N° 3260 - Rapport de M. Jean-Frédéric Poisson sur la proposition de résolution de M. Jean-Frédéric Poisson et plusieurs de ses collègues tendant à la création d'une commission d'enquête relative à la participation de fonds français au financement de DAESCH (2799)




N
° 3260

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (n° 2799) DE M. JEAN-FRÉDÉRIC POISSON ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES tendant à la création d’une commission d’enquête relative à la participation de fonds français au financement de DAESCH,

par M. Jean-FrÉdÉric POISSON,

Député

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 7

A. UN OBJET SUFFISAMMENT PRÉCIS 7

B. L’ABSENCE DE COMMISSION D’ENQUÊTE AYANT LE MÊME OBJET AU COURS DES DOUZE DERNIERS MOIS 7

C. L’INEXISTENCE DE POURSUITES JUDICIAIRES EN COURS SUR LES FAITS AYANT MOTIVÉ LE DÉPÔT DE LA PROPOSITION 8

II. L’OPPORTUNITÉ DE LA CRÉATION D’UNE TELLE COMMISSION D’ENQUÊTE 9

A. LES DÉCLARATIONS PRÉOCCUPANTES DE L’ANCIENNE CHEFFE DE LA DÉLÉGATION DE L’UNION EUROPÉENNE EN IRAK 9

B. OUTRE LA CONTREBANDE DE PÉTROLE, DAECH BÉNÉFICIE DE MULTIPLES RESSOURCES EXTÉRIEURES 10

C. MENER UNE GUERRE FINANCIÈRE TOTALE ET EXEMPLAIRE CONTRE DAECH 11

EXAMEN EN COMMISSION 13

ANNEXE – DÉCLARATIONS DE MME JANA HYBÁšKOVÁ AU PARLEMENT EUROPÉEN 21

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le 22 mai dernier, votre Rapporteur a déposé une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative à la participation de fonds français au financement de Daech. Une telle proposition est plus que jamais d’actualité après les attentats perpétrés par cette organisation terroriste au cœur de notre territoire, mais aussi au Liban, en Turquie ou contre un avion civil russe.

Daech, qui a pris le contrôle de vastes espaces à cheval sur l’Irak et la Syrie, impose sa domination barbare sur 8 à 10 millions de personnes. Jamais une entreprise terroriste n’a disposé d’une puissance de feu aussi considérable. Daech pourrait s’appuyer sur environ 25 000 combattants étrangers et détournerait des ressources financières sans précédent, notamment sous la forme d’une contrebande de pétrole de grande ampleur.

La création d’une commission d’enquête viserait à s’assurer que la France participe dans toute la mesure de ses moyens à la guerre financière contre Daech et qu’elle ne porte donc aucune forme de responsabilité, même indirecte, dans les lacunes manifestes qui persistent en la matière.

Conformément à l’article 140 du Règlement de l’Assemblée nationale, il revient à la commission permanente compétente – en l’espèce la commission des Affaires étrangères – de se prononcer sur la recevabilité juridique de cette proposition de résolution et sur l’opportunité de la création d’une telle commission d’enquête.

I. LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

La création d’une commission d’enquête est soumise à plusieurs conditions de recevabilité mentionnées à l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et au chapitre IV de la première partie du titre III de notre Règlement.

En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa du I de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, « les commissions d’enquête sont formées pour recueillir des éléments d’information soit sur des faits déterminés, soit sur la gestion des services publics ou des entreprises nationales, en vue de soumettre leurs conclusions à l’assemblée qui les a créées ». L’article 137 du Règlement précise que les propositions de résolution « doivent déterminer avec précision soit les faits qui donnent lieu à enquête, soit les services ou entreprises publics dont la commission doit examiner la gestion ».

L’intitulé de la commission d’enquête et l’article unique de la proposition de résolution font référence à « la participation de fonds français au financement de Daesch ». L’exposé des motifs précise qu’il s’agit en particulier de « s’assurer que pas une goutte de pétrole terroriste n’est achetée par des sociétés françaises ». Votre Rapporteur estime que l’objet des travaux de la commission d’enquête est défini avec une précision suffisante.

En deuxième lieu, en application du premier alinéa de l’article 138 du Règlement, « est irrecevable toute proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête ayant le même objet qu’une mission effectuée dans les conditions prévues à l’article 145-1 (1) ou qu’une commission d’enquête antérieure, avant l’expiration d’un délai de douze mois à compter du terme des travaux de l’une ou de l’autre ».

Notre Assemblée a traité des questions de terrorisme international dans le cadre de la commission d’enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes, qui a adopté son rapport le 2 juin 2015. Toutefois, cette commission d’enquête ne portait spécifiquement ni sur le financement du terrorisme en général ni sur celui de Daech en particulier.

