N° 2932 - Rapport de M. Christophe Sirugue sur , en nouvelle lecture, le projet de loi , modifié par le Sénat, relatif au dialogue social et à l'emploi (n°2913)



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N° 2932

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er juillet 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES, EN NOUVELLE LECTURE, SUR LE PROJET DE LOI, MODIFIÉ PAR LE SÉNAT, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, relatif au dialogue social et à l’emploi,

PAR M. Christophe SIRUGUE,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1ère lecture : 2739, 2770, 2773, 2792 et T.A. 521.

Commission mixte paritaire : 2918.

Nouvelle lecture : 2913.

Sénat : 1ère lecture : 476, 490, 493, 501 et T.A. 123 (2014-2015).

Commission mixte paritaire : 575 et 576 (2014-2015).

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 9

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

DISCUSSION GÉNÉRALE 13

EXAMEN DES ARTICLES 17

TITRE IER – AMÉLIORER L’EFFICACITÉ ET LA QUALITÉ DU DIALOGUE SOCIAL AU SEIN DE L’ENTREPRISE 17

Chapitre Ier – Une représentation universelle des salariés des très petites entreprises 17

Article Premier : Généralisation des commissions paritaires régionales 17

Article Premier bis (art. L. 2141-13 du code du travail) : Couverture par une convention collective des salariés des TPE 21

Article Premier quater (art. L. 2622-3 [nouveau]du code du travail) : Commission paritaire régionale interprofessionnelle à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin 22

Chapitre II – Valorisation des parcours professionnels des élus et des titulaires d’un mandat syndical 23

Article 4 (art. L. 2141-5-4 [nouveau] du code du travail) : Garantie de non-discrimination salariale pour les représentants du personnel 23

Article 5 (art. L. 2314-24-1 et suivants du code du travail) : Représentation équilibrée des femmes et des hommes 25

Article 5 bis (article 1er de la loi n° 2014-1528 du 18 décembre 2014 relative à la désignation des conseillers prud’homaux) : Parité des conseillers prud’homaux 28

Article 7 (art. L. 225-30-2 du code du commerce) : Formation des représentants des salariés au conseil d’administration 29

Article 7 bis (art. L. 225-27-1 du code du commerce) : Conditions de représentation des salariés au conseil d’administration 30

Article 7 ter (art. L. 6524-6 du code des transports) : Regroupement des heures de délégation dont bénéficient les salariés navigants du transport aérien titulaire d’un mandat 32

Chapitre III – Des instances représentatives du personnel adaptées à la diversité des entreprises 33

Article 8 A (nouveau) : Gel des effets de seuils 33

Article 8 (art. L. 2326-1 et suivant du code du travail) : Élargissement et fonctionnement de la délégation unique du personnel 35

Article 9 (art. L. 2391-1, L. 2391-2, L. 2391-3, L. 2392-1, L. 2392-2, L. 2392-3, L. 2393-1, L. 2393-2, L. 2393-3 et L. 2394-1 [nouveaux] du code du travail) : Regroupement d’instances par accord majoritaire dans les entreprises de plus de 300 salariés 41

Article 9 bis (article 8 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi) : Report de l’obligation de mise en place d’une base de données économiques et sociales dans les entreprises 43

Article 10 (art. L. 2323-3, L. 2327-2, L. 2327-15, L. 4616-1 et L. 4616-3 du code du travail) : Clarification des compétences des institutions représentatives du personnel 45

Article 11 (art. L. 4611-1, L. 4612-8, L. 4612-8-1, L. 4613-1, L. 4614-2, L. 4614-12 et L. 4616-1 du code du travail) : Dispositions relatives au CHSCT 46

Article 12 (art. L. 2315-10, L. 2324-1, L. 2325-5-1, L. 2325-20, L. 2334-2, L. 4616-16, L. 2343-11-1, L. 2353-27-1, L. 23-101-1, L. 23-101-2, L. 2391-1, L. 2391-2, L. 4614-11-1 et L. 4616-6du code du travail) : Fonctionnement des institutions représentatives du personnel 48

Chapitre IV – Un dialogue social plus stratégique dans les entreprises 51

Article 13 (art. L. 2323-1, L. 2323-2, L. 2323-3, L. 2323-6, L. 2323-7, L. 2323-7-1, L. 2323-7-2, L. 2323-7-3, L. 2323-8, L. 2323-9, L. 2323-10, L. 2323-11, L. 2323-12, L. 2323-13 à L. 2323-17, L. 2323-18, L. 2323-19 à L. 2323-26-3, L. 2323-27, L. 2323-28, L. 2323-29 à L. 2323-32, L. 2323-33 à L. 2323-45, L. 2323-46, L. 2323-47, L. 2323-48, L. 2323-49, L. 2323-55 à L. 2323-57, L. 2323-59, L. 2323-60, L. 2323-61, L. 2323-68 à L. 2323-72, L. 2323-74, L. 2323-75, L. 2323-77, L. 3312-17 du code du travail) : Regroupement des informations et consultations annuelles obligatoires du comité d’entreprise 51

Article 14 (art. L. 2242-1, L. 2242-2, L. 2242-5 à L. 2242-16 et L. 2242-18 à L. 2242-23 du code du travail) : Regroupement des négociations obligatoires en entreprise 55

Article 14 bis (art. L. 1142-2-1 [nouveau] du code du travail) : Codification de la notion d’agissement sexiste 58

Article 15 (art. L. 2232-21, L. 2232-22, L. 2232-23, L. 2232-23-1, L. 2232-24, L. 2232-28 et L. 2232-29 du code du travail) : Négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical 58

Article 16 (art. L. 2322-7, L. 2325-14, L. 2325-14-1, L. 2325-26 et L. 2325-34 du code du travail) : Franchissement de seuils 60

Article 16 bis (art. L. 2314-8 et L. 2324-11 du code du travail) : Suppression du monopole syndical pour les élections professionnelles 61

Article 16 ter (art. L. 3122-4 du code du travail) : Clarification du seuil de déclenchement des heures supplémentaires dans le cadre d’un accord d’aménagement du temps de travail 61

Chapitre V – Adaptation des règles du dialogue social interprofessionnel 63

Article 17 (art. L. 2151-1, L. 2152-1, L. 2152-2, L. 2152-6 et L. 2261-32 du code du travail) : Adaptation des règles de la représentativité patronale 63

Article 17 bis (nouveau) (art. L. 2122-6-1 [nouveau] du code du travail) : Représentativité des agents de direction des organismes de protection sociale 64

Article 18 (art. L. 2135-7, L. 2135-11 et L. 3142-8 du code du travail) : Financement des activités des organismes de recherche par le fonds paritaire de financement des partenaires sociaux 64

Article 19 (art. L. 1226-12, L. 4622-2, L. 4622-3, L. 4624-1, L. 4624-3, L. 4624-4, L. 4624-5 [nouveau], L. 4641-1 à L. 4641-4 du code du travail [nouveaux], art. 10 et 16 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites) : Santé au travail et transmission de la fiche de prévention des expositions 66

Article 19 bis : Reconnaissance des pathologies psychiques comme maladies professionnelles 74

Article 19 quater (art. L. 4161-2 du code du travail) : Création de référentiels de branche dans le cadre du compte personnel de prévention de la pénibilité 76

Article 19 septies A (nouveau) : Entrée en vigueur différée de diverses dispositions relatives à la mise en œuvre du compte pénibilité 77

Article 19 octies : Demande de rapport sur l’intégration des pathologies psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ou l’abaissement du seuil d’IPP 78

TITRE II – CONFORTER LE RÉGIME D’ASSURANCE CHÔMAGE DE L’INTERMITTENCE 79

Article 20 (art. L. 5424-22 et L. 5424-23 du code du travail) : Pérennisation et modalités de négociation des annexes VIII et X 79

Article 20 bis A (nouveau) : Création d’une conférence des métiers du spectacle 84

Article 20 bis (art. L. 161-22 du code de la sécurité sociale) : Interdiction pour les artistes du spectacle en CDI de cumuler une pension de retraite et une activité professionnelle 85

Article 20 quater (art. L. 3164-2 du code du travail) : Dérogation au temps de repos des jeunes de moins de seize ans employés par un entrepreneur du spectacle 86

TITRE III – SÉCURISATION DES PARCOURS ET RETOUR À L’EMPLOI 87

Article 21 (Supprimé) : Compte personnel d’activité 87

Article 22 (art. L. 5315-1 du code du travail) : Définition des missions de service public de l’emploi de l’AFPA 88

Article 22 bis A (nouveau) (art. L. 625-1 à L. 625-7 [nouveaux], L. 612-20-1, L. 622-19-1, [nouveaux], L. 617-14, L. 624-12, L. 631-1, L. 632-1, L. 634-4, L. 633-1, L. 634-1, L. 645-1, L. 646-1, L. 647-1 du code de la sécurité intérieure) : Formation aux activités privées de sécurité 89

Article 23 (art. L. 6325-1-1 du code du travail) : Contrat de professionnalisation « nouvelle chance » 91

Article 23 bis (art. L. 5134-23-1, 5134-25-1, L. 5134-67-1, L. 5134-69-1, L. 5134-70-1 du code du travail) : Modalités applicables aux contrats aidés pour les salariés seniors 91

Article 23 ter (art. L. 322-11, L. 322-15, L. 322-31, L. 322-35 et L. 322-38 du code du travail applicable à Mayotte) : Modalités applicables aux contrats aidés pour les salariés seniors à Mayotte 92

Article 23 quater : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer Action Logement 92

Article 23 quinquies A (nouveau) (art. L. 5132-5, L. 5132-11-1, L. 5132-15-1 du code du travail) : Accueil au sein des structures d’insertion par l’activité économique 94

Article 23 quinquies B (nouveau) (art. L. 127-5, L. 127-11, L. 127-15 du code du travail applicable à Mayotte) : Accueil au sein des structures d’insertion par l’activité économique à Mayotte 95

Article 23 septies (art. L. 6241-8 du code du travail) : Modalités d’acquittement de la fraction « hors quota » de la taxe d’apprentissage 95

Article 23 octies A (nouveau) (art. L. 6241-9 du code du travail) : Établissements habilités à percevoir une part de la taxe d’apprentissage 96

Article 23 nonies A (nouveau) (art. L. 6222-18 du code du travail) : Rupture du contrat d’apprentissage 97

Article 23 nonies (art. L. 6325-2 du code du travail) : Possibilité de suivre une formation dans plusieurs entreprises dans le cadre du contrat de professionnalisation 97

Article 23 decies A (nouveau) (art. L. 1263-1 du code du travail) : Contrôle des dispositions applicables en matière de détachement dans le secteur du bâtiment 98

Article 23 decies B (nouveau) (art. L. 124-6 du code de l’éducation) : Gratification forfaitaire pour les stagiaires 99

Article 23 decies : Demande de rapport sur les transitions professionnelles liées à la transition énergétique 100

Article 23 undecies (supprimé) : Demande de rapport sur la « Garantie jeunes » 100

Article 23 duodecies (nouveau) (art. L. 1242-8, L. 1243-2, 1243-13, L. 1244-3, L. 1251-12, L. 1251-28, L. 1251-35, L. 1251-36 et L. 1254-12 du code du travail) : Renouvellement des contrats à durée déterminée 101

Article 23 terdecies (nouveau) (art. L. 1251-1 et L. 1251-4-1 [nouveau] du code du travail) : Contrat à durée indéterminée intérimaire 103

TITRE IV – ENCOURAGER L’ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE PAR LA CRÉATION D’UNE PRIME D’ACTIVITÉ 105

Article 24 (art. L. 841-1, L. 842-1 à L. 842-7, L. 843-1 à L 843-7, L. 844-1 à L. 844-5, L. 845-1 à L. 845-2 et L. 846-1 du code de la sécurité sociale) : Prime d’activité 105

Article 25 (art. L. 262-1 à L. 262-4, L. 262-9, L. 262-10, L. 262-24, L. 262-25, L. 262-27-1, art. L. 262-28, L. 262-38, L. 262-40, L. 262-45, L. 262-46, L. 262-53 et L. 522-12 du code de l’action sociale et des familles) : Suppression du RSA « activité » 107

Article 26 (art. 30 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, art. L. 115-2, L. 121-7, L. 131-2, L. 14-10-6, L. 262-29, L. 262-32 et L. 262-33 du code de l’action sociale et des familles, art. L. 114-16-2, L. 114-17, L. 167-3, L. 412-8, L. 523-1, L. 553-1, L. 553-2, L. 821-5-1, L. 835-3, L. 861-2 et L. 861-5 du code de la sécurité sociale, art. L. 3252-3, L. 5132-3-1, L. 5134-72-2 et L. 6325-1 du code du travail, art. L. 3334-6-1, L. 3334-16-2 et L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, art. 81 du code général des impôts, art. L. 98 A du livre des procédures fiscales, art. L. 331-2, L. 334-5 et L. 334-9 du code de la consommation, art. L. 351-11 du code de la construction et de l’habitation, art. L. 120-11 et L. 120-21 du code du service national, art. 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale) : Coordination et dispositions diverses 108

Article 28 : Rapport au Parlement sur la prime d’activité 108

INTRODUCTION

Le 2 juin dernier, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, signe de l’engagement du Gouvernement et de la majorité en faveur de la lutte contre le chômage, de la protection des travailleurs et de l’insertion par l’activité de nos concitoyens les plus modestes.

Le 30 juin, le Sénat adoptait un texte profondément remanié, traduisant une philosophie générale assez éloignée de celle retenue par l’Assemblée nationale. Alors que le projet de loi initial comportait 27 articles, le texte adopté par le Sénat en comptait 72, dont seulement 15 dans une rédaction conforme à celle de l’Assemblée nationale. Sur les 57 articles restant en discussion, le Sénat a supprimé 10 des articles adoptés par l’Assemblée nationale, et inséré 17 articles additionnels.

Fort logiquement, la commission mixte paritaire, réunie quelques heures seulement après l’adoption du projet de loi par le Sénat, n’a pu que constater le désaccord entre les deux chambres, appelant dès le 1er juillet une nouvelle lecture par la Commission des affaires sociales, dont ce rapport fait état.

La suppression de l’article 1er en séance publique au Sénat après qu’il est été profondément modifié par sa Commission des affaires sociales suffit à acter le désaccord entre les deux chambres. La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a logiquement rétabli l’article 1er dans sa rédaction votée en première lecture par l’Assemblée nationale. En effet, il s’agit d’offrir enfin une représentation aux 4,6 millions de personnes travaillant dans des entreprises de moins de onze salariés.

Par ailleurs, concernant les articles suivants, les différents amendements du Sénat ont consisté principalement à supprimer ou à restreindre les nouvelles dispositions introduites par l’Assemblée nationale en première lecture comme le nouveau mode de scrutin paritaire en début de liste pour l’élection des délégués du personnel et les membres du comité d’entreprise mais aussi la possibilité de siéger pour les représentants du personnel suppléants ou encore les modalités de recours à la visioconférence pour l’organisation des réunions des instances représentatives du personnel. La Commission des affaires sociales a rétabli ses dispositions équilibrées et issues d’un dialogue fructueux entre le Gouvernement et la majorité parlementaire.

S’agissant du regroupement des instances représentatives du personnel par accord d’entreprise, l’élargissement voté par le Sénat de la possibilité d’y recourir aux entreprises dès cinquante salariés rompait l’équilibre global mis en place par le projet de loi et qui repose sur le pivot entre l’article 8, avec le recours à la délégation unique du personnel, le cas échéant élargie, dans les entreprises de moins de trois cents salariés, et l’article 9, avec le recours à un accord pour regrouper les instances représentatives du personnel dans les entreprises de plus de trois cents salariés.

Sur le reste du titre Ier, le Sénat a introduit une série d’articles additionnels auxquels la Commission des affaires sociales n’a logiquement pas souscrit, qu’il s’agisse de la suppression du monopole syndical au premier tour des élections professionnelles ou encore des modalités de calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

La fin du titre premier, relative au dialogue social interprofessionnel et à la santé au travail, a été significativement amendée par le Sénat. La Commission des affaires sociales a par conséquent proposé de rétablir les articles permettant la reconnaissance des pathologies psychiques d’origine professionnelle, et de revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture s’agissant de l’adaptation des règles applicables au compte personnel de prévention de la pénibilité.

Au titre II, la Commission des affaires sociales a rétabli le mécanisme de subsidiarité consistant à déléguer aux organisations représentatives des intermittents du spectacle la négociation des règles spécifiques d’indemnisation du chômage qui leur sont propres, dans un cadre défini par les partenaires sociaux représentatifs au niveau interprofessionnel.

S’agissant du titre III relatif à la sécurisation des parcours professionnels et au retour à l’emploi, qui s’est enrichi d’une vingtaine d’articles au cours de la première lecture, la Commission des affaires sociales a souhaité rétablir, à l’initiative du rapporteur, l’article relatif à l’instauration du compte personnel d’activité. La Commission des affaires sociales a néanmoins choisi de conserver, sous réserve d’ajustements rédactionnels, plusieurs mesures de bon sens introduites par le Sénat. La commission a ainsi maintenu l’article autorisant le recours à deux renouvellements de contrats à durée déterminée (CDD), en réduisant toutefois la durée maximale de renouvellement à dix-huit mois ; elle a également conservé deux articles visant à adapter les modalités d’accueil au sein des structures d’insertion par l’activité économique pour les personnes sous main de justice, ainsi qu’un article prévoyant les modalités d’encadrement des organismes de formation aux activités privées de sécurité. Sur proposition du rapporteur, la commission a enfin adopté un amendement transformant la mise en place du contrat à durée indéterminée (CDI) intérimaire, proposée par le Sénat, en expérimentation.

Le titre IV propose la création d’une prime d’activité, en remplacement de la prime pour l’emploi et du volet « activité » du revenu de solidarité active. La Commission des affaires sociales a choisi de conserver certaines modifications bienvenues apportées par le Sénat, sur le plan légistique et rédactionnel pour l’essentiel. À l’initiative du rapporteur, elle a en revanche proposé d’en revenir au texte de l’Assemblée nationale sur deux points : d’une part, en permettant à tous les apprentis de bénéficier de la prime d’activité, et non aux seuls apprentis dépourvus de diplôme ; d’autre part, en supprimant du contenu du rapport que le Gouvernement devra remettre au Parlement sur la prime d’activité certaines demandes irréalistes et donc impossibles à satisfaire.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires sociales examine, sous la présidence de M. Jean-Patrick Gille, vice-président, en nouvelle lecture, sur le rapport de M. Christophe Sirugue, le présent projet de loi lors de sa séance du mercredi 1er juillet 2015.

M. Jean-Patrick Gille, président. Nous entamons l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi. Je suis parfaitement conscient des conditions difficiles dans lesquelles nous examinons ce texte, moins de vingt-quatre heures après l’échec, prévisible, de la commission mixte paritaire (CMP) réunie elle-même dans la foulée du vote du Sénat hier après-midi.

Ce calendrier très resserré nous est imposé par l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, le texte devant être débattu en séance publique dès mardi prochain 7 juillet.

Sans chercher en rien à nier les conséquences de ce calendrier, je ferai deux observations. D’une part, des situations de ce genre ne sont certes pas propices à la qualité du travail parlementaire, mais sont malheureusement habituelles lors des fins de session, lorsqu’il s’agit d’assurer les ultimes navettes de textes considérés comme prioritaires par le Gouvernement – et cela, quelle que soit la couleur politique de la majorité. D’autre part, la commission a fait son maximum pour vous laisser le plus de temps possible pour amender le texte, en ligne, hier, à dix-neuf heures quarante-cinq, soit trente minutes à peine après la fin de la CMP.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Le texte a été examiné par le Sénat suivant une approche assez différente de celle de la majorité de l’Assemblée, si bien que de nombreux articles ont été considérablement modifiés, non seulement dans la forme, mais aussi dans l’esprit. Aussi pourrez-vous constater qu’une grande partie des amendements que je défendrai visent à rétablir le texte de l’Assemblée. Toutefois, ce rétablissement n’a rien d’automatique, puisque nous avons retenu certaines améliorations apportées par le Sénat.

Je rappelle que l’esprit du texte est le dialogue social, l’équilibre. Même s’il résulte du constat de l’impossibilité d’un accord entre les organisations patronales et les organisations syndicales, il nous revient de tenir compte de la volonté du Gouvernement et de la majorité de promouvoir le dialogue social – c’est pourquoi, par exemple, je proposerai de rétablir l’article 1er.

M. Gérard Cherpion. Le Sénat a voté le texte, hier, entre quinze heures et quinze heures quarante-cinq. Le résultat du scrutin devait ensuite être transmis au Premier ministre pour qu’il convoque la CMP. Celle-ci l’a été pour dix-huit heures trente et il était évident qu’elle échouerait. Les administrateurs, en un temps record, ont mis le texte en ligne afin que nous puissions rédiger des amendements. Vous remarquerez que nous en avons déposé très peu, en attendant sans doute d’en présenter davantage sur le texte tel qu’il sera examiné en séance – mais nous n’avons que jusqu’à vendredi prochain à dix-sept heures pour ce faire !

Sur le fond, je trouve pour ma part que le travail du Sénat a été excellent. On peut déplorer cependant l’absence de préparation de la majorité, au point, comme vient de le dire le président, que nous devions servir de voiture-balai.

M. Jean-Patrick Gille, président. Je n’ai pas dit cela !

M. Gérard Cherpion. Le Gouvernement a ainsi déposé des amendements à la va-vite, comme on a déjà pu le constater lors de l’examen d’autres textes, impréparation qui conduit à des « accidents ». Ainsi, à l’article 18, un amendement gouvernemental a été rejeté. Introduire de la sorte, dans un texte, des propositions faites sur un coin de table sans qu’elles aient été au préalable étudiées me paraît quelque peu cavalier.

En somme, nous avons là un texte sur le dialogue social et l’emploi qui ne garantit pas le dialogue social, ne favorise pas l’emploi et dont l’examen précipité ne respecte pas le Parlement.

M. Michel Liebgott. Je rejoins le rapporteur qui entend rétablir le texte de l’Assemblée, d’autant que, sur certains points, nous entendons l’améliorer : présence des suppléants, administrateurs, parité… Le Sénat a peut-être beaucoup travaillé, mais ce qu’il propose me paraît assez éloigné du dialogue social tel que nous le concevons, puisqu’il entend instaurer un contrat unique de travail, la rupture du contrat de travail sans fondement, reporter à 2018 l’entrée en vigueur du compte pénibilité... Le Sénat marque ainsi son désaccord de fond avec la majorité. Nous ferons donc tout ce qu’il convient, au cours de cette nouvelle lecture, pour fluidifier le dialogue social, ouvrir de nouveaux droits aux salariés ainsi qu’aux syndicats, et éviter tout dérapage par rapport à la formule initiale.

M. Gilles Lurton. Hier soir, en CMP, la rapporteure du Sénat, Catherine Procaccia, rappelait que la Haute Assemblée avait souvent été précurseur en de nombreux domaines. Vous souriez, monsieur le rapporteur, mais vous lui avez répondu que les sénateurs avaient fortement contribué à faire évoluer le texte concernant la pénibilité. Si l’on nous avait écoutés, au moment de l’examen du projet de loi sur les retraites, qui comportait des dispositions, précisément, sur la pénibilité, peut-être n’aurait-on pas eu besoin de créer une mission pour l’appliquer. Quand le Sénat repousse à 2018 l’application des dispositions relatives à la pénibilité, étant donné les circonstances, je me demande s’il n’a pas raison. Je ne crois pas qu’il n’y ait que du bon d’un côté et du mauvais de l’autre, mais des éléments à reprendre de tous les côtés. Quoi qu’il en soit, nous ne sommes pas là pour fabriquer des usines à gaz, ce qui est le cas, par exemple, avec l’article 1er qui vise à créer des commissions paritaires régionales interprofessionnelles. Les entreprises se manifestent déjà contre la lourdeur de ce dispositif.

Enfin, je partage les observations de Gérard Cherpion sur les conditions dans lesquelles nous travaillons : vote, hier, du texte par le Sénat, CMP juste après, dépôt des amendements aujourd’hui avant midi et examen en commission cet après-midi même pour un passage en séance la semaine prochaine… Or, pendant ce temps, on examine en séance le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), texte dont l’importance justifierait notre présence dans l’hémicycle. Nous ne pouvons pas continuer à travailler, j’y insiste à mon tour, dans de telles conditions qui nous amènent à voter des textes bâclés, et de ce fait inapplicables.

M. Bernard Perrut. Je regrette qu’on bafoue le travail du Sénat.

M. le rapporteur. Qu’en savez-vous ?

M. Bernard Perrut. Nous devrions, en effet, tenir compte du travail de fond qu’il a réalisé, quelles que soient nos sensibilités politiques : sur un sujet comme le dialogue social, nous pourrions nous rassembler autour d’un certain nombre d’éléments. Peut-être l’examen en commission puis en séance nous permettra-t-il d’évoluer dans un sens commun, dans l’intérêt, certes, des salariés, mais sans remettre en cause l’intérêt de l’entreprise.

Au Sénat, le Gouvernement n’a pas pu introduire, à l’article 18, la disposition visant à préciser que les sièges des organisations professionnelles d’employeurs sont répartis entre elles à partir de 2017 en fonction du nombre de salariés de leurs entreprises adhérentes. Nous devrons nous montrer très vigilants sur ces questions, parce qu’une telle disposition aurait des conséquences sur la représentation d’un certain nombre d’organisations essentiellement présentes dans les petites entreprises.

Nous entendons nous exprimer très clairement sur les menaces que ce projet de loi peut faire peser sur l’entreprise, mais aussi sur les ouvertures auxquelles il peut conduire pour favoriser le dialogue social.

M. Dominique Tian. Ce que vient de dire M. Perrut est très important : plusieurs syndicats nous ont alertés sur cet amendement du Gouvernement que nous ne retrouvons pas ici – pouvez-vous nous rassurer sur sa disparition ? Ce dispositif remettrait en effet totalement en cause l’équilibre du texte. La Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME) s’en est publiquement émue auprès de vous.

M. Jean-Patrick Gille, président. Je tiens, chers collègues, à vous rassurer : il ne s’agit pas de bafouer le travail du Sénat – et, du reste, nous retiendrons certains éléments qu’il a introduits – ni de nous ravaler au rang de voiture-balai. La CMP a permis de constater des divergences politiques, chaque assemblée ayant une majorité différente.

