique, afin de renforcer l’impulsion pour une mise en œuvre concrète, innovante et ambitieuse. Il pourrait ainsi être ajouté une disposition sur les expérimentations et innovations en détention. En tout état de cause, les modalités d’application de la réduction des risques en détention feront l’objet de décrets dans lesquels ces orientations mériteraient d’être intégrées.

M. Olivier Véran, rapporteur. À contraintes spécifiques, modalités spécifiques de mise en œuvre. Avis défavorable.

La commission rejette ces amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS1230 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement consiste à remplacer les mots : « milieu carcéral », par les mots : « lieux privatifs de liberté », de manière à être plus « incluant », si j’ose dire, qu’il s’agisse des centres de rétention et des différents dispositifs d’enfermement qui ne correspondent pas nécessairement au milieu carcéral.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS172 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Dans l’esprit de l’article 9, nous proposons de sécuriser aussi bien les acteurs que les usagers de la politique de réduction des risques. Cela paraît aller de soi, mais, dans les faits, on a constaté que les acteurs ont parfois rencontré des problèmes juridiques. Je pense à des pharmaciens qui ont eu à en subir de graves conséquences.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable : tout ce que vous ne précisez pas dans les dispositions que vous proposez peut donner lieu à interprétation.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement AS1729 du rapporteur et de Mme Catherine Lemorton visant à retenir la dénomination « réduction des risques et des dommages ».

Puis elle en vient à l’amendement AS1231 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Le présent amendement prévoit une sécurisation pénale des acteurs et usagers, et, à cette fin, vise, en cohérence avec l’esprit de l’article 8, à permettre un accès effectif, renforcé et facilité aux politiques et dispositifs de réduction des risques dans une optique de santé individuelle pour les personnes, mais, plus largement, dans un objectif de santé publique.

Ces dispositions sont cohérentes avec celles proposées par l’article 9 sur les salles de consommation de drogue à moindre risque.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS1713 du rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cet amendement vise à inscrire la politique de réduction des risques et des dommages dans le cadre de la lutte contre le VIH. Il s’agit de transférer les dispositions concernées du livre I au livre IV de la troisième partie du code de la santé publique.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 8 modifié.

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Après l’article 8

La commission examine l’amendement AS170 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à dépénaliser l’usage thérapeutique du cannabis. La production, la détention, le transport, l’acquisition ou l’emploi de cannabis ne pourraient faire l’objet de poursuites pénales dès lors que l’infraction serait commise par une personne obéissant à une prescription médicale. Un amendement ultérieur précisera l’étendue des prescriptions médicales possibles du cannabis thérapeutique.

Il ne s’agit pas du tout, par conséquent, de donner un prétexte, de créer un alibi à la consommation de cannabis qui n’aurait pas de visée thérapeutique, mais bien plutôt de faire en sorte que la France rejoigne les pays les plus avancés en la matière. Surtout, cet amendement très sérieux offrirait aux patients atteints de certaines pathologies un moyen, reconnu pour son efficacité, de lutter contre la douleur.

Ceux qui verraient là la violation d’un tabou ne doivent pas oublier que les dérivés morphiniques sont déjà largement utilisés, ce qui ne revient en rien à encourager l’usage de la morphine à des fins récréatives. Ne mélangeons donc pas tout : il n’est ici question, j’y insiste, que de cannabis thérapeutique.

M. Bernard Accoyer. Nous sommes opposés à cet amendement. Nous avons bien noté la volonté d’un certain nombre de collègues d’aller vers la dépénalisation du cannabis récréatif – pour reprendre le mot employé à l’instant par M. Roumegas. Tous les moyens sont bons pour approcher ce but, y compris celui consistant à prétendre que les cannabinoïdes auraient les mêmes effets antalgiques que d’autres produits disponibles dans la pharmacopée et qui ne pourraient satisfaire à ce besoin thérapeutique. Il y a là, évidemment, une grossière manipulation de l’opinion publique. Nous nous opposons par conséquent à cette banalisation et soulignons à nouveau les risques qu’elle fait courir pour la santé publique en matière de désinsertion sociale, mais aussi les risques cancéreux et psychiatriques.

Mme Michèle Delaunay. Il n’y a aucun risque cancéreux !

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Si l’on vous arrête dans la rue en possession de cannabis et que vous faites valoir qu’il est destiné à un usage thérapeutique propre…

M. Jean-Louis Roumegas. C’est précisé !

M. Olivier Véran, rapporteur. Non, ce n’est pas précisé.

M. Jean-Louis Roumegas. Il suffit de montrer une prescription médicale.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les conditions qui vous permettent de démontrer qu’il s’agit bien d’une prescription médicale ne sont précisées ni par le texte ni par votre amendement.

Quant au fond, le débat sur le cannabis thérapeutique ne peut être traité rapidement et doit faire l’objet d’une expertise de la part des autorités compétentes. On sait que la libéralisation de la consommation de cannabis – quand bien même ce serait pour des raisons thérapeutiques – aura un impact populationnel et des conséquences sanitaires.

Mme la ministre. Si le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement, il ne donnera pas dans les caricatures qu’on vient d’entendre.

Le cannabis peut avoir des vertus thérapeutiques.

Mme Michèle Delaunay. Bien sûr !

Mme la ministre. C’est pourquoi, il y a deux ans, j’ai autorisé la mise sur le marché de médicaments fabriqués à base de cannabis – cela a été le cas, d’ailleurs, dans d’autres pays européens. Toutefois, je réaffirme que, d’une manière générale, le Gouvernement n’est favorable ni à la légalisation ni à la dépénalisation de l’usage du cannabis.

Pour ce qui est de l’usage thérapeutique, je suis favorable à la mise sur le marché éventuelle de médicaments identifiés comme pouvant avoir un effet dans certains traitements – comme on l’a fait dans le cadre de traitements contre la douleur. Cependant, je vois mal comment on va faire la différence entre l’usage thérapeutique du cannabis et son usage à d’autres fins. Aussi, pour éviter toute ambiguïté, est-il préférable de s’en tenir aux deux catégories existantes. Au reste, des médicaments à base de cannabis ont déjà été mis sur le marché et ne sont contestés par personne.

M. Gérard Bapt. En effet, ils sont efficaces !

Mme la ministre. En somme, l’usage du cannabis n’a pas à être dépénalisé.

M. Arnaud Robinet. Attention aux termes employés : le cannabis n’a pas de visée thérapeutique, mais antalgique. Quand on veut mettre un médicament sur le marché, on compare la nouvelle molécule à d’autres, et elle doit répondre à plusieurs critères : service médical rendu, risques secondaires éventuels et bénéfices. Dès lors, je ne vois pas pourquoi, par le biais d’un amendement, on légaliserait l’usage du cannabis à visée antalgique sans passer par les exigences prévues pour les autres molécules avant leur mise sur le marché.

Dans ce contexte, le groupe UMP est fortement opposé à cet amendement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. L’un des produits contenant du Subutex, utilisé notamment en cas de spasticité, bénéficie d’une autorisation de mise sur le marché européenne. La France n’est donc pas laxiste, monsieur Robinet.

La commission rejette l’amendement.

*

Article 9
Expérimentation de salles de consommation à moindre risque (SCMR)

L’article 9 du projet de loi autorise l’expérimentation de salles de consommation à moindre risque : il s’agit de locaux gérés par les professionnels des centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogue (CAARUD), où est autorisée la consommation des substances illicites, sous la supervision d’une équipe pluridisciplinaire.

Comme indiqué dans le commentaire de l’article 8 du projet de loi, cette démarche s’inscrit dans la logique pragmatique d’adaptation des actions de réduction des risques à l’évolution des besoins de santé publique afin de mieux prévenir les dommages, considérables, occasionnés par la consommation des produits stupéfiants.

Le rapporteur souhaite insister sur le fait qu’il ne s’agit nullement de céder à la facilité : il s’agit au contraire de ne pas abandonner les personnes les plus en difficulté. L’expérimentation de ces salles vise à accueillir selon de nouvelles modalités, dans un contexte strictement professionnel, des personnes hautement dépendantes aux stupéfiants et consommant leurs produits dans des conditions d’hygiène déplorables, souvent sur la voie publique ou dans les halls d’immeuble. Les intervenants de la réduction des risques ont besoin de ce nouveau cadre afin de pouvoir installer avec les usagers un rapport de confiance qui doit permettre d’établir progressivement le lien nécessaire pour les orienter vers le soin.

La salle de consommation à moindre risque s’inscrit donc dans la continuité des dispositifs de lutte contre la dépendance aux produits stupéfiants dits « à bas seuil d’exigence » vis-à-vis des usagers, auxquels le sevrage n’est pas imposé comme condition d’accès.

La comparaison avec les expériences menées dans de nombreux pays étrangers, et parfois de longue date, confirme l’intérêt de la démarche. L’institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) a mené une expertise collective sur la réduction des risques (30), qui souligne l’opportunité de mettre en place des centres d’injection supervisés au sein d’une palette plus large d’outils de prévention.

Là où ils ont été mis en place, ces centres ont permis de réduire les risques liés à l’injection et d’améliorer l’accès aux soins des usagers de drogues les plus marginalisés, parfois majoritairement sans domicile fixe. À Vancouver par exemple, il a été établi que l’espace de réduction des risques évite, chaque année, 35 cas d’infection au VIH ainsi que trois surdoses mortelles : pour les finances sociales, le rapport bénéfice – coût du dispositif s’établirait de cinq à un.

L’article 9 autorise donc une expérimentation, d’une durée de six ans à compter de l’ouverture de la première salle, consistant, pour un petit nombre de CAARUD, à mettre en place des salles de consommation à moindre risque, distinctes des locaux habituels d’intervention des professionnels et d’accueil des usagers de drogues. Ces lieux seront désignés par arrêté du ministre chargé de la santé après avis du directeur général de l’agence régionale de santé concernée et soumis à un cahier des charges national. Selon les informations fournies à votre rapporteur, trois salles pourraient ouvrir, à terme.

Elles ne pourront accueillir que des personnes majeures. Les produits consommés devront être apportés par l’usager lui-même, et dans la limite de sa seule consommation, qui devra être réalisée sur place. La consommation sera supervisée par une équipe pluridisciplinaire, comprenant des professionnels de santé et du secteur médico-social.

Enfin deux alinéas prévoient de façon expresse que les infractions pour usage illicite et détention illicite de stupéfiants ne seront pas applicables à la personne qui détient pour son seul usage personnel et consomme des stupéfiants à l’intérieur d’une salle de consommation à moindre risque. De même, le professionnel intervenant à l’intérieur de la salle de consommation à moindre risque ne pourra être poursuivi pour complicité d’usage illicite de stupéfiants et de facilitation de l’usage illicite de stupéfiants, dès lors qu’il agit conformément à sa mission de supervision.

Les conditions de l’évaluation sont définies. Le III de l’article prévoit que les CAARUD adresseront chaque année un rapport sur le déroulement de l’expérimentation au directeur général de l’agence régionale de santé dans le ressort duquel ils sont implantés, ainsi qu’au ministre chargé de la santé.

Le IV indique que dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adressera au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, portant notamment sur son impact sur la santé publique et sur la réduction des nuisances dans l’espace public.

Auditionnée par votre rapporteur, la Présidente de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives a ainsi indiqué que cette évaluation comprendra la mise en place de cohortes d’usagers de drogues utilisateurs et non utilisateurs de la salle de consommation, ce qui permettra d’en mesurer les effets, ainsi qu’une étude de l’acceptabilité sociale du dispositif par les riverains.

Enfin, le V de l’article 8 précise que ne sont pas applicables aux projets de mise en place de ces salles les dispositions du code de l’action sociale et des familles relatives à l’autorisation, par le Département, des établissements sociaux et médico-sociaux.

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté deux amendements de Mme Seybah Dagoma et des commissaires du groupe SRC précisant, d’une part, que la durée de l’expérimentation, fixée à six ans, est une durée maximale, d’autre part que le rapport sur le déroulement de l’expérimentation que chaque CAARUD concerné adressera chaque année au directeur général de l’ARS et au Ministre chargé de la santé sera également transmis au maire de la commune où se trouve la salle de consommation à moindre risque.

La Commission a en outre adopté sept amendements du rapporteur proposant des modifications de rédactionnelles ou de cohérence.

*

La commission examine les amendements identiques AS440 de M. Jean-Pierre Door, AS628 de M. Élie Aboud, AS665 de M. Dino Cinieri, AS731 de M. Fernand Siré, AS822 de M. Bernard Accoyer et AS1429 de M. Yannick Moreau.

M. Jean-Pierre Door. Nous demandons la suppression de l’article 9. La France a été le premier pays d’Europe à mener une politique de réduction des risques, mais les addictions aux substances psychoactives créent plutôt un état de maladie qu’il convient de traiter et non d’entretenir.

C’est pourquoi nous sommes opposés à l’ouverture, même expérimentale, des salles de shoot. Il existe en effet déjà des structures de prévention, d’accompagnement et de soins aux toxicomanes, qu’il s’agisse des CAARUD ou des centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), structures très performantes – je puis le confirmer, puisque j’en ai dans ma circonscription.

Seuls six pays au monde ont tenté l’expérience que vous proposez, et certains – l’Australie, la Suisse ou le Canada – commencent à en revenir, voire à y renoncer. Plusieurs études ont même montré une aggravation des effets délétères : l’Allemagne a confirmé une augmentation de plus de 15 % du nombre de toxicomanes.

Enfin, la création de ces centres impliquerait des dépenses immobilières et d’équipement, ainsi que des dépenses pour rémunérer les équipes – plus de 1 million d’euros par an.

Vous avez voulu passer outre la décision du Conseil d’État d’octobre 2013, qui avait empêché l’ouverture de ces centres. Vous n’écoutez pas non plus les propositions de l’Académie nationale de médecine, qui s’oppose à ce genre d’expériences et préfère également le traitement.

Nous proposons de favoriser le développement des CAARUD et des CSAPA en leur octroyant des financements supplémentaires, mais également de créer des appartements thérapeutiques – le renoncement à créer une seule salle de shoot permettrait le financement de quinze de ces appartements.

Au total, votre parti pris idéologique ne nous satisfait pas.

M. Élie Aboud. Je relève chez nos collègues une certaine schizophrénie : ils étaient tout à l’heure très sévères à propos du tabac, et c’est tout juste si, maintenant, ils ne nous présentent pas la légalisation de l’usage du cannabis comme une vertu.

Les résultats des études, monsieur le rapporteur, sont toujours discutés. La seule certitude, c’est que l’expérimentation proposée est très coûteuse.

M. Yannick Moreau. L’amendement AS665 vise à supprimer l’article 9, car les salles de shoot – le mot déplaît au Gouvernement, mais il décrit une réalité – sont contraires à l’esprit de notre ordre juridique, au code de la santé publique et aux traités internationaux. En confondant la réduction des risques avec la banalisation de l’addiction aux drogues, le Gouvernement détourne le projet de loi de son objectif, qui est d’aider les personnes à se soigner et à se guérir. La politique de santé publique doit demeurer axée sur les soins, le sevrage ou la prévention précoce – et sans démagogie – des jeunes vis-à-vis du fléau de la drogue. Parallèlement, le Gouvernement doit mener une politique pénale ferme et répressive à l’encontre des trafiquants. Le Conseil d’État avait évidemment rejeté le projet expérimental à Paris. Une expérimentation qui durerait six ans serait une légalisation pure et simple.

M. Fernand Siré. En 2013, en effet, le Conseil d’État a considéré comme illégale l’ouverture de salles de shoot. On ne peut donc accepter un article proposant une telle expérimentation avec des produits dont on ne connaît pas l’origine et qui sont fournis par des dealers. Ces salles seraient des zones de non-droit, le dispositif encouragerait fortement l’exclusion et l’État se rendrait complice d’une société malade.

Un amendement pourrait plutôt prévoir la création d’un centre strictement encadré par des équipes médico-sociales et destiné à accueillir les usagers majeurs de substances psychoactives ou classées comme stupéfiants. Ces personnes bénéficieraient d’une prise en charge médicalisée avec prescription de produits dont l’utilisation serait graduée dans le dessein d’effectuer une désintoxication. En cas d’impossibilité, on leur fournirait la dose minimale. Ces traitements seraient prescrits par une ordonnance sécurisée et, comme pour la morphine, seraient fournis gratuitement pour ôter leur puissance aux dealers et pour éviter à certains d’en être parfois réduits à voler ou à se prostituer pour pouvoir acheter ces produits.

Cette solution honorerait la France : nous aiderions ces gens sans favoriser les dealers et la délinquance liée à la fourniture de produits stupéfiants.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je précise, monsieur Siré, que, dans son avis d’octobre 2013, le Conseil d’État ne considérait pas la création de centres d’accueil et d’accompagnement comme illégale, mais mettait en évidence une insécurité juridique.

M. Bernard Accoyer. Cette initiative nous paraît particulièrement dangereuse : elle revient radicalement sur la politique de lutte contre la toxicomanie, conduite depuis des décennies et qui a donné des résultats. Seuls quelques pays ont créé de telles salles de shoot et, dans de nombreux cas, les retours d’expérience sont particulièrement négatifs. Ce projet est contraire à la législation en vigueur et pose de nombreux problèmes.

Qui, par exemple, va s’occuper de la sécurité à l’intérieur de ces salles de shoot ? Qui va contrôler les doses que vont s’injecter les toxicomanes, le degré de toxicité des substances qu’ils vont consommer dans des lieux publics financés par de l’argent public ? À cela s’ajouteront des problèmes de sécurité à l’extérieur des salles, avec la présence de dealers, des risques de violence et, donc, le trouble causé au voisinage, qui est une constante partout où ces expériences hasardeuses ont été conduites.

Enfin, son coût atteindrait 10 millions d’euros par an. Cet argent pourrait être utilisé pour améliorer l’accès à des médicaments innovants pour des patients qui n’ont aucune raison d’être victime de telle ou telle maladie, ce qui n’est pas le cas de tous les toxicomanes, ou bien utilisé pour la prise en charge des jeunes handicapés pour laquelle on connaît l’insuffisance des budgets – je pense en particulier aux établissements spécialisés pour la prise en charge de l’autisme, les familles concernées se trouvant souvent dans la détresse.

M. Arnaud Robinet. L’amendement AS1429 est défendu.

M. Jean-Louis Roumegas. Je souhaite exprimer ma très forte opposition aux amendements de suppression qui viennent d’être présentés. Tout le monde ici souhaite combattre le fléau de la toxicomanie, mais on peut se demander si chacun veut agir de façon efficace. Certains, moralisateurs, considèrent encore les toxicomanes comme des délinquants, des pestiférés, alors qu’il faudrait les traiter comme des patients atteints de graves pathologies – auquel cas on ne saurait refuser que des structures les prennent en charge. En effet, que veut-on ? Que les seringues soient utilisées dans la rue, dans les parkings ? Mais les gens susceptibles de se rendre dans ces salles sont sans domicile fixe, complètement exclus, ils n’ont pas la possibilité de se droguer en toute sécurité, bien au chaud, dans de beaux appartements parisiens ! Or vous les condamnez à se droguer dans des conditions sanitaires déplorables, sans aucune prise en charge possible. Le dispositif proposé s’inspire de l’expérience d’acteurs de terrain : ils ne font pas de morale, luttent de façon pragmatique contre ce fléau et ont besoin de structures pour accueillir ces gens et les prendre en charge. Ces discours moralisateurs sont lassants. On a de la morale, mais pas de bras pour agir. Nous, nous voulons être efficaces, et nous soutenons donc l’article 9.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Comme M. Roumegas, je suis fortement opposée aux amendements de suppression. Les députés du groupe SRC et, plus largement, de la majorité soutiennent fermement la création des salles de consommation de drogue à moindre risque – et non « salles de shoot », car il s’agit de respecter la dignité des personnes dont nous parlons.

Deux visions s’affrontent. Celle de la droite, marquée par la répression et la stigmatisation, est inefficace. Nous proposons à l’inverse la prévention, l’accompagnement et l’efficacité dans la lutte contre la consommation des drogues.

On compte quatre-vingt-dix salles de consommation dans neuf pays, dont vingt-cinq en Allemagne. De nombreuses études ont démontré leur efficacité en matière de réduction des risques, grâce à l’accompagnement social qui est leur caractéristique, mais aussi en matière de diminution des coûts financiers liés aux conséquences sanitaires de l’utilisation des drogues, et enfin en matière de diminution des nuisances dans l’espace public – il s’agit d’éviter les contaminations accidentelles par utilisation d’un matériel usagé.

Mme la présidente Catherine Lemorton. J’ai participé pendant quinze ans à un réseau de réduction des risques à Toulouse. Les salles de consommation prévues à l’article 9 s’adressent aux populations qui échappent aux radars des dispositifs en vigueur. Est-il raisonnable de laisser quelqu’un se piquer dans la rue, au vu et au su de tous, à l’entrée d’un parking souterrain, sur la place publique, à quelques centaines de mètres d’une école ? Quelqu’un, ici, peut-il soutenir que c’est acceptable ? Ces salles de consommation s’adressent à des gens qui ne bénéficient d’aucune prise en charge, qui sont sans domicile fixe, vivent souvent dans des squats et se rendent – dans le meilleur des cas – à la pharmacie pour chercher un Stéribox.

Les salles de consommation ne vont absolument pas favoriser l’usage des substances illicites – autrement dit des drogues dures, même si la distinction entre drogue « dure » et drogue « douce » n’a guère de sens. Soutenir que la présence de ces salles, à l’étranger, a provoqué une augmentation du nombre d’usagers de drogue, c’est oublier que ceux-ci sont simplement sortis du bois ! S’il n’est pas toxicomane, injecteur compulsif, un jeune de dix-huit ou vingt ans, un samedi après-midi, pendant les soldes du mois de janvier, ira plutôt acheter un jean que dans une salle de shoot pour voir si ce n’est pas bien de se piquer avec de l’héroïne !

Ces salles s’adressent à des gens qui sont déjà dans la précarité sanitaire, sociale, et qui, si l’on ne fait rien pour eux, ont une espérance de vie de quarante ou quarante-cinq ans. La France peut faire mieux !

Mme la ministre. Les députés de l’opposition ont déclaré que l’article 9 était important et qu’il fallait donc le supprimer. J’ai entendu que le dispositif proposé était illégal, que le Conseil d’État l’estimait infondé : or celui-ci a simplement considéré qu’un décret ne suffirait pas et qu’il faudrait passer par la loi. C’est bien pourquoi nous vous soumettons aujourd’hui ce projet, car, s’il n’y avait pas eu besoin de la loi, ces salles de consommation de drogue à moindre risque auraient déjà été mises en place par décret.

L’objectif du Gouvernement n’est pas de banaliser, de faciliter la consommation de drogue, mais de prendre en compte des situations qui existent, qu’on les supporte ou pas, qu’on les voie ou pas, et dans lesquelles se retrouve un nombre non négligeable de personnes. Même si tous ne sont pas concernés par les expérimentations que nous proposons, on compte en France plus de 80 000 usagers de drogue par voie intraveineuse et cent morts par overdose chaque année. Parmi ces personnes, des femmes et des hommes restent exclus de tout ; c’est à eux que s’adresse le dispositif.

Certes, des centres existent déjà, comme les CAARUD, mais certains individus restent réfractaires à tous ces dispositifs, et c’est pourquoi nous proposons des solutions qui ne marcheront sans doute pas dans tous les cas – si nous avions la certitude de pouvoir sortir de l’engrenage de la drogue la totalité des personnes accueillies, nous serions très heureux et nous n’hésiterions pas –, mais nous ne pouvons nous résigner à ce que des femmes et des hommes ne trouvent pas de solutions, d’accompagnement, de soutien, et continuent de se droguer, non seulement dans des entrées de parking, mais aussi dans des jardins publics – dans les bacs à sable desquels on a retrouvé des seringues. Est-ce là l’avenir que nous voulons proposer ?

Notre démarche est donc à la fois volontariste, réaliste et pragmatique. Et, puisque nous n’avons pas de certitudes, comme nous ne nous soumettons à aucune idéologie – le mot a été employé –, les dispositifs que nous proposons sont évolutifs. Nous voulons répondre à la réalité des situations et non pas brandir l’étendard du bien contre celui du mal. L’expérimentation sera de six ans au maximum, et seules les villes, les structures candidates mèneront ces expérimentations, toutes soumises à un cahier des charges. Nous sommes donc loin d’une France qui se couvrirait de salles de consommation de drogue à moindre risque : il faut savoir raison garder.

M. Jean-Pierre Door. Qui assurera le financement de ces salles : les villes, les collectivités territoriales, l’assurance maladie ou l’État ?

M. Bernard Accoyer. Ou l’emprunt ?

Mme la ministre. Ce seront des financements d’État.

M. Bernard Accoyer. Ce sera donc l’emprunt !

M. Olivier Véran, rapporteur. Je reviendrai sur quelques contre-vérités énoncées par les députés de l’opposition. Il se trouve que les chiffres sont têtus et que nous disposons désormais de données internationales fiables.

On compte quarante salles aux Pays-Bas, trente en Allemagne, treize en Suisse, sans oublier le Canada ou l’Australie. La première salle, en Suisse, a été ouverte il y a trente ans et, il y a quelques années, 70 % des riverains interrogés ont exprimé le vœu qu’elle reste ouverte.

En trente ans, il n’y a eu aucun décès des suites d’une overdose dans aucune salle de consommation de drogue à moindre risque dans le monde. De façon générale, on note une réduction notable des décès par overdose dans les pays et, surtout, dans les villes où des salles ont été ouvertes.

Le partage de seringues a considérablement chuté. Or on sait que les premières victimes du partage de seringues sont souvent les conjointes des usagers de drogue par voie intraveineuse.

On a constaté, grâce à ces salles, une amélioration sensible de l’acceptabilité des traitements de substitution, et donc de l’entrée dans la voie du sevrage.

Ces salles présentent donc un intérêt thérapeutique pour les personnes très marginalisées et éloignées des dispositifs existants.

On a également noté une diminution des autres pratiques à risque. Ainsi, le recours au préservatif par les usagers des salles lors de rapports sexuels tend à augmenter. On peut donc parler d’intégration dans un parcours de prévention globale au regard des risques viraux.

En ce qui concerne la sécurité, on constate une réduction drastique du nombre de seringues usagées, une raréfaction très nette, partout, des injecteurs sur la voie publique. Aucune hausse de la délinquance n’a été observée à proximité des salles – on a même noté une réduction des nuisances publiques.

M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas vrai !

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est très important de mener une forte concertation auprès des riverains avant l’ouverture d’une salle, pendant l’expérimentation et ensuite, afin de procéder à des évaluations régulières. C’est ainsi que les idées reçues tomberont. Je prendrai l’exemple de Vancouver : une enquête montre que, chaque année, l’existence de la salle évite trente-cinq cas d’infection au VIH ainsi que trois overdoses mortelles. Enfin, vous serez sans doute surpris d’apprendre que, pour 1 euro investi dans une salle d’injection, vous économisez 5 euros en matière de dépenses de santé.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS1530 de M. Yannick Moreau.

M. Yannick Moreau. Je reviendrai à mon tour sur quelques contre-vérités qui viennent d’être prononcées par le rapporteur et d’autres collègues. Vous défendez une expérimentation sur six ans, une durée qui vaut légalisation. Mme la ministre évoque six ans au maximum, un « maximum » que ne prévoit pas le texte – il s’agit donc bien de six ans au minimum.

Vous citez des exemples merveilleux à l’étranger en nous faisant croire que la planète entière s’est convertie à l’utilité, en matière de santé publique, des salles de shoot. Or il n’y a que six pays dans le monde qui y ont eu recours. Partout, le projet de santé publique lié à ces salles est en recul, y compris à Vancouver.

Quant au supposé caractère répressif du discours de l’opposition, j’ai relevé que des élus de la majorité défendaient la légalisation du cannabis : vous souhaitez donc bien la banalisation de son usage.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Dans les salles de consommation supervisées, vous ne trouverez jamais un consommateur de cannabis, mais uniquement des injecteurs compulsifs hors du droit commun. Je vous lance un défi, monsieur Moreau : d’ici à l’examen du texte en séance publique, trouvez-nous une solution pour tous les injecteurs compulsifs qui vivent dans les squats et ont disparu de l’écran radar de notre société. Vous avez deux semaines pour réfléchir à la manière de les localiser, de les accompagner, de réduire les risques, de leur faire réintégrer le droit commun, de leur faire remplir un dossier de demande de couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). Si vous avez une meilleure proposition que la nôtre, nous en discuterons. N’allez pas croire que c’est par provocation que je lance ce défi, mais la population concernée est tellement particulière ! C’est aussi pourquoi la solution du Gouvernement – et Mme la ministre a eu raison de le souligner – ne réussira pas à 100 %.

M. Yannick Moreau. Il y a une vraie différence d’approche entre nous. Ce n’est pas, de mon point de vue, en accompagnant les toxicomanes dans leur dépendance, fût-ce dans des endroits protégés, où l’on cache la misère pour qu’elle ne s’expose pas aux regards de nos concitoyens, qu’on va régler ce problème de santé publique. Il s’agit plutôt d’accompagner les toxicomanes, les malades, vers la guérison par le sevrage. Ce devrait être l’objectif principal de cette politique de santé et non l’ouverture des salles de shoot partout sur le territoire national, aux frais du contribuable, alors qu’il n’y a plus d’argent public.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette également l’amendement AS1430 de M. Yannick Moreau.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1437 de M. Yannick Moreau et AS1236 de Mme Dominique Orliac.

M. Yannick Moreau. Au lieu de créer des salles de shoot aux frais des contribuables, il est du devoir humanitaire du législateur de mettre en œuvre un programme d’État conduisant à une politique de création de lits de désintoxication et de sevrage des usagers majeurs dépendant de substances psychoactives ou classées comme stupéfiantes, qui souhaitent bénéficier à titre gratuit de soins pour réduire puis cesser leur consommation.

Les établissements médico-sociaux mentionnés au livre III du code de l’action sociale et des familles, ainsi que les associations spécialisées dans la lutte contre la drogue, souvent courageuses et dépourvues de la moindre aide du ministère de la santé, seraient au contraire agréés pour remplir cette mission salvatrice de sevrage de la drogue. Il est en effet affligeant que, en 2015, la France soit à ce point à la traîne dans ce domaine et n’offre à ses toxicomanes que le choix entre « la rue ou la rue ».

Mme Dominique Orliac. Je propose pour ma part une nouvelle rédaction de l’article qui réduit de six à quatre années la durée de l’expérimentation. En effet, la durée de six ans pourrait représenter un frein à l’extension du dispositif à la population des usagers de drogues sur l’ensemble du territoire, alors que des études et les expérimentations chez nos voisins européens ont pleinement montré l’intérêt de la démarche proposée par l’article 9. Nous avons le devoir d’être efficaces, de mener une politique volontariste, de ne pas fermer les yeux sur la réalité du drame de la toxicomanie.

Cette rédaction inscrit dans le dispositif les missions de vigilance et de respect des bonnes pratiques par l’équipe pluridisciplinaire en lieu et place de celle de supervision, puisque la supervision est parfois perçue par les responsables d’établissement comme « proactive », si j’ose dire, et donc plus ambivalente en termes de limites d’intervention de l’équipe, alors qu’aucune participation active aux gestes de l’injection des drogues n’est envisageable.

En outre, cette nouvelle rédaction formule explicitement la nécessité d’une formation adaptée des professionnels de l’équipe pluridisciplinaire et des acteurs associatifs, pour assurer ces missions très spécifiques. Elle permet également de sensibiliser les usagers aux risques encourus plutôt que de les « mettre en garde », cette locution n’étant pas adaptée aux situations des personnes qui seraient accueillies dans ces salles.

Enfin, cet amendement fait référence à la notion de « substance psychoactive », plus adaptée que celle de « produit ».

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement AS1437.

Quant à l’amendement AS1236 de Mme Orliac, je note que la durée de six ans permettra d’ouvrir deux ou trois salles et au Parlement d’aller au-delà de l’expérimentation sur la base d’un rapport d’évaluation. Il s’agit bien d’un délai maximal. Quant au dernier paragraphe de votre amendement, il est redondant avec l’article 8. Je vous suggère de le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Dominique Orliac. Même s’il est redondant, je maintiens mon amendement.

Mme la ministre. Un amendement précisera que la durée de six ans est maximale. Je précise d’ores et déjà qu’il ne s’agit pas de la durée de chaque expérimentation, mais de la durée pendant laquelle, à partir du moment où la première salle est ouverte, pourront s’engager des expérimentations. Admettons qu’une salle s’ouvre le 1er janvier 2016 : à partir de cette date et jusqu’au 31 décembre 2021, des travaux d’expérimentation pourront être menés, mais pas nécessairement pendant six ans. Il faut laisser le temps à des villes qui souhaitent s’engager dans cette voie d’élaborer leur projet et au Parlement le temps d’évaluer les expérimentations qui auront été menées à bien afin de décider de la suite à donner. Ainsi, une commune qui a un projet pour trois ans le conduira pendant trois ans. Une commune qui ne s’engagerait que dans deux ou trois ans doit disposer du temps de développer son projet – c’est pourquoi le Gouvernement entend que la durée soit de six ans au maximum.

La commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement AS1435 de M. Yannick Moreau.

M. Yannick Moreau. L’expérimentation des salles de shoot pour une durée maximale de six ans, si l’amendement du Gouvernement devait être adopté, contrevient directement à nos engagements internationaux.

J’ajoute que l’étude d’impact pas plus que l’exposé des motifs du présent texte n’a fait l’objet d’un examen préalable de conventionalité, c’est-à-dire de vérification du respect des traités internationaux que nous avons signés et qui nous engagent – ce qui constitue un vice de procédure au regard de l’article 39 de la Constitution, car nous nous apprêtons à voter un texte non expertisé juridiquement sous l’angle conventionnel. Or le Parlement ne peut ignorer l’article 55 de la Constitution.

Le présent amendement a donc tout au moins pour objet de rappeler la hiérarchie des normes de notre État de droit.

M. Richard Ferrand. L’exposé sommaire de cet amendement est une pétition de principe ! Notre collègue nous explique que la disposition visée serait contraire aux traités internationaux : quels traités et lesquelles de leurs dispositions ? On nous annonce la lecture en séance de la litanie desdits traités ; nous nous en réjouissons d’avance, mais autant viser précisément les articles ou les dispositions internationales concernés.

J’ajoute que cela me paraît un tantinet farfelu, car, que je sache, les pays qui ont ouvert ces salles sont, pour certains, liés par les mêmes traités que la France. Il ne me semble par conséquent pas très judicieux de fonder ainsi votre opposition à l’ouverture des salles de consommation. Enfin je m’étonne que vous, qui êtes si attachés à la souveraineté nationale, pensiez que nous devrions courber l’échine sous le poids de traités imaginaires et de dispositions qui ne le sont pas moins.

M. Olivier Véran, rapporteur. Les engagements internationaux souscrits par la France s’appliquent en tout état de cause. Si la France y contrevenait, n’importe qui serait habilité à se tourner vers une juridiction pour faire cesser immédiatement l’expérimentation. En outre, vous insinuez que la France viole le droit international, mais vous citez la Suisse, le Canada, les Pays-Bas… Aussi, si nous violons le droit international, nous sommes plutôt en bonne compagnie.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS1466 de Mme Seybah Dagoma.

Mme Seybah Dagoma. Préalablement à l’ouverture définitive de salles de consommation de drogue à moindre risque, tous les pays ont procédé à des expérimentations plus ou moins longues en fonction des spécificités locales. Cet amendement vise à introduire de la clarté et de la flexibilité dans la durée d’expérimentation, dans la limite de six ans à compter de l’ouverture de la première salle. L’introduction du mot « maximum » permettrait, comme vous l’avez souligné, madame la ministre, de tenir compte des spécificités locales et de laisser aux villes le temps de préparer leur dispositif.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de conséquence AS1714 du rapporteur

Elle en vient à l’amendement AS1232 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement vise à mettre en cohérence l’alinéa 1 avec l’alinéa 2 qui utilise la notion d’« espace ». Il s’agit bien de garantir un espace dédié, distinct de celui habituellement utilisé dans le cadre des autres missions, dans le respect de la confidentialité, de la sécurité des usagers et dans le souci de ne pas inciter à la consommation.

M. Olivier Véran, rapporteur. Si l’amendement était voté, l’espace dédié pourrait être une partie d’un CAARUD, alors qu’il est important d’avoir un espace bien identifié pour accueillir le public concerné. Je suggère le retrait. Sinon, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement d’harmonisation AS1416 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS1433 de M. Yannick Moreau.

M. Yannick Moreau. L’expérimentation sur une longue durée, c’est-à-dire la légalisation des salles de shoot, serait non seulement une erreur en matière de santé publique, mais une faute à l’égard des forces de l’ordre qui, tous les jours, au péril de leur vie, luttent contre le trafic de drogues. Nous sommes en train d’instaurer, au cœur de la République, des endroits où l’on pourrait légalement consommer de la drogue, en contravention avec les principes élémentaires du droit pénal et avec les conventions internationales.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS1436 de M. Yannick Moreau.

Les amendements AS625 de M. Élie Aboud et AS1420 du rapporteur sont retirés.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS1422 et AS1715 du rapporteur.

Puis elle examine les amendements identiques AS173 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1233 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à ajouter les acteurs de la promotion de santé aux professionnels du secteur médico-social.

Mme Dominique Orliac. Il s’agit de mieux associer les acteurs associatifs et de la promotion de la santé – qui ne seraient certes pas soignants ni travailleurs sociaux, mais malgré tout dûment formés – à la mise en œuvre de l’expérimentation d’un espace de consommation à moindre risque.

M. Olivier Véran, rapporteur. Cette disposition se justifie à l’article 8, mais pas dans le cadre des salles de consommation. Si l’on élargit trop l’expérimentation, on pourrait la fragiliser. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS1572 de M. Yannick Moreau.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AS1425 du rapporteur.

En conséquence, les amendements AS1234 de Mme Dominique Orliac, AS1311 de Mme Seybah Dagoma et AS348 de Mme Chantal Guittet tombent.

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS1428 du rapporteur.

En conséquence, les amendements AS174 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1235 de Mme Dominique Orliac tombent.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette ensuite l’amendement AS1431 de M. Yannick Moreau.

Puis elle examine l’amendement AS1465 de Mme Seybah Dagoma.

Mme Seybah Dagoma. L’implantation de salles de consommation de drogue à moindre risque nécessite de nombreuses discussions entre riverains, associations, élus et professionnels. Or le maire est toujours en première ligne, à tous les stades, avant, pendant et après l’expérimentation. C’est pourquoi il semble indispensable que les CAARUD lui adressent chaque année un rapport sur le déroulement de l’expérimentation.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Pourquoi l’exposé sommaire mentionne-t-il les CAARUD puisque les salles de consommations ne sont pas des CAARUD ?

Mme Seybah Dagoma. Ils sont mentionnés par l’article 9 qui précise que « les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues mentionnés au I adressent chaque année un rapport sur le déroulement de l’expérimentation au directeur général de l’agence régionale de santé dans le ressort duquel ils sont implantés, ainsi qu’au ministre chargé de la santé ». Je propose qu’on y ajoute le maire.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis favorable. Une question néanmoins : ne faudrait-il pas ajouter le maire de l’arrondissement ?

Mme Seybah Dagoma. À titre personnel, s’agissant de Paris, je préfère que ce soit le maire de la commune.

La commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements AS1432 et AS1438 de M. Yannick Moreau.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS678 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Merci de m’accueillir dans votre commission. Le présent amendement résulte du travail que j’ai pu mener dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques. Ce texte très fort, défendu par la ministre de la santé, devrait prévoir que, dans un délai de six mois après le début de l’expérimentation, le gestionnaire concerné adresse un premier bilan chiffré accompagné d’une première appréciation de l’impact sur les personnes et sur leur environnement, de manière à pouvoir sans tarder émettre des hypothèses, tirer des conclusions et procéder à d’éventuelles réévaluations.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le délai de six mois semble prématuré. Les expériences étrangères montrent qu’il faut du temps pour inscrire la salle dans son environnement et toucher le public visé – d’autant que celui-ci est a priori très éloigné des soins. Je vous suggère de retirer votre amendement, faute de quoi je devrai émettre un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS1571 de M. Yannick Moreau.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS1526 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement AS1569 de Mme Dominique Orliac.

Elle adopte enfin l’article 9 modifié.

*

Après l’article 9

La commission examine l’amendement AS1348 de M. Hervé Féron.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Dans le cadre du programme national du dépistage du cancer du sein, le présent amendement vise à permettre à toute femme employée dans une administration publique de prendre rendez-vous pour un dépistage pendant son temps de travail, avec l’accord de son chef de service et sans retenue de salaire.

M. Olivier Véran, rapporteur. La disposition que vous préconisez est déjà satisfaite dans la pratique et ne concerne ici que les agents publics alors que, dans les faits, toutes les femmes salariées, dans le public comme dans le privé, bénéficient de ce droit. Je vous suggère de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

*

Chapitre IV
Informer et protéger les populations face aux risques sanitaires
liés à l’environnement

Article 10
(art. L. 221-6 du code de l’environnement)

Information du public sur les risques sanitaires liés à la pollution de l’air

L’article 10 vise à mieux informer le grand public des risques sanitaires occasionnés par les épisodes de dépassement des valeurs limites d’exposition aux substances surveillées, telles les particules atmosphériques. À cette fin, il modifie l’article L. 221-6 du code de l’environnement qui définit les conditions d’information du public sur la surveillance de la qualité de l’air.

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 221-6 du code de l’environnement prévoit que les résultats d’études épidémiologiques liées à la pollution atmosphérique, et les informations et prévisions liées à la surveillance de la qualité de l’air font l’objet d’une publication périodique. Il prévoit également que l’État publie chaque année un inventaire des émissions des substances polluantes et un rapport sur la qualité de l’air, son évolution possible et ses effets sur la santé et l’environnement : ces documents sont soumis à l’avis de l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (ANSES). Enfin, le troisième alinéa de cet article dispose que, lorsque les normes de qualité de l’air ne sont pas respectées ou risquent de ne pas l’être, le public en est immédiatement informé par l’autorité administrative compétente, qui peut en déléguer la mise en œuvre à des organismes agréés.

Les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA)

Définis à l’article L. 221-3 du code de l’environnement, ces organismes sont agréés par le Ministère de l’environnement pour la surveillance, au niveau local, de paramètres donnés de la qualité de l’air. Ils sont chargés de la surveillance et de l’information sur la qualité de l’air, de la diffusion des résultats et des prévisions et doivent transmettre immédiatement aux préfets des informations relatives aux dépassements ou prévisions de dépassements des seuils d’alerte et des recommandations.

Chaque AASQA associe des représentants de l’État, des collectivités territoriales, des représentants des activités contribuant à l’émission des substances surveillées, des associations de protection de l’environnement agréées, des associations agréées de consommateurs et des personnalités qualifiées.

Pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants, les associations diffusent un indicateur global de la qualité de l’air : l’indice ATMO. Pour les villes de moins de 100 000 habitants, il s’agit de l’Indice de la qualité de l’air simplifié (IQAs). Ce sont des indicateurs journaliers de la qualité de l’air, calculés à partir des résultats des stations “urbaines” et “périurbaines” représentatives des zones dites “de pollution homogène”. Quatre polluants sont pris en compte : les particules fines, le dioxyde de soufre, le dioxyde d’azote, l’ozone. Les concentrations de chacun de ces polluants sont classées sur une échelle de 1 (très bon) à 10 (très mauvais). Le plus élevé de ces 4 sous-indices donne l’indice de la journée.

Dans sa rédaction actuelle, le troisième alinéa de l’article L. 221-6 du code de l’environnement prévoit que lorsque le public est informé que les valeurs limites d’exposition sont dépassées ou que des seuils d’alerte sont atteints, « cette information porte également sur les niveaux de concentration des polluants, les conseils aux populations concernées et les dispositions arrêtées ».

Le de l’article 10 du projet de loi modifie ce dernier alinéa afin de préciser que l’information porte non seulement sur les niveaux de concentration de polluants et les conseils aux populations concernées mais aussi sur « les risques sur la santé et l’environnement ».

Par coordination, le de l’article 10 du projet de loi précise, à l’alinéa 2 du même article, que le rapport sur la qualité de l’air, son évolution possible et ses effets sur la santé et l’environnement porte également sur « les risques qui en résultent ».

L’étude d’impact jointe au projet de loi indique que la communication autour de la pollution permettra de mieux mettre en évidence ses conséquences sanitaires : elle pourra ainsi mentionner le nombre d’hospitalisations ou encore le nombre de décès liés aux expositions à court, moyen et long termes, sur le modèle des données présentées récemment par l’institut de veille sanitaire (InVS) à partir des émissions relevées dans une quinzaine de grandes villes de France.

Le rapporteur se félicite de cette garantie d’information supplémentaire, mais constate que sa portée est modeste. Il espère qu’au-delà des conséquences des dépassements ponctuels des niveaux maximaux d’expositions, les effets sanitaires de l’exposition chronique à des seuils d’intensité moyenne seront mieux pris en compte.

Mais cette avancée doit être mise en regard des difficultés récurrentes rencontrées par la France pour atteindre les objectifs de limitation des dépassements des valeurs limites d’exposition aux particules atmosphériques assignés par la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe.

Cette directive impose aux États membres de limiter l’exposition de la population aux microparticules PM10, les particules de diamètre aérodynamique de moins de 10 microns. Elle prévoit des valeurs limites d’exposition pour la concentration annuelle (40 µg/m³) ainsi que la concentration journalière (50 µg/m³) qui ne doit pas être dépassée plus de 35 fois par an.

Or ces objectifs ne sont aujourd’hui pas respectés dans 16 zones urbaines majeures de notre territoire (31).

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté, outre deux amendements rédactionnels du rapporteur, plusieurs amendements présentés par le rapporteur et par Mme Dominique Orliac et les commissaires RRDP qui définissent, à l’article L. 221-1 du code de l’environnement, un objectif d’abaissement de la moyenne annuelle des concentrations journalières des particules atmosphériques et qui prévoient la prise en compte de cet objectif dans le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, mentionné à l’article L. 222-1 du même code.

*

La Commission est saisie de deux amendements identiques : les amendements AS1718 du rapporteur et AS1237 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1237 vise à renforcer l’article L.221-1 du code de l’environnement, qui organise les modalités de la surveillance par l’État et les collectivités territoriales de la qualité de l’air et de ses effets sur la santé et sur l’environnement. Pour gagner en efficacité, il convient d’ajouter à cette surveillance la définition d’un objectif pluriannuel de diminution des concentrations journalières des particules atmosphériques.

M. Olivier Véran, rapporteur pour le titre I. L’amendement AS1718 est identique. Plutôt que d’attendre, pour agir, d’avoir atteint des valeurs limites en matière de pollution atmosphérique, il faudrait réduire la moyenne annuelle de présence des particules atmosphériques dans l’air. En effet, le gain sanitaire est plus élevé lorsque l’amélioration de la qualité de l’air est continue. La seule question qui pouvait se poser était la faisabilité technique.

La Commission adopte les amendements identiques.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS1574 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS528 de M. Fernand Siré.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS1528 du rapporteur.

Elle aborde ensuite l’amendement AS1238 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’article L. 221-6 du code de l’environnement, en son chapitre premier, « Surveillance de la qualité de l’air et information du public », section II, « Information du public », dispose que « les résultats d’études épidémiologiques liées à la pollution atmosphérique, les résultats d’études sur l’environnement liées à la pollution atmosphérique ainsi que les informations et prévisions relatives à la surveillance de la qualité de l’air, aux émissions dans l’atmosphère et aux consommations d’énergie font l’objet d’une publication périodique ».

Dès lors, il faudrait cartographier au niveau national les concentrations d’émission des substances polluantes, ce qui permettra d’informer la population et de lutter contre les inégalités de santé, bien souvent liées, dans les faits, à la proximité des axes denses de trafic.

Il s’agit plus précisément d’établir, après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), les zones de surexposition aux particules de diamètre aérodynamique de moins de dix microns, dites « PM10 ».

M. Olivier Véran, rapporteur. J’approuve entièrement l’objectif poursuivi, mais l’État publie déjà chaque année un rapport sur la qualité de l’air, son évolution possible et ses effets sur la santé et l’environnement, lequel inclut des données nationales relatives à la concentration en particules. C’est d’ailleurs l’objet de l’une des actions du troisième plan national santé environnement, qui mentionne également les zones sensibles à la qualité de l’air pour certains polluants spécifiques, sous forme de cartes stratégiques air (CSA) qui fournissent des outils de pilotage aux collectivités. Ce type de cartes est en train de se développer sur le territoire. Il n’est pas nécessaire de recourir à la loi pour le spécifier davantage.

Votre amendement étant ainsi satisfait par la pratique, je vous suggère de le retirer, ma chère collègue.

L’amendement est retiré.

La Commission examine deux amendements identiques, les amendements AS1716 du rapporteur et AS1573 de Mme Dominique Orliac.

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement AS1716 est de conséquence.

Mme Dominique Orliac. Nous proposons par l’amendement AS1573 de renforcer l’article L. 221-1 du code de l’environnement, en ajoutant à la surveillance de la qualité de l’air la définition d’un objectif pluriannuel de diminution des concentrations journalières des particules atmosphériques.

La Commission adopte les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 10 modifié.

*

Après l’article 10

La Commission est saisie de l’amendement AS192 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. La qualité de l’air intérieur est liée à deux facteurs au moins : d’abord, la présence d’émetteurs dans les matériaux de construction, le sol, les meubles, les produits d’entretien, etc. ; ensuite, le renouvellement de l’air.

C’est sur ce dernier déterminant qu’il est proposé ici d’agir afin de mieux traiter ce problème sanitaire, en imposant des normes d’aération à double flux dans les nouvelles constructions.

M. Élie Aboud. Comment cet amendement a-t-il pu franchir l’obstacle de l’article 40 ? À qui incomberait cette charge ? Au constructeur ? L’amendement parle de bâtiments publics : c’est donc bien de l’argent public qu’il s’agit. Je ne connais pas beaucoup de bâtiments privés « dans lequel s’exerce une activité de service public ».

M. Jean-Patrick Gille, président. Le champ de l’amendement est plus large que les seuls bâtiments publics et, de toute façon, il a passé l’article 40.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. D’abord, la mesure ne figure pas dans le très important plan d’action sur la qualité de l’air intérieur. Ensuite, la ventilation motorisée contrôlée à double flux n’est pas connue pour ses effets sanitaires, mais plutôt pour les économies d’énergie qu’elle permet de réaliser, lesquelles ne compensent d’ailleurs pas toujours le coût de l’investissement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement AS190 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit de tenir compte des émissions de composés organiques volatils (COV) dans les diagnostics de performance environnementale des logements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS191 de M. Jean-Louis Roumegas.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS363 de M. François-Michel Lambert.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons d’intégrer le diagnostic de qualité de l’air extérieur au carnet de santé du logement dont la création est prévue par le projet de loi sur la transition énergétique.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le dispositif serait techniquement difficile à mettre en œuvre. Les réseaux de mesure de la qualité de l’air extérieur ne donnent pas d’information à l’échelle du logement. Surtout, cela représenterait une charge importante pour les propriétaires. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS538 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Cet amendement tend à protéger les populations résidentes des produits toxiques déjà interdits aux professionnels, en en proscrivant la vente au-delà d’une concentration définie par décret.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable : l’ANSES a entrepris de hiérarchiser les substances afin de déterminer celles qu’il serait le plus pertinent de mesurer et de contrôler s’agissant de la population générale.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS259 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. En matière d’émission de composés organiques volatils, il existe un étiquetage de type « scoring », obligatoire pour les matériaux de construction et de décoration et qu’il est prévu, à terme, d’étendre aux meubles. Nous proposons d’anticiper sur cette étape en l’appliquant dès à présent aux meubles pour enfants. Sans doute avez-vous entendu parler de ce scandale sanitaire : on a relevé chez certains particuliers, à cause d’un seul meuble émetteur de composés organiques volatiles (COV), des niveaux bien supérieurs à ceux préconisés dans les crèches. C’est absolument inacceptable. Un simple étiquetage permettrait au consommateur de faire son choix.

M. Olivier Véran, rapporteur. Un étiquetage intermédiaire, en attendant la mise en œuvre de l’étiquetage obligatoire du mobilier tel qu’il est prévu par la loi, paraît compliqué. L’ANSES travaille à définir les substances qu’il convient d’analyser et celles pour lesquelles une signalétique d’information serait appropriée.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS260 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’appliquer un taux réduit de TVA aux produits les moins émetteurs de COV, afin d’encourager la recherche de produits plus sains.

M. Élie Aboud. L’amendement a-t-il passé l’article 40 ?

M. Jean-Patrick Gille, président. Il est gagé.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je comprends votre démarche, mon cher collègue, mais le seuil de 1 000 microgrammes par mètre cube n’a pas la même signification selon les substances considérées. Il me semble peu réaliste d’adopter un même seuil pour toutes les substances et toutes les classes d’émissions.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS263 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’un sujet dont nous avons déjà beaucoup parlé, mais qui, malheureusement, n’a toujours pas donné lieu à une modification de la réglementation.

On sait que les particules fines, émises notamment par les véhicules diesel, sont un cancérigène certain. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le Centre international de recherche sur le cancer : il s’agit de données officielles. Il paraîtrait donc normal que l’on tînt compte des émissions de particules fines dans le calcul du malus automobile, aujourd’hui fondé sur les seules émissions de CO2.

M. Bernard Accoyer. Nos collègues du groupe écologiste ont réussi l’exploit de dénoncer le diesel comme une technologie polluante. Or, s’il est exact que les anciens moteurs ont pu se caractériser par d’importants taux de rejet, les nouveaux diesels, en particulier ceux issus des technologies développées par l’industrie française, sont remarquables et la qualité de l’air qu’ils rejettent en tout point comparable à celle qui résulte des moteurs à essence. En somme, selon une habitude bien française, on s’en prend à l’industrie de notre pays, à ce qu’elle a fait de mieux, à ce qu’elle a apporté de plus performant en matière de rejet de CO2, dans la mesure où le rendement de ces moteurs diesels est meilleur que celui des autres moteurs thermiques.

J’aimerais que l’on cesse de faire une fixation sur le diesel. Certes, les vieux diesels doivent être remplacés. Mais la manière dont le Gouvernement et la mairie socialiste de Paris, en particulier, laissent penser que les moteurs diesel sont encore plus polluants que les autres, outre que c’est archifaux, met en péril tout un pan de l’industrie française et des centaines de milliers d’emplois.

M. Jean-Louis Roumegas. Je suis prêt à prendre M. Accoyer au mot. S’il pense réellement que les véhicules diesel, français ou non, sont très propres, c’est une raison supplémentaire d’accepter de lier le malus au taux d’émission de particules fines, puisqu’ils devraient logiquement bénéficier d’un bonus… Je considère donc votre démonstration comme l’expression de votre soutien à notre amendement, mon cher collègue.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je suis pour ma part un peu perplexe. Nous examinons un projet de loi sur la santé et je ne dispose pas de tous les éléments pour me prononcer sur l’intégration au système de bonus-malus de l’émission d’oxydes d’azote et de particules fines. Je sais que des mesures ont été prises concernant les véhicules neufs avec la nouvelle norme Euro 6. Mais le lien entre ces questions et la politique de la santé devient si ténu que je vous demanderais volontiers de retirer votre amendement, sans quoi mon avis sera défavorable.

M. Jean-Louis Roumegas. Le lien avec les problèmes de santé est évident ! Le système de bonus-malus sert à prévenir les émissions de CO2. Les particules fines sont aujourd’hui dénoncées pour leurs effets directs sur la santé, puisqu’il s’agit, je le répète, d’un cancérigène certain. Un dispositif de bonus-malus qui tienne compte des effets sanitaires a toute sa place dans une loi sur la santé. Je maintiens mon amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS1239 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’article L. 111-6 du code de la recherche définit les axes de la stratégie nationale de recherche, révisée tous les cinq ans. L’amendement AS1239 tend à la compléter par un volet relatif à la recherche en santé environnementale.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Ce n’est pas au Gouvernement de fixer des thèmes de recherche prioritaires. La recherche est orientée par les initiatives des chercheurs et par les progrès de la science.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS178 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Voilà encore un amendement auquel M. Accoyer devrait apporter son soutien : nous proposons que les fiches techniques qui présentent les automobiles chez les concessionnaires, et qui ne mentionnent aujourd’hui que leur taux d’émission de CO2, indiquent également leur taux d’émission de particules fines. Puisque M. Accoyer est convaincu que les véhicules diesel, notamment français, sont peu polluants, il se félicitera certainement que l’on affiche ainsi cette excellence.

Cet amendement correspond à une demande des consommateurs et de nombreuses ONG. Le consommateur a le droit de savoir. L’indication du taux d’émission de particules fines aura par ailleurs une vertu pédagogique.

M. Bernard Accoyer. Je confirme que les moteurs issus des dernières technologies, dotés de filtres à particules installés sur l’échappement, sont tout aussi performants que les dernières générations de moteurs à essence.

M. Olivier Véran, rapporteur. Comme précédemment, le lien me paraît ténu entre l’objet de l’amendement et le texte en discussion… Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS177 de Mme Laurence Abeille.

M. Jean-Louis Roumegas. Pour calculer l’état chimique de l’eau, on ne prend actuellement en considération qu’une quarantaine de substances, en appliquant des seuils qui méritent sans doute d’être révisés. Nous proposons que l’on tienne compte d’un plus grand nombre de substances, notamment, après l’adoption de la stratégie nationale, les perturbateurs endocriniens, mais aussi les résidus de médicaments, de plus en plus présents dans les eaux que nous consommons.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous voudriez que les propriétaires soient chargés de mesurer toutes les substances présentes dans l’eau distribuée chez eux. Cela paraît très lourd et compliqué à mettre en œuvre. Les nitrates, les pesticides, certains métaux perturbateurs endocriniens font déjà l’objet d’analyses systématiques dans le cadre du contrôle sanitaire par les ARS des eaux destinées à la consommation humaine. Avis défavorable.

M. Élie Aboud. Il est dommage que cet amendement évoque pêle-mêle pesticides, nitrates, perturbateurs et médicaments. Nous aurions pu nous retrouver sur l’indice PBT (persistance, bio-accumulation et toxicité) adopté en Suède, et qui fonctionne très bien.

M. Jean-Patrick Gille, président. Peut-être pourra-t-on y revenir en séance publique.

M. Jean-Louis Roumegas. Je n’en maintiens pas moins mon amendement.

J’aimerais dissiper un malentendu, monsieur le rapporteur. L’obligation n’incomberait pas aux propriétaires : elle concerne les analyses d’eau potable auxquelles doivent procéder les collectivités responsables de la distribution et les distributeurs. Cet aspect relève du ministère de la santé ; il a donc toute sa place ici.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je vous ai bien compris. Je voulais parler des propriétaires des pompes d’eau, non des particuliers dans leur logement. Alors qu’actuellement les ARS effectuent déjà des contrôles obligatoires sous l’autorité du ministère, on irait demander à chaque propriétaire de pompe d’eau de procéder à des analyses supplémentaires portant sur d’autres produits. D’où mon avis défavorable.

M. Jean-Patrick Gille, président. J’ai bien noté que l’amendement reviendra en séance s’il n’est pas adopté.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS176 de Mme Brigitte Allain.

M. Jean-Louis Roumegas. Toujours à propos des analyses de l’eau, nous proposons d’apporter une précision pour tenir compte des effets des mélanges de molécules.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS743 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L’amendement AS743 vise à alourdir les sanctions pénales pesant sur les fabricants qui ne respectent pas les mesures préventives et curatives prescrites par les pouvoirs publics, notamment en cas d’urgence sanitaire. Le montant de l’amende actuellement encourue est ridicule : 3 700 ou 3 750 euros. Je propose de le fixer à 300 000 euros, en précisant qu’il peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois dernières années.

M. Jean-Pierre Door. De quels fabricants parle-t-on, de quels matériaux ? D’où viennent ces substances et quel est l’objectif ? Votre rédaction reste bien vague.

M. Gérard Bapt. Nous avons à l’heure actuelle un certain nombre de normes, de nature réglementaire, adoptées sur un fondement législatif ou par décret, qui imposent des mesures préventives et curatives aux fabricants, aux importateurs et aux utilisateurs finaux de ces substances. Il ne s’agit ici que d’appliquer la législation ou la réglementation en vigueur, mais en alourdissant les pénalités, car, outre que les contrôles sont peu fréquents, les montants sont dérisoires.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Les sanctions étaient effectivement faibles, mais le projet de loi les porte déjà à trois mois d’emprisonnement et 20 000 euros d’amende.

M. Gérard Bapt. Si vous pensez que mon amendement est superfétatoire, je veux bien le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine enfin l’amendement AS262 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Encore un amendement qui va faire plaisir à nos collègues de l’UMP ! Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la mise en place d’une expertise technique indépendante relative à la mesure des émissions de polluants par les véhicules automobiles. Peut-être cette expertise viendra-t-elle corroborer les assertions de nos collègues partisans du diesel ; nous verrons bien. À l’heure actuelle, en tout cas, les seules normes sur lesquelles ils fondent leur discours sont celles de l’Union technique de l’automobile et du cycle (UTAC), qui émanent donc d’industriels ayant pour clients les constructeurs automobiles : on pourrait rêver d’une expertise plus indépendante en matière de santé publique… C’est précisément le projet que nous proposons au Gouvernement d’étudier. Cette demande de transparence devrait être soutenue dans tous nos rangs.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il ne semble pas nécessaire de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport faisant l’analyse d’une méthode de mise en place d’une expertise technique indépendante. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

*

Article 11
(art. L. 1334-14, L. 1334-15, L. 1334-16-1 [nouveau], L. 1334-16-2 [nouveau]
et L. 1334-17 du code de la santé publique)

Renforcement de la protection contre l’exposition à l’amiante

Après plusieurs décennies d’utilisation extensive, en particulier dans les immeubles bâtis, l’amiante, un polluant hautement cancérigène, a été interdit en France par le décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996.

Plusieurs dispositions, figurant aux articles L. 1334-12-1 et suivants du code de la santé publique établissent, pour les propriétaires des immeubles comportant de l’amiante, des obligations visant à en protéger les occupants. L’article L. 1334-12-1 définit ainsi l’obligation d’y faire rechercher la présence d’amiante et, le cas échéant, de faire établir un diagnostic de l’état de sa conservation et de mettre en œuvre les mesures nécessaires de réduction de l’exposition. En cas de carence, une compétence d’intervention du représentant de l’État dans le département est définie par les articles L. 1334-15 et 1334-16.

L’article 11 du projet de loi vise à rendre ces mesures plus effectives et à en étendre la portée à la lutte contre l’exposition de la population aux fibres d’amiantes susceptibles de résulter d’une activité humaine.

La principale pathologie maligne occasionnée par l’exposition à l’amiante est le mésothéliome de la plèvre.

Selon les données du programme national de surveillance du mésothéliome (PNSM), entre 1998 et 2006, le nombre moyen annuel de cas peut être estimé entre 535 et 645 chez les hommes et entre 152 à 210 chez les femmes, soit environ 700 à 850 cas par an.

À plus long terme, la mortalité par mésothéliome en France devrait continuer d’augmenter, le pic de mortalité se situant entre 2025 et 2040. Entre 1997 et 2050, la mortalité par mésothéliome représenterait entre 44 000 et 57 000 décès.

Pour les maladies occasionnées par une exposition d’origine professionnelle à l’amiante, à l’instar de l’ensemble des cancers d’origine professionnelle, la branche accidents du travail et maladies professionnelles finance l’indemnisation forfaitaire relevant de la législation applicable.

Mais l’amiante a donné lieu à un mécanisme complémentaire d’indemnisation intégrale du préjudice, institué par le législateur : le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) qui indemnise les préjudices occasionnés les expositions à l’amiante d’origine professionnelle comme d’origine environnementale.

De 2002 à fin 2012, le FIVA a enregistré 76 350 dossiers de victimes et enregistré 91 000 autres demandes en raison d’aggravation de l’état de la victime ou émanant de ses ayants droit. Le montant total des indemnisations cumulées versées par le FIVA depuis 2002 atteint 3,523 milliards d’euros.

Tout d’abord, les et de cet article insèrent deux sections dans le chapitre IV relatif à la lutte contre la présence de plomb ou d’amiante, du titre III, consacré à la prévention des risques sanitaires liés à l’environnement et au travail, du livre III du code de la santé publique, relatif à la protection de la santé et de l’environnement. Il s’agit d’améliorer la lisibilité des dispositions, distinctes, relatives à l’une et l’autre de ces substances. Une première section intitulée : « Lutte contre la présence de plomb » est donc établie avant l’article L. 1334-1, premier article de ce chapitre, et une seconde section intitulée : « Lutte contre la présence d’amiante » est créée après l’article L. 1334-12. Les autres modifications opérées par l’article 11 figurent donc dans cette seconde section.

Les nouvelles obligations d’information des autorités publiques

La capacité d’intervention des autorités publiques pour protéger les occupants d’un immeuble exposés à la fibre d’amiante, nécessite au préalable leur information sur l’existence de ces risques.

L’article 11 du projet de loi établit donc, à la charge des organismes réalisant des repérages, de nouvelles obligations d’information des autorités administratives sur les risques de présence d’amiante.

Le  de l’article 11 modifient l’article L. 1334-14 dont la rédaction actuelle prévoit que les organismes réalisant les repérages et les opérations de contrôle communiquent au représentant de l’État dans le département les informations nécessaires à l’observation de l’état du parc immobilier. Il est désormais précisé que la communication est adressée simultanément au Préfet et « aux ministres chargés de la santé et de la construction », ce qui constitue une garantie supplémentaire de protection et de prise en compte des risques d’exposition sur l’ensemble du territoire. En conséquence, il est précisé que doivent être également transmises, outre les informations nécessaires à l’observation de l’état du parc immobilier, « les informations nécessaires à la gestion des risques ».

Cette clarification des destinataires et du contenu des informations transmises sera précisée par le décret en Conseil d’État mentionné à l’article L. 1334-17. Le  de l’article 11 du projet de loi modifie en effet le 5° de cet article, afin de prévoir que les ministres chargés de la santé et de la construction seront également destinataires des informations mentionnées à l’article L. 1334-14. Les dispositions du 5° de l’article L. 1334-17 relatives au directeur général de l’agence régionale de santé ne sont pas modifiées : elles prévoient qu’il obtient, sur sa demande, les informations nécessaires à l’exercice de ses pouvoirs généraux d’inspection et de contrôle, prévus au 1° de l’article L. 1431-2 et à l’article L. 1435-7 du code de la santé publique.

Une nouvelle compétence de sanction

Sur la base des informations reçues par les autorités publiques, le Préfet dispose aujourd’hui, en vertu de l’article L. 1334-15, du pouvoir de prescrire au propriétaire, ou, à défaut, à l’exploitant d’un immeuble bâti de rechercher la présence d’amiante et de prendre les mesures nécessaires de contrôle et de réduction de l’exposition. Le Préfet peut également prescrire la réalisation d’une expertise afin de déterminer les mesures nécessaires ou de vérifier que les mesures mises en œuvre ou envisagées par le propriétaire sont adaptées.

En cas de carence du propriétaire, l’article L. 1334-16 lui permet, en cas d’urgence, de faire réaliser, aux frais du propriétaire ou, à défaut, de l’exploitant de l’immeuble concerné, les repérages et diagnostics ou cette expertise. Il peut également fixer un délai pour la réalisation des mesures conservatoires nécessaires pour faire cesser l’exposition à l’amiante. Si ces mesures n’ont pas été exécutées à l’expiration du délai, il fait procéder d’office à leur exécution aux frais du propriétaire ou de l’exploitant.

L’article 11 complète ce dispositif en renforçant les pouvoirs du préfet.

Le modifie tout d’abord l’article L. 1334-15 afin de substituer à la simple capacité de « prescrire » la mise en œuvre des obligations que le propriétaire a méconnues, celle de le « mettre en demeure » d’y satisfaire, et d’assortir cette mise en demeure d’un délai fixé par le Préfet.

Or une mise en demeure qui resterait sans effet autorise l’édiction d’une sanction administrative. Aussi, en cas de carence persistante, un article L. 1334-16-1, nouveau, établi par le  du présent article, accorde ce nouveau pouvoir au Préfet.

Si, à l’expiration du délai fixé dans la mise en demeure, le propriétaire ou l’exploitant de l’immeuble bâti n’a pas mis en œuvre les mesures prescrites ou n’a pas fait réaliser l’expertise visant à déterminer les mesures nécessaires ou à les vérifier, le représentant de l’État dans le département peut, suspendre l’accès à des locaux et y faire cesser l’exercice de toute activité. Il s’agit d’une faculté et non d’une obligation pour le Préfet, qui en apprécie pleinement l’opportunité. Il s’agit donc un outil de persuasion afin d’inciter les propriétaires à satisfaire à leurs obligations : il n’a vocation à être mis en œuvre que de façon exceptionnelle

L’emploi éventuel de cette nouvelle arme du Préfet est cependant subordonné à une double condition : « le danger grave pour la santé », condition facile à remplir en cas de présence d’amiante, mais également l’« urgence » qu’il pourrait être difficile d’apprécier, au terme d’une procédure sans doute longue puisque marquée par la carence persistante du propriétaire de l’immeuble bâti. Sous réserve de cette remarque, votre rapporteur se félicite de ce nouvel instrument de protection des populations exposées à l’amiante.

La prise en compte des expositions aux fibres d’amiante résultant de l’activité humaine

Enfin, l’article 11 définit un nouveau cas d’intervention du Préfet dans les situations de dissémination de fibres dans l’environnement. Celles-ci peuvent être occasionnées par des activités dans des zones d’affleurement de l’amiante et en particulier par des travaux menés par des particuliers sur des matériaux amiantés, donc sans possibilité d’intervention des services de l’inspection du travail.

Il peut par exemple s’agir d’un particulier qui enlèverait par lui-même des éléments de flocage en amiante, des dalles vinyles ou le couvert d’une toiture en amiante dont la dégradation entraîne la dissémination de fibres dans le voisinage. De même en cas de mauvaise gestion de déchets laissés à l’air libre.

Aussi, le 5° du présent article établit un article L. 1334-16-2, nouveau, qui dispose que si la population est exposée à des fibres d’amiante résultant d’une activité humaine, le préfet peut, dans des délais qu’il fixe, ordonner la mise en œuvre des mesures propres à évaluer et à faire cesser l’exposition.

Si la personne responsable de l’activité émettrice ne s’exécute pas, le représentant de l’État dans le département y procède d’office à ses frais. Il est précisé que la créance publique est recouvrée comme en matière de contributions directes.

À nouveau, cette compétence est réservée aux situations présentant un « danger grave pour la santé » et une situation « d’urgence » : comme en matière de prévention des expositions dans les immeubles bâtis, la mention de cette seconde condition paraît inopportune à votre rapporteur.

*

Lors de l’examen du texte du projet de loi, sur proposition du rapporteur, la Commission a supprimé la condition d’urgence pour l’intervention du Préfet : compte-tenu de ce temps de latence élevé entre l’exposition à l’amiante et l’apparition des effets sur la santé, le Préfet pourrait en effet se trouver en difficulté pour qualifier l’urgence de la situation. La Commission a également adopté un amendement de conséquence et un amendement rédactionnel du rapporteur.

Enfin, la Commission a adopté un amendement présenté par Mme Martine Pinville et par le rapporteur ainsi que par les commissaires du groupe RRDP, prévoyant, à l’article L. 1334-1 du code de la santé publique, que dans le cas le cas où l’enquête sur l’environnement du mineur met en évidence la présence d’une source d’exposition au plomb susceptible d’être à l’origine de l’intoxication du mineur, les femmes enceintes bénéficient également d’une information particulière.

*

La Commission est saisie de deux amendements identiques, l’amendement AS103 de Mme Martine Pinville et l’amendement AS1240 de Mme Dominique Orliac.

Mme Martine Pinville. Les enfants en bas âge sont une cible particulière du saturnisme, car ils ingèrent du plomb plus facilement que les adultes en portant leur main à la bouche. Mais cette maladie touche également les femmes enceintes, comme le rappelle un rapport de 2003 intitulé Intoxication par le plomb de l’enfant et de la femme enceinte, dont les auteurs recommandent que la future mère soit, préalablement à toute mesure de suivi et de prise en charge, soustraite au risque d’exposition au plomb dès que celui-ci est connu.

Or il n’est pas précisé dans le code de la santé publique que les femmes enceintes doivent bénéficier d’une information particulière lorsque ce risque est mis en évidence. Tel est l’objet de l’amendement AS103.

Mme Dominique Orliac. Les femmes enceintes doivent être particulièrement protégées de l’exposition au plomb, car les conséquences d’une imprégnation importante sur le développement intra-utérin sont établies. Elles doivent donc être la cible d’une information spécifique.

Voilà pourquoi l’amendement AS1240 prévoit de compléter au bénéfice des femmes enceintes l’article du code de la santé publique intitulé « Lutte contre la présence de plomb ou d’amiante », aux termes duquel, en cas de dépistage du saturnisme chez l’enfant, le directeur général de l’ARS prend toute mesure nécessaire à l’information du médecin et de la famille. En effet, à l’heure actuelle, aucune mesure d’information spécifique n’est prévue à l’intention de la femme enceinte dans le cas où l’enquête sur l’environnement de l’enfant met au jour une exposition au plomb.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’amendement de conséquence AS1529 du rapporteur.

Elle aborde ensuite trois amendements identiques, les amendements AS179 de M. Jean-Louis Roumegas, AS961 de Mme Jacqueline Fraysse et AS1241 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Roumegas. Le projet de loi donne aux préfets la faculté de prendre des mesures de contrainte lorsque des actes de prévention des risques liés à la présence de plomb ou d’amiante ne sont pas réalisés. Après toutes ces années, cette simple faculté devrait devenir une obligation.

Tel est le sens de l’amendement AS179.

Mme Jacqueline Fraysse. La loi prévoit que les propriétaires d’immeubles recherchent la présence d’amiante et réalisent des travaux lorsque celle-ci est confirmée ; s’ils ne le font pas, le préfet peut le leur imposer.

Le problème est ce « peut », que nous proposons, dans l’amendement AS961, de remplacer partout par le verbe concerné, à l’indicatif. Le préfet doit prendre des dispositions d’autorité face à ces dangers. En outre, en transformant la faculté en obligation, il s’agit aussi de le protéger des pressions dont il pourrait faire l’objet.

Mme Dominique Orliac. Mon amendement AS1241 est identique. On sait que le plomb, en particulier, peut être présent dans les canalisations et dans les vieilles peintures que les enfants risquent de gratter et d’ingérer. L’intervention de l’autorité préfectorale ne devrait plus relever de la simple faculté, mais de l’obligation.

M. Olivier Véran, rapporteur. Sur le fondement des informations reçues par les autorités publiques, le préfet dispose aujourd’hui du pouvoir de prescrire aux propriétaires de rechercher la présence d’amiante et de prendre les mesures nécessaires. L’article 11 prévoit qu’à l’expiration du délai fixé dans la mise en demeure, si le propriétaire n’a pas mis en œuvre les mesures prescrites ou fait réaliser l’expertise, le représentant de l’État peut suspendre l’accès aux locaux concernés et y faire cesser l’exercice de toute activité.

Vous proposez de remplacer ce « peut » par un « doit ». Or il s’agit bien d’une faculté et non d’une obligation pour le préfet qui en apprécie pleinement l’opportunité. La sanction envisagée est d’abord un outil de persuasion, une incitation pour les propriétaires. Elle n’a vocation à être mise en œuvre que de manière exceptionnelle. En outre, le fait que les amendements ne définissent pas les moyens de vérifier que l’obligation du préfet serait respectée en affaiblirait singulièrement la portée.

Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS1242 de Mme Dominique Orliac et AS1534 du rapporteur.

Mme Dominique Orliac. L’amiante est un polluant cancérigène pour l’être humain. S’il est interdit depuis 1997 en France, il reste présent dans de nombreux édifices.

L’article 11 renforce les mesures de protection contre l’amiante dans le code de la santé publique, mais, en l’état actuel du texte, l’intervention du préfet est subordonnée à la production par le propriétaire d’un diagnostic de l’état de conservation de l’amiante attestant de l’existence d’un danger grave pour la santé. Cette restriction ouvre la porte à des manœuvres dilatoires. Nous proposons donc de la supprimer.

M. Olivier Véran, rapporteur. Mon amendement AS1534 est presque identique, puisqu’il tend à supprimer le critère d’urgence, mais non celui du danger grave pour la santé, qui seul justifie que le préfet puisse porter atteinte aux droits du propriétaire.

L’amendement AS1242 est retiré.

La Commission adopte l’amendement AS1534.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS1717 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS181 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’indiquer sur les sites officiels, ceux des ministères concernés, les centres de valorisation et d’apport des encombrants (CVAE) habilités à recevoir des déchets amiantés. Trop souvent, faute d’informations, on dépose des déchets amiantés issus de déconstructions ou de rénovations dans des CVAE non spécialisés. C’est très grave, car les personnels qui y travaillent ne sont pas prévenus alors même qu’une seule fibre d’amiante suffit pour développer une maladie.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je comprends l’objectif. Les particuliers devraient effectivement être mieux informés sur l’élimination des déchets amiantés. Le problème est que votre amendement reste muet sur les modalités de mise en œuvre de la mesure, lesquelles doivent tenir compte des compétences des conseils départementaux en matière de planification et de gestion des déchets. Avis défavorable.

M. Gérard Sebaoun. Attention : dans certains appartements, surtout ceux qui ont été construits dans les années 1960 et 1970, il y a beaucoup d’amiante caché, par exemple sous des dalles de carrelage. On en trouve partout ! Or des entreprises peuvent y réaliser des travaux sans être contraintes d’effectuer un diagnostic et ne sont même pas toujours conscientes du fait que les déchets issus de la déconstruction contiennent de l’amiante.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 11 modifié.

*

Après l’article 11

La Commission est saisie de l’amendement AS193 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons de créer une taxe supplémentaire sur les cigarettes, la « taxe mégots », pour tenir compte de la pollution qu’engendre le tabagisme et de la charge que représente le nettoyage pour les collectivités locales, auxquelles son produit sera affecté.

M. Élie Aboud. Acceptez-vous d’ajouter au tabac les substances dangereuses comme le cannabis ?

M. Jean-Louis Roumegas. Oui, quand le cannabis sera dépénalisé : on pourra alors le taxer !

M. Jean-Patrick Gille, président. Notez que ce n’est pas le tabac qui serait taxé, mais les filtres. Et il peut y en avoir dans les joints…

Mme Michèle Delaunay. Un mégot suffit à polluer cinq cents litres d’eau et met des années à disparaître totalement.

M. Jean-Louis Touraine. Douze ans !

Mme Michèle Delaunay. Je ne sais pas s’il est envisageable d’introduire une taxe au détour d’un amendement, mais c’est un authentique problème, qui mérite toute notre attention.

M. Olivier Véran, rapporteur. Quand on jette un mégot sur la voie publique, on est passible d’une amende.

Je comprends que l’on dissocie cet amendement des dispositions relatives au tabac, mais comme la taxe proposée repose directement sur le produit, il revient à créer une accise additionnelle au droit de consommation du tabac, ce qui nous renvoie au débat sur la fiscalité du tabac. Or, en cette matière, je ne peux vous faire d’autre réponse que celle qui résulte de l’arbitrage gouvernemental : dans le cadre de la loi santé et du plan tabac, on ne touche pas à la fiscalité du tabac.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS211 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement tend à inscrire le droit à l’eau et à l’assainissement de l’eau parmi les droits fondamentaux garantis à tous.

M. Olivier Véran, rapporteur. Il est satisfait par l’article L. 210-1 du code de l’environnement, aux termes duquel « l’usage de l’eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous. »

L’amendement est retiré.

La Commission aborde ensuite l’amendement AS847 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Cet amendement vise à protéger du bruit les personnes présentes dans les établissements recevant du public et diffusant habituellement de la musique amplifiée, qu’il s’agisse du public lui-même ou des salariés, en limitant le niveau sonore de la musique amplifiée par le moyen d’un limiteur. Un tel appareil permet une réaction immédiate lorsque le seuil fixé par décret est dépassé, qui peut être un arrêt complet du système, de manière progressive ou non.

Aujourd’hui, sont seuls soumis à cette obligation les établissements ou locaux contigus de bâtiments comportant des locaux à usage d’habitation ou destinés à un usage impliquant la présence prolongée de personnes et qui ne sont pas en mesure de respecter les valeurs maximales d’émergence définies par décret, du fait d’un isolement insuffisant. Pour les exploitants d’établissements diffusant de la musique amplifiée, cet équipement est simplement recommandé.

Face au risque que représentent les activités bruyantes et le bruit en général, la loi doit pouvoir garantir une limitation effective de l’exposition à des niveaux sonores élevés, notamment dans les salles fermées où l’on diffuse de la musique amplifiée.

L’amendement AS847 rend donc obligatoire l’installation d’un limiteur de niveau sonore pour tout propriétaire d’établissement, sans distinction. En cela, il s’inscrit pleinement dans la dynamique de renforcement de la prévention inhérente au projet de loi et tend à enrayer ce phénomène préoccupant qui frappe les générations actuelles, mais risque surtout de toucher les générations futures s’il n’est pas traité rapidement.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le bruit, sujet important, fait l’objet d’un amendement du Gouvernement qui va nous être présenté dans quelques instants. Je vous suggère donc de retirer le vôtre, ma chère collègue.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS183 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS183 vise à mettre en cohérence la stratégie nationale de recherche et la stratégie nationale de santé. Cela peut sembler aller de soi, mais cela va mieux en le disant. Il convient d’insister particulièrement sur la nécessité de la recherche en santé environnementale, établie lors de la conférence environnementale mais sans engagement très clair quant aux moyens.

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. La cohérence entre les deux stratégies est en effet fondamentale, mais on ne saurait la réduire aux seuls enjeux environnementaux, si importants soient-ils.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS182 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons d’indiquer que la santé-environnement fait partie des priorités de la stratégie nationale de recherche.

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous visez ici la recherche relative aux risques pour la santé liés à des facteurs environnementaux, sur le fondement du concept d’exposome que nous avons introduit dans la loi. Elle doit faire partie des orientations de la stratégie nationale de recherche, sous la responsabilité du ministère de la recherche, et dont devront tenir compte les contrats pluriannuels conclus avec les organismes de recherche et les établissements d’enseignement supérieur, la programmation de l’Agence nationale de la recherche ainsi que les autres financements publics de la recherche. Compte tenu de ces explications, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS721 de Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. En France, les accidents de la vie courante, sur lesquels j’ai travaillé avec plusieurs d’entre vous pendant près d’un an, causent chaque année entre 18 000 et 19 000 morts et 500 000 hospitalisations. Le problème est d’abord leur absence de visibilité, ensuite le fait que cette cause n’est pas suffisamment défendue au niveau interministériel et dans les territoires.

C’est la raison pour laquelle mon amendement AS721 définit les accidents de la vie courante, et précise que le comité national de santé publique veille à la mise en œuvre et au suivi des orientations adoptées en matière de prévention.

J’ai conscience du fait que le comité national de santé publique n’est peut-être pas l’organe adéquat. J’espère donc retravailler mon amendement d’ici à la séance publique avec les membres de votre commission, les administrateurs et le ministère afin de définir l’échelon opportun au niveau interministériel.

En tout état de cause, la politique de prévention est cruciale. Les accidents domestiques représentent la première cause de mortalité des enfants et des personnes âgées dans notre pays.

M. Olivier Véran, rapporteur. Madame Lignières-Cassou, nous savons tous combien vous vous impliquez sur ce dossier, depuis de nombreuses années. Au-delà du fait que la prévention des accidents domestiques engage à la fois les particuliers, les industries et les transports, le problème, vous l’avez dit vous-même, est que le comité national de santé publique n’est pas le bon organe pour y veiller.

Je vous suggère donc de retirer votre amendement en vue de formuler une autre proposition en séance.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je le redéposerai en séance, mais pas nécessairement sous une autre forme.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS537 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. Cet amendement vise à définir les perturbateurs endocriniens et à évaluer leur activité et leur nocivité afin de pouvoir les classifier et prévenir leurs effets.

M. Olivier Véran, rapporteur. La France a demandé l’adoption au niveau européen d’une définition harmonisée des perturbateurs endocriniens. La définition que vous proposez reprend partiellement celle que l’Organisation mondiale de la santé a établie en 2002. Elle risque donc de ne pas être cohérente avec celle qui sera bientôt adoptée.

Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission examine l’amendement AS740 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je propose de compléter l’article du code de la santé publique qui a donné naissance au plan national santé environnement (PNSE) afin d’indiquer que celui-ci privilégie désormais les agents physiques et chimiques en tant que facteurs de risque, dont les effets et la nature sont aujourd’hui mieux connus qu’à l’époque des premiers plans. Le plan présentera tous les cinq ans des mesures destinées à réduire l’effet des facteurs environnementaux sur la santé humaine, fondées sur des indicateurs aussi précis que possible.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement comporte des éléments déjà mentionnés à l’article L. 1311-6 du code de la santé publique et qu’il ne semble pas utile d’ajouter ici, d’autant que le concept d’exposition a été étendu par l’introduction de la notion d’exposome. Quant à la mention du renvoi à d’autres plans ou législations, elle n’apparaît pas nécessaire dans la mesure où le dernier plan, le PNSE3, a mis en exergue l’approche que vous défendez. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

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Article 11 bis
(art. L. 1311-7 du code de la santé publique)

Plans régionaux Santé et environnement

Inséré par un amendement présenté par M. Gérard Bapt et Mme Sophie Errante, l’article 11 bis complète l’article L. 1311-7 du code de la santé publique afin de renforcer la gouvernance régionale pour la mise en œuvre des plans régionaux santé environnement (PRSE). Alors que les PRSE ne sont actuellement définis que comme composante du projet régional de santé visant à prévoir les dispositions nécessaires à la mise en œuvre du plan national de prévention des risques pour la santé liés à l’environnement qui relèvent de la compétence des agences régionales de santé, l’article 11 bis inscrit dans la loi une déclinaison du plan national en plans régionaux et en décrit la gouvernance régionale.

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La Commission en vient alors à l’amendement AS741 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Il s’agit de mettre en avant la déclinaison régionale des plans nationaux santé environnement. Prévus par le code de la santé publique, ces plans régionaux prévoient divers schémas stratégiques, dont un schéma régional de prévention auquel ils sont généralement intégrés. Des programmes territoriaux peuvent en découler, mis en œuvre par l’intermédiaire de contrats locaux de santé, ce qui assure l’articulation avec l’organisation territoriale de la prise en charge de la santé. L’amendement AS741 vise à renforcer la gouvernance régionale de la mise en œuvre des plans régionaux santé environnement, en mobilisant les services déconcentrés de l’État et des conseils régionaux pour élaborer et suivre ces derniers. Il est important d’associer les collectivités locales à cette mise en œuvre.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 11 bis

La Commission examine l’amendement AS198 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons ici une démarche originale, favorable aux entreprises, que nous ne souhaitons pas sanctionner, mais responsabiliser et accompagner. Ainsi, aux termes de l’amendement, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) assiste les entreprises qui souhaitent s’engager volontairement et par anticipation dans des plans de substitution aux perturbateurs endocriniens, sur le modèle de ce qu’elle a déjà fait pour les substitutions aux agents CMR (cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques). Cela correspond à une demande de certains professionnels, qui aimeraient œuvrer en ce sens mais manquent d’informations. La question se pose aujourd’hui pour le bisphénol A, mais va très rapidement s’étendre à d’autres substances.

M. Olivier Véran, rapporteur. À la lumière de la pratique actuelle et du droit en vigueur, il ne paraît pas nécessaire de prendre de nouvelles dispositions à cet égard. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Roumegas. Les mesures nécessaires que je propose sont prévues par la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens. Aujourd’hui, les CMR sont pris en considération dans la réglementation et les actions menées, mais ce n’est pas le cas des perturbateurs endocriniens en tant que tels. Or ils obéissent à des règles de toxicologie entièrement différentes, d’où la nécessité d’une stratégie nationale spécifique. Vous ne pouvez donc pas me répondre ainsi, monsieur le rapporteur, à moins de nier tout le travail accompli et la stratégie adoptée – sous l’égide du ministère de l’écologie, certes, mais je ne doute pas que le ministère de la santé s’en sente également responsable.

M. Olivier Véran, rapporteur. La démarche européenne permet déjà de garantir que la substance sera retirée du marché, au niveau tant national qu’européen. Une substance qui serait classée parmi les perturbateurs endocriniens ferait ipso facto partie des substances dites reprotoxiques. Or une substance reprotoxique avérée doit être en tout état de cause remplacée par une autre substance moins dangereuse. C’est déjà prévu par le code du travail.

La Commission rejette l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement AS184 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous souhaitons que les campagnes d’information visant à lutter contre les perturbateurs endocriniens insistent sur les risques spécifiques auxquels ces derniers exposent le développement fœtal et la petite enfance. Nous nous inscrivons dans le cadre de mesures prévues par la stratégie nationale, que nous proposons simplement de concrétiser dès à présent, à l’occasion de cette loi santé dont on nous annonce depuis longtemps qu’elle pourra intégrer toutes les questions de santé environnementale que nous soulevons. Un engagement a été pris en ce sens lors de la conférence environnementale.

M. Olivier Véran, rapporteur. Ici, mon objection ne porte pas sur le fond mais sur la forme : le texte a-t-il vraiment sa place dans le chapitre du code de la santé publique définissant les missions, les moyens et la gouvernance de l’ANSES ? Je vous suggère de le retirer.

M. Jean-Louis Roumegas. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est alors saisie de l’amendement AS188 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit cette fois d’un amendement d’appel, car le problème qu’il pose pourrait être résolu par la voie réglementaire. La concentration maximale de pesticides dans les eaux destinées à la consommation humaine, fixée à 20 % de la valeur sanitaire maximale par un avis du conseil supérieur d’hygiène, a été portée de manière incompréhensible à 100 % de cette valeur, ce qui revient à multiplier par cinq les taux de pesticides admis. Ce point a été lui aussi soulevé lors de la conférence environnementale. Je suis prêt à retirer cet amendement si le ministère s’engage à revenir au taux précédemment appliqué et qui l’a été pendant des années.

M. Olivier Véran, rapporteur. Le dispositif existant paraît satisfaisant. Il subordonne la distribution d’eau à l’absence de risque sanitaire. En cas de non-conformité, des dérogations pour trois ans peuvent être accordées par le préfet sur le fondement du rapport de l’ARS, à condition que les concentrations en pesticides soient inférieures à la valeur sanitaire maximale et qu’un plan d’actions soit mis en œuvre.

Les seuils sont établis par l’ANSES pour chaque molécule de pesticide de manière indépendante, à partir d’évaluations réalisées par l’OMS. Il serait quelque peu arbitraire d’établir un seuil supplémentaire fixé à 20 % de la valeur sanitaire maximale.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 11 ter
(art. L. 1336-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Prévention des risques liés au bruit

Établi par un amendement du Gouvernement, l’article 11 ter insère dans le titre III du livre III de la première partie du code de la santé publique un chapitre VI relatif à la « Prévention des risques liés au bruit » composé d’un article L. 1336-1, nouveau, qui prévoit que les activités impliquant la diffusion de sons à un niveau sonore élevé, dans tout lieu public ou recevant du public, clos ou ouvert sont exercées de façon à protéger l’audition du public et la santé des riverains. Les modalités de mise en œuvre seront fixées par décret en Conseil d’État.

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La Commission en vient à l’amendement AS1656 du Gouvernement.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Nous revenons à la lutte contre le bruit. L’amendement présenté tout à l’heure par Mme Clergeau proposait un dispositif spécifique qui ne nous paraît pas approprié. Nous proposons plutôt de créer dans le code de la santé publique un chapitre consacré à la prévention des risques liés au bruit, afin d’encadrer les activités impliquant la diffusion de sons à un niveau élevé dans les lieux publics ou recevant du public. Le texte renvoie à un décret qui définira les niveaux sonores maximaux et prévoira des avertissements destinés aux personnes sensibles et des messages de prévention.

Je ne reviens pas sur les motivations de la mesure, très bien présentées par Mme Clergeau. Le bruit devient problématique pour la santé de nombre de nos concitoyens, qui lui sont confrontés à des niveaux trop élevés ou de manière trop régulière ou trop durable.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 11 ter

La Commission examine l’amendement AS185 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’inclure dans le carnet de santé, à l’intention des parents, une information sur le risque que présentent les perturbateurs endocriniens, auxquels les jeunes enfants sont particulièrement sensibles.

M. le rapporteur. Cette disposition est déjà prévue dans le cadre de la refonte globale du carnet de santé de l’enfant, au titre de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens qui sera mise en œuvre dès 2016. L’amendement est donc satisfait. De plus, la mesure proposée n’est pas d’ordre législatif : elle relèverait d’un arrêté. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

M. Jean-Louis Roumegas. Je le maintiens, dans l’attente d’un engagement du Gouvernement sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 11 quater
(art. L. 5231-2 du code de la santé publique)

Interdiction du Bisphénol A dans les jouets et amusettes

Découlant d’un amendement présenté par M. Jean-Louis Roumegas et les commissaires du groupe Écolo, l’article 11 quater complète l’article L. 5231-2 du code de la santé publique relatif aux objets concernant les nourrissons et les enfants, afin d’ajouter à l’interdiction de la fabrication, la vente, la mise en vente, l’exposition et l’importation des collerettes de tétines et de sucettes et des anneaux de dentition comportant du Bisphénol A, l’ensemble des « jouets et amusettes comportant du bisphénol A ».

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La Commission aborde l’amendement AS187 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement propose d’étendre aux jouets l’interdiction du bisphénol A, qui concerne actuellement les biberons et les contenants alimentaires en contact direct avec les aliments. Les jouets étant fréquemment portés à la bouche, le risque est analogue à celui que présentent les contenants alimentaires.

M. Bernard Accoyer. Dans ce domaine, la France est allée plus vite que la musique : à ce jour, aucune publication scientifique reconnue au niveau international n’a confirmé la campagne conduite par notre collègue Bapt, qui a abouti au résultat que l’on connaît. Ce que l’on sait, en revanche, c’est que les produits de substitution au bisphénol A utilisés dans certains emballages alimentaires sont porteurs de réels dangers. Nous appelons donc à la plus grande prudence vis-à-vis d’éventuels changements limités à notre pays, qui, une fois de plus, voudrait donner des leçons au monde entier.

Mme la ministre. Pour ma part, je trouve cet amendement intéressant, et j’émettrai donc un avis favorable. Certes, des dispositions existent déjà au niveau européen, mais rien n’interdit d’aller plus loin au niveau national – surtout s’agissant des jouets, par cohérence avec les mesures qui concernent déjà les biberons et les tétines. On peut entendre ceux qui estiment que les règles en vigueur sont suffisantes, mais cette démarche me paraît aller dans le bon sens et le Gouvernement la soutient.

M. le rapporteur. Même avis, comme député et comme père de jeunes enfants. Je m’interroge seulement sur l’emploi du mot « amusette »…

M. Jean-Louis Roumegas. Je vous remercie. Cet avis favorable est une bonne nouvelle qui réjouira notamment WECF (Women in Europe for a Common Future), une association de femmes qui œuvre pour la protection sanitaire des enfants et le développement durable et qui mène campagne en ce sens depuis longtemps. Il montre que la France continue d’être pionnière sur ces questions. On ne peut que s’en féliciter pour la santé de nos jeunes enfants, malgré le déni de certains.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 11 quater

La Commission en vient à l’amendement AS199 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Étonnamment, les textiles destinés aux enfants peuvent contenir des phtalates, pourtant reconnus comme extrêmement dangereux pour la santé car cancérigènes ou perturbateurs endocriniens. On le sait, les enfants portent aussi leurs vêtements à la bouche, notamment leur pyjama. Pourtant, à cet égard, les textiles pour enfants sont considérés comme n’importe quel textile. L’interdiction proposée est une mesure de bon sens, destinée à protéger un public particulièrement vulnérable.

M. Bernard Accoyer. Le précédent amendement a été adopté, suivant l’avis favorable de Mme la ministre. Si nous suivions l’orientation qui nous est ici proposée s’agissant des phtalates, nous ferions disparaître des pans entiers de notre industrie, qui représentent des centaines de milliers d’emplois directs. Il serait souhaitable que les amendements de ce genre soient assortis d’un minimum d’études d’impact afin d’en mesurer les vraies conséquences scientifiques, celles qui sont prouvées, les conséquences économiques et sociales, et de les comparer au droit en vigueur en Europe et dans le monde. Malheureusement, nous ne vivons pas dans une bulle ; les résultats de notre commerce extérieur et notre taux de chômage le démontrent chaque jour.

M. Gérard Bapt. Ce sont des produits importés de Chine…

M. le rapporteur. Les industriels n’ont jamais demandé que les phtalates soient autorisés dans les vêtements et les bijoux pour enfants. En pratique, il n’y en a pas dans ces objets. Les six phtalates cités sont déjà interdits dans les jouets et articles de puériculture et cette interdiction va bientôt être généralisée. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Roumegas. Vous mettez le doigt sur une contradiction : ces substances sont interdites dans les jouets et articles de puériculture, mais pas dans les tissus. Elles y sont présentes, je vous l’assure, notamment dans les textiles importés de Chine ; c’est d’ailleurs l’objet d’une campagne de WECF depuis plusieurs années. C’est donc une question de cohérence.

M. le rapporteur. Renseignements pris auprès d’experts, je le répète, il n’y a eu aucune demande d’autorisation des phtalates dans les vêtements ni les bijoux pour enfants, que ces derniers ne portent d’ailleurs pas autant à la bouche que les objets sur lesquels portait le précédent amendement. Peut-être pourrons-nous en rediscuter en séance à la lumière d’informations nouvelles.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 11 quinquies
(art. L. 5232-1 du code de la santé publique)

Conception des appareils portables permettant l’écoute de son
par l’intermédiaire d’écouteurs ou d’oreillettes

Inséré par un amendement du Gouvernement, l’article 11 quinquies actualise la rédaction de l’article L. 5232-1 du code de la santé publique afin de l’aligner sur la norme européenne relative aux exigences de sécurité des appareils audio, vidéos et des appareils électroniques analogues.

L’article L. 5232-1 prévoit actuellement que les « baladeurs musicaux » vendus sur le marché français ne peuvent excéder une puissance sonore maximale de sortie correspondant à une pression acoustique de « 100 décibels S.P.L. ». Afin de protéger davantage l’audition au regard du temps d’écoute, la nouvelle rédaction ne fait plus référence à une puissance sonore maximale de sortie mais prévoit que les appareils sont conçus de façon à être sans danger pour l’audition de l’utilisateur dans des conditions normales d’utilisation ou d’utilisation raisonnablement prévisibles. Afin de couvrir l’ensemble des appareils disponibles à la vente, la dénomination de « baladeurs musicaux » est remplacée par celle de « tout appareil portable permettant l’écoute de son par l’intermédiaire d’écouteurs ou d’oreillettes ainsi que tout écouteur ou oreillette mis sur le marché ».

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La Commission en vient à l’amendement AS1658 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement poursuit les mêmes objectifs que le précédent, la lutte contre une exposition excessive au bruit, en particulier pour les jeunes qui, de plus en plus souvent, écoutent de la musique à travers des écouteurs, casques ou oreillettes sur des baladeurs musicaux à des volumes élevés. Cette pratique, lorsqu’elle est prolongée, peut causer des atteintes sérieuses.

M. Élie Aboud. Nous voterons cet amendement, qui va dans le bon sens.

M. Bernard Accoyer. La mesure n’est-elle pas d’ordre réglementaire ? Notre législation est déjà lourde…

Mme la ministre. Il s’agit en réalité de transposer des dispositions européennes dans notre droit. C’est donc bien du domaine législatif.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

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Après l’article 11 quinquies

La Commission passe à l’amendement AS189 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Mon amendement AS189 tend à appeler l’attention de l’agence en charge de la cosmétovigilance sur les risques afférents aux perturbateurs endocriniens dans les produits destinés aux enfants de moins de trois ans. Le scandale des lingettes pour nourrissons, chacun s’en souvient sans doute, avait défrayé la chronique en ce domaine.

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement est satisfait par l’alinéa 15.

M. Jean-Louis Roumegas. Je vous crois sur parole, mais comptez sur moi pour revenir sur le sujet en séance s’il y a lieu…

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit de l’amendement AS744 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. La création de postes de conseillers en environnement intérieur, déjà envisagée dans le cadre des deux premiers plans nationaux santé environnement (PNSE), figure encore dans le troisième. Or seulement trente-cinq postes sont pour l’heure budgétés : je propose que les ARS, si elles le souhaitent, en fassent état sur leurs portails d’information publics. L’amendement obéit donc à un motif de santé publique au regard de l’explosion du nombre d’allergies, laquelle ne tient pas seulement à la pollution mais aussi à certains allergènes présents dans l’air intérieur.

M. Olivier Véran, rapporteur. D’après les retours que nous avons, les conseillers en environnement intérieur sont très utiles ; cependant une évaluation est en cours sur le rapport coût-bénéfice de tels postes. L’amendement me semble donc prématuré, d’autant que les ARS sont déjà chargées de favoriser l’intervention de ces acteurs dans le cadre des plans régionaux santé-environnement, les PRSE. Avis défavorable.

M. Gérard Bapt. Si les ARS doivent déjà assurer la promotion en ce domaine, qu’est-ce que cela leur coûtera d’afficher sur leurs portails publics les informations que je préconise ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Votre amendement consacrerait dans la loi l’existence des conseillers en environnement intérieur alors qu’ils font actuellement l’objet d’expérimentations financées par les ARS. Une mission est en train de réfléchir à l’opportunité de généraliser le dispositif.

M. Gérard Bapt. Certes, mais des conseillers en environnement intérieur s’installent aujourd’hui en libéral, en créant des entreprises unipersonnelles. Cela dit, je retire mon amendement à ce stade.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS264 de Mme Brigitte Allain.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS264 vise à étendre le bénéfice de la loi Labbé, relative à l’encadrement des produits phytosanitaires, aux personnes vulnérables en interdisant, à l’horizon 2017, l’utilisation de ces produits par les collectivités dans le traitement des bords de route, des terrains de sport et des cimetières.

M. Bernard Accoyer. Cette proposition purement incantatoire méconnaît les réalités des élus locaux, quotidiennement interpellés par nos concitoyens sur l’état des trottoirs et bordures de routes.

M. Olivier Véran, rapporteur. La question est étudiée dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique. Je vous invite donc au retrait, faute de quoi mon avis serait défavorable.

TITRE II
FACILITER AU QUOTIDIEN LES PARCOURS DE SANTÉ

Chapitre Ier
Créer un service territorial de santé au public

Avant l’article 12

La Commission examine l’amendement AS972 du Gouvernement.

Mme la ministre. Je demande que l’article 38, ainsi que les amendements portant articles additionnels après l’article 38, soient appelés après les amendements déposés après l’article 12.

Comme je vous l’ai précisé hier, le Gouvernement vous propose des modifications au texte initial. Je remercie la rapporteure sur le titre II, Mme Bernadette Laclais, qui a accompagné ce travail au cours des derniers jours, dans des conditions que je tiens à saluer.

Des articles du titre II, notamment celui relatif au service territorial de santé au public (STSP), ont été perçus par les professionnels de santé libéraux comme des signes d’une volonté d’étatisation des soins ambulatoires, avec une emprise accrue des ARS. Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, cela n’a jamais été mon intention. Les amendements que je vous propose aujourd’hui, issus de la concertation que j’ai conduite ces dernières semaines, traduisent trois orientations claires : réaffirmer le rôle des médecins généralistes et des équipes de soins primaires dans la structuration des parcours de santé ; donner aux acteurs la possibilité d’engager le « virage ambulatoire » ; mettre en place une nouvelle démocratie sanitaire dans les territoires.

Le travail mené a permis de renforcer les outils à la disposition des professionnels de santé. Ces outils s’intègrent désormais dans un nouveau chapitre, qui traduit clairement l’objectif de « promouvoir les soins primaires et favoriser la structuration des parcours de santé ». Ce chapitre intègre les articles 12 à 17 du projet de loi. De nouveaux outils visent à soutenir l’initiative des acteurs en leur offrant la possibilité de constituer des équipes de soins primaires – c’est l’objet de l’article 12 – autour des médecins généralistes de premier recours et de « communautés professionnelles territoriales de santé » – appellation qui se substitue à celle de « service territorial de santé au public » –, définies à l’article 12 bis, lesquelles peuvent s’associer aux professionnels de santé du premier et du second recours, ainsi qu’aux acteurs médico-sociaux et sociaux. Ces coordinations, résultant de l’initiative et de la volonté des professionnels d’organiser entre eux leur prise en charge, contribueront fortement à structurer le parcours de santé, notamment pour les patients atteints de maladies chroniques, les personnes en situation de précarité sociale, de handicap ou de perte d’autonomie.

Par ailleurs, des fonctions d’appui, complémentaires à l’exercice clinique des professionnels de santé, peuvent être nécessaires dans la prise en charge des patients complexes : c’est l’objet de l’article 14, un amendement précisant la définition et le recours à ces fonctions d’appui. Il incombera au médecin traitant, ou à un médecin en lien avec lui, de décider du déclenchement de l’appui à la coordination, en fonction de l’état du patient.

Enfin, le nouveau chapitre intègre les articles 15, 16 et 17 du projet de loi, dont les dispositions visent à mieux valoriser les missions des acteurs des soins de proximité et les fonctions du médecin traitant : création d’un numéro national de permanence des soins ambulatoires (PDSA), désignation du médecin traitant de l’enfant et financement des centres de santé.

Ces modifications apportées à l’article 12 ont conduit à revoir l’article 38, lequel ancre les initiatives professionnelles et l’animation territoriale conduite par les ARS dans un fonctionnement rénové de la démocratie sanitaire à l’échelle du territoire. De fait, il y a un risque de voir les initiatives professionnelles valorisées par l’article 12 se développer sans connexion avec la démocratie sanitaire dans les territoires, démocratie dont le fonctionnement doit par ailleurs être amélioré : alors que les conférences régionales de la santé et de l’autonomie l’animent avec dynamisme, au niveau plus local, les conférences de territoire souffrent d’un défaut de visibilité et d’efficacité.

Afin de donner à la démocratie sanitaire locale un nouvel élan, le choix a été fait de mobiliser les conseils territoriaux de santé, créés par l’article 38 en remplacement des actuelles conférences de territoire. Ces instances seront notamment composées d’élus et de représentants de l’ensemble des acteurs de santé du territoire, professionnels comme usagers ; un décret en Conseil d’État déterminera leur composition, leurs modalités de fonctionnement et de désignation de leurs membres. Elles seront le point de convergence et de synthèse, au niveau du territoire de démocratie sanitaire, des besoins des professionnels de santé, des attentes des usagers et des projets des collectivités.

Le conseil territorial de santé contribuera à l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation du projet régional de santé ; il participera à la réalisation du diagnostic territorial partagé en s’appuyant notamment, suivant une logique ascendante, sur les projets des équipes de soins primaires et des communautés professionnelles territoriales de santé, et il organisera l’expression des usagers à l’échelle locale. Un sous-amendement de la rapporteure, auquel je suis favorable, tend d’ailleurs à organiser cette expression au sein d’une commission dédiée.

Plusieurs amendements visent aussi à consolider la défense des droits des usagers au niveau local. Les conseils territoriaux en santé auront en la matière un rôle majeur, y compris pour améliorer le circuit des plaintes et réclamations – nous y reviendrons avec plusieurs de vos amendements.

L’article 12 apparaît comme l’article central d’un nouveau chapitre, dans une architecture qui, issue de la concertation, entend mieux marquer la place du médecin généraliste et des équipes de soins primaires dans la structuration des parcours.

M. Jean-Pierre Door. Madame la ministre, votre amendement va dans le bon sens, les événements de ce week-end vous ayant contrainte à changer votre fusil d’épaule. Cela étant, vous allez nous proposer une réécriture complète de l’article 12 qui n’est pas sans soulever certaines questions, notamment au regard des amendements de suppression que nous avons déposés. La méthode est quelque peu surréaliste : tout cela étant tombé du ciel en quelques heures, seule la rapporteure a été en mesure de déposer des sous-amendements.

L’affirmation du rôle du médecin généraliste et l’instauration des communautés professionnelles territoriales de santé constituent des avancées dont il serait logique que nous puissions débattre. Même si vous arguez de la concertation pour dire que tout va bien, des questions restent posées. D’après une dépêche de l’AFP tombée dans l’après-midi, les professionnels de santé, y compris les internes, seront reçus demain par le Premier ministre, alors que vous les aviez reçus rue de Ségur : comment interpréter cette réunion à Matignon ?

Le syndicat MG France, représentant les médecins généralistes, vient de nous adresser un communiqué pour nous informer que, n’ayant pas obtenu de réponse sur la généralisation du tiers payant, il ne participera pas à la réunion organisée demain au ministère. Un autre communiqué, cette fois des associations des internes, annonce des manifestations à Lyon et dans tous les internats de France. Bref, en dépit de vos nouvelles propositions, tout ne va pas aussi bien que vous le laissez entendre.

Nous devons également en savoir plus sur le déroulement de nos travaux, puisque votre amendement AS1323 fera tomber tous ceux qui le suivent. Nous marchons un peu la tête à l’envers… En d’autres temps, vous n’auriez pas manqué de protester, et avec autrement plus de véhémence que moi, contre de telles conditions de travail.

Mme Martine Pinville. Même formulés sur un ton posé, monsieur Door, vos propos sont très critiques à l’égard de la ministre.

Pour ma part, je salue la méthode : les attentes, fortes, des professionnels ont été entendues, notamment à travers la création de groupes de travail dont les préconisations, les modifications proposées en témoignent, ont été prises en compte.

Mme la ministre. J’ai annoncé l’amendement de réécriture dès le lundi 9 mars, monsieur Door, notamment pour en informer l’opposition. Cet amendement a été transmis lundi soir, il y a deux jours, aux services de l’Assemblée.

Les modifications que je propose sont significatives, je ne le conteste pas ; mais, au terme d’une concertation fructueuse engagée il y a plusieurs semaines, elles ont justement permis le consensus que reflète l’article 12. Contrairement à ce que vous suggérez, ce ne sont pas les objectifs poursuivis dans cet article qui étaient contestés mais son écriture, laquelle ne marquait pas suffisamment le rôle des médecins traitants et restait ambiguë sur celui des ARS, au regard des initiatives des professionnels de terrain. Il n’a jamais été question, dans mon esprit, d’imposer quoi que ce soit par le haut, mais tout au contraire de partir des initiatives locales : la réécriture que je vous soumets vise seulement à clarifier ces objectifs.

Vous mélangez un peu les sujets, ce qui est au demeurant de bonne guerre. La réunion à Matignon demain porte sur la conférence nationale de santé prévue à la fin de l’année : les professionnels pourront évoquer à cette occasion les questions relatives à leurs métiers, même si d’autres points pourront utilement être abordés.

Quant aux internes, ils ont pris connaissance « avec intérêt », selon leurs propres termes, du consensus qui se dégage ; leurs interrogations ne concernent d’ailleurs pas l’article 12, mais la généralisation du tiers payant. Nos contacts avec eux sont positifs et fructueux, comme ils le sont avec les autres professionnels de santé.

La question est donc de nous positionner, les uns et les autres, sur le virage ambulatoire organisé autour des médecins traitants et des équipes de soins primaires : une telle évolution permettrait à notre système de santé, aujourd’hui « hospitalo-centré », de mieux prendre en compte les maladies chroniques et les personnes vieillissantes. Ce sont là les enjeux politiques, au sens le plus fort de ce terme, dont nous avons à débattre.

M. Jean-Patrick Gille, président. Avant de passer à l’examen des autres amendements, je propose que chaque groupe s’exprime.

M. Arnaud Robinet. Notre système de santé doit évoluer en fonction des besoins de nos concitoyens et des attentes des professionnels, nous en convenons tous. Cela étant, vos arguments sont assez laborieux, tant sur la méthode que sur votre interprétation du ressenti des acteurs.

L’amendement de réécriture, en effet annoncé le lundi 9 mars, n’a été déposé qu’avant-hier, de sorte que nous n’avons pas eu le temps de le sous-amender.

D’autre part, nous n’avons pas la même définition de ce qu’est une avancée, puisque l’ensemble des représentants des professionnels comme des étudiants, que Jean-Pierre Door, le président Christian Jacob et moi-même avons encore rencontrés pas plus tard que ce midi, restent vent debout contre votre réforme, refusant de participer à des réunions, à commencer par celle qui se tiendra demain à Matignon. Le Premier ministre entend préparer une conférence nationale de la santé, j’entends bien ; mais si les choses évoluent aussi favorablement que vous le dites, pourquoi cette réunion n’a-t-elle pas été programmée bien après l’examen du présent texte ? Les débats y auraient gagné en sérénité. Au reste, nous aurions aimé, pour notre part, que cette réunion ait lieu avant.

M. Gérard Bapt. Les amendements dont nous parlons, monsieur Door, ne tombent pas du ciel : rédigés au ministère de la santé, ils découlent tout naturellement de l’exposé des motifs du texte, qui, lui, n’a pas changé.

Une réforme de l’offre de soins est nécessaire, notamment pour faire face à la prise en charge des maladies chroniques. D’autre part, lors du congrès de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), qui s’est tenu à Lille en septembre et auquel, ce me semble, assistait M. Robinet, la ministre a clairement indiqué que l’organisation du « service territorial de santé au public », aujourd’hui remplacé par les « communautés professionnelles de territoire », devait partir du terrain, moyennant bien entendu un arbitrage a posteriori de l’État au niveau régional.

Les réformes structurelles, qu’elles visent les professions réglementées ou le secteur de la santé, sont difficiles à mettre en œuvre dans notre pays. Je me souviens, à cet égard, de la façon dont le président de la CSMF parlait de la ministre en charge de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » (HPST) : un peu plus de modestie serait donc bienvenu de votre part.

Enfin, les groupes de travail ont rendu des rapports d’étape dont nous avions connaissance et auxquels les amendements dont nous parlons font écho : je pense au groupe de travail présidé par le docteur Jean-François Thébaut – que vous connaissez bien, monsieur Door –, président de la Fédération des spécialités médicales, ancien syndicaliste et membre de la Haute autorité de santé (HAS). Le groupe SRC soutient donc la démarche du Gouvernement, en dépit des difficultés procédurales que la ministre n’a pas niées.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1323 a effectivement été déposé il y a quarante-huit heures. Le Gouvernement modifie la structuration du projet de loi, tenant ainsi compte des conclusions du groupe de travail sur l’organisation des soins de proximité. Le médecin généraliste est replacé au cœur du système : nous pouvons nous féliciter de cette mesure car elle est dans l’intérêt des patients.

M. Jean-Louis Roumegas. L’essentiel est préservé, c’est-à-dire la coordination des actions de santé au service des patients. La méthode avait fait polémique et des craintes s’étaient exprimées s’agissant de l’étatisation du dispositif et de la mise à l’écart des médecins libéraux. Si ces obstacles de forme sont levés, il y a tout lieu de nous réjouir.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour le titre II. Je veux dissiper tout malentendu sur le calendrier. Les amendements du Gouvernement, monsieur Door, ont été déposés vendredi à dix-sept heures, dans les délais impartis, puis diffusés lundi dans la soirée après que les services de l’Assemblée eurent, comme c’est normal, traité d’abord les amendements sur le titre premier ; c’est ainsi que j’ai pu déposer moi-même un certain nombre de sous-amendements.

L’amendement AS972 prend en compte une concertation qui a donc porté ses fruits, ainsi que les propositions dont nous débattrons aux articles 12, 13 et 14. Aussi émets-je un avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS972.

Elle en vient à l’amendement AS1256 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Les pharmacies d’officine, grâce aux compétences de leurs personnels et à leur maillage territorial, permettent l’accès de tous aux soins de premier recours. Dans un contexte de vieillissement de la population, et alors que le projet de loi de santé prévoit de faciliter au quotidien le parcours de santé des Français, il semble nécessaire d’intégrer le conseil pharmaceutique au parcours de soins des patients.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Votre amendement est satisfait par l’amendement AS1323 que le Gouvernement présentera à l’article 12, puisque les pharmaciens ont bien entendu vocation à participer aux communautés professionnelles territoriales de santé. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement AS212 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Il convient de consacrer le rôle des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) et des services de protection maternelle et infantile (PMI), qui, en concourant aux soins de premier recours, participent aussi à la lutte contre les inégalités territoriales.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement, auquel nous sommes sensibles sur le fond, est satisfait par le droit en vigueur puisque l’article L. 1411-1 du code de la santé publique dispose que les professionnels de santé – dont font bien entendu partie les acteurs paramédicaux et les infirmiers et infirmières – concourent à l’offre de soins de premier recours.

De plus, l’article 26 du projet de loi intègre les PASS dans le projet médical de santé, et les services de PMI ont vocation à participer à la concertation sur le diagnostic partagé : j’ai d’ailleurs déposé un amendement en ce sens à l’article 38.

L’amendement est retiré.

La Commission passe à l’amendement AS550 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. Il s’agit de consacrer le rôle des sages-femmes comme praticiennes, dans l’optique d’une politique coordonnée pour la santé des femmes, à travers des actions de dépistage ou des diagnostics.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Vous imaginez la sensibilité que nous pouvons avoir sur cette question. Les sages-femmes ont bien entendu vocation à participer aux communautés professionnelles territoriales de santé, qui assureront la coordination des soins sur le territoire. L’amendement étant satisfait, j’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS639 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Les infirmières et infirmiers ont un rôle essentiel à l’hôpital – notamment pour assurer les entrées et les sorties – comme dans un cadre libéral ou dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), et ce vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. La loi devrait donc reconnaître qu’ils contribuent aux soins de premier recours.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Votre amendement est satisfait par l’article L. 1411-1 du code de la santé publique, dont j’ai précisé le contenu. J’ajoute que les infirmières et infirmiers ont toute légitimité pour intégrer les communautés professionnelles territoriales de santé. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

*

Article 12
(art. L. 1431-2, L. 1434-11, L. 1434-12, L. 1434-13, L. 1434-14, L. 1434-15 du code de la santé publique et L. 313-4 du code de l’action sociale et des familles)

Création du service territorial de santé au public

Cet article institue en son I le service territorial de santé au public (STSP) dans les territoires de santé définis par les agences régionales de santé (ARS) dans les conditions prévues par l’article 38 du projet de loi. Le STSP doit permettre d’améliorer la coordination des différents acteurs de la santé en vue d’améliorer l’état de santé de la population concernée. Il repose sur des besoins définis dans le cadre d’un diagnostic partagé et dont la réponse est pluri professionnelle. Sa mise en œuvre ressortit à l’ARS en coordination avec les autres acteurs de santé sur la base d’un projet territorial et au sein d’un outil contractuel, le contrat territorial de santé. Cet article prévoit également en ses II et III des mesures de coordination. Son IV prévoit enfin des dispositions transitoires pour articuler le cadre aujourd’hui en vigueur avec le nouveau dispositif.

I. LE SERVICE TERRITORIAL DE SANTÉ AU PUBLIC

Le I créé, au sein du chapitre IV du titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique, tel qu’il résulte de l’article 38 de la loi une section 4 consacrée au service territorial de santé comprenant quatre articles L. 1434-11 à L. 1434-15.

Dans le cadre des travaux du Pacte de confiance menés en 2013 et à la suite du rapport présenté par Mme Bernadette Devictor (32), le projet de loi de santé met en place un service territorial de santé au public au service des patients, fondé sur la coopération entre les acteurs du système de santé à partir d’un diagnostic territorial partagé. Sa mise en place relève des ARS.

A.  L’OBJET DU SERVICE TERRITORIAL DE SANTÉ AU PUBLIC

L’article L. 1434-11 propose une définition du service territorial de santé au public. Il concourt au projet régional de santé et demeure fondé sur le principe de la « responsabilité populationnelle » : toute personne doit pouvoir trouver une orientation adaptée à ses besoins de santé dans le respect du principe d’égalité d’accès aux soins.

1.  Une réalité territoriale

Comme le suggère son intitulé, le STSP couvre une réalité territoriale. Il est mis en place dans les territoires définis par l’agence régionale de santé conformément au 1° de l’article L. 1434-8 du code de la santé publique, tel qu’il résulte de l’article 38 du présent projet de loi.

a.  La notion de territoire

● L’organisation territoriale de la santé a connu une évolution progressive. Les territoires se sont tout d’abord constitués à partir de l’offre de soins existant autour des établissements hospitaliers avant d’intégrer ensuite des caractéristiques propres déterminées par le contexte démographique, sociologique, économique ou administratif. L’ordonnance du 4 septembre 2003 (33) a procédé à la suppression de la carte sanitaire pour retenir la notion de territoires de santé définis à partir d’objectifs quantifiés de l’offre de soins « par activités de soins, y compris sous la forme d’alternatives à l’hospitalisation, et par équipements matériels lourds ».

● Au terme de l’article L. 1434-16 du code de la santé publique, les territoires de santé sont aujourd’hui définis par les ARS.

En effet, depuis la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) (34), les ARS ont pour mission de territorialiser l’action publique dans le domaine sanitaire. Elles élaborent à cet effet le projet régional de santé (PRS), dont les diverses composantes contribuent à une organisation transversale de l’offre de services de santé : prévention, soins de premier recours, soins délivrés par les établissements de santé, prises en charge médico-sociales. Pour mettre en œuvre la nouvelle organisation des soins, les ARS, doivent, en amont de leur PRS, définir des territoires de santé, qui constituent l’unité première du découpage géographique pour l’ensemble de leurs activités. Ces « nouveaux » territoires de santé recouvrent une notion beaucoup plus large que les précédents, puisqu’il s’agit de territoires « pertinents pour les activités de santé publique, de soins et d’équipement des établissements de santé, de prise en charge et d’accompagnement médico-social ainsi que pour l’accès aux soins de premier recours ».

Ils peuvent être infrarégionaux, régionaux ou interrégionaux. L’avis du représentant de l’État dans la région, de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie ainsi que des présidents des conseils généraux de la région pour ce qui ressortit à leur compétence est préalablement requis.

La cartographie actuelle repose sur les comportements sanitaires et sociaux des populations, leurs besoins en matière d’offre de santé et médico-sociale, la prise en compte de l’offre existante et la recherche de territoires homogènes.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, le découpage actuel fait apparaître 108 territoires de santé dont 99 pour la France métropolitaine. La population moyenne des territoires est de 605 000 habitants. Ce chiffre recouvre une réalité disparate : d’un minimum de 77 000 habitants (35) à plus de 2 millions (36).

● Si le cadre juridique du service territorial s’appuie sur des territoires, la rédaction du projet de loi ne reprend pas l’appellation « territoire de santé » afin de ne pas créer d’ambiguïté. En effet, les deux unités géographiques ne recouvrent pas les mêmes notions : le territoire du STSP correspond à une unité géographique du service territorial et du parcours associé alors que le territoire de santé représente aujourd’hui l’unité géographique de mise en œuvre de la politique de l’ARS et de l’ensemble des missions qui lui sont assignées.

Les territoires de santé du STSP devront être suffisamment larges pour pouvoir réunir l’ensemble des acteurs concernés autour d’un projet territorial de santé, parmi lesquels les collectivités territoriales. Il sera donc plus large qu’une aire de proximité même s’il n’est pas exclu d’engager certaines sur des zones plus petites que le territoire du STSP.

L’esprit du projet ne consiste pas à fixer une norme indifférenciée mais plutôt à prévoir un cadre suffisamment souple pour s’adapter aux habitudes de vie et de recours aux services de santé du territoire de la population concernée.

Compte tenu de ces éléments, il n’est pas exclu que le nombre de territoires STSP soit à la hausse par rapport aux territoires de santé actuel mais il est impossible de chiffrer l’évolution à ce stade.

b.  L’objet du service territorial de santé au public

L’objet du SPST consiste à améliorer et protéger l’état de santé de la population tout en contribuant à la réduction des inégalités sociales et territoriales.

De nombreuses études ont été menées pour caractériser ces inégalités qui demeurent profondes dans la France d’aujourd’hui (37). Elles tendent même à s’aggraver sous l’effet de la crise économique, qui frappe inégalement les territoires et de la concentration de l’offre de soins dans certaines zones. De nombreux habitants se retrouvent de facto exclus à la fois pour des raisons économiques et d’accessibilité géographique.

Une récente publication (38) souligne ainsi que la croissance de la population française se traduit par une répartition inégale sur l’ensemble du territoire. À l’échelle du pays, on observe ainsi l’attraction par les régions du sud et les aires urbaines au détriment des régions du nordest et des communes rurales éloignées. À l’échelle de l’aire urbaine, le coût du logement, les infrastructures de transports poussent à l’extension vers les couronnes périurbaines. Les communes les plus accessibles offrent ainsi un cadre de vie et les infrastructures d’accueil pour les jeunes couples en quête d’accession à la propriété laissant à la marge les zones rurales plus reculées.

Le SPST doit ainsi contribuer à résorber ces inégalités à travers la poursuite d’objectifs définis au niveau du territoire à partir des besoins spécifiques identifiés, au niveau régional dans le cadre du plan régional de santé et au niveau national dans celui de la stratégie nationale de santé.

Le texte ne reprend pas explicitement ces éléments et aborde indirectement le chaînage du niveau local au niveau national :

– le diagnostic territorial partagé doit permettre de mettre en lumière les forces et faiblesses du territoire, avec l’objectif tant d’améliorer l’état de santé de la population que de réduire les inégalités sociales et territoriales de santé ;

– le diagnostic se traduit par un projet territorial de santé dont la cohérence avec les objectifs du projet régional de santé est assurée par l’ARS ;

– le projet régional de santé est défini en cohérence avec la stratégie nationale de santé (SNS).

Votre rapporteure regrette que ces éléments ne soient pas explicitement évoqués dans le dispositif. Une certaine logique doit en effet prévaloir dans l’approche du SPST qui doit tenir compte de la répartition des besoins aux différents échelons nationaux, régionaux et locaux.

L’ensemble des éléments méthodologiques seront développés et fournis aux ARS par circulaire. Les ARS seront amenées à décliner ces axes en tenant compte des spécificités locales.

Pour parvenir à cet objectif, le service territorial de santé au public prend appui sur une coordination des acteurs « intéressés ». Interrogés par votre rapporteur, les services du ministère de la santé ont bien voulu préciser qu’il s’agit de « l’ensemble des acteurs impliqués dans l’amélioration des parcours et appartenant à des champs différents : ambulatoire, hospitalier, médico-social ainsi que social, qu’il s’agisse des professionnels intervenant directement dans le domaine de la santé, des professionnels ou institutions qui contribuent aux politiques de santé (éducation nationale, collectivités locales…) ou des représentants des usagers ».

Comme le souligne, le rapport de Mme Bernadette Devictor, la réponse apportée par le SPST constitue un système et non une somme de réponses ponctuelles d’acteurs. La coordination des acteurs publics comme privés, hospitaliers comme libéraux suppose la mise en place d’une chaîne de réponses garantissant que le premier professionnel concerné pourra orienter le plus efficacement le patient en vue d’une prise en charge adaptée et sans rupture du parcours de soins.

Cette rédaction tend à accréditer l’idée que l’offre en santé est le fait des acteurs et non des institutions. Comme le relève le rapport précité, « à ces dernières, il revient un rôle d’orientation, de planification, d’incitation voire parfois d’injonction, d’accompagnement et de régulation ».

Cette coordination suppose ainsi une accessibilité en tous points du territoire ainsi que la définition de règles de répartition des interventions. C’est la raison pour laquelle le deuxième alinéa de l’article L. 1434-11 dispose que le STSP contribue à structurer les soins de proximité et les parcours de santé.

Les acteurs doivent partager la même préoccupation de ne laisser personne à l’écart du système de santé et surmonter l’approche individualiste en vue d’une convergence des initiatives entre professions médicales et paramédicales et entre secteurs sanitaires et médico-sociaux. Le rapport de Mme Bernadette Devictor relève à cet égard que 12 % des médecins généralistes travaillent au sein de structures de groupe. La situation actuelle est « celle de l’isolement et de l’individualisation de l’offre en santé ». La durée hebdomadaire de travail ne les autorise pas à dégager du temps pour participer à des concertations ou à des organisations coopératives à la différence de ce que peut autoriser le regroupement de professionnels.

c.  La prise en compte des publics spécifiques

Cet article vise à prendre en compte des publics spécifiques tels que les patients atteints de maladies chroniques, les personnes en situation de précarité sociale ou celles en situation de handicap ou de perte d’autonomie.

La notion de précarité sociale

Selon la définition du Père Joseph Wresinski dans son rapport pour le conseil économique et social en 1987 « La précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités, notamment celle de l’emploi, permettant aux personnes et familles d’assumer leurs obligations professionnelles, familiales et sociales, et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitive » (39).

Dans son introduction aux travaux portant sur la santé des personnes en situation sociale difficile, Emmanuelle Cambois définit ainsi la précarité sociale (40) : « Elle résulte de parcours de vie faits de ruptures sociales, professionnelles ou affectives (...) qui induisent ou révèlent des problèmes de santé, parfois aussi en découlent. Elles rendent moins à même les personnes de repérer et de soigner ces problèmes de santé, qui s’aggravent et se cumulent. Entre consultations tardives et renoncements, ce type de recours aux soins limite aussi les chances de guérison et de récupération. La diversité des déterminants en cause souligne la nécessité d’une réponse plurielle au problème « précarité-santé » et le besoin de prendre en compte de manière globale les contextes sociaux susceptibles de limiter l’efficacité des filières et soins courants. »

La situation de précarité sociale nuit l’accès aux services de santé comme à la continuité des soins, la santé n’apparaissant pas comme le besoin prioritaire ou les conditions de vie (absence de logement par exemple) rendant difficile voire impossible le suivi de certains traitements.

Ces priorités s’inscrivent dans la continuité d’orientations définies par le Gouvernement et concrétisées dans un cadre expérimental.

● Les maladies chroniques qui touchent près d’un français sur quatre sont ainsi l’un des grands défis auquel doivent répondre les politiques de santé. La feuille de route de la Stratégie nationale de santé (SNS) a été présentée par la ministre des affaires sociales et de la santé le 23 septembre 2013.

La maladie chronique est définie comme une maladie de longue durée, évolutive, souvent associée à une invalidité et à la menace de complications graves. Les maladies chroniques regroupent :

– les maladies comme l’insuffisance rénale chronique, les bronchites chroniques, l’asthme, les maladies cardio-vasculaires, le cancer ou le diabète, des maladies lourdement handicapantes, comme la sclérose en plaques ;

– des maladies rares, comme la mucoviscidose, la drépanocytose et les myopathies ;

– des maladies transmissibles persistantes, comme le Sida ou l’hépatite C ;

– enfin, des troubles mentaux de longue durée (dépression, schizophrénie…).

Pour améliorer la santé des Français, répondre à leurs besoins et de se préparer aux défis de l’avenir, pour réduire les inégalités observées en santé et dans l’accès au système de santé, trois axes prioritaires ont été définis notamment la prévention et l’organisation des soins autour des patients tout en garantissant l’égal accès.

● Le dispositif PAERPA (personnes âgées en risque de perte d’autonomie) a, quant à lui, pour objectif d’améliorer la prise en charge des personnes âgées, en mettant fin aux difficultés ou ruptures dans leur prise en charge. En partant des besoins de la personne et de ses aidants, les différentes actions mises en œuvre visent ainsi à mieux coordonner de multiples intervenants intervenant en ville, à l’hôpital, ou dans le médico-social. Les professionnels de santé en ville s’organisent à cet effet pour éviter un recours excessif à l’hospitalisation – souvent dommageable pour l’autonomie des personnes âgées.

Il est expérimenté par neuf ARS depuis septembre 2013, sur la base d’un cahier des charges national.

d.  Le concours des plateformes territoriales d’appuis aux professionnels de santé

Le STSP peut s’appuyer sur le concours des plates-formes territoriales d’appuis aux professionnels de santé (cf. commentaire de l’article 14) pilotées par les ARS. Cette forme intégrée de coopération entre professionnels a vocation à fluidifier les parcours complexes.

Cet appui suppose toutefois de développer les ressources internes des ARS pour leur permettre de jouer un rôle dans l’accompagnement des projets. Le rapport de Mme Bernadette Devictor soulignait ainsi le besoin de développer une formation interne assortie le cas échéant d’un recours à des compétences externes. À cet égard, il a été indiqué à votre rapporteure que « des travaux seront menés en collaboration avec les ARS afin de leur permettre de renforcer leurs compétences en matière d’accompagnement de projets et d’animation du STSP, tout comme d’ailleurs de leurs autres projets, présentant les mêmes besoins ».

e.  Un projet plus prudent

Le projet de loi est plus restreint au regard de l’ambition consistant à élaborer un service public territorial de santé (SPTS). Dans son rapport, Mme Bernadette Devictor précisait que le SPTS revêtait les attributs du service public, ouvert aux acteurs publics comme privés, selon le quadriptyque égalité, continuité, neutralité et adaptabilité. Partant du constat que la participation à un service public n’impliquait nullement que les acteurs revêtent un statut public, le rapport soulignait que « l’abandon de cette dénomination traduirait la primauté donnée à des questions de statut, alors que la raison même de la démarche est de partir des besoins des usagers et non des positionnements spécifiques des professionnels ».

Force est de constater que la dénomination de service territorial de santé en public ne correspond ni à cette intention initiale, ni à la position de repli émise par le rapport consistant en un « service territorial de santé publique ». La rédaction proposée ne mentionne pas non plus les critères déterminants du service public. En effet, même s’il s’inspire des valeurs du service public (égalité, continuité, neutralité et adaptabilité), il a été précisé à votre rapporteure que la participation de tous les acteurs du territoire, quel que soit leur statut (professionnels de santé libéraux, associations, établissements privés…), justifiait de ne pas faire référence aux principes dégagés par la jurisprudence administrative pour ne pas introduire d’ambiguïté : il importait de ne pas introduire de confusion entre le service public et le service destiné à améliorer le parcours de santé des patients.

2.  Le rôle déterminant des ARS

L’article L. 1434-12 du code de santé publique fait de l’ARS la structure motrice de la mise en place du STSP. Ce choix s’inscrit dans le cadre des préconisations formulées dans le rapport de Mme Bernadette Devictor précité. L’ARS apparaît comme étant la seule structure susceptible de garantir la pérennisation du STSP par son implication active. Ce rôle suppose toutefois que les délégations territoriales des ARS soient dotées d’une « réelle capacité d’initiative, de marges de manœuvre et de montage de projets avec les acteurs de territoires ».

Cette implication trouve à se réaliser dans la mise en place d’un diagnostic territorial partagé et l’élaboration d’un projet territorial de santé.

a.  Le diagnostic territorial partagé : une approche stratégique fondée sur la concertation

● La concertation est un pilier essentiel du service territorial. Au terme du II de l’article L. 1434-12, le diagnostic sera ainsi élaboré par l’ARS avec les acteurs de la santé du territoire.

La notion de diagnostic partagé recouvre à la fois une démarche quantitative et une analyse fonctionnelle.

La démarche quantitative aura pour objectif d’évaluer si le dysfonctionnement repéré porte bien un caractère suffisamment général pour nécessiter une évolution organisationnelle. Cette analyse permettra par la suite d’effectuer un suivi des améliorations effectivement apportées.

L’analyse fonctionnelle sera effectuée par les professionnels concernés afin de déterminer ce qui dans les organisations, les pratiques, les échanges doit évoluer. Cette analyse fonctionnelle se fera le plus souvent dans le cadre de groupes de travail avec les acteurs concernés dont les représentants de patients.

Une liste non exhaustive mentionne également les acteurs concernés dans une optique de décloisonnement : les représentants des usagers, des professionnels et établissements de santé, sociaux et médicaux-sociaux, les collectivités territoriales, l’assurance maladie et les services et établissements publics de l’État.

Parallèlement, l’article L. 1434-8, dans sa rédaction issue de l’article 38, mentionne que le conseil territorial de santé, qui organise en son sein l’expression des représentants des usagers, contribue au diagnostic partagé (cf. commentaire de l’article 38).

L’organisation des concertations sera laissée à la libre appréciation des ARS. Un guide méthodologique sur l’élaboration des STSP serait toutefois établi et contiendrait des recommandations en la matière.

● La concertation doit permettre l’émergence d’une feuille de route. Le diagnostic territorial partagé repose ainsi sur l’analyse des besoins des usagers, du niveau de service offert, de l’organisation de l’offre et de la charge des professionnels.

Dans le cadre de la coopération entre acteurs, il est ainsi suggéré de disposer d’une photographie précise de la situation sur le territoire concerné et pour chacun des acteurs, notamment les établissements. La comparaison entre les besoins et les moyens dont dispose chacun des acteurs permettra de définir la feuille de route sanitaire et sociale.

L’analyse du niveau de service est établie selon les caractéristiques de continuité – horaire et tout au long du parcours – et d’accessibilité.

Selon le rapport de Mme Bernadette Devictor, l’analyse de l’offre et de son organisation permettra d’identifier les segments d’activité pour lesquels il y a abondance d’offre en santé et ceux pour lesquels des besoins restent insatisfaits. La rédaction proposée par le projet de loi reprend ces préconisations, qu’il s’agisse du décloisonnement interprofessionnel et du niveau de service à proposer (continuité et accessibilité). Le diagnostic a ainsi pour principal objectif de préconiser des actions pour remédier aux insuffisances constatées.

Constatant que l’analyse des besoins constitue une démarche trop peu fréquente, le rapport de Mme Bernadette Devictor préconise une déclinaison des enjeux, nationalement via la stratégie nationale de santé, régionalement au travers du projet régional de santé et localement compte tenu des spécificités du territoire. Le rapport suggère de s’appuyer sur les travaux de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) (41) portant sur le diagnostic territorial établi dans le cadre de l’expérimentation des PAERPA (42).

Questionnés sur ce point par votre rapporteure, les services du ministère de la santé ont précisé que des travaux seront menés en collaboration avec les ARS et les professionnels pour accompagner le déploiement du STSP. Dans ce cadre, toutes les contributions méthodologiques existantes seront utilisées et en particulier celles de l’ANAP. Précisons que la méthodologie de l’ANAP portant sur le diagnostic territorial propose de déterminer les besoins de santé de la population (épidémiologie), d’identifier l’état de santé de la population du territoire en référence à la région considérée et au territoire national, d’analyser la consommation de soins et d’étudier les évolutions démographiques récentes et à venir.

L’ensemble de ces travaux permettra d’établir une ou plusieurs thématiques sur laquelle le STSP pourra se développer.

Le texte proposé reste toutefois trop marqué par une cartographie de l’offre et semble laisser de côté celle de la consommation des soins et des besoins des usagers dans les domaines sanitaires et médico-sociaux. Surtout, aucun lien n’est établi avec les données de santé.

La rédaction ne prend pas en compte le cas particulier des personnels saisonniers pour lesquels des réels enjeux se posent en termes de suivi sanitaire et social. Le diagnostic partagé doit être l’occasion de se pencher sur les besoins de cette catégorie socio-professionnelle très particulière.

La rapporteure estime utile de préciser ces éléments.

b.  Le projet territorial de santé : une approche opérationnelle

Les actions à entreprendre sont formalisées au sein du projet territorial de santé (PTS) mentionné au III de l’article L. 1434-12.

L’article de loi ne prévoit pas qu’un décret vienne fixer un document-type par voie réglementaire.

Des travaux seront toutefois menés en collaboration avec les ARS et les professionnels pour accompagner le déploiement du dispositif STSP. Pourront être ainsi précisés les éléments obligatoires que devront comporter le PTS dont la liste des actions concrètes à retenir en priorité pour répondre aux carences constatées sur le territoire et les modalités concrètes de réalisation de ce projet (durée, modalités d’approbation, éventuellement l’identification des acteurs et leurs engagements). Les ARS resteront, toutefois, libres d’y ajouter les points qu’elles jugent nécessaire d’y faire figurer.

Les ARS devront s’assurer de la cohérence entre le PTS et le projet régional de santé (PRS). Toutefois, ces deux dispositifs restent bien distincts. En effet, si le STSP concourt à la réalisation des objectifs du PRS, il demeure que :

– le PRS pourra alimenter le STSP et inversement ;

– le STSP n’est en rien une des composantes du PRS : à ce titre, leurs modalités d’adoption seront distinctes ainsi que leurs durées respectives.

À chaque territoire du SPST sera associé un seul projet territorial de santé. Cependant compte tenu de la diversité des sujets concernés (soins de proximité, santé dans le domaine de la périnatalité, des adolescents ; accès aux soins des personnes handicapées), le projet pourra contenir plusieurs volets différents. Il pourra également être enrichi dans le temps.

Le projet territorial de santé implique une approche pluriannuelle puisqu’il vise à définir les actions à entreprendre pour répondre aux besoins identifiés par le diagnostic territorial partagé. Selon les informations transmises à votre rapporteure, « il a néanmoins été jugé préférable de laisser ce point à la libre appréciation des ARS en accord avec les acteurs du territoire, en fonction des réponses qui seront apportées aux problématiques relevées sur le territoire ».

c.  L’adoption des documents.

Au terme du IV de l’article L. 1434-12, le diagnostic comme le projet territorial sont arrêtés et publiés par le directeur général de l’ARS (43). Deux préalables sont néanmoins requis :

– dans une démarche de concertation, l’avis du conseil territorial de santé institué par l’article 38 du projet de loi (44).

– l’information de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA). Prévue par l’article 1434-2 du code de la santé publique, la conférence régionale de la santé et de l’autonomie est un « organisme consultatif composé de plusieurs collèges qui concourt, par ses avis, à la politique régionale de santé ». Y sont représentés les collectivités territoriales, les usagers et associations, les conférences de territoire, les organisations représentatives des salariés, des employeurs et des professions indépendantes, les professionnels du système de santé, les organismes gestionnaires des établissements et services de santé et médico-sociaux, les organismes de protection. La CRSA peut faire des propositions relatives à la politique de santé dans la région et émet un avis sur le plan stratégique régional de santé.

Par ailleurs, le dispositif prévoit la révision ou la complétion des documents à tout moment. L’avis du conseil territorial et l’information de la CRSA seront également requis.

S’agissant plus particulièrement du lien entre révision du PRS et révision du PTS, aucune automaticité n’est prévue. Il appartiendra aux ARS de déterminer si l’évolution territoriale ayant amené à de nouveaux diagnostics partagés justifie d’une réforme plus profonde du PRS.

Enfin, l’ARS informe la population sur l’activité du STSP. Elle sera libre de choisir les modalités qu’elles jugent les plus appropriées. Elle pourra inscrire sur le site internet de l’agence les informations relatives à la mise en œuvre du STSP et les modalités de recours aux différentes actions. Selon les sujets, ces informations seront également diffusées par les acteurs concernés par les différentes actions eux-mêmes et les collectivités territoriales.

Ces éléments témoignent de la volonté d’inscrire le STPS dans le cadre d’une démarche de concertation et de transparence.

La gouvernance, à la main de l’ARS, ne peut se concevoir qu’en associant les différents acteurs, représentants des usagers compris.

3.  Le STSP s’inscrit dans une démarche contractuelle

Le diagnostic conduit à la formalisation d’un projet territorial dont les actions sont concrétisées par la mise en place d’un contrat territorial de santé tel que prévu par l’article L. 1434-13. Conclu entre l’ARS et les acteurs du territoire participant à la mise en œuvre des actions, le contrat décrit plusieurs éléments :

– les actions menées par les signataires correspondant aux objectifs de santé poursuivis ;

– les missions et engagements des signataires : il s’agit notamment de la traduction opérationnelle de la responsabilité « populationnelle », décrivant les rôles et responsabilités assignés à chaque acteur, tout au long du parcours de l’usager, en matière d’information, d’orientation, d’accompagnement ou de prise en charge ;

– les moyens consacrés et notamment les modalités de financements : il s’agit des moyens matériels (45) et financiers mobilisés tant par l’ARS que par les autres financeurs (46) ;

– les modalités de suivi et d’évaluation traduisant la « dynamique qualité ». Concernant les indicateurs de qualité et d’amélioration du service rendu, il pourra s’agit d’indicateurs nationaux proposés aux ARS pour assurer le suivi des contrats (temps d’accès à une structure d’urgence, nombre d’organisations adaptées pour accueillir des personnes handicapées…etc.). D’autres indicateurs pourront être définis localement et être mentionnés dans les contrats.

Chaque PTS devra se traduire par un contrat territorial de santé. En fonction de la richesse des PTS, la conclusion de plusieurs contrats au sein d’un même PTS serait tout à fait envisageable et même probable d’après les précisions apportées à la rapporteure. Si nécessaire, une articulation entre CTS sera assurée au sein du PTS.

Le contrat territorial aurait vocation à s’appuyer sur les acquis existants et à les consolider. Le IV du présent article prévoit ainsi que les contrats locaux de santé actuellement en cours d’exécution peuvent tenir lieu de contrat territorial de santé s’ils comportent une action susceptible de concourir au projet territorial. Dans un souci de simplification du droit, le choix privilégie le fait de ne pas conserver deux outils juridiques proches. C’est pourquoi le contrat territorial de santé sera amené à terme à remplacer le contrat local de santé. En application de l’article 38 du projet de loi, les contrats locaux de santé en cours ne seront pas prorogés et les contrats locaux de santé, sans date d’échéance, perdront tout effet au plus tard en 2018.

Les contrats territoriaux de santé se distinguent des contrats locaux de santé par leur objet plus large. Les derniers visent la mise en cohérence de l’ensemble des politiques publiques intervenant dans le domaine de la santé.

Les premiers visent non seulement à mettre en cohérence ces politiques publiques dans une optique de coopération mais aussi à améliorer la coordination entre tous les acteurs de santé pour fluidifier les parcours.

Les contrats locaux de santé

Les contrats locaux de santé, mentionnés à l’article L. 1434-17 du code dans sa version actuellement en vigueur, participent aujourd’hui de la mise en œuvre du projet régional de santé et sont conclus notamment avec les collectivités territoriales et leurs groupements. Ils portent sur la promotion de la santé, la prévention, les politiques de soins et l’accompagnement médico-social. Suite aux recommandations du rapport de Mme Bernadette Devictor, ces contrats ont vocation à évoluer vers les contrats territoriaux de santé (cf. IV du présent article). Le travail effectué par les ARS sur ces contrats constitue en effet une première étape vers le dispositif porté par le projet de loi.

La dimension intersectorielle est en effet une caractéristique des CLS : si les signataires sont les collectivités territoriales et les ARS, les préfets, les services de l’État, les acteurs de santé et les associations peuvent y être associés.

Les CLS s’appuient sur une stratégie et des objectifs définis en commun. Ils formalisent un programme d’actions pluriannuel co-construit à partir des besoins locaux et incluent un suivi de la mise en œuvre et une évaluation des résultats.

Les initiatives sont souvent dédiées à la promotion et la prévention de la santé, le CLS incite à élargir le champ de la contractualisation à l’ensemble des domaines d’intervention de l’ARS et de l’assurance maladie tels que la promotion et la prévention de la santé, l’offre de premier recours et l’accompagnement médico-social.

La gouvernance propre au contrat territorial, abordée par le rapport de Mme Bernadette Devictor, n’est pas reprise par le texte proposé. L’idée est de laisser suffisamment de souplesse aux acteurs pour s’organiser en fonction des spécificités de leur territoire, avec l’appui de l’ARS.

4.  Les outils à la disposition de l’ARS

La mise en place du STSP se formalise également par le renforcement des moyens d’action des ARS.

Avec l’article L. 1434-14, L’ARS dispose d’un levier financier pour mettre en œuvre les orientations du projet territorial : elle peut ainsi subordonner l’attribution de crédits du fonds d’intervention régional à la participation du bénéficiaire à une action relevant du projet territorial de santé.

Avec l’article L. 1434-15, le directeur dispose d’un levier organisationnel pour la mise en place des actions relevant du STSP. Les autorisations qu’elle est amenée à délivrer peuvent aussi être subordonnées à une action relevant du projet territorial de santé. Ces autorisations concernent ainsi :

– les autorisations relevant de l’article L. 6122-1 du code de la santé publique, c’est-à-dire les projets relatifs à la création de tout établissement de santé, la création, la conversion et le regroupement des activités de soins, y compris sous la forme d’alternatives à l’hospitalisation ou d’hospitalisation à domicile, et l’installation des équipements matériels lourds ;

– les autorisations mentionnées aux b, d et f et de l’article L. 313-3 du code de l’action sociale et des familles.

Les autorisations relevant du b concernent certains des établissements et services sociaux et médico-sociaux dotés ou non d’une personnalité morale propre mentionnés à l’article L. 312-1 du même code et les lieux de vie et d’accueil mentionnés au III du même article, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par les organismes d’assurance maladie.

Les autorisations relevant du d concernent les établissements et services sociaux et médico-sociaux dotés ou non d’une personnalité morale propre mentionnés à l’article L. 312-1 du même code dont l’autorisation relève simultanément du président du conseil général et du directeur général de l’agence régionale de santé.

Les autorisations relevant du f concernent les établissements et services sociaux et médico-sociaux dotés ou non d’une personnalité morale propre mentionnés à l’article L. 312-1 du même code dont l’autorisation relève simultanément de l’autorité compétente de l’État et du directeur général de l’agence régionale de santé.

II. LES MESURES DE COORDINATION ET DE TRANSITION

Les II à IV prévoient des mesures de coordination ainsi que les dispositions transitoires permettant d’articuler les outils existants avec ceux qui sont instaurés par le texte de loi.

1.  Les mesures de coordination

Le II modifie l’article L. 1431-2 du code de la santé publique, relatif aux missions exercées par les ARS. Elles sont ainsi chargées de deux missions :

– au terme du 1°, elles mettent en œuvre de la politique de santé publique en liaison avec les autorités compétentes dans les domaines de la santé au travail, de la santé scolaire et universitaire et de la protection maternelle et infantile ;

– selon le 2°, elles assurent la régulation, l’orientation et l’organisation, en concertation avec les professionnels de santé, de l’offre de services de santé, de manière à répondre aux besoins en matière de soins et de services médico-sociaux, et à garantir l’efficacité du système de santé. Elles veillent ainsi, conformément au c du 2° à ce que la répartition territoriale de l’offre de soins permette de satisfaire les besoins de santé de la population. Le II vise précisément à compléter cette mission afin de prévoir que les ARS assurent la mise en place du SPST.

Le III procède à une coordination au sein du code de l’action sociale et des familles. Il a été souligné que, s’agissant des établissements et services médico-sociaux, certaines autorisations délivrées par les ARS pouvaient être subordonnées à une action relevant du projet territorial de santé. L’article L. 313-4 récapitule justement les conditions dans lesquelles une autorisation peut être délivrée aux établissements et services sociaux et médico-sociaux. Cet article est logiquement complété par une disposition la subordonnant « à des conditions relatives à la participation à une ou plusieurs actions » relevant du projet territorial de santé.

2.  Les mesures de transition

Le IV prévoit les conditions d’applications de cet article.

Son dispose que les projets territoriaux de santé sont arrêtés pour les territoires définis par les ARS dans un délai de cinq ans à compter la publication de la présente loi. Cette disposition tient notamment compte de la définition préalable du projet régional de santé dont l’article 38 prévoit une entrée en vigueur au plus tard le 1er janvier 2018.

Son dispose que, jusqu’à la publication du futur projet régional de santé, les diagnostics et projet territoriaux sont établis dans le cadre de territoires « déterminés à cet effet » par l’ARS. Le projet régional de santé ne reposera plus sur les territoires de santé, que le projet de loi supprime, mais sur les territoires STSP, a priori plus circonscrits ainsi que sur différentes zones (cf. commentaire de l’article 38). Dans l’attente des nouveaux projets régionaux de santé, les ARS travailleront sur la base de territoires provisoires. Par la suite, il appartiendra à l’ARS de faire converger les périmètres des territoires provisoires et futurs en particulier si ceux-ci étaient amenés à évoluer dans le cadre des travaux conduits tant pour le déploiement du STSP que des nouveaux PRS.

Le dispose que, jusqu’à l’installation des conseils territoriaux, les attributions prévues par cet article sont exercées par les actuelles conférences de territoires. En d’autres termes, la conférence de territoire sera consultée sur l’élaboration et le suivi du projet régional de santé, contribuera au diagnostic partagé et pourra rendre un avis sur le contrat territorial de santé.

Les conférences de territoire

Selon l’article L. 1434-17 du code de la santé publique, le directeur général de l’agence régionale de santé constitue une conférence de territoire, composée de représentants des différentes catégories d’acteurs du système de santé du territoire concerné, dont les usagers du système de santé. Cette instance contribue à mettre en cohérence les projets territoriaux sanitaires avec le projet régional de santé et les programmes nationaux de santé publique. Elle peut enfin faire toute proposition au directeur général de l’agence régionale de santé sur l’élaboration, la mise en œuvre, l’évaluation et la révision du projet régional de santé.

Le prévoit la transformation des actuels contrats locaux de santé en contrats territoriaux de santé par voie d’avenants. Rappelons qu’au terme de l’article 38 du projet de loi, les actuels CLS sont maintenus jusqu’à leur terme. Si les parties prenantes au CLS entendent poursuivre une action relevant du projet territorial de santé ou engager une action nouvelle y concourant, le CLS pourra tenir lieu de contrat territorial.

Le prévoit une articulation entre le futur projet régional de santé (PRS) institué par l’article 38 du projet de loi, dont il est rappelé qu’il doit entrer en vigueur le 1er janvier 2018, et les projets et contrat territoriaux susceptibles d’être élaborés avec les ARS. Les projets et contrats territoriaux élaborés par les ARS à la publication du PRS pourront être révisés afin de les ajuster aux objectifs du PRS.

Un décret devra enfin préciser les conditions d’application du IV.

*

Aux termes des débats en commission, l’architecture de l’article 12 a été intégralement remaniée avec l’adoption d’un amendement de rédaction globale déposé par le Gouvernement. L’article 12 insère un nouvel article L. 1411-1-1 qui réaffirme la place du médecin généraliste avec l’instauration des équipes de soins primaires. Ces équipes contribueront à la structuration du parcours de santé des patients en coordination avec les acteurs du premier recours, dans une optique de prise en charge des besoins de soins non programmés et de coordination des soins.

*

La Commission examine deux amendements identiques, AS445 de M. Jean-Pierre Door et AS827 de M. Bernard Accoyer, tendant à la suppression de l’article.

M. Jean-Pierre Door. Nous aurions préféré que le Gouvernement nous présente d’abord la version réécrite de cet article qui, en son état actuel, n’a pas plus d’intérêt que les amendements tendant à le supprimer.

Si j’ai bien compris, personne – pas même les collègues de la majorité – n’a eu communication des amendements du Gouvernement avant vendredi à dix-sept heures, délai de rigueur pour le dépôt de nos propres amendements qui, de ce fait, sont tous devenus inutiles : cela pose quand même un problème de méthode. Au moins aurait-on pu décaler nos travaux de façon à nous permettre d’examiner la nouvelle version de l’article. Pourquoi Mme la ministre ne nous présente-t-elle pas d’abord son amendement AS1323 ?

M. Bernard Accoyer. En proposant la suppression de l’article 12, nous avons anticipé les demandes des professionnels devant lesquelles Mme la ministre a été contrainte de reculer. Dans sa version actuelle, cet article prévoit en effet une étatisation du dispositif à travers des contraintes qui, selon ses termes mêmes, font l’objet d’un « contrat » ; il était donc indispensable d’en exiger la suppression.

La nouvelle rédaction, que nous venons de découvrir, montre qu’il ne reste plus qu’à renoncer à la généralisation du tiers payant pour avancer sereinement dans nos travaux. D’une manière ou d’une autre, madame la ministre, vous serez amenée, en dépit de votre acharnement, à reculer sur cette posture politique qui se heurte à l’opposition de tous les acteurs, que vous aurez réussi à mettre en grève, vous exposant ainsi à des conséquences fâcheuses pour l’avenir.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. La procédure, je le rappelle, exige l’examen préalable des amendements de suppression.

La Commission rejette ces amendements.

Elle en vient à l’amendement AS1323 du Gouvernement, faisant l’objet d’un sous-amendement AS1763 de M. Jean-Pierre Door.

Mme la ministre. Je ne doute pas que l’opposition, au-delà des débats de pure forme, se positionnera sur le fond de cet amendement assez simple dans son contenu. Il définit l’équipe de soins primaires comme « un ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins généralistes de premiers recours » et pouvant « prendre la forme d’une structure d’exercice coordonnée ». Sont mises en avant, parmi ses objectifs, l’amélioration et la protection de l’état de santé de la population, ainsi que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé.

M. Jean-Pierre Door. L’équipe de soins de proximité doit être composée non seulement d’équipes de soins primaires, mais aussi de professionnels de santé de soins de premier et deuxième recours, en d’autres termes de spécialistes. C’est là un point essentiel pour donner toute sa place à la médecine libérale de proximité dans les communautés professionnelles territoriales de santé. D’où mon sous-amendement AS1763.

M. Bernard Accoyer. Je propose un autre sous-amendement consistant à faire suivre le quatrième paragraphe de l’amendement AS1323 par les mots : « L’équipe de soins primaires s’inscrit dans le respect de la liberté d’installation de l’ensemble des professions de santé. »

Mme la ministre. Le principe de la liberté d’installation est rappelé à l’article 38 ; votre sous-amendement, par ailleurs satisfait, y serait plus à sa place. Avis défavorable.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable également au sous-amendement de M. Accoyer. L’article 38 précise en effet que le schéma régional de santé « indique, dans le respect de la liberté d’installation, les besoins en implantations pour l’exercice des soins de premier recours ».

Mme la ministre. Avis défavorable aussi au sous-amendement AS1763 : les professionnels de santé du deuxième recours ne font pas partie des équipes de soins primaires, mais des communautés professionnelles territoriales de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable également à ce sous-amendement : l’amendement du Gouvernement apporte une réponse à l’argumentation développée dans son exposé sommaire.

Avis favorable à l’amendement AS1323, fruit du travail de concertation. Le rôle des médecins libéraux est reconnu à travers l’équipe de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé. Cela répond aux préoccupations exprimées par les médecins généralistes au cours des auditions.

La Commission rejette le sous-amendement de M. Bernard Accoyer et le sous-amendement AS1763.

Elle adopte l’amendement AS1323.

L’article est ainsi rédigé.

En conséquence, tous les autres amendements déposés sur l’article 12 tombent.

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Après l’article 12

La Commission en vient à l’amendement AS719 de M. Joël Aviragnet.

Mme Michèle Delaunay. L’amendement AS719 vise à introduire dans la loi les dispositifs qui conjuguent, en tant que de besoin, l’accueil de jour, celui de nuit et l’accompagnement ambulatoire en lien avec les secteurs sanitaire et social et l’éducation nationale. Il est inacceptable que les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ne puissent notifier des orientations qu’à l’adresse des établissements de service et non aux instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP).

M. Joël Aviragnet. Afin de lutter contre les ruptures d’accompagnement, cet amendement a pour objet de permettre aux CDAPH de préconiser un dispositif qui inclut les ITEP. On pourra ainsi mieux suivre le parcours des jeunes.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Si cet amendement est opportun sur le fond, les termes employés manquent de précision. Il est nécessaire d’approfondir la réflexion et de retravailler cette proposition pour favoriser la mise en œuvre du parcours de santé du jeune présentant des difficultés et des troubles de comportement. Avis défavorable à ce stade.

L’amendement est retiré.

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Article 12 bis
(art. L. 1431-2, L. 1434-11, L. 1434-12 et L. 6324-4 du code de la santé publique)

Mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé

L’article 12 bis institue la coopération entre professionnels avec la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé. Celles-ci seront le fruit de l’initiative de professionnels organisés en équipes de soins primaires, auxquels viendront s’adjoindre, selon les projets des fondateurs de la communauté, des acteurs du premier ou du second recours, ou des acteurs médico-sociaux et sociaux. Ces communautés permettront de concourir à l’amélioration de la prise en charge des patients dans un souci de continuité, de cohérence, de qualité et de sécurité.

Les équipes de soins primaires articulées avec les communautés professionnelles territoriales de santé constituent les nouveaux étages de l’organisation des parcours de patients en lieu et place de « service territorial de santé au public » ressenti comme trop centralisateur et trop administratif. Les nouvelles dispositions traduisent mieux l’idée que l’organisation des parcours de santé partira des professionnels eux-mêmes.

Les projets médicaux qui se mettent en place dans les territoires pour faciliter le parcours des patients seront pilotés par les professionnels présents sur le terrain et non par l’État, via les Agences régionales de santé (ARS). Conséquence de ces orientations, la mise en place du diagnostic partagé ne se fera plus dans le cadre des « communautés professionnelles territoriales de santé ». Il sera élaboré par les ARS dans le cadre d’un territoire de démocratie sanitaire censé s’articuler avec les « communautés professionnelles territoriales de santé ». Il appartiendra aux ARS de s’assurer de l’accessibilité aux soins de l’ensemble des patients ressortissants de la région.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1324 du Gouvernement avec le sous-amendement AS1764 de M. Jean-Pierre Door.

Mme la ministre. Il s’agit de mettre en place les communautés professionnelles territoriales de santé. Deux dispositifs reconnaissent le rôle des médecins libéraux de premier recours dans la structuration locale des parcours de santé : la constitution des équipes de soins primaires autour du médecin traitant, que nous venons d’évoquer à l’article 12 du projet de loi, et l’instauration des communautés professionnelles territoriales de santé. Ces dernières résultent des coopérations lancées entre professionnels de santé pour répondre aux besoins ; aux équipes de soins primaires viendront ainsi s’ajouter des praticiens de second recours, des acteurs médico-sociaux et sociaux. Si aucune initiative de coopération n’est déployée dans une zone ou que les actions de coordination s’avèrent trop réduites pour permettre la constitution d’une communauté professionnelle territoriale de santé, les agences régionales de santé (ARS), en lien avec les unions régionales des professionnels de santé (URPS), agiront pour qu’une communauté émerge. La conjugaison de ces deux dispositifs permettra de bien identifier la place et le rôle des professionnels de santé et des acteurs médico-sociaux et sociaux.

M. Arnaud Robinet. Il conviendrait d’élaborer un troisième dispositif, constitué d’équipes de soins de proximité, d’équipes de soins primaires et de professionnels de santé de premier et de deuxième recours. La mise en œuvre de ce système est indispensable si l’on veut donner toute sa place à la médecine libérale de proximité. C’est ce que nous proposons par le sous-amendement AS1764.

M. Christian Paul. Le Gouvernement a rédigé cet amendement sur le fondement d’un compromis tout à fait pertinent. Aujourd’hui, deux situations prévalent : soit des réseaux de santé et des groupements interprofessionnels existent déjà et l’ARS doit les soutenir, soit il n’y a pas d’organisation constituée et l’ARS doit alors impulser la coopération. L’association des deux dispositifs et la seule façon d’aboutir, à moyen et long termes, à une couverture complète du territoire par les communautés professionnelles territoriales de santé, indispensables pour traduire concrètement les parcours de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. J’émets un avis défavorable à l’adoption du sous-amendement AS1764 pour les mêmes raisons qui m’avaient conduite à ne pas approuver le sous-amendement de M. Jean-Pierre Door au précédent amendement du Gouvernement. En revanche, je suis favorable à l’adoption de l’amendement présenté par le Gouvernement, car il vient compléter le dispositif en tenant compte des résultats de la concertation et en répondant aux interrogations soulevées lors des auditions que nous avons menées.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement.

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Article 12 ter
(art. L. 1434-13 du code de la santé publique)

Pacte national de lutte contre les déserts médicaux

Afin de lutter contre la désertification médicale, le Gouvernement a également déposé un amendement visant à instituer un pacte national de lutte contre les déserts médicaux. Partant du constat d’échec des mesures visant à lutter contre ce phénomène (dispositif isolé et sans cohérence), ce plan est articulé autour de trois points :

– changer la formation et faciliter l’installation des jeunes médecins ;

– transformer les conditions d’exercice dans le cadre des équipes de soins primaires et des communautés professionnelles de territoires ;

– investir dans les territoires isolés.

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La Commission aborde l’amendement AS1743 rectifié du Gouvernement.

Mme la ministre. La présence de professionnels de santé est un sujet de préoccupation dans de nombreux territoires. Dès la fin de l’année 2012, j’ai proposé le pacte territoire santé pour lutter contre les inégalités territoriales en la matière. Les dispositifs de ce pacte s’enrichissent au fil des années. Nous souhaitons que la loi reconnaisse la nécessité de l’action contre les inégalités territoriales et les déserts médicaux. Le texte, en l’état, évoque un pacte national de lutte contre les déserts médicaux, mais nous reprendrons en séance le terme de pacte territoire santé utilisé depuis deux ans, pour éviter toute ambiguïté.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis favorable. Cet article additionnel viendra utilement compléter le texte en répondant, là encore, aux préoccupations de nombreux acteurs.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 12 ter

La Commission examine l’amendement AS453 de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Cet amendement prolonge l’examen de la proposition de loi relative à la maladie de Lyme. Le Gouvernement avait affirmé que le projet de loi relatif à la santé proposerait plusieurs pistes visant à mieux prendre en compte la maladie. Or le texte ne comporte aucune disposition sur la borréliose de Lyme, ce qui m’a amenée à déposer un amendement demandant à l’ARS de rédiger un rapport annuel portant sur les actions de sensibilisation et de formation des professionnels, ainsi que sur les mesures de prévention mise en œuvre. Je connais les limites de cet amendement et sais que le projet de loi ne peut prévoir de plan pour chaque maladie. Je suis donc prête à retirer mon amendement et à le réécrire pour intégrer des dispositions concernant la prévention des maladies vectorielles à tiques et pour le rendre cohérent avec le plan d’action proposé lors de l’examen de la proposition de loi.

M. Élie Aboud. Je suis déçu que vous retiriez votre amendement, chère collègue, car, lors de l’examen de la proposition de loi, le Gouvernement avait pris l’engagement d’agir contre cette maladie. Si cet amendement était retiré, nous le reprendrions.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Madame la députée, je vous remercie d’avoir proposé de retirer votre amendement. En effet, le champ de votre mesure relève du dispositif de l’article 38 du projet de loi, puisque la maladie de Lyme se contracte surtout dans quelques zones de notre territoire. C’est un projet régional de santé qui devrait prévoir les actions contre cette maladie, et nous pourrions réfléchir à une rédaction qui satisfasse votre attente.

Mme la ministre. À l’issue du débat sur la proposition de loi, nous avons saisi à nouveau le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), qui doit nous dire s’il s’agit d’une maladie à déclaration obligatoire et nous préciser la nature des tests diagnostiques qui pourraient être effectués. Je demande donc le retrait de cet amendement ; outre le fait qu’il n’est effectivement pas à la bonne place, nous sommes déjà engagés dans une démarche de santé publique avec le HCSP qui, comme pour tous ces sujets, doit se prononcer avant toute décision des pouvoirs publics.

Mme Chaynesse Khirouni. Je souhaiterais m’assurer que la loi comportera bien des dispositions relatives à cette maladie ; en attendant, je maintiens mon amendement.

M. Gilles Lurton. Mme Khirouni a raison de ne pas retirer son amendement, car le prochain texte relatif à la santé sera peut-être déposé dans plusieurs années, et il importe de traiter ce sujet. Lors de l’examen de la proposition de loi, tout le monde s’accordait à reconnaître l’existence d’un problème de fond, et le projet de loi sur la santé représente l’occasion de trouver une solution pour les personnes atteintes de cette maladie.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Madame la députée, la prévalence de cette maladie diffère fortement d’un territoire à l’autre ; elle est ainsi moins répandue dans l’Est et le Sud-Est que dans l’Ouest de la France. Demander à toutes les ARS de rédiger un rapport n’est donc pas judicieux, d’autant plus qu’elles n’auront pas toutes les capacités de le produire. Je vous propose d’intégrer votre préoccupation dans l’article traitant des projets régionaux de santé. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS820 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Cet amendement vise à favoriser la négociation et la conclusion de protocoles de coopération entre professionnels de santé outre-mer, que ceux-ci soient nouveaux ou qu’ils constituent une extension ou une adaptation de protocoles métropolitains. L’objectif est de faciliter le parcours de soins.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ce sujet est important, mais il ne relève pas du domaine de la loi ; la coopération professionnelle repose sur une démarche volontaire, et le Gouvernement ne peut la soutenir qu’une fois celle-ci engagée. J’émets un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 13
(art. L. 3211-1, L. 3211-2-3, L. 3221-1, L. 3221-2, L. 3221-3, L. 3221-4, L. 3221-4-1, L. 3222-1, L. 3222-1-1 A, L. 3311-1 et L. 6143-2 du code de l’action sociale et des familles)

Organisation territoriale de la santé mentale et de la psychiatrie

De nombreux rapports ont concerné la santé mentale et la psychiatrie. D’une manière globale, leurs conclusions visaient, entre autres, à mieux coordonner les actions des acteurs relevant des secteurs sanitaire et médico-social. Cet article répond à cet enjeu au travers d’une organisation territoriale renouvelée, inscrite dans le cadre du service territorial de santé au public mentionné à l’article 12.

