N° 3564 tome 1 - Rapport sur le projet de loi, modifié par le Sénat, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (n°3442).




N
° 3564 rectifié

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationalele 9 mars 2016.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, modifié par le Sénat, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (n° 3442).

PAR Mme Geneviève GAILLARD

Députée

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TOME I

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1re lecture : 1847, 2064 et T.A. 494.

2e lecture : 3442.

Sénat : 1re lecture : 359, 607, 608, 549, 581 (2014-2015) et T.A. 69 (2015-2016).

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 15

TRAVAUX DE LA COMMISSION 17

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 17

II. EXAMEN DES ARTICLES 33

TITRE IER  – PRINCIPES FONDAMENTAUX 33

Article 1er(article L. 110-1 du code de l’environnement) : Actualisation des principes généraux du droit de l’environnement 33

Article 2 (articles L. 110-1 du code de l’environnement, article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) : Actualisation des principes de préservation et de reconquête de la biodiversité 37

Article 2 bis A (article L. 110-1 du code de l’environnement) : Inscription de la sauvegarde des services fournis et des usages se rattachant à la biodiversité parmi les engagements fondant la recherche du développement durable (supprimé) 56

Article 2 bis (articles 1386-19 à 1386-21 [nouveaux] du code civil) : Inscription de la réparation des atteintes à l’environnement dans le code civil 58

Après l’article 2 bis 71

Article 3 (article L. 110-2 du code de l’environnement) : Intégration de la lutte contre les nuisances lumineuses dans le droit environnemental 72

Article 3 ter (articles L. 371-3, L. 411-1-A [nouveau], L. 411-3, L. 411-5 [supprimé], titre Ier du Livre III [supprimé] du code de l’environnement) : Contribution des maîtres d’ouvrage à l’inventaire national du patrimoine naturel par le versement des données brutes de biodiversité et diffusion des données 73

Article 4 (articles L. 110-3 et L. 414-9 du code de l’environnement) : Élaboration des stratégies nationale et régionales pour la biodiversité 83

Article 4 bis (article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle) : Non brevetabilité des produits obtenus par procédés essentiellement biologiques 90

Article 4 ter (articles L. 613-2-2 et L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle) : Limitation de la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique 93

Article 4 quater (article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle) : Condition complémentaire à la définition de l’obtention végétale, relative au caractère reproductible de la semence (supprimé) 96

Article 4 quinquies (article L. 315-5 du code rural et de la pêche maritime) : Extension des possibilités d’entraide entre les agriculteurs (supprimé) 97

TITRE II – GOUVERNANCE DE LA BIODIVERSITÉ 102

Article 5 A (article L. 421-1 A [nouveau] du code de l’environnement) : Définition dans la loi des fonctions du CNCFS 102

Article 5 (articles L. 134-1 et L. 134-2 [nouveaux] du code de l’environnement) : Instances de gouvernance de la biodiversité 105

Article 6 (articles L. 371-2 et L. 134-1 [nouveau] du code de l’environnement) : Intégration des missions du comité national « trames verte et bleue » 110

Article 7 (articles L. 213-13, L. 213-13-1, L. 213-14, L. 213-14-1, L. 213-14-2,  L. 371-3 et L. 515-3 du code de l’environnement, article 10 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République) : Substitution des comités régionaux de la biodiversité aux comités régionaux « trames verte et bleue » 110

Article 7 ter : Demande de rapport relatif à l’opportunité du transfert aux régions de la compétence départementale sur les espaces naturels sensibles 118

Article 7 ter (article L. 421-1 du code de l’environnement) : Gouvernance de l’ONCFS 119

TITRE III – AGENCE FRANÇAISE POUR LA BIODIVERSITÉ 124

Article 9 (articles L. 131-8 à L. 131-13 [nouveaux] du code de l’environnement) : Création de l’Agence française pour la biodiversité : définition, missions, gouvernance et ressources 124

Article 11 bis : Rapport relatif au périmètre de l’agence française pour la biodiversité 144

Article 11 ter  : Rapport relatif à l’élargissement du périmètre de l’agence française pour la biodiversité à l’établissement public du marais poitevin 146

Article 14 : Dispositions transitoires : représentation des personnels au conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité 148

Article 15 : Élection des représentants du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l’Agence française pour la biodiversité 148

Article 15 bis (articles L. 213-8-1, L. 213-9-2, L. 213-9-3 du code de l’environnement) : Extension du périmètre d’intervention des agences de l’eau 149

Article 16 (articles L. 132-1, L. 172-1, L. 213-2, L. 213-3, L. 213-4, L. 213-4-1, L. 213-5, L. 213-6, L. 213-9-1, L. 213-9-2, L. 213-10-8, L. 213-12-2, L. 331-29, L. 334-1, L. 334-2, L. 334-4, L. 334-5, L. 334-7, L. 414-10, L. 437-1 du code de l’environnement, article L. 942-1 du code rural et de la pêche maritime) : Organisation de l’intégration des différents opérateurs de l’État fusionnant dans l’Agence française pour la biodiversité 152

Article 16 bis (article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales) : Amélioration de l’information des citoyens sur le prix et la qualité des services de l’eau potable et de l’assainissement 154

Article 17 : Entrée en vigueur 154

Article 17 bis : Audition préalable du candidat à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité 156

TITRE III BIS – GOUVERNANCE DE LA POLITIQUE DE L’EAU 157

Article 17 ter (article L. 213-8 du code de l’environnement) : Modification de la composition des comités de bassin 157

Article 17 quater (article L. 213-8-1 du code de l’environnement) : Représentation des usagers non économiques dans les conseils d’administration des agences de l’eau 161

Article 17 quinquies (articles L. 213-8-3 et L. 213-8-4 [nouveau] du code de l’environnement) : Création d’une commission des aides au sein des agences de l’eau et d’un régime d’incompatibilités de fonctions pour les membres des conseils d’administration 165

TITRE IV – ACCÈS AUX RESSOURCES GÉNÉTIQUES ET PARTAGE JUSTE ET ÉQUITABLE DES AVANTAGES 168

Article 18 (articles L. 412-2-1 à L. 412-18 [nouveaux] du code de l’environnement) : Accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées, partage des avantages en découlant, traçabilité et contrôle de l’utilisation 168

Article 25 (article L. 331-15-6 du code de l’environnement) : Abrogation du dispositif d’accès et de partage existant pour le territoire du Parc amazonien de Guyane 202

Article 26 bis : Rapport sur l’évaluation des modalités d’application des dispositifs régissant les accès aux ressources génétiques (suppression maintenue) 203

Article 26 ter : Ratification du protocole de Nagoya 203

TITRE V – ESPACE NATURELS ET PROTECTION DES ESPÈCES 208

Article 27 A (section X du chapitre III du titre III de la première partie du Livre premier et article 564 quater B [nouveaux] du code général des impôts) : Taxe additionnelle sur l’huile de palme 208

Chapitre Ier  – Institutions locales en faveur de la biodiversité 221

Section 1 : Parcs naturels régionaux 221

Article 27 (article L. 333-1 du code de l’environnement) : Modalités de création et de renouvellement du classement d’un parc naturel régional 221

Article 27 bis (article L. 141-10 du code de l’urbanisme) : Inscription de dispositions des chartes de parcs naturels régionaux dans les schémas de cohérence territoriale (SCOT) (suppression maintenue) 226

Article 28 (article L. 333-3 du code de l’environnement) : Missions du syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc 226

Article 28 bis (article L. 333-4 [nouveau] du code de l’environnement) : Inscription de la « Fédération des parcs naturels régionaux de France » dans la loi 229

Article 29 (article L. 581-14 du code de l’environnement) : Règlements locaux de publicité sur le territoire d’un parc naturel régional 230

Article 31 : Prorogation du classement de certains parcs et modalités d’intégration de certaines communes au syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc 233

Section 1 bis : Réserves naturelles de France 234

Article 31 ter (article L. 332-1 du code de l’environnement) : Inscription de « Réserves naturelles de France » dans la loi 234

Section 2 : Établissements publics de coopération environnementale 235

Article 32 (Intitulé du titre III du livre IV de la première partie et articles L. 1431-1 à L. 1431-8 du code général des collectivités territoriales) : Établissements publics de coopération environnementale 235

Article 32 bis AA (article L. 332-3 du code de l’environnement) : Principe de libre exercice des activités humaines dans les réserves naturelles, leur restriction étant l’exception (supprimé) 238

Section 2 bis : Espaces naturels sensibles 241

Article 32 bis A (article L. 113-9 du code de l’urbanisme) : Compatibilité entre la politique des espaces naturels sensibles (ENS) avec le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) 241

Article 32 bis BA (article L. 215-21 du code de l’urbanisme) : Incorporation automatique dans le domaine public des sites « espaces naturels sensibles » acquis par préemption 242

Article 32 bis B (article L. 215-21 du code de l’urbanisme) : Généralisation des plans de gestion des espaces naturels sensibles 243

Article 32 bis C (article L. 213-8-2 du code de l’environnement) : Possibilité pour les agences de l’eau de déléguer leur droit de préemption aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) 244

Section 3 : Établissements publics territoriaux de bassin 245

Article 32 bis (article L. 213-12 du code de l’environnement) : Missions des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) 247

Article 32 ter AA (article L. 5421-7 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : Possibilité de transformer un organisme interdépartemental en syndicat mixte 249

Article 32 ter A (articles L. 5215-22, L. 5216-7 et L. 5217-7 du code général des collectivités territoriales et article 59 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) : Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : représentation-substitution des EPCI aux communes au sein des syndicats 250

Article 32 ter B (article L. 151-36 du code rural et de la pêche maritime et article 56 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) : Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : dispositions de coordination relatives à la « taxe GEMAPI » 252

Article 32 ter C (article 1530 bis du code général des impôts) : Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : possibilité pour les communes et les EPCI de lever la « taxe GEMAPI » même s’ils ont transféré la compétence à un syndicat mixte 253

Section 4 : Réserves de biosphère et zones humides d’importance internationale 255

Article 32 ter : (chapitre VI du titre III du livre III et articles L. 336-1 et L. 336-2 [nouveaux] du code de l’environnement) Réserves de biosphère et zones humides d’importance internationale 255

Section 5 : Agence des espaces verts de la région Île-de-France 256

Article 32 quater (articles L. 215-2, L. 215-5, L. 215-6, L. 215-7 et L. 215-13 du code de l’urbanisme) : Droit de préemption pour l’Agence des espaces verts de la région d’Île-de-France au titre des espaces naturels sensibles 256

Article 32 quinquies (article L. 113-21 du code de l’urbanisme) : Consultation de l’Agence des espaces verts de la région Île-de-France 257

Article 32 sexies : Inscription de la mission des parcs zoologiques dans la loi (supprimé) 259

Chapitre II – Mesures foncières et relatives à l’urbanisme 260

Section 1A : Obligations réelles environnementales 260

Article 33 AA (article L. 411-2 du code de l’environnement) : Évaluation par une tierce expertise de l’absence d’autre solution satisfaisante pour une dérogation à une espèce protégée 260

Article 33 A (articles L. 163-1 à L.163-5 [nouveaux] du code de l’environnement) : Obligations de compensation des atteintes à la biodiversité par un maître d’ouvrage 262

Article 33 BA : Inventaire national des espaces naturels à fort potentiel de gain écologique 281

Article 33 BB (article L. 122-3 du code de l’environnement) : Contenu de l’étude d’impact 285

Section 1 : Obligations de compensation écologique 286

Article 33 (article L. 132-3 [nouveau] du code de l’environnement) : Possibilité pour le propriétaire d’un immeuble d’y créer une obligation réelle environnementale 286

Article 33 bis : Rapport sur les moyens de renforcer l’attractivité des obligations réelles environnementales (suppression maintenue) 293

Articles 33 ter : Rapport sur la mise en œuvre du mécanisme des obligations réelles environnementales (suppression maintenue) 293

Section 2 : Zones prioritaires pour la biodiversité 294

Article 34 (article L. 411-1 du code de l’environnement) : Création de zones prioritaires pour la biodiversité (suppression maintenue) 294

Section 3 : Assolement en commun 297

Article 35 (article L. 411-39-1 du code rural et de la pêche maritime) : Finalité environnementale des assolements en commun 297

Section 3 bis : Protection des chemins ruraux 299

Article 35 bis (article L. 161-6-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Recensement communal des chemins ruraux 299

Article 35 ter : Suspension du délai de prescription 305

Article 35 quater (article L. 161-10-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques) : Modification d’assiette et continuité d’un chemin rural 306

Article 35 quinquies : Révision du plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée 308

Section 4 : Aménagement foncier agricole et forestier 309

Article 36 (article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime) : Finalité environnementale des actions de remembrement parcellaire (supprimé) 309

Article 36 bis AA (article L. 121-4 du code de l’urbanisme) : Consultation du Centre national de la propriété forestière (suppression maintenue) 310

Article 36 bis A (articles L. 151-23 et L. 421-4 du code de l’urbanisme) : Protection des espaces boisés 312

Section 5 : Conservatoires régionaux d’espaces naturels 314

Article 36 quater AA (article L. 2222-10 du code général de la propriété des personnes publiques) : Possibilité pour les conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés de gérer des biens domaniaux par convention 314

Article 36 quater A (article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques) : Cession à titre gratuit d’immeubles du domaine privé de l’État à un conservatoire régional d’espaces naturels (suppression maintenue) 315

Article 36 quater B (article 885-0 V bis A du code général des impôts) : Imputation sur l’impôt de solidarité sur la fortune des dons à des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés (suppression maintenue) 316

Article 36 quater C (article L. 414-11 du code de l’environnement) : Missions des conservatoires régionaux d’espaces naturels 317

Section 6 : Espaces de continuités écologiques 318

Article 36 quater (articles L. 113-29 et L. 113-30 [nouveaux] du code de l’urbanisme) : Création d’espaces de continuités écologiques 318

Section 6 bis : Biodiversité en milieux urbain et péri-urbain 321

Article 36 quinquies A (article L. 111-19 du code de l’urbanisme) : Incitation à l’exploitation des toitures des zones commerciales et à la perméabilisation des places de stationnement 321

Article 36 quinquies B (article L. 229-26 du code de l’environnement) : Rôle de la biodiversité urbaine pour lutter contre le changement climatique pris en compte dans le PCET 325

Article 36 quinquies C (article L. 141-8-1 [nouveau] du code de l’urbanisme Mention dans les documents d’orientation et d’objectifs des schémas de cohérence territoriale de la notion de permaculture (supprimé) 326

Article 36 quinquies D (article L. 141-11 [nouveau] du code de l’urbanisme) : Promotion de la permaculture (supprimé) 328

Section 7 : Associations foncières pastorales 329

Article 36 sexies Rapport sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des organismes nuisibles (supprimé) 329

Section 8 : Vergers 331

Article 36 septies (article L. 415-9 du code rural et de la pêche maritime) : Suppression des dispositions facilitant l’arrachage des pommiers à cidre et des poiriers à poiré 331

Article 36 octies (ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme) : Ratification de l’ordonnance portant nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme (supprimé) 332

Après l’article 36 octies 334

Chapitre III – Milieu marin 335

Section 1 : Pêche professionnelle en zone Natura 2000 335

Article 37 (article L. 414-4 du code de l’environnement) : Activités de pêche professionnelle en zone Natura 2000 335

Section 2 : Aires marines protégées 338

Article 38 (articles L. 332-8 et L. 640-1 du code de l’environnement et articles L. 912-2, L. 912-3 et L. 912-7 du code rural et de la pêche maritime) : Gestion des réserves naturelles en mer par les acteurs socio-économiques 338

Section 3 : Autorisation des activités sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive 342

Article 40 (articles 1er, 2, 4 et 5 et articles 6 à 14 [nouveaux] de la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République) : Organisation des activités sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive 342

Section 4 : Encadrement de la recherche en mer 356

Article 41 (articles L. 251-1 et L. 251-2 et L. 251-3 [nouveaux] du code de la recherche) : Sanction des activités de recherche non autorisées et transmission des données collectées aux autorités publiques 356

Section 5 : Protection des ressources halieutiques et zones de conservation halieutiques 357

Article 43 (articles L. 911-2 et L. 924-1 à L. 924-5 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) : Intégration de la politique de la pêche dans un cadre écosystémique et mise en place des zones de conservation halieutiques 357

Article 43 bis : Rapport relatif aux activités d’extraction de granulats marins 360

Article 44 (articles L. 942-1, L. 942-4, L 942-10, L. 945-4-1 [nouveau] et L. 945-5 du code rural et de la pêche maritime) : Dispositions de coordination 361

Article 45 (article L. 334-1 du code de l’environnement) : Attribution du statut d’aire marine protégée aux zones de conservation halieutique 362

Article 46 bis (article L. 321-2 du code de l’environnement) : Perception de la taxe sur le transport de passagers 364

Section 6 : Protection des espèces marines 365

Article 46 quater : Équipement des navires avec un dispositif anticollision avec les cétacés 365

Chapitre IV – Littoral 369

Article 47 (articles L. 322-1, L. 322-8 et L. 322-9 du code de l’environnement) : Compétences du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres en matière de patrimoine culturel 369

Article 49 (articles 713 du code civil et articles L. 1123-3 et L. 2222-20 du code général de la propriété des personnes publiques) : Transfert de biens sans maître au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres 371

Article 50 (articles L. 113-27 et L. 215-2 du code de l’urbanisme) : Sécurisation des interventions du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres en cas de superposition de zones de protection 374

Article 51 ter : Programme d’actions de protection des mangroves et plan d’action pour la protection des récifs coralliens 375

Chapitre IV bis – Lutte contre la pollution 376

Article 51 quater AA (article L. 77-10-1 du code de justice administrative) : Création d’une action de groupe spécifique pour les dommages environnementaux 376

Article 51 quater A (article 8 du code de procédure pénale) : Prescription de l’action publique pour les délits de pollution des eaux marines et fluviales 382

Article 51 quater B (article L. 142-2 du code de l’environnement) : Ouverture de la possibilité pour les associations d’exercer les droits reconnus à la partie civile en cas d’inobservations d’obligations non pénalement sanctionnées (supprimé) 384

Article 51 quinquies (article L. 253-7-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Traitement des fonds de cuve et résidus de produits phytopharmaceutiques 386

Article 51 octies (articles L. 212-1 et L. 212-2-2 du code de l’environnement) : Échéances d’atteinte du bon état chimique des eaux, surveillance de la matrice biote, et agrément des laboratoires d’analyse 388

Article 51 nonies (article L. 213-10-8 du code de l’environnement) : Soutien aux projets territoriaux visant la suppression des néonicotinoïdes dans le cadre du plan Ecophyto (suppression maintenue) 390

Article 51 decies A (article L. 257-3 du code rural et de la pêche maritime) : Amélioration de la diffusion des données sur l’utilisation des produits phytosanitaires par les agriculteurs produisant des végétaux destinés à la consommation humaine ou animale (supprimé) 391

Article 51 undecies A (article 214-17 du code de l’environnement) : Articulation entre la continuité écologique des cours d’eau et la préservation des moulins (supprimé) 398

Article 51 undecies B (article 214-17 du code de l’environnement) : Délai de trois ans accordé aux propriétaires de bonne foi pour la réalisation des travaux sur les moulins permettant l’amélioration de la continuité écologique 402

Article 51 undecies (articles L. 218-83, L. 218-84, L. 218-86, L. 612-1, L. 622-1, L. 632-1 et L. 640-1 du code de l’environnement) : Contrôle et gestion des eaux de ballast et des sédiments des navires 405

Article 51 duodecies A (article 167 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte) : Abrogation d’une habilitation à légiférer par ordonnance 408

Article 51 duodecies (articles L. 219-1 à L. 219-6 du code de l’environnement) : Régime d’opposabilité des documents stratégiques de façade et des documents stratégiques de bassin maritime et transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime 409

Article 51 terdecies A (articles L. 541-10 et L. 541-10-5 du code de l’environnement) : Interdiction des cotons-tiges à tige en plastique et création de sanctions pour le non-respect de l’interdiction des sacs, verres, gobelets, assiettes et cotons-tiges en plastique 414

Article 51 terdecies (article L. 2334-22 du code général des collectivités territoriales) : Modulation de la dotation de solidarité rurale pour les communes qui maîtrisent leur éclairage public 421

Article 51 quaterdecies (article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime) : Restriction de l’utilisation des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes 422

Article 51 sexdecies A Interdiction de la distribution gratuite de magnets publicitaires (supprimé) 435

Article 51 sexdecies : Rapport sur les plantes invasives 436

Article 51 septdecies (articles L. 512-18, . 512-21, L. 516-1, L. 556-1 du code de l’environnement et article L. 642-2 du code de commerce) : Assouplissement du cadre juridique régissant les carrières, les stockages de CO2 et les sites industriels à reconvertir 438

Chapitre V – Sanctions en matière d’environnement 442

Article 52 (articles L. 415-3, L. 415-6, L. 624-3 et L. 635-3 du code de l’environnement) : Sanctions applicables à certaines infractions en matière d’environnement (supprimé) 442

Article 53 (article L. 415-2 du code de l’environnement et article 59 octies [nouveau] du code des douanes) : Échanges de données visant à améliorer la protection des espèces menacées 444

Article 53 bis (article 29 du code de procédure pénale) : Harmonisation du délai de transmission des procès-verbaux par les gardes particuliers assermentés 445

Article 53 ter A (article L. 428-21 du code de l’environnement) : Saisie par les gardes-chasse particuliers et les agents des fédérations départementales des chasseurs des armes de chasse et autres objets ayant servi à commettre une infraction (supprimé) 447

Article 53 ter (articles L. 362-5 et L. 415-1 du code de l’environnement ) : Rétablissement de l’habilitation des agents des collectivités territoriales à constater les infractions relatives à la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels et à la faune et la flore protégée 450

Article 54 bis (article L. 432-10 du code de l’environnement) : Absence de sanctions pénales pour certaines pratiques de pêche 450

Article 54 ter (article L. 431-7 du code de l’environnement) : Protection de la truite et pisciculture (suppression maintenue) 451

Article 56 (articles L. 945-4 du code rural et de la pêche maritime) : Sanctions applicables en cas de pêche d’espèces en danger 452

Article 57 bis : Rapport évaluant la mise en œuvre de la convention de Washington sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction 460

Chapitre VI – Simplification des schémas territoriaux 462

Article 58 (article L. 122-1 du code forestier, Section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre IV [abrogée], articles L. 141-2, L. 142-1, L. 421-1, L. 421-13, L. 425-1 et L. 433-4 [nouveau], Section 2 du chapitre III du titre III du livre IV [abrogée], et intitulé de la Section 3 du chapitre III du titre III du livre IV du code de l’environnement) : Orientations régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses habitats, schémas départementaux de vocation piscicole et plans départementaux de protection du milieu aquatique et de gestion des ressources piscicoles 462

Article 58 bis AA (article L. 430-1 du code de l’environnement) : Pêche de loisir 464

Article 58 bis A (article L. 425-1 du code de l’environnement) : Prolongation de la validité du schéma départemental de gestion cynégétique 464

Chapitre VII – Habilitations à légiférer par ordonnance et dispositions diverses 465

Article 59 (articles L. 211-3, L. 211-12, L. 212-5-1, L. 310-1 à L. 310-3, L. 331-3, L. 331-3-1 et L. 331-3-2 [nouveaux], L. 411-5, L. 412-1, L. 424-10 et L. 421-12 du code de l’environnement) : Demande d’habilitations sur huit sujets différents (suppression maintenue) 465

Article 59 bis AA (articles L. 211-3, L. 212-5-1, L. 300-4 [nouveau], L. 331-3, L. 331-3-1 et L. 331-3-2 [nouveaux] du code de l’environnement) : Simplification des règles de fonctionnement des parcs nationaux, rectification d’une erreur matérielle et coordination entre codes 467

Article 59 bis AB (articles L. 411-3, L. 411-4, L. 411-5, L. 411-6, L. 411-7 et L. 411-8, L. 411-9, L. 411-10 et L. 411-11 [nouveaux], L. 414-9, L. 415-2 [nouveau], L. 415-3, L. 624-3, L. 635-3 et L. 640-1 du code l’environnement) : Lutte contre les espèces exotiques envahissantes 469

Article 59 bis AC (articles L. 424-1 et L. 424-10 du code de l’environnement) : Dérogations à l’interdiction de destructions d’œufs d’oiseaux 472

Article 59 bis A (article L. 421-12 du code de l’environnement) : Régime des fédérations interdépartementales des chasseurs 475

Article 59 bis B (article L. 422-4 du code de l’environnement) : Maintien des associations de chasse en cas de fusion de communes 476

Article 59 bis (articles L. 412-1, L. 415-3, L. 624-2 et L. 635-2 du code de l’environnement) : Simplification des procédures nécessaires pour la protection de certaines espèces 479

Article 59 ter (articles L. 413-6, L. 413-7 et L. 413-8 [nouveaux] du code de l’environnement, article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime) : Encadrement de la détention d’espèces non domestiques protégées 480

Article 59 quater (article L. 413-1 du code de l’environnement) : Établissements détenant des espèces invertébrées 487

Article 59 quinquies (nouveau) (ordonnance n° 2015–1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme) : Ratification de l’ordonnance portant nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme 488

Après l’article 59 quater 489

Article 60 (articles L. 331-10, L. 427-6, L. 427-8, L. 33-10-4, L. 422-2, L. 422-15, L. 424-10, L. 427-8, L. 427-10, L. 423-16, L. 424-15, L. 427-11, L. 428-14, L. 428-15 du code de l’environnement ; article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales) : Substitution de la notion d’« espèce déprédatrice » à celle d’« espèce nuisible et malfaisante » 491

Article 61 (articles L. 2213-30 et L. 2213-31 du code général des collectivités territoriales) : Dissociation des mares de la notion d’insalubrité publique 498

Article 62 (articles L. 212-1, L. 219-9, L. 321-17 [nouveau] et L. 414-2 du code de l’environnement ; article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques) : Extension de certains espaces naturels protégés au-delà des 12 milles marins, mise en cohérence des plans d’action pour le milieu marin avec les autres outils existants, protection du domaine public maritime à Mayotte 499

Article 62 bis (articles L. 331-1, L. 332-1 et L. 334-3 du code de l’environnement) : Extension des espaces protégés aux eaux sous juridiction de l’État et aux espaces du plateau continental 502

Article 62 ter (article L. 212-2 du code de l’environnement) : Consultation du Centre national de la propriété forestière sur le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 503

Article 64 : Habilitation à prendre des ordonnances pour clarifier et simplifier l’application de la politique Natura 2000 (suppression maintenue) 504

Article 64 bis (articles L. 414-1 et L. 414-2 du code de l’environnement) : Dispositions relatives aux sites Natura 2000 505

Article 65 : Habilitation à procéder par ordonnance pour définir le cadre juridique applicable aux réserves biologiques 506

Article 66 (articles L. 171-2, L. 171-8, L. 172-4, L. 172-13 et L. 173-5 du code de l’environnement) : Harmonisation des dispositions relatives à la police de l’environnement 508

Article 67 : Habilitation à procéder par ordonnance pour réaliser une expérimentation visant à simplifier la gestion des espaces naturels protégés (suppression maintenue) 511

Article 68 : Habilitation à procéder par ordonnance pour refondre le droit applicable aux espaces maritimes (suppression maintenue) 512

Article 68 ter B (article L. 332-25 du code de l’environnement) : Rétablissement de la nature contraventionnelle des infractions à la réglementation des réserves naturelles (supprimé) 514

Chapitre VIII – Biodiversité terrestre 516

Article 68 quater (article L. 424-2-1 [nouveau] du code de l’environnement) : Interdiction de la chasse des mammifères pendant les stades de reproduction et de dépendance (suppression maintenue) 516

Article 68 quinquies (article L. 424-4 du code de l’environnement) : Interdiction de la chasse à la glu ou à la colle (suppression maintenue) 521

Article 68 sexies (articles L. 341-2, L. 341-6 et L. 341-10 du code forestier ; article L. 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux) : Ajustement de la compensation des opérations de défrichement 529

TITRE VI – PAYSAGE 539

Chapitre Ier – Sites 539

Article 69 (articles L. 341-1, L. 341-2, L. 341-9, L. 341-10, L. 341-12, L. 341-13 du code de l’environnement, article L. 341-1-1 [nouveau] du code de l’environnement, articles L. 143-8, L. 630-1 et L. 641-1 du code du patrimoine) : Réforme de la procédure d’inscription des monuments naturels et des sites 539

Article 71 (article L. 341-19 du code de l’environnement) : Coordination 543

Chapitre II – Paysages 544

Article 72 (articles L. 350-1 AA, L. 350-1 A et L. 350-1 B [nouveaux] du code de l’environnement) : Atlas de paysages et objectifs de qualité paysagère 544

Article 72 bis AA (article L. 350-3 [nouveau] du code de l’environnement) : Protection des allées et des alignements d’arbres (supprimé) 548

Article 72 bis A (article 7 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture) : Mission paysagère des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement 550

Article 72 bis : Paysagistes concepteurs 551

Article 74 (article L. 621-29-8 du code du patrimoine) : Interdiction de la publicité sur les bâches d’échafaudages installées sur les immeubles classés (suppression maintenue) 552

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 555

INTRODUCTION

Le projet de loi relatif à la biodiversité (1) a été déposé par le Gouvernement, le 26 mars 2014, il y a deux ans. Alors que notre commission avait examiné ce texte dès juin 2014, le projet de loi, pourtant présenté comme très important par le Gouvernement, n’a été inscrit à l’ordre du jour de notre Assemblée qu’en mars 2015, il y a juste un an. Le calendrier d’examen parlementaire s’est brusquement accéléré puisque le Sénat a examiné le projet en séance publique, en janvier 2016, et que notre commission se réunit, un mois après l’adoption par le Sénat, pour l’examen, en seconde lecture, du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Si la longueur des travaux parlementaires a de quoi nous faire douter sur les réels engagements des uns et des autres, votre rapporteure se réjouit, non seulement de cette accélération du calendrier qui peut laisser espérer une adoption définitive avant la suspension estivale des travaux parlementaires, mais surtout que le Gouvernement se soit enrichi d’une secrétaire d’État chargée spécifiquement de la biodiversité.

Le texte que votre commission examine en seconde lecture comprend 160 articles restant en discussion dont une centaine d’articles, adoptés par notre Assemblée en première lecture mais modifiés par le Sénat, et une soixantaine d’articles ajoutés par le Sénat et que l’Assemblée nationale, ne s’étant pas prononcée auparavant, examine comme s’il s’agissait d’une première lecture : c’est dire si un long chemin reste à parcourir pour que ce texte soit adopté et s’il est impossible qu’il sorte conforme de nos travaux.

Ce n’est pas tant la complexité des dispositions sur les plans technique comme politique qui alimente nos débats que la multiplicité des acteurs de la société concernés par le projet de loi et dont les intérêts divergent souvent. Entre les entrepreneurs, les chasseurs, les pêcheurs, les protecteurs de la nature, les citoyens dans leur ensemble voire certains groupes de pression, les approches paraissent parfois inconciliables.

Or, votre rapporteure a toujours considéré, au long de ses travaux, qu’il y avait une seule priorité – la défense de la biodiversité, des espaces naturels et des écosystèmes, au nom des générations futures et de leur pérennité sur notre planète –  et que, dans le droit fil de l’élan responsable dont la COP21 a fait démonstration, il fallait maintenir des objectifs ambitieux et affirmer nos convictions, renoncer à une politique de petits pas et convaincre ceux qui restent tentés par l’immobilisme ou sensibles aux arguments de certains lobbies.

Si nos débats, qui ont duré près de 27 heures afin d’examiner près d’un millier d’amendements, ont été marqués de sérieux et ne peuvent faire douter de la qualité de nos travaux, ils ont été aussi quelquefois difficiles. Car toutes les modifications apportées par le Sénat ne sont pas à retenir, soit parce qu’à l’exemple des obligations réelles environnementales – que votre rapporteure conçoit comme un engagement volontaire unilatéral et non un contrat – ou le périmètre de l’Agence française pour la biodiversité, elles ne suivent pas la logique des grands défis à relever, soit parce qu’elles auraient comme conséquence de dénaturer le texte en y introduisant des dispositions qui doivent alors être rectifiées.

Les travaux de la commission ont permis de consolider le texte ou de l’améliorer sans prendre le risque de l’amoindrir. Car le projet de loi comporte des rendez-vous à ne pas manquer : la solidarité écologique, dans sa double dimension ; le triptyque « éviter, réduire, compenser » qu’il faut réaffirmer avec force mais dont les modalités méritent d’être précisées ; la réparation du préjudice écologique qui doit être inscrit dorénavant dans la loi ; la création de l’Agence française pour la biodiversité, aux missions d’expertise, de conseil et d’appui aux opérateurs reconnues et qui, si elle dotée des moyens humains et financiers nécessaires, constituera un outil efficace et fonctionnel au service de tous les acteurs de la biodiversité ; la transposition et la mise en œuvre du protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages ; l’interdiction des néonicotinoïdes — une décision qui exige du courage, mais qui profitera aux agriculteurs, aux populations, aux acteurs économiques et aux espèces animales et végétales. Tous ces rendez-vous témoignent de la volonté de notre pays d’atteindre ses objectifs et de tendre vers l’exemplarité.

Votre rapporteure regrette que certaines de ses propositions n’aient pas été retenues, notamment en ce qui concerne la protection des espèces ou la place de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) : l’avenir confirmera qu’il s’agit d’une occasion manquée sur laquelle il faudra revenir. Elle est persuadée qu’il conviendra de débattre à nouveau de certains thèmes, toujours avec des approches et des sensibilités différentes. Elle regrette enfin que les règles de la deuxième lecture, en particulier l’application de la théorie de « l’entonnoir », aient empêché d’aborder des idées nouvelles, qui ne manquaient pas de pertinence et qui étaient issues des réflexions engagées depuis deux ans ou de la mise en place de l’AFB : mais elle s’est pliée à la règle.

La dernière ambition de votre rapporteure sur ce texte passionnant est la nécessité que l’Assemblée nationale soit fière de ce qu’elle votera à l’issue de ses travaux.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné, sur le rapport de Mme Geneviève Gaillard, le projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à la biodiversité (n° 3442), au cours des séances du mardi 1er mars 2016, après-midi et soir, du mercredi 2 mars, matin et après-midi, du lundi 7 mars au soir, du mardi 8 mars, après-midi et soir, et du mercredi 9 mars, matin et après-midi.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous commençons aujourd’hui l’examen en deuxième lecture du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et, pour avis, de la proposition de loi organique relative à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) — deux textes dont la rapporteure est Mme Geneviève Gaillard. Je suis ravi d’accueillir Mme Barbara Pompili, nouvelle secrétaire d’État chargée de la biodiversité, qui va participer à nos travaux.

La procédure a débuté il y a deux ans avec le dépôt du projet de loi par le Gouvernement, le 26 mars 2014. L’Assemblée nationale a examiné le projet, en commission du 24 au 26 juin 2014, puis en séance publique du 16 au 24 mars 2015. Le texte que nous avons adopté a été discuté au Sénat, en commission, début juillet 2015, puis en séance publique du 19 au 26 janvier 2016. À l’Assemblée nationale, aucune commission ne s’est saisie pour avis et le Gouvernement n’a pas déclenché la procédure accélérée, ce qui explique la nécessité d’une deuxième lecture.

À l’issue du délai de dépôt, vendredi 26 février dernier, le secrétariat de la Commission a enregistré 1 054 amendements. Six doivent être déclarés irrecevables au titre de l’article 40 : ce sont les amendements CD497 de Mme Laurence Abeille, CD313 de M. Dino Cinieri et CD355 de M. Julien Aubert, CD353 de M. Julien Aubert, CD941 de M. Gérard Menuel et CD946 de M. André Chassaigne. Cent quarante-trois amendements ont été retirés par leurs auteurs ou déclarés irrecevables au nom de la « règle de l’entonnoir » ; leurs auteurs ont été prévenus par message électronique. Il nous reste donc 911 amendements à examiner.

Lors d’une deuxième lecture, la jurisprudence du Conseil constitutionnel interdit les cavaliers législatifs, ainsi que toute nouvelle mesure sous forme d’article additionnel. C’est ce qui explique que certains amendements aient été déclarés irrecevables au titre de ce qu’on appelle « l’entonnoir ». Par ailleurs, la logique de la deuxième lecture empêche d’examiner les amendements identiques à des amendements déjà rejetés lors de la première lecture, à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Cette règle peut apparaître un peu sévère, mais elle a été appliquée avec le plus d’impartialité possible. Ont notamment été gardés des amendements portant sur des articles ou des alinéas modifiés par le Sénat. Il nous reste suffisamment de dispositions à examiner sans reprendre le débat sur celles qui ont déjà été rejetées, quelquefois à plusieurs reprises. De toute façon, les auteurs de ces amendements peuvent les redéposer pour la séance publique, comme les y autorise l’article 88 du règlement.

M. Martial Saddier. Pour mettre un peu plus de chaleur dans nos échanges, mieux vaut éviter la froideur des courriels pour nous informer du rejet d’un amendement !

Je me permets un rappel au règlement. Je vous fais confiance, Monsieur le président, quant à l’impartialité qui a présidé au rejet des amendements déposés par les députés de sensibilités différentes ; mais je m’interroge sur les motifs d’irrecevabilité invoqués – amendement identique à un amendement examiné en première lecture au Sénat ou rejeté en première lecture à l’Assemblée nationale. En effet, en vertu de l’article 108 de notre règlement et de la règle dite de « l’entonnoir », il n’est possible, en deuxième lecture, d’amender que les articles pour lesquels nos deux assemblées ne sont pas parvenues à un accord, et il est interdit de créer de nouvelles dispositions. La décision du Conseil constitutionnel du 19 janvier 2006 précise que « les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion ». Il semblerait pourtant que certains de nos amendements, déclarés irrecevables – par exemple le CD243 –, répondaient parfaitement à la règle et à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Nous serons obligés de les redéposer en séance ; mais les commissions doivent servir à nourrir le débat afin de simplifier la procédure en séance publique. Nous regrettons ces rejets apparemment non conformes au règlement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Vous pouvez redéposer ces amendements, que nous examinerons dans le cadre de l’article 88, mais je suis prêt à revoir le sort de l’amendement CD243.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Mesdames et Messieurs les députés, j’allais dire « chers collègues », non seulement par la force de l’habitude, mais également parce que, bien que secrétaire d’État depuis le 11 février, je n’en reste pas moins considérée par votre assemblée pour quelques jours encore comme « députée non votante, membre du Gouvernement ». Cet état de fait illustre la nouveauté que représente pour moi cet exercice essentiel de l’examen en commission, vu de ce côté de la barrière. Avant que votre commission n’entame, en deuxième lecture, l’examen de ce projet de loi sur la biodiversité, ainsi que du texte qui permettra de créer cette Agence française pour la biodiversité dans laquelle nous plaçons tant d’espoirs, je vous dirai quelques mots sur la manière dont je conçois mon rôle aux côtés de Ségolène Royal, les relations que j’entends établir avec vous et les raisons qui m’ont amenée à accepter la fonction qui m’a été confiée par le Président de la République.

Vous en avez fait l’expérience au cours des années passées, je suis écologiste. Cela signifie que, à mes yeux, les deux enjeux principaux auxquels nous sommes confrontés sont la lutte pour le climat et la réponse aux menaces qui pèsent sur la biodiversité, qu’il s’agisse de la préservation d’espaces naturels indispensables à la vie ou du maintien d’espèces animales ou végétales dont la vitesse d’extinction atteint des niveaux inégalés du fait, pour l’essentiel, de l’activité humaine. Parce que je suis écologiste, j’ai la conviction que répondre à ces enjeux n’est pas qu’une nécessité, mais véritablement une opportunité de vivre mieux, de développer de nouvelles activités et de nouveaux projets, et de créer des emplois. Sur ces deux questions essentielles et intimement liées du climat et de la biodiversité, nous avons accompli un chemin déterminant dans la prise de conscience collective, et obtenu des avancées qu’il s’agit désormais de concrétiser.

L’année 2015 a permis de grandes réalisations en matière de climat : l’accord obtenu lors de la conférence de Paris, en décembre dernier, mais également la loi de transition énergétique et pour la croissance verte, que Ségolène Royal a portée et que votre assemblée a adoptée. De la même manière que 2015 fut l’année des grandes décisions sur le climat, 2016 doit être celle d’avancées majeures en matière de biodiversité. Au plan international, la fin de l’année verra l’organisation de la COP13 de la convention sur la biodiversité biologique. Au plan national, nous allons faire aboutir ensemble la loi sur la biodiversité – un texte dont Philippe Martin avait pris l’initiative, qui a été consolidé et porté par Ségolène Royal en première lecture ici même et au Sénat, et dont le pilotage de la fin du parcours législatif m’a été confié.

Chacun conçoit la responsabilité qui est la nôtre, et en premier lieu la vôtre, dans la lutte pour la conservation de la biodiversité. La France, notamment grâce à ses outre-mer, abrite un patrimoine considérable. Nous sommes comptables de la préservation d’un espace maritime majeur, le deuxième du monde après celui des États-Unis, et de zones naturelles uniques. Pour un pays qui tire du tourisme tant d’activités et d’emplois, et dont les habitants puisent leur force dans leur qualité de vie, les paysages, la faune et la flore constituent un enjeu à proprement parler existentiel.

La première lecture du texte, dans votre assemblée, avait permis d’enrichir le projet de loi, de le préciser sur de nombreux sujets et de trouver des points d’équilibre. Le texte issu des travaux du Sénat, voté à une écrasante majorité, par-delà les frontières partisanes, en a modifié ou affiné certaines dispositions, tout en en conservant l’esprit.

Permettez-moi de rappeler quelques points saillants. L’AFB, lieu d’expertise et de pilotage, pourra être opérationnelle dès la promulgation de la loi. Les modalités d’organisation de la future agence ont été précisées, en particulier en matière de partenariats avec les collectivités territoriales. Elles joueront un rôle clé dans le succès de la reconquête de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique dans les territoires. L’AFB rassemblera des réseaux de professionnels de haut niveau qui pourront s’appuyer sur les agents de terrain de l’agence. J’ai rencontré hier, avec Ségolène Royal, l’ensemble des membres des conseils d’administration des quatre organismes amenés à fusionner au sein de l’AFB. Cette démarche de préfiguration, voulue par la ministre, est un gage de succès, car, au-delà des mesures législatives et réglementaires, il y a les réalités humaines. Le nouveau secrétariat d’État à la biodiversité jouera un rôle de facilitateur, accompagnant les structures et les agents dans la création de l’AFB.

Le préjudice écologique sera inscrit dans la loi. Il conviendra de préciser encore et d’affiner les conditions de ce principe fondamental. Le Gouvernement vous propose un amendement en ce sens, qu’il nous faudra clarifier. Je suis sûre que le débat parlementaire permettra d’aboutir à une rédaction consensuelle.

La ratification du protocole de Nagoya dès l’adoption de la loi concrétisera un engagement international pris en 2010. La France se donnera ainsi les moyens d’innover sans piller. Si une société exploite une molécule issue de la recherche sur des plantes, des animaux ou des bactéries, et que son exploitation lui permet de développer un marché commercial, elle devra partager avec ceux qui ont contribué à préserver les ressources génétiques une partie des avantages qu’elle en retirera. C’est un retour juste et plus équitable qui permettra d’éviter la biopiraterie. Ce dispositif, sur lequel vous aviez beaucoup travaillé en première lecture, a été enrichi au Sénat pour inciter à la création d’emplois locaux par les sociétés qui utilisent la biodiversité, à la sensibilisation du public et à la formation des professionnels locaux, en étant davantage à l’écoute des communautés d’habitants qui ont des connaissances traditionnelles, notamment dans les outre-mer.

Le principe impliquant d’éviter les atteintes à l’environnement, à défaut, de les réduire, et dans le pire des cas, faute d’autres options, de les compenser sera inscrit dans le code de l’environnement. Le système de compensation en sortira consolidé ; chacun mesure à quel point c’est essentiel. C’est une condition à la fois de notre capacité à atteindre les objectifs que nous nous fixons en matière de biodiversité et à établir la confiance avec les populations, qui bien souvent doutent de l’efficacité de ces compensations.

Le brevetage des gènes natifs est interdit dans ce projet de loi, pour lever le frein à l’innovation que constitue la multiplication des dépôts de brevets sur le vivant et la concentration croissante des détenteurs de ces brevets.

Afin de limiter les effets négatifs des pesticides de la famille des néonicotinoïdes sur les abeilles et autres pollinisateurs, le Sénat a décidé que l’utilisation de ces pesticides serait encadrée par un arrêté ministériel, conformément au récent avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Il reviendra à l’Assemblée d’examiner cette disposition qui s’inscrit par ailleurs dans le plan national « France, terre de pollinisateurs » lancé par Ségolène Royal en 2015.

La protection de la biodiversité marine est renforcée avec notamment l’introduction, dans notre corpus législatif, des dispositions permettant la création de la cinquième plus grande réserve marine du monde dans les eaux des terres australes françaises, la création des zones de conservation halieutique pour une gestion durable de la faune et de la flore marines, et l’obligation d’une autorisation pour les activités de recherche ou d’extraction en haute mer en zone économique exclusive et sur le plateau continental.

De nouvelles mesures sur les paysages viendront compléter les dispositifs actuels, avec la généralisation des plans de paysage et des atlas, et le soutien à la reconnaissance des paysagistes.

J’ajoute enfin que vos travaux sont très suivis par les entreprises de la croissance verte et bleue, et par les chercheurs qui innovent et permettent les créations d’emplois dans le domaine du vivant, des technologies vertes et de la nature. Pour ces acteurs, le vote de ce projet de loi constituera un signal clair de soutien à leur développement.

Cette liste de points saillants est loin d’être exhaustive et n’épuise pas l’apport du texte que nous nous apprêtons à examiner ensemble, riche de dispositions qui permettront de mieux préserver la biodiversité. Je veux surtout vous dire l’état d’esprit qui m’anime, et qui anime le Gouvernement, en ouverture de vos travaux. J’entends faire preuve tout à la fois d’écoute, de sagesse et d’humilité. La sagesse se traduit par un nombre réduit d’amendements du Gouvernement : nous considérons en effet que l’équilibre issu de la première lecture, s’il peut être peaufiné et précisé – c’est votre rôle –, doit être globalement préservé afin de permettre l’adoption la plus large et la plus rapide possible. C’est nécessaire pour que la loi soit promulguée avant l’été et pour que l’AFB soit créée selon le calendrier annoncé. Je sais, Madame la rapporteure, votre vigilance sur ce dernier point. Nous entendons également faire preuve d’humilité : l’immensité de la tâche et de l’enjeu nous y invite, mais également l’histoire législative de notre pays. Nous nous devions d’intégrer dans notre droit les grands principes développés par la communauté internationale et les obligations juridiques internationales auxquelles notre pays a souscrit, en particulier la Convention sur la diversité biologique ; avec cette loi, ce sera chose faite. Mais n’oublions pas que ce texte n’est pas le premier qui traite, sciemment ou de manière implicite, de la biodiversité : il s’inscrit dans une histoire législative marquée notamment par la loi de 1976 sur la protection de la nature et sur celle de 1993 sur les paysages, présentée – déjà – par Ségolène Royal.

Les grandes lois sont souvent le fruit de consensus larges. Ce texte sur la biodiversité n’est pas le premier et ne sera pas le dernier. Il constituera une réussite dès lors qu’il sera le plus ambitieux que l’on puisse élaborer et faire adopter aujourd’hui. Il ne clora pas certains débats qui continueront de traverser la société française et qui trouveront sans doute ultérieurement de nouvelles traductions législatives, mais il permettra d’avancer concrètement, de manière pragmatique, efficace, et – je le souhaite – la plus consensuelle possible. C’est en tout cas l’état d’esprit qui est le mien au début de vos travaux.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Un an après la première lecture dans notre assemblée, nous sommes à nouveau réunis pour un examen, en seconde lecture, du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Un an représente un délai long, d’autant que l’examen en commission avait eu lieu en juin 2014 et surtout pour un texte qui nous avait toujours été présenté comme très important pour le Gouvernement. La longueur de nos débats a de quoi nous faire douter ; mais je suis heureuse qu’il y ait enfin dans ce Gouvernement une secrétaire d’État qui s’occupe précisément de la biodiversité.

Un long chemin reste à parcourir pour que ce texte soit adopté, mais nous espérons comme vous qu’il pourra l’être rapidement. Toutefois, il ne sortira pas conforme de nos débats, car nous avons bien des choses à dire. Ce projet de loi est complexe parce qu’il est technique et politique, et parce qu’il concerne tous les acteurs de la société, aux intérêts souvent divergents. Entre les entrepreneurs, les chasseurs, les pêcheurs, les protecteurs de la nature et les autres séducteurs – la séduction ne devrait jamais aller jusqu’à la pression… – (Murmures divers), les différences de points de vue paraissent parfois inconciliables. Nous devons en priorité défendre la biodiversité, les espèces, les espaces et les écosystèmes ; remplir notre mission implique donc de trouver un seuil en deçà duquel nous ne pouvons pas descendre.

Dans le droit fil de l’élan responsable dont nous avons fait la démonstration lors de la COP21, il nous faut nous engager sur des objectifs ambitieux. Nous devrons accepter de nous bousculer au lieu de ronronner dans une politique de petits pas. Il nous faut du courage et de la conviction pour avancer ; ne vous laissez donc pas influencer par les pressions dont les auteurs n’ont d’autre volonté que de nous amener à ne rien faire. Vous connaissez tous le vieil adage : qui n’avance pas recule. Montrons donc que les représentants de la Nation sont capables de défendre l’intérêt général, au nom des générations futures et de la pérennité de l’espèce humaine sur notre planète, qui que l’on soit et où que l’on se trouve.

Le Sénat a examiné le texte il y a quelques semaines. Les débats y ont été sérieux, quelquefois un peu durs. Je salue le rapporteur Jérôme Bignon qui a fait tout ce qu’il a pu pour ne pas se laisser déborder, même s’il n’a pas toujours réussi. Ce travail a permis des avancées qui nous permettront d’améliorer encore le texte sans prendre le risque de l’amoindrir.

Le projet de loi comporte des rendez-vous à ne pas manquer : la solidarité écologique, dans sa double dimension ; le triptyque « éviter, réduire, compenser » déjà présent dans la loi de 1976, mais dont nous devons réaffirmer l’ordre avec force ; le préjudice écologique qui permettra de ne plus nous contenter de la jurisprudence ; l’interdiction des néonicotinoïdes — une décision qui exige du courage, mais qui profitera aux agriculteurs, aux populations et aux espèces animales et végétales, ainsi qu’aux micro-organismes du sol ; la création de l’AFB, un outil efficace et fonctionnel au service de tous les acteurs, qui, sans être une usine à gaz, démultipliera les moyens alloués à la biodiversité.

Je regrette que l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) n’y participe pas, car c’était pour cette structure une formidable opportunité de voir consacrer ses compétences. L’avenir saura nous démontrer, en particulier au niveau local, la pertinence d’une telle intégration. Nous pourrons à nouveau débattre de tous ces thèmes avec nos approches et nos sensibilités respectives ; j’espère néanmoins que nos débats iront toujours dans le sens d’une volonté farouche d’atteindre nos objectifs et de tendre vers l’exemplarité.

Mais les apports du Sénat ne sont pas tous positifs. Certains amendements ne suivent pas la logique des grands défis que nous devons relever et nous aurons à cœur de rectifier les dispositions qui auraient pour conséquence de dénaturer le texte. Ainsi, le Sénat a transformé les obligations réelles environnementales — que nous concevons comme un engagement volontaire unilatéral — en contrats, sans que cela apparaisse nécessaire.

Nous devons examiner 911 amendements ; la règle de « l’entonnoir » nous empêche d’en considérer quelques autres, qui seraient pourtant pertinents. En effet, l’étalement dans le temps nous a permis de gagner en recul, donc en idées ; il est dommage d’en abandonner certaines, car le sujet est transversal et nous n’en avions pas traité toutes les facettes en première lecture. Mais nous devons nous plier à la règle. Malgré sa complexité et ses imperfections, ce texte nous passionne. J’espère que nous pourrons en être fiers.

Mme Viviane Le Dissez. Le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a été adopté au Sénat à une très large majorité. Plus d’une centaine d’articles nouveaux y ont été introduits. Bien que l’équilibre du texte et ses principales dispositions aient été maintenus, des ajustements sont encore nécessaires.

L’examen du texte par la Haute Assemblée a permis d’enrichir les débats sur plusieurs points. Les sénateurs ont conforté la création de l’Agence française pour la biodiversité qui sera la première agence de pilotage, de suivi et d’expertise au monde. Elle sera opérante dès la promulgation de la loi.

La protection et la valorisation de la biodiversité et de ses ressources passent par la connaissance de ce milieu complexe, mais aussi par la participation active des territoires. Ainsi, les partenariats de l’Agence avec les collectivités territoriales, les territoires d’outre-mer ou le monde de la recherche — qui est au cœur de ses missions — sont justement représentés et reflètent les choix de sa gouvernance.

Le Sénat a avalisé la transposition dans notre droit national du protocole de Nagoya en autorisant sa ratification. Ce protocole, outil indispensable de lutte contre la biopiraterie, met en place un instrument juridique afin de promouvoir une utilisation durable des ressources et de garantir un partage juste et équitable des avantages. Ainsi le texte concrétise-t-il des engagements ambitieux envers les populations des pays qui ont déjà ratifié le protocole comme envers les experts, les muséums et les laboratoires, notamment de recherche pharmaceutique et de cosmétologie, qui attendent aussi cette manière de travailler.

Ce nouveau cadre juridique allie d’ailleurs une meilleure gestion des ressources naturelles et de protection du monde de la recherche avec la mise en œuvre de procédures encadrées relevant soit du régime de la déclaration, soit de l’autorisation, avec un juste retour envers les communautés d’habitants, dès lors qu’elles découlent de l’utilisation des connaissances traditionnelles.

Enfin, la notion de préjudice écologique entre dans la loi. Il nous appartient de finaliser et d’encadrer cette disposition majeure attendue depuis bien longtemps qui, je le pense, fait consensus sur tous les bancs. En tant que Costarmoricaine, je n’oublie pas le désastre écologique causé par le naufrage de l’Erika : il a durablement marqué les esprits et, bien sûr, la faune et la flore de notre littoral. Les mécanismes d’une responsabilité civile, fondée sur les dommages causés à l’environnement, doivent être encore précisés et affinés. Nos décisions quant à la définition de ce cadre juridique seront décisives pour les décennies à venir.

Alors que la filière agricole est confrontée à une crise sans précédent, il est important d’intégrer l’agriculture dans le champ de la biodiversité. Ce texte doit être l’occasion de mieux protéger et soutenir les initiatives durables. Les agriculteurs font partie des acteurs majeurs de la reconquête de la biodiversité. La disposition introduite par le Sénat et qui vise à interdire le brevetage des gènes natifs est à considérer comme un soutien du secteur agricole.

Ce texte primordial affermit nos engagements, notamment à travers le triptyque « éviter, réduire, compenser » – éviter avant de réduire, et réduire avant de compenser.

Son dernier volet conforte les sites protégés inscrits sur nos territoires et préservera les allées d’arbres, l’image de notre patrimoine aussi bien rural qu’urbain.

Il nous faudra revenir sur quelques sujets controversés, tels que la chasse, certaines mesures concernant l’agriculture et le chalutage en eaux profondes – il nous appartiendra de trancher dans le respect de la biodiversité pour les années à venir. Nous devons aboutir à un texte clair et applicable dès sa promulgation.

Notre responsabilité est grande, face au défi de la préservation et de la gestion durable de la biodiversité, qui est mouvante : les termes de la loi devront pouvoir évoluer et s’adapter aux changements qu’elle rencontrera.

J’espère que les échanges qui auront lieu dans cette commission seront toujours aussi riches et courtois.

M. Martial Saddier. Madame la secrétaire d’État, je tiens à vous féliciter pour votre nomination – mais, par les temps qui courent, ces félicitations doivent être assorties d’encouragements. (Sourires)

Ce texte revient devant notre commission après y avoir été examiné il y a deux ans et après que l’Assemblée l’a adopté en première lecture il y a un an : ces faits doivent tempérer l’enthousiasme de Mme la secrétaire d’État et de ceux qui prétendent qu’il constitue une priorité absolue de la majorité et du Gouvernement.

En première lecture, nous nous étions interrogés sur l’objet même du texte, notamment sur l’Agence française pour la biodiversité. J’espère que la deuxième lecture nous fournira des réponses plus précises. Nous sommes plusieurs à penser que cette agence, qui sera nationale, nous fera courir un risque de recentralisation. Nous ne savons toujours pas quelle sera son articulation avec les territoires et nous n’avons toujours pas vraiment compris où est la rationalisation et quels moyens supplémentaires seront dégagés en faveur de la biodiversité de manière homogène sur l’ensemble des territoires.

Nous saluons les travaux du Sénat. En première lecture, nous avions défendu diverses mesures sur l’agriculture, sur la gouvernance des agences de l’eau – laquelle a évolué en 2014, puisqu’elle a été ouverte à la société civile – et sur la chasse. Sur ces trois points, le Sénat est plus ou moins parvenu à un équilibre que nous défendrons. Toutefois, nous désapprouvons la notion de préjudice écologique et la manière dont elle serait inscrite dans le code civil, les mesures concernant les chemins ruraux et l’abattage des arbres, ainsi que la taxe sur l’huile de palme.

Comme d’habitude, les députés du groupe Les Républicains abordent l’examen de ce texte avec un esprit constructif, mais ils ne manqueront pas de revenir sur les questions qu’il soulève depuis deux ans.

M. Bertrand Pancher. Madame la secrétaire d’État, vos propos nous ont presque attendris (Sourires) : nous avons parfois eu l’impression d’entendre Ségolène Royal – ce qui n’est pas vraiment un compliment. (Rires et murmures divers)

Cela dit, je tiens à saluer votre enthousiasme.

Sans doute pourrait-on dire que ce texte est un grand projet de loi sur la biodiversité des escargots (Sourires), car son examen avance avec lenteur. Il aura mis trois ans à cheminer ! Cela complique notre travail, même si nous nous adaptons et reprenons assez facilement nos notes.

S’agit-il vraiment de la grande loi sur la biodiversité qu’on nous avait annoncée lors de la conférence environnementale ? Non. Nous attendions la création d’une « grande » agence de la biodiversité : nous aurons une « petite » agence, qui s’occupera essentiellement de la biodiversité des milieux aquatiques, puisque l’ONCFS et l’Office national des forêts ont fait comprendre qu’il était hors de question qu’ils y soient associés – et on comprend leurs réserves. Cette agence sera-t-elle dotée de nouveaux moyens ? Non. Nous sommes dans un contexte de réduction généralisée des budgets.

Certes, Mme la rapporteure avait introduit en première lecture des dispositions astucieuses, mais certaines ont été remises en cause par le Sénat. Que ressortira-t-il de nos travaux en deuxième lecture ? Les décrets d’application seront-ils publiés, sachant que nous nous rapprochons de plus en plus des prochaines échéances électorales ?

Nous présenterons des amendements qui visent à améliorer ce texte. Du sort qui leur sera réservé dépendra le vote final de notre groupe.

Mme Laurence Abeille. Comme mes collègues, je déplore la lenteur avec laquelle ce texte est examiné. Nous attendions ce projet de loi avec impatience. Nous sommes aujourd’hui à une nouvelle étape ; espérons que les suivantes seront plus rapides.

Nous ne nous satisfaisons pas du tout des mesures qui ont été adoptées au Sénat. Si la Haute Assemblée a voté ce texte à une large majorité, il l’a profondément abîmé. Il va donc falloir revenir sur un certain nombre de dispositifs.

L’une des dispositions phares concerne le refus du Sénat d’interdire les néonicotinoïdes. Faut-il rappeler à quel point ces produits sont nocifs pour la biodiversité, pour les pollinisateurs, pour les sols, pour les eaux ?

Il nous faudra également revenir sur les dispositifs adoptés concernant les modes de chasse nuisibles à la biodiversité. Il est parfois bon de rappeler des évidences : ce que nous souhaitons, c’est protéger les espèces protégées. La chasse à la glu n’est pas admissible, puisqu’elle permet d’attraper des espèces d’oiseaux protégées. Nous reviendrons également sur la question de la chasse en période de reproduction.

Je suis très attachée aux mesures favorisant la biodiversité en milieu urbain, dont ce texte ne parle pas assez, comme les toitures végétalisées et les revêtements perméables sur les parkings. Ces dispositifs, qui peuvent sembler anodins, sont extrêmement importants. La densité urbaine fait que nous avons créé des îlots de chaleur. La question climatique en ville est devenue importante, tout comme la lutte contre la pollution et l’évacuation des eaux.

Enfin, s’agissant du triptyque « éviter, réduire, compenser », on ne dira jamais assez qu’il faut évidemment favoriser l’évitement, puis la réduction, la compensation devant intervenir en dernier ressort. Ce sujet a fait l’objet de peu de discussions en première lecture à l’Assemblée nationale. Il faudra trouver les moyens de l’encadrer plus fermement.

L’interdiction du chalutage en eaux profondes est un sujet qui me tient à cœur. On sait à quel point les milieux marins sont fragiles et combien la biodiversité en milieu marin est riche. Il est donc important d’interdire ce mode de pêche, inintéressant d’un point de vue économique et qui a des conséquences graves sur la biodiversité.

Nous reviendrons peu sur la question de la gouvernance de l’Agence française pour la biodiversité, car nous en avons déjà longuement débattu. Bien évidemment, nous continuons de regretter l’absence de l’ONCFS au sein de l’AFB. Comme le dit Bertrand Pancher, en l’état, il s’agit davantage d’une agence des milieux aquatiques.

M. Bertrand Pancher. Si même les écologistes le disent ! (Rires)

Mme Laurence Abeille. La question des moyens de cette agence est essentielle ; nous aurons l’occasion d’y revenir.

La notion de préjudice écologique a été introduite au Sénat. La nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement nous inquiète grandement : elle ne doit surtout pas constituer une régression par rapport au droit de l’environnement. Au contraire, il faut prendre sérieusement en main ce dossier et avancer.

L’interdiction des néonicotinoïdes ou celle du chalutage en eaux profondes sont des mesures concrètes qui peuvent donner du corps à cette loi. Nous avons envie de nous occuper de la protection de la nature, et nous nous adressons aussi aux générations futures. La destruction de la biodiversité est massive et n’a jamais été aussi rapide. Bien sûr, cette loi ne réglera pas tout, mais nous espérons qu’elle constituera un jalon important.

M. Guillaume Chevrollier. Le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité continue son long cheminement. Cela fait presque deux ans qu’il a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale. Il revient aujourd’hui devant nous après avoir été profondément modifié et enrichi au Sénat. Nous pouvons saluer la Haute Assemblée pour sa sagesse qui a permis d’améliorer considérablement le texte. Il est toutefois à craindre que cette sagesse ne gagne pas les bancs de l’Assemblée nationale et que la deuxième lecture ne malmène le texte.

Si la préservation de la biodiversité doit être notre ligne de conduite, nous ne pourrons la tenir qu’en respectant les agriculteurs et les chasseurs qui jouent un rôle important en la matière. Les premiers, dont le mécontentement et l’inquiétude grandement justifiés n’ont échappé à personne, sont en effet très concernés par ce texte. Or qu’y trouvent-ils ? Des contraintes, des interdictions et des complications. Certes, le Sénat a amoindri ces difficultés, mais certains articles doivent encore être améliorés.

Parmi les sources d’inquiétudes des agriculteurs, on peut citer l’obligation environnementale dont la portée doit être encadrée, les chemins ruraux et l’abattage des arbres pour lesquels le recensement ne doit pas avoir des conséquences préjudiciables pour eux, les associations environnementales dont le rôle doit être bien défini, sans oublier les produits phytosanitaires dont l’utilisation doit être encadrée et non fustigée.

Quant aux chasseurs, ils demandent une reconnaissance de leur rôle en tant que protecteurs de la biodiversité et refusent d’être stigmatisés comme ils le furent lors de la première lecture à l’Assemblée nationale qui a vu l’adoption d’amendements anti-chasse. Les chasseurs, même si des corrections sont encore à apporter au texte adopté au Sénat, veulent le maintien de l’équilibre trouvé. Il me reste à espérer que le texte issu du Sénat ne sera pas dénaturé en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

M. Serge Letchimy. J’ai eu l’occasion de m’exprimer à de très nombreuses reprises et de contribuer, avec mes collègues de l’outre-mer, à l’amélioration du texte. L’examen du projet de loi au Sénat suscitait de grandes inquiétudes de ma part. Or je dois reconnaître qu’il n’a pas été trop modifié. Contrairement à Bertrand Pancher, je tiens à féliciter la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, pour avoir porté ce texte. Que Barbara Pompili prenne aujourd’hui le relais me semble être une très bonne chose. Ce projet de loi est une grande initiative française. Il est très facile de parler d’écologie et d’environnement ; il est plus difficile – et pourtant essentiel – d’atteindre un haut niveau de reconnaissance, de valorisation et de protection de la nature.

Cette question est d’une importance extrême pour l’outre-mer, qui concentre 80 % de la biodiversité française. Nous avons beaucoup œuvré pour ne pas être dans un système contemplatif de la biodiversité, dans une posture géopolitique de domination de la biodiversité, des récifs coralliens aux richesses naturelles de la Guyane, mais dans une approche de réappropriation collective par nous-mêmes de la biodiversité et de valorisation de sa protection. C’est essentiel pour l’équilibre de la nature. À ce titre, je tiens beaucoup à ce que certaines des dispositions adoptées soient maintenues, notamment les délégations de l’Agence. Le Sénat a adopté une formule qui me paraît bizarre, puisqu’elle remplace le mot « délégation » par l’expression « organisme de collaboration pérenne ». Je ne sais pas ce que cela veut dire. En tout cas, ce n’est pas crédible.

Enfin, l’accès et le partage des ressources me paraissent essentiels, notamment par la reconnaissance des pratiques et des savoirs traditionnels. L’expression de « communauté d’habitants » conduit à intégrer le maximum de personnes. Je souhaite que soit engagée une analyse juridique très précise pour voir si les retombées des savoirs et des pratiques traditionnelles utilisées dans le cadre d’une valorisation sont aussi profitables à des pays comme la Martinique ou la Guadeloupe, qui n’ont pas de communautés d’habitants telles qu’on les conçoit. Le pillage de la richesse biologique ayant été constaté, il faut entrer dans un processus de valorisation, car ce sont des filières de croissance économiques essentielles pour l’avenir.

J’en viens aux moyens de l’Agence française pour la biodiversité et au cas précis de l’intégration, dans l’Agence, du comité national de l’initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR). Quels seront les moyens mis en œuvre, sachant que, l’IFRECOR ayant un modèle de gouvernance propre, sa dynamique pourrait être compromise si l’on n’y prend garde ?

M. François-Michel Lambert. Nous devons faire de la défense de la biodiversité une priorité législative et politique. La création du secrétariat d’État chargé de la biodiversité nous en donne l’occasion. Le moment est venu de régler définitivement la question des éléments qui détruisent réellement la biodiversité – je pense notamment aux néonicotinoïdes et à la pêche en eaux profondes.

Mais ne nous trompons pas de combat : nous devons œuvrer à rassembler, à plus ou moins long terme, tous les acteurs de la nature dans une gouvernance partagée. Agriculteurs et chasseurs devront trouver leur place dans un pilotage partagé de la gestion de la biodiversité.

M. Arnaud Leroy. Depuis quelques heures, la question du préjudice écologique suscite beaucoup d’émoi. Vous le savez, j’ai animé, avec Geneviève Gaillard, un petit groupe de travail pour donner au dispositif un peu plus d’efficacité, de stabilité et de visibilité, notamment pour les entreprises. Je dois avouer que je suis surpris de la dernière mouture du texte. Il est important de ne pas revenir en arrière par rapport à la rédaction issue du Sénat et de ne pas abandonner le principe pollueur-payeur inscrit dans les traités de l’Union européenne.

La notion de préjudice écologique est aussi importante et novatrice pour notre droit civil que la loi sur la biodiversité car c’est une véritable révolution juridique. Aussi convient-il de ne pas se tromper. Avec Geneviève Gaillard, nous avons essayé de trouver une rédaction juridiquement solide. Peut-être n’est-elle pas parfaite, peut-être faudra-t-il la revoir, mais il faut surtout éviter d’adopter l’amendement du Gouvernement qui prévoit que « n’est pas réparable, sur le fondement du présent titre, le préjudice résultant d’une atteinte autorisée par les lois, règlements et engagements internationaux de la France ou par un titre délivré pour leur application », car il est extrêmement dangereux pour le droit de l’environnement dans notre pays.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la secrétaire d’État, vous représentez ici le Gouvernement de la France. Or, à deux reprises au début de votre intervention, vous avez rappelé votre engagement écologiste. Je souhaite que votre engagement s’adresse avant tout à tous les Français.

Mme la secrétaire d’État. C’est une évidence !

M. Jean-Marie Sermier. Vous avez rappelé les enjeux essentiels de la planète sur le dérèglement climatique et le maintien de la biodiversité. Ces enjeux, nous les partageons, sur tous les bancs de l’Assemblée. C’est un souci permanent qui a trouvé une première réponse en 2010, à Nagoya. Tous les gouvernements qui ont ratifié l’accord ont travaillé ensemble. La France a joué un rôle essentiel d’entraîneur. Mais, quand on est un entraîneur, l’essentiel n’est pas de courir vite tout seul devant, mais d’associer toute l’équipe pour que nous puissions courir ensemble au même rythme et faire avancer les moins performants.

Si la France joue le rôle essentiel d’une nation qui possède une biodiversité exceptionnelle et un périmètre non moins exceptionnel, puisqu’elle est présente dans le monde entier, comme l’a rappelé à l’instant Serge Letchimy, elle a aussi le devoir de préserver ceux qui font son pays, ses traditions, son économie. Je pense aux agriculteurs qui n’ont pas besoin de surtransposition ni de normes supplémentaires. Ce débat sera l’occasion d’envoyer un signal très fort à nos agriculteurs. Ainsi, ils sauront si on les emmène dans une réserve ou si l’on compte sur eux pour qu’ils produisent demain une agriculture de qualité.

Plusieurs intervenants ont évoqué la lenteur du parcours législatif de ce projet de loi. Effectivement, la vitesse n’est pas au rendez-vous. Souhaitons que la précipitation ne le soit pas non plus. Les débats seront importants. Le brevetage du vivant est compliqué, y compris pour les petites entreprises françaises. La question de l’utilisation des néonicotinoïdes est également complexe, et l’avis rendu par l’ANSES au mois de janvier dernier laisse penser que ce dossier n’est pas aussi simple qu’on voudrait nous le faire croire. Quant à la taxation de l’huile de palme, il ne faut pas confondre les politiques d’affichage et les politiques réalistes sur la déforestation.

De beaux débats nous attendent en tout état de cause. J’espère, Madame la secrétaire d’État, que vous serez ouverte au dialogue avec les diverses corporations françaises.

Mme la secrétaire d’État. Avec les Français, pas avec les corporations !

M. Philippe Plisson. Nous arrivons au terme d’un long cheminement législatif qui aboutira à l’adoption du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité.

Le Sénat a amendé le projet de loi et le texte qui nous revient aujourd’hui a été voté à l’unanimité des groupes politiques. C’est assez rare pour être souligné. Or j’ai entendu tout à l’heure des propos qui vont ranimer les polémiques, en particulier en ce qui concerne la chasse. Je souhaite que nos débats se focalisent sur ce qui nous rassemble et non sur ce qui nous divise, afin que nous votions, nous aussi à l’unanimité, une loi relative à la biodiversité — j’allais dire : une loi sur la chasse. (Sourires)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il fut un temps où le Parlement votait chaque année une loi sur la chasse. La dernière en date, en 2011, est la proposition de loi de Jérôme Bignon, que l’opposition d’alors avait votée.

M. Yves Nicolin. Ce projet de loi cherche à atteindre des objectifs multiples et importants, que nous pouvons partager, mais qui sont parfois contradictoires. Certains ont parlé de la sagesse du Sénat. Mais, tandis que notre agriculture est en plein désarroi, certaines mesures adoptées par le Sénat ne font qu’aviver l’inquiétude, car elles auraient des conséquences désastreuses pour certaines professions, en particulier pour la profession agricole. Alors que le principe de complémentarité entre l’agriculture et l’environnement devrait prévaloir, on a parfois le sentiment que ce texte les oppose.

Certains amendements votés au Sénat frisent l’extravagance. Ainsi, l’article 72 bis vise à interdire purement et simplement l’abattage de certains arbres, notamment « les allées d’arbres et alignements d’arbres, qui constituent un patrimoine culturel et une source d’aménités ». Est donc interdit « le fait d’abattre, de porter préjudice à l’arbre ou à son domaine vital, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l’aspect d’un ou de plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres ».

Il paraîtrait logique de demander que l’Agence française de la biodiversité ne vienne pas contredire, voire perturber le rôle d’autres instances, comme l’ANSES ou l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Il faudra faire cohabiter tout ce petit monde en bonne intelligence.

Nous souhaitons que la création des réserves d’eau ne soit plus soumise à la réglementation des carrières, comme cela peut être le cas aujourd’hui. En ce qui concerne les débits réservés, il pourrait être demandé de permettre de déroger aux obligations, notamment en zone de montagne ou de piémont méditerranéen, pour permettre l’irrigation. Dino Cinieri, député de la Loire, est tout particulièrement concerné par cette question.

Si ce texte a permis à la sagesse du Sénat de s’exprimer, il me semble que le bon sens de l’Assemblée peut à son tour apporter une contribution intéressante et positive.

Mme Valérie Lacroute. Je veux évoquer les dispositions afférentes à l’activité agricole. En première lecture, le groupe Les Républicains avait voté contre ce texte, car il comptait de nombreuses dispositions qui préoccupaient le monde agricole. Les débats ont parfois été très durs à l’encontre des agriculteurs. Pourtant, l’agriculture contribue aussi à la préservation de la biodiversité. Les agriculteurs sont en contact avec le vivant tous les jours, sur leurs exploitations.

Face à la crise que traverse l’agriculture française, il serait suicidaire d’imposer à nos agriculteurs de nouvelles contraintes environnementales qui vont au-delà des exigences européennes. Au tout réglementaire, il vaut mieux privilégier la contractualisation et les partenariats avec les agriculteurs. Il est primordial de trouver le juste équilibre entre développement durable et compétitivité de notre agriculture.

Je voudrais saluer nos collègues sénateurs pour le travail qu’ils ont effectué. Ils ont répondu aux interrogations du monde agricole en modifiant substantiellement certaines dispositions trop contraignantes. J’en veux pour preuve que l’interdiction, à compter du 1er janvier 2016, de l’usage des produits phytosanitaires de la famille des néonicotinoïdes a été supprimée, au motif que le législateur français n’est pas habilité à interdire l’usage d’une famille de produits phytosanitaires. Une telle disposition relève en effet du législateur européen.

Je soutiendrai donc, pour ma part, le texte tel qu’il a été adopté par les sénateurs, tout en m’opposant à certains articles qui augmentent les contraintes, telles que le renforcement des missions de l’AFB ou l’obligation de transmission systématique par les agriculteurs de leur registre de produits phytosanitaires.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen, en deuxième lecture, sur le rapport de Mme Geneviève Gaillard, du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (n° 3442).

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il nous reste à examiner 754 amendements. Nous lèverons la séance à vingt heures et reprendrons nos travaux lundi prochain, 7 mars 2016, à vingt heures trente. Nous n’avons aucune autre possibilité.

M. Martial Saddier. Il est surprenant que nos travaux ne puissent pas se poursuivre demain alors que chacun savait que nous ne pourrions pas achever l’examen du texte aujourd’hui. Nous pourrions nous réunir ce soir.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je ne me sens pas le droit d’annoncer maintenant que nous poursuivrons nos travaux ce soir.

M. Philippe Plisson. En effet, certains ont pris d’autres engagements pour ce soir et demain. Par contre, peut-être pourrions-nous reprendre nos travaux dès lundi après-midi.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Non. Mme la secrétaire d’État ne sera pas disponible. Je propose de reprendre nos travaux sans plus tarder.

TITRE IER
PRINCIPES FONDAMENTAUX

Article 1er
(article L. 110-1 du code de l’environnement)

Actualisation des principes généraux du droit de l’environnement

Le présent article actualise les principes généraux du droit de l’environnement définis à l’article L. 110-1 du code de l’environnement.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Le présent article, tel qu’il a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, permet notamment de préciser que :

– les ressources et milieux naturels qui font partie du patrimoine commun de la nation sont terrestres ou marins ;

– les êtres vivants et la biodiversité, et non plus les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent, font partie du patrimoine commun de la nation ;

– le patrimoine commun de la nation inclut les paysages diurnes et nocturnes ;

– les processus biologiques, les sols et la géo-diversité concourent à la constitution de ce patrimoine.

La biodiversité a été définie, suite aux travaux en commission, conformément aux termes de la Convention sur la diversité biologique de 1992 et du Protocole de Nagoya de 2010.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En commission, les sénateurs ont adopté :

– un amendement présenté par le rapporteur, M. Jérôme Bignon, tendant à revenir aux notions d’espèces animales et végétales ;

– un amendement présenté par le rapporteur, supprimant la référence aux sols comme concourant au patrimoine commun de la nation ;

– un amendement présenté par le rapporteur, modifiant la définition de la biodiversité et tendant à intégrer la notion d’interactions (la biodiversité est entendue comme « l’ensemble des organismes vivants ainsi que les interactions qui existent, d’une part, entre les organismes vivants eux-mêmes, d’autre part, entre ces organismes, leurs habitats naturels et leurs milieux de vie ») ;

– un amendement présenté par le rapporteur, supprimant la mention des paysages diurnes et nocturnes comme faisant partie du patrimoine commun de la nation.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre commission a adopté, en deuxième lecture, deux amendements présentés par votre rapporteure :

– le premier tendant à réintroduire la mention des paysages diurnes et nocturnes, ainsi que des êtres vivants et de la biodiversité ;

– le second tendant à revenir à la notion de la biodiversité telle qu’elle était issue des travaux de l’Assemblée nationale, en insérant la notion d’interactions entre les organismes vivants issue des travaux du Sénat.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CD172 rectifié de la rapporteure et les amendements identiques CD493 de Mme Laurence Abeille, CD568 de M. Bertrand Pancher et CD749 de M. Joël Giraud.

Mme la rapporteure. L’amendement CD172 rectifié vise à rétablir les dispositions issues des travaux de l’Assemblée nationale incluant les paysages diurnes et nocturnes, les êtres vivants et la biodiversité dans le patrimoine commun de la Nation.

Mme Laurence Abeille. Je retire l’amendement CD493 au profit de celui de Mme la rapporteure, dont la rédaction s’avère plus exhaustive.

M. Bertrand Pancher. L’amendement CD568 est défendu.

M. Olivier Falorni. De même que l’amendement CD749.

Mme la secrétaire d’État. Ces amendements proposent de réintroduire les notions de paysages diurnes et nocturnes ; la biodiversité englobe des espaces, des ressources et des milieux naturels terrestres et marins, ainsi que les sites et les paysages diurnes et nocturnes. Des paysages nocturnes, la biodiversité et des insectes se trouvent affectés par la pollution induite par l’excès de lumière artificielle. Je suis favorable à l’adoption de ces amendements.

M. Martial Saddier. Insérer ces précisions dans la loi nous semble inutile. Le texte évoquait les sites et les paysages, et leur qualification de diurnes et de nocturnes entraînera d’importantes conséquences quand on connaît l’ampleur des débats portant sur la luminosité entre les zones très urbaines, périurbaines, rurales et d’infrastructures.

L’amendement CD493 est retiré.

À la demande du président Jean-Paul Chanteguet, les amendements CD568 et CD749 sont également retirés.

La Commission adopte l’amendement CD172 rectifié.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CD494 de Mme Laurence Abeille, CD750 rectifié de M. Jacques Krabal et l’amendement CD173 de la rapporteure.

Mme Laurence Abeille. Il s’agit de rétablir une disposition, adoptée par l’Assemblée nationale et supprimée par le Sénat, qui vise à reconnaître la biodiversité des sols. Celle-ci n’est pas immédiatement visible, mais elle a toute sa place dans ce projet de loi qui réaffirme l’importance de la biodiversité ordinaire. Les sols jouent un rôle primordial dans les équilibres écosystémiques pour l’agriculture et dans le cycle du carbone.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD750 rectifié est défendu.

Mme la rapporteure. L’amendement CD173 défend l’idée selon laquelle les sols concourent à la constitution du patrimoine commun de la Nation. Ils sont le support d’un patrimoine génétique fondamental et assurent des fonctions de première importance.

Mme la secrétaire d’État. Les sols remplissent une fonction essentielle, car une grande partie de la biodiversité s’y trouve nichée. Néanmoins, l’introduction de cette notion suscite des craintes pour l’agriculture, alors que les sols sont déjà inclus dans le terme de géodiversité. L’objet de ces amendements étant déjà satisfait, je vous propose de les retirer.

M. Jean-Marie Sermier. Vous avez parfaitement raison, Madame la secrétaire d’État. Le texte n’a pas à rappeler que le sol fait partie de la biodiversité, puisqu’il s’agit d’un élément minéral. N’effectuons pas de transposition inutile envoyant un mauvais signal à l’agriculture française.

M. Jean-Yves Caullet. Le sol résulte d’un élément géologique minéral et d’interactions vivantes, végétales et animales. Dès lors que l’on protège la biodiversité végétale et animale, on protège les sols avec la géodiversité ; le texte inclut donc déjà cette notion.

Mme Laurence Abeille. L’Assemblée nationale avait adopté cette disposition en première lecture ; il me semble essentiel de réintégrer les sols dans le texte pour ne pas les oublier. Les sols ne sont pas des minéraux, mais des corps vivants dont la biodiversité se révèle primordiale.

Mme la rapporteure. Le sol est constitué d’éléments minéraux, mais aussi de bactéries et de germes qui ont leur importance. L’Union européenne nous demande de nous pencher sur la question des sols, et une convention sur leur biodiversité se tiendra prochainement. L’insertion de cette notion dans le texte n’enlève ni n’impose rien aux agriculteurs, car on se contente de constater que les sols concourent à la biodiversité.

M. Julien Aubert. Lorsque l’on élabore un projet de loi sur la biodiversité, il semble opportun de s’entendre sur le périmètre du texte ; après deux années de navette parlementaire, on ne s’accorde toujours pas sur l’acception du terme de biodiversité, ce qui devrait nous faire réfléchir.

Les sénateurs ont sans doute supprimé la notion de sol dans l’article 1er pour de bonnes raisons. Il serait intéressant de les connaître. Sont-elles de forme ou obéissent-elles à une conception différente de la biodiversité ? L’existence de deux chambres devrait nous permettre de mener un débat sur le fond.

Mme la rapporteure. L’amendement de Mme Laurence Abeille affirme que les sols font partie du patrimoine de la Nation, alors que le mien explique que les sols concourent à la biodiversité et à la constitution de ce patrimoine. Madame Abeille, accepteriez-vous de retirer votre amendement ?

Mme Laurence Abeille. Oui.

M. Gilbert Sauvan. Je suis sceptique quant à la pertinence d’introduire dans le texte la notion de sol, qui ne touche pas qu’à l’agriculture, mais également à l’urbanisme. Nous ne devons pas contrarier les vocations agricoles ou d’accueil de constructions des sols.

Les amendements CD494 et CD750 rectifié sont retirés.

La Commission rejette l’amendement CD173.

Puis elle en vient à l’amendement CD174 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Tout en intégrant certaines modifications votées par le Sénat, cet amendement propose de définir la biodiversité à partir du texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, qui s’appuyait lui-même sur la Convention sur la diversité biologique (CDB).

Mme la secrétaire d’État. La définition de la CDB, enrichie par la notion d’interactions entre les organismes vivants, est complète et précise. Les sénateurs sont parvenus à un accord consensuel établissant une caractérisation plus simple et acceptée par les associations. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2
(article L. 110-1 du code de l’environnement, article L. 1 du code rural et de la pêche maritime)

Actualisation des principes de préservation et de reconquête de la biodiversité

Le présent article a trait aux principes gouvernant la protection et la gestion de la biodiversité.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article introduit la notion de connaissance de la biodiversité, le triptyque « éviter, réduire, compenser » et de nouveaux principes, tels que le principe de solidarité écologique et le principe de complémentarité entre l’agriculture et l’environnement.

Les travaux en commission avaient permis, à l’initiative de votre rapporteure, de définir la compensation comme ne devant intervenir qu’en dernier ressort, après l’évitement et la réduction des atteintes à la biodiversité, de préciser les éléments de biodiversité affectés (en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées) et de définir le principe de solidarité écologique pour toute décision publique ayant une incidence notable sur l’environnement des territoires (directement ou indirectement concernés précisera le texte à l’issue de la séance publique). Votre commission avait également introduit le principe nouveau de complémentarité entre l’environnement et l’agriculture.

En séance, l’Assemblée nationale a précisé que le triptyque « éviter, réduire, compenser » vise un objectif d’absence de perte nette de biodiversité, voire doit tendre vers un gain de biodiversité, et que le principe de complémentarité est étendu à la sylviculture.

Un rapport a été demandé, dans un délai de deux ans, sur l’opportunité d’inscrire dans le code de l’environnement le principe de non-régression.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En commission, les sénateurs ont adopté :

– sept amendements identiques, dont l’un présenté par le rapporteur, supprimant l’objectif d’absence de perte nette de biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur tendant à supprimer la mention des territoires indirectement concernés dans la définition du principe de solidarité ;

– un amendement présenté par le rapporteur déplaçant à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime le principe de complémentarité entre l’environnement, l’agriculture et la sylviculture, et remplaçant la notion de fonctionnalités écologiques par celle de services environnementaux qui utilisent les fonctions écologiques d’un écosystème pour restaurer, maintenir ou créer de la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur précisant que le rapport sur l’opportunité d’inscrire dans notre droit le principe de non-régression porterait également sur la valeur du principe lui-même et serait remis dans un délai d’un an au lieu de deux ans ;

– un amendement tendant à ajouter que le patrimoine commun de la nation génère des services écosystémiques et des valeurs d’usage. Votre rapporteure souligne que la notion de valeurs d’usage peut soulever des difficultés de définition (2) ;

– deux amendements identiques, tendant à modifier la définition du triptyque éviter, réduire, compenser : « Ce principe implique d’éviter les atteintes significatives à l’environnement ; à défaut, d’en réduire la portée ; enfin en dernier lieu, de compenser les atteintes résiduelles qui n’ont pu être évitées et réduites. » Ce principe porterait sur les atteintes, qui seraient définies comme significatives, à l’environnement, et non plus à la biodiversité. La précision des différents éléments affectés et nécessitant la mise en œuvre d’une compensation a été supprimée.

En séance, le Sénat a adopté :

– trois amendements identiques, tendant à ce que l’article L. 110-1 du code de l’environnement précise que les mesures prises en faveur des espaces, ressources et milieux naturels, sites et paysages, de la qualité de l’air, des espèces animales et végétales, et de la diversité et des équilibres biologiques (mesures de protection, mise en valeur, restauration, remise en état et gestion) prennent en compte « les valeurs intrinsèques ainsi que les différentes valeurs d’usage de la biodiversité reconnues par la société » ;

– trois amendements identiques, visant à supprimer le rapport sur le principe de non-régression ;

– trois amendements identiques, tendant à ajouter « le principe de la conservation par l’utilisation durable, selon lequel la pratique des usages est un instrument au service de la conservation de la biodiversité ».

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté :

– un amendement tendant à supprimer les nouveaux alinéas 1 et 2 de l’article relatifs à la mention que le patrimoine commun génère des services écosystémiques et des valeurs d’usage ;

– un amendement présenté par votre rapporteure tendant à rétablir la définition du triptyque « éviter, réduire, compenser » telle qu’elle résultait des travaux de l’Assemblée ;

– un amendement présenté par votre rapporteure visant à réintroduire la mention des territoires indirectement concernés dans la définition du principe de solidarité ;

– un amendement présenté par votre rapporteure, complété par un amendement présenté par Mme Anne-Yvonne Le Dain, visant à modifier le principe de conservation par l’utilisation durable pour lui substituer le principe de l’utilisation durable, selon lequel la pratique des usages peut être un instrument qui contribue à la conservation de la biodiversité ;

– un amendement tendant à réinscrire le principe de complémentarité, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat, au sein du code de l’article L. 110-1 du code de l’environnement et un amendement de coordination supprimant les alinéas 15 et 16 de l’article ;

– deux amendements identiques, dont l’un a été présenté par votre rapporteure, tendant à réintroduire la remise, dans un délai de six mois, du rapport sur l’inscription dans le droit du principe de non régression.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD823 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je propose souvent de supprimer des dispositions bavardes, et cet amendement s’inscrit dans cette démarche. Le code de l’environnement définissant déjà la biodiversité et son caractère prioritaire, il s’avère inutile de préciser que le patrimoine commun de la Nation « génère des services écosystémiques et des valeurs d’usage ».

Mme la rapporteure. J’approuve cette proposition de supprimer les deux premiers alinéas de l’article 2 et émets donc un avis favorable à l’adoption de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CD175, deuxième rectification, de la rapporteure et CD901 de Mme Marie Le Vern n’ont plus d’objet.

La Commission étudie les amendements identiques CD176 de la rapporteure et CD541 de Mme Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. Nous souhaitons supprimer les alinéas 7 et 8 de l’article 2, car nous nous opposons à ce que la protection des espaces, des ressources et des milieux naturels, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et des services qu’ils fournissent doivent prendre « en compte les valeurs intrinsèques ainsi que les différentes valeurs d’usage de la biodiversité reconnues par la société ». Contrairement au Sénat reprenant une proposition de chasseurs, il ne nous semble pas pertinent d’insérer dans l’un des premiers articles du texte et dans la partie du code de l’environnement relative au développement durable la notion de valeur d’usage, qui est d’essence économique. On sait ce qu’est la valeur intrinsèque, mais celle d’usage peut recouvrir beaucoup de choses.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement a le même objet que celui de Mme la rapporteure.

M. Philippe Plisson. Il m’apparaît utile de reconnaître que le patrimoine commun de la nature est constitué par les espaces et les milieux naturels, et se trouve valorisé et entretenu par les chasseurs et les agriculteurs ; il convient de prendre en compte les valeurs intrinsèques et d’usage de la nature dans l’action pour la biodiversité. Je souhaite donc le maintien de ces deux alinéas.

Mme la secrétaire d’État. Ces amendements visent à supprimer du projet le fait que les mesures prises en faveur de la biodiversité doivent prendre en compte les valeurs intrinsèques et d’usage de la nature. Il existe un ensemble de valeurs reconnu par la société aux écosystèmes, mais la loi n’a pas à dresser une liste qui pourrait s’avérer incomplète, voire créer des opposabilités. Je suis donc favorable à l’adoption de ces amendements.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle aborde l’amendement CD177 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement reprend la définition du triptyque « éviter, réduire, compenser » adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement propose de rétablir le texte voté par l’Assemblée nationale. Les deux définitions de la séquence « éviter, réduire, compenser » retenues par les deux chambres du Parlement en première lecture sont acceptables, si bien que je m’en remets à la sagesse de la Commission.

Mme Laurence Abeille. Je préfère la rédaction de mon amendement CD515 à celle du vôtre, Madame la rapporteure, car elle précise que la compensation apparaît comme une dérogation au principe de précaution.

Mme la rapporteure. Il faut se montrer prudent : insérer les mots « par dérogation au principe de précaution » peut ouvrir des débats inutiles, car la Charte de l’environnement a permis d’atteindre un équilibre fragile mais efficace qu’il convient de ne pas rompre.

Le texte du Sénat dispose que « ce principe implique d’éviter les atteintes significatives », alors que nous pensons préférable d’écrire que « ce principe implique d’éviter les atteintes à la biodiversité ». Dans un texte de loi consacré à la biodiversité, il y a lieu de se concentrer sur celle-ci et non sur l’environnement. Par ailleurs, qu’est-ce qu’une atteinte significative à la biodiversité ? La rédaction sénatoriale s’avère des plus confuses.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la rapporteure, vous nous dites que l’on ignore ce que recouvre la qualification de « significatives », mais cette remarque vaut également pour les atteintes portées à l’environnement. En revanche, l’expression d’« atteintes significatives » permet le développement de l’activité économique et la construction d’infrastructures. Si l’on inclut dans la loi toute atteinte à un habitat naturel, on ne pourra plus enlever le moindre arbre ! Votre amendement va trop loin et crée une norme supplémentaire, si bien que nous préférons la rédaction adoptée par le Sénat.

M. Julien Aubert. Toute activité humaine porte atteinte, de manière significative ou non, à l’environnement, et, dès que l’on construit, on heurte la biodiversité. La formulation du Sénat s’avère bien préférable, votre amendement, Madame la rapporteure, pouvant ouvrir la voie à des contentieux et à des dérives. Des projets ont été interrompus parce que la vie de deux espèces de scarabées était en jeu ! (Murmures) On ne peut pas bloquer toute activité humaine au prétexte qu’elle porterait atteinte à la biodiversité. On comprend néanmoins ce que signifie l’objectif d’éviter une « atteinte significative à l’environnement », à savoir que nos actions ne doivent pas conduire à détériorer la qualité environnementale. Il faut introduire une notion de seuil. Pourquoi n’avez-vous pas proposé la formulation d’« atteinte significative à l’environnement » ?

M. Jean-Louis Bricout. Il importe de qualifier les atteintes, afin de limiter les risques de dérives.

M. Gérard Menuel. La rédaction proposée engendrera de la jurisprudence et de la confusion. On a empêché un projet parce qu’une pie-grièche avait pondu quelques œufs en 1930. Je suis donc opposé à l’adoption de cet amendement.

Mme Delphine Batho. L’article L. 110-1 du code de l’environnement définit les principes généraux. Madame la rapporteure, vous avez raison de souligner le caractère inopérant et même dangereux de la rédaction adoptée par le Sénat. Le terme « significatives » créera immanquablement des problèmes d’application et d’interprétation de la loi. Votre formulation s’avère donc la meilleure.

L’absence de distinction entre la prévention et la réparation pose un problème de fond, et il aurait été plus clair de les séparer pour assurer une meilleure effectivité au principe « éviter, réduire, compenser ».

