N° 3353 - Rapport de M. Jean-Claude Guibal sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant n° 6 entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco à la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale (n°2586)




N
° 3353 (rectifié)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 décembre 2015

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI autorisant l’approbation de l’avenant n° 6 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco à la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale.

PAR M. Jean-Claude GUIBAL

Député

——

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 2586

SOMMAIRE

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Pages

A. LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO 7

1. Des relations bilatérales intenses dont la clé de voute est la commission annuelle de coopération franco-monégasque 7

2. L’influence de la Principauté dépasse de loin sa taille et elle partage avec notre diplomatie des engagements communs 8

a. Monaco est devenue un membre actif de la communauté internationale 8

b. Les questions de développement, de protection de l’environnement ou encore de défense de la diversité culturelle et de la francophonie nous rapprochent 9

c. La France participe aussi au rapprochement économique de la Principauté et de l’Union européenne 10

3. Le bassin économique monégasque est générateur d’emploi pour des dizaines de milliers de salariés français 11

a. Une économie particulièrement dynamique 11

b. La Principauté est une zone d’attractivité économique qui rayonne sur toute la région 12

B. L’AVENANT PERMETTRA LA PRISE EN CHARGE DES PRESTATIONS DES TÉLÉTRAVAILLEURS FRANÇAIS TRAVAILLANT POUR LE COMPTE D’ENTREPRISES ÉTABLIES À MONACO 14

1. La convention de sécurité sociale de 1952 ne permettrait pas de couvrir les cas de télétravail 14

a. La volonté monégasque de développer ses activités de télétravail 14

b. La convention de sécurité sociale du 28 février 1952 qui lie la France et Monaco, ne permettait pas de couvrir les cas de télétravail 14

2. Le présent avenant vient combler ce vide juridique 15

a. La possibilité pour les salariés exerçant leur activité de télétravail à Monaco mais résidant en France d’être affiliés au régime de sécurité sociale de la Principauté 15

b. Le partage, en contrepartie, de la moitié des frais de santé des personnes titulaires d’une pension de retraite ou d’une rente d’accident du travail 15

c. Des retombées positives en termes d’emploi et de conditions de travail 16

CONCLUSION 19

EXAMEN EN COMMISSION 21

ANNEXES : ANNEXE N° 1 : 23

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 23

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 25

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi vise à approuver le sixième avenant à la convention de sécurité sociale du 28 février 1952 qui lie la France à la Principauté de Monaco.

En effet, la Principauté a fait le vœu de développer son économie, tout en desserrant les contraintes liées à l’exiguïté de son territoire et au coût des loyers, notamment par le développement du télétravail.

Dans cette perspective, une modification de la convention de sécurité sociale avec la France était nécessaire, pour permettre l’affiliation au régime monégasque des télétravailleurs exerçant depuis leur domicile en France pour des entreprises établies à Monaco.

Les négociations ont été menées pendant près de trois ans, avec l’objectif, pour les autorités françaises, de parvenir à un accord qui n’aggrave pas le déséquilibre pour la sécurité sociale française entre financement et dépenses, tel qu’il résulte de la convention franco-monégasque. Un accord a pu être trouvé au printemps 2013.

L’aboutissement de ces négociations a permis de finaliser fin 2013 l’avenant à la convention franco-monégasque sur la sécurité sociale et à l’arrangement administratif général pris pour celle-ci. L’avenant a été signé à Monaco le 18 mars 2014, à l’occasion de la Commission mixte franco-monégasque de sécurité sociale.

L’adoption de ce texte devrait donc œuvrer au renforcement des liens économiques qui nous unissent à la Principauté, et devrait avoir un impact positif sur l’emploi dans la région, tout en améliorant les conditions de vie et de travail des salariés concernés.

Les relations politiques entre la France et Monaco ont profondément évolué depuis quelques années, dans le sens d’une souveraineté renforcée de la Principauté.

Trois étapes permettent d’en rendre compte :

– la signature du Traité d’amitié de 2002.

Prenant la place du traité « d’amitié protectrice » de 1918, le traité d’amitié et de coopération du 24 octobre 2002 est venu réaffirmer la communauté de destin qui lie la France et la Principauté de Monaco et dont témoigne la mise en œuvre de nombreuses coopérations entre les deux Etats.

la signature de la convention de coopération administrative de 2005.