Par ailleurs, si la commission des Affaires étrangères a constitué un groupe de travail permanent consacré au suivi de la lutte contre le terrorisme international, il ne s’agit pas d’un motif d’irrecevabilité au titre de l’article 138 du Règlement qui ne fait pas mention de tels groupes de travail.

Enfin, en vertu du principe de séparation des pouvoirs, le troisième alinéa du I de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 interdit la création d’une commission d’enquête dont les travaux porteraient « sur des faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours ».

Pour garantir l’application de cette disposition, l’article 139 du Règlement prévoit les dispositions suivantes :

« Le dépôt d’une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête est notifié par le Président de l’Assemblée au garde des Sceaux, ministre de la justice.

« Si le garde des Sceaux fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition, celle-ci ne peut être mise en discussion. Si la discussion est déjà commencée, elle est immédiatement interrompue. »

Saisie par le Président de l’Assemblée nationale, Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la justice, a répondu le 30 juillet 2015 qu’aucune procédure judiciaire n’avait été engagée, à sa connaissance, sur les faits ayant motivé le dépôt de cette proposition de résolution.

*

Dans ces conditions, votre Rapporteur considère que, à ce jour, la proposition de résolution répond aux conditions posées tant par l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires que par les articles 137 à 139 du Règlement de l’Assemblée nationale.

II. L’OPPORTUNITÉ DE LA CRÉATION D’UNE TELLE COMMISSION D’ENQUÊTE

Les auteurs de la proposition de résolution mettent en avant des propos tenus au Parlement européen par Mme Jana Hybášková, qui était alors cheffe de la délégation de l’Union européenne en Irak. S’exprimant sur l’exploitation des ressources pétrolières dans les territoires passés sous le contrôle de Daech en Irak et en Syrie, elle aurait fait les déclarations suivantes : « malheureusement, des États membres de l'Union européenne achètent ce pétrole (...) Je ne peux pas partager avec vous cette information. Ce n'est pas une information publique ».

Dans une réponse en date du 23 janvier 2015 à une question écrite de M. Jean-Luc Mélenchon, député européen, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et vice-présidente de la Commission européenne, Mme Federica Mogherini, n’a pas démenti les propos de Mme Hybášková, expliquant que « le trafic de pétrole par l'EIIL (2) et, ensuite, son éventuel achat non intentionnel par des États membres de l'UE est dû au fait que le pétrole brut fourni aux raffineries provient de différentes zones, dont certaines peuvent être contrôlées par l'EIIL. Il existe un vaste réseau d'intermédiaires et d'entreprises privées à travers l'Iraq qui achètent et revendent du pétrole brut de contrebande (ou non). Ce pétrole étant mélangé, on ne connaît pas exactement sa provenance ».

Interrogé sur les propos de Mme Hybášková, le ministre français de la défense a indiqué dans une réponse écrite du 25 août 2015 que « les services de renseignement du ministère de la défense n'ont à ce jour recueilli aucun élément permettant d'établir l'existence de relations commerciales entre des intermédiaires œuvrant au contact de Daech et des compagnies pétrolières européennes ou des États membres de l'Union » (3). Toutefois, la même réponse du ministre de la défense ne paraît pas exclure cette possibilité, puisqu’elle rapporte que « les islamistes semblent parvenir, par l'intermédiaire de réseaux de contrebande, à introduire du pétrole qu'ils produisent dans des filières d'exportation officielles, rendant très difficile l'identification de sa provenance ».

Le sous-secrétaire d’Etat américain au Trésor pour le terrorisme et le renseignement financier, M. David S. Cohen, précisait le 23 octobre 2014 (4) que Daech fait appel à des réseaux de contrebande anciens et profondément ancrés dans la région. Ces réseaux achètent le pétrole, à un prix très inférieur à celui du marché, le transportent, puis le revendraient notamment à des acteurs du Kurdistan irakien et de Turquie. La question qui se pose est de savoir si le pétrole des terroristes ne finit pas en bout de course dans des circuits français. Comme l’indique l’exposé des motifs de la proposition de résolution, « il convient de s’assurer que pas une goutte de pétrole n’est achetée par des sociétés françaises », y compris involontairement, après avoir transité par des réseaux manifestement très complexes et opaques.

Daech a réussi à s’arroger un trésor de guerre et des revenus considérables, utilisés pour financer son projet de restauration d’un « califat islamique », qui a déjà fait plonger dans les ténèbres d’un autre âge entre 8 et 10 millions de personnes, résidant dans de vastes territoires à cheval sur l’Irak et la Syrie, mais aussi pour mener à l’extérieur de véritables actes de guerre contre ceux que Daech qualifie de « Croisés », c’est-à-dire le monde chrétien ou occidental.