Pour l’instant, nous n’avons connaissance d’aucun amendement du Gouvernement à l’article 18.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
AMÉLIORER L’EFFICACITÉ ET LA QUALITÉ
DU DIALOGUE SOCIAL AU SEIN DE L’ENTREPRISE

Chapitre Ier
Une représentation universelle des salariés des très petites entreprises

Article Premier
Généralisation des commissions paritaires régionales

Cet article vise à renforcer et à moderniser le dialogue social au sein des entreprises de moins de onze salariés.

1.  Le projet de loi : une généralisation de la représentation des salariés des entreprises de moins de 11 salariés

L’article vise à instituer une représentation à l’ensemble des salariés des petites entreprises.

a. Champ d’application des commissions paritaires régionales

L’article L. 23-111-1 nouveau prévoit qu’il est institué une commission paritaire interprofessionnelle au niveau de chaque région. Cette commission régionale représente l’ensemble des salariés et employeurs des entreprises de moins de onze salariés. Toutefois, en sont exclues les branches ayant déjà mis en place de telles commissions par accord.

b. Des commissions constituées de vingt membres élus

Ces commissions paritaires interprofessionnelles se composent vingt membres à raison d’au moins dix représentants des organisations professionnelles d’employeurs représentatives et dix représentants d’organisations de salariés représentatives. Leur nombre ne peut dans tous les cas pas être inférieur à dix membres. Aux termes de l’alinéa 13, ces salariés et employeurs sont issus « d’entreprises de moins de onze salariés ».

Les membres sont « désignés pour quatre ans » et « leur mandat est renouvelable ».

Dix sièges sont attribués aux organisations syndicales de salariés interprofessionnels. En vue de l’attribution des sièges, l’élection de référence est le scrutin prévu aux articles L. 2122-10-1 à L. 2122-10- 11 du code du travail. Ces articles, introduits par la loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, disposent qu’il est organisé « un scrutin… au niveau régional tous les quatre ans » afin de « mesurer l’audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés ».

Dix sièges sont attribués aux organisations professionnelles d’employeurs à caractère interprofessionnel. Le nombre de siège est proportionnel à l’audience de chaque organisation dans la région et les branches couvertes par la commission jusqu’en 1er juillet 2021 et ensuite à l’audience de chaque organisation mesurée seulement auprès des entreprises de moins de 11 salariés.

c. Un lieu d’information et de débat mais pas de négociation

Le projet de loi confie aux commissions régionales les compétences suivantes :

– donner aux salariés et aux employeurs toutes les informations nécessaires sur leur environnement légal, réglementaire et conventionnel souvent perçu comme complexe et mouvant par les petits patrons et leurs salariés ;

– émettre des avis sur les questions relatives à l’emploi, la formation, la GPEC, les conditions de travail et la santé au travail.

Il n’est pas prévu en revanche de donner aux commissions des prérogatives de négociation qui reste l’apanage des branches.

d. Les membres des commissions paritaires régionales : des salariés protégés bénéficiant de 5 heures par mois pour exercer leur mandat

Les membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) sont des représentants de salariés de droit commun.

Par conséquent, le projet de loi étend naturellement la protection aux membres des commissions paritaires régionales et soumet donc tout licenciement et rupture du contrat de travail à la procédure d’autorisation administrative prévue le livre IV de la deuxième partie du code du travail intitulé Les salariés protégés.

2.  Les apports de l’Assemblée nationale

À l’initiative du rapporteur, la Commission des affaires sociales a adopté deux amendements étendant les prérogatives des commissions paritaires régionales et celles de leurs membres :

– Le premier amendement permet aux membres des CPRI de jouer un rôle de médiation entre les employeurs et les salariés s’il est fait appel à eux. La médiation ne se substitue pas à la conciliation des prud’hommes mais intervient en amont afin de faciliter le dialogue. L’amendement donne également à ces commissions un rôle dans le domaine social et culturel. Le champ d’intervention des commissions a également été étendu à l’égalité professionnelle et au travail à temps partiel.

– Par ailleurs, et afin de leur permettre de jouer pleinement leur rôle, il a été voté un second amendement pour donner accès aux locaux des entreprises, aux membres des commissions pour une médiation ou une autre raison, mais seulement sur autorisation de l’employeur.

Dans un souci de bon fonctionnement, il a été prévu une possibilité d’annualisation des heures de délégation sans pour autant que cette annualisation ne conduise un membre à disposer de plus d’une fois et demie le temps mensuel dont il bénéficie ordinairement ainsi qu’une possibilité de mutualisation des 5 heures de délégation que reconnaît la loi.

Enfin, la parité entre les femmes et les hommes a été instaurée pour la désignation des membres des commissions aussi bien pour la délégation patronale que pour la délégation des salariés.

3.  Le rejet de l’article par le Sénat

La Commission des affaires sociales a adopté une série d’amendements consistant pour la plupart à revenir sur ce qui a été modifié ou ajouté en première lecture à l’Assemblée nationale : elle a en effet supprimé les prérogatives de médiation et a durci les conditions d’accès à l’entreprise pour les membres des commissions paritaires. Enfin, elle a renvoyé à un accord entre les organisations professionnelles d’employeurs et les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national la mise en œuvre de cet article sans que l’on comprenne si cet accord peut déroger aux dispositions de l’article ou simplement à ce qui s’apparenterait à un règlement intérieur.

En tout état de cause, l’article n’a pas été adopté en séance publique.

4.  Les dispositions retenues par la commission

La suppression de l’article 1er résulte d’une conception du dialogue social contraire à celle de la majorité parlementaire. En effet, s’il est difficile de nier que, dans les très petites entreprises, le dialogue social est direct et quotidien, il s’agit d’un dialogue entre deux personnes dont l’une est soumise à un très fort lien de subordination lui aussi direct et quotidien. D’ailleurs, personne ne conteste que les différends entre employeurs et salariés dans les TPE se terminent le plus souvent par un divorce.

En conséquence, La Commission des affaires sociales a rétabli l’article dans sa rédaction votée en première lecture par l’Assemblée nationale en y insérant par souci de cohérence les dispositions relatives à Saint-Martin et Saint-Barthélemy qui se trouvaient dans l’article 1erquater.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS25 du rapporteur et AS75 de Mme Véronique Massonneau.

M. le rapporteur. L’amendement AS25 vise à rétablir l’article 1er, supprimé par le Sénat sur le fondement d’une mauvaise interprétation de la définition du dialogue social.

L’article 1er met en place les commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI), complétant ainsi, enfin, la représentation de l’ensemble des salariés, comme la Constitution nous y engage d’ailleurs. Il se trouve qu’une telle représentation n’existait pas pour les entreprises de moins de onze salariés.

Personne ne nie le fait qu’il existe un dialogue social au sein des entreprises de moins de onze salariés, et je l’ai dit aux représentants de la CGPME, mais l’échange entre un salarié et son employeur est par nature déséquilibré. Personne ne peut non plus nier qu’il n’existe pas à ce jour, dans ce type d’entreprise, de structure permettant de débattre des questions salariales.

C’est pourquoi je vous propose de rétablir l’article 1er, ajoutant des dispositions qui se trouvaient dans l’article 1er quater, supprimé, relatives aux CPRI à Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

M. Gérard Cherpion. L’idée de généraliser la représentation des 4,6 millions de salariés qui n’en bénéficient pas me paraît tout à fait intéressante. Vous en avez cependant considérablement modifié le sens. En effet, alors qu’il devait être question, au départ, d’instaurer des représentations territoriales globales, vous proposez un dispositif qui permettra une ingérence dans la vie des entreprises malgré les barrières que vous souhaitez établir. Dès lors, nous voterons contre l’amendement tel qu’il est rédigé.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS75 est défendu.

M. le rapporteur. L’amendement de Mme Massonneau poursuit le même objectif que le mien, si ce n’est qu’il ne comprend pas certaines dispositions telles celles que j’ai mentionnées à propos de Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Je lui suggère donc de retirer son amendement au profit du mien, plus complet.

L’amendement AS75 est retiré.

La Commission adopte l’amendement AS25.

L’article 1er est ainsi rétabli.

Article Premier bis
(art. L. 2141-13 du code du travail)

Couverture par une convention collective des salariés des TPE

1. Un article introduit par l’Assemblée nationale

Cet article a été introduit par l’Assemblée nationale en première lecture à l’initiative du groupe Écologiste. Il vise à remédier à une situation qui voit 250 000 salariés travaillant dans des TPE en France non couvert par une convention collective ou un accord de branche. Or le préambule de la Constitution de 1946 dans son 8e alinéa prévoit que : « tout salarié a le droit de participer, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective de ses conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

Cet article demande au ministère du travail de publier chaque année un rapport sur les salariés des TPE ne bénéficiant d’aucun accord collectif et de mettre en place un plan d’action visant à améliorer la couverture conventionnelle.

2. Un article supprimé par le Sénat

Afin de rationaliser le nombre de branches et de supprimer celles qui sont inactives, un décret du 5 mars 2015 (1) a créé une sous-commission de la restructuration des branches professionnelles au sein de la convention nationale de la négociation collective (CNNC). Une première liste de 37 branches destinées à être rattachées à des branches plus importantes a été établie. Selon les indications du ministre, une centaine de branches devraient être supprimées dès cette année.

Le Sénat a par conséquence supprimé l’article en estimant que la rationalisation était déjà initiée.

Cependant, la rationalisation ne signifie pas pour autant l’extension d’une couverture conventionnelle à l’ensemble des salariés.

3. Les dispositions retenues par la commission

Dans un objectif de bonne information du Parlement, La Commission des affaires sociales a rétabli l’article voté en première lecture par l’Assemblée nationale en supprimant toutefois l’annualité du rapport.

*

La Commission examine les amendements identiques AS26 du rapporteur et AS92 de Mme Véronique Massonneau.

M. le rapporteur. Il s’agit là aussi d’un amendement de rétablissement, cette fois de l’article 1erbis, qui vise à remédier à la situation, identifiée par le groupe Écologiste, de 250 000 salariés des très petites entreprises (TPE) non couverts par une convention collective. Nous persistons à considérer qu’il s’agit d’une bonne disposition.

La Commission adopte les amendements.

L’article 1er bis est ainsi rétabli.

Article Premier quater
(art. L. 2622-3 [nouveau]du code du travail)

Commission paritaire régionale interprofessionnelle
à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin

Cet article a été introduit à l’Assemblée nationale en première lecture à l’initiative de plusieurs députés du groupe Socialiste, républicain et citoyen afin de tenir compte de la spécificité de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

L’article 1er institue des commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI). Il fixe à vingt membres, dix désignés par les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau régional et dix désignés par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives à ce même niveau.

Pour tenir compte de la spécificité – insularité, nombre d’habitants, tissu économique local – il a été confié au pouvoir réglementaire le soin d’adapter le nombre de représentants des salariés et des employeurs dans les CPRI de ces territoires.

La Commission des affaires sociales du Sénat a supprimé cet article pour intégrer les dispositions de l’article dans l’article 1er – article 1er qui n’a finalement pas été voté en séance publique.

La Commission des affaires sociales a maintenu la suppression de l’article et intégré les dispositions votées par l’Assemblée nationale en première lecture dans l’article 1er.

*

La Commission maintient la suppression de cet article.

Chapitre II
Valorisation des parcours professionnels des élus
et des titulaires d’un mandat syndical

Article 4
(art. L. 2141-5-4 [nouveau] du code du travail)

Garantie de non-discrimination salariale pour les représentants du personnel

1. Un article garantissant la non-discrimination salariale pour les représentants du personnel

Cet article ainsi vise à garantir une évolution de rémunération pour les représentants du personnel et les responsables syndicaux au moins égale, pendant la durée du mandat, à l’évolution moyenne des rémunérations perçues par les salariés de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable à celle du salarié concerné ou à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles s’il n’y a pas eu d’accord de branches plus favorables.

Les dispositions proposées s’inspirent largement de l’article L. 1225-26 relatif aux congés de maternité qui dispose qu’« en l’absence d’accord collectif de branche ou d’entreprise déterminant des garanties d’évolution de la rémunération des salariées pendant le congé de maternité et à la suite de ce congé au moins aussi favorables que celles mentionnées dans le présent article, cette rémunération,… , est majorée, à la suite de ce congé, des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ce congé par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l’entreprise ».

2. Les apports de l’Assemblée nationale

Un amendement a été adopté à cet article en Commission des affaires sociales. La commission l’a modifié sur proposition de notre collègue député Denys Robiliard afin de reprendre les termes figurant à l’article L. 1225-26 relatif au congé de maternité.

Désormais, l’évolution de la rémunération des titulaires d’un mandat de représentation du personnel doit être au moins égale « aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles » durant la période concernée, et non plus seulement à l’évolution moyenne des rémunérations.

3. Les modifications adoptées par le Sénat

Sur proposition de son rapporteur, la Commission des affaires sociales est revenue au texte initial du projet de loi en faisant reposer le mécanisme prévu à cet article sur l’évolution moyenne des rémunérations, soit des salariés comparables soit, à défaut, de l’entreprise, plutôt que sur les augmentations générales et la moyenne des augmentations individuelles.

Le Sénat a estimé, en effet, que les augmentations individuelles sont le reflet du pouvoir de direction de l’employeur pour récompenser les résultats obtenus par chaque salarié.

4. Les dispositions retenues par la commission

Le rapporteur estime que si les augmentations individuelles sont le reflet du pouvoir de direction de l’employeur, elles sont octroyées en priorité aux salariés présents sur leur poste de travail et qu’il est nécessaire d’en faire bénéficier également les salariés qui prennent des responsabilités de représentation ou syndicales à l’image de ce qui se passe pour les femmes en congé maternité.

La Commission des affaires sociales a donc rétabli l’article dans sa rédaction issue du vote en première lecture par l’Assemblée nationale.

*

La Commission examine l’amendement AS83 de M. Christophe Cavard.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS83 est défendu.

M. le rapporteur. Je ne pense pas qu’il faille réduire le taux de non-discrimination salariale de 30 % à 10 % afin d’inciter les femmes à prendre davantage de responsabilités syndicales. L’idée n’est pas de distinguer les femmes des hommes, mais de distinguer le degré d’investissement dans une responsabilité syndicale ; or le seuil de 30 % est celui à partir duquel nous avons décliné plusieurs dispositions destinées à valoriser les parcours syndicaux. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS28 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement concerne l’évolution moyenne des rémunérations définie en première lecture par un amendement de M. Robiliard. Il s’agit de reprendre cette notion : les augmentations des personnels qui ont des responsabilités syndicales ne seront pas seulement assises sur les augmentations générales, mais tiendront compte également des augmentations individuelles sur la base de la moyenne des augmentations individuelles.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS16 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Il s’agit de compléter l’alinéa 2 par les mots : « et pour la partie correspondant strictement à l’exercice de ce mandat ».

M. le rapporteur. Cet amendement avait déjà été rejeté en première lecture. La question de la discrimination est réelle, toutes les études le montrent ; aussi ne sommes-nous pas favorables à la distinction proposée.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5
(art. L. 2314-24-1 et suivants du code du travail)

Représentation équilibrée des femmes et des hommes

1. Le dispositif proposé par le projet de loi initial : une représentation miroir des électeurs

Les femmes représentent 47,9 % de la population occupant un emploi. Elles ne sont en revanche que 36,42 % des élus à des fonctions de représentation des salariés (2). Cette proportion est tout de même légèrement supérieure à la proportion de candidate qui est de 32 % au premier tour des élections professionnelles.

Pourtant, l’article premier de la constitution dispose que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ». Il est donc temps que la loi prévoit des mesures plus directives afin d’atteindre cet objectif.

L’égal accès signifie-t-il pour autant la stricte parité ou la représentation en miroir. Si la stricte parité est un objectif évident pour les fonctions politiques, étant entendu que les électrices et les électeurs représentent chacun la moitié du corps électoral, les métiers sont moins évidemment paritaires.

Le scrutin visant à élire les délégués du personnel est un scrutin de liste à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

L’article 5 prévoit que les listes doivent comporter un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part des femmes et des hommes inscrits sur la liste électorale.

2. Les apports de l’Assemblée nationale

La représentation en miroir s’applique distinctement à la liste des titulaires et à la liste des suppléants afin d’éviter que candidates ne riment trop souvent avec suppléantes. En revanche, aucune disposition n’est prévue quant à l’ordre des candidats. Si les candidats d’un même sexe sont placés en tête de la liste et les candidats de l’autre sexe dans les dernières places, l’équilibre aura été respecté pour les candidatures mais pas parmi les élus. La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a voté, à l’initiative du rapporteur, une disposition visant à présenter la liste classée alternativement femme – homme. Cette disposition aura de plus l’avantage de faire tendre les élus vers une quasi-parité vu le nombre de listes présentées.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adapté le régime de sanction en cas de non-respect des règles d’équilibre sexué.

3. Les modifications adoptées par le Sénat

Sur proposition de son rapporteur, la Commission des affaires sociales du Sénat a estimé que les modifications apportées par l’Assemblée nationale créeraient de très importantes difficultés d’adaptation aux organisations syndicales et aux entreprises. Elle a donc supprimé l’obligation de faire alterner, dans les listes, un homme et une femme « jusqu’à l’épuisement du sexe le moins représenté » et a rétabli le mécanisme de sanction initial. Afin de garantir la sécurité juridique des chefs d’entreprise, elle a également prévu qu’ils n’auraient pas à organiser d’élections partielles si l’annulation par le juge de l’élection de délégués du personnel ou de membres du comité d’entreprise en raison du non-respect, par leur liste, de la proportion de femmes et d’hommes dans l’entreprise aboutissait à ce qu’un collège électoral ne soit plus représenté ou à ce que le nombre de titulaires soit réduit de moitié ou plus.

4. Les dispositions retenues par la commission

Le Sénat a supprimé les dispositions prévoyant la parité des listes jusqu’à épuisement des candidats du sexe sous-représenté du fait de la complexité que cela engendrerait pour les organisations syndicales et les entreprises. Or, il ne s’agit nullement de trouver des candidats d’un sexe ou de l’autre mais simplement de les ordonner de telle sorte que la liste des élus soit la plus paritaire possible.

Il n’y a donc aucune difficulté supplémentaire et l’argument paraît pour le moins spécieux. La commission est donc revenue à l’article dans sa rédaction votée par l’Assemblée nationale en première lecture.

*

La Commission examine l’amendement AS29 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit là encore d’un amendement de rétablissement, concernant ici la parité entre les hommes et les femmes dans les instances représentatives du personnel. Je regrette que le Sénat n’ait pas apprécié la formulation précise de la disposition qui correspondait exactement à la situation à laquelle nous sommes confrontés. En effet, il convient de tenir compte de la composition de certaines branches professionnelles tout en cherchant à assurer la parité des personnels élus.

La formulation proposée avait certes, à l’époque, fait sourire mais elle correspondait à la réalité des questions à régler. Je vous propose la même formulation que j’ai plaisir à vous relire : « Les listes sont composées alternativement d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes. »

M. Élie Aboud. Pour quelle raison le Sénat a-t-il supprimé cette disposition ?

M. le rapporteur. Il a estimé qu’elle était compliquée à mettre en œuvre.

M. Arnaud Richard. Vous estimez pour votre part, si j’ai bien compris, que le dispositif que vous proposez est le plus efficient ?

M. le rapporteur. La question posée est celle de l’ordonnancement de la liste. Or, dans certaines branches professionnelles, si vous voulez appliquer purement et simplement la parité, le risque est qu’il n’y ait pas de liste du tout. L’idée, pour que la représentation compte des hommes et des femmes, est d’établir la parité pour le début de la liste jusqu’à ce qu’on n’ait plus de candidat, dans un cas, de candidate, dans l’autre, et d’autoriser de compléter la liste avec des candidats du même sexe. En outre, quand plusieurs listes se présentent, ce sont les premiers de chaque liste qui sont élus ; or si le début de chaque liste est paritaire, la représentation le sera donc aussi.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS31 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit, par souci de cohérence, de supprimer l’alinéa 11 introduit par le Sénat.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS32 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination cohérent avec le rétablissement de la règle d’alternance hommes-femmes des listes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements AS33 à AS37 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 5 modifié.

Article 5 bis
(article 1er de la loi n° 2014-1528 du 18 décembre 2014
relative à la désignation des conseillers prud’homaux)

Parité des conseillers prud’homaux

1. La parité des conseillers prud’homaux introduite à l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 1er de la loi n° 2014-1528 du 18 décembre 2014 relative à la désignation des conseillers prud’hommes habilite le Gouvernement à prendre une ordonnance, dans les dix-huit mois qui suivent la promulgation de la loi, pour remplacer l’élection des conseillers prud’hommes par un dispositif de désignation fondé sur l’audience des organisations syndicales et patronales.

L’ordonnance devra respecter l’indépendance, l’impartialité et le caractère paritaire de la juridiction prud’homale. Elle portera notamment sur les modalités de répartition des sièges par organisation dans les sections, collèges et conseils, les conditions des candidatures et leurs modalités de recueil et de contrôle, ou encore la procédure de nomination des conseillers prud’hommes.

L’article 5 bis, introduit par un amendement du groupe Socialiste, républicain et citoyen en séance publique, a maintenu ces dispositions et prévu que les modalités de désignation des conseillers prud’hommes devront assurer la présence de femmes et d’hommes à parité dans toutes les sections et dans tous les collèges et conseils.

2. Un article supprimé par le Sénat

La Commission des affaires sociales du Sénat a supprimé cet article du fait des difficultés que pourrait poser la parité. L’argument de la difficulté de trouver des candidates est l’argument habituellement opposé à la parité.

3. Les dispositions retenues par la commission

Afin de tenir compte de la composition sexuée des métiers et de la difficulté de parvenir à une parité générale, la commission a posé un principe de parité mais prévu que pour les métiers où cela ne serait pas possible, un minimum de 30 % de représentants du sexe sous-représenté.

*

La Commission examine l’amendement AS109 de M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Pour certaines sections – la section agricole n’est pas la seule concernée –, on ne peut atteindre une représentation composée à parité d’hommes et de femmes. Je propose par conséquent que chaque liste comporte au moins 30 % de candidats de chacun des deux sexes.

M. le rapporteur. Avis favorable dans la mesure où nous essayons de nous montrer pragmatiques dans notre volonté commune d’établir la parité.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 5 bis est ainsi rétabli.

Article 7
(art. L. 225-30-2 du code du commerce)

Formation des représentants des salariés au conseil d’administration

1. Un renforcement du droit à la formation des administrateurs salariés

La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a prévu la participation des administrateurs salariés dans les entreprises – sociétés anonymes, sociétés par actions – dont les effectifs totaux sont au moins égaux à 5 000 salariés en France ou à 10 000 salariés dans le monde. Le nombre d’entreprises de plus de 5 000 salariés employés en France était évalué à 200 en 2011. Il s’agit globalement de groupes composés eux-mêmes de plusieurs sociétés employant environ 4 millions de personnes, soit un actif du secteur privé sur quatre.

Les administrateurs salariés – au nombre de deux dans les organes présentant plus de douze membres et de un dans ceux présentant un nombre inférieur de membres – sont soit élus par les salariés, soit désignés par le comité de groupe, le comité central d’entreprise ou le comité d’entreprise.

L’article 7 prévoit de compléter l’article L. 225-30-2 du code du commerce en fixant une durée minimum de 20 heures par an à la formation des administrateurs salariés.

2. Les apports de l’Assemblée nationale

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par notre collègue députée Sandrine Mazetier et les membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen imposant aux administrateurs salariés, dans les entreprises dotées d’un conseil d’administration, de respecter les conditions mises en place par l’article 5 du projet de loi pour les listes électorales aux élections professionnelles (art. L. 2314-24-1 nouveau du code du travail), c’est-à-dire de refléter la proportion de femmes et d’hommes dans l’entreprise.

3. Un article supprimé par le Sénat

Le Sénat a supprimé l’article 7 en contestant le recours à la loi pour prévoir un temps de formation pour les administrateurs salariés. Cependant, la raison principale de la suppression réside dans l’amendement voté à l’Assemblée nationale qui prévoit la parité lorsque les administrateurs salariés sont au moins au nombre de deux.

4. Les dispositions retenues par la commission

L’argument de la difficulté de trouver un administrateur de chaque sexe semble pour le moins faible dans les très grandes entreprises. La suppression de l’article se situe même en retrait par rapport à la loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.

En conséquence, La commission a rétabli l’article dans sa rédaction votée en première lecture par l’Assemblée nationale.

*

La Commission adopte l’amendement AS43 du rapporteur visant à rétablir cet article supprimé par le Sénat.

L’article 7 est ainsi rétabli.

Article 7 bis
(art. L. 225-27-1 du code du commerce)

Conditions de représentation des salariés au conseil d’administration

1. La suppression des conditions restrictives à la présence d’administrateurs salariés à l’initiative de l’Assemblée nationale

Cet article, inséré en commission à l’Assemblée nationale puis complété en séance publique, supprime la dérogation à la présence d’administrateurs salariés dont bénéficient les holdings, abaisse le plancher d’effectifs qui déclenche cette obligation et augmente leur nombre minimal.

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a supprimé la condition de la présence d’un comité d’entreprise pour la désignation d’administrateurs salariés, soumettant par là les holdings, c’est-à-dire des sociétés mères n’exerçant pas d’activité industrielle ou commerciale, qui ont donc moins de 50 salariés mais qui, en concentrant des participations financières, permettent le contrôle direct d’entreprises, au droit commun et les ouvrant aux administrateurs salariés.

En séance publique, l’Assemblée nationale a abaissé le seuil d’effectif à partir duquel des administrateurs représentants les salariés doivent intégrer le conseil d’administration de 5 000 salariés en France et 10 000 dans le monde à 1 000 salariés en France et 5 000 dans le monde. Elle a fixé le nombre minimal d’administrateurs salariés à deux, quelle que soit la taille du conseil d’administration.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La Commission des affaires sociales du Sénat a maintenu la suppression de la condition de la présence d’un comité d’entreprise et a même supprimé par cohérence cette condition pour les holdings organisées sous la forme d’une société anonyme dont la gouvernance est assurée par un conseil de surveillance et un directoire.