Faisant suite au traité d’amitié et de coopération du 24 octobre 2002 qui a profondément rénové les singulières relations franco-monégasques, les deux Etats ont signé à Paris le 8 novembre 2005 trois nouveaux instruments techniques qui forment un « triptyque de modernisation ».

Après les conventions sur l’entraide judiciaire et la coopération administrative, entrées en vigueur respectivement le 1er novembre 2008 et le 1er janvier 2009  (1) , l’accord sous forme d’échange de lettres sur la garantie des investisseurs, aujourd’hui soumis à l’Assemblée nationale, constitue le dernier volet de ce triptyque.

l’établissement de nos relations diplomatiques, avec élévation de notre Consulat à Monaco au rang d’Ambassade depuis le 1er janvier 2006.

Bien que ces deux Etats soient pleinement souverains, leurs rapports ne sont pas ceux de deux voisins ordinaires. La « communauté de destin » proclamée dans le traité d’amitié et de coopération de 2002 est loin d’être vide de sens ; elle se vit effectivement jour après jour, dans tous les domaines. Une série d’accords datant de 1963 mais actualisés périodiquement illustre cette proximité singulière entre les deux Etats : conventions fiscale, douanière, de voisinage, mutuelle, sur les assurances, sur les relations postales, télégraphiques et téléphoniques.

La Commission annuelle de coopération franco-monégasque (CCFM) est la clef de voûte de notre très intense relation bilatérale. Elle sert de cadre aux consultations entre nos deux pays sur les situations d’intérêt commun. Les deux dernières réunions de la Commission ont eu lieu le 16 octobre 2013 à Paris et le 21 avril 2015 à Monaco.

Lors de cette 8ème édition, les échanges ont porté sur de nombreux dossiers d’intérêt commun, et notamment sur le processus de rapprochement avec l’UE engagé par Monaco (avec San Marin et Andorre et qui doit conduire à la conclusion d’un accord d’Association).

Trois autres réunions bilatérales rythment notre relation :

– la Commission chargée des questions locales de coopération transfrontalière entre Monaco et la France, créée en 2006 pour rechercher une gestion plus efficace des dossiers de proximité et de voisinage, notamment avec la création de groupes de travail par thèmes, qui a été réactivée en juillet 2013 ;

– la Commission bilatérale de suivi de la convention de sécurité sociale (enjeux sanitaires importants) ;

– la Commission mixte sur la fiscalité (suivi de la convention fiscale de 1963 et notamment du compte de partage de la TVA).

En matière de coopération scientifique, culturelle et éducative, on peut souligner l’importance de notre partenariat, qui a vocation à se développer, en matière de recherche.

La recherche bénéficie en effet, dans la Principauté, de conditions propices. De nombreuses entreprises de secteurs tels que l’alimentaire, la plasturgie, les cosmétiques et la pharmacologie ont installé à Monaco leurs centres de recherche et développement. Par ailleurs, le Centre scientifique de Monaco (CSM), créé en 1960, est dédié à la conservation et à la protection de la vie marine. Il est en charge de l’Observatoire de météorologie créé par le Prince Albert 1er et dispose de deux laboratoires dédiés à la neurobiologie et aux pollutions marines. Enfin Monaco participe au programme-cadre pour la recherche et l’innovation de l’Union européenne, « Horizon 2020 », en tant que pays tiers.

L’influence de la Principauté dépasse de loin sa taille (création de nombreuses missions diplomatiques, engagement sur les problématiques environnementales ; présence dans les organisations internationales ; francophonie ; Jeux Olympiques).

Si le Prince Rainier III a su orienter l’économie et les activités de la principauté vers des secteurs clés (bâtiment, finance, terrains gagnés sur la mer) ; depuis son avènement, le Prince Albert II a, quant à lui, donné une impulsion majeure à la présence et à l’action internationale de la Principauté.

Monaco est ainsi devenue aujourd’hui un membre actif de la communauté internationale.

Membre de l’ONU depuis 1993 et du Conseil de l’Europe depuis 2004, Monaco est aussi membre de l’OSCE, de l’Organisation Internationale de la Francophonie et de nombreuses organisations spécialisées de l’ONU.