Les revenus annuels « théoriques » de Daech, c’est-à-dire tenant compte de l’ensemble des ressources à sa disposition, pouvaient atteindre 2,9 milliards de dollars à la fin de l’année 2014 (5). D’autres évaluations, à la même époque, étaient comprises entre 1 et 3 millions de dollars par jour, soit jusqu’à environ 1 milliard par an (6), ce qui reste extrêmement élevé. Selon un récent rapport du Groupe d’action financière (GAFI) (7), les principales sources de financement de Daech étaient, par ordre décroissant, les suivantes :

– les ressources tirées de l’occupation territoriale d’une partie de l’Irak et de la Syrie, en particulier le pillage des banques, l’extorsion de fonds, notamment sous couvert de taxation de la population et de l’activité économique, ainsi que le contrôle de puits de pétrole et de raffineries ;

– les rançons collectées suite à des enlèvements ;

– les dons privés, notamment par l’intermédiaire de fondations ou d’associations à but non lucratif ;

– des soutiens matériels, notamment en lien avec le phénomène des combattants terroristes étrangers ;

– des levées de fonds grâce aux moyens modernes de communication.

Bien que Daech soit une organisation terroriste très largement autofinancée grâce à l’exploitation d’importantes ressources dans les territoires situés sous sa domination, ce qui constitue une différence notable par rapport à d’autres groupes relevant de la nébuleuse d’Al-Qaïda, on voit bien que les financements sont loin d’être dépourvus de tout lien avec l’extérieur, en particulier la contrebande de pétrole et d’autres ressources naturelles ou agricoles, le trafic d’antiquités et les dons privés. Ce sont autant de domaines dans lesquels il convient de s’assurer qu’aucun acteur français ne contribue directement ou indirectement au financement de Daech.

Outre des actions politico-militaires qui sont plus que jamais indispensables pour mettre en échec la stratégie de contrôle territorial de Daech, des mesures destinées à endiguer l’afflux des combattants étrangers et des efforts en matière de lutte contre la propagande et la radicalisation, il faut s’attaquer avec la même détermination aux financements dont cette organisation peut bénéficier pour maintenir sous sa coupe des millions de personnes en Irak et en Syrie, et pour commettre à l’étranger des actions terroristes qui s’apparentent, par leur ampleur, à de véritables actes de guerre.

Il s’agit d’une obligation juridique qui résulte notamment de plusieurs résolutions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations Unies pour lutter contre le financement du terrorisme. La résolution 2199, adoptée le 12 février 2015, réaffirme que « les États sont tenus de veiller à empêcher leurs nationaux et les personnes se trouvant sur leur territoire de mettre à la disposition de l’EIIL, du Front el-Nosra ou d’autres personnes, groupes, entreprises et entités associés à Al-Qaida tous fonds, autres avoirs financiers ou ressources économiques, y compris pétrole, produits pétroliers, unités de raffinage modulaires, matériels connexes et autres ressources naturelles, qui ont été repérés comme leur étant destinés, comme ayant été recueillis pour leur compte, ou comme étant censés servir leurs intérêts, ainsi que tous fonds ou avantages négociables découlant de ces ressources ».

C’est aussi, évidemment, une responsabilité morale et politique devant laquelle un pays comme le nôtre ne saurait se dérober. Comment pourrait-on tolérer que des fonds français contribuent à soutenir Daech dans son entreprise d’asservissement et de persécution de populations entières, notamment des chrétiens d’Orient, et dans ses campagnes d’actes terroristes à l’étranger ? Il importe de s’assurer qu’il n’existe aucune faille dans notre dispositif de lutte contre le financement de Daech.

Dans un rapport établi pour la dernière réunion du G20 (8) à Antalya, les 15 et 16 novembre 2015, le GAFI estime que si la quasi-totalité des Etats ont érigé le financement du terrorisme en incrimination spécifique, les cadres légaux restent souvent incomplets, de même que leur mise en œuvre pratique. Selon les déclarations du ministre des finances, M. Michel Sapin, il faut resserrer les mailles du filet, « qui sont un peu larges aujourd'hui », pour être en mesure de repérer davantage de financements. Dans son communiqué final, le G20 a ainsi chargé le GAFI de lui faire un rapport avant la première réunion des ministres des finances et des gouverneurs de banque centrale en 2016 sur les mesures adoptées par les Etats pour répondre aux faiblesses constatées dans les efforts devant permettre d’assécher les flux financiers liés au terrorisme.