I. LES ENJEUX DE PSYCHIATRIE ET DE SANTÉ MENTALE

A.  LE MAINTIEN DE LA SECTORISATION : UN ENJEU FONDAMENTAL

Dans un récent rapport thématique, la Cour des comptes relevait les principaux griefs formulés à l’égard des actions relatives à la psychiatrie et la santé mentale (47) : les entraves aux parcours de soins du patient occasionnées plus particulièrement par la pluralité des acteurs et des structures.

La Cour des comptes a ainsi souligné le caractère excessif du recours à l’hospitalisation complète découlant de l’application du plan 2005-2010 faute de prise en charge en amont.

Elle a également relevé une organisation territoriale défectueuse. Historiquement fondé sur des prises en charges dans le cadre d’une « sectorisation », le cadre organisationnel a fait l’objet d’un abandon progressif dont l’aboutissement a été formalisé par l’ordonnance n° 2010-137 du 23 février 2010 (48).

La sectorisation avait notamment pour objet de rompre avec l’image d’un hôpital psychiatrique conçu comme un lieu clos et de faire sortir les patients de l’état de réclusion. Posé en 1960, le principe de la sectorisation en psychiatrie a été progressivement généralisé avant d’être formalisé dans le cadre d’une planification dès 1974 et d’un financement identifié au milieu des années 1980.

La sectorisation comporte une dimension territoriale de proximité de soins couvrant une population donnée (70 000 habitants) et une dimension fonctionnelle consistant à assurer une prise en charge pluridisciplinaire et continue depuis la prévention jusqu’à la réinsertion.

Plusieurs limites ont été relevées.

En premier lieu, le découpage, pas nécessairement fondé sur les besoins de la population, a pu revêtir un caractère artificiel. Il n’est pas non plus en concordance avec les autres découpages relatifs aux secteurs sanitaire et social.

Avec l’adoption de la loi du 21 juillet 2009 (49), le territoire de santé devient le cadre territorial d’exercice de la psychiatrie ainsi qu’en dispose l’article L. 3221-1 du code de la santé publique. Le secteur ne disparaît pas pour autant des textes mais une ambiguïté demeure quant à son devenir.

Article L. 3221-1 du code de la santé publique

« La lutte contre les maladies mentales comporte des actions de prévention, de diagnostic, de soins, de réadaptation et de réinsertion sociale.

À cet effet, les établissements de santé autorisés en psychiatrie exercent leurs missions dans le cadre des territoires de santé mentionnés à l’article L. 1434-16 et dans les conditions prévues aux articles L. 1434-7 et L. 1434-9 ».

Parallèlement, l’application du plan 2005-2010 a été effectuée de façon contradictoire entre une stratégie nationale de suppression de la sectorisation et un maintien sur le terrain de la notion de sectorisation. La Cour des comptes relève ainsi que la suppression du secteur en tant qu’unité territoriale de planification sanitaire n’a pas empêché que la notion soit maintenue dans l’organisation interne de l’hôpital. Une certaine confusion existe donc.

Or, le secteur demeure toujours une aire d’organisation d’une offre de soins de proximité ce qui confère à cette organisation toute son actualité. Dans son rapport portant sur la santé mentale, M. Denys Robiliard préconisait ainsi de « réaffirmer la légitimité et l’actualité des secteurs en fixant par la loi leurs missions communes » (50). Selon le rapporteur, l’organisation sectorielle doit évoluer vers plus de coopération avec d’autres acteurs tout en confortant les politiques intersectorielles.

B.  LA MISE EN PLACE DU PLAN DE PSYCHIATRIE ET DE SANTÉ MENTALE

Fruit de nombreux travaux préparatoires, le plan 2011-2015 s’adresse aux personnes vivant avec des troubles psychiatriques, en particulier des troubles sévères générant parfois du handicap tout en insérant cette priorité dans une prise en compte plus globale de la santé mentale (51).

Ce plan consiste à prévenir les ruptures dans les parcours de vie des personnes concernées, y compris celles en grande précarité ou en milieu pénitentiaire selon 4 axes :

– la prévention et la réduction des ruptures au cours de la vie de la personne ;

– la prévention et la réduction des ruptures selon les publics et les territoires ;

– la prévention et la réduction des ruptures entre la psychiatrie et son environnement sociétal ;

– la prévention et la réduction des ruptures entre les savoirs.

Conçu comme un plan de nouvelle génération, il consolide la gouvernance en légitimant la mission des agences régionales de santé (ARS), chargées de décliner le plan en mesures opérationnelles dans les 26 projets régionaux de santé. Les ARS sont invitées à envisager trois échelons d’action :

– un échelon régional de concertation associant les représentants des usagers, des professionnels ainsi que des élus ;

– un échelon départemental en articulation avec le territoire de santé ;

– un échelon de proximité fondé sur la sectorisation et certains dispositifs tels que les conseils de santé mentale ou les ateliers santé-ville.

Dans un avis d’avril 2012 (52), la Conférence nationale de santé a salué ces orientations tout en relevant encore quelques insuffisances parmi lesquelles :

– l’absence d’articulation clairement définie et animée de la psychiatrie avec le secteur médico-social et la médecine de ville ;

– l’absence de mise en cohérence des instances locales de concertation avec les aires géographiques ;

– l’absence d’outils de pilotage national relatifs à l’évaluation de la répartition des enveloppes ou à la mise en place d’une répartition plus équilibrée des professionnels sur le territoire national.

Le présent article entend répondre à une partie de ces légitimes attentes.

II. L’ORGANISATION DU SERVICE TERRITORIAL DE SANTÉ POUR LA SANTÉ MENTALE

Cet article décline, sur l’ensemble du territoire, une organisation particulière pour la santé mentale totalement articulée avec le cadre général nouvellement créé du service territorial de santé. Dans la continuité des travaux du Pacte de confiance menés en 2013, les professionnels ont souligné la nécessité de concevoir une nouvelle organisation territoriale, prenant davantage en compte les besoins des usagers et favorisant une prise en charge coordonnée et pluri-professionnelle des patients.

Le modifie le second alinéa de l’article L. 3211-1 du code de la santé publique relatif à l’hospitalisation sans consentement des patients.

Cet article figure dans le chapitre Ier du titre Ier du Livre II de la troisième partie du code qui traite du droit des personnes hospitalisées. Au terme de la rédaction actuelle, « toute personne hospitalisée ou sa famille dispose du droit de s’adresser au praticien ou à l’équipe de santé mentale, publique ou privée, de son choix tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur psychiatrique correspondant à son lieu de résidence ».

Le 1° tend à supprimer les mots « tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur psychiatrique correspondant à son lieu de résidence ». Le principe du libre choix du praticien est maintenu (53) mais il s’inscrira dans le cadre du service territorial de santé au public (STSP) organisé conjointement avec les professionnels de santé. Il s’agit de poser les conditions permettant une coopération entre acteurs pour assurer la meilleure réponse au patient en fonction de son état clinique.

Le plan psychiatrie et santé mentale 2011-2015 souligne que le risque de rupture de la capacité à demander de l’aide et à consentir fait partie intégrante de nombreux troubles. La prise en charge psychiatrique du patient doit l’amener à prendre en compte ses troubles en travaillant sur la capacité à consentir. La recherche de « l’alliance thérapeutique » constitue ainsi une modalité incontournable de la prise en charge. Il ne doit pas être fait obstacle au principe du libre-choix de la personne malade, y compris pour les personnes détenues atteintes de troubles mentaux.

Le vise à modifier par coordination l’article L. 3211-2-3 du code de la santé publique résultant de l’article premier de la loi du 5 juillet 2011 (54). Cet article prévoit la prise en charge en urgence des patients hospitalisés sans consentement. Ces dispositions concernent plus particulièrement les établissements de santé qui n’exercent pas la mission de service publique prévue par le 11° de l’article L. 6112-1 du même code. Un transfert vers un établissement habilité est ainsi organisé dans des délais adaptés à l’état de santé des patients et au plus tard sous quarante-huit heures. Il concerne :

– soit les patients hospitalisés sans consentement admis en soins psychiatriques à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent ;

– soit les patients hospitalisés sans consentement à la demande du représentant de l’État ;

– soit les personnes détenues atteintes de troubles mentaux ;

– soit les personnes déclarées pénalement irresponsables par une décision de justice « s’il est établi par une expertise psychiatrique figurant au dossier de la procédure que les troubles mentaux de l’intéressé nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public ».

L’article L. 6112-1 faisant l’objet d’une réécriture globale au terme de l’article 26 du projet de loi, l’article L. 3211-2-3 est modifié par coordination. En effet, le rétablissement d’un bloc de service public ne justifie plus la référence à la mission de service public prévue par l’article L. 6112-1. L’article L. 3211-2-3 vise désormais explicitement les types de patients pour lesquels les hôpitaux, qui n’assument pas une prise en charge, sont supposés organiser un transfert vers un établissement habilité.

Les 3° et 4° procèdent à la réécriture générale du chapitre Ier du titre II du Livre II de la troisième partie du code de la santé publique.

Le 3° intitule ce chapitre « Organisation de la santé mentale et de la psychiatrie ». Le 4° remplace les articles L. 3221-1 à L. 3221-4-1 par de nouvelles dispositions. Les articles L. 3221-5 et L. 3221-6 qui relèvent du même chapitre sont maintenus dans leur rédaction actuelle.

● L’article L. 3221-1 est désormais consacré aux modalités de mise en œuvre de la politique de santé mentale.

La politique de santé mentale se définit en fonction d’un objectif global, qui est de prévenir, traiter et prendre en charge de manière aussi complète que possible les personnes en situation de souffrance psychique et/ou présentant une pathologie psychiatrique, quelle qu’en soit la cause, en prenant en compte le contexte de vie de la personne.

Dans une logique de santé publique, elle comporte des actions de prévention, de diagnostic, de soins, de réadaptation et de réinsertion sociale. La rédaction proposée demeure sur ce point inchangée par rapport au droit actuel et traduit le souci constant d’envisager la prise en charge selon le parcours de santé et de vie des populations.

La politique de santé mentale consiste en une politique intersectorielle à laquelle contribuent les acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Les établissements de santé autorisés en psychiatrie y tiennent une place particulière. L’objectif est ainsi de clarifier la place de la psychiatrie au sein de la santé mentale ce qui permet de mieux définir les responsabilités des différents acteurs sanitaires. L’étude d’impact jointe au projet de loi souligne que « cette clarification, qui ne cantonne plus la responsabilité de la lutte contre la maladie mentale aux acteurs spécialisés de la psychiatrie, devrait également contribuer à la « déstigmatisation » de la maladie mentale ».

Psychiatrie et santé mentale

La santé mentale

Selon l’Organisation mondiale de la santé, « la santé mentale est une composante essentielle de la santé ». La Constitution de l’OMS définit la santé comme suit : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Cette définition a pour important corollaire que la santé mentale ne saurait se réduire à l’absence de troubles ou de handicaps mentaux.

La santé mentale est un état de bien-être dans lequel une personne peut se réaliser, surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et contribuer à la vie de sa communauté. Dans ce sens positif, la santé mentale est le fondement du bien-être d’un individu et du bon fonctionnement d’une communauté.

La santé mentale est déterminée par des facteurs socioéconomiques, biologiques et environnementaux.

Les politiques nationales de santé mentale ne doivent pas limiter leur champ d’action aux troubles mentaux. Il faut aussi qu’elles reconnaissent et prennent en compte les facteurs plus généraux qui favorisent la santé mentale. Il s’agit notamment d’intégrer la promotion de la santé mentale dans les politiques et programmes des secteurs publics et non gouvernementaux. Outre le secteur de la santé, il convient d’associer aussi les secteurs suivants : éducation, emploi, justice, transports, environnement, logement et protection sociale.

La psychiatrie

La psychiatrie est une discipline médicale qui prend en charge les affections psychiatriques caractérisées et les aspects pathologiques de la souffrance psychique. Elle peut comporter des spécificités lorsqu’elle s’adresse à certains âges de la vie. Ainsi pour la psychiatrie infanto-juvénile, les dimensions de repérage et de prévention sont essentielles. Elle s’inscrit dans une dimension globale du soin, incluant la prévention, le repérage des troubles et l’insertion, en partenariat étroit avec les professionnels intervenant dans le champ social, éducatif, judiciaire, médico-social et des collectivités locales.

La psychiatrie et la santé mentale sont donc deux concepts complémentaires. La psychiatrie a sa place dans l’ensemble de la santé mentale, mais avec une intensité et une technicité différente selon la nature des situations. Elle ne saurait, en tout état de cause, être tenue pour seul acteur et responsable des parcours des populations en santé mentale, en particulier depuis l’émergence, dans les années 1970, des champs social et médico-social et de leurs savoir-faire spécifiques.

Source : ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

● L’article L. 3221-2 décline précise l’articulation de la politique de santé mentale avec le service territorial de santé au public (STSP).

Elle s’inscrit ainsi dans le cadre défini par l’article 12 du projet loi relatif au STSP.

Le STSP est mis en place dans les territoires définis par les ARS conformément aux conditions prévues par l’article 38 du projet de loi. Le STSP doit permettre d’améliorer la coordination des différents acteurs de la santé en vue d’améliorer l’état de santé de la population concernée. Il repose sur des besoins définis dans le cadre d’un diagnostic partagé et dont la réponse est pluri-professionnelle. Sa mise en œuvre ressortit à l’ARS en coordination avec les autres acteurs de santé sur la base d’un projet territorial et au sein d’un outil contractuel, le contrat territorial de santé.

Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, « le renforcement de l’organisation territoriale de la santé mentale permet de poser un cadre, celui du STSP, dans lequel l’ensemble des acteurs de la prévention, du soin, de l’insertion mais plus largement l’ensemble des acteurs sociaux ainsi que les collectivités territoriales, et le cas échéant les initiatives telles que les conseils locaux de santé mentale, pourront analyser les besoins de la population, les insuffisances dans la réponse apportée et les moyens d’y répondre ».

Dans ce cadre, la place des acteurs de la psychiatrie est clarifiée. Si la psychiatrie doit participer aux actions de prévention et d’insertion, elle n’en a pas la responsabilité et il convient que chaque acteur assure les actions qui lui reviennent et relèvent de son champ de compétence.

Dans le cas particulier de la santé mentale, des contrats territoriaux sont conclus entre l’ARS et les acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux.

Le territoire peut correspondre à l’échelon départemental, ou être supra ou infra départemental. Il n’en constitue pas moins la circonscription de référence la plus proche de l’organisation départementale dont il faut rappeler qu’elle est l’échelon de référence pour les politiques de solidarité et de cohésion sociale.

Le territoire devrait permettre une meilleure coordination des acteurs entre eux afin d’éviter le double écueil de la sur spécialisation des réponses et de la segmentation de l’offre de soins d’une part, du cloisonnement entre secteurs sanitaire, social et médico-social, éducatif et judiciaire d’autre part. Le rapport précité de M. Denys Robiliard pointait ainsi la question du cloisonnement entre le sanitaire et le médico-social particulièrement importante pour la population âgée, qu’il s’agisse de troubles psychiatriques ou de troubles apparentés.

Il est enfin précisé que le territoire d’intervention des unités pour malades difficiles (UMD) ou des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) ne saurait être confondu avec celui de la mise en œuvre d’une coopération territoriale. Pour autant, ces unités ont vocation, si un projet territorial en fait un des acteurs impliqués dans la thématique traitée, à participer audit projet. L’articulation avec de telles structures dans le cadre d’un projet territorial pourrait se concevoir autour de l’amélioration des parcours des personnes souffrant de troubles psychiques et/ou en injonction de soins, en sortie de détention.

● La réforme permet également de définir la place de la psychiatrie sectorisée dans l’organisation générale de la psychiatrie, au travers des établissements qui seront désormais en charge d’une mission de psychiatrie de secteur sur un territoire donné.

Après les échelons nationaux, régionaux et territoriaux, l’article L. 3221-3 définit un échelon de proximité, le secteur. Cet article réaffirme et définit les spécificités de la psychiatrie de secteur.

Précisons d’emblée que l’aire géographique du secteur est inférieure au territoire tout en s’articulant avec les actions prévues par le projet territorial de santé. Une partie importante de la réponse aux besoins de soins des personnes, y compris en hospitalisation, peut se trouver en dehors du secteur dont elle dépend et de la zone géographique où elle réside. De nouveaux modes d’intervention différenciés selon les pathologies et les publics ciblés sont ainsi progressivement apparus rendant nécessaire la territorialisation de l’offre pour les spécificités et compétences qui ne peuvent raisonnablement prétendre être disponibles dans un secteur donné. Des modèles innovants d’organisation ont ainsi été institués tels que les équipes mobiles, les dispositifs de soins partagés avec les médecins généralistes, les consultations de psychiatrie du sujet âgé. En réponse à des particularités populationnelles, des unités spécifiques ont été érigées comme les unités dédiées aux adolescents, aux troubles anxieux et dépressifs, les unités d’immédiate post urgence ou les unités de comorbidités addictives. La mise en œuvre de techniques de soins spécifiques s’est aussi traduite par l’émergence de centres experts, de réhabilitation psycho-sociale ou remédiation cognitive.

Au terme du I de l’article L. 3221-3, la mission de la psychiatrie de secteur consiste à garantir à la population l’accès et la continuité des soins sur l’ensemble du territoire concerné, à l’hôpital comme en ambulatoire.

Trois missions sont assignées à la psychiatrie de secteur :

– la mise en place d’un recours de proximité par la mise en place d’une organisation ambulatoire en lien avec le médecin traitant ;

Votre rapporteure regrette toutefois que la coopération entre acteurs, qui constitue pourtant une dimension essentielle pour la mise en œuvre et la réussite de cette politique intersectorielle, ne figure pas expressément dans cette rédaction.

– l’accessibilité territoriale et financière des soins apportés.

L’accessibilité territoriale recouvre une double composante :

– la proximité par la mise à disposition d’équipements de consultations dans la communauté et la possibilité d’intervention au domicile, ces dispositifs ouvrant, en cas de besoin, l’accès à d’autres prises en charge adaptées (hospitalisation par exemple) ;

– la couverture intégrale du territoire national sans exception.

L’accessibilité financière est comprise comme la mise en œuvre du tarif conventionnel de secteur 1 pour les prestations de soins facturables aux patients ;

– la continuité des soins, y compris par le recours à l’hospitalisation en lien avec les autres acteurs.

Selon le rapport sur la santé mentale précité, « le secteur se devait de garantir une prise en charge globale, allant du diagnostic jusqu’à l’insertion sociale ». Or, cette mission n’a pas été réalisée complètement : faute de place dans des structures médico-sociales, de nombreux patients séjournent à l’hôpital de façon prolongée occasionnant des hospitalisations dites inadéquates. Cette situation éloigne d’autant la perspective de réinsertion et d’autonomie.

Le II de l’article L. 3221-3 précise que la mission de la psychiatrie de secteur est assurée par les établissements de santé désignés à cet effet dans les conditions définies à l’article L. 3221-4. Ils participent au service territorial de santé au public.

Votre rapporteur estime également que les particularités de la mission de psychiatrie de secteur dédiée à la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent doivent être reconnues. Leur déclinaison dans les projets d’établissement requiert en effet une prise en compte spécifique.

● L’article L. 3221-4 précise les conditions dans lesquelles la psychiatrie de secteur est organisée. Son I précise que le directeur général de l’ARS désigne à cet effet les établissements de santé assurant la psychiatrie de secteur et la zone de couverture de leur intervention.

Ces établissements de santé sont tout d’abord désignés parmi ceux autorisés en psychiatrie et assurant le service public hospitalier tel que refondé à l’article 26 du présent projet de loi.

L’article L. 6112-2, dont la rédaction est issue de l’article 26, définit certaines garanties. Le service public hospitalier doit ainsi :

– délivrer un accueil et un délai de prise en charge adapté au patient et à son état de santé ;

– assurer une permanence de l’accueil et de la prise en charge ;

– assurer l’égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité ;

– garantir l’absence de dépassements d’honoraires.

On dénombre à ce jour 562 établissements, 249 publics, 136 établissements privés à but non lucratif et 177 privés à but commercial, autorisés à exercer une activité de psychiatrie. Il n’est pas possible d’évaluer les ajustements qui pourraient se produire sur le nombre et sur cette répartition, qui peut dépendre de stratégies d’établissements ou de groupe dans l’ensemble des secteurs, ainsi que des décisions prévues par les projets régionaux de santé.

La zone géographique dans laquelle l’établissement de santé exerce cette mission de service public hospitalier sera par ailleurs définie par l’ARS.

Il est désormais précisé que l’affectation des zones d’intervention est effectuée de telle sorte que la région soit couverte.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, le directeur général de l’ARS devrait affecter une zone d’intervention aux établissements chargés du service public et de la psychiatrie de secteur en fonction de critères spécifiques. Rien n’empêche que ce zonage fasse l’objet d’une discussion stratégique, par exemple dans le cadre de la définition du projet régional de santé, avec les acteurs concernés, dès lors que l’intégralité de la région se trouve couverte ni qu’il soit revu à l’occasion de la réalisation de diagnostic et/ou de projet territorial.

La zone d’intervention devra se définir par la liste des communes couvertes pour la mission de psychiatrie de secteur confiée à l’établissement. Elle sera inscrite dans le contrat d’objectifs et de moyens de l’établissement.

Enfin, il n’est pas prévu de donner un cadre réglementaire pour définir les critères qui seront susceptibles de varier selon la géographie des territoires. Ceux-ci peuvent en effet obéir à une logique géographique et/ou démographique, et évoluer au regard de l’offre de soins existante ou des stratégies des établissements.

Cela étant dit, devrait aussi être précisée la spécificité des personnes en situation de précarité dont les soins en matière psychiatrique nécessitent une organisation adaptée.

Le II de l’article L. 3221-4 dispose que les établissements désignés déterminent les modalités d’organisation de la psychiatrie de secteur. Ces orientations seront précisées soit dans le projet d’établissement pour les établissements publics soit dans les documents fixant la politique médicale des pour les établissements de santé privés.

Le projet d’établissement

Le projet d’établissement mentionné à l’article L. 6143-2 du code de la santé publique définit, notamment sur la base du projet médical, la politique générale de l’établissement. Il prend en compte les objectifs de formation et de recherche définis conjointement avec l’université dans la convention. Il comporte un projet de prise en charge des patients en cohérence avec le projet médical et le projet de soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, ainsi qu’un projet social. Il est établi pour une durée maximale de cinq ans. Il peut être révisé avant ce terme.

La rédaction actuelle ne prévoit pas de texte réglementaire d’application, laissant les ARS s’organiser selon les spécificités régionales. Néanmoins, le cadre de la loi ainsi posé permettra d’écrire des décrets sur les conditions d’autorisation de la psychiatrie (décrets en conseil d’État sur les conditions d’implantation et décrets simples sur les conditions de fonctionnement). Selon les précisions apportées à votre rapporteure, ces textes définiront des conditions applicables à l’ensemble des établissements autorisés en psychiatrie mais également des conditions particulières pour certaines missions ou types de prise en charge.

● L’article L. 3221-4-1 prévoit, dans le droit fil du plan psychiatrie et santé, la mission particulière remplie par l’ARS dans la politique de santé mentale.

Elle veille ainsi à la qualité et à la coordination des actions de soutien et d’accompagnement des familles et des aidants des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques. Ce rôle s’exerce à l’égard des établissements de santé assurant la psychiatrie de secteur et des associations ayant une activité dans le domaine de la santé et de la prise en charge des malades agréées en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique.

On notera que cet article existe d’ores et déjà dans le code de la santé publique et n’a pas lieu d’être impacté par le projet de texte. Une erreur de rédaction a conduit à ne faire s’appliquer ces dispositions qu’aux établissements assurant la mission de psychiatrie de secteur alors que dans la version actuelle du code qui doit être maintenue, elle s’applique à l’ensemble des établissements autorisés en psychiatrie. Un amendement se révèle à cet égard nécessaire.

La notion d’aidant

Selon le plan psychiatrie et santé mentale 2011-2015, l’aidant peut être un membre de la famille en application de l’article R. 245-7 du code de l’action sociale et des familles, un ami, un groupe, ou encore la personne de confiance que la personne souffrante désigne en application de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique. Les aidants peuvent être aussi les personnes qui ont vécu et surmonté un problème de santé mentale. De nombreuses associations d’aidants spécialisées et agréées proposent des services et participent à ce titre à la représentation des usagers du système de soins.

Les 5°, 6° et 7° procèdent à la réécriture générale du chapitre II du titre II du Livre II de la troisième partie du code de la santé publique.

Le 5° intitule ce chapitre « Établissements de santé chargés d’assurer les soins psychiatriques sans consentement ». Il regroupera désormais le nouvel article L. 3222-1 dans sa rédaction issue du 6° ainsi que les articles L.3222-2 à L. 3222-7.

Le 6° procède à la rédaction globale de l’article L. 3222-1. La nouvelle rédaction n’emporte pas de modifications majeures.

Elle maintient le principe de la désignation par le directeur général de l’ARS, après avis du représentant de l’État dans le département, des établissements autorisés en psychiatrie chargés d’assurer les soins psychiatriques sans consentement. L’article L. 6112-1 faisant l’objet d’une réécriture globale au terme de l’article 26 du présent projet de loi, l’article L. 3222-1 est modifié par coordination. En effet, le rétablissement d’un bloc de service public ne justifie plus la référence à la mission de service public prévue par l’article L. 6112-1. L’article L. 3222-1 vise désormais explicitement les types de patients pour lesquels les hôpitaux sont autorisés à effectuer des soins sans consentement.

La rédaction maintient également le principe du maintien de la définition de la zone géographique applicable aux établissements concernés dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens.

Elle actualise toutefois la question des moyens mis en œuvre pour l’application de ces activités en tenant compte des dispositions portées par le présent projet de loi. Les modalités de coordination avec la psychiatrie de secteur doivent ainsi être précisées dans le projet d’établissement pour les établissements publics et les documents fixant la politique médicale pour les établissements privés.

La rédaction proposée pour l’article L. 3222-1 complète par ailleurs le dispositif en prévoyant que les établissements de santé privés, désignés pour assurer des soins psychiatriques sans consentement mais ne participant pas au secteur public hospitalier, doivent garantir aux patients les principes mentionnés au I de l’article L. 6112-2 dans sa rédaction issue de l’article 26 du projet de loi.

Ces établissements privés devront ainsi délivrer un accueil et un délai de prise en charge adapté au patient et à son état de santé, assurer une permanence de l’accueil et de la prise en charge, assurer l’égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité et garantir l’absence de dépassements d’honoraires.

Le 7° procède à la renumérotation de l’article L. 3222-1-1 A qui devient un nouvel article L. 3222-7.

Par coordination, les 8° et 9° modifient respectivement les articles L. 3311-1 et L. 6143-2 du code de la santé publique.

*

Outre six amendements rédactionnels, la Commission a adopté quatre amendements modifiant sensiblement le dispositif de cet article.

L’organisation de la psychiatrie de secteur repose sur une mission de proximité. Celle-ci gagnera à être mieux remplie si le texte prévoit explicitement la coopération entre acteurs libéraux et hospitaliers. Cette dimension est essentielle pour la mise en œuvre et la réussite de cette politique décloisonnée.

Par ailleurs, l’ensemble des personnes auditionnées a fait part de la nécessité de préserver l’organisation actuelle de santé mentale. Les conseils locaux de santé mentale constituent à cet égard les instances idoines de concertation pour la mise en place des actions de prévention, de soins et d’insertion en termes de santé mentale et de psychiatrie. Il a ainsi été proposé de maintenir la situation existante en préservant les conseils locaux de santé mentale. Pour tenir compte de la diversité des territoires, le dispositif adopté par la Commission prévoit la mise en place d’une commission spécialisée de santé mentale au sein des conseils territoriaux de santé.

La place de la psychiatrie infanto-juvénile au sein de la psychiatrie de secteur gagnerait à être davantage mise en lumière dans la mesure où la prise en charge et l’organisation nécessitent une organisation particulière. La Commission a suivi la recommandation de la rapporteure en adoptant un amendement sur ce point.

Enfin, une place spécifique doit être réservée aux personnes en situation de précarité dont les soins en matière psychiatrique nécessitent une organisation adaptée. Un amendement a été adopté en ce sens.

*

M. Arnaud Robinet. Avec l’examen de l’article 13 du projet de loi, nous abordons la partie concernant la psychiatrie. L’Assemblée nationale a créé il y a plusieurs mois une mission d’information sur la psychiatrie, présidée par M. Denys Robiliard, mais nous n’avons jamais eu connaissance du rapport définitif des travaux de cette mission.

M. Denys Robiliard. Monsieur Robinet, la mission a bien adopté un rapport complet ; la Commission des affaires sociales l’a examiné et a décidé de le publier à l’unanimité.

La Commission est saisie de l’amendement AS1254 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Amendement défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour le titre II. Avis défavorable. La prise en charge des patients faisant l’objet de soins psychiatriques s’effectue dans le cadre des communautés professionnelles de territoire et des outils définis à l’article 38 du projet de loi, que nous venons d’adopter.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS669 de la rapporteure.

La Commission aborde l’amendement AS1615 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Amendement défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS670 de la rapporteure.

La Commission en vient à l’amendement AS1617 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Amendement défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS204 de M. Éric Alauzet et AS1618 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Roumegas. La santé mentale et la psychiatrie recouvrent deux réalités différentes. Il importe donc de mentionner au sixième alinéa la politique psychiatrique aux côtés de celle de la santé mentale.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1618 est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. J’émets un avis défavorable à l’adoption de ces amendements qui créeraient une confusion ; la rédaction du projet de loi consiste en premier lieu à définir la politique de santé mentale à laquelle concourt la psychiatrie.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle étudie l’amendement AS1315 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Le plan français de psychiatrie et de santé mentale pour les années 2011 à 2015 s’est inscrit dans le cadre du pacte européen qui reconnaît notamment que la santé mentale est un droit de l’Homme. Il vise à améliorer les réponses apportées par le système de santé aux troubles mentaux, dont l’Organisation mondiale de la santé (OMS) rappelle qu’ils contribuent fortement à la morbidité et à la mortalité prématurée. La santé mentale doit devenir une priorité des politiques de santé ; le plan de psychiatrie et de santé mentale poursuit l’objectif de donner à tous les Français une juste compréhension des enjeux d’une politique ambitieuse de santé mentale et d’offrir un cadre commun d’action pour l’ensemble des acteurs engagés dans la lutte contre les troubles psychiques.

Au terme de la mise en œuvre de ce plan, la Nation devra compter sur toutes ses ressources publiques et privées pour pouvoir satisfaire les besoins de la population. Dans cette optique, il y a lieu que la loi relative à la santé confère une portée législative aux textes qui encadrent les activités de psychiatrie ; cela permettra aux structures hospitalières publiques et privées de répondre aux attentes de la population. Tel est l’objet de mon amendement AS1315.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. L’organisation de la psychiatrie et de la santé mentale s’inscrit dans le cadre territorial qui mettra en œuvre des parcours dédiés.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS560 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Dans le cadre du nouveau service territorial de santé au public et dans le respect des objectifs du plan régional de santé et du projet territorial de santé, le directeur général de l’ARS, après concertation avec les élus des collectivités territoriales et des intercommunalités, et avec les acteurs concernés, met en œuvre une organisation territoriale des parcours en santé mentale incluant la prévention, les soins et la réadaptation. Ce système s’appuie sur les conseils locaux de santé mentale qui rassemblent les élus, des psychiatres de secteur, des usagers ainsi que tous les professionnels sanitaires, sociaux et médico-sociaux, mais aussi les autres acteurs locaux. Ces derniers s’avèrent indispensables pour assurer la qualité et la sécurité des parcours de soins et de vie des personnes souffrant de troubles psychiques, ainsi que leur pleine intégration dans la cité. J’insiste sur l’importance de cet amendement.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Monsieur Door, je vous demande de retirer votre amendement ; si vous le mainteniez, j’émettrais un avis défavorable à son adoption car la rédaction proposée n’est plus cohérente avec le texte depuis que nous avons voté l’amendement instaurant les communautés professionnelles de territoire. Cependant, je partage votre volonté de préserver le dispositif existant qui repose sur le rôle essentiel des conseils locaux de santé mentale. J’ai déposé un amendement allant dans ce sens et sur lequel nous pourrions peut-être nous retrouver.

L’amendement est retiré.

La Commission aborde l’amendement AS1619 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Amendement défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. Je m’interroge sur le terme d’« accessibilité » lorsqu’il est appliqué aux parcours de soins et de vie.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS206 de M. Éric Alauzet.

M. Jean-Louis Roumegas. Amendement défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine ensuite les amendements identiques AS773 de Mme Jacqueline Fraysse et AS1039 de M. Denys Robiliard.

Mme Jacqueline Fraysse. Les conseils locaux de santé mentale sont des lieux de concertation et de coordination entre les services publics de psychiatrie, les élus locaux d’un territoire, les usagers et les aidants. Il apparaît donc tout à fait opportun de les consulter à propos des contrats territoriaux de santé. Tel est l’objet de l’amendement AS773.

M. Denys Robiliard. L’amendement AS1039 est identique. La consultation permettrait aussi aux acteurs de s’approprier les futurs contrats territoriaux de santé. Je crains simplement que ces amendements ne soient pas cohérents avec le nouvel article 38.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Effectivement, il semblerait plus judicieux de les retirer pour les retravailler en vue de la séance publique.

Mme Jacqueline Fraysse. Soit. Je note tout de même que l’article 38 généralise les conseils locaux de santé mentale.

Les amendements sont retirés.

La Commission en vient à l’amendement AS1042 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Les personnes que nous avons auditionnées ont formulé le souhait que l’organisation actuelle de santé mentale soit préservée, et en particulier que soient maintenus les conseils locaux de santé mentale, instances de concertation et de suivi des actions de prévention, de soins et d’insertion en santé mentale et en psychiatrie qui ont prouvé leur efficacité.

Je propose donc de conserver ces instances et d’installer une commission spécialisée de santé mentale au sein des conseils territoriaux de santé.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement AS1620 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’amendement est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je vous suggère de le retirer afin de parvenir à une rédaction plus appropriée, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Dominique Orliac. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1046 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. La coordination entre les établissements de santé et la médecine de ville par l’intermédiaire du médecin traitant est nécessaire à une bonne prise en charge en santé mentale et en psychiatrie. En effet, elle associe des équipes pluriprofessionnelles de secteur, seules à même de garantir l’approche multidimensionnelle de la prise en charge des parcours des personnes souffrant de troubles mentaux, et un médecin traitant qui occupe une place centrale dans cette prise en charge.

Tel est l’objet de cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement AS1621 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable, car les termes « sectorielles, intersectorielles ou spécifiques » ne font pas partie du vocabulaire usité.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1045 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement précise le dispositif relatif à l’organisation et au fonctionnement de la psychiatrie de secteur. Il tend à reconnaître les particularités de la mission de la psychiatrie de secteur dédiée à la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, dont la déclinaison dans les projets d’établissement requiert une prise en considération spécifique.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1622 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS506 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

L’amendement s’insère mal dans le dispositif puisqu’il parle d’associer les professionnels de santé à la conclusion des contrats alors que l’alinéa 13 vise la désignation par l’ARS de l’établissement responsable de la psychiatrie de secteur, ainsi que sa zone d’intervention.

En outre, dans l’organisation actuelle du système de santé, ce sont les professionnels de santé qui contractent avec les autres acteurs, non les ordres professionnels.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS1623 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Les précisions apportées ne me semblent pas toutes relever du champ de la loi, mais du règlement pour certaines, et, pour d’autres, de mesures d’organisation interne ou qui doivent être définies en lien avec les ARS.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle aborde alors l’amendement AS1044 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement précise la place qui doit être réservée aux personnes en situation de précarité dont les soins en matière psychiatrique nécessitent une organisation adaptée.

Cet aspect avait fait l’objet d’un développement particulier dans le rapport sur la santé mentale de notre collègue Denys Robiliard, que je tiens à saluer.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS1624 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement me paraît satisfait par celui sur la psychiatrie infanto-juvénile que nous avons adopté il y a quelques instants.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS926 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Annie Le Houerou. Pour mieux articuler les interventions sanitaires et sociales et favoriser l’insertion en milieu ordinaire des personnes souffrant de troubles psychiques, il est nécessaire de prévoir une organisation géographique des activités de psychiatrie de secteur et d’accompagnement médicosocial et social, fondée sur des territoires de proximité permettant des coopérations entre les acteurs.

Une commission départementale est intégrée au dispositif afin de garantir le fonctionnement du secteur de santé mentale et des conseils locaux de santé mentale. Cet amendement permet aux acteurs de s’organiser en fonction des contextes locaux.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement est intéressant en ce qu’il définit une logique organisationnelle et favorise la coopération, mais il laisse de côté l’offre de psychiatrie non sectorisée et le médecin généraliste.

Je vous prie donc de bien vouloir le retirer, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient aux amendements identiques AS671 de la rapporteure et AS1625 de Mme Dominique Orliac.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement AS671 est rédactionnel.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1625 est identique.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS673 de la rapporteure.

Elle aborde ensuite l’amendement AS1626 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je ne suis pas certaine que la présence du représentant de l’État soit nécessaire s’agissant de l’organisation des soins.

Je vous suggère donc de retirer votre amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Dominique Orliac. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS674 et AS675 de la rapporteure.

Enfin, elle adopte l’article 13 modifié.

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Article 13 bis
(art. L. 3211-12-1 du code de la santé publique)

Modification du champ du contrôle judiciaire dans le cadre de l’hospitalisation sans consentement

Cet article vise à homogénéiser le traitement des situations des personnes faisant l’objet d’une hospitalisation sans consentement. La poursuite de l’hospitalisation complète est soumise au contrôle du juge des libertés et de la détention qui doit statuer dans un délai de six mois à compter de toute décision judiciaire prononcée à la suite d’un différend entre deux psychiatres et le préfet pour les patients relevant du droit commun de la levée des soins.

Il tend ainsi à prévoir le report de ce délai en cas de décision consécutive au règlement des différends.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1186 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement tend à apporter une précision aux articles du code de la santé publique issus de la loi du 5 juillet 2011 modifiée, qui traitent des soins sans consentement. Il convient en effet de faire courir dans tous les cas de figure le délai de six mois imparti au juge des libertés et de la détention pour se prononcer après une décision de justice concernant l’irresponsabilité d’un malade mental.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

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Article 13 ter
(art. L. 3211-12-2 du code de la santé publique)

Clarification du lieu de l’audience en cas de transfert de la personne faisant l’objet de soins psychiatriques postérieurement à la saisine judiciaire

Cet article a pour objet de clarifier les dispositions de l’article L. 3211-12-2 du code de la santé publique sur le lieu de l’audience en cas de transfert de la personne faisant l’objet de soins.

*

La Commission aborde deux amendements identiques, les amendements AS1199 de M. Robiliard et AS1662 du Gouvernement.

M. Denys Robiliard. Il arrive que le transfert d’un patient dans un nouvel établissement intervienne alors que le juge des libertés et de la détention a été saisi par le directeur de l’établissement ou par le préfet en vue du contrôle qu’il doit exercer dans les douze jours suivant la décision d’admission en soins. Le juge compétent est-il alors celui dans le ressort duquel se situe l’établissement où le patient se trouvait au moment de la saisine, ou celui dont dépend le nouvel établissement d’accueil ? Compte tenu de la brièveté des délais, je propose que le juge initialement saisi reste compétent, même en cas de transfert.

Mme la ministre. L’amendement AS1662 est identique.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte les amendements.

Article 13 quater
Encadrement des pratiques de placement
en chambre d’isolement et de contention

Cet article affirme le caractère de dernier recours que devraient avoir isolement et contention pour répondre à l’importance croissante du recours à l’isolement et à la contention dans les services psychiatriques des hôpitaux généraux et dans les établissements publics de santé mentale. Il encadre ces mesures et prévoit un registre accessible aux tiers.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1467 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. L’isolement et la contention des patients des établissements publics de santé mentale qui font l’objet de soins sous contrainte sont des pratiques difficiles à chiffrer. En effet, même si elles font l’objet d’une entrée dans le RIMP (recueil d’informations médicalisées en psychiatrie), on a du mal à en suivre l’évolution. Lors des travaux de la mission d’information, il nous a toutefois semblé que ces deux pratiques étaient en expansion. M. Delarue, ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous a fait observer que l’on y recourait de manière très diverse selon les hôpitaux, voire selon les différents services d’un même hôpital.

En tout état de cause, elles ne devraient être employées qu’en dernier recours. Pour y veiller, il convient d’instituer dans chaque établissement un registre permettant d’en suivre l’utilisation et qui devrait être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au contrôleur général des lieux de privation de liberté, ou à ses délégués, ainsi qu’aux parlementaires, puisque ceux-ci peuvent désormais visiter les hôpitaux psychiatriques.

Enfin, ces pratiques devraient faire l’objet dans chaque établissement d’un rapport annuel transmis à la commission des usagers et au conseil de surveillance.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement, qui fait suite aux travaux de la mission d’information que vous avez conduite, monsieur Robiliard, précise bien le cadre du placement en chambre d’isolement et de la contention. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Article 13 quinquies
Rapport portant sur l’infirmerie psychiatrique
de la préfecture de police de Paris

Cet article prévoit à la remise par le Gouvernement d’un rapport consacré à l’organisation de l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris, notamment au regard de la réglementation en matière de soins sans consentement.

*

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement AS1255 de Mme Dominique Orliac.

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Article 14
(art. L. 1431-2, L. 6327-1 [nouveau], L. 6327-2 [nouveau]
et L. 6327-3 [nouveau] du code de la santé publique)

Mission d’appui aux professionnels pour la coordination des parcours de santé complexes

Cet article vise à mettre en place un service d’appui à la coordination des parcours complexes à destination des professionnels de santé. Piloté par les agences régionales de santé, ce service est institué en collaboration avec les collectivités territoriales, l’assurance maladie et les autres acteurs du territoire de santé.

I. LA COORDINATION DES PARCOURS DE SANTÉ COMPLEXES : UNE NÉCESSITÉ MÉDICALE ET SOCIALE

1.  Un soutien au médecin de premier recours

La loi place le médecin généraliste de premier recours au centre de la coordination des soins. Porte d’entrée dans le système de santé, le médecin de premier recours joue un rôle éminent dans la prévention, le dépistage, le diagnostic et le traitement des maladies. Il assure le suivi et la coordination de la prise en charge des patients. Parmi les missions qui lui sont confiées, figure la nécessité « d’orienter ses patients, selon leurs besoins, dans le système de soins et le secteur médico-social » et de « s’assurer de la coordination des soins nécessaire à ses patients » (55).

Selon, l’article L. 1411-11 du code de la santé publique, les soins comprennent :

– la prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement et le suivi des patients ;

– la dispensation et l’administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que le conseil pharmaceutique ;

– l’orientation dans le système de soins et le secteur médico-social ;

– l’éducation pour la santé.

Dans la grande majorité des cas, l’expertise nécessaire à une bonne orientation dans le système est directement fournie par le médecin généraliste de premier recours. Toutefois, s’agissant des patients en situation complexe nécessitant l’intervention de multiples intervenants des secteurs sanitaire, social et médico-social, le médecin généraliste de premier recours peut avoir besoin d’un appui. Ce dernier doit notamment lui permettre de mieux évaluer la situation du patient et de mobiliser l’ensemble des intervenants afin de garantir un parcours de soins continu et coordonné.

Dans son rapport daté de 2011 (56), le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) avait identifié ces besoins dans le cas spécifique de la prise en charge des personnes âgées afin :

– d’élaborer un diagnostic sur les besoins d’aménagement du domicile, en prévention notamment des risques de chute ;

– d’obtenir « un avis expert ou une évaluation gériatrique spécialisée, permettant d’améliorer le mode de recours aux soins hospitaliers et notamment les hospitalisations injustifiées ou les admissions par les services d’urgences » ;

– de disposer d’un diagnostic des besoins d’auxiliaires de vie ;

– et de bénéficier d’un suivi de la prise en charge globale de la personne à domicile (observance des traitements et analyses prescrits) et de la bonne coordination des différents intervenants soignants et sociaux.

Le HCAAM avait notamment relevé la pertinence de services fournie par une structure d’appui tels que les réseaux gérontologiques, maison de santé pluridisciplinaire, centres locaux d’information et de communication (CLIC), plate-forme d’appui ou de service…

Au-delà des personnes âgées, le besoin de structure d’appui apparaît comme une nécessité pour les patients en situation complexe.

2.  La notion de parcours complexe

Selon un guide établi par la direction générale de l’offre de soins (DGOS) (57), la situation complexe des patients est appréhendée au regard de la complexité médicale et de la complexité psycho-sociale :

– la complexité médicale consiste en l’association de plusieurs pathologies, se caractérise par un degré de sévérité des pathologies ou par des hospitalisations répétées dans l’année pour la même problématique ;

– la complexité psycho-sociale se caractérise par l’isolement ou la vulnérabilité sociale, des pratiques de santé inadaptées ou l’intrication de plusieurs pathologies et d’une situation de dépendance, associée à la nécessité de faire intervenir plusieurs acteurs.

Il s’agit en résumé des « situations appelant une diversité d’intervenants, et auxquelles le médecin de premier recours ne peut répondre avec ses propres moyens ». Les patients concernés sont atteints « d’affections chroniques sévères, avec comorbidités, et [souffrent de] problèmes sociaux ou problèmes de dépendance surajoutés ».

3.  Des structures de coordination multiples

Plusieurs initiatives visant à une meilleure coordination des parcours ont déjà été prises.

● Des acteurs intègrent ainsi dans leur activité une fonction de coordination des soins de proximité. Dans le guide précité, la DGOS relève que cette mission est d’ores et déjà assurée par les maisons de santé, les centre de santé, les services d’hospitalisation à domicile, les centres locaux d’information et de coordination gérontologique (CLIC) ou encore les établissements de santé.

Les CLIC

Les CLIC ressortissent aux services sociaux et médico-sociaux mentionnés au 11° de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles. Ils consistent en des guichets d’accueil, de conseil, d’orientation des personnes âgées et de prise en charge des situations complexes qu’elles peuvent rencontrer.

En fonction du niveau de label, les CLIC sont amenés à accomplir une ou plusieurs missions :

– informer, orienter, faciliter les démarches, fédérer les acteurs locaux ;

– évaluer les besoins, élaborer un plan d’accompagnement, ou un plan d’intervention ;

– assurer le suivi du plan d’aide, en lien avec les intervenants extérieurs, coordonner.

Selon le dernier rapport de l’IGAS (58), on dénombre 592 CLIC labellisés en 2012. Les porteurs sont des associations, des centres communaux d’action sociale, des collectivités territoriales ou des établissements hospitaliers.

● Des organisations ad hoc ont également été constituées pour renforcer l’intégration des interventions des acteurs autour des patients. Tel est l’objet des maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer (MAIA) dont la mission, prévue par l’article L. 113-3 du code de l’action sociale et des familles, consiste à renforcer l’articulation des intervenants des champs sanitaire, social et médico-social autour de la personne en perte d’autonomie fonctionnelle et de ses aidants.

Selon le dernier rapport de l’IGAS, on dénombre 202 MAIA en 2013. Pour 2014, l’objectif de 252 MAIA est recherché.

● Plus récemment, le dispositif PAERPA (59) constitue une forme plus intégrée de parcours de santé centré sur les personnes âgées.

En partant des besoins de la personne et de ses aidants, les actions visent ainsi à mieux coordonner les multiples intervenants en ville, à l’hôpital, ou dans le secteur médico-social. Les professionnels de santé en ville s’organisent pour éviter un recours excessif à l’hospitalisation, bien souvent dommageable pour l’autonomie des personnes âgées.

Ce dispositif est actuellement expérimenté par neuf agences régionales de santé (ARS) sur la base d’un cahier des charges national. Il tend à fluidifier le parcours des personnes âgées de plus de 75 ans en développant la coordination des acteurs à un double niveau.

Il est par ailleurs construit autour d’une coordination clinique de proximité rassemblant le médecin traitant, l’infirmier, le pharmacien, et si nécessaire d’autres professionnels de santé (masseur-kinésithérapeute, professionnel intervenant à domicile). Cette coordination s’appuie sur un outil spécifique, le plan personnalisé de santé (PPS) intégrant les logiques sanitaires et sociales, et prévoyant un dispositif de suivi des personnes prises en charge.

Il consiste également en une coordination territoriale d’appui portée par une structure existante (MAIA, réseau, CLIC…), qui assure le double rôle d’aide au suivi des patients (notamment dans son volet social) et de plate-forme d’information et d’appui auprès des professionnels, des personnes âgées et de leurs aidants. Cette coordination territoriale a pour objet d’assurer le lien et la cohérence entre les dispositifs existants et de formaliser le travail en commun des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux sur un territoire donné.

Territoires des projets pilotes PAERPA retenus par la Ministre en 2013-2014

Cinq premiers territoires ont intégré la démarche PAERPA en septembre 2013 :

– Centre (territoire du Lochois) ;

– Ile-de-France (9e, 10e et 19e arrondissements de Paris) ;

– Lorraine (territoire du Grand Nancy) ;

– Midi-Pyrénées (territoire des Hautes-Pyrénées) ;

– Pays de la Loire (territoire de la Mayenne).

Quatre territoires retenus par la Ministre en mai 2013 ont rejoint l’expérimentation en janvier 2014 :

– Aquitaine (territoire de Bordeaux) ;

– Limousin (territoire corrézien) ;

– Nord-Pas-de-Calais (territoire du Valenciennois-Quercitain) ;

– Bourgogne (Bourgogne Nivernaise).

Source : ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

II. LA MISE EN PLACE DE PLATEFORMES D’APPUI AUX PROFESSIONNELS DE SANTÉ POUR LA COORDINATION DES PARCOURS COMPLEXES

Cet article consiste précisément à donner une base législative au concept de plateforme territoriale d’appui développé dans le cadre des expérimentations PAERPA

Le créé un nouveau chapitre VII au sein du Titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique. Intitulé « mission d’appui aux professionnels pour la coordination des parcours de santé complexes », il est composé de trois articles L. 6327-1 à L. 6327-3.

● L’article L. 6327-1 définit les missions des plateformes d’appui aux professionnels. Il donne compétence aux agences régionales de santé pour organiser l’appui aux professionnels, exerçant surtout des soins de premier recours, assurant une prise en charge des patients :

– relevant de parcours complexes ;

– pour lesquels l’intervention de plusieurs catégories de professionnels de santé, sociaux ou médico-sociaux est nécessaire en raison de leur état de santé ou de leur situation sociale.

Il appartient aux ARS d’organiser l’accès aux soins de premier recours comme le rappelle l’article L. 1411-11 du code de la santé publique. Comme le souligne un récent rapport de l’IGAS « Évaluation de la coordination de l’appui aux soins » précité, les ARS devront « impulser une dynamique de développement des coordinations » et établir un dispositif en cohérence avec les spécificités territoriales.

Cet appui est décliné dans les 1° à 3° de l’article :

– l’évaluation des besoins des professionnels et l’identification des ressources ;

– l’apport d’information pour la coordination des parcours ;

– la contribution à l’orientation des patients.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, les ARS pourraient organiser leur appui selon une approche transversale. En effet, les plateformes territoriales d’appui englobant le parcours du patient dans son ensemble (sanitaire, médico-sociale, social), il convient que la personne/l’équipe en charge des plateformes travaille de manière étroite avec l’ensemble des équipes en charge des dispositifs de coordination (MAIA, réseaux) et des expérimentations parcours (PAERPA) au sein de l’ARS. Toutefois, l’autonomie d’organisation des ARS étant la règle, les dispositifs seront nécessairement différenciés en fonction des enjeux et des ressources régionaux. Un soutien de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) serait éventuellement envisagé en 2016 pour accompagner les ARS dans ce dispositif.

Les plateformes territoriales d’appui feront enfin l’objet d’un diagnostic, animé par l’ARS, en concertation avec les acteurs du premier recours, les acteurs de la coordination et les usagers. Il permettra d’identifier les ressources, les points de rupture et les besoins des professionnels en matière d’appui à la coordination. Ce diagnostic sera fait en interaction avec le diagnostic du projet régional de santé et celui du service territorial de santé au public : il couvrira un périmètre plus restreint, celui de l’appui à la coordination des parcours complexes.

● L’article L. 6327-2 précise le cadre des missions d’appui. Elle peut être créée par la voie conventionnelle entre l’ARS et d’autres acteurs. En tout état de cause, il ne s’agit ni d’un acteur nouveau, ni d’une nouvelle structure. Elle repose à la fois sur des financeurs (ARS, assurance maladie, collectivités territoriales) et des acteurs déjà existants. Cette notion est à dessein très large et couvre les acteurs des secteurs sanitaire, social ou médico-social :

– des acteurs de la coordination de parcours : CLIC, réseaux de santé, MAIA… ;

– des structures de soins primaires (maisons de santé pluri professionnelles, centres de santé…) ;

– des structures sanitaires, sociales ou médico-sociales : établissements et services de santé, établissements médico-sociaux, services d’hospitalisation à domicile…

Les structures de coordination existantes

Plusieurs acteurs intègrent dans leur activité une fonction de coordination des soins de proximité, notamment :

– les réseaux de santé, au nombre de 632 en 2013 ;

– les CLIC, au nombre de 592 en 2012 ;

– les MAIA, au nombre de 148 en 2013 ;

Parmi ces acteurs, ce sont les MAIA dont les caractéristiques semblent les mieux adaptées au déploiement des plateformes telles qu’envisagées par le projet de loi.

Les structures d’exercice coordonné (maisons de santé, centres de santé) peuvent aussi remplir des missions de coordination, même si ce ne sont pas leurs missions principales : on dénombre 600 maisons de santé et 1 750 centres de santé en 2014.

Source : ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Des expérimentations en cours ont également pour objectif de coordonner les parcours des patients : le dispositif PAERPA dans les 9 régions pilotes rappelées ci-dessus et le dispositif territoire de soins numérique dans 5 régions (Île-de-France, Océan Indien, Rhône-Alpes, Aquitaine, Bourgogne), tous deux pilotés par le ministère chargé de la santé.

Au regard de ces choix, les ARS privilégieront un opérateur ayant une expertise de la coordination d’appui sur le territoire, avec une connaissance des ressources sanitaire, social et médico-social sur le territoire.

La convention devra aussi préciser les missions, les engagements et les apports des signataires.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, « l’apport des signataires s’entend des moyens matériels consacrés au financement de la plateforme, sous la forme d’apports à proprement parler, de prêts, de dons, de mises à disposition, etc. ».

La plateforme sera financée par le fonds d’intervention régional (FIR). Le financement sera octroyé dans le cadre d’un contrat pluriannuel d’objectif et de moyens (CPOM), signé avec l’ARS. Le cas échéant, d’autres financeurs (collectivités territoriales notamment) pourront contribuer à son fonctionnement.

L’objet de cette réforme consiste à mieux structurer les organisations existantes dont la redondance nuit à une coordination optimale de la prise en charge des patients. Les conventionnements permettront d’améliorer les articulations entre professionnels, de modifier les périmètres d’intervention des différents acteurs ou d’élargir le champ d’intervention des structures existantes.

L’étude d’impact précise que la plateforme constituée devra, dans le trimestre suivant sa constitution effective, proposer à l’ARS une première feuille de route détaillant les missions ou fonctions exercées par chaque acteur du territoire, les problèmes rencontrés par les membres de la plateforme et les moyens permettant d’y répondre.

Une cible d’environ 130 plates-formes est définie. Leur mise en place est associée à un objectif d’une économie pour l’ONDAM sous 5 ans.

Les économies mesurées ont été évaluées sur la base des hospitalisations et ré-hospitalisations évitées, ainsi que sur la base de la diminution des erreurs d’orientation dans le parcours de santé (passages indus aux urgences, examens conduits en double, etc.).

Elle se traduira par un coût initial d’investissement de 3,9 millions d’euros, imputable notamment au déploiement des systèmes d’information, et un coût de fonctionnement de 6,5 millions d’euros. Le financement des frais de fonctionnement est assuré par un redéploiement des crédits affectés aux réseaux de soins.

Les frais d’investissement s’appuieront d’abord sur les apports des 2 expérimentations en cours sur le territoire : PAERPA et Territoire de soins numérique. Les plateformes pourront ainsi s’appuyer et capitaliser sur ces systèmes d’informations. Le financement de l’investissement pourra par ailleurs s’effectuer par redéploiement des crédits FIR.

● Enfin, l’article L. 6327-3 dispose que les modalités d’application du chapitre VII seront fixées par décret. D’après les informations transmises à votre rapporteure, le décret prévoit d’inscrire les modalités de gouvernance de la plateforme, sa nature juridique, les territoires concernés par les plateformes, la méthode de guichet intégré à employer, les aspects relatifs aux systèmes d’information, les modalités de partage de données au sein des plateformes, les modalités d’évaluation des plateformes par les ARS ainsi l’articulation avec le service territorial de santé au public.

Le complète l’article L. 1431-2 relatif aux compétences des ARS. Aux termes du 2° de cet article, les ARS ont pour objectif de réguler, d’orienter et d’organiser, notamment en concertation avec les professionnels de santé, l’offre de services de santé, de manière à répondre aux besoins en matière de soins et de services médico-sociaux, et à garantir l’efficacité du système de santé. S’ensuit une liste de missions destinées à parfaire cet objectif. L’appui aux professionnels pour la coordination des parcours de santé complexes ressortira des compétences de l’ARS par coordination avec les dispositions des articles L. 6327-1 à L. 6327-3 du code de la santé publique.

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Le Gouvernement a présenté un amendement visant à définir les fonctions d’appui. Adopté en commission, cet amendement précise également le rôle pivot du médecin traitant dans la médecine de parcours. Point d’entrée du patient dans le système de santé, il lui revient de déclencher l’appui à la coordination. L’amendement précise aussi que l’organisation ressortissant aux ARS doit être pensée en coordination avec les professionnels et les usagers. Il précise enfin que les fonctions d’appui pourront être mises en œuvre par les équipes de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé.

À l’initiative de la rapporteure, le dispositif a été complété par l’adoption de trois sous-amendements, incluant une amélioration rédactionnelle.

Convaincue que la prise en compte du handicap relève du parcours complexe, la Commission a entendu préciser le dispositif pour tenir compte de la situation particulière de ces personnes. La prise en charge du handicap nécessite en effet l’intervention de plusieurs catégories de professionnels de santé, sociaux ou médico-sociaux.

La Commission a aussi entériné l’éligibilité des établissements d’hospitalisation à domicile (HAD) à la participation au fonctionnement d’une ou plusieurs plateformes territoriales d’appui. En effet, sur certains territoires, les établissements d’hospitalisation à domicile disposent d’une réelle compétence en matière de coordination médicale, soignante et psycho-sociale.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1325 du Gouvernement, qui fait l’objet des sous-amendements AS1692, AS1693 et AS1694 de la rapporteure et du sous-amendement AS1765 de M. Jean-Pierre Door.

Mme la ministre. L’amendement AS1325 tend à préciser les fonctions d’appui dont peuvent bénéficier les professionnels de santé lorsque ceux-ci en expriment le besoin. Je rappelle que, selon l’organisation des soins dans les territoires telle que nous la définissons, le médecin traitant est le pivot de la médecine de parcours ; à ce titre, c’est lui qui peut être appelé à déclencher l’appui à la coordination lorsque la situation de son patient le nécessite. Concrètement, il s’agit de structures d’appui permettant de prendre en charge des cas complexes, dont le recours reste à l’initiative du médecin et où travaillent le plus souvent des professionnels.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis favorable à cet amendement très important, qui répond bien aux différentes interrogations qu’a suscitées l’article 14. Il indique non seulement que le recours aux fonctions d’appui est déclenché par le médecin traitant, mais aussi que l’organisation des fonctions d’appui est confiée aux ARS, en concertation avec les professionnels et les usagers ; ce sont des points très positifs.

Mon sous-amendement AS1692 tend à préciser que la mission d’appui aux professionnels concerne également les personnes handicapées.

Mme la ministre. Je suis favorable à ce sous-amendement.

La Commission adopte le sous-amendement AS1692.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Mon sous-amendement AS1693 est rédactionnel.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Aux termes du sous-amendement AS1694, les établissements d’hospitalisation à domicile (HAD), qui disposent dans certains territoires d’une réelle compétence en matière de coordination médicale, soignante et psychosociale, peuvent participer au fonctionnement d’une plate-forme territoriale d’appui ou de plusieurs.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

M. Jean-Pierre Door. Il est indispensable que les fonctions d’appui, qui correspondent à l’ensemble des activités ou des prestations à envisager pour soutenir les professionnels de santé, soient réévaluées en concertation non seulement avec les unions régionales des professionnels de santé (URPS), mais aussi avec les commissions conventionnelles régionales.

Tel est le sens du sous-amendement AS1765.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable, pour les raisons exposées tout à l’heure.

Mme la ministre. Même avis.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS1325 sous-amendé.

En conséquence, l’article 14 est ainsi rédigé tous les autres amendements sur l’article tombent.

Après l’article 14

La Commission est saisie de l’amendement AS1050 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Malgré une convention signée avec l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), la majeure partie des actes de podologie ne sont pas reconnus ni pris en charge par l’assurance maladie, ce qui fait obstacle à l’égal accès des patients aux soins et réduit les avantages conventionnels pour les podologues.

Je suggère donc de dresser un état des lieux du dispositif pour les patients âgés de plus de soixante-quinze ans ou atteints d’une affection de longue durée, les plus concernés par une rupture de prise en charge.

Mme la ministre. Je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable. Je comprends l’idée d’un état des lieux, mais il serait préférable de demander à l’assurance maladie de faire un point sur ce sujet dans son rapport annuel sur les charges et produits, plutôt que d’attendre un rapport spécifique du Gouvernement qui ne pourrait que s’appuyer sur les données de l’assurance maladie.

L’amendement est retiré.

*

Chapitre II
Faciliter l’accès aux soins de premier recours

Titre du chapitre II

La Commission est saisie de l’amendement AS973 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’intitulé du chapitre II du titre II est supprimé.

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Article 15
(art. L. 6314-1 du code de la santé publique)

Régulation médicale de la permanence des soins ambulatoires

Cet article vise à instaurer un numéro harmonisé national de régulation médicale de la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Il modifie à cet effet L’article L. 6314-1 du code de la santé publique.

I. L’ACCÈS À LA PERMANENCE DES SOINS PAR LA RÉGULATION TÉLÉPHONIQUE PRÉALABLE

A.  LES ENJEUX DE LA RÉGULATION TÉLÉPHONIQUE PRÉALABLE

Le régime de la permanence des soins ambulatoire, et notamment de la régulation médicale, est fixé par les articles L. 6314-1 à L. 6314-3 du code de la santé publique.

La permanence des soins relève d’une mission de service public assurée, en collaboration avec les établissements de santé, par les médecins libéraux. Il s’agit d’une obligation collective reposant le volontariat individuel des professionnels libéraux.

La permanence des soins est assurée, en dehors des horaires d’ouverture des cabinets libéraux et des centres de santé, de 20 heures à 8 heures les jours ouvrés, ainsi que les dimanches et jours fériés par des médecins de garde et d’astreinte exerçant dans ces cabinets et centres ainsi que par des médecins appartenant à des associations de permanence des soins. Elle est organisée au niveau départemental sur la base des besoins identifiés dans le cadre d’un comité départemental, le comité de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires. Un cahier des charges est élaboré à cet effet par chacune des agences régionales de santé (ARS).

L’accès à un médecin, aux horaires de la permanence des soins, fait l’objet d’une régulation téléphonique préalable. Il s’agit d’un acte médical individuel pratiqué au téléphone permettant d’apporter la réponse la plus appropriée à un problème de santé. Un médecin régulateur est ainsi chargé de répondre aux appels des patients et apprécie la réponse à leur apporter une réponse en fonction de leur état de santé : conseil médical, déplacement d’un médecin de permanence, engagement des secours d’urgence…

La régulation est assurée par le biais de plateformes téléphoniques abritées par le service d’aide médical urgente (centre 15 ou 15) ou par le numéro des associations comme « SOS médecins ». Dans ce dernier cas, la plateforme d’appel doit être interconnectée avec le numéro national d’aide médicale urgente, le 15. Les modalités de collaboration sont fixées dans le cadre d’une convention approuvée par le directeur général de l’ARS (articles R. 6311-8 à R. 6311-11 du code de santé publique).

La responsabilité du médecin régulateur, qui, lorsqu’il régule les appels, assure une activité distincte de ses fonctions habituelles, est couverte par le même régime que celui qui s’applique aux agents de l’établissement public siège du SAMU. Des recommandations de bonnes pratiques ont également été édictées par la Haute autorité de santé (HAS) : elles visent la prescription médicamenteuse par téléphone dans le cadre de la régulation médicale et les modalités de prise en charge d’un appel de demande de soins non programmés dans le cadre de la régulation médicale.

Le décret n° 2010-809 du 13 juillet 2010 relatif aux modalités d’organisation de la permanence des soins a consacré la possibilité pour le médecin régulateur de procéder à une prescription médicamenteuse par téléphone. Le médecin régulateur peut prescrire aussi bien des médicaments à prescription facultative que ceux soumis à prescription obligatoire aux termes de l’article R. 5132-6 du code de la santé publique. Ces prescriptions sont limitées, non renouvelables, et soumises à une obligation de traçabilité. La HAS recommande également de développer les moyens de transmission sécurisés des télé-prescriptions entre médecins régulateurs et pharmacies.

Afin d’homogénéiser les pratiques de régulation médicale de tous les professionnels sur le territoire, la Haute autorité de santé a établi des recommandations en partie reprises par un arrêté du 20 octobre 2011 (60).

La participation effective des médecins libéraux est de 97 %, cette valeur étant constante depuis deux ou trois ans. Toutefois, la participation varie selon les régions et selon les territoires infra-régionaux, principalement en raison de la démographie médicale.

B.  LES ENJEUX LIÉS À LA PERMANENCE DE SOINS

Plusieurs difficultés liées à la régulation médicale ont été relevées.

En premier lieu, le système de permanence des soins ne se caractérise pas par sa lisibilité. À ce jour, 60 % seulement des actes médicaux réalisés aux heures de la permanence des soins font l’objet d’une régulation médicale préalable. Si certains patients peuvent encore bénéficier d’un acte pratiqué par leur médecin traitant, on observe aussi un recours encore trop fréquent aux urgences hospitalières. Selon l’étude d’impact, sur les 5 millions d’actes réalisés en période de PDSA, 2 millions de consultations demeurent réalisées sans que la demande de soins du patient ait été préalablement régulée.

En outre, l’existence d’un numéro unique, le 15, destiné à accéder à l’aide médicale urgente aussi bien qu’à la permanence des soins ambulatoires engendre une certaine confusion chez nos concitoyens. Elle nuit, à certains égards, à la visibilité de la permanence des soins dont les missions ne semblent pas clairement identifiées par tout un chacun. Si en pratique on observe une bonne coordination entre les médecins du SAMU et les médecins libéraux au sein des centres de régulation des appels téléphoniques, cette organisation n’est pas correctement appréhendée par les citoyens.

Une troisième difficulté est également relevée. Elle est liée à la coexistence de plusieurs autres numéros que le 15, comme le 18 et les numéros dédiés aux associations de permanence des soins. Ce foisonnement ne permet pas non plus aux citoyens de se repérer.

Les missions du 15 et du 18 peuvent se recouper sur le terrain, et si leurs rapports sur le terrain sont bons, il peut exister des enjeux et des conflits de gouvernance. En dépit des obligations tenant à l’interconnexion des systèmes de régulation, il n’est pas encore certain que la totalité des plateformes dispose encore de systèmes d’information compatibles permettant d’assurer, le cas échéant, un basculement automatique des appels et des informations collectées sur le patient.

La coexistence de la régulation entre les centres 15 et les associations de permanence de soins de type « SOS Médecins » peut également poser des problèmes de coordination. Il existe aussi des différences de pratique médicale. Alors que les appels au centre 15 sont réceptionnés par un auxiliaire médical placé sous la responsabilité d’un médecin régulateur, exclusivement dédié à cette tâche, les appels dans les associations de permanence des soins sont traités par un auxiliaire médical en lien avec un praticien qui n’est pas nécessairement présent sur la plateforme : la régulation est en effet souvent effectuée par le médecin effectuant des déplacements à domicile. Cette situation témoigne de la différence de « culture » entre les associations de permanence des soins et les centres 15 : alors que les déplacements à domicile seront privilégiés dans le premier cas, c’est un panel plus large de réponses qui est offert dans le second cas (conseil médical, intervention d’un médecin à domicile, déplacement vers une maison médicale de garde ou vers un hôpital…). Il existe en effet plusieurs protocoles selon les centres d’appels, notamment pour réguler la sollicitation d’un médecin régulateur par l’auxiliaire médical prenant en charge l’appel.

II. LA MISE EN PLACE D’UN NUMÉRO NATIONAL UNIQUE DE PERMANENCE DES SOINS

Cet article instaure remplace le troisième alinéa de l’article L. 6314-1 du code de la santé publique par deux nouveaux alinéas.

L’alinéa 2 dispose que la régulation médicale de la permanence des soins sera désormais accessible soit par un numéro national de permanence des soins soit par l’actuel numéro national d’aide médicale urgente, le 15. Il appartiendra au directeur de chacune des ARS de définir lequel de ces deux numéros pourra être utilisé, l’objet étant de parvenir à une situation harmonisée au niveau régional. Ce choix s’effectue dans les conditions fixées par l’article L. 1435-5, c’est-à-dire en association avec les représentants des professionnels de santé, dont l’ordre des médecins, et après avis du représentant de l’État territorialement compétent.

L’étude d’impact précise les raisons pour lesquelles le choix ne s’est pas porté sur la mise en place d’un numéro national unique de régulation des appels de PDSA.

De nombreuses ARS ont en effet déjà opté pour le 15 : c’est le cas dans environ 70 départements selon l’étude d’impact. Il aurait été pour le moins délicat de leur demander de modifier leur choix : la loi sauvegarde cette solution que les ARS ont mise en place en concertation avec les acteurs hospitaliers et libéraux et qui est désormais intégrée par la population locale.

C’est donc un autre scénario qui a ainsi été retenu, celui d’un numéro national coexistant avec le 15 et avec ceux des associations de type « SOS médecins ».

Avec la mise en place d’un numéro national, dédié à la permanence des soins, la visibilité du dispositif devrait être accrue. En effet, ce nouveau système mettrait déjà fin à la coexistence des différents numéros des régulations régionales et départementales à 10 chiffres ou 4 chiffres. Pour s’assurer de la cohérence régionale, le texte sous-tend en effet une harmonisation du numéro pour l’ensemble de la région.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, lorsque l’ARS choisit le numéro d’aide médicale urgente, l’accès à la régulation téléphonique de permanence des soins ambulatoires pourra rester accessible par le numéro national de permanence des soins. Le fait de composer le numéro national de PDSA dans une région faisant usage du seul « 15 » doit effectivement aboutir à la régulation médicale de PDSA. C’est en effet un pré requis important qui relève d’une mise en œuvre, en lien avec les opérateurs téléphoniques.

L’alinéa 3 du présent dispositif dispose que la régulation téléphonique est également accessible par les numéros des associations de permanence des soins, c’est-à-dire les associations de type « SOS médecins ». Les plates-formes d’appels sont interconnectées avec le numéro d’accès à la régulation de l’aide médicale urgente. Ce dispositif n’est en rien nouveau. Il correspond à la rédaction de la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 6314-1 dans sa rédaction actuelle.

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Hormis deux amendements rédactionnels, la Commission a souhaité réaffirmer le principe de la gratuité de l’accès à la PDSA et préciser que la régulation médicale doit être mieux coordonnée avec la psychiatrie d’urgence.

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La Commission est saisie des amendements identiques AS26 de M. Jean-Pierre Door, AS567 de M. Fernand Siré et AS646 de M. Bernard Accoyer.

M. Jean-Pierre Door. La permanence des soins est un sujet qui nous passionne, Mme la présidente et moi-même : nous lui avons consacré une mission d’information dont le rapport sera rendu sous peu.

L’amendement AS26 crée un numéro spécial dédié à la permanence des soins ambulatoires (PDSA) qui coexisterait avec le 15 – l’aide médicale urgente – et avec les numéros d’associations de permanence des soins disposant de plates-formes d’appels interconnectées avec le 15.

Il faut éduquer les patients, par l’information, à une bonne utilisation du système de soins en rendant lisible le fonctionnement de la PDSA, afin qu’ils ne privilégient pas automatiquement l’hôpital aux heures d’ouverture du cabinet, mais aussi aux heures de PDSA, et en leur offrant un numéro dédié unique sur le territoire, en dehors des numéros d’association de permanence des soins lorsque ceux-ci fonctionnent. Un tel numéro unique national a aussi l’avantage d’être clair pour la population quelle que soit sa situation géographique – en territoire rural comme urbain, de plaine comme de montagne.

M. Fernand Siré. L’amendement AS567 est identique.

M. Bernard Accoyer. L’amendement AS646 également.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ces amendements tendent à revenir sur une organisation retenue dans la majeure partie des départements.

Par ailleurs, si la régulation médicale est pratiquée à partir d’un centre abrité dans un hôpital, il n’en est pas de même de la prise en charge qui peut consister en un conseil médical, l’envoi d’un médecin ou l’orientation vers une maison médicale de garde. Je ne crois pas que l’on puisse dire que l’hôpital est alors privilégié.

L’objectif d’un numéro national unique de PDSA est largement partagé, mais sa mise en œuvre suppose une certaine progressivité. Le dispositif prévoit la coexistence du 15 et du numéro de PDSA, ce qui mettra déjà fin à la coexistence de plusieurs numéros de PDSA distincts au sein des territoires. Toutefois, la garantie d’accéder à la PDSA par le numéro national est acquise en tout point du territoire même si un département choisit le 15. J’ai déposé un amendement de clarification en ce sens.

Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements identiques.

L’amendement AS1677 de la rapporteure est retiré.

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques AS518 de M. Bernard Accoyer et AS769 de Mme Jacqueline Fraysse et l’amendement AS1676 de la rapporteure.

M. Bernard Accoyer. L’amendement AS518 est défendu.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 15 instaure un nouveau numéro national de permanence des soins. Il nous apparaît essentiel de préciser que le recours à ce numéro est gratuit. Tel est l’objet de l’amendement AS769.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il me paraît évident que les numéros d’aide médicale urgente et de PDSA doivent être gratuits. C’est d’ailleurs le sens de mon amendement AS1676.

En revanche, je ne suis pas favorable à la gratuité de l’accès à la PDSA par l’intermédiaire de SOS Médecins, qui pourrait entraîner la fermeture d’associations et le défaut de réponse territoriale.

Pour cette raison, je suis défavorable à ces amendements identiques, qui associent les deux éléments.

La Commission rejette les amendements identiques.

Elle adopte ensuite l’amendement AS1676.

Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel AS709 et l’amendement de précision AS1052 de la rapporteure.

La Commission en vient ensuite à l’amendement AS1051 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je propose ici d’articuler la PDSA et la psychiatrie d’urgence ; cette préoccupation a d’ailleurs été mise en avant par la conférence nationale de santé. À cette fin, la coordination des centres de régulation d’aide médicale urgente et de PDSA doit être articulée avec les dispositifs de psychiatrie d’intervention en urgence.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 15 modifié.

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Après l’article 15

La Commission est saisie des amendements identiques AS800 de M. Jean-Pierre Door, AS1189 de M. Jean-Pierre Barbier et AS1517 de M. Gilles Lurton.

M. Jean-Pierre Door. Les amendements AS800 et AS1189 sont défendus.

M. Gilles Lurton. De même que l’amendement AS1517.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette ces amendements identiques.

Elle en vient à l’amendement AS707 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Lorsqu’un patient arrive en urgence dans une maison médicale de garde, il est obligé d’avancer les honoraires du médecin de la permanence des soins. Lors des auditions auxquelles nous avons procédé dans le cadre de la mission d’information, beaucoup de médecins praticiens des maisons médicales de garde ont demandé à pouvoir envoyer directement les feuilles de soins électroniques à l’assurance maladie, c’est-à-dire à proposer une forme de tiers payant qui faciliterait l’accès à ces structures, en particulier la nuit, des personnes qui ne bénéficient pas de la couverture maladie universelle (CMU) ni de l’aide médicale de l’État (AME), qui ouvrent déjà droit au tiers payant.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Vous demandez donc un tiers payant total – part régime obligatoire et part de l’organisme complémentaire – s’agissant de la PDSA…

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il me semble que cet amendement serait plus à sa place à l’article 18, auquel cas il se réduirait à une version a minima de la position de notre majorité… Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement AS362 de M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange. Cet amendement est issu des travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur le transport de patients. Celui-ci bénéficie, rappelons-le, d’une enveloppe budgétaire de près de 4,5 milliards d’euros. Le rapport de la Cour des comptes à ce sujet montre qu’une rationalisation et une meilleure adéquation de l’offre et de la demande permettraient d’économiser un demi-milliard d’euros par an.

Un dispositif de géolocalisation obligatoire et installé aux frais des transporteurs sanitaires et des taxis est apparu comme la mesure la plus pertinente afin de vérifier plus efficacement la régularité de la facturation. Il fait l’objet d’une expérimentation s’agissant des ambulances et des véhicules sanitaires légers (VSL) au titre de l’article 1er de l’avenant n° 5 de la convention entre l’assurance maladie et les transporteurs sanitaires. Quant aux taxis, l’article 1er de la loi du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur (VTC) instaure une géolocalisation, mais sur la base du volontariat.

Il importe donc de rendre la géolocalisation obligatoire, afin de mettre clairement un terme à ce que je n’hésiterai pas à qualifier de détournement de fonds publics, même si ce n’est évidemment pas la règle générale. Cet objectif est conforme à la politique, voulue par le Gouvernement, de lutte contre la fraude sociale et de rationalisation des moyens mis à la disposition des patients.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Sur le fond, je n’ai rien à redire à cet amendement. Lors de l’examen du PLFSS pour 2015, la commission avait émis un avis favorable à cette proposition, mais le Gouvernement a déclaré en séance publique, que s’il partageait l’objectif poursuivi, il souhaitait privilégier la voie conventionnelle.

C’est sur le fondement de cette réponse apportée il y a quelques mois seulement que je me permettrai de vous demander de retirer votre amendement, mon cher collègue, faute de quoi je devrai émettre un avis défavorable.

Mme la ministre. Je confirme l’accord de principe, même si je préfère effectivement la voie conventionnelle. Peut-être pourriez-vous retravailler l’amendement en ce sens d’ici à l’examen en séance ?

M. Pierre Morange. Je regrette cette réponse, madame la ministre. L’argument de la voie conventionnelle est devenu systématique. Je me permets donc d’insister solennellement : il est urgent de débroussailler ce qui est devenu une véritable jungle, des mécanismes de surfacturation ayant été clairement identifiés par la Cour des comptes. Nous avons tous entendu parler d’histoires inadmissibles de détournements de fonds publics dans ce domaine. L’autorité de l’État ne saurait être suspendue à des conventions ; elle doit imposer une orthodoxie et des moyens de contrôle afin d’assurer le bon usage des cotisations acquittées par nos concitoyens. Cet impératif me semble exclure toute tergiversation de notre part.

J’avais déposé un autre amendement, déclaré irrecevable au titre de l’article 40, sur la création d’une plateforme commune entre les services d’aide médicale urgente (SAMU) et les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), cette arlésienne sur laquelle s’affrontent les « blancs » et les « rouges ». Un dispositif de ce genre a été mis en place dans quinze départements, où il donne toute satisfaction ; mais, pour des raisons dites « culturelles » – pour ne pas dire corporatistes –, l’autorité de l’État est battue en brèche. Il eût été légitime d’étendre le dispositif de numéro d’appel unique aux SAMU et aux SDIS : nous devons progresser sur cette question.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1317 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. L’amendement est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je suis sensible à la question soulevée, mais le Premier ministre a souhaité une évaluation approfondie de la loi montagne, assortie de propositions concrètes à l’occasion du prochain conseil national de la montagne ; la lettre de mission qu’il a adressée à Mme Genevard et à moi-même, évoque explicitement les médecins de montagne. En ce domaine, d’ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 comporte des avancées dont je remercie Mme la ministre et ses services. Je vous invite donc à un retrait, non pour des raisons de fond, mais parce qu’une mission parlementaire est en cours.

M. Bernard Accoyer. Mon amendement pourra, le cas échéant, être rediscuté dans le prochain PLFSS. Par le fait, nous sommes confrontés au double risque de la disparition des médecins dans les zones de montagne et dans les stations, où ils apportent des soins irremplaçables qui font faire des économies considérables à la sécurité sociale. Plutôt que de surcharger l’assurance-maladie, il convient d’instaurer un forfait « soins en montagne » pour rétribuer ces actes, remboursé le cas échéant à hauteur de 20 %, le reste étant pris en charge par les assurances complémentaires.

Mme la ministre. Je ne puis que souscrire aux observations de Mme la rapporteure. Les mesures adoptées dans la loi de financement de la sécurité sociale, que vous jugez inappropriées, ont été unanimement saluées par les acteurs comme par les élus concernés, que j’ai reçus, parmi lesquels M. Wauquiez et d’autres membres du parti auquel vous appartenez. Un travail est par ailleurs engagé par Mme Laclais et Mme Genevard : de nouvelles propositions pourront être formulées dans ce cadre.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 16
(art. L. 162-5, L. 162-5-3, L. 162-26 du code de la sécurité sociale)

Médecin traitant des patients de moins de seize ans

L’article 16 concerne la désignation d’un médecin traitant pour les patients de moins de seize ans, dans un but de coordination des soins à destination de l’enfance et de l’adolescence. La définition de ses missions particulières et des rémunérations associées seront précisées par les négociations conventionnelles qui définissent les relations entre l’assurance maladie et les médecins.

Une mission de coordination et d’aide à l’accès aux soins

L’article 162-5-3 du code de la sécurité sociale, établi par l’article 7 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, dispose que « tout assuré ou ayant droit âgé de seize ans ou plus indique à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom du médecin traitant qu’il a choisi, avec l’accord de celui-ci ».

Cette obligation pesant sur toute personne âgée de plus de seize ans a des finalités différentes : l’article 162-5-3 indique qu’il vise à « favoriser la coordination des soins » mais la place du médecin traitant dans le parcours coordonné du patient, associé à des pénalités financières s’il n’est pas respecté, traduit également un objectif de régulation de la demande de soins et de « responsabilisation » du patient.

En matière de soins accordés aux enfants, ce dernier objectif ne saurait entrer en ligne de compte. En outre, le besoin d’un dispositif de coordination spécifique à destination des enfants n’a émergé que progressivement. Il doit en effet être mis en regard de la disponibilité de médecins spécialisés en médecine pédiatrique, du recours fréquent aux médecins de famille, de la réalisation de bilans de santé obligatoires par la médecine préventive des services de protection maternelle et infantile ou de la médecine scolaire et enfin en raison de l’utilisation de l’outil simple et robuste que constitue le carnet de santé prévu à l’article L. 2132-1 du code de la santé publique. Mais un tel suivi s’étiole avec l’âge, et n’est, en tout état de cause, pas généralisé.

Or un médecin traitant est particulièrement bien placé pour mettre en œuvre un suivi des parcours de santé des enfants dans un but de prévention et de meilleur accès aux soins, en particulier pour les enfants vivant dans les familles les moins favorisées.

Il dispose par exemple de toutes les informations pertinentes. Conformément à la convention médicale du 26 juillet 2011, le médecin traitant réalise ainsi une synthèse médicale dont le contenu est défini par la Haute autorité de santé : elle retrace en particulier les pathologies en cours, les antécédents personnels du patient, les facteurs de risque, les éventuels traitements au long cours… L’article 25 du projet de loi prévoit également l’accès du médecin traitant à l’ensemble des informations contenues dans le dossier médical partagé (DMP) du patient et prévoit que le médecin traitant alimente ce dossier, autant que de besoin et au moins une fois par an, de la synthèse médicale.

Cette approche globale de la santé de l’enfant peut lui permettre d’être un acteur des chantiers prioritaires de la politique de santé des enfants : prévention de l’obésité, lutte contre les addictions, amélioration du suivi vaccinal par exemple.

Les modalités de désignation par les parents

L’article 16 modifie donc l’article L. 162-5-3 afin d’adapter les conditions de choix du médecin traitant à la situation des ayants droit âgés de moins de seize ans. Le a) du de l’article 16 insère ainsi deux nouveaux alinéas à la suite du premier alinéa de l’article L. 162-5-3.

Le nouvel alinéa 2 vise à préciser que pour les ayants droit de moins de seize ans, il revient aux parents ou au titulaire de l’autorité parentale qui a choisi le médecin traitant d’indiquer ce choix à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie. Il s’agit d’une précision utile : ce n’est qu’à l’âge de seize ans qu’une relation directe s’établit entre la caisse et l’ayant droit, avec l’établissement d’une carte SESAME-Vitale à son nom. Avant cet âge, seuls les parents assurés sont en mesure de procéder à cette déclaration auprès de leur organisme local de sécurité sociale.

L’insertion supplémentaire, un nouvel alinéa 3 de l’article L. 162-5-3 paraît nettement moins utile : il précise que « pour les ayants droit âgés de seize à dix-huit ans, le choix du médecin traitant suppose l’accord de l’un au moins des deux parents ou du titulaire de l’autorité parentale ». Or il s’agit manifestement d’une redite au regard des règles énoncées à l’alinéa premier de l’article L. 162-5-3 : un assuré ou ayant droit âgé d’au moins seize ans doit indiquer à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom du médecin traitant qu’il a choisi et, s’il est mineur, donc, âgé de seize à dix-huit ans, le choix nécessite l’accord de l’un au moins des deux parents ou du titulaire de l’autorité parentale.

La liberté de choix des parents est étendue : l’article L. 162-5-3 prévoit que le médecin traitant peut être un généraliste ou un spécialiste, et donc également un médecin spécialiste en médecine pédiatrique. Il peut être un médecin hospitalier ou un médecin salarié d’un centre de santé. Mais dans tous les cas, le médecin pressenti doit donner son accord.

Dans les faits, la grande majorité des médecins traitants des patients de moins de seize ans seront des médecins spécialisés en médecine générale. L’étude d’impact jointe au projet de loi indique que la formation pédiatrique des médecins généralistes sera renforcée, au moyen de stages obligatoires, pour les internes de médecine générale, dans des services de pédiatrie hospitalière, auprès de pédiatres de médecine ambulatoire ou dans des services de protection maternelle et infantile.

L’absence d’incidence financière pour les patients

L’instauration du médecin traitant des enfants n’est pas envisagée comme un outil de régulation des dépenses : le médecin traitant n’est pas un « passage obligé » comme dans le parcours de soins coordonné qui exige la consultation du médecin traitant avant celle d’un autre médecin et, dans le cas contraire, expose l’assuré à un moindre remboursement. La mesure ne vise pas à établir une contrainte pour les parents mais à leur offrir un meilleur suivi médical de leurs enfants, à une période décisive du parcours de vie.

Aussi, l’article 16 prévoit que ne sont pas applicables les différentes sanctions financières définies en cas de non-respect du parcours de soins.

Il peut s’agit tout d’abord de la majoration de la « participation aux tarifs servant de base au calcul des prestations », définie à l’article L. 322-2 du code de la sécurité sociale, et communément appelé « ticket modérateur », ce qui aboutit à diminuer la montant remboursé par l’assurance maladie. L’article L. 162-5-3 dispose en effet, dans sa rédaction actuelle, que la participation de l’assuré « peut être majorée pour les assurés et les ayants droit n’ayant pas choisi de médecin traitant ou consultant un autre médecin sans prescription de leur médecin traitant ». La majoration est appliquée sauf en cas de consultation réalisée en urgence ou en dehors du lieu de résidence stable et durable du patient. Aussi, le b) du prévoit, à l’article L. 162-5-3, une nouvelle exception à cette règle qui s’applique désormais « sauf pour les patients âgés de moins de seize ans ».

De même, le dernier alinéa de l’article 16 modifie l’article L. 162-26 du code de la sécurité sociale relatif au montant de la majoration appliquée aux patients qui, sans prescription préalable de leur médecin traitant, consultent un médecin spécialiste hospitalier. Il est donc précisé que cette majoration vise les seuls patients « âgés de plus de seize ans ».

La sanction financière peut également provenir de dépassements autorisés pour certains médecins lorsque le patient n’a pas été adressé par un médecin traitant. Dans ce but le b) du modifie le 18° de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale qui prévoit que les conventions médicales définissent les modalités selon lesquelles les médecins relevant de certaines spécialités sont autorisés à pratiquer, dans certaines limites, des dépassements d’honoraires sur le tarif des actes et consultations pour les patients qui les consultent sans prescription préalable de leur médecin traitant et qui ne relèvent pas d’un protocole de soins. Il est donc à nouveau précisé que « ces modalités ne sont pas applicables aux patients âgés de moins de seize ans ».

La rapporteure se félicite que ces garanties soient apportées car il est nécessaire qu’aucune confusion ne soit entretenue sur ce point.

La définition des missions et des rémunérations associées

L’article 16 renvoie à la convention médicale, conclue entre l’union nationale des caisses d’assurance maladie et les représentants des médecins, le soin de définir les missions particulières et les modalités de cette coordination des soins qui motivent l’instauration du dispositif.

L’article 16 opère en conséquence plusieurs modifications à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale relatif à ces conventions. Le d) du 1° y établit ainsi un 23° qui prévoit que la convention médicale détermine « les missions particulières des médecins traitants des enfants de moins de seize ans et les modalités de l’organisation de la coordination des soins spécifique à cette population ». Et le a) du 1° précise, au 17° que les missions propres aux médecins traitants sont distinctes de celles prévues à ce 23° pour les médecins traitants des enfants de moins de seize ans.

Les forfaits associés à la qualité de médecin traitant

Les médecins de secteur 1 et de secteur 2 adhérant au contrat d’accès aux soins perçoivent un forfait « médecin traitant » pour la totalité des patients de plus de 16 ans. C’est la rémunération de la fonction de coordination des soins : le montant est de 5 euros par an et par patient.

Le médecin traitant d’un patient atteint d’une affection de longue durée (ALD) bénéficie en outre d’une rémunération spécifique adaptée au besoin de coordination médicale de la pathologie et intégrant la rédaction et l’actualisation du protocole de soins : le montant, de 40 euros par an et par patient en ALD ne peut être cumulé avec le forfait de 5 euros.

En outre, pour le médecin traitant, la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) repose sur le suivi d’indicateurs spécifiques : cinq indicateurs portant sur l’organisation du cabinet dont la synthèse annuelle du dossier médical du patient ; 24 indicateurs portant sur la qualité de la pratique médicale, dont neuf indicateurs de suivi des pathologies chroniques, huit indicateurs de prévention et sept indicateurs d’efficience. La rémunération sur objectifs de santé publique est modulée selon le volume de la patientèle et tient compte de la progression et de l’atteinte des objectifs.

Des modalités de rémunération spécifiques seront également définies. Le d) du 1° insère un 24° qui prévoit que les conventions médicales déterminent les modes de rémunération, autres que le paiement à l’acte, relatifs aux missions et modalités d’organisations des médecins traitants des patients de moins de seize ans prévues au 23° du même article.

Il est précisé que cette rémunération spécifique ne se confondra pas avec la rémunération sur objectifs de santé publique prévue par le 22° de l’article L. 162-5 : elle est la contrepartie d’engagements portant sur la prescription, la participation à des actions de dépistage, de prévention, la prise en charge de patients atteints de pathologies chroniques, des actions favorisant la continuité et la coordination des soins, mais aussi améliorant les pratiques, la formation et l’information des professionnels. Le c) du 1° de l’article 10 prévoit en effet de manière expresse que ces engagements seront distincts des missions particulières des médecins traitants des patients de moins de seize ans.

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La Commission a adopté un amendement de la rapporteure visant à mieux coordonner les actions de prévention conduites par les services de la protection maternelle et infantile et les services de santé scolaire avec les missions des nouveaux médecins traitants des enfants. Il prévoit donc, à l’article L. 2112-2 du code de la santé publique, la prise en compte des missions des médecins traitants dans le cadre de l’organisation, par le président du conseil départemental, des consultations et des actions de prévention médico-sociales en faveur des enfants de moins de six ans. De même, il indique à l’article L. 541-1 du code de l’éducation, que les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour les visites médicales et les dépistages obligatoires, non seulement la périodicité et le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage, mais aussi les modalités de la coordination avec les missions particulières des médecins traitants des enfants.

La Commission a en outre adopté cinq autres amendements de la rapporteure supprimant la mention redondante précédemment signalée, rectifiant des erreurs références ou opérant des modifications rédactionnelles.

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La Commission examine l’amendement AS1559 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Les services de la protection maternelle et infantile et les services de santé scolaire conduisent des actions de prévention particulièrement utiles. Toutefois, il leur est difficile de les coordonner avec les actes de prévention et de soins dispensés en médecine de ville et, surtout, de toucher prioritairement les familles pour lesquelles un tel suivi est lacunaire ou absent.

Cet amendement prévoit donc la prise en compte des missions des médecins traitants dans le cadre de l’organisation, par le président du conseil départemental, des consultations et des actions de prévention médico-sociales en faveur des enfants de moins de six ans, prévues à l’article L. 2112-2 du code de la santé publique.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS1554 de la rapporteure.

Elle passe aux amendements identiques AS27 de M. Jean-Pierre Door, AS568 de M. Fernand Siré et AS647 de M. Bernard Accoyer.

M. Arnaud Robinet. Notre système de santé a l’avantage de permettre à tous les enfants de France de bénéficier librement, et à n’importe quel moment de leur vie, du suivi de leur développement et de la prise en charge de leurs pathologies par un pédiatre, médecin ayant reçu une formation spécifique de quatre ans consacrée à l’enfant, de sa naissance jusqu’à sa majorité, et enrichie d’une expérience professionnelle et de formation continue exclusive qui lui est entièrement dévolue.

Il appartient donc aux partenaires conventionnels de mettre en place un plan de prise en charge de la santé de l’enfant à des âges spécifiques mobilisant une véritable coopération de l’ensemble des spécialistes impliqués dans le suivi de l’enfant, et en premier lieu le médecin généraliste et le pédiatre, dont le rôle doit être reconnu et valorisé.

M. Fernand Siré. L’amendement AS568 est défendu.

M. Bernard Accoyer. L’amendement AS647 également.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ces amendements sont satisfaits puisque l’article habilite les partenaires conventionnels à définir les missions des médecins traitants des enfants, ainsi que les modalités de la coordination des soins spécifiques qui leur sont destinés. Les partenaires conventionnels ont par conséquent toute liberté de définir un plan de prise en charge spécifique pour les enfants de moins de seize ans en fonction des besoins identifiés au cours des négociations.

Je vous invite donc à retirer ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement AS1556 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il vous est tout simplement proposé de supprimer une mention redondante.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte également trois amendements de la rapporteure : l’amendement rédactionnel AS1155, l’amendement de conséquence AS1557 et l’amendement AS1558 de rectification d’une référence.

Puis elle adopte l’article 16 modifié.

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Article 17
(art. L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale)

Clause d’examen des conventions médicales par les accords applicables aux centres de santé et modalités d’élaboration de ces accords

L’article 17 modifie l’article L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale relatif aux accords conclus entre l’assurance maladie et les représentants des gestionnaires de centres de santé afin de prévoir une équité de rémunération entre les centres de santé et les professionnels libéraux, reposant sur une transposition régulière aux centres de santé des améliorations de rémunération consenties aux professionnels libéraux.

Il s’agit d’une disposition initialement insérée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, à l’Assemblée nationale, à l’initiative du rapporteur Christian Paul, et figurant à l’article 34 du texte adopté. Mais par la décision n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a censuré ces dispositions au motif qu’elles « ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement et que par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale ».

L’article 17 établit donc cette clause d’examen régulier, lors des négociations des accords applicables aux centres de santé, des aides existantes pour les professionnels libéraux.

En outre, il prévoit les modalités de résolution arbitrale de l’échec des négociations de ces accords.

Les modalités de rémunération des professionnels des centres de santé doivent être adaptées au nouveau contexte conventionnel

L’article L. 6323-1 du code de la santé publique définit les centres de santé comme des structures sanitaires de proximité dispensant principalement des soins de premier recours. Bien que relevant du champ ambulatoire, les médecins de ces centres y sont salariés ; les tarifs facturés aux patients ne peuvent donner lieu à dépassement d’honoraires et le tiers payant y est d’ores et déjà pratiqué, de droit sur la part relevant de l’assurance maladie, et fréquemment sur la part complémentaire.

Le nombre des centres de santé dépasse 1 200 mais ils forment un ensemble varié : ils ne représentent que 2,4 % des dépenses de santé ambulatoire mais assurent une offre de soins adaptée à de nombreux territoires et aux populations défavorisées (61). Malgré leur utilité sanitaire et sociale, ils sont fragiles financièrement.

Le dernier accord conclu entre l’assurance maladie et les centres de santé date d’avril 2003 ; il a été renouvelé par tacite reconduction en 2008 et en 2013, alors que durant cette décennie les modes de rémunération des médecins libéraux ont sensiblement évolué.

Parallèlement, alors que l’accord national des centres de santé n’évoluait pas, les conventions médicales ont intégré de nouveaux modes de rémunération : forfait de suivi des patients en affection de longue durée (ALD), forfait du médecin traitant, forfait pour personnes âgées, majorations diverses, rémunération sur objectifs de santé publique etc.

La caisse nationale d’assurance maladie a évalué à 13 millions d’euros le manque à gagner pour les centres de santé occasionné par l’absence de transposition des seuls trois forfaits (ALD, non ALD et personnes âgées), hors prise en compte de la rémunération sur objectifs de santé publique qui approche aujourd’hui un montant moyen de 5 000 euros par an pour les médecins spécialisés en médecine générale.

Il est donc urgent de fixer les conditions d’un réexamen des accords conclus entre les organismes d’assurance maladie et les représentants des centres de santé au regard des avantages consentis aux médecins libéraux par les différentes conventions médicales.

Le dispositif envisagé

L’article L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale organise les relations entre l’assurance maladie et les centres de santé et détermine les éléments que l’« accord » qui les lie doit comporter. (62)

Le 2° de l’article L. 162-32-1 indique que cet accord détermine les conditions générales d’application aux différentes professions exerçant dans des centres de santé, des conventions conclues entre l’assurance maladie et les professionnels de santé. Mais les conditions d’application définies par l’accord ne peuvent modifier les tarifs des honoraires et les rémunérations et frais accessoires déterminés par ces conventions.

Le du présent article complète cet alinéa afin de prévoir que les parties prenantes de l’accord, assurance maladie d’une part, centres de santé d’autre part, devront se réunir, au plus tard six mois après la conclusion d’une convention ou d’un avenant liant l’assurance maladie à une profession de santé, pour examiner les conditions d’intégration des modes de rémunération qui y sont mentionnés, autres que le paiement à l’acte, dans l’accord liant l’assurance maladie aux centres de santé. L’accord doit avoir lui-même défini, au préalable, les conditions de cet examen.

L’intégration des nouvelles stipulations au sein de l’accord est soumise aux règles définies au premier alinéa de l’article L. 162-32-2 qui prévoit que l’accord national, ses annexes et avenants sont approuvés dans les conditions prévues à l’article L. 162-15, ce qui renvoie aux conditions de validité des conventions médicales : approbation, expresse ou tacite, des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, à moins qu’ils ne s’y opposent ou ne prononcent la disjonction de clauses litigieuses, pour des motifs de non-conformité aux lois et règlements ou pour des motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire ou lorsqu’il est porté atteinte au principe d’un égal accès aux soins.

Le de l’article 17 complète l’article L. 162-32-1 par un II visant à régir les situations de rupture des négociations préalables à l’élaboration de l’accord national, ou d’opposition des ministres à cet accord, ou de négociations préalables n’ayant pas abouti au terme d’un délai de six mois. Dans ce cas un arbitre doit arrêter un projet d’accord dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé : c’est la définition d’une procédure de règlement arbitral.

Un renvoi aux deuxième à cinquième alinéas du I de l’article L. 162-14-2 signifie que le projet d’accord doit être soumis aux ministres pour approbation et publication, sous la forme d’un règlement arbitral arrêté pour une durée de cinq ans. Mais l’assurance maladie et les représentants des centres de santé doivent, dans ce cas, à nouveau engager des négociations en vue d’élaborer un nouvel accord au plus tard dans les deux ans qui suivent l’entrée en vigueur du règlement arbitral.

Le dernier alinéa de ce II indique que l’arbitre est désigné par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et au moins une organisation représentative des centres de santé. À défaut ou en cas d’opposition à cette désignation par la majorité des organisations représentatives des centres de santé (aujourd’hui au nombre de dix (63)), l’arbitre est désigné par le président du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. 

Votre rapporteure espère que cette clarification des « règles du jeu » va contribuer à relancer les négociations partenariales entre l’assurance maladie et les centres de santé : le dernier accord national en date entre des organisations représentatives des gestionnaires de centre de santé et l’assurance maladie est celui du 19 novembre 2002, publié le 19 avril 2003 et tacitement reconduit pour cinq ans une première fois en 2008 et à nouveau en 2013 comme cela a été souligné ci-dessus.

Début 2014 de nouvelles négociations ont débuté : votre rapporteure souhaite qu’elles permettent d’intégrer les centres de santé dans la politique concertée en faveur des parcours et des soins de proximité.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, outre un amendement de clarification de la rapporteure, la Commission a adopté un amendement présenté par Mme Fraysse et les commissaires du groupe GDR prévoyant une faculté supplémentaire d’opposition à l’accord, soit par la majorité des organisations représentatives des centres de soins infirmiers, soit par la majorité des organisations représentatives des centres de santé médicaux.

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La Commission examine un amendement, AS1304 de M. Bernard Accoyer, tendant à la suppression de l’article.

M. Bernard Accoyer. Les centres de santé, créés au début des années 1980, sont devenus des gouffres financiers pour l’assurance-maladie et les organismes complémentaires. Il serait illogique et contre-productif de soumettre aux règles de conventionnement des organismes dont les médecins sont tous des salariés.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’exposé sommaire invoque le respect de la compétence des partenaires conventionnels ; or l’article 17 prévoit la transposition des modes de rémunération autres que le paiement à l’acte relevant du champ conventionnel. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS941 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement AS941 donne aux organisations représentatives des centres de santé la possibilité de s’opposer à un accord national si au moins la moitié d’entre elles le décident.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de clarification rédactionnelle AS233 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 17 modifié.

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Article 17 bis
(art. L. 2212-5 du code de la sécurité sociale)

Suppression du délai de réflexion préalable
à une interruption volontaire de grossesse

Issu d’un amendement présenté par Mme Coutelle au nom de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, adopté par la Commission des affaires sociales sur avis défavorables du Gouvernement et de la rapporteure, l’article 17 bis modifie l’article L. 2212-5 du code de la santé publique afin de supprimer le délai de réflexion de sept jours qui sépare aujourd’hui obligatoirement la première consultation médicale pour une interruption volontaire de grossesse (IVG), prévue à l’article L. 2212-3, et la consultation visant à pratiquer l’IVG.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1451 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Il y a quarante ans, la loi Veil avait été adoptée moyennant certaines concessions, même s’il n’y a évidemment pas lieu, pour moi, de remettre en cause son caractère admirable.

Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, dans un rapport sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), ainsi que de nombreuses associations préconisent la suppression de certaines clauses qui freinent l’accès à l’IVG et en font un droit à part.

L’amendement a trait au délai de réflexion, que la loi de 1975 avait fixé à sept jours avant la seconde consultation. Je propose de le supprimer car, à ce stade, les femmes ont généralement pris leur décision. Cela n’implique évidemment pas de supprimer tout délai de réflexion, puisque deux consultations sont prévues, la première pour l’entretien – au cours duquel est remis un livret –, la seconde pour l’acte proprement dit ; une consultation supplémentaire avait été prévue entre les deux, au cours de laquelle la femme avait à signer un accord écrit. Les associations sont nombreuses à dénoncer cette procédure qu’elles jugent infantilisante et stigmatisante. Je rappelle enfin que la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a supprimé la notion de « situation de détresse ». Le 17 janvier, jour anniversaire de la promulgation de la loi Veil, vous avez aussi annoncé, madame la ministre, un programme national de grande qualité, visant à améliorer l’accès à l’IVG sur l’ensemble du territoire, et je vous en félicite.

M. Arnaud Robinet. Il y a quelques semaines, nous avions trouvé un équilibre dans le cadre d’une résolution relative à l’IVG, gravant ainsi la loi Veil dans le marbre. Il est dommage de revenir, à deux heures du matin et dans le cadre d’un projet de loi relatif à la santé, sur un sujet de cette ampleur.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il n’est jamais dommage, ce me semble, d’évoquer l’accès à l’IVG.

Mme la ministre. L’accès concret à l’IVG doit bien entendu être garanti. C’est en tout cas l’objectif du plan que j’ai présenté le 17 janvier dernier : il doit permettre de lever les obstacles, qu’ils soient de nature financière, organisationnelle ou territoriale, que rencontrent certaines femmes pour pratiquer une IVG.

La suppression du délai de réflexion ne fait pas partie des mesures que j’ai proposées, et je ne suis pas sûre qu’elle soit de nature à faciliter l’accès au droit dont nous parlons. Certaines situations particulières, j’en ai conscience, peuvent exiger une accélération de la procédure ; ainsi, lorsque la grossesse est à un stade avancé, le délai est d’ores et déjà raccourci. On peut aussi envisager un raccourcissement du délai dans les cas d’IVG pratiquées par voie médicamenteuse, autorisée pendant les cinq premières semaines de la grossesse.

Dans la plupart des cas, cependant, le délai de réflexion est utile. Doit-il rester fixé à sept jours ? La question peut être posée ; mais, en tout état de cause, je suis défavorable à sa suppression, car la décision qui est en jeu, si elle est un droit absolu, est évidemment tout sauf banale.

Mme Catherine Coutelle. L’IVG est le seul acte médical, avec les interventions de chirurgie esthétique, soumis à un délai de réflexion légal. Que les femmes prennent un temps de réflexion, j’en suis d’accord ; mais la France est l’un des derniers pays européens à imposer un délai de sept jours. Cette mesure, symboliquement forte, peut aussi être un frein à l’IVG ; elle avait été une concession fort compréhensible dans le contexte de la loi de 1975, mais elle n’a plus de justification aujourd’hui. Présenté au nom de la Délégation aux droits des femmes, l’amendement répond, je le répète, à une demande forte des associations.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sujet, on l’a dit, n’est évidemment pas banal. Avis de sagesse.

La Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 17 bis

La Commission examine l’amendement AS1452 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. La Délégation aux droits des femmes avait initialement déposé trois amendements, dont l’un a subi le couperet de l’article 40 ; il faisait écho à l’un des volets de votre plan en donnant aux centres de santé la possibilité de réaliser des IVG. J’aimerais donc, madame la ministre, vous entendre sur ce point.

L’amendement AS1452 participe du même esprit que le précédent. Simone Veil, dont la loi avait notamment été adoptée grâce aux voix de la gauche, avait accepté, pour gagner des suffrages au sein de sa propre majorité, l’introduction d’une clause de conscience spécifique dans son texte, alors que l’article R. 4127-47 du code de la santé publique dispose déjà qu’« un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. S’il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient […]. »

Nous proposons de supprimer, non la clause de conscience en tant que telle, mais celle qui est spécifique à la loi Veil.

M. Arnaud Robinet. Début janvier, je le répète, nous avions adopté une résolution de façon relativement consensuelle. Revenir, à deux heures dix du matin, sur l’équilibre de la loi Veil ne me semble pas sérieux.

Mme la ministre. Je suis favorable à toute disposition donnant la possibilité aux centres de santé de pratiquer des IVG, qu’elles soient médicamenteuses ou instrumentales, dans les conditions prévues aux articles L. 2212-1 à L. 2212-10 du code de la santé publique, selon un cahier des charges établi par la Haute autorité de santé et dans le cadre conventionnel applicable aux établissements de santé. Si vous déposez en séance l’amendement dont vous venez de parler, je lèverai donc le gage.

Mme Catherine Coutelle. Merci, madame la ministre.

Mme la ministre. Vous venez de faire adopter la suppression du délai de réflexion dont, pour ma part, je suggérais plutôt le raccourcissement. En tout état de cause, le Gouvernement émet un avis résolument défavorable à la suppression de la clause de conscience pour les IVG. Il ne nous paraît pas utile, en effet, de rouvrir le débat sur des sujets dont, par ailleurs, je mesure pleinement la portée symbolique – et c’est une ministre tout aussi résolument engagée en faveur de l’IVG qui vous le dit. Dès ma prise de fonction, j’ai adopté des mesures permettant d’améliorer la prise en charge des IVG, avant d’annoncer, il y a quelques semaines, un plan destiné à favoriser l’accès concret à ce droit pour les femmes qui rencontrent des difficultés ; mais, dans le contexte de tensions que nous connaissons, sur des sujets de société et avec certains professionnels de santé, la mesure que vous proposez ne me paraît pas opportune, d’autant qu’elle ne changera rien dans la pratique. Les médecins qui opposent une clause de conscience en ce domaine sont rares et, même si je ne méconnais pas le poids des symboles, votre amendement ne changera rien à l’effectivité du droit dont nous parlons. Ma responsabilité est aussi de vous faire part, sans détours, des réalités du contexte politique.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Chacun se positionnera sur le sujet, même si le message que vient de nous délivrer Mme la ministre mérite à tout le moins réflexion. À titre personnel, je le suivrai.

M. Gérard Sebaoun. Je comprends d’autant mieux les arguments de Mme la ministre que, dans le texte relatif à la fin de vie, j’avais moi-même défendu l’idée d’une clause de conscience spécifique pour l’exception d’euthanasie.

La clause de conscience fut introduite, en 1975, parce que l’IVG pouvait, aux yeux de certains médecins, signifier mettre fin à une vie naissante, donc être contraire à leur déontologie.

J’ai conscience du contexte politique que vous avez évoqué, madame la ministre ; mais de deux choses l’une : ou bien l’IVG s’apparente à un soin ou à un traitement, et elle relève du droit général, ou bien elle relève de l’exception – ce que je ne crois pas. Dans le premier cas, la clause de conscience doit s’appliquer, et pas dans le second. Cela ne signifie pas que je voterai l’amendement de Mme Coutelle, mais j’en comprends la portée historique et symbolique : peut-être faudra-t-il, un jour, en venir à ce qu’il propose.

M. Gérard Bapt. Je souscris aux propos de M. Sebaoun et à ceux de Mme la ministre s’agissant du contexte. La sédation profonde et l’IVG heurtent toutes deux la culture médicale traditionnelle, historiquement fondée sur le curatif plutôt que sur le soin. Personnellement, je ne voterai pas cet amendement.

Mme Jacqueline Fraysse. Je partage l’analyse de M. Sebaoun. L’IVG fait partie des soins dus au patient : dès lors que celui-ci les demande, le médecin doit être tenu de les administrer dès lors que les procédures sont respectées et qu’aucun risque particulier ne s’y oppose.

La clause de conscience, introduite dans le contexte que l’on a rappelé, n’a plus lieu d’être, même si je conçois que sa suppression rouvrirait de nombreux débats. Je voterai en tout cas l’amendement, car il correspond à mes convictions.

M. Gilles Lurton. Lors du récent examen de la proposition de loi relative à la fin de vie, la question de l’introduction d’une clause de conscience s’est posée. Les rapporteurs du texte ont auditionné le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), qui a écarté cette clause en arguant que le rôle des praticiens était de soigner. Avant de présenter un tel amendement, qui plus est à deux heures vingt du matin, on devrait a minima consulter le CNOM.

Mme Catherine Coutelle. Madame la ministre, j’apprécie votre réponse sur les centres de santé, qui constituent une avancée réelle.

Je comprends votre propos sur le contexte politique, mais je suis dans mon rôle de présidente de la Délégation aux droits des femmes en présentant cet amendement. Un rapport du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a également proposé cette amélioration de l’accès au droit à l’avortement.

Lorsque nous avons supprimé la notion d’état de détresse dans la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, nous avons rencontré des oppositions comme on n’imaginait plus devoir en supporter.

Eu égard au contexte politique, je retire mon amendement, mais il faudra un jour le voter car il n’y a pas de raison de maintenir des barrières à l’effectivité du droit fondamental des femmes à choisir le moment de leur grossesse. À l’occasion du quarantième anniversaire de la loi Veil, nous avons voté à l’unanimité, le 25 novembre dernier, une résolution en séance publique reconnaissant ce caractère fondamental du droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Or le maintien des deux premiers alinéas de l’article L. 2218-8 du code de la santé publique fait de l’IVG un droit à part. Cela montre en tout cas à quel point il est difficile d’évoluer en France…

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il manquait sept voix pour que le vote de cette résolution se soit fait à l’unanimité.

Mme la ministre. Je tiens à vous remercier, madame la députée, d’avoir retiré cet amendement. Nous sommes en accord sur le contenu de votre proposition, mais le moment n’est pas propice à son adoption. Merci de l’avoir compris.

L’amendement est retiré.

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Chapitre III
Garantir l’accès aux soins

Article 18
(art. L. 133-4, L. 161-1-4, L. 161-36-3 et L. 161-36-4 [nouveaux], L. 162-5, L. 162-9, L. 162-14-1, L. 162-16-1, L. 162-32-1, L. 315-1, L. 322-1, L. 322-2 et L. 871-1 du code de la sécurité sociale)

Généralisation du tiers payant pour les consultations de ville

L’article 18 vise à dispenser les assurés d’avancer les frais des consultations de médecine de ville à la hauteur des montants faisant l’objet de remboursements par l’assurance maladie et par les organismes complémentaires.

Il définit donc, dans le but de lever les obstacles à l’accès aux soins, les conditions de généralisation de la technique du « tiers payant » qui est déjà appliquées par de nombreux professionnels de santé.

1.  Pratiqué de manière étendue, le tiers payant doit être généralisé

L’article L. 322-1 du code de la sécurité sociale prévoit que « la part garantie par la caisse primaire d’assurance maladie (…) est remboursée (…) directement à l’assuré », ce qui présuppose une avance des frais par le patient. Mais la loi ou les conventions médicales prévoient de nombreux cas de dispense d’avance de frais, au point que, dans la pratique, le tiers-payant concerne plus de 70 % des montants des prestations. On peut recenser une quinzaine de cas de dispense d’avance de frais et les médecins libéraux ont la capacité de l’accorder sans qu’il existe pour autant de mise en cohérence nationale.

Le tiers payant est pratiqué par de nombreux professionnels de santé

Le tiers payant est ainsi de droit à l’hôpital, l’article L. 162-21-1 prévoyant, pour la part garantie par les régimes obligatoires d’assurance maladie la « dispense de l’avance des frais d’hospitalisation » pour les établissements de santé publics ou privés sous convention avec l’assurance maladie.

Il est applicable dans les centres de santé : l’article L. 162-32 du code de la sécurité sociale prévoit que « les centres de santé font bénéficier les assurés sociaux de la dispense d’avance de frais pour la part garantie par l’assurance maladie ».

Le tiers payant est également de droit pour de nombreux actes de prévention : dépistages organisés à l’occasion des campagnes publiques, examens bucco-dentaires de prévention prodigués aux enfants à six ans et à douze ans, délivrance du vaccin antigrippal pour les populations les plus à risque…

Le tiers payant est d’ores et déjà en cours de généralisation pour les assurés les plus modestes pour la couverture de base comme pour la couverture complémentaire : ce tiers payant « intégral » est de droit pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaires (CMU-C) conformément à l’article L. 861-1 du code de la sécurité sociale. Il est étendu aux bénéficiaires de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) par l’article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, applicable le 1er juillet 2016.

En outre la couverture spécifique des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP) prévoit également le tiers payant pour les soins prodigués à la victime, à l’article L. 431-1 du code de la sécurité sociale.

Pour la part relevant de l’assurance maladie, la généralisation du tiers payant ne nécessite donc pas de modifier les dispositions applicables à ces différentes situations.

Des aménagements de l’obligation d’avancer les frais de santé appelés à être remboursés sont également prévus par des conventions conclues entre l’assurance maladie et les professions de santé. Concernant les médecins, l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale prévoit que la convention médicale détermine « 2° bis, le cas échéant, les conditions tendant à éviter à l’assuré social de payer directement les honoraires aux médecins ».

La convention médicale signée le 26 juillet 2011 prévoit par exemple le tiers payant pour les actes particulièrement coûteux inscrits dans la classification commune des actes médicaux (CCAM) ; le tiers payant est également de droit dans le cadre de la permanence des soins, sur la seule part des remboursements pris en charge par l’assurance maladie obligatoire. Cette convention prévoit par ailleurs le principe du « tiers payant social » à destination des bénéficiaires de l’ACS, pour la seule part prise en charge par l’assurance maladie obligatoire : le tiers payant intégral prévu par loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, déjà mentionnée, s’y substituera. On relève également que les patients qui avaient choisi leurs anciens médecins « référent » comme médecin traitant bénéficient encore de la dispense d’avance de frais accordée dans le cadre de l’option conventionnelle « médecin référent », clôturée en 2005.

Les conventions régissant les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes prévoient la faculté pour le professionnel d’accepter une dispense d’avance de frais par paiement différé de ses honoraires par l’assurance maladie, en fonction des situations locales. Des accords locaux avec les caisses primaires d’assurance maladie ont parfois visé à élargir ces dispositifs. Les conventions régissant les différentes catégories d’auxiliaires médicaux ont également prévu différents cas de tiers payant, soit laissés à l’appréciation du professionnel, soit restreints aux seuls actes faisant l’objet d’un remboursement à 100 %.

Concernant les pharmacies d’officine, le 4° de l’article 162-14-1 du code de la sécurité sociale relatif aux conventions entre l’assurance maladie et les pharmaciens titulaires d’officine prévoit que la convention détermine « les mesures tendant à favoriser le développement de la dispense d’avance de frais ». La pratique du tiers payant est extrêmement développée, mais différenciée selon que le patient accepte ou non la substitution d’un médicament princeps par un médicament générique, selon le principe « tiers payant contre génériques », prévu par l’article L. 162-16-7 du code de la sécurité sociale.

Enfin le tiers payant est aujourd’hui systématique dans les laboratoires privés d’analyses médicales, sur une base conventionnelle ancienne, initiée dès 1994.

L’objectif de généralisation concerne donc essentiellement, aujourd’hui, les soins fournis par la médecine de ville, comme l’indique le tableau ci-après.

TAUX D’ACTES FACTURÉS EN TIERS-PAYANT EN 2012
(HORS CMU ET AFFECTIONS DE LONGUE DURÉE)

Médecins généralistes

14,2 % (secteur 1)

4,9 % (secteur 2)

Médecins spécialistes cliniques

20,5 % (secteur 1)

12,6 % (secteur 2)

Médecins spécialistes techniques

42,3 % (secteur 1)

23,8 % (secteur 2)

Laboratoires

99 %

Infirmiers

84 %

Masseurs kinésithérapeutes

55,6 %

Orthophonistes

71 %

Sages-femmes

38,1 %

Chirurgiens-dentistes

17,4 %

Données CNAMTS – Erasme national tous régimes - juillet à septembre 2012.

Les avantages du tiers payant ne font pas de doute

Sur le fond, la généralisation du tiers-payant paraît justifiée à votre rapporteure : le patient a en effet déjà « payé » une première fois la part des soins prise en charge par l’assurance maladie, au travers de ses cotisations ou des impôts affectés au financement de l’assurance maladie ; de même, pour la part remboursée par les organismes complémentaires, lorsqu’il cotise.

Le spectre de la « gratuité » et d’un recours inflationniste aux soins inutiles est illusoire. Le tiers payant constitue en revanche un excellent révélateur des pratiques de « dépassements » d’honoraires par certains professionnels et contribuera donc à les modérer.

Un effet de hausse transitoire et mesurée des dépenses de santé est bel et bien recherché par la mesure : en levant la contrainte de trésorerie, le tiers payant va diminuer les situations de renoncement aux soins utiles. Le droit au soin au moment où le besoin en est ressenti sera enfin effectif et permettra d’éviter, à terme, les dépenses plus lourdes occasionnées par le traitement des affections qui n’ont pas été prises en charge au bon moment.

La généralisation du tiers payant améliorera l’attractivité des soins de ville : une part des sollicitations actuelles de l’hôpital public est en effet motivée par le fait que le patient n’a pas à y avancer les frais. On peut donc raisonnablement attendre un report, à terme, vers la prise en charge ambulatoire.

Enfin le tiers payant dispensera les médecins d’avoir à apprécier l’état de disponibilité financière des patients dans les conditions, largement aléatoires, prévues par la convention médicale du 26 juillet 2011 qui se contente de « permettre ponctuellement, pour les patients qui le nécessiteraient la dispense d’avance de frais selon l’appréciation du médecin traitant ».

2.  La mise en œuvre conventionnelle envisagée initialement

Dans le texte du projet de loi déposé par le Gouvernement, l’article 18 renvoie la définition des modalités de mise œuvre du tiers payant aux différentes conventions conclues entre l’assurance maladie et les représentants des professions médicales.

Au préalable, le II de l’article 18 modifie l’article L. 322-1 du code de la sécurité sociale, dont la rédaction actuelle prévoit que la part garantie par la caisse primaire d’assurance maladie est « remboursée » au professionnel de santé : il est désormais indiqué qu’elle est « versée au professionnel de santé dans le cadre du mécanisme du tiers payant ou elle est remboursée ». L’ordre des priorités est ainsi clairement indiqué.

Les situations de remboursement sont appelées à perdurer pour les cas où le tiers payant ne sera pas applicable. Il s’agit principalement des situations de non-respect du parcours de soins défini à l’article L. 162-5-3, c’est-à-dire du choix d’un médecin traitant et de l’obligation de consulter ce dernier préalablement à toute consultation d’un médecin pour lequel la faculté d’accès direct n’a pas été prévue. Le du I indique donc, dans un 7° de l’article L. 162-14-1 que l’application du tiers payant est subordonnée au respect du parcours de soins conformément à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 162-5-3.

Mais l’obligation de respecter ce parcours est elle-même assortie d’exceptions définies au dernier alinéa de cet article et qui s’appliqueront également au tiers payant : il sera donc toujours de droit pour des consultations réalisées auprès d’un autre médecin que celui désigné à l’organisme gestionnaire du régime de base d’assurance maladie mais justifiées par l’urgence, ou lorsque la consultation se fait en dehors du lieu où l’assuré social réside de façon stable et durable.

Les autres dispositions du I de l’article 18 font figurer les modalités du tiers payant dans le champ du contenu obligatoire des conventions conclues entre l’assurance maladie et les différentes professions de santé.

Le du I modifie l’article L. 162-14-1 qui prévoit les dispositions communes à différentes catégories de conventions conclues avec l’assurance maladie par :

– Les différentes catégories de médecins, par renvoi aux conventions mentionnées à l’article L. 162-5 ;

– les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les auxiliaires médicaux, régis par les conventions mentionnées l’article L. 162-9 ;

– les infirmiers, par renvoi à l’article L. 162-12-2 ;

– les masseurs-kinésithérapeutes, par renvoi à l’article L. 162-12-9 ;

– les directeurs de laboratoires privés d’analyses médicales, par renvoi aux conventions mentionnées à l’article L. 162-14 ;

– enfin les entreprises de transports sanitaires, visées à l’article L. 322-5-2.

Les conventions applicables à chacune de ces professions devront désormais toutes prévoir expressément « les modalités du tiers payant permettant de dispenser l’assuré social de payer directement aux professionnels de santé la part des honoraires prise en charge par l’assurance maladie », comme l’indique désormais un 7° de l’article L. 162-4-1, ainsi que « le cas échéant, les modalités permettant de dispenser l’assuré social de payer directement aux professionnels de santé la part des honoraires prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire, lorsqu’un mécanisme de tiers payant est mis en place par ces organismes », comme le prévoit un 8° de cet article, également inséré par le présent article.

En conséquence, leet ledu I abrogent les dispositions spécifiques figurant déjà dans deux de ces conventions et désormais satisfaites par la définition des règles applicables à l’ensemble des professions médicales. Le 1° abroge ainsi le 2° bis de l’article L. 162-5 qui autorise les conventions applicables aux médecins à déterminer « le cas échéant, les conditions tendant à éviter à l’assuré social de payer directement les honoraires aux médecins ». Et le 2° abroge le 4° de l’article L. 162-9 qui prévoit le tiers payant pratiqué par les chirurgiens-dentistes pour la part relevant de l’assurance maladie.

La convention régissant les activités des pharmaciens n’étant pas visée par l’article L. 162-14-1, le modifie les dispositions particulières qui leur sont applicables, définies à l’article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale.

Concernant les centres de santé, qui pratiquent le tiers payant sur la part prise en charge par l’assurance maladie en application d’une disposition expresse de l’article 162-32 du code de la sécurité sociale, le 5° modifie l’article L. 162-32-1 relatif à l’accord régissant les rapports entre l’assurance maladie et ces centres. Un 7° est inséré qui prévoit que l’accord doit désormais obligatoirement définir les conditions du tiers payant pour la part complémentaire.

Enfin le III modifie l’article L. 871-1 qui définit les conditions que doivent remplir les contrats de couverture maladie complémentaire pour être qualifiés de « responsables » et être éligibles à un taux réduit de taxe supplémentaire sur les contrats d’assurance : ces contrats devront donc permettre à l’assuré « de bénéficier du mécanisme de tiers payant sur les prestations faisant l’objet de ces garanties, au moins à hauteur du tarif des prestations servant de base au calcul de la prise en charge par l’assurance maladie ».

Il n’est donc pas instauré d’obligation pour l’ensemble des contrats complémentaires de proposer un remboursement par tiers payant mais le dispositif des contrats responsables constituera une incitation forte en ce sens : la pratique du tiers payant conditionnera le bénéfice des aides fiscales et sociales qui y sont attachées.

Le IV prévoit l’entrée en vigueur de ce III à compter du 1er janvier 2017 : il s’agit de la seule indication figurant dans la loi du calendrier d’entrée en vigueur de la réforme.

Par ailleurs, votre rapporteure relève que l’article L. 162-2 du code de la sécurité sociale n’est pas modifié par le projet de loi.

Cet article définit les « principes déontologiques fondamentaux » établis « dans l’intérêt des assurés sociaux et de la santé publique » afin d’assurer le « respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des médecins ». Or il mentionne « le paiement direct des honoraires par le malade » aux côtés du libre choix du médecin par le malade, de la liberté de prescription du médecin, de la liberté d’installation du médecin et du secret professionnel… Une telle assertion est d’ores et déjà sans rapport avec la réalité, au regard de la pratique actuelle du tiers payant, qui établit un paiement indirect du médecin, par la médiation de l’assureur. Cette assertion est en outre manifestement contradictoire avec l’objectif de généralisation du tiers payant à la médecine de ville.

3.  Les modifications apportées par la Commission des affaires sociales

La généralisation du tiers payant par la voie des conventions conclues entre les différentes professions et l’assurance maladie était présentée comme une garantie d’appropriation du dispositif par les professionnels. Mais la généralisation du tiers payant a suscité des interrogations persistantes pour de nombreux médecins qui font état de retard de paiement ou d’impayés dans le cadre de certains des mécanismes actuels de tiers payant.

Les trois systèmes de tiers payant techniquement possibles

– L’assurance maladie est le payeur unique du professionnel de santé : le professionnel de santé envoie sa feuille de soins électronique à l’assurance maladie obligatoire qui lui rembourse la totalité (part base et part complémentaire) puis se retourne vers l’organisme complémentaire pour obtenir le remboursement de la part avancée par elle pour le compte de celui-ci.

– L’assurance maladie est le destinataire unique des factures puis transfère la facture de la part complémentaire vers les organismes d’assurance maladie complémentaire. Ce dispositif a été mis en place par certains accords locaux de tiers payant. Le professionnel reçoit des remboursements distincts pour la part obligatoire de base et la part complémentaire. La simultanéité des remboursements peut être envisagée mais n’est pas garantie.

– L’éclatement des flux « à la source » : le professionnel envoie directement la facture de la part obligatoire à l’assurance maladie obligatoire et celle de la part complémentaire à l’assurance maladie complémentaire. Ce modèle a été choisi par les professions qui pratiquent le tiers payant intégral de manière massive : pharmacies, centres d’imagerie médicale, laboratoires d’analyses médicales. Mais, du fait de la multiplicité des organismes de complémentaire santé, ces professions ont le plus souvent recours à des intermédiaires techniques spécialisés, les organismes concentrateurs techniques (OCT) qui se chargent de l’adressage des factures aux complémentaires et de la gestion des rejets.

La rapporteure ne doute pas de la possibilité d’aboutir à un système simple et fiable : les caisses primaires d’assurance maladie effectuent d’ores et déjà sans difficultés des paiements aux professionnels de santé libéraux, au titre du tiers payant, pour des montants qui dépassaient, en 2012, 10,2 milliards d’euros. La généralisation du tiers payant, au plan technique, ne saurait constituer un défi insurmontable, au regard des évolutions connues par l’assurance maladie en matière de télétransmission, grâce à la carte vitale, et, plus globalement, en raison des progrès des systèmes d’informations.

Mais il parait indispensable d’apporter, dans la loi, des clarifications et des garanties supplémentaires.

La mise en œuvre du tiers payant requiert en effet la présence des garanties permettant d’éviter :

– les risques de trésorerie pour les médecins, en raison de délais de paiement excessifs ;

– les difficultés d’identification des droits du patient causés par des changements d’affiliation à une couverture de base ou d’adhésion à une couverture complémentaire ;

– les défauts de paiement des actes dispensés en cas de contestation ultérieure des droits du patient par l’organisme tiers payeur ;

– les charges administratives liées à l’émission de factures et à la réception de paiements en lien avec des interlocuteurs différents.

Aussi, la Commission des affaires sociales a adopté un amendement du Gouvernement, sous-amendé par la rapporteure, qui précise les modalités d’extension du tiers payant en tirant le bilan de la concertation qui s’est tenue depuis le début de l’année 2015 avec les professionnels de santé et les organismes d’assurance maladie obligatoire et complémentaire.

Cet amendement établit au I de l’article 18 le calendrier d’une extension progressive du tiers payant. Celle-ci concernera dans un premier temps les patients pris en charge à 100 % par l’assurance maladie obligatoire, au titre d’une affection de longue durée ou de l’assurance maternité : les médecins pourront leur proposer le tiers payant à compter du 1er juillet 2016, puis devront accepter le tiers payant, si ces patients le demandent, au 31 décembre 2016. De la même façon, un tiers payant sur la base du volontariat est prévu pour l’ensemble des assurés à compter du 1er janvier 2017, et devient un droit pour les patients au 30 novembre 2017.

Les solutions techniques seront définies conjointement par l’assurance maladie et les organismes complémentaires : un rapport, établi par ces organismes au plus tard le 31 octobre 2015, devra présenter les modalités de mise en place du mécanisme du tiers payant simultanément sur les parts couvertes par les régimes obligatoires d’assurance maladie et les organismes d’assurance maladie complémentaire au profit de l’ensemble des bénéficiaires de l’assurance maladie. Le sous-amendement de la rapporteure a précisé que ce rapport détermine également les solutions techniques assurant aux professionnels de santé la simplicité de l’utilisation, la lisibilité des droits et la garantie du paiement.

En outre, l’amendement du Gouvernement insère un V à l’article 18 qui prévoit que l’assurance maladie assume la mission générale de pilotage du déploiement et de l’application du tiers payant et assure, en liaison avec les organismes d’assurance maladie complémentaire, la cohérence et la performance des dispositifs.

En conséquence, les dispositions du I et du II de l’article 18 dans la rédaction initiale renvoyant la définition de ces étapes aux conventions médicales sont supprimées. La définition directe du mécanisme du tiers payant figure dans un II bis qui modifie plusieurs articles du code de la sécurité sociale.

Un article L. 161-36-3, nouveau, définit les conditions d’application du tiers payant par le professionnel de santé, et les garanties apportées au titre du paiement dû par l’assurance maladie. Lorsque le professionnel de santé applique le tiers payant, le paiement de la part prise en charge par l’assurance maladie est garanti, dès lors qu’il utilise la carte vitale. Ce paiement intervient dans un délai maximum fixé par décret, et qui devrait être de sept jours. Il est précisé que le non-respect de ce délai ouvre droit pour le professionnel de santé concerné, sans préjudice des sommes dues, au versement d’une pénalité selon des modalités fixées par décret. En outre l’article prévoit une obligation de transparence sur les délais moyens de paiement de chaque caisse primaire d’assurance maladie.

Aux articles L. 133-4 et L. 322-2, les conditions de récupération de la participation forfaitaire et de la franchise médicale sont définies: elle peut être payée directement par l’assuré à l’organisme d’assurance maladie ou prélevée sur le compte bancaire de l’assuré après autorisation de ce dernier ou encore récupérée par l’organisme d’assurance maladie sur les prestations de toute nature à venir.

Un article L. 161-36-4, nouveau, récapitule les obligations que doit remplir l’assuré pour bénéficier du tiers payant : présenter la carte vitale au professionnel de santé, avoir donné à l’assurance maladie une autorisation de prélèvement sur son compte bancaire ou avoir expressément renoncé à cette autorisation, respecter le parcours coordonné de santé, et, pour la délivrance des médicaments, accepter la substitution des génériques.

En outre, une modification de l’article L. 315-1 définit les modalités de transmission du dossier relatif au protocole des patients en ALD entre médecins conseil, en cas de changement d’organisme ou de régime d’assurance maladie : il s’agit d’assurer une bonne continuité de la prise en charge de l’ALD et donc le maintien de la mise en œuvre du tiers payant.

Par ailleurs, des améliorations sont apportées à l’article L. 161-1-4 qui définit les cas de suspension des prestations lorsqu’une personne ne produit pas les justificatifs réclamés par les organismes de sécurité sociale. Cette suspension sera restreinte aux seules circonstances de non fourniture des justificatifs pouvant attester que la personne remplit bien la condition de résidence afin de réduire les situations de discontinuité des droits aux prestations en nature et donc d’améliorer la garantie de paiement du médecin.

*

La Commission examine les amendements de suppression de l’article AS28 et AS446 de M. Jean-Pierre Door, AS569 de M. Fernand Siré, AS832 de M. Bernard Accoyer et AS1096 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Robinet. L’article 18 prévoit la généralisation du tiers payant, mesure phare de ce projet de loi. Le Gouvernement a déposé un amendement mardi dernier en fin d’après-midi ; il n’a été possible de le consulter sur la base Éloi que ce matin et, qui plus est, le Gouvernement l’a depuis modifié. Comme nous siégions en commission, nous n’avons pas pu étudier les modifications apportées au texte. Une fois de plus, nos conditions de travail sont inacceptables !

Le groupe UMP a déposé des amendements identiques visant à supprimer cet article généralisant le tiers payant. Cela étant, soyons clairs : l’opposition n’adopte pas une position dogmatique sur cette question, contrairement au Gouvernement. Si sa mise en œuvre technique était bien conçue, le tiers payant généralisé pourrait simplifier la vie administrative des médecins. Or le projet gouvernemental soulève plusieurs inquiétudes.

Inquiétude sur le paiement des médecins tout d’abord : madame la ministre, vous avez annoncé il y a une semaine que la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) piloterait le dispositif du tiers payant généralisé et prendrait en charge les pénalités découlant d’un non-paiement rapide des médecins. Vous faites reposer l’intégralité de ce système sur la CNAM, alors que les assurances et les mutuelles devraient pouvoir intervenir. Qui plus est, la CNAM va « s’asseoir », passez-moi l’expression, sur un milliard d’euros puisque les franchises n’existeront plus.

Le tiers payant généralisé conduira à une bureaucratisation de la médecine libérale. Sa gestion entraînera un coût de 3,50 euros par acte pour les médecins libéraux, dont le Gouvernement ne propose pas la prise en charge. Cette réforme revient donc à imposer une baisse tarifaire inacceptable, alors que d’autres solutions beaucoup plus souples et modernes comme la carte de paiement santé à débit différé pourraient être déployées.

Affirmer que la généralisation du tiers payant permettra l’accès aux soins de l’ensemble de nos concitoyens est un argument totalement irrecevable, puisque le tiers payant existe déjà pour nos concitoyens les plus modestes, qui bénéficient de la couverture maladie universelle (CMU), de l’aide pour une complémentaire santé (ACS) et de l’aide médicale de l’État (AME).

Vous avez voulu faire de cette mesure le symbole du projet de loi relatif à la santé, mais elle nourrit la contestation de l’ensemble des professionnels libéraux de santé, qui demandent le retrait pur et simple de l’article 18.

M. Jean-Pierre Door. La mesure de généralisation du tiers payant pour l’ensemble des assurés en 2017 est une mesure démagogique et idéologique, et beaucoup moins sociale qu’il n’y paraît, car il ne s’agit pas de médecine gratuite.

Cette mesure pose de nombreuses questions techniques qui font douter de la possibilité de l’appliquer dès 2017. D’ailleurs, le président de la République a averti que les contours de ce dispositif devraient être suffisamment simples pour que l’on puisse le mettre en œuvre. Qui plus est, le tiers payant s’avérera chronophage pour les médecins qui devront vérifier les remboursements et les droits des patients pour éviter de se faire « rouler dans la farine ». Ses difficultés techniques coûteront aux contribuables, aux professionnels de santé, à l’assurance maladie et aux mutuelles. Ainsi, l’assurance maladie devra couvrir les inévitables retards de paiement. Enfin, le coût d’envoi de feuilles de remboursement devrait, à en croire les évaluations réalisées par certains cabinets, être compris entre 3 et 4 euros par acte, ce qui constitue un montant élevé.

Le tiers payant intégral doit rester réservé aux patients qui en ont besoin – c’est déjà le cas pour les patients bénéficiaires de la CMU-C, de l’ACS, voire des patients en affection de longue durée (ALD). Si vous mainteniez votre article, madame la ministre, veillez au moins à ce que la généralisation du tiers payant s’applique aux soins urgents dans les maisons médicales de garde. Mais surtout, n’imposez pas de décision qui ne recueille ni l’assentiment des Français ni celui des professionnels de santé et continuez la concertation !

M. Fernand Siré. La généralisation du tiers payant modifiera le rapport entre le médecin et le patient. Ce dernier choisit son praticien et doit acquitter un paiement ; le paiement de l’acte par une caisse d’assurance maladie faussera cette relation. Comme le disent les paysans, qui paie, commande !

M. Bernard Accoyer. Nous étudions ces amendements à deux heures trente-quatre dans des conditions choquantes, car il s’agit d’un article très important qui pourrait très rapidement paralyser le système de soins. Madame la ministre, cette mesure n’est rien d’autre qu’une décision politique et un marqueur ; le Gouvernement échouant dans tous les domaines, il cherche à faire passer cette disposition en force. C’est de la folie !

La non-généralisation de l’accès aux soins ne constitue pas un frein à l’accès aux soins puisque la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), l’AME, l’ACS et l’ALD fonctionnent déjà sous le régime du tiers payant intégral. Les barrières existent aujourd’hui pour la lunetterie, les prothèses dentaires et l’audioprothèse. Dans le corps médical, 90 % des praticiens sont opposés à cette mesure. Comment pourriez-vous continuer à être en charge d’un secteur en suscitant l’opposition frontale de 90 % de ceux qui le font fonctionner ? Cette mesure est insupportable pour les médecins, car elle dévorera leur temps
– pensez qu’il leur faudra harceler 500 complémentaires ! – et représentera un coût financier du fait des impayés. En effet, lorsque le tiers payant fut appliqué en pharmacie, on a constaté une explosion de la dépense de médicaments et un impayé moyen de 3 000 euros par mois et par officine. Les médecins devront faire face aux mêmes difficultés, alors qu’ils se trouvent aujourd’hui au bord du burn-out. L’entêtement du Gouvernement est proprement irresponsable : les médecins ne veulent pas de cette mesure qui engendrera une inflation des dépenses, une suppression des mécanismes de modération – franchises et ticket modérateur –, une déresponsabilisation des patients, et des conséquences financières négatives pour les professionnels et pour l’assurance maladie. La sécurité sociale devant déjà faire face à un déficit cumulé de 147 milliards d’euros, vous n’avez pas le premier euro pour financer ce caprice politique, madame la ministre !

M. Arnaud Richard. Il faut reconnaître, que l’on soit d’accord ou pas, au Gouvernement que cette mesure met en œuvre un engagement de campagne, ce qui est très rare. La généralisation du tiers payant semble d’ailleurs être l’assurance-vie de Mme la ministre au sein de ce Gouvernement – n’y voyez aucune attaque personnelle, madame la ministre !

L’article 18, dont notre amendement propose la suppression, organise la généralisation du tiers payant pour les consultations en ville. Je ne reviens pas sur la méthode, le dépôt d’amendements de dernière minute, etc. : après tout, certains de vos collègues au Gouvernement font beaucoup mieux que vous, madame la ministre : n’avons-nous pas vu arriver en toute fin de débat sur la loi NOTRe un amendement de quarante-deux pages ?

Mme la ministre. J’ai encore de la marge !

M. Arnaud Richard. Le tiers payant existe déjà pour les personnes précaires couvertes par la CMU, l’ACS ou l’AME ; du reste, les médecins libéraux le pratiquent spontanément en fonction de la situation et pour les actes les plus coûteux. Le projet de loi ne traite de l’accès aux soins que sous cet angle du tiers payant, et aucune réponse n’est accordée pour diminuer le reste à charge, qui atteint parfois des montants insoutenables et qui représente le vrai problème d’accès aux soins.

Qui plus est, la généralisation du tiers payant risque de transformer la carte Vitale en carte de paiement, de déresponsabiliser les patients au regard du coût de leur santé et de déprécier les actes médicaux devenus virtuellement gratuits. Elle générera également une bureaucratisation de la médecine libérale, puisque la gestion et le contrôle des paiements devraient coûter 3,50 euros par acte aux médecins libéraux ; or la prise en charge de ce montant n’est pas assurée. Elle revient donc à imposer une baisse tarifaire inacceptable, alors que le Gouvernement aurait pu développer des solutions souples et modernes comme la carte de paiement santé à débit différé. L’intégration de l’ensemble des complémentaires dans la carte Vitale permettrait de lutter contre les impayés et de simplifier massivement le système d’assurance santé de notre pays.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous sommes pour notre part très favorables à l’instauration d’un tiers payant généralisé et souhaiterions l’accélération de son déploiement, même si l’on comprend que cela puisse pose des difficultés techniques.

Le tiers payant ne revient pas à instaurer la gratuité des soins, il assure simplement l’avance du paiement ; cette mesure ne fera pas disparaître les restes à charge et ne modifiera pas les taux de remboursement.

Pour les gens qui ont les moyens de faire l’avance, le fait de payer n’est en rien un facteur de responsabilisation. En revanche, ceux qui n’ont les moyens de faire l’avance des frais renoncent aux soins. Une responsabilisation fondée uniquement sur la capacité à engager une dépense avant son remboursement n’est pas de bonne méthode. Je préfère que l’on insiste sur la prévention afin que l’on ait moins recours à la médecine, et que l’on se penche sur la surconsommation médicamenteuse. On ne doit se contenter d’un système où ceux qui ne peuvent consentir à l’avance des frais renoncent aux soins.

Du reste, les études menées sur les populations bénéficiant déjà du tiers payant montrent que les dépenses de santé finissent par diminuer, parce que le meilleur accès aux soins permet de traiter les maladies lorsqu’elles sont moins avancées. Cela s’avère beaucoup moins coûteux pour la situation sanitaire et pour la protection sociale. Autrement dit, les arguments avancés contre la généralisation du tiers payant sont faux et totalement idéologiques ; en soutenant le Gouvernement, nous défendons un meilleur accès aux soins pour tous qui se traduira, in fine, par une diminution des dépenses de santé.

M. Gérard Sebaoun. Les médecins sont responsables d’une incongruité qui dure depuis longtemps dans notre pays : une loi oblige les médecins à télétransmettre ; or une partie des feuilles de maladie restent expédiées sous forme de papier, ce qui coûte douze fois plus cher à la sécurité sociale. Un rapport évalue les économies potentielles à un montant compris entre 70 et 250 millions d’euros en trois ans si tout était télétransmis. Que les médecins appliquent la loi et cessent de refuser de s’équiper – ce phénomène existe même dans les grandes villes, 20 % des médecins parisiens et 9 % de leurs confrères niçois n’étant pas informatisés malgré les aides versées, et se trouve surtout répandu chez les spécialistes qui sont 40 % à enfreindre la loi contre 14 % des généralistes. Cette situation est tout à fait anormale car les médecins ne sont jamais sanctionnés : comme la sanction doit intervenir par voie conventionnelle, il ne se passe rien.

Un fort corporatisme nourrit l’hostilité à cette réforme. De nombreux médecins, les radiologues, les laboratoires acceptent le tiers payant pour des patients ne bénéficiant pas de la CMU, de l’ACS ou de l’AME, des pays étrangers qui nous sont comparables l’ont également mis en œuvre. Je loue le courage de Mme la ministre d’emprunter le chemin de la généralisation du tiers payant et de le déployer en trois ans. Ce n’est pas simple, et de vrais problèmes techniques se posent, ce qui explique que l’on soit amené à prévoir plusieurs étapes d’ici à 2017.

La fédération des radiologues libéraux a souhaité nous rencontrer pour nous dire que lorsqu’ils utilisaient le tiers payant ils rencontraient des difficultés avec les mutuelles pour récupérer 6 % de leurs honoraires.

Le tiers payant n’engendre pas d’augmentation des dépenses. Le directeur du Fonds CMU nous a expliqué que les gens privés de soins rattrapaient un retard lorsqu’ils bénéficiaient de la couverture puis se comportaient comme les autres assurés. Les ayants droit étant des assurés sociaux, il n’est pas normal qu’ils fassent une avance de frais.

Enfin, certains médecins sont arc-boutés contre le tiers payant car ils refusent l’idée que puissent apparaître les dépassements d’honoraires.

Mme Michèle Delaunay. Nous nous trouvons dans une situation particulièrement tendue vis-à-vis du personnel médical et soignant. Ne serait-il pas possible d’agir dans le cadre d’un deuxième acte législatif pour mettre en œuvre la seconde phase de la généralisation du tiers payant ? Cela permettrait de montrer que l’on a pris en considération l’inquiétude des médecins et constituerait une mesure d’apaisement. Madame la ministre, si vous décidiez néanmoins d’en rester à une seule loi pour appliquer cette réforme, je me rallierais à votre position. Je vous demande simplement de réfléchir à ma proposition d’agir en deux temps.

Mme Jacqueline Fraysse. Notre rôle est de nous préoccuper de la santé de l’ensemble de nos concitoyens et de veiller à ce que les moins fortunés puissent avoir accès à des soins de qualité. La droite soutient que les médecins sont opposés au tiers payant, ce qui n’est pas vrai. Parler ainsi du corps médical s’avère très péjoratif ; si certains praticiens ne soutiennent pas cette mesure, la très grande majorité, et c’est heureux, c’est conforme à leur déontologie, souhaitent soigner tout le monde dans les meilleures conditions. Au demeurant, la sécurité sociale rend les patients solvables et les médecins en profitent car bon nombre de leurs patients, dans ce contexte difficile, seraient incapables de les payer s’ils n’avaient pas la sécurité sociale.

Je ne suis pas étonnée que la droite ne soit pas préoccupée de l’accès aux soins de l’ensemble de nos concitoyens, puisqu’elle a instauré avec la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), les forfaits, les franchises et les déremboursements. Je me félicite que le Gouvernement propose la généralisation du tiers payant. Le président du CNOM n’est pas opposé à cette mesure, mais il exprime des préoccupations légitimes que nous devons prendre en compte : les médecins doivent naturellement être payés dans des délais corrects et les problèmes techniques doivent être résolus. Nous devons saluer le principe de la réforme et les efforts consentis par le Gouvernement pour la mettre en œuvre, et je regrette que cette mesure ne recueille pas l’approbation unanime des députés.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Notre souhait de généraliser le tiers payant ne répond pas à une position dogmatique, mais au souhait d’améliorer la vie de nos concitoyens. Cette mesure permettra de lutter contre les phénomènes de renoncement aux soins, que l’on observe également chez des gens dont les revenus se situent au-dessus des seuils de la CMU-C et de l’ACS. Pour bénéficier de l’ACS, une personne seule doit justifier de ressources ne dépassant pas 970 € par mois – encore avons-nous relevé le plafond par rapport à celui qu’avait fixé l’ancienne majorité. Il est facile d’imaginer qu’une personne percevant un revenu juste un peu plus élevé puisse être confrontée à des difficultés financières pour bénéficier de soins et le tiers payant leur facilitera l’accès aux professionnels de santé. Cela aura des conséquences bénéfiques pour la santé des individus et celle de l’ensemble de la société.

Personne ne nie l’existence de difficultés techniques, mais elles ne doivent pas servir de prétexte pour renoncer ; il convient de se donner les moyens de les résoudre, et le calendrier proposé, qui prévoit une mise en œuvre progressive de la généralisation du tiers payant, constitue la bonne méthode pour réussir.

Enfin, notre discussion montre que c’est la droite qui fait preuve d’idéologie dans ce débat.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Ainsi que l’a relevé à juste raison M. Roumegas, la généralisation du tiers payant concerne la dispense de l’avance des frais et n’instaure aucune gratuité. L’argument selon lequel cette mesure enlèverait toute valeur à l’acte médical est totalement vide. Personne n’avance les frais d’une opération à cœur ouvert ou d’une greffe, compte tenu du coût de cette intervention : est-ce à dire que l’acte chirurgical, qui sauve des vies, n’a aucune valeur ?

Contrairement à ce que soutient M. Accoyer, l’application du tiers payant en pharmacie depuis trente-cinq ans n’a pas fait exploser la consommation de médicaments ; le tiers payant ne concerne que les médicaments prescrits par un médecin, et penser que le tiers payant a engendré une augmentation des dépenses de médicaments revient à accuser les médecins de prescrire depuis trente-cinq ans des médicaments inutiles au seul prétexte que leurs patients ne doivent pas acquitter l’avance de frais. C’est un raisonnement absurde ! L’augmentation de la consommation de médicaments – que l’on ne constate plus aujourd’hui, la France rejoignant progressivement ses voisins européens en la matière – a résulté d’un réflexe de prescription qui n’a rien à voir avec le tiers payant !

Mme la ministre. Si le tiers payant est devenu une des mesures de référence de ce projet de loi, le texte ne se limite pas à cela. Reste que c’est un débat important, et j’ai du reste senti quelques nuances dans les positions défendues par les députés de l’opposition : si certains rejettent la généralisation en bloc en criant à l’idéologie, d’autres assurent qu’ils ne sont pas totalement opposés au tiers payant, mais… Tant et si bien qu’il n’est pas toujours facile de comprendre leurs arguments. Peut-être entendent-ils les Français qui, très majoritairement, expriment leur volonté de mettre en place un dispositif qui n’a effectivement rien à voir avec la gratuité – tous les Français cotisent à la Sécurité sociale –, mais qui facilitera leur relation avec leur médecin en leur permettant de ne pas avancer les frais.

Ce n’est pas un caprice de ma part – je ne suis pas femme de caprices –, mais bien un engagement, une volonté de justice et de progrès. Et force est de constater que lorsque l’on défend des mesures de justice et de progrès, on est très vite taxé d’idéologie par l’opposition…

Du reste, si près de 30 % des actes sont d’ores et déjà réalisés en tiers payant, ce ne sont pas forcément ceux qu’a évoqués l’opposition. Ainsi, les ALD n’en font pas partie : si certains professionnels leur appliquent le tiers payant, d’autres se voient opposer des refus de la part de l’assurance maladie. L’ACS non plus n’est pas encore en tiers payant : cette étape supposera d’ailleurs une coordination entre l’assurance maladie et les organismes complémentaires.

Contrairement à ce que certains soutiennent parfois, il ne s’agit pas d’une mesure à but uniquement social : le tiers payant social, c’est la CMU. Mais il n’y a pas que les bénéficiaires de la CMU qui peuvent avoir des difficultés, et je ne crois pas que les médecins aient envie d’évaluer à chaque fois la situation financière de leur patient. Le fait que des gens dont le revenu se situe entre 1 500 et 2 500 euros expriment une attente très forte du tiers payant montre bien que, sans être pauvre, on peut avoir besoin d’être dispensé de l’avance de frais.

Vous avez été très nombreux, sinon unanimes, quelle que soit votre position sur le principe, à souligner la complexité d’un changement d’organisation qui supposera la mise en place d’infrastructures que les médecins ne devront même pas voir : la mise en place du tiers payant sera une affaire de coulisses, de back-office, bref, cachée dans le disque dur de l’ordinateur, et l’intervention du praticien devra rester extrêmement simple. J’ai entendu, madame Delaunay, les inquiétudes exprimées par le corps médical ; c’est bien la raison pour laquelle nous avons repris la concertation et c’est ce qui explique que nous vous proposions, par l’amendement AS1725 rectifié, une rédaction de l’article 18 sensiblement différente de celle du projet de loi initial.

Cet amendement détaille une méthode et un calendrier. Il met en place un tiers payant qui sera progressivement étendu à l’ensemble des patients en suivant des étapes identifiées et qui permettront de tester et de roder le système. Plusieurs rapports d’étape sont prévus, dont les conclusions seront intégrées dans la suite de la démarche.

Il n’est évidemment pas acceptable, et cela ne le sera pas davantage demain, que des professionnels ne soient pas payés pour des actes qu’ils réalisent. Une telle situation ne saurait être considérée comme normale par le Gouvernement. C’est pourquoi nous inscrivons dans la loi le principe d’une garantie de paiement au professionnel qui applique ou appliquera le tiers payant dès lors que l’acte fera l’objet d’une télétransmission – c’est important –, ledit paiement devant intervenir dans un délai fixé par décret. Passé ce délai, qui pourrait être de sept jours, une pénalité sera versée au professionnel.

Je précise que ces garanties ne se limiteront pas aux professionnels qui appliqueront le tiers payant à l’avenir ; elles vaudront aussi, sitôt la loi adoptée, pour les actes d’ores et déjà réalisés en tiers payant.

L’amendement prévoit par ailleurs une série de simplifications et pose le principe d’un dispositif technique identifié qui passe par un partenariat renforcé entre l’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires – et cela vaut dès l’étape de l’ACS. Il sera indispensable, au moment où s’engagera la phase de l’extension du tiers payant à tous, que la coopération entre l’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires conduise à la mise en place d’un dispositif respectant les exigences de simplicité, de fiabilité et d’efficacité, et prévoyant un flux unique de paiement vers le professionnel.

L’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires devront me remettre au plus tard le 31 octobre 2015 un rapport définissant les modalités opérationnelles de ce dispositif.

L’amendement AS1725 rectifié reprend la disposition du projet de loi initial prévoyant que l’obligation du tiers payant s’ajoutera aux obligations qui s’imposent aux organismes complémentaires pour bénéficier des avantages fiscaux et sociaux liés aux contrats responsables.

Par ailleurs, j’ai souhaité évidemment préciser le rôle de l’assurance maladie obligatoire dans la mise en place du tiers payant généralisé. La réussite de cette réforme implique un étroit partenariat entre l’assurance maladie et les organismes complémentaires. Il est normal que l’assurance maladie, compte tenu de sa part prépondérante dans les dépenses de santé, ait une responsabilité de premier rang dans la mise en place de cette réforme. Nous devons évidemment faire en sorte que cette part prépondérante soit bien identifiée : c’est ce qui est indiqué dans le V de l’article 18, tel que l’amendement propose de le rédiger.

Enfin, je tiens à réaffirmer clairement que la mise en place du tiers payant ne se traduira par aucun coût supplémentaire pour les médecins ni par aucune mainmise des complémentaires sur les conditions d’exercice ou les modalités de délivrance des soins par les praticiens. La position du Gouvernement n’a pas changé depuis la loi du 27 janvier 2014 relative aux réseaux de soins, qui avait consacré l’indépendance des médecins par rapport aux financeurs.

Tels sont les points que je souhaitais évoquer pour répondre aux observations des uns et des autres, préciser l’esprit dans lequel cette réforme est proposée, les objectifs de progrès et de justice sociale qu’elle poursuit, et les modalités concrètes de sa mise en œuvre opérationnelle auxquelles nous nous devons d’être particulièrement attentifs, pour répondre aux inquiétudes des professionnels. Le tiers payant n’aura de sens que si sa mise en œuvre est réussie, ce qui exigera beaucoup de précautions et un suivi étroit : d’où le calendrier qui vous est proposé dans l’amendement AS1725.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Personne ne sera surpris que je rende un avis défavorable sur les amendements de suppression. J’ai entendu, ici comme ailleurs, que la mise en place du tiers payant pourrait entraîner une augmentation rapide de certaines dépenses. À supposer qu’une augmentation se produise, cela sera dû au fait que des gens sont pour l’heure effectivement amenés à renoncer à certains soins. N’est-ce pas justice que de leur permettre de se soigner au moment où ils en ont besoin, d’autant que cela se traduira à terme par des dépenses de santé moins élevées pour la collectivité ? Et si certains expliquent cet emballement des frais médicaux serait le fait de gens inconscients du coût que cela représente pour la collectivité et portés à une consommation déraisonnable, je trouve cela particulièrement désobligeants à l’égard de ces publics qui, bien que gagnant à peu près correctement leur vie, hésitent, passé le 20 du mois, à aller en consultation, parce qu’ils ne sont pas pris en charge au titre de la CMU ou de l’ACS. Ce n’est pas justice, et nous devons faire progresser les choses dans ce domaine.

Certes, la mise en place d’une telle réforme n’est pas exempte de difficultés. Je me réjouis des avancées qu’apporte sur ce point l’amendement du Gouvernement en termes de calendrier et de garanties. Je m’autoriserai seulement, madame la ministre, à proposer un sous-amendement qui viendra compléter les éléments que vous venez de détailler.

Les amendements AS28, AS446, AS569, AS 832 et AS1096 sont rejetés.

La Commission en vient à l’amendement AS1725 rectifié du Gouvernement, faisant l’objet de deux sous-amendements, AS1751 de M. Arnaud Robinet et AS1759 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement AS1725 rectifié vient de nous être présenté par le Gouvernement.

M. Gilles Lurton. Il y a quelques mois, madame la rapporteure, un responsable de la CMU et de la CMU-C, auteur d’un rapport sur ces organismes, nous a indiqué que 27 % des bénéficiaires de la CMU-C renoncent aux soins bien qu’ils n’aient rien à débourser pour les recevoir. En quoi le tiers payant changera-t-il quoi que ce soit pour eux ?

Le paiement du médecin sera conditionné à la télétransmission de l’acte à la sécurité sociale, avez-vous dit, madame la ministre. Cette télétransmission se fera via la carte Vitale ; or l’article L. 161-31 du code de la sécurité sociale prévoit que cette carte doit être régulièrement mise à jour. Comment le médecin sera-t-il payé si elle ne l’est pas ? De fait, certains patients n’effectuent jamais cette mise à jour que, dans certains cas, personne ne leur demande. Où en est-on, par ailleurs, de la généralisation des cartes Vitale avec photo ? J’ajoute que des personnes continuent à utiliser leur carte Vitale bien qu’elles ne cotisent plus, pour une raison ou une autre. Comment le dispositif est-il contrôlé ? De réelles questions, on le voit, se posent sur l’utilisation de cette carte.

Mme la ministre. Le délai de paiement sera effectivement garanti dès lors que l’acte aura été télétransmis, et non envoyé sous forme papier. Mais au bout du compte, le médecin sera de toute façon payé.

Quant aux modalités techniques, la nature de la carte reste bien entendu à définir : le tiers payant n’a pas vocation à s’appliquer du jour au lendemain avec le système actuel ; d’où la montée en charge par étapes, ce qui permettra de mettre au point les dispositifs techniques adéquats. À terme, le médecin n’aura qu’à télétransmettre les actes – via une carte qui sera peut-être la carte Vitale du futur – pour être remboursé par les organismes primaires et complémentaires.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Aujourd’hui, le patient fait l’avance ; lorsqu’un médecin lui signale que sa carte Vitale n’est pas à jour, le même patient, souvent, va effectuer cette mise à jour à la pharmacie d’à côté. La quasi-totalité des pharmacies sont équipées. La solution existe donc déjà, monsieur Lurton.

M. Gilles Lurton. Quel intérêt les patients auront-ils à faire ce genre de démarche s’ils n’ont plus rien à payer ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Ils y seront bien obligés : s’ils refusent, le médecin n’acceptera pas le tiers payant…

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je me souviens de l’audition à laquelle vous avez fait allusion, monsieur Lurton. Les considérations financières n’expliquent pas à elles seules le fait que certains de nos concitoyens renoncent aux soins, nous en sommes bien d’accord. Au demeurant, ce ne sont pas 27 %, mais 4 % de bénéficiaires de la CMU-C qui y renoncent ; mais combien seraient-ils si le dispositif n’existait pas ? Voilà la vraie question à poser. Bref, il faut lever tous les obstacles – pas seulement financiers, donc – qui empêchent l’accès aux soins.

M. Arnaud Richard. Sur les quelque 1 600 amendements dont nous sommes saisis, de 300 à 400 sont d’ores et déjà tombés : ce gain de temps justifierait, ce me semble, d’assouplir la règle dont nous sommes convenus pour l’organisation de nos travaux, afin de nous arrêter plus longuement sur les sujets d’importance.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Ne suis-je pas précisément en train de vous donner satisfaction ?

M. Arnaud Richard. Tout à fait, et je vous en remercie.

La généralisation du tiers payant était un engagement de campagne ; j’imagine donc que vos services y travaillent depuis au moins deux ans. S’est ensuite engagé le travail législatif proprement dit, avec la concertation et l’examen en Conseil d’État. Pourquoi donc nous avoir présenté votre amendement l’avant-veille de l’examen du texte en commission ? Pourquoi ne pas avoir eu l’intelligence de proposer cette version dès le départ ? Faut-il y voir un recul face à la pression des professionnels de santé ? Il n’y aurait rien de honteux à l’assumer… Au cours des auditions que nous avons menées, j’ai rarement senti une telle nervosité parmi les acteurs de santé. On peut toujours avancer que certains d’entre eux sont de mauvaise foi, mais un tel niveau d’incompréhension ne laisse pas d’interroger, même si j’espère, dans l’intérêt de notre pays, que les choses se débloqueront.

Mme la ministre. L’introduction de la généralisation du tiers payant dans le présent texte date de la mi-2013. Les acteurs – y compris ceux qui, depuis, ont fait part de leurs inquiétudes – étaient alors très nombreux à la soutenir. Les inquiétudes, grandissantes à l’approche de l’examen du texte, portent sans doute, au demeurant, sur des considérations plus générales, touchant à l’avenir des professions concernées ; reste que la concertation a eu lieu, notamment sur les aspects techniques qui soulevaient de légitimes questions. Je me réjouis qu’elle porte aujourd’hui ses fruits.

M. Arnaud Robinet. Le sous-amendement AS1751 est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sous-amendement AS1751 tend à supprimer les alinéas 4, 6 et 7 de l’amendement AS1725 rectifié, qui précisément détaillent les étapes de mise en œuvre. Cette proposition peut surprendre, car nous nous sommes tous félicités de cette progressivité. Avis défavorable.

Mon sous-amendement AS1759 précise les garanties qui devront être fournies aux professionnels de santé par les organismes complémentaires. Il n’y a aucune raison que la procédure soit plus lourde ou moins sécurisée, pour le professionnel de santé, selon que la part payée l’est au titre de la couverture de base ou de la couverture complémentaire.

Le rapport qui devra être remis au 31 octobre 2015, devra donc également déterminer les solutions techniques assurant aux professionnels de santé la simplicité d’utilisation, la lisibilité du droit et la garantie de paiement, quelles que soient les parts respectivement couvertes par les régimes obligatoires et complémentaires.

Mme la ministre. Avis favorable au sous-amendement AS1759.

La Commission rejette le sous-amendement AS1751.

Elle adopte le sous-amendement AS1759.

Puis elle adopte l’amendement AS1725 rectifié sous-amendé.

En conséquence, l’article 18 est ainsi rédigé et tous les autres amendements déposés sur l’article tombent.

*

Après l’article 18

La Commission est saisie de l’amendement AS1478 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Cet amendement vise à prévoir que le Gouvernement présente au Parlement un rapport indiquant les modalités selon lesquelles instaurer la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) à Mayotte. Devant la situation dramatique sur place, des assurances me sont venues de la part du Gouvernement qu’il pourrait voir cet amendement avec bienveillance.

M. Bernard Accoyer. La maîtrise des flux migratoires dérape à Mayotte, mais il s’y observe aussi un dérapage des dépenses à caractère sanitaire. Il s’agit donc d’une question que nous devons aborder avec une grande prudence, en nous appuyant sur une étude d’impact valable.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour le titre II. Avis défavorable. En l’absence de la ministre, je peux seulement vous conseiller, madame Orphé, de déposer à nouveau l’amendement en séance publique.

L’amendement est retiré.

*

Article 19
(art. L. 4122-1 du code de la santé publique)

Évaluation par les conseils nationaux des ordres professionnels médicaux des situations de refus de soin illégitimes

L’article 19 confie aux conseils nationaux de chacun des ordres professionnels médicaux une mission d’évaluation du respect, par les membres de ces ordres, du principe de non-discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins établi par l’article L. 1110-3 du code de la santé publique. La mise en œuvre, définie par décret, pourrait prendre la forme d’observatoires des refus de soins visant à mieux objectiver ces comportements, et à améliorer la lutte contre cette atteinte à l’égalité dans l’accès aux soins.

Le principe de non-discrimination dans l’accès aux soins

L’article L. 1110-3 du code de la santé publique dispose qu’aucune personne ne peut faire l’objet de « discriminations dans l’accès à la prévention ou aux soins » et indique qu’un professionnel de santé ne peut refuser de soigner une personne pour l’un des motifs discriminatoires mentionnés aux articles 225-1 et 225-1-1 du code pénal, qui disposent que « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation ou identité sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ou « toute distinction opérée entre les personnes parce qu’elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel ou témoigné de tels faits ».

L’article 54 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a complété cet article afin d’y mentionner de façon expresse l’interdiction faite à un professionnel de santé de refuser de soigner une personne au motif qu’elle est bénéficiaire de la couverture maladie universelle (CMU), de la CMU complémentaire ou de l’aide médicale d’État.

L’article L. 1110-3 définit des voies de recours pour toute personne « qui s’estime victime d’un refus de soins illégitime » : cette mention établit, a contrario, le fait que certains refus de soins par le médecin peuvent être légitimes.

La personne peut saisir des faits qui permettent de présumer l’existence de ce refus de soin illégitime, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de l’ordre professionnel concerné. Cette saisine vaut dépôt de plainte. Le professionnel de santé mis en cause est convoqué par l’ordre ou la caisse d’assurance maladie. Une procédure de conciliation est définie. Si elle n’aboutit pas et en cas de carence de l’instance territorialement compétente de l’ordre professionnel, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie peut prononcer une sanction à l’encontre du professionnel de santé. Définie à l’article L. 162-1-14-1 du code la sécurité sociale, il s’agit d’une « pénalité financière forfaitaire, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale ». Le montant maximal est donc aujourd’hui de 6 340 euros.

La nécessité d’objectiver les refus de soins

Les sanctions administratives prononcées sont rares, et plus encore les procédures engagées devant le juge pénal. Pourtant de nombreux travaux font état de difficultés pour les bénéficiaires de la CMU d’accéder aux professionnels de santé dans les mêmes conditions que l’ensemble des assurés, alors même que leur couverture spécifique est censée lever l’obstacle directement financier.

Ce phénomène des « refus de soins » apparaît multiforme et encore mal défini. Il est marqué par de fortes disparités territoriales, ou selon les catégories de professionnels de santé ou en fonction de leurs modalités d’exercice. Le refus illégitime du professionnel de santé de recevoir un patient en raison des conditions de prise en charge de sa couverture maladie peut être direct et explicite. Il est beaucoup plus fréquemment tacite et implicite.

Une circulaire n° 33/2008 de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) du 30 juin 2008 a tenté de recenser des manifestations de refus de soins implicites ou indirects. Elle cite :

– la fixation tardive, inhabituelle et abusive d’un rendez-vous ;

– l’orientation répétée vers un autre confrère, un centre de santé ou la consultation externe d’un hôpital, sans raison médicale énoncée ;

– le refus d’élaborer un devis ;

– le non-respect des tarifs opposables ;

– l’attitude et le comportement discriminatoires du professionnel de santé : la dispense volontaire de soins de mauvaise qualité, l’acceptation du patient dans des conditions différentes du reste de la patientèle ;

– le refus d’accorder la dispense d’avance des frais.

Auditionné par votre rapporteure, le Défenseur des droits a confirmé que les données sur les refus de soins illégitimes ne sont aujourd’hui ni suffisamment précises ni suffisamment actualisées ce qui rend malaisée la définition d’une politique visant à les réduire.

Les contours de la mission confiée aux conseils nationaux des ordres professionnels médicaux.