3. Les dispositions retenues par la commission

La commission a rétabli les dispositions prévoyant l’abaissement du seuil et l’augmentation à deux administrateurs salariés quelle que soit la taille du conseil d’administration ou du conseil de surveillance. Elle a par ailleurs, étendu les nouveaux seuils et le nombre minimum d’administrateurs salariés aux sociétés dont la gouvernance est assurée par un conseil de surveillance et un directoire. Cependant, elle a fixé au 1er janvier 2017 l’entrée en vigueur des nouvelles obligations.

Par ailleurs, les entreprises ayant déjà au sein de leur conseil d’administration, un administrateur représentant les salariés pourront attendre la fin du mandat de celui-ci avant de se mettre en conformité avec les nouvelles règles.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS107 du rapporteur et AS84 de M. Christophe Cavard.

M. le rapporteur. L’amendement AS107 vise à rétablir les dispositions votées en première lecture et abaissant le seuil d’effectifs à partir duquel des administrateurs représentant les salariés doivent intégrer le conseil d’administration. Nous avons ajouté des précisions calendaires. L’administrateur salarié désigné en 2014 est maintenu dans ses fonctions jusqu’au prochain renouvellement. Le dispositif que nous souhaitons mettre en place, et qui instaure deux administrateurs salariés – un homme et une femme – pour les entreprises de plus de 1 000 salariés, entrera en vigueur au 1er janvier 2017.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS84 est identique à celui du rapporteur sans toutefois les précisions calendaires qu’il apporte. Aussi, comme il est moins complet, je le retire.

L’amendement AS84 est retiré.

La Commission adopte l’amendement AS107.

L’article 7 bis est ainsi rédigé.

Article 7 ter
(art. L. 6524-6 du code des transports)

Regroupement des heures de délégation dont bénéficient les salariés navigants du transport aérien titulaire d’un mandat

1. Les regroupements des heures de délégation pour les salariés navigants du transport aérien

L’utilisation morcelée de ses heures de délégation par un élu du personnel peut avoir pour conséquence de désorganiser de manière disproportionnée le travail au sein d’une entreprise de transport aérien puisque, dans ce cas, une programmation spécifique doit être organisée en sa faveur, déconnectée de celle de l’équipage auquel il appartient.

Ainsi, le temps de service en vol serait amputé des heures de délégation, qui constituent du temps de travail, avec pour effet parfois l’impossibilité même d’affecter la personne concernée sur un vol.

Pour corriger cette situation préjudiciable aux entreprises de transport aérien, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté, à l’initiative de M. Bruno Le Roux et Mme Joëlle Huillier, cet article prévoyant que le crédit d’heures de délégation dont bénéficie un délégué syndical, un délégué du personnel ou un membre du comité d’entreprise ou du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est regroupé en jours d’une durée minimale de 7 heures.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Dans un arrêt du 16 avril 2015, la Cour de cassation a jugé qu’une répartition des heures de délégation en jours, qui était organisée dans l’entreprise par une note de la direction, n’était pas conforme au code du travail. Cette disposition va donc donner une base légale à cette pratique sans préjuger du principe constitutionnel de liberté syndicale.

Pour cette raison la Commission des affaires sociales du Sénat a, sur proposition de son rapporteur, décidé d’inverser la logique et de prévoir, qu’un accord collectif pourra regrouper le crédit d’heures de délégation des élus en jours.

3. Les dispositions retenues par la commission

La Commission des affaires sociales a adopté un amendement de rédaction globale de l’article reconnaissant les usages des grandes compagnies d’aviation en fixant des tranches de 5 heures de crédit d’heures.

*

La Commission examine les amendements AS108 et AS113 de Mme Joëlle Huillier, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Joëlle Huillier. Il s’agit de reconnaître dans la loi les usages existants dans les grandes compagnies d’aviation. Pour les représentants du personnel, le nombre d’heures peut être commué en jours. L’amendement rétablit, d’une part, à l’alinéa 2, l’expression « sauf accord collectif contraire », adoptée par l’Assemblée en première lecture, préférable à l’expression adoptée par le Sénat – « un accord collectif peut prévoir… » –, et, d’autre part, le dernier alinéa de l’article 7 ter relatif au regroupement en jours des heures de délégation dont disposent les salariés navigants du transport aérien titulaires d’un mandat syndical ou de représentant du personnel, supprimé par le Sénat.

Nous proposons néanmoins que la norme d’un jour soit égale à cinq heures et non plus sept, comme nous en avions décidé en première lecture, et que les heures excédentaires « donnent droit à demi-journée » lorsque le crédit d’heures légal ou conventionnel est supérieur à un multiple de cinq. Ainsi, vingt-sept heures de délégation seraient divisées en tranches de cinq, mais les deux heures restantes équivaudraient à une demi-journée.

M. le rapporteur. Je suis favorable aux deux amendements.

La Commission adopte successivement les amendements AS108 et AS113.

Puis elle adopte l’article 7 ter modifié.

Chapitre III
Des instances représentatives du personnel
adaptées à la diversité des entreprises

Article 8 A (nouveau)
Gel des effets de seuils

1. Le gel des effets de seuil introduit par le Sénat

Toute entreprise qui atteint l’effectif de onze salariés doit organiser l’élection de délégués du personnel et, à partir de cinquante salariés, celle des représentants du personnel au comité d’entreprise. Elle doit également faire procéder à la désignation des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), se soumettre à des obligations d’information-consultation du comité d’entreprise et de négociation récurrentes et accueillir un délégué syndical par organisation représentative dans l’entreprise.

Cet article additionnel, inséré par la Commission des affaires sociales du Sénat sur proposition de sa rapporteure, met en place à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, un mécanisme de lissage sur une durée de trois ans des obligations nouvelles en matière de représentation du personnel liées au franchissement des seuils de onze et cinquante salariés. Le Gouvernement est chargé d’évaluer le dispositif.

2. Les dispositions retenues par la commission

Dans un souci de simplification du dialogue social, le présent projet de loi étend la possibilité pour l’employeur de mettre en place une délégation unique du personnel (DUP) jusqu’à 300 salariés puis de procéder à des regroupements des instances représentatives du personnel (IRP) par voie d’accord au-delà de 300 salariés.

Par ailleurs, aucune étude conséquente n’est venue confirmer que les obligations de mettre en place des IRP constituaient un frein à l’emploi. D’autant plus que l’étude d’impact montre que 86 % des entreprises de 11 à 49 salariés n’ont aucune IRP. 74 % des entreprises de 50 à 99 salariés sont dans le même cas. Par conséquent, pour la majorité des entreprises, le gel des effets de seuil n’aura aucun effet.

Par conséquent, la Commission des affaires sociales a supprimé cet article.

*

La Commission examine l’amendement AS44 du rapporteur.

M. le rapporteur. En introduisant cet article, le Sénat entendait supprimer les effets de seuil. Le présent amendement vise à supprimer l’article.

M. Dominique Tian. Les effets de seuil aggravent le chômage, tous les spécialistes en sont convaincus et le ministre lui-même a évoqué l’avantage que nous aurions à les modifier. Nous manquons ici une occasion historique !

M. Gérard Cherpion. Le ministre est certes revenu sur sa promesse, mais c’était là l’occasion pour nous de la tenir… Nous aurions très bien pu envisager une délégation unique du personnel (DUP) à partir de cinquante salariés. Or vous nous proposez un système dogmatique qui va compliquer les choses plutôt qu’il ne les simplifiera. Je l’ai dit : ce texte ne favorise ni le dialogue social ni l’emploi.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 8 A est supprimé.

Article 8
(art. L. 2326-1 et suivant du code du travail)

Élargissement et fonctionnement de la délégation unique du personnel

1. Un élargissement de la délégation unique du personnel

Le droit existant prévoit la faculté de mettre en place une délégation unique du personnel (DUP) pour toutes les entreprises de moins de 200 salariés.

L’article L. 2326-1 dispose que : « dans les entreprises de moins de 200 salariés, l’employeur peut décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d’entreprise ».

L’objectif principal était d’encourager les employeurs de petites et moyennes entreprises (PME) à embaucher sans craindre le passage des 50 salariés qui les contraindrait à mettre en place un comité d’entreprise en plus des délégués du personnel. Aucune étude significative n’a à ce stade montré que la possibilité d’une DUP a favorisé l’embauche, en revanche cette possibilité permet d’écarter l’argument de la présence de seuils sociaux pour expliquer les réticences à embaucher.

L’autre objectif de la DUP est de généraliser la présence d’IRP au sein des PME.

L’article 8 propose de modifier les articles du chapitre VI du titre II du livre III de la deuxième partie du code du travail intitulé Délégation unique du personnel. Il prévoit ainsi de relever leur seuil permettant de mettre en place une DUP de 200 à 300 salariés et intègre le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au sein de la DUP élargie. Les membres du CHSCT seront, au même titre que les délégués du personnel et les membres du comité d’entreprise, obligatoirement consultés lors de la mise en place de la DUP sans que leur avis ne lie l’employeur.

L’employeur pourra désormais mettre en place une DUP au moment de la mise en place ou du renouvellement d’une des trois IRP. Dans ce cas, la durée des mandats des délégués du personnel, des membres du comité d’entreprise ou du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut être soit réduite, soit prorogée d’une durée maximum de deux années afin de coïncider avec la date de la mise en place de la DUP. Parallèlement, aux termes de l’article L. 2326-8 nouveau, l’employeur peut décider de ne pas renouveler la DUP à l’expiration des mandats de ses membres. Dans ce cas, il procède sans délai à l’élection des délégués du personnel, des membres du comité d’entreprise et à la désignation des membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

La mise en place de la DUP a lieu au niveau de chaque établissement lorsque l’entreprise au sein duquel est mise en place la DUP en comporte plusieurs. Cette règle jurisprudentielle sera désormais intégrée à l’article L. 2326-1 du code du travail.

La DUP élargie entraîne uniformément la diminution d’un membre titulaire par rapport au nombre de membre de la DUP et du CHSCT.

Le crédit global d’heures de délégation est sensiblement le même avec l’élargissement de la DUP au CHSCT, il varie de – 10 heures pour les entreprises de 100 à 124 salariés à + 15 heures pour celles employant 175 à 199 salariés. Les entreprises nouvellement concernées par la mise en place d’une DUP – les entreprises comprises entre 200 et 300 salariés – verront également le crédit d’heures dont peuvent bénéficier les IRP rester globalement stables.

Enfin, dans le cadre de la DUP, les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT « conservent l’ensemble de leurs attributions ». Il n’est donc pas question d’instance unique.

Le CHSCT, en particulier, conserve la personnalité morale et pourra continuer à ester en justice. Il procède à des inspections régulières afin de s’assurer des prescriptions en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail. Il effectue des enquêtes en matière d’accident du travail ou de maladies professionnelles et conserve tous ses pouvoirs en matière de danger grave et imminent.

2. Les apports de l’Assemblée nationale

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a veillé tout particulièrement à faciliter le fonctionnement de la DUP.

Deux amendements ont été adoptés créant d’une part un secrétaire-adjoint et précisant d’autre part son mode de désignation. En effet, l’article 8 prévoit que le secrétaire de la DUP exerce les fonctions actuellement dévolues au secrétaire du comité d’entreprise et au secrétaire du CHSCT. Il s’agit d’une fonction lourde. Les amendements adoptés prévoient donc que le secrétaire soit assisté par un secrétaire adjoint sans que les tâches de l’un et de l’autre soient spécifiées.

À l’initiative du rapporteur a également été adopté un amendement permettant aux suppléants de siéger à toutes les réunions avec voix consultative comme le prévoit le droit positif en vigueur.

Pour permettre une plus grande souplesse, un amendement également adopté à l’initiative du rapporteur prévoit une annualisation des heures de délégation. En revanche, il prévoit une limite à 1,5 fois le temps mensuel prévu afin de ne pas regrouper les temps de délégation pendant une période trop longue.

Enfin, deux amendements précisent les conditions de maintien des DUP actuelles. Il sera permis le maintien des DUP actuelles pour permettre aux entreprises qui le souhaitent d’avoir le temps de s’adapter.

En séance publique, l’Assemblée nationale a, sur proposition du rapporteur, porté de 5 à 8 jours avant la réunion de la DUP le délai dans lequel l’ordre du jour doit être envoyé aux membres de la délégation et maintenu la DUP jusqu’à expiration du mandat de ses membres en cas de franchissement du seuil des 300 salariés.

Enfin, sur proposition des députés du groupe Écologiste, l’Assemblée nationale a précisé que lorsqu’une expertise unique, dans le cadre de la DUP, est réalisée sur des thématiques relevant de la compétence croisée du comité d’entreprise et du CHSCT, les exigences propres à chacune de ces deux IRP quant à la qualification et à la probité de ces experts devaient être respectées.

3. Les modifications apportées par le Sénat

Sur proposition de son rapporteur, la Commission des affaires sociales du Sénat a adopté trois modifications à cet article :

– elle a limité la présence des suppléants aux réunions de la DUP en prévoyant que seul un nombre d’entre eux inférieur de moitié à celui des titulaires pourraient y assister ;

– elle a restreint la possibilité de cumuler les heures de délégation sur trois mois au lieu de douze ;

– enfin, elle a renforcé l’encadrement de la mutualisation de ces mêmes heures de délégation en prévoyant qu’un titulaire ne pourra les transférer qu’à un seul autre élu, titulaire ou suppléant, et qu’il ne pourra distribuer plus de la moitié des heures dont il dispose.

En séance publique, le Sénat a adopté également plusieurs amendements :

– il a élargi la possibilité de mettre en place une DUP aux établissements ;

– il a prévu qu’une DUP pouvait être mise en place jusqu’à 6 mois après la promulgation de la présente loi afin de ne pas attendre le renouvellement des IRP ;

– enfin, il supprime toute possibilité pour les suppléants de siéger en cas de présence des membres titulaires sauf lors des réunions sur les orientations stratégiques de l’entreprise.

4. Les dispositions retenues par la commission

Étant entendu que les apports du Sénat ont consisté quasi exclusivement à revenir sur les dispositions nouvelles votées par l’Assemblée nationale à l’initiative de son rapporteur, la Commission des affaires sociales a rétabli l’article dans sa rédaction votée en première lecture par l’Assemblée nationale.

*

La Commission examine l’amendement AS47 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le présent amendement vise à supprimer l’alinéa 3, introduit par le Sénat et visant à étendre la DUP aux établissements de moins de 300 salariés. Cette disposition ne correspond pas à la philosophie du texte.

M. Gérard Cherpion. Ce n’est pas une question de philosophie, mais de pragmatisme. Veut-on vraiment que les entreprises se développent ou préfère-t-on en rester à une philosophie de repli ? Vous semblez avoir choisi la seconde solution.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS49 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement AS49 vise à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 7. Il est curieux de vouloir mettre en place des dispositions qui ne tiennent compte ni du renouvellement du comité d’entreprise ni de celui du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Le Sénat voulait qu’on puisse créer une DUP dans les six mois suivant la promulgation de la loi, ce qui ne nous semble pas correspondre à l’esprit du texte.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements AS89 et AS91 de M. Christophe Cavard, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Véronique Massonneau. Il s’agit de s’assurer que la DUP disposera des moyens suffisants pour mener à bien ses missions, et donc de garantir qu’ils seront au moins équivalents à la situation actuelle.

M. le rapporteur. J’ai déjà eu l’occasion de vous dire, madame Massonneau, que, si l’on considère l’intégralité du dispositif que nous avons mis en place – annualisation et mutualisation des heures, question des suppléants –, il est fort possible que, dans certaines entreprises, davantage de moyens soient mobilisés si l’on veut bien admettre que, jusqu’à présent, 30 % des heures n’étaient pas utilisées pour des raisons liées à la maladie, aux congés… Par ailleurs, les dispositions que vous proposez, trop rigides, interdiraient toute adaptation. Avis défavorable aux deux amendements.

La Commission rejette successivement les amendements AS89 et AS91.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements AS93 à AS96 de M. Christophe Cavard.

Elle examine ensuite l’amendement AS98 du même auteur.

Mme Véronique Massonneau. Le présent amendement vise à garantir à la DUP un délai suffisant – de quinze jours au moins – pour mener ses missions qui relèvent surtout des compétences du CHSCT.

M. le rapporteur. Au terme d’un très long débat en séance, nous nous sommes mis d’accord sur un délai de huit jours : plus qu’un compromis, m’a-t-il semblé, c’était d’abord une solution intéressante. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS101 de M. Christophe Cavard.

Mme Véronique Massonneau. Nous sommes attachés à la possibilité d’avoir deux expertises bien distinctes dans le cadre de la DUP, dès lors que l’objet de l’expertise relève des attributions ou du comité d’entreprise ou du CHSCT.

M. le rapporteur. Il est compliqué d’avoir deux avis pour une même instance… Avis défavorable.

Mme Véronique Massonneau. Les expertises peuvent être très différentes selon que leur objet ressort du CHSCT ou du comité d’entreprise.

M. le rapporteur. Mais, je le répète, il s’agit de la même instance.

M. Dominique Tian. Si les deux expertises se contredisent, ne faut-il pas en prévoir une troisième ?

M. le rapporteur. C’est toute la distinction entre les expertises communes et les expertises uniques. Encore une fois, nous sommes en présence d’une seule et même instance – qui ne fait pas disparaître pour autant le CHSCT ni le comité d’entreprise. Reste que, comme il s’agit d’une seule et même instance, il n’y aura qu’un avis émis par les délégués, puisqu’ils siégeront et au sein du CHSCT et au sein du comité d’entreprise. Rien n’empêche, certes, que plusieurs demandes soient formulées, mais un seul avis sera remis : c’est le principe même de la DUP.

M. Gérard Cherpion. Cet amendement remet en cause la délégation unique du personnel (DUP), et il ne fallait donc pas voter l’article précédent qui lui était consacré.

M. Denys Robiliard. Le projet de loi ne fond pas les instances en une structure unique, si bien que le comité d’entreprise et le CHSCT continueront d’exister. Les missions du premier diffèrent de celles du second, et le comité d’entreprise doit prendre en compte l’action du CHSCT, puisque l’avis sur les conditions de travail participe de celui, plus général, qu’il doit rendre. Expertise commune ne doit pas signifier expert unique ; d’ailleurs, l’expert-comptable ne possède pas de compétences particulières en matière de conditions de travail. Le ministère du travail agrée les experts pouvant agir pour le CHSCT, les professionnels retenus ayant des compétences techniques et méthodologiques précises, puisqu’ils doivent transférer une partie de leur savoir à l’instance.

La difficulté réside dans le fait de trouver deux experts – même s’il convient de réaffirmer qu’il est possible de le faire – ou une structure offrant les deux expertises. Les deux grands cabinets d’expertise-comptable intervenant auprès des comités d’entreprise sont habilités à s’occuper également des conditions de travail. Il importe que le comité d’entreprise conserve la liberté de choisir ses experts et puisse, notamment, en nommer deux appartenant à des structures différentes. La rédaction précédente permettait d’atteindre cet équilibre, et il faut veiller à bien écrire le texte afin de ne pas gommer la différence entre l’expert-comptable et l’expert agréé.

M. le rapporteur. Madame Massonneau, à la demande de votre groupe, nous avons accepté un amendement obligeant les cabinets d’experts à respecter le cahier des charges touchant aux domaines de compétence du CHSCT.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS50 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a interdit aux suppléants de siéger aux réunions, et cet amendement rétablit cette autorisation.

M. Gérard Cherpion. Le suppléant ne doit siéger que si le titulaire est absent.

M. le rapporteur. Les suppléants siègent dans les comités d’entreprise, et cela participe de la formation continue. S’ils ne pouvaient pas assister aux réunions, l’entreprise aurait des charges de formation à supporter. Il me semble préférable de maintenir la situation des comités d’entreprise et de l’étendre à l’ensemble de la DUP.

M. Denys Robiliard. Les suppléants participent déjà aux réunions ; voulons-nous une régression de leur rôle ? Non. Ces suppléants ne sont pas comparables à celui d’un député qui ne siège que si ce dernier est nommé au Gouvernement ou meurt ; en effet, ils peuvent intervenir à tout moment et doivent être parfaitement au fait des dossiers, d’où la nécessité de leur participation aux réunions des instances.

Les suppléants désignés par les groupes assistent aux CMP et peuvent prendre la parole sans voter ; nous sommes, avec cet amendement, dans le même cas de figure.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS51 du rapporteur.

M. le rapporteur. La Commission des affaires sociales du Sénat a souhaité restreindre la possibilité que le projet de loi offrait aux membres de la DUP de cumuler et de reporter dans l’année leurs heures de délégation. Cette disposition avait été introduite par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale dans une logique de souplesse. Le Sénat a donc remplacé l’annualisation mise en place par l’Assemblée nationale par la possibilité de reporter des heures de délégation sur un trimestre. Le présent amendement propose de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale.

M. Gérard Cherpion. Cet amendement prévoit de reporter les heures de délégation sur un trimestre ?

M. le rapporteur. Non, c’est le Sénat qui a décidé cela. L’Assemblée avait choisi d’annualiser les heures.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS52 du rapporteur.

M. le rapporteur. La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, à l’initiative de son rapporteur, a introduit une possibilité de mutualisation des heures de délégation que le Sénat a restreinte. Cet amendement rétablit la version de notre première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS88 de M. Christophe Cavard.

Elle adopte ensuite l’article 8 modifié.

Article 9
(art. L. 2391-1, L. 2391-2, L. 2391-3, L. 2392-1, L. 2392-2, L. 2392-3, L. 2393-1, L. 2393-2, L. 2393-3 et L. 2394-1 [nouveaux] du code du travail)

Regroupement d’instances par accord majoritaire
dans les entreprises de plus de 300 salariés

En contrepoint de l’article 8, qui étend aux entreprises de moins de 300 salariés la possibilité de mettre en place une DUP, cette faculté étant pour l’heure réservée aux entreprises de moins de 200 salariés, le présent article propose d’apporter les souplesses nécessaires aux entreprises de plus de 300 salariés, en leur ouvrant la possibilité, sous réserve de la conclusion d’un accord majoritaire, de regrouper tout ou partie des institutions représentatives du personnel (IRP), autrement dit les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

1. Les apports de l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a procédé à trois modifications notables du dispositif proposé par le projet de loi. La Commission des affaires sociales a tout d’abord clarifié la possibilité de mettre en place par accord majoritaire une instance regroupée dans les entreprises des unités économiques et sociales (UES) de plus de 300 salariés, quel que soit par ailleurs l’effectif des entreprises en relevant. Elle a ensuite précisé, à l’instar de la rédaction retenue à l’article 8 pour la délégation unique du personnel (DUP), que les réunions que l’instance regroupée doit consacrer aux sujets relatifs à l’hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail portent bien « en tout ou partie » sur ce sujet. Enfin, en séance publique, l’Assemblée nationale a apporté deux précisions, notamment pour clarifier le fait que les commissions spécialisées de l’instance unique seraient mises en place selon les mêmes règles que pour le comité d’entreprise, soit à partir de 1 000 salariés pour la commission économique.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Le Sénat a adopté deux amendements à cet article : le premier, en Commission des affaires sociales, pour prévoir qu’une commission d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) devait obligatoirement être mise en place dès lors que l’instance unifiée inclut le CHSCT, alors que le projet de loi ne prévoyait pour l’heure qu’une faculté en la matière ; le second, en séance publique, pour ouvrir la possibilité d’organiser un regroupement des instances par accord majoritaire dans les entreprises dès 50 salariés.

3. Les dispositions retenues par la commission

Dans le cadre de la nouvelle lecture du projet de loi, la commission a souhaité revenir à la rédaction de l’article 9 dans le texte initialement voté par l’Assemblée nationale.

Il va de soi que l’équilibre du texte repose sur la distinction entre les entreprises de moins de 300 salariés et les entreprises de plus de 300 salariés, les premières pouvant recourir à la mise en place d’une délégation unique du personnel (DUP), le cas échéant élargie, les secondes ayant la possibilité de procéder par voie d’accord pour regrouper deux ou trois instances représentatives du personnel : de ce point de vue, ouvrir aux entreprises dès 50 salariés la possibilité de procéder par voie d’accord rompt cet équilibre fondamental.

D’autre part, s’agissant de la mise en place d’une commission d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail dans les instances unifiées qui regroupent le CHSCT, l’Assemblée nationale a souhaité conserver toute latitude pour opérer les choix les plus adaptés au profil de l’entreprise : si dans certaines entreprises, les sujets d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail auront intérêt à être traités par une commission dédiée, dans d’autres, un tel traitement isolé de ces questions n’aura pas lieu d’être ou pourrait même faire perdre les avantages d’un regroupement des instances. C’est pourquoi la commission a souhaité réintroduire cette marge de manœuvre, en revenant à une simple possibilité sur ce point.

*

La Commission aborde l’amendement AS1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a élargi à toutes les entreprises de plus de cinquante salariés la possibilité de procéder à une fusion des instances représentatives du personnel par accord d’entreprise : tel n’est pas l’esprit du texte, qui souhaite permettre aux entreprises jusqu’à 300 salariés de mettre en place une DUP, le cas échéant élargie, et aux entreprises de plus de 300 salariés de négocier par accord les termes d’un regroupement des instances. Cet amendement a donc pour objet de revenir au texte voté par l’Assemblée nationale, car le seuil de 300 employés assure un équilibre qui doit être respecté.

M. Gérard Cherpion. Le texte du Sénat est une proposition d’ouverture : pourquoi empêcher la constitution d’une DUP dans les entreprises possédant au moins cinquante salariés ? Le Sénat a simplifié le dispositif, et nous sommes opposés à l’amendement de M. le rapporteur.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS2 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rétablit le texte de l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte enfin l’article 9 modifié.

Article 9 bis
(article 8 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi)

Report de l’obligation de mise en place d’une base de données économiques
et sociales dans les entreprises

Le Sénat a adopté un nouvel article 9 bis relatif à la base de données unique, créée dans le cadre de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.

Cette loi a en effet imposé la mise en place dans chaque entreprise de plus de 50 salariés d’une base de données unique ayant vocation à servir de support aux consultations périodiques du comité d’entreprise. Cette base de données, codifiée à l’article L. 2323-7-2 – qui devient l’article L. 2323-8 à la faveur des modifications prévues par le présent projet de loi à l’article 13 – rassemble l’ensemble des informations économiques et sociales relatives à l’entreprise que l’employeur met à disposition du comité d’entreprise.