Le Président russe Vladimir Poutine a fait, quant à lui, cette déclaration à l’occasion du sommet d’Antalya : « J’ai donné des exemples, basés sur nos renseignements, du financement de l’Etat islamique par des individus. Nous avons établi que ce financement provient de 40 pays, y compris de certains pays membres du G20. J’ai aussi montré à nos partenaires de nombreuses photos satellites qui montrent très clairement l’ampleur du trafic illégal de pétrole » (9).

Votre Rapporteur veut espérer que la France ne fait pas partie de ces 40 Etats. Il estime qu’une commission d’enquête serait nécessaire pour s’assurer qu’aucun financement français ne bénéficie directement ou indirectement à Daech et pour étudier les mesures complémentaires qui pourraient s’imposer pour veiller à ce que la France mène une guerre financière totale et exemplaire contre cette organisation terroriste.

*

Pour votre Rapporteur, il ressort que la proposition de résolution présentée est juridiquement recevable.

Par ailleurs, les interrogations sur les financements dont bénéficie réellement Daech, les éléments publics laissant penser qu’une participation de fonds européens est susceptible d’exister et les lacunes décelées par le GAFI dans les politiques qui doivent être mises en œuvre pour couper les vivres de Daech, partout dans le monde, rendent cette proposition de résolution parfaitement justifiée.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission procède à l’examen de la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative à la participation de fonds français au financement de Daesch (n° 2799).

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur. Conformément à l’ordonnance de 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et à notre Règlement, trois conditions doivent être réunies pour qu’une commission d’enquête puisse être créée : il faut que son objet soit suffisamment précis, qu’il n’y ait pas eu de commission d’enquête sur le même sujet au cours des douze mois précédents et qu’aucune procédure judiciaire ne soit en cours.

Il s’agit d’étudier l’éventuelle participation de fonds français, publics ou privés, au financement de Daech, de manière directe ou indirecte. Il est beaucoup question, ces derniers temps, de trafic de pétrole, d’objets d’art, de coton et d’autres produits encore. L’objet est suffisamment précis. Ensuite, aucune commission d’enquête n’a été consacrée à cette question au cours des douze derniers mois. Enfin, Mme la garde des Sceaux a confirmé l’été dernier, dans un courrier au Président de l’Assemblée nationale, qu’aucune procédure judiciaire n’était en cours. Les trois conditions de recevabilité sont donc satisfaites.

Sur le fond, Mme Jana Hybášková, alors ambassadrice de l’Union européenne en Irak, a déclaré devant les membres de la commission des affaires étrangères du Parlement européen que des Etats membres achètent du pétrole à Daech. Je joindrai un verbatim de ses propos à mon rapport écrit.

Avec 140 membres du groupe Les Républicains, le président du groupe UDI, Philippe Vigier, et plusieurs autres membres de ce groupe, qui ont cosigné la proposition de résolution, je vous propose de tirer cette affaire au clair. En tant que représentant de la nation française, je n’accepte pas qu’il puisse subsister le moindre doute. Si ces affirmations sont vraies, s’agissant en particulier de la France, il faut le dire et faire des propositions pour résoudre un tel problème. Si ce n’est pas vrai, il importe tout autant de l’établir compte tenu des fantasmes, des imprécisions et des élucubrations qui circulent, dans l’intérêt des débats que nous avons. Dans les deux cas, la procédure de la commission d’enquête est la bonne. Elle correspond aux missions qui sont les nôtres, a fortiori quand le Parlement est plus étroitement associé que jamais aux travaux de l’exécutif sur ces différentes questions dans le cadre de l’état d’urgence.

L’exposé des motifs de la proposition de résolution fait une part assez large à la question du pétrole. Pour avoir eu des contacts avec des experts en matière de stratégie d’énergie et d’achat de pétrole, je sais qu’il y a en réalité de forts doutes sur la possibilité que des acteurs vendent du pétrole à la sauvette. La commission d’enquête permettra d’apporter des clarifications sur le fonctionnement de ce marché. Surtout, il y a d’autres sources de financement : le trafic de personnes, comme nos collègues Jean Glavany et Nicole Ameline l’ont rappelé au début de cette réunion dans le cadre de leur mission d’information sur la Libye, le trafic de drogues ou celui des antiquités et des objets d’arts. La formulation de la proposition de résolution englobe toutes ces questions.

M. Kader Arif. Malgré l’esprit de consensus qui préside ce matin à nos travaux, de nombreux éléments m’amèneraient quand même à rejeter cette proposition de résolution. L’exposé des motifs, très maladroit, fait apparaître une sorte de « guerre des civilisations » et n’évoque pas l’ensemble des victimes. Je n’ai pas non plus trouvé de lien entre l’exposé des motifs et l’article unique de la proposition de résolution.