L’article L. 4121-1 du code de la santé publique dispose que l’ordre national des médecins, celui des chirurgiens-dentistes et celui des sages-femmes groupent obligatoirement tous les médecins, les chirurgiens-dentistes ou les sages-femmes habilités à exercer. L’article L. 4121-2 prévoit que ces ordres veillent au maintien des principes de moralité, de probité, de compétence et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine, de l’art dentaire, ou de la profession de sage-femme et à l’observation, par tous leurs membres, des devoirs professionnels, ainsi que des règles édictées par le code de déontologie.

L’article L. 4122-1 du code de la santé publique prévoit que conseil national de l’ordre remplit sur le plan national la mission dévolue à chaque ordre professionnel et veille à l’observation, par tous les membres de l’ordre, des devoirs professionnels et des règles édictées par le code de déontologie.

Votre rapporteure relève donc que le conseil national est, en l’état du droit, déjà compétent pour examiner la situation des refus de soins, puisque ces derniers sont contraires à la déontologie médicale. S’ils ne figurent pas de façon expresse dans le code de la déontologie médicale dans sa rédaction actuelle, certaines de ses dispositions s’y rapportent indubitablement.

Ainsi l’article 6 prévoit que « le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l’exercice de ce droit » et l’article 7 indique que « le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard. Il doit leur apporter son concours en toutes circonstances. Il ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne examinée ».

Aussi, l’alinéa unique de l’article 19 modifie l’article L. 4122-1 afin de confier, de façon expresse, à ces conseils nationaux, une mission nouvelle d’évaluation de la portée et des effets des refus de soins illégitimes par leurs membres. L’article 19 précise que « selon des modalités précisées par décret », le respect par les membres de l’ordre du principe de non-discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins pourra être apprécié « en réalisant ou faisant réaliser des tests permettant de mesurer l’importance et la nature des pratiques de refus de soins. » 

Il s’agira de tests de situation dits « scientifiques », permettant de disposer de données objectives sur les comportements des professionnels et non de tests de situation à visée pénale destinés à fonder des poursuites contre un professionnel particulier.

L’organisation de ces opérations pourra être réalisée par des prestataires indépendants, dans le cadre de conventions conclues par les ordres. La mise en œuvre de ces tests passe généralement par la constitution de deux groupes : un groupe de référence qui ne présente aucune des variables que lon cherche à tester, et le groupe de contrôle présentant la variable susceptible de faire l’objet d’une discrimination. Des garanties méthodologiques devront être apportées.

Le choix de confier cette mission aux conseils nationaux paraît logique : les conseils départementaux exercent les attributions générales de l’ordre dans le cadre départemental et, comme l’indique l’article L. 4123-1 « sous le contrôle du conseil national ». Les commissions de conciliation, compétentes en cas de plaintes reçues par l’ordre conformément à l’article L. 4123-2, sont constituées auprès de chaque conseil départemental : leur carence entraîne la compétence du conseil national. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir la constitution d’observatoires auprès de chaque conseil départemental : la pratique des refus de soins illégitimes est en tout état de cause disparate au plan national et il reviendra aux ordres nationaux de fournir progressivement des éléments objectifs permettant d’en mesurer la portée.

L’exposé des motifs indique qu’un bilan annuel de ces travaux sera adressé par les ordres au ministre chargé de la santé et au Défenseur des droits : le décret le prévoira sans précision légale supplémentaire.

La compétence du Défenseur des droits ne saurait en effet figurer à l’article L. 4122-1 car elle relève de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au défenseur des droits, dont l’article 4 dispose qu’il est chargé « de lutter contre les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France ainsi que de promouvoir l’égalité ».

Votre rapporteure salue le choix de procéder par étapes et de responsabiliser les ordres professionnels.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté un amendement présenté par la rapporteure prévoyant que les conseils nationaux des ordres professionnels évaluent les pratiques de refus de soin en lien avec les associations de patients agréées en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique.

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La Commission est saisie des amendements identiques AS447 de M. Jean-Pierre Door et AS835 de M. Bernard Accoyer.

M. Élie Aboud. La pratique du testing est profondément vexatoire pour le corps médical. L’ordre des médecins joue déjà son rôle. Je ne connais pas de médecin qui refuse les soins à un malade. Aussi voulons-nous la suppression de cet article.

M. Bernard Accoyer. Pareille pratique serait en effet inacceptable, humiliante et stigmatisante. L’ordre des médecins est là pour faire régner la discipline professionnelle parmi eux. Les praticiens sont en réalité plus souvent au bord du burn-out. Ils ne sauraient être surveillés comme à l’entrée d’une boîte de nuit. Aucune autre profession de services à la personne n’est soumise à une telle mesure. Cette stigmatisation relève d’une insupportable résurgence de la lutte des classes.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ces propos très forts ne reflètent pas la réalité de l’article que nous examinons. Pour préciser la portée et les motifs d’un refus de soins illégitime, le projet de loi s’appuie au contraire sur les ordres professionnels, garants du respect de la déontologie médicale. Loin de toute démarche répressive ou de stigmatisation des médecins, il confie en effet aux ordres nationaux de chacun des ordres professionnels médicaux le soin de mener cette évaluation. Les modalités d’application du présent article seront prévues par décret. L’instance de contrôle pourra prendre la forme d’un observatoire de refus de soins. Je souligne que cet article a fait l’objet d’échanges préalables avec la profession médicale et les associations. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS213 de M. Jean-Louis Roumegas.

Mme Véronique Massonneau. Le projet de loi relatif à la santé fixe l’objectif de lutter contre le refus de soins. À ce titre, et afin d’appuyer concrètement cette orientation, cet amendement propose de créer une liste de critères permettant de mieux caractériser les refus.

Cet amendement a donc une large portée : il inclut non seulement les refus de soins à raison de la situation sociale des personnes, de leur état de santé, de leurs pratiques ou de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, mais aussi de leur âge, notamment pour les personnes vieillissantes en situation de dépendance, prises en charge en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), et pour lesquelles des dysfonctionnements ont pu être observés, notamment des réorientations abusives vers des services d’urgence.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Vous proposez en réalité deux mesures, d’abord de définir très précisément par la loi les situations assimilées à des refus de soins, ensuite de permettre à des associations d’exercer les droits de la personne s’estimant victime d’un refus de soins illégitime. À mon sens, nous ne pouvons définir une politique d’ensemble à partir des données dont nous disposons aujourd’hui. Comme le Défenseur des droits en est lui-même convenu au cours de son audition devant notre commission, des données fiables et mises à jour font défaut sur les refus de soins illégitimes. L’article 19 vise précisément à se donner les moyens d’objectiver les choses. À partir du constat actuel, il me semble difficile de définir une politique répressive. Avis défavorable.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Cet amendement a le mérite d’attirer l’attention sur ce que peut être un refus de soins. Quand la loi impose le tiers payant, il n’est pas admissible que le médecin exige un paiement par le patient. Si un seul d’entre eux le fait, c’est encore un cas de trop. Confrontés ensuite à la demande de remboursement du patient, les services de la sécurité sociale devraient au demeurant être alertés et réagir grâce à leurs médecins contrôleurs.

M. Élie Aboud. Nous sortons cependant du cas de refus de soins. Madame la présidente, le cas que vous évoquez peut en effet se présenter. Mais faire payer le patient n’est pourtant pas refuser de le soigner.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Certains patients ressortent d’un cabinet médical parce qu’ils ne peuvent pas payer. J’en ai personnellement recueilli le témoignage, même si je reconnais que de tels faits ne concernent qu’une infinie minorité de médecins, à cause desquels l’ensemble de la profession ne saurait être stigmatisé. Si un seul cas se présente, c’est cependant inacceptable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS618 de Mme Annie Le Houérou et AS859 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Marie-Françoise Clergeau. L’amendement AS618 vise à renforcer le rôle du Défenseur des droits, afin que ce dernier puisse s’impliquer pleinement et coordonner les actions menées par les différents ordres professionnels, qui devront lui remettre un bilan annuel de leur activité.

M. Élie Aboud. L’amendement AS859 va dans le même sens. Il vise à étendre l’information donnée au conseil national consultatif des personnes handicapées et à la conférence nationale de santé, pour améliorer la communication entre le Défenseur des droits et les organismes concernés.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Les compétences du Défenseur des droits sont fixées par la loi organique. L’article 19 implique les ordres professionnels, pour qu’ils se saisissent de la question des refus de soins. Rien n’empêchera ensuite un rapprochement entre ces ordres et le Défenseur des droits, qui pourra intervenir dans les formes prévues par la loi organique. Si ces amendements n’étaient pas retirés, je devrais émettre un avis défavorable à leur adoption.

Les amendements sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement AS324 de M. Jean-Pierre Door.

M. Élie Aboud. L’organe évaluateur ne peut pas être aussi celui qui sanctionne.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Vous supprimez par votre amendement la nouvelle mission qu’il est pourtant souhaitable de confier à l’ordre des médecins. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS276 de la rapporteure et AS1469 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Mon amendement vise à compléter l’article, en prévoyant, au moment de la constitution des observatoires professionnels de refus de soins, la participation d’associations de patients agréés au titre de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique.

Mme Martine Pinville. Je partage tout à fait l’avis de la rapporteure.

M. Bernard Accoyer. Il y a déjà, dans les compétences des ordres professionnels, tout l’arsenal nécessaire pour répondre à d’éventuelles plaintes sur ce fondement. Il me semble qu’il y a mieux à faire que de poursuivre le harcèlement d’une profession qui n’a certainement pas besoin de cela en ce moment.

La Commission adopte les amendements.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS30 de M. Jean-Pierre Door, AS483 de M. Dominique Tian, AS571 de M. Fernand Siré et AS1099 de M. Arnaud Richard.

M. Élie Aboud. Le conseil national de l’ordre des médecins a mieux à faire qu’à réaliser des contrôles dans les cabinets médicaux sur d’éventuels refus de soins. Pour un problème marginal, la loi jetterait en outre le discrédit sur toute une profession.

M. Fernand Siré. Je signale seulement que nous évoquons toujours les droits du patient, mais jamais ses devoirs. Parfois, un médecin refuse seulement de soigner un patient parce que celui-ci refuse de se conformer à ses prescriptions ou ne tient pas ses rendez-vous. Comme les médecins, les patients ont des devoirs.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je conviens volontiers qu’un médecin ne saurait être accusé d’un refus de soins s’il y a violence dans son cabinet.

M. Arnaud Richard. La fin de l’article stigmatise les personnels de santé, mais place aussi les ordres professionnels en position de juge et partie, créant un dispositif inefficace. Mon amendement vise ainsi à supprimer la possibilité de réaliser des opérations de tests de situation.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Quand on parle de l’article 19, nous évoquons des dispositions qui visent à objectiver des situations de refus de soins illégitimes, tout en reconnaissant que le refus peut être parfois légitime. Aussi le testing prévu n’a-t-il pas de visée judiciaire. Il ne cherche pas à mettre en cause des professionnels de santé, mais vise au contraire à faciliter une évaluation ou des sondages scientifiques, selon des méthodes analogues à celles pratiquées pour des études de marché. Sur un grand nombre de demandes adressées à des médecins, il s’agira seulement d’analyser et de dégager les critères de refus de soins. Je ne voudrais donc pas qu’on fasse naître de fausses inquiétudes. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS214 de M. Jean-Louis Roumegas.

Mme Véronique Massonneau. La lutte contre le refus de soins est l’un des objectifs du présent projet de loi. Cependant, il est important qu’il ne revienne pas au patient de prouver le refus de soins, mais au professionnel d’apporter tout élément de nature à justifier son refus.

M. Élie Aboud. Je ne comprends pas le sens de cet amendement. Croit-on que le professionnel va appeler le conseil de l’ordre pour signaler qu’il a refusé des soins et en donner le motif ?

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. Il ne s’agit pas de susciter la défiance, mais de se doter d’outils efficaces pour mieux connaître les obstacles à l’accès aux soins.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS215 de M. Jean-Louis Roumegas.

Puis la Commission adopte l’article 19 modifié.

Après l’article 19

La Commission est saisie de l’amendement AS219 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. La législation prévoit une dérogation à la mise en accessibilité des cabinets médicaux situés dans des immeubles d’habitation. En vertu du principe de non-discrimination, un cabinet médical doit pourtant être accessible aux personnes handicapées. L’amendement vise ainsi à limiter cette dérogation, lorsque des travaux sont possibles, aux établissements non médicaux.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit d’une proposition de bon sens. L’ordonnance qui introduit cette dérogation fait l’objet d’un projet de loi de ratification qui est déposé au Sénat et sera ensuite examiné par notre assemblée. Le problème que vous soulevez méritera donc d’être soulevé dans le cadre de ce débat de ratification. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer. Chacun ne peut être que favorable à la mise en accessibilité. Quand un médecin part à la retraite et peine à trouver un successeur, l’absence de facilités d’accès à son cabinet peut être l’une des causes de son non-renouvellement. La démarche qui inspire cet amendement me semble donc constructive.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS861 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à améliorer la démocratie sanitaire en ouvrant les possibilités de mise en lumière des pratiques discriminatoires des professionnels de santé par le Défenseur des droits.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il ne relève pas d’une simple loi de fixer les attributions du Défenseur des droits, puisqu’elles sont définies par une loi organique. Il appartient au Défenseur des droits de se saisir librement des faits portant atteinte au principe d’égalité. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS221 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement prend en compte le fait que l’ouverture des droits à la couverture maladie universelle comme à la couverture maladie universelle complémentaire est seulement valable un an, nécessitant un renouvellement annuel assez laborieux. Dès lors, il est proposé d’instaurer une obligation d’information des bénéficiaires deux mois avant l’expiration de leurs droits. J’ajoute que cet amendement s’inspire de préconisations formulées dans un rapport de la sénatrice Aline Archimbaud, qui a montré que ces formalités représentaient non moins de quarante pages à remplir.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je voudrais que nous abordions de nouveau ce problème ultérieurement. Je comprends votre souhait, mais je pense que l’amendement trouve déjà satisfaction dans le droit actuel. Encore faudrait-il le vérifier, surtout s’agissant du délai. Peut-être s’agit-il seulement de mieux faire connaître les possibilités existantes.

M. Jean-Louis Roumegas. Je vais donc retirer mon amendement, mais je le déposerai à nouveau en séance publique, si possible sur la base d’un travail commun, pour que le Gouvernement prenne conscience du problème.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS216 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’évaluation du principe de non-discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins mérite d’être confiée à un observatoire indépendant, rassemblant représentants de l’assurance maladie et des ordres concernés, mais aussi représentants d’usagers.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’article 19, que nous venons d’adopter, va déjà dans votre sens. Il faut prendre garde de superposer les instances d’observation. La nouvelle disposition adoptée serait superfétatoire. Si cet amendement n’était pas retiré, je devrais émettre un avis défavorable à son adoption.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette ensuite l’amendement AS860 de Mme Bérengère Poletti.

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Article 20
(art. L. 162-9 et L. 165-6 du code de la sécurité sociale)

Accès aux soins optiques, audioprothétiques et dentaires des bénéficiaires
de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé

L’article 20 vise à améliorer l’accès des populations précaires aux soins dentaires prothétiques et orthodontiques ainsi qu’aux dispositifs médicaux optiques et audioprothétiques pour lesquels on constate que les restes à charge des patients sont élevés et les renoncements aux soins importants. Il s’agit d’instaurer, pour les bénéficiaires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé (ACS), un panier de soins à tarifs opposables.

L’article 20 confie donc aux partenaires conventionnels la capacité de fixer les tarifs maxima applicables aux biens concernés pour les bénéficiaires de l’ACS, à l’instar de ce qui est déjà appliqué en matière de couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C).

Les bénéficiaires de l’ACS : un public en risque de renoncement aux soins

Alors que la CMU-C, définie à l’article L. 861-1 du code de la sécurité sociale, offre une protection complémentaire santé gratuite aux demandeurs dont les ressources annuelles sont inférieures à un plafond, l’ACS, définie aux articles L. 863-1 et suivants du même code, a été créé par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie afin d’atténuer l’effet de seuil de la CMU-C. Elle consiste en une aide financière au paiement d’un contrat d’assurance maladie complémentaire de santé pour les personnes dont les revenus ne dépassent pas le plafond de la CMU-C majoré de 35 %.

La caisse d’assurance maladie délivre une attestation de droit, à partir d’un formulaire de demande : le bénéficiaire de l’attestation l’utilise auprès d’un organisme d’assurance complémentaire de santé qui déduit l’aide du montant de la cotisation. Sont éligibles les contrats individuels qui respectent les règles des contrats responsables : la réforme des contrats ACS, engagée par l’article 56 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014, vise à améliorer la qualité de ces contrats.

PLAFOND DE RESSOURCES POUR L’ACCÈS À L’ACS
SELON LE LIEU DE RÉSIDENCE ET DE LA COMPOSITION DU FOYER

Fin décembre 2013, on compte 1,2 million de bénéficiaires d’une attestation, en hausse de 15,1 % par rapport à l’année 2012. C’est l’effet de la revalorisation au 1er juillet 2013 du plafond de la CMU-C à hauteur de 8,3 %, portant ainsi le plafond au niveau du seuil de pauvreté. À la même date, plus de 885 000 bénéficiaires d’une attestation l’ont utilisée pour acquérir une complémentaire. La dépense a été financée par le fonds CMU à hauteur de 234 millions d’euros.

Des difficultés aggravées pour certains soins et produits de santé

Si l’avenant 8 à la convention médicale prévoit que les médecins sont tenus de ne pas pratiquer de dépassements d’honoraire à l’égard des bénéficiaires de l’ACS, les dépassements sont libres pour les autres professionnels de santé et le reste à charge est important pour les soins visés par le présent article.

Selon l’enquête 2012 sur la santé et la protection sociale (64) de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), le renoncement aux soins pour raisons financières concerne, en matière de soins dentaires, 18 % des bénéficiaires de l’assurance maladie âgés d’au moins 18 ans et 10 % pour les soins d’optique. Les personnes appartenant aux 20 % de ménages les plus pauvres sont 15 % à déclarer un renoncement à des soins d’optique pour raisons financières, un taux près de quatre fois plus élevé que pour les personnes appartenant aux 20 % les plus riches.

On constate ces niveaux de renoncement aux soins lorsque les revenus se situent dans les premier et deuxième quintiles alors même que la couverture complémentaire atteint près de 95 % de la population en 2012 : 89 % au moyen d’un contrat de complémentaire santé privé, le cas échéant acquis au moyen de l’ACS et 6 % relevant de la CMU-cC. L’accès à la couverture maladie complémentaire ne lève donc pas tous les obstacles tarifaires.

Les renoncements aux soins dentaires sont donc d’abord dus aux niveaux de prix des soins, issue de la distinction entre d’une part les soins conservateurs et chirurgicaux, remboursés à 70 % d’un tarif opposable, et d’autre part les soins prothétiques principalement remboursés par les organismes complémentaires et dont les honoraires ont été laissés libres (65) en contrepartie d’une progression faible du tarif des soins conservateurs. En conséquence, le prix des soins prothétiques a très fortement augmenté et la part des dépassements dans le total des honoraires a progressé, passant de 47,6 % en 2004 à 53 % en 2012, pour un montant total de 4,7 milliards d’euros.

En matière d’audioprothèses, le taux moyen de reste à charge atteint 60 % en 2009, et s’explique par la déconnexion entre les tarifs retenus par l’assurance maladie comme base du remboursement et les prix des dispositifs médicaux effectivement proposés par les audioprothésistes

En matière d’optique, la part prise en charge par les organismes complémentaires représente 68,4 % du total en 2011, soit près de vingt fois la part de l’assurance maladie obligatoire. Le montant du reste à charge pour les ménages atteint 1,42 milliard d’euros.

L’adaptation des conventions applicables aux professionnels et producteurs concernés

En conséquence l’article 20 prévoit que les conventions applicables devront définir des plafonds tarifaires pour les bénéficiaires de l’ACS.

Le I modifie l’article L. 162-9 du code de la sécurité sociale relatif aux rapports entre les organismes d’assurance maladie et les chirurgiens-dentistes, régis par des conventions nationales, conclues entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) et une ou plusieurs des organisations syndicales nationales les plus représentatives de cette profession. Le 8° de cet article prévoit actuellement que la convention nationale intéressant les chirurgiens-dentistes fixe, pour les bénéficiaires de la CMU-c, le montant maximal des dépassements autorisés pour les produits mentionnés au 3° de l’article L. 861-3, donc les soins dentaires prothétiques ou d’orthopédie dento-faciale. Le I insère la référence aux bénéficiaires de l’ACS, afin de les faire entrer dans le champ du dispositif.

Le II de l’article 20 modifie l’article L. 165-6 du code de la sécurité sociale qui définit le périmètre des conventions sur les tarifs des dispositifs médicaux inscrits sur la liste de produits et prestations (LPP) admis au remboursement par l’assurance maladie. Ceci concerne donc les biens optiques et de l’audioprothèse.

Les modifications apportées par le prennent la forme du remplacement de l’alinéa premier de l’article L. 165-6 dans sa rédaction actuelle, mais sont de portée limitée : à la mention des « dispositifs médicaux à usage individuel » est substituée celle des « produits et prestations de santé mentionnées à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale », qui a le même objet ; la référence aux « modalités de dispense d’avance de frais » est remplacée par les modalités « du mécanisme de tiers payant », par harmonisation avec la terminologie retenue par l’article 18 du projet de loi. La seule différence avec la pratique actuelle concerne l’introduction de l’UNCAM parmi les signataires de la convention, au côté des organismes d’assurance maladie. Par coordination, cette modification est reprise au dernier alinéa de l’article, par le de l’article 20.

Sur le fond, les accords conclus entre d’une part l’assurance maladie et les organismes complémentaires et d’autre part les distributeurs des produits et prestations peuvent, comme dans le droit existant, être conclus « à l’échelon local ou national » et concerner « la qualité et les prix maximum pratiqués, sous réserve que les prix de ces produits n’aient pas fait l’objet d’une décision de fixation de prix par le comité économique des produits de santé », en application de l’article L. 165-3.

La modification principale est apportée par le 2° : le deuxième alinéa de l’article L. 165-3 ne prévoit actuellement que l’obligation d’adaptation des accords « à la situation des bénéficiaires du droit à la protection complémentaire en matière de santé », c’est-à-dire de la CMU-C. Le a) du 2° propose une nouvelle rédaction qui prévoit que les accords peuvent prendre en compte non seulement la situation des bénéficiaires de la CMU-C et relevant de l’article L. 861-3, mais également bénéficiaires de l’ACS, visée à l’article L. 863-2. Le b) insère la mention de ces assurés dans la phrase suivante, qui vise à préciser que l’accord peut définir le montant maximal pouvant être facturé pour ces produits.

L’étude d’impact jointe au projet de loi indique que les négociations pourraient aboutir à fixer des tarifs plus élevés pour les bénéficiaires de l’ACS que pour les bénéficiaires de la CMU-C.

En cas de silence de la convention, ces tarifs seraient fixés par arrêté. L’alinéa 3 de l’article L. 165-3 prévoit en effet qu’en absence d’accord ou lorsque les dispositions de l’accord ne répondent pas aux conditions définies précédemment, un arrêté fixe, après avis du comité économique des produits de santé, les obligations tarifaires s’imposant aux distributeurs.

Enfin, il convient de préciser que le plafonnement des tarifs ne permet de diminuer le reste à charge que sous réserve d’un maintien d’une garantie de qualité par la couverture complémentaire. C’est l’objet de la définition des niveaux minimaux de garanties par le cahier des charges des contrats éligibles à l’ACS dans le cadre de la procédure de mise en concurrence prévue par l’article 56 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté cet article moyennant une modification de précision proposée par la rapporteure.

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La Commission examine les amendements identiques AS1026 de M. Arnaud Robinet et l’amendement AS1265 de Mme Dominique Orliac.

M. Élie Aboud. Si l’on veut assurer un haut niveau de protection dentaire pour les publics les plus fragiles, il faut revoir, pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU), les plafonnements d’honoraires des actes prothétiques et des actes d’orthodontie.

Mme Dominique Orliac. Cet article 20 a pour objet l’instauration de « tarifs sociaux » en dentaire et en optique au profit des bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé (ACS) : à l’instar des bénéficiaires de la CMU-C, ils bénéficieraient de tarifs plafonnés chez les dentistes et les opticiens.

Mais ce type de mesure porte en elle des risques. D’une part, elle pourrait être considérée comme stigmatisante par les bénéficiaires de l’ACS et générer des refus de soins à leur égard. D’autre part, elle conduirait à protéger seulement une partie de la population, dans des secteurs où les restes à charge sont importants et génèrent des renoncements aux soins pour une population bien plus large que les bénéficiaires de l’ACS.

Une telle mesure pourrait donc conduire à une augmentation des dépassements pratiqués dans ces secteurs sur le reste de la population, non protégée par ces « tarifs sociaux » et aller à l’encontre du but recherché, à savoir l’égal accès aux soins pour tous.

M. Bernard Accoyer. Nous voyons en effet les effets secondaires redoutables des mécanismes dont la mise en place obsède le Gouvernement. Dans le domaine de la médecine dentaire, la nomenclature est complètement obsolète, n’ayant pas été remise à jour depuis des décennies. Les tarifs actuels sont notamment déconnectés de la réalité des coûts des prothèses. C’est une évidence pour tout le monde. Alors que le Gouvernement considère que le tiers payant généralisé, auquel la profession médicale s’oppose à juste titre, représente la panacée, mieux vaudrait admettre que l’accès à certains soins, tels que les soins dentaires, optiques ou audioprothétiques, posent problème. Plutôt que d’affronter ces difficultés, le Gouvernement préfère malheureusement ouvrir un conflit avec la profession médicale en déclenchant en son sein une crise sans précédent.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. En supprimant l’alinéa premier, ces amendements vident l’article de son contenu. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1358 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Cet article vise à encadrer les tarifs des prestations d’optique et de soins dentaires prothétiques et orthodontiques. Il nous semble souhaitable d’associer aux accords d’encadrement les fabricants des dispositifs médicaux, à l’instar, par exemple, des prothésistes dentaires. Il s’agit d’un amendement de bon sens.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision AS1570 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1589 de Mme Dominique Orliac.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. Je m’interroge sur l’objectif de l’amendement, qui restreint la portée de la mesure aux bénéficiaires de la CMU-C.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1588 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Je souligne que le renoncement aux soins concerne d’abord les soins dentaires, l’optique et les audioprothèses.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. L’article prévoit déjà ce que vous proposez.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte ensuite l’article 20 modifié.

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Après l’article 20

La Commission est saisie de l’amendement AS225 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement vise à supprimer le ticket modérateur pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État. Soulignons d’ailleurs que cette disposition n’a jamais été appliquée.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Conformément à l’avis de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS535 de M. Fernand Siré.

Puis elle est saisie de l’amendement AS932 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Marie-Françoise Clergeau. L’amendement vise à éviter qu’un malade en soins ambulatoires ne soit isolé et ne puisse faire valoir devant une personne compétente les souffrances qu’il endure ou encore trouver les solutions médicales les plus adaptées à ces souffrances. Il doit pouvoir trouver le référent le plus proche afin d’obtenir les informations et l’accompagnement souhaité pour, le cas échéant, pouvoir bénéficier des soins palliatifs.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. L’article L.1110-9 du code de la santé publique définit déjà ce droit aux soins palliatifs.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Je comprends. Je vais donc retirer l’amendement, mais je vérifierai ce point.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS224 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement vise à élargir aux bénéficiaires de l’aide médicale d’État l’accès la carte Vitale dans les mêmes conditions que pour les assurés sociaux.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS621 de Mme Annie Le Houérou.

Mme Annie Le Houérou. Il s’agit d’imposer aux différents organismes en charge des aides techniques l’obligation d’informer par écrit leurs bénéficiaires que le prêt de matériel est possible.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Même si l’on peut partager votre souhait de mieux diffuser l’information, cet amendement n’est pas du domaine de la loi, tel qu’il est rédigé. Peut-être faudrait-il travailler à une autre formulation. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS620 de Mme Annie Le Houérou.

Mme Annie Le Houérou. L’amendement prévoit que l’observatoire du marché et des prix des aides techniques fixe un prix limite de vente du matériel et qu’il soit habilité à en assurer le contrôle. Car une inflation artificielle des prix du matériel est constatée en l’absence de fixation de prix maximum.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je ne peux que recommander un retrait, car ces dispositions ne relèvent pas, sous cette forme, du domaine de la loi. Il faudrait définir de manière plus précise les compétences de cet observatoire.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il s’agit néanmoins d’un vrai sujet. Le tarif de remboursement n’augmente pas, tandis que l’industrie relève ses prix, de sorte que les professionnels soit facturent le matériel à la sécurité sociale sous le prix auquel ils l’ont acheté soit sont contraints d’en refuser la délivrance, s’ils veulent conserver des marges.

L’amendement est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS882 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. L’amendement vise à ce que, dans un délai d’un an suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement une étude relative à la pondération des actes médicaux en fonction du handicap. Cela permettrait au comité interministériel du handicap de tenir sa feuille de route, qui prévoit l’étude sur la pondération des actes médicaux en fonction du handicap.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

*

Chapitre IV
Mieux informer, mieux accompagner les usagers dans leur parcours de santé

Article 21
(art. L. 1111-1-1 [nouveau] et L. 1431-2 du code de la santé publique)

Instauration d’un service public d’information en santé

Cet article prévoit la mise en œuvre d’un service public d’information en santé. Plus que jamais acteurs de leur santé, les patients doivent pouvoir disposer d’un service d’information proposant divers services depuis la prévention à l’orientation dans le système de santé. Il sera mis en place au niveau national et au niveau régional via les agences régionales de santé (ARS).

1.  Des informations en santé éparses et mal identifiées

Selon l’étude d’impact, de nombreux sites publics d’information existent. Une trentaine a été dénombrée comprenant ceux du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, de l’assurance maladie, de la Haute autorité de santé (HAS), de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), de l’Institut national de la prévention et de l’éducation à la Santé (INPES), de l’Institut national du cancer (INCa).

Bien qu’utiles et riches, les informations diffusées restent toutefois éparpillées et manquent parfois de cohérence. Il apparaît donc difficile de s’y retrouver d’autant que, selon l’étude d’impact, « ces contenus procèdent des missions des institutions qui les produisent, ce qui ne coïncide pas nécessairement avec les besoins des usagers ».

Un état des lieux a été réalisé par l’inspection générale des affaires sociales qui a rendu ses conclusions dans un rapport remis en juin 2014. Il a notamment permis de préciser le périmètre des services projetés, de proposer le contenu du cahier des charges et d’estimer les coûts de réalisation et de maintenance d’un tel dispositif ainsi que les économies induites par cette rationalisation. Il a enfin permis de poser les bases de la gouvernance coordonnée du service public ainsi constitué (66).

2.  La mise en place d’un service national en santé unifié et cohérent

Le I de cet article créé au sein de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du Livre 1er de la première partie du code de la santé publique, relative aux principes généraux de l’information des usagers du système de santé, un nouvel article L. 1111-1-1.

Le premier alinéa définit les contours du service public d’information en santé (SPIS). L’objectif n’est pas de construire un site Internet qui se substituerait aux sites publics existants. Il est d’organiser un service cohérent et unifié du point de vue de l’internaute grâce à un portail commun. Celui-ci proposera une répartition plus claire des compétences attribuées à chaque émetteur public en matière de diffusion d’information, d’harmonisation des règles de navigation ou de présentation. Au regard de l’importance des contenus et des finalités poursuivies en matière d’information des usagers, sont principalement concernés, la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la Haute autorité de santé, l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’institut national du cancer et les agences régionales de santé. Ce système a ainsi vocation à couvrir le champ de la santé mais aussi le domaine médico-social et, pour partie, social, afin de coordonner l’action des différents émetteurs publics d’information.

Internet sera bien évidemment le support central de diffusion de l’information. L’accès au portail pourra également être assuré par le biais de la téléphonie mobile. Cette dernière option permettra d’assurer une aide à l’orientation associée à un service de géolocalisation.

Par ailleurs, certains services offerts sous forme de plate-forme téléphonique sont actuellement accessibles (INCa) ou le seront prochainement (CNSA). Ils ont évidemment vocation à être maintenus dans le futur SPIS.

Le but poursuivi est triple. Il vise tout d’abord à réduire les inégalités dans l’accès à l’information. Il a pour objet d’améliorer l’efficience du système de santé. Des économies peuvent ainsi être facilitées par la diffusion d’une meilleure information auprès des patients des citoyens. Enfin, le service public a vocation à rendre les parcours de santé plus lisibles et plus accessibles.

Un cahier des charges devrait être élaboré à cet effet par une équipe projet qui sera prochainement mise en place. Elle s’appuiera sur des travaux actuellement conduits par l’IGAS visant à proposer les principaux éléments de structuration du futur SPIS : principaux contenus attendus, scénarios de répartition des compétences, gouvernance… Dans l’esprit du projet de texte, la gouvernance associera, sous l’autorité de la ministre en charge de la santé, les représentants des agences et opérateurs membres du SPIS ainsi que les représentants des patients.

Le coût de construction et de maintenance de ce dispositif n’est pas encore circonscrit. Dans tous les cas, l’orientation choisie doit conduire à des coûts inférieurs à ceux induits par le fonctionnement de l’ensemble des sites publics actuels, en raison notamment de la suppression des redondances.

Selon les éléments transmis à votre rapporteure, les informations contenues dans ce système d’information concerneront les domaines suivants :

– les médicaments et dispositifs médicaux ;

– les symptômes, pathologies et traitements ;

– l’orientation dans le système de soins avec la présentation de l’offre libérale, des établissements de santé, des services médico-sociaux et des autres structures (associations, structures de soutien, sites santé, réseaux, …) ;

– les droits des patients ;

– la prévention, l’éducation à la santé, et les risques.

3.  La déclinaison régionale du service d’information

Le II modifie le d) du 1° de l’article L. 1431-2 du code de la santé publique. Cet article fixe les missions des ARS.

Elles définissent et financent des actions visant à promouvoir la santé, à éduquer la population à la santé et à prévenir les maladies, les handicaps et la perte d’autonomie, et elles veillent à leur évaluation.

Cette modification est cohérente avec le I qui prévoit le concours des ARS à la constitution du service public d’information en santé. C’est la raison pour laquelle il est prévu qu’elles auront pour mission d’informer les populations à la santé.

*

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a adopté deux amendements visant à préciser que le SPIS permettra notamment, d’une part, de mieux connaître l’offre sanitaire, sociale et médico-sociale et pourra être accessible aux personnes handicapées, d’autre part.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS18 de la rapporteure.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1135 et AS1470 de Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Annie Le Houérou. L’amendement prévoit d’abord d’élargir à tous les types de soins l’information diffusée par le service public d’information globale en santé, ensuite de garantir l’effectivité de la compréhension par leur destinataire des informations relatives à l’offre de soins, nonobstant le handicap dont il peut être affecté.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je ne peux que recommander un retrait. Nous partageons l’objectif, mais, en adoptant l’amendement AS1470, nous répondrons à la première de vos préoccupations. Sur le deuxième point, j’ai déposé un amendement placé à un point où il s’insérera mieux dans le texte.

L’amendement 1135 est retiré.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement AS1470.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS266 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Il s’agit de faire connaître les droits de la population en termes de santé, concernant notamment son droit à l’information, au refus de traitements ou de rédiger des directives anticipées.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Les informations relatives à la santé me semblent déjà couvrir les droits des personnes malades. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement AS701 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Il est important de préciser que l’information doit également concerner la perte d’autonomie.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Comme précédemment, cette notion est déjà incluse dans la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Je vous invite donc à retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS265 de Mme Véronique Massonneau et AS1675 de la rapporteure, et l’amendement AS862 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Véronique Massonneau. Il est essentiel que les informations diffusées par le nouveau service public soient accessibles et adaptées aux personnes en situation de handicap.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit en effet d’une précision utile, qui satisfait la demande d’Annie Le Houérou.

La Commission adopte les amendements AS265 et AS1675.

En conséquence, l’amendement AS862 tombe.

La Commission est saisie de l’amendement AS1053 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit de donner suite à une suggestion du Défenseur des droits, qui préconise que la plateforme de service public d’information en santé comporte des espaces dédiés aux parents ainsi qu’aux enfants et aux adolescents. Je retire néanmoins cet amendement, pour le redéposer en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1591 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Il convient de préciser, après l’alinéa 2, que « les modalités d’organisation de cette diffusion et les moyens déployés pour atteindre un public hétérogène du point de vue de l’âge, de la formation et des conditions de vie sont définies par décret ».

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je souhaite le retrait de cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1592 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Il s’agit de préciser que les informations concernent également le champ médico-social.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. Il ne nous semble pas opportun d’étendre dans la loi le champ d’intervention du service public d’information en santé.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen des amendements identiques AS407 de M. Dominique Tian et AS635 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Afin d’approfondir les synergies entre les différents acteurs de la santé, nous proposons que le service d’information soit un pôle de ressources pour les Agences régionales de santé (ARS), les établissements de santé publics et privés, les professionnels libéraux de santé ainsi que les associations d’usagers agréées.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il ne nous semble pas opportun d’étendre la participation au service public d’information en santé, sous peine d’alourdir le processus. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS570 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Il importe de mentionner la présence des ordres professionnels parmi les instances visées à l’alinéa 3.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. L’information du public ne me semble pas relever du champ d’intervention des ordres professionnels.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS268 de Mme Dominique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Il s’agit de s’assurer que les informations soient adaptées et accessibles aux personnes handicapées, d’où la nécessité qu’un rapport soit remis chaque année pour avis au Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH).

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il serait souhaitable que le Gouvernement puisse vous répondre sur ce point. Je suggère donc le retrait de votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement AS267 de M. Jean-Louis Roumegas.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’information sur les financements publics et les avantages concédés aux entreprises pharmaceutiques ne fait pas partie des missions du service public d’information en santé. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1590 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Il s’agit toujours de renforcer la collaboration entre les professionnels de santé et les pouvoirs publics, en garantissant par un décret en Conseil d’État la participation de ces professionnels au service d’information.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’article 21 a pour objet de mettre en place un portail collaboratif à destination du public et non des professionnels. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS408 de M. Dominique Tian.

Puis elle en vient à l’examen, en présentation commune, des amendements AS1107 et AS1108 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. L’article 21 prévoit la mise en place d’un service public d’information en santé. Partant du constat que le patient est de plus en plus acteur de sa prise en charge et que l’accès à l’information est à la fois limité est inégalitaire, l’objectif est d’améliorer l’information globale sur la santé, la prévention et l’orientation dans le système de soins.

Dans ce cadre, cet amendement propose la mise en place d’une carte des défibrillateurs externes automatisés installés en France. Il y a quinze ans, l’usage de ces défibrillateurs était réservé au corps médical. La législation l’a aujourd’hui étendu à toute personne, ainsi susceptible de sauver une vie avant l’arrivée des secours, et de plus en plus de villes s’équipent de ces défibrillateurs, installés dans les lieux publics.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit d’une proposition qui ne me semble pas relever du domaine de la loi, laquelle n’a pas vocation à entrer dans ces détails, au risque de ne plus être exhaustive. Cela étant, le dépôt de vos amendements en séance pourrait permettre au Gouvernement de vous apporter des réponses et de vous confirmer que le cahier des charges prévoira une carte des défibrillateurs. Je suis donc favorable à vos amendements sur le principe mais guère sur la forme.

La Commission rejette successivement les amendements AS1107 et AS1108.

Puis elle examine l’amendement AS1575 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. Il s’agit de promouvoir l’égalité des chances des personnes handicapées dans le domaine de la santé.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’examen, en discussion commune, des amendements AS269 de Mme Véronique Massonneau et AS622 de Mme Annie Le Houérou, ainsi que des amendements identiques AS863 de Mme Bérengère Poletti et AS914 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Véronique Massonneau. Pour bâtir la société inclusive que nous voulons et changer notre regard sur les différentes formes de handicap, les actions financées par les ARS doivent, au-delà de la promotion de la santé, sensibiliser au handicap.

Mme Annie Le Houérou. L’amendement AS622 vise à assurer une meilleure connaissance des caractéristiques du handicap, ce qui participe de sa prévention.

M. Élie Aboud. L’amendement AS863 vise à promouvoir les actions des ARS destinées à améliorer l’information sur le handicap.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements. Ces propositions sont légitimes mais elles sont couvertes par la rédaction proposée, qui est à lire dans le sens de la définition que donne l’OMS de la santé : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS270 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Notre politique de santé publique est axée essentiellement autour de la médecine curative et met trop souvent de côté le traitement de la douleur. C’est le cas notamment pour ce qui concerne la fin de vie : nous manquons de soins palliatifs, et nos personnels médicaux sont insuffisamment formés à ce type de soins. Notre pays est en retard dans le domaine de la prise en compte de la douleur. Pour ces raisons, les campagnes de sensibilisation des publics doivent également communiquer sur les moyens de prévention de la douleur.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 21 modifié.

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Article 21 bis
Mise en place d’un dispositif permanent d’accompagnement des personnes handicapées

Cet article prévoit la mise en place, sur décision de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), d’un groupe opérationnel de synthèse comprenant notamment une équipe pluri-professionnelle. Ce groupe est chargé de mettre en œuvre la réponse à la situation de la personne handicapée sur la base d’un plan d’accompagnement global défini à partir de ses besoins.

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La Commission examine l’amendement AS1488 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Pinville. Cet amendement reprend certaines des propositions formulées dans le rapport « Zéro sans solution » de Denis Piveteau pour assurer une réponse accompagnée aux personnes handicapées et à leurs proches, tout au long de leur parcours de vie.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis favorable. Vous êtes nombreux à être intervenus pour conforter l’accompagnement des personnes handicapées.

La Commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. La ministre assistant ce matin au conseil des ministres, elle ne peut être parmi nous. Nous examinerons donc cet après-midi l’amendement AS1614.

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Article 21 ter
Encadrement de la médiation sanitaire et de l’interprétariat linguistique

Cet article promeut la médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique, qui constituent des outils d’aide à l’accompagnement des publics vulnérables. Au regard de pratiques hétérogènes, il charge la HAS d’élaborer ou d’approuver des référentiels de compétences et de formation et de préciser le cadre d’intervention.

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La Commission examine l’amendement AS1614 du Gouvernement, précédemment réservé.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous en revenons à l’amendement du Gouvernement, dont nous avons réservé l’examen ce matin, compte tenu de l’absence de Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. L’accès à la prévention, aux soins, et la continuité des parcours de santé des populations précaires et confrontées à des inégalités sociales de santé, sont des objectifs prioritaires de santé publique. Dans ce cadre, la mesure proposée est de promouvoir la médiation sanitaire et l’interprétariat linguistique, qui constituent des outils évalués d’aide à l’accompagnement des publics vulnérables vers la prévention et le soin.

L’inscription dans la loi de dispositifs promus par le plan quinquennal contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale doit consolider le cadre de référence pour la pratique des intervenants, de leurs employeurs (établissements de santé, associations, organisations non gouvernementales, collectivités territoriales et tout autre organisme intervenant dans le champ de la prévention et de la promotion de la santé, de l’orientation, de l’accompagnement vers et dans les soins, ou de l’éducation thérapeutique du patient), ainsi que des pouvoirs publics. Au regard de pratiques hétérogènes, il s’agit en particulier de donner mission à la Haute Autorité de santé d’élaborer ou de valider des référentiels de compétences et de formation et de préciser le cadre déontologique d’intervention, au bénéfice des usagers les plus éloignés du système de santé.

M. Élie Aboud. Il arrive que des patientes francophones, accompagnées à l’hôpital par des militants associatifs, aient des exigences inacceptables à l’égard des soignants. Cet amendement ouvre la porte à ce genre de pratiques dangereuses, contraires aux valeurs de la République.

Mme la ministre. Cet amendement prévoit un cadre : les référentiels proposés par la Haute Autorité de santé permettront le déploiement de la médiation sanitaire dans le respect des valeurs de la République.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour le titre II. Je suis favorable à cet amendement, mais j’ai deux questions, madame la ministre.

Pourriez-vous préciser la notion d’« interprétariat linguistique » ? Les référentiels de compétences seront-ils adaptés, d’un point de vue déontologique, aux personnes accompagnant les personnes sourdes ?

Mme la ministre. La notion de compétences intégrera la dimension déontologique. Quant à celle d’interprétariat linguistique, elle est consacrée dans le milieu de la médiation sanitaire.

L’amendement est adopté.

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Article 22
Expérimentation de dispositifs d’accompagnement des patients

Cet article met en place un cadre expérimental permettant d’accompagner les patients souffrant de maladies chroniques.

1.  Les contours de la maladie chronique

Une maladie chronique est une maladie de longue durée, évolutive, souvent associée à une invalidité et à la menace de complications graves. Cette notion recouvre ainsi :

– des maladies comme l’insuffisance rénale chronique, les bronchites chroniques, l’asthme, les maladies cardio-vasculaires, le cancer ou le diabète, des maladies lourdement handicapantes, comme la sclérose en plaques ;

– des maladies rares, comme la mucoviscidose, la drépanocytose et les myopathies ;

– des maladies transmissibles persistantes, comme le Sida ou l’hépatite C ;

– et des troubles mentaux de longue durée (dépression, schizophrénie…) ;

Certaines de ces maladies font l’objet de plans de santé publique en cours d’application tels que les plans psychiatrie et santé mentale 2011-2015, maladies rares 2011-2014, greffe 2012-2016, autisme 2013-2017 ou plan cancer n° 3 2014-2019.

Elles sont aussi inscrites dans des dispositifs transversaux de prévention et de prise en charge.

Selon l’étude d’impact, le nombre de personnes sujettes aux maladies chroniques est estimé à 10 millions par l’assurance maladie.

2.  Les dispositifs mis en place depuis 2012

Plusieurs dispositifs ont été mis en place afin de mieux prendre en charge les maladies chroniques.

● Ils consistent tout d’abord en des dispositifs de prévention.

Chez le nouveau-né, l’enfant et le jeune, le diagnostic et la prise en charge précoce des affections chroniques se révèlent nécessaires afin d’éviter les pertes de chance (67) en cas de diagnostic tardif ou erroné et les risques de ruptures dans le parcours de soins. Les mesures s’attachent à améliorer le dépistage et l’organisation d’un niveau intermédiaire de prise en charge entre les professionnels de première ligne et les centres de référence ou services spécialisés.

Des actions de préventions ont également été engagées en ce qui concerne les addictions. Dans le cadre du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et pratiques addictives 2013-2017, le réseau des consultations jeunes consommateurs (CJC) a fait l’objet d’un soutien accru.

La promotion de l’activité physique comme moyen de prévenir certaines pathologies chroniques comme l’obésité est prise en compte dans le Plan « Sport santé bien-être (2013-2016) ».

● Les politiques conduites consistent aussi en la prise en charge et l’accompagnement des malades et de leurs familles.

Dans la continuité des actions du plan pour l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques 2007-2011, la direction générale de la santé poursuit son soutien au développement des programmes d’éducation thérapeutique du patient (mise en place d’un cadre d’évaluation des programmes par la HAS, outils pour construire les programmes avec les représentants des personnes malades, patients experts). Plus de 400 nouveaux programmes d’éducation thérapeutique ont été autorisés depuis 2012.

Citons également le dispositif des appartements de coordination thérapeutique (ACT), hébergeant toute personne en situation de précarité psychologique et/ou sociale nécessitant des soins, qui a connu un développement important. Le parc des ACT comportait 1 800 places en 2012. En 2013, 100 places supplémentaires ont été financées et 200 en 2014.

3.  La mise en place d’un cadre expérimental

Cet article met en place à titre expérimental un accompagnement des personnes atteintes de maladies chroniques afin de les aider à faire face à chaque étape de la maladie.

● Le I prévoit une expérimentation, d’une durée de cinq ans, visant à mettre en place un accompagnement sanitaire, social et administratif des personnes souffrant d’une maladie chronique ou exposée au risque d’une telle maladie.

Son deuxième paragraphe vise à faire de ces patients des acteurs dans la prise en charge de leur affection : connaissance de la maladie, élaboration du parcours de santé, orientation au sein des services de prévention, de soins et suivi médico-sociaux.

Enfin, le dernier paragraphe met en place une coordination entre professionnels et organisations intervenant dans le parcours de santé.

● Le II dispose que chaque projet expérimental fait l’objet d’une convention dont le contenu sera conforme à un cahier des charges national établi par le ministre en charge de la santé. Cette convention met en rapport l’agence régionale de santé (ARS) d’une part et les acteurs de santé volontaires, d’autre part.

Le second alinéa du II précise que les projets pilotes ainsi que leur périmètre territorial seront définis par voie d’arrêté.

● Le III précise les conditions du financement des expérimentations. Selon l’étude d’impact, elles pourront être soit réalisées à coût constant par redéploiement des moyens financiers, soit être financées en complément par le fonds d’intervention régional (FIR) mentionné à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique.

Les missions du FIR

Les missions du FIR ont été redéfinies par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (68). Elles s’articulent autour de cinq axes :

– la promotion de la santé, la prévention des maladies, des traumatismes, du handicap et la perte d’autonomie ;

– l’organisation et la promotion de parcours de santé coordonnés, ainsi que la qualité et la sécurité de l’offre sanitaire et médico-sociale ;

– la permanence des soins et la répartition des professionnels et des structures de santé sur le territoire ;

– l’efficience des structures sanitaires et médico-sociales et l’amélioration des conditions de travail de leurs personnels ;

– le développement de la démocratie sanitaire.

Les crédits ressortiront à la dotation mentionnée au 1° de l’article L. 1435-9, c’est-à-dire la dotation des régimes obligatoires de base d’assurance maladie dont le montant est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé, du budget, de la sécurité sociale, des personnes âgées et des personnes handicapées en fonction de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. L’arrêté fixant cette dotation précisera le montant affecté aux dépenses nouvelles liées aux expérimentations.

Le regroupement de différents crédits en une seule enveloppe, le FIR, est associé à la possibilité d’opérer, dans les conditions prévues par l’article L. 1435-9 du code de la santé publique, une certaine fongibilité. Le présent III prévoit toutefois une dérogation et sanctuarise les crédits consacrés à l’expérimentation.

Le IV précise les conditions d’exercice des professionnels participant aux expérimentations. Ils ont vocation à constituer une équipe de soins au sens de l’article L. 1110-12 du code de la santé publique (cf. commentaire de l’article 25) (69). Ce dispositif leur permettra d’échanger et de partager les informations nécessaires à la prise en charge des patients concernés.

Le V réaffirme le principe du consentement explicite du patient à l’échange et au partage des informations.

Le VI prévoit une évaluation du dispositif expérimental. Les ARS impliquées dans la démarche expérimentale sont chargées d’assurer un suivi et une évaluation annuelle des projets pilotes. À cet effet, elles ont accès aux données nécessaires à cette évaluation dans les conditions prévues par l’article L. 1435-6 (cf. commentaire de l’article 47).

Le deuxième alinéa du VI dispose que cette évaluation pourra comporter un suivi clinique individualisé et croiser des données relatives à la prise en charge sanitaire, sociale et médico-sociale sous réserve du respect de l’anonymat et de l’absence de possibilité d’identification directe ou indirecte.

Enfin, il est prévu la remise, par le Gouvernement, d’un rapport au Parlement après avis de la conférence nationale de la santé. Celui-ci portera évaluation de l’expérimentation et devra être remis au plus tard trois mois avant son terme.

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Outre sept amendements rédactionnels, le dispositif a été amélioré par la Commission à l’initiative de la rapporteure.

Un premier amendement vise à préciser que le projet d’accompagnement consiste en un suivi personnalisé. Un deuxième amendement a été adopté pour tenir compte de la nécessaire coordination interrégionale en vue de l’accompagnement de populations spécifiques. Un troisième prévoit que le cahier des charges de l’expérimentation pourra être élaboré en lien avec les associations d’usagers du système de santé. La rédaction du projet de loi privilégiant une approche par trop médicalisée, la Commission a aussi entendu davantage insister sur le caractère multidimensionnel de la prise en charge (dimension sanitaire, sociale et administrative) en adoptant deux autres amendements aux alinéas 7 et 8. Le principe de la mise en place d’un plan personnalisé a enfin été approuvé par la Commission.

Deux amendements identiques ont également été adoptés afin d’étendre l’expérimentation aux personnes handicapées.

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La Commission examine l’amendement AS1055 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’article 22 évoque les projets d’accompagnement « pour les » malades. Il s’agit plutôt d’instaurer un suivi personnalisé. Je vous suggère donc de mettre en place un projet d’accompagnements « des » malades.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS272 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Cet article propose à titre expérimental un projet d’accompagnement des patients pour assurer une meilleure coordination des parcours de santé pour les personnes souffrant de maladies chroniques. Les personnes en situation de handicap sont également concernées par ces enjeux, d’où cet amendement qui propose d’étendre cette expérimentation aux personnes handicapées.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement est déjà satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement AS1368 de M. Serge Letchimy.

Mme Monique Orphé. Le présent amendement propose d’élargir le périmètre d’application des expérimentations prévues à l’article 22 pour y inclure, au-delà des maladies chroniques, les troubles psychiatriques et comportementaux. Les besoins en la matière sont importants, notamment dans les territoires d’outre-mer.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je vous invite à retirer votre amendement car, comme je l’indique dans mon rapport, la notion de maladie chronique couvre notamment la dépression, la schizophrénie ou les troubles mentaux de longue durée.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements identiques AS864 de Mme Bérengère Poletti et AS916 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

M. Élie Aboud. Il s’agit d’étendre l’expérimentation au monde du handicap.

Mme Annie Le Houérou. L’article 22 est incomplet, dans la mesure où il convient de différencier la notion de maladie et celle de handicap, qui doit être explicitement concernée par le dispositif.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cette précision m’apparaît inutile. Je souhaite donc le retrait de ces amendements.

M. Élie Aboud. Je ne retire pas mon amendement, qui envoie un signal positif au monde du handicap.

Mme Annie Le Houérou. Je n’ai pas non plus le sentiment que mon amendement soit satisfait.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS378 de M. Denis Baupin.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons l’extension d’une expérimentation qui a actuellement lieu à Strasbourg, où des médecins prescrivent par ordonnance la pratique d’une activité physique à des malades souffrant de maladies chroniques. Les résultats de cette expérimentation sont prometteurs, il est donc souhaitable de l’étendre.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il me semble que cet amendement est satisfait par l’esprit même de l’article 22. Je vous invite donc à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS19, AS1540 et AS1057 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement AS1056 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Dans le cadre de l’accompagnement du suivi de personnes souffrant de maladies rares, il convient de prévoir la mise en place d’une coordination interrégionale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS20 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement AS1058 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement fixe les conditions dans lesquelles le cahier des charges des expérimentations pourra être élaboré. Il prévoit notamment l’association des associations d’usagers du système de santé à son élaboration.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’examen, en discussion commune des amendements AS821 de Mme Monique Orphé et AS1267 de Mme Dominique Orliac.

Mme Monique Orphé. L’outre-mer est souvent la grande oubliée des projets mis en œuvre dans le domaine sanitaire. Or nos populations souffrent de pathologies spécifiques. Cet amendement vise donc à garantir que des projets puissent être menés outre-mer. De nombreuses zones ultramarines sont en effet confrontées en matière de santé à des enjeux très spécifiques qui appellent la mise en place de solutions innovantes. Elles doivent pouvoir bénéficier de projets pilotes d’accompagnement pouvant participer à l’amélioration de la santé des populations.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Loin de moi l’idée que l’outre-mer puisse être oublié, mais le dispositif prévoit qu’une liste des projets pilotes concernés par l’expérimentation et de leurs zones d’application est arrêtée par la ministre. Je vous propose donc de retirer ces amendements pour les redéposer en séance et obtenir de la ministre l’assurance que cette liste comportera bien l’outre-mer.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS21 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1059 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit de prévoir le partage des informations nécessaires au projet d’accompagnement et relatives à l’état de santé du patient et à sa situation sociale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS574 de M. Bernard Accoyer.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement de M. Accoyer va dans le même sens que celui que j’ai moi-même défendu mais il comporte deux inconvénients : d’une part, il fait référence à une équipe de prise en charge qui n’est nullement définie ; d’autre part, il ne renvoie pas au partage des informations mentionné à l’article L. 1110-4 : or ce renvoi explicite aux conditions de partage permet d’encadrer strictement le dispositif. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS1063 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Il s’agit de préciser que l’accompagnement est global, c’est-à-dire sanitaire, social et administratif, et qu’il ne s’agit pas uniquement d’une démarche médicalisée.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1061 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Nous proposons de compléter les outils visant à faciliter la coordination entre professionnels de santé par la mise en place d’une feuille de route, le plan personnalisé de soins et d’accompagnement, élaboré selon des recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) et actualisé pour tenir compte de l’évolution de l’état de santé du patient.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite, successivement, les amendements rédactionnels AS1541 et AS1542 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques AS866 de Mme Bérengère Poletti et AS920 de Mme Martine Carrillon-Couvreur, ainsi que l’amendement AS274 de Mme Véronique Massonneau.

Mme Annie Le Houérou. Cet amendement propose que soit également requis à propos de l’expérimentation l’avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). C’est reconnaître pleinement son rôle.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’expérimentation prend en compte la situation de handicap en lien avec le caractère chronique des maladies. La conférence nationale de santé comporte en son sein des représentants des principales associations par ailleurs susceptibles d’être concernées par le dispositif des maladies chroniques. Sa consultation me paraît donc suffisante et il n’y a pas lieu de procéder à une consultation du CNCPH. Je demande donc le retrait de ces amendements.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’article 22 modifié.

*

Article 22 bis
Mise en place d’un dispositif de tiers payant pour certaines aides financées par la prestation de compensation du handicap

Cet article vise à permettre au département de mettre en place un mécanisme de tiers payant pour l’achat des aides techniques, pour les dépenses d’aménagement du logement et du véhicule, ainsi que pour les aides exceptionnelles faisant l’objet d’un financement par la prestation de compensation du handicap, dès la décision d’attribution de l’aide prise par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1487 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Pinville. Le présent amendement vise à permettre aux départements de mettre en place un mécanisme de tiers payant pour l’achat des aides techniques, pour les dépenses d’aménagement du logement et du véhicule, ainsi que pour les aides exceptionnelles faisant l’objet d’un financement par la prestation de compensation du handicap (PCH), dès la décision d’attribution de l’aide prise par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Certaines personnes en effet ne peuvent avancer l’argent.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement cosigné par nombre de vos collègues complète utilement l’article 22. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 22 bis

La Commission examine l’amendement AS1439 de M. Hervé Pellois.

Mme Annie Le Houérou. Cet amendement prévoit la possibilité pour une personne atteinte d’une pathologie de recevoir un plan personnalisé de soins et d’accompagnement rédigé par son équipe de soins, sur la base de recommandations élaborées la HAS. Il s’inscrit dans la logique de parcours que cherche à promouvoir le projet de loi.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement que j’ai proposé à l’article 22 procède de la même logique mais se limite à l’expérimentation. Je suggère que nous attendions les résultats de cette expérimentation avant d’étendre le dispositif. C’est la raison pour laquelle je vous invite à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Article 23
(art. L. 1111-3-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Information du patient sur le coût de son hospitalisation

Cet article prévoit l’obligation, pour les établissements de santé, d’informer les patients sur le coût de leur hospitalisation.

1.  L’information du patient, un principe incontournable du droit des usagers du système de santé

L’article L. 1111-3 du code de la santé publique fixe aujourd’hui le régime d’information des patients sur les frais auxquels ils sont exposés.

Son premier alinéa dispose que cette information est délivrée à la demande du patient. Elle couvre les établissements et services de santé publics et privés, les professionnels de santé d’exercice libéral ou exerçant en centres de santé

Cet article rend obligatoire une information écrite préalable précisant le tarif des actes effectués ainsi que la nature et le montant du dépassement facturé dès lors que les honoraires du professionnel de santé dépassent un seuil fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Enfin, il comporte un volet de publicité obligatoire applicable aux professionnels de santé, aux établissements de santé et à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) :

– le professionnel de santé doit en effet afficher de façon visible et lisible dans sa salle d’attente ou à défaut dans son lieu d’exercice les informations relatives à ses honoraires, y compris les dépassements qu’il facture ;

– les sites de communication au public en ligne des établissements de santé comportent des informations sur les tarifs et honoraires des professionnels de santé qui y exercent ;

– le site de communication au public en ligne de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés peut également publier les mêmes informations.

Le dispositif de l’article L. 1111-3, dont le champ d’application est assez large, ne permet cependant pas de renseigner précisément le patient sur les frais effectivement engagés en cas d’hospitalisation. L’information ne lui est pas délivrée automatiquement si bien que l’on constate, à ce jour, une certaine disparité entre établissements. L’étude d’impact précise ainsi que « lorsque le patient est pris en charge dans un établissement de santé privé, un bordereau de facturation, présentant le taux de remboursement par l’assurance-maladie obligatoire ainsi que le montant restant à sa charge et à celles des organismes complémentaires, lui est remis. Lorsque le patient est pris en charge dans un établissement public de santé, la facture qui lui est délivrée ne l’informe que sur le montant des sommes qu’il lui reste à acquitter, sans être informé du montant des frais d’hospitalisation engagés au titre de sa venue ».

2.  Les frais auxquels est exposé un patient hospitalisé

Les frais liés à la prise en charge de patients dans un hôpital comprennent principalement les frais d’hospitalisation et les frais d’hébergement.

Les frais liés à l’hospitalisation

Des tarifs de prestations sont établis en médecine-chirurgie-obstétrique (MCO), en soins de suite et de réadaptation et en psychiatrie.

Les tarifs des prestations d’hospitalisation sont obtenus, pour chaque catégorie tarifaire, en divisant les charges d’exploitation engagées par l’hôpital au cours des séjours des malades par le nombre de journées prévisionnelles. Ces charges comprennent les dépenses de personnel, les dépenses médicales (médicaments, petit matériel, actes…), les dépenses hôtelières (alimentation, chauffage…) et les frais de gestion et autres charges d’exploitation du compte de résultat principal qui ne sont pas couvertes par des ressources propres.

En cas d’hospitalisation dans un établissement public ou une clinique privée conventionnée, l’assurance maladie rembourse les frais d’hospitalisation à 80 %, la part restante – le ticket modérateur  pouvant être prise en charge par l’assurance complémentaire.

Le forfait hospitalier

Prévu par l’article L. 174-4 du code de la sécurité sociale, le forfait hospitalier représente la participation financière du patient aux frais d’hébergement et d’entretien entraînés par son hospitalisation. Il est dû pour chaque journée d’hospitalisation, y compris le jour de sortie.

Son montant est fixé par arrêté ministériel. Depuis le 1er janvier 2010 (70), il est de 18 euros par jour en hôpital ou en clinique, 13,50 euros par jour dans le service psychiatrique d’un établissement de santé.

Le forfait hospitalier n’est pas remboursé par l’assurance maladie. Il peut éventuellement être pris en charge par l’assurance complémentaire si le contrat souscrit par le patient le prévoit.

Il est toutefois pris en charge par l’assurance maladie dans certains cas : enfants et adolescents handicapés hébergés dans des établissements d’éducation spéciale ou professionnelle, victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles, bénéficiaires de l’assurance maternité et bénéficiaires de l’article L. 115 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. Les bénéficiaires de la couverture maladie universelle et de l’aide médicale d’État en sont également exonérés.

Les autres frais qui restent à la charge de l’assuré

Outre le ticket modérateur et le forfait journalier, le patient est amené à s’acquitter des éventuels suppléments pour confort personnel (chambre individuelle, téléphone, télévision…) et des dépassements d’honoraires médicaux. Ces derniers frais peuvent éventuellement être pris en charge au titre de l’assurance complémentaire santé.

3.  L’instauration d’une obligation d’information

Cet article tend à insérer au sein du chapitre Ier du titre Ier de la première partie du code de la santé publique, relatif à l’information des usagers du système de santé et expression de leur volonté, un nouvel article L. 1111-3-1.

Cet article dispose qu’au moment de sa sortie, tout patient pris en charge par un établissement de santé reçoit un document récapitulant le coût de l’ensemble des prestations reçues.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, cet article s’applique à l’ensemble des activités réalisées par les établissements de santé (champ MCO – actes et consultations externes et séjours –, champ SSR (soins de suite de réadaptation) et psychiatrie) et à « l’ensemble des prestations reçues » par les patients pris en charge en établissement de santé, qu’il s’agisse des prestations de soin, d’hébergement ou des prestations pour exigence particulière du patient (chambre particulière, téléphone, TV, etc.).

Ce document précise la part couverte par l’assurance maladie obligatoire (AMO), et le détail du reste à charge patient décliné en des prestations de soin, d’hébergement (forfait hospitalier) ou des prestations pour exigence particulière du patient, avec le montant éventuellement pris en charge par l’assurance maladie complémentaire (AMC).

Le décret d’application prévu par cet article prévoira :

– les modalités de mise en œuvre, dont les calculs des parts AMO, patient et éventuellement AMC ;

– un calendrier de généralisation du dispositif.

*

La Commission examine l’amendement AS469 de M. Yves Daniel.

Mme Marie-François Clergeau. Cet article fait partie d’une série d’articles destinés à mieux informer et mieux accompagner les usagers dans leur parcours de santé. Pour ce faire, l’information ne doit pas être donnée au patient uniquement après sa prise en charge mais également avant et sans que celui-ci ait besoin de la solliciter.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’idée est intéressante. Mais, si elle est simple à mettre en œuvre dans le cadre d’un séjour programmé, elle est plus compliquée à opérer pour une prise en charge non programmée. La voie proposée par l’article 23 est donc moins ambitieuse mais plus facilement réalisable. C’est la raison pour laquelle je vous invite à retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS983 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Le présent article a pour objectif que le patient, au moment de sa sortie de l’hôpital, reçoive un document l’informant du coût de son hospitalisation, de la part couverte par l’assurance maladie obligatoire, de celle couverte par son organisme complémentaire et de la part restant à sa charge. Or il se heurte à deux difficultés : d’une part, il n’envisage pas le cas où le patient ne dispose pas de complémentaire santé ; d’autre part, même dans le cas où le patient dispose d’une telle couverture complémentaire, le montant des prestations pris en charge par la complémentaire n’est pas toujours connu dès la sortie de l’hôpital. Il convient donc de limiter les informations aux frais couverts par l’assurance maladie obligatoire.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Votre amendement pourrait introduire dans le texte une difficulté supplémentaire. Je propose donc qu’il soit retravaillé dans la perspective de nos débats en séance.

M. Élie Aboud. Nous sommes d’accord sur le fait que le patient doit être informé sur le coût des soins qu’il a reçus. Faut-il obligatoirement que cela passe par un document qui lui soit transmis dès sa sortie de l’hôpital ?

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’article 23 précise bien que le patient pris en charge dans un établissement de santé reçoit, à sa sortie, un document l’informant du coût des soins.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS1493 de M. Hervé Pellois.

Mme Annie Le Houérou. Nous souhaitons préciser que cette information n’est pas obligatoire pour les sommes dépassant un certain montant.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’objectif de l’article 23 n’est pas de culpabiliser les malades. Il a une visée pédagogique, et il me paraît difficile de fixer un seuil au-delà duquel l’information ne devrait pas être donnée au patient. Avis défavorable.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Une telle disposition pourrait par ailleurs ne pas être constitutionnelle.

Mme Annie Le Houérou. Je retire l’amendement en insistant néanmoins sur le fait qu’il ne faut pas que les patients souffrant notamment de maladies chroniques et bénéficiant de traitements très lourds soient culpabilisés.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement 1109 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. L’assemblée avait voté en 2003 un amendement ouvrant le droit à l’information sur les retraites, qui permet désormais à nos compatriotes d’être informés sur leurs cotisations retraite. Il s’agit ici, dans l’idée de responsabiliser les assurés, de les informer sur l’ensemble des prestations dont ils bénéficient, grâce à notre système de santé, fondé sur l’assurance maladie. Les Français doivent prendre conscience de la chance qu’ils ont.

Vous m’objecterez peut-être que c’est une mesure compliquée à mettre en œuvre. Ce n’est pas pour cela qu’il ne faut pas le faire. Cela contribuera à la responsabilisation de tous les acteurs. Certes la facturation n’est pas toujours le point fort des hôpitaux, mais l’assurance maladie doit pouvoir, tous les ans, fournir un relevé des prestations fournies aux assurés.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je pense au contraire qu’il s’agit d’une mesure techniquement très simple à mettre en œuvre, dans la mesure où les franchises sont récupérées en fin d’année à partir du calcul des soins fournis aux patients.

Mme Michèle Delaunay. Je souscris à cette proposition, qui valorise la cotisation et l’impôt. Nos malades en effet ne sont pas conscients de la chance qu’ils ont d’être pris en charge par une médecine de très haut niveau. Une telle mesure redonnerait également du sens à l’effort collectif.

M. Gérard Sebaoun. Un patient qui reçoit beaucoup considérera favorablement ce système solidaire, quelle que soit sa contribution. Je vous mets en garde cependant contre le fait que les gens plus jeunes, qui sont de grands contributeurs, sont malheureusement prêts, pour certains d’entre eux, à se tourner vers d’autres systèmes.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Votre amendement ne me semble pas s’inscrire dans l’esprit de l’article 23, dont le but n’est pas d’ouvrir un droit à l’information. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 23 sans modification.

*

Après l’article 23

La Commission aborde l’amendement AS796 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Depuis 1998, il existait un cadre réglementaire en matière de traitement du syndrome d’apnées du sommeil. Ce cadre réglementaire a permis à la France d’améliorer de manière significative le suivi des patients souffrant de cette maladie et d’atteindre des niveaux d’observance très élevés. Actuellement, 300 000 malades sont équipés d’un système permettant un suivi par téléobservance.

Or un arrêt du Conseil d’État du 28 novembre 2014 a annulé les dispositions réglementaires conditionnant le remboursement par l’Assurance maladie du traitement de l’apnée du sommeil. Aujourd’hui, les prestataires ne sont plus incités par la tarification à installer des dispositifs coûteux permettant le télé-suivi. Au surplus, la perte de qualité du traitement accroît les risques d’accident vasculaire cérébral ou d’infarctus du myocarde.

Cet amendement propose que le cadre législatif permette un télé-suivi dans un objectif d’amélioration de la prise en charge et d’efficience du système.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement trouverait davantage sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale. En outre, il ne présente pas toutes les garanties relatives à l’échange et au partage des données, comme le prévoit l’article 25. Enfin, une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est en cours actuellement. J’en propose donc le retrait.

L’amendement est retiré.

*

Article 23 bis
Information préalable des patients faisant l’objet
d’une évacuation sanitaire effectuée à l’initiative
de l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna et de leurs accompagnateurs

Cet article dispose que, pour toute évacuation sanitaire programmée effectuée à l’initiative de l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont les ressources ne permettent plus la prise en charge des patients, les personnes évacuées et leurs accompagnateurs reçoivent un document les informant notamment des conséquences financières du transfert. Dans la majeure partie des cas, l’absence d’information laisse ces personnes esseulées, en proie à des difficultés tant financières que d’organisation du parcours de soins.

*

La Commission en vient à l’amendement AS1479 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Les évacuations sanitaires à partir des îles de Wallis-et-Futuna posent actuellement des problèmes financiers et humains. Compte tenu de la faiblesse des infrastructures médicales au sein de la collectivité territoriale, le nombre des évacuations ne cesse de croître. La dette de l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna à l’égard des hôpitaux de Nouvelle-Calédonie fait que les malades sont de plus en plus dirigés vers la métropole. Or en métropole, les malades sont souvent livrés à eux-mêmes du point de vue de leur suivi médical, sans compter qu’ils sont dans l’ignorance non seulement de leurs droits en matière de prise en charge, mais aussi des conséquences financières de leur délocalisation.

Cet amendement prévoit, pour toute évacuation sanitaire programmée effectuée à l’initiative de l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna, que le patient reçoit, avant son départ du territoire, un document à sa signature et à celle de la personne qui l’accompagne l’informant des modalités et des conséquences, notamment financières, de son transfert.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 23

La Commission est saisie de l’amendement AS885 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. Cet amendement prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement une étude relative à la santé des aidants familiaux portant, notamment, sur l’évaluation des risques psychosociaux auxquels ces derniers sont particulièrement exposés.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Un rapport supplémentaire ne s’impose pas.

La Commission rejette l’amendement.

*

Chapitre V
Renforcer les outils proposés aux professionnels
pour leur permettre d’assurer la coordination du parcours de leur patient

Article 24
(art. L. 1112-1 du code de la santé publique)

Lettre de liaison entre les services de soins en ville et à l’hôpital

Cet article met en place un document écrit de liaison entre les services de soins en ville et à l’hôpital sous la forme d’une lettre de liaison.

1.  Le droit existant

À l’heure actuelle, aucune disposition législative n’encadre l’échange d’informations entre la médecine de ville et l’hôpital.

Aux termes du premier alinéa de l’article L. 1112-1 du code de la santé publique, les informations médicales sont délivrées aux patients sur leur demande par les établissements de santé. Elles sont également à la disposition des praticiens qui ont prescrit l’hospitalisation qui en font la demande. Cette communication est effectuée, au choix de la personne concernée, directement ou par l’intermédiaire d’un médecin qu’elle désigne.

Parallèlement, comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi des pratiques existent sous la forme de lettres d’adressage des patients à l’hôpital d’une part, de comptes rendus de fin d’hospitalisation d’autre part.

L’article R. 1112-1 du code de la santé publique dispose ainsi qu’ « à la fin de chaque séjour hospitalier, copie des informations concernant les éléments utiles à la continuité des soins est remise directement au patient au moment de sa sortie ou, si le patient en fait la demande, au praticien que lui-même ou la personne ayant l’autorité parentale aura désigné, dans un délai de huit jours maximum ».

Le compte rendu d’hospitalisation (CRH) se distingue de la lettre de sortie qui commence classiquement par un « cher confrère ». Il s’agit d’un document contenant l’ensemble des éléments relatifs au séjour du patient et visant à résumer l’ensemble des actes, examens et soins pratiqués. Il résume les conclusions de l’hospitalisation et établit des préconisations de prise en charge après la sortie afin d’assurer une bonne coordination « hôpital/ville » ou « hôpital/structure de transfert ». En cas de mutation, les éléments qualitatifs indispensables à la continuité des soins doivent être retrouvés dans le dossier. Signé par le médecin de l’établissement, il est adressé réglementairement dans les 8 jours suivant la sortie du patient, au médecin de ville, si le patient en fait la demande. Il est également remis au patient le jour de sa sortie.

La lettre de liaison a vocation à garantir la continuité des soins dès la sortie du patient et à informer obligatoirement le jour même de la sortie le médecin traitant afin qu’il puisse répondre aux questions de son patient et le prendre en charge dans les meilleures conditions possibles dès sa sortie. De plus elle est rédigée de façon compréhensible pour le patient, ce qui n’est pas toujours le cas du CRH. Elle est remise le jour de la sortie du patient (J0) contrairement au CRH. Elle peut être complétée dans un second temps et si besoin par l’envoi du CRH (résultats d’examens disponibles après la sortie du patient…).

2.  La mise en place de lettres de liaison

Les documents de liaison sont des éléments indispensables à la continuité des soins et leur formalisation vise à éviter les ruptures de parcours de soins trop souvent constatées à la suite d’hospitalisation. À cet effet, l’article L. 1112-1 est modifié afin de prévoir la transmission de ces documents.

● Le modifie le premier alinéa en maintenant l’indispensable principe de l’accès des patients aux informations médicales les concernant. La deuxième phrase, relative à l’information des médecins ayant prescrit l’hospitalisation, est toutefois supprimée en vertu des nouvelles dispositions contenues dans le 2° du présent article.

● Le insère un II, comprenant 5 alinéas, à la suite du quatrième alinéa de l’article L. 1112-1.

Le premier alinéa du II dispose que, pour préparer l’entrée en hospitalisation, le médecin qui adresse le patient à un établissement de santé accompagne sa demande d’une lettre de liaison. Cette lettre « synthétise les informations nécessaires à la prise en charge du patient ». Par « informations nécessaires », il faut comprendre les antécédents médicaux, le motif d’hospitalisation, ou encore le traitement en cours.

Cette lettre comprend le motif du recours à l’hospitalisation et donne toutes les informations nécessaires à la prise en charge du patient.

Le deuxième alinéa du II prévoit l’accès des praticiens qui en font la demande aux informations médicales. Les praticiens concernés sont d’une part, le médecin ayant prescrit l’hospitalisation, d’autre part, le médecin traitant.

Le troisième alinéa du II instaure la lettre de liaison de sortie de l’hospitalisation. Cette lettre comprendra les éléments utiles à la continuité des soins et devra être rédigée par le médecin de l’établissement en charge du patient.

Dans cette lettre figurent le motif de l’hospitalisation, la synthèse médicale du séjour, les résultats d’examens, le traitement médicamenteux actualisé et les suites à donner : conseils et surveillance particulière, rendez-vous et examens prévus et à programmer (médicaux, paramédicaux, sociaux).

La lettre de liaison à la sortie a pour vocation de garantir la continuité des soins à la sortie du patient. Si cela s’avère pertinent, elle doit contenir des informations ayant trait au séjour du patient dans l’établissement et peut donc indiquer les différents services dans lesquels le patient est passé et les différents types de prises en charge qui ont eu lieu en amont. Elle est cependant rédigée par les derniers professionnels ayant pris en charge le patient.

Le quatrième alinéa du II prévoit que cette lettre est transmise au patient ou à la personne de confiance au moment de sa sortie. Cet alinéa précise que la transmission de cette lettre est effectuée dans le respect des exigences prévues par les quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 1111-2.

– le quatrième alinéa dispose que « la volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée ». L’exposition d’un tiers à un risque de transmission peut toutefois y faire obstacle ;

– pour les mineurs ou les majeurs sous tutelle, ce droit est exercé, respectivement par les titulaires de l’autorité parentale et le tuteur. Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée.

Enfin, le dernier alinéa du II prévoit que ces lettres de liaison peuvent être dématérialisées. Elles sont déposées dans le cadre du dossier médical partagé, refondé aux termes de l’article 25 du présent projet de loi, et envoyées par messagerie sécurisée.

● Le insère un III au début du cinquième alinéa de l’article L. 1112-1 dans sa rédaction actuelle.

Ce III comprendra les trois derniers alinéas relatifs :

– à l’obligation de la protection de la confidentialité des informations par les établissements de santé ;

– à l’accès aux informations de certains médecins lorsqu’elles sont nécessaires à l’exercice de leurs missions (71) ;

– aux modalités d’application de l’article.

*

Outre quatre amendements rédactionnels, la Commission a adopté un amendement visant à informer le médecin traitant du déroulement d’une hospitalisation impromptue d’un de ses patients.

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La Commission est saisie de l’amendement AS325 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Si la lettre de liaison est remise au patient ou à son représentant légal à la sortie de l’hospitalisation, il convient de prévoir les mêmes modalités d’information du patient et de remise de cette lettre au moment de son admission en établissement de santé.

La dématérialisation des lettres de liaison et leur envoi par messagerie sécurisée aux praticiens concernés ne doivent pas faire obstacle à l’information du patient. C’est pourquoi il convient de prévoir qu’une copie lui est remise.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS277 de Mme Brigitte Allain.

M. Jean-Louis Roumegas. La dénutrition touche 800 000 personnes âgées en France. Cet amendement a pour objet de garantir un meilleur suivi de l’état nutritionnel des patients en sortie d’hospitalisation.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Le contenu de la lettre de liaison a vocation à être précisé par voie réglementaire et, surtout, doit faire l’objet de recommandations en termes de bonnes pratiques, notamment de la Haute autorité de santé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1129 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Il semble utile d’étendre l’obligation de la lettre de liaison aux relations entre généralistes et psychiatres et, plus généralement, entre généralistes et spécialistes.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement est mal placé. J’en demande donc le retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS23 de la rapporteure.

Elle étudie l’amendement AS1271 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Il s’agit de préciser que la fiche de liaison va au-delà de la simple mention des traitements curatifs, et qu’elle devra prendre en compte l’ensemble des soins accordés aux patients, dont le soulagement de la douleur.

En effet, l’impact des pathologies de longue durée et des douleurs chroniques sur l’autonomie ou le bien-être des patients est un enjeu de santé publique majeur, engendrant par ailleurs d’importants coûts pour l’assurance maladie et une perte d’activité souvent significative chez les patients. Or les traitements non curatifs, qui peuvent limiter ces impacts, sont généralement mal coordonnés dès lors que le patient doit changer de structure de soins, cas de figure particulièrement fréquent lorsque la pathologie soignée est chronique. Dans cette optique, il est également important de reconnaître la douleur chronique, pour que celle-ci soit prise en charge dans le cadre d’un parcours de soins.

Il semble donc indispensable que la coordination des soins entre diverses structures permette non seulement de mieux s’assurer de la continuité des traitements curatifs administrés au patient, mais également de coordonner l’administration des traitements non curatifs et, ainsi, de coordonner le parcours de soins qui doit être considéré comme un parcours de vie.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je demande le retrait de cet amendement, car la voie réglementaire doit être privilégiée pour définir le contenu de la lettre de liaison.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1064 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le médecin traitant doit pouvoir être informé du déroulement de l’hospitalisation impromptue de ses patients.

L’amendement est adopté.

L’amendement AS1070 de la rapporteure est retiré.

Puis la Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS29 et AS25 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement AS1593 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement prévoit que la lettre liaison est remise à la personne de confiance, sous réserve de l’accord du patient.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable, car il est satisfait par un de mes amendements à venir.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie, en discussion commune, de l’amendement AS1047 de M. Francis Vercamer, et de l’amendement AS1110 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Ces amendements sont défendus.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. C’est le médecin traitant qui est identifié comme étant le principal contact pour les échanges d’informations.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS24 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de trois amendements identiques AS805 de M. Jean-Pierre Door, AS1145 de M. Jean-Pierre Barbier et AS1514 de M. Gilles Lurton.

M. Élie Aboud. Pour progresser vers un véritable décloisonnement ville-hôpital, il est important que les pharmaciens d’officine ne soient pas omis du dispositif. Il est donc proposé que le pharmacien d’officine désigné par le patient soit destinataire de l’ordonnance de sortie de ce dernier, afin de faciliter la continuité des soins.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement AS1145 est défendu.

M. Gilles Lurton. L’amendement AS1514 également.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable pour les raisons que je viens d’exposer.

La Commission rejette les amendements.

Sur avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement AS1111 de M. Arnaud Richard.

Elle adopte enfin l’article 24 modifié.

*

Article 25
(art. L. 1110-4, L. 1110-4-1 [nouveau], L. 1110-12 [nouveau], L. 1111-8, L. 1111-14, L. 1111-15, L. 1111-16, L. 1111-17, L. 1111-18, L. 1111-19, L. 1111-20, L. 1111-21, L. 1111-22, L. 1111-23 et L. 1521-2 du code de la santé publique et articles, L. 161-36-1 A, L. 162-1-14, L. 162-5-3 et L. 221-1 du code de la sécurité sociale)

Échange, partage de données et dossier médical partagé

Le décloisonnement et la mise en place d’une meilleure coordination entre professionnel de santé supposent un plus grand partage d’informations et des supports appropriés. Cet article vise à modifier les conditions de partage des données. Il a également pour objet de refonder le dossier médical personnel désormais rebaptisé dossier médical partagé (DMP).

Le I modifie le code de la santé publique à cet effet. L’hébergement des données fait l’objet des évolutions précisées dans les 1° à 4°. Les 5° à 12° actualisent le cadre juridique du dossier médical partagé.

I. L’ÉCHANGE ET LE PARTAGE DE DONNÉES DANS LES SECTEURS SANITAIRE ET MÉDICO-SOCIAL

A.  LE CADRE GÉNÉRAL DE L’ÉCHANGE ET DU PARTAGE DE DONNÉES

Dans une publication datée de 2012, Mme Jeanne Bossi, alors secrétaire générale de l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP) Santé relevait que « le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans les domaines sanitaire et médico-social ainsi que des modes d’exercice pluridisciplinaire accroissent le besoin d’échange dans l’intérêt d’une meilleure prise en charge des personnes. Les données de santé et les données médico-sociales sont aujourd’hui des données destinées à être partagées, même si elles relèvent de la vie privée de la personne. » (72)

Le cadre juridique actuel de l’échange et du partage de ces données s’inscrit dans le nécessaire respect du secret professionnel dont l’atteinte fait l’objet de sanctions mentionnées à l’article 226-13 du code pénal. Seul un texte de loi peut y déroger. Instaurer un secret partagé nécessite une dérogation législative ainsi que l’observance des principes de la protection des données personnelles fixés par la loi du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Les données de santé

« Les données de santé ne peuvent être utilisées et communiquées que dans des conditions déterminées par la loi et dans l’intérêt des patients (assurer le suivi médical, faciliter sa prise en charge par l’assurance maladie…) ou pour les besoins de la santé publique.

La loi Informatique et Libertés énumère les cas dans lesquels le traitement ou la collecte des données de santé est possible :

– les traitements pour lesquels la personne concernée a donné son consentement exprès, sauf disposition contraire prévue par la loi ;

– les traitements nécessaires à la sauvegarde de la vie humaine ;

– les traitements nécessaires aux fins de suivi médical des personnes, de prévention, de diagnostic, d’administration de soins ou de traitements, ou de gestion de services de santé ;

– les traitements statistiques réalisés par un service statistique ministériel ;

– les traitements nécessaires à la recherche dans le domaine de la santé (chapitre IX de la loi Informatique et Libertés) ;

– les traitements de données de santé à des fins d’évaluation ou d’analyse des pratiques ou des activités de soins de prévention (chapitre X de la loi Informatique et Libertés) ;

– si les données sont appelées à faire l’objet, à bref délai, d’un procédé d’anonymisation ;

– les traitements justifiés par l’intérêt public et autorisés par la CNIL. »

Source : CNIL, Guide professionnels de santé, édition 2011.

1.  Des principes communs

L’article de Mme Bossi relève l’existence de principes communs aux deux secteurs sanitaire et médico-social.

Il s’agit tout d’abord du droit au respect de la vie privée et à la confidentialité des informations. Dans le secteur sanitaire, il trouve son fondement dans le premier alinéa de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique selon lequel « toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. » Pour le secteur médico-social, ce droit est affirmé par l’article L. 311-3 du code de l’action sociale et des familles aux termes duquel « L’exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux… » dont la « confidentialité des informations la concernant ».

Le deuxième point commun réside dans l’exigence d’un dossier de suivi. Pour le secteur sanitaire, elle est formulée à l’article L. 1111-7 du code de la santé publique dont le premier alinéa dispose que « toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l’objet d’échanges écrits entre professionnels de santé ». Elle se décline, pour les établissements de soins, dans le dossier médical des patients hospitalisés (73) et, pour le médecin libéral, dans l’élaboration d’une fiche d’observation (74).

Pour le secteur social et médico-social, ce suivi s’intègre dans le cadre plus général projet d’accompagnement personnalisé. Le dossier de suivi sert ainsi de support aux interventions des différents acteurs de la santé et à la consignation des informations nécessaires à la prise en charge des patients.

2.  Des cadres juridiques distincts

Au-delà des principes communs, les cadres juridiques divergent.

● Le fondement juridique de l’échange et du partage entre professionnels de santé est posé à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique.

Il prévoit l’échange de données entre deux professionnels de santé afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible, sauf opposition du patient. Cet échange de données suppose de dûment avertir le patient pour lui laisser la possibilité d’exercer son droit d’opposition.

Il prévoit également le partage de données de santé :

– entre professionnels de santé exerçant au sein d’un même établissement de santé formant une « équipe de soins ». Les informations la concernant sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe. Le patient dispose toujours du droit de s’opposer. Les données de santé sont partagées au sein de l’équipe, l’ensemble des personnels faisant partie de l’équipe de soins ;

– au sein d’une maison ou d’un centre de santé, sous réserve du consentement exprès du patient et du respect d’exigences s’agissant des professionnels de santé (adhésion au projet de santé).

Enfin, le régime d’échange ou de partage d’informations relève aussi de l’article L. 1111-8 du code de la santé publique. Son objet vise à encadrer le recours par les professionnels et les établissements de santé à des prestataires tiers pour l’hébergement des données de santé à caractère personnel. Ce dispositif d’encadrement concerne nombre d’applications telles que le dossier médical personnel (DMP) ou le dossier pharmaceutique (DP).

Selon la CNIL (75), l’activité d’hébergement consiste « dans l’organisation du dépôt et de la conservation des données personnelles de santé, afin d’assurer leur pérennité et leur confidentialité ». Les données de santé personnelles faisant l’objet d’un hébergement sont recueillies ou produites à l’occasion des activités de prévention, de diagnostic ou de soins et sont déposées, auprès de personnes physiques ou morales, agréées. Un contrat est passé entre l’hébergeur et la personne ou l’organisme à l’initiative du dépôt de ces données. Il prévoit que l’hébergement des données, les modalités d’accès à celles-ci et leurs modalités de transmission sont subordonnés à l’accord de la personne concernée.

Les conditions d’agrément des hébergeurs des données, quel qu’en soit le support, sont fixées par les articles R. 1111-9 à R. 1111-15-1 du code de la santé publique. Ils précisent les informations qui doivent être fournies à l’appui de la demande d’agrément, notamment les modèles de contrat et les dispositions prises pour garantir la sécurité des données traitées, en particulier les mécanismes de contrôle et de sécurité dans le domaine informatique ainsi que les procédures de contrôle interne.

● Dans le secteur médico-social, aucun cadre législatif n’existe pour l’échange et le partage des données personnelles. Dans le silence du texte, et en l’absence de dispositions spécifiques (personnes âgées (76) ou handicapées (77)), il est fait application des principes contenus dans la loi informatique et libertés.

3.  Les limites du cadre actuel

Ce cadre juridique se présente toutefois quelques limites alors se développent de plus en plus les parcours de santé des patients faisant intervenir conjointement ou successivement des acteurs des secteurs sanitaire, social et médico-social. Dans le cas particulier du secteur sanitaire, le partage de données se heurte à l’absence de cadre pour les équipes ressortissantes de structures distinctes : à l’instar de Mme Bossi, l’étude d’impact du projet de loi relève ainsi que le texte restreint la notion d’équipe de soins aux professionnels de santé exerçant en établissements de santé. Dans le cadre d’une prise en charge globale, cohérente et continue, l’échange et le partage des données se révèlent pourtant primordiaux pour éviter les ruptures de prise en charge et de parcours.

B.  UN RÉGIME QUI DOIT ÊTRE ADAPTÉ AUX NOUVEAUX MODES DE PRISE EN CHARGE

Les 1° à 4° du I modifient substantiellement le régime juridique des données de santé, qu’il s’agisse de l’échange, du partage et de l’hébergement afin de s’adapter aux nouveaux modes de prises en charge faisant intervenir conjointement ou successivement différents professionnels issus de structures distinctes, sanitaire, sociale et médico-sociale.

● Le modifie l’article L. 1110-4 du code de la santé publique.

Son a) en remplace les huit actuels premiers alinéas par cinq subdivisions I à V.

Le nouveau I regroupe deux alinéas visant à définir le champ du droit au respect de la vie privée et à la confidentialité des informations des patients.

Le premier alinéa étend le champ d’application appelé à couvrir désormais les secteurs sanitaire, social et médico-social.

S’agissant du secteur sanitaire, aux côtés des professionnels de santé, des établissements, l’article couvre les services de santés mentionnés au sein du livre III de la sixième partie du code de la santé publique. Il concerne les services participant à des missions précises telles que l’aide médicale urgente, la permanence des soins, les transports sanitaires ou la télémédecine. Il vise également les autres services de santé que sont les réseaux, les centres, les maisons et les pôles de santé ainsi que les installations autorisées à pratiquer les interventions de chirurgie esthétique.

S’agissant des établissements et services social et médico-social, le renvoi au I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles permet de couvrir un large panel de structures en charge de l’enfance, des personnes handicapées et âgées.

Le deuxième alinéa du I reprend, en les modifiant, la liste des intervenants concernés par le régime de secret. Sauf exception prévue par la loi, ce régime s’applique à tous les individus ayant connaissance des informations qu’il s’agisse de professionnel ou de membre du personnel des établissements, services ou organismes visés au premier alinéa du I. Comme aujourd’hui, ce régime s’étend aux personnes dont l’activité les met en relation avec ces structures. Enfin, sont visés tous les professionnels intervenant dans le système de santé. Par professionnel, il faut entendre l’ensemble des professionnels de santé (médecins, infirmier diplômé d’État, etc.) et des non professionnels de santé du champ sanitaire (par exemple psychologue ou radiophysicien) ou du champ social (assistante sociale) qui participent à la prise en charge du patient.

Le nouveau II reprend, en l’adaptant, le régime d’échanges de données relatives à un patient faisant l’objet d’une prise en charge.

C’est la totalité du parcours du patient qui est désormais envisagée, qu’il s’agisse du parcours sanitaire, social ou médico-social. Sont désormais visés l’ensemble des professionnels, et non plus les seuls professionnels de santé, pour autant qu’ils participent à la prise en charge du patient. L’échange des données est toutefois borné : il est ainsi subordonné à la nécessité de permettre la coordination, la continuité des soins, ou le suivi social et médico-social.

Le nouveau III précise le régime de partage de données selon qu’il implique des personnes relevant ou non d’une même équipe de soins.

Lorsqu’ils relèvent d’une même équipe de soins, les informations faisant l’objet du partage doivent permettre la coordination, la continuité des soins, ou le suivi social et médico-social. Dans ce cas précis, aucun consentement préalable n’est requis, les informations étant par ailleurs réputées confiées à l’ensemble de l’équipe : sur ces deux derniers points, le régime prévu ne diffère en rien du droit actuel. En revanche, la notion d’équipe de soins se fait plus large qu’actuellement. Il est en effet fait référence au nouvel article L. 1110-12 institué par le 3° du I du présent article. Ce nouvel article modifie la portée de la notion d’équipes de soins afin d’envisager les équipes constituées quelle que soit la structure de support (cf. infra).

Le partage de données trouve à s’appliquer au-delà de l’équipe de soins lorsque les informations sont nécessaires à la prise en charge de la personne. Dans ce cas précis, le consentement préalable est requis. Il s’agit par exemple de l’accès au dossier d’un patient demandé par un médecin qui souhaite accéder à l’historique médical de son patient contenu dans un dossier partagé que celui-ci consulte pour la première fois en dehors d’un parcours de soins « piloté » par son médecin traitant ou, autre exemple, un médecin consulté par le patient sur son lieu de vacances.

Dans ces conditions, le consentement est recueilli par tout moyen, y compris dématérialisé. Le recueil du consentement sous forme dématérialisée signifie que celui-ci est tracé par exemple dans le dossier médical électronique du patient, sans qu’il soit nécessaire de faire intervenir des formulaires papier et de faire signer une attestation papier au patient. Un décret indiquera les conditions dans lesquelles le patient devra être informé du devenir de ses données ainsi que des règles qui président à l’échange et au partage de l’information le concernant. Il indiquera en second lieu les conditions matérielles d’enregistrement de son consentement sous forme dématérialisée enregistrée dans le système d’information du professionnel ou de l’établissement qui le prend en charge.

Enfin, le IV vise à homogénéiser pour l’ensemble de l’article L. 1110-4 les règles d’échange et de partage des données. Le régime de l’information préalable de la personne concernée par les échanges ou les partages de données est réaffirmé tout en lui reconnaissant un droit d’opposition.

Ce droit trouvera à s’exercer par tout moyen à la convenance du patient. Généralement, le patient peut signifier oralement les restrictions qu’il entend apporter à la circulation de l’information le concernant. Notons qu’il s’agit de cas exceptionnels dans lesquels le patient vise à exclure une personne précise du cadre de l’échange ou peut demander que telle information ne soit pas communiquée. C’est au nom de ce droit fondamental qu’un patient peut par exemple demander à ce qu’une prescription particulière soit exclue de son dossier pharmaceutique ou qu’un aspect de son histoire médicale soit masquée dans son dossier médical partagé.

Le b) vise à regrouper les trois derniers alinéas de l’article L. 1110-4 au sein d’un V.

Le c) complète le même article par un VI prévoyant un décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL pour préciser les conditions et les modalités de la mise en œuvre de l’article L. 1110-4. Selon les informations transmises à votre rapporteur, le texte précisera et encadrera les conditions concrètes dans lesquelles l’information peut circuler entre professionnels de santé et non professionnels de santé : catégories d’informations pouvant être échangées ou partagées, définition des motifs de ces échanges, etc.

● Le insère un nouvel article L. 1110-4-1 dont l’objet vise à harmoniser les dispositions sur les référentiels permettant d’assurer la qualité, la confidentialité et la protection des données. Ce dispositif est aujourd’hui précisé aux articles L. 1110-4 et L. 1111-8 du code de la santé publique.

L’ensemble des acteurs concernés doit disposer de systèmes d’information conformes à des référentiels d’interopérabilité et de sécurité élaborés par l’ASIP Santé mentionnée à l’article L. 1111-24, étant précisé qu’ils doivent être approuvés par le ministère chargé de la santé par un arrêté pris après avis de la CNIL. La rédaction vise un large panel d’acteurs : il s’agit des professionnels de santé, des établissements et services de santé, des hébergeurs de données ou des organismes participant à la prévention, aux soins ou au suivi médico-social et social. Les opérations concernées concernent aussi bien le traitement, la conservation sur support informatique et la transmission par voie électronique.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, les référentiels d’interopérabilté et de sécurité relèvent du cadre d’interopérabilité des systèmes d’information de santé (CI-SIS). Ce dernier spécifie les standards à utiliser dans les échanges et lors du partage de données entre les systèmes d’information de santé. L’ASIP Santé construit le CI-SIS sur des normes internationales et des standards robustes, adaptés au contexte français, reconnus par la communauté des éditeurs et des acteurs de santé utilisateurs. On dénombre plusieurs volets du CI-SIS : un volet de transport, un volet de services, trois volets transverses et une dizaine de volets de contenus métier, soit, au total, une vingtaine de documents de référence. L’actualisation des référentiels techniques est annuelle et les référentiels de contenu métier ont été produits au fur et à mesure de leur mise au point.

● Le insère un nouvel article L. 1110-12 précisant la notion d’équipe de soins. La notion de parcours de soins implique l’action de plusieurs intervenants, qui ne sont pas exclusivement des professionnels de santé, appartenant à des structures différentes. L’article L. 1110-12 fixe les critères matériels et organiques permettant de caractériser l’équipe de soins.

D’un point de vue matériel, une équipe de soins regroupe un ensemble de professionnels participant directement au profit d’un même patient à la réalisation :

– d’un acte diagnostique, qui permet d’identifier la nature et la cause de l’affection ou de la maladie dont un patient est atteint, par l’interprétation des symptômes et des signes ;

– d’un acte thérapeutique, entendu comme un ensemble de mesures appliquées par un professionnel de la santé à une personne, afin de l’aider à guérir d’une maladie, de soulager ses symptômes, ou encore d’en prévenir l’apparition ;

– d’un acte de compensation du handicap, c’est-à-dire d’un acte visant à compenser les besoins liés à la perte d’autonomie résultant du handicap pour la réalisation des actes essentiels de la vie quotidienne ;

– d’un acte de prévention de perte d’autonomie, c’est-à-dire d’un acte visant à prévenir les événements péjoratifs dont la survenue porte ou peut porter atteinte à l’autonomie, en tenant pleinement compte des facteurs sociaux et environnementaux. Il s’agit par exemple de garantir la qualité de l’alimentation, du sommeil, le maintien de l’exercice physique, de la mémoire, la prévention des chutes, le maintien du lien social, etc.

D’un point de vue organique, l’équipe de soins se caractérise par la participation directe à la prise en charge d’un patient et doit satisfaire une des trois conditions suivantes :

– les membres exercent tout d’abord soit dans le même établissement de santé, soit dans le même établissement ou service social ou médico-social au sens du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles (enfance, personnes âgées et personnes handicapées), soit dans le cadre d’une structure de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale figurant sur une liste fixée par décret (centre de santé, maison de santé pluriprofessionnelle…) ;

– les membres ont été désignés par un médecin auquel le patient a confié la responsabilité de la prise en charge. Il s’agit de l’équipe de soins constituée de fait (ex post) par les différents professionnels qui interviennent à l’occasion d’un épisode de soins (ou d’un parcours dans la situation d’une maladie chronique) à l’initiative du médecin traitant du patient. Par exemple, dans un cas simple et banal d’un épisode de soins : le médecin traitant, le biologiste, et/ou le radiologue et le pharmacien ;

– les membres exercent dans un ensemble, incluant au minimum un professionnel de santé, dans la mesure où cet ensemble relève d’une organisation formalisée et se caractérise par la mise en œuvre de pratiques conformes à un cahier des charges fixé par la voie réglementaire. Il s’agit d’une équipe de soins définie a priori et identifiable indépendamment du parcours d’un patient à la différence du 2° et dont les membres n’appartiennent pas à la même entité juridique, à la différence du 1°. Il peut s’agir d’une maison pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (MAIA), d’un réseau de soins ou d’une réunion de concertation pluridisciplinaire en cancérologie. Le texte pose le principe de la définition d’éléments permettant de s’assurer de façon tangible de la réalité du travail en équipe tels que l’existence de rencontres régulières ou de protocoles communs.

● Le modifie l’article L. 1111-8 qui fixe le régime applicable aux hébergements de données.

Le a) propose une nouvelle rédaction du premier alinéa.

Le régime de l’hébergement des données de santé s’appuie aujourd’hui sur des critères organiques (données déposées par des professionnels de santé, des établissements de santé ou la personne concernée) et des critères matériels (données recueillies ou produites à l’occasion des activités de prévention, de diagnostic ou de soins).

Cette nouvelle rédaction comporte un double objectif :

– d’une part, elle vise à remplacer l’actuelle liste limitative des professionnels et des structures pouvant faire appel à un hébergement externe de leurs données de santé par une définition des activités dont la mise en œuvre permet l’hébergement externe. Cette nouvelle rédaction évite l’obsolescence du texte lorsqu’un nouveau type de structure médicale est créé par le législateur. Ce problème s’est ainsi posé avec la création des maisons de santé pluri-professionnelles, postérieurement à l’écriture de l’article L. 1111-8 ;

– d’autre part, elle a pour objet de préciser le champ de l’agrément en indiquant qu’il ne concerne que les structures qui font profession d’héberger les données « pour le compte » d’un tiers.

La seconde phrase substitue au consentement préalable à l’hébergement de données, un régime d’information préalable assorti d’un droit d’opposition reposant sur un motif légitime. Selon les informations transmises à votre rapporteure, cette rédaction résulte d’échanges avec la CNIL. La rédaction initiale du Gouvernement ne prévoyait pas la possibilité pour le patient de s’opposer à l’hébergement de ses données pour des raisons pratiques évidentes : dès lors qu’un médecin ou un hôpital a décidé de sous-traiter l’hébergement de son système d’information, il lui est raisonnablement impossible en pratique de stocker chez lui le dossier d’un patient qui refuserait l’hébergement. La CNIL, qui a admis ce raisonnement, a toutefois souhaité que le droit d’opposition puisse être maintenu dans des cas exceptionnels dûment justifiés et argumentés par le patient. Il est, à ce stade, difficile en l’absence de jurisprudence de définir ce que serait un motif légitime.

Par coordination, le b) supprime la dernière phrase du deuxième alinéa. Celle-ci précise que lorsque l’hébergement est à l’initiative d’un professionnel de santé ou d’un établissement de santé, le contrat prévoit que l’hébergement des données, les modalités d’accès à celles-ci et leurs modalités de transmission sont subordonnés à l’accord de la personne concernée. Dans la mesure où le consentement est présumé, une telle disposition n’a plus lieu d’être.

Enfin, le c) supprime les quatrième et cinquième alinéas du même article.

Le quatrième alinéa ne présente plus guère d’utilité, le régime relatif aux référentiels de sécurité et d’interopérabilité applicable à l’hébergement de données relevant désormais de l’article L. 1110-4-1 aux termes du 2° précité.

Le cinquième alinéa prévoyait des dérogations au consentement exprès prévu par les dernières phrases des deux premiers alinéas. L’abandon de ce dernier principe au profit d’une information préalable assortie d’un droit d’opposition rend également cet alinéa superflu.

II. LES ENJEUX DU DMP

A.  UNE MISE EN PLACE LABORIEUSE

Le dispositif du dossier médical personnel (DMP) a été introduit dans le code de la sécurité sociale par les articles 2 à 5 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie. Le dossier médical personnel avait pour ambition d’améliorer la prise en charge des malades par un partage informatique de l’information médicale associant le patient et son – ou ses – médecins. Ce dossier contient les informations personnelles de santé nécessaires au suivi et à la coordination des soins. Il suppose d’être régulièrement alimenté par les professionnels de santé d’une part, et le consentement du titulaire d’autre part. Plusieurs objectifs sous-tendaient la mise en place de cet outil adapté à l’utilisation croissante des systèmes et des réseaux dématérialisés :

– une meilleure prise en compte de la santé dans un contexte de spécialisation des soins et de fragmentation des soins ;

– une prise en charge plus adaptée, s’appuyant sur la coordination des acteurs de l’hôpital et de la médecine de ville ;

– la suppression des actes répétitifs inutiles et des accidents liés à une mauvaise association de médicaments (iatrogénie).

L’accès du DMP est limité aux seuls professionnels de santé et, parmi eux, à ceux désignés par le patient. Même avec le consentement du patient, le DMP ne peut être accessible à d’autres personnes. Ainsi, l’article L. 1111-18 interdit l’accès au DMP lors de la conclusion d’un contrat relatif à une protection complémentaire en matière de couverture des frais de santé et à l’occasion de la conclusion de tout autre contrat exigeant l’évaluation de l’état de santé d’une des parties. Le DMP n’est pas non plus accessible au médecin du travail. Tout manquement donne lieu à l’application de sanctions pénales.

Le DMP contient les informations nécessaires au suivi et à la coordination des soins telles que les comptes rendus hospitaliers et radiologiques, les résultats d’analyses de biologie, les antécédents et allergies, les actes importants réalisés, ou les traitements qui vous ont été prescrits et délivrés.

La création d’un DMP peut être demandée à l’accueil d’un établissement de santé, ou lors d’une consultation médicale, sous réserve que le médecin dispose des outils informatiques adaptés. À tout moment, le titulaire du DMP est en droit de supprimer certains des documents qu’il contient, ou de masquer certaines informations.

Le DMP peut être fermé à tout moment. À partir de sa fermeture, il est conservé 10 ans puis supprimé.

La mise en place du DMP est aujourd’hui assurée par un groupement d’intérêt public qui en assure l’exploitation. Il s’agit d’une structure juridique ad hoc initialement dénommée groupement d’intérêt public GIP-DMP puis renommée GIP-Agence des systèmes d’information partagées de santé ASIP santé en 2009.

Plusieurs rapports ont souligné les retards importants pris dans le déploiement du dossier médical personnel, le dernier en date ayant été commis par la Cour des comptes (78). L’étude d’impact souligne ainsi « l’absence de stratégie construite autour d’un projet d’organisation des soins » couplée aux difficultés d’appropriation de l’outil pour des raisons culturelles, techniques ou organisationnelles. Le DMP n’a pas été envisagé comme un outil au profit d’un projet de santé publique mobilisateur.

La Cour des comptes estime à 210 millions d’euros le coût total du DMP entre son instauration en 2004 et 2011, le quart de cette somme ayant été consacré au financement d’expérimentation. À cette somme, il convient d’ajouter les montant consacrés au déploiement d’autres dossiers de santé censés converger vers le dossier médical personnel, tels que le dossier de patient informatisé des hôpitaux (plusieurs centaines de millions d’euros), le dossier pharmaceutique (23 millions d’euros) ou le dossier cancer. Au total, près d’un demi-milliard d’euros aura été consacré à la mise en place du DMP et du développement parallèle des autres systèmes d’information supposés l’alimenter.

La mise en œuvre du DMP a été effective en 2011, l’objectif d’un million de dossiers ouverts en 2013 ayant été fixé ainsi que le souligne le rapport précité de la Cour des comptes. En décembre 2014, un peu plus de 500 000 DMP ont été ouverts selon le site internet dédié (http://www.dmp.gouv.fr/).

B.  LA RÉNOVATION DU DMP

Les 5° à 11 ° du I mettent en œuvre un nouveau dispositif : le dossier médical partagé.

● Le remplace le premier alinéa de l’article L. 1111-14 par deux alinéas.

Le premier alinéa institue le dossier médical partagé en lieu et place du dossier médical personnel. Le dossier médical partagé a vocation à remplir les mêmes objectifs que le dispositif actuel à savoir prévention, coordination, qualité et continuité des soins.

Le régime juridique applicable au dossier médical partagé ressortit tout d’abord aux articles L. 1110-4 et L. 1110-4-1 : respect de la vie privée et des informations concernant le patient, conformité à des référentiels d’interopérabilité et de sécurité.

Le DMP est par ailleurs constitué dans le respect du secret médical et peut être créé sous réserve du consentement exprès de la personne concernée. Celui-ci est recueilli oralement après information du patient et enregistré dans le DMP sous forme dématérialisée.

À noter que la nouvelle rédaction ne reprend pas la mention relative à l’information du patient sur le don d’organes. Selon les informations transmises à votre rapporteure, le décret d’application du DMP devrait maintenir le dispositif actuel tout en prévoyant aussi la mention de la personne de confiance et les directives anticipées.

Le second alinéa confie la maîtrise d’ouvrage du DMP à la CNAMTS dans des conditions précisées par décret pris après avis de la CNIL.

Il est apparu « plus opérationnel » de confier la gestion de la deuxième génération du DMP à l’assurance maladie compte tenu de son implantation territoriale et de son réseau de proximité. Cette institution est également en relation étroite avec les professionnels de santé avec lesquels les échanges sont quasi-permanents. L’adoption du DMP par les professionnels de santé suppose une parfaite intégration du logiciel avec leur processus métier et leur pratique. La difficulté de cette intégration est plus grande en ambulatoire qu’en milieu hospitalier, dans la mesure où les professionnels libéraux sont seuls pour faire face à la complexité des systèmes d’information. Dès lors, afin de favoriser la prise en compte des spécificités de l’exercice « en ville », il est apparu logique de confier le DMP à la CNAMTS en tant qu’interlocuteur « naturel » des professionnels de santé libéraux. Ceci permettra à la CNAMTS d’harmoniser notamment les conditions d’accès à ses téléservices avec le DMP et d’être l’interlocuteur unique des éditeurs pour l’intégration de l’ensemble des téléservices dans les logiciels qu’ils distribuent.

Sa gestion reste toujours confiée à un hébergeur de données dans les conditions précisées par l’article L. 1111-8.

● Le procède à la rédaction globale de l’article L. 1111-15 relatif au report des informations dans le DMP par les professionnels de santé, quels que soient le mode et le lieu d’exercice.

Ce report s’inscrit tout d’abord dans le cadre des règles déontologiques applicables au professionnel de santé concerné, dans le respect de la vie privée et à la confidentialité des informations des patients (article L. 1110-4) et avec la garantie que la sécurité et la confidentialité des données de santé à caractère personnel sont préservées en cas d’hébergement des données par un tiers (article L. 1110-4-1). Le report des données de santé est également subordonné, comme actuellement, au respect du droit du patient à être informé de son état de santé dans les conditions fixées par l’article L. 1111-2.

Les informations reportées seront les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins. L’étude d’impact précise à cet égard que le DMP doit être un outil de référence autorisant la prise en charge coordonnée principalement pour les personnes âgées et les malades atteints de pathologies chroniques.

Les modalités de reversement des informations de santé sont également précisées par ce nouveau dispositif et seront en tout état de cause normalisées. Deux régimes sont prévus selon que le patient a effectué un séjour dans un établissement de santé ou relève de son médecin traitant.

Lors du séjour d’un patient, les professionnels de santé habilités des établissements de santé, soit les médecins responsables de l’équipe de soins ayant procédé à sa prise en charge, sont tenus de reporter sur le dossier médical les principaux éléments résumés relatifs à ce séjour.

L’habilitation consiste à reconnaître des droits à un professionnel de santé pour accéder à des données de santé à caractère personnel. Il doit être enregistré dans les répertoires nationaux (répertoire partagé des professionnels de santé notamment) et dans le système national de sécurité des systèmes d’information de santé (infrastructure de gestion de clés gérée par l’ASIP Santé). Cette habilitation est attestée par une authentification forte du professionnel de santé au moyen de sa carte de professionnel de santé (CPS) ou d’un dispositif équivalent agréé.

Le dispositif proposé prévoit que ce report s’inscrit dans le respect des obligations définies par la Haute autorité de santé (HAS). Selon les informations transmises à votre rapporteure, il s’agit des obligations relatives au contenu du courrier de fin d’hospitalisation ou compte rendu d’hospitalisation qui doit comporter l’identité du médecin destinataire (nom et adresse) ou du service en cas de mutation/transfert, une référence aux dates du séjour (date d’entrée et date de sortie), une synthèse du séjour (contenu médical sur la prise en charge du patient), une trace écrite d’un traitement de sortie (dénomination des médicaments, posologie, rythme des prises, durée du traitement).

Par ailleurs, à la différence du régime actuel, il est désormais prévu que le médecin traitant alimente périodiquement le dossier par une synthèse dont le contenu est défini par la HAS.

La synthèse médicale du médecin traitant est un document défini dans le cadre de la convention médicale (79) et dont le contenu a été élaboré par la HAS (80). Il comporte différentes rubriques : les coordonnées du patient, les coordonnées du médecin traitant, la date de mise à jour, les pathologies en cours, et les antécédents personnels du patient (y compris allergies et intolérances médicamenteuses), les facteurs de risque (comprenant les antécédents familiaux, les facteurs de risque liés au mode de vie (81) et les facteurs de risques professionnels), les traitements au long cours, et les points de vigilance (ou points d’attention). Il doit être signé par le médecin traitant en cas d’impression. La synthèse médicale sera être mise à jour autant que de besoin en fonction de l’évolution de l’état du patient et au moins une fois par an.

Le nouveau dispositif de l’article L. 1111-15 dispose en outre que les données nécessaires à la coordination des soins issues des procédures de remboursement ou de prise en charge sont versées dans le dossier. Il s’agit d’alimenter le DMP dès son ouverture par « l’historique des remboursements », système d’information de l’assurance maladie mis en œuvre auprès des médecins libéraux. L’objectif est de fournir ainsi une première synthèse du parcours du patient et en particulier des médicaments qui lui ont été délivrés dès lors que ceux-ci ont été présentés au remboursement.

Le dernier alinéa dispose que le titulaire du dossier peut rendre inaccessibles certaines informations. Le titulaire du DMP garde ainsi le contrôle des accès aux éléments d’information de son dossier. Il peut ainsi interdire l’accès à certains professionnels de santé, que ce soit intégralement ou partiellement. Dans ce dernier cas, des documents sont « masqués » à certains professionnels de santé qui par ailleurs restent autorisés à accéder aux autres documents. Les documents masqués sont néanmoins toujours accessibles au médecin traitant et au professionnel de santé auteur de ces documents. En résumé, l’inaccessibilité ne concerne que certains documents et certains professionnels de santé. Elle n’est pas définitive et peut être modifiée (réduite, étendue, voire levée) selon la décision du titulaire du DMP.

● Le complète l’article L. 1111-16. Le dispositif actuel dispose que le médecin coordonnateur, notamment des établissements assurant l’hébergement des personnes âgées, a accès au dossier médical de la personne sous réserve son accord ou de celui de son représentant légal.

Le nouvel alinéa prévoit l’accès du médecin traitant de la personne hébergée à l’ensemble des informations contenues dans le dossier. Il bénéficie à cet égard de droits d’accès au dossier. Il permet au médecin traitant de connaître en permanence l’intégralité du DMP de son patient en n’étant pas concerné par la dissimulation de certaines informations ou documents. La place et le rôle du médecin traitant demeurent indispensables s’agissant des personnes hébergées dans les établissements. Il est le trait d’union entre la ville et l’établissement et constitue un lien important pour la personne âgée avec sa vie antérieure.

● Le procède à la rédaction globale de l’article L. 1111-19.

Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit l’instauration d’un « portail du dossier médical personnel », destiné aux bénéficiaires de l’assurance maladie et aux professionnels de santé. Ce portail assure des fonctions d’information générale et un service de gestion permettant aux bénéficiaires de l’assurance maladie de gérer leur dossier médical personnel et les droits d’accès des professionnels de santé. Ce portail était rendu nécessaire en raison de la pluralité des hébergeurs dans le schéma initial du DMP. Ce service destiné aux bénéficiaires de l’assurance maladie et aux professionnels de santé permettait d’offrir un point d’accueil unique pour assurer les divers services liés au DMP.

Le choix d’un hébergeur unique (82) a rendu par la suite la création d’un portail par décret inutile. Ce service d’accueil -un accès web- a été mis en œuvre par l’ASIP et le sera par la CNAMTS. Sa mention dans la loi, avec l’appellation « portail », est en conséquence devenue superflue. C’est la raison pour laquelle la nouvelle rédaction prévoit que le titulaire du dossier médical peut accéder à son contenu par voie électronique.

Le DMP étant un dossier médical informatisé, les bénéficiaires peuvent y accéder en se connectant sur Internet. Les accès étant sécurisés, les bénéficiaires doivent utiliser les codes d’accès qui leur ont été remis au moment de la création de leur DMP. Les patients ne disposant pas d’accès informatique peuvent accéder à leur DMP en utilisant les ordinateurs connectés des médecins impliqués dans leur prise en charge, dont leur médecin traitant. Il est également possible de demander une impression de son DMP par courrier papier envoyé à l’hébergeur du DMP. Des critères permettant de justifier l’identité du titulaire requérant sont alors demandés.

Le patient peut également accéder à la liste des professionnels et des équipes ayant accès à son dossier et la modifier. Il peut enfin prendre connaissance des traces d’accès à son dossier.

● Le abroge l’article L. 1111-20 qui prévoyait avant la généralisation du DMP et au plus tard le 31 décembre 2011, un dossier médical sur un support portable numérique sécurisé est remis à titre expérimental à des patients atteints d’une affection de longue durée (ALD) jusqu’au 31 décembre 2013.

L’article 30 de la loi Fourcade du 11 août 2011 réformant la loi « hôpital, patients, santé et territoires » (83) organisait, d’ici au 31 décembre 2013, l’expérimentation d’un « dossier médical implanté sur un support portable numérique sécurisé » pour un échantillon d’assurés souffrant d’une ALD.

Compte tenu du retard pris, la mise en chantier de ce projet avait été abandonnée, la priorité ayant été fixée en faveur d’une nouvelle étape du dossier médical pour en faire un véritable support consultable pour l’ensemble des professionnels de santé concernés.

● Le 10° procède à la rédaction globale de l’article L. 1111-21. Les modalités d’application du dossier médical partagé feront l’objet d’un décret en conseil d’État pris après avis de la CNIL et des conseils nationaux de l’ordre des professions de santé (médecins, pharmaciens, sages-femmes, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes, infirmier et podologues).

Ce décret devrait préciser :

– les conditions de création et de fermeture du dossier médical partagé prévues au premier alinéa de l’article L. 1111-14.

– la nature et le contenu des informations contenues dans le dossier ;

– les modalités d’exercice des droits des personnes sur les informations figurant dans leur dossier ;

– les conditions de masquage de certaines informations par le titulaire du dossier médical partagé ;

– les conditions d’utilisation par les professionnels de santé et les conditions particulières d’accès au dossier médical partagé.

● Le 11° procède à l’abrogation de l’article L. 1111-22 qui prévoyait les conditions dans lesquelles les informations contenues dans le dossier médical personnel pouvaient alimenter le carnet de santé.

III. LES MESURES DE COORDINATION

Le II procède à diverses mesures de coordination au sein du code de la sécurité sociale.

Son abroge l’article L. 161-36-1 A du code de la sécurité sociale, relatif au respect de la vie privée et du secret des informations, le dispositif ayant été remanié aux termes du I du présent article.

Il supprime par ailleurs le 8° du II de l’article L. 162-1-14. Cet alinéa prévoit aujourd’hui l’application d’une pénalité lorsqu’un professionnel de santé refuse de reporter dans le dossier médical les éléments issus de chaque acte ou consultation, dès lors que le patient ne s’est pas explicitement opposé au report de cet acte ou consultation dans son dossier médical. Selon les informations transmises à votre rapporteure, cette disposition répond à une demande des médecins et témoigne de la recherche d’un consensus plutôt que d’imposer le DMP par la contrainte.

Le complète l’article L. 221-1 relatif aux missions exercées par la CNAMTS. Cet article prévoit explicitement qu’elle exercera la maîtrise d’ouvrage du DMP.

Enfin, le III procède, par coordination, à la substitution de l’appellation « dossier médical personnel »  par celle de « dossier médical partagé » dans divers articles du code de la santé publique et de la sécurité sociale.

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Outre 25 amendements rédactionnels ou de coordination, cet article a fait l’objet d’améliorations sur plusieurs points à l’initiative de la rapporteure.

La définition de l’équipe de soins a ainsi été complétée afin d’inclure les professionnels de santé très investis dans la prise en charge de la douleur. Il a également été précisé que les données pouvant faire l’objet d’un échange et d’un partage d’informations entre professionnels comprendraient les activités de suivi social et médico-social. Sur proposition de la rapporteure, le contenu du DMP a été précisé afin d’inclure les mentions relatives aux dons d’organes, aux directives anticipées et à la personne de confiance.

Deux autres amendements ont également été adoptés. Le premier procède à une nouvelle rédaction de l’alinéa 8. Le second dispose que le chirurgien-dentiste accède à l’ensemble des données médicales nécessaires à l’exercice de sa profession sous réserve de l’accord préalable du patient.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1014 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. Il s’agit de protéger les données personnelles des usagers de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS1013 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à garantir le respect de la vie privée des patients.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Le partage d’informations concerne l’ensemble des professionnels.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1272 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’échange et le partage des données de santé entre professionnels sont la base d’une coordination efficace. L’information doit circuler grâce à des systèmes d’information adaptés, incluant le pharmacien, et spécifiques aux professionnels de santé. Cette coordination permettra une prise en charge optimale du patient.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS1012 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. L’utilisation des données relatives à la santé des patients nécessite un cadre rigoureux et un partage limité.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS78 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1011 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. Il s’agit de réserver aux professionnels de santé les informations concernant la prise en charge du patient, en supprimant les termes « ou de son suivi médico-social et social » à la fin de l’alinéa 6.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Cet amendement restreint le champ des informations échangées.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS79 de la rapporteure.

Ensuite, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette successivement les amendements AS1010 de M. Arnaud Robinet, AS636 de M. Élie Aboud, AS1009 de M. Arnaud Robinet et AS1601 de M. Élie Aboud.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AS80 de la rapporteure.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements AS637 de M. Élie Aboud et AS1008 de M. Arnaud Robinet.

Elle adopte l’amendement rédactionnel AS102 de la rapporteure.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS703 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. L’article donnerait à penser que l’obligation d’informer la personne de son droit d’exercer une opposition à l’échange et au partage d’informations la concernant a été posée dans un autre article. Or ce n’est pas le cas. Il est donc important que soit posée à un moment donné cette obligation d’informer et de stipuler ensuite et de manière distincte que la personne peut exercer ce droit à tout moment.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Cet amendement est satisfait par le texte.

La Commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS1007 de M. Arnaud Robinet.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels AS81 et AS82 de la rapporteure.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement AS1006 de M. Arnaud Robinet.

La Commission examine ensuite trois amendements identiques AS31 de M. Jean-Pierre Door, AS484 de M. Dominique Tian et AS572 de M. Fernand Siré. 

M. Jean-Pierre Door. L’article 25 du projet de loi permet à une équipe de soins de partager les informations concernant une même personne, qui sont strictement nécessaires à la coordination et à la continuité des soins. Cette équipe de soins est définie comme un ensemble de professionnels, participant directement au profit d’un même patient à la réalisation d’un acte diagnostique, thérapeutique, de compensation du handicap ou de prévention de perte d’autonomie, ou aux actions nécessaires à leur coordination. Il est impératif que ceux-ci soient réunis autour et sous la responsabilité du médecin traitant.

M. Fernand Siré. Mon amendement est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Des dispositions juridiques reconnaissent d’ores et déjà le rôle du médecin traitant. D’une part, l’article L.162-5-3 du code de la sécurité sociale prévoit que tout assuré indique à son organisme d’assurance maladie le nom du médecin traitant qu’il a choisi. D’autre part, le dispositif du dossier médical partagé permet au médecin d’accéder à toutes les informations de son patient, y compris celles qui sont masquées pour les autres professionnels de santé. Défavorable.

M. Élie Aboud. Il y a une crise de confiance aujourd’hui. Il ne coûterait rien d’inscrire dans le marbre de la loi que le médecin traitant est à la tête de la chaîne de responsabilités.

Mme la ministre. Il y a un malentendu, car l’expression « équipe de soins » renvoie à deux réalités. Il y a l’équipe de soins primaires, définie à l’article 12 et à la tête de laquelle se trouve le médecin traitant, chargé d’organiser la prise en charge du patient. Mais il y a aussi l’équipe de soins, au sein de laquelle est partagée l’information entre professionnels et pour laquelle il n’y a pas de chef d’équipe.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à deux amendements identiques AS1071 de la rapporteure et AS1273 de Mme Dominique Orliac.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement vise à prévoir la prise en charge de la douleur, en insérant l’expression « soulagement de la douleur » à l’alinéa 16.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS101 de la rapporteure.

La Commission examine ensuite l’amendement AS1005 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. L’amendement AS1005 vise à préciser qu’il s’agit d’une « coordination clinique », associant précisément les professionnels de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’amendement restreint le champ. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements AS1004 et AS1003 de M. Arnaud Robinet.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS638 de M. Élie Aboud.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS100 de la rapporteure.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS999 de M. Arnaud Robinet.

Puis elle examine les amendements identiques AS808 de M. Jean-Pierre Door et AS1190 de M. Jean-Pierre Barbier.

M. Jean-Pierre Door. Nous craignons que le pharmacien d’office ne trouve pas sa place dans l’échange d’informations organisé autour de l’équipe de soins.

C’est la raison pour laquelle les amendements identiques AS808 et AS1190 visent à caler l’équipe de soins sur les protocoles de coopération existants, ce qui permettra d’y associer le pharmacien d’officine qui dispose du dossier pharmaceutique du patient.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable. L’amendement est en effet satisfait par l’alinéa 18, dont la rédaction permet de couvrir les pharmacies d’officine.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS1364 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Cet amendement vise à intégrer les pharmaciens d’officine dans l’ensemble des professionnels de santé qui participent au parcours de soins d’un patient et qui, en conséquence, ont intérêt à avoir accès au dossier médical partagé de ce dernier.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Même réponse que précédemment, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1275 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Comme aucune disposition ne fixe de manière expresse de délai pour la conservation des dossiers médicaux détenus par les professionnels de santé et par d’autres structures de soins, comme les centres de santé, il est nécessaire d’harmoniser les différents délais, en appliquant à l’ensemble des acteurs les délais de conservation actuellement prévus pour les établissements de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ce sujet important mérite une concertation. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement.

L’amendement AS1275 est retiré.

La Commission adopte ensuite successivement l’amendement de coordination AS107 et l’amendement rédactionnel AS99 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1073 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement vise à étendre au suivi social et médico-social l’initiative d’hébergement et l’accès aux données.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels AS97, AS96, AS95, AS94, AS93 et AS92 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1072 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement prévoit la mention, au sein du dossier médical partagé, des informations relatives au don d’organes – peut-être faudrait-il ajouter et de tissus humains –, aux directives anticipées mentionnées à l’article L. 1111-11, ainsi qu’à la personne de confiance mentionnée à l’article L. 1111-6.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels AS91, AS90 et AS89 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1074 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement concerne le droit à l’oubli. Toutefois, comme j’ai cru comprendre que le Gouvernement fera des propositions en ce sens, je le retire.

L’amendement AS1074 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS1028 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. Les chirurgiens-dentistes courent, le plus souvent, après l’information médicale relative à l’état de leurs patients en affection de longue durée, sous anticoagulants ou diabétiques. L’amendement AS1028, dans une approche de synergie, vise à placer les chirurgiens-dentistes au cœur du système de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement l’amendement de coordination AS108 et l’amendement rédactionnel AS88 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement AS998 de M. Arnaud Robinet.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à limiter l’accès au dossier médical partagé aux seuls professionnels disposant d’une carte de professionnel de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cette précision ne relève pas de la loi mais des modalités d’accès et d’alimentation du dossier. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement AS998 est retiré.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS326 de M. Jean-Pierre Door.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels AS87 et AS86, ainsi que l’amendement AS85 corrigeant une erreur matérielle, qui sont tous de la rapporteure.

Puis, elle examine l’amendement AS1498 de M. Hervé Pellois.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement est déjà satisfait par l’adoption d’un amendement que j’ai déposé. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS84 et AS83 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 25 modifié.

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Après l’article 25

La Commission examine, en présentation commune, les amendements AS1360, AS1359 et AS1361 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Apparues en 2007, les nouvelles cartes Vitale permettent de stocker des informations. Les mutuelles peuvent dès lors autoriser l’intégration d’informations directement sur la carte Vitale.

L’amendement AS1359 vise à intégrer automatiquement et obligatoirement dans les cartes Vitale les informations relatives à la complémentaire santé. Cette évolution permettra l’accès direct aux droits via la lecture de la carte Vitale sans avoir à manipuler un autre support, ainsi qu’un remboursement plus rapide du patient grâce à l’automatisation du tiers payant.

Par ailleurs, lors de l’adhésion à une mutuelle de complémentaire santé, l’organisme remet à l’adhérent une carte de mutuelle santé connue sous le nom de carte de tiers payant permettant de dispenser le patient d’avance de frais. Or chaque mutuelle fournit à ses adhérents une carte différente, qu’il s’agisse de la taille, de la disposition des informations, des abréviations utilisées ou du contenu sur les garanties offertes aux adhérents. Ce système complexe freine parfois le parcours de soins coordonné. L’amendement AS1360 vise à harmoniser les cartes des complémentaires santé.

Enfin, l’amendement AS1361 est un amendement de repli, qui demande au Gouvernement, dans un délai de deux ans après la promulgation de la présente loi, la remise d’un rapport évaluant l’opportunité d’organiser l’harmonisation des cartes de complémentaire santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. J’émets un avis défavorable aux amendements AS1360 et AS1359 : les dispositifs qu’ils prévoient relèvent non pas de la loi mais du domaine réglementaire.

Les demandes de rapport s’accumulant, j’émets également un avis défavorable à l’amendement AS1361.

La Commission rejette successivement les amendements.

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Chapitre VI
Ancrer l’hôpital dans son territoire

Article 26 A
Garantie apportée à chaque patient d’avoir un accès aux soins, notamment dans les établissements de santé, dans des délais raisonnables

À l’initiative de la rapporteure, la Commission a réaffirmé la garantie apportée à chaque patient d’avoir un accès aux soins, notamment dans les établissements de santé, dans des délais raisonnables. Cet article tient ainsi compte des territoires pour lesquelles l’accessibilité peut être rendue malaisée en raison de particularités géographiques ou touristiques.

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Après avoir rejeté, suivant l’avis défavorable de la rapporteure l’amendement AS1113 de M. Arnaud Richard, la Commission examine l’amendement AS1201 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cet amendement vise à garantir à chaque patient un accès aux soins dans des délais raisonnables. Il s’agit de tenir compte des territoires pour lesquelles l’accessibilité peut être rendue malaisée en raison de particularités géographiques. Je pense particulièrement aux zones de montagne ou touristiques éloignées, dans lesquelles les temps de déplacement ne se comptent pas en kilomètres mais en heures.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 26
(art. L. 229-5-1 du code de l’environnement, art. L. 1 121-16-1, L. 1123-14, L. 1435-5-2, L. 1435-8, L. 2131-1, L. 2212-8, L. 4221-10, L. 4381-1, L. 5126-2, L. 5126-9, L. 6111-1, L. 6111-1-1 [nouveau], L. 6111-1-2 [nouveau], L. 6111-1-3 [nouveau], L. 6111-7, L. 6111-8 [nouveau], L. 6112-1, L. 6112-2, L. 6112-3, L. 6112-4, L. 6112-5, L. 6114-1, L. 6114-2, L. 6122-7, L. 6141-7-3, L. 6143-6, L. 6146-2, L. 6147-2, L. 6147-7, L. 6154-1, L. 6154-2, L. 6155-1, L. 6161-5, L. 6161-8, L. 6161-9, L. 6162-8 et L. 6213-2 du code de la santé publique et L. 162-22-13, L. 162-12-15, L. 162-22-19, L. 174-20 et L. 381-30-5 du code de la sécurité sociale)

Refondation du service public hospitalier

Dans la continuité du pacte de confiance à l’hôpital (84), Cet article propose de refonder un service public hospitalier répondant aux attentes des citoyens en matière d’accès à la santé.

I. VERS UNE REFONDATION DU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

A.  LE SERVICE PUBLIC HOSPITALIER, UNE DIMENSION ORGANIQUE

Ainsi que le rappelle le rapport remis par M. Couty, la notion de service public renvoie, en droit administratif, aux activités d’intérêt général gérées par une personne publique ou sous son contrôle et gouvernées par des procédés exorbitants du droit commun. La gestion du service public peut être assurée par la régie, la concession (délégation de service public) ou par un établissement public.

La loi du 31 décembre 1970 (85) a défini les bases d’un grand service public hospitalier (SPH), inscrit dans la tradition française de service public, assuré non seulement par les établissements d’hospitalisation publics, mais aussi par les établissements de soins privés sous réserve de certaines conditions.

Le service public hospitalier couvrait ainsi les activités de soins, la prévention, l’enseignement, la recherche.

Les établissements privés à but non lucratif sont admis à participer au service public, sur leur demande et sont identifiés en tant qu’établissement participant au service public hospitalier (PSPH). Les établissements privés à but lucratif peuvent participer au service public et concluent à cet effet un contrat de concession pour l’exécution du service public hospitalier.

B.  L’APPROCHE MATÉRIELLE DU SERVICE PUBLIC RETENUE DANS LA LOI « HPST »

La loi hôpital, patients, santé et territoire (HPST) (86) a supprimé la notion de service public hospitalier en définition une approche matérielle résumée au travers de quatorze missions précisées à l’article L. 6112-1.

Les 14 missions de service public prévues par l’article L. 6112-1 du code de la santé publique

« Les établissements de santé peuvent être appelés à assurer, en tout ou partie, une ou plusieurs des missions de service public suivantes :

1° La permanence des soins ;

2° La prise en charge des soins palliatifs ;

3° L’enseignement universitaire et post-universitaire ;

4° La recherche ;

5° Le développement professionnel continu des praticiens hospitaliers et non hospitaliers ;

6° La formation initiale et le développement professionnel continu des sages-femmes et du personnel paramédical et la recherche dans leurs domaines de compétence ;

7° Les actions d’éducation et de prévention pour la santé et leur coordination ;

8° L’aide médicale urgente, conjointement avec les praticiens et les autres professionnels de santé, personnes et services concernés ;

9° La lutte contre l’exclusion sociale, en relation avec les autres professions et institutions compétentes en ce domaine, ainsi que les associations qui œuvrent dans le domaine de l’insertion et de la lutte contre l’exclusion et la discrimination ;

10° Les actions de santé publique ;

11° La prise en charge des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II à IV du titre Ier du livre II de la troisième partie du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale ;

12° Les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire et, si nécessaire, en milieu hospitalier, dans des conditions définies par décret ;

13° Les soins dispensés aux personnes retenues en application de l’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

14° Les soins dispensés aux personnes retenues dans les centres socio-médico-judiciaires de sûreté. »

Dans le cadre des travaux parlementaires portant sur la loi HPST, ce changement de portage était notamment présenté comme la volonté d’assurer une meilleure répartition territoriale des missions de service public, étant constaté que « sur certains territoires aucun établissement n’assure les missions de service tandis que dans d’autres, l’exercice de ces missions est parfois redondant » (87).

Présenté comme une liste recoupant les missions déjà prévues, le dispositif laisse toutefois de côté une grande partie des activités de soins assurées par les établissements publics et les établissements privés à but non lucratif participant au service public hospitalier. Les missions de service public visent à mettre en exergue certaines activités spécifiques, par essence de service public. Cette approche laisse paradoxalement sans qualification l’activité de soins, l’article L. 6112-1 du code de la santé publique ne faisant effectivement pas référence à l’activité « cœur de métier » de tout établissement de santé, c’est-à-dire la prise en charge sanitaire des patients.

● Pour l’accomplissement des missions de service public, l’article L. 6112-2 du code de la santé publique précise la liste des acteurs.

Les établissements de santé sont tout d’abord cités sans que le code n’établisse plus de distinction entre établissements publics et établissements privés. Les établissements concernés sont ainsi :

– les établissements de santé publics ;

– les établissements de santé privés ;

– les établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC) qui correspondent à l’ancienne catégorie des hôpitaux privés participant au service public hospitalier (PSPH) et aux centres de lutte contre le cancer. La catégorie des ESPIC avait été introduite par les parlementaires lors de la discussion de la loi HPST qui, en supprimant la notion de service public hospitalier, avait fait disparaître le statut de PSPH des établissements de santé privés à but non lucratif. Le projet de loi ne reconnaissait alors plus que deux catégories d’établissements : public et privé. Cette distinction binaire méconnaissait le rôle particulier par le secteur privé non lucratif, appelé à participer au service public hospitalier. Les établissements issus du régime antérieur des PSPH sont ainsi devenus des ESPIC sous réserve de la demande établie auprès de l’agence régionale de santé (ARS) conformément à l’article L. 6161-5 (88).

● Les missions de service public peuvent être assurées dans les mêmes conditions par l’ensemble des établissements de santé quel que soit leur statut. Les missions de service public peuvent être assurées « à la carte » en fonction des besoins d’accès aux soins identifiés et dans le cadre d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens conclu avec l’agence régionale de santé ou d’un contrat spécifique.

Outre les établissements de santé, peuvent notamment être chargés d’assurer ou de contribuer à assurer, en fonction des besoins de la population appréciés par le schéma régional d’organisation des soins les centres, maisons et pôles de santé, l’Institution nationale des invalides, le service de santé des armées, les groupements de coopération sanitaire.

En cas de carence sur un territoire de santé, compétence est donnée au directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) d’imposer, lorsque cela est nécessaire, une mission de service public à l’un de ces acteurs, sans préjudice des compétences réservées par la loi à d’autres autorités administratives.

Le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens prévu à l’article L. 6114-1 ou un contrat spécifique précise les obligations auxquelles est assujettie toute personne assurant ou contribuant à assurer une ou plusieurs des missions de service public ainsi que, le cas échéant, les modalités de calcul de la compensation financière de ces obligations :

– le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens est conclu entre les agences régionales de la santé et les établissements de santé, les groupements de coopération sanitaire ainsi que les titulaires d’une autorisation d’installation d’équipements matériels lourds ;

– le contrat spécifique s’applique aux personnes physiques ou morales qui ne sont pas soumises à l’obligation de conclure un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens au titre de l’article L. 6114-1.

● L’article L. 6112-3 du code de la santé publique précise les garanties qui sont accordées aux patients des personnes morales ou physiques qui assurent une ou plusieurs missions de service public :

– l’égal accès à des soins de qualité ;

– la permanence de l’accueil et de la prise en charge, ou l’orientation vers un autre établissement ou une autre institution, dans le cadre défini par l’agence régionale de santé ;

– la prise en charge aux tarifs fixés par l’autorité administrative ou aux tarifs des honoraires prévus au 1° du I de l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire « les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires dus aux professionnels par les assurés sociaux en dehors des cas de dépassement autorisés par la convention pour les médecins et les chirurgiens-dentistes ».

L’article L. 6112-3-1 précise enfin les garanties que doivent apporter tous les établissements publics de santé, y compris en dehors du cadre des missions de service public : l’égalité d’accès à des soins de qualité et la permanence de l’accueil et de la prise en charge, ou l’orientation vers un autre établissement ou une autre institution.

Telles sont les dispositions applicables aux établissements de santé.

Ces principes posés occultent toutefois une différence essentielle ainsi que le rappelle le rapport Couty. Les missions de service public s’imposent au secteur lucratif qui, à la différence du secteur non lucratif, n’a pas le choix des missions du SPH et ne peut choisir ses missions à la carte.

C.  LA NÉCESSAIRE REFONDATION DU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

Le rapport Couty propose de renouer avec la tradition française du service public par le biais d’un rétablissement d’un bloc de compétences plutôt qu’une liste énumérative et incomplète des missions de service public.

Si l’énumération des missions de service public permet d’identifier les missions principales de service public, elle ne constitue pas une liste exhaustive des obligations qui s’imposent de facto au secteur non lucratif. Toujours selon le rapport Couty, 80 % des missions des activités de soins actuellement assumées par les établissements de santé ne sont pas incluses dans le champ de l’article L. 6112–1.

À cet effet, la réaffirmation du SPH doit pouvoir s’articuler autour de notions de bases telles que les activités de soins, quels qu’ils soient, de recherche et d’enseignement. Cette réaffirmation n’exclut pas de pouvoir reconnaître la participation du secteur privé lucratif au SPH en cas de carence dans la mesure où il offre des garanties identiques au secteur public.

Pour être effectif, le service public doit s’appuyer sur les principes fondateurs du service public :

– l’égalité d’accès aux soins qui se manifeste par la non-discrimination que les soins soient ou non programmés, l’accessibilité géographique ou financière ;

– le principe de mutabilité dans une approche privilégiant l’adaptation continue de l’offre aux besoins et dont une des déclinaisons est la prise en compte des besoins exprimés par les usagers à travers leur participation à la gouvernance du SPH ;

– le principe de continuité qui se traduit par la garantie d’un accès permanent ou régulier à l’offre de soins.

Enfin, on rappellera le rapport de Mme Bernadette Devictor précisant qu’il y a un « réel enjeu dans la définition des obligations de service public et de ce qui les distingue des obligations qui s’imposent à tous les acteurs de santé » (89).

Le I modifie le code de la santé publique afin de réaffirmer les missions des établissements de santé ainsi que les principes du service public hospitalier, son champ d’application et les garanties que sa mise en œuvre implique.

II. LES MISSIONS DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

Le A modifie le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique.

A.  DES MISSIONS RENFORCÉES

Son modifie l’article L. 6111-1 dont le dispositif précise les missions que doivent accomplir les établissements de santé.

Le a) modifie la rédaction globale du premier alinéa et apporte deux modifications principales.

La rédaction actuelle tend à préciser le champ des établissements qu’ils soient publics, privés ou d’intérêt collectif. La nouvelle rédaction ne distingue plus que les établissements publics et privés.

Les missions exercées par les établissements de santé consisteront toujours à assurer le diagnostic, la surveillance, le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes. Le premier alinéa est toutefois complété puisqu’échoient aux établissements des missions tenant à la prévention et l’éducation à la santé. Cette modification tend à rétablir, sous une forme plus adaptée aux enjeux contemporains, la rédaction antérieure à la loi HPST. L’article L. 6111-1 précisait alors que les établissements participaient à des actions d’éducation pour la santé et de prévention. La rédaction proposée par le présent article conforte le rôle des établissements en leur accordant un rôle moteur. Ceci correspond à la réalité de la pratique, les différents établissements de santé intégrant de facto des actions d’éducation à la santé et de prévention, plus ou moins présentes selon les activités et le type de patients accueillis.

Le b) modifie le début du deuxième alinéa qui précise les différents modes de délivrance de soins par les établissements de santé. Il s’agit d’une délivrance, sous forme ambulatoire ou à domicile, ce dernier couvrant tant le lieu de résidence que l’établissement avec hébergement relevant du code de l’action sociale et des familles. Il est désormais précisé que la délivrance des soins pourra inclure les soins palliatifs.

On rappellera, qu’au terme de l’article L. 1110-1 du code de la santé publique, les soins palliatifs sont « des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ».

Le c) modifie le quatrième alinéa relatif à la participation des établissements à la politique de santé publique et aux dispositifs de vigilance relatif à la sécurité sanitaire. La notion de « santé publique » est désormais remplacée par celle de « santé » par coordination avec l’article premier du projet de loi.

Enfin le d) complète le dispositif en précisant que les établissements de santé peuvent participer à la formation, la recherche et à l’innovation en santé.

B.  LA PRISE EN COMPTE DES PATIENTS FRAGILES

Le insère trois nouveaux articles L. 6111-1-1 à L. 6111-1-3 au sein du code de la santé publique.

1.  Les patients en situation de précarité

L’article L. 6111-1-1 met en place, au sein des établissements de santé, des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) pour les personnes en situation de précarité. Il reprend, en l’adaptant, la rédaction de l’actuel article L. 6112-6 faisant l’objet d’une abrogation en application du B du présent article.

Dans le droit actuel, la permanence d’accès aux soins de santé est mise en œuvre dans le cadre des programmes régionaux pour l’accès à la prévention et aux soins des personnes démunies dont l’article L. 1434-2 précise qu’ils sont partie intégrante du projet régional de santé (PRS). L’article 38 du présent projet de loi procède à la réécriture des dispositions relatives au projet régional de santé rendant caduc le renvoi aux dispositions de l’article L. 1432-2. En conséquence, L’article L. 6111-1-1 insère d’emblée les PASS dans le cadre du PRS.

Les PASS sont actuellement mises en place par les établissements publics de santé et les établissements de santé privés assurant une ou plusieurs des missions de service public définies à l’article L. 6112-1. Dans la rédaction prévue par le projet de loi, la mise en place des PASS ressortit à l’ensemble des établissements de santé, y compris les établissements privés qui ne participeraient pas au SPH.

Les PASS ont bénéficié d’une politique active de soutien récemment avec la publication d’une circulaire (90) rappelant leurs missions et les conditions de leur exercice et l’extension des PASS à vocation régionale sur l’ensemble du territoire en 2014. Il existe environ 430 PASS aujourd’hui – hors PASS à vocation régionale. Leur mise en place ouvre droit à un financement au titre des missions d’intérêt général.

Le reste de la rédaction demeure inchangé. Il est précisé que les PASS comprennent des permanences d’orthogénie. Il est également prévu que des conventions sont conclues entre les établissements de santé et l’État envisageant, en cas de nécessité, la prise en charge des consultations externes, des actes diagnostiques et thérapeutiques ainsi que des traitements qui sont délivrés gratuitement aux personnes accueillies dans les PASS.

La PASS

Les premières consultations pour les patients en situation de précarité remontent à 1992 mais c’est la loi relative à la lutte contre les exclusions (91) qui les a instituées.

Les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) facilitent l’accès au système de santé des personnes en situation de précarité et les aident dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits. Une PASS doit :

– offrir un accès aux soins et un accompagnement soignant et social aux patients dans la perspective d’un retour à l’offre de soins de droit commun. Ces soins peuvent ne pas être soumis à facturation, dans le cadre notamment de la réalisation d’actes gratuits ;

– agir à l’intérieur de l’établissement et à l’extérieur de celui-ci pour faciliter le repérage et la prise en charge de ces patients et construire un partenariat institutionnel élargi.

La permanence est habituellement située dans un établissement de santé ; elle peut cependant être localisée sur un site en dehors de l’enceinte de l’établissement de santé, de manière à faciliter l’accès de certains publics. Quel que soit son mode d’organisation – PASS centralisée, dont l’action s’effectue pour l’essentiel sur un local dédié, ou, PASS transversale, c’est-à-dire dont l’activité est peu localisée car portée par un ensemble des professionnels sociaux et sanitaires dans l’établissement – la PASS doit être facilement identifiable et accessible au patient, ainsi qu’aux acteurs internes et externes à l’établissement de santé.

La plus grande part des 430 PASS recensées en 2012 sont des PASS généralistes. Elles sont généralement situées dans des établissements publics. Beaucoup (55 %) sont dans des établissements où le service des urgences a une activité importante. Tous les CHU/CHR en ont une, ce sont alors des permanences de taille plutôt importante en nombre de patients, comme en effectifs de professionnels.

L’accès sans frais à des consultations de médecine générale est possible dans près de quatre PASS généralistes sur cinq. L’accès à des médicaments sans frais est plus large encore, Les actes techniques sont accessibles sans frais dans environ 75 % des permanences, autant pour les analyses biologiques que pour les examens radiologiques. Les soins infirmiers le sont à même proportion.

Les PASS généralistes comptent en moyenne près de 2 ETP, avec du temps de travailleur social quasi-systématiquement, puis du temps infirmier et/ou du temps médecin. D’autres professionnels peuvent intervenir : du personnel administratif notamment, mais également des pharmaciens, cadres de santé, psychologues, aides-soignants… Leur file active moyenne est de l’ordre de 430 patients mais il existe de fortes disparités, puisque 20 % déclarent une file active de moins de 100 patients ; à l’opposé, 25 % dénombrent 500 patients ou plus.

Des partenariats liant la PASS et les professionnels ou services de l’établissement de santé sont très fréquemment mis en place, mais pas toujours formalisés par un protocole. Les partenariats extérieurs sont fréquents également, mais encore moins formalisés. L’implication de la permanence dans les actions menées en interne ou à l’extérieur de l’établissement de santé est plus affirmée pour les PASS accueillant le plus de patients.

Les PASS sont financées par des crédits missions d’intérêt général (MIG). En 2013, ce sont au total 56,50 M€ qui ont été octroyés.

2.  Les patients en situation de vulnérabilité

L’article L. 6111-1-2 reprend les 11° à 14° de l’article L. 6112-1, dans son actuelle rédaction, relatifs :

– à la dispensation des soins psychiatriques pour les patients à la demande d’un tiers, du représentant de l’État ou à la suite d’un jugement, ou pour les personnes détenues ;

– aux soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire et, si nécessaire, en milieu hospitalier ;

– aux soins dispensés aux personnes placées en retenue en application de l’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

– à la dispensation de soins aux personnes retenues dans les centres socio-médico-judiciaires de sûreté.

Le dernier alinéa précise que les établissements de santé concernés devront satisfaire aux garanties du SPH mentionnées à l’article L. 6112-2 dans sa rédaction résultant du B du présent article : accueil adapté, permanence de l’accueil et de la prise en charge, égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité, absence de dépassement d’honoraire.

Concernant les soins sans consentement, le directeur général de l’ARS continuera de désigner un ou plusieurs établissements autorisés en psychiatrie chargés d’assurer les soins psychiatriques sans consentement. Les moyens mis en œuvre pour l’accomplissement de ces activités et les modalités de coordination avec l’activité de psychiatrie de secteur seront précisés dans le projet d’établissement ou les documents de politique médicale pour les établissements privés.

Pour les soins aux détenus, les établissements de santé continueront d’être désignés par arrêté du directeur général de l’ARS compétent. Cette nomination est le fruit d’une concertation avec les établissements de santé. Deux supports servent à formaliser cette désignation : les conventions et les protocoles, respectivement signés entre les directions interrégionales des services pénitentiaires (DISP) et les ARS d’une part, et les établissements de santé et les établissements pénitentiaires d’autre part.

Il a enfin été précisé à votre rapporteure que la qualité du parcours de santé et de vie des personnes détenues pourra également faire l’objet d’un projet territorial dans le cadre du service territorial de santé au public (STSP), y compris sur le volet santé mentale.

3.  Les patients en situation d’urgence

L’article L. 6111-1-3 dispose enfin que tout patient pris en charge en situation d’urgence ou dans le cadre de la permanence des soins bénéficie des garanties du SPH mentionnées à l’article L. 6112-2 dans sa rédaction résultant du B du présent article.

Cet article s’applique à l’ensemble des établissements de santé, l’objectif étant bien de permettre au patient d’être hospitalisé en urgence dans des conditions d’accessibilité financière qui contribuent par ailleurs à définir le service public hospitalier. Ce patient n’est en effet pas en mesure de donner son consentement à un dépassement tarifaire et n’a pas fait nécessairement le choix de l’établissement le prenant en charge. Les conditions de prise en charge en termes d’accessibilité financière s’étendent en outre aux soins consécutifs et liés à l’hospitalisation en urgence. Cette règle n’est d’ailleurs en rien une novation, puisqu’elle trouve déjà à s’appliquer à tout patient hospitalisé en urgence.

Il s’agit, en fait, d’un toilettage rendu nécessaire par la réécriture de l’article L. 6112-3 qui prévoyait expressément cette règle.

4.  Les modifications de coordination

● Le dispose que l’article L. 6111-7 devient l’article L. 6111-8 : Cet article précise que les mesures réglementaires prévues par le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la sixième partie sont déterminées par décret en Conseil d’État ainsi que les modalités d’application en tant que de besoin.

● Le rétabli un article L. 6111-7 qui fixe les modalités de financement de certaines dépenses. Il reprend, en l’adaptant, la rédaction de l’article L. 6112-8 faisant l’objet d’une abrogation en application du B du présent article.

L’État participe ainsi aux dépenses exposées par les établissements de santé au titre des activités de formation des médecins, des odontologistes, des pharmaciens et des personnels paramédicaux dans la limite des crédits ouverts chaque année par la loi de finances. Ces financements relèvent aujourd’hui de la Mission d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI) mais selon les réponses apportées à votre rapporteure, il n’est pas possible de différencier en leur sein les financements alloués uniquement à la partie formation, la MERRI couvrant également les activités de recherche.

Les dépenses des centres de réception et de régulation des appels sont financées par des contributions qui peuvent notamment provenir des régimes obligatoires d’assurance maladie, de l’État et des collectivités territoriales. Pour les établissements publics, le financement provient de la mission d’intérêt général SAMU qui en 2013 s’élevait à 227,7 millions d’euros et de manière marginale de quelques subventions de collectivités territoriales.

Enfin, l’État prend en charge les dépenses exposées par les établissements de santé au titre des soins apportées aux personnes faisant l’objet d’une rétention administrative qui est désormais mentionnée au 4° de l’article L. 6111-1-2. Ce financement est assuré par le ministère de l’intérieur sur le budget de l’État. Il s’élève en 2014 à 7,6 millions d’euros. Les unités médicales des centres de rétention administrative sont aujourd’hui rattachées uniquement à des établissements publics de santé.

III. LE SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

Le B du I procède à la rédaction globale du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique désormais intitulé « Service public hospitalier ». Ce chapitre sera composé de cinq articles numérotés de L. 6112-1 à L. 6112-5.

A.  LES PRINCIPES DU SPH

L’article L. 6112-1 définit les principes du service public hospitalier (SPH).

● Le SPH couvre tout d’abord les missions qui sont précisées au chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique, c’est-à-dire les missions réactualisées au terme du A du présent article. Il s’agit notamment des missions de soins, de politique de santé, de recherche prévues par l’article L. 6111-1, de la mise en place des PASS en faveur des personnes précaires mentionnées à l’article L. 6111-1-1, des soins psychiatriques ou des soins apportées aux personnes détenues ou faisant l’objet d’une rétention comme précisé par l’article L. 6111-1-2, des soins urgents ainsi que de la permanence des soins comme prévu par l’article L. 6111-1-3.

● Le SPH couvre également l’aide médicale urgente définie à l’article L. 6311-1 du code de la santé publique.

Le service d’aide médicale urgente (SAMU), service hospitalier, a pour mission de répondre par des moyens exclusivement médicaux aux situations d’urgence.

Les missions du SAMU

Selon l’article L. 6311-1 du code de la santé publique, l’aide médicale urgente « a pour objet, en relation notamment avec les dispositifs communaux et départementaux d’organisation des secours de faire assurer aux malades, blessés et parturientes, en quelque endroit qu’ils se trouvent les soins d’urgence appropriés à leur état », le SAMU, service hospitalier, a pour mission de répondre par des moyens exclusivement médicaux aux situations d’urgence.

Aux termes des articles R. 6311-1 à R. 6311-5, lorsqu’une situation d’urgence nécessite la mise en œuvre conjointe de moyens médicaux et de moyens de sauvetage, les SAMU joignent leurs moyens à ceux qui sont mis en œuvre par les services d’incendie et de secours.

Les SAMU comportent un centre de réception et de régulation des appels (CRRA) afin d’assurer la régulation médicale des situations d’urgence. Ils doivent, à cet effet, assurer une écoute médicale permanente, déterminer et déclencher la réponse la mieux adaptée à la nature des appels, s’assurer de la disponibilité des moyens d’hospitalisation, publics ou privés, adaptés à l’état du patient, organiser, le cas échéant, le transport dans un établissement public ou privé en faisant appel à un service public ou à une entreprise privée de transports sanitaires et veiller à l’admission du patient.

● Enfin ces missions s’inscrivent dans le respect des principes qui fondent le service public tel que rappelé par le rapport Couty - égalité d’accès et de prise en charge, continuité, adaptation et neutralité - ou des obligations définies à l’article L. 6112-2.

L’égalité d’accès conduit « à garantir sur un territoire donné, l’accès de tous, sans discrimination, à une offre hospitalière, financièrement et géographiquement accessible » ainsi que le résume le rapport de Mme Bernadette Devictor précité.

L’accessibilité comporte une dimension financière qui peut être évaluée en fonction du reste à charge pour les patients. Cette obligation trouve à s’appliquer aujourd’hui et se traduit par l’application d’un tarif de responsabilité et l’absence de dépassement d’honoraires pour les médecins libéraux.

Cette disposition a fait débat au sein de la conférence nationale de santé (CNS). Les enjeux ont tout d’abord porté sur le choix à établir entre absence de dépassements d’honoraires ou absence de reste à charge pour l’usager. Cette dernière proposition, portée par la fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a été écartée en raison de la complexité de sa mise en œuvre et de ses implications sur la répartition des rôles entre l’assurance maladie obligatoire et les assurances complémentaires. Les échanges ont également porté sur l’activité libérale à l’hôpital public dont l’encadrement demeure une attente forte de la CNS. L’idée défendue serait de voir les praticiens conclure un contrat d’accès aux soins régulant les dépassements d’honoraires.

L’accessibilité comporte aussi une dimension géographique puisqu’il convient d’assurer une offre suffisante sur l’ensemble du territoire. La réforme du financement des activités isolées portées par l’article L. 162-22-8-1 du code de la sécurité sociale (92) comme celle du financement particulier des hôpitaux de proximité, instauré par l’article L. 162-22-8-2 du même code s’inscrivent dans ce cadre (93).

Les hôpitaux de proximité
Article L. 6111-3-1 du code de la santé publique

« - I.– Les hôpitaux de proximité sont des établissements de santé publics ou privés qui contribuent, par des coopérations avec les structures et professionnels de médecine ambulatoire et avec les établissements et services médico-sociaux, à l’offre de soins de premier recours dans les territoires qu’ils desservent. Ils permettent aux patients qui s’adressent à eux d’accéder à des consultations spécialisées, dans le cadre des coopérations qu’ils développent, et assurent, en cas de nécessité, l’orientation des patients vers des structures dispensant des soins de second recours.

« II.– Les hôpitaux de proximité exercent une activité de médecine. Ils n’exercent pas d’activité de chirurgie ou d’obstétrique.

« Le volume de leur activité de médecine n’excède pas un seuil défini dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« III.– Pour chaque région, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, sur proposition du directeur de l’agence régionale de santé, la liste des hôpitaux de proximité au regard des besoins de la population et de l’offre de soins dans la région.

« IV.– Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article, notamment les modalités de révision de la liste mentionnée au III. »

L’accessibilité comporte enfin une dimension liée à l’accueil des personnes en situation de handicap mais aussi des personnes âgées, qui tendent à cumuler plusieurs déficiences, des enfants, dont les besoins et comportements sont spécifiques et qui peuvent de ce fait être placés en situation de handicap ou encore des personnes présentant des caractéristiques physiques spécifiques.

Le principe de continuité renvoie à l’obligation de disponibilité afin de garantir un accès permanent et régulier à l’offre de soins. Il se traduit de plusieurs façons : obligation d’accueil, réorientation du patient vers la structure la plus apte à le prendre en charge, réponse à la demande de soins non programmés. Elle sous-tend la coordination entre établissements ainsi que la coopération avec les autres acteurs pour faciliter la prise en charge des patients sans rupture de son parcours (retour à domicile, coordination avec la médecine de ville) et encadrement du droit de grève.

Le principe d’adaptation suppose de prendre en compte les besoins des usagers et de proposer des services en lien avec les avancées technologiques. Dans le rapport de Mme Bernadette Devictor ce principe se décline dans la participation des usagers dans les instances de gouvernance ou dans la promotion des bonnes pratiques professionnelles justifiées par le développement de la politique de qualité et de sécurité des soins (accréditation notamment).

Le principe de neutralité est lié à l’obligation de non-discrimination pour des motifs d’ordre moral, politique, religieux ou financier. Tous les patients doivent pouvoir être accueillis au sein du SPH.

En définitive, le SPH a vocation à recouvrer l’ensemble des missions des établissements de santé, celles-ci se distinguant par les conditions dans lesquelles elles sont exécutées (accessibilité y compris financière, continuité…). Le SPH étant assuré par de nombreux établissements de santé, il n’est pas attendu que tout établissement du SPH exerce, à lui seul, l’intégralité, des missions définies par le code de la santé publique et ce d’autant plus que la demande est nécessairement variable sur le territoire. Il appartiendra ainsi aux ARS, en fonction des besoins spécifiques de leurs territoires, de veiller à ce que l’offre de SPH, qu’elle soit le fait d’un ou plusieurs établissements, réponde au besoin de la population, tel qu’analysé dans le cadre du projet régional de santé.

B.  LES OBLIGATIONS AFFÉRENTES AU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

L’article L. 6112-2 précise les obligations des établissements du service public hospitalier.

1.  Les garanties apportées aux patients

Le I de l’article L. 6112-2 précise les garanties apportées aux patients par les établissements de santé du SPH et les professionnels de santé exerçant en leur sein :

– un accueil adapté notamment en cas de handicap ou lorsque la personne est en situation précaire. Dans une démarche de qualité et de sécurité des soins, le délai de prise en charge est également en rapport avec l’état de santé du patient.

La question de la précarité renvoie en premier lieu à sa dimension pécuniaire (patients sous CMU et CMU-C notamment mais pas uniquement afin d’éviter tout effet de seuil), à laquelle les établissements SPH seront tenus de répondre par l’obligation d’accessibilité financière qui leur sera faite.

Les établissements du SPH seront, par ailleurs, tenus de participer au service territorial de santé au public. À ce titre, ils seront amenés à prendre en compte la précarité dans l’acception qu’en donne le Père Joseph Wresinski dans son rapport pour le conseil économique et social en 1987 « La précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités, notamment celle de l’emploi, permettant aux personnes et familles d’assumer leurs obligations professionnelles, familiales et sociales, et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. » (94)

– une permanence de l’accueil et de la prise en charge. La prise en charge s’effectue dans les conditions prévues par le cahier des charges établi par les ARS dans le cadre de la permanence des soins. Par ailleurs, l’établissement doit être en mesure d’orienter le patient vers une autre structure ou un autre établissement de santé en mesure de dispenser les soins requis.

La réorientation s’effectuera comme aujourd’hui, dans les conditions fixées par l’article R. 1112-14 : « lorsqu’un médecin ou un interne de l’établissement constate que l’état d’un malade ou blessé requiert des soins urgents relevant d’une discipline ou d’une technique non pratiquée dans l’établissement ou nécessitant des moyens dont l’établissement ne dispose pas, ou encore lorsque son admission présente, du fait de manque de place, un risque certain pour le fonctionnement du service hospitalier, le directeur provoque les premiers secours et prend toutes les mesures nécessaires pour que le malade ou le blessé soit dirigé au plus tôt vers un établissement susceptible d’assurer les soins requis ».

– l’égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité.

– l’absence de dépassement des tarifs de responsabilité et des tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires dus aux professionnels par les assurés sociaux en dehors des cas de dépassement autorisés par la convention pour les médecins et les chirurgiens-dentistes. Il s’agit ici de l’absence de facturation au patient de dépassements des tarifs mentionnés par l’article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale, des tarifs de prestations de l’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 et des articles L. 174-3 (psychiatrie et soins de suite et de réadaptation) et L. 174-6 (unités de soins de longue durée) du code de la sécurité sociale.

Ces garanties sont applicables y compris lorsque le patient est transféré à titre temporaire dans un autre établissement, y compris hors SPH, ou une autre structure pour des actes médicaux. On entend par « autre structure » toute structure autre que les établissements de santé susceptible de réaliser des actes médicaux, tels que les cabinets d’imagerie par exemple.

2.  Des obligations tenant à la démocratie sanitaire

Le II de l’article L. 6112-2 précise également deux obligations complémentaires des établissements de santé relevant du SPH : la participation des représentants des usagers dans leur gouvernance et la transmission annuelle des données de leur compte d’exploitation à l’ARS.

Dans le premier cas, il s’agit, dans la continuité du rapport Couty, d’infléchir les prises de décision dans une logique de service plutôt que de défense des acquis ou de concurrence.

Dans le second cas, cette obligation permet d’assurer les conditions d’un contrôle démocratique de l’utilisation des fonds publics comme le souligne le rapport de Mme Bernadette Devictor. Toutefois, une différence se fait avec les recommandations du rapport précité : il n’est nullement mentionné la transmission du bilan. Il pourrait, néanmoins, être envisagé de compléter la transmission annuelle des comptes d’exploitation par celle du bilan.

3.  Les actions mises en œuvre par les établissements du SPH

Le III de l’article L. 6112-2 précise enfin les actions que doivent mettre en œuvre les établissements de santé.

Le 1° du III dispose que les établissements de santé participent à la mise en œuvre du service territorial de santé (cf. commentaire de l’article 12). Dans l’esprit du rapport remis par M. Couty, les établissements de santé sont des acteurs de santé à part entière apportant leur contribution à la réduction des inégalités de santé et à la mise en place de parcours fluides pour les patients. Pour accomplir ce rôle, le projet de loi prévoit à cet effet différents dispositifs destinés à faciliter la coordination entre les hôpitaux et les autres acteurs de santé : la mise en place du service territorial (article 12) comme celle des lettres de liaison synthétisant les informations nécessaires à la prise en charge du patient (article 24) participent de cette intention.

Le 2° autorise les directeurs des agences régionales de santé à désigner des établissements de santé du SPH en cas de carence de l’offre de services de santé pour développer des actions permettant de répondre aux besoins de la population.

Cette carence est constatée dans le cadre du diagnostic territorial, mentionné à l’article L. 1434-12 du code de la santé publique institué à l’article 12 du projet de loi. Rappelons que ce diagnostic est établi par l’agence régionale de santé avec les acteurs de santé du territoire, notamment avec les représentants des usagers, les professionnels et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, les collectivités territoriales, les organismes locaux d’assurance maladie et les services et les établissements publics de l’État concernés.

Son objet vise notamment à identifier les insuffisances dans l’offre de services sanitaires et médico-sociaux et dans l’accessibilité, la coordination et la continuité de ces services, et de préconiser des actions pour y remédier.

Cette carence est également constatée dans le cadre du projet régional de santé refondé au terme de l’article 38 du présent projet de loi. Ce document, élaboré par l’ARS, est établi en cohérence avec la stratégie nationale de santé et fixe les objectifs pluriannuels en matière de santé et d’offre de santé. Il permet notamment la définition par l’ARS de zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou pour lesquelles des difficultés d’accès aux soins sont constatées.

En cas de carence constatée sur le territoire, L’ARS désignera les établissements SPH les plus à même d’y répondre. Il pourra s’agir du développement d’une activité indispensable au regard des besoins de la population ou de consultations avancées…

Cette notion n’est pas une innovation du projet de loi de santé. Elle préexistait à la loi HPST. En effet, dès lors que l’ARS identifiait un manque de service dans un territoire donné que l’offre de service public ne pouvait combler, l’ARS pouvait proposer aux établissements privés de participer au service public pour l’activité en cause.

Le 3° vise à développer les actions de coopération inter-établissements, avec le secteur social et médico-social et les professionnels de santé libéraux. Ces actions sont établies à la demande de l’ARS. La nécessité de la coopération découle du constat que si l’hôpital tient une place dans la mise en place du parcours de santé, il ne peut agir isolément des autres acteurs. Les établissements de santé doivent considérer que leur apport dans l’offre de services de santé est complémentaire des autres acteurs du système de santé.

Cette coopération est souhaitée pour l’ensemble des établissements de santé mais devient une obligation pour les établissements SPH. Elle témoigne de la volonté que la redéfinition du SPH ne se traduise pas par un hospitalo-centrisme mais bien par une analyse des conditions de mise en œuvre des activités dans un cadre territorial respectueux des compétences de chacun. Cela impliquera pour les établissements de santé concernés de passer les conventions ou de définir des protocoles d’organisations qui assurent une plus grande fluidité dans les parcours de santé dans une perspective de soins ambulatoires ou au domicile plus développés, conformément au souhait des patients.

Il convient d’inclure la participation au service territorial de santé au public (STSP) qui est une obligation nouvelle pour les établissements de santé assurant le SPH. L’établissement SPH est ainsi un acteur parmi les autres au sein du STSP mais sa présence garantit que si les acteurs d’un territoire ont fait le constat, dans le diagnostic partagé validé par l’ARS, d’un manque sur le territoire, cet établissement pourra être désigné pour y répondre.

