N° 3129 tome V - Rapport de M. Denis Jacquat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n°3106)



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N° 3129

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2016,

TOME V

ACCIDENTS DU TRAVAIL – MALADIES PROFESSIONNELLES

PAR M. Denis JACQUAT,

Député.

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 3106.

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 1er, 2, 5, 7 à 15, 17 à 20, 25 à 30 et 57 à 61 figurent dans le rapport de M. Gérard Bapt, sur les recettes et l’équilibre général (n° 3129, tome I).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 3, 4, 6, 16, 21 à 24, 39 à 45, 48 à 55 figurent dans le rapport de Mme Michèle Delaunay, sur l’assurance maladie (n° 3129, tome II).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 46 et 47 figurent dans le rapport de Mme Joëlle Huillier, sur le secteur médico-social (n° 3129, tome III).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 35, 36 et 56 figurent dans le rapport de M. Michel Issindou, sur l’assurance vieillesse (n° 3129, tome IV).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 37 et 38 figurent dans le rapport de M. Denis Jacquat, sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (n° 3129, tome V).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 31 à 34 figurent dans le rapport de Mme Marie-Françoise Clergeau, sur la famille (n° 3129, tome VI).

SOMMAIRE

___

Pages

I. UNE BRANCHE DONT LE SOLDE RESTE EXCÉDENTAIRE ET DONT LA PRIORITÉ DEMEURE LA PRÉVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS 7

A. EXCÉDENTAIRE DEPUIS 2013, LE SOLDE DE LA BRANCHE S’EST ENCORE AMÉLIORÉ EN 2014, MALGRÉ L’ALOURDISSEMENT DES CHARGES DE TRANSFERTS 7

1. Une forte augmentation des produits 7

2. Une évolution contrastée des dépenses 8

a. La forte augmentation des prestations d’invalidité 8

b. La progression modérée des prestations d’incapacité permanente 9

c. La stabilité des indemnités journalières de maternité et de paternité 9

d. La baisse des charges liées aux fonds amiante 9

3. Les prévisions de la Commission des comptes de la Sécurité sociale pour 2015 12

4. Les prévisions de la Commission des comptes de la Sécurité sociale pour 2016 13

B. LA BAISSE DE LA SINISTRALITÉ SE POURSUIT MAIS LE CONTENTIEUX AUGMENTE EN 2014 15

1. Une sinistralité en baisse constante 15

2. Un contentieux en légère hausse 23

C. LA PRÉVENTION EST AU CœUR DU 3E PLAN « SANTÉ AU TRAVAIL » (2015-2019) COMME DE LA CONVENTION D’OBJECTIFS ET DE GESTION ÉTAT-CNAMTS AT-MP (2014-2017) 28

1. Bilan du 2e plan « Santé au travail » (2010-2014) 30

2. Bilan d’étape de la mise en œuvre de la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAMTS AT-MP (2014-2017) 34

3. Les travaux de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) 39

4. Les travaux de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) 41

II. UNE BRANCHE AU SEIN DE LAQUELLE DE MULTIPLES INTERROGATIONS SE FONT JOUR 45

A. L’ÉVALUATION DU MONTANT REVERSÉ PAR LA BRANCHE AT-MP À LA BRANCHE MALADIE AU TITRE DE LA SOUS-DÉCLARATION EST TOUJOURS EN QUESTION 45

B. DES DÉBATS AUTOUR DE L’UTILISATION DES EXCÉDENTS DE LA BRANCHE AT-MP, DE LA PRISE EN CHARGE DU « BURN-OUT » ET DE L’ORGANISATION DE LA MÉDECINE DU TRAVAIL 48

1. L’utilisation des excédents de la branche en vue du renforcement des actions de prévention 48

2. La délicate prise en charge du « burn-out » 49

3. Réformes en cours et pistes de réformes de la médecine du travail 54

C. DES INTERROGATIONS AU SUJET DU PROJET DE REGROUPEMENT DES CONTENTIEUX TRAITÉS PAR LES TRIBUNAUX DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE ET PAR LES TRIBUNAUX DU CONTENTIEUX DE L’INCAPACITÉ AU SEIN DES PÔLES SOCIAUX DES TRIBUNAUX DE GRANDE INSTANCE 58

TRAVAUX DE LA COMMISSION 61

EXAMEN DES ARTICLES RELATIFS AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES 61

QUATRIÈME PARTIE – DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2016 61

TITRE III – DISPOSITIONS RELATIVES À LA BRANCHE DES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET DES MALADIES PROFESSIONNELLES 61

Article 37 : Fixation des montants des dépenses de transfert instituées par des dispositions légales à la charge de la branche AT-MP 61

Après l’article 37 70

Article 38 : Objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2016 73

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 75

INTRODUCTION

Si, en ce mois d’octobre 2015, on célèbre le soixante-dixième anniversaire de l’ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la Sécurité sociale, il faut garder à l’esprit que le principe de la couverture des risques liés aux accidents du travail et aux maladies professionnelles (« AT-MP ») est vieux de 117 ans, car c’est une loi du 9 avril 1898 qui l’a posé.

Si la gestion du risque professionnel a été intégrée à la Sécurité sociale depuis la loi du 30 octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, les orientations de la branche AT-MP sont définies dans un cadre strictement paritaire au sein de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CATMP) de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

Cette année encore, les personnes auditionnées par le rapporteur ont souligné la qualité du dialogue social au sein de la branche AT-MP : les débats et négociations y sont menés dans le respect et de façon constructive.

L’efficience dont le paritarisme a fait preuve au sein de la branche AT-MP n’est sans doute pas pour rien dans les succès de cette branche qui, en 2014, a une nouvelle fois enregistré une baisse de la sinistralité – qui a ainsi atteint un niveau historiquement faible – et un solde excédentaire.

Si, soixante-dix ans après son institution, la Sécurité sociale peut se féliciter des résultats d’une branche qui, en excédent, a su dépasser une logique de réparation pour faire de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles une priorité – du reste placée au cœur du troisième plan « Santé au travail » (2015-2019) comme de la convention d’objectifs et de gestion liant l’État et la CNAMTS pour la période 2014-2017 –, il n’en reste pas moins qu’un certain nombre d’interrogations se font en ce moment jour au sein de la branche AT-MP.

Les débats portent en particulier sur l’utilisation des excédents de la branche qui, grevés par l’augmentation continue et conséquente du versement effectué à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, sont, selon une bonne partie des acteurs entendus par le rapporteur, insuffisamment mobilisés au service des actions de prévention. D’aucuns plaident en outre pour que ces excédents servent à améliorer la prise en charge des pathologies psychiques d’origine professionnelle comme le « burn-out ».

La loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a été l’occasion d’avancées sur cette question, comme sur celle de l’inaptitude – même si la réforme de la médecine du travail reste largement à entreprendre, au-delà des modifications apportées au statut de « collaborateur-médecin » par le projet de loi de modernisation de notre système de santé.

Si, cette année, ces deux textes ont exceptionnellement permis d’aborder la question des accidents du travail et des maladies professionnelles en dehors du cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le rapporteur regrette, une nouvelle fois, que le Parlement se saisisse trop rarement des enjeux de santé et de sécurité au travail. Preuve en est que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 ne comporte aucune mesure nouvelle concernant la couverture du risque AT-MP.

Les auditions que le rapporteur a menées en septembre dernier ont néanmoins permis de « prendre le pouls » de la branche AT-MP et d’identifier les sujets de préoccupation des partenaires sociaux, des associations représentant des accidentés du travail et des victimes de l’amiante ainsi que des représentants d’organismes institutionnels ou juridiques.

Le présent rapport se fait l’écho de certaines de ces inquiétudes, au sujet desquelles le rapporteur n’a pas manqué d’alerter le Gouvernement.

En 2014, malgré des charges qui ont augmenté de 2,8 % (alors qu’elles avaient baissé de 3,1 % en 2013), l’excédent de la branche « accidents du travail – maladies professionnelles » (AT-MP) s’est amélioré d’environ 50 millions d’euros par rapport à 2013 pour atteindre 691 millions d’euros.

Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, « l’évolution du résultat a été plus positive qu’anticipé, les cotisations ayant été en définitive supérieures de 0,3 milliard d’euros à l’estimation initiale (et de 0,2 milliard d’euros à la prévision révisée en loi de financement pour 2015) et les prestations inférieures de près de 0,3 milliard d’euros à celle inscrite dans la loi de financement initiale (et de 0,2 milliard d’euros à la dernière prévision) » (1).

Les recettes de la branche AT-MP ont progressé de 3,1 % en 2014, dans le prolongement de la forte augmentation de 2013 (+ 3,9 %).

Cette croissance a été tirée par celle des cotisations sociales nettes (+ 3,8 %) qui ont représenté 97 % des produits de la branche en 2014 – étant précisé que le taux net moyen national des cotisations AT-MP (2) s’est stabilisé à 2,44 % (contre 2,28 % en 2008).

Les remboursements de cotisations versées par la branche AT-MP à la suite de litiges avec des employeurs ont diminué (- 0,1 milliard d’euros), ainsi que les charges liées au recouvrement, en raison surtout d’une forte reprise sur provision relative à des contentieux (0,1 milliard d’euros). En revanche, la forte diminution des produits nets de recours contre tiers (- 24 %) a atténué la croissance des produits.

D’après la Commission des comptes de la Sécurité sociale, la dynamique des charges de la branche AT-MP constatée en 2014 s’explique essentiellement par le contrecoup des effets positifs et transitoires dont avait bénéficié la branche en 2013, en particulier la baisse de la dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) et la régularisation des dépenses hospitalières favorable au régime.

Les dépenses ont en effet augmenté en raison de la hausse importante de la dotation au FIVA et, dans une moindre mesure, des prestations sociales, et notamment des prestations d’incapacité temporaire (+ 100 millions d’euros).

Les prestations sociales, qui représentent près de 75 % des charges de la branche AT-MP, ont progressé de 0,6 %, après avoir baissé de 0,9 % en 2013. Les prestations exécutées en établissements publics ont sensiblement augmenté (+ 19 %). Les prestations de la branche AT-MP qui n’entrent pas dans le champ de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) (3) se sont élevées à 15,8 milliards d’euros.

Il faut toutefois noter que la dynamique par type de dépenses a été contrastée.

En 2014, la progression des prestations d’invalidité est restée soutenue (+ 5,3 %, comme en 2013). Le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite (de 60 à 62 ans) opéré par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites se traduit par un allongement de la durée passée en invalidité. Ainsi, en 2014, le recul de l’âge légal aurait eu un effet plus important qu’en 2013, la Commission des comptes de la Sécurité sociale chiffrant à 3,4 points (contre 2,6 points en 2013) sa contribution à la hausse des prestations d’invalidité. En revanche, la revalorisation des pensions d’invalidité a été moins importante (0,8 % en moyenne annuelle en 2014, contre 1,5 % en 2013).

Depuis plusieurs années, le volume des rentes d’accidents du travail et de maladies professionnelles est relativement stable. L’évolution en volume a été nulle en 2014. La progression des prestations d’incapacité permanente a suivi celle de la revalorisation des pensions (+ 0,8 % en moyenne annuelle en 2014).

En 2014, les indemnités journalières (IJ) de maternité et les indemnités de paternité et d’accueil de l’enfant ont légèrement augmenté (+ 0,9 % pour les IJ maternité et - 0,3 % pour les IJ paternité). L’augmentation des indemnités journalières de maternité découle principalement de la reprise de la natalité (+ 0,2 % en 2014 contre – 1,1 % en 2013).

Le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA)
& le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA)

Les lois de financement de la sécurité sociale pour 1999, 2000 et 2001 ont mis en place un dispositif de cessation anticipée d’activité ouvert à partir de 50 ans aux salariés du régime général atteints de maladies professionnelles liées à l’amiante ou ayant travaillé dans des établissements de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, de flocage et de calorifugeage à l’amiante ou de construction et de réparation navales. Le dispositif a été étendu successivement aux dockers professionnels (en 2000), aux personnels portuaires de manutention (en 2002) et aux salariés agricoles atteints de maladies professionnelles liées à l’amiante (en 2003).

Les allocations de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) sont prises en charge par le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA), dépourvu de personnalité morale et intégré dans les comptes de la branche AT-MP. Ce fonds prend également à sa charge les cotisations au régime de l’assurance volontaire vieillesse ainsi que les cotisations aux régimes de retraite complémentaire dues par les bénéficiaires des allocations versées par le fonds.

Le fonds est financé essentiellement par une contribution de la branche AT-MP du régime général fixée chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que par une fraction du produit des droits de consommation sur le tabac et une contribution de la branche AT-MP du régime des salariés agricoles.

Le fonds est géré pour une partie de ses opérations (allocations, cotisations volontaires vieillesse et frais de gestion) par la caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM AT-MP) et, pour l’autre partie (cotisations complémentaires vieillesse) par la caisse des dépôts et consignations (CDC).

Le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) est un établissement public qui a été mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 pour prendre en charge l’indemnisation (en réparation intégrale de leurs préjudices) des personnes atteintes de maladies liées à l’amiante (contractées ou non dans un cadre professionnel).

Le fonds prend en charge les maladies d’origine professionnelle occasionnées par l’amiante reconnues par la sécurité sociale, les maladies spécifiques figurant dans l’arrêté du 5 mai 2002 (pour lesquelles le constat vaut justification de l’exposition à l’amiante) et enfin toute maladie pour laquelle le lien avec une exposition à l’amiante est reconnu par le FIVA après examen par la commission d’examen des circonstances de l’exposition à l’amiante.

Le fonds instruit les dossiers et verse les indemnisations selon un barème qui se décompose en deux parties : l’indemnisation des préjudices patrimoniaux et l’indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux.

En 2014, l’impact des opérations relatives au FCAATA et au FIVA sur le solde de la branche AT-MP a augmenté de près de 0,3 milliard d’euros – ce qui reflète la hausse de 320 millions d’euros de la dotation au FIVA.

Cette augmentation de la dotation au FIVA a contribué à faire progresser les charges hors prestations de la branche AT-MP de 10,3 % - hausse qui a été limitée par la diminution des charges de gestion courante (- 2,9 %).

La baisse continue du nombre d’allocataires de l’ACAATA

Le nombre des bénéficiaires de l’ACAATA a continué de diminuer fortement en 2014, pour s’établir à 21 484, ce qui représente une baisse de 8,7 % par rapport à 2013.

C’est le signe de la fin de la montée en charge du dispositif, le nombre d’entrées étant inférieur au nombre de sorties.

La dotation de la CNAM AT-MP au FCAATA – qui représente 95 % des produits du fonds – s’est élevée à 821 millions d’euros, tandis que la fraction du produit des droits sur la consommation de tabacs s’est élevée à 37 millions d’euros.

En conséquence, le FCAATA a été excédentaire de 81 millions d’euros.

S’agissant de l’ACAATA, le rapporteur a attiré l’attention du Gouvernement sur des difficultés d’ordre réglementaire qui lui ont été signalées par l’Association nationale des victimes de l’amiante (ANDEVA), lors de son audition, au sujet des règles de calcul de l’allocation. Celles-ci favoriseraient, semble-t-il, les salariés qui, reconnus avoir été exposés à l’amiante, font l’objet d’un licenciement économique, plutôt que ceux qui, également reconnus avoir été exposés à l’amiante, font l’effort de reprendre un emploi avec une rémunération plus faible, dans le cadre d’un reclassement. Par ailleurs, le calcul de l’ACAATA poserait des difficultés quand le salarié est embauché en contrat à durée indéterminée (CDI) à temps partiel (contrairement au cas où il serait embauché en contrat à durée déterminée – CDD – à temps partiel).

Interrogé à ce sujet, le Gouvernement a fait savoir que, pour les salariés des entreprises de plus de mille salariés dont le licenciement pour motif économique est envisagé et qui peuvent bénéficier d’un congé de reclassement donnant lieu à rémunération réduite (65 % du salaire brut mensuel des 12 derniers mois, sans pouvoir être inférieur à 85 % du SMIC), les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) responsables de l’attribution de l’ACAATA opéraient déjà, dans les faits, la neutralisation de la période du congé de reclassement afin que celle-ci ne soit pas prise en compte dans le calcul du salaire de référence servant de base au calcul de l’ACAATA.

Quant à la neutralisation de la période d’activité salariée avec rémunération réduite, consécutive à une période de chômage à la suite de la fermeture ou de la reconversion de l’activité d’un établissement ou port figurant sur une des listes fixées par arrêté interministériel ouvrant droit au bénéfice de l’ACAATA, le Gouvernement a indiqué que « la faisabilité et de l’impact d’une telle mesure est en cours d’étude ». Il s’agirait de permettre aux salariés qui ont consenti à reprendre un emploi avec une rémunération plus faible, dans le cadre d’un congé de reclassement – et donc indépendamment de toute situation de chômage – de bénéficier d’un montant d’allocation calculé en tenant compte des salaires perçus pour l’activité qui leur ouvre droit à ladite allocation.

Pour ce qui est du salaire de référence servant de base au calcul de l’ACAATA, celui-ci correspond aux rémunérations perçues par le demandeur lors de sa dernière année d’activité « sous réserve qu’elles présentent un caractère régulier et habituel » (4). Le salaire de référence calculé devant refléter au mieux le caractère régulier et habituel de la rémunération de l’assuré, les périodes de travail à temps partiel effectuées par l’intéressé dans le cadre d’un CDD ne sont pas prises en compte dans le calcul du salaire de référence. En revanche, le Gouvernement estime qu’il convient de considérer, s’agissant d’un assuré travaillant à temps partiel dans le cadre d’un CDI, que la rémunération calculée sur la base de son temps partiel correspond bien à sa rémunération habituelle.

La baisse des dépenses du FIVA

En 2014, les dépenses nettes du FIVA ont diminué de 6 %, pour atteindre 520 millions d’euros, alors qu’elles avaient augmenté en 2013 de 16 % pour s’établir à 556 millions d’euros.

En revanche, le nombre d’offres faites aux victimes par le FIVA a progressé de 3,3 % : 8 200 offres ont été proposées (contre 7 900 en 2013). Il faut cependant noter que le nombre d’offres faites aux ayants droit a légèrement diminué, passant de 12 500 offres en 2013 à 12 000 offres en 2014.

CHARGES NETTES, PRODUITS NETS ET SOLDE DE LA BRANCHE AT-MP
DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Charges nettes

11,3

11,6

11,8

12

Taux d’évolution annuelle

- 3,1 %

2,8 %

1,6 %

1,9 %

Produits nets

11,9

12,3

12,4

12,7

Taux d’évolution annuelle

3,9 %

3,1 %

0,8 %

2,5 %

Solde

0,6

0,7

0,6

0,7

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale (septembre 2015)

En 2015, l’excédent de la branche se réduirait légèrement pour s’établir à 603 millions d’euros.