Par ailleurs, je suggère de ne pas se limiter à d’éventuels financements français, mais de se poser aussi la question au plan européen et international. Selon une réponse du ministre de la défense à une question écrite d’une de nos collègues, aucun élément ne permet aujourd’hui de confirmer les propos de l’ancienne ambassadrice de l’Union européenne en Irak.

Une commission d’enquête pourrait être utile pour apporter des réponses aux préoccupations de nos concitoyens, mais je préfèrerais qu’elle soit portée par le Président de l’Assemblée nationale et qu’une discussion soit engagée avec les différents présidents de groupe. Cela permettrait d’aller au-delà de la commission des affaires étrangères et de faire de la commission d’enquête un moment fort de la vie démocratique de notre pays.

M. Jean-Marc Germain. Les questions posées par le rapporteur sont totalement légitimes. Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, il est très important que la question du tarissement des modes de financement puisse être soulevée. Mais du temps a passé depuis le dépôt de cette proposition de résolution.

Les attentats du 13 novembre dernier doivent donner lieu à des travaux à l’Assemblée, comme ceux du mois de janvier et précédemment l’affaire « Merah », afin de tirer tous les enseignements nécessaires. C’est notre devoir. Dans le moment d’unité nationale que nous vivons, il me paraît nécessaire de définir les contours et les modalités de ce travail en concertation avec les différents groupes politiques de l’Assemblée. Il faut élargir le champ au-delà des éventuels financements français, pour lesquels vous exigez en quelque sorte une preuve négative. Nous devons traiter l’ensemble des questions qui se posent, au-delà même du financement.

C’est pourquoi je propose au rapporteur de retirer sa proposition de résolution dans l’attente de la prochaine Conférence des présidents, qui devrait essayer de définir en commun un plan de travail d’ensemble pour tirer tous les enseignements des attentats.

M. Axel Poniatowski. Je suis surpris par les arguments des précédents intervenants. On a l’impression que l'objet de cette commission d’enquête gêne le groupe socialiste, alors qu'il n’y a rien de partisan, ni rien à cacher, mais seulement des choses à découvrir dans cette affaire. J’estime que les attentats commis il y a quelques jours justifient encore davantage que l’on cherche à en savoir plus sur les sources de financement de Daech.

Comme pour toutes les commissions d’enquête, tous les groupes politiques seront naturellement associés. Cet argument n’est pas recevable.

Enfin, il me semble qu’une commission d’enquête est le seul outil adapté sur un tel sujet. Tous ceux que nous souhaiterons auditionner seront tenus de venir. Si l’on ne créait qu’une mission d’information, cela voudrait dire que l’on ne veut rien savoir en réalité.

Nous maintenons donc cette proposition de résolution, ce qui permettra d’en discuter en séance. Je ne doute pas que tout le monde fera preuve d’esprit constructif sur un tel sujet. Nous verrons de quelle manière le champ pourrait éventuellement être élargi.

M. François Asensi. Il faut assécher les sources de financement de ces barbares. Le Parlement doit jouer son rôle : il faut savoir la vérité sur les éventuelles complicités. Je suis donc pour la création d’une commission d’enquête, mais j’ai des réserves à l’égard de l’exposé des motifs.

Il y a l’extermination des chrétiens, et c’est un sujet auquel je suis très sensible, mais il n’y a pas qu’eux. Les barbares veulent éradiquer tous ceux qui ne se rallient pas à leur propre vision de l’islam. Il faut donc élargir l’exposé des motifs.

Par ailleurs, nous devons aller au-delà de la question d’une participation de fonds français. Plusieurs pays européens pourraient profiter du pétrole de Daech, voire de son coton. Il serait intéressant de savoir si l’on ne vend pas en France des produits issus des champs cotonniers de la Syrie et ayant ensuite transité par la Turquie.

S’il est possible d’élargir cette proposition de résolution, je la voterai volontiers. En l’état actuel, je ne le peux pas.

M. Jacques Myard. Je suis également assez étonné de ces réactions. L'exposé des motifs mentionne clairement qu’« il en va de la responsabilité de notre peuple de demeurer aux côtés des minorités persécutées », ce qui montre bien qu’il ne s’agit pas d’une « guerre de civilisations » mais d’une démarche humanitaire globale.

Une commission d’enquête ne concerne que les citoyens français et pas l’ensemble de la planète : nous n’avons pas pour coutume de convoquer Mao Zedong ou al-Baghdadi. Il n’en demeure pas moins que la question du financement est primordiale. Cette organisation a la prétention d’être un Etat. Elle est dotée d’un budget de 2,7 milliards de dollars, ce qui lui permet de payer ses combattants à hauteur de 500 ou 700 dollars par mois. Une commission d’enquête permettrait de faire toute la lumière nécessaire.