Mme la rapporteure. Cet amendement s’insère en effet dans les grands principes énoncés par le code de l’environnement. La loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement évoquait déjà le principe « éviter, réduire, compenser », mais aucun progrès n’a été enregistré depuis trente ans puisque la biodiversité continue de diminuer. La séquence d’évitement, de réduction et de compensation s’est avérée inefficace, et l’on empirerait la situation en utilisant l’expression d’« atteintes significatives », cette qualification étant sujette à diverses interprétations.

Je reprends l’exemple : toute construction d’équipement porte atteinte à la biodiversité ; on évite de la mener à bien et, à défaut, on en réduit les externalités négatives, voire on les compense. Il faut dresser le bilan des trente dernières années afin de progresser. La rédaction sénatoriale porte la promesse du statu quo, si bien que nous devons supprimer le terme « significatives ».

M. Julien Aubert. Le juge évalue le caractère proportionné d’une atteinte. Même si la loi parle d’« atteintes à la biodiversité », la jurisprudence découlant des contentieux nés de son application mesurera le caractère significatif ou non de l’atteinte portée. Est-ce au législateur ou au juge de fixer le seuil ? Cette question renvoie à la conception que l’on se fait de la répartition des pouvoirs entre le législatif et le juridictionnel ; pour ma part, je souhaite que la loi soit précise, afin d’éviter le gouvernement des juges.

Mme Viviane Le Dissez. Je soutiens les propos de Mme la rapporteure, car le terme « significatives » complexifiera l’application de la loi. Puisqu’une jurisprudence ne manquera pas de se développer, le mot « atteinte » suffit, et il n’y a pas lieu de la qualifier.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CD515 de Mme Laurence Abeille et CD268 de M. Dino Cinieri tombent.

Puis la Commission examine, en discussion commune, les amendements CD178 de la rapporteure, CD540 de Mme Laurence Abeille et CD751 de M. Jacques Krabal.

Mme la rapporteure. L’amendement CD178 vise à rétablir le principe d’absence de perte nette et de recherche de gain de biodiversité. Je tiens à rappeler que l’objet de ce texte de loi est la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Le terme de « reconquête » implique de regagner du terrain par rapport à la perte de biodiversité.

Mme Laurence Abeille. L’amendement CD540 a pour objet de définir le principe de compensation et d’inscrire plusieurs garde-fous dans la loi. Ainsi, l’absence de perte nette exige une compensation intégrale, la non-substitution interdit de recourir à la compensation lorsque les opérations d’évitement et de réduction sont possibles, et le respect de l’équivalence écologique oblige les résultats de la compensation à être équivalents écologiquement et non financièrement aux pertes induites par les impacts du projet. La compensation doit être effective pendant toute la durée des externalités, un aménageur étant chargé de s’en assurer. Il convient d’effectuer la compensation in situ et non à des centaines de kilomètres ou à l’étranger. Il faut également éviter le morcellement, et il ne doit pas être possible d’aménager quinze parcelles d’un hectare pour compenser la dégradation d’un lieu de quinze hectares. Enfin, l’obligation de résultat importe d’autant plus qu’il s’avère compliqué de définir a priori celui de la compensation, et l’aménageur doit modifier son projet de compensation pour obtenir le résultat escompté.

M. Jacques Krabal. L’amendement CD751 est défendu.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas favorable à l’adoption des amendements CD540 et CD751, car l’article L. 110-1 du code de l’environnement énonce des grands principes, alors que ces amendements définissent et encadrent la compensation de manière précise. L’article 33 A du projet de loi a trait à ces sujets, et nous devrons en débattre lorsque nous examinerons cet article. Madame Laurence Abeille et Monsieur Jacques Krabal, je vous demande de retirer vos amendements.

Mme Laurence Abeille. La compensation constitue un thème fondamental de ce texte relatif à la biodiversité, et il s’avère essentiel de la définir. Je maintiens donc mon amendement.

M. Julien Aubert. Madame la rapporteure, l’absence de perte ou la recherche d’un gain sont des notions quantitatives. Comment les mesurez-vous ? Comptez-vous le nombre d’espèces ? Il est important de connaître l’intention du législateur.

Mme la rapporteure. Des organismes de recherche sont capables d’apprécier l’évolution de la biodiversité. Mon amendement adopte une perspective globale : constate-t-on une absence de perte nette en matière de biodiversité ?

Mme Delphine Batho. Madame la rapporteure, Madame la secrétaire d’État, j’ai défendu la notion de perte nette, mais sa portée normative pose problème. Je me demande si la rédaction précisant que l’absence de perte s’entend quantitativement et qualitativement n’est pas la meilleure. Ces dispositions devraient en revanche figurer dans la partie du texte traitant de la mise en œuvre des mesures de compensation.

Mme la secrétaire d’État. L’article 2 pose le principe essentiel d’éviter, de réduire et de compenser, un autre titre de la loi développant la réalisation de la compensation. La loi doit être lisible, et nous devrions en rester ici au niveau des principes. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de ces trois amendements.

M. Guy Bailliart. Si l’on veut qualifier la perte, il ne faut pas écrire « quantitative et qualitative », mais « quantitative ou qualitative » pour ne pas réduire la portée de l’article. Une autre solution consisterait à supprimer tous les qualitatifs.

Mme la rapporteure. Mme la secrétaire d’État a eu raison de rappeler que l’article 2 s’insérait dans la partie définissant les grands principes. Nous pourrons les qualifier plus loin dans le texte. Nous examinons un projet de loi de reconquête de la biodiversité, et nous devons proclamer les principes sur lesquels il repose.

M. Jacques Krabal. Je retire mon amendement CD751.

L’amendement CD751 est retiré.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Madame Laurence Abeille, vous maintenez toujours votre amendement CD540 ?

Mme Laurence Abeille. Oui !

La Commission rejette alors successivement les amendements CD178 et CD540.

L’amendement CD269 de M. Dino Cinieri est retiré.

La commission examine les amendements identiques CD55 de M. Guillaume Chevrollier, CD92 de M. Jean-Marie Sermier, CD108 de Mme Sophie Rohfritsch, CD216 de M. Martial Saddier, CD317 de M. Dino Cinieri, CD382 de M. Julien Aubert, CD784 de M. Gérard Menuel, CD844 de Mme Valérie Lacroute et CD863 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Guillaume Chevrollier. Le principe de complémentarité entre l’agriculture, la sylviculture et l’environnement, introduit par l’Assemblée nationale en première lecture, repose sur l’idée que les surfaces agricoles et forestières sont porteuses d’une biodiversité spécifique.

Il convient donc que ce principe figure dans le code de l’environnement, ainsi qu’il était prévu initialement, et non dans le code rural et de la pêche maritime.

M. Jean-Marie Sermier. Ce principe de complémentarité est un principe extrêmement important. Deux solutions s’offrent à nous : soit nous l’inscrivons dans le code rural, comme le fait le projet de loi dans son état actuel, soit nous le gravons dans le code de l’environnement, comme je le propose par mon amendement, identique à ceux de nombre d’autres collègues.

L’article L. 110-1 du code de l’environnement édicte en effet les principes sur lesquels repose la protection de l’environnement : le principe de précaution, le principe de l’action préventive, le principe « pollueur-payeur », le droit à l’accès à l’information, le droit à la participation. Alors que nous y ajoutons deux nouveaux éléments, il serait dommage de ne pas compléter cette liste par un huitième principe, à savoir la complémentarité entre l’agriculture et l’environnement. Si les agriculteurs de France sont réellement les « jardiniers de l’espace » en même temps que les producteurs d’une alimentation de qualité, ce serait leur donner un bon signal que de faire ce choix.

M. Jean-Louis Bricout. Je partage l’argumentation de mes collègues.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Avis défavorable. J’appelle votre attention sur le fait que la rédaction de l’alinéa tel qu’adopté par le Sénat est moins claire que celle que nous avions votée, et je pense que nous ferions preuve d’intelligence en inscrivant dans les deux codes, comme je le propose par mon amendement CD181 rectifié, le principe de complémentarité entre l’agriculture et l’environnement, car cette complémentarité va de pair avec la transversalité des actions nécessaires en faveur de la biodiversité, laquelle souffre du cloisonnement vertical des activités.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Le code de l’environnement n’a pas vocation à identifier les pratiques agricoles et sylvicoles favorables à la biodiversité. Comme l’a dit Ségolène Royal lors de la première lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale, « le fait de reconnaître la complémentarité entre l’environnement et l’agriculture incitera encore davantage la profession à se remettre en cause, surtout dans ses pratiques les plus intensives, et à envisager une réflexion collective sur l’avenir de notre planète, et donc a toute sa place dans le code rural ». Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.

Mme Laurence Abeille. J’ai beaucoup critiqué les modifications apportées par le Sénat, mais je trouve celle-ci plutôt opportune. Nous avions eu des échanges en séance sur la complémentarité, difficile à organiser entre une agriculture conventionnelle et intensive, qui utilise des intrants chimiques – dont je souhaite pour part que l’usage soit réduit, voire supprimé – et la biodiversité des sols. En consacrant le principe de complémentarité dans le code rural, nous saluons les efforts réalisés et adoptons une attitude positive vis-à-vis des agriculteurs. C’est pourquoi, à l’instar du Gouvernement, je suis opposée à son inscription dans le code de l’environnement.

M. Jean-Yves Caullet. Depuis la première lecture, nous avons adopté la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui a bel et bien inscrit dans le code rural le principe de la triple performance économique, sociale et environnementale. Je souligne au passage que le livre préliminaire du code rural où l’insertion est demandée ne comporte aucune référence à la forêt, et je défendrai tout à l’heure l’amendement CD649 à ce propos.

Je ne suis pas opposé à un « effet miroir » entre les deux codes, mais je préférerais que le code de l’environnement précise seulement que la sylviculture et l’agriculture ont, sur un plan général, une complémentarité avec l’environnement, en réservant au code rural la consécration du principe de la triple performance.

La commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD243 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je remercie le président Chanteguet d’avoir tenu compte de mon intervention de cet après-midi et veillé à ce que mon amendement vienne en discussion.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Nous nous réjouissons que le principe de solidarité écologique, qui dérive d’un principe jusqu’à présent circonscrit aux parcs nationaux et énoncé à l’article L. 331-1 du code de l’environnement, soit inscrit à l’article L. 110-1 du même code. J’insiste sur la double dimension de ce principe, qui consacre l’interdépendance et l’interaction du vivant, des espèces, des milieux et des fonctionnalités, mais aussi des territoires et de leur gestion, parfois lourde à assumer – aspect qui nécessitera sans nul doute un prolongement budgétaire de cette reconnaissance.

En effet, les collectivités riches d’une vaste biodiversité, sous forme de mares ou de zones humides par exemple, rencontrent de ce fait une vraie difficulté à attirer des entreprises ou des constructions neuves. Si nous arrivons à faire voter une disposition en ce sens en loi de finances, la solidarité territoriale pourra s’exprimer à travers la participation de collectivités voisines, qui bénéficient de cette biodiversité sans en subir le contrecoup économique. Il est donc important de maintenir dans la présente loi le principe de solidarité écologique.

Mme la secrétaire d’État. Ce principe existe déjà pour les bassins-versants, au titre de la solidarité entre amont et aval dans la gestion de l’eau, ainsi que pour les parcs nationaux, au titre de la solidarité entre la zone-cœur et l’aire d’adhésion. Il convient donc de préserver, et même de généraliser, ce qui est l’une des innovations importantes de ce projet de loi, et je fais mien l’avis défavorable de la rapporteure.

M. Martial Saddier. Nous débattons, depuis cet après-midi, de problèmes posés par la précision, ou plutôt l’imprécision juridique, du texte. Le Sénat l’a amélioré sur ce point, mais nous risquons fort de nous défausser sur l’autorité judiciaire de la résolution des questions laissées pendantes au terme d’un examen législatif qui aura pourtant duré deux ans.

J’apprécie l’honnêteté intellectuelle de la rapporteure, qui convient que le texte mériterait plus de précision. Nos amendements ne visent pas à remettre en cause des principes, mais à éviter que des définitions trop larges créent des nébuleuses juridiques, ouvrant un champ très large à l’interprétation, en amont de toute décision publique. Si nous restons trop peu rigoureux, n’importe quel dossier pourra, demain, être retardé ou même arrêté. Nous sommes naturellement opposés à toute atteinte à la biodiversité, mais il ne faut pas qu’il soit possible d’invoquer n’importe quel motif, n’importe quand et n’importe où, car aucun projet d’aménagement ne serait plus possible.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je ne suis pas sûr que vous ayez tous deux la même interprétation de ce qu’est le principe de solidarité écologique.

M. Julien Aubert. C’est bien ce qui nous inquiète ! Nous avons pourtant l’occasion d’en donner une définition unique. Or, lorsque je lis, dans la nouvelle rédaction proposée de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, que le principe de solidarité écologique « appelle à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l’environnement des territoires directement concernés, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés », je trouve que la mention des territoires introduit une forme d’ambiguïté, l’idée d’une solidarité territoriale que je peine à distinguer d’une solidarité purement écologique.

Si nous, législateur, ne savons pas donner de ce principe une définition précise, nous ne pourrons nous étonner de la manière dont pourront l’interpréter nos concitoyens demain. Saisissons l’occasion qui nous est donnée de définir clairement le principe. Comment l’interpréter, par exemple, dans le cas du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ?

M. Michel Heinrich. Notre discussion met bien en évidence le problème. S’il n’y a pas d’interprétation univoque du principe de solidarité écologique, c’est le juge qui devra trancher en cas de litige, car nous n’aurons pas réussi à élaborer un texte compréhensible et applicable.

Mme la rapporteure. Il ne s’agit pas d’une simple divergence d’interprétation, puisque notre collègue Saddier veut tout bonnement supprimer l’alinéa. Nous n’avons pas du principe une interprétation différente : c’est lui qui n’en veut pas. Ce n’est pas la même chose !

Nous en sommes au stade de la définition des grands principes du code de l’environnement. Le code rural en compte dix-sept, similaires à celui-ci. Vous n’allez pourtant pas revenir dessus ! Une fois posés les principes, les choses se développeront au fil du temps. Dans ce contexte, la définition que nous proposons peut être intéressante à la fois pour les écosystèmes et pour les territoires.

Il y a quelques années, j’ai commis avec l’un de nos collègues un rapport sur cette question, dont il ressortait que les communes riches d’une vaste biodiversité, étant obligées de protéger leur territoire, ne pouvaient engager autant de projets que les communes des environs, qui profitaient pourtant de cette biodiversité proche sans participer à son maintien ni à sa gestion. Nous pouvons corriger cette situation, grâce à l’alinéa 13 que M. Martial Saddier propose de supprimer, Si nous ne le faisons pas, nous continuerons à porter atteinte à la biodiversité au motif qu’il faut construire, se développer, etc. Il serait dommage de laisser la biodiversité passer en dernier lieu.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Monsieur Martial Saddier, ne proposez-vous pas vous-même la prise en compte du patrimoine naturel des communes dans le calcul de leur dotation globale de fonctionnement (DGF) ? Vous aurez d’ailleurs tout loisir de réécrire cet alinéa d’ici l’examen en séance publique.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD884 de M. Christophe Bouillon et CD752 de M. Jacques Krabal.

M. Christophe Bouillon. Cet amendement vise à expliciter le principe de solidarité écologique, de façon à le placer dans une logique de territoire et de planification.

M. Olivier Falorni. L’amendement est défendu.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à l’un comme à l’autre amendement, au demeurant fort différents. Tandis que notre collègue Christophe Bouillon tend à restreindre à la définition des plans et programmes publics la prise en compte du principe de solidarité écologique, ce qui me paraît trop étroit, l’autre amendement vise à l’étendre à toute décision, qu’elle soit publique ou privée, ce qui me paraît trop large.

Mme la secrétaire d’État. Même avis. L’amendement CD884, qui réserve l’application du principe de solidarité écologique aux seuls plans et programmes faisant l’objet d’une décision publique, restreint considérablement sa portée, puisqu’il ne pourrait s’appliquer pas à des projets particuliers. J’en demande donc le retrait, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement CD752, en revanche, va trop loin en étendant sa portée aux décisions privées.

Par ailleurs, d’autres amendements tendent à insérer le mot « indirectement » dans l’alinéa 13 afin de revenir à la rédaction initiale, mais leurs auteurs pourront recevoir satisfaction d’une autre façon.

M. Martial Saddier. Ces deux amendements, déposés par des membres de la majorité, montrent que mon amendement précédent était justifié. Il faut que la rapporteure, la secrétaire d’État et la majorité travaillent davantage sur la définition juridique de la solidarité écologique. Je déplore le flou juridique dans lequel nous nous mouvons.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CD495 de Mme Laurence Abeille, CD902 de Mme Marie Le Vern et CD1040 de M. Jacques Krabal et les amendements identiques CD179 de la rapporteure et CD621 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Laurence Abeille. Nous proposons de supprimer l’adverbe « directement », qui peut être source d’imprécision. Mieux vaut se contenter d’évoquer les territoires sur l’environnement desquels une décision peut avoir une incidence notable, sans préciser s’ils sont « directement » ou « indirectement » concernés.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Je propose, pour ma part, d’ajouter plutôt « indirectement », ce qui reviendra au même.

Mme la secrétaire d’État. Je partage la position de la rapporteure. Je demande le retrait de ces amendements.

M. Julien Aubert. Nous nous trouvons dans un écosystème global où tout dépend de tout : le battement d’ailes d’un papillon à un bout du monde peut déclencher une tempête à l’autre bout… (Sourires) Dans ces conditions, il me semble nécessaire de borner un périmètre précis. Pour reprendre l’exemple de Notre-Dame-des-Landes, le Gouvernement entend demander l’avis des habitants des territoires « directement » concernés, mais on pourrait considérer que les citoyens « indirectement » concernés soient consultés aussi. Ce serait plus cohérent même si je ne comprends toujours pas ce que recouvre concrètement, financièrement, le principe de solidarité écologique…

Les amendements CD495, CD902 et CD1040 sont retirés.

Mme Viviane Le Dissez. À l’appui de mon amendement CD621 qui, comme celui de la rapporteure, tend à la prise en considération de tous les territoires concernés, directement ou indirectement, je voudrais rappeler que la biodiversité est mouvante : tenons-en compte !

M. Martial Saddier. Je prendrai, pour ma part, l’exemple de la qualité de l’air. Nous avons voté des dispositions selon lesquelles l’État établit des plans de protection de l’atmosphère, mais l’air ne connaît pas les frontières ! Quand ces plans sont adoptés ou révisés, faut-il organiser la consultation des citoyens à l’intérieur du seul périmètre couvert par les plans, ou également au-delà ? En Île-de-France, 30 % des polluants atmosphériques viennent de zones extérieures à la région. Faudra-t-il élargir l’enquête publique à la moitié de la France, voire à l’étranger ?

L’imprécision juridique est telle que nous ouvrons un champ béant à toutes les interprétations, et la multiplication des amendements de la majorité ne peut qu’alimenter notre méfiance. Je rappelle que cette commission a dans ses compétences, outre le développement durable, l’aménagement du territoire.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. C’est le Sénat, je le rappelle, qui a supprimé le mot « indirectement ». Il ne s’agit donc que de rétablir ce que nous avons adopté en première lecture.

Mme la rapporteure. Certes, nous pouvons faire le choix de l’immobilité, mais la biodiversité a besoin d’actions fortes. Ce souci commun devrait nous amener à travailler plus collectivement, sans chercher de problèmes juridiques là où il n’y en a pas. La population et les élus sont plus raisonnables que vous ne le laissez entendre.

M. Yves Nicolin. Le manque de sérieux de vos propos est quasi criminel, madame la rapporteure. (Murmures)

La loi a besoin d’être interprétée, dès lors qu’elle n’est pas suffisamment claire, car d’abusifs procéduriers ne manqueront pas de s’engouffrer dans les brèches ouvertes par l’imprécision du texte. Loin de protéger la biodiversité, vous aurez créé les conditions d’un blocage généralisé, compte tenu de l’état d’engorgement de nombre de nos juridictions.

La commission adopte les amendements identiques CD179 et CD621.

Puis elle examine l’amendement CD819 de M. Joël Giraud.

Mme la rapporteure. Je souhaite le retrait de cet amendement, car il n’a guère sa place à cet endroit du texte.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement CD542 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 14, relatif à la valeur d’usage de la biodiversité, qui est inutile.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Plutôt que de supprimer cet alinéa, il me paraît préférable d’en modifier la rédaction, ainsi que je le propose par l’amendement CD180 rectifié que je présenterai dans un instant.

Mme la secrétaire d’État. L’alinéa 14 de l’article 2 introduit le principe de la conservation par l’utilisation durable, qui est appliqué dans le cadre des conventions internationales. Je propose donc à Mme Laurence Abeille de retirer son amendement au profit de celui de la rapporteure.

L’amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD180 rectifié de la rapporteure, CD271 de M. Dino Cinieri et CD882 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme la rapporteure. Comme je viens de l’indiquer, l’amendement CD180 rectifié vise, d’une part, à remplacer le « principe de la conservation par l’utilisation durable », qui n’existe pas dans les conventions internationales, par le « principe de l’utilisation durable » et, d’autre part, à préciser que la pratique des usages « peut être » – plutôt que « est » – un instrument au service de la conservation de la biodiversité.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. La rédaction de l’alinéa 14 me semble par trop complexe. L’amendement de la rapporteure contribue à la simplifier, mais je suggère de le compléter par l’amendement CD882, qui tend à préciser que « la pratique des usages est un instrument qui contribue à la conservation de la biodiversité », plutôt qu’un « instrument au service de la conservation de la biodiversité ». Celle-ci est en effet, par nature, évolutive ; elle n’est pas figée dans le temps. L’homme a contribué à la façonner, et il a vocation à la modifier, y compris en l’augmentant, dans le respect de sa préservation. Il me paraît important d’introduire cette précision à l’article 2, qui énonce des principes.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à l’amendement CD271. En revanche, je ne vois pas de difficulté à ce que l’amendement CD882 soit également adopté.

Mme la secrétaire d’État. Je suis également défavorable à l’amendement CD271. Quant aux amendements CD180 rectifié et CD882, ils sont tous deux intéressants, mais la rédaction proposée par la rapporteure me paraît préférable.

M. Philippe Plisson. La nature ne se suffit pas toujours à elle-même ; son entretien et sa régulation sont, sinon indispensables, du moins bénéfiques à la biodiversité et doivent être reconnus en tant que tels. Je suis donc opposé à la modification de l’alinéa 14.

M. David Douillet. L’alinéa 14 est en effet très clair et n’a pas besoin d’être modifié. On protège mieux ce que l’on connaît et ce que l’on utilise, à condition que cette utilisation soit durable ; tout cela est simple. Pourquoi vouloir introduire des notions subjectives sujettes à interprétation, en particulier de la part des juges ? J’ai le sentiment qu’en modifiant cet alinéa, on fragiliserait le texte.

M. Jean-Yves Caullet. Je rappelle que l’article L. 110-1 du code de l’environnement énonce des principes. Si je suis sensible aux arguments qui viennent d’être exposés, il me semble que l’amendement de la rapporteure apporte une clarification dans la mesure où il précise que, si les usages humains apportent une contribution positive, tous ne doivent pas forcément être conservés. Au demeurant, je doute que les avocats s’attaquent en premier lieu à un article qui, encore une fois, énonce des principes.

Mme Laurence Abeille. À ce stade du débat, je me demande si nous n’aurions pas dû adopter l’amendement CD852 (Sourires). Il aurait été en effet plus simple de supprimer cet alinéa, inutile à cet endroit du texte.

La commission adopte l’amendement CD180 rectifié, puis rejette l’amendement CD271 et adopte l’amendement CD882.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CD649 de M. Jean-Yves Caullet et CD254 de M. Martial Saddier.

M. Jean-Yves Caullet. Mon amendement vise à replacer le principe de complémentarité de l’environnement, de l’agriculture et de la sylviculture dans le code de l’environnement, comme le prévoyait le texte voté en première lecture par l’Assemblée nationale. Introduire ce principe dans le code rural modifierait en effet l’équilibre de ce texte tel qu’il est issu de l’adoption de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAAF), laquelle précise, du reste, que les exploitations agricoles doivent s’inscrire dans une triple performance environnementale, économique et sociale. Il s’agit donc d’une clarification.

Mme la rapporteure. J’ai dit quel était mon point de vue sur cette question ; j’estime qu’il serait dommage que ce principe ne figure pas dans les deux codes. Néanmoins, je m’en remets à la sagesse de la commission.

Mme la secrétaire d’État. J’ai indiqué tout à l’heure les raisons pour lesquelles je suis défavorable à ces amendements.

La commission adopte successivement les deux amendements.

En conséquence, les amendements CD181 rectifié de la rapporteure, CD953 de Mme Viviane Le Dissez et CD270 de M. Dino Cinieri tombent.

La commission est saisie des amendements identiques CD182 de la rapporteure et CD574 de M. Bertrand Pancher.

Mme la rapporteure. Je propose de rétablir l’alinéa 17, qui prévoyait que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, un rapport sur l’opportunité d’inscrire le principe de non-régression dans le code de l’environnement.

M. Bertrand Pancher. Si nous avons compris qu’il était difficile d’inscrire dans le code de l’environnement le principe de non-régression – dont je précise qu’il est reconnu dans un certain nombre de pays anglo-saxons – en raison des difficultés techniques et juridiques que peut poser son application, il nous semble néanmoins intéressant de réfléchir à cette question. Je rappelle que ce principe juridique, qui exclut tout abaissement du niveau d’exigence de la protection de l’environnement, garantit une sorte de non-retour en arrière dans les politiques publiques de l’environnement. J’ajoute qu’il est déjà présent en droit international, notamment dans la convention des Nations unies sur le droit de la mer. Un rapport nous permettrait d’évaluer les incidences juridiques et économiques de l’application de ce principe, et donc de nous prononcer sur l’opportunité de l’inscrire un jour dans notre code de l’environnement.

Mme la secrétaire d’État. Je suis naturellement très favorable à ces deux amendements.

Mme Delphine Batho. Si nous appliquions le principe de non-régression à ce projet de loi – je pense en particulier à son article 2 bis, relatif au préjudice écologique –, ce serait déjà un premier pas important… Par ailleurs, je rappelle qu’en 2013, j’avais fait de ce principe un des principes fondamentaux de la modernisation du droit de l’environnement. Or, depuis, nous n’avons guère progressé. Je m’interroge donc sur le calendrier proposé par ces amendements. De fait, si l’on prévoit que la remise du rapport doit intervenir dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, on le renvoie aux calendes grecques, puisque la législature actuelle prendra fin dans un peu plus d’un an.

M. Arnaud Leroy. Je me demande également quel peut être l’intérêt de remettre un tel rapport deux ans après la promulgation de la loi, d’autant, madame la secrétaire d’État que de nombreux groupes de travail consacrés à la modernisation du droit de l’environnement ont été constitués. Pouvez-vous nous dire comment s’articulent ces différentes initiatives ?

M. David Douillet. L’application du principe de non-régression aurait des conséquences extrêmement graves pour la biodiversité, puisqu’il ne permettrait plus de revenir sur la protection d’une espèce devenue invasive. Or, une espèce prolifère toujours au détriment d’une autre, de sorte que ce principe risque, en supprimant la régulation, de provoquer la disparition de certaines espèces. Il faut donc traiter ce sujet à part pour éviter une catastrophe annoncée.

M. Martial Saddier. L’amendement me paraît beaucoup trop précis. En effet, il s’agit d’examiner l’opportunité d’inscrire le principe de non-régression dans le code de l’environnement, principe dont l’application peut avoir des incidences sur le code de la santé ou sur le code rural.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il s’agit uniquement du principe et d’une opportunité.

M. Martial Saddier. Certes, mais l’amendement anticipe sur le résultat du rapport, puisque seul le code de l’environnement y est mentionné. Or, je le répète, l’application de ce principe pourrait avoir des conséquences non seulement sur certaines espèces animales, comme l’a dit David Douillet, mais aussi sur la santé humaine. Chacun sait en effet qu’on s’interroge aujourd’hui sur des produits dont on nous disait en toute bonne foi, il y a vingt ou trente ans, qu’ils pouvaient être consommés sans danger. Il me semble donc utile de préciser que la réflexion ne doit pas être limitée au code de l’environnement.

Mme Laurence Abeille. Nous discutons de grands principes, et je regrette que l’on se perde dans des détails et des raisonnements oiseux sur la protection des espèces. La question qui se pose est de savoir comment nous pouvons préserver « ce qui reste », si je puis dire. La perte de biodiversité est massive, au point que l’on peut s’interroger sur l’utilité de ce que nous faisons. La moindre des choses serait donc de ne pas régresser dans ce domaine. Le principe de non-régression du droit de l’environnement devait d’ailleurs être inscrit dans le projet de loi. Hélas ! nous n’en sommes plus là, puisqu’il s’agit maintenant de demander un rapport sur le sujet. Qu’au moins le Gouvernement remette ce rapport au Parlement le plus rapidement possible.

M. Bertrand Pancher. Je suis peiné que l’on s’engage dans une controverse sur un principe simple, qui a été théorisé, sous le nom de standstill, dans de nombreux pays anglo-saxons bien plus libéraux que le nôtre. Ce principe, je le rappelle, exclut tout abaissement du niveau d’exigence de la protection de l’environnement. Il ne s’agit donc pas de figer l’évolution de telle ou telle espèce : cela n’a pas de sens. S’opposer au principe de non-régression donne une image rétrograde de notre action dans le domaine de la protection de l’environnement. Il ne s’agit que d’un rapport !

M. Martial Saddier. Qu’un pays anglo-saxon où l’exploitation du gaz de schiste est autorisée et où l’on tue n’importe quelle espèce protégée applique le principe de non-régression, soit. Mais, en France, nous n’en sommes pas là. Notre pays – et c’est notre fierté – est le champion du monde toutes catégories de la protection des espèces animales. Comparons ce qui est comparable.

Par ailleurs, on a présenté à plusieurs reprises la situation de la France comme catastrophique du point de vue de la consommation des espaces agricoles et de la diminution de la biodiversité. Je m’inscris en faux contre une telle affirmation. Certes, il existe une marge de progression, mais je rappelle que, depuis quelques années, ont été votées, sous deux majorités différentes, les lois « Grenelle » 1 et 2, la loi de modernisation agricole et la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Seuls les parlementaires qui n’ont jamais participé de près ou de loin à l’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale (SCOT) ou d’un plan local d’urbanisme (PLU) peuvent imaginer que l’on consomme l’espace et que l’on détruit la biodiversité comme on le faisait il y a vingt ou trente ans. La situation de notre pays n’est tout de même pas tout à fait la même que celle du Royaume-Uni, des États-Unis ou de pays dont la densité de population est particulièrement faible.

Mme la rapporteure. Je regrette que nous tergiversions au moment de voter des amendements qui concernent uniquement un rapport sur l’opportunité d’inscrire le principe de non-régression dans le code de l’environnement. Attendons que ce rapport nous soit remis, et nous en débattrons. Il est inutile de faire peur en invoquant je ne sais quelle prolifération des espèces. En tout état de cause, je suis plutôt d’accord avec Mmes Batho et Abeille pour que le délai dans lequel ce rapport doit être remis au Parlement soit réduit.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je m’étonne, monsieur Martial Saddier, que vous teniez de tels propos, vous qui avez été, je le rappelle, rapporteur pour avis du projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte pour l’environnement.

Mme la secrétaire d’État. M. Arnaud Leroy m’a interrogée sur les groupes de travail qui ont été créés pour réfléchir à la modernisation du droit de l’environnement. Sur certains sujets, notamment la participation du public, l’évaluation environnementale et le permis environnemental unique, leurs travaux ont bien avancé. Mais tel n’est pas le cas sur le principe de la non-régression. Ce rapport, qui est un bon compromis, est donc nécessaire : il faut non seulement réfléchir à cette question, mais inscrire, à terme, ce principe dans le code de l’environnement. Toutefois, il est vrai que le délai prévu est un peu long. Je suis donc favorable à ce qu’il soit réduit au moins de moitié.

M. Arnaud Leroy. Il est important que nous nous efforcions de canaliser l’ensemble des initiatives relatives à la modernisation du droit de l’environnement. À ce propos, je rappelle que le Parlement a été écarté des groupes de travail consacrés à cette question, ainsi que de l’élaboration de certaines dispositions de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron », qui ont fait l’objet d’une ordonnance. À force de multiplier les rapports sur le sujet, nous n’aboutirons jamais ! Je partage l’objectif, mais je tiens à appeler votre attention sur la méthode utilisée : prenons garde à ne pas prendre nous-mêmes des mesures dilatoires. Si un rapport doit être remis au Parlement, je pense qu’il peut l’être dans les six mois suivant la promulgation de la loi.

M. Martial Saddier. La majorité doit assumer ses positions : si elle veut un tel rapport, il doit être remis au Parlement d’ici à la fin de l’année 2016. Je vous promets, monsieur le président, que, si je me suis trompé, je ferai amende honorable.

Mme la secrétaire d’État. Il est légitime que vous souhaitiez que ce rapport soit remis avant la fin de la législature. Un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi me paraît acceptable.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Les amendements sont donc ainsi rédigés : « Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’inscrire le principe de non-régression dans le code de l’environnement. »

La commission adopte les amendements ainsi rectifiés.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. M. Martial Saddier, pour une explication de vote du groupe Les Républicains.

M. Martial Saddier. Monsieur le président, j’ai bien compris que vous aviez souhaité, en faisant référence à la Charte de l’environnement, rendre hommage à l’actuelle opposition, qui est à l’origine de la première inscription du droit de l’environnement dans notre loi suprême. Je rappelle d’ailleurs que Mme Geneviève Gaillard fut alors la seule députée de l’opposition à voter cette charte, en dépit des pressions amicales qu’ont dû exercer sur elle les responsables de son groupe.

Au plan juridique, outre l’article 5 de la Charte de l’environnement, relatif au principe de précaution, la question de savoir si la protection de l’environnement, le progrès social et le développement économique devaient être mis sur un pied d’égalité avait suscité de longs débats. À cet égard, nous tenons à exprimer les plus grandes réserves sur l’article 1er et l’article 2 du présent projet de loi, qui accordent une priorité à la protection de l’environnement sur le pilier social et le pilier économique. C’est pourquoi nous voterons contre l’article 2.

La commission adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis A
(article L. 110-1 du code de l’environnement)

Inscription de la sauvegarde des services fournis et des usages se rattachant à la biodiversité parmi les engagements fondant la recherche du développement durable

(supprimé)

Le présent article, introduit en séance au Sénat par trois amendements identiques, vise à compléter le deuxième engagement par lequel l’objectif de développement durable est recherché (préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources) avec l’ajout de la sauvegarde des services que la biodiversité, les milieux et les ressources fournissent ainsi que des usages qui s’y rattachent. De nouveau, la question des usages serait immédiatement accolée à la préservation de la biodiversité.

En commission, le présent article a été supprimé par l’adoption de cinq amendements de suppression de l’article, dont l’un a été présenté par votre rapporteure.

*

* *

La commission est saisie des amendements identiques CD183 de la rapporteure, CD543 de Mme Laurence Abeille, CD825 de M. Lionel Tardy et CD970 de M. Gérard Menuel, tendant à supprimer l’article.

Mme la rapporteure. Je demande la suppression de l’article 2 bis A, qui n’apporte strictement rien sur le plan des grands principes. Les usages n’ont pas à figurer à cet endroit du texte ; nous les évoquerons ultérieurement.

M. Lionel Tardy. Cet article étend l’objectif de préservation de la biodiversité à la sauvegarde des services et des usages qui s’y rattachent. Or une telle extension n’est pas souhaitable : elle ajoute de la complexité et nous fait perdre de vue l’objectif global, qui est celui du développement durable. Du reste, on peut craindre que, s’il est maintenu, cet article ne se traduise par des contraintes supplémentaires, car il est difficile de mesurer et de prendre en compte dans les faits les services et les usages dont il est question. C’est pourquoi je propose également la suppression de l’article 2 bis A.

M. Gérard Menuel. Cet article nuit en effet à la lisibilité du texte et le complique excessivement. Il est donc souhaitable de le supprimer.

Mme la secrétaire d’État. L’article 2 bis A complexifie en effet beaucoup la prise en compte de la biodiversité par l’ensemble des acteurs locaux. Je suis donc favorable à ces amendements de suppression.

M. Philippe Plisson. Je suis, quant à moi, opposé à la suppression de cet article. Il s’agit de faire de la préservation des services écosystémiques et des usages de la nature une des finalités du développement durable, dans la mesure où, précisément, l’usage et l’entretien de la nature sont souvent une condition du maintien de la biodiversité.

M. Daniel Fasquelle. L’article 2 bis A énonce un principe, puisqu’y est affirmée la nécessité de préserver tous ceux qui participent au développement des services écosystémiques et des usages de la nature. Il a donc toute sa place à cet endroit du texte. Il serait bon, en effet, que soit enfin reconnu le rôle des chasseurs, qui sont également des protecteurs de la nature dans la mesure où ils régulent les espèces et protègent les espaces naturels. Supprimer cet article serait une erreur.

M. David Douillet. Il est évident que, sans l’intervention des chasseurs, certaines espèces auraient disparu de nos plaines, notamment en Ile-de-France. Mais ils ne sont pas les seuls à protéger la faune et la flore ; je pense, par exemple, aux amateurs de plongée sous-marine. Or, cette activité touristique, qui est également importante au plan économique, a disparu des côtes françaises. Supprimer l’article 2 bis A, c’est fragiliser l’action de celles et ceux qui concourent à faire de notre pays un véritable territoire de biodiversité.

M. Julien Aubert. Les chasseurs sont les horlogers de la biodiversité (Rires et murmures). Je rappelle, du reste, que Mme Ségolène Royal a indiqué que ce projet de loi n’a rien à voir avec la chasse et qu’elle a estimé nécessaire de l’expurger de tous les éléments qui pouvaient laisser croire qu’il s’agissait d’un texte anti-chasse. Maintenir l’article 2 bis A, c’est montrer que l’on peut parfaitement concilier biodiversité et respect des usages et des services rendus notamment par les chasseurs. Je partage donc l’opinion de mes collègues Fasquelle et Douillet.

M. Jean-Yves Caullet. Parmi les grands principes énoncés dans le code de l’environnement figure celui de l’épanouissement des êtres humains, ce qui signifie bien que ces derniers peuvent légitimement profiter des bienfaits de la biodiversité. Les chasseurs, dont je suis, ne sont pas les seuls concernés : pensons à d’autres pratiques, telles que la cueillette ou le pâturage. Si nous affirmons, au cours de nos débats, que les principes énoncés reconnaissent bien la légitimité des usages humains des services de la biodiversité, cela suffit. Il est inutile d’en rajouter, dès lors que l’on a explicitement indiqué que l’on n’est pas contre une activité particulière.

M. Gérard Menuel. Je suis moi-même chasseur, mais il y va de la lisibilité du texte, qui énonce ici des principes généraux. Je retire donc l’amendement CD970.

M. Lionel Tardy. Je retire également l’amendement CD825.

Mme la rapporteure. Tout à l’heure, nous avons adopté un amendement qui inscrit dans le texte le « principe de l’utilisation durable, selon lequel la pratique des usages peut être un instrument qui contribue à la conservation de la biodiversité ». Pourquoi faudrait-il mentionner de nouveau, ici, les usages ? Je vois bien ce qui inspire ces interventions, mais soyez responsables ! Comme l’a dit Jean-Yves Caullet, ces usages sont nombreux, et il n’est pas question de les nier.

Mme la secrétaire d’État. Monsieur Julien Aubert, puisque vous avez salué la position équilibrée adoptée par Mme Ségolène Royal lors de l’examen du texte au Sénat, je vous rappelle, pour information, qu’elle avait émis un avis défavorable à l’amendement visant à créer cet article additionnel, au motif qu’il complexifiait inutilement le texte.

Les amendements CD825 et CD970 sont retirés.

La commission adopte les amendements identiques CD183 et CD543.

En conséquence, l’article 2 bis A est supprimé.

Article 2 bis
(articles 1386-19 à 1386-21 [nouveaux] du code civil)

Inscription de la réparation des atteintes à l’environnement dans le code civil

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement présenté par le rapporteur et M. Bruno Retailleau, tendant à inscrire le principe de la réparation des atteintes à l’environnement dans le code civil, selon les termes proposés par M. Bruno Retailleau dans sa proposition de loi n° 546 rectifiée bis, adoptée par le Sénat, le 16 mai 2013. Cet article additionnel permettra fort opportunément d’inscrire la réparation du préjudice écologique dans le code civil, ce qui constituera une avancée importante.

Comme l’ont rappelé les auteurs de l’amendement lors des travaux au Sénat, cette proposition de loi adoptée par le Sénat faisait suite à l’arrêt « Erika » de la Cour de cassation du 25 septembre 2012 (3), qui avait consacré la notion de préjudice écologique ainsi que la nécessité de réparer l’atteinte directe ou indirecte portée à l’environnement après la catastrophe de 1999. La proposition de loi ne permet cependant pas de trancher l’ensemble des questions soulevées, et notamment ne définit pas ce qu’est le préjudice écologique mais dispose que toute personne « qui cause un dommage grave et durable à l’environnement est tenue de le réparer », ni ne fixe la liste des personnes autorisées à intenter une action en réparation, ni ne précise de régime de prescription, ni ne spécifie de régime d’articulation avec les systèmes de réparation au titre de la police administrative prévus par le code de l’environnement, notamment le régime des articles L. 160-1 et suivants du code de l’environnement définissant le régime de responsabilité environnementale, qui est fondé sur le principe du pollueur-payeur.

Sans reprendre ici l’historique des travaux de référence entrepris suite à l’arrêt précité de la Cour de Cassation pour réfléchir aux modalités d’inscription du préjudice écologique dans le code civil, il convient de renvoyer aux travaux ayant abouti au rapport dit « rapport Jégouzo » (Pour la réparation du préjudice écologique, rapport du groupe de travail installé par Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice, remis le 17 septembre 2013). Votre rapporteure souhaite également rappeler l’adoption de la proposition de loi dite « Retailleau » (4) au Sénat le 16 mai 2013 et l’engagement de Mme Christiane Taubira, ministre de la justice, en faveur du dépôt d’un projet de loi. Le Gouvernement n’a pas déposé de projet de loi.

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, a soutenu l’article additionnel au Sénat.

Les conditions sont donc réunies pour voir consacrée cette notion et il convient donc que l’Assemblée complète les dispositions adoptées au Sénat.

Votre commission n’a pas adopté d’amendement relatif à cet article, compte tenu du dépôt de plusieurs amendements qui n’étaient pas identiques, des délais contraints d’examen des propositions et des questions restant à trancher, afin qu’un amendement soutenu aussi largement que possible puisse être déposé en séance.

Votre rapporteure a défendu la définition du préjudice écologique comme « résultant d’une atteinte grave aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes, ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement ». Elle a souhaité qu’un article de principe rappelle que toute personne qui cause un dommage environnemental en est responsable.

Votre rapporteure n’a pas retenu l’idée que ne devait pas être réparable le préjudice résultant d’une atteinte autorisée par les lois, règlements et engagements internationaux de la France ou par un titre délivré pour leur application.

Elle a souhaité que l’ouverture de l’action soit large.

Elle a également souhaité que le délai de prescription soit fixé à dix ans, à compter du jour où le titulaire de l’action a connu ou aurait dû connaître la manifestation du dommage, dans le cadre d’un délai butoir de cinquante ans. Ce délai de prescription ne pourrait ainsi être porté au-delà de cinquante ans à compter du fait générateur. Par mesure de cohérence, les mêmes délais de prescription auraient été introduits dans le code de l’environnement pour les obligations financières liées aux dommages causés à l’environnement par certaines activités.

Votre rapporteure n’a pas souhaité que le dispositif soit rétroactif et a souhaité, enfin, que ces actions puissent être tranchées par des juridictions spécialisées.

*

* *

Mme Delphine Batho. Avant que nous n’abordions les amendements à l’article 2 bis, notamment ceux de la rapporteure et d’Arnaud Leroy, qui ont beaucoup travaillé sur la question du préjudice écologique, je souhaite débattre de l’aspect politique du sujet.

En 2012, un jugement de la Cour de cassation, rendu après plus de dix ans de procédures engagées à la suite de la marée noire provoquée par le naufrage du pétrolier Erika, a reconnu le préjudice écologique. C’était un grand jour pour le droit de l’environnement, cette décision jurisprudentielle impliquant qu’il n’y ait plus d’impunité en la matière. Le Gouvernement de l’époque – je m’en souviens bien puisque c’était par ma voix – avait annoncé sa volonté d’inscrire dans le code civil le préjudice écologique.

Par la suite, la Chancellerie a été chargée de préparer un projet de loi et, à cet effet, différents groupes de travail ont été conduits par Christiane Taubira, composés entre autres de juristes reconnus, spécialisés dans le droit de l’environnement. Puis une proposition de loi a été déposée au Sénat par Bruno Retailleau, qui n’a jamais été mise à l’ordre du jour des travaux de cette assemblée, si bien que c’est par voie d’amendement au présent texte que le dispositif a été introduit.

La ministre de l’environnement a annoncé, au cours du débat au Sénat, que l’article 2 bis serait récrit, et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) a exprimé sa vive opposition à cette disposition.

Ce matin-même, nous avons découvert un amendement du Gouvernement qui récrit en effet entièrement cet article, amendement que j’ai dû relire deux fois pour en avoir le cœur net puisqu’il prévoit une impunité généralisée, remet en cause le principe pollueur-payeur, remet en question le principe même de la responsabilité de celui qui est à l’origine de la pollution dès lors qu’il aurait bénéficié, dans une vie antérieure, d’une quelconque autorisation administrative, et déclare irrecevable le principe des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés par les victimes. Il s’agirait d’une régression très grave, au point que je me suis demandé s’il n’y avait pas une « loi des séries » si l’on songe à ce qui s’est passé avec la loi sur le travail récemment – j’espère que non et j’espère, madame la secrétaire d’État, que, sur cette question politique plus que juridique, vous allez nous annoncer soit le retrait de l’amendement du Gouvernement, soit sa modification sur les deux points que je viens d’évoquer.

Mme la secrétaire d’État. Delphine Batho a bien rappelé l’histoire de notre volonté d’inscrire dans notre droit le principe du préjudice écologique après en avoir déterminé les conditions et le périmètre d’application. Le Sénat, après de nombreux débats, y a en effet procédé à l’initiative d’un sénateur du groupe Les Républicains qui, par ailleurs, a dû faire face au drame de l’Erika. Il n’est évidemment pas question, contrairement à ce que j’ai pu entendre, d’attenter de quelque manière que ce soit au principe pollueur-payeur qui, je vous le rappelle, est un principe constitutionnel.

Il était prévu de créer un groupe de travail après l’examen du texte par le Sénat. Le temps a manqué ; aussi le Gouvernement a-t-il proposé un amendement dont la rédaction suscite des interprétations divergentes et pas seulement sur le plan juridique – je suis d’accord avec vous, Delphine Batho. Ségolène Royal et moi-même n’entendons ni dramatiser ni ignorer ces questions ; c’est pourquoi nous avons travaillé avec la rapporteure, aujourd’hui, afin de rédiger un amendement certes encore imparfait, mais qui permet d’avancer et de débattre. Le Gouvernement va retirer par conséquent son amendement en faveur de celui de la rapporteure. Il nous reste quinze jours avant l’examen en séance pour travailler tous ensemble, dans la sérénité, à une rédaction plus explicite et qui réponde aux objections et aux interrogations. Nous continuerons d’autant plus de pratiquer cette méthode que nous poursuivons tous le même objectif.

M. Martial Saddier. Les députés de l’opposition, par définition, disposent de moins de moyens et sont plus tardivement informés que leurs collègues de la majorité. Aussi pouvez-vous imaginer combien il nous est difficile d’interpréter un amendement de quatre pages, éminemment juridique, et qui ne nous est parvenu que ce soir. C’est même impossible si l’on tient compte des implications du dispositif proposé, que l’on en donne une interprétation maximaliste ou minimaliste. Si nous souhaitons sacraliser le principe de préjudice écologique, il ne serait peut-être pas inintéressant de demander son avis, même informel, à la commission des lois. Les députés du groupe Les Républicains souhaitent donc que des précisions soient apportées, notamment en ce qui concerne la portée du dispositif ; en effet, les conséquences du vote de cet amendement pourraient se révéler catastrophiques.

Mme Delphine Batho. Je prends acte avec satisfaction du retrait par le Gouvernement de son amendement au profit de celui de Geneviève Gaillard. Je ne souhaite toutefois pas que les dispositions en question, après avoir été sorties par la porte de la commission du développement durable, reviennent par la fenêtre en séance publique. Je rappelle que les différents principes qui auraient été écornés renvoyaient explicitement à la loi et donc étaient dépourvus de garantie absolue. Enfin, au cours de la discussion des amendements, je souhaite, madame la secrétaire d’État, que vous précisiez votre position sur le fond.

En effet, l’amendement que vous retirez disposait : « N’est pas réparable, sur le fondement du présent titre, le préjudice résultant d’une atteinte autorisée par les lois, règlements, et engagements internationaux de la France ou par un titre délivré pour leur application. » Selon cette disposition, par exemple, pour une industrie qui aurait bénéficié d’une autorisation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) en 1980 et qui serait victime d’une pollution grave en 2015, le préjudice écologique ne pourrait être reconnu.

De la même manière, plus loin, votre amendement disposait que « toute demande formée aux fins d’octroi de dommages et intérêts [était] irrecevable ». Autrement dit, seule une réparation en nature était prévue ou alors, certes, des dommages et intérêts versés à l’Agence française pour la biodiversité (AFB). Ainsi, ce que la Cour de cassation a décidé à l’encontre du groupe Total dans le cadre du procès de l’Erika ne serait plus possible. Les opposants à votre amendement n’ont donc pas mal interprété le texte mais l’ont décodé avec précision.

M. Arnaud Leroy. Je fais partie de ceux qui ont milité pendant très longtemps pour que la loi reconnaisse le préjudice écologique ou le dommage environnemental. Martial Saddier l’a dit avec raison, et il ne faut pas minorer l’enjeu, pas plus qu’il faudrait en avoir peur : nous sommes face à une vraie révolution juridique. Nous complétons, modernisons un système de responsabilité conçu en 1804 en l’élargissant à la protection d’une nature menacée.

Il faut par ailleurs savoir, monsieur Martial Saddier, que votre groupe, au Sénat, a adopté la reconnaissance du principe du préjudice écologique par la loi.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Martial Saddier ne le conteste pas !

M. Arnaud Leroy. Certes, je rappelle seulement que le Sénat a introduit le principe dans le texte.

L’idée est néanmoins de clarifier la rédaction sénatoriale. Il y a en effet, en France, une concurrence des régimes de responsabilité. La reconnaissance du préjudice écologique complétera par conséquent des systèmes en vigueur qu’il ne s’agit pas de remettre en cause. Il faudra également réfléchir à l’articulation juridique du dispositif – la question du sursis à statuer est importante et concurrence ou complète le régime prévu par la loi de 2008 relative à la responsabilité environnementale (LRE), régime qui n’est toujours pas appliqué.

Enfin, où ira le produit des amendes ? De nombreux opérateurs craignent que le préjudice écologique ne soit utilisé pour financer, en tout cas en partie, l’Agence française pour la biodiversité.

M. Bertrand Pancher. J’avoue trouver le pavé qu’on nous a donné à lire difficilement digeste. Je suis d’autant plus surpris que j’ai été alerté par l’importance de ce débat non par les rapports, mais par le réseau Twitter : j’ai bien reçu, en cinq ou six heures, une cinquantaine de tweets. Il serait bon d’apaiser le débat et d’aboutir à une version qui nous rassemble plus, je n’y verrais que des avantages.

Mme la secrétaire d’État. Nous sommes bien d’accord.

M. Bertrand Pancher. Par pitié, cessons de travailler ainsi. Je n’aurai pas la cruauté, chers collègues, d’insister sur le fait que vous réfléchissez sur cette loi depuis trois ans ! « Déposer » un tel amendement à la dernière minute n’est pas très sérieux.

Mme la rapporteure. Je tiens à remercier Viviane Le Dissez qui a participé à nos travaux sur le préjudice écologique.

J’entends bien les remarques de Martial Saddier et de Bertrand Pancher sur la difficulté d’analyser au dernier moment quatre ou cinq pages d’amendement, surtout pour des gens qui, comme moi, n’ont jamais fait de droit sinon un peu de droit rural. Mais Mme la secrétaire d’État nous propose justement de travailler ensemble pour essayer de trouver un terrain d’entente sur l’amendement CD943 rectifié, que je présente et qui, je le rappelle, n’est pas identique à celui du Gouvernement et n’en a pas les défauts. (Sourires) Nous disposons de quinze jours. Moi-même j’ai obtenu l’amendement du Gouvernement ce matin à onze heures et demie… (Murmures)

La commission examine l’amendement CD888 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Cet amendement vise à supprimer l’article 2 bis car il me paraît étrange de transférer dans le code civil ce qui relève actuellement du code de l’environnement, la justice n’ayant jamais été empêchée pour autant de statuer sur des dommages graves – ainsi, dans l’affaire Erika, le groupe Total a-t-il été sévèrement condamné. Il est donc bon que les codes techniques conservent leur valeur profonde, à moins d’entrer dans une logique de culpabilité en ayant recours au civil puis au pénal. Je souhaite donc que nous en restions au code de l’environnement.

M. Martial Saddier. C’est intéressant !

Mme la rapporteure. J’émets un avis défavorable à cet amendement, puisque nous avons choisi de faire référence au code civil. Au passage, je ne trouve pas que le groupe Total ait été trop sévèrement condamné pour le préjudice qu’il a causé aux côtes françaises.

Mme la secrétaire d’État. Je suis défavorable également à cet amendement : l’article 2 bis est important puisqu’il met en place le principe du préjudice écologique que nous voulons introduire dans le droit. Autant nous devons modifier considérablement le dispositif, autant je pense que nous ne devons pas le supprimer.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. J’entends bien, mais je pense qu’il est bon de conserver au code de l’environnement sa puissance. La tentation d’une logique punitive me paraît quelque peu dangereuse et le recours à une logique de prise en compte me semble préférable. Néanmoins, je retire mon amendement.

M. Martial Saddier. C’est dommage.

Mme Viviane Le Dissez. Le préjudice écologique nous paraissait initialement devoir figurer dans le code de l’environnement mais il nous est apparu opportun, au fil des auditions d’avocats et de juristes auxquelles nous avons procédé, de l’introduire finalement dans le code civil.

L’amendement est retiré.

L’amendement CD1048 du Gouvernement est retiré. En conséquence, les sous-amendements CD1049 et CD1050 de Mme Delphine Batho n’ont plus d’objet.

La commission examine, en discussion commune, l’amendement CD943 rectifié de la rapporteure, qui fait l’objet du sous-amendement CD1056 de Mme Delphine Batho, les amendements CD516 de Mme Laurence Abeille, CD666 et CD1053 rectifié de M. Arnaud Leroy.

Mme la rapporteure. La rédaction de l’amendement CD943 rectifié s’inspire du rapport d’Yves Jegouzo, mais aussi de l’avis d’éminents spécialistes.

Il est proposé de créer un régime de responsabilité civile environnementale et de réparation du préjudice écologique, qui serait défini comme le préjudice résultant d’une atteinte grave aux éléments et aux fonctions des écosystèmes ainsi qu’aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement. Les actions en réparation du préjudice seraient ouvertes à l’État, au ministère public, à l’Agence française pour la biodiversité, aux collectivités territoriales et à leurs groupements dont le territoire est concerné, ainsi qu’aux établissements publics, fondations reconnues d’utilité publique et associations agréées ou ayant au moins cinq années d’existence, ayant pour objet la protection de la nature et de l’environnement.

La réparation du préjudice écologique s’effectuerait en priorité en nature. En cas d’impossibilité, des dommages et intérêts seraient versés à l’Agence française pour la biodiversité, qui les affecterait à la protection de l’environnement exclusivement.

L’action serait prescrite après un délai de dix ans à compter du jour où le titulaire de l’action a connu ou aurait dû connaître la manifestation du dommage environnemental, sans que ce délai puisse être porté au-delà de cinquante ans à compter du fait générateur du dommage. Le choix du délai de dix ans s’imposait. Quant au délai de cinquante ans, il a été fixé entre deux extrêmes : trente ans pour les uns, cent ans pour les autres. La spécificité de la matière concernée impose d’explorer des voies inédites et il conviendra bien de ne pas caricaturer le délai de cinquante ans qui ne trouvera à s’appliquer que pour des pollutions diffuses et lentes qui se caractériseront après un temps long et dont nous savons qu’elles existent.

Par conséquent, ces délais de dix et cinquante ans seraient également ceux fixés par l’article L. 152-1 du code de l’environnement, qui prévoit un délai de prescription particulièrement long, trente ans, pour les obligations financières liées aux dommages causés à l’environnement par certaines activités par rapport au droit commun de cinq ans ; mais ce délai court à partir du fait générateur du dommage, ce qui ne nous semble pas très protecteur.

Les présentes dispositions s’appliqueraient dès la publication de la loi. Le choix a été fait de ne pas créer d’amende civile en cas de faute grave dans la mesure où la pénalisation des comportements les plus graves est à même de garantir une dissuasion et une répression efficaces.

Le choix a été fait de ne pas créer de régime de sursis à statuer pour articuler les dispositions du présent article avec celles des articles L. 160-1 et suivants du code de l’environnement, créés par la loi du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale. Le juge, en effet, ne pourra pas ordonner de deuxième réparation pour le même préjudice qui aurait déjà été réparé. Il a déjà, en outre, la possibilité de surseoir à statuer, aux termes de l’article 377 du code civil, pour un motif de bonne administration de la justice. Cela viserait les cas dans lesquels le préfet et le juge agiraient de façon concomitante. La procédure judiciaire serait alors temporairement arrêtée.

Telle est, présentée de manière succincte, la teneur du présent amendement. Bien entendu le débat est ouvert tant le sujet est difficile. Il importe en tout cas que ce dispositif soit introduit dans le code civil, faute de quoi nous affaiblirions la portée du texte.

Ensuite, nous demandons en priorité une réparation en nature et, dans les cas exceptionnels, j’y insiste, où une telle réparation serait impossible, une réparation financière serait envisageable.

Nous avons tâché de tirer les conséquences de la très longue procédure concernant l’affaire Erika.

Nous avons par ailleurs beaucoup discuté de la question du sursis à statuer. On nous a expliqué qu’un tel dispositif n’était pas nécessaire puisque figurant déjà dans le code civil. Or j’ai tendance à croire ce que me disent d’éminents juristes même si le débat, je le répète, reste ouvert.

Quoi qu’il en soit, nous devons nous efforcer d’aboutir à une rédaction simple.

Je remercie ceux qui, en l’espace de quelques heures ont pu nous aider à mettre au propre les grandes lignes de ce que nous souhaitions. Enfin, je remercie la secrétaire d’État d’avoir retiré son amendement qui, en effet, n’était pas très heureux.

Mme Delphine Batho. Je constate que l’une des dispositions de l’amendement de Mme Geneviève Gaillard est rédigée exactement de la même manière que l’une des dispositions prévues par l’amendement que le Gouvernement vient de retirer : « Toute demande formée aux fins d’octroi de dommages et intérêts est irrecevable, sous réserve des dispositions prévues au présent article. » Ainsi que l’a indiqué la rapporteure, la réparation serait en priorité en nature et, sinon, prendrait la forme de dommages et intérêts versés à l’Agence française pour la biodiversité. Cela signifie que les parties civiles – collectivités locales, associations, État… – ne pourraient pas être indemnisées et ne pourraient pas demander de dommages et intérêts pour cause de préjudice écologique.

Je suis en total désaccord avec cette disposition, et mon sous-amendement CD1056 vise à supprimer la phrase que j’ai citée.

M. Martial Saddier. J’imagine que, si l’amendement de Mme Geneviève Gaillard était adopté, un certain nombre d’autres tomberaient, y compris les nôtres.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En effet.

M. Martial Saddier. Vous comprendrez, étant donné le flou juridique des dispositions que nous sommes amenés à examiner, dans des délais qui plus est restreints, que nous ne puissions que nous opposer au texte, sur la forme et sur le fond. Nous sommes tout de même en train de récrire le droit de l’environnement, issu de la Charte de l’environnement, sans que la commission des lois, je le répète, ait donné son avis – or nous avons pu constater que la remarque d’un de ses membres, Mme Le Dain, ici présente, n’était pas dénuée de bon sens juridique.

Personne n’a relevé, par exemple, que l’amendement « bricolait » la carte judiciaire. Une disposition prévoit en effet une spécialisation des tribunaux. Nous souhaitons donc que le garde des Sceaux vienne en séance nous expliquer sa conception de la spécialisation des tribunaux en matière de droit de l’environnement.

Mme la rapporteure. C’est en effet un sujet de débat.

M. Martial Saddier. Le site du Mont Blanc, l’un des joyaux environnementaux de notre pays, se trouve dans le ressort d’un tribunal situé dans ma circonscription. Si, demain, ce site subissait une catastrophe écologique, sera-t-elle jugée par un tribunal de Marseille, de Lyon, de Lille, de Paris ? Voilà qui est de nature à m’inquiéter.

Je nous invite donc à la plus grande sagesse et à faire attention à ce que nous allons voter.

M. Jean-Marie Sermier. Je ne comprends pas, moi non plus, un certain nombre d’éléments de ce texte, qui paraît prévoir une possible rétroactivité. Quand survient une catastrophe naturelle, on connaît en général le fait générateur de façon assez claire, comme ce fut le cas pour l’Erika. En revanche, en cas de pollution diffuse, tant qu’on ne dépasse pas certains seuils, il n’y a pas pollution. Dans ce dernier cas, le fait générateur est-il le moment du dépassement de la norme ou bien le moment où les opérateurs ont commencé de produire ce qui sera considéré comme pollution ? Dans ce dernier cas, on pourrait remonter dix ans, voire cinquante ans en arrière, ce qui présente pour de nombreux opérateurs, notamment dans le secteur agricole, une certaine insécurité juridique. Qu’en est-il ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le code de l’environnement répond à votre question.

Mme la rapporteure. Je souhaite que nous constituions un petit groupe de travail afin d’examiner un certain nombre de points. Nous devrions notamment nous efforcer de présenter, quant au préjudice écologique, un dispositif sur lequel nous soyons tous d’accord, tant l’enjeu est important. Il nous faut dépasser les considérations idéologiques et faire preuve de plus de pragmatisme, faute de quoi ce serait une bataille perdue pour l’environnement en général et pour la biodiversité en particulier.

Mme la secrétaire d’État. Le sous-amendement CD1056 touche à un principe sur lequel nous devons bien nous mettre d’accord. Nous considérons tous que la réparation doit en priorité s’effectuer en nature. Delphine Batho souhaite supprimer la possibilité d’une demande d’une réparation sous forme de dommages et intérêts. En fait, l’idée est que cette demande ne soit permise qu’en cas d’impossibilité d’obtenir une réparation en nature qui, je le répète, doit être la priorité absolue.

Ensuite, l’idée que le produit de ces dommages et intérêts soit versé à l’Agence française de la biodiversité peut être discutée. C’est pourquoi je suis d’avis que nous en débattions ensemble – le sujet est passionnant. Il est proposé de verser cet argent à l’Agence plutôt que de le répartir entre des associations ou des collectivités, parce qu’elle aura pour mission, précisément, de mettre sur pied des actions en faveur de la biodiversité là où elle aura été détériorée. Reste, j’y insiste, que nous devons prendre le temps d’examiner cette disposition. En attendant, puisque nous ne pourrons pas avancer beaucoup plus ce soir, je vous suggère de voter l’amendement de la rapporteure, quitte à le retravailler en profondeur d’ici à l’examen en séance. J’ajoute être ouverte à toute autre méthode.

M. Bertrand Pancher. Je suis d’accord avec votre proposition, madame la rapporteure, consistant à nous donner le temps de la réflexion. Le texte est suffisamment important pour que nous en analysions plus avant l’impact. Ensuite, je souhaite connaître la position des différentes parties prenantes, au-delà des seules organisations environnementales, que je soutiens. Enfin, nous devons tenir compte du fait que la valeur de la nature n’est pas un débat mineur et varie en fonction de la jurisprudence, du vécu de chaque pays – en d’autres termes, tenir compte du fait que nous nous engageons dans une voie difficile.

Mme Viviane Le Dissez. Je suis d’avis que nous prenions l’amendement de la rapporteure pour base de discussion, puisqu’il est le fruit d’un travail de trois ou quatre semaines. Il y a certes lieu de le retravailler, mais avec prudence. Et si, comme le demande Mme Delphine Batho, les collectivités, les associations, doivent pouvoir recouvrer le produit de la réparation des dommages subis, l’Agence française pour la biodiversité doit être le garant de l’impartialité de sa répartition vers les différents sites.

M. Philippe Plisson. Ma position est quelque peu identique : nous devons partir de l’amendement de la rapporteure et voter le sous-amendement de Delphine Batho, car il me semble important qu’une réparation financière, lorsqu’une réparation en nature n’est pas possible, bénéficie au territoire qui a subi le préjudice. Si, par exemple, les dommages et intérêts versés à la suite d’un accident écologique dans l’estuaire de la Gironde, sont confiés à l’Agence française pour la biodiversité, il ne faudrait pas qu’elle le redistribue aux collectivités riveraines de celui de la Seine…

M. Arnaud Leroy. Je serai plus radical (Sourires) : nous devrions ne rien voter ce soir. Je m’explique. Je ne fais pas sécession : j’ai travaillé sur le sujet avec la rapporteure et avec Viviane Le Dissez. La question des tribunaux, par exemple, mérite débat : on a entendu, lors des questions au Gouvernement, cet après-midi, la polémique liée à la spécialisation des tribunaux de commerce.

En outre, jusqu’à ce soir, madame la secrétaire d’État, je ne savais pas qu’il était prévu qu’une partie des réparations liées à un préjudice écologique viendrait abonder, sous une forme qui reste à définir, l’Agence française pour la biodiversité !

Ensuite, la question reste posée de savoir qui pourra ester en justice. Les amendements que je propose visent à élargir la capacité à agir alors que l’amendement de la rapporteure me paraît assez restrictif en la matière.

Nous avons par ailleurs travaillé sur les notions de suivi, d’acte attestant que les réparations ont été effectuées, de réparation-protection… La protection de l’environnement n’en reste pas moins un concept très flou et l’argent des réparations, à mon sens, ne doit pas servir à la fabrication, par exemple, de films de promotion... Aussi devons-nous nous concentrer sur la question de la réparation, d’une éventuelle compensation sur une échelle territoriale à déterminer.

Nos positions sont proches, madame la rapporteure, mais je vous invite à examiner les amendements que je propose car nous devons clarifier les notions que nous employons.

Nous ne sommes pas tout nus puisque nous disposons du texte sénatorial qui introduit le préjudice écologique dans le droit. Nous devrions toutefois, j’y insiste, reprendre l’ensemble des questions soulevées par Delphine Batho ou d’autres afin d’établir la liste des sujets à approfondir et des notions à préciser afin de nous entendre sur leur définition. Par exemple, en ce qui concerne la rétroactivité, les gens doivent comprendre que la notion de préjudice écologique viendra en sus de régimes déjà en vigueur, notamment de régimes de police administrative.

Il nous reste un gros travail à réaliser pour aboutir à un texte simple, lisible et applicable dès promulgation.

M. Martial Saddier. Très bien !

Mme Laurence Abeille. La situation est assez complexe, en effet, et nous devons garder à l’esprit que les médias comme les réseaux sociaux sont attentifs à notre travail en commission ce soir.

Je trouve très positif que le Gouvernement ait décidé de retirer son amendement. Il nous est proposé de nous « rabattre » sur l’amendement de la rapporteure qui, on le voit, n’est pas parfait car rédigé rapidement. Je souscris pour ma part totalement au sous-amendement de Delphine Batho : elle montre du doigt un élément important. Je suggère donc que nous adoptions, ce soir, l’amendement de la rapporteure, sous-amendé par Mme Batho, sous réserve de la création d’un groupe chargé de revoir la rédaction du texte dans le sens d’une clarification, ainsi que nous y invite Arnaud Leroy. Nous partageons le même objectif, mais il nous reste à préciser les modalités pour y parvenir. La réparation en nature est évidemment prioritaire et indispensable, mais la question des dommages et intérêts à accorder aux victimes se pose.

Mme Chantal Berthelot. Nous avons évoqué la catastrophe de l’Erika, survenue il y a un certain nombre d’années, mais je rappelle que nous avons organisé, la semaine dernière, une table ronde sur l’orpaillage illégal en Guyane qui, lui, est un phénomène bien actuel. Or le texte ne peut présenter d’intérêt pour la Guyane, dans ce contexte, qu’à la double condition que l’on précise la notion de réparation en nature et que les dommages et intérêts éventuels résultant du dommage subi bénéficient au seul territoire concerné. Cela peut paraître évident mais l’évidence ne vaut pas loi, aussi devons-nous nous montrer très clairs. C’est pourquoi je serai très vigilante, quand nous récrirons l’amendement de la rapporteure, sur la destination des dommages et intérêts – d’autant que, plus encore que de préjudice écologique, la Guyane subit un véritable meurtre écologique.

Mme la secrétaire d’État. L’idée est que l’Agence française de biodiversité utilise les montants dont elle aura été destinataire pour exercer une action réparatrice sur les territoires pollués, en lien avec les différentes collectivités. Cela mérite certainement des précisions, et nous allons approfondir le sujet.

Il me semble toutefois qu’une confusion est en train de s’installer. Le préjudice écologique n’est absolument pas exclusif d’autres procédures civiles, pour des dommages aux personnes ou des dommages économiques. Dans l’affaire de l’Erika, par exemple, les conséquences sur le tourisme représentent des pertes économiques. Si la rédaction devait conduire à une confusion de cette nature, il faudrait absolument la corriger.

Mme la rapporteure. Il est écrit au deuxième alinéa : « indépendamment des préjudices réparés suivant les modalités du droit commun ». Ce ne sont pas les mêmes procédures et elles n’ont pas les mêmes conséquences.

Mme Delphine Batho. Il existe aujourd’hui une jurisprudence de la Cour de cassation ; l’enjeu est de la graver dans le marbre. Si la loi devait être en recul par rapport à la décision de la Cour, j’y serais opposée, comme je suis opposée au fait que les victimes d’un préjudice écologique ne puissent plus demander de dommages et intérêts.

La proposition d’Arnaud Leroy, consistant à en rester ce soir au texte du Sénat et à conduire un travail collectif d’ici à la séance publique, me paraît sensée. Le débat au fond reviendra de toute façon en séance. Ce n’est pas un hasard si ce texte annoncé depuis trois ans par le Gouvernement n’a jamais trouvé sa place dans le calendrier parlementaire, car il va à l’encontre d’intérêts de très grandes firmes.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je vous proposerais bien, si cela était possible, de reprendre mon amendement de suppression… (Sourires.)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Considérez-vous, madame Laurence Abeille, monsieur Arnaud Leroy, que l’amendement de la rapporteure soit amendable de votre point de vue ?

M. Arnaud Leroy. Je ne le crois pas.

Mme Laurence Abeille. Je serais moins négative, mais je ne suis pas aussi au fait des questions juridiques qu’Arnaud Leroy. (Sourires)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Compte tenu des réponses qui ont été faites, j’invite les auteurs des amendements à les retirer, afin que nous en restions pour le moment à la rédaction du Sénat, à charge pour nous de parvenir ensemble, d’ici la réunion que nous tiendrons au titre de l’article 88 du Règlement, à une solution acceptable pour le plus grand nombre.

Mme la rapporteure. Soit, mais je crains que, ce faisant, nous n’enterrions le préjudice écologique, car nous n’aurons pas le temps, en quinze jours à peine, d’entrer dans le détail. Nous avons, Viviane Le Dissez et moi, mis de longs mois à comprendre certaines choses, qui exigent le regard de juristes chevronnés. Je crains que nous ayons quelques surprises d’ici au 15 mars.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de votre président. Nous avons peu de temps devant nous, mais nous ne partons pas d’une feuille blanche : le travail de la rapporteure est un bon travail, qui offre une base de discussion solide. Il existe entre nous des différences d’appréciation sur le principe même du préjudice écologique, et nous devrons avoir ce débat, mais sur des bases qui soient un peu plus claires. Je ferai en sorte que nous nous rencontrions très rapidement pour travailler ensemble et faire mentir ceux qui pensent que nous ne parviendrons pas à instituer le préjudice écologique.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Si les auteurs de tous les amendements en discussion commune sont d’accord pour les retirer, la cohérence voudrait que les amendements qui suivent soient également retirés ou, en tout cas, ne soient pas votés.

M. Martial Saddier. Je souhaite, pour ma part, soumettre au vote les trois amendements que j’ai déposés.

Les amendements CD943 rectifié, CD516 et CD666 sont retirés, de même que les amendements CD575 et CD576 de M. Bertrand Pancher, CD517 et CD518 de Mme Laurence Abeille ? CD1053 et CD623 de M. Arnaud Leroy.

La commission rejette successivement les amendements CD 260, CD258 et CD259 de M. Martial Saddier.

Puis elle adopte l’article 2 bis sans modification.

Après l’article 2 bis

La Commission examine l’amendement CD677 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’insérer à cet endroit l’article 51 quater AA sur l’action de groupe introduit par le Sénat, afin d’améliorer la cohérence de la loi en plaçant l’article dans le code de l’environnement.

Mme la secrétaire d’État. Je préfère, pour ma part, que nous traitions cette question à l’article 51 quater AA et vous invite donc à retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

Article 3
(article L. 110-2 du code de l’environnement)

Intégration de la lutte contre les nuisances lumineuses dans le droit environnemental

Le présent article vise à prévoir que les lois et règlements contribuent à la préservation des continuités écologiques, le Sénat ayant ajouté en commission la préservation de l’utilisation durable des continuités écologiques.

Un nouvel alinéa introduit en séance au Sénat vise à ce que l’article L. 110-2 dispose qu’il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde et de contribuer à la protection de l’environnement, « y compris nocturne ».

Votre commission a adopté deux amendements identiques tendant à supprimer les mots « et l’utilisation durable » afin que les lois et règlements contribuent à la préservation des continuités écologiques.

*

* *

La commission examine l’amendement CD496 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Nous proposons de supprimer les termes « et l’utilisation durable », ajoutés par le Sénat. C’est une notion extrêmement vague, qui soulève la question des moyens employés pour assurer cette durabilité.

L’amendement tend par ailleurs à harmoniser la rédaction de l’alinéa 3 avec les dispositions du code de l’environnement relatives à la trame verte et bleue et les objectifs assignés à cette politique publique par les articles L. 371-1 et suivants dudit code.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable. L’article 3 érige les continuités écologiques en élément fondamental de la protection de la biodiversité. La notion d’utilisation durable, en revanche, est difficile à définir et ne constitue pas un élément fondamental. En outre, les outils de la trame verte et bleue concernent toutes les échelles de planification et sont destinés à identifier les usages qui profitent à la biodiversité et à les valoriser.

M. Philippe Plisson. Cette notion vise à préserver les usages vertueux dans les continuités écologiques. Cela peut paraître évident, mais cela va mieux en le disant. Je suis donc favorable à son maintien, et défavorable à l’amendement.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD826 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. L’ajout des mots « y compris nocturne » à la fin du deuxième alinéa de l’article n’apporte rien. C’est l’environnement dans son ensemble qui doit être protégé, qu’il soit diurne ou nocturne ; une telle distinction n’a pas lieu d’être.

Mme la secrétaire d’État. Certains travaux récents montrent que la fragmentation des continuités écologiques est également le fait des éclairages urbains et routiers. Leur contribution à cette fragmentation est très importante et induit des modifications de comportement chez certaines espèces. Compte tenu de l’impact de la pollution lumineuse sur les espèces, je suis très défavorable à cet amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 3 ainsi modifié.

Article 3 ter
(articles L. 371-3, L. 411-1-A [nouveau], L. 411-3, L. 411-5 [supprimé], titre Ier du Livre III [supprimé] du code de l’environnement)

Contribution des maîtres d’ouvrage à l’inventaire national du patrimoine naturel par le versement des données brutes de biodiversité et diffusion des données

L’article 3 ter, dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, a été supprimé et intégré dans l’amendement gouvernemental introduit en séance au Sénat. Il visait à inclure les richesses pédologiques dans l’inventaire du patrimoine naturel.

1. Les nouvelles dispositions issues des travaux du Sénat

Le nouvel article 3 ter réécrit l’article L. 411-5 du code de l’environnement relatif à l’inventaire national du patrimoine naturel, en introduisant deux novations majeures :

– la contribution obligatoire des maîtres d’ouvrages publics et privés à l’inventaire national ;

– la libre mise à disposition et la libre réutilisation des données brutes (principe de l’open data).

Le présent article est issu d’un amendement gouvernemental, le Gouvernement ayant renoncé à demander l’autorisation de légiférer par ordonnance sur cette question. Il impose la contribution des maîtres d’ouvrage, publics ou privés, « à cet inventaire national par la saisie ou, à défaut, le versement des données brutes de biodiversité acquises à l’occasion des études d’évaluation préalable ou de suivi des impacts, réalisés dans le cadre de l’élaboration des plans et programmes » faisant l’objet d’une étude environnementale.

Les données brutes sont définies comme « les données d’observation de taxons, d’habitats d’espèces ou naturels obtenues par observation directe, par bibliographie ou par acquisition de données auprès d’organismes détenant des données existantes. »

La saisie ou le versement de données s’effectuerait au moyen d’une application informatique mise gratuitement à la disposition des maîtres d’ouvrage par l’État.

Les collectivités territoriales pourraient contribuer par la réalisation d’inventaires locaux et d’atlas de la biodiversité, ayant notamment pour objet de réunir les connaissances nécessaires à l’élaboration du schéma régional de cohérence écologique ou à la mise en œuvre des articles relatifs à la procédure d’autorisation ou de déclaration pour l’accès aux ressources génétiques lorsque la collectivité ou région d’outre-mer concernée a adopté la délibération prévue à l’article L. 412-12-1.

Hormis dans les cas prévus à l’article L. 124-4 du code de l’environnement, « les données brutes contenues dans les inventaires mentionnés au présent article sont diffusées comme des données publiques, gratuites, librement réutilisables ». L’article L. 124-4 fixe les conditions dans lesquelles l’autorité administrative peut rejeter une demande d’information relative à l’environnement, pour la protection de l’environnement ou pour d’autres motifs (document non communicable pour des motifs tenant au secret des délibérations du Gouvernement, à la défense nationale, à la conduite de la politique extérieure, à la sûreté de l’État, au déroulement de procédures juridictionnelles). Certains documents ne sont communicables qu’à l’intéressé (protection de la vie privée et respect du secret en matière commerciale ou industrielle).

2. La position de votre commission

Votre rapporteure soutient la disposition proposée et souligne son caractère novateur. Votre commission a adopté :

– quatre amendements de coordination avec l’article 59 bis AB, déposés par votre rapporteure, ainsi que trois amendements rédactionnels. L’article relatif à l’inventaire serait le nouvel article L. 411-1 A du code de l’environnement ;

– un amendement tendant à prévoir que les modalités de collecte des données feront l’objet d’une concertation avec les personnes morales concernées ;

– deux amendements tendant à réinscrire dans l’article L. 411-1 A les actuels II et II de l’article L. 411-5 supprimés par erreur dans l’article 3 ter (dispositions relatives au conseil scientifique régional du patrimoine naturel et dispositions sur les dommages causés à la propriété privée) ;

– un amendement présenté par votre rapporteure tendant à prévoir que le rôle du Muséum national d’histoire naturelle est limité, comme c’est le cas actuellement, à la responsabilité scientifique de l’inventaire ;

– un amendement présenté par votre rapporteure tendant à prévoir que les conditions dans lesquelles la diffusion des données est restreinte pour des motifs de protection de l’environnement sont précisées par décret.

*

* *

La commission adopte successivement les amendements de coordination CD185, CD186 et CD187 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CD200 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 7 à 9, qui prévoient la mise à disposition gratuite de toutes les données recueillies dans le cadre des évaluations environnementales. Il est surprenant que des entreprises qui travailleront sur un projet et constitueront de ce fait des données sur la biodiversité dans tel ou tel secteur soient obligées de les mettre à disposition gratuitement, par un outil informatique, et que de surcroît les personnes qui souhaiteraient faire des recours contre les projets puissent les utiliser.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Je suis certes sensible à la nécessité d’encadrer l’open data mais cet amendement va directement à l’encontre de notre volonté d’un véritable open data en matière de biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. Même avis. Il est important de maintenir la notion de données brutes, qui rend possible l’open data sans pour autant emporter de droits de propriété intellectuelle. Il est par ailleurs important que les données brutes qui fondent les interprétations et conclusions des études d’impact puissent être portées à la connaissance des acteurs, administration et public, et pas seulement les analyses qui en découlent.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle se penche sur l’amendement CD399 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Cet amendement porte sur la démarche d’inventaire du patrimoine naturel institué pour l’ensemble du territoire national, qu’il vise à compléter par la géodiversité. L’expression de « données brutes de biodiversité » introduite dans le présent article est insuffisante car l’inventaire ne porte pas uniquement sur le patrimoine vivant mais également sur les richesses géologiques, pédologiques, minéralogiques et paléontologiques.

Il n’apparaît pas non plus opportun que les données issues de la bibliographie ainsi que celles acquises auprès d’organismes détenant des données existantes soient saisies par les bureaux d’études, dont ce n’est pas le rôle, au risque de créer des doublons et d’autres difficultés.

Mme la rapporteure. L’intention est louable, mais ce n’est malheureusement pas possible : nous ne sommes pas prêts, nous n’avons pas les outils qui nous permettraient d’inventorier tout notre sous-sol. Une solution serait de renvoyer le sujet à ce « serpent de mer » qu’est la réforme du code minier...

Mme Florence Delaunay. L’inventaire national du patrimoine naturel est déjà en cours de réalisation, notamment par les conservatoires botaniques nationaux. Des données doivent être échangées entre le Muséum national d’histoire naturelle et ces conservatoires. J’ai déposé un autre amendement portant sur la validation de ces données : elles existent déjà.

Mme la rapporteure. C’est dans la transmission par les maîtres d’ouvrage que réside la difficulté.

Mme Viviane Le Dissez. Je comprends les difficultés qui peuvent exister pour enregistrer toutes ces données, même si elles ne sont pas aussi pléthoriques qu’on peut le penser. La géologie est souvent oubliée, alors que ces connaissances sont importantes. Nous manquons par exemple de données sur les sous-sols du milieu marin, en vue de permettre ou non l’extraction de ces fonds, qui ne sont pas des milieux morts mais vivants. Espérons que le code minier ne restera pas indéfiniment un serpent de mer.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CD188, l’amendement de cohérence CD189 et l’amendement rédactionnel CD190 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CD827 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Cet article prévoit une sorte d’open data pour les données de la biodiversité. Plus précisément, il oblige les maîtres d’ouvrage à partager leurs données en la matière. Une telle disposition, qui concerne à la fois les acteurs publics et privés, me rappelle l’article 12 du projet de loi pour une République numérique visant à recueillir les données des entreprises dès lors qu’elles ont un intérêt public, et je m’interroge sur l’articulation entre ces deux textes. Il est louable de prévoir que le versement des données se fasse sans coût supplémentaire pour les entreprises, mais des précisions sont à apporter sur les modalités de collecte et d’enregistrement temporaire des données. Il faut prévoir ces modalités par décret, comme c’est le cas dans le projet de loi pour une République numérique.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD961 de M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert. Il s’agit de reconnaître la présence et l’action positive des fédérations de chasseurs et de pêcheurs comme acteurs de la nature. Les structures de la chasse et de la pêche contribuent à la connaissance des espèces et des espaces. Les études scientifiques qu’elles réalisent apportent des éléments positifs pour la connaissance de notre biodiversité. La ministre et le Conseil national de la transition écologique (CNTE) encouragent déjà ces acteurs à participer au développement des connaissances sur la biodiversité, par le biais de l’open data. Il apparaît donc légitime de prévoir que ces structures puissent, le cas échéant, contribuer directement à la connaissance du patrimoine naturel.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Il faudrait, dans cette logique, dresser une liste à la Prévert de tous ceux qui peuvent contribuer à la connaissance du patrimoine naturel : organisations non gouvernementales (ONG), associations de protection de l’environnement, etc.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement créerait dans la loi une forme d’exclusivité à l’égard des chasseurs et des pêcheurs. Or le système d’information tel qu’il existe aujourd’hui permet déjà à quiconque d’y participer : personnes physiques et morales, fédérations des conservatoires botaniques, réseaux des conservatoires d’espaces naturels, associations locales ou nationales, établissements publics… Il n’y a pas de raison de cibler telle fédération ou tel réseau plutôt que tel autre : l’inventaire national s’adresse à tous, y compris aux pêcheurs et aux chasseurs. Je demande le retrait de l’amendement, faute de quoi mon avis sera défavorable.

Mme Delphine Batho. Les fédérations de pêcheurs ou de chasseurs ne sont pas des établissements publics. C’est l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) qui en est un. Il est important de reconnaître le rôle de sentinelle et d’alerte de ces fédérations.

M. Martial Saddier. Je soutiens cet amendement. Les pêcheurs et les chasseurs ont un rôle important dans les commissions locales de l’eau. Une association communale de chasse agréée (ACCA) est une association et non un établissement public. Par le passé, ces associations ont été parfois montrées du doigt, mais tout le monde reconnaît aujourd’hui que ce sont des acteurs qui jouent un rôle extrêmement positif, contribuant à la recherche scientifique et aux alertes.

M. Philippe Plisson. Ces fédérations de chasseurs et de pêcheurs sont des acteurs importants et une reconnaissance les inciterait à une démarche plus professionnelle, qui ne s’est pas encore développée partout de manière uniforme sur le terrain.

M. Jean-Yves Caullet. Je soutiens également l’amendement. Les fédérations de pêcheurs ont longtemps été les seules à pouvoir ester en justice en cas de pollution aquatique dans les milieux d’eau douce, et l’on fait appel aux chasseurs en cas d’épizootie et autre. Je propose que nous adoptions l’amendement tout en prévoyant d’élargir la rédaction d’ici à la séance.

Mme Laurence Abeille. Depuis le début de l’examen de cette loi, nous avons entendu à de multiples reprises les demandes des chasseurs et des pêcheurs, et vous savez ce que j’en pense... Je ne comprends pas pourquoi ces fédérations n’ont pas accepté d’entrer dans l’Agence française de la biodiversité. Il y a une contradiction très grande entre les grands discours sur la contribution du monde de la chasse au maintien de la biodiversité et cette attitude de refus. Je ne voterai pas l’amendement.

M. Jean-Yves Caullet. Les pêcheurs sont entrés dans l’Agence !

Mme la rapporteure. Cet alinéa concerne les collectivités territoriales, qui « peuvent contribuer à la connaissance du patrimoine naturel par la réalisation d’inventaires locaux ou territoriaux ou d’atlas de la biodiversité ». Avec qui pensez-vous que les collectivités réalisent des atlas de la biodiversité, sinon avec les pêcheurs, les chasseurs, les agriculteurs, les ONG… ? Quel est l’intérêt d’un tel ajout, venant qui plus est de ceux qui nous mettent en garde contre les lois « bavardes » ?

Mme la secrétaire d’État. Il y a d’une part les maîtres d’ouvrage de cet inventaire, qui sont, conformément aux textes, l’État et les régions, et d’autre part ceux qui y contribuent. L’amendement donnerait aux chasseurs et aux pêcheurs un statut supérieur aux autres contributeurs, en les plaçant au même niveau que les régions et l’État. Les autres contributeurs – forestiers, agriculteurs, naturalistes…– ne sont pourtant pas moins respectables.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je me retrouve pleinement dans les explications de la rapporteure et de la secrétaire d’État. Donner le sentiment qu’il faudrait faire allégeance aux pêcheurs et chasseurs serait tomber dans l’excès. (Approbations diverses)

M. François-Michel Lambert. Je n’ai pas la même lecture de l’alinéa que la secrétaire d’État. J’ai choisi les fédérations de pêcheurs et de chasseurs car ce sont des personnes qui sont au contact direct de la biodiversité. D’autres structures tout aussi spécifiquement consacrées à la biodiversité peuvent exister. Ce n’est pas le cas des agriculteurs. Ce serait le cas des chasseurs de papillons (Sourires), s’ils étaient organisés en fédérations locales ! Les fédérations de chasseurs, comme l’a rappelé Philippe Plisson, sont de plus en plus professionnelles ; elles recourent à des doctorants pour produire des bases de données, dont nous nous priverions.

Mme Delphine Batho. Pour une fois, je ne suis pas d’accord avec le président Chanteguet (Sourires). Il serait bon d’arrêter de caricaturer les positions des uns et des autres quand on parle des fédérations de chasseurs ou de pêcheurs. Le problème de cet article, c’est que la société civile en est absente. Il est dommage de ne pas prévoir que les fédérations de chasseurs, les fédérations de pêcheurs, les ONG, etc., peuvent contribuer à l’inventaire.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CD191 de la rapporteure et CD402 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Cet amendement a été repris par la rapporteure et je m’en félicite. Il apparaît indispensable de rétablir la référence aux conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel (CSRPN) créés par la loi du 27 février 2002.

Mme la rapporteure. Il convient en effet de rétablir ces dispositions effacées par erreur.

Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable au rétablissement, dans l’article L. 411-5 du code de l’environnement, cette mention malencontreusement supprimée par le Sénat ; et je remercie la rapporteure et Mme Delaunay de leur vigilance.

M. Martial Saddier. Une structure de plus, au moment où la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) est censée faire œuvre de rationalisation ! J’observe au passage que nous avons la fâcheuse habitude de voter en cours d’année des textes dont le financement est renvoyé à la loi de finances à venir... Enfin, la nomination des membres par le préfet de région exclusivement n’augure pas d’une bonne coopération avec les nouvelles régions, compétentes en matière d’environnement à travers les schémas régionaux d’aménagement et de développement du territoire (SRADT).

La commission adopte les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CD744 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à ce que l’inventaire national soit établi sous la responsabilité du Muséum national d’histoire naturelle, sans que ce dernier ait en outre à le valider ou à le diffuser. La centralisation proposée nous apparaît excessive.

La commission adopte cet amendement.

Puis elle étudie l’amendement CD400 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Cet amendement consiste à ajouter la phrase suivante : « Les données recueillies font l’objet d’une validation scientifique, en lien avec les structures et instances d’experts, existantes ou créées à cet effet. » Il apparaît en effet contradictoire de confier aux régions la qualité de chef de file pour la compétence « biodiversité » tout en les dessaisissant de tout rôle dans la validation et l’assemblage des données, qu’elles assurent pourtant de longue date avec l’appui de partenaires locaux. Au surplus, l’article méconnaît les missions déjà confiées par le législateur à certains acteurs reconnus, comme par exemple les conservatoires botaniques nationaux, eux-mêmes en charge d’une mission de diffusion des données qu’ils recueillent.

Mme la rapporteure. Il me semblait que l’adoption de l’amendement CD744 faisait tomber celui-ci. J’en demande le retrait.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement précise que la validation scientifique des données effectuée par le Muséum national d’histoire naturelle se fait en lien avec d’autres structures. Cette disposition, que je partage sur le fond, n’est pas du domaine législatif, et l’amendement CD744 que nous venons de voter supprime en effet la référence à la validation et à la diffusion des données qui avait été confiée au Muséum par le Sénat. Je demande, moi aussi, le retrait de l’amendement.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je suis rassurée par la précision apportée par la secrétaire d’État. En matière d’écologie et de biodiversité, nous avons intérêt à ce que beaucoup de formations soient créées dans toute la France. Le blocage au niveau du Muséum, même s’il s’agit d’une instance prestigieuse, ne va pas dans le bon sens.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement CD745 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de faire préciser par décret les conditions dans lesquelles certaines données, pour des motifs liés à la protection de l’environnement, ne sont pas diffusées. Leur diffusion pourrait en effet inciter trafiquants et pillards à se précipiter sur les lieux ainsi désignés à l’attention du public.

Mme Chantal Berthelot. C’est ce qui s’est passé lorsque le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a réalisé, voici trente ans, un état des lieux de la recherche aurifère en Guyane, apprenant ainsi aux orpailleurs où se trouvaient les filons.

Mme la rapporteure. L’objectif est de faire le maximum pour nous prémunir de ces agissements. Y réussirons-nous ? Je l’espère.

La commission adopte l’amendement.

Elle discute ensuite l’amendement CD1024 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. La mise à disposition de données brutes met à mal la sécurité juridique des projets et peut en outre avoir pour effet, comme vient de le rappeler notre rapporteure, que ces données tombent en de mauvaises mains. Le présent amendement est un amendement de repli par rapport à mon précédent amendement CD200 : je propose de remplacer les termes « données brutes » par « informations ».

Mme la rapporteure. Avis défavorable. En termes de propriété intellectuelle, le terme « informations » n’a guère de sens. C’est l’expression « données brutes » qui est reconnue.

Mme la secrétaire d’État. Il est important de conserver dans la loi la notion de données brutes d’inventaire. L’observation des espèces, des espaces ou des habitats est considérée comme la transcription d’une réalité physique ; il ne s’agit pas d’une création originale et la notion de plagiat ne s’applique pas. Ainsi, il n’existe pas de propriété intellectuelle sur les données brutes d’observation de biodiversité. Par contre, en visant des informations, l’amendement proposé peut avoir des incidences sur le droit de propriété intellectuelle. J’en demande le retrait.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD401 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. La mention relative à la gratuité de la diffusion des données paraît contraire aux dispositions de l’article L. 127-9 du code de l’environnement selon lesquelles « les autorités publiques peuvent soumettre l’accès ou le partage des séries et services de données géographiques visés à l’article L. 127-8 à une redevance ou une licence d’exploitation dans les conditions définies par les dispositions des articles 14 à 16 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public ».

De même, l’article L. 414-10 du code de l’environnement dispose que les conservatoires botaniques nationaux « assurent l’accès aux données recueillies à toute personne qui en fait la demande […] moyennant, le cas échéant, une contribution financière ».

Je propose donc de supprimer la mention de la gratuité et d’ajouter, après le mot « diffusées », les mots « conformément aux dispositions des articles L. 127-4 à L. 127-9 ».

Mme la rapporteure. Il me semble que cet amendement aurait pour effet de supprimer de facto l’open data. Mon avis est donc défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis. L’open data suppose la mise à disposition gratuite des données.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD828 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec la formulation commune à tous les textes traitant de l’open data, à savoir que les données sont diffusées « gratuitement et dans un format librement réutilisable ».