Les cotisations connaîtraient un ralentissement marqué (+ 0,8 %). En effet, la mise en place du pacte de responsabilité, dans le cadre de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, a augmenté le niveau maximal d’exonération sur les bas salaires, ce qui se traduirait par une perte de cotisations pour la branche de 40 millions d’euros, compensée en 2015 par l’affectation d’une partie du prélèvement à la source de cotisations des caisses de congés payés.

Les charges progresseraient de 1,6 %, en raison notamment de la hausse de 210 millions d’euros du transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents de travail – hausse qui contribuerait à l’augmentation de 4,4 % des charges hors prestations de la branche AT-MP. Cette augmentation s’expliquerait aussi, et dans une moindre ampleur, par la hausse du reversement à la caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV) au titre de la retraite pour pénibilité.

Les prestations sociales progresseraient à un rythme très légèrement supérieur à celui de 2014 (+ 0,7 %). Les prestations entrant dans le champ de l’ONDAM augmenteraient de 2,4 % (contre 2,7 % en 2014). Les prestations hors ONDAM s’élèveraient à 16,2 milliards d’euros.

La croissance des prestations d’invalidité ralentirait (+ 3,7 % en 2015), compte tenu d’un moindre effet du recul de l’âge légal de départ en retraite (estimé à 2,4 points).

La Commission des comptes de la Sécurité sociale prévoit que le volume des prestations d’incapacité permanente restera stable en 2015 (+ 0,1 % en raison de la revalorisation des pensions).

Les indemnités pour congés de maternité resteront stables dans l’hypothèse d’une baisse de la natalité et d’une progression des salaires de 1,6 %.

Les dépenses de la branche AT-MP relatives aux fonds amiante devraient baisser de 100 millions d’euros sous les effets combinés de la diminution de la dotation au FIVA et de la baisse des ACAATA.

En 2015, la décroissance rapide des ACAATA devrait se poursuivre (- 11,1 %), sous l’effet combiné d’une diminution du nombre d’allocataires (- 12 %) et d’une revalorisation quasiment nulle des allocations, en cohérence avec la faiblesse de l’inflation.

La loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015 a fixé le montant de la dotation de la CNAM AT-MP au FCAATA à 693 millions d’euros en 2015.

Le solde du FCAATA devrait rester excédentaire en 2015, mais l’excédent devrait se réduire pour atteindre 12 millions d’euros.

Les dépenses du FIVA devraient s’élever à 525 millions d’euros (dont 446 millions d’euros au titre des dépenses d’indemnisation).

En 2016, la croissance des produits serait plus rapide que celle des charges, ce qui permettrait une amélioration du solde de la branche AT-MP de près de 100 millions d’euros.

La croissance des produits devrait repartir à la hausse (+ 2,5 %).

Les charges progresseraient quant à elles de 1,9 %. Les prestations dans le champ de l’ONDAM seraient en hausse de 3,9 % tandis que les prestations hors ONDAM s’élèveraient à 16,4 milliards d’euros.

Les prestations d’invalidité progresseraient à un rythme légèrement supérieur à celui de 2015 (+ 3,9 %), en raison d’une revalorisation des pensions plus importante qu’en 2015 (+ 0,8 % en moyenne annuelle).

La Commission des comptes de la Sécurité sociale prévoit que le volume des prestations d’incapacité permanente restera stable en 2016 (+ 0,8 % en raison de la revalorisation des pensions).

Les indemnités pour congés de maternité devraient progresser légèrement (+ 0,5 %), sous l’effet d’une accélération prévisionnelle dans la progression des salaires, estimée à 2,1 %.

Les charges liées aux fonds amiante devraient augmenter de 11 millions d’euros, en raison d’une hausse de 50 millions d’euros de la dotation au FIVA dont les dépenses devraient s’élever à 525 millions d’euros (dont 466 au titre des dépenses d’indemnisation).

D’ici à 2016, le nombre de nouvelles demandes de victimes devrait augmenter pour s’établir à 7 300, et le nombre de nouvelles demandes d’ayants droit progresserait d’environ 5 % par an pour atteindre 13 400 demandes en 2016. Par ailleurs, le coût moyen par dossier augmenterait annuellement d’environ 3 % et s’établirait à 46 000 euros pour les dossiers de victimes et 11 500 euros pour les dossiers d’ayants droit.

En 2016, la forte baisse des ACAATA devrait se poursuivre (- 8,5 %) en raison de la diminution des effectifs (- 9 %) et d’un impact en moyenne annuelle de la revalorisation des allocations quasiment nul (+ 0,33 %).

LES COMPTES DU FCAATA

(en millions d’euros)

 

2013

%

2014

%

2015 (p)

%

2016 (p)

%

Charges

819

- 4,5

779

- 4,9

717

- 8

678

- 5,4

Produits

928

0,6

860

- 7,3

729

- 15,3

636

- 12,7

Dont contribution de la CNAM AT-MP

890

0

821

- 7,8

693

- 15,6

600

- 13,4

Dont droits sur les tabacs

35

7,5

37

5,1

35

- 4,2

36

1

Autres produits

3

 

2

- 23,2

0

 

0

 

Résultat net

109

 

81

 

12

 

- 42

 

Résultat cumulé depuis 2000

- 51

 

30

 

42

 

0

 

Source : Direction de la sécurité sociale.

LES COMPTES DU FIVA

(en millions d’euros)

 

2013

2014

%

2015 (p)

%

2016 (p)

%

Charges

555,6

520,5

- 6,3

524,7

- 0,8

524,7

0

Dépenses d’indemnisation

469,3

429

- 8,6

445,7

3,9

465,7

4,5

Autres charges

8,6

9

4,2

9

0,5

9

0

Provisions

77,7

82,5

6,2

70

- 15,2

50

- 28,6

Produits

239,4

547,1

128,5

492

- 10,1

543,4

10,4

Subvention État

0

0

 

10

 

13,4

 

Contribution de la branche AT-MP

115,5

435

 

380

- 12,6

430

13,2

Reprises sur provisions

79,8

79,1

- 0,8

72

- 9

70

- 2,8

Autres produits

44,7

33

- 26

30

- 9,2

30

0

Résultat net

- 316,2

26,7

 

- 32,7

 

18,7

 

Variation du fonds de roulement

- 318,2

30,1

0

- 34,7

 

- 1,3

 

Fonds de roulement net

78,8

108,9

 

74,2

 

72,8

 

Source : FIVA (données comptables jusque 2014) – Direction de la sécurité sociale (prévisions pour 2015 et 2016)

Près de 760 000 sinistres ont été recensés par la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en 2014, dont 685 000 ayant entraîné un arrêt d’au moins 4 jours. Ce chiffre est en diminution de 0,5 % par rapport à 2013. Parmi les sinistres constatés et reconnus en 2014, 82 % concernent des accidents du travail, 12 % des accidents de trajet et 7 % des maladies professionnelles.

Évolution générale de la sinistralité

Alors que le nombre d’accidents du travail est globalement en baisse sur la période 2008-2014 (- 12 % sur la période), on constate une augmentation très importante du nombre de maladies professionnelles reconnues sur la période (+ 14 %). Cette forte progression doit toutefois être relativisée : si elle a été très forte sur la période 2008-2011 (+ 21 %), elle marque le pas depuis 2012, avec une baisse de 4 % entre 2012 et 2014.

ÉVOLUTION GÉNÉRALE DE LA SINISTRALITÉ DEPUIS 2008

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Accidents du travail

703 976

651 453

658 847

669 914

640 891

618 263

621 111

Dont accidents du travail avec arrêt d’au moins 4 jours

628 857

581 816

590 639

602 576

577 995

559 404

562 648

Accidents de trajet

87 855

93 840

98 429

100 018

90 092

93 363

86 746

Dont accidents de trajet avec arrêt d’au moins 4 jours

76255

80 954

85 058

86 520

78 238

80 936

75 007

Maladies professionnelles

45 411

49 341

50 688

55 057

54 015

51 452

51 631

Dont maladies professionnelles avec arrêt d’au moins 4 jours

43 269

45 472

46 308

50 314

49 288

46 859

47 275

Total AT-MP

837 242

794 634

807 964

824 989

784 998

763 078

759 488

Dont AT-MP avec arrêt d’au moins 4 jours

748 381

708 242

722 005

739 410

705 521

687 199

684 930

Source : Rapport de gestion 2014 de la CNAM AT-MP.

D’après la Direction de la sécurité sociale, les éléments permettant d’expliquer cette baisse générale de la sinistralité sont de différents ordres :

– en premier lieu, les efforts réalisés en matière de prévention des risques en milieu professionnel sont de nature à justifier en partie la baisse significative des accidents du travail sur la période ;

– en deuxième lieu, en matière d’évolution du nombre de maladies professionnelles, la réglementation en termes de reconnaissance des pathologies est également à prendre en compte : à sinistralité inchangée, une modification des critères de reconnaissance entraîne mécaniquement une hausse ou une baisse (selon que l’on élargit ou restreint ces critères) de la sinistralité telle qu’enregistrée dans les statistiques nationales de la CNAMTS ;

– en troisième lieu, l’activité économique et son dynamisme jouent également un rôle prépondérant dans l’évolution de la sinistralité en absolu : un ralentissement de l’activité aura logiquement un impact à la baisse sur la sinistralité, même si cet impact n’est pas pleinement mesurable immédiatement en raison, d’une part, du délai de traitement et de clôture des dossiers et, d’autre part, des règles régissant la production des statistiques en matière de sinistralité (remontée de données en fin de trimestre et consolidation en fin d’exercice) ;

– en dernier lieu, et de manière plus anecdotique, le volume des accidents du trajet est corrélé significativement avec les conditions climatiques (verglas notamment).

Le rapporteur note que le nombre d’enquêtes menées par l’Inspection du travail a baissé en 2014 : 190 enquêtes ont été diligentées au titre des maladies professionnelles (contre 222 en 2013) et 6 291 l’ont été au titre des accidents du travail (contre 7 649 en 2013).

Par ailleurs, 119 462 contrôles ont été mis en œuvre par les agents de l’Inspection du travail en 2014.

Évolution de la fréquence des accidents du travail et des maladies professionnelles

En 2014, l’indice de fréquence des accidents du travail s’est établi à 34 pour mille salariés. Globalement en diminution depuis 2008, il a néanmoins légèrement augmenté en 2014 (+ 0,2 %).

Après une légère hausse en 2013, l’indice des accidents de trajet s’est rétabli à son niveau le plus bas depuis 2008 (4,7 accidents pour mille salariés).

L’indice de fréquence des maladies professionnelles est resté constant par rapport à 2013.

INDICE DE FRÉQUENCE DES ACCIDENTS DU TRAVAIL
ET DES MALADIES PROFESSIONNELLES DEPUIS 2008

(en pourcentage)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Accidents du travail

38,0

36,0

36,0

36,2

35,0

33,8

34,0

Dont accidents du travail ayant entraîné une IP

2,4

2,4

2,3

2,2

2,2

2,1

2,0

Dont accidents du travail avec décès

0,03

0,03

0,03

0,03

0,03

0,03

0,03

Accidents de trajet

4,7

5,1

5,2

5,3

4,8

5,0

4,7

Dont accidents de trajet ayant entraîné une IP

0,4

0,5

0,4

0,5

0,4

0,4

0,4

Dont accidents de trajet avec décès

0,02

0,02

0,02

0,02

0,02

0,02

0,02

Maladies professionnelles

2,5

2,7

2,7

2,9

2,9

2,8

2,8

Dont maladies professionnelles ayant entraîné une IP

1,2

1,3

1,4

1,5

1,6

1,5

1,3

Dont maladies professionnelles avec décès

0,02

0,03

0,03

0,03

0,03

0,02

0,02

Source : Rapport de gestion 2014 de la CNAM AT-MP.

Pour l’ensemble de la période 2008-2014 et sur le champ plus précis des accidents du travail ayant entraîné une incapacité permanente (IP), la baisse progressive de l’indice de fréquence sur la période observée s’est poursuivie en 2014, tandis que l’indice de fréquence des décès liés à des accidents de travail reste constant, à 0,3 pour 1000.

La fréquence des accidents de travail est en partie corrélée avec l’activité économique : les secteurs les plus « accidentogènes » (typiquement le BTP) ont été touchés plus rapidement et plus sévèrement par la contraction de l’activité. Ils ont donc vu leurs effectifs diminuer plus rapidement que dans les activités pour lesquelles la sinistralité est structurellement moins importante (activités de service par exemple).

Évolution de la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles

La part des accidents du travail ayant donné lieu à une incapacité permanente s’établit à 5,9 % en 2014, en nette baisse par rapport aux années précédentes (- 0,4 point).

Celle des accidents de trajet s’établit à 8,4 % en 2014, comme en 2013. Elle a nettement diminué depuis 2008 où elle s’établissait à 9,1 %.

En revanche, la proportion de maladies professionnelles donnant lieu à incapacité permanente est nettement plus élevée : elle s’établit à 50 % en 2014, après des hausses notables en 2012 et 2013 (+ 4 points puis + 3 points).

PART DES SINISTRES AYANT DONNÉ LIEU À UNE INCAPACITÉ PERMANENTE DEPUIS 2008

(en pourcentage)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Accidents du travail

6,3

6,6

6,2

6,1

6,3

6,3

5,9

Accidents de trajet

9,1

9,0

8,2

8,5

9,0

8,4

8,4

Maladies professionnelles

50,9

50,1

49,2

49,3

54,2

53,4

50,0

Source : Rapport de gestion 2014 de la CNAM AT-MP.

Exprimé en nombre de journées perdues pour 1 000 heures travaillées, le taux de gravité des accidents du travail avec arrêt a progressé de 0,2 point en 2014 par rapport à l’année précédente. Entre 2008 et 2014, le nombre de journées perdues pour 1000 heures travaillé est passé de 1,31 à 1,40.

NOMBRE DE JOURNÉES PERDUES POUR CAUSE D’ACCIDENT DU TRAVAIL
POUR 1000 HEURES TRAVAILLÉES DEPUIS 2008

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Nombre de journées perdues

1,31

1,32

1,32

1,39

1,39

1,38

1,40

Source : Rapport de gestion 2014 de la CNAM AT-MP.

Évolution du nombre de décès liés aux maladies professionnelles, aux accidents du travail et aux accidents de trajet

Les décès liés aux différents sinistres ont diminué de 7,7 % entre 2013 et 2014. La baisse la plus notable est observée sur le nombre de décès causés par des maladies professionnelles (368 décès, soit une baisse de 14 %). Les accidents de trajet ayant entraîné un décès ont également beaucoup diminué en 2014 (281 décès, soit une baisse de 8 %) tandis que 530 décès ont été causés par un accident de travail (soit une baisse de 2 %).

NOMBRE DE MALADIES PROFESSIONNELLES, D’ACCIDENTS DU TRAVAIL ET D’ACCIDENTS DE TRAJET AYANT ENTRAÎNÉ UN DÉCÈS SUR LA PÉRIODE 2008-2014

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Maladies professionnelles ayant entraîné un décès

425

564

533

570

523

430

368

Taux d’évolution annuelle

1,2 %

32,7 %

- 5,5 %

6,9 %

- 8,2 %

- 17,8 %

- 14,4 %

Accidents du travail ayant entraîné un décès

569

538

529

552

558

541

530

Taux d’évolution annuelle

- 8,5 %

- 5,4 %

- 1,7 %

4,3 %

1,1 %

- 3 %

- 2 %

Accidents de trajet ayant entraîné un décès

387

356

359

393

323

306

281

Taux d’évolution annuelle

- 4,9 %

- 8 %

0,8 %

9,4 %

- 17,8 %

- 5,3 %

- 8,2 %

Total des sinistres ayant entraîné un décès

1381

1458

1421

1515

1404

1277

1179

   

5,6 %

- 2,5 %

6,6 %

- 7,3 %

- 9 %

- 7,7 %

Source : Rapport de gestion 2014 de la CNAM AT-MP.

Évolution des déclarations dématérialisées d’accidents du travail ou de trajet

Le télé-service « déclaration accident du travail (DAT) » permet de remplir en une seule fois, en ligne, la déclaration d’accident du travail ou de trajet proprement dite et la feuille d’accident qui permet au salarié victime de bénéficier de la gratuité des soins consécutifs à l’accident. En cas d’arrêt de travail du salarié, le déclarant peut saisir également l’attestation de salaires qui permet le versement des indemnités journalières. L’employeur peut apporter tout complément d’information qu’il juge utile et notamment joindre toute pièce utile à sa déclaration en ligne. La traçabilité des échanges est assurée notamment par la délivrance au déclarant d’accusés de dépôt puis d’accusés de réception de la formalité effectuée.

En 2014, le taux de dématérialisation des déclarations d’accidents de travail et de trajet via le portail net-entreprises approche les 60 %, mais marque un léger fléchissement. En effet, la moyenne de progression constatée les années précédentes dépassait les 9 % par an, alors que le différentiel entre 2013 et 2014 reste en deçà de 7 %.

Période

Nombre total de déclarations d’accident du travail ou de trajet

Nombre de déclarations d’accident du travail ou de trajet en ligne

Proportion de déclarations d’accidents du travail ou de trajet en ligne

2008

1 553 392

39 005

2,5 %

2009

1 435 618

214 935

15 %

2010

1 477 177

389 863

26,4 %

2011

1 461 323

499 131

34,2 %

2012

1 392 497

584 848

42 %

2013

1 385 222

729 734

52,70 %

2014

1 366 519

799 414

58,5 %

Le télé-service « compte AT-MP » a été ouvert au sein du groupement d’intérêt public « Modernisation des déclarations sociales » (GIP-MDS) en avril 2011 afin de donner aux entreprises des détails sur les éléments de calcul des taux précédemment notifiés et de leur permettre de suivre au quotidien l’évolution de leur sinistralité. Une entreprise ayant plusieurs établissements peut ainsi suivre tous ses établissements à partir d’un seul et même compte.

Ce service permet également d’avoir un retour en temps réel sur les accidents du travail et les maladies professionnelles reconnus qui auront une incidence sur les taux des prochaines cotisations, de connaître le nombre de jours d’arrêt de travail prescrits et de gérer au mieux la sinistralité.

Ce service propose enfin des éléments d’information sur la nouvelle tarification ainsi que les barèmes des coûts moyens par secteur d’activité.