Je suis par ailleurs convaincu de la multiplicité des financements. Un écran a manifestement été constitué par un certain nombre de pays voisins pour faire des affaires de la manière la plus cynique qui soit. Je ne vois pas en quoi cette commission d’enquête pourrait nuire à l’établissement de la vérité. Et puisque nous sommes dans un moment d’unité nationale, permettez-moi de dire que c’est comme l’amour : cela n’existe qu’à travers des preuves.

M. Jean-Jacques Guillet. Je suis étonné des réserves émises par certains de nos collègues. Je comprends dans une certaine mesure que l’on puisse débattre de l’exposé des motifs, même si j’ai signé cette proposition de résolution sans aucun problème tout en étant profondément laïque. Ce texte a été déposé le 22 mai 2015 à un moment où le problème des chrétiens d’Orient se posait au premier chef, ce qui explique sa rédaction.

Refuser aujourd’hui la constitution d’une commission d’enquête serait un très mauvais signal alors que nous sommes dans un moment d’unité nationale. On lit dans les journaux beaucoup de choses sur les sources de financement de Daech : il y a manifestement de la matière. Il faut donc adopter cette proposition de résolution en se centrant sur le texte de son article unique plus que sur l’exposé des motifs.

M. Gwenegan Bui. Je regrette que notre position ne soit pas comprise. Nous voulons connaître la vérité et nous sommes donc favorables à une commission d’enquête. Mais pour qu’elle soit utile, le champ d’investigation ne doit pas être trop restrictif. Il faut tout prendre en compte, non seulement le pétrole, mais aussi l’argent qui passe par la City de Londres ou encore le trafic d’antiquités.

Quant à l’exposé des motifs de la proposition de résolution, je suis plus réticent, car notre intérêt à agir dépasse très largement la seule question des minorités qui sont victimes de Daech ; nous agissons aussi au nom des victimes des attentats du 13 novembre. L’exposé des motifs fait référence à la protection accordée par Saint-Louis et mentionne six fois les chrétiens d’Orient contre trois fois seulement le pétrole ; les mots ont aussi un poids.

Nous voulons travailler ensemble dans un esprit de concorde nationale pour que cette mission soit utile. Il faut lever tous les doutes et rassembler l’ensemble des forces politiques de ce pays.

M. Kader Arif. Je regrette que mes propos aient été mal interprétés. Je le répète, il faut une commission d’enquête, mais qui aurait un champ plus large, serait constituée après un débat entre nos groupes et serait portée par le Président de l’Assemblée nationale.

M. Jean-Marc Germain. Je regrette aussi la manière dont tourne ce débat alors que nous sommes dans un état d’esprit constructif.

M. François Loncle. L’écart entre nos positions n’est pas si grand. Notre seul problème avec la rédaction de M. Poisson est son caractère restrictif. Après les attentats de janvier, il y a eu un accord entre groupes et une décision de la Conférence des présidents pour déboucher sur la commission d’enquête de MM. Ciotti et Menucci, laquelle a fait des propositions très pertinentes. Dans le contexte présent, il nous faut une commission d’enquête, mais avec un champ qui ne soit pas limité aux seuls fonds « français », car le trafic des antiquités, par exemple, c’est en Suisse que cela se passe, voire à Singapour plus marginalement. La Conférence des présidents et les groupes doivent se saisir de la question.

M. Jean-Pierre Dufau. L’écart entre nos positions est effectivement moins grand que les propos tenus ne le font penser. La proposition de résolution a été déposée en mai et des évènements dramatiques sont survenus depuis lors. Nous devons élever le débat à la hauteur de nos responsabilités et le porter au niveau de l’ensemble de l’Assemblée nationale. Constituer la commission d’enquête selon la rédaction proposée par M. Poisson serait perçu comme maladroit par la Nation ; nous ne pouvons pas nous en tenir à la seule question des fonds « français » et au seul financement par le pétrole. Nous proposons que la Conférence des présidents se saisisse de la question et que le Président de l’Assemblée nationale propose la création de la commission d’enquête. Nous pourrons ainsi lui conférer toute la solennité qu’elle mérite tout en vous donnant satisfaction.

M. le rapporteur. Si je comprends bien l’argumentation, c’est donc ça qu’il faut faire, mais pas maintenant et pas avec les gens qui le proposent.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Nous essayons tous de nous comprendre et je ne crois pas que ce type de remarques soit vraiment très bienvenu.

M. le rapporteur. J’en suis désolé, Madame. C’est ma liberté de ton.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Certes. C’est la mienne aussi. Je vous dis juste comment je reçois ce que vous dites.