Mme la rapporteure. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. La rédaction proposée est moins sûre juridiquement, car elle laisse entendre que la liberté d’utilisation des données est liée à leur format. Avis défavorable également.

M. Lionel Tardy. Ce sont les termes même qui figurent dans le projet de loi pour une République numérique !

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement de coordination CD192 de la rapporteure et son amendement CD193 tendant à rectifier une erreur matérielle.

Puis elle examine l’amendement CD1025 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Il convient que nous disposions, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, d’une étude d’impact de la mise à disposition gratuite des données, afin de nous assurer que celle-ci ne compromet pas la sécurité juridique des projets.

Mme la rapporteure. Un rapport de plus ! Je ne suis pas contre a priori, mais cela dépend des possibilités du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. La saisie et le versement des données brutes d’observation de biodiversité permettent d’alimenter l’inventaire en continu. S’agissant des données issues des évaluations environnementales, ce sera également un processus continu. Dès lors, un rapport dans un délai de six mois après la loi ne sera probant que si l’application informatique permettant la saisie et le versement des données fonctionne. Dans ces conditions, je vous invite à retirer l’amendement, en m’engageant à faire une communication lorsque l’application informatique sera opérationnelle.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 3 ter ainsi modifié.

Mme la secrétaire d’État. Je me félicite de l’adoption de cet article relatif à l’open data. C’était un engagement du Président de la République : il est tenu.

Article 4
(articles L. 110-3 et L. 414-9 du code de l’environnement)

Élaboration des stratégies nationale et régionales pour la biodiversité

1. Le projet d’article à l’issue des travaux du Sénat en première lecture

Le présent article, portant sur la stratégie nationale pour la biodiversité, a fait l’objet de plusieurs modifications au Sénat. En commission, les sénateurs ont adopté :

– un amendement présenté par le rapporteur Jérôme Bignon déplaçant en début d’article l’alinéa selon lequel les stratégies nationale et régionales doivent contribuer à la cohérence des politiques publiques en matière de préservation de la biodiversité ;

– deux amendements présentés par le rapporteur Jérôme Bignon, supprimant la référence à la convention sur la diversité biologique adoptée à Nairobi ainsi que la mention, parmi les acteurs avec lesquels l’État doit engager la concertation, des petites et moyennes entreprises et des associations de naturalistes, qui avait été introduite par un amendement présenté par votre rapporteure ;

– un amendement présenté par le rapporteur disposant que l’agence française pour la biodiversité apporte son soutien à l’État pour élaborer la stratégie nationale et assure le suivi de sa mise en œuvre ;

– un amendement présenté par le rapporteur précisant le rôle des délégations territoriales de l’agence française pour la biodiversité en tant que soutien aux régions (ces délégations étant toutefois supprimées plus loin à l’article 9, qui crée les organismes de coopération pérenne) ;

– un amendement précisant que la stratégie nationale devrait couvrir deux périodes successives de cinq ans (sauf celle établie en 2015 couvrant « deux périodes successives de, respectivement, trois et cinq ans ») et qu’elle « définit les objectifs quantitatifs et qualitatifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité, de la programmation et l’enveloppe maximale indicative des ressources publiques de l’État et de ses établissements publics mobilisées pour les atteindre. Cette enveloppe est fixée en engagements et en réalisations » ;

– enfin, un amendement ajoutant un alinéa à cet article, selon lequel « chacune des espèces classées sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature [UICN] présente sur le territoire français fait l’objet d’un plan d’action spécifique en vue d’assurer sa préservation, intégré à la stratégie nationale pour la biodiversité prévue à l’article L. 110-3 du code de l’environnement. »

En séance, le Sénat a adopté :

– des amendements tendant à la suppression de l’alinéa selon lequel la stratégie nationale pour la biodiversité fixe des objectifs qualitatifs et quantitatifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité, de la programmation et l’enveloppe maximale indicative des ressources publiques de l’État et de ses établissements publics mobilisées pour les atteindre ;

– des amendements pour restreindre la portée du dernier alinéa relatif aux plans d’actions devant être menés pour les espèces menacées figurant sur la liste rouge de l’UICN. Sont dorénavant visées les espèces figurant dans les catégories « en danger » et « en danger critique », présentes sur le territoire, les plans d’actions ou les mesures de protection renforcées pouvant être mis en œuvre par espèce ou groupe d’espèces.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté des amendements présentés par votre rapporteure :

– tendant à réintroduire la référence à la convention sur la diversité biologique, ainsi que les petites et moyennes entreprises et les associations de naturalistes parmi les personnes consultées ;

– supprimant l’alinéa précisant de rôle de l’AFB dans l’élaboration de la stratégie nationale, que votre rapporteure a souhaité transférer au sein de l’article 9 plutôt que de l’inscrire à l’article 4 ;

– déplaçant après l’alinéa 6 le premier alinéa, complété sur le fait que les stratégies nationale et régionales contribuent à l’intégration des objectifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité dans les politiques publiques et à la cohérence de ces dernières en ces matières ;

– supprimant la disposition relative à la définition de la stratégie nationale comme devant couvrir deux périodes successives de cinq ans ;

– substituant aux dispositions introduites au Sénat sur les espèces menacées (relevant des catégories « en danger » ou « en danger critique » de la liste rouge de l’UICN) des dispositions pour renforcer, à l’article L. 414-9 du code de l’environnement, les mesures législatives applicables en matière de plans nationaux d’action pour les espèces protégées afin que ces dernières fassent l’objet de plans d’action opérationnels, par espèce ou par groupe d’espèces, et qui soient fondés, non seulement sur les données des instituts scientifiques comme c’est le cas aujourd’hui, mais également sur les données des organisations de protection de l’environnement. L’article L. 414-9 vise à la conservation et au rétablissement des espèces protégées ainsi que des espèces d’insectes pollinisateurs.

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La Commission examine l’amendement CD194 rectifié, de la rapporteure et de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Nous proposons de revenir à la définition de la stratégie nationale pour la biodiversité adoptée par l’Assemblée nationale, qui renvoie à la convention de Nagoya, référence en la matière.

Cet amendement prévoit également de déplacer un alinéa, ce qui ne devrait pas transformer totalement le texte.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. La stratégie nationale pour la biodiversité constitue la mise en œuvre de l’engagement de la France au titre de la convention sur la diversité biologique.

Il peut être intéressant de faire référence à la convention internationale dans la loi, je m’interroge cependant sur le retour de la mention aux petites et moyennes entreprises au sein des acteurs économiques, ainsi que des associations de naturalistes au sein des organisations de protection de l’environnement.

En dépit de ces réserves, cet amendement me paraît très positif, j’émets donc un avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD892 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Cet amendement propose une modification rédactionnelle qui est loin d’être cosmétique. La rédaction actuelle de l’alinéa 3 prévoit : « la stratégie nationale pour la biodiversité est élaborée par l’État en concertation avec des représentants de collectivités territoriales et de leurs groupements, de la communauté scientifique, d’acteurs socio-économiques et d’organisations de protection de l’environnement. »

Il me semble préférable de faire mention aux « membres de la communauté scientifique » plutôt qu’à la seule communauté scientifique, car celle-ci ne saurait être considérée comme un tout homogène. La liberté du scientifique est un principe fondamental : il ne saurait donc exprimer le point de vue de l’université de Bordeaux, du Centre national de la recherche scientifique, de l’Institut national de la recherche agronomique ou du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, il ne pourra donner que son avis d’expert.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Malheureusement, votre amendement est tombé, du fait de l’adoption de l’amendement précédent, qui a réécrit les alinéas 2 et 3.

Mme la rapporteure. Au demeurant, il est satisfait par la nouvelle rédaction, qui fait bien mention des « membres de la communauté scientifique ».

La Commission en vient à l’amendement CD195, présenté par la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 4, qui trouverait mieux sa place à l’article 9 du projet de loi.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD197 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement tend à mieux insérer cette disposition au sein de l’article L. 110-3 du code de l’environnement et à préciser que les stratégies nationale et régionales contribuent à l’intégration des objectifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité dans les politiques publiques.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable à cet amendement qui permettra une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les politiques publiques.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD198 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 7, ajouté par le Sénat, selon lequel la stratégie nationale pour la biodiversité devrait porter sur deux périodes de cinq ans. Or cette stratégie constitue un tout ; prévoir deux périodes de cinq ans nous paraît étonnant au regard des objectifs poursuivis.

Mme la secrétaire d’État. La stratégie nationale pour la biodiversité 2011-2020 couvre bel et bien une période de dix ans. Même si une évaluation à mi-parcours est prévue cette année, il n’a jamais été prévu d’établir une nouvelle stratégie nationale pour la biodiversité en 2015, car la stratégie actuelle est cohérente avec la stratégie de l’Union européenne et le plan stratégique mondial, qui tous deux couvrent la même période, de 2011 à 2020.

Je suis donc favorable à cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD184 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de renforcer les plans d’action et de prévoir la prise en compte des données des organisations de protection de l’environnement pour leur élaboration. Cette disposition importante ne remet aucunement en cause les plans stratégiques.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement propose des ajustements de nature à renforcer le caractère opérationnel des plans nationaux d’action. Avis favorable.

M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement pourrait entraîner l’apparition de normes ou de contraintes supplémentaires. Des scientifiques sont chargés de nous faire des propositions ; vous proposez d’y ajouter des organisations de protection de l’environnement que nous ne connaissons pas toutes, qui ne sont pas listées, sachant que l’objectif de certaines d’entre elles est de contraindre sérieusement l’agriculture traditionnelle et conventionnelle.

Cette logique va aboutir à imposer de nouvelles contraintes très fortes sur l’agriculture.

M. Martial Saddier. Cet amendement pourrait presque tomber sous le coup de l’article 40, car il entraîne indéniablement une dépense supplémentaire. Il prévoit la réalisation de plans opérationnels, j’aimerais que la rapporteure ou la secrétaire d’État nous éclairent sur l’ampleur de ces plans : combien coûteraient-ils, qui va les payer ? S’agit-il, comme l’État a l’habitude de le faire, de plans nationaux dont la réalisation sera laissée à la charge des collectivités territoriales, notamment les régions qui ont reçu une nouvelle compétence environnementale ?

Cet amendement a une portée beaucoup plus lourde que la quiétude matinale de notre réunion ne peut le laisser croire. Je pense que nous en parlerons longtemps dans les territoires. Pourriez-vous nous éclairer sur la portée concrète de cet amendement ?

M. Jean-Pierre Vigier. Comme mes collègues, je pense que cet amendement va ajouter une couche au millefeuille administratif et compliquer encore le système. Nos agriculteurs n’ont vraiment pas besoin de cela en ce moment. Il faut être réalistes, efficaces, et prévoir des procédures simples. Je suis fortement opposé à cet amendement.

Mme Catherine Quéré. Je suis très réservée sur cet amendement, qui exprime presque une défiance vis-à-vis des scientifiques et risque de créer des contraintes inutiles. Il existe toute sorte d’organisations de protection de l’environnement ; la rédaction n’est pas assez précise.

Mme la rapporteure. Je pense que vous n’avez pas lu l’alinéa proposé par le Sénat que cet amendement a pour objet de remplacer. (Sourires) Nous proposons simplement de renforcer les plans d’action opérationnels.

Il n’y a pas que l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui pourrait fournir des informations, mais aussi des organisations de protection de l’environnement de toutes sortes.

Il y a un problème de compréhension de votre part : il n’est pas question d’ajouter quelque chose qui coûtera « la peau des fesses » (Sourires), mais simplement d’opérer une substitution pour renforcer la protection des espèces et les plans d’action opérationnels. Il ne faut pas considérer que seule l’UICN peut nous donner des informations : les associations de chasseurs et de pêcheurs, par exemple, peuvent également fournir des données utiles. Vous ne mesurez pas combien cet amendement permet d’ouvrir la procédure d’élaboration de ces plans d’action.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Et l’article 40 ne fait pas référence à la « peau des fesses », me semble-t-il… (Sourires)

Mme la secrétaire d’État. Rappelons que les plans d’action nationaux consistent avant tout à prévoir des actions de la part de toutes les parties dont l’activité a un impact sur l’espèce ou les espèces concernées. Ils ne constituent pas du tout un surcroît de dépenses publiques, ce sont des plans volontaires, et qui font l’objet d’un consensus.

M. Gérard Menuel. L’amendement prévoit bien d’insérer les mots « organisation de protection de l’environnement ». Qu’entend-on exactement par ces termes, quelles associations sont concernées ? Il y a beaucoup trop d’incertitudes à ce niveau, et cet amendement exprime aussi une défiance à l’égard des scientifiques, dont les travaux doivent rester à la base de nos réflexions.

Mme Martine Lignières-Cassou. Peut-être le trouble de mes collègues tient-il au fait que nous n’avons pas sous les yeux le texte de l’article L. 414-9 du code de l’environnement que cet amendement tend à modifier… Il suffit de le relire pour comprendre que cet amendement n’ajoute aucune contrainte supplémentaire.

M. le président. Je vous rappelle les termes de l’article L. 414-9 du code de l’environnement :

« Des plans nationaux d’action pour la conservation ou le rétablissement des espèces visées aux articles L. 411-1 et L. 411-2 ainsi que des espèces d’insectes pollinisateurs sont élaborés et, après consultation du public, mis en œuvre sur la base des données des instituts scientifiques compétents lorsque la situation biologique de ces espèces le justifie.

« Ces plans tiennent compte des exigences économiques, sociales et culturelles ainsi que des impératifs de la défense nationale.

« Les informations relatives aux actions prévues par les plans sont diffusées aux publics intéressés ; les informations prescrites leur sont également accessibles pendant toute la durée des plans, dans les secteurs géographiques pertinents.

« Un décret précise, en tant que de besoin, les modalités d’application du présent article. »

Mme la rapporteure. L’amendement CD184 rectifié prévoit de préciser que les plans d’action sont « opérationnels »…

M. Gérard Menuel. C’est précisément cela, le problème…

Mme la rapporteure. S’ils ne sont pas opérationnels, ce n’est pas la peine d’en faire… Il faut savoir ce que l’on veut !

De plus, nous ajoutons que ces plans d’action sont mis en œuvre sur la base des données des instituts scientifiques compétents « et des organisations de protection de l’environnement. » Ces dernières sont effectivement nombreuses, il n’y a pas que l’UICN ; il ne faut pas nier le travail que font de nombreuses associations, ainsi, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pourrait y contribuer.

M. Jean-Marie Sermier. Hier vous étiez contre !

Mme la rapporteure. Ne mélangez pas tout ! Nous n’avons jamais dit que l’ONCFS ne s’intéressait pas à la biodiversité terrestre, la preuve en est que nous voulions l’inclure dans l’agence de la biodiversité : j’ai moi-même dit hier qu’il était dommage qu’il n’en fasse pas partie.

M. le président. On peut imaginer que les associations concernées sont les associations de protection de l’environnement agréées.

Mme la rapporteure. Je suis tout à fait prête à ajouter ce mot si cela peut contribuer à rassurer mes collègues.

M. Jean-Marie Sermier. L’article L. 414-9 du code de l’environnement est clair : Il s’appuie sur des instituts scientifiques pour élaborer les plans. Si l’on y ajoute les organisations de protection de l’environnement – agréées ou pas, nous n’en savons rien – il faut en faire de même avec tout un pan d’autres activités professionnelles : chambres consulaires, chambres d’agriculture, et j’en passe. On me dit que l’ONCFS pourrait en faire partie, mais ce n’est pas le cas, pas plus que l’Office national des forêts. Si l’on commence à faire une liste à la Prévert, il ne faudra rien oublier.

M. le président. Je vous invite à relire l’alinéa 8 du projet de loi. Cet amendement propose de le remplacer par quelques modifications à l’article L. 414-9, dont je viens de vous donner lecture.

Effectivement, l’amendement propose de spécifier que plans d’action sont « opérationnels » – ce qui peut choquer, mais trouve pour ma part cette précision tout à fait utile. Et en ce qui concerne les organisations de protection de la nature, si nous indiquons qu’il s’agit d’organisations de protection de l’environnement « agréées », il n’y aura plus de problème.

Si vous préférez l’alinéa 8 dans sa version actuelle, je vous invite à le relire avec attention.

Mme Laurence Abeille. Cette proposition d’ajouter le mot « agréées » me paraît restrictive. Je trouve que la rédaction de la rapporteure est plus intéressante, et je ne pense pas que nous devions la modifier, cela nous priverait de nombreuses expertises intéressantes sur le sujet.

M. Guy Bailliart. Si le mot « agréées » n’est pas ajouté au texte de l’amendement, je ne le voterai pas.

M. le président. Nous aurons l’occasion d’en discuter à nouveau en séance, ou lors de la réunion de notre commission en application de l’article 88 du règlement. Je vous propose de passer au vote.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 4 ainsi modifié.

Article 4 bis
(article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle)

Non brevetabilité des produits obtenus par procédés essentiellement biologiques

1. Le dispositif introduit au Sénat

Le présent article, issu d’un amendement, dont une partie provient d’un amendement présenté par le Gouvernement et portant article additionnel, vise à compléter les dispositions du code de la propriété intellectuelle (article L. 611-19) selon lequel ne sont pas brevetables « les procédés essentiellement biologiques pour l’obtention des végétaux et des animaux ; sont considérés comme tels les procédés qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection ».

Le Gouvernement a initialement souhaité viser également les produits qui sont issus des procédés essentiellement biologiques. Toutefois, l’amendement adopté au Sénat vise, outre les produits issus de ces procédés, les parties et les composantes génétiques des produits.

L’idée principale de cet article et de l’article 4 ter est d’interdire la brevetabilité de végétaux et d’animaux obtenus uniquement par des procédés biologiques, la brevetabilité des parties d’animaux ou de végétaux qui seraient dotées, du fait des sélections effectuées, de certaines propriétés ainsi que la brevetabilité des traits natifs, présents à l’état naturel dans certaines espèces et présentant des fonctions particulières dès lors que les animaux ou végétaux portant les gènes sont uniquement issus de procédés biologiques.

2. Les travaux de votre commission

Votre rapporteure souscrit pleinement à l’objectif général de cet article. Elle a toutefois souhaité, afin d’en assurer la sécurité juridique, que les termes employés soient bien ceux définis par la directive 98/44/CE (5) et le code de la propriété intellectuelle qui la transpose. Elle souligne également que l’insertion du mot « produits » pouvait laisser penser qu’il s’agirait des produits issus des animaux et végétaux, ce qui n’est pas le sens recherché. Par ailleurs, la notion de parties et de composantes génétiques ne renvoie pas à une définition clairement établie au niveau juridique ou scientifique.

Votre commission a adopté un amendement présenté par votre rapporteure selon lequel ne sont pas brevetables les produits (c’est-à-dire les animaux et végétaux) exclusivement obtenus par des procédés essentiellement biologiques, y compris les éléments qui constituent ces produits et les informations génétiques qu’ils contiennent. Les termes « éléments » et « informations génétiques » sont déjà employés par la directive précitée (article 5 relatif au corps humain et article 9 relatif au brevet sur un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique). Ne seraient visés que les animaux et végétaux exclusivement obtenus par procédé essentiellement biologique.

Ainsi, seraient protégés les exploitants qui auraient, par leur travail de reproduction et de sélection, obtenu des végétaux ou des animaux présentant des caractéristiques identiques à celles protégées par un brevet (brevet relatif à un élément des animaux ou végétaux ou brevet relatif à une information génétique).

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La Commission examine en présentation commune l’amendement de suppression CD903 de Mme Anne-Yvonne Le Dain, l’amendement CD692 de la rapporteure ainsi que les amendements identiques CD253 de M. Martial Saddier et CD650 de M. Jean-Yves Caullet.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je propose de supprimer purement et simplement cet article ajouté par le Sénat. J’ai bien lu l’amendement proposé par Mme Geneviève Gaillard, et je comprends l’inquiétude sur l’utilisation des gènes et de leurs produits, mais les différentes rédactions proposées interdisent toute extraction naturelle ou par voie chimique ou physique de principes actifs à partir de la nature, ce qui constitue pourtant la base de toute la pharmacopée, de la cosmétique et de nombreux procédés industriels.

La rédaction actuelle de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle est conforme au droit européen, qui s’applique à tous les pays d’Europe. Avant de le modifier, il faut être d’une prudence de chat : en adoptant la rédaction proposée, nous risquons de nous interdire toute utilisation de ce qui n’a pas été découvert. Or la nature est immensément vaste et inexplorée.

Cette angoisse risque d’aboutir à un blocage complet de l’exploration, et donc de réduire les possibilités d’exploiter la biodiversité qui existent en métropole et dans les DOM, pourtant à la base de bien de ce dont nous vivons aujourd’hui.

Mme la rapporteure. Cet article ajouté par le Sénat introduit des éléments extrêmement importants sur la brevetabilité, permettant de protéger les agriculteurs du risque que des brevets soient déposés sur les découvertes qu’ils ont réalisées. Parfois, des entreprises déposent des brevets sur des éléments issus du vivant contenant des informations génétiques, interdisant aux agriculteurs de les reproduire pour continuer leur culture.

C’est une demande de longue date des agriculteurs, qui souhaitent pouvoir cultiver des espèces qu’ils ont eux-mêmes découvertes par leur travail. Nous vous proposons donc une réécriture de l’article 4 bis afin d’en préciser les termes conformément au droit existant.

Nous devrions trouver un consensus sur ce point et améliorer la rédaction du Sénat, car cette disposition est tout à fait pertinente en ce qu’elle permettra aux agriculteurs et aux éleveurs de continuer à travailler avec des espèces qu’ils ont eux-mêmes obtenues par mutagenèse spontanée. Je vous propose donc de repousser l’amendement de suppression de Mme Le Dain et d’adopter l’amendement CD692 que je vous soumets.

M. Martial Saddier. Mon amendement CD253 est dans le même esprit.

M. Jean-Yves Caullet. Mon amendement CD650 est identique à celui de M. Martial Saddier : il tend à préciser la disposition introduite à juste titre par le Sénat, de telle sorte que l’on ne puisse pas interdire à un agriculteur, par un brevet qu’il ne peut pas déposer lui-même, d’utiliser le résultat de son travail.

Mme la secrétaire d’État. Je me rends complètement aux arguments de notre rapporteure, qui a été assez claire. Je suggère donc à Mme Le Dain et à MM. Saddier et Caullet de retirer leurs amendements au profit de celui de la rapporteure.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je ne partage pas les analyses qui viennent d’être développées. Je vais travailler mon amendement en vue de la séance publique.

Il est une chose dont personne n’a parlé : le catalogue officiel français des espèces et variétés, institution française extrêmement puissante qui s’impose progressivement dans le reste du monde et qui permet de qualifier les semences, tout en offrant de grandes libertés d’interprétation. L’année dernière, le Gouvernement a ouvert le catalogue aux semences paysannes ; autrement dit, il y a eu des évolutions importantes. Or nous risquons d’aboutir ni plus ni moins à la suppression du catalogue, et donc des autorisations de cultures. Cela risque d’inhiber fortement l’agriculture française.

Je retire pour l’instant mon amendement, mais j’y reviendrai en séance.

Les amendements CD903, CD253 et CD650 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD692.

En conséquence, l’article 4 bis est ainsi rédigé et les amendements CD121, CD528 et CD931 tombent.

Mme la rapporteure. Au nom des agriculteurs, je tiens à vous remercier car nous réalisons une grande avancée pour les protéger. Cette mesure était très attendue, notre commission peut être fière d’avoir voté cet amendement.

Article 4 ter
(articles L. 613-2-2 et L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle)

Limitation de la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique

1. Le dispositif introduit au Sénat

Le présent article additionnel, issu d’un amendement adopté en séance au Sénat, vise à préciser que « la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées ne s’étend pas aux matières biologiques dotées ou pouvant être dotées desdites propriétés déterminées, par procédé essentiellement biologique, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication ».

En application de l’article L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle « la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées s’étend à toute matière biologique obtenue à partir de cette matière biologique par reproduction ou multiplication et dotée de ces mêmes propriétés.

La protection conférée par un brevet relatif à un procédé permettant de produire une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées s’étend à la matière biologique directement obtenue par ce procédé et à toute autre matière biologique obtenue, à partir de cette dernière, par reproduction ou multiplication et dotée de ces mêmes propriétés. »

2. Les travaux de votre commission

Votre rapporteure a proposé d’instituer, dès l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle, la non brevetabilité des éléments et des informations génétiques qui auraient été obtenus par procédés biologiques. Elle a également estimé nécessaire de préciser cette disposition, à la fois au sein de l’article L. 613-2-2 du code (brevet portant sur un produit contenant ou consistant en une information génétique) et au sein de l’article L. 613-2-3 (brevet sur les matières biologiques dotées de certaines propriétés du fait d’une invention). Le Sénat n’a pas adopté de modification de l’article L. 613-2-2 relatif à la protection conférée par un brevet portant sur un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique.

Comme pour l’article 3 ter, votre rapporteure a souhaité rester au plus près des définitions figurant déjà dans le code de la propriété intellectuelle.

Ainsi :

– la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique ne s’étend pas aux matières exclusivement obtenues par des procédés essentiellement biologiques, dans lesquelles l’information génétique est contenue et exerce la fonction indiquée et

– la protection conférée par un brevet sur les matières biologiques dotées de certaines propriétés ne s’étend pas aux matières biologiques exclusivement obtenues par des procédés essentiellement biologiques.

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La Commission examine l’amendement CD693 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article 4 ter introduit par le Sénat et qui modifie les articles L. 613-2-2 et L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle, afin de protéger les personnes qui ont obtenu, par leur propre sélection, des espèces aux mêmes propriétés que celles protégées par un brevet.

La modification de l’article L. 613-2-2 permet de restreindre la portée des protections accordées par un brevet portant sur un produit contenant une information génétique. Une matière obtenue par procédé biologique qui contient les mêmes informations génétiques ne sera pas soumise au brevet. Les termes employés sont repris du droit européen applicable et de sa transposition en droit français.

Le même raisonnement est appliqué aux brevets protégeant une matière biologique dotée de certaines propriétés du fait d’une intervention. La protection ne s’étend pas aux matières obtenues par des procédés biologiques.

Cet amendement amplifie la portée de ceux que nous avons déjà votés, et permettra de protéger les agriculteurs qui ont, dans le cadre de leur activité, obtenu des produits aux qualités identiques à des produits protégés par un brevet. Ils n’auront pas à payer un brevet ou à acheter les droits pour les utiliser.

Mme la secrétaire d’État. Je partage l’objectif de limitation du champ de brevetabilité du vivant, mais je trouve que les amendements identiques CD122 et CD529 ont une rédaction plus précise, ils ont donc ma préférence.

M. Guy Bailliart. L’amendement mentionne des procédés « essentiellement biologiques » ; je voudrais savoir quel est le sens donné en droit à cette expression.

M. Jean-Marie Sermier. J’aimerais savoir si l’amendement proposé s’applique également aux ferments, ces micro-organismes utilisés notamment dans la production fromagère. Un certain nombre de fromagers ont isolé et élevé ces ferments depuis plusieurs décennies, il ne faudrait pas qu’ils soient ensuite contraints de déposer un brevet. Il serait donc positif pour eux que cet amendement couvre ce cas de figure.

Mme la rapporteure. Cet amendement concerne exactement ce type de situations.

En réponse à M. Guy Bailliart, le code de la propriété intellectuelle n’emploie pas les termes : « de manière naturelle ». L’expression reconnue est celle de procédés biologiques. C’est donc pour rester cohérents avec la terminologie du code de la propriété intellectuelle que nous utilisons cette expression. Nous y avons veillé pour être sûrs d’être « dans les clous », car c’est un sujet difficile : si nous utilisons des termes qui ne sont pas reconnus, nous risquons d’obtenir l’effet contraire à celui qui était recherché.

Je maintiens donc ma préférence à l’amendement que j’ai présenté plutôt qu’aux amendements suivants.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Si cet amendement était voté, l’amendement CD904 que je dois présenter ensuite tomberait. Je souhaite pouvoir le défendre.

De nouveau, nous allons vers une spécification compliquée. J’aurais souhaité que la protection conférée par un brevet ne s’applique pas aux autres matières biologiques qui acquerraient ces propriétés par d’autres voies, ni à leurs descendances ou aux produits qui en sont issus par reproduction ou multiplication.

Ce n’est pas qu’une question de brevet. Nous constatons une tendance en France à ne délivrer que des licences d’exploitation, au cas par cas, ce qui limite profondément l’utilisation des avancées scientifiques dans ces domaines.

Je suis inquiète des bouleversements que nous sommes en train d’introduire, et je compte donc retravailler cet amendement en vue de la séance publique.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 4 ter est ainsi rédigé et les amendements CD904, CD122, CD529 et CD933 tombent.

Article 4 quater
(article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle)

Condition complémentaire à la définition de l’obtention végétale, relative au caractère reproductible de la semence

(supprimé)

Le présent article est issu d’un amendement adopté au Sénat visant à fixer un nouveau critère pour le certificat d’obtention végétale (COV) tenant au caractère reproductible de la semence en milieu naturel de la variété nouvelle créée.

Votre rapporteure souligne que les semences strictement non reproductibles, que sont les semences dites « terminator », ne sont pas autorisées et que, si l’objectif était d’interdire les semences dites hybrides, alors il convient de rappeler que ces dernières ne sont pas reproductibles à l’identique mais peuvent tout de même être reproduites de façon non homogène et en perdant leurs qualités. Il convient également de rappeler que ces semences sont à l’origine de l’immense majorité de notre production.

Enfin, ajouter une condition complémentaire à la définition de l’obtention végétale pose problème au regard de nos engagements au titre de la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales.

Votre commission a supprimé cet article, quatre amendements de suppression ayant été déposés, dont l’un l’a été par votre rapporteure.

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La Commission examine les amendements de suppression CD255 de M. Martial Saddier, CD651 de M. Jean-Yves Caullet, CD694 de Mme Geneviève Gaillard et CD924 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

M. Martial Saddier. Tel qu’il est rédigé, l’article 4 quater semble aller à l’encontre des normes actuellement en vigueur, qui satisfont tout le monde et ont été établies en conformité avec les règles de l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales, dont la France est un membre fondateur. Mon amendement CD255 a donc pour objet de le supprimer.

M. Jean-Yves Caullet. Il s’agit d’un problème qui tient notamment aux semences dites « hybrides F1 », reproductibles en milieu naturel mais qui tomberaient sous le coup de cet article s’il était maintenu.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je suis ravie de constater que tout le monde envisage la suppression de cet article, qui risque de mettre en péril une grande partie de l’agriculture française, notamment les cultures de colza, de tournesol et éventuellement de maïs. Il faut être d’une prudence de chat dans ce domaine, d’autant que les semences dont nous discutons ont une capacité à se reproduire en milieu naturel extrêmement faible, voire nulle.

Mme la rapporteure. Je suis entièrement d’accord avec les orateurs précédents, puisque je propose également de supprimer cet article, qui me semble rater sa cible. Il peut viser non seulement les semences dites « terminator » – mais cela n’a pas de sens – et ensuite les hybrides, qui sont reproductibles. Si cet article était adopté, 90 % de la production française serait mise à mal. Je crois donc que nous avons intérêt à supprimer cet article qui n’est pas de nature à améliorer les choses.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à ces amendements de suppression.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 4 quater est supprimé.

Article 4 quinquies
(article L. 315-5 du code rural et de la pêche maritime)

Extension des possibilités d’entraide entre les agriculteurs

(supprimé)

Le présent article additionnel, introduit par un amendement en séance publique au Sénat, élargit le périmètre pour le droit d’échange de semences ou de plants n’appartenant pas à une variété protégée par un certificat d’obtention végétale, et produits sur une exploitation hors de tout contrat de multiplication. Le droit actuel dispose que ce droit d’entraide n’est ouvert qu’aux membres d’un groupement d’intérêt économique et environnemental (GIEE). La condition tenant à l’appartenance à un GIEE a été supprimée.

Votre commission a supprimé cet article, contre l’avis de votre rapporteure.

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La Commission examine les amendements de suppression CD256 de M. Martial Saddier, CD652 de M. Jean-Yves Caullet et CD928 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

M. Martial Saddier. La loi d’avenir pour l’agriculture a autorisé l’échange de produits au sein des groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE). Il semble que cet article élargisse considérablement le périmètre de l’échange dit « entre voisins », au point de le faire exploser. Je souhaite revenir à l’esprit de la loi d’avenir pour l’agriculture ; c’est pourquoi je propose la suppression de cet article.

M. Jean-Yves Caullet. Mes arguments sont les mêmes. Il est pertinent, dans le cadre d’un groupement qui se reconnaît un intérêt mutuel et qui fonctionne sur une relation de confiance, de permettre ces échanges pour que tout ne soit pas du domaine marchand. Mais sortir de ce cadre ferait courir un risque sur la sincérité des échanges.

Je pense donc qu’il convient de s’en tenir au champ de l’échange « entre voisins » dans le cadre des GIEE.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas favorable à ces amendements de suppression. Hormis pour les semenciers qui les ont soutenus, je ne vois pas quel problème il y aurait à autoriser les agriculteurs à se transmettre des semences en dehors des GIEE. Je pense que vous voulez trop restreindre le champ de l’échange.

Au contraire, il faut permettre aux agriculteurs d’échanger des semences. Il est vrai que cela échappe pour partie aux semenciers, mais rassurez-vous : ceux-ci feront quand même des affaires ! (Murmures) Et les agriculteurs ne se porteront que mieux s’ils peuvent échanger un certain nombre de semences, même en dehors des groupements.

Je préfère donc laisser en l’état cette rédaction introduite, rappelons-le, par le Sénat et je suis défavorable à ces amendements.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je maintiens mon amendement de suppression. Nous allons mettre en péril le certificat d’obtention végétale (COV) qui représente un acquis immense et ancien pour notre pays. La filière semencière est exportatrice nette et représente l’un des secteurs économiques les plus puissants ; ses acteurs paient des impôts et attirent des capitaux pour notre pays. Le COV est un outil formidable pour lutter contre la brevetabilité du vivant, puisqu’il qualifie une réalité concrète et non un potentiel.

Le catalogue, instrument puissant mais trop longtemps verrouillé à cause d’une complicité entre le ministère de l’agriculture et le monde des semenciers, s’est développé grâce à des dispositifs scientifiques et juridiques. Je suis très circonspecte à la lecture de cet article rédigé par le Sénat, car la loi doit permettre de valoriser l’expertise et la puissance économique françaises : dans le domaine des semences, nous sommes non seulement vaillants, mais puissants et reconnus dans le monde entier. Les agriculteurs n’utilisent pas des semences génériques, mais systématiquement des variétés adaptées au milieu, à la culture et aux habitudes alimentaires. Le système actuel fonctionne parfaitement ; autoriser une ouverture totale des échanges en dehors d’un cercle restreint de proximité – qui bénéficie du reste d’une grande tolérance de la part de l’administration : on peut s’envoyer des semences par colis postal à cinq cents kilomètres… – mettrait en péril une filière majeure de l’économie française.

M. Gérard Menuel. Madame la rapporteure, les mesures législatives adoptées depuis vingt-cinq ans étaient nécessaires et la loi relative à l’avenir de l’agriculture, vieille de seulement quelques mois, était parvenue à un équilibre en matière d’échange de produits. Pourquoi revenir sur ce texte aujourd’hui ?

M. Jean-Marie Sermier. Les semences échangées entre voisins ne font l’objet d’aucun contrôle sanitaire ou génétique ; ainsi, il est parfaitement possible d’échanger des semences contenant des organismes génétiquement modifiés (OGM). Maintenons l’échange entre voisins, mais restons très vigilants sur le reste.

M. Jean-Yves Caullet. Il ne s’agit pas de protéger les semenciers, mais la qualité et la sincérité de l’échange ; or celle-ci suppose une relation de confiance entre les deux parties de l’échange. Si la confiance se distend, les risques de dérives dans la production augmentent. Il convient donc de maintenir la proximité entre les acteurs ou tout du moins un accord fondamental sur les objectifs, ce que traduit bien le groupement d’intérêt économique et environnemental (GIEE). Sans cela, ce type d’échanges et de semences en pâtira et pourrait être interdit à la suite de scandales ou d’escroqueries. Le mieux est l’ennemi du bien : tenons-nous en au système actuel, qui a fait la preuve de sa vertu.

M. Martial Saddier. Madame la rapporteure, vous avez salué hier M. Lionel Tardy qui s’attachait à ce que l’on n’écrive pas dans la loi le contraire de ce que l’on avait adopté six mois auparavant. Les Français ne supportent plus de voir qu’un dispositif n’a pas fini d’être mis en route qu’il est modifié par une nouvelle loi. Le ministre actuel de l’agriculture a porté une loi, datant du 13 octobre 2014, qui a donné lieu à de nombreux débats sur la notion d’échange. Celle-ci a été grandement élargie au sein des GIEE, et nous évaluerons cette évolution dans quelques années. N’allons pas bouleverser dès maintenant un dispositif qui vient tout juste d’être déployé !

Enfin, madame la rapporteure, je connais votre engagement, mais comprenez qu’il est assez désagréable d’entendre que chacun de nos amendements a été préparé par un lobby. (Murmures divers) Les députés sont capables d’avoir des idées personnelles et de conduire leur propre expertise.

M. Jean-Pierre Vigier. Comment sont effectués les contrôles des échanges ? Quelle est la place de la recherche dans ce contexte ?

M. Bertrand Pancher. La brevetabilité de la nature est un débat très intéressant qui renvoie à la nécessité de concilier le refus de laisser le monde uniquement dans les mains des intérêts économiques avec le développement de la recherche. Le texte initial était équilibré ; prenons garde à ne pas adopter de position jusqu’au-boutiste qui paralyserait toute perspective de développement.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. M. Jean-Yves Caullet a raison : à laisser tout un chacun faire ce qu’il veut chez lui et échanger librement avec ses voisins et ses amis plus lointains, nous nous exposons à un risque tout simple, et inévitable : celui d’une dérive génétique. Voilà pourquoi le contrôle et la certification importent tant : c’est tout le principe de l’agronomie et la sélection variétale, depuis l’aube de l’humanité.

Mme la rapporteure. De quoi parlons-nous ? Je vous relis les termes de l’article L. 315-5 du code rural : « Les actions menées dans le cadre de leur projet pluriannuel par les agriculteurs membres d’un groupement d’intérêt économique et environnemental au bénéfice d’autres agriculteurs membres sont présumées relever de l’entraide au sens de l’article L.325-1. Il en est de même sans préjudice de la réglementation qui leur est applicable des échanges entre agriculteurs membres d’un groupement d’intérêt économique et environnemental de semences ou de plants n’appartenant pas à une variété protégée par un certificat d’obtention végétale et produits sur une exploitation hors de tout contrat de multiplication de semences ou de plants destinés à être commercialisés ».

On restreint considérablement le champ, puisque l’on en exclut les produits destinés à l’alimentation et les COV. Vos arguments n’ont pas de raison d’être, puisque nous parlons ici de variétés qui ne sont pas protégées. Cet article ne présente aucun danger et je ne comprends pas les amendements proposant sa suppression. Les dérives que vous dénoncez peuvent tout aussi bien se produire dans le cadre d’un GIEE. Les agriculteurs sont tout de même des gens responsables…

Mme Catherine Quéré. Pas tous !

Mme la rapporteure. Je maintiens : des gens responsables, qui savent ce qu’ils veulent et ce qu’ils font, et j’ai confiance en eux. Arrêtons de répandre des choses inexactes, sinon des mensonges : nous parlons de variétés non protégées.

Mme la secrétaire d’État. L’article 4 quinquies vise effectivement à garantir le droit d’échange des semences qui n’appartiennent pas à une variété protégée par un COV et qui sont produites sur une exploitation n’ayant pas signé de contrat de multiplication. Le projet de loi souhaite étendre ce droit d’échange à tous les agriculteurs, y compris à ceux qui ne sont pas regroupés dans un GIEE, au demeurant peu nombreux. Cette disposition constitue une avancée, notamment pour des variétés anciennes, typiques ou locales. Le Gouvernement s’oppose donc à ces amendements de suppression.

M. Jean-Yves Caullet. L’argumentation de Mme la rapporteure et de Mme la secrétaire d’État confirme mes propos : nos amendements ne représentent pas une garantie pour les obtenteurs officiels et ne sont pas destinés à protéger les semenciers puisque les champs des dispositifs diffèrent.

Les GIEE ont été créés pour favoriser le développement d’une agriculture plus collaborative, et tout ce qui contribuera à l’augmentation de leur nombre s’avérera vertueux. Le problème tient au fait que, dans la mesure où nous sommes hors du champ des COV, il n’existe aucune garantie de la sincérité de l’échange ; nous ne devons pas accepter une évolution qui semble opportune, mais qui, au premier incident sanitaire, viendra miner toute idée d’échange de semences paysannes et ira à l’encontre de notre objectif. Il ne s’agit pas de protéger les semenciers, mais bien les échanges paysans. (Approbations diverses)

M. Philippe Plisson. Dans le contexte de crise agricole, deux agricultures s’affrontent : l’agriculture industrielle et intensive et l’agriculture paysanne. L’échange de grains fait partie de l’agriculture de proximité. Je suis donc favorable à ces amendements.

M. le président. Nous en venons au vote.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence l’article 4 quinquies est supprimé.

TITRE II
GOUVERNANCE DE LA BIODIVERSITÉ

Article 5 A
(article L. 421-1 A [nouveau] du code de l’environnement)

Définition dans la loi des fonctions du CNCFS

Le présent article additionnel, introduit par amendement en séance publique au Sénat, et qui n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale, vise à définir dans la loi le rôle du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) selon ces termes : il « exerce une fonction consultative auprès des ministres chargés respectivement de la chasse et de l’agriculture. Il se prononce sur l’ensemble des textes relatifs à l’exercice de la chasse et la gestion de la faune sauvage, et à la protection de la nature lorsqu’ils ont une incidence directe ou indirecte sur l’exercice de la chasse. »

Ses missions seraient étendues par rapport aux prérogatives actuelles, qui figurent dans la partie réglementaire du code de l’environnement. Le CNCFS est en effet défini comme un organisme consultatif, chargé de donner au ministre de la chasse son avis sur les moyens propres à préserver la faune sauvage, développer le capital cynégétique dans le respect des équilibres biologiques, et améliorer les conditions d’exercice de la chasse. Le conseil est consulté sur les projets de loi et de décret modifiant les dispositions législatives et réglementaires relatives à la chasse.

Votre rapporteure regrette la définition élargie, au niveau législatif, des missions du CNCFS et souligne que cet article ne participe pas de la logique globale du projet de loi. Elle a déposé un amendement de suppression de l’article.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission examine les amendements identiques CD482 de Mme Laurence Abeille, CD695 de la rapporteure et CD829 de M. Lionel Tardy.

Mme la rapporteure. L’article 5 A transfère les dispositions relatives au rôle du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) de la partie réglementaire à la partie législative du code de l’environnement. Il ne poursuit pas la même logique d’association du CNCFS que le reste du projet de loi puisque ce dernier prévoit que le Conseil national constitue une commission permanente sur la chasse du Conseil national de la biodiversité. Le Conseil national se prononcerait sur l’ensemble des textes relatifs à la chasse et à la protection de la nature lorsque ceux-ci ont une incidence directe ou indirecte sur l’exercice de la chasse. Ces missions apparaissent trop étendues, car sa fonction consultative s’exercerait auprès des ministres chargés de la chasse et de l’agriculture, alors que l’article 7 ter du projet de loi place l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) sous la tutelle des ministres chargés de l’écologie et de l’agriculture. Cet article est inutile, ses dispositions étant de nature réglementaire. C’est pourquoi je propose de le supprimer.

Mme Laurence Abeille. Il ne semble effectivement pas opportun d’intégrer dans la loi la disposition réglementaire prévoyant la consultation obligatoire du CNCFS, afin de garantir la simplification et la qualité de la législation. D’où mon amendement de suppression CD482.

M. Lionel Tardy. Le CNCFS conduit une activité réelle, attestée par le « jaune » pour 2016 ; il se réunit régulièrement et son coût de fonctionnement s’avère limité. Son maintien se justifie, mais les dispositions régissant un tel comité sont toujours d’ordre réglementaire, comme le dispose le décret de juin 2006 relatif au fonctionnement des commissions administratives. Il n’y a aucune raison d’inscrire dans la loi l’existence du CNCFS, pas plus que celle de l’ensemble des autres comités. Je propose également de supprimer cet article.

M. Philippe Plisson. Soit le CNCFS a un rôle reconnu, soit il ne sert à rien. La consultation du CNCFS comme celle du Conseil national de la biodiversité est nécessaire, ces deux instances accueillant des scientifiques reconnus ; je soutiens donc le maintien de cet article rédigé par le Sénat.

M. Martial Saddier. J’approuve les propos de mon collègue Philippe Plisson. Madame la rapporteure, nous avons réaffirmé hier, jusque tard dans la nuit, la nécessité de mentionner les pollutions diurnes et nocturnes dans la loi ; vous avez tranché. De même, vous avez insisté pour que les associations environnementales agréées soient associées. Et maintenant, vous refusez cette reconnaissance aux associations de pêcheurs et de chasseurs ! La loi doit explicitement définir le rôle des millions de chasseurs et de pêcheurs à qui on reconnaît la fonction de protection de l’environnement.

Madame le secrétaire d’État, monsieur le président, quelle est la cohérence entre ces amendements de suppression et le CD1042 déposé par le Gouvernement expliquant dans son exposé sommaire qu’« il est nécessaire de préciser dans la loi quels sont les textes devant faire l’objet d’une consultation du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage » ? Cela prouve en tout cas que certains interlocuteurs sont incontournables ; le monde de la chasse et de la pêche entre dans cette catégorie et doit donc trouver sa place dans la loi.

M. Bertrand Pancher. Ce projet de loi se débat dans de nombreuses contradictions. Il instaure une agence de la biodiversité à côté du CNCFS ; il aurait été complexe de regrouper ces deux instances, mais on aurait dû prévoir un rôle accru pour le CNCFS, ne serait-ce que pour la police de la chasse – ce n’est pas rien. Nos amis chasseurs souhaitent être davantage associés à la mise en œuvre de la réglementation dans le domaine de la biodiversité et soutiennent le maintien de cet article. Il ne me paraît pas illogique d’accepter leur demande.

Mme Viviane Le Dissez. Le CNFS est déjà présent au sein du Conseil national de la biodiversité à travers une commission permanente : il n’y a donc aucune raison de détailler son rôle comme le propose l’article 5 A, alors que c’est plutôt de nature réglementaire. Je soutiens donc la suppression de cet article.

M. Jean-Marie Sermier. Certains symboles méritent d’être défendues, et le rôle des chasseurs reconnus dans la préservation de la biodiversité : ils ont besoin d’être rassurés, notamment pour tout ce qui touche à la formation des jeunes à la biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

Mme la rapporteure. Vous semblez sous-entendre que nous ne souhaitons pas donner de rôle au CNCFS, ce qui est faux. Il sera consulté et fera partie du Conseil national de la biodiversité. Quel est l’intérêt de l’insérer à cet endroit de la loi, comme un OVNI qui superviserait toute action en matière de biodiversité ?

Lors de l’examen du texte en première lecture, nous avons tous reconnu l’importance du rôle des chasseurs en matière de biodiversité. Ils ne souhaitent pas entrer dans l’Agence française pour la biodiversité, mais ils veulent bénéficier d’une place prééminente. Je ne m’explique pas cette contradiction. Le règlement prévoit que les associations de chasseurs et le CNCFS sont agréés en tant qu’associations de protection de l’environnement, soyons raisonnables : il n’y a pas besoin d’inscrire de telles dispositions dans la loi.

M. Lionel Tardy. Dès que l’on peut éviter d’inscrire l’existence et le rôle d’un comité dans la loi, il faut le faire. Cela vaut pour le CNCFS, qui a une activité très fournie, mais qui n’entre pas dans le domaine de la loi.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je suis en plein accord avec les propos de Mme la rapporteure et de M. Lionel Tardy. Nous sommes en train de faire une loi bavarde ; cette disposition n’a rien à faire dans ce texte, d’autant qu’il ne traite pas de la chasse mais de la biodiversité. Il ne s’agit pas d’une loi relative à la chasse ! M. Jérôme Bignon a déposé une proposition qui est devenue loi le 7 mars 2012 avec le soutien du groupe socialiste alors dans l’opposition ; il s’agit de la dernière loi portant sur la chasse.

Le nombre de chasseurs s’élève à 1,2 million et diminue tous les ans. Croyez-vous que l’insertion d’une telle disposition dans la loi permettra d’endiguer cette baisse ? Bien sûr que non ! Il convient de s’interroger sur cet effritement régulier, qui est appelé à continuer. Les chasseurs seront bientôt moins d’un million en France. C’est un réel problème, mais qui se pose au monde rural et à celui de la chasse.

La Commission rejette les amendements.

L’amendement CD1042 du Gouvernement est retiré.

La Commission adopte l’article 5A sans modification.

Article 5
(articles L. 134-1 et L. 134-2 [nouveaux] du code de l’environnement)

Instances de gouvernance de la biodiversité

Le présent article définit le comité national de la biodiversité (CNB) ainsi que le conseil national de la protection de la nature (CNPN).

1. Le projet d’article à l’issue des travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté :

– un amendement présenté par le rapporteur tendant à fixer la composition du CNB dans la loi et à élargir son rôle : ainsi, il serait obligatoirement saisi par le Gouvernement sur tout projet de texte relatif à la biodiversité et il donnerait son avis sur les orientations stratégiques de l’Agence française pour la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur renvoyant à un décret la définition des conditions dans lesquelles la composition du CNPN concourt à (et non assure) une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. La précision selon laquelle le décret porte sur la répartition des désignations prévues par l’article par sexe est supprimée.

En séance, le Sénat a adopté :

– trois amendements identiques tendant à souligner que les compétences du CNB s’appliquent sans préjudice de celles de l’ONCFS nouvellement définies, à l’article 5 A du projet de loi ;

– un amendement selon lequel le CNB peut être saisi pour avis par la commission concernée de l’Assemblée nationale ou du Sénat de toute proposition de loi déposée sur le bureau de l’une ou l’autre des deux assemblées parlementaires, avant l’examen du texte en commission, concernant, à titre principal, la biodiversité ;

– un amendement de cohérence présenté par le Gouvernement ;

– deux amendements identiques selon lesquels le décret relatif au conseil national de la protection de la nature assure aux sciences du vivant et aux sciences humaines une représentation équilibrée. Il fixe également les règles de transparence applicables aux experts du CNPN.

2. Les travaux de votre commission

Votre commission a adopté trois amendements présentés par votre rapporteure :

– le premier tendant à revenir à la définition des compétences du CNB adoptées par l’Assemblée nationale, tout en maintenant l’avis sur les orientations stratégiques de l’AFB et la composition issue des travaux du Sénat. Votre rapporteure a toutefois précisé que les représentants des propriétaires fonciers, et non des propriétaires, font partie du CNB ;

– le deuxième selon lequel la composition du CNB doit assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes ainsi qu’une représentation de chaque département et collectivité d’outre-mer, en tenant compte de la richesse de leur biodiversité ;

– le troisième selon lequel la composition du CNPN concourt à une représentation équilibrée des femmes et des hommes, d’une part, ainsi que des sciences du vivant et des sciences humaines, d’autre part.

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La Commission est saisie de l’amendement CD830 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je m’étais étonné, lors de l’examen du texte en première lecture, de la création du Comité national de la biodiversité et du Conseil national de la protection de la nature. Mme Ségolène Royal m’avait expliqué que ces deux comités remplaçaient plusieurs structures. Je salue cet effort de rationalisation, mais, là encore, je maintiens que les dispositions prévoyant l’existence, les missions et la composition de ces comités relèvent du domaine réglementaire.

Mme la rapporteure. Monsieur Lionel Tardy, je comprends votre logique, mais le Comité national de la biodiversité n’existe pas encore : il est nécessaire que la loi qui le crée définisse son rôle. Je ne suis donc pas favorable à l’adoption de votre amendement.

Mme la secrétaire d’État. Le titre II du projet de loi, dont relève l’article 5, traduit la feuille de route adoptée par le Gouvernement lors de la conférence environnementale de 2012, qui se fixait comme objectif de mettre en œuvre une nouvelle gouvernance de la biodiversité. Cette réforme vise à simplifier les instances administratives nationales pour les rendre plus lisibles et plus efficientes, en distinguant les structures d’expertise scientifique et technique des lieux de débat et de discussion. La création du chapitre IV portant sur les institutions relatives à la biodiversité constitue une innovation majeure et nécessaire, incarnée par l’instauration de deux grandes institutions chargées des questions liées à la biodiversité. Le Comité national de la biodiversité intégrera plus d’une dizaine de comités existants, dont le comité national trames verte et bleue actuellement régi par l’article L. 371-2 du code de l’environnement ; pour ce comité en particulier, une reprise simplement réglementaire ne serait pas acceptable juridiquement. La loi a institué le Conseil national de protection de la nature en 1946, même si les dispositions qui l’ont fait évoluer figurent dans le code de l’environnement.

En outre, le code des relations entre le public et l’administration prévoit en outre que les commissions administratives consultatives non prévues par la loi sont créées pour une durée limitée, mais renouvelable. C’est donc à la loi de prévoir la naissance du Comité national de la biodiversité. C’est la raison pour laquelle, monsieur Tardy, je vous demande de retirer votre amendement.

M. Lionel Tardy. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie, en discussion commune, les amendements CD696 rectifié de la rapporteure, CD385 et CD386 de Mme Chantal Berthelot.

Mme la rapporteure. Le projet de loi modifie plusieurs aspects de la gouvernance de la biodiversité. Cet amendement propose de corriger certaines locutions employées dans les alinéas 5 à 8 de l’article 5.

La saisine pour avis du Comité national de la biodiversité par les commissions du développement durable de l’Assemblée et du Sénat sur tout projet de texte législatif ou réglementaire relatif à la biodiversité n’apparaît pas indispensable, contrairement à ce que souhaite le Sénat. Cette consultation doit être une faculté et non une obligation.

Il importe, en revanche, de prévoir que le Comité donne son avis sur les orientations stratégiques de l’Agence française pour la biodiversité. Il doit exister un lien entre ces deux instances.

Enfin, nous ne modifions pas la composition du Comité national de la biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. J’émets un avis favorable à l’adoption de cet amendement.

Mme Chantal Berthelot. Si l’on rétablit la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, la Commission peut adopter mon amendement CD385 qui s’inscrit dans sa logique en prévoyant que la composition du Comité national de la biodiversité prend en compte la richesse de la biodiversité du patrimoine naturel des collectivités d’outre-mer.

Mme la rapporteure. Madame Berthelot, votre proposition devrait amender un autre alinéa de cet article.

Mme Chantal Berthelot. Dans la version adoptée par l’Assemblée, cet amendement trouve bien sa place dans l’alinéa 8 de l’article 5.

Mme la rapporteure. J’ai déposé un amendement CD697, qui dispose que la composition du Comité national de la biodiversité assure la représentation de chaque département d’outre-mer en tenant compte notamment de la richesse de leur biodiversité. L’objet de nos amendements est identique, mais on ne place pas cette disposition au même alinéa de l’article.

Mme Chantal Berthelot. Je retire mes amendements.

M. Bertrand Pancher. Madame la rapporteure, je regrette que M. Jacques Krabal ne soit pas là pour défendre son amendement car je le trouve astucieux. Il suggérait de rétablir la possibilité pour les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat de saisir pour avis le Comité national de la biodiversité. Cela aurait permis de renforcer le rôle du Parlement et de notre Commission, notamment dans leur fonction d’initiative et d’évaluation législatives. Madame la rapporteure, pourquoi n’avez-vous pas retenu cette proposition ?

Mme la rapporteure. Je ne l’ai pas retenue, car nous ne rencontrons jamais de difficulté pour auditionner une personne de notre choix : il suffit de le demander aux intéressés. Cette mesure me semble donc inutile.

M. Bertrand Pancher. Nos invitations reçoivent toujours en effet des réponses positives, mais entre venir répondre à des questions et venir travailler sur un sujet, il y a une marge… Dans les pays voisins, les organismes d’expertise travaillent pour les parlements, ce qui n’est pas le cas en France. Cet amendement renforcerait les moyens d’investigation de notre Commission, même si le Comité national de la biodiversité ne dispose peut-être pas des moyens pour accomplir cette mission.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. L’adoption de l’amendement déposé par MM. Jacques Krabal et Olivier Falorni ne compenserait malheureusement pas l’absence de pouvoirs de l’Assemblée nationale… Nous ne pouvons que le regretter.

Les amendements CD385 et CD386 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD696 rectifié.

Puis elle aborde, en discussion commune, les amendements CD697 de la rapporteure et CD625 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Nous souhaitons que la composition du Comité national de la biodiversité respecte le principe de la parité, comme toutes les organisations.

Mme la rapporteure. Mon amendement CD697 vise à rétablir les règles relatives à la parité et à la représentation de chaque département d’outre-mer.

Mme Chantal Berthelot. Madame la rapporteure, il faudrait, dans votre amendement, ajouter le terme « collectivité » après celui de « département » et avant « outre-mer », afin d’assurer la représentation de chaque territoire.

Mme la rapporteure. Je me propose de rectifier mon amendement en ce sens.

Mme Viviane Le Dissez. Je retire mon amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

L’amendement CD625 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD697 tel qu’il vient d’être rectifié.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD698 rectifié de la rapporteure et CD626 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Mon amendement CD626 vise à assurer la parité entre les femmes et les hommes au Conseil national de protection de la nature.

Mme la rapporteure. Mon amendement CD698 rectifié propose de renforcer les obligations en matière de représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein du Conseil national de protection de la nature et de procéder à des modifications rédactionnelles.

Mme la secrétaire d’État. On ne peut pas renforcer l’obligation de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein du Conseil national de protection de la nature dans la mesure où il s’agit d’une instance d’expertise. La création d’une telle structure constitue l’une des rares exceptions à l’obligation d’un strict respect de la parité. Madame la rapporteure, si vous acceptez de ne pas remplacer le terme « concourt » par le mot « assure », je soutiendrais l’adoption de votre amendement.

Mme la rapporteure. J’accepte votre requête, madame la secrétaire d’État, et je me propose de supprimer le troisième alinéa de mon amendement.

Mme Florence Delaunay. Je maintins qu’il est dommage que la parité ne s’applique pas obligatoirement aux structures d’expertise. Cela me paraît quelque peu méprisant…

Mme Viviane Le Dissez. Je retire mon amendement.

L’amendement CD626 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD698 2e rectification.

Puis elle adopte l’article 5 ainsi modifié.

Article 6
(articles L. 371-2 et L. 134-1 [nouveau] du code de l’environnement)

Intégration des missions du comité national « trames verte et bleue »

Le présent article vise à intégrer les missions du comité national « trames verte et bleue » dans le comité national de la biodiversité.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Article 7
(articles L. 213-13, L. 213-13-1, L. 213-14, L. 213-14-1, L. 213-14-2,  L. 371-3 et L. 515-3 du code de l’environnement, article 10 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République)

Substitution des comités régionaux de la biodiversité aux comités régionaux « trames verte et bleue »

Le présent article vise à substituer aux « comités régionaux trames verte et bleue » les comités régionaux de la biodiversité. La dénomination ainsi que la composition et les missions des organismes sont adaptées.

1. Le projet d’article à l’issue des travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté :

– deux amendements identiques visant à préciser que le comité est associé à l’élaboration de la stratégie régionale pour la biodiversité ;

– un amendement tendant à préciser que le comité représente les parties prenantes avec une représentation équilibrée par collège ;

– un amendement présenté par le rapporteur visant à renommer les comités de bassin dans les départements d’outre-mer « comités de l’eau et de la biodiversité » ;

– un amendement présenté par le rapporteur, visant à prévoir que les comités régionaux de la biodiversité émettent un avis sur les orientations des délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité.

En séance, le Sénat a adopté :

– deux amendements identiques tendant à prévoir la consultation du comité régional de la biodiversité préalablement à l’élaboration du schéma régional d’aménagement de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) ;

– deux amendements de coordination présentés par le rapporteur.

2. Les travaux de votre commission

Votre commission a adopté :

– un amendement rédactionnel présenté par votre rapporteure ;

– un amendement présenté par votre rapporteure visant à ce que le schéma régional des carrières prenne en compte le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires.

*

* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD699 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD700 de la rapporteure.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. L’amendement vise à supprimer la notion de représentation équilibrée par collège au sein des comités régionaux de la biodiversité dans la mesure où leur composition et leur fonctionnement sont fixés par décret. La loi définit les principaux représentants des acteurs qui font partie du comité.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Cette disposition a été introduite par le Sénat. Il s’agit d’un principe fondamental des comités régionaux comme nationaux, qui mérite d’être inscrit dans la loi et explicité dans le décret. Aussi, je demande le retrait de cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD701 rectifié de la rapporteure et CD758 de M. Jacques Krabal.

Mme la rapporteure. L’amendement CD701 rectifié vise à modifier la disposition selon laquelle le comité régional de la biodiversité donne son avis sur les orientations stratégiques prises par les organismes de collaboration pérenne, tels qu’ils seraient désormais dénommés, institués entre l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et les régions. Ces organismes de collaboration pérenne ne sont pas des antennes de l’AFB. Nous leur laissons la liberté de définir leurs orientations stratégiques.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD758 est défendu.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable à l’amendement de Mme la rapporteure, qui propose des ajustements rédactionnels.

Je suis favorable sur le fond à l’amendement CD758 puisqu’il vise à améliorer la cohérence avec une modification intervenue à l’article 9. En revanche, la suppression de la dernière phrase de l’alinéa 7 priverait les outre-mer d’un principe très important. Aussi, je demande le retrait de cet amendement.

M. Serge Letchimy. En première lecture, c’est le principe de délégation qui a été retenu, à la suite d’un séminaire sur les possibilités de décentralisation des politiques de l’Agence, dont le rapport a été remis à Mme la ministre Ségolène Royal. Aujourd’hui, on entérine le principe d’un organisme de collaboration pérenne – expression que je n’avais jamais vue dans le droit français –, c’est-à-dire d’une structure autonome par rapport à l’agence de base, dont les relations contractuelles ne sont pas celles d’une délégation.

On remet ici en cause la structuration même du financement de ces délégations ou organismes puisque les remontées des ressources et des bénéfices du mécanisme d’accès et de partage des avantages (APA) vont à l’Agence et non pas à la délégation. Il y a donc là deux philosophies très différentes qui bouleversent le principe fondateur que nous avions retenu. Alors que 80 % de la biodiversité française se trouve outre-mer, il importe d’accorder la place qui leur revient à ces territoires.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Pourquoi, en effet, remplacer les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité par des organismes de collaboration pérenne ?

M. Serge Letchimy. C’est une invention philosophique !

Mme la rapporteure. C’est le Gouvernement qui a modifié l’appellation.

Mme la secrétaire d’État. Je peux juste vous confirmer que l’outre-mer bénéficiera des personnels et des moyens de l’Agence. Ces organismes de collaboration ne sont pas autonomes, ils dépendent des collectivités et de l’AFB.

M. Serge Letchimy. Madame la secrétaire d’État, vos propos ne me rassurent pas du tout. Les réalités du bassin océanique de la Polynésie, celles de La Réunion ou de la Caraïbe ne sont absolument pas les mêmes. Il avait été décidé de permettre la plus grande liberté d’expression, de telle sorte que la dynamique liée à la biodiversité serait conçue localement par les populations elles-mêmes, en relation avec l’AFB. On nous avait même laissé la possibilité de travailler de manière autonome sur la préfiguration, qui pourrait être très différente selon les bassins, et surtout de fixer les modalités d’association des instances qui pourraient intégrer cette délégation.

Je ne voterai aucun amendement qui reviendrait sur le principe de la délégation par département, que nous avons préféré à la délégation par bassin océanique prévue à l’origine. Vous imaginez bien que Chantal Berthelot risque de se fâcher si je lui dis que la réalité de la biodiversité de la Guyane est la même que celle de la Martinique. (Sourires)

Vous défédérez le système, tant sur la relation financière que sur les mécanismes d’organisation. Si c’est le Gouvernement qui a inventé ce terme d’organisme de collaboration pérenne, je dois dire qu’il a fait un très mauvais choix.

Mme Chantal Berthelot. Je vois de moins en moins de cohérence dans ce texte : tantôt il faut revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, tantôt il faut conserver la rédaction issue du Sénat. Je ne comprends pas ce que l’on nous propose aujourd’hui : si les deux termes veulent dire la même chose, pourquoi ne pas conserver celui qui a été adopté en première lecture ?

Je voterai contre l’amendement CD701 rectifié. Je crains que bien d’autres amendements ne reviennent sur les décisions qui ont été prises concernant les outre-mer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Les délégations territoriales de l’AFB n’étaient-elles pas inscrites dans un autre article ?

M. Serge Letchimy. À l’article 9. Je présenterai, d’ailleurs, un amendement visant à restituer la délégation territoriale.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Les délégations territoriales ont donc disparu à l’article 9 ainsi qu’à l’article 7.

M. Serge Letchimy. Il faut les rétablir dans un souci de cohérence.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas du tout opposée au maintien du terme de « délégations territoriales ». Il appartient au Gouvernement de nous dire pourquoi il a décidé de le remplacer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je tiens à rappeler qu’un accord avait été trouvé entre Ségolène Royal et les représentants des outre-mer, Chantal Berthelot et Serge Letchimy.

Mme Viviane Le Dissez. L’alinéa 16 de l’article 9, tel qu’il a été adopté par les sénateurs, mentionne les « organismes de collaboration pérenne ». C’est dans un souci de cohérence avec un article qui a fait l’objet de longs débats au Sénat qu’il est proposé ici de faire référence aux organismes de collaboration pérenne.

Mme la secrétaire d’État. Les organismes de collaboration pérenne ont ceci d’important qu’ils peuvent intervenir dans le cadre d’une collaboration entre les délégations de l’AFB sur le territoire et les collectivités ; ils marquent un moment où l’on se rencontre pour se parler. Quant aux délégations territoriales de l’AFB, ce sont des antennes de l’Agence. À l’article 7, je ne vois pas d’objection à ce que l’on s’en tienne à l’appellation de délégations territoriales, mais, plus loin dans le texte, il faut garder ce principe d’organismes de collaboration pérenne.

M. Serge Letchimy. Ces organismes de collaboration pérenne sont prévus d’une manière générale. Concernant l’outre-mer, je dis clairement que nous préférons la formulation de « délégations territoriales » qui a d’ailleurs été consacrée dans le rapport que Victorin Lurel et moi-même avions remis à Mme la ministre. À moins que vous ne vouliez nous donner tout de suite l’autonomie de fonctionnement institutionnel et politique… (Sourires)

Aujourd’hui, vous créez un lien dans la connaissance, la préservation et la valorisation de la biodiversité, y compris dans les mécanismes de l’APA, assez rigide sur la question du financement des politiques liées à la préservation de la biodiversité. Mais, dans le même temps, vous coupez ce lien par un organisme qui serait déconnecté de l’Agence. Si c’est le cas, allez jusqu’au bout de votre logique et donnez-nous tous les avantages de l’APA, toutes les retombées et toutes les possibilités de décision sans que l’Agence puisse intervenir. Mais ce n’est pas ce qui avait été convenu. Je précise que je parle de l’outre-mer et non des autres régions de l’hexagone qui pourraient revendiquer autre chose.

Mme la rapporteure. Il n’est pas question de revenir sur ce qui avait été décidé.

J’appelle simplement votre attention sur le fait qu’il n’y a pas de définition précise de ce que sont les délégations territoriales de l’AFB. Il serait donc utile d’avoir davantage d’informations.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. On sait encore moins ce que sont les organismes de collaboration pérenne. (Sourires)

Je pense qu’il faut respecter les engagements qui ont été pris, donc maintenir le terme de « délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité », tant à l’article 7 qu’à l’article 9.

Mme Chantal Berthelot. Je remercie le président pour sa sagesse.

J’ajoute que je ne comprends pas l’intérêt de supprimer, à la deuxième phrase de l’alinéa 7, le mot « réflexion ». En fait, pourquoi ne pas tout simplement voter l’article 7 en l’état ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. On oublie trop souvent l’outre-mer, et les parlementaires qui les représentent mènent des combats difficiles. Dans les lois, ce sont toujours les derniers articles qui concernent l’outre-mer. La ministre Ségolène Royal avait confié une mission à Serge Letchimy et à Victorin Lurel, à l’issue de laquelle un accord a été obtenu. Cet accord doit être respecté.

Je demande donc à notre rapporteure et à Olivier Falorni de retirer leurs amendements.

Les amendements CD701 rectifié et CD758 sont retirés.

L’amendement CD1044 du Gouvernement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD702 rectifié de la rapporteure et CD759 de M. Jacques Krabal.

Mme la rapporteure. L’amendement CD702 rectifié vise à imposer que le schéma régional des carrières (SRC), qui est élaboré par l’État, prenne en compte le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) dans lequel la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, a intégré le schéma régional de cohérence écologique (SRCE). Il faut éviter que ce dernier soit mis à mal par un schéma des carrières qui n’en tiendrait pas compte.

L’amendement CD759 diffère un peu en ce qu’il vise le schéma régional de développement économique, qui ne relève que de la région. On ne peut pas imposer de telles obligations à la région, qui est libre de construire, dans de bonnes conditions, son schéma économique. Le schéma régional des carrières, lui, est élaboré par le préfet, qui peut se moquer complètement du schéma de cohérence écologique si l’on n’y prend pas garde. Le travail d’identification des continuités écologiques et des réservoirs de biodiversité effectué par la trame verte et bleue est trop important pour qu’un schéma des carrières vienne tout faire tomber à l’eau.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD759 vise à faire du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires un document central en matière d’aménagement du territoire. Les orientations pour les différentes activités économiques doivent être compatibles avec les objectifs de ce schéma afin de permettre de les réaliser.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement travaille sur l’absorption du schéma régional de cohérence écologique dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires. C’est dans cette perspective que Mme la rapporteure souhaite rétablir l’opposabilité actuelle du SRCE sur le SRC. Je suis donc favorable à l’amendement CD702 rectifié.

Quant à l’introduction d’un rapport d’opposabilité entre le SRADDET et le schéma régional de développement économique, elle ne semble pas cohérente dans la mesure où ces deux schémas stratégiques sont élaborés par le même acteur. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement CD759.

M. Jean-Marie Sermier. Monsieur le président, hier, vous nous avez expliqué que la loi ne devait pas être bavarde. Aujourd’hui, on nous demande d’y inscrire une disposition obligeant les préfets à respecter le code de l’environnement. C’est ubuesque !

Mme la rapporteure. Pourtant, les choses ne se passent pas tout à fait comme cela aujourd’hui : un schéma régional des carrières peut tout à fait être élaboré sans tenir compte des travaux relatifs aux continuités écologiques et aux réservoirs de biodiversité. C’est pourquoi il importe de souligner la nécessité d’un rapport de compatibilité. La loi n’est donc pas trop bavarde : elle ne fait que rappeler ce que l’État doit respecter.

M. Michel Heinrich. Pourrait-on avoir un bilan de l’existence des SRADDET sur le territoire ?

Mme la rapporteure. La loi créant les SRADDET est encore trop récente pour que nous disposions d’informations.

M. Michel Heinrich. Je trouve l’amendement présenté par Olivier Falorni intéressant. Il serait bon, en effet, de prévoir un lien entre les SRADDET et les schémas de développement économique.

M. Martial Saddier. La loi NOTRe est d’application récente puisqu’elle est entrée en vigueur le 1er janvier dernier. Cette loi prévoit l’élaboration par les régions de deux grands schémas d’aménagement dans lesquels les carrières ne sont pas incluses. Néanmoins, les schémas des carrières ne sont pas de la seule compétence des préfets puisqu’ils sont coécrits et délibérés par les assemblées départementales. À l’instar de Jean-Marie Sermier, je ne vois pas comment on pourrait élaborer un SRADDET qui ne respecterait pas les autres points de la loi, qu’ils figurent dans le code de l’environnement ou dans le code rural.

Mme la secrétaire d’État a dit ne pas vouloir créer d’opposabilité entre les deux grands schémas régionaux, mais c’est ce qui se passera avec l’amendement de la rapporteure. Allez plutôt jusqu’au bout de la logique et confiez aux régions le soin d’inscrire les carrières dans le schéma régional d’aménagement. Alors que nous n’avons pas été capables de trancher ce débat, il y a deux mois, lors de l’examen de la loi NOTRe, il ressurgit aujourd’hui, au beau milieu d’un texte sur la biodiversité avec laquelle les liens sont tout de même ténus.

M. Jean-Yves Caullet. Épargnons-nous un débat sur le chaînage dans le temps : tout schéma en cours d’élaboration doit tenir compte de celui en vigueur. Toutefois, en cette période de transition, il me semble que la mention en question serait utile. Dans l’instruction d’une autorisation de carrière, l’ensemble des paramètres doit être pris en compte, dont tous les éléments environnementaux connus. Mentionner que le schéma régional des carrières prend en compte le SRADDET participe à éclairer les porteurs de projet sur le fait qu’il existe deux schémas avec lesquels leur projet doit être compatible.

M. Michel Heinrich. J’ai cru comprendre que l’élaboration des SRADDET ne sera obligatoire qu’après les prochaines élections régionales, c’est-à-dire dans six ans. Bien sûr, cela n’empêche pas ceux qui le veulent d’en élaborer un.

Mme la rapporteure. Monsieur Martial Saddier, je vous renvoie à l’article L. 515-3 du code de l’environnement qui dispose que le schéma régional des carrières est élaboré par le préfet de région, après consultation du plan régional de l’agriculture durable et des schémas départementaux ou interdépartementaux des déchets de chantier du bâtiment et de travaux publics. Je peux comprendre, vu l’importance de la matière, que l’État veuille garder la compétence sur le schéma des carrières.

Aujourd’hui, le SRADDET a « absorbé » les SRCE, dont le rôle est extrêmement important pour assurer les continuités écologiques et les réservoirs de biodiversité définis dans les trames verte et bleue. Si le schéma des carrières élaboré par l’État n’est pas compatible avec le SRADDET, tout le travail mobilisé pour l’élaboration des SRCE depuis des années risque d’être mis à mal. Or on sait bien que la biodiversité n’est pas toujours le problème de l’État. C’est pourquoi il est bon que la loi souligne la nécessaire compatibilité des différents schémas.

M. Jean-Marie Sermier. Je ne peux pas laisser dire que les préfets ne prennent pas en compte la biodiversité. Qui a suivi l’élaboration d’un schéma des carrières peut dire que c’est extrêmement contraignant : il faut plusieurs mois, voire des années, pour évaluer les risques, pour chercher les moyens de les éviter, de les réduire, et mettre en place une compensation. La législation est bien en place et ce n’est pas la peine d’ajouter une obligation supplémentaire. Un bon schéma des carrières doit être compatible avec le SRADDET ; le préciser revient à nier que l’État élabore ses schémas de façon légitime et logique, ou à considérer que les textes encadrant les schémas des carrières sont mal faits.

Mme la rapporteure. Si tout le monde prenait bien en compte la biodiversité, on n’en serait pas là !

Puisque le schéma régional des carrières prend en compte le schéma régional de cohérence écologique, lui-même complètement fondu dans le SRADDET, il est cohérent de préciser dans la loi que le schéma régional des carrières prend aussi en compte le SRADDET. C’est important pour pouvoir continuer à travailler dans de bonnes conditions.

L’amendement CD759 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD702 rectifié.

Puis elle adopte l’article 7 ainsi modifié.

Article 7 ter A
Demande de rapport relatif à l’opportunité du transfert aux régions de la compétence départementale sur les espaces naturels sensibles

Le présent article, adopté en séance publique à l’Assemblée nationale, prévoit que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur l’opportunité de transférer aux régions la compétence départementale relative aux espaces naturels sensibles.

En commission, les sénateurs ont supprimé cet article, ayant estimé que les départements avaient fait la démonstration de leur efficacité dans leur gestion de proximité et souligné que la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, avait écarté un tel transfert.

Votre commission a adopté un amendement visant à rétablir la demande de rapport telle qu’elle était issue des travaux de l’Assemblée nationale en première lecture, votre rapporteure ayant pour sa part proposé que le sujet du rapport soit centré sur les recettes de la part départementale de la taxe d’aménagement destinée à financer les espaces naturels sensibles, définie à l’article L. 331-3 du code de l’urbanisme, et sur les dépenses auxquelles celle-ci a été affectée depuis sa création.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CD352 de M. Julien Aubert, CD512 de Mme Laurence Abeille et CD926 de M. Gérard Menuel, et les amendements CD743 de M. Olivier Falorni et CD703 de la rapporteure.

M. Julien Aubert. L’amendement CD352 tend à réintégrer, en la modifiant, une proposition de l’Assemblée nationale visant à étudier une évolution de la taxe d’aménagement. Il s’agirait que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’opportunité d’un élargissement ou d’un transfert aux régions de cette compétence départementale. Le but est de mieux articuler les relations avec les conseils départementaux, sachant que la loi NOTRe a redistribué les cartes et que l’on a parfois du mal à s’y retrouver.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD743 vise à réintégrer l’article 7 ter A, supprimé par le Sénat. Il s’agit d’étudier l’évolution de la taxe d’aménagement destinée à financer les espaces naturels sensibles, afin de la transférer ou d’en élargir l’assiette au bénéfice des régions.

Mme la rapporteure. Mon amendement CD703 est très légèrement différent. Avant d’envisager le transfert de la part de la taxe destinée à financer les espaces naturels, il me semble plus judicieux de recentrer l’objet du rapport demandé au Gouvernement sur le montant des recettes de la taxe d’aménagement et sur les dépenses auxquelles celle-ci a été affectée depuis sa création. Aujourd’hui, je suis en effet incapable de le dire.

Mme la secrétaire d’État. Les amendements identiques ont déjà fait l’objet d’une discussion, en première lecture, à l’Assemblée nationale, puis la mesure a été retirée au Sénat. Mme Ségolène Royal avait émis un avis de sagesse, considérant qu’il appartient aux parlementaires de débattre de cette question au moment où une répartition des compétences est décidée par la loi NOTRe. J’émets donc un avis de sagesse.

L’amendement d’Olivier Falorni ne suggère pas, contrairement aux amendements précédents, d’étudier les conditions pour garantir l’action des conseils départementaux. Je m’en remets également à la sagesse de votre commission.

Enfin, compte tenu du renforcement de la compétence des collectivités territoriales sur la biodiversité, la proposition de la rapporteure de mieux comprendre l’affectation des recettes et dépenses de la taxe d’aménagement dans le cadre du fonctionnement de la politique des espaces naturels sensibles est bienvenue. Je suis donc favorable à l’amendement CD703.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La seule région qui bénéficie de la taxe départementale des espaces naturels et sensibles (TDENS) est l’Île-de-France. La cohérence voudrait que cette compétence soit transférée aux régions. Demander au Gouvernement qu’il remette un rapport me paraît une bonne idée. Quant à connaître le montant de la TDENS et son utilisation, c’est une bonne question.

La Commission adopte les amendements identiques.

En conséquence, l’article 7 ter A est ainsi rétabli et les amendements CD743 et CD703 tombent.

Article 7 ter
(article L. 421-1 du code de l’environnement)

Gouvernance de l’ONCFS

Le présent article visait, dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en première lecture, à ce que la tutelle du conseil d’administration de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage soit exercée par le ministre en charge de l’écologie et par celui en charge de l’agriculture et à ce que neuf membres du conseil, sur un total de vingt-deux, soient des représentants issus des milieux cynégétiques. À l’heure actuelle, la moitié des membres du conseil d’administration doivent être des représentants issus des milieux cynégétiques.

En commission, les sénateurs ont rétabli que la moitié des membres du conseil d’administration de l’ONCFS devaient être issus du monde de la chasse et modifié le nombre total de ses membres, qui passera de 22 à 26, le conseil d’administration devant comporter trois représentants nouveaux : un représentant des régions, un représentant des départements et un représentant des communes (6).

Votre commission a décidé d’adopter cet article sans modification, votre rapporteure ayant proposé de supprimer cet article afin de maintenir le droit actuellement en vigueur.

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La Commission est saisie de l’amendement CD1051 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer l’article 7 ter.

En première lecture, j’avais défendu, sur la proposition du directeur de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), un amendement présentant une nouvelle composition, plus ouverte, du conseil d’administration (CA) dans la perspective d’un travail plus complet. Cela me paraissait intéressant et intelligent. Aujourd’hui, j’ai le sentiment d’avoir été manipulée de façon éhontée. (Murmures)

Au Sénat, le poids et la force des chasseurs ont permis de faire adopter un amendement différent leur donnant la majorité, c’est-à-dire revenant à la situation antérieure à l’amendement qui m’avait été suggéré par le directeur de l’ONCFS.

Je n’apprécie pas du tout la manœuvre, et je trouve insupportable qu’on nous prenne pour des imbéciles, des marionnettes. Les parlementaires ont des capacités de réflexion ; ils écoutent ce que leur disent les parties prenantes. J’ai écouté l’ONCFS et je m’aperçois que c’était une cabale. C’est pourquoi je propose d’en revenir à la situation ante.

Mme la secrétaire d’État. La discussion initiale sur cet article portait sur l’intégration de trois représentants des collectivités territoriales au sein du conseil d’administration de l’ONCFS. C’est une bonne idée, car les collectivités ont de réelles compétences dans la sauvegarde et la reconquête de la biodiversité. Toutefois, le texte modifie la composition actuelle du conseil d’administration en portant le nombre de membres de vingt-deux à vingt-six, avec une parité entre chasseurs et non-chasseurs. Cette nouvelle composition implique la suppression d’un membre dans la catégorie des non-chasseurs, ce qui ne sera pas facile à déterminer.

L’amendement proposé ne vise qu’à réduire la représentation des chasseurs et des personnalités qualifiées ayant des compétences en matière de chasse et de faune sauvage pour ramener leur nombre de onze à neuf sans ouvrir le conseil d’administration aux collectivités territoriales. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. Philippe Plisson. Le conseil d’administration de l’Office national de la chasse était à parité entre chasseurs, ONG et personnalités qualifiées. Dès lors qu’on y a intégré trois représentants des collectivités territoriales, les chasseurs ne sont plus à parité. Le Sénat a souhaité rétablir cette parité tout en maintenant la représentation des communes et des intercommunalités dans le conseil d’administration. Pour cela, il fallait bien augmenter le nombre de membres.

Je vous demande de ne pas supprimer cet article qui est essentiel à l’équilibre du conseil d’administration. Les chasseurs ne doivent pas perdre une partie de leur influence dans l’Office national de la chasse. J’ajoute que, au Sénat, la ministre de l’écologie a donné un avis favorable sur cet article.

M. Julien Aubert. En première lecture, la première version de l’amendement visait à réduire la proportion des chasseurs de la moitié du conseil d’administration de l’ONCFS à neuf membres. Mme Ségolène Royal avait soutenu qu’ils représentaient toujours la moitié du conseil d’administration – or, sur un conseil de vingt-deux membres, avoir neuf représentants n’assure pas la majorité. Puisque l’on parle de manipulation, nous avions alors eu le sentiment que l’on avait essayé de diminuer le nombre des représentants des milieux cynégétiques sans le dire. Pourtant, dès lors qu’une grande partie des ressources de l’ONCFS provient des redevances cynégétiques, il n’est pas absurde que le monde de la chasse soit bien représenté au conseil d’administration de l’office qui lui est dédié.

N’oublions pas qu’en toile de fond, il y a la création de l’Agence nationale de la biodiversité et la question de la fusion en son sein de l’ONCFS. Les chasseurs y sont hostiles. Il ne faudrait donc pas que, profitant de la modification de la composition de son conseil d’administration, l’ONCFS prenne la décision de rejoindre l’ANB sans que les chasseurs, devenus minoritaires, puissent s’y opposer.

Telles sont les raisons pour lesquelles je suis opposé à l’amendement de suppression de l’article 7 ter.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement CD481, que nous allons examiner ultérieurement, pourrait satisfaire le Gouvernement, car il s’agit, dans le même esprit, de retrouver l’équilibre du texte adopté par l’Assemblée en première lecture. Toutefois, s’il n’était pas retenu, je soutiendrais la proposition de la rapporteure.

En effet, selon la présentation qui en est faite sur son site internet, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage est un établissement public de référence en matière de gestion durable de la faune sauvage et de ses habitats. Rien n’indique que les chasseurs doivent y être majoritaires. Il est donc important – et tel était notre objectif en première lecture – qu’intervienne un rééquilibrage qui traduise la prise en compte des spécificités de l’ONCFS, à savoir la protection des habitats, la gestion de la faune sauvage et la préservation de la biodiversité de nos territoires.

M. David Douillet. Le produit de la redevance payée par 1,1 million de chasseurs français, qui permet à plus de 3 000 professionnels d’agir au quotidien au service de la biodiversité et de la chasse à travers les fédérations départementales et l’ONCFS, représente 70 % des recettes de cet office ; il n’est donc pas anormal que les chasseurs composent la moitié de son conseil d’administration. J’ajoute que ces derniers sont au service de la biodiversité, qu’ils connaissent mieux que quiconque. Si, comme nous le pressentons, on déséquilibre la composition du conseil d’administration de l’ONCFS, on commettra une grave injustice.

Mme la rapporteure. La suppression de l’article 7 ter ne ferait que maintenir la situation actuelle. Aujourd’hui, le conseil d’administration de l’ONCFS est composé de quatre représentants de l’État, de sept présidents de fédérations départementales ou interdépartementales de chasseurs, de deux présidents d’associations de chasse spécialisée, de deux personnes qualifiées dans le domaine de la chasse et de la faune sauvage, de deux représentants d’organisations professionnelles agricoles et forestières, d’un représentant d’organisme de propriétaires ruraux et de deux représentants d’organismes de protection de la nature. Cela fonctionne bien ainsi.

L’amendement que m’avait présenté l’ONCFS me paraissait intelligent et me semblait témoigner d’une ouverture ; je l’ai donc présenté tel quel. Or je m’aperçois que l’on a encore modifié le texte au Sénat. Je n’aime pas beaucoup les manipulations et je préfère donc que nous en restions aux dispositions actuelles.

M. Philippe Plisson. Nous avons tous pour objectif de maintenir une proportion de 50 % de chasseurs au sein du conseil d’administration de l’ONCFS. Ces derniers et les collectivités territoriales ont souhaité que trois élus locaux y siègent également, de façon à ce que la ruralité soit représentée. Mais, de ce fait, les chasseurs devenaient minoritaires, ce qu’ils ne souhaitent pas. Comme ils ne veulent pas non plus renoncer à la représentation des collectivités territoriales, ils demandent que l’on conserve les trois élus locaux et que l’on augmente de trois le nombre des sièges au conseil d’administration, afin de revenir à la parité. Il n’y a là rien de dramatique ; nous ne sommes pas loin d’être d’accord. Pourquoi remettre en cause aujourd’hui l’équilibre fragile qui a été voté, au Sénat, par la droite et la gauche, avec l’avis favorable de la ministre de l’écologie ?

L’article 7 ter me semble consensuel ; je propose donc que nous rejetions cet amendement de suppression et que nous nous en tenions à la rédaction adoptée par le Sénat.

Mme la rapporteure. Je précise que le II de l’article 7 ter créerait deux catégories de membres du conseil d’administration de l’ONCFS : celle des membres actuels, qui percevraient une rémunération ou une indemnité, et celle des nouveaux membres, qui ne le pourraient pas. Or il me semble qu’au sein d’un conseil d’administration, tout le monde doit être traité de la même façon. Encore une fois, il me paraît plus intelligent d’en rester à la situation actuelle.

M. Martial Saddier. La navette parlementaire présente l’avantage de permettre d’aboutir à un consensus sur un problème qui paraît, à l’origine, insoluble. Le groupe Les Républicains estime ainsi qu’il ne faut pas revenir sur l’équilibre qui a été trouvé au Sénat. Par ailleurs, Madame la rapporteure, le bénévolat n’a jamais tué personne. Au demeurant, les élus désignés par une collectivité territoriale pour siéger au conseil d’administration d’une structure telle que l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France ou l’Association des régions de France ne perçoivent aucun jeton de présence, et la structure peut parfaitement leur rembourser leurs frais si elle le souhaite. Il s’agit donc d’un faux problème.

Comme beaucoup au sein de la Commission, nous sommes attachés à ce que les représentants des chasseurs composent la moitié du conseil d’administration de l’ONCFS et nous estimons nécessaire que les collectivités y soient également représentées. Actuellement, en France, le nombre des chasseurs diminue, y compris au sein des conseils municipaux, et la population est de plus en plus urbaine. La représentation des collectivités territoriales au conseil d’administration de l’ONCFS permettrait de pallier cette évolution et faciliterait les discussions lorsque des conflits opposent les chasseurs et la population à propos d’éventuels dégâts ou de la fréquentation d’un chemin, par exemple. Cela nous paraît sain. Nous souhaitons donc que l’équilibre auquel nous sommes parvenus au terme de deux années de débats ne soit pas remis en cause par l’amendement de suppression ; c’est pourquoi nous nous y opposerons.

M. Julien Aubert. Nous avons souhaité introduire des représentants des communes, des départements et des régions au conseil d’administration de l’ONCFS considérant que cela apporterait une véritable plus-value. Et voilà qu’on devrait y renoncer au motif qu’il faudrait augmenter le nombre des représentants des chasseurs pour que ceux-ci continuent de représenter la moitié du conseil d’administration. C’est un faux débat ! La véritable question qu’il faut se poser, c’est celle de savoir si la présence de représentants des collectivités territoriales apporte ou non une réelle plus-value. Manifestement, la réponse est oui. Je ne comprends donc pas pourquoi il faudrait supprimer cet article, à moins que l’on ne pense que nous faisons fausse route depuis le début.

Mme Viviane Le Dissez. Pour ma part, je souhaite l’apaisement. En conséquence, si vous souhaitez maintenir le texte du Sénat, je me rallierai à cette option.

La Commission rejette l’amendement CD1051.

Les amendements CD627 et CD481 sont retirés.

Puis la Commission adopte l’article 7 ter sans modification.

TITRE III
AGENCE FRANÇAISE POUR LA BIODIVERSITÉ

Article 9
(articles L. 131-8 à L. 131-13 [nouveaux] du code de l’environnement)

Création de l’Agence française pour la biodiversité : définition, missions, gouvernance et ressources

Le présent article vise à créer l’Agence française pour la biodiversité, établissement public de l’État à caractère administratif. Le nouvel article L. 131-8 du code de l’environnement définit les compétences de l’agence. Le nouvel article L. 131-9 détaille ses missions. Le nouvel article L. 131-10 porte sur la composition du conseil d’administration, l’article L. 131-10-1 sur le conseil scientifique, l’article L. 131-11 sur les comités d’orientation, l’article L. 131-11-1 sur la nomination du directeur général, l’article L. 131-12 sur les ressources de l’agence et l’article L. 131-13 prévoit un décret d’application de la nouvelle section 2 du chapitre 1er du titre III du livre 1er ainsi créée.

1. Le projet d’article à l’issue des travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté :

– un amendement présenté par le rapporteur visant à permettre une mutualisation des missions de police de l’environnement, dans le cadre d’unités de travail communes entre l’agence et les organismes déjà compétents en matière de police administrative et de police judiciaire de l’environnement ;

– un amendement présenté par le rapporteur tendant à prévoir que la mission de conduite et de soutien de programmes de recherche de l’agence doit s’effectuer en lien avec la Fondation française pour la recherche sur la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur tendant à ajouter une mission de suivi des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur prévoyant, s’agissant des actions de formation, que l’agence ait une mission de structuration des métiers de la biodiversité et des services écologiques ;

– six amendements identiques, dont l’un a été présenté par le rapporteur, visant à ce que l’agence apporte un appui et une expertise techniques à tous les acteurs socio-économiques qui engagent des actions en faveur de la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur prévoyant que l’agence apporte son soutien technique pour lutter contre l’introduction des plantes invasives et contre leur maintien dans le milieu naturel ;

– un amendement de précision présenté par le rapporteur sur le fait que l’agence assure le suivi des actions françaises dans le cadre de l’agenda des solutions de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques dans le domaine de l’impact du changement climatique sur la biodiversité ;

– un amendement présenté par le rapporteur modifiant la composition du conseil d’administration telle que l’avait établie l’Assemblée nationale. Les sénateurs ont défini une répartition des membres entre quatre collèges, sans fixer le nombre total des membres. Le premier collège, représentant au moins la moitié des membres, est constitué par des représentants de l’État, des représentants d’établissements publics nationaux œuvrant dans le champ des compétences de l’agence et des personnalités qualifiées ; le deuxième collège comprend des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, des représentants des secteurs économiques concernés, des représentants d’associations agréées de protection de l’environnement ou d’éducation à l’environnement, des représentants des gestionnaires d’espaces naturels ainsi qu’un représentant de chacun des cinq bassins écosystémiques ultramarins ; le troisième collège comprend deux députés et deux sénateurs ; le quatrième collège est composé des représentants élus du personnel de l’agence. La composition prévue par l’Assemblée nationale était différente et détaillait le nombre de personnes membres pour chaque catégorie (7).

– un amendement présenté par le rapporteur visant à instituer un second comité d’orientation permanent de la biodiversité ultramarine ainsi qu’un amendement modifiant la dénomination des comités thématiques pouvant être créés par le conseil d’administration, qui deviennent des comités d’orientation, et un amendement étendant aux littoraux les fonctions du comité d’orientation pour la biodiversité ultramarine ;

– deux amendements identiques, dont l’un a été déposé par le rapporteur, afin de rendre obligatoire la création des délégations territoriales de l’agence ;

– un amendement présenté par le rapporteur précisant qu’un établissement public rattaché à une collectivité territoriale peut constituer un établissement public de coopération environnementale formant une délégation territoriale de l’agence ;

– un amendement présenté par le rapporteur selon lequel le conseil scientifique doit être placé auprès du conseil d’administration et non pas sous son autorité.