Les informations contenues dans la base de données portent sur les thèmes suivants : investissements ; fonds propres et endettement ; ensemble des éléments de la rémunération des salariés et des dirigeants ; activités sociales et culturelles ; rémunération des financeurs ; flux financiers à destination de l’entreprise, notamment aides publiques et crédits d’impôts ; sous-traitance ; et enfin, le cas échéant, transferts commerciaux et financiers entre les entités du groupe.

Un décret en Conseil d’État doit déterminer le contenu précis de ces informations, qui peut varier selon que l’entreprise compte plus ou moins de 300 salariés.

Le IV de cet article définit le cadre temporel de mise en place de la base de données unique, en laissant un an à compter de la promulgation de la loi aux entreprises de plus de 300 salariés pour l’instaurer, et deux ans aux entreprises de moins de 300 salariés. Autrement dit, en vertu de la date de promulgation de la loi, la base de données uniques doit avoir été mise sur pied dans les entreprises de plus de 300 salariés au 14 juin 2014 et au 14 juin 2015 pour les entreprises de moins de 300 salariés.

Compte tenu des difficultés pour les petites entreprises d’instaurer une telle base de données unique, le Sénat a adopté deux amendements identiques, l’un de M. Olivier Cadic et certains de ses collègues du groupe Union des démocrates et indépendants (UDI) et l’autre de M. Jean-Baptiste Lemoyne et de certains de ses collègues du groupe Les Républicains, pour autoriser le report d’une année supplémentaire de l’obligation de mise en place d’une base de données unique dans les entreprises de moins de 300 salariés, pour la fixer au 14 juin 2016.

Lors de son examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a supprimé cet article, au motif que les délais initiaux d’instauration de la base de données unique impartis aux entreprises en fonction de leur taille avaient été définis par les partenaires sociaux eux-mêmes dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, et que le bilan réalisé à la mi-avril 2014 avec ces derniers fait état sur ce point d’une mise en œuvre progressive de cet outil, sans difficultés majeures qui pourraient justifier le report de sa mise en place.

*

La Commission étudie l’amendement AS3 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 9 bis. Le Sénat a prévu de reporter d’un an la mise en place de la base de données unique dans les entreprises de moins de 300 salariés, ce que nous refusons.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 9 bis est supprimé.

Article 10
(art. L. 2323-3, L. 2327-2, L. 2327-15, L. 4616-1 et L. 4616-3 du code du travail)

Clarification des compétences des institutions représentatives du personnel

Cet article se propose de clarifier les compétences respectives des instances représentatives du personnel dans les entreprises composées d’établissements distincts. En effet, dans ce cadre, il existe deux niveaux de représentation du personnel : celui de l’établissement, et celui de l’entreprise. Or, il n’apparaît pas toujours clairement, en fonction des mesures envisagées, s’il convient de consulter le comité central d’entreprise, les comités d’établissement ou les deux, ni le cas échéant, dans quel ordre il convient de les consulter. Cet article donc de clarifier ce point, en précisant les compétences respectives des comités d’établissement et du comité central d’entreprise. La même clarification est opérée pour les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et l’instance temporaire de coordination des CHSCT, lorsqu’une telle instance est mise en place.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

Lors de son examen du texte en première lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté un amendement du rapporteur qui prévoit une information spécifique des comités d’établissement dans le cadre d’un projet décidé au niveau de l’entreprise et qui implique la consultation du seul comité central d’entreprise (CCE) : dans ce cadre, les comités d’établissement resteraient néanmoins informés de la teneur du projet et seraient destinataires de l’avis du CCE.

En séance publique, l’Assemblée nationale a ensuite adopté quatre amendements rédactionnels ainsi qu’un amendement de M. Denys Robiliard et Mme Fanélie Carrey-Conte précisant les cas dans lesquels seul le comité central d’entreprise est consulté : il prévoyait ainsi que cela ne concernait que les projets décidés au niveau de l’entreprise et qui ne « nécessitent » pas de mesures d’adaptation spécifiques à un ou plusieurs établissements, alors que le texte initial du projet de loi le prévoyait pour les projets ne « comportant » pas de telles mesures d’adaptation spécifiques.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Le Sénat a apporté deux modifications à l’article 10 : la première, en commission, à l’initiative de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia, qui revient sur la rédaction initiale du projet de loi concernant les cas où seul le comité central d’entreprise est consulté – autrement dit, dans le cas des projets ne « comportant » pas de mesures spécifiques d’adaptation au niveau d’un ou plusieurs établissements ; la seconde, en séance publique, à l’initiative de Mme Sophie Primas et certains de ses collègues du groupe Les Républicains, qui prévoit d’organiser une expertise unique dans le cadre de projets qui concerneraient plusieurs établissements.

3. Les dispositions retenues par la commission

Lors de son examen du projet de loi en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a proposé de revenir au texte de l’article 10 dans sa rédaction issue de l’Assemblée.

*

La Commission est saisie des amendements identiques AS4 du rapporteur et AS86 de M. Christophe Cavard.

M. le rapporteur. Le Sénat a souhaité prévoir que, dans le cadre d’un projet concernant plusieurs établissements, une seule expertise soit organisée et qu’elle ait lieu au comité central d’entreprise ; or les comités d’établissement sont dotés de la personnalité morale, et il serait préjudiciable que ceux-ci ne soient pas à même de diligenter une expertise destinée à tenir compte des conséquences spécifiques d’un projet dans l’établissement. Nous souhaitons donc supprimer l’alinéa introduit par le Sénat et revenir au texte de l’Assemblée nationale.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS86 est défendu.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 10 modifié.

Article 11
(art. L. 4611-1, L. 4612-8, L. 4612-8-1, L. 4613-1, L. 4614-2,
L. 4614-12 et L. 4616-1 du code du travail)

Dispositions relatives au CHSCT

Cet article apporte trois séries de modifications importantes pour la mise en place et le fonctionnement du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Il propose ainsi :

– que l’ensemble des salariés d’une entreprise de plus de 50 salariés soient bien couverts par un CHSCT ;

– que la durée du mandat des membres élus du CHSCT, aujourd’hui de deux ans, soit alignée sur celle qui prévaut pour les autres instances représentatives du personnel – délégués du personnel et comité d’entreprise –, soit quatre ans ;

– et enfin, que le fonctionnement du CHSCT soit amélioré par l’adoption d’un règlement intérieur et par la définition des principes de la prise de décision au sein de cette instance, y compris la fixation de délais au terme desquels son avis est supposé avoir été rendu, à l’instar de ce qui prévaut pour le comité d’entreprise.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

Lors de l’examen du texte en première lecture, l’Assemblée nationale a adopté deux modifications de fond à cet article. En premier lieu, la Commission des affaires sociales a tiré les conséquences de l’élargissement opéré par le projet de loi de la couverture des salariés par un CHSCT. Elle a ensuite adopté un amendement de M. Gérard Cherpion et de plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, pour adapter cet élargissement aux délégués du personnel lorsque ceux-ci sont amenés à exercer les attributions du CHSCT.

La seconde modification a été adoptée en séance publique à l’initiative de votre rapporteur : elle prévoit que c’est avant tout par accord d’entreprise que doit être établi le délai dont disposera le CHSCT pour remettre ses avis, alignant les conditions de fixation des délais impartis au CHSCT pour rendre ses avis sur celles applicables au comité d’entreprise.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Outre un amendement rédactionnel présenté en commission par la rapporteure du texte, Mme Catherine Procaccia, le Sénat a adopté en séance publique un amendement, toujours à l’initiative de la rapporteure, modifiant l’article 11, pour revenir sur la priorité donnée à l’accord d’entreprise pour fixer les délais dont dispose le CHSCT pour rendre ses avis : alors que le texte voté par l’Assemblée nationale prévoit qu’un accord direct entre l’employeur et le comité n’est possible qu’en l’absence de délégué syndical, le texte adopté par le Sénat prévoit qu’il est possible d’aménager ces délais autant par accord d’entreprise que par accord direct entre l’employeur et le comité.

3. Les dispositions retenues par la commission

Lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité rétablir le caractère prioritaire donné à l’accord d’entreprise pour fixer les délais de consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; ce n’est bien qu’à défaut de délégué syndical qu’il sera possible de passer par un accord direct entre l’employeur et le comité pour aménager ces délais.

*

La Commission aborde l’amendement AS17 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Cet amendement vise à supprimer les premier et deuxième alinéas de l’article 11.

M. le rapporteur. Vous n’aviez pas formulé cette proposition en première lecture, et le vote de votre amendement conduirait à supprimer l’extension de la couverture des salariés par un CHSCT. J’émets un avis défavorable à son adoption.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS7 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a souhaité établir une alternative stricte entre l’accord d’entreprise et l’accord direct entre l’employeur et le comité pour fixer les délais dans lesquels les avis du CHSCT sont rendus. Cet amendement vise à rétablir le texte voté par l’Assemblée nationale en première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 11 modifié.

Article 12
(art. L. 2315-10, L. 2324-1, L. 2325-5-1, L. 2325-20, L. 2334-2, L. 4616-16,
L. 2343-11-1, L. 2353-27-1, L. 23-101-1, L. 23-101-2, L. 2391-1, L. 2391-2,
L. 4614-11-1 et L. 4616-6du code du travail)

Fonctionnement des institutions représentatives du personnel

Cet article propose d’améliorer le fonctionnement concret des institutions représentatives du personnel (IRP) en procédant aux quatre modifications suivantes :

– la sécurisation et l’encadrement de la possibilité de tenir des réunions communes de plusieurs instances ;

– l’assouplissement du cadre du recours à la visioconférence, à l’enregistrement des séances et à la sténodactylographie ;

– la sécurisation de l’établissement et de la transmission des procès-verbaux de réunions ;

– et enfin, l’encadrement de la présence des membres suppléants aux réunions des différentes instances.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

Lors de l’examen du texte en première lecture, la Commission des affaires sociales a, à l’initiative du rapporteur, adopté deux séries de modifications majeures à cet article :

– la première, pour revenir sur la réforme proposée par le projet de loi du rôle des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise suppléants. Alors que le projet de loi prévoyait en effet de supprimer la possibilité pour les suppléants d’assister aux réunions avec voix consultative, la commission a souhaité rétablir ce droit ;

– la seconde qui, à travers une série d’amendements, modifie le cadre applicable au recours à la visioconférence pour la réunion des instances représentatives du personnel, en le soumettant à un accord entre l’employeur et les membres élus de chacune des instances concernées. En l’absence d’accord, le nombre de réunions pouvant être tenu sous cette forme est limité à trois réunions par année civile.

En séance publique, l’Assemblée nationale a ensuite porté de cinq à huit jours le délai dans lequel l’ordre du jour de la réunion commune de plusieurs instances représentatives du personnel doit être porté à la connaissance de leurs membres.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Au Sénat, le texte de l’article 12 a de nouveau subi plusieurs modifications d’ampleur.

En premier lieu, le Sénat a, en séance publique et à l’initiative conjointe des groupes Union des démocrates et indépendants (UDI), Les Républicains et Rassemblement démocratique et social européen (RDSE), rétabli le texte initial du Gouvernement s’agissant du rôle joué par les représentants du personnel suppléants, en prévoyant que ceux-ci n’assisteraient aux réunions de l’instance qu’en l’absence des titulaires. En outre, ils auraient la possibilité de participer avec voix consultative aux réunions tenues dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Alors que l’Assemblée nationale avait souhaité maintenir le rôle actuel des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise suppléants, le Sénat a quant à lui confirmé son souhait de voir opérée la réforme des suppléants.

Le Sénat a ensuite adopté deux amendements de M. Jean-Baptiste Lemoyne et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, pour prévoir que s’agissant du comité central d’entreprise et du comité de groupe, le recours à la visioconférence peut être opéré par l’employeur, sans l’accord des membres de l’instance concernée, et sans limitation du nombre de réunions pouvant être organisées sous cette forme.

3. Les dispositions retenues par la commission

Dans le cadre de la nouvelle lecture du texte, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité rétablir le texte initialement voté par l’Assemblée en première lecture, tant s’agissant du rôle des suppléants que des modalités de recours à la visioconférence.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS30 du rapporteur et AS90 de M. Christophe Cavard.

M. le rapporteur. L’amendement AS30 a pour objet de supprimer les alinéas 2 à 5 de l’article 12 portant sur le rôle des suppléants, afin de revenir au texte de l’Assemblée nationale.

Mme Véronique Massonneau. Je retire mon amendement au profit de celui de M. le rapporteur.

M. Gérard Cherpion. Je maintiens la position que j’ai exprimée précédemment sur les suppléants.

L’amendement AS90 est retiré.

La Commission adopte l’amendement AS30.

La Commission étudie l’amendement AS103 de M. Christophe Cavard.

Mme Véronique Massonneau. La visioconférence est un dispositif utile, mais il convient de privilégier les réunions où les personnes se trouvent dans la même pièce. Si l’usage exceptionnel de la visioconférence est envisageable, les parties prenantes doivent en être d’accord. Cet amendement vise donc à supprimer les exceptions où ce consentement ne serait pas obligatoire.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Vous proposez de supprimer tout recours à la visioconférence, ce qui me semble préjudiciable, puis vous suggérez que ce moyen puisse être utilisé par accord entre l’employeur et l’instance considérée, ce qui est déjà inscrit dans le texte.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS5 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a souhaité que, pour le comité central d’entreprise, le recours à la visioconférence relève du seul employeur, l’accord des membres du comité n’étant pas nécessaire. L’Assemblée nationale avait prévu que les membres du comité devaient y consentir, et cet amendement rétablit cette disposition.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS6 du rapporteur.

M. le rapporteur. C’est le même amendement pour le comité de groupe.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS100 de M. Christophe Cavard.

Elle examine ensuite l’amendement AS99 de M. Christophe Cavard.

Mme Véronique Massonneau. Les réunions communes des instances représentatives doivent se dérouler quinze jours après la diffusion de leur ordre du jour lorsque le CHSCT en est partie prenante. Cet amendement vise ainsi à ce que les membres de ces instances bénéficient d’un temps suffisant pour préparer les séances.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 12 modifié.

Chapitre IV
Un dialogue social plus stratégique dans les entreprises

Article 13
(art. L. 2323-1, L. 2323-2, L. 2323-3, L. 2323-6, L. 2323-7, L. 2323-7-1, L. 2323-7-2, L. 2323-7-3, L. 2323-8, L. 2323-9, L. 2323-10, L. 2323-11, L. 2323-12, L. 2323-13 à L. 2323-17, L. 2323-18, L. 2323-19 à L. 2323-26-3, L. 2323-27, L. 2323-28, L. 2323-29 à L. 2323-32, L. 2323-33 à L. 2323-45, L. 2323-46, L. 2323-47, L. 2323-48, L. 2323-49, L. 2323-55 à L. 2323-57, L. 2323-59, L. 2323-60, L. 2323-61, L. 2323-68 à L. 2323-72, L. 2323-74, L. 2323-75, L. 2323-77, L. 3312-17 du code du travail)

Regroupement des informations et consultations annuelles obligatoires
du comité d’entreprise

Cet article propose de regrouper les dix-sept obligations actuelles d’information et de consultation annuelles du comité d’entreprise en trois grandes consultations portant respectivement sur les orientations stratégiques de l’entreprise, la situation économique et financière de l’entreprise, ainsi que sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté plusieurs modifications majeures à l’article 13.

La Commission des affaires sociales a tout d’abord exclu, à l’initiative du rapporteur, l’ensemble des données relatives à la situation comparée des femmes et des hommes de la possibilité ouverte par le texte de modifier, par accord d’entreprise, la liste et le contenu des informations transmises au comité d’entreprise.

Elle a également adopté trois amendements du rapporteur qui inscrivent dans la base de données unique l’ensemble des informations transmises par l’employeur au CHSCT, afin que ces données puissent désormais être mises à disposition de l’ensemble des représentants du personnel ainsi que des délégués syndicaux.

Elle a adopté deux amendements identiques, l’un du Gouvernement sous-amendé par le rapporteur, l’autre de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen, qui intègrent à la base de données économiques et sociales l’ensemble des informations qui sont obligatoirement transmises au comité d’entreprise au titre de la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise.

Elle a, à l’initiative du rapporteur, réparé un oubli qui a été occasionné par la refonte des informations et consultations du comité d’entreprise. En effet, le comité d’entreprise est aujourd’hui destinataire du rapport des commissaires aux comptes et peut convoquer ces derniers pour recevoir leurs explications sur la situation financière de l’entreprise : ce pouvoir, omis dans le cadre de la réécriture du texte, a bien vocation à être maintenu.

Enfin, la commission a adopté un amendement de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen, visant à préciser que dans le cadre de la nouvelle consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi, les informations transmises au comité d’entreprise sur les données relatives à l’égalité professionnelle comportent bien l’ensemble des informations existantes et qui ont désormais vocation à être intégrées à la base de données unique.

En séance publique, outre un important travail de coordination juridique présenté par le rapporteur pour tirer les conséquences des modifications portées par l’article 13 dans l’ensemble du code du travail et dans les autres codes, l’Assemblée nationale a adopté quatre amendements modifiant l’article 13 :

– le premier, des députés du groupe Écologiste, pour préciser que la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise, qui inclut une consultation sur la politique de recherche et de développement, porte également sur l’utilisation du crédit impôt recherche (CIR) ;

– le deuxième, du rapporteur, pour préciser que comme par le passé dans le cadre de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise, les documents de gestion comptable prévisionnelle transmis au comité d’entreprise sont bien confidentiels ;

– le troisième, du groupe Écologiste, pour autoriser le comité d’entreprise à recourir à un expert-comptable dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, que le texte initial prévoyait d’exclure de cette possibilité de recours ;

– et enfin, le quatrième, du groupe Socialiste, républicain et citoyen, qui prévoit que dans les entreprises de plus de 300 salariés, le comité d’entreprise peut recourir à un expert technique pour préparer la négociation sur l’égalité professionnelle.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Lors de son examen du texte en première lecture, la Commission des affaires sociales du Sénat a apporté, à l’initiative de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia, plusieurs modifications au texte de l’article 13.

Elle a d’abord supprimé le principe d’une consultation « ad hoc » du comité d’entreprise sur tous les sujets relatifs à la marche générale de l’entreprise, hors consultations récurrentes de celui-ci.

Elle est également revenue sur la priorité donnée par le texte à l’accord d’entreprise pour fixer les délais impartis au comité d’entreprise pour rendre ses avis : alors que le projet de loi voté par l’Assemblée prévoyait en effet que la fixation des délais de consultation du comité d’entreprise incombait prioritairement à l’accord d’entreprise, et seulement en l’absence de délégué syndical à un accord direct entre l’employeur et le comité, le Sénat a souhaité instaurer une alternative stricte entre ces deux modes de fixation des délais.

En parallèle, la Commission des affaires sociales du Sénat a prévu la possibilité de procéder par voie d’accord direct entre l’employeur et les membres du comité d’entreprise pour adapter la périodicité des consultations du comité et le contenu des informations requises dans leur cadre, alors que le projet de loi ne prévoit initialement qu’une possibilité de procéder par voie d’accord d’entreprise.

Elle a également inclus la consultation sur les orientations stratégiques dans la liste des consultations annuelles pouvant faire l’objet d’adaptations par voie d’accord, celle-ci étant la seule qui en était exclue par le projet de loi initial.

Elle a substitué à l’intitulé du paragraphe 2 de la sous-section 4 qui couvre désormais la consultation annuelle sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi : cette sous-section intitulée « Dispositions complémentaires pour les entreprises d’au moins 300 salariés » ne couvre en réalité que le bilan social, d’où le fait de lui substituer ce dernier intitulé.

Lors de son examen du texte en séance publique, le Sénat a adopté trois amendements à l’article 13 :

– le premier, à l’initiative de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia, qui tire les conséquences de l’inclusion de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise dans la liste des consultations pouvant faire l’objet d’adaptations par voie d’accord, en précisant que la liste et le contenu des informations relatives à cette consultation pourront donc dès lors bien être également adaptées ;

– le deuxième, à l’initiative de Mme Élisabeth Lamure et certains de ses collègues du groupe Les Républicains, qui supprime une précision qu’avait souhaité apporter l’Assemblée nationale sur le suivi spécifique de l’utilisation du crédit impôt recherche (CIR) dans le cadre de la consultation sur la politique de recherche et de développement technologique de l’entreprise ;

– et enfin, un troisième amendement présenté par Mme Pascale Gruny et certains de ses collègues du groupe Les Républicains, qui supprime l’expertise spécifique prévue pour préparer la négociation sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail qui est traitée à l’article 14 du projet de loi.

3. Les dispositions retenues par la commission

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a, lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, souhaité revenir au texte initialement voté par l’Assemblée sur l’ensemble de cet article, à l’exception de la question relative au recours à l’expertise en vue de la préparation de la négociation relative à l’égalité professionnelle, dont le traitement a été renvoyé à la séance publique.

*

La Commission étudie l’amendement AS15 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rétablit le texte de l’Assemblée nationale sur les motifs de consultation ad hoc du comité d’entreprise qui n’entrent pas dans les consultations annuelles.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS14 du rapporteur.

M. le rapporteur. Comme pour le CHSCT, le Sénat a souhaité qu’un accord direct entre l’employeur et le comité puisse intervenir au même titre qu’un accord d’entreprise pour fixer les délais de consultation du comité d’entreprise. Nous souhaitions donner la priorité à ce dernier, et cet amendement rétablit le texte voté en première lecture par l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS13 du rapporteur.

M. le rapporteur. La Commission des affaires sociales du Sénat a souhaité qu’un accord direct entre l’employeur et le comité puisse intervenir pour revoir les conditions des consultations du comité d’entreprise. Or il est essentiel que ce soit bien un accord d’entreprise seul qui puisse procéder à de telles adaptations. Cet amendement rétablit le texte de l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS9 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement reprend la version de l’Assemblée nationale, puisque le Sénat a souhaité pouvoir inclure la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise dans la liste des consultations pouvant être adaptées par voie d’accord. Cela pourrait toucher la périodicité comme le contenu des informations requises, ce qui n’est pas souhaitable tant cette consultation constitue le socle de l’information du comité d’entreprise.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS12 du rapporteur et AS97 de M. Christophe Cavard.

M. le rapporteur. L’amendement AS12 vise à rétablir le texte de l’Assemblée nationale afin de préciser que la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise, qui porte notamment sur la politique de recherche et de développement technologique, inclut bien un suivi de l’utilisation des sommes reçues par l’entreprise au titre du crédit impôt recherche (CIR).

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS97 est défendu.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle étudie l’amendement AS11 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rétablit l’intitulé d’un chapitre.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS10 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 13 modifié.

Article 14
(art. L. 2242-1, L. 2242-2, L. 2242-5 à L. 2242-16 et L. 2242-18 à L. 2242-23 du code du travail)

Regroupement des négociations obligatoires en entreprise

Cet article procède au regroupement des négociations obligatoires en entreprise en trois grandes négociations portant respectivement sur :

– la rémunération, le temps de travail et la répartition de la valeur ajoutée ;

– la qualité de vie au travail ;

– et la gestion des emplois et des parcours professionnels.

Par accord majoritaire, il sera également possible de regrouper certains thèmes de négociation et/ou d’en modifier la périodicité. Seule la négociation sur les salaires se voit réserver un sort particulier, dans la mesure où elle pourra sans délai redevenir annuelle à la demande d’une seule des parties signataires de l’accord.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

Lors de l’examen du texte en première lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté dix amendements à cet article.

Deux amendements de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen visent à inclure l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’intitulé de la nouvelle grande négociation sur la qualité de vie au travail. Elle a adopté un amendement des mêmes auteurs précisant que la mise en œuvre des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et leurs différences de carrière faisait l’objet d’un suivi dans le cadre de la consultation sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise.

Elle a ensuite adopté deux amendements identiques, l’un du rapporteur, le second de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen, précisant que la négociation sur la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes s’appuie bien sur les données relatives à la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise, qui ont par ailleurs été incluses dans la base de données unique.

Elle a également adopté un amendement de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen qui rétablit la mention explicite de l’obligation d’établissement d’un plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes en l’absence d’accord collectif sur ce sujet.

Elle a adopté un amendement du rapporteur, qui a fait l’objet de deux sous-amendements visant à clarifier le régime de la pénalité applicable aux entreprises de plus de 50 salariés non couvertes par un accord ou, le cas échéant, un plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Elle a enfin adopté un amendement de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen visant à préciser que la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels intègre bien la question de la mixité des métiers.

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté deux amendements de Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen pour confirmer la priorité donnée à la thématique de l’égalité professionnelle dans le cadre de la négociation sur la qualité de vie au travail. Elle a ensuite adopté un amendement des mêmes auteurs visant à maintenir dans le texte législatif les obligations relatives aux obligations d’affichage du plan d’action relatif à l’égalité professionnelle qui incombent à l’employeur. Elle a également souhaité, toujours à l’initiative de ces auteurs, interdire aux entreprises non couvertes par un accord collectif ou un plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle de procéder à une quelconque adaptation des modalités des trois négociations annuelles obligatoires. Enfin, elle a adopté un amendement du rapporteur qui précise que le dispositif de diminution de l’exonération de cotisations en zone de revitalisation rurale (ZRR) en cas de non-respect par l’employeur de l’obligation de négocier sur les salaires s’applique également lorsqu’une organisation signataire a demandé l’ouverture immédiate de cette négociation, et pas seulement au terme de la périodicité fixée par l’accord.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Outre des amendements rédactionnels ou de précision juridique, la Commission des affaires sociales du Sénat a apporté deux modifications majeures au texte de l’article 14 à l’initiative de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia. Elle a d’une part restreint le champ de l’interdiction d’adapter la périodicité des négociations annuelles obligatoires en cas d’absence d’accord collectif ou de plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle, en prévoyant que cette interdiction ne concernait que la seule négociation sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail, et non les deux autres. Elle a, d’autre part, supprimé la possibilité pour une organisation syndicale d’exiger l’engagement direct de la négociation sur les salaires, dans l’hypothèse où la périodicité de celle-ci aurait été modifiée par accord collectif.

Dans le cadre de l’examen du texte en séance publique, le Sénat s’est contenté d’adopter deux amendements de cohérence et coordination juridiques de la rapporteure.