De façon plus générale, les coopérations reposent sur un certain nombre d’outils, selon un plus ou moins grand degré de mutualisation des moyens : d’une convention ad hoc au groupement de coopération sanitaire, en passant par les groupements hospitaliers de territoire et les groupements d’intérêt économique.

Au-delà du gain en termes de qualité et d’efficience qu’un plus grand degré de coopération apportera aux structures participantes, les ARS pourront accorder des aides à la contractualisation, ou des crédits relevant du fonds d’intervention régional.

Le 4° dispose que les établissements de santé informent l’ARS de toute cessation ou modification de l’activité de soins susceptible de restreindre l’offre de soins. Les établissements doivent par ailleurs rechercher avec les autres acteurs les moyens de répondre aux besoins de santé de la population.

Il est essentiel pour la population que l’ARS soit en mesure de prendre des mesures permettant d’éviter toute carence de l’offre sur le territoire. Ceci explique qu’elle soit tenue informée de toute cessation ou modification de l’activité de soins susceptible de restreindre l’offre de soins. Les coopérations avec les autres acteurs permettent de s’assurer d’une coordination effective de la chaîne de soins en amont (ville) comme en aval (ville/médico-social/social) de la prise en charge hospitalière.

C.  LES ÉTABLISSEMENTS RELEVANT DU SPH

L’article L. 6112-3 définit le champ des établissements appelés à assurer le SPH.

● Il s’agit tout d’abord des établissements publics de santé. Au terme de l’article L. 6141-1 du code de la santé publique, ces établissements sont des personnes morales de droit public dotées de l’autonomie administrative et financière. Soumis au contrôle de l’État, leur objet principal n’est ni industriel ni commercial. Les établissements publics de santé sont dotés d’un conseil de surveillance et dirigés par un directeur assisté d’un directoire.

Le ressort des centres hospitaliers peut être communal, intercommunal, départemental, régional, interrégional ou national :

– les établissements à ressort national, ou interrégional sont créés par décret après avis du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale ;

– les établissements à ressort régional sont créés par décret après avis de la commission spécialisée de l’organisation des soins de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie

– les établissements à ressort communal, intercommunal et départemental sont créés par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé de la région où est situé le siège de l’établissement après avis de la commission spécialisée de l’organisation des soins de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie et de la commune où est situé le siège de l’établissement

● Il s’agit ensuite des hôpitaux des armées, qui au terme de l’article L. 6147-7 du code de la santé publique, sont placés sous l’autorité du ministre de la défense. Outre leur mission prioritaire de soutien sanitaire des forces armées assurée avec les autres éléments du service de santé des armées, les neuf hôpitaux militaires concourent au service public hospitalier.

Les hôpitaux militaires sont ouverts à tous les assurés sociaux, même sans lien avec le ministère de la Défense. Assimilés par le ministère de la Santé à des centres hospitaliers et universitaires (CHU) (95), ces hôpitaux sont des établissements polyvalents de soins pour adultes (96). Ils se soumettent aux procédures de certification de la santé publique.

● Participent enfin au SPH les établissements de santé privés habilités, sur leur demande, par l’ARS. La procédure d’habilitation sera définie par décret (modalités de dépôt, constitution du dossier, délais…).

Pour ce faire plusieurs conditions doivent être remplies :

– le respect des conditions énoncées à l’article L. 6112-2 : accueil adapté, permanence de l’accueil et de la prise en charge, égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité, absence de dépassement d’honoraire ;

– l’adéquation de l’activité au regard des besoins de la population ;

– l’adéquation à la situation de l’offre hospitalière relevant du SPH.

Lorsque l’établissement est habilité le contrat pluriannuel d’objectif et de moyens (CPOM), mentionné à l’article L. 6114-1, est modifié pour préciser les engagements pris afin de respecter les obligations du SPH.

Les ESPIC sont enfin habilités de plein droit à participer au SPH sauf opposition de leur part ou refus motivé par le directeur de l’ARS. Cette habilitation se traduit par un avenant au CPOM. Ce droit de priorité s’explique par le fait que les ESPIC sont aujourd’hui soumis à des règles très proches de ce que sera demain le SPH. Ce sont donc ces établissements qui devraient majoritairement être habilités.

Les établissements privés à but lucratif pourront demander à être habilités, mais il est encore difficile à ce stade d’évaluer le nombre de ces établissements qui accepteront de se mettre en conformité avec les obligations du SPH. Selon les informations transmises à votre rapporteure, les données produites par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, 29 cliniques « Médecine, chirurgie, obstétrique », 13 cliniques autorisées en psychiatrie et 234 cliniques de soins de santé et de réadaptation n’ont réalisé aucun dépassement d’honoraires en 2013, et paraissent donc en mesure de s’engager à adhérer au service public hospitalier.

● L’article L. 6112-4 fixe la procédure de contrôle du respect des règles et principes applicables au SPH par un établissement habilité à cet effet.

L’éventuel manquement constaté fait l’objet d’une procédure contradictoire. À la suite de la notification par l’ARS l’établissement est invité à formuler ses observations et présenter les mesures correctrices adoptées ou envisagées, dans un délai fixé réglementairement. Le délai pourrait être d’un mois, avec ouverture d’une procédure contradictoire. Une procédure d’urgence en cas de manquement caractérisé serait également prévue.

Ce n’est qu’en l’absence de réponse dans les délais ou en cas de réponse insuffisante qu’un retrait d’habilitation peut être envisagé. Le CPOM est révisé à cet effet.

● L’article L. 6112-5 précise que les modalités d’application du chapitre, c’est-à-dire des articles L. 6112-1 à L. 6112-4 seront fixées par décret en Conseil d’État. C’est notamment le cas des modalités de dépôt et d’examen des demandes d’habilitation. Le décret devrait prévoir les modalités de constitution du dossier, de délai d’examen, de procédure de concertation ainsi que les critères d’appréciation (capacité à répondre aux besoins).

IV. LES MODIFICATIONS INDUITES PAR LE RÉTABLISSEMENT DU SPH

A.  LES MESURES DE COORDINATION AU SEIN DU CODE LA SANTÉ PUBLIQUE

Le C, en ses 1° à 27°, et à l’exception notable des 21° et 25°, procède à diverses mesures de coordination au sein du code de la santé publique.

1.  Les modifications relatives au SPH

● Il s’agit tout d’abord de tenir compte de l’abrogation des dispositions tendant à instaurer une approche matérielle du service public. Aux termes des 1°, 2°, 7°, 8°, 9°, 10°, 11°, 15°, 16°, 17°, 18°, 19° et 20° font ainsi l’objet d’une modification :

– l’article L. 1 121-16-1 relatif à la prise en charge des médicaments dans le cadre d’une recherche biomédicale ;

– l’article L. 1123-14 relatif à la recherche biomédicale ;

– l’article L. 4221-10 accordant la possibilité d’exercer dans les établissements du SPH la profession de pharmacien en qualité de contractuel sous réserve de certaines conditions ;

– l’article L. 4381-1 précisant le régime applicable aux auxiliaires médicaux ;

– l’article L. 5126-2 relatif à l’autorisation temporaire accordée par l’ARS à une pharmacie à usage intérieur pour approvisionner d’autres pharmacies à usage intérieur ;

– l’article L. 5126-9 autorisant sous conditions l’ouverture d’une pharmacie à usage intérieur dans les établissements pénitentiaires ;

– l’article L. 6141-7-3 accordant aux établissements publics de santé la possibilité de créer des fondations afin de concourir aux missions de recherche ;

– l’article L. 6143-6 prévoyant de déroger au régime d’incompatibilité applicable aux membres du conseil de surveillance en cas de conflit d’intérêts lorsqu’est concerné un établissement privé assurant le SPH ;

– l’article L. 6146-2 autorisant, sous conditions, l’exercice des missions de service public par les médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre libéral, autres que les praticiens statutaires à temps plein ;

– l’article L. 6147-2 relatif au centre d’accueil et de soins hospitaliers situé à Nanterre ;

– l’article L. 6147-7 relatif aux hôpitaux des armées ;

– l’article L. 6154-1 autorisant les praticiens statutaires exerçant à temps plein dans les établissements publics de santé à exercer une activité libérale dès lors que l’intérêt du SPH n’y fait pas obstacle. Il appartiendra à l’établissement de santé de veiller à ce que l’activité libérale des médecins exerçant en son sein ne remette pas en cause les obligations de service public dont il assume la responsabilité. L’ARS vérifiera également, en tant qu’autorité de contrôle, que cette activité ne remet pas en cause les engagements de l’établissement et qu’il est donc en mesure de faire face, de front, tant à l’activité SPH que du secteur libéral.

2.  Les conséquences de la suppression de la catégorie juridique des ESPIC

La mise en place du SPH entraîne également la suppression de la catégorie juridique des ESPIC au profit des établissements de santé à but non lucratif habilités à assurer le SPH et se traduit, aux termes des 3°, 5°, 6°, 22°, 23°, 24°, 26° et 27° :

– par la modification des articles L. 1435-5-2 (contractualisation en vue d’assurer une activité ambulatoire en cas d’offre médicale insuffisante ou de difficultés dans l’accès aux soins), L. 2131-1 (autorisation par l’Agence de la biomédecine de la création de centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal), L. 2212-8 (interruption volontaire de grossesse), L. 6155-1 (obligation de développement professionnel continu pour les médecins, odontologistes et les pharmaciens), L. 6162-8 (régime d’incompatibilité applicable aux membres du conseil d’administration des centres de lutte contre le cancer), L. 6213-2 (conditions d’exercices des fonctions de biologiste médical) ;

– ainsi que par l’abrogation des L. 6161-5 (qualification des ESPIC) et L. 6161-8 (conclusion d’accord par les ESPIC en vue d’accomplir des missions de service public).

3.  Les autres modifications

● La mise en place d’une permanence des soins assortie des garanties tenant au respect des obligations du SPH se traduit par des modifications de coordination à l’article L. 1435-8, prévue par le . Cette modification n’est toutefois plus nécessaire compte tenu de la réécriture de cet article par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (97).

● La modification des CPOM, consécutives à l’habilitation des établissements de santé privés à participer au SPH, se traduit par des mesures de coordination aux articles L. 6114-1 et L. 6114-2 prévues par les 11°, 12° et 13° :

– le 11° modifie le premier alinéa de l’article L. 6114-1. La durée applicable aux CPOM prévoyant la durée comportant des clauses relatives à l’exécution d’une mission de service public est de 5 ans. Cette durée restera inchangée mais s’appliquera dorénavant aux établissements assurant le SPH ;

– le 12° modifie le cinquième alinéa de l’article L. 6114-2. Cet article prévoit que font l’objet d’un avenant aux CPOM, les termes de l’habilitation à assurer le service public hospitalier, les engagements nouveaux qui en découlent, les conditions relatives au respect des obligations afférentes au SPH ou aux obligations prévues en cas d’autorisation par l’ARS de projets relatifs à la création de tout établissement de santé, à la création, conversion et regroupement des activités de soins et à l’installation des équipements matériels lourds ;

– le 13° modifie le sixième alinéa du même article. Les CPOM seront désormais signés ou révisés au plus tard six mois après la délivrance de l’autorisation ou la décision d’habilitation à assurer le service public hospitalier. Ils fixeront à cet effet les modalités selon lesquelles est calculée la compensation financière liée aux obligations de SPH.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, les modalités de la compensation seront abordées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Des études devraient être menées afin de déterminer si les obligations du SPH emportent une charge financière supplémentaire et, en cas de réponse positive, d’en évaluer le montant.

● Le 14° modifie l’article L. 6122-7 relatif aux obligations prévues en cas d’autorisation par l’ARS de projets relatifs à la création de tout établissement de santé, à la création, conversion et regroupement des activités de soins et à l’installation des équipements matériels lourds.

Les autorisations délivrées sont aujourd’hui subordonnées à des conditions relatives à la participation à une ou plusieurs des missions de service public définies à l’article L. 6112-1 ou à l’engagement de mettre en œuvre des mesures de coopération favorisant l’utilisation commune de moyens et la permanence des soins.

À l’avenir elles seront subordonnées à la condition :

– d’être habilité à assurer le service public hospitalier ;

– ou d’exercer l’activité de soins ou d’utiliser l’équipement matériel lourd en respectant les obligations énoncées au I de l’article L. 6112-2 (accueil adapté, permanence d’accueil, égalité d’accès à la prévention et aux soins de qualité, absence de dépassements de tarifs ou d’honoraires) ;

– ou de participer à une ou plusieurs actions tendant à mettre en œuvre le projet territorial de santé ;

– ou de s’engager à mettre en œuvre des mesures de coopération favorisant l’utilisation commune de moyens et la permanence des soins.

Le 14° répond à la situation d’un territoire où la seule autorisation existante (par exemple maternité) serait celle d’un établissement privé qui fait des dépassements d’honoraires. Dans le cas d’une nouvelle autorisation, celle-ci serait donnée à un établissement SPH ou à un établissement non SPH mais qui respecterait pour cette activité, les obligations SPH de l’activité. Pour cette activité précise (et non pour le reste de leur activité), les établissements s’engageraient à respecter le non-dépassement d’honoraire.

Le 25° du C modifie l’article L. 6161-9. Cet article prévoit aujourd’hui la possibilité pour les établissements privés à but non lucratif mentionnés aux b et c de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale de recourir, sur décision du directeur général de l’agence régionale de santé, à des professionnels médicaux et auxiliaires médicaux libéraux dans la mise en œuvre de ses missions de service public et de ses activités de soins. Ces autorisations seront désormais accordées au titre des missions définies à l’article L. 6111-1 (cf. 1° du A du I du présent article).

B.  LE CAS PARTICULIER DE L’EXERCICE DE L’ACTIVITÉ LIBÉRALE AU SEIN DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS

Le 21° du C du I complète l’article L. 6154-2 du code de la santé publique relatif à l’exercice de l’activité libérale des praticiens hospitaliers à temps plein dans les établissements de santé.

Les praticiens statutaires exerçant à temps plein sont autorisés à exercer une activité libérale dans l’établissement public de santé où ils sont nommés. Ils doivent à cet effet conclure un contrat d’activité libérale, le bon déroulement de cette activité étant soumis au contrôle d’une commission d’activité libérale.

L’activité libérale peut concerner les consultations externes, les actes médico-techniques et les soins en hospitalisation. Toutefois plusieurs conditions sont requises :

– le praticien hospitalier qui exerce une activité libérale doit exercer personnellement et à titre principal une activité de même nature dans le secteur hospitalier public ;

– la durée de l’activité libérale ne doit pas dépasser 20 % de la durée du service hospitalier hebdomadaire à laquelle sont astreints les praticiens ;

– le nombre de consultations et le volume d’actes effectués au titre de l’activité libérale doivent être inférieurs au nombre de consultations et au volume d’actes effectués au titre de l’activité publique.

Encadrement de l’activité libérale

S’agissant de l’activité libérale dans les hôpitaux publics, le rapport de Mme Dominique Laurent avait tracé plusieurs pistes visant à encadrer son exercice (98).

Citons ainsi :

– le paiement des actes du patient directement à l’hôpital ;

– la soumission du reversement au praticien à la production non seulement de son état récapitulatif d’activité libérale mais également de son planning d’activité publique (afin de pouvoir contrôler le respect de la règle des 20 %) ;

– l’encadrement de la rémunération issue de l’activité libérale. Outre qu’elle conduit à s’interroger sur le bon niveau du plafonnement à retenir, l’instauration du plafonnement d’un cumul des rémunérations pose la question de son articulation avec l’existence des autres règles en vigueur (20 % de temps et 50 % maximum d’activité libérale dans l’activité totale).

Le présent 21° tend à prévoir une dérogation au 4° du I de l’article L. 6112-1, c’est-à-dire à l’obligation faite aux établissements du SPH à ne pas appliquer de dépassements de tarifs ou d’honoraires. Les modalités de la dérogation seraient fixées par la voie réglementaire et ne concerneraient en tout état de cause que les établissements publics. En creux, ces dérogations ne concerneraient donc pas les établissements privés habilités à participer au SPH.

Le secteur d’activité libéral des établissements publics est aujourd’hui particulièrement circonscrit. En 2013, il ne concernait que 4 579 médecins hospitaliers, soit seulement 10 % des 45 900 praticiens hospitaliers exerçant à temps plein qui sont éligibles à cette activité et moins de 4 % du total des praticiens libéraux, hospitaliers compris. Sur ces 4 579 praticiens hospitaliers, seuls 1 957 d’entre eux exerçaient en secteur 2, soit 42,7 % de l’ensemble des praticiens hospitaliers temps plein ayant une activité libérale.

De surcroît, le volume d’honoraires en cause est limité à 1,8 % de l’ensemble de la masse des honoraires perçus dans l’ensemble du secteur libéral.

Enfin, il n’est pas possible de comparer la situation des praticiens hospitaliers à temps plein dans un établissement de santé, soumis à un régime strict d’encadrement de leurs pratiques, à celle des praticiens qui interviennent en clinique et peuvent compléter cette activité, comme ils le souhaitent en cabinet ou dans un autre établissement.

Pour toutes ces raisons, il a été estimé préférable de maintenir inchangé le cadre juridique de l’activité libérale en établissement public.

C.  LES MESURES DE COORDINATION DANS LES AUTRES CODES

1.  Les coordinations propres au code de la sécurité sociale

Le II procède à des mesures de coordination au sein du code de la sécurité sociale.

Le actualise une référence au premier alinéa de l’article L. 162-22-13 relatif à la dotation nationale de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation. Dans sa rédaction actuelle, elle a vocation à financer les missions de service public mentionnées à l’article L. 6112-2. Dorénavant, elle financera les missions prévues par l’article L. 6111-1, soit les missions de soins, de prévention et d’éducation à la santé, la participation des établissements à la politique de santé publique et aux dispositifs de vigilance relatifs à la sécurité sanitaire ainsi que la formation, la recherche et l’innovation en santé.

Le modifie l’article L. 162-12-15 relatif aux références professionnelles établies par la Haute autorité de santé susceptibles d’être rendues opposables aux professionnels de santé mais également mises en œuvre par les établissements de santé assurant une ou plusieurs des missions de service public définies à l’article L. 6112-1 du code de la santé publique, pour ce qui concerne leurs activités de consultation externe. Cet article prévoit par ailleurs que leur respect est, pris en compte dans la procédure de certification. Enfin, il est prévu que les recommandations font l’objet d’une diffusion auprès des établissements de santé publics ou privés participant au secteur public hospitalier.

Aux termes du 2° :

– ces recommandations seront dorénavant mises en œuvre dans les établissements assurant le SPH ;

– la diffusion des recommandations sera assurée dans tous les établissements assurant le SPH.

Les autres établissements ne sont pas spécifiquement visés dans la mesure où les recommandations de bonne pratique sont déjà diffusées auprès des professionnels libéraux par les unions régionales des professionnels de santé (URPS).

Le modifie la rédaction de l’article L. 162-22-19 relatif au rapport annuel remis au Parlement et portant sur les actions menées sur le champ du financement des établissements de santé. Ce rapport est censé préciser les mesures prises sur la tarification de la T2A et ses conséquences sur l’activité et l’équilibre financier des établissements. Il décrit ainsi les dispositions prises afin de prendre en compte les spécificités des actes réalisés dans les établissements publics de santé et « de mesurer l’impact sur le coût de leurs missions de service public ». Les termes « service public » sont supprimés dans la mesure où les établissements publics assurent de facto une mission de service public hospitalier comme le précise l’article L. 6112-3.

Le modifie l’article L. 381-30-5 qui régit la prise en charge des dépenses afférentes aux soins dispensés aux personnes détenues par les régimes d’assurance maladie. Dans le cas de soins dispensés par un établissement de santé dans le cadre de sa mission de service public prévu par l’article L. 6112-1 du code de la santé publique, la prise en charge s’effectue par le biais de la tarification à l’activité. Cette prise en charge est inchangée mais cette mission n’est plus prévue par le 12° de l’article L. 6112-1 mais par le 2° de l’article L. 6111-1-2 conformément au 2° du A du I du présent article.

Le rectifie par coordination l’article L. 174-20 régissant les tarifs des prestations de soins programmés, qui servent de base au calcul de la participation de l’assuré, pour les établissements de santé dans le cas particulier des soins apportés aux patients étrangers.

Il est ainsi précisé que les tarifs des prestations de soins et d’hébergement des patients étrangers non assurés sociaux en situation régulière sur le territoire français peuvent être librement fixés. Cette possibilité est aujourd’hui limitée aux soins qui ne relèvent pas d’une mission de service public et ne s’applique pas à certains patients pour ne pas porter atteinte au droit à l’accès aux soins (aide médicale d’État, soins urgents, etc.).

Il est désormais prévu que le dispositif s’applique à l’ensemble des soins programmés et non plus aux soins ne relevant pas d’une mission de service public (99).

L’impact du 5°, qui vise simplement à tirer les conséquences de la suppression des missions de service, peut donc être regardé comme minime en termes d’élargissement du périmètre de l’article L. 174-20. Ce paragraphe est donc considéré comme une mesure de toilettage du code.

2.  Les modifications afférentes au code de l’environnement

Le III modifie l’article L. 229-5-1 du code de l’environnement. Celui-ci exclut les établissements de santé publics, privés et privés d’intérêt collectif du système d’échange de quotas d’émission lorsqu’ils adoptent des mesures permettant d’atteindre des réductions d’émissions. Il est désormais fait référence aux seuls établissements de santé. Cette simplification rédactionnelle ne modifie pas le champ d’application de l’article : comme aujourd’hui cette mesure concernera toujours l’ensemble des établissements de santé.

D.  LES MESURES DE TRANSITION

Le IV prévoit la cessation d’effet des stipulations des CPOM mentionnés à l’article L. 6114-1, principalement conclus entre l’ARS et les établissements de santé, et des contrats spécifiques mentionnés à l’article L. 6112-2.

Ces contrats précisent les obligations auxquelles sont assujetties les personnes assurant ou contribuant à assurer une ou plusieurs des missions de service public et, le cas échéant, les modalités de calcul de la compensation financière de ces obligations. Dans le droit actuel, la compensation financière s’applique aux obligations résultant des 14 missions de service public précisées par l’article L. 6112-1.

Plusieurs cas de cessation d’effet sont prévus :

– dès la promulgation de la présente loi pour les établissements du SPH qu’il s’agisse des établissements publics ou des hôpitaux des armées ;

– à la date de la conclusion de l’avenant au CPOM pour les établissements privés, habilités de plein droit ou sur demande, à assurer le SPH ;

– à l’échéance des actuels CPOM ou contrats spécifiques pour les autres établissements ou autres acteurs de santé.

*

La Commission a adopté un amendement gouvernemental de rédaction globale de l’article. Il réaffirme l’attachement au principe du non-dépassement d’honoraires pour les établissements privés habilités à participer au SPH. A aussi été réaffirmée la règle aujourd’hui en vigueur selon laquelle l’appartenance au SPH n’a aucun impact sur les autorisations d’activités de soins. Cet amendement pérennise par ailleurs la catégorie des ESPIC que le projet de loi avait initialement supprimée. La nouvelle rédaction réserve enfin une place particulière aux établissements privés disposant d’une autorisation au titre de la médecine d’urgence. Ils se voient associés au SPH sous réserve de ne pas appliquer de dépassement d’honoraires pour les patients pris en charge en situation d’urgence ou dans le cadre de la permanence des soins y compris pour les soins consécutifs.

L’amendement du Gouvernement a enfin fait l’objet d’améliorations substantielles à l’initiative de la rapporteure.

Le développement des soins, notamment palliatifs, sous forme ambulatoire ou à domicile, en substitution à l’hospitalisation avec hébergement, contribue à la qualité et à l’efficience des soins. Dans son dernier rapport, la Cour des Comptes suggère une plus grande intervention des structures d’hospitalisation à domicile (HAD) en la matière. Un amendement a ainsi été adopté pour tenir compte des modes de prise en charge, centrée autour du maintien au domicile et du retour précoce au domicile dès lors que l’état de santé du patient le permet, notamment en matière de soins palliatifs.

La rédaction de l’amendement du Gouvernement a également été remaniée afin de garantir la possibilité d’ouvrir des PASS dans chaque établissement de santé dans le cadre de la mise en œuvre du projet régional de santé.

La commission a aussi précisé que les actions des établissements de santé doivent pouvoir être coordonnées avec les structures telles que les centres de santé ou les maisons de santé. La notion de parcours de soins implique en effet que les actions sanitaires puissent être envisagées de manière complémentaire et non exclusive.

La commission a enfin précisé la portée des engagements liés la participation des établissements privés à but non lucratif au SPH. L’avenant au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens pour ces établissements habilités de plein droit interviendra, si besoin, pour des engagements nouveaux.

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La Commission examine l’amendement AS448 de M. Jean-Pierre Door tendant à supprimer l’article.

M. Jean-Pierre Door. Le Gouvernement a prévu depuis quelques jours de nous présenter une nouvelle rédaction de l’article 26 qui définit le service public hospitalier. De ce fait, l’amendement de suppression AS448 devient superfétatoire. Nous attendons de connaître la présentation par Mme la ministre de l’amendement AS977. Nous pourrons alors éventuellement défendre nos sous-amendements.

C’est la méthode que nous avons suivie pour l’examen de l’article 12 : je vous propose de la reprendre pour celui de l’article 26.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement de suppression AS448.

Puis elle examine l’amendement AS977 du Gouvernement.

Cet amendement fait l’objet des sous-amendements AS1695 et AS1697 de la rapporteure, AS1748 de M. Jean-Pierre Door, AS1760 de M. Élie Aboud et AS1734 de M. Arnaud Richard, ainsi que des sous-amendements AS1696 et AS1738 de la rapporteure.

Les sous-amendements AS1748 et AS1760 sont identiques.

Mme la ministre. L’amendement AS977 vise à récrire l’article 26. Toutefois, l’ambition qu’a cet article de réinscrire dans la loi le service public hospitalier, qui avait disparu de la loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST), reste intacte.

Il crée également une habilitation au service public hospitalier ouverte à l’ensemble des établissements de santé, y compris du secteur privé.

Notre volonté, je le dis très clairement, est de rompre avec la logique de la loi HPST, qui avait découpé le service public hospitalier en quatorze missions comme en autant de rondelles. Le texte vise à refonder le service public hospitalier comme un tout cohérent autour d’un bloc d’obligations concrètes qui doivent être assumées globalement dans l’intérêt de nos concitoyens. Parmi ces obligations figurent la permanence de l’accueil, l’égalité d’accès aux soins, la non-discrimination entre les pathologies et l’accessibilité financière.

À la suite de la concertation engagée, l’amendement prend en compte plusieurs évolutions.

C’est ainsi qu’il précise de manière explicite la règle selon laquelle il n’existe aucun lien entre l’appartenance ou la non-appartenance au service public hospitalier et la délivrance des autorisations de soins ou d’activités. Les réorganisations d’établissements et les autorisations de soins, de plateaux techniques ou de matériels ne dépendent pas de l’appartenance au service public hospitalier.

Le texte confère également un rôle majeur aux conférences médicales d’établissement dans le processus d’habilitation des cliniques privées au service public. Dès lors qu’une clinique privée souhaitera être habilitée au service public, il lui faudra avoir préalablement obtenu un avis favorable de la communauté médicale de l’établissement pour engager la démarche. Cette mesure permet de renforcer la place de la communauté médicale au sein de l’établissement privé.

L’amendement crée par ailleurs un régime d’association au service public hospitalier pour les établissements de santé privés disposant d’une autorisation d’exercice de l’activité d’urgences. En effet la prise en charge des patients en situation d’urgence se fait conformément aux obligations du service public hospitalier, s’agissant notamment du non-dépassement des honoraires, à savoir dans les conditions du service public hospitalier.

L’amendement explicite aussi que les missions de formation, d’enseignement universitaire et postuniversitaire, de recherche et d’innovation en santé sont ouvertes de la même façon que les activités à l’ensemble des établissements de santé, qu’ils soient publics ou privés.

Il réintroduit enfin la notion d’établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC), qui était supprimée dans la rédaction actuelle de l’article 26 : leur habilitation au service public hospitalier est assurée dès lors qu’ils respectent les obligations du bloc que constitue de nouveau le service public hospitalier.

Ce n’est pas parce que la loi reconnaît la spécificité du service public hospitalier et qu’elle consacre un bloc d’obligations qui y est lié qu’elle nie l’existence et la contribution des établissements privés au système de santé.

Ne confondons pas le débat sur les statuts des établissements avec le débat financier sur les tarifs hospitaliers qui peuvent être accordés aux uns et aux autres.

M. Élie Aboud. Je reconnais les avancées réalisées dans la nouvelle rédaction de cet article, grâce notamment au dialogue récemment renoué avec les responsables de l’hospitalisation privée.

Entre 20 % et 30 % des établissements privés disposent d’un service d’urgences. Que prévoit l’accord pour ceux qui ne disposent pas d’un service d’urgences stricto sensu ?

Mme la ministre. La règle est que, pour être habilité au service public hospitalier, il faut respecter l’ensemble de ses obligations, y compris le non-dépassement d’honoraires.

Les services d’urgences seuls, indépendamment du reste de l’établissement, peuvent être associés au service public hospitalier puisque dans le cadre des activités d’urgences, ils sont obligés de respecter la règle du non-dépassement des honoraires.

Il existe donc deux statuts différents pour les établissements privés : l’habilitation et l’association, l’un concernant l’ensemble de l’établissement et l’autre uniquement les services d’urgences.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sous-amendement AS1695 vise à mieux valoriser les prises en charge alternatives à l’hospitalisation classique.

La Commission adopte le sous-amendement AS1695

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sous-amendement AS1697 vise à rétablir la rédaction actuelle du code de la santé publique. Il est nécessaire de préserver le principe d’un maillage territorial suffisant des permanences d’accès aux soins de santé.

La Commission adopte le sous-amendement AS1697.

M. Jean-Pierre Door. On reconnaît, avec l’article 26, votre volonté de réduire à néant la loi HPST pour fonder un nouveau service public hospitalier pour lequel vous faites preuve, si je puis dire, d’hospitalocentrisme.

Les avancées réalisées, que j’ai déjà évoquées, l’ont été sous la contrainte des derniers jours : aussi devrons-nous étudier en détail la nouvelle rédaction de l’article.

Nous sommes pour le maintien des 1 000 établissements privés dont les Français valident la présence à côté des établissements publics. Nous regrettons que ces établissements privés soient placés sous la coupe des conférences médicales d’établissement.

Vous vous en prenez aux dépassements d’honoraires dans les cliniques privées où, il est vrai, nombreux sont les praticiens qui appartiennent au secteur II. Pourquoi les autorisez-vous toujours dans le secteur public ? Ce faisant, le texte organise le « deux poids deux mesures ».

C’est pourquoi le sous-amendement AS1748 vise à supprimer les alinéas 25 à 64.

M. Élie Aboud. Le sous-amendement AS1760 est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis défavorable à ces sous-amendements dans la mesure où ils proposent de supprimer des alinéas importants de la nouvelle rédaction de l’article 26, qui est le fruit de la concertation.

Les sous-amendements identiques ne sont pas adoptés.

M. Arnaud Richard. Les nouvelles dispositions prévues dans l’article 26 excluent du service public hospitalier les établissements pratiquant les dépassements d’honoraires, ce qui revient à exclure de facto du service public les cliniques privées au sein desquelles le droit garantit aux médecins la fixation libre de leurs honoraires.

Le sous-amendement AS1734 vise à supprimer cette condition du bloc d’obligations fondamental afin de permettre aux établissements, quelle que soit leur nature juridique, de participer au service public hospitalier.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette le sous-amendement AS1734.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sous-amendement AS1696 vise à compléter l’alinéa 41.

La Commission adopte le sous-amendement AS1696.

Puis elle adopte le sous-amendement de précision AS1738.

Elle adopte ensuite l’amendement AS977 ainsi sous-amendé.

En conséquence l’article 26 est ainsi rédigé et tous les autres amendements déposés sur l’article 26 tombent.

*

Après l’article 26

La Commission examine l’amendement AS283 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS283 vise à préciser dans le code de l’éducation que les arrêtés concernant la formation de base des professionnels de santé comprennent une unité d’enseignement en santé environnementale.

Le sujet, sur lequel le Gouvernement s’est engagé à travailler, a été longuement évoqué lors de la Conférence environnementale.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. La rédaction de l’amendement fait peser un risque d’injonction : c’est pourquoi je vous demande de le retirer en vue de le réécrire. Faute de quoi, j’émettrai un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS566 de Mme Bérengère Poletti.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à mieux identifier l’approche médico-sociale des Agences régionales de santé via la nomination obligatoire d’un directeur-adjoint chargé de la bonne mise en œuvre de la partie médico-sociale du projet régional de santé.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Cette disposition, qui relève de l’organisation administrative, n’est pas de nature législative.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS471 de Mme Gisèle Biémouret et AS472 de M. Pierre Morange.

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Article 26 bis
Encadrement du recours aux emprunts
par les établissements publics de santé

Dans la continuité des travaux menés par la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale portant sur la dette publique des hôpitaux, cet article encadre les conditions du recours aux emprunts toxiques par les hôpitaux publics et prohibe notamment tout emprunt libellé en devises.

*

M. Pierre Morange. Cet amendement concerne la dette des hôpitaux qui a triplé ces dix dernières années pour atteindre quelque 30 milliards d’euros dont 1,5 milliard d’emprunts toxiques, chiffre qui a doublé pour atteindre 3 milliards, en raison du déplafonnement du franc suisse.

La mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) a procédé à de nombreuses auditions sur le sujet.

Mme Gisèle Biémouret, coprésidente de la MECSS et rapporteure sur le sujet, ainsi que les membres de la MECSS et moi-même souhaitons que, comme pour les collectivités territoriales, il ne soit plus possible pour les hôpitaux de contracter des emprunts à taux variables. Tel est l’objet des amendements identiques AS471 et AS472.

Certes, plus aucun établissement de soins ne se hasardera à spéculer sur les marchés internationaux. Il n’en existe pas moins une coresponsabilité évidente, d’un côté, des banques et, de l’autre, des directeurs d’établissement. J’ai tenu à souligner devant les représentants des établissements bancaires le caractère paradoxal de leur double amnésie relative, d’une part, au fait que le peuple français s’est porté caution en 2008 pour éviter l’effondrement du système financier et que, d’autre part, ils ont absorbé 70 % de la dette toxique grecque. Ils auraient pu faire un effort similaire pour la santé des travailleurs français, d’autant que des taux d’intérêt particulièrement bas et l’injection de 1 100 milliards d’euros décidée par la Banque centrale européenne constituent de bonnes opportunités.

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé aux établissements bancaires de fournir, à tout le moins, aux établissements de soins des solutions leur permettant de sortir d’emprunts à des taux éminemment élevés, frisant les 40 %, pour revenir à des taux fixes conformes à ceux du marché.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis favorable aux amendements, dont l’enjeu est important.

La Commission adopte les amendements à l’unanimité.

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Après l’article 26 bis

La Commission en vient à l’amendement AS1202 de la rapporteure.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je retire l’amendement et présenterai une nouvelle rédaction en séance publique.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS1112 de M. Arnaud Richard.

Puis elle examine l’amendement AS275 de Mme Brigitte Allain.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à transformer les comités de protection des personnes en centres régionaux de ressources sur les maladies professionnelles et environnementales (CREMAPE).

Ce service devrait permettre à toutes les personnes intoxiquées aux pesticides de savoir quelles démarches entamer, qu’elles soient d’ordre sanitaire ou juridique. Il sera nécessaire que ces CREMAPE disposent de moyens adaptés et d’un personnel formé à la question des pathologies environnementales, notamment celles ayant trait aux pesticides et aux substances chimiques.

Cet amendement prévoit également d’élargir l’accès de ces futures structures à tous les régimes de santé, y compris ceux dépendant du régime social des indépendants.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Défavorable. Cet amendement relève du domaine de l’organisation administrative et non de la loi.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 26 ter
Remise d’un rapport portant sur les conditions de la mise en œuvre d’un financement des établissements de santé organisés pour fonctionner sans dépassement d’honoraires

Cet article prévoit la remise d’un rapport portant sur les conditions de la mise en œuvre d’un financement, par le biais d’une dotation de mission d’intérêt général, des établissements de santé organisés pour fonctionner sans dépassement d’honoraires.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1278 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’amendement est défendu.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Sagesse.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 26 ter

La Commission examine l’amendement AS734 de Mme Michèle Bonneton.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous demandons que le Gouvernement remette un rapport sur l’accès aux urgences en milieu rural. La constitution d’un réseau comprenant les services d’urgences, les services des sapeurs-pompiers et des médecins libéraux permettrait de mieux répondre aux besoins.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS278 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la mise en place dans les hôpitaux d’un système de lecture par code-barres des médicaments. Ce système permettrait d’aider le personnel hospitalier à prescrire et à préparer les doses. Cette demande émane des professionnels qui insistent sur les difficultés qu’ils rencontrent à l’hôpital pour assurer le suivi des prescriptions.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. L’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) travaille sur cette proposition. En l’état actuel, j’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 27
(art. L. 1434-7, L. 6211-21, L. 6131-2, L. 6131-3, L. 6132-1, L. 6132-2, L. 6132-3, L. 6132-4, L. 6132-5, L. 6132-6, L. 6132-7, L. 6143-1 et L. 6161-8 du code de la santé publique, L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, et art. 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000)

Création des groupements hospitaliers de territoire

Cet article institue les groupements hospitaliers de territoire en lieu et place des actuelles communautés hospitalières de territoire.

I. LES ACTUELS OUTILS DE LA COOPÉRATION INTER HOSPITALIÈRE

A.  LE RÔLE D’IMPULSION DES ARS

Les agences régionales de santé (ARS) sont chargées par le code de la santé publique, aux termes de l’article L. 1431-2, de réguler, orienter et organiser l’offre de services de santé au niveau régional. À ce titre, elles mettent en place le schéma régional d’organisation des soins (SROS) qui précise « les adaptations et les complémentarités de l’offre de soins, ainsi que les coopérations » (100).

À cet effet, les ARS disposent d’outils incitatifs et coercitifs.

Aux termes des articles L. 6131-1 et L. 6131-2, le directeur général de l’agence régionale de santé coordonne l’évolution du système hospitalier, notamment en vue de l’adapter aux besoins de la population, de garantir la qualité et la sécurité des soins, encore d’améliorer l’organisation et l’efficacité de l’offre de soins ou de valoriser la recherche.

À cette fin, il peut demander à un établissement public de santé de conclure une convention de coopération, de créer un groupement de coopération sanitaire ou un groupement d’intérêt public. Si sa demande n’est pas suivie d’effet, après concertation avec le conseil de surveillance des établissements, le directeur général de l’agence régionale de santé peut prendre les mesures appropriées, notamment une diminution des dotations MIGAC (101), pour que, selon les cas, les établissements concluent une convention de coopération, créent un groupement d’intérêt public ou créent un groupement de coopération sanitaire.

Plusieurs dispositifs de coopérations inter hospitalières coexistent. Ils peuvent être classés selon deux catégories distinctes :

– les coopérations conventionnelles ;

– les coopérations institutionnelles ou organiques ;

B.  LES COOPÉRATIONS CONVENTIONNELLES

Les coopérations mises en œuvre sur la base d’une convention regroupent les communautés hospitalières de territoire (CHT) et les fédérations médicales inter-hospitalières.

1.  La communauté hospitalière de territoire

Introduite par la loi HPST (102), l’objet de la CHT vise à rechercher une meilleure allocation des ressources associée à une plus grande complémentarité entre les acteurs. Elle est composée d’établissements publics de santé qui désignent l’un d’eux comme siège de la CHT.

Prévue par les articles L. 6132-1 à L. 6132-8, la CHT ne dispose pas de la personnalité morale et repose sur le libre accord des établissements membres qui conservent leur indépendance et leur autonomie. Elle est organisée en fonction d’un mécanisme conventionnel d’utilisation très souple. Ainsi, le dispositif juridique de la CHT permet d’organiser le transfert de moyens ou d’activités entre établissements publics de santé membres, autour d’un projet médical commun.

Ce modèle présente toutefois quelques limites : absence de budget spécifique, de patrimoine, de personnels ou de transfert d’autorisations.

2.  La fédération médicale inter hospitalière

La possibilité de constituer une fédération médicale inter hospitalière est prévue par l’article L. 6135-1 du code de la santé publique. En vue du rapprochement d’activités médicales, les centres hospitaliers, des établissements publics de santé, peuvent par décision conjointe décider de regrouper certains de leurs pôles d’activité clinique ou médico-technique ou certaines des structures internes de ces pôles, en fédérations médicales inter hospitalières.

C.  LES FORMES DE COOPÉRATION INSTITUTIONNELLES

Il existe plusieurs catégories de coopérations institutionnelles qui permettent de créer des organismes dotés de la personnalité morale en vue de l’exercice de missions communes. Les principales formes de coopération institutionnelles regroupent les groupements de coopération sanitaire et les groupements d’intérêt public.

1.  Le groupement de coopération sanitaire

Le groupement de coopération sanitaire (GCS) est l’outil de coopération privilégié dans le cadre des coopérations entre le secteur public et privé, mais également entre la ville et l’hôpital.

Il permet d’associer des établissements de santé publics comme privés, des centres de santé, des maisons de santé et des professionnels médicaux libéraux à titre individuel ou collectif, ou encore les acteurs du secteur médico-social. Il est doté, selon le cas, de la personnalité morale de droit public ou de droit privé.

La loi HPST a refondu le cadre juridique des groupements de coopération sanitaire. On distingue désormais, selon leurs finalités, deux grandes catégories de GCS :

– le GCS de moyens ;

– le GCS-établissement de santé.

Selon l’article L. 6133-1, Le groupement de coopération sanitaire de moyens a pour objet de faciliter, de développer ou d’améliorer l’activité de ses membres.

● Un groupement de coopération sanitaire de moyens peut être constitué pour :

– organiser ou gérer des activités administratives, logistiques, techniques, médico-techniques, d’enseignement ou de recherche ;

– réaliser ou gérer des équipements d’intérêt commun en étant, le cas échéant, titulaire de l’autorisation d’installation d’équipements matériels lourds ;

– permettre les interventions communes de professionnels médicaux et non médicaux exerçant dans les établissements ou centres de santé membres du groupement ainsi que des professionnels libéraux membres du groupement.

Ce groupement poursuit un but non lucratif.

● Le GCS-établissement de santé a été présenté comme étant l’innovation majeure de la loi HPST dont il était attendu une recomposition de l’offre de soins sur un territoire. Dans ce groupement, le patient est hospitalisé directement par la structure de coopération qui est responsable de l’intégralité de sa prise en charge.

Aux termes de l’article L. 6133-7, lorsqu’il est titulaire d’une ou plusieurs autorisations d’activités de soins, le groupement de coopération sanitaire est un établissement de santé avec les droits et obligations afférents.

Afin de mettre fin aux situations où le GCS exploitait une autorisation d’activités de soins qui restait détenue par ses membres, la loi HPST a prévu que le CGS constitué pour mettre en œuvre des activités de soins doit être titulaire de l’autorisation d’activité afférente et être érigé à ce titre en établissement de santé. Le groupement de coopération sanitaire de droit privé est érigé en établissement de santé privé et le groupement de coopération sanitaire de droit public est érigé en établissement public de santé, par décision du directeur général de l’agence régionale de santé.

2.  Le groupement d’intérêt public

Doté de la personnalité morale de droit public, le groupement d’intérêt public s’adresse à des personnes morales, de droit public ou de droit privé. Permettant notamment de gérer des équipements ou des activités d’intérêt commun, il peut détenir une autorisation d’équipements matériels lourds mais pas d’autorisation d’activités de soins. Il existe des GIP spécifiques au domaine de l’action sanitaire et sociale, par exemple pour la gestion en commun d’activités supports telles que la fonction linge ou la fonction restauration.

D.  LES LIMITES DE LA DÉMARCHE COOPÉRATIVE

1.  La répartition des formes de coopérations

Selon les informations transmises à votre rapporteure, la répartition de la coopération entre les établissements de santé est la suivante :

– 903 (103) établissements publics de santé en France, dont 402 (104) n’étaient ni en direction commune, ni dans une communauté hospitalière de territoire ;

– 276 directions communes couvrant 399 établissements publics de santé ;

– en moyenne 5 à 6 fusions par an sur les 17 dernières années (105) ;

– 53 CHT créées au 17 février 2015, dont 6 supportées par un GCS ;

– 525 des 626 GCS référencés comptent au moins 1 établissement public de santé ;

– 238 établissements ont déclaré en 2012 participer à une fédération médicale inter-hospitalière (FMIH) dans le cadre de la statistique annuelle des établissements de santé (SAE). Pour l’année 2013, 1 200 fédérations médicales inter-hospitalières sont référencées dans la SAE pour l’année 2013 ;

– En 2013, 67 GIP étaient recensés dans le secteur de la santé, dont 11 étaient d’envergure inter-régionale.

2.  Des dispositifs bornés

Plusieurs limites afférentes à la démarche coopérative ont été relevées.

Les GCS de moyens initiés dès 1996 ont permis un grand nombre de coopérations entre offreurs publics et privés de santé, mais ne peuvent porter au-delà de mises en commun de moyens. Les GCS établissements de santé sont quant à eux d’une trop grande lourdeur qui rend difficile l’expansion de ce type d’établissement, et explique son faible développement au cours des 6 dernières années.

Interrogés par votre rapporteure, les services du ministère de la santé soulignent que si les GCS de moyens offrent une forme souple de mutualisation, ils ne peuvent toutefois pas porter une autorisation d’activités de soins au nom de leurs membres, puisqu’ils ne jouissent pas de la qualité d’établissement de santé. De ce premier constat découlent des constats pratiques de difficultés de refacturation entre les membres et de limite de l’utilisation de l’outil dans une perspective de restructuration de l’offre de soins.

Concernant les GCS-ES, la difficulté réside en l’empilement de personnes morales et en leur multiplication, puisque la création d’un GCS-ES ne fait pas disparaître les établissements membres du GCS. Ce dispositif entraîne par ailleurs des lourdeurs de gestion du fait d’une duplication des instances de gouvernance pour les offreurs de soins.

Le ministère chargé de la santé note également que les groupements de coopération se caractérisent par d’autres inconvénients :

– duplication des budgets et donc des comptabilités et flux financiers ;

– duplication des organes de décision et donc dilution des responsabilités et multiplication des instances.

Quant aux communautés hospitalières de territoire, l’aspect facultatif des coopérations n’aurait pas permis d’insuffler la dynamique nécessaire à la recomposition de l’offre de soins publique. L’efficacité de la coopération s’est heurtée aux limites d’un dispositif n’ayant intégré ni les leviers, ni l’harmonisation des outils de travail pour la construction d’une stratégie médicale.

● En outre, les structures de coopération se recoupent fréquemment. En effet, les outils de coopération n’ont pas tous la même finalité, ce qui explique qu’un même établissement puisse utiliser différents dispositifs. Ainsi, les communautés hospitalières sont des conventions public-public structurées autour d’un projet médical, et s’appuient fréquemment sur une convention de direction commune dans leur déploiement.

● Dans son rapport portant sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2011, la Cour des comptes a par ailleurs consacré un chapitre à l’évaluation de la coopération hospitalière (106).

Elle relève ainsi que les coopérations hospitalières emportent des effets positifs tels que le rapprochement de l’offre de soins vers le patient, la complémentarité dans le cadre de projet médical commun ou l’optimisation de l’emploi des ressources médicales. Ces coopérations n’en restent pas moins marquées par plusieurs inconvénients.

S’agissant des conventions, leur signature ne garantit pas l’effectivité des coopérations tant le degré de mise en œuvre est variable. Au surplus, il a été constaté dans la plupart des établissements interrogés une absence de suivi ou d’évaluation de la mise en œuvre ou des résultats. Surtout, elles présentent un inconvénient du fait de leur caractère peu contraignant : le droit de retrait de chacun des partenaires.

Dans nombre de coopérations qui lient un hôpital public à un acteur de santé privé, la part du risque économique ou financier assumée par le centre hospitalier est la plus importante. La Cour relève ainsi, que pour un cas de co-utilisation d’équipements lourds par l’établissement public de santé détenteur du matériel et des médecins libéraux, les conventions font reposer le risque de non-réalisation des objectifs d’activité sur l’hôpital public alors qu’il n’est assigné aucun seuil de rentabilité aux partenaires privés, ou qu’il n’est prévu aucune pénalité particulière.

Enfin, les coopérations peuvent s’avérer contraires à la rationalisation de l’offre lorsqu’elles sont motivées par des intérêts défensifs au lieu d’être envisagées à des fins de réorganisation. La dynamique de coopération n’est pas utilisée à des fins de stratégie couvrant à la fois le devenir des établissements ou l’offre globale de soins (faciliter la trajectoire des patients, articulation de la chaîne des soins entre l’hôpital et la médecine de ville…).

II. LA CRÉATION DES GROUPEMENTS HOSPITALIERS DE TERRITOIRE

Le I créé au sein du titre III du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique un chapitre II consacré aux groupements hospitaliers de territoire.

A.  UNE COOPÉRATION CONVENTIONNELLE OBLIGATOIRE

Le GHT constitue une nouvelle forme de coopération conventionnelle fondée sur une adhésion obligatoire des établissements publics de santé.

Au terme de l’article L. 6132-1, les établissements publics sont tenus d’adhérer à un GHT sauf dérogation tenant à la spécificité des établissements dans l’offre de soins régionale.

L’apport majeur de ce dispositif réside ainsi dans ce caractère obligatoire.

Il convient de préciser que le groupement n’est pas doté de la personnalité morale. Selon l’étude d’impact, l’objectif consiste à procéder à une recomposition de l’offre publique et non à multiplier les structures, à travers l’encouragement des convergences.

La démarche coopérative a également montré que les dynamiques de convergence les plus fortes entre établissements de santé ne passent pas par la création de personnalité morale mais plutôt par la mise en place de directions communes. C’est en partie pour cette raison que le choix a été fait de ne pas faire évoluer les dispositifs intégrés existants, tels que les GCS établissements de santé (GCS-ES). Comme le précise l’étude d’impact, trois autres arguments ont conduit à écarter ce scénario :

– les GCS couvrant aussi le secteur privé, il aurait été pour le moins délicat de réduire l’obligation pour une partie des acteurs ;

– le transfert d’activités, tel que pratiqué dans les GCS établissements de santé, ne déclenche pas d’effet d’entraînement vers une intégration progressive des autres activités ;

– l’objet des GCS-ES ne porte pas sur les mutualisations des fonctions supports (administratives, techniques, logistiques et médico-techniques) mais sur les activités de soins alors que l’enjeu consiste principalement en la rationalisation des doublons existant dans les fonctions supports.

L’outil juridique « GCS » sera toutefois maintenu compte tenu de son utilité avérée dans le cadre de coopérations entre établissements, publics ou privés, y compris autour d’équipements lourds d’imagerie ou de radiothérapie, ou de coopérations entre établissements de santé et praticiens libéraux.

Le dispositif prévoit cependant une dérogation tenant à la spécificité des établissements dans l’offre de soins régionale.

Cette disposition doit être reliée avec le rôle dévolu aux ARS dans l’approbation de la convention constitutive conformément à l’article L. 6132-2 (cf. ci-après). Cette appréciation est estimée au regard des objectifs du projet régional de santé refondé par l’article 38 du projet de loi ou de la mise en œuvre de la stratégie régionale en matière hospitalière.

Selon l’étude d’impact, la dérogation vise les établissements dont la taille (centre hospitalier universitaire - CHU), la localisation (établissements isolés) ou la spécialisation (établissements spécialisés en psychiatrie) ne rend pas pertinente l’intégration et la mutualisation des fonctions.

À défaut, les établissements concernés seront sanctionnés financièrement comme le prévoit l’article L. 6132-6 (cf. ci-après).

Le II reprend, tout en la modifiant, la rédaction du premier alinéa de l’article L. 6132-1 dans sa rédaction actuelle.

L’objet principal de la coopération consiste à définir une stratégie commune. Elle vise également à rationaliser les modes de gestion soit par une mise en commun de fonctions, soit par des transferts d’activités entre établissements. Les modes de gestion s’entendent ainsi de plusieurs manières, la gestion de l’offre de soins d’une part, en réponse aux besoins des patients, et la gestion des outils supports d’autre part, permettant une amélioration des modalités de travail.

Enfin, il est précisé, à la différence de la rédaction actuelle, que chaque groupement élabore un projet médical commun. Il s’agit d’un ajout tendant à faire prévaloir l’intérêt d’une approche médicale partagée. L’objectif des GHT est de garantir une égalité d’accès à des soins sécurisés et de qualité. Pour ce faire, il convient de construire des stratégies de prises en charges territoriales organisant une gradation des soins entre établissements de santé. Ce projet médical aura vocation à assurer la cohérence des projets médicaux des différents établissements, voire à être adopté comme projet médical par chacun des établissements dans les cas d’intégration les plus poussés. L’objectif recherché est de permettre des gains de performance par le biais de la mutualisation de certains équipements, activités et organisations médicales ou soignantes.

Le III précise les modalités d’association des autres acteurs. Les établissements et services médico-sociaux publics peuvent devenir membres d’un GHT par signature de la convention constitutive. Il s’agit des structures mentionnées à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles.

Le III élargit aussi la coopération aux établissements privés. Ils peuvent être associés aux GHT par voie conventionnelle et bénéficient du statut d’établissements partenaires. D’après les informations transmises à votre rapporteure, le statut d’établissement partenaire est conféré par la conclusion d’une convention entre l’établissement support agissant pour le compte du groupement hospitalier de territoire et le ou les établissement(s) privé(s) concerné(s), et désireux de s’inscrire dans la dynamique de construction d’un projet médical orienté parcours patient.

Le IV renforce la cohésion des GHT et dispose qu’un établissement public de santé ou un établissement ou service médico-social public ne peut être membre que d’un groupement hospitalier, les établissements n’ayant pas vocation à mutualiser plusieurs fois leurs compétences. À l’inverse, les accords d’association, qui concernent les établissements privés, peuvent être pluriels et porter sur des objets différents. Ainsi, un établissement privé peut être partenaire de plusieurs GHT.

Le V dispose que les centres hospitaliers régionaux, les établissements de santé ayant la psychiatrie pour principale activité et tout autre établissement de santé public ou privé désignés par les ARS concernés peuvent être associés au projet médical de GHT dont ils ne sont ni membres ni partenaires.

L’association des centres hospitaliers régionaux à différents GHT se justifie par l’organisation de la gradation de l’offre de soins sur le territoire : les centres hospitaliers régionaux sont à la fois centres hospitaliers de proximité et centres hospitaliers de référence. Le premier aspect justifie qu’ils soient concernés par l’obligation d’adhérer à un GHT, tandis que le second nécessite qu’ils puissent être associés aux projets médicaux des GHT dont ils ne sont pas membres afin d’organiser l’offre de recours en lien avec les GHT concernés, et ainsi permettre l’accès aux soins des patients.

Par ailleurs, certains établissements ont des zones de recrutement et exercent des missions dans des territoires qui peuvent concerner différents GHT. Ainsi en est-il des établissements publics ayant la psychiatrie pour principale activité, ou des établissements publics d’hospitalisation à domicile.

B.  LA CONVENTION CONSTITUTIVE

1.  La mise en place de la convention

L’article L. 6132-2 dispose que les GHT sont constitués par voie de convention approuvée par l’ARS ou les ARS compétentes. Comme dans le dispositif des communautés hospitalières de territoire, les ARS apprécient la compatibilité de la convention avec le projet régional de santé (107) et peuvent, le cas échéant, demander que lui soient apportées les modifications nécessaires pour assurer cette compatibilité. Le dispositif est toutefois complété pour donner aux ARS un véritable pouvoir d’approbation de la convention initialement établie, de sa modification ou de son renouvellement.

L’article 38 propose de renforcer le caractère stratégique et l’opérationnel de la programmation régionale en simplifiant et en assouplissant le dispositif des projets régionaux de santé (PRS). La nouvelle architecture du PRS comprendra dorénavant deux documents : le cadre d’orientation stratégique (COS) traduisant la vision stratégique de l’ARS à dix ans et un schéma régional de santé (SRS) établi pour cinq ans.

Le schéma prévoit l’évolution de l’offre sur l’ensemble du champ de compétence des ARS, établit des objectifs pour améliorer la qualité, la sécurité, et la préparation à la gestion des situations sanitaires exceptionnelles.

Il vise à favoriser et développer les coordinations entre structures et professionnels pour faciliter les parcours et maîtriser les dépenses de santé. Il devra aussi organiser de nouvelles formes de prises en charges plus globales et mieux articulées.

Il est enfin précisé que l’approbation de la convention constitutive vaut confirmation de la modification des autorisations mentionnées à l’article L. 6122-1 du code de la santé publique, relatives aux activités de soins et aux équipements matériels lourds. Il s’agit, en effet, de permettre la mise en œuvre du projet médical commun qui repose sur l’exploitation de ces autorisations.

2.  L’objet de la convention

L’article L. 6132-3 précise les éléments que doivent inclure les conventions constitutives. Il s’agit :

– du projet médical commun à l’ensemble des membres du GHT mais aussi aux établissements associés en vertu du V de l’article L. 6132-1 ;

– des modalités d’organisation et de fonctionnement du GHT. Il s’agit notamment de la désignation de l’établissement support des compétences et activités transférées mentionnées à l’article L. 6132-4. Selon l’étude d’impact, il pourra s’agir de n’importe quel établissement public de santé membre du groupement ;

– des transferts d’activités de soins ou d’équipements matériels lourds entre établissements membres ;

– des délégations de fonction mentionnées au II de l’article L. 6132-4, c’est-à-dire la gestion des activités administratives, techniques et médico-techniques et des activités de recherche ou d’enseignement.

C.  LES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES

L’article L. 6132-4 précise, en son I, les fonctions faisant l’objet d’un transfert obligatoire de compétences au profit de l’établissement support.

● Il s’agit en premier lieu de la gestion d’un système d’information hospitalier et d’un département d’information médicale (DIM) unique.

L’établissement support sera chargé du suivi des informations relatives à la prise en charge des personnes au titre d’un établissement public de santé membre du GHT.

La centralisation des données est liée au déploiement d’un système d’information unique. Il s’agit notamment de mettre en place des « bases patients mutualisées ». Cette étape consiste à mettre en place une « identité patient communautaire » et le rapprochement des « identités patients » des différents établissements, dans un objectif d’identito-vigilance.

L’objectif est de faciliter le partage de l’information médicale afin notamment, de faciliter l’accès aux données médicales par :

– un même médecin qui peut être amené à changer de site d’exercice au cours d’une même semaine dans le cadre d’un GHT ;

– des médecins d’une même équipe de prise en charge d’un patient.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, la centralisation de ces données pourrait être effectuée via un serveur commun, par exemple, qui pourrait être hébergé au sein de l’établissement support. Ces données, seront transmises par les différents praticiens des établissements du groupement, au profit du département de l’information médicale unique, et traitées pour analyse et facturation de l’activité de chacun des établissements du groupement.

L’objectif consiste à définir un schéma directeur des systèmes d’information unique qui prendra notamment appui sur le projet médical du GHT. Il n’est pas question de renouveler hic et nunc l’ensemble des systèmes d’information pour constituer un système unique mais plutôt de tracer la trajectoire de sa mise en place pour chaque GHT en fonction de la maturité des applicatifs et du degré de convergence des applicatifs de chacun des établissements.

Le transfert de compétences est effectué dans les conditions prévues par l’article L. 1110-4 du code de la santé publique tel que modifié par l’article 25 du projet de loi (droit au respect de la vie privée et du secret des informations concernant le patient, échange et partage de données de santé entre professionnels notamment entre sanitaire et médico-social, droit d’opposition à l’échange et au partage d’informations).

L’analyse et la facturation de l’activité sont placées sous la responsabilité de l’administrateur du département informatique de l’établissement support. Actuellement, l’article L. 6113-7 dispose que les praticiens exerçant dans les établissements de santé transmettent les données médicales nominatives nécessaires à l’analyse de l’activité et à la facturation de celle-ci au médecin responsable de l’information médicale de leur établissement. À l’avenir et à titre dérogatoire, ces informations seront directement transmises au correspondant de l’établissement support.

Enfin, cette collecte d’information doit s’effectuer dans le respect des exigences requises par l’article 34 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés. Le responsable du traitement est ainsi tenu de prendre toutes précautions utiles, au regard de la nature des données et des risques présentés par le traitement, pour préserver la sécurité des données et, notamment, empêcher qu’elles soient déformées, endommagées, ou que des tiers non autorisés y aient accès.

● La mutualisation de la politique d’achats constitue la deuxième activité transférée au profit de l’établissement support.

Tous les achats sont concernés par la politique d’achat commune du GHT en termes de gouvernance, de pilotage, d’organisation.

Concernant la passation des marchés, il a été précisé que certains marchés pourront être passés par le GHT pour ses membres ou partie de ses membres. Il s’agira des achats anciennement passés au niveau des établissements (hors mutualisation), principalement des investissements et certains services particuliers. Les autres achats du GHT seront réalisés via les groupements de commande territoriaux ou nationaux, le GHT adhérant aux groupements de commande existants.

● Enfin, le denier axe concerne la coordination des plans de formation continue et de développement professionnel continu des personnels du groupement et de la coordination des instituts et écoles de formation paramédicale du groupement.

Cette mutualisation des politiques de formation répond à un double enjeu :

– d’une part, garantir une offre de formation équivalente dans le cadre d’un GHT à tous les professionnels pouvant être amenés à travailler dans le cadre d’équipes communes ;

– d’autre part, mutualiser les efforts et coûts de gestion.

Le II de l’article L. 6132-7 prévoit la possibilité de transférer au profit d’un établissement membre du GHT des fonctions administratives, techniques et logistiques.

L’étude d’impact relève que les activités administratives et logistiques d’une part et activités d’enseignement et de recherche d’autre part, sous réserve de retour sur investissement et sous réserve des mutualisations déjà mises en œuvre, pourront également être transférées à l’un des établissements du GHT qui les exercera pour le compte des autres membres.

Conformément à l’article L. 6132-2, les autorisations d’activités de soins pourront être transférées d’un établissement à l’autre, en fonction de ce que déterminera la convention constitutive.

Les conditions seront précisées par le décret d’application mentionné l’article L. 6132-7.

D.  LA CERTIFICATION DES ÉTABLISSEMENTS MEMBRES D’UN GHT

L’article L. 6132-5 précise les modalités de la certification des établissements de santé membres d’un même GHT.

La certification des établissements de santé est prévue par l’article L. 6113-3 et vise à assurer l’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins.

Cette procédure, conduite par la Haute autorité de santé, vise à porter une appréciation indépendante sur la qualité d’un établissement ou, le cas échéant, d’un ou plusieurs pôles, structures internes ou activités d’un établissement, à l’aide d’indicateurs, de critères et de référentiels portant sur les procédures, les bonnes pratiques cliniques et les résultats des différents services et activités de l’établissement.

L’article L. 6132-5 prévoit que la certification est engagée de manière conjointe par les établissements publics de santé membres du GHT.

E.  LA MISE EN PLACE DES GHT

L’article L. 6132-6 précise les conditions dans lesquelles les GHT sont constituées par les ARS.

Son I prévoit que les ARS arrêtent la liste des groupements en tenant compte du schéma régional de santé, refondé à l’article 38 du projet de loi.

Le schéma régional de santé, qui constitue un volet du projet régional de santé, fixe, selon un zonage, la répartition des activités et équipements nécessaires à la réalisation des objectifs de l’offre de soins. Il prévoit également les créations et suppressions d’implantations ainsi que les transformations, regroupements et coopérations entre les établissements de santé, incluant de fait la constitution des GHT.

Afin de favoriser l’éclosion des GHT, les ARS disposeront du levier des financements des dotations d’aide à la contractualisation. Ainsi, le II subordonne l’attribution des dotations de financements à l’aide à la contractualisation prévue par l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, au regroupement au sein d’un GHT.

Toutefois, cette exigence ne s’applique pas aux établissements bénéficiant de la dérogation prévue par le premier alinéa de l’article L. 6132-1 précité. Rappelons à cet égard que l’association d’un établissement à un GHT n’est pas obligatoire si l’établissement de santé relève d’une situation spécifique au regard de l’offre de soins régionale.

L’existence de dotations destinées au financement de missions d’intérêt général est indissociable du modèle de tarification à l’activité tel qu’il a été pensé dès l’origine. En effet, les activités des établissements de santé ne peuvent toutes être liées à un volume d’actes pratiqués et mesurables par un système d’information.

Les dotations MIGAC sont actuellement destinées à financer les engagements relatifs aux missions de service public des établissements de santé, ceux relatifs à la mise en œuvre du schéma régional d’organisation des soins (SROS) ou visant à améliorer la qualité des soins ou à répondre aux priorités locales ou nationales, que ce soit en matière de politique sanitaire, d’innovation médicale ou de soins dispensés à certaines populations spécifiques. Le montant de la dotation est fixé à 6 139,7 millions d’euros pour l’année 2014 (108).

La dotation MIGAC couvre trois sous-ensembles :

– les MERRI (missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation), qui représentent environ 34 % de la dotation ;

– les MIG (missions d’intérêt général autres que les MERRI), qui concernent la permanence des soins en établissement de santé, l’aide médicale urgente, la prévention, l’éducation pour la santé ou encore et la prise en charge de populations spécifiques (notamment les détenus et les patients en situation de précarité). Elles concentrent 37 % de la dotation en 2010 ;

– les AC (aides à la contractualisation), destinées « à financer ponctuellement et temporairement les établissements de santé pour la mise en œuvre des adaptations de l’offre de soins, ainsi que pour l’accompagnement de la montée en charge du modèle de financement de la T2A », et qui représentent environ 29 % de la dotation en 2010.

F.  LES TEXTES D’APPLICATION

L’article L. 6132-7 du code de la santé publique prévoit la publication d’un décret en Conseil d’État portant application des articles L. 6132-1 à L. 6132-6.

Ce décret devrait préciser plusieurs points :

– la définition du projet médical partagé prévu à l’article L. 6132-3 ;

– les conditions dans lesquelles est accordée la dérogation prévue au I de l’article L. 6132-1 ;

– les conditions d’élaboration de la convention constitutive de groupement hospitalier de territoire ;

– les éléments devant être inscrits dans la convention constitutive, notamment les schémas directeurs de mutualisation des activités mentionnées au L. 6132-4 ;

– les conditions de mutualisation des fonctions mentionnées à l’article L. 6132-4 au sein des groupements hospitaliers de territoire ;

– les conditions dans lesquelles les établissements privés d’hospitalisation peuvent être partenaires des groupements hospitaliers de territoire ;

– les conditions dans lesquelles les autorisations mentionnées à l’article L. 6122-1, et transférées en application de la convention de groupement hospitalier de territoire, sont modifiées ;

– les conditions de résiliation de la convention constitutive ;

– les dispositions transitoires pour les établissements appartenant à des communautés hospitalières de territoire ;

– le régime de la mise à disposition des biens mobiliers et immobiliers ;

– les modalités d’articulation des compétences pour la mise en œuvre de la convention constitutive, dans le respect des attributions des instances des établissements de santé.

III. LES MESURES DE COORDINATION ET DE TRANSITION

A.  LES MESURES DE COORDINATION

Les 2° à 5° du I procèdent à diverses mesures de coordination, le GHT ayant vocation à se substituer à la communauté hospitalière de territoire.

Le 2° modifie le 4° de l’article L. 6143-1 du code de la santé publique. Cet article traite des compétences du conseil de surveillance des établissements publics de santé. Il dispose notamment que le conseil de surveillance délibère sur l’avenir sur la participation de l’établissement à une communauté hospitalière de territoire dès lors qu’un centre hospitalier universitaire est partie prenante. À l’avenir, cette délibération portera sur la participation à un GHT.

Le 2° modifie également l’article L. 6161-8 au terme duquel les établissements de santé privés d’intérêt collectif peuvent conclure, entre autres, avec une communauté hospitalière de territoire, des accords en vue de leur association à la réalisation des missions de service public.

Le 3° tire les conséquences de la création du GHT pour les articles L. 1434-7, relatif au schéma régional de l’organisation des soins, et L. 6211-21, relatif à la facturation des actes de biologie médicale. La modification de l’article L. 1434-7 ne semble pas utile à votre rapporteure, compte tenu, de la refonte du schéma régional d’organisation des soins opérée par l’article 38. L’article L. 1434-7 fait ainsi l’objet d’une rédaction globale.

La création d’un GHT étant obligatoire, le dispositif de l’article L. 6131-2 prévoyant la possibilité pour le directeur général de l’ARS de demander aux établissements publics de conclure une communauté hospitalière de territoire n’est pas transposable. Le 4° procède à sa suppression.

Pour les mêmes raisons, le 5° vise à abroger l’article L. 6131-3 relatif à la constitution d’une communauté hospitalière de territoire à la demande de l’ARS.

Les II et III, modifient par coordination, le premier alinéa de l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, relatif à l’attribution des dotations MIGAC, et le III de l’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, relatif au financement des groupements hospitaliers par le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP).

B.  LES MESURES DE TRANSITION

Les IV à VI prévoient le dispositif transitoire applicable aux futurs GHT.

Le IV dispose que le régime des actuelles communautés de territoire demeure applicable jusqu’au 1er janvier 2016.

Le V prévoit que, dans le temps imparti, sera établie la liste des GHT en conformité avec le schéma régional applicable. Il dispose en outre que ce schéma régional doit servir référence pour l’appréciation de la convention constitutive du GHT. Pour mémoire, l’article 38 prévoit la mise en place progressive des nouveaux schémas régionaux et ce, au plus tard, le 1er janvier 2018.

Le VI prévoit l’obligation pour chaque établissement public de santé d’adhérer au GHT avant le 1er janvier 2016 sauf dérogation prévue par le I de l’article L. 6132-1.

Il prévoit également les modalités d’application des nouvelles conditions de versements de la dotation MIGAC prévue par le II de l’article L. 6132-4 :

– jusqu’au 31 décembre 2015, la dotation MIGAC sera maintenue pour les établissements non membres d’un GHT et qui ne relèvent pas du régime dérogatoire. Il s’agit principalement des établissements privés qui ne percevront pus de dotations à compter du 1er janvier 2016 ;

– jusqu’au 31 décembre 2018, la dotation MIGAC sera maintenue pour les établissements membres d’un GHT mais ne répondant pas aux exigences de mutualisation formulées par l’article L. 6132-4. À compter du 1er janvier 2018, elle ne sera plus versée si les conditions ne sont pas remplies. Selon les informations transmises à votre rapporteure, la conformité aux exigences s’appréciera notamment en fonction de l’adoption par les membres du GHT des schémas directeurs permettant l’effectivité de la mutualisation des systèmes d’informations, département d’information médicale et politique d’achats. Ces éléments sont prévus par le décret.

*

Le dispositif proposé a nourri quelques craintes et s’est traduit par le dépôt d’un amendement gouvernemental de rédaction globale de l’article qui a été adopté par la Commission. S’il ne remet pas en question le cœur même du dispositif (convention, caractère obligatoire pour les établissements publics, projet médical partagé), l’amendement précise le dispositif en plusieurs points :

– la place spécifique des centres hospitaliers universitaires (CHU) : tous les GHT seront associés à un CHU (pour les activités hospitalo-universitaires que sont l’enseignement, la recherche, la prospective en matière de démographie médicale et le recours). Parallèlement, le CHU pourra être partie à un GHT à raison des soins de proximité qu’il assure (80 % de l’activité d’un CHU consiste en effet à assurer une prise en charge de proximité) ;

– la place spécifique des centres hospitaliers spécialisés en leur accordant la possibilité d’être associés à d’autres GHT ;

– la spécificité territoriale des établissements et services d’hospitalisation à domicile en leur permettant d’être associés à d’autres GHT compte tenu du principe d’exclusivité territoriale qui les caractérisent ;

– la clarification de la place des établissements privés en leur octroyant un statut de partenaire distinct du statut prévu pour les établissements publics de santé et médico-sociaux ;

– la mise en place de dispositions spécifiques pour l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, les hospices civils de Lyon, l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, qui se caractérisent par une implantation multi-site dans des territoires d’une très grande hétérogénéité ;

– la mise en place d’une gouvernance des GHT via un comité stratégique ;

– l’introduction d’une démarche conjointe de certification des comptes (comme c’est déjà prévu pour la certification HAS).

L’amendement déposé par le Gouvernement a fait l’objet d’améliorations substantielles, notamment à l’initiative de la rapporteure.

Un premier sous-amendement vise à préciser la nécessaire articulation du projet médical des établissements privés partenaires du SPH avec celui du GHT.

Pour répondre aux besoins des populations situés dans les zones transfrontalières, la commission a adopté un sous-amendement visant à associer au GHT les établissements situés dans les pays frontaliers.

Un troisième sous-amendement a complété la gouvernance du GHT en réservant une place particulière aux élus au sein d’un comité territorial. Composé des représentants des élus des collectivités territoriales aux conseils de surveillance des établissements parties au GHT, il a pour vocation de s’exprimer sur les périmètre et composition des GHT. Il est également chargé d’évaluer les actions mises en œuvre à ce titre. Il peut émettre des propositions en ce sens et est informé des suites qui y ont été données.

Un quatrième sous-amendement précise la mise en place du système d’information médicale du GHT. Il permet d’engager un schéma directeur des systèmes d’information visant l’interopérabilité des systèmes existants et leur remplacement à raison de l’obsolescence. L’objectif à terme vise à constituer progressivement un système unique pour l’ensemble du GHT.

Un dernier sous-amendement précise le dispositif de certification conjointe des établissements partis au GHT. Il indique que l’appréciation portée par HAS doit faire l’objet d’une publication séparée pour chaque établissement.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS970 du Gouvernement, qui fait l’objet des sous-amendements AS1732 de M. Philip Cordery, AS1700 de la rapporteure, AS1733 de M. Philip Cordery, AS1699, AS1698 et AS1701 de la rapporteure.

Mme la ministre. L’article 27 vise à créer les groupements hospitaliers de territoire (GHT).

Sans doute cet article ne retient-il pas l’attention du grand public et de ceux qui ne sont pas spécialistes de notre système de santé. C’est pourtant l’une des mesures les plus structurantes de ce texte pour l’avenir de notre système de santé.

Avec l’article 12, qui restructure l’offre de soins primaires, et l’article 27, nous tournons une page : celle de la période au cours de laquelle les établissements hospitaliers se livraient parfois une compétition pour prendre les patients en charge. Nous proposons en effet de coordonner les établissements publics de santé d’un même territoire autour d’une prise en charge commune et graduée des patients. Il s’agit de permettre l’émergence de filières de soins territorialisées et d’organiser la gradation de l’offre de soins – d’abord les hôpitaux de proximité, puis les centres hospitaliers plus importants, voire les centres hospitaliers universitaires (CHU). Les GHT permettront également d’optimiser des fonctions transversales qui doivent pouvoir être communes à plusieurs établissements d’un même territoire.

La création des GHT a été envisagée il y a plusieurs mois. Sans attendre la loi, j’avais confié une mission à deux personnalités, Frédéric Martineau, président de la Conférence des présidents de commissions médicales d’établissements des centres hospitaliers, et Jacqueline Hubert, directrice générale du CHU de Grenoble. Ils ont engagé une très large concertation qui a abouti à préciser l’article tel qu’il était rédigé initialement. Je veux saluer le remarquable travail qu’ils ont accompli. Ils ont permis d’entraîner un mouvement d’adhésion collectif des professionnels et des directeurs à la mise en place des GHT.

Nous proposons de parler désormais de projet médical « partagé » et non pas « commun », pour bien traduire l’idée d’un rassemblement des professionnels autour d’un projet fédérateur. Ensuite, il s’agit de mieux préciser l’objet des groupements hospitaliers de territoire en introduisant la notion d’égalité d’accès à des soins sécurisés et de qualité. La notion de proximité est également intégrée. C’est une manière de dire très clairement que les groupements hospitaliers de territoire ne doivent pas conduire à la fermeture des petits hôpitaux. Au contraire, c’est le moyen d’organiser un maillage territorial pertinent et de préserver, grâce à ces coopérations, des établissements parfois fragiles.

Le texte apporte par ailleurs des précisions sur l’articulation de certains établissements avec les GHT. Tous les GHT seront associés à un CHU pour les activités d’enseignement, de recherche et de démographie médicale.

La place des centres hospitaliers spécialisés en psychiatrie et des établissements d’hospitalisation à domicile est précisée. Ils pourront être associés au projet médical d’un autre GHT que celui duquel ils sont membres. En effet, les hôpitaux spécialisés en psychiatrie ou en hospitalisation à domicile peuvent être amenés à intervenir sur un territoire beaucoup plus large.

L’amendement apporte une précision sur la place des établissements privés et clarifie le vocable pour éviter toute confusion. Ils pourront être partenaires d’un GHT.

Il est précisé par ailleurs que l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, les Hospices civils de Lyon et l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille verront les dispositions les concernant précisées par décret, puisque ce sont des établissements de taille très particulière.

L’amendement vous propose également de préciser la gouvernance avec la désignation d’un établissement support au sein du GHT et la mise en place d’un comité stratégique. Il sera possible de mettre en place des équipes médicales de territoire et des pôles inter-établissements.

Enfin, l’article précise le calendrier de mise en œuvre, le délai d’élaboration du projet médical partagé, qui va jusqu’au 1er juillet 2016.

Il s’agit de dispositions très techniques, mais extrêmement structurantes et qui ont vocation à remodeler de façon durable et en profondeur le visage de notre système hospitalier et de notre système de soins.

M. Jean-Pierre Door. Le Gouvernement nous propose une nouvelle rédaction de l’article 27, qui, concernant la restructuration hospitalière publique et privée, est fondamental.

Les communautés hospitalières de territoire (CHT), qui constituaient un avant-signe de rapprochement, deviennent les groupements hospitaliers de territoire. J’avais créé une telle structure dans mon territoire : elle regroupe trois hôpitaux et fonctionne si bien que nous envisageons de l’étendre à deux régions différentes. Cela permet de partager l’information, la télétransmission, la gestion, les achats et même des partenariats de technologie médicale, de manière à éviter les doublons.

Cependant, je comprends mal quelle est, dans votre projet, la position des établissements privés. Nous avions déjà préparé les groupements de coopération sanitaire (GCS), associés aux CHT : il s’agissait de partenariats public-privé prévoyant des partages dans le domaine des spécialités médico-chirurgicales et médico-sociales, ou dans les technologies modernes.

L’article 27 constitue donc une nouvelle évolution. Nous ferons des observations complémentaires lors de son examen en séance publique après l’avoir étudié en détail.

M. Élie Aboud. Cet article est en effet le plus important du projet de loi, en tout cas celui qui conditionnera le fonctionnement des soignants sur le territoire. Il y est question de « pôles inter-établissements » et de la constitution d’équipes médicales et paramédicales. Cela impliquera-t-il mécaniquement une mobilité du corps médical et du corps paramédical ?

Mme la ministre. Monsieur Aboud, il n’y a pas d’obligation, c’est seulement une possibilité qui est ouverte.

Monsieur Door, l’appartenance à un groupement hospitalier de territoire est obligatoire, ce qui constitue une nouveauté fondamentale. À l’intérieur de cette structure, il y aura un établissement pivot, ce qui veut dire qu’une force entraînante et structurante est identifiée.

M. Jean-Pierre Door. Vous parlez d’établissement pivot. Est-ce l’équivalent de ce que l’on appelait le pôle référent dans la communauté hospitalière de territoire, et qui était par exemple le CHR ou le CHU ?

Mme la ministre. Il y aura un établissement pivot qui sera identifié comme tel, qui ne sera pas nécessairement un CHU ou un CHR, et à partir duquel se structurera un projet médical pour un territoire.

M. Philip Cordery. Il existe depuis longtemps des coopérations entre établissements français et étrangers, par exemple entre Tourcoing et Mouscron dans le domaine de l’imagerie, et entre Forbach et Völklingen dans le domaine cardiaque. Plus récemment, c’est un hôpital transfrontalier qui a été créé à Puigcerdà à la frontière franco-espagnole. Pour ne pas pénaliser ces coopérations qui prennent en compte la proximité, le sous-amendement AS1732 vise à permettre une dérogation à l’obligation d’adhérer à un GHT en cas de réalité transfrontalière.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je suggère le retrait de ce sous-amendement. C’est au décret et non à la loi de cibler les situations transfrontalières.

Le sous-amendement AS1732 est retiré.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Le sous-amendement AS1700 a pour objet de prévoir l’articulation du projet médical des établissements privés associés avec celui du groupement hospitalier de territoire.

M. Philip Cordery. Le sous-amendement AS1733 est fondamental pour la coopération transfrontalière : il propose d’associer des établissements étrangers à des GHT.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Avis favorable.

Monsieur Door, vous avez raison, les coopérations peuvent fonctionner. J’ajouterai que la place et le rôle des élus sont souvent fondamentaux.

Le sous-amendement AS1699 vise à préciser le rôle des élus locaux dans la constitution des GHT pour le choix de l’établissement support en l’absence d’accord des conseils de surveillance. Il prévoit que le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) ne pourra pas prendre de décision sans consulter les élus et que les élus seront informés par le comité stratégique. Je propose donc la constitution d’un comité territorial des élus.

Quant au sous-amendement AS1698, il vise à préciser la finalité des mutualisations en termes de systèmes d’information et d’optimiser l’architecture existante en rendant dans un premier temps les systèmes interopérables.

Le sous-amendement AS1701, enfin, précise que la certification doit faire l’objet d’une appréciation de la Haute Autorité de santé (HAS), établissement par établissement.

La Commission adopte successivement les sous-amendements AS1700, AS1733, AS1699, AS1698 et AS1701.

Puis elle adopte l’amendement AS970 ainsi sous-amendé.

En conséquence, l’article 27 est ainsi rédigé et tous les autres amendements déposés sur l’article 27 tombent.

*

Après l’article 27

La Commission examine l’amendement AS1133 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Cet amendement concerne la sécurité des systèmes d’information hospitaliers. En la matière, nous sommes encore loin du compte. Il est en effet très rare, même dans les CHU, qu’un agent spécialisé dans les problèmes de sécurité dépende directement du directeur général, afin qu’il dispose d’une autorité suffisante.

Je vous propose une disposition qui ne fait peut-être que précéder une directive européenne. Tout événement affectant la disponibilité, l’intégrité, la confidentialité ou la traçabilité des systèmes d’information hospitaliers devra être signalé, y compris lorsqu’il est significatif, à l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Je préférerais que M. Bapt retire son amendement, même si la question mérite d’être posée et qu’une réponse appropriée doit être apportée.

L’amendement est retiré.

*

Article 27 bis
Exploitation en commun par tous les membres
d’un groupement de coopération sanitaire de moyens
d’une autorisation détenue par l’un d’entre eux

Cet article vise à permettre aux groupements de coopération sanitaires de moyens d’exploiter en commun une autorisation d’activité de soins ou d’équipements matériels lourds dont l’un des membres demeure titulaire. Cette évolution permettrait de renforcer la coopération entre établissements de santé parallèlement à la constitution des GHT.

*

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement AS1280 de Mme Dominique Orliac.

*

TITRE III
INNOVER POUR GARANTIR LA PÉRENNITÉ DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ

Chapitre Ier
Innover en matière de formation des professionnels

Article 28
(titre II du livre préliminaire de la quatrième partie, art. L. 4021-1, L. 4022-1, L. 4133-1,
L. 4133-2, L. 4143-1, L. 4143-2, L. 4153-1, L. 4153-2, L. 4236-1, L. 4236-2,
L. 4242-1 et L. 4382-1 du code de la santé publique)

Développement professionnel continu des professionnels de santé

Cet article a pour objet de fixer les grandes lignes d’une réforme du développement professionnel continu (DPC) des professionnels de santé.

La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (dite « HPST ») (109) a :

– unifié les divers dispositifs de formation continue préexistants, en faisant du DPC une obligation commune à toutes les professions de santé ;

– centralisé les circuits de financement et les outils de pilotage en une entité unique, l’Organisme gestionnaire du développement professionnel continu (OGDPC).

À grands traits, le fonctionnement du DPC est le suivant : les professionnels doivent suivre au moins une formation par an, dispensée par un organisme dûment enregistré par l’OGDPC, après évaluation favorable par une commission scientifique indépendante (CSI). Les formations et l’indemnisation des professionnels pendant leur temps de formation sont financées par l’OGDPC.

En juillet 2013, soit un an après l’entrée en vigueur effective de la réforme, la ministre de la Santé a demandé à l’Inspection générale des Affaires sociales (IGAS) de procéder à un contrôle de l’OGDPC, différents dysfonctionnements ayant été constatés. Ce rapport, rendu public en avril 2014 (110), a davantage relevé les défauts du mécanisme de DPC lui-même que de sa gestion par l’OGDPC : contenu imprécis de l’obligation de formation ; absence de sanction en cas de manquement à cette obligation ; financements insuffisants au regard de l’obligation générale de formation annuelle posée par les textes ; évaluation insatisfaisante des organismes formateurs et absence d’évaluation du contenu des formations.

Sur la base des conclusions de ce rapport, une concertation a été engagée par le Gouvernement avec l’ensemble des acteurs du DPC, pour en rendre l’obligation contraignante, en recentrer les objectifs, en adapter le contenu et les modalités aux contraintes de financement, et renforcer le contrôle de la qualité des formations.

Cette concertation s’est achevée mi-février 2015, soit quatre mois après le dépôt du projet de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale. Les dispositions de l’article 28 apparaissent donc en retrait des objectifs poursuivis, qui n’étaient en fait pas connus dans le détail au moment de la rédaction du texte. Au surplus, l’essentiel des mesures concrètes de réforme relèvent du domaine réglementaire.

Ce commentaire a donc vocation à présenter le contexte de la réforme et les différentes questions posées, au moins autant qu’à détailler le dispositif juridique proposé, dont la portée est somme toute assez relative.

I. LA FORMATION CONTINUE DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ : HISTORIQUE ET DROIT EXISTANT

A.  BREF HISTORIQUE DES DISPOSITIFS EN VIGUEUR AVANT LA LOI HPST

● Le serment médical actuel, version moderne de celui d’Hippocrate, comporte l’engagement suivant : « Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés. ». Cette obligation déontologique ancienne a été traduite dans la loi par l’ordonnance du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins (111), qui a introduit dans le code de la santé publique d’alors un article L. 367-2, disposant que « l’entretien et le perfectionnement de ses connaissances constituent pour chaque médecin un devoir professionnel ».

● Avant la loi HPST, l’obligation de formation continue des médecins obéissait à un régime complexe, faisant coexister deux obligations distinctes : la formation médicale continue (FMC) et l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP).

La FMC, dont les modalités de fonctionnement ont été pour l’essentiel définies par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (112) avait pour but « le perfectionnement des connaissances et l’amélioration de la qualité des soins et du mieux-être du patient » (article L. 4133-1 du code de la santé publique d’alors). Avec l’aide d’un comité de coordination, trois conseils nationaux de la formation médicale continue (un pour les médecins libéraux, un pour les médecins hospitaliers et un pour les médecins salariés non hospitaliers), composés principalement de professionnels, géraient le dispositif : définition des orientations prioritaires de formation, agrément des organismes formateurs, fixation des règles de validation du respect de l’obligation de FMC. Des conseils régionaux de la formation médicale continue devaient procéder à la validation effective ; ces conseils n’ayant pas été institués, l’obligation n’a donc jamais été sanctionnée.

Les modalités de financement et de gestion de la FMC, dont un rapport de l’IGAS de 2008 (113) regrettait le manque de clarté, différaient selon le mode d’exercice de la médecine :

– les employeurs des médecins salariés et hospitaliers contribuaient directement au financement de la formation continue de leurs employés, qui pouvait également être assuré, sans cadre précis, par les industries de santé ;

– le financement de la formation continue des médecins libéraux était assuré par trois canaux :

Ø une contribution des industries de santé, manifestement assez peu formalisée puisque le rapport de l’IGAS de 2008 emploie le terme d’ « aides » (114) ;

Ø la cotisation des médecins conventionnés à un organisme gestionnaire conventionnel (OGC), chargé notamment d’indemniser les médecins pour le temps passé en formation, dans le cadre de la formation professionnelle conventionnelle (FPC) instituée par la convention médicale entre les syndicats des médecins libéraux et l’assurance maladie ;

Ø les organisations syndicales elles-mêmes, dans le cadre du fonds d’assurance formation de la profession médicale (FAF-PM).

● La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (115) a institué, parallèlement, un dispositif d’ « évaluation individuelle des pratiques professionnelles » (article L. 4133-1-1 du code de la santé publique d’alors). Cette évaluation « consiste en l’analyse de la pratique professionnelle en référence à des recommandations et selon une méthode élaborée ou validée par la Haute autorité de santé et inclut la mise en œuvre et le suivi d’actions d’amélioration des pratiques » (article D. 4133-23 du même code).

Les modalités de financement de l’EPP n’étaient pas organisées, et reposaient sur des contributions diverses, notamment de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

● Les obligations de formation continue des pharmaciens, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes étaient calquées, mutatis mutandis, sur celles des médecins, la loi de 2002 précitée ayant étendu l’obligation de formation continue à l’ensemble des professionnels de santé.

B.  LA CRÉATION DU DPC PAR LA LOI HPST

L’article 59 de la loi HPST précitée avait pour ambition de rassembler en un dispositif unique les différentes modalités de formation préexistantes ; le chapitre III du titre III du livre Ier de la quatrième partie de la partie législative du code de la santé publique (articles L. 4133-1 à L. 4133-4) est désormais (116) consacré au développement professionnel continu des médecins.

Ces dispositions ont été transposées, peu ou prou dans les mêmes termes, aux autres professions de santé : chirurgiens-dentistes (articles L. 4143-1 et suivants du code de la santé publique), sages-femmes (articles L. 4153-1 et suivants), pharmaciens (articles L. 4236-1 et suivants), préparateurs en pharmacies (articles L. 4242-1 et suivants) et autres professionnels de santé (auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture et ambulanciers).

1.  Le cadre général de l’obligation de DPC

● L’article L. 4133-1 réaffirme le caractère obligatoire du DPC pour les médecins, et lui assigne cinq objectifs :

– l’évaluation des pratiques professionnelles, qui ne se distingue donc plus, comme antérieurement, de la formation professionnelle continue ;

– le perfectionnement des connaissances ;

– l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ;

– la prise en compte des priorités de santé publique ;

– la prise en compte de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

L’article L. 4133-2 renvoie au pouvoir réglementaire le soin de définir :

– les modalités selon lesquelles les médecins satisfont à leur obligation de formation médicale continue ;

– les critères de qualité des formations qui leur sont proposées ;

– les modalités d’enregistrement des organismes de formation, après évaluation par une commission scientifique indépendante.

● La partie réglementaire du code de la santé publique définit de manière un peu plus précise le contenu de l’obligation de DPC. S’agissant des médecins – ces règles étant pour l’essentiel transposables aux autres professionnels de santé – les articles R. 4133-1 et suivants font du DPC une obligation annuelle, satisfaite par la participation à un programme :

– conforme à une orientation définie nationalement (par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de la CSI) ou régionalement (par l’Agence régionale de santé, après avis de la même commission) ;

– comportant des méthodes et des modalités validées par la Haute autorité de santé (HAS) après avis de la CSI ;

– et mis en œuvre par un organisme enregistré, choisi librement par le médecin.

2.  Les garanties de qualité de la formation

Les organismes de formation qui souhaitent mettre en œuvre des programmes de DPC doivent déposer une demande d’enregistrement auprès de l’OGDPC ; l’enregistrement est conditionné à une évaluation favorable de la commission scientifique indépendante.

Il existe quatre CSI proprement dites, par type de profession : médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens. Pour les professions paramédicales, le rôle de CSI est assuré par la commission scientifique placée auprès du Haut conseil des professions paramédicales. Chaque CSI est composée de représentants des « sociétés savantes » de la profession ; la CSI des médecins compte, pour sa part, 17 représentants du conseil national professionnel de spécialité (CNPS) (117) de médecine générale et 17 représentants des autres CNPS.

L’évaluation de la CSI porte notamment sur la capacité pédagogique et méthodologique de l’organisme, la qualité des intervenants, et l’indépendance financière envers les industries de santé. La liste des organismes enregistrés est rendue publique par l’OGDPC, avec une description des programmes proposés et les résultats détaillés de l’évaluation favorable par la CSI.

L’évaluation des organismes doit être réactualisée tous les cinq ans au moins. En outre, l’OGDPC est habilité à contrôler le respect par les organismes enregistrés des critères d’évaluation. L’OGDPC peut mettre fin à l’enregistrement d’un organisme qui ne respecte plus ces critères, ou qui ne se conforme pas à l’obligation de transmission annuelle du bilan de son activité en matière de DPC.

3.  Le suivi de l’obligation de DPC

L’article L. 4133-3 confie aux instances ordinales – dans la généralité des cas (118) – le soin de s’assurer du respect, par les médecins, de leur obligation de DPC. En application de l’article L. 4133-4, les employeurs de médecins salariés sont tenus de prendre les dispositions leur permettant de respecter leur obligation.

Les organismes de formation chargés du DPC doivent délivrer aux professionnels de santé une attestation, qui est également adressée aux autorités supposées s’assurer que l’obligation de DPC est bien satisfaite. L’autorité de contrôle doit s’en assurer au moins une fois tous les cinq ans. Si ce n’est pas le cas, elle demande au professionnel concerné les motifs de non-respect et, « au vu des éléments de réponse communiqués, […] apprécie la nécessité de mettre en place un plan annuel personnalisé de développement professionnel continu » (119). L’absence de mise en œuvre de ce plan est susceptible de constituer un cas d’insuffisance professionnelle au sens de l’article L. 4113-14 du code de la santé publique, qui permet au directeur général de l’Agence régionale de santé de suspendre jusqu’à cinq mois le droit d’exercice d’un médecin, d’un chirurgien-dentiste ou d’une sage-femme qui expose ses patients à un danger grave.

4.  Les modalités de gestion des fonds et de financement

La loi HPST a par ailleurs rationalisé le financement de la formation professionnelle continue, en créant dans le code un titre dédié : « Gestion des fonds du développement professionnel continu des professionnels de santé » (titre II du livre préliminaire de la quatrième partie, article L. 4021-1).

● La gestion des sommes affectées au DPC est assurée, pour l’ensemble des professionnels concernés, par l’OGDPC, groupement d’intérêt public constitué entre l’État et l’assurance maladie, et chargé par la loi de la gestion financière des actions de DPC. Les principes généraux de gouvernance de l’OGDPC, doté de la personnalité morale et administré par un conseil de gestion, sont les mêmes que celui de l’OGC, qui gérait antérieurement la FPC.

● Les modalités de financement du DPC, régies par les articles R. 4133-8 et R. 4133-9 du code de la santé publique, varient selon le mode d’exercice de la profession :

– l’OGDPC concourt au financement du DPC des médecins libéraux et exerçant dans les centres de santé conventionnés, dans la limite d’un forfait ;

– le DPC des médecins employés par des structures privées est financé dans les conditions de droit commun de la formation continue, régies par le code du travail. Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) peuvent néanmoins passer avec l’OGDPC des conventions, en application desquelles une fraction de la dotation budgétaire versée par la CNAM est employée au financement du DPC des professionnels concernés ;

– le DPC des médecins des hôpitaux publics est financé par les employeurs, au moyen d’un prélèvement sur le montant de la rémunération (0,5 % dans les centres hospitaliers universitaires et 0,75 % dans les autres établissements). Sur le modèle du conventionnement entre les OPCA et l’OGDPC, les établissements publics adhérents de l’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) bénéficient d’un financement de l’OGDPC ;

– le DPC des sages-femmes et des personnels paramédicaux de ces mêmes hôpitaux relève du dispositif général de formation professionnelle tout au long de la vie, financé par un prélèvement de 2,1 % sur la masse salariale.

● Avec les sommes qui lui sont allouées, l’OGDPC doit assurer :

– le financement des programmes de DPC des professionnels libéraux conventionnés, ou exerçant dans des centres de santé conventionnés ;

– l’indemnisation pour perte de ressources des mêmes professionnels libéraux et des centres de santé ;

– le financement des programmes de DPC de ceux des médecins salariés dont l’OPCA a signé une convention avec l’OGDPC.

● L’article R. 4021-20 du code de la santé publique prévoit l’attribution à l’OGDPC de trois types de recettes :

– les financements apportés par ses membres dans les conditions prévues par la convention constitutive, à savoir :

Ø une dotation de l’État, servie en 2012 (2 millions d’euros) depuis la mission Santé, mais supprimée dès 2013 ;

Ø une contribution annuelle des caisses d’assurance maladie (44,6 millions d’euros en 2012), via le fonds des actions conventionnelles (FAC) prévu à l’article L. 221-1-2 du code de la sécurité sociale ;

– une fraction – inconnue du rapporteur – du produit de la contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises pharmaceutiques, prévues à l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale (128 millions d’euros en 2012). Cette fraction de contribution transite par la CNAMTS, puisque son affectation directe à l’OGDPC n’a jamais été prévue en loi de financement de la sécurité sociale (120). La convention constitutive de l’OGDPC flèche ce produit vers le financement du DPC des médecins (libéraux, hospitaliers et exerçant dans des centres de santé) ;

– les contributions volontaires d’organismes publics ou privés, autres que les établissements de santé. Le Gouvernement a confirmé au rapporteur que cette disposition reste purement théorique.

Au final, depuis 2013, l’OGDPC reçoit pour tout flux de recettes une dotation de l’assurance maladie : 155 millions d’euros versés en 2013, 176 millions en 2014, 162 millions prévus en 2015, 182 millions en 2016 et en 2017 (121).

BUDGET DE L’OGDPC

(en millions d’euros)

 

2013 (voté)

2013 (exécuté)

2014 (voté)

Médecins libéraux et des centres de santé

83,2

70,2

100,0

Autres professionnels libéraux et des centres de santé

43,1

42,8

58,9

Total libéraux

126,3

113,0

158,9

Interprofessionnels

1,5

2,0

7,0

Total hors hospitaliers

127,8

115,0

165,9

Médecins hospitaliers

19,3

13,3

19,3

Dont hôpitaux publics

17,2

13,3

17,2

Frais de structure

8,0

5,6

11,0

Total

155,1

133,9

196,2*

(*) Soit 176 millions + crédits non consommés

Source : réponses du Gouvernement au questionnaire du rapporteur.

C.  LE FONCTIONNEMENT IMPARFAIT DU DPC, CONSTATÉ PAR L’IGAS

Le 1er juillet 2013, la ministre de la Santé a demandé à l’IGAS d’opérer un contrôle de l’OGDPC, en fonction depuis seulement un an. Cette demande était motivée par le constat de dysfonctionnements dans les procédures d’inscription et d’indemnisation des professionnels, ou d’enregistrement des organismes formateurs.

Dans son rapport d’avril 2014, l’IGAS a établi que les dysfonctionnements proviennent moins du fonctionnement de l’OGDPC que du dispositif de DPC lui-même, qui « a développé un épais nuage de problèmes de nature extrêmement diverse » (122).

Sans prétendre à l’exhaustivité, les développements qui suivent résument les principales conclusions de ce rapport, qui inspirent pour partie les dispositions du présent article, et surtout nourrissent les réflexions en cours sur les évolutions ultérieures.

1.  Les malfaçons et dysfonctionnements du DPC

● L’IGAS constate tout d’abord une série de « vices de conception de la réforme » (123) :

– l’absence de véritable définition du contenu de l’obligation de DPC, qui en conséquence « peut être satisfaite par un programme de quelques heures qui portent sur un sujet sans rapport avec l’activité professionnelle du praticien » (124) ;

– l’absence de sanction en cas de manquement à l’obligation, autre que la qualification d’insuffisance professionnelle en cas de non-respect du plan pluriannuel de DPC par les professions médicales (cf. supra). Les conséquences de l’insuffisance professionnelle sont telles (suspension en urgence) que « la question de la sanction, au mieux, apparaît comme ne pas devoir se poser réellement, au pire, génère un sentiment d’insécurité » (125). De plus, les conséquences du constat d’insuffisance professionnelle varient selon le mode d’exercice de la profession : alors que les médecins salariés peuvent être licenciés sur ce fondement, l’ordre se contente d’imposer aux professionnels concernés des mesures d’accompagnement ;

– le financement insuffisant du DPC, dont le coût théorique pourrait dépasser le milliard d’euros si tous les professionnels satisfaisaient immédiatement à leur obligation légale, alors que le budget de l’OGDPC est inférieur à 200 millions d’euros (126). L’IGAS, à juste titre, ne se satisfait pas du fait que cette insuffisance soit due à un respect progressif de l’obligation : « la loi édicte une obligation d’application immédiate, et donc susceptible d’entraîner une sanction à court terme, pendant que, parallèlement, les pouvoirs publics ne dégagent pas les moyens de financer le respect par tous de l’obligation, comme s’ils ne croyaient pas à la force de l’obligation qu’ils ont instaurée » (127).

Au sujet du financement, l’IGAS rapporte par ailleurs une contestation forte des médecins, en ce sens que la fraction de contribution sur les industries pharmaceutiques n’est pas directement affectée à l’OGDPC et fléchée vers le financement de leur DPC, mais perçue par la CNAMTS, qui reverse une dotation globale, sans distinction, à l’OGDPC.

● Le rapport identifie ensuite plusieurs « mauvais réglages » (128), concernant pour l’essentiel le contrôle de la qualité des formations :

– sur le plan théorique, le principe consistant à agréer des organismes a priori plutôt que des formations a posteriori n’a rien d’évident ;

– sur le plan pratique, il faudrait plusieurs années pour que les CSI évaluent l’ensemble des organismes. Le rapport indique ainsi qu’au 30 septembre 2013, sept organismes étaient enregistrés… pour 2 146 demandes déposées.

● Pour illustrer ce qui est sans ambages qualifié de « conduite de projet désastreuse » (129), l’IGAS relève entre autres :

– que la dématérialisation totale des tâches de l’OGDPC, mise en œuvre ab initio, a contraint l’organisme à mettre en place en trois mois, avec le concours d’un prestataire unique, un système d’information qui s’avère loin d’être infaillible ;

– qu’il s’ensuit des retards de paiement des professionnels et des organismes de formation.

2.  Les scénarios d’évolution envisagés

● L’IGAS constate que la réforme de 2009 poursuivait une série d’objectifs qui ne font pas, l’objet de contestations massives quant à leur fondement, et qui pourraient être utilement sauvegardés : obligation de formation commune à toutes les professions de santé, indifférente au statut (libéral ou salarié) ; définition de méthodes communes à toutes les formations, et validées par la HAS ; instauration d’une procédure d’évaluation préalable de la qualité des formations ; mise en place d’un financement spécifique ; lisibilité de l’offre de formation, concentrée en un point unique ; liberté de choix de l’organisme par le professionnel.

Sur cette base, le rapport propose quatre scénarios d’évolution qui, du plus conservateur au plus audacieux, se déclinent de la sorte :

– « amélioration progressive du dispositif actuel » (130) (scénario 1). C’est dans le cadre de ce scénario, qui nécessite par construction le plus d’adaptations, y compris mineures, que sont formulées les multiples recommandations du rapport (cf. infra) ;

– « un OGDPC pilote mais une gestion déléguée » (131) (scénario 2). Dans ce scénario, qui a la préférence de l’IGAS, l’OGDPC gérerait les seules formations interprofessionnelles, les formations spécifiques étant pour leur part gérées par les opérateurs existants (OPCA, ANFH, FAF-PM) ;

– « un DPC recentré sur les connaissances critiques » (132) (scénario 3). Il s’agirait de limiter le DPC aux formations centrées sur la sécurité des soins, définies après évaluation individuelle des besoins des professionnels ;

– « l’application du droit commun de la formation » (133) (scénario 4), ce qui reviendrait à supprimer l’obligation légale de DPC et l’OGDPC.

En tout état de cause, le rapport insiste sur la nécessité de faire précéder toute réforme d’une concertation approfondie, afin « de remédier à l’une des faiblesses de la situation actuelle qu’est la désaffection à l’égard du dispositif ».

● Sans évoquer chacune des 32 recommandations de l’IGAS, on peut en retenir quelques-unes.

L’obligation de DPC doit être rendue effective, car la sanction ultime actuellement prévue, à savoir le constat d’insuffisance professionnelle, n’est pas mise en œuvre.

S’agissant du contrôle de la qualité, le rapport constate que « le système actuel est bancal et décrédibilise l’ensemble du dispositif de DPC » (134), et appelle en conséquence à mettre en place rapidement un système de contrôle a posteriori des formations.

Afin d’assurer la soutenabilité financière du DPC, il est proposé de revoir à la baisse les forfaits actuellement pris en charge, mais surtout de rendre l’obligation de formation triennale et non plus annuelle. Le financement gagnerait à être assuré par l’affectation directe d’une taxe sur les produits de santé (et non plus seulement pharmaceutiques) à l’OGDPC, ce qui aurait le double mérite d’accroître les recettes de l’organisme et de mettre fin au « fléchage » – de fait non respecté – de l’actuelle taxe vers la formation des médecins, renforçant ainsi le caractère interprofessionnel du DPC.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A.  UN ARTICLE DONT LA PORTÉE RÉELLE EST DIFFICILE À DÉTERMINER

● Selon l’étude d’impact, cet article entend répondre aux insuffisances pointées par l’IGAS, et poursuit pour ce faire quatre objectifs :

– « définir plus précisément le contenu de l’obligation de DPC » ;

– « circonscrire le champ de l’obligation à l’amélioration des pratiques professionnelles et le [sic] perfectionnement des connaissances » ;

– « reconnaître la place des conseils nationaux professionnels de spécialité dans le dispositif et celle des universités » ;

– « recentrer le travail confié à la commission scientifique indépendante sur le contrôle de la qualité de l’offre de DPC ».

Mais la lecture de la même source invite à relativiser singulièrement l’ambition de cet article, qui « consiste à préparer les grandes lignes du futur dispositif », une concertation ayant été lancée à l’automne dernier « pour repenser le sens du dispositif avec l’ensemble des parties prenantes ». Le rapporteur ne peut manquer de s’interroger sur la nécessité, dans ce contexte, de faire figurer cet article dans le projet de loi : même si de nombreuses dispositions régissant le fonctionnement du DPC sont de niveau réglementaire et non législatif, il est pour le moins étonnant de procéder à une réforme dont ni l’architecture ni le sens n’étaient connus au moment du dépôt du texte sur le bureau de l’Assemblée.

● Le Gouvernement a apporté au rapporteur quelques informations sur l’organisation et l’objet de la concertation.

Celle-ci s’est déroulée en trois temps :

– une phase « de calage » en novembre et décembre, c’est-à-dire l’organisation de réunions bilatérales entre la direction générale de l’offre de soins et les acteurs du DPC, afin de « tester et affiner un modèle pour une réforme structurelle du DPC intégrant la contrainte du financement dans le cadre d’une enveloppe fermée » ;

– un cycle de « réunions plénières » en janvier (135) ;

– une synthèse avec l’ensemble des acteurs, le 18 février, permettant de soumettre un projet à l’arbitrage de la ministre de la Santé, en février. À la veille de l’examen du projet de loi en commission, soit environ un mois après la synthèse, les arbitrages ne sont toujours pas connus du rapporteur.

Les principaux objets de débat ont été les suivants :

– la redéfinition du contenu de l’obligation de DPC, comme le suivi d’une formation répondant à des objectifs prioritaires, portant sur le cœur de métier du professionnel, et seule éligible de ce fait au financement public ;

– la révision de la périodicité de l’obligation de DPC, qui ne serait plus annuelle ;

– la réorganisation du système de contrôle de la qualité des formations ;

– la réforme de la gouvernance de l’OGDPC.

B.  LE DÉTAIL DU DISPOSITIF PROPOSÉ

L’article réorganise la partie législative du code de la santé publique, afin de rassembler les dispositions les plus générales relatives au DPC, qui sont en l’état du droit dispersées car organisées par catégorie de professions. Le titre II de la quatrième partie du livre préliminaire, intitulé « Gestion des fonds du développement professionnel continu des professionnels de santé », compte aujourd’hui un chapitre unique et un article unique, L. 4021-1, consacré à l’OGDPC (cf. supra). Cet article serait renuméroté L. 4022-1 ( du I du présent article – alinéa 4) et l’actuel chapitre unique deviendrait un chapitre II, intitulé « Gestion des fonds du développement professionnel continu » ( du I –alinéa 3). Un chapitre Ier, intitulé « Dispositions générales », serait inséré en tête du titre II (du I), titre désormais intitulé « Développement professionnel continu des professionnels de santé » ( du I – alinéa 2). Ce chapitre Ier serait composé d’un article unique, le nouveau L. 4021-1 (alinéas 8 à 12), qui pose de manière synthétique les grands principes du futur DPC.

● Puisqu’il s’agit de rassembler ces principes en un article unique, il est tout d’abord prévu que le DPC constitue une obligation pour les professionnels de santé, entendus donc dans leur ensemble (alinéa 8). On rappellera qu’au sens de la quatrième partie du code de la santé publique, les professions de santé couvrent :

– les professions médicales (médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme) ;

– les professions de la pharmacie (pharmacien et préparateur en pharmacie) ;

– les professions paramédicales (infirmier, masseur-kinésithérapeute, orthophoniste, orthoptiste, pédicure-podologue, ergothérapeute, psychomotricien, manipulateur d’électroradiologie médicale, audioprothésiste, opticien-lunetier, prothésiste et orthésiste, diététicien, technicien de laboratoire médical, aide-soignant et auxiliaire de puériculture).

● Le DPC est recentré sur un objectif général d’ « amélioration des pratiques des professionnels de santé par l’actualisation et le développement des compétences » (alinéa 9). Cet objectif est lui-même défini « compte tenu des domaines d’action et des objectifs prioritaires d’amélioration de la santé portés par la stratégie nationale de santé ».

Le recentrage ainsi opéré n’est pas totalement révolutionnaire, dans la mesure où quatre des cinq objectifs actuels du DPC se retrouvent, mutatis mutandis, dans la rédaction retenue : évaluation des pratiques professionnelles, perfectionnement des connaissances, amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, prise en compte des priorités de santé publique. Le seul objectif actuel ne figurant plus dans la rédaction retenue, c’est la prise en compte de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé ; cela apparaît cohérent avec la volonté de recentrer le DPC sur le cœur de métier des professionnels.

● Le contenu du DPC est très sommairement défini comme associant « l’analyse, l’évaluation des pratiques professionnelles et le perfectionnement des connaissances » (alinéa 10). Les deux dimensions du DPC, le « cognitif » et l’évaluation professionnelle, sont donc logiquement conservées.

Ce contenu devra être déterminé :

– selon des méthodes validées par la Haute autorité de santé, comme le prévoit le droit existant (mais au niveau réglementaire et non législatif) ;

– « sur la base » des recommandations des conseils nationaux professionnels de spécialité. Il s’agit là d’une nouveauté, dont la rédaction ne permet toutefois pas d’apprécier pleinement la portée. L’étude d’impact ne permet pas d’en savoir davantage, se contentant d’indiquer qu’il s’agit d’ « impliquer » les CNPS. On rappellera qu’ils sont déjà associés à l’actuel DPC, puisqu’ils sont membres des commissions spéciales indépendantes (cf. supra).

● La mention dans la loi de l’association des universités au DPC constitue une autre nouveauté prévue par le présent article (alinéa 11). Il est prévu qu’elles contribuent à la dimension pédagogique du DPC (le « cognitif ») ; le Gouvernement a jugé utile de préciser que cette contribution est assurée « par leur expertise scientifique dans le domaine de la formation initiale et continue des professionnels de santé ». Les réponses au questionnaire du rapporteur confirment ce que la lecture du dispositif laisse croire, à savoir que le rôle des universités « reste à définir dans le cadre de la concertation ».

L’encadré suivant reproduit l’analyse faite par l’IGAS de la place des universités dans l’actuel DPC, posant les enjeux d’un débat que la rédaction très ouverte retenue dans le texte ne permet pas de trancher à ce stade.

Les universités, acteurs particuliers dont la place n’a pas été définie

Deux modalités de reconnaissance des formations réalisées par l’université

Les articles L. 123-3 et 123-4 du code de l’éducation mentionnent la « participation à la formation continue » et la réalisation de formations de formateurs parmi les missions des universités.

Dès lors, les universités ont vocation à participer au DPC de l’ensemble des professionnels de santé. Deux modalités leur sont ouvertes par les textes régissant le DPC.

Modalité n° 1 : les articles R. 4021-23 et suivants du code de la santé publique instaurent l’enregistrement des ODPC auprès de l’OGDPC. Une université peut demander la reconnaissance du caractère d’ODPC à l’instar des autres organismes.

Modalité n° 2 : les articles R. 4133-5 et D. 4133-16, 6°, du code de la santé publique prévoient qu’un médecin remplit son obligation de DPC s’il a suivi dans l’année civile précédente un diplôme d’université reconnu comme équivalent à un programme de DPC. Cette reconnaissance est fondée sur l’établissement d’une liste de diplômes par la CSI des médecins. Des dispositions similaires valent pour les autres professions.

Une recherche à partir du mot-clé « université » sur le site de l’OGDPC montre qu’une quarantaine d’universités ont déjà obtenu leur enregistrement comme ODPC au titre de la modalité n° 1.

La coexistence des deux modalités permettant aux universités de participer au DPC pose question. Plus particulièrement, la modalité n° 2 apparaît peu pertinente en ce qu’elle crée une dérogation peu justifiée au principe général que le DPC soit réalisé au sein d’un ODPC enregistré (article R. 4133-2 du code de la santé publique pour les médecins par exemple). Si une quarantaine d’universités se sont déjà vues enregistrées comme ODPC, la possibilité pour un professionnel de santé de réaliser un diplôme d’université valant DPC au sein d’une université non reconnue apparaît peu pertinente.

La mission recommande la suppression de cette modalité, par la suppression du 6° de l’article D. 4133-16 du code de la santé publique pour les médecins et ses équivalents pour les autres professions de santé.

Un risque d’atteinte à la loyauté de la concurrence sur le marché de la formation

Par ailleurs, les universités étant financées partiellement sur fonds publics, il existe un risque de voir la concurrence entre ODPC faussée si les fonds publics subventionnent de manière directe ou indirecte (mise à disposition gratuite de locaux, bénéfice de temps d’enseignants) l’activité concurrentielle de DPC. Dès lors, il importe que les structures universitaires identifient précisément les recettes et coûts générés par l’activité de DPC afin de pouvoir prouver qu’elles ne disposent d’aucun avantage qui fausse ou menace de fausser la concurrence en renforçant leur position concurrentielle. Cela passe par la tenue d’une comptabilité analytique précise ou – comme l’ont déjà réalisé certaines universités enregistrées comme ODPC – par la création de structures ad hoc, dispositions que recommande la mission.

Source : IGAS, précité, page 50.

● La rédaction est encore plus ouverte s’agissant de la mise en œuvre du DPC (alinéa 12), qui doit se faire « dans le respect des règles d’organisation et de prise en charge propre à leur [sic] secteur d’activité ». La définition de règles juridiques précises est donc renvoyée à un décret en Conseil d’État, dont le contenu sera vraisemblablement issu de la concertation.

La très grande généralité de la rédaction, sans prescrire aucun principe, n’interdit à l’inverse presque aucune modification de l’organisation actuelle de la gestion et du financement. En effet, à l’exception de l’article législatif consacrant l’existence de l’OGDPC, les autres dispositions relatives à l’organisation et au financement du DPC relèvent du niveau réglementaire. C’est également le cas des modalités de suivi de l’obligation de DPC et du régime de sanction en cas de manquement.

L’étude d’impact indique d’ailleurs que « des solutions de rééquilibrage budgétaire de l’OGDPC doivent […] être trouvées mais relèvent, pour l’essentiel, du domaine réglementaire ». Elle évoque même « une réduction des dépenses en 2015-2017 ». En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que l’ajustement du budget de l’OGDPC aux besoins théoriques « est inenvisageable dans le contexte financier particulièrement contraint que nous connaissons », et que le respect de l’enveloppe prévue jusqu’en 2017 nécessite de prendre en considération plusieurs pistes, notamment le passage d’une obligation annuelle à une obligation pluriannuelle et la définition d’un nombre limité de priorités.

● Le II du présent article (alinéa 13) tire les conséquences légistiques du rassemblement en un article unique des dispositions générales relatives au DPC. Il est en effet nécessaire d’abroger les articles qui, pour chaque catégorie de professionnels de santé, posent le principe de l’obligation de DPC et en définissent les objectifs, sur le même modèle.

● Le III modifie, pour chacune des catégories de professionnels de santé, les attributions des commissions scientifiques indépendantes. En l’état du droit, les CSI évaluent les organismes avant leur enregistrement par l’OGDPC. La rédaction proposée par l’alinéa 16 ouvre aux CSI la possibilité de contrôler la qualité des formations (par définition a posteriori), et plus seulement la qualité des organismes, a priori. Il est en effet prévu que la CSI « assure le contrôle de la qualité de l’offre de développement professionnel continu ».

*

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission des affaires sociales a adopté un seul amendement à l’article 28, à l’initiative de Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux Droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et de plus de quarante députés membres de la majorité.

En l’état du droit, l’article L. 2214-2 du code de la santé publique prévoit que « la formation initiale et la formation permanente des médecins, des sages-femmes, ainsi que des infirmiers et des infirmières, comprennent un enseignement sur la contraception ». L’amendement complète l’article 28 d’un IV, qui modifie l’article L. 2214-2 pour préciser que cet enseignement doit porter sur les différents modes de contraception.

*

La Commission examine l’amendement AS745 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Les propositions ayant trait au développement professionnel continu (DPC) nous agréent. Le DPC doit s’inscrire dans la stratégie nationale de santé. Toutefois, nous proposons que des formations non directement comprises dans le champ de la stratégie nationale de santé puissent être dispensées dans le cadre du DPC. L’amendement propose donc d’insérer le mot « notamment » pour ouvrir le champ des formations possibles.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur pour le titre III. Défavorable. Les objectifs de la stratégie nationale de santé ne sont pas prédéfinis. Ils peuvent être élargis. Les objectifs que vous voudriez voir pris en compte peuvent donc y figurer.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS704 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Défendu.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Défavorable. Cette disposition relève du domaine réglementaire.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS284 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1472 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS284 vise à intégrer dans la formation professionnelle continue des professionnels de santé les enjeux et les problématiques des populations en situation de précarité.

Mme Martine Pinville. L’amendement AS1472 est défendu.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Même remarque que précédemment. On ne doit définir que des objectifs très généraux et non faire l’inventaire de la totalité des thématiques. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle examine l’amendement AS285 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Même proposition, mais en ce qui concerne la santé environnementale.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS705 de Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Défendu.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Défavorable. Il est logique que les méthodes de formation soient validées par la HAS, même si l’on ne méconnaît pas l’importance des autres organismes. Le droit existant permet que soient entendues les différentes structures, mais la responsabilité incombe à la HAS.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS126 de M. Jean-Pierre Door, AS485 de M. Dominique Tian et AS576 de M. Fernand Siré.

M. Jean-Pierre Door. Je défendrai également les amendements AS126, AS127 et AS34, qui vont dans le même sens.

Le développement professionnel continu est très important. La formation des médecins libéraux doit être gérée et organisée par la profession, non par les universités. C’était d’ailleurs la construction de l’organisme gestionnaire du développement professionnel continu (OGDPC).

Effectivement, le contrôle de la qualité de l’offre doit être réalisé par une commission scientifique indépendante, dans l’année qui suit l’enregistrement. J’ajoute que le contrôle doit être réel.

Enfin, les financements se sont considérablement réduits ces dernières années. Il est proposé de réintroduire le fait que la convention médicale avec les partenaires sociaux détermine le montant de la contribution annuelle pour l’organisation générale du DPC.

M. Élie Aboud. L’amendement AS485 est défendu.

M. Fernand Siré. L’amendement AS576 est défendu.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis défavorable à la suppression de la participation des universités. Le DPC ne concerne pas seulement les médecins libéraux, mais tous les professionnels de santé, publics et privés. Bien évidemment, l’université n’intervient pas dans la gestion du DPC, mais elle est enregistrée comme organisme de formation.

La Commission rejette les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements AS286 de M. Jean-Louis Roumegas et AS870 de Mme Bérengère Poletti, et les amendements identiques AS127 de M. Jean-Pierre Door et AS1548 de M. Fernand Siré.

Elle examine ensuite l’amendement AS1447 de Mme Catherine Coutelle.

M. Gérard Sebaoun. Il s’agit d’élargir la formation des personnels médicaux à tous les modes de contraception qui peuvent exister.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements identiques AS34 de M. Jean-Pierre Door, AS487 de M. Dominique Tian et AS1549 de M. Fernand Siré.

Elle adopte enfin l’article 28 modifié.

Après l’article 28

La Commission est saisie de l’amendement AS287 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Avis défavorable, cela reviendrait à donner aux formateurs sociaux la formation des professionnels de santé.

La Commission rejette l’amendement.

Article 28 bis
(art. L. 632-2 et L. 632-4 du code de l’éducation)

Faciliter la réorientation des médecins en cours de carrière

Cet article, introduit à l’initiative du Gouvernement avec l’avis favorable du rapporteur, a pour objet de faciliter la réorientation de carrière des médecins, grâce à la formation.

L’article L. 632-2 du code de l’éducation prévoit que les études médicales théoriques et pratiques doivent permettre aux étudiants de participer effectivement à l’activité hospitalière. L’article 28 bis modifie cet article du code afin de permettre à des médecins en exercice d’être, à cet égard, considérés comme des étudiants.

Il procède également à une mesure de toilettage à l’article L. 632-4, qui distingue encore la médecine générale et les spécialités, alors que la médecine générale est aujourd’hui considérée comme une spécialité à part entière.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1392 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il faut permettre au médecin de changer de spécialité pendant son parcours professionnel afin de favoriser la mobilité et l’évolution des carrières.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 28 bis

La Commission examine l’amendement AS884 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Défavorable : formulé de façon très générale, cet amendement n’aurait pas d’effet concret.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements AS871 et AS549 de Mme Bérengère Poletti.

*

Article 29
(art. L. 4311-12 du code de la santé publique)

Diversification des lieux de stage pour les étudiants paramédicaux

Le parcours de soins fait intervenir un nombre croissant de professionnels de santé. Ces derniers relèvent du monde hospitalier mais aussi et surtout du secteur ambulatoire. Bien souvent, un patient sortant l’hospitalisation requiert un suivi médical nécessitant dans la durée l’intervention de son médecin généraliste comme d’un infirmier. La meilleure prise en charge de ces patients suppose que les intervenants connaissent le mode de fonctionnement et les attentes de l’autre.

Dans ce contexte, le Gouvernement souhaite mettre à profit les périodes de stage réalisées par les étudiants paramédicaux pour les préparer au travail en réseau, et plus particulièrement avec les autres professionnels de santé intervenant dans le secteur ambulatoire. Pour ce faire, il est proposé de faire évoluer le périmètre des organismes agréés pouvant accueillir en stage les étudiants infirmiers.

1.  La nécessité d’élargir le panel des stages que les étudiants paramédicaux peuvent valider au cours de leurs études

La stratégie nationale de santé a fait de la rénovation des formations des professionnels de santé un objectif majeur. Ce chantier doit contribuer au « virage ambulatoire » et garantir une continuité de prise en charge des patients dans le cadre de parcours de soins cohérents. Il s’agit de favoriser de façon systématique la prise en compte par l’ensemble des professionnels de santé de la nature pluridisciplinaire de ces parcours.

Avec le temps, la multiplication de ce type d’immersions permettra d’une part la construction d’une communauté de vue – d’une « culture commune » dans le domaine ambulatoire – ainsi que, d’autre part, la mise en place de passerelles entre professions. Pour ce faire, c’est dès le stade de la formation des professionnels qu’il convient d’agir : ce moment est propice à l’acquisition de la connaissance mutuelle entre professionnels, au développement de réflexes et de pratiques en commun.

Or, les paramédicaux comptent parmi les professionnels directement et systématiquement impliqués dans les parcours de santé des Français.

Les professions paramédicales

La notion de « professions paramédicales » rassemble un grand nombre de professionnels. Il s’agit des professions de santé non exercées par des médecins, des dentistes, des sages-femmes ou des pharmaciens. Elles sont décrites dans le livre III de la quatrième partie du code de la santé publique.

En janvier 2012 et de façon non exhaustive, on dénombrait en France : plus de 500 000 infirmières ou infirmiers, soit près de la moitié des paramédicaux, 340 000 aides-soignants, 72 800 masseurs kinésithérapeutes, 28 700 manipulateurs en électroradiologie, 23 300 opticiens-lunetiers, 19 900 orthophonistes, 11 500 pédicures, 11 000 puéricultrices, 11 000 pédicures podologues, 7 800 psychomotriciens, 7 500 ergothérapeutes, 7 100 diététiciens, 6 000 auxiliaires de puériculture, 4 500 diététiciens, 3 400 orthoptistes, 2 400 audioprothésistes ou encore 450 podo-orthésistes.

Conformément aux orientations définies dans la stratégie nationale de santé, la formation des étudiants infirmiers devra davantage tenir compte du mode de fonctionnement des autres professionnels de santé et notamment de la médecine ambulatoire, ce qui est déjà possible pour les autres professions paramédicales. L’accent sera mis sur les conditions de prise en charge des patients dans le secteur ambulatoire.

Pour ce faire, il est nécessaire de modifier le cadre législatif applicable aux stages obligatoires réalisés par les étudiants paramédicaux pour diversifier les organismes de stages agréés. Ainsi, outre les structures déjà éligibles (établissements sanitaires et médico-sociaux), le Gouvernement souhaite permettre des stages en structures ambulatoires, telles que les cabinets libéraux ou les structures dites « d’exercice coordonné » : maisons de santé pluri-professionnelles ou encore centres de santé.

Cette logique doit être soutenue autant que possible, en favorisant à cette occasion la réalisation d’actes par les stagiaires dans ces différentes structures, ce que seul permet un cadre législatif précis et sécurisant pour les maîtres de stage et organismes d’accueil.

2.  Tout en maintenant les possibilités de stages en établissements de santé, cet article met en valeur des stages dans des structures ambulatoires

Les trois alinéas de cet article visent à remplacer les dispositions du 2° de l’article L. 4311-12 du code de la santé publique qui, par dérogation, ouvrent l’exercice de la profession d’infirmière ou d’infirmier soit en qualité d’auxiliaire polyvalent, soit pour un ou plusieurs établissements ou pour un mode d’activité déterminé à certaines catégories de demandeurs, dont, en 2°, les « étudiants préparant le diplôme d’État pendant la durée de leur scolarité, mais seulement dans les établissements ou services agréés pour l’accomplissement des stages ».

● La nouvelle rédaction précise et élargit la nature des organismes éligibles à ces dispositions. Outre les établissements de santé ou médico-sociaux, seront ainsi éligibles les structures de soin ambulatoires et les cabinets libéraux « agréés pour l’accomplissement des stages », ces deux dernières précisions constituant un véritable élargissement du champ de cet article. Cette mesure permettra de diversifier l’offre de stages des étudiants infirmiers en la rendant plus proche des parcours des patients.

Au cours de ses auditions, votre rapporteur a constaté le très bon accueil réservé à cette disposition. Il souhaite donc que le Gouvernement concrétise cette avancée sur le plan réglementaire le plus rapidement possible afin de la rendre applicable au plus tard pour la rentrée universitaire 2016.

● La seconde phrase permet de préciser que, dans le cadre des stages décrits dans ce 2°, la loi permet aux étudiants d’effectuer personnellement des actes dans chacun de ces lieux de stage, pourvu qu’ils soient accomplis non pas sous la seule supervision, mais bien sous la « responsabilité » d’un infirmier diplômé.

La supervision et donc la présence du professionnel auprès de l’étudiant en stage est conforme aux dispositions de l’article L. 4381-1 du code de la santé publique qui prévoit sa présence constante pour l’accueil en stage des étudiants auxiliaires médicaux en formation. Pour mémoire, cet article prévoit que : « Les auxiliaires médicaux concourent à la mission de service public relative à la formation initiale des étudiants et élèves auxiliaires médicaux.

À ce titre, ils peuvent accueillir, pour des stages à finalité pédagogique nécessitant leur présence constante, des étudiants et élèves auxiliaires médicaux en formation.

La réalisation de ces stages ne peut avoir pour objet ou pour effet d’accroître l’activité rémunérée de ces praticiens. »

La supervision et donc la présence du professionnel auprès de l’étudiant en stage permettent seul le remboursement de l’acte par l’assurance maladie (136). Cette précision permettra donc de faciliter la mise en pratique des connaissances du stagiaire infirmier en clarifiant les conditions de prise en charge des actes en question : ils seront réputés réalisés par l’infirmier diplômé sous l’autorité duquel le stage est conduit. Cette disposition facilitera la pratique de ces actes en sécurisant et en clarifiant les conditions de prise en charge et de mise en œuvre de leur responsabilité pour les organismes d’accueil.

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Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS1116 de M. Arnaud Richard.

Puis elle adopte l’article 29 sans modification.

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Après l’article 29

Mme Jacqueline Fraysse. Après l’article 29, j’avais déposé un amendement tombé sous le coup de l’article 40 ; aux termes d’un accord négocié avec le Gouvernement, je demande à Mme la ministre de bien vouloir lever le gage. Il s’agit de développer la coopération régionale entre les centres ou les maisons de santé et les universités afin de favoriser la formation, l’enseignement supérieur et la recherche.

Mme la ministre. Je suis favorable à la mise en place d’un nouveau mode de coopération régionale entre les centres de santé, les maisons de santé et les unités de formation et de recherche (UFR) médicales, car la réglementation actuelle ne leur permet pas de participer à la recherche en santé. Un alinéa ajouté à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique permettra de répondre à cet objectif. Je lèverai donc le gage de l’amendement que vous déposerez.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS1106 de M. Arnaud Richard.

Puis elle examine les amendements identiques AS488 de M. Dominique Tian et AS577 de M. Fernand Siré.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Avis défavorable : ces amendements sont satisfaits.

La Commission rejette les amendements.

*

Chapitre II
Innover pour préparer les métiers de demain

Ce chapitre traite de la modernisation des professions de santé. Il valorise les métiers, apporte des réponses aux difficultés démographiques de certaines professions et s’adapte aux nouveaux besoins des patients. Il comprend cinq articles :

– l’article 30, qui répond à une attente ancienne des professions paramédicales en créant un exercice en pratique avancée ;

– l’article 31, qui permettra la délégation d’actes aux sages-femmes concernant deux champs particuliers : l’interruption volontaire de grossesse (IVG) médicamenteuse et la vaccination ;

– l’article 32, qui prévoit la possibilité pour les pharmaciens de participer à la mise en œuvre de la politique vaccinale ;

– l’article 33, qui renforcera l’arsenal de lutte anti-tabac en permettant aux médecins du travail, aux infirmiers et aux sages-femmes de prescrire des substituts nicotiniques ;

– enfin, l’article 34, qui met en place des outils de lutte contre les dérives du recours à l’intérim médical.

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Article 30
(art. L. 4301-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Instauration d’un exercice en pratique avancée
pour les professions paramédicales

L’évolution des besoins sanitaires de la population impose l’adaptation de l’offre des professions de santé. Cela suppose d’enrichir les formations, mais aussi de reconnaître le fruit de certaines pratiques et de moderniser leur statut. C’est à cette aune que cet article propose de définir la notion de « pratique avancée » d’une profession paramédicale. Cette démarche permettra par exemple la création du métier d’infirmier clinicien en cancérologie, tel qu’annoncé par le Président de la République lors de l’adoption du troisième Plan cancer.

I. IL EST NÉCESSAIRE DE CRÉER UN STATUT INTERMÉDIAIRE ENTRE LES PROFESSIONS PARAMÉDICALES ET MÉDICALES AFIN DE MIEUX ADAPTER L’OFFRE AUX BESOINS DES PATIENTS.

1.  Le constat d’un besoin en professions de santé d’un niveau de formation équivalant au master

Les besoins médicaux évoluent. La pratique médicale aussi. Dans un nombre de cas croissants, les personnels paramédicaux sont conduits à se spécialiser et à « pousser » leur niveau de pratique et d’aptitude au-delà du niveau de qualification issu de leur formation initiale. Il s’agit, grosso modo, de répondre à un besoin en personnels de santé dont la qualification serait située entre les formations à bac + 3/4 des paramédicaux et celles à bac + 8 des médecins.

La notion de pratique avancée repose sur l’identification d’un métier socle dont le champ de compétence se trouverait élargi pour réaliser des tâches plus spécialisées. Il s’agirait notamment des activités suivantes : formulation d’un diagnostic, réalisation d’une analyse clinique, établissement d’une prescription, accomplissement d’activités d’orientation ou de prévention. Elle concerne les auxiliaires médicaux, un ensemble étendu de professions de santé, définies par le livre III du code de la santé publique et regroupe les infirmiers (titre I), les masseurs-kinésithérapeutes, les orthoprothésistes et pédicures-podologues (titre II), les ergothérapeutes et psychomotriciens (titre III), les orthophonistes et orthoptistes (titre IV), les manipulateurs d’électro-radiologie médicale (titre V), les audioprothésistes, opticien-lunetiers, prothésistes et orthésistes pour l’appareillage des personnes handicapées (titre VI) et les diététiciens (titre VII). La situation de spécialisation de l’exercice de leur profession est désormais fréquente dans les faits et concerne des domaines très différents.

C’est à l’appui d’exemples que la notion de « pratique avancée » peut certainement être le mieux appréhendée. Le Président de la République l’a ainsi mise en avant lors de la présentation du troisième Plan cancer (2014-2019) : partant du constat que le suivi des patients atteints de cancer demandait une expertise particulière et mobilisant les infirmiers dans la durée, il a ainsi été proposé de créer un statut d’infirmier clinicien en cancérologie, destiné à répondre à ce besoin précis. Le Plan prévoit ainsi dans son quatrième objectif de créer ce statut « pour faire face aux besoins nouveaux, notamment en matière de suivi des chimiothérapies orales ou de coordination des parcours ». Ces infirmiers seront ainsi « habilités à assurer, sous certaines conditions, la prescription protocolisée d’examens de suivi des traitements, de traitements complémentaires et de support, ainsi que la reconduction ou l’adaptation de traitements spécifiques ».

Le déploiement des premières formations est prévu pour la rentrée universitaire 2016, ce nouveau métier ne se substituant pas aux spécialisations en cancérologie à partir du métier socle d’infirmier qui feront toujours l’objet de formations spécifiques. La reconnaissance de ce métier nouveau sera soumise à une durée d’expérience ainsi qu’à une formation universitaire de niveau master adaptée aux compétences requises.

Les auxiliaires médicaux qui seront formés en pratique avancée auront vocation à exercer dans le cadre d’équipes de soins. Leur activité se déploiera en lien avec les médecins traitants pour répondre plus spécifiquement aux besoins des patients atteints d’affections chroniques.

2.  Des propositions précises formulées dès 2011 et intégrées à la stratégie nationale de santé qui invitent à compléter le code de la santé publique

Le rapport au Gouvernement de MM. Laurent Hénart, Yvon Berland et Mme Danielle Cadet en janvier 2011 (137), relatif aux métiers en santé de niveau intermédiaire a dressé le constat d’une organisation de la santé en France où les professions et les professionnels sont soumis à un système rigide et cloisonné. La notion de « métier » organise précisément l’activité de chacun. Ils relèvent que pour la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, devenue direction générale de l’offre de soins (DGOS) « une personne à un moment donné de sa vie, est positionnée sur un métier et un seul » et que le code de la santé établit une typologie rigide des professions de la santé, distinguant professions médicales, professions de la pharmacie, et professions d’auxiliaires médicaux.

Ces professions se caractérisent par une situation réglementaire et des évolutions démographiques hétérogènes. L’environnement dans lequel elles évoluent est en profonde mutation du fait de l’évolution de la population, de son vieillissement, de l’accroissement de la technicité ainsi que de la dimension technologique des soins.

En outre, les rapporteurs relèvent que la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) a fait progresser l’éducation thérapeutique du patient, a modifié les bases de certaines rémunérations et a rénové les cadres de coopération entre les professionnels de santé. Ces changements de cadres ont favorisé le besoin d’affirmer des métiers nouveaux, à l’interface entre les métiers médicaux et paramédicaux d’autant que ces évolutions s’inscrivent, parallèlement, dans la structuration des études de médecine selon le format LMD.

Le rapport a formulé un certain nombre de propositions, parmi lesquelles le développement des métiers socles (notamment par la mise à jour des portefeuilles et champs d’action associés) ; la construction de métiers nouveaux à partir de ces métiers socles ; la valorisation des parcours professionnels, la mise en place de filières universitaires et l’affirmation de la compétence de l’État sur l’ensemble des questions de formation. Ces travaux ont directement alimenté la stratégie nationale de santé (SNS) adoptée en 2013.

Extrait des objectifs de la SNS « Innover pour garantir la pérennité du système
de santé » relatif à l’exercice en pratique avancée

La SNS synthétise le constat d’un besoin fort de reconnaître l’exercice en pratique avancée et conclut à la nécessité de modifications législatives.

« Enjeux :

Créer l’exercice en pratiques avancées en soins pour l’ensemble des professions paramédicales permettant notamment la reconnaissance du métier d’infirmier clinicien comme le recommande le plan Cancer 3 (reconnaissance du métier d’infirmier clinicien).

Mieux prendre en charge les maladies chroniques, renforcer les capacités du système de santé à faire face au vieillissement de la population dans une logique de prévention et de soins de proximité.

Participer à la lutte contre les inégalités d’accès aux soins des concitoyens et assurer la pérennité du système d’assurance maladie solidaire.

Propositions :

Inscription dans la loi de la notion de pratique avancée d’une profession de santé paramédicale : l’exercice en pratique avancée se définit par des missions de santé qui peuvent comporter la formulation d’un diagnostic, la réalisation d’une analyse clinique, l’établissement de prescription ou l’accomplissement d’activité d’orientation ou de prévention. »

II. L’INSTAURATION D’UN EXERCICE EN PRATIQUE AVANCÉE : UN PROGRÈS LÉGISLATIF DONT L’AMPLEUR DÉPENDRA FORTEMENT DES DÉCLINAISONS RÉGLEMENTAIRES

Le de l’article insère un titre préliminaire libellé « Titre préliminaire Exercice en pratique avancée » au livre III de la quatrième partie « Auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture et ambulanciers ». Il concerne ainsi l’ensemble des professions paramédicales.

Ce titre nouveau est composé d’un article unique. Il précède le titre Ier « Profession d’infirmier ou d’infirmière ».

L’article L. 4301-1 nouveau rassemble l’ensemble des dispositions du titre préliminaire relatif à l’exercice en pratique avancée. Son I définit cette notion. Il s’adresse aux auxiliaires médicaux (cf. définition supra) et exerçant cette activité au sein d’une équipe de soins. Cette équipe de soins est définie à l’article L. 1110-12, qui précise : « Les modalités d’exercice de ces équipes seront définies par un décret en Conseil d’État pris après l’avis de l’Académie de médecine. »

Votre rapporteur proposera d’élargir cette demande d’avis aux représentants des professionnels concernés par chaque évolution envisagée.

Leur activité ne pourra intervenir que dans un champ limitativement défini par l’article L. 4301-1 et qui sont de trois ordres. Seront concernées :

– les missions d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage (1°) ;

– celles d’évaluation clinique, de diagnostic, ainsi que certains actes techniques ou la surveillance clinique ou para-clinique (2°) ;

– celles de prescription de produits de santé non soumis à prescription médicale obligatoire, de prescription d’examens complémentaires et de renouvellement ou adaptation de prescriptions médicales (3°).

Il est positif de raisonner par missions afin de ne pas prolonger les difficultés rencontrées aujourd’hui qui découlent d’une approche trop cloisonnée par métiers.

Le même décret définit les actes ouverts pour chaque type d’auxiliaire médical, en précisant les domaines d’intervention en pratique avancée, les activités praticables dans chacun des domaines, ainsi que, le cas échéant, les types d’actes pouvant être réalisés de façon autonome par le professionnel.

D’après les informations communiquées à votre rapporteur, les déclinaisons réglementaires devraient permettre la définition de ces métiers nouveaux par étapes. Quatre ou cinq métiers seraient identifiés dans un premier temps, parmi lesquels celui annoncé par le Président de la République d’infirmier clinicien en cancérologie. Le domaine de compétence, la durée d’exercice requise ainsi que la nature des actes autorisés seront définis à la suite d’une concertation avec les professionnels concernés.

Ce champ doit être suffisamment large pour permettre une forme de médicalisation de ces professions. Il n’y a pas lieu de craindre une mauvaise concurrence avec les professions médicales, la technicité croissante des besoins entraînant en effet une spécialisation vers le haut de l’ensemble des professions de santé. À terme, près de 3 % des effectifs d’auxiliaires médicaux devraient être concernés.

Le II de l’article L. 4301-1 nouveau soumet l’exercice en pratique avancée à une durée minimale d’exercice de la profession paramédicale ainsi qu’à l’obtention d’un diplôme de formation en pratique avancée délivré par une université habilitée et décrit au III du même article.

Les personnes ayant obtenu ce titre et souhaitant exercer en pratique avancée seront tenues de se faire enregistrer auprès d’un organisme que le ministre chargé de la santé désignera à cette fin.

Les spécificités du diplôme et de son mode d’obtention tout comme les caractéristiques de la pratique préalable requise ainsi que de la reconnaissance mutuelle des diplômes sont déterminées par décret.

Le III précise les dispositions du II relatives à la formation universitaire en prévoyant que l’université doit avoir été habilitée à cet effet. Les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé devront prendre conjointement un arrêté déterminant un référentiel de formation qui servira de base à l’examen du volet « exercice en pratique avancée » dans le cadre de l’accréditation de l’offre de formations de l’établissement candidat.

Le IV prévoit quant à lui que les règles professionnelles et éthiques de chaque profession ainsi que celles communes à l’ensemble des professionnels de santé demeurent applicables. Si des dérogations devaient être envisagées, elles ne pourraient être décidées que sur le fondement d’un décret pris en Conseil d’État et devraient notamment se conformer aux règles figurant aux articles L. 1110-4 (respect à la vie privée du patient et droit au secret des informations le concernant) et L. 1111-2 (droit à l’information du patient sur son état de santé) du même code.

Le deuxième alinéa de ce IV prévoit que « le professionnel agissant dans le cadre des pratiques avancées est responsable des actes qu’il réalise dans ce cadre ». Autrement, le fait même que ces responsabilités nouvelles soient exercées dans le cadre d’une équipe de soins n’exonère en rien le professionnel de sa responsabilité individuelle. Si ces dispositions peuvent sembler à première vue superfétatoires, elles permettent de rappeler avec la plus grande clarté que l’exercice en pratique avancée qu’instaure l’article 30 ne crée pas une nouvelle profession ni ne développe une nouvelle définition des professions paramédicales ou de leur art : il ne s’agit ici que d’en élargir le périmètre d’exercice.

Le comporte une mesure de mise en cohérence de l’article L. 4161-1 du code de la santé publique. Cet article, qui porte sur l’exercice illégal des professions médicales, prévoit à son dernier alinéa des dispositions permettant de soustraire de l’incrimination d’exercice illégal de la médecine certaines catégories telles que les étudiants en médecine ou l’accomplissement d’actes dans des cas particuliers tels que les « infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides d’un médecin ». Il est ici proposé d’y intégrer le cas des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancées : cette précision vise à rappeler que les professionnels reconnus comme praticiens avancés ne sont pas des médecins, dont la formation est différente, mais bien des auxiliaires médicaux.

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La Commission des affaires sociales a adopté cet article moyennant un amendement du Gouvernement. Il a prévu que l’exercice en pratique avancée se déroule dans le cadre d’une équipe de soins en établissements de santé, coordonnée par un médecin. Un décret en Conseil d’État déclinera les domaines d’intervention ainsi que les conditions et les règles de l’exercice en pratique avancée. Il a été complété par un sous-amendement de votre rapporteur, qui prévoit la consultation pour avis des représentants des professionnels concernés avant la publication de ce décret.

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La Commission examine les amendements identiques AS489 de M. Dominique Tian, AS578 de M. Fernand Siré et AS737 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Ces amendements sont partiellement satisfaits : avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1505 du Gouvernement, qui fait l’objet du sous-amendement AS1706 du rapporteur.

Mme la ministre. Cet amendement porte sur la pratique avancée qui a donné lieu à bien des inquiétudes : il fixe un cadre à celle-ci pour l’ensemble des professions paramédicales et indique qu’elle s’exerce au sein d’équipes pluriprofessionnelles dont le chef est bien le médecin traitant.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Nous souhaitons associer les représentants des professionnels de santé concernés par l’exercice en pratique avancée, et non pas seulement l’Académie nationale de médecine, au choix des règles et conditions qui régiront ce nouveau cadre d’activité.

La Commission adopte le sous-amendement AS1706, puis l’amendement AS1505 sous-amendé.

En conséquence, les amendements AS601 de M. Bernard Accoyer, AS1421 du rapporteur, AS602, AS603 et AS604 de M. Bernard Accoyer, AS1629 et AS1630 du Gouvernement, et AS712 de M. Marc Le Fur tombent.

La Commission adopte enfin l’article 30 modifié.

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Article 30 bis
(art. L. 313-26 du code de l’action sociale et des familles)

Délégation d’actes de soins infirmiers à des professionnels
des établissements et services médico-sociaux

La Commission des affaires sociales a adopté un amendement portant création d’un article additionnel après l’article 30. Il prévoit qu’un décret viendra préciser les conditions dans lesquelles des actes de soins infirmiers peuvent être délégués à des professionnels des établissements et services médico-sociaux.

Il complète à cette fin l’article L. 313-26 du code de l’action sociale et des familles qui prévoit notamment que « l’aide à la prise des médicaments peut […] être assurée par toute personne chargée de l’aide aux actes de la vie courante dès lors que, compte tenu de la nature du médicament, le mode de prise ne présente ni difficulté d’administration ni d’apprentissage particulier ».

Cette disposition permettra d’accroître la diversité des tâches effectuées par des personnels non-soignants en cas d’absence de médecins ou d’infirmiers. Le décret précisera le champ des possibilités de délégation ainsi que les conditions de formation et d’information des personnels.

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La Commission examine l’amendement AS872 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Nous proposons qu’« un décret précise les conditions dans lesquelles les actes de soins infirmiers peuvent être délégués à des professionnels des établissements et services médico-sociaux mentionnés à l’article L. 3121 ».

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 30 bis

La Commission examine l’amendement AS288 de M. Éric Alauzet.

M. Jean-Louis Roumegas. Une concertation régulière du Haut Conseil des professions paramédicales permettrait de régler la question du niveau de formation et de la reconnaissance de celle-ci.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’avis est défavorable : le Haut Conseil des professions paramédicales tient déjà cette concertation annuelle.

L’amendement est retiré.

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Article 30 ter
(art. L. 4393-8 à L. 4393-15 [nouveaux] et art. L. 4393-4 [nouveau] du code de la santé publique)

Création du statut d’assistants dentaires

La Commission des affaires sociales a adopté un amendement portant création d’un statut d’assistant dentaire au sein du code de la santé publique.

Cet article additionnel insère un chapitre III bis relatif aux « Assistants dentaires » au sein du titre IX du livre III de la quatrième partie du code. Il reprend le projet de création de ce statut, adopté à l’article 14 de la loi n°2011-940 du 10 août 2011, mais censuré par le Conseil constitutionnel au motif qu’il constituait un cavalier législatif.

Le dispositif adopté définit la profession d’assistant dentaire, qui exerce sous la responsabilité et le contrôle d’un chirurgien-dentiste ou d’un médecin. Peuvent exercer cette profession les titulaires des titres de formation spécialisés, dont les modalités d’accès, de délivrance ainsi que le contenu sont définies par voie réglementaire. L’arrêté du ministre chargé de la santé est pris après avis conforme d’une commission comprenant des représentants de l’État et des partenaires sociaux représentant les chirurgiens-dentistes et des assistants dentaires. L’exercice est également ouvert, après avis de cette même commission :

– aux titulaires de titres ou de certificats spécifiques, également définis par voie réglementaire ;

– aux ressortissants de l’Union européenne ne répondant pas aux conditions de détention d’un des diplômes ou certificats mentionnés précédemment, mais disposant d’un diplôme équivalent délivré dans un autre pays de l’Union ou au titre de leur expérience professionnelle.

Il permettra aux assistants dentaires établis dans les autres pays de l’Union européenne d’exercer leur art en France de manière temporaire ou occasionnelle. Lors de la délivrance de l’autorisation d’exercice ou de la déclaration de prestation de services, l’assistant dentaire devra posséder les connaissances linguistiques nécessaires à l’exercice en France.

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La Commission examine les amendements identiques AS1029 de M. Arnaud Robinet et AS1282 de Mme Dominique Orliac.

M. Élie Aboud. Le rôle des assistants dentaires, qui ont une réelle expertise, est souvent méconnu. Il est proposé de les reconnaître comme des professionnels de santé.

Mme Dominique Orliac. Il s’agit de faire évoluer la profession d’assistant dentaire et de préparer le métier de demain.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les amendements à l’unanimité.

L’amendement AS1474 de M. Denys Robiliard est retiré.

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Article 31
(art. L. 2212-1, L. 2212-2, L. 2212-3, L. 2212-5 à L. 2212-8, L. 2212-10, L. 2213-2, L. 2222-2, L. 4151-1 et L. 4151-2 du code de la santé publique)

Délégation d’actes en faveur des sages-femmes en matière d’IVG médicamenteuse et de politique vaccinale

Cet article propose d’accroître la capacité des sages-femmes à prescrire et réaliser des actes médicaux, à savoir les interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses et la vaccination.

1.  Renforcer les missions des sages-femmes en matière d’IVG

a.  L’implication des sages-femmes dans les IVG médicamenteuses

D’après les données fournies par le Gouvernement, près d’une femme sur trois en métropole et d’une femme sur deux outre-mer aura recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) au cours de sa vie. Chaque année, plus de 14 pour mille des femmes enceintes y ont recours, un taux qui reste stable depuis 2006, avec plus de 220 000 actes chaque année.

L’IVG peut être médicamenteuse ou non médicamenteuse. Le recours à l’IVG médicamenteuse est en développement, représentant 47 % de celles réalisées en établissements de santé et 12 % de celles réalisées en ville. Cette pratique se diffuse progressivement dans les centres de santé ainsi que dans les centres de planification ou d’éducation familiales.

Les deux méthodes d’IVG

1) La méthode chirurgicale

Cette méthode peut être pratiquée jusqu’à la 12e semaine de grossesse. Une fois le col utérin dilaté, l’embryon est aspiré à l’aide d’une canule. L’intervention peut être pratiquée sous anesthésie locale ou générale. Après l’intervention, l’hospitalisation est généralement inférieure à 12 heures.

2) La méthode médicamenteuse

Cette méthode est autorisée jusqu’à la 5e semaine de grossesse, soit la 7e semaine après le 1er jour des dernières menstruations. La première prise de médicaments consiste à interrompre la grossesse. Une deuxième prise provoque les contractions et l’éjection de l’embryon.

Dans les centres agréés, elle peut être pratiquée jusqu’à la 7e semaine de grossesse

Malgré ces dynamiques, le Gouvernement constate la persistance d’une inégalité d’accès à ce dispositif, le taux de recours à l’IVG étant particulièrement variable selon les régions. Il propose donc de mieux accompagner les femmes souhaitant recourir à l’IVG en accroissant le nombre des professionnels de santé capables de réaliser directement ces actes.

Permettre aux sages-femmes de réaliser l’IVG médicamenteuse constituerait une mesure de simplification qui ne modifie pas les conditions de mise en œuvre de l’IVG. Elle apporte en revanche une réponse aux difficultés démographiques rencontrées chez les gynécologues cliniciens.

b.  Un élément de réponse aux évolutions de la démographie gynécologique

L’étude d’impact rappelle que les 18 000 sages-femmes constituent une offre sanitaire étendue et relativement accessible. Leur nombre croît de façon supérieure à celui des femmes en âge de procréer, pour atteindre un ratio de 126 sages-femmes pour 100 000 femmes de 15 à 49 ans. En particulier, le nombre de sages-femmes en secteur libéral a crû de 7 % depuis 2011.

Or, dans le même temps, la démographie des gynécologues connaît depuis plusieurs années des évolutions préoccupantes, au point de nourrir une véritable problématique d’accès aux soins et, s’agissant précisément de l’IVG, d’accès au droit.

Le nombre de gynécologues médicaux en France était évalué à 2 071 par l’ordre des médecins en 2009, un chiffre relativement stable depuis 2006 (138). Au 31 décembre 2009, les gynécologues médicaux libéraux représentent 32,2 % de l’effectif de l’ensemble des gynécologues libéraux, qui s’élève à 5 494. La moyenne d’âge de la profession atteint un niveau élevé et le renouvellement à l’horizon du départ à la retraite est problématique (139). Le diagramme ci-après illustre cette situation particulièrement préoccupante.

Cette situation s’explique par de nombreux facteurs, dont le faible niveau de rémunération des actes ainsi que le recrutement insuffisant au cours des dernières années, illustrées par le tableau ci-après.

De ce fait, la densité moyenne de gynécologues est de 7,6 médecins pour 100 000 femmes de 15 ans ou plus. Les gynécologues médicaux relèvent que « la région Aquitaine, avec une densité de 12,5 gynécologues médicaux pour 100 000 femmes de 15 ans ou plus, est la région la mieux dotée, suivie par l’Île-de-France (12) et Midi-Pyrénées (10,3). Parmi les régions les moins bien dotées, on trouve les DOM (1,1), l’Alsace (2,2) et la Bourgogne 3,1. À l’exception de la Corse, les régions du Sud sont les mieux dotées ». La carte ci-après vient confirmer le constat dressé par le Gouvernement.

Le constat de ces inégalités justifie pleinement les mesures proposées par le Gouvernement. La délégation d’actes ne résout pas en elle-même les difficultés démographiques de la profession des gynécologues, mais, pour ceux d’entre eux pratiquant les IVG, elle devrait permettre un allégement des tâches au profit, on peut l’espérer, du traitement des cas les plus complexes. Le Gouvernement apporte à cette occasion une première réponse aux difficultés d’accès aux structures pratiquant l’IVG rencontrées dans un nombre croissant de régions.

2.  Mobiliser les sages-femmes dans la politique vaccinale

La stratégie nationale de santé dresse également le constat d’une insuffisante couverture vaccinale de la population française. Pour y remédier, il est proposé de faciliter la vaccination en permettant à davantage de professionnels de santé de la pratiquer ou de la prescrire, simplifiant ainsi le parcours des patients et les encourageant à y souscrire. C’est le sens des développements de l’article 32 qui permet aux pharmaciens d’officine de procéder directement à certaines vaccinations mais aussi de la deuxième partie de cet article qui prévoit de permettre aux sages-femmes de participer plus largement à la politique vaccinale. Ce choix est d’autant plus logique que, outre le suivi des femmes enceintes, les sages-femmes assurent le suivi gynécologique de prévention ainsi que les consultations de contraception des femmes ne présentant pas de pathologie particulière. Il est nécessaire en particulier de promouvoir la vaccination chez les adolescents afin de mieux protéger les individus et notamment les plus vulnérables (les nourrissons) mais également de développer une véritable immunité de groupe.

En l’état du droit les sages-femmes sont autorisées à pratiquer la vaccination sans davantage de précisions. Cela limite de fait leur compétence aux femmes enceintes et jeunes mamans ainsi qu’au nourrisson. L’objectif est de profiter du parcours de santé de la femme enceinte pour favoriser également la vaccination des proches de la patiente, ce qui devrait toucher en particulier les jeunes adultes.

L’étude d’impact jointe au projet de loi souligne l’intérêt particulier qu’il y a à créer un environnement sanitaire particulièrement protégé autour du nouveau-né (le cocooning) : la prévention vaccinale de l’entourage le protège des maladies infectieuses contre lesquelles il ne peut être vacciné du fait de son âge, telles que la coqueluche.

3.  Le projet de loi renforce significativement les compétences et le rôle des sages-femmes vis-à-vis des femmes enceintes et de leurs proches

a.  Permettre aux sages-femmes de procéder aux seules IVG médicamenteuses.

Cette opération ne présente pas de complexité juridique particulière : il s’agit de compléter les dispositions relatives à l’IVG pour l’ouvrir aux sages-femmes, en précisant lorsque cela est nécessaire, que la pratique autorisée par la loi est limitée aux seules IVG médicamenteuses.

L’ensemble des dispositions de cet article modifient le code de la santé publique.

En I, il rassemble des dispositions modifiant le chapitre II du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code de la santé, c’est-à-dire les dispositions du code dévolues à l’interruption pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse.

Le modifie l’article L. 2212-1, un article qui prévoit le droit de toute femme à demander « à un médecin » la fin de sa grossesse. L’interruption ne peut être pratiquée qu’avant la fin de la douzième semaine de grossesse. L’objet de cet alinéa est de prévoir que la femme puisse demander cette interruption à un médecin « ou à une sage-femme ».

Le modifie quant à lui l’article L. 2212-2. Il ouvre la pratique de la seule IVG médicamenteuse aux sages-femmes (a) puis prévoit la possibilité qu’elle soit pratiquée dans le cadre d’une convention conclue entre une sage-femme et un établissement de santé, public ou privé, au même titre que pour les praticiens (b).

Le porte sur l’article L. 2212-3. Il en modifie les trois alinéas pour adjoindre le mot sages-femmes à chaque mention des médecins. Il s’agit ici de les inclure dans le champ des diligences que doit commettre le médecin sollicité pour réaliser une IVG, à savoir :

– d’informer la patiente des méthodes existant pour l’interruption de la grossesse – médicamenteuse ou chirurgicale – ainsi que des risques encourus (a) ;

– de lui remettre un dossier guide mis à jour au moins une fois par an comportant notamment le rappel des dispositions législatives décrivant le droit à l’IVG avant la fin de la 12e semaine de grossesse, la liste et les adresses des centres de planification ou d’éducation familiale, des services sociaux ou autres organismes agréés où bénéficier d’une consultation préalable ainsi que les coordonnées des établissements où sont réalisées les IVG (b).

Au même titre que pour les médecins, les agences régionales de santé (ARS) assurent la réalisation ainsi que la diffusion des dossiers guides destinés à l’usage des sages-femmes (c).

Le insère quant à lui la mention de la sage-femme au côté du médecin à l’article L. 2212-5, puis en remplaçant la mention du médecin (« il ») par celle du « médecin ou de la sage-femme ». Il s’agit ici de reconnaître le rôle de la sage-femme dans l’étape suivante de l’IVG, celle où la femme enceinte confirme par écrit son choix de recourir à l’IVG. Il sera ainsi prévu que « si la femme renouvelle, après les consultations prévues aux articles L. 2212-3 et L. 2212-4, sa demande d’interruption de grossesse, le médecin ou la sage-femme doit lui demander une confirmation écrite ; le médecin ou la sage-femme ne peut accepter cette confirmation qu’après l’expiration d’un délai d’une semaine suivant la première demande de la femme, sauf dans le cas où le terme des douze semaines risquerait d’être dépassé ».

Le refonde la rédaction du premier alinéa de l’article L. 2212-6 qui décrit l’étape suivante de l’IVG, suivant la confirmation. En l’état, il est prévu que le médecin puisse pratiquer lui-même l’interruption. À défaut, il doit rendre à la patiente sa demande et délivrer un certificat destiné au confrère choisi par elle pour pratiquer l’IVG attestant qu’il s’est conformé aux démarches prévues par la loi.

La nouvelle rédaction reprend les termes et dispositions de la rédaction en vigueur. Il est cependant proposé une nouvelle rédaction afin d’alléger la rédaction telle que modifiée par l’insertion des mentions de la sage-femme.

Le porte sur la rédaction de l’article L. 2212-7 qui décrit les conditions juridiques de mise en œuvre de l’IVG pour les mineures non émancipées. À l’image du , il est proposé d’insérer la mention de la sage-femme. Ainsi, au même titre que le médecin, la sage-femme :

– prend connaissance dans le dossier de demande d’IVG du consentement de l’un des titulaires de l’autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal (a) ;

– doit s’efforcer, si la femme mineure non émancipée désire garder le secret et dans l’intérêt de celle-ci, d’obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l’autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite (b).

Le poursuit cette démarche en insérant la mention de la sage-femme à l’article L. 2212-8. Cet article garantit le respect de la « clause de conscience » des médecins et personnels de santé. Ceux-ci peuvent refuser de pratiquer l’IVG mais doivent alors en informer immédiatement la personne demanderesse.

La clause de conscience

Introduite par la loi Veil, cette clause prévoit qu’un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l’article L. 2212-2.

Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de concourir à une interruption de grossesse. Un établissement de santé privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées dans ses locaux.

Le porte sur l’article L. 2212-10 qui prévoit que toute interruption de grossesse doit faire l’objet d’une déclaration (établie par le médecin et adressée par l’établissement où elle est pratiquée) au médecin de l’agence régionale de santé désigné par le directeur général de l’agence, cette déclaration ne faisant aucune mention de l’identité de la femme. Il est ici proposé d’astreindre la sage-femme ayant pratiqué l’IVG à cette même disposition.

Enfin, le modifie l’article L. 2213-2 : il s’agit de rappeler que si le régime juridique des IVG décrit dans le I s’applique également aux IVG pratiquées pour motif médical, celles-ci ne peuvent l’être que par des médecins. Les dispositions relatives aux sages-femmes introduites par le présent article ne seront donc pas applicables dans ce cas de figure.

Le II modifie quant à lui le 2° de l’article L. 2222-2 du code de la santé publique afin de faire peser sur les sages-femmes les sanctions encourues en cas de pratique illégale de l’IVG.

L’article L. 2222-2 du code de la santé publique

« L’interruption de la grossesse d’autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende lorsqu’elle est pratiquée, en connaissance de cause, dans l’une des circonstances suivantes :

1° Après l’expiration du délai dans lequel elle est autorisée par la loi, sauf si elle est pratiquée pour un motif médical ;

2° Par une personne n’ayant pas la qualité de médecin ;

3° Dans un lieu autre qu’un établissement d’hospitalisation public ou qu’un établissement d’hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la loi, ou en dehors du cadre d’une convention conclue selon les modalités prévues à l’article L. 2212-2.

Cette infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende si le coupable la pratique habituellement.

La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines. »

Le III modifie l’article L. 4151-1 du code de la santé publique : il s’agit ici de mettre en conformité avec les dispositions du présent article celles régissant l’exercice de la profession de sage-femme. L’insertion proposée ici permet d’inclure dans cet exercice la possibilité de réaliser outre des consultations « de contraception et de suivi gynécologique de prévention » (140), des consultations d’IVG par voie médicamenteuse.

Le IV propose quant à lui des dispositions tout à fait différentes : elles visent à accroître le rôle des sages-femmes dans la politique de vaccination de la population. Pour ce faire, il est proposé une nouvelle rédaction de l’article L. 4151-2 du code de la santé publique.

En l’état, il est seulement prévu que « les sages-femmes sont autorisées à pratiquer les vaccinations dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé », ce qui limite cet exercice au seul bénéfice des femmes enceintes ou ayant accouché et aux nourrissons.

La nouvelle rédaction propose de développer cet article en trois alinéas.

Le premier rappelle que les sages-femmes peuvent pratiquer la vaccination de la femme et du nouveau-né.

Le second les autorise à pratiquer ces vaccinations, en vue de protéger le nouveau-né, sur les personnes « qui vivent régulièrement dans son entourage ou assurent sa garde ». C’est par décret que le Gouvernement précisera l’étendue de cette disposition. Il a néanmoins précisé que les termes « les personnes qui vivent régulièrement dans son entourage ou assure sa garde » peuvent couvrir le père du nouveau-né, les frères et sœurs, les autres enfants d’une famille recomposée ou encore les gardes d’enfants. Le Haut Conseil de la santé publique s’intéresse de près à cette stratégie du cocooning et pourrait recommander d’en élargir le champ à d’autres maladies. Le même décret devra en outre prévoir les conditions dans lesquelles les sages-femmes transmettent au médecin traitant les informations relatives à ces vaccinations.

Le troisième alinéa reprend la mention en vigueur de l’arrêté du ministre de la santé déterminant la liste des vaccinations éligibles à ce dispositif. Le périmètre éligible ne devrait pas varier par rapport à celui en vigueur, à savoir λεσ ϖaccins sous forme monovalente ou associés contre les pathologies suivantes : tétanos, diphtérie, poliomyélite, coqueluche (vaccin acellulaire), rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, grippe, affections liées au papillomavirus humain et infections invasives par le méningocoque C.

*

Au cours de son examen, la Commission a adopté cet article moyennant plusieurs amendements. Le premier prévoit que la sage-femme pourra effectuer l’examen postnatal « à condition d’adresser la femme à un médecin en cas de situation pathologique constatée », que la grossesse ou l’accouchement aient été eutociques ou non. Un deuxième a prévu qu’un décret en Conseil d’État détermine le contenu de la formation requise pour pratiquer les IVG par voie médicamenteuse. Enfin, un troisième amendement, présenté par le Gouvernement, a quant à lui circonscrit le champ de compétence vaccinale des sages-femmes en supprimant la mention des personnes assurant la garde du nouveau-né.

*

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS490 de M. Dominique Tian.

La Commission examine l’amendement AS545 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis favorable à cet amendement qui permet aux sages-femmes d’effectuer un examen post-natal en l’absence de situation pathologique.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Puis elle est saisie de l’amendement AS749 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Dans le cadre des nouvelles compétences dévolues aux sages-femmes, il est nécessaire de faire évoluer la formation initiale appropriée afin que les intéressées puissent établir le diagnostic avant de pratiquer une interruption de grossesse par voie médicamenteuse.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis d’accord avec Mme Fraysse.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS1118 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Cet amendement vise à autoriser les sages-femmes à pratiquer des vaccinations sur la femme enceinte, l’enfant et leur entourage.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. J’y suis défavorable. Il serait plus sage de renvoyer à un décret le soin de définir la notion d’entourage, la loi risquant d’être trop restrictive.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1427 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement limite le nombre des personnes susceptibles d’être vaccinées par les sages-femmes aux seules personnes vivant avec le nourrisson.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS1177 de Mme Maud Olivier.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Il convient de faciliter l’accès des femmes à l’information relative à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), car, comme le fait remarquer le rapport du Conseil économique, social et environnemental de 2010, ainsi que le rapport du Haut Conseil à l’égalité de 2013, les femmes sont très peu informées sur les différentes méthodes existantes.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je partage votre préoccupation, mais la rédaction proposée pourrait être améliorée. Je vous suggère le retrait de l’amendement au profit d’une insertion dans le premier alinéa de l’article L. 2212-1 du code de l’action sociale et des familles.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 31 modifié.

Après l’article 31

La Commission examine l’amendement AS543 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Il est proposé que la sage-femme puisse dispenser des soins aux parturientes mineures n’ayant pas le consentement de l’autorité parentale. Aujourd’hui, seuls les médecins sont autorisés à le faire. Or cela est inadapté à la situation des intéressées.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. J’y suis défavorable, car l’amendement est satisfait par la rédaction de l’amendement AS1485 qui prévoit la possibilité de déroger au consentement parental.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS544 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement propose d’appliquer ce qui se fait tous les jours en cas de grossesse ou de suites de couches pathologiques : la sage-femme peut mettre en œuvre la prise en charge prescrite par un médecin qu’elle informe et qui intervient en cas de besoin.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Avis défavorable. Dans la rédaction actuelle, la sage-femme peut prodiguer des soins en cas de grossesse ou de suites de couches pathologiques. Ajouter une information des médecins « si nécessaire » n’apporte rien.

L’amendement est retiré.

*

Article 32
(art. L. 5125-1-1 A et L. 5125-1-1 B [nouveau] du code de la santé publique)

Participation des pharmaciens à la politique vaccinale

Afin de lutter contre le recul de la couverture vaccinale, cet article propose d’autoriser les pharmaciens d’officine à pratiquer des actes de vaccination, sur la base du volontariat et dans des conditions déterminées par le pouvoir réglementaire. Il complète les mesures proposées à l’article 31 concernant les sages-femmes.

1.  Il est nécessaire de renforcer la couverture vaccinale des Français

Si la couverture vaccinale des Français est globalement satisfaisante chez l’enfant, la situation de l’adulte donne aujourd’hui des signes de lente dégradation. Ainsi, en 2013, l’Institut national de veille sanitaire (InVS) s’est notamment inquiété de la stagnation des ventes de vaccins en ce qui concerne l’ensemble rougeole-rubéole-oreillon et « des vaccinations très insuffisantes contre l’hépatite B, le papillomavirus chez l’adolescent et la grippe chez les sujets âgés ».

La vaccination est réalisée par les médecins, dont les médecins du travail, infirmiers (depuis 2004), sages-femmes (pour certains vaccins) ou encore les centres publics de vaccination. Malgré le nombre de ces acteurs, le parcours vaccinal souffre souvent d’une image compliquée en ambulatoire : le patient doit se faire prescrire un vaccin, se rendre dans une pharmacie pour se le faire délivrer, puis retrouver son médecin traitant pour se faire vacciner.