En séance, le Sénat a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur ainsi que :

– un amendement ajoutant, parmi les compétences de l’agence, une compétence d’information et de conseil sur l’utilisation des produits phytosanitaires ;

– deux amendements identiques précisant que l’agence intervient dans les eaux placées sous la souveraineté ou la juridiction de l’État, ainsi que sur les espaces appartenant au domaine public maritime ou au plateau continental ;

– un amendement présenté par le Gouvernement prévoyant que l’agence coordonne ses actions avec celles menées par les collectivités territoriales dans des domaines d’intérêt commun. Elle peut mettre en place à la demande des régions des organismes de collaboration pérenne avec celles-ci. Ces organismes peuvent être constitués en établissements publics de coopération environnementale. Dans les départements et collectivités d’outre-mer, ces organismes peuvent être constitués à la demande de plusieurs collectivités et exercent alors leurs compétences sur tout ou partie du territoire des collectivités demanderesses. Cet amendement a également supprimé la disposition relative aux délégations territoriales. Toutefois, cet amendement n’a pas modifié les références aux délégations territoriales dans le reste du reste ;

– deux amendements identiques prévoyant que la création de services communs avec d’autres établissements publics ne peut intervenir qu’à la demande du conseil d’administration de l’établissement public intéressé, statuant à la majorité des deux tiers ;

– un amendement ajoutant une mission d’évaluation des dommages agricoles et forestiers causés par les espèces animales protégées ;

– deux amendements identiques ajoutant une mission d’accompagnement de la mobilisation citoyenne et du développement du bénévolat ;

– deux amendements identiques modifiant la composition du conseil d’administration pour prévoir un collège spécifique pour les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, portant le nombre de collèges à cinq ;

– un amendement présenté par le Gouvernement relatif à la nomination du directeur général ;

– un amendement précisant que le conseil scientifique comprend une proportion significative d’experts de l’outre-mer.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté :

– sept amendements identiques supprimant la compétence d’information et de conseil sur l’utilisation des produits phytosanitaires ;

– un amendement présenté par votre rapporteure visant à inscrire dans cet article 9 la précision insérée au Sénat à l’article 4, selon laquelle l’agence apporte son soutien à l’État pour l’élaboration de la stratégie nationale pour la biodiversité, assure le suivi de sa mise en œuvre et inscrit son activité dans le cadre de cette stratégie et des objectifs définis à l’article L. 211-1 ;

– un amendement présenté par votre rapporteure précisant que l’agence française pour la biodiversité et les collectivités territoriales coordonnent leurs actions dans les domaines d’intérêt commun ;

– deux amendements prévoyant que l’agence met en place, en tant que de besoin, des délégations territoriales et non des organismes de collaboration pérenne ;

– deux amendements identiques, dont l’un a été présenté par votre rapporteure, supprimant la mission d’évaluation des dommages agricoles et forestiers causés par les espèces animales protégées ;

– un amendement précisant que le conseil d’administration doit respecter la parité de manière à ce que l’écart entre le nombre d’hommes, d’une part, et le nombre de femmes, d’autre part, ne soit pas supérieur à un. Lorsqu’un organisme est appelé à désigner plus d’un membre du conseil, il procède à ces désignations de telle sorte que l’écart entre le nombre des hommes désignés, d’une part, et le nombre des femmes désignées, d’autre part, ne soit pas supérieur à un. La même règle s’applique à la désignation des personnalités qualifiées ;

– deux amendements de précision déposés par votre rapporteure portant sur les alinéas 40 et 53.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD69 de M. Jean-Marie Sermier, CD217 de M. Martial Saddier, CD381 de M. Julien Aubert, CD416 de Mme Sophie Rohfritsch, CD653 de M. Jean-Yves Caullet, CD785 de M. Gérard Menuel et CD847 de Mme Valérie Lacroute.

M. Jean-Marie Sermier. Il s’agit de supprimer l’alinéa 10 de l’article 9, qui tend à inclure dans les missions de l’Agence française de la biodiversité un rôle d’information et de conseil sur l’utilisation des produits phytosanitaires. Cette disposition nous paraît inutile, dans la mesure où un certain nombre de structures sont déjà chargées de cette mission, qu’il s’agisse de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) ou des chambres d’agriculture.

M. Martial Saddier. Rappelons que, pour qu’une matière active soit exploitée, l’entreprise doit obtenir l’autorisation de la mettre sur le marché, le distributeur celle de la mettre en vente et l’agriculteur celle de l’utiliser. La commercialisation et l’utilisation de produits phytosanitaires sont donc aujourd’hui très strictement encadrées. Dès lors, je ne vois pas l’utilité de confier une telle mission à l’AFB, qui n’aura de toute façon pas les moyens de la remplir. Mieux vaut que cette mission soit exercée par les structures compétentes en la matière.

M. Gérard Menuel. Les organismes chargés de conseiller les agriculteurs dans ce domaine sont si nombreux qu’il est inutile d’en ajouter, d’autant que l’AFB n’a pas vocation à s’y substituer.

M. Jean-Yves Caullet. Le rôle de l’AFB est, en premier, lieu de gérer, de préserver et de restaurer la biodiversité, en apportant son appui scientifique, technique et financier à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements. L’Agence est donc parfaitement habilitée à délivrer des informations et des conseils sur les conséquences de l’utilisation de pesticides sur la biodiversité. En revanche, l’autorisation et les modalités techniques d’utilisation de ces produits relèvent bien des organismes compétents dans ce domaine, notamment l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Supprimer l’alinéa 10 contribuerait à clarifier les rôles respectifs des différentes agences sans pour autant ôter à l’AFB sa compétence en matière d’évaluation des conséquences de l’usage ainsi que des méthodes et des autorisations d’utilisation des pesticides.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas défavorable à ces amendements. (Sourires)

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable. Cet ajout par le Sénat est superflu, car les missions de l’Agence lui permettent déjà, par exemple, de financer les actions de lutte contre les produits phytosanitaires et de diffuser des informations sur les bonnes pratiques. En outre, je confirme que l’Agence n’a pas vocation à se substituer aux organismes de conseil agricole.

La Commission adopte les amendements.

Elle en vient à l’amendement CD705 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’inscrire à l’article 9 un ajout inséré au Sénat à l’article 4.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement CD706 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de bien faire apparaître qu’il appartient aux régions et à l’Agence de se coordonner.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite, en présentation commune, les amendements CD979 et CD981 de M. Serge Letchimy.

Mme la rapporteure. Je suis un peu ennuyée, car le débat que nous avons eu tout à l’heure sur la notion de délégation territoriale était plus général. En outre, il conviendrait de supprimer l’expression : « en tant que de besoin », qui est inutile. Je suggère donc à Serge Letchimy de retirer ces amendements afin que l’on réfléchisse à une solution d’ici à la prochaine lecture.

Mme la secrétaire d’État. L’objectif des organismes de collaboration pérenne est bien de mettre en commun les moyens apportés par l’État à travers l’AFB et ceux des collectivités territoriales pour qu’ils agissent ensemble de façon plus efficace en faveur de la biodiversité. Cela dit, je conçois qu’il puisse être nécessaire d’améliorer la rédaction de l’article afin que chacun s’y retrouve. Je propose donc à M. Serge Letchimy de retirer ces deux amendements de manière à ce que nous puissions élaborer ensemble une rédaction optimale en vue de la discussion en séance publique.

M. Jean-Yves Caullet. Je souhaiterais m’assurer, Madame la secrétaire d’État, qu’il s’agit bien d’imaginer une organisation particulière pour tenir compte de la spécificité des outre-mer.

Mme la secrétaire d’État. Un alinéa de cet article est déjà consacré aux outre-mer. De toute façon, il ne s’agit que de possibilités et, pour que ces options soient définies le plus clairement possible, il est souhaitable de prendre le temps de rédiger un amendement ensemble.

Mme Sophie Rohfritsch. J’ai dû rater une étape. Nous nous sommes mis d’accord, à l’issue d’un débat fort intéressant, pour que les articles 7 et 9 soient cohérents. Si nous n’adoptons pas les amendements de M. Serge Letchimy, peut-être faut-il que nous reprenions l’examen de l’article 7… (Murmures)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous allons faire preuve de cohérence jusqu’au bout : je demande que ces amendements soient adoptés. Si ce vote ne vous convient pas, Madame la secrétaire d’État, vous avez la possibilité de déposer un amendement dans le cadre de la procédure de l’article 88 et, à tout moment, en tant que représentante du Gouvernement. Mais je tiens à ce que nous soyons transparents. Je me suis exprimé sur l’article 7, et je pense que nous devons aller jusqu’au bout de notre logique.

M. Martial Saddier. Nous vous soutenons, Monsieur le président, d’autant plus que nous avons joué le jeu tout à l’heure.

Madame la secrétaire d’État, entre le début de l’examen de ce texte et aujourd’hui, sont tout de même intervenus le vote de la loi NOTRe et le nouveau découpage des régions. Or se pose la question de savoir si l’Agence nationale de la biodiversité est un outil de recentralisation ou si elle aura une présence territoriale. Nous souhaiterions donc que vous nous éclairiez sur votre vision de la présence territoriale de l’Agence, notamment au regard des nouvelles régions et des autres structures étatiques ou para-étatiques, telles les agences de l’eau, puisqu’il est évident, comme l’a dit Mme la rapporteure, que tout cela doit déboucher sur des rationalisations.

Enfin, puisqu’il a été question d’un rapprochement avec les collectivités territoriales, nous souhaiterions également savoir si, selon vous, les délégations territoriales impliquent une sorte de transfert aux collectivités, en l’espèce – pourquoi ne pas le dire ? – aux nouvelles régions. Ces questions ne sont pas anodines ; en tout cas, nombreux sont ceux qui seront attentifs à votre réponse.

M. Serge Letchimy. Le président Chanteguet a fait une bonne proposition. Je rappelle qu’une ministre d’État a pris un engagement et a confié à deux parlementaires une mission qui a nécessité six mois de travail durant lesquels ils ont réfléchi à la manière dont les pays d’outre-mer, qui représentent 80 % de la biodiversité française, peuvent contribuer à la richesse nationale dans le respect de leur différence. Dans leur rapport, ils concluent que le principe de la délégation est la réponse la plus appropriée. À l’article 7, il a été décidé de maintenir ce principe ; il faut donc rester cohérent et adopter les amendements CD979 et CD981 à l’article 9.

Néanmoins, je suis évidemment très favorable à ce que nous travaillions ensemble, Madame la secrétaire d’État, à un amendement de cohérence que vous pourriez présenter. Je propose donc que nous adoptions ces amendements, sachant que j’accepterai volontiers leur modification en séance publique.

Mme la secrétaire d’État. Monsieur Martial Saddier, j’apporterai des réponses très précises, assorties de chiffres, aux questions que vous m’avez posées. Sachez cependant que nous ne touchons pas aux agences de l’eau. Par ailleurs, il n’est pas question que l’AFB soit déconnectée des territoires ; le projet de loi poursuit l’objectif inverse. L’Agence doit, au contraire, être très proche de leurs caractéristiques.

La Commission adopte successivement les amendements CD979 et CD981.

Puis elle est saisie de l’amendement CD397 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Il s’agit de reconnaître au plan législatif la Fédération des conservatoires botaniques nationaux (FCBN), à laquelle le législateur a confié, en 2010, une mission de coordination technique des CBN et de représentation auprès des pouvoirs publics. Or le projet de loi prévoit de transférer la mission de coordination technique à l’AFB et de supprimer la mission de représentation. Ainsi, les nombreux services actuellement rendus par la FCBN à ses membres ne pourront tous être maintenus. En outre, les scenarii envisagés jusqu’à présent n’apportent pas de réponses satisfaisantes aux problèmes que soulèverait un transfert dès 2017 de l’équipe de la FCBN : problème d’organisation, puisque la structure serait bicéphale et deviendrait illisible pour les partenaires des CBN ; problème politique, puisque se posera la question de la légitimité de l’AFB pour coordonner des syndicats mixtes ; problème posé par une inégalité de traitement manifeste des différentes têtes de réseaux.

L’amendement CD397 vise donc à supprimer, à l’alinéa 23, la référence à la coordination technique des conservatoires botaniques nationaux.

Mme la rapporteure. Cet amendement soulève une question de fond : que veut-on faire de l’Agence française de la biodiversité ? Si chacun défend son pré carré, nous ne parviendrons jamais à modifier l’organisation de ce secteur. Je suis donc plutôt défavorable à cet amendement, sachant que nous examinerons ultérieurement un amendement tendant à préciser que la Fédération des conservatoires botaniques nationaux garde un rôle d’animation du réseau.

Mme la secrétaire d’État. Je souscris aux arguments de Mme la rapporteure ; je suggérerai donc à Mme Delaunay de retirer son amendement.

Mme Florence Delaunay. Depuis 2012, le texte a connu de nombreuses modifications, qu’il s’agisse de la gouvernance de l’AFB ou des structures qu’elle doit regrouper. Il semble que les conditions ne soient pas réunies pour envisager un transfert de l’équipe salariée de la FCBN. Je plaide donc pour le maintien de cette équipe au sein de la fédération afin que celle-ci puisse continuer à assurer les nombreux services qu’elle rend à ses membres. Par ailleurs, je souhaiterais que soit privilégié un partenariat renforcé avec l’AFB, à l’instar de ce qui est prévu pour les autres têtes de réseau, notamment la Fédération des conservatoires d’espaces naturels (FCEN), Réserves naturelles de France (RNF), Fédération des parcs naturels régionaux de France (FPNR), qui ne sont plus concernées par un transfert de personnels et qui bénéficient par ailleurs d’une reconnaissance législative.

Je maintiens donc l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

L’amendement CD708 de la rapporteure est retiré.

La Commission discute de l’amendement CD527 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. La création de services communs avec les autres établissements publics en charge de la gestion de l’eau, de la biodiversité et des espaces naturels permettra à l’Agence française pour la biodiversité de conclure les partenariats nécessaires à l’exercice de sa mission d’appui technique et administratif. Ces services communs pourront être notamment développés en matière de police avec l’ONCFS ou les parcs nationaux ainsi qu’en matière de connaissance de la biodiversité avec le Muséum national d’histoire naturelle ou d’autres établissements scientifiques. Dans le cadre de démarches partenariales en régions, des services communs pourront également être créés avec des établissements publics locaux en charge de la gestion de l’eau, de la biodiversité et des espaces naturels. Or l’exigence, introduite par le Sénat, que les conseils d’administration des établissements publics intéressés statuent à la majorité des deux tiers sur la demande de création de services communs risque d’être source de blocage et donc d’entraver la conclusion des partenariats nécessaires à une bonne gouvernance de la biodiversité. Cet amendement vise à supprimer ce blocage.

Mme la rapporteure. Ayant retiré à l’instant un amendement analogue, je ne peux qu’être défavorable à celui-ci.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à supprimer l’obligation, pour le conseil d’administration de l’établissement public intéressé par la création de services communs avec l’AFB, de se prononcer à une majorité des deux tiers. Au Sénat, le Gouvernement s’était déclaré favorable à l’introduction de cette condition afin de rassurer ceux qui s’inquiétaient d’une éventuelle fusion forcée entre l’AFB et l’ONCFS. C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.

M. Julien Aubert. La règle des deux tiers présente un avantage : elle oblige à prendre cette décision lourde de conséquences de manière consensuelle. En outre, nous l’avons vu tout à l’heure, un conseil d’administration peut être composé pour moitié de représentants d’une même activité. Certes, cette règle ralentit le processus, mais elle le renforce, car elle implique que l’engagement pris sera pérenne. Enfin, l’Agence française de la biodiversité ne peut pas naître dans un contexte de méfiance généralisée.

Mme Laurence Abeille. Je maintiens l’amendement, et je regrette que la rapporteure ait retiré le sien. Nous avons besoin de fluidité, de simplification et de confiance. Or la règle de la majorité des deux tiers instaure, de fait, une sorte de blocage et risque de figer les choses. Je le déplore d’autant plus que l’Agence aura besoin, dans les années à venir, de souplesse pour être opérationnelle et agir, avec tous les partenaires qui l’accepteront, en faveur de la reconquête et de la protection de la biodiversité.

M. Philippe Plisson. La majorité des deux tiers est celle qui est requise, par exemple, pour l’adhésion d’une commune à une intercommunalité. Cette règle permet de garantir des choix réfléchis.

M. Jean-Yves Caullet. J’appelle votre attention sur le fait que la composition des conseils d’administration des différents établissements publics avec lesquels peut être conclue une convention de ce type n’est pas homogène. L’impact de la règle de la majorité qualifiée variera en fonction de cette composition. Appliquer une règle uniforme à des conseils d’administration dont la composition est diverse aura des résultats divers.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques CD545 de Mme Laurence Abeille et CD711 de la rapporteure.

Mme Laurence Abeille. Le Sénat a confié à l’Agence française pour la biodiversité une mission d’évaluation des dommages agricoles et forestiers causés par les espèces animales protégées. Toutefois, une telle évaluation ne relève pas spécifiquement de l’Agence ; elle devrait être réalisée en commun avec l’ONCFS et l’ONF, établissements publics qui ne sont pas intégrés à l’AFB. Il n’est pas utile de surcharger l’AFB de missions qu’elle ne pourra pas remplir, compte tenu de ses moyens limités en l’état actuel des choses.

Mme la rapporteure. J’ajoute qu’il ne faudrait pas que certains établissements, comme l’ONCFS, par exemple, se déchargent de leurs missions sur l’AFB tout en refusant d’intégrer celle-ci. On ne peut pas vouloir le beurre et l’argent du beurre.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable. La mission dont il est question étant déjà assumée par l’ONCFS, il est inutile de la confier également à l’AFB.

M. Jean-Yves Caullet. Je suis également favorable à ces amendements, même si la question n’est pas tant de savoir qui va évaluer ces dégâts que de savoir qui va payer leur réparation.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD900 de Mme Marie Le Vern et CD925 de M. Gérard Menuel.

M. Christophe Bouillon. La mise en œuvre des mesures compensatoires doit être renforcée par de nouveaux outils créés par le projet de loi, notamment les réserves d’actifs naturels ou les opérateurs de la compensation. Cet amendement vise à confier à l’Agence française de la biodiversité une mission d’appui technique aux opérateurs chargés de la mise en œuvre de ces mesures.

Mme la rapporteure. Si l’on multiplie les missions confiées à l’Agence, elle risque de ne pas pouvoir toutes les remplir. En outre, il est déjà prévu qu’elle suive les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité, ce qui est extrêmement important. Par ailleurs, il ne faudrait pas que les opérateurs publics et privés chargés de la mise en œuvre des compensations se déchargent de leur mission sur l’Agence. Avis défavorable.

M. Christophe Bouillon. L’amendement fait référence à une mission d’appui technique et d’expertise ; c’est ce que l’on attend d’une telle agence. Vous avez rappelé la responsabilité des opérateurs de la compensation, qui figure dans le texte. Il s’agit, en l’espèce, non pas de les décharger leur mission, mais de renforcer leur rôle en leur permettant de profiter de l’expertise de l’Agence de manière à ce que tout se déroule dans les meilleures conditions possible.

Mme la secrétaire d’État. La précision n’est pas utile au regard des missions d’appui technique et d’expertise auprès d’acteurs publics et privés que confie déjà le projet de loi à l’Agence. L’amendement étant ainsi satisfait, je suggère à M. Bouillon de le retirer.

Mme Florence Delaunay. Cette mission d’appui technique et d’expertise facilitera le suivi des mesures compensatoires.

La Commission rejette successivement les amendements CD900 et CD925.

L’amendement CD712 de la rapporteure est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD674 de M. Martial Saddier et CD713 de la rapporteure.

M. Martial Saddier. Madame la secrétaire d’État, je profite de l’examen de cet amendement pour vous demander où en est le dialogue social entre les personnels de l’ONEMA et le Gouvernement. On sait, en effet, que ce projet de loi a créé des tensions, liées à la future intégration de ces personnels dans l’Agence française de la biodiversité.

Ceux qui participent à l’élaboration de schémas d’aménagement et de gestion des eaux ou de contrats de rivière connaissent le rôle fondamental que jouent les agents de l’ONEMA sur le terrain. Or nous craignons, et notre inquiétude est largement partagée, que les agents incorporés à l’Agence aient moins de temps à consacrer à leurs activités antérieures, notamment celles qui sont directement liées à la qualité de l’eau. Que sera, selon vous, l’ONEMA de demain ?

Mme la rapporteure. L’amendement CD713 tend à préciser à l’alinéa 40, comme c’est le cas à l’alinéa 41, que les missions visées sont bien relatives à l’eau et à l’environnement.

Quant à l’amendement de CD674 de M. Martial Saddier, il vise notamment à supprimer les mots : « dans le cadre d’unités de travail communes ». Or il est important que l’on puisse commencer à créer des unités de travail communes entre les polices de l’eau et de l’environnement, à l’instar de ce qui se fait dans les départements d’outre-mer. Peut-être pourra-t-on ainsi convaincre l’ONCFS qu’il peut être intéressant pour lui d’intégrer l’Agence française de la biodiversité. C’est pourquoi je ne suis pas forcément favorable à l’amendement CD674.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement de M. Martial Saddier vise à préciser que l’AFB assurera des missions relatives à la police de l’eau, des milieux aquatiques, de la pêche et de la biodiversité. Ces précisions sont superflues puisque la police de l’environnement englobe tous ces aspects. L’amendement de la rapporteure, qui n’évoque que l’eau et l’environnement me paraît suffisant. Je propose donc à M. Saddier de retirer son amendement et je soutiens celui de la rapporteure.

M. Martial Saddier. Dieu sait si, depuis hier après-midi, nous nous efforçons de faire preuve de cohérence, dont vous avez estimé, Madame la secrétaire d’État, qu’elle était d’autant plus claire qu’elle est inscrite dans la loi. Je vais pousser la clarté jusqu’à la caricature. Un service aujourd’hui dédié à la police de l’eau sera incorporé demain dans une agence nationale. La question est : fera-t-il encore de la police de l’eau ? Or vos propos ne sont pas de nature à rassurer les agents. En effet, si, parmi les compétences de l’AFB, la police de l’eau n’est pas mentionnée explicitement et que l’on se contente de la notion de police de l’environnement, mon amendement n’est pas infondé.

Mme la secrétaire d’État. Évidemment, la police de l’eau sera maintenue.

Vous vous êtes interrogé sur la manière dont la fusion était en train de s’opérer : avec Ségolène Royal, nous avons réuni les conseils d’administration des agences lundi dernier ; des travaux sont en cours, des réunions mensuelles sont organisées avec les organisations syndicales. Bref, le travail de rapprochement entre les équipes progresse et s’effectue dans la concertation. Je me rendrai moi-même dans les différentes agences pour discuter avec leurs personnels. Tout cela va se faire en bonne intelligence et de façon que les agents eux-mêmes deviennent les premiers défenseurs de la nouvelle agence. Chaque organisme a certes son histoire et il faut procéder avec patience, car l’enjeu en vaut vraiment la peine.

M. Philippe Plisson. La police de l’eau est notoirement insuffisante, on peut même considérer que, de fait, elle n’existe plus. Les agents sont très peu nombreux et l’ONEMA n’a plus les moyens de remplir ses fonctions.

Il faut rassurer les agents, certes, mais je crois qu’à terme, dans le cadre de la reconfiguration des différents organismes, la police de l’eau pourrait incomber à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, qui dispose de tous les moyens et personnels nécessaires, sur le territoire, pour pouvoir assurer les deux activités. (Rires)

Mme Laurence Abeille. Et allons-y, formidable !

Mme la rapporteure. C’est incroyable d’entendre cela !

M. Philippe Plisson. Les agents de l’ONEMA seraient ainsi intégrés à l’ONCFS. (Murmures)

Mme la secrétaire d’État. L’ONCFS compte 900 agents et l’ONEMA en déploie pour sa part 600 sur le terrain ; on ne peut donc pas raisonnablement avancer qu’il n’y a pas de police de l’eau. Ensuite, que les différents organismes cherchent à mieux coordonner leur action, voilà un souhait que nous partageons tous.

Mme la rapporteure. Il y a quelques années, un rapport du conseil général de l’environnement assurait que les polices de l’environnement, nombreuses, faisaient bien leur travail. Il est vrai que, dans certains départements, il y a moins d’agents de l’ONEMA que dans d’autres, mais de là à vouloir charger l’ONCFS de la police de l’eau, il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités ! Nos débats sont pollués par des revendications très puissantes venues de l’extérieur, qui nous empêchent de prendre du recul. Je regrette les propos de M. Philippe Plisson. Je vous ferai observer que, dans les départements d’outre-mer, des coordinations se mettent en place entre les polices de l’eau et l’ONCFS et qui fonctionnent très bien. Il faut encourager ce type de coordinations sur le territoire métropolitain et ne pas mélanger les choses.

M. Jean-Yves Caullet. Il convient, en effet, d’éviter les propositions caricaturales.

M. Philippe Plisson. Ma proposition n’a rien de caricatural ! Elle est en discussion et vous verrez que les choses se passeront comme je l’indique.

M. Jean-Yves Caullet. Nous sommes en train de passer d’une organisation en tuyaux d’orgue – par milieu, par activité – à une organisation plus globale. Il y aura forcément un temps d’adaptation, d’autant que des activités en milieu naturel se développent, que nous ne connaissions pas forcément au départ. Le milieu forestier est fréquenté par des gens qui se promènent à vélo, d’autres qui chassent, d’autres encore qui cueillent des champignons, et personne, de façon globale, n’est à même de faire respecter les règles dans chacune de ces activités. Les coopérations qui se mettent en place sont très saines et préfigurent sans doute une réflexion sur la police des activités en milieu naturel plus que sur la police des milieux.

M. David Douillet. L’ONCFS dresse entre 60 et 70 % des procès-verbaux en matière de police judiciaire, alors que l’ONEMA est davantage spécialisé dans la police administrative. C’est pourquoi les deux organismes ont passé des contrats entre eux – bon sens oblige ! Ils travaillent donc déjà conjointement. C’est là la réalité du terrain

La Commission rejette l’amendement CD674 et adopte l’amendement CD713.

Elle discute de l’amendement CD119 de M. Arnaud Leroy.

M. Arnaud Leroy. Des élus se consacrent à la présidence de certains conseils – Conseil national de la mer et des littoraux, Conseil national de la montagne, Comité national de l’eau. Je souhaite que les présidents de ces organismes, qui sont souvent des députés ou des sénateurs, participent à la vie de l’AFB.

Mme la rapporteure. Nous en sommes à la composition du conseil d’administration de l’AFB, que tout le monde veut intégrer. Le Sénat a modifié notre texte, et il me semble plus sage de s’en tenir là, faute de quoi nous allons continuer d’en discuter pendant des heures. Les petites différences entre le texte que nous avons transmis au Sénat et le texte tel qu’il nous en revient seront à régler par le Gouvernement par voie de décret. Et si la configuration ici prévue devait être maintenue, l’Agence fonctionnerait tout de même.

Mme la secrétaire d’État. Les propos de la rapporteure sont d’une grande sagesse. Nous sommes parvenus, en effet, à un équilibre et, en l’occurrence, le mieux serait l’ennemi du bien. Je propose également d’en rester à la rédaction sénatoriale ; c’est pourquoi je suis défavorable à tous les amendements qui visent à modifier cette composition.

M. Martial Saddier. Par tradition, quand nous créons des collèges territoriaux, il est souvent précisé qu’ils comprendront au moins un représentant de la montagne, de la mer, de l’outre-mer ou autre. Retrouverons-nous cette représentation à l’issue des deux navettes ?

Mme la secrétaire d’État. Dans un premier temps, le conseil d’administration transitoire sera formé de la fusion des quatre conseils d’administration actuels. Ensuite, nous nous sommes engagés auprès des organismes concernés à prendre le temps de régler ces questions en concertation. Je ne peux donc pas répondre à votre question puisque la composition du conseil d’administration n’est pas encore décidée.

M. Arnaud Leroy. Je rejoins Martial Saddier sur la nécessité que soient représentés le Conseil national de la mer et des littoraux, celui de la montagne ainsi que le Comité national de l’eau. Il faut s’assurer, Madame la secrétaire d’État, qu’au moment de la rédaction des décrets, on prenne en considération les travaux réalisés par ces conseils qui n’ont pas vocation à amuser la galerie. Aussi faut-il leur accorder la place qui leur est due.

Mme la rapporteure. Nous recommençons donc les mêmes débats qu’en première lecture. Je dirai seulement que le conseil d’administration est un organe de gestion chargé d’appliquer les décisions concernant la biodiversité et de gérer l’AFB. De mon point de vue, il est plus important d’être membre du Conseil national de la biodiversité, car c’est là que seront prises les décisions. C’est donc au sein de ce dernier que chacun devrait veiller à être représenté.

M. Arnaud Leroy. Je vais retirer mon amendement qui est, en fait, un amendement d’appel. Je souhaite seulement obtenir un engagement du Gouvernement que la rédaction du décret définira une articulation de travail entre l’AFB et le Conseil national de la mer et des littoraux, le Conseil national de la montagne et le Comité national de l’eau. Je conviens que cela ne relève pas du domaine législatif, mais nous devons pouvoir dire demain quel est l’esprit de la loi que nous avons votée.

Mme la secrétaire d’État. L’esprit du travail en cours, c’est la concertation. Et celle-ci ne doit pas se limiter à la discussion en amont du texte ; nous devons pouvoir également travailler ensemble, avec les parlementaires mais aussi avec les représentants des organismes concernés, au moment de la rédaction des décrets d’application.

M. Julien Aubert. Tout cela ne me paraît pas très net. Le conseil d’administration ne serait, selon la rapporteure, qu’une structure de gestion. Dès lors, pourquoi y siégeraient des représentants d’associations agréées de protection de l’environnement ou de l’éducation à l’environnement ; pourquoi y seraient représentés les cinq bassins écosystémiques ultramarins ? Si le conseil d’administration gère l’Agence et doit donc être composé de gestionnaires, il faut revoir totalement l’articulation des futurs articles L. 131-10 et L. 131-11 du code de l’environnement, avec, d’un côté, un comité d’orientation représentatif des différents écosystèmes et, de l’autre, un conseil d’administration décisionnel. Si l’on en reste au texte tel qu’il est rédigé, on se demande pourquoi la montagne ou la mer ne sont pas représentées dès lors que le sont les cinq bassins susmentionnés ou des associations de protection de l’environnement.

Mme Sophie Rohfritsch. Au fond, ce que doit être l’AFB n’a pas été du tout préparé, alors qu’il s’agit apparemment de la pièce maîtresse de ce texte. Si la composition de cet organisme n’est pas d’emblée inclusive et détaillée, on n’obtiendra pas le résultat recherché, à savoir la protection ou en tout cas la « reconquête », si je reprends le titre du texte, de la biodiversité. Je rappelle au passage qu’il existe un Conseil national supérieur du patrimoine naturel et de la biodiversité qui émet très régulièrement des avis qui ne sont pas du tout suivis par la ministre.

Donc, nous discutons depuis deux ans d’un projet d’organisme sans que soient définies ses compétences ni sa composition. C’est franchement grotesque. (Murmures divers)

Mme la secrétaire d’État. Ce n’est pas parce que nous prenons le temps de discuter qu’il faut parler d’impréparation. Un organe est d’ores et déjà associé à la préparation des décrets relatifs à la composition du CA de l’AFB : il s’agit de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique (CNTE) qui suit les travaux de préfiguration de l’AFB. Cette commission spécialisée comprend les représentants de toutes les parties prenantes, y compris les élus – parlementaires comme représentants de collectivités. Les membres des CA des quatre agences amenées à fusionner sont également associés.

La composition proposée par le Sénat me paraît constituer une bonne base. On peut certes continuer de palabrer, mais nous n’avancerons pas.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Si vous considérez que certains organismes ou collectivités territoriales ne sont pas assez bien représentés au sein du CA de l’AFB, vous avez la possibilité de déposer des amendements qui seront examinés dans le cadre de l’article 88 du règlement avant d’être discutés en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD498 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Je souhaite que soient représentées au sein du CA de l’AFB les fondations reconnues d’utilité publique dont l’objet principal est la protection de l’environnement. Il ne s’agit pas de modifier la composition du CA, mais d’introduire la possibilité de cet ajout.

Mme la rapporteure. Voilà l’illustration de ce que je disais tout à l’heure : tout le monde veut être membre du CA de l’AFB. Je rappelle que nous avons créé la possibilité pour l’Agence d’être pourvue de comités d’orientation spécialisés sur certains thèmes de son choix, afin de tenir compte du fait, précisément, que tout le monde ne pourrait pas faire partie du CA. Cette ouverture a été maintenue par le Sénat. Ainsi les représentants de territoires particuliers pourront-ils travailler en concertation avec l’Agence tout en jouissant d’une certaine autonomie. Je campe donc sur ma position et ne souhaite pas qu’on touche à la version sénatoriale.

Mme la secrétaire d’État. Je suis défavorable à l’amendement pour les raisons que j’ai précédemment exposées et non sur le fond. Reste que, a priori, rien ne s’oppose à ce que ces fondations siègent au sein du CA.

Mme Laurence Abeille. Il ne s’agit pas, je le répète, de modifier la composition du CA, mais de ne pas oublier les fondations. Sans cette précision, les fondations ne pourront pas intégrer le CA. Leur offrir cette possibilité, tel est l’esprit de l’amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Vous pensez à WWF ?

Mme Laurence Abeille. En effet, mais aussi à la fondation Nicolas-Hulot.

M. Jean-Marie Sermier. En attendant que soit constitué le futur conseil d’administration de l’AFB, un CA transitoire est prévu, agrégeant les quatre CA des organismes qui rejoindront l’Agence. Nous souhaitons, Madame la secrétaire d’État, avoir un engagement de votre part sur la date de la mise en place du futur CA.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement présentera, à l’article 17, un amendement prévoyant la date de mise en place du nouveau CA.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD387 de Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. Nous nous sommes battus pour que soient reconnus les cinq bassins écosystémiques ultramarins parce que la réalité de chacun d’eux est totalement différente. En outre, il ne s’agissait pas seulement de faire acte de présence mais de faire valoir que, pour nous, la biodiversité offre aussi des perspectives en matière d’emploi. Or, je l’ai souligné hier soir, cette biodiversité, en Guyane, est pillée. Nous souhaitons donc, à travers la prise en compte de ces bassins, orienter l’action de l’AFB, qui doit s’approprier la biodiversité dans sa dimension territoriale à la fois nationale et particulière. En ce sens, la nation doit s’imprégner des réalités ultramarines pour en faire un atout.

J’en viens à mon amendement. Déjà, en première lecture, nous demandions que la composition du CA concoure à une représentation équilibrée des enjeux, en particulier ultramarins, liés à la biodiversité. Le rapporteur du texte au Sénat, M. Jérôme Bignon, a souhaité la création d’un second comité d’orientation dédié aux territoires ultramarins. C’est très bien, mais il est tout aussi important que nous soyons représentés au CA. Ne nous renvoyez pas toujours en annexe ! Nous faisons partie d’un tout dont chacun doit avoir conscience de la diversité.

Mme la rapporteure. Le texte prévoit la présence de représentants des collectivités ultramarines un peu partout. C’est bien ce que nous avons voulu en première lecture pour répondre précisément à vos demandes. Il ne me paraît donc pas nécessaire d’en rajouter. L’alinéa 46 prévoit que le deuxième collège comprenne un représentant de chacun des cinq bassins écosystémiques ultramarins ; par ailleurs, il est prévu la création d’un « comité d’orientation réunissant des représentants des différentes parties concernées par la biodiversité ultramarine et de tous les départements et collectivités d’outre-mer », entre autres exemples. Sachez, Madame Chantal Berthelot, que nous sommes conscients de l’importance de la biodiversité de vos territoires et qu’il ne saurait être question de la mettre de côté.

Mme la secrétaire d’État. Pour les mêmes raisons qu’exposées précédemment, je suis défavorable à cet amendement. L’outre-mer dispose déjà d’une base de cinq garanties, et je confirme ce que j’ai déclaré lors du séminaire de préfiguration de l’AFB : les territoires ultramarins, quels qu’ils soient, sont extrêmement importants pour notre biodiversité, et il est hors de question qu’ils soient sous-représentés, oubliés. Je prends l’engagement que tant que j’occuperai ces fonctions, je m’emploierai à montrer à quel point la biodiversité de l’outre-mer est une richesse que nous devons, non seulement préserver, mais également mettre en valeur. Et nous ne l’oublierons pas au moment de définir la composition du CA.

Mme Chantal Berthelot. Compte tenu des propos rassurants de la secrétaire d’État de sa volonté de faire de la biodiversité ultramarine un enjeu national, et étant donné que, par votre intermédiaire, Monsieur le président, la commission est déjà sensibilisée à cette question, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD628 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Il importe de rappeler que la parité doit bien être assurée au sein du conseil d’administration de l’AFB.

Mme la rapporteure. Évidemment, nous sommes tous d’accord ici pour considérer qu’il faut garantir la parité au sein du conseil d’administration, mais nous nous sommes dotés d’un texte de loi disposant que la parité doit être. Pour nous assurer qu’elle est bien réelle, Mme la secrétaire d’État pourrait s’engager à nous transmettre le texte du décret d’application avant qu’il ne soit publié.

Mme la secrétaire d’État. Je suis très attentive à ces questions. Je ne peux pas vous promettre la transmission du décret d’ici à l’examen du texte en séance, mais je peux prendre l’engagement d’y introduire l’obligation de parité, ce qui du reste ne revient qu’à respecter la loi votée en 2014, qui s’applique à tous les conseils d’administration des établissements publics.

Mme Viviane Le Dissez. En effet, l’alinéa 50 tel qu’il est rédigé prévoit que « la composition du conseil d’administration concourt à une représentation équilibrée des femmes et des hommes », et non à une représentation paritaire.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD715 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de préciser, à l’alinéa 53, que le conseil scientifique de l’AFB comprend une proportion significative de spécialistes de la biodiversité ultramarine plutôt que d’experts de l’outre-mer.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD832 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Il est prévu de créer, au sein de l’AFB, des comités d’orientation. Si je comprends bien la création d’un comité d’orientation relatif à la biodiversité ultramarine, étant donné les spécificités de l’outre-mer, je comprends moins celle d’un comité d’orientation sur les milieux marins et littoraux, dont le rôle m’apparaît proche de celui du Conservatoire du littoral. Évitons donc de multiplier les structures.

Mme la rapporteure. Ce comité d’orientation a vocation à éclairer l’Agence et n’a rien à voir avec le Conservatoire du littoral.

Mme la secrétaire d’État. Le Conservatoire du littoral est un établissement public chargé de la préservation des milieux littoraux, et non du milieu marin, par l’acquisition et la gestion foncière. Le comité d’orientation, lui, vise à répondre, pour le compte de la future Agence, aux enjeux très forts et spécifiques de ces milieux. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD654 de M. Jean-Yves Caullet et CD939 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

M. Jean-Yves Caullet. Dans la mesure où nous avons estimé qu’il y avait une nécessaire complémentarité, dans la défense de la biodiversité, des secteurs naturels, agricoles et forestiers, il importe que le directeur général de l’AFB soit nommé par un arrêté conjoint des ministères chargés respectivement de l’environnement et de l’agriculture – à quoi, si vous en êtes d’accord, on peut ajouter la forêt, attribution de ce dernier ministère.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Mon amendement va dans le même sens, la préservation de la biodiversité touchant également à des parties importantes de la production agricole. Puisque le ministère de la santé est chargé de vérifier que tout produit issu des secteurs agricole et agroalimentaire que nous consommons est exempt de tout risque sanitaire, je propose que l’AFB soit placée sous la triple tutelle du ministère de l’environnement, du ministère de l’agriculture et de la forêt et du ministère de la santé.

Mme la rapporteure. La reconquête de la biodiversité est en effet très transversale. Quand j’ai proposé d’introduire, dans le code rural et dans le code de l’environnement, les grands principes entérinant cette transversalité, vous ne l’avez pas accepté. Aujourd’hui, il vous arrangerait que le directeur général de l’Agence soit nommé conjointement par deux ministères, voire trois. Je vous renvoie à vos incohérences. Le ministère de tutelle de l’AFB est celui de l’environnement, et je ne vois pas pourquoi on ajouterait la signature de tel ou tel ministre, en fonction de l’intérêt du moment, au bas du décret de nomination du directeur général.

Mme la secrétaire d’État. Les missions de l’AFB relèvent bien principalement du ministère de l’environnement. Faire nommer le directeur général de l’Agence conjointement par le ministre de l’agriculture reviendrait à considérer que l’AFB aurait à traiter les questions agricoles et forestières de façon particulière par rapport à l’impact sur l’environnement d’autres secteurs, telle l’industrie que nous n’avons pas évoquée. Or ce n’est pas le cas. Par ailleurs, aucun des directeurs des quatre établissements qui vont être intégrés au sein de l’AFB n’est nommé conjointement avec le ministère de l’agriculture ou celui de la santé. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements CD654 et CD939.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CD668 de M. Arnaud Leroy et CD995 de M. Christophe Bouillon, et l’amendement CD120 de M. Arnaud Leroy.

M. Arnaud Leroy. Au Sénat, un amendement gouvernemental a introduit, en séance publique, le poste de directeur général de l’AFB. Le présent amendement s’inscrit dans la logique de la proposition de loi relative à l’économie bleue que j’ai défendue, et part du constat que notre administration et, au-delà, la sphère publique en général, a du mal à prendre en compte l’enjeu maritime. Aussi, étant donné la réalité physique selon laquelle 70 % de la terre est couverte de mers et d’océans, je ne trouverais pas totalement incongru que quelqu’un, au sein de la direction de l’AFB, soit chargé des questions relatives aux milieux marins.

Quand vous voulez faire avancer un dossier, selon qu’il relève du domaine de la recherche ou du secteur économique, vous avez affaire à des interlocuteurs totalement différents, qui n’ont pas les mêmes programmes, les mêmes stratégies, les mêmes crédits que pour l’ensemble des autres éléments de biodiversité. Même si le portage public des questions maritimes dans notre pays est un vrai sujet, il ne s’agit pas d’un premier pas vers la création d’un ministère de la mer – le général de Gaulle n’en voyait pas la nécessité puisqu’il n’y avait pas de ministère de la terre. Mais si l’on veut relever le défi de la pêche, de l’aquaculture, de la préservation des fonds océaniques et des coraux, de l’outre-mer, la création d’un poste de directeur adjoint de l’AFB spécialement affecté à la question maritime m’apparaît indispensable.

Mme la rapporteure. Il me semble qu’on entre un peu trop dans le détail de la composition du CA de l’AFB. Je suis plutôt défavorable à cet amendement. Le ministère de l’environnement doit prendre ses responsabilités et nous n’avons pas à le faire à sa place.

Mme la secrétaire d’État. Je partage complètement le point de vue de M. Leroy : une place essentielle doit être accordée, au sein de l’AFB, aux questions maritimes. En revanche, en se mêlant de l’organisation interne de l’Agence, l’amendement me paraît dépasser la compétence du législateur qui définit les objectifs, les missions de l’établissement – et la préservation des milieux marins et littoraux en fait évidemment partie. C’est donc uniquement parce qu’il ne revient pas au législateur de traiter de cette matière que j’y suis défavorable.

Le Gouvernement sera très attentif à cette question. Un comité d’orientation chargé des questions marines est déjà placé auprès du conseil d’administration de l’AFB, ce qui n’empêche pas que l’idée d’un directeur général adjoint chargé des questions maritimes puisse être retenue.

M. Bertrand Pancher. Dans les faits, l’AFB ne va donc plus s’occuper que des milieux aquatiques. Si l’on flanque son directeur général d’un directeur général adjoint chargé des questions relatives aux milieux marins, l’Agence va vraiment finir par prendre l’eau ! (Rires)

Mme Florence Delaunay. Lors de l’examen en commission de la proposition de loi organique relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, nous avons « neutralisé » tous les titres : « président-directeur général » a été remplacé par l’expression « présidence-direction générale », le mot « président » par celui de « présidence », etc. Par souci de cohérence, nous devrions parler de « direction adjointe » plutôt que de « directeur adjoint ». Sinon, nous serons bien étonnés de voir une femme arriver à un poste de responsabilité au sein de l’AFB ! (Sourires)

M. Arnaud Leroy. Compte tenu des engagements de la secrétaire d’État et de la remarque de notre collègue Florence Delaunay, je retire mon amendement, ainsi, d’ailleurs, que l’amendement CD120.

L’amendement CD668 est retiré, de même que l’amendement CD995.

L’amendement CD120, de M. Arnaud Leroy, est également retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD764 de M. Jacques Krabal.

Mme la rapporteure. Cet amendement est déjà satisfait.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 9 ainsi modifié.

Article 11 bis
Rapport relatif au périmètre de l’agence française pour la biodiversité

Le présent article prévoit que le Gouvernement remette un rapport sur l’élargissement du périmètre de l’agence et l’opportunité d’intégrer d’autres établissements publics nationaux pour une meilleure prise en compte de la biodiversité terrestre.

En commission, les sénateurs ont adopté trois amendements identiques de suppression de cet article.

Votre commission a adopté trois amendements identiques de rétablissement de l’article, dont l’un a été présenté par votre rapporteure.

*

* *

La Commission examine les amendements identiques CD716 de la rapporteure, CD525 de Mme Laurence Abeille et CD629 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. Nous souhaitons rétablir l’article 11 bis afin que le Gouvernement remette au Parlement un rapport relatif à l’élargissement du périmètre de l’AFB. Je rappelle que cet article avait été adopté sur votre proposition, Monsieur le président.

Mme Laurence Abeille. L’AFB, telle qu’envisagée, risque d’être très déséquilibrée en défaveur de la biodiversité terrestre. Il faut donc rétablir cette demande de rapport qui nous permettra de savoir ce qu’il est opportun de décider en ce qui concerne le rattachement éventuel à l’AFB d’opérateurs de l’État compétents dans différents domaines comme l’ONCFS ou l’ONF.

Mme Viviane Le Dissez. Je vais dans le même sens de ce qu’a très bien exprimé la rapporteure.

Mme la secrétaire d’État. Je crois sage de prendre le temps de la réflexion, d’observer comment les choses se passent sur le terrain et d’en tirer les conclusions dans un rapport. Sagesse.

M. Jean-Marie Sermier. Un certain nombre de personnes souhaitent que l’ONCFS rejoigne l’Agence. Le Sénat a eu la sagesse de ne pas contraindre les relations entre les uns et les autres et de laisser les choses se faire naturellement. L’amendement n’apporte rien, n’engage personne, mais c’est un mauvais signal envoyé à nos amis chasseurs.

M. David Douillet. C’est un énième rapport, alors que les choses fonctionnent bien au sein de l’ONCFS – car c’est bien d’un début de remise en question de cet organisme qu’il s’agit. Nous avons cette fâcheuse tendance, dans notre pays, à vouloir changer ce qui marche. L’ONCFS fait du bon travail, mais vous entendez créer une brèche par laquelle le monde de la chasse sera une nouvelle fois attaqué. (Murmures divers)

M. François-Michel Lambert. Le monde de la chasse n’est pas attaqué. Le monde évolue, et l’ONCFS, comme toutes les autres structures, doit aussi tenir compte du nouvel environnement, avec l’arrivée de l’Agence française pour la biodiversité. Cette création offre une opportunité de placer chacun dans le rôle le plus performant. Je crois que les chasseurs y gagneront beaucoup. Hier soir, nous avons été nombreux à rappeler la qualité du travail des fédérations de chasseurs, en termes de recherche ou de mise à disposition de moyens et d’indicateurs. Ce sera aussi l’occasion de contrer les raccourcis qui peuvent exister vis-à-vis de ces fédérations et de l’ONCFS, et de mieux faire comprendre le rôle positif qu’ils jouent. Il ne faut pas avoir peur d’un rapport.

Mme Françoise Dubois. Dans le cadre du travail que Jean-Pierre Vigier et moi-même avons conduit sur les continuités écologiques, nous avons constaté que les strates étaient trop nombreuses et qu’il convenait de regrouper tous les organismes publics de façon qu’ils ne se contredisent pas. Les acteurs de terrain voient des personnes différentes qui leur donnent des consignes différentes et souvent contradictoires.

M. Martial Saddier. Deux choses sont profondément choquantes dans ces amendements. La première, c’est qu’après avoir échoué à intégrer l’ONCFS, vous remettez le couvert. La seconde, alors qu’il a fallu deux ans entre la première lecture et la seconde, et qu’il reste à franchir les étapes de la commission mixte paritaire, du Conseil constitutionnel et de la promulgation, c’est qu’à treize mois de la fin de la législature, au lieu d’essayer de terminer ce travail du mieux possible, vous déposez des amendements qui parlent de ce qui sera fait dans deux ans.

Mme la rapporteure. Le rapport ne devrait pas concerner que l’ONCFS. Les personnels de l’établissement public du marais poitevin (EPMP) ont décidé d’entrer dans l’AFB ; l’ONCFS l’aurait fait, nous n’aurions pas demandé un tel rapport.

M. David Douillet. L’ONCFS est financé à 70 % par les chasseurs, des gens qui défendent la biodiversité et son équilibre. Je ne suis pas sûr qu’ils continuent si l’ONCFS est absorbé par l’AFB.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 11 bis est ainsi rétabli.

Article 11 ter
Rapport relatif à l’élargissement du périmètre de l’agence française pour la biodiversité à l’établissement public du marais poitevin

En séance, le Sénat a adopté ce nouvel article selon lequel, dans un délai de deux ans, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’élargissement du périmètre de l’Agence française pour la biodiversité à l’établissement public du marais poitevin.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD717 de la rapporteure et CD833 de M. Lionel Tardy.

Mme la rapporteure. Je retire mon amendement, car l’établissement public du marais poitevin a décidé d’intégrer l’AFB et il n’y a donc pas de problème.

L’amendement CD717 est retiré.

M. Lionel Tardy. Cet article prévoit un rapport du Gouvernement relatif à l’élargissement du périmètre de l’AFB au marais poitevin. Je n’ai rien contre le marais poitevin mais plutôt contre les demandes de rapport. Ce serait, en l’occurrence, un rapport pour connaître le périmètre d’une agence qui n’est pas encore créée. C’est au Gouvernement de définir ce périmètre, dès maintenant, et cela aurait même dû être déjà fait. Je demande la suppression de cet article.

Mme la secrétaire d’État. L’article est satisfait par l’amendement qui vient d’être adopté.

Mme Delphine Batho. L’établissement public du marais poitevin, établissement public d’État, a été créé par une disposition législative. Nous n’aurons pas, dans un délai proche, de nombreuses occasions de revenir sur une disposition législative. Ce que souhaitent les acteurs du marais poitevin, c’est qu’une décision soit prise, non qu’elle soit renvoyée à un ou deux ans, après un hypothétique rapport. Je suis plutôt favorable à l’intégration de l’établissement dans l’AFB, à condition que soit garantie la pérennité de son action très importante, notamment en matière de politique de l’eau sur le territoire. Je souhaiterais que l’on aille au bout de cette discussion et que cette intégration soit décidée par un amendement en séance. Les acteurs nous disent : « C’est maintenant ou jamais. » Ils souhaitent faire partie de l’Agence dès sa création.

Mme la secrétaire d’État. Je suis tout à fait d’accord pour que nous ayons cette discussion d’ici à la séance.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il vaut donc mieux que l’article soit maintenu et, pour cela, que M. Tardy retire son amendement de suppression.

L’amendement CD833 est retiré.

La Commission adopte l’article 11 ter.

Article 14
Dispositions transitoires : représentation des personnels au conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité

Le présent article, sur lequel le Sénat a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur, fixe les modalités de représentation des personnels au sein du conseil d’administration de l’agence française pour la biodiversité, ainsi que celles applicables dans l’attente de la tenue des élections au sein du nouvel établissement.

Compte tenu du fait que les prochaines élections générales de la fonction publique devront se tenir en décembre 2018, votre commission a adopté un amendement présenté par votre rapporteure visant à ce que le texte de l’article 14 prévoie la tenue d’élections des représentants du personnel dans un délai de trente mois, et non deux ans, suivant la promulgation de la loi, afin que des élections n’interviennent pas à quelques mois d’intervalle si la loi était promulguée pendant l’été 2016.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CD718 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise, compte tenu de la date estimée de promulgation de la loi, à éviter que deux séries d’élections de représentants du personnel au conseil d’administration de l’Agence ne se tiennent à quelques mois d’intervalle, des élections étant prévues en décembre 2018. Nous souhaitons donc substituer aux mots « deux ans » les mots « trente mois ».

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 14 ainsi modifié.

Article 15
Élection des représentants du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l’Agence française pour la biodiversité

Votre commission a adopté, sur cet article adopté sans modification par le Sénat, un amendement de coordination présenté par votre rapporteure, fondé sur la même logique que l’amendement adopté à l’article 14. Cet amendement vise également, s’agissant de l’élection des représentants du personnel au comité technique de l’Agence française pour la biodiversité, à porter le délai dans lequel les élections doivent intervenir à trente mois, au lieu de deux ans, car les prochaines élections générales de la fonction publique devront se tenir en décembre 2018.

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La Commission examine l’amendement CD719 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Amendement de coordination. C’est la même modification que précédemment.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 15 ainsi rédigé.

Article 15 bis
(articles L. 213-8-1, L. 213-9-2, L. 213-9-3 du code de l’environnement)

Extension du périmètre d’intervention des agences de l’eau

Le présent article, inséré par un amendement du Gouvernement adopté en séance publique, étend le périmètre d’intervention des agences de l’eau. Les agences mettront en œuvre les SDAGE et les SAGE en favorisant une gestion non pas économique mais durable et équilibrée de la ressource en eau et elles pourront contribuer à la connaissance, à la protection et à la préservation de la biodiversité terrestre et marine ainsi que du milieu marin. La coopération entre les agences de l’eau et l’Agence française pour la biodiversité fera l’objet de conventions passées sur le modèle d’une convention type fixée par arrêté du ministre chargé de l’environnement.

Les agences de l’eau pourront apporter une aide financière aux personnes réalisant des actions d’intérêt commun visant une gestion équilibrée et durable du milieu marin et de la biodiversité. Enfin les contributions de l’agence de l’eau à l’AFB pourront être utilisées pour des interventions dans les départements d’outre-mer.

C’est donc une meilleure intégration des politiques de l’eau, de la biodiversité et du milieu marin qui est visée.

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement présenté par le rapporteur précisant que l’action des agences de l’eau s’exerce, concernant la biodiversité terrestre, dans le cadre de la stratégie nationale et des stratégies régionales pour la biodiversité. Il convient de rappeler que, pour le milieu marin, le document de référence est le plan d’action pour le milieu marin.

Votre commission a adopté un amendement de précision présenté par votre rapporteure, portant sur cette même question, et tendant à préciser que l’action des agences de l’eau en faveur de la biodiversité terrestre et marine s’inscrit, en particulier mais pas uniquement, dans le cadre de ces stratégies et de ce plan d’action.

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La Commission discute des amendements identiques CD246 de M. Martial Saddier et CD978 de Mme Valérie Lacroute.

M. Martial Saddier. Il s’agit d’un amendement fondamental. Nous avons fêté l’an dernier les cinquante ans des agences de l’eau, qui ont permis de flécher le produit des taxes sur l’eau douce sur des actions en faveur de l’eau douce. Tout le monde s’accorde à dire, même si des progrès restent à faire, que le système a été bien sécurisé, alors qu’en général, quand une taxe voit le jour, dix ans plus tard, elle sert à tout sauf à ce pour quoi elle a été créée. Les agences ont permis de sacraliser et de bien flécher l’argent de l’eau.

L’an dernier, 75 millions d’euros ont été prélevés sur leur budget pour le fonctionnement de l’AFB, qui n’a toujours pas été mise en route. Le projet de loi étend la redistribution de l’argent de l’eau douce au-delà du seul périmètre de l’eau douce, au secteur marin et ultramarin. Cela diminuera mathématiquement la quote-part du financement de l’eau douce. Nous demandons la suppression des alinéas 4, 5, 7, 8 et 9. C’est un amendement d’appel de manière à garantir le financement de l’AFB à la fois sur l’eau douce et la partie marine.

Mme Valérie Lacroute. Les agences de l’eau ont perdu 75 millions d’euros l’an dernier. L’extension au-delà des problématiques d’eau douce pose question.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Je trouve au contraire intéressant de s’écarter du principe « l’eau paie l’eau », car les agences de l’eau ont des relations avec le milieu marin et mènent d’autres actions que la potabilisation ou la création de conduites. Elles ont, c’est vrai, de moins en moins d’argent ; Jean Launay devrait présenter un amendement répondant au problème sans augmenter la fiscalité existante, prévoyant que les agences de l’eau perçoivent des taxes nouvelles, liées notamment au milieu marin. Puisque leurs missions sont étendues, il est nécessaire que leurs ressources s’élargissent.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable. Ces amendements visent à ne pas élargir les missions des agences de l’eau à la biodiversité et au milieu marin, alors qu’il leur est déjà possible d’intervenir en matière de biodiversité aquatique et de zones humides. Une telle proposition ne permettrait pas à l’AFB de financer ses missions en expansion en matière de biodiversité et de milieu marin à partir de la contribution financière des agences de l’eau.

Le Gouvernement considère que le financement de la biodiversité terrestre permet de renforcer la capacité de résilience des milieux, qui bénéficie aussi à la préservation des masses d’eau, et que le financement des milieux marins est nécessaire à l’atteinte des objectifs fixés par la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin ». L’extension du périmètre d’intervention des agences à la biodiversité et au milieu marin ne remet pas en cause les principes fondateurs de la fiscalité des agences : pollueur-payeur et « l’eau paie l’eau ». Plusieurs redevances perçues par les agences de l’eau visent des atteintes à la biodiversité – pollution diffuse, en particulier par les pesticides, des milieux aquatiques – et justifient que les agences financent les actions de préservation de la biodiversité.

Enfin, l’élargissement des missions des agences de l’eau à la biodiversité terrestre et au milieu marin permet une complémentarité des interventions des établissements publics de l’État dans les domaines de l’eau et de la biodiversité.

M. Bertrand Pancher. Nous ne ferons pas l’impasse sur une discussion sur les moyens apportés aux collectivités par les agences de l’eau et sur la stratégie des pouvoirs publics en matière de prélèvement et d’affectation de cette fiscalité. En trois ans, 30 % ont été prélevés sur le budget des agences de l’eau. Quid de la stratégie du Gouvernement, dans le projet de loi de finances pour 2017, avec l’arrivée des nouvelles conventions des agences ? Va-t-on prélever des sommes supplémentaires sur elles ? Quid de la loi NOME et des conséquences pour les collectivités en termes de tarifs de l’eau et de l’assainissement ? Les travaux sur les dessertes vont énormément peser sur les budgets des usagers.

Au cours du précédent mandat, je disais aux collectivités avec lesquelles j’étais en relation de ne pas réaliser de travaux s’ils devaient conduire à des tarifs supérieurs à 3 euros le mètre cube. La moyenne nationale en est actuellement à 3,80 euros. Avec les nouvelles missions confiées aux agences, cela va devenir une véritable folie, les 4 euros au mètre cube seront allègrement dépassés ! L’agence de l’eau de ma communauté d’agglomération s’est organisée pour ne plus avoir de trésorerie, à cause de la lourdeur des prélèvements de l’État et du manque de visibilité.

M. Guy Bailliart. Je suis également préoccupé par cette mesure. Nous vivons une période très difficile en ce qui concerne le financement de l’alimentation en eau potable et l’assainissement. En milieu rural, beaucoup de territoires ont des circuits d’eau potable d’une cinquantaine d’années, qu’il va falloir changer, et nous allons dans le mur à très brève échéance. Avons-nous les moyens de faire participer les agences de l’eau à des actions autres que sur l’eau douce ?

Ces agences fonctionnent selon une logique de bassin. Qu’en sera-t-il de cette logique ? Dans la Manche, une logique de bassin qui intégrerait les milieux marins n’a rien d’évident.

Le programme national d’aide aux personnes en assainissement non collectif a permis une amélioration de ces systèmes, mais cela a été très difficile à mettre en place et dépend totalement des subventions. Où va-t-on trouver l’argent pour de nouvelles missions ?

M. Michel Lesage. Il n’est pas possible de s’accrocher au principe de « l’eau paie l’eau », qui est déjà obsolète : les redevances étant appliquées sur le prix du mètre cube payé par les usagers, l’eau est payée par les usagers, et à 85 % par les usagers domestiques. En outre, la politique de l’eau nécessite une gestion intégrée des petits cycles et des grands cycles, terre et mer, car l’usager paie aussi les conséquences des problèmes de pollution, d’inondation et autres. Il est donc pertinent de se diriger vers une conception globale de la politique de l’eau et de réfléchir à un financement global de cette politique.

Mme la secrétaire d’État. Le système va devoir évoluer. Un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), qui va bientôt m’être remis et a déjà été présenté ce matin au Comité national de l’eau, doit faire la lumière sur le prix de l’eau, le coût des services de l’eau et les moyens de limiter la facture des ménages, qui est en moyenne de 3,50 euros par mètre cube aujourd’hui. Un second rapport a été commandé en début d’année par Ségolène Royal, au même CGEDD, sur le financement de la biodiversité. Ces rapports nous aideront à travailler sur ces questions essentielles.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques CD218 de M. Martial Saddier et CD849 de Mme Valérie Lacroute.

Mme Valérie Lacroute. Cet amendement vise à retirer aux agences de l’eau la mission « biodiversité terrestre » et donc à cibler ses nouvelles missions sur la biodiversité aquatique.

M. Martial Saddier. Je suis administrateur d’une agence de l’eau depuis de nombreuses années. Suivant les décisions qui seront prises, et qui consisteront, nous l’avons compris, à partager le gâteau, des programmes d’investissement devront être arrêtés.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision CD720 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 15 bis ainsi modifié.

Article 16
(articles L. 132-1, L. 172-1, L. 213-2, L. 213-3, L. 213-4, L. 213-4-1, L. 213-5, L. 213-6, L. 213-9-1, L. 213-9-2, L. 213-10-8, L. 213-12-2, L. 331-29, L. 334-1, L. 334-2, L. 334-4, L. 334-5, L. 334-7, L. 414-10, L. 437-1 du code de l’environnement, article L. 942-1 du code rural et de la pêche maritime)

Organisation de l’intégration des différents opérateurs de l’État fusionnant dans l’Agence française pour la biodiversité

Le présent article organise l’intégration des établissements publics devant être fusionnés avec l’Agence française pour la biodiversité.

1. Les travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur ainsi qu’un amendement présenté par le rapporteur selon lequel c’est à l’AFB qu’il revient d’être responsable de l’inventaire national du patrimoine naturel pour l’État.

En séance, le Sénat a adopté :

– un amendement présenté par le Gouvernement modifiant la gouvernance du plan Ecophyto actuellement définie par l’article L. 213-4-1 du code de l’environnement. La révision du plan Ecophyto conduit en effet à modifier les dispositions législatives mentionnant ce plan afin de tenir compte des évolutions apportées. Le comité consultatif de gouvernance et le comité national d’orientation et de suivi du plan sont fusionnés et remplacés par le comité d’orientation stratégique et de suivi du plan, composé, et c’est une évolution importante, de l’ensemble des parties prenantes du plan. Ce comité donne son avis sur les orientations stratégiques et financières du plan. Le programme annuel et le budget prévisionnel correspondant lui sont en particulier soumis pour avis. Actuellement, l’article L. 213-4-1 du code de l’environnement dispose que les aides sont attribuées après avis d’un comité consultatif de gouvernance dont la composition est fixée par décret et qui comprend notamment des représentants des professions agricoles ;

– deux amendements de coordination et rédactionnels présentés par le rapporteur.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté quatre amendements identiques, dont l’un a été présenté par votre rapporteure, supprimant l’alinéa 24 selon lequel l’AFB, et non l’État, est responsable de l’inventaire national du patrimoine naturel car il est préférable que cette compétence reste du ressort de l’État, comme le prévoit par ailleurs l’article 3 ter du projet de loi qui procède à la réécriture de l’article L. 411-5, devenu L. 411-1-A.

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La Commission est saisie des amendements identiques CD219 de M. Martial Saddier, CD722 de la rapporteure, CD862 de Mme Valérie Lacroute et CD864 de M. Jean-Louis Bricout.

Mme la rapporteure. Il s’agit de conserver à l’État la mission d’animer l’inventaire national du patrimoine naturel.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 16 ainsi modifié.

Article 16 bis
(article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales)

Amélioration de l’information des citoyens sur le prix et la qualité des services de l’eau potable et de l’assainissement

Le présent article, introduit en commission à l’Assemblée nationale à l’initiative du Gouvernement, vise à améliorer l’information des citoyens sur le prix et la qualité des services de l’eau potable et de l’assainissement en améliorant la transmission dématérialisée des données.

Le Sénat a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur en séance publique.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 16 bis sans modification.

Article 17
Entrée en vigueur

Le présent article définit le conseil d’administration transitoire de l’agence ainsi que l’entrée en vigueur des articles du titre III.

En séance, le Sénat a adopté, à l’initiative du Gouvernement, un amendement précisant que :

– jusqu’à l’installation du conseil d’administration de l’AFB, un conseil d’administration transitoire, composé des membres des quatre conseils d’administration des établissements publics qui composent l’Agence française pour la biodiversité, règle par ses délibérations les affaires de l’établissement ;

– les articles 11, 12 et 16 de la présente loi entrent en vigueur à compter de la publication du décret en Conseil d’État prévu à l’article 9.

Votre commission a adopté deux amendements présentés par le Gouvernement visant à :

– faire référence aux organismes publics, au lieu des établissements publics, pour pouvoir prévoir l’association du conseil d’administration du groupement d’intérêt public ATEN au conseil d’administration transitoire de l’agence ;

– fixer un délai d’un an à l’autorité administrative pour permettre d’installer le conseil d’administration de l’agence ;

– prévoir que les articles 11, 12 et 16, à l’exclusion du b du 3° quater de cet article 16 (relatif à la gouvernance du plan Ecophyto qui entrerait donc en vigueur avec la promulgation de la loi), entrent en vigueur à la date fixée dans le décret en Conseil d’État prévu à l’article 9 et au plus tard le 31 décembre 2017.

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La Commission est saisie de l’amendement CD1000 rectifié du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. L’article 17 a été revu pour introduire un conseil d’administration provisoire et retoucher l’entrée en vigueur opérationnelle de l’Agence française pour la biodiversité. Il mérite encore quelques ajustements rédactionnels. Le présent amendement permet au paragraphe I de prévoir l’association du conseil d’administration du groupement d’intérêt public Atelier public des espaces naturels (ATEN), qui n’est pas un établissement public, au conseil d’administration transitoire de l’AFB, et fixe un délai à l’autorité administrative pour prendre le décret en Conseil d’État qui rendra l’Agence totalement opérationnelle.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD571 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Les reports successifs du projet de loi ont contraint les sénateurs à créer un conseil d’administration transitoire pour l’AFB. Ce conseil devrait, selon nous, être composé non seulement, comme dans la rédaction actuelle, des membres des conseils d’administration des établissements composant l’AFB, mais aussi des membres du Comité national « trame verte et bleue ».

Mme la rapporteure. En qualité de présidente du Comité national « trame verte et bleue », je pense que le Comité n’a pas sa place dans le conseil d’administration de l’AFB, même pendant la période transitoire. Ce n’est pas du tout la même chose qu’un établissement public. Cela n’empêche que je salue le travail des membres de ce comité, qui a permis des avancées formidables sur les continuités écologiques et les réservoirs de biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. Je m’associe à cet hommage.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD1013 rectifié du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à différer l’entrée en vigueur des articles 11, 12 et 16 de manière à ne pas faire disparaître les organismes intégrant l’AFB avant la création de cette dernière, qui sera effective à la publication du décret prévu à l’article 9, lequel doit être pris au plus tard un an après la promulgation de la loi, sans toutefois différer l’entrée en vigueur d’une disposition de l’article 16 faisant évoluer la gouvernance du plan Ecophyto suite à sa révision en octobre 2015.

Cette disposition met, en effet, en place un comité d’orientation stratégique et de suivi du plan qui a vocation à se réunir dès l’entrée en vigueur de la loi.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 17 ainsi modifié.

Article 17 bis
Audition préalable du candidat à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité

Le présent article permet d’effectuer les coordinations nécessaires, dans la loi du 23 juillet 2010 (8), à l’audition préalable par les commissions parlementaires compétentes du candidat à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, prévue par la proposition de loi organique relative à la nomination du président du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité (n° 2055 rectifié).

En séance publique, le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur, un amendement de coordination avec la loi organique n° 2015-911 du 24 juillet 2015 relative à la nomination du président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 17 bis sans modification.

TITRE III BIS
GOUVERNANCE DE LA POLITIQUE DE L’EAU

Article 17 ter
(article L. 213-8 du code de l’environnement)

Modification de la composition des comités de bassin

Le présent article, introduit en séance publique à l’Assemblée nationale, vise à modifier la composition des comités de bassin.

1. Les travaux de l’Assemblée nationale en première lecture

Actuellement, en application de l’article L. 213-8 du code de l’environnement, le comité de bassin est formé :

– pour 40 %, d’un premier collège composé de représentants des conseils départementaux et régionaux et, majoritairement, de représentants des communes ou de leurs groupements compétents dans le domaine de l’eau ;

– pour 40 %, d’un deuxième collège composé de représentants des usagers de l’eau et des milieux aquatiques, des organisations socioprofessionnelles, des associations agréées de protection de l’environnement et de défense des consommateurs, des instances représentatives de la pêche et de personnes qualifiées ;

– pour 20 %, d’un troisième collège composé de représentants de l’État ou de ses établissements publics concernés.

Le président est élu par les représentants des deux premiers collèges (représentants des collectivités locales et des usagers).

Le comité de bassin est notamment consulté sur l’opportunité des actions significatives d’intérêt commun au bassin. Il définit les orientations de l’action de l’agence de l’eau et participe à l’élaboration des décisions financières de l’agence de l’eau.

Le décret n° 2014-722 du 27 juin 2014 relatif aux comités de bassin et l’arrêté du 27 juin 2014 relatif à la représentation des usagers aux comités de bassin ont fait évoluer la composition des comités de bassin. Ainsi, le collège des usagers de l’eau a été divisé en trois sous-collèges (article D 213-17 du code de l’environnement) :

– le sous-collège des « usagers non professionnels » ;

– le sous-collège des usagers professionnels « Agriculture, pêche, aquaculture, batellerie et tourisme » ;

– et le sous-collège des usagers professionnels « Entreprises à caractère industriel et artisanat ».

L’article D 213-19 prévoit que le président du comité de bassin est un représentant des collectivités territoriales ou une personnalité qualifiée du deuxième collège. Les vice-présidents sont au nombre de trois et sont issus de chacun des trois sous-collèges d’usagers. Ils sont élus par les représentants des collectivités territoriales et par les représentants des usagers.

La Cour des comptes a, dans son rapport public annuel 2015, estimé que la réforme n’avait pas suffisamment amélioré la représentation des usagers non professionnels car les représentants du deuxième collège comprennent encore une trop forte proportion de représentants des usagers professionnels.

L’Assemblée nationale a donc modifié la composition des comités de bassin en scindant le deuxième collège en deux collèges, afin d’assurer que 20 % des membres des comités de bassin seraient des représentants des usagers non économiques. Ainsi, le comité de bassin serait composé :

– pour 40 %, d’un premier collège composé de représentants des conseils départementaux et régionaux et, majoritairement, de représentants des communes ou de leurs groupements compétents dans le domaine de l’eau ;

– pour 20 %, d’un deuxième collège composé de représentants des usagers non économiques de l’eau et des milieux aquatiques, des associations agréées de protection de l’environnement et de défense des consommateurs, des instances représentatives de la pêche et de personnes qualifiées ;

– pour 20 %, d’un troisième collège composé de représentants des usagers économiques de l’eau et des milieux aquatiques et des organisations socioprofessionnelles ;

– pour 20 %, d’un troisième collège composé de représentants de l’État ou de ses établissements publics concernés.

Le président serait élu par les trois premiers collèges.

2. Les travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement présenté par le rapporteur, tendant à consacrer, dans la partie législative du code, la réforme mise en œuvre par le décret de 2014 précité et prévoyant que chaque sous-collège peut élire son vice-président en son sein (ce qui n’est pas le cas actuellement). Par ailleurs, le collège des usagers comprend des représentants des milieux marins et de la biodiversité.

En séance publique, les sénateurs ont adopté trois amendements :

– deux amendements identiques tendant à inclure les représentants des sylviculteurs au sein des comités de bassin ;

– le dernier, présenté par le rapporteur, visant à ce que le premier collège comprenne au moins un parlementaire et à mieux représenter les groupements de collectivités compétents dans le domaine de l’eau (le terme groupements de collectivités se substituant à celui de groupements de communes).

3. La position de votre commission

Votre commission a pris acte du caractère récent de la réforme intervenue en 2014 ainsi que de l’ensemble des modifications proposées par le présent projet de loi, s’agissant notamment des actions des agences de l’eau, et a estimé que la réforme proposée par l’Assemblée nationale pourrait utilement être reportée au prochain renouvellement des représentants élus ou désignés des comités de bassin. La durée de leur mandat est fixée à six ans. Votre commission n’a donc pas adopté d’amendement sur cet article, au bénéfice d’un travail à mener en séance publique sur la gouvernance de l’eau.

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* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD519 de Mme Laurence Abeille et CD630 de Mme Delphine Batho.

L’amendement CD519 est retiré.

Mme Viviane Le Dissez. L’amendement CD630 tend à modifier les collèges au sein des agences de l’eau, afin notamment de garantir une juste représentation entre collectivités, usagers professionnels et non professionnels.

Mme la rapporteure. J’y étais favorable en première lecture mais une réforme est intervenue en 2014, qui a bousculé les agents. Leur imposer une réforme supplémentaire maintenant me paraît compliqué, d’autant plus que leurs missions sont lourdes, dans un contexte pas franchement favorable.

Mme la secrétaire d’État. La gouvernance de la politique de l’eau a été réformée en juillet 2014 par Mme Ségolène Royal, après une longue concertation de tous les acteurs de l’eau dans le cadre du Comité national de l’eau, à la suite de la Conférence environnementale. Cette nouvelle organisation, qui a permis de renforcer la représentation des usagers non économiques et leur a offert une vice-présidence de comité de bassin, est en train de se mettre en place, et cela a l’air de se passer plutôt bien. Je demande le retrait de l’amendement.

M. Martial Saddier. Je soutiens la position sage de la rapporteure. Une vraie évolution a eu lieu dans les agences. Le vice-président est en voie d’être élu. Il ne faut pas tout remettre à plat maintenant, cela risquerait d’être une marche en arrière plutôt qu’une marche en avant.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je ne comprends pas en quoi la modification de la composition des agences perturberait les agents qui y travaillent.

Mme la rapporteure. Vous avez raison. C’est simplement une question de réorganisation.

M. Michel Lesage. Une réponse purement conjoncturelle et ponctuelle à la question de la gouvernance de l’eau et de la démocratie de l’eau, au motif que le Comité national de l’eau, où les lobbies économiques sont très présents, s’est prononcé, serait ignorer que cette réflexion est demandée depuis dix ans par la Cour des comptes et les associations de protection de l’environnement et de consommateurs. Le collège des usagers représente les usagers à la fois domestiques et non domestiques, et les représentants associatifs sont parfois même des représentants de chambres d’agriculture ou d’industriels. Alors que les usagers domestiquent payent 85 % des redevances, ils peuvent ne représenter que 30, 20, voire 10 % des membres des conseils d’administration ; c’est une injustice fondamentale. Les associations demandent depuis longtemps à ne pas être associées au monde industriel, qui joue les rapports de force et défend par définition des intérêts privés. Cet amendement, dont je suis le deuxième signataire, est extrêmement important.

M. Bertrand Pancher. Nous sommes atteints de « diarrhée législative » (Sourires), les textes changent tout le temps. Je partage l’avis de M. Michel Lesage dans l’absolu, mais nous passons notre temps à changer le fonctionnement des agences. Faisons une pause !

M. Jean-Louis Bricout. Nous avons besoin de stabilité. Les usagers sont aussi représentés par les élus.

M. Michel Lesage. Les élus sont, en effet, censés représenter l’intérêt général, et ils le font souvent, mais leur taux d’absentéisme est malheureusement très élevé dans les conseils d’administration. C’est une réalité dont témoignent les rapports d’experts.

Mme Martine Lignières-Cassou. L’amendement ne propose pas de révolution. Il s’agit seulement de scinder en deux la représentation des usagers – non économiques, d’un côté, économiques, de l’autre –, car leurs intérêts ne sont pas forcément convergents.

Mme la rapporteure. Prévoir cela à la date de renouvellement serait moins impactant. Nous pouvons y travailler d’ici à la séance.

Mme la secrétaire d’État. Comme souvent, les débats parlementaires permettent d’avancer. Nous pouvons aboutir à quelque chose d’intelligent en séance.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mme Viviane Le Dissez, retirez-vous l’amendement CD630 ? Ainsi d’ailleurs que le CD631 ?

L’amendement CD630 est retiré, ainsi que l’amendement CD631 de Mme Delphine Batho.

La Commission adopte l’article 17 ter sans modification.

Article 17 quater
(article L. 213-8-1 du code de l’environnement)

Représentation des usagers non économiques dans les conseils d’administration des agences de l’eau

Le présent article vise à modifier la composition du conseil d’administration d’une l’agence de l’eau, compte tenu de l’évolution de la composition des comités de bassin prévue par l’article 17 ter.

1. Les travaux de l’Assemblée nationale en première lecture

L’agence de l’eau est administrée par un conseil d’administration, qui comprend, outre son président, 34 membres, et est composé :

– de onze représentants désignés par le premier collège des comités de bassin en leur sein (collectivités territoriales) ;

– de onze représentants désignés par le deuxième collège des comités de bassin en leur sein (usagers) ;

– de onze représentants de l’État ou de ses établissements publics ;

– d’un représentant du personnel de l’agence.

Les représentants désignés par le premier collège, ceux désignés par le deuxième collège et les représentants de l’État disposent d’un nombre égal de sièges.

En première lecture, l’Assemblée nationale avait adopté une modification de l’article L. 213-8-1 visant à ce que le conseil d’administration des agences de l’eau comprenne des représentants des usagers non économiques de l’eau et des représentants des usagers économiques de l’eau. Toutefois, le dispositif adopté comportait une erreur de référence.

2. Les travaux du Sénat en première lecture

Une nouvelle rédaction de l’article 17 quater a été adoptée en commission au Sénat, en cohérence avec la rédaction de l’article 17 ter issue des travaux du Sénat. Un amendement rédactionnel présenté par le rapporteur a été adopté en séance publique. Chaque sous collège du deuxième collège des usagers aura un nombre égal de représentants et un siège sera ajouté pour les organisations socio-professionnelles ainsi qu’un siège pour une personnalité qualifiée (ce qui aboutit à prévoir trois sièges pour les représentants de chaque sous-collège).

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement visant à prévoir que chaque sous-collège des usagers désigne ses représentants en son sein et à ce que, parmi les représentants des usagers, au moins trois personnes appartiennent au sous-collège des usagers non professionnels (sur les onze représentants). Elle a également rappelé son souhait de voir intervenir une réforme de la gouvernance de l’eau lors du prochain renouvellement des comités de bassin.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD874 de M. Jean Launay, CD520 de Mme Laurence Abeille, et CD632 de Mme Delphine Batho.

Les amendements CD520 et CD632 sont identiques.

M. Jean Launay. Depuis que ce projet de loi a commencé son cheminement, les instances de bassin qui gèrent la politique de l’eau ont eu le temps de se renouveler en 2014. En première lecture, nous avions déjà évoqué la question de la représentation dans le collège des usagers où l’on retrouve les trois contributeurs aux redevances : les usagers domestiques et les deux usagers dits « professionnels », agriculteurs et industriels. De nombreux débats traversent ces instances ainsi que le Comité national de l’eau que j’ai l’honneur de présider à l’instigation de l’ancienne ministre de l’écologie, Mme Delphine Batho.

Ces débats portent sur la gouvernance et la représentation. Certains soutiennent que les usagers domestiques, qui supportent l’essentiel des redevances, que ce soit au titre du prélèvement sur la ressource ou de la pollution, n’ont pas le poids qui leur correspond dans le collège des usagers. Au moment où nous mettons en place l’Agence française de la biodiversité, alors que les redevances de l’eau seront très probablement appelées à payer pour la biodiversité – et pas seulement pour la diversité aquatique ou marine –, cette situation risque de créer un déséquilibre au sein des instances telles qu’elles existent actuellement et telles qu’elles seront amenées à évoluer.

Même si je comprends leur motivation, les amendements qui viseraient à porter la seule voix des usagers domestiques risqueraient de fragiliser le système des agences de l’eau alors qu’il est déjà difficile de faire accepter le principe de l’extension des interventions en faveur de la biodiversité au milieu marin. Je ne voudrais pas que la diminution du poids des acteurs économiques – que ce soit les agriculteurs, les industriels, ou les pêcheurs professionnels – remette en cause leur consentement à payer.

Mon amendement CD874 vise à garantir une représentation suffisante du sous-collège des usagers non professionnels au sein des conseils d’administration des agences de l’eau, tout en permettant une représentation des sous-collèges des usagers professionnels adaptée au territoire : c’est la raison pour laquelle nous avons prévu que l’équilibre entre les représentants des agriculteurs et assimilés et des industriels et assimilés pourra varier en fonction du caractère plus ou moins rural ou industriel du bassin. La désignation de personnalités qualifiées ou de représentants socioprofessionnels reste également possible.

Mme Laurence Abeille. J’entends qu’il est difficile de revenir dès aujourd’hui sur les évolutions qu’ont connues les agences de l’eau il y a relativement peu de temps. Cela étant, nous sommes réunis pour trouver un équilibre afin que les usagers puissent s’y sentir réellement représentés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Je comprends la complexité de la situation, mais je maintiens mon amendement CD520 tout en étant prête à accepter que la représentation des usagers n’évolue que lors du prochain renouvellement des conseils d’administration des agences. À la veille d’un nouveau bouleversement, nous donnerions aux acteurs un signe de notre volonté politique en précisant les choses dès aujourd’hui dans le texte de la loi.

Mme Delphine Batho. Monsieur le président, je vous présente mes excuses pour n’avoir pu assister à la fin des débats de la commission, mercredi dernier : je pensais naïvement que la séance serait levée à vingt heures… (Sourires)

Mon amendement CD632 est de cohérence avec les amendements CD630 et CD631 à l’article 17 ter qui ont été retirés mercredi.

Le rapport accablant de la Cour des comptes impose au législateur de prendre ses responsabilités.

Il n’est pas proposé de fixer une représentation proportionnelle à la redevance versée : la part des usagers économiques est donc pleinement respectée.

J’ajoute que, pour ma part, je refuse complètement la notion de « sous-collège » introduite au Sénat : les usagers non professionnels ne sont pas des sous-usagers. Il faut en revenir à des choses simples, c’est-à-dire à un principe d’égalité entre les professionnels et les autres.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La semaine dernière, nous avons décidé que, dans la mesure où des bouleversements ont déjà eu lieu en 2014 et où le nouveau système commence à fonctionner, les prochaines modifications ne seraient effectives que lors des prochains renouvellements des instances. Je suis donc plutôt favorable à l’amendement CD874 qui propose une solution d’attente dans la perspective de la réforme que nous appelons de nos vœux.

Les choses sont plus compliquées s’agissant des amendements CD520 et CD632, même si nous abondons dans le sens de Mme Batho : il n’y a pas de sous-usagers.

Je rappelle que le projet de loi élargit les missions des agences de l’eau. Je signale aussi que je soutiendrai en séance publique un amendement que M. Jean Launay n’a pas pu présenter la semaine dernière, et qui vise à alléger les redevances dues par les usagers. Ajoutons que le programme d’intervention des agences de l’eau se met en place pour 2018 : il me paraît en conséquence judicieux d’attendre que ces trois éléments trouvent une traduction dans la réalité pour avancer. Je suggère le retrait des amendements identiques.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Je suis favorable à l’amendement CD874 de M. Jean Launay, qui améliore le texte adopté au Sénat en autorisant une représentation des usagers professionnels adaptée aux caractéristiques du bassin.

Nous avons la volonté de ne pas déstabiliser dès aujourd’hui une réforme engagée il y a très peu de temps, en concertation avec les différents acteurs. Les conseils d’administration se mettent actuellement en place et les usagers ont obtenu une vice-présidence ; les acteurs commencent à peine à s’y retrouver dans une nouvelle organisation qui suscite plutôt des retours positifs.

Certaines attentes s’expriment cependant ; je les entends. Mais il faut aussi prendre garde à certains écueils. Le fameux rapport de la Cour des comptes, cité par Mme Delphine Batho, notait également la nécessité de renforcer la position de l’État dans les conseils d’administration, que les amendements CD520 et CD632 conduiraient pourtant à l’affaiblir – l’État ne détiendrait plus que 25 % des sièges contre 33 % actuellement –, en même temps qu’ils renforceraient la représentation des usagers économiques, qui passerait de moins de 20 % à 25 %.

Nous sommes parvenus à un compromis auquel il me semble que nous devons nous tenir. La réforme que les amendements de Mme Laurence Abeille et Mme Delphine Batho proposent sera envisagée, mais pour le prochain renouvellement, en 2020. En attendant qu’un autre amendement soit préparé en ce sens, je suggère leur retrait.

Mme Delphine Batho. Nous ne faisons que proposer de revenir à ce que l’Assemblée nationale avait adopté en première lecture et que le Sénat a modifié. Les amendements que nous avions alors défendus ne touchaient pas à l’équilibre entre l’État et les collectivités territoriales, et cela était délibéré car, sur ce sujet, nous ne partageons pas le point de vue de la Cour des comptes. Nos amendements visaient l’égalité entre les usagers économiques et non économiques.

Je ne comprends pas bien la position qui consiste à accepter l’amendement de M. Jean Launay modifiant la composition du conseil d’administration des agences et entérinant de fait la notion de sous-collège, tout en refusant des amendements qui ne font que rétablir le texte adopté par l’Assemblée qui modifiait également la composition de ce conseil.

D’ici à la séance, je travaillerai, quoi qu’il en soit, à un ajustement pour le prochain renouvellement des conseils d’administration puisque la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », soulève un certain nombre de problèmes en matière de désignation des représentants des collectivités territoriales, en particulier pour ce qui concerne les communautés de communes. À mon sens, cela pose la question d’un renouvellement général des conseils d’administration des agences pour 2017 ou 2018.

Pour toutes ces raisons, je ne souhaite pas retirer mon amendement CD632.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je constate que les trois amendements en discussion commune sont maintenus. Je rappelle que notre rapporteure et le Gouvernement ont émis un avis favorable à l’amendement CD874.

La Commission adopte l’amendement CD874.

En conséquence, les amendements CD520 et CD632 tombent.

La Commission adopte ensuite l’article 17 quater ainsi modifié.

Article 17 quinquies
(articles L. 213-8-3 et L. 213-8-4 [nouveau] du code de l’environnement)

Création d’une commission des aides au sein des agences de l’eau et d’un régime d’incompatibilités de fonctions pour les membres des conseils d’administration

Le présent article, inséré par l’Assemblée nationale en première lecture, vise à instituer une commission des aides au sein des conseils d’administration des agences de l’eau ainsi qu’un régime d’incompatibilité de fonctions.

1. La disposition adoptée à l’Assemblée nationale en première lecture

Les agences de l’eau mettent en œuvre les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, attribuent des aides financières dans le cadre d’un programme pluriannuel, perçoivent les redevances des utilisateurs et mènent une politique foncière de sauvegarde des zones humides.

L’article 17 quinquies dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée visait à ce que :

– chaque conseil d’administration mette en place une commission des aides, qui se prononce sur l’attribution des aides financières attribuées par l’agence de l’eau. Cette commission est composée de représentants des différents collèges siégeant au conseil d’administration. Ses délibérations et décisions sont rendues publiques ;

– les fonctions de membre du conseil d’administration d’une agence de l’eau définie à l’article L. 213-8-1 soient incompatibles avec les fonctions définies par décret en Conseil d’État. Quiconque se trouve dans ce cas d’incompatibilité doit démissionner des fonctions ou du mandat qu’il détenait antérieurement ;

– les membres du conseil d’administration de l’agence de l’eau souscrivent une déclaration publique d’intérêts ;

– un membre du conseil d’administration directement intéressé par une délibération comme représentant d’une entreprise, d’une collectivité territoriale ou d’une association bénéficiant d’une subvention en discussion ne participe pas au débat.

2. Les travaux du Sénat en première lecture

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement présenté par le rapporteur substituant au régime d’incompatibilité de fonctions une charte de déontologie visant à prévenir les conflits d’intérêts. Les membres du conseil d’administration souscriraient une déclaration publique d’intérêts.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement présenté par le Gouvernement visant à supprimer le renvoi à un décret pour la définition des règles de déontologie.

3. La position de votre commission

Votre commission a souhaité revenir à la rédaction de cet article telle qu’elle était issue des travaux de l’Assemblée nationale et a donc rétabli le régime d’incompatibilité.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD633 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. L’Assemblée nationale avait adopté en première lecture un amendement identique, avec l’avis favorable du Gouvernement, afin de mettre en place un régime de prévention des conflits d’intérêts dans la gouvernance des agences de l’eau. Nous proposons de revenir à ce texte que le Sénat a modifié.

Mme la rapporteure. Je suis favorable à cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Il s’agit de prévoir des cas d’incompatibilité de la fonction de membre du conseil d’administration d’une agence de l’eau avec certaines fonctions définies par décret ainsi qu’une règle de fonctionnement visant à prévenir les conflits d’intérêts.

Il me paraît dommage de ne pas adopter la version du Sénat qui a amélioré la lisibilité du texte en supprimant les dispositions qui n’étaient pas de nature législative ou celles qui étaient inopérantes. Le Gouvernement avait de surcroît proposé par amendement de ne pas recourir à un décret, ce qui n’était pas indispensable. Aucune fonction ne paraît justifier une incompatibilité avec celle d’administrateur d’une agence de l’eau, à l’exception de celles qu’exercent les agents en exercice dans cette dernière, représentants du personnel exclus. Par ailleurs, à la demande de Mme Ségolène Royal, tous les conseils d’administration des agences ont adopté ou adoptent actuellement des chartes de déontologie homogènes et beaucoup plus complètes que ce que prévoit la loi, afin de prévenir tout conflit d’intérêts.

Toutefois, s’agissant de cet amendement, je m’en remets à la sagesse de votre commission.

Mme Delphine Batho. Le texte que nous avions adopté en première lecture était meilleur que le condensé qu’en a fait le Sénat : il prévoyait la mise en place d’une commission des aides dans chaque conseil d’administration, et il ne se contentait pas de poser des règles de déontologie : il mettait bel et bien en place un régime d’incompatibilités.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 17 quinquies est ainsi rédigé.

TITRE IV
ACCÈS AUX RESSOURCES GÉNÉTIQUES ET PARTAGE JUSTE ET ÉQUITABLE DES AVANTAGES

Article 18
(articles L. 412-2-1 à L. 412-18 [nouveaux] du code de l’environnement)

Accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées, partage des avantages en découlant, traçabilité et contrôle de l’utilisation

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

a. Un dispositif d’APA national

L’article 18 crée un dispositif dit « d’APA » (accès et partage des avantages) pour l’utilisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées, avec des dispositifs de déclaration et de contrôle, afin de transposer dans le droit national les dispositions du Protocole de Nagoya à la Convention de Nairobi sur la diversité biologique, et d’adapter le droit national aux dispositions du règlement européen n° 511/2014 du 16 avril 2014.

L’article 18 introduit dans le code de l’environnement une section relative à ce dispositif, qui sera applicable sur l’ensemble du territoire français et vient donc se substituer aux dispositifs d’APA antérieurs qui étaient spécifiques à la Guyane, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie.

Le Protocole de Nagoya a été adopté en 2010, la France l’a signé en 2011, et l’article 26 ter du présent projet de loi permet la ratification de ce traité.

Le nouvel article L. 412-3 du code de l’environnement définit les notions suivantes : « utilisation de ressources génétiques », « utilisation de connaissances traditionnelles associées », « partage des avantages » (en précisant en quelles actions ce partage peut consister), « communauté d’habitants », « connaissances traditionnelles associées à une ressource génétique », « espèce domestiquée ou cultivée », « espèce sauvage apparentée » et « collection ».

La notion juridique de « communauté d’habitants »

L’article 18 du projet de loi s’attache notamment à établir un lien juridique entre les connaissances traditionnelles et les communautés d’habitants qui les détiennent. La définition proposée de « communauté d’habitants » respecte à la fois la Convention sur la diversité biologique (voir commentaire de l’article 26 ter), le Protocole de Nagoya et les principes constitutionnels français. Ceux-ci, en particulier l’indivisibilité de la République, l’unité du peuple français et l’égalité des citoyens, interdisent de reconnaître des droits collectifs (en l’occurrence, la capacité juridique de consentir à l’accès et à l’utilisation de leurs connaissances traditionnelles et de contracter en vue du partage des avantages) à des groupes sur des fondements ethniques – la représentation des intérêts de certaines communautés pouvant toutefois être assurée en se basant sur des critères objectifs, par exemple géographiques.

Le Gouvernement français va formuler, au moment de la ratification du Protocole de Nagoya, une déclaration interprétative relative à l’expression « communautés autochtones et locales » qui est employée par la Convention sur la diversité biologique et par le Protocole. Comme l’a fait le Gouvernement lors de l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, cette déclaration interprétative visera à rappeler qu’en vertu des principes à valeur constitutionnelle d’indivisibilité de la République et d’unité du peuple français, le peuple français est constitué de tous les citoyens français sans aucune distinction d’origine, de race ou de religion. La notion de « communauté autochtone et locale » est en conséquence traduite en droit national par celle de « communauté d’habitants ».

Le champ d’application du dispositif d’APA est défini par le nouvel article L. 412-4. Il concerne à la fois les utilisateurs des ressources génétiques, c’est-à-dire les chercheurs publics et privés, et les fournisseurs de ces ressources et de connaissances traditionnelles associées à ces ressources. Le propriétaire et fournisseur des ressources génétiques est l’État ; les fournisseurs des connaissances traditionnelles associées sont les communautés d’habitants.

Les ressources agricoles ne sont pas dans le champ couvert par le dispositif d’APA, soit parce qu’elles sont régies par un traité international, soit parce qu’elles seront régies par une ordonnance que l’article 26 du projet de loi habilite le Gouvernement à prendre.

b. L’APA pour les ressources génétiques

Deux procédures sont prévues :

1° Si la recherche n’a pas de visée commerciale, l’utilisation ne nécessite qu’une procédure de déclaration (nouvel article L. 412-5) :

● l’organisme de recherche fait une déclaration auprès de l’autorité administrative, qui lui remet un récépissé de déclaration ;

● il conclut une convention de partage des avantages non monétaires ;

● l’autorité administrative fait enregistrer le récépissé de déclaration en tant que certificat international de conformité au Centre d’échange des Nations Unies sur l’accès et le partage des avantages créé dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.