M. le rapporteur. Je suis désolé si mes propos ont pu froisser mais vous comprendrez que je sois un peu étonné de ce que j’entends depuis tout à l’heure. Peut-on me dire ce qu’il y a de faux dans l’exposé des motifs ? J’ai mal reçu, moi aussi, les propos de certains collègues qui me prêtent des intentions absentes de l’exposé des motifs, si on veut bien le lire attentivement.

Comment élargir cette commission d’enquête ? Peut-on enquêter sur des faits commis par des personnes privées ou publiques de nationalité étrangère ? Non. Ce n’est pas l’ancienne garde des Sceaux qui me contredira, cela relève de commissions rogatoires ou de mandats d’arrêts internationaux. Une personne étrangère peut accepter librement de venir devant une commission d’enquête, mais elle n’est pas tenue de déférer à une convocation et elle ne dépose pas sous serment. Même si la commission d’enquête est constituée dans le cadre universel de l’Assemblée nationale, comme vous semblez le souhaiter, elle sera nécessairement limitée à des faits commis sur le territoire français.

Ensuite, je ne connais pas à l’Assemblée nationale d’instance où l’on n’associe pas l’ensemble des groupes politiques, en assurant un équilibre entre eux. Une commission d’enquête est à l’image de l’Assemblée nationale. Ce ne sera pas non plus une commission d’enquête de la commission des affaires étrangères, même si la proposition de résolution lui est renvoyée. Il y a manifestement des incompréhensions dans les remarques que j’ai entendues.

La proposition de résolution fait référence à la participation de fonds français au financement de Daech. Comment élargir le champ pour faire en sorte que tous les sujets nécessaires puissent être traités ? Il y a un équilibre à tenir. Il faut que l’objet de la commission d’enquête soit suffisamment précis pour des raisons de recevabilité.

Je ne vais pas retirer la proposition de résolution que j’ai déposée. Je remercie d’ailleurs les membres de mon groupe pour leur soutien à cette initiative. Il y aura un débat en séance publique le 3 décembre et chacun pourra faire valoir ses arguments devant l’ensemble de la représentation nationale. J’ai la possibilité d’amender la proposition de résolution en tant que de besoin. Je tiendrai compte des remarques qui ont été formulées, mais je ne peux pas amender l’exposé des motifs. Je suis désolé s’il a pu blesser certains d’entre vous, car ce n’était pas mon intention. Je voudrais dire à mon cher collègue Arif que nous nous connaissons suffisamment pour qu’il m’exempte des reproches qu’il m’a adressés.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Une commission d’enquête ne peut pas convoquer un étranger, mais rien ne l’empêche de s’intéresser à des agissements étrangers et de demander à des Français de témoigner. Il n’y a aucun obstacle à élargir le champ de la commission d’enquête.

M. Jean Glavany. Permettez-moi de m’exprimer à mon tour très franchement, comme à mon habitude. Soit on fait du droit, soit on fait de la politique. Si on fait du droit, et j’ai bien entendu la leçon de notre collègue Poisson, celui-ci nous a fait part d’une réponse de la garde des Sceaux datant de juillet dernier. Imaginez-vous que le parquet anti-terroriste n’enquête pas sur le financement de Daech en France depuis ce qui s’est passé le 13 novembre ? En droit, la constitution d’une telle commission d’enquête pourrait être contestable. Faisons plutôt de la politique.

On peut le faire de manière politicienne ou avec le sens de l’intérêt général. J’ai été choqué que certains de nos collègues sous-entendent que si nous ne voulons pas de cette commission d’enquête, c’est que nous avons quelque chose à cacher. Les députés socialistes de la commission des affaires étrangères auraient bien entendu quelque chose à cacher sur le financement de Daech ! Ce procès d’intention est extrêmement choquant. On pourrait vous renvoyer la balle politicienne en affirmant que votre insistance s’explique par la volonté de faire un coup politique.

Oublions plutôt ces deux procès d’intention et essayons de regarder l’intérêt général. Dans les circonstances dramatiques que nous vivons, et ayant à l’esprit le rassemblement que nous essayons de faire vivre, nous vous proposons de constituer une commission d’enquête dont l’objet serait élaboré ensemble, sous l’égide de la Conférence des présidents. Nous n’avons aucun but politicien. C’est une proposition honnête dans l’intérêt de la vérité et des droits du Parlement, sans rabaisser le débat.