Après son élection en 2009 comme membre du Conseil exécutif de l’UNESCO jusqu’en 2013, la Principauté a décidé, en février 2010, de nommer un Ambassadeur extraordinaire et délégué permanent auprès de l’UNESCO. Depuis 2006, elle a renforcé son réseau diplomatique et consulaire. Ainsi, la Principauté a notamment ouvert une dizaine d’ambassades en Europe.

Les questions humanitaires et de développement nous rapprochent.

La Principauté a en effet mis en place une politique originale d’action humanitaire reposant d’une part sur des fonds privés (Fight Aids Monaco, présidée par la Princesse Stéphanie, AMADE, association mondiale des amis de l’enfance, présidée par la Princesse Caroline de Hanovre), et d’autre part, sur fonds publics par un accroissement de l’aide au développement. Le Gouvernement monégasque souhaite atteindre l’objectif de 0,7 % du RNB consacré à ces dépenses à l’horizon 2015.

La francophonie est un autre axe majeur de coopération de la France avec Monaco.

Le Français est la langue officielle de la Principauté. Les Monégasques disposent d’une langue nationale, le monégasque, dont l’enseignement dans les établissements publics est obligatoire jusqu’en classe de cinquième et optionnel à partir de la classe de quatrième.

Une centaine de nationalités étant représentée à Monaco, la langue française est, pour beaucoup de résidents, une seconde langue, même si cette place n’est pas acquise. En effet l’influence de l’anglais et de l’italien seraient grandissantes. La Principauté applique d’ailleurs les mêmes programmes éducatifs que la France. Radio Monte Carlo et Télé Monte Carlo assurent la diffusion de programmes en langue française dans les pays du pourtour méditerranéen.

Monaco a adhéré à l’Organisation internationale de la Francophonie dès sa création en 1970. La principauté en est un membre très actif. Le Prince souverain assiste régulièrement aux sommets et était présent à Dakar (29 et 30 novembre 2014) ; Monaco participe activement aux instances politiques de la Francophonie multilatérale (incluant l’élaboration du contenu politique de chaque sommet).

Monaco est aussi un précieux partenaire de la France sur les questions environnementales.

C’est un centre scientifique actif et un partenaire engagé sur les questions environnementales et le développement durable. Outre le musée océanographique et le centre scientifique, créé en 1960, Monaco accueille le laboratoire de l’environnement marin de l’AIEA et le bureau hydrographique international créé en 1921.

Par ailleurs, en juin 2006, le Prince Albert II de Monaco a décidé de créer sa propre fondation afin de répondre aux menaces qui pèsent sur l’environnement (changement climatique ; énergies renouvelables ; biodiversité ; l’eau et lutte contre la désertification). Le Prince Albert, souhaitant également rendre hommage à son aïeul Albert 1er et sensibiliser l’opinion internationale au changement climatique, a été le premier chef d’État à atteindre le pôle nord géographique après une expédition à chiens de traîneau en 2006 et le pôle sud en 2009.

L’engagement du Prince souverain sur les questions environnementales, et en particulier polaires, s’est notamment illustré lors du Rio+20, avec le soutien de Monaco à la création d’une véritable organisation mondiale de l’environnement. En mars 2015, le Prince a inauguré à Paris, avec le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, une conférence sur « L’Arctique, sentinelle avancée du changement climatique ».

Très mobilisé dans le cadre de la COP 21, où il souhaite que des objectifs ambitieux soient adoptés, le Prince a également participé au Sommet des Consciences organisé à Paris le 21 juillet dernier.

Enfin, la France joue un rôle de catalyseur dans le rapprochement économique de la Principauté avec l’Union européenne.

État tiers vis-à-vis de l’Union européenne, Monaco est de facto incluse, à plusieurs égards, dans l’espace de l’UE par son union douanière avec la France. Elle est aussi associée à l’espace Schengen, conformément à la convention franco-monégasque de voisinage du 18 mai 1963, modifiée suite aux accords Schengen.

Ces liens sont consolidés par trois accords bilatéraux UE-Monaco : la convention monétaire de 2001, modifiée en 2011, qui permet à Monaco de bénéficier d’un quota important d’émission de pièces en euros ;un accord commercial conclu avec Monaco en 2003, qui couvre les produits et dispositifs médicaux et les cosmétiques ; et un accord de 2005 sur la fiscalité de l’épargne, qui traduit la volonté de la Principauté de ne pas se mettre à l’écart de la coopération internationale, tout en préservant l’intérêt de sa place financière, notamment en garantissant le secret bancaire, sauf en matière pénale.