Dans ce contexte, relever le niveau de couverture vaccinale suppose avant tout de renforcer l’offre de vaccination de proximité et de simplifier le parcours de vaccination des Français. Les pharmacies d’officine représentent un réseau sanitaire de proximité unique, accueillant entre trois et quatre millions d’usagers au quotidien, qu’ils viennent pour la délivrance de produits de santé ou pour de simples conseils.

Aux États-Unis, face au constat d’un recul de la couverture vaccinale les autorités ont fait le choix d’autoriser les pharmaciens d’officine à pratiquer de façon encadrée la vaccination. Elles ont constaté des progrès réels dans la couverture de la population, cette mesure ayant permis d’attirer à la vaccination des populations qui s’en tenaient à l’écart de façon croissante (141).

Mobiliser les pharmaciens offrirait un double avantage :

– permettre de créer une offre de vaccination à proximité immédiate des usagers et accessible sans rendez-vous et quelles que soient les conditions de patientèle ;

– simplifier le parcours vaccinal en supprimant une étape parmi les démarches des patients et, selon la cotation de l’acte réalisé par le pharmacien, de permettre une moindre dépense à la charge de l’assurance maladie.

Partant de ce constat, le rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) RM2011-090P « Pharmaciens d’officine : rémunération, missions, réseau » préconisait « que le pharmacien, spécifiquement formé, puisse réaliser l’acte vaccinal sur prescription » (préconisation n° 25). Il proposait en outre (recommandation n° 26), « d’étudier la possibilité pour le pharmacien de pratiquer de sa propre initiative des rappels de vaccination chez les patients adultes ».

Ces mesures répondent aux objectifs de la stratégie nationale de santé. Il convient en effet de renforcer la couverture vaccinale des Français dans une démarche de proximité et de cohérence, dans la ligne des mesures du projet de loi relatives au dossier médical personnalisé.

2.  Cet article vise à faciliter la mise en œuvre d’une vaccination de proximité

Le I de cet article modifie l’article L. 5125-1-1 A du code de la santé publique qui décrit les missions auxquelles le pharmacien d’officine prend part. Il s’agit de compléter son 1° qui prévoit sa participation aux soins de premier recours en prévoyant qu’elle inclut, par la mention « notamment » la participation à la politique vaccinale. Les conditions de cette participation sont définies à l’article L. 5125-1-1 B, un article qu’il est prévu ici de créer.

Pour mémoire, les soins de premier recours sont définis à l’article L. 1411-11 du code de la santé publique. Ils regroupent les activités de prévention, dépistage, diagnostic, traitement et de suivi des patients ; de dispensation et d’administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que de conseil pharmaceutique ; d’orientation dans le système de soins et le secteur médico-social ; d’éducation pour la santé. Les soins de second recours sont quant à eux plus spécialisés et permettent la prise en charge des patients dans un second temps, à la suite de la prise en charge et ou de l’orientation par les structures de premier recours.

L’objet du II est précisément d’insérer un article L. 5125-1-1 B nouveau qui prévoit d’autoriser les pharmaciens d’officine à pratiquer certaines vaccinations. Il s’agit d’une simple faculté. La liste des vaccins autorisés est fixée par arrêté du ministre de la santé pris après avis du Haut Conseil de la santé publique.

La rédaction proposée prévoit qu’un décret en Conseil d’État déterminera le niveau de qualification requis pour pratiquer la vaccination, qu’il s’agisse de titres ou de formations. Il précisera en outre les conditions techniques dans lesquelles elles doivent être réalisées.

Au même titre que pour les sages-femmes dans le dispositif de délégation d’acte prévu à l’article 31 du projet de loi, il sera également prévu que le pharmacien ayant réalisé la vaccination informe le médecin-traitant concerné. Le cas échéant, cette information pourra être insérée dans le dossier médical partagé.

3.  La position réservée de votre rapporteur

Des auditions conduites par votre rapporteur, il ressort que si l’objectif de renforcer la couverture vaccinale de la population recueillait un large consensus, l’option retenue dans cet article a fait l’objet de débats.

Sur le fond, d’aucuns s’opposent purement et simplement au principe de cette délégation d’acte, la mise en œuvre de la vaccination devant relever des seuls personnels infirmiers et médecins, le rôle du pharmacien étant de fournir le produit contre rémunération. L’étude d’impact jointe au projet de loi reconnaît d’ailleurs que « cette mesure pourrait ainsi être perçue comme une modification des équilibres économiques entre professions de santé, au détriment des médecins ». En outre, il demeure des incertitudes sur les modalités de mise en œuvre de la mesure, notamment en ce qui concerne les conditions de formation, d’équipement (par exemple le fait de disposer d’une salle isolée) et d’assurance qui seront requises.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement a consacré un groupe de travail au traitement de cette question. Ses travaux n’ont pas permis d’aboutir à un projet de rédaction faisant consensus.

*

La Commission des affaires sociales a donc adopté l’amendement de votre rapporteur prévoyant la suppression de cet article.

*

La Commission examine les amendements identiques AS42 de M. Jean-Pierre Door, AS579 de M. Fernand Siré, AS750 de Mme Jacqueline Fraysse et AS1165 du rapporteur.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. La vaccination par les pharmaciens n’a pas encore fait l’objet de consultations suffisantes et le Gouvernement doit, par ailleurs, proposer une solution. Nous préconisons donc la suppression de l’article 32.

Mme la ministre. Cette disposition a provoqué certaines inquiétudes. L’objectif est de prendre à bras-le-corps la question de l’insuffisance de la couverture vaccinale en France. Dans nombre d’autres pays, on a choisi de multiplier les professionnels habilités à pratiquer la vaccination, notamment les pharmaciens. Des expérimentations vont donc être conduites après concertation avec les professions concernées.

M. Jean-Pierre Door. J’ai fait un rapport sur ce sujet, qui proposait la tenue d’états généraux de la vaccination. Au pays de Pasteur, c’est un comble d’être où nous en sommes aujourd’hui.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 32 est supprimé.

Les amendements AS1284 de Mme Dominique Orliac, AS1508 de Mme Audrey Linkenheld, AS1365 de M. Francis Vercamer et AS356 de Mme Chantal Guittet n’ont plus d’objet.

*

Après l’article 32

La Commission est saisie des amendements AS289 de M. Éric Alauzet, AS291 de M. Jean-Louis Roumegas et AS290 de M. Éric Alauzet, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Jean-Louis Roumegas. Le premier amendement prône l’obligation pour les industriels de fabriquer des vaccins limités aux valences imposées par la loi afin de ne pas soumettre la population à des vaccinations en cocktail obligatoires.

Le deuxième impose la mise sur le marché de vaccins sans sels d’aluminium. Nous préférerions que ce soient les laboratoires pharmaceutiques qui les produisent, mais, si le ministère répond qu’il n’a pas le pouvoir de contraindre ces derniers, nous lui demanderions alors d’assurer cet approvisionnement.

Le troisième amendement prévoit que les industriels sont obligés de répondre à la demande de vaccins exempts de sels d’aluminium, comme cela était le cas auparavant.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Il faut connaître les chaînes de production des vaccins qui, dans leur majorité, sont internationaux, pour comprendre que des demandes très spécifiques risquent de ne pas aboutir. Cela pourrait même priver certains enfants de vaccination faute de production industrielle. Il n’est pas réaliste de demander à l’État de se substituer aux producteurs de vaccins.

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a conclu à la nécessité de conduire des études : pour l’instant, rien n’est établi au sujet des effets de l’aluminium, pas plus que pour ceux des adjuvants qui étaient utilisés auparavant, qui ont été abandonnés, mais qui n’avaient fait la preuve ni de leur efficacité ni de leur innocuité. Il faudra attendre les résultats des recherches qui devront être financées sur fonds publics, et pas seulement privés. Il convient de ne pas alarmer une population déjà rétive à la vaccination, tout en rappelant que, ce qui compte, c’est le rapport bénéfice-risque, et que, aujourd’hui, celui-ci est positif.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS811 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. L’ensemble des rapports récemment déposés, notamment par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et la Cour des comptes, et l’analyse de la jurisprudence disciplinaire rendue par l’Ordre des pharmaciens ont relevé certains manquements. Tout pharmacien doit être en mesure d’apporter la preuve qu’il a mis en œuvre tous moyens nécessaires pour assurer la qualité et la sécurité de ses actes.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement, car la mesure ne paraît pas nécessaire. En revanche, je souhaite interroger le Gouvernement sur un autre sujet, car les dispositions de l’article 40 de la Constitution impliquent son soutien. Il s’agit de faire évoluer le statut de l’Académie nationale de pharmacie vers un statut équivalent à celui de l’Académie nationale de médecine.

Mme la ministre. Le Gouvernement accepte de lever le gage.

La Commission rejette l’amendement.

*

Article 33
(art. L. 3511-10 [nouveau], L. 4154-4 et L. 4311-1 du code de la santé publique)

Prescription de substituts nicotiniques

Cet article vise à introduire dans le code de la santé publique la possibilité pour certaines professions médicales et paramédicales de prescrire des substituts nicotiniques. Il s’agit de donner une assise législative à un dispositif qui permet déjà aux patients de bénéficier du remboursement d’une partie du coût des substituts.

1.  Les substituts nicotiniques font partie des instruments de lutte contre le tabagisme et doivent être davantage prescrits

Les substituts nicotiniques (patch, gomme, pastille, inhalateur…) comptent parmi les outils permettant d’accompagner efficacement le sevrage tabagique. Il s’agit de traitements de première intention (issus du bupropion et de la varénicline), bénéficiant d’une recommandation de la Haute autorité de santé (HAS) d’octobre 2013. Ils augmentent de 50 à 70 % le taux d’arrêt du tabac à 6 mois et sont proposés en vente libre en pharmacie depuis 1999.

Depuis 2007, l’assurance maladie rembourse, sur prescription médicale établie par un médecin ou, en ce qui concerne les seules femmes enceintes, par une sage-femme, les traitements par substituts nicotiniques à hauteur de 50 euros par année civile et par bénéficiaire. Depuis septembre 2011, ce plafond a été porté à 150 euros pour les femmes enceintes ainsi que, depuis le 5 septembre 2014, pour les jeunes de 20 à 25 ans. La ressource provient du fonds national d’éducation et d’information sanitaire des régimes obligatoires d’assurance maladie.

Les travaux mis en lumière par l’étude d’impact soulignent que l’accompagnement par un professionnel permet d’accroître de 75 % le taux de réussite de l’arrêt du tabac à six mois. D’autres dispositifs d’accompagnement existent, tels Tabac info service (accessible par téléphone ou par la toile).

Chaque année, près de 2 millions de personnes tentent d’arrêter de fumer en France en recourant aux substituts nicotiniques en vente libre en pharmacie. En volume, le nombre de personnes recourant à ces traitements est en constante augmentation, passant de près de 1,5 million en 2008 à 2,2 millions en 2012. Toutefois, un recul de 11 % des ventes a été observé en 2013, même si cette désaffection apparente peut être relativisée du fait de la montée en charge de la cigarette électronique.

Dans ce contexte, on ne peut que souhaiter un recours accru aux mesures de soutien au sevrage tabagique. Seules 250 000 personnes ont bénéficié du forfait de prise en charge des substituts nicotiniques en 2012 (contre 500 000 en 2008). Plusieurs facteurs y contribuent : faiblesse du forfait au regard du coût des substituts remboursés, manque d’informations sur le dispositif, nécessité d’une ordonnance prescrite par les seuls médecins. Le projet de loi peut agir sur le volet juridique de cette question en élargissant les possibilités de prescription. Compte tenu de la sous-consommation des crédits ouverts pour l’aide au sevrage, la mesure ne représentera pas de coût supplémentaire au regard des crédits déjà mobilisés : elle vise à accroître la consommation des crédits mobilisés par le fonds national d’éducation et d’information sanitaire avec, in fine, un impact positif sur les dépenses d’assurance maladie.

Conformément au plan cancer 2014-2019 et au programme national de réduction du tabagisme, le Gouvernement souhaite favoriser la prise en charge forfaitaire des substituts nicotiniques en permettant à un plus grand nombre de professionnels de santé de permettre leur prescription et donc leur prise en charge. Il s’agira notamment de mobiliser les infirmiers et d’insister sur le rôle des médecins du travail. Votre rapporteur appuie cette démarche et souhaite la pousser davantage encore.

2.  Cet article introduit la possibilité de prescrire les substituts nicotiniques dans le code de la santé publique

Le I insère un article L. 3511-10 nouveau après l’article L. 3511-9 du code de la santé publique. Il permet, pour la première fois, d’introduire la mention des substituts nicotiniques dans le code de la santé publique. Il se décompose en quatre alinéas.

Il est prévu que les substituts puissent être prescrits par trois catégories de professionnels de santé, à savoir :

– les médecins, y compris les médecins du travail (1°) ;

– les sages-femmes, dans le cadre de leurs compétences en matière de prescription de dispositifs médicaux (décrits à l’article L. 4151-4 du même code) (2°) ;

– les infirmiers, dans le cadre de leurs compétences générales décrites à l’article L. 4311-1 (3°).

Cette liste correspond à celle des prescripteurs permettant de bénéficier de la prise en charge de 50 ou 150 euros par l’assurance maladie. Votre rapporteur considère qu’elle doit être élargie afin de soutenir davantage encore les démarches visant à arrêter de fumer.

Il serait utile à cet égard d’inclure dans cette liste les chirurgiens-dentistes. Cela présenterait le double avantage de viser l’ensemble des professions médicales dans le champ de ces dispositions (aux côtés des médecins et des sages-femmes) et ménagerait de nombreuses occasions d’un meilleur accompagnement des patients dans l’arrêt du tabac. Les effets du tabac sur la dentition ou les gencives sont bien souvent plus rapides et visibles que sur le reste de l’organisme. L’identification de ces effets néfastes sur la santé mais aussi sur l’esthétique peut motiver le patient à prendre la décision d’arrêter de fumer, une circonstance dans laquelle il doit être immédiatement et fortement soutenu. Le remboursement dont ils pourraient ainsi bénéficier fait partie des outils qui doivent alors être immédiatement mobilisés à son profit.

Le II propose de compléter un article L. 4154-4, un article qui n’existe pas. Il s’agit en fait de l’article L. 4151-4, mentionné en I. En conséquence des dispositions du I, il s’agit de permettre également aux sages-femmes de prescrire des substituts nicotiniques à toutes les personnes :

– qui vivent régulièrement dans l’entourage de la femme enceinte ;

– ou bien qui vivent régulièrement dans l’entourage du nouveau-né ;

– en encore qui assurent la garde du nouveau-né.

Cette disposition transpose celle prévue à l’article 31 du projet de loi et qui, traduisant l’approche dite du « cocooning », recommandée par l’étude d’impact, vise à créer le meilleur espace sanitaire possible dans l’entourage du nouveau-né et de la femme enceinte en permettant à la sage-femme de prescrire la vaccination de l’entourage du bébé.

Le III procède de la même façon en faveur des infirmiers et infirmières en modifiant l’article L. 4311-1 (mentionné en I), pour y introduire la mention explicite de la faculté de prescription des substituts nicotiniques.

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La Commission des affaires sociales a adopté cet article sans modification.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS328 de M. Jean-Pierre Door.

M. Élie Aboud. Nous avons adopté des mesures qui concernent les sages-femmes et les infirmières. Cependant, dans le domaine du tabagisme, alors que des patients présentent plusieurs maladies – hypertension, diabète – et qu’ils fument, permettre aux infirmières la prescription de substituts nicotiniques risque d’inciter ceux-ci à surseoir à la consultation médicale, ce qui serait une mauvaise chose pour la santé publique.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je ne suis pas favorable à cet amendement, car la lutte contre le tabagisme doit être menée sur tous les fronts. J’interroge par ailleurs Mme la ministre : ne serait-il pas opportun d’inclure les chirurgiens dentistes dans la liste des professionnels habilités à prescrire des substituts nicotiniques et, donc, de lever le gage attaché à cette mesure ?

Mme la ministre. Je confirme l’accord que j’ai déjà eu l’occasion de donner sur ce point dans le cours de la discussion du projet de loi.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1286 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. La lutte contre le tabagisme constituant un sujet majeur, les pharmaciens d’officine, qui sont de véritables professionnels de santé, doivent pouvoir dispenser des substituts nicotiniques avec ou sans prescription.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’intention est d’autant plus louable qu’elle est satisfaite, puisque ces produits sont en vente libre dans les officines depuis 1999.

Mme Dominique Orliac. Si cette délivrance est prise en charge par l’assurance maladie, cela ne doit-il pas être gagé ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. La commission des finances n’a pas jugé cet amendement irrecevable.

M. Gérard Sébaoun. Les pharmaciens seraient donc à la fois ceux qui prescrivent et ceux qui vendent les substituts nicotiniques. Ne risquons-nous pas de créer un conflit d’intérêts ?

Mme la ministre. Cette inquiétude pourrait concerner d’autres types de produits, mais je ne recommande pas que nous nous aventurions sur ce terrain. Je suis prête à débattre des enjeux – comme celui, assez proche, de la vaccination –, mais, à ce stade, je ne souhaite pas lever le gage.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte l’article 33 sans modification.

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Article 34
(art. L. 6143-7, L. 6146-3 [nouveau], L. 6152-1-1 [nouveau]
et L. 6152-6 du code de la santé publique et L. 1251-60 du code du travail)

Encadrement du recours à l’intérim médical à l’hôpital

Cet article vise à encadrer le recours à l’intérim médical dans les établissements de santé. Cette question a fait l’objet d’un rapport remis à la ministre chargée la santé par notre collègue Olivier Véran en décembre 2013 (142). Aux termes de ces travaux, il apparaît que le surcoût du recours à l’intérim médical est évalué à 500 millions d’euros. Au-delà de ces implications financières qui peuvent remettre en cause l’équilibre financier des structures publiques, l’absence d’encadrement du recours à l’intérim pose des difficultés qu’il faut résoudre.

I. L’INTÉRIM MÉDICAL, UNE SITUATION PRÉOCCUPANTE

Comme pour la médecine de ville, le milieu hospitalier est confronté à l’enjeu de la démographie médicale. De fortes disparités régionales et par spécialité sont relevées entraînant d’importantes difficultés de recrutement. Le creux démographique en médecine hospitalière touche ainsi certaines spécialités plus que d’autres. Trois d’entre elles cumulent 70 % des difficultés : il s’agit de l’anesthésie, de la radiologie, et de la médecine d’urgence. Pour certaines spécialités, le taux de vacance est élevé : il est de l’ordre de 38,5 % en radiologie. S’y ajoutent également les difficultés liées à la pénibilité des tâches, au stress et aux emplois du temps qui se sont particulièrement aggravées.

Face aux vacances ponctuelles ou prolongées de postes médicaux, les hôpitaux ont recours à l’emploi temporaire en se faisant parfois concurrence. De nombreuses dérives en découlent : rémunération exorbitante pour conserver une certaine attractivité, entorse à la réglementation et dépenses de personnel en forte progression.

A.  LE RÉGIME DE L’INTÉRIM MÉDICAL

Le régime de l’intérim médical s’inscrit dans le cadre du code du travail et du statut de la fonction publique hospitalière.

L’article L. 1251-60 du code du travail dispose que les personnes morales de droit public peuvent faire appel aux salariés de ces entreprises pour des tâches non durables, dénommées missions, notamment dans le cas d’une vacance temporaire d’un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière :

– le II de l’article 9-1 dispose, entre autres, que, pour les besoins de continuité du service, des agents contractuels peuvent être recrutés pour faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire. Dans ces conditions, il est fait application des articles R. 6152-401 à R. 6152-420 du code de la santé publique ;

– l’article 9-3 prévoit quant à lui la possibilité pour les établissements publics de santé de recourir aux services des entreprises de travail temporaire.

Dispositions relatives à la vacance temporaire d’emploi

Le recrutement à temps partiel des praticiens hospitaliers est régi par les articles R. 6152-401 à R. 6152-420 du code de la santé publique.

L’article R. 6152-402 précise les conditions dans lesquelles un contrat de courte durée est autorisé :

– un surcroît occasionnel d’activité de l’établissement public de santé ;

– en cas de nécessité de service, le remplacement de praticiens hospitaliers à temps plein ou à temps partiel, lors de leurs absences ou congés statutaires et dont le remplacement ne peut être assuré dans les conditions prévues par leurs statuts ;

– en cas de nécessité de service et lorsqu’il s’avère impossible d’opérer un tel recrutement en application des dispositions statutaires en vigueur, un poste de praticien à temps plein ou à temps partiel resté vacant à l’issue de chaque procédure statutaire de recrutement ;

– activités nouvelles ou en voie d’évolution nécessitant des connaissances hautement spécialisées.

Un même praticien ne peut bénéficier, au sein du même établissement, de recrutements successifs en qualité de praticien contractuel que pour une durée maximale de trois ans.

Simultanément, d’autres limites sont posées par l’article R. 6152-411. Le nombre de praticiens à temps partiel, pour une durée inférieure à trois mois, ne peut excéder celui des praticiens titulaires et des praticiens nommés ou recrutés pour une durée de plus de trois mois exerçant leurs fonctions dans la structure où ils sont affectés ainsi que dans la discipline d’activité au sein de l’établissement. Cet article prévoit aussi qu’un état semestriel des effectifs de praticiens contractuels recrutés pour une durée inférieure à trois mois est à remettre au directeur général de l’agence régionale de santé par le directeur de l’établissement.

B.  DES RAISONS MULTIPLES

Pour les médecins intéressés, l’explication de cette désaffection pour l’hôpital est multifactorielle : ce peut être un engouement pour une activité lucrative, une solution de repli faute de trajectoire professionnelle précise, ou bien une aspiration à travailler dans un cadre moins figé que celui de la carrière hospitalière.

Le recours à l’emploi intérimaire résulterait aussi des pesanteurs administratives. Le recrutement des praticiens pâtirait du caractère peu adapté de la procédure de publicité de la vacance des postes. Le passage d’annonces, notamment par le biais de revues spécialisées, n’apparaît pas comme étant le moyen de recrutement le plus efficace.

Le recours à l’intérim résulte aussi d’une logique non coopérative entre établissements hospitaliers. Elle se manifeste par une concurrence exacerbée, certains hôpitaux recrutant des remplaçants à des tarifs prohibitifs, d’autres privilégiant des recrutements, en toute irrégularité, sur des missions de courte durée, de médecins pourtant sous contrat de praticien hospitalier dans un autre établissement. Cette situation tendue résulte du différentiel important de rémunérations entre secteur public et secteur privé, entre praticiens relevant d’une échelle indiciaire figée et médecins recrutés sur un contrat d’intérim. L’attractivité d’un hôpital se mesure parfois à la rémunération qu’il peut offrir. Cette mise sous tension peut se traduire par des concessions financières importantes.

C.  DES DIFFICULTÉS MANIFESTES

Le recours à l’intérim médical, s’il peut résoudre des difficultés temporaires d’emploi pose plusieurs difficultés si l’on considère les excès constatés en la matière.

Le recours à l’intérim et le « turnover » des effectifs qui en résulte ne permettent pas à un établissement d’engager ou d’assumer un projet médical. L’ouverture d’un service ou son maintien nécessite l’engagement de personnels de santé sur une longue durée. En toute objectivité, un intérimaire ne s’investira pas autant qu’un praticien hospitalier recruté sur un projet précis. Cette situation, que l’on ne peut nier, peut entraîner des pertes de chance pour les patients.

La deuxième difficulté réside dans le coût élevé du recours à l’intérim pour l’hôpital. En 2012, les hôpitaux ont déclaré 76 millions d’euros au titre des charges d’intérim médical, en hausse de 50 % en 3 ans. Ces chiffres doivent cependant être pris avec précaution, toutes les dépenses induites par le recours aux contrats temporaires n’étant pas comptabilisées à ce titre (143).

Les tarifs et les niveaux de rémunération pratiqués par les agences d’intérim et les sociétés de recrutement sont similaires : de 600 à 800 euros nets pour une journée, 1 300 pour une garde de 24 heures, contre respectivement 260 euros et 600 euros pour un praticien hospitalier. Le coût total de l’intérim représenterait 500 millions d’euros.

Le recours à l’intérim peut également poser un problème de sécurité des soins. Le rapport d’Olivier Véran souligne ainsi l’absence d’obligation de formation continue, d’évaluation, y compris dans le cas de médecins ayant arrêté pendant une période prolongée toute activité professionnelle. L’augmentation du risque pour les malades n’est pas avérée. Pour autant, il apparaît que le médecin ignore tout ou presque des procédures propres à chaque établissement ou chaque unité de soins.

II. VERS UNE LIMITATION DES DÉRIVES DU RECOURS À L’INTÉRIM MÉDICAL

Le 1° du I modifie l’article L. 6143-7 du code de la santé publique. La modification apportée est à mettre en relation avec la création d’un nouvel article L. 6152-1-1 prévue par le 3° du présent I qui prévoit l’instauration d’un volant de praticiens hospitaliers volontaires pour effectuer des remplacements.

L’article L. 6143-7 fixe les pouvoirs du directeur de l’établissement public de santé, notamment ceux relatifs à la nomination :

– des directeurs adjoints et des directeurs des soins ;

– des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques exerçant dans un cadre statutaire, à temps plein ou partiel.

Le 1° du I dispose que cet alinéa n’a pas vocation à s’appliquer au nouvel article L. 6152-1-1, dont le dispositif dérogatoire prévoit un pouvoir de nomination encadré du centre national de gestion.

Le 2° du I insère un nouvel article L. 6143-3 au sein du code de la santé publique dont l’objet vise à limiter le coût de l’intérim médical pour les hôpitaux ayant recours aux agences d’intérim.

Son premier alinéa précise que les établissements publics de santé peuvent avoir recours à des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques pour des missions de travail temporaire. Ce dispositif s’applique aux établissements qui ont recours aux services des entreprises de travail temporaire mentionnées à l’article L. 1251-1 du code du travail.

Son second alinéa dispose que le montant journalier des dépenses relatives à l’engagement d’un praticien hospitalier ne peut excéder un plafond fixé par voie réglementaire.

Selon les informations transmises à votre rapporteur ce plafond comprend d’une part le montant de la rémunération de l’agent versé par l’agence y compris les charges sociales, d’autre part, le montant de la prestation de l’agence d’intérim. Il s’agira d’un montant brut.

Le 3° du I insère un nouvel article L. 6152-1-1 au sein du code de la santé publique. Il institue un corps de praticiens volontaires autorisés à accomplir des missions d’intérim.

Le premier alinéa dispose que les praticiens mentionnés au 1° de l’article L. 6152-1 du code de la santé publique assurant des missions de remplacement temporaire sont placés auprès du centre national de gestion (CNG) sur la base du volontariat et pour une seule région. Il concerne les médecins, odontologistes et les pharmaciens relevant du statut de la fonction publique hospitalière, exerçant leur activité à temps plein ou partiel.

Par dérogation à l’article L. 6143-7 et conformément au 1° du I du présent article, ces personnels ne relèvent pas du pouvoir de nomination du directeur de l’établissement mais du CNG dont l’article 116 de la loi relative à la fonction publique hospitalière (144) dispose qu’il est un établissement public national chargé notamment de la gestion des praticiens hospitaliers. Cette modification répond au souci d’apporter plus de transparence et de rigueur dans le recrutement de praticiens temporaires pour assurer des remplacements en cas de congés ou pour assurer la continuité des soins pour des spécialités ou dans des zones géographiques où la démographie médicale est particulièrement insuffisante.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, la durée du placement serait de 3 ans, cette position n’ayant pas vocation à être un mode d’exercice pérenne.

La position de praticien remplaçant est construite sur le modèle de la position de recherche d’affectation mentionnée aux articles R. 6152-50-1 à R. 6152-50-7 du code de la santé publique.

Il est enfin précisé que, conformément à son statut de praticien hospitalier titulaire auquel il restera soumis, le praticien devra respecter l’obligation d’exercice public exclusif.

Article R. 6152-50-1 du code de la santé publique

« La recherche d’affectation est la situation dans laquelle le praticien hospitalier titulaire en activité est placé, compte tenu des nécessités du service, auprès du Centre national de gestion, soit sur sa demande, soit d’office, en vue de permettre son adaptation ou sa reconversion professionnelle ou de favoriser la réorganisation ou la restructuration des structures hospitalières.

Lorsque la demande de placement en recherche d’affectation est présentée par le praticien, le directeur transmet celle-ci au directeur général du Centre national de gestion, accompagnée de son avis et de celui du président de la commission médicale de l’établissement.

Lorsque la demande de placement en recherche d’affectation est présentée en application de l’article L. 6143-7, le directeur de l’établissement adresse sa demande au directeur général du Centre national de gestion. Celle-ci est accompagnée de la proposition du chef de pôle ou, à défaut, du responsable du service, de l’unité fonctionnelle ou d’une autre structure interne ainsi que de l’avis du président de la commission médicale d’établissement.

Lorsque la demande de placement en recherche d’affectation est présentée en application des dispositions de l’article L. 6131-5 par le directeur de l’établissement ou, en cas de carence, par le directeur général de l’agence régionale de santé, celui-ci saisit le directeur général du Centre national de gestion sans que les propositions et avis mentionnés au troisième alinéa soient requis.

Le placement d’un praticien hospitalier en recherche d’affectation est prononcé, après avis de la commission statutaire nationale et pour une durée maximale de deux ans, par arrêté du directeur général du Centre national de gestion qui exerce à son égard toutes les prérogatives reconnues à l’autorité investie du pouvoir de nomination ».

Le second alinéa dispose que le CNG :

– exerce à l’égard de ces praticiens toutes les prérogatives reconnues à l’autorité investie du pouvoir de nomination : procédures disciplinaires, sortie de la carrière mais également, comme c’est le cas pour la recherche d’affectation, les actes de gestion (congés, indemnités) qui sont habituellement déconcentrés auprès de l’établissement d’affectation ;

– rémunère les praticiens remplaçants pendant leur période, l’établissement public remboursant au CNG les dépenses occasionnées par le recours à un personnel remplaçant. Cette disposition vise ainsi à limiter le recours coûteux à l’intérim et les dérives constatées en cas de négociation de gré à gré.

Le Centre national de gestion
(article 116 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)

« Le Centre national de gestion est l’établissement public national chargé de la gestion des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, des directeurs des soins et des praticiens hospitaliers.

Tout établissement mentionné à l’article 2 verse au Centre national de gestion une contribution. L’assiette de la contribution de chaque établissement est constituée de la masse salariale des personnels employés par l’établissement à la date de clôture du pénultième exercice. Le taux de la contribution est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé et des affaires sociales dans la limite de 0,15 %. En vue de la fixation du montant de la contribution, chaque établissement fait parvenir à l’administration une déclaration des charges salariales induites par la rémunération de ses personnels. La contribution est recouvrée par le Centre national de gestion.

Les ressources du Centre national de gestion comprennent également des subventions, avances, fonds de concours et dotations de l’État ainsi qu’une dotation des régimes obligatoires d’assurance maladie composée de deux parts, l’une au titre de la contribution de l’assurance maladie au fonctionnement du centre et l’autre au titre du financement des contrats d’engagement de service public. Le montant de la dotation est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. La participation des organismes d’assurance maladie est versée et répartie entre les régimes dans des conditions fixées par décret.

Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, le Centre national de gestion peut également assurer le remboursement des rémunérations, avantages en nature, charges sociales et taxes assises sur les salaires versés par les établissements mentionnés à l’article 2 aux praticiens hospitaliers, aux personnels de direction ou aux directeurs des soins qui y sont nommés en surnombre.

Le Centre national de gestion exerce ses missions au nom du ministre chargé de la santé ou du directeur de l’établissement de rattachement du personnel qu’il gère.

Le directeur général du Centre national de gestion est recruté sur un emploi doté d’un statut fonctionnel dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.

Le Centre national de gestion emploie des agents régis par les lois n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État ou n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ou par la présente loi ainsi que des personnels mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 6152-1 du code de la santé publique, en position d’activité, de détachement ou de mise à disposition.

Il emploie également des agents contractuels de droit public avec lesquels il peut conclure des contrats à durée déterminée ou indéterminée. Le conseil d’administration délibère sur un règlement fixant les conditions de leur gestion administrative et financière ».

Le complète l’article L. 6152-6 afin d’étendre les mesures réglementaires d’application à l’article L.6152-1-1.

Le II modifie l’article L. 1251-60 du code du travail dont le 2° prévoit la possibilité, pour les personnes morales de droit public, de faire appel aux salariés des entreprises intérimaires en cas de vacance temporaire d’un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues notamment par la loi portant statut de la fonction publique hospitalière. Cet alinéa prévoit désormais que le recours à des entreprises intérimaires pourra s’effectuer dans les conditions prévues par les dispositions des chapitres Ier et II du titre V du Livre Ier de la sixième partie du code de la fonction publique : il s’agit en l’occurrence des dispositifs applicables aux personnels enseignants et hospitaliers et aux praticiens hospitaliers.

Votre rapporteur tient à préciser que le chapitre Ier ne devrait pas être mentionné, cette mesure n’ayant vocation à s’appliquer qu’aux personnels médicaux hospitaliers et non aux personnels enseignants et hospitaliers.

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Outre sept amendements rédactionnels, la commission a complété le dispositif par l’adoption d’un amendement garantissant l’exercice légal de leur activité par les praticiens intérimaires.

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Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS548 de Mme Bérengère Poletti.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels AS61 et AS62 du rapporteur.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS751 de Mme Jacqueline Fraysse et AS329 de M. Jean-Pierre Door.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous partageons l’idée selon laquelle il est opportun que les établissements publics de santé qui souhaitent recourir à des personnels intérimaires puissent garantir que ces professionnels remplissent toutes les obligations légales leur permettant d’exercer.

M. Jean-Pierre Door. Il arrive que des établissements de santé se trouvent dans l’obligation de recruter des personnels qui, malheureusement, ne remplissent pas toujours les conditions de compétence ou les conditions légales souhaitées. Ce qui rend les choses difficiles, c’est que ces gens-là aussi permettent le fonctionnement des hôpitaux. Il faut pourtant bien être assuré que les conditions concernées sont effectivement remplies.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis favorable à l’intention, particulièrement dans la rédaction de l’amendement AS751 de Mme Fraysse. J’invite d’ailleurs M. Door à se rapprocher de cette version.

La Commission adopte l’amendement AS751.

En conséquence, l’amendement AS329 tombe.

La Commission adopte les amendements rédactionnels AS63 à AS66, et AS105 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 34 modifié.

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Article 34 bis
Assouplissement des règles relatives
à la détention du capital des sociétés exploitant une officine

Cet article assouplit les règles relatives à la détention du capital des sociétés exploitant une officine. D’une part, il supprime l’obligation faite aux pharmaciens titulaires exerçant en société d’en détenir 5 %. D’autre part, il prévoit de donner un nouveau statut aux pharmaciens adjoints en leur ouvrant la possibilité d’entrer au capital des sociétés d’exercice libéral exploitant une pharmacie d’officine.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1664 du Gouvernement.

Mme la ministre. Conformément aux engagements pris auprès de la profession, il s’agit de moderniser le régime des sociétés d’exercice libéral et de donner un nouveau statut aux pharmaciens adjoints en leur ouvrant la possibilité d’entrer dans le capital. Cela permettra d’anticiper le choc démographique à venir.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 34 bis

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS547 de Mme Bérengère Poletti.

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Article 34 ter
Prolongation d’activité des personnels médicaux hospitaliers

Cet article vise à anticiper le choc démographique des professions de santé dans les établissements publics en autorisant une prolongation d’activité jusqu’à l’âge de 70 ans.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1497 du Gouvernement.

Mme la ministre. Compte tenu des difficultés démographiques que nous connaissons pour recruter des praticiens hospitaliers, nous proposons diverses mesures particulières. Ce premier amendement anticipe l’effet de l’augmentation de la durée de cotisation. Il sera permis aux praticiens hospitaliers nés entre le 1er juillet et le 31 décembre 1951, et qui le souhaitent, de reporter l’âge légal de leur départ en retraite à soixante-dix ans. Je précise que cette mesure répond à une demande des intéressés.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Si certains le souhaitent, ils pourront partir à soixante-douze ans. Nous ne reviendrons cependant pas au temps de l’après-Première Guerre mondiale où cet âge avait été porté à soixante-quinze ans.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Article 34 quater
Modification des dispositions relatives
au cumul emploi retraite des personnels médicaux hospitaliers

Cet article vise à anticiper le choc démographique des professions de santé dans les établissements publics en modifiant les dispositions relatives au cumul emploi retraite.

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Elle examine ensuite l’amendement AS1496 du Gouvernement.

Mme la ministre. Dans le même esprit, l’amendement propose de permettre le cumul emploi-retraite des praticiens hospitaliers jusqu’à l’âge de soixante-douze ans.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

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Chapitre III
Innover pour la qualité des pratiques, le bon usage des médicaments
et la sécurité des soins

Ce chapitre regroupe des mesures de modernisation attendues par le secteur. Il permet d’inscrire dans les codes de la sécurité sociale et de la santé publique des dispositions destinées aux professionnels de santé, à travers deux articles :

– l’article 35, qui prévoit la définition d’une fiche de bon usage de certains médicaments par la Haute autorité de santé (HAS) ;

– l’article 36, qui renforce les moyens de lutte contre les ruptures d’approvisionnement de produits de santé.

Article 35
(art. L. 161-37 de la sécurité sociale)

Fiches de bon usage des médicaments

Cet article prévoit que la HAS publie une fiche de bon usage pour certains médicaments en même temps que l’avis sur le service médical rendu.

Il permet en outre la mise en œuvre par la HAS d’un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques et donne un fondement législatif à l’établissement de listes préférentielles de médicaments. Ces listes pourront être rédigées par la HAS ou directement par les professionnels puis validées par la HAS.

1.  Renforcer la culture de santé par la promotion des bonnes pratiques

Dans l’exercice de ses missions, la HAS joue un rôle clé dans la construction d’une culture partagée dans le domaine de la santé.

La démarche proposée par cet article se fonde sur le constat que les professionnels de santé ne disposent pas aujourd’hui en France d’un outil synthétique proposant une information par grande pathologie. Ils prescrivent sur la base des informations produites par les agences de santé ou sur les données propres à chaque médicament. Pourtant, ce type d’informations synthétiques a fait ses preuves dans d’autres pays européens, ce que rappelle l’exposé des motifs du projet de loi, tels que le British Formulary au Royaume-Uni ou la Kloka Listan en Suède. Le Gouvernement souhaite doter la France d’outils similaires, ce qui suppose de missionner spécifiquement la HAS dans ce sens.

Le bon usage des médicaments constitue un enjeu de première importance. Les dépenses publiques de médicaments ont atteint 27 milliards d’euros en 2012. La consommation de médicaments en France se caractérise par une consommation élevée et, en comparaison avec les autres pays européens, par une structure de consommation surpondérant les médicaments les plus onéreux, au détriment notamment des versions génériques (145). Il est donc important de rendre les outils d’information plus accessibles et plus efficients.

Dans ce contexte, il est proposé dans cet article de mettre en place un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes, dont l’économie générale sera déterminée par décret. Le Gouvernement a néanmoins indiqué que ces guides porteront sur les pathologies les plus fréquentes ainsi que sur les plus coûteuses pour l’assurance maladie et ils proposeront aux professionnels de santé les informations de bonne pratique indispensables.

La mise en place de ces fiches constituera une charge de travail conséquente pour la HAS qui pourrait être conduite à modifier son programme de travail pour absorber à moyens constants la première phase de mise en place.

2.  Le renforcement des missions de la Haute autorité de santé

Cet article modifie l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, un article qui recense les neuf grandes missions dévolues à la HAS, parmi lesquels on compte notamment :

– « procéder à l’évaluation périodique du service attendu des produits, actes ou prestations de santé et du service qu’ils rendent, et contribuer par ses avis à l’élaboration des décisions relatives à l’inscription, au remboursement et à la prise en charge par l’assurance maladie des produits, actes ou prestations de santé » (son 1°) ;

– « élaborer les guides de bon usage des soins ou les recommandations de bonne pratique, procéder à leur diffusion et contribuer à l’information des professionnels de santé et du public » (son 2°). Ces fiches de bon usage ont pour but de faire connaître les résultats de l’évaluation d’un médicament ou d’une classe thérapeutique par la commission de la transparence.

Sans préjudice des missions actuelles de la HAS, il est proposé d’enrichir la rédaction de l’article L. 161-37 en y insérant un 1° bis et en complétant son 2°.

En , il est proposé d’insérer un 1° bis missionnant explicitement la HAS pour l’élaboration ou la mise à jour de fiches sur le bon usage de certains médicaments. Ces fiches doivent notamment permettre de définir la place des médicaments en question dans la stratégie thérapeutique.

Cette insertion donne un poids réel aux guides pratiques, tout en maintenant des marges d’appréciation importantes à la HAS, puisque seuls « certains médicaments » sont concernés et le champ couvert par ces guides n’est pas décrit. Cette souplesse paraît néanmoins acceptable dans la mesure où le recours à un véhicule législatif est un choix qui ne semblait pas s’imposer nécessairement, les missions décrites dans le 1° et le 2° de la rédaction en vigueur pouvant être interprétées comme suffisantes. Il s’agit d’une démarche vertueuse car elle permet au législateur d’affirmer son attachement à cet outil de renforcement de la culture sanitaire.

En , il est prévu de compléter le 2° de l’article L. 161-37 qui porte sur les guides de bon usage afin de définir un cadre législatif pour la mise en place de l’équivalent français du British Formulary au Royaume-Uni ou de la Kloka Listan en Suède. Concrètement, la HAS devra élaborer ou valider (lorsque les professionnels les rédigeront eux-mêmes) un « guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques » les plus efficientes face à telle ou telle pathologie. Ce guide mentionnera la liste des médicaments à utiliser de préférence. Ce guide sera destiné à l’usage exclusif des professions de santé. Les conditions de rédaction et de validation du contenu de ce guide seront déterminées par décret.

*

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements AS824 de M. Jean-Pierre Door et AS391 de M. Denis Baupin.

Elle examine ensuite l’amendement AS1369 de M. Hervé Féron.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Il s’agit de renforcer la lutte contre les infections nosocomiales en chargeant la Haute Autorité de santé de participer à l’élaboration ou à la validation de recommandations relatives à l’utilisation des matériaux antibactériens dans les établissements de santé.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’objectif est intéressant, mais les études en cours à ce sujet étant inachevées, la proposition est prématurée. Je suggère le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 35 sans modification.

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Après l’article 35

La Commission est saisie de l’amendement AS1511 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L’amendement vise à tirer la leçon de l’affaire du Mediator. On facilitera la reconnaissance du lien de causalité entre l’utilisation d’un produit de santé et le dommage subi par le patient en disposant que l’imputabilité est présumée quand des études épidémiologiques ou de pharmacovigilance établissent suffisamment que la prise de ce produit entraîne le risque du dommage dont la réparation est demandée. L’amendement tend d’autre part à établir la responsabilité du producteur lorsqu’un dégât sanitaire est dû à l’utilisation d’un médicament alors même que ce risque était inconnu lors de la mise sur le marché.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Je suis d’accord sur le principe, mais je suggère le retrait de l’amendement dont la rédaction gagnerait à être retravaillée avec le cabinet de Mme la ministre avant la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS295 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement tend à lutter contre les abus de l’industrie pharmaceutique en précisant que, en cas de recours aux dispositions de l’article L. 613-16 du code de la propriété intellectuelle, le ministre chargé de la santé peut autoriser l’enregistrement des produits visés en génériques, l’inventeur étant dédommagé.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1376 de M. Hervé Féron.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Il s’agit, pour lutter contre les infections nosocomiales, de préciser le cadre législatif en définissant les matériaux antimicrobiens.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. La proposition est intéressante, mais prématurée, des études étant en cours qui visent à lever des incertitudes scientifiques. Je suggère le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS714 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. L’amendement vise à introduire dans le texte la mention d’un indice « persistance-bioaccumulation-toxicité » pour les résidus médicamenteux présents dans les eaux usées. Les pays d’Europe du Nord le font déjà.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. La disposition est d’ordre réglementaire. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS1489 de Mme Dominique Orliac.

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Article 35 bis
(art. L. 5132-10 [nouveau] du code de la santé publique)

Lutte contre les résistances aux antibiotiques

La Commission des affaires sociales a adopté l’amendement AS 1504 du Gouvernement. Il autorise la Gouvernement à prendre par voie réglementaire des mesures destinées à lutter contre les résistances aux antibiotiques.

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La Commission examine l’amendement AS1504 du Gouvernement.

Mme la ministre. L’amendement tend à créer le cadre législatif propre à faciliter la lutte contre la résistance aux médicaments antibiotiques.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

*

Article 35 ter
(art. L. 5211-4-1 [nouveau], L. 5212-2-1, L. 5112-2-2 [nouveaux], L. 5211-6, L. 5461-4-2 [nouveau], L. 5461-6-1 et L. 5431-6-2 [nouveaux], L. 5461-9 et L. 5471-1 du code de la santé publique)

Amélioration de l’information sur la performance
et l’évaluation clinique des dispositifs médicaux

La Commission a adopté un amendement du Gouvernement visant à renforcer le suivi et la traçabilité des dispositifs médicaux mis sur le marché, en particulier des dispositifs médicaux implantables. Il s’agit notamment de répondre aux interrogations ayant suivi l’affaire des prothèses mammaires frauduleuses PIP.

Le dispositif adopté améliore la surveillance du marché en permettant aux autorités sanitaires de disposer des informations pertinentes sur la performance et l’évaluation clinique des dispositifs médicaux ou catégories de dispositifs médicaux. Leurs fabricants devront fournir un résumé des caractéristiques du dispositif au moment de la déclaration à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Les établissements de santé ou les professionnels de santé devront également renseigner un registre spécifique afin que l’ANSM soit informée en amont de tout problème de sécurité ou de moindre performance.

*

La Commission examine l’amendement AS1503 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il y a quelques jours seulement, on apprenait la survenue de lymphomes spécifiques chez des femmes porteuses d’implants mammaires, et nul n’a oublié le scandale des prothèses PIP frelatées. La traçabilité des dispositifs médicaux est un enjeu de santé publique important. Une directive européenne à ce sujet est en cours d’élaboration et la France joue un rôle moteur pour que des dispositions de contrôle renforcé soient adoptées, mais je suis au regret de constater que les discussions n’avancent pas. Aussi proposons-nous d’une part d’imposer aux fabricants de certains dispositifs médicaux de fournir un résumé des caractéristiques de ces produits à l’Agence nationale de sécurité du médicament, d’autre part de rendre obligatoire le renseignement de registres par les établissements de santé pour permettre, en cas d’accident, de faire le lien entre les patients et les dispositifs implantés.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Avis très favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 35 ter

La Commission est saisie de l’amendement AS294 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Chacun a en mémoire le prix exorbitant demandé par les laboratoires pharmaceutiques pour le sofosbuvir, molécule destinée à soigner l’hépatite C, ou pour certains traitements du cancer. Dans ce contexte, nous proposons par cet amendement que la fixation du prix ne tienne pas seulement compte des critères de marché, mais aussi des coûts réels – à justifier – de recherche et développement encourus pour mettre au point les molécules nouvelles.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’objectif visé est louable et il faudra y parvenir, mais le moyen proposé n’est pas proportionné à son objet. Dans un premier temps, il faut préférer la négociation conventionnelle, puis engager une réflexion de fond sur le mécanisme de fixation des prix. Avis, pour cette raison, défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS293 rectifié de M. Jean-Louis Roumegas.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS296 du même auteur.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous insistons sur le contrôle démocratique qui doit s’exercer sur le comité économique des produits de santé en proposant que, chaque année, son rapport d’activité – et donc la manière dont est élaboré le prix des médicaments – soit débattu au Parlement.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’ordre du jour du Parlement ne peut être fixé dans la loi. À nouveau, l’objectif est légitime, mais le moyen de l’atteindre est inapproprié. Je suggère le retrait de l’amendement, auquel je donnerai, sinon, un avis défavorable.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je rappelle que les parlementaires ont connaissance d’un rapport du comité économique des produits de santé chaque année avant la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L’amendement est retiré.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements AS1362 de M. Francis Vercamer, AS1288 de Mme Dominique Orliac et AS1382 de M. Hervé Féron.

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Article 36
(art. L. 5111-4 et L. 5121-29 à L. 5121-34 [nouveaux], art. L. 5124-6, L. 5124-17-2,
art. L. 5124-17-3 [nouveau], art. L. 5126-4 et art. L. 5423-8 du code de la santé publique)

Lutte contre les ruptures d’approvisionnement de produits de santé

La chaîne d’approvisionnement des produits de santé est confrontée par nature à des contraintes très particulières qui la placent fréquemment en tension. Cet article vise à renforcer les dispositions en vigueur permettant de les prévenir et surtout de renforcer les moyens d’y faire face.

1.  Les ruptures d’approvisionnement : un phénomène fréquent mais sous contrôle

« Une rupture d’approvisionnement d’un médicament est définie comme une incapacité pour une pharmacie d’officine ou une pharmacie à usage intérieur d’un établissement (de santé ou médico-social) à dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures ». (146)

La solidité ou la fragilité d’un système d’approvisionnement ne semblent pas corrélées au prix du médicament et la France est dans une situation comparable aux autres pays occidentaux. En effet, les produits de santé évoluent sur un marché particulier, complexe, dans lequel de nombreux éléments jouent. L’ajustement de l’offre à la demande fait intervenir de multiples facteurs rendant parfois l’approvisionnement aléatoire alors même que ces produits conditionnent pour certains la survie de patients.

La demande n’est, par définition, que très partiellement prévisible, même si des pics de consommation peuvent être anticipés, c’est le cas par exemple des vaccins pour la grippe saisonnière, il est pratiquement impossible d’anticiper exactement la demande : il faut donc disposer de stocks et les réapprovisionner régulièrement.

L’offre de son côté est aussi sujette à des fragilités intrinsèques, qui sont de tous ordres. Que le médicament soit ou non produit en France, 80 % de la matière première vient de deux pays situés en dehors de l’Union européenne, la Chine et l’Inde. En outre, les industriels signalent des risques de tension croissants du fait du renvoi de lots pour des raisons liées au contrôle de la qualité des produits ainsi que, tout simplement, du fait de l’accroissement de la demande internationale, notamment dans les pays émergents.

Il s’y ajoute des difficultés de livraison : au cours des auditions menées par votre rapporteur, il a ainsi été indiqué que 17 % des boîtes commandées par les répartiteurs et 5 % de celles commandées par des pharmaciens d’officine n’étaient pas livrées.

Compte tenu de l’importance de ces produits, le Gouvernement et les autorités sanitaires sont conduits à jouer un rôle pilote afin de garantir le meilleur approvisionnement possible et, par-là, la sécurité sanitaire des Français. Ils organisent à cette fin les acteurs de l’approvisionnement, qui se répartissent entre les activités de production et de distribution que sont :

– les entreprises pharmaceutiques exploitant le médicament (les exploitants) ;

– les établissements pharmaceutiques se livrant à l’achat, au stockage et à la distribution des médicaments aux pharmacies, qui assurent une mission de service public (147) (les grossistes-répartiteurs devant théoriquement disposer de deux semaines de stock) ;

– les pharmaciens d’officine ;

– les pharmaciens hospitaliers (exerçant dans les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé).

Pour ce faire, le Gouvernement dispose d’un cadre juridique de nature essentiellement réglementaire, que le projet de loi entend aujourd’hui consolider dans la partie législative du code de la santé publique.

1.  Un dispositif de prévention essentiellement réglementaire

Pris en application de l’article 47 de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, le décret n° 2012-1096 du 28 septembre 2012 relatif à l’approvisionnement en médicament à usage humain constitue la colonne vertébrale du dispositif français de prévention et de réponse aux risques de rupture d’approvisionnement, dispositif placé sous le pilotage du ministère chargé de la santé.

Ce décret a inséré dans la partie réglementaire du code la définition de la rupture d’approvisionnement, au I de l’article R. 5124-49-1 : « La rupture d’approvisionnement se définit comme l’incapacité pour une pharmacie d’officine ou une pharmacie à usage intérieur définie à l’article L. 5126-1 de dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures. Ce délai peut être réduit à l’initiative du pharmacien en fonction de la compatibilité avec la poursuite optimale du traitement du patient. » Ce décret a en outre permis de préciser les obligations des différents acteurs de la chaîne du médicament.

● En premier lieu, le bon fonctionnement repose sur le rôle des exploitants. Ils sont ainsi tenus d’assurer des diligences précises, définies à l’article R. 5124-49-1, à savoir :

– informer les autorités en amont : ils sont tenus d’informer l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dès lors qu’ils anticipent un risque de situation de rupture. Ils doivent préciser les délais de survenue envisagés, les stocks disponibles, les modalités de retour à une disponibilité normale, les délais prévisionnels de remise à disposition et, le cas échéant, l’identification de spécialités pouvant se substituer à la spécialité pharmaceutique manquante ;

– garantir la meilleure continuité possible d’approvisionnement : en l’assurant au mieux au profit des grossistes-répartiteurs, afin de leur permettre d’approvisionner les officines de pharmacie de leur territoire de répartition ;

– informer pendant les périodes de ruptures : par la mise en place de centres d’appel d’urgence qui permettent le signalement des ruptures en médicaments par les pharmaciens d’officine et hospitaliers. Ces centres sont destinés à prendre en charge à tout moment ces ruptures et à permettre la dispensation effective de la spécialité manquante par des approvisionnements en urgence des pharmaciens ;

– adresser à l’agence régionale de santé (ARS) dont ils dépendent un bilan trimestriel des approvisionnements en urgence et des déclarations, pour chaque médicament en mentionnant, le cas échéant, les quantités fournies et leurs destinataires.

● De leur côté, les grossistes-répartiteurs sont tenus à leur obligation de service public sur leur territoire de répartition autorisé, notamment en assurant un approvisionnement en moins de huit heures le samedi à partir de 14 heures, le dimanche et les jours fériés. Ils participent à un système d’astreinte interentreprises leur permettant d’assurer la livraison dans les délais.

● Les pharmaciens (grossistes-répartiteurs, pharmaciens d’officine et pharmaciens des pharmacies à usage intérieur) ont pour obligation de signaler les ruptures en médicaments dont ils n’ont pas été encore informés par l’exploitant ou par l’ANSM via les centres d’appel d’urgence.

● Parallèlement, aux termes du IV de l’article R. 5124-49-1, l’ANSM informe les professionnels de santé des ruptures d’approvisionnement effectives ou anticipées et précise, s’il y a lieu, les recommandations éventuelles pour gérer cette pénurie. Ces informations sont disponibles sur le site de l’ANSM.

● Pour coordonner ce dispositif, la direction générale de la santé a mis en place un comité de suivi du décret du 28 septembre 2012. Elle effectue des bilans réguliers des ruptures d’approvisionnement et a identifié 26 établissements pivots pour la répartition des stocks d’urgence s’agissant des spécialités concernées par des ruptures.

Ce dispositif, que l’on peut qualifier de consensuel, concerne aujourd’hui 38 % des références de médicaments. Consultée pour avis sur le projet de décret, l’autorité de la concurrence avait émis un avis positif sur le dispositif, sous réserve notamment de limiter les mesures de restriction des exportations aux seuls médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (avis n° 12-A-18 du 20 juillet 2012 portant sur un projet de décret relatif à l’approvisionnement en médicaments à usage humain (148)). Comme décrit supra, le projet de loi s’inspire fortement de ce décret et, dans les faits, inscrit dans la partie législative du code des éléments introduits en 2012 dans la partie réglementaire.

2.  Mieux anticiper les réponses aux cas de rupture des molécules les plus indispensables

À travers cet article, le projet de loi apporte une réponse législative ambitieuse aux situations de rupture d’approvisionnement. Il vise notamment à renforcer les instruments à la disposition des pouvoirs publics pour faire face aux ruptures d’approvisionnement. Il renforce également les obligations pesant sur les acteurs du circuit de distribution.

Pour ce faire, cet article modifie et enrichit la cinquième partie du code de la santé publique. Il prévoit ainsi de :

– déterminer quels sont les médicaments pour lesquels les ruptures sont les plus préjudiciables ;

– préciser les nouvelles obligations pour les titulaires d’autorisations de mise sur le marché et les exploitants ;

– déterminer les conditions de définition de la liste des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur en situation de rupture ou en risque de rupture ;

– renforcer les obligations d’identification et de mise en œuvre de solutions alternatives pesant sur les exploitants de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur ;

– encadrer les règles d’exportation applicables à ces médicaments ;

– adapter les modalités de dispensation au détail des médicaments en situation ou en risque de rupture et des médicaments importés pour pallier ces ruptures.

En , cet article insère un article L. 5111-4 nouveau au sein du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la santé publique. Il apporte une définition législative des médicaments ou classes de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Il s’agit des médicaments ou classes de médicaments dont la rupture de l’approvisionnement conduirait à la mise en cause du pronostic vital des patients. Il s’agit d’une définition large seulement tempérée par un horizon temporel lui-même relativement lâche « à court ou moyen terme ». Relèvent également de cette catégorie les médicaments ou classes de médicaments dont la rupture d’approvisionnement représenterait « une perte de chance importante » en regard de leur maladie, que ce soit du fait de la gravité constatée de cette maladie ou de l’évolution qu’elle pourrait connaître faute de traitement.

En , à la suite de cette définition, est insérée la majeure partie des dispositions nouvelles dans un chapitre Ier quater au titre Ier du livre Ier.

Ce chapitre est intitulé « Lutte contre les ruptures d’approvisionnement » et comprend les articles L. 5121-29 à L. 5121-34.

L’article L. 5121-29 confère aux personnes morales titulaires d’autorisations de mise sur le marché ainsi qu’aux entreprises pharmaceutiques exploitant des médicaments une responsabilité générale d’approvisionnement. Cet approvisionnement concerne le territoire national et l’ensemble des patients s’y trouvant (149). Deux adjectifs précisent la nature de l’approvisionnement qui doit être « approprié » et « continu ». Ces précisions ménagent une certaine marge d’appréciation s’agissant de l’étendue et de la déclinaison concrète de cette responsabilité, ce qui est adapté au caractère spécifique de ce marché. Cet article doit tout de même être interprété comme posant l’obligation d’une fourniture constante des médicaments mis sur le marché et exploité, à un niveau permettant de répondre raisonnablement à la demande.

Le deuxième alinéa de cet article précise les obligations qui en découlent. Assurer la fourniture en médicaments suppose une action a priori, à savoir « toute mesure utile pour prévenir et pallier toute difficulté d’approvisionnement », formulation qui reprend celle en vigueur sur le plan réglementaire.

Le cas de rupture de stock est explicitement prévu : il entraîne la mise à disposition des informations dont disposent les titulaires d’autorisation de mise sur le marché ainsi que les entreprises pharmaceutiques exploitant les médicaments au profit :

– des pharmaciens d’officine ;

– des pharmaciens de pharmacies de pharmacie à usage intérieure (de l’article L. 5126-1) ;

– des pharmaciens responsables ou délégués de grossistes répartiteurs.

L’objectif est de leur permettre, le plus rapidement possible, d’informer les patients et de mettre à leur disposition des mesures de substitution lorsqu’elles existent. Ces processus doivent se dérouler avec la plus grande rapidité et doivent être anticipés au mieux, d’où le projet de systématiser ce protocole en l’inscrivant dans la loi.

Cet article nouveau n’introduit pas d’innovation pour les acteurs de la répartition. Il permet en fait de remonter au niveau législatif les dispositions de l’article R. 5124-48-1 du décret de 2012.

L’article L. 5121-30 fait quant à lui référence à la liste des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur défini en à l’article L. 5111-4. Il rappelle que les médicaments pour lesquels une rupture ou un risque de rupture a été identifié sont déclarés à l’ANSM, ce qui correspond au dispositif en vigueur (article R. 5124-49-1). Disposition nouvelle en revanche, le directeur général de l’ANSM en établit la liste, rendue publique par publication sur la toile. Cette liste peut en outre préciser, lorsque cela s’avère pertinent, si les médicaments en question peuvent être vendus au public au détail par les pharmacies à usage intérieur.

L’article L. 5121-31 prévoit la préparation en amont, par les titulaires d’autorisations de mise sur le marché (AMM) et les entreprises pharmaceutiques exploitant des médicaments de plans de gestion des pénuries. Il s’agit, au regard du seul intérêt des patients, de prévenir et pallier au mieux toute rupture de stock. Ces plans de gestion ne sont pas publics. Cependant les personnes morales chargées de les prévoir dressent la liste de leurs plans qu’ils déclarent auprès de l’agence.

Ces plans constituent une innovation importante. Ils prévoiront les mesures prises ou envisageables pour faire face à la pénurie telle que l’importation d’une spécialité de remplacement pouvant se substituer à la spécialité en défaut, le basculement vers une autre chaîne de production, ou encore la constitution de stock en amont.

L’article L. 5121-34 prévoit que les modalités d’application de ces dispositions seront précisées par un décret. Ce décret précisera notamment les caractéristiques des médicaments pour lesquels sont définis des plans de gestion. Un arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l’ANSM décrira les classes thérapeutiques auxquelles ces médicaments appartiennent.

L’article L. 5121-32 prévoit l’obligation faite à l’entreprise pharmaceutique exploitant un médicament d’intérêt thérapeutique majeur d’informer l’ANSM de tout élément permettant d’identifier une rupture de stock ou bien un risque de rupture de stock sur le médicament qu’elle exploite.

Renforçant ainsi les obligations en vigueur (article L. 5124-6, voir supra), cet article prévoit que sous réserve de validation de l’agence, l’entreprise met en place des solutions alternatives permettant de faire face à la situation et met en œuvre les mesures envisagées dans le plan de gestion. C’est la suite logique du dispositif d’anticipation, destiné à faire face au plus vite à la rupture de stock ou au risque de rupture de stock, dans le cadre d’un dialogue constant avec les autorités sanitaires. Les solutions alternatives, lorsqu’elles existent, sont plurielles : déblocage de stocks, recours à des produits concurrents, etc. Les mesures adéquates d’informations des patients sont également prises. Il s’agit ici d’une avancée par rapport au dispositif réglementaire en vigueur, où la recherche de solutions alternatives relève par défaut de la responsabilité de l’ANSM qui s’appuie sur des procédures amiables.

L’article L. 5121-33 autorise les officines de pharmacie à dispenser au détail les médicaments disposant d’une autorisation d’importation. Le recours à cette solution vise à faire face à la rupture d’approvisionnement d’un médicament d’intérêt thérapeutique majeur. Cette faculté est ouverte sur simple décision du directeur général de l’Agence, décision publiée sur son site internet et non plus sur une décision administrative, plus complexe, du ministère de la santé.

Cette innovation constitue une mesure de bon sens permettant d’adapter au plus juste la distribution de médicaments devenus subitement rares, en attentant le retour à un approvisionnement normal.

L’article L. 5121-34 est le dernier de ceux composant le chapitre Ierquater « Lutte contre les ruptures d’approvisionnement ». Il s’agit d’un article récapitulatif portant sur l’application de l’ensemble du chapitre qu’il renvoie à un décret en Conseil d’État.

Le de l’article prévoit quant à lui la suppression des deux dernières phrases du premier alinéa de l’article L. 5124-6 du code. Les dispositions visées sont les suivantes :

« Elle doit en outre informer l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé de tout risque de rupture de stock ou de toute rupture sur un médicament ou produit sans alternative thérapeutique disponible, dont elle assure l’exploitation, ainsi que de tout risque de rupture de stock ou de toute rupture sur un médicament ou produit dont elle assure l’exploitation, lié à un accroissement brutal et inattendu de la demande. Lorsque le médicament est utilisé dans une ou des pathologies graves dans lesquelles elle ne disposerait pas d’alternatives disponibles sur le marché français, l’entreprise apporte à l’agence sa collaboration à la mise en place de solutions alternatives permettant de couvrir ce besoin et des mesures d’accompagnement nécessaires. »

Cette suppression est la suite logique de l’insertion du chapitre Ier quater : ce chapitre nouveau sera entièrement dévolu aux situations de rupture d’approvisionnement. Il convient donc de supprimer les dispositions qui couvrent jusqu’alors, de façon incidente, ces hypothèses.

Le champ visé par les dispositions supprimées était plus restreint, car il ne visait pas explicitement l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement et posait une seule obligation d’information et de collaboration avec les autorités. Les dispositions nouvelles que lui substitue le projet de loi renforceront quant à elles les obligations de moyens et de résultats : en ce qui concerne la transmission d’informations et de données il est vrai, mais aussi dans la définition et la mise en œuvre des plans de gestion. La suppression de ces deux phrases, mise en regard de dispositions nouvelles, illustre l’avancée considérable que propose le projet de loi dans cette matière.

Le complète quant à lui le deuxième alinéa de l’article L. 5124-17-2 du même code qui porte sur les obligations de service public (alinéa 1) et de couverture du territoire (alinéa 2) des grossistes répartiteurs. Le prévoit d’introduire un nouvel alinéa afin de mentionner leur participation à la prévention et à la gestion des ruptures de médicaments, précisément « au titre des obligations de service public » mentionnées au premier alinéa.

Le insère un nouvel article, après l’article L. 5124-17-2. L’article L. 5124-17-3 renforce les obligations pesant sur les grossistes-répartiteurs en prévoyant de subordonner les exportations de médicament ainsi que les ventes aux distributeurs en gros réalisées par les grossistes-répartiteurs à la satisfaction de leurs obligations de service public. Celles-ci sont définies à l’article L. 5124-17-2, qui renvoie leur définition à un décret en Conseil d’État (cf. ).

Le deuxième alinéa de cet article proscrit quant à lui l’exportation de médicaments, lorsqu’ils relèvent de la catégorie dite des « médicaments d’intérêt thérapeutique majeur », telle que définie à l’article L. 5120-30 (cf. ).

Le complète par un nouvel alinéa l’article L. 5126-4 qui décrit les conditions dans lesquelles le ministre chargé de la santé définit la liste des médicaments que certains établissements de santé, disposant d’une pharmacie à usage intérieur, sont autorisés à vendre au public, ainsi que les conditions de leur prise en charge par l’assurance maladie. Cet alinéa autoriserait les pharmacies à usage intérieur à vendre au public, au détail, les médicaments en rupture ou en risque de rupture, pourvu que leur vente au public ait été autorisée par l’ANSM, dans les conditions prévues à l’article L. 5121-30 (cf. ).

Le complète le 2° de l’article L. 5423-8 afin d’y introduire la mention du non-respect des obligations de réponse aux risques ou situations de rupture, à savoir la mise en place « des solutions alternatives ou des mesures prévues par les plans de gestion des pénuries et des mesures d’accompagnement des professionnels de santé et des patients ».

En effet, la rédaction en vigueur ne porte en l’état que sur le non-respect de l’obligation d’information. Il s’agit donc d’une mesure de cohérence, qui met à jour l’article L. 5423-8, en complétant les cas dans lesquels les entreprises pharmaceutiques peuvent être soumises à sanction financière en cas de rupture de stock ou encore en cas de défaut de plan de gestion de pénurie ou de recherche de solutions alternatives.

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La Commission examine l’amendement AS1289 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’amendement précise l’article en ajoutant la notion de « combinaisons de médicaments », nécessaire au traitement de certaines pathologies.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’amendement est superfétatoire. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AS1595 rectifié de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. L’amendement précise l’article par la notion d’absence « d’alternatives thérapeutiques » pour les médicaments non substituables dans la même classe.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1290 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Par souci de cohérence, l’amendement propose de substituer à la mention de « rupture de stock » celle de la « rupture d’approvisionnement ».

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’amendement est satisfait par le texte même. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements AS1596, AS1599, AS1291, AS1600, AS1292, AS1597 et AS1602 de Mme Dominique Orliac.

Elle adopte enfin l’article 36 sans modification.

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Après l’article 36

La Commission examine les amendements identiques AS298 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1294 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS298 tend à prévenir les conflits d’intérêts en interdisant aux industriels du secteur du médicament et des dispositifs médicaux et aux prestataires de services en santé de gérer un centre de santé ou d’être titulaires d’une autorisation d’activité de soins ou d’établissement ou service social ou médico-social. Cela se produit trop souvent et mine la confiance des usagers dans le service de santé.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS1294 a le même objet.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. L’objectif est juste, mais la proposition aurait pour conséquence d’empêcher les établissements concernés de réaliser certaines activités. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS364 de M. François-Michel Lambert.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons, comme cela se fait en Allemagne, d’autoriser la réutilisation après stérilisation du matériel médical à usage unique aux fins d’expérimentation et dans des conditions sécurisées. Cet amendement serait facteur de très importantes économies.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Des discussions à ce sujet sont en cours au niveau européen. Je suggère, par respect du principe de précaution, que nous nous en tenions aux procédures actuelles jusqu’à ce qu’une position commune ait été définie, que nous adopterons alors. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Chapitre IV
Développer la recherche et l’innovation en santé au service des malades

Article 37
(art. L. 1121-13-1 [nouveau], L. 4211-9-1 et L. 5121-1 du code de la santé publique)

Mise en œuvre au sein des établissements de santé de recherches cliniques industrielles et autorisation de fabrication de médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement

Cet article vise à réduire les délais de mise en œuvre des recherches cliniques industrielles au sein des établissements de santé et permet de soutenir la recherche dans le domaine des médicaments de thérapie innovante.

I. LE SOUTIEN À LA RECHERCHE INDUSTRIELLE EN MATIÈRE BIOMÉDICALE

Le I insère un article au sein du chapitre Ier du titre II de la première partie du code de santé publique relatif aux principes de la recherche biomédicale.

A.  LES PRINCIPES DE LA RECHERCHE BIOMÉDICALE

Définie à l’article L. 1121-1, la recherche biomédicale consiste en une recherche organisée et pratiquée sur l’être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales ; elle est encadrée par un régime protecteur de la personne humaine.

En effet, les dispositions législatives prévoient que la recherche ne peut être effectuée sur l’être humain que si certaines conditions sont réunies :

– la recherche doit se fonder sur le dernier état des connaissances scientifiques et sur une expérimentation préclinique suffisante ;

– le risque prévisible encouru par les personnes qui se prêtent à la recherche ne doit pas être hors de proportion avec le bénéfice escompté pour ces personnes ou l’intérêt de cette recherche ;

– la recherche doit viser à étendre la connaissance scientifique de l’être humain et les moyens susceptibles d’améliorer sa condition ;

– la recherche biomédicale doit avoir été conçue de telle façon que soient réduits au minimum la douleur, les désagréments, la peur et tout autre inconvénient prévisible lié à la maladie ou à la recherche ;

– la recherche ne peut être réalisée qui si le promoteur a reçu l’avis favorable d’un comité de protection des personnes et l’autorisation de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. La personne qui se prête à la recherche a donné son consentement, après avoir reçu une information sur cette étude.

Les personnes impliquées dans une recherche biomédicale sont les suivantes :

– la personne qui se prête à la recherche ;

– le promoteur, personne physique ou morale qui prend l’initiative de la recherche biomédicale sur l’être humain, qui en assure la gestion et le financement ;

– l’instigateur : personne physique dirigeant et surveillant la réalisation de la recherche sur un lieu. C’est l’interlocuteur principal de la personne qui se prête à la recherche.

B.  UNE RECHERCHE INDUSTRIELLE À SOUTENIR

Le nouvel article L. 1121-13-1 vise à mettre en œuvre la mesure n° 19 du contrat stratégique de filière signé le 5 juillet 2013 entre le Gouvernement et les industries de santé.

Celui-ci qui prévoit de « simplifier et accélérer la mise en place des essais cliniques à promotion industrielle dans les établissements de santé en mettant en place une convention unique intégrant les honoraires investigateurs et augmenter le nombre d’essais cliniques proposés à la France ». Cette mesure est notamment motivée par le souci de soutenir la recherche industrielle en France dans un contexte de forte diminution (– 21 % entre 2007 et 2011) et de concurrence internationale accrue.

L’hétérogénéité actuelle des contrats de recherche constitue un des obstacles à la réalisation d’études cliniques industrielles en France. En promouvant une convention unique, le contrat stratégique de filière précité vise à augmenter la part des essais cliniques industriels pour le médicament proposés à la France.

Le premier alinéa dispose que pour les recherches à finalité commerciale, les produits faisant l’objet de cette recherche sont, pendant la durée de celle-ci, fournis gratuitement ou mis gratuitement à disposition par le promoteur. Selon les informations transmises à votre rapporteur, les produits en question sont mentionnés à l’article L. 5311-1 du code de la santé publique. Ce dispositif ne constitue pas une innovation juridique. En effet, il est actuellement prévu par la voie réglementaire (150).

Extrait de l’article L. 5311-1 du code de la santé publique

« 1°Les médicaments, y compris les insecticides, acaricides et antiparasitaires à usage humain, les préparations magistrales, hospitalières et officinales, les substances stupéfiantes, psychotropes ou autres substances vénéneuses utilisées en médecine, les huiles essentielles et plantes médicinales, les matières premières à usage pharmaceutique ;

2° Les produits contraceptifs et contragestifs ;

3° Les biomatériaux et les dispositifs médicaux ;

4° Les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ;

5° Les produits sanguins labiles ;

6° Les organes, tissus, cellules et produits d’origine humaine ou animale, y compris lorsqu’ils sont prélevés à l’occasion d’une intervention chirurgicale ;

7° Les produits cellulaires à finalité thérapeutique ;

8° Le lait maternel collecté, qualifié, préparé et conservé par les lactariums ;

9° Les produits destinés à l’entretien ou à l’application des lentilles de contact ;

10° (Abrogé) ;

11° Les procédés et appareils destinés à la désinfection des locaux et des véhicules dans les cas prévus à l’article L. 3114-1 ;

12° Les produits thérapeutiques annexes ;

13° (Abrogé) ;

14° Les lentilles oculaires non correctrices ;

15° Les produits cosmétiques ;

16° Les micro-organismes et toxines mentionnés à l’article L. 5139-1 ;

17° Les produits de tatouage ;

18° Les logiciels qui ne sont pas des dispositifs médicaux et qui sont utilisés par les laboratoires de biologie médicale, pour la gestion des examens de biologie médicale et lors de la validation, de l’interprétation, de la communication appropriée en application du 3° de l’article L. 6211-2 et de l’archivage des résultats ;

19° Les dispositifs à finalité non strictement médicale utilisés dans les laboratoires de biologie médicale pour la réalisation des examens de biologie médicale. »

Le deuxième alinéa prévoit que les frais supplémentaires liés à d’éventuels examens ou fournitures spécifiquement requis par le protocole de la recherche sont à la charge du promoteur. Comme pour le premier alinéa, la rédaction reprend des dispositions d’ordre réglementaire déjà en vigueur (151).

Le troisième alinéa constitue le cœur de l’article. Il prévoit la mise en place d’une convention unique destinée à la prise en charge des frais et des surcoûts liés à une recherche réalisée dans un ou plusieurs établissements de santé.

Signée entre le promoteur et le représentant légal de chaque établissement de santé, la convention est conforme à une convention type définie par un arrêté du ministre en charge de la santé.

Aujourd’hui, une telle convention type existe (152) mais elle ne concerne que les établissements publics de santé. Le présent article permettra d’en généraliser l’usage à tous les établissements privés et publics. Le décret qui sera pris définira le modèle de convention qui fera ensuite l’objet de l’arrêté.

II. LE SOUTIEN APPORTÉ À LA THÉRAPIE INNOVANTE

Le II modifie les articles L. 4211-9-1 et L. 5121-1 du code de la santé publique renforce le dispositif de recherche portant sur les thérapies innovantes.

A.  LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA THÉRAPIE INNOVANTE

L’article L. 4211-9-1 prévoit que les établissements ou organismes autorisés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) après avis de l’agence de la biomédecine peuvent assurer la préparation, la conservation, la distribution, la cession, des médicaments de thérapie innovante (MTI) préparés ponctuellement. Celle-ci est délivrée pour une durée de cinq ans et peut être renouvelée.

L’article 2 du règlement (CE) n° 1394/2007 du 13 novembre 2007 (153) précise qu’un médicament de thérapie innovante consiste en un médicament de thérapie génique, un médicament de thérapie cellulaire somatique ou un produit issu de l’ingénierie tissulaire.

Un MTI préparé ponctuellement (MTI-PP), quant à lui, est un MTI qui, en raison de ses caractéristiques et de sa destination, est préparé de façon ponctuelle à l’attention d’un malade déterminé Les MTI-PP sont définis au 17° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique. Il s’agit de tout médicament tel que défini dans le règlement précité, fabriqué en France selon des normes de qualité spécifiques et utilisé dans un hôpital en France, sous la responsabilité d’un médecin, pour exécuter une prescription médicale déterminée pour un produit spécialement conçu à l’intention d’un malade déterminé.

A.  LES ÉVOLUTIONS APPORTÉES PAR LE TEXTE

● Le 1° du II complète la législation pour permettre, dans le cas des MTI-PP, que les établissements ou organismes autorisés par l’ANSM, réalisent les importations et exportations dans le cadre de recherches biomédicales.

Les dispositions législatives actuelles ne prévoient pas que les établissements autorisés à préparer et conserver les MTI-PP puissent également les importer et les exporter notamment dans le cadre de recherches biomédicales. Cette situation se révèle être un frein à l’innovation et à la recherche en France dans la mesure où les chercheurs français ne peuvent pas participer à des essais cliniques multicentriques européens ou internationaux. Afin de permettre aux équipes françaises de recherche de participer aux essais qui se déroulent au sein de l’espace européen ou international, il est nécessaire de prévoir que dans le cadre des recherches biomédicales, les établissements qui préparent des MTI-PP expérimentaux puissent les importer et les exporter.

C’est pourquoi il est proposé de compléter l’article L 4211-9-1 :

– en permettant l’importation et l’exportation dans le cadre des recherches définies à l’article L. 1121-1, c’est-à-dire les recherches biomédicales. L’étude d’impact précise que cette mesure est motivée par le souci de ne pas pénaliser les chercheurs français : les MTI-PP doivent pouvoir faire l’objet d’importation et d’exportation, notamment dans le cadre des essais multicentriques européens ;

– en prévoyant que le dispositif s’appliquerait aux établissements de santé.

Cet article vise à permettre aux établissements de santé déjà titulaires d’une autorisation au titre de l’article L. 1243-2 du code de la santé publique (banque de tissus et unité de thérapie cellulaire) d’obtenir une autorisation pour fabriquer des MTI au moins dans le cadre de la recherche impliquant la personne humaine.

Le 2° du II modifie, par coordination, le 17 ° de l’article L. 5121-1. La définition des MTI-PP est désormais assortie d’une dérogation accordant la possibilité de fabriquer, importer ou exporter ces médicaments dans le cadre des recherches portant sur la thérapie innovante.

*

Outre quatre amendements rédactionnels, le dispositif a été complété par voie d’amendement gouvernemental afin de permettre aux établissements de santé de préparer, dans le cadre des recherches biomédicales, des médicaments de thérapie innovante lorsque ces derniers sont destinés à être mis sur le marché dans les États membres. Ainsi, les établissements de santé déjà titulaires d’une autorisation d’unité de thérapie cellulaire pourront solliciter auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament une autorisation complémentaire pour pouvoir préparer ces médicaments dans le cadre des recherches biomédicales.

*

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS67, AS949 et AS68 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS1502 du Gouvernement.

Mme la ministre. L’amendement a pour objet de permettre aux établissements de santé de préparer, dans le cadre des recherches biomédicales, des médicaments de thérapie innovante destinés à être mis sur le marché.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS69 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ensuite l’amendement AS1121 de M. Arnaud Richard.

Elle adopte enfin l’article 37 modifié.

*

Après l’article 37

La Commission examine l’amendement AS1175 de Mme Maud Olivier.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Comme l’a souligné le Conseil économique, social et environnemental dans un rapport de 2010, les différences biologiques entre les hommes et les femmes sont insuffisamment prises en compte dans les traitements médicaux proposés. On note en effet une sous-représentation des femmes dans la recherche médicale et les essais cliniques. Aussi, l’amendement tend à ce que la recherche biomédicale tienne compte de la nécessité d’une approche sexuée.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Les essais cliniques sur les femmes sont beaucoup moins fréquents que sur les hommes par crainte qu’elles ne soient enceintes. On note aussi que l’insuffisance d’essais cliniques sur les enfants fait que les pédiatres manquent d’études qui leur permettraient de mieux prescrire. L’objectif visé est donc positif, mais la voie préconisée pour l’atteindre n’est pas la meilleure. Je suggère le retrait de l’amendement, et que l’on cherche les moyens réglementaires incitant à la réalisation d’essais cliniques plus fréquents sur les enfants et les femmes même si cela induit un surcoût – car il faut s’assurer que les femmes qui se soumettent à ces essais cliniques sont sous contraceptif pendant toute la durée de l’expérimentation. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

*

Article 37 bis
Dialogue préalable entre la Haute autorité de santé
et les entreprises porteuses de produits innovants

Cet article vise à organiser un dialogue préalable à l’évaluation entre les services de la HAS et les entreprises porteuses de projets innovants. Il permettra à ces entreprises d’obtenir un descriptif de la méthodologie de l’étude et des indicateurs attendus pour évaluer les produits, pour sécuriser le dispositif d’évaluation et éviter des investissements inutiles et des délais supplémentaires.

*

La Commission examine l’amendement AS1665 du Gouvernement.

Mme la ministre. L’amendement tend, en accélérant les procédures, à renforcer l’attrait de la France en matière d’essais cliniques.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 37 bis

La Commission est saisie de l’amendement AS297 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement propose d’étendre l’expérimentation du cannabis thérapeutique aux patients atteints de troubles de spasticité et de troubles neurologiques d’origine cérébrale et aux malades sous traitement chimiothérapique. Cela répond à un besoin réel qui impose de passer outre les tabous moralisateurs.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Avis défavorable, non point en raison d’un « tabou moralisateur », mais parce que, pour le moment, le contrôle de l’usage du cannabis est insuffisant en France.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS825 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Pour accroître l’offre de soins existant dans les départements ou dans les collectivités d’outre-mer, l’amendement tend à ce que le Gouvernement favorise la conclusion d’accords internationaux de coopération régionale de santé.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Cette question ne relève pas de la loi. Je suggère le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS1399 de M. Serge Letchimy.

Mme Monique Orphé. La géographie de l’outre-mer fait militer en faveur d’un plan d’action général de développement de la télémédecine dans ces territoires. C’est le sens de l’amendement.

M. Jean-Louis Touraine, rapporteur. Une expérimentation est en cours à la Guadeloupe, avec la participation du CHU. Je suggère que le Parlement soit informé de son bilan, afin que l’on puisse en tirer les conclusions nécessaires. Dans l’intervalle, je suggère le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

Puis elle examine l’amendement AS1481 de Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. L’amendement tend à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport indiquant comment l’on pourrait développer outre-mer un ou plusieurs pôles d’excellence dans le domaine de la recherche et de la médecine tropicale.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

*

TITRE IV
RENFORCER L’EFFICACITÉ DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET LA DÉMOCRATIE SANITAIRE

Le quatrième titre du projet de loi vise à renforcer l’efficacité des politiques publiques dans le domaine de la santé et améliorant l’articulation entre ses grands acteurs.

Ses six chapitres visent respectivement à :

– renforcer l’animation territoriale conduite par les agences régionales de santé (ARS) au chapitre Ier ;

– renforcer l’alignement stratégique entre l’assurance maladie et l’État (chapitre II) ;

– réformer le système d’agences (chapitre III) ;

– renforcer les droits des usagers et leur association à l’élaboration de la politique de santé (chapitre IV) ;

– réformer les conditions d’accès aux données de santé (chapitre V) ;

– et renforcer le dialogue social dans le domaine sanitaire (chapitre VI).

Chapitre Ier
Renforcer l’animation territoriale conduite par les ARS

Ce premier volet du titre IV rassemble deux articles réformant l’animation des politiques de santé dans les régions. Ils proposent notamment de renforcer le pouvoir des directeurs d’ARS dans l’organisation de l’offre sanitaire et médico-sociale (article 38) et dans le pilotage du système d’alerte sanitaire en régions (article 39).

Article 38
(art. L. 1434-1 à L. 1434-10, L. 1431-2, L. 1432-1, L. 1432-3, L. 1432-4, L. 1433-2, L. 1435-4-2, L. 1435-5-1, à L. 1435-5-4, L. 3131-7, L. 3131-8, L. 3131-11 du code de la santé publique ; art. 151 ter du code général des impôts ; art. L. 362-6 du code de l’éducation)

Simplification et assouplissement des programmes régionaux de santé

L’article 38 occupe une place particulière dans le projet de loi : il permet de réformer la gouvernance sanitaire régionale en simplifiant les outils de pilotage et en renforçant le rôle des directeurs généraux d’Agences régionales de santé (ARS). Il revoit les critères de définition des territoires de santé et propose des modalités rénovées de détermination des zones sanitaires. Les conférences de territoires sont supprimées au profit de conseils territoriaux de santé (CTS) réunissant l’ensemble des acteurs sanitaires sur le territoire.

Alors que l’ARS met en œuvre la politique de santé publique en liaison avec les services chargés de la santé au travail, de la santé scolaire et universitaire et de la protection maternelle et infantile, cet article permettra aussi d’accroître la cohérence des actions que conduisent ces acteurs en renforçant les compétences de la commission de coordination des politiques publiques de santé (CCPPS).

Il propose enfin une amélioration des outils dévolus à :

– la gestion de situations sanitaires exceptionnelles sur le territoire des ARS avec en particulier la réforme des plans blancs ;

– la promotion de la santé, qui sera érigée en champ d’action de premier rang pour les ARS.

I. LA RÉFORME DE LA PLANIFICATION SANITAIRE ET MÉDICO-SOCIALE RÉGIONALE

Le I rassemble les modifications intervenant au sein du code de la santé publique.

1.  Renforcer le caractère stratégique et opérationnel de la programmation régionale en simplifiant et en assouplissant les PRS

En 1996, les agences régionales de l’hospitalisation ont été créées afin de mettre en œuvre les dispositions du schéma régional de l’organisation des soins (SROS). La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) les a remplacées par les ARS. Elles sont été dotées de pouvoirs élargis et disposent de divers outils facilitant leur intervention. Cette même loi a également prévu leur coordination avec des acteurs nombreux, institutionnels ou professionnels, et leur a confié la mise en œuvre des projets régionaux de santé (PRS). Elles ont enfin été chargées de la mise en œuvre des schémas régionaux d’organisation médico-sociale (SROMS) : attribuer le pilotage de l’offre dans ces différents secteurs constituait un premier gage de mise en cohérence.

Toutefois, l’accumulation des missions a entraîné aussi l’accumulation des documents, des procédures ou encore des logiques. C’est pourquoi, six ans après leur création, l’optimisation de l’action des ARS suppose d’améliorer ou de renforcer certains des outils à leur disposition. Elles n’en seront que plus efficaces dans la mise en œuvre des objectifs de la stratégie nationale de santé. Ce qui passe, avant tout, par une réforme de la programmation, pour lui donner plus de simplicité, de cohérence et d’efficacité.

a.  La nécessaire réforme des PRS

Le système actuel de planification de l’offre sanitaire et médico-sociale articule au sein des PRS un plan stratégique régional de santé (PSRS) avec :

– un schéma régional de prévention ;

– un schéma régional de l’organisation des soins (SROS) ;

– un schéma régional d’organisation médico-sociale (SROMS) ;

– et, outre ces trois schémas sectoriels, différents programmes de mise en œuvre.

Cette organisation, qui visait à couvrir tous les champs de l’action sociale et médico-sociale entre lesquels il existe une évidente continuité, est devenue, avec le temps, complexe et difficile à coordonner. L’existence de documents cloisonnant les actions dans chacun des domaines diminue bien souvent la dimension stratégique de l’ensemble, c’est-à-dire coordonnée et de long terme, visant des objectifs précis, qui serait pourtant nécessaire. De surcroît, la conception de ces documents, leur adoption, mais également leur suivi, conduit systématiquement à des charges importantes liées à la multiplication des consultations et travaux d’adaptation. Cette situation est d’autant plus problématique que, bien souvent, ces procédures parallèles mobilisent des acteurs similaires. De surcroît, toute modification suppose un processus relativement contraignant.

Le schéma ci-après, extrait de l’étude d’impact jointe au projet de loi, synthétise l’organisation actuelle et met en lumière sa complexité.


STRUCTURE ACTUELLE DES PRS

PRGDR : programme régional de gestion du risque.

PRAPS : programme régional d’accès à la prévention et aux soins.

PRIAC : programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie.

Source : Projet de loi relatif à la santé – Étude d’impact.

Dans son rapport annuel sur l’exécution des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014, la Cour des comptes a corroboré ce constat (voir Chapitre XI : Les projets régionaux de santé : un cadre peu opérationnel) plaidant pour une simplification des conditions d’élaboration des PRS ainsi que de leur structure. La Cour a en effet mis en lumière l’existence de procédures d’élaboration « trop lourdes et complexes », relevant que les PRS qui devaient être arrêtés dans toutes les régions fin 2011 ne l’ont finalement été qu’au début 2013 - ce retard étant en grande partie imputable à la multiplication des consultations ainsi qu’à la complexité du processus de zonage. Il en résulte que les PRS sont des documents trop volumineux, souvent de plus de 1 000 pages, comportant généralement plusieurs centaines d’objectifs insuffisamment hiérarchisés et peu ou pas articulés avec l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM).

Quelques années seulement après leur adoption, la Cour constate ainsi l’échec relatif des PRS : ils n’ont pas permis de mettre en place une action sanitaire véritablement cohérente au niveau des régions.

Elle a également mis en lumière la fragilité de la démocratie sanitaire locale. L’obligation de consulter les conférences régionales de la santé et de l’autonomie (CRSA) a certes contribué à l’expression de tous les acteurs de santé. Au niveau du bassin de vie, les conférences de territoire (CT) ont été également été créées par la loi HPST n’ont pas permis de favoriser la participation de tous à la politique régionale de santé. Elles font face à un risque d’essoufflement et la Cour considère que « l’apport de ces conférences de territoire, dont les missions réglementaires sont limitées, n’est pas avéré ; leur fonctionnement est très hétérogène, leurs réunions irrégulières et leur articulation avec la CSRA souvent faible ». Leur composition (entre 20 et 100 personnes) ainsi que le manque de formation de certains membres entraîne souvent une lourdeur d’organisation à laquelle s’ajoute le constat d’un absentéisme qui « peut être important ».

Partant d’un constat similaire, la stratégie nationale de santé (SNS) a mis en avant la nécessité de renforcer les actions de promotion de la santé et de la prévention. Cela suppose le renforcement des missions et des capacités de coordination des ARS dans ce domaine.

Par conséquent, réformer les PRS, c’est tout d’abord réaffirmer et renforcer leur caractère stratégique, ce qui suppose de définir ces documents en conformité avec la SNS. Il convient en outre, pour la mise en œuvre du PRS, de mettre fin à l’approche segmentée de la planification régionale ce qui se traduirait par l’adoption d’un document unique rassemblant l’ensemble des éléments de pilotage et de gestion actuellement couverts par les SROS, les SROMS et les schémas régionaux de prévention. La fusion de ces documents permettrait mécaniquement de développer une approche transversale et de faciliter les parcours de santé.

C’est bien l’intention du Gouvernement, qui entend réaliser la mise en œuvre du PRS sur la base d’une territorialisation des actions des ARS et d’une approche plus souple permettant d’adapter au mieux la politique conduite dans chaque région. Le schéma ci-après décrit l’organisation proposée dans le projet de loi.


STRUCTURE DES PRS PROPOSÉE PAR LE PROJET DE LOI DE SANTÉ

Source : Projet de loi relatif à la santé – Étude d’impact.

Les outils proposés dans cet article permettront de répondre à certaines des critiques et propositions de la Cour des comptes en réduisant la complexité des documents, en développant les approches sectorielles, en diminuant les consultations préalables, mais aussi par la simplification et le recentrage de la programmation régionale.

Les orientations des PRS seront inscrites dans une temporalité de 10 ans, une durée censée correspondre aux modifications attendues de l’état de santé de la population et permettant donc d’inscrire le PRS dans une perspective stratégique.

Tout ne sera pas résolu pour autant et il faudra compléter ces dispositions par d’autres actions :

– dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale, en apportant des réponses aux critiques de la Cour portant sur « une certaine résistance » manifestée par l’Assurance maladie face à la création des ARS ou encore sur la faiblesse des crédits mobilisés pour lutter contre les inégalités de santé ;

– dans le suivi plus général de la politique sanitaire, par exemple en limitant le phénomène de multiplication des plans nationaux de santé et plus généralement d’empilement d’initiatives aussi volontaristes que dispersées, dont le secteur est assez fertile.

b.  Réformer le PRS pour le rendre plus stratégique

Le substitue une nouvelle rédaction à celle du chapitre IV du titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique. Le titre III rassemble les dispositions relatives aux ARS et, en son sein, le chapitre IV celles dites de « Planification régionale de santé ». La nouvelle rédaction le baptise « Territorialisation de la politique de santé » afin de marquer l’ambition d’adapter la politique sanitaire régionale aux spécificités des différents territoires qu’elle couvre.

La première section du nouveau chapitre IV porte sur le « Projet régional de santé ».

Son article L. 1434-1 reprend la définition en vigueur du PRS pour rappeler qu’il définit les objectifs pluriannuels de l’ARS ainsi que les mesures tendant à les atteindre, conformément aux lois de financement de la sécurité sociale et à la stratégie nationale de santé. Est en revanche supprimé le deuxième alinéa de la rédaction en vigueur qui dispose que le PRS « s’inscrit dans les orientations de la politique nationale de santé ». Ce choix s’explique aisément : le PRS doit être la déclinaison stratégique d’une politique cohérente dont les objectifs sont rassemblés et articulés au niveau national dans la SNS.

L’article L. 1434-2 décrit en deux parties la composition du PRS, à savoir :

– d’un cadre stratégique, fixant les grandes orientations à 10 ans (1°),

– d’un document de planification appelé le schéma régional de santé (2°). Établi pour une durée de cinq ans. Il comporte des prévisions sur l’ensemble de l’offre de soins et de services de santé. L’article mentionne explicitement des secteurs devant être mis en valeur dans ce document : la prévention et la promotion de la santé ainsi que l’accompagnement médico-social. Le schéma régional fait la jonction entre les objectifs généraux (définis dans le cadre des orientations stratégiques) et la déclinaison opérationnelle : il doit ainsi comprendre des objectifs opérationnels que mettent en œuvre des contrats territoriaux de santé, documents nouveaux définis par la suite, à l’article L. 1434-13.

Ainsi, la nouvelle rédaction réforme profondément les PRS :

– en fixant un horizon temporel précis pour l’orientation stratégique (10 ans) comme pour le document de planification (5 ans) ;

– en regroupant en un schéma unique divers documents : schémas régionaux de mise en œuvre en matière de prévention, d’organisation, de soins et d’organisation médico-sociale, mais également « des programmes déclinant les modalités spécifiques d’application de ces schémas » ;

– en remplaçant la faculté de décliner cette programmation en « programmes territoriaux de santé pouvant donner lieu à des contrats locaux de santé » par la déclinaison désormais systématique de « contrats territoriaux de santé ».

Dans une démarche de simplification, la mention des articulations avec la santé au travail, en milieu scolaire et celle des personnes en situation de précarité et d’exclusion est supprimée. Elle relèvera davantage de la CCPPS évoquée supra.

Le I de l’article L. 1434-3 décline le contenu du schéma régional de santé selon quatre axes. En premier lieu (1°), ce document précise ce que sont les besoins en implantations pour l’exercice « des soins en premier recours » définis à l’article L. 1411-11 du code de la santé publique (prévention, dépistage, diagnostic, traitement et suivi des patients ; dispensation et administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que conseil pharmaceutique ; orientation dans le système de soins et le secteur médico-social ; éducation pour la santé), ainsi que ceux dits de « second recours », mentionnés à l’article L. 1411-12.

Soins de premier et de second recours

Le Sénateur M. Dominique Watrin en donne les définitions suivantes (154) :

« Les soins de premier recours sont les soins usuels pour les pathologies légères dont le diagnostic est aisé, ils sont dispensés par les médecins généralistes. Les soins de second recours sont les soins qui ne peuvent être pris en charge par les médecins généralistes en raison de leur complexité : ils le sont alors par les médecins spécialistes. On distingue généralement un troisième niveau de soins qui se caractérise par la nécessité du recours à un plateau technique important ou à une médecine de pointe : il s’agit là de soins hospitaliers. La logique territoriale, dans cette vision stricte, découle de la logique technique. On doit, dans chaque commune, avoir accès aux soins de premier recours, mais la gamme complète des soins spécialisés peut n’être présente que dans un ou plusieurs centres urbains et les soins hospitaliers de pointe accessibles uniquement dans les villes les plus importantes. Enfin, pour ce qui est de la logique financière, les soins de deuxième et de troisième recours ne sont que subsidiaires et leur remboursement est subordonné à leur prescription par le médecin de premier recours ».

Dans les différents territoires d’action identifiés par l’ARS, ce document fixe les objectifs orientant l’offre de soins en les déclinant par activités de soins et équipements matériels lourds ; détermine les créations, suppressions ou transformations d’implantations ; et prévoit les regroupements et coopérations entre établissements de santé (2°).

Il fixe également les objectifs de l’offre des établissements et services médico-sociaux (3°), reprenant en cela les objectifs des SROMS. Il définit en outre l’offre d’examens de biologie médicale selon les besoins des populations qu’il a identifiés.

Son II subordonne la délivrance des autorisations d’exercer délivrées par le directeur général de l’ARS aux établissements de santé et médico-sociaux à leur compatibilité avec les objectifs définis en 2° (à savoir : objectifs de l’offre de soins, créations, suppressions et transformations d’établissements ainsi que regroupements et coopérations entre établissements de santé) et ceux définis en 3° (objectifs de l’offre médico-sociale).

Le III de l’article prévoit que le schéma régional est établi et actualisé en cohérence avec les schémas départementaux d’organisation sociale et médico-sociale relatifs aux personnes handicapées ou en perte d’autonomie, arrêtés par les conseils généraux. Il importe que les deux documents comportent des dispositions cohérentes en particulier en ce qui concerne les établissements relevant du même champ de compétence (6°, 7° et 12° de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles), à savoir :

– les établissements et services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ;

– les établissements et services, y compris les foyers d’accueil médicalisé, qui accueillent des personnes adultes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques ;

– ceux qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert ;

– les établissements ou services à caractère expérimental.

Le représentant de l’État dans la région sera consulté pour avis sur le PRS et la définition de ses territoires de mise en œuvre. Le décret d’application de cette section précisera en outre les autres consultations, notamment celles de la CRSA ainsi que des collectivités territoriales.

c.  La simplification des conditions de zonage

L’objectif du Gouvernement est de simplifier les conditions de définition des zones d’action sanitaire afin de rendre cet outil plus souple et réactif. L’idée est de dissocier leur définition de celle des PRS : les directeurs généraux d’ARS détermineront les tracés d’une façon plus souple, non soumise aux procédures de consultation du PRS. Aujourd’hui, l’article L. 1434-8 prévoit déjà la définition de zones où il existe une surcapacité et missionne l’ARS pour suivre particulièrement l’évolution de la bonne articulation entre l’offre et la demande sanitaires. Au terme du projet de loi, il existera des zones sur-denses et des zones sous-denses. Ces dernières bénéficieraient des moyens de régulation de l’offre, essentiellement incitatifs.

Ainsi, il est proposé que la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-4 (155) traite du zonage des régions de santé. Le directeur général de l’agence fixera par simple arrêté deux types de zones :

– les zones sous-denses ou « en difficultés » où il identifie « une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins » ;

– les zones où l’offre de soins est particulièrement élevée.

Elles ne concerneront pas l’ensemble du territoire de la région, mais identifieront plutôt des « fractions de territoire » au profil sanitaire spécifique. L’objectif est de favoriser des rééquilibrages dans la durée et de rendre l’action publique la plus efficace possible : les ARS pourront ainsi concentrer les moyens pour soutenir des objectifs précis, en cohérence avec les orientations stratégiques régionales, diminuant ainsi les risques de dilution de l’action publique liés aux consultations ou au raffinement des critères à prendre en compte. Dans cette perspective, le deuxième alinéa de l’article précise que des mesures sont mises en œuvre dans la première catégorie de zones afin de « favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé, des maisons de santé, des pôles de santé et des centres de santé ».

Cet article ne prévoit que des mesures de soutien à la densification de l’offre dans les zones sous-denses pour le développement des soins de premier recours. La logique sous-tendant son premier alinéa qui repose sur le diptyque sous-denses/sur-denses aurait pourtant pu plaider pour un dispositif de densification et de « dédensification », un pas que le projet de loi ne franchit pas. Il s’en tient à une logique de rattrapage qui mobilise « notamment » des outils d’incitation existants tels que :

– les contrats de santé territoriale, noués avec les médecins généralistes (article L. 1435-4-2) ;

– les contrats favorisant l’exercice ambulatoire des établissements de santé publics (article L. 1435-5-1), des établissements de santé privés (article L. 1435-5-2), des centres de santé (article L. 1435-5-3) ou encore des centres mutualistes (article L. 1435-5-4) dans les zones sous-dotées ;

– le partenariat avec les collectivités territoriales et leurs groupements qui, aux termes de l’article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, peuvent « aussi attribuer des aides visant à financer des structures participant à la permanence des soins, notamment des maisons médicales » ;

– les exonérations d’impôt sur le revenu dont bénéficient les professionnels participant à la permanence des soins (article 151 ter du code général des impôts) ;

– le système d’allocation mensuelle que peut verser le centre national de gestion jusqu’à la fin des études médicales : en contrepartie de cette allocation, les étudiants s’engagent à exercer leurs fonctions à titre libéral ou salarié, à compter de la fin de leur formation, dans les lieux d’exercice où un fort besoin est identifié (le III modifie le code de l’éducation afin de mieux cibler ce dispositif) ;

– les possibilités ouvertes par le conventionnement entre les professionnels de santé à l’assurance maladie.

Parmi les outils contractuels de nature essentiellement réglementaire liant les ARS aux professionnels de santé, on peut relever le relatif succès d’un certain nombre d’entre eux : l’option géographique (aide à l’investissement et aide à l’activité), l’option santé solidarité territoire (exercice en zone fragile pendant trois ans contre une aide à l’activité et la prise en charge de frais de déplacement), les options conventionnelles « contrat incitatif » pour les infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, sages-femmes, orthophonistes, ou encore chirurgiens-dentistes (prévoyant une participation à l’équipement ainsi qu’aux cotisations d’allocations familiales).

En 2013, plus de 35,5 millions d’euros d’aides démographiques ont été versés à des professionnels de santé, dont 27,3 millions d’euros en faveur de médecins et près de 360 contrats d’engagement de service publics en été signés (cf. III).

Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur que les critères de détermination des zones devraient s’articuler autour des spécificités démographiques, sanitaires et sociales, des particularités géographiques de la zone, de l’offre sanitaire locale, de ville et hospitalière. La définition de ces zones devrait faire l’objet d’une concertation avec les professionnels de santé, les groupes d’usagers et les collectivités territoriales.

L’article L. 1434-5 introduit un élément de sécurité juridique : il limite les possibilités de recours contre le PRS et ses composantes, définis dans la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-2, pour les motifs de vice de forme ou vice de procédure. Afin d’assurer une stabilité juridique au système de décision, il les limite aux six premiers mois suivant la prise d’effet du document concerné.

Tout comme la rédaction en vigueur de l’article L. 1434-4, la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-6 prévoit qu’un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de cette section. Il comporte cependant quatre nouveaux alinéas précisant le champ de ce décret :

– les règles de consultations préalables et d’adoption du PRS qui doivent notamment prévoir son articulation avec les autres documents de planification propres à l’ensemble des politiques publiques ;

– les conditions dans lesquelles des activités et équipements particuliers peuvent faire l’objet d’un schéma interrégional de santé ou encore d’un schéma de santé spécifique ;

– les modalités permettant, par voie de convention, la participation des organismes et services d’assurance maladie à la définition ainsi qu’à la mise en œuvre des PRS d’une part, ainsi que, d’autre part, à la coordination des actions prévues par les conventions d’objectifs et de gestion (COG) prévues à l’article L. 227-1 du code de la sécurité sociale ;

– les conditions réglementaires dans lesquelles les directeurs généraux d’ARS déterminent les zones définies dans la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-4.

2.  Les outils budgétaires : l’encadrement de la fongibilité des crédits apporte une garantie au développement du secteur médico-social

La section 2 porte sur les « Conditions de fongibilité des crédits » et comporte un article unique, l’article L. 1434-7, divisé en deux parties.

La première (I) décrit les ressources allouées aux ARS pour financer des actions liées à la promotion de la santé, à l’éducation à la santé, à la prévention des maladies, des handicaps et de la perte d’autonomie. Il les « sanctuarise » en prévoyant qu’elles ne peuvent être affectées qu’au financement d’activités de soins ou de prise en charge et d’accompagnement médico-social. Dans le contexte de fusion des documents de planification, cette disposition est de nature à pérenniser le soutien au secteur médico-social dans la nouvelle organisation. Pour mémoire, les opérations de fongibilité du sanitaire vers le médico-social ont représenté un volume d’un peu plus de 10 millions d’euros en 2013 et environ 9,6 millions d’euros en 2014.

La seconde (II) porte quant à elle sur les moyens financiers des ARS alloués au titre des objectifs de dépenses dévolus aux établissements et services médico-sociaux (ESMS) du sous-ONDAM médico-social (articles L. 314-3 et L. 314-3-2 du code de l’action sociale et des familles). Il prévoit que ces crédits soient exclusivement destinés au financement des ESMS.

Là encore, il s’agit d’apporter des garanties fortes à un secteur qui souffre d’une offre encore trop faible et doit faire face à une demande particulièrement dynamique. Les crédits médico-sociaux ne pourront pas être mobilisés pour soutenir la politique sanitaire – mais l’inverse demeure possible.

Ce même II est complété par un deuxième alinéa évoquant les situations où des établissements de santé convertissent tout ou partie de leur activité en activités médico-sociales. Ces établissements bénéficiaient au départ de financements de l’assurance maladie, afin de couvrir les frais suivants :

– des frais d’hospitalisation remboursés sur la base de tarifs journaliers propres à certains établissements de santé privés (article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale) ;

– des frais d’hospitalisation remboursés sur la base de tarifs nationaux (article L. 162-22-9 du code de la sécurité sociale) ;

– de l’éligibilité aux dotations annuelles de financement et forfait journalier (article L. 174-1-1 du code de la sécurité sociale).

La conversion de leur activité les conduit alors à assurer des prestations éligibles aux enveloppes décrites au premier alinéa du II, à savoir les prestations médico-sociales. Dans cette hypothèse, les crédits correspondant sont basculés de l’enveloppe de prise en charge des soins vers celle dévolue à la subvention des établissements médico-sociaux. Il en résulte un encouragement aux restructurations de l’offre sanitaire – concernant notamment les diminutions du nombre de lits – qui devrait favoriser l’enrichissement de l’offre médico-sociale. Cette mesure participera au rééquilibrage de l’offre et à la meilleure circulation des investissements entre les deux secteurs. Elle sera particulièrement bénéfique en secteur rural où l’évolution de la démographie et des besoins des populations accentue relativement la demande en offre médico-sociale fortement médicalisée.

3.  La territorialisation de la politique de santé et la réforme de la démocratie locale en santé

La section 3 est désormais libellée « Territoires et conseils territoriaux de santé ». Elle vise à réformer les modalités de participation et de démocratie sanitaire sur les territoires.

a.  Les autres zones et les territoires

L’article L. 1434-8 récapitule la compétence des ARS pour délimiter différents zonages.

En 1°, il prévoit que l’ARS délimite les territoires où est organisé chaque service territorial de santé au public (SPST). Ces territoires seront définis par les directeurs généraux : leur dimensionnement doit favoriser la mise en réseau des acteurs du sanitaire et du social, leur coordination et leur coopération, afin de fluidifier les parcours. Ils doivent couvrir l’intégralité du territoire de chaque région

Le 2° définit des zones permettant d’autoriser ou d’orienter l’installation de l’offre sanitaire. Il précise ainsi :

– dans son a) la prise en compte des offres et équipements mentionnés dans la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-3 : activités de soins et équipements médicaux lourds (par exemple la nécessité de disposer d’un scanner sur un rayon géographique ou un bassin de vie déterminés) ;

– dans son b) les zones donnant lieu à l’application des règles de territorialité relatives aux laboratoires de biologie médicale. Leur activité est en effet soumise à des règles de territorialité précises, déjà en vigueur. Elles sont définies aux articles L. 6211-16, L. 6212-3, L. 6212-6, L. 6222-2, L. 6222-3, L. 6222-5 et L. 6223-4.

Ces règles prévoient notamment que les laboratoires participent à la permanence de l’offre de biologie médicale définie sur le territoire de santé et soumettent l’évolution de l’offre de santé aux SROS ainsi qu’à la délimitation des territoires de santé. Le directeur général de l’ARS peut s’opposer à l’ouverture d’un laboratoire de biologie médicale, lorsqu’elle aurait pour effet de porter l’offre d’examens de biologie médicale à un niveau supérieur de 25 % à celui des besoins de la population du territoire.

Il peut en outre s’opposer, pour des motifs tenant au risque d’atteinte à la continuité de l’offre de biologie médicale, à une opération d’acquisition d’un laboratoire de biologie médicale ou d’un site de laboratoire de biologie médicale, à une opération de rachat de tout ou partie d’actifs d’une société exploitant un laboratoire de biologie médicale ou encore à une opération de fusion de laboratoires de biologie médicale.

– dans son c), la prise en compte de l’organisation des soins de premier recours, définis supra (voir article L. 1434-3).

b.  Le renforcement de la démocratie sanitaire locale

Le projet de loi prévoit de renforcer les mécanismes d’expression des patients et acteurs de la santé, en favorisant l’expression de la démocratie en santé au niveau local.

L’article L. 1434-9 donne mission au directeur général de l’ARS de garantir la couverture de l’intégralité de sa région, par des conseils territoriaux de santé (CTS). Il choisit de les organiser selon les découpages du STSP ou des zones définis à l’article L. 1434-8.

Le CTS est une instance destinée à permettre l’expression des représentants des usagers. Il permet ainsi aux associations d’usagers d’être consultées sur l’élaboration et le suivi du PRS et travaillera en lien étroit avec les CRSA. Le CTS contribue à la définition du diagnostic partagé, tel que mentionné dans la nouvelle rédaction de l’article L. 1434-12. Les ARS leur soumettent pour avis les contrats territoriaux de santé.

Cette rédaction est relativement simple et renvoie pour l’essentiel à des dispositions réglementaires. Il s’agit en effet de répondre aux critiques relayées par exemple par la Cour des comptes relatives aux conseils territoriaux en instaurant un système simple et efficace. Toutefois, d’après les informations communiquées à votre rapporteure, le Gouvernement envisage de lui conférer une composition proche de celle des conférences de territoires, avec des représentants des usagers (8° de l’article D. 1434-22), mais aussi d’y ajouter des représentants des conseils de vie sociale, des commissions des usagers et du défenseur des droits.

Votre rapporteure souhaite que soit prévue l’expression des usagers au sein d’une formation spécifique des CTS et, surtout, que ceux-ci puissent conduire des actions de médiation sanitaire, qui manquent particulièrement dans le domaine ambulatoire.

L’article L. 1434-10 comporte des dispositions classiques renvoyant à un décret en Conseil d’État la déclinaison des modalités de mise en œuvre de ce titre. Il prévoit en 1° que ce décret déclinera les conditions dans lesquelles « les directeurs généraux des agences régionales de santé » déterminent le zonage prévu à l’article L. 1434-8 ainsi que, en 2°, la composition, les modalités de fonctionnement et de désignation des membres des CTS.

4.  Placer la prévention et la promotion de la santé au même plan que le sanitaire et le médico-social

Le de l’article 38 porte sur l’article L. 1431-2, qui recense les missions des ARS. Il s’agit de le mettre en conformité avec les dispositions du présent projet de loi, et notamment celles qui concernent sa mission de régulation, d’orientation et d’organisation de l’offre de services de santé, à savoir :

– en premier lieu, d’inclure des services et acteurs nouveaux (a) dans le champ de compétence de l’agence, à savoir ceux en charge de la prévention et de la promotion de la santé, ainsi que les besoins dans ce domaine (b) ;

– de permettre aux ARS de participer à l’évaluation de ces professionnels (c) ;

– d’élargir la compétence des ARS pour le suivi de la répartition de l’offre de soins sur le territoire, afin qu’elle corresponde aux besoins de la population. À cet effet, le d) prévoit de remplacer l’expression « l’offre de soins » par celle plus large d’« offre de prévention, de promotion de la santé, de soins et médico-sociale » et de faire référence à la nouvelle rédaction du chapitre et notamment son article L. 1434-2 ;

– de compléter le e) de l’article L. 1431-2. Celui-ci traite de la mission de veille des ARS quant à la qualité et la sécurité des actes médicaux, de la dispensation et de l’utilisation des produits de santé, ainsi que des prises en charges des accompagnements médico-sociaux. Il s’agit ici de la missionner en plus sur la veille de la qualité des interventions en prévention et en promotion de la santé ;

– de compléter le f) pour élargir la mission d’accès des populations aux dispositifs de prévention et de promotion de la santé ;

– de compléter l’article par deux nouveaux alinéas j) et k). Le j) porte sur la participation des ARS à l’analyse des besoins et de l’offre en formation destinée aux professionnels des secteurs sanitaire et médico-social. Elle y participe en lien avec les universités et les collectivités territoriales intéressées. Le k) porte quant à lui sur l’organisation territoriale de la recherche, prévoyant que les ARS s’associent à cette fin aux universités, établissements de santé et établissements publics à caractère scientifique et technologique ou à tout autre organisme de recherche.

5.  Renforcer les outils de coordination des acteurs de la santé en région

Le modifie le chapitre II du titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique.

Son a) il enrichit la rédaction de l’article L. 1432-1 qui porte sur la gouvernance des agences et plus précisément de son 2° qui décrit les deux commissions de coordination des politiques publiques de santé, constituées auprès des ARS. Elles associent les services de l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi que les organismes de sécurité sociale. La première est compétente dans le domaine de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail, de la protection maternelle et infantile. La seconde est en charge du domaine des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux. Toutes deux se doivent d’assurer la cohérence et la complémentarité des actions menées dans leurs champs respectifs.

Il est tout d’abord prévu de substituer à sa compétence actuelle (« assurer la cohérence et la complémentarité des actions ») celle, plus forte, de coordination des actions. Les travaux des commissions devront donc déboucher sur des actions répondant à une même stratégie générale. Les compétences de la première commission sont en outre élargies au domaine de la prévention.

Le b) procède à une modification de conséquence en substituant à la notion de « plan stratégique régional de santé » celle de « projet régional de santé » à l’article L. 1432-3 qui concerne le rôle du conseil de surveillance de l’ARS qui continuera ainsi à émettre un avis sur la rédaction du PRS.

Le c) porte quant à lui sur l’article L. 1432-4 relatif à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie. Il le modifie tout d’abord pour tirer les conséquences de l’instauration des conseils territoriaux de santé, dont la mention remplace celle des conférences de territoire au premier alinéa.

Il procède ensuite au remplacement des mots « plans stratégiques régional de santé » par « projet régional de santé » au troisième alinéa qui porte sur le pouvoir de proposition de la conférence. Il modifie en outre la rédaction de la dernière phrase de cet alinéa afin d’associer les CTS au travail de la conférence en matière d’évaluation de l’égalité d’accès aux services de santé ainsi qu’à la qualité de la prise en charge et des accompagnements. La nouvelle rédaction élargit ses compétences aux services médico-sociaux et rappelle sa capacité à formuler toute proposition d’amélioration dans ces domaines.

Le porte sur le deuxième alinéa de l’article 1433-2. Cet article prévoit que les ministres chargés de la santé, de l’assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées signent avec le directeur général de l’ARS un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM).

Son deuxième alinéa prévoit que le contrat est conclu pour une durée de quatre ans et qu’il est révisable chaque année. Il est proposé de remplacer la rédaction de cet alinéa afin d’indiquer :

– que le CPOM décline les objectifs et priorités d’action de l’ARS pour la mise en œuvre de la stratégique nationale de santé ainsi que des plans et programmes nationaux de santé qui sont prévus dans les PRS, tels que définis à l’article L. 1434-1 résultant du présent projet de loi ;

– que chaque CPOM comporte un volet chiffré consacré à la maîtrise des dépenses de santé ;

– qu’il est conclu pour une durée de cinq ans et est révisable chaque année (ce sont les seules dispositions de la rédaction en vigueur de cet alinéa) ;

– qu’afin de mesurer l’atteinte de ces objectifs, le CPOM fait l’objet d’un suivi et d’une évaluation.

6.  La prise en compte de ces modifications dans les outils de contractualisation

Le comporte des mesures de cohérence juridiques avec les dispositions des articles L. 1434-4 et L. 1434-5 telles qu’elles résultent de ce projet de loi. Il s’agit de mentionner les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins dans les outils permettant à l’ARS d’agir sur l’offre. Ces modifications portent sur :

– l’article L. 1435-4-2 qui prévoit que les ARS peuvent conclure avec un médecin spécialisé en médecine générale, ou avec un assistant spécialiste à temps partiel au sein d’un établissement public de santé, un contrat de praticien territorial de médecine générale sur la base duquel il perçoit une rémunération complémentaire aux revenus de ses activités de soins exercées en qualité de praticien territorial de médecine générale ;

– l’article L. 1435-5-1 qui permet aux ARS de conclure des contrats avec des établissements publics de santé ;

– l’article L. 1435-5-2, qui leur permet de se lier avec un établissement de santé privé d’intérêt collectif ;

– et l’article L. 1435-5-3 qui comporte des dispositions similaires concernant les centres de santé et les médecins de ces centres.

7.  Les réponses face aux situations sanitaires exceptionnelles

La loi de santé publique de 2004 (156) a prévu la possibilité de mobiliser deux outils spécifiques en cas de situation sanitaire exceptionnelle. Le premier se nomme le « plan blanc », qu’organise l’article L. 3131-7 du code de la santé publique : il s’agit de la réponse en cas de crise à l’échelle d’un établissement. Le second se nomme « plan blanc élargi ». Mentionné à l’article L. 3131-8, il est quant à lui un outil de réquisition préfectorale des professionnels de santé au niveau du département.

La gestion de la pandémie H1N1 en 2009 a montré que ces dispositifs sont perfectibles. En particulier, la réquisition, plus ou moins appréciée par les professionnels, ne doit être utilisée qu’en dernier recours.

Il est donc proposé de réformer cette organisation, afin, d’une part, de l’alléger et, d’autre part, de prévoir une réponse à un niveau plus pertinent, celui de la région. Les ARS doivent ainsi disposer de la capacité de mobiliser l’intégralité du système de santé en cas de situation exceptionnelle en prévoyant des réponses adaptées et coordonnées aux besoins sanitaires des personnes, correspondant le plus possible à leur parcours de soins classiques et diminuant le recours à des dispositifs de réquisition.

À cette fin, le modifie le chapitre Ier du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique.

Son a) supprime les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article L. 3131-7, soit l’essentiel des dispositions de cet article relatif au plan blanc, dispositif de crise dont se dote chaque établissement. Il lui permet de mobiliser immédiatement les moyens nécessaires pour faire face à un afflux important de patients ou de victimes, ou encore pour faire face à une situation sanitaire exceptionnelle. Il ne conserve que son premier alinéa qui prévoit simplement que « chaque établissement de santé est doté d’un dispositif de crise dénommé plan blanc d’établissement, qui lui permet de mobiliser immédiatement les moyens de toute nature dont il dispose en cas d’afflux de patients ou de victimes ou pour faire face à une situation sanitaire exceptionnelle ». Les dispositions supprimées sont celles décrivant les obligations de consultation et d’information incombant au directeur de l’établissement. Le plan blanc devient ainsi un dispositif relevant de la responsabilité de chaque établissement, dont le contenu et le mode de fonctionnement seront définis par voie réglementaire.

Le b) modifie quant à lui l’article L. 3131-8 pour changer la dénomination des plans blancs élargis en « plan départemental de mobilisation ». Il ne conserve que son premier alinéa qui autorise la représentant de l’État dans le département à réquisitionner les biens et services, y compris le service de tout professionnel de santé, de tout établissement de santé ou établissement médico-social pour faire face à une situation exceptionnelle du fait de l’afflux de victimes ou de patients ou encore à une situation sanitaire exceptionnelle. Lorsqu’il met en œuvre ce plan, le représentant de l’État dans le département en informe sans délai le directeur général de l’ARS ainsi que les représentants des collectivités territoriales concernées. Les dispositions détaillant les modalités de réquisition sont supprimées et donc renvoyées au cadre réglementaire.

Le c) modifie l’article L. 3133-11 qui porte sur la mise en œuvre des mesures activées en cas de menace sanitaire grave et dont le contenu est rappelé ci-après.

Article L. 3131-11

Sauf disposition contraire, les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État, notamment :

a) Le contenu du plan zonal de mobilisation des moyens pour faire face aux situations sanitaires exceptionnelles ;

b) La procédure d’élaboration des plans blancs du département et du plan zonal de mobilisation ;

c) Le rôle et le mode de désignation des établissements de référence mentionnés à l’article L. 3131-9.

Il est ici proposé une nouvelle écriture du a) de l’article. La nouvelle rédaction permettra d’intégrer dans la partie législative du code le dispositif d’organisation de la réponse du système de santé en cas de situation sanitaire exceptionnelle (ORSAN) et de permettre de définir par décret en Conseil d’État les modalités de définition et de mise en œuvre de ce plan.

Les objectifs du dispositif ORSAN

Cette organisation vise tout d’abord à la mise en place d’un dispositif intégré de préparation mettant en cohérence à l’échelle régionale les efforts en matière de planification, de déploiement de moyens opérationnels et de formation des acteurs du système de santé. Il place l’ARS comme pilote de l’organisation sanitaire en situation sanitaire exceptionnelle.

Le dispositif ORSAN permet à l’ARS de disposer, par avance, des réponses en termes de parcours de santé nécessaires à la gestion de l’événement : il s’agit non seulement de recenser les dispositifs mobilisables mais également de prévoir la mise en place de dispositifs qui s’avéreraient lacunaires.

Ce dispositif prévoit aussi la déclinaison de réponses à l’échelle locale, avec la mise en œuvre des plans blancs des établissements de santé ainsi que les plans blancs élargis qui permettent l’éventuelle mobilisation de ressources supplémentaires à l’échelle zonale ou départementale.

Il permet enfin de prévoir l’interopérabilité de l’organisation du système de santé avec les autres dispositifs censés être mobilisés en cas de situations exceptionnelles, telles que la sécurité civile, ainsi que l’ensemble des acteurs intervenant dans le plan ORSEC, dont il est complémentaire.

Il découlera également du dispositif ORSAN des préconisations en matière de formation des professionnels.

Le plan ORSAN peut être décliné en cinq versions différentes : AMAVI pour l’accueil massif de victimes non contaminées ; CLIM, pour la prise en charge de nombreux patients suite à un phénomène climatique ; EPI-VAC qui permet de gérer une épidémie ou une pandémie sur le territoire national (ce qui peut comprendre la mise en place d’une campagne de vaccination exceptionnelle), BIO prenant en charge le risque biologique connu ou émergent ; NRC en cas de risque nucléaire, radiologique ou chimique.

Traduction récente et concrète de ces mesures, la prise en charge de l’épidémie grippale a conduit le Gouvernement à déclencher le 19 février dernier le plan ORSAN EPI-VAC en régions, qui s’est notamment traduit par la déprogrammation d’interventions non-urgentes, la mobilisation d’équipes ou encore la réaffectation de patients vers d’autres services ou établissements.

Les contrats d’objectifs et de moyens qui lient les ARS aux acteurs sanitaires et médico-sociaux devront tenir compte des impératifs liés à ce plan afin de transposer les besoins et objectifs dans l’offre disponible sur le territoire. La logique zonale s’imposera notamment pour certains parcours de soins nécessitant des ressources rares : les établissements de santé de référence joueront alors un rôle pivot.

La rédaction du b) est modifiée afin de renvoyer au même décret la définition du contenu et des procédures d’élaboration des plans de réponse aux urgences sanitaires, à savoir :

– le plan zonal de mobilisation ;

– le plan départemental de mobilisation ;

– les plans blancs des établissements.

Disposition de conséquence rédactionnelle, le apporte des modifications au livre II de la sixième partie pour remplacer la notion de « territoire de santé », devenue obsolète, par celle de « zone déterminée en application du b du 2° de l’article L. 1434-8 », à savoir celles définies au début de la nouvelle rédaction du titre III « Territoires et conseils territoriaux de santé », c’est-à-dire : les zones de répartition des activités et équipements d’une part et celle organisant l’implantation et l’activité des laboratoires de biologie médicale d’autre part.

Au risque de générer au début quelques confusions, cela signifie que la notion de « territoire de santé » disparaît au profit des zones, et que la notion de « territoire » est désormais affectée au STSP.

II. MODIFICATION DE CONSÉQUENCE DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS

Le II de l’article porte sur le code général des impôts. Il comporte des modifications de conséquence, afin d’y adapter la rédaction de l’article 151 ter qui prévoit que « la rémunération perçue au titre de la permanence des soins exercée en application de l’article L. 6314-1 du code de la santé publique par les médecins ou leurs remplaçants installés dans une zone définie en application de l’article L. 1434-7 du même code est exonérée de l’impôt sur le revenu à hauteur de soixante jours de permanence par an ». Il s’agit ici d’y substituer la mention « dans une zone caractérisée par une offre insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins, définie en application de l’article L. 1434-5 » du code de la santé publique.

III. MODIFICATION DES CONDITIONS D’INSTALLATION DES BÉNÉFICIAIRES DE L’ALLOCATION MENSUELLE D’ÉTUDES VERSÉES PAR LE CENTRE NATIONAL DE GESTION

Le III modifie le code de l’éducation et plus précisément l’article L. 632-6 qui porte sur les études médicales et prévoit notamment que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale déterminent chaque année par arrêté le nombre d’étudiants parmi ceux admis à poursuivre des études médicales à l’issue de la première année qui peuvent bénéficier d’un contrat avec le centre national de gestion. Ce contrat leur ouvre droit à une allocation mensuelle tout au long de leurs études en contrepartie de l’engagement à exercer leurs fonctions, à titre libéral ou salarié, dans certaines zones présentant des besoins spécifiques, pour une durée équivalente à celle du versement de l’allocation. Ce dispositif a été mentionné ci-dessus à l’occasion de l’examen des dispositions relatives au zonage.

Il est proposé de modifier le troisième alinéa de cet article. En l’état, il prévoit que les étudiants ayant signé un contrat d’engagement de service public choisissent un poste d’interne sur une liste établie annuellement par arrêté des ministres en charge de la santé et de l’enseignement supérieur, « en fonction de la situation de la démographie médicale dans les différentes spécialités » sur les territoires visés précédemment.

Le projet de loi prévoit en de lever le critère restrictif de définition de la liste, en supprimant les mots « en fonction de la situation de la démographie médicale dans les différentes spécialités sur les territoires visés à l’alinéa précédent ». Cela permettra au Gouvernement de définir plus librement la liste des postes à pouvoir pour les étudiants diplômés dans le cadre de leur engagement de service public.

Le met quant à lui en conformité le quatrième alinéa de cet article du code avec les dispositions du projet de loi relatives au zonage. Il est ainsi proposé de remplacer les critères en vigueur : mention des zones « où l’offre médicale est insuffisante ou la continuité d’accès aux soins menacée » complétée par la mention d’une priorité à des zones spécifiquement définies par le législateur (zones de revitalisation rurale et zones urbaines sensibles) par un critère plus clair et donc plus simple à appréhender et à piloter.

Les lieux d’exercice seront ainsi ceux correspondant aux zones insuffisamment dotées telles que définies à l’article L. 1434-4 (et non L. 1434-5 comme mentionné dans le texte du projet de loi). Cette disposition renforcera les outils à disposition des ARS pour redynamiser les zones dans le besoin sanitaire en simplifiant les critères d’identification des zones d’action et en les faisant correspondre aux autres outils à disposition des ARS pour soutenir l’offre.

IV. MISE EN œUVRE DES DISPOSITIONS DU I ET MESURES TRANSITOIRES

Le A du IV fixe l’horizon temporel de mise en œuvre des PRS au 1er janvier 2018.

Dans l’attente, les projets régionaux de santé demeurent en vigueur jusqu’à la publication des nouveaux PRS.

Le B concerne les contrats locaux de santé conclus en application de la version en vigueur de l’article L. 1434-17 avant la promulgation de la loi de santé : ceux-ci restent en vigueur jusqu’à leur terme.

Le C porte sur les arrêtés définissant les zones de mise en œuvre des mesures destinées à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé, des maisons de santé, des pôles de santé et des centres de santé. Les arrêtés en vigueur à la date de promulgation de la loi de santé demeurent applicables jusqu’à la publication dans chaque région des arrêtés prévus au premier alinéa de l’article L. 1437-4 dans la rédaction issue du présent projet de loi.

*

La commission des affaires sociales a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant une nouvelle rédaction de cet article.

Cette nouvelle rédaction ajoute des éléments de précisions par rapport à la rédaction initiale du projet de loi. Elle tire notamment les conséquences des modifications intervenues à l’article 12. Le conseil territorial de santé est renforcé dans ses missions. Il contribuera au diagnostic territorial partagé et sera informé de l’évolution des structures d’offre de soins. La nouvelle rédaction prévoit également que les PRS pourront être mis en œuvre au moyen des contrats territoriaux de santé, des contrats territoriaux en santé mentale, ainsi que des contrats locaux de santé.

Il est également indiqué que les professionnels de santé sont consultés sur la définition des zones sous-denses et sur-denses. La mention du zonage relatif aux soins de premier recours est supprimée, rendue inutile du fait de l’introduction à l’article 12 des projets des équipes de soins primaires. La liberté d’installation des professionnels est réaffirmée.

Cet amendement a été adopté moyennent des sous-amendements qui ont précisé les objectifs des mesures de rééquilibrage de l’offre de soins en faveur des zones sous-denses en prévoyant qu’elles contribuaient également à la lutte contre les inégalités en santé. Ils garantissent également l’expression des usagers au sein d’une enceinte spécifique des conseils territoriaux de santé. À titre expérimental, et pour une durée de deux ans, l’État pourra prévoir que les CTS et les CRSA soient saisis de demandes de médiation en santé. La participation aux CTS de représentants des collectivités territoriales ainsi que des services départementaux de protection maternelle et infantile a également été explicitement prévue. Le diagnostic territorial devra tenir compte des besoins de prise en charge sans hébergement ainsi que des besoins en soins palliatifs.

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La Commission examine l’amendement AS978 rectifié du Gouvernement avec le sous-amendement AS1703 de Mme Hélène Geoffroy, rapporteure, les sous-amendements identiques AS1736 de M. Jean-Pierre Door, AS1750 de M. Arnaud Robinet, AS1755 de Mme Valérie Boyer et AS1756 de M. Bernard Accoyer, et les sous-amendements AS1704 de la rapporteure, AS1720 de Mme Bernadette Laclais, AS1705 de la rapporteure, AS1719, AS1721 et AS1722 de Mme Bernadette Laclais, et AS1737 de la rapporteure.

Mme la ministre. L’amendement AS978 rectifié du Gouvernement vise à définir l’organisation du système de santé dans les territoires en mettant en adéquation la structure des soins et celle de la démocratie sanitaire. Cet amendement consacre le principe du respect de la liberté d’installation des professionnels de santé, définit les schémas régionaux de santé, détermine les zones dans lesquelles des offres particulières doivent intervenir en raison du manque de professionnels ou d’une situation spécifique.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure pour le titre IV. J’émets un avis favorable à l’adoption de cet amendement qui clarifie la composition des conseils territoriaux de santé et garantit ainsi la participation de l’ensemble des acteurs de santé du territoire. Il prévoit des dispositions qui renforceront les conseils territoriaux de santé (CTS) et inclut la santé mentale dans les déclinaisons spécifiques des projets régionaux de santé, ce qui répond à des demandes exprimées lors des réunions des groupes de travail et des auditions. Enfin, il renforce la participation des professionnels à la définition du zonage territorial. J’émets donc un avis favorable à son adoption.

Mon sous-amendement AS1703 vise à compléter les dispositions de l’article 38 relatives au zonage dessiné par les directeurs généraux des ARS. Ceux-ci doivent identifier les zones pâtissant d’une insuffisance de l’offre de soins ou de difficultés d’accès aux soins. Une attention particulière est accordée à ces zones qui bénéficieront de mesures d’incitation au renforcement de l’offre. Je vous propose de veiller à ce que ces mesures réduisent effectivement les inégalités en matière de santé.

Mme la ministre. Je suis très favorable à l’adoption de ce sous-amendement qui apporte une précision bienvenue.

M. Bernard Accoyer. Madame la présidente, nous nous retrouvons avec un amendement de huit pages que nous n’avons pas eu le temps d’examiner ; nous légiférons dans des conditions inacceptables. Le Gouvernement se targue de donner des leçons de démocratie à la terre entière et voilà qu’il réécrit totalement le code de la santé… Il aurait pu le faire par ordonnance, le débat démocratique n’en aurait pas été plus abîmé. Dans ces conditions, je ne peux soutenir l’adoption de cet amendement, faute d’avoir eu le temps de m’assurer des garanties qu’il est supposé apporter.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Accoyer, cet amendement a été déposé vendredi 13 mars à dix-sept heures et a publié lundi dernier sur le site de l’Assemblée nationale. Vous avez eu quarante-huit heures pour l’étudier.

M. Jean-Pierre Door. Je critique les méthodes de travail du Gouvernement et d’examen de ce texte. Madame la présidente, vous venez de rappeler que cet amendement avait été déposé vendredi dernier à dix-sept heures, heure à laquelle il n’était plus possible pour les parlementaires de proposer un amendement. Comment sous-amender des amendements aussi lourds ? On lit par exemple que des mesures limiteraient le conventionnement et introduiraient donc le conventionnement sélectif. Ce sujet est d’importance !

Nous avons rédigé un sous-amendement qui s’avère finalement sans objet, puisqu’il prévoit d’insérer dans le texte des mots qui s’y trouvent déjà. Nous ne nous prononcerons pas sur l’amendement du Gouvernement et attendrons son examen en séance publique.

Mme la présidente Catherine Lemorton. D’où l’intérêt de la procédure de l’article 88 qui permet de représenter des amendements avant la séance publique.

Mme la ministre. Monsieur Door, cet amendement, comme d’autres, a été communiqué de manière informelle aux groupes UMP et UDI vendredi dernier entre seize heures et seize heures trente. Nous avons d’ailleurs reçu des accusés de réception des conseillers de vos groupes…

M. Bernard Accoyer. Si nous vous avions fait le dixième lorsque vous étiez dans l’opposition, que n’aurions-nous entendu !

Mme la ministre. Le débat reprendra dans l’hémicycle, puisque nous avons prolongé la concertation avec les professionnels, mais l’on ne peut pas à la fois demander une concertation approfondie avec les acteurs de santé, regretter que les amendements la closent et se plaindre de ne pas disposer rapidement de ceux-ci. Comme je l’avais indiqué en conférence de presse, j’ai souhaité que l’opposition disposât du plus grand nombre d’éléments possible afin de pouvoir s’exprimer ; voilà pourquoi, je vous ai fait adresser cet amendement. Ce dernier ne modifie d’ailleurs pas le droit existant en matière de zonage, dont l’élaboration date de la période où l’UMP était majoritaire, monsieur le député.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Accoyer, lors de la précédente législature, jamais l’opposition n’a reçu d’amendements de manière informelle.

M. Jean-Pierre Door. Madame la ministre, je maintiens ma critique portant sur la méthode employée. Ce n’est pas entre seize heures trente et dix-sept heures vendredi dernier que nous aurions pu étudier l’ensemble de ces dispositifs.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il n’y a pas d’échéance pour le dépôt de sous-amendements, monsieur Door !

M. Jean-Pierre Door. J’ai tout de même le droit de critiquer la méthode du Gouvernement dans ce dossier, madame la présidente ! Dimanche, un de mes collègues socialistes m’a demandé si je pouvais lui communiquer ces amendements, car il ne les avait pas non plus… Autrement dit, les députés de votre majorité ne sont pas mieux lotis que nous, mais ils se taisent, et je me mets à leur place. Je ne me prononce pas sur le fond des mesures que propose cet amendement, probablement intéressantes ; nous en débattrons début avril dans l’hémicycle et nous ne participerons donc pas au vote grotesque qui va avoir lieu dans quelques instants.

Mme Jacqueline Fraysse. Loin de moi l’idée d’en rajouter, mais il est peu contestable que nous travaillons dans des conditions difficiles et anormales. Qui plus est, j’apprends à l’instant que l’opposition a eu droit à la communication informelle de l’amendement gouvernemental ! N’ayant pas l’honneur d’être dans l’opposition, ce dont je me félicite, du coup, je n’ai pas eu connaissance de cet amendement et, d’après ce que j’entends, mes collègues du groupe majoritaire pas davantage ! Je n’apprécie pas du tout cette différence de traitement. Il faut déjà faire montre de beaucoup de patience pour travailler dans ces conditions, pour accepter que nos amendements tombent d’un seul coup et pour digérer que seules trois secondes soient consacrées à l’examen de la question de la médecine du travail après avoir passé des heures à discuter du tour de taille des mannequins… Cette fois-ci, la coupe déborde ! Il conviendrait de se respecter, de cesser de se faire des coups en biais et de se témoigner un minimum de confiance, à plus forte raison entre ceux qui soutiennent le Gouvernement dans cette affaire.

Mme Dominique Orliac. Le groupe RRDP fait partie de la majorité et, en son nom, je regrette moi aussi cette façon de travailler particulièrement désagréable.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je me dois, au nom de la commission, de demander des comptes au Gouvernement. Je ne peux pas cautionner que l’on ait transmis des amendements à certains groupes et pas à d’autres. Que s’est-il passé vendredi dernier, madame la ministre ?

Mme la ministre. Madame la présidente, je ne peux pas vous répondre maintenant et vais vérifier quels ont été les destinataires de ces amendements. Si certains groupes ne les avaient pas reçus, je le regretterais profondément.

M. Arnaud Robinet. Nous vivons aujourd’hui une situation grotesque qui montre l’impréparation de ce projet de loi. Au nom du groupe UMP, je tiens à remercier le Gouvernement de nous avoir fait parvenir cet amendement à seize heures trente, mais nous regrettons de ne pas l’avoir reçu à quinze heures, ce qui nous aurait permis de travailler de manière approfondie.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le groupe UMP défend-il ses quatre sous-amendements identiques ?

M. Jean-Pierre Door. Je retire mon sous-amendement AS1736 puisque le texte du Gouvernement l’intègre déjà.

M. Arnaud Robinet. Je retire mon sous-amendement AS1750.

Mme Valérie Boyer. Mon sous-amendement AS1755 est défendu.

M. Bernard Accoyer. L’amendement fleuve du Gouvernement prévoit la limitation d’accès au conventionnement. Voilà qui devrait conduire les internes à se mettre en grève ! Je maintiens donc mon sous-amendement AS1756 qui me paraît particulièrement pertinent.

Mme la ministre. J’émets un avis défavorable à l’adoption de ces sous-amendements maintenus ; mon amendement AS978 rectifié n’induit aucun changement du droit existant. Ne trompons pas les jeunes internes en leur faisant peur ! L’article précédent a réaffirmé la liberté d’installation des professionnels de santé.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. J’émets également un avis défavorable, puisque la liberté d’installation n’est pas remise en cause et se trouve même réaffirmée à l’article évoquant les schémas régionaux de santé.

Les sous-amendements AS1736 et AS1750 sont retirés.

La Commission rejette les sous-amendements AS1755 et AS1756

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’article 38, tel que propose de le réécrire l’amendement du Gouvernement, instaure les conseils territoriaux de santé et le sous-amendement AS1704 vise à garantir la prise en compte de la voix des usagers. Je propose que ces conseils comportent une enceinte spécifiquement dédiée à l’expression des préoccupations des usagers.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Bernadette Laclais. Mon sous-amendement AS1720 précise que les CTS sont composés des élus des collectivités territoriales et souligne l’importance du rôle des services de la protection maternelle et infantile (PMI).

Mme la ministre. Avis favorable. Il est utile de spécifier le rôle de la PMI.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Le sous-amendement AS1705 étend l’application de la logique des CTS en proposant un dispositif comprenant un échelon de médiation sanitaire local, qui manque dans l’ambulatoire alors qu’il est bien représenté dans les établissements hospitaliers. Je propose une expérimentation de deux ans, période à l’issue de laquelle le législateur statuera sur l’opportunité de la généraliser.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Bernadette Laclais. Mon sous-amendement AS1719 est de coordination.

Mme la ministre. Avis favorable.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Même avis.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Bernadette Laclais. La rédaction actuelle de l’article 38 ne prévoit pas qu’une attention particulière soit portée aux soins palliatifs dans l’élaboration du diagnostic territorial et le sous-amendement AS1721 vient combler ce manque.

Mme la ministre. Avis favorable.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Même avis.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Bernadette Laclais. Le sous-amendement AS1722 propose de compléter la troisième phrase de l’alinéa 48 en insérant les mots « en favorisant les modes de prise en charge sans hébergement ».

Mme la ministre. Avis favorable.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Même avis.

La Commission adopte le sous-amendement.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Le sous-amendement AS1737 suggère de conférer, à titre expérimental, une compétence en matière de médiation sanitaire aux conférences régionales de la santé et de l’autonomie. Il s’agit de dupliquer à l’échelon régional les dispositions proposées pour les CTS.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte le sous-amendement.

La Commission adopte l’amendement AS978 rectifié sous-amendé.

En conséquence, l’article 38 est ainsi rédigé et tous les autres amendements à l’article 38 tombent.

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Article 38 bis
(art. L. 1431-2 du code de la santé publique)

Élargir la qualité des acteurs consultés par les ARS

La commission a adopté un amendement portant création d’un article additionnel après l’article 38. Il prévoit que, pour la définition et le financement des actions de promotion de la santé, les ARS agissent en concertation non plus avec les seuls « professionnels de santé » mais avec « les différents acteurs de santé ».

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La Commission en vient à l’amendement AS981 de Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Parmi les missions des ARS figurent la régulation et l’organisation de l’offre de services de santé et de services médico-sociaux. Cette régulation s’effectue en concertation avec les professionnels de santé ayant un exercice libéral, mais n’associe pas tous les acteurs concernés par cette régulation. Mon amendement AS981 a pour objectif de combler cette lacune.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. J’émets un avis favorable à l’adoption de cet amendement, car il explicite la possibilité qu’ont déjà les ARS de convier l’ensemble des acteurs à cette concertation.

Mme Valérie Boyer. Merci beaucoup, madame la rapporteure !

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 38 bis

La Commission étudie les amendements identiques AS57 de M. Jean-Pierre Door, AS583 de M. Fernand Siré et AS654 de M. Bernard Accoyer.

M. Arnaud Robinet. L’amendement AS57 a pour objet d’inclure les représentants des professionnels de santé dans les conseils de surveillance des ARS.

M. Fernand Siré. L’amendement AS583 est défendu.

M. Bernard Accoyer. L’amendement AS654 également.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. J’émets un avis défavorable à l’adoption de votre proposition qui ne correspond pas à la composition des conseils de surveillance ; ces derniers rassemblent les représentants des pouvoirs publics et sont chargés d’approuver le budget et le compte financier de l’ARS. En outre, les représentants des professionnels de santé siègent déjà dans plusieurs instances.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS361 de M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange. Je défends cet amendement au nom de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) et de sa coprésidente, Mme Gisèle Biémouret. J’ai rédigé pour la MECCS un rapport portant sur les transports sanitaires. Nous souhaitons inclure dans les schémas régionaux d’organisation des soins (SROS), définis par les ARS, un volet portant sur les transports. Cela permettrait d’assurer une meilleure cohérence entre l’offre et la demande, de mieux appréhender les coûts financiers liés aux déplacements et d’intégrer la création des plateaux techniques pour répondre aux besoins des patients.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. La nouvelle rédaction de l’article 38 consacre la disparition des SROS au profit des schémas régionaux de santé. Des dispositions réglementaires pourront traiter les enjeux de transport, ce qui m’amène à émettre un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS228 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Parallèlement à la création du parcours de santé, il nous paraît utile de créer un comité territorial de relation avec les usagers, afin que ceux-ci puissent faire valoir leurs droits.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis défavorable. J’approuve la proposition portée par cet amendement, mais elle se trouve satisfaire par les sous-amendements que nous venons d’adopter.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS442 de M. Jean-Pierre Door.

M. Élie Aboud. Cet amendement vise à permettre aux directeurs des ARS, en lien avec les conférences de territoire, de proposer au ministre chargé de la santé d’intégrer dans les programmes nationaux de santé les actions locales ayant concouru à l’amélioration de l’état de santé de la population ou à la réduction des inégalités en matière de santé. Le but est de faire confiance aux acteurs de terrain, de valoriser les projets locaux qui réussissent et d’assurer une articulation efficace entre le national et le local.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je comprends votre intention de faire remonter les bonnes pratiques, monsieur Aboud, mais les ARS doivent déjà procéder à ces remontées. De plus, votre proposition relève du domaine réglementaire. Si cet amendement n’était pas retiré, j’émettrais un avis défavorable à son adoption.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS497 de M. Dominique Tian, AS657 de M. Bernard Accoyer et AS1136 de M. Fernand Siré.

M. Élie Aboud. Nous souhaitons supprimer le deuxième collège des unions régionales des professionnels de santé (URPS), afin que ne subsistent que ceux des médecins généralistes et de leurs confrères spécialistes. Il convient de ne pas diviser inutilement la profession.

M. Bernard Accoyer. L’amendement AS657 est défendu.

M. Fernand Siré. L’amendement AS1136 également.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cette mesure présentée comme une simplification est d’un apport réel très limité, puisque le deuxième collège n’engendre aucun coût de fonctionnement. En revanche, son existence permet de garantir la représentation des chirurgiens anesthésistes et obstétriques. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle étudie l’amendement AS733 de Mme Michèle Bonneton.

M. Jean-Louis Roumegas. Amendement défendu.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis défavorable. Il s’agit d’une nouvelle demande de rapport adressée au Gouvernement, alors que les députés sont libres d’en élaborer un s’ils le jugent nécessaire.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 39
(art. L. 1431-2, L. 1435-12 [nouveau], L. 4001-2 [nouveau] du code de la santé publique)

Renforcement des dispositifs d’alerte sanitaire

Le système d’alerte sanitaire français souffre d’imperfections liées à la dispersion de ses acteurs, dont les missions, voire la création, ont été initiées par des crises précises, formant au final un ensemble dont la cohérence doit être aujourd’hui renforcée. Le projet de loi porte cette ambition : améliorer la coordination des acteurs au niveau régional et rappeler les obligations des professionnels sur l’ensemble du territoire.

1.  La vigilance sanitaire aujourd’hui : des acteurs multiples dont la coordination et l’implication doivent être renforcées

a.  Un système de vigilance complexe et caractérisé par une sous-déclaration d’événements

La stratégie nationale de santé présentée en 2013 a retenu parmi ses trois principaux axes : « faire le choix de la prévention et agir tôt et fortement sur tout ce qui a un impact sur notre santé », une ambition qui suppose notamment d’améliorer l’évaluation et la gestion des risques sanitaires.

Depuis 2009, l’article L. 1431-2 du code de la santé publique prévoit que les agences régionales de santé (ARS) sont chargées d’organiser la surveillance sanitaire « en s’appuyant en tant que de besoin » sur les observatoires régionaux de la santé, la veille sanitaire, l’observation de la santé dans la région le recueil et le traitement des signalements d’événements sanitaires. Les ARS « contribuent, dans le respect des attributions du représentant de l’État territorialement compétent, à l’organisation de la réponse aux urgences sanitaires et à la gestion des situations de crise sanitaire ».

Or, parallèlement, l’impératif de veille sanitaire a conduit le législateur et le Gouvernement à mettre en place diverses structures régionales de vigilance et/ou d’appui sur les produits et pratiques en santé :

– les centres anti-poison et de toxicovigilance ;

– les centres régionaux de pharmacovigilance ;

– Les centres d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance ;

– les coordonnateurs régionaux d’hémovigilance ;

– les antennes régionales de lutte contre les infections nosocomiales ;

– les centres de coordination de lutte contre les infections nosocomiales ;

– les observatoires de médicaments, des dispositifs médicaux et des médicaments ;

– les structures régionales d’appui à la qualité.

Ces structures, pour la plupart indépendantes des agences nationales et des ARS, concourent à l’ensemble des missions de vigilance, à savoir : la veille, la surveillance, le recueil et l’évaluation ; l’expertise et la recherche ; l’appui à la gestion des risques et de la qualité ; l’animation territoriale et la formation. En dépit de leur rôle essentiel en matière de veille et de sécurité sanitaire, les ARS n’ont pas nécessairement autorité sur ces structures pour coordonner leur action et consolider le fruit de leurs travaux.

Le rapport de mission intitulé « Réorganisation des vigilances sanitaires » (157) a, en juillet 2013, corroboré ce constat d’un dispositif de vigilance sanitaire construit par strates successives.

Ce rapport a en outre relevé la faiblesse persistante de la culture de la déclaration des événements indésirables, comme du signalement sanitaire en général, avec un constat de sous-déclarations chroniques. Il s’est ainsi appuyé sur plusieurs études :

– une enquête TNS Sofres d’avril 2013 qui montre « que seulement 24 % des médecins libéraux et hospitaliers déclarent systématiquement les événements pourtant à déclaration obligatoire ou encore les infections associées aux soins ». Les principaux facteurs explicatifs mis en avant sont la méconnaissance des circuits et du rôle des acteurs, ainsi que la complexité et la lourdeur administrative des dispositifs existants ;

– une étude de l’Institut national de veille sanitaire (InVS) de 2005 qui avait « montré que près de 30 % des biologistes et des médecins disaient ne pas déclarer après avoir diagnostiqué une maladie à déclaration pourtant obligatoire ».

Le rapport relève au final qu’entre 275 000 à 395 000 événements indésirables graves surviennent pendant une hospitalisation chaque année. 95 000 à 180 000 pouvant « être considérés comme évitables ». Or, on ne dénombre en France qu’environ 120 000 déclarations d’événements indésirables chaque année.

b.  Le projet de loi apporte des éléments de réponse institutionnels et légaux

Face à ce constat, le projet de loi propose d’agir dans deux directions :

– renforcer le rôle des ARS dans l’animation régionale de la veille sanitaire ;

– mobiliser les acteurs de la santé pour renforcer la culture de la vigilance sanitaire.

L’animation de l’action publique dans ce domaine requiert en effet un pilotage fort et visible, d’où le projet de réaffirmer le rôle de l’ARS comme chef de file régional de la surveillance sanitaire. Les agences doivent être explicitement en charge de constituer un réseau régional de vigilance et d’appui.

Parallèlement, l’amélioration des réponses collectives aux messages sanitaires suppose de mobiliser les professionnels de santé libéraux pour contribuer à la veille et à la gestion des alertes ou des crises sanitaires, car ils sont les premiers maillons du parcours de santé des patients. Afin de les encourager, il convient de simplifier et de clarifier les démarches que doivent entreprendre les professionnels de santé et les usagers.

Il est donc proposé dans ce texte de préciser les obligations déclaratives légales des professionnels de santé et de rappeler les obligations de participer à des actions de prévention, de dépistage ou de soins nécessités par une urgence sanitaire. De plus, dans l’exposé des motifs, le Gouvernement annonce son intention de mettre en place un portail de déclaration des événements indésirables de toute nature, à la suite d’une préconisation du rapport de M. Jean-Yves Grall précité. Il permettra de faciliter l’orientation des déclarants et de faciliter la mise en œuvre des réponses appropriées, notamment de tenir informé le télédéclarant des suites données à sa démarche.

2.  Cet article renforce le dispositif d’alerte sanitaire en consolidant le rôle des ARS et rappelant les modalités de participation des professionnels de santé à la vigilance sanitaire

a.  Le renforcement du rôle des ARS

Sur le plan institutionnel, les ARS doivent pouvoir coordonner l’action de l’ensemble des services régionaux de veille et d’appui parties prenantes, même s’ils n’y sont pas localisés, la contribution de chacune de ces structures à l’exercice de la veille sanitaire et l’allocation des financements correspondant devant également être clarifiées.

Le projet de loi prévoit donc que les ARS constituent un réseau régional de vigilance et d’appui (dit RREVA). Formalisé par un contrat de réseau les liant aux ARS, il rassemblerait l’ensemble de ces services régionaux de veille et d’appui, permettrait de coordonner leur action et d’agir en coordination avec l’action des agences nationales responsables de vigilances spécifiques.

Pour y parvenir, le I du présent article modifie profondément le chapitre Ier du titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique.

Son modifie la rédaction actuelle du a du 1° de l’article L. 1431-2, qui porte sur les missions des ARS, à savoir qu’« elles organisent, en s’appuyant en tant que de besoin sur les observatoires régionaux de la santé, la veille sanitaire, l’observation de la santé dans la région, le recueil et le traitement des signalements d’événements sanitaires ». La nouvelle rédaction proposée maintient le fond de ces dispositions mais permet d’en clarifier la rédaction.

Ainsi, en premier lieu, les ARS demeurent effectivement chargées de l’observation de la santé dans la région. Les observateurs régionaux de santé peuvent les y aider sans être leur source exclusive d’information : elles s’appuient « autant que de besoin » sur les observatoires.

La seconde mission prévue, à savoir la veille sanitaire, est renforcée et confortée par la nouvelle rédaction qui le mentionne dans un second temps et – ce qui est nouveau – lui subordonne explicitement les activités de recueil, de transmission et de traitement des signalements d’événements sanitaires.

Le insère une section 6, nouvelle, intitulée « Organisation régionale des vigilances sanitaires » au sein du titre III du livre IV de la première partie du même code.

Cette section est composée d’un article unique, l’article L. 1435-12 nouveau, qui confère aux ARS la responsabilité de l’organisation et de la couverture territoriale des vigilances sanitaires :

– l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (mentionné à l’article L. 1313-1) ;

– l’InVS (article L. 1413-2) ;

– l’Agence de biomédecine (article L. 1418-1) ;

– et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (article L. 5311-1).

Ces organismes sont indépendants des ARS, mais leurs contributions à la veille sanitaire doivent s’organiser sous leur autorité. La mise en commun des informations et l’animation de la mission doivent se traduire par la mise en place d’un réseau régional de vigilance et d’appui.

L’article 42 du projet de loi prévoit la fusion de l’InVS avec l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) et l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) pour former un institut national de veille, de prévention et d’intervention en santé. La constitution de cet institut, dans le contexte de renforcement du rôle de l’ARS prévu à cet article, doit s’accompagner du maintien de l’équilibre actuel qui prévoit que les équipes de l’InVS placées auprès des ARS participent à la mission de veille de l’ARS mais font administrativement et scientifiquement parties intégrante de l’InVS. Ce mode de fonctionnement apporte en effet une garantie d’indépendance scientifique et de consolidation des données épidémiologiques sur le plan national.

Un contrat de réseau précisera les missions de chacun et les modes de coordination des structures, sur le fondement d’un cadre national de conventionnement. Les objectifs des contrats de réseau se formaliseront dans les conventions financières préexistantes et organisant le financement de chacune de ces structures.

Le coût de la mise en place est estimé à 2,5 millions d’euros, ce qui inclut la mise en place du portail commun de déclaration et l’interconnexion avec les systèmes actuels de vigilance. En dehors de cet investissement initial, la réorganisation des moyens de vigilance doit se réaliser à coûts constants.

b.  Renforcer la participation des professionnels de santé

En un dispositif gigogne, le II de l’article permet d’insérer au début du livre préliminaire de la quatrième partie du code de la santé publique, un titre lui-même préliminaire intitulé « Missions des professionnels de santé », également composé d’un article unique, libellé L. 4001-2.

Cet article nouveau décrit les missions de santé publique comprises dans l’exercice d’une profession de santé. Elles sont de trois ordres (1°, 2° et 3°).

Il s’agit tout d’abord d’obligations déclaratives (1°), qui sont décrites à diverses occurrences du code, aux articles :

– L. 1413-4, qui prévoit la transmission spontanée à l’InVS de toute information utile de la part de l’État et des collectivités territoriales, établissements publics ainsi que, sur demande de l’Institut, de la part de nombreux acteurs privés, (entreprises publiques et privées, services de pompes funèbres etc.) ;

– L. 1413-14, qui prévoit que « tout professionnel ou établissement de santé ayant constaté une infection nosocomiale ou tout autre événement indésirable grave lié à des soins réalisés lors d’investigations, de traitements ou d’actions de prévention doit en faire la déclaration au directeur général de l’agence régionale de santé » ;

– L. 1413-15, qui prévoit que « les services de l’État et les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements de santé publics et privés, le service de santé des armées, les établissements et services sociaux et médico-sociaux, les services de secours ainsi que tout professionnel de santé sont tenus de signaler sans délai au directeur général de l’agence régionale de santé les menaces imminentes pour la santé de la population dont ils ont connaissance ainsi que les situations dans lesquelles une présomption sérieuse de menace sanitaire grave leur paraît constituée » ;

– et L. 3113-1, qui prévoit que font l’objet d’une transmission obligatoire de données individuelles à l’autorité sanitaire par les médecins et les responsables des services et laboratoires de biologie médicale publics et privés les maladies dont la surveillance est nécessaire à la conduite et à l’évaluation de la politique de santé publique ainsi que les maladies qui nécessitent une intervention urgente locale, nationale ou internationale.

En somme, cet article n’ajoute pas d’obligation déclarative au droit existant ; il se contente d’en rappeler l’étendue.

Le 2° prévoit également la possibilité que des professionnels participent à des actions de prévention, de dépistage et de soins. Cette participation peut en effet être requise « par un contexte d’urgence sanitaire » et les actions visées seraient alors mises en œuvre par les ARS, conformément à l’article L. 1431-2 mentionné et modifié en I du présent article. Il s’agit là encore d’un rappel visant à compléter le panorama des missions de vigilance sanitaire des professionnels de santé.

Enfin, le 3° prévoit la reconnaissance des actions de veille de surveillance et de sécurité sanitaire auxquelles ces professionnels pourraient participer volontairement. Il s’agit d’une disposition générale de reconnaissance juridique, telle que souhaitée par le Gouvernement dans l’étude d’impact, destinée à encourager les démarches proactives des professionnels dans ce domaine.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1441 de M. Serge Letchimy.

Mme Monique Orphé. L’amendement tend à ce que la veille sanitaire outre-mer permette d’établir des données propres à une comparaison avec la situation en métropole, et comporte une dimension régionale.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure pour le titre IV. Le recueil de données s’effectuant sur l’ensemble du territoire national, l’amendement est satisfait. J’en suggère le retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 39 sans modification.

*

Après l’article 39

La Commission examine l’amendement AS1172 de Mme Maud Olivier.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement vise à promouvoir la parité dans le conseil de surveillance de l’ARS.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je suis favorable au principe, mais je suggère la réécriture de l’amendement avant sa présentation en séance publique.

L’amendement est retiré.

*

Chapitre II
Renforcer l’alignement stratégique entre l’État et l’assurance maladie

La politique de santé est traditionnellement pilotée par l’assurance maladie et l’État. Si ce double pilotage a permis de proposer une couverture sanitaire de qualité à la population française, il importe aujourd’hui de poursuivre la mise en cohérence de l’ensemble de leurs actions dans le chemin tracé par la stratégie nationale de santé. Dans les régions, ce mouvement a notamment été initié par la création des agences régionales de santé (ARS) ; il doit maintenant franchir une nouvelle étape.

Les articles 40 et 41 apportent des réponses concrètes, respectivement en :

– rénovant le cadre de gestion du risque maladie ;

– en permettant aux ministres chargés de la santé et des affaires sociales de définir en amont les attentes de l’État en ce qui concerne le cadre de négociation des conventions nationales et les conditions de leur déroulement.

Article 40
(art. L. 182-2-1-1, L. 182-2-3, L. 182-2-4, du code de la sécurité sociale
et L. 1431-2, L. 1433-1 du code de la santé publique)

Rénovation du cadre stratégique de la gestion du risque

Cet article vise à améliorer la conduite des politiques de gestion du risque dans le domaine de la santé, en renforçant la coordination entre les actions menées par l’État et celles conduites par les caisses d’assurance maladie, réunies au sein de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM).

Il propose en particulier de renouveler le cadre contractuel la régissant au profit d’un plan national de gestion du risque établi sur une courte durée, de deux ans, et décliné en programmes nationaux et régionaux.

1.  La gestion du risque en santé doit aujourd’hui gagner en efficacité

Tout système d’assurance maladie résulte d’une histoire particulière. En France, la compétence de gestion du risque en santé, c’est-à-dire la politique de suivi et de pilotage du coût et de la qualité des prises en charge de la population relève de l’assurance maladie et de l’État.

Or, au cours des dernières décennies, les enjeux de santé publique ont connu une profonde mutation, caractérisée par une valorisation verticale des activités de prévention ou encore d’intervention, ainsi que par un mouvement plus horizontal de décloisonnement vers les autres secteurs de l’action sanitaire publique : éducation, travail ou encore médico-social. Cette mutation, combinée aux enjeux de financement du risque santé (fiscalisation des ressources, rôle croissant du Parlement à travers les lois de financement de la sécurité sociale, les LFSS) ont considérablement renforcé le rôle de l’État comme acteur et, de plus en plus, comme garant de la coordination des actions publique en santé, et même comme pilote de la politique de santé en France. Parallèlement, les pouvoirs de l’assurance maladie ont été consolidés, notamment dans ses relations avec les professionnels de santé, en particulier par la création de l’UNCAM.

L’UNCAM

Créé par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, cet établissement public national à caractère administratif regroupe les trois principaux régimes d’assurance maladie : le régime général d’assurance maladie, le régime agricole (Mutualité sociale agricole) et le régime social des indépendants.

Il inscrit son action dans le respect des LFSS et a pour objectif la mise en œuvre de la politique de santé définie à l’article L. 1411-1 du code de la santé publique – qui prévoit notamment que « la détermination des objectifs, la conception des plans, des actions et des programmes de santé mis en œuvre pour les atteindre ainsi que l’évaluation de cette politique relèvent de la responsabilité de l’État ».

Ces évolutions se sont également traduites à travers la loi HPST n° 2009-879 du 21 juillet 2009 précitée qui a créé les ARS, chargées notamment de piloter la mise en œuvre de schémas régionaux d’organisation des soins (cf. article 38).

La gestion du risque maladie est donc aujourd’hui une affaire commune à l’État et aux caisses d’assurance maladie, mais dans laquelle l’État exerce un rôle croissant de mise en cohérence au niveau national et de mise en œuvre au niveau des régions.

La gestion du risque maladie aujourd’hui

La gestion du risque (GDR) est une politique publique qui vise la maîtrise de l’évolution des dépenses de santé tout en maintenant ou améliorant l’état de santé de la population.

Le risque est compris comme tout ce qui génère des dépenses de santé : apparition et aggravation de la maladie, coût des soins, maintien de l’insertion dans la société des personnes atteintes de pathologies chroniques.

Il suppose de prévenir les maladies et limiter leur aggravation, promouvoir un juste recours aux soins, proposer une offre de soins adaptée, maîtriser le coût de ces soins.

Différentes actions sont mises en œuvre par l’État et l’assurance maladie, auprès des professionnels de santé de ville et en établissements, auprès des établissements de santé et médico-sociaux, auprès des assurés. Un levier d’action existe également en activant les dotations et les budgets alloués aux professionnels et aux établissements. La lutte contre les abus et les fraudes en fait également partie.

Ces différentes actions sont définies dans le programme pluriannuel de gestion du risque (PR-GDR), qui fait partie des programmes opérationnels du projet régional de santé (PRS), profondément réformé à l’article 38 du projet de loi.

Depuis 2010, les relations entre l’État et les caisses d’assurance maladie en matière de gestion de risque sont formalisées par un contrat État-UNCAM et une convention d’objectifs et de gestion (COG).

Les Convention d’objectifs et de gestion (158)

Instituées par l’ordonnance n° 344 du 24 avril 1996, les conventions d’objectifs et de gestion (COG) sont conclues entre l’État et les caisses nationales des principaux régimes de sécurité sociale. Identiques dans leurs principes généraux, les COG diffèrent selon chaque branche ou régime en fonction des axes stratégiques qui lui sont propres.

Elles constituent un des leviers de modernisation et d’amélioration de la performance de la sécurité sociale.

Elles formalisent dans un document contractuel la délégation de gestion du service public de la sécurité sociale aux organismes gestionnaires. Ces conventions sont signées pour une durée de quatre ans par le président et le directeur de la caisse concernée ainsi que par les ministres de tutelle. Elles sont ensuite déclinées en contrats pluriannuels de gestion (CPG) entre la caisse nationale et les caisses locales.

Chaque année, l’annexe 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale précise les objectifs et moyens des conventions d’objectifs et de gestion.

Créé par l’article 17 de la loi HPST, l’article L. 182-2-1-1 du code de la sécurité sociale décrit le contrat État-UNCAM de gestion de risque qui détermine les objectifs des contrats pluriannuels de gestion du risque conclus par l’État et l’UNCAM pour des périodes minimales de quatre ans. Ce contrat vise « à promouvoir des actions relatives à la prévention et l’information des assurés, ainsi qu’à l’évolution des pratiques et de l’organisation des professionnels de santé et des établissements de santé, de manière à favoriser la qualité et l’efficacité des soins » (alinéa 1er). Il s’inscrit dans le cadre des LFSS et définit les actions mises en œuvre par chacun des signataires. Les programmes nationaux de gestion du risque sont ensuite déclinés conformément aux objectifs définis par le contrat d’objectifs.

Cinq ans après la conclusion du contrat État-UNCAM, il apparaît que ce système n’a pas permis la mise en cohérence des actions des uns et des autres.

C’est le constat dressé par les inspecteurs généraux des affaires sociales Constance Bensussan, Delphine Chaumel, François Chieze et Nathalie Destais dans leur rapport 2013-163R rendu en mai 2014 intitulé Évaluation de la gestion du risque maladie. Ils ont ainsi relevé que la gestion du risque est aujourd’hui menacée par la confusion grandissante née des actions multiple qu’elle recouvre, qui est « génératrice de nombreux chevauchements de compétences au niveau central et territorial ». Elle se caractérise par des indicateurs multiples et hétérogènes et par l’absence de coordination entre les réseaux de l’assurance maladie et les ARS. Son efficacité en pâtit, l’efficacité de ses messages s’en trouve affaiblie et les coûts de gestion de ces chevauchements continuent de peser sur la ressource.

Cette mission a notamment préconisé d’unifier le pilotage de la gestion du risque, de redéfinir le périmètre des priorités partagées, d’améliorer la conception opérationnelle et l’évaluation des programmes.

Dans l’exposé des motifs, le Gouvernement reprend le constat d’un manque d’alignement stratégique entre l’État et l’assurance maladie, l’outil du programme pluriannuel de gestion de risque n’ayant pas eu l’effet fédérateur attendu, y compris en région.

Il est donc proposé de renforcer la qualité de l’action des structures de gestion du risque et d’améliorer la coordination entre les acteurs relevant de l’État et ceux relevant de l’assurance maladie. Le dispositif envisagé consiste à remplacer le contrat par un plan national de gestion du risque établi pour une durée de deux ans et décliné de façon plus opérationnelle en programmes par grands champs d’action en impliquant les ARS le plus en amont possible.

Il est également proposé d’affirmer plus précisément le rôle de pilotage des ARS : son champ d’action doit être transversal sur tout l’ensemble ville–hôpital–médico-social.

2.  L’instauration d’un plan national de gestion du risque

Le I apporte de profondes modifications au chapitre II bis du titre VIII du livre Ier du code de la sécurité sociale.

Le propose une nouvelle rédaction de l’article L. 182-2-1-1.

Le premier de ses cinq alinéas instaure un plan national de gestion du risque (PNGR), définissant sur une durée de deux ans les objectifs pluriannuels de gestion du risque communs aux trois régimes membres de l’UNCAM.

Le contrat État-UNCAM de gestion de risque détermine les objectifs des contrats pluriannuels de gestion du risque, conclu pour une durée minimale de quatre ans, est donc supprimé et remplacé par le PNGR.

Au terme du deuxième alinéa, ce plan identifie les actions relevant des différents signataires concourant à la mise en œuvre des objectifs que lui confère la loi dans le cadre de ses déclinaisons appelées « Programmes nationaux de gestion du risque ». Afin de mieux articuler les actions contenues dans le plan avec la politique de gestion du risque menée au niveau régional, le projet de loi prévoit que chacun des programmes nationaux de gestion du risque sera établi par le conseil national de pilotage des ARS, ce qui permettra aux services de l’État de contrôler le processus de définition, d’organisation et d’évaluation de la gestion du risque.