M. Benoît Hamon. Connaissant l’érudition de notre excellent collègue Jean-Frédéric Poisson, je voudrais lui faire une remarque. L’exposé des motifs, outre qu’il est sans doute un peu décalé dans le temps, est un peu gênant par le lien établi entre Saint-Louis et ce qu’on ferait aujourd’hui pour protéger, à juste titre, les minorités persécutées. Saint-Louis a conduit la Septième Croisade en 1248, alors que nous ne prétendons en aucune façon être en croisade aujourd’hui. L’exposé des motifs comporte aussi une référence à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, mais le lien que je viens de rappeler est problématique dans ce qui constitue la préfiguration d’une commission d’enquête. Nous y sommes favorables, je le répète, sous réserve des remarques que nous avons formulées.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Je crois que ce débat était indispensable, car le sujet que vous avez soulevé est un vrai sujet, Monsieur le rapporteur. Mais vous comprenez les réticences, que je partage, sur les formulations retenues et le format. Je m’associe au souhait d’une commission d’enquête dont le champ serait élargi et intéresserait des membres d’autres commissions, notamment celles des finances et des lois.

J’ai de bonnes raisons de penser que cette question sera inscrite à l’ordre du jour de la Conférence des présidents de la semaine prochaine et que tous les groupes politiques pourront ainsi en débattre dans ce cadre. Il ne s’agit pas de rejeter le principe d’une commission d’enquête sur le financement de Daech. Je pense qu’il n’y a pas lieu de polémiquer. Nous sommes dans une attitude constructive.

La proposition de résolution n’étant pas retirée, je vais la mettre aux voix et nous en débattrons en séance le 3 décembre prochain.

Contre l’avis du rapporteur, la commission rejette la proposition de résolution.

*

* *

En conséquence, la commission des Affaires étrangères vous demande de rejeter la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête relative à la participation de fonds français au financement de DAESCH (n° 2799).

ANNEXE

DÉCLARATIONS DE MME JANA HYBÁšKOVÁ AU PARLEMENT EUROPÉEN

Extraits de l’intervention de Mme Jana Hybášková, alors cheffe de la délégation de l’Union européenne en Irak, devant la commission des affaires étrangères du Parlement européen, le 2 septembre 2014 (verbatim) :

« Whatever me, us and you can do to empower this new government would be the way how to defeat ISIL […]. The key issue for Islamic State is oil. I am sure, if not the key issue, it is the first key issue. Whatever we can do and you can do as parliamentarians [is] to come up with smart legal solutions on sanctions for whoever is trading this illicit oil, it's of utmost importance. […]. Unfortunately we have European Member States buying this oil.

[…] Our member states are now arming Kurds and delivering arms to them, in totally uncoordinated manner, which is a very complex issue. We have a dire humanitarian situation, we have 250,000 unprotected children, we have 650 schools which will not be able to be opened, we will not have a school year in Iraq. We have 600,000 Yazidis who cannot stay in Iraq and we have, all together, more than one million IDPs who are doing one thing : trying to find a [shadow].

[…] About Kurdish independence, please, please, please don’t support, I mean support the referendum process, support the solution according to the Mistura plan for disputed territories, but to create now new independent state will mean the total collapse of all the Middle East. So please, please, support them and empower them to stay in Iraq because this is the only guarantee to their physical integrity, to be so blunt with you. »

Traduction de courtoisie :

« Tout ce que moi, nous et vous pouvons faire pour soutenir ce nouveau gouvernement, ce serait un moyen de défaire l'EIIL […]. La question essentielle pour l'Etat islamique, c'est le pétrole. J'en suis convaincue, si ce n'est pas la question clé, alors c'est la première des questions clés. Tout ce que nous pouvons faire et tout ce que vous pouvez faire en tant que parlementaires pour apporter des solutions juridiques intelligentes en matière de sanctions contre tous ceux qui font le commerce de ce pétrole illicite est d'une importance capitale […]. Malheureusement, certains Etats membres européens achètent ce pétrole.

[…] Nos Etats membres arment désormais les Kurdes, leur livrent des armes, de manière totalement non-coordonnée, et c'est un problème très complexe. Nous sommes face à une situation humanitaire épouvantable, 250 000 enfants ne sont pas protégés, nous avons 650 écoles qui ne pourront pas ouvrir leurs portes, nous n'aurons pas d'année scolaire en Irak. Nous avons 600 000 Yézidis qui ne peuvent pas rester en Irak, et nous avons, au total, plus d'un million de personnes déplacées dans le pays, qui font une chose : essayer de trouver [de l'ombre] *.

[…] En ce qui concerne l'indépendance kurde, je vous en prie, s'il vous plaît, de grâce, ne la soutenez pas. Soutenez le processus du référendum, soutenez la solution du plan de Mistura pour les territoires contestés, mais créer aujourd'hui un nouvel Etat indépendant, cela signifierait l'effondrement complet de tout le Moyen-Orient. Donc, je vous en prie, soutenez-les et donnez-leur les moyens de rester en Irak, parce que c'est la seule garantie pour leur intégrité physique, pour être tout à fait claire avec vous. »

* C'est-à-dire un abri (NDT)

© Assemblée nationale