2° Si la recherche a un objectif de développement commercial, l’utilisateur doit se soumettre à une procédure d’autorisation (nouvel article L. 412-6) :

● l’organisme de recherche dépose un dossier de demande d’autorisation auprès de l’autorité administrative ;

● il conclut une convention de partage des avantages avec l’autorité administrative ; ce partage peut comprendre des avantages financiers, mais ce n’est pas systématique (le Protocole de Nagoya prévoit seulement que le partage doit être « juste et équitable ») ;

● l’autorité administrative délivre l’autorisation d’accès à la ressource génétique en vue de son utilisation spécifique dans le cadre du projet présenté (le délai d’instruction de la demande d’autorisation ne peut excéder deux mois, et le refus d’autorisation doit être motivé) ;

● l’autorité administrative fait enregistrer l’autorisation comme certificat international de conformité auprès du Centre d’échange sur l’accès et le partage des avantages.

Une liste des motifs pouvant justifier le refus de l’autorisation figure dans le nouvel article L. 412-6. Trois motifs sont prévus : l’absence d’accord sur le partage des avantages ; un partage des avantages qui ne correspond manifestement pas aux capacités techniques et financières du demandeur ; un risque que l’activité ou ses applications potentielles affectent la biodiversité de manière significative, restreignent son utilisation durable, ou épuisent la ressource génétique concernée. Un décret en Conseil d’État définira une procédure de conciliation pouvant être mise en œuvre quand le demandeur et l’administration ne parviennent pas à un accord sur le partage des avantages.

c. L’APA pour les connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques

Pour l’accès à ces connaissances, qui sont détenues par des communautés d’habitants, la procédure d’autorisation (nouveaux articles L. 412-8 à L. 412-12) exige qu’une personne morale de droit public désignée par décret en Conseil d’État organise une consultation de la communauté d’habitants qui détient le savoir traditionnel.

Cette personne morale peut être un « établissement public de coopération environnementale » (EPCE) – nouvelle catégorie d’établissements publics, créée par l’article 32 du projet de loi –, ou, à défaut d’EPCE, l’État ou un établissement public national compétent en matière d’environnement (nouvel article L. 412-8).

À l’issue de cette consultation, la personne morale de droit public dresse un procès-verbal qui relate le déroulement de la consultation et qui constate l’accord, ou l’absence d’accord, sur l’utilisation de la connaissance. Au vu de ce procès-verbal, l’autorité administrative accorde ou refuse l’autorisation des connaissances ; sa décision est notifiée au demandeur et publiée (nouvel article L. 412-10).

S’il y a accord constaté par le procès-verbal, l’organisme de recherche signe un contrat de partage des avantages avec la personne morale de droit public.

À l’initiative de votre rapporteure, l’Assemblée nationale a précisé que les innovations font partie des connaissances traditionnelles associées faisant l’objet du dispositif d’APA.

d. Les règles applicables aux avantages financiers

Le partage « juste et équitable » des avantages exigé par le Protocole de Nagoya peut consister en différentes menées par l’utilisateur des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles associées. Le nouvel article L. 412-3 tel qu’adopté par l’Assemblée nationale dresse une liste de cinq types d’actions possibles :

– l’enrichissement ou la préservation de la biodiversité in situ ou ex situ ;

– la préservation des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques (création de bases de données, avec le consentement préalable des communautés concernées) et des autres pratiques et savoirs traditionnels respectueux de la biodiversité ;

– la contribution au développement local de filières associées à l’utilisation des ressources et connaissances concernées ou de filières permettant la valorisation de la biodiversité ;

– la collaboration, la coopération ou la contribution à des activités de recherche, d’éducation, de formation, de transfert de compétences ou de technologies ;

– le versement de contributions financières.

Lorsque la dernière possibilité est utilisée, le nouvel article L. 412-6 dispose que les contributions financières versées par les utilisateurs au titre du partage des avantages sont calculées sur la base d’un pourcentage du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxe réalisé et des autres revenus perçus grâce aux produits ou procédés obtenus à partir des ressources génétiques faisant l’objet de l’autorisation. Ce pourcentage a été plafonné à 5 % par adoption d’un amendement du Gouvernement. Un décret fixera un seuil en dessous duquel aucune contribution financière ne sera demandée.

Le produit de ces contributions financières est affecté à l’Agence française pour la biodiversité (dont la création est prévue par l’article 9 du projet de loi), qui devra l’utiliser exclusivement pour financer des actions relevant des autres types d’action énumérés par l’article L. 412-3. Il est précisé que l’AFB « tient compte de la part importante de la biodiversité des outre-mer dans la biodiversité nationale lors de la redistribution des avantages financiers ».

e. Quelle est l’autorité administrative compétente ?

Le Protocole de Nagoya prévoit que des autorités compétentes au niveau national pour délivrer les autorisations et négocier les accords de partage des avantages devront être désignées et communiquées au secrétariat de la Convention sur la diversité biologique. Plusieurs autorités compétentes peuvent être désignées pour un pays.

Le nouvel article L. 412-12-1, introduit par l’Assemblée nationale, donne la possibilité aux assemblées délibérantes de Guyane, de Guadeloupe, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte d’exercer la fonction d’autorité administrative compétente pour la procédure de déclaration et pour la procédure d’autorisation. Dans les autres régions et départements, l’autorité compétente est l’État.

2. Les modifications apportées par le Sénat

a. Sur les actions pouvant être menées au titre du partage des avantages

En séance publique, avec l’avis favorable du Gouvernement et du rapporteur, le Sénat a adopté un amendement de M. Jacques Cornano pour ajouter à la liste des actions pouvant être menées pour opérer le partage des avantages (article L. 412-3) une sixième catégorie : le maintien, la conservation, la gestion, la fourniture ou la restauration de services écosystémiques (9) sur un territoire donné.

Il a également adopté un amendement du même auteur donnant une priorité aux catégories d’actions autres que le versement de contributions financières (le Gouvernement et le rapporteur s’en étant remis à la sagesse du Sénat sur ce point).

S’agissant des contributions financières, le Sénat, en séance publique, a adopté des amendements de Mme Corinne Imbert, M. Gilbert Barbier et Mme Sophie Primas, avec l’avis favorable du Gouvernement, pour ramener de 5 % à 1 % le taux plafond pour le calcul de la part de revenus à appliquer. Le Sénat a également adopté un amendement de M. Jacques Cornano précisant que l’Agence française pour la biodiversité doit prendre en compte la part importante de la biodiversité des outre-mer « de manière proportionnelle » lors de la redistribution des avantages financiers (avis de sagesse du Gouvernement).

b. Sur la procédure de déclaration

En séance publique, le Sénat a adopté des amendements identiques du groupe Écologiste et du groupe Socialiste et Républicain, avec l’avis favorable du Gouvernement, pour créer une obligation, pour l’autorité administrative, d’informer les communautés d’habitants lorsque l’accès aux ressources génétiques pour des recherches sans but commercial a lieu sur le territoire où elles sont présentes. Cette obligation d’informer les communautés d’habitants vient se substituer à l’obligation, adoptée par l’Assemblée nationale, d’informer l’établissement public du parc national concerné lorsque l’accès aux ressources implique un prélèvement in situ à l’intérieur du parc.

c. Sur les motifs pouvant justifier un refus d’autorisation

Le texte adopté par l’Assemblée nationale disposait que seuls trois motifs peuvent justifier un refus d’autorisation ; le troisième motif était le risque que l’activité ou ses applications potentielles affectent la biodiversité de manière significative, restreignent son utilisation durable, ou épuisent la ressource génétique concernée. Un amendement du rapporteur adopté par la commission du Sénat a reformulé ce motif : au lieu des trois impacts possibles (« affecte », « restreint » ou « épuise »), c’est l’affectation de la biodiversité qui se trouve définie comme la restriction de l’utilisation durable de la ressource ou l’épuisement de celle-ci.

d. Sur la possibilité, pour certaines assemblées territoriales d’outre-mer, de délivrer les autorisations d’accès concernant leur territoire

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement pour prendre en compte l’évolution institutionnelle des collectivités territoriales concernées, où les « assemblées délibérantes » sont désormais des conseils régionaux (Guadeloupe, Réunion), un conseil départemental (Mayotte) et les assemblées de Guyane et de Martinique.

Le Sénat a également adopté un sous-amendement du groupe Écologiste, avec l’avis favorable du rapporteur mais un avis défavorable du Gouvernement, obligeant lesdites assemblées à créer un « comité territorial d’accès et de partage des avantages liés aux ressources génétiques représentant les parties prenantes concernées qui a pour mission de les appuyer dans ces fonctions ».

e. Sur la propriété intellectuelle

La commission du Sénat a adopté des amendements présentés par les groupes Communiste et Écologiste qui imposent aux bénéficiaires d’une autorisation française sur des ressources génétiques de s’engager à ne revendiquer aucun droit de propriété intellectuelle limitant l’accès à ces ressources pour la recherche, la conservation, l’utilisation durable, la valorisation ou l’exploitation commerciale.

Le Sénat a supprimé ces dispositions en séance publique, en adoptant des amendements identiques de Mme Corinne Imbert et du Gouvernement, avec l’avis favorable du rapporteur.

f. Une obligation de restitution pour les travaux de recherche sans objectif commercial

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du groupe Écologiste, avec l’avis favorable du Gouvernement, complétant les dispositions de l’article L. 412-5 (procédure de déclaration) pour instaurer une obligation, pour le demandeur, de « restituer auprès des communautés d’habitants (…) les informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques prélevées sur le territoire (…) où une ou plusieurs communautés d’habitants sont présentes. ». Le demandeur devra consulter l’autorité administrative sur les modalités de cette restitution.

g. Sur les modalités d’entrée en vigueur et d’application

La commission du Sénat a adopté un amendement de son rapporteur pour préciser les modalités d’entrée en vigueur de l’article 18, en ce qui concerne les collections de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles constituées avant l’entrée en vigueur de la future loi (nouvel article L. 412-4-1) :

Pour les projets de recherche sans objectif commercial, le dispositif d’APA ne s’appliquera qu’aux accès ultérieurs à la promulgation de la loi.

Pour les recherches ayant un « objectif direct de développement commercial »,

– le nouveau dispositif s’appliquera aux accès aux ressources ultérieurs à la promulgation de la loi ;

– pour les personnes ayant obtenu l’accès à une ressource avant la promulgation de la loi, le nouveau dispositif ne s’appliquera qu’aux « nouvelles utilisations », c’est-à-dire aux activités de recherche et de développement dont les objectifs et le contenu se distinguent de celles précédemment menées par le même utilisateur avec la même ressource ou la même connaissance traditionnelle.

En séance publique, le Sénat a remplacé, dans cette définition de la nouvelle utilisation, l’expression « les objectifs et le contenu » par « le domaine d’activité (…) précédemment couvert » (amendement de M. Daniel Dubois, avec l’avis favorable du Gouvernement).

Le Sénat a également adopté en séance publique un amendement du Gouvernement précisant que les conditions d’application de l’ensemble du dispositif de l’article 18 seront définies par un décret en Conseil d’État, pris après avis, lorsqu’elles sont concernées, des collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution (les départements d’outre-mer et les régions d’outre-mer).

Enfin, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement permettant la mise en conformité du droit national avec le règlement européen n° 511/2014 et son règlement d’application n° 2015/1866, pour prévoir qu’un décret désignera une ou plusieurs autorités administratives compétentes chargées de l’application de ces règlements.

3. La position de votre commission

Outre cinq amendements rédactionnels ou de coordination de votre rapporteure, la commission a adopté des amendements portant sur les sujets suivants :

a. Les définitions

● un amendement de Mme Chantal Berthelot modifiant la définition de la notion de communauté d’habitants pour que cette notion inclue également les « communautés autochtones et locales » ;

● un amendement de M. Ary Chalus ajoutant une définition supplémentaire, celle de l’« espèce sauvage », correspondant à toutes les espèces dont l’évolution n’a pas été influencée par l’homme ;

● un amendement de Mme Danielle Auroi modifiant la définition de la notion de nouvelle utilisation, pour revenir à la rédaction qu’avait adoptée la commission du Sénat (« objectifs et contenu ») ;

b. La procédure de déclaration

● un amendement du Gouvernement complétant la rédaction issue du Sénat pour préciser que l’information des communautés d’habitants est assurée, non pas par l’autorité administrative qui reçoit la déclaration, mais par la personne morale de droit public désignée pour organiser, par ailleurs, les consultations des communautés d’habitation détentrices de connaissances traditionnelles associées ;

● un amendement de votre rapporteure, pour modifier l’obligation de restitution introduite par le Sénat : au lieu de devoir restituer les informations et connaissances auprès des communautés d’habitants, le demandeur les restituera auprès de la personne morale de droit public précitée ; d’autre part, la rédaction du Sénat faisait entrer en application l’obligation de restitution « à l’issue des travaux de recherche », expression que votre rapporteure a proposé de supprimer ;

c. La procédure d’autorisation d’accès aux ressources génétiques

● des amendements identiques de Mmes Chantal Berthelot et Danielle Auroi créant une procédure obligatoire d’information des communautés d’habitants organisée par la personne morale de droit public précitée ;

● un amendement de Mme Chantal Berthelot créant une obligation de restitution identique à celle qui a été introduite dans la procédure de déclaration ;

d. Les motifs pouvant justifier un refus d’autorisation

● un amendement de votre Rapporteure visant à revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture pour le troisième motif, pour que les risques d’atteinte à la biodiversité soient entendus de manière plus large ;

e. Les contributions financières

● des amendements identiques de votre Rapporteure et de Mme Danielle Auroi pour que le pourcentage plafond soit relevé de 1 % à 5 % (retour au texte adopté par l’Assemblée en première lecture) ;

● un amendement de votre rapporteure supprimant la mention « de manière proportionnelle » ajoutée par le Sénat s’agissant de la méthode de redistribution des avantages financiers par l’Agence française pour la biodiversité ;

f. La procédure d’autorisation pour l’utilisation des connaissances traditionnelles associées

● un amendement de Mme Chantal Berthelot visant à ce que le conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge de Guyane puisse être, sur ce territoire, la « personne morale de droit public » mentionnée à l’article L. 412-8 ;

● un amendement de Mme Danielle Auroi précisant que cette personne morale de droit public ne doit pas seulement organiser une information des communautés concernées selon des modalités qu’elle détermine, mais également une participation de ces communautés ;

● un amendement de Mme Chantal Berthelot modifiant la portée du procès-verbal attestant du consentement préalable de la communauté d’habitants : l’autorité administrative devra prendre la décision d’autoriser ou de refus l’autorisation « conformément au consentement préalable et aux conditions consignés » dans ce procès-verbal, et non pas seulement « au vu » de ce procès-verbal ;

g. La possibilité, pour certaines assemblées territoriales d’outre-mer, de délivrer les autorisations d’accès concernant leur territoire

La commission a adopté des amendements identiques de votre Rapporteure et de Mme Chantal Berthelot supprimant le « comité territorial » que devraient instaurer ces assemblées si elles décidaient d’exercer elles-mêmes la fonction d’autorité de délivrance des autorisations d’accès.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD775 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. La définition de l’utilisation des connaissances traditionnelles est particulièrement large, dans la mesure où les modalités d’études et de valorisation ne sont pas précisées. L’amendement CD775 tend à remédier à ce problème.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cette précision restreint à mon sens le champ du texte. Il est de plus préférable de ne pas trop nous écarter du protocole de Nagoya sur lequel nous nous sommes appuyés.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable. Les notions de patrimoine matériel et immatériel, mises en avant dans cet amendement, ne figurent pas dans le protocole de Nagoya alors que le projet de loi vise à mettre en œuvre ce protocole de la manière la plus fidèle possible.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD776 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. La biodiversité ayant une assise territoriale, cet amendement vise à permettre aux régions et collectivités territoriales de bénéficier du partage des avantages, aux côtés de l’utilisateur et, selon le cas, de l’État ou des communautés d’habitants.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Je rappelle que l’État est l’unique propriétaire des ressources : il n’est pas vraiment souhaitable de prévoir un partage avec les collectivités territoriales. Les retours se feront vers elles, mais le partage des avantages ne peut être prévu dans ces dispositions relatives aux grands principes qu’avec le propriétaire des ressources ou les communautés d’habitants, comme cela est prévu dans le projet de loi.

Mme la secrétaire d’État. Avis également défavorable. Je rappelle que le protocole de Nagoya impose que le partage des avantages découlant de l’utilisation des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques se fasse exclusivement avec les communautés détentrice de ces connaissances.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD728 de la rapporteure.

M. le président Jean-Paul Chanteguet L’amendement CD729 de Mme la rapporteure est également rédactionnel.

Mme Chantal Berthelot. Monsieur le président, qu’un amendement soit rédactionnel ne signifie pas que l’on doive être automatiquement d’accord avec sa rédaction ! (Rires) Le français se cache derrière les détails…

Madame la rapporteure, vous allez très loin en invoquant des motifs rédactionnels pour supprimer certaines précisions adoptées par le Sénat. Ce dernier a indiqué que le partage des avantages permettait de contribuer à la création d’emplois « pour la population », faisant ainsi de la biodiversité une filière de développement locale. Pourquoi supprimer cette précision ? Elle ne me dérangeait pas…

Mme la rapporteure. La contribution à la création d’emplois se fait au niveau local : cela est déjà inscrit dans le texte. Pourquoi ajouter que ces emplois sont « pour la population » ? C’est une évidence ! À qui d’autres pourraient-ils être destinés ? De toute évidence, aux populations, pas aux oiseaux ni aux chiens ! (Sourires) Mon amendement est purement rédactionnel.

Mme Chantal Berthelot. Le Sénat a pris la peine d’apporter une précision ; je me disais que si elle avait un sens, il pouvait être utile de ne pas la supprimer.

Mme la rapporteure. Si vous ne voulez pas de cet amendement, je n’en ferai pas une affaire. Je trouvais que le texte était ainsi moins lourd, mieux rédigé en faisant disparaître ce que je considérais comme une évidence.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement de la rapporteure me semble typiquement d’ordre rédactionnel. J’y suis plutôt favorable parce que je n’aime pas les lois bavardes, mais je ne vois aucun problème si vous souhaitez conserver le texte en l’état. Je crois surtout que nous aurons à traiter des sujets plus importants. (Approbations diverses)

Mme Chantal Berthelot. Je ne me battrai pas davantage contre cet amendement… Nous serons plus bavards sur les suivants. (Murmures)

La Commission adopte l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement de précision CD730 de la rapporteure.

Mme Chantal Berthelot. Vous proposez un amendement de « précision » mais c’est justement le Sénat qui a précisé que les activités énumérées concernaient « le public et les professionnels locaux », ce que justement votre amendement tend à supprimer… Sans cette indication, introduite à l’initiative de sénateurs ultramarins, nous ne saurions pas quelle cible vise l’alinéa 18. Je veux bien qu’on collabore, mais avec qui et comment ?

Mme la rapporteure. Pour éviter que nous ne débattions trop longuement de ce sujet, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD731 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’amendement CD731 vise à supprimer l’alinéa 19 tendant à inclure la restauration ou la fourniture de services écosystémiques en tant que mesures de partage des avantages, car un service écosystémique peut ne pas avoir d’impact positif sur la biodiversité. La mesure pourrait alors être contre-productive.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable. Dans la mesure où les modalités de partage des avantages au bénéfice des services écosystémiques sont déjà possibles, cet alinéa ne me paraît pas du tout indispensable.

Mme Chantal Berthelot. Cet alinéa, introduit au Sénat, ne se limite pas à la restauration et la fourniture des services écosystémiques : nous parlons de leur maintien, leur conservation, et leur gestion. Sa portée est donc beaucoup plus large que ce qui nous est dit. Il permet de revenir au protocole de Nagoya et au projet du Gouvernement qui s’était déclaré, crois-je savoir, favorable à cette disposition au Sénat.

M. Jean-Yves Caullet. Un service écosystémique sera nécessairement positif pour la biodiversité s’il est durable. L’inconvénient souligné par la rapporteure serait éliminé si nous apportions cette précision. Il y a des tas de choses dans un service écosystémique, qui parfois peuvent être exploitées de façon un peu « minière », sans souci de durabilité.

Mme la secrétaire d’État. Monsieur le député, un écosystème évolue toujours. Le service doit évoluer en conséquence… Je ne sais pas si le terme « durable » est vraiment adapté.

Mme la rapporteure. Je veux bien retirer mon amendement. Franchement, cela ne change pas grand-chose sur le fond !

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD732 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Je propose de supprimer l’alinéa 21 qui vise à donner la priorité aux actions autres que le versement de contributions financières, ce que ne prévoit notamment pas le protocole de Nagoya.

Mme la secrétaire d’État. Je suis plutôt favorable à cet amendement. Le dispositif de l’alinéa 21 n’est pas imposé par le protocole de Nagoya.

Mme Chantal Berthelot. Cet amendement touche au cœur du sujet. Les alinéas a à e du texte proposé pour l’article L. 412-3 du code de l’environnement proposent une série de définitions sur ce que peut être le partage des avantages. Les accords issus de la Conférence mondiale sur la biodiversité, tenue à Nagoya en 2010, ne comportent pas de dispositions particulières en cette matière.

Dans les territoires concernés par le champ de l’article 18, la biodiversité et l’accès aux ressources génétiques doivent à notre sens devenir des filières de développement économique. Autrement dit, il faut nous inscrire dans la durabilité. Il est de loin préférable de structurer des activités – par exemple en formant des jeunes à la cueillette – plutôt que de se contenter de donner un chèque. L’alinéa 21 montre en quoi la biodiversité constitue une ressource et une voie de développement dans les territoires, notamment ultramarins. Il est trop facile d’acheter, d’entrer dans une marchandisation des savoir-faire. C’est pour moi une forme de pillage. Nous avons des ressources génétiques et du savoir-faire ; il ne s’agit pas de les vendre, mais d’en faire de vraies filières de développement dans nos territoires. Il ne s’agit pas d’empêcher les financements, mais de faire une place à la connaissance dans le partage. Nous voulons faire en sorte que les ressources nationales perdurent sur le territoire national, avec les connaissances qui y sont liées.

Mme la rapporteure. N’étant pas de Guyane, je n’ai pas tout saisi des implications de votre propos, madame Berthelot. (Rires)

Constatant que certains refusaient de contribuer financièrement, j’ai déposé cet amendement afin de ne pas donner la priorité aux autres actions. On ne doit pas considérer le transfert financier comme la dernière option.

Je sais par ailleurs que certains souhaiteraient voir cet argent aller à l’Agence française pour la biodiversité (AFB). J’ai conscience que c’est une affaire assez compliquée, notamment chez nos compatriotes ultramarins. Cela pourrait aller totalement à l’inverse de ce qu’était l’intention des auteurs de ces amendements, comme l’esprit du protocole de Nagoya… Et l’on ne s’en aperçoit qu’après. Je sais que bon nombre d’entreprises n’ont absolument aucune envie de verser de l’argent.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mme Chantal Berthelot souhaite que l’on privilégie les autres actions que la contribution financière dans le partage des avantages.

Mme la rapporteure. C’est ce que j’ai dit.

M. Michel Heinrich. Non, vous avez dit le contraire !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Effectivement. L’alinéa 21 indique que les actions mentionnées aux a à d sont examinées en priorité, autrement dit, qu’on les privilégie par rapport au versement d’une contribution financière.

Mme la rapporteure. Cela ne veut pas dire, à mon sens, que l’idée d’une contribution financière doive être examinée en dernier. Cela étant, je ne vis pas dans le territoire que représente Mme Berthelot ; je veux bien retirer mon amendement, si cela peut lui faire plaisir.

Mme Chantal Berthelot. Gardons notre sérénité… (Rires)

Au-delà du fait que je suis élue de Guyane et que cet alinéa résulte d’un amendement présenté par des sénateurs ultramarins, ce n’est pas une question de connaissance des territoires. Le savoir-faire des peuples autochtones de Guyane, comme celui de tous les peuples d’Amérique du Sud, repose qu’on le veuille ou non sur un lien spirituel, chamanique, à la terre. Nous souhaitons que les ressources génétiques et le savoir-faire des populations autochtones et locales permettent de développer de vraies industries dans nos territoires. D’autres pays ont été pillés après avoir reçu un chèque donnant à des acteurs extérieurs l’autorisation d’utiliser des ressources pour développer une activité qui n’a eu aucune retombée sur le territoire concerné. Nous ne souhaitons pas empêcher le versement de contributions financières ; nous disons seulement que les discussions avec les demandeurs doivent donner la priorité au développement local de filières économiques.

C’est dans cette logique que se sont inscrits tous les autres pays, Canada et autres. On ne peut pas se référer aux accords de Nagoya quand cela nous arrange et les mettre de côté quand on le désire.

Mme la rapporteure. Je retire mon amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il conviendra de déposer un autre amendement en séance publique pour rendre cohérente la rédaction de cet alinéa et la mention du d) bis.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD778 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. La référence à la communauté d’habitants tend à évincer le principe fondamental selon lequel les droits des autochtones résultent de leur lien à leur terre.

Depuis l’accord de Nouméa de 1998, le peuple kanak est reconnu en Nouvelle-Calédonie. Cela s’accompagne d’un statut civil coutumier régissant les rapports de nature civile entre les Kanaks, mais aussi les terres coutumières. Par ailleurs, dans des arrêts récents, les juridictions ont reconnu aux structures coutumières traditionnelles la personnalité juridique.

Cet amendement vise à insérer une référence aux communautés autochtones et locales à l’alinéa 22 de l’article 18 après la seconde occurrence du terme « habitants ».

Mme la rapporteure. Monsieur Olivier Falorni, nous avons longuement discuté de ce sujet lors de l’examen du texte en première lecture. Pour des motifs de conformité à la Constitution, je ne peux pas donner un avis favorable à l’adoption de cet amendement, je vous demande donc de le retirer.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement a choisi l’expression de « communautés d’habitants » pour transcrire en droit français la notion onusienne de « communautés autochtones et locales » et il ne souhaite pas l’abandonner. Le Conseil constitutionnel interdit de mentionner les populations autochtones. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission étudie l’amendement CD388 de Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. Les accords de Nagoya utilisent l’expression de « communautés autochtones et locales », vis-à-vis de laquelle le droit français se montre réfractaire. Au-delà du droit, prenons en compte, mes chers collègues, l’Histoire de la Guyane ! Les Amérindiens furent les premiers à habiter cette terre et ils forment bien un peuple autochtone.

Depuis la première lecture de ce texte, le Gouvernement a confié à une sénatrice, Mme Aline Archimbaud, et à une députée, Mme Marie-Anne Chapdelaine, la mission d’étudier les raisons expliquant que le taux de suicide chez les Amérindiens de Guyane soit dix fois supérieur au niveau de la métropole. Lorsque l’on déclare sa fierté de posséder en France le premier parc national en Europe, on oublie de rappeler que les Amérindiens vivent dans ce parc et l’entretiennent depuis des siècles grâce à leurs savoir-faire. Ces personnes demandent aujourd’hui une reconnaissance de leur travail et de leur culture. Le rapport de nos collègues montre très clairement que nous n’avons pas reconnu les droits de ces populations.

Nous, parlementaires, pourrions utiliser ce texte de loi, pour reconnaître, grâce aux accords de Nagoya, ces peuples autochtones. Les Français sont fiers de la biodiversité de leur parc naturel, mais ceux qui y vivent ne peuvent pas l’être, car on les a catalogués comme sauvages : c’est toute l’histoire de la colonisation. Or, aujourd’hui, on se tourne vers eux car leurs savoir-faire pourraient s’avérer très utiles. M. Thierry Mandon, secrétaire d’État chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, part demain en Guyane où il rencontrera notamment les peuples autochtones et les chercheurs de l’institut recherche développement (IRD) pour régler le différend qui les oppose sur le couachi.

La France est diverse et un peuple premier, les Amérindiens de Guyane, vit en son sein. Il est nécessaire de le reconnaître.

M. Michel Heinrich. Très beau plaidoyer !

Mme la rapporteure. Madame Berthelot, il n’est pas question de nier l’importance des populations autochtones, mais nous nous sommes mis d’accord lors de l’examen du texte en première lecture, après en avoir débattu fort longtemps, pour ne pas retenir l’expression de « communautés autochtones », afin de ne risquer la censure du Conseil constitutionnel. Cela ne nous empêche pas de considérer ces populations avec respect et de prendre en compte leur apport dans le maintien de la biodiversité de notre territoire. Je vous demande de retirer votre amendement, car une décision négative du Conseil constitutionnel aurait des conséquences particulièrement dommageables pour le texte.

Mme la secrétaire d’État. Madame Chantal Berthelot, vous avez dit, avec vos tripes, des choses justes et touchantes. Les Amérindiens ont toujours joué un rôle dans la préservation de la biodiversité de ces territoires et dans le développement d’une connaissance et d’une culture dont la richesse est attestée au point que certains cherchent à se les approprier – en omettant d’ailleurs de rendre hommage à ces populations. Le texte reconnaît leur apport et cherche à leur conférer des droits. J’entends ce que vous dites, mais je refuse de prendre le risque d’une inconstitutionnalité qui les empêchera de bénéficier de ces avantages. Vous pourriez, en revanche, défendre plus tard une modification de la Constitution pour que l’inscription de tels termes dans la loi ne soit plus contraire à la norme suprême. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

Mme Danielle Auroi. Je suis un peu étonnée par ce que j’entends : le protocole de Nagoya, norme de droit international reconnue par l’Union européenne (UE), évoque les peuples autochtones, et la loi française refuserait d’employer ces termes ? Il serait intéressant de connaître l’avis du Conseil constitutionnel avant de proclamer qu’une telle disposition est contraire à la Constitution. Afin de ne pas maintenir un néocolonialisme culturel, encore plus indécent lorsque l’on travaille contre la biopiraterie et que l’on souhaite valoriser l’apport et les connaissances des populations amérindiennes, il importe de reconnaître ces dernières comme des peuples autochtones et non pas simplement comme des communautés d’habitants.

Mme Chantal Berthelot. L’art de la répétition est une bonne chose, y compris dans cette maison… (Sourires)

Il n’est heureusement pas besoin d’être un constitutionnaliste ou un juriste distingué pour être un bon législateur, et c’est heureux. Lors de la création du parc amazonien de Guyane, le Gouvernement était conscient de la nécessité de prendre en compte la biodiversité. La loi du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux comporte une partie spécifique dédiée au parc amazonien de Guyane. Le Conseil d’État, dans une décision du 28 novembre 2013, n’a pas contesté l’emploi de l’expression « communautés autochtones et locales » dans la charte du parc amazonien de Guyane, où il est écrit « […] la mission de protection des patrimoines culturels revêt ici une dimension bien particulière. En effet, le patrimoine culturel, loin d’être réduit à un ensemble de patrimoines matériels à conserver, est constitué de cultures vivantes, de représentations de l’environnement et de modes de vie et de gouvernance que les communautés autochtones et locales ont développés en interaction avec leur environnement ». Autrement dit, lorsqu’il s’agit pour le Gouvernement, ou pour l’État français, de trouver des artifices pour mettre au point un statut particulier du parc de Guyane et un dispositif expérimental pour intégrer l’APA dans la charte, la notion de communauté autochtone n’a rien d’inconstitutionnel !

Au regard de la Constitution, le problème réside dans le mot « peuple » et non dans le terme « autochtone » ; mon amendement propose donc d’insérer l’expression de « communautés autochtones et locales » et non de « peuples autochtones et locaux ». Les Amérindiens revendiquent le statut de « peuple autochtone » : le peuple français est un, mais on peut reconnaître sa diversité et sa richesse liées à l’existence de plusieurs peuples et de plusieurs communautés.

La Commission adopte alors l’amendement CD388.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’indique qu’il y a eu neuf voix pour cet amendement et trois contre.

Puis elle en vient à l’amendement CD389 de Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. Je retire cet amendement, monsieur le président.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD779 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. Le texte définit les connaissances par le fait qu’elles sont détenues « de manière ancienne et continue », ce qui ne s’avère pas satisfaisant car l’origine de leur émergence et leurs modes de transmission importent davantage que leur ancienneté. Cet amendement vise à remplacer ces termes par celui de « traditionnel », qui permet de renvoyer aux modes de constitution et de transmission des savoirs intergénérationnels.

Mme la rapporteure. Le terme de « traditionnel » renvoie au caractère ancien et continu des connaissances, si bien que cette substitution n’apporte rien, d’autant plus que votre amendement, monsieur Falorni, ne définit pas le mot « traditionnel ». Autrement dit, on ne fait que répéter la même chose… Il me paraît plus judicieux de dire qu’une connaissance traditionnelle est une connaissance détenue de manière « ancienne et continue ». J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement n’améliore pas la définition prévue par le texte, simple et facile à comprendre. J’émets un avis défavorable à son adoption.

L’amendement est retiré.

La Commission aborde l’amendement CD780 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. Cet amendement vise à définir la notion d’« espèces sauvages », qui ne figure dans aucun texte juridique alors que l’alinéa 23 caractérise celle d’« espèces sauvages apparentées ». Cela est très important dans les outre-mer, où plusieurs espèces sauvages sont utilisées et valorisées dans l’agriculture.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD781 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. Cet amendement propose de supprimer l’alinéa 41 de l’article 18 pour ne pas exclure du régime d’accès et de partage des avantages (APA) les connaissances traditionnelles que l’on ne peut attribuer à une ou plusieurs communautés d’habitants.

Mme la rapporteure. Il serait dommage de supprimer l’alinéa 41 ; en effet, il arrive de ne pas connaître l’identité des communautés ayant fait émerger certaines connaissances, ce qui complexifie les négociations et le partage de ces savoirs. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Le protocole de Nagoya n’impose aux États parties la création d’un dispositif sur ce sujet car sa mise en œuvre serait très ardue. Cette question de la prise en compte des connaissances traditionnelles qui ne peuvent être attribuées et de la redistribution des avantages retirés des exploitations en matière de recherche et de développement s’avère intéressante ; la France pourra la porter dans le cadre des travaux des parties au protocole de Nagoya portant sur l’article 10, qui traite du mécanisme multilatéral mondial de partage des avantages. Je suis donc défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement CD782 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. L’alinéa 42 met fin à des revendications pourtant légitimes sur les connaissances, qui ont été partagées par les communautés et qui ont été versées dans le domaine public sans de justes compensations. Il valide ainsi le rapport de force et les abus qui ont permis aux chercheurs d’utiliser de longue date et de façon répétée ces connaissances en dehors des communautés. Nous proposons de le supprimer.

Mme la rapporteure. J’émets un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à conserver dans le champ d’application du dispositif les connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques dont les propriétés sont bien connues et qui ont été utilisées de longue date et de façon répétée en dehors des communautés d’habitants qui les partagent. Parmi les usages de ces connaissances figure la tisanerie de nombreuses plantes comme le tilleul ou la verveine. Votre amendement représente plutôt une source d’insécurité juridique, et j’émets un avis défavorable à son adoption.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques CD391 de Mme Chantal Berthelot et CD783 de M. Ary Chalus.

Mme Chantal Berthelot. L’amendement CD391 est défendu.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD783 également.

Mme la rapporteure. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle en vient aux amendements identiques CD316 de M. Dino Cinieri, CD687 de M. Jacques Krabal et CD733 de la rapporteure.

M. Dino Cinieri. Amendement de cohérence rédactionnelle avec l’alinéa 24 de l’article 18.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD687 est défendu.

Mme la rapporteure. L’amendement CD733 également.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement CD287 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 49 qui prévoit deux dispositions engendrant une application rétroactive des règles relatives au partage des avantages des ressources génétiques. Outre l’insécurité juridique qu’elles induisent, ces mesures mettent en péril la compétitivité des organismes de recherche français qui se voient imposer une réglementation plus contraignante que leurs concurrents européens.

Mme la rapporteure. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CD530 de Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Cet amendement propose de revenir à la rédaction initiale du texte en substituant au critère de changement d’activité celui de changement d’objectifs et de contenu. M. Jérôme Bignon, rapporteur du texte au Sénat, a souligné à juste titre combien cette modification introduite par ses collègues de droite allait vider ce dispositif de toute portée.

Supposons que, après avoir mené une étude reposant sur la pharmacopée des populations locales d’un territoire d’outre-mer, un institut de recherche dépose avant la date d’entrée en vigueur de cette loi un premier brevet sur l’utilisation d’une molécule active d’une plante connue pour ses vertus médicinales – anticancéreuses, par exemple. L’institut de recherche déciderait par la suite d’exploiter cette molécule pour la commercialisation d’un autre médicament. Il s’agirait bien du même domaine d’activité, celui de la recherche médicale, de la même ressource génétique et de la même étude de savoirs traditionnels des populations locales, mais l’utilisation différerait et ne serait plus soumise au dispositif d’APA. En outre, la procédure est simplement déclarative, la demande d’autorisation ne s’avérant nécessaire que pour la poursuite d’un objectif de développement commercial. La première rédaction est nettement plus claire et nous devrions la rétablir.

Mme la rapporteure. Je suis favorable au retour au texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture et donc à l’adoption de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Je ne souhaite pas revenir sur un amendement voté par le Sénat pour lequel le Gouvernement avait émis un avis favorable. La rédaction du Sénat s’avère plus simple et moins sujette à interprétation, si bien que je suis opposée à l’adoption de cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD288 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Le dispositif d’accès aux ressources génétiques et de partage juste et équitable des avantages repose sur un système dual de déclaration-autorisation.

Le fait générateur de l’application du régime d’autorisation est l’accès aux ressources génétiques en vue de leur utilisation à des fins de connaissance sur la biodiversité, de conservation en collection ou de valorisation avec objectif direct de développement commercial. Cette notion d’objectif direct de développement commercial nécessite d’être définie par un décret en conseil d’État afin de garantir une sécurité juridique aux utilisateurs.

Mme la rapporteure. Avis défavorable : je ne suis pas sûre qu’il faille renvoyer systématiquement à un décret spécifique.

Mme la secrétaire d’État. J’y suis défavorable également.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD1046 du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. À la suite de l’amendement adopté en première lecture au Sénat, le présent amendement vise à préciser la procédure d’information des communautés d’habitants sur les déclarations d’accès aux ressources génétiques. Afin de garantir à cette disposition toute son efficacité, il est proposé de communiquer cette information aux populations concernées par le biais de la personne morale de droit public prévue dans le dispositif d’accès aux connaissances traditionnelles. Je proposerai, par ailleurs, un amendement CD1047 portant sur l’alinéa suivant. Ces deux amendements garantissent la constitutionnalité de l’alinéa 61 et du suivant, la rédaction sénatoriale comportant, en effet, un risque en la matière.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas défavorable à cet amendement, d’autant que j’aborde moi-même le sujet dans l’amendement CD734 rectifié, que nous allons examiner dans un instant et qui vise à modifier la nouvelle obligation, instituée par le Sénat, de restitution aux communautés d’habitants des informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques prélevées.

Il apparaît que cette nouvelle obligation n’est pas stabilisée en l’état. Il sera donc proposé de supprimer les mots « à l’issue des travaux de recherche » qui rendent le terme de cette disposition incertain et de prévoir que la restitution se fait auprès de la personne morale de droit public compétente, ce qui est une meilleure solution.

La commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CD734 rectifié de la rapporteure et CD1047 du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Je retire l’amendement du Gouvernement au profit de celui que la rapporteure vient de défendre.

L’amendement CD1047 est retiré.

Puis la commission adopte l’amendement CD734 rectifié.

Elle en vient aux amendements identiques CD392 rectifié de Mme Chantal Berthelot et CD531 rectifié de Mme Danielle Auroi.

Mme Chantal Berthelot. Nous souhaitons que soit respecté le parallélisme des formes : l’obligation préalable étant déjà prévue à l’alinéa 68 pour les déclarations relatives à l’accès aux ressources génétiques à des fins non commerciales, il s’agit ici de l’étendre aux autorisations relatives à l’accès aux ressources génétiques à des fins commerciales.

Mme Danielle Auroi. Au cours de la discussion du texte au Sénat, il a été montré que certaines communautés ne vivaient pas forcément dans des parcs ; c’est le cas à Mayotte, à Wallis-et-Futuna ou dans certains endroits de Guyane, à l’extérieur du parc national. C’est pourquoi le présent amendement vise à faire en sorte que la personne morale de droit public mentionnée à l’article L. 412-8 organise l’information de toutes les communautés d’habitants concernées, y compris quand la déclaration concerne l’exploitation commerciale des ressources génétiques.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte ces amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD393, deuxième rectification, de Mme Chantal Berthelot et CD532 rectifié de Mme Danielle Auroi.

Mme Chantal Berthelot. L’amendement CD393, deuxième rectification, tend à créer une obligation de restitution aux communautés d’habitants des informations acquises à partir des ressources génétiques prélevées.

Mme Danielle Auroi. Puisque les communautés concernées participent à la préservation des ressources génétiques, elles ont le droit de recevoir les informations scientifiques qui en sont issues et le droit de savoir à quelles fins commerciales seront utilisées les molécules. Mon amendement CD532 rectifié est d’une grande cohérence.

Mme la rapporteure. Je souhaite m’assurer que ces amendements visent bien l’utilisation commerciale des ressources génétiques. Car j’ai du mal à imaginer qu’une entreprise produisant des cosmétiques vienne avec sa bouteille de shampoing pour montrer aux habitants ce qui a été fabriqué à l’aide des ressources. Je vois mal comment vos amendements pourraient se traduire dans les faits. Vous rendez-vous compte de ce qu’ils impliquent ? Une fois que l’entreprise en question aura effectué ses recherches, conçu des produits cosmétiques et autres, que viendrait-elle donc restituer aux populations ?

Mme Danielle Auroi. Il est prévu que la restitution soit faite auprès de la personne morale.

Mme la rapporteure. Certes, mais, quinze ans après les recherches engagées et la création d’un produit – admettons que ce soit une crème de jour – (Sourires), je vois très mal la manière dont cela peut se passer. Après, si vous pensez qu’il s’agit d’une disposition importante, je n’y vois pas d’inconvénient, mais, je le répète, je pense qu’il sera très compliqué d’appliquer ce que vous demandez.

Mme la secrétaire d’État. Vous souhaitez imposer aux chercheurs qu’ils restituent aux communautés d’habitants les résultats de leur travail quand ils ont une visée commerciale. Je partage votre préoccupation mais je m’interroge sur l’opportunité de l’inscrire dans la loi. Il me semble en effet que, dans le cas de recherches donnant lieu à la commercialisation d’un produit, la restitution des résultats de la recherche a plutôt vocation à faire partie des modalités de partage des avantages non monétaires qui pourraient être traitées dans les textes d’application à venir. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.

Mme Viviane Le Dissez. Je vois difficilement, moi aussi, comment une telle disposition pourra s’appliquer et, au-delà, comment une entreprise pourra communiquer son savoir-faire tout en respectant les critères de confidentialité liés à la fabrication de son produit, comment, donc, elle conciliera l’obligation prévue avec le secret professionnel.

Mme Danielle Auroi. Certes, chère collègue, mais le savoir-faire en question est celui, précisément, des populations traditionnelles. Par exemple, le Brésil, estimant que les populations concernées étaient pillées, a bloqué toute recherche menée sur les ressources d’Amazonie par les grands laboratoires de cosmétique – je pense plus précisément à la plus grande entreprise du monde dans ce secteur. Par conséquent, il est plus intelligent, me semble-t-il, dans le cadre du protocole de Nagoya qui vise tout de même, il ne faut pas l’oublier, à lutter contre la biopiraterie, de faire confiance à la personne morale qui servira d’interface, et de reconnaître et les savoir-faire et leurs utilisations.

Du reste, plusieurs laboratoires mettent déjà en pratique ce que nous préconisons : c’est le cas d’au moins deux en Guyane et de deux autres au Pérou. Le dispositif dont nous souhaitons la mise en place fonctionne donc pour peu que la volonté politique ne fasse pas défaut.

Mme Chantal Berthelot. La restitution est déjà prévue quand l’accès aux ressources génétiques est réalisé à des fins non commerciales. Pourquoi ne serait-ce pas le cas si ces fins sont commerciales ? Nos amendements visent donc à équilibrer le texte, à établir un rapport de confiance.

Mme la rapporteure. Je reste très réservée.

La commission adopte l’amendement CD393, deuxième rectification.

En conséquence, l’amendement CD532 rectifié tombe.

La commission examine l’amendement CD814 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. Parallèlement à l’article 412-10-II, la précision relative à l’interdiction d’utiliser des ressources génétiques à d’autres fins que celles mentionnées dans l’autorisation figure au paragraphe 4 concernant la décision portant sur les connaissances traditionnelles. Il n’y a aucune raison pour qu’elle ne soit pas aussi mentionnée concernant la décision relative à l’accès aux ressources génétiques.

Mme la rapporteure. Cet amendement me paraît inutile puisqu’il est déjà prévu que l’autorisation fixe les conditions d’utilisation des ressources génétiques.

Mme la secrétaire d’État. L’idée énoncée par l’amendement est inhérente à tout acte administratif autorisant une activité ; et si cette mention a en effet été intégrée dans la procédure relative aux connaissances traditionnelles associées, c’était uniquement pour des raisons pédagogiques Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD735 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est proposé d’en revenir à la rédaction de l’Assemblée qui ne définissait pas strictement les moyens par lesquels la biodiversité est significativement affectée, alors que le Sénat propose de les définir : la biodiversité serait significativement affectée « en restreignant l’utilisation durable de la ressource génétique pour laquelle un accès est demandé ou en l’épuisant ». Ces dispositions constituent un des motifs pour lesquels une demande d’accès à une ressource génétique peut être refusée.

Mme la secrétaire d’État. La modification introduite par le Sénat risque de nous conduire à des situations où la France accorderait l’accès à ces ressources génétiques pour des activités qui nuiraient à la biodiversité. Je suis donc favorable au présent amendement.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD314 de M. Dino Cinieri et CD815 de M. Ary Chalus.

M. Dino Cinieri. La prise en compte du chiffre d’affaires revient à ne pas tenir compte de tous les frais de recherche et développement et de production qui ont précédé la commercialisation des produits et qui imputent en grande partie le bénéfice généré par le produit. Mon amendement CD314 propose donc, à l’alinéa 75, de remplacer les mots : « chiffre d’affaires » par les mots : « bénéfice net ».

M. Olivier Falorni. Dans la mesure où le fait de calculer les contributions financières susceptibles d’être versées par les utilisateurs sur la base d’un pourcentage du chiffre d’affaires annuel mondial se révélerait particulièrement préjudiciable aux petites et moyennes entreprises, notamment locales, – ce qui va à l’encontre de l’économie du projet de loi –, il est proposé dans l’amendement CD815 de prendre le bénéfice pour base de calcul.

Mme la rapporteure. Je ne vois pas comment une entreprise, sur un produit particulier, peut calculer le bénéfice net. Adopter l’un de ces deux amendements reviendrait à créer une usine à gaz épouvantable. C’est pourquoi il me paraît plus raisonnable de garder le chiffre d’affaires comme base de calcul.

Mme la secrétaire d’État. Le protocole de Nagoya impose un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées ; il ne précise pas si le terme « avantages » correspond au chiffre d’affaires ou au bénéfice. Par souci de simplicité, et je rejoins la rapporteure, et pour faciliter l’instruction des dossiers, le Gouvernement estime préférable d’asseoir le calcul sur le chiffre d’affaires du ou des produits développés à partir de la ressource génétique ou de connaissances traditionnelles associées, élément facilement identifiable dans les comptes de l’utilisateur. Par contre, il serait beaucoup plus délicat d’isoler du bénéfice net la part relevant d’un produit ou d’un procédé découlant de l’usage de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles. J’ajoute que je donnerai des instructions de manière à favoriser un partage des avantages sous une forme non monétaire. Je suis donc défavorable aux deux amendements.

M. Gérard Menuel. Le système prévu par votre texte est sans doute simple, mais il est particulièrement injuste et très préjudiciable en matière de recherche et très préjudiciable aux PME et aux TPE du secteur. La comptabilité analytique existe, par ailleurs…

M. Dino Cinieri. Chiffre d’affaires et bénéfice net sont deux éléments totalement différents. Quand on investit à l’extérieur, notamment dans la recherche, dans l’immobilier, dans le personnel, et quand on a un produit commercial à développer, encore faut-il que l’on puisse disposer d’une marge pour pouvoir réinvestir.

M. Michel Heinrich. Le bénéfice net sert en général de base de calcul dans les autres pays : ainsi, le Brésil taxe le bénéfice à hauteur de 1 %. Votre dispositif défavoriserait les entreprises françaises.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle en vient à l’amendement CD315 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. La disposition qui fixe un plafond maximum de 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé est disproportionnée au regard des montants d’avantages pratiqués aujourd’hui par les utilisateurs de ressources génétiques. De surcroît, le calcul de ce pourcentage ne permet pas de prendre en compte les sommes considérables investies en recherche et développement. Enfin, cette disposition, sans équivalent dans d’autres pays européens, aurait comme effet pervers de détourner les acteurs de la recherche des ressources présents sur le territoire national et particulièrement dans les territoires d’outre-mer.

Mme la rapporteure. Vous proposez que le chiffre d’affaires en fonction duquel la contribution sera calculée ne soit pas le chiffre d’affaires mondial mais celui réalisé en France. Je ne vois pas pourquoi…

Mme la secrétaire l’État. Avis défavorable : cet amendement n’est pas dans l’esprit du protocole de Nagoya.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les deux amendements identiques CD533 de Mme Danielle Auroi et CD736 de la rapporteure.

Mme Danielle Auroi. Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale du Gouvernement, qui prévoyait que les contributions financières susceptibles d’être versées par les utilisateurs ne pouvaient dépasser un plafond à 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé et des autres revenus. Les sénateurs l’ont ramené à 1 %. En outre, le taux de 5 % auquel nous souhaitons revenir est modulable puisque le pourcentage retenu peut être inférieur.

Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable à ces amendements.

M. Michel Heinrich. La position de la secrétaire d’État est étonnante puisque contraire à celle de Ségolène Royal au Sénat, qui estimait le taux de 1 % raisonnable, ajoutant : « Le Gouvernement tient compte du débat démocratique et prend en considération les bonnes idées qui émergent. Nous faisons un travail de coconstruction législative, notre objectif commun étant l’amélioration du texte. » Pour le reste, le taux initial de 5 % est vraiment prohibitif, d’autant que vous décidez de taxer le chiffre d’affaires et non le bénéfice net.

M. Gérard Menuel. On s’écarte complètement de la real économy : un taux de 5 %, vous ne vous rendez pas compte !

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un plafond.

M. Gérard Menuel. Peut-être, mais il n’empêche que même 1 % du chiffre d’affaires, c’est déjà énorme pour des entreprises qui vont faire 0,5 % ou 1 % voire 2 % de résultat – citez-moi des entreprises qui réalisent 5 à 10 % de résultat au niveau mondial !

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement avait en effet entendu un certain nombre d’arguments au Sénat. Mais nous entendons également ceux de votre rapporteure : elle ne propose rien d’autre que d’en revenir à une proposition initiale du Gouvernement qui, très « realpolitiquement » parlant, s’alignait sur la pratique de l’Australie, pays comparable à la France en matière de biodiversité et de développement économique.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte ces amendements.

Elle en vient à l’amendement CD816 de M. Ary Chalus.

M. Olivier Falorni. Comme le soulignait le texte initial, « la biodiversité est […] une force économique pour la France. […] Elle assure des services qui contribuent aux activités humaines [et au bien-être des populations], dits services écosystémiques ».

La prise en compte par l’utilisateur de ces services doit donc pouvoir apparaître comme une alternative au versement d’une contribution financière, et ce d’autant plus que la promotion des services écosystémiques figure au deuxième rang des missions imparties à l’Agence française pour la biodiversité. À l’alinéa 77, après la référence : « L. 412-17 », il est donc proposé d’insérer les mots : « ou lorsque l’activité ou ses implications participe au maintien, à la conservation, à la gestion, à la fourniture ou à la restauration des services écosystémiques, ».

Mme la rapporteure. J’émets un avis défavorable, car je comprends qu’il s’agirait de supprimer la possibilité d’une contribution financière si l’activité participe à la conservation des services écosystémiques. Cela me paraît malvenu…

Mme la secrétaire d’État. Je rappelle que le versement d’une contribution financière pour le partage des avantages n’est pas systématique. Le texte prévoit de nombreuses autres modalités de partage qui pourront s’avérer pertinentes pour ce type d’utilisateur. Par ailleurs, l’amendement fait référence aux services écosystémiques. Le lien entre l’état de la biodiversité et la fourniture de services écosystémiques n’est pas établi scientifiquement. Par exemple, un milieu dégradé par des espèces exotiques envahissantes peut produire de nombreux services écosystémiques : stockage de carbone, production de biomasse, aménité paysagère… Cet amendement ne serait pas du tout opérationnel et de surcroît contraire à l’esprit du protocole de Nagoya.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD737 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. À l’alinéa 79, je propose de supprimer les mots : « , de manière proportionnelle, ». En effet, comment calculer la part importante de la biodiversité des outre-mer dans la biodiversité nationale lors de la redistribution des avantages financiers ? Disposons-nous de données suffisamment exactes ?

Mme la secrétaire d’État. Même si Je suis attachée à ce que l’AFB tienne compte de la part importante de la biodiversité des outre-mer, je suis d’accord avec la rapporteure, et donc favorable à son amendement : il est impossible d’en mesurer la proportion exacte.

Mme Chantal Berthelot. Je suis surprise de l’avis exprimé par la secrétaire d’État : je pensais qu’elle serait favorable à la prise en compte de façon proportionnelle de la biodiversité des outre-mer. Si le mot « proportionnelle » ne convient pas, on aurait pu rédiger un amendement gardant l’idée d’une prise en compte plus précise.

Mme la rapporteure. Nous le savons tous pour l’avoir dit et répété cent fois : les outre-mer participent pour une grande part à la biodiversité française et il ne saurait donc être question, en votant cet amendement, de ne plus le reconnaître.

Mme Chantal Berthelot. Votre force de conviction me trouble, madame la rapporteure, si bien que je me range à vos arguments. (Sourires)

La commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD396 rectifié de Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. En 2006, le Gouvernement a compris qu’il fallait prendre en compte la réalité des Amérindiens et des Bushinengue et, par un décret du 17 juin 2008, a créé le Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge de Guyane (CCPAB).

Le présent texte prévoit qu’une personne morale organise la consultation des populations autochtones. Je vous propose, dans ce cadre, de faire sinon un grand pas, du moins de faire un pas en donnant toute sa place au CCPAB dans le recueil du consentement de ces populations.

Mme la rapporteure. Bien entendu, nous pouvons être favorables à cet amendement. J’appelle cependant votre attention, chère collègue, sur le fait que le CCPAB n’est pas une personne morale de droit public. Dès lors, si nous adoptons votre amendement, ce à quoi je ne vois aucun inconvénient, il faudra impérativement que le CCPAB change de statut car il ne pourrait, en l’état actuel, remplir la mission que vous entendez lui donner.

Mme la secrétaire d’État. En effet, votre amendement entend renforcer le rôle du CCPAB ; mais, comme l’a très bien rappelé Geneviève Gaillard, ce conseil étant une commission administrative de nature consultative dépourvue de la personnalité morale, il ne peut pas, par définition, remplir le rôle ici prévu de la personne morale de droit public : pour mémoire, il est important, pour cette dernière, d’avoir la capacité d’ester en justice afin de défendre les droits des communautés d’habitants qui auraient été lésés.

Pour que votre proposition soit opérationnelle, il vous faudra donc prendre les dispositions nécessaires pour doter le CCPAB de la personnalité morale ; mais je crois que c’est votre intention et c’est pourquoi je suis favorable à votre amendement.

La commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD289 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Le texte ne prévoit pas d’associer les communautés d’habitants à la négociation et à la signature du contrat de partage des avantages découlant de l’utilisation des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques. Leurs représentants doivent être partie au contrat.

Mme la rapporteure. Avis défavorable : c’est l’État qui est propriétaire des ressources génétiques. On ne peut, pour des motifs constitutionnels, donner une forme de souveraineté à certaines communautés sur certaines ressources. C’est donc bien la personne morale de droit public qui organise la bonne tenue des négociations et c’est elle, donc l’État, qui signe le contrat.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD390 de Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. Cet amendement de précision vise, à l’alinéa 89, à insérer, après le mot « pertinentes », les mots : « , coutumières ou traditionnelles, ».

Mme la rapporteure. J’ai l’impression que l’ajout de ces deux adjectifs ferme un peu l’horizon du texte. Si vous pensez le contraire et comme je ne souhaite pas qu’on discute de cet amendement pendant trois heures, j’y serai favorable, mais faites attention : à croire croit bien faire, il arrive parfois qu’on se trompe… (Sourires)

Mme la secrétaire d’État. En effet, êtes-vous certaine, madame Chantal Berthelot, que les représentations pertinentes des communautés d’habitants se réduisent toutes, selon les contextes, aux seules structures coutumières ou traditionnelles ? C’est pourquoi je ne vois pas bien l’intérêt de cette précision.

Mme Chantal Berthelot. Je ne peux pas retirer mon amendement puisque j’y précise ma pensée. Nous ne supprimons pas le mot « pertinentes », mais nous lui ajoutons les mots « , coutumières ou traditionnelles, ».

Mme la rapporteure. On a compris ! (Murmures et rires)

Mme Chantal Berthelot. En effet, il y a des revendications coutumières et traditionnelles en Guyane. Il s’agit donc de donner la possibilité aux communautés d’habitants en question d’être représentées. Or, dans ce contexte, le mot « pertinentes », justement, est bien large. N’est-ce pas ?

Mme la rapporteure. Je ne suis pas sûre de partager votre point de vue. (Rires)

Mme la secrétaire d’État. L’interprétation peut être sujette à caution, je vous parle d’expérience. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

Mme la rapporteure. Je reste, quant à moi, très réservée.

La commission rejette l’amendement.

La Commission en vient à l’amendement CD534 de Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Cet amendement a pour objet de définir les modalités de participation des communautés autochtones.

J’avais proposé en première lecture un amendement permettant d’assurer que les modes de consultation seront bien adaptés aux modes de vie des communautés. La rapporteure avait alors répondu que cette préoccupation était satisfaite par l’alinéa 90, qui prévoit que la personne morale de droit public détermine des modalités d’information adaptées aux communautés d’habitants concernées.

Or cet alinéa 90 prévoit que la personne morale de droit public détermine des modalités d’information des communautés d’habitants concernés, mais pas les modalités de leur participation, alors même que la personne morale de droit public doit s’en assurer. Organiser une telle participation effective à la démarche consultative peut présenter de nombreuses difficultés : pratiques coutumières différentes, barrières culturelles et linguistiques, méthodes de communication, les obstacles sont nombreux.

Il faut donc faire preuve de cohérence, en précisant clairement les différentes étapes du processus. Certes, il faut faire confiance aux acteurs de terrain pour mettre en place des procédures adaptées, mais il est important de spécifier qu’il appartient in fine à la personne morale de droit public de déterminer, au même titre que les modalités d’information, les modalités de participation qu’elle estime les mieux adaptées à chaque territoire en tenant compte des spécificités locales.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Nous considérons toujours cet amendement comme satisfait, et nous suggérons son retrait.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CD535 de Mme Danielle Auroi et CD817 de M. Ary Chalus, ainsi que l’amendement CD394 de Mme Chantal Berthelot.

Mme Danielle Auroi. L’amendement CD535 vise à renforcer l’obligation de recueillir un consentement préalable des communautés d’habitants, donné en connaissance de cause, pour toute utilisation de leurs connaissances traditionnelles, conformément à l’article 7 du Protocole de Nagoya.

La terminologie « au vu », que cet amendement propose de remplacer, est imprécise et n’implique pas la conformité, mais un simple visa. Or la décision de l’autorité administrative doit tenir compte de l’ensemble des étapes du processus de consultation notifiées dans le procès-verbal, et en particulier du recueil du consentement préalable en connaissance de cause.

Pour que le consentement préalable et les conditions d’utilisation posées par les communautés d’habitants soient dûment respectés, le contrat doit être conforme au contenu du procès-verbal, et non pas simplement y faire référence. Cette nouvelle terminologie permet de combler cette lacune.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD817 a exactement le même objet. « Au vu » est une terminologie imprécise qui n’implique pas la conformité mais un simple visa. Pour que le consentement préalable et les conditions d’utilisation posées par les communautés d’habitants à l’utilisation de leurs connaissances traditionnelles soient respectés, le contrat doit être conforme au contenu du procès-verbal, et non pas simplement y faire référence. L’article 7 du protocole de Nagoya prévoit bien que : « l’accès aux connaissances traditionnelles […] soit soumis au consentement préalable donné en connaissance de cause ou à l’accord et à la participation de ces communautés autochtones et locales […] ».

Il est important que les conditions d’utilisation demandées par les communautés soient bien reprises dans l’autorisation, car c’est elle qui déterminera les conditions dans lesquelles pourront être utilisées les connaissances traditionnelles.

Mme Chantal Berthelot. Mon amendement CD394 est défendu.

Mme la rapporteure. Ce n’est pas un sujet facile, il faut faire extrêmement attention. Les ressources génétiques appartiennent à l’État.

Il m’apparaît donc que l’autorité administrative peut accorder ou refuser l’utilisation de ces ressources au vu du procès-verbal, mais elle n’est pas obligée de faire exactement ce que veulent les communautés.

Il faut laisser une certaine autonomie à l’autorité publique, conformément au fonctionnement normal de notre démocratie. Il est des moments où il faut faire des choix. Nous laissons donc à l’autorité administrative le soin de prendre sa décision, après avoir pris connaissance d’un certain nombre d’éléments. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ces amendements.

Mme la secrétaire d’État. Ces amendements tendent à contraindre l’autorité administrative à se conformer aux résultats et aux conditions consignées dans le procès-verbal établi par la personne morale de droit public suite à la consultation des communautés d’habitants.

Je comprends cette préoccupation, mais le texte donne déjà beaucoup de garanties en ce sens et je ne souhaite pas en alourdir davantage la rédaction. Je partage les réflexions de la rapporteure et je suggère donc le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.

Mme Danielle Auroi. Je suis étonnée : Mme Ségolène Royal, ministre de l’environnement, avait indiqué en séance au Sénat que remplacer l’expression « au vu » par les termes « conformément au consentement » – comme il est proposé par ces amendements – est d’autant plus acceptable que l’article 7 du protocole de Nagoya dispose bien que l’accès aux connaissances traditionnelles est soumis au consentement préalable donné en connaissance de cause.

Mme Chantal Berthelot. Permettez-moi un instant de sérieux. (Rires) Il faut être attentif aux réponses que l’on donne.

Madame la rapporteure, je suis désolée de reprendre vos propos. Vous avez dit que l’État est propriétaire du sol et du sous-sol, ce qui est vrai. Mais l’alinéa 98 de cet article 18 porte sur les « connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques ». Je ne vois pas en quoi l’État est propriétaire de ces connaissances.

Cet article 18 concerne de vastes populations dans de nombreux territoires d’outre-mer, faisons bien attention à ce que nous disons.

Mme la rapporteure. Vous relirez mes propos, madame, je n’ai jamais dit que l’État était propriétaire des connaissances traditionnelles. J’ai fait mention des seules ressources génétiques. Je sais bien qu’il n’est pas propriétaire du reste !

La Commission rejette les amendements identiques CD535 et CD817.

Puis elle adopte l’amendement CD394.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CD290 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Il s’agit de renforcer l’obligation du consentement préalable des communautés d’habitants à l’utilisation de leurs connaissances traditionnelles.

Actuellement, le texte du projet de loi n’affirme pas expressément cette obligation, car il permet différentes interprétations et laisse à l’autorité administrative le pouvoir de décider seule d’accorder ou refuser, en partie ou en totalité, l’utilisation des connaissances traditionnelles, au vu du procès-verbal dressé par la personne morale de droit public chargée de recueillir le consentement des communautés d’habitants.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Dans les cas où il y a consentement, cet ajout est redondant avec les dispositions prévues au 6° de l’article L. 412-9.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement a déjà été présenté, et rejeté, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale. Il tend à préciser que le procès-verbal établi par la personne morale de droit public à l’issue de la consultation des communautés d’habitants exprime bien le consentement de ces dernières. Cette précision n’est pas utile au texte.

Par ailleurs, cet amendement pourrait soulever un problème de constitutionnalité. Je vous propose donc de le retirer ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD536 de Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Cet amendement tend à rendre obligatoire la divulgation de l’origine de la ressource génétique ou du savoir traditionnel associé lors du dépôt d’un brevet, et à conditionner la recevabilité de la demande de brevet à cette obligation.

Permettez-moi de donner un exemple. France Libertés a demandé le rejet d’une demande de brevet de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) devant l’Office européen des brevets en octobre dernier. Le brevet en question, également déposé devant l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI), porte sur une molécule antipaludique contenue dans l’acacia amara, plante largement utilisée dans les remèdes traditionnels guyanais.

L’étude des chercheurs se fonde clairement sur la pharmacopée des populations locales. Quarante-sept recettes traditionnelles ont été observées, puis reproduites par les chercheurs, pour déterminer leur potentiel antipaludique. L’acacia amara a été identifié comme la plante la plus prometteuse. Les populations locales, interrogées sur leurs connaissances traditionnelles, n’ont pas été informées et n’ont pas consenti au dépôt du brevet. Leur apport en termes de recherche et développement n’est donc clairement pas reconnu dans le brevet, alors que les chercheurs de l’IRD ont publié des articles scientifiques y faisant référence. Or la brevetabilité repose sur trois critères : la nouveauté, l’inventivité et l’application industrielle. L’INPI doit pouvoir octroyer ou non les brevets en toute connaissance de cause. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire de systématiquement fournir à l’INPI toutes les informations nécessaires à la prise de décision, et pas seulement à l’initiative du déclarant.

Mme la rapporteure. Dans la logique du texte, le devoir d’information pèse sur l’utilisateur. Il ne faut pas transférer cette charge à l’autorité administrative, mais maintenir la même logique que dans le règlement européen. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Votre amendement tend à imposer à l’autorité compétente pour la procédure d’accès aux connaissances traditionnelles associées de transmettre les informations du dossier du demandeur à l’INPI.

Vous citez un article du règlement n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil, relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya. Toutefois, rien dans ce règlement n’impose une telle obligation, et cette obligation qui pèserait sur l’autorité administrative – et non sur l’utilisateur – serait même contraire à ce règlement.

Pour cette raison, je vous propose de retirer votre amendement, à défaut, avis défavorable.

Mme Danielle Auroi. Je ne retire pas mon amendement. C’est la moindre des choses, alors que le protocole de Nagoya reconnaît les connaissances traditionnelles, que ceux qui en sont les porteurs puissent savoir si elles sont brevetées !

Je ne comprends pas l’argumentaire en vertu duquel des gens pourraient profiter des connaissances des populations autochtones sans que ces dernières n’aient le droit d’être au courant, ni avoir leur mot à dire sur le sujet. C’est une ignorance des connaissances des populations autochtones, et un mépris qui m’étonne beaucoup. (Murmures)

Mme la rapporteure. Je ne pense pas qu’il y ait de mépris, puisque les populations seront informées de toute façon. Simplement, les obligations au moment du dépôt du brevet ne doivent pas peser sur l’autorité publique, mais sur l’utilisateur. Tout peut faire l’objet d’interprétations, mais je reste défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CD395 de Mme Chantal Berthelot, CD537 de Mme Danielle Auroi et CD818 de M. Ary Chalus.

Mme Chantal Berthelot. L’amendement CD395 est défendu.

Mme Danielle Auroi. L’amendement CD537 également.

M. Olivier Falorni. Ainsi que l’amendement CD818.

Mme la rapporteure. Nous avons débattu de cette question dans des termes presque identiques il y a quelques minutes. Je maintiens l’avis défavorable que j’avais alors donné.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient aux amendements identiques CD738 de Mme la rapporteure et CD983 de M. Serge Letchimy.

Mme la rapporteure. Il me semblait un peu excessif d’obliger les collectivités d’outre-mer à créer des comités. Toute liberté est laissée aux territoires et départements d’outre-mer ; il ne paraît pas opportun d’imposer la création de ces comités. Je propose donc leur suppression.

Mme Chantal Berthelot. L’amendement CD983 est défendu.

Mme la secrétaire d’État. J’estime également qu’il ne faut pas imposer un format figé de consultation des parties prenantes, mais plutôt laisser le soin aux collectivités ultramarines d’identifier la formule la plus adaptée. Avis favorable aux amendements.

Les amendements sont adoptés.

La Commission examine ensuite l’amendement CD739 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est proposé de supprimer la quatrième sous-section intitulée « dispositions diverses », afin d’inclure les articles L. 412-7 et L. 412-18 au sein de la sous-section 3.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 18 ainsi modifié.

Article 25
(article L. 331-15-6 du code de l’environnement)

Abrogation du dispositif d’accès et de partage existant pour le territoire du Parc amazonien de Guyane

L’article L. 331-15-6 du code de l’environnement prévoit un dispositif d’APA spécifique pour le parc amazonien de Guyane :

L'accès aux ressources génétiques des espèces prélevées dans ce parc national ainsi que leur utilisation sont soumis à autorisation. Sur proposition de l'assemblée de Guyane, la charte du parc définit les orientations relatives aux conditions d'accès et d'utilisation de ces ressources, notamment en ce qui concerne les modalités du partage des bénéfices pouvant en résulter. Les autorisations sont délivrées par le président de l'assemblée de Guyane, après consultation de l'établissement public du parc national.

Puisque l’article 18 du projet de loi crée un dispositif national d’APA, l’abrogation de l’article L. 331-15-16 mettra fin à ce dispositif spécifique à la Guyane. Cette abrogation prendra effet à compter de l’entrée en vigueur des décrets d’application de l’article 18.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de son rapporteur pour préciser que cette abrogation sera effective au plus tard le 1er janvier 2018.

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La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26 bis
Rapport sur l’évaluation des modalités d’application des dispositifs régissant les accès aux ressources génétiques

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté, en commission, un amendement de votre rapporteure demandant que le Gouvernement remette au Parlement, dans les trois ans suivant la promulgation de la loi, un rapport sur l’évaluation des modalités d’application des dispositifs d’APA.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du Sénat a supprimé cet article, à l’initiative de son rapporteur, jugeant préférable d’avoir un retour d’expérience annuel dans le cadre du rapport d’activité de l’Agence française pour la biodiversité plutôt qu’un rapport ponctuel.

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La Commission maintient la suppression de cet article.

Article 26 ter
Ratification du protocole de Nagoya

Le présent article, inséré par l’adoption d’un amendement présenté par le rapporteur en séance publique au Sénat, permet à la France de procéder à la ratification du protocole de Nagoya à la convention des Nations Unies sur la diversité biologique.

1. La Convention sur la diversité biologique

En février 1991, un comité intergouvernemental de négociation a été créé dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Ses travaux ont abouti à la Conférence de Nairobi en mai 1992, par la présentation du texte de la Convention sur la diversité biologique. La convention a été ouverte à la signature le 5 juin 1992, lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (le « Sommet planète Terre » de Rio), et est entrée en vigueur le 29 décembre 1993. Ce traité est le seul instrument international complet sur la diversité biologique, et regroupe 168 parties dont l’Union européenne. La France a signé le traité le 13 juin 1992 et a déposé son instrument de ratification le 1er janvier 1994.

La Convention a trois objectifs : la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de ses éléments constitutifs et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. Elle pose plusieurs définitions au niveau mondial, notamment les notions de « ressources génétiques », d’ « écosystème », de « pays fournisseur de ressources génétiques » et d’ « utilisation durable ». Le principe fondamental affirmé par la Convention comporte un droit et un devoir pour les États :

– le droit souverain d'exploiter leurs propres ressources selon leur politique d'environnement ;

– le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres États ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale.

L’article 8 de la Convention dispose que les États parties doivent adopter un certain nombre de mesures, parmi lesquelles l’établissement d’un système de zones protégées, une réglementation ou une gestion des ressources biologiques présentant une importance pour la conservation de la diversité biologique (à l'intérieur comme à l'extérieur des zones protégées), la remise en état et la restauration des écosystèmes dégradés… L’article 8 prévoit également que chaque partie au traité « sous réserve des dispositions de sa législation nationale, respecte, préserve et maintient les connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l'application sur une plus grande échelle, avec l'accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations et pratiques et encourage le partage équitable des avantages découlant de l'utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques ».

L’article 15 de la Convention est relatif à l’accès aux ressources génétiques. Il réaffirme le droit de souveraineté des États sur leurs ressources naturelles, droit qui leur confère le pouvoir de déterminer l’accès aux ressources génétiques par des règles fixées par la législation nationale. Il est toutefois prévu que les parties doivent s’efforcer de « créer les conditions propres à faciliter l’accès aux ressources génétiques aux fins d’utilisation écologiquement rationnelle par d’autres parties » au traité.

En particulier, l’article 15 impose aux parties de prendre les mesures législatives et administratives appropriées pour « assurer le partage juste et équitable des résultats de la recherche et de la mise en valeur ainsi que des avantages résultant de l’utilisation commerciale et autre des ressources génétiques avec la partie contractante qui fournit ces ressources ». Il n’est ainsi plus possible d’utiliser les ressources génétiques d’un pays sans obtenir son consentement préalable et sans lui offrir une contrepartie monétaire ou non monétaire, négociée d’un commun accord. C’est le mécanisme d’accès et de partage des avantages (APA), destiné à introduire plus d’équité et de sécurité juridique.

C’est sur le fondement de cet article qu’ont été introduites en droit français les dispositions spécifiques au parc amazonien de Guyane (voir le commentaire de l’article 25 du projet de loi) et les dispositifs d’APA établis en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

2. Le Protocole de Nagoya

Les obligations créées par la Convention sont entrées en vigueur en 1993. Mais les États parties ne les ont pas totalement mises en œuvre : il manquait un mécanisme juridiquement contraignant pour assurer le respect de ces obligations, permettant d’engager la responsabilité des États, de les sanctionner, le cas échéant, et de lutter contre la « biopiraterie » (l’accès et l’utilisation illégales des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées).

Le protocole de Nagoya, signé par la France le 20 septembre 2011, est entré en vigueur le 12 octobre 2014, mais la France ne l’a pas encore ratifié. À ce jour, 91 États et l’Union européenne ont signé le Protocole, et 69 parties (dont l’Union européenne, l’Espagne, le Royaume-Uni, le Mexique, l’Inde…) l’ont ratifié. Parmi eux, une trentaine ont mis en place un dispositif législatif et réglementaire.

Il complète la convention sur la diversité biologique. Comme l’expliquait votre rapporteure dans son rapport relatif au projet de loi sur la biodiversité, du 26 juin 2014, le protocole de Nagoya organise l’accès et le partage des avantages permettant à l’État fournisseur et aux communautés d’habitants de profiter des bénéfices qu’un tiers pourrait retirer des ressources et des connaissances traditionnelles. Il prévoit :

– des obligations en matière d’accès (articles 6, 7 et 8) : pour libéraliser l’accès à ses ressources génétiques, un pays adhérant au Protocole doit assurer la sécurité juridique et la transparence des exigences internes imposées aux acquéreurs potentiels de ressources génétiques en établissant une procédure de consentement préalable et des termes mutuellement convenus claire, en adoptant des procédures d’accès justes et non arbitraires, en prévoyant la délivrance de permis une fois l’accès accordé, tout en tenant dûment compte des cas d’urgence actuel ou imminent qui menace l’homme, la santé animale ou végétale ainsi que de l’importance des ressources génétiques liées à l’alimentation et l’agriculture pour la sécurité alimentaire ;

– des obligations en matière de partage des avantages (articles 5, 9, 10 et 11) : les États utilisateurs doivent en particulier prendre des mesures garantissant un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation au sens large des ressources génétiques, incluant les bénéfices liés à leur commercialisation ou à la commercialisation des applications issues de la recherche et du développement, avec les pays fournisseurs, et notamment avec les communautés d’habitants en matière de connaissances traditionnelles ;

– des obligations en matière de respect des obligations, c’est-à-dire de « conformité » (articles 13, 15, 16, 17 et 18) : les parties contractantes devront vérifier que les ressources génétiques utilisées dans leur juridiction auront bien été obtenues à la suite d’un consentement préalable en connaissance de cause et dans le cadre de conditions convenues d’un commun accord, organiser les possibilités de recours en cas de différend lors de ladite utilisation, et surveiller cette dernière, notamment en désignant des points de contrôle efficace à tous les stades de la chaîne de valeur (recherche, développement, innovation, pré-commercialisation ou commercialisation).

Il convient de relever que seule la transposition du troisième volet est obligatoire dans les États ayant ratifié le protocole. Le Titre IV du présent projet de loi vise à effectuer cette transposition.

Ce que le Protocole apporte de plus par rapport aux articles 8 et 15 de la Convention sont les dispositions relatives à la manière dont les parties à ce traité devront traiter les cas de non-respect de la législation nationale par leurs ressortissants (obligation de contrôler, poursuivre et infliger des sanctions).

3. La mise en œuvre au niveau européen

Le règlement (UE) n° 511/2014 du 16 avril 2014 du Parlement européen et du Conseil relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation, a été adopté le 16 avril 2014.

Comme le soulignait votre rapporteure dans son rapport de première lecture : « bien que d’application directe, [le règlement n° 511/2014] implique toutefois un certain nombre de mesures nationales de mise en œuvre en matière :

– de contrôle de la conformité des utilisateurs français, au premier rang desquels la définition des sanctions pénales en cas de non-respect des obligations qui leur incombent ;

– de transcription de la notion de « communautés autochtones ou locales » détenant les connaissances traditionnelles présentant un intérêt pour l’utilisation des ressources génétiques, le règlement précité ne la précisant pas dans son article 3 ;

– d’application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, les dispositions du règlement ne s’appliquant dans les territoires d’États-membres faisant l’objet d’une décision d’association avec l’Union européenne qu’à la condition d’une « transposition » en droit interne. »

Le règlement est entré en vigueur en même temps que le Protocole, le 12 octobre 2014, mais un délai d’un an était prévu pour permettre aux États membres de l’Union européenne de prendre les mesures nationales nécessaires pour mettre en œuvre ses dispositions.

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La Commission adopte l’article 26 ter sans modification.

TITRE V
ESPACE NATURELS ET PROTECTION DES ESPÈCES

Article 27 A
(section X du chapitre III du titre III de la première partie du Livre premier et article 564 quater B [nouveaux] du code général des impôts)

Taxe additionnelle sur l’huile de palme

1. Le droit en vigueur

L’article 1609 vicies du code général des impôts crée une « taxe spéciale sur les huiles végétales (…) destinées, en l’état ou après incorporation dans tous produits alimentaires, à l’alimentation humaine ». Les tarifs de cette taxe sont révisés chaque année, par arrêté du ministre chargé du budget. Son produit est affecté à la mutualité sociale agricole (MSA), comme ressource pour le financement de la protection sociale des non-salariés agricoles. Elle est due pour les huiles fabriquées en France métropolitaine et pour les huiles importées.

La taxe est recouvrée selon des taux réels pour les huiles brutes, et des taux forfaitaires pour les huiles incorporées dans des produits alimentaires. S’agissant des huiles brutes, les tarifs applicables en 2016 (10) sont, notamment, d’environ 190 euros par tonne pour l’huile d’olive, d’environ 170 euros/tonne pour l’huile d’arachide, d’environ 113 euros/tonne pour les huiles de coprah et de palmiste, d’environ 104 euros/tonne pour l’huile de palme et d’environ 87 euros/tonne pour l’huile de colza et l’huile de pépins de raisin. Ainsi, les huiles de palme, de coprah et de palmiste font partie des huiles végétales les moins taxées.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du groupe Écologiste visant à créer une taxe additionnelle spécifique aux huiles de palme, de coprah et de palmiste, en introduisant un article 564 quater B dans le code général des impôts.

Cette contribution additionnelle aura la même assiette que la taxe existante sur les huiles végétales, mais présente deux caractéristiques différentes de celle-ci :

● son produit sera affecté au fonds de solidarité vieillesse et non à la MSA ;

● son tarif est précisément fixé par l’amendement et serait donc défini au niveau législatif pour les premières années d’application (ensuite son tarif serait fixé, comme celui de la taxe « générale », par arrêté ministériel) : 300 euros/tonne en 2017, 500 euros/tonne en 2018, 700 euros/tonne en 2019 et 900 euros/tonne à partir de 2020.

L’amendement a été adopté malgré l’avis défavorable du rapporteur du Sénat, le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse des sénateurs.

3. La position de votre rapporteure et de la commission

Votre rapporteure observe que, contrairement à ce que certains sénateurs ont affirmé lors de l’examen en séance au Sénat, cet article additionnel ne vise pas à opérer un simple « rattrapage » entre les niveaux de taxation des différentes huiles, ni à un « rééquilibrage » analogue à celui qui a été engagé entre fiscalité du diesel et fiscalité de l’essence : le dispositif adopté par le Sénat amènera à ce que les huiles de palme, de coprah et de palmiste soient trois fois plus taxées que les autres huiles végétales.

On peut estimer que l’objectif des auteurs de l’amendement, qui était de rendre la taxation dissuasive pour le recours à ces huiles, pourra certainement être atteint avec des tarifs beaucoup moins lourds que ceux que le Sénat a proposés. Votre rapporteure a donc proposé à la commission de conserver le principe de cette taxe additionnelle, mais en fixant son tarif à 90 euros pour que l’huile de palme se trouve globalement taxée au même niveau que l’huile actuellement la plus taxée.

La commission a adopté cet amendement de votre rapporteure, ainsi qu’un amendement de M. Martial Saddier visant à exempter de cette taxe additionnelle les redevables qui apportent la preuve que les huiles qu’ils utilisent répondent à des « critères de durabilité environnementale », et un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

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* *

La Commission examine deux amendements de suppression, CD872 de M. Christophe Bouillon et CD881 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

M. Christophe Bouillon. L’amendement CD872 vise à supprimer cet article, introduit par le Sénat, qui relève de la fiscalité. Si une réflexion peut être utilement menée sur la taxation des huiles, elle devrait aboutir dans le projet de loi de finances. Je signale par ailleurs que notre collègue Razzy Hammadi mène actuellement un travail sur la taxation des produits alimentaires ; nous serions bien avisés d’attendre ses conclusions avant de légiférer en la matière.

Nous percevons tous les motifs de cette taxation punitive : personne n’ignore la question de la déforestation, mais j’ai le sentiment que cette disposition est disproportionnée. Elle n’encourage pas, en tout cas, celles et ceux qui souhaitent la production d’huile de palme durable.

La France a signé la déclaration de New York sur les forêts en septembre 2014, puis la déclaration d’Amsterdam du 7 décembre 2015, en marge de la COP 21, afin de soutenir l’engagement du secteur privé à s’approvisionner à 100 % en huile de palme durable en Europe d’ici à 2020. Ces engagements traduisent une démarche incitative qui doit amener l’ensemble du secteur privé à être exemplaire en la matière.

La déclaration d’Amsterdam va permettre d’accélérer significativement la transformation de la filière de l’huile de palme et faire basculer l’ensemble de la production vers une huile de palme durable. Le développement de cette huile durable est un élément clé pour lutter contre la déforestation et le réchauffement climatique.

Une augmentation de la fiscalité mettrait en danger la compétitivité des entreprises de la filière alimentaire qui utilisent l’huile de palme durable, puisqu’aucune différence n’est faite, et pénaliserait les industries qui se sont engagées, avec la France, au respect de la déclaration d’Amsterdam pour l’utilisation d’une huile de palme durable.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. L’huile de palme est une production qui a été massivement introduite en Indonésie et en Malaisie par les pays coloniaux, notamment européens, et nous en avons tiré un immense bénéfice pendant très longtemps. Aujourd’hui, la Malaisie et l’Indonésie tirent une grande partie de leurs ressources de l’exportation de cette huile de palme. La production d’huile de palme a effectivement entraîné la destruction de forêts et de jungles il y a plus d’un siècle, voire il y a plus longtemps encore. Mettre ces économies en péril est donc une décision difficile.

Les arbres utilisés pour produire l’huile de palme – par cette expression, nous entendons les huiles de palme, de palmiste et de coprah – ont de grandes qualités de productivité. Les palmiers sont cultivés en vergers et produisent chaque mois. En Afrique, après le drame survenu en Sierra Léone, une partie des terres qui avaient été incendiées et détruites a été replantée avec des palmiers à huile.

Aujourd’hui, la croissance de la production mondiale d’huile de palme est importante et permet d’apporter une partie des graisses alimentaires consommées par la population mondiale. Et elle ne cause pas plus d’obésité que les huiles de colza, d’arachide ou de tournesol.

Il ne serait donc pas pertinent de mettre en péril des filières économiques qui ne sont pas présentes sur le territoire national – il n’y a pas de palmiers à huile sur le territoire national – au motif que cette huile serait entachée des souffrances nées du colonialisme (Murmures divers), de guerres, ou qu’elle porterait atteinte à la biodiversité. Il y a plus d’un siècle que la biodiversité de la Malaisie ou des Philippines est en grande partie perdue, alors qu’une telle décision mettrait en péril des partenaires économiques importants et en pleine croissance.

En France, l’exploitation des huiles de palme, de palmiste et de coprah emploie à peu près 1 200 personnes dans les entreprises françaises qui, au total, emploient 3 300 personnes dans le monde.

Par ailleurs, cette mesure crée une taxe alors que le Gouvernement a décidé qu’il n’y en aurait plus d’autres. La création de taxes doit intervenir dans une loi de finances, et il serait pertinent d’équilibrer le niveau de taxation des différentes huiles comme l’huile de colza, l’huile d’olive, l’huile de tournesol, l’huile d’arachide et d’autres encore qui sont aujourd’hui taxées à des niveaux très différents, sans que l’on ne comprenne bien pourquoi.

Je rejoins notre collègue Christophe Bouillon dans son souhait que le ministère des finances réalise un travail de fond sur cette question. Je m’inquiète de voir arriver au Sénat le projet de cette taxe, qui me semble liée à la polémique autour du Nutella, et qui met en péril beaucoup de monde. Alors que personne ne cherche à stigmatiser l’arachide, par exemple, qui contribue pourtant beaucoup à l’obésité en France et dans le monde.

Cet amendement de suppression est donc extrêmement réfléchi, d’autant que la France et les industriels se sont engagés vers la production d’huile de palme durable et responsable, notamment dans le cadre de la COP 21.

Mme la rapporteure. Le Sénat a introduit cet article pour créer une taxe additionnelle sur l’huile de palme, de coprah et de palmiste, actuellement soumise une taxation de 10,371 euros pour cent kilogrammes alors que l’huile d’olive, par exemple, est taxée à 18,896 euros. Il est donc apparu intéressant au Sénat de taxer l’huile de palme, parce que l’on connaît les effets négatifs de sa culture sur les forêts, et les avis très controversés quant à ses effets sur la santé publique.

Aujourd’hui, des efforts de certification sont réalisés dans les pays producteurs – Indonésie et Malaisie en particulier – mais ces certifications n’ont strictement rien d’officiel. C’est uniquement un moyen d’aider les petits agriculteurs, parce que les grosses entreprises s’en sortiront toujours. Il n’est donc pas question pour moi de mettre un terme à ces efforts de certification, je crois d’ailleurs qu’une mission est en cours sur ce point.

J’ai préparé un amendement CD130 pour réduire le niveau de taxation proposé par le Sénat, parce qu’il apparaît beaucoup trop élevé et signifierait un arrêt pur et simple de cette importation. Je vous proposerai donc de limiter la taxe additionnelle au taux de l’huile d’olive. J’en ai discuté avec l’ambassadeur d’Indonésie et des représentants de Malaisie, ainsi qu’avec les associations qui sont au côté des petits agriculteurs dans ces pays, et ils ne considèrent pas que ce soit irréalisable. Je pense donc que nous pouvons taxer l’huile de palme au niveau de l’huile d’olive.

Par ailleurs, en étudiant le tableau de taxation des huiles, j’ai été choquée de découvrir que nous cautionnions toujours l’utilisation d’huile d’animaux marins dont le commerce et l’utilisation sont soumis aux règles internationales ou nationales relatives aux espèces protégées. J’ai cherché des informations, j’ai demandé ce que devenaient ces huiles, sans réponse. Ces huiles sont aujourd’hui taxées au niveau de l’huile d’olive, je vous proposerai, par un amendement CD1072, de les taxer plus lourdement car je ne peux pas imaginer que l’on encourage l’utilisation de ces huiles, alors que notre pays se veut exemplaire dans la protection des espèces menacées.

Je vous demande donc de repousser les amendements de suppression présentés par nos collègues, ce qui permettra d’adopter l’amendement CD130 que je vous ai présenté ainsi que l’amendement CD1072 sur les huiles provenant d’animaux marins protégés.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement, comme beaucoup d’entre vous, est très mobilisé sur ce sujet. Cette question a des conséquences sur la biodiversité de notre planète, sur notre climat, et comme l’a bien montré la COP 21, sur la déforestation.

La production mondiale de ces huiles, actuellement de 50 millions de tonnes par an, est en forte croissance. Les prévisions font état d’un doublement de la production d’ici à 2030. La France en consomme 150 000 tonnes par an à des fins alimentaires.

Par rapport aux autres huiles alimentaires, ces huiles sont soumises à une fiscalité à l’importation très avantageuse, au point que l’on pourrait l’apparenter à une niche fiscale. Même si les filières d’approvisionnement, française et européenne, s’organisent pour réduire les effets néfastes de ces productions sur l’environnement, j’estime important de donner un signal pour encourager une industrie plus vertueuse.

Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression ; en revanche, je serai favorable à l’amendement de la rapporteure qui propose un niveau de taxation plus raisonnable, aligné sur celui de l’huile d’olive, en faisant disparaître l’avantage énorme dont bénéficiait l’huile de palme jusqu’à présent.

S’agissant des filières durables, nous souhaitons travailler avec les pays producteurs à une meilleure certification, qui permettrait de les aider à développer une production durable. Le ministère prépare dans ce cadre un plan d’action cohérent sur ce sujet, afin de garantir une labellisation sérieuse d’une huile de palme durable et à assurer autant que possible une taxation favorable adaptée à cette filière durable.

M. Jean-Yves Caullet. Cette thématique pourrait valoir pour d’autres produits, tel le caoutchouc, qui a connu les mêmes histoires ; du coup, l’économie circulaire qui se trouve désavantagée par rapport à des pneus à bas coût, produits dans le Sud-Est asiatique, avec lesquels nous roulons tous.

Ce qui m’interroge, c’est la limitation de la mesure à l’alimentation humaine : en m’intéressant à la fiscalité sur les carburants, j’ai découvert que l’huile de palme allait être importée afin de fabriquer une catégorie de biocarburant. Nous devrions y réfléchir d’ici l’examen en séance publique.

Mme Laurence Abeille. L’article 27 A introduit par le Sénat porte sur un problème grave : celui des dégâts causés à la biodiversité par la culture des palmiers à huile. La taxation proposée constitue une occasion pour la France d’affirmer sa position vis-à-vis de ce type de culture particulièrement destructrice. Et même si ce projet de loi sur la biodiversité ne concerne pas directement la santé, rappelons que l’huile de palme est souvent décriée pour ses effets sur le système cardio-vasculaire. Enfin, l’argument de Jean-Yves Caullet est tout à fait intéressant.

Autant de raisons pour lesquelles il ne faut surtout pas supprimer cet article ; de même, il serait tout à fait dommage de baisser le montant de taxation proposé par le Sénat. Je rappelle que la mesure prendrait effet en 2020, ce qui laisserait le temps de s’y préparer.

Méfions-nous enfin des discours présentant cette culture comme durable : elle recourt massivement à des produits chimiques, ce qui est peu compatible avec la notion de biodiversité.

Mme Delphine Batho. La remarque de Jean-Yves Caullet au sujet d’importations massives d’huile de palme à des fines énergétiques est importante. Si l’objectif, dans le projet de loi que nous examinons, est de prendre en compte l’impact de la production et de l’exploitation de l’huile de palme sur la biodiversité, cette question ne saurait être mise de côté, tant au regard des volumes concernés que de son impact sur l’agriculture française, du fait de la concurrence déloyale que représente ce type d’importation.

Rappelons aussi qu’il n’y a pas d’équivalence entre l’huile d’olive et l’huile de palme, ni en termes d’incidences sur la biodiversité ni en termes sanitaires ; on ne saurait se fonder sur une telle comparaison pour justifier la suppression de l’avantage fiscal dont bénéficie l’huile de palme.

Enfin, plusieurs amendements qui n’ont pas encore été examinés proposent le maintien du texte du Sénat en excluant du dispositif l’exploitation de l’huile de palme durable ; Mme la secrétaire d’État peut-elle nous indiquer si cette filière est mûre en termes de certification et de traçabilité, de sorte que nous pourrions poser, dès à présent, dans la loi un principe général de taxation des huiles, sans niche fiscale, et d’exemption des filières dites vertueuses ?

Mme la secrétaire d’État. La question des biocarburants ne saurait être négligée, le Premier ministre a d’ailleurs chargé mon ministère de préparer un plan d’action. Je souhaite qu’un signal clair soit émis au sujet de l’huile de palme. Le Sénat s’est borné au domaine alimentaire : je souhaite que les aspects environnementaux et sanitaires soient, eux aussi, pris en compte. Au demeurant, la taxe proposée par cet article paraît relativement exorbitante ; nous préférons qu’elle soit ramenée à un niveau plus raisonnable.

À l’heure actuelle, madame Batho, il n’existe pas de filière certifiée sérieusement vérifiable ; l’idée est de travailler avec les pays producteurs — l’Indonésie et la Malaisie étant les premiers concernés — qui ont besoin de solutions pour pouvoir travailler, afin de mettre ces filières en place.

J’entends que l’on puisse vouloir appeler l’attention en signifiant que la taxe ne concernera pas les filières vertueuses, mais cela n’est pas applicable pour l’heure ; je m’en remets à vous si vous souhaitez adresser ce message – qui peut être signe de bonne volonté – aux pays producteurs dont l’économie dépend fortement de l’huile de palme.

Mme la rapporteure. L’ambassadeur d’Indonésie, que nous avons rencontré, Viviane Le Dissez et moi-même, a évoqué des volumes de production de l’ordre de 25 000 tonnes…

Mme Delphine Batho. La France importe 110 000 tonnes…

Mme la rapporteure. Une bonne part des importations provient de Malaisie, et d’autres des Pays-Bas, qui sont le fait de grandes entreprises.

Mme Viviane Le Dissez. Les chiffres qui nous ont été communiqués sont les suivants : l’Indonésie produit 22 millions de tonnes par an ; 62 000 tonnes d’huile destinée à la consommation et 4 000 tonnes de carburant sont importées par la France. La Malaisie produit 15 millions de tonnes dont 500 000 passent par les Pays-Bas, qui font office de plateforme européenne par laquelle transite la majeure partie des huiles provenant de ces territoires.