En somme, le compte AT-MP offre aux employeurs une visibilité plus complète sur leurs risques professionnels, leur permettant ainsi d’agir plus efficacement et rapidement dans le domaine de la prévention.

Depuis son ouverture, en avril 2011, le service connaît une croissance exponentielle (+ 600 % sur les 12 derniers mois). Au 30 avril 2015, la quasi-totalité des établissements qui comptent plus de 150 salariés – et qui font donc l’objet d’une tarification individuelle – ont ouvert un compte AT-MP (5).

Mode de tarification

Nombre de SIRET

Adhérent compte AT-MP

Taux d’adhésion

Collective

2 001 864

369 463

18 %

Mixte

120 271

92 655

77 %

Individuelle

110 283

107 708

98 %

Total général

2 232 418

569 826

26 %

Modifications des tableaux de maladies professionnelles intervenues en 2014

Un décret n° 2014-605 du 6 juin 2014 a modifié le tableau de maladies professionnelles n° 40 annexé au code de la sécurité sociale, qui est relatif aux maladies dues aux bacilles tuberculeux et à certaines mycobactéries atypiques. Ce décret a révisé et complété le paragraphe B de ce tableau, pour ce qui concerne la désignation des maladies et les examens médicaux complémentaires à réaliser pour confirmer le diagnostic.

L’année 2014 a par ailleurs été marquée par la poursuite des travaux de révision :

– du tableau n° 57 relatif aux affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail ;

– des tableaux relatifs aux monomères de matières plastiques.

L’année 2015 devrait voir la publication d’un certain nombre de tableaux modificatifs, à commencer par le tableau n° 76 dont le projet de modification de l’intitulé (« maladies liées à des agents infectieux ou parasitaires contractées en milieu d’hospitalisation, d’hospitalisation à domicile, ou en EHPAD ») a été soumis pour avis en juin 2015 à la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CAT/MP) de la CNAMTS.

Par ailleurs, la commission des pathologies professionnelles du Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT) poursuit ses travaux sur :

– la révision du tableau n° 57 ;

– la révision du tableau n° 52 relatif aux affections provoquées par le chlorure de vinyle monomère ;

– la maladie de Parkinson provoquée par les pesticides ;

– les effets sur la santé du travail de nuit ;

– l’examen des niveaux d’exposition et des statistiques concernant les maladies professionnelles reconnues pour certaines professions non mentionnées dans le tableau n° 97 (« affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier »).

Évolution du nombre de reconnaissances de maladies professionnelles hors tableaux

Si l’origine d’une maladie peut être caractérisée comme par la voie d’une présomption, lorsque la maladie en question est « désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau » (article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale), la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d’ordre social a instauré une procédure de reconnaissance des maladies professionnelles fondée sur une expertise individuelle.

Cette procédure intervient dans deux cas :

– lorsqu’une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue comme maladie professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime (article L. 461-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale) ;

– lorsqu’il est établi qu’une maladie, non désignée dans un tableau, est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente (article L. 461-1, alinéa 4 du code de la sécurité sociale) – dès lors que cette incapacité permanente est d’un taux au moins égal à 25 % (article R. 461-8 du même code).

Dans ces deux situations, la demande est soumise par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) concernée à un comité de reconnaissance des maladies professionnelles composé de trois médecins : le médecin-conseil régional ou son représentant, le médecin inspecteur régional du travail (MIRT) ou son représentant et un professeur des universités praticien hospitalier, particulièrement qualifié en matière de pathologies professionnelles.

L’avis du comité s’impose à la CPAM et cette dernière doit notifier sans délai à la victime ou à ses ayants droit la décision de reconnaissance ou de rejet de l’origine professionnelle de la maladie qui en résulte.

En 2014, 18 214 demandes ont été examinées, soit une diminution de 3,2 % par rapport à l’année précédente. C’est la première année où l’on assiste à une baisse du nombre de demandes, après une hausse continue de celles-ci depuis la création du dispositif.

16 251 avis ont été donnés au titre de l’alinéa 3 de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, ce qui correspond à 90 % des demandes. Le nombre d’avis rendus a baissé de 4,7 % en 2014, ce qui explique la diminution du nombre d’avis observée lors de cette année.

En revanche, le nombre d’avis rendus au titre de l’alinéa 4 de l’article L. 461-1 du même code continue à progresser, atteignant 1 963 en 2014 contre 1 793 l’année précédente, soit une augmentation d’environ 8,6 %. L’augmentation du nombre de cas reconnus, de l’ordre de 9,5 %, connaît toutefois une inflexion en 2014 par rapport aux années précédentes.

En 2014, l’activité contentieuse a connu une légère augmentation avec 173 891 procédures traitées (en ce compris toutes les procédures clôturées et pendantes en contentieux général et technique (6)), contre 168 920 en 2013.

Évolution du contentieux général en 2014

L’année 2014 a été marquée par une diminution du nombre de recours formés par les employeurs, qui est passé de 28 923 en 2013 à 23 381 en 2014.

S’agissant des recours formés par les assurés, cette diminution est moins sensible : le nombre de contentieux est passé de 29 022 en 2013 à 28 420 en 2014. En conséquence, la part de recours engagés par les assurés est passée de 50 % en 2013 à 55 % en 2014.

Le contentieux général s’est concentré sur les commissions de recours amiable (CRA) : sur les 51 801 contentieux engagés en 2014, 21 898 se sont dénoués au niveau des CRA et n’ont donc pas fait l’objet d’un recours juridictionnel.

Les dossiers clos en 2014 l’ont été à 70 % après une décision de la CRA. Le contentieux général reste donc très majoritairement centré sur le précontentieux, malgré un déclin ces dernières années. En effet, en 2013, 75 % des décisions définitives étaient issues des CRA. Au 31 décembre 2014, 24 016 recours étaient en attente d’une décision de CRA.

On assiste enfin à une augmentation constante du taux de confirmation des décisions des caisses en contentieux général depuis 2010. Le taux moyen de confirmation est passé de 85 % en 2013 (au niveau des CRA : 86 % de confirmation des décisions dans les recours assurés et 87 % dans les recours employeurs) à 87 % en moyenne en 2014 (au niveau des CRA : 90 % dans les recours assurés et 91 % dans les recours employeurs).

Les motifs de contentieux ont quant à eux évolué : le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 relatif à la procédure d’instruction des déclarations d’accidents du travail et maladies professionnelles a notamment eu pour effet de provoquer un changement des motifs de recours de la part des employeurs. Désormais, les contestations relatives au non-respect du contradictoire sont en déclin, tandis que les contentieux fondés sur un motif d’ordre médical (relatif à la justification des durées d’arrêt de travail, à l’imputabilité des lésions à l’accident du travail ou à la maladie professionnelle, ainsi qu’à la date de consolidation) augmentent jusqu’à représenter, en 2014, 34 % du contentieux général engagé par les employeurs.

L’impact financier des recours introduits par les employeurs pour faire reconnaître l’inopposabilité à leur égard des dépenses supportées par la branche du fait de l’accident ou de la maladie en cause s’est élevé à 393 millions d’euros en 2014, en net recul par rapport à 2013 où cet impact représentait 505 millions d’euros.

Il est en outre observé, depuis 2011, une baisse significative de la part des remboursements des cotisations dans l’impact financier du contentieux : 69 % en 2011, 62 % en 2012, 46 % en 2013 et 33 % en 2014. Cette tendance est notamment le résultat de la réforme de tarification conjuguée à celle de l’instruction des déclarations d’accidents du travail.

En effet, le décret du 29 juillet 2009 précité a encadré les recours dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’accord ou du refus de prise en charge d’un accident, d’une maladie ou d’une rechute, ou en cas de notification d’une décision attribuant un taux d’incapacité permanente partielle. En conséquence, tout recours formé par l’employeur au-delà du délai de deux mois suivant la notification est forclos et la décision de la caisse devient définitive à son égard. Ainsi, le contentieux naît et se résout généralement avant que le sinistre ait produit son effet sur le taux de cotisation de l’entreprise (soit 2, 3 voire 4 ans après la date du sinistre).

Évolution du contentieux technique en 2014

On a constaté en 2014 une augmentation du nombre de recours engagés : 20 389 (contre 20 005 en 2013).

Le contentieux technique reste majoritairement un contentieux engagé par les assurés (dans 68 % des cas en 2013 et 70 % en 2014).

Ce contentieux est concentré sur les tribunaux de l’incapacité (TCI) : les dossiers clos en 2014 l’ont été à 81 % par une décision d’un TCI et à 9 % par la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail (CNITAAT) – cette répartition étant stable depuis 2013. Au 31 décembre 2014, 23 131 affaires étaient pendantes devant un TCI et 7 198 devant la CNITAAT.

Les taux de confirmation restent peu élevés : le taux de confirmation des décisions des caisses primaires d’assurance maladie est de 48 % devant les TCI et de 55 % devant la CNITAAT (contre respectivement 46 % et 59 % en 2013). Il est particulièrement peu élevé s’agissant des contentieux techniques engagés par les employeurs : 39 % devant les TCI et 43 % devant la CNITAAT.

Évolution du contentieux relatif aux victimes de l’amiante

Les contentieux relatifs aux victimes de l’amiante devant les tribunaux des affaires de sécurité sociales (TASS) ont trait à l’indemnisation des victimes. Ils portent notamment sur :

– l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) : calcul, montant, date d’effet, salaire de référence (etc.) ;

– la reconnaissance d’une maladie professionnelle au titre des tableaux de maladies professionnelles 30 et 30 bis (affections dues à l’inhalation de poussières d’amiante) annexés au code de la sécurité sociale ;

– la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur en cas de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat envers le salarié.

Les victimes de l’amiante peuvent saisir les juridictions judiciaires de leur action contre le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) si leur demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne leur a été présentée dans les six mois suivant la réception de leur demande ou si elles n’ont pas accepté l’offre qui leur a été faite. Cette action est intentée devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le domicile du demandeur.

La tendance à la baisse du nombre de contentieux indemnitaires constatée depuis plusieurs années se confirme en 2014 : 772 recours ont été engagés, contre 882 en 2013, 1128 en 2012 et 1200 en 2011. Cette tendance à la baisse s’explique notamment par le meilleur respect par le FIVA des délais légaux et réglementaires de présentation des offres.

Par ailleurs, une partie de l’activité contentieuse du FIVA est aussi constituée par le recours subrogatoire exercé contre la personne responsable du dommage : en 2014, le FIVA a engagé 835 recours subrogatoires, dont 680 au titre de la faute inexcusable de l’employeur.

Les contentieux relatifs aux victimes de l’amiante devant les juridictions administratives ont principalement pour objet les demandes d’inscription sur la liste des établissements, fixée par arrêté interministériel, ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA).

Ce contentieux s’est développé à partir de 2005 à l’occasion de refus d’inscription de certains établissements, mais il diminue depuis 2007 (20 affaires pendantes en 2014). L’essentiel des contentieux porte désormais sur la preuve du caractère significatif de l’activité impliquant l’utilisation de l’amiante – critère nécessaire à l’inscription de l’établissement pour les établissements qui avaient une activité de flocage, calorifugeage ou fabrication de matériaux contenant de l’amiante.

Les contentieux relatifs aux victimes de l’amiante devant les juridictions pénales portent sur la responsabilité pénale de l’employeur.

La plupart des affaires portant sur des expositions à l’amiante antérieures à l’interdiction de l’amiante par décret à compter du 1er janvier 1997 sont encore en cours d’instruction ou ont été conclues par des non-lieux, en raison de difficultés diverses : difficultés liées la recherche de preuves par les victimes afin de prouver la faute de l’employeur ; extinction de l’action publique en cas de décès de la personne mise en cause ; prescription de l’action publique pour des expositions anciennes ; difficulté de retrouver les responsables lorsque les entreprises exposantes ont disparu.

Depuis cette interdiction de l’amiante en 1997, quelques condamnations d’employeurs ont été prononcées, notamment dans le cas des travailleurs chargés d’opérations de désamiantage pour mise en danger de la vie d’autrui en raison d’un manquement par l’employeur à l’obligation de sécurité et de prudence prévue par la réglementation de 1996 relative à la protection des travailleurs exposés à l’amiante.

Les affaires pénales relatives aux victimes de l’amiante sont centralisées et traitées par les pôles de santé publique des tribunaux de grande instance de Paris et de Marseille. Selon les informations transmises en septembre 2015 par la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice, le pôle de Paris traite actuellement 29 dossiers en lien avec l’amiante et le pôle de Marseille 4 dossiers.

L’année 2015 aura été marquée par la jurisprudence de la Cour de cassation précisant les conditions de la reconnaissance d’un préjudice d’anxiété au profit des travailleurs exposés à l’amiante.

Selon la Cour de Cassation, le salarié qui a travaillé dans l’un des établissements susceptibles d’ouvrir droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA), pendant une période où y étaient fabriqués ou traités de l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante, se trouve, par le fait de l’employeur, dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante, qu’il se soumette ou non à des contrôles et examens médicaux réguliers. Il subit à ce titre un préjudice spécifique d’anxiété. L’indemnisation accordée au titre de ce préjudice répare l’ensemble des troubles psychologiques, y compris ceux liés au bouleversement dans les conditions d’existence résultant du risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante.

Par un arrêt du 3 mars 2015, la Cour de cassation, statuant en sa chambre sociale, a précisé que « la réparation du préjudice d’anxiété n’est admise, pour les salariés exposés à l’amiante, qu’au profit de ceux remplissant les conditions prévues par l’article 41 de la loi [n° 98-1194] du 23 décembre 1998 [de financement de la sécurité sociale pour 1999] et l’arrêté ministériel » du 7 juillet 2000 fixant notamment la liste des métiers de la construction et de la réparation navales susceptibles d’ouvrir droit à l’ACAATA (7). Cette réparation est donc exclue pour les salariés qui n’ont pas travaillé dans les conditions prévues par cet arrêté.

Les actions menées pour réduire le contentieux dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion « AT-MP » 2014-2017

Compte tenu de l’enjeu que revêt le risque contentieux pour le fonctionnement de la branche AT-MP, en raison, notamment, de ses conséquences sur le financement de la branche et sur sa capacité à prévenir les sinistres, la réduction de ce risque, notamment grâce à la sécurisation des processus de gestion, constitue l’une des actions de la convention d’objectifs et de gestion « AT-MP » 2014-2017.

La réduction du risque contentieux passe par l’élaboration d’une stratégie nationale contentieuse dont la mise en œuvre a été partiellement réalisée en 2014, à travers :

– la diffusion d’un référentiel de gestion des précontentieux et contentieux concernant les accidents du travail ;

– l’intégration de la jurisprudence dans une base de données mise à la disposition des caisses primaires d’assurance-maladie ;

– la généralisation, à partir de la fin de l’année 2015, de la gestion médico-juridique du contentieux technique visant à optimiser le traitement de ces contentieux par différents niveaux de gestion (colloque médico-juridique, production de notes techniques, présence d’un praticien conseil à l’audience) sur des dossiers ciblés, au regard notamment de leurs enjeux financiers ;

– le lancement d’une procédure d’acquisition d’un logiciel national de gestion des contentieux visant à équiper le réseau juridique de l’assurance maladie, afin d’harmoniser la gestion des dossiers et d’optimiser le pilotage national.

Par ailleurs, des amendements au projet de loi de modernisation de notre système de santé, actuellement en cours d’examen, ont été adoptés en première lecture à l’Assemblée nationale pour :

– permettre la transmission des pièces médicales au médecin-expert devant les juridictions du contentieux général à l’instar de la disposition existant pour le contentieux technique depuis 2009 ;

– renforcer le pilotage national en matière de pourvoi en cassation.

Enfin, la mise en place d’un dispositif national d’entraide ponctuelle déployé par des caisses du réseau au profit de tous les organismes sur le processus pré-contentieux (PHARE : Programme Harmonisé d’Aide au Réseau) est prévue pour la fin de l’année 2015.

Le 27 janvier 2015, lors du comité permanent du conseil d’orientation des conditions de travail (COCT), le ministre chargé du travail a validé les sept orientations pour le troisième plan « Santé au travail » (« PST 3 ») qui avaient été proposées par les partenaires sociaux :

– faire de la prévention une priorité, en rupture avec une approche faisant prévaloir la réparation ;

– développer l’accompagnement des travailleurs et des entreprises dans la prévention de la désinsertion professionnelle ;

– faire de la qualité de vie au travail un objet stratégique et en favoriser la mise en œuvre ;

– simplifier les normes, les rendre plus intelligibles et plus accessibles aux employeurs ainsi qu’aux salariés et à leurs représentants, pour une plus grande efficience des règles de prévention ;

– prioriser certains risques : renouveler la démarche préventive, en priorisant quelques risques récurrents (chutes de hauteur et de plain-pied, exposition aux substances classées cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, et risques psychosociaux), émergents (nanotechnologies) et multifactoriels (pratiques addictives au travail et maladies cardio-vasculaires au travail) ;

– rassembler et mettre en perspective les données de santé au travail ;

– assurer une gouvernance partagée et opérationnelle de la santé au travail.

Ces grandes orientations ont été adoptées par consensus entre les cinq confédérations syndicales et les cinq organisations patronales représentées au groupe permanent d’orientation du COCT.

L’objectif du PST 3 est l’appropriation par tous les acteurs d’une culture de la prévention fondée avant tout sur l’action concrète à partir de situations de travail réelles. Les partenaires sociaux ont entendu adopter une approche positive qui s’incarne par exemple dans la démarche qualité de vie au travail ou le maintien en emploi et qui doit motiver les acteurs à investir dans la prévention en leur montrant les gains de performance et en matière de santé qui en résultent.

Au cours du premier semestre 2015, la direction générale du travail (DGT) a piloté le processus d’écriture du « PST 3 » sur la base des orientations des partenaires sociaux, avec le souci, semble-t-il, d’une cohérence accrue avec les autres outils de programmation contractuels (convention d’objectifs et de gestion (COG) 2014-2017 de la branche AT-MP ; contrat d’objectifs et de performance (COP) de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail – ANACT – pour 2014-2017 ; Plan national santé environnement pour 2015-2019 (PNSE 3) ; Plan cancer 3 pour 2014-2019, etc.).

En février 2015, la DGT a mis en place un comité de pilotage (COPIL) auquel ont été invités à prendre part les principaux partenaires ministériels (ministères de la santé, de l’agriculture, direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques - DARES) ainsi que les organismes de prévention en santé sécurité au travail : CNAMTS, Institut national de recherche et de sécurité (INRS), Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT), Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), Institut de veille sanitaire (InVS), Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) et Mutualité sociale agricole (MSA).