Par ailleurs, le Conseil de l’UE a encouragé, depuis décembre 2010, « la négociation d’un ou plusieurs accords-cadres d’association » avec Andorre, Monaco et San Marin, en vue d’une plus forte intégration de ces trois Etats au sein du marché intérieur.

La Commission et le Service européen d’action extérieure (SEAE) ont rendu leurs propositions au mois de mars 2014 et le mandat de négociation a été adopté par le Conseil en décembre 2014. Les négociations entre l’UE et les trois États de petite dimension territoriale (Andorre, Monaco, Saint Marin) ont officiellement débuté le 18 mars 2015, à Bruxelles.

L’économie monégasque se caractérise par son dynamisme, sa forte réactivité à la conjoncture internationale, et, compte tenu de la petite dimension de la Principauté, son lien étroit avec les résultats de quelques gros acteurs économiques locaux (industrie, construction, immobilier, commerce de gros, hôtellerie).

Sur la période 2006-2014, la croissance moyenne annuelle de Monaco a été d’environ + 4 % par an, effaçant le fort recul (– 11 %) enregistré en 2009 dans le contexte de la crise de la zone euro. Avec + 7,2 % de croissance du PIB en 2014, l’économie de Monaco a poursuivi sur la lancée de 2013 (+ 9,6 %) après un point bas en 2012 (+ 1 %).

L’économie monégasque est assez diversifiée : commerces de détail, professions libérales, services, industries, tourisme, immobilier, travaux publics, banques et finances.

Le commerce de détail concerne plus de 1 000 établissements et représente un chiffre d’affaires de près de 2 milliards d’euros. Le secteur des services est particulièrement varié.

Le secteur bancaire monégasque compte 35 banques (18 monégasques et 12 succursales françaises notamment), 3 sociétés financières (dont 2 françaises), 62 fonds communs de placements monégasques qui gèrent plus de 5 milliards d’euros d’actifs et 51 sociétés de gestion de fonds. Ce secteur d’activité emploie plus de 3500 personnes, soit 7 % des salariés de la Principauté et ses ressources s’élèvent à 102 milliards d’euros fin 2013.

Les secteurs du BTP et de l’industrie sont également dynamiques. Enfin, le tourisme reste un secteur phare de l’économie monégasque.

Concernant le commerce extérieur (inclus dans le territoire statistique français), le solde des échanges a été positif en 2013 (+ 22 millions) pour la première fois depuis 2009 grâce à une croissance beaucoup plus marquée des exportations (+ 49 %) que des importations (+ 33,5 %). L’UE hors France est le principal partenaire commercial de Monaco (48 % des exportations monégasques et 61 % des importations), l’Allemagne et l’Italie étant les principaux pays commerçant avec la Principauté. Les produits industriels, les équipements électriques et le matériel de transport représentent près de 85 % des exportations monégasques tandis que les importations concernent principalement les produits issus de l’industrie textile (17 %), des autres industries manufacturières (16 %) et de la fabrication de matériels de transport (15 %).

Nos liens privilégiés avec la Principauté sont donc aussi de nature économique : en effet, la Principauté constitue, à l’est du Var, un centre d’expansion de l’activité et un bassin important d’emplois (100 000 personnes vivent de la prospérité économique de Monaco).

Votre rapporteur souhaite ici insister tout particulièrement sur l’économie numérique et le développement durable, qui ont vocation à constituer des axes forts de notre rapprochement économique.

En effet, le gouvernement princier exprime désormais clairement sa volonté de faire de Monaco une « ville intelligente et durable ».

La Principauté a d’abord souhaité renforcer son attractivité en matière de recherche et d’innovation, indissociable de son proche voisinage français. Dès 2012, la commission de coopération franco-monégasque avait donné un accord de principe à la constitution d’un groupe de travail entre Monaco, la Métropole Nice-Côte d’azur et la technopole Sophia-Antipolis, dans le domaine de la société numérique et des technologies de l’information.