3. Les dispositions retenues par la commission

Lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité revenir sur les deux amendements de fond votés par le Sénat sur cet article, tout en conservant partiellement les modifications apportées sur le plan rédactionnel et sur le plan juridique.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS59 du rapporteur.

M. le rapporteur. Sandrine Mazetier avait suggéré cette disposition qui vise à interdire de procéder par voie d’accord à la modification de la périodicité des négociations obligatoires pour les entreprises qui ne seraient pas couvertes par un accord ou par un plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Le Sénat ayant limité le champ de cette mesure, l’amendement vise à rétablir la version votée par l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS8 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a supprimé la procédure dérogatoire instituée par le projet de loi initial s’agissant de la négociation sur les salaires ; il était prévu qu’elle pouvait à tout moment redevenir annuelle, sur simple demande d’une organisation syndicale signataire de l’accord d’entreprise modifiant la périodicité des négociations. Il est essentiel de maintenir cette spécificité, que rétablit l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 14 modifié.

Article 14 bis
(art. L. 1142-2-1 [nouveau] du code du travail)

Codification de la notion d’agissement sexiste

Cet article est issu de deux amendements identiques adoptés par le Sénat à l’initiative respectivement de Mme Patricia Schillinger et certains de ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen et de M. Dominique Watrin et de certains de ses collègues du groupe Communiste, républicain et citoyen : il vise à codifier la notion d’« agissement sexiste », consacrée par la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Lors de la discussion de la loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel, la question de la codification de cette notion a été évoquée, mais celle-ci n’a pas été retenue. Elle continue toutefois à être préconisée par le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (CESP).

Dans le cadre de l’examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale n’est pas revenue sur le principe d’une telle codification, qui est souhaitable sur le fond.

*

La Commission adopte l’article 14 bis sans modification.

Article 15
(art. L. 2232-21, L. 2232-22, L. 2232-23, L. 2232-23-1, L. 2232-24, L. 2232-28
et L. 2232-29 du code du travail)

Négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical

Afin de favoriser au maximum la conclusion d’accords d’entreprise ou d’établissement, notamment dans les petites structures, plutôt que de recourir à des décisions unilatérales de l’employeur, l’article 15 s’attache à consolider le régime de la négociation selon la procédure du mandatement d’un salarié.

Il renforce la prééminence des organisations syndicales, puisqu’il prévoit que l’employeur devra désormais négocier en priorité avec un élu du personnel mandaté. Ce n’est qu’à défaut qu’il sera possible de négocier avec un élu du personnel non mandaté. Et ce n’est qu’en dernière analyse qu’interviendra la possibilité d’engager la négociation avec un ou des salariés mandatés : dans ce dernier cas, l’approbation par la majorité des salariés reste bien une condition de la validité d’un accord signé par des salariés mandatés. La possibilité de négocier avec un salarié mandaté serait cependant ouverte de droit aux entreprises dépourvues de délégué syndical et de représentants du personnel sur la base d’un procès-verbal de carence, ainsi que dans les entreprises de moins de onze salariés.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

Lors de l’examen du texte en première lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté deux amendements du rapporteur visant à rétablir les commissions paritaires de branche qui ont vocation à valider les accords conclus avec des salariés élus non expressément mandatés par des organisations syndicales, ainsi que leur mode de fonctionnement.

Elle n’a pas adopté de modification autre que rédactionnelle ou de précision dans le cadre de son examen du texte en séance publique.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

En Commission des affaires sociales, le Sénat est revenu, à l’initiative de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia, sur le rétablissement des commissions paritaires de branche.

Toutefois, les sénateurs ont, en séance publique, rejoint la position initiale de l’Assemblée nationale sur ce point, par l’adoption d’un amendement de Mme Élisabeth Schillinger et les membres du groupe Socialiste et républicain, qui prévoit bien la validation des accords conclus avec des salariés élus non mandatés par des commissions paritaires de branche.

3. Les dispositions retenues par la commission

Lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale n’a pas modifié l’article 15, le texte issu du Sénat correspondant en tous points à celui voté par elle en première lecture.

*

La Commission adopte l’article 15 sans modification.

Article 16
(art. L. 2322-7, L. 2325-14, L. 2325-14-1, L. 2325-26 et L. 2325-34 du code du travail)

Franchissement de seuils

Afin de répondre à la problématique du franchissement des seuils, cet article procède à l’harmonisation de certains seuils applicables aux petites et moyennes entreprises en les relevant à 300 salariés. Il clarifie ensuite l’appréciation de ce seuil en matière d’information et de consultation du comité d’entreprise. Il codifie enfin la jurisprudence sur l’appréciation du seuil permettant de supprimer un comité d’entreprise en cas de baisse importante et durable des effectifs.

1. Les apports de l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale n’a adopté que des modifications rédactionnelles à cet article en première lecture.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement de la rapporteure, Mme Catherine Procaccia, prévoyant que l’obligation de mise en place d’un comité d’entreprise ne s’appliquerait que si le seuil de 50 salariés était franchi par une entreprise pendant douze mois consécutifs, et non douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois dernières années, comme le prévoit le droit existant. En conséquence, cette même règle des douze mois consécutifs s’appliquerait pour la suppression du comité d’entreprise en cas de retour en deçà de 50 salariés – au lieu d’une règle actuelle de vingt-quatre mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédant le renouvellement du comité –, ainsi que pour le franchissement du seuil de trois cents salariés.

3. Les dispositions retenues par la commission

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité revenir au texte voté par elle en première lecture, et a supprimé l’ensemble des modifications qui ont été apportées par le Sénat sur cet article concernant les règles de franchissement des seuils.

*

La Commission aborde l’amendement AS38 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rétablit la rédaction intégrale de l’article 16 du projet de loi votée par l’Assemblée nationale en première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 16 est ainsi rédigé.

Article 16 bis
(art. L. 2314-8 et L. 2324-11 du code du travail)

Suppression du monopole syndical pour les élections professionnelles

Cet article, issu d’un amendement présenté en séance publique par M. Jean-Baptiste Lemoyne et ses collègues du groupe Les Républicains, propose de supprimer le monopole syndical de désignation des candidats au premier tour des élections professionnelles au comité d’entreprise et aux fonctions de délégué du personnel, afin de favoriser les candidatures libres et en particulier celles des salariés non syndiqués.

Lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a supprimé cet article, qui remet en cause l’équilibre mis en place par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail et la promotion de l’engagement syndical porté de bout en bout par le présent projet de loi.

*

La Commission examine l’amendement AS39 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 16 bis, introduit par le Sénat, qui supprime le monopole syndical pour les élections professionnelles ; celui-ci se trouve pourtant au cœur de l’amélioration du dialogue social et en constitue la colonne vertébrale depuis la loi du 20 août 2008.

M. Gérard Cherpion. Nous sommes en train de légiférer à l’ancienne et sans prendre en compte l’évolution de la société. Sous le coup de facteurs comme la numérisation de l’économie, le nombre de salariés a tendance à diminuer et d’autres formes de travail émergent. Le Sénat n’a pas entendu supprimer le monopole syndical, mais a ouvert la possibilité à des gens travaillant dans une entreprise de se présenter. Il est dommage que vous refermiez cette ouverture.

M. le rapporteur. Cette disposition a été introduite dans la loi de 2008, et je vous laisse la paternité de la qualifier de législation faite à l’ancienne.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 16 bis est supprimé.

Article 16 ter
(art. L. 3122-4 du code du travail)

Clarification du seuil de déclenchement des heures supplémentaires
dans le cadre d’un accord d’aménagement du temps de travail

Cet article est issu d’un amendement adopté en séance publique par le Sénat à l’initiative de M. Daniel Gremillet et certains de ses collègues du groupe Les Républicains : il prévoit que, dans le cadre d’un accord d’aménagement négocié du temps de travail, le seuil de 1 607 heures annuelles de travail qui sert de déclenchement au calcul des heures supplémentaires tienne compte des cinq semaines de congés payés.

Cet article aurait pour conséquence qu’un salarié qui n’aurait pas acquis cinq semaines de congés payés serait amené à travailler plus de 1 607 heures par an sans être considéré comme travaillant plus de 35 heures par semaine, autrement dit, certaines heures travaillées en réalité comme des heures supplémentaires ne seraient pas rémunérées comme telles.

Compte tenu de la rupture d’égalité entre les salariés qui en serait la conséquence, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité supprimer cet article.

*

La Commission étudie l’amendement AS40 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement propose de supprimer l’article 16 ter, introduit par le Sénat et qui ouvre la possibilité pour un accord d’aménagement du temps de travail de comptabiliser le seuil de 1 607 heures, au-delà duquel se déclenchent les heures supplémentaires, en intégrant les cinq semaines de congés payés : autrement dit, cela conduirait un salarié n’ayant pas acquis l’ensemble de ses droits à congés payés à une rémunération moindre pour le même nombre d’heures de travail effectuées.

Telle n’est pas la logique qui doit présider au calcul des heures supplémentaires : cet amendement propose donc la suppression de cette disposition créatrice d’une rupture d’égalité entre les salariés.

M. Gérard Cherpion. La disposition introduite par le Sénat se contente d’intégrer la prise ou non des congés payés dans le calcul du seuil des 1 607 heures. Cela ne change rien sur le fond !

M. Denys Robiliard. Les 1 607 heures correspondent à 47 semaines à 35 heures et comprennent donc les cinq semaines de congés payés ; la 1 608e heure est forcément supplémentaire ! Nous ne faisons que respecter la jurisprudence de la Cour de cassation ; on peut vouloir la renverser, mais on ne peut pas dire que nous sommes incohérents par rapport aux règles actuelles relatives aux heures supplémentaires.

M. Gérard Cherpion. Je ne pense pas avoir parlé d’incohérence, monsieur Robiliard.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 16 ter est supprimé.

Chapitre V
Adaptation des règles du dialogue social interprofessionnel

Article 17
(art. L. 2151-1, L. 2152-1, L. 2152-2, L. 2152-6 et L. 2261-32 du code du travail)

Adaptation des règles de la représentativité patronale

Cet article propose une série d’ajustements en matière de mesure de la représentativité des organisations professionnelles d’employeurs et de restructuration des branches professionnelles, afin de sécuriser certaines dispositions introduites par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à l’emploi, à la formation professionnelle et au dialogue social. Il a été considérablement enrichi au cours des débats parlementaires.

● À l’Assemblée nationale, la Commission des affaires sociales a adopté deux amendements présentés par le rapporteur, visant à :

– permettre au ministre en charge du travail de s’assurer que le montant des cotisations versées par les entreprises ne présente pas un caractère dérisoire ;

– renforcer les outils à la disposition du ministre pour lever les obstacles à la restructuration des branches professionnelles.

● Au Sénat, les sénateurs ont adopté en séance publique un amendement de clarification présenté par le Gouvernement, qui propose de préciser que pour être pris en compte dans la mesure de la représentativité, l’acte d’adhésion d’une entreprise à une organisation professionnelle d’employeurs doit être volontaire.

Les sénateurs ont également adopté deux amendements de la rapporteure ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, qui visent à clarifier les formes juridiques des organisations professionnelles d’employeurs prises en compte dans le cadre général de la représentativité patronale. Ils précisent que les associations d’employeurs et les syndicats professionnels sont assimilés à des organisations professionnelles d’employeurs dès lors qu’ils ont vocation à négocier des accords collectifs de travail avec des organisations syndicales de salariés, une situation qui concerne particulièrement le secteur agricole.

● La Commission des affaires sociales a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

*

La Commission adopte l’article 17 sans modification.

Article 17 bis (nouveau)
(art. L. 2122-6-1 [nouveau] du code du travail)

Représentativité des agents de direction des organismes de protection sociale

Cet article a été introduit au Sénat par un amendement de M. Jean-Noël Cardoux et certains de ses collègues du groupe Les Républicains, malgré un avis défavorable du Gouvernement et de la commission. Il propose de mesurer l’audience des organisations syndicales, pour les agents de direction de la Mutualité sociale agricole (MSA) et du Régime social des indépendants (RSI), sur la base des résultats des élections aux commissions paritaires nationales.

Il crée un nouvel article L. 2122-6-1 au sein du code du travail, qui vise à instaurer des règles spécifiques de mesure de la représentativité syndicale pour les agents de direction de la MSA et du RSI, dont les voix aux élections professionnelles sont actuellement mesurées de la même manière que celles des autres catégories de personnel de ces organismes de protection sociale.

Pour ces agents de direction, la représentativité serait désormais appréciée au regard des suffrages exprimés lors de l’élection des membres représentant les salariés aux commissions paritaires nationales instituées par leur convention collective spécifique. Les modalités d’application de cet article sont renvoyées à un décret en Conseil d’État.

La Commission des affaires sociales a adopté cet article sans modification.

*

La Commission adopte l’article 17 bis sans modification.

Article 18
(art. L. 2135-7, L. 2135-11 et L. 3142-8 du code du travail)

Financement des activités des organismes de recherche
par le fonds paritaire de financement des partenaires sociaux

Cet article fait entrer dans le champ du fonds paritaire de financement des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs, les activités de recherche conduites par ces dernières dans les domaines économiques et sociaux.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

À l’initiative du Gouvernement, la Commission des affaires sociales a adopté un amendement autorisant l’employeur à maintenir la rémunération des salariés bénéficiant de congés de formation économique, sociale et syndicale, sous réserve d’une convention définissant les modalités de remboursement de l’employeur par l’organisation syndicale.

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur et un amendement de M. Denys Robiliard prévoyant que les éventuelles indemnités de fonction payées par une organisation syndicale sont assimilées à des salaires.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En commission, le Sénat a adopté un amendement de la rapporteure visant à préciser que le financement du fonds paritaire ne peut porter que sur les organismes dont les recherches portent sur les politiques publiques relevant de la compétence de l’État. Les sénateurs sont revenus sur cette modification en séance publique, à l’invitation de Mme Patricia Schillinger et de ses collègues du groupe Socialiste et républicain.

Ils ont ensuite adopté un amendement présenté par le Gouvernement proposant de généraliser le dispositif de subrogation pour les salariés qui partent en congé de formation économique, sociale et syndicale, alors que cette disposition n’avait été envisagée que comme une faculté lors de l’examen du texte en commission à l’Assemblée nationale. Selon l’exposé des motifs de l’amendement du Gouvernement, le maintien de tout ou partie de la rémunération serait de droit, si une organisation syndicale présente depuis deux ans au minimum dans l’entreprise et respectant les critères d’indépendance et de respect des valeurs républicaines en fait la demande.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article tel que modifié par le Sénat.

*

M. Gérard Cherpion. Au Sénat, le Gouvernement a déposé un amendement à l’article 18 qui n’a pas été adopté, et je m’étonne que le Gouvernement ne le soumette pas à l’Assemblée nationale.

M. Dominique Tian. Monsieur le rapporteur, quelle serait votre position si le Gouvernement déposait son amendement en séance publique ? Vous y opposeriez-vous ?

M. le rapporteur. Il est extraordinaire que l’on débatte d’un amendement qui n’existe pas !

La Commission adopte l’article 18 sans modification.

Article 19
(art. L. 1226-12, L. 4622-2, L. 4622-3, L. 4624-1, L. 4624-3, L. 4624-4, L. 4624-5 [nouveau], L. 4641-1 à L. 4641-4 du code du travail [nouveaux], art. 10 et 16 de la loi n° 2014-40
du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites)

Santé au travail et transmission de la fiche de prévention des expositions

Cet article modifie plusieurs procédures en matière de santé au travail et propose d’inscrire dans la loi l’existence du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT).

Il supprime par ailleurs, dans le cadre du dispositif du compte personnel de prévention de la pénibilité, l’obligation pour l’employeur de transmettre annuellement à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) une copie de la fiche de prévention des expositions du salarié.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Alors que le projet de loi initial ne contenait qu’une seule mesure relative à la santé au travail, l’Assemblée nationale a substantiellement enrichi le texte en séance publique, afin de prendre en compte plusieurs des recommandations formulées par le groupe du travail « Aptitude et médecine du travail » (3) dans son rapport rendu public le 21 mai 2015.

Outre un amendement rédactionnel du rapporteur adopté en commission, l’Assemblée nationale a ainsi adopté en séance publique quatre amendements de M. Michel Issindou visant à clarifier les conditions de la rupture du contrat de travail en cas d’inaptitude et à cibler l’activité des services de santé au travail sur les personnes les plus exposées à des facteurs de risques.

En ce qui concerne les conséquences de l’inaptitude, l’employeur sera désormais habilité à rompre le contrat de travail tout en étant réputé avoir accompli son obligation de reclassement, lorsque l’avis du médecin du travail mentionne expressément que le maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé. Le médecin du travail sera quant à lui invité à rechercher le consentement du salarié sur les préconisations liées à l’adaptation du poste du travail. Il est également proposé de mettre systématiquement à disposition des représentants du personnel les préconisations du médecin du travail en cas d’inaptitude.

Enfin, la surveillance médicale des salariés affectés à des postes présentant des risques particuliers pour leur santé, leur sécurité ou celles de tiers, sera renforcée, de même lorsque leur situation personnelle le justifie. Les modalités d’identification de ces salariés seront précisées par décret en Conseil d’État.

2. La reconnaissance législative du COCT adoptée au Sénat

À l’initiative de la rapporteure, le Sénat a adopté un amendement de coordination en commission et un amendement rédactionnel en séance publique.

Sur l’invitation du Gouvernement, les sénateurs ont également adopté un amendement visant à inscrire dans la partie législative du code du travail l’existence et les missions du Conseil d’orientation des conditions de travail et des comités régionaux d’orientation des conditions de travail (4). Il complète l’article 19 du présent projet de loi par un I quinquies qui propose une nouvelle rédaction du chapitre Ier du titre IV du livre VI de la quatrième partie du code du travail, désormais composé de deux sous-sections, relatives respectivement au Conseil d’orientation des conditions de travail et aux comités régionaux d’orientation des conditions de travail.

La section 1 se compose de trois articles L. 4641-1 à L. 4641-3 nouveaux qui définissent les missions du COCT, sa composition, et renvoient à un décret en Conseil d’État le soin de préciser son organisation, ses missions, ses règles de composition et le fonctionnement de ses formations. En matière de santé et de sécurité au travail et d’amélioration des conditions de travail, le COCT aurait ainsi pour missions, selon l’article L. 4641-1 :

– de participer à l’élaboration des orientations stratégiques des politiques publiques nationales ;

– de contribuer à la définition de la position française sur les questions stratégiques au niveau européen et international ;

– d’être consulté sur les projets de textes législatifs et réglementaires ;

– de participer à la coordination des acteurs intervenant dans ces domaines.

La section 2, composée d’un unique article L. 4641-4, dispose qu’un comité régional d’orientation des conditions de travail est placé auprès de chaque préfet de région. Cette instance est chargée de participer à l’élaboration et au suivi des politiques publiques régionales en matière de santé, de sécurité au travail et de conditions de travail, ainsi qu’à la coordination des acteurs intervenant dans cette matière au niveau régional. Un décret en Conseil d’État doit également déterminer son organisation, ses missions, sa composition et son fonctionnement.

3. La position de la commission

La Commission des affaires sociales a adopté cet article moyennant un amendement rédactionnel.

*

La Commission examine les amendements AS85, AS79 et AS82 de M. Michel Issindou, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Michel Issindou. Le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, porté par Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, s’est penché sur la médecine du travail, et le Gouvernement a installé une mission chargée de réfléchir au problème posé par cette médecine, qui ne remplit pas les obligations que lui assigne le code du travail, du fait, notamment, d’un déficit démographique. La médecine du travail devrait assurer environ 30 millions de visites par an, mais elle n’en effectue que 10 millions ; la multiplication des contrats de très courte durée explique largement cet écart.

La mission a procédé à quatre-vingts auditions pendant six mois et a dressé des constats nourrissant des propositions visant à améliorer le fonctionnement de cette médecine. Les cinq membres de cette mission estiment que l’existence de la médecine du travail ne peut être remise en cause, car elle remplit l’utile fonction de connaître la santé des salariés ainsi que leur environnement de travail. Il n’est pas davantage question de revenir sur les dispositions de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 concernant la médecine du travail ni sur la loi du 20 juillet 2011 relative à l’organisation de la médecine du travail. Ces textes ont incité au développement de la pluridisciplinarité et souhaitaient déjà s’attaquer au manque de médecins du travail. De 6 000 médecins en 2010, cette population ne compte plus que 5 000 praticiens en 2012 ; si ce rythme se poursuivait, ils ne seraient plus que 2 000 en 2030. Cette spécialité n’attire pas les jeunes internes, puisque seuls 100 postes ont été pourvus sur les 160 offerts cette année. Il faut trouver des solutions pour enrayer ce déclin.

Ces amendements visent à clarifier le débat sans fin centré sur l’opposition entre l’aptitude et l’inaptitude. Certains contestent la notion même d’aptitude, qui ne repose sur aucune définition véritable, alors que celle d’inaptitude se décline, de l’incapacité totale à l’aptitude avec réserves. Aux yeux de la mission, il était essentiel d’alléger les visites d’aptitude, certaines d’entre elles pouvant être effectuées par d’autres personnes que les médecins du travail qui, de toute façon, n’ont pas le temps de les faire aujourd’hui. De nombreux salariés ne restant qu’un mois dans une entreprise ont travaillé en toute illégalité, car ils n’ont jamais vu de médecin du travail. Les personnes occupant des postes de sécurité et à risques doivent être fréquemment examinées – nous avons proposé une périodicité de cinq ans, alors que les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) autorisent de la fixer à six ans –, le récent accident d’avion de la Lufthansa ayant montré l’importance de la médecine du travail, mais également les difficultés de sa mission. Il reste à délimiter la catégorie des métiers à risques.

On peut comprendre qu’un médecin du travail ne souhaite pas déclarer une personne inapte, mais il pose parfois tellement de conditions à l’autorisation d’occuper le poste que cela aboutit souvent à un licenciement.

L’amendement AS85 modifie les articles législatifs du code du travail et vise à harmoniser les dispositions de la première partie du code sur les mesures de reclassement et les modalités de rupture du contrat de travail ; il a également pour objet de généraliser les dispositions de la loi sur les obligations de reclassement de l’employeur et sur la rupture du contrat de travail à tous les cas d’inaptitude – que celle-ci résulte d’une maladie professionnelle, d’un accident du travail ou de tout autre facteur et qu’elle suive ou non une période de suspension du contrat de travail ; il se propose enfin de clarifier les relations entre l’employeur, le salarié et le médecin du travail. Ainsi, nous proposons d’écrire dans la loi que « L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un poste dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2 [du code du travail], soit du refus par le salarié du poste proposé dans ces conditions, soit du fait que l’avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’entreprise (…) ».

L’amendement AS79 a trait à la pénibilité : à notre grande surprise, les médecins du travail nous ont affirmé que l’obligation d’une visite semestrielle aux travailleurs de nuit ne s’imposait pas pour la santé du salarié. Néanmoins, le travail de nuit cause des dégâts et constitue l’un des dix critères de la pénibilité. Le salarié peut d’ailleurs consulter à tout moment le médecin du travail.

L’amendement AS82 a pour objet de compléter le chapitre intitulé « Actions et moyens des membres des équipes pluridisciplinaires de santé au travail » du code du travail, en organisant de façon intelligible le suivi de l’état de santé des travailleurs, notamment en s’appuyant sur l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail. Cette dernière représente l’avenir de la médecine du travail, notamment pour les nombreux salariés de très petites, de petites et de moyennes entreprises (TPE) et (PME) qui ne rencontrent jamais de médecin du travail.

Cet amendement vise à insérer de nouvelles dispositions dans le code du travail. La première consacre le suivi de l’état de santé de tous les travailleurs par le médecin du travail ou par les professionnels de santé, notamment l’infirmier, membres de l’équipe pluridisciplinaire qu’il anime et coordonne. La deuxième précise que le médecin s’assure de l’aptitude des salariés ; la mission souhaitait instaurer un double contrôle systématique, mais nous ne retenons pas cette piste même si les contrôles spécifiques sont bien entendu maintenus pour certaines professions comme les pilotes d’avion de ligne. La troisième disposition explicite les propositions que peut formuler le médecin du travail, après avoir entendu le salarié, pour préserver l’état de santé de l’intéressé tout en permettant de le maintenir à son poste de travail. L’essentiel est de s’assurer de l’adéquation entre le poste et l’état de santé, et le rôle du médecin s’avère fondamental en la matière.

La quatrième modification définit les conditions dans lesquelles un avis d’inaptitude peut être rendu. Cette dernière ne peut être prononcée qu’en dernier recours, à la suite d’une étude de poste et alors que les échanges avec le salarié et l’employeur ont montré qu’aucun aménagement n’était possible et qu’un changement était seul capable de préserver l’état de santé de l’employé. Ces avis se soldent fréquemment par des licenciements, si bien qu’ils doivent être accompagnés d’indications relatives au reclassement du salarié.

La cinquième valorise les échanges entre le médecin du travail, le salarié et l’employeur. Il convient que l’aide apportée à ce dernier pour mettre en œuvre les propositions du médecin soit formalisée. Une discussion portant sur les mesures proposées doit être menée avec le salarié, mais elle ne doit pas forcément aboutir au consentement de celui-ci. En effet, il arrive souvent que des employés refusent de quitter leur poste de travail, alors que le médecin du travail les a déclarés inaptes.

Enfin, une dernière disposition organise la contestation des propositions, la direction générale du travail (DGT) ayant constaté que les inspecteurs du travail n’apportaient pas de valeur ajoutée à l’avis du médecin. Il s’agit en effet de deux métiers différents, et nous proposons que la procédure de contestation des avis du médecin du travail devant l’inspecteur du travail soit remplacée par la possibilité de solliciter un expert près de la cour d’appel. Si le désaccord persiste, le litige est alors porté devant les prud’hommes.

Les décrets d’application de la loi devront identifier les postes de sécurité, ainsi que ceux à risques par catégorie d’entreprises. Ces derniers ne devront pas être trop nombreux, afin de ne pas condamner à nouveau la médecine du travail à l’impossibilité d’accomplir ses missions. Le dialogue social aura à se pencher sur cette question qui touche à celle du maintien dans l’emploi, preuve que cet article 19 a bien toute sa place dans ce projet de loi.