Le conseil national de pilotage des ARS (159)

Il est présidé par le ou les ministres chargés de la santé, de l’assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées. Il regroupe les différents directeurs d’administration centrale concernés par l’action des ARS, les directeurs généraux des caisses nationales d’assurance maladie et le directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Il a pour mission de veiller à la cohérence des politiques que les ARS mettent en œuvre en termes de santé publique, d’organisation de l’offre de soins, de prise en charge médico-sociale, de gestion du risque. Il valide les objectifs et les directives et s’assure de leur bonne mise en œuvre et de leur atteinte.

Cette démarche est cohérente : elle définit un pilote, l’État et favorise en amont les déclinaisons territoriales.

Le troisième alinéa prévoit que le PNGR est lui-même décliné dans chaque région au moyen d’un « plan pluriannuel régional de gestion du risque », déterminé par référence à l’article L. 1432-2 du code de la santé publique qui décline les compétences du directeur général de l’ARS.

Les modalités de mise en œuvre des plans pluriannuels régionaux de gestion risque sont déterminées de façon contractuelle. Une convention sera conclue entre le directeur d’ARS, au nom de l’État, et un représentant du directeur général de l’UNCAM ou, à défaut, par un représentant de l’Union désigné par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

Cette convention sera organisée selon un modèle type défini par le conseil national de pilotage des ARS. Au terme du dernier alinéa de l’article, cette convention permet de prendre en compte les particularités territoriales, au point le cas échéant, de pouvoir adapter les actions de gestion du risque ou encore de prévoir des actions spécifiques. Un bilan d’application de la convention est établi par les signataires et est transmis pour information au conseil national de pilotage des ARS.

Ce dispositif va donc bien au-delà de la clarification des relations entre l’État et l’assurance maladie dans le domaine de la gestion de risque : il donne à l’État et singulièrement aux ARS les moyens juridiques de mener la politique nationale et régionale dans ce domaine.

Le modifie quant à lui le 7° de l’article L. 182-2-3 dont il propose une nouvelle rédaction. Parmi ses missions, le conseil de l’UNCAM statue non plus sur « les orientations du contrat d’objectifs prévu à l’article L. 182-2-1-1 » mais sur « les orientations relatives au projet de plan national de gestion des risques prévu à l’article L. 182-1-1 ». Il s’agit d’une disposition de conséquence, permettant de prendre en compte les évolutions retenues au .

Le procède à une démarche similaire, substituant aux « contrats d’objectifs » le « plan national de gestion de risque » au 2° et au dernier alinéa de l’article L. 182-2-4 du code de la sécurité sociale – cet article portant quant à lui sur le mandat du directeur général de l’Union.

Le II introduit des modifications similaires dans le code de la santé publique.

Le porte sur le g du 2° de l’article L. 1431-2, un article qui décrit les missions des ARS. Il introduit parmi ces missions celle de mettre en œuvre des actions régionales déclinant ou complétant le PNGR. La nouvelle rédaction maintient sa mission de coordination avec les organismes d’assurance maladie ainsi qu’avec la CNSA pour la définition et la mise en œuvre des actions de gestion des risques.

Les actions visées découlent désormais du plan national de gestion de risque ou le complète, et non plus des programmes nationaux de gestion du risque. Le cadre législatif de ce travail n’est donc plus l’article L. 1434-14 du code de la santé publique, qui porte sur le programme pluriannuel régional de gestion du risque mais l’article L. 182-2-1-1 du code de la sécurité sociale, dont la rédaction a été entièrement revue en I.

La nouvelle rédaction du g conduit en outre à la suppression de dispositions devenues sans objet ou obsolètes :

– la description de la nature des actions, afin de ne plus les limiter aux seules conditions de recours aux soins et aux pratiques des personnels de santé en médecine ambulatoire et en établissements ;

– la publication d’un bilan annuel des séjours et de l’activité des établissements de santé ;

– la publication annuelle d’une analyse nationale et comparative par région.

Le modifie quant à lui l’article L. 1344-1 du code de la santé publique qui décrit le fonctionnement et les missions du conseil national de pilotage des ARS.

Son a substitue au troisième alinéa de cet article (« il valide toutes les instructions qui leur sont données. Il conduit l’animation du réseau des agences ») deux nouveaux alinéas tendant à renforcer le rôle des ARS dans la gestion de risque. Il est ainsi prévu que le conseil national de pilotage :

– établisse les programmes nationaux de gestion du risque ;

– définisse les contrats-types régissant la mise en œuvre des plans pluriannuels régionaux de gestion du risque (mentionnés en I) ;

– et assure le suivi de la mise en œuvre du plan national et des plans régionaux.

Le deuxième alinéa reprend sur le fond la rédaction du troisième alinéa dans sa rédaction en vigueur.

Le b porte quant à lui sur le quatrième alinéa de cet article dans sa rédaction en vigueur qui traite de l’évaluation périodique de l’action des agences et de leurs directeurs généraux.

Il est ainsi prévu d’adjoindre la mention « notamment sur la base des contrats définis à l’article L. 1433-2 », c’est-à-dire des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens de l’agence que les directeurs généraux signent avec les ministres chargés de la santé, de l’assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées tous les quatre ans.

Bien que cette insertion introduite par le terme « notamment » n’emporte pas de conséquence juridique décisive, elle rappelle que la démarche de structuration de la politique de santé en France, et singulièrement de son volet portant sur la gestion de risque, la place sous l’autorité du Gouvernement, à l’appui du réseau des ARS dans une optique de mise en cohérence des moyens de l’État et des organismes d’assurance maladie.

*

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS1124 de M. Arnaud Richard.

Puis elle adopte l’article 40 sans modification.

*

Après l’article 40

La Commission examine l’amendement AS359 de M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange. L’amendement est identique à un amendement déposé par ma collègue Gisèle Biémouret, qui préside la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) avec moi ; les préconisations de la MECSS à ce sujet ont été adoptées à l’unanimité. Nous proposons de remédier à l’absence de vision d’ensemble de l’offre de transport de patients dénoncée par la Cour des comptes. Pour mieux coordonner la gestion du parc de véhicules destinés aux transports de patients, il serait pertinent de confier la délivrance de l’agrément des entreprises de transport sanitaires aux caisses primaires d’assurance maladie sur délégation des ARS.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’examen des articles a permis de redonner aux ARS un pilotage réellement régional qui demeure pertinent ; de plus, des travaux ont été engagés pour simplifier la procédure d’agrément des transports sanitaires et d’autorisation de mise en service des véhicules sanitaires. Avis, pour ces raisons, défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS358 de M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange. L’amendement complète le précédent, rejeté pour des raisons bien peu convaincantes. Il ne s’agit pas de déshabiller les ARS, mais de leur permettre de déléguer aux caisses primaires la délivrance de l’agrément des entreprises de transport sanitaires pour rationaliser une offre de transports de patients dont la Cour des comptes et la ministre elle-même ont souligné la surabondance. Il me paraît donc judicieux de reprendre dans le texte des dispositions indispensables puisqu’elles visent à récupérer 1,5 milliard d’euros des 4 milliards d’euros que coûte le transport des patients.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Une étude est en cours à ce sujet. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 40 bis
(art. L. 221-1 du code de la sécurité sociale)

Publication par la CNAMTS d’un rapport d’activité
comportant des données sexuées

La commission des affaires sociales a adopté un amendement portant création d’un article additionnel après l’article 40. Il prévoit que la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés publie chaque année un rapport d’activité comportant des données sexuées. Ces données concerneront en particulier les accidents du travail et les maladies professionnelles.

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La Commission examine l’amendement AS1446 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Nous proposons que la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés publie chaque année un rapport d’activité et de gestion comportant des données sexuées, concernant en particulier les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

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Article 41
(art. L. 162-5, art. L. 162-14-4 et L. 162-14-5 [nouveaux],
art. L. 182-2-3 du code de la sécurité sociale, et L. 1432-2 du code de la santé publique)

Définition par l’État de principes cadres des négociations
des conventions nationales et de leurs adaptations régionales

L’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) regroupe les caisses des trois principales structures d’assurance maladie : régimes général, agricole et des indépendants. Les trois régimes gèrent leurs relations avec les médecins de façon indépendante et les organisent dans le cadre de conventions nationales, négociées sous la conduite du directeur de l’UNCAM. Les ministres ne disposent d’aucun moyen formel permettant d’orienter a priori la conclusion de ces conventions, alors même qu’elles doivent ensemble conduire des missions de service public. Ils ne peuvent intervenir qu’a posteriori pour contrôler la légalité des accords une fois ceux-ci signés.

1.  Poursuivre l’affirmation de la place de l’État dans les négociations conventionnelles

Les caisses d’assurance maladie, à travers l’UNCAM, sont liées par conventions aux professions de santé : il s’agit d’un pilier de l’organisation sanitaire française, fondée sur le rapport contractuel entre les caisses et les professionnels, régi notamment par les dispositions générales des articles L. 162-14-1 à L. 162-14-3 du code de la sécurité sociale communes à ces conventions. Toutefois, ce fonctionnement traditionnel a fait progressivement la place à l’État, devenu en trois décennies le véritable pilote politique de l’action sanitaire, pour des raisons tenant d’abord au financement de la sécurité sociale (fiscalisation de son financement, création et adoption annuelle des lois de financement de la sécurité sociale), mais aussi au besoin de mise en cohérence de l’ensemble des acteurs de la santé, qu’illustre par exemple la création des agences régionales de santé (ARS) en 2009.

Le rapport du sénateur M. Yves Daudigny (160), commis pour la commission des affaires sociales du Sénat, a rappelé en 2014 que « la réforme de 2004 a transféré le pouvoir de négociation conventionnelle des administrateurs des caisses des régimes obligatoires d’assurance maladie à leurs directeurs généraux, et notamment au directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM). » S’appuyant sur l’analyse de la Cour des comptes, il a rappelé également que cette réforme a élargi le champ de la négociation conventionnelle, qui était auparavant limitée à la seule détermination des tarifs, jusqu’à intégrer une approche globale de la relation entre patients et professions libérales de santé.

Le sénateur conclut que « de ce fait, les organismes « payeurs » de l’assurance maladie, et au premier rang d’entre eux la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM) dont le directeur général est également directeur général de l’UNCAM, ont développé un pouvoir d’influence en matière de gestion du risque, c’est-à-dire dans le champ du coût des prestations et de leur qualité. »

Il regrette dans ses travaux que l’UNCAM apparaisse comme trop en retrait ; elle devrait au contraire être conduite à demander davantage de contreparties aux professionnels dans les négociations. Aussi, parmi ses préconisations, le rapporteur souhaitait « clarifier le rôle de l’État » dans la conduite de ces négociations par l’UNCAM. Il s’agirait surtout de reconnaître un fait et de l’amplifier : son influence est déjà réelle, que ce soit par la communication de recommandations informelles sur les négociations ou par l’intervention de la législation sociale et notamment des lois de financement de la sécurité sociale.

Dans ce contexte, cet article vise à renforcer le poids de l’État dans les négociations de conventions nationales entre l’UNCAM et les médecins. Les ministres chargés de la santé et des affaires sociales pourront définir en amont les attentes de l’État vis-à-vis de ces conventions et déterminer les conditions de leur négociation. Ils en informeront par écrit le président du conseil de l’UNCAM. Le dispositif proposé permettra au conseil de l’UNCAM de demeurer souverain dans la définition des orientations des conventions et maintiendra le rôle du directeur dans la conduite des discussions. Toutefois, l’État pourra jouer un rôle accru dans certains aspects de la négociation.

Par la même occasion, dans un souci d’efficacité et d’optimisation de la ressource publique, cet article vise à introduire une plus forte territorialisation des conventions. La rédaction proposée permettra une déclinaison régionale de tout ou partie des mesures prévues au niveau national dans les conventions. L’opportunité de prévoir une déclinaison régionale de telle ou telle mesure envisagée lors de la négociation sera ainsi systématiquement envisagée. En ce qui concerne les dispositions destinées à réguler l’installation d’un professionnel de santé, les partenaires à la convention pourraient, autant que de besoin, envisager de recourir à des marges d’adaptation régionale de la convention nationale. Ces marges d’adaptation de modulation seront définies a priori par les partenaires à la négociation conventionnelle.

Ainsi, cet article fait directement échos aux orientations développées à l’article 1er du projet de loi, dont un volet repose sur la rénovation des relations entre l’État et les caisses d’assurance maladie et un autre sur la territorialisation de la politique de santé. Il s’agit de préserver les grandes compétences de chacun mais de poursuivre l’accroissement du rôle de l’État dans une démarche de cohérence : cohérence, car l’État est désormais le pilote principal de la politique de santé, cohérence, car il permet l’articulation des orientations votées par les parlementaires en loi de financement de la sécurité sociale et cohérence enfin, car le renforcement du rôle de l’État intervient symétriquement aux niveaux national et régional.

2.  Renforcement du poids de l’État et déclinaisons régionales

Le I modifie tout d’abord le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale.

Le supprime le deuxième alinéa de l’article L. 162-5. Cet article porte sur les rapports entre les caisses d’assurance maladie et les médecins. Il dispose notamment que les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les médecins sont définis par des conventions nationales conclues séparément pour les médecins généralistes et les médecins spécialistes. Son deuxième alinéa prévoit que ces conventions nationales peuvent faire l’objet de clauses locales particulières, « sous forme d’accords complémentaires ». L’objet du est de supprimer cette dernière disposition, afin de permettre une rénovation plus vaste du mode de négociation des conventions.

Le permet d’insérer deux articles, les articles L. 162-14-4 et 162-14-5 nouveaux.

● Le périmètre du I de l’article L. 162-14-4 nouveau porte sur l’ensemble des conventions nationales, qu’il s’agisse :

– de celles régissant les rapports entre l’UNCAM et les médecins généralistes ou spécialistes (art. L. 162-5) ;

– de celles portant sur les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les auxiliaires médicaux (art. 162-9) ;

– de celles conclues avec les infirmiers (L. 162-12-2) ;

– et enfin avec les directeurs de laboratoires privés d’analyses médicales (L. 162-32-1).

Ce nouvel article prévoit que l’ensemble de ces conventions se fonde sur un ou plusieurs contrats-type nationaux prévoyant systématiquement des modalités d’adaptation régionale des dispositifs définis au 4° du I de l’article L. 162-14-1 qui prévoit la possibilité de définir des incitations spécifiques pour encourager l’installation ou le maintien de professionnels de santé dans certaines zones, en particulier en instaurant des modes de rémunération adaptés. Ces modulations sont en particulier fonction des zones d’exercice déterminées dans le cadre des schémas régionaux de santé prévus à l’article L. 1434-7 du code de la santé publique. Ces dispositifs sont décrits précisément dans le commentaire de l’article 38 du projet de loi.

En outre, le deuxième alinéa de l’article L. 162-14-4 nouveau précise que ces conventions liant les organismes d’assurance maladie aux professions de santé pourront également prévoir des mesures d’adaptation régionales d’autres mesures conventionnelles, c’est-à-dire autres que celles liées aux conditions ou à la géographie d’installation de ces professionnels. Les seules mesures exclues du champ des adaptations sont celles relatives « aux tarifs prévus au 1° du I de l’article L. 162-14-1 et aux rémunérations de nature forfaitaire fixées par les conventions », c’est-à-dire les honoraires, rémunérations et frais accessoires dus par les assurés aux professionnels et les rémunérations forfaitaires (de type forfait médecin traitant ou encore affections de longue durée).

La détermination des contrats-type régionaux relèvera du directeur général de l’ARS : il en validera le format par arrêté en conformité avec les contrats-types nationaux. Ils contiendront des clauses modulées, par exemple des fourchettes d’attribution des aides par région, qui seront mises en œuvre de façon adaptée dans chaque région.

Cette disposition permettra une plus forte territorialisation de la politique conventionnelle par exemple pour moduler localement les dispositifs d’aides à l’installation ou de rémunération sur objectifs de santé publique. Il s’agira d’un levier de coordination et d’action d’autant plus efficace que, dans les orientations qu’il transmet à son directeur, le conseil de l’UNCAM devra aborder systématiquement la question de la déclinaison régionale des dispositions conventionnelles.

En lien avec les dispositions de l’article 38 conduisant notamment à la définition nouvelle de zones sanitaires sous-denses, ces mesures devraient accroître la différentiation des revenus des professionnels au profit de ceux intervenant dans ces zones. Par exemple, l’étude d’impact avance que l’enveloppe de 28,3 millions représentant l’ensemble des mesures démographiques adoptées dans le cadre des conventions nationales pourrait être désormais ventilée dans le cadre des conventions régionales.

Le II de l’article L. 162-14-4 nouveau élargit encore le recours aux contrats pour la mise en cohérence de l’offre de soins. Il prévoit en effet que, sur la base des mêmes contrats-type régionaux, chaque professionnel de santé ou chaque centre de santé conventionné établi dans le ressort de l’ARS puisse signer un ou plusieurs contrats avec le directeur général de l’ARS et un représentant de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie. Ce dernier est désigné par l’Union ou, à défaut, par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Le III prévoit que la participation financière des régimes d’assurance maladie aux actions prévues par ces contrats relève de l’enveloppe de l’Objectif nationale de dépenses d’assurance maladie (ONDAM). L’ONDAM, mentionné à au 3° du D de la loi organique 111-3, est voté chaque année par le Parlement ; cette disposition permettra donc aux parlementaires de suivre, et le cas échéant d’amender, le pilotage de la politique de contractualisation locale.

● L’article L. 162-14-5 nouveau porte quant à lui sur la définition des lignes directrices.

En I, il permet aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale de définir, au préalable, des lignes directrices cadrant les négociations des accords contrats et conventions mentionnés au premier alinéa de l’article L. 162-14-4 nouveau.

Cette faculté ne sera pas systématiquement utilisée et prendra la forme d’un courrier du ministre en charge de la sécurité sociale au directeur de l’UNCAM. Ces orientations pourront porter, notamment, sur les actions devant être soutenues prioritairement, dans le domaine de la prévention par exemple, ou encore sur la mise en œuvre de mesures permettant de rééquilibrer l’offre sanitaire dans les territoires.

Le II de l’article porte sur l’article L. 182-2-3 du code de la sécurité sociale qui porte sur les missions du conseil de l’UNCAM. Il s’agit de compléter son 4° qui prévoit que le conseil statue sur « les orientations relatives à la négociation des accords, contrats et conventions qui sont de la compétence de l’union » afin d’insérer la mention des contrats types nationaux tels que mentionnés à l’article L. 162-14-4.

Symétriquement, le III complète d’un nouvel alinéa l’article L. 1432-2 du code de la santé publique qui décrit les compétences du directeur général de l’ARS. Il insère deux alinéas spécifiques prévoyant :

– sa compétence pour arrêter le plan pluriannuel de gestion du risque, tel que prévu à l’article L. 182-2-1. Il doit le faire après concertation avec les caisses locales d’assurance maladie et les organismes complémentaires d’assurance maladie ;

– sa compétence pour arrêter les contrats-types régionaux (désormais mentionnés à l’article L. 162-14-4), et pour conclure le cas échéant des contrats conformes à ces contrats-types avec chaque professionnel de santé ou centre de santé établi dans le ressort de l’agence qu’il dirige.

*

La Commission examine ensuite l’amendement AS449 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement tend à supprimer l’article, qui modifie radicalement le cadre de la négociation conventionnelle en la rendant plus contraignante et en l’encadrant par des injonctions ministérielles. Aujourd’hui, les conventions sont négociées entre l’Assurance maladie, les mutuelles et les professionnels de santé, puis validées par le ministère. Il convient de conserver cette procédure et non de l’inverser. Dans le cas contraire, le risque est grand que des médecins de plus en plus nombreux choisissent le déconventionnement.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis défavorable. L’État doit formaliser ses orientations en amont, les conventions nationales étant ensuite déclinées au niveau régional.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette ensuite l’amendement AS1583 de M. Jean-Pierre Door.

Puis elle est saisie des amendements identiques AS56 de M. Jean-Pierre Door et AS1585 de M. Fernand Siré.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis défavorable. Les amendements précédents permettent de clarifier la place de l’État en amont, dans le respect de la liberté de négociation.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 41 sans modification.

*

Après l’article 41

La Commission étudie les amendements identiques AS59 de M. Jean-Pierre Door, AS495 de M. Dominique Tian et AS587 de M. Fernand Siré.

M. Jean-Pierre Door. La commission de hiérarchisation des actes et prestations (CHAP) a pour mission d’établir les règles de hiérarchisation des actes de sa profession et de valider la hiérarchisation qui en résulte. Actuellement, concernant la détermination du coût de la pratique affecté à chaque acte, l’article R.162-52 du code de la sécurité sociale indique que l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) « définit le tarif de l’acte ou de la prestation dans le respect des règles de hiérarchisation ». L’objet de cet amendement est de permettre à la CHAP, qui est une instance paritaire, de piloter et de déterminer la procédure d’évaluation du coût de la pratique des actes.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Défavorable. Ces amendements visent à permettre à l’UNCAM de déterminer les règles d’évaluation des coûts. Cette mission ne correspond pas à un besoin identifié dans le code au profit de l’UNCAM. Cela lui conférerait donc une mission législative sans aucune finalité précise, puisqu’elle n’aurait pas de mandat pour en tenir compte.

La Commission rejette les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette les amendements identiques AS60 de M. Jean-Pierre Door, AS496 de M. Dominique Tian et AS588 de M. Fernand Siré.

*

Chapitre III
Réformer le système d’agences sanitaires

Article 42
Réforme par ordonnances du système d’agences, création d’un institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique, mesures de simplification et d’allégement de procédures

Cet article vise à réformer le système d’agences dans le domaine sanitaire. Il autorise le Gouvernement à prendre diverses mesures législatives par voie d’ordonnances, poursuivant les objectifs suivants :

– renforcer le rôle de coordination des agences joué par le ministère de la santé ( du I) ;

– améliorer le dispositif de prévention, de veille et de sécurité sanitaire par la création d’un institut national de la prévention, de veille et d’intervention en santé publique ( et du I) ;

– simplifier et clarifier la législation applicable à certains produits de santé ( du II) ;

– assouplir, simplifier et accélérer les procédures mises en œuvre par l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ( du II) ;

– assouplir et simplifier la législation relative à l’Établissement français du sang (EFS) et à la transfusion sanguine ( du II) ;

– regrouper et harmoniser les dispositions relatives à certains établissements, autorités, groupements d’intérêt public et instances collégiales agissant dans le domaine de la santé (III) ;

– favoriser la mutualisation de fonctions transversales intéressant le fonctionnement des agences (IV).

I. RÉFORME DU SYSTÈME D’AGENCES ET CRÉATION D’UN INSTITUT NATIONAL DE PRÉVENTION, DE VEILLE ET D’INTERVENTION EN SANTÉ PUBLIQUE

Le I de l’article autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnances des mesures relevant du domaine de la loi conduisant à améliorer la coordination des agences sanitaires et à créer un institut de prévention, de veille et d’intervention en santé publique.

A.  LA DISPERSION DES ACTEURS EN CHARGE DE LA VEILLE ET DES RÉPONSES AUX CRISES SANITAIRES

Le rapport de mission de la Direction générale de la santé intitulé « Réorganisation des vigilances sanitaires » de M. Jean-Yves Grall en juillet 2013 (161) a dressé un état des lieux précis de la complexité du système d’agences en France. S’agissant du système de surveillance sanitaire, il a ainsi relevé les difficultés liées à sa construction « par strates successives, parfois en réaction à des crises, de fait sans cohérence globale ».

Le I de l’article vise précisément à y apporter une réponse en instaurant un outil de coordination renforcée entre les agences () mais également en rassemblant (en ), au sein d’un même institut, les missions exercées par trois organismes différents aujourd’hui :

– l’Institut de Veille sanitaire (InVS) ;

– l’Institut national d’éducation et de prévention pour la santé (INPES) ;

– et l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS).

1.  L’InVS

Créé par la loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme (162), l’InVS a vu ses missions complétées et renforcées par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique (163) afin de répondre aux nouveaux défis révélés au rythme des crises sanitaires et de l’apparition de nouveaux risques.

Ses missions sont décrites à l’article L. 1413-2 du code de la santé publique. L’institut est chargé de la surveillance et de l’observation permanentes de l’état de santé de la population ; de la veille et de la vigilance sanitaire ; de participer au système d’alerte sanitaire. Il concourt également à la gestion des situations de crise sanitaire. Il est chargé du suivi des risques liés aux maladies infectieuses, aux effets des facteurs environnementaux sur la santé, aux risques d’origine professionnelle, aux maladies chroniques et traumatismes ainsi qu’aux risques internationaux.

L’InVS est doté d’un Conseil d’administration de 23 membres (dont 11 représentants de l’État), chargé de se prononcer sur les grandes orientations stratégiques, sur son programme d’activité et sur les moyens humains et financiers nécessaires à l’exercice de ses missions. Il est également pourvu d’un Conseil scientifique de 17 membres, chargé de veiller à la cohérence de la politique scientifique et dispose d’un comité technique et de déontologie.

L’InVS tient un rôle particulier dans le projet de création du nouvel Institut : c’est sur son site que seront regroupés les organes de direction, et le réseau reproduira la structuration de l’InVS, avec le maintien de structures régionales placées auprès des agences régionales de santé (ARS).

Les relations de l’InVS avec les ARS

L’InVS dispose d’un réseau décentralisé, placé auprès des agences régionales de santé (ARS) et qui lui fournit l’appui dans ses missions d’analyse et de veille sanitaires : les 17 cellules régionales d’épidémiologie (CIRE), qui emploient 130 personnes. Positionnées au sein des ARS, elles sont placées sous la direction de l’InVS.

Ces cellules assurent une fonction d’épidémiologie, d’intervention et d’évaluation quantifiée des risques sanitaires, orientée principalement vers l’aide à la décision et le déclenchement de l’alerte (analyse du signal, évaluation de la situation, proposition d’options de gestion, suivi permettant l’adaptation de la réponse).

Elles assurent également une fonction d’animation, de structuration et de coordination du réseau régional de veille sanitaire, dans le prolongement de l’action de l’InVS. Ce travail s’inscrit dans le cadre des plans régionaux relatifs à l’alerte et à la gestion des situations d’urgence sanitaire.

Le réseau des CIRE constituera l’ossature du réseau régional de l’Institut. Il jouera un rôle accru, compte tenu notamment du renforcement des missions d’alerte sanitaire dévolues aux ARS prévu par le projet de loi à l’article 39.

L’équilibre actuel devra être maintenu : ces équipes devront appuyer les missions des ARS tout en demeurant sous l’autorité de l’Institut, garantie d’un strict périmètre scientifique pour leurs travaux.

2.  L’INPES

L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé est un établissement public administratif créé par la loi du 4 mars 2002 (164) relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. L’Institut est un acteur de santé publique plus particulièrement chargé de mettre en œuvre les politiques de prévention et d’éducation pour la santé conformément aux orientations de la politique de santé publique fixées par le Gouvernement.

La loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique précitée a élargi ses missions initiales à la participation à la gestion des situations urgentes ou exceptionnelles ayant des conséquences sanitaires collectives et à la formation à l’éducation pour la santé.

Les missions de l’INPES sont fixées à l’article L. 1417-1 du code de la santé publique. Il s’agit :

– de mettre en œuvre, pour le compte de l’État et de ses établissements publics, les programmes de santé publique prévus par l’article L. 1411-6 ;

– d’exercer une fonction d’expertise et de conseil en matière de prévention et de promotion de la santé ;

– d’assurer le développement de l’éducation pour la santé sur l’ensemble du territoire ;

– de participer, à la demande du ministre chargé de la santé, à la gestion des situations urgentes ou exceptionnelles ayant des conséquences sanitaires collectives, notamment en participant à la diffusion de messages sanitaires en situation d’urgence ;

– d’établir les programmes de formation à l’éducation à la santé, selon des modalités définies par décret.

Cet établissement est placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé et concourt à la politique de santé publique.

L’institut apporte son concours à la mise en œuvre des projets régionaux de santé mentionnés à l’article L. 1434-1.

3.  L’EPRUS

L’EPRUS est un opérateur de l’État né en 2007 à la suite de la crise du chikungunya outre-mer. Il est chargé de préparer, d’organiser et de conduire la mobilisation de moyens logistiques et humains de réponse à une situation de crise sanitaire. Il gère ainsi les stocks stratégiques de la France (iode, antibiotiques, etc.), garantit leur mobilisation rapide sur l’ensemble du territoire national et entretien un vivier près de 2 000 réservistes sanitaires déployables très rapidement en France ou à l’étranger. Il a ainsi participé à la réponse de la France aux crises en Haïti, en Libye, au Japon ou encore, plus récemment, en Guinée dans le cadre de la lutte contre la pandémie Ebola. Cet établissement a acquis en visibilité et a su nouer des partenariats efficaces avec le service de santé des armées (SSA), la sécurité civile, le centre de crise du ministère des affaires étrangères ou encore des organisations non-gouvernementales (ONG). Il est placé sous la tutelle unique du ministère de la santé.

Les diminutions de moyens décidées au cours des dernières années l’ont conduit à se rapprocher de l’INPES à qui il a notamment confié la gestion de sa fonction ressources humaines. Son intégration dans un institut plus vaste a du sens, mais la gouvernance future devra ménager la réactivité que lui permet sa structure ramassée et lui permettre de fructifier son capital de réputation. La mutualisation de moyens doit lui offrir l’occasion de développer des compétences nouvelles, grâce à la mobilisation des ressources de l’ensemble de l’institut, par exemple dans le domaine post-crise, avec le développement de compétences dans le suivi des populations ou encore la reconstruction des systèmes de santé.

Toutefois, l’optimisation des moyens publics conduit in fine à une approche plus interministérielle. Le développement d’aptitudes nouvelles telles que le suivi post-crises doit ainsi être mené en fonction des seules carences identifiées chez les acteurs publics déjà investis dans le domaine, et notamment au regard de l’expertise dont disposent déjà le ministère de la défense ainsi que, dans une moindre mesure, l’agence française de développement (AFD). C’est pourquoi votre rapporteure propose la présence d’un représentant du ministère de la Défense dans le collège administratif du conseil de son administration.

B.  LA RÉFORME DU SYSTÈME D’AGENCES SANITAIRES

Le I autorise le Gouvernement à légiférer afin d’opérer des transformations majeures visant à réformer le système d’agences français dans le domaine sanitaire.

Il importe d’agir en amont en renforçant le rôle de pilotage du ministère de la santé sur les agences et organismes sur lesquels il exerce une tutelle unique afin d’améliorer l’organisation des acteurs de la sécurité sanitaire.

Sur le modèle américain ou britannique, il s’agit surtout de créer un Institut national à forte visibilité nationale et internationale, dédié à l’ensemble des missions de santé publique relatives à la santé des populations : veille et surveillance, prévention, promotion de la santé, réponse aux crises sanitaires. Il sera centré sur les fonctions essentielles de santé publique et agira pour le renforcement de la coordination du système d’agences sanitaires. Il offrira une véritable continuité dans la réponse des pouvoirs publics aux enjeux sanitaires (surveillance, alerte, communication, appui aux réponses).

L’exposé des motifs du projet de loi indique que des synergies permettront de dégager des moyens pour renforcer des missions aujourd’hui mal couvertes telles que la conception et l’évaluation des interventions en santé. Ces mesures seront prises dans les six mois suivant la promulgation de la loi.

1.  Le rôle pilote de l’État pour coordonner le système d’agences

Le autorise le Gouvernement à prendre toute mesure de nature législative afin d’assurer la coordination et l’exercice des missions des agences nationales compétentes en matière de santé publique et de sécurité sanitaire. La France s’est dotée, étape par étape d’un système d’agences de qualité, permettant à la population et aux autorités de disposer d’un réseau scientifique et juridique réactif et efficace. Ce réseau s’est néanmoins construit par strates successives, sans une coordination d’ensemble suffisante, au point de souffrir aujourd’hui d’un manque de lisibilité et de cohérence.

Il faut donc renforcer la coordination de l’ensemble des opérateurs de l’État intervenant dans le champ du ministère chargé de la santé, qui est actuellement assurée par le comité d’animation du système d’agences (CASA), présidé par le directeur général de la santé. Il s’agit d’une instance informelle, que le Gouvernement souhaite renforcer en lui conférant une dimension législative, afin de réaffirmer la tutelle de l’État sur ses opérateurs.

Cet organisme ne sera pas doté d’une personnalité juridique propre. Il assurera, sous l’autorité du ministre chargé de la santé, la coordination de l’exercice des missions des agences et des autorités sanitaires nationales compétentes en matière de santé publique et de sécurité sanitaire ainsi que la mise en cohérence des actions qu’elles mettent en œuvre en matière de santé publique, de conception et d’évaluation en santé, de veille et de sécurité sanitaire.

La formulation du est donc relativement générale. Présidé par le ministre chargé de la santé, qui sera remplacé en cas d’absence ou d’empêchement par le directeur général de la santé, le CASA devra « assurer la coordination de l’exercice des missions des agences nationales compétentes en matière de santé publique et de sécurité sanitaire ». Pour ce faire, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteure que ce comité comprendra, outre son président :

– en tant que membres de droit :

● le directeur général de la santé ou son représentant ;

● les directeurs généraux de l’agence de Biomédecine (ABM), de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et du nouvel institut (ou de l’InVS, INPES et l’EPRUS dans l’intervalle), le président du conseil d’administration de l’EFS et le président du Haut conseil de la santé publique (HCSP) ou leurs représentants ;

– en tant qu’invités permanents :

● le secrétaire général des ministères des affaires sociales et les directeurs concernés du ministère chargé de la santé ou leurs représentants ;

● les présidents de la Haute autorité de santé (HAS) et de l’Institut national du Cancer (INCa), les directeurs généraux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et le président-directeur général de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) ou son représentant ;

● les représentants des ministères chargés de la tutelle des organismes cités au 2° ;

● un représentant des directeurs généraux des ARS, désigné par leur collège.

Le prévoit aussi que le comité devra veiller « à la cohérence des actions mises en œuvre dans ces domaines », c’est-à-dire dans leurs domaines de compétences. Dans cette perspective, le comité sera chargé :

– de mettre en cohérence les programmes de travail annuels des agences placées sous tutelle exclusive du ministère chargé de la santé ;

– de conduire des réunions hebdomadaires de sécurité sanitaire, en donnant davantage de visibilité à ces travaux ;

– de coordonner la mise en œuvre des règles déontologiques, en donnant également davantage de visibilité à cette mission. Le Gouvernement entend répondre ainsi à l’attente forte de la société française sur ce point.

Différentes instances lui seront rattachées, telles que le comité stratégique des vigilances qui vient d’être institué au sein du ministère chargé de la santé.

Le CASA ne prendra pas de décisions contraignantes concernant ses membres invités. Les modifications législatives attendues confieront à l’État un rôle de pilotage et de coordination de l’action des agences relevant de sa tutelle.

En outre, l’étude d’impact annonce la mise en place d’un schéma global permettant de rassembler, d’organiser et de réévaluer les missions et l’organisation de ces agences.

Enfin, une attention spécifique sera apportée à la coordination et à la mise en cohérence des domaines de la veille sanitaire, de l’éducation, de la promotion de la santé et de l’intervention en santé publique : c’est l’objet du projet de rapprochement des organismes y concourant au sein d’un même institut national.

2.  La création d’un institut national assurant les missions de l’InVS, de l’INPES et de l’EPRUS

Le prévoit la création d’un organisme nouveau dénommé Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique. Il aura le statut d’établissement public et reprendra les rôles exercés par l’InVS, ceux de l’INPES, ainsi que de l’EPRUS.

Votre rapporteure se réjouit de ce projet, mais considère qu’il convient d’accroître la visibilité et l’appropriation de cet institut en lui attribuant un nom plus pratique et immédiatement identifiable. Elle proposera par voie d’amendement de le baptiser « Santé publique France ».

Les droits, biens et personnels de ces instituts seront transférés au nouvel institut. Le projet d’habilitation apporte une mention particulière sur le transfert des obligations de l’employeur à l’égard des personnels, ce qui doit être interprété a minima comme la garantie du maintien des conditions contractuelles dont bénéficient leurs personnels.

D’après les éléments communiqués à votre rapporteure, les moyens de l’institut seront concentrés sur un site unique, à Saint-Maurice (Val de Marne). Il s’agit du site actuel de l’InVS, le seul des sièges des trois organismes dont l’État soit propriétaire. Des aménagements, dont le coût est évalué entre 5 et 7 millions d’euros, seront nécessaires pour accueillir les équipes franciliennes de l’EPRUS et de l’INPES. Ces investissements devraient être rapidement amortis, les loyers dus au titre de la location du siège de ces deux organismes s’élevant actuellement à près de 2,5 millions d’euros annuels. Il serait donc de bonne gestion que le Gouvernement soutienne résolument leur financement.

Comme de coutume, le rapprochement des systèmes d’information représentera un chantier important et long. Les évaluations sur sa mise en œuvre sont aujourd’hui en cours. Il s’agit notamment de rapprocher les fonctions support des trois organismes. Toutefois, les outils spécifiques de gestion de crise dont dispose l’EPRUS devraient quant à eux fonctionner de façon plus autonome.

L’accès aux donnés représentera une question d’une grande complexité qui justifie également le recours à l’ordonnance. Il s’agira de veiller en particulier aux conséquences du rapprochement sur l’accès à l’information, parfois sensible, dont jouit l’InVS.

La question des ressources

Les lois de finances initiale (LFI) et loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) devront déterminer la nature et la structure des ressources du futur institut au cours des années à venir, en tenant compte de l’hétérogénéité des ressources actuelles ainsi que des besoins liés à toute opération de restructuration.

Le rapprochement des structures intervient dans un contexte de forte décroissance des moyens des agences entre 2010 et 2015 :

– pour l’INPES, avec une basse d’un tiers de son budget (de 113 à 76 millions d’euros par an) et de – 13 % de ses effectifs (de 146 à 127 ETP) ;

– pour l’InVS, avec une diminution de 10 % de son budget (de 64 à 57,5 millions d’euros) et de 9 % de ses effectifs (de 432 à 392 ETP) ;

– comme pour l’EPRUS, dont le budget a reculé de plus de 40 % (de 73,6 à 41,7 millions d’euros) ainsi que les effectifs, de 14 % (de 35 à 30 ETP).

Élément supplémentaire de complexité, la part de la contribution de l’Assurance maladie évolue symétriquement à celle de l’État, avec des clés de répartition différentes selon l’organisme étudié : 2/3 pour l’INPES, 50 % pour l’EPRUS et nulle pour l’InVS. Toute variation de la dotation de l’État aura donc un impact accru sur l’équilibre budgétaire et les capacités d’action de l’Institut.

Sans éléments plus précis sur les perspectives du futur institut, tant en termes budgétaires que d’effectifs, il est permis de considérer qu’à missions constantes les marges de manœuvre dégagées par le nouvel institut ne seront pas considérables, surtout si les diminutions en cours se poursuivent. Il importe donc que la création de l’Institut s’accompagne d’une stabilisation de ses moyens dans la durée afin de lui permettre d’organiser les synergies générées par le rapprochement et d’identifier les ressources destinées à renforcer son action dans certains champs, tel que le préconise l’exposé des motifs.

Une fois ce régime de croisière atteint, il ne pourra être demandé à l’Institut de prendre une plus grande part dans d’éventuels plans de diminution de dépenses ou d’effectifs. Votre rapporteure invitera ses collègues à la plus grande vigilance sur ce point au cours de l’examen des prochains PLF et PLFSS.

Sous réserve de ses moyens, cet établissement devra investir dans des compétences déjà ouvertes aux trois instituts mais insuffisamment exploitées aujourd’hui, et notamment dans la promotion de la santé.

3.  Des règles de transparence et de déontologie

Le donne au Gouvernement mandat pour adapter au domaine d’activité de cet établissement les règles relatives à la transparence et aux conflits d’intérêts s’agissant des personnels ; des membres de ses conseils et commissions ainsi que des personnes collaborant occasionnellement à ses travaux. Il prévoira également les sanctions pénales applicables en cas de violation de ces règles.

a.  Règles déontologiques

L’ordonnance devra appliquer à ces personnes les règles relatives à la transparence et aux conflits d’intérêts prévues dans le code de la santé publique. Elles sont définies au sein du titre V « Règles déontologiques et expertise sanitaire » du Livre IV de la première partie du code. Son chapitre Ier (articles L. 1451-1 à L. 1451-4) prévoit notamment :

– que les membres des commissions et conseils, ainsi que les agents dont la nature des missions le justifient établissent une déclaration d’intérêts (article L. 1451-1) ;

– la publicité des séances des commissions, conseils et instances collégiales (article L. 1451-1-1) ;

– l’interdiction de percevoir des avantages d’entreprises intéressées par le domaine de compétences (article L. 1451-2).

Le chapitre II traite spécifiquement de l’expertise sanitaire, prévoyant également une démarche de déclaration d’intérêts ainsi que le respect d’une charte de l’expertise sanitaire. Le chapitre III prévoit la publicité des conventions conclues par les entreprises du secteur avec les professionnels, associations, étudiants, formateurs ou encore éditeurs de logiciels directement intéressés. Le chapitre IV enfin répond directement à la dernière partie de l’énoncé du en décrivant les dispositions pénales applicables. Sont notamment prévues une amende de 30 000 euros sanctionnant le fait « d’omettre sciemment d’établir ou de modifier une déclaration d’intérêts » afin d’actualiser les données qui y figurent ou « de fournir une information mensongère qui porte atteinte à la sincérité de la déclaration » ; ainsi qu’une amende de 45 000 euros sanctionnant le fait pour les entreprises d’omettre sciemment de rendre publique l’existence des conventions mentionnées au chapitre III. L’article L. 1454-4 prévoit également des peines complémentaires à l’encontre des personnes physiques, parmi lesquelles, en particulier, l’interdiction des droits civiques ou encore l’interdiction d’exercer une fonction ou une activité.

b.  Gouvernance envisagée

La mise en place de ces garanties repose en outre sur la gouvernance de l’Institut. Sur le modèle de l’InVS, il est prévu qu’il dispose :

– d’un conseil scientifique qui veillera à la qualité de la politique scientifique de l’établissement ;

– d’un comité d’éthique et de déontologie qui veillera au respect des règles éthiques et déontologiques ;

– d’un comité d’orientation qui précisera les attentes et interrogations de la société en matière de santé publique.

Le Gouvernement a indiqué que la composition précise de l’ensemble de ces instances était encore à l’étude.

Le conseil d’administration disposera d’une formation permettant de traiter dans un cercle restreint les informations classifiées. Il est envisagé en outre qu’il comprenne six collèges. Le premier sera institué pour représenter les administrations de l’État, dont les ministères du travail, des affaires étrangères ainsi que, se propose votre rapporteure, de la défense, directement concerné par la gestion de crises sanitaires graves. Ce collège permettra de conserver le principe d’une tutelle unique du ministère en charge de la santé, qui apporte une garantie de cohérence et d’efficacité, tout en ménageant la prise en compte de l’ensemble des enjeux interministériels. Le second rassemblerait des partenaires institutionnels (ARS, CNSA, etc.). Le troisième doit permettre la représentation des professionnels de santé, le quatrième celle des associations, le cinquième celle des élus et, enfin, un sixième collège permettrait l’expression des représentants du personnel.

c.  Propositions de votre rapporteure

Votre rapporteure souhaite que le comité scientifique présente les plus grandes garanties d’indépendance, en vérifiant les impératifs suivants :

– indépendance du directeur général, dont les décisions sont insusceptibles de recours administratif ;

– possibilité pour les scientifiques de s’autosaisir de thèmes de recherche et de publication ;

– garantie de la publication systématique en ligne sous un délai raisonnable de l’ensemble des travaux.

De son côté, le comité d’orientation doit permettre d’ouvrir le fonctionnement du futur institut sur la société civile en prévoyant notamment la participation de personnalités qualifiées, de représentants des associations de malades, des villes, de parlementaires, etc. Des dispositifs de dialogue avec la société civile doivent s’y ajouter, sur le modèle de ceux mis en place par l’ANSES ou l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) par exemple.

La mise en place du futur institut

La ministre des Affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a chargé en septembre 2014 M. François Bourdillon, directeur général de l’InVS, d’une mission de préfiguration afin de proposer le cadre d’organisation de ce futur établissement. Il doit remettre un rapport intermédiaire sur ce sujet fin mars 2015 et son rapport final d’ici fin juin 2015.

Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteure que l’ensemble du cadre législatif et réglementaire devrait être prêt pour permettre la mise en place effective du futur institut dès le début de l’année 2016.

4.  Habilitation à la mise en cohérence juridique

Disposition de cohérence, le délivre une autorisation générale à modifier les codes et lois non codifiées qui seraient concernés par la disparition de l’InVS, de l’INPES et de l’EPRUS, ainsi que par la création du nouvel institut.

Les enjeux culturels inhérents au rapprochement des trois organismes

La réunion des missions et moyens des trois organismes va tout d’abord poser le défi de l’intégration d’équipes dont les missions, et donc les cultures, sont très différentes que ce soit en matière d’analyse épidémiologique, d’évaluation, ou encore d’intervention. Il faudra que les équipes travaillent immédiatement ensemble afin d’assurer la continuité de ces missions essentielles. Le rapprochement peut en effet représenter une source de motivation pour l’ensemble des équipes. Ainsi, les travaux en épidémiologie déboucheront directement sur des possibilités d’actions, par exemple au titre des politiques de prévention ou d’intervention.

Sur le plan de la médiatisation, l’instauration de l’institut doit être l’occasion d’une véritable modernisation, avec, par exemple, le développement de nouveaux moyens de communication en santé, tels que les applications téléphoniques.

Votre rapporteure tient à saluer l’engagement remarquable de l’équipe de préfiguration qui a mis en place des outils de dialogue avec les personnels, d’information des autorités, a instauré des groupes de travail thématiques et a su définir une trajectoire réaliste et mobilisatrice pour les personnels. Il revient au Gouvernement et au Parlement d’appuyer pleinement ces travaux remarquables.

Enfin, il convient de lire cet article 42 en lien avec l’article 39 du projet de loi qui fait du directeur général d’ARS le coordonnateur et le pilote de l’analyse et de la gestion du risque (voir commentaire de cet article). L’instauration d’un cadre juridique nouveau impliquera donc également de maintenir des dispositions claires qui préservent l’équilibre actuel en confirmant la tutelle de l’Institut sur les structures de type CIRE. Votre rapporteure déposera un amendement en ce sens.

II. MESURES DE SIMPLIFICATION DES MISSIONS DE L’AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ DU MÉDICAMENT ET DES PRODUITS DE SANTÉ

Le II du projet de loi autorise le Gouvernement à prendre dans les neuf mois suivant la promulgation de la loi diverses mesures relevant du domaine de la loi « d’amélioration et de simplification du système de santé ».

A.  MESURES DE SIMPLIFICATION ET DE CLARIFICATION RELATIVES AUX PRODUITS SUPERVISÉS PAR L’ANSM

Le autorise le Gouvernement à prendre une série de mesures de simplification touchant à la législation applicable aux produits mentionnés à l’article L. 5311-1 du code de la santé publique.

Cet article décrit les missions de l’ANSM. Son II décrit l’ensemble des produits de santé pour lesquelles s’exerce la compétence de l’agence : évaluation des bénéfices et risques liés à l’utilisation de ces produits, qu’ils soient à finalité sanitaire ou cosmétique. Elle surveille le risque qui leur est lié et effectue des réévaluations des bénéfices et des risques présentés par leur utilisation.

L’agence peut également, dans certains cas, prendre des décisions touchant à l’ensemble du processus précédant la mise sur le marché du produit et entourant sa commercialisation : évaluation, essais, fabrication, préparation, importation, exportation, distribution en gros, courtage, conditionnement, conservation, exploitation, mise sur le marché ou encore publicité.

Il s’agit donc de pouvoirs mais aussi de responsabilités particulièrement étendus et les mesures de simplification et de clarification envisagées ici visent à alléger la charge de travail de l’agence dans un contexte de profonde transformation du secteur. Elles portent sur des champs très différents.

En premier lieu (a), il s’agit d’exclure du champ d’application de l’article L. 5311-1 les produits thérapeutiques annexes, mentionnés au 12° de la liste des produits relevant des compétences décrites au II. L’agence en donne la définition reproduite ci-après (165).

Les produits thérapeutiques annexes

« Les produits thérapeutiques annexes (PTA) sont définis comme tout produit, à l’exclusion des dispositifs médicaux, entrant en contact avec des organes, tissus, cellules ou produits issus du corps humain ou d’origine animale au cours de leur conservation, de leur préparation, de leur transformation, de leur conditionnement ou de leur transport, avant leur utilisation thérapeutique chez l’homme, ainsi que tout produit entrant en contact avec des embryons dans le cadre d’une activité d’assistance médicale à la procréation.

Pour l’essentiel, cette catégorie de produits comprend des milieux de conservation de greffons (tissus, organes), des milieux utilisés dans le cadre de la fécondation in-vitro, ou des milieux utilisés au cours de la préparation de produits de thérapie cellulaire.

Les PTA doivent faire l’objet, préalablement à leur mise sur le marché, d’une autorisation délivrée par le directeur général de l’ANSM, après évaluation de leur qualité, de leur sécurité et de leur efficacité in-vitro. L’autorisation peut être modifiée, suspendue ou retirée par l’Agence. Par ailleurs, des conditions particulières ou de restrictions pour l’utilisation de ces produits peuvent être fixées pour garantir leur sécurité sanitaire. »

Ainsi, au terme des modifications envisagées, ces produits seront toujours dans le champ de compétence de l’agence. En supprimant le 12° du II de l’article L. 5311-1, ce dernier ne s’appliquera plus directement à ces produits mais portera donc sur leur processus de fabrication.

Le b vise quant à lui à « supprimer le régime spécifique des produits officinaux divisés mentionnés au 4° de l’article L. 5121-1 du même code ». Ces produits sont ainsi définis : « toute drogue simple, tout produit chimique ou toute préparation stable décrite par la pharmacopée, préparés à l’avance par un établissement pharmaceutique et divisés soit par lui, soit par la pharmacie d’officine qui le met en vente, soit par une pharmacie à usage intérieur ».

Le Gouvernement propose ainsi de supprimer « des procédures administratives devenues obsolètes, parmi lesquelles : l’autorisation d’importation des médicaments à usage humain pour les particuliers ; l’autorisation d’importation des médicaments pour le médecin accompagnant une équipe sportive lors de compétitions se déroulant en France ».

En somme, à cet alinéa, il est proposé :

– de supprimer le statut spécifique des produits d’officine, devenu obsolète, la réglementation française se distinguant inutilement par sa complexité ;

– et de remplacer les régimes d’autorisation mentionnés supra par un régime déclaratif pour certaines opérations relatives aux micro-organismes et toxines ainsi qu’aux produits les contenant.

Le c prévoit d’étendre l’interdiction de la publicité pour les médicaments faisant l’objet d’une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques. Cette réévaluation est régie par l’article L. 5122-3 du code de la santé publique qui prévoit que seuls peuvent faire l’objet d’une publicité les médicaments pour lesquels a été obtenue l’autorisation de mise sur le marché, un enregistrement, ou qui bénéficient d’une autorisation d’importation parallèle.

Toutefois, la publicité pour un médicament est interdite lorsqu’il fait l’objet d’une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques. Cette réévaluation tire la conséquence d’un signalement de pharmacovigilance. Les professionnels de santé sont alors informés par l’exploitant du médicament de cette réévaluation.

La publicité est elle-même précisément définie par la loi. On entend ainsi par publicité pour les médicaments à usage humain toute forme d’information, y compris le démarchage, la prospection ou l’incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de ces médicaments, à l’exception de l’information dispensée dans le cadre de leurs fonctions par les pharmaciens gérant une pharmacie à usage intérieur (article L. 5122-1 du même code).

Le d prévoit quant à lui une mesure de coordination touchant à la question de l’importation des médicaments et produits de santé, entre :

– l’article 38 du code des douanes qui, dans le cadre de la définition des compétences générales des douanes définit les prohibitions d’importations, dont les médicaments et produits entrant dans le champ sanitaire (du 5° au 12°) ;

– et l’article L. 5311-1 du même code, tel que modifié au présent du II.

Le e prévoit la suppression de la procédure de fixation d’orientations en vue de l’élaboration et de la diffusion des recommandations de bonnes pratiques de l’ANSM, prévues à l’article L. 161-39 du code de la sécurité sociale. Il s’agit ici de dispenser l’agence de procédures relevant d’un formalisme excessif. L’élaboration et la diffusion des recommandations de bonne pratique traduisent en effet une mission d’information qui ne nécessite pas un travail administratif amont de préparation, d’examen et d’adoption d’orientations générales.

A.  ASSOUPLIR, SIMPLIFIER ET ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES MISES EN œUVRE PAR L’ANSM

Le vise quant à lui à accroître la fluidité de fonctionnement de l’ANSM. Il comporte diverses mesures de simplification.

Le a permettra au Gouvernement de supprimer le répertoire des recherches médicales. Prévu au deuxième alinéa de l’article L. 1121-15 du code de la santé publique, son utilité n’a pas été démontrée.

Le b supprime les procédures d’importation et d’exportation de certains produits dont l’agence a estimé que la levée ne compromettrait pas la sécurité sanitaire : micro-organismes et toxines, produits sanguins labiles, pâtes plasmatiques. Au besoin, une procédure de déclaration pourra y être substituée. En cohérence avec le , seraient également supprimées les procédures d’autorisation d’importation pour les particuliers et les médecins accompagnant une équipe sportive lors de compétitions se déroulant en France.

Le c autorise le directeur général de l’agence à établir directement deux listes jusqu’à présent établies par le ministre chargé de la santé :

– celle prévue à l’article L. 5212-1 portant sur la matériovigilance et qui prévoit une liste de dispositifs médicaux fixée par le ministre chargé de la santé après avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, et pour laquelle l’exploitant est tenu de s’assurer du maintien des performances et de la maintenance du dispositif médical ;

– celle prévue à l’article L. 5222-2 du même code qui prévoit la fixation d’une liste de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro d’occasion éligibles à la cession gratuite ou onéreuse.

Le d porte sur la politique de communication de l’agence. Il est proposé que le Gouvernement abroge les dispositions imposant des règles de communication aux directions d’établissements publics ou de départements ministériels lorsque leur nécessité n’est plus vérifiée par la pratique. Élément de modernisation, l’Agence pourra en outre rendre publics par ses propres moyens certains actes ou décisions. Cela lui permettra de les publier sur son site Internet, et non plus au Journal officiel ou au Bulletin officiel du ministère des affaires sociales et de la santé.

En e, il est prévu la possibilité d’accorder un agrément pour une durée illimitée aux établissements de transfusion sanguine. Cette mesure évitera le renouvellement périodique d’une même autorisation administrative tout en maintenant en l’état les dispositifs de contrôle de leurs activités. Le décret n° 2015-100 du 2 février 2015 relatif au plasma dans la production duquel intervient un processus industriel prévoit un renouvellement de l’autorisation tous les deux ans.

Le f permettra à l’agence de publier directement la pharmacopée qu’elle prépare et élabore. Pour mémoire, l’Agence fournit la définition suivante de la pharmacopée : « ouvrage réglementaire destiné aux professionnels de santé qui définit :

– les critères de pureté des matières premières ou des préparations entrant dans la fabrication des médicaments (à usage humain et vétérinaire) voire leur contenant ;

– les méthodes d’analyses à utiliser pour en assurer leur contrôle.

L’ensemble des critères permettant d’assurer un contrôle de la qualité optimale est regroupé et publié sous forme de monographies. Ces textes font autorité pour toute substance ou formule figurant dans la pharmacopée : ils constituent un référentiel opposable régulièrement mis à jour. ».

Le g permet l’abrogation des dispositions encadrant la publicité des contraceptifs autres que les médicaments en modifiant les articles L. 5134-2 et L. 5213-6 du code de la santé publique. Cela permettra une publicité libre de produits tels que les préservatifs.

Le h prévoit une habilitation afin que le Gouvernement renforce les missions de l’Agence en faveur de l’adoption des bonnes pratiques.

Enfin en i, il est prévu de dispenser les redevables de la contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises exploitant une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques de fournir la déclaration annuelle, rassemblant les informations relatives aux ventes réalisées au cours de l’année civile précédente pour les médicaments, produits de santé, dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro donnant lieu au paiement de chacune de ces taxes ou contributions, ainsi qu’à leur régime de prise en charge ou de remboursement.

B.  ASSOUPLIR ET SIMPLIFIER LA LÉGISLATION RELATIVE À L’ÉTABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, À LA TRANSFUSION SANGUINE ET AU CENTRE DE TRANSFUSION SANGUINE DES ARMÉES

Le prévoit diverses dispositions de nature à moderniser le fonctionnement des acteurs du sang en France.

1.  Mesures relatives à l’établissement français du sang et aux établissements de transfusion sanguine

L’établissement français du sang (EFS) est l’opérateur unique de la transfusion sanguine. La transfusion sanguine, dont l’EFS a le monopole depuis 2000, comprend le don de sang, le don de plasma, le don de plaquettes, le don de moelle osseuse et le don de sang placentaire. L’Établissement français du sang garantit la sécurité de la chaîne transfusionnelle, du donneur au receveur. Il est présent sur l’ensemble du territoire avec ses 149 sites de prélèvement et ses 40 000 collectes mobiles. Il dispose de 17 établissements régionaux, les établissements de transfusion sanguine (ETS).

EFS et ETS

L’EFS est un établissement public de l’État et est, à ce titre doté de la personnalité juridique, contrairement aux ETS, qui, dans le cadre d’une organisation déconcentrée, sont des établissements locaux de l’EFS (article L. 1223-1 du code de la santé publique). Ce sont les ETS qui exercent les activités liées à la transfusion sanguine par délégation de fonction, sous le pilotage d’un directeur entouré d’un conseil d’établissement, l’EFS ayant quant à lui pour mission de gérer le service public transfusionnel et ses activités annexes.

Les ETS sont autorisés à exercer les activités transfusionnelles dans le cadre d’un agrément de l’ANSM.

Dans un contexte de fortes mutations de la filière sang, le projet de loi prévoit de moderniser l’organisation de l’EFS et de ses ETS en renforçant son échelon central ainsi qu’en facilitant l’exercice de certaines de ses activités.

En a, il est prévu d’habiliter le Gouvernement à mettre en conformité le droit français encadrant la distribution, la délivrance, la commercialisation et la vigilance des produits sanguins labiles et des médicaments dérivés du sang.

Votre rapporteure n’a pas obtenu de précisions sur les projets du Gouvernement en ce domaine. Celui-ci a néanmoins indiqué qu’il s’agissait essentiellement de mettre en conformité le droit relatif à cette partie de l’activité sanguine avec le droit européen, et notamment la directive 2004/33/CE.

En b, il est prévu de modifier la définition et le champ des schémas d’organisation de la transfusion sanguine ainsi que leurs modalités d’application. Ces schémas sont prévus au titre II du livre II de la première partie du code de la santé publique et notamment à l’article L. 1224-1, qui définit ces schémas ainsi qu’à l’article L. 1223-2 qui porte sur les champs géographiques et techniques d’activité des établissements de transfusion sanguine. Chaque schéma détermine :

– la zone de collecte de chaque établissement de transfusion sanguine ;

– la répartition des activités entre les établissements de transfusion sanguine et, le cas échéant, leur regroupement ;

– les installations et les équipements nécessaires pour satisfaire les besoins en matière de transfusion sanguine, dont les dépôts de sang ;

– les modalités de coopération entre les établissements de transfusion sanguine ainsi que, le cas échéant, celles relatives à la coopération entre les établissements de santé et les établissements de transfusion.

Le Gouvernement souhaite ici tenir compte des modifications fréquentes touchant aux dépôts de sang (changement de catégorie de dépôt, changement de nom de l’établissement de santé pour cause de fusion entre établissements ou de changement statutaire) et aux 17 établissements de transfusion sanguine de l’EFS, qui ont connu de nombreuses réformes au cours des dernières années. Il est donc proposé en lieu et place du système actuel un schéma directeur national de la transfusion sanguine déterminant les principes et critères applicables aux activités de mise à disposition de produits sanguins labiles. Ce schéma directeur national sera arrêté par la ministre chargée de la santé, sur la base du projet élaboré par l’EFS.

Interrogé par votre rapporteure, et dans une démarche de transparence, le Gouvernement a précisé que ce schéma directeur national « sera ensuite décliné dans des schémas régionaux d’organisation de la transfusion sanguine (SROTS), déterminant, la répartition sur les sites des activités de mises à disposition de produits sanguins labiles, conformément aux principes et critères fixés dans le schéma directeur national. »

Les projets de SROTS seront élaborés par l’EFS, après avis du directeur général de l’ARS territorialement compétente. Ces projets seront transmis pour avis au ministre chargé de la santé et définitivement approuvés par décision du président de l’EFS en l’absence d’opposition du ministre chargé de la santé dans les deux mois.

Alors que le Gouvernement a affirmé son souhait de renforcer l’EFS, il importe que grâce aux modifications envisagées cet établissement puisse conduire directement certaines activités et ne pas dépendre exclusivement des échelons régionaux pour les mener. Cet objectif suppose de renforcer l’outil « schémas d’organisation » mais également, ce que prévoit le c, de revoir la répartition de certaines missions.

En c, le Gouvernement est habilité à restructurer le droit encadrant l’activité de l’EFS ainsi que les activités ouvertes à tire principal ou accessoire aux établissements de transfusion sanguine.

Il s’agit d’entreprendre un travail légistique complexe, consistant notamment à regrouper l’ensemble de ces dispositions dans une même subdivision du code de la santé publique. Il serait également souhaitable de modifier la répartition des activités de manière à permettre à l’EFS d’exercer certaines activités en direct, dans le respect du principe de subsidiarité.

Au-delà de ces aspects touchant à l’organisation, votre rapporteure constate la persistance de mesures réglementaires excluant d’office les personnes entretenant des rapports homosexuels masculins. Ces dispositions ne sont pas en conformité avec le droit communautaire et le Gouvernement a annoncé son intention de les modifier. Votre rapporteure déposera un amendement prévoyant la prise en compte de cette question à l’occasion des aménagements législatifs prévus dans ce c.

Le d permettra aux établissements de transfusion sanguine d’exercer des activités de soins. Pour ce faire, la définition des centres de santé, prévue à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, sera modifiée afin de prévoir les activités de soins spécifiques à l’activité de transfusion sanguine.

En l’état, l’article L. 1223-1 du code de la santé publique autorise les ETS à exercer des activités de soins à titre accessoire. Pour ce faire, l’EFS doit obtenir les autorisations de droit commun à travers la gestion de centres de santé, faute d’un régime d’autorisation spécifique. Compte tenu de la complexité de ces montages, il est ici préconisé de construire un régime d’autorisation ad hoc, de nature à autoriser directement les ETS à exercer certaines activités de soin.

Le e prévoit de modifier les attributions consultatives de l’EFS : votre rapporteure n’a pas obtenu davantage de détails sur cette mesure.

Le f vise à élargir les actes que les étudiants en médecine peuvent pratiquer en matière de prélèvement sanguin dans les établissements de transfusion sanguine. En seront néanmoins exclus les cas où ils interviennent pour la réserve sanitaire, qui répondent à des dispositions spécifiques (article L. 3132-1).

En l’état, la rédaction de l’article L. 4311-12-1 du code réserve l’exercice des actes infirmiers par des étudiants en médecine aux seuls titres des situations d’urgence (réserve sanitaire). Il s’agit d’ouvrir l’exercice d’actes infirmiers à ces étudiants en particulier afin de leur permettre d’effectuer des prélèvements sanguins.

Globalement, votre rapporteure a souhaité obtenir des précisions sur les objectifs légistiques visés par la demande d’ordonnance relative au sang. En dehors de ceux relatifs aux SROTS, les éléments obtenus sont retracés dans le tableau ci-après.

« Dans le but de simplifier l’action de l’EFS, et son organisation au niveau territorial, ont été identifiées des procédures susceptibles d’être assouplies dans le respect de la sécurité sanitaire. Il s’agit :

– d’alléger la procédure actuelle de fixation des schémas régionaux d’organisation de la transfusion sanguine (SROTS) ;

– de regrouper et adapter au sein d’un même chapitre du code de la santé publique relatif à l’EFS, les activités ouvertes à titre principal ou accessoire aux établissements de transfusion sanguine ;

– de modifier la définition des centres de santé précisée à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique pour permettre aux établissements de transfusion sanguine d’exercer des activités de soins dans ce cadre ;

– de modifier l’organisation des instances de direction, de gestion et de consultation de l’établissement français du sang ;

– de permettre aux étudiants en médecine de pratiquer certains actes de prélèvement sanguin dans les établissements de transfusion sanguine, hors les cas où ils interviennent dans le cadre de la réserve sanitaire mentionnée à l’article L. 3132-1 du code de la santé publique ;

– enfin, de permettre au centre de transfusion sanguine des armées d’exporter des produits sanguins labiles en précisant les modalités et les conditions de cette autorisation ».

Ces éléments n’ayant pas permis d’identifier l’ensemble des projets législatifs du Gouvernement, et notamment en ce qui concerne le a et le c, votre rapporteure déposera un amendement visant à garantir la pérennité du principe de gratuité des dons de sang.

1.  Mesures relatives au centre de transfusion sanguine des armées

Le g concerne les centres de transfusion sanguine des armées (CTSA). Ce réseau d’excellence relevant du service de santé des armées est chargé de fournir les produits sanguins de toutes sortes aux forces armées, afin notamment de garantir leur approvisionnement en opérations.

Les activités de recherche conduites par le centre lui ont permis de développer des produits de très haute technicité. Il en va ainsi du plasma cryo-desséché viro inactivé (PLYO), un plasma produit sous forme de poudre et conditionné en flacon de verre et qui permet un ravitaillement en plasma dans des conditions opérationnelles exigeantes. Protégé par plusieurs brevets internationaux, il n’est produit dans le monde que par le CTSA.

Sa production permet aujourd’hui d’approvisionner certains hôpitaux d’instruction des armées (HIA) tels que Sainte-Anne, Percy, Bégin ou le Val-de-Grâce ainsi que les unités en opérations extérieures, soit la production d’une centaine de flacons chaque année.

La France étant seule capable de fabriquer ce produit, et afin de réaliser des gains d’échelle, le ministère de la défense souhaite accroître sa production en permettant au CTSA d’en exporter au profit d’armées alliées mais également d’en faire profiter des acteurs civils. L’armée américaine souhaite ainsi acquérir plusieurs milliers de flacons par an dès 2015. De même, des acteurs français tels que les SAMU ont également manifesté leur intérêt.

Or, ces perspectives, et notamment celle d’exporter, nécessitent des adaptations en droit. En l’état, le troisième alinéa de l’article L. 1222-3 du code de la santé publique prévoit que « les exportations de produits sanguins labiles ne peuvent être effectuées, après vérification que les besoins nationaux sont satisfaits, que par l’Établissement français du sang qui en informe l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ».

Il semble en effet opportun de modifier la législation afin de permettre au CTSA d’exporter lui aussi des produits sanguins labiles. Compte tenu de l’urgence attachée à cette mesure de bon sens, le recours aux ordonnances semble tout à fait justifié.

III. MESURES DE MISE EN COHÉRENCE LÉGISLATIVE A DROIT CONSTANT CONCERNANT LES ORGANISMES INTERVENANT DANS LE DOMAINE DE LA SANTÉ

Le III rassemble des mesures autorisant le Gouvernement à prendre des mesures de nature législative dans les 12 mois suivant la promulgation de la loi de santé dans deux champs distincts.

En , le Gouvernement pourra regrouper et harmoniser les dispositions législatives relatives aux missions, à l’organisation, au fonctionnement et aux ressources des autorités, établissements, groupements d’intérêt public et instances collégiales suivantes :

– l’EFS (mentionné à l’article L. 122-1 du code de la santé publique) ;

– l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (article L. 1313-1) ;

– le Haut Conseil de la santé publique (article L. 1411-4) ;

– l’InVS (article L. 1413-2) ;

– l’Institut national du cancer (article L. 1415-2) ;

– l’INPES (article L. 1417-1) :

– l’Agence de la biomédecine (ABM) (article L. 1418-1) ;

– l’EPRUS (article L. 3135-1) ;

– l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (article L. 5311-1) ;

– la Haute Autorité de santé (article L. 161-37 du code de la sécurité sociale).

Ces dispositions concernent également l’Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé créé en I.

Le autorise la Gouvernement à prendre des mesures visant à regrouper et harmoniser les dispositions législatives en matière de veille, de vigilance et d’alerte sanitaires. Ainsi, un même chapitre du code de la santé publique regroupera les dispositions relatives aux missions de prévention, de vigilance, de sécurité et de police sanitaires actuellement confiées à ces opérateurs publics. Il s’agira également de préciser les modalités d’exécution de leurs missions ainsi que les règles constitutives des opérateurs. Le régime de leurs décisions est aujourd’hui relativement hétérogène, prises au nom de l’État avec ou sans possibilité de recours hiérarchique ; il s’agira de les harmoniser.

Le quatrième alinéa de ce III prévoit que les mesures du (deuxième alinéa) et du (alinéa 3) sont prises à droit constant sous réserves de modifications très limitées et justifiées au nom :

– du respect de la hiérarchie des normes ;

– de l’amélioration de la cohérence rédactionnelle des textes ;

– de l’harmonisation du droit ;

– de la nécessité de remédier à des erreurs et insuffisances de codification ;

– et de celle d’abroger des dispositions obsolètes ou devenues sans objet.

IV. MESURES TOUCHANT AU FONCTIONNEMENT DES AGENCES DE SOUTIEN

Les ordonnances prévues au IV devront être prises dans un délai de 12 mois à compter de la promulgation de la loi. Elles visent à optimiser l’emploi de la ressource publique par la mutualisation.

Le vise à donner au Gouvernement les moyens législatifs d’organiser la mutualisation des fonctions transversales d’appui et de soutien, en modifiant les dispositions relatives aux missions et fonctionnement des organismes suivants : EFS, Haut Conseil de la santé publique, INPES, ABM, ANSM, HAS, ainsi que l’Institut national créé au du I.

Il s’agit de soutenir la réorganisation du système d’agences en favorisant la mutualisation des fonctions transversales d’appui et de soutien (cf. supra)

Le permettra au Gouvernement de déterminer le régime des décisions prises par les présidents ou directeurs généraux de ces agences afin d’assurer une meilleure cohérence de celles-ci.

Le autorisera l’évolution des missions et de l’organisation du groupement d’intérêt public chargé du développement des systèmes d’information de santé partagés, dont le statut est fixé par l’article L. 1111-24 du code de la santé publique. Il s’agit aussi d’organiser son rapprochement avec d’autres structures ainsi que de mettre en cohérence ses missions et son organisation avec les dispositions du présent projet de loi, et notamment celles liées à l’évolution du dossier médical personnel.

Le prévoit de délivrer une habilitation générale pour permettre au Gouvernement de modifier autant que nécessaire les codes et lois non codifiées afin de les mettre en cohérence avec les dispositions du présent IV.

Interrogé par votre rapporteure, le Gouvernement a indiqué que « le premier projet identifié est lié à la mise en œuvre du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ». Ce décret concerne la quasi-totalité des agences sanitaires. Une opération commune regroupant cinq d’entre elles (InVS, INPES, EPRUS, ANSM et INCa) a été lancée par le Gouvernement afin de disposer d’un système d’information financier et comptable commun, dès le 1er janvier 2016.

D’autres mesures de nature législative pourraient être prises afin de pérenniser des pistes de mutualisation de moyens, actuellement possibles aux seuls moyens de conventions et concernant des domaines précis, tels que les ressources humaines, la logistique, les achats, ou encore les systèmes d’information.

En V, il est prévu le dépôt devant le Parlement d’un projet de loi de ratification dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues dans cet article.

*

La commission des affaires sociales a adopté cet article moyennant trois amendements de votre rapporteure.

Le premier a substitué au nom de « Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique » celui de « Santé publique France ».

Le deuxième a précisé que le transfert des compétences de l’InVS à Santé publique France, qui se déroule à périmètre de missions et de moyens constant, n’entrainera pas de modification des rapports entre les futures structures régionales de l’établissement public et les ARS.

Enfin, l’autorisation de recourir aux ordonnances pour modifier le droit applicable à la transfusion et à la commercialisation du sang devra s’inscrire dans le cadre des principes éthiques mentionnés à l’article L. 1221-1 du code de la santé publique (bénévolat, anonymat et absence de profit).

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1038 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’article 42 prévoit la fusion de l’Institut de veille sanitaire (InVS), de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) et de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) en un établissement unique, pour lequel cet amendement propose la dénomination « Santé publique France », qui lui assurera une meilleure visibilité en France et à l’étranger.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement AS1066 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cet amendement vise à garantir l’articulation entre ce nouvel établissement public et les ARS dans le cadre de leur mission de veille, de surveillance et d’alerte en région.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS299 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. La loi de financement de la sécurité sociale et la loi Macron ont suscité des inquiétudes quant à la transformation de la filière française du sang. L’alinéa 15 de l’article prévoit la suppression des procédures d’autorisation d’importation et d’exportation de certains produits de santé, au profit d’une procédure de déclaration. Ainsi, concernant la transfusion sanguine, nous prenons le risque de passer d’un système éthique fondé sur le bénévolat, la gratuité et l’autosuffisance, à une commercialisation des produits. Cet amendement vise donc à supprimer l’alinéa 15.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Nous avons auditionné la Fédération française pour le don de sang bénévole, attachée comme nous à des procédures éthiques. Cependant, j’émets un avis défavorable, car cet amendement est satisfait par des amendements à venir à d’autres alinéas.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS300 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 24, qui présente les risques que je viens d’exposer.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Défavorable. Il est satisfait par mon amendement suivant.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS1037 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cet amendement rappelle les principes éthiques encadrant le don du sang en France : le bénévolat, l’anonymat et l’absence de profit.

La Commission adopte l’amendement.

L’amendement AS1043 de la rapporteure est retiré.

La Commission adopte l’article 42 modifié.

*

Après l’article 42

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement AS1691 de la présidente Catherine Lemorton et l’amendement AS1163 de Mme Michèle Delaunay.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mon amendement vise à étendre les contrôles de la Cour des comptes aux établissements de santé privés. La représentation nationale serait ainsi parfaitement éclairée sur la base du rapport de la Cour, en particulier au regard des tarifications, d’autant que ces établissements reçoivent d’importants financements publics.

M. Joël Aviragnet. L’amendement AS1163 prévoit que les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés sont soumis au contrôle de la Cour des comptes.

Mme la ministre. Le financement public de ces établissements justifie la transparence. Néanmoins, le contrôle de la Cour des comptes est-il la seule option ? Cette question mérite d’être expertisée, avant d’être abordée en séance publique.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je pense également utile de retravailler ces amendements, avant leur examen en séance.

M. Jean-Louis Roumegas. Il suffira de remplacer les mots « sont soumis au contrôle » par « peuvent être soumis au contrôle ».

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je retire mon amendement, mais je le représenterai en séance, en y intégrant la rectification suggérée par M. Roumegas.

M. Joël Aviragnet. Je retire également l’amendement AS1163.

Les amendements sont retirés.

*

Article 42 bis
(art. L. 1340-2 à L. 1340-6 [nouveaux], L. 1341-1, L. 1341-2,  L. 1341-3, L. 1342-1, L. 1413-4, L. 6141-4 du code de la santé publique)

Transfert à l’ANSES du pilotage de la toxicovigilance

La commission a adopté un amendement du Gouvernement portant création d’un article additionnel après l’article 42. Il organise le transfert de la responsabilité du pilotage de la toxicovigilance de l’InVS à l’ANSES.

En effet, la toxicovigilance, qui repose notamment sur le concours des centres anti-poison, concerne surtout les produits de consommation courante, qui relèvent davantage du champ d’action de l’ANSES.

Les modalités d’organisation du nouveau dispositif seront déterminées par décret en Conseil d’État. Elles porteront en particulier sur la déclaration des cas d’intoxication humaine ainsi que sur les conditions de conservation de l’information.

*

La Commission en vient à l’amendement AS1499 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit de transférer à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) la mise en œuvre du système de toxicovigilance.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 42 bis

La Commission est saisie de l’amendement AS301 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à préciser que la veille environnementale fera partie des missions du futur Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Défavorable, car un amendement à l’article 1er a été adopté, afin de préciser que la surveillance et l’observation de l’état de santé de la population et l’identification de ses principaux déterminants s’appuient sur le concept d’exposome dans l’analyse des risques pour la santé de la population.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS877 de Mme Bérengère Poletti.

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Article 42 ter
(art. L. 1418-1, L. 5311-1, L. 5311-2 du code de la santé publique)

Transfert à l’agence de biomédecine de missions de biovigilance

La commission a adopté un amendement du Gouvernement portant création d’un article additionnel après l’article 42. Il prévoit de transférer à l’agence de biomédecine la mise en œuvre du dispositif de biovigilance pour les produits suivants : lait maternel, organes, tissus, cellules et préparations de thérapie cellulaire.

Cette compétence relève actuellement de l’ANSM. Le Gouvernement a souhaité proposer ce transfert en faveur de l’agence de biomédecine du fait de sa relation de proximité avec les acteurs concernés par ces produits. Cette disposition s’inscrit dans le cadre plus général du renforcement de son rôle en matière de vigilance sanitaire.

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La Commission examine l’amendement AS1500 du Gouvernement.

Mme la ministre. L’amendement AS1500 vise à transférer à l’Agence de la biomédecine la mise en œuvre du dispositif de biovigilance.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

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Chapitre IV
Associer les usagers à l’élaboration de la politique de santé et renforcer les droits

Article 43 A
Mise en place d’un libre choix du patient quant à son mode de prise en charge

Le recours à l’hospitalisation à domicile reste aujourd’hui très limité alors que la demande de rester au domicile pour y recevoir les soins nécessaires est forte. Cet article, issu d’un amendement de la rapporteure, dispose que le libre choix du malade, qui porte aujourd’hui sur son praticien et son établissement de santé, soit étendu à son mode de prise en charge, notamment en ambulatoire et à domicile. Il prévoit également que chaque patient soit informé de la possibilité de bénéficier d’une prise en charge sans hébergement lorsqu’elle en exprime la volonté et que son état de santé le permet.

*

La Commission examine l’amendement AS1166 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Le recours à l’hospitalisation à domicile reste limité alors que la demande de rester chez soi pour recevoir les soins nécessaires est forte. C’est particulièrement vrai dans le cas des soins palliatifs : 81 % des Français déclarant vouloir passer leurs derniers instants chez eux, l’amendement vise à informer le patient de la possibilité de recevoir, lorsque son état de santé le permet, des soins palliatifs sous forme ambulatoire ou à domicile.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 43 B
Droit à la formation des représentants d’usagers du système de santé

Cet article, lui aussi intégré à l’initiative de la rapporteure, porte sur le droit à la formation des représentants d’usagers du système de santé. Il s’agit toutefois d’un dispositif a minima pour des raisons tenant à l’application de l’article 40 de la Constitution sur la recevabilité financière. Il n’en constitue pas moins une étape nécessaire qu’il conviendrait de parachever lors de l’examen de ce texte en séance publique.

*

La Commission examine l’amendement AS1210 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’amendement AS1210 est un amendement d’appel sur le droit à la formation des représentants des usagers, que nous souhaitons encourager pour qu’ils prennent une place plus importante dans les instances de santé publique.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Avant l’article 43

La Commission examine l’amendement AS1127 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’amendement d’appel AS1127 vise à favoriser la diversification des profils de représentants d’usagers par l’instauration d’un statut leur permettant de se préparer à leur mandat.

Mme la ministre. Je vous demande de le retirer pour nous permettre de travailler sur le sujet, qui est complexe.

L’amendement AS1127 est retiré.

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Article 43
(art. L. 1142-22, L. 1222-5, L. 1413-8, L. 1417-6, L. 1418-3, L. 3135-2,
L.5322-1 et L. 6113-10-1 du code de la santé publique)

Représentation des usagers au sein des agences sanitaires

Dans son rapport remis en février 2014 (166), Mme Claire Compagnon a souligné la nécessité de renforcer la participation des usagers dans les agences sanitaires nationales.

Lors de son audition par la rapporteure, Mme Claire Compagnon a notamment insisté sur la difficulté à faire valoir ces droits en l’absence de participation des usagers dans les lieux de décision hormis les établissements de santé.

I. LES INSTANCES DE PARTICIPATION DES USAGERS

À côté des associations d’usagers qui ont vu leur légitimité renforcée, les textes ont progressivement instauré une représentation des usagers au sein de différentes instances. La loi du 4 mars 2002 (167) a représenté une avancée majeure en matière de reconnaissance des droits individuels des malades. Ces droits sont codifiés au sein du titre Ier de la première partie du Livre Ier du code de la santé publique.

1.  La participation des usagers au sein des établissements

L’ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée a ainsi instauré la participation des usagers au conseil d’administration de ces établissements.

Elle a institué des commissions de conciliation chargées « d’assister et d’orienter toute personne qui s’estime victime d’un préjudice du fait de l’activité de l’établissement, et de lui indiquer les voies de conciliation et de recours dont elle dispose » (168).

Ces commissions souffraient à l’origine d’un déficit de reconnaissance. En effet, leur dénomination était empreinte d’ambiguïté et ne correspondait pas à leur mission : elles n’avaient pas pour objet d’organiser la conciliation. Faute de clarté, l’instauration de ces commissions n’a pas été vécue comme un véritable progrès pour les usagers.

L’article 16 de la loi du 4 mars 2002précitée a redéfini les missions de ces commissions pour les centrer clairement sur les fonctions en amont du précontentieux (dialogue, régulation, information). Elle a également élargi leur rôle à la qualité de la prise en charge (cf. commentaire de l’article 44).

Cette même loi a également reconnu l’existence et le rôle des associations de malades et de défense des droits des usagers comme des acteurs à part entière du système de santé.

2.  Le rôle des associations valorisées avec l’instauration d’un agrément

Constatant que les associations dans le domaine de la santé étaient multiformes et n’avaient pas toutes vocation à représenter l’ensemble des usagers, un système d’agrément des associations sur des critères de représentativité a été mis en place.

L’article L. 1114-1 dispose à cet effet que les associations, régulièrement déclarées, ayant une activité dans le domaine de la qualité de la santé et de la prise en charge des malades peuvent faire l’objet d’un agrément par l’autorité administrative compétente soit au niveau régional, soit au niveau national.

L’agrément est prononcé sur avis conforme d’une commission nationale. Il est subordonné à l’activité effective et publique de l’association en vue de la défense des droits des personnes malades et des usagers du système de santé ainsi qu’aux actions de formation et d’information qu’elle conduit, à la transparence de sa gestion, à sa représentativité et à son indépendance.

3.  Les instances nationales et territoriales de consultation, lieux de la démocratie sanitaire

La mise en œuvre de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique se traduit par la publication annuelle d’un rapport sur le respect des droits des usagers du système de santé par la Conférence nationale de santé (CNS). Ces travaux s’appuient sur les rapports adressés par chaque conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA) instituée par la loi hôpital, patients, santé et territoires (169).

● Selon l’article L. 1411-3 du code de la santé publique, la Conférence nationale de santé est un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de la santé. Elle a pour objet de permettre la concertation sur les questions de santé. À cet effet, la conférence est consultée par le Gouvernement lors de la préparation des projets de loi définissant les objectifs de la politique de santé publique.

Elle élabore en outre, sur la base des rapports établis par les conférences régionales de la santé et de l’autonomie, un rapport annuel adressé au ministre chargé de la santé et rendu public, sur le respect des droits des usagers du système de santé.

Elle formule enfin des avis et propositions au Gouvernement sur les plans et programmes qu’il entend mettre en œuvre, des avis ou propositions en vue d’améliorer le système de santé publique. Elle contribue à l’organisation de débats publics sur ces mêmes questions.

Aux termes de l’article L. 1432-4 du code de la santé publique, la conférence régionale de la santé et de l’autonomie est un organisme consultatif qui concourt, par ses avis, à la politique régionale de santé. Sont notamment représentés au sein de ces collèges les collectivités territoriales, les usagers et associations œuvrant dans les domaines de compétence de l’agence régionale de santé, les conférences de territoire, les organisations représentatives des salariés, des employeurs et des professions indépendantes, les professionnels du système de santé, les organismes gestionnaires des établissements et services de santé et médico-sociaux, les organismes de protection sociale.

● La conférence régionale de la santé et de l’autonomie peut faire toute proposition au directeur général de l’agence régionale de santé sur l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de la politique de santé dans la région. Elle émet un avis sur le plan stratégique régional de santé. Elle organise en son sein l’expression des représentants des usagers du système de santé et procède à l’évaluation des conditions dans lesquelles sont appliqués et respectés les droits des personnes malades et des usagers du système de santé, de l’égalité d’accès aux services de santé et de la qualité des prises en charge.

Elle est habilitée à organiser un débat public sur les questions de santé de son choix.

II. LA NÉCESSAIRE PARTICIPATION DE L’USAGER DANS LES INSTANCES DE DÉCISION DES AUTORITÉS PUBLIQUES

La participation du citoyen, de l’usager et/ou du patient constitue un enjeu essentiel pour les politiques de santé publique. Son point de vue vient questionner, compléter ou enrichir les points de vue des professionnels de santé et des institutions. Sa participation vient, par ailleurs, conforter son appropriation des politiques de santé publique.

Dans son dernier rapport (170), la CNS relève que si les organes de démocratie sanitaire constituent des avancées, il reste « une marge d’amélioration importante dans le renforcement des procédures de saisine de ces organes consultatifs et dans la prise en compte de leur avis ». Elle souligne également que « l’implication des représentants des usagers dans l’élaboration des politiques de santé doit être systématisée ».

L’article 43 du projet de loi entend mettre en œuvre ces recommandations en prévoyant une obligation légale de représentation des usagers dans les organes de gouvernance de toutes les agences sanitaires nationales.

Si les statuts de certains opérateurs sanitaires prévoient la représentation des usagers au sein de leurs instances dirigeantes, à ce jour, les usagers ne sont pas représentés dans l’ensemble des instances délibérantes des opérateurs sanitaires.

● À l’heure actuelle, et comme le rappelle fort opportunément le rapport de Claire Compagnon, le code de la santé publique prévoit la représentation des usagers du système de santé :

– au sein du conseil d’administration de l’Établissement français du sang (EFS) (article L. 1222-5) ;

– au sein du conseil d’administration de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) (article L. 1313-4) ;

– au sein du conseil d’administration de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) (article L. 1417-6) ;

– au sein du conseil d’administration de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) (article L. 1142-22) ;

– au sein du conseil d’administration de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) (article L. 5322-1) ;

Enfin, le rapport de Claire Compagnon souligne la nomination par la Haute autorité de santé de représentants des usagers dans quasiment toutes ses commissions hormis au sein de son collège et de la commission de la transparence.

L’obligation légale instituée par le I consiste à privilégier la systématisation des associations de représentants d’usagers agréés au sein des conseils d’administration des agences sanitaires.

● Le I procède ainsi à un toilettage des textes existants, par l’ajout d’une référence explicite à l’agrément mentionné à l’article L. 1114-1. Il s’agit de l’établissement français du sang (1°), de l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé (3°), de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (5°) et de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (7°) ;

● Pour d’autres agences, le même I procède à la généralisation de la représentation des usagers au sein des conseils d’administration. Il s’agit de l’Institut de veille sanitaire (2°), de l’Agence de la biomédecine (4°), de l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (6°) et de l’agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (8°).

L’étude d’impact précise que « les instances auront la possibilité de faire appel à candidature auprès [des] associations nationales pour la désignation de représentants ».

Les agences devront prendre en charge le coût du remboursement des frais de déplacement, mais aussi de formation ainsi que les indemnités du congé de représentation (9 jours ouvrables). Selon l’étude d’impact, ce coût devrait rester modéré. L’étude ajoute que « les 26 ARS disposent d’une enveloppe annuelle de 192 000 euros pour faire vivre la démocratie sanitaire sur leur territoire, ce qui excède largement la portée de la présente mesure ».

Le II prévoit une mise en œuvre distincte selon les agences concernées.

S’agissant des agences incluant déjà des représentants des usagers, le prévoit que les nouvelles dispositions ont naturellement vocation à s’appliquer à l’expiration des mandats détenus par les actuels représentants des usagers.

Pour les autres agences, le prévoit une mise en application à la date de publication des textes d’application nécessaires et au plus tard un an après la publication de la loi.

Votre rapporteure estime toutefois nécessaire de davantage conforter la présence des usagers au sein des agences sanitaires. Outre le toilettage nécessaire de la représentation des usagers au sein de l’agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (article L. 1313-4 du code de la santé publique), il importe de renforcer le rôle des usagers.

Parallèlement, la diversification des profils de représentants d’usagers nécessite l’instauration d’un statut leur permettant de se préparer à leur mandat, comme l’a fort justement souligné le rapport de Mme Compagnon : crédits de temps, décharges d’activité, protection au titre du mandat exercé et formation. La mission des représentants des usagers n’en sera que mieux affirmée. Un amendement a ainsi été déposé en commission par votre rapporteure. Le dispositif proposé était toutefois limité en raison des contraintes de recevabilité financière liées à l’application de l’article 40 de la Constitution.

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Sur proposition de la rapporteure, la Commission a adopté six amendements rédactionnels ou de coordination.

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La Commission examine l’amendement AS1196 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’exercice du contradictoire étant un des principes de la vie démocratique, l’amendement AS1196, qui est un amendement d’appel, propose que les avis minoritaires figurent dans les procès-verbaux des différentes réunions des agences.

Mme la ministre. Je vous demande de retirer l’amendement pour nous permettre de travailler sur la question avant la séance publique.

L’amendement AS1196 est retiré.

Puis la Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS464 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1560 de Mme Bérengère Poletti, et l’amendement AS1730 de la rapporteure.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS464 vise à assurer la représentation des usagers du système de santé notamment dans la Commission de la transparence et dans le Comité économique des produits de santé. Il convient de mettre fin à l’opacité du système, qui a déjà été relevée.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement AS1560 est défendu.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Si vous supprimez le mot « donneurs », comme toutes les associations de donneurs de sang ne sont pas agréées, les donneurs seront privés de représentation. C’est pourquoi je vous propose de retirer les amendements identiques au profit de mon amendement AS1730 dont la rédaction évite cet écueil.

Si vous ne les retirez pas, j’émettrai un avis défavorable.

La Commission rejette les amendements AS464 et AS1560.

Puis elle adopte l’amendement AS1730.

Puis elle examine l’amendement AS1197 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cet amendement de coordination est relatif à la composition du conseil d’administration de l’ANSES.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels AS33 et AS35 de la rapporteure.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1195 de la rapporteure, AS465 de M. Jean-Louis Roumegas, AS752 de Mme Jacqueline Fraysse et AS1562 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’amendement d’appel AS1195 prévoit la représentation des associations d’usagers au sein du Comité économique des produits de santé (CEPS).

Mme la ministre. Je vous demande de bien vouloir le retirer : compte tenu des conséquences d’une telle disposition, il convient d’y travailler de manière plus approfondie.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je retire mon amendement.

M. Jean-Louis Roumegas. Je ne retirerai pas l’amendement AS465.

Mme la ministre. Je tiens à rappeler que, chaque année, le CEPS remet un rapport au Parlement avant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. La capacité de décision du Gouvernement doit être identifiée pour ce qu’elle est, dès lors que le Parlement peut exercer ses fonctions de contrôle. Si je suis favorable à l’amélioration de la place des usagers dans les différents dispositifs, je tiens à souligner que les parlementaires ne sont pas les usagers.

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement AS465 ne concerne que les usagers. Je le maintiens.

Quant à l’amendement AS304, que je défendrai tout à l’heure, il visera à donner aux parlementaires un rôle non pas décisionnel, mais d’observateurs au sein du CEPS.

Mme la ministre. S’agissant des usagers, la mesure, qui est intéressante, bouleversera la situation actuelle. Il convient donc d’y travailler.

Mme Jacqueline Fraysse. La présence des associations d’usagers est essentielle pour assurer la transparence : c’est un gage de sécurité.

L’amendement AS752 vise donc à permettre la participation des usagers à la Haute Autorité de santé, au Haut Conseil de la santé publique et au Comité économique des produits de santé.

Cet objectif peut être atteint dans le cadre du présent texte. Nous sommes évidemment prêts à retravailler la rédaction de l’amendement. Il ne suffit plus d’évoquer le sujet : il faut désormais passer à l’acte.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement AS1562 est défendu.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je vous demande de retirer vos amendements pour travailler ensemble à un amendement que nous pourrions défendre en séance publique. Je suis aussi attachée que vous à la représentation des usagers.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte ensuite les amendements rédactionnels AS36 et AS37 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 43 modifié.

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Après l’article 43

La Commission examine l’amendement AS1171 de Mme Maud Olivier.

Mme Marie-Françoise Clergeau. L’amendement vise à promouvoir la parité entre les femmes et les hommes dans les collèges de l’ANSES.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Nous devons revoir la rédaction de tous les amendements relatifs à la représentation paritaire dans les différentes instances : c’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. Il s’agit d’être efficace.

L’amendement AS1171 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS931.

M. Gérard Bapt. L’amendement AS931 vise à tenir compte de l’arrêt récent du Conseil d’État après requête de l’ordre des médecins et du Formindep relatif à la transparence des avantages accordés par les entreprises commercialisant ou produisant des produits à finalité sanitaire et cosmétique.

Selon les termes du Conseil d’État, l’esprit de la loi doit être respecté. Le montant de la rémunération en euros concernant les conventions passées entre les praticiens et les laboratoires doit être indiqué.

L’association Regards Citoyens a en effet prouvé que ces conventions donnaient lieu à des rémunérations importantes, de plusieurs dizaines de milliers d’euros chacune.

L’amendement complète la volonté de transparence du législateur de 2011.

Mme la ministre. Le Gouvernement est d’autant plus favorable à l’objectif que vous poursuivez, monsieur Bapt, qu’il a demandé son avis au Conseil d’État dans l’intention de déposer sur le sujet en séance publique un amendement dont le champ sera plus large que le vôtre. En effet, votre amendement ne couvre pas l’ensemble des besoins qui résultent de l’arrêt du Conseil d’État. Celui-ci nous demande par exemple de nous prononcer sur l’antériorité des versements.

C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1173 de Mme Maud Olivier.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Cet amendement concerne le conseil d’administration de l’Agence nationale de sécurité des médicaments. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS1181 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Il est nécessaire de mieux prendre en compte la participation des usagers. Cet amendement vise à généraliser la publicité des débats au sein du collège de la HAS. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit précédemment, je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS1188 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Il s’agit de prévoir un droit d’alerte auprès de la HAS. Là encore, je le retire, dans l’attente d’une nouvelle rédaction en séance publique.

L’amendement est retiré.

Les amendements AS1187 de la rapporteure et AS1174 de Mme Maud Olivier sont retirés.

La Commission en vient aux amendements AS271, AS304 et AS303 de M. Jean-Louis Roumegas, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je suis défavorable à ces amendements qui concernent le comité fixant les prix du médicament et la participation des usagers.

La Commission rejette successivement les amendements.

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Article 44
(art. L. 1112-3, L. 6144-1 et L. 6161-2 du code de la santé publique)

Remplacement de la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge des établissements de santé par la commission des usagers

Cet article modifie les missions de la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC) des établissements de santé. Elle sera dorénavant appelée commission des usagers (CDU).

Les rapports Couty (171) et Compagnon (172) ont tous deux souligné la nécessité de renforcer la place de l’usager au sein des établissements de santé.

I. LA COMMISSION DES RELATIONS AVEC LES USAGERS ET DE LA QUALITÉ DE LA PRISE EN CHARGE

Instituée en 2002, la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC) s’est substituée à la commission de conciliation instaurée par l’ordonnance du 24 avril 1996 (173).

1.  Les missions de la CRUQPC

L’article L. 1112-3 du code de la santé publique dispose que cette commission a pour mission de veiller au respect des droits des usagers et de contribuer à l’amélioration de la qualité de l’accueil des personnes malades et de leurs proches et de la prise en charge.

Elle facilite à cet effet leurs démarches et veille à ce qu’elles puissent, le cas échéant, exprimer leurs griefs auprès des responsables de l’établissement, entendre les explications de ceux-ci et être informées des suites de leurs demandes.

Elle est également consultée sur la politique menée dans l’établissement en ce qui concerne l’accueil et la prise en charge et fait des propositions en ce domaine.

Elle est enfin informée de l’ensemble des plaintes ou réclamations formées par les usagers de l’établissement ainsi que des suites qui leur sont données.

Le conseil de surveillance des établissements publics de santé ou une instance habilitée à cet effet dans les établissements privés délibère au moins une fois par an sur la politique de l’établissement en ce qui concerne les droits des usagers et la qualité de l’accueil et de la prise en charge, sur la base d’un rapport présenté par la CRUQPC.

1.  La composition de la commission

Cette instance est composée du représentant légal de l’établissement, de deux médiateurs, désignés par le représentant légal de l’établissement et de deux représentants des usagers désignés par le directeur général de l’agence régionale parmi les personnes proposées par les associations agréées en application de l’article L. 1114-1.

La composition de la commission varie ensuite selon la nature de l’établissement.

Dans les établissements publics de santé, autres que l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (174), la commission peut en outre comporter le président de la commission médicale d’établissement, un représentant de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, un représentant du personnel et un représentant du conseil de surveillance, choisi par et parmi les représentants des collectivités locales et les personnalités qualifiées.

Dans les établissements de santé privés, la commission peut en outre comporter le président de la commission médicale ou de la conférence médicale, un représentant du personnel infirmier ou aide-soignant et un représentant du conseil de surveillance ou de l’organe collégial qui en tient lieu.

2.  État des lieux du fonctionnement des CRUQPC

Selon le rapport de Mme Claire Compagnon précité, le rôle des CRUQPC varie d’un établissement à l’autre.

Globalement, les CRUQPC ont été installées dans l’ensemble des établissements de santé, qu’ils soient publics ou privés. Le dernier rapport adopté par la conférence nationale de santé (CNS) souligne que la proportion d’établissements disposant d’une CRUQPC se situe entre 90 % et 100 % (175).

Ce constat établi, le même rapport souligne un fonctionnement très hétérogène des commissions d’un établissement à l’autre. Il constate tout d’abord la réduction de la commission à un rôle strictement administratif, celle de la gestion des plaintes. En effet, les représentants des usagers ne sont pas en situation d’accompagner les patients ou de faire entendre leur voix auprès des instances de l’établissement.

Ce rôle réduit tient tout d’abord à l’absence d’articulation avec les autres instances de l’hôpital telles que la commission médicale ou de la conférence médicale des établissements public et privé, pourtant en charge de la politique de la qualité.

Il tient également de la difficulté des représentants des usagers à assurer leur fonction faute de formation ou de soutien dans l’exercice de leur mandat. Souvent profanes, les représentants d’usager peuvent éprouver quelques difficultés à se faire entendre et à porter une parole autonome. Le dernier rapport de la CNS relève que la formation des membres des commissions reste limitée : « dans certaines régions, moins de la moitié des membres des CRUQPC bénéficient de formations ». Cette situation est d’autant plus dommageable que, de l’avis de Mme Claire Compagnon, les personnels médicaux semblent plutôt désireux d’échanger avec des représentants de patients dûment au fait du fonctionnement des établissements et du système de santé.

Les CRUQPC restent également très méconnues des patients. Selon le dernier baromètre du collectif interassociatif sur la santé (CISS), 85 % des personnes interrogées déclaraient ne pas connaître cette commission (176). Le rapport de Mme Claire Compagnon révèle également l’absence de visibilité des commissions au sein des établissements : leur rôle est peu connu des personnels hospitaliers, à l’exception des médecins.

Au total, cette instance n’a été investie ni par les usagers ni par les professionnels.

Enfin, le dernier grief porte sur l’absence de reconnaissance de la fonction de représentant des usagers. Le rapport de Mme Claire Compagnon souligne que « majoritairement, les représentants des usagers ont dans les faits le sentiment bien réel de ne pas siéger à égalité des autres membres ».

Les représentants des usagers n’auraient pas accès aux lettres de plaintes in extenso alors même qu’ils disposent des mêmes prérogatives que les autres membres s’agissant notamment de l’accès aux données médicales relatives à ces plaintes ou réclamations.

Pour améliorer l’existant, ce rapport préconise de prévoir un droit de suite. Si les lettres de plainte des usagers donnent lieu à des réponses argumentées et à des engagements d’action d’amélioration, le suivi reste peu opérant. Le droit de suite serait à cet égard « éminemment légitime et un levier puissant pour faire évoluer le positionnement de la CRUQPC ».

En conclusion, le bilan des CRUQPC apparaît encore trop centré sur les missions antérieures des commissions de conciliation dont elles ont pris la succession. Elles devraient être au contraire des commissions où les représentants des usagers s’expriment, se fassent l’écho de leurs besoins, accèdent réellement aux informations.

II. UNE NOUVELLE IMPULSION EN FAVEUR DES USAGERS

Le de l’article 44 modifie l’appellation de la CRUQPC, rebaptisée en « commission des usagers ». Cette nouvelle dénomination vise à rendre plus visible la commission tant pour les patients que pour les personnels des hôpitaux. Ces modifications s’appliquent aux articles L. 1112-3, fixant le régime la commission, et aux articles L. 6144-1 et L. 6161-2 relatifs aux instances de représentation dans des établissements de santé publics et privés.

Le remplace les quatrième à sixième alinéas de l’article L. 1112-3 par trois nouveaux alinéas dont la rédaction tend à élargir les missions de la commission.

● La commission est aujourd’hui consultée sur la politique de l’établissement en termes d’accueil et de prise en charge. D’après le premier alinéa, elle le sera sur les questions de qualité, de sécurité des soins, d’organisation du parcours de soins et d’information sur les droits des usagers. La nouvelle rédaction introduit également la possibilité d’un droit de suite s’agissant des plaintes ou réclamations formées par les usagers.

À cet effet, l’étude d’impact précise que la CDU :

– peut saisir sur ces sujets les autres instances représentatives du personnel et les organes délibérants des établissements ;

– est informée des événements indésirables graves et donne son avis sur les actions correctives mises en œuvre ;

– est informée des avis rendus par la commission ou la conférence médicale d’établissement (CME) et le conseil d’administration ou le conseil de surveillance, sur ses domaines de compétences.

Concernant les relations de la commission des usagers avec les autres instances de l’établissement évoquées dans l’étude d’impact, ces dispositions ne figurent pas explicitement dans le présent article mais sont néanmoins largement couvertes par le droit en vigueur.

S’agissant de la CME, l’actuel article R. 6144-2-2 du code de la santé publique précise que la commission médicale d’établissement propose au directeur un programme d’actions prenant en compte le bilan des améliorations mises en œuvre à la suite de l’analyse des événements indésirables. Il prévoit en outre que la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques contribuent à l’élaboration de ce programme d’actions.

S’agissant du conseil de surveillance, et en complément des évolutions introduites par le projet de loi, on peut également noter que deux représentants des usagers y sont d’ores et déjà représentés conformément aux dispositions de l’article L. 6143-5.

Par ailleurs, la volonté de renforcer la participation des usagers, y compris dans les établissements privés, est traduite dans l’article 49 du projet de loi qui prévoit que dans les établissements de santé privés habilités à assurer le service public hospitalier les usagers sont représentés dans les conseils d’administration ou dans les conseils de surveillance ou dans les organes qui en tiennent lieu.

S’agissant de la question des événements indésirables graves, cette mission ne figure pas, explicitement dans la rédaction proposée par le texte mais semble sous entendue. La commission est en effet informée et consultée sur les questions de politique de l’établissement en termes de qualité, de sécurité des soins et d’organisation du parcours de soins. Elle fait des propositions en ce domaine et elle est informée de l’ensemble des plaintes ou réclamations formées par les usagers de l’établissement ainsi que des suites qui leur sont données.

● Le deuxième alinéa réécrit l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1112-3. Il maintient le principe de la délibération du conseil de surveillance une fois par an sur la base du rapport établi par la CDU sur la politique de l’établissement en matière de droits des usagers et de qualité. Toutefois, il ne mentionne plus la transmission du rapport et des conclusions du débat à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie et à l’agence régionale de santé (ARS) qui est chargée d’élaborer une synthèse de l’ensemble de ces documents.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, la transmission des rapports des CDU et l’élaboration de bilans régionaux concernant les droits des usagers n’ont pas vocation à être remis en question. En effet, l’actuel R. 1112-80 du code de la santé publique précise que la CRUQPC, et donc la future CDU, rend compte de ses analyses et propositions dans le rapport mentionné à l’article L. 1112-3. Il est ainsi transmis au conseil d’administration ou à l’organe collégial qui en tient lieu, quinze jours au moins avant la séance au cours de laquelle ce dernier délibère sur la politique de l’établissement en ce qui concerne les droits des usagers et la qualité de l’accueil et de la prise en charge. Il est également transmis à l’agence régionale de santé et à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie.

Il importe également de souligner que la conférence régionale de la santé et de l’autonomie et l’agence régionale de santé disposent d’autres sources d’information, en dehors des rapports de la CDU, pour élaborer un bilan des actions régionales en termes de droits des usagers.

Elles reçoivent en effet des réclamations et des plaintes de la part des usagers et mènent différentes actions au titre de la démocratie sanitaire (formations, organisation de débats publics par exemple…) qui leur permettent de disposer directement de nombreuses informations concernant les droits des usagers et la politique qualité des établissements de santé.

Les ARS peuvent également avoir accès aux bilans et aux plans d’actions élaborés par les CME des établissements de leurs régions concernant la qualité et la sécurité des soins, conformément aux dispositions de l’article R 6144-2-2 du code de la santé publique.

● Le dernier alinéa prévoit, comme c’est le cas actuellement, la fixation par décret de la composition et des modalités de fonctionnement de la commission.

*

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a entendu suivre les préconisations de la rapporteure en adoptant trois amendements.

La CDU est désormais investie d’un véritable pouvoir d’auto-saisine sur tout sujet relatif à la politique de qualité et de sécurité de l’établissement ainsi que d’un droit de suite portant sur les propositions qu’elle établit, sur les plaintes qu’elle instruit et sur les suites données par l’établissement en cas de survenue d’événements indésirables graves.

Pour que leur place et leur rôle soient mieux identifiés et reconnus, les commissions des usagers seront dorénavant présidées par un représentant des usagers.

Enfin, un dernier amendement adopté vise à rétablir une disposition supprimée par le texte de loi. Le principe de la transmission du rapport présenté par la CDU portant sur les droits des usagers et la qualité de l’accueil et de la prise en charge sera, comme aujourd’hui, transmis à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie et à l’agence régionale de santé.

*

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS39 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement AS1194 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Nous proposons que la commission des usagers qui va remplacer la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC) soit présidée par un représentant des usagers.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS1192 de la rapporteure, et les amendements identiques AS431 de M. Jean-Louis Roumegas et AS879 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Il s’agit de préciser la façon dont l’usager peut être associé à l’élaboration de la politique menée dans l’établissement en ce qui concerne l’accueil, la prise en charge, l’information et les droits des usagers. La commission des usagers est associée à l’organisation des parcours de soins.

Je propose de lui ajouter un pouvoir d’autosaisine sur tout sujet relatif à la politique de sécurité et de qualité de l’établissement, et un véritable droit de suite portant sur les propositions qu’elle établit, sur les plaintes qu’elle instruit et sur les suites données par l’établissement en cas de survenue d’événements indésirables graves, en précisant que les membres de la commission sont astreints au secret professionnel dans les conditions définies par les articles afférents du code pénal.

Actuellement, la CRUQPC est informée de l’ensemble des plaintes et des réclamations. Il semble important de pouvoir donner à la commission des usagers un droit de suivi de ces mêmes plaintes et réclamations.

M. Gérard Sebaoun. Le champ que vous décrivez est très large. Vous donnez à la commission des usagers des pouvoirs importants.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cette commission se saisit d’un certain nombre de sujets, mais uniquement dans le cadre de ses missions et non sur tout ce qui peut se produire dans un hôpital.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement AS879 est défendu.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Si mon amendement est adopté, les amendements AS431 et AS879 seront satisfaits.

La Commission adopte l’amendement AS1192.

En conséquence, les amendements AS431 et AS879 tombent.

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement AS1193 de la rapporteure, et les amendements identiques AS305 de M. Jean-Louis Roumegas et AS1543 de Mme Bérengère Poletti.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. L’amendement AS1193 vise à rétablir une disposition supprimée par la nouvelle rédaction issue du projet de loi, c’est-à-dire que le rapport et les conclusions du débat sont transmis à la Conférence régionale de la santé et de l’autonomie et à l’ARS qui est chargée d’élaborer une synthèse de l’ensemble des documents.

La Commission adopte l’amendement AS1193.

En conséquence, les amendements AS305 et AS1543 tombent.

Puis la Commission adopte l’article 44 modifié.

*

Après l’article 44

La Commission est saisie de l’amendement AS554 de Mme Bérengère Poletti.

M. Jean-Pierre Door. Il est défendu.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cet amendement aborde un sujet intéressant, mais risquerait de modifier le code du travail, ce qui pose problème. Peut-être pourriez-vous le retirer et proposer une nouvelle rédaction en séance publique.

L’amendement est retiré.

*

Article 45
(chapitre III et chapitre IV du titre IV du livre Ier de la première partie,
art. L. 1143-1 à L. 1143-23 [nouveaux] et L. 1144-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Création de l’action de groupe
pour la réparation des dommages causés par des produits de santé

Cet article propose de créer une procédure d’action de groupe en réparation des préjudices corporels causés par l’utilisation de produits de santé, et imputables à un ou plusieurs responsables (producteur, fournisseur ou utilisateur du produit). Les usagers du système de santé victimes de ces préjudices pourraient ainsi se joindre à une action collective introduite par une association agréée, au lieu d’introduire chacun une action individuelle. Cette procédure permettrait en outre d’éviter la mise en place de dispositifs d’indemnisation ad hoc, pris en charge en tout ou partie par la solidarité nationale, comme ce fut le cas à la suite de plusieurs drames sanitaires ayant causé des dommages « sériels » dans les dernières décennies (sang contaminé, Mediator).

L’action de groupe, qui contrevient au principe classique selon lequel « nul ne plaide par procureur », a été récemment introduite dans le droit français, par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation (177). Si la procédure prévue par cet article s’approche de celle figurant désormais dans le code de la consommation, elle n’en est cependant pas une duplication pure et simple. En effet, la réparation des préjudices résultant de dommages corporels nécessite une individualisation poussée de la procédure d’indemnisation, qui mérite qu’une attention particulière soit accordée à la question, dans un texte consacré à la santé.

I. L’INSTAURATION D’UNE ACTION DE GROUPE EN MATIÈRE DE PRODUITS DE SANTÉ APPARAÎT COMME UNE NÉCESSITÉ

A.  L’ACTION DE GROUPE A ÉTÉ RÉCEMMENT INTRODUITE EN DROIT FRANÇAIS, EN MATIÈRE DE CONSOMMATION ET DE CONCURRENCE

1.  Idée ancienne, la création d’une action de groupe en matière de consommation et de concurrence doit faciliter l’accès à la justice

L’introduction en droit français d’une action de groupe est une idée ancienne, soutenue par les associations de consommateurs et promise, sans suite, par les deux précédents Présidents de la République. De nombreux groupes de travail se sont penchés sur cette question, qui a également fait l’objet de rapports parlementaires et d’initiatives législatives diverses.

Pour plus de détails, on se reportera utilement à l’historique très complet dressé par notre collègue Sébastien Denaja, dans son avis, au nom de la Commission des lois, sur le projet de loi relatif à la consommation (178) ; de manière générale, les développements qui suivent s’inspirent pour beaucoup de la même source.

L’action de groupe n’est pas une originalité procédurale, puisqu’elle existe dans de nombreux pays. L’exemple qui vient le plus spontanément à l’esprit est sans doute celui de la class action prévue par le droit américain, en particulier au niveau fédéral. Mais des procédures similaires existent également au Québec, et dans huit pays de l’Union européenne (Allemagne, Angleterre, Suède, Espagne, Italie, Pays-Bas, Portugal et Danemark). Au niveau européen, à la suite de réflexions conduites par les différentes institutions, la Commission a présenté, le 11 juin 2013, une recommandation relative à des principes communs applicables aux mécanismes de recours collectif en cessation et en réparation dans les États membres en cas de violation de droits conférés par le droit de l’Union. Cette recommandation, qui ne lie pas les États membres, les invite à se doter de mécanismes de recours collectifs pour garantir à leurs justiciables un accès effectif à la justice en cas de violation de droits que leur confère l’Union européenne.

Le droit de la consommation connaissait déjà quelques procédures collectives, mais aucune ne présentait les avantages de l’action de groupe. Celle qui s’en rapproche le plus en apparence est l’action en représentation conjointe, car elle seule permet aux associations de consommateurs d’agir en justice en vue d’obtenir la réparation de préjudices individuels, et non du préjudice collectif des consommateurs, souvent indemnisé à l’euro symbolique à l’issue des autres procédures (action civile dans l’intérêt collectif des consommateurs, action en cessation d’agissements illicites et en suppression de clauses illicites ou abusives, action en intervention volontaire). Mais très peu d’actions en représentation conjointe ont été lancées, en raison notamment des contraintes que la loi impose aux associations pour rallier des victimes potentielles, qui doivent être identifiées avant l’introduction de l’action, et ne peuvent être sollicitées que par voie de presse.

L’action de groupe présente comme principal attrait la démocratisation de l’accès à la justice : elle permet à des justiciables isolés qui n’auraient pas nécessairement engagé de procédure – coûteuse en temps comme en argent, a fortiori pour les litiges de faibles montants courants en droit de la consommation – d’obtenir indemnisation d’un préjudice, en rejoignant une démarche collective initiée par une association spécialisée, dotée de moyens d’expertise. Symétriquement, du point de vue de l’administration de la justice, l’action de groupe évite la multiplication des recours individuels et donc des instructions et des coûts afférents.

1.  La procédure créée par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation

L’action de groupe codifiée aux articles L. 423-1 à L. 423-26 du code de la consommation a pour objet de permettre la réparation des préjudices matériels subis individuellement par plusieurs consommateurs, à l’occasion de la vente d’un produit ou de la fourniture d’un service, et ayant pour origine commune un manquement d’un professionnel à ses obligations légales ou contractuelles, ou aux règles de concurrence. Les dommages corporels et les préjudices moraux sont exclus du champ de la loi. Il faut relever qu’aucune modification n’est apportée au fond du droit de la responsabilité ; la réforme est uniquement procédurale.

a.  Le champ de l’action de groupe

L’article L. 423-1 du code de la consommation dispose que l’action de groupe ne peut porter que sur la réparation des préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis par les consommateurs. Il s’agit de préjudices individuels de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d’un ou plusieurs professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles en droit de la consommation (obligations en matière de vente de biens ou fourniture de services) ou en droit de la concurrence (titre II du livre IV du code de commerce ou articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne).

La notion de consommateur et le champ d’application du droit de la consommation sont interprétés largement par la jurisprudence. Ainsi, le code de la consommation peut s’appliquer dans le domaine de la santé. En revanche, l’action de groupe en consommation ne peut porter que sur la réparation d’un préjudice matériel résultant d’une atteinte au patrimoine des consommateurs concernés.

Les préjudices corporels sont donc exclus, ainsi que les préjudices matériels résultant d’un dommage corporel (par exemple les pertes de revenus consécutives à un accident, ou les frais de soins). Cette exclusion se justifie par la nécessaire individualisation des préjudices corporels : alors que l’on peut estimer un préjudice financier de façon collective quand des personnes ont été victimes d’un même manquement, ce ne peut être le cas pour l’évaluation d’un préjudice corporel. Un tel préjudice doit être expertisé médicalement pour chaque victime, afin d’en apprécier l’étendue et l’imputabilité au manquement dénoncé.

a.  La qualité pour agir

Le droit d’introduire l’action est réservé aux seules associations de consommateurs agréées représentatives au niveau national. Il s’agit d’empêcher les actions fantaisistes ou abusives qui pourraient apparaître si la qualité pour agir était accordée à des associations ad hoc, créées pour l’occasion, ou à tout consommateur.

b.  Une procédure normale en trois phases

● Le jugement au fond constitue la première phase. Le juge statue sur la responsabilité du professionnel à partir des cas individuels soumis par l’association requérante, détermine les critères à partir desquels les consommateurs seront susceptibles de demander réparation et fixe le montant de l’indemnisation ou à tout le moins les modalités de calcul de celle-ci, ainsi que la procédure pour permettre aux consommateurs d’obtenir cette indemnisation (le « schéma d’indemnisation »).

● La deuxième phase permet aux victimes concernées d’adhérer au groupe. Le jugement de phase 1 met à la charge du responsable des mesures de publicité, qui permettent aux consommateurs d’adhérer au groupe, dans un délai déterminé. L’adhésion au groupe vaut obligatoirement mandat donné à l’association aux fins d’indemnisation.

La procédure d’adhésion repose sur le mécanisme d’ « opt in » : les membres potentiels d’un groupe de victimes doivent manifester leur intention de participer à l’action de groupe engagée. Avec la procédure d’ « opt out », retenue aux États-Unis pour la class action au niveau fédéral, le groupe intègre par défaut tous les consommateurs lésés, ceux-ci pouvant cependant faire savoir qu’ils souhaitent être exclus de l’action de groupe.

On notera que le groupe n’a pas besoin d’être constitué au moment de l’introduction de l’action, ce qui en constitue l’un des avantages pour les consommateurs : ce n’est qu’une fois le jugement sur la responsabilité prononcé que les victimes doivent se faire connaître.

● L’indemnisation des préjudices constitue la troisième phase. Les consommateurs sont en principe indemnisés par le professionnel à l’amiable. En cas d’échec, le juge est saisi de l’ensemble des demandes d’indemnisation non satisfaites ; cette audience finale met fin à la procédure.

c.  Deux procédures spécifiques

● En dehors de la procédure ordinaire, la loi prévoit une procédure simplifiée : dans un même jugement, le juge statue sur la responsabilité du professionnel et fixe le montant de l’indemnisation à laquelle les consommateurs victimes sont fondés à prétendre. Cette procédure recouvre les situations courantes dans lesquelles les consommateurs victimes sont liés contractuellement à un même professionnel, par exemple par une formule d’abonnement à un service.

● En outre, des modalités particulières s’appliquent à l’action de groupe intervenant dans le domaine de la concurrence. Lorsque les manquements reprochés au professionnel portent sur des pratiques anti-concurrentielles, la responsabilité de ce dernier ne peut être prononcée dans le cadre de l’action de groupe que sur le fondement d’une décision définitive de l’Autorité de la concurrence, d’une autorité de la concurrence d’un autre État membre de l’Union européenne, de la Commission européenne ou de la juridiction communautaire.

d.  Un recours possible à la médiation

L’association requérante peut participer à une médiation, dans les conditions de droit commun fixées par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative. Tout accord négocié au nom du groupe est soumis à l’homologation du juge, qui vérifie s’il est conforme aux intérêts de ceux auxquels il a vocation à s’appliquer et lui donne force exécutoire.

A.  LE CADRE JURIDIQUE ACTUEL EST IMPARFAITEMENT ADAPTÉ À LA RÉPARATION DE DOMMAGES SÉRIELS CAUSÉS PAR DES PRODUITS DE SANTÉ

1.  Les dommages sériels causés par des produits de santé peuvent théoriquement être réparés dans le cadre des règles générales de responsabilité résultant de la loi du 4 mars 2002

En raison des contentieux mettant en cause la responsabilité des professionnels de santé qui se sont développés dans les années 1990 et de l’augmentation des montants des indemnisations accordées aux patients, le législateur a été conduit à adapter le régime de la responsabilité médicale. La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a instauré un dispositif qui permet aux victimes d’accidents médicaux, d’affections iatrogènes ou d’infections nosocomiales (ou à leurs ayants droit) d’obtenir réparation lorsque les dommages subis (179) présentent un certain caractère de gravité, tenant compte notamment du taux d’incapacité permanente ou des conséquences sur la vie privée et professionnelle.

La personne qui estime remplir ces conditions peut, dans les dix ans suivant la consolidation du dommage, saisir une commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI).

Si, à l’issue de l’instruction (dans un délai de neuf mois), la CRCI estime que le dommage est imputable à un responsable, le dossier est transmis à son assureur, qui fait une offre pour indemniser la victime. La loi du 4 mars 2002 a réaffirmé le principe selon lequel la responsabilité civile de droit commun est fondée sur la faute ; son engagement suppose donc l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi.

Mais il existe également un régime de responsabilité sans faute du fait des produits défectueux, introduit en droit national par transposition de la directive n° 85/374/CEE du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux (180). L’acceptation de l’offre par la victime éteint toute possibilité d’action en justice.

Les CRCI ont par ailleurs une mission générale de conciliation, qui leur permet de tenter de dégager une solution amiable entre les parties même si le critère de gravité du dommage n’est pas vérifié.

En l’absence de faute ou de manquement imputable à un responsable – donc en cas d’« aléa thérapeutique » –, c’est l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) qui est chargé de présenter une offre d’indemnisation à la victime, au titre de la solidarité nationale. L’acceptation de l’offre de l’ONIAM éteint également toute possibilité de recours juridictionnel.

1.  En pratique, les procédures de droit commun se sont révélées mal adaptées, et de nombreux dispositifs ad hoc ont vu le jour

L’étude d’impact constate que la procédure de recours amiable devant les CRCI « s’est révélée peu adaptée aux dommages sériels […] que peuvent causer la défectuosité ou la mauvaise utilisation de produits de santé » ; en effet, « les médicaments [font] par eux-mêmes l’objet de très peu d’action devant les CRCI, en dehors d’actions les mettant en cause à l’occasion de soins ». En pratique, lorsque les CRCI identifient un responsable intervenant dans le processus de soins lui-même (un professionnel de santé), elles ne recherchent pas systématiquement la responsabilité du producteur du produit de santé dont l’usage est incriminé. Par voie de conséquence, « les défectuosités d’un produit de santé sont très généralement poursuivies devant les tribunaux judiciaires à l’occasion d’actions introduites contre leurs exploitants ». En 2014, les CRCI ont rendu une cinquantaine d’avis sur des réclamations relatives à des accidents dus au matériel médical ou à un produit de santé, sur un total de 4 800 avis.

Face à la gravité et à l’ampleur de certains dommages sériels causés par des produits de santé, dont le règlement individuel par voie contentieuse aurait pris plusieurs années sans assurer à toutes les victimes une indemnisation correcte, des dispositifs ad hoc ont été mis en place à l’initiative des pouvoirs publics, selon des formes différentes : « dispositif purement amiable mis en place par l’État en vue de l’indemnisation des victimes de l’hormone de croissance, dispositif conventionnel pour les sur-irradiés des centres hospitalier [sic] d’Épinal et de Toulouse, dispositif d’indemnisation des victimes de contamination par le virus de l’hépatite C (VHC) ou le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) du fait d’un produit sanguin, dispositif d’indemnisation des victimes du benfluorex ». Dans la quasi-totalité des cas, la gestion et le financement de ces dispositifs ad hoc ont été confiés à l’ONIAM, dont les missions ont donc été significativement étendues depuis la loi du 4 mars 2002.

Le dispositif mis en place pour l’indemnisation des victimes du benfluorex (le principe actif du Mediator), créé par la première loi de finances rectificative pour 2011 (181), est toutefois spécifique. L’ONIAM se voit en effet confier une mission de facilitation du règlement amiable des litiges, habituellement confiée aux CRCI. Le législateur a en effet estimé nécessaire de centraliser le dispositif à l’ONIAM, pour un traitement plus rapide des dossiers, sur la base d’une expertise unique. De plus, le dispositif est ouvert à toute personne s’estimant victime, indépendamment de la période pendant laquelle elle aurait consommé du benfluorex et indépendamment du seuil de gravité. Le rôle de l’ONIAM consiste en l’espèce à susciter une proposition d’indemnisation de la part des responsables, et à se substituer à eux pour l’indemnisation du préjudice en cas d’échec. Dans ce dernier cas, l’ONIAM dispose d’un recours subrogatoire contre les responsables (cf. infra). En tout état de cause, les coûts de fonctionnement du dispositif reposent sur l’ONIAM, donc sur les contribuables.

2.  La création d’une action de groupe en matière de produits de santé apparaît donc utile

Comme le souligne l’étude d’impact, « il convient de se demander s’il est juste que la collectivité soit toujours appelée à contribuer à la réparation de dommages sériels de santé ». La création d’une action de groupe en réparation des dommages causés par des produits de santé pourrait donc avoir le mérite d’éviter deux écueils : la multiplication de dispositifs ad hoc, qui ne contribuent pas à la lisibilité des procédures de responsabilité, et la prise en charge par la collectivité
– même partiellement et transitoirement – d’indemnisations devant être assumées par les responsables des dommages, autant sur le plan financier que sur le plan des principes.

L’action de groupe éviterait également la multiplication des procédures individuelles. Car si les dommages sériels résultant de produits de santé demeurent fort heureusement assez rares, ils peuvent malheureusement impliquer un grand nombre de victimes, dont toutes ont vocation à engager des procédures individuelles en réparation. L’étude d’impact rappelle ainsi que « les sur-irradiations causées à Épinal et à Toulouse à certains patients ont induit une centaine d’actions individuelles par centre, l’hormone de croissance environ 200 demandes, le benfluorex quelques [sic] 8 000 demandes et les prothèses PIP environ 5 000 ».

La création de l’action de groupe devrait donc alléger la charge de la procédure pour les victimes, mais cela pourrait également être le cas pour la justice. L’étude d’impact indique en effet que « l’introduction de l’action de groupe n’ajoutera aux procédures individuelles que l’action de la phase 1, dont on peut penser qu’en cas de reconnaissance par le juge de la responsabilité du défendeur, ce dernier procédera sans attente de nouveaux procès à l’indemnisation des victimes membres du groupe ».

Cette référence à la phase 1 laisse entrevoir que la procédure prévue par cet article est, dans l’ensemble, calquée sur celle prévue par la loi relative à la consommation. Elle est toutefois, comme cela a été souligné ci-dessus, adaptée à la spécificité des dommages corporels, dont la réparation nécessite une appréciation individualisée des préjudices, qui ne sont pas identiques d’une victime à l’autre.

C’est d’ailleurs cette différence de situation qui a justifié l’exclusion des dommages corporels du champ de l’action de groupe en matière de consommation. Le VI de l’article 2 de la loi du 17 mars 2014 prévoit qu’en septembre 2016, le Gouvernement remette au Parlement un rapport dressant un bilan de l’action de groupe, et examine notamment « son extension aux domaines de la santé et de l’environnement ».

Les représentants des entreprises du secteur de la santé rencontrés par la rapporteure ont unanimement regretté que ce projet de loi propose la création d’une action de groupe en matière de santé, en anticipant de près de deux ans les conclusions d’un rapport pourtant prévu par la loi. L’étude d’impact entend tempérer les craintes des entreprises, en rappelant les conclusions d’une étude conduite en 2008 par la Commission européenne (182), dont il résulte que, « dans les pays de l’Union européenne qui ont déjà adopté une procédure de recours collectif y compris pour des dommages corporels, il n’a pas été constaté d’effets délétères sur les entreprises concernées, ni en termes assurantiels ni en terme de frais de procédure ». On indiquera au surplus que l’introduction de l’action de groupe n’entraîne aucune modification du fond du droit de la responsabilité.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR CET ARTICLE

Le I transforme le chapitre III (« Dispositions communes ») du titre IV (« Réparation des conséquences des risques sanitaires ») du livre Ier (« Protection des personnes en matière de santé ») du code de la santé publique en chapitre IV.

Le II insère un nouveau chapitre III, intitulé « Action de groupe ». Ce nouveau chapitre est composé de six sections, relatives au champ d’application et à la qualité pour agir (section 1), au jugement sur la responsabilité (section 2), à la médiation (section 3), à la mise en œuvre du jugement et à la réparation individuelle des préjudices (section 4), à des dispositions diverses (section 5) et aux dispositions relatives à l’outre-mer (section 6). Il contient les nouveaux articles L. 1143-1 à L. 1143-23 du code de la santé publique.

A.  LE CHAMP D’APPLICATION ET LA QUALITÉ POUR AGIR

La section 1 du nouveau chapitre III comporte les articles L. 1143-1 et L. 1143-2, qui définissent l’action de groupe en santé, indiquent qui sont les personnes susceptibles d’introduire une telle action, mais sans désigner de juge spécifiquement compétent.

1.  Le champ d’application

L’article L. 1143-1 détermine le champ de l’action de groupe en santé selon trois critères cumulatifs :

– les victimes doivent être des usagers du système de santé, placés dans une situation identique ou similaire ;

– leur cause commune doit résulter du manquement à leurs obligations légales ou contractuelles par un producteur, un fournisseur ou un prestataire utilisant un produit de santé ;

– l’action doit avoir pour objet la réparation de préjudices individuels résultant de dommages corporels.

a.  Les victimes : des usagers du système de santé placés dans une situation identique ou similaire

La notion d’usagers du système de santé, utilisée à plusieurs reprises dans le code de la santé publique, n’est pas définie spécifiquement, en raison sans doute de son caractère intuitif. Il ressort des réponses du Gouvernement au questionnaire adressé par la rapporteure une acception large de la qualité d’usagers du système de santé : cette terminologie a été retenue par référence à l’article L. 1114-1 du code de la santé publique, qui prévoit les modalités d’agrément des associations d’usagers du système de santé, celles-ci pouvant « représenter toute personne susceptible de subir un dommage du fait d’un produit de santé » ; on en infère donc que le seul fait pour une personne d’avoir subi un dommage corporel en fait par construction un usager du système de santé.

Comme dans l’action de groupe en consommation, les usagers doivent être placés dans une situation identique ou similaire. Pour illustrer la différence entre ces deux états, le Gouvernement a indiqué à la rapporteure que « sont par exemple, placées dans une situation identique les victimes de sur-irradiations du centre hospitalier d’Épinal ; sont placés dans une situation similaire, les personnes qui ont pris un médicament défectueux (les durées de prise et les posologies pouvant varier ».

a.  La cause commune : le manquement à leurs obligations légales ou contractuelles par un producteur, un fournisseur ou un prestataire utilisant un produit de santé

● La notion de produit de santé est définie par référence au II de l’article L. 5311-1 du code de la santé publique, qui confie à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) le soin d’évaluer les bénéfices et les risques de l’utilisation « des produits à finalité sanitaire destinés à l’homme et des produits à finalité cosmétique ». Une liste non exhaustive – car précédée de l’adverbe « notamment » – est fournie par l’article, et reproduite dans l’encadré ci-après.

Liste des produits contrôlés par l’ANSM

1° Les médicaments, y compris les insecticides, acaricides et antiparasitaires à usage humain, les préparations magistrales, hospitalières et officinales, les substances stupéfiantes, psychotropes ou autres substances vénéneuses utilisées en médecine, les huiles essentielles et plantes médicinales, les matières premières à usage pharmaceutique

2° Les produits contraceptifs et contragestifs

3° Les biomatériaux et les dispositifs médicaux

4° Les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro

5° Les produits sanguins labiles

6° Les organes, tissus, cellules et produits d’origine humaine ou animale, y compris lorsqu’ils sont prélevés à l’occasion d’une intervention chirurgicale

7° Les produits cellulaires à finalité thérapeutique

8° Le lait maternel collecté, qualifié, préparé et conservé par les lactariums

9° Les produits destinés à l’entretien ou à l’application des lentilles de contact

10° (Abrogé)

11° Les procédés et appareils destinés à la désinfection des locaux et des véhicules dans les cas prévus à l’article L. 3114-1

12° Les produits thérapeutiques annexes

13° (Abrogé)

14° Les lentilles oculaires non correctrices

15° Les produits cosmétiques

16° Les micro-organismes et toxines mentionnés à l’article L. 5139-1

17° Les produits de tatouage

18° Les logiciels qui ne sont pas des dispositifs médicaux et qui sont utilisés par les laboratoires de biologie médicale, pour la gestion des examens de biologie médicale et lors de la validation, de l’interprétation, de la communication appropriée en application du 3° de l’article L. 6211-2 et de l’archivage des résultats

19° Les dispositifs à finalité non strictement médicale utilisés dans les laboratoires de biologie médicale pour la réalisation des examens de biologie médicale

Source : article L. 5311-1 du code de la santé publique.

L’attention de la rapporteure a été appelée, au cours des auditions préparatoires à l’examen du projet de loi, sur l’inclusion des produits cosmétiques dans le champ de l’action de groupe. On rappellera que les produits cosmétiques ont une définition légale propre : aux termes de l’article L. 5131-1 du code de la santé publique, « on entend par produit cosmétique toute substance ou mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (l’épiderme, les systèmes pileux et capillaire, les ongles, les lèvres et les organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ».

L’inclusion de ces produits dans le champ de l’action de groupe se justifie, selon le Gouvernement, par le fait que « les victimes des dommages corporels induits par ces produits, qui, de ce fait, sont usagers du système de santé, peuvent être valablement représentées par des associations agréées en application de l’article L. 1114-1 ». Cette justification est cohérente avec l’acception large de la notion d’usagers du système de santé, présentée supra.

● L’action de groupe peut être lancée contre le producteur, le fournisseur ou le prestataire d’un des produits concernés. S’agissant par exemple d’un médicament, le responsable peut donc aussi bien être le laboratoire pharmaceutique le produisant, le grossiste en assurant la commercialisation, ou encore l’établissement de santé ou le médecin l’administrant à l’usager (183). Il peut donc s’agir d’une personne physique ou morale, de droit privé ou de droit public.

La rédaction retenue pour l’article L. 1143-1 pourrait laisser croire que le responsable est nécessairement unique. Cette impression est contredite par la lecture de l’article L. 1143-12, qui mentionne « la ou les personnes responsables » (cf. infra).

Cela signifie que l’action de groupe peut être intentée contre l’un ou l’autre des trois responsables possibles (producteur, fournisseur, prestataire). C’est au juge qu’il reviendra de déterminer à qui incombe la responsabilité, et le cas échéant comment elle se partage. On précisera qu’en application de l’article L. 1386-7 du code civil, la responsabilité du fait des produits défectueux doit être prioritairement recherchée auprès du producteur, celle du fournisseur s’y substituant si le producteur ne peut être identifié. Plus généralement, un prestataire ou un fournisseur considéré comme responsable pourra toujours se retourner contre le producteur, dans le cadre de la procédure commune d’action récursoire.

● La cause commune est constituée par le manquement du producteur, du fournisseur ou du prestataire à leurs obligations légales ou contractuelles. Cette notion de manquement, reprise dans les mêmes termes de la loi relative à la consommation, n’est pas davantage précisée dans le texte. Le Gouvernement a indiqué à la rapporteure que « cette notion de manquement recouvre, d’une part, la faute commise par le producteur, fournisseur ou prestataire, et, d’autre part, les défauts, au sens des articles 1386-1 et suivants du code civil ».

De manière générale, un manquement renvoie à une violation des obligations mises à la charge d’une personne, qu’elles résultent d’un contrat (elles sont alors conventionnelles) ou de règles légales (entendues au sens large, et pas seulement des dispositions législatives). Pour illustrer la notion de manquement, l’étude d’impact indique que pourront être mis en cause «, notamment, la défectuosité d’un produit au sens des articles 1386-1 et suivants du code civil (manquement à l’obligation de sécurité) ou son utilisation fautive même s’il n’est pas défectueux ». Cela signifie donc que même en l’absence de faute au sens strict, la responsabilité peut être recherchée dans le cadre de l’action de groupe, sur le fondement de la défectuosité du produit.

b.  La réparation recherchée : des préjudices individuels résultant de dommages corporels

Pour être recevable, l’action de groupe nécessite l’existence de préjudices résultant de dommages corporels, par construction individuels. Interrogé par la rapporteure, le Gouvernement – en se fondant sur la jurisprudence – a défini le dommage corporel comme « une atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’une personne objectivement perceptible », ce qui comprend « les atteintes psychologiques qui ont un retentissement sur le corps ». Le Gouvernement a en revanche indiqué qu’ « une lésion ou une marque physiologique d’exposition à un produit de santé susceptible de causer un effet indésirable, qui n’a pas de répercussions physiologiques fonctionnelles, ne constitue pas un dommage corporel » (par exemple une marque de vaccin). Si l’action est recevable, ce sont tous les préjudices résultant du dommage corporel qui sont susceptibles d’être réparés (cf. infra).

1.  La qualité pour agir : les associations d’usagers du système de santé agréées

L’action de groupe peut être introduite seulement par les associations d’usagers du système de santé, agréées en application de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique. Cet article dispose que « l’agrément est notamment subordonné à l’activité effective et publique de l’association en vue de la défense des droits des personnes malades et des usagers du système de santé ainsi qu’aux actions de formation et d’information qu’elle conduit, à la transparence de sa gestion, à sa représentativité et à son indépendance ». L’agrément est prononcé par « l’autorité administrative compétente, soit au niveau régional, soit au niveau national », sur avis conforme d’une commission nationale composée de représentants du Conseil d’État, de la Cour de cassation, du Parlement, et de personnalités qualifiées. Ces associations sont seules habilitées à représenter les usagers dans les établissements hospitaliers et les instances de santé publique.

En 2014, 135 associations étaient agréées nationalement et 324 régionalement. Le nombre élevé d’associations susceptibles d’introduire une action de groupe a été relevé par la quasi-totalité des personnes auditionnées par la rapporteure, qu’il s’agisse des avocats, des associations de victimes de produits de santé, des représentants des entreprises ou encore du Défenseur des droits. On rappellera qu’en matière de consommation, seules les associations nationales de consommateurs agréées, au nombre de seize à peine, ont qualité pour agir. La rapporteure souhaiterait donc que le Gouvernement engage une réflexion sur les critères d’agrément, afin de s’assurer que les associations introduisant des actions de groupe aient bien la capacité de les mener à terme.

2.  L’absence de désignation d’un juge spécifiquement compétent

Le texte ne précise pas devant quel ordre de juridiction l’action de groupe doit être introduite : l’article L. 1143-1 donne qualité aux associations agréées pour agir « en justice », l’article L. 1143-2 prévoyant que « l’action de groupe est introduite et régie selon des modalités définies par décret en Conseil d’État ». Par comparaison, l’article L. 423-1 du code de la consommation dispose que l’action de groupe, en la matière, doit être introduite devant le juge civil. Le décret pris en application de l’article L. 423-2, dont la rédaction est identique à celle proposée pour l’article L. 1143-2 du code de la santé publique, désigne comme territorialement compétent le tribunal de grande instance du lieu de résidence du défendeur. Ces modalités d’administration de la justice sont cohérentes avec la nature privée des litiges, qui opposent des consommateurs réunis en associations à des fournisseurs de biens et services.

Le responsable auquel l’action de groupe en matière de santé tend à demander réparation peut être, comme on l’a vu, une personne publique ou une personne privée. C’est la raison pour laquelle aucun ordre de juridiction n’est désigné dans le texte, comme le précise en ces termes le Gouvernement, en réponse au questionnaire de la rapporteure : « L’action est portée devant le juge judiciaire ou devant le juge administratif selon que le producteur, le fournisseur ou le prestataire dont la responsabilité est recherchée est une personne relevant du droit privé (laboratoire pharmaceutique ou clinique, par exemple) ou une personne publique (centre hospitalier, par exemple) ».

En l’état de la rédaction, le nombre de tribunaux qui pourraient avoir à connaître d’une action de groupe en matière de santé s’élève à 339, soit 42 tribunaux administratifs, 161 tribunaux de grande instance (TGI) et, potentiellement (même si cela semble très improbable), 136 tribunaux de commerce (184).

Interrogé par la rapporteure sur les modalités de gestion des contentieux complexes, le Gouvernement a fourni une réponse très éclairante, reproduite dans l’encadré suivant.

Traitement des contentieux complexes d’actions de groupe

Dans la majorité des cas, sera recherchée devant le juge judiciaire, de façon générale, la responsabilité de producteurs et fournisseurs de produits de santé, et devant le juge administratif la responsabilité d’établissements publics de santé, en tant qu’utilisateurs de produits de santé.

Mais il ne saurait être exclu qu’un dommage lié à un même produit puisse conduire à l’engagement de deux actions de groupe, devant la juridiction administrative, d’une part, et devant la juridiction judiciaire, d’autre part. Mais, dans de telles hypothèses très restreintes, les manquements qui pourraient être examinés par les deux juges dépendent nécessairement des compétences et obligations de chaque personne responsable (producteur ou utilisateur du produit). Or ces obligations relèvent, s’agissant de la personne publique dont la responsabilité est recherchée devant le juge administratif, pour l’essentiel, du droit public, et s’agissant de la personne privée dont la responsabilité est recherchée devant le juge judiciaire, du droit privé. Les manquements examinés sont bien différents, dépendant des obligations de droit public ou de droit privé, selon la nature et les missions des personnes dont la responsabilité est recherchée devant chaque ordre de juridiction.

Il n’y a donc pas de risque de divergence de jurisprudence dans la mesure où les deux ordres de juridictions ne sont pas appelés à statuer sur les mêmes obligations, et par suite les mêmes manquements. […]

Pour résumer :

– dans une première hypothèse, les victimes recherchent la responsabilité d’un producteur devant le TGI pour défectuosité du produit ou manquement de la personne responsable à ses obligations. En cas de condamnation, celui-ci peut dans un second temps se retourner contre l’État ou la personne publique pour un éventuel partage de responsabilité ;

– dans une deuxième hypothèse, les victimes peuvent rechercher la responsabilité d’un établissement de santé public pour mauvaise utilisation d’un produit de santé. Si le produit était également défectueux et que cette défectuosité a participé à la survenance des dommages, la personne publique pourrait introduire une action récursoire contre le producteur […] ;

– dans une troisième hypothèse, il pourrait être envisagé que certaines victimes recherchent devant le juge judiciaire la responsabilité du producteur, tandis que d’autres rechercheront la responsabilité d’une personne publique pour mauvaise utilisation du produit. Dans cette hypothèse, conformément au droit commun, l’un des deux juges peut surseoir à statuer dans l’attente de la décision de l’autre ordre de juridiction à intervenir ; en tout état de cause, […] les règles de droit commun font obstacle à ce que la victime puisse bénéficier d’une double indemnisation.

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire de la rapporteure.

A.  UNE PROCÉDURE JURIDICTIONNELLE EN DEUX PHASES

1.  Le jugement sur la responsabilité (phase 1)

La section 2 du nouveau chapitre III comporte les articles L. 1143-3, L. 1143-4 et L. 1143-5.

● L’article L. 1143-3 prévoit en quelque sorte la manière dont le juge circonscrit l’action de groupe, en répondant dans une décision unique à trois questions.

Première question : l’action de groupe est-elle recevable ? Pour répondre positivement, le juge doit constater que les conditions mentionnées à l’article L. 1143-1 sont réunies : qualité pour agir de l’association, objet de l’action en justice (la réparation de préjudices résultant de dommages corporels causés par un produit de santé), existence d’une cause commune (cf. supra).

Deuxième question : le défendeur est-il responsable ? Le texte prévoit que le juge statue sur cette responsabilité « au vu des cas individuels présentés par l’association requérante », formule reprise de la loi relative à la consommation. Les règles du droit de la responsabilité ne sont pas modifiées sur le fond, pas davantage qu’elles ne le furent en matière de consommation.

Troisième question : qui peut rejoindre l’action ? Il incombe au juge de définir le groupe des usagers à l’égard desquels la responsabilité peut être engagée, en fixant ainsi les critères de rattachement au groupe. Cette définition implique de déterminer les dommages corporels susceptibles d’être réparés, ce qui nécessite bien logiquement des mesures d’expertise médicale, que le texte permet au juge d’ordonner, comme du reste toute mesure d’instruction.

Le texte ne précise pas les modalités d’organisation des expertises médicales, sans nul doute indispensables à l’office du juge. Le Gouvernement a indiqué à la rapporteure que ces modalités relèvent des pouvoirs d’instruction de droit commun du juge administratif et du juge civil, définis par voie réglementaire. (articles R. 621-1 et R. 621-1-1 du code de justice administrative, d’une part, et articles 143 à 154 du code de procédure civile, d’autre part).

● Afin que les usagers susceptibles de rejoindre l’action de groupe soient informés de son existence, l’article L. 1143-4 prévoit que le juge, dans la même décision, ordonne les mesures de publicité adaptées, à la charge de la personne reconnue responsable.

La mise en œuvre de ces mesures ne saurait cependant intervenir avant que le jugement de phase 1 soit devenu définitif, c’est-à-dire une fois purgés les recours ordinaires et le pourvoi en cassation. Ce délai permet d’éviter qu’il soit porté atteinte à l’image d’un défendeur qui, à l’issue des recours intentés contre le jugement, pourrait finalement ne pas être reconnu responsable. On notera au surplus que rien n’empêche l’association de communiquer sur l’introduction d’une action de groupe, avant que les mesures de publicité ne soient mises en œuvre par la personne définitivement reconnue comme responsable.

● L’article L. 1143-5 prévoit, du point de vue de l’usager, les modalités et les conséquences du rattachement à l’action de groupe.

Il charge tout d’abord le juge de fixer, toujours dans la même décision, le délai d’adhésion au groupe pour les usagers souhaitant se prévaloir du jugement de première phase. Sur le modèle de l’action de groupe en matière de consommation, c’est en effet le système d’opt in qui a été retenu : les usagers souhaitant rejoindre l’action de groupe doivent en manifester expressément la volonté. Le juge peut fixer le délai entre six mois et cinq ans suivant « l’achèvement » des mesures de publicité qu’il ordonne dans le même jugement. Le délai minimal correspond au délai maximal prévu en matière de consommation, ce que l’étude d’impact justifie logiquement par la volonté « de faciliter l’accès à la procédure dans les cas où les dommages corporels provoqués par le manquement sont d’apparition lente ».

À la différence de ce que prévoit le code de la consommation, l’opt in n’a pas pour effet automatique de donner mandat à l’association pour que celle-ci obtienne réparation au nom de l’usager. Cette possibilité est ouverte, mais au choix de l’usager, qui peut également décider d’adresser directement sa demande au responsable, et de conserver ainsi le bénéfice du secret médical. S’il décide au contraire de donner mandat à l’association, il lève de son propre chef ledit secret. En tout état de cause, si l’usager donne mandat à l’association, cela n’entraîne pas adhésion automatique.

Puisqu’une partie au moins des conséquences financières résultant d’un dommage causé par un produit de santé est prise en charge par des tiers, essentiellement les organismes de sécurité sociale, il est logique que ces tiers soient informés de l’existence d’une action de groupe, qui peut aboutir à l’indemnisation d’usagers pour le compte desquels ils ont engagé des dépenses (cf. infra). Le texte prévoit donc que l’usager donnant mandat à l’association indique à celle-ci sa qualité d’assuré social, les organismes de sécurité sociale auxquels il est affilié, ainsi que les prestations reçues ou à recevoir de ces organismes et des autres tiers payeurs. Le Gouvernement a indiqué à la rapporteure que les tiers payeurs en question sont les employeurs, l’État au titre des prestations sociales qu’il verse à ses salariés, les mutuelles, les institutions de prévoyance et les sociétés d’assurances. L’association doit informer les organismes de sécurité sociale et les autres tiers du mandat qu’elle a reçu.

● Si la procédure de cette phase 1 est globalement assez proche de celle prévue en matière de consommation, on remarque une différence notable, à savoir l’absence de provision ad litem (« en vue du procès »).

L’article L. 423-8 du code de la consommation prévoit en effet que lorsqu’il statue sur la responsabilité, le juge peut condamner le défendeur au paiement d’une provision à valoir sur les frais non compris dans les dépens, exposés par l’association, en particulier ceux afférents au recrutement de personnes chargées de l’assister dans les tâches relatives à l’indemnisation (cf. infra). Cette disposition permet d’éviter qu’une association renonce, faute d’une trésorerie suffisante, à engager une action de groupe – par construction justifiée en l’espèce puisque le juge a désigné un responsable.

On rappellera que dans une procédure juridictionnelle, les dépens sont en principe mis à la charge de la partie perdante ; ils comprennent une liste variable de frais selon le code concerné (article 695 du code de procédure civile ou article R. 761-1 du code de justice administrative). En tout état de cause, certains frais, dits « irrépétibles », ne sont pas compris dans les dépens ; il s’agit pour l’essentiel des honoraires d’avocat. L’article 700 du code de procédure civile et l’article L. 761-1 du code de justice administrative prévoient que le juge condamne la partie tenue aux dépens au paiement d’une somme au titre des frais irrépétibles.

Cet article ne prévoit pas de mesure similaire à celle du code de la consommation.

1.  La réparation individuelle des préjudices (phase 2)

La section 4 du nouveau chapitre III comporte les articles L. 1143-12 à L. 1143-16.

● L’article L. 1143-12 oblige la ou les personnes responsables à indemniser les usagers rattachés à l’action de groupe, que la demande d’indemnisation soit formulée directement ou par le truchement de l’association.

Le responsable doit procéder à l’indemnisation « des préjudices subis ». Le Gouvernement a indiqué à la rapporteure que peuvent ainsi être indemnisés, en plus de dépenses de santé, les préjudices patrimoniaux (par exemple la perte de revenus) ainsi que les préjudices personnels (par exemple le préjudice moral ou le préjudice esthétique). L’indemnisation de l’ensemble de ces préjudices se fonde sur la nomenclature dite « Dintilhac » (185).

L’indemnisation de ces préjudices doit être individuelle, comme du reste en matière de consommation, en principe. Mais en l’espèce, l’individualisation de l’indemnisation revêt une dimension particulière, car les dommages corporels et les préjudices qui en résultent sont par construction différents d’un usager à l’autre. Ainsi, à la différence de la procédure prévue en matière de consommation, le jugement de phase 1 ne définit pas de schéma général d’indemnisation, que les responsables auraient vocation à respecter (cf. supra).

Le texte de l’article L. 1143-12 ne prévoit cependant aucune disposition relative aux modalités d’évaluation de l’indemnisation individuelle des préjudices.

● Cela s’explique sans doute par le fait que l’article L. 1143-13 prévoit que les usagers dont la demande n’a pas été satisfaite par le responsable peuvent demander au juge compétent la réparation de leur préjudice, dans le cadre fixé par le jugement de phase 1. Il convient en effet de prévoir les cas dans lesquels, en dépit du jugement de phase 1, le responsable refuse d’indemniser un usager ayant rejoint l’action de groupe – par exemple parce qu’il conteste le lien de causalité entre le manquement et le dommage –, ou bien l’usager estime insuffisante l’indemnisation qui lui est proposée.

Le texte ne désigne pas précisément le juge compétent. L’étude d’impact indique simplement que « le juge saisi de la demande en réparation n’est pas le juge qui a prononcé le jugement sur la responsabilité, qui statuerait sur toutes les demandes par un unique jugement, mais le juge de droit commun, qui statue séparément sur chacune ». La procédure diffère donc sur ce point de celle prévue en matière de consommation, l’article L. 423-12 du code de la consommation disposant que le juge « statue dans un même jugement sur toutes les demandes d’indemnisation auxquelles le professionnel n’a pas fait droit ». Outre la nécessité mécanique d’individualiser l’indemnisation, l’absence de jugement unique permet aux usagers ayant rejoint l’action de groupe d’obtenir indemnisation avant expiration du délai d’adhésion au groupe, fixé par le jugement de phase 1.

Si rien n’est explicitement prévu dans le texte, le Gouvernement a confirmé à la rapporteure que dans le cadre du jugement de phase 2, le juge peut ordonner des expertises individuelles, « notamment sur la question du lien de causalité entre le manquement constaté et l’état des victimes ainsi que sur l’évaluation de ses [sic] préjudices ». Les expertises peuvent être demandées, comme en phase 1, en application des pouvoirs d’instruction de droit commun du juge (cf. supra).

Ces expertises doivent permettre de vérifier que sont bien respectées les règles de droit commun en matière de responsabilité, qui, on le rappelle, ne sont pas modifiées par cet article : lien de causalité direct et certain entre le préjudice et le manquement constaté, caractère réel et certain du préjudice indemnisable.

● L’article L. 1143-14 précise que le mandat éventuellement donné par un usager à l’association, afin d’obtenir indemnisation des préjudices, vaut également aux fins de représentation pour l’action en justice de phase 2, ainsi que pour l’exécution forcée du jugement.

● L’article L. 1143-15 prévoit qu’avec l’autorisation du juge, l’association peut s’adjoindre, pour l’assister dans ses missions, « toute personne appartenant à une profession judiciaire réglementée ». Il s’agit, comme l’a indiqué le Gouvernement à la rapporteure, de « s’assurer que les personnes concernées, qui seront amenées à manier des fonds importants, soient soumises au respect de règles déontologiques (notamment l’absence de conflits d’intérêts) et qu’elles disposent d’une assurance de responsabilité civile ».

L’article L. 423-9 du code de la consommation prévoit des dispositions identiques, en application desquelles les avocats et les huissiers de justice ont été désignés par décret (186). Selon toute vraisemblance, le décret pris en application du présent article devrait faire de même.

● L’article L. 1143-16 prévoit que l’indemnisation des usagers, qu’elle qu’en soit la source (règlement amiable, jugement de phase 2 ou convention de médiation – cf. infra) est soumise aux règles de recours contre tiers.

Sans entrer dans le détail de ces dispositions, dont l’exposé excède le champ de ce commentaire, on peut retenir que les caisses de sécurité sociale – et plus généralement les tiers payeurs, tels les assureurs – peuvent intenter un recours (dit subrogatoire) contre une personne reconnue responsable d’un dommage ayant eu pour conséquence la prise en charge de dépenses pour le compte de l’assuré. La caisse ou l’assureur ne sont cependant subrogés dans les droits de l’assuré qu’à hauteur des dépenses, en l’espèce de santé, prises en charge pour son compte. Or, comme on l’a vu précédemment, l’indemnisation résultant de l’action de groupe a vocation à excéder sensiblement les seules dépenses de santé.

Les dispositions relatives à la subrogation visées par l’article L. 1143-16 concernent :

– les caisses d’assurance sociale du régime général et du régime agricole (articles L. 376-1 à L. 376-4 et articles L. 454-1 et L. 454-2 du code de la sécurité sociale) ;

– l’État, les collectivités locales, les établissements publics administratifs et la Caisse des dépôts et consignations, en ce qu’ils peuvent être subrogés aux droits d’un agent décédé, infirme ou malade du fait d’un tiers (ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l’État et de certaines autres personnes publiques) ;

– l’ensemble des autres tiers payeurs, notamment les assurances (chapitre II de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation).

Il est nécessaire d’actualiser ces références pour tenir compte des modifications intervenues en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, tendant à parachever l’extension, à l’ensemble des régimes de sécurité sociale, des dispositions applicables dans le régime général en matière de recours contre les tiers responsables de dommages corporels aux assurés (187).

A.  LE RECOURS POSSIBLE À LA MÉDIATION

La section 3 du nouveau chapitre III, qui comporte les articles L. 1143-6 à L. 1143-11, prévoit une procédure de médiation. Son objet est, selon l’étude d’impact, d’éviter un engorgement de la procédure judiciaire et d’accélérer en conséquence l’indemnisation.

La médiation est également prévue dans la procédure d’action de groupe en consommation, mais de manière beaucoup plus succincte. Les articles L. 423-15 et L. 423-16 du code de la consommation prévoient en effet :

– que l’association requérante peut participer à une médiation afin d’obtenir l’indemnisation des préjudices individuels, dans les conditions du droit commun de la médiation (188) ;

– que le juge homologue l’accord résultant de la médiation, après s’être assuré qu’il est conforme aux intérêts de ceux qui ont vocation à en bénéficier, et que les mesures de publicité prévues par l’accord informent les consommateurs de la possibilité d’y adhérer.

Les dispositions de cet article sont beaucoup plus détaillées, ce qui s’explique par les particularités, voire les curiosités, de la procédure prévue.

● L’article L. 1143-6 prévoit que le juge saisi de l’action de groupe en phase 1 puisse charger un médiateur de proposer aux parties une convention réglant les conditions d’indemnisation amiable des dommages. Le médiateur a jusqu’à trois mois pour remplir sa mission, mais peut demander une prolongation pour la même durée. Les conditions prévues par cet article se distinguent sur deux points du droit commun de la médiation.

D’une part, la mission peut être confiée au médiateur par le juge à la demande d’une seule des parties, alors que le droit commun de la médiation
– applicable à l’action de groupe en matière de consommation – implique l’accord des deux parties (189). Cela signifie concrètement qu’une partie rétive à la médiation pourrait se la voir imposée par le juge.

D’autre part, le texte prévoit qu’avant de missionner le médiateur, le juge doit non seulement examiner (190) la recevabilité de l’action, mais également « les chances de succès d’une médiation ». Cette appréciation préalable du juge, qui n’existe nulle part ailleurs dans les procédures de médiation, est assez peu documentée par l’étude d’impact, qui se contente d’indiquer que « l’accès à la phase amiable sera d’autant plus accessible [sic] que le juge pourra y mettre fin à tout moment s’il considère qu’elle ne débouchera pas sur un accord ». Outre le fait que la rédaction retenue ne semble pas permettre au juge de mettre fin à la médiation à tout moment, mais simplement de ne pas la lancer s’il l’estime vouée à l’échec, le pré-examen ainsi prévu ne se justifie que par la dérogation précédemment exposée, à savoir le fait que la médiation puisse être lancée à l’initiative d’une seule partie.

● L’article L. 1143-7 dispose que le médiateur est choisi par le juge sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de la santé. Le juge peut en outre décider que le médiateur est assisté d’une commission de médiation, composée dans des conditions déterminées par décret (191). Il s’agit là de deux autres éléments originaux au regard de l’article 21 de la loi de 1985, qui prévoit que le médiateur est soit choisi par les parties, soit désigné par le juge avec leur accord ; ils se justifient par la nécessité d’assurer la plus grande indépendance possible du médiateur.

Les membres de la commission sont tenus au secret professionnel, dont la violation est réprimée par les articles 226-13 et 226-14 du code pénal (un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende). Le médiateur est tenu au même secret, mais en application de l’article 21-3 de la loi de 1985, qui ne renvoie cependant pas au code pénal.

● L’article L. 1143-8 détaille le contenu de la convention d’indemnisation amiable, à savoir « les conditions auxquelles la ou les personnes mises en cause assurent aux personnes ayant subi un dommage corporel en raison d’un ou plusieurs faits qu’elle identifie, […] la réparation de leur préjudice causé par ce fait ».

On relèvera que le champ lexical utilisé n’est pas celui de la faute, puisque sont mentionnées « les personnes mises en cause » – et non « les responsables » – et « les faits » à l’origine du dommage – et non « les manquements ». Cela résulte du fait qu’il est explicitement prévu que la convention d’indemnisation peut ne pas déterminer les responsabilités. Dans sa décision d’autoriser la médiation, le juge lui-même ne détermine pas la responsabilité, mais se contente d’examiner la recevabilité de l’action de groupe et les chances de succès de la médiation. Cela signifie donc que, via la médiation, l’indemnisation peut avoir lieu sans désignation d’un responsable. Cette procédure, en apparence peu intuitive, a pour objet de faciliter l’indemnisation : un producteur pourrait en effet être d’autant plus enclin à procéder à l’indemnisation qu’il n’est pas jugé formellement responsable du dommage, et préserve ainsi son image.

Les personnes mises en cause ne sont d’ailleurs pas nécessairement les responsables : la convention peut en effet prévoir que l’indemnisation soit assurée par une personne distincte du responsable, typiquement son assureur. La personne mise en cause est alors simplement chargée d’assurer la réparation des préjudices des victimes, pour le compte de la personne responsable du dommage ; le texte utilise à cet égard une formule classique quoiqu’absconse (« pour le compte de qui il appartiendra »). La détermination de la charge finale de la réparation se règle après l’indemnisation des victimes, entre le payeur et le responsable. Cela évite aux victimes d’attendre que cette question soit tranchée pour être indemnisées.

Le texte dresse ensuite une liste, non exhaustive, du contenu de la convention :

– le type de dommages corporels résultant des faits, « si les éléments à la disposition des parties et la nature des préjudices le permettent » ;

– les modalités d’expertise individuelle contradictoire et les conditions de prise en charge de ces expertises par les personnes mises en cause. On notera que ce qui est explicitement prévu ici ne l’est pas dans les phases juridictionnelles, car cela relève alors des pouvoirs d’instruction de droit commun du juge (cf. supra) ;

– les conditions de formulation des offres transactionnelles individuelles aux « personnes intéressées » – il faut entendre par là les usagers ayant rejoint l’action de groupe et leurs ayants-droit – et aux tiers payeurs (organismes de sécurité sociale, assurances) ;

– le délai dans lequel doivent intervenir les demandes d’indemnisation ;

– « les modalités de suivi du dispositif », rédaction dont on peine à comprendre pleinement le sens ;

– les modalités de publicité engagées par les personnes mises en cause pour informer les usagers potentiellement bénéficiaires de l’existence de la convention, de la possibilité subséquente de demander indemnisation sur son fondement, des délais pour ce faire, et des « modalités », entendues comme les conditions matérielles dans lesquelles les demandes d’adhésion au groupe devront être formulées.

● L’article L. 1143-9 prévoit que la convention est proposée aux parties par le médiateur, éventuellement après délibération de la commission.

Pour entrer en vigueur, elle doit être acceptée par l’association et au moins une partie mise en cause, et être homologuée par le juge. Les parties qui n’acceptent pas la convention ne sont pas tenues par ses stipulations.

Si une victime refuse l’offre faite dans le cadre de la médiation, notamment parce qu’elle estime que ses préjudices ne sont pas entièrement couverts par le projet de convention, elle dispose des voies de recours de droit commun, afin de solliciter réparation de son préjudice. Il est en effet possible de quitter à tout instant l’action de groupe engagée par une association, y compris pendant la phase de médiation.

● En application de l’article L. 1143-10, cette homologation met fin à l’action entre les parties signataires.

L’homologation, le choix du médiateur et de son éventuelle assistance par une commission, la fixation de la durée de mission du médiateur et son éventuelle prolongation, et enfin la décision de missionner un médiateur, sont insusceptibles de recours.

B.  DISPOSITIONS DIVERSES, DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER ET ENTRÉE EN VIGUEUR

1.  Les dispositions diverses de la section 5

Cette section comporte les articles L. 1143-17 à L. 1143-22. Ces dispositions s’inspirent très largement de celles prévues par la loi relative à la consommation. Elles ont notamment pour objet d’assurer la compatibilité de la procédure avec les quelques contraintes constitutionnelles qui s’imposent (cf. encadré).

Action de groupe et contraintes constitutionnelles

La jurisprudence constitutionnelle est peu abondante sur les recours collectifs, seules deux décisions (192) ayant abordé ce sujet […]. On peut cependant déduire de ces deux décisions qu’une action de groupe, dérogeant au principe selon lequel « nul ne plaide par procureur », doit respecter plusieurs conditions pour être conforme à la Constitution.

En premier lieu, les personnes au nom desquelles l’action collective est conduite doivent conserver la liberté de conduire personnellement la défense de leurs intérêts. […]

En second lieu, les consommateurs lésés ne doivent être liés par l’action menée qu’à condition d’avoir donné leur assentiment en pleine connaissance de cause et d’avoir été informés de l’action.

Source : M. Sébastien Denaja, précité, pages 41 et 42.

● L’article L. 1143-17 prévoit que l’introduction d’une action de groupe suspend la prescription des actions individuelles en réparation des préjudices résultant des manquements constatés par le jugement de phase 1 (ou des faits retenus dans la convention issue de la médiation). Le délai de prescription recommence à courir, pour au moins six mois, à compter de la date à laquelle le jugement de phase 1 est devenu définitif (ou à compter de la date d’homologation de la convention).

Cette suspension du délai de prescription des actions individuelles a pour objet de laisser aux usagers le choix entre la poursuite d’une action individuelle ou le rattachement à une action de groupe. Ce faisant, elle contribue à assurer le respect de la liberté de conduire personnellement la défense de ses intérêts.

● L’article L. 1143-18 prévoit que le jugement de phase 1 a autorité de la chose jugée à l’égard des usagers rattachés à l’action de groupe dont le préjudice a été réparé au terme de la phase 2 (soit à l’amiable, soit après jugement). Cela signifie donc, a contrario, que l’autorité de la chose jugée n’est pas opposable à ceux dont le préjudice n’aurait pas été réparé, ni a fortiori à ceux qui n’auraient pas rejoint l’action de groupe.

● L’article L. 1143-19 exclut la possibilité d’introduire une nouvelle action de groupe fondée sur les mêmes manquements et faits que ceux ayant déjà fait l’objet d’un jugement de phase 1 ou d’une convention homologuée après médiation.

On ne saurait mieux justifier l’objet de cette mesure que ne l’a fait notre collègue Sébastien Denaja à propos de la disposition symétrique prévue pour l’action de groupe en consommation : elle « vise, dans un souci de sécurité et de stabilité juridique, à éviter qu’un [responsable] puisse faire l’objet d’actions de groupe successives (sans exclure cependant des actions de groupe concurrentes, dès lors qu’elles ont toutes été introduites avant qu’une action de groupe identique ait déjà été jugée), ce qui conduirait à une forme de renouvellement infini du procès à son encontre. Cette précision est nécessaire, car l’autorité de la chose jugée, telle qu’elle est définie par l’article 1351 du code civil, ne serait pas suffisante pour rendre de telles actions de groupe irrecevables en application de l’article 122 du code de procédure civile : il y a bien identité de l’objet et de la cause de la demande, mais pas des parties, à l’exception du défendeur » (193).

Inversement, le fait d’adhérer à une action de groupe ne saurait faire obstacle aux actions individuelles de droit commun, tendant à obtenir réparation de dommages n’entrant pas dans le champ du jugement de phase 1 ou de la convention homologuée.

● L’article 1143-20 permet à une association agréée d’usagers du système de santé de demander au juge, à tout moment, d’être substituée dans les droits de l’association ayant introduit l’action de groupe, si cette première association s’avère défaillante.

● L’article L. 1143-21 prévoit que les actions en justice, en phase 1 comme en phase 2, peuvent être exercées directement contre l’assureur du responsable, en application de l’article L. 124-3 du code des assurances (« Le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. »).

● Enfin, l’article L. 1143-22 répute non écrite toute clause ayant pour objet ou pour effet d’interdire la participation à une action de groupe.

1.  Les dispositions relatives à l’outre-mer

La section 6 du chapitre III comporte un unique article L. 1143-23, qui rend l’action de groupe applicable à Wallis-et-Futuna, seule collectivité soumise au principe de spécialité législative et dans laquelle l’État demeure compétent en matière de santé.

2.  L’entrée en vigueur

Le III prévoit l’entrée en vigueur de ses dispositions à la date prévue par le décret en Conseil d’État mentionné à l’article L. 1143-2, censé définir les modalités selon lesquelles l’action de groupe est introduite et régie. En tout état de cause, les dispositions de cet article devront entrer en vigueur au plus tard le 1er juillet 2016.

Elles ne sont pas applicables aux manquements ayant cessé avant leur entrée en vigueur. Cette formule, d’une clarté toute relative, signifie par exemple qu’aucune action de groupe ne pourra être introduite pour obtenir réparation des dommages causés par un produit de santé défectueux, mais qui ne serait plus produit, commercialisé, ni prescrit au moment de l’entrée en vigueur du texte.

*

La Commission a adopté six amendements de la rapporteure à l’article 45. Outre la correction d’une erreur de référence il s’agit d’amendements dont la portée est significative.

● L’action de groupe ne sera pas ouverte aux associations ayant pour activité annexe la commercialisation de l’un des produits de santé susceptibles d’entrer dans son champ. Cet amendement a pour objet d’éviter tout conflit d’intérêt, puisque des associations d’usagers peuvent en effet être amenées à fournir à leurs membres des dispositifs médicaux, par exemple. Même si la procédure d’agrément a en principe pour effet d’éviter en amont ce type de conflit d’intérêt, il n’est sans doute pas inutile de le prévoir expressément dans la loi.

● Le jugement de phase 1 pourra mettre à la charge du responsable le paiement à l’association requérante d’une provision ad litem, comme cela est prévu dans le cadre de l’action de groupe en consommation (cf. supra).

● La médiation ne pourra intervenir qu’à la demande de l’ensemble des parties, et non pas d’une seule, comme prévu par le droit commun de la médiation, et dans le cadre de l’action de groupe en consommation.

Les auditions réalisées en préparation de l’examen du projet de loi ont fait ressortir les craintes unanimes – et légitimes – des associations d’usagers du système de santé, qui voient dans la procédure dérogatoire prévue par le texte d’origine un moyen de rendre la médiation quasi-obligatoire.

Or, le recours à la médiation doit rester pleinement choisi : d’une part, pour en garantir les chances de succès ; d’autre part, car ses conséquences ne sont pas neutres. Ainsi, la convention de médiation peut déterminer les conditions de l’indemnisation sans pour autant désigner de responsable. Or, l’association à l’origine de l’action de groupe peut – encore une fois légitimement – tenir à ce que le responsable soit jugé comme tel par un tribunal ; dans ce cas, il faut éviter de la contraindre à la médiation.