Le premier résultat fut l’adhésion, en juin 2013, de la Principauté au GIE Eurecom de Sophia-Antipolis, qui regroupe industriels et grandes écoles. Monaco peut ainsi disposer d’un incubateur et a ouvert, sur son territoire, un laboratoire sur la sécurité numérique.

Plus longue à se mettre en place, la coopération avec la Métropole Nice-Côte d’Azur, les deux parties ayant annoncé lors de la dernière réunion de la commission transfrontalière (6 février 2015) la prochaine signature d’une lettre d’intention de coopération dans le domaine numérique, en vue d’établir une « métropole French tech » incluant des avancées en termes de « ville intelligente », de centres de données et d’amélioration des réseaux.

Sur son territoire, la Principauté a aussi développé les outils nécessaires à la création d’une ville intelligente. Le Gouvernement princier a présenté, dans le budget 2015, une Agence monégasque de sécurité numérique, dotée de 1,5 millions d’euro. Parallèlement, une lettre d’intention de coopération aurait été signée avec notre Agence nationale de sécurité des systèmes d’information.

En matière d’infrastructures numériques, un soutien au développement des réseaux à grande capacité est en place, facilité par le monopole de la société Monaco Telecom. En outre, un deuxième centre de données de Monaco Telecom, Monaco Datacenter, exploité conjointement avec la société Telis et certifié « Green IT » par APC-Schneider Electric, avec notamment une technologie de refroidissement à l’eau de mer, a été inauguré en 2013.

Enfin, référence en termes événementiels, la Principauté entend développer son image d’excellence dans des domaines qui sont aussi pourvoyeurs d’emploi, notamment dans les domaines :

– sportif (Grand Prix de Formule 1, créé en 1929, qui attire chaque année plus de 50 000 spectateurs, et 500 millions de téléspectateurs, et génère un chiffre d’affaires de plus de 70 millions d’euros ; le tennis avec le tournoi des Master Series de tennis de Monte Carlo, environ 100 000 spectateurs ; le football  avec le club de l’AS Monaco de réputation internationale) ;

– culturel (orchestre philharmonique, opéra de Monte-Carlo, centre culturel et de congrès, et le Festival International du cirque, présidé par la Princesse Stéphanie, qui attire en janvier de chaque année plus de 30 000 spectateurs) ;

– touristique (secteur florissant de l’économie monégasque, celui-ci repose sur deux forces d’attraction anciennes, d’une part, la Société des Bains de Mer de Monaco, créée en 1856, qui gère la plupart des établissements de loisirs et d’hôtellerie de la Principauté et d’autre part le Casino, créé la même année par le fondateur de la SBM, François Blanc, et inauguré en juillet 1865).

Comme le rappelle l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, les autorités monégasques souhaitent développer davantage les activités économiques de la Principauté en desserrant les contraintes liées à l’exiguïté du territoire et au coût des loyers.

Pour ce faire, elles souhaitent favoriser le recours par les entreprises monégasques au télétravail, en adoptant un cadre législatif adapté et en soumettant à la législation de sécurité sociale monégasque les salariés exerçant en télétravail pour des entreprises établies à Monaco.

Cette situation concernerait principalement les personnes résidant en France (80 % des salariés travaillant actuellement à Monaco, soit 36 045 salariés sur 47 759, résident en France) et, dans une moindre mesure, en Italie.

Comme toutes les conventions internationales de sécurité sociale, la convention franco-monégasque de 1952 vise à assurer le maintien et la coordination de la protection sociale des travailleurs d’un Etat lorsqu’ils vont exercer leur activité professionnelle sur le territoire de l’autre Etat et à conserver leurs droits lorsqu’ils sont à la retraite. 

La convention de sécurité sociale entre la France et la Principauté de Monaco de 1952 prévoit l’assujettissement des travailleurs salariés à la législation d’exercice de l’activité.

Elle précise par ailleurs que les travailleurs à domicile sont soumis à la législation du lieu de leur domicile. Les télétravailleurs exerçant leur activité en France devraient donc être affiliés à la législation française de sécurité sociale.

La situation de télétravailleurs qui exerceraient leur activité pour partie en France et pour partie à Monaco, comme le prévoit le projet de loi monégasque sur le télétravail, n’est donc pas réglée par l’actuelle convention franco-monégasque et impliquerait une affiliation dans chacun des États.