Sous l’égide du COPIL, dix groupes de travail ont été constitués, dont les thèmes de travail faisaient directement écho aux orientations stratégiques dégagées par le groupe permanent d’orientation. La composition de ces groupes a été volontairement conçues pour être large : 6 départements ministériels, 13 organismes de sécurité sociale ou de prévention, 3 branches professionnelles ainsi que de nombreux représentants des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) et des médecins du travail, afin de préparer la déclinaison territoriale du PST. Cette composition des groupes de travail a permis l’approfondissement des thématiques et l’élaboration de propositions d’actions concrètes. Les aspects méthodologiques (modalités de déclinaison territoriale, d’animation, de suivi et d’évaluation) ont également été traités dans le cadre de ces groupes qui se sont réunis entre mars et mai 2015.

Le produit de ce travail a déjà fait l’objet d’une première validation par le COPIL et le groupe permanent d’orientation du COCT au début de l’été 2015. La présentation, en juillet 2015, du premier projet de « PST 3 » élaboré par la DGT a été favorablement perçue par le groupe permanent d’orientation du COCT.

Le projet de « PST 3 » a été présenté aux partenaires sociaux le 25 septembre dernier, et il devrait être adopté par le comité permanent du COCT au mois d’octobre.

C’est l’occasion pour le rapporteur de dresser un bilan du « PST 2 » (2010-2014).

Le « PST 2 » avait défini les priorités de l’action gouvernementale autour de quatre grands axes, déclinés en 14 objectifs et 36 actions.

Le premier axe (« Améliorer la connaissance en santé au travail ») visait à développer la recherche et l’expertise en santé au travail. Il s’agissait de mieux structurer ce champ et celui de la formation et d’assurer une diffusion opérationnelle des résultats de la recherche et de l’expertise aux entreprises et aux salariés. Cet axe approfondissait des orientations déjà développées par le premier PST.

Le deuxième axe (« Poursuivre une politique active de prévention des risques professionnels ») traduisait la volonté de mettre en œuvre une politique de prévention des risques plus ciblée, notamment en ce qui concerne :

– les risques prioritaires (le risque chimique, les risques psychosociaux, les troubles musculo-squelettiques ou encore les risques émergents liés aux nanotechnologies) ;

– des secteurs prioritaires, particulièrement accidentogènes, comme le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) ou le secteur agricole et forestier ;

– des publics particuliers, fragiles ou soumis à des conditions de travail spécifiques (nouveaux embauchés, seniors, saisonniers, notamment).

Le troisième axe (« Encourager les démarches de prévention des risques dans les entreprises, notamment les PME et les TPE ») entendait renforcer l’accompagnement des entreprises dans leurs actions de prévention afin de compléter les actions du premier PST.

Le quatrième axe (« Pilotage du plan, communication, développement et diversification des outils pour une effectivité du droit ») avait pour objectif de renforcer la coordination et la mobilisation des différents partenaires aux niveaux national et régional.

Depuis le lancement officiel du PST en juillet 2010, sa mise en œuvre a été progressive :

– certaines actions ont fait l’objet d’une attention particulière dès le départ, comme celles relevant du premier axe pour améliorer la structuration du champ de la recherche et de l’expertise en santé au travail, ou celle relative à la réforme de la médecine du travail qui s’est concrétisée dans l’adoption de la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l’organisation de la médecine du travail ;

– d’autres n’ont abouti que plus tardivement, en 2013 ou en 2014, avec, entre autres, la mise en œuvre, en 2013, des dispositions du décret n° 2012-232 du 17 février 2012 relatif à la déclaration annuelle des substances à l’état nanoparticulaire mises sur le marché et le lancement, en 2014, de la campagne « Chutes de hauteur » concernant particulièrement le secteur du BTP.

Quelques exemples d’actions majeures

Le PST 2 a indéniablement contribué à favoriser une baisse globale de la sinistralité sur la période 2010-2014, qu’il s’agisse des accidents du travail ou des maladies professionnelles.

S’agissant du premier axe du « PST 2 », sa mise en œuvre a permis des progrès importants dans la structuration de la recherche et de l’expertise en santé au travail. Ainsi, la fusion en 2010 de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset), qui a donné naissance à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), a permis aux pouvoirs publics, et en particulier à la DGT, de bénéficier de l’appui d’un opérateur en mesure de réaliser l’évaluation des risques sanitaires afin d’éclairer l’action publique et de fournir aux autorités l’information nécessaire à la prise de décision concernant les risques professionnels.

De même, c’est dans le cadre du « PST 2 » que l’InVS a pu programmer et mener des études de cohortes sur les pathologies professionnelles, en bénéficiant à cette fin d’une meilleure mobilisation du réseau des acteurs locaux.

S’agissant du deuxième axe du « PST 2 », sa mise en œuvre a permis des avancées réelles dans la prévention de certains risques professionnels. C’est notamment dans le cadre de l’action « risque chimique » que la réglementation concernant l’amiante ainsi que les contrôles en la matière ont été renforcés. Ainsi, les années 2012 et 2013 ont été marquées par le renforcement de la protection des travailleurs contre l’exposition aux fibres d’amiante.

En 2012, le dispositif de formation des travailleurs a été optimisé par l’arrêté du 23 février 2012 définissant les modalités de la formation des travailleurs à la prévention des risques liés à l’amiante ainsi que par le décret n° 2012-639 du 4 mai 2012 relatif aux risques d’exposition à l’amiante. Ce décret a mis en œuvre les recommandations de l’Anses et de l’INRS en abaissant la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP), de 100 fibres par litre, à 10 fibres par litre, au 1er juillet 2015 notamment.

S’agissant des risques émergents, un système permettant une connaissance et une traçabilité des nanomatériaux a été instauré en 2013 en application des articles L. 523-1 et L. 523-2 du code de l’environnement issus des lois « Grenelle I et II » (8) : les substances à l’état nanoparticulaire font dorénavant l’objet d’une déclaration annuelle par les fabricants, importateurs et distributeurs.

Par ailleurs, des campagnes de contrôle ont été menées par l’Inspection du travail sur les risques prioritaires identifiés par le « PST 2 », notamment l’amiante, le risque routier professionnel ou les garages. Des conventions d’objectifs ont été conclues entre la DGT, la CNAMTS, l’INRS et les principales organisations professionnelles concernées, par exemple pour la prévention des risques chimiques dans le secteur de la réparation de véhicules (convention « garages » signée en 2012) ou encore de la convention « poussières de bois » signée le 27 mars 2012.

Enfin, des actions en faveur de la prévention des risques psychosociaux ont été engagées. En 2012, l’Anact et le réseau des associations régionales (Aract), forts de leurs nombreuses actions de sensibilisation, formation ou accompagnement d’entreprises à la prévention des risques psychosociaux, ont notamment pu expérimenter un modèle d’intervention (C2R : Contraintes Régulations Ressources). En 2012 et 2013, l’Anact et l’INRS ont élaboré deux outils (« RPS-DU » et « Faire le point ») pour aider les entreprises à évaluer les risques psychosociaux, à les intégrer dans le document unique d’évaluation des risques et à définir un plan d’actions de prévention. Enfin, le nombre d’accords sur les risques psychosociaux conclus et déclarés par les entreprises de plus de 1 000 salariés a augmenté entre 2010 et 2014, pour atteindre 596 accords signés à la fin de l’année 2013, contre 342 à la fin de l’année 2010, ce qui représente une augmentation de 74 % sur la période.

S’agissant du troisième axe du « PST 2 », les actions se sont concentrées autour de la réforme de la médecine du travail mise en œuvre en 2012 et en 2013.

S’agissant du quatrième axe du « PST 2 », si certains dispositifs de suivi et certains indicateurs se sont révélés perfectibles, force est de constater qu’une réelle dynamique nationale et territoriale, partagée par l’ensemble des acteurs, a émergé en faveur de l’amélioration de la santé au travail et de la prévention des risques professionnels. Les régions se sont toutes dotées d’un plan régional « santé au travail » (PRST) et des partenariats locaux ont été noués.

Le bilan, réalisé au premier semestre 2015 par la DGT, sur la mise en œuvre des PRST, a conduit à constater  que :

– lesdits PRST ont tous décliné les actions obligatoires et, au-delà, les grands axes du PST – certaines actions obligatoires ayant été fortement investies, par exemple la prévention de l’exposition au risque chimique et aux substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), l’aide à l’évaluation des risques, la prévention des risques psychosociaux et celle des troubles musculo-squelettiques (TMS) ;

– dans la mesure du possible, la mise en œuvre d’actions partenariales a été recherchée par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), avec des succès notables s’agissant des partenariats avec les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), les associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail et l’organisme de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), et des succès plus variables s’agissant des partenariats avec les agences régionales de santé (ARS) et les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) ;

– la participation des services de santé au travail aux actions du PRST a été satisfaisante, notamment grâce à la mobilisation du levier des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), signés entre la DIRECCTE, la CARSAT et les services de santé au travail interentreprises de la région ;

– la mobilisation de certains acteurs (CHSCT, acteurs de la formation, partenaires sociaux, réseaux consulaires, branches professionnelles) a été diverse selon les régions ;

– l’implication des comités régionaux de prévention des risques professionnels (CRPRP) est encore variable selon les régions, allant d’un rôle d’impulsion et d’animation à un simple suivi ;

– si les DIRECCTE ont dans la plupart des cas mis en œuvre des dispositifs de suivi ou produit des bilans des actions menées dans le cadre des PRST, l’évaluation du résultat de ces actions n’a pu être réalisée que dans de très rares cas.

La branche AT-MP a été associée à la quasi-totalité des 14 objectifs du PST 2, grâce aux actions de la caisse nationale et de son réseau : caisses régionales, INRS et Eurogip (9).

En 2014, le budget de la branche AT-MP consacré aux actions de prévention s’est élevé à 341 millions d’euros au titre du fonds national de prévention des accidents du travail, dont 195 millions d’euros pour les caisses et 83,5 millions d’euros pour l’INRS.

L’année 2014 a été la première année d’exécution de la convention d’objectifs et de gestion (COG) de la branche AT-MP pour 2014-2017. La CNAMTS a lancé des actions dans le cadre des quatre axes stratégiques fixés dans la COG :

– assurer une prévention des risques fondée sur le ciblage et l’évaluation ;

– gagner en efficience par une meilleure harmonisation des pratiques et des moyens du réseau ;

– renforcer la cohérence de la branche en tant qu’assureur solidaire des risques professionnels en développant les relations contractuelles ;

– maîtriser les risques et poursuivre l’adaptation de la tarification des risques.

Ces axes sont eux-mêmes déclinés en 13 programmes d’action assortis d’indicateurs et d’échéances.

Les premiers pas de la COG 2014-2017

Dans le domaine de la prévention des risques professionnels, l’action de la branche AT-MP a été consacrée au lancement des programmes nationaux prioritaires :

– prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) : le programme « TMS Pros », qui vise à rendre les entreprises plus autonomes dans leur démarche de prévention des TMS, a été lancé au cours de l’année 2014. Un panel de 8 000 établissements ayant une sinistralité forte dans ce domaine a été identifié. Ces établissements peuvent adhérer à ce programme de manière volontaire, en bénéficiant d’une offre de services facilitant le diagnostic des situations à risque afin de mettre en place un plan d’action. À l’heure actuelle, 67 % du panel sélectionné a adhéré à l’offre « TMS Pros », soit 5 326 établissements ;

– prévention des chutes dans le secteur du BTP : une convention a été conclue avec l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) afin de permettre une collaboration efficace dédiée à la prévention pour les entreprises ciblées. À la suite de cet accord, toutes les caisses régionales ont signé en fin d’année 2014 une convention locale de partenariat avec les agences de l’OPPBTP pour déployer ces actions ;

– suppression ou réduction des expositions à des agents cancérogènes identifiés : les 4 programmes identifiés par la COG (perchloroéthylène dans les pressings, émissions de moteur diesel dans les centres de contrôle technique de véhicules, styrène dans la plasturgie et le nautisme, fumées de soudage en chaudronnerie) ont été lancés dans toutes les caisses, l’objectif final étant une maîtrise de ces risques par au moins la moitié des entreprises.

Concernant les problématiques particulièrement identifiées (réduire la sinistralité des seniors, santé et sécurité au travail des jeunes et des nouveaux embauchés, nouveaux modes d’action dans les très petites entreprises, prévention des expositions à l’amiante et prévention contre les risques psychosociaux), l’année 2014 a vu la mise en place de partenariats et d’expérimentations ainsi que l’élaboration d’outils afin de développer des actions dans le cadre pluriannuel de la COG :

– partenariat dans cinq régions avec le réseau ANACT/ARACT afin de mener des actions de prévention en direction des seniors afin de leur permettre de partir à la retraite dans un meilleur état de santé ;

– définition par les caisses régionales des programmes d’action « Synergie » et du tutorat pour les jeunes et nouveaux embauchés ;

– déploiement dans les régions de sensibilisations « très petites entreprises » concernant 4 secteurs : garages, maçonnerie, transport routier de marchandises et restauration traditionnelle ;

– élaboration de guides et sensibilisation des entreprises sur les problématiques de l’amiante ;

– pour les risques psychosociaux, structuration de l’offre de prévention en direction des entreprises et mise en place de nouvelles formations à l’INRS.

Ces priorités nationales ont été déclinées au niveau régional en tenant compte des spécificités des différents tissus économiques ainsi que des orientations fixées par les commissions régionales des accidents du travail et des maladies professionnelles (CRATMP) et les comités techniques régionaux (CTR), par la fixation de plans d’actions régionaux dans la totalité des régions.

Une expérimentation sur l’accompagnement des victimes d’accidents du travail graves ou complexes a été lancée à la fin de l’année 2014. Cette expérimentation, qui pourrait concerner 400 personnes sur la base du volontariat, s’est traduite par une offre de service dans 5 caisses (Lille-Douai, Artois, Melun, Versailles, Nice) et la désignation au sein de ces caisses d’un conseiller risques professionnels (CRP) chargé d’assurer la coordination entre les différents acteurs concernés par l’accompagnement de la personne (Pôle Emploi, médecin-conseil, médecin traitant, unité hospitalière, services prévention et social des CARSAT). Un marché a été lancé pour évaluer l’impact médico-économique du dispositif.

La CNAMTS a également développé ses actions en faveur de la prévention de la désinsertion professionnelle, qui passe par le maintien en emploi à travers la prévention ou la limitation du risque de désinsertion professionnelle des assurés qui ne peuvent pas reprendre leurs postes de travail sans une phase d’accompagnement ou qui se voient contraints d’envisager un reclassement professionnel du fait d’une inaptitude. Un document type de règlement intérieur définissant le fonctionnement des cellules de prévention de la désinsertion professionnelle a été réalisé.

La branche AT-MP s’est aussi attachée à mieux harmoniser les pratiques et les moyens du réseau en proposant une méthode d’équilibrage des effectifs de prévention. L’année 2014 a ainsi vu la mise en place d’une coordination médico-administrative dans les régions pour la gestion des dossiers relevant du contentieux technique. Dans chaque région, des binômes médico-juridiques ont ainsi été constitués. Un suivi trimestriel des actions menées a été mis en place.

La CNAMTS a par ailleurs engagé des actions visant à améliorer le pilotage de son réseau :

– tous les contrats pluriannuels de gestion (CPG) liant la CNAMTS et les caisses régionales ont été signés au 1er septembre 2014 ;

– une convention bilatérale définissant le cadre général des relations entre la CNAMTS et l’INRS pour la durée de la COG a été signée le 22 décembre 2014.

Afin de renforcer le développement des coopérations entre caisses régionales, DIRECCTE et services de santé au travail (SiST), la signature de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) s’est poursuivie. Ainsi, au 31 décembre 2014, 65 CPOM ont ainsi été signés, liant 40 % des 160 SiST.

La CNAMTS a enfin poursuivi son travail sur les règles de tarification, afin de les rendre moins complexes et plus incitatives à la prévention. 2014 a marqué une étape importante dans cette démarche de simplification : le nombre de « catégories de risque » a été réduit de 610 à 404.

Les conventions nationales d’objectifs

Les conventions nationales d’objectifs constituent l’un des outils de la politique de prévention de la CNAMTS. Il s’agit d’accords qu’elle signe pour quatre ans avec une ou plusieurs organisations professionnelles et qui fixent un programme, spécifique à leur branche d’activité, d’actions de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles et d’amélioration des conditions de travail.

Leur but est d’inciter les entreprises des secteurs professionnels à risques élevés à développer leurs investissements de prévention dans les domaines d’application de la convention et d’obtenir des réalisations susceptibles de servir d’exemple aux autres entreprises du même secteur confrontées aux mêmes difficultés. Ainsi, pour les entreprises où des accidents du travail ou des maladies professionnelles ne seraient pas encore survenus, cela permet d’éviter un accroissement des dépenses, et pour celles qui ont connu des sinistres, à plus ou moins brève échéance, cela permet d’obtenir une régression réelle du nombre d’accidents ou de maladies professionnelles, ce qui favorise une diminution du taux de cotisations d’accidents du travail de la profession.

Chaque fois qu’une convention arrive à expiration, elle est dans un premier temps évaluée par les comités techniques nationaux (CTN) aussi bien sur le plan quantitatif (nombre de contrats signés, numéro de risque concerné) que qualitatif (réalisations les plus retenues et apport de celles-ci pour la prévention). Il peut être ensuite procédé à une étude d’opportunité pour la préparation d’une nouvelle convention d’objectifs.

En 2014, quatorze conventions nationales d’objectifs sont arrivées à échéance et six nouvelles conventions ont été signées avec les branches professionnelles. Pour l’année 2015, quatre conventions ont déjà été signées et treize nouvelles conventions sont prévues d’ici la fin de l’année. Ces conventions mettent en avant les priorités de la COG 2014-2017. Cinq conventions devraient donner lieu à un renouvellement en 2016.

Les contrats de prévention et les aides financières simplifiées (AFS)

Le ciblage de la prévention s’est également traduit par un redéploiement des incitations financières vers les secteurs prioritaires.

En effet, les entreprises dont l’effectif global est inférieur à 200 salariés et qui veulent souscrire au programme d’actions de prévention spécifique à leur branche d’activité peuvent signer avec les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) ou les caisses générales de sécurité sociale (CGSS, dans les départements d’outre-mer) des contrats de prévention qui transposent et mettent en œuvre au niveau local les objectifs généraux fixés à la branche dans la convention. Elles ont ainsi la possibilité de bénéficier d’une aide financière pour réaliser des projets visant à améliorer les conditions de santé et sécurité au travail.