Le fait de remettre la procédure prévue dans le droit commun permet de supprimer deux autres originalités du texte du Gouvernement, à savoir :

– le fait que le juge évalue les chances de succès de la médiation avant de la lancer ;

– le fait que le juge examine, sans pour autant statuer dessus, la recevabilité de l’action.

Cette construction quelque peu baroque était une sorte de compensation au fait que la médiation puisse être demandée par une seule partie ; ce pis-aller n’a donc plus lieu d’être si la demande de médiation est commune.

● Contre l’avis du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement de suppression de l’alinéa 62, qui prévoit que les dispositions introduites dans le code de la santé publique par l’article 45 ne sont pas applicables aux manquements ayant cessé avant leur entrée en vigueur.

Les manquements en question sont la production, la fourniture ou l’utilisation de produits de santé produisant des dommages corporels sériels générateurs de préjudices susceptibles d’être réparés par la voie de l’action de groupe. Cela signifie que des dommages nés ou à naître, mais résultant de produits qui ne seraient plus fabriqués, distribués ou prescrits à la date d’entrée en vigueur de l’article 45, ne pourraient pas faire l’objet d’une action de groupe. Cela nuirait à l’efficacité du dispositif, et c’est la raison pour laquelle il convenait de supprimer cette disposition.

L’action de groupe entrera donc en vigueur au plus tard le 1er juillet 2016, ou à une date antérieure fixée par décret en Conseil d’État. Pourront faire l’objet d’une action de groupe les dommages non couverts par les règles classiques de prescription qui, comme le reste du fond du droit de la responsabilité, ne sont pas modifiées par le projet de loi.

● Enfin, la Commission a demandé que le Gouvernement remette au Parlement un rapport faisant le bilan de l’action de groupe en santé, trente mois au plus tard après son entrée en vigueur (soit le 1er janvier 2019). La rédaction est reprise de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation. Compte tenu de la spécificité de la procédure en santé, il sera en effet utile de disposer, d’ici quelques années, d’un premier bilan.

*

La Commission examine l’amendement AS450 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je défendrai également les amendements AS839, AS846, AS912, AS929, AS834, AS842, AS844 et AS848.

L’article 45 instaure l’action de groupe dans le domaine de la santé, sur le modèle de ce qui a été adopté dans le cadre de la loi sur la consommation. Cela nous paraît difficilement pertinent et un peu contraire à l’esprit de la loi Kouchner de 2002 qui, depuis douze ans, a prouvé son efficacité. Cette loi a notamment mis en place le dispositif de conciliation devant les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation (CRCI) qui permet un règlement amiable des accidents médicaux et des infections nosocomiales et prévoit la possibilité d’indemniser des dommages qui ne sont pas liés à une faute.

L’expérience a montré que le temps des victimes d’affaires sanitaires n’est pas compatible avec le temps judiciaire, dont – on l’a vu à propos de récentes catastrophes – les délais sont extrêmement longs.

La mise en place d’un système de médiation serait plutôt protectrice pour les victimes, contrairement au mécanisme que vous proposez et pour lequel nous n’avons aucun recul puisque la loi relative à la consommation a été votée récemment. Nous craignons une hyper-judiciarisation des affaires sanitaires qui serait contre-productive. Les États-Unis réfléchissent à une modération de l’action de groupe dans le domaine sanitaire.

Nous demandons donc la suppression de l’article 45. S’il devait être maintenu, nous proposerions la mise en place systématique d’une commission de médiation.

Mme la ministre. M. Door reconnaît d’une certaine manière l’importance de cet article qui vise à instaurer une action de groupe en matière de santé. Il s’agit d’aller au-delà de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Nous franchissons une étape supplémentaire en prenant en compte les spécificités de la réparation des dommages corporels. C’est la raison pour laquelle je n’avais pas souhaité que l’action de groupe en matière de santé figurât dans la loi relative à la consommation. Le débat aura lieu dans l’hémicycle, mais je tenais à souligner ici la portée de cet article, son importance et les changements majeurs qu’il va entraîner pour ceux de nos concitoyens qui seraient concernés par des dommages sériels corporels en matière de santé.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Je suis défavorable à la suppression de l’article 45.

Les procédures de conciliation fonctionnent très peu pour les produits de santé. Les CRCI ont rendu une cinquantaine d’avis en 2014, sur un total de 4 800 demandes.

La procédure est suffisamment encadrée pour éviter des dérives, puisque seules les associations agréées d’usagers du système de santé pourront introduire une action de groupe.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement AS1476 de M. Jean-Pierre Le Roch.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Cet amendement vise à permettre à plusieurs associations de porter conjointement une même action de groupe.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Vous souhaitez permettre à plusieurs associations d’introduire une action de groupe conjointe. En réalité, tel qu’il est rédigé, l’article 45 le permet déjà. Je vous demande donc de retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission rejette ensuite l’amendement AS839 de M. Jean-Pierre Door.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendement AS958 rectifié de Mme Jacqueline Fraysse et l’amendement AS1164 rectifié de Mme Michèle Delaunay.

Mme Jacqueline Fraysse. Je défendrai également les amendements AS1536, AS1537, AS1538 et AS1539 qui ont le même objet.

Je me félicite de cette très importante disposition qui concerne l’intérêt des patients. S’il faut en effet veiller à ne pas judiciariser à l’excès, il est nécessaire que les citoyens puissent obtenir réparation pour un préjudice qui les touche dans leur chair.

Nous avons noté que les actions de groupe sont réservées aux seules associations agréées d’usagers du système de santé et qu’elles ne visent que les dommages subis par les usagers du fait de produits de santé défaillants. Il nous semble cependant que nous devrions étendre le champ des possibilités d’action de groupe aux défaillances répétitives du système de santé – je pense au non-accès aux soins de certaines catégories de malades –, aux dommages sanitaires d’origine environnementale et aux préjudices sanitaires subis dans le cadre du travail – tels ceux liés à l’amiante. Cela aurait pour conséquence d’élargir les possibilités de saisine à toute personne ayant intérêt à agir dans ces domaines. Ma démarche est donc radicalement opposée à celle de M. Door, ce qui promet de beaux débats en séance publique !

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. En circonscrivant le champ des produits concernés, nous avons trouvé, je crois, un bon équilibre entre ces deux positions.

Madame Fraysse, je suis défavorable à votre amendement, même si j’en comprends l’intérêt. Les deux premières causes de dommages que vous donnez n’ont pas une définition juridique précise. Par ailleurs, comment justifier une action de groupe sans manquement ? On vient de voir des îles dévastées par un cyclone. En la matière, d’où viendrait le manquement ? Je prends à dessein un exemple extrême pour bien montrer où se situe le problème en ce qui concerne la rédaction de votre amendement.

M. Jean-Louis Touraine, président. L’amendement AS1164 rectifié vise à étendre aux victimes d’un préjudice individuel provenant de la consommation de substances psychoactives à caractère addictif la possibilité de porter une action de groupe.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis défavorable. Il s’agit là encore d’élargir le champ de l’action de groupe. Même si le producteur ou le fournisseur de ce type de substance n’a commis aucun manquement, il pourrait voir sa responsabilité engagée. Peut-on être responsable des dommages causés par la consommation d’un produit que l’on commercialise par ailleurs légalement ?

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS753 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Il s’agit d’un amendement d’appel. L’action de groupe n’est pas ouverte aux associations ayant pour activité annexe la commercialisation de l’un des produits que nous venons de mentionner.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle rejette successivement l’amendement AS1536 de Mme Jacqueline Fraysse et l’amendement AS846 de M. Jean-Pierre Door.

La Commission examine ensuite l’amendement AS746 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. « Lorsqu’il statue sur sa responsabilité, le juge peut condamner le défendeur au paiement d’une provision à valoir sur les frais non compris dans les dépens exposés par l’association. » Cet amendement permet de compléter les dispositions de l’action de groupe.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement AS742 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Nous proposons que la médiation ait lieu à l’initiative des deux parties, et non plus d’une seule.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle rejette l’amendement AS912 de M. Jean-Pierre Door.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS754 de la rapporteure.

Elle rejette successivement les amendements AS929 de M. Jean-Pierre Door, AS1537 et AS1538 de Mme Jacqueline Fraysse, AS834 de M. Jean-Pierre Door, AS1539 de Mme Jacqueline Fraysse et AS842 de M. Jean-Pierre Door.

Puis elle examine l’amendement AS755 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 62, qui prévoit que les dispositions introduites dans le code de la santé publique par l’article 45 ne sont pas applicables aux manquements ayant cessé avant leur entrée en vigueur. Les manquements en question sont la production, la fourniture ou l’utilisation de produits de santé produisant des dommages corporels sériels générateurs de préjudices susceptibles d’être réparés par la voie de l’action de groupe. Le maintien de l’alinéa 62 supposerait que des dommages nés ou à naître, mais résultant de produits qui ne seraient plus fabriqués, distribués ou prescrits à la date d’entrée en vigueur de l’article 45, ne pourraient pas faire l’objet d’une action de groupe.

Mme la ministre. Cet amendement vise à permettre à l’action de groupe de viser tous les dommages susceptibles d’avoir été causés par des produits de santé avant l’entrée en vigueur de la loi en discussion, la fameuse « clause de grand-père ».

Le Gouvernement émet un avis défavorable à cet amendement. On ne peut évidemment pas ignorer les incidences qu’une telle action de groupe peut avoir sur les conditions dans lesquelles les responsables potentiels sont couverts par leurs assurances. Ce sont tous des acteurs du système de santé. Le marché de l’assurance est étroit et une hausse incontrôlée des primes pourrait avoir un effet pénalisant pour l’ensemble des usagers du système de santé. Il est donc souhaitable que l’action de groupe ne porte pas sur des manquements qui appartiendraient entièrement au passé, car l’équilibre des contrats portant sur des périodes d’assurances déjà échues pourrait s’en trouver affecté.

Je signale que ne sont exclus du champ de l’action de groupe que les manquements qui ont cessé à la date d’entrée en vigueur de la loi. Si un produit de santé défectueux continue d’être mis sur le marché à cette date, les dommages causés par ce défaut pourront être réparés par le biais d’une action de groupe, même si l’utilisation du produit était antérieure, sous la seule limite des règles de prescription.

Par ailleurs, les manquements ayant cessé avant l’entrée en vigueur de la loi en discussion auront déjà pu faire l’objet d’actions individuelles ou collectives et les dommages liés à ces manquements, mais constatés après son entrée en vigueur pourront faire l’objet de telles actions. Les victimes ne sont ainsi pas privées d’action.

Des discussions ont eu lieu avec les acteurs de ce système pour élaborer l’article sur les actions de groupe, et un équilibre a été trouvé. Seuls les préjudices appartenant totalement au passé sont écartés de la réparation proposée. C’est une restriction dont je ne nie pas la portée, mais qui permettra à des personnes qui ont commencé à utiliser des produits avant l’entrée en vigueur de la loi, mais qui continuent à subir des dommages, d’engager des actions collectives.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS756 de la rapporteure.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Trente mois au plus tard après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement devrait remettre au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre de la procédure d’action de groupe.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 45 modifié.

*

Après l’article 45

La Commission examine l’amendement AS801 de M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L’amendement AS801, comme l’amendement AS799 qui sera appelé ensuite, vise à concourir à l’indemnisation des victimes. Je le retire au bénéfice des amendements AS1512 et AS1509 du Gouvernement qui ont la même fin et dont la rédaction me semble plus sûre.

L’amendement est retiré.

*

Article 45 bis
(art. L. 1142-24-5 du code de la santé publique)

Possibilité de réexamen de certaines demandes
d’indemnisation des victimes du benfluorex

Cet article, introduit à l’initiative du Gouvernement avec l’avis favorable de la rapporteure, reprend un dispositif inscrit à tort dans le dernier projet de loi de finances rectificative pour 2014, et censuré comme « cavalier budgétaire » par le Conseil constitutionnel (194).

L’objectif est de permettre au comité des experts de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), qui traite les demandes d’indemnisation des dommages causés par le Mediator en application de l’article L. 1142-24-5 du code de la santé publique, de réexaminer une demande rejetée une première fois, en cas d’éléments nouveaux ou d’évolution des connaissances scientifiques. Cette possibilité de réexamen n’est toutefois pas ouverte si le premier avis de rejet a donné lieu à une décision juridictionnelle irrévocable.

*

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS1512 du Gouvernement et AS799 de M. Gérard Bapt.

Mme la ministre. Par l’amendement AS1512, le Gouvernement reprend une disposition figurant à l’article 109 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2014 et censurée par le Conseil constitutionnel, qui y a vu un cavalier. Il s’agit, en tenant compte du progrès des connaissances scientifiques sur les effets de ce produit, de permettre le réexamen des dossiers présentés à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales par les victimes du Mediator, soit qu’ils aient été rejetés au cours des premières années d’existence du dispositif d’indemnisation, soit pour réévaluer si nécessaire les indemnités allouées. L’amendement AS1509, qui sera appelé ensuite, précise la mesure.

L’amendement AS799 est retiré.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement AS1512.

*

Article 45 ter
(art. L. 1142-28 du code de la santé publique)

Modification des délais de prescription des demandes d’indemnisation présentées à l’ONIAM

● Le premier alinéa de l’article L. 1142-28 du code de la santé publique dispose que « les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l’occasion d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage ».

Le I de l’article 45 ter, introduit à l’initiative du Gouvernement avec l’avis favorable de la rapporteure, modifie la rédaction de cet article du code, pour aligner sur ce délai de prescription celui des demandes d’indemnisation formées devant l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), qui est en l’état du droit de quatre ans.

Sont concernées les demandes présentées en application (195) :

– du II de l’article L. 1142-1 (mécanisme général d’indemnisation de l’aléa thérapeutique) ;

– de l’article L. 1221-14 (contamination par une hépatite à l’occasion d’une transfusion sanguine) ;

– de l’article L. 3111-9 (vaccinations) ;

– de l’article L. 3122-1 (contamination par le VIH à l’occasion d’une transfusion sanguine) ;

– de l’article L. 3131-4 (conséquences de l’application des mesures d’urgence en cas de risque sanitaire grave).

● Le second alinéa de l’article L. 1142-28 exclut l’application de l’article 2232 du code civil aux actions en responsabilité médicale. Celui-ci dispose que, dans la généralité des cas, « le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit ».

Cet alinéa est réécrit par le I de l’article 45 ter, qui prévoit au cas d’espèce l’application des dispositions du titre XX du livre III du code civil (« De la prescription extinctive »), à l’exclusion de celles de son chapitre II (« Des délais et du point de départ de la prescription extinctive »). Cela aura notamment pour conséquence de rendre désormais applicable l’article 2232.

● Le II de l’article 45 ter dispose en son premier alinéa que « la présente loi » (il aurait fallu écrire « les dispositions du I ») est sans effet sur une prescription acquise.

Mais le second alinéa du même II prévoit une exception pour les demandes d’indemnisation présentées à l’ONIAM depuis le 1er janvier 2006, et qui n’ont pas fait l’objet d’une décision de justice irrévocable. Cela signifie que des demandes normalement prescrites pourront en fait être accueillies favorablement. L’ONIAM assumera seul l’indemnisation dans ce cas, puisqu’il est expressément prévu qu’il ne puisse engager d’action subrogatoire ou récursoire.

L’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement justifiait ainsi cette mesure dérogatoire : « réparer la solution de continuité [sic] qu’a induite [sic], dans le délai de prescription des actions en indemnisation introduites par les victimes d’hépatites transfusionnelles, le transfert des dossiers de l’EFS [Établissement français du sang], qui appliquait la prescription décennale, à l’ONIAM, dont les créances se prescrivent dans un délai de quatre ans ».

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Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement AS1509 du Gouvernement.

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Article 46
(art. L. 1110-4, L. 1111-5 et L. 1111-7 du code de la santé publique)

Clarification des conditions d’accès au dossier médical

Émanant de l’article 3 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, l’article L. 1110-4 du code de la santé publique dispose que toute personne prise en charge par le système de santé a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations qui la concernent.

Institué dans l’intérêt du malade, le secret médical s’impose aux professionnels de santé, médecins et membres de l’équipe médicale, soumis par ailleurs au secret professionnel pénalement sanctionné par l’article 226-13 du code pénal.

Le secret médical ne s’éteint pas avec le décès de la personne. Dans sa rédaction actuelle, le dernier alinéa de l’article L. 1110-4 énonce donc de façon limitative les situations d’accès. Le droit de demander un tel accès est réservé aux « ayants droit » de la personne décédée et la demande doit être motivée au regard de conditions limitativement énumérées : pour connaître les causes de la mort, faire valoir un droit ou défendre la mémoire du défunt.

L’article 46 du projet de loi vise à fournir une définition plus précise des bénéficiaires de ce droit d’accès afin d’étendre, sans ambiguïté, au concubin et la personne ayant conclu un pacte civil de solidarité (PACS), la possibilité de demander l’accès au dossier médical de la personne décédée. L’accès des parents d’un mineur décédé est également énoncé de façon expresse.

Par ailleurs, l’article 46 précise les conditions d’exercice du droit d’accès au dossier médical, de son vivant, par un majeur protégé.

Les compléments nécessaires à la référence aux « ayants droit »

En définissant les bénéficiaires du droit d’accès au dossier de la personne décédée, l’article 3 de la loi du 4 mars 2002 précitée a visé les seuls ayants droit : or l’ayant droit est la personne qui bénéficie d’un droit en raison de sa situation juridique ou d’un lien familial avec le bénéficiaire direct de ce droit, en l’occurrence le droit d’accès de toute personne à l’ensemble des informations concernant sa santé détenues par des professionnels et établissements de santé défini par l’article L. 1111-7 du code de la santé publique.

La notion d’ayant droit pour l’accès au dossier médical de la personne décédée a donc été entendue dans un sens strictement successoral : selon un arrêté du 3 janvier 2007, elle vise « les successeurs légaux du défunt conformément au code civil » (196) définis par la Commission d’accès aux documents administratifs comme « les héritiers, conjoints, légataires universels ou à titre universel ».

En conséquence, le partenaire de PACS d’un patient décédé n’a pas systématiquement accès au dossier du défunt (197), de même qu’un concubin (198) et que la mère d’une patiente majeure qui n’a pas la qualité de successeur légal (199).

Cette lecture par la CADA ne s’impose au demeurant pas aux établissements privés de santé n’assurant pas de service public hospitalier, dont les actes ne relèvent pas de la catégorie des actes administratifs : la qualité d’ayant droit est alors appréciée de façon plus large incluant les personnes ayant des droits à faire valoir, ainsi que le résume le tableau ci-dessous, issu des recommandations pour la pratique clinique établies par la Haute Autorité de santé à destination des professionnels de santé.

LES DIFFÉRENTES DÉFINITIONS DE L’AYANT DROIT

Établissements publics ou privés assurant un service public hospitalier

Établissements privés n’assurant pas un service public hospitalier

La qualité d’ayant droit vise les successeurs du défunt au sens du Code civil, c’est-à-dire :

– les héritiers ;

– le conjoint survivant ;

– les légataires universels ou à titre universel *.

Il n’y a pas lieu de réduire cette notion aux seuls descendants directs de la première génération **.

• La qualité d’ayant droit ne vise pas la personne qui entretenait avec le défunt une relation de concubinage, sauf dispositions testamentaires particulières ***

• La qualité d’ayant droit vise les personnes titulaires d’un droit venant de la personne décédée, c’est-à-dire :

– les ascendants ;

– les descendants ;

– le conjoint ;

– des personnes ayant des droits à faire valoir, par exemple, les bénéficiaires de contrats d’assurance souscrits par la personne décédée.

Dans le cas particulier d’un contrat d’assurance, lorsque le défunt s’est opposé de son vivant à la communication d’informations de santé le concernant, l’ayant droit peut obtenir un certificat médical.

* Avis de la commission d’accès aux documents administratifs (CADA) n° 20031877 du 26 mai 2003.

** Avis CADA n° 20020684 du 28 février 2002.

*** Avis CADA n° 20024128 du 17 octobre 2002.

Source : Haute autorité de santé, Recommandations pour la pratique clinique – Accès aux informations concernant la santé d’une personne. Modalités pratiques et accompagnement, décembre 2005.

Il en résulte une application imparfaite du droit : le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ne peut demander à accéder au dossier médical que s’il a préalablement été désigné comme héritier.

Le 1° du I de l’article 46 modifie donc l’article L. 1110-4 relatif au secret médical afin de substituer au terme d’ayants droit, l’ensemble des personnes justifiant d’un lien suffisamment étroit avec la personne décédée pour pouvoir demander à accéder aux informations la concernant, à savoir « ses héritiers et ses ayants droit, son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ». La distinction introduite entre héritiers et ayants droit permet de donner à ce dernier terme une acception non strictement successorale mais de viser l’ensemble des personnes ayant des droits à faire valoir au sens du code civil. Pour les concubins et les personnes liées par un pacte civil de solidarité, il est expressément mis un terme à l’inégalité actuelle au regard des droits du conjoint.

Par coordination, le du II apporte la même modification à l’article L. 1111-7 relatif au droit d’accès de toute personne à l’ensemble des informations concernant sa santé détenues par des professionnels et établissements de santé. L’avant dernier alinéa de cet article prévoit qu’en cas de décès du malade, l’accès s’effectue dans les conditions définies à l’article L. 1110-4. À nouveau, la notion d’ayants droit est donc précisée par la mention simultanée des héritiers, conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité.

Conformément à l’article R. 111-7 du code de la santé publique, découlant de l’article premier du décret n° 2006-6 du 4 janvier 2006 relatif à l’hébergement de données de santé à caractère personnel, l’ensemble des personnes autorisées à accéder aux informations médicales concernant la personne décédée doivent préciser, lors de la demande, le motif pour lequel ils ont besoin d’avoir connaissance de ces informations.

Le refus éventuellement opposé doit être motivé et ne fait pas obstacle à la délivrance d’un certificat médical, dès lors que ce certificat ne comporte pas d’informations couvertes par le secret médical.

La personne a alors accès à l’ensemble du dossier médical, à l’exclusion des informations pour lesquelles la personne décédée s’est refusée à une telle communication et à l’exception des éléments recueillis auprès de tiers n’intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou qui les concernent.

L’accès des parents des enfants mineurs décédés

Ledu I du présent article complète le dernier alinéa de l’article L. 1110-4 du code de santé publique afin de prévoir de façon expresse, lorsque la personne décédée est mineure, le droit d’accès des titulaires de l’autorité parentale, et de supprimer, dans ce cas, l’obligation de motivation, levée de droit par la nature du lien existant entre les parents et les enfants mineurs.

Les parents disposeront ainsi d’un droit d’accès à la totalité du dossier médical, sous réserve d’une opposition antérieure du mineur à la communication de certains éléments de son dossier prévue à l’article L. 1111-5 du code de la santé publique.

Cet article autorise en effet le mineur à demander au médecin de garder le secret sur son état de santé en ne cherchant pas à obtenir le consentement des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque le traitement ou l’intervention s’impose pour sauvegarder son état de santé. Une telle demande doit être réitérée puisque l’article L. 1111-5 prévoit que le médecin doit dans un premier temps s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation.

Si le mineur a maintenu son opposition, les documents de son dossier médical se rapportant aux décisions médicales en cause ne doivent donc pas être accessibles, après le décès, aux titulaires de l’autorité parentale. À défaut, le secret médical ne persisterait plus après le décès, pour les personnes mineures, malgré l’expression de leur volonté affirmée de manière persistante.

Le III corrige en conséquence une erreur de référence figurant à l’article L. 1111-5 dans sa rédaction actuelle : la dérogation aux règles fixées par le code civil concernant l’autorité parentale y est en effet établie par référence à son article 371-2, qui prévoit pourtant seulement l’obligation de chacun des parents de contribuer à l’entretien et à l’éducation des enfants en proportion de leurs ressources. Cette référence erronée est donc remplacée par celle de l’article 371-1 qui définit l’autorité parentale comme « un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ».

La prise en compte des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique

Enfin, le 1° du II modifie l’article L. 1111-7 du code de la santé publique relatif au droit d’accès par le patient à son dossier médical afin de mieux prendre en compte la situation des majeurs protégés.

Il vise l’ensemble des dispositions du titre XI du livre Ier du code civil mais particulièrement son article 459 qui prévoit que lorsque l’état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge, ou le conseil de famille s’il a été constitué, peut prévoir qu’elle bénéficiera, pour l’ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d’entre eux qu’il énumère, de l’assistance de la personne chargée de sa protection. Au cas où cette assistance ne suffirait pas, il peut, après l’ouverture d’une mesure de tutelle, autoriser le tuteur à représenter l’intéressé.

Si ces décisions ont été prises, c’est donc le tuteur qui pourra exercer les droits d’accès aux informations concernant la santé de la personne protégée.

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Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté, outre trois amendements de la rapporteure de mise en cohérence rédactionnelle, un amendement, présenté par la rapporteure, visant à clarifier, à l’article L. 1111-18 du code de la santé publique, les conditions d’accès au dossier médical personnel de la personne décédée.

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La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS1551, AS1550, AS1552 et AS1553 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 46 modifié.

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Article 46 bis
(art. L. 1141-5 et L. 1141-6 [nouveaux] du code de la santé publique)

Accès à l’assurance et à l’emprunt en cas de problème grave de santé

La Commission a adopté un amendement du Gouvernement, visant à améliorer l’accès à l’assurance et à l’emprunt des personnes ayant eu un problème grave de santé : il instaure, pour les candidats à l’emprunt ayant eu des pathologies cancéreuses, un « droit à l’oubli », c’est-à-dire un délai au-delà duquel ils ne pourront se voir exiger aucune majoration de tarifs d’assurance ni d’exclusion spécifique de garanties.

Cet amendement prévoit, dans un article L. 1141-5, nouveau, du code de la santé publique, que ces délais seront définis par la convention signée par les pouvoirs publics, les fédérations professionnelles de la banque, de l’assurance et de la mutualité et les associations de malades et de consommateurs. Cette convention, mentionnée à l’article L. 1141-2, est dénommée « S’assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé » (AERAS).

En tout état de cause, pour des cancers survenus avant l’âge de quinze ans, ce délai ne pourra excéder cinq ans. En outre, l’article L. 1141-5 interdit aux assureurs de recueillir auprès des candidats à l’emprunt des données sur ce risque aggravé. À défaut de mise en œuvre par la voie conventionnelle dans les deux mois suivant la publication de la présente loi, la mesure sera mise en œuvre par décret.

En outre, un article L. 1141-6, nouveau, du code de la santé publique prévoit, le même « droit à l’oubli » pour les personnes atteintes ou ayant été atteintes d’une pathologie pour laquelle l’existence d’un risque aggravé ne peut être établie compte tenu des données de la science : la liste de ces pathologies et les délais au-delà desquels ne peuvent être appliquées les majorations de tarifs ou les exclusions de garanties seront définis par la convention AERAS.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1754 du Gouvernement.

Mme la ministre. Par cet amendement, le Gouvernement instaure « le droit à l’oubli ». Il s’agit, je l’ai dit dans mon propos liminaire, de permettre à des personnes qui ne sont plus considérées comme malades par leur médecin d’avoir des relations apaisées avec les compagnies d’assurance et les banques, en évitant aux candidats à l’emprunt ayant eu des pathologies graves des prêts à taux majorés. Des discussions sont en cours pour préciser les modalités d’application de cette mesure. Si la voie conventionnelle permet un accord rapide couvrant l’ensemble des dispositions proposées, cet amendement n’aura plus lieu d’être lors de l’examen du texte en séance publique. Dans le cas contraire, l’amendement sera discuté et un décret assurera l’entrée en vigueur rapide de ces dispositions, qui concernent les anciens malades de cancer et d’autres pathologies.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis très favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 46 bis

La Commission examine l’amendement AS519 de M. Fernand Siré.

M. Fernand Siré. L’amendement tend à ce que toute personne souhaitant faire don de ses organes après sa mort puisse faire mentionner cette volonté sur sa carte Vitale. C’est un moyen simple de sauver de nombreuses vies.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

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Article 46 ter
(art. L. 1232-1 du code de la santé publique)

Prélèvement d’organes sur une personne décédée

La Commission a adopté un amendement du rapporteur Jean-Louis Touraine visant à simplifier les conditions de prélèvement d’organes sur une personne décédée. Il vise à lever les obstacles pratiques au prélèvement dus à l’imprécision des dispositions figurant actuellement à l’article L. 1232-1 du code de la santé publique concernant les modalités d’information des proches.

Il supprime les dispositions selon lesquelles : « si le médecin n’a pas directement connaissance de la volonté du défunt, il doit s’efforcer de recueillir auprès des proches l’opposition au don d’organes éventuellement exprimée de son vivant par le défunt, par tout moyen, et il les informe de la finalité des prélèvements envisagés. » En effet, dans l’incertitude des volontés du défunt sur un tel sujet, les proches s’opposent quasi systématiquement au prélèvement.

L’amendement prévoit donc que, lorsque la personne décédée est majeure, le refus du prélèvement ne peut être exprimé que par une inscription préalable par l’intéressé sur un registre national automatisé. L’amendement prévoit en conséquence la simple information des proches de la personne décédée sur les prélèvements envisagés et sur leur finalité. Il établit ainsi sans ambiguïté que seul le défunt a eu qualité pour exprimer son opposition au prélèvement.

Cette nouvelle rédaction entrera en vigueur le 1er janvier 2018, ce qui permettra notamment d’améliorer les conditions d’inscription au registre national automatisé.

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La Commission examine en discussion commune les amendements identiques AS1344 de M. Jean-Louis Touraine et AS1346 de M. Olivier Véran ainsi que l’amendement AS1244 de Mme Dominique Orliac.

M. Jean-Louis Touraine. Faute de greffons, de nombreux patients sont en attente d’une transplantation. La principale cause de cette pénurie est le refus de prélèvements d’organes opposé, en contradiction avec la loi, par les proches de la personne décédée. La législation étant inapplicable en l’état, nous proposons de prévoir que les prélèvements d’organes peuvent être pratiqués dès lors que la personne majeure n’a pas fait connaître son opposition de son vivant, en l’exprimant par l’inscription sur un registre national des refus. Tous les Français sont favorables à la transplantation ; que l’on revienne au plus simple, l’avis de la personne elle-même. L’amendement a le soutien de M. Olivier Véran, de Mme Dominique Orliac et nos collègues de l’opposition Gilles Lurton et Bernard Accoyer.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte les amendements identiques.

En conséquence, l’amendement AS1244 tombe.

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Chapitre V
Créer les conditions d’un accès ouvert aux données de santé

Article 47
(art. L. 1111-8-1, L. 1435-6, L. 1451-1, L. 1460-1 [nouveau], L. 1461-1 à L. 1461-7 [nouveaux], L. 1462-1 [nouveau], L. 5121-28 du code de la santé publique, L. 161-28-1, L. 161-29, L. 161-30, L. 161-36-5 du code de la sécurité sociale, L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales, art. 8, 22, 27, 53, 54, 55, 57, 61 et chapitre X de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés)

Amélioration de l’accès aux données de santé médico-administratives

L’article 47 du projet de loi définit un nouveau cadre d’accès aux données à caractère personnel figurant dans les bases dites « médico-administratives » : celles-ci comportent des informations à caractère personnel sur les usagers des services de santé, recueillies dans le cadre du soin, par exemple en raison de la prise en charge par l’assurance maladie des dépenses du patient.

Les contenus de ces bases sont particulièrement riches : elles concernent l’ensemble des patients, sur tout le territoire et rassemblent les informations figurant, chaque année, dans 1,2 milliard de feuilles de soins, 500 millions d’actes médicaux et 11 millions de séjours hospitaliers. L’exploitation de ces informations est cependant encore difficile : les différentes bases répondent à des régimes juridiques distincts et aucun système de gouvernance d’ensemble n’est aujourd’hui satisfaisant. La richesse de ces informations constitue pourtant un atout pour la France en matière d’innovation et de recherche en santé, comme pour les mener les différentes vigilances sanitaires ou pour optimiser la dépense en santé.

L’utilisation de ces données est cependant étroitement encadrée, au regard du droit fondamental au respect de la vie privée, qui se déduit de l’article 2 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789.

C’est pourquoi, l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite loi « Informatique et Libertés », pose le principe d’interdiction de collecte ou de traitement des données à caractère personnel qui sont relatives à la santé des personnes, de même que celles qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à leur vie sexuelle. Mais le même article autorise cette collecte ou ce traitement, dans la mesure où la finalité du traitement l’exige, et pour certaines catégories de données, dont « les traitements nécessaires à la recherche dans le domaine de la santé », selon différentes procédures d’autorisation.

Il résulte de cette pluralité des bases de données, mal articulées, et de procédures d’autorisations hétérogènes, des difficultés importantes pour mener à terme des projets de recherche ou d’étude ou d’évaluation dans le domaine de la santé.

L’article 47 du projet de loi apporte donc des modifications symétriques dans le code de la santé publique et dans la loi informatique et libertés afin de fournir le cadre d’une ouverture des données propice à l’innovation et garante du respect des droits fondamentaux. En outre la réforme s’accompagne de mesures de simplification, sans affaiblissement du contrôle.

Le projet de loi établit un système national des données de santé (SNDS) qui assemble les données des bases existantes, ou en cours de constitution, en matière sanitaire et médico-sociale. Le I de l’article 47 insère à cette fin, dans le livre quatrième relatif à l’administration générale de la santé de la première partie de ce code, consacrée à la protection générale de la santé, un titre VI, nouveau, sur la « mise à disposition des données de santé ».

La rapporteure précise qu’il s’agit d’un « système » qui met en relation les organismes contributeurs, et non de la centralisation de l’ensemble des processus actuels dans une « méga base ». Les organismes contributeurs restent gestionnaires des bases : le responsable du traitement du SNDS reçoit copie de ces bases afin de répondre aux demandes d’accès aux données rassemblées par le système.

Le I établit donc un article L. 1461-1, nouveau, premier du nouveau titre inséré dans le code de la santé publique, qui récapitule, en I, la liste des données rassemblées par le SNDS en fonction des bases dont elles sont issues. Le 1° mentionne les données des systèmes d’information hospitaliers mentionnés à l’article L. 6112-7 : il s’agit du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI).

Les données transmises par les établissements de santé, incluant des résumés de sortie individuels, sont gérées par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH). Ces données permettent de déterminer les ressources des établissements, de contrôler la facturation, d’évaluer la qualité des soins, de mettre en œuvre la vigilance sanitaire et d’élaborer le projet régional de santé.

Le 2° opère un renvoi l’article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale : il s’agit des données du système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIRAM), géré par la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), selon des modalités actuellement fixées par un arrêté (200).

Le SNIIRAM a pour finalités : la connaissance des dépenses de l’ensemble des régimes d’assurance maladie par circonscription géographique, par nature de dépenses, par catégorie de professionnels responsables de ces dépenses et par professionnel ou établissement ; la transmission en retour aux prestataires de soins d’informations pertinentes relatives à leur activité et leurs recettes et, s’il y a lieu, à leurs prescriptions ; enfin la définition, la mise en œuvre et à l’évaluation de politiques de santé publique.

Le 3° vise les données de la statistique nationale sur les causes de décès définie à l’article L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales.

Le 4° mentionne les données médico-sociales transmises par les maisons départementales des personnes handicapées à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) conformément à l’article L. 247-2 du code de l’action sociale et des familles : ces bases ne sont pas aujourd’hui opérationnelles mais pourront donc être ultérieurement rassemblées dans le SNDS.

Enfin le 5° vise « des données » de remboursement par bénéficiaires, transmises par les organismes d’assurance maladie complémentaires : il ne s’agit donc pas de bases exhaustives.

En conséquence, l’article 47 introduit des modifications de coordination dans les différentes dispositions applicables aux données désormais rassemblées dans le SNDS.

Le II modifie ainsi l’article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale relatif au SNIIRAM : huit alinéas sont modifiés, mais, au regard de la rédaction actuelle, les modifications sont, en réalité, limitées. La contribution du SNIIRAM à la « constitution » du SNDS par renvoi à l’article L. 1461-1 du code de la santé publique est établie. Par ailleurs, le dernier alinéa du II de l’article établit un IV qui prévoit que les modalités de gestion et de renseignement du SNIIRAM sont définies par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) alors que la rédaction actuelle vise un protocole « passé entre au moins la CNAM, la caisse centrale de mutualité sociale agricole et la caisse nationale du régime social des indépendants », et approuvé par arrêté des ministres, l’arrêté SNIIRAM actuel. Le deuxième alinéa du IV de l’article 47 prévoit en outre que l’arrêté SNIIRAM actuel reste applicable : la conjonction de ces deux dispositions paraît source d’ambiguïté.

Conséquence également de la création du SNDS, le V du présent article modifie l’article L. 223-42 du code général des collectivités territoriales dont le 2° n’autorise aujourd’hui le recueil des causes de décès que pour l’établissement de la statistique nationale des causes de décès et pour la recherche en santé publique par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Il est donc introduit un 3° prévoyant de façon expresse que ces données peuvent alimenter le SNDS.

Enfin le II de l’article L. 1462-1 indique que, dans le cadre d’orientations générales définies par l’État, la CNAM reçoit, réunit et organise l’ensemble des données du SNDS. Elle est identifiée comme « responsable du traitement » : il lui revient donc, conformément à l’article 3 de la loi informatique et libertés de déterminer les moyens nécessaires au bon fonctionnement du SNDS.

Le III de l’article L. 1461-1 définit les finalités générales de l’utilisation des données. L’énumération permet de recouvrir l’ensemble des situations actuelles d’utilisation : elles devront être utilisées à des fins d’information sur la santé, les soins et la prise en charge médico-sociale ; à des fins de définition, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques de santé et de protection sociale ; pour la connaissance des dépenses de santé, des dépenses de l’assurance maladie et des dépenses médico-sociales ; pour l’information des professionnels, structures et établissements de santé ou médico-sociaux sur leur activité ; à des fins de surveillance, de veille et de sécurité sanitaires et enfin dans le cadre de la recherche, des études et de l’innovation dans les domaines de la santé et de la prise en charge médico-sociale.

La rapporteure estime qu’il conviendrait de mieux indiquer les principes fondamentaux conciliant l’ouverture des données publiques de santé et le respect de la vie privée, en cohérence avec la loi informatique et libertés. De plus l’énumération des finalités autorisées ne fait pas suffisamment apparaître les finalités interdites. La rapporteure souhaite donc qu’il soit indiqué que les traitements de ces données ne peuvent avoir ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à la vie privée des personnes concernées. En particulier, ils ne doivent en aucun cas permettre l’identification directe ou indirecte des personnes concernées, à moins que la loi ne l’ait prévu de façon expresse.

Deux catégories d’utilisation potentielle des données du SNDS pourraient également être interdites de façon expresse : en effet, les données issues des bases médico-administratives ne sauraient être utilisées à des fins de ciblage des professionnels et établissements de santé afin d’optimiser la visite médicale car un tel ciblage se fonderait sur des informations couvertes par le secret médical ; de même le SNDS ne doit en aucun cas permettre à des assureurs d’effectuer une sélection du risque en modifiant la segmentation des contrats en fonction des risques identifiés entre individus ou groupes d’individus.

Si les finalités interdites ne sont pas énoncées en tant que telles, le I du présent article établit, dans un article L. 1461-4, nouveau, quatre grandes garanties quant à l’utilisation des données à caractère personnel issues du SNDS.

Cet article dispose en premier lieu qu’aucune décision ne peut être prise à l’encontre d’une personne physique identifiée sur le fondement des données la concernant et figurant dans l’un de ces traitements. Des exceptions sont prévues, définies de manière limitative au troisième alinéa de l’article L. 1461-5, nouveau, qui permet, sur autorisation de la CNIL, l’accès à l’identité d’une personne quand cet accès est nécessaire pour lui proposer de participer à une recherche ou pour l’avertir d’un risque sanitaire grave auquel elle est exposée.

L’article L. 1461-4 prévoit en outre que toute personne responsable des traitements des données à caractère personnel issues du SNDS est soumise au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 226-13 du code pénal. En conséquence, le III du présent article apporte la même précision à l’article L. 161-29 du code de la sécurité sociale concernant le personnel des organismes d’assurance maladie.

Le 3° de l’article L. 1461-4 prévoit que l’accès aux données s’effectue dans des conditions assurant leur confidentialité et leur intégrité, ainsi que la traçabilité des accès et des requêtes, conformément à un référentiel défini par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. La rapporteure relève que l’adoption de cet arrêté n’est pas assortie d’une consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) : la commission se sera seulement prononcée, au préalable, par un avis sur le décret en Conseil d’État, prévu par le 3° de l’article L. 1461-7, définissant de façon plus générale les conditions dans lesquelles sont garanties la sécurité et la traçabilité des accès aux données. Or une intervention de la CNIL au stade de l’approbation du référentiel, paraît plus protectrice.

Enfin, le 4° prévoit que les données individuelles du système national des données de santé sont conservées pour une durée maximale de vingt ans.

Une amélioration complémentaire : l’utilisation du NIR comme identifiant de santé

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 1111-8-1 du code de la santé publique prévoit l’utilisation d’un « identifiant de santé des bénéficiaires de l’assurance maladie » est utilisé, dans l’intérêt des personnes concernées et à des fins de coordination et de qualité des soins, pour la conservation, l’hébergement et la transmission des informations de santé. Il est également utilisé pour l’ouverture et la tenue du dossier médical personnel et du dossier pharmaceutique. Un décret, pris après avis de la CNIL, fixe le choix de cet identifiant ainsi que ses modalités d’utilisation.

Le VII du projet de loi modifie cet article L. 1111-8-1 afin de prévoir de façon expresse que le NIR est utilisé comme identifiant de santé pour la prise en charge des personnes à des fins sanitaires et médico-sociales.

Cette réforme est susceptible d’améliorer les parcours de soins dans la mesure où un seul identifiant se substituera aux identifiants multiples parfois utilisés par les différents intervenants, ou, pour la prise en charge des patients de moins de seize ans, de l’identifiant de leurs parents.

À ces garanties générales s’ajoute l’interdiction posée par l’article L. 1461-5, nouveau, qui indique que le SNDS ne permet d’accéder ni aux noms et prénoms des personnes, ni à leur numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR).

Il est précisé que les codes permettant l’identification de la personne sont confiés à un organisme distinct du responsable du SNDS et des responsables des traitements : ce « tiers de confiance » sera un organisme désigné par le décret en Conseil d’État après avis de la CNIL, prévu par le 5° de l’article L. 1461-7. Selon les indications fournies à la rapporteure, il conservera les noms, prénoms, adresses et ainsi que le NIR. Nulle personne en dehors des agents du tiers de confiance n’accédera à ces données ; le tiers de confiance n’hébergera en contrepartie aucune donnée de santé.

Le I du présent article établit une distinction entre les données de santé en fonction du risque d’identification de la personne qu’elles occasionnent, donc d’atteinte au droit au respect de la vie privée.

Un article L. 1461-2, nouveau, prévoit la mise à disposition du public de « données individuelles constituées de telle sorte que l’identification directe ou indirecte des personnes concernées y est impossible ». Il s’agit de la mise en œuvre du principe de l’open data.

Cependant, il n’est pas indiqué selon quels procédés les données seront rendues anonymes : votre rapporteure suggère de prévoir que la mise à disposition du public des données à caractère personnel doit avoir fait l’objet d’une anonymisation complète des données personnelles qu’elles contiennent selon un procédé reconnu préalablement conforme par la CNIL. Ce principe pourrait au demeurant être applicable, non seulement aux données de santé issues du SNDS, mais à l’ensemble des données à caractère personnel qui font l’objet d’une protection particulière en vertu de l’article 8 de la loi informatique et libertés.

La rapporteure relève également que le principe de la gratuité des données en open data n’est pas expressément établi, même si l’étude d’impact jointe au projet de loi indique qu’il s’agit bien de l’intention du Gouvernement.

L’article L. 1461-2 précise en outre que les données relatives à l’activité des professionnels de santé figurant dans le SNDS pourront être publiées par les gestionnaires des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie dans le cadre de leur mission générale d’information des assurés sociaux : ces données ne sont pas anonymes mais continueront de pouvoir être mises à la disposition du public. Les dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 dite loi CADA sont applicables : elles prévoient l’information de la personne concernée et interdisent la dénaturation des données diffusées.

Ainsi, les données susceptibles de faire l’objet d’une réidentification, directe ou indirecte, ne pourront pas être mises à la disposition du public. L’article L. 1461-3, nouveau, prévoit dans ce cas une procédure d’autorisation des responsables de traitements, au regard des finalités du SNDS déjà mentionnée.

Il s’agit de données potentiellement identifiantes : elles ne comportent certes ni les noms et prénoms ni le numéro de sécurité sociale des personnes, mais la juxtaposition des informations qu’elles apportent, ou le croisement avec des données détenues par ailleurs, présentent un risque d’identification de la personne.

Dès lors, l’utilisation doit être autorisée et l’autorisation accordée selon une procédure adaptée au regard des objectifs poursuivis par le demandeur.

Deux cas de figure sont envisagés par l’article L. 1461-3, nouveau:

a) des accès nécessaires à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation et qui doivent, dans ce cas, répondre à un motif d’intérêt public : une procédure d’accès sur autorisation par la CNIL est appliquée ;

b) des accès nécessaires à l’accomplissement des missions des autorités publiques, dont il est précisé qu’elles ne sont pas exclusives des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation : un accès permanent est accordé.

Dans les deux cas de figure, il est affirmé que le responsable du traitement n’est autorisé à accéder aux données du SNDS ou à procéder à des appariements avec des données détenues par ailleurs que dans la seule mesure où ces actions sont rendues strictement nécessaires par les finalités de la recherche, de l’étude ou de l’évaluation ou par les missions de l’autorité publique.

Les autorisations d’accès permanent

La liste des organismes publics, relevant du a) de l’article L. 1461-3 et disposant de cet accès permanent, ainsi que l’étendue de l’autorisation dont ils disposent sont fixés par un décret en Conseil d’État. Le III de l’article L. 1461-3 prévoit que doit être définie la liste des services de l’État, des établissements publics ou des organismes chargés d’une mission de service public autorisés à traiter des données à caractère personnel du SNDS pour les besoins de leurs missions : dans ce cas l’accès est circonscrit à des catégories précises de données du SNDS.

Le décret évoqué ci-dessus est prévu par le 4° de l’article L. 1461-7, nouveau : il est pris après avis de la CNIL et fixe, la liste des services, établissements ou organismes bénéficiant de l’autorisation ainsi que l’étendue de cette autorisation, les conditions d’accès aux données et celles de la gestion des accès. La rapporteure observe qu’il n’est pas prévu que les personnes accédant aux SNDS devront être nommément habilitées par le responsable du traitement : ceci constituerait pourtant une garantie de sécurité supplémentaire.

Les agences régionales de santé (ARS) sont au nombre des institutions qui disposeront de cet accès permanent. Aussi, le VI modifie l’article L. 1435-6 du code de la santé publique qui définit les modalités d’accès aux données de santé des ARS. Les trois alinéas proposent une réécriture de la totalité de l’article actuel, mais seules deux modifications de fond sont apportées : un renvoi est opéré aux conditions d’accès au SNDS définies, pour ces agences, par le décret envisagé par le III de l’article L. 1461-3 ; par ailleurs alors que l’article L. 1435-6 restreint l’accès aux données aux agents de l’agence « ayant la qualité de médecin », cette mention est supprimée, ce qui habilite l’ensemble des agents, mais il reste précisé qu’ils ne peuvent accéder qu’aux données strictement nécessaires à l’accomplissement de leurs missions, et qu’ils sont tenus au secret professionnel.

Par ailleurs, en cas d’alerte sanitaire, et pour les traitements de données personnelles à réaliser en urgence, il est instauré un régime d’habilitation permanente d’accès mais assortie d’une obligation de simple déclaration à la CNIL et non d’autorisation. Cette modification est apportée à l’article 22 de la loi informatique et libertés, par le du VIII du présent article. L’article 22 est complété par un V qui soumet au régime de déclaration préalable les traitements « mis en œuvre par les organismes ou services chargés d’une mission de service public figurant sur une liste fixée par arrêtés des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pris après avis de la CNIL » afin de répondre, en cas de situation d’urgence, à une alerte sanitaire. Dans ce cas, le responsable du traitement rend compte chaque année à la CNIL des traitements ainsi mis en œuvre.

Un décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL définit les conditions dans lesquelles ces traitements peuvent utiliser le NIR. En conséquence, le du VIII de l’article 47 insère, à l’article 27 de la loi informatique et libertés un IV définissant, pour les situations d’alerte sanitaire, une exception au principe posé par le 1° du I et du II de cet article 27, qui prévoit que chacun des traitements utilisant le NIR sont autorisés par décret en Conseil d’État, pris après avis motivé et publié de la CNIL.

Les autorisations d’accès sur projet, accordées par la CNIL

S’il n’a pas été préalablement autorisé par décret, au regard des missions de certaines autorités publiques, l’accès aux données du SNDS non mises à disposition en « open data », n’est accordé qu’au responsable d’un traitement préalablement autorisé par la CNIL : le II de l’article L. 1461-3 indique en effet que ces traitements à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation mentionnés sont autorisés selon la procédure définie au chapitre IX de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. Cette procédure peut donc concerner les autorités publiques qui disposent par ailleurs d’un accès permanent, si le projet de recherche n’entre pas dans le champ de l’autorisation d’accès définie par le décret.

La procédure envisagée concernera la très grande majorité des personnes qui doivent aujourd’hui, d’ores et déjà, solliciter une autorisation de la CNIL pour accéder aux données qui seront assemblées dans le SNDS : près de 650 autorisations de recherche ont en effet été accordées par la CNIL en 2014, selon la procédure prévue au chapitre IX de la loi informatique et libertés et près de 150 autorisations concernant des projets d’évaluation dans le domaine de la santé, régis par son chapitre X. Cela représente près du quart de l’activité de la CNIL et une hausse de moitié en cinq ans.

Cependant une distinction est établie qui appelle des observations : le II de l’article L. 1461-3 prévoit que les recherches, études et évaluations peuvent être effectuées directement par les organismes à but non lucratif mais que les organismes à but lucratif devront recourir à des laboratoires de recherche ou bureaux d’études. Les critères d’expertise et d’indépendance de ces intermédiaires seront définis dans un référentiel, par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de la CNIL.

Le motif de cette différence de traitement n’apparaît pas clairement, faute d’être justifié par le fait que le demandeur serait par nature, plus susceptible qu’un autre de poursuivre des finalités interdites. La présence d’un intermédiaire qui aurait seul accès aux données personnelles et qui opérerait pour le compte d’un demandeur auquel il remettrait les résultats entrant strictement dans le champ de la recherche autorisée par la CNIL peut être justifiée : mais elle ne saurait être imposée à l’ensemble des acteurs privés à but lucratif. Elle pourrait en outre constituer un obstacle au développement, sur le territoire Français, de centres de recherche internalisés par des entreprises, moyennes et grandes, du secteur de la santé.

Par ailleurs, pour l’ensemble des demandeurs, l’accès aux données est subordonné à l’engagement du bénéficiaire de communiquer, à la fin de la recherche, de l’étude ou de l’évaluation, les résultats de l’analyse et les moyens d’en confirmer la validité à un comité d’expertise prévu par l’article 54 de la loi informatique et libertés.

L’article L. 1461-3 précise que la finalité de la recherche, de l’étude ou de l’évaluation doit répondre « à un motif d’intérêt public ». Mais cette notion n’est pas harmonisée avec les règles en matière d’autorisation de traitement des données personnelles par la CNIL. Au VII, le I de l’article 54 de la loi informatique et liberté, prévoit en effet que sont autorisées les données ayant une finalité « d’intérêt général » de recherche, d’étude ou d’évaluation. Ceci peut entraîner des interprétations contradictoires ou restrictives.

Enfin, l’article L. 1461-6, nouveau, introduit dans le code de la santé publique par le I du présent article, prévoit que les organismes chargés de gérer la mise à disposition effective des données peuvent percevoir une redevance mise à la charge de tout organisme public ou privé accédant aux données de santé. Mais le second alinéa de cet article précise que sont exonérées de cette redevance les recherches, études ou évaluations demandées par l’autorité publique, réalisées pour les besoins de services publics administratifs, ou demandées par les organismes dont les finalités pour l’accès à ces données relèvent exclusivement de l’intérêt général ou qui contribuent à la production de ces données.

L’Institut national des données de santé

La création du système national des données de santé nécessite de modifier la gouvernance actuelle des données de santé : la participation de l’ensemble des acteurs concernés est en effet gage d’effectivité de l’accès, de qualité de données fournies et d’évaluation des effets de leur usage.

L’article L. 161-36-5 du code de la sécurité sociale prévoit aujourd’hui qu’un groupement d’intérêt public (GIP) dénommé « Institut des données de santé » est constitué entre l’État, la CNAM, l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (UNOCAM) et l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS). Cet institut a pour missions « d’assurer la cohérence et de veiller à la qualité des systèmes d’information utilisés pour la gestion du risque maladie » et de « veiller à la mise à disposition des données issues des systèmes d’information des membres » à des fins de gestion du risque maladie ou pour des préoccupations de santé publique.

La création du SNDS nécessite de modifier ce schéma de gouvernance, de portée plus restreinte que le nouveau périmètre des données. L’article L. 161-36-5 est donc abrogé par le IV du présent article, ainsi que, par coordination, l’article L. 161-30, et un nouvel « Institut national des données de santé » est établi, dans le code de la santé publique, par les articles L. 1462-1 et L. 1462-2, nouveaux.

L’article L. 1462-1 prévoit que ce GIP est constitué entre « l’État, des organismes assurant une représentation des malades et usagers du système de santé, des producteurs de données de santé et des utilisateurs publics et privés des données de santé, y compris des organismes de recherche en santé ».

L’article L. 1462-1 indique que l’Institut est chargé de « veiller à la qualité des données de santé et aux conditions générales de leur mise à disposition garantissant leur protection et facilitant leur utilisation ». L’article L. 1462-2 renvoie la définition des missions à la convention constitutive du groupement d’intérêt public.

Par ailleurs, le troisième alinéa de l’article L. 1462-1 permet que « dans la mesure où les missions du groupement l’exigent », un décret puisse adapter les règles concernant la composition GIP posées par le chapitre 2 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit. Suite aux demandes d’éclaircissement de la rapporteure, il semble qu’aucune des règles applicables aux GIP ne fassent obstacles à la mise en place du SNDS dans les formes envisagées. Le maintien de cette disposition ne paraît donc pas s’imposer.

Auditionnés par la rapporteure, les représentants de la CNIL ont préconisé que les missions du GIP soient définies de manière plus précise. La loi pourrait par exemple préciser le rôle d’assistance que jouera l’INDS auprès des demandeurs dans le cadre de la procédure d’autorisation. Il pourrait également être indiqué que l’INDS établit un bilan des utilisations et qu’il est habilité à proposer au ministre des améliorations concernant le périmètre, les critères et les modalités d’accès aux données de santé, ou leur gestion.

Les autres modifications principales apportées par l’article 47 visent à clarifier les modalités d’examen, par la CNIL, des demandes d’autorisation d’accès aux données du SNDS au titre de recherches, études ou évaluations.

Le du VIII de l’article 47 modifie plusieurs articles du chapitre IX de la loi informatique et libertés, et le en abroge le chapitre X : l’ensemble des demandes d’accès à des données de santé relèveront donc d’un chapitre unique, qu’il s’agisse de projets de recherche en santé, à partir de données personnelles désidentifiées mais susceptibles de donner lieu à une demande d’autorisation de réidentification (chapitre IX) ou qu’il s’agisse de projet d’évaluation à partir des bases de données du SNIIRAM ou du PMSI actuels (chapitre X).

Le a) du 4° du VIII modifie ainsi l’intitulé du chapitre IX de la CNIL qui recouvre désormais les « traitements de données à caractère personnel à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation dans le domaine de la santé », conformément au champ des utilisations autorisées par l’article L. 1461-3 du code de la santé publique.

Le nouveau champ d’application est défini par l’article 53 dans sa nouvelle rédaction : il s’agit des traitements automatisés de données à caractère personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé, ainsi que l’évaluation ou l’analyse des pratiques ou des activités de soins ou de prévention.

Six catégories de traitements de données de santé à caractère personnel dans le domaine de la santé sont cependant soustraites à ce régime d’autorisation par la CNIL : conformément à la rédaction actuelle de l’article 53, en sont exclus les traitements de données à caractère personnel ayant pour fin le suivi thérapeutique ou médical individuel des patients ou permettant aux équipes soignantes d’effectuer des études à partir de ces données et destinées à leur usage exclusif ; il en va de même pour les traitements effectués à des fins de remboursement ou de contrôle par les organismes chargés de la gestion d’un régime de base d’assurance maladie, ou des traitements effectués au sein des établissements de santé par les médecins responsables de l’information médicale déjà exclus du champ d’application du chapitre X. Et c’est enfin le cas des traitements effectués par les agences régionales de santé et par l’État dans le cadre de l’organisation de l’activité hospitalière et des traitements, déjà mentionnés, mis en œuvre pour répondre à une alerte sanitaire.

La procédure est définie par la nouvelle rédaction de l’article 54.

La décision de la CNIL

Le I de l’article 54 indique que la CNIL autorise les traitements de données à caractère personnel « ayant une finalité d’intérêt général de recherche, d’étude ou d’évaluation dans le domaine de la santé » dans le respect des principes définis par la loi Informatique et libertés et en fonction de l’intérêt public que présentent la recherche, l’étude ou l’évaluation.

Le II prévoit que la CNIL doit obligatoirement consulter le comité compétent de protection des personnes mentionné à l’article L. 1123-6 du code de la santé publique, pour les recherches impliquant la personne humaine : l’intervention de ce comité est prévue, pour les recherches biomédicales, par l’article 8 de la loi n° 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine, dont la date d’entrée en vigueur est subordonnée à la publication de décrets qui ne sont pas encore parus.

Le cas plus général des études, évaluations et recherches n’impliquant pas la personne humaine relève du 2° du II qui prévoit que la CNIL doit consulter un « comité d’expertise scientifique pour la recherche, les études ou l’évaluation dans le domaine de la santé » : sa composition et ses règles de fonctionnement sont définies par un décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL. La dénomination d’un comité d’expertise « scientifique » paraît restreindre la participation à des autorités ayant cette qualité, alors que la nomination de personnalités qualifiées pourrait être opportune.

Ce comité donne un avis sur la nécessité du recours à des données à caractère personnel et la pertinence de celles-ci par rapport à la finalité du traitement, au regard de son intérêt scientifique et de la méthodologie retenue. Comme prévu par l’article L. 1461-3 du code de la santé publique, le bénéficiaire d’une autorisation de traitement adresse à ce comité, à la fin de la recherche, de l’étude ou de l’évaluation, les résultats de l’analyse afin de confirmer la validité du recours aux données à caractère personnel

Enfin, la CNIL peut saisir l’Institut national des données de santé sur le caractère d’intérêt public que présente la recherche, l’étude ou l’évaluation justifiant la demande de traitement.

Pour chaque demande, la CNIL doit vérifier les garanties présentées par le demandeur et examiner la conformité de sa demande à ses missions ou à son objet social. Si le demandeur n’apporte pas d’éléments suffisants pour attester la nécessité de disposer de certaines des données à caractère personnel dont il envisage le traitement, la commission peut interdire la communication de ces informations par l’organisme qui les détient et n’autoriser le traitement que pour ces données réduites.

Le III de l’article 54 prévoit que « les dispositions des II et III de l’article 25 sont applicables » à ces demandes d’autorisation. Le renvoi au III de l’article 25 permet de définir des délais : la CNIL doit se prononcer dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande, délai qui peut être renouvelé une fois sur décision motivée de son président. Lorsque la commission ne s’est pas prononcée dans ces délais, la demande d’autorisation est réputée rejetée.

Le renvoi au II de l’article 25 constitue une mesure de simplification, non applicable jusqu’à présent au domaine des données de santé : il s’agit de la faculté pour la CNIL d’accorder une autorisation dite « unique », valable pour plusieurs demandeurs, pour les traitements qui répondent à une même finalité, portent sur des catégories de données identiques et ont les mêmes destinataires. Dans ce cas, le responsable de chaque traitement adresse à la commission un engagement de conformité du traitement à la description figurant dans l’autorisation. Ces autorisations sont accordées par la CNIL sur le constat de demandes similaires provenant d’acteurs différents.

En outre, le IV indique que pour les catégories les plus usuelles de traitements automatisés, la CNIL peut homologuer et publier des « méthodologies de référence » : dans ce cas, un seul engagement de conformité, adressé directement à la CNIL, est suffisant dès lors que le traitement mis en œuvre est conforme à la méthodologie de référence. Il est cependant indiqué que ces méthodologies sont établies après avis d’instances d’expertise définies par décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL, ce qui paraît inutilement contraignant ; la CNIL paraît en mesure de déterminer par elle-même les instances d’expertise susceptibles de l’aider à établir ces méthodologies, sans nécessité de faire intervenir un décret en Conseil d’État à chaque changement de situation.

La rapporteure estime qu’outre l’autorisation simplifiée de l’article 25 et les méthodologies de référence, des autorisations « cadre » pourraient être utilisées par la CNIL dans le domaine des données de santé, comme elles le sont pour d’autres traitements à des fins de recherche : il s’agit d’une décision fixant le cadre valant autorisation pour l’ensemble des traitements, réalisés par un même demandeur, et entrant dans ce cadre.

Les autres modifications à la loi informatique et libertés

D’autres mesures de simplification figurent à l’article 47 qui auront un impact favorable sur les activités de recherche dans le domaine de la santé.

Ainsi, le du VIII complète l’article 27 en y insérant dans un IV, un 1° qui prévoit une nouvelle exception au principe d’autorisation par décret en Conseil d’État pour chacun des traitements utilisant le NIR : outre les situations d’alerte sanitaire, déjà mentionnées, cette exigence est abandonnée pour les traitements menés à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation dans le domaine de la santé, dès lors soumis aux dispositions du chapitre IX de la loi informatique et libertés, donc à une autorisation par la CNIL. Cette modification répond à une attente importante des chercheurs confrontés à des difficultés pour apparier les données des bases médico-administratives avec d’autres fichiers de données à caractère personnel, par exemple les données d’enquête recueillies auprès des patients. Or l’appariement de données anonymisées nécessite de recourir à nouveau au NIR au moyen de tables de concordances.

Par ailleurs l’article 55 est modifié : il définit les règles applicables en matière de transmission des données de santé entre professionnels de santé. Dans sa rédaction actuelle, un codage avant transmission est exigé. La sécurité de la transmission électronique devra désormais faire l’objet de procédés techniques définis par décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL.

Une modification d’ordre rédactionnel apportée à l’article 61. Enfin à l’article 57 les obligations d’information des personnes concernées par les traitements des données à caractère personnel sont adaptées aux particularités des bases de données médico-administratives.

Pour les utilisations à des fins de recherche, une dérogation est établie à l’obligation d’information individuelle des personnes dont les données personnelles ont été recueillies pour un autre objet que celui du traitement réalisé : il ne sera plus nécessaire de chercher à les en informer lorsque cette démarche « représente des efforts disproportionnés par rapport à l’intérêt de la démarche ».

En outre quand la recherche, l’étude ou l’évaluation utilise des données de santé à caractère personnel recueillies à titre obligatoire et destinées aux services ou établissements de l’État ou aux organismes de sécurité sociale, l’information des personnes concernées quant à la réutilisation possible de ces données, après suppression des données directement identifiantes sera assurée selon des modalités définies par décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL. Le décret devrait permettre aux administrations recueillant les données de santé (hôpitaux, caisses d’assurance maladie) de fournir une information d’ordre général, par voie d’affichettes situées dans les locaux, ou sur le site ameli.fr par exemple, il sera indiqué que les données recueillies dans le champ de la santé peuvent être réutilisées à des fins de recherche, dans le respect de la vie privée de la personne.

6.  Les améliorations apportées par la Commission des affaires sociales

Lors de l’examen du texte du projet de loi, la Commission a adopté des modifications importantes à l’article 47, par sept amendements présentés par le Gouvernement, deux d’entre eux faisant l’objet de sept sous-amendements de la rapporteure Hélène Geoffroy, ainsi que de six autres amendements de la rapporteure.

Les garanties supplémentaires du respect de la vie privée

Le I de l’article 47 a ainsi été modifié par un amendement du Gouvernement qui a ajouté, dans le code de la santé publique, en tête du titre VI un chapitre préliminaire intitulé « Principes relatifs à la mise à disposition des données de santé » comportant un article unique L. 1460-1, nouveau, qui présente les principes fondamentaux conciliant l’ouverture des données publiques de santé et le respect de la vie privée, en cohérence avec la loi Informatique et Libertés.

Cet article rappelle utilement que les traitements des données de santé ne doivent avoir ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à la vie privée des personnes concernées. Un sous-amendement de la rapporteure a renforcé cette garantie en indiquant que l’identification directe ou indirecte des personnes concernées constitue une finalité interdite de ces traitements, sauf dispositions législatives contraires.

Plusieurs modifications adoptées, à l’initiative de la rapporteure, à l’article L. 1461-2 du code de la santé publique et à l’article 8 de la loi Informatique et Libertés ont en outre visé à entourer de garanties la mise à disposition du public « en open data » des données personnelles les plus sensibles. Elle ne sera possible qu’après application de procédés d’anonymisation complète déclarés conformes par la CNIL. En outre, il est précisé que leur utilisation ne connaît d’autres restrictions qu’une finalité interdite : si l’utilisation a pour objet ou pour effet d’identifier une personne. Si l’intervention opérée préalablement sur les données individuelles est censée garantir qu’elles ne permettront pas d’identifier une personne et autorise leur mise en disposition en « open data », le caractère identifiant ne vient pas seulement de la donnée elle-même mais également de son environnement, c’est-à-dire de toutes les autres données avec lesquelles elle peut être croisée. Aussi, l’enrichissement constant des données mises en open data conduit progressivement à ce que certaines d’entre elles peuvent être utilisées dans le but d’identifier des personnes, au terme d’une succession de croisements de données. La rapporteure a donc souhaité affirmer clairement un cas d’utilisation interdite des données mise à la disposition du public, afin d’apporter une garantie supplémentaire de sauvegarde de la vie privée : toute infraction à l’interdiction d’utiliser l’open data en santé à des fins d’identification d’une personne pourra dès lors faire l’objet des sanctions applicables en cas de méconnaissance des obligations instituées par la CNIL.

Les mesures de simplification de l’accès aux données du SNDS

De nombreuses modifications ont visé à simplifier la constitution des données du SNDS et à améliorer les conditions d’accès.

Le champ des données figurant dans le SNDS a été précisé : le I de l’article L. 1460-1 indique les données attendues des organismes d’assurance maladie complémentaires ne seront pas exhaustives mais devront permettre la constitution d’un échantillon représentatif, réalisé en collaboration avec les organismes représentatifs des assureurs complémentaires. La dimension partenariale de la mise en place du SNDS est accentuée : le II de l’article L. 1460-2 précise que l’assemblage des données du SNDS s’effectue en concertation avec les organismes qui y contribuent, puisqu’ils demeurent les gestionnaires des bases dont ils transmettent copie à la CNAM.

Par soucis de lisibilité, les principes relatifs à l’utilisation des données du SNDS, initialement établis à l’article L. 1461-4 sont insérés dans un IV de cet article L. 1460-1. En outre, conformément aux préconisations de la rapporteure, le référentiel sur la sécurité des données du SNDS sera désormais défini directement par arrêté pris après avis de la CNIL.

À l’article L. 1461-2, un amendement du Gouvernement a prévu de façon expresse la gratuité de la mise à disposition en « open data » des données issues du SNDS.

Les conditions d’accès aux données ont été précisées, pour l’ensemble des personnes disposant d’un droit d’accès : le I de l’article L. 1461-3 et le 4° bis de l’article L. 1461-7 prévoient ainsi qu’un décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL, devra fixer les conditions de désignation et d’habilitation nominative par le responsable du traitement des personnes physiques qu’il autorise à accéder au SNDS.

Le II de l’article L. 1461-3 oblige les personnes produisant ou commercialisant des produits de santé ou participant à la gestion de contrats d’assurance, à démontrer que les modalités d’accès aux données du SNDS rendent impossible toute utilisation de ces données pour deux catégories de finalités interdites, définies dans un V de l’article L. 1461-1 : d’une part, le SNDS ne doit pas être utilisé à des fins de ciblage des professionnels et établissements de santé afin d’optimiser la visite médicale ; d’autre part, le SNDS ne doit en aucun cas permettre à des assureurs d’optimiser la segmentation du risque pour des individus ou groupes d’individus.

À défaut, les personnes visées doivent recourir à un laboratoire de recherche ou un bureau d’études. En revanche, l’obligation de recours à ces intermédiaires est supprimée pour l’ensemble des autres demandeurs privés : la différence de traitement instituée repose donc désormais sur un critère pertinent.

La nouvelle rédaction de l’article L. 1461-5 clarifie les dispositions relatives au tiers de confiance : cet organisme, distinct des organismes gestionnaires du SNDS et désigné par décret en Conseil d’État après avis de la CNIL, conservera les noms, prénoms, adresses et le NIR. Nulle personne en dehors des agents de ce tiers de confiance n’accédera à ces données ; le tiers de confiance n’hébergera en contrepartie aucune donnée de santé. Cette séparation complète des identifiants et des données de santé constitue en effet une garantie fondamentale de protection de la vie privée des personnes concernées.

Deux circonstances exceptionnelles sont définies dans lesquelles la CNIL peut autoriser le recours au tiers de confiance pour retrouver par son intermédiaire l’identité d’une personne : afin d’avertir des personnes d’un risque sanitaire grave, ou afin de proposer par exemple à des personnes atteintes d’une maladie rare de contribuer à une recherche. Le recours au tiers de confiance sera également possible pour apparier des données du SNDS avec des données d’une autre base, à des fins de recherche, d’études ou d’évaluation, si la CNIL a autorisé cet appariement et si cette méthode d’appariement est la seule permettant d’atteindre cet objectif.

En outre, un article L. 1461-6-1 nouveau est inséré afin de préciser que les modalités d’accès au SNDS décrites dans ce chapitre sont également applicables à toute demande d’accès aux bases composant le SNDS pour une finalité de recherche, étude ou évaluation.

Enfin, les amendements du Gouvernement mettent fin aux différentes incohérences rédactionnelles relevées par la rapporteure.

Les missions de l’Institut national des données de santé

Dans la nouvelle rédaction du chapitre II relatif à l’INDS, les missions de cet organisme sont davantage détaillées, tout en étant rassemblées dans un article unique, L. 1462-1, emportant suppression de l’article L. 1462-2 figurant dans le texte du projet de loi. On relève ainsi la fonction de « guichet unique » qui doit simplifier les démarches de demande d’accès soumises à la CNIL et la publication d’un rapport annuel au Parlement, comme le fait déjà l’actuel Institut des données de santé dont l’INDS reprend la suite. L’éventualité de dérogations à la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 est supprimée, celle-ci étant compatible avec le dispositif prévu.

Par amendement de la rapporteure, modifiant l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, les dirigeants, personnels de direction et d’encadrement ainsi que les personnes siégeant aux instances de l’INDS seront soumis à l’obligation de déclarer leurs intérêts, dans les mêmes conditions que celles s’imposant à de nombreuses autres commissions et organismes compétents dans le domaine de la santé (Comités de protection des personnes, Institut de veille sanitaire, Établissement français du sang…). L’INDS sera un forum de dialogue entre les parties prenantes qui représentent la diversité des intérêts autour des données de santé : il faut donc que leurs intérêts soient clairement énoncés. En outre, l’INDS sera amené à se prononcer sur le caractère d’intérêt public d’une étude, évaluation ou recherche utilisant les données de santé, sur la base de dossiers transmis par la CNIL : il conviendra donc de faire toute la transparence sur les éventuelles situations de conflit d’intérêts.

En outre, par cohérence, un amendement du Gouvernement abroge l’article L. 5121-28 du code de la santé publique créé par l’article 33 de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé qui prévoit la création d’un GIP spécifique pour autoriser l’accès au SNIIRAM ou l’extraction de ses données afin de réaliser des études dans le domaine de la santé : ce GIP « études de santé » n’avait pas encore vu le jour et l’instauration de l’INDS le rend sans objet.

Par ailleurs, sur propositions de la rapporteure, l’INDS acquiert une compétence nouvelle, définie au 4° de l’article L. 1462-1 : faciliter la mise à disposition d’échantillons et de jeux de données agrégés dans des conditions préalablement homologuées par la CNIL. Si l’accès aux données issues du SNDS est organisé autour de la distinction entre des données considérées comme insusceptibles de réidentifier les personnes, qui seront mises à disposition en open data, et des données présentant un risque de réidentification, directe ou indirecte, pour lesquelles il faudra une autorisation d’accès fournie par la CNIL, il existe en effet une catégorie intermédiaire de données : des jeux de données agrégés ou des échantillons, à l’exemple de l’échantillon généraliste des bénéficiaires (EGB) élaboré par la CNAM. Ces échantillons présentent aujourd’hui un faible risque de réidentification donc ne peuvent pas être mis à disposition en open data, mais ils peuvent sans danger être mis plus librement à disposition de certains utilisateurs spécialisés. C’est par exemple déjà le cas, dans le domaine de la statistique et des sciences sociales, du « réseau Quetelet » qui permet aux chercheurs français et étrangers, s’ils fournissent certaines garanties, d’accéder à différentes bases de données statistiques partagées. Ces données pourraient donc faire l’objet d’une mise à disposition, dans des conditions préalablement homologuées par la CNIL, sans qu’une demande d’autorisation ne soit nécessairement requise. Sur proposition de la rapporteure, le principe de cette mise à disposition a donc été établi à l’article 8 de la loi Informatique et Libertés et la compétence de l’INDS en la matière a été précisée à l’article L. 1462-1.

Le renforcement des missions de la CNIL

En conclusion, votre rapporteure souligne que les différentes modifications apportées aux missions de la CNIL, résumées dans le tableau ci-après, la confortent dans son rôle de garant de l’équilibre entre la protection des données à caractère personnel, nécessaire au respect de la vie privée et du secret médical, et un accès ouvert et effectif aux données des bases médico-administratives à des fins de promotion de la recherche, de l’innovation, des vigilances sanitaires ou des parcours de santé.

LES COMPÉTENCES DE LA CNIL DÉFINIES PAR L’ARTICLE 47 DU PROJET DE LOI

Code de la santé publique

L. 1111-8-1

Avis sur le décret en Conseil d’État fixant les modalités d’utilisation du NIR en empêchant l’utilisation à des fins autres que sanitaires et médico-sociales

L. 1461-1 –IV

Avis sur le référentiel, défini par arrêté interministériel, définissant les conditions de confidentialité et d’intégrité des données du SNDS, et la traçabilité des accès

L. 1461-3 –II

Avis sur le référentiel, défini par arrêté du Ministre chargé de la santé, incluant les critères d’expertise et d’indépendance des laboratoires de recherche et des bureaux d’étude

L. 1461-5

Autorisation de l’accès à l’identité des personnes figurant dans le SNDS quand cet accès est nécessaire :

– pour proposer à ces personnes de participer à une recherche ou pour les avertir d’un risque sanitaire grave auquel elles sont exposées

– ou pour la réalisation d’un traitement à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation si le recours à ces données est nécessaire, sans solution alternative, à la finalité du traitement et proportionné aux résultats attendus

L. 1461-7

Avis sur le décret mentionné à l’article L. 1461-7 qui définit :

– les organismes chargés de gérer la mise à disposition effective des données du SNDS et déterminant leurs responsabilités

– les catégories de données réunies au sein du SNDS et les modalités d’alimentation du système

– la liste des services disposant d’un accès permanent aux données du SNDS en fonction de leurs missions

– les conditions de désignation et d’habilitation des personnels autorisés à accéder au SNDS

– les conditions de gestion et de conservation séparées des données permettant une identification directe des personnes

Loi Informatique et Libertés

Art. 8, V

Reconnaissance préalable de la conformité à la loi Informatique et Libertés de tout procédé d’anonymisation complète des données personnelles faisant l’objet d’une protection spécifique et mises à disposition du public

Art. 22, V

– Avis sur l’arrêté interministériel fixant la liste des organismes et services dont les traitements sont soumis au régime de la déclaration préalable afin de répondre, en cas de situation d’urgence, à une alerte sanitaire.

– Avis sur le décret en Conseil d’État définissant les conditions dans lesquelles ces traitements peuvent utiliser le NIR

Art. 54, I

Autorisation des traitements de données à caractère personnel ayant une finalité d’intérêt général de recherche, d’étude ou d’évaluation en santé

Art. 54, II

Avis sur le décret en Conseil d’État qui définit la composition et les règles de fonctionnement du comité d’expertise pour la recherche, les études ou l’évaluation dans le domaine de la santé

Art. 54, IV

Homologation et publication de méthodologies de référence destinées à simplifier la procédure d’examen des catégories les plus usuelles de traitements automatisés de données en concertation avec le comité d’expertise

Art. 54, IV bis

Homologation des conditions de mise à disposition de jeux de données agréés ou d’échantillons constitués à partir du système national des données de santé

Art. 54, V

Délivrance, par décision unique, à un même demandeur, d’une autorisation pour les traitements répondant à une même finalité, portant sur des catégories de données identiques et ayant des catégories de destinataires identiques

Art. 55

Adoption de recommandations ou de référentiels sur les procédés techniques garantissant la confidentialité des transmissions électroniques de données identifiantes

Art. 57

Avis sur le décret en Conseil d’État définissant les modalités d’information des personnes sur la réutilisation des données personnelles à des fins de recherche, étude et évaluation

Des clarifications apportées dans le chapitre IX de la loi Informatique et libertés permettront en outre à la CNIL d’utiliser à plein les procédures d’autorisation simplifiées, afin de concentrer ses moyens sur les autorisations préalables les plus complexes et sur le contrôle a posteriori. L’ensemble des procédures simplifiées que pourra utiliser la CNIL sont regroupées à la fin de l’article 54. Dans un souci de clarification, il est ajouté que les méthodologies de référence sont destinées à simplifier la procédure d’examen des demandes par la CNIL ; elles seront en outre établies en concertation avec le comité d’expertise et les organismes représentatifs des acteurs concernés.

Des modifications concernent également le comité d’expertise, conformément aux demandes des parties prenantes réunies au sein de la Commission open data en santé : la composition du comité d’expertise devra garantir la diversité des profils, en cohérence avec la diversité des projets sur lesquels ses avis seront requis ; le comité rendra un avis au regard de la « qualité scientifique » plutôt que de « l’intérêt scientifique » d’un projet ; enfin le comité aura l’obligation d’émettre des recommandations en cas d’avis négatif, afin d’éclairer le demandeur sur les modifications à apporter à sa demande, le cas échéant.

Enfin, deux amendements de la rapporteure ont enserré de délais les avis rendus, sur les décisions d’autorisation de la CNIL, par le comité d’expertise scientifique ou par l’INDS : des délais d’un mois à compter de la saisine sont expressément prévus à l’article 54 de la loi Informatique et Libertés, qui entrent dans le délai de deux mois, renouvelable une fois, applicable à la CNIL.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS451 de M. Jean-Pierre Door.

M. Fernand Siré. Ayant pris acte de la volonté de dialogue du Gouvernement, qui s’exprime par la nouvelle rédaction de l’article que va proposer la ministre, nous retirons cet amendement de suppression de l’article 47.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1373 du Gouvernement, qui fait l’objet des sous-amendements AS1768, AS1780, AS1769 et AS1778 de la rapporteure.

Mme la ministre. L’amendement réécrit l’article 47, qui porte sur « l’open data ». Au terme d’une concertation intense, j’ai souhaité modifier certains points. L’équilibre général défini par la commission « open data » n’est pas modifié : il y a ouverture au public des données anonymes, et les données comportant un risque de ré-identification des personnes doivent être rendues disponibles pour les projets d’intérêt public dans des conditions garantissant le respect de la vie privée des individus. Les modifications introduites répondent aux trois principales demandes de la commission « open data » : clarifier la gouvernance installée pour réguler les accès aux données à caractère personnel ; garantir le traitement diligent des demandes d’accès ; simplifier les procédures d’accès.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Avis favorable ; il restera à préciser en séance publique l’interdiction de la prospection commerciale en direction des professionnels de santé ou d’établissements de santé.

Mme Jacqueline Fraysse. Il conviendra aussi de préciser le caractère d’« intérêt public » des projets de recherche donnant accès aux données de santé nominatives. Nous devons être extrêmement attentifs à ce sujet. D’autre part, pourquoi les organismes d’assurance complémentaire santé ne seront-ils pas tenus de transmettre la totalité des données dont ils disposent ?

Mme la ministre. Parce qu’est seulement nécessaire aux études un échantillon représentatif.

Mme Hélène Geoffroy, rapporteure. Ces questions seront précisées lors du débat en séance publique.

La Commission adopte successivement les sous-amendements AS1768, AS1780, AS1769 et AS1778.

Puis elle adopte l’amendement AS1373 sous-amendé.

En conséquence, les amendements AS470 de M. Yves Daniel, AS312 de Mme Isabelle Attard, AS1513 de Mme Valérie Boyer, AS313 et AS314 de Mme Isabelle Attard, AS1531 de Mme Bérengère Poletti, AS424, AS911 et AS910 de M. Dominique Tian, et AS1491 de Mme Valérie Boyer tombent.

La Commission adopte ensuite l’amendement AS1770 de la rapporteure.

La Commission est saisie de l’amendement AS1377 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit de garantir le traitement diligent des demandes d’accès.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS426 de M. Dominique Tian et AS1495 de Mme Valérie Boyer tombent.

La Commission adopte successivement l’amendement de précision AS1774 et l’amendement de conséquence AS1772 de la rapporteure.

Puis, suivant l’avis favorable de la rapporteure, elle adopte successivement les amendements AS1387, AS1378, AS1379 et AS1383 du Gouvernement.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement rédactionnel AS1775, l’amendement de rectification AS1771 et l’amendement AS1773 de la rapporteure prévoyant que les catégories de données personnelles devant faire l’objet des garanties de protection les plus élevées ne pourront être mises à disposition du public qu’après une anonymisation complète.

Elle est saisie de l’amendement AS1386 du Gouvernement, qui fait l’objet des sous-amendements AS1779, AS1777 et AS1776 de la rapporteure.

Mme la ministre. L’amendement est défendu.

La Commission adopte successivement les sous-amendements AS1779, AS1777 et AS1776, puis, suivant l’avis favorable de la rapporteure, l’amendement AS1386 sous-amendé.

Elle adopte enfin l’article 47 modifié.

*

Chapitre VI
Renforcer le dialogue social

Article 48
(art. L. 6156-1 [nouveau], L. 6156-2 [nouveau], L. 6156-3 [nouveau], L. 6156-4 [nouveau], L. 6156-5 [nouveau], L. 6156-6 [nouveau] et L. 6156-7 [nouveau] du code de la santé publique)

Représentation des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques hospitaliers

Cet article institue une instance nationale de représentation des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques hospitaliers et définit les critères de représentativité des organisations syndicales appelées à représenter ces personnels.

Comme le rappelle l’étude d’impact, le renforcement du pacte social fait partie des engagements pris par le Gouvernement dans le cadre du pacte de confiance. L’article 47 crée un chapitre VI intitulé « Dialogue social » au sein du titre V du Livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique, comprenant les articles L. 6156-1 à L. 6156-7.

I. LA CONSOLIDATION LÉGISLATIVE DU DROIT SYNDICAL ET DE LA REPRÉSENTATIVITÉ SYNDICALE

Le projet de loi définit le cadre juridique de l’exercice du droit syndical et précise les conditions dans lesquelles les médecins hospitaliers pourront exercer une activité syndicale. Une section 1 « droit syndical et critères de représentativité », comprenant trois articles L. 6156-1 à L. 6156-3 est instituée à cet effet.

A.  LA MISE EN œUVRE DU DROIT SYNDICAL

L’article créé un article L. 6156-1 portant la garantie légale du droit syndical des personnels médicaux hospitaliers.

Le rapport de M. Édouard Couty (201) rappelle le caractère essentiel du dialogue social à l’hôpital, appréhendé comme une des « valeurs fondatrices du service public hospitalier ». Il est de l’intérêt de tous les agents publics, quels que soient leurs statuts, de participer aux orientations du système public de santé au travers d’un dialogue structuré au sein des établissements ou au sein d’instances nationales

Le rapport reprend notamment la définition du dialogue social établie par l’organisation internationale du travail. Il « inclut toutes formes de négociations, de consultation ou simplement d’échanges d’informations entre représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs sur des questions d’intérêt commun liées à la politique économique et sociale ».

1.  Le dialogue social dans la fonction publique

● Le Préambule de la Constitution de 1946 consacre la liberté la liberté syndicale et le droit à la participation. Il prévoit ainsi que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ». Le Conseil constitutionnel a confirmé que le principe de participation a valeur constitutionnelle et a jugé qu’il s’applique dans la fonction publique (202).

La liberté syndicale s’inscrit dans le cadre des lois relatives aux fonctions publiques.

L’article 8 de la loi du 13 juillet 1983 (203) dispose ainsi que « le droit syndical est garanti aux fonctionnaires » et que les intéressés « peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats ».

L’article 8 bis donne qualité aux organisations syndicales de fonctionnaires pour participer au niveau national à des négociations relatives à l’évolution des rémunérations et du pouvoir d’achat des agents publics. Elles ont également la possibilité de participer à des négociations relatives aux conditions et à l’organisation du travail, et au télétravail, au déroulement des carrières et à la promotion professionnelle, à la formation professionnelle et continue, à l’action sociale et à la protection sociale complémentaire, à l’hygiène, à la sécurité et à la santé au travail, à l’insertion professionnelle des personnes handicapées et à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Le dialogue social s’inscrit dans une dynamique différente des règles régissant les rapports entre salariés et employeurs relevant du secteur privé. Alors que dans ce dernier cas, les règles ressortissent à la négociation collective, les agents publics se voient placer dans une situation légale et réglementaire. Tout accord nécessite l’adoption d’une disposition législative ou réglementaire pour être appliquée.

2.  Les règles applicables aux praticiens hospitaliers

Le droit syndical des praticiens hospitaliers est prévu par la voie réglementaire pour chacune des catégories concernées : praticiens hospitaliers (article R. 6152-73), praticiens des hôpitaux à temps partiel (R. 6152-248), praticiens contractuels (R. 6152-421), assistants (R. 6152-534), praticiens attachés (R. 6152-625), internes (R. 6153-24), étudiants en médecine, en odontologie et en pharmacie (respectivement R. 6153-62-1, R. 6153-76-1 et R. 6153-91-1).

Ces textes prévoient qu’ils peuvent créer des organisations syndicales, y adhérer, y exercer des mandats. Ils ne peuvent subir aucun préjudice ou bénéficier d’avantages en raison de leurs engagements syndicaux.

En outre, ces mêmes textes prévoient que des autorisations spéciales d’absence sont accordées, par le directeur de l’établissement, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé, aux représentants syndicaux, dûment mandatés, à l’occasion de la tenue de congrès syndicaux, fédéraux et confédéraux, ainsi que de la réunion des instances nationales et régionales de leur syndicat lorsqu’ils en sont membres élus.

3.  Les dispositions du projet de loi

● L’article L. 6156-1 garantit ce droit aux personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques des établissements publics de santé. À l’instar des dispositions de la loi du 13 juillet 1983 précitée, les intéressés peuvent créer librement des organisations syndicales.

Le second alinéa prévoit la publication d’un décret pour la mise en œuvre effective des droits et moyens syndicaux. Selon les informations transmises à votre rapporteure, son contenu doit préalablement faire l’objet d’une concertation avec les organisations syndicales représentatives de ces personnels : contingents de temps de crédit syndical et d’autorisations d’absence pour les instances et congrès, pour les réunions de négociation et concertation locales, régionales ou nationales, moyens matériels, humains et financiers, modalités et le nombre des mises à disposition auprès d’organisations syndicales au niveau national, modalités de mise en œuvre du droit à la formation syndicale.

B.  LES RÈGLES DE REPRÉSENTATIVITÉ SYNDICALE

1.  Les critères de la représentativité syndicale

● Les accords de Bercy du 2 juin 2008 sur la rénovation du dialogue social dans la fonction publique ont profondément modifié les conditions d’exercice de la démocratie sociale dans la fonction publique en définissant de nouvelles règles de légitimité des organisations syndicales.

Les principales stipulations de ces accords ont été transposées dans la loi du 5 juillet 2010 (204) dont le dispositif consacre notamment l’élection comme source de la représentativité et de la légitimité des syndicats. Cette loi élargit les conditions d’accès aux élections professionnelles en ne conditionnant plus la présentation de listes par les organisations syndicales, à certains critères de représentativité ou au bénéfice d’une présomption de représentativité.

L’article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 précitée prévoit désormais que peuvent se présenter aux élections professionnelles « les organisations syndicales de fonctionnaires qui, dans la fonction publique où est organisée l’élection, sont légalement constituées depuis au moins deux ans à compter de la date de dépôt légal des statuts et satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance » ainsi que « les organisations syndicales de fonctionnaires affiliées à une union de syndicats de fonctionnaires qui remplit les conditions » précitées. Ces nouvelles règles sont mises en œuvre pour les principales instances de concertation de la fonction publique.

S’agissant de la participation aux négociations, l’article 8 bis de la loi précitée dispose que sont appelées à y participer les organisations « disposant d’au moins un siège dans les organismes consultatifs au sein desquels s’exerce la participation des fonctionnaires et qui sont déterminées en fonction de l’objet et du niveau de la négociation ».

Dans le cas particulier la fonction publique hospitalière (205), le Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière est notamment composé de représentants des organisations syndicales représentatives des fonctionnaires pour lesquels les sièges sont répartis « proportionnellement au nombre de voix qu’elles ont obtenues aux élections organisées pour la désignation des représentants du personnel aux comités techniques d’établissement et aux comités consultatifs nationaux ».

● S’agissant des praticiens, il est apparu nécessaire de mettre au point des critères effectifs afin de clarifier la relation entre les organisations concernées et l’État ou les établissements hospitaliers. La rédaction de l’article L. 6156-2 s’inspire ainsi des dispositions relatives à la loi du 13 juillet 1983 tout en l’adaptant à la situation hospitalière.

Sont appelées à participer aux négociations au niveau national les organisations syndicales ayant obtenu un résultat suffisant aux élections professionnelles. Le seuil fixé par la loi est de 10 % des suffrages exprimés au sein du collège électoral concerné lors des dernières élections du conseil supérieur des personnels médicaux, ondotologistes et pharmaceutiques créé par le présent article. Les organisations concernées regroupent les organisations représentant les praticiens ainsi que les étudiants des mêmes disciplines.

Dans le cas particulier des négociations concernant les médecins, odontologistes et pharmaciens soumis à un statut, un critère supplémentaire doit être rempli. Les organisations syndicales doivent avoir obtenu au moins un siège dans au moins deux sections au sein du collège des praticiens hospitaliers de la commission statutaire également instituée par le présent article.

Les négociations ou concertations ouvertes par les autorités compétentes au niveau national auront notamment pour objet de préparer les réunions du Conseil supérieur des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques des établissements publics de santé. En lien avec les missions du conseil supérieur, ces négociations pourront donc porter sur tout projet de texte de portée générale relatif à l’exercice hospitalier de ces personnels et toute question relative à ces personnels (conditions de travail, déroulement des carrières, droit syndical, organisation du travail…).

L’article L. 6156-3 dispose, quant à lui, que les règles définies pour la présentation aux élections professionnelles des personnels médicaux, ondotologistes et pharmaceutiques sont celles de l’article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 précitée. Rappelons que les syndicats doivent avoir été constitués depuis au moins deux ans et satisfaire aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, ou doivent être affiliés à une union de syndicats qui remplit ces critères.

Un décret d’application fera l’objet d’une concertation avec les organisations syndicales représentatives. Il précisera notamment les règles applicables pour l’élection des représentants des organisations syndicales représentatives des personnels concernés par le conseil supérieur des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques (calendrier électoral, liste électorale, dépôt des candidatures, déroulement du scrutin, contentieux).

II. LE RENFORCEMENT DU DIALOGUE SOCIAL PAR LA CRÉATION D’UNE INSTANCE NATIONALE CONSULTATIVE

Les différents travaux menés ont tous relevé la situation particulière des praticiens hospitaliers au regard des personnels enseignants et hospitaliers titulaires et stagiaires. Une section 2 comprenant deux articles L. 6156-4 et L. 6156-5 porte création du Conseil supérieur des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques des établissements publics de santé.

● Selon l’article L. 6156-4, il rassemblera, autour d’un président nommé par décret, des représentants des organisations syndicales représentatives, des représentants des ministres et des représentants des établissements publics de santé.

Selon les informations transmises à votre rapporteure, la composition de cette instance est encore en négociation avec les partenaires sociaux : en effet, elle est complexe dans la mesure où elle prévoit d’associer tous les personnels médicaux, qu’ils soient titulaires ou contractuels, en exercice ou en formation.

Parmi les principes retenus et en cohérence avec les instances nationales créées depuis la loi sur la rénovation du dialogue social – Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et Conseil commun de la fonction publique – il est prévu une composition non paritaire et des avis rendus par collège.

La mise en place d’une instance nationale de dialogue social sur l’exercice médical ne constitue pas une nouveauté, loin s’en faut. Il s’agit de la renaissance du conseil des hôpitaux prévu par des dispositions réglementaires du code de la santé publique jusqu’à leur abrogation en 2009. Ce conseil pouvait être appelé à donner son avis sur les questions relatives à l’organisation et au fonctionnement administratif, financier et médical des établissements de santé ainsi que sur les questions relatives au statut des différentes catégories de personnel médical qui y sont attachées.

Cependant, cette instance nationale était composée de deux sections :

– une première section compétente pour donner un avis sur les problèmes généraux concernant l’organisation hospitalière et sur les questions relatives au fonctionnement administratif, financier et médical des établissements publics de santé ;

– une seconde section compétente pour donner un avis sur les questions relatives au statut des différentes catégories de personnel médical qui exercent leur activité dans les établissements publics de santé.

La lourdeur de cette instance nationale composée de deux sections comprenant chacune 27 à 37 membres représentant l’ensemble des disciplines, statuts et acteurs institutionnels du secteur et difficile à mobiliser a conduit à sa suppression en juin 2009.

● L’absence d’instance consultative nationale constituait depuis lors une carence dans le processus d’élaboration de la norme. Il est proposé de combler ce manque. L’article L. 6156-5 précise les compétences de cette institution.

Ce conseil aura tout d’abord pour mission d’examiner les projets de loi et projets de décret de portée générale relatifs à l’exercice des personnels médicaux et des projets de statuts particuliers qui leur sont applicables. Il émettra un avis sur ces projets de texte. D’après les informations transmises à votre rapporteure, il s’agit d’un avis purement consultatif. Les 3 collèges rendront leurs avis séparément.

Les textes législatifs ou réglementaires ayant des incidences statutaires devraient être soumis à ce nouveau conseil supérieur et pourront concerner des thèmes tels que le temps de travail médical, l’activité libérale, le droit syndical, la pénibilité ou la prolongation d’activité.

Par ailleurs, le Conseil examinera toute question relative aux personnels concernés sur saisine des ministres compétents ou à la demande écrite du tiers de ses membres. Cette dernière disposition doit permettre au Conseil supérieur de se saisir de questions sur lesquelles il ne serait pas directement impliqué en termes d’avis requis. Ce point a été une demande forte des organisations syndicales. On notera qu’une disposition analogue figure dans la législation relative au Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière (206).

III. CRÉATION D’UNE COMMISSION STATUTAIRE NATIONALE

Une section 3, comprenant un article L. 6156-6, porte création d’une commission statutaire nationale des établissements publics de santé.

La commission statutaire nationale est déjà prévue par les articles R. 6152–324 à R. 6152-324-23. Cette mesure vise à inscrire dans la loi son existence : sa composition et ses missions figurent dans la partie réglementaire du code de la santé publique sans base légale à ce jour.

Cette commission est chargée de statuer sur les situations individuelles des praticiens hospitaliers relevant d’une situation statutaire, notamment sur les cas d’insuffisance professionnelle.

Le dispositif de l’article L. 6156-6 prévoit que la commission comprend deux collèges, le collège des praticiens hospitaliers à temps plein et des praticiens des hôpitaux à temps partiel et le collège des personnels enseignants et hospitaliers titulaires. Ces deux collèges sont divisés en sections regroupant des spécialités.

Aux termes de l’article R. 6152-324 du code de la santé publique, la commission statutaire nationale, présidée par le chef de l’inspection générale des affaires sociales ou son représentant, membre de l’inspection générale ayant rang d’inspecteur général, comprend en nombre égal six membres représentants de l’administration et six membres, élus par collège, représentant les personnels.

La commission est organisée en deux collèges – collège des praticiens hospitaliers et collège des praticiens personnels enseignants et hospitaliers titulaires – eux-mêmes configurés en sept sections détaillées à l’article R. 6152-324.

La composition et le fonctionnement de la commission statutaire nationale sont déterminés par les articles réglementaires précités, notamment lorsque celle-ci siège en matière d’insuffisance professionnelle. Ses compétences en matière de gestion de carrière sont précisées aux articles R. 6152-13 et R. 6152-50-1 du code de la santé publique relatifs respectivement à la validation de l’année probatoire et au placement en position de recherche d’affectation.

La dernière section comprend un article L. 6156-7 renvoyant les modalités d’application à un décret en conseil d’État. À ce stade, votre rapporteure a été informée qu’il n’était pas nécessaire de prévoir un décret d’application, le régime juridique réglementaire ayant été remanié à l’automne 2010.

*

Lors de l’examen du texte en commission, trois amendements rédactionnels ont été adoptés à l’initiative de la rapporteure.

*

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS43, AS44 et AS45 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 48 modifié.

*

Après l’article 48

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS1407 de M. Hervé Pellois.

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Article 49
(art. L. 6143-2-1, L. 6143-7-3, L. 6143-7-5, L. 6144-2, L. 6146-1, L. 6161-1-1 [nouveau], L. 6161-2, L. 6161-2-1 [nouveau] et L. 6161-2-2 [nouveau] du code de la santé publique)

Rénovation de la gouvernance des établissements de santé

Dans le cadre du Pacte de confiance à l’hôpital, la ministre des affaires sociales et de la santé a réaffirmé la nécessité de renforcer le dialogue social au sein des établissements de santé. Cet article vise à moderniser la gouvernance interne des établissements de santé.

I. LA SITUATION DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

A.  LA MISE EN PLACE DES PÔLES DANS LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ : UNE ORGANISATION PERFECTIBLE

L’étude d’impact jointe au projet fait état de diverses enquêtes et rapports centrés sur le dialogue interne des hôpitaux. Parmi ces documents figure le rapport des conférences hospitalières (207) remis en mars 2014 dont les conclusions plaident en faveur d’un accroissement du rôle de la conférence médicale d’établissement (CME) et des pouvoirs de son président.

Ce document a été élaboré à partir d’une enquête réalisée sur la base d’un questionnaire adapté à chaque d’établissement. Une concertation a ensuite été organisée avec les acteurs concernés pour approfondir les informations collectées.

Globalement, le principe de l’organisation des établissements de santé en pôle est bien accepté par les acteurs. Cette architecture, préfigurée dans certains établissements au début des années 2000, a été généralisée par l’ordonnance du 2 mai 2005 (208) et confirmée par la loi du 21 juillet 2009 (209).

● L’article L. 6146-1 du code de la santé publique précise les modalités de l’organisation en pôle.

S’agissant des établissements publics de santé, il est prévu que le directeur d’établissement définisse l’organisation en pôles d’activité conformément au projet médical d’établissement. On distingue ainsi plusieurs pôles : pôles d’activité clinique, médico-technique, hospitalo-universitaires.

Le directeur signe avec le chef de pôle un contrat précisant les objectifs et les moyens, après avis, pour les pôles d’activité clinique et médico-technique, du président de la commission médicale d’établissement pour vérifier la cohérence du contrat avec le projet médical, ainsi que, dans les centres hospitaliers universitaires, du directeur de l’unité de formation et de recherche médicale.

Le praticien chef d’un pôle d’activité clinique ou médico-technique met en œuvre la politique de l’établissement afin d’atteindre les objectifs fixés. Il organise le fonctionnement et l’affectation des ressources humaines en fonction des nécessités de l’activité. À cet effet, il dispose d’une autorité fonctionnelle sur les équipes médicales, soignantes, administratives et d’encadrement.

Les conclusions du rapport

Selon le rapport précité, l’organisation en pôle s’est appuyée sur une « base médicale cohérente ». Dans la très grande majorité des cas, la logique médicale a pris le pas sur des logiques administratives moins appropriées (logique de gestion, logique managériale). Toutefois, les établissements universitaires ont plutôt privilégié la proximité des disciplines tandis que les établissements mono-disciplinaires en psychiatrie se sont organisés sur la base des secteurs propres à cette discipline.

Le plus souvent, la constitution en pôle n’a pas altéré le maintien des services. Le rapport précité relève que 90 % des centres hospitaliers moyens ou importants ainsi que 100 % des centres hospitaliers régionaux universitaires ont conservé cette unité de proximité. À cet égard, le maintien des services apparaît d’autant plus nécessaire que les conférences des présidents de commissions médicales des établissements publics de santé mentale ont tenu à souligner l’inscription spécifique de la psychiatrie dans l’organisation sectorisée départementale.

La création des pôles s’est accompagnée du développement de la contractualisation entre les chefs de pôle et le directeur d’établissement. Toutefois, le contenu de ces contrats semble plutôt variable. Si les objectifs d’activité, d’efficience, de qualité ou d’organisation semblent quasi-systématiquement suivis, d’autres items semblent inégalement repris : recherche, coopération territoriale, mise en place du projet d’établissement ou du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.

Les établissements se sont adaptés à l’organisation en pôle mais le rapport relève que les moyens affectés aux pôles pour le suivi de leur gestion sont inégaux selon le type d’établissements. Les établissements de taille modeste sont ainsi peu pourvus en outils informatiques de gestion. En outre, les établissements ne sont pas tous en mesure de fournir à leurs pôles des comptes de résultats analytiques individualisés afin de les aider à identifier les axes de progression de leurs activités.

Enfin, les modalités de concertation et de consultation internes demeurent insatisfaisantes. Si la majeure partie des établissements a maintenu les conseils de pôle, le constat établi fait état d’une très large insatisfaction s’agissant des modalités de représentation et d’association des professionnels au sein des pôles. Il est relevé que les « personnels, y compris médicaux, ne disposent pas de suffisamment d’informations pertinentes sur les orientations stratégiques de l’hôpital ». L’expression des organisations professionnelles au sein des pôles est en outre très limitée tandis que « les instances représentatives des personnels ne sont que peu informées du dialogue social existant au sein des pôles ».

Les recommandations

À la suite de ces constats, plusieurs recommandations ont été formulées, certaines d’entre elles n’ayant pas vocation à trouver une traduction législative. Ainsi, il est préconisé de réaffirmer le principe de l’organisation en pôle et d’inciter les établissements à élaborer une charte à cet effet. Le règlement intérieur de l’établissement devrait pouvoir comprendre les règles principales d’organisation des pôles.

Le rapport recommande également de conforter la logique médicale de l’organisation en pôle tout en l’adaptant aux centres hospitaliers régionaux universitaires (CHRU) dont la structure doit plutôt privilégier les projets de recherche et de formation dont les thématiques sont cohérentes avec leur projet médical.

Il est également apparu que les pôles devaient atteindre une taille critique suffisante. Des dérogations devraient être envisagées selon la taille mais aussi selon « l’éclatement des structures ». Selon la mission, deux écueils devraient pouvoir être évités :

– pour les petits établissements, la question du maintien du découpage en pôles se pose ;

– pour les gros établissements, il est relevé que l’organisation en pôles « perd de sa pertinence et rend difficile le management de proximité et l’organisation des transversalités ». Les inconvénients identifiés, fréquemment mis en avant sont l’augmentation des coûts de coordination et une gestion trop éloignée des préoccupations des soignants. Les pôles ont vocation à être le lieu de la synthèse entre l’efficience et la cohérence du projet médical.

Il est aussi proposé de généraliser les projets de pôle, les contrats afférents ainsi que les outils de pilotage à la disposition des pôles. Il est notamment recommandé de prévoir la co-signature du contrat par le directeur de l’établissement et le président de la commission médicale d’établissement. Dans le cas particulier des CHRU, la co-signature du doyen des facultés concernées devrait être privilégiée au titre de l’enseignement et de la recherche.

La mission a souhaité réaffirmer la place des services dans les pôles. À cet effet, elle préconise la nomination par le directeur de l’établissement des responsables des services sur proposition du président de la CME et du chef de pôle. Cette nomination marquerait ainsi une cohérence avec le projet médical et le projet de soins mis en œuvre sous l’autorité du chef de pôle.

Le rapport s’est enfin fait le relais de d’une « demande forte de dialogue ». Les propositions incluent à cet effet la mise en place d’outils permettant de faciliter le droit à l’expression directe au sein des pôles. La première recommandation demeure la mise en place de réunions de concertation au sein des pôles. Il est aussi proposé de faire de la concertation au sein des pôles un volet obligatoire du projet social tout en instaurant des outils de suivi du dialogue par le biais d’un rapport d’activité ou du bilan social.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE TEXTE

1.  Le renouvellement des pôles au sein de l’organisation hospitalière

Le modifie l’article L. 6146-1 relatif à l’organisation interne des hôpitaux en pôle.

Les modifications proposées réaffirment la place du pôle au sein des organisations tout en renforçant la place des présidents de CME.

● Le a) en modifie le deuxième alinéa. La dernière phrase dispose aujourd’hui que le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) peut autoriser un établissement à ne pas créer de pôles d’activité quand l’effectif médical de l’établissement le justifie. Dans la droite ligne du rapport des conférences hospitalières, le a) confirme que la constitution de pôles est facultative mais renvoie à un décret la fixation des seuils et le nombre d’agents maximum que peut comporter un pôle.

Les seuils en-dessous desquels la constitution des pôles est facultative n’ont pas encore été définis de manière définitive et feront l’objet d’une concertation entre la direction générale de l’offre de soins (DGOS) et des représentants hospitaliers postérieurement à l’adoption du présent texte de loi. À titre d’information, il ressort des études sur les pôles, et notamment du rapport de M. Édouard Couty (210), que la plupart des établissements ont organisé leurs pôles sur une base assez homogène de 100 à 300 agents.

Le projet de loi prévoit aussi de définir le nombre d’agents maximum que peut comporter un pôle, de manière à éviter la mise en place de pôles de taille trop importante. En effet, selon le rapport Couty, des pôles de taille trop importante « peuvent présenter certaines difficultés de management et un risque de balkanisation ». À ce stade, l’hypothèse de travail du ministère serait de fixer ce seuil à 500 équivalents temps plein.

● Le b) remplace les troisième à cinquième alinéas relatifs à l’organisation interne des pôles et à la nomination de leurs responsables.

Le deuxième alinéa du b) réaffirme la place des services, départements et unités fonctionnelles dans le fonctionnement des hôpitaux. Structures de proximité pour la prise en charge des patients et l’organisation des équipes soignantes et médicales, ces entités ont généralement été maintenues au sein des établissements. Le texte actuel les identifiait dans le cadre d’une structure interne. Le nouveau texte supprime cette dernière notion et mentionne explicitement la déclinaison des pôles en services, départements et unités fonctionnelles.

Cette évolution faite suite aux propositions contenues dans le rapport remis par M. Édouard Couty faisant état d’une organisation hospitalière reposant sur deux niveaux :

– une structure de regroupement des unités de base, disposant de moyens adaptés, assurant l’activité dans une logique médico-économique. Ce niveau est apte à gérer des programmes de qualité, assurer la gestion des risques, des contrats et des programmes de recherche en cohérence avec le projet médical ;

– une structure de proximité pour les soins et l’enseignement constituée à partir d’une équipe de soins pluri-professionnelle, pluri ou mono-disciplinaire.

Les troisième et quatrième alinéas du b) précisent le régime applicable à la nomination des chefs de pôles.

Aux termes du droit actuel, le chef d’établissement désigne le chef de pôle sur la base d’une liste de trois noms établie par le président de la conférence médicale d’établissement (211). En cas de désaccord persistant, le directeur d’établissement nomme les chefs de pôle de son choix.

Afin de renforcer la légitimité du chef de pôle et la place du président de la CME, il est désormais prévu que la désignation intervient :

– sur proposition du président de la CME pour les pôles d’activité clinique et médico-technique ;

– sur proposition conjointe du président de la CME et des doyens pour les centres hospitalo-universitaires.

Ces modifications renforceront tout d’abord la légitimité du chef de pôle auprès des instances médicales et de la direction de l’établissement. La procédure de désignation sera plus rapide.

Le pouvoir de la CME voit son rôle renforcé, à travers son président dont la proposition lie le chef d’établissement.

Enfin, le dernier alinéa du b) dispose que le mandat des chefs de pôle, renouvelable, voit sa durée fixée par décret. Ces conditions sont inchangées par rapport au droit actuel. La durée du mandat des chefs de pôles est aujourd’hui fixée par décret et s’élève à 4 ans. Codifiée à l’article D. 6146-1 du code de la santé publique cette disposition n’a pas vocation à être modifiée.

● Le c) remplace le septième alinéa, relatif au contrat de pôle, par trois nouveaux alinéas.

Actuellement, le contrat de pôle est signé, après avis du président de la CME pour les pôles d’activité clinique et médico-technique, et celui du directeur de l’unité de formation et de recherche médicale dans les centres hospitaliers universitaires. La consultation de la CME est motivée par le souci de tenir compte de la conformité du contrat au projet médical.

Le c) prévoit que le contrat fera désormais l’objet d’une contresignature du président de la CME. Dans le cas particulier des CHRU, la contresignature devra échoir au directeur de l’unité de formation de recherche médicale, ou lorsque plusieurs unités sont concernées, au président du comité de coordination du comité de l’enseignement médical.

● Le d) procède à une modification d’ordre rédactionnel à la deuxième phrase du huitième alinéa par coordination avec la réaffirmation de l’importance des services et unités fonctionnelles comme composantes intégrantes des pôles.

● Enfin, le e) complète l’article L. 6146-1 par deux nouveaux alinéas qui reprennent deux nouvelles préconisations du rapport des conférences hospitalières.

Le deuxième alinéa du e) donne compétence au chef de pôle pour organiser la concertation interne du pôle et favoriser le dialogue avec l’ensemble des personnels relevant de son autorité fonctionnelle.

Selon l’étude d’impact, le dialogue interne prendra une forme variable selon la taille de l’établissement. D’après les informations transmises à votre rapporteure, il n’est pas prévu de mesures réglementaires sur ce point, l’objectif étant de donner au chef de pôle une latitude dans l’organisation de son pôle et de lui permettre ainsi de tenir compte de ses spécificités. En revanche, il est prévu que l’agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) publie en 2015 un guide sur les pôles d’excellence. Celui-ci contiendra, sur la base du retour d’expérience de l’accompagnement mené par l’ANAP depuis 2 ans auprès de 300 pôles, des recommandations et bonnes pratiques, ayant vocation notamment à aider les chefs de pôles dans l’organisation de la concertation et du dialogue interne.

Le troisième alinéa du e) prévoit que les principes essentiels de l’organisation en pôles et de leurs règles de fonctionnement figurent dans le règlement intérieur de l’établissement. Rappelons qu’aux termes de l’article L. 6143-1, le règlement intérieur fait partie des matières sur lesquelles le conseil de surveillance délibère.

« Principes essentiels » de l’organisation en pôles

Les « principes essentiels » de l’organisation en pôles de l’établissement comprennent une description de la logique retenue par l’établissement pour structurer ses différents pôles, le lien entre cette structuration et le projet médical, les principaux objectifs assignés aux pôles, leurs obligations (signature d’un contrat de pôle, mise en place de délégation de gestion sur un certain nombre de sujets, production d’un compte de résultat par pôle etc.) ainsi que la nature des relations entre les chefs de pôles et les responsables d’unités fonctionnelles.

2.  Un meilleur suivi du projet social de l’établissement de santé

Le modifie l’article L. 6143-2-1 du code de la santé publique relatif au projet social de l’établissement.

Selon le premier alinéa, le projet social définit les objectifs généraux de la politique sociale de l’établissement ainsi que les mesures permettant la réalisation de ces objectifs. Il porte notamment sur la formation, l’amélioration des conditions de travail, la gestion prévisionnelle et prospective des emplois et des qualifications et la valorisation des acquis professionnels.

Suivant la recommandation des conférences hospitalières, il inclura désormais un volet consacré aux modalités du dialogue interne aux pôles dont le droit d’expression des personnels. Comme pour les autres volets, le comité technique d’établissement en établira le suivi annuel et un bilan à son terme.

3.  Le renforcement des pouvoirs du président de la CME

Le précise les pouvoirs du président de la CME mentionnés à l’article L. 6143-7-3.

Dans le droit actuel, il élabore le projet médical de l’établissement, avec le directeur et en conformité avec le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens. Il coordonne également la politique médicale de l’établissement.

La deuxième phrase dispose que « les modalités d’exercice de sa fonction sont précisées par décret ». Cette phrase est supprimée par le a) et devient au terme du b) la première phrase d’un nouvel alinéa.

Le b) complète ainsi l’article L. 6143-7-3 afin de prévoir, par décret :

– les modalités de l’élaboration d’une charte de gouvernance entre le président de la CME et le directeur de l’établissement. Il est prévu que la charte de gouvernance précise les conditions d’animation de l’organisation en pôles du président de la CME avec les pôles d’activités cliniques et médico-techniques au sein de l’établissement, les modalités selon lesquelles le président de la CME peut assurer la représentation de l’établissement auprès des autorités ou organismes extérieurs, ainsi que les moyens matériels et humains mis à disposition du président de la CME dans l’exercice de ses fonctions ;

– les modalités des relations du président de la CME avec les pôles d’activité cliniques et médico-techniques. Il s’agit de l’organisation mise en œuvre entre le président de la CME et les pôles telle que la mise en place d’instances de gouvernance (composition, fréquence, principaux objectifs et missions assignés à ces instances) ou les modalités d’organisation des relations et du dialogue entre président de la CME et les chefs de pôles. L’objectif est que le président de la CME puisse assurer ses fonctions dans un contexte où les relations directes entre pôles et direction de l’établissement sont de plus en plus essentielles ;

– les modalités de la représentation de l’établissement auprès des autorités ou organismes extérieurs. Il s’agit des instances externes à l’établissement auxquelles pourrait participer le président de CME et des relations conduites au nom de l’établissement avec des autorités de tutelle (ARS, ministère de la santé etc.) ou des organismes extérieurs à l’établissement (ex. organismes certificateurs, associations de patients, …) ;

– les moyens matériels et humains mis à la disposition du président de la CME.

Le 4° renforce les pouvoirs du président de la CME dans la désignation des membres du directoire appartenant aux professions médicales. Il modifie à cet effet le sixième alinéa de l’article L. 6143-7-5.

Le directoire est composé de membres du personnel de l’établissement, dont une majorité de membres du personnel médical, pharmaceutique, maïeutique et odontologique.

Organe collégial, le directoire approuve le projet médical, prépare le projet d’établissement et conseille le directeur dans la gestion et la conduite de l’établissement. Il est présidé par le directeur et le président de la CME est son vice-président.

Il comporte sept membres et neuf dans les centres hospitaliers universitaires parmi lesquels des médecins. Ces derniers sont nommés par le directeur sur présentation d’une liste établie par le président de la CME et dans les CHU conjointement avec le directeur de l’unité de formation et de recherche médicale ou avec le président du comité de coordination de l’enseignement médical. En cas de désaccord, le directeur peut demander une nouvelle liste. En cas de nouveau désaccord, il lui revient de nommer les membres de son choix.

Le 4° modifie les conditions de désignation prévues dans ce dernier cas de figure : la nomination ne pourra plus avoir lieu sans l’avis du président de la CME.

4.  La nouvelle composition de la CME

Le rectifie l’article L. 6144-2 relatif à la composition de la commission médicale d’établissement des établissements publics. Elle comprend actuellement des représentants des personnels médicaux, odontologiques et pharmaceutiques. À l’avenir, elle inclura les représentants des personnels maïeutiques. Cette modification vise à permettre une représentation systématique des sages-femmes.

III. L’ORGANISATION DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ PRIVÉS

Les 6° à 8° modifient le régime des mécanismes de représentation des médecins et des usagers au sein des établissements privés.

1.  La représentation des usagers

Le créé une représentation des usagers dans les établissements de santé privés habilités à exercer le service public dans les conditions prévues à l’article L. 6112-3 (cf. commentaire de l’article 26). Cette représentation vaut pour les conseils d’administration, les conseils de surveillance ou les organes qui en tiennent lieu. Les modalités sont prévues par la voie réglementaire et devront tenir compte de la nature juridique de l’établissement.

Il est envisagé, sous réserve d’évolutions de l’article 26 du projet de loi de santé consacré au service public hospitalier, qu’au moins deux représentants des usagers soient représentés au sein des conseils d’administration ou dans les conseils de surveillance ou dans les organes qui en tiennent lieu, dès lors qu’un établissement souhaite pouvoir être admis au service public hospitalier.

Cette modification fait suite aux travaux menés par Mme Claire Compagnon et dont les conclusions sont consignées dans son rapport de synthèse (212). Pour les établissements désireux de faire partie intégrante du service public hospitalier, il est apparu normal que les principes applicables aux établissements publics puissent être transposables en raison d’une proximité de principes, de fonctionnement et d’activité.

2.  La représentation de la communauté médicale

Les 7° et 8° fixent le régime des instances de représentations des personnels médicaux des établissements privés. Ils établissent une distinction selon qu’ils relèvent ou non du secteur lucratif. L’objectif est de parvenir à un rapprochement du régime applicable aux commissions médicales d’établissement des hôpitaux publics pour les établissements optant pour le service public hospitalier.

L’organisation médicale est actuellement fixée par l’article L. 6161-2 du code de la santé publique. Elle sera désormais régie par les articles L. 6161-2 à L. 6161-2-2.

● L’article L. 6161-2 maintient pour les établissements privés à but lucratif l’organisation autour de la conférence médicale d’établissement. Cet organe est formé de plein droit et voit ses attributions relever du I du nouvel article L. 6161-2-2 créé par le 8°.

● Le nouvel article L. 6161-2-1 prévoit l’instauration d’une commission médicale d’établissement pour les établissements privés à but non lucratif, élue par les praticiens dont les attributions relèvent du I du nouvel article L. 6161-2-2 créé par le même 8°. Les matières sur lesquelles elle peut être consultée et ses modalités de fonctionnement seront fixées par décret. Sous réserve d’ajustements à certaines spécificités des établissements privés, une cohérence avec les matières sur lesquelles elle pourra être consultée seront similaires à celles de la CME des établissements publics de santé.

● Le nouvel article L. 6161-2-2 fixe les attributions communes aux conférences et commissions médicales des établissements privés.

Le I reprend, en les adaptant, les attributions mentionnées à l’article L. 6161-2 dans sa rédaction actuelle.

Son premier alinéa précise les matières relevant de leur champ de compétence. Elles doivent être consultées sur la politique médicale et sur l’élaboration des prévisions annuelles d’activité de l’établissement. Elles doivent contribuer à la définition de la politique médicale d’établissement, à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité et des conditions d’accueil et de la prise en charge des usagers.

Afin de tenir compte de la refondation du service public hospitalier, le texte prévoit que ces conférences et commissions médicales seront consultées sur toute demande tendant à être habilité à assurer le service public hospitalier. Pour mémoire, cette consultation concerne aujourd’hui tout contrat ou avenant prévoyant l’exercice d’une ou plusieurs missions de service public.

Le deuxième alinéa du I dispose que les conditions de consultation feront l’objet d’un décret.

Le dernier alinéa du I reprend, en l’adaptant, le dernier alinéa de l’article L. 6161-2 dans sa rédaction actuelle. Le dispositif prévoit de joindre l’avis des instances à toute demande d’autorisation ou d’agrément, en cas de consultations.

Le II reprend le dispositif des quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 6161-2.

Son premier alinéa dispose que l’établissement de santé met à la disposition du public les résultats des indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la santé.

Son deuxième alinéa prévoit notamment une modulation des dotations de financement mentionnées à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale (dotation nationale de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation) en cas de non-respect du premier alinéa du II constaté par le directeur général de l’agence régionale de santé. Cette disposition fait aujourd’hui l’objet de mesures d’application réglementaires reproduites ci-après.

« Article D. 6111-23. Le non-respect des dispositions prévues au troisième alinéa de l’article L. 6144-1 et au quatrième alinéa de l’article L. 6161-2 peut être constaté par le directeur général de l’agence régionale de santé, notamment dans les cas où l’établissement de santé s’abstient de mettre à la disposition du public les résultats de ses indicateurs de qualité et de sécurité des soins ou lorsque cette mise à disposition est incomplète ou insuffisante.

« Dans les cas prévus à l’alinéa précédent, le directeur général de l’agence régionale de santé adresse au directeur de l’établissement de santé une mise en demeure de mettre ses indicateurs à la disposition du public dans un délai de trois mois.

« Lorsque le directeur de l’établissement ne peut déférer à cette mise en demeure, il présente au directeur général de l’agence régionale de santé, avant l’expiration du délai qu’il prescrit, ses observations et les mesures qu’il s’engage à mettre en œuvre pour remédier aux manquements constatés.

« Le directeur général de l’agence régionale de santé décide, au vu de ces observations et engagements, des mesures appropriées.

« En cas d’insuffisance ou de non-respect des engagements pris, le directeur général de l’agence régionale de santé peut prononcer, par décision motivée et publiée, une diminution de la dotation mentionnée à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, dans la limite de 0,1 % des recettes totales d’assurance maladie de l’année de la mise en demeure.

« Lorsque l’établissement ne bénéficie pas de la dotation mentionnée à l’alinéa précédent, la diminution porte, dans la même limite, selon le cas, sur le produit des tarifs des prestations d’hospitalisation mentionnés à l’article L. 162-22-4 du code de la sécurité sociale ou sur la dotation mentionnée à l’article L. 174-1 du même code.

« Le directeur général de l’agence régionale de santé en informe sans délai les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »

*

Lors de l’examen du texte en commission, onze amendements rédactionnels ou de coordination ont été adoptés à l’initiative de la rapporteure.

*

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS46 et AS47, l’amendement de coordination AS1198, les amendements rédactionnels AS48 et AS49, l’amendement de coordination AS106 et les amendements rédactionnels AS50, AS51, AS385, AS54 et AS55 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 49 modifié.

*

Après l’article 49

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS586 de M. Fernand Siré.

L’amendement AS1170 de Mme Maud Olivier est retiré.

TITRE V
MESURES DE SIMPLIFICATION

Article 50
Habilitation à prendre par ordonnance des mesures
de modernisation des groupements de coopération sanitaire

Cet article habilite le Gouvernement, dans un délai de 12 mois suivant la promulgation de la loi relative à la santé, à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi visant à faciliter la constitution et le fonctionnement des groupements de coopération sanitaire (GCS). Un projet de loi de ratification de l’ordonnance devra être déposé au Parlement dans les trois mois suivant sa publication (II).

I. LA LOI HPST A DISTINGUÉ DEUX CATÉGORIES DE GROUPEMENTS DE COOPÉRATION SANITAIRE.

Créé par l’ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée (213), le groupement de coopération sanitaire est une forme de coopération hospitalière entre les secteurs public et privé. Son régime juridique a été modifié en dernier lieu par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (dite HPST) (214), qui a distingué deux formes de coopération : le GCS de moyens et le GCS érigé en établissement de santé. Sur les 626 GCS recensés, seuls 22 sont des établissements de santé.

A.  LE GCS DE MOYENS

Le GCS de moyens constitue un instrument de coopération inter-hospitalière qui favorise la mutualisation et la mise en commun des ressources et moyens qui permettent l’exercice d’une activité de soins, sans pour autant que les membres du groupement se dessaisissent des autorisations sanitaires dont ils sont titulaires.

Selon l’article L. 6133-1 du code de la santé publique, le GCS de moyens poursuit un but non lucratif et a pour objet :

– d’organiser ou gérer des activités administratives, logistiques, techniques, médico-techniques, d’enseignement ou de recherche ;

– de réaliser ou gérer des équipements d’intérêt commun, et peut à cette fin être titulaire d’une autorisation d’installation d’équipements matériels lourds ;

– de permettre les interventions communes de professionnels médicaux et non médicaux exerçant dans les établissements ou centres de santé membres du groupement, ainsi que des professionnels libéraux membres du groupement.

L’article L. 6133-2 du code de la santé publique dresse la liste des personnes qui peuvent participer à un groupement, sachant qu’il doit comprendre au moins un établissement de santé : les établissements de santé publics ou privés, les établissements médico-sociaux, les centres de santé et les pôles de santé, les médicaux libéraux exerçant à titre individuel ou en société. D’autres professionnels de santé ou organismes peuvent participer à ce groupement sur autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS).

La création du GCS de moyens, qui peut être constitué avec ou sans capital, intervient après que le directeur général de l’ARS a approuvé la convention constitutive établie par les membres du groupement.

Le GCS de moyens est une personne morale de droit public s’il est composé exclusivement d’établissements publics de santé. Inversement, il est doté de la personnalité morale de droit privé s’il comporte uniquement des établissements de santé privés. Si sa composition est mixte, sa nature juridique est fixée librement par les membres dans la convention constitutive (215). Du statut juridique du GCS découle le régime applicable au groupement en ce qui concerne la comptabilité, les personnels recrutés, les biens et le financement.

Une assemblée générale des membres du groupement constitue l’organe délibérant du GCS de moyens. Ses décisions sont mises en œuvre par un administrateur élu en son sein et qui représente le groupement dans tous les actes de la vie civile et en justice.

B.  LE GCS ÉRIGÉ EN ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ

La loi HPST précitée a créé le GCS érigé en établissement de santé. Ce statut s’adresse aux groupements les plus aboutis et intégrés, que la loi autorise à coopérer de manière plus étroite autour du soin.

L’article L. 6133-7 du code de la santé publique dispose que « lorsqu’il est titulaire d’une ou plusieurs autorisations d’activités de soins, le groupement de coopération sanitaire est un établissement de santé avec les droits et obligations afférents ». Un GCS de moyens est ainsi érigé en établissement de santé par décision du directeur général de l’ARS dès lors qu’il se voit délivrer en propre au moins une autorisation d’activité de soins.

Les activités de soins et l’exploitation des équipements lourds du GCS sont autorisées dans les mêmes conditions que celles applicables aux établissements de santé. Elles doivent donc faire l’objet d’une autorisation par l’ARS, qui est accordée lorsque le projet :

– répond aux besoins de santé de la population identifiés par le schéma d’organisation sanitaire ;

– satisfait à des conditions d’implantation et à des conditions techniques de fonctionnement.

Un GCS peut être érigé en établissement de santé dès sa création. Les modalités de détermination de son statut juridique, public ou privé, sont similaires à celles s’appliquant à un GCS de moyens.

Enfin, l’article L. 6133-8 du code de la santé publique prévoit que, sous réserve de la décision du directeur général de l’ARS, le GCS-établissement de santé peut choisir l’échelle tarifaire qui lui est applicable dès lors qu’il est composé, d’une part, d’établissements publics de santé ou d’établissements privés à but non lucratif et, d’autre part, d’établissements privés à but lucratif.

II. L’HABILITATION PROPOSÉE A POUR OBJECTIF GÉNÉRAL DE REMÉDIER À DES RIGIDITÉS ET LOURDEURS QUI AFFECTENT LE BON FONCTIONNEMENT DES GCS

A.  ADAPTER L’ORGANISATION DES GCS ET CLARIFIER LES RÈGLES DE DÉTENTION D’AUTORISATIONS

● Ledu I habilite tout d’abord le Gouvernement à adapter les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des GCS. L’exposé des motifs indique qu’il s’agit de mieux les articuler avec les groupements de coopération sociaux et médico-sociaux (GCSMS).

Les dispositions de l’article L. 312-7 du code de l’action sociale et des familles, qui permettent la création des GCSMS, sont calquées sur celles relatives aux GCS. Un GCSMS est un outil de coopération doté, selon le cas, de la personnalité morale de droit public ou de droit privé ; ses membres peuvent être des personnes morales ou physiques, de droit public ou de droit privé ; ses missions sont larges, puisqu’il a notamment pour objet de permettre des interventions communes des professionnels des secteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires, d’exercer une mission ou une prestation exercée par l’un de ses membres et de détenir, à ce titre, les autorisations afférentes.

L’exposé des motifs relève que « chacun de ces deux outils permettent [sic] l’association d’entités de l’autre secteur », ce qui « peut conduire à un certain nombre de dysfonctionnements » et appelle « au rapprochement de ces deux régimes » par ordonnance. L’étude d’impact est moins spécifique, indiquant que les adaptations se feront « notamment en modifiant les entités habilitées à être membres d’un groupement et en organisant de manière plus cohérente le régime des groupements de coopération sanitaire ». Ces deux sources justifient différemment une habilitation elle-même assez large.

En réponse au questionnaire adressé par le rapporteur, le Gouvernement a indiqué que « la juxtaposition des dispositifs GCS et GCSMS peut conduire à la multiplication des outils de coopération entre acteurs sanitaires et médico-sociaux [et à] une disparité forte de régime pour des coopérations inter-secteur comparables, selon les territoires (le régime d’approbation étant par exemple différent entre le GCS et le GCSMS […]) ».

Le rapprochement des GCSMS et des GCS a été engagé par le Gouvernement dans le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, qui prévoit en son article 44 (216) que les GCSMS peuvent choisir leur statut (droit public ou droit privé), sous réserve de tempéraments similaires à ceux prévus pour les GCS (caractère par principe public du groupement composé de personnes publiques, et inversement). Selon le Gouvernement, « une concertation plus ciblée avec les représentants du secteur médico-social (et non du secteur social) a vocation à définir les autres adaptations souhaitables ».

● Le même 1° habilite par ailleurs le Gouvernement à clarifier les modalités de détention et d’exploitation d’autorisations (217) par un GCS. Il s’agit, selon l’exposé des motifs, d’harmoniser les modalités de prise en charge des patients et de permettre à nouveau aux GCS de moyens d’exploiter l’autorisation de leurs membres. En l’état du droit, seuls les GCS-établissements de santé sont autorisés à facturer directement à l’assurance-maladie, car ils sont titulaires d’une autorisation de soins. Avant l’entrée en vigueur de la loi HPST, les GCS de moyens pouvaient être titulaires de l’autorisation de soins de l’un de leurs membres ou exploiter cette autorisation, sans en être titulaires ; sous cette condition, les GCS pouvaient facturer directement à l’assurance-maladie… mais selon des critères fixés par un décret qui n’a jamais été publié. Les GCS de moyens créés depuis la loi HPST ne sont plus autorisés à exploiter l’autorisation de l’un de leurs membres, et donc par construction à facturer à l’assurance-maladie.

La lecture de ce qui précède devrait suffire à convaincre de la nécessité de remettre de l’ordre dans cette situation confuse, ce que le Gouvernement prévoit de faire :

– en redonnant la possibilité aux GCS de moyens d’exploiter les autorisations de leurs membres ;

– en leur permettant, sous cette réserve et sur autorisation du directeur général de l’Agence régionale de santé, de facturer directement à l’assurance-maladie ;

– en ramenant dans le droit commun issu de la loi HPST les GCS de moyens préexistants titulaires d’une autorisation de soins, qui devraient donc soit y renoncer (et rester GCS de moyens) soit devenir GCS-établissements de santé.

B.  AMÉLIORER LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

Le du I entend permettre au Gouvernement de répondre, par des mesures appropriées, aux « difficultés dans la gestion des ressources humaines tant concernant la mise à disposition de personnels que les carences dans les instances de représentation de ceux-ci » (étude d’impact).

● Le texte de l’article habilite tout d’abord le Gouvernement à « définir le régime des mises à disposition des agents des établissements publics de santé membres d’un groupement de coopération sanitaire ».

L’article 48 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière prévoit que la mise à disposition d’un fonctionnaire ne peut avoir lieu qu’avec son accord.

Par dérogation, la mise à disposition est de plein droit en cas de transfert ou de regroupement d’activités, auprès de l’établissement assurant la poursuite des activités. Cette dérogation n’est semble-t-il pas applicable aux fonctionnaires attachés à un établissement dont les activités sont exercées par un GCS, qui peuvent donc refuser d’être mis à disposition du groupement. Par l’extension à ces fonctionnaires du droit commun de la mise à disposition, le refus ne serait plus possible.

Le Gouvernement a indiqué au rapporteur que « bien que cette mesure paraisse contraignante pour les fonctionnaires concernés par les mises à disposition, elle constitue une garantie pour eux dans la mesure où, lorsque prend fin la mise à disposition, ils sont de plein droit réintégrés dans leur établissement d’origine ».

● Le 2° du I permet également au Gouvernement d’étendre aux GCS de droit public l’application de l’article L. 4111-1 du code du travail et de l’article L. 6144-3 du code de la santé publique, « s’agissant des instances représentatives du personnel ».

L’article L. 4111-1 du code du travail prévoit l’application de la quatrième partie de ce code, relative à la santé et à la sécurité au travail, aux employeurs de droit privé et aux travailleurs, ainsi qu’à certains organismes publics : établissements publics industriels et commerciaux, établissements publics administratifs employant du personnel dans les conditions du droit privé, établissements de santé, sociaux et médico-sociaux relevant du droit public.

L’article L. 6144-3 du code de la santé publique dispose que « dans chaque établissement public de santé, il est créé un comité technique d’établissement doté de compétences consultatives […] ».

Actuellement, ces dispositions relatives aux conditions de représentation du personnel ne s’appliquent pas dans les GCS de droit public, « au prétexte que chaque salarié reste rattaché à son établissement d’origine » (exposé des motifs). La même source relève que « cet argument se heurte à la réalité de fonctionnement de nombreux GCS qui exploitent pour le compte de leurs adhérents des équipements importants, installés dans des sites propres et dont le fonctionnement quotidien justifie un dialogue social interne structuré ».

Interrogé par le rapporteur sur les raisons pour lesquelles ces dispositions ne figurent pas « en dur » dans le projet de loi, le Gouvernement a indiqué que son objectif est de « laisser le temps de mener les concertations avec les acteurs ».

C.  ADAPTER LE RÉGIME FISCAL DES GCS ET FACILITER L’EXPLOITATION DE CERTAINES ACTIVITÉS

Le du I rassemble, curieusement, deux champs d’habilitation qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre.

● Il s’agit tout d’abord de permettre au Gouvernement d’adapter le régime fiscal des GCS. Aucune précision n’est apportée sur le régime fiscal actuel, l’étude d’impact évoquant de manière non éclairante « des enjeux fiscaux autour des GCS qui créent une instabilité juridique préjudiciable pour ces organismes ». La légèreté de ces justifications contraste avec l’affirmation selon laquelle les questions fiscales sont « centrales dans les impacts attendus du dispositif ».

● Il s’agit ensuite de faciliter l’exploitation par les GCS d’une pharmacie à usage intérieur et d’activités biologiques d’assistance médicale à la procréation.

En l’occurrence, l’exposé des motifs fournit une explication très précise de la situation, et de la nécessité de légiférer. Les GCS peuvent gérer une pharmacie à usage intérieur (PUI) pour le compte de leurs membres. Mais, à la différence des établissements de santé autorisés à gérer une PUI, les GCS de moyens ne peuvent pas bénéficier du régime dit de la rétrocession, qui permet, sous conditions, la vente de médicaments au public. Afin de favoriser la gestion des PUI par les GCS, le Gouvernement souhaite leur ouvrir le bénéfice du régime de la rétrocession, et « en tirer l’ensemble des conséquences juridiques ».

La problématique des activités biologiques est assez proche. Si les GCS peuvent exploiter un laboratoire de biologie médicale, la réalisation des activités biologiques d’assistance médicale à la procréation est conditionnée à la détention d’une autorisation d’activité de soins. Or, seuls les GCS érigés en établissements de santé peuvent obtenir cette autorisation, alors qu’elle est accordée à des laboratoires de biologie médicale dont il n’est pas exigé qu’ils soient établissements de santé. Le Gouvernement souhaite donc permettre à un GCS de moyens de réaliser ces activités biologiques, sans le préalable de sa transformation en GCS-établissement de santé.

D.  DES MESURES PRÉSENTÉES COMME DE TOILETTAGE

● Le texte dudu I prévoit deux mesures :

– la suppression des fédérations médicales inter-hospitalières (218) , forme devenue semble-t-il inutile de coopération conventionnelle, permettant aux centres hospitaliers publics de rapprocher leurs activités médicales et de regrouper certains pôles d’activité et certaines structures internes ;

– la modification des dispositions relatives aux GCS de l’article 121 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit. Cet article prévoit que le chapitre II de cette loi, qui comporte une série de mesures relatives aux groupements d’intérêt public (GIP), ne s’applique pas, entre autres, aux GCS ; cela laisse croire que le statut de GIP est applicable aux GCS, ce qui est jugé inopportun par le Gouvernement.

● Mais la lecture de l’exposé des motifs montre que de nombreuses autres mesures, non couvertes en l’état de la rédaction par le 4° du I, sont envisagées sous la bannière générale du « toilettage des incohérences résiduelles du droit des GCS ». On peut notamment relever, dans la catégorie des mesures qui excèdent très manifestement le domaine de l’hygiène législative :

– l’éventuelle applicabilité d’un régime fiscal dérogatoire pour les partenaires des GCS, « pour lever toute incertitudes juridiques [sic] pour ces derniers » ;

– l’application obligatoire d’une redevance « dans le cadre des GCS qui organisent l’intervention des professionnels libéraux dans des [établissements publics de santé] afin d’éviter le recours au GCS déjà [sic] à seule fin d’organiser le travail des professionnels libéraux au sein de centres hospitaliers en contournement des règles du contrat d’exercice libéral ».

Interrogé par le rapporteur, le Gouvernement a apporté les compléments suivants, qui laissent croire qu’aucune mesure fiscale ne sera finalement nécessaire : « La formulation de l’article L. 6133-2 du code de la santé publique opère une distinction entre les structures membres du GCS (premier alinéa) et celles participant au GCS sur autorisation du directeur général de l’Agence régionale de santé (deuxième alinéa), qui semblent donc être des structures n’ayant pas la qualité de membre à part entière des GCS et dites « partenaires » (avec droit de vote et contribution aux charges du groupement). Cette souplesse permet de donner un rôle sur-mesure à certains établissements/organismes, avec des avantages possibles en termes de fiscalité (vente de prestation à un régime de TVA préférentiel par exemple). En revanche, elle présente l’inconvénient majeur de rendre imprécis le rôle de ces partenaires au sein du GCS et avec les membres. Les concertations menées avec les acteurs ces derniers mois ont confirmé l’intérêt de supprimer la notion de partenaire d’un GCS. ».

Le projet de loi n’apporte aucune précision sur la création d’une redevance dans le cadre des GCS, dont on ne connaît ni le redevable, ni le fait générateur, ni le montant, ni l’affectataire, et dont la finalité même reste absconse. L’étude d’impact indique néanmoins, sans doute pour susciter un peu plus la curiosité du lecteur sans la satisfaire, qu’il s’agit d’un enjeu central dans les impacts attendus du dispositif.

En réponse aux questions du rapporteur, le Gouvernement a fourni les éléments suivants : « Un certain nombre de projets ou de GCS déjà constitués le sont uniquement en vue d’organiser le travail de libéraux au sein de centres hospitaliers. Cette pratique, qui ne correspond pas à la vocation première des GCS […] vise en fait à contourner les règles du contrat d’exercice libéral définit à l’article L. 6146-2 du code de la santé publique qui organisent la participation des professionnels médicaux libéraux dans les établissements publics de santé et qui prévoient en effet le versement d’une redevance représentant la part des frais des professionnels de santé supportés par l’établissement (frais liés aux moyens matériels et humains). Une telle redevance n’est pas imposée dans le cadre d’un GCS ayant pour objet la participation d’un ou plusieurs professionnels médicaux libéraux dans un établissement public de santé. Il est donc proposé de mettre fin à cette différence de régime, qui induit une utilisation du GCS pour des motifs inappropriés. ».

*

La Commission adopte l’article 50 sans modification.

*

Article 51
Habilitation à prendre par ordonnance des mesures
d’amélioration et de simplification du système de santé

Cet article a pour objet d’habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances une série de dispositions relevant du domaine de la loi, dans l’objectif très large d’améliorer et de simplifier le système de santé.

La très grande variété des mesures envisagées empêche une présentation thématique. Ces mesures seront donc détaillées – autant que le permettent les informations à disposition du rapporteur – selon le schéma retenu par l’article, à savoir en fonction de la durée de l’habilitation demandée : 12 mois (I), 18 mois (II) ou 24 mois (III). Dans tous les cas, il est prévu qu’un projet de loi d’habilitation soit déposé au Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chacune des ordonnances (IV).

I. LES ORDONNANCES À PRENDRE DANS UN DÉLAI D’UN AN SUIVANT LA PROMULGATION DE LA LOI

A.  SIMPLIFIER ET MODERNISER LE RÉGIME DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

Le du I habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance quatre catégories de mesures relevant du domaine de la loi et tendant à « simplifier et moderniser le régime des établissements de santé ».

1.  Facturation et recouvrement des créances des établissements de santé

Le a du du I permet de prendre des mesures destinées à « faciliter la facturation et le recouvrement des créances des établissements de santé à l’encontre des organismes de l’assurance maladie obligatoire, tout en précisant le caractère d’insaisissabilité des biens de ces organismes ».

L’exposé des motifs indique qu’il s’agit « d’instituer un fondement légal indispensable au volet opérationnel de la mise en œuvre des chantiers de simplification et d’allégement du processus de facturation et de recouvrement », sans toutefois préciser quelles sont les règles de facturation et de recouvrement actuellement applicables et en quoi il est nécessaire de les simplifier. On peut comprendre de l’étude d’impact que le processus de simplification consiste en la dématérialisation de la procédure de recouvrement des créances, dans le cadre du programme SIMPHONIE (SIMplification du Parcours administratif Hospitalier et Numérisation des Informations Échangées).

Il est prêté à ce programme une double vertu : « améliorer à la fois la situation financière de l’hôpital public et la gestion des fonds et des comptes de l’assurance maladie ». La comparaison entre ces gains attendus et les coûts générés par la mise en œuvre du programme fait l’objet d’une étude du secrétariat général à la modernisation de l’action publique.

Selon l’exposé des motifs, les biens des organismes de base de l’assurance maladie seraient rendus insaisissables à l’égard des seuls créanciers auxquels ces organismes doivent rembourser les soins, c’est-à-dire aux établissements publics de santé. Cette précision n’est pas apportée dans le texte.

Il a été indiqué au rapporteur, mais trop tard pour que les conséquences puissent en être tirées en Commission, que cette demande d’habilitation est devenue sans objet du fait de l’adoption des articles 38 et 39 de la loi relative à la simplification de la vie des entreprises (219). Le Gouvernement devrait donc déposer en séance publique un amendement de suppression.

2.  Règles de marchés publics spécifiques aux établissements de santé

Le b du a pour objet de clarifier les procédures de passation des marchés publics prévues à l’article L. 6148-7 du code de la santé publique.

Cet article permet aux établissements publics de santé, aux organismes gestionnaires d’un régime obligatoire de sécurité sociale gérant un établissement de santé et aux structures de coopération sanitaires dotées de la personnalité morale de confier à un cocontractant unique à la fois la conception, la construction, l’aménagement, l’entretien et la maintenance de bâtiments ou d’équipements affectés à l’exercice de leurs missions. Il s’agit d’une dérogation sectorielle à la loi dite « MOP » (220; celle-ci prévoit que si le pouvoir adjudicateur peut confier tout ou partie de la mission de conception du projet à un maître d’œuvre, ce dernier ne peut se voir également confier les travaux d’exécution du projet, qui reviennent alors à l’entrepreneur. Plus généralement, l’article 37 du code des marchés publics prévoit cette catégorie particulière des marchés de « conception-réalisation », qui doit obéir à des contraintes procédurales plus lourdes, fixées par l’article 69 du même code.

On comprend de l’exposé des motifs que l’objet du b est de préciser que les marchés conclus en application de l’article L. 6148-7 du code de la santé publique ne sont pas soumis à la procédure spécifique de l’article 69 du code des marchés publics. Cela permettrait de lever une ambiguïté – porteuse de risques contentieux selon l’étude d’impact – sur le point de savoir si de tels marchés peuvent être passés en suivant la procédure de dialogue compétitif prévue par les articles 36 et 67 du code des marchés publics, et qui permet de définir, par des échanges entre les candidats et le pouvoir adjudicateur, la nature précise des besoins de ce dernier.

3.  Fusion entre établissements publics de santé

Le c du permet d’aménager, par ordonnance, la procédure de fusion entre les établissements publics de santé.

L’étude d’impact éclaire peu l’intention du texte, se contentant d’indiquer qu’il s’agit de toiletter le droit en vigueur « afin de faciliter le processus de fusion pour les établissements publics de santé qui recourent à cette formule ».

Mais, là aussi, les vertus attendues sont grandes, puisque « les simplifications proposées devraient permettre la sécurisation des procédures administratives et financières pour limiter les contentieux, de réduire les délais de prise de décision et d’améliorer la qualité des projets ».

En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que « les dispositions envisagées n’apportent pas de modification au fond mais sécurisent et allègent les différentes étapes de la procédure », en précisant par exemple que l’ensemble des droits et obligations fusionnant est transféré au nouvel établissement, point qui a pu être source d’incompréhensions par le passé.

4.  Mise à jour de la liste des établissements dont les personnels sont régis par le droit de la fonction publique hospitalière

Le d du permet la mise à jour de la liste des établissements figurant à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière (FPH).

L’exposé des motifs indique que « cette modification, rendue nécessaire par l’évolution des catégories juridiques d’établissements, est indispensable pour clarifier la situation de nombre d’entre eux au regard du statut applicable à leur personnel ». Il s’agit notamment de supprimer la mention des hospices publics. Selon l’étude d’impact, cette mise à jour « devrait permettre une gestion plus efficace du dialogue social pour les personnels relevant de la FPH ».

Liste des établissements figurant à l’article 2 de la loi sur la FPH

1° Établissements publics de santé ;

2° Hospices publics ;

3° Maisons de retraite publiques, à l’exclusion de celles qui sont rattachées au bureau d’aide sociale de Paris ;

4° Établissements publics ou à caractère public relevant des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance et maisons d’enfants à caractère social ;

5° Établissements publics ou à caractère public pour mineurs ou adultes handicapés ou inadaptés, à l’exception des établissements nationaux et des établissements d’enseignement ou d’éducation surveillée ;

6° Centres d’hébergement et de réadaptation sociale, publics ou à caractère public, mentionnés à l’article L. 345-1 du code de l’action sociale et des familles ;

7° Centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre.

Source : article 2 de la loi n° 86-33.

B.  RÉGIME D’AUTORISATIONS DES PHARMACIES À USAGE INTÉRIEUR

Le du I habilite le Gouvernement à « simplifier et harmoniser le régime des autorisations des pharmacies à usage intérieur […] tout en facilitant la coopération entre celles-ci ». Cette mesure est présentée comme complémentaire de celle prévue à l’article 50, s’agissant des groupements de coopération sanitaire (GCS).

Le régime législatif des pharmacies à usage intérieur (PUI) est prévu par les articles L. 5126-1 à L. 5126-14 du code de la santé publique. Le Gouvernement ne précisant pas sur quels articles portent les modifications envisagées, il est délicat d’apprécier la portée précise de la demande d’habilitation.

La lecture de l’exposé des motifs laisse cependant augurer de mesures assez techniques qu’il ne serait pas choquant de prendre par ordonnance. À ce stade, il est seulement possible de lister ces modifications : « ouvrir les possibilités de sous-traitance pour le compte des PUI sur l’ensemble de leurs missions [,] améliorer la lisibilité du droit des PUI [,] donner la possibilité aux PUI de coopérer entre elles, notamment dans le cadre de GCS de bloc opératoire et de la problématique de la gestion des gaz à usage médical [,] autoriser les PUI à exercer une seule activité [,] faciliter la mutualisation des moyens (exemple des automates) [,] renforcer l’encadrement relatif aux préparations magistrales et hospitalières [,] proposer d’autres missions aux PUI en développant notamment la pharmacie clinique ».

C.  MODERNISATION DE LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES DU SYSTÈME DE SANTÉ

Le du I habilite le Gouvernement à prendre quatre séries de mesures destinées à « simplifier et moderniser les modalités de gestion et d’exercice de certains professionnels ».

1.  Rationaliser la gestion des directeurs d’hôpitaux mis à disposition des inspections générales interministérielles

Le a du du I permet de confier au Centre national de gestion (CNG) la gestion des directeurs d’hôpitaux mis à disposition des inspections générales interministérielles, « tout en assurant dans cette situation le maintien de leurs droits statutaires ».

Initialement dénommé Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, le CNG est un établissement public administratif créé en 2007 pour assurer le recrutement et la gestion statutaire des personnels de direction de la FPH et des praticiens hospitaliers. Les inspections générales interministérielles sont celles de l’administration, des affaires sociales et des finances.

L’étude d’impact laisse croire que le champ d’habilitation est plus large que celui prévu par le texte, indiquant que le Centre national de gestion devra prendre en charge la rémunération (221) des personnels hospitaliers – et non des seuls directeurs – mis à disposition, notamment – et pas exclusivement – des inspections. On apprend à la lecture de la même source que la prise en charge de la rémunération « se faisait jusqu’à présent selon des modalités ad hoc et différentes d’un établissement à l’autre ».

2.  Fusionner les comités consultatifs nationaux des trois corps de direction de la fonction publique hospitalière

Le b du permet de créer un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps mentionnés à l’article 25 de la loi sur la FPH précitée, c’est-à-dire les corps de catégorie A. Cet article prévoit un comité par corps.

On rappellera que les comités consultatifs nationaux sont des instances de dialogue et de concertation, s’exprimant sur la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences du corps concerné, sur la formation professionnelle (initiale et continue), sur les conditions de travail, sur l’égalité professionnelle ainsi que sur les questions générales touchant à la mobilité du personnel (les questions individuelles relevant de la commission administrative paritaire).

L’étude d’impact mentionne uniquement les trois corps de direction (directeurs d’hôpital, directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médicaux sociaux, et directeurs des soins).

En tout état de cause, le recours à une ordonnance n’apparaît pas indispensable, puisque la modification envisagée peut être aisément apportée dans le projet de loi.

3.  Supprimer les conseillers généraux des établissements de santé

Le c du permet d’abroger les dispositions législatives relatives aux conseillers généraux des établissements de santé.

Institués par l’article 2 de l’ordonnance n° 2005-406 du 2 mai 2005 simplifiant le régime juridique des établissements de santé (codifié à l’article L. 6141-7-2 du code de la santé publique), les conseillers généraux des établissements de santé ont essentiellement pour mission d’accompagner les établissements de santé publics, privés ou participant au service public, dans leur processus de modernisation.

Placés sous l’autorité du ministre chargé de la santé et rattachés au CNG pour leur gestion, les conseillers généraux des établissements de santé sont choisis pour leur expérience professionnelle et leur expertise de haut niveau dans le domaine des politiques hospitalières et de l’organisation des soins.

Les missions qu’ils exercent sont, d’une part, des missions ciblées, à la demande d’un établissement ou d’une Agence régionale de santé (ARS), sur des hôpitaux ou des territoires de santé en difficulté, d’autre part, des missions transversales sur des thématiques-clés pour la modernisation du système de santé, afin de proposer des mesures propres à améliorer le fonctionnement des établissements et leurs relations avec les collectivités territoriales, les usagers et l’État.

Leur suppression résulte du fait que les personnes pouvant être nommées conseillers généraux de santé peuvent, en application d’un récent décret (222), accéder à la fonction d’inspecteur général en service extraordinaire auprès des trois inspections générales interministérielles. Depuis 2010, ils étaient rattachés à l’Inspection générale des affaires sociales.

4.  Simplification de l’exercice de la profession de manipulateur d’électroradiologie médicale

Le d du permet de modifier l’article L. 4351-1 du code de la santé publique « pour préciser et simplifier les relations du manipulateur d’électroradiologie médicale avec les différents professionnels de santé ».

Aux termes de cet article, « est considérée comme exerçant la profession de manipulateur d’électroradiologie médicale toute personne qui, non médecin, exécute habituellement, sous la responsabilité et la surveillance d’un médecin en mesure d’en contrôler l’exécution et d’intervenir immédiatement, des actes professionnels d’électroradiologie médicale ».

Le Gouvernement précise son intention dans l’étude d’impact, à savoir supprimer « la condition obsolète de présence physique du médecin » aux côtés du manipulateur d’électroradiologie. On remarque que le champ d’habilitation prévu par le texte est plus large, et que la modification évoquée par l’étude d’impact semble pouvoir être facilement apportée dans le projet de loi, sans passer par une ordonnance.

D.  SIMPLIFICATION DE LA LÉGISLATION EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ SANITAIRE

Le du I permet au Gouvernement de prendre trois catégories de mesures législatives, afin de « simplifier la législation en matière de sécurité sanitaire ».

1.  Abrogation de dispositions obsolètes en matière de vaccination

Les articles L. 3111-6, L. 3111-7 et L. 3111-8 du code de la santé publique permettent au ministre chargé de la santé de rendre obligatoire, par arrêté et sous certaines conditions, la vaccination contre, respectivement, la typhoïde, le typhus exanthématique (véhiculé d’homme à homme par le pou) et la variole en cas de guerre.

La prévalence de ces maladies étant fort heureusement moins que résiduelle en France, ces dispositions législatives sont devenues superflues. Elles le sont d’autant plus que l’article L. 3131-1 du code de la santé publique permet au ministre, « en cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d’urgence, notamment en cas de menace d’épidémie, […] de prescrire dans l’intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population ».

Le a du du I permet d’abroger ces dispositions et d’en tirer les conséquences légistiques.

2.  Mise à jour des dispositions du code de la santé publique relatives aux déchets d’activité de soins à risques

Le b du permet de mettre à jour les dispositions du code de la santé publique relatives aux déchets d’activité de soins à risques.

L’étude d’impact précise qu’il s’agit de remplacer, à l’article L. 1335-1 du code de la santé publique, la référence obsolète à la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux. Il s’agit manifestement d’une erreur matérielle, puisque c’est l’article L. 1335-2 qui fait référence à cette loi, dans une formulation du reste peu heureuse : « Les dispositions relatives à la gestion des déchets, prises dans l’intérêt de la santé publique, sont celles de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux ».

Le caractère obsolète de ce renvoi est incontestable, la quasi-totalité des dispositions de la loi de 1975 ayant été abrogées par l’ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l’environnement. Quinze années de réflexion auront donc suffi pour tirer la conclusion d’un nécessaire toilettage, en conséquence, du code de la santé publique.

3.  Faciliter l’utilisation d’eau non destinée à la consommation humaine

Le c du a pour objet de « permettre l’utilisation d’eau non destinée à la consommation humaine lorsque la qualité de l’eau n’a pas d’effet sur la santé d’un usager ou sur la salubrité d’une denrée alimentaire finale ».

En l’état du droit, l’article L. 1321-1 du code de la santé publique dispose que : « Toute personne qui offre au public de l’eau en vue de l’alimentation humaine, à titre onéreux ou à titre gratuit et sous quelque forme que ce soit, y compris la glace alimentaire, est tenue de s’assurer que cette eau est propre à la consommation. L’utilisation d’eau impropre à la consommation pour la préparation et la conservation de toutes denrées et marchandises destinées à l’alimentation humaine est interdite. ».

L’étude d’impact indique que « pour certains usages, la qualité de l’eau n’a aucune influence sur la sécurité sanitaire des usagers et la salubrité des denrées alimentaires finales » et qu’« il n’est donc pas nécessaire de maintenir des exigences sanitaires fortes pour ces usages ».

En réponse aux questions du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que l’assouplissement envisagé :

– est permis par la réglementation européenne, notamment la directive 98/83/CE du 3 novembre 1998 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (223), « qui n’avait pas été traduite en droit français à l’époque, car ces pratiques (recours à des ressources alternatives au réseau public d’eau potable) étaient jusque-là peu répandues » ;

– concerne deux secteurs, ce qui semble apparaître à la lecture du texte :

Ø le secteur de l’industrie agroalimentaire, dans lequel l’utilisation d’une eau impropre à la consommation pourrait être sans conséquence sur la salubrité des denrées alimentaires finales. Le Gouvernement cite en exemple « certains process industriels tels que l’eau utilisée au contact des produits de la pêche » ;

Ø les usages domestiques – expliquant l’emploi dans le texte du terme « usager » –, comme l’utilisation d’eau de pluie dans les toilettes.

E.  LA SIMPLIFICATION DU TRAITEMENT DES DONNÉES PERSONNELLES DE SANTÉ

Le du I prévoit une habilitation à simplifier la législation en matière de traitement des données personnelles de santé ; il est donc à mettre en relation avec les articles 25 et 47 du projet de loi (cf. commentaires supra). Quatre catégories de mesures sont prévues.

1.  Harmoniser, au sein de la législation, les procédures d’hébergement des données de santé

Le a du du I permet au Gouvernement d’« harmoniser les dispositions de l’article L. 1111-8 du code de la santé publique relatives aux procédures d’agrément des hébergeurs de données de santé et celles de l’article L. 212-4 du code du patrimoine ».

L’article L. 1111-8 du code de la santé publique permet aux professionnels de santé, aux établissements de santé ou aux personnes concernées de déposer des données de santé auprès d’un hébergeur agréé, dans des conditions fixées par voie contractuelle. Astreint au secret professionnel, l’hébergeur est également soumis aux prescriptions de la loi dite « Informatique et libertés » (224), et doit restituer les données à la fin de la période d’hébergement, sans en conserver de copie.

Les données de santé détenues par des établissements publics de santé, parce qu’elles sont au regard de la loi des archives publiques, sont également soumises aux dispositions de l’article L. 212-4 du code du patrimoine. Celui-ci prévoit notamment que les personnes astreintes à la conservation d’archives publiques peuvent la confier, sur la base d’un contrat, à des personnes agréées à cette fin.

Bien que le code du patrimoine précise que la conservation des données de santé s’organise dans le cadre prévu par le code de la santé publique, les hébergeurs de données de santé d’un établissement public de santé sont de fait soumis à un double agrément : celui de l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP-Santé) (225) au titre du code de la santé publique, et celui de la direction des archives de France au titre du code du patrimoine. Cette double contrainte ne s’applique en revanche pas aux établissements de santé privés ou aux professionnels libéraux.

La demande d’habilitation a donc pour objectif d’harmoniser les exigences (226) et de faire en sorte que l’agrément pour l’hébergement des données de santé emporte agrément pour l’hébergement des archives publiques.

2.  Permettre au médecin employé par l’hébergeur d’accéder aux données de santé à caractère personnel

En application d’un décret de 2006 (227), l’hébergeur doit identifier un médecin, auquel il est lié par contrat, chargé de veiller à la confidentialité des données à caractère personnel et au respect des conditions d’accès à ces données.

L’exposé des motifs indique clairement que le b du « vise à créer la possibilité pour le médecin employé par l’hébergeur d’accéder aux données de santé à caractère personnel » et précise qu’« une mesure législative est nécessaire pour fonder l’accès à des données de santé à caractère personnel en dehors de la relation de soins ». Interrogé par le rapporteur, le Gouvernement a indiqué que cet accès peut être nécessaire « par exemple pour répondre à la demande d’un patient d’accéder à ses données ».

3.  Remplacer la procédure d’agrément des hébergeurs par une procédure de certification

Le c du vise à remplacer l’agrément des hébergeurs de données de santé (qui serait harmonisé avec celui des archives en application du a) par une accréditation par le Comité français d’accréditation (COFRAC). D’après les informations fournies par le Gouvernement au rapporteur, il s’agira d’une procédure de certification dans le cadre de laquelle la puissance publique définit le référentiel d’exigences à satisfaire mais laisse à des organismes certificateurs accrédités par le COFRAC le soin d’en vérifier le respect.

Cette modification repose sur un constat de lourdeur administrative clairement posé par l’exposé des motifs, qu’il n’est pas utile de paraphraser : « Le dispositif d’agrément des hébergeurs repose actuellement sur un double examen des demandes d’agrément par la CNIL (228) et par une instance ad hoc, le "comité d’agrément des hébergeurs de données de santé", dont le secrétariat est assuré par l’ASIP-Santé. La spécificité nationale et la lourdeur de ce dispositif constituent un obstacle à sa transposition au niveau européen ou international. Il est donc proposé d’évoluer vers une démarche de certification en transférant la compétence d’agrément des hébergeurs à des opérateurs économiques certifiés par le COFRAC, instance nationale d’accréditation. ». Il devrait donc résulter de la réforme envisagée une réduction des coûts pour le groupement d’intérêt public ASIP-Santé.

4.  Fournir un cadre légal à la nécessaire évolution vers la suppression des dossiers papier

Le d dupermet au Gouvernement d’« encadrer les conditions de destruction des dossiers médicaux conservés sous une autre forme que numérique quand ils ont fait l’objet d’une numérisation ».

Cité par l’étude d’impact, l’audit réalisé par l’Agence nationale d’appui à la performance (ANAP) en 2014 montre que la très grande majorité des établissements sanitaires a engagé l’informatisation du « dossier patient » et qu’environ 60 % l’ont achevée. Mais, faute d’y être autorisés par la loi, ils ne peuvent détruire les documents papier numérisés. L’exposé des motifs relève ainsi que le stockage des dossiers papier de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris occupe plus de 300 kilomètres linéaires…

Il importe donc de prévoir un cadre législatif adapté, tenant bien évidemment compte de la nécessité de conservation de l’ensemble des données, eu égard aux enjeux médico-légaux particulièrement sensibles.

F.  MESURES DIVERSES

● Le du I a pour objet de faciliter l’inscription de candidats sur la liste nationale des experts en accidents médicaux, en supprimant une condition actuellement prévue par l’article L. 1142-11 du code de la santé publique, à savoir le fait d’être inscrit sur la liste des experts judiciaires.

● Le du I permet d’adapter, à droit constant, la terminologie et le plan des livres II, III, IV et V de la troisième partie du code de la santé publique, consacrés respectivement à la lutte contre les maladies mentales, à la lutte contre l’alcoolisme, à la lutte contre la toxicomanie, et à la lutte contre le tabagisme et le dopage. Ainsi, la lutte contre le tabagisme deviendra lutte contre le tabac, et la lutte contre l’alcoolisme lutte contre l’alcoolisation.

II. LES ORDONNANCES À PRENDRE DANS UN DÉLAI DE 18 MOIS

A.  L’ADAPTATION DE LA LÉGISLATION SUR LES SUBSTANCES VÉNÉNEUSES AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE

Le du II permet :

– d’adapter au droit de l’Union européenne la législation sur les substances vénéneuses ;

– de clarifier le champ d’application de cette législation aux produits contenant ces substances ;

– et d’adapter en conséquence les dispositions relatives aux conditions de prescription et de délivrance des médicaments.

Le chapitre II du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique est consacré aux substances et préparations vénéneuses. L’article L. 5132-1 définit les substances vénéneuses comme les substances stupéfiantes, psychotropes et inscrites sur les listes I et II définies à l’article L. 5132-6 (certaines substances classées dangereuses pour la santé ; les médicaments susceptibles de présenter directement ou indirectement un danger pour la santé ; les médicaments à usage humain contenant des substances dont l’activité ou les effets indésirables nécessitent une surveillance médicale ; tout autre produit ou substance présentant pour la santé des risques directs ou indirects). On entend par « substances » les éléments chimiques et leurs composés comme ils se présentent à l’état naturel ou tels qu’ils sont produits par l’industrie, et par « préparations » les mélanges ou solutions composés de deux substances ou plus.

L’étude d’impact indique que cette législation est source d’interprétations divergentes et de difficultés d’application :

– au regard du droit de l’Union européenne, notamment en matière de conditions de prescription et de délivrance des médicaments contenant des substances vénéneuses ;

– et s’agissant des produits autres que les médicaments contenant ces mêmes substances.

En réponse aux précisions demandées par le rapporteur, le Gouvernement a notamment indiqué qu’en l’état du droit, la soumission d’un médicament à prescription obligatoire est conditionnée à l’inscription préalable sur la liste des substances vénéneuses. Or, c’est désormais au niveau européen que sont décidées les autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments ; lorsque l’AMM est assortie d’une condition de prescription obligatoire, cela impose donc l’inscription du médicament sur la liste des substances vénéneuses, alors qu’il serait plus simple que l’AMM puisse s’appliquer directement.

L’exposé sommaire indique par ailleurs que « de nombreuses questions sont souvent posées sur des produits dits frontières », en prenant l’exemple d’un médicament et d’un complément alimentaire contenant la même substance. Le Conseil d’État a ainsi jugé que l’inscription de la mélatonine sur la liste II des substances vénéneuses a pour conséquence de soumettre à prescription obligatoire et à délivrance en officine pharmaceutique les compléments alimentaires contenant cette substance. L’ordonnance aura donc vocation à remédier au paradoxe soumettant ainsi des produits de consommation courante au circuit de distribution spécifique des médicaments.

L’exposé des motifs rapporte enfin que du fait de l’imprécision des termes employés par la législation, la Cour de cassation a pu juger que seuls les professionnels de santé peuvent commettre une infraction à la réglementation sur les substances vénéneuses, ce qui a pour effet d’empêcher de poursuivre des particuliers pour des trafics de médicaments (229). En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a toutefois indiqué que ce problème a été réglé par une ordonnance du 19 décembre 2013 (230), antérieure de 10 mois, donc, à la publication de l’exposé des motifs…

B.  ALIGNEMENT DES RÉGIMES DE SANCTION EN MATIÈRE DE TOXICOVIGILANCE

Le du II permet de corriger une incohérence entre le code de la santé publique et celui de l’environnement, s’agissant des sanctions prévues en cas de méconnaissance des règles de toxicovigilance (par exemple en cas de défaut de déclaration des produits et mélanges par les industriels).

La partie réglementaire du code de la santé publique (article R. 1343-1) qualifie les infractions de contraventions ; l’étude d’impact cite par exemple le fait de faire de la publicité sur les produits et mélanges, sans faire état de la mention « Dangereux–Respecter les précautions d’emploi ». En revanche, le code de l’environnement (article L. 521-21) érige en délits des infractions aux obligations imposées aux industriels en matière de substances et mélanges, punies de deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.

L’habilitation a pour objet de rendre délictuelles (et non plus seulement contraventionnelles) les infractions à la législation sur la toxicovigilance prévues dans le code de la santé publique.

III. LES ORDONNANCES À PRENDRE DANS UN DÉLAI DE DEUX ANS

Le III du présent article habilite le Gouvernement à prendre trois catégories d’ordonnances afin de simplifier l’organisation, notamment territoriale, du système de soins.

A.  AMÉLIORER LA LÉGISLATION RELATIVE AUX CONDITIONS D’IMPLANTATION ET DE FONCTIONNEMENT DES ACTIVITÉS DE SOINS ET D’EXPLOITATION DE MATÉRIELS LOURDS

Le du III habilite le Gouvernement à prendre une série de mesures relevant du domaine de la loi, répondant à un objectif général d’allégement des procédures, mais dont la nature très diverse ne fait pas clairement ressortir l’articulation.

Il s’agit d’harmoniser et simplifier :

– les différents régimes d’autorisation des activités de soins et d’équipements matériels lourds ;

– les régimes des visites de conformité ;

– les modalités de contractualisation entre les agences régionales de santé et les structures de coopération, afin d’assurer une plus grande cohérence avec les projets régionaux de santé, définis par l’article 38 du projet de loi.

Les éléments avancés à l’appui de la demande d’habilitation sont très généraux. L’exposé des motifs indique ainsi que « le cadre actuel ne réussit plus que très imparfaitement à remplir ses missions initiales, qui sont d’assurer la régulation de l’offre de soins […] de façon prospective, de garantir la sécurité pérenne des installations et des activités concernées, et d’accorder une place à l’efficience, à la coordination et aux exigences de qualité des projets ».

Les objectifs recherchés par le Gouvernement ne sont pas beaucoup plus clairs que le diagnostic des problèmes actuels, comme devrait suffire à le montrer la reproduction, sur ce point, de l’exposé sommaire : « L’évolution envisagée cherche à aller vers une gradation du système d’autorisation en déclinant des reconnaissances contractuelles des sous-activités ; une extension du champ même des autorisations et des secteurs à autoriser (place de la ville) ; une évolution de la notion de conditions techniques de fonctionnement vers un dispositif fixant des objectifs de qualité, laissant au titulaire de l’autorisation le soin de s’organiser en conséquence, dans le cadre d’une démarche d’amélioration continue de la qualité de la part des différents acteurs ; une évolution du régime des visites de conformité, jugées chronophages, par l’intégration de la [Haute autorité de santé] dans le dispositif ».