Il est vrai qu’aucune comparaison ne peut être établie entre l’huile d’olive et l’huile de palme, alors que la première est taxée à plus de 18 % et la seconde à environ 10 %. Il me semble qu’au minimum, il conviendrait d’harmoniser ces taux, d’autant plus que la tonne d’huile de palme est vendue aux environs de 260 dollars et plus sur les marchés ; vouloir affecter une taxe de 300 euros me paraît très exagéré.

M. Christophe Bouillon. Je salue la démarche de la rapporteure et de Mme Le Dissez, qui ont rencontré des représentants des pays producteurs. La rédaction du Sénat posant problème, Mme la rapporteure propose un autre montant ; en défendant mon amendement, j’ai indiqué que les travaux de la mission d’information sur la taxation des produits alimentaires de nos collègues Véronique Louwagie et Razzy Hammadi étaient en cours. J’aimerais savoir s’il y a urgence ou non : souhaitons-nous avoir une approche globale d’une question qui ne se limite pas à la seule huile de palme ? On recense sept huiles qui connaissent des niveaux de taxations très différents.

Je partage les préoccupations de Mme Delphine Batho, et ils me confortent dans l’idée qu’il s’agit d’une question plus vaste devant trouver sa solution en loi de finances : allez-vous nous demander de voter un montant pour, demain, à la lumière des conclusions des travaux de la mission d’information, nous proposer une autre approche ?

J’ai déposé un deuxième amendement, CD871, qui opère une distinction en faveur des entreprises qui s’approvisionnent en huile de palme certifiée durable. J’ai entendu les doutes de la ministre au sujet des possibilités actuelles de certification de cette filière, mais j’aimerais comprendre : en décembre 2015, la France a signé la convention d’Amsterdam avec l’objectif de 100 % d’huile de palme durable d’ici à 2020 ; j’espère qu’elle considère que la certification est une réalité, sinon, ce ne sont que des mots.

La démarche de certification est bien plus sérieuse que ce que j’en ai entendu dire à l’instant ; les sociétés qui s’y engagent sont évidemment au fait des exigences qu’emporte cette notion. C’est pour cela que mon amendement CD871 vise à promouvoir une démarche incitative, afin d’encourager le plus grand nombre d’entreprises utilisant l’huile de palme en France à s’engager dans des démarches de certification afin d’éviter les dégâts environnementaux qui ont été évoqués et qui, pour la plupart, relèvent du passé.

Je pose donc deux questions : comment nous déterminerons-nous à l’égard des travaux de la mission d’information ; s’il existe un doute sur la certification, pourquoi prendre au niveau international des engagements tels que cet objectif de 100 % d’huile de palme durable à l’horizon 2020 ?

M. Gérard Menuel. À première vue, la proposition du Sénat pourrait paraître séduisante, mais elle semble ignorer les efforts fournis depuis plusieurs années par plusieurs entreprises pour développer une filière durable et lutter contre la déforestation au bénéfice de planteurs dont la plupart sont indépendants. Elles s’approvisionnent uniquement en huile de palme durable et sont porteuses, avec leurs homologues européennes, d’un vrai projet environnemental.

La proposition du Sénat annihilerait leurs efforts alors même que ces entreprises sont unanimement reconnues et soutenues par des ONG et les experts scientifiques qui présentent l’huile de palme durable comme l’une des solutions susceptibles au défi de nourrir 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec un impact environnemental minimal.

Cette taxation pourrait être contraire à l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), à l’accord de New York sur les forêts, signé par la France en 2004 ; mais surtout, elle irait à l’encontre de l’accord d’Amsterdam dans lequel la France s’est engagée, il y a quelques semaines, à soutenir les entreprises vertueuses.

M. Dino Cinieri. Nous sommes confrontés à un enjeu économique et fiscal, car notre huile d’olive est plus taxée que l’huile de palme alors qu’elle n’a pas un impact négatif sur l’environnement. Cependant, une taxation spécifique de l’huile de palme n’est pas la bonne solution : il ne s’agit pas d’un produit toxique, et ses qualités nutritionnelles sont avérées à la condition de la consommer avec modération, comme c’est le cas pour le beurre.

Le véritable enjeu est la transformation de cette filière qui, directement ou indirectement, fait vivre plusieurs millions de familles en Asie et en Afrique ; il faut développer les filières durables et lutter contre la déforestation. Des progrès ont été réalisés, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), par exemple, travaille depuis des années au développement de semences améliorées afin d’augmenter la productivité et limiter la déforestation. Une démarche globale est entreprise depuis dix ans, à la fois par les industriels, les Gouvernements, les ONG les raffineurs, les entreprises utilisatrices, les distributeurs, les utilisateurs finaux et les producteurs locaux pour changer les pratiques culturales et, aujourd’hui, 90 % environ de l’huile de palme produite dans le monde est couverte par des engagements de zéro déforestation. L’adoption de cet article 27 A fragiliserait les efforts réalisés par l’ensemble des acteurs de la filière – producteurs, ONG, gouvernements, raffineurs, entreprises utilisatrices, distributeurs et utilisateurs finaux – pour développer des solutions collaboratives permettant de mettre un terme à la déforestation.

M. Jean-Louis Bricout. Les enjeux environnementaux et de santé publique ne sauraient être ignorés ; pour autant, arbitrer une question de fiscalité dans le cadre d’un débat concernant la biodiversité ne me paraît pas opportun. Il conviendrait, pour le moins, de disposer au préalable d’une étude de l’impact économique d’une telle mesure sur nos entreprises et de savoir si une harmonisation fiscale est prévue à l’échelle européenne ; par ailleurs, il serait préférable de disposer des conclusions du rapport de la mission d’information sur la taxation des produits alimentaires. Cette disposition relève plutôt de la loi de finances.

M. Philippe Plisson. Cela fait des années que nous entretenons ce débat au sujet de l’huile de palme, de la déforestation et des problèmes que soulèvent ces questions. Aujourd’hui, alors que nous sommes sur le point d’adopter de bonnes mesures, on trouve des raisons de ne pas les prendre. Je conçois qu’il soit nécessaire d’en mesurer les effets, mais la proposition de la rapporteure me semble équilibrée : elle permettrait au moins de mettre la fiscalité applicable à l’huile de palme au même niveau que les autres huiles que nous consommons. Ce serait la moindre des choses.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je persiste à penser qu’une nouvelle taxe relève de la loi de finances, et pas d’un texte relatif à la biodiversité.

La culture d’huile de palme représente 39 % de la production mondiale d’huile végétale en occupant 7 % seulement de la surface agricole. Cela est bien plus faible que la culture du soja, du colza ou du tournesol qui occupent respectivement 61 %, 18 % et 14 % de cette surface.

Cette manière que nous avons de nous décharger de notre culpabilité coloniale m’inquiète quelque peu… (Murmures)

Mme la secrétaire d’État. Cela n’a rien à voir !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Cela a totalement à voir. L’implantation de ces palmeraies en Indonésie et en Malaisie est directement liée à l’implantation coloniale hollandaise, portugaise et anglaise. Et les Français portent la même responsabilité en d’autres lieux : on ne se pose pas la question au sujet de l’arachide ou de la disparition de la forêt primaire en Europe à laquelle le blé est venu se substituer ! (Murmures)

Notre point de vue ne peut pas se fonder sur notre confort français et européen ; nous ne pouvons pas être les seuls au monde à l’adopter en donnant l’image d’une France qui rétrécit et donne des leçons de morale. En revanche, l’harmonisation du régime fiscal pesant en France sur les diverses huiles me paraît raisonnable : c’est le travail de la mission d’information sur la taxation des produits alimentaires.

Aujourd’hui, le revenu moyen d’une palmeraie à huile est de 2 100 euros à l’hectare, contre 200 pour une rizière. C’est cela, la réalité économique ! Et prétendre que nous allons accompagner et aider l’Indonésie et la Malaisie se développer de manière intelligente – car c’est bien ce qu’on voulait dire – a un petit relent d’attitude coloniale quelque peu condescendante. Ce sont des gens tout à fait intelligents et formés, qui vivent dans un pays situé là où il est, en zone intertropicale, et où poussent des palmiers qui produisent de l’huile de palme, ce qui en fait une culture tout à fait pertinente. Arrêtons de nous poser en donneurs de leçons !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ces amendements sont-ils maintenus ?

La Commission rejette successivement les amendements CD872 et CD881.

La Commission examine ensuite, en présentation commune, les amendements CD436 de M. Martial Saddier, CD1072 de la rapporteure et CD871 de M. Christophe Bouillon.

Mme la rapporteure. J’ai par avance défendu tout à l’heure l’amendement CD1072. Le but est de taxer un peu plus les huiles provenant d’animaux marins protégés, notamment la baleine ; c’est un signal que nous pouvons adresser.

Mme la secrétaire d’État. L’intention est louable ; toutefois, dans la mesure le commerce et l’utilisation des produits provenant de ces animaux sont interdits, le texte visé me semble obsolète…

Mme la rapporteure. Certes, mais si l’on supprime la mesure alors qu’il reste encore du commerce de ces huiles, elles ne seront plus taxées du tout. Ce serait embêtant…

Mme la secrétaire d’État. Effectivement, s’il reste malgré tout des importations, c’est une vraie question, et je remercie Mme la rapporteure de l’avoir soulevée. Afin d’éviter toute erreur éventuelle, je propose de mûrir la réflexion jusqu’à la séance publique, car nous parlons là d’un commerce interdit.

Mme la rapporteure. Je retirerai volontiers mon amendement, il me semblait important de souligner cette incongruité et de lever un certain nombre de doutes ; si nous pouvions le faire d’ici à la séance publique, je serais totalement d’accord.

M. Jean-Yves Caullet. Je réitère ma remarque sur les huiles alimentaires : la situation n’est pas meilleure pour les animaux marins.

L’amendement CD1072 est retiré.

M. Gérard Menuel. Vous disiez tout à l’heure, madame la secrétaire d’État, que vous partagiez l’idée d’adresser un signal. C’est précisément ce que nous proposons avec l’amendement CD436 en conditionnant la contribution additionnelle à la taxe spéciale sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l’alimentation humaine à des critères de durabilité environnementale. Une telle disposition permettra d’encourager les progrès, d’accélérer la transformation de la filière et de répondre ainsi aux enjeux actuels de la déforestation.

Mme la rapporteure. L’intention de favoriser la culture de l’huile de palme réalisée dans les meilleures conditions environnementales possibles est louable ; certains acteurs de la filière ont engagé des démarches allant dans ce sens, et leurs efforts doivent être salués. Mais il existe trois démarches de certification au sein des pays producteurs bénéficiant du soutien des autorités nationales et, pour l’une d’entre elles, d’un soutien non gouvernemental.

Certaines certifications semblent n’être que de façade ; il convient d’attendre les conclusions de la mission d’information sur la taxation des produits alimentaires ainsi que le plan d’action commandité par le Premier ministre afin de disposer de plus d’éléments relatifs à la certification. Aussi, à ce stade je demande le retrait de cet amendement au profit de mon amendement CD130 dont je vous ai déjà parlé et qui vous sera soumis dans un instant.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement CD436 entraînerait une baisse de recettes pour l’État, il est surprenant qu’il ait passé le barrage de l’article 40 de la Constitution…

Sur le fond, nous ne pouvons plus nous satisfaire de certifications non contrôlées. C’est dans ce contexte qu’un plan d’action a été demandé à mon ministère ; il prendra naturellement en compte les conclusions des travaux de la mission d’information conduite par Razzy Hammadi sur la taxation des produits alimentaires et nous essaierons d’avancer avec les pays producteurs afin de déterminer une méthode de certification sérieuse qui ne laissera plus la place au doute.

Prévoir dès aujourd’hui d’adresser un message à la profession en indiquant que ceux qui peuvent prouver que leur huile provient d’une production durable bénéficieraient d’une réduction ou d’une exonération de la taxe serait pour l’heure inopérant. Cela étant, si les députés tiennent à envoyer un message de caractère symbolique, cela relève de leur responsabilité ; je m’en remettrais à leur sagesse.

M. Christophe Bouillon. Mon amendement CD871 procède du même esprit, il s’agit d’adresser un message aux producteurs.

La Commission adopte l’amendement CD436.

L’amendement CD871 est retiré.

La Commission étudie ensuite l’amendement CD130 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Je l’ai déjà défendu.

La Commission adopte cet amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD131 de la rapporteure.

Elle est saisie des amendements identiques CD305 de M. Dino Cinieri, CD513 de Mme Laurence Abeille et CD929 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Le projet de loi crée une Agence française pour la biodiversité ambitieuse dont le périmètre est très large, or aucune disposition particulière ne prévoit de moyens adaptés à cette ambition.

La question des moyens de cette agence a fait l’objet de « l’appel de Strasbourg » le 22 mai 2015 à l’occasion de la conférence nationale intitulée « L’Agence française pour la biodiversité, quel projet commun ? »

Le Sénat ayant instauré une taxe sur l’huile de palme en prenant pour principal argument que cette production constitue une atteinte majeure à l’environnement, l’amendement CD305 vise à affecter le produit de cette taxe à l’Agence française pour la biodiversité. Les 150 millions d’euros apportés par cette taxe à l’horizon 2020 constituent une réponse proportionnée aux ambitions affichées.

Mme Laurence Abeille. L’amendement CD513 a le même objet.

M. Gérard Menuel. L’amendement CD929 également.

Mme la rapporteure. Avis favorable à l’adoption de ces amendements.

Mme la secrétaire d’État. Vous savez à quel point l’Agence française pour la biodiversité me tient à cœur… Je dois toutefois rappeler que la taxe sur les huiles végétales est affectée à la mutualité sociale agricole (MSA), rien ne justifierait qu’une taxe additionnelle assise sur les mêmes mécanismes de marché soit affectée à une autre politique nationale, sachant que l’affectation d’une taxe doit demeurer chose exceptionnelle ; mon avis est donc défavorable.

Mme la rapporteure. Peut-être me suis-je mal exprimée : la taxe est affectée à la MSA, mais nous parlons ici de la surtaxe, et c’est elle qui, dans la logique de mon amendement précédemment adopté, pourrait être affectée à la biodiversité. De fait, retirer la taxe de base à la mutualité sociale agricole risquerait de déstabiliser le régime.

M. Gérard Menuel. Je retire l’amendement CD929 à la faveur des arguments développés.

M. Jean-Yves Caullet. Ce type de taxe peut concerner d’autres produits, on l’a vu, et préfigurer une fiscalité écologique sur les matières premières.

Le principe est celui de la non-affectation des taxes. Les moyens de l’agence de la biodiversité doivent s’inscrire dans le cadre budgétaire. Si nous commençons par lui affecter une petite recette, qui peut être vertueuse, chaque fois que nous allons améliorer la fiscalité écologique des matières premières d’origine végétale, nous serons contraints d’en affecter le produit de la même manière. Je préfère que nous nous en tenions à la non-affectation de cette surtaxe.

Mme la rapporteure. Sachant que la taxe elle-même est affectée, en l’espèce à la Mutualité sociale agricole, pourquoi la surtaxe ne le serait-elle pas ?

M. Jean-Yves Caullet. La taxe est affectée à la MSA. Affecter la surtaxe au même objet ne pose pas de problème conceptuel. Mais donner une ressource affectée à l’agence, et celle-là précisément, s’apparente selon moi à un préciput sur son financement qui devrait relever du budget de l’État. Ce serait adresser un signal bizarre et dommageable, à terme, sur les modalités de financement de l’agence de la biodiversité.

Mme la rapporteure. Je ne tiens pas à créer de problème : l’agence devra effectivement pouvoir voler de ses propres ailes. J’entends l’argument de M. Jean-Yves Caullet et je propose à chacun des auteurs de retirer leur amendement.

M. Dino Cinieri. Je retire mon amendement CD305.

Mme Laurence Abeille. Je maintiens le mien.

Les amendements CD305 et CD929 sont retirés. La Commission rejette l’amendement CD513.

La Commission adopte l’article 27 A ainsi modifié.

Chapitre Ier
Institutions locales en faveur de la biodiversité

Section 1
Parcs naturels régionaux

Article 27
(article L. 333-1 du code de l’environnement)

Modalités de création et de renouvellement du classement d’un parc naturel régional

L’article 27 améliore la rédaction de l’article L. 333-1 du code de l’environnement, relatif aux missions et aux modalités de création et de renouvellement des parcs naturels régionaux (PNR). En première lecture, l’Assemblée a apporté des modifications rédactionnelles et de coordination proposées par votre rapporteure, et a complété l’article par l’adoption d’un amendement du Gouvernement.

I. LES MISSIONS DES PARCS NATURELS RÉGIONAUX

Le I de l’article L. 333-1 définit les missions des PNR. L’article 27 du projet de loi y ajoute la possibilité de créer un PNR sur un territoire dont le patrimoine naturel et culturel ainsi que les paysages présentent un intérêt particulier. La dimension paysagère des PNR, qui n’était jusqu’alors mentionnée qu’au niveau réglementaire, se trouve ainsi valorisée.

Le Sénat a adopté ces dispositions de l’article 27 sans modification.

II. LE CONTENU DE LA CHARTE DU PARC NATUREL RÉGIONAL

Le II de l’article L. 333-1 régit les chartes de PNR, qui déterminent les orientations de protection, de mise en valeur et de développement des territoires considérés, les mesures permettant de mettre en œuvre ces orientations, et les orientations et principes de protection des structures paysagères. Ce paragraphe comporte la liste des documents que doit obligatoirement comporter une charte de PNR. L’article 27 du projet de loi restructure ce paragraphe pour établir plus clairement les catégories de documents que doit inclure la charte : un rapport définissant les orientations et les mesures, un plan indiquant les différentes zones, des annexes comportant notamment le projet des statuts du syndicat mixte d’aménagement et de gestion (SMAG) du parc. Les objectifs de qualité paysagère sont ainsi intégrés dans la charte, et les annexes relatives au financement sont supprimées.

En première lecture, l’Assemblée nationale n’a apporté à ces dispositions que des modifications rédactionnelles, et le Sénat n’a pas adopté de modifications.

III. LA PROCÉDURE DE CRÉATION ET LA PROCÉDURE DE RÉVISION

Le III de l’article L. 333-1 porte sur les modalités de création d’un PNR (élaboration du projet par la région avec des modalités de consultation et de concertation, avis motivé de l’État, enquête publique, approbation par les collectivités concernées, et adoption par décret), et le IV, sur le renouvellement de son classement.

A. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Aux termes de l’article 27 du projet tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale, les principales étapes de la procédure de création sont les suivantes :

1° Une délibération de la région définit le périmètre d’étude ;

2° Cette délibération fait l’objet d’un avis motivé de l’État sur l’opportunité du projet, dans un délai fixé par décret ;

3° Le cas échéant, la région modifie le périmètre d’étude retenu, compte tenu de l’avis de l’État ; puis une nouvelle délibération de la région prescrit l’élaboration de la charte ;

4° La région élabore le projet de charte initial, avec l’ensemble des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) concernés, en associant l’État et en concertation avec les partenaires intéressées ;

5° Le projet de charte est soumis à une enquête publique ;

6° Le projet de charte est transmis par la région aux collectivités et EPCI-FP concernés, pour approbation ; l’approbation du projet de charte par une collectivité emporte demande d’adhésion au SMAG du parc ;

7° Si les communes ayant approuvé la charte représentent une majorité qualifiée (définie par décret) des communes comprises dans le périmètre d’étude, la région peut approuver le projet de charte ; elle approuve alors également le périmètre de classement (constitué du territoire des communes comprises dans le périmètre d’étude et qui ont approuvé la charte) ; la région peut aussi, à ce stade, proposer un périmètre de classement potentiel, constitué du territoire de communes comprises dans le périmètre d’étude et qui n’ont pas approuvé la charte ;

8° Enfin, la charte est adoptée par décret portant classement en PNR du territoire des communes comprises dans le périmètre de classement approuvé par la région. Ce décret inclut également, le cas échéant, la définition du périmètre de classement potentiel proposé par la région. La durée du classement sera désormais de quinze ans (au lieu de douze).

Postérieurement à la création du PNR, peuvent se produire :

– le classement du territoire d’une commune comprise dans le périmètre de classement potentiel : ce classement est opéré par arrêté du préfet de région, sur proposition du SMAG du parc, après approbation de la charte par la commune concernée ;

– la révision de la charte du PNR : la procédure de révision suit les mêmes étapes que la procédure de création, à la différence que c’est le SMAG du parc qui élabore le projet de charte révisée.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

1. En commission

La commission du Sénat a adopté deux amendements de son rapporteur, l’un concernant la procédure d’élaboration ou de révision de la charte du PNR, et l’autre concernant la procédure de classement d’une commune du périmètre de classement potentiel :

1° Lors de la quatrième étape de la procédure décrite précédemment, pour l’élaboration du projet de charte initial ou de charte révisée, la commission du Sénat a souhaité que les chambres d’agriculture soient associées au même rang que l’État à cette élaboration ;

2° Le classement, postérieur à la création d’un PNR, d’une commune du périmètre potentiel de classement sera valable « pour la durée de classement du parc (…) restant à courir ».

2. En séance publique

Le Sénat a adopté un amendement du rapporteur, avec avis favorable du Gouvernement, afin de préciser qui agit au nom de l’État pour délivrer l’avis motivé sur l’opportunité du projet de création ou de renouvellement du classement d’un PNR : il s’agira du « représentant de l’État dans la région ».

S’agissant de l’élaboration de la charte, le statut d’« associé à l’élaboration » accordé en commission aux chambres d’agriculture a été supprimé en séance, mais un amendement du rapporteur l’a remplacé par la mention explicite des « chambres consulaires » parmi les partenaires qui doivent prendre part à la concertation. Sur ce point, le Gouvernement s’en est remis à la sagesse des sénateurs.

IV. L’ARTICULATION ENTRE LES INTERVENTIONS DES PARTIES PRENANTES ET ENTRE LES DOCUMENTS DE PLANIFICATION

Le V de l’article L. 333-1 précise la manière dont s’articulent les interventions des différentes parties prenantes. L’État et les collectivités territoriales qui ont adhéré à la charte du PNR doivent appliquer les orientations de celle-ci dans l’exercice de leurs compétences respectives, et prendre les mesures qu’elle prévoit. Ils doivent également assurer la cohérence de leurs actions. Dans le cadre des contrats de plan État-région, l’État et les régions peuvent conclure un contrat avec le SMAG du parc. Les règlements locaux de publicité et les documents d’urbanisme doivent être compatibles avec les dispositions de la charte.

Le VI de l’article L. 333-1 donne un pouvoir consultatif au SMAG du parc sur plusieurs catégories de documents de planification et de gestion (relatifs à l’air, aux transports, à la forêt, à l’eau, à la chasse, au tourisme…), lors de leur élaboration ou de leur révision, et en tant qu’ils s’appliquent au territoire du parc.

A. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Sur l’articulation des actions des parties prenantes, la rédaction de l’article 27 issue des travaux de l’Assemblée intègre les EPCI dans la liste des collectivités ayant approuvé une charte et qui doivent donc appliquer les dispositions de celle-ci. D’autre part, il est ajouté que l’État, les collectivités et les EPCI devront périodiquement évaluer la mise en œuvre de la charte et faire un suivi de l’évolution du territoire du parc.

S’agissant du lien de compatibilité que les documents d’urbanisme doivent respecter dans leur articulation avec les chartes de PNR, l’Assemblée a adopté sans modification les dispositions posant le principe selon lequel tous les documents d’urbanisme doivent être compatibles avec ces chartes, accompagné d’une disposition spécifique pour certaines catégories de documents d’urbanisme : les schémas de cohérence territoriale (SCOT), lorsqu’ils existent, doivent être compatibles avec les chartes de PNR ; mais les plans locaux d’urbanisme (PLU), les documents tenant lieu de PLU et les cartes communales n’ont l’obligation d’être directement compatibles avec les chartes qu’en l’absence de SCOT.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Sur le lien de compatibilité entre chartes de PNR et documents d’urbanisme, la commission du Sénat a adopté des amendements de MM. Alain Duran et Roland Courteau pour inverser l’ordre d’énonciation, afin de mentionner d’abord le cas spécifique de certaines catégories de documents d’urbanisme, puis le cas général. En séance, un amendement du rapporteur a été adopté pour corriger une référence erronée aux articles du code de l’urbanisme.

Le VI de l’article L. 333-1 comporte une liste des documents qui doivent recueillir, lors de leur élaboration ou de leur révision, l’avis du SMAG du parc naturel régional s’ils s’appliquent au territoire du parc. Le Sénat a adopté en commission un amendement du rapporteur pour ajouter à cette liste les documents de planification, d’aménagement de l’espace et de gestion des ressources naturelles relatifs à la gestion des milieux aquatiques ou à la prévention des risques.

V. LA POSSIBILITÉ D’INTÉGRATION DE COMMUNES DANS UN PARC NATUREL RÉGIONAL DÉJÀ CLASSÉ

L’amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale en séance, en première lecture, avec l’accord de votre rapporteure, prévoit que, pour les PNR dont le classement ou le renouvellement de classement a été opéré par décret avant la promulgation de la future loi pour la reconquête de la biodiversité, ou lorsque l’avis motivé de l’État sur l’opportunité du projet est intervenu avant l’entrée en vigueur de cette loi, une ou plusieurs communes n’ayant pas approuvé la charte du PNR au départ peuvent être classées dans le territoire du parc. Ce cas de figure concerne en particulier les communes qui auraient initialement refusé la constitution du parc, et qui pourraient ainsi y adhérer ultérieurement, à leur demande et sur proposition du SMAG du parc.

Le Sénat a précisé, en commission, par adoption d’un amendement du rapporteur, que ce classement « de rattrapage » serait valable pour la durée de classement du PNR restant à courir.

VI. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission a adopté un amendement de M. Christophe Bouillon pour revenir au texte de l’Assemblée s’agissant de la désignation de l’autorité qui émet un avis motivé sur l’opportunité du projet de création d’un PNR, et quatre modifications rédactionnelles proposées par votre rapporteure.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD634 de M. Christophe Bouillon.

Mme Viviane Le Dissez. Cet amendement supprime la mention de l’autorité de l’État compétente pour rendre l’avis motivé sur l’opportunité des projets de parcs naturels régionaux car cette précision ne relève pas du niveau législatif.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable également.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD1, CD2, CD3 et CD4 de la rapporteure.

La Commission adopte l’article 27 ainsi modifié.

Article 27 bis
(article L. 141-10 du code de l’urbanisme)

Inscription de dispositions des chartes de parcs naturels régionaux dans les schémas de cohérence territoriale (SCOT)

(suppression maintenue)

Le code de l’urbanisme dispose que le document d’orientations et d’objectifs (DOO) de chaque schéma de cohérence territoriale (SCOT) « transpose à une échelle appropriée les dispositions pertinentes des chartes de parcs naturels régionaux ».

En première lecture, l’Assemblée nationale a introduit un article 27 bis visant à ce que le DOO transpose également les dispositions des chartes des parcs régionaux à une échelle appropriée. La commission du Sénat a supprimé cet article. Votre rapporteure a proposé de maintenir cette suppression.

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* *

La Commission maintient la suppression de l’article 27 bis.

Article 28
(article L. 333-3 du code de l’environnement)

Missions du syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article L. 333-3 du code de l’environnement prévoit que l’aménagement et la gestion d’un parc naturel régional (PNR) sont confiés à un syndicat mixte. Les statuts de celui-ci sont annexés à la charte du parc. Le syndicat mixte d’aménagement et de gestion (SMAG) est l’un des acteurs chargés de mettre en œuvre la charte ; il a également un rôle consultatif puisqu’il doit être saisi pour avis lors de l’élaboration de certains documents de planification dont le périmètre couvre totalement ou partiellement le territoire du parc.

L’article 28 du projet de loi, tel qu’adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, renforce le rôle du SMAG :

À l’initiative de votre rapporteure, l’article L. 333-3 a été complété pour reconnaître au SMAG un statut de « partenaire privilégié » de l’État, des collectivités territoriales et des EPCI concernés dans le domaine de la biodiversité et des paysages, sur le territoire du parc.

D’autre part, le SMAG a reçu une triple mission :

● « assurer la cohérence des engagements » des collectivités locales, des EPCI et de l’État ;

● coordonner la mise en œuvre de ces engagements, « notamment par une programmation financière pluriannuelle et des propositions d’harmonisation des schémas de cohérence territoriale » ;

● coordonner l’évaluation de la mise en œuvre de ces engagements et le suivi de l’évolution du territoire du parc ; cette coordination vient compléter l’article 27 du projet de loi qui prévoit une évaluation périodique de la mise en œuvre de la charte et un suivi de l’évolution du territoire par l’État et les collectivités.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, et, en commission, des amendements de MM. Jean-François Husson et Roland Courteau supprimant la possibilité, pour le SMAG, de formuler des propositions d’harmonisation des SCOT.

3. La position de la commission

La commission a rétabli, à l’initiative de votre rapporteure, la possibilité, qu’avait introduite l’Assemblée en première lecture, pour un SMAG de faire des propositions d’harmonisation des différents SCOT dont le périmètre recoupe le territoire du PNR. Elle a également adopté deux modifications rédactionnelles.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CD77 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est juridiquement inexact de parler de communes « signataires » de la charte de parc naturel. Les communes peuvent approuver la charte ou y adhérer, mais elles n’en sont pas signataires. Il est donc préférable de faire référence au territoire des communes « classées ».

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement ainsi que l’amendement rédactionnel CD5 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CD23 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose de revenir au texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, permettant aux syndicats d’aménagement et de gestion des parcs de proposer des harmonisations des différents SCOT dont le périmètre recoupe le périmètre de leur parc – plusieurs SCOT peuvent en effet coexister sur le territoire d’un parc naturel. Il s’agit d’une possibilité et non d’une obligation.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

M. Michel Heinrich. Cette disposition me paraît inutile et pose de nombreuses questions tant sur la forme que sur le fond.

Sur le fond, les périmètres des parcs naturels régionaux (PNR) ne correspondent jamais à un périmètre complet de SCOT. En outre, la nature juridique de ces propositions d’harmonisation et leur caractère obligatoire restent flous. Cette disposition crée une rupture d’égalité entre les personnes publiques associées, notamment avec l’État et la région. Enfin, les PNR ont déjà la possibilité de présenter des propositions, soit en qualité de personnes publiques associées, soit lors de la consultation obligatoire, avant l’enquête publique, sur l’élaboration ou la révision du projet de schéma.

L’obligation de compatibilité du SCOT à la charte du PNR apporte de surcroît la garantie que les propositions du parc sont prises en compte.

J’avoue ne pas comprendre l’utilité de cet amendement. Le directeur de la fédération des parcs naturels régionaux de France que j’ai rencontré partage ma perplexité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 ainsi modifié.

Article 28 bis
(article L. 333-4 [nouveau] du code de l’environnement)

Inscription de la « Fédération des parcs naturels régionaux de France » dans la loi

Le chapitre III du titre III du livre III du code de l’environnement régit les parcs naturels régionaux. En première lecture, le Sénat a adopté un amendement du groupe Socialiste et Républicain visant à compléter ce chapitre par un article L. 333-4 qui inscrit au niveau législatif la Fédération des parcs naturels régionaux de France et son rôle. Cet amendement a été adopté en séance avec un avis favorable du rapporteur, le Gouvernement s’en remettant à la sagesse du Sénat.

Les auteurs de l’amendement ont fait valoir que d’autres associations bénéficient d’une reconnaissance au niveau législatif, notamment la Fédération des conservatoires régionaux d’espaces naturels (article L. 414-11 du code de l’environnement) et la Fédération des conservatoires botaniques nationaux (article L. 414-10 du même code). Actuellement, la Fédération des parcs naturels régionaux et son rôle consultatif figurent déjà dans le code de l’environnement, mais dans sa partie réglementaire.

Votre rapporteure a proposé à la commission de conserver cet article, mais en le modifiant pour préciser que la Fédération n’a pas vocation à « regrouper » mais à « représenter » l’ensemble des parcs naturels régionaux, pour harmoniser la rédaction de cet article avec celle de l’article additionnel introduit également par le Sénat relatif à Réserves naturelles de France (article 31 ter). La commission a adopté cet amendement, ainsi qu’un amendement rédactionnel.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD6 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’expression « a vocation à regrouper l’ensemble des parcs » pourrait être interprétée comme créant une obligation pour tous les parcs régionaux d’adhérer à la fédération des parcs naturels régionaux. Il est préférable d’employer le terme « représenter », qui figure dans l’article 31 ter pour une autre association, les réserves naturelles de France.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement ainsi que l’amendement rédactionnel CD7 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 28 bis ainsi modifié.

Article 29
(article L. 581-14 du code de l’environnement)

Règlements locaux de publicité sur le territoire d’un parc naturel régional

1. Le droit en vigueur

L’article L. 581-4 du code de l’environnement pose un principe d’interdiction de toute publicité « dans les cœurs des parcs nationaux et les réserves naturelles ».

L’article L. 581-8 du même code dispose que, à l’intérieur des agglomérations, la publicité est « interdite (…) dans les parcs naturels régionaux (…) [et] dans l’aire d’adhésion des parcs nationaux ». Le même article prévoit toutefois la possibilité de déroger à cette interdiction « dans le cadre d’un règlement local de publicité ».

Sous réserve des dispositions de ces articles L. 581-4 et L. 581-8, la publicité à l’intérieur des agglomérations est en principe « admise » (article L. 581-9), mais doit respecter des prescriptions fixées par décret en Conseil d’État.

En revanche, en dehors des agglomérations, la publicité est en principe interdite (article L. 581-7), même si des exceptions sont prévues ; il est notamment possible d’autoriser, hors agglomération, la publicité « à proximité immédiate des établissements de centres commerciaux exclusifs de toute habitation », par un règlement local de publicité (RLP).

L’article L. 581-14 du code de l’environnement dispose que les EPCI compétents en matière de plan local d’urbanisme (PLU) ou, à défaut, les communes peuvent élaborer un règlement local de publicité applicable sur l’ensemble de leur territoire. Le RLP a pour objet d’adapter les dispositions générales qui concernent la publicité. Le RLP doit définir une ou plusieurs zones dans lesquelles s’appliquent des règles plus restrictives. L’article L. 581-14 précise que, le cas échéant, le RLP doit être compatible :

● avec les orientations de protection, de mise en valeur et de développement durable de la charte applicables à l’aire d’adhésion d’un parc national,

● et avec les orientations et mesures de la charte d’un parc naturel régional (ce lien de compatibilité figure également dans l’article L. 333-1 du code de l’environnement).

Les compétences en matière de police de la publicité sont exercées par le préfet. Toutefois, s’il existe un règlement local de publicité, ces compétences sont exercées par le maire au nom de la commune (article L. 581-14-2).

2. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 29 du projet de loi vise à modifier l’article L. 581-14 pour limiter la possibilité de déroger, par un RLP, à l’interdiction de publicité dans les parcs naturels régionaux (PNR). Dans sa rédaction initiale, que l’Assemblée nationale n’a modifiée que par des amendements rédactionnels, l’article 29 prévoit qu’un RLP dérogeant à l’interdiction de publicité dans un PNR ne sera désormais possible que si des dispositions spécifiques à ce sujet existent dans la charte du parc. Ainsi, le RLP pourra autoriser la publicité lorsque la charte du parc contient des orientations ou des mesures relatives à la publicité, après avis du syndicat mixte d’aménagement et de gestion du parc.

D’autre part, l’article 29 réaffirme le lien de compatibilité entre le RLP et la charte du parc, et indique que cette obligation de compatibilité sera opposable aux RLP applicables sur le territoire d’un parc naturel régional dont le projet de charte a fait l’objet d’une enquête publique ouverte après l’entrée en vigueur de la loi pour la reconquête de la biodiversité, dans un délai de trois ans à compter de la publication du décret approuvant la charte.

3. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du Sénat a supprimé l’article 29, le rapporteur ayant jugé la contrainte excessive pour les communes et intercommunalités. En séance publique, le Sénat a rétabli cet article, en adoptant un amendement du groupe Écologiste, dans une rédaction différente de celle adoptée par l’Assemblée, avec l’avis favorable du Gouvernement.

Il résulte de la rédaction issue du Sénat que, sur le territoire d’un PNR, le RLP ne peut déroger à l’interdiction de publicité que si deux conditions sont réunies : il faut que la charte du PNR comporte des dispositions relatives à la publicité, et il faut que le RLP soit compatible avec ces dispositions. La formulation diffère donc du texte de l’Assemblée, mais sans changement sur le fond.

Il est également prévu que cette double condition soit aussi réunie pour que le RLP puisse autoriser la publicité hors agglomération à proximité immédiate des établissements des centres commerciaux exclusifs de toute habitation.

Le texte adopté par le Sénat traite également le cas des RLP adoptés avant l’entrée en vigueur de la future loi, en distinguant deux cas :

● lorsqu’une charte comportant des dispositions relatives à la publicité est approuvée après l’approbation d’un RLP, et si ce RLP n’est pas compatible avec ces nouvelles dispositions, le RLP doit être rendu compatible avec la charte dans les trois ans suivant l’entrée en vigueur de cette charte ;

● un RLP adopté dans le périmètre d’un PNR avant l’entrée en vigueur de la future loi doit, dans les trois ans qui suivront la publication de cette loi, être abrogé ou être mis en compatibilité avec la charte du PNR.

4. La position de la commission

La commission a adopté cet article dans la rédaction issue des travaux du Sénat avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

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* *

La Commission est saisie des amendements de suppression CD415 de M. Dino Cinieri et CD971 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Le projet de loi précise qu’en l’absence d’orientations et de mesures relatives à la publicité dans la charte de parc naturel régional, il serait impossible aux collectivités compétentes d’élaborer les règlements locaux de publicité. Cette disposition porte de facto atteinte au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales puisque la faculté des collectivités compétentes est subordonnée à l’accord du syndicat mixte d’aménagement et de gestion du parc naturel régional.

Par conséquent, il convient de maintenir la rédaction actuelle de l’article L. 581-14 du code de l’environnement qui impose la compatibilité des règlements locaux de publicité avec les chartes de parcs naturels régionaux.

M. Gérard Menuel. Je souhaite également le maintien de la rédaction actuelle de l’article L. 581-14 du code de l’environnement.

Si, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, l’obligation de compatibilité avec un document de rang supérieur est parfaitement compatible avec le principe de la libre administration des collectivités territoriales, il n’est en revanche pas acceptable sur le plan constitutionnel qu’une collectivité publique, en l’espèce, un syndicat de parc naturel régional, dispose d’un droit de veto sur les décisions d’une autre collectivité, en l’espèce, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de règlements locaux de publicité.

Mme la rapporteure. Les règlements locaux de publicité doivent être compatibles avec les chartes de parc. Cette règle a été introduite à l’article L. 333-1 du code de l’environnement par la loi ALUR. L’article 29 ne crée donc pas une contrainte nouvelle, ni un droit de veto. J’émets donc un avis défavorable à ces deux amendements.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD8 de la rapporteure.

La Commission adopte l’article 29 ainsi modifié.

Article 31
Prorogation du classement de certains parcs et modalités d’intégration de certaines communes au syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc

L’article 31 vise à traiter deux situations spécifiques :

1. Les parcs naturels régionaux déjà classés pour douze ans

Le droit en vigueur fixe à douze ans la durée maximale du classement d’un parc naturel régional (PNR). L’article 27 du projet de loi porte cette durée de validité à quinze ans, qu’il s’agisse du classement initial ou du renouvellement d’un classement.

Le premier alinéa de l’article 31, tel qu’adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, permet aux PNR classés en application du droit en vigueur (pour douze ans) de bénéficier d’une prorogation de ce classement pour trois ans.

Cette prorogation sera opérée par décret, à la demande de la région, sur proposition du syndicat mixte d’aménagement et de gestion (SAMG) du parc. La procédure sera très simple puisqu’il ne sera pas nécessaire, pour obtenir cette prorogation, de faire une enquête publique, ni de procéder aux consultations préalables prévues dans la procédure de classement.

Toutefois, les PNR dont la durée de classement avait déjà été prorogée de deux ans par la loi dite « Grenelle I » du 12 juillet 2010 ne pourront pas faire l’objet de cette nouvelle prorogation.

Le Sénat a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

2. Les communes dont l’adhésion à un P.N.R a été bloquée par leur E.P.C.I

Le second alinéa de l’article 31, dans sa rédaction issue de la première lecture à l’Assemblée nationale, concerne deux catégories de parcs naturels régionaux et une catégorie de communes :

– les PNR dont le classement ou le renouvellement de classement ont été prononcés par décret avant l’entrée en vigueur de la future loi pour la reconquête de la biodiversité,

– et les PNR dont le projet de charte a été transmis par la région aux communes et aux EPCI concernés avant cette entrée en vigueur.

Dans ces deux cas, il peut y avoir des communes qui ont approuvé la charte mais qui n’ont pourtant pas été incluses dans le classement en PNR en raison du refus de l’EPCI dont elles sont membres d’approuver la charte. L’article 31 prévoit qu’une commune se trouvant dans cette situation peut demander à être classée malgré ce refus, pour la durée restant à courir du classement du parc, sur proposition du SMAG et après que la commune ait une deuxième fois approuvé la charte. Comme pour la prorogation du classement des PNR prévue par le premier alinéa de l’article 31, le classement de ces communes est rendu le plus simple possible : pas d’enquête publique, ni de consultations préalables.

Le Sénat a adopté un amendement de coordination du rapporteur.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

*

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD9 de la rapporteure puis elle adopte l’article 31 ainsi modifié.

Section 1 bis
Réserves naturelles de France

Article 31 ter
(article L. 332-1 du code de l’environnement)

Inscription de « Réserves naturelles de France » dans la loi

L’article L. 332-1 du code de l’environnement définit les territoires qui peuvent donner lieu à la création d’une réserve naturelle classée. Le Sénat a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, un amendement du rapporteur visant à insérer, dans cet article, un paragraphe consacrant au niveau législatif l’existence et le rôle de l’association Réserves naturelles de France.

La commission a adopté cet article sans modification.

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* *

La Commission adopte l’article 31 ter sans modification.

Section 2
Établissements publics de coopération environnementale

Article 32
(Intitulé du titre III du livre IV de la première partie et articles L. 1431-1 à L. 1431-8 du code général des collectivités territoriales)

Établissements publics de coopération environnementale

L’article 32 crée une nouvelle catégorie d’établissements publics réunissant plusieurs collectivités territoriales et, le cas échéant, l’État et des établissements publics de l’État. Ils sont dénommés « établissements publics de coopération environnementale » (EPCE), et leur régime juridique est aligné sur celui des « établissements publics de coopération culturelle » (EPCC), créé par la loi du 4 janvier 2002 (11) et défini par les articles L. 1431-1 à L. 1431-9 du code général des collectivités territoriales.

L’objectif de cet article est de créer un statut juridique unique pour les conservatoires botaniques nationaux (dont l’existence est reconnue par le code de l’environnement mais qui ont actuellement des formes juridiques diverses), notamment pour pouvoir intégrer l’État à leur gouvernance. Toutefois, la forme « EPCE » pourra également être utilisée pour d’autres structures. Les EPCE pourront être des établissements publics administratifs ou des établissements publics industriels et commerciaux, selon l’objet de leur activité.

Comme pour un EPCC, la création d’un EPCE sera décidée par l’État mais nécessitera l’accord de l’ensemble des collectivités territoriales ou des groupements intéressés.

I. LES MISSIONS POUVANT ÊTRE CONFIÉES À UN E.P.C.E

A. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, l’EPCE est chargé :

– d’accroître et d’améliorer les connaissances sur l’environnement et leur diffusion ;

– d’accroître et d’améliorer la sensibilisation et l’information des publics ;

– d’apporter un concours scientifique et technique aux pouvoirs publics (cette mission a été ajoutée par l’adoption d’un amendement de votre rapporteure) ;

– d’assurer la conservation d’espèces ou la mise en place d’actions de restauration des milieux.

Il convient de rappeler que l’article 18 du projet de loi prévoit qu’un EPCE pourra être la « personne morale de droit public » visée par le nouvel article L. 412-8 du code de l’environnement, chargée d’organiser la consultation des communautés d’habitants détentrices de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le rapporteur du Sénat a souhaité reformuler la présentation des missions des futurs EPCE, en alignant celles-ci sur les missions confiées à l’Agence française pour la biodiversité par l’article 9 du projet de loi (nouvel article L. 131-9 du code de l’environnement), en excluant toutefois les pouvoirs de police que cet article prévoit d’attribuer à l’Agence.

Ainsi, les missions pouvant être confiées à un EPCE seraient beaucoup plus nombreuses, puisqu’elles incluraient par exemple, en vertu de la rédaction de l’article L. 131-9 issue des travaux du Sénat et en plus des quatre missions prévues par l’Assemblée nationale : l’attribution d’aides financières à des projets en faveur de la biodiversité ; la garantie de la solidarité financière entre les bassins hydrographiques ; des actions de formation, de « structuration des métiers de la biodiversité » ; l’accompagnement et le suivi du dispositif d’accès aux ressources génétiques ; le suivi des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité… (voir commentaire de l’article 9).

Le Sénat a également prévu que, dans les départements d’outre-mer, un EPCE puisse être créé à la place de l’office de l’eau. L’office de l’eau est un établissement public local administratif créé dans chaque DOM et dont les missions et la composition sont définies par l’article L. 213-13 du code de l’environnement.

II. LA COMPOSITION DU CONSEIL D’ADMINISTRATION DE L’E.P.C.E

Du texte adopté par l’Assemblée en première lecture il résulte que le conseil d’administration de l’EPCE est ainsi composé :

– la majorité de ses membres sont des représentants des personnes publiques qui ont constitué l’EPCE,

– le conseil d’administration comporte aussi des personnalités qualifiées désignées par ces personnes publiques, des représentants du personnel, et, le cas échéant, des représentants de fondations.

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a ajouté la possibilité de nommer des représentants d’associations au conseil d’administration de l’EPCE.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Votre rapporteure a proposé à la commission de revenir à la définition des missions pouvant être confiées aux EPCE qui figurait dans le texte adopté par l’Assemblée. Elle a également proposé deux modifications rédactionnelles. La commission a adopté ces trois amendements.

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La Commission est saisie de l’amendement CD82 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à revenir au texte adopté par l’Assemblée en première lecture, prévoyant d’élargir les missions qui pourront être confiées à des établissements publics de coopération environnementale (EPCE) afin de doter les conservatoires botaniques nationaux et le futur conservatoire écologique de Guyane d’un statut juridique adapté.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission en vient aux amendements identiques CD304 de M. Dino Cinieri et CD927 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Compte tenu de leur très forte implication dans les politiques territoriales en faveur de la biodiversité́, mon amendement vise à̀ permettre aux conservatoires d’espaces naturels agréés au titre du L. 414-11 du code de l’environnement d’être associés à la création et à la gouvernance des EPCE.

M. Gérard Menuel. L’amendement CD927 est défendu.

Mme la rapporteure. La décision de création d’un EPCE ne relève pas des associations mais des collectivités publiques. En revanche, les représentants des associations peuvent siéger au conseil d’administration et participer activement à la gouvernance des EPCE, grâce la précision introduite par le Sénat. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

L’amendement CD927 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CD304.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CD10 et CD84 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 32 ainsi modifié.

Article 32 bis AA
(article L. 332-3 du code de l’environnement)

Principe de libre exercice des activités humaines dans les réserves naturelles, leur restriction étant l’exception

(supprimé)

1. Le droit en vigueur

L’article L. 332-1 du code de l’environnement prévoit que « des parties du territoire d’une ou de plusieurs communes peuvent être classées en réserve naturelle lorsque la conservation de la faune, de la flore, du sol, des eaux, des gisements de minéraux et de fossiles et, en général, du milieu naturel présente une importance particulière ou qu’il convient de les soustraire à toute intervention artificielle susceptible de les dégrader ». La création d’une réserve naturelle classée est soumise à enquête publique, et nécessite l’accord de l’ensemble des propriétaires concernés.

L’article L. 332-3 du même code dispose :

– d’une part, dans son premier alinéa, que l’acte de classement d’une réserve naturelle « peut soumettre à un régime particulier et, le cas échéant, interdire à l’intérieur de la réserve toute action susceptible de nuire au développement naturel de la faune et de la flore, au patrimoine géologique et, plus généralement, d’altérer le caractère de ladite réserve. ».

À ce titre, l’alinéa 2 indique que peuvent notamment être réglementés ou interdits la chasse, la pêche, les activités agricoles, forestières, pastorales, industrielles, commerciales, sportives et touristiques, l’exécution de travaux publics ou privés, l’utilisation des eaux, la circulation ou le stationnement des personnes, des véhicules et des animaux ;

– d’autre part, dans son dernier alinéa, que l’acte de classement « tient compte de l’intérêt du maintien des activités traditionnelles existantes dans la mesure où elles sont compatibles » avec les considérations qui justifient le classement en réserve naturelle (préservation d’espèces, reconstitution de populations animales ou végétales, préservation de biotopes, constitution d’étapes sur les grandes voies de migration de la faune sauvage…).

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En séance, le Sénat a adopté un amendement de M. Jean-Noël Cardoux (LR) tendant à poser un principe de libre exercice des activités humaines (chasse, pêche, sport, activités agricoles, forestières, pastorales, industrielles, commerciales, sportives, touristiques, travaux publics ou privés, utilisation des eaux, circulation ou stationnement des personnes et des véhicules) dans les réserves naturelles classées. L’amendement prévoit une exception à ce principe : ces activités peuvent toutefois être limitées ou interdites après concertation « avec les utilisateurs habituels des territoires ».

L’auteur de l’amendement entendait lutter contre la volonté de faire de la réserve naturelle « un sanctuaire dans lequel l’homme n’a pas sa place », en posant le principe que toutes les activités sont a priori permises, sauf à apporter la preuve de leur nocivité.

L’amendement introduit une nouvelle rédaction de l’alinéa 2 de l’article L. 332-3.

3. La position de la commission

La commission a adopté les amendements de suppression de l’article présentés par votre rapporteure, Mme Laurence Abeille, MM. Gérard Menuel et Jean-Yves Caullet.

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La Commission est saisie des amendements de suppression CD24 de la rapporteure, CD514 de Mme Laurence Abeille, CD940 de M. Gérard Menuel et CD949 de M. Jean-Yves Caullet.

Mme la rapporteure. L’article 32 bis AA, introduit au Sénat, pose le principe du libre exercice, sans restriction, de toutes les activités humaines dans les réserves naturelles, qu’il s’agisse de la chasse, du sport, de la circulation des véhicules, des travaux, les éventuelles limitations ou interdictions n’étant que des exceptions à ce principe. Cette logique va trop loin. Je vous propose donc de supprimer cet article. La rédaction actuelle de l’article L. 3323 du code de l’environnement prévoit d’ores et déjà que, dans les réserves naturelles qui sont des territoires d’excellence en matière de préservation de la diversité biologique, les activités humaines peuvent être limitées ou interdites et que l’intérêt du maintien des activités traditionnelles existantes est pris en compte.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement CD514 vise également à supprimer cet article qui introduit une ambiguïté en posant comme principe que les activités susceptibles d’avoir un fort impact sur le patrimoine naturel s’exercent dans le respect des objectifs de protection de la réserve. Les réserves naturelles sont des territoires d’excellence pour la préservation de la biodiversité et les règles qui s’y appliquent doivent être respectées, d’autant que l’acte de classement d’une réserve naturelle tient déjà compte de l’intérêt du maintien des activités traditionnelles existantes dans la mesure où elles sont compatibles avec les intérêts définis à l’article L. 332-1 du code de l’environnement.

M. Gérard Menuel. L’amendement CD940 est défendu.

M. Jean-Yves Caullet. Mon amendement CD949 procède de la même lecture. Les dispositions actuelles indiquent clairement que l’acte de classement tient compte de l’intérêt du maintien des activités traditionnelles existantes et que celles-ci peuvent être réglementées ou interdites. Je ne saisis pas ce qu’apporte cet article en cherchant à dire la même chose en sens inverse… Les situations existantes, qui semblent donner satisfaction, ne sont pas remises en cause, bien au contraire, si l’on conserve le texte actuel.

Mme la secrétaire d’État. Les réserves naturelles sont des territoires d’excellence pour la préservation de la diversité biologique et géologique. C’est ce qui justifie la possibilité donnée par le code de l’environnement de réglementer ou d’interdire dans ces espaces toute action susceptible de nuire au patrimoine naturel.

Il n’est pas souhaitable de poser le principe que toutes les activités humaines peuvent s’exercer dans les réserves. Le code de l’environnement permet déjà de prendre en compte l’intérêt du maintien des activités traditionnelles existantes. Il garantit également la participation de l’ensemble des parties prenantes au travers de l’enquête publique et par diversions consultations.

En outre, la notion d’utilisateur habituel des territoires concernés, introduite par cet article, paraît ambiguë et insuffisante pour couvrir l’ensemble des parties concernées.

Je suis donc favorable à l’adoption de ces amendements.

M. Philippe Plisson. L’article 32 bis AA vise à inverser la charge de la preuve en posant le principe que la pratique des activités dans les réserves est la règle et non l’exception. Il permet ainsi de supprimer un certain nombre de contentieux, nés d’interprétations très diverses sur le territoire.

Prenons le cas, par exemple, des palombières, qui sont des équipements à poste fixe qu’on ne peut pas déplacer. Les réserves de chasse étant, elles, souvent mobiles, une palombière peut se retrouver au milieu d’une réserve, et la règle veut que l’on continue à y chasser. L’application de la disposition que vous défendez suscite souvent des controverses et peut conduire à la fermeture d’un équipement.

La rédaction proposée pour l’article L. 3323 du code de l’environnement n’empêche pas les interdictions, ni les discussions. Mais elle fixe comme postulat de départ que les activités traditionnelles peuvent continuer à être exercées dans les réserves naturelles.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 32 bis AA est supprimé et les amendements rédactionnels CD11 et CD12 de la rapporteure tombent.

Section 2 bis
Espaces naturels sensibles

Article 32 bis A
(article L. 113-9 du code de l’urbanisme)

Compatibilité entre la politique des espaces naturels sensibles (ENS) avec le schéma régional de cohérence écologique (SRCE)

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article L. 142-1 du code de l’urbanisme (dans sa numérotation antérieure à l’ordonnance de codification de septembre 2015) dispose que la politique du département en matière d’espaces naturels sensibles doit être compatible avec :

– les orientations des schémas de cohérence territoriale (SCOT) et des chartes intercommunales de développement et d’aménagement, lorsqu’ils existent ;

– les directives territoriales d’aménagement ou, en l’absence de ces directives, les « lois d’aménagement et d’urbanisme prévues » à l’article L. 111-1-1 (ancienne numérotation) du code de l’urbanisme.

L’Assemblée nationale a adopté en séance des amendements identiques de MM. Martial Saddier et Gilbert Sauvan, afin de compléter l’article L. 142-1 du code de l’urbanisme en prévoyant que les actions départementales en matière d’espaces naturels sensibles doivent également être compatibles avec le schéma régional de cohérence écologique (prévu par l’article L. 371-3 du code de l’environnement, le SRCE est un document-cadre relatif aux continuités écologiques, élaboré conjointement par la région et l’État).

2. Les modifications apportées par le Sénat

Sans en modifier le fond, le Sénat a modifié l’article 32 bis A pour tenir compte de la renumérotation des articles du code de l’urbanisme opérée par l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015. Le lien de compatibilité de la politique départementale des espaces naturels sensibles par rapport au SRCE est ainsi intégré à l’article L. 113-9 du code de l’urbanisme (nouvelle numérotation).

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

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* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD13 de la rapporteure. Puis elle adopte l’article 32 bis A ainsi modifié.

Article 32 bis BA
(article L. 215-21 du code de l’urbanisme)

Incorporation automatique dans le domaine public
des sites « espaces naturels sensibles » acquis par préemption

1. Le droit en vigueur

Le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles est régi par les articles L. 215-1 à L. 215-24 du code de l’urbanisme. L’article L. 215-21 oblige la personne publique qui a acquis de cette manière un terrain à aménager celui-ci pour qu’il soit ouvert au public (sauf exception justifiée par la fragilité du site). De manière générale, cet article rend la personne publique acquéreur responsable de la gestion, de l’aménagement, de la préservation et de l’entretien de ces espaces.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En première lecture, le Sénat a adopté un amendement du groupe UDI-UC visant à compléter l’article L. 215-21 pour préciser que les terrains acquis par exercice du droit de préemption se trouvent automatiquement et immédiatement incorporés au domaine privé de la personne publique propriétaire. Les auteurs de l’amendement, adopté en séance contre l’avis du rapporteur mais avec avis favorable du Gouvernement, ont fait valoir que la domanialité publique rendra ces terrains inaliénables, ce qui permettra de les protéger de manière pérenne.

3. La position de votre commission

Votre rapporteure a proposé à la commission de modifier cet article, car il ne permet pas de prendre en compte un cas de figure qu’a pu rencontrer, par exemple, le Conservatoire du littoral au moment de l’acquisition de terrains : le cas dans lequel le terrain à acquérir n’est que partiellement qualifiable d’« espace naturel sensible », et où, par conséquent, la personne publique qui l’acquiert peut souhaiter en vendre ensuite la partie qui ne constitue pas un ENS. La commission a adopté l’amendement visant à ce que les terrains acquis ne soient pas intégrés automatiquement dans le domaine public, mais seulement si l’organe délibérant de la personne publique propriétaire le décide.

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La Commission examine, en présentation commune, les amendements CD655 de M. Jean-Yves Caullet et CD1075 de la rapporteure.

M. Jean-Yves Caullet. Il s’agit de faire en sorte que les terrains, qui peuvent être de nature différente – une partie intéressant le domaine public, une autre ne présentant pas d’intérêt –, puissent rester cessibles. La disposition prévue par l’article 32 bis BA est, semble-t-il, contraire à plusieurs textes, en particulier au code général de la propriété publique.

Mme la rapporteure. Je laisse à Mme Viviane Le Dissez le soin de présenter l’amendement CD1075.

Mme Viviane Le Dissez. La rédaction actuelle de l’article 32 bis BA n’est pas satisfaisante. Lorsqu’un organisme acquiert une propriété, une partie de celle-ci peut ne pas correspondre aux objectifs poursuivis par l’organisme qui sera amené à revendre cette partie – le conservatoire du littoral, en l’occurrence.

Il est donc important de ne pas incorporer tout de suite dans le domaine public l’ensemble de la propriété mais d’attendre et de se donner les moyens d’une décision appropriée. L’amendement CD1075 que je vous présente avec la rapporteure propose une nouvelle rédaction de l’article répondant à ces exigences.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable sur l’amendement CD1075.

L’amendement CD655 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD1075. Puis elle adopte l’article 32 bis BA ainsi modifié.

Article 32 bis B
(article L. 215-21 du code de l’urbanisme)

Généralisation des plans de gestion des espaces naturels sensibles

1. Le droit en vigueur

Dans le cadre de la politique des espaces naturels sensibles, les départements font l’acquisition de terrains, et l’article L. 142-10 du code de l’urbanisme (ancienne numérotation) dispose que ces terrains doivent être aménagés pour être ouverts au public (sauf exception justifiée par la fragilité du milieu naturel). La personne publique propriétaire est responsable de la gestion des terrains acquis, même si cette gestion peut être confiée à une autre personne publique ou à une personne privée.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

La commission du Sénat a adopté un amendement de Mme Évelyne Didier (CRC) complétant l’article L. 142-10 pour prévoir que les sites espaces naturels sensibles acquis par le département ou un tiers font obligatoirement l’objet d’un plan de gestion – ce qui est déjà souvent le cas en pratique, mais pas systématique. En séance, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur pour placer la disposition dans l’article L. 215-21 du code de l’urbanisme, en coordination avec la renumérotation des articles de ce code opérée par ordonnance en 2015.

La commission a adopté cet article dans sa rédaction issue des travaux du Sénat.

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La Commission adopte l’article 32 bis B sans modification.

Article 32 bis C
(article L. 213-8-2 du code de l’environnement)

Possibilité pour les agences de l’eau de déléguer leur droit de préemption aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER)

1. Le droit en vigueur

L’article L. 213-8-2 du code de l’environnement charge les agences de l’eau, outre leurs missions principales, de mener une politique foncière de sauvegarde des zones humides. Pour ce faire, les agences de l’eau peuvent attribuer des aides financières pour l’acquisition de parcelles par les conservatoires régionaux d’espaces naturels, les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics. Les agences de l’eau peuvent également « acquérir ou faire acquérir des parcelles dans les zones humides à des fins de lutte contre l’artificialisation des sols et de valorisation, notamment agricole ». Pour acquérir ces terrains, deux hypothèses sont distinguées :

– pour les terrains définis par référence à un règlement de l’Union européenne relatif aux paiements de la politique agricole commune (12), l’acquisition est obligatoirement faite par une société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER), qui va alors exercer son propre droit de préemption sur proposition d’une agence de l’eau ; les SAFER sont titulaires d’un droit de préemption en application de l’article L. 143-1 du code rural ;

– pour les autres terrains, les agences de l’eau disposent des mêmes prérogatives que le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres (acquisition par voie amiable, expropriation, préemption…), sans pouvoir toutefois acquérir des parcelles situées dans le champ d’intervention de ce Conservatoire.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En première lecture, le Sénat a adopté un amendement du groupe Écologiste visant à compléter l’article L. 213-8-2 pour donner à chaque agence de l’eau la possibilité de déléguer la mise en œuvre de son droit de préemption à une SAFER. Les auteurs de l’amendement, adopté avec avis favorable du rapporteur et du Gouvernement, ont fait valoir que les SAFER, qui sont obligatoirement saisies par les agences de l’eau pour acquérir certains terrains, peuvent utilement mettre à la disposition de ces agences leur savoir-faire d’opérateur foncier pour l’acquisition d’autres terrains.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD14 de la rapporteure. Puis elle adopte l’article 32 bis C ainsi modifié.

Section 3
Établissements publics territoriaux de bassin

Avant l’entrée en vigueur de la loi « MAPTAM » (13) du 27 janvier 2014, la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI) étaient des compétences facultatives et partagées entre toutes les collectivités et leurs groupements.

La loi MAPTAM a attribué aux communes une compétence ciblée et obligatoire relative à la GEMAPI ; le législateur a prévu que cette compétence serait exercée par les communes ou, en lieu et place des communes, par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP).

Toutefois, les communes et les EPCI-FP ont la possibilité de déléguer cette compétence, ou d’adhérer à des groupements de collectivités et ce faisant, en leur transférant la compétence (14) : lorsqu’une commune est intégrée dans une communauté d’agglomération, dans une communauté urbaine ou dans une métropole, le transfert de la compétence GEMAPI au groupement est automatique. Lorsqu’une commune intègre une communauté de communes, le transfert est opéré sous réserve d’intérêt communautaire.

La compétence GEMAPI est composée des missions visées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, c’est-à-dire :

● l’aménagement d’un bassin ou d’une fraction de bassin hydrographique ;

● l’entretien et l’aménagement des cours d’eau, canaux, lacs ou plans d’eau, y compris des accès ;

● la défense contre les inondations et contre la mer ;

● et la protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides, ainsi que des formations boisées riveraines.

La loi distingue trois échelles cohérentes pour la GEMAPI :

– le bloc communal (communes et EPCI-FP) ;

– l’établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau (EPAGE), syndicat mixte en charge de la maîtrise d’ouvrage locale pour l’exercice de la compétence « GEMAPI » à l’échelle d’un sous-bassin versant hydrographique ;

– l’établissement public territorial de bassin (EPTB), syndicat mixte en charge des missions de coordination dans le domaine de l’eau, et de la maîtrise d’ouvrage de projets d’intérêt commun à l’échelle d’un bassin ou d’un groupement de bassins.

Pour encourager le regroupement des collectivités à des échelles pertinentes du point de vue hydrographique, les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) doivent identifier les bassins, les sous-bassins et les groupements de bassins qui justifient la création ou la modification de périmètre des EPAGE et des EPTB. Toutefois, l’adhésion d’une commune ou d’un EPCI à un syndicat mixte n’est jamais obligatoire.

Pour l’exercice de la compétence « GEMAPI », le mécanisme antérieur de « redevance pour service rendu » (qui était facultative) a été remplacé, également par la loi MAPTAM, par une taxe facultative, plafonnée (à 40 euros par habitant et par an) et affectée. Cette taxe ne peut être levée qu’en cas d’exercice de la compétence par la commune ou par l’EPCI-FP.

L’ensemble de ces dispositions de la loi MAPTAM sont entrées en vigueur au 1er janvier 2016. Toutefois, la loi prévoit que les structures qui existaient avant sa publication et qui exerçaient des missions de GEMAPI (conseils généraux, conseils régionaux, syndicats mixtes, État et ses établissements publics…) continuent à assurer celles-ci jusqu’au transfert de la compétence à des EPCI-FP, et au plus tard jusqu’au 1er janvier 2018 (et en janvier 2024 pour la gestion des ouvrages de protection par l’État).

Le projet de loi relatif à la biodiversité, dans sa version initiale déposée par le Gouvernement, ne comportait pas de dispositions sur ce sujet. Une section 3 comportant un article 32 bis, relatifs aux EPTB, a été insérée par l’Assemblée nationale en première lecture, par adoption d’un amendement de votre rapporteure, et le Sénat a créé quatre autres articles additionnels relatifs à la GEMAPI (articles 32 ter AA, 32 ter A, 32 ter B et 32 ter C).

Article 32 bis
(article L. 213-12 du code de l’environnement)

Missions des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB)

1. Le droit en vigueur

Une commune, ou un EPCI-FP compétent en matière de GEMAPI, peut décider de transférer ou de déléguer tout ou partie des missions correspondantes à un EPTB (ou à un EPAGE), en vertu de la loi MAPTAM.

Lorsqu’il y a délégation de compétences, celles-ci sont exercées au nom et pour le compte de la collectivité délégante ; cette délégation est régie par une convention. La convention définit des objectifs à atteindre, les modalités de contrôle de la collectivité délégante sur l’EPTB, et des indicateurs de suivi. Elle détermine également le cadre financier dans lequel s’exerce la délégation, et les moyens de fonctionnement mis à la disposition de l’EPTB.

L’article L. 213-12 du code de l’environnement définit les missions de l’EPTB : c’est un syndicat mixte (composé de communes et d’EPCI, ou exclusivement d’EPCI) constitué en vue « de faciliter, à l’échelle d’un bassin ou d’un groupement de sous-bassins hydrographiques, la prévention des inondations et la défense contre la mer, la gestion équilibrée de la ressource en eau, ainsi que la préservation et la gestion des zones humides et de contribuer, s’il y a lieu, à l’élaboration et au suivi du schéma d’aménagement et de gestion des eaux ». L’EPTB peut exercer, selon les compétences qui lui sont transférées ou déléguées, des missions de coordination, de maîtrise d’ouvrage, d’avis, d’animation et de gouvernance locale de la politique de l’eau.

2. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

En première lecture, l’Assemblée a adopté un amendement de votre rapporteure pour compléter les missions des EPTB, d’une part pour qu’ils garantissent une gestion à la fois équilibrée et durable de la ressource en eau, et d’autre part pour qu’ils soient également chargés d’une mission de préservation et de restauration de la biodiversité des écosystèmes aquatiques. Ce dernier ajout a été supprimé en séance à la demande du Gouvernement.

3. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du Sénat a rétabli le texte qu’avait adopté la commission de l’Assemblée, et cet article n’a pas fait l’objet de modifications en séance.

4. La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission est saisie de l’amendement CD291 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Le périmètre des établissements publics territoriaux de bassin est aujourd’hui limité à la gestion de l’eau, y compris la prévention des inondations depuis la loi du 27 janvier 2014 sur la modernisation de l’action publique territoriale et de l’affirmation des métropoles.

Il n’est pas souhaitable de multiplier les acteurs chargés des missions de préservation de la biodiversité aquatique, à l’heure où le gouvernement manifeste sa volonté de simplification administrative.

Mme la rapporteure. Nous avons eu ce débat en première lecture. Les établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) ont notamment pour mission de faciliter les actions dans les domaines de la gestion intégrée et durable de l’eau par bassin hydrographique et de la préservation des zones humides, qui incluent les actions de restauration et de préservation des trames bleues.

Ils contribuent à la mise en œuvre des orientations nationales pour la préservation et la remise en état des continuités écologiques ainsi qu’à la stratégie nationale de la biodiversité. Il est donc utile de préciser leur mission en matière de préservation et de restauration de la biodiversité. J’émets un avis défavorable sur l’amendement.

Mme la secrétaire d’État. L’alinéa 3 précise que les EPTB doivent se saisir de la mission de gestion et de restauration de la biodiversité aquatique, ce qui peut paraître contraignant pour certains établissements gérant exclusivement des nappes souterraines. Cependant, la préservation et la restauration de la biodiversité aquatique sont déjà comprises dans les missions de ces établissements. Cet alinéa apporte donc une précision qui n’est pas nécessaire, voire qui peut être gênante pour certains établissements.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 32 bis sans modification.

Article 32 ter AA
(article L. 5421-7 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : Possibilité de transformer un organisme interdépartemental en syndicat mixte

1. Le droit en vigueur

Les articles L. 5421-1 à L. 5421-6 du code général des collectivités territoriales régissent les institutions et organismes interdépartementaux. Il s’agit d’établissements publics constitués par au moins deux conseils départementaux (dont les départements sont ou non limitrophes), et qui peuvent associer des conseils régionaux ou des conseils municipaux.

Des institutions interdépartementales ont été reconnues comme établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) sur le fondement des dispositions en vigueur avant la publication de la loi MAPTAM. En effet, avant cette loi, un EPTB pouvait être constitué soit sous forme d’institution interdépartementale, soit sous forme d’un syndicat mixte.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi MAPTAM, il n’est plus possible de constituer de nouveaux EPTB sous la forme d’institutions interdépartementales. Et depuis lors, les institutions ou organismes interdépartementaux ne remplissent plus les critères pour être considérés comme des EPTB, et ne peuvent donc plus assurer les missions d’un EPTB. Toutefois, en vertu des dispositions transitoires de la loi MAPTAM, ces institutions peuvent continuer à intervenir pour l’exercice de la compétence GEMAPI jusqu’au 1er janvier 2018.

L’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales régit la constitution d’un syndicat mixte associant des collectivités locales, des groupements de collectivités et d’autres personnes publiques. Un tel syndicat mixte peut être créé « en vue d’œuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales ». En l’état actuel du droit, pour transformer une institution interdépartementale en syndicat mixte, il est nécessaire de dissoudre la première avant de pouvoir constituer le second.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En séance, le Sénat a adopté des amendements de MM. Jean-François Husson (LR) et Jean-Claude Requier (RDSE), avec avis favorable du rapporteur et du Gouvernement, pour créer un article L. 5421-7 dans le code général des collectivités territoriales. Ce nouvel article dispose que, lorsqu’une institution ou un organisme interdépartemental remplit les conditions de création d’un syndicat mixte (fixées par l’article L. 5721-2), il peut « se transformer en syndicat mixte ».

Les auteurs de l’amendement ont fait valoir que l’attribution de la compétence GEMAPI aux communes et à leurs groupements peut rendre utile cette transformation d’instances interdépartementales en syndicats mixtes pour éviter la coexistence de plusieurs structures sur un même périmètre, tout en évitant une « dissolution-reconstitution » qui risque de porter atteinte à la continuité des actes juridiques et aux conditions d’emploi des personnels de l’institution initiale.

3. La position de la commission

La commission a adopté deux amendements rédactionnels de votre rapporteure.

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La Commission adopte les amendements rédactionnels CD15 et CD16 de la rapporteure. Puis elle adopte l’article 32 ter AA ainsi modifié.

Article 32 ter A
(articles L. 5215-22, L. 5216-7 et L. 5217-7 du code général des collectivités territoriales et article 59 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles)

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : représentation-substitution des EPCI aux communes au sein des syndicats

1. Le droit en vigueur

La loi MAPTAM a attribué aux communes une compétence obligatoire en matière de GEMAPI, avec transfert automatique aux EPCI-FP dont elles sont membres (métropole, communautés de communes – CC, communautés urbaines – CU, communautés d’agglomération – CA). Or il est fréquent que les communes aient, auparavant, déjà transféré cette compétence à des syndicats de communes ou à des syndicats mixtes.

Dans ces cas, l’attribution automatique de la compétence GEMAPI à l’EPCI-FP emporte :

– soit le retrait des communes du syndicat pour la compétence ;

– soit la substitution de plein droit des communes par l’EPCI-FP au sein du syndicat ;

– soit la dissolution du syndicat.

Plusieurs cas de figure existent :

1° Si le périmètre de l’EPCI-FP (CC, CU, CA ou métropole) est identique à celui du syndicat préexistant, l’EPCI est substitué de plein droit au syndicat pour la totalité des compétences de celui-ci, et le syndicat est dissous.

2° Si le périmètre du syndicat préexistant est inclus en totalité dans le périmètre de l’EPCI mais que celui-ci a des compétences plus larges que le syndicat, l’EPCI est substitué de plein droit au syndicat pour les compétences de l’EPCI. Si le syndicat n’exerçait aucune autre compétence, il est dissous. Sinon, il demeure, pour les compétences qui n’ont pas été transférées à l’EPCI, mais doit modifier ses statuts pour tenir compte de la réduction de son champ de compétence.

3° L’hypothèse la plus complexe est celle où le périmètre de l’EPCI est inclus en totalité dans celui du syndicat ou « chevauche » celui-ci. Il y a alors deux cas à distinguer :

a) quand l’EPCI est une CC, celle-ci est substituée aux membres du syndicat, pour la compétence GEMAPI, au 1er janvier 2016 ;

b) quand l’EPCI est une CA, une CU ou une métropole, les communes membres sont retirées du syndicat pour la compétence GEMAPI. L’EPCI peut par la suite adhérer à un ou plusieurs syndicats, et ce faisant, leur transférer tout ou partie de la compétence GEMAPI.

2. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement du Gouvernement qui complète les articles du code général des collectivités territoriales relatifs, respectivement, aux communautés d’agglomération, aux communautés urbaines et aux métropoles, pour prévoir la représentation-substitution de l’EPCI aux communes au sein des syndicats concernés. Ainsi, dans la troisième hypothèse décrite ci-dessus, le même dispositif s’appliquera aussi bien aux CA, aux CU et aux métropoles qu’aux CC : il n’y aura pas de retrait des communes des syndicats existants.

L’amendement comporte également une modification de l’article 59 de la loi MAPTAM pour corriger une erreur de référence.

3. Les modifications apportées par le Sénat

En séance, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur, avec le soutien du Gouvernement, afin de préciser que le dispositif de l’article 32 ter A entrera en vigueur au 1er janvier 2018, mais que les communes et EPCI qui le souhaitent peuvent anticiper cette entrée en vigueur et utiliser dès à présent le nouveau dispositif.

4. La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 32 ter A sans modification.

Article 32 ter B
(article L. 151-36 du code rural et de la pêche maritime et article 56 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles)

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : dispositions de coordination relatives à la « taxe GEMAPI »

1. Le droit en vigueur

L’article 1379 du code général des impôts, dans la rédaction issue de la loi « MAPTAM » du 27 janvier 2014, prévoit la possibilité pour les communes de percevoir une « taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ». Les règles applicables à cette taxe facultative sont définies par l’article 1530 bis du même code. Celui-ci dispose :

● que les communes qui exercent la compétence GEMAPI peuvent instituer et percevoir cette taxe,

● mais que, lorsqu’un EPCI à fiscalité propre se substitue à ses communes membres pour l’exercice de la compétence GEMAPI, cet EPCI peut instituer et percevoir la taxe en lieu et place des communes membres.

L’article L. 151-36 du code rural et de la pêche maritime concerne les travaux d’aménagement et d’équipement qui présentent, du point de vue agricole ou forestier, un caractère d’intérêt général ou un caractère d’urgence dans plusieurs domaines (lutte contre l’érosion et les avalanches, reboisement, débroussaillement, entretien des canaux…).

Les départements, les communes, les EPCI et les syndicats mixtes peuvent prescrire ou exécuter ces travaux. Elles doivent alors les prendre en charge, mais elles peuvent faire participer à cette prise en charge « les personnes qui ont rendu les travaux nécessaires ou qui y trouvent intérêt ». Toutefois, il est interdit d’utiliser le produit des participations ainsi obtenues pour financer des actions relevant de la compétence GEMAPI.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur, avec l’avis favorable du Gouvernement, procédant à deux modifications de coordination :

– suppression de dispositions de l’article 56 de la loi MAPTAM qui constituaient une redondance par rapport aux articles précités du code général des impôts,

– modification de l’article L. 151-36 du code rural, de manière ce que l’interdiction précitée ne soit applicable que lorsqu’une taxe GEMAPI a été effectivement instituée.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

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La Commission adopte l’amendement de précision CD17 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 32 ter B ainsi modifié.

Article 32 ter C
(article 1530 bis du code général des impôts)

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) : possibilité pour les communes et les EPCI de lever la « taxe GEMAPI » même s’ils ont transféré la compétence à un syndicat mixte

1. Le droit en vigueur

L’article 1530 bis du code général des impôts, qui régit la taxe facultative permettant de financer l’exercice de la compétence GEMAPI, dispose dans son I :

● que les communes qui exercent la compétence GEMAPI peuvent instituer et percevoir cette taxe,

● mais que, lorsqu’un EPCI à fiscalité propre se substitue à ses communes membres pour l’exercice de la compétence GEMAPI, cet EPCI peut instituer et percevoir la taxe en lieu et place des communes membres.

Le III du même article définit les personnes privées ou morales entre lesquelles le produit de la taxe est réparti : il s’agit de toutes les personnes assujetties aux taxes foncières, à la taxe d’habitation et à la cotisation foncière des entreprises, proportionnellement aux recettes que chacune de ces taxes a procuré l’année précédente à la commune ou aux communes membres de l’EPCI.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement modifiant le I de l’article 1530 bis du code général des impôts, afin :

– qu’une commune qui décide d’instituer cette taxe puisse le faire même si elle a transféré tout ou partie de la compétence GEMAPI à un ou plusieurs syndicats mixtes (par exemple à un établissement public territorial de bassin) ;

– que les communes et les EPCI qui ont institué cette taxe ne soient plus obligés d’en assurer le suivi au sein d’un budget annexe spécial.

Ces modifications entreront en vigueur pour les impositions dues au titre de 2017.

Le III de l’article 1530 bis est également modifié pour préciser la méthode de répartition des recettes de la taxe selon qu’il s’agit d’une taxe instituée par une commune ou instituée par un EPCI. Cette modification entrera en vigueur à compter de l’exercice budgétaire 2017.

Enfin, l’amendement du Gouvernement a supprimé le dernier paragraphe de l’article 1530 bis, qui prévoyait qu’un décret en Conseil d’État en définirait les modalités d’application.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec une modification rédactionnelle proposée par votre rapporteure.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD18 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 32 ter C ainsi modifié.

Section 4
Réserves de biosphère et zones humides d’importance internationale

Article 32 ter
(chapitre VI du titre III du livre III et articles L. 336-1 et L. 336-2 [nouveaux] du code de l’environnement)

Réserves de biosphère et zones humides d’importance internationale

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

À l’initiative de votre rapporteure et avec des modifications proposées par le Gouvernement, l’Assemblée nationale a adopté des amendements créant une Section additionnelle sur « les réserves de biosphère et les espaces remarquables », et deux nouveaux articles dans le code de l’environnement : un article L. 336-1 consacré aux réserves de biosphère et un article L. 336-2 sur les zones humides d’importance internationale.

Les réserves de biosphère constituent des sites de démonstration de l’approche intégrée de la conservation et de l’utilisation durable de la biodiversité. Le réseau des réserves de biosphère permet de développer et de diffuser les bonnes pratiques en matière de coexistence entre l’homme et la biodiversité. Leur cadre statutaire est défini au niveau mondial, par une résolution adoptée le 14 novembre 1995 par la Conférence générale de l’UNESCO, à laquelle renvoie le nouvel article L. 336-1. Celui-ci prévoit que les collectivités territoriales, leurs groupements, les syndicats mixtes, les associations et les établissements publics nationaux à caractère administratif des parcs peuvent « mettre en œuvre une réserve de biosphère ».

Quant aux zones humides d’importance internationale, elles sont prévues par la convention de Ramsar relative aux zones humides d’importance internationale, signée le 2 février 1971. La convention de Ramsar dispose que les États parties doivent inscrire sur une liste internationale des zones humides ayant une importance particulière, notamment comme habitat des oiseaux d’eau (« sites Ramsar »). Conformément aux termes de la convention, à laquelle l’article L. 336-2 renvoie, ces sites doivent être gérés de façon à favoriser leur conservation et leur utilisation rationnelle.

Les deux notions de « réserve de biosphère » et de « zone humide d’importance internationale » se trouvent ainsi inscrites dans le droit national.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du Sénat a adopté un amendement de son rapporteur, qui a complété le dispositif de l’article 32 ter pour que la stratégie nationale pour la biodiversité (prévue par l’article 4 du projet de loi) « favorise le développement des réserves de biosphère (…) et l’inscription de sites sur la liste des zones humides d’importance internationale (…), tant en métropole qu’en outre-mer ». En séance, le Sénat a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 32 ter sans modification.

Section 5
Agence des espaces verts de la région Île-de-France

Article 32 quater
(articles L. 215-2, L. 215-5, L. 215-6, L. 215-7 et L. 215-13 du code de l’urbanisme)

Droit de préemption pour l’Agence des espaces verts de la région d’Île-de-France au titre des espaces naturels sensibles

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté en commission un amendement de M. Michel Pouzol, modifié en séance par l’adoption d’un amendement du Gouvernement, afin de doter l’Agence des espaces naturels de la région d’Île-de-France du même droit de préemption que celui dont dispose le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. L’Agence pourra ainsi se substituer aux départements d’Ile-de-France si ceux-ci n’exercent pas leur droit de préemption pour acquérir et préserver des espaces naturels sensibles, et prendre l’initiative de créer elle-même une zone de préemption.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du Sénat a supprimé cet article en adoptant des amendements de Mme Sophie Primas, M. Michel Raison et Mme Evelyne Didier, en considérant que conférer ces compétences à l’Agence des espaces verts d’Île-de-France n’était pas utile et risquerait de concurrencer l’exercice du droit de préemption que détiennent les SAFER.

3. La position de la commission

La commission a adopté un amendement de votre rapporteure pour rétablir cet article dans sa rédaction adoptée en première lecture.

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La Commission examine l’amendement CD637 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Cet amendement vise à rétablir l’article adopté en première lecture par l’Assemblée nationale afin de permettre à l’Agence des espaces verts de la région d’Île-de-France d’exercer un droit de préemption analogue à celui du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement et l’article 32 quater est ainsi rétabli.

Article 32 quinquies
(article L. 113-21 du code de l’urbanisme)

Consultation de l’Agence des espaces verts de la région Île-de-France

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Le code de l’urbanisme (ancien article L. 143-2, devenu l’article L. 113-21) donne aux départements et aux établissements publics compétents pour élaborer un SCoT (schéma de cohérence territoriale) la possibilité de « mettre en œuvre une politique de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains ». Ces personnes publiques peuvent, pour ce faire, définir des périmètres d’intervention associés à des programmes d’action. Ces programmes d’action sont élaborés en accord avec les communes et les EPCI ; ils précisent « les aménagements et les orientations de gestion destinés à favoriser l’exploitation agricole, la gestion forestière, la préservation et la valorisation des espaces naturels et des paysages au sein du périmètre d’intervention ». Le projet de programme est adressé à la chambre départementale d’agriculture et, le cas échéant, à l’Office national des forêts.

En commission, l’Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Michel Pouzol complétant l’article L. 113-21 pour que l’Agence des espaces verts d’Île-de-France soit obligatoirement consultée sur les programmes d’action.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a procédé à des modifications rédactionnelles et de coordination sur cet article.

3. La position de la commission

Votre rapporteure a proposé à la commission d’adopter un amendement pour modifier la rédaction actuelle de l’article qui, en l’état, permettrait aux départements d’Île-de-France d’adopter un programme d’action sans obtenir l’accord des communes, simplement en consultant l’Agence des espaces verts. La commission a adopté cet amendement.

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La Commission est saisie des amendements identiques CD322 de M. Dino Cinieri et CD789 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Les programmes d’actions pour les périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains sont aujourd’hui définis en concertation avec les communes et les établissements publics de coopération intercommunale concernés. L’avis de l’Agence des espaces verts de la région d’Île-de-France ne se justifie pas, d’autant que ses compétences portent sur la mise en œuvre de la politique régionale en matière d’espaces verts, de forêts et de promenades, ce qui exclut l’agriculture périurbaine. L’amendement CD322 vise donc à supprimer cet article.

M. Gérard Menuel. L’amendement CD789 est défendu.

Mme la rapporteure. Parmi ces diverses activités, l’Agence des espaces verts d’Ile-de-France acquiert des espaces agricoles qu’elle loue par bail rural aux agriculteurs, dans le but de préserver une agriculture de proximité en Île-de-France.

Solliciter son avis sur les programmes d’actions pour les espaces agricoles et naturels périurbains me semble donc pertinent. J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements. Cela étant, il n’est pas question que la consultation de cette agence se substitue à l’accord des communes. Mon amendement CD51 rectifié précisera dans ce sens la rédaction de l’article 32 quinquies.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle adopte l’amendement CD51 rectifié de la rapporteure.

La Commission adopte l’article 32 quinquies ainsi modifié.

Article 32 sexies
Inscription de la mission des parcs zoologiques dans la loi

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Le Sénat a adopté, en séance, deux amendements identiques de M. Jean-Pierre Sueur (Soc) et de Mme Jacqueline Gourault (UDI-UC) tendant à inscrire dans la loi que « les parcs zoologiques exercent une mission de conservation de la biodiversité et d’éducation du public à la biodiversité ». Le rapporteur du Sénat comme le Gouvernement s’en sont remis à la sagesse des sénateurs, le rapporteur faisant observer que cette disposition est purement déclarative et n’a aucun caractère normatif.

2. La position de la commission

La commission a supprimé cet article, à l’initiative de votre rapporteure.

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La Commission examine l’amendement CD27 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet article ajouté par le Sénat est purement déclaratif et n’apporte rien sur le plan normatif. Il ne paraît donc pas utile de le conserver.

Mme la secrétaire d’État. Indiquer dans la loi que certains parcs zoologiques exercent une mission de conservation de la biodiversité et d’éducation du public n’a pas d’effet normatif et ne recouvre pas toujours la réalité.

Il serait plus efficace d’écrire que tous les parcs zoologiques « doivent » exercer cette mission. Je m’en remets à la sagesse de la Commission, tout en considérant que cet article ne devrait pas être adopté en l’état.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 32 sexies est supprimé.

Chapitre II
Mesures foncières et relatives à l’urbanisme

Section 1A
Obligations réelles environnementales

Article 33 AA
(article L. 411-2 du code de l’environnement)

Évaluation par une tierce expertise de l’absence d’autre solution satisfaisante pour une dérogation à une espèce protégée

Adopté au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article, adopté en Commission au Sénat, donne la possibilité à l’autorité administrative d’évaluer l’absence d’autre solution satisfaisante en cas de demande de dérogation à la protection des espèces, conformément au dispositif prévu par les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement.

L’article L. 411-1 prévoit un dispositif de protection stricte pour certaines espèces, en matière de faune et de flore sauvages, dont les listes sont établies par arrêté ministériel.

Sont notamment interdits pour ces espèces :

– la destruction ou l’enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture, (…) ;

– la destruction, la coupe, la mutilation, l’arrachage, la cueillette ou l’enlèvement de végétaux de ces espèces (…) ;

– la destruction, l’altération ou la dégradation des habitats naturels de ces espèces.

L’article L. 411-2 prévoit toutefois la possibilité d’obtenir une dérogation à ces interdictions, à condition qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

L’article du Sénat prévoit que l’autorité administrative saisie d’une telle demande de dérogation pourra désormais faire appel à une tierce expertise afin d’évaluer l’absence d’autre solution satisfaisante. De surcroît, les frais de l’expertise sont à la charge du pétitionnaire. Cette faculté vise à renforcer l’objectivité des décisions prises en matière de dérogation à la protection stricte des espèces, au bénéfice de l’ensemble des parties prenantes.

Ce nouvel article a aussi pour objet d’améliorer la transparence des décisions publiques et de donner une meilleure information au citoyen conformément aux dispositions de l’article 7 de la Charte de l’environnement.

1. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

En commission, l’article a été adopté sans modification.

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La Commission examine l’amendement CD39 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’article 33 AA qui introduirait la possibilité pour l’autorité administrative d’avoir recours à une tierce expertise menée par un organisme indépendant et aux frais du pétitionnaire dans le cadre de l’application de l’article L.412-1 du code de l’environnement. En effet, l’article proposé ne précise pas les conditions à remplir pour qu’un organisme soit indépendant, et le mode de financement de l’expertise ne garantit de toute façon pas l’indépendance de l’avis rendu. En outre, la valeur juridique de l’avis rendu par ledit organisme n’est pas précisée, ce qui pourrait donner lieu à des contentieux. Enfin, l’ouverture d’une telle possibilité laisse entendre que l’autorité administrative n’est pas indépendante lorsqu’elle rend ses décisions.

Mme la secrétaire d’État. Les arguments présentés en faveur de la suppression de cet article peuvent se comprendre : il s’agit au fond de renforcer la mise en œuvre de la séquence visant à « éviter, réduire, compenser » les impacts sur les milieux naturels. En effet, ces impacts ne concernent pas que les espèces protégées et les dispositions prises concernant les étapes « éviter » et « réduire » doivent être appliquées correctement et très en amont du projet. C’est pourquoi il serait sans doute plus efficace de traiter ce sujet dans un cadre plus général que celui de la réglementation relative aux espèces protégées – en l’occurrence, dans celui des ordonnances de modernisation du droit de l’environnement.

Si votre Commission souhaitait néanmoins maintenir ces dispositions, je proposerais que l’article soit amendé de telle sorte que l’autorité administrative puisse exiger la production, aux frais du demandeur, d’une analyse critique des scénarios alternatifs au projet portant atteinte aux espèces protégées, effectuée par un organisme expert extérieur choisi en accord avec l’administration. Concernant l’amendement de suppression de l’article, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

Mme la rapporteure. Il est important de rappeler le triptyque « éviter, réduire, compenser » et, surtout, l’ordre des priorités qu’il fixe : éviter d’abord, puis réduire et, en dernier lieu, compenser. Dès lors, l’expertise d’un organisme indépendant devrait être effectuée très en amont de la compensation, voire au tout début du projet, afin que les atteintes à la biodiversité puissent être d’emblée évitées. Je ne suis pas opposée au maintien de l’article sous réserve qu’il y soit explicitement mentionné à quel stade du projet l’expertise doit être conduite, en vue d’éviter de telles atteintes. En l’état de sa rédaction, cet article issu du Sénat est insatisfaisant car il semble mettre en doute les experts consultés. La priorité doit être d’éviter les atteintes à la biodiversité. Je vous propose donc de retirer l’amendement de suppression et de revoir la formulation de l’article 33 AA d’ici au débat en séance afin de trouver un dispositif plus adapté.

Mme Laurence Abeille. Dans ces conditions, il nous faudrait pouvoir disposer d’une proposition de rédaction au plus tôt : chaque mot compte dans cet article complexe, dont il nous faudra examiner la formulation dès que possible.

Mme la secrétaire d’État. Je ferai de mon mieux ! (Sourires)

L’amendement CD39 est retiré.

La Commission adopte l’article 33 AA sans modification.

Article 33 A
(articles L. 163-1 à L.163-5 [nouveaux] du code de l’environnement)

Obligations de compensation des atteintes à la biodiversité par un maître d’ouvrage

L’objet de cet article, inséré en commission à l’Assemblée nationale, est de préciser les modalités permettant à un maître d’ouvrage de remplir ses obligations de compensation des atteintes à la biodiversité.

1. Le texte adopté par l’Assemblée nationale

Réécrit en séance publique à l’Assemblée, cet article introduit un nouveau chapitre au sein du titre VI du livre Ier du code de l’environnement. Ce nouveau chapitre est composé de cinq nouveaux articles numérotés L. 163-1 à L. 163-5.

L’article L. 161-1 définit les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité et les modalités de mise en œuvre du dispositif de compensation, notamment pour les contrats de longue durée qui doivent prendre la forme d’obligations réelles environnementales. Cet article, qui définit la notion d’opérateur de compensation, précise que le maître d’ouvrage demeure le seul responsable à l’égard de l’administration qui a prescrit les mesures de compensation.

L’article L. 163-2 réglemente la mise en œuvre des mesures de compensation lorsque celles-ci ont lieu sur un terrain n’appartenant ni à la personne soumise à l’obligation de mettre en œuvre ces mesures, ni à l’opérateur de compensation qu’elle a désigné. L’article encadre par ailleurs le terme du contrat.

L’article L. 163-3 définit la notion de « réserves d’actifs naturels ». Il dispose aussi que l’opérateur d’une réserve d’actifs doit faire préalablement l’objet d’un agrément délivré par les services de l’État. L’article précise enfin que l’acquisition d’unités de compensation écologiques au sein d’une réserve d’actifs naturels n’est possible que lorsqu’elles sont équivalentes aux mesures de compensation prescrites au maître d’ouvrage.

L’article L. 163-4 défini le régime des sanctions administratives pouvant être prises à l’encontre d’un maître d’ouvrage qui ne met pas en œuvre les mesures de compensation demandées.

Enfin, l’article L. 163-5 prévoit la géolocalisation des mesures de compensations au sein d’un système d’information géographique, accessible au public. Cet outil s’appuiera notamment sur les informations données par les maîtres d’ouvrage aux services de l’État.

1. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté, outre deux modifications rédactionnelles, quatre amendements soutenus par le rapporteur du Sénat.

Les amendements ont pour objectif de :

– préciser la nature juridique de l’acte entraînant la création d’une obligation environnementale qui concerne un terrain n’appartenant ni à la personne soumise à obligation de compensation, ni à l’opérateur de compensation qu’elle a désigné pour les mettre en œuvre. Cet acte doit prendre obligatoirement la forme d’un contrat ;

– préciser l’objet des réserves d’actifs naturels. Ces dernières sont définies comme « des opérations de restauration ou de développement d’éléments de biodiversité » ;

– supprimer l’ordre de priorité établie au profit du mécanisme de réserves d’actifs naturels lorsque l’autorité administrative fait procéder d’office à l’exécution des mesures prescrites en matière de compensation, en lieu et place et aux frais de la personne soumise à une telle obligation. Selon le rapporteur, l’administration doit pouvoir mettre en œuvre la compensation de la façon la plus pertinente ;

– doter les opérateurs de compensation d’un agrément afin de garantir que l’opérateur possède l’expertise technique, les capacités financières et l’indépendance nécessaire, pour mettre en œuvre les mesures de compensation. C’est pour tenir compte de la technicité des mesures que le rapporteur a souhaité encadrer cette activité.