Le contrat de prévention définit précisément les objectifs sur lesquels l’entreprise s’engage et les aides, en particulier financières, que la caisse apporte (de 20 % à 30 % de l’investissement réalisé).

En 2014, 502 contrats de prévention ont été signés pour un montant de 14,8 millions d’euros, alors qu’en 2013, 547 contrats de prévention avaient été signés pour un montant de 16,1 millions d’euros et qu’en 2012, 739 contrats avaient été signés pour un montant supérieur à 20 millions d’euros.

Ces contrats ont été signés majoritairement dans les activités couvertes par le Comité technique national (CTN) A (métallurgie), qui concentre 41 % des engagements, le CTN F (bois, ameublement, papier, carton, textiles, vêtement, cuirs et peaux et pierres et terres à feu) et le CTN D (services, commerces et industries de l’alimentation) – ces deux derniers représentant chacun 13 % des engagements. Il est à noter que le nombre de contrats de prévention du CTN B (industries du bâtiment et des travaux publics) est en très forte baisse en 2014, en raison de l’entrée en vigueur de deux nouvelles conventions de ce secteur à la fin du premier semestre 2014 et d’un niveau d’activité plus faible pour les petites et moyennes entreprises de ce secteur éligibles aux aides.

Les aides financières simplifiées sont quant à elles destinées aux entreprises de moins de 50 salariés, et plus particulièrement aux moins de 20 salariés. Expérimentées entre 2008 et 2010, puis pérennisées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, elles permettent aux entreprises, sous conditions, d’être subventionnées jusqu’à hauteur de 25 000 euros. Elles sont un instrument complémentaire aux contrats de prévention, qui s’inscrivent dans des logiques d’expérimentation, d’innovation et d’exemplarité destinées à montrer, au-delà de l’entreprise aidée, la faisabilité et la pertinence de certaines mesures de prévention.

Les dispositifs d’aides financières simplifiées ont été revus en 2014 par la CNAMTS et les caisses régionales, conformément à la COG et aux recommandations de la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2013, afin de concentrer les moyens sur les programmes prioritaires nationaux et régionaux.

Ainsi, en 2014, 4 336 aides financières simplifiées ont été accordées pour un montant de 28 millions d’euros, essentiellement dans le bâtiment (30 % de la dépense). Le rapporteur rappelle qu’en 2013, 6 058 aides financières simplifiées avaient été accordées pour un montant de 34 millions d’euros.

4 aides financières simplifiées nationales ont été conçues en 2014 et ont été accordées à 2 120 entreprises pour un montant total de 9,3 millions d’euros dans les domaines du pressing, des salons de coiffure, du BTP, du granulat et du béton, constituant ainsi la déclinaison des trois programmes nationaux prioritaires définis dans la COG. En parallèle, chaque CARSAT, en accord avec ses priorités régionales, a délivré des aides financières simplifiées régionales ciblées.

En 2015, la CNAMTS a lancé 2 nouvelles aides financières simplifiées nationales (troubles musculo-squelettique et « airbonus » pour la réduction des émissions de moteur diesel dans les centres de contrôle technique).

Les actions du Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (FNPATMP)

Le Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (FNPATMP) finance le fonctionnement des services de prévention et de tarification des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et maladies professionnelles (INRS) et les actions de prévention telles que des contrats de prévention ou des campagnes d’information.

Il finance également le groupement Eurogip évoqué ci-dessus, qui mène des études au niveau européen sur les sujets intéressant la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT MP).

Enfin, dans le cadre de l’accord conclu entre les partenaires sociaux le 13 septembre 2000 sur la santé au travail et la prévention des risques professionnels, il finance le fonctionnement des Observatoires régionaux de santé au travail (ORST) et les études proposées par ces observatoires, une fois validées par la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CATMP).

Les dépenses d’intervention programmées par le FNPATMP sont en légère diminution sur la période de la COG 2014-2017 (- 3,7 %), contribuant ainsi aux efforts de maîtrise des dépenses publiques. Les subventions aux opérateurs de la branche, composées à 98 % de la subvention à l’INRS, s’établissent à 84,8 millions d’euros. Les incitations financières s’élèvent à 50 millions d’euros. Au sein de cette enveloppe, les montants consacrés aux contrats de prévention sont en augmentation de 5 %. Les autres dépenses d’intervention du FNPATMP sont en recul de 7,3 % sur la durée la COG.

L’article 22 de l’accord national interprofessionnel sur la qualité de vie au travail (ANI QVT) du 19 juin 2013 a confié à l’ANACT le soin :

– d’appuyer le déploiement de l’accord, notamment par la sensibilisation des acteurs régionaux (institutionnels, partenaires sociaux, etc.) et l’identification des terrains (filières, branches et entreprises) à même d’impulser des démarches « qualité de vie au travail » (QVT) ;

– d’assurer l’évaluation tout au long du processus de la démarche QVT.

À ce titre, la conception et la formulation de méthodes à destination des entreprises qui souhaitent initier une démarche qualité de vie au travail ou négocier un accord unique, comme le permet la loi, a été un axe de travail prioritaire du réseau ANACT/ARACT en 2014.

Par ailleurs, le réseau a assuré l’accompagnement d’expérimentations en matière de qualité de vie au travail dans plusieurs domaines, notamment :

– dans le cadre de partenariats sectoriels avec la filière des industries agro-alimentaires, la filière bois, la Mission nationale relations clients ou les établissements sanitaires et sociaux dans le cadre d’un partenariat avec la haute autorité de santé (HAS) ;

– dans des entreprises de toutes tailles et de tous secteurs souhaitant s’engager dans cette démarche ;

– dans le cadre de la fonction publique, en appui de la négociation d’un accord sur la QVT notamment.

L’ANACT a par ailleurs encouragé le développement d’une approche proactive au sein des entreprises de promotion de la santé au travail, au-delà et en complément de la prévention plus classique des risques professionnels. Des actions ont été orientées soit sur certains secteurs professionnels (services à la personne, industrie agro-alimentaire), soit sur certains emplois à risque (travail temporaire) ou sur certains risques (troubles musculo-squelettiques, risques psychosociaux, etc.).

Le réseau ANACT-ARACT a promu des méthodologies et des pratiques clés, notamment grâce à :

– l’élaboration de solutions opérationnelles pour les acteurs de la prévention externes à l’entreprise (services de santé au travail, consultants préventeurs, etc) ou internes (comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, etc) ;

– la construction de partenariats permettant de toucher de manière large les TPE-PME, notamment grâce à la mobilisation des branches professionnelles, et les organisations publiques ;

– la mobilisation d’un accompagnement individuel et d’une aide financière en direction des PME-TPE dans le cadre du Fonds pour l’amélioration des conditions de travail (FACT).

Ces actions, souvent expérimentales, font l’objet d’une mutualisation et d’une capitalisation au sein du réseau afin de créer, en prenant appui sur elles, des méthodes, des outils et des offres de service largement diffusés.

Ainsi, par exemple, après plusieurs années d’interventions dans le champ des risques psychosociaux, un guide d’évaluation expérimental des démarches de prévention a été produit en partenariat avec l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail) à destination des préventeurs et des acteurs de l’entreprise.

L’activité de l’ANACT a également porté sur l’accompagnement et la promotion de démarches de prévention de l’exposition à des facteurs de pénibilité en entreprise.

Le réseau ANACT/ARACT, la CNAMTS et la Caisse nationale de l’assurance vieillesse des salariés (CNAV) ont signé en 2014 une convention de coopération afin de développer, après expérimentation dans cinq régions, une offre de service globale incitant les entreprises à agir sur tous les déterminants de l’usure (diagnostic pénibilité, conception des organisations, gestion des parcours, prévention de la désinsertion, aménagement des postes de travail, etc). Cette action est actuellement en cours.

Par ailleurs, dans le cadre d’un partenariat avec l’Institut national du cancer (INCa) dans le cadre du troisième Plan cancer, le réseau ANACT/ARACT mène des expérimentations dans cinq régions sur le maintien en emploi face aux maladies chroniques évolutives.

Enfin, un groupe de travail constitué de représentants de l’ANACT et des ARACT a été chargé d’élaborer une offre de service composée de différentes prestations à destination des entreprises et autres acteurs relais. Ce groupe a pris en charge en 2015 le pilotage de l’élaboration d’une offre « accès et maintien durable en emploi des seniors » en direction des PME-TPE, en partenariat avec l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

L’année 2015 a également été marquée par la publication du décret n° 2015-968 du 31 juillet 2015 relatif aux missions et au fonctionnement de l’ANACT, qui procède notamment à l’actualisation des missions du réseau ANACT/ARACT, ainsi qu’au renforcement du rôle de pilotage de l’ANACT sur le réseau. Il sécurise également les financements reçus par les ARACT d’un point de vue juridique. Par ailleurs, il organise les modalités de gestion et d’allocation du Fonds pour l’amélioration des conditions de travail – dispositif d’aide publique à caractère incitatif destiné à permettre à différents acteurs (entreprises, associations, branches professionnelles) de mener des projets d’expérimentation dans le champ de l’amélioration des conditions de travail.

Une convention-cadre pour la période 2012-2016 a été conclue entre l’État et l’INRS pour la livraison de certaines prestations d’intérêt commun.

Dans le cadre de cette convention, un programme de travail est arrêté chaque année. Celui-ci est construit autour de trois axes : l’appui technique à l’élaboration et la mise en œuvre de la réglementation, les missions d’information et de sensibilisation et les études spécifiques.

Au titre des années 2014 et 2015, les principaux travaux réalisés dans le cadre de ces conventions sont les suivants :

En matière d’appui technique à l’élaboration et la mise en œuvre de la réglementation :

– gestion de bases de données relatives aux produits chimiques ;

– contrôle de qualité des organismes agréés ou accrédités, notamment l’instruction technique des dossiers de demande d’agrément concernant les experts intervenant pour les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ;

– veille technique et réglementaire et participation aux différents groupes de travail animés par la direction générale du travail (DGT) relatifs aux risques chimiques, aux valeurs limites d’exposition professionnelle, aux risques psychosociaux, à la surveillance radiologique des travailleurs ou encore à la prévention du « burn-out » en milieu professionnel ;

– participation aux travaux d’élaboration et de mise en œuvre du troisième Plan de santé au travail (« PST 3 ») ;

– contribution aux travaux de normalisation européenne et internationale dans le domaine des équipements de travail et des lieux de travail dont les cabines de peinture et poursuite de l’expertise de certaines machines et équipements de protection individuelle ;

– appui à l’élaboration de textes produits par la DGT notamment dans le cadre de la transposition de directives européennes dans le domaine de la prévention des risques biologiques, des risques d’exposition professionnelle aux champs électromagnétiques et risques électriques (finalisation de la transposition de la directive relative à la protection des travailleurs exposés aux rayonnements optiques artificiels) ;

– appui technique aux travaux d’élaboration des mesures de mise en œuvre des dispositions dans le cadre du compte personnel de prévention de la pénibilité ;

– appui à la conception et à la mise en œuvre de la campagne de communication et de contrôle sur la prévention des chutes de hauteur ;

– participation aux travaux de l’OCDE relatifs aux nanomatériaux.

En matière d’information et de sensibilisation :

– élaboration ou actualisation de guides ;

– élaboration et organisation d’actions de formation notamment à l’attention des agents de contrôle de l’Inspection du travail ;

– suites données aux campagnes nationales de contrôle et conventions d’objectifs ;

– élaboration d’un guide pratique pour l’évaluation simplifiée des risques liés aux rayonnements optiques artificiels ;

– participation au comité de pilotage et au comité opérationnel du projet CARTO (campagne de mesurage des empoussièrements amiante) ;

– participation au groupe de travail interministériel et appui à la conception et à la mise en œuvre d’une campagne exploratoire de mesures avec les CARSAT sur les « gaz toxiques dans les conteneurs de marchandises ».

II. UNE BRANCHE AU SEIN DE LAQUELLE DE MULTIPLES INTERROGATIONS SE FONT JOUR

L’article L. 176-1 du code de la sécurité sociale prévoit qu’il est institué à la charge de la branche AT-MP et au profit de la branche maladie du régime général, un versement annuel pour tenir compte des dépenses supportées par cette dernière branche au titre des accidents et affections non pris en charge en application du livre IV du code de la sécurité sociale.

L’article L. 176-2 du même code précise que le montant de ce versement est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale.

Une commission présidée par un magistrat de la Cour des Comptes remet tous les trois ans au Parlement et au Gouvernement, avant le 1er juillet de l’année considérée, un rapport évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des AT-MP.

Le montant du versement dû par la branche AT-MP à la branche maladie du régime général n’a cessé d’être revu à la hausse, au point d’avoir presqu’été multiplié par dix entre 1997 et 2015, passant de 0,1 milliard d’euros à 1 milliard d’euros durant cette période.

MONTANTS DES VERSEMENTS EFFECTUÉS PAR LA BRANCHE AT-MP A LA BRANCHE MALADIE AU TITRE DE LA SOUS-DÉCLARATION

En milliards d’euros

Objet

Année

Montant

Maladies professionnelles

1997

0,137

Maladies professionnelles

1998

0,139

Maladies professionnelles

1999

0,140

Maladies professionnelles

2000

0,141

Maladies professionnelles

2001

0,144

Maladies professionnelles + accidents du travail

2002

0,300

Maladies professionnelles + accidents du travail

2003 à 2006

0,330

Maladies professionnelles + accidents du travail

2007 et 2008

0,410

Maladies professionnelles + accidents du travail

2009 à 2011

0,710

Maladies professionnelles + accidents du travail

2012

0,790

Maladies professionnelles + accidents du travail

2013

0,790

Maladies professionnelles + accidents du travail

2014

0,790

Maladies professionnelles + accidents du travail

2015

1,000

Depuis 1997, sept commissions se sont attachées à l’estimation du montant dû par la branche AT-MP à la branche maladie au titre des accidents de travail et des maladies professionnelles : celle présidée par M. Alain Deniel en 1997, celles présidées par Mme Levy Rosenwald en 1999 et 2002, celles présidées par M. Noël Diricq, en 2005, 2008 et 2011 et celle présidée par M. Jean-Pierre Bonin en 2014.

Les personnes entendues par le rapporteur ont unanimement regretté que le rapport de la commission présidée par M. Jean-Pierre Bonin n’ait pas été publié.

Le rapporteur a toutefois pu prendre connaissance d’une partie de son contenu, grâce aux éléments qui lui ont été fournis par la Direction de la sécurité sociale.

D’après ces éléments, le rapport de la dernière commission dresse un bilan globalement positif de la mise en œuvre des préconisations des précédentes commissions, ainsi que des mesures mises en place depuis lors pour améliorer le taux de déclaration et la reconnaissance des AT-MP. Toutefois, il mentionne que les efforts doivent être poursuivis pour :

– homogénéiser les pratiques des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles et des caisses primaires d’assurance-maladie (CPAM) ;

– améliorer le signalement des accidents du travail par les hôpitaux ainsi que la formation des étudiants en médecine en matière de détection du caractère professionnel de certaines maladies.

La commission a aussi regretté l’importance des délais de mise à jour des tableaux de maladies professionnelles, tout en soulignant que le dispositif résultant des textes ne permettait pas d’aller beaucoup plus vite en l’état des moyens existants.

Cette commission, comme les précédentes, s’est attachée à tenter de comparer les niveaux de déclaration et de reconnaissance entre un certain nombre de pays européens, en soulignant cependant les limites de cet exercice tant les systèmes et les pratiques diffèrent d’un pays à l’autre. Les conclusions qu’elle en a néanmoins tirées sont, d’une part, que la France reconnaît beaucoup plus que les autres pays les troubles musculo-squelettiques des membres supérieurs et, d’autre part, que les dermatoses y sont vraisemblablement très sous-déclarées.

Le rapport de la commission présidée par M. Jean-Pierre Bonin revient par ailleurs sur les causes de la sous-déclaration, qui sont multiples et restent inchangées :

– méconnaissance par la victime ou par ses ayants droit de l’origine professionnelle de l’affection ;

– appréhensions du salarié au regard de l’emploi ou de la complexité de la procédure ;

– préférence pour la pension d’invalidité ;

– pressions de certains employeurs sur les salariés afin d’éviter la déclaration ;

– insuffisance de la formation et de l’information des médecins ;

– manque d’effectifs des médecins du travail ;

– difficultés liées à l’enregistrement des soins et prestations en AT-MP par les professionnels de santé et non-imputation des dépenses AT-MP par les établissements de santé.

S’agissant spécifiquement des cancers, la commission souligne les difficultés de reconstitution des séquences d’exposition des salariés d’entreprises extérieures et des intérimaires souvent amenés à effectuer des travaux les exposant à des cancérogènes, difficultés amplifiées par l’absence de mise à jour ou d’archivage des fiches d’exposition.

Le rapport formule ensuite un certain nombre de préconisations visant, pour l’avenir, à limiter le phénomène de sous-déclaration, parmi lesquelles :

– l’amélioration de la formation des médecins sur la détection du caractère professionnel des maladies ;

– la simplification et la mise en cohérence des réglementations applicables en matière d’AT-MP et d’invalidité ;

– l’archivage des documents uniques d’exposition aux risques.

Enfin, le rapport a évalué le coût de la sous-déclaration pour la branche maladie du régime général dans la fourchette de 0,695 milliard d’euros à 1,3 milliard d’euros.

Cette forte augmentation par rapport à la fourchette d’évaluation retenue en 2011 (0,587 à 1,1 milliard d’euros) s’expliquerait surtout par l’accroissement du nombre de malades, qui aurait différentes causes.

Dans le cas des asthmes, l’évaluation globale de l’effectif des asthmatiques sur la base d’études plus approfondies aboutirait à un quintuplement. Dans le cas des cancers, cet accroissement résulterait d’une détection plus précoce des maladies et de l’allongement de l’espérance de survie. Enfin, les affections du rachis lombaire ont pu, cette fois, être évaluées, ce qui n’avait pas été possible précédemment.

Au regard de cette estimation, le montant du versement a été fixé à un milliard d’euros par la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015. Ce montant a été reconduit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, sans que le rapporteur ait pu obtenir des éléments de justification précisément chiffrés de la part de la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des droits des femmes, Mme Marisol Touraine, qu’il a pourtant interrogée à ce sujet lors de son audition par la commission des Affaires sociales, le 7 octobre dernier.