Il fallait donc modifier la convention en ce sens, c’est l’objet du présent avenant.

Le préambule rappelle le souhait des deux Parties d’assurer la modernisation des dispositions de la Convention de sécurité sociale qui les lient en prenant en compte le développement de nouvelles formes de travail.

L’article 1er complète le paragraphe 2 de l’article 3 de la convention du 28 février 1952 par un alinéa h) qui dispose que « les travailleurs salariés ou assimilés, résidant dans l’un des deux pays, qui exercent, pour le compte exclusif d’un employeur dont le siège social ou le domicile est établi dans l’un des deux États, une activité en télétravail depuis le territoire de l’autre État, sont soumis à la législation de sécurité sociale de l’État où l’employeur a son siège social ou son domicile, à condition d’effectuer au moins un tiers de leur temps de travail hebdomadaire dans les locaux de l’employeur. »

Concrètement, cela signifie que les salariés en télétravail d’une entreprise établie à Monaco, résidant en France, pourront être affiliés au régime de sécurité sociale de la Principauté. L’inverse est aussi vrai. Cependant, cette disposition devrait principalement concerner des salariés résidant en France.

Il est précisé que le salarié devra effectuer au moins un tiers de son temps de travail hebdomadaire dans les locaux de l’employeur, ce afin d’éviter tout détournement de la législation.

Enfin, l’étude d’impact précise que la Principauté s’engage à ne pas accueillir de transferts de siège de sociétés spécialisées dans le télétravail installées en France, de manière à prévenir les délocalisations d’entreprises.

L’assujettissement des télétravailleurs résidant en France au régime monégasque prive les régimes de sécurité sociale français des cotisations sur les salaires perçus mais, pendant leur activité, la charge des prestations incombe au régime monégasque.

En revanche, pour éviter de faire supporter au régime français de sécurité sociale la charge intégrale des soins de santé des télétravailleurs devenus retraités, alors même que cette charge est la plus importante, en application de la convention de sécurité sociale franco-monégasque, la France a négocié le partage de la prise en charge des soins des télétravailleurs devenus retraités.

L’avenant prévoit ainsi la prise en charge par moitié par les caisses de sécurité sociale françaises et monégasques des soins de santé des pensionnés qui auront été télétravailleurs et de leurs ayants-droit sous réserve d’une durée de télétravail à Monaco d’au moins 15 ans, au moyen d’un compte de partage.

C’est l’objet de l’article 2 du projet de loi, qui vient compléter l’article 10 de la convention du 28 février 1952 par un paragraphe 5 qui dispose que « par dérogation aux dispositions des paragraphes 1 et 2 de l’article 10, la charge des prestations en nature des assurances maladie et maternité des titulaires de pensions ou de rentes, ainsi que celles de leurs ayants droit, est partagée par moitié entre les deux États contractants, à condition que ces titulaires aient exercé, de manière continue ou discontinue, une activité en télétravail d’une durée minimum de quinze années, les soumettant à la législation de l’État autre que celui de leur résidence, en application de l’exception mentionnée au nouveau paragraphe 2 h) de l’article 3. »

L’article 2 prévoit également qu’un « arrangement administratif fixe les modalités du règlement financier relatif au partage de la charge ». Selon l’étude d’impact, il est difficile pour l’heure d’évaluer l’impact financier de partage des charges pour la France, dans la mesure où le nombre de bénéficiaires potentiels de cet avenant n’est pas encore connu.

Les autorités monégasques ont estimé que le nombre de salariés susceptibles d’être concernés par le télétravail pourrait se situer entre 500 et 5000.

Pour la France, le développement du télétravail par des entreprises monégasques est de nature à offrir du travail à des personnes inactives de la région PACA mais aussi à améliorer les conditions de vie des personnes déjà employées à Monaco, qui pourraient exercer leur activité depuis chez elle. Le télétravail devrait permettre une réduction des temps de transport pour les salariés et l’amélioration des conditions de circulation dans la région.

Il convient de noter que le présent avenant pourra s’appliquer sans condition de nationalité aux ressortissants d’États faisant partie de l’Espace économique européen et de la Suisse ou aux ressortissants de pays tiers résidents de longue durée dans le respect dans le respect des dispositions du droit de l’Union européenne.