En séance publique, le Sénat a adopté trois autres amendements :

Le premier, présenté par M. Daniel Gremillet, rend obligatoire la mise en place d’un cahier des charges dans le but d’assurer la pérennité et l’efficacité du suivi des mesures de compensation lors de la mutation d’un bien support d’une obligation environnementale.

Ce cahier des charges défini au III de l’article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime est celui des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER). Il peut être conclu sur une durée de trente ans sous le contrôle de la SAFER qui peut obtenir la résolution par la vente cas de manquement à une obligation.

S’agissant d’un engagement contractuel, il présente, selon l’auteur de l’amendement, l’avantage de pouvoir ajuster les obligations aux objectifs poursuivis et ainsi parvenir à une plus-value écologique acceptable, durable et optimale.

Le deuxième amendement, présenté par M. Ronan Dantec et les membres du groupe écologiste, et soutenu par le gouvernement, prévoit le cas où la personne soumise à une obligation de compensation a mis en œuvre de façon sincère ses obligations mais que les mesures réalisées se révèlent inopérantes pour atteindre l’équivalence écologique requise.

La disposition adoptée prévoit que, dans une telle hypothèse et à l’issue d’un délai déterminé dans le dossier mentionné au premier alinéa de l’article L. 163-1, le maître d’ouvrage propose dans un délai de deux ans à l’autorité administrative compétente des mesures correctives visant à atteindre ses obligations de compensation. Après instruction, l’autorité prend un arrêté complémentaire relatif aux modifications apportées aux mesures compensatoires.

Le troisième amendement, également présenté par M. Ronan Dantec et les membres du groupe écologiste et soutenu par le gouvernement, vise à instituer un mécanisme de constitution de garanties financières à la charge des personnes soumises à obligation. Inspiré des dispositions existantes sur les carrières, ces garanties sont destinées à assurer la réalisation des mesures de compensation prévues dans le respect de leur équivalence écologique. Sans préjudice de la procédure d’amende administrative prévue au 4° du II de l’article L. 171-8, les manquements aux obligations de garanties financières donnent lieu à l’application de la procédure de consignation prévue au 1° du II de l’article L. 171-8, indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées.

1. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

En commission, deux amendements rédactionnels de la rapporteure ont été adoptés, ainsi que deux amendements de précision et de coordination.

Par ailleurs, votre commission a adopté :

– un amendement qui soumet les mesures compensatoires des atteintes à la biodiversité à une obligation de résultat. Il est également précisé, au sein de ce même amendement, que les mesures de compensation ne peuvent pas se substituer aux mesures d’évitement et de réduction. Enfin, lorsque les atteintes liées au projet ne peuvent ni être réduite, ni compensées de façon satisfaisante, le maître d’ouvrage doit envisager la possibilité d’abandonner le projet ;

– trois amendements identiques dont un soutenu par la rapporteure visant à élargir les possibilités de mises en œuvre de contrat conclu directement par le maître d’ouvrage avec les exploitants agricoles ou forestiers concernant la mise en œuvre de mesures compensatoires. Les mesures de compensation seront généralement mises en œuvre en milieu agricole ou forestier, il était donc nécessaire d’inclure ces acteurs au sein de ce nouveau dispositif ;

– un amendement visant à substituer aux termes « réserve d’actifs naturels », les termes « sites naturels de compensation ». Cette modification vise à clarifier la dénomination de ce type d’action, les termes « réserves d’actifs naturels » étant source de confusion avec les réserves naturelles nationales et régionales. Par ailleurs, ces termes mettent en avant la notion d’actifs financiers, ce qui est contraire à l’esprit de ce nouveau dispositif ;

– un amendement visant à préciser que les mesures compensatoires sont mises en œuvre en priorité sur le site endommagé ou à proximité de celui-ci afin de garantir ses fonctionnalités de manière pérenne. Par ailleurs, il est précisé qu’une même mesure peut compenser différentes fonctionnalités ;

– trois amendements identiques dont un soutenu par la rapporteure qui ont entraîné la suppression de l’alinéa 8 de l’article 33 A. Cet alinéa restreignait la compensation environnementale à la notion d’obligations réelles environnementales. Les dispositions relatives aux obligations réelles de cet alinéa ont par la suite étaient transférées à l’article 33 de la présente loi ;

– un amendement de suppression de l’alinéa 9 soutenu par la rapporteure concernant le suivi des mesures de compensation par un cahier des charges, défini au III de l’article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime, concomitamment à la mutation du bien support de la compensation. Ces modalités de suivi seront en effet précisées par le Gouvernement au sein du décret d’application du présent article ;

– enfin, un amendement de rédaction globale soutenu par la rapporteure de l’alinéa 20 visant à supprimer la référence à des délais dont le point de départ n’était pas précisé concernant les cas où les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité mises en œuvre par le maître d’ouvrage se relèvent inopérantes pour respecter l’équivalence écologique.

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* *

Mme la secrétaire d’État. Tel qu’il est actuellement rédigé, l’article 33 A résulte des travaux parlementaires, en particulier du remarquable travail accompli par la rapporteure, Mme Geneviève Gaillard. Dans la conception et la mise en œuvre de leurs projets, les maîtres d’ouvrage doivent définir des mesures adaptées pour éviter, réduire et, en dernier lieu et en l’absence d’autre solution, compenser leurs impacts négatifs sur l’environnement.

Je tiens d’emblée à rassurer la Commission concernant les intentions du Gouvernement : le projet de loi ne remet naturellement pas en cause la séquence « éviter, réduire, compenser ». Ces dispositions de droit commun ne sont pas modifiées dans l’article L. 122-1 du code de l’environnement, bien au contraire : le projet d’ordonnance de modernisation de l’évaluation environnementale, qui transpose la directive de 2014 en cours de débat au Conseil national de la transition écologique, conforte le principe selon lequel les maîtres d’ouvrage doivent en priorité éviter et réduire les atteintes à l’environnement, et seulement en dernier recours les compenser.

L’objet du présent article consiste précisément à mieux encadrer les mesures compensatoires. À ce titre, le Gouvernement tire les enseignements des contentieux récents suscités par des projets contestés. Le projet de texte prévoit que les mesures compensatoires demeurent sous la seule responsabilité du maître d’ouvrage titulaire de l’autorisation et respectent l’équivalence écologique, qu’elles soient soumises à un agrément lorsqu’elles sont réalisées par un tiers, qu’elles fassent l’objet d’un suivi renforcé et soient stockées dans un système d’information dédié, qu’elles s’accompagnent de sanctions administratives en cas de défaillance et qu’elles permettent à l’autorité administrative d’exiger du maître d’ouvrage la constitution de garanties financières. L’État peut ainsi se prémunir contre le risque de faillite du maître d’ouvrage avant même que celui-ci n’ait pu satisfaire à ses obligations de compensation environnementale.

D’autre part, l’article 33 A prévoit des solutions alternatives à l’acquisition foncière des sites de compensation, vécue comme une double peine dans le monde rural dont les terrains sont d’abord grignotés par les projets eux-mêmes puis par les mesures compensatoires prescrites, et qui ne présentent pas toujours une garantie de pérennité car l’aménageur ne gère pas ces sites de compensation dans la durée. L’article 33 A permet donc au maître d’ouvrage de satisfaire à ses obligations de compensation en signant des contrats avec les propriétaires de terrains, notamment agricoles et forestiers. Les contrats civils attachés aux terrains et comportant une obligation réelle environnementale, en particulier, offrent les garanties de pérennité requises. En confiant les mesures compensatoires à un prestataire dit « opérateur de compensation », le maître d’ouvrage pourrait également, le cas échéant, acquérir des unités de compensation écologiquement équivalentes à ses obligations auprès d’une réserve d’actifs naturels agréée par l’État. Cette voie intéressante est en cours d’expérimentation et le projet de loi prévoit de l’encadrer.

Toutes ces dispositions sont contractuelles et conclues avec l’accord de l’ensemble des parties. En particulier, le propriétaire du terrain accueillant les mesures compensatoires reste libre d’accepter les termes du contrat, de le résilier dans les termes prévus dans le contrat initial et de disposer de son terrain comme il l’entend à l’issue du contrat passé avec le maître d’ouvrage. Dans tous les cas, le maître d’ouvrage demeure responsable de la bonne mise en œuvre de la compensation prescrite.

Enfin, plusieurs députés ont déposé des amendements visant à supprimer les réserves d’actifs naturels au motif qu’elles participeraient à la financiarisation de la nature. Or, ces réserves respectent le principe de la compensation en nature et de l’équivalence écologique. En d’autres termes, il ne s’agit pas pour le maître d’ouvrage de solder ses obligations de compensation par un chèque, mais de contractualiser avec l’opérateur ayant réalisé la mesure compensatoire équivalente en amont en présentant des garanties.

Ce dispositif a donné lieu à plusieurs expérimentations, par CDC Biodiversité en plaine de Crau depuis 2008 et, depuis 2015, par EDF, par la société Dervenn et par le conseil général des Yvelines. Les premiers résultats semblent positifs. S’il fonctionne, ce dispositif aura pour avantage de permettre l’anticipation et la mutualisation des mesures compensatoires. En définitive, l’encadrement réglementaire et le recours à un agrément préalable de l’État offrent les garanties permettant d’éviter les dérives que vous craignez, y compris l’arrêt des réserves d’actifs s’ils ne s’avèrent pas concluants.

La Commission examine l’amendement CD766 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Je persiste et signe en présentant cet amendement de suppression de l’article, parce qu’il subsiste dans ce texte un déséquilibre entre « éviter » et « réduire » d’une part, et « compenser » de l’autre. Malgré les dispositions en vigueur du code de l’environnement qu’a rappelées Mme la secrétaire d’État, la réalité est souvent la suivante : les deux premières étapes sont négligées au profit de la troisième.

En outre, je suis opposée au dispositif de réserve d’actifs naturels – le choix des termes est d’ailleurs significatif – dans un moment où la priorité devrait être d’affirmer que la biodiversité est un bien commun qui ne saurait donner lieu à marchandisation.

Mme la rapporteure. Si j’ai proposé la réécriture de l’article précédent sur les experts indépendants, c’est parce que j’estime que l’expertise en question doit être exigée dès le déclenchement d’un projet. On ne peut éviter les atteintes à l’environnement d’un projet que si le maître d’ouvrage peut s’appuyer sur une expertise fiable et complète. Certains maîtres d’ouvrage – en nombre certes insuffisant – parviennent aujourd’hui à éviter ces atteintes. Il faut donc renforcer la séquence « éviter » et « réduire ». Il est vrai que la compensation va davantage de soi car la loi prévoit plusieurs outils à cette fin, y compris les réserves d’actifs. Même si l’on peut débattre de leur appellation, elles constituent un outil parmi d’autres, que nous allons encadrer très précisément. D’autres amendements visent à ce que des agriculteurs et d’autres structures puissent être opérateurs de compensation. Les trois expérimentations de réserves d’actifs semblent ne pas présenter de problèmes particuliers de financiarisation, de monétarisation ou de spéculation sur la biodiversité – ce que nous voulons évidemment éviter. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette l’amendement CD766.

Elle passe à l’amendement CD897 de Mme Marie Le Vern.

M. Christophe Bouillon. Cet amendement vise à préciser que les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité ne peuvent concerner que les atteintes réversibles, c’est-à-dire celles qui peuvent être compensées. En effet, la disparition définitive d’une espèce et la destruction d’un écosystème unique constituent des atteintes irréversibles qu’aucune mesure, même ambitieuse et durable, ne saurait compenser à due proportion. De même, le principe d’équivalence écologique ne saurait être respecté dès lors que l’on entend compenser la disparition d’une espèce par la préservation d’une autre. En conséquence, tout projet qui aurait pour effet de porter une atteinte irréversible à la biodiversité devrait être abandonné ou modifié afin de le conformer aux principes de la compensation écologique.

Mme la rapporteure. Avis défavorable : le caractère juridiquement flou du terme « réversible » risque de se traduire par de nombreux contentieux ; il ne me semble donc pas opportun de l’employer dans la loi.

Mme la secrétaire d’État. Par cet amendement, vous soulignez que les atteintes irréversibles à la biodiversité, c’est-à-dire la disparition définitive d’une espèce ou d’un écosystème, sont inacceptables et vous avez raison. Cependant, d’autres mesures comme la liste des espèces protégées et le réseau Natura 2000 protègent d’ores et déjà spécifiquement les espèces et espaces à forts enjeux et satisfont votre préoccupation. Je vous propose donc de retirer cet amendement.

M. Christophe Bouillon. Vous m’avez convaincu.

L’amendement CD897 est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD28 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD521 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à prévoir la réalisation d’un inventaire exhaustif de la faune, de la flore et des écosystèmes affectés par un projet avant même la définition de mesures compensatoires. On ne peut en effet envisager de compenser que ce que l’on connaît. À titre d’exemple, si un secteur d’alimentation d’une espèce est détruit, un nouvel espace lui permettant de s’alimenter doit être prévu en compensation.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. La fixation des conditions dans lesquelles les mesures compensatoires seront prises relève davantage du domaine réglementaire. Il n’est pas nécessaire de prévoir des inventaires systématiques dans la loi, d’autant plus qu’il n’est pas certain qu’ils soient toujours réalisables ; il faut donc être prudent. Sans doute vaudrait-il mieux que le Gouvernement fixe la méthode selon laquelle les espèces sont prises en compte.

Mme la secrétaire d’État. Même avis. L’étude d’impact prévoit déjà l’obligation de réaliser un inventaire, et des diagnostics similaires sont d’ores et déjà imposés pour la délivrance des autorisations administratives accordées aux projets, qu’il s’agisse des études d’incidences concernant les projets relevant de la loi sur l’eau et des dérogations d’espèces ou des études d’impact. En outre, cet amendement ne vise que les seuls diagnostics naturalistes, alors que les mesures de compensation peuvent porter sur d’autres impacts comme les obstacles aux crues et les pollutions sonores, par exemple.

La Commission rejette l’amendement CD521.

Elle passe à l’amendement CD546 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement concerne une nouvelle fois la compensation – preuve que ce texte porte davantage sur le volet « compenser » que sur les deux autres volets du triptyque, « éviter » et « réduire ». Il vise à définir le principe de compensation. L’obligation de résultat est d’autant plus essentielle qu’il est difficile de définir a priori le résultat de la compensation. L’aménageur doit donc modifier son projet de compensation afin d’obtenir le résultat escompté, s’assurer que les mesures de compensation sont effectives pendant toute la durée des impacts et les ajuster le cas échéant.

D’autre part, les mesures permettant d’éviter ou de réduire les atteintes à la biodiversité doivent être prises dès lors qu’elles sont possibles et ne sauraient être remplacées par des mesures de compensation. En tout état de cause, il est indispensable de rappeler que l’abandon du projet constitue une option possible dès lors qu’aucune compensation satisfaisante ne peut être effectuée. Certaines espèces et certains écosystèmes sont irremplaçables, et leur destruction n’est donc pas compensable.

Mme la rapporteure. Je suis d’accord avec vous… Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Par cet amendement, vous insistez sur la nécessité de respecter la séquence visant à « éviter, réduire, compenser » les impacts des projets sur les milieux naturels. Vous avez raison sur le fond, et votre amendement est parfaitement conforme à la doctrine nationale « éviter, réduire, compenser » publiée par le ministère de l’environnement en 2012. C’est le principe même qui fonde l’acte administratif autorisant un projet d’aménagement qui affecte l’environnement, conformément à l’article L.122-1 du code de l’environnement. Cela étant, les ordonnances de modernisation du droit de l’environnement qui sont actuellement débattues au Conseil national de la transition écologique confortent ces dispositions. S’il n’est donc pas nécessaire d’y revenir dans le présent article, j’y suis néanmoins favorable sur le fond.

Mme Delphine Batho. Je propose de rectifier cet amendement en remplaçant son dernier mot, « envisagé », par le mot « décidé », faute de quoi l’amendement serait vain.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Cela change fondamentalement le sens de l’amendement…

Mme Delphine Batho. C’est le sens que veulent lui donner ses auteurs, d’après ce que j’ai cru comprendre. Sinon, on se paye de mots…

Mme la rapporteure. J’y serais a priori favorable (Sourires) : vient en effet un moment où il faut décider de cesser un projet lorsque les mesures de compensation ne donnent pas satisfaction. N’étant cependant pas certaine que le terme proposé soit le plus adapté, je suis réservée.

Mme Laurence Abeille. Tel qu’il est rédigé, l’amendement que je défends aboutit en effet nécessairement à ce que l’abandon du projet soit « décidé », et non pas seulement « envisagé ». Il s’agit de cas sans doute exceptionnels, la plupart des projets donnant lieu à des mesures d’évitement, de réduction ou de compensation satisfaisantes, mais la proposition de rectification me semble pertinente.

M. Jean-Yves Caullet. Je comprends ce qui inspire cette proposition, mais l’abandon d’un projet ne constitue pas une décision juridique. Chaque projet fait l’objet d’une autorisation, qui peut ou non être délivrée.

Mme la secrétaire d’État. Prenons garde à ne fermer aucune porte : faut-il impérativement abandonner un projet dont les atteintes à la biodiversité ne peuvent être ni évitées, ni réduites, ni compensées, ou ne doit-il pas simplement être révisé sous un autre angle pour trouver d’autres solutions ? Il me semble trop restrictif d’imposer l’abandon d’un projet ; l’amendement initial de Mme Abeille, au contraire, laissait plusieurs options ouvertes, puisqu’il permet non seulement d’abandonner un projet, mais aussi, le cas échéant, d’en revoir la copie si nécessaire.

Mme la rapporteure. Sans doute vaudrait-il mieux remplacer le dernier membre de phrase par les mots suivants : « le projet doit être réexaminé ».

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous propose de mettre aux voix l’amendement tel quel et, si besoin est, de proposer une rédaction différente lors du débat en séance publique.

La Commission adopte l’amendement CD546.

Puis elle examine les amendements identiques CD83 de la rapporteure, CD221 de M. Martial Saddier, CD323 de M. Dino Cinieri et CD790 de M. Gérard Menuel.

Mme la rapporteure. Les mesures de compensation écologique sont généralement appliquées en milieu agricole ou forestier. L’amendement CD83 vise à élargir leur possibilité de mise en œuvre à des contrats conclus directement entre le maître d’ouvrage et des exploitants agricoles ou forestiers, qui sont eux aussi des artisans de la biodiversité.

M. Michel Heinrich. L’amendement CD221 a le même objet. La contractualisation directe entre maître d’ouvrage et exploitants agricoles ou forestiers est d’autant plus efficace qu’elle est mise en œuvre de manière volontaire et sans recourir à un opérateur intermédiaire, souvent très coûteux pour les maîtres d’ouvrage, en particulier lorsque les projets sont d’ampleur limitée.

M. Dino Cinieri. En effet, l’article tel qu’il est rédigé prévoit de restreindre la liste des personnes susceptibles de mettre en œuvre les mesures de compensation aux opérateurs de compensation écologique, aux maîtres d’ouvrage ou aux gestionnaires d’actifs naturels, d’où l’amendement identique CD323.

M. Gérard Menuel. L’amendement identique CD790 me semble judicieux, en effet, car la rédaction actuelle est trop restrictive.

Mme la secrétaire d’État. Je suis tout à fait favorable à ce principe, même si cette possibilité est d’ores et déjà ouverte dès lors que les exploitants agricoles ou forestiers sont eux-mêmes reconnus comme opérateurs de compensation, ce qu’ils peuvent par exemple demander via leurs structures collectives agréées.

Mme Delphine Batho. Si cette précision est insérée au II de l’article, quelle sera alors la durée d’engagement des intéressés ?

Mme la rapporteure. Tout contrat suppose une durée d’engagement ; en l’occurrence, elle devra être suffisamment longue pour que le contrat porte ses fruits – sans pour autant aller jusqu’à 99 ans, cela va de soi. Elle dépendra des négociations librement conduites entre les parties et des résultats obtenus.

Mme Laurence Abeille. Je suis tout à fait opposée à cette proposition. En l’état, le texte permet déjà à des exploitants agricoles ou forestiers d’être opérateurs de compensation ; avec ces amendements, néanmoins, les uns et les autres se retrouvent placés au même niveau au point que l’on ne sait plus distinctement qui fait office d’opérateur – pourtant un pilier essentiel du dispositif. Se pose en outre la question de la durée de l’opération. Il me semble donc incongru d’introduire un tel élargissement à ce stade du texte.

La Commission adopte les amendements identiques CD83, CD221, CD323 et CD790.

La Commission est saisie de l’amendement CD499 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Il est proposé de supprimer la référence à la notion de « réserves d’actifs naturels ». L’expérimentation lancée par le ministère de l’écologie sur ce système n’étant pas encore aboutie et aucune évaluation n’ayant encore été réalisée, il est prématuré de l’instaurer dans la loi. L’exemple de la compensation menée dans la plaine de la Crau doit nous inciter à être prudents, et une analyse de ce projet devrait être menée en amont.

Du reste, de nombreuses questions se posent quant à la généralisation possible d’un tel système, tant du point de vue de l’impact sur le foncier et sa disponibilité que du respect du principe de l’équivalence écologique. Il ne faudrait pas non plus qu’une généralisation hâtive de ce dispositif incite les maîtres d’ouvrage à se précipiter vers les mesures compensatoires plutôt qu’à conduire une réflexion de fond autour des trois étapes du triptyque « éviter-réduire-compenser ».

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Avis défavorable. Supprimer les réserves d’actifs naturels reviendrait à nous priver d’un outil important parmi ceux dont nous disposons pour la compensation. J’ai compris, de diverses interventions, que le nom même de cet outil pouvait donner à penser qu’on allait financiariser, monétariser la nature. Il n’en est rien, et il existe divers outils de compensation. En tout cas, je proposerai tout à l’heure une autre dénomination. Hier, nous avons réfléchi au moyen de garantir l’évitement très en amont, car c’est bien la phase prioritaire du triptyque « éviter, réduire, compenser ».

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Nous disposons de premières conclusions plutôt positives s’agissant de l’expérimentation en plaine de la Crau, menée par la filiale Biodiversité de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) depuis 2008. En huit ans, l’opération a permis de restaurer 357 hectares sur un ancien verger industriel, aujourd’hui recolonisé par une faune et une flore remarquables. Du point de vue économique, on ne peut pas non plus parler de marchandisation. Il me paraît intéressant d’expérimenter la possibilité de recours à ce mécanisme, qui présente des garanties de qualité et de pérennité de mesures compensatoires, permet d’anticiper ces mesures compensatoires, et qui sera encadré par un décret. Je demande le retrait de cet amendement.

Mme Laurence Abeille. La CDC a pris des engagements verbaux, mais aucune mesure ne permet d’assurer la protection du site de la Crau sur le long terme, qui est précisément ce qui pose problème. Même si le système peut sembler intéressant, à l’étranger, les réserves d’actifs naturels sont décriées par nombre d’associations, qui considèrent, à raison de mon point de vue, qu’il s’agit d’une financiarisation de la biodiversité.

Il nous semble très prématuré de s’engager en France dans un système aventureux qui pourrait, à terme, mener à une financiarisation. Ce serait prendre le risque que les opérateurs s’engouffrent dans le dispositif pour éviter les premières étapes du triptyque.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD307 de M. Dino Cinieri et CD936 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Il y a un risque de confusion entre les réserves d’actifs naturels et les réserves naturelles nationales et régionales qui sont des outils de protection de la nature clairement identifiés dans le code de l’environnement depuis très longtemps. Même si les actions concernées par les réserves d’actifs naturels sont destinées à être vendues, il est fondamental de préférer la terminologie « site naturel de compensation » qui renvoie à la finalité et pas au moyen.

M. Gérard Menuel. Mon amendement a le même objet.

Mme la rapporteure. La connotation financière de l’expression « réserves d’actifs » peut, en effet, entraîner une confusion. Pour des raisons rédactionnelles, ma préférence va à l’amendement de M. Gérard Menuel.

Mme la secrétaire d’État. Si le changement de dénomination peut lever les doutes sur cet outil, j’y suis favorable, sachant qu’un décret permettra de limiter les risques évoqués par Mme Laurence Abeille. J’ai également une préférence pour la rédaction de M. Menuel, plus précise.

L’amendement CD307 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD936.

Elle aborde l’amendement CD887 de M. Christophe Bouillon.

Mme la rapporteure. Les modalités de mise en œuvre des mesures compensatoires seront précisées par voie réglementaire, dans le guide de bonnes pratiques. Néanmoins, il s’agit là d’une mesure de bon sens dont le Gouvernement devrait tenir compte. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Il est certes inutile d’introduire une telle disposition, mais je n’ai pas de raison de m’opposer à une mesure de bon sens. J’y suis donc plutôt favorable.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement mérite sa place dans le texte.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques CD308 de M. Dino Cinieri, CD878 de M. Gérard Menuel et CD1063 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer l’alinéa 8, qui restreint la mise en œuvre des mesures compensatoires à la notion d’obligation réelle environnementale et à la conclusion de contrats. Or nous ne voulons pas restreindre la compensation à ces seuls outils.

M. Dino Cinieri. Il convient de supprimer le lien privilégié entre les « réserves d’actifs naturels » et les « obligations réelles ».

En permettant à un propriétaire d’attacher à son bien des engagements en faveur de la biodiversité, en accord avec le preneur si un bail est consenti sur ce bien, le dispositif des obligations réelles peut être très bénéfique pour l’environnement et répondre de manière cohérente à des engagements volontaires. Mais lier ce nouvel outil aux réserves d’actifs naturels le dénature à deux égards. D’une part, cela crée une protection passagère, en ne donnant un statut patrimonial à un espace que pour une durée limitée, donc sans effet durable pour la biodiversité́. D’autre part, cela assortit cet engagement d’une valeur financière minimisant la possibilité d’engagement volontaire. Ce lien a, par ailleurs, pour effet d’inciter à la création de réserves d’actifs naturels pour satisfaire un marché.

La suppression de l’alinéa 8 n’empêcherait pas l’utilisation des obligations réelles environnementales comme support de la mise en œuvre de mesures compensatoires.

M. Gérard Menuel. La compensation environnementale ne doit pas être mise en relation avec la notion d’obligations réelles environnementales, ni restreinte à la conclusion de contrats. L’alinéa 8 est inutilement trop précis.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte les trois amendements.

Elle est saisie de l’amendement CD86 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer l’alinéa 9 qui n’apporte rien. Les modalités de suivi des mesures compensatoires lors de la mutation d’un bien seront précisées par le Gouvernement au sein d’un guide de bonnes pratiques.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CD657 de M. Jean-Yves Caullet tombe.

La Commission en vient à l’amendement CD87 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec l’amendement CD39 modifiant l’alinéa 5 du présent article.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD1026 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Il est proposé de supprimer la référence à la notion de « réserves d’actifs naturels ».

Mme la rapporteure. Défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD522 de Mme Laurence Abeille, CD938 de M. Gérard Menuel, CD309 de M. Dino Cinieri et CD896 de Mme Marie Le Vern.

Mme Laurence Abeille. La procédure de compensation peut se révéler dangereuse : si, au terme du contrat, l’équivalence écologique du terrain sur lequel a été menée une opération de compensation est modifiée, l’opération se sera soldée par une perte de biodiversité. Comment garantir que le terrain conserve sa fonction de restauration de la biodiversité sur le long terme ? Peut-être faudrait-il penser à une protection juridique de type « réserve naturelle », sachant, par exemple, que dans l’opération de la plaine de la Crau, le contrat dure trente ans et rien ne garantit la préservation de la biodiversité restaurée au terme de cette période.

M. Gérard Menuel. Dès lors qu’un terrain est l’assiette d’une mesure de compensation, il acquiert une destination environnementale. Pour répondre au caractère définitif de l’atteinte qui a été portée à la biodiversité, cette destination environnementale doit être pérennisée. Tel est l’objet de l’amendement CD938.

Mme la rapporteure. Je suis défavorable à chacun de ces amendements. Si, au terme du contrat, on empêche le signataire de recouvrer sa liberté, je crains qu’aucun contractant n’entre dans la logique de la compensation.

Mme la secrétaire d’État. Un contrat sous seing privé ne peut être à l’origine d’une obligation qui s’apparente à une servitude d’utilité publique. À la fin du contrat, le propriétaire récupère l’usage libre de ses terrains. Avis défavorable.

L’amendement CD896 est retiré.

Mme Laurence Abeille. Le problème avec la compensation, c’est son caractère provisoire quand la protection de la biodiversité se fait sur le long terme. La reconquête de la biodiversité est l’objet même du projet de loi ; il faudrait trouver une rédaction qui ne la rende pas vaine.

M. François-Michel Lambert. Comment la rapporteure et la secrétaire d’État peuvent-elles garantir que la biodiversité ne sera pas la grande perdante ?

Mme la secrétaire d’État. Une fois le contrat terminé, si le terrain présente une biodiversité exceptionnelle à protéger, d’autres outils peuvent être utilisés, par exemple un arrêté de protection de biotope. En revanche, le seul et unique porteur de l’obligation de compensation, selon le contrat, est le maître d’ouvrage, conformément au principe du pollueur-payeur.

Mme la rapporteure. À la fin du contrat, le maître d’ouvrage aura la possibilité de contracter avec un autre opérateur si les obligations de compensation n’ont pas été réalisées. La biodiversité, rappelons-le, est une dynamique.

Mme Laurence Abeille. Je serais prête à me rallier à l’amendement de M. Gérard Menuel.

La Commission rejette successivement les amendements CD522, CD938 et CD309.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD1028 de Mme Marie Le Vern et CD1029 de M. Gérard Menuel.

Mme la rapporteure. Ces dispositions sont inutiles. Je propose le retrait de ces amendements.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle passe à l’amendement CD248 de M. Martial Saddier.

M. Jean-Marie Sermier. L’alinéa 16 prévoit que les réserves d’actifs naturels font l’objet d’un agrément. Il est donc redondant avec l’alinéa 11 qui prévoit que les opérateurs de compensation font eux-mêmes l’objet d’un agrément.

Mme la rapporteure. Il est préférable de conserver les agréments qui pourront être délivrés plus rapidement par les services de l’État ; la certification viendra dans un second temps. Le décret d’application prendra en compte cet aspect. Je demande le retrait de l’amendement.

Mme la secrétaire d’État. L’agrément des réserves d’actifs naturels permettra de vérifier que les principes de mise en œuvre de la compensation sont bien respectés et que les unités de compensation peuvent être proposées au maître d’ouvrage. Cela va plus loin que le simple agrément d’un opérateur. Je suis donc défavorable à cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD306 de M. Dino Cinieri et CD930 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. La loi offre la possibilité au maître d’ouvrage n’ayant pas satisfait à ses obligations de compensation dans les délais impartis de s’acquitter de sa dette via une réserve d’actifs naturels ou en ayant recours à un opérateur de la compensation. L’amendement CD306 vise à préciser par décret les conditions dans lesquelles ces actions nouvelles seront mises en œuvre, en particulier concernant le régime fiscal des flux financiers générés par les réserves d’actifs naturels, les notions d’unité de compensation et le maintien d’une priorité de mise en œuvre de la compensation dans les territoires dégradés.

M. Gérard Menuel. Il y a, en effet, un problème concernant le régime fiscal des flux financiers.

Mme la rapporteure. Le Gouvernement s’est engagé à publier un décret d’application. Je demande le retrait de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Même avis. Ces amendements sont satisfaits aux alinéas 11 et 16.

M. Yves Albarello. Je souligne qu’il faut désormais parler de « sites naturels ».

La Commission rejette successivement les amendements.

La Commission est saisie de l’amendement CD483 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à introduire une date butoir au-delà de laquelle l’administration doit mettre en demeure la personne soumise à une obligation de compensation de mener les opérations de compensation prévues.

Mme la rapporteure. Défavorable. Laissons un peu de souplesse au préfet pour apprécier les situations, qui nécessitent des délais plus ou moins longs. En tout état de cause, le préfet a d’ores et déjà la possibilité de prononcer une mise en demeure.

Mme la secrétaire d’État. Aux termes des articles L.171-7 et L.171-8 du code de l’environnement, aucun délai n’est fixé en matière de police administrative. Le préfet l’adapte en fonction de l’ampleur de la régularisation demandée. Dans de nombreux cas, elle sera inférieure à un an, mais les cas particulièrement complexes peuvent nécessiter un peu plus de temps. Je demande également le retrait de cet amendement.

Mme Laurence Abeille. Le délai ne vise que la mise en demeure rappelant les obligations. Faute de cette mise en demeure, on peut craindre que les obligations ne soient réalisées avant longtemps.

Le président Jean-Paul Chanteguet. L’amendement est maintenu ?

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CD484 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à créer une astreinte journalière lorsque les obligations de compensation n’ont pas été respectées. Il paraît logique de prévoir une sanction financière pour l’opérateur de compensation qui n’aurait pas satisfait à ses obligations.

Mme la rapporteure. Des sanctions administratives sont d’ores et déjà prévues dans la loi. Sachant que l’administration peut mettre en demeure le maître d’ouvrage et procéder d’office aux mesures de compensation aux frais de celui-ci, il est inutile d’ajouter un régime de sanctions. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CD1027 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Il s’agit d’un amendement de cohérence visant à supprimer la référence à la notion de réserves d’actifs naturels.

Mme la rapporteure. Défavorable. Il n’y a aucune raison de modifier le texte qui permet au préfet de mobiliser les mesures de compensation les plus adaptées à la situation.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision et de coordination CD29 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CD1071 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un amendement de rédaction globale de l’alinéa qui supprime la référence à des délais dont le point de départ n’est pas précisé.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement améliore le texte du Sénat. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD547 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à rendre publiques les données de compensation en les géolocalisant. Les mesures de compensation s’étalant sur le long terme, la transparence est nécessaire afin que les citoyens et les ONG puissent contrôler le bon déroulement des procédures de compensation et savoir quels sites sont concernés.

Mme la rapporteure. Défavorable. Il existe déjà des obligations de publicité. À force d’en rajouter, les dispositifs deviendront moins attractifs.

Mme la secrétaire d’État. Il me semble excessif d’imposer la publication annuelle et la mise à disposition du public des mesures compensatoires, d’autant que ces éléments peuvent être demandés par des tiers à l’autorité administrative. Je propose le retrait de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD30 de la rapporteure.

Elle étudie ensuite l’amendement CD886 de M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Le présent amendement vise à garantir la cohérence de l’alinéa 22 avec les dispositions du code de l’environnement. L’amendement introduit au Sénat s’inspire du dispositif applicable aux carrières, dont la mise en service est conditionnée à la constitution de garanties financières pour leur remise en état. En raison de la capacité des carrières à créer et à diversifier des milieux permettant l’installation d’un cortège d’espèces animales et végétales remarquables, le réaménagement des sites en nature peut être considéré comme mesure compensatoire. Il convient de ne pas décourager ces bonnes pratiques et de ne pas démultiplier les garanties financières auxquelles les installations classées sont déjà soumises. Ces garanties financières amputeraient d’autant les capacités d’emprunt, et donc d’investissement, des entreprises, pour une durée extrêmement longue.

Mme la rapporteure. Défavorable. S’il existe deux garanties, c’est parce qu’elles n’ont pas le même objectif. L’une vise à la remise en état du site, l’autre à la mise en œuvre des mesures de compensation. Les mesures de compensation ne doivent pas concurrencer ou affaiblir l’obligation de remise en état d’un site.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD310 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Il n’existe pas, à ce jour, d’observatoire des mesures compensatoires. Ces dispositifs de compensation doivent être améliorés en termes de visibilité et de lisibilité. Cet amendement vise à en assurer la transparence et le suivi.

Mme la rapporteure. Il est inutile d’alourdir le code de l’environnement. Les mesures de publicité sont suffisantes, et le mécanisme que vous proposez est, de plus, coûteux.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CD935 rectifié de M. Gérard Menuel.

M. Gérard Menuel. Il s’agit de demander que, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement rende au Parlement un rapport sur la mise en œuvre des réserves d’actifs naturels et des opérateurs de la compensation.

Mme la rapporteure. Je déposerai en séance un amendement visant à rétablir l’article 33 bis, qui prévoit la remise d’un rapport par le Gouvernement. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Vigier. Cet amendement me semble intéressant. Il est important de maintenir dans la durée un juste équilibre entre activité agricole et préservation de la biodiversité.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD523 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Il s’agit de prévoir un décret d’application de l’article 33 A qui instaure le dispositif de compensation par l’offre. Des questions se posent sur ses modalités d’application, tant au regard des modalités d’attribution de l’agrément aux opérateurs de compensation ou aux réserves d’actifs naturels, que du devenir des terrains faisant l’objet de mesures compensatoires, ou encore des conditions dans lesquelles le maître d’ouvrage n’ayant pas satisfait à ses obligations de compensation dans les délais impartis pourrait s’acquitter de sa dette via une réserve d’actifs naturels ou en recourant à un opérateur de la compensation. Un décret en Conseil d’État apporterait ces précisions.

Mme la rapporteure. Défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement est satisfait par les alinéas 11 et 16 qui prévoient un décret pour l’agrément des opérateurs de compensation et pour les sites naturels de compensation.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 33 A ainsi modifié.

Article 33 BA
Inventaire national des espaces naturels à fort potentiel de gain écologique

Cet article, introduit par le Sénat, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Introduit en commission par un amendement du rapporteur et soutenu par le Gouvernement, cet article crée un inventaire national des espaces naturels pour la compensation. Cet inventaire, réalisé par l’Agence française pour la biodiversité en coordination avec les instances locales compétentes doit recenser tous les espaces naturels à fort potentiel de gain économique appartenant à des personnes morales de droit public susceptibles d’être mobilisés pour la mise en œuvre de mesures de compensation.

Le renforcement de la compensation des atteintes à la biodiversité va accroître les besoins fonciers nécessaires à la mise en œuvre de ces mesures. L’objectif de la mesure est aussi de valoriser les propriétés publiques sous-exploitées, et d’éviter une réduction du foncier agricole par l’acquisition de terrains supplémentaires.

1. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

Votre commission a adopté deux amendements : le premier a rajouté la consultation de l’Observatoire national de la consommation des espaces agricoles lors de l’élaboration de l’inventaire. ; le second a supprimé le terme « naturels ».

Ainsi, l’inventaire national devra identifier tous les espaces à fort potentiel de gain écologique, appartenant à des personnes morales de droit public et susceptibles d’être mobilisés pour mettre en œuvre des mesures de compensation. La suppression du mot « naturels » permet de prendre en compte certains espaces qui n’étaient pas inclus dans l’inventaire, notamment les friches industrielles appartenant à des personnes publiques.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD769 de M. Jacques Krabal et CD572 de M. Bertrand Pancher.

M. Olivier Falorni. La rédaction actuelle prévoit de donner à l’Agence française pour la biodiversité la capacité de réaliser un inventaire national des espaces à fort potentiel écologique appartenant à des personnes morales de droit public et pouvant être mobilisés à une échéance indéterminée afin de recevoir et de mettre en œuvre des opérations de compensation écologique.

L’utilité réelle de cet inventaire apparaît quasi-nulle : l’application du critère d’équivalence écologique rendra très peu probable l’utilisation à bref délai de terrains inventoriés situés à proximité d’un projet dont les impacts devront être compensés. En revanche, disposer d’un « atlas des compensations », permettant de connaître les terrains ayant déjà fait l’objet d’engagements de compensation, est une nécessité reconnue par tous. Le but de l’amendement CD769 est donc de répondre à ce besoin. Il est très fréquent, par exemple en zone périurbaine, industrielle ou portuaire, que des projets successifs concernent des emprises très proches, avec des impacts à compenser assez semblables, faisant donc appel au même type de terrains de compensation.

M. Yannick Favennec. À l’occasion de la loi d’avenir agricole, Stéphane Le Foll s’était engagé à mener une réflexion sur les surfaces naturelles délaissées susceptibles d’être utilisées dans le cadre des obligations de compensation écologique. Cette solution est intéressante, parce qu’elle permet d’éviter d’utiliser des terres agricoles. Qui plus est, notre territoire en compte un grand nombre et de vastes dimensions, qui entourent les lignes à grande vitesse, les rocades ou les échangeurs autoroutiers. Les recenser sur une base départementale, par exemple, permettrait de les mobiliser plus facilement dans le cadre de compensations. Au lieu de laisser l’entretien de ces surfaces à la charge de l’État ou des collectivités, elles pourraient faire l’objet, par exemple, d’un reboisement.

Le ministre avait proposé d’intégrer ce recensement dans les objectifs de l’Observatoire national de la consommation espaces agricoles. Malheureusement, rien ne semble avoir été fait dans ce sens.

Pour le groupe UDI, l’article 33 BA représente un premier pas non négligeable, puisqu’il propose que l’Agence française pour la biodiversité réalise un inventaire national des espaces naturels à fort potentiel de gain écologique. Nous proposons que l’Agence soit épaulée dans cette tâche par l’Observatoire national de la consommation des espaces agricoles. Cela permettrait de trouver des espaces susceptibles d’être mobilisés pour des mesures de compensation sans pour autant priver de futurs exploitants de l’espace agricole ou forestier. L’expertise de l’Observatoire dans ce domaine nous paraît tout à fait indispensable.

Mme la rapporteure. Il est prévu que l’Agence française pour la biodiversité réalise un inventaire national avec les instances compétentes locales. Je ne sais pas comment fonctionnera l’Agence française pour la diversité, mais je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’elle travaille avec l’Observatoire national de la consommation des espaces agricoles. Je ne suis pas défavorable à cet amendement, disons même que j’y suis favorable.

En revanche, je demande le retrait de l’amendement CD769 : la géolocalisation des mesures compensatoires et leur publication sont déjà prévues à l’article 33 A.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement CD769 est déjà satisfait dans l’article 33 A. J’en demande donc le retrait.

Pour ce qui est de l’amendement CD572, il n’est pas du niveau législatif de citer nommément toutes les structures avec lesquelles l’Agence française pour la biodiversité devrait se coordonner. C’est pourquoi j’y suis défavorable.

L’amendement CD769 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD572.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD526 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Limiter l’inventaire des sites pour les opérations de compensation aux espaces naturels reviendrait à exclure des espaces artificialisés pouvant avoir un fort potentiel de gain écologique, par exemple des friches industrielles. Cet amendement vise donc à supprimer le mot « naturels ».

Mme la rapporteure. Il ne faudrait pas, en effet, laisser de côté des sites industriels à fort potentiel écologique. Il ne faudrait pas non plus être obligé de faire des inventaires sur tout le territoire. C’est impossible, ne serait-ce que pour des raisons financières – les coûts seraient énormes. Je suis donc plutôt réservée. Peut-être pourrait-on travailler à une rédaction plus ciblée.

Mme la secrétaire d’État. Je partage les réserves de la rapporteure, mais l’amendement soulève une vraie question. On ne peut pas limiter l’inventaire aux seuls espaces naturels, car la réhabilitation des friches industrielles offre des possibilités de désartificialisation et de gain écologique. La rédaction actuelle nous prive de telles possibilités, ce qui est vraiment dommage. Voilà pourquoi je suis plutôt favorable à ce que l’on adopte, par principe, cet amendement, quitte à le réécrire d’ici à son passage en séance.

M. Yves Nicolin. Pour une fois, je vais dans le sens de Mme la rapporteure. Nous sommes en train de partir sur des listes à la Prévert, sans avoir mesuré ce que cela pourrait coûter. Je pense d’ailleurs qu’une étude d’impact permettrait de renoncer de façon évidente à un tel amendement.

M. François-Michel Lambert. Chaque mot de la loi a son importance. Certains pourraient se retrancher derrière le mot « naturels » pour ne pas aller chercher l’essentiel, c’est-à-dire des espaces de compensation de biodiversité, y compris dans des friches qui reviennent à la nature. Combien de carrières, qui ne sont plus des espaces naturels puisqu’elles ont été défoncées par l’homme, sont redevenues des espaces de compensation de biodiversité ? En maintenant le mot « naturels », nous risquons de nous priver de nombreuses opportunités.

Certains s’inquiètent de la capacité à faire cet inventaire, mais les nouvelles approches collaboratives, permettent de mobiliser, bien au-delà des seuls acteurs professionnels, nombre de bénévoles. Qui plus est, grâce à la révolution numérique, la collecte des données se fait bien plus vite que dans le passé, de même que l’identification des espaces à fort potentiel.

M. Jean-Pierre Vigier. Je soutiens Mme la rapporteure : si l’on part dans tous les sens, on n’aura pas les moyens de tout financer, et notre action ne sera pas efficace.

M. Jean-Yves Caullet. Si l’on recherche des gains écologiques, le plus simple est de prendre des terrains de qualité médiocre que l’on peut améliorer facilement. S’en tenir aux espaces naturels, c’est se mettre un handicap. Je soutiendrai donc l’amendement de Mme Laurence Abeille.

En revanche, nous devons nous protéger du syndrome de l’exhaustivité. « Inventaire national », ne signifie pas que rien ne doit échapper à l’inventaire. C’est infaisable ! Attachons-nous, d’ici à la séance, à trouver une autre formule. L’AFB pourrait, par exemple, « répertorier » des terrains qu’on lui proposerait comme susceptibles de faire l’objet de compensations. Cela ne veut pas dire que tout doit être en permanence surveillé et intégré dans un système centralisé. Il ne s’agit pas de faire un « Gosplan » des zones.

Mme la rapporteure. En tout cas, il ne faut pas s’en tenir à la seule suppression du mot « naturels ».

Mme la secrétaire d’État. Si l’on adopte cet amendement en commission, cela nous incitera d’autant plus à trouver une rédaction plus adaptée pour la séance.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. L’analyse qui vient d’être faite montre bien que l’AFB porte en elle un mouvement de recentralisation, aspect que nous avions, les uns comme les autres, dénoncé. (Approbations diverses)

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 33 BA ainsi modifié.

Article 33 BB
(article L. 122-3 du code de l’environnement)

Contenu de l’étude d’impact

Cet article, introduit par le Sénat, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Ce nouvel article a été introduit en séance publique au Sénat par un amendement de M. Ronan Dantec et des membres du groupe écologiste, et il a été soutenu par le Gouvernement. Il précise le contenu des études d’impact. Ainsi, l’étude d’impact devra désormais de fournir une « description » des principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d’ouvrage au lieu d’une « esquisse » des principales solutions.

Cet amendement de précision vise à rendre le droit français conforme à la directive n° 2014/54/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, modifiant la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement qui sera prochainement transposée en droit interne.

1. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

La commission a adopté cet article sans modifications.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD676 et CD1006 de Mme Catherine Beaubatie.

Mme la rapporteure. Le code de l’environnement est en cours de modification et les parties prenantes seront associées dans le cadre du Conseil national de la transition énergétique. Je suis défavorable à cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements CD676 et CD1006.

Elle examine ensuite l’amendement CD767 de M. Jacques Krabal.

M. Olivier Falorni. Cet amendement vise à préciser que la compensation par l’offre, lorsqu’elle est envisagée, est incluse dès l’étude d’impact dans la demande d’autorisation du pétitionnaire, comme c’est le cas pour la compensation par la demande.

Mme la rapporteure. Cette disposition est déjà prévue par l’article 33 A, et elle est au cœur du mécanisme de compensation. Il n’est pas nécessaire de le répéter.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 33 BB sans modification.

Section 1
Obligations de compensation écologique

Article 33
(article L. 132-3 [nouveau] du code de l’environnement)

Possibilité pour le propriétaire d’un immeuble d’y créer une obligation réelle environnementale

Cet article a pour objet de donner la possibilité au propriétaire d’un bien immobilier de créer à sa charge et à la charge des propriétaires successifs des obligations réelles à finalité environnementale.

Ainsi, le nouvel article L. 132-3 de code de l’environnement autorisera les propriétaires de biens immobiliers à contracter avec une collectivité publique, un établissement public ou une personne morale de droit privé agissant pour la protection de l’environnement en vue de faire naître à leur charge – ainsi qu’à celle des propriétaires successifs du bien – des obligations réelles ayant pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la biodiversité ou de services écosystémiques dans un espace naturel, agricole ou forestier.

Dans le contrat signé entre les parties, doivent figurer la durée de l’obligation et les possibilités de révision et de résiliation. L’accord préalable et écrit du preneur est obligatoire.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale n’a apporté que trois modifications rédactionnelles à cet article lors de son examen en commission.

En séance publique, elle a adopté deux amendements déposés par le gouvernement et qui ont reçu un avis favorable de votre rapporteure :

– le premier amendement apporte une précision terminologique et fait référence à la notion de « fonction écologique » plutôt que de « service écosystémique » ;

– le second amendement vise à assurer la publicité foncière des obligations réelles environnementales afin de garantir que les propriétaires successifs du bien soient bien informés de l’obligation réelle attachée au terrain. La publicité foncière permet également de rendre le dispositif opposable aux tiers et de prévenir des conflits entre titulaires de droits concurrents.

1. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté cinq amendements, dont un de précision terminologique.

Le premier des quatre autres amendements a été déposé par le rapporteur. Le contenu obligatoire du contrat est renforcé. Ainsi, les parties seront tenues d’inscrire les engagements réciproques et les possibilités de révision dans le contrat. Aussi, en vertu du principe de prohibition des engagements perpétuels, l’amendement plafonne la durée du contrat à 99 ans.

Le second amendement, déposé par Mme Sophie Primas au nom de la commission des affaires économiques, vise à lier la durée de vie des obligations réelles au respect par le cocontractant de ses engagements. Cet amendement a été adopté pour que la propriété ne soit pas durablement grevée par des obligations environnementales dans le cas où la contrepartie tomberait. Cela pourrait être le cas si une loi de finance anéantissait un dispositif fiscal favorable par exemple.

Le troisième amendement, également déposé par Mme Sophie Primas, précise que le contrat faisant naître l’obligation réelle doit être conclu sous forme authentique, avec inscription de l’acte au service de la publicité foncière. L’amendement prévoit également d’exonérer les droits d’enregistrement de la taxe de publicité foncière afin de favoriser l’application du dispositif, à défaut de mécanismes incitatifs. L’obligation d’authentifier l’acte devant un notaire permettra d’inscrire les obligations réelles au fichier immobilier, ce qui ne serait pas forcément le cas si l’acte était conclu sous-seing privé.

Le quatrième et dernier amendement, défendu par M. Jean-Noël Cardoux, vise à étendre le périmètre des détenteurs de droits dont l’accord est requis préalablement à la conclusion du contrat. L’objectif est de sécuriser le dispositif en prévoyant que le propriétaire s’assure ex ante que la conclusion du contrat ne le met pas en porte-à-faux avec les autres titulaires de droits dont il est redevable.

1. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

Défavorable à l’ensemble des modifications apportées par le Sénat, votre rapporteure a rétabli l’article tel qu’adopté à l’Assemblée nationale en y apportant cependant deux rectifications.

La première a supprimé les références spatiales dans lesquelles les obligations réelles environnementales pourront être mises en œuvre. En effet en restreignant la conclusion de ces contrats à des espaces naturels, agricoles ou forestiers, l’article excluait certains espaces qui pourront faire l’objet de contrat portant sur des obligations réelles environnementales.

La seconde rectification est l’inclusion d’un nouvel alinéa disposant que les obligations réelles environnementales peuvent être utilisées à des fins de compensation, conformément à la suppression de l’alinéa 8 de l’article 33.

Votre rapporteure n’a pas souhaité alourdir le formalisme contractuel en y insérant de nouvelles obligations ou inclure une quelconque limite de durée à la convention portant création d’obligations environnementales réelles. Par ailleurs, le contenu du contrat sera librement déterminé par les parties. Afin de les aider, le Gouvernement publiera des documents explicatifs appelant l’attention des parties sur les points sensibles du futur contrat et les mentions qui doivent y figurer.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD294 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. L’obligation réelle environnementale, prévue par l’article 33, constituerait un démembrement du droit de propriété au bénéfice de l’environnement. Elle entraverait de façon démesurée le droit de propriété et la capacité d’entreprendre. En outre, les éventuels fermiers se verraient obligés de respecter des contraintes environnementales acceptées par le bailleur et le preneur initial sans en être indemnisés des coûts ou de la perte de revenus qui en résulterait.

Il est donc proposé de supprimer cet article dès lors que d’autres outils, tels que le contrat de droit commun ou le bail rural, peuvent permettre aux mêmes acteurs de mettre en œuvre des mesures efficaces en faveur de la biodiversité ou des écosystèmes.

Mme la rapporteure. Évidemment, je suis totalement opposée à cet amendement. Une fois de plus, je répète que l’obligation réelle environnementale est une démarche volontaire et individuelle, qui permet de préserver la biodiversité sur un morceau de jardin ou tout autre espace. Ce n’est pas une obligation. En revanche, une fois que le propriétaire a pris sa décision, l’obligation court et il est dans l’obligation de continuer. Mais, si le propriétaire ne veut pas, il ne le fait pas. Arrêtez de dire des choses qui ne sont pas exactes !

Les obligations réelles environnementales peuvent être contractualisées, si on le souhaite. C’est un des outils de compensation. Il y aura alors, dans le contrat passé entre un maître d’ouvrage et un agriculteur qui veut contractualiser parce que cela lui plaît également, des choses qu’il sera obligé de mettre en place. Mais dans tous les cas, c’est une démarche volontaire.

Je suis totalement opposée à la suppression de cet article, qui porterait un coup aux possibilités que l’on a de préserver la biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. L’article 33 organise un nouvel outil foncier contractuel de protection de la biodiversité. Il est complémentaire aux mesures réglementaires existantes, et il présente des garanties de pérennité indispensables à la préservation de la biodiversité. Il autorise le propriétaire d’un bien immeuble à créer sur ce bien, avec une tierce partie garante des enjeux environnementaux, une obligation durable et automatiquement transmissible aux propriétaires successifs qui doivent respecter les clauses du contrat.

Ce contrat ne pourra être établi qu’avec l’accord du preneur – par exemple, le fermier en place si les terres sont louées à un agriculteur ou le détenteur d’un bail de chasse –, et il est inscrit aux hypothèques. Au regard des enjeux, il est justifié d’introduire un démembrement du droit de propriété au bénéfice de l’environnement, alors même que ce droit de démembrement existe déjà pour d’autres activités : droit de chasse, droit de pêche, droit de passage.

Les obligations réelles sont les seuls outils alternatifs à l’acquisition foncière permettant de garantir une pérennité des mesures dans le temps et une stabilité dans l’espace, indispensables à la protection de la biodiversité. Le contrat de droit commun et le bail rural cités ne le permettent pas. De plus, les obligations réelles ne se limitent pas aux pratiques agricoles, et les autres cas de figure, la protection d’un espace naturel non exploité par exemple, ne sont pas couverts par l’existence d’autres contrats.

La durée de l’obligation réelle doit être spécifiée. Il peut y avoir des clauses de révision ou de rupture, comme dans tout contrat. Il est possible de prévoir une rémunération du propriétaire et, le cas échéant, du bailleur, sans que ce soit systématique. De telles indemnisations sont à évaluer en fonction des obligations et dans le respect du cadre juridique existant.

Voilà pourquoi je défends cet article, et je suis contre cet amendement.

M. Philippe Plisson. Je suis tout à fait d’accord avec Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d’État.

M. Yves Nicolin. Si je vous comprends bien, le propriétaire, sans l’accord d’un éventuel locataire ou fermier, peut imposer…

Mme la secrétaire d’État. Non. Je viens de dire le contraire.

M. Yves Nicolin. Donc, il faut l’accord du locataire et du fermier.

Mme la secrétaire d’État. Absolument.

M. Yves Nicolin. Ensuite, cette obligation peut avoir une limite dans le temps, fixée dans le cadre du contrat ?

Mme la secrétaire d’État. C’est le principe du contrat.

M. Gérard Menuel. Ce sont des généralités. Dans la pratique, les cas particuliers sont nombreux. En cas de coupe d’herbe, par exemple, un exploitant agricole peut louer annuellement à un propriétaire une coupe d’herbe sans qu’il se soit engagé par un bail écrit.

Mme Catherine Quéré. S’il y a un versement d’argent, cela vaut bail. Mais il peut ne pas y avoir versement d’argent.

La Commission rejette l’amendement CD294.

Elle discute ensuite de l’amendement CD40 (2e rectification) de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l’article 33 telle qu’elle a été adoptée par l’Assemblée nationale. Il tend, de même, à rétablir des dispositions qui ont été supprimées à l’alinéa 8 de l’article 33 A en précisant que les obligations réelles environnementales peuvent être utilisées à des fins de compensation – mais pas obligatoirement.

Toutes les modifications apportées par le Sénat alourdissent le formalisme contractuel et rendent les contrats extrêmement difficiles à conclure, ce qui peut faire échec à la mise en œuvre des obligations réelles environnementales. Je souhaite laisser aux parties la liberté de conclure le contrat qui leur semble approprié – les parties doivent donner leur consentement et elles peuvent avoir recours au guide de bonnes pratiques qui sera publié par le Gouvernement et qui prendra en compte nos différentes préoccupations.

Mme la secrétaire d’État. La rédaction proposée par l’amendement permet de ne pas alourdir le formalisme contractuel dont les dispositions sont déjà prévues par la réglementation, notamment dans le code civil. J’y suis donc favorable.

Toutefois, je remarque que s’agissant d’une réécriture de l’article, elle risque de faire tomber les amendements suivants. Or je trouve que l’amendement CD548 de Mme Laurence Abeille est intéressant, parce qu’il tend à faire en sorte que les obligations réelles environnementales s’appliquent dans les espaces urbains. Pourrait-on rectifier en ce sens l’amendement de Mme la rapporteure ?

Mme la rapporteure. C’est probablement une erreur de ma part. Une obligation réelle environnementale peut s’appliquer partout, dans un espace urbain, un jardin, à la campagne, en forêt. Il faut modifier la rédaction de mon amendement, pour répondre à la préoccupation exprimée par Mme Laurence Abeille, que je partage.

Mme Laurence Abeille. J’aurais souhaité que la nouvelle rédaction proposée par Mme la rapporteure ne fasse pas tomber mon amendement ! Néanmoins, je suis d’accord avec la rectification proposée par Mme la secrétaire d’État et pour faire en sorte que tous les espaces, ruraux, urbains et péri-urbains, puissent être concernés.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La rectification consistera à supprimer les mots « dans un espace naturel, agricole ou forestier », et l’amendement deviendra ainsi l’amendement CD40 troisième rectification.

M. Jean-Yves Caullet. La rédaction a le mérite de la limpidité. Elle est cohérente, dès lors que l’on enlève la caractérisation des espaces. Je m’interroge cependant sur certains droits des tiers qui peuvent s’exercer sur les propriétés en dehors de tout bail, tel un droit de passage. On comprend très bien qu’en l’existence d’un bail, le propriétaire demande l’avis d’un preneur. Mais en ville, si un propriétaire veut empêcher que son jardin soit désormais emprunté par une personne qui détient un droit de passage pour accéder à son garage, il est logique qu’il consulte le détenteur, car c’est un droit réel qui s’applique sur la propriété.

Certes, la rédaction du Sénat est un peu lourde, mais préciser qu’il faut l’accord écrit du preneur « et des autres détenteurs de droits » me paraît constituer une sage précaution. En matière de chasse – ou de pêche –, la chasse est tantôt privative, et il y a un bail, tantôt elle est en association communale, donc sans bail à proprement parler. D’où l’importance, pour éviter les blocages, de mentionner les autres détenteurs de droits – droit de passage, droit d’accès à des sources ou autres.

M. Jean-Marie Sermier. La rédaction du Sénat est peut-être lourde, mais elle a l’avantage d’être précise. S’agissant d’un contrat dont bailleurs et preneurs choisiront la durée, mais pour lequel il n’y a plus de durée maximale, on peut imaginer que certains droits ne seront plus respectés. M. Jean-Yves Caullet vient de parler des droits de chasse et des droits de pêche ; ce pourrait être aussi des droits de passage pour l’exploitation d’énergies renouvelables, pour des lignes à haute tension ou autres. Je pense donc qu’il faut conserver l’alinéa 6 écrit par les sénateurs.

Ensuite, l’amendement CD212 de M. Martial Saddier tomberait aussi alors qu’il est également important. Il a pour objet de permettre aux propriétaires de se préserver des dommages aux cultures et des risques sanitaires susceptibles d’être causés par des espèces qui viendraient naturellement à se densifier, des sangliers par exemple.

Donc, même si votre rédaction peut paraître plus limpide, elle est moins précise, et elle ne me semble pas être la meilleure.

M. Philippe Plisson. À entendre Jean-Marie Sermier et Jean-Yves Caullet, la rédaction du Sénat apportait des garanties, non seulement pour l’environnement, mais aussi pour les détenteurs de droits et d’usages. La modification de l’article 33 me semble constituer une régression par rapport aux obligations environnementales et d’usage. Il faut donc conserver la version actuelle.

M. Michel Heinrich. Pourrait-on sous-amender l’amendement de Mme la rapporteure en rétablissant « autres détenteurs des droits et d’usages » ?

Mme la rapporteure. Nos débats pourraient durer extrêmement longtemps. Je vous propose plutôt de voter l’amendement de rétablissement et de travailler, d’ici à la séance publique, sur une meilleure rédaction, plus claire et susceptible d’apporter certaines garanties. Sinon, on n’en sortira jamais. Il y a toujours de bonnes raisons pour éviter de s’engager en faveur de la biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. Il me semble qu’il faut faire très attention à ces questions de servitudes. Si l’on suit vos propositions, quiconque utilise une servitude de marchepied, c’est-à-dire un promeneur, pourra exiger d’être informé sous peine de nullité. Autrement dit, on peut tout bloquer. En revanche, il me paraît tout à fait normal que les autres détenteurs de droits et d’usages soient informés de cette mesure.

La proposition de la rapporteure me paraît constituer une bonne base. Dans l’idéal, j’aurais aimé que l’on intègre également à son amendement celui de M. Jean Launay. Cela aurait résolu notre problème et nous aurait permis d’avancer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous propose d’adopter l’amendement CD40, troisième rectification, en supprimant, sur proposition de Mme Laurence Abeille, les mots « dans un espace naturel, agricole ou forestier ». Pour ce qui est des autres suggestions, qui reprennent en particulier la rédaction de l’alinéa 6 de l’article 33, je vous suggère d’y travailler en vue du débat en séance publique.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

En conséquence, l’article 33 est ainsi rédigé et l’amendement CD548 de Mme Laurence Abeille, les amendements identiques CD212 de M. Martial Saddier et CD292 de M. Dino Cinieri, les amendements CD582 de M. Bertrand Pancher et CD293 de M. Dino Cinieri, les amendements CD32 et CD31 de la rapporteure, les amendements identiques CD72 de M. Jean-Marie Sermier, CD111 de Mme Sophie Rohfritsch, CD222 de M. Martial Saddier, CD324 de M. Dino Cinieri, CD376 de M. Julien Aubert, CD791 de M. Gérard Menuel, CD853 de M. Stéphane Demilly, CD865 de M. Jean-Louis Bricout et CD974 de Mme Valérie Lacroute, l’amendement CD61 de M. Guillaume Chevrollier, les amendements identiques CD33 de la rapporteure et CD770 de M. Jacques Krabal, les amendements CD500 de M. Éric Alauzet, CD877 de M. Jean Launay et CD34 de la rapporteure tombent.

La Commission adopte l’article ainsi modifié.

Article 33 bis
Rapport sur les moyens de renforcer l’attractivité des obligations réelles environnementales

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées à l’Assemblée nationale

Cet article, adopté à l’assemblée suite à un amendement de votre rapporteure, prévoit que dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur les bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur les moyens de renforcer l’attractivité, notamment au moyen de dispositifs fiscaux incitatifs, du mécanisme d’obligations réelles environnementales.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Jugeant la remise de ce rapport inutile, le Sénat a supprimé cet article.

3. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

La commission n’a pas rétabli cet article.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article 33 bis.

Articles 33 ter
Rapport sur la mise en œuvre du mécanisme des obligations réelles environnementales

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées à l’Assemblée nationale

Cet article, adopté à l’Assemblée suite à un amendement de votre rapporteure, prévoit que dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement dépose sur les bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur la mise en œuvre du mécanisme d’obligations réelles environnementales.

2. Les modifications adoptées par le Sénat

Jugeant la remise de ce rapport inutile, le Sénat a supprimé cet article.

3. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

La commission n’a pas rétabli cet article.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article 33 ter.

Section 2
Zones prioritaires pour la biodiversité

Article 34
(article L. 411-1 du code de l’environnement)

Création de zones prioritaires pour la biodiversité

(suppression maintenue)

L’objet de cet article est de permettre à l’autorité administrative de définir un zonage spécifique, assorti d’un programme d’actions et, le cas échéant, d’obligations en matière de pratiques agricoles afin de protéger l’habitat d’espèces protégées.

Lorsque l’habitat de certaines espèces évolue de manière défavorable au point de mettre en péril le maintien d’une de ses populations, l’autorité administrative peut :

– délimiter des zones où il est nécessaire de maintenir ou de restaurer ces habitats ;

– établir un programme d’actions visant à restaurer, préserver, gérer et mettre en valeur de façon durable ces zones ;

– décider, à l’expiration d’un certain délai de rendre obligatoire certaines pratiques agricoles favorables à l’espèce concernée.

Les pratiques agricoles rendues obligatoires peuvent faire l’objet d’aides lorsqu’elles induisent des surcoûts ou des pertes de revenus. Le programme d’actions est établi en concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements et les représentants des propriétaires et des exploitants des terrains.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté cet article complété par des amendements de précision rédactionnelle et de cohérence.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a considéré que le dispositif proposé par l’article 34 concernait potentiellement toute espèce protégée mais visait particulièrement le grand hamster d’Alsace : il s’agit d’une espèce qui a connu une diminution de sa population depuis une vingtaine d’années, en raison, notamment, du développement de la culture du maïs en Alsace.

Or, un plan national d’actions a été mis en œuvre à partir de 2012. Il est concentré sur un périmètre de 9 000 hectares au sein duquel des mesures agricoles individuelles et collectives favorables au développement du hamster sont mises en œuvre. Ces mesures témoignent, selon le Sénat, d’une prise en charge par les agriculteurs eux-mêmes de la sauvegarde du hamster sur leur territoire.

Les résultats de cette politique sont pourtant fluctuants puisque, après une hausse constatée de 37 % du nombre de terriers entre 2013 et 2014, une baisse de 49 % a été enregistrée au printemps 2015.

Dans ce contexte, le Sénat a considéré que l’article 34 pouvait être perçu comme une « provocation » à l’égard des agriculteurs locaux engagés dans des démarches collectives. Le Rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable s’est donc déclaré davantage favorable à une solution élaborée conjointement avec les agriculteurs et les autres parties prenantes, un dispositif conventionnel, plutôt qu’à une disposition législative. Il a donc donné un avis favorable aux différents amendements de suppression que le Sénat a adoptés.

3. La position de votre commission

Rejoignant la position du Sénat, votre commission n’a pas souhaité rétablir l’article malgré l’avis contraire de votre rapporteure.

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* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD164 de la rapporteure et CD501 de Mme Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. L’objet de cet amendement est de rétablir, sans le modifier, un article que le Sénat a supprimé au motif erroné que cette mesure concernerait essentiellement le grand hamster d’Alsace dont la protection serait efficacement assurée par des actions locales. Or, cet article ne concerne évidemment pas que cet animal dont la population continue d’ailleurs de diminuer, mais toute une catégorie d’espèces dont l’habitat est menacé. Il me semble équilibré : le programme d’action qu’il prévoit étant établi en coordination avec les exploitants locaux, il n’apporte pas de contraintes supplémentaires. C’est précisément ainsi qu’on peut réussir à faire avancer la biodiversité.

Mme la secrétaire d’État. L’article 34 crée des zones prioritaires pour la biodiversité afin de restaurer des espèces menacées de disparition, telles que le hamster commun d’Alsace. Les débats au Sénat ont mis en évidence les craintes suscitées par cet instrument. Si la situation des espèces les plus menacées appelle des mesures fortes, elle requiert en même temps l’acceptation de ceux qui les mettent en œuvre. Le Gouvernement a compris que des dispositions réglementaires volontaristes pouvaient être considérées, notamment dans le cas présent, comme excessives et finalement contre-productives. En outre, s’agissant du hamster commun pour lequel cette disposition avait été spécialement créée, la mobilisation des Alsaciens, en particulier des agriculteurs et des élus, a permis d’enregistrer des résultats encourageants pour l’objectif de conservation de l’espèce. Il faut poursuivre cette stratégie fondée sur la responsabilisation des acteurs du territoire et leur mobilisation collective. Dans cette logique, le rétablissement de l’article 34 ne semble pas nécessaire. Je propose le retrait de ces amendements.

Mme Laurence Abeille. Je suis surprise de votre réticence. On a besoin de ce dispositif pour disposer d’un panel large et efficace de mesures en matière de protection et de reconquête de la biodiversité. Des aides sont prévues pour le cas où des pratiques agricoles rendues obligatoires induisent des surcoûts ou des pertes de revenus. Le dispositif proposé, qui répond à un souci plus large que le seul cas du hamster, me semble bien construit. Je regrette qu’on l’abandonne.

M. Julien Aubert. Je m’interroge sur la portée de cet amendement qui vise à rétablir des zones prioritaires pour la biodiversité. Toute une série de zonages découlant du cadre européen existent déjà et permettent de protéger l’environnement. À force de les multiplier, on finira par rendre illisible la politique de protection de la faune et de la flore. Je pense donc que la ministre a raison : au-delà du cas du hamster d’Alsace, que je connais peu, cet article me semble redondant avec les mécanismes de protection déjà existants.

M. Yves Nicolin. Les indemnités, qui doivent être demandées à un tribunal, sont difficiles à obtenir, alors que les mesures proposées imposeraient des contraintes qui pourraient avoir de lourds impacts sur l’économie agricole. Cet article ferait donc prendre un risque important à toute une catégorie socioprofessionnelle. Je rejoins l’avis de la secrétaire d’État.

M. Jean-Marie Sermier. L’analyse du cas du hamster d’Alsace a conduit le Sénat à supprimer cet article, car elle a montré que les politiques traditionnelles ont permis de maintenir une espèce alors que l’outil ici proposé n’existait pas. Il n’y a donc aucun besoin d’ajouter cet instrument supplémentaire.

Mme la rapporteure. Le Sénat a supprimé cet article parce que les agriculteurs ont demandé de ne pas leur ajouter de contraintes en cette période difficile. Je veux bien retirer l’amendement puisqu’on dispose d’autres outils, mais je pense qu’on se prive là d’un moyen de protéger l’habitat de certaines espèces, en accord avec les exploitants et les habitants d’un territoire. L’intérêt de cet instrument justifierait de rétablir la rédaction de l’Assemblée nationale.

Mme Viviane Le Dissez. Il est important de pouvoir délimiter des secteurs pour protéger une espèce. Comme il s’agit de procéder par décret, il y aura forcément des discussions et des rencontres avec différents partenaires sur le territoire. Nous devrions au moins introduire cette possibilité dans le code, quitte à ne pas l’appliquer systématiquement.

M. Jean-Yves Caullet. Le troisième alinéa rendant des pratiques obligatoires, il faudrait en imaginer un contrôle ; or il n’est pas évident de constituer des corps de fonctionnaires pour exercer un tel contrôle. Tout le reste est affaire d’accord et de volonté politique des collectivités. Menons donc les actions sans pour autant les rendre obligatoires, donc rébarbatives. L’avis de la secrétaire d’État me semble plein de sagesse : nous sommes d’accord sur l’objectif, mais rendre l’outil contraignant serait contre-productif.

Mme la rapporteure. Sans cet outil, le grand hamster aurait peut-être déjà disparu depuis longtemps ! Les contraintes dont il est question ne sont pas sans contrepartie puisque les exploitants ont la possibilité de bénéficier d’aides financières qui en limitent l’impact. On ne peut pas, d’un côté, souhaiter sauver des espèces en voie de disparition et, de l’autre, se priver d’outils qui peuvent servir à les protéger !

La Commission rejette les amendements.

En conséquence, la suppression de l’article 34 est maintenue.

Section 3
Assolement en commun

La section 3 modifie le code rural et de la pêche maritime pour introduire une dimension environnementale dans un outil ayant, à l’origine, pour finalité principale l’augmentation de la production agricole – à savoir, l’assolement en commun.

Article 35
(article L. 411-39-1 du code rural et de la pêche maritime)

Finalité environnementale des assolements en commun

Cet article vise à faire de la finalité environnementale l’une des justifications possibles à la mise en œuvre de pratiques d’assolement en commun. Il propose d’ajouter au premier alinéa de l’article L. 411-39-1 du code rural et de la pêche maritime une disposition aux termes de laquelle la finalité d’un assolement en commun pourra notamment être « la préservation de la qualité de l’eau ou la protection de la biodiversité ».

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Non amendé en commission, l’article 35 a été modifié en séance publique, par l’adoption d’un amendement proposé par les députés Jean-Yves Caullet et Philippe Baumel dans le but de prévoir qu’au-delà de son objectif initial, un assolement en commun peut aussi avoir d’autres finalités, notamment la préservation de la qualité de l’eau ou la protection de la biodiversité.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté un amendement déposé par Mme Sophie Primas au nom de la commission des affaires économique, dans l’optique de préciser que l’objectif initial de l’assolement en commun est économique ou social. En réaffirmant l’objet de l’assolement en commun, tout en laissant ouverte la possibilité de poursuivre une finalité environnementale complémentaire, cette précision permet, selon le Sénat, de répondre aux inquiétudes exprimées sur l’évolution de cet outil agricole.

3. La position de votre commission

Conformément à la demande de votre rapporteure, cet article a été adopté sans modification.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD295 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. L’introduction de la notion de finalité d’un assolement en commun, notamment pour la préservation de la qualité de l’eau ou de la protection de la biodiversité, complexifie la mise en œuvre de cet article par les agriculteurs. Elle ne répond à aucune difficulté d’application, aucun contentieux en cours n’étant recensé à ce jour dans ce domaine. Afin d’éviter d’introduire des lourdeurs inutiles dans le code rural, il est nécessaire de la supprimer.

Mme la rapporteure. Défavorable. L’article 35 fait de la finalité environnementale l’une des justifications possibles à la mise en œuvre de pratiques d’assolement en commun. Le Sénat a précisé que l’objectif initial de l’assolement en commun était aussi économique ou social. Cet article répond donc aux inquiétudes exprimées sur l’évolution de cet outil agricole. Il n’y a aucune raison de le supprimer.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 35 sans modification.

Section 3 bis
Protection des chemins ruraux

Le Sénat a adopté, en séance publique, quatre amendements de MM. Henri Tandonnet, Daniel Dubois et des membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants – UC. Ces amendements créent une section 3 bis composée de quatre articles nouveaux dont l’objet est de protéger les chemins ruraux. Ils reprennent la proposition de loi du sénateur Henri Tandonnet visant à renforcer la protection des chemins ruraux, adoptée en séance, au Sénat, le 12 mars 2015.

Article 35 bis
(article L. 161-6-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime)

Recensement communal des chemins ruraux

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article nouveau, adopté en séance publique au Sénat, introduit un nouvel article L. 161-6-1 dans le code rural et de la pêche maritime qui vise à inciter les communes à procéder au recensement de leurs chemins ruraux en conférant à cette démarche un effet interruptif de la prescription acquisitive.

Le dispositif proposé s’inspire des dispositions du code civil relatives à l’interruption de la prescription du fait de l’introduction d’une demande en justice (articles 2241, 2242 et 2243 du code civil).

La décision de procéder au recensement des chemins ruraux serait prise par délibération du conseil municipal et aurait pour effet d’interrompre la prescription, c’est-à-dire d’effacer le délai de prescription acquis et de faire courir un nouveau délai de même durée que l’ancien (article 2231 du code civil).

Ce nouveau délai ne courrait qu’à compter de la délibération marquant la fin des opérations de recensement en arrêtant le tableau récapitulatif des chemins ruraux. Le texte limite cette interruption de façon à ce que la première délibération soit effectivement suivie d’une action de la commune, afin d’éviter que cette procédure ne soit utilisée à des fins dilatoires.

Ce délai serait de deux ans car il est prévu, eu égard aux effets juridiques du recensement, d’encadrer celui-ci du formalisme d’une enquête publique, de manière à s’assurer du caractère public des opérations. L’enquête permettrait de purger dès ce stade certaines difficultés qui pourraient apparaître en termes de propriété des parcelles.

À l’issue des opérations de recensement, la commune dresserait le tableau récapitulatif de ses chemins ruraux. Les chemins n’ayant pas été retenus dans cet inventaire échapperaient a posteriori à l’interruption de la prescription et pourraient donc être prescrits, avec le consentement implicite de la commune, dans les délais légaux, sans que les propriétaires aient eu à souffrir d’un quelconque retard.

Cette dérogation au droit commun de la prescription acquisitive, limitée aux seuls chemins ruraux, est justifiée, selon le Sénat, par leur vocation de voie de circulation. Aussi ne pourrait-elle pas être étendue aux autres biens du domaine privé des communes.

2. La position de votre commission

Les articles nouveaux 35 bis à 35 quinquies reprennent la proposition de loi du sénateur Henri Tandonnet visant à renforcer la protection des chemins ruraux, adoptée à l’unanimité, en séance, au Sénat, le 12 mars 2015 avec un avis favorable du Gouvernement et déposée à l’Assemblée nationale sous le numéro 2655.

En première analyse – c’était également la réaction initiale du Gouvernement lors de l’examen du présent projet de loi au Sénat – il apparaît inutile d’inscrire dans un texte de loi des dispositions déjà adoptées par ailleurs, d’autant qu’en l’espèce elles s’éloignent du cœur de la thématique du présent projet.

Toutefois, reconnaissant que les dispositions proposées étaient pertinentes et regrettant que l’ordre du jour chargé de l’Assemblée nationale ne permette pas l’inscription de la proposition de loi 2655, le Gouvernement a fini par s’en remettre à la sagesse du Sénat, ce qui a permis l’intégration dans le présent projet de loi de ces quatre articles indissociables.

Votre commission a adopté l’article 35 bis, après avoir substitué au mot « recensement » le mot « inventaire ».

*

* *

La Commission aborde l’amendement CD866 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Les chemins ruraux concentrent des intérêts souvent divergents, notamment parce qu’ils peuvent avoir plusieurs fonctions : agricole, économique et touristique. Il est donc nécessaire de mettre en place une commission de concertation réunissant l’ensemble des acteurs concernés, au-delà du seul maire et des élus, afin de dresser un inventaire, limité dans le temps, qui indiquera les chemins ayant intérêt à exister, ceux qui doivent être aliénés ou, au contraire, restaurés après avoir été aliénés sauvagement.

Mme la rapporteure. Avis défavorable

Mme la secrétaire d’État. Défavorable. Cette procédure serait plus contraignante pour les communes sans pour autant garantir le respect des enjeux portés dans le cadre des politiques publiques de l’État.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD538 de M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert. Les chemins ruraux sont essentiels dans la structuration de nos territoires dont ils garantissent les équilibres. Aussi ne peut-on pas se contenter de la rédaction qui laisse aux conseils municipaux une variable d’appréciation quant à leur recensement. En ajoutant les mots « doit » et « exhaustif », nous précisons la nécessité de cet inventaire.

Mme la rapporteure. Cet amendement modifie profondément la nature des dispositions relatives aux schémas ruraux puisqu’il s’agit de rendre le recensement – ou l’inventaire – obligatoire, faisant peser des contraintes supplémentaires sur les communes. Mieux vaut en rester à une simple possibilité. En outre, la formulation de l’amendement n’est pas vraiment correcte du point de vue juridique. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Je comprends vos préoccupations, mais cette disposition imposerait une procédure même dans le cas où les communes n’en ressentent pas le besoin. Ajoutant une nouvelle charge aux collectivités, elle aurait un impact sur leur fonctionnement. Cela dit, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. Julien Aubert. La formulation proposée est étrange : si l’on dit que les communes doivent, par délibération, décider le recensement, c’est qu’on les oblige à délibérer dans un seul sens. La délibération représente une pure perte de temps dès lors que la loi a préalablement décidé quelle devait en être l’issue. N’habillons pas une obligation d’une forme de démocratie. Cet amendement me semble contradictoire avec le principe de la libre administration des collectivités territoriales et donc anticonstitutionnel.

M. François-Michel Lambert. Pour être honnête, la rédaction de l’amendement est en effet bancale. Restant convaincus sur le fond, nous le retirons pour trouver une formulation qui respectera les règles de droit.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements identiques CD223 de M. Martial Saddier, CD325 de M. Dino Cinieri, CD584 de M. Bertrand Pancher et CD792 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Jean-Marie Sermier. L’amendement CD223 a pour objet de rendre le texte de l’article 35 bis cohérent avec le droit et la pratique en matière de chemins ruraux. En effet, le droit précise que les communes effectuent un inventaire et non un recensement. Employer deux mots pour désigner la même chose risque d’engendrer de la confusion dans les obligations des communes.

M. Yves Nicolin. C’est une question de cohérence grammaticale.

M. Gérard Menuel. Même si les mots ont la même signification, une commune effectue bien un inventaire et non un recensement.

M. Yannick Favennec. Pour éviter toute confusion, il est préférable d’utiliser le même terme pour une même procédure.

Mme la rapporteure. Je ne vois pas d’inconvénient à remplacer « recensement » par « inventaire », mais il faudra alors effectuer une harmonisation plus loin.

Mme la secrétaire d’État. Favorable.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle étudie les amendements identiques CD62 de M. Guillaume Chevrollier, CD224 de M. Martial Saddier, CD326 de M. Dino Cinieri et CD793 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Guillaume Chevrollier. Cet amendement vise à encadrer la protection des chemins ruraux en limitant le recensement aux chemins qui permettent de réaliser un circuit de randonnée. Il faut éviter aux randonneurs de s’engager dans des chemins qui ne mènent qu’aux exploitations, qui les conduisent à faire demi-tour, à entrer dans des propriétés privées ou à traverser les champs. Le but du recensement doit être de faciliter les randonnées et non de gêner les exploitants, qui n’en ont pas besoin en cette période de contraintes.

M. Jean-Marie Sermier. Dans les plans départementaux des itinéraires de promenade et de randonnée, il est indispensable de retenir, uniquement les chemins ruraux qui permettent aux randonneurs de réaliser un circuit.

M. Gérard Menuel. C’est en effet indispensable. À l’entrée d’un chemin, rien n’indique s’il est privé ou non ; or très souvent des chemins dits ruraux appartiennent aux associations foncières qui en ont la responsabilité de l’entretien. En cas d’accident sur un chemin privé, le propriétaire peut être responsable. Le plan départemental ne doit recenser que les véritables chemins ruraux.

Mme Laurence Abeille. Les chemins ruraux servent aussi à se rendre d’un endroit à un autre – des enfants peuvent ainsi les emprunter pour aller à l’école –, et non uniquement à se promener pour le plaisir. Par conséquent, le mot « randonnée », qui implique une activité de loisir, me gêne.

M. François-Michel Lambert. Ceux qui portent ce type d’amendements n’ont pas compris l’esprit de l’article. Recenser les chemins ruraux sert à avoir une meilleure connaissance de notre territoire. On ne va pas se limiter à recenser uniquement les routes où peuvent passer des voitures alors que des vélos ou d’autres moyens de transport peuvent également les emprunter ! Certains chemins peuvent être qualifiés spécialement comme ouverts à la randonnée ; d’autres, qualifiés pour d’autres usages. Il faut retirer cet amendement qui dessert nos communes.

M. Jean-Louis Bricout. On voit bien la divergence d’intérêts entre les randonneurs, les agriculteurs qui ont besoin de chemins pour l’accès aux champs, et les communes qui en ont besoin pour contourner les petites villes et éviter le passage d’engins agricoles – un enjeu important dans le contexte de requalification urbaine. Je souhaite donc que l’on crée une instance de concertation pour arbitrer ces choix. Certains chemins, aliénés sauvagement et retournés par les agriculteurs, mériteraient d’être restaurés ; d’autres devraient être aliénés, par exemple lorsqu’ils ne servent qu’à accéder à une exploitation. Je reviendrai en séance sur l’amendement que j’ai proposé.

M. Guy Bailliart. Je suis gêné par ces amendements. Pourquoi, dans ce cas, ne pas faire le décompte des culs-de-sac ? L’argument selon lequel un accident est ennuyeux pour le propriétaire du chemin devrait nous amener à dégager la responsabilité du propriétaire et non à supprimer l’accès à la nature et à la terre. De plus, l’intérêt pour la randonnée n’exclut en rien la possibilité de faire un aller-retour. Retirer un chemin du recensement supprime une possibilité d’utilisation. En Grande-Bretagne, par exemple, le right of way, vieux de plusieurs siècles, n’a pas forcément à voir avec la randonnée. Pourquoi abolir le droit d’accès en France alors qu’il existe dans de nombreux autres pays ?

Plusieurs députés. Très bien !

M. Gérard Menuel. Les itinéraires des plans départementaux doivent être basés sur des chemins qui appartiennent aux collectivités, sinon tous les chemins privés seront barrés par des panneaux « Interdit d’entrer ».

Mme la rapporteure. Le but de tout inventaire est de favoriser la connaissance et non de gêner les exploitants agricoles. Dans certaines communes, il existe des chemins mal balisés qui conduisent quelquefois à des cours de fermes ; mais les agriculteurs ne font pas partir les promeneurs à coups de fourche ! Il faut mieux baliser et rendre les cartes plus précises, mais limiter l’inventaire ne changera rien au problème. De plus, qui définira les chemins comme chemins de randonnée, et sur quels critères ? Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable. Le recensement des chemins ruraux n’a pas pour seul objectif d’assurer le bon fonctionnement des randonnées. Il doit également permettre de procéder à un réaménagement du parcellaire agricole en vue de l’adapter aux nouvelles pratiques sans passer par un remembrement, et de favoriser le dialogue pour éviter les conflits d’usage.

M. Gérard Menuel. Il faudra alors définir ce qu’est un chemin rural ! Beaucoup de chemins ruraux, dans beaucoup de départements, sont entièrement privés. Voulez-vous créer des itinéraires sur des chemins privés ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ce n’est pas ce que propose l’article.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques CD63 de M. Guillaume Chevrollier, CD225 de M. Martial Saddier, CD327 de M. Dino Cinieri, CD585 de M. Bertrand Pancher, CD794 de M. Gérard Menuel et CD982 de Mme Valérie Lacroute.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements étant défendus, je vous propose qu’un seul représentant par groupe s’exprime.

M. Guillaume Chevrollier. La consultation de la profession agricole est nécessaire pour le recensement des chemins ruraux, car les agriculteurs, acteurs de terrain incontournables de notre ruralité et de notre biodiversité, sont directement concernés et sont à même de fournir des indications précieuses pour qualifier ces chemins.

M. Yannick Favennec. La protection des chemins ruraux doit, en effet, se faire en bonne entente avec les agriculteurs dont ils desservent souvent les exploitations. Nous proposons donc de les associer à la réalisation de l’inventaire.

Mme la rapporteure. Je ne vois pas comment, en pratique, un maire peut procéder à l’inventaire des chemins ruraux sans les agriculteurs. Il me semble donc que cet amendement alourdit inutilement le texte. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Cette disposition facilitera l’inventaire, donc le Gouvernement y est favorable.

Mme Viviane Le Dissez. Maire, j’ai déjà procédé au recensement des chemins ruraux dans ma commune et nous avions naturellement associé à nos travaux les agriculteurs et les associations de marcheurs. Je suis donc de l’avis de la rapporteure. Cet amendement est inutile et pourrait de surcroît faire penser à ceux qui ne sont pas mentionnés qu’ils ont été oubliés.

M. Julien Aubert. Pour ma part, je pense que cet amendement est utile. Il est de plus en plus difficile d’intégrer des agriculteurs dans les conseils municipaux des villages, car ils sont de moins en moins nombreux et ils sont très occupés. Il est donc utile de préciser que les représentants des professions agricoles seront associés au recensement, afin d’éviter des incompréhensions ultérieures. Et si les marcheurs devaient se sentir oubliés, rien n’interdit de voter un amendement les concernant.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 35 bis ainsi modifié.

Article 35 ter
Suspension du délai de prescription

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article vise à suspendre le délai de prescription pour l’acquisition d’une parcelle comportant un chemin rural à compter de la publication de la présente loi, afin de permettre aux communes de procéder à un inventaire de leurs chemins ruraux. Cette suspension vaudrait pour l’ensemble de ces chemins.

Ce délai devrait être mis à profit par les communes pour se saisir de la question du devenir de leurs chemins ruraux, de leur propre chef ou à l’instigation du secteur associatif.

Le rapporteur de la proposition de loi initiale, Yves Détraigne, avait, dans un premier temps, proposé une suspension d’une durée de cinq ans correspondant à la moitié du délai de prescription acquisitive abrégée de dix ans, afin de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété des particuliers sur le point d’acquérir par prescription au regard de l’intérêt général de préservation du patrimoine, fût-il privé, des communes. La commission a rectifié cet amendement pour réduire la durée de la suspension à deux ans.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement rédactionnel déposé par votre rapporteure.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD106 de Mme Sophie Rohfritsch, CD226 de M. Martial Saddier, CD328 de M. Dino Cinieri et CD795 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Gérard Menuel. Les dispositions de l’article 35 ter encourent un fort risque d’inconstitutionnalité pour cause d’atteinte au droit de propriété.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. C’est le principe de prescription qui pourrait poser problème et non la durée. Or nous venons d’acter ce principe dans l’article précédent.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD165 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 35 ter ainsi modifié.

Article 35 quater
(article L. 161-10-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques)

Modification d’assiette et continuité d’un chemin rural

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article vise à permettre l’échange de terrains comportant des chemins ruraux qu’une interprétation littérale par le Conseil d’État des dispositions du code rural et de la pêche maritime prohibe actuellement.

Pour surmonter la jurisprudence du Conseil d’État, le dispositif proposé par la proposition de loi dans sa version initiale alignait la procédure d’échange sur celle de la vente des chemins ruraux, ce qui supposait la désaffectation préalable des chemins.

Constatant que l’intention de l’auteur de la proposition de loi était de permettre l’échange de chemins ruraux pour permettre d’en modifier le tracé, le Sénat s’est interrogé sur l’opportunité d’en exiger la désaffectation préalable.

C’est pourquoi, s’inspirant de l’article L. 3112-3 du code général de la propriété des personnes publiques qui permet l’échange de biens du domaine public sans désaffectation préalable, la commission des lois du Sénat, saisie au fond sur la proposition de loi d’origine, a proposé d’insérer dans le code rural et de la pêche maritime un nouvel article L. 161-10-2 prévoyant que lorsque l’échange a pour objet la rectification de l’assiette d’un chemin rural, il est procédé selon les conditions prévues aux articles L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales et L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques. Toutefois, l’acte d’échange doit comporter des clauses permettant de préserver la continuité du chemin rural.

Cette procédure d’échange étant spécifique aux chemins ruraux, cet article complète en outre l’article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques relatif à l’échange des immeubles des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics, par un alinéa n’autorisant l’échange de chemins ruraux que dans les conditions prévues au nouvel article L. 161-10-2 du code rural et de la pêche maritime.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté les trois modifications suivantes :

– un amendement rédactionnel déposé par votre rapporteure ;

– un amendement remplaçant la notion d’« assiette » par celles de « tracé et emprise », jugées plus précises ;

– un amendement supprimant l’obligation d’assurer la continuité du chemin rural dans un éventuel acte d’échange. En effet, les commissaires ont jugé que la législation actuelle garantissant la continuité des chemins de randonnée était suffisante.

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* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD166 de la rapporteure.

Elle est saisie des amendements identiques CD227 de M. Martial Saddier, CD329 de M. Dino Cinieri et CD796 de M. Gérard Menuel.

M. Jean-Marie Sermier. Ces amendements précisent que l’article 35 quater ne porte que sur les échanges de parcelles ayant pour objet la modification du tracé ou de l’emprise d’un chemin, dès lors que cet acte d’échange doit contenir une clause de continuité du chemin. En effet, en l’état, le texte risque d’empêcher que les actes d’échange réalisés lors des aménagements fonciers puissent avoir pour objet éventuel la suppression d’un chemin.

Mme la secrétaire d’État. Sagesse.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques CD228 de M. Martial Saddier, CD330 de M. Dino Cinieri et CD797 de M. Gérard Menuel.

M. Dino Cinieri. Une procédure existe déjà pour garantir la continuité des chemins de randonnée. En effet, en cas de suppression d’un chemin inscrit au plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée, l’article L. 121-7 du code rural prévoit qu’une proposition de substitution doit être faite au département.

Mme la secrétaire d’État. Sagesse.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques CD278 de M. Jean-Louis Bricout et CD539 de M. François-Michel Lambert.

M. Jean-Louis Bricout. Il est primordial que le principe d’échange, aussi intéressant soit-il, ne soit pas réalisé au détriment des communes et de leur patrimoine. Les clauses supplémentaires proposées ici permettront de s’en assurer.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

M. Julien Aubert. Je crains que, dans les faits, cela ne bloque certaines procédures d’échange.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En fait, ces amendements tombent puisque la seconde phrase de l’alinéa vient d’être supprimée.

La Commission adopte alors l’article 35 quater ainsi modifié.

Article 35 quinquies
Révision du plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article a pour objet d’inciter les départements à réactualiser le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée, afin de tenir compte du recensement des chemins ruraux mené par les communes, dans la mesure où ces itinéraires utilisent bien souvent les chemins en question.

Le Sénat a considéré que, dès lors que l’on mobilisait les collectivités territoriales sur la question du recensement des chemins ruraux, il semblait nécessaire d’inciter aussi les départements à réviser leur plan des itinéraires de promenade et de randonnée.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans le modifier.

*

* *

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette les amendements identiques de coordination CD229 de M. Martial Saddier et CD798 de M. Gérard Menuel.

Puis elle adopte l’article 35 quinquies sans modification.