À cet égard, nombre des personnes entendues par le rapporteur ont exprimé leur vive inquiétude quant à l’augmentation continue des sommes versées par la branche AT-MP à la branche maladie du régime général, au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Les représentants de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) ont notamment suggéré que la branche AT-MP engage avec la branche maladie des plans d’action pour mieux traiter les causes de la sous-déclaration.

De leur côté, les représentants de la Confédération générale du travail (CGT) ont estimé que le mécanisme de reversement automatique, à la branche maladie, d’un montant déterminé par une commission empêchait un réel débat sur les motifs de la sous-déclaration. Il faut, selon eux, adopter une méthode autre que celle consistant à ce qu’un rapport vienne, tous les trois ans, fixer le montant de la « taxe » due par la branche AT-MP à la branche maladie.

Plusieurs des organisations entendues par le rapporteur ont formé le vœu que les excédents de la branche AT-MP soient mobilisés à des fins autres que le versement de sommes à la branche maladie au titre de la sous-déclaration ou que le remboursement des dettes de la branche.

Rappelant que l’équilibre de la branche AT-MP avait été conquis au prix d’une restructuration et de réformes de la tarification et des processus d’instruction des dossiers, les représentants de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ont fait valoir auprès du rapporteur qu’il était nécessaire :

– d’objectiver les données servant de fondement à l’évaluation du montant dû par la branche AT-MP à la branche maladie (10) ;

– de limiter ce montant afin de renouer avec la logique assurantielle qui anime la branche AT-MP ;

– de conserver davantage d’excédents au sein de la branche en faveur d’actions de prévention (dont le succès est démontré, comme l’a encore récemment prouvé la campagne de prévention des cancers de la vessie).

Lors de leur audition, les représentants de la Confédération générale du travail (CGT) ont déploré que ces excédents ne soient pas au moins en partie investis dans des actions de prévention ou dans des dispositifs d’amélioration de la réparation des accidents du travail.

Pour leur part, les représentants de la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) se sont interrogés sur l’emploi des excédents de la branche AT-MP, suggérant que ces derniers pourraient notamment financer les interventions de soutien apportées aux personnes en situation de handicap pour réaliser les actes essentiels du quotidien.

Dans un communiqué de presse du 24 septembre dernier, la FNATH a exprimé ses doutes « sur l’intérêt pour une branche – dont l’objectif est d’être à l’équilibre – de dégager des excédents régulièrement sans que cela ne profite à l’amélioration des droits des victimes du travail », ajoutant que « des travaux sur la refonte des barèmes d’incapacité sont en cours et [qu’ils] ne devraient pas favoriser l’indemnisation des victimes du travail ».

La FNATH propose notamment de :

– revaloriser les indemnités en capital, c’est-à-dire les indemnisations des personnes ayant un taux d’incapacité permanente inférieur à 10 % ;

– refondre totalement le système de reconnaissance des maladies professionnelles hors tableaux en supprimant la condition liée au taux d’incapacité permanente de 25 %.

Sans faire nécessairement siennes ces dernières propositions, le rapporteur estime néanmoins que les excédents de la branche AT-MP devraient être mobilisés au service du monde de la santé au travail.

L’origine d’une maladie peut être caractérisée comme professionnelle :

– soit par la voie d’une présomption, si la maladie en question est « désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau » (article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale) ;

– soit par l’établissement d’un lien de causalité direct entre le travail habituel de la victime et le décès ou l’incapacité permanente de celle-ci, si la maladie en question n’est pas désignée dans un tableau de maladies professionnelles (article L. 461-1 précité, alinéa 4).

Dans cette seconde hypothèse, le taux d’incapacité permanente de la victime doit être au moins égal à un pourcentage déterminé et évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. La caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) « reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles » - avis qui s’impose à la caisse.

En l’état du droit, les pathologies purement psychiques, et notamment le « burn-out », ne peuvent être reconnues comme étant d’origine professionnelle par la voie d’une présomption car elles ne sont pas mentionnées au sein des 98 tableaux figurant en annexe II du code de la sécurité sociale, qui ne font état que de pathologies physiques.

Par ailleurs, le taux d’incapacité permanente requis pour qu’une maladie non désignée dans l’un de ces 98 tableaux soit reconnue comme étant d’origine professionnelle est fixé par l’article R. 461-8 du code de la sécurité sociale à 25 %.

Or il est rare aujourd’hui que les médecins-conseils attribuent un tel taux d’incapacité permanente à des pathologies psychiques dont il est difficile de déterminer si elles sont (exclusivement) imputables au travail et si elles sont stabilisées.

Le rapporteur note toutefois qu’en 2014 :

– le pourcentage de reconnaissance de maladies professionnelles au titre de l’alinéa 4 de l’article L. 461-1, qui s’élève à plus de 31 % est en augmentation par rapport à 2013 (27 %) ;

– les affections pour lesquelles les comités ont eu à se prononcer le plus souvent sont les troubles psychosociaux, avec 693 demandes ;

– le lien direct et essentiel entre la pathologie et l’activité professionnelle a été reconnu dans 49 % des situations.

En 2014, les pathologies psychiques ont été les pathologies les plus fréquemment reconnues au titre de l’alinéa 4 de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

En deux ans, le nombre de reconnaissances d’une affection psychique au titre d’une maladie professionnelle a presque quadruplé (339 reconnaissances en 2014, contre 90 en 2012 et 239 en 2013).

La lettre ministérielle du 13 mars 2012 précisant l’interprétation de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale a permis de soumettre plus de dossiers aux comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) grâce à la notion d’« incapacité permanente prévisible » à la date de la demande. Ce taux d’incapacité permanente prévisible n’a qu’une valeur indicative visant à évaluer le degré de gravité de la pathologie du demandeur afin de décider de l’éventuelle transmission de la demande au CRRMP. Il est donc à distinguer du taux d’incapacité permanente réel notifié lors de la stabilisation de la pathologie, si elle est ultérieure.

Par ailleurs, des actions de prévention sont menées depuis plusieurs années tant par le ministère du Travail que par la CNAMTS.

La première phase des travaux du groupe de travail chargé de l’amélioration de la reconnaissance des pathologies d’origine psychique d’origine professionnelle, engagés depuis fin 2008, se sont achevés en 2012 par la rédaction d’un rapport sur les pathologies d’origine psychique susceptibles d’être prise en compte par les médecins-conseils, et de recommandations destinées à guider CRRMP dans l’appréciation des liens entre ces pathologies et l’activité professionnelle.

La seconde phase des travaux consacrés à la mise en œuvre d’un référentiel permettant de faciliter le travail des agents des caisses lors de leurs enquêtes a été présentée lors de la commission des pathologies professionnelles du 19 mai 2014.

Le Gouvernement a installé, en février 2015, un groupe de travail spécifique sur « burn-out », qui a élaboré un guide d’aide à la prévention à destination des acteurs de l’entreprise. En mai dernier, les partenaires sociaux ont émis, dans le cadre du groupe permanent d’orientation (GPO) du Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT), un avis favorable sur cet outil qui mérite selon eux d’être largement diffusé tant aux organisations professionnelles qu’aux entreprises.

Afin de faciliter la reconnaissance du syndrome d’épuisement professionnel, l’article 27 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a complété l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale par un alinéa prévoyant que « les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle ».

Il s’agirait :

– de mieux faire connaître la possibilité de voir reconnue l’origine professionnelle d’une pathologie psychique – possibilité qui n’était pas connue de tous les assurés ;

– d’adopter des modalités spécifiques de traitement de ces dossiers, qui, prochainement précisées par décret, devraient conduire à revoir la composition des CRRMP appelés à se prononcer sur la reconnaissance des pathologies psychiques pour intégrer, si besoin, des médecins psychiatres.

Toutefois, la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une pathologie psychique ne peut toujours intervenir que dans les conditions prévues aux quatrième et avant-dernier alinéas de l’article L. 461-1, autrement dit :

– si le taux d’incapacité permanente est supérieur ou égal au seuil de 25 % mentionné à l’article R. 461-8 ;

– et si l’origine professionnelle de la maladie est établie par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Nombre des personnes entendues par le rapporteur ont salué l’avancée résultant de l’article 27 de la loi du 17 août 2015 tout en exprimant le vœu d’aller encore plus loin dans la reconnaissance de l’origine professionnelle des pathologies psychiques.

Aussi bien les représentants de la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO) que ceux de la Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) ont demandé que le syndrome d’épuisement professionnel soit désigné dans un tableau de maladies professionnelles annexé au code de la sécurité sociale.

À défaut de reconnaissance de l’origine professionnelle du « burn-out » par voie de présomption, les représentants de la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) ont demandé l’abaissement du taux de 25 % d’incapacité permanente aujourd’hui requis pour la reconnaissance de l’origine professionnelle de maladies non désignées dans les tableaux annexés au code de la sécurité sociale. Tant les représentants de la FNATH que ceux de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) ont suggéré d’abaisser ce taux à 10 %, voire de le supprimer.

De leur côté, pour les pathologies psychiques qui, contrairement au « burn-out », ne seraient pas désignées dans un tableau de maladies professionnelles annexé au code de la sécurité sociale, les représentants de la CFE-CGC ont suggéré de fixer des fourchettes de taux d’incapacité permanente, à un niveau inférieur à 25 %. La refonte en cours des barèmes d’incapacité pourrait, selon eux, constituer une opportunité pour procéder à cette réforme.

Pour leur part, les représentants de la CNAMTS se sont montrés prudents au sujet de la désignation du « burn-out » dans un tableau de maladies professionnelles. Celle-ci leur paraît illusoire dans la mesure où, pour ce type de pathologies, il est impossible d’établir une liste exhaustive et détaillée des symptômes et des facteurs d’exposition. Les risques psycho-sociaux sont souvent la résultante de problèmes de management qui relèvent davantage des conseils de prud’hommes que de la branche AT-MP.

Les représentants de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ont abondé en ce sens, rappelant que les pathologies psychiques pouvaient résulter de difficultés d’ordre autant personnel que professionnel.

Ces derniers ont d’ailleurs signalé une étude d’Eurogip publiée en février 2013 sur la reconnaissance des pathologies psychiques liées au travail dans dix pays européens (11). Cette étude révèle que :

– contrairement à ce qui a pu être récemment affirmé, la Belgique reste très en retrait en matière de reconnaissances de pathologies psychiques liées au travail : une étude de 2009-2010 sur un échantillon de quelque 135 000 patients a enregistré 1 089 cas de « burn-out » ce qui, par extrapolation, a conduit à évaluer à 19 000 le nombre de travailleurs souffrant d’un « burn-out » ou d’un mal-être susceptible d’évoluer vers le « burn-out » ;

– dans aucun des 10 pays étudiés, les pathologies psychiques ne sont désignées dans un tableau de maladies professionnelles (si ce n’est au Danemark, où le stress post-traumatique, assimilé en France à un accident du travail, est classé parmi les maladies professionnelles) ;

– la reconnaissance des troubles psychiques comme maladies professionnelles n’est pas possible dans 3 des 10 pays étudiés (Allemagne, Finlande, Suisse) ;

– seuls la France, l’Italie, la Belgique (à titre exceptionnel) et le Danemark (pour les troubles mentaux autres que le stress post-traumatique) organisent un système de reconnaissance de l’origine professionnelle des pathologies psychiques hors tableaux.

RECONNAISSANCE DES PATHOLOGIES PSYCHIQUES EN EUROPE EN 2010

Pays (et date des données)

Reconnaissance en accident du travail

Reconnaissance en maladies professionnelles

Allemagne (estimation)

Au moins 4 900

-

Belgique

606

*

Danemark

730

246 (dont 149 cas de syndrome de stress post-traumatique)

Espagne

203 pathologies non traumatiques

 

Finlande (estimation)

100 à 180 cas de stress post-traumatique / an

 

France

entre 10 000 et 12 000 / an**

63

Italie

ND

37

Suède

Agence d’assurance sociale (2011) : 99

Assurance complémentaire AFA Försäkring (2009-2010) : 2010

103

Suisse (2009)

24

-

Source : Eurogip, « Quelle reconnaissance des pathologies psychiques liées au travail ? Une étude sur 10 pays européens », février 2013, p. 36.

* En Belgique, seuls 2 cas ont été reconnus durant les 15 dernières années, à titre exceptionnel

** En France, il n’est pas possible d’isoler les accidents du travail causés par des risques psycho-sociaux au sein de l’ensemble des accidents du travail reconnus, faute d’indication de l’élément matériel dans la nomenclature statistique. En revanche, une estimation est possible dans la mesure où, en présence d’un cas d’incapacité permanente, le médecin-conseil de la Sécurité sociale est tenu d’en indiquer le motif. En extrapolant la proportion habituelle de motifs psychiques au sein du total des cas d’incapacité permanente examinés et reconnus annuellement comme accidents du travail (soit 1 %), on peut estimer que 10 000 à 12 000 accidents du travail sont pris en charge au titre des lésions d’ordre psychologique par an.

Compte tenu des difficultés d’ordre médical qu’il peut y avoir à imputer un « burn-out » aux seules conditions de travail et compte tenu de l’absence d’indicateurs précis permettant de déterminer le degré d’incapacité provoqué par telle ou telle pathologie psychique, le rapporteur estime préférable que les pouvoirs publics attendent les conclusions du rapport sur l’intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ou l’abaissement du seuil d’incapacité permanente partielle pour ces mêmes affections, que le Gouvernement est tenu de remettre au Parlement avant le 1er juin 2016, en application de l’article 33 de la loi du 17 août 2015.

L’année 2015 aura été marquée par d’abondantes réflexions autour de l’organisation de la médecine du travail – réflexions qui auront conduit à :

– l’adoption d’une réforme par le Parlement ;

– l’engagement d’une réforme encore en cours d’examen par le Parlement ;

– la formulation d’un certain nombre de préconisations susceptibles d’inspirer d’éventuelles futures réformes.

La réforme de l’inaptitude par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi

L’article 26 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi prévoit que :

– l’employeur n’est pas soumis à l’obligation de reclassement du salarié inapte quand le maintien dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à son état de santé ;

– les services de santé au travail et les médecins du travail ont expressément pour mission d’assurer la protection de la sécurité du salarié du fait de son travail, mais également de celle des tiers ;

– les salariés affectés à des postes à risques pour leur santé et leur sécurité ou celle des tiers, ou ceux dont la situation personnelle le justifie bénéficient d’une surveillance médicale spécifique ;

– la partie (employeur ou salarié) à l’origine de la contestation d’un avis médical d’aptitude ou d’inaptitude auprès de l’inspecteur du travail en informe l’autre partie.

La réforme en cours du statut de « collaborateur médecin »

Afin de remédier à l’évolution très défavorable de la démographie médicale dans la spécialité de médecine du travail, une passerelle pérenne vers la spécialité de médecine du travail pour des médecins spécialistes dans d’autres disciplines qui s’engagent à suivre une formation qualifiante dans la spécialité a été créée : il s’agit du statut de « collaborateur médecin ».

Sa mise en place effective s’est cependant rapidement heurtée à une difficulté : le « collaborateur médecin » remplit les missions que lui confie le médecin du travail qui l’encadre, dans le cadre d’un protocole écrit validé par le médecin du travail, en fonction des compétences et de l’expérience que le collaborateur médecin a acquises, mais il a l’impossibilité juridique de prononcer des avis d’aptitude ou d’inaptitude des salariés à leurs postes de travail. La ressource complémentaire que constituent les médecins en reconversion vers la spécialité de médecine du travail n’est donc pas utilisée de manière optimale.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, après échanges avec le Conseil national de l’ordre des médecins, a introduit dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé un article 6 prévoyant qu’« un décret fixe les conditions dans lesquelles un collaborateur médecin, médecin non spécialiste en médecine du travail et engagé dans une formation en vue de l’obtention de cette qualification auprès de l’ordre des médecins, exerce, sous l’autorité d’un médecin du travail d’un service de santé au travail et dans le cadre d’un protocole écrit et validé par ce dernier, les fonctions dévolues aux médecins du travail ».

Adoptée conforme par le Sénat en première lecture, en septembre dernier, cette disposition a pour but de permettre aux collaborateurs médecins, sous l’autorité d’un médecin tuteur qualifié en médecine du travail, de remplir, progressivement au regard de leur parcours individuel et de leur avancée dans leur formation, et dans le cadre de protocoles écrits, les fonctions de médecin du travail, y compris les décisions qui relèvent de la seule prérogative des médecins du travail et qui sont relatives à l’aptitude médicale des salariés à leurs postes de travail.

Les pistes de réforme esquissées par le groupe de travail « Aptitude et médecine du travail »

En mai dernier, notre collègue Michel Issindou, M. Christian Ploton et Mme Sophie Fantoni-Quinton ont remis aux ministres de la Santé et du Travail un rapport contenant un certain nombre de propositions d’évolution des modalités de suivi de l’état de santé des salariés.

Ce rapport met notamment en avant l’obsolescence de la notion d’aptitude, qui ne permettrait pas de garantir la préservation de la santé des salariés, et propose en conséquence de l’abandonner, sauf pour les salariés occupant un poste de sécurité (transport ferroviaire, aérien, etc.).

L’ensemble des salariés bénéficierait d’une visite d’information et de prévention qui serait réalisée par l’infirmier du service de santé au travail après l’embauche et qui serait réitérée périodiquement, ainsi que d’un suivi médical périodique réalisé par le médecin du travail.

La périodicité de ces suivis serait plus rapprochée pour les salariés affectés à des postes à risques (par exemple les agents chimiques dangereux), à des postes de sécurité ou nécessitant une surveillance médicale renforcée.

En cas d’inadéquation entre l’état de santé du salarié et son affectation, le médecin du travail centrerait son activité sur les possibles aménagements du poste et, le cas échéant, si aucune adaptation de poste ne peut être envisagée, sur des propositions de reclassement du salarié.

Le rapport formule en outre certaines recommandations concernant les préconisations du médecin du travail et leur incidence sur le contrat de travail, et en particulier :

– l’introduction, comme condition de fond, du principe selon lequel le médecin du travail doit rechercher le consentement du salarié sur les préconisations qu’il adresse à l’employeur ;

– l’encadrement du rôle du médecin du travail, qui serait assorti de garanties procédurales et déontologiques lorsque les préconisations sont de nature à entraîner une restriction significative des tâches exercées ;

– l’introduction du principe selon lequel l’employeur serait réputé avoir satisfait à ses obligations dès lors que le salarié refuse des préconisations du médecin du travail qui n’entraînent pas une modification du contrat de travail et selon lequel la rupture du contrat de travail serait alors regardée comme reposant sur une cause réelle et sérieuse.