Il sera procédé à une évaluation régulière de ce dispositif. En effet, l’article 3 prévoit la possibilité pour les deux Parties de prendre des mesures de coopération utiles pour vérifier le respect des conditions prévues pour l’application des articles 1er et 2, de suivre annuellement le nombre de personnes susceptibles d’entrer dans le champ de ces dispositions, ainsi que les entreprises qui les emploient, dans l’objectif notamment de prévenir des délocalisations d’entreprises de la France à la Principauté de Monaco.

Un bilan d’application est prévu, à l’issue d’un délai de trois ans suivant la date d’entrée en vigueur de l’avenant. Les deux Parties s’engagent à procéder aux adaptations qui paraîtraient utiles sur la base de cette analyse conjointe.

L’article 4 est consacré aux dispositions transitoires et finales.

CONCLUSION

Votre rapporteur est évidemment favorable à l’approbation de cet accord : il en va de l’intérêt partagé de la Principauté – qui pourra ainsi développer certaines activités économiques sans engorger son territoire – et la France – qui y gagne en termes d’emploi et de conditions de travail de ses concitoyens.

La mise en place concrète de cet accord se prépare d’ailleurs déjà sur le terrain, notamment par la mise en place de plateformes de télétravail dans la région à Menton.

Sur ce point, votre rapporteur insiste sur la nécessité de bien clarifier quelle sera la réglementation du travail qui s’appliquera à ces salariés.

Les autorités monégasques attendent que la France ait ratifié cet accord pour le faire elles-mêmes. L’adoption du présent projet de loi leur permettra d’accomplir sans tarder cette procédure.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa séance du mardi 15 décembre 2015 à 16h30.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

M. Jean-Pierre Dufau. L’intérêt du rapport est d’actualiser ce qui n’avait pas été prévu en 1952, notamment en ce qui concerne le télétravail. Sur fond de plaisanterie, avec la multiplicité des entreprises dont le siège est à Monaco, d’autres l’ayant en France, je dirais que l’on va retrouver le télésiège.

Plus sérieusement, cela va avoir une influence certaine, au moins sur la circulation. Néanmoins est-ce que cela ne va pas contribuer à faire baisser la démographie des Français à Monaco ?

M. Thierry Mariani. Il est bien de souligner la participation de Monaco aux investissements pour les transports en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, région dans laquelle j’ai été en charge de ces questions.

Ma première question : Pourquoi le nombre de résidents français à Monaco diminue ?

Par ailleurs, je m’étonne que l’on passe en poste à présence diplomatique dans vingt-trois pays parfois à fort potentiel et que dans le même temps on crée une ambassade à Monaco. Dans ma circonscription, six ambassades ont été fermées. Malgré ma sympathie pour le Prince de Monaco, je m’interroge sur la pertinence d’une telle initiative.

M. le rapporteur. Ceux que l’on appelle « les enfants du pays », les 8 500 résidents français à Monaco, continueront à y travailler. Ce ne sont pas les Français de Monaco qui sont concernés par l’accord.

Mais si leur nombre diminue, cela tient à deux facteurs. D’abord, les difficultés de logement, dans une Principauté qui connaît des loyers exorbitants. Le contingent des loyers protégés, dans un système de même nature que notre « loi de 1948 », est en train de se réduire. Etant obligés d’aller sur le marché libre, ces Français ont d’extrêmes difficultés à se loger. A noter cependant que la priorité de la Principauté est de construire des logements aidés pour ces « enfants du pays ».

Le deuxième facteur réside dans la fiscalité et notamment au fait que les ressortissants français sont assujettis à l’ISF. Il suffit aujourd’hui d’être propriétaire à Monaco pour rentrer automatiquement au-delà du plancher d’imposition à l’ISF.

Enfin, concernant l’ambassade, cette décision date de 2006, et est la conséquence d’un traité d’amitié de 2002 qui renforce le traité de 1918. Il y a eu une volonté monégasque, partagée par la France, de renforcer sa souveraineté. C’est une révérence à la souveraineté monégasque qui a conduit à transformer le consulat en ambassade. Cette ambassade compte environ 5 personnes et notre ambassadeur est M. Hadelin de La Tour du Pin.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi (n° 2586) sans modification.

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

Néant

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’avenant n° 6 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco à la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale, signé à Monaco le 18 mars 2014, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 2586)

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