Le régime d’autorisation des activités de soins et équipements matériels lourds est défini aux articles L .6122-1 à L. 6125-2 du code de la santé publique. Cette autorisation ne peut être délivrée – par le directeur général de ARS, pour au moins cinq ans – ou renouvelée que si les besoins de la population, définis par le schéma régional d’organisation des soins (SROS) le justifient. En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que « les éléments envisagés de la réforme sont guidés par un souci de la simplification du régime des autorisations tant pour les établissements de santé que pour les agences régionales de santé, tout en élevant le niveau d’exigence en termes d’adéquation territoriale, d’accessibilité, d’efficience et de qualité-sécurité des soins ».

La visite de conformité est aujourd’hui prévue par l’article L. 6122-4 et encadrée par les articles R. 6122-37 et D. 6122-38 du code de la santé publique. Conduite par l’ARS dans les six mois suivant la mise en œuvre d’une autorisation, elle permet la vérification du respect des conditions d’implantations et conditions techniques de fonctionnement ainsi que de l’ensemble des éléments propres à assurer la sécurité des patients. Le Gouvernement a indiqué au rapporteur qu’ « une évolution est aujourd’hui nécessaire et ce constat est partagé par les acteurs du fait notamment de la lourdeur des procédures, chronophages et mobilisantes en compétences mais aussi de l’insuffisante prise en compte dans la conformité induite par les normes actuelles de l’efficience des projets ou des exigences de qualité et de sécurité ».

B.  REDÉFINIR LA COMPOSITION ET LA MISSION DU COMITÉ NATIONAL DE L’ORGANISATION SANITAIRE ET SOCIALE

Le du III permet de redéfinir par ordonnance la composition et la mission du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale (CNOSS).

Les articles L. 6121-7 et L. 6121-8 du code de la santé publique prévoient que le CNOSS comprend : des représentants des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale ; des représentants des institutions et des établissements de santé, des établissements sociaux, publics ou privés, et des établissements assurant une activité de soins à domicile ; des représentants des personnels de ces institutions et établissements ; des représentants des usagers ; des représentants des professions de santé ; des personnalités qualifiées ; un député et un sénateur, désignés par les commissions des Affaires sociales. Sa présidence est assurée par un conseiller d’État ou un conseiller maître à la Cour des comptes.

Mais l’essentiel des dispositions relatives au CNOSS, en particulier la nature précise de ses missions, est de nature réglementaire (section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier de la sixième partie de la partie réglementaire du code de la santé publique).

Les dispositions envisagées consistent notamment à supprimer la présence des parlementaires, qui « ne sont jamais présents dans cette instance à vocation administrative » (réponse au questionnaire).

C.  SIMPLIFIER ET RENFORCER L’ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS

Le du III habilite le Gouvernement à prendre quatre catégories d’ordonnances afin de simplifier et renforcer l’accès aux soins de premier recours.

1.  Maisons de santé et sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires

Le a du du III permet de clarifier et d’adapter les dispositions du code de la santé publique relatives aux conditions de création, de gestion, d’organisation et de fonctionnement des maisons de santé et des sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires (SISA).

Les maisons de santé, régies par l’article L. 6323-3 du code de la santé publique, sont des personnes morales constituées entre des professionnels médicaux, auxiliaires médicaux ou pharmaciens. Ces professionnels « assurent des activités de soins sans hébergement et peuvent participer à des actions de santé publique, de prévention, d’éducation pour la santé et à des actions sociales dans le cadre du projet de santé qu’ils élaborent et dans le respect d’un cahier des charges déterminé par arrêté du ministre chargé de la santé ». Créées en 2007, les maisons de santé ont connu un développement important, doublant entre 2012 et 2013 (174 à 370), et dépassant 600 en 2014.

Régies par le titre IV du livre préliminaire de la première partie du code de la santé publique, les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires (SISA) sont des sociétés civiles pouvant être constituées entre des personnes physiques exerçant une profession médicale, d’auxiliaire médical ou de pharmacien. Elles ont pour objet la mise en commun de moyens pour faciliter l’exercice de l’activité professionnelle de chacun de leurs associés et l’exercice en commun d’activités de coordination thérapeutique, d’éducation thérapeutique ou de coopération entre les professionnels de santé.

Selon l’étude d’impact, l’habilitation a pour objet « de simplifier la gestion des maisons de santé, en uniformisant leur composition avec celle des [SISA], tout en simplifiant le dispositif de création, de gestion, voire la composition de ces SISA ». Il est notamment prévu de modifier le régime de responsabilité des associés des SISA afin d’éviter les obligations de modification de statuts et d’enregistrement au registre du commerce et des sociétés à chaque entrée ou sortie d’associé.

2.  Centres de santé

Le b du permet de clarifier et d’adapter les dispositions du code de la santé publique « relatives aux conditions de création, de gestion, d’organisation et de fonctionnement des centres de santé ».

L’article L. 6323-1 du code de la santé publique définit les centres de santé comme « des structures sanitaires de proximité dispensant principalement des soins de premier recours », qui ont pour caractéristique de pratiquer le tiers-payant. Ils sont créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales, soit par des établissements de santé. Les médecins y exercent en qualité de salariés. Il est prévu que les centres de santé « élaborent un projet de santé incluant des dispositions tendant à favoriser l’accessibilité sociale, la coordination des soins et le développement d’actions de santé publique ».

Dans un rapport de juillet 2013 (231), l’Inspection générale des affaires sociales dénombrait environ 1 200 centres de santé, qui « forment un monde éclaté de par la variété de leurs activités » : un tiers se consacre exclusivement aux soins dentaires, un tiers aux soins infirmiers et un tiers (les centres médicaux) sont polyvalents. La répartition par tiers vaut également pour la nature des gérants : associations, mutuelles et autres (organismes de sécurité sociale, établissements de santé, communes). Les centres médicaux sont plutôt concentrés autour des grandes villes, les centres dentaires et infirmiers – de plus petite taille – sont mieux répartis sur le territoire. Ce rapport a conclu à « la réelle utilité sanitaire et sociale des centres de santé [,qui] assurent une offre de soins précieuse dans des quartiers à faible densité de professionnels libéraux et répondent aux préoccupations financières d’accès aux soins ». Le même rapport souligne la fragilité financière des centres de santé, longtemps masquée par le versement de subventions par les gestionnaires, permettant le bouclage des budgets.

L’étude d’impact apporte quelques précisions sur les objectifs du Gouvernement, qui entend :

– ouvrir aux établissements publics de coopération intercommunale la possibilité de créer et gérer des centres de santé. En effet, ces « acteurs des actions [sic] de proximité » sont en l’état du droit exclus du dispositif ;

– corriger des asymétries rédactionnelles dans les dispositions relatives aux centres de santé, qui n’utilisent pas systématiquement la notion de « projet de santé ». Cette correction permettra d’« éviter la multiplication de termes qui rendent confus les projets portés par ces centres, à l’intérieur comme à l’extérieur ».

3.  Aides destinées à favoriser l’installation ou le maintien des professionnels de santé

Le c du a pour objet de « mettre en cohérence les différentes dispositions législatives relatives aux aides destinées à favoriser l’installation ou le maintien des professionnels de santé et abroger celles devenues sans objet ».

L’étude d’impact précise qu’il s’agit de simplifier ces dispositifs – qui concernent également les étudiants en médecine – « en tirant partie des modifications législatives intervenues depuis 2008 ». En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a précisé que les modifications envisagées sont de pures coordinations légistiques.

4.  Regroupement des officines de pharmacie

Le d du permet d’« adapter les conditions de transfert et de regroupement des officines de pharmacie au sein d’une commune ou de communes avoisinantes ».

L’étude d’impact indique que « des dispositions relatives aux transferts d’officine au sein d’une même commune, à l’intérieur donc des zones au sein desquelles s’appliquent les quotas d’officine par habitant, peuvent être utilement simplifiées afin d’alléger les procédures tant pour le demandeur (pharmacien) que pour l’administration chargée d’instruire la demande (Agences régionales de santé-ARS) ». L’exposé des motifs précise l’intention du Gouvernement, à savoir « l’assouplissement de cette procédure tout en maintenant le contrôle administratif utile pour éviter par exemple le regroupement systématique en centre-ville ».

Dans un rapport remis au ministre de l’Économie en qualité de parlementaire en mission, le rapporteur a pointé les difficultés posées par le cadre juridique actuel. Les développements de son rapport (232) relatifs à cette question sont reproduits dans l’encadré suivant. Il a été indiqué au rapporteur que « les pistes envisagées sont convergentes dans leurs objectifs avec les préconisations du rapport ».

Il s’agit :

– d’ouvrir la possibilité pour les directeurs généraux des ARS d’identifier les territoires fragiles regroupant plusieurs communes avoisinantes ne disposant pas d’officine du fait du seuil démographique légal (2 500 habitants), afin d’y autoriser le transfert ou le regroupement d’officines permettant de desservir au moins 2 500 personnes ;

– de réviser les contraintes pesant sur les transferts et regroupements d’officines, notamment en supprimant le délai de cinq ans existant entre deux autorisations successives (article L. 5125-7 du code de la santé publique) ;

– de simplifier les règles d’autorisation.

Au-delà des règles présentées infra, le maillage territorial des pharmacies d’officine doit répondre aux critères suivants :

– répondre de manière optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d’accueil ;

– ne pas compromettre l’approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d’origine (en cas de transfert) ;

– assurer un accès permanent du public à la pharmacie et permettre à celle-ci d’assurer un service de garde ou d’urgence ;

– assurer une desserte démographique suffisante.

GRAPHIQUE 1 : ÉVOLUTION D’HABITANTS PAR PHARMACIE DEPUIS 2000

Source : Ordre national des pharmaciens.

En 2013, la France comptait, 35 officines pour 100 000 habitants.

1.1.3.2. Les règles d’installation et de mobilité applicables aux pharmacies d’officine sont rigides et ne correspondent plus aux besoins

La création, le transfert et le regroupement de pharmacies sont subordonnés à l’octroi d’une licence, délivrée par le directeur général de l’Agence régionale de santé (ARS), après avis du représentant de l’État dans le département.

Les transferts et les regroupements ne peuvent être accordés que s’ils permettent de répondre de « façon optimale » aux besoins en médicaments de la population résidente des quartiers d’accueil et s’ils n’ont pas pour effet de compromettre l’approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d’origine.

L’autorisation d’implanter une officine de pharmacie dans une commune dépend du nombre d’habitants. L’Agence régionale de santé peut également imposer :

– une distance minimale par rapport à la pharmacie la plus proche ;

– le secteur de la commune où la pharmacie doit être située.

ENCADRÉ 2 : RÈGLES APPLICABLES AUX CRÉATIONS,
TRANSFERT OU REGROUPEMENTS D’OFFICINES

Qu’il s’agisse d’une création, d’un transfert ou du regroupement d’officines celles-ci doivent remplir des conditions liées à la densité de population.

L’ouverture d’une nouvelle pharmacie dépend du nombre d’habitants recensés dans la commune où elle va être située.

L’ouverture d’une pharmacie, par transfert ou création, est possible dans les communes qui comptent plus de 2 500 habitants (ou 3 500 en Guyane, en Moselle et en Alsace).

Ensuite, l’ouverture ou le transfert de nouvelles pharmacies sont autorisés par tranche de 4 500 habitants. Ainsi, une seconde pharmacie peut être implantée dans une commune qui compte plus de 7 000 habitants.

L’implantation d’une pharmacie dans une commune de moins de 2 500 habitants n’est pas autorisée, sauf si la commune a précédemment disposé d’une pharmacie qui desservait plus de 2 500 habitants.

Le transfert d’une pharmacie dans une autre commune est possible seulement si la commune d’origine compte moins de 2 500 habitants, s’il n’y a qu’une seule pharmacie, ou un nombre d’habitants inférieur à 4 500 par pharmacie supplémentaire.

À la demande de leurs titulaires, plusieurs pharmacies peuvent être regroupées en un lieu unique, que ce soit à l’emplacement de l’une d’elles ou un nouveau lieu situé dans la commune de l’une d’elles.

En cas de regroupement dans un nouveau lieu, la nouvelle pharmacie ne peut ouvrir qu’après fermeture des pharmacies regroupées.

Source : Mission.

La création d’une nouvelle pharmacie étant exceptionnelle, l’implantation se fait principalement par transfert d’une pharmacie d’une commune à une autre ou par regroupement de pharmacies existantes. Tout transfert, regroupement ou création de pharmacies est soumis à la délivrance d’une licence par l’ARS.

Sur la période 2009-2013, si le nombre de transferts d’officines a augmenté de presque 13 %, le nombre de regroupement a reculé de 14 %. Le nombre de restitutions de licences a fortement augmenté (+ 98 %). En effet, les conditions juridiques prévues par le code de la santé publique en matière de regroupement [ont] conduit les pharmaciens, selon l’Ordre national des pharmaciens, à préférer les rachats et les cessions d’actifs entre officines. L’évolution du nombre de transferts d’officines s’explique par le fait que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a fait du transfert d’officine le principal moyen d’ouvrir une officine. Cette loi a ouvert, sous conditions, les possibilités de création d’une officine nouvelle. Elle dispose en effet qu’une officine nouvelle peut être créée uniquement si les trois conditions suivantes sont réunies :

– la nouvelle officine serait située dans une commune dépourvue d’officine, dans une zone franche urbaine, dans une zone urbaine sensible ou dans une zone de redynamisation urbaine ;

– les conditions de population autorisant un transfert d’officine sont remplies depuis au moins deux ans ;

– aucune décision autorisant le transfert d’une officine vers ce lieu n’a été prise depuis deux ans.

TABLEAU 12 : ÉVOLUTION DES OFFICINES (2009-2013)

Nature des évolutions

2009

2010

2011

2012

2013

Variation sur la période

Transfert d’officines

236

235

291

241

266

12,7 %

Regroupements d’officines

35

31

18

24

30

– 14,3 %

Restitution de licences

47

84

78

93

97,9 %

Source : Ordre national des pharmaciens.

Selon l’Ordre national des pharmaciens, les 266 transferts d’officines, opérés en 2013, ont été réalisés à l’intérieur de la commune d’implantation. Seuls deux transferts intercommunaux ont été recensés. […]

1.2.2. Les règles de transfert ou de regroupement des pharmacies doivent être rendues plus fluides

En 2013, la France bénéficiait d’une des plus fortes densités officinales d’Europe, grâce à un maillage de qualité.

L’instruction de la direction générale de l’offre de soins (DGOS) du ministère chargé de la santé n° 2014-70 du 7 mars 2014 note que des disparités territoriales existent (233) et que certaines officines souffrent de fragilités économiques. Cette analyse est partagée par la mission sur la base des différents éléments dont elle a pu prendre connaissance.

La mission recommande donc de rationaliser le maillage territorial des officines pour assurer la viabilité des structures et garantir l’égalité d’accès des populations aux médicaments.

PROPOSITION N° 9 : ASSOUPLIR LES RÈGLES DE TRANSFERT ET DE REGROUPEMENT DES OFFICINES

Il s’agit par cette mesure d’alléger les contraintes normatives existantes pour faciliter :

– les transferts intra-communaux dans les communes ne comptant qu’une seule officine ;

– le déplacement depuis une commune excédentaire au regard des critères de répartition, à destination de toute commune incluse dans un zonage défini par l’ARS comme étant déficitaire en matière d’offre pharmaceutique.

Le regroupement d’officines dans les communes autres que celles des officines à l’origine du regroupement pourrait être envisagé. En effet, les regroupements ne peuvent aujourd’hui se réaliser que dans la commune d’implantation d’une des officines regroupées.

Enfin, le rapprochement spatial avec les prescripteurs pourrait être facilité en autorisant les transferts ou regroupements dans les communes sans officine au sein desquelles est implantée une maison de santé pluridisciplinaire ou un centre de santé ; quand bien même les quotas populationnels ne seraient pas atteints, pour des raisons de cohérence territoriale de l’organisation de l’accès aux soins de premier recours.

Actuellement, il n’est pas possible de céder ou de transférer une officine ou de réaliser un transfert après un regroupement.

PROPOSITION N° 10 : AUTORISER LES CESSIONS D’OFFICINE DANS LES CINQ ANS SUIVANT UN TRANSFERT

Cette mesure permettrait la restructuration de l’offre de pharmacies d’officine pour tenir compte des évolutions de contexte, telles que la mobilité médicale ou la fermeture d’établissements de santé.

Par ailleurs, la Cour des comptes dans son rapport de septembre 2014 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale recommande d’« étendre, dans les zones de surdensité, le conventionnement conditionnel à toutes les professions, y compris aux médecins, pour mieux équilibrer la répartition des professionnels sur le territoire », à l’instar de ce qui a été mis en place pour les infirmiers libéraux. Au-delà du bénéfice des populations en termes d’accès aux soins dans les zones sous denses, la mission considère que cette mesure serait par corollaire de nature à améliorer la présence et la situation financière de certaines officines dans ces zones.

En effet, le maillage territorial des pharmacies et leur santé économique est fortement lié par la présence de médecins (234) à proximité.

Source : Professions réglementées : pour une nouvelle jeunesse, octobre 2014, pages 10 à 12 et 22 à 24 :

http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/rapport_professions_reglementees-r-ferrand.pdf

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La Commission des affaires sociales a adopté quatre amendements à cet article 51.

● À l’initiative du rapporteur, elle a supprimé les b et d du 3° du I, afin d’inscrire les dispositions « en dur » dans le projet de loi (cf. infra les commentaires des articles 51 ter et 51 quinquies).

● À l’initiative du Gouvernement, et avec l’avis favorable du rapporteur, elle a tout d’abord complété l’habilitation demandé au 6° du I, afin :

– de prévoir une possibilité d’inscription probatoire sur la liste des experts en accidents médicaux, l’objectif étant notamment de faire face au volume important de dossiers à traiter par le commissions régionales de conciliation et d’indemnisation (CRCI) et l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;

– de permettre aux autorités sanitaires d’accéder, sous conditions, aux dossiers d’expertise médicale traités par les CRCI et l’ONIAM, « afin de faciliter les études des risques liés aux soins ».

Toujours à l’initiative du Gouvernement et avec l’avis favorable du rapporteur, la Commission a élargi le champ de l’habilitation prévue au d du 3° du III. Le texte d’origine habilitait le Gouvernement à adapter les conditions de transfert et de regroupement des officines de pharmacie au sein d’une commune ou de communes avoisinantes. L’amendement du Gouvernement prévoit d’étendre le champ de cette habilitation aux conditions de création et de cession des officines. La problématique des regroupements communaux et intercommunaux, bien que centrale, ne serait plus la seule dans le champ de l’ordonnance.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1643 de M. Richard Ferrand, rapporteur pour le titre V.

M. Richard Ferrand, rapporteur pour le titre V. Un amendement après l’article 51 propose d’inscrire « en dur » dans le projet de loi l’habilitation prévue à l’alinéa 10 de l’article 51, alinéa qu’il convient donc de supprimer.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement AS1645 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Un amendement après l’article 51 propose d’inscrire « en dur » dans le projet de loi l’habilitation prévue à l’alinéa 12 de l’article 51. Il convient donc de supprimer cet alinéa.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS1520 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit de prévoir une inscription probatoire sur la liste des experts.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1524 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement permettra au Gouvernement de prendre, par voie d’ordonnance, des mesures de simplification sur les conditions de transferts et regroupements des officines de pharmacie, afin de favoriser le maillage territorial.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 51 modifié.

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Article 51 bis
(article L. 1435-5 du code de la santé publique)

Association des centres de santé à l’élaboration des modalités de la permanence des soins

Cet article, adopté par la Commission à l’initiative du rapporteur et avec l’avis favorable du Gouvernement, associe les centres de santé à l’élaboration des modalités de la mission de permanence des soins.

Aux termes de l’article L. 1435-5 du code de la santé publique, il appartient aux agences régionales de santé (ARS) d’organiser la mission de service public de permanence des soins, qui vise à répondre aux demandes de soins la nuit, les week-ends et les jours fériés. Les modalités de cette mission sont élaborées en association avec les représentants des professionnels de santé, dont l’ordre des médecins. Le présent article vise à préciser que les centres de santé font partie des professionnels de santé concernés, ce qui permet que leur représentation soit assurée au sein des comités départementaux de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires (CODAMUPS).

*

La Commission est saisie de l’amendement AS1680 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Les centres de santé sont des acteurs à part entière de la permanence des soins. Leur inscription dans la loi est indispensable pour les intégrer dans les comités départementaux de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires (CODAMUPS).

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 51 ter
(art. L. 4351-1 du code de la santé publique)

Suppression de la condition de présence physique d’un médecin aux côtés du manipulateur d’électroradiologie

Cet article, introduit à l’initiative du rapporteur, inscrit « en dur » dans le projet de loi les dispositions que le d du 3° du I de l’article 51 habilitait le Gouvernement à prendre par ordonnance.

Il s’agit de supprimer, à l’article L. 4351-1 du code de la santé publique, l’obligation de présence physique d’un médecin aux côtés du manipulateur d’électroradiologie. Comme le relève l’étude d’impact, cette condition est en effet devenue obsolète.

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La Commission examine l’amendement AS1644 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Il s’agit, comme l’indique l’étude d’impact, de supprimer « la condition obsolète de présence physique du médecin » aux côtés du manipulateur d’électroradiologie.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Après l’article 51 ter

La Commission aborde l’amendement AS1648 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Je retire cet amendement, qui, après réécriture, sera examiné en séance publique.

L’amendement est retiré.

Article 51 quater
(article L. 6323-1 du code de la santé publique)

Dispositions relatives aux missions des centres de santé et aux conditions d’accès aux soins en leur sein

Cet article apporte plusieurs modifications à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, relatif aux missions et à l’organisation des centres de santé. Ces modifications résultent de l’adoption par la Commission de trois amendements du rapporteur, ayant chacun recueilli un avis favorable du Gouvernement ; elles ont été rassemblées pour des raisons légistiques en un article unique.

Le modifie le premier alinéa de l’article L. 6323-1, portant sur la définition des centres de santé et sur leurs missions.

Le a du précise que les soins dispensés par les centres de santé peuvent l’être au sein du centre, sous forme ambulatoire, ou bien au domicile du patient ; il s’agit de mentionner dans la loi la possibilité de soins à domicile, qui sont aujourd’hui pratiqués. Il précise également que les centres de santé pratiquent les tarifs opposables, c’est-à-dire les tarifs conventionnels sans autorisation de dépassement. Si l’obligation de pratiquer le tiers-payant est d’ores et déjà mentionnée par l’article L. 6323-1, tel n’est pas le cas s’agissant des tarifs opposables : cette obligation ne figurait que dans le chapitre II du titre Ier de l’accord national destiné à organiser les rapports entre les centres de santé et les caisses nationales d’assurance maladie, conclu en novembre 2002 et reconduit en juillet 2008. L’application des tarifs opposables s’inscrit dans la vocation sociale des centres de santé, tout comme la dispense d’avance de frais et, plus largement, la mission d’accompagnement social qui leur est dévolue.

Le b du précise que des actions d’éducation thérapeutique des patients peuvent être menées par les centres de santé, alors que le droit en vigueur prévoit que ces actions doivent être assurées par ces centres.

Le précise que parmi les établissements de santé, seuls les établissements à but non lucratif, qu’ils soient publics ou privés, sont autorisés à gérer des centres de santé. Aux termes du quatrième alinéa de l’article L. 6323-1, les centres de santé peuvent être créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales, soit par des établissements de santé – la faculté pour ces établissements de gérer des centres de santé ayant été ouverte par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (235). Selon les données présentées par le rapport précité de juillet 2013 de l’Inspection générale des affaires sociales (236), 9 % des centres de santé sont gérés par des établissements de santé, tandis qu’environ un tiers le sont par des associations, un tiers par des mutuelles et 7 % par des collectivités territoriales.

Enfin, le introduit un alinéa mentionnant les obligations des centres de santé en matière d’information du public, s’agissant :

– de l’identification des lieux de soins, des activités de santé publique et des activités sociales qu’ils assurent ;

– du statut de leur gestionnaire ;

– des modalités d’accès aux soins.

Ces dispositions visent à faire davantage connaître les centres de santé et leurs missions, et à éclairer le public sur les conditions sociales d’accès aux soins.

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La Commission en vient à l’amendement AS1678 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les missions des centres de santé, en introduisant l’obligation de pratiquer, outre le tiers payant, les tarifs conventionnels sans dépassement. Cette dernière disposition ne figurait jusqu’à présent que dans l’accord national des centres de santé.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1682 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Il s’agit de restreindre aux établissements de santé non commerciaux la possibilité de gérer des centres de santé et, ainsi, de proclamer le principe de non-lucrativité de ces derniers.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle étudie ensuite l’amendement AS1683 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Il s’agit de préciser les obligations des centres de santé en matière d’information des usagers sur les activités de soins, ou hors soins, ainsi que sur les modalités d’accès aux soins. L’objectif est d’éclairer le libre choix de l’usager et de l’informer sur les conditions sociales d’accès aux soins.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 51 quater

La Commission est saisie de l’amendement AS1681 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Je retire cet amendement, afin qu’il puisse être amélioré et adopté en séance, conformément à l’engagement du Gouvernement.

L’amendement est retiré.

La Commission passe ensuite à l’amendement AS1687 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Je le retire, pour la même raison.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission est saisie de l’amendement AS1688 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Idem.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS1679 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. La rédaction actuelle de l’article L. 162-32-2 du code de la sécurité sociale rend nécessaire l’adhésion individuelle et formalisée des centres de santé à l’accord national, ainsi qu’à ses avenants. Le présent amendement vise à aligner les centres de santé sur les dispositions applicables aux professionnels libéraux, contenues dans les huitième, neuvième et dixième alinéas de l’article L. 162-15 du code de la sécurité sociale.

Mme la ministre. Je suggère le retrait, car cette disposition est satisfaite.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Je le retire, sous réserve que soit démontrée en séance publique la stricte égalité d’obligation entre les centres de santé et les professionnels libéraux.

Mme la ministre. D’accord.

L’amendement est retiré.

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Article 51 quinquies
(art. 25 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)

Création d’un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps de catégorie A de la fonction publique hospitalière

Cet article, introduit à l’initiative du rapporteur, inscrit « en dur » dans le projet de loi les dispositions que le b du 3° du I de l’article 51 habilitait le Gouvernement à prendre par ordonnance.

Il s’agit de créer un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps mentionnés à l’article 25 de la loi sur la fonction publique hospitalière (237), c’est-à-dire les corps de catégorie A. En l’état du droit, il existe un comité par corps, ce qui est facteur de lourdeur administrative.

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La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS1642 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Cet amendement a pour objet d’inscrire « en dur » dans le projet de loi la disposition du b du 3° du I de l’article 51, prévue sous forme d’habilitation.

Il s’agit de créer un seul comité consultatif national pour l’ensemble des corps mentionnés à l’article 25 de la loi sur la fonction publique hospitalière, c’est-à-dire les corps de catégorie A. En l’état du droit, il existe un comité par corps, ce qui est facteur de lourdeur administrative.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 51 sexies
Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions du code civil et du code de la santé publique relatives aux personnes protégées

Cet article, introduit à l’initiative du Gouvernement avec un avis de sagesse du rapporteur, l’habilite à prendre par ordonnance, dans un délai de 18 mois, des mesures législatives permettant de mieux articuler les dispositions du code civil et du code de la santé publique relatives à l’expression du consentement aux actes médicaux des personnes placées sous protection juridique (tutelle, curatelle). Un projet de loi de ratification de l’ordonnance devra être présenté dans les six mois suivant son adoption.

L’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement, bien qu’assez long, ne permettait pas de cerner précisément les objectifs de l’habilitation. Un complément d’information avait été demandé par le rapporteur, mais il est resté sans réponse.

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La Commission en vient à l’amendement AS1522 du Gouvernement.

Mme la ministre. Le présent amendement vise à autoriser le Gouvernement à réformer par ordonnance le code civil et le code de la santé publique s’agissant des questions relatives à l’expression du consentement des personnes placées sous une mesure de protection juridique pour toute décision en lien avec un acte médical.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Des demandes de précisions sur cet amendement sont restées sans réponse. Je m’en remets donc à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 51 septies
Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions relatives
aux ordres des professions de santé

Cet article, introduit à l’initiative du Gouvernement et avec l’avis favorable du rapporteur, l’habilite à prendre par ordonnance, dans un délai d’un an, des dispositions législatives relatives aux ordres des professions de santé. Un projet de loi de ratification de l’ordonnance devra être déposé dans les trois mois suivant son adoption.

Sept ordres sont concernés : médecins, sages-femmes, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, infirmiers.

Les mesures envisagées sont assez variées : évolution de la composition et des compétences des organes composant les ordres, allègement des procédures, renforcement des moyens destinés à veiller au respect de la législation relative aux avantages consentis par les entreprises, modalités d’intervention des ordres en matière d’exercice professionnel.

Il est également prévu de soumettre les ordres au respect des dispositions de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. Cela résulte, selon l’exposé sommaire de l’amendement, de préconisations formulées par la Cour des comptes et l’Inspection générale des affaires sociales.

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La Commission est saisie de l’amendement AS1666 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit d’un amendement de simplification portant sur les ordres des professions de santé.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 52
Encadrement des soins de conservation et obligation vaccinale du virus de l’hépatite B (VHB) pour les thanatopracteurs en formation et en exercice

Cet article a pour objet d’habiliter le Gouvernement, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, à légiférer par voie d’ordonnance pour définir les conditions d’exercice de la thanatopraxie et les obligations vaccinales des professionnels qui la réalisent (I). Le délai d’habilitation est de 12 mois à compter de la promulgation de la loi relative à la santé ; le projet de loi de ratification devra être déposé dans les trois mois suivant la publication de l’ordonnance (II).

● L’activité dont il s’agit de préciser les conditions d’exercice est celle visée au 3° de l’article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, à savoir « les soins de conservation », qui sont l’une des composantes de la mission de service public que constitue « le service extérieur des pompes funèbres » (cf. encadré).

Article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales

Le service extérieur des pompes funèbres est une mission de service public comprenant :

1° Le transport des corps avant et après mise en bière ;

2° L’organisation des obsèques ;

3° Les soins de conservation ;

4° La fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ;

 [Alinéa supprimé]

6° La gestion et l’utilisation des chambres funéraires ;

7° La fourniture des corbillards et des voitures de deuil ;

8° La fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l’exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d’imprimerie et de la marbrerie funéraire.

Cette mission peut être assurée par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée. Les communes ou leurs délégataires ne bénéficient d’aucun droit d’exclusivité pour l’exercice de cette mission. Elle peut être également assurée par toute autre entreprise ou association bénéficiaire de l’habilitation prévue à l’article L. 2223-23.

L’étude d’impact définit de manière plus précise, mais malheureusement plus évocatrice, l’activité de thanatopraxie : « des actes invasifs post mortem ayant pour objectif de suspendre pour une durée de trois semaines le processus de décomposition du corps [, qui] consistent notamment en une extraction de la masse sanguine et l’évacuation des gaz et des liquides des cavités thoraciques et abdominales […], suivie de l’injection d’un liquide biocide tel que le formol ».

● La nature précise des soins de conservation est mal définie juridiquement, ainsi que l’ont souligné les différents rapports publiés sur cette question dans les dernières années :

– celui de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale de l’administration (IGA) de juillet 2013 (238) ;

– celui du Haut conseil de la santé publique de décembre 2012 (239), faisant suite à celui de novembre 2009 (240;

– celui du Défenseur des droits d’octobre 2012 (241).

Alors que les soins de conservation sont bel et bien distincts des simples soins funéraires (toilette, désinfection, habillage, maquillage), la diversité et l’imprécision des termes employés « est à l’origine de certains abus avec des prestations effectuées sans information des familles, des prestations mal définies mais par contre bien facturées » (242).

Cette mauvaise information contribue, selon les mêmes sources, à la pratique de la thanatopraxie au domicile des défunts. En effet, si les soins doivent être dispensés par des professionnels diplômés, rien n’interdit qu’ils le soient ailleurs que dans des chambres mortuaires (des établissements de santé) ou des chambres funéraires (gérées en régie ou déléguées par les collectivités territoriales). Or, la réalisation de ces actes invasifs dans des lieux non dédiés favorise les risques sanitaires, notamment infectieux. Il est donc unanimement préconisé de circonscrire les actes de thanatopraxie dans des lieux dédiés, à l’exclusion, donc, du domicile des défunts.

Les conclusions des différents travaux précités convergent également sur la nécessité de lever l’interdiction de pratiquer des soins de conservation sur des personnes décédées de l’hépatite B ou d’une infection à VIH, posée par un arrêté du 20 juillet 1988 (243).

● L’ordonnance prise sur le fondement du présent article aura comme objectif général de mettre la législation en adéquation avec les conclusions partagée de ces différentes expertises, ce qui devrait se traduire par trois types de mesures :

– la définition précise des soins de conservation ;

– la définition des lieux dédiés et équipés dans lesquels ces soins pourront être réalisés ;

– l’obligation de vaccination, notamment contre le virus de l’hépatite B, des thanatopracteurs en exercice comme en formation.

Ces différentes mesures permettront ultérieurement au Gouvernement de lever l’interdiction de soins de conservation pour les défunts de l’hépatite B ou d’une infection à VIH, cette décision relevant du pouvoir réglementaire.

● L’impact des mesures envisagées devrait être limité :

– pour les chambres funéraires, vers lesquelles seront reportés les soins des défunts actuellement réalisés à domicile. L’étude d’impact évalue le nombre d’interventions hebdomadaires des chambres funéraires à 1 à l’avenir, contre 0,46 aujourd’hui ;

– pour les thanatopracteurs, dont l’activité pourrait être réduite, mais régulée du fait du numerus clausus qui régit l’accès à la profession ;

– pour les collectivités territoriales, qui peuvent être gestionnaires de chambres funéraires (cf. supra).

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À l’initiative du rapporteur, et avec l’avis favorable du Gouvernement, la Commission a procédé à une rédaction globale de l’article 52, ayant pour objet d’inscrire « en dur » dans le projet de loi les dispositions que le Gouvernement envisageait de prendre par ordonnance.

Il s’agit :

– de définir plus précisément les soins de conservation des corps, ou thanatopraxie ;

– de circonscrire la réalisation de ces soins dans des lieux dédiés et équipés ;

– d’enrichir le contenu du règlement national des pompes funèbres d’une définition des conditions dans lesquelles peuvent intervenir les thanatopracteurs, notamment pour proposer leurs prestations aux familles ;

– d’obliger les thanatopracteurs en exercice et en formation à être vaccinés contre l’hépatite B, préalable indispensable à la levée de l’interdiction de soins sur les corps des défunts de cette maladie (interdiction relevant du domaine réglementaire).

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La Commission examine l’amendement AS1647 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. L’amendement AS1647 a pour objet d’inscrire « en dur » dans le projet de loi les dispositions que l’article 52 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance.

Il s’agit de définir plus précisément les soins de conservation des corps – thanatopraxie ; de circonscrire la réalisation de ces soins dans des lieux dédiés et équipés ; d’enrichir le contenu du règlement national des pompes funèbres d’une définition des conditions dans lesquelles peuvent intervenir les thanatopracteurs, notamment pour proposer leurs prestations aux familles ; enfin, d’obliger les thanatopracteurs en exercice et en formation à être vaccinés contre l’hépatite B, préalable indispensable à la levée de l’interdiction de soins sur les corps des défunts de cette maladie – interdiction relevant du domaine réglementaire.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 52 est ainsi rédigé.

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Article 53
Habilitation à prendre par ordonnance des mesures d’adaptation
du droit national au droit européen et international

Cet article habilite le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances dans des domaines très variés et souvent très complexes, dont certains relèvent assez peu directement du champ de la santé. Le caractère hétéroclite de ces mesures empêche de les présenter autrement que dans l’ordre du texte.

Le I permet de transposer quatre directives européennes en droit interne : protection contre l’exposition aux rayonnements ionisants ; fabrication, présentation et vente des produits du tabac ; reconnaissance des qualifications professionnelles ; niveau minimal de formation des gens de mer.

Le II permet d’adapter outre-mer, voire d’y étendre, les dispositions résultant de la mise en œuvre du I.

Le III permet d’adapter la législation nationale relative aux recherches biomédicales à un récent règlement européen.

Le IV permet d’harmoniser et de sécuriser la procédure de reconnaissance des qualifications obtenues par les professionnels de santé dans un autre État membre de l’Union européenne.

Le V permet d’adapter notre législation à certaines exigences du règlement sanitaire international.

Enfin, le VI prévoit que chacune des ordonnances prises en application de cet article – au nombre de huit au moins – devra faire l’objet d’un projet de loi de ratification, déposé sur le bureau de l’une ou l’autre des chambres dans un délai de trois mois suivant sa publication ; les délais d’habilitation varient quant à eux de six mois à deux ans suivant la publication de la loi relative à la santé.

I. TRANSPOSITION EN DROIT INTERNE DE QUATRE DIRECTIVES EUROPÉENNES

A.  PROTECTION CONTRE LES RAYONNEMENTS IONISANTS

Le du I habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance, dans un délai de deux ans suivant la promulgation de la loi relative à la santé, pour transposer en droit interne la directive 2013/59/Euratom du Conseil du 5 décembre 2013 fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire contre les dangers résultant de l’exposition aux rayonnements ionisants et abrogeant les directives 89/618/Euratom, 90/641/Euratom, 96/29/Euratom, 97/43/Euratom et 2003/122/Euratom.

Les rayonnements ionisants ont la particularité de posséder assez d’énergie pour créer des dommages dans les matières qu’ils traversent ; la radioactivité, notamment, produit plusieurs types de rayonnements ionisants. L’exposition aux rayonnements ionisants, qui peut être naturelle (radioactivité de certains sols) ou artificielle (imagerie médicale) peut être facteur de dangers pour l’homme. La protection contre ces dangers a justifié la mise en place d’un riche corpus de normes, dans le cadre de la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom). La directive de 2013 est l’aboutissement de travaux de mise à jour de ces normes, entamés en 2008. Le délai de transposition par les États membres court jusqu’au 17 janvier 2018.

La directive compte 109 articles, sur 73 pages. Il est bien évidemment illusoire de prétendre en détailler ici le contenu, et l’on se contentera donc du bref résumé fourni par l’étude d’impact, qui indique que la directive « s’applique notamment aux matières radioactives (fabrication, traitement, détention, stockage, transport, etc.), à l’exposition aux sources naturelles de rayonnements ionisants (radon, radionucléides présents dans les matériaux de construction), à l’utilisation de rayonnements ionisants dans le secteur médical, à l’exposition du public et des travailleurs, à la préparation et à la gestion des situations d’urgences et de leurs conséquences ».

La transposition de cette directive appelle la modification de plusieurs codes, ainsi que le détaillent les a à g du du : code de la santé publique (244), code du travail (245), code de l’environnement (246), code des douanes, code de la défense.

Bien que le ministère chef de file de la transposition soit celui chargé de l’écologie, la présence de ces questions dans le présent projet de loi n’est pas illogique, compte tenu de la poursuite d’un objectif général de protection de la santé. Compte tenu de la technicité de la matière, la législation par ordonnance paraît adaptée. Le Gouvernement tient fortement à disposer de cette habilitation, au point de l’avoir également introduite par amendement à l’article 33 du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

B.  FABRICATION, PRÉSENTATION ET VENTE DES PRODUITS DU TABAC

Le du I donne un an au Gouvernement pour transposer par ordonnance la directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE.

Cette directive, dont la transposition doit avoir lieu avant le 20 mai 2016, compte 33 articles sur 38 pages. Elle s’inscrit dans un objectif général de baisse de la prévalence de la consommation de tabac dans l’Union européenne, en accentuant les efforts de protection des jeunes.

Les principales mesures prévues sont :

– l’interdiction des arômes perceptibles dans les produits du tabac, à l’exception du menthol, qui bénéficie d’un délai supplémentaire de quatre ans ;

– la plus grande visibilité des avertissements sanitaires, qui devront être placés en haut des paquets de cigarettes et représenter 65 % de leur surface, contre 40 % au plus en l’état du droit ;

– une « ébauche de standardisation des paquets », pour reprendre la formule de l’étude d’impact, à savoir notamment la limitation des formes possibles ;

– l’interdiction des mesures de « marketing positif » sur les emballages, mettant par exemple en valeur le goût ou le tarif.

La directive n’interdit pas aux États d’aller plus loin dans la lutte contre le tabagisme, par exemple par la mise en place du paquet neutre.

La transposition de la directive est déjà engagée par ailleurs. Son article 18 prévoit par exemple que les États membres peuvent interdire la vente à distance transfrontalière de produits du tabac destinés aux particuliers. En conséquence, l’article 93 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (247) a interdit non seulement la vente, mais également l’achat de tabac à distance, instauré un régime de sanctions pénales et renforcé les moyens à la disposition des services des douanes (en leur conférant notamment un pouvoir d’audition).

En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que le directive contient un certain nombre de dispositions de nature législative, s’agissant notamment :

– de certaines définitions (par exemple celle sur les produits du tabac, qui diffère de la définition contenue actuellement dans le code de santé publique) ;

– des arômes caractérisant (article 7) ;

– des avertissements sanitaires (modification de l’article L. 3511-6 du code de la santé publique) ;

– de la présentation des produits (modification de l’article L. 3511-4 du code de la santé publique) ;

– des cigarettes électroniques (article 20) ;

– des sanctions pénales associées aux infractions à ces dispositions.

Le Gouvernement estime à juste titre que « compte tenu du nombre de dispositions de nature législative à transposer strictement, de leur lien rédactionnel avec un certain nombre de textes d’application et de la nécessité d’un travail interministériel, [..] il est nécessaire de recourir à une ordonnance pour effectuer la transposition des dispositions de nature législative de la directive ».

C.  RECONNAISSANCE DES QUALIFICATIONS PROFESSIONNELLES

Le du I habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance, dans un délai d’un an :

– la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles. La transposition de cette directive doit intervenir avant le 18 janvier 2016 ;

– le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur. Cette habilitation à transposer un règlement est curieuse, la propriété de cette catégorie de norme européenne étant, précisément, son applicabilité directe.

Pour toute justification de sa demande d’habilitation à transposer par ordonnance une directive de 39 pages, le Gouvernement indique, dans l’étude d’impact, qu’elle « renforce, notamment, les obligations des États membres en matière d’échange d’informations relatives à l’autorisation d’exercer pour certains professionnels [et] introduit, également, la possibilité d’une carte professionnelle européenne, qui faciliterait la mobilité et la reconnaissance au titre du système de reconnaissance automatique ».

Il est heureux d’apprendre, à la lecture de la même source, que le ministère chargé de la santé serait concerné par les mesures de cette directive, entre autres ministères. L’exposé des motifs est à peine plus disert, indiquant que la transposition de cette directive permettra « la mise en conformité des dispositions relatives à l’usage du titre de psychothérapeute, aux professions de conseiller en génétique [et] permettra également la reconnaissance du métier de radio-physicien au titre de profession de santé ». On relèvera que le texte de la directive ne comporte aucune mention directe de ces trois professions.

D.  NIVEAU MINIMAL DE FORMATION DES GENS DE MER

Le du I habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance, dans un délai d’un an, une partie de la directive 2008/106/CE modifiée par la directive 2012/35/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 concernant le niveau minimal de formation des gens de mer. Auraient vocation à être transposées les stipulations de cette directive « relatives à la prévention et à la répression de l’alcoolémie à bord des navires et à l’aptitude médiale [sic – il faut lire « médicale »] des gens de mer ». Le délai de transposition est échu depuis janvier 2014, le dispositif adapté n’ayant pu être élaboré dans les délais requis.

● La formation des gens de mer et la délivrance subséquente de leurs titres est régie par le droit international, à savoir la convention de l’Organisation maritime internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (dite STCW, pour Standards of Training, Certification and Watchkeeping). Cette convention de 1978, entrée en vigueur en 1984 et modifié en 1995, a été intégrée au droit de l’Union par la directive 94/58/CE du Conseil du 22 novembre 1994 concernant le niveau minimal de formation des gens de mer. En 2010, lors d’une conférence à Manille, les parties à la convention STCW lui ont apporté des modifications significatives dans des domaines divers, notamment la formation en matière de lutte contre la piraterie ou la prévention de pratiques frauduleuses en matière de titres. Ces « amendements de Manille » ont été intégrés par la directive de 2012 à la directive de 2008, elle-même issue d’une refonte des directives s’étant succédées depuis 1994.

Une partie des amendements de Manille concerne la prévention et la répression de la consommation excessive d’alcool à bord des navires. En conséquence, le 2 de l’article 15 de la directive de 2008, dans sa rédaction consolidée, stipule qu’ « en vue de prévenir la toxicomanie et l’abus d’alcool, les États membres s’assurent que des mesures adéquates sont mises en place ». Le 14 du même article stipule, plus précisément, qu’ « en vue de prévenir l’abus d’alcool, les États membres établissent un taux d’alcoolémie maximal de 0,05 % ou une concentration maximale d’alcool dans l’haleine de 0,25 mg/l ou une quantité d’alcool maximale entraînant ces concentrations, pour les capitaines, les officiers et d’autres gens de mer auxquels sont confiées certaines tâches liées à la sécurité, à la sûreté et à la protection du milieu marin ».

Les amendements de Manille ont également apporté des exigences nouvelles en matière d’aptitude médicale des gens de mer, et non plus seulement en matière d’aptitude physique (248). L’article 11 de la directive consolidée stipule désormais que « les États membres définissent les normes d’aptitude médicale applicables aux gens de mer et les procédures à suivre pour la délivrance d’un certificat médical [et] veillent à ce que les personnes responsables de l’évaluation de l’aptitude médicale des gens de mer soient des médecins praticiens agréés ».

● Le champ de l’habilitation demandée concerne marginalement la question de l’aptitude médicale : le b du du I a pour objet d’autoriser le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi (249) de nature à « préciser les conditions de reconnaissance des certificats d’aptitude médicale des gens de mer délivrés […] par des médecins établis à l’étranger ».

● Pour l’essentiel, l’ordonnance concernerait les questions relatives à l’alcool à bord. Le champ de l’habilitation sollicitée est assez détaillé, mais également assez confus.

Le a du permet ainsi de prendre par ordonnance, dans le code des transports, « les mesures de cohérence nécessaires en matière de conditions d’introduction et de consommation d’alcool à bord ». Aucune précision n’est apportée sur l’incohérence des mesures qu’il s’agit de corriger. La suite de la rédaction semble avoir pour intention de définir le cadre général et les objectifs dans lesquels seront prises les mesures « de cohérence », mais elle n’est guère éclairante sur les conséquences législatives qu’elle est susceptible d’emporter : il est en effet prévu que le navire soit considéré « comme un lieu de travail et de vie où s’exerce la responsabilité particulière du capitaine et de l’armateur au regard des restrictions nécessaires à la protection de la santé et à la sécurité des personnes embarquées et à la sécurité de la navigation maritime ».

En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a apporté des précisions suffisantes sur les mesures de cohérence qu’il entend prendre, et qui sont effectivement d’ordre technique ; il s’agit notamment de rapatrier dans le code des transports des dispositions éparses, relatives à l’encadrement de la consommation d’alcool à bord. S’agissant des conséquences de la définition du navire comme lieu de vie, il s’agit notamment « de fixer la réglementation de l’introduction de boissons alcooliques à bord des navires sans l’autorisation du capitaine ».

Le c permet d’étendre « avec les adaptations nécessaires » (250) l’application des mesures prévues au a, qui concernent les seuls navires de commerce :

– à l’ensemble des navires battant pavillon français titulaires d’un titre de navigation maritime ;

– aux navires ne battant pas pavillon français mais naviguant dans nos eaux territoriales et intérieures ou touchant l’un de nos ports. Pour ces navires, seules les dispositions relatives au respect des taux d’alcoolémie autorisés s’appliqueront, car « il n’apparaît […] pas opérant de leur appliquer les dispositions relatives à l’introduction de boissons alcooliques à bord ». On peut donc déduire de cette rédaction que la fixation des taux d’alcoolémie se fera en application du a.

Le d prévoit l’aménagement ou la création de sanctions en cas d’infraction aux règles d’introduction et de consommation d’alcool. Le champ des sanctions contre les « marins » est large : professionnelles, administratives, pénales. Il reviendra également à l’ordonnance de définir le régime des fautes contre la discipline à bord. Les sanctions pourront également consister en des mesures d’immobilisation temporaire ou « de conduite » ( ? ) des navires, en cas de dépassement des taux d’alcoolémie autorisés.

Le e prévoit, toujours dans le champ des sanctions, une adaptation des dispositions du code pénal applicables aux véhicules terrestres à moteur « pour tenir compte du caractère particulier du navire et de la navigation maritime, en cas de non respect des taux maxima d’alcoolémie autorisés ».

Le f permet de préciser la liste des agents compétents pour rechercher et constater les infractions.

Le g, enfin, habilite à tirer les conséquences légistiques de l’ensemble de ces mesures.

E.  L’ADAPTATION DE L’ENSEMBLE DE CES MESURES OUTRE-MER

Le II habilite le Gouvernement à adapter ou étendre, par ordonnance, les mesures législatives introduites par les ordonnances prévues au I. On se reportera utilement au commentaire de l’article 56 pour un développement plus spécifique sur l’application outre-mer des dispositions du présent projet de loi. Il faut signaler que le texte omet de fixer un délai d’habilitation.

II. ADAPTATION AU DROIT EUROPÉEN DE LA LÉGISLATION SUR LES RECHERCHES BIOMÉDICALES

Le III habilite le Gouvernement, pour un délai de six mois, à légiférer par ordonnance dans le domaine des recherches biomédicales, afin :

– d’adapter le titre II du livre Ier de la première partie du code de la santé publique au règlement (UE) n° 536/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain ;

– de coordonner l’intervention des comités de protection des personnes ;

– d’adapter la législation concernée à d’autres dispositions législatives.

Le titre II du livre Ier de la première partie du code de la santé publique (« Recherches biomédicales ») est composé de 50 articles, ventilés en cinq chapitres : 18 dans le chapitre Ier (« Principes généraux »), quatre dans le chapitre II (« Information de la personne qui se prête à une recherche biomédicale et recueil de son consentement »), 13 dans le chapitre III (« Comités de protection des personnes et autorité compétente »), quatre dans le chapitre V (« Dispositions particulières à certaines recherches ») et 11 dans le chapitre VI (« Dispositions pénales »). La rédaction actuelle de ce titre du code est issue de la loi n° 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine, dite « loi Jardé » car résultant de l’adoption d’une proposition de loi déposée le 6 janvier 2009 par notre ancien collègue Olivier Jardé. Le règlement du 16 avril 2014, quant à lui, compte 99 articles sur 76 pages.

C’est donc au prix d’un effort de synthèse absolument remarquable que l’étude d’impact justifie en ces termes la demande d’habilitation : « comme les recherches portant sur le médicament seront directement régies par le règlement européen, il convient d’exclure l’encadrement de ces recherches de la loi Jardé et de les renvoyer au règlement européen ». D’après la même source, « la préparation du décret d’application de la loi Jardé a mis en lumière des difficultés qu’il convient de corriger », mais dont il ne convient manifestement pas de dire un mot de plus.

L’exposé des motifs, dans la limite du paragraphe consacré à cette question, prend la peine de citer quelques exemples d’adaptation : typologie des essais cliniques, utilisation des données de la recherche, coordination entre les comités de protection des personnes. On y apprend avec profit que « ces modifications auront pour effet d’assurer la lisibilité et la coordination des textes pour les différents acteurs concernés ».

En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a fourni les éléments suivants, pour illustrer chacun des trois points de la demande d’habilitation :

– en ce qui concerne l’adaptation du code de la santé publique au règlement, « il s’agit de supprimer du code de la santé publique toutes les dispositions législatives relatives aux recherches biomédicales portant sur un médicament à usage humain et de préciser que toutes ces recherches sont régies par ledit règlement » ;

– en ce qui concerne les comités de protection des personnes, « les dispositions qui seront introduites dans l’ordonnance viseront à renvoyer au niveau réglementaire la composition de la commission nationale des recherches impliquant la personne humaine ainsi que les modalités du tirage au sort du comité de protection des personnes compétent pour une recherche. La commission nationale des recherches impliquant la personne humaine ainsi que le tirage au sort étant des mesures nouvelles introduites par la loi dite Jardé du 5 mars 2012, il convient de pouvoir adapter le dispositif aux difficultés qui seront éventuellement rencontrées lors de sa mise en place en l’organisant au niveau réglementaire plutôt qu’au niveau législatif. La fluidité du dispositif est d’autant plus cruciale qu’il convient de faire face aux exigences du règlement européen susmentionné et de maintenir l’attractivité de la France en matière d’essais cliniques » ;

– en ce qui concerne l’adaptation à d’autres mesures législatives, « le projet de loi santé prévoyant une modification de la loi CNIL dans son article 47, il conviendra de toiletter en conséquence les dispositions législatives encadrant les recherches biomédicales ».

III. FORMATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ

Le IV habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai d’un an, les mesures relevant du domaine de la loi relatives à la formation des professionnels de santé, afin d’harmoniser et de sécuriser la procédure de reconnaissance des qualifications obtenues dans un État membre de l’Union européenne (UE). La lecture de l’étude d’impact laisse croire que cette ordonnance permettra de satisfaire certains des motifs avancés à l’appui de la demande d’habilitation formulée au 3° du I, s’agissant par exemple de la profession de conseiller en génétique.

● En effet, il s’agirait notamment de modifier l’article L. 4381-4 du code de la santé publique, qui permet sous conditions d’autoriser des ressortissants non membres de l’Union européenne, sous réserve qu’ils soient titulaires d’un diplôme délivré dans l’UE, à exercer les professions régies par le livre III de la quatrième partie du code (auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture et ambulanciers), ainsi que celles de préparateur en pharmacie et en pharmacie hospitalière. Cette procédure de reconnaissance des qualifications résulte de la transposition de la directive 2005/36/CE, précitée.

Quatre modifications de cet article sont envisagées :

– élargir la liste des professions concernées à celle de conseiller en génétique. Titulaire d’un diplôme de niveau bac+5 (251), le conseiller en génétique a pour mission essentielle d’expliquer la maladie génétique au patient, en lien étroit avec le médecin généticien. L’étude d’impact motive cet élargissement en relevant que l’article L. 4381-4 « ayant pour objet de lever une discrimination en raison de la nationalité, rien ne justifie de faire une distinction entre différents professionnels mentionnés au code de la santé publique » ;

– rendre facultative une condition – aujourd’hui obligatoire – de recevabilité de la demande de reconnaissance de la qualification, à savoir l’expérience professionnelle du demandeur. Seule la condition de diplôme resterait obligatoire ;

– supprimer la fixation d’un quota annuel d’autorisations, « au regard du flux limité de professionnels demandeurs » ;

– supprimer la nécessité de faire la preuve d’une connaissance suffisante de la langue française. Cela se justifierait par l’intégration des demandeurs aux procédures de reconnaissance des qualifications organisées pour les ressortissants européens, dans le cadre desquelles le test de maîtrise de la langue est déjà organisé.

● L’ordonnance doit également permettre d’instaurer une procédure permettant à un ressortissant de l’UE de voir reconnaître l’équivalence de sa formation ou de son expérience avec la formation de psychopathologie clinique, qui permet de s’inscrire en France sur le registre des psychothérapeutes. Cela implique la modification de l’article 52 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

● Enfin, il convient de faire figurer dans la partie législative du code, parce qu’elle relève du domaine de la loi et non de celui du règlement, la définition du champ et des conditions d’exercice des prothésistes et orthésistes pour l’appareillage des personnes handicapées (chapitre IV du titre VI du livre III de la quatrième partie de la partie réglementaire du code de la santé publique). À cette occasion, il faudrait confier au seul préfet de région la compétence de gestion des autorisations d’exercice pour les ressortissants de l’UE, comme pour les autres professions de santé.

IV. ADAPTATION DE LA LÉGISLATION AU RÈGLEMENT SANITAIRE INTERNATIONAL

Le V habilite le Gouvernement, dans un délai d’un an, à légiférer par ordonnance afin d’adapter la législation au règlement sanitaire international (RSI).

Le RSI est un instrument juridique international entré en vigueur le 15 juin 2007, qui a force obligatoire pour 194 pays, et notamment pour l’ensemble des États membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il a pour but d’aider la communauté internationale à éviter les risques aigus pour la santé publique susceptibles de se propager au-delà des frontières et de constituer une menace dans le monde entier, en prenant les mesures qui s’imposent.

● Les mesures que l’OMS peut demander aux États de mettre en place afin de lutter contre la propagation des maladies peuvent être privatives de liberté. En ce sens, elles s’assimilent en droit interne à des pouvoirs de police spéciaux, exercés par le préfet, ainsi que l’a estimé le Conseil d’État dans sa note sur un projet de décret relatif au RSI. Or, l’institution d’un régime de police spéciale, portant atteinte à certains droits fondamentaux, ne peut relever que du domaine de la loi (252). Le du V habilite donc le Gouvernement à élargir les pouvoirs de police du préfet, pour lui permettre de prendre les mesures de contrainte nécessaires en vue de lutter efficacement contre la propagation internationale des maladies.

Ces mesures pourront être prises à l’égard :

– des personnes atteintes d’une infection contagieuse ou susceptibles de l’être ;

– des exploitants de moyens de transport, capitaines de navire et commandants de bord.

En réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement a indiqué que les mesures de contrainte pourraient par exemple être les suivantes : « le déroutement d’un moyen de transport vers un port ou un aéroport en capacité de prendre en charge un évènement survenant à bord ; l’isolement des bagages, moyens de transport, conteneurs, marchandises ; l’immobilisation d’un moyen de transport ».

● L’article L. 3115-1 du code de la santé publique prévoit que, pour la bonne réalisation du contrôle sanitaire aux frontières, dont les règles résultent notamment du RSI, le préfet « peut confier la réalisation des contrôles techniques et la délivrance des certificats correspondants à des personnes ou organismes agréés ». L’article 41 du RSI stipule que si un État choisit de rendre payants ces contrôles, le tarif doit être uniformisé à l’échelle du territoire (253). Or, la rédaction de l’article L. 3115-5 du code de la santé publique, qui met les frais de contrôle à la charge des transporteurs, ne prévoit pas la tarification unique (254). Le du V habilite donc le Gouvernement à établir par ordonnance la tarification unique, et à en préciser les modalités de recouvrement.

● Le du V, enfin, permet au Gouvernement de préciser par ordonnance les conditions de la vaccination contre la fièvre jaune dans les départements où la situation sanitaire l’exige. La mention des seuls départements résulte sans doute de ce que c’est en Guyane que l’on constate la prévalence de cette maladie.

*

La Commission examine l’amendement AS1651 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. L’amendement AS1651 vise à supprimer l’alinéa 29 de l’article 53 pour inscrire « en dur » les dispositions que cet alinéa habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance.

Mme la ministre. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement : le Gouvernement doit en effet en présenter un en séance publique pour transposer « en dur » les dispositions de l’ordonnance et souhaite travailler avec vous sur ce sujet complexe avant la séance publique.

M. Richard Ferrand, rapporteur. J’accepte de retirer mon amendement si j’ai la certitude que, d’ici à la séance publique, les membres de la Commission seront suffisamment éclairés sur les dispositions en cause.

L’amendement AS1651 est retiré.

La Commission adopte l’article 53 sans modification.

*

Article 53 bis
(art. L. 1111-3-2 [nouveau] du code de la santé publique)

Information du patient sur l’autorisation d’exercer et l’assurance des professionnels de santé

Cet article, introduit à l’initiative du Gouvernement avec l’avis favorable du rapporteur, transpose certaines dispositions de la directive 2011/24/UE du Parlement et du Conseil du 9 mars 2011 relative à l’application des droits des patients en matière de soins transfrontaliers (255), dont l’article 4 prévoit que les patients soient informés :

– d’une part, du fait que le professionnel de santé est bien titulaire des autorisations requises pour exercer ;

– d’autre part, du fait que le professionnel est dûment couvert par une assurance-responsabilité.

L’article inscrit cette obligation d’information dans le code de la santé publique (nouvel article L. 1111-3-2). La charge d’informer le patient pèsera soit sur le professionnel, soit sur son employeur.

*

La Commission examine l’amendement AS1663 du Gouvernement.

Mme la ministre. Le présent amendement a pour objet de conformer notre droit aux dispositions de la directive Soins de santé transfrontaliers, qui imposent aux États membres de l’Union européenne de veiller à ce que les prestataires de soins de santé fournissent des informations utiles aux patients.

M. Richard Ferrand, rapporteur. J’émets un avis d’autant plus favorable que le délai de transcription de la directive est échu depuis le 25 octobre 2013.

L’amendement est adopté.

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Article 53 ter
(art. L. 4381-4 du code de la santé publique)

Reconnaissance des qualifications des professionnels de santé au sein de l’Union européenne

Cet article, introduit à l’initiative du rapporteur avec l’avis favorable du Gouvernement, amendement a pour objet d’inscrire « en dur » dans le projet de loi les modifications de l’article L. 4381-4 du code de la santé publique que le IV de l’article 53 habilite le Gouvernement à réaliser par ordonnance. En effet, il s’agit de dispositions techniquement simples, qui ne justifient pas un dessaisissement du Parlement.

L’article L. 4381-4 permet sous conditions d’autoriser des ressortissants non membres de l’Union européenne (UE), sous réserve qu’ils soient titulaires d’un diplôme délivré dans l’UE, à exercer les professions régies par le livre III de la quatrième partie du code (auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture et ambulanciers), ainsi que celles de préparateur en pharmacie et en pharmacie hospitalière.

Quatre modifications de cet article sont prévues :

– élargir la liste des professions concernées à celle de conseiller en génétique. Titulaire d’un diplôme de niveau bac+5 , le conseiller en génétique a pour mission essentielle d’expliquer la maladie génétique au patient, en lien étroit avec le médecin généticien. L’étude d’impact motive cet élargissement en relevant que l’article L. 4381-4 « ayant pour objet de lever une discrimination en raison de la nationalité, rien ne justifie de faire une distinction entre différents professionnels mentionnés au code de la santé publique » () ;

– rendre facultative une condition – aujourd’hui obligatoire – de recevabilité de la demande de reconnaissance de la qualification, à savoir l’expérience professionnelle du demandeur. Seule la condition de diplôme resterait obligatoire () ;

– supprimer la fixation d’un quota annuel d’autorisations, « au regard du flux limité de professionnels demandeurs » () ;

– supprimer la nécessité de faire la preuve d’une connaissance suffisante de la langue française. Cela se justifierait par l’intégration des demandeurs aux procédures de reconnaissance des qualifications organisées pour les ressortissants européens, dans le cadre desquelles le test de maîtrise de la langue est déjà organisé (a du ).

Le b du est une simple modification de conséquence rédactionnelle.

*

Puis la Commission examine l’amendement AS1649 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. L’amendement AS1649 a pour objet d’inscrire « en dur » dans le projet de loi les modifications de l’article L. 4381-4 du code de la santé publique que le IV de l’article 53 habilite le Gouvernement à réaliser par ordonnance.

Il s’agit en effet de dispositions techniques simples, qui ne justifient pas un dessaisissement du Parlement : élargir la liste des professions concernées à celle de conseiller en génétique ; rendre facultative une condition de recevabilité de la demande de reconnaissance de la qualification ; supprimer la fixation d’un quota annuel d’autorisations ; supprimer enfin la nécessité de faire la preuve d’une connaissance suffisante de la langue française.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Article 54
(art. L. 5542-6-1 du code des transports)

Mise à disposition des gens de mer
d’un exemplaire de leur convention collective

Cet article a pour objet de mettre le droit national en conformité avec :

– la convention du travail maritime de l’Organisation internationale du travail (adoptée le 23 février 2006 et applicable en France depuis le 1er mars 2014) ;

– et la directive 2009/13/CE du Conseil du 16 février 2009 portant mise en œuvre de l’accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF) concernant la convention du travail maritime, 2006, et modifiant la directive 1999/63/CE.

Ces normes de droit international exigent que le capitaine d’un navire commercial tienne à disposition des gens de mer un exemplaire de l’accord ECSA-ETF. C’est ce que prévoit l’article 54.

Son lien avec les questions de santé est si peu évident que son maintien dans le projet de loi l’expose à un risque juridique fort, le Conseil constitutionnel pouvant sans peine le qualifier de « cavalier législatif ».

Le rapporteur, en sa qualité de rapporteur général du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, a déposé un amendement à ce texte – qui comportait diverses mesures de droit social – reprenant les dispositions du présent article, corrigées de deux erreurs rédactionnelles. Adopté par l’Assemblée nationale avec l’avis favorable du Gouvernement, cet amendement est devenu l’article 97 quater du texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. La motion de censure déposée à la suite de l’engagement de responsabilité ayant été rejetée, le projet de loi est donc considéré comme adopté en première lecture.

Par coordination, cet article doit donc être supprimé.

*

La Commission examine l’amendement AS1652 du rapporteur.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Les dispositions de l’article 54 sont déjà contenues dans le projet de loi, adopté en première lecture, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Comme il n’est pas utile de légiférer deux fois sur le même objet, l’amendement AS1652 vise à supprimer l’article.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 54 est supprimé.

Article 54 bis
(art. L. 231-2, L. 231-2-1, L. 231-2-2 et L. 231-2-3 du code du sport)

Assouplissement des conditions de renouvellement
des certificats médicaux d’aptitude sportive

Cet article, adopté à l’initiative – tardive – du Gouvernement avec l’avis favorable du rapporteur, a pour objet d’assouplir les règles de renouvellement des certificats médicaux d’aptitude sportive.

Il s’agit tout d’abord d’abroger l’article L. 231-2-2 du code du sport, qui donne aux fédérations sportives le soin de définir la périodicité de délivrance des certificats médicaux pour l’obtention des licences dites « loisir ».

Pour ces licences comme pour les licences dites « compétition », la périodicité serait désormais définie par décret (II de la nouvelle rédaction prévue pour l’article L. 231-2 du code du sport). Il semblerait que la pratique actuelle, dont le Gouvernement n’a pas su indiquer la source, impose un renouvellement annuel des certificats compétition. L’objectif est de fixer par décret une périodicité plus longue dans la généralité des cas (trois ans).

Les certificats médicaux destinés à la pratique de la compétition devraient mentionner explicitement l’absence de contre-indication à la compétition (nouvelle rédaction de l’article L. 231-2-1). En outre, la nouvelle rédaction de l’article L. 231-2-3 prévoit la production d’un certificat médical spécifique pour certaines disciplines, définies par décret, dont la pratique en compétition présente des risques particuliers pour la santé.

On notera pour finir qu’en tout état de cause, quelle que soit sa fréquence de renouvellement, le certificat médical présenté devra être récent, datant de moins d’un an.

*

La Commission examine l’amendement AS1731 du Gouvernement.

Mme la ministre. L’amendement AS1731 a pour objet à la fois de faire œuvre de simplification et de faciliter l’accès à la pratique sportive, en diminuant la fréquence de l’obligation de présentation d’un certificat médical pour l’obtention ou le renouvellement d’une licence sportive. Cette fréquence est actuellement de un an : il est envisagé de la passer à trois ans dans le cas général, tout en tenant compte des spécificités liées à l’âge.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

*

Article 55
Habilitation du Gouvernement à prendre des mesures législatives favorisant la coopération entre l’offre de soins civile et le service de santé des armées ainsi que l’institution nationale des Invalides

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre des mesures de nature législative visant à accroître la coopération entre le secteur civil de santé d’une part et les acteurs de la santé militaire que sont le service de santé des armées (SSA) et l’institution nationale des Invalides (INI) d’autre part. Le Gouvernement souligne que la complexité et l’urgence des modifications envisagées justifient le recours aux ordonnances, ce qui se vérifie particulièrement en ce qui concerne le SSA mais aussi s’agissant de l’INI.

Le SSA est, dans le monde, le plus ancien service de santé militaire en activité. Il a été également en France le premier service de santé structuré de l’État, avant même le service de santé civil. Il joue un rôle indispensable, garantissant la capacité d’action des forces françaises sur le territoire national comme en opérations extérieures mais également en pré-positionnement à l’étranger. Conçu pour faire partie intégrante de la manœuvre, depuis le contact jusqu’au suivi postopératoire et à la réadaptation des soldats en France, il est un des piliers de la politique extérieure de la France, permettant à notre pays de compter parmi les deux ou trois capables « d’entrer en premier » sur un théâtre d’opération (256). La pérennité de ses moyens étant indispensable au maintien de notre indépendance stratégique, le ministère de la défense s’est résolu à une transformation profonde de l’outil. Ce processus conduit à envisager un rapprochement important avec le service public de santé afin de garantir à nos soldats un haut niveau de qualité de prise en charge, quelles que soient les circonstances, tout en optimisant les ressources de l’État.

A.  LE SSA, UN SERVICE COHÉRENT À VISÉE OPÉRATIONNELLE

Le SSA dispose de l’ensemble du spectre des moyens lui permettant d’assurer sa mission de soutien sanitaire des armées. Il rassemble plus de 16 000 personnels ; neuf établissements hospitaliers (pour 2 655 lits ouverts), 55 centres médicaux des armées (répartis sur 300 implantations en métropole et dans les DOM-TOM), des écoles de formation, un centre de recherche biomédicale des armées, une direction des approvisionnements en produits de santé (dont une structure de production pharmaceutique), un centre de transfusion sanguine, un centre d’épidémiologie et de santé publique et un service de protection radiologique des armées. Il mobilise en outre près de 3 000 réservistes, une donnée qui nuance à elle seule l’image d’un SSA déconnecté du monde sanitaire civil.

1.  Des infrastructures hospitalières ouvertes sur la patientèle civile

En France le SSA arme neuf hôpitaux d’instruction des armées (HIA) à savoir : Bégin à Saint-Mandé (94), Clermont-Tonerre à Brest (29), Desgenettes à Lyon (69), Laveran à Marseille (13), Legouest à Metz (57), Percy à Clamart (92), Robert Picqué à Bordeaux (33), Sainte-Anne à Toulon (83) ainsi que le Val de Grâce à Paris (75).

Les hôpitaux des armées représentent moins de 2 % du nombre de lits que comprend l’hospitalisation publique. Cependant, ces établissements disposent d’expertises souvent uniques en France, et rares dans le monde. Ils permettent d’assurer le soutien médico-chirurgical de nos forces en opérations, en projetant du personnel d’un haut niveau de compétence technique et aguerri, et confèrent à la France l’expertise nécessaire pour assumer le rôle de nation-cadre dans le domaine sanitaire au sein de l’Alliance atlantique.

Les structures hospitalières militaires garantissent aux forces armées un accueil différencié des blessés de guerre et un vivier de personnel formé spécifiquement aux besoins opérationnels et mobilisables sur très court préavis. Ils mettent aussi à disposition de la communauté de défense des expertises qui lui sont propres, répondant à ses besoins en aptitude et en conseil au commandement. Certains pays ont été contraints de faire le choix de fermer toutes leurs structures hospitalières militaires mais on constate que ces derniers, pour conserver un haut niveau opérationnel, ont dû trouver des solutions remilitarisées (exemple de l’unité 100 % militaire au sein de l’hôpital de Birmingham pour les Anglais).

Pour garantir des structures hospitalières de qualité intégrant les évolutions des techniques médicales et maintenant à niveau les compétences de ses personnels, une activité au profit d’un large panel de patients est indispensable. C’est pourquoi, les HIA ont été ouverts depuis longtemps à la population civile.

Les statistiques de fréquentation des HIA sont stables, avec, en moyenne, près de 140 000 séjours chaque année, incluant une forte montée en puissance des séjours obstétriques, qui ont plus que doublé entre 2010 et 2014. Le taux d’occupation doit cependant poursuivre la croissance, demeurant inférieur d’environ 15 % à la moyenne des hôpitaux civils (257).

En ce qui concerne la nature de leur fréquentation, les HIA ont déjà largement entamé leur ouverture vers la demande d’origine civile. Ces hôpitaux, pour militaires qu’ils soient, concilient leur identité avec l’accueil de patients majoritairement civils et la mise en œuvre de la tarification à l’activité (T2A). Ainsi, contrairement à une idée répandue, ces établissements ne sont pas réservés aux seuls militaires : le tableau ci-après le confirme explicitement en décrivant la part représentée par les civils parmi les patients du SSA, qui s’élève à 72,5 % (sans compter les familles de militaires).

RÉPARTITION CIVILE ET MILITAIRE DE LA PATIENTÈLE DU SSA

Type de clientèle

Nombre total de venues en 2014

Poids relatif

Civils

894 920

72,56 %

Civils défense

27 317

2,21 %

Militaires

225 652

18,30 %

Personnalités étrangères

15 701

1,27 %

Familles militaires

24 772

2,01 %

Retraités militaires

44 935

3,64 %

Total général

1 233 297

 

Source : SSA.

De surcroît, malgré leur mission militaire, les HIA peuvent d’ores et déjà participer à des réseaux de santé et à des groupements de coopération sanitaire par voie de convention. L’HIA Sainte-Anne de Toulon, par exemple, a été labellisé pôle d’excellence en traumatologie, en partenariat avec le ministère de la santé, et de nombreuses formes de coopération et de partenariat existent déjà impliquant les HIA sur l’ensemble du territoire.

L’heure est donc à la poursuite du mouvement, engagé depuis la fin de la conscription, de conjuguer la réponse aux besoins opérationnels avec la participation au service public de santé. La seconde étant la condition indispensable à une réponse de qualité et à la garantie pour nos soldats d’une prise en charge de haut niveau même en conditions dégradées. À travers cette demande d’habilitation, le Gouvernement entend approfondir pleinement cette logique qui a commencé à porter ses fruits.

2.  Les autres infrastructures

Le SSA dispose d’autres moyens contribuant à l’accomplissement de ses missions parmi lesquels :

– une capacité de recherche : l’institut de recherche biomédicale des armées (IRBA) dirige des programmes fondamentaux et appliqués selon les objectifs fixés par l’état-major. Il regroupe 425 chercheurs, praticiens, techniciens et personnels de soutien administratif et est à l’origine de près 200 publications scientifiques internationales par an. Le caractère dual des recherches biomédicales de défense bénéficie des liens étroits noués avec les universités et les centres hospitalo-universitaires. Toutes les activités de recherche du SSA auront été regroupées sur le site unique de Brétigny-sur-Orge à l’horizon 2017 ;

– des capacités de production : la pharmacie centrale des armées située près d’Orléans fabrique notamment des contre-mesures médicales (ex : les comprimés d’iode distribués aux personnes résidant autour des centrales nucléaires) et participe à la constitution du stock national (comme par exemple les comprimés antiviraux distribués en cas de pandémie grippale). Le SSA détient aussi une capacité de conception et d’assemblage des unités médicales opérationnelles (postes de secours, antennes chirurgicales, hôpitaux projetables, etc.) ;

– des moyens d’intervention en cas de crise sanitaire de très forte intensité, notamment dans le cadre des risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) mais également en cas de crise sanitaire majeure, comme l’a illustré la participation déterminante du SSA pour assurer la réponse française face à la pandémie Ébola ;

– une capacité de production de produits sanguins, avec le centre de transfusion sanguine des armées (CTSA), qui approvisionne en sang les forces armées en opérations et les hôpitaux militaires et dont le projet de loi traite à l’article 42.

3.  Le nouveau modèle hospitalier militaire

Le projet de service du SSA répond à une double contrainte : opérationnelle, liée à la projection, et budgétaire.

La contrainte économique

Le plan de transformation du SSA a suscité d’importantes économies, de l’ordre de 98,3 millions d’euros sur la période 2008-2015 (dont 17,9 millions d’euros d’économies de fonctionnement).

S’agissant des personnels, entre 2008 et 2015, l’objectif de déflation est de 659 ETP, réalisé à ce jour à hauteur de 90 %. Le reste est intégré dans la nouvelle trajectoire de déflation, déterminée par l’application de la loi de programmation militaire pour la période 2014- 2019.

Le nouveau modèle « SSA 2020 » conduira, à l’horizon 2020, à un SSA plus économe en fonctionnement de 42 millions d’euros par rapport à 2015, moins coûteux en infrastructure de 120 millions d’euros, et qui aura réalisé une déflation de 2000 personnels.

Afin de maintenir les capacités de projection et de recherche du service, cet objectif de diminution des moyens du SSA conduit à la transformation du service dans son ensemble et de l’offre hospitalière en particulier, que traduit le nouveau modèle de service « SSA2020 ». Dans ce cadre, les hôpitaux des armées doivent être conservés mais sont appelés à se reconfigurer en appliquant deux principes indissociables et complémentaires :

– celui de la concentration : en se recentrant sur les activités de soins et d’expertise indispensables à l’activité opérationnelle, en densifiant les moyens humains et matériels à leur consacrer et en se retirant autant que possible, de façon concertée, des activités étrangères au contrat opérationnel ;

– et celui de l’ouverture : grâce au développement simultané des synergies et des partenariats avec les établissements de santé dont ils sont proches.

L’offre hospitalière militaire deviendra plus compacte et l’hôpital militaire du Val-de-Grâce, en activité depuis 1796, devrait ainsi fermer d’ici à 2017. Les HIA restant seront classés en deux catégories, en fonction des impératifs opérationnels : les hôpitaux plateformes et ceux hors plateformes :

● Les premiers concentreront le panel de compétences indispensables aux soins des patients militaires. La prise en charge des blessés de guerre exige en effet que chacune de ces plateformes soit en mesure de disposer des moyens humains et matériels nécessaires aux projections d’unités médicales opérationnelles sur les théâtres d’opérations et aux évacuations médicales stratégiques.

Ces hôpitaux plateformes seront, en région parisienne, les HIA Percy et Begin, proches des hôpitaux de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris avec lesquels ils ont vocation à entretenir des liens étroits ainsi que, en région PACA, les HIA Laveran et Sainte-Anne. Parmi eux, les HIA Percy et Sainte-Anne ont été reconnus comme centres de traumatologie de niveau 1 dans l’offre de soins de leur territoire de santé.

Ces établissements se verront attribuer l’intégralité des missions de médecine hospitalière militaire et, prioritairement, la charge de répondre en premier au contrat opérationnel. Ils disposeront d’équipes médicales et chirurgicales immédiatement disponibles, en quantité comme en qualité, dans les spécialités correspondant aux besoins des forces armées projetées en opération extérieure. La collaboration avec les agences régionales de santé (ARS) et la concentration avec des équipes issues d’autres emprises devrait leur assurer un volume d’activité suffisant dans les spécialités clés. De plus, la projection de personnel sous court préavis ne perturbera que marginalement le fonctionnement de ces structures densifiées. En contrepartie, les spécialités non directement sollicitées par le déroulement des opérations (y compris dans le suivi post-opérations) devront, en concertation avec les ARS et les établissements de santé voisins, faire progressivement, si possible, l’objet d’un désengagement dans le respect de la cohérence de l’établissement et des besoins du territoire de santé.

● Les hôpitaux hors plateforme seront les HIA de Brest, Bordeaux, Metz et Lyon. Eux aussi sont proches d’établissements de santé, publics ou privés d’intérêt collectif, avec lesquels existe un dialogue souvent ancien. Leur avenir est envisagé dans une intégration très poussée au sein de l’offre de santé de leur territoire.

À la différence des hôpitaux de plateformes, ces hôpitaux n’auront pas à assurer l’ensemble des missions de médecine hospitalière militaire. Cependant, ils devront garantir la réponse aux besoins de soutien santé des unités militaires du territoire, aux besoins en expertise et enfin la constitution d’un réservoir de compétences pour la projection. Compte tenu de leur haut niveau d’intégration locale, ils ne feront pas nécessairement partie des capacités opérationnelles immédiatement disponibles. Toutefois, dans certaines situations, le SSA indique qu’ils pourront répondre en second au contrat opérationnel, essentiellement par la relève de structures médico-chirurgicales stabilisées dans la durée. La pérennité de l’identité militaire pour tout ou partie de ces structures ne semble donc pas assurée à long terme, quels que soient d’ailleurs les projets de rapprochement avec le secteur civil.

En somme, l’approche partenariale mise en avant par les ministères de la défense et de la santé semble une opération logique et cohérente : elle optimise les moyens publics et conditionne la transformation de la carte hospitalière du SSA. Il est donc logique d’aménager le cadre juridique entourant l’exercice de leurs activités par le SSA et les ARS afin d’accompagner la poursuite de réduction de fait de l’offre hospitalière engagée depuis la fin de la conscription.

B.  L’INSTITUTION NATIONALE DES INVALIDES, UN ACTEUR ORIGINAL AU STATUT ADAPTABLE

Créée par édit royal en avril 1674 afin d’accueillir les blessés des campagnes royales, l’INI dispose d’un statut original. Il ne s’agit ni d’un établissement de santé ni d’un démembrement du SSA mais bien d’un établissement public administratif. Il ne relève ni des ministères de la santé ou de la défense mais est placé sous la tutelle du ministre chargé des anciens combattants.

L’étude d’impact indique que les activités de l’INI souffrent de ne pas être rattachées au schéma régional d’organisation des soins (SROS) établi par l’ARS d’Île de France. Le projet de loi propose donc d’habiliter le Gouvernement à faire évoluer les missions de l’INI et son organisation, élargir sa gouvernance, afin de l’ancrer pleinement dans le schéma civilo-militaire issu du rapprochement du SSA avec les structures d’organisation de l’offre sanitaire civile.

1.  Un statut sui generis

La loi du 3 juillet 1991 modifiant le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre fait de l’institution nationale des Invalides un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé des anciens combattants (article L. 528 du code des pensions militaires). L’article L. 529 a confirmé ses missions historiques :

– accueillir dans le centre des pensionnaires, à titre permanent ou temporaire, les invalides bénéficiaires des dispositions de ce code (258) (1°) ;

– dispenser dans un centre médico-chirurgical des soins en hospitalisation ou en consultation, en vue de la réadaptation fonctionnelle, professionnelle ou sociale des patients, en premier lieu des bénéficiaires du code (259). À titre complémentaire, elle contribue au service public hospitalier, selon un dispositif dérogatoire du droit commun, ce qui, par essence, ne fait pas de l’INI une institution isolée ou déconnectée de l’offre de soins civile (2°) ;

– participer aux études et à la recherche sur l’appareillage des handicapés, via le centre d’études et de recherche sur les appareillages des handicapés (CERAH) (3°).

Son positionnement singulier se traduit par un statut juridique spécifique également développé dans deux autres codes : le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale. Il permet à l’institution de bénéficier de ressources diversifiées, qui proviennent principalement :

– du ministère de la défense, avec une subvention pour charge de service public versée par le programme 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » ;

– d’une dotation annuelle versée par le ministère de la santé pour les soins et les hospitalisations au profit des assurés sociaux. Cette dotation, dont le fondement réglementaire est le décret 2001-455 du 29 mai 2001, est basée sur les coûts de revient de l’Institution et sur le nombre de journées réalisées ;

– de recettes générées par l’activité du centre des pensionnaires (redevances des pensionnaires et forfait soins versé par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale – CNMSS) ;

– de recettes issues de l’activité de soins au bénéfice de ressortissants de l’article L. 115 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre ;

– de recettes provenant des mutuelles ou directement des patients (telles que le forfait journalier) ;

– de recettes générées par l’activité du CERAH (appareillage, essais, formation, etc.).

Cette structure budgétaire originale lui a permis d’accueillir tous les publics et de développer une politique partenariale originale.

1.  Un triple champ d’activité

Il se répartit conformément au statut issu de la loi de 1991.

● Le centre des pensionnaires

Le centre des pensionnaires est destiné aux grands invalides titulaires d’une pension militaire d’invalidité d’un taux minimum de 85 %. Les pensionnaires sont pris en charge par l’État moyennant une redevance (correspondant à 30 % de leur pension).

Il accueille des anciens combattants et victimes civiles – femmes et hommes – frappés par un lourd handicap. Ces personnes sont principalement éligibles au titre des combats de la Seconde guerre mondiale et des conflits d’Indochine et d’Algérie, des récentes opérations extérieures mais aussi d’actes de terrorisme : les catégories de publics prioritaires connaissent donc une forme de renouvellement. Outre la prise en charge médicale, le centre des pensionnaires assure un accompagnement paramédical quotidien, un projet de vie personnalisé, des animations, sans oublier le lien avec les familles et le monde militaire. Il s’agit d’un exemple de prise en charge global, permis par l’originalité de ses missions et de ses ressources, alliant sanitaire, social et médico-social.

● Le centre médico-chirurgical

Le centre médico-chirurgical assure en priorité les soins médicaux et chirurgicaux des pensionnaires, des anciens combattants et de l’ensemble du monde combattant. Il est aussi largement ouvert à des blessés civils.

Orienté vers la prise en charge des patients blessés médullaires, amputés ou cérébrolésés, il dispose d’un plateau technique de rééducation fonctionnelle, d’une piscine thérapeutique et d’un laboratoire spécialisé dans l’adaptation personnalisée de prothèses. Sa capacité d’accueil (70 lits et 10 places) se répartit entre trois services :

– le service de soins de suite et de réadaptation ;

– le service de chirurgie, dont le périmètre technique est strictement défini autour du handicap et plus particulièrement de la prise en charge des escarres ;

– l’unité sensori-cognitive (USC), chargée d’évaluer les troubles cognitifs et/ou sensoriels (pathologies neurodégénératives et neurosensorielles des patients cérébrolésés et des patients âgés) qui peuvent être à l’origine d’une perte d’autonomie.

● Le CERAH

Le CERAH, antérieurement rattaché à la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, est devenu une des trois composantes de l’INI. Ses travaux portent sur les domaines suivants :

– homologation des dispositifs médicaux et formation des vendeurs et distributeurs ;

– analyse de la marche des personnes amputées de membres inférieurs ;

– analyse des efforts de propulsion en fauteuil roulant manuel ;

– fabrication de prothèses/orthèses (pour les soldats blessés en opérations extérieures) ;

– mise à disposition des patients, des associations de personnes handicapées et des professionnels de données sur les aides techniques et les matériaux nouveaux.

2.  L’INI a noué de nombreux partenariats avec des établissements civils et militaires et s’inscrit dans de nombreux réseaux.

Le statut de forte autonomie de l’INI lui a permis de se lier contractuellement avec de nombreux acteurs et de s’inscrire dans des réseaux sanitaires régionaux.

● L’articulation avec le SSA est possible juridiquement et fluide dans les faits : l’INI est liée au SSA par un accord-cadre. Le directeur central du SSA siège à son conseil d’administration.

● En outre, l’INI a conclu des conventions interhospitalières avec de nombreux partenaires civils et militaires afin de traiter de domaines très divers parmi lesquels, par exemple :

– le soutien de l’activité de prise en charge médico-chirurgicale des escarres, y compris du suivi de toute la bactériologie particulièrement pointue dans ce type d’activité (convention avec l’HIA Begin et le centre hospitalier de Montreuil) ;

– des partenariats avec le Val-de-Grâce en neurologie et urologie ;

– des partenariats avec de nombreux hôpitaux franciliens civils : la Pitié Salpêtrière (unité sensori-cognitive), avec les hôpitaux de Garches, Lariboisière, Saint Louis ou encore, en matière de soins palliatifs, avec le centre Jeanne Garnier de l’Hôpital Léopold Bellan (Paris).

● L’INI s’est également inscrit dans des réseaux sanitaires. Le rapporteur relève ainsi, parmi d’autres illustrations :

– la participation au réseau COMETE (qui prévoit une prise en charge précoce des problématiques sociales et professionnelles des patients hospitalisés dans les établissements ou services de soins de suite et de réadaptation, spécialisés en médecine physique et de réadaptation) ;

– la mise en œuvre de consultations polio en lien avec le réseau polio en région ;

– sa participation active au réseau des blessés médullaires d’Île de France ;

– ou encore sa participation au réseau de prise en charge des traumatisés crâniens graves dans la région.

Ce constat confirme que le statut de l’INI lui a permis de s’adapter et de s’intégrer dans l’offre sanitaire et médico-sociale de la région. L’INI n’est donc pas un établissement isolé : cette institution a au contraire su faire évoluer son offre et s’inscrire dans de véritables partenariats. Cependant il s’agit aujourd’hui d’aller plus loin en concrétisant les complémentarités avec le SSA et les établissements de santé du territoire et en adaptant le droit applicable à l’INI découlant de la loi Santé permettant de mieux insérer l’établissement dans l’offre de soins régionale.

● À cet égard, l’analyse des statistiques de fréquentation de l’institution confirme ce constat selon lequel l’INI est un établissement pleinement intégré à l’offre de soins de sa région. Ainsi, la part des ayants droit, c’est-à-dire de personnes qui a priori auraient spontanément relevé de l’offre civile a crû au cours des dernières années, passant de 66,6 % en 2012 à plus de 69 % en 2014, ce qu’illustre les diagrammes ci-dessous.

Ensemble de l’INI :

Service de chirurgie :

MPR :

USC :

Légende :

L115 : bénéficiaires du CPMIVG ;

ACVG : anciens combattants non pensionnés ;

SSM : militaires ;

SSM AT : militaires accident présumé imputable au service (APIAS) ;

PCDEF : personnels civils du ministère de la défense ;

FAD : famille des précédentes catégories ;

NAD : assurés sociaux ;

AMB : ambassade.

Source : INI.

Dans le détail, l’exemple de la médecine physique et de réadaptation (MPR) dément lui aussi l’image d’une institution « fermée », illustrant au contraire son insertion dans une véritable chaîne de prise en charge. Le tableau et le diagramme ci-après montrent ainsi que les patients qui y sont pris en charge proviennent pour plus de la moitié du secteur hospitalier civil (94 sur 181 l’année dernière).

PROVENANCE DES PATIENTS DE MPR

Source : INI

L’origine géographique des patients confirme plus généralement l’insertion de l’INI dans l’offre de sanitaire francilienne : le tableau ci-après rappelle que près de 80 % des patients de l’INI sont franciliens.

ORIGINE GÉOGRAPHIQUE DES PATIENTS DE L’INI

Source : INI.

3.  Les relations de l’INI avec les régulateurs de l’offre de soins civile

L’intégration de l’INI à l’offre de soins en Ile-de-France repose également sur sa capacité à articuler son activité avec les orientations retenues par le ministère de la santé. Il existe des canaux de dialogue organisés avec la direction générale de l’offre de soins (DGOS) et l’ARS d’Ile-de-France.

● Au même titre que le directeur central du service de santé des armées, le directeur général de l’offre de soins (DGOS) du ministère de la santé est membre du conseil d’administration de l’Institution. Il se prononce donc, comme les autres membres du conseil, et participe aux délibérations et aux votes, en particulier sur les tarifs d’hospitalisation et le budget, un document qui comprend également le volume et le type d’activité. Un représentant de la DGOS participe aux réunions techniques préparatoires à chaque séance du conseil.

Le DGOS est en outre signataire du contrat d’objectifs et de performance, avec le représentant du ministère de la défense et le directeur de l’INI.

Enfin, c’est la DGOS qui fixe le montant de la dotation annuelle de financement (DAF) conformément au décret 2001-455 du 29 mai 2001 (un montant qui demeure figé depuis 2012).

● L’INI est également associée aux travaux de planification et d’organisation de l’offre de soins assurés par l’ARS d’Île-de-France. Par exemple, l’Institution a participé à l’élaboration du cahier des charges du SROS de la région en 2009. Réciproquement, l’ARS a été associée à la discussion du contrat d’objectifs et de performance, aux côtés de la DGOS. D’une certaine façon, le statut de l’INI lui a ainsi permis de s’intégrer plus facilement que le SSA à l’offre de santé civile.

De surcroît, l’ARS labellise ou autorise les activités de l’INI avec, par exemple : la confirmation en juin 2013 de la labellisation de la consultation mémoire de l’unité sensori-cognitive, ou encore l’autorisation du programme thérapeutique « Prévention des escarres et gestion de l’incontinence chez les personnes paraplégiques et/ou ayant d’autres atteintes neurologiques ».

Compte tenu de ces éléments le projet d’ordonnances apportera des évolutions visant à élargir la gouvernance de cette Institution pour tenir compte des collaborations nouvelles avec le SSA et le territoire de santé, celles rendues nécessaire par l’application de la loi Santé, enfin redéfinir pour partie ses missions et son organisation afin de tenir compte de l’évolution souhaitée de la prise en charge des anciens combattants et blessés en opérations et en particulier du stress post traumatique. Il ne semble pas nécessaire de modifier la structure de financement de l’Institution, ni la tutelle du ministère chargé des Anciens combattants, garante de son identité.

C.  L’ADAPTATION DE CES SERVICES AUX AVANCÉES DU PROJET DE LOI ET LA MODERNISATION DE LEURS STATUTS

La rédaction de l’article 55 est simple. Il se décompose en quatre alinéas, le premier rappelant classiquement que le Gouvernement sollicite une habilitation conformément à l’article 38 de la Constitution, le dernier alinéa prévoyant au terme de ce même article 38 le dépôt d’un projet de loi de ratification. Celui-ci sera déposé dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance.

L’essentiel des dispositions de cet article est donc contenu dans ses alinéas 2 et 3 et est divisé en deux sections ( et ). Elles comportent des dispositions très générales qu’il convient d’examiner en premier lieu avant d’en étudier la portée et la pertinence.

Le prévoit la mise en cohérence des dispositions législatives relatives au SSA et à l’INI avec celles issues du projet de loi.

Il s’agit d’une mesure de cohérence, qui permet d’affirmer que la médecine militaire se modernise de pair avec l’offre et l’organisation civiles. Cela suppose certainement des adaptations complexes sur le plan juridique. Toutefois, il aurait été possible de préciser, en amont, dans les documents de présentation du projet de loi l’éventuelle participation de ces services à certaines déclinaisons de la stratégie nationale de santé, par exemple au titre de la vigilance sanitaire ou encore de la création de l’institut national de prévention et d’intervention en santé : la lutte contre la pandémie Ebola a illustré le rôle indispensable du service de santé des armées dans la gestion des crises sanitaires dures. Pour autant, il semble cohérent d’adapter le droit pour prévoir l’insertion du SSA et de l’INI à ces nouveaux dispositifs.

Le prévoit des mesures bien plus générales portant sur l’organisation, le fonctionnement et les missions du SSA et de l’INI. Il prévoit également d’adapter les dispositions du code de la santé publique afin de favoriser l’articulation entre le SSA et l’INI et les services de droit commun, « et notamment le service hospitalier ». Il est précisé que ces adaptations sont soumises au respect des obligations particulières qu’assument le SSA et l’INI pour la défense nationale.

L’étude d’impact jointe au projet de loi expose le calendrier de transformation du SSA ainsi que la nécessité de l’insérer dans un nombre important de dispositifs : ces motifs d’urgence et de complexité justifient le recours aux ordonnances et, sur le fond, le projet semble tout à fait rationnel.

En revanche, cette même étude d’impact ne fournit pas d’élément explicite sur l’opportunité d’y recourir en ce qui concerne l’INI. Elle relève néanmoins que la transformation en cours de la médecine militaire prévoit d’inclure l’INI dans le vaste mouvement de recomposition de l’offre militaire sanitaire et médico-sociale, afin de faire de l’INI un référant médico-social et sanitaire d’une chaîne de prise en charge des blessés de guerre. C’est dans cette perspective que le ministère de la défense et le ministère de la santé ont souhaité conduire une réflexion qui doit aboutir à une modification du statut de l’INI, de nature à permettre son intégration dans la carte sanitaire régionale, non plus sur le fondement de son exception mais en tant que composante de droit commun. C’est donc dans un souci de cohérence que le projet de loi traite de l’INI dans son article 55 et non pas dans un article séparé, dans le cadre d’une proposition de modification législative classique.

Au moment de la rédaction du présent rapport, ces projets étaient encore à l’état d’étude et votre rapporteur n’a pas obtenu de réponse détaillée sur les intentions juridiques précises du Gouvernement sur ce point. Il est toutefois probable que les transformations envisagées pour les HIA comme pour l’INI visent à les rendre éligibles à l’ensemble des crédits alloués par les ARS aux établissements de santé et médico-sociaux. Autrement dit, l’intérêt et la pérennisation de ces établissements conduisent à envisager de les placer sous un statut mixte, civilo-militaire, avec la possibilité d’une tutelle partagée avec les autorités de santé, ce qui semble cohérent pour les HIA, mais moins évidemment nécessaire pour l’INI.

Inversement, le Gouvernement envisage de confier au ministère de la santé et notamment aux ARS une véritable mission de défense. Le régime des autorisations serait alors adapté aux missions spécifiques de défense.

En outre, le rapporteur soutient pleinement les démarches à l’étude visant à permettre aux HIA de participer à des groupements hospitaliers de territoires, gages d’une véritable pérennité. Ces ordonnances doivent également fournir l’occasion de faciliter la circulation des personnels entre établissements civils et militaires et rendre les actuels HIA pleinement éligibles aux crédits de santé publique.

Pour l’ensemble de ces raisons, confiant dans le schéma et la solidité du projet de transformation porté par le Gouvernement, le rapporteur apporte son soutien à la demande d’habilitation du Gouvernement telle qu’elle est formulée à l’article 55.

*

La Commission adopte l’article 55 sans modification.

*

Article 56
Habilitation à adapter par ordonnance les dispositions de la loi à l’outre-mer

Par cet article, le Gouvernement sollicite du Parlement, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, une habilitation à légiférer par voie d’ordonnance afin de modifier la législation sanitaire et sociale applicable outre-mer.

● Le du I donne au Gouvernement un délai de 18 mois pour :

– adapter les dispositions de la loi relative à la santé « aux caractéristiques et contraintes particulières » des collectivités soumises au principe d’identité législative, à savoir les départements d’outre-mer (DOM), Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon ;

– étendre et adapter ces mêmes dispositions aux collectivités soumises au principe de spécialité législative (autres collectivités d’outre-mer et Nouvelle-Calédonie), sous réserve que l’État y soit compétent dans les matières concernées.

Si le principe de spécialité législative suffit par construction à justifier le motif d’extension, le motif d’adaptation résulte, selon l’explication sommaire donnée par l’étude d’impact, du fait que « des écarts subsistent en matière de santé et de régime de sécurité sociale entre le droit métropolitain et le droit applicable [outre-mer] ».

Interrogé par le rapporteur, le Gouvernement a cité comme exemples :

– le fait que les régimes de sécurité sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte soient distincts du régime général ;

– l’absence d’assurance maladie à Wallis-et-Futuna, où la santé est une compétence d’État.

Le du I donne au Gouvernement le même délai pour étendre et adapter les dispositions du code de la santé publique – au-delà, donc, des seules mesures figurant dans la loi relative à la santé – aux caractéristiques et contraintes particulières de Mayotte et, « le cas échéant », de La Réunion.

S’agissant de Mayotte, « il s’agit pour le Gouvernement de parachever l’extension et l’adaptation de la législation en matière de santé et d’offre de soins à Mayotte, à laquelle a partiellement procédé l’ordonnance n° 2013-1208 du 24 décembre 2013 relative à l’adaptation du code de la santé publique à Mayotte. Ainsi, les dispositions en matière de débits de boisson, de tarif pharmaceutique, d’organisation des ordres professionnels devraient être alignées sur le droit commun national. » (réponse au questionnaire du rapporteur).

La même source précise que « La Réunion est prévue dans le champ d’habilitation en raison des organisations parfois communes aux deux départements : agence de santé de l’océan Indien, conseils de l’ordre interdépartementaux ».

La longueur du délai d’habilitation sollicité par le I est justifiée par la nécessité d’associer les collectivités concernées à un ensemble varié de mesures d’adaptation.

● Le délai d’habilitation sollicité par le II est plus bref, de seulement 12 mois.

Le du II habilite le Gouvernement à modifier la législation de sécurité sociale applicable à Mayotte, qu’il s’agisse :

– de l’organisation générale de la sécurité sociale ;

– de l’organisation de chacune des branches assurantielles (maladie, maternité, invalidité et décès) ;

– des « circuits comptables » de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte, qu’il s’agirait d’aligner sur les règles communes.

Le Gouvernement a indiqué au Rapporteur que cette habilitation est devenue sans objet, les mesures concernées ayant été adoptées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (article 32 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014).

Le du II permet au Gouvernement de rapprocher du droit applicable dans les DOM ou en métropole celui applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte en matière de sécurité sociale.

On peine quelque peu à voir spontanément, s’agissant de Mayotte, l’apport de ce 2° par rapport au 1° du II. Le Gouvernement a indiqué au rapporteur que « la rédaction est ici à la fois plus large et axée sur un alignement sur le droit commun national en matière de sécurité sociale : le Gouvernement pourra poursuivre le travail entamé en 2011 lors de la départementalisation de Mayotte. La rédaction au 1° du II devait permettre la réorganisation de la sécurité sociale opérée finalement en LFSS : la rédaction du 2° du II, axée sur un rapprochement sur le droit commun national, ne l’aurait pas permis. ».

S’agissant de Saint-Pierre-et-Miquelon, la demande d’habilitation est justifiée de la sorte : « En dépit du principe de l’identité législative applicable en la matière, Saint-Pierre-et-Miquelon n’est pas soumis au code de la sécurité sociale : ce sont des ordonnances et des décrets spécifiques qui sont applicables localement. Ces textes anciens n’ont pas évolué en même temps que les textes de référence applicables en métropole et dans les DOM. Cette habilitation doit donc permettre de mettre à jour ces textes particuliers au regard des évolutions du code de la sécurité sociale. ».

● Le III prévoit le dépôt d’un projet de loi de ratification de chacune des ordonnances six mois après sa publication.

*

La Commission adopte l’article 56 sans modification.

*

Article 56 bis
Volet ultramarin des statistiques sanitaires

Cet article a été introduit à l’initiative de notre collègue Monique Orphé et de plus de cinquante députés membres de la majorité, avec un avis favorable du rapporteur et du Gouvernement.

Il s’agit de prévoir qu’à partir du 1er janvier 2016, toute statistique sanitaire publiée par le ministère de la santé ou par des organismes dont il assure la tutelle, dès lors qu’elle est déclinée au niveau local, doit comporter des données chiffrées concernant les départements et les collectivités d’outre-mer.

*

La Commission examine l’amendement AS1482 de Mme Monique Orphé.

M. Gérard Sebaoun. L’amendement AS1482 vise à ce que, à partir du 1er janvier 2016, toute statistique déclinée au niveau local publiée par les services du ministère chargé de la santé ou par des organismes placés sous sa tutelle comporte des données chiffrées concernant les départements et les collectivités d’outre-mer.

M. Richard Ferrand, rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

*

Article 57
Habilitation à procéder par ordonnance aux coordinations nécessaires

Par le présent article, le Gouvernement sollicite du Parlement, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, une habilitation à légiférer par voie d’ordonnance dans un délai d’un an suivant la publication de la loi, afin d’en tirer les conséquences légistiques nécessaires, à savoir :

– la modification des parties législatives des codes et des dispositions législatives non codifiées, dans un objectif de cohérence des textes ;

– l’abrogation des dispositions législatives devenues sans objet.

Un projet de loi de ratification de chacune des ordonnances prises sur le fondement du présent article sera déposé sur le bureau de l’une ou l’autre des chambres, dans un délai de trois mois suivant la publication de l’ordonnance.

Compte tenu de la technicité de la matière, le recours aux ordonnances n’appelle en l’espèce aucun commentaire particulier.

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La Commission adopte l’article 57 sans modification.

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Titre du projet de loi

La Commission examine l’amendement AS1308 du Gouvernement.

Mme la ministre. Le titre actuel du projet de loi est trop général. L’amendement AS1308 vise à ce que l’objectif de « modernisation de notre système de santé » y apparaisse.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis la Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

* *

En conséquence, la Commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter le présent projet de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Haute autorité de santé (HAS)  Pr Jean-Luc Harousseau, président, et M. Dominique Maigne, directeur

Ø Table ronde sur la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé :

– Conférence nationale de santé (CNS) – Mme Bernadette Devictor, présidente

– Haut Conseil de la santé publique (HCSP) – M. Roger Salamon, président

– Société française de santé publique (SFSP) – Mme Catherine Bernard, vice-présidente

– Mme Claire Compagnon, auteure du rapport « Pour l’an II de la Démocratie sanitaire »

Ø Collectif interassociatif sur la santé (CISS)  M. Nicolas Brun, président d’honneur et coordinateur du pole protection sociale de l’Union nationale des associations familiales (UNAF), et M. Christian Saout, secrétaire général délégué

Ø Fédération nationale des observatoires régionaux de la santé (FNORS)  M. Alain Trugeon, ancien président et administrateur, directeur de l’OR2S Picardie, et Mme Hélène Martineau, déléguée

Ø Collège des directeurs généraux des Agences régionales de santé (ARS) Dr Jean-Yves Grall, président du collège des directeurs généraux, directeur général de l’ARS Nord-Pas-de-Calais, M. Philippe Calmette, directeur général de l’Agence régionale de santé du Limousin, M. Claude Evin, directeur général de l’ARS Île-de-France, et Mme Véronique Wallon, directrice générale de l’ARS Rhône-Alpes

Ø Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) – M. François Hébert, directeur général adjoint en charge des opérations, et Mme Carole Le-Saulnier, directrice des affaires juridiques et réglementaires

Ø Table ronde sur l’accès à la contraception :

– Association française pour la contraception (AFC) – Mme Elisabeth Aubeny, présidente

– Mouvement français pour le planning familial – Mme Danièle Gaudry, membre du bureau national

– Syndicat national des infirmier(e)s conseiller(e)s de santé (SNICS-FSU) – M. Christian Allemand et Mme Patricia François, co-secrétaires généraux

– Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs de santé (SNIES-UNSA)Mme Brigitte Accart, secrétaire générale, et Mme Sophie Martinat, secrétaire nationale

Ø Table ronde sur l’alcool et la politique de santé :

– Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA)Dr Alain Rigaud, président

– Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES)Dr Laure Com-Ruelle, directrice de recherche

– Institut de recherches scientifiques sur les boissons (IREB) – Dr Marie Choquet, psychologue et épidémiologiste, présidente du conseil scientifique, et Mme Nicole Leymarie, directrice générale

– Entreprise et préventionM. Alexis Capitan, directeur général

Ø Table ronde sur la politique de santé en milieu scolaire :

– Ministère de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – Direction générale de l’enseignement scolaireM. Roger Vrand, sous-directeur de la vie scolaire, des établissements et des actions socio-éducatives, et Mme Véronique Gasté, chef du bureau

– Pr Danièle Sommelet, pédiatre, auteur du rapport de 2006 « L’enfant et l’adolescent : un enjeu de société, une priorité du système de santé »

– Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU-UNSA-Éducation)Docteur Jocelyne Grousset, secrétaire générale

– Syndicat national autonome des médecins de l’éducation nationale (SNAMSPEN) – Dr Patricia Colson, secrétaire générale

– M. Didier Jourdan, professeur à l’université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand II

– Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES)Mme Sandrine Broussouloux, chargée de mission, Département appui aux acteurs et aux institutions, Direction de l’animation des territoires et des réseaux

Ø Table ronde sur la nutrition et santé :

– Professeur Serge Hercberg, professeur de nutrition à la faculté de médecine de Paris XIII, directeur de recherche à l’INSERM, président du plan national nutrition santé

– Fédération nationale des entreprises du commerce et de la distribution (FCD)* – M. Jacques Creyssel, délégué général, Mme Emilie Tafournel, responsable Qualité de la FCD, et Mme Fabienne Prouvost, directrice de la Communication et des Affaires publiques

– Association nationale des industries alimentaires (ANIA)*M. Jean-Philippe Girard, président, et Mme Catherine Chapalain, directrice générale

– Conseil national de l’alimentation (CNA)Dr Bernard Vallat, président, et Dr Véronique Bellemain, adjointe au président

– Union fédérale des consommateursQue choisir (UFC Que Choisir) – M. Olivier Andrault, chargé de mission Alimentation et nutrition

Ø Table ronde sur la lutte contre les ruptures d’approvisionnement de médicaments (articles 36 et 37) :

– Les entreprises du médicament en France (LEEM)* – M. Philippe Lamoureux, directeur général, M. Éric Baseilhac, directeur des affaires économiques et internationales, Mme Anne Carpentier, directrice des affaires pharmaceutiques, Mme Muriel Carroll, directrice des affaires publiques, et Mme Blandine Fauran, directrice juridique

– Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP) – M. Fausto Ferreira, président, M. Emmanuel Déchin, délégué général, et M. Hubert Olivier, trésorier

Ø Table ronde sur la réduction des risques liés à la drogue (260) :

– Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) – Mme Danièle Jourdain Menninger, présidente, Dr Gilles Lecoq, délégué, Dr Ruth Gozlan, chargée de mission Santé, Mme Catherine Ashworth, cheffe de cabinet, chargée de mission police nationale, Mme Katia Dubreuil, magistrat, chargée de mission Application de la Loi, et Mme Stéphane Idrac, chargée de mission communication information

– Observatoire Français des drogues et des toxicomanies (OFDT)M. François Beck, directeur

– Fédération AddictionJean-Pierre Couteron, président, Mme Nathalie Latour, déléguée générale, et M. Yann Bisiou, maître de conférences. Université Paul Valéry - Montpellier III

– Médecins du MondeDr Jean-François Corty, directeur des opérations France de Médecins du Monde, et Dr Jean-Pierre Lhomme, responsable de la mission Naloxone

– Association « Élus, santé publique et territoires » M. Laurent El Ghozi, président, président du CAARUD SIDA-Paroles

– Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) – Dr Patrizia Carrieri, chercheuse

– Pr Jean Costentin, membre de l’Académie de médecine

– Association française pour la réduction des risques liés aux usages de drogues (AFR)Mme Marie Debrus, présidente

Ø M. Didier Tabuteau, conseiller d’État, responsable de la Chaire santé de sciences po, professeur associé et co-directeur de l’Institut Droit et Santé de l’Université Paris Descartes

Ø Table ronde sur l’assurance complémentaire :

– Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP)M. Jean Paul Lacam, délégué général, Mme Evelyne Guillet, directrice santé, et Mme Miriana Clerc, directrice de la communication

– Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA)M. Norbert Bontemps, président du comité Maladie-accidents, M. Alain Rouché, directeur santé, Mme Véronique Cazals, conseillère santé, M. Stéphane Pénet, directeur des assurances de biens et de responsabilité, M. Jean- Paul Laborde, directeur des affaires parlementaires et Mme Anne-Marie Papeix, chargée de mission, direction des assurances de biens et de responsabilité

– Fédération nationale de la mutualité française (FNMF)M. Stéphane Junique, vice-président, M. Jean-Martin Cohen Solal, délégué général, M. Olivier Bachellery, directeur adjoint à la direction de la santé, et Mme Isabelle Millet-Caurier, directrice des affaires publiques

Ø Table ronde réunissant des médecins :

– Confédération des syndicats médicaux de France (CSMF)M. Jean-Paul Ortiz, président

– Fédération des médecins de France (FMF) – M. Jean-Paul Hamon, président

– Syndicat des médecins généralistes (MG France) – Dr Claude Leicher, président, Dr Martine Langlois, vice-présidente, et Dr Gilles Urbejtel, trésorier

– Le Bloc Drs Jean Marty et Jérôme Vert, coprésidents, et Dr Xavier Gouyon-Beauchamps, secrétaire général

Ø Table ronde réunissant des syndicats de médecins hospitaliers :

– Avenir hospitalier Dr Nicole Smolski, présidente, Dr Michel Salom, président du Syndicat national de gérontologie clinique (SNGC)

– Coordination médicale hospitalière (CMH) – M. Thévenin Didier, membre du bureau et président du SNRMH, et M. Remy Couderc, secrétaire général

– Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH)Dr Jacques Trevidic, secrétaire général, Dr Marc Bétremieux, et Dr Denis Cazaban

– Intersyndicat national des praticiens hospitaliers(INPH) - Dr Rachel Bocher, présidente, Dr Michel Triantafyllou et Dr Bertrand Diquet, professeur praticien en pharmacologie au CHU d’Angers

– Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (SNAM-HP) Pr Sadek Beloucif, président, et Dr Christophe Segouin, secrétaire général

Ø Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM)Dr Patrick Bouet, président, Dr Jacques Lucas, Vice-président, délégué général aux systèmes d’information en santé, et M. Francisco Jornet, directeur des services juridiques

Ø Audition commune « pédiatrie » :

– Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA) – Dr Nathalie Gelbert, présidente

– Association Sparadrap – Dr Catherine Devoldère, présidente, responsable de l’unité d’onco-hématologie-immunologie du CHU d’Amiens

 Syndicat national des médecins de la protection maternelle et infantile (SNMPMI) – M. Pierre Suesser, président

 Syndicat national des pédiatres français (SNPF) – Dr Francis Rubel, président

Ø Table ronde réunissant des syndicats d’étudiants en médecine :

– Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF)M. Sébastien Foucher, président, M. François-Antoine Casciani, vice-président

– Inter syndicat national des chefs de clinique assistants des hôpitaux de ville de facultéMme Florence de Rohan Chabot, présidente, et Dr Sébastien Mirek, vice-président

– Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG) M. Pierre-Antoine Moinard, président

– Intersyndicat national des internes (ISNI) – M. Mickael Benzaqui, président, Mme Camille Jantzi, vice-présidente

– Syndicat national des jeunes médecins généralistes – Dr Théo Combes, président

– Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) – M. Jacques Olivier Dauberton, président, et Mme Julie Marcus, vice-présidente

Ø Table ronde sur les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD), VIH et hépatites virales :

– Conseil national du Sida (CNS) – Pr Patrick Yeni, président du Conseil national du sida, et M. Laurent Geffroy, conseiller-expert auprès du CNS

– AIDES – M. Stéphane Simonpietri, directeur animation réseau

– ACT UP-Paris – Mme Laure Pora

– Groupe interassociatif traitements & recherche thérapeutique (TRT5) Mme Nelly Reydellet, chef de service du Kiosque Info Sida et responsable des programmes de dépistage, et Dr Michel Ohayon, directeur du 190 (Sida-Info-Service)

– SOS Hépatites – M. Michel Bonjour, président

Ø Association nationale de défense des victimes de l’amiante (ANDEVA) – M. Michel Parigot, vice-président, Mme Marie-José Voisin, trésorière, et M. Pierre Bernardini, membre d’un groupe de travail sur la prévention

Ø Table ronde sur les mesures législatives de mise en œuvre du programme national de réduction du tabagisme :

– Institut de veille sanitaire (InVS) – Pr François Bourdillon, directeur général, et M. Mili Spahic, chargé de mission auprès du directeur général

– Office français de prévention du tabagisme (OFT) – Pr Bertrand Dautzenberg, président

– Alliance contre le tabac – M. Yves Bur, président, et Mme Clémence Cagnat-Lardeau, directrice

– Association nationale des sages-femmes tabacologues – Mme Conchita Gomez, présidente, et Pr Michel-Henri Delcroix, président de Appri-Maternité sans tabac

– Confédération des buralistes de France – M. Pascal Montredon, président, M. Jean-Paul Vaslin, directeur général, et M. Jean-Luc Renaud, secrétaire général

Ø Table ronde sur « les usagers des soins psychiatriques » (art. 13) :

– Fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie (FNAPSY) – Mme Claude Finkelstein, présidente, et M. Irénée Skotarek

– Union nationale des amis et familles de personnes malades et/ou handicapées psychiques (UNAFAM) – M. Michel Girard, vice-président

Ø Table ronde sur « les usagers des soins psychiatriques » (art. 13) :

– Union nationale Groupe d’entraide mutuelle (GEM) France – Mme Maïté Arthur, présidente, et Mme Anne-Marie Schnellmann, trésorière et présidente du GEM Forts Ensemble à La Seyne sur Mer

– Cercle de réflexion et de proposition d’actions sur la psychiatrie (CRPA) – M. André Bitton, président, et Mme Yaël Frydman, secrétaire

Ø Table ronde sur « l’organisation des soins psychiatriques » (art. 13) :

– Dr Jean-Luc Roelandt, psychiatre, responsable d'un secteur de psychiatrie de la banlieue Est de Lille

– Conférence nationale des présidents et vice-présidents de Commissions médicales d'établissement des Centres hospitaliers spécialisés (CME-CHS) – Dr Christian Müller, président

– Inspection générale des affaires sociales – M. Roland Cecchi-Tenerini, inspecteur général, co-auteur du rapport IGAS « Missions et organisation de la santé mentale et de la psychiatrie »

Ø Table ronde sur « la pauvreté et l’accès aux soins » :

– Médecins du monde – Dr Thierry Brigaud, président, et Dr Jean-François Corty, directeur de la Mission France

– Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS) – M. François Bregou, responsable du Service Stratégie et Analyse des Politiques Publiques

– Comité médical pour les exilés (COMEDE)Dr Pascal Revault, directeur opérationnel, et M. Didier Maille, responsable du service social et juridique

– Fédération nationale des samusociaux – Dr Martine Wonner, directrice médicale du samusocial de Paris

Ø Table ronde des juristes sur l’action de groupe :

– Me Alain Gorny, avocat associé du cabinet Lexcase

– Mme Anne Laude, professeur agrégé des facultés de droit, co-directricee de l’Institut droit et santé de l’Université Paris Descartes

– M. Daniel Mainguy, agrégé des facultés de droit, professeur à l'université de Montpellier

– M. Benoît Javaux, avocat counsel, cabinet August & Debouzy

 M. Jean-Louis Fourgoux, avocat associé du cabinet Fourgoux et associés

 M. Jean-Christophe Coubris, cabinet Coubris, Courtois & Associés

Ø Table ronde des fédérations de santé :

– Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP) – M. Yves-Jean Dupuis, directeur général et M. David Causse, coordonnateur du Pôle santé social

 Fédération hospitalière de France (FHF)M. Gérard Vincent, délégué général, M. Cédric Arcos, directeur de cabinet

 Fédération hospitalière privée (FHP)M. Lamine Gharbi, président, Mme Élisabeth Tome-Gertheinrichs, déléguée général et Mme Béatrice Noëllec, responsable des relations institutionnelles et de la veille sociétale

Ø Table ronde réunissant des pharmaciens d’officines :

– Conseil national de l’ordre des pharmaciens* M. Alain Delgutte, président du Conseil central des Pharmaciens d’officine, M. Jean-Pierre Paccioni, Président du Conseil central des Pharmaciens de l’industrie et M. Jean-Charles Rochard, Secrétaire Général

– Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) – M. Philippe Gaertner, président, M. Pierre Fernandez, directeur général

– Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) – M. Gilles Bonnefond, président, et Mme Marie-Josée Auge-Caumon, conseillère à la présidence

– Union nationale des pharmacies de France (UNPF) – M. Jean-Luc Fournival, président, M. Éric Myon, secrétaire général, et M. Jean-Paul Kauffmann, trésorier

Ø Table ronde des sages-femmes :

– Conseil national de l’ordre des sages-femmes*Mme Marie-Josée Keller, présidente, Mme Marianne Benoît Truong Canh, vice-présidente et M. Jean-Marc Delahaye, chargé des relations institutionnelles

– Organisation nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF) – Mme Caroline Raquin, présidente, et Mme Laurence Vayer, membre du Conseil d'administration

– Union nationale et syndicale des sages-femmes – Mme Chantal Birman, membre de l’UNSSF, vice-présidente de l’Association nationale des sages-femmes orthogénismes (ANSFO), et Mme Prisca Wetzel, membre de l'UNSSF, titulaire du CA

Ø Fédération nationale des associations d’aides-soignants – M. Denis Fischer, vice-président

Ø Table ronde des syndicats infirmiers :

 Coordination nationale infirmière (CNI) – Mme Laurette Mira, vice-présidente, et Mme Sandrine Bouichou, secrétaire adjointe

 Syndicat national des infirmiers et infirmières libéraux (SNIIL) – M. John Pinte, vice-président du Sniil

 Syndicat National des Professionnels Infirmiers (SNPI) – M. Thierry Amouroux, secrétaire général, et Mme Anne Larinier, trésorière

Ø Haut Conseil des professions paramédicales Mme Dominique Acker, présidente, inspectrice générale des affaires sociales, Mme Michèle Lenoir-Salfati, sous-directrice des ressources humaines du système de santé à la DGOS, M. Guy Boudet, chef du bureau de l’exercice, déontologie et développement professionnel continu à la DGOS et Mme Carole Merle, adjointe au chef du bureau de l’exercice, déontologie et développement professionnel continu à la DGOS

Ø Audition commune :

– Établissement français du sang M. François Toujas, président, de Mme Karine Bornarel, directrice adjointe des Affaires Juridiques, et de M. Jean-Marc Ouazan, son directeur de Cabinet

– Fédération française pour le don du sang bénévole M. Roger Praile, président fédéral, et M. Michel Monsellier, membre de la Commission des Relations Transfusionnelles de la FFDSB

Ø Table ronde sur l’accès aux données de santé :

– M. Didier Sicard, président du comité d’experts de l’Institut des données de santé

 Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)* – M. Edouard Geffray, secrétaire général, Mme Délia Rahal-Löfskog, chef du service Santé, et Mme Tiphaine Inglebert, conseillère pour les questions institutionnelles et parlementaires

– Etalab M. Henri Verdier, administrateur général de données, directeur, et Mme Laure Lucchesi, directrice adjointe

– Institut des données de santé (IDS) – M. Christian Babusiaux, président, et M. Richard de Cottignies, directeur

– Inspection générale des affaires sociales (IGAS) – M. Pierre-Louis Bras, auteur du rapport sur la gouvernance et l’utilisation des données de santé

– Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) – M. Franck Von Lennep, directeur

– Union fédérale des consommateurs – Que choisir (UFC Que Choisir) – M. Mathieu Escot, responsable adjoint des études

Ø Audition commune sur le thème de la santé au travail :

– Syndicat national des professionnels de la santé au travail (SNPST) Dr Jean-Michel Domergue, membre du Bureau National

– Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) – M. Hervé Lanouzière, directeur général

Ø Fédération des associations de surveillance de la qualité de l’air ATMO France) – M. Bernard Garnier, président, vice-président d’Air Pays de la Loire, M. Damien Cuny, membre du bureau, vice-président d'ATMO Nord Pas de Calais, et Mme Anne Laborie, secrétaire générale

Ø Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé) M. Michel Gagneux, président

Ø Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (SNITEM) M. Éric Le Roy, directeur général, et M. François-Régis Moulines, directeur des affaires gouvernementales et de la communication

Ø Table ronde sur « les personnes handicapées » :

– Association nationale des directeurs de MDPH (ADMDPH) – Mme Patrizia Gubiani-Banholzer, administratrice et directrice de la MDPH du Haut-Rhin

– Association des paralysés de France (APF) – Mme Pascale Ribes, vice-présidente, et Mme Amaëlle Penon, conseillère nationale Santé et médico-social

– Agence régionale de santé (ARS) du Limousin – M. Philippe Calmette, directeur général

– Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH)M. Philippe Chazal, vice-président

– Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (UNAPEI) – Mme Aude Bourden, responsable du service travail, éducation, politiques publiques de santé, et M. Pierre Lagier, vice-président et président de la commission handicap mental et santé - accès aux soins des personnes handicapées mentales

Ø Table ronde sur « le parcours de soin des personnes âgées » :

– Conférence nationale des directeurs d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (CNDEHPAD) – Mme Emmanuelle Gard, directrice de la Fondation Aulagnier

– Comité national des retraites et des personnes âgées (CNRPA) – M. Sylvain Denis, vice-président

– Croix-Rouge française – Mme Murielle Jamot, déléguée nationale des personnes âgées et domicile et Mme Carole Daoud, directrice de la santé et de l’autonomie

– Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA) – Mme Françoise Toursiere, directrice

– Syndicat national des établissements et résidences privées pour personnes âgées (SYNERPA) – Mme Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale, et M. Éric Fregona, responsable médico-social

– Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA)M. Romain Gizolme, directeur

Ø Conseil national de l’ordre des infirmiers – M. Didier Borniche, président, Mme Sonia Ferré, vice-présidente

Ø Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) – M. Didier Houssin, président du Conseil d’administration, M. Marc Mortureux, directeur général, et Mme Alima Marie, directrice de l’information, de la communication et du dialogue avec la Société

Ø Le Défenseur des droits – M. Jacques Toubon, Défenseur des droits, Mme Rachel Moutier, juriste au pôle santé, M. Vincent Lewandowski, chef de pôle au Département de la promotion des droits et de l’égalité, et Mme Martine Timsit, conseillère parlementaire du Défenseur

Ø Association des directeurs d’action sociale et santé des Conseils généraux (ANDASS) – M. Stéphane Césari, directeur général adjoint chargé de la vie sociale au Conseil général de l’Isère, Mme Anne-Claude Lamur-Baudreu, directrice générale adjointe des solidarités au Conseil général de la Drôme, Dr Laurence Leconte, chargée de la stratégie santé au Conseil général du Nord, et Mme Françoise Simon, directrice de l’enfance et de la famille au Conseil général de Seine-Saint-Denis

Ø Audition commune sur « les centres, maisons et pôles de santé » :

– Fédération nationale des centres de santé (FNCS) – Dr Richard Lopez, président

– Fédération française des maisons et pôles de santé (FFMPS) – M. Pierre de Haas, président

– Union syndicale des médecins de centres de santé (USMCS) – Dr Frédéric Villebrun, secrétaire général, et Dr Alain Beaupin, membre du bureau

Ø Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) – M. Housseyni Holla, directeur, et M. Max Bensadon, directeur adjoint, chef du service Architecture et Production Informatiques

Ø M. Olivier Poulet, avocat au Barreau de Rennes

Ø Groupe Carrefour – M. Jérôme Bedier, secrétaire général, M. Hervé Gomichon, directeur Qualité, et Mme Nathalie Namade, directrice Affaires publiques

Ø Groupe E. Leclerc – M. Michel-Edouard Leclerc, président du Mouvement E.Leclerc, M. Alexandre Tuaillon, chargé de mission auprès du président, M. Aristide Luneau, directeur associé Interel, et M. Philippe Seligman, directeur de la communication

Ø Inspection générale des affaires sociales (IGAS) – M. Etienne Marie, Mme Juliette Roger, co-auteurs du rapport sur le tiers payant pour les consultations de médecine de ville

Ø Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) – M. Igor Busschaert, secrétaire général, et M. Christian Anastasy, directeur général

Ø Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS) – M. Nicolas Revel, directeur général, M. Etienne Grass, directeur de Cabinet de M. Revel, Mme Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la Direction déléguée à la gestion et à l'organisation des soins, M. Olivier de Cadeville, directeur de la Direction déléguée aux opérations, Mme Véronika Levendof, responsable du Département Juridique, et Mme Dominique Polton, conseillère auprès de M. Revel

Ø Table ronde réunissant des associations d’usagers du système de santé agréées sur l’action de groupe :

– Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) – M. Karim Felissi, conseiller national

– Union fédérale des consommateurs – Que choisir (UFC Que Choisir) – M. Nicolas Godfroy, responsable du département juridique

– Collectif interassociatif sur la santé (CISS) – Mme Marianick Lambert, administratrice

– Collectif Europe et médicament – M. Pierre Chirac, membre actif du collectif, Mme Sophie Le Pallec, présidente d'Amalyste, et Me Martine Verdier, conseil d'une association de victimes

– Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) – M. Vincent Perrot, animateur santé, représentant CLCV pour ce qui concerne le domaine de la santé

Ø Audition commune :

– Ministère de la défense – Service de santé des armées – M. le médecin général des armées Jean-Marc Debonne, directeur central du service de santé des armées, et M. le médecin général inspecteur Rémy Meesemaecker, adjoint "Ressources spécialisées" au directeur

– Institution nationale des Invalides – M. le médecin général inspecteur Jack Dorol, directeur, et M. le lieutenant-colonel Joël Orvoën, adjoint au directeur

Ø Les entreprises du médicament (LEEM)* – M. Philippe Lamoureux, directeur général, Mme Blandine Fauran, directrice des affaires juridiques, et Mme Muriel Carroll, directeur des affaires publiques

Ø Table ronde des collectivités territoriales :

– Assemblée des communautés de France (AdCF) – Mme Geneviève Darrieussecq, membre du Conseil d'administration de l'AdCF, présidente de Marsan Agglomération (Landes), M. Christophe Bernard, secrétaire général, et M. Bernard Moncoucy, directeur de cabinet au Marsan Agglomération

– Assemblée des départements de France (ADF) – M. Jean-Pierre Hardy, directeur des affaires sociales

– Association des maires ruraux de France (AMRF) – M. Vanik Berberian, président

– Association des maires villes et banlieues de France (Ville & Banlieue) – Mme Catherine Arenou, première vice-présidente, maire de Chanteloup les Vignes (78)

– Association nationale des élus de la montagne (ANEM) – Mme Sophie Dion, députée de la Haute Savoie, et Mme Marie-Noëlle Battistel, députée de l’Isère et secrétaire générale de l’ANEM, et M. Pierre Bretel, délégué général de l’ANEM

– Association des petites villes de France (APVF)* – M. Antoine Homé, maire de Wittenheim, et M. Erwann Calvez, chargé de mission

– Élus, Santé Publique et Territoire, M. Laurent El Ghozi, président

Ø Table ronde des syndicats des salariés de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) et de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES:

– Syndicat National Autonome du Personnel de l’InVS (Snapi) :  Mme Blandine Vacquier, présidente du Syndicat National Autonome du Personnel de l’InVS (SNAPI), M. Loïc Rambaud, chargé d’études scientifiques à l’InVS, et M. Edouard Chatignoux, chargé de projets scientifiques à l’InVS

– Syndicat CGT-InVS : Mme Mathilde Pascal, représentante du personnel au comité Technique, travaillant au Département Santé environnement, et Mme Béatrice Jaillant, représentante du personnel au comité Technique, travaillant au Système des Services d'information

– Syndicat UNSA de l'INPES : Mme Annick Fayard, chargée d'expertise scientifique, et Mme Sandra Garnier, chargée de mission relations extérieure

– Syndicat UNSA - EPRUS : - M. Jean-Michel Sap, responsable administratif et financier, Pôle Réserve Sanitaire

– Syndicat CGT – EPRUS : M. Laurent Théveniaud, pharmacien, Etablissement Pharmaceutique

Ø Audition commune : la création d’un institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique :

– Institut national de veille sanitaire (InVS) – M. François Bourdillon, directeur général, M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint de l’InVS, et M. Mili Spahic, chargé de mission auprès du directeur général

– Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) – M. Marc Meunier, directeur général

– Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) –M. François Bourdillon, directeur général par intérim, et M. Mili Spahic, chargé de mission auprès du directeur général

Ø Mouvement des entreprises de France (MEDEF)*  M. Jean-Marc Lamère, représentant du MEDEF au HCAAM et président du Comité santé-assurances maladie du MEDEF, Mme Delphine Benda, directrice de la protection sociale, et Mme Emeline Touzet, chargée de mission à la Direction des affaires publiques

Ø Association nationale des centres hospitaliers locaux (ANCHL) – M. Dominique Colas, président, et Dr Pascal Gendry, président de l’Association nationale des médecins généralistes d’hôpital local (AGHL)

Ø Association des établissements participant au service public de santé mentale (ADESM) – M. Joseph Halos, président, M. Gilles Moullec, directeur du Centre Hospitalier Edouard Toulouse de Marseille, M. Pascal Mariotti, directeur du Centre Hospitalier Alpes-Isère de Grenoble, et M. Antoine Pacheco, directeur du Centre Hospitalier Esquirol de Limoges

Ø Audition conjointe :

– Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) – Mme Catherine Mojaïsky, présidente, et M. Jean-Marc Yvernogeau, directeur

– Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes – M. Christian Couzinou, président

– Syndicat national des chirurgiens-dentistes de centres de santé (SNCDCS) – Dr Dominique Jasseron, présidente, et Dr Fabien Cohen, secrétaire général

Ø Syndicat des manageurs publics de santé (SMPS)M. Jérémie Sécher, président, et Mme Elodie Chapel, déléguée nationale

Ø SEITA* – M. Eric Sensi, directeur des affaires corporate et Mme Clémence Rouquette, chargée des affaires publiques

Ø Japan Tobacco International France – M. Daniel Sciamma, président, M. Benoît Bas, directeur Corporate Affairs et Communications, et M. Jean-Philippe Daniel, directeur associé de Lysios Public Affairs

Ø Table ronde sur la santé environnementale :

– Mme Francelyne Marano, professeure émérite à l’université Paris-Diderot, présidente de la société française de santé et environnement, vice-présidente de la Commission spécialisée Risques liés à l’environnement (CSRE) du Haut Conseil de la santé publique, et M. Robert Barouki, professeur de Biochimie Université Paris Descartes, directeur de l’unité Inserm 1124 de Toxicologie et Pharmacologie, coordonnateur de l’Initiative Française de Recherche en Environnement et Santé des alliances de recherche

– Association France nature environnement* – Mme Marie-José Cambou, secrétaire nationale, pilote du réseau santé environnement, et M. Adrien Brunetti, coordinateur du réseau santé environnement

– Alliance des maladies environnementales émergentes (AM2E) – M. Geoffrey Begon, porte-parole, et M. Didier Lambert, président d'E3M, association membre de l'AM2E

– Réseau Environnement Santé – M. André Cicolella, président

Ø Table ronde sur l’accès aux données de santé par les acteurs privés :

– CELTIPHARM – M. Jean-Yves Robin, conseiller, et Mme Amandine Galliou, chargée de projet

– LESISS – M. Régis Sénégou, président

– SYNTEC NUMÉRIQUE – M. Christophe Richard, directeur médical, médecin de l’hébergeur (Santeos), président du Groupe de travail Open data en santé du Comité Santé de Syntec Numérique

Ø Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers – M. Loic Massardier, président, M. Irving Montorier, premier vice-président en charge de l'enseignement supérieur

Ø Audition commune – Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes :

– Direction de la sécurité sociale (DSS) – M. Thomas Fatome, directeur, Mme Charlotte Bouzat, chef de la mission de la coordination et de la gestion du risque maladie, et Mme Géraldine Duverneuil, chef du bureau de la couverture maladie universelle et des prestations de santé

– Direction générale de la santé (DGS) – M. Benoît Vallet, directeur général, et Mme Magali Guegan, juriste

– Direction générale de l’offre de soins (DGOS) – M. Jean Debeaupuis, directeur général, et M. Philippe Chiesa, adjoint à la sous-directrice de la stratégie et des ressources, chef du bureau par intérim synthèse stratégique et appui au pilotage

– M. Pierre Ricordeau, secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales, et Mme Natacha Lemaire, cheffe de service au SGMAS, M. Philippe Burnel, délégué à la stratégie des systèmes d'information de santé (DSSIS)

Ø Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile (FNEHAD) – Dr Elisabeth Hubert, présidente, Ancien Ministre, M. Éric Ginesy, délégué national, Mme Maud Robert, chargée de mission, et Mme Anne Dabadie, chargée de mission

Ø Réseau Français des Villes-Santé OMS Mme Charlotte Marchandise-Franquet, présidente, maire adjointe, déléguée à la santé et à l'environnement, Ville de Rennes

Ø Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) Mme Anne-Marie Brocas, inspectrice générale des affaires sociales, présidente, et Mme Sandrine Danet, chargée de mission expert au HCAAM

Ø Conférence nationale des Directeurs de Centre Hospitalier (CNDCH) Mme Zaynab Riet, présidente et directrice de l’EPS de Ville Evrard Neuilly sur Marne, et M. Denis Frechou, membre du bureau et directeur des Hôpitaux de Saint-Maurice

Ø Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) M. Serge Perrot, vice-président, Mme Carole Samia Robert, présidente de l’Association fibromyalgie France, et Mme Catherine Sebire, vice-présidente de l’Association francophone pour vaincre les douleurs (AFVD)

Ø Conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes  Mme Pascale Mathieu, présidente, M. Jacques Vaillant, vice-président, M. Jean-François Dumas, secrétaire général, et M. Thibaut Bousquet, consultant

Ø Conférence des Présidents de CME de CHU – Pr Guy Moulin, président

Ø AFM-Téléthon – M. Christophe Duguet, directeur des Actions Revendicatives

Ø Conférence nationale des PCME des hôpitaux généraux – Monsieur le docteur Frédéric Martineau, président de la Conférence Nationale des Présidents de CME de Centres Hospitaliers et président de CME du Centre Hospitalier de la Côte Basque, et Monsieur le docteur Bernard Garrigues, vice-président de la Conférence Nationale des Présidents de CME de CH et président de CME du Centre Hospitalier Pays d'Aix

Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () M. Alain Cordier, « Un projet global pour la stratégie nationale de santé : 19 Recommandations du comité des « sages », 21 juin 2013.

2 () M. Édouard Couty, « Le pacte de Confiance pour l’hôpital : synthèse des travaux », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, mars 2013.

3 () Claire Compagnon, « Pour l’an II de la démocratie sanitaire », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, février 2014.

4 () Mme Bernadette Devictor, « Le service public territorial de santé (STSP), le service public hospitalier (SPH) : développer l’approche territoriale et populationnelle de l’offre en santé », Rapport, mars 2014.

5 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

6 () http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/150212_PNRT-Complet-V_DEF_2_.pdf.

7 () Directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE.

8 () Mme Bernadette Devictor, « Le service public territorial de santé (SPTS), le service public hospitalier (SPH) : développer l’approche territoriale et populationnelle de l’offre en santé », Rapport, mars 2014.

9 () Prévue par l’article 42 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015, cette exonération entrera en vigueur le 1er juillet 2015.

10 () Édouard Couty, « Le pacte de Confiance pour l’hôpital : synthèse des travaux », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, mars 2013.

11 () Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

12 () Loi n° 2014-344 relative à la consommation.

13 () Ce qui ne sera sans doute pas le cas, plusieurs mesures pouvant figurer dans la même ordonnance.

14 () Décision n° 2004-510 DC du 20 janvier 2005, Loi relative aux compétences du tribunal d’instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance.

15 () Décision n° 76-72 DC du 12 janvier 1977, Loi autorisant le Gouvernement à modifier par ordonnances les circonscriptions pour l’élection des membres de la chambre des députés du territoire français des Afars et des Issas.

16 () Décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l’adoption de la partie législative de certains codes.

17 () Décision n° 2004-506 DC du 2 décembre 2004, Loi de simplification du droit.

18 () Professions réglementées : pour une nouvelle jeunesse, octobre 2014 :

19 () http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i3968.pdf.

20 () En conséquence, le b) du 2° du II met le deuxième alinéa de l’article L. 3353-3 du code de la santé publique en cohérence avec ces modifications. Cet article réprime un cas de récidive d’une peine d’un an emprisonnement et de 15 000 euros d’amende : or cette peine n’est pas supérieure aux nouvelles peines auxquelles renvoie l’article L. 3353-4. Ces sanctions sont remplacées par le doublement du maximum des peines encourues, ce qui rend plus opérante la sanction de la récidive.

21 () http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/150212_PNRT-Complet-V_DEF_2_.pdf

22 () Directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE.

23 () L’amendement AS1408 est devenu l’article 5 decies, dont le commentaire figure infra pour des raisons légistiques.

24 () Car la directive n’oblige pas à interdire la publicité par affichage, ni à interdire la publicité des produits ne contenant pas de nicotine.

25 () Décret n° 2013-414 du 21 mai 2013 relatif à la transparence des avantages accordés par les entreprises produisant ou commercialisant des produits à finalité sanitaire et cosmétique destinés à l’homme.

26 () Cet article prohibe la publicité de produits imitant le tabac (typiquement, les cigarettes en chocolat).

27 () Précité, pages 13 et 14.

28 () Ainsi de l’abrogation en 1987 d’un décret interdisant la vente de seringues en pharmacies sans présentation d’une pièce d’identité (décret du 13 mars 1972 réglementant le commerce et l’importation des seringues et aiguilles destinées aux injections parentérales en vue de la lutte contre l’extension de la toxicomanie).

29 () Par exemple, la circulaire n° 72 du 9 novembre 1993 de la direction générale de la santé a permis les premières prescriptions de méthadone aux usagers d’héroïne, avant même que cette substance n’obtienne d’autorisation de mise sur le marché en mars 1995.

30 () INSERM, Réduction des risques infectieux chez les usagers de drogues. Expertise collective. 30 juin 2010.

31 () Marseille, Toulon, Avignon, Paris, Valenciennes, Dunkerque, Lille, le territoire du Nord Pas-de-Calais, Grenoble, Montbéliard/Belfort, Lyon et la région Rhône-Alpes, la zone côtière urbanisée des Alpes-Maritimes, Bordeaux, la Réunion et Strasbourg.

32 () Mme Bernadette Devictor, « Le service public territorial de santé (STSP), le service public hospitalier (SPH) : développer l’approche territoriale et populationnelle de l’offre en santé », Rapport, mars 2014.

33 () Ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l’organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d’établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

34 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

35 () Territoire de santé « Île du Nord » de l’ARS Guadeloupe.

36 () Territoires de santé de Paris.

37 () M. Emmanuel Vigneron « Les inégalités de santé dans les territoires français : état des lieux et voies de progrès », Elsevier Masson, mai 2011.

38 () Francis Aubert, « L’évolution des territoires en France : dynamiques spatiales et différenciation sociale », La santé en action, n° 428, juin 2014.

39 () Joseph Wresinski, « Grande pauvreté et précarité économique et sociale », rapport présenté au nom du conseil économique et social, séances des 10 et 11 février 1987, session de 1987.

40 () Emmanuelle Cambois, « Les personnes en situation sociale difficile et leur santé », « Première partie : actualisation des données liées à la pauvreté ; conjoncture et impact des politiques publiques », Les travaux de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, 2003-2004.

41 () ANAP, « les parcours de santé des personnes âgées sur un territoire : réaliser un diagnostic et définir une feuille de route pour un territoire », 2012.

42 () Personnes âgées en risque de perte d’autonomie.

43 () Ces documents, arrêtés par le directeur général de l’ARS, seront publiés au recueil des actes administratifs.

44 () Selon les services du ministère de la santé, « le conseil territorial n’est pas conçu comme l’instance pour faire ce travail mais comme l’instance de validation de la pertinence des projets proposés et si nécessaire d’appui de la démarche ».

45 () Le rapport de Mme Bernadette Devictor évoque ainsi la possibilité de se doter d’une structure juridique ad hoc si le besoin est ressenti. Toutefois, le texte ne prévoit pas de gouvernance spécifique autre que celle du STSP, mais rien n’interdira effectivement aux acteurs de prévoir un mode d’organisation plus resserré, pour tout ou partie du projet territorial de santé si le besoin s’en faisait sentir, en fonction des réalités locales.

46 () En matière financière, les ARS pourront mobiliser le fonds d’intervention régional (FIR). D’autres financeurs pourront également contribuer à la réalisation de ce contrat (les collectivités territoriales par exemple).

47 () Cour des comptes, « L’organisation des soins psychiatriques : les effets du plan psychiatrie et santé mentale (2005-2010) », rapport public thématique, décembre 2011.

48 () Ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010 de coordination avec la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

49 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

50 () M. Denys Robiliard, rapport d’information déposé en application de l’article 145 du règlement par la commission des affaires sociales en conclusion des travaux de la mission sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie, Assemblée nationale, XIVe législature, session ordinaire 2013-2014, n° 1662, 18 décembre 2013.

51 () La santé mentale revêt trois aspects : la santé mentale positive qui est une discipline s’intéressant aux déterminants de santé mentale conduisant à améliorer l’épanouissement personnel, la détresse psychologique réactionnelle qui correspond aux situations éprouvantes et aux difficultés existentielles et les troubles psychiatriques qui se réfèrent à des classifications diagnostiques.

52 () Avis du 5 avril 2012 portant sur la méthode de la nouvelle génération de plans de santé publique et sur le projet de plan psychiatrie et santé mentale, Conférence nationale de santé.

53 () Le droit du malade au libre choix de son praticien est inscrit à l’article L. 1110-8 du code de la santé publique comme un principe fondamental de la législation sanitaire, qu’il n’a donc pas semblé nécessaire de rappeler dans ce texte. Les patients souffrant de troubles psychiatriques disposent des mêmes droits que l’ensemble de la population.

54 () Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

55 () Article L.4130-1 du code de la santé publique.

56 () Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, « Assurance maladie et perte d’autonomie : Contribution du HCAAM au débat sur la dépendance des personnes âgées », 23 juin 2011 (pages 85 et 86).

57 () DGOS, Guide méthodologique, « Améliorer la coordination des soins : comment faire évoluer les réseaux de santé ? », octobre 2012.

58 () M. Philippe Blanchard, Mmes Laurence Eslous et Isabelle Yeni, « Évaluation de la coordination d’appui aux soins », IGAS, n° 2014-010R, décembre 2014.

59 () Parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie.

60 () Arrêté du 20 octobre 2011 fixant les règles de traçabilité des appels traités dans le cadre de la permanence des soins en médecine ambulatoire, pris en application de l’article R. 6315-3 du code de la santé publique.

61 () Inspection générale des affaires sociales. « Les centres de santé : situation économique et place dans l’offre de soins », rapport établi par Philippe Georges et Cécile Waquet, juillet 2013.

62 () On distingue des « accords » entre les centres de santé et l’assurance maladie alors que des « conventions » lient cette dernière aux médecins libéraux.

63 () Cinq représentent les centres de soins infirmiers (Adessa, C3SI, ADMR, UNA, FNISASIC) et cinq les centres de soins médicaux, dentaires, et polyvalents (CANSSM, FNMF, FMF, FNCS, CRF).

64 () Nicolas Célant, Stéphanie Guillaume, Thierry Rochereau, Enquête sur la santé et la protection sociale 2012, Les rapports de l’IRDES, n° 556, juin 2014 (p. 103 à 132).

65 () Sous réserve de remettre un devis au patient et de faire preuve de tact et mesure dans la fixation des honoraires.

66 () Laurence Eslous et Huguette Mauss, « Étude de faisabilité d’un service public d’information en santé », IGAS, juin 2014.

67 () Le dépistage de la surdité chez le nouveau-né a ainsi été instauré par l’arrêté du 23 avril 2012 relatif à l’organisation du dépistage de la surdité permanente néonatale.

68 () Article 56 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

69 () Le dispositif présenté mentionne l’article L. 1110-4. Il s’agit en réalité de l’article L. 1110-12.

70 () Arrêté du 23 décembre 2009 fixant les montants du forfait journalier hospitalier prévu à l’article L. 174-4 du code de la sécurité sociale.

71 () Les médecins membres de l’inspection générale des affaires sociales, les médecins inspecteurs de santé publique, les inspecteurs de l’agence régionale de santé ayant la qualité de médecin et les médecins conseils des organismes d’assurance maladie.

72 () http://esante.gouv.fr/services/reperes-juridiques/le-cadre-juridique-du-partage-d-informations-dans-les-domaines-sanitaire; Repères juridiques, 22 août 2012

73 () Article R. 1112-2 du code de la santé publique.

74 () Article R. 4127-45 du code de la santé publique.

75 () Source : CNIL, Guide professionnels de santé, édition 2011.

76 () Article L. 113-3 du code de l’action sociale et de la famille.

77 () Article L. 146-8 du même code.

78 () Cour des comptes, « le coût du dossier médical personnel depuis sa mise en place », communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale, article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, juillet 2012.

79 () Convention médicale des médecins généralistes et des médecins spécialistes, ainsi que ses annexes qui y sont jointes, conclue le 26 juillet 2011 entre, d’une part, l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et, d’autre part, la Confédération des syndicats médicaux français, le Syndicat des médecins libéraux et la Fédération française des médecins généralistes.

80 () Haute autorité de santé, « Synthèse médicale : quel contenu ? Analyse bibliographique réalisée entre décembre 2011 et février 2012 », mai 2012.

81 () Alcool, tabac, activité physique, alimentation.

82 () Organisation mise en place par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

83 () Loi n° 2011-940 du 10 août 2011 modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

84 () M. Édouard Couty, « Le pacte de confiance pour l’hôpital », rapport de synthèse, mars 2013.

85 () Loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière.

86 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

87 () M. Jean-Marie Rolland, Rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, Tome I, n° 1441, treizième législature, session ordinaire 2008-2009, 5 février 2009.

88 () Cette catégorie était initialement provisoire et devait disparaître en principe avec l’aboutissement du processus de convergence tarifaire alignant les modes de financement des établissements de santé publics et privés. Ce processus a toutefois été supprimé par l’article 59 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

89 () Mme Bernadette Devictor, « Le service public territorial de santé (STSP), le service public hospitalier (SPH) : développer l’approche territoriale et populationnelle de l’offre en santé », Rapport, mars 2014.

90 () Circulaire n° DGOS/R4/2013/246 du 18 juin 2013 relative à l’organisation et le fonctionnement des permanences d’accès aux soins de santé (PASS).

91 () Loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions.

92 () Article introduit par l’article 41 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014.

93 () Article introduit par l’article 52 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

94 () Joseph Wresinski, « Grande pauvreté et précarité économique et sociale », rapport présenté au nom du conseil économique et social, séances des 10 et 11 février 1987, session de 1987.

95 () Arrêté du 2 avril 2013 fixant la liste prévue à l’article L. 6147-7 du code de la santé publique.

96 () Un hôpital d’instruction des armées (HIA) est aussi autorisé pour une activité de maternité.

97 () Article 56 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

98 () Dominique Laurent, « L’activité libérale dans les établissements publics de santé », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, 31 mars 2013.

99 () La portée de cette exclusion est en pratique très limitée puisque la plupart des missions de service public ne concernent pas les soins programmés.

100 () Article. L. 1434-7 du code de la santé publique.

101 () Missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation des établissements de santé.

102 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

103 () Recensement du nombre d’établissements référencés en FINESS (fichier national des établissements sanitaires et sociaux), avec retraitement des données avec les données DGFIP, au 10 décembre 2014.

104 () Donnée au 10 décembre 2014.

105 () 116 fusions entre 1995 et 2012.

106 () Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, « Chapitre IX : les coopérations hospitalières » Cour des comptes Sécurité sociale 2011 – septembre 2011.

107 () Dans le cas des CHT, il s’agit plus précisément du schéma régional d’organisation des soins.

108 () Arrêté du 24 février 2014 portant détermination pour l’année 2014 de la dotation nationale de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation mentionnée à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale.

109 () Article 59 de la loi n° 2009-879.

110 () MM. Bertrand Deumié, Philippe Georges et Jean-Philippe Natali, Contrôle de l’Organisme gestionnaire du développement professionnel continu et évaluation du développement professionnel continu des professionnels de santé :

111 () Article 3 de l’ordonnance n° 96-345.

112 () Articles 59 à 61 de la loi n° 2002-303.

113 () MM. Pierre-Louis Bras et Gilles Duhamel, Formation médicale continue et évaluation des pratiques professionnelles des médecins, novembre 2008 :

114 () Prise en charge des congrès médicaux, bourses d’études, prêt de matériels…

115 () Loi n° 2004-810

116 () Depuis son entrée en vigueur le 29 avril 2012 : la loi prévoyait en effet une application décalée, à compter de la mise en place effective de l’OGDPC, qui impliquait elle-même un processus conventionnel avec l’ancien OGC.

117 () Un conseil national professionnel regroupe les différents organismes représentatifs de la spécialité, scientifiques (sociétés savantes) et professionnels (syndicats).

118 () Conseil de l’ordre pour les professions médicales et les auxiliaires médicaux libéraux qui en disposent ; employeur pour les auxiliaires médicaux, les aides-soignants ou les auxiliaires de puériculture salariés ; Agence régionale de santé pour les audioprothésistes, les opticiens-lunetiers, les prothésistes et orthésistes non-salariés, ainsi que pour les auxiliaires médicaux non rattachés à un ordre.

119 () Article R. 4133-13 du code de la santé publique, s’agissant des médecins.

120 () L’article LO 111-3 du code de la sécurité sociale dispose en effet que « l’affectation, totale ou partielle, d’une recette exclusive des régimes obligatoires de base de sécurité sociale […] à toute autre personne morale ne peut résulter que d’une disposition de loi de financement ».

121 () Fixée dans la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAMTS pour la période 2014-2017.

122 () Précité, page 3.

123 () Page 22.

124 () Page 23.

125 () Page 23.

126 () Le coût du DPC des personnels relevant directement de l’OGDPC, à l’exclusion donc de ceux qui peuvent en relever au titre d’une convention passée entre l’OGDPC et un OPCA, est estimé par le rapport à 565 millions d’euros, soit près du triple du budget de l’organisme.

127 () Page 24.

128 () Page 25.

129 () Page 27.

130 () Page 35.

131 () Page 55.

132 () Page 56.

133 () Page 57.

134 () Page 45.

135 () 14 janvier : périmètre du DPC, nature de l’obligation, contenu des programmes ; 22 janvier : sélection des organismes et des programmes, veille et contrôle qualité de l’offre de DPC ; 29 janvier : gouvernance du dispositif.

136 () En effet l’article 5 relatif aux dispositions générales de la nomenclature générale des actes professionnels précise que « seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d’Assurance Maladie […] les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu’ils aient fait l’objet d’une prescription médicale écrite qualitative et quantitative et qu’ils soient de sa compétence ».

137 () Rapport relatif aux métiers en santé de niveau intermédiaire présenté par MM. Laurent Hénart, Yvon Berland et Mme Danielle Cadet en janvier 2011 :

138 () http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Compte-rendu_de_laudition_des_Gynecologues_medicaux.pdf

139 () « L’âge moyen (56,2 ans) est supérieur de 5 ans à celui de l’ensemble des spécialistes. (50,8 ans). Chez les femmes (55,8), il est inférieur de 4 ans à celui des hommes (60 ans), caractéristique que l’on retrouve également chez les autres spécialistes. Les hommes sont quasiment absents, parmi les moins de 50 ans. » Source : op cit.

140 () Sous réserve que la sage-femme adresse la femme à un médecin en cas de situation pathologique.

141 () Cette pratique existe dans de nombreux autres pays, tels que le Royaume-Uni, le Canada, le Portugal ou encore l’Irlande.

142 () M. Olivier Véran, « Hôpital cherche médecins, coûte que coûte : essor et dérives du marché de l’emploi médical temporaire à l’hôpital public », décembre 2013.

143 () Selon le rapport d’Olivier Véran précité, les dépenses engagées auprès de sociétés de recrutement, n’entrent pas dans le cadre de l’intérim médical.

144 () Loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

145 () Ce que corrobore, par exemple, le rapport au ministre chargé de la sécurité sociale et au parlement sur l’évolution des charges et des produits de l’assurance maladie au titre de 2014 : la consommation de médicaments en France compte parmi les plus élevées d’Europe. Notre pays se classe au deuxième rang en ce qui concerne le volume consommé par habitant et au premier s’agissant des dépenses par habitant.

146 () http://www.sante.gouv.fr/rupture-d-approvisionnement-d-un-medicament.html.

147 () « Article L. 5124-17-2. – Les grossistes-répartiteurs sont tenus de respecter sur leur territoire de répartition les obligations de service public déterminées par décret en Conseil d’État. Ils assurent l’approvisionnement continu du marché national ».

148 () http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/12a18.pdf.

149 () À titre d’exemple, devraient vraisemblablement y figurer les antirétroviraux destinés à combattre le VIH, les anticancéreux et les antibiotiques.

150 () Article R.1121-1 du code de la santé publique.

151 () Article R.1121-1 du code de la santé publique.

152 () Instruction n° DGOS/PF4/2014/195 du 17 juin 2014 relative à la mise en place d’un contrat unique pour les recherches biomédicales à promotion industrielle dans les établissements de santé publics.

153 () Règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/ CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004.

154 () Avis n° 109 (2011-2012) de M. Dominique Watrin sur le projet de loi de finances pour 2012, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 17 novembre 2011.

155 () Dans sa rédaction en vigueur, l’article L. 1434-4 prévoit que les modalités d’application de la section 1 sont prises par décret en Conseil d’État.

156 () Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

157 () Jean-Yves Grall « Réorganisation des vigilances sanitaires », rapport remis à la ministre de la santé, juillet 2013.

158 () Définition extraite de http://www.securite-sociale.fr/Presentation-des-Conventions-d-objectifs-et-de-gestion.

159 () Article D. 1433-1 du code de la santé publique issu du décret n° 2010-786 du 8 juillet 2010 relatif au pilotage national des agences régionales de santé.

160 () Rapport de M. le sénateur Yves Daudigny au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur l’enquête de la Cour des comptes sur les relations conventionnelles entre l’assurance maladie et les professions libérales de santé.

161 () http://www.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_JY_Grall_-_Reorganisation_des_vigilances_sanitaires.pdf.

162 () Loi n° 98-535.

163 () Loi n° 2004-806.

164 () Loi n° 2004-303.

165 () http://ansm.sante.fr/Glossaire/%28filter%29/P#term_1992.

166 () Claire Compagnon, « Pour l’an II de la démocratie sanitaire », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, février 2014.

167 () Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

168 () Article premier de l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée.

169 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

170 () Conférence nationale de santé, Rapport 2012 sur les droits des usagers, « Réduire les inégalités d’accès à la santé… en renforçant la participation des usagers », 2013.

171 () Édouard Couty, « le Pacte de confiance pour l’hôpital : synthèse des travaux », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, mars 2013.

172 () Claire Compagnon, « Pour l’an II de la démocratie sanitaire », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, février 2014.

173 () Ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée.

174 () Dans le cas de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris il est institué une commission locale des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge soit dans un groupement d’hôpitaux, soit dans un hôpital. Elle peut comporter des représentants des instances représentatives locales.

175 () Conférence nationale de santé, « Renforcer l’information des usagers et l’observation du système de santé », rapport 2013 sur les droits des usagers.

176 () CISS-LH2, Le baromètre des droits des malades, mars 2014.

177 () Article 1er de la loi n° 2014-344.

178 () M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis au nom de la Commission des lois sur le projet de loi relatif à la consommation, document Assemblée nationale n° 1123, 11 juin 2013 :

179 () À la suite de faits postérieurs au 5 septembre 2001.

180 () La transposition dans le code civil (articles 1386-1 et suivants) fut tardive (loi n° 98-389 du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. La Cour de Justice des Communautés européennes a confirmé que les produits de santé entrent bien dans le champ d’application de la directive (10 mai 2001, Henning Veedfald contre Arhus Amtskommune, affaire C-203/99).

181 () Article 57 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011.

182 () Evaluation of the effectiveness and efficiency of collective redress mechanisms in the European Union: http://ec.europa.eu/consumers/archive/redress_cons/finalreportevaluationstudypart1-final2008-11-26.pdf

183 () Le terme « prestataire », qui n’est sans doute pas le plus heureux, renvoie en fait à la personne qui fait usage du produit sur un tiers ; mais le terme « utilisateur », qui vient plus spontanément à l’esprit, aurait pu entretenir une certaine confusion, pouvant laisser croire que l’on parle de l’utilisateur final, c’est-à-dire de l’usager.

184 () En cas de litige entre deux parties dont l’une seulement est commerçante, le juge compétent peut néanmoins être le tribunal de commerce, si la partie non commerçante est demanderesse et qu’elle choisit d’agir contre le défendeur devant le tribunal de commerce (Cour de cassation, chambre commerciale, 20 juillet 1965, publié au bulletin).

185 () Rapport du groupe de travail chargé d’élaborer une nomenclature des préjudices corporels, sous la direction de M. Jean-Pierre Dintilhac, président de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, juillet 2005 : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/064000217/0000.pdf

186 () Article 1er du décret n° 2014-1081 du 24 septembre 2014 relatif à l’action de groupe en matière de consommation.

187 () Pour plus de précisions, on se reportera utilement au commentaire de l’article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (devenu article 16 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 par notre collègue Gérard Bapt, rapporteur des recettes et de l’équilibre général, document Assemblée nationale n° 2303, tome I, 16 octobre 2014, pages 106 à 110 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r2303-tI.pdf

188 () Définies par le chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative.

189 () Cf. l’article 21 de la loi du 8 février 1995 : « La médiation régie par le présent chapitre s’entend de tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige. »

190 () Sans toutefois statuer dessus.

191 () L’article L. 1143-11 prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de la section 3.

192 () Décisions n° 89-257 DC du 25 juillet 1989, Loi modifiant le code du travail et relative à la prévention du licenciement économique et au droit à la conversion, et n° 2011-126 QPC du 13 mai 2011, Société Système U.

193 () Précité, page 64.

194 () Article 109 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 – Décision n° 2014-708 DC du 29 décembre 2014, considérants 42 à 44.

195 () Pour plus de détails, cf. supra le commentaire de l’article 45.

196 () Arrêté du 3 janvier 2007 portant modification de l’arrêté du 5 mars 2004 portant homologation des recommandations de bonnes pratiques relatives à l’accès aux informations concernant la santé d’une personne.

197 () Conseil CADA du 18 mars 2004 n° 20041100.

198 () Conseil CADA du 17 octobre 2002 n° 20024128.

199 () Avis CADA du 2 décembre 2004 n° 20045126.

200 () En dernier lieu, l’arrêté du 19 juillet 2013 relatif à la mise en œuvre du Système national interrégimes de l’assurance maladie.

201 () Édouard Couty, « Le pacte de Confiance pour l’hôpital : synthèse des travaux », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, mars 2013.

202 () Décision n  77-83 DC du 20 juillet 1977.

203 () Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

204 () Loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

205 () Article 11 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

206 () Article 12 de la loi n° 86-33 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

207 () « Bilan et évaluation du fonctionnement des pôles dans les établissements de santé » , rapport des conférences hospitalières présenté par M. Philippe Domy, Président de la conférence des directeurs généraux des centres hospitaliers régionaux et universitaires, Pr Guy Moulin, Président de la conférence des présidents de commission médicale d’établissement des centres hospitaliers régionaux et universitaires, M. Denis Fréchou, Président de la conférence nationale des directeurs de centres hospitaliers, Dr Frédéric Martineau, Président de la conférence des présidents de commission médicale d’établissement des centres hospitaliers, Dr Christian Müller, Président de la conférence d’établissement des centres hospitaliers spécialisés, mars 2014.

208 () Ordonnance n° 2005-406 du 2 mai 2005 simplifiant le régime juridique des établissements de santé.

209 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

210 () Édouard Couty, « Le pacte de Confiance pour l’hôpital : synthèse des travaux », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la santé, mars 2013.

211 () Dans les CHU, la liste est établie conjointement avec les doyens.

212 () Claire Compagnon, « Pour l’an II de la démocratie sanitaire », rapport remis à la ministre des affaires sociales et de la sante, février 2014.

213 () Article 39 de l’ordonnance n° 96-346.

214 () Article 23 de la loi n° 2009-879.

215 () Ce droit d’option, prévu à l’article L. 6133-3 du code de la santé publique, a été instauré par l’article 31 de la loi n° 2011-940 du 10 août 2011 modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

216 () Ce projet de loi a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 17 septembre dernier ; le 4 mars dernier, la commission des Affaires sociales du Sénat a adopté le texte de l’article 44 avec une simple modification rédactionnelle.

217 () Le Gouvernement a indiqué au rapporteur qu’il s’agit essentiellement des autorisations de soins.

218 () Régies par l’article L. 6135-1 du code de la santé publique.

219 () Loi n° 2014-1545.

220 () Articles 7 et 18 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.

221 () Sur ce point, le texte est plus large car il parle de « gestion ».

222 () Décret n° 2014-1091 du 26 septembre 2014 modifiant le décret n° 95-860 du 27 juillet 1995 instituant les fonctions d’inspecteur général en service extraordinaire à l’inspection générale des finances, à l’inspection générale de l’administration au ministère de l’intérieur et à l’inspection générale des affaires sociales.

223 () Et, plus récemment, le « paquet hygiène », constitué des règlements (CE) n° 852/2004 et 853/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004.

224 () Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

225 () Cf. infra pour plus de précision.

226 () L’étude d’impact précise qu’en l’état du droit, « les différences d’approche portent notamment sur la gestion du cycle de vie des données ou la garantie de l’intégrité des données ».

227 () Décret n° 2006-6 du 4 janvier 2006 relatif à l’hébergement de données de santé à caractère personnel et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires).

228 () Commission nationale informatique et libertés.

229 () Chambre criminelle, 15 novembre 2011, pourvoi n° 11-80570.

230 () Ordonnance n° 2013-1183 du 19 décembre 2013 relative à l’harmonisation des sanctions pénales et financières relatives aux produits de santé et à l’adaptation des prérogatives des autorités et des agents chargés de constater les manquements.

231 () Les centres de santé : situation économique et place dans l’offre de soins de demain : http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/RM2013-119P-Centres_de_sante.pdf.

232 () Professions réglementées : pour une nouvelle jeunesse, octobre 2014, http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/rapport_professions_reglementees-r-ferrand.pdf

233 () La répartition des officines sur le territoire national présente des disparités régionales (sud/nord), auxquelles s’ajoute une disparité entre les zones rurales et les zones fortement urbanisées (surdensité liée à l’autorisation des pharmacies existantes lors de l’institution de la législation pharmaceutique en 1941).

234 () Environ 80 % du chiffre d’affaires des pharmacies d’officines résultent de prescriptions médicales obligatoires.

235 () Article 1er de la loi n° 2009-879.

236 () Cf. supra le commentaire de l’article 51.

237 () Loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

238 () Pistes d’évolution de la règlementation des soins de conservation :

239 () Recommandations pour les conditions d’exercice de la thanatopraxie :

240 () Maladies contagieuses interdisant certaines opérations funéraires :

241 () Rapport relatif à la législation funéraire :

242 () Rapport IGAS-IGA, précité, page 9.

243 () Arrêté du 20 juillet 1998 fixant la liste des maladies contagieuses portant interdiction de certaines opérations funéraires prévues par le décret n° 76-435 du 18  mai 1976 modifiant le décret du 31 décembre 1941.

244 () S’agissant de la protection contre les rayonnements ionisants (chapitre III du titre III du livre III de la première partie) et de la matériovigilance (chapitre II du titre Ier du livre II de la cinquième partie).

245 () S’agissant de la formation et de l’exécution du contrat de travail (titre II du livre II de la première partie), de la prévention des risques d’exposition aux rayonnements ionisants (chapitre Ier du titre V du livre IV de la quatrième partie), de la prévention des risques liés aux installations nucléaires (titre II du livre V de la quatrième partie), des services de santé au travail (livre VI de la quatrième partie), et des infractions pénales aux règles de santé et de sécurité (chapitre Ier du titre IV du livre VII de la quatrième partie).

246 () S’agissant de l’air et de l’atmosphère (titre II du livre II), des installations classées pour la protection de l’environnement (titre Ier du livre V), des déchets (titre IV du livre V), et de la prévention des risques naturels (titre VI du livre V).

247 () Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014.

248 () L’extension ainsi prévue concerne notamment, et il faut sans nul doute s’en réjouir, l’acuité auditive et l’élocution satisfaisante pour communiquer, l’absence d’état pathologique, l’absence de trouble ou de déficience de nature à empêcher l’exécution efficace des missions.

249 () L’article L. 5521-1 du code des transports réglemente en effet les conditions d’aptitude médicale d’accès à la profession.

250 () Car « il importe de prendre en compte la spécificité maritime, la mer étant un espace partagé ».

251 () Actuellement délivré par la seule Université d’Aix-Marseille 2 (master professionnel pathologie humaine spécialité conseil en génétique et médecine préventive).

252 () Voir par exemple le considérant 7 de la décision du Conseil constitutionnel n° 87-149 L du 20 février 1987, Nature juridique de dispositions du code rural et de divers textes relatifs à la protection de la nature.

253 () « Si des droits sont perçus pour l’application de mesures sanitaires aux bagages, cargaisons, conteneurs, moyens de transport, marchandises ou colis postaux en vertu du présent Règlement, il ne doit y avoir dans chaque État Partie qu’un seul tarif pour ces droits […]. »

254 () « Les frais résultant de l’application des mesures sanitaires prescrites pour un moyen de transport en application de l’article L. 3115-1sont à la charge de l’exploitant du moyen de transport concerné, et notamment les frais d’immobilisation. Si le moyen de transport est un navire, l’ensemble des frais est à la charge de l’armateur, du propriétaire ou de l’exploitant. »

255 () Dont le délai de transposition est échu depuis le 25 octobre 2013.

256 () L’entrée en premier correspond à la phase initiale de l’engagement, avec des préavis de quelques heures et une exposition aux risques très élevée qui exigent au plus haut niveau, disponibilité, engagement professionnel et aptitudes physiques, psychologiques et techniques. Le service de santé des armées est une des composantes majeures de cette capacité à entrer en premier.

257 () Étant entendu que la nature militaire de ces structures les conduit par essence à devoir conserver des capacités « en attente » et donc statistiquement inoccupées.

258 () Un public dont le champ a été élargi par le législateur avec, par exemple, la prise en compte des victimes d’actes de terrorisme.

259 () L’INI prend en charge en priorité mais non exclusivement les patients suivants : ses pensionnaires ; les bénéficiaires du code des pensions militaires d’invalidité, des militaires, au titre d’une affection présumée imputable au service ou non ; des personnels civils de la défense, des membres de la famille des précédentes catégories. Ces patients sont pris en charge en soins, soit au titre de l’affection pensionnée ou de l’imputabilité au service le cas échéant (hors dotation globale de fonctionnement, DAF), soit au titre de l’assurance maladie (DAF). Un bénéficiaire du code des pensions militaires d’invalidité peut donc être hospitalisé à l’INI avec une prise en charge au titre de l’assurance maladie.

260 () La retransmission vidéo de cette table ronde est disponible sur : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.6169.commission-des-affaires-sociales--table-ronde-sur-le-theme-de-la-reduction-des-risques-lies-a-la-d-2-decembre-2014