Lors de son audition par le rapporteur, le directeur général du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise (CISME), M. Martial Brun, a insisté sur la nécessité de modifier un certain nombre de textes relatifs à la médecine du travail, dont l’application apparaît aujourd’hui soit impossible soit difficile soit peu utile.

C’est notamment le cas des textes qui conduisent à privilégier des examens cliniques systématiques plutôt que des actions ciblées que les médecins du travail sont pourtant les mieux à même de définir au regard de l’état de santé des travailleurs et de leur environnement.

Selon M. Martial Brun, il est impossible de pratiquer systématiquement une visite médicale d’embauche à l’issue des périodes d’essai, quand on sait que plus d’une vingtaine de millions d’embauches ont lieu chaque année.

En octobre 2014, le Conseil de la simplification pour les entreprises constatait que la visite médicale, pourtant obligatoire, n’était réalisée que dans 15 % des cas, qu’elle pouvait relever de la formalité impossible, notamment en raison de la faiblesse des effectifs de la médecine du travail et de la brièveté de certains contrats et que, dans le même temps, les visites périodiques (annuelles ou biennales) étaient chronophages et peu ciblées, au détriment de la prévention.

En septembre dernier, l’Association nationale des internes en médecine du travail (ANIMT), s’interrogeant sur l’avenir de la médecine du travail, a exprimé son souhait de « recentrer l’activité du médecin sur ses compétences médicales, qui lui permettent de résoudre avec une logique spécifique à sa formation des problématiques préventives de santé au travail et de maintien dans l’emploi », et non pas de « remplir des quotas de visites ». Selon les membres de cette association, « c’est à cette condition que le médecin du travail pourra être reconnu comme un spécialiste du lien santé-travail » (12). Cette reconnaissance se gagnera, selon eux, par la concentration des efforts des médecins du travail sur les situations où leur formation de médecin est la plus pertinente.

Le rapporteur partage ce point de vue : si la spécialité de médecine du travail attire si peu de médecins, c’est notamment parce que rien n’est fait pour rendre cette médecine plus efficiente et donc plus attractive.

Interrogée par le rapporteur sur l’horizon temporel et le véhicule législatif possibles pour la mise en œuvre des préconisations du groupe de travail sur l’aptitude et la médecine du travail qui n’avaient pu être concrétisées dans le cadre de la loi du 17 août 2015, notamment en matière de suivi de l’état de santé des salariés, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des droits des femmes, Mme Marisol Touraine, n’a pas fourni de calendrier précis lors de son audition par la commission des Affaires sociales, le 7 octobre dernier.

L’article 8 du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle, déposé sur le Bureau du Sénat le 31 juillet 2015, a pour ambition de simplifier l’organisation judiciaire en matière de sécurité sociale, afin de mieux répondre aux besoins des justiciables les plus vulnérables : travailleurs indépendants économiquement fragiles, personnes malades, bénéficiaires de prestations sociales qui ont de faibles ressources, personnes handicapées pour lesquelles les délais d’attente des décisions peuvent être particulièrement préjudiciables.

Il est vrai que ces derniers ont besoin d’un accompagnement personnalisé impliquant une identification rapide de la juridiction compétente et une proximité avec celle-ci. Or aujourd’hui, la multiplicité des juridictions intervenantes en la matière est source de complexité et génère une procédure coûteuse et longue. Ainsi, de nombreuses juridictions connaissent un nombre élevé de dossiers en attente et un allongement considérable des délais. Pour remédier à cette situation, le projet de loi précité envisage de simplifier l’organisation actuelle.

Les contentieux actuellement traités par les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et par les tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) seraient fusionnés, de même que les litiges relatifs à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS) et à la couverture maladie universelle complémentaire (CMUc) traités par les commissions départementales d’aide sociale.

Tout ce contentieux, à l’avenir unifié, serait traité par le pôle social du tribunal de grande instance (TGI) de chaque chef-lieu de département. L’appel de ces décisions relèverait des chambres sociales des cours d’appel. La Cour nationale de l’incapacité et de la tarification des accidents du travail (CNITAAT) conserverait uniquement sa compétence en premier et dernier ressort pour les questions liées à la tarification. L’organisation de ce transfert serait déterminée par une ordonnance.

Tout en reconnaissant l’utilité d’une simplification de la répartition actuelle entre contentieux général, contentieux technique et contentieux médical, les représentants de la CNAMTS ont déploré l’insuffisance de l’étude de l’impact de la mesure proposée et fait part de leur attachement :

– au principe des commissions de recours amiables (CRA) – et notamment au caractère paritaire de leur composition ;

– à la présence d’assesseurs non-professionnels représentant les salariés et les employeurs dans les juridictions amenées à connaître des litiges aujourd’hui tranchés par les TASS et les TCI ;

– au maintien de la gratuité du recours au tribunal dans ces matières.

De leur côté, les représentants de Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) ont également fait part au rapporteur de leurs interrogations quant à l’accompagnement des victimes devant les TGI et quant aux risques de divergences de jurisprudence que pourrait engendrer l’éclatement entre l’ensemble des cours d’appel d’un contentieux aujourd’hui unifié au niveau de la CNITAAT.

Pour sa part, le rapporteur forme le vœu que la commission des Affaires sociales se saisisse au moins pour avis de la réforme des TASS et des TCI lorsque le projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle sera soumis à l’examen de notre Assemblée – d’autant plus que, lors de l’audition de la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des droits des femmes par la commission le 7 octobre dernier, aucune réponse n’a été apportée à la question du rapporteur qui souhaitait obtenir du Gouvernement la garantie que cette réforme ne remettrait en cause ni le caractère écheviné et paritaire des juridictions amenées à connaître des litiges aujourd’hui tranchés par les TASS et TCI ni le principe de gratuité du recours au tribunal dans ces matières.

*

TRAVAUX DE LA COMMISSION

EXAMEN DES ARTICLES RELATIFS AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES

La commission a procédé à l’examen des articles relatifs aux accidents du travail et maladies professionnelles au cours de sa deuxième séance du mardi 13 octobre 2015.

QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2016

TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES À LA BRANCHE DES ACCIDENTS DU TRAVAIL
ET DES MALADIES PROFESSIONNELLES

Article 37
Fixation des montants des dépenses de transfert instituées par des dispositions légales à la charge de la branche AT-MP

Cet article fixe les montants des dotations versées par la branche « Accidents du travail et maladies professionnelles » (AT-MP) du régime général :

– au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) (I) ;

– au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA) (II) ;

– à la branche de l’assurance maladie du régime général, au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, dans les conditions précisées par l’article L. 176-2 du code de la sécurité sociale (III).

I. LE FONDS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE (FIVA)

L’article 53 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2001 a créé un dispositif de réparation intégrale des préjudices subis par les victimes de l’amiante et leurs ayants droit. Le II dudit article prévoit que le FIVA prend en charge les maladies d’origine professionnelle occasionnées par l’amiante, les maladies spécifiques figurant dans l’arrêté du 5 mai 2002 ainsi que toute maladie pour laquelle le lien avec une exposition à l’amiante est reconnu par le fonds.

Le VII de l’article 53 de la loi précitée prévoit que le FIVA est financé, d’une part, par une contribution de la branche AT-MP, fixée chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale, et d’autre part, par une contribution de l’État, qui relève de la loi de finances.

En conséquence, le I fixe le montant de la contribution de la branche AT-MP au financement du FIVA pour l’année 2016 à 430 millions d’euros, contre 380 millions d’euros en 2015.

Le nombre de demandes et d’offres d’indemnisation a augmenté en 2014

Lors de leur audition par le rapporteur, le président du conseil d’administration du FIVA, M. Gilles Hermitte, et sa directrice, Mme Agnès Plassart, ont souligné qu’en 2014, l’activité du fonds avait été soutenue, aussi bien du côté de l’offre d’indemnisation que de celui de la demande d’indemnisation.

D’après le rapport d’activité du FIVA au Parlement et au Gouvernement pour l’année 2014, le fonds a enregistré l’an dernier un total de 19 110 demandes d’indemnisation, soit en moyenne 1 593 demandes par mois. Si la tendance à la hausse se confirme avec une augmentation de 3 % par rapport à 2013, le nombre de demandes est cependant inférieur au niveau élevé atteint en 2006 et 2007 (où il était d’environ 22 400 en moyenne, sur ces deux années). 34 % des demandes ont été formulées par des victimes directes (6 512) et 66 % par des ayants droit (12 598). Les victimes dépendent principalement du régime général (84,5 %) et sont majoritairement des hommes (91 %, comme en 2013). Concernant les pathologies, la tendance observée les années précédentes se poursuit, avec une prépondérance des victimes atteintes de plaques pleurales et d’épaississements pleuraux, dont la part relative par rapport au nombre total de victimes diminue toutefois. En revanche, la part des pathologies malignes (cancers broncho-pulmonaires et mésothéliomes) continue de croître (38,7 % des victimes contre 36 % en 2013). La répartition géographique des victimes demeure similaire, d’une année sur l’autre. En 2014, les trois départements les plus représentés sont le Nord, la Moselle et la Seine-Maritime.

Du côté des offres d’indemnisation présentées par le FIVA, leur nombre a atteint 20 170 en 2014. Ce chiffre est supérieur à celui des nouvelles demandes (comme en 2012 et 2013) et traduit la volonté du fonds de traiter les demandes en flux en évitant la reconstitution de stocks.

Le FIVA a d’ailleurs amélioré ses délais de traitement des demandes d’indemnisation, de présentation des offres et de versement des indemnisations. S’agissant des offres, le FIVA a réduit ses délais de décision de 10 mois et 2 semaines en 2013 à 7 mois en 2014 (soit un raccourcissement d’un tiers). Il s’agit du délai le plus faible constaté depuis 2007. Le FIVA accorde la priorité aux pathologies lourdes qui, pour la première fois depuis 2007, font l’objet d’offres d’indemnisation dans un délai inférieur au délai légal de six mois. Pour les délais de paiement aussi, la priorité a été accordée aux pathologies graves : les indemnités ont été versées en 2014 dans un délai d’un mois (inférieur, donc, au délai réglementaire de deux mois). Ce délai a aussi été respecté pour le versement d’indemnisations en réparation de pathologies bénignes (3 semaines).

Ce meilleur respect des délais légaux de présentation des offres a contribué à réduire l’activité contentieuse du FIVA qui, en 2014, a diminué pour la cinquième année consécutive. Le nombre de recours a diminué de moitié depuis 2010 (772 contre 1 313) et le taux de contestation des offres est de 7 %. En 2014, les quelque 23 millions d’euros de dépenses engagées au titre du contentieux indemnitaire n’ont représenté que 5 % de la dépense totale liée aux indemnisations (contre 11,3 % en 2008).

En revanche, l’activité subrogatoire du FIVA est restée soutenue en 2014 : le fonds a exercé 835 recours subrogatoires (680 sur le fondement de la faute inexcusable de l’employeur ; 149 à l’encontre d’employeurs publics, concernant des fonctionnaires ; 6 interventions dans des procédures en reconnaissance de maladie professionnelle). Les recettes perçues au titre de l’activité du contentieux subrogatoire se sont élevées à 31,7 millions d’euros en 2014.

Compte tenu de la forte activité constatée en 2014, le budget relatif à l’indemnisation a été intégralement consommé (et rectifié en fin d’exercice). Le résultat de l’exercice 2014 est néanmoins resté excédentaire (de 26,7 millions d’euros). La dépense globale d’indemnisation s’est élevée en 2014 à 427,8 millions d’euros (contre 469,2 millions d’euros en 2013). Les dépenses d’indemnisation cumulées depuis 2002 s’établissent ainsi à 4,42 milliards d’euros.

Alors que les victimes atteintes de cancers broncho-pulmonaires et de mésothéliomes représentent 38,6 % du nombre total de victimes qui se sont adressées au FIVA en 2014, les sommes versées au titre de leur indemnisation constituent 82 % du total versé, toutes pathologies confondues. Le montant moyen de l’indemnisation des pathologies malignes est en effet très supérieur à celui des pathologies bénignes : le montant versé au titre d’un cancer broncho-pulmonaire représente près de 8 fois celui versé au titre des plaques pleurales.

Le montant de la contribution de la branche AT-MP au financement du FIVA tire les conséquences des perspectives d’augmentation du nombre de demandes et d’offres d’indemnisation en 2015-2016

La dynamique d’augmentation des demandes et des offres d’indemnisation constatée en 2014 étant appelée, selon les prévisions, à se confirmer en 2015 et en 2016, où elles pourraient atteindre le nombre de 20 000 (soit le niveau le plus élevé depuis 2007), le I propose de fixer le montant de la contribution de la branche AT-MP du régime général au financement du FIVA à 430 millions d’euros au titre de l’année 2016 – soit un montant supérieur de 50 millions d’euros à celui qui avait été fixé, pour l’année 2015, par l’article 82 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Ce montant est cohérent avec les éléments que les représentants du FIVA ont fournis au rapporteur. En effet, pour l’exercice 2015, le budget prévisionnel voté par le conseil d’administration du fonds était de 479 millions d’euros (dont 404 millions d’euros pour le poste « indemnisation »), sur la base d’une dotation de l’État de 10 millions d’euros et d’une contribution de la branche AT-MP de 435 millions d’euros. Ce budget devra vraisemblablement être rectifié d’ici la fin de l’exercice 2015 car le montant estimé des dépenses pour cet exercice avoisine 433 millions d’euros.

Le montant total des dépenses du FIVA étant estimé à 525 millions d’euros en 2016, il semble justifié de fixer le montant de la dotation de la branche AT-MP du régime général à 430 millions pour l’année 2016, car ce montant correspond peu ou prou à la contribution effective de la branche au financement du FIVA en 2015.

LES COMPTES DU FIVA

(en millions d’euros)

 

2013

2014

%

2015 (p)

%

2016 (p)

%

Charges

555,6

520,5

– 6,3

524,7

– 0,8

524,7

0

Dépenses d’indemnisation

469,3

429

– 8,6

445,7

3,9

465,7

4,5

Autres charges

8,6

9

4,2

9

0,5

9

0

Provisions

77,7

82,5

6,2

70

– 15,2

50

– 28,6

Produits

239,4

547,1

128,5

492

– 10,1

543,4

10,4

Subvention État

0

0

 

10

   

13,4

Contribution de la branche AT-MP

115,5

435

 

380

– 12,6

430

13,2

Reprises sur provisions

79,8

79,1

– 0,8

72

– 9

70

– 2,8

Autres produits

44,7

33

– 26

30

– 9,2

30

0

Résultat net

– 316,2

26,7

– 32,7

18,7

Variation du fonds de roulement

– 318,2

30,1

0

– 34,7

– 1,3

Fonds de roulement N

78,8

108,9

74,2

72,8

Source : FIVA (données comptables jusque 2014) - Direction de la sécurité sociale (prévisions pour 2015 et 2016).

II. LE FONDS DE CESSATION D’ACTIVITÉ ANTICIPÉE DES TRAVAILLEURS DE L’AMIANTE

L’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 a instauré une allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) accessible aux salariés du régime général ou du régime AT-MP des salariés agricoles atteints de maladies professionnelles liées à l’amiante, ou aux salariés et anciens salariés ayant travaillé au sein d’établissements « de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l’amiante ou de construction et de réparation navales ».

Cette allocation est financée par le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA), créé par le III de l’article 41 de la loi précitée. La gestion du FCAATA est assurée par la Caisse des dépôts. Aux termes dudit article, les ressources du FCAATA sont constituées :

– d’une fraction égale à 0,31 % des droits à tabac (articles 575 du code général des impôts) ;

– d’une contribution de la branche AT-MP du régime général, dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale ;

– d’une contribution de la branche AT-MP du régime des salariés agricoles, dont le montant est fixé annuellement par arrêté.

Une contribution complémentaire à la charge des entreprises dont les salariés ont été exposés à l’amiante avait été instaurée par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2005. En raison de son rendement peu élevé et du contentieux abondant qu’elle suscitait, cette contribution a été abrogée par la LFSS pour 2009.

La baisse continue du nombre d’allocataires de l’ACAATA

Le FCAATA est revenu à l’équilibre en 2010. Depuis cette date, son solde est constamment excédentaire (+ 9 millions d’euros en 2010, + 51 millions d’euros en 2011, + 64 millions d’euros en 2012, + 109 millions d’euros en 2013). Cette amélioration résulte de la diminution continue, depuis 2009, des dépenses du fonds (– 0,2 % en 2009, – 2,9 % en 2010 et 2011, – 1,8 % en 2012, – 4,5 % en 2013).

En 2014, le nombre des bénéficiaires de l’ACAATA a continué de diminuer fortement en 2014, pour s’établir à 21 484, ce qui représente une baisse de 8,7 % par rapport à 2013.

La dotation de la branche AT-MP au FCAATA – qui représente 95 % des produits du fonds – s’est élevée à 821 millions d’euros, tandis que la fraction du produit des droits sur la consommation de tabacs s’est élevée à 37 millions d’euros.

En conséquence, le FCAATA a été excédentaire de 81 millions d’euros.

En 2015 et en 2016, la décroissance rapide des charges d’allocation devrait se poursuivre (– 11,1 % en 2015 et – 8,5 % en 2016), sous les effets combinés d’une baisse des effectifs des allocataires (– 12 % en 2015 et – 9 % en 2016) et d’un impact (en moyenne annuelle) de la revalorisation des allocations quasiment nul en 2015 et de 0,33 % en 2016, en raison de la faible inflation.

La baisse continue des besoins de financement du FCAATA

L’article 82 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015 a fixé le montant de la dotation de la branche AT-MP au FCAATA à 693 millions d’euros.

Dans le contexte de la baisse constante du nombre de bénéficiaires de l’ACAATA, cette dotation devrait permettre au FCAATA de rester excédentaire en 2015 (son excédent se réduisant toutefois à 12 millions d’euros). Après une baisse de 4,9 % en 2014, les dépenses du fonds devraient encore diminuer de 8 % en 2015.

Dans le rapport qu’elle a publié en septembre dernier, la commission des comptes de la Sécurité sociale estimait qu’une dotation de la branche AT-MP au FCAATA de 600 millions d’euros en 2016 laisserait à l’équilibre le solde cumulé du fonds. En effet, les charges du FCAATA devraient diminuer en 2016 de 5,4 % par rapport à 2015, pour s’établir à 678 millions d’euros, tandis que le produit de la fraction des droits sur les tabacs affectée au fonds devrait demeurer stable (autour de 35 millions d’euros).