Ces amendements sont donc issus d’un rapport que nous avons présenté au conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT), celui-ci ayant émis des avis positifs ou négatifs très tranchés sur les propositions émises. Deux organisations syndicales se sont montrées favorables à son orientation et soutiennent les amendements déposés, la confédération générale du travail (CGT) et la confédération française démocratique du travail (CFDT) ont été plus nuancées, et d’autres structures nous ont fait part de leur opposition, ces différences accompagnant la publication de chaque rapport.

La pire politique pour la médecine du travail serait l’immobilisme, car la loi pose l’obligation de visites bisannuelles alors que les DIRECCTE, directions déconcentrées de l’État, acceptent qu’elles n’aient lieu que tous les six ans. La situation sur le terrain rend nécessaire l’intervention du législateur.

M. le rapporteur. Nous comprenons que Michel Issindou souhaite donner une suite législative au rapport du groupe de travail « Aptitude et médecine du travail », et les discussions que nous avons eues en première lecture nous ont permis d’entrevoir les difficultés qu’il évoque. Je ne doute pas que ses amendements soient fort judicieux, mais, j’en suis navré, les délais qui nous étaient impartis ne nous ont pas permis de les expertiser. Sans doute, dans ces conditions, devrais-je m’en remettre à la sagesse de la commission.

M. Gérard Cherpion. M. Issindou vient de faire un brillant exposé, après avoir rendu un rapport très intéressant. Chacun, me semble-t-il, ne peut que s’accorder sur le constat : la médecine du travail connaît un problème de vocations. Toutefois, si nous sommes plutôt favorables à ce que nous venons d’entendre, nous aimerions avoir le temps de lire attentivement ces amendements avant de les voter. S’ils étaient mis aux voix, nous nous abstiendrions « positivement ».

M. Gérard Sebaoun. Indépendamment de la qualité du rapport de Michel Issindou, je suis à la fois surpris et irrité que l’on nous présente des amendements qui réécrivent les fondements de la médecine du travail sans nous laisser le temps de les expertiser. Ce n’est pas raisonnable ! Si ces amendements sont maintenus, je voterai contre.

Je souhaite cependant faire quelques remarques de fond. La notion d’aptitude est aussi complexe que discutée, et son usage peut avoir des conséquences néfastes pour les salariés – par exemple un licenciement. On ne peut donc pas, sous prétexte que ces amendements seraient réclamés depuis longtemps par le patronat, refonder la médecine du travail en s’appuyant sur l’avancée qu’a représentée la loi de 2011 – avancée que, à l’époque, je le reconnais, notre groupe avait combattue.

Un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental a montré que le travail de nuit est délétère. L’idée d’un suivi particulier des travailleurs de nuit est donc parfaitement légitime.

Quant à l’opportunité, pour les salariés, des dispositions fondamentales qui nous sont proposées, je rappelle que le Conseil de l’Ordre, qui n’est pas le plus grand défenseur des médecins du travail, mais qui a une certaine qualité d’expertise, s’est prononcé très défavorablement à l’égard de ce rapport, de même que les syndicats professionnels de médecins du travail.

On peut s’offusquer de voir qu’on nous soumet ainsi trois amendements que personne n’a lus. Je comprends bien qu’il s’agit d’une traduction législative du rapport. Mais on s’appuie, pour ce faire, sur le constat d’un manque d’effectifs et d’une absence de prévisionnel en matière de médecine du travail, mais cela revient à supprimer un feu rouge à un croisement, sous prétexte que le trafic y est intense ! Ce n’est pas ainsi que je fonctionne et je voterai contre ces amendements, s’ils sont maintenus. Nous pourrons toutefois avoir un débat utile en séance publique, après une expertise scrupuleuse de ces dispositions.

M. Denys Robiliard. Tous les intervenants l’ont dit, nous n’avons pas eu le temps d’étudier de manière approfondie des amendements qui portent sur des sujets extrêmement importants : réforme de la médecine du travail, dispositions spécifiques sur le travail de nuit et réforme concernant les conséquences de l’inaptitude, que la maladie ou l’accident soient professionnels ou non, avec des conséquences qui, en l’état du droit positif, sont différentes.

Il semble donc que nous ne soyons pas capables de voter en connaissance de cause et que le plus sage serait, à ce stade, de retirer les amendements. Nous pourrons d’ailleurs aussi nous demander si ce texte est le meilleur vecteur pour ces dispositions.

La réforme est si importante qu’il ne serait pas bon qu’elle soit adoptée sans que les partenaires sociaux aient été consultés de manière approfondie. J’ai bien entendu que des consultations avaient eu lieu. Michel Issindou nous a d’ailleurs donné des indications sur des positions qui m’étonnent un peu, et j’aimerais savoir quelle est celle de chaque syndicat sur chaque question. Il ne me paraîtrait pas prudent d’adopter ces amendements aujourd’hui, car ce serait voter des dispositions que nous ne connaissons pas. Il me paraît donc nécessaire de les retirer.

S’agissant de l’amendement AS82, je rappellerai que la médecine du travail a déjà été réformée en 2010, avec un décret en 2012. Il s’agit d’une médecine de prévention : or l’un des axes du projet de loi Santé de Marisol Touraine est précisément de renforcer la prévention. Je crains que les modalités proposées n’aillent pas dans cette direction, même si je reconnais les difficultés que les associations de médecine du travail et les entreprises peuvent avoir à recruter un médecin du travail.

La notion d’équipes pluridisciplinaires me paraît aller dans le bon sens. C’est une dimension que l’on retrouve également dans le projet de Mme Touraine, qui vise à permettre aux professionnels de santé qui ne sont pas médecins d’avoir un rôle à la hauteur de leurs compétences, qui se sont considérablement développées.

Cet amendement propose également une réforme du recours concernant l’avis du médecin du travail. Actuellement, il s’agit d’un recours administratif – dont les délais et les modalités ont été récemment précisés –, introduit auprès de l’inspection du travail, laquelle sollicite un médecin inspecteur. Si ces dispositions étaient adoptées, ce ne serait plus l’administration qui serait destinataire du recours, mais le juge en référé ; celui-ci se contenterait de désigner un expert, dont l’avis remplacerait celui du médecin du travail.

La règle, en matière judiciaire, veut que celui qui demande l’expertise en avance les frais. J’estime qu’il n’est pas acceptable qu’un salarié ait à avancer les frais d’une expertise en matière d’aptitude.

Par ailleurs, les seuls experts judiciaires que je connaisse dans le domaine médical sont des experts psychiatres dans des affaires criminelles, des spécialistes de la réparation du préjudice corporel ou des spécialistes dans un domaine déterminé, qui peuvent être interrogés sur d’éventuelles responsabilités du corps médical. Je ne connais pas d’experts inscrits sur les listes établies par les cours d’appel et spécialisés dans les conditions de travail. S’il était voté, ce texte serait immédiatement applicable, mais pourrait-il vraiment être appliqué ?

L’amendement AS79 concerne le rythme du contrôle et le contrôle avant l’affectation sur un poste de nuit. Je ne comprends pas que, dans un même amendement, on supprime tout contrôle avant l’affectation sur un poste, à moins de supposer que les médecins du travail considèrent qu’il n’y a pas lieu de mettre en place un contrôle d’une durée spécifique.

J’en viens à l’amendement AS85 et à l’inaptitude. Il faut regarder précisément ce qu’il en est, comparer avec le droit positif et réfléchir aux conséquences.

M. Jean-Patrick Gille, président. Nous déplorons tous les délais qui nous sont impartis pour examiner ces amendements. Je propose donc qu’ils ne soient pas, cette fois, soumis au vote. Nous pourrons y revenir en séance publique, et, d’ici là, mener les concertations que certains ont demandées et corriger quelques erreurs matérielles. Je vous demande donc, monsieur Issindou, de retirer ces amendements, même s’ils reçoivent, à quelques nuances près, un accueil assez favorable.

M. Michel Issindou. L’argument du temps est irréfutable. Je ne peux pas m’y opposer.

Sur le fond, je ne relance pas le débat, puisque je vais retirer les amendements. Mais je reste convaincu qu’il faut agir. J’ai entendu des critiques : ce que j’aimerais entendre aussi, dans les prochains jours, c’est des idées pour sortir de cette situation. J’ai vu ce qu’il ne fallait pas faire, mais je n’ai pas beaucoup vu ce qu’il fallait faire… Peut-on accepter sans broncher que les lois que vote le législateur ne soient pas respectées ? Je reviendrai donc sur ces amendements en séance publique. Chacun aura eu le temps de les examiner.

Les amendements AS85, AS79 et AS82 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS20 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l’amendement AS41 de M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Cet amendement vise à simplifier les facteurs de pénibilité. Il inscrit dans la loi le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes et le travail en milieu hyperbare, qui sont les trois facteurs dont l’exposition est facile à mesurer.

Tant que le Gouvernement ne sera pas parvenu à recueillir l’approbation des partenaires sociaux sur des modalités plus simples de mesure de l’exposition aux autres facteurs définis par le décret du 9 octobre 2014 – manutention manuelle de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques, agents chimiques dangereux – et que le législateur n’aura pas été en mesure de les apprécier, ils ne pourront pas entrer en vigueur.

M. le rapporteur. Il s’agit bel et bien d’une simplification, puisque vous réduisez les facteurs à trois ! Vous avez sans doute manqué un épisode, monsieur Cherpion. Nous travaillons en ce moment avec les branches professionnelles pour avancer sur la question des référentiels professionnels de branche. Il n’est pas question de revenir sur les dix facteurs mis en place dans le cadre du compte pénibilité. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS18 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. L’amendement est défendu.

M. le rapporteur. M. Tian supprime la fiche individuelle et n’est pas loin de vouloir supprimer le compte pénibilité… Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

Article 19 bis
Reconnaissance des pathologies psychiques comme maladies professionnelles

L’article 19 bis visait à préciser que les pathologies psychiques pouvaient être reconnues comme des maladies d’origine professionnelle.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article résultait de l’adoption en séance publique de deux amendements identiques présentés par le Gouvernement et par M. Benoît Hamon visant à améliorer la reconnaissance du syndrome d’épuisement professionnel, ou « burn-out ».

Il offrait aux patients atteints d’une pathologie psychique d’origine professionnelle la possibilité de demander la requalification de cette pathologie en maladie professionnelle, par l’intermédiaire du système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles devant les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).

Il renvoyait au pouvoir réglementaire le soin de définir le syndrome d’épuisement professionnel, à l’issue d’une concertation avec les partenaires sociaux au sein du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT), et de retenir les critères de reconnaissance du caractère professionnel de cette pathologie.

2. La suppression de l’article par le Sénat

La Commission des affaires sociales du Sénat n’a pas été convaincue par le dispositif proposé et a adopté, contre l’avis de la rapporteure, un amendement de suppression de cet article présenté par M. Jean-Marc Gabouty, membre du groupe UDI.

En séance publique, les sénateurs ont rejeté trois amendements de rétablissement de cet article, dont l’un était présenté par le Gouvernement.

3. La position de la commission

En nouvelle lecture, cet article a été rétabli par la Commission des affaires sociales.

*

La Commission examine les amendements identiques AS22 du rapporteur et AS76 de M. Christophe Cavard.

M. le rapporteur. L’amendement AS22 rétablit ce que nous avions inscrit sur la reconnaissance du burn-out. Je ne reviens pas sur le débat, mais j’estime qu’il est très important que cet article figure dans le texte.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement AS76 est défendu.

M. Dominique Tian. Nous avons débattu de la question du burn-out, à laquelle le Gouvernement était assez opposé. Le Sénat a eu raison de supprimer l’article, car il faudrait mener une étude d’impact sur le sujet. Comme cela n’est pas au programme, nous continuons à nous opposer à cette disposition. Je ne dis pas que la notion de burn-out n’existe pas. Mais on ne peut pas la traduire ainsi dans la loi, sans prendre un peu de recul.

M. Gérard Sebaoun. Je veux rassurer M. Tian. Le Sénat s’est contenté de supprimer quelque chose qui ne fait que réécrire positivement le droit positif.

La Commission adopte les amendements.

L’article 19 bis est ainsi rétabli.

Article 19 quater
(art. L. 4161-2 du code du travail)

Création de référentiels de branche dans le cadre du compte personnel
de prévention de la pénibilité

Cet article permet à des accords de branche étendus, ou à des référentiels professionnels de branche homologués par le pouvoir réglementaire, d’identifier les postes, métiers ou situations de travail susceptibles d’être exposés à des facteurs de pénibilité.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article résulte de l’adoption, en séance publique, d’un amendement du Gouvernement proposant de sécuriser l’appréciation, par les employeurs, de l’exposition de leurs salariés à la pénibilité. Il s’inspire de la proposition n° 5 du rapport remis au Gouvernement par le rapporteur, par M. Gérard Huot et par M. Michel Davy de Virville au mois de mai dernier (5).

En l’absence d’accord de branche étendu, un référentiel professionnel de branche, homologué par l’État après avis du Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT), pourrait définir les postes, métiers ou situations de travail exposés à des facteurs de pénibilité, selon des conditions déterminées par décret. Les branches professionnelles se verraient ainsi confier l’appréciation des expositions aux six facteurs de risques devant entrer en vigueur en 2016 et considérés par les entreprises comme les plus difficiles à mesurer.

Les référentiels de branches seraient opposables, ce qui signifie que l’employeur appliquant les stipulations de l’accord de branche ou d’un référentiel professionnel homologué serait exonéré de pénalité en cas de déclaration inexacte.

2. Les modifications apportées par le Sénat

● Tout en saluant la prise de conscience du Gouvernement sur les difficultés opérationnelles qu’aurait entraînées la mise en œuvre des six facteurs de pénibilité au 1er janvier 2016, la commission du Sénat a souhaité clarifier et sécuriser le dispositif.

Elle a donc adopté un amendement de la rapporteure visant à préciser que ce sont les organisations professionnelles d’employeurs qui seront en charge d’élaborer unilatéralement les référentiels.

Elle a également adopté un amendement de la rapporteure indiquant que les ministres en charge du travail et des affaires sociales doivent veiller, lors de l’homologation des référentiels de branche, à ce que les règles retenues ne portent pas atteinte à la soutenabilité du fonds chargé du financement des droits liés au compte personnel de prévention de la pénibilité.

● En séance publique, les sénateurs ont adopté deux amendements identiques présentés par MM. Olivier Cadic et Jean-Baptiste Lemoyne qui restreignent aux seuls postes et situations de travail exposés la portée des référentiels définis par les branches, afin de lever toute ambiguïté sur le terme « métiers ».

3. La position de la commission

La commission a rétabli le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.

*

La Commission examine l’amendement AS63 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les sénateurs ont supprimé le terme « métiers » dans la définition des référentiels de branche. Il est proposé de revenir à la rédaction retenue initialement par l’Assemblée nationale, car le maintien du terme « métiers » permettra aux branches d’apprécier de manière plus fine l’exposition à la pénibilité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS21 du rapporteur.

M. le rapporteur. Nous proposons, là aussi, de revenir au texte de l’Assemblée, car ce qu’a adopté le Sénat rigidifie le dispositif.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS24 du rapporteur.

M. le rapporteur. Dans le même esprit, il s’agit de maintenir les éléments mis en place pour le compte pénibilité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 19 quater modifié.

Article 19 septies A (nouveau)
Entrée en vigueur différée de diverses dispositions
relatives à la mise en œuvre du compte pénibilité

Cet article résulte de l’adoption au Sénat d’un amendement de M. Olivier Cadic, membre du groupe UDI, contre l’avis du Gouvernement.

Il prévoit de différer l’entrée en vigueur des nouvelles obligations en matière de négociation des accords de prévention de la pénibilité à la date de mise en place définitive de l’ensemble des dispositions du compte personnel de prévention de la pénibilité, c’est-à-dire au 1er janvier 2018.

Le rapporteur rappelle que l’entrée en vigueur du compte a déjà été partiellement différée pour répondre aux difficultés de mise en place de six facteurs. En outre, l’objet du présent article va à l’encontre des propositions formulées par le rapport de MM. Sirugue, Huot et Davy de Virville, remis le 26 mai 2015 au Premier ministre (6), qui visent à sécuriser et à simplifier la mise en œuvre du compte, sans en reporter l’entrée en vigueur.

La Commission des affaires sociales a supprimé cet article.

*

La Commission examine l’amendement AS27 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la proposition du Sénat de repousser au 1er janvier 2018 la mise en place du compte pénibilité.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 19 septies A est supprimé.

Article 19 octies
Demande de rapport sur l’intégration des pathologies psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ou l’abaissement du seuil d’IPP

Introduit à l’Assemblée nationale par un amendement présenté par M. Benoît Hamon et sous-amendé par M. Gérard Cherpion, cet article demandait au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er juillet 2016, un rapport sur l’abaissement du seuil d’incapacité permanente partielle ou sur l’intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles.

Suivant une position de principe de la rapporteure de refuser les demandes de rapport du Gouvernement au Parlement, le Sénat a supprimé cet article en commission.

En nouvelle lecture, la commission a rétabli cet article dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

*

La Commission étudie l’amendement AS23 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit du rapport qu’évoquait tout à l’heure M. Sebaoun à propos du burn-out. Nous proposons de revenir au texte de l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 19 octies est ainsi rétabli.

TITRE II
CONFORTER LE RÉGIME D’ASSURANCE CHÔMAGE DE L’INTERMITTENCE

Article 20
(art. L. 5424-22 et L. 5424-23 du code du travail)

Pérennisation et modalités de négociation des annexes VIII et X

Cet article consacre dans le code du travail l’existence de règles spécifiques d’indemnisation du chômage des artistes et techniciens intermittents du spectacle.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Dans la rédaction issue du projet de loi et adoptée à l’Assemblée nationale, cet article confie aux partenaires sociaux représentatifs du secteur du spectacle le soin de définir ces règles spécifiques, dans un cadre défini par les partenaires sociaux représentatifs au niveau national interprofessionnel.

Il crée par ailleurs un comité d’expertise, en charge notamment de l’évaluation des propositions réalisées au cours de la négociation. Il engage également les partenaires sociaux à ouvrir des négociations pour mettre à jour la liste des emplois susceptibles d’être pourvus par la voie de contrats à durée déterminée d’usage (CDDU) dans le secteur du spectacle et à définir les conditions de recours à ces contrats.

Il invite enfin les partenaires sociaux représentatifs du secteur du spectacle à examiner l’évolution de la prise en compte des périodes de maladie et de maternité des artistes et techniciens du spectacle, et demande la remise au Parlement d’un rapport sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle.

● Outre des amendements rédactionnels ou de coordination juridique, la Commission des affaires sociales a adopté quatre amendements à l’article 20 présentés par M. Jean-Patrick Gille au nom de la commission des affaires culturelles. Ces amendements visent à :

– préciser le contenu du document de cadrage élaboré par les partenaires sociaux représentatifs au niveau national et interprofessionnel ;

– supprimer la possibilité pour les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel de désigner des représentants au sein du comité d’expertise ;

– préciser que le comité d’expertise doit évaluer et non rendre un avis sur les propositions qui lui sont soumises ;

– préciser par décret les règles de fonctionnement de ce comité ;

Un cinquième amendement présenté par M. Jean-Patrick Gille en tant que rapporteur pour avis, et qui a fait l’objet d’un amendement identique de M. Christophe Cavard, invite les partenaires sociaux à prendre en compte les périodes de maladie et de maternité des salariés des professions de l’intermittence lors de la prochaine négociation de la convention d’assurance chômage.

● En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel et un amendement de coordination, ainsi que deux amendements de M. Jean-Patrick Gille présentés au nom de la commission des affaires culturelles, visant à spécifier explicitement la vocation d’appui technique du comité d’expertise et à donner la priorité aux organisations professionnelles dans l’examen des demandes d’évaluation formulées devant le comité d’expertise.

Elle a également adopté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse invitant les organisations représentatives au niveau professionnel à ouvrir avant le 30 juin 2016 une négociation portant sur « la politique contractuelle et notamment les conditions de recours au contrat à durée déterminée d’usage ».

Elle a enfin adopté un amendement présenté par Mme Sandrine Mazetier et ses collègues du groupe Socialiste, républicain et citoyen demandant au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle.

2. Les modifications apportées par le Sénat

● La Commission des affaires sociales du Sénat n’a pas remis en cause l’inscription de règles spécifiques à l’indemnisation de l’assurance chômage des intermittents du spectacle, ce dont on ne peut que se réjouir. Elle a, en revanche, formulé des réserves sur la mise en œuvre concrète du dispositif et modifié significativement le dispositif de délégation de négociation.

Considérant que le risque de contentieux lié à la délégation de compétence était élevé, que la forme juridique de l’accord était insuffisamment définie dans le texte, et que la probabilité d’aboutir à un tel accord était d’ailleurs très faible, la commission a adopté, à l’initiative de la rapporteure, un amendement visant à remplacer le dispositif de délégation de négociation par un dispositif de « concertation renforcée ». Les partenaires sociaux représentatifs au niveau interprofessionnel auraient ainsi l’obligation de recueillir, en amont de l’ouverture de la négociation et avant sa conclusion, les propositions des organisations patronales et syndicales représentatives des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle. La liste de ces derniers serait définie par voie réglementaire.

La commission a maintenu l’instauration du comité d’expertise telle que proposée dans le projet de loi initial ; elle a seulement proposé d’élargir ses compétences en donnant aux partenaires sociaux la possibilité de saisir le comité pour lui confier le suivi des règles spécifiques des annexes VIII et X.

À l’invitation de la rapporteure, la commission a apporté deux ajustements aux négociations à venir : seuls les partenaires sociaux représentatifs du secteur du spectacle devront négocier avant le 30 juin 2016 les conditions de recours au CDDU, en outre, la référence à la « politique contractuelle », jugée trop imprécise, a été supprimée à juste titre.

La commission a enfin supprimé la demande de rapport du Gouvernement au Parlement sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle, conformément à la position de principe de la rapporteure de refuser les demandes de rapport au Parlement.

● En séance publique, le Sénat a adopté, sur avis favorable de la commission et défavorable du Gouvernement, deux amendements identiques proposés par Mme Marie-Christine Blandin et ses collègues du groupe Écologiste et par M. Pierre Laurent et les membres du groupe Communiste, républicain et citoyen, qui proposent une nouvelle rédaction de l’alinéa relatif au contenu du document de cadrage. Il dispose que le document de cadrage devra mentionner « les objectifs concernant la trajectoire des dépenses de l’ensemble du régime d’assurance chômage », préciser les objectifs de la concertation « afin que celle-ci se conforme à cette trajectoire » et fixer un délai dans lequel cette concertation doit aboutir.

Les sénateurs ont également rétabli, à l’invitation de Mme Blandin, la demande de rapport au Parlement sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle.

3. La position de la commission

La Commission des affaires sociales a rétabli la rédaction de l’Assemblée nationale s’agissant de la subsidiarité de négociation, et a adopté deux amendements rédactionnels.

*

La Commission examine les amendements identiques AS45 du rapporteur et AS74 de M. Jean-Patrick Gille, et les amendements AS77 de M. Christophe Cavard et AS19 de M. Dominique Tian, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. le rapporteur. Le Sénat a adopté un amendement visant à remplacer le dispositif de délégation de négociation à deux niveaux des règles spécifiques d’indemnisation du chômage des intermittents du spectacle par une « concertation renforcée » qui ne correspond pas aux éléments mis en place. Les amendements identiques proposent le rétablissement du mécanisme initial et des missions du comité d’expertise qui en découlent.

M. Jean-Patrick Gille, président. Les sénateurs ont conservé la première partie de l’article 20, qui consistait à sanctuariser les annexes VIII et X. Le différend entre l’Assemblée et le Sénat porte sur la méthode de négociation, les sénateurs reconnaissant eux-mêmes, dans le cadre de la mission de concertation, qu’il fallait associer directement à la négociation les professionnels du secteur. Les sénateurs proposaient une simple concertation. Le texte du Gouvernement, que nous avions amendé, allait plus loin en proposant une véritable négociation entre les acteurs du secteur professionnel.

Nous proposons de revenir à ce que nous avons voté en première lecture. Les acteurs en question ont suivi nos travaux, ils en ont discuté et je pense qu’ils sont d’accord. La réticence vient plutôt du niveau interprofessionnel, un peu inquiet de se sentir dépossédé, alors que, j’en suis convaincu, ce n’est pas le cas. Il ne faut pas considérer cela comme une délégation de négociation, mais comme une forme de subsidiarité dans la négociation. J’indique de surcroît que, si la négociation n’aboutit pas, ce sont eux qui reprennent la main. Et, dans tous les cas de figure, ce sont eux qui rédigent la convention Unédic.

M. Gérard Cherpion. Les annexes VIII et X étaient sanctuarisées de fait. Maintenant, c’est officiel. Mais en ce qui concerne l’évolution du système global, il faudra revenir sur plusieurs points.

Mme Véronique Massonneau. L’objectif de l’amendement AS77 est de rétablir le mécanisme permettant aux partenaires sociaux du secteur du spectacle et de l’audiovisuel de négocier les règles spécifiques aux annexes VIII et X.

Par ailleurs, la rédaction proposée, qui part du constat qu’il n’existe pas de dispositif législatif ou réglementaire permettant de définir la représentativité d’organisations patronales sur plusieurs branches, permet de prendre en compte les organisations d’employeurs du spectacle qui auraient été exclues de la rédaction initiale du projet de loi.

M. Dominique Tian. L’amendement AS19 est défendu.

M. le rapporteur. L’amendement de Mme Massonneau propose d’intégrer les organisations d’employeurs et de salariés dans chacune des branches des professions mentionnées, ce qui n’est pas forcément une bonne idée, car on risquerait de se retrouver avec un très grand nombre d’organisations autour de la table de négociation. Il semble préférable d’inciter les organisations à se fédérer pour que les négociations aient une chance d’aboutir. Avis défavorable.

Je suis également défavorable à l’amendement de M. Tian, qui vise à supprimer le comité d’expertise.

M. Jean-Patrick Gille, président. L’amendement de Mme Massonneau vise à mettre autour de la table de négociation tous les syndicats de la branche. Cela peut faire beaucoup de monde. L’idée est que le ministère propose une négociation très large, avec des syndicats portant sur l’ensemble du secteur.

Mme Véronique Massonneau. Je retire mon amendement.

M. Dominique Tian. Je maintiens le mien. Vous avez été rapporteur d’un texte sur les intermittents du spectacle, monsieur Gille, et vous savez combien le sujet est important. Nous voulons supprimer tout ce qui peut empêcher un contact direct entre les négociateurs et en finir avec les blocages en nous attaquant à leurs causes.

L’amendement AS77 est retiré.

La Commission adopte les amendements AS45 et AS74.

Puis elle rejette l’amendement AS19.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS46 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS78 de M. Christophe Cavard.

Mme Véronique Massonneau. La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale précise les modalités de représentativité patronale au niveau de la branche professionnelle. Cependant, il n’existe pas de dispositif législatif ou réglementaire permettant de définir la représentativité d’organisations patronales sur plusieurs branches.

La rédaction actuelle risque de provoquer des conflits d’interprétation, les professions mentionnées à l’article L. 5424-20 dépendant de neuf champs conventionnels différents. Ainsi, de nombreuses organisations d’employeurs du spectacle représentatives de structures indépendantes risqueraient d’être exclues au bénéfice d’une seule grande fédération représentant plusieurs branches professionnelles.

M. le rapporteur. À vouloir associer l’ensemble des organisations représentatives, on prend le risque de bloquer le dispositif. Avis défavorable.

M. Jean-Patrick Gille, président. La difficulté consiste à savoir qui l’on met autour de la table, puisque le travail concernant la représentativité n’est pas tout à fait terminé. On pourrait faire appel à un arrêté qui prend acte de la représentativité, mais dans ce cas, cela prendrait des mois, alors que la négociation devrait s’ouvrir à l’automne.

L’engagement pris est que les neuf branches soient représentées, même si elles sont regroupées dans la fédération des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma (FESAC). Il existe toutefois une autre fédération, qui fédère à la fois des employeurs et des salariés, ce qui est un peu compliqué dans notre système paritaire. Nous devons trouver le moyen d’associer tout le monde à la discussion. Le ministre pourra s’engager dans l’hémicycle et indiquer comment il conçoit cette négociation, ce qui rassurera tout le monde.

M. Dominique Tian. Vous parlez de bloquer un système qui est complètement bloqué depuis des années…

M. Jean-Patrick Gille, président. Nous avons la faiblesse de croire que nous avons trouvé la voie de la décrispation, pour reprendre une formule qui a fait fureur en son temps !

L’amendement est retiré.

L’amendement AS80 de M. Christophe Cavard est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS48 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 20 modifié.

Article 20 bis A (nouveau)
Création d’une conférence des métiers du spectacle

Cet article résulte de l’adoption en séance publique au Sénat d’un amendement présenté par M. Gérard Bailly, qui a reçu un avis défavorable du Gouvernement et un avis de sagesse de la commission. Il propose la création d’une conférence des métiers du spectacle.

Cette instance se réunirait tous les cinq ans et serait chargée d’examiner « les questions relatives à l’avenir, à moyen terme, des emplois et des entreprises culturels ».

Elle serait composée, selon des modalités précisées par décret, des organisations professionnelles d’employeurs et des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, des organisations d’employeurs et de salariés représentatives des artistes et techniciens du spectacle, des représentants de l’État et des collectivités territoriales et des personnalités qualifiées.

Considérant que cet article ne relevait pas du domaine de la loi, la commission a supprimé cet article.

*

La Commission examine l’amendement AS64 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a imaginé une conférence des métiers du spectacle qui se réunirait tous les cinq ans. Nous proposons de supprimer cet article.

M. Jean-Patrick Gille, président. Le Gouvernement a proposé d’organiser cette conférence, qui va avoir lieu au mois de septembre. L’idée n’est pas mauvaise, mais faut-il l’inscrire dans la loi ?

M. Dominique Tian. Peut-être faudrait-il préciser que la conférence se tiendra en septembre pour ne pas perturber les festivals de l’été…

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 20 bis A est supprimé.

Article 20 bis
(art. L. 161-22 du code de la sécurité sociale)

Interdiction pour les artistes du spectacle en CDI de cumuler
une pension de retraite et une activité professionnelle

Cet article, issu d’un amendement présenté à titre individuel par M. Jean-Patrick Gille devant la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, vise à interdire le cumul d’une pension de retraite de base et d’une activité professionnelle pour les artistes du spectacle bénéficiant d’un contrat à durée déterminée (CDI) de droit commun.

Les sénateurs ont adopté en séance publique un amendement présenté par Mme Catherine Procaccia au nom de la Commission des affaires sociales visant à circonscrire la suppression de la dérogation permettant le cumul emploi retraite aux seuls artistes interprètes sous contrat de travail à durée indéterminée. La rédaction initiale de l’article 20 bis visait en effet indifféremment les artistes du spectacle et les mannequins, alors que la situation de ces derniers ne justifiait pas qu’ils soient exclus du champ de la dérogation.

La commission a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

*

La Commission adopte l’article 20 bis sans modification.

Article 20 quater
(art. L. 3164-2 du code du travail)

Dérogation au temps de repos des jeunes de moins de seize ans
employés par un entrepreneur du spectacle

Cet article propose une dérogation aux règles du repos hebdomadaire pour les jeunes salariés âgés de moins de seize ans qui sont employés par des entrepreneurs du spectacle tout en poursuivant leur scolarité.

● Introduit à l’Assemblée nationale par un amendement de M. Pierre-Alain Muet, cet article complète l’article L. 3164-2 du code du travail afin de prévoir une exception à la règle des quarante-huit heures consécutives de repos hebdomadaire pour les travailleurs mineurs.

L’article L. 3164-2 autorise déjà une convention ou un accord collectif de travail étendu, ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement à réduire le temps de repos à trente-six heures pour les jeunes libérés de l’obligation scolaire, lorsque les caractéristiques particulières de l’activité le justifient. Le présent article étend cette dérogation aux jeunes travailleurs de moins de seize ans employés par un entrepreneur du spectacle et soumis à l’obligation scolaire, sous réserve de trois conditions :

– les jeunes concernés doivent bénéficier d’une période minimale de repos hebdomadaire de trente-six heures consécutives ;

– l’activité en question doit être « de nature à contribuer à leur développement » ;

– leur santé doit être préservée.

À défaut d’accord et sous réserve du respect des trois conditions mentionnées ci-dessus, l’inspecteur du travail peut accorder cette dérogation, après avis de la commission des enfants du spectacle.

● Les sénateurs ont considéré que le temps de repos obligatoire de trente-six heures revenait à priver les jeunes artistes de la possibilité de participer à des représentations le samedi soir. Ils ont donc adopté en séance publique, sur proposition de la rapporteure, un amendement visant à autoriser l’abaissement de la durée minimale de repos hebdomadaire à vingt-quatre heures consécutives, dans la limite de six participations par an à une répétition ou à un spectacle.

● La Commission des affaires sociales a adopté un amendement visant à préciser que la durée minimale de repos hebdomadaire doit être de trente-six heures, dont au moins vingt-quatre heures consécutives. En effet, une directive européenne de 1994 (7) autorise une telle dérogation à la durée du temps de travail des jeunes sous réserve que la période de repos soit de trente-six heures, qui peuvent être consécutives ou non.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS71 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a adopté un amendement qui abaisse à vingt-quatre heures la durée de repos minimale pour les jeunes mineurs employés par les entrepreneurs du spectacle. Une directive européenne de 1994 autorise une telle dérogation à la durée du temps de travail des jeunes, sous réserve que la période de repos considérée soit de trente-six heures, qui peuvent être consécutives ou non. L’amendement AS71 entend mettre les modifications adoptées au Sénat en conformité avec le droit européen en précisant que la durée minimale de repos doit être de trente-six heures, dont au moins vingt-quatre heures consécutives.

M. Dominique Tian. Je m’étais étonné que les petits rats de l’Opéra de Marseille ne soient pas visés par cette disposition, qui semble ne concerner que ceux de l’Opéra de Paris. Peut-être s’agit-il d’un dispositif discriminatoire : nous verrons cela dans l’hémicycle.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 20 quater modifié.

TITRE III
SÉCURISATION DES PARCOURS ET RETOUR À L’EMPLOI

Article 21 (Supprimé)
Compte personnel d’activité

Cet article prévoyait la création, au 1er janvier 2017, d’un compte personnel d’activité qui réunirait, dès l’entrée d’un actif sur le marché du travail et tout au long de sa vie professionnelle, les droits sociaux individuels utiles à la sécurisation de son parcours professionnel.

L’article 21 proposait une méthode et un calendrier impliquant les partenaires sociaux afin de définir le périmètre et les modalités de mise en œuvre du compte. Il prévoyait ainsi, d’ici au 1er décembre 2015, le lancement d’une concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, cette concertation pouvant donner lieu à l’ouverture d’une négociation portant sur la mise en œuvre du compte personnel d’activité.

Sur proposition de deux amendements identiques présentés par MM. Jean-Baptiste Lemoyne (Les Républicains) et Claude Kern (UDI), le Sénat a supprimé cet article, suivant l’avis favorable de la commission et contre l’avis du Gouvernement.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales a rétabli cet article.

*

La Commission examine l’amendement AS53 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rétablit le compte personnel d’activité, qui a été supprimé par le Sénat.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 21 est ainsi rétabli.

Article 22
(art. L. 5315-1 du code du travail)

Définition des missions de service public de l’emploi de l’AFPA

Cet article a vocation à préciser dans la loi les missions de service public exercées par l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transformer l’AFPA en établissement public industriel et commercial.

● L’Assemblée nationale a complété la définition des missions de service public de l’emploi de l’AFPA : en commission, un amendement de Mme Sandrine Mazetier et des membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen a précisé que l’AFPA devait contribuer à « l’égal accès des femmes et des hommes à la formation professionnelle et à la promotion de la mixité des métiers ». En séance publique, un amendement présenté par Mme Chaynesse Khirouni et les membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen a étendu la mission de service public de l’AFPA à la qualification des personnes les plus éloignées de l’emploi.

À l’initiative du Gouvernement, la Commission des affaires sociales a par ailleurs initié une profonde réforme du statut de l’AFPA par le biais d’une habilitation à légiférer par ordonnance. Dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi, l’habilitation autorise le Gouvernement à transformer l’AFPA en établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), à définir les modalités de dévolution à l’AFPA des actifs immobiliers aujourd’hui mis à la disposition de l’AFPA par l’État et à préciser les conditions de transfert des biens, droits et obligations de l’AFPA vers ce nouvel établissement.

● Lors de la réunion de la Commission des affaires sociales au Sénat, la rapporteure a mis en garde contre les potentiels risques juridiques soulevés par la transformation de l’AFPA en EPIC, en constatant que les implications financières de cette transformation ainsi que le futur statut du personnel de l’AFPA étaient inconnus à ce jour.

La commission a supprimé la mention ajoutée à l’Assemblée nationale concernant le rôle de l’AFPA dans l’égal accès des femmes et des hommes à la formation professionnelle et à la promotion de la mixité des métiers. Elle a par ailleurs précisé le champ de l’habilitation accordée au Gouvernement afin que « des biens qui ne sont pas aujourd’hui mis à la disposition de l’AFPA ne puissent être transférés à cette nouvelle structure ».

À l’initiative de Mme Patricia Schillinger et de ses collègues du groupe Socialiste et républicain, le Sénat est revenu en séance publique sur l’ensemble des dispositions adoptées en commission mais a supprimé de ce fait, sans doute par inadvertance, la mission de participation de l’AFPA à la politique de certification du ministre chargé du travail.

● La commission a rétabli le texte de l’Assemblée nationale et adopté un amendement rédactionnel.

*

La Commission en vient à l’amendement AS72 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement vise à rétablir une phrase que le Sénat a sans doute supprimée par inadvertance.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS73 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 22 modifié.

Article 22 bis A (nouveau)
(art. L. 625-1 à L. 625-7 [nouveaux], L. 612-20-1, L. 622-19-1, [nouveaux], L. 617-14, L. 624-12, L. 631-1, L. 632-1, L. 634-4, L. 633-1, L. 634-1, L. 645-1, L. 646-1, L. 647-1
du code de la sécurité intérieure)

Formation aux activités privées de sécurité

Cet article, introduit par un amendement du Gouvernement en séance publique au Sénat, propose d’encadrer les organismes de formation aux activités privées de sécurité.

L’article 22 bis A insère un nouveau titre II bis au sein du livre VI du code de la sécurité intérieure. Composé de trois chapitres et de sept articles L. 625-1 à L. 625-7 nouveaux, ce titre détermine les règles applicables à la formation aux activités privées de sécurité, qui couvre à la fois la formation permettant de justifier de l’aptitude professionnelle à exercer les activités mentionnées aux 1° à 3° de l’article L. 611-1 (8) et à l’article L. 621-1 du même code, et la formation permettant le renouvellement des cartes professionnelles nécessaires à l’exercice de ces activités.

Cet article soumet l’exercice de ces formations à la délivrance d’une autorisation, par la commission d’agrément et de contrôle territorialement compétente, aux prestataires de formation remplissant les conditions fixées par le même article. Les prestataires de formation doivent ainsi :

– être titulaires d’une déclaration d’activité enregistrée dans les conditions fixées aux articles L. 6351-1 à L. 6351-8 du code du travail ;

– être dirigés par une personne physique répondant aux conditions prévues aux 1° à 4° de l’article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure ;

– avoir fait l’objet d’une certification dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Cet article prévoit également les conditions de retrait ou de suspension de cette autorisation – lorsque le prestataire fait l’objet de poursuites pénales par exemple – ainsi que les dispositions pénales applicables en cas de non-respect des règles prévues par le titre II bis. Selon l’article L. 625-6 nouveau, serait ainsi puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diriger ou d’exercer, en lieu et place de ses représentants légaux, la direction d’un organisme exerçant une activité mentionnée à l’article L. 625-1. Le fait de faire obstacle à l’accomplissement des contrôles prévus aux articles L. 634-1 et L. 634-3, lorsqu’ils sont relatifs à l’activité mentionnée à l’article L. 625-1, serait puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

L’article 22 bis A soumet également le renouvellement de la carte professionnelle au suivi d’une formation continue, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État. Enfin, il procède à des modifications de coordination dans le code de sécurité intérieure.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales a adopté cet article sans modification.

*

La Commission adopte l’article 22 bis A sans modification.

Article 23
(art. L. 6325-1-1 du code du travail)

Contrat de professionnalisation « nouvelle chance »

Afin d’encourager la réinsertion professionnelle des demandeurs d’emploi de longue durée, cet article leur donne accès au contrat de professionnalisation « adapté » selon les conditions prévues aux articles L. 6325-11, L. 6325-14, L. 6332-14 et L. 6332-15 du code du travail. Ce dispositif permet notamment d’allonger la durée des actions de professionnalisation ; il permet également une meilleure prise en charge des actions de financement et d’accompagnement par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA).

L’Assemblée nationale a adopté en commission un amendement de conséquence du rapporteur.

Le Sénat a adopté cet article moyennant un amendement corrigeant une erreur de référence.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale l’a adopté sans modification.

*

La Commission adopte l’article 23 sans modification.

Article 23 bis
(art. L. 5134-23-1, 5134-25-1, L. 5134-67-1, L. 5134-69-1, L. 5134-70-1 du code du travail)

Modalités applicables aux contrats aidés pour les salariés seniors

Inséré par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, cet article vise à adapter les conditions d’accès aux contrats aidés pour les salariés seniors.

● Cet article modifie tout d’abord les articles L. 5134-25-1 et L. 5134-69-1 du code du travail afin d’autoriser le renouvellement des contrats aidés pour les salariés âgés de cinquante-huit ans ou plus rencontrant des difficultés particulières d’insertion professionnelle, jusqu’à la date à laquelle ces derniers peuvent faire valoir leurs droits à la retraite.

Il modifie par ailleurs l’article L. 5137-70-1 du même code afin d’autoriser une dérogation à la durée de travail minimale de vingt heures hebdomadaires pour les contrats uniques d’insertion déclinés, dans le secteur marchand, sous la forme de contrats initiative-emploi (CUI-CIE). Cette disposition permet de fixer un niveau moins élevé, si la décision d’attribution de l’aide à l’insertion professionnelle le prévoit « pour répondre aux besoins d’un salarié âgé d’au moins soixante ans et éligible à un dispositif d’intéressement à la reprise d’activité des bénéficiaires des allocations du régime de solidarité ».

● En séance publique, le Sénat a adopté un amendement présenté par M. Jean Desessard et ses collègues du groupe Écologiste, qui a reçu un avis doublement favorable du Gouvernement et de la commission, visant à élargir les possibilités de renouvellement de contrats aidés aux personnes « rencontrant des difficultés d’insertion professionnelle particulières qui font obstacle à [leur] insertion durable dans l’emploi », sans restreindre ces dernières aux bénéficiaires de minima sociaux.

● En nouvelle lecture, la commission a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

*

La Commission adopte l’article 23 bis sans modification.

Article 23 ter
(art. L. 322-11, L. 322-15, L. 322-31, L. 322-35 et L. 322-38
du code du travail applicable à Mayotte)

Modalités applicables aux contrats aidés pour les salariés seniors à Mayotte

Inséré à l’Assemblée nationale à l’invitation du Gouvernement, cet article transpose, pour leur application à Mayotte, les mesures d’adaptation des contrats aidés pour les salariés seniors prévues à l’article 23 bis du projet de loi.

En séance publique, le Sénat a modifié cet article sur proposition de M. Jean Desessard afin d’étendre ce dispositif aux personnes rencontrant des difficultés d’insertion professionnelle faisant obstacle à leur insertion durable dans l’emploi, selon les mêmes modalités que celles prévues à l’article 23 bis.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

*

La Commission adopte l’article 23 ter sans modification.

Article 23 quater
Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance
pour réformer Action Logement

Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, les mesures de nature législative nécessaires à la réforme de la gouvernance d’Action logement.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

● Cet article, introduit en commission sur proposition du Gouvernement et avec un avis de sagesse du rapporteur, entreprend une réforme en profondeur d’Action logement. L’habilitation accordée au Gouvernement mettrait fin à la gestion décentralisée de la participation des employeurs à l’effort de construction (Peec), puisqu’elle autorise l’État à mettre en place une structure faîtière et deux structures placées sous son autorité, l’une chargée de la collecte de la Peec et de la distribution des emplois, l’autre chargée de la gestion des participations dans les entreprises sociales de l’habitat (ESH) et les autres sociétés immobilières.

Il reviendra au Gouvernement de définir la forme juridique, la gouvernance, les missions, les modes de financement et le régime fiscal de ces trois organismes nouveaux.

De même, l’ordonnance devra préciser les dispositions, y compris fiscales, nécessaires à la transmission, au transfert ou à la cession aux trois organismes nouvellement créés des droits et obligations, de la situation active et passive et des biens de toute nature appartenant aux organismes existants. Les missions de l’agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) seront adaptées en lien avec la création des trois organismes précités.

Le champ de l’habilitation permet enfin au Gouvernement de prendre toute mesure de coordination rendue nécessaire par la mise en œuvre des mesures précédemment décrites.

● En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté cet article moyennant trois amendements rédactionnels du rapporteur.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement de la rapporteure réduisant à six mois au lieu de douze la durée de l’habilitation accordée au Gouvernement, afin que la nouvelle organisation d’Action logement puisse être opérationnelle dès le 1er janvier 2016.

3. La position de la commission

Compte tenu de la complexité de cette réforme, la commission a adopté un amendement proposant de revenir à la durée d’habilitation de douze mois adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS68 du rapporteur.

M. le rapporteur. La Commission des affaires sociales du Sénat a réduit à six mois le délai de l’habilitation accordée au Gouvernement pour procéder à la réforme d’Action Logement.

Compte tenu de la complexité du dossier, il est proposé de revenir au délai de douze mois adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 23 quater modifié.

Article 23 quinquies A (nouveau)
(art. L. 5132-5, L. 5132-11-1, L. 5132-15-1 du code du travail)

Accueil au sein des structures d’insertion par l’activité économique

Cet article résulte de l’adoption au Sénat d’un amendement présenté par des membres du groupe Écologiste, qui a reçu un avis doublement favorable de la commission et du Gouvernement. Il a pour objet de faciliter l’accueil des personnes placées sous main de justice au sein des structures d’insertion par l’activité économique (IAE) et de faciliter la rupture du contrat pour accéder à une formation qualifiante.

● En l’état actuel du droit, les entreprises d’insertion peuvent conclure avec des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières des contrats à durée déterminée, dont la durée ne peut être inférieure à quatre mois. Or cette durée n’est pas adaptée aux personnes faisant l’objet d’un aménagement de peine, car celles-ci n’ont pas toujours la possibilité de travailler en dehors du milieu pénitentiaire sur une durée de quatre mois ou plus.

Le présent article autorise donc une dérogation à la durée minimale de quatre mois pour les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation et bénéficiant d’un aménagement de peine.

Il autorise par ailleurs tout salarié en insertion à rompre par anticipation son contrat de travail afin de poursuivre une formation qualifiante. Une telle disposition existait déjà pour les contrats aidés.

● En nouvelle lecture, la commission a adopté cet article moyennant un amendement rédactionnel.

*

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS69 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article quinquies A modifié.

Article 23 quinquies B (nouveau)
(art. L. 127-5, L. 127-11, L. 127-15 du code du travail applicable à Mayotte)

Accueil au sein des structures d’insertion par l’activité économique à Mayotte

Cet article a été introduit au Sénat par un amendement des membres du groupe Écologiste, sur avis favorable de la commission et du Gouvernement. Il procède aux mêmes modifications que l’article 23 quinquies B du présent projet de loi dans le code du travail applicable à Mayotte.

● En nouvelle lecture, la commission a adopté cet article moyennant un amendement rédactionnel.

*

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS70 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 23 quinquies B modifié.

Article 23 septies
(art. L. 6241-8 du code du travail)

Modalités d’acquittement de la fraction « hors quota »
de la taxe d’apprentissage

Cet article introduit à l’Assemblée nationale à l’initiative de M. Richard Ferrand, permet aux entreprises de mobiliser tout ou partie de la part dite « hors quota » de leur taxe d’apprentissage pour pouvoir effectuer des donations de matériels professionnels à des centres de formation d’apprentis.

En application de l’article 8 de la loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014, la taxe d’apprentissage due par les entreprises se décompose désormais en trois fractions :

– une fraction régionale, versée aux organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (OCTA) et affectée aux conseils régionaux, à 51 % ;

– la part « quota », attribuée aux centres de formation d’apprentis (CFA), qui correspond à 26 % ;

– la part « hors quota » destinée à soutenir les formations technologiques et professionnelles dispensées en dehors du cadre de l’apprentissage, et dont l’entreprise peut décider librement du fléchage, à hauteur de 23 %.

L’article 23 septies complète les dispositions de l’article L. 6241-8 du code du travail relatives au « hors quota » afin de préciser qu’un employeur peut satisfaire à ses obligations en faisant don à un CFA ou à une section d’apprentissage de matériels à visée pédagogique en lien avec les besoins de la formation.

La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement supprimant une précision inutile. En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

*

La Commission adopte l’article 23 septies sans modification.

Article 23 octies A (nouveau)
(art. L. 6241-9 du code du travail)

Établissements habilités à percevoir une part de la taxe d’apprentissage

Cet article a été introduit au Sénat par un amendement présenté par M. Philippe Mouiller et certains de ses collègues du groupe Les Républicains, suivant l’avis favorable de la commission et contre l’avis défavorable du Gouvernement.

Il propose d’habiliter à percevoir une part de la taxe d’apprentissage les établissements privés soumis à une évaluation périodique définie par décret et non mentionnés au 2° de l’article L. 6241-9 du code du travail, ainsi que les établissements privés relevant de l’enseignement supérieur soumis à une évaluation périodique définie par décret.

Considérant que cet article contribuait à déséquilibrer le système de répartition de la taxe d’apprentissage tel qu’il résulte de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a supprimé cet article.

*

La Commission examine l’amendement AS67 du rapporteur.

M. le rapporteur. Introduit au Sénat, l’article 23 octies A élargit le bénéfice de la taxe d’apprentissage à certains établissements privés se soumettant à une évaluation pédagogique. En revenant sur la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, cet article risque de déséquilibrer le système de répartition de la part barème de la taxe d’apprentissage qui avait été retenu. Je propose donc de le supprimer.

M. Gérard Cherpion. L’idée du Sénat était intéressante, mais il faudrait faire une évaluation.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 23 octies A est supprimé.

Article 23 nonies A (nouveau)
(art. L. 6222-18 du code du travail)

Rupture du contrat d’apprentissage

Inséré au Sénat par un amendement du Gouvernement ayant reçu un avis favorable de la commission, cet article autorise la rupture du contrat d’apprentissage pendant les quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de la formation pratique en entreprise effectuée par l’apprenti dans le cadre d’un contrat d’apprentissage.

Dans le droit existant, la période d’essai était de deux mois consécutifs, sans distinction des périodes en entreprise et des périodes de formation pratique en entreprise, ce qui ne donnait pas toujours à l’employeur le temps d’évaluer son apprenti. L’article précise que cette disposition s’applique aux contrats d’apprentissage conclus après la publication du présent projet de loi.

En nouvelle lecture, la commission a adopté un amendement rédactionnel à cet article.

*

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS66 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 23 nonies A modifié.

Article 23 nonies
(art. L. 6325-2 du code du travail)

Possibilité de suivre une formation dans plusieurs entreprises
dans le cadre du contrat de professionnalisation

Cet article permet à un salarié en contrat de professionnalisation de suivre sa formation dans plusieurs entreprises.

Le contrat de professionnalisation, défini à l’article L. 6325-2 du code du travail, permet d’associer « des enseignements généraux, professionnels et technologiques dispensés dans des organismes publics ou privés de formation », d’une part, et « l’acquisition d’un savoir-faire par l’exercice en entreprise d’une ou plusieurs activités professionnelles en relation avec les qualifications recherchées », d’autre part.

La formation ne peut actuellement être dispensée qu’auprès d’une seule entreprise, à l’exception de l’exercice d’activités saisonnières pour lesquelles, en application de l’article L. 6325-4-1 du même code, un contrat de professionnalisation peut être conclu conjointement par deux employeurs.