C’est la raison pour laquelle le II propose de fixer le montant de la contribution de la branche AT-MP au FCAATA à 600 millions d’euros au titre de l’année 2016.

LES COMPTES DU FCAATA

(en millions d’euros)

 

2013

%

2014

%

2015 (p)

%

2016 (p)

%

Charges

819

– 4,5

779

– 4,9

717

– 8

678

– 5,4

Produits

928

0,6

860

– 7,3

729

– 15,3

636

– 12,7

Dont contribution de la CNAM AT-MP

890

0

821

– 7,8

693

– 15,6

600

– 13,4

Dont droits sur les tabacs

35

7,5

37

5,1

35

– 4,2

36

1

Autres produits

3

 

2

– 23,2

0

 

0

 

Résultat net

109

81

12

– 42

Résultat cumulé depuis 2000

– 51

30

42

0

Source : Direction de la sécurité sociale.

III. LA SOUS-DÉCLARATION DES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES

En application de l’article L. 461-5 du code de la sécurité sociale, la déclaration d’une maladie professionnelle incombe au salarié, contrairement à la déclaration d’un accident du travail qui est une obligation de l’employeur.

Or pour des raisons multiples, liées par exemple à la méconnaissance de l’origine professionnelle d’une affection, à la complexité de la procédure de la déclaration, à la formation et à l’information insuffisante des professionnels de santé ou encore à des pressions de certains employeurs pour se soustraire à leur obligation, certaines dépenses engendrées par des pathologies d’origine professionnelle ou des accidents subis sur le lieu de travail sont prises en charge par l’assurance maladie, et non par la branche AT-MP.

En conséquence, l’article L. 176-1 du code de la sécurité sociale, issu de l’article 30 de la loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 de financement de la sécurité sociale pour 1997, instaure le principe d’un « versement annuel » à la charge de la branche AT-MP au profit de la branche maladie du régime général. Ce versement a pour objet de compenser les dépenses engagées par cette dernière au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles non déclarés comme tels. L’article L. 176-2 du même code précise que le montant de ce versement est fixé annuellement par la loi de financement de la sécurité sociale.

Le III fixe donc à un milliard d’euros le montant du reversement de la branche AT-MP vers la branche maladie du régime général pour l’année 2016
– soit un montant identique à celui fixé l’an passé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Les critères permettant de fixer le montant de la sous-déclaration

Comme cela a été rappelé ci-dessus, une commission est chargée de remettre tous les trois ans aux membres du Parlement et au Gouvernement un rapport permettant d’évaluer le coût réel, pour la branche maladie, de la sous-déclaration des AT-MP. Cette commission a présenté un nouveau rapport en juillet 2014.

Pour déterminer la fourchette de sous-évaluation, la commission réalise une estimation de l’écart entre le nombre de cas d’accidents ou de maladies théoriquement imputables à l’activité professionnelle et le nombre de cas effectivement reconnus par la branche AT-MP. Outre les accidents du travail, cinq grands groupes de pathologies, inchangés depuis 2011, ont été examinés par la commission : les cancers professionnels, les principales affections périarticulaires et du rachis lombaire, l’asthme et les broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO), les dermatoses et la surdité.

La commission s’appuie principalement sur des données épidémiologiques pour établir une estimation du nombre de cas sous-déclarés, qu’elle rapporte aux données de coût moyen par pathologie fournies par la CNAM-ATMP.

La reconduction, pour 2016, du montant d’un milliard d’euros versé à la branche maladie en 2015

Rappelons que le montant du versement dû par la branche AT-MP à la branche maladie du régime général n’a cessé d’être revu à la hausse, au point d’avoir presqu’été multiplié par dix entre 1997 et 2015, passant de 0,1 milliard d’euros à 1 milliard d’euros durant cette période (13). Et pour l’année 2016, le III propose de reconduire le montant d’un milliard d’euros retenu l’an dernier.

Le rapporteur ne reviendra pas, à ce stade, sur les interrogations légitimes que suscitent chez de nombreux acteurs les modalités d’évaluation du montant du versement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles et dont il est fait état dans l’exposé général ci-dessus.

Comme l’an passé, ce montant a suscité des réactions très hétérogènes de la part des partenaires sociaux entendus par le rapporteur. D’aucuns le jugent insuffisant, puisqu’éloigné de la fourchette haute établie par la commission. D’autres estiment ce montant largement surestimé et regrettent l’imprécision des critères qui fondent l’évaluation de la commission.

Il est vrai que le chiffre d’un milliard est avancé sans évaluations précises à l’appui. La méthode consistant à confier à une commission le soin de déterminer le montant de la « taxe » due par la branche AT-MP à la branche maladie, sans qu’y soient associés les partenaires sociaux et sans que les causes de la sous-déclaration soient vraiment traitées n’est pas sans éveiller des soupçons quant à l’objectivité des critères retenus et quant à la finalité d’un versement dont certains se demandent s’il ne devrait pas être minoré pour privilégier le financement d’actions de prévention au sein de la branche AT-MP.

Dans une déclaration commune du 30 septembre dernier, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ont dénoncé un « siphonage » inacceptable de la branche AT-MP au profit de la branche maladie, ajoutant que « cette nouvelle ponction ne peut que déstabiliser les différents acteurs de la branche AT-MP, y compris les entreprises », que la logique de la branche AT-MP, d’incitation à la prévention, devait être respectée et que les résultats enregistrés devaient se traduire par une baisse des cotisations.

Comme l’an passé, le rapporteur appelle à poursuivre les actions de lutte contre la sous-déclaration, afin qu’une proportion croissante d’accidents du travail et de maladies professionnelles soit effectivement imputée sur le compte de la branche AT-MP et ne pèse plus à l’avenir sur les comptes de l’assurance maladie.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS226 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à rétablir la contribution des entreprises au financement des fonds de l’amiante qui a été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, et supprimée en 2009. Cette contribution visait à prendre en compte la responsabilité des entreprises à l’origine des dépenses du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA). Il est proposé de la rétablir puisqu’elle avait été supprimée au motif que, depuis sa création, son rendement était peu élevé. Elle doit être rétablie : de nombreux rapports parlementaires le préconisent et proposent de l’augmenter et de simplifier les modalités de son recouvrement.

Figurent dans liste des entreprises qui contribuent – ce qui ouvre droit au bénéfice de ce fonds – celles dont l’activité entraîne l’exposition des travailleurs impliqués dans le transport, la fabrication et la transformation de l’amiante. Cette liste doit être actualisée afin d’y intégrer les entreprises actives depuis de nombreuses années dans le domaine des services de diagnostic et de désamiantage.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Cet amendement – déjà discuté lors de l’examen du PLFSS pour 2013 – vise à rétablir la contribution à la charge des entreprises pour le financement du FCAATA.

À l’époque, Mme la ministre, Marisol Touraine, avait émis un avis défavorable à son sujet, estimant, à juste titre, qu’il n’était pas utile de revenir en arrière et de rétablir la contribution supprimée en 2009, parce que le rendement de la mesure était faible – 30 millions d’euros par an en moyenne, alors que plus de 100 millions d’euros étaient initialement attendus.

Par ailleurs, son recouvrement était lourd. Les établissements dont les salariés bénéficiaient de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) avaient souvent fait l’objet de reprises successives qui rendaient leur identification difficile. De plus, les entreprises qui avaient repris ces établissements et les avaient reconverties comprenaient mal pourquoi elles devaient payer pour un risque auquel elles n’avaient pas exposé les salariés, ce qui a pu peser sur les décisions de reprise et donc sur le maintien des emplois. Le contentieux était en conséquence important.

En outre, il paraissait préférable de responsabiliser les entreprises qui exposent leurs salariés à l’amiante et sont à l’origine des dépenses du FCAATA en améliorant les procédures de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

Enfin, plus on s’éloigne de la période d’utilisation intensive de l’amiante, moins le rétablissement de la contribution aurait de sens.

Je partage ce constat et rappelle que la contribution souhaitée alimenterait un fonds aujourd’hui excédentaire. En effet, le FCAATA est revenu à l’équilibre en 2010. Depuis cette date, son solde est constamment excédentaire : 9 millions d’euros en 2010 ; 51 millions en 2011 ; 64 millions en 2012 et 109 millions en 2013.

En 2014, le nombre des bénéficiaires de l’ACAATA a continué de diminuer fortement, pour s’établir à 21 484, ce qui représente une baisse de 8,7 % par rapport à 2013. Il y a aujourd’hui plus de sorties que d’entrées dans le dispositif. En conséquence, le FCAATA a été excédentaire de 81 millions d’euros en 2014.

En 2015 et en 2016, la décroissance rapide des charges d’allocation devrait se poursuivre – moins 11,1 % en 2015 et moins 8,5 % en 2016 –, sous les effets combinés d’une baisse des effectifs des allocataires – moins 12 % en 2015 et moins 9 % en 2016 – et d’un impact, en moyenne annuelle, de la revalorisation des allocations quasiment nul en 2015 et de 0,33 % en 2016, en raison de la faible inflation.

Dans ce contexte, le rétablissement d’une contribution au rendement faible et au recouvrement lourd ne paraît guère pertinent. Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 37 sans modification.

Après l’article 37

La Commission examine l’amendement AS224 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à obtenir du Gouvernement un rapport sur le traitement des dossiers des victimes de l’amiante, puisqu’un retard considérable est constaté et que les dossiers sont parfois traités après le décès des intéressés. Il faut prendre en considération les victimes et les ayants droit qui connaissent des situations dramatiques. Le Gouvernement s’était montré favorable à ce rapport, mais ne l’a jamais remis.

Le fait est que ce régime a pu bénéficier à des salariés dont le degré d’exposition avait été faible, voire nul, tandis que des travailleurs qui, eux, avaient été fortement exposés, n’ont pas été inscrits sur les listes ouvrant droit à l’ACAATA, et ne peuvent donc en bénéficier. Plusieurs pistes de réforme ont déjà été explorées.

D’autres perspectives ont ensuite été expertisées par l’administration. En mai 2011, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (ANSES) a conclu qu’il n’existait pas de base de données permettant de dresser de façon univoque une liste exhaustive des métiers les plus exposants. Elle a aussi mis en lumière les difficultés d’établissement d’une telle liste, puisque, par exemple, l’intensité de l’exposition peut varier selon les secteurs d’activité ou la période concernée.

M. Denis Jacquat, rapporteur. La demande de rapport au Parlement au sujet de l’amélioration des conditions de traitement des dossiers des victimes de l’amiante pour l’accès au FCAATA est déjà satisfaite.

En effet, le rapport demandé par l’article 90 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, relatif aux modalités de création d’une nouvelle voie d’accès individuelle au dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, a été transmis au Parlement le 7 août 2015. Il met en évidence l’importance du dispositif collectif actuel dans la prise en charge des conséquences de l’amiante en France : depuis sa création en 1999, ce dispositif s’est traduit par une dépense de plus de 9 milliards d’euros au bénéfice de plus de 80 000 salariés.

Sur la faisabilité d’une voie d’accès individuelle à l’ACAATA, ce document met en lumière les importantes difficultés liées à l’évaluation de l’exposition professionnelle individuelle à l’amiante, s’agissant tant de la reconstitution préalable du parcours professionnel du demandeur et de son exposition à l’amiante que de ses modalités de preuve.

L’estimation statistique du nombre de bénéficiaires potentiels se révèle par ailleurs délicate : les premières estimations établies tendent à montrer que l’ouverture d’une voie d’accès individuelle majorerait de façon très importante le nombre de personnes bénéficiant de l’ACAATA. Cet important afflux de bénéficiaires aurait un fort impact sur la gestion et les délais d’attribution de l’allocation, qui avait conduit l’Italie, seul autre pays à avoir mis en place un dispositif de préretraite « amiante », à clôturer son dispositif dix ans après sa création. Il aurait également un coût qui pèserait significativement sur les comptes de la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), étant précisé que, sur les douze dernières années, cette dernière a déjà consacré plus de 700 millions d’euros par an au dispositif de l’ACAATA.

En effet, l’impact financier de l’ouverture de la voie individuelle pourrait être compris entre 600 millions d’euros, dans l’hypothèse de 5 000 attributions par génération, et 1,2 milliard d’euros, correspondant à un effectif de 10 000 nouveaux allocataires par génération, la première année, avec une montée en charge les années suivantes.

Compte tenu de ces éléments et à supposer qu’elle soit envisageable, la faisabilité d’une voie d’accès individuelle pourrait par exemple être assortie de conditions d’exposition et d’âge minimal différentes de celles qui prévalent actuellement. Ces conditions permettraient de réduire l’impact financier par rapport à l’ouverture d’une voie d’accès individuelle sans condition. Pour autant, la maîtrise du dispositif ne serait pas assurée : les difficultés liées à l’absence de traçabilité des expositions passées demeureraient, de même que le fort risque contentieux et le risque de dérive lié à la fragilité des modes de preuve.

Par ailleurs, et surtout, la mise en place de conditions d’accès différentes entre le dispositif collectif actuel et le nouveau dispositif individuel apparaît peu envisageable au regard du principe d’égalité. L’introduction de conditions d’accès, si elle était retenue, devrait s’appliquer à l’ensemble des dispositifs d’accès pour les personnes non malades, ce qui supposerait de revenir sur les contours du dispositif actuel.

Il faut également préciser que le rapport demandé porterait sur l’amélioration des conditions de traitement des dossiers des ayants droit. Or le dispositif FCAATA est un dispositif de préretraite « amiante », il n’y a donc pas d’ayants droit au FCAATA, pas plus qu’il n’y a d’indemnisation : ces notions font plutôt penser au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), qui peut notamment prendre en charge l’indemnisation de personnes exposées de manière chronique dans les bâtis publics ou privés et qui auraient développé une maladie liée à l’amiante.

Enfin, les conditions de traitement des dossiers des bénéficiaires de l’ACAATA – dont le nombre a encore diminué de 8,7 % en 2014 pour s’établir à 21 484 – n’ont pas, à ce jour, fait l’objet de critiques.

Dans ces conditions, un nouveau rapport sur l’ACAATA, moins de trois mois après le précédent, n’apparaît pas nécessaire.

M. Gérard Sebaoun. Je comprends mal comment M. Jacquat peut dire que l’ouverture d’une nouvelle voie pour reconnaître l’exposition coûterait trop cher. Nous parlons là de victimes de l’amiante, et mettre en avant à leur sujet le coût pour la société, quel qu’il soit et fût-il exorbitant, ne me paraît pas recevable.

M. Denis Jacquat, rapporteur. En réponse à cette excellente question, je dirai que je me suis contenté de lire des extraits du rapport. Ce n’est donc pas Denis Jacquat qui s’exprime. Je dis simplement que, trois mois après la remise d’un rapport, nous n’allons pas en réclamer un nouveau.

La Commission rejette l’amendement.

Article 38
Objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2016

En application du 2° du D du I de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article a pour objet d’établir les objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) pour l’année à venir.

Le fixe donc, pour 2016, à 13,4 milliards d’euros l’objectif de dépenses de la branche AT-MP pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et le à 12 milliards d’euros l’objectif de dépenses de la branche pour le seul régime général.

D’après les prévisions de la commission des comptes de la Sécurité sociale publiées en septembre dernier, l’excédent de la branche AT-MP devrait se contracter légèrement en 2015 pour s’établir à 603 millions d’euros (contre 691 millions d’euros en 2014).

Les charges progresseraient de 1,6 % en raison notamment de la hausse de 210 millions d’euros du transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents de travail – hausse qui contribuerait à l’augmentation de 4,4 % des charges hors prestations de la branche AT-MP. Cette augmentation s’expliquerait aussi, et dans une moindre ampleur, par la hausse du reversement à la caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV) au titre de la retraite pour pénibilité.

Les prestations sociales progresseraient à un rythme très légèrement supérieur à celui de 2014 (+ 0,7 %). Les prestations entrant dans le champ de l’ONDAM augmenteraient de 2,4 % (contre 2,7 % en 2014). Les prestations hors ONDAM s’élèveraient à 16,2 milliards d’euros.

D’après les prévisions de la commission des comptes de la Sécurité sociale publiées en septembre dernier, les charges de la branche AT-MP progresseraient de 1,9 % en 2016.

Les prestations dans le champ de l’ONDAM seraient en hausse de 3,9 % tandis que les prestations hors ONDAM s’élèveraient à 16,4 milliards d’euros.

Cette augmentation ténue des dépenses de la branche AT-MP ne devrait qu’entamer légèrement son excédent qui, en septembre dernier, était estimé pour l’année 2016 à environ 700 millions d’euros par la commission des comptes de la Sécurité sociale et qui pourrait finalement n’être pour la même année que de 525 millions d’euros, en raison du transfert de cotisations de 0,05 point entre la branche AT-MP et la branche maladie du régime général qui est organisé par le projet de loi.

CHARGES NETTES, PRODUITS NETS ET SOLDE DE LA BRANCHE AT-MP
DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Charges nettes

11,3

11,6

11,8

12

 

– 3,1 %

2,8 %

1,6 %

1,9 %

Produits nets

11,9

12,3

12,4

12,7

 

3,9 %

3,1 %

0,8 %

2,5 %

Solde

0,6

0,7

0,6

0,7

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2015.

*

La Commission adopte l’article 38 sans modification.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) (*)  M. Philippe Maussion, secrétaire confédéral et M. Philippe Cuignet, administrateur CA branche AT-MP

Ø Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise (CISME) – M. Martial Brun, directeur général, et Mme Corinne Letheux, médecin conseil

Ø Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH)  M. Arnaud de Broca, secrétaire général

Ø Association nationale des victimes de l’amiante (ANDEVA) M. Alain Bobbio, secrétaire national

Ø Pradel avocats Me Perle-Marie Pradel-Boureux, avocat, et Mme Véronique Branger, consultante de Volcan communication

Ø Confédération française de l’encadrement Confédération générale des cadres (CFE-CGC) M. Jean-François Gomez, délégué national du secteur Protection sociale maladie, et Mme Patricia Guéret, chargée d’études à la protection sociale

Ø Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) M. Jean-Michel Cerdan, secrétaire confédéral en charge du logement et des conditions de travail

Ø Confédération générale du travail (CGT) M. Jean-François Naton, conseiller confédéral en charge du travail et de la santé

Ø Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) Mme Marine Jeantet, directrice des risques professionnels, et Mme Nathalie Buet, présidente de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CAT-MP)

Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) M. Georges Tissié, directeur des affaires sociales, et Dr. Pierre Thillaud, membre de la commission des affaires sociales

Ø Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA)  M. Gilles Hermitte, président du conseil d’administration, et Mme Agnès Plassart, directrice

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale

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