L’article 23 nonies, introduit en séance publique à l’Assemblée nationale par un amendement de M. Gérard Cherpion avec un avis doublement favorable du rapporteur et du Gouvernement, complète l’article L. 6325-2 du même code afin d’autoriser tout salarié en contrat de professionnalisation à poursuivre la formation dans plusieurs entreprises, sous réserve de la conclusion d’une convention entre l’employeur, les entreprises d’accueil et le salarié. Un décret doit préciser les modalités de l’accueil et le contenu de la convention.

La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement de simplification et d’harmonisation rédactionnelle. En nouvelle lecture, la commission a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

*

La Commission adopte l’article 23 nonies sans modification.

Article 23 decies A (nouveau)
(art. L. 1263-1 du code du travail)

Contrôle des dispositions applicables en matière de détachement
dans le secteur du bâtiment

Cet article résulte de l’adoption au Sénat d’un amendement de Mme Élisabeth Doineau et de plusieurs de ses collègues du groupe UDI.

● Dans le cadre de la lutte contre la fraude au travail détaché, il propose de donner aux douaniers, aux agents des frontières et aux autres agents mentionnés à l’article L. 8271-1-2 du code du travail, la compétence pour exercer un contrôle sur les chantiers, en complément du contrôle effectué par les inspecteurs du travail.

Au cours des débats parlementaires, le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, M. François Rebsamen, a exprimé un avis défavorable sur cet article, estimant que cette disposition ne relevait pas de sa compétence, tout en rappelant que la lutte contre la fraude au travail détaché était une préoccupation majeure du Gouvernement.

● Suivant la demande du rapporteur, qui a rappelé que dans le cadre du plan gouvernemental de lutte contre les fraudes au détachement de salariés et du projet de loi relatif à la croissance, à l’activité et à l’égalité des chances, plusieurs mesures – telles que l’instauration d’une carte d’identité professionnelle dans le secteur du bâtiment ou le renforcement des sanctions – ont été prises récemment pour endiguer ce phénomène, la Commission des affaires sociales a supprimé cet article.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS60 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 23 decies A. En effet, le phénomène de la fraude au détachement des salariés en France a déjà fait l’objet, en février 2015, d’un plan gouvernemental de lutte. Dans le cadre de ce plan et de la loi relative à la croissance, à l’activité et à l’égalité des chances économiques, plusieurs mesures ont été prévues pour endiguer ces fraudes, telles que l’instauration d’une carte d’identité professionnelle dans le secteur du bâtiment ou le renforcement des sanctions. Je propose d’attendre le bilan de ces dispositifs avant d’introduire une nouvelle mesure dont on ne connaît pas les conséquences.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 23 decies A est supprimé.

Article 23 decies B (nouveau)
(art. L. 124-6 du code de l’éducation)

Gratification forfaitaire pour les stagiaires

Cet article additionnel a été introduit au Sénat à l’invitation de la rapporteure.

Il propose de modifier la seconde phrase de l’article L. 124-6 du code de l’éducation pour indiquer que la gratification accordée aux stagiaires est de nature forfaitaire et ne varie pas en fonction du nombre de jours ouvrés dans le mois.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales a considéré que cette disposition était déjà visée par l’actuelle rédaction de l’article L. 124-6 du code de l’éducation, qui dispose que « [le] montant minimal forfaitaire n’est pas fonction du nombre de jours ouvrés dans le mois » (9), pour les conventions de stage signées à compter du 1er septembre 2015.

La commission a donc supprimé cet article.

*

La Commission aborde l’amendement AS61 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de supprimer l’article 23 decies B, car la disposition proposée par nos collègues du Sénat est d’ores et déjà prévue par le troisième alinéa de l’article L. 124-6 du code de l’éducation, qui s’appliquera aux conventions de stage signées à compter du 1er septembre 2015.

M. Jean-Patrick Gille, président. En effet, nous avons déjà instauré la forfaitisation de la gratification accordée aux stagiaires afin que ceux-ci ne pâtissent pas du nombre variable de jours travaillés dans un mois. Il s’agit donc bien d’une redite.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 23 decies B est supprimé.

Article 23 decies
Demande de rapport sur les transitions professionnelles
liées à la transition énergétique

Cet article, inséré à l’Assemblée nationale sur proposition de députés du groupe Écologiste, demandait au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er juillet 2016, un rapport sur les transitions professionnelles liées à la transition énergétique afin d’inviter par la suite les partenaires sociaux et les acteurs de l’emploi à identifier, au sein du conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CNEFOP), les besoins de certification, de compétences et d’offre de formation en matière de transition énergétique.

La commission du Sénat a considéré que ce rapport n’apporterait pas d’éléments nouveaux par rapport à ceux figurant dans le rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese), « L’emploi dans la transition écologique », adopté le 26 mai 2015. Elle a donc supprimé cet article.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a confirmé la suppression de cet article.

*

La Commission maintient la suppression de cet article.

Article 23 undecies (supprimé)
Demande de rapport sur la « Garantie jeunes »

Inséré à l’Assemblée nationale à l’initiative de plusieurs députés du groupe Socialiste, républicain et citoyen, cet article demande la remise d’un rapport au Parlement, avant le 30 novembre 2015, sur les conditions et les modalités de généralisation de la « Garantie jeunes » au 1er janvier 2017.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Le dispositif de la « Garantie jeunes » s’inscrit dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale adopté le 21 janvier 2013.

Il s’adresse à des jeunes de 18 à 25 ans en situation de grande précarité, qui ne sont ni étudiants, ni en emploi, ni en formation, ni éligibles au revenu de solidarité active (RSA) « jeunes » (10) – ces conditions pouvant en outre être assouplies lorsque la situation du jeune le justifie.

En contrepartie de l’engagement individuel du jeune à s’investir pleinement, à suivre un accompagnement personnalisé par la mission locale, à rechercher des opportunités d’emploi et à accepter les mises en situation professionnelle, le bénéficiaire de la « Garantie jeunes » reçoit une allocation d’un montant équivalent à celui du RSA.

Le dispositif de la « Garantie jeunes » a débuté en novembre 2013, avec dix territoires pilotes. Ces derniers ont été rejoints le 1er janvier 2015 par dix départements, puis par vingt-six autres le 1er avril 2015. Vingt-six autres départements doivent rejoindre le dispositif au 1er septembre 2015. La demande de rapport au Parlement formulée porte sur les conditions et modalités de la généralisation de ce dispositif d’ici au 1er janvier 2017.

2. La suppression de cet article par le Sénat

La commission du Sénat a considéré que les conclusions des travaux du comité de pilotage national et du comité scientifique chargé d’évaluer l’expérimentation et de déterminer les conditions appropriées pour la généralisation de la « Garantie jeunes » avaient vocation à être transmises au Parlement dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2016. Afin d’éviter un rapport nécessairement redondant par rapport aux conclusions de ces deux instances, la commission a donc supprimé cet article.

3. La position de la commission

La commission a confirmé la suppression de cet article en nouvelle lecture.

*

La Commission maintient la suppression de cet article.

Article 23 duodecies (nouveau)
(art. L. 1242-8, L. 1243-2, 1243-13, L. 1244-3, L. 1251-12, L. 1251-28, L. 1251-35, L. 1251-36 et L. 1254-12 du code du travail)

Renouvellement des contrats à durée déterminée

Cet article, qui résulte de l’adoption au Sénat d’un amendement présenté par le Gouvernement, est la traduction législative d’une mesure annoncée par le Premier ministre le 9 juin 2015 dans le cadre du plan en faveur de l’emploi dans les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME).

Le I modifie le code du travail afin d’autoriser deux renouvellements du contrat à durée déterminée (CDD), contre un seul renouvellement en l’état actuel du droit. Selon l’exposé des motifs de l’amendement, la contrainte du renouvellement unique est « un frein à l’emploi qu’il faut lever. Certaines TPE/PME peuvent, en l’absence d’une visibilité très claire sur leurs carnets de commandes, avoir besoin de renouveler un CDD de manière imprévue. Pour le salarié, ce renouvellement peut être une opportunité pour rester en emploi, d’abord, et pour s’acheminer vers un CDI, surtout, si l’activité se maintient ou s’améliore ».

Les deux renouvellements doivent toutefois s’inscrire dans le cadre de la durée maximale, que le Sénat a relevée à vingt-quatre mois contre dix-huit mois actuellement, sur proposition d’un sous-amendement de la rapporteure.

Le II dispose que ces dispositions sont applicables aux contrats en cours.

En nouvelle lecture, la Commission des affaires sociales est revenue à la durée maximale de renouvellement des CDD à dix-huit mois.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS65 du rapporteur et AS42 de M. Gérard Cherpion.

M. le rapporteur. L’amendement AS65 concerne la question du recours à deux renouvellements du contrat à durée déterminée. Je propose de ramener à dix-huit mois la durée totale du contrat à durée déterminée, que le Sénat a portée à vingt-quatre mois. M. Cherpion, dans son amendement, souhaite au contraire aller jusqu’à trente-six mois.

M. Gérard Cherpion. La possibilité des renouvellements représente déjà un progrès, mais à durée totale inchangée, l’intérêt d’un renouvellement reste limité. Adopter une position plus ouverte permettrait peut-être de déboucher sur des contrats à durée indéterminée à l’issue de cette période.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. Gérard Sebaoun. Monsieur Cherpion, mon expérience montre que, au-delà de dix-huit mois, si l’entreprise veut embaucher le salarié, il bénéficie immédiatement d’un contrat à durée indéterminée. Le délai de vingt-quatre mois n’y changera rien.

La Commission adopte l’amendement AS65.

En conséquence, l’amendement AS42 tombe.

La Commission adopte l’article 23 duodecies modifié.

Article 23 terdecies (nouveau)
(art. L. 1251-1 et L. 1251-4-1 [nouveau] du code du travail)

Contrat à durée indéterminée intérimaire

Cet article a été introduit au Sénat à l’invitation d’un amendement de la rapporteure, qui a reçu un avis de sagesse du Gouvernement. Il propose de donner une assise législative au contrat à durée indéterminée (CDI) intérimaire, dont les modalités ont été définies dans l’accord sur la sécurisation des parcours professionnels des intérimaires conclu le 10 juillet 2013 (11).

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 23 terdecies modifie l’article L. 1251-1 du code de travail pour préciser que le contrat entre le salarié temporaire et son employeur – l’entreprise de travail temporaire –, dit « contrat de mission », peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée.

Il ajoute ensuite un article L. 1251-4-1 dans le même code prévoyant qu’en cas de contrat de mission à durée indéterminée, certaines dispositions du code du travail ne sont pas applicables.

2. La position de la commission

La Commission des affaires sociales a adopté en nouvelle lecture un amendement de rédaction globale présenté par le rapporteur, visant à substituer au dispositif proposé par le Sénat une expérimentation de trois années, mieux encadrée juridiquement.

Les principales dispositions adoptées sont les suivantes :

– chaque mission doit faire l’objet d’un contrat de mise à disposition entre l’entreprise de travail temporaire et le client utilisateur, et d’une lettre de mission établie par l’entreprise de travail temporaire ;

– le contrat de travail peut prévoir des périodes sans exécution de mission, appelées « périodes d’intermission » ;

– il doit prévoir également le versement d’une rémunération mensuelle minimale garantie.

L’expérimentation est applicable aux contrats conclus jusqu’au 31 décembre 2018. Six mois avant cette date, le Gouvernement devra remettre un rapport au Parlement relatif aux conditions d’application du CDI intérimaire et à son éventuelle pérennisation.

*

La Commission étudie l’amendement AS106 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement important vise à consacrer dans la loi le contrat à durée indéterminée des travailleurs intérimaires. Ce nouveau type de contrat de travail a été défini par les partenaires sociaux en 2013 et étendu par l’arrêté du 22 février 2014. Sur le fond, il s’agit d’une bonne mesure, qui va dans le sens de la sécurisation des parcours professionnels. Pour un travailleur intérimaire, le fait de disposer d’un contrat à durée indéterminée facilite les démarches de la vie courante telles que l’obtention d’un logement ou d’un prêt immobilier. C’est pourquoi je propose de maintenir cette disposition.

J’ai également souhaité, par cet amendement de rédaction globale, sécuriser et enrichir le dispositif proposé par le Sénat, tout en corrigeant certains problèmes de formulation. L’amendement prévoit une expérimentation du contrat à durée indéterminée intérimaire jusqu’à la fin de l’année 2018, l’établissement d’un contrat de travail et d’une lettre de mission, ainsi que le versement d’une rémunération pendant les périodes d’intermission. La remise d’un rapport au Parlement six mois avant la fin de la période d’expérimentation nous permettra d’évaluer l’opportunité de pérenniser le dispositif. Il s’agit de s’assurer de l’absence de tout élément inattendu, défavorable aux salariés qui auraient recours à ces contrats.

M. Gérard Sebaoun. Si je comprends bien, le Sénat proposait de mettre ce contrat à disposition de l’entreprise sans tenir compte du facteur géographique, alors que vous imposez des contraintes dans ce domaine.

M. Gérard Cherpion. C’est une bonne mesure, qui était souhaitée et attendue, et j’y souscris. L’expérimentation ne change pas grand-chose, mais pourquoi ne pas l’organiser ? La nouvelle rédaction apparaît en effet un peu plus précise que celle du Sénat.

M. Dominique Tian. Les sociétés d’intérim nous ont précisé qu’il y avait là un vrai gisement d’emplois. Le nouveau contrat rendra le travail intérimaire beaucoup plus simple à gérer. C’est une mesure qu’il faut soutenir, même s’il ne s’agit que d’une expérimentation.

M. le rapporteur. Monsieur Sebaoun, par rapport au texte du Sénat, nous avons souhaité davantage encadrer le dispositif, non par défiance, mais parce que se voir confier une mission à 700 kilomètres du domicile peut avoir de lourdes conséquences – que l’on peut accepter, mais que l’on peut aussi ne pas pouvoir ou vouloir endosser. À côté des éléments relatifs au périmètre géographique, nous avons également consolidé d’autres volets du dispositif. Pour plus de sécurité, nous avons prévu une période d’expérimentation : si le bilan s’avère positif, on pourra alors pérenniser ce contrat. Il est précieux d’avoir pu intégrer tous ces éléments dans la loi.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 23 terdecies est ainsi rédigé.

TITRE IV
ENCOURAGER L’ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE
PAR LA CRÉATION D’UNE PRIME D’ACTIVITÉ

Article 24
(art. L. 841-1, L. 842-1 à L. 842-7, L. 843-1 à L 843-7, L. 844-1 à L. 844-5, L. 845-1 à L. 845-2
et L. 846-1 du code de la sécurité sociale)

Prime d’activité

● Cet article propose la création d’une prime d’activité, qui doit se substituer à la prime pour l’emploi (PPE), supprimée par la loi de finances rectificative pour 2014 (12), et au volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA).

Ce nouvel outil de soutien financier aux revenus d’activité modestes doit répondre aux critiques adressées, à juste titre et de longue date, aux deux dispositifs préexistants : tandis que la PPE était insuffisamment ciblée et donc trop peu redistributrice, le RSA activité est trop peu sollicité – par seulement un tiers de ses bénéficiaires potentiels –, en raison sans doute de sa complexité mais également de son rattachement au RSA « socle », minimum social potentiellement jugé comme stigmatisant.

La prime d’activité, qui reste calculée par foyer comme le RSA activité, et non par personne comme la PPE, est ouverte aux travailleurs dès 18 ans, alors que seuls les plus de 25 ans peuvent bénéficier du RSA. À l’initiative du Gouvernement, la Commission des affaires sociales puis l’Assemblée nationale ont voté l’extension du dispositif aux étudiants et aux apprentis dont les revenus d’activité excèdent, sur les trois derniers mois, 0,78 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC).

Afin de renforcer l’incitation à l’activité au sein des foyers bénéficiaires de la prime, le texte prévoit un élément d’individualisation, prenant la forme d’une bonification accordée pour chaque membre du foyer percevant des revenus professionnels dépassant un certain seuil. La définition précise des modalités de calcul de la bonification – comme au demeurant de l’ensemble des éléments entrant dans la formule de calcul – relève du pouvoir réglementaire ; selon les informations fournies dans l’étude d’impact, la bonification ne serait versée qu’au titre des membres du foyer dont les revenus d’activité mensuels excèdent 0,5 SMIC, puis augmenterait linéairement jusqu’à 0,8 SMIC, restant fixe à ce niveau maximum avant d’être absorbée par la décroissance du montant de la prime.

En réponse à la complexité de détermination comme de gestion du RSA activité, le texte propose entre autres :

– de simplifier la « base ressources », soustraite des revenus d’activité du foyer afin de déterminer le montant de la prime, avec notamment l’exclusion des ressources « théoriques » (par exemple la détention d’un bien immobilier non loué, donc ne produisant pas de revenus) ;

– d’adopter le principe des « droits figés », qui permet un réexamen trimestriel des droits du bénéficiaire, mais assure la stabilité du montant de la prime dans l’intervalle, même en cas d’évolution de sa situation.

Compte tenu de la contrainte qui pèse sur nos finances publiques, la réforme proposée est à budget constant : ce sont donc les sommes jusqu’ici consacrées à la PPE et au RSA activité qui financeront à l’avenir la prime d’activité, à hauteur d’environ 4 milliards d’euros. Cette enveloppe est calculée en faisant l’hypothèse d’une forte hausse du taux de recours, qui passerait de 32 % pour le RSA activité à 50 % pour la prime.

● La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté trois amendements à cet article, à l’initiative de sa rapporteure.

Le premier de ces amendements réécrit partiellement le nouvel article L. 842-3 du code de la sécurité sociale, afin de décrire plus clairement les modalités de calcul de la prime d’activité. Cette nouvelle rédaction, qui ne change pas le fond du dispositif, apporte néanmoins des clarifications bienvenues. Par coordination, les articles L. 842-4 et L. 842-7 sont également modifiés.

Le deuxième amendement modifie la formulation de l’article L. 843-7, introduit en première lecture en séance à l’Assemblée nationale, à l’initiative du rapporteur. Dans sa version d’origine, il prévoyait que le bénéficiaire de la prime d’activité, lorsqu’il est en recherche d’emploi, a droit à un accompagnement adapté à ses besoins. La formulation retenue par la Commission des affaires sociales du Sénat assigne comme objectif à l’accompagnement du bénéficiaire de la prime d’activité « son maintien durable dans l’emploi ».

En outre, l’amendement modifie l’article L. 845-1-1, également introduit à l’initiative du rapporteur (en commission), qui prévoit que Pôle Emploi informe chaque mois l’État des inscriptions des bénéficiaires de la prime d’activité sur la liste des demandeurs d’emploi et de leurs radiations ; il s’agit de préciser utilement les références, dans le code du travail, à la procédure d’inscription.

Le troisième amendement modifie le dernier alinéa de l’article 24, introduit en première lecture à l’Assemblée nationale à l’initiative des députés du groupe Socialiste, républicain et citoyen. L’amendement adopté par l’Assemblée nationale prévoyait que « les caisses d’allocations familiales et la direction générale des finances publiques veillent à mener conjointement une campagne dématérialisée d’information auprès des bénéficiaires actuels du revenu de solidarité active activité et de la prime pour l’emploi ». Sans modifier l’objectif poursuivi, la rédaction retenue par la Commission des affaires sociales du Sénat est plus complète et précise : outre une formulation plus heureuse, elle prévoit en effet d’associer à cette campagne d’information la Caisse centrale de mutualité sociale agricole, et précise que la campagne doit être déclinée dans les réseaux, au-delà du seul niveau national.

● À l’initiative de sa Commission des affaires sociales, mais contre l’avis du Gouvernement, le Sénat a restreint en séance publique l’éligibilité de la prime d’activité aux seuls apprentis dépourvus de diplôme. À l’initiative du rapporteur, la commission en est revenue sur ce point à la rédaction de l’Assemblée nationale.

● La Commission des affaires sociales a par ailleurs adopté en nouvelle lecture deux amendements rédactionnels du rapporteur.

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La Commission est saisie de l’amendement AS54 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le Sénat a réduit le nombre d’apprentis qui pouvaient bénéficier de la prime d’activité, en la réservant aux seuls apprentis dépourvus de diplômes. Je propose de revenir au texte originel de l’Assemblée nationale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS55 et AS56 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 24 modifié.

Article 25
(art. L. 262-1 à L. 262-4, L. 262-9, L. 262-10, L. 262-24, L. 262-25, L. 262-27-1,
art. L. 262-28, L. 262-38, L. 262-40, L. 262-45, L. 262-46, L. 262-53
et L. 522-12 du code de l’action sociale et des familles)

Suppression du RSA « activité »

Cet article tire les conséquences de la création par l’article 24 de la prime d’activité, en supprimant le volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA). Cela implique de nombreuses coordinations au chapitre II du titre VI du livre II du code de l’action sociale et des familles.

À l’initiative de sa Commission des affaires sociales, le Sénat a adopté en séance publique un amendement corrigeant opportunément une erreur de référence.

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La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26
(art. 30 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, art. L. 115-2, L. 121-7, L. 131-2, L. 14-10-6, L. 262-29,
L. 262-32 et L. 262-33 du code de l’action sociale et des familles, art. L. 114-16-2, L. 114-17, L. 167-3, L. 412-8, L. 523-1, L. 553-1, L. 553-2, L. 821-5-1, L. 835-3, L. 861-2 et L. 861-5 du code de la sécurité sociale, art. L. 3252-3, L. 5132-3-1, L. 5134-72-2 et L. 6325-1 du code du travail, art. L. 3334-6-1, L. 3334-16-2 et L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, art. 81 du code général des impôts, art. L. 98 A du livre des procédures fiscales, art. L. 331-2, L. 334-5
et L. 334-9 du code de la consommation, art. L. 351-11 du code de la construction et de l’habitation, art. L. 120-11 et L. 120-21 du code du service national, art. 14 de l’ordonnance n° 96-50
du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale)

Coordination et dispositions diverses

Cet article procède pour l’essentiel aux nombreuses coordinations rendues nécessaires – dans pas moins de neuf codes, une loi et une ordonnance – par la suppression du volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et la création d’une prime d’activité, prévues respectivement par les articles 25 et 24 du projet de loi. Certaines de ces coordinations auraient d’ailleurs pu trouver leur place à l’article 25, tant elles sont directement liées aux dispositions qu’il comporte. Cet article prévoit également le régime fiscal et social de la prime d’activité.

À l’initiative de sa Commission des affaires sociales, le Sénat a adopté en séance publique un amendement rédactionnel bienvenu.

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La Commission adopte l’article 26 sans modification.

Article 28
Rapport au Parlement sur la prime d’activité

● Cet article résulte de l’adoption par la Commission des affaires sociales puis par l’Assemblée nationale d’un amendement du rapporteur. Il s’agit de demander au Gouvernement de remettre au Parlement, dix-huit mois après l’entrée en vigueur de la prime d’activité (soit au 1er juillet 2017) un rapport en dressant un premier bilan.

Ce rapport devra détailler les éléments suivants, en les présentant par sexe : le taux de recours à la prime d’activité ; son coût budgétaire ; le nombre de bénéficiaires ; la ventilation de ces bénéficiaires par déciles de niveau de vie ; ses effets sur le taux de pauvreté monétaire ; la situation des bénéficiaires sur le marché de l’emploi, notamment la durée moyenne des contrats des bénéficiaires salariés ; l’impact de la prime d’activité sur le parcours d’insertion des femmes.

● La Commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement à cet article, à l’initiative de la commission des finances, saisie pour avis :

– les informations relatives au coût budgétaire de la prime d’activité devront préciser les impacts respectifs de la part familialisée, de la bonification individuelle et des autres composantes. Ces informations étant impossibles à obtenir, la Commission des affaires sociales en est revenue sur ce point à la rédaction de l’Assemblée nationale, à l’initiative du rapporteur ;

– une évolution du nombre de bénéficiaires sur la période évaluée devra être présentée, ainsi que l’impact de cette évolution sur le coût budgétaire.

● La Commission des affaires sociales a en outre adopté un amendement rédactionnel, à l’initiative du rapporteur.

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La Commission examine l’amendement AS57 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’Assemblée nationale avait demandé au Gouvernement la remise d’un rapport sur la prime d’activité. Le Sénat a souhaité compléter cette demande par celle d’informations plus spécifiques relatives au coût budgétaire de la prime, notamment à l’impact de la part familialisée, de la bonification individuelle et des autres composantes. Comme il s’avère impossible de disposer de ces éléments, je propose de supprimer la fin de l’alinéa 3.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS58 du rapporteur.

Elle adopte l’article 28 modifié.

La Commission adopte enfin l’ensemble du projet de loi modifié.

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* *

En conséquence, la Commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter le projet de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.

© Assemblée nationale

1 () Décret n° 2015-262 du 5 mars 2015 relatif à la création de la sous-commission de la restructuration des branches professionnelles de la commission nationale de la négociation collective.

2 () INSEE, enquête emploi 2013 citée par l’étude d’impact du projet de loi

3 () Ce groupe de travail était conduit par trois personnalités qualifiées, M. Michel Issindou, député, M. Christian Ploton, membre de la direction des ressources humaines du groupe Renault, et Mme Sophie Quinton-Fantoni, professeur de médecine du travail.

4 () Les missions et le fonctionnement de cette instance ont été fixés par le décret n° 2008-1217 du 25 novembre 2008 relatif au Conseil d’orientation sur les conditions de travail.

5 () Rapport de MM. Sirugue, Huot et Davy de Virville, « Propositions pour un dispositif plus simple, plus sécurisé et mieux articulé avec la prévention », remis le 26 mai 2015 au Premier ministre.

6 () « Propositions pour un dispositif plus simple, plus sécurisé et mieux articulé avec la prévention ».

7 () Directive 94/33/CE du Conseil du 22 juin 1994, relative à la protection des jeunes au travail.

8 () Activités consistant à « fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles » ou à « protéger l’intégrité physique des personnes ».

9 () Dans sa rédaction résultant de l’article 1er de la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires.

10 () Peuvent bénéficier du RSA « jeunes » les personnes âgées de 18 à 25 ans ayant travaillé pendant au moins deux fois 1 607 heures sur une période de référence de trois années précédant la demande de RSA.

11 () Cet accord a été étendu par l’arrêté du 22 février 2014 portant extension d’un accord relatif à la sécurisation des parcours professionnels des salariés intérimaires des entreprises de travail temporaire.

12 () Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014.