Section 4
Aménagement foncier agricole et forestier

Article 36
(article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime)

Finalité environnementale des actions de remembrement parcellaire

(supprimé)

Cet article modifie le code rural et de la pêche maritime afin d’étendre l’aménagement foncier, agricole et forestier à l’environnement, d’une part, et en vue d’y intégrer des finalités hydrologiques ou écologiques, d’autre part.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

La commission du développement durable de l’Assemblée nationale avait adopté, outre quelques modifications rédactionnelles, une disposition prévoyant que l’aménagement foncier devait se faire « en favorisant notamment l’enherbement des cultures et les zones sans pesticides ».

En séance publique, un amendement du député Jean-Yves Caullet a, sur avis favorable du Gouvernement et de votre rapporteure, supprimé cette disposition qui alourdissait inutilement le projet de loi sans apporter d’élément normatif supplémentaire. Ainsi, exception faite de modifications rédactionnelles mineures, l’Assemblée nationale n’a pas modifié le fond de l’article 36.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Pour le Sénat, la rédaction originelle de l’article 36 suggère qu’une finalité environnementale supplémentaire est imposée aux opérations d’aménagement foncier agricole et forestier. L’esprit de cette disposition, en l’état, aurait été perçu comme faisant des enjeux environnementaux un pivot, et non plus une finalité seulement accessoire des opérations de redistribution des parcelles.

Afin de tenir compte des inquiétudes exprimées sur l’évolution de cet outil agricole, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement proposé par le rapporteur. Cette modification établit un lien entre l’aménagement foncier agricole et forestier et le nouveau principe de complémentarité entre environnement, agriculture et sylviculture, inscrit dans le code rural et de la pêche maritime par l’article 2 du présent projet de loi : l’amendement dispose que l’aménagement foncier doit se faire dans le respect du principe de complémentarité. Le Sénat a ainsi souhaité réaffirmer la dimension environnementale existante de l’aménagement foncier agricole et forestier.

3. La position de votre commission

Votre commission a supprimé cet article sans portée normative et qui faisait référence à un article de loi lui-même supprimé lors du début de ses travaux. Conserver l’article 36 aurait donc abouti à créer une incohérence juridique.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CD296 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Les producteurs agricoles et forestiers respectent la réglementation environnementale issue du code de l’environnement et rendent des services environnementaux par l’exercice même de leur activité. Les procédures d’aménagement foncier actuelles s’effectuent dans un cadre qui respecte le droit de l’environnement. La structure et l’organisation de la procédure de remembrement sont articulées autour de l’amélioration de la production agricole, dans le respect des réglementations environnementales. Il ne convient donc pas de créer une nouvelle procédure de remembrement environnemental.

Mme la rapporteure. Avis favorable. L’article fait référence à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime qui a été supprimé ; le conserver aboutirait donc à créer une incohérence juridique.

Mme la secrétaire d’État. Sagesse.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 36 est supprimé et l’amendement CD876 tombe.

Article 36 bis AA
(article L. 121-4 du code de l’urbanisme)

Consultation du Centre national de la propriété forestière

(suppression maintenue)

1. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de ses travaux, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement déposé par Mmes Anne-Catherine Loisier et Annick Billion créant un article additionnel ayant pour but de conférer au Centre national de la propriété forestière (CNPF) le rôle de personne publique associée à l’élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d’urbanisme.

Le CNPF est un établissement public de l’État à caractère administratif, compétent, dans le cadre de la politique forestière définie par les lois et règlements, pour développer, orienter et améliorer la gestion forestière des bois, forêts et terrains privés.

La forêt privée représente plus de 70 % de la forêt en France, qui couvre dans son ensemble près d’un tiers du territoire métropolitain. C’est parce qu’elle a considéré qu’il était important de renforcer la prise en compte des enjeux forestiers dans l’aménagement du territoire que la commission a adopté un amendement qui associe le CNPF à l’élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d’urbanisme, en complétant l’article L. 121-4 du code de l’urbanisme.

Toutefois, en séance publique, le Sénat a adopté un amendement, déposé par MM. Roland Courteau, Marc Daunis et Gérard Miquel, supprimant cet article. En effet, les sénateurs ont considéré que ce nouvel article alourdissait inutilement la procédure d’association à la charge des collectivités, elles-mêmes chargées de l’élaboration des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) et des schémas de cohérence territoriale (SCOT). Cet article, contraire à la volonté de simplification du droit a, en outre, été considéré comme « largement superfétatoire » par le premier signataire de l’amendement. En effet, les délégations régionales du CNPF sont d’ores et déjà obligatoirement consultées en cas de réduction des espaces forestiers, conformément à l’article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime.

Par ailleurs, dans la pratique, ces mêmes délégations régionales sont le plus souvent associées lors des phases de concertation auprès des partenaires, sans qu’il soit nécessaire de complexifier la procédure d’association inscrite dans le code de l’urbanisme.

2. La position de votre commission

En accord avec les arguments développés par le Sénat, votre commission a décidé de ne pas rétablir cet article.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD206 de M. Martial Saddier.

M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement a pour but de faire participer plus largement qu’aujourd’hui à l’élaboration des schémas de cohérence territoriaux et des plans d’occupation d’urbanisme le Centre national de la propriété forestière, dont l’avis n’est requis aujourd’hui qu’en cas de réduction des espaces forestiers. Nous proposons que ces documents lui soient systématiquement soumis.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

En conséquence, la suppression de l’article 36 bis AA est maintenue.

Article 36 bis A
(articles L. 151-23 et L. 421-4 du code de l’urbanisme)

Protection des espaces boisés

Cet article, inséré en séance publique à l’Assemblée nationale, vise à supprimer l’application automatique du régime des espaces boisés classés aux espaces boisés identifiés dans le plan local d’urbanisme.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté un amendement déposé par M. Jean-Marie Sermier et qui a été accepté par le Gouvernement et la commission. Cet amendement, qui crée le présent article, modifie l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a introduit dans le code de l’urbanisme une disposition qui applique automatiquement le régime des espaces boisés classés – les EBC – aux espaces boisés. En conséquence, il est interdit d’y associer toute autre prescription. Il semble indispensable de conserver les deux systèmes de protection des espaces boisés, qui sont complémentaires, et de revenir aux dispositions prévalant avant l’adoption de la loi d’avenir pour l’agriculture.

Cet amendement vise ainsi à rétablir une distinction entre deux outils : l’identification et l’élaboration de prescriptions pour certains espaces boisés identifiés dans le règlement du PLU, et l’application d’un régime juridique intégré et plus protecteur pour les espaces boisés classés par les PLU. Selon l’importance et le rôle écologique des espaces boisés, les collectivités territoriales disposeront ainsi d’outils différents. Pour certains espaces qui sont d’intérêt, sans justifier un classement – bosquets, haies, arbres isolés – les collectivités pourront ainsi moduler les prescriptions selon les besoins locaux.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté cet article sans modification.

En revanche, le Sénat a adopté en séance un amendement de coordination destiné à tenir compte du changement de références de l’article du code de l’urbanisme et qui ne modifie rien sur le fond.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement du Gouvernement qui permet à la fois de conserver la souplesse du dispositif des éléments de paysage identifiés dans les PLU et la dispense de déclaration préalable pour les espaces boisés concernés, dès lors qu’un document de gestion durable s’y applique déjà.

*

* *

La Commission en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements CD1043 du Gouvernement, CD242 de M. Jean-Marie Sermier et CD658 de M. Jean-Yves Caullet.

Mme la secrétaire d’État. L’article 36 bis A supprime une disposition du code de l’urbanisme qui permet aux maires de gérer les espaces boisés, dans le cadre des plans locaux d’urbanisme, selon le seul régime des « espaces boisés classés » et ce, quelle que soit la finalité envisagée : protection pour un motif écologique, pour un motif paysager ou pour une remise en état des continuités écologiques.

L’application du régime des « espaces boisés classés » a été jugée trop contraignante pour les maires concernant les motifs d’intérêt paysager. Cette simplification de gestion dans le code de l’urbanisme avait été introduite par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, promulguée le 13 octobre 2014, dans l’idée de faire bénéficier les exploitants des surfaces forestières concernées d’une dispense de déclaration préalable des coupes ou abattages d’arbres dans les forêts auxquelles s’applique déjà un document de gestion durable.

Le Gouvernement souhaite conserver cette mesure de simplification de procédure. La nouvelle codification du code de l’urbanisme a séparé les dispositions relatives aux effets du classement en « espaces boisés classés » qui figurent désormais à l’article L. 113-2 et celles relatives aux diverses déclarations préalables inscrites à l’article L. 421-4. La nouvelle rédaction de l’article 36 bis A proposée par l’amendement CD1043 permet donc à la fois de conserver la souplesse du dispositif des éléments de paysage identifiés dans les PLU et la dispense de déclaration préalable pour les espaces boisés concernés, dès lors qu’un document de gestion durable s’y applique déjà.

M. Jean-Marie Sermier. L’amendement CD242 propose d’étendre non pas le régime des espaces boisés classés dans son ensemble, mais simplement son régime déclaratif, ainsi que ses exceptions, aux espaces boisés identifiés comme des éléments de paysage à préserver et des espaces de continuités écologiques.

M. Jean-Yves Caullet. S’agissant de trouver l’articulation adéquate entre la prise en compte des espaces boisés dans le cadre des PLU et les garanties qui sont données par les documents de gestion durable, l’amendement du Gouvernement nous satisfait, et nous retirons le nôtre.

Mme la rapporteure. Je suis favorable à l’amendement du Gouvernement.

Les amendements CD242 et CD658 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD1043.

L’article 36 bis A est ainsi rédigé.

Section 5
Conservatoires régionaux d’espaces naturels

Article 36 quater AA
(article L. 2222-10 du code général de la propriété des personnes publiques)

Possibilité pour les conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés de gérer des biens domaniaux par convention

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Lors de la séance publique du Sénat, le gouvernement a déposé et fait adopter, sur avis favorable du rapporteur, un amendement créant un article additionnel destiné à compléter l’article 36 ter.

En modifiant le code général de la propriété des personnes publiques, l’article 36 ter permet en effet de confier des biens domaniaux en gestion à des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés, pour des durées longues mais sans transfert de propriété.

Cet amendement place les conservatoires régionaux d’espaces naturels agréées sous le régime de l’article L. 2222-10 du code général de la propriété des personnes publiques, leur permettant ainsi de se voir confier la gestion d’immeubles dépendant du domaine privé de l’État en vue d’assurer leur conservation, leur protection ou la mise en valeur du patrimoine national.

Cet amendement simplifie les procédures dans la mesure où l’article L. 2222-10 précité dispose que les conditions et la durée de la gestion sont déterminées par une simple convention passée par l’État.

2. La position de votre commission

Cet article a été adopté sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 36 quater AA sans modification.

Article 36 quater A
(article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques)

Cession à titre gratuit d’immeubles du domaine privé de l’État à un conservatoire régional d’espaces naturels

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article, inséré en commission au Sénat, visait à permettre la cession à titre gratuit d’immeubles du domaine privé de l’État à un conservatoire régional d’espaces naturels agréé, lorsque ces immeubles présentent une forte valeur écologique.

L’article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit la possibilité de vendre un immeuble du domaine privé de l’État, lorsque ces biens ne sont plus utilisés par un service civil ou militaire de l’État, ou un établissement public de l’État.

En l’absence de dispositions spécifiques, la cession à titre gratuit de biens, y compris ceux relevant du domaine privé de l’État, n’est pas autorisée, en application du principe d’incessibilité des propriétés publiques à vil prix.

Considérant qu’en présence de terrains présentant une forte valeur écologique, il était pertinent de permettre une cession à titre gratuit de biens immeubles relevant du domaine privé de l’État à des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés, la commission a adopté deux amendements identiques de Mme Nicole Bonnefoy et de M. Cyril Pellevat permettant, dans ce cas particulier, les cessions à titre gratuit.

En séance publique, le Gouvernement s’est déclaré défavorable à cet article, arguant que, d’une manière générale, il n’était pas possible d’aliéner les biens publics à titre gratuit, et que les immeubles en question devraient au minimum être évalués. Le Sénat a considéré que, dès lors que ces biens étaient mis à disposition des conservatoires, l’objectif poursuivi était atteint, même si les conservatoires n’en étaient pas les propriétaires. Il a donc supprimé cet article.

2. La position de votre commission

Votre commission n’a pas rétabli cet article.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article 36 quater A.

Article 36 quater B
(article 885-0 V bis A du code général des impôts)

Imputation sur l’impôt de solidarité sur la fortune des dons à des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article, inséré en commission au Sénat, prévoyait la possibilité d’imputer sur l’impôt de solidarité sur la fortune les dons effectués au profit des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés.

L’article 885-0 V bis A du code général des impôts prévoit la possibilité, pour un redevable de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), d’imputer au montant de l’impôt 75 % (dans la limite de 50 000 euros) du montant des dons en numéraire ou des dons en pleine propriété de titres de société admis aux négociations sur un marché réglementé, effectués au profit de plusieurs catégories d’organismes : établissements de recherche ou d’enseignement supérieur, fondations reconnues d’utilité publique, entreprises d’insertion, fondations universitaires, Agence nationale de la recherche.

L’intégration des conservatoires régionaux d’espaces naturels agréés aux organismes auxquels les dons des particuliers sont imputables à l’ISF devait permettre de soutenir l’activité des conservatoires, appelés à avoir un rôle croissant en matière de biodiversité.

En séance publique, cet article a été supprimé par deux amendements identiques déposés, l’un par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues, l’autre par le Gouvernement, au motif qu’il n’était pas opportun de créer une nouvelle niche fiscale et de grever ainsi le budget de la Nation.

2. La position de votre commission

Votre commission n’a pas rétabli cet article.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article 36 quater B.

Article 36 quater C
(article L. 414-11 du code de l’environnement)

Missions des conservatoires régionaux d’espaces naturels

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article a été inséré par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable après l’adoption de trois amendements identiques déposés par MM. Joël Labbé et Ronan Dantec, Mme Evelyne Didier et M. Cyril Pellevat.

L’article L. 414-11 du code de l’environnement donne pour missions aux conservatoires régionaux d’espaces naturels de contribuer à la préservation d’espaces naturels et semi-naturels notamment par des actions de connaissance, de maîtrise foncière et d’usage, de gestion et de valorisation du patrimoine naturel sur le territoire régional.

L’amendement adopté confère aux conservatoires régionaux d’espaces naturels des missions d’expertise et d’animation territoriale en appui aux politiques publiques en faveur du patrimoine naturel. Les commissaires ont considéré que les conservatoires avaient développé une expertise de référence en matière de préservation du patrimoine naturel, et étaient devenus des partenaires importants de l’État et des collectivités territoriales pour la mise en œuvre des politiques publiques environnementales.

Cet article a pour objet de consacrer et de renforcer ces fonctions, en faveur d’une meilleure préservation de la biodiversité à l’échelon local.

Cet article n’a pas été modifié en séance publique.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui précise que les missions confiées aux conservatoires régionaux d’espaces naturels ne peuvent être que locales, l’agence française pour la biodiversité étant compétente pour les missions d’expertise inscrites dans un champ plus large ;

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD167 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Par la création de cet article, le Sénat a souhaité permettre aux conservatoires régionaux d’espaces naturels de mener des missions d’expertise en matière de patrimoine naturel. Cet amendement précise que ces missions ne peuvent être que locales, l’Agence française pour la biodiversité étant compétente pour les missions d’expertise qui dépassent le champ local.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

M. Julien Aubert. Pourquoi des missions locales plutôt que régionales ? Selon moi, un périmètre local est plus restreint qu’un périmètre régional.

Mme la rapporteure. Des missions peuvent être menées au niveau départemental, et l’emploi du mot local permet une certaine souplesse dans l’appréciation du territoire.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 36 quater C modifié.

Section 6
Espaces de continuités écologiques

Article 36 quater
(articles L. 113-29 et L. 113-30 [nouveaux] du code de l’urbanisme)

Création d’espaces de continuités écologiques

Cet article, inséré par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, prévoit la possibilité d’identifier des espaces de continuités écologiques dans les plans locaux d’urbanisme et d’élaborer des prescriptions afin de les préserver.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 36 quater a été introduit en commission par l’adoption d’un amendement de la rapporteure. Cet article insérait, à l’origine, un chapitre II nouveau au titre III du livre Ier du code de l’urbanisme, relatif aux espaces de continuités écologiques.

Ces nouvelles dispositions prévoyaient dans leur version originelle la possibilité, au sein d’un plan local d’urbanisme (PLU) ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, de classer en espaces de continuités écologiques (ECE) un espace ou une formation végétale naturelle ou semi-naturelle nécessaire à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques, et compris dans le périmètre de la trame verte ou de la trame bleue. Dans les communes non couvertes par un tel document d’urbanisme, le conseil municipal peut identifier par délibération de tels ECE, après enquête publique.

Ces dispositions visaient ainsi à doter les communes d’un outil opérationnel afin de protéger les continuités écologiques sur leur territoire, et particulièrement les corridors écologiques. Les ECE devaient être complémentaires aux espaces boisés classés, en permettant de protéger d’autres espaces et formations végétales. Le régime des ECE ainsi proposé s’inspire directement du régime des espaces boisés classés prévu à l’article L. 130-1 du code de l’environnement.

L’article 36 quater a été entièrement réécrit en séance publique, à la suite de l’adoption de deux amendements d’origine gouvernementale.

L’article prévoit désormais que le règlement d’un PLU peut identifier et localiser des espaces de continuités écologiques, et définir des prescriptions de nature à assurer leur préservation.

Les dispositions du chapitre II nouveau relatif à l’ECE ont été simplifiées et prévoient désormais :

– une définition de la notion d’ECE, espace ou formation végétale ou aquatique, naturelle ou semi-naturelle, intégré dans les trames vertes et bleues, nécessaire à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques ;

– une justification de l’identification et de la localisation des ECE ainsi que des prescriptions au sein du PLU, au regard de l’intérêt patrimonial des espaces et formations concernées, ou de leur identification dans le SRCE.

Il est par ailleurs précisé que l’identification, la localisation et les prescriptions « tiennent compte des activités humaines, notamment agricoles ».

Les autres dispositions adoptées en commission ont été supprimées. La rédaction adoptée en séance a donc sensiblement infléchi le dispositif des ECE, en supprimant les obligations systématiques liées à leur identification et en renvoyant au règlement du PLU l’édiction des prescriptions.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté cet article sans le modifier.

En revanche, en séance publique, le Sénat a adopté, sur l’avis favorable du gouvernement, un amendement technique de réécriture globale de l’article déposé par le rapporteur. Cet amendement de coordination, qui reprend fidèlement la rédaction du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale, a été rendu nécessaire par la réécriture du livre Ier du code de l’urbanisme par l’ordonnance du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement gouvernemental qui réécrit les alinéas 5 à 9 de cet article et propose une évolution rédactionnelle afin de clarifier le dispositif dans ses intentions et d’en lever les ambiguïtés. Cet amendement a pour conséquences :

– de créer l’outil juridique dans le code de l’urbanisme, dans une section consacrée aux espaces protégés et au même titre, par exemple, que les EBC (espaces boisés classés) ;

– de donner une définition aux éléments constitutifs des ECE (espaces de continuité écologique) en renvoyant aux éléments de la trame verte et bleue du code de l’environnement ;

– d’ouvrir la palette des outils de protection prévus dans le code de l’urbanisme car il ne s’agit pas d’associer l’ECE à un seul outil du règlement du PLU mais au contraire de laisser aux élus le soin de choisir l’outil adéquat du PLU pour assurer sa protection.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD297 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. L’amendement CD297 tend à supprimer l’article 36 quater. Cet article ajoute de la complexité au paysage réglementaire concernant la trame verte et bleue. Il vise à réglementer, voire à interdire, les activités humaines dans les espaces de continuités écologiques, par l’inscription d’un nouveau zonage dans les documents d’urbanisme et l’interdiction de certaines activités. De telles restrictions auront un impact économique important sur les activités forestières et agricoles ainsi que sur le développement économique des communes rurales. La mise en œuvre de la trame verte et bleue ne doit pas aboutir à la création, dans les documents d’urbanisme, d’un nouveau zonage qui viendrait s’ajouter à la multitude de zonages existants.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. La trame verte et bleue est un outil extrêmement important en milieu urbain comme en milieu rural, et ces trames sont de plus en plus nombreuses dans les schémas régionaux de cohérence écologique, car elles permettent de mener de vraies politiques publiques en matière de maintien des continuités écologiques et des réservoirs de biodiversité. La trame verte et bleue est, par ailleurs, un outil assez simple à mettre en place pour les collectivités.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’examen des amendements identiques CD1003 du Gouvernement et CD1066 de la rapporteure.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement propose une nouvelle rédaction de l’article 36 quater, en inscrivant dans le code de l’urbanisme la création des espaces de continuités écologiques au sein d’une section consacrée aux espaces protégés, au même titre par exemple que les espaces boisés classés ; en donnant des éléments constitutifs des espaces de continuité écologique une définition qui renvoie aux éléments de la trame verte et bleue du code de l’environnement ; en ouvrant la palette des outils de protection prévus dans le code de l’urbanisme, car il ne s’agit pas d’associer les espaces de continuités écologiques à un seul outil du règlement du PLU mais, au contraire, de laisser aux élus le soin de choisir l’outil adéquat. Ces outils ont été améliorés par la loi ALUR, et il convient de promouvoir leur utilisation combinée plutôt que de privilégier un seul outil en particulier, comme c’est le cas dans la rédaction actuelle.

L’amendement CD1066 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD1003.

Puis elle adopte l’article 36 quater ainsi modifié.

Section 6 bis
Biodiversité en milieux urbain et péri-urbain

Article 36 quinquies A
(article L. 111-19 du code de l’urbanisme)

Incitation à l’exploitation des toitures des zones commerciales et à la perméabilisation des places de stationnement

Cet article, inséré en séance publique à l’Assemblée nationale, impose la végétalisation ou l’installation de procédés de production d’énergies renouvelables sur la toiture des nouveaux établissements commerciaux soumis à autorisation, et crée une comptabilisation défavorable aux places de stationnement imperméabilisées.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 36 quinquies A a été inséré par adoption en séance publique à l’Assemblée nationale, sur avis favorable de la commission, d’un amendement déposé par le groupe écologiste, sous-amendé par le gouvernement. Un amendement du Gouvernement a également été adopté, créant l’alinéa 3 de l’article.

L’article L. 111-6-1 du code de l’urbanisme limite l’emprise au sol des aires de stationnement affectées à un commerce soumis à autorisation d’exploitation commerciale (AEC). Ces dispositions ont été renforcées par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. La surface de l’aire de stationnement, antérieurement plafonnée à une fois et demie la surface de plancher des bâtiments affectés au commerce, a été abaissée aux trois quarts de cette même surface de vente. Par ailleurs, la même loi a créé un dispositif incitatif en faveur des places de stationnement perméables, dont seulement la moitié de la surface est comptée dans le cadre du plafonnement.

Les alinéas 1 et 2 de l’article prévoient l’obligation, pour les projets soumis à AEC, d’intégrer sur tout ou partie de la toiture des bâtiments, et de façon non exclusive, des procédés de production d’énergies renouvelables ou un système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation, et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité.

L’alinéa 3 de l’article prévoit qu’à compter du 1er janvier 2017, la surface des places de stationnement imperméabilisées compte pour le double de leur surface, dans le cadre du plafond de l’aire de stationnement des projets soumis à AEC.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En commission, le rapporteur Jérôme Bignon a regretté l’absence d’étude d’impact de ces mesures et a également relevé que ces dispositions durcissaient une législation déjà modifiée par deux fois en 2014.

S’agissant de l’obligation de végétaliser ou de créer des installations de production d’énergie renouvelable sur tout ou partie de la toiture, le bénéfice pour l’environnement est apparu « très incertain » aux sénateurs, tandis que les coûts pour les activités concernées sont certains et élevés. La commission a considéré que la végétalisation entraînait une surcharge importante qui impliquait un surenchérissement des coûts de construction, tandis que sa participation à la performance énergétique des établissements était limitée voire négative, dès lors que les nouvelles constructions sont mieux optimisées dans leur conception. La mise en place de panneaux photovoltaïques est compromise par l’obligation de soumettre les installations d’une puissance supérieure à 100 kilowatts-crête à un appel d’offres de la commission de régulation de l’énergie et par le statut comptable de l’autoproduction d’énergie. Par ailleurs, l’efficacité de ces dispositifs est conditionnée par la localisation du projet sur le territoire national.

S’agissant des contraintes accrues en matière de places de stationnement, le rapporteur Jérôme Bignon a regretté que le dispositif revienne sur l’esprit de la loi ALUR, en passant d’une logique incitative à une logique coercitive. En imposant de fait le recours à des places perméables, le dispositif adopté par l’Assemblée nationale « méconnaît les inconvénients techniques de ce procédé et les alternatives disponibles pour les places imperméabilisées ». Les projets d’établissements commerciaux qui souhaiteraient opter pour des places imperméabilisées verraient la surface de leur aire de stationnement fortement déséquilibrée par rapport à leur surface de vente, dans des zones de chalandise souvent très fréquentées.

En conséquence, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat a supprimé cet article.

En séance publique, deux amendements visant à rétablir l’article adopté par l’Assemblée nationale, l’un déposé par le groupe socialiste et républicain, l’autre par le groupe écologiste, n’ont pas été adoptés malgré l’avis favorable du gouvernement.

3. La position de votre commission

Regrettant que le Sénat ait supprimé un article dont la finalité consiste notamment à inciter à la végétalisation des toitures des centres commerciaux ou à leur exploitation pour produire de l’énergie renouvelable, votre rapporteure a souhaité aboutir à une solution de compromis.

Votre commission a donc adopté, sur sa demande, un amendement qui rétablit l’esprit de l’article 36 quinquies A et qui a pour objet de s’assurer que les centres commerciaux dont les permis de construire seront déposés à compter du 1er janvier 2017 répondront à des critères environnementaux stricts.

Les dispositions adoptées sont assouplies par rapport à celles inscrites par l’Assemblée nationale en première lecture : s’agissant aussi bien des toitures que des places de stationnement, la possibilité que des dispositifs autres que ceux envisagés à l’origine puissent être utilisés a été retenue, à condition qu’ils atteignent le même résultat.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD168 de la rapporteure, CD502 de Mme Laurence Abeille et CD638 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. L’amendement CD168 rétablit l’article 36 quinquies A supprimé par le Sénat et qui a pour objet de s’assurer que les centres commerciaux dont les permis de construire seront déposés à compter du 1er janvier 2017 répondront à des critères environnementaux stricts comme la végétalisation des toitures, leur utilisation pour la production d’énergie renouvelable ainsi que la perméabilisation des surfaces de stationnement.

Les dispositions proposées sont assouplies par rapport à celles adoptées en première lecture, et l’article prévoit, dans sa nouvelle rédaction, la possibilité de négocier avec les organisations professionnelles. Les acteurs locaux que nous avons entendus en semblent satisfaits.

Mme Laurence Abeille. La rédaction adoptée en première lecture avait été soigneusement pesée. Cette nouvelle version affaiblit le dispositif, notamment en ce qui concerne les aires de stationnement sur lesquelles il faut impérativement mettre un terme à l’imperméabilisation des sols.

En ce qui concerne les toitures, le texte adopté en première lecture précisait que la végétalisation et les procédés de production d’énergie renouvelable pouvaient être utilisés conjointement, ce que ne semble pas prévoir l’amendement de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Si, puisqu’il est écrit que ces procédés peuvent être utilisés de façon non exclusive.

Mme Laurence Abeille. Vous mentionnez également les autres dispositifs aboutissant au même résultat : de quoi s’agit-il ?

Mme la rapporteure. On peut penser aux éoliennes de toiture. En tout cas, l’intérêt de cette formulation est de laisser l’avenir ouvert. Nous proposons également que la perméabilisation des places de stationnement puisse se faire à l’aide d’aménagements hydrauliques ou grâce à des dispositifs végétalisés qui permettent l’évacuation des eaux.

Face aux acteurs économiques impliqués, il faut certes avoir des exigences fermes en matière de résultat, mais il est préférable de faire preuve de souplesse sur les moyens.

Mme la secrétaire d’État. La proposition de la rapporteure est d’autant plus satisfaisante qu’elle est issue d’une concertation avec les professionnels concernés et me paraît offrir un bon compromis. Il est très important que les centres commerciaux, qui peuvent être responsables d’atteintes au paysage péri-urbain, rentrent pleinement dans la transition écologique et énergétique. La perméabilisation des sols est également une question majeure, à laquelle je suis très attachée. Avis favorable.

Mme Laurence Abeille. Le vrai problème, ce sont les aires de stationnement. Or je crains que les aménagements ne se résument à l’installation de pots de fleurs. (Sourires)

Le dispositif que je proposais était plus contraignant.

M. Julien Aubert. Je pense que Mme Abeille a raison. L’imperméabilisation des places de stationnement est, en effet, un vrai problème, qui mériterait un débat de fond et une évaluation économique précise.

Par ailleurs, la rédaction proposée par la rapporteure précise que les dispositifs doivent aboutir à un même résultat, mais de quel résultat s’agit-il ? S’agit-il d’un résultat en matière de production d’énergie, d’efficacité thermique ou de reconquête de la biodiversité ?

Enfin, dans la mesure où les dispositifs exigés ne peuvent concerner qu’une partie de la toiture, qui empêchera un aménageur de se limiter à une surface très réduite ? À partir de quel niveau d’installation estimera-t-on que les critères exigés par la loi sont remplis ?

La Commission adopte l’amendement CD168.

En conséquence, l’article 36 quinquies A est ainsi rétabli et les amendements CD502 et CD638 tombent.

Article 36 quinquies B
(article L. 229-26 du code de l’environnement)

Rôle de la biodiversité urbaine pour lutter contre le changement climatique pris en compte dans le PCET

Cet article, inséré en séance publique à l’Assemblée nationale, intègre une prise en compte de la biodiversité en milieu urbain dans le programme d’actions du plan climat-énergie territorial, afin d’adapter la ville au changement climatique.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

La disposition adoptée par l’Assemblée nationale, sur avis favorable de votre rapporteure et du Gouvernement, a pour objet d’insérer dans les plans climat-énergie territoriaux une formule précisant que ces plans doivent « favoriser la biodiversité pour adapter la ville au changement climatique ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

Considérant qu’il n’était « pas souhaitable de complexifier par de nouveaux éléments » la législation déjà en place, la commission sénatoriale saisie au fond a supprimé cet article.

En séance publique, le Sénat a toutefois adopté un amendement déposé par M. Ronan Dantec et les membres du groupe écologiste qui rétablit, dans son esprit, la disposition adoptée à l’Assemblée nationale.

Au lieu d’évoquer l’adaptation de la « ville » au changement climatique, la nouvelle rédaction propose plus globalement d’adapter le « territoire » à ce changement.

3. La position de votre commission

Dans la mesure où le Sénat n’a apporté qu’une modification de précision à la disposition adoptée par l’Assemblée nationale, votre commission a adopté cet article sans le modifier.

*

* *

La Commission adopte l’article 36 quinquiessans modification.

Article 36 quinquies C
(article L. 141-8-1 [nouveau] du code de l’urbanisme

Mention dans les documents d’orientation et d’objectifs des schémas de cohérence territoriale de la notion de permaculture

(supprimé)

Cet article nouveau qui vise à promouvoir la permaculture dans le document d’orientation et d’objectifs, a été introduit en séance par le Sénat et n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Le document d’orientation et d’objectifs peut définir des objectifs à atteindre en matière de maintien ou de création d’espaces verts dans les zones faisant l’objet d’une ouverture à l’urbanisation. Cette disposition nouvelle précise qu’il peut définir des objectifs en matière de permaculture. La permaculture se définit comme un ensemble de pratiques visant à créer une production agricole soutenable, très économe en énergie et respectueuse des êtres vivants et de leurs relations réciproques.

Selon les sénateurs, la permaculture peut être mise en œuvre partout, à l’instar des anciens jardins ouvriers et des pratiques traditionnelles de maraîchage urbain. Elle a sa place sur les toits des surfaces commerciales, des immeubles des villes, ainsi que dans les cours et les jardins urbains. Elle se caractérise par différentes pratiques, dont l’absence de recours aux intrants de synthèse, le travail du sol minimum et le couvert végétal permanent. La durabilité de ce schéma ne réside pas uniquement dans la pratique agricole stricto sensu, mais aussi dans le fait que la production maraîchère alimente les circuits courts et peut même être créatrice d’emplois.

Cette disposition, qui résulte d’un amendement déposé par le groupe socialiste et républicain, a été adoptée malgré l’avis défavorable du rapporteur, le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse du Sénat.

2. La position de votre commission

Votre commission a considéré que l’article 36 quinquies C n’apportait aucun élément normatif.

Par ailleurs, la permaculture est une notion qui ne répond pas à une définition juridique rigoureuse. Elle est souvent présentée comme « un ensemble de pratiques et de modes de pensée visant à créer une production agricole soutenable, très économe en énergie et respectueuse des êtres vivants et de leurs relations réciproques ». La notion de « mode de pensée » nous éloigne sensiblement du sujet du présent projet de loi. Pour ces raisons, votre commission a supprimé cet article.

*

* *

La Commission examine les amendements identiques CD38 de M. Michel Heinrich, CD73 de M. Jean Marie Sermier, CD230 de M. Martial Saddier, CD332 de M. Dino Cinieri, CD368 de M. Julien Aubert, CD659 de M. Jean-Yves Caullet et CD800 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Michel Heinrich. Il s’agit de supprimer cet article introduit par le Sénat, qui offre la possibilité aux schémas de cohérence territoriale (SCOT), dans leurs documents d’orientation et d’objectif (DOO), de délimiter des secteurs pour « promouvoir le développement d’espaces dédiés à la permaculture ».

Bien qu’optionnelle, cette disposition semble inopportune pour plusieurs raisons. En premier lieu, le code de l’urbanisme, dont l’article L. 101-3 précise que « la réglementation de l’urbanisme régit l’utilisation qui est faite des sols, en dehors des productions agricoles », n’a pas à définir un mode de culture. Il ne semble donc pas opportun d’aller, par exception, à l’encontre de cette règle.

En second lieu, le terme de permaculture ne connaît aucune définition précise, et communément admise – certains parlent même d’un mode de pensée –, laissant place à de nombreuses interprétations, sources de contentieux.

En troisième lieu, on voit mal comment les plans locaux d’urbanisme (PLU) pourront traduire concrètement une telle orientation.

Enfin, soit à travers le projet d’aménagement et de développement durable (PADD), soit à travers le DOO, le SCOT peut déjà traduire un projet de territoire autour de l’enjeu agricole, sans qu’il soit nécessaire de complexifier l’outil juridique.

Mme la rapporteure. Avis favorable. La notion de permaculture n’est, en effet, pas bien définie et varie selon les dictionnaires. Il est donc sans doute prématuré d’inscrire dans la loi un concept qui désigne le plus souvent un ensemble de pratiques et de modes de pensée. Cet article peut donc être supprimé même si, dans un mouvement de conciliation, j’avais envisagé de ne pas y toucher.

Mme la secrétaire d’État. Le SCOT est un document d’urbanisme qui n’a pas pour rôle d’imposer telle ou telle pratique agricole. Avis favorable.

M. François-Michel Lambert. Il me semble très difficile, lorsqu’on veut faire la promotion de la permaculture, manière différente de faire de l’agriculture en l’insérant dans des espaces qui ne lui étaient pas d’emblée dédiés, de définir à l’avance les périmètres voués à la permaculture. Je suis donc pour la suppression de cet article.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence l’article 36 quinquies C est supprimé et l’amendement CD170 tombe.

Article 36 quinquies D
(article L. 141-11 [nouveau] du code de l’urbanisme)

Promotion de la permaculture

(supprimé)

Cet article nouveau qui vise également à promouvoir la permaculture dans le code de l’urbanisme, a été introduit en séance par le Sénat et n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Cet article procède du même esprit que le précédent. Il vise à préciser que le document d’orientation et d’objectifs peut promouvoir, dans le cadre de son objectif de gestion économe des espaces et dans des secteurs qu’il délimite, le développement d’espaces consacrés à la permaculture.

Cette disposition résulte comme la précédente d’un amendement déposé par le groupe socialiste et républicain. Comme la précédente, elle a été adoptée malgré l’avis défavorable du rapporteur, le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse du Sénat.

2. La position de votre commission

Pour les mêmes raisons que celles cités à l’article précédent, votre commission a supprimé cet article.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD74 de M. Jean-Marie Sermier, CD231 de M. Martial Saddier, CD367 de M. Julien Aubert, CD660 de M. Jean-Yves Caullet et CD801 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements étant défendus, je demanderai à un seul responsable par groupe de s’exprimer.

M. Julien Aubert. Je ne reprendrai pas l’argumentation que j’ai déjà développée au soutien de mon amendement précédent.

M. Jean-Yves Caullet. J’appelle votre attention sur le fait que l’article en question insère dans un article du code de l’urbanisme le terme « notamment ».

Mme la rapporteure. Avis favorable. Je veux, en effet, adopter une ligne cohérente avec celle que je défendais tout à l’heure.

Mme la secrétaire d’État. J’ai quelques réserves, comme pour l’amendement précédent. Mais celui-ci n’est pas prescriptif ; je m’en remets donc à votre sagesse.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 36 quinquies D est supprimé et les amendements identiques CD37 de M. Michel Heinrich et CD905 de M. Gérard Menuel tombent.

Section 7
Associations foncières pastorales

Article 36 sexies
Rapport sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des organismes nuisibles

(supprimé)

Cet article, qui a été adopté en séance par l’Assemblée nationale sur un amendement de M. Bertrand Pancher, prévoit la remise dans un délai de deux ans, d’un rapport au Parlement sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des organismes nuisibles.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Depuis de nombreuses années, les dégâts occasionnés par la présence du frelon asiatique sont récurrents, en particulier dans certaines régions. Malgré des demandes répétées de la part des élus locaux, l’arrêté de classement du frelon asiatique comme espèce dite nuisible n’a pas été pris.

Les SDIS, les services départementaux d’incendie et de secours, sont régulièrement sollicités pour détruire des nids de frelons asiatiques. Il s’agit d’une espèce invasive, dont la piqûre est extrêmement dangereuse pour les humains et qui, en outre, s’attaque aux abeilles, contribuant à leur disparition.

En l’absence de classement de ce frelon dans la catégorie des nuisibles, aucune action coordonnée n’est menée. Très souvent, les particuliers n’appellent pas les SDIS en raison du coût élevé de l’intervention. Certaines collectivités proposent une aide, mais pas toutes ; l’inégalité, en la matière, est réelle.

Le classement, au titre du code rural et de la pêche maritime, engage le ministère de l’agriculture à mettre en œuvre les actions qui doivent accompagner les objectifs de destruction des espèces nuisibles. Ce classement serait donc un gage d’efficacité. C’est la raison pour laquelle cette disposition a été adoptée.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Adopté sans modification en commission, cet article a été légèrement modifié en séance par l’adoption d’un amendement du groupe écologiste qui réduit à six mois le délai originellement fixé à deux ans pour que le gouvernement rende son rapport. Le Gouvernement a donné un avis favorable à cet amendement.

3. La position de votre commission

Votre commission a considéré qu’il convenait de ne pas surcharger l’administration de demande de rapports ; par ailleurs, la décision de classer une espèce d’animaux dans la catégorie des nuisibles relève du pouvoir réglementaire. Pour ces raisons, votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD837 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Mon amendement tend à supprimer l’article 36 sexies. Nous voici encore dans la position de demander au Gouvernement un rapport, qui porte en l’espèce sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des nuisibles. J’imagine que des études ont déjà été réalisées et que le Gouvernement est suffisamment éclairé pour opérer un tel classement s’il l’estime nécessaire.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à la suppression de cet article. Depuis le temps que ce problème du frelon asiatique est évoqué, le Gouvernement doit dresser enfin un état des lieux. Si nous ne disons rien, je crois les dégâts vont continuer et nous ne pourrons qu’observer leur progression.

Mme la secrétaire d’État. Le frelon asiatique constitue avant tout une menace sérieuse pour l’apiculture. Ce sujet concerne en premier lieu le ministre en charge de l’agriculture, du fait des impacts économiques sur cette filière. Il est utile qu’un examen approfondi de la situation soit réalisé en vue de déterminer les meilleures mesures de lutte contre ce phénomène et en prenant en compte les coûts et les effets induits des luttes. Néanmoins le frelon est déjà classé comme danger sanitaire de deuxième catégorie, en tant que danger pour l’abeille domestique. Dans ce contexte législatif, l’opportunité de ce rapport est donc laissée à votre appréciation. Avis de sagesse.

M. François-Michel Lambert. Faut-il vraiment amender la loi à chaque fois qu’une menace arrive ? N’avons-nous pas d’autres outils à notre disposition pour interpeller le Gouvernement ? Si ! J’appelle de mes vœux une loi avant tout efficace.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 36 sexies est supprimé et l’amendement CD171 de la rapporteure tombe.

Section 8
Vergers

Article 36 septies
(article L. 415-9 du code rural et de la pêche maritime)

Suppression des dispositions facilitant l’arrachage des pommiers à cidre et des poiriers à poiré

Cet article nouveau, qui vise à supprimer les dispositions facilitant l’arrachage les pommiers à cidre et les poiriers à poiré, a été introduit en séance par le Sénat et n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

C’est actuellement la commission consultative départementale des baux ruraux qui détermine les obligations du bailleur relatives à la permanence et à la qualité des plantations sur le fonds qu’il loue à son fermier.

Toutefois, dans deux cas, il est fait exception à ce principe, pour des raisons dont la pertinence demeure obscure : il s’agit des pommiers à cidre et des poiriers à poiré. Dans ces deux cas, le bailleur n’est pas tenu de respecter les obligations précédemment mentionnées et le fermier ne pourra être considéré comme ayant manqué à ses obligations contractuelles en cas de disparition de ces arbres.

Compte tenu de l’état actuel des vergers de haute-tige de pommiers et de poiriers, du regain d’intérêt pour l’agroforesterie et du bienfait que représente pour le jeune agriculteur qui s’installe la présence de telles plantations entretenues sur l’exploitation qui lui est transmise, cet amendement vise à mettre un terme à cette exception pour les nouveaux contrats. Il est donc proposé de procéder à la suppression de l’article L. 415-9 du code rural et de la pêche maritime qui peut être considéré comme un encouragement à l’arrachage, ce qui a donné lieu à la disparition de dizaines de variétés anciennes de ces fruits.

Cette disposition ne s’appliquera toutefois pas aux baux en cours de manière à ce que propriétaires et fermiers ne puissent être exposés à des sanctions s’agissant d’engagements auxquels ils n’étaient jusqu’alors pas tenus. Une mesure transitoire est donc prévue : c’est l’objet du second alinéa de cet article.

Cet article a été adopté sur l’avis favorable du rapporteur et du Gouvernement.

2. La position de votre commission

Cette mesure présente le mérite de contribuer à la lutte contre la disparition de variétés anciennes de poires et de pommes, lesquelles font partie du patrimoine national. À la demande de votre rapporteure votre commission a donc adopté cet article sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 36 septies sans modification.

Article 36 octies
(ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme)

Ratification de l’ordonnance portant nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme

(supprimé)

Cet article, qui porte ratification d’une ordonnance, a été introduit en séance publique au Sénat et n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale en premier lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Selon les termes mêmes de la ministre de l’écologie s’exprimant devant le Sénat, cette disposition constitue « un service rendu à Mme la ministre du logement, qui m’a priée de bien vouloir utiliser ce support législatif pour ratifier l’ordonnance du 23 septembre 2015 visant à procéder à une nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme ».

De l’aveu même de M. Jérôme Bignon, rapporteur saisi au fond, les Sénateurs étaient « très demandeurs de cette procédure, qu’a bien voulu diligenter Mme la ministre, avec beaucoup d’énergie et de succès ». Bien qu’il ait regretté la précipitation avec laquelle l’amendement créant cet article a été déposé, ce qui n’a pas laissé le temps à la commission « d’examiner le contenu de l’ensemble du texte visé », le rapporteur a néanmoins donné un avis favorable à l’adoption de cette disposition.

2. La position de votre commission

Votre rapporteure partage les regrets du rapporteur du Sénat concernant le caractère précipité de cette procédure de ratification par amendement qui n’a, de fait, pas été examiné en commission en première lecture, ni à l’Assemblée nationale, ni au Sénat.

Pour autant, votre rapporteure ne mésestime pas l’utilité de la réécriture à droit constant de la partie législative du code de l’urbanisme.

Lancée au moment des lois du Grenelle de l’environnement en 2010, avec une première habilitation législative, puis une seconde dans la loi ALUR du 24 mars 2014, la recodification du livre Ier du code de l’urbanisme aura pris cinq ans – l’ordonnance nécessaire a été publiée au JO du 24 septembre dernier, trois jours avant la fin de l’habilitation législative.

Datant d’une quarantaine d’années, le code de l’urbanisme, devenu de plus en plus intégrateur, avec la prise en compte de nombreux objectifs comme la mixité sociale, le développement durable, la performance énergétique, etc. était devenu très difficilement lisible, et nécessitait de sans cesse se reporter à d’autres textes – certains articles comptent jusqu’à 27 alinéas. Il y avait donc un enjeu de citoyenneté et d’accessibilité de la réglementation dans cet exercice complexe.

Le livre premier, désormais intitulé « réglementation de l’urbanisme », contient tous les principes du droit de l’urbanisme et décline ensuite les différents types de documents de planification – schéma de cohérence territoriale, plan local d’urbanisme, carte communale. La recodification, dirigée par les services de la direction de l’urbanisme, de l’habitat et des paysages, qui dépend à la fois du ministère de l’écologie et du ministère du logement, a été réalisée à droit constant, même si la rédaction de certains articles a pu être modifiée pour plus de clarté.

Le nouveau plan est extrêmement détaillé pour éviter des articles avec de très nombreux alinéas. Après un titre préliminaire qui pose les principes généraux, le titre premier contient les règles applicables sur l’ensemble du territoire, puis le titre deux les règles spécifiques à certaines parties du territoire comme celles issues de la loi Littoral et de la loi Montagne.

Le titre trois contient les règles communes aux différents documents d’urbanisme, puis sont déclinés les différents documents d’urbanisme. Certaines dispositions ont été supprimées, car renvoyant à des dispositifs qui ont disparu, ou déplacées dans d’autres livres du code.

Enfin la refonte de la partie réglementaire du livre premier a été menée conjointement et contient notamment la réforme du règlement du plan local d’urbanisme ainsi que la mise à jour de la liste des servitudes d’utilité publique.

Tout en étant favorable, sur le fond, à cet article, votre commission a décidé de le supprimer pour le recréer dans le Chapitre VII « Habilitations à légiférer par ordonnance et dispositions diverses », après l’article 59 quater. En effet, il a été jugé que cet article de ratification d’ordonnance n’avait pas sa place dans la section « vergers ».

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD1061 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit seulement de transférer cette disposition à un autre endroit. Cet article de ratification d’ordonnance n’a pas sa place dans la section « Vergers ». Il est donc supprimé pour être recréé par un autre amendement dans le Chapitre VII « Habilitations à légiférer par ordonnance et dispositions diverses ».

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 36 octies est supprimé.

Après l’article 36 octies

La Commission en vient à l’amendement CD1002 du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Je vais le retirer au bénéfice d’un amendement ultérieur de la rapporteure.

L’amendement est retiré.

Chapitre III
Milieu marin

Section 1
Pêche professionnelle en zone Natura 2000

Article 37
(article L. 414-4 du code de l’environnement)

Activités de pêche professionnelle en zone Natura 2000

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 37, qui n’a fait l’objet d’aucun amendement lors de son examen à l’Assemblée nationale, vise à créer un régime dérogatoire au régime classique d’évaluation individuelle des incidences sur les sites Natura 2000 pour la pêche maritime professionnelle.

La directive « Habitats » du 21 mai 1992 (15) a mis en œuvre un cadre commun pour la conservation des habitats, des plantes et des animaux d’intérêt communautaire en application duquel un réseau, baptisé « Natura 2000 », a été mis en place. Il est constitué des zones spéciales de conservation définies par cette directive et des zones de protection spéciale mises en place dans le cadre de la directive « Oiseaux » du 30 novembre 2009 (16).

Les zones spéciales de conservation sont des sites d’importance communautaire désignés par les États où sont appliquées les mesures de conservation nécessaires au maintien ou au rétablissement des habitats naturels ou des populations des espèces pour lesquels le site est choisi.

L’article L. 414-1 du code de l’environnement définit les sites « Natura 2000 » qui comprennent :

1° les zones spéciales de conservation, définies comme des sites marins et terrestres à protéger comprenant :

– des habitats naturels menacés de disparition ;

– des habitats naturels réduits à de faibles dimensions ;

– des habitats naturels qui offrent des exemples remarquables des caractéristiques propres aux régions alpine, atlantique, continentale et méditerranéenne ;

– des habitats qui abritent des espèces de faune ou de flore sauvages rares, vulnérables ou menacées de disparition ;

– des espèces de faune ou de flore sauvages dignes d’une attention particulière en raison de la spécificité de leur habitat ou des effets de leur exploitation sur leur état de conservation ;

2° les zones de protection spéciale, définies comme des sites marins et terrestres qui :

– sont particulièrement appropriés à la survie et à la reproduction de certaines espèces d’oiseaux sauvages qui figurent sur une liste établie par le pouvoir réglementaire ;

– servent d’aires de reproduction, de mue, d’hivernage ou de zones de relais, au cours de leur migration, à des espèces d’oiseaux qui ne font pas partie des espèces mentionnées sur la liste établie par le pouvoir réglementaire.

L’article 6 de la directive « Habitats » du 21 mai 1992 prévoit que « pour les zones spéciales de conservation, les États membres établissent les mesures de conservation nécessaires impliquant, le cas échéant, des plans de gestion appropriés spécifiques aux sites ou intégrés dans d’autres plans d’aménagement et les mesures réglementaires, administratives ou contractuelles appropriées ».

Il complète ce dispositif en prévoyant que « tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d’affecter ce site de manière significative […] fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site » et indique que les autorités nationales compétentes doivent prendre en compte les conclusions de cette évaluation et n’approuver le plan ou le projet concerné « qu’après s’être assurées qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site concerné et après avoir pris, le cas échéant, l’avis du public ».

Le I de l’article L. 414-4 du code de l’environnement, qui transpose cette exigence en droit français, définit les documents de planification et les programmes, projets, manifestations et interventions qui doivent faire l’objet d’une « évaluation des incidences Natura 2000 ».

Le II de l’article L. 414-4 du code de l’environnement prévoit que, s’ils sont prévus par les contrats « Natura 2000 » ou pratiqués selon les engagements spécifiques définis par une charte « Natura 2000 », ils sont dispensés de cette évaluation des incidences.

L’article 37 insère un II bis dans l’article L. 414-4 du code de l’environnement pour prévoir que bénéficient également de cette dispense les activités de pêche maritime professionnelle qui « ont fait l’objet d’une analyse des risques d’incidences au regard des objectifs de conservation du site Natura 2000 lors de l’élaboration ou de la révision du document d’objectifs ». Cette analyse doit être effectuée lors de l’élaboration ou de la révision du document d’objectifs du site concerné.

Ce II bis prévoit également que des mesures réglementaires conservatoires sont mises en place lorsqu’un risque d’impact négatif est identifié, afin de garantir que les activités de pêche maritime professionnelle n’auront pas d’effet significatif sur le site au regard des objectifs de conservation « Natura 2000 ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

À l’initiative du rapporteur, l’article 37 a fait l’objet d’un amendement rédactionnel de réécriture globale adopté en commission. Cet amendement a permis d’améliorer la clarté du dispositif et d’apporter certaines précisions :

– il a précisé que l’analyse des risques d’atteinte aux objectifs de conservation des sites Natura 2000 doit être réalisée à l’échelle de chaque site ;

– il précise clairement que cette analyse doit être faite à l’occasion de l’élaboration ou de la révision des documents d’objectifs mentionnés à l’article L. 414-2 du code de l’environnement ;

– il indique que les mesures réglementaires prises par l’autorité administrative lorsqu’un risque est identifié doivent respecter les règles de la politique commune de la pêche maritime.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

À l’initiative de votre rapporteure, une série d’amendements rédactionnels a été adoptée.

*

* *

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD437 rectifié et CD438 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD669 de M. Arnaud Leroy.

M. Arnaud Leroy. Cet article a été modifié au Sénat, par un amendement à portée rédactionnelle. Si la nouvelle rédaction a désormais le mérite de permettre une meilleure adéquation avec le vocabulaire de la directive européenne « Habitats » du 21 mai 1992, il est nécessaire de réintégrer dans cet article certaines dispositions inhérentes au contexte français de mise en œuvre de cette directive.

En particulier, comme le prévoyait l’article figurant dans le projet de loi déposé par le Gouvernement, la prise de mesures doit être corrélée à l’existence d’un risque avéré d’atteinte des objectifs de conservation des sites « Natura 2000 » du fait des activités de pêche maritime s’y déroulant. L’ajout de la mention « s’il y a lieu » permet de laisser la latitude nécessaire à la qualification et à la hiérarchisation des risques opérée par les membres des comités locaux de pilotage des sites, comme le prévoit la circulaire du 30 avril 2013 du ministère de l’écologie relative à la prise en compte des activités de pêche maritime professionnelle dans le cadre de la mise en œuvre de Natura 2000 en mer.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. L’insertion à cet endroit de l’expression « s’il y a lieu » conduirait à supprimer le caractère systématique de la réalisation de l’analyse des risques d’atteinte aux objectifs de conservation des sites Natura 2000.

Il ne s’agit pas du tout de rétablir le texte de l’Assemblée nationale, car l’expression « s’il y a lieu », présente dans sa rédaction de l’article 37, ne s’appliquait pas à la réalisation de l’analyse des risques d’atteinte aux objectifs de conservation des sites Natura 2000, mais à la prise de mesures réglementaires.

Je demande donc à l’auteur de l’amendement de bien vouloir le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Même avis.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD439 et CD440 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 37 ainsi modifié.

Section 2
Aires marines protégées

Article 38
(articles L. 332-8 et L. 640-1 du code de l’environnement et articles L. 912-2, L. 912-3 et L. 912-7 du code rural et de la pêche maritime)

Gestion des réserves naturelles en mer par les acteurs socio-économiques

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 38 a modifié une série d’articles du code rural et du code de l’environnement pour favoriser l’association des organismes professionnels de la pêche maritime et de la conchyliculture à la gestion des réserves naturelles marines.

Le I de l’article 38 modifie l’article L. 332-8 du code de l’environnement pour ouvrir aux comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins et aux comités régionaux de la conchyliculture la possibilité de se voir confier la gestion des réserves marines.

Le II de l’article 38 modifie les articles L. 912-2 et L. 912-3 du code de l’environnement pour étendre les missions de ces comités à « la protection, la conservation et la gestion des milieux et écosystèmes contribuant au bon état des ressources [halieutiques ou conchylicoles] ».

Le III de l’article 38 modifie l’article L. 640-1 du code de l’environnement pour faire en sorte que ces nouvelles dispositions ne soient pas applicables aux Terres australes et antarctiques françaises, du fait des spécificités de ce secteur.

À l’initiative de la rapporteure, le I de l’article 38 a été réécrit lors de son examen à l’Assemblée nationale pour supprimer la possibilité ouverte aux comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins et aux comités régionaux de la conchyliculture de gérer des réserves naturelles marines. Cette possibilité a été remplacée par une possibilité pour ces organismes d’être associés à la gestion de ces réserves.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen en commission au Sénat, un amendement du rapporteur a été adopté, qui réintroduit la possibilité, pour les comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins et les comités régionaux de la conchyliculture, de gérer une réserve naturelle quand celle-ci comprend une partie marine.

Cette possibilité a été étendue en séance publique au comité national des pêches maritimes et des élevages marins et au comité national de la conchyliculture par un amendement n° 210 rect quinquies de Mme Sophie Primas adopté avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

La possibilité de confier la gestion de réserves naturelles ayant une partie marine aux comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins et aux comités régionaux de la conchyliculture, réintroduite au Sénat, a été supprimée par les amendements n° CD486 et CD596 de votre rapporteure.

*

* *

La commission examine l’amendement CD595 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rétablir le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale, en supprimant la possibilité introduite au Sénat d’associer le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM) et le Comité national de la conchyliculture à la gestion d’une réserve naturelle comprenant une partie maritime. Une telle possibilité ne doit être ouverte, selon moi, qu’aux comités régionaux.

Mme la secrétaire d’État. La possibilité introduite par le Sénat existe déjà, en effet, pour les comités régionaux. L’étendre aux comités nationaux se justifierait dans le cas d’une réserve naturelle dont le périmètre se situerait sur la zone de compétence de deux ou plusieurs comités régionaux. Je souhaite le retrait de l’amendement.

Mme la rapporteure. Je veux bien le retirer, mais la position du Gouvernement m’étonne quelque peu. Un comité national n’est pas censé connaître ce qu’il se passe au niveau régional.

L’amendement est retiré.

La commission examine ensuite les amendements identiques CD486 de Mme Laurence Abeille et CD596 de la rapporteure.

Mme Laurence Abeille. Je propose de supprimer, à l’alinéa 2, les mots : « se voit confier la gestion ou ».

Si l’association de tous les acteurs concernés, et en particulier des pêcheurs, est nécessaire pour définir les modalités de gestion des réserves naturelles ayant une partie maritime, il est indispensable de maintenir le principe d’une gestion de ces réserves par des organismes d’intérêt général spécialisés dans la conservation de la nature. Or les comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins (CRPEM) sont des organismes professionnels qui ont pour mission principale de représenter les intérêts de la pêche professionnelle, au sens de l’article 912.2 a) du code rural et de la pêche maritime. Cette mission peut donc entrer en conflit avec celles que les CRPEM seraient amenés à assumer dans le cadre de la gestion de réserves naturelles marines.

De plus, on peut relever une contradiction avec l’article L. 332-8 du code de l’environnement, aux termes duquel des établissements publics, groupements d’intérêt public, syndicats mixtes, associations ou fondations peuvent se voir confier la gestion de réserves naturelles si, et seulement si, la protection du patrimoine naturel constitue leur objet statutaire principal. L’introduction de cet article créerait un précédent.

Mme la rapporteure. Partageant le point de vue de Mme Abeille, je ne vous infligerai pas une démonstration identique à l’appui de mon propre amendement, identique.

Mme la secrétaire d’État. La possibilité de se voir confier la gestion de réserves naturelles ayant une partie marine est une revendication ancienne des organismes socio-professionnels de la pêche et de la conchyliculture, qui souhaitent s’impliquer directement et fortement dans la démarche de protection de l’environnement marin. Certaines aires marines protégées, tel le plateau marin de Rochebonne, sont déjà gérées par des comités des pêches. Le projet de loi conforte d’ailleurs les missions de protection, conservation et gestion des milieux et écosystèmes de ces organisations professionnelles.

Toutefois, face aux craintes de certaines associations de protection de l’environnement, qui soulignent les risques de conflit d’intérêts, l’Assemblée nationale avait prévu, au profit des acteurs du secteur économique de la pêche et de l’aquaculture, une simple association à la gestion. Cette position constitue un compromis acceptable pour le Gouvernement. Le Sénat est revenu sur cette position en permettant à ces acteurs d’assurer seuls la gestion d’une réserve. Je suis donc favorable à ces amendements identiques.

La commission adopte les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CD116 de M. Arnaud Leroy.

M. Arnaud Leroy. Mon amendement s’inscrit également dans la réflexion sur le point de savoir qui est en droit, ou non, de gérer une réserve naturelle. Je pars du constat que les parcs marins se multiplient et qu’il est difficile de leur allouer des moyens, et propose donc l’agrément, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État, de personnes morales de droit privé qui seraient chargées de la gestion de réserves. Le but est de faire émerger une filière de sociétés spécialisées dans la gestion des espaces naturels maritimes.

Comment, en effet, nous assurerons-nous, demain, de la surveillance effective, voire de la valorisation, de ces espaces maritimes protégés, qui couvrent parfois des zones extrêmement importantes ? Le sujet inquiète la Marine nationale, qui doit veiller, sitôt qu’une zone est déclarée protégée, à ce qu’aucune activité illégale, telle que le prélèvement de stocks halieutiques, ne s’y déroule. Notre collègue Plisson, qui préside désormais un parc naturel marin, est familier de ces problèmes. Je crois que nous devons réfléchir à l’avenir de ces structures, sans nous interdire de susciter éventuellement l’émergence d’une filière privée, contrôlée, capable d’assister l’État dans ses missions.

Mme la rapporteure. Tel qu’il est rédigé, cet amendement semble ne concerner que les personnes morales de droit privé mentionnées aux premiers alinéas de l’article L. 332-8 du code de l’environnement, à savoir les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 ou fondations dont la protection du patrimoine naturel constitue l’objet statutaire principal.

Il semble donc avoir pour but de mettre en place une procédure d’agrément pour ces personnes, dans des conditions définies en Conseil d’État. Or il est déjà prévu par le code de l’environnement que les modalités d’application de l’article L. 332-8 sont fixées par décret en Conseil d’État.

Il me semble que la procédure prévue par votre amendement s’ajouterait déjà aux procédures existantes, qui relèvent du niveau réglementaire, ce qui complexifierait, voire rigidifierait excessivement le droit. Je souhaite par conséquent que vous le retiriez.

Mme la secrétaire d’État. La gestion d’une réserve naturelle est une activité à but non lucratif. En ce sens, l’octroi de la gestion fait l’objet d’une délégation de service public hors marché concurrentiel, ce qui exclut une ouverture large des possibilités de candidature.

Les obligations, notamment en termes de responsabilité ou de prérogatives de puissance publique, qui découlent de la gestion de ce service public ne diffèrent pas en fonction du statut du gestionnaire. Ainsi, le gestionnaire doit se doter d’agents commissionnés chargés du contrôle des infractions à la réglementation. Un tel pouvoir de sanction administrative ne saurait être confié à des personnes morales de droit privé. C’est pourquoi je demande le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 38 ainsi modifié.

Section 3
Autorisation des activités sur le plateau continental
et dans la zone économique exclusive

Article 40
(articles 1er, 2, 4 et 5 et articles 6 à 14 [nouveaux] de la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976
relative à la zone économique et à la zone de protection écologique
au large des côtes du territoire de la République)

Organisation des activités sur le plateau continental
et dans la zone économique exclusive

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Les 1° et 2° de l’article 40 modifient l’intitulé de la loi du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République (17) qui devient la loi « relative au plateau continental, à la zone économique exclusive et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République ». Le champ d’application de cette loi est désormais étendu au plateau continental, qui faisait déjà l’objet de la loi du 30 décembre 1968 relative à l’exploration du plateau continental et à l’exploitation de ses ressources naturelles (18).

Par ailleurs, les 4° à 6° de l’article 40 insèrent huit articles dans la loi du 16 juillet 1976. Celle-ci ne comprenait jusqu’ici que quatre articles et l’article 2 servait seulement à renvoyer à la loi du 30 décembre 1968 en disposant que : « les dispositions de la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l’exploration du plateau continental et à l’exploitation de ses ressources naturelles, à l’exception de l’article 1er de cette loi, ainsi que celles des articles L. 124-1 et L. 134-1 du code minier sont applicables au fond de la mer et à son sous-sol dans la zone économique définie à l’article 1er ci-dessus, sous réserve des compétences dévolues aux collectivités d’outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux Terres australes et antarctiques françaises par les dispositions statutaires qui leur sont applicables. ». Cette rédaction faisait écho au second alinéa de l’article 36 de la loi du 30 décembre 1968 qui dispose que « les dispositions de la présente loi sont applicables, à l’exception de l’article 1er, au fond de la mer et à son sous-sol dans la zone économique définie à l’article 1er de la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976. ».

Le 3° modifie l’article 2 de la loi du 16 juillet 1976 pour faire évoluer l’articulation avec la loi du 30 décembre 1968 : l’article 1er (19) n’est plus le seul article de la loi du 30 décembre 1968 dont l’application au fond de la mer et à son sous-sol dans la ZEE est exclue. Des sections relatives aux autorisations, aux redevances et aux sanctions pour les activités exercées dans la ZEE étant insérées dans la loi de 1976, le nouvel article 2 de la loi de 1976 prévoit désormais c’est non seulement l’article 1er de la loi du 30 décembre 1968 mais aussi les articles 2 (20), 24 et 27 de cette loi qui ne s’appliquent pas.

Les articles de la loi du 30 décembre 1968 qui continuent à s’appliquer à la ZEE sont essentiellement :

– les articles relatifs à la définition des installations et dispositifs et des règles de sécurité qui leur sont applicables (articles 3, 4 et 10 à 14) ;

– les articles relatifs aux lois applicables sur ces installations et dispositifs (articles 5 et 9) ;

– la possibilité de grever d’une hypothèque ces installations et dispositifs (article 8) ;

– les dispositions douanières et fiscales (article 15 à 19) ;

– les dispositions pénales et notamment celles applicables aux personnes qui auraient entrepris une activité en vue de son exploration ou de l’exploitation de ses ressources naturelles sans autorisation (articles 24, 25, 26) ou qui n’auraient pas respecté les règles de sécurité applicables (articles 29 à 32).

2. Les modifications apportées par le Sénat

Outre une série de corrections rédactionnelles, cinq modifications de fond ont été apportées à l’article 40 lors de son examen au Sénat.

a. Mise en place d’une autorisation unique

L’article 6 inséré dans la loi du 16 juillet 1976 dispose que : « toute activité entreprise sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive, en vue de l’exploration ou de l’exploitation des ressources naturelles ou de l’utilisation des milieux marins, est subordonnée à la délivrance préalable d’une autorisation ».

Il ajoute que les activités soumises à autorisation comprennent notamment « la construction, l’exploitation et l’utilisation d’îles artificielles, d’installations, d’ouvrages et de leurs installations connexes. ».

Une série d’amendements identiques (21) adoptés en séance publique a inscrit à l’article 6 le principe selon lequel les activités entreprises sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive en vue de l’exploration ou de l’exploitation des ressources naturelles ou de l’utilisation des milieux marins font l’objet d’une autorisation unique. Cette autorisation unique « tient lieu des autorisations, déclarations, approbations et dérogations nécessaires pour la construction, l’exploitation et l’utilisation d’îles artificielles, d’installations, d’ouvrages et de leurs installations connexes ». Cet amendement s’inscrit dans la continuité de la mesure prévue par l’article 18 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises (22) qui prévoit que le Gouvernement est habilité à mettre en place par ordonnance une procédure d’autorisation unique pour les installations de production d’énergie renouvelable en mer situées sur le domaine public maritime.

Cet amendement a recueilli un avis favorable de la part du Gouvernement et du Rapporteur, ce dernier rappelant toutefois que « la plupart des autorisations prévues par le code de l’environnement ne s’appliquent pas en zone économique exclusive » et que cette autorisation unique « permet surtout de répondre aux inquiétudes qui ont été exprimées » (23).

b. Ajout d’une condition au maintien en place d’éléments d’îles artificielles après l’expiration de l’autorisation

Le paragraphe 3 de l’article 60 de la Convention de Montego Bay (24) dispose que « les installations ou ouvrages abandonnés ou désaffectés doivent être enlevés afin d’assurer la sécurité de la navigation, compte tenu des normes internationales généralement acceptées établies en la matière par l’organisation internationale compétente. Il est procédé à leur enlèvement en tenant dûment compte aussi de la pêche, de la protection du milieu marin et des droits et obligations des autres États »

L’article 9 inséré dans la loi du 16 juillet 1976 définit les conditions dans lesquelles les îles artificielles, installations et ouvrages sont démantelés à l’expiration de l’autorisation et fixe les conditions dans lesquelles le site est remis en état.

Il précise que l’autorité administrative peut « décider du maintien sur site de certains éléments, dès lors qu’ils bénéficient aux écosystèmes et qu’ils ne portent pas atteinte à la sécurité de la navigation ».

Cette restriction au maintien sur site de certains éléments a été renforcée par l’adoption en commission de deux amendements identiques (25) de Mmes Claireaux et Billon qui permettent ce maintien uniquement s’il ne porte atteinte « ni à la sécurité de la navigation, ni à d’autres usages ». En effet, ces éléments sont susceptibles d’occasionner non seulement une gêne ou un danger pour la navigation mais aussi un obstacle pour la pratique de certaines activités comme la pêche. Cet amendement procède ainsi à une harmonisation de la rédaction de l’article 9 avec celle de l’article 13 relative aux câbles et pipelines sous-marins. (26)

c. Extension de la redevance créée par l’article 40 aux activités minières s’exerçant sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive

Le nouvel article 10 de la loi du 16 juillet 1976 dispose que « les activités soumises à autorisation en application de la présente section sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive sont assujetties au paiement d’une redevance annuelle au profit de l’Agence française pour la biodiversité ». Sont donc concernées toutes les activités « entreprise[s] sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive en vue de l’exploration ou de l’exploitation des ressources naturelles ou de l’utilisation des milieux marins » à l’exception des activités régies par le code minier et celles relevant de la politique commune de la pêche qui ne sont pas concernées par l’autorisation définie par l’article 6 (27).

L’amendement n° 439 de M. Ronan Dantec adopté en séance publique modifie cet article 10 pour assujettir les activités « régies par le code minier » à la redevance prévue cet article. La définition des activités concernées semble quelque peu floue. Son auteur a précisé en séance publique qu’il s’agissait de viser « l’exploration mais aussi l’exploitation au titre du code minier des ressources naturelles, biologiques ou non biologiques du fond de la mer ».

Une lecture littérale du texte fait considérer que, du fait du champ des activités couvertes par le code minier, il s’agit de soumettre à redevance :

– toutes les activités qui font l’objet d’une réglementation dans le code minier : les activités d’exploitation mais aussi celles d’exploration ou encore la conduite de travaux (28) ;

– toutes les activités qui concernent des substances dont le régime relève du code minier, c’est-à-dire, pour les substances situées dans le fond de la mer et le sous-sol :

o les substances relevant du régime légal des mines définies par l’article L. 111-1 du code minier (29) ;

o les substances relevant du régime des carrières dont, par exception au régime général, la recherche et l’exploration relèvent du code miner si elles se trouvent dans les fonds marins (30).

Les gîtes géothermiques définis par l’article L. 112-1 du code minier ne seraient par contre pas concernés car, si le régime des gîtes situés sur terre est défini par le code minier (31), les articles L. 125-1 et L. 134-13 de ce code disposent que le régime juridique de la recherche et de l’exploitation des gîtes situés dans la ZEE ou sur le plateau continental est défini par l’article 2 de la loi du 30 décembre 1968.

Par ailleurs, cet amendement conduit à soumettre à une double redevance l’exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux liquides dans la ZEE et sur le plateau continental. En effet, l’article L. 132-16-1 du code minier dispose que « pour les gisements en mer situés dans les limites du plateau continental […] les titulaires de concessions de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux sont tenus de payer annuellement à l’État, au profit de ce dernier et des régions, une redevance à taux progressif et calculée sur la production »

d. Attribution à l’Agence française de la biodiversité de la totalité du produit de la redevance définie par l’article 10 inséré dans la loi du 16 juillet 1976

Le premier alinéa de l’article 10 de la loi du 16 juillet 1976 dans sa rédaction résultant des travaux de l’Assemblée nationale prévoyait que la redevance était perçue « au profit de l’État ou de l’Agence française pour la biodiversité ».

Outre le champ de la redevance, l’amendement de M. Ronan Dantec a aussi modifié son attribution, en prévoyant qu’elle serait limitée à l’Agence française pour la biodiversité.

e. Prise en compte des externalités négatives pour l’environnement dans la fixation de la redevance définie par l’article 10 du 16 juillet 1976

L’avant-dernier alinéa de l’article 10 de la loi du 16 juillet 1976 dans sa rédaction résultant des travaux de l’Assemblée nationale prévoyait que « la redevance due pour les activités exercées sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l’autorisation ». Cette rédaction reprenait la rédaction de l’article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques qui s’applique au domaine public maritime (32).

L’amendement n° 439 de M. Ronan Dantec conduit à appliquer des règles différentes de celles du domaine public maritime pour la ZEE et le plateau continental. En effet, il substitue aux termes « avantages de toute nature procurés au titulaire de l’autorisation » les termes : « avantages de toute nature tirés de l’exploitation des ressources, de l’impact environnemental des activités concernées ainsi que du risque que font courir ces activités à l’environnement ».

Par ailleurs, il précise que « cette redevance est majorée si les activités concernées s’exercent dans le périmètre d’une aire marine protégée ».

Certaines aires marines protégées concernent des espaces inclus dans la ZEE. C’est par exemple le cas des parcs naturels marins, qui sont inclus dans la liste des aires marines protégées définie par le III de l’article L. 334-1 du code de l’environnement et qui, en application de l’article L. 334-3 du code de l’environnement « peuvent être créés dans les eaux placées sous la souveraineté ou la juridiction de l’État, ainsi que sur les espaces appartenant au domaine public maritime ». Par exemple, le parc naturel des Glorieuses situé dans les Terres australes et antarctiques françaises, à l’entrée du canal du Mozambique, s’étend jusqu’à la limite de la zone économique exclusive et couvre plus de 43 000 km2.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Une série d’amendements rédactionnels présentés par votre rapporteure a été adoptée ainsi qu’un amendement de M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement supprime l’extension de la redevance prévue par l’article 10 de la loi du 16 juillet 1976 aux activités minières s’exerçant sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive. Il a recueilli un avis favorable de la rapporteure qui a rappelé que la nouvelle rédaction de cet article issue des travaux du Sénat posait une série de problèmes juridiques et économiques.

Ainsi, l’expression « régies par le code minier » était trop floue et conduisait à viser non seulement les activités d’exploitation mais aussi celles d’exploration ou encore les activités de conduite de travaux qui, toutes, sont régies par le code minier.

Par ailleurs, il semblait illogique d’étendre la redevance prévue pour les activités qui font l’objet de l’autorisation de l’article 6 à des activités qui ne sont pas concernées par cette autorisation.

Enfin, l’instauration d’une telle mesure conduirait à soumettre certaines activités d’exploitation à une double taxation car l’article L. 132-16-1 du code minier prévoit déjà que l’exploitation des hydrocarbures offshore est soumise à une redevance.

*

* *

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD441, CD479, CD442 et CD480 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD555 de M. Denis Baupin.

Mme Laurence Abeille. Les éoliennes de plus de douze mètres sont soumises à deux procédures distinctes, d’urbanisme et d’environnement, ce qui constitue une source de complexité inutile pour les porteurs de projets et pour les services de l’État, y compris en ce qui concerne le permis de construire intégré dans l’autorisation unique créée par l’ordonnance du 20 mars 2014.

En effet, alors même que, en vertu du principe qu’une autorisation n’ouvre qu’un régime de voies et délais de recours, seule l’autorisation unique en cours d’expérimentation pourra être attaquée et non chacune des autorisations qui la composent, le juge aura la faculté de prononcer une annulation partielle de cette autorisation, portant par exemple sur les aspects du dossier relatifs au permis de construire. Or l’annulation partielle, si elle évite l’annulation de l’ensemble de l’autorisation, n’en aboutit pas moins à l’arrêt du projet, dans l’attente d’une nouvelle instruction des aspects visés, sans que l’on sache à ce jour comment l’administration instruira ce type de corrections partielles au sein d’une procédure d’autorisation unique.

Il suffirait pourtant que l’administration s’assure, comme c’est le cas dans le régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), que les éoliennes sont compatibles avec les dispositions d’urbanisme. Au-delà de ce contrôle, les dispositions propres au permis de construire sont redondantes pour les raisons qui suivent.

D’une part, l’article L. 511-1 du code de l’environnement prévoit que l’ICPE protège la commodité du voisinage, la santé, la sécurité et la salubrité publiques, l’agriculture, la nature, l’environnement et les paysages, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. Ainsi, par exemple, la prise en compte par le permis de construire de la sécurité publique, en vertu de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme, ou des paysages, en vertu de l’article R. 111-27 du même code, est parfaitement redondante et inutile dès lors que le régime ICPE s’applique.

D’autre part, les éoliennes soulèvent essentiellement un problème d’exploitation, non de construction. Le juge a eu l’occasion de confirmer que les éoliennes, contrairement aux ICPE exploitées dans un immeuble, ne sont pas des bâtiments. Il n’y a donc pas lieu que le contrôle opéré par le permis de construire soit mis en œuvre.

Dispenser les éoliennes de toute formalité au titre du droit de l’urbanisme, à l’instar du droit applicable aux ouvrages d’infrastructure terrestres, permettra d’aboutir pleinement à la simplification visée par l’autorisation unique, en évitant les difficultés résultant d’annulations ou de demandes de modifications partielles, dont le traitement, à ce jour inconnu, risque de bloquer un grand nombre de projets éoliens.

Enfin, la suppression des formalités d’urbanisme contribuera à débloquer le potentiel éolien dans les départements d’outre-mer, en particulier pour le remplacement d’éoliennes exploitées depuis longtemps par de nouvelles éoliennes plus performantes.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose d’exonérer l’implantation des éoliennes en mer de l’obligation d’obtenir un permis de construire. Comme il tend à insérer un alinéa dans l’article 6 nouveau de la loi du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, les projets d’éoliennes qu’il concerne sont donc ceux qui pourraient être réalisés dans la zone économique exclusive (ZEE) ou sur le plateau continental.

Or le régime de la haute mer s’applique à la colonne d’eau surjacente pour la partie du plateau continental située au-delà des limites de la ZEE, et la France ne peut donc pas imposer de permis de construire pour des éoliennes flottantes dans cette zone. Pour ce qui concerne l’implantation d’éoliennes dans la ZEE, l’article 40 du présent projet de loi prévoit la mise en place d’une procédure d’autorisation unique. Par contre, il n’exige en aucun cas un permis de construire.

L’obligation de permis de construire ne vaut que pour l’implantation d’éoliennes sur le domaine public maritime, qui est hors du champ couvert par la loi du 16 juillet 1976 dans laquelle votre amendement insère un alinéa. Cet amendement étant sans objet, je vous demanderai de le retirer.

Mme la secrétaire d’État. L’article 40 a pour objet de mettre en place un régime d’autorisation pour les activités en mer dans la zone économique exclusive (ZEE) et sur le plateau continental. Cet article s’inscrit dans le cadre des dispositions prévues par la Convention des Nations unies pour le droit de la mer, qui s’appliquent à ces espaces maritimes.

L’amendement vise à ajouter un alinéa à cet article du projet de loi, afin de prévoir une dispense des formalités de permis de construire au titre du code de l’urbanisme et au titre de la réglementation relative aux installations classées pour les éoliennes de plus de douze mètres.

Le ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer est favorable à la suppression du permis de construire pour les éoliennes, dès lors que celles-ci font l’objet d’une autorisation environnementale. Mais cette suppression doit être organisée de manière cohérente à l’occasion de la pérennisation de l’autorisation environnementale unique prévue par l’article 103 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Cette suppression a été proposée en début d’année par la mission d’évaluation des expérimentations et par le groupe de travail multipartite chargé de leur suivi.

Indépendamment de la mise en place de cette autorisation unique, le permis de construire ne peut être supprimé immédiatement. Il est en effet indispensable de prévoir que certains sujets traités aujourd’hui uniquement par le code de l’urbanisme seront transférés dans l’autorisation environnementale. C’est le cas, par exemple, des obstacles à la navigation aérienne.

La suppression du permis de construire pour les éoliennes sera donc inscrite, comme le permet l’habilitation législative obtenue, dans l’ordonnance prise en application de l’article 103 de la loi relative à la croissance, que le Gouvernement soumettra à consultation dans les prochaines semaines.

En conséquence, je demande le retrait de l’amendement.

M. Martial Saddier. Dans la mesure où l’amendement traite d’urbanisme dans un texte relatif à la biodiversité, j’estime qu’il s’agit d’un cavalier législatif.

Je dénonce, une nouvelle fois, le fait que le groupe écologiste profite de la moindre fenêtre de tir pour déposer des amendements visant à ouvrir la terre entière aux éoliennes. Nous sommes favorables aux éoliennes, à condition qu’elles soient encadrées et que l’ensemble des paysages et des milieux dans lesquels elles se trouvent soit respecté. Cet amendement n’a pas sa place ici.

M. Philippe Plisson. Je serai bref, puisque Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteure ont demandé le retrait de l’amendement.

J’ai moi-même défendu un projet d’éoliennes pendant six ans. Je suis allé pour cela devant la cour administrative d’appel et devant le Conseil d’État, j’ai gagné, mais les éoliennes ne sont toujours pas construites ! D’aucuns ont beau prétendre que le pays en est couvert, mais tout cet empilement de procédures ayant pour but d’empêcher leur construction fait qu’aujourd’hui nous sommes en retard et qu’il est urgent de prendre des mesures de simplification.

M. Julien Aubert. Après avoir tenté de couvrir la terre d’éoliennes, on essaie d’en couvrir les mers ! (Murmures)

Nous avons déjà eu ce débat, à propos de ce type d’amendements : à la loi Macron, à la loi relative à la transition énergétique, aujourd’hui au présent projet de loi la biodiversité. Je ne suis pas certain que le citoyen qui écoutera nos débats verra un lien entre la construction d’éoliennes en mer et la protection de la biodiversité.

Une question juridique se pose en ce qui concerne la convention de Montego Bay sur le droit de la mer et l’articulation entre le plateau continental et la ZEE, s’agissant notamment du critère bathymétrique au-delà des 150 milles marins.

En écoutant l’argumentation de Mme la rapporteure, j’ai cru comprendre qu’il n’y avait pas besoin d’une demande de permis de construire. Une telle libéralisation pose question, car il faut faire attention à ce que l’on fait dans les ZEE et veiller à l’aspect environnemental. Je ne suis pas certain que la création de nombreux champs d’éoliennes soit la meilleure manière de protéger les fonds marins.

Je m’étonne enfin, Madame la secrétaire d’État, de vous entendre dire que la libéralisation de ce type de projet sera prévue dans le cadre d’une ordonnance. Je doute que cet aspect des choses soit vraiment mis en lumière dans le débat public, et j’estime que ces procédures ne sont pas superfétatoires, mais complémentaires.

M. Arnaud Leroy. S’il y a quelque chose à encadrer aujourd’hui, Monsieur Martial Saddier, ce sont plutôt les maquettes d’éoliennes, parce que nous n’en avons pas beaucoup dans notre pays… (Rires)

Quand vous étiez aux affaires, la France a lancé des appels d’offres pour l’éolien offshore. Souvenez-vous, c’était la grande fête, nous allions avoir des champions nationaux... Las, les appels d’offres ont été lancés en 2010, et il n’y a toujours pas d’éolienne marine en fonctionnement dans notre pays.

Nous avons eu ce débat lors de l’examen de la proposition de loi pour l’économie bleue. Nous sommes en train de passer à côté de la possibilité d’avoir une filière, et certains de nos champions nationaux auraient peut-être besoin, aujourd’hui, d’avoir un nouveau poumon : Alstom, fleuron que nous avons vendu, mais aussi Areva.

Des engagements ont été pris par de nombreux élus locaux. Je vous demanderai, Madame la secrétaire d’État, de nous épauler sur la question de l’éolien offshore, notamment s’il était réduit, demain, à sa plus simple expression dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) qui sera présentée prochainement, faute de quoi nous aurons de nouveau l’occasion, dans dix ans, de décrire la non-émergence de cette filière dans notre pays, alors que nous avions, comme pour tant d’autres expériences industrielles, des années d’avance. Nous sommes en train de rater le marché national et le marché à l’export. Si nous croyons pouvoir contenter tout le monde avec la seule énergie nucléaire, nous nous mettons le doigt dans l’œil jusqu’au coude.

Mme Catherine Quéré. Sous la précédente législature, nous sommes allés à quinze en voyage d’études au Danemark, où nous avons pu voir, enthousiasmés, deux fermes éoliennes, l’une de cent, l’autre de quatre-vingt-dix éoliennes, installées depuis plus de trente ans.

Le maire du port où nous avons pris le bateau nous a expliqué que cela avait permis de créer 10 000 emplois. Les éoliennes ont été installées dans des endroits où les pêcheurs ne pouvaient pas aller, et sont devenues d’extraordinaires réserves de poissons. Nous prenons beaucoup de retard dans ce domaine, et je le regrette.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ce n’est pas d’éoliennes que la France est couverte, mais de centrales nucléaires… (Rires)

Madame Abeille, retirez-vous l’amendement ?

Mme Laurence Abeille. Oui, car ce qui a été dit par Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteure vaut engagement.

Il faut régler très rapidement ce problème. Nous ne pouvons pas nous contenter d’aller admirer ce qui se fait dans d’autres pays européens, tout en gardant sur notre territoire des centrales vieillissantes, que nos voisins nous demandent aujourd’hui de fermer rapidement. Nous attendons les dispositifs qui permettront l’émergence des énergies renouvelables en France.

L’amendement CD555 est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CD639 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Il convient d’engager des recherches sur le milieu marin avant de lancer des projets dans la zone économique exclusive. Tel est le sens de mon amendement.

Mme la rapporteure. Sur le fond, nous sommes d’accord, mais la rédaction est floue. Je vous propose de le retirer pour le réécrire d’ici à la séance publique.

Mme la secrétaire d’État. L’objectif est louable, mais je partage l’avis de la rapporteure : l’amendement est trop imprécis quant à la nature de la « recherche associée ».

M. Martial Saddier. Sur le principe, en effet, l’amendement est louable, mais la question ne relève-t-elle pas du décret ?

M. Arnaud Leroy. Veillons à ne pas multiplier les dispositifs, s’agissant notamment des mesures de prévention sur certains sites en mer.

Le manque de données sur la mer et les écosystèmes marins est une question essentielle. Pour tirer le meilleur bénéfice et attribuer la meilleure protection, il nous faut progresser dans la connaissance des espaces océaniques et maritimes.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD443, CD444, CD478 et CD445 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD249 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Il n’est pas justifié d’assujettir, à la redevance annuelle prévue, les activités régies par le code minier s’exerçant sur le plateau continental ou en ZEE, car des redevances en matière d’extraction sont d’ores et déjà à la charge de l’exploitant.

Je propose donc de revenir à l’équilibre initial du projet de loi.

Mme la rapporteure. L’objet de l’amendement est de supprimer l’assujettissement des activités régies par le code minier à la redevance visée à l’article 10 nouveau de la loi du 16 juillet 1976.

J’émets un avis favorable, pour plusieurs raisons.

D’abord, l’expression « régies par le code minier » est un peu floue. Elle conduit à viser, non seulement les activités d’exploitation, mais aussi celles d’exploration, ou encore les activités de conduite de travaux. Toutes sont visées par le code minier.

Ensuite, il semble illogique d’étendre la redevance prévue pour les activités qui font l’objet de l’autorisation de l’article 6 de la loi du 16 juillet 1976 à des activités non concernées par cette autorisation. Une telle mesure aurait des effets économiques néfastes, notamment celui d’assujettir certaines activités d’exploitation à une double taxation. En effet, l’article L. 132-16-1 du code minier dispose déjà que l’exploitation des hydrocarbures offshore est soumise à une redevance.

Concernant l’extraction, dans la ZEE ou sur le plateau continental, de substances de mines autres que les hydrocarbures, et de substances de carrières, pour lesquelles aucune taxation n’est prévue par le code minier, les renseignements qui m’ont été transmis par les services compétents indiquent que ces activités ne sont pas pratiquées à l’heure actuelle.

Mme la secrétaire d’État. Il est proposé d’exempter, sans contrepartie, les activités minières s’exerçant sur le plateau continental et la ZEE de toute redevance au profit de l’Agence française pour la biodiversité. Or le paiement de la redevance en ZEE et sur le plateau continental correspond au paiement pour services rendus par l’occupation privative temporaire accordée par l’État sur des espaces dont il a la responsabilité.

C’est un dispositif similaire à celui prévu pour les activités dans le domaine public maritime.

La rédaction de l’alinéa 26 a été introduite par le Sénat, mais il était envisagé d’en revoir la rédaction pour éviter de faire subir une double redevance à certaines activités déjà assujetties à une redevance au titre du code minier, ce qui recouvre, notamment, la question des hydrocarbures.

Je suis donc défavorable à l’amendement, mais nous reviendrons certainement sur le sujet en séance pour trouver un dispositif adapté permettant d’éviter la double redevance.

M. Jean-Marie Sermier. Il ne serait pas raisonnable, alors que nous réfléchissons depuis plusieurs années sur l’évolution du code minier, d’accroître aujourd’hui la taxation de ces opérations. Il importe de préciser quelles taxes doivent être payées et par qui, et surtout à qui elles reviennent. Si nous procédons « par petits bouts », nous aurons ensuite plus de mal à rééquilibrer le code minier.

M. Martial Saddier. Sur le fond, nous ne sommes pas en désaccord avec Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteure, que je remercie pour son avis favorable.

Cela étant, j’ai le sentiment que la balle est dans votre camp, Madame la secrétaire d’État. Je pense que la commission serait bien inspirée d’adopter l’amendement, ce qui obligerait le Gouvernement à présenter en séance un amendement intelligent, que nous soutiendrions avec force et loyauté.

M. Julien Aubert. Mme la secrétaire d’État a parlé des activités fossiles, mais elle n’a pas caractérisé les autres activités qui ne seraient pas soumises à redevance et qui relèveraient tout de même du code minier. S’agirait-il des nodules polymétalliques, qui ne feraient pas partie des hydrocarbures conventionnels ?

Mme la secrétaire d’État. Il s’agit essentiellement des activités de prélèvement de granulats.

Par ailleurs, nous allons réfléchir à ce que nous pouvons faire d’ici à la séance pour trouver le moyen, non d’augmenter les redevances, mais de les aligner sur ce qui se passe au niveau du domaine public maritime, en évitant, bien sûr, de faire acquitter une seconde redevance à ceux qui en paient déjà une.

Mme la rapporteure. Les granulats et les nodules polymétalliques seront peut-être une importante activité économique dans cinq, dix ou quinze ans, mais nous n’allons pas taxer aujourd’hui des choses qui n’existent pas encore.

Voyons plutôt si nous pouvons ajouter la taxation des activités évoquées, afin d’éviter l’écueil évoqué par Mme la secrétaire d’État.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD446, CD447, CD448, CD449, CD452 et CD453 de la rapporteure. Les amendements CD450 et CD451 ayant été retirés, elle adopte alors l’article 40 ainsi modifié.

Section 4
Encadrement de la recherche en mer

Article 41
(articles L. 251-1 et L. 251-2 et L. 251-3 [nouveaux] du code de la recherche)

Sanction des activités de recherche non autorisées et transmission des données collectées aux autorités publiques

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 41, qui n’a fait l’objet lors de son examen par l’Assemblée nationale que d’amendements rédactionnels, renforce le régime juridique encadrant la recherche en mer en insérant deux articles dans le code de la recherche.

Le premier punit de 15 000 euros d’amende l’exercice non autorisé d’une activité de recherche scientifique dans les espaces maritimes sous souveraineté ou juridiction nationales.

Le second subordonne la délivrance d’autorisations pour la recherche en mer à l’engagement de communiquer les renseignements et données recueillis et les éléments nécessaires à leur exploitation aux organismes scientifiques publics concernés. Il précise les obligations qui s’imposeront aux organismes publics qui recueilleront ces données.

Par ailleurs, l’article L. 251-1 code de la recherche fait l’objet de modifications rédactionnelles.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Cet article n’a fait l’objet que d’un amendement lors de son examen au Sénat. Cet amendement, déposé par le Gouvernement, a supprimé un renvoi inutile à un décret en Conseil d’État.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 41 a fait l’objet de deux amendements rédactionnels de votre rapporteure.

*

* *

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD454 et CD456 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 41 ainsi modifié.

Section 5
Protection des ressources halieutiques et zones de conservation halieutiques

Article 43
(articles L. 911-2 et L. 924-1 à L. 924-5 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime)

Intégration de la politique de la pêche dans un cadre écosystémique
et mise en place des zones de conservation halieutiques

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Partant du constat que le statut d’aire marine protégée ne permet pas de prendre des mesures réglementaires pour protéger les zones d’intérêt halieutique des pressions auxquelles elles sont confrontées et, qu’a contrario, le statut de réserve naturelle est trop protecteur car il est destiné à sanctuariser des espaces de manière pérenne, le Gouvernement a souhaité mettre en place un zonage intermédiaire.

Pour ce faire, l’article 43 a inséré un nouveau chapitre dans le titre II du livre IX du code rural et de la pêche maritime consacré à la conservation et à gestion des ressources halieutiques.

Ce chapitre fixe le régime juridique applicable aux zones de conservation halieutique.

Une zone de conservation halieutique est définie par l’article L. 924-1 comme « un espace maritime et, le cas échéant, fluvial pouvant s’étendre jusqu’à la limite des eaux territoriales qui présente un intérêt particulier pour la reproduction, la croissance jusqu’à maturité ou l’alimentation d’une ressource halieutique et dont il convient de préserver ou restaurer les fonctionnalités afin d’améliorer l’état de conservation des ressources concernées ».

L’article L. 924-2, qui a été modifié à l’initiative de la rapporteure lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, prévoit que « la zone est constituée des substrats nécessaires à l’espèce en cause, de la colonne d’eau surjacente ou, le cas échéant, de ces deux compartiments ». Cette rédaction permet d’éviter que la protection concomitante du substrat et de la colonne d’eau ne soit imposée en manière systématique. Cela permet de prendre en compte les cas où seul l’un des deux compartiments est nécessaire à une espèce pour réaliser une phase de son cycle de vie

L’article L. 924-3 fixe les conditions dans lesquelles une zone peut être classée en zone de conservation halieutique. À l’initiative de la rapporteure, il a été précisé que le projet de création d’une zone de conservation halieutique est fondé sur une analyse qui en établit l’importance « au regard de l’intérêt mentionné à l’article L. 924-1 du [code rural et de la pêche maritime] » c’est-à-dire de l’ « intérêt particulier pour la reproduction, la croissance jusqu’à maturité ou l’alimentation d’une ressource halieutique » d’une zone « dont il convient de préserver ou restaurer les fonctionnalités afin d’améliorer l’état de conservation des ressources concernées, en tenant compte de l’intérêt du maintien des actions et activités existantes ». Cette rédaction permet de faire primer les critères scientifiques sur les intérêts économiques.

Le classement en zone de conservation halieutique est effectué par un décret qui a trois objets :

– il définit le périmètre de la zone, les objectifs de conservation et la durée du classement ;

– il réglemente ou interdit les actions et activités susceptibles d’être exercées dans la zone dans la mesure nécessaire à la réalisation des objectifs de préservation ou de restauration des fonctionnalités halieutiques de cette zone ;

– il désigne une autorité administrative chargée d’assurer le suivi des mesures prévues par le classement et l’évaluation périodique de leur mise en œuvre et de leurs résultats.

L’article L. 924-4 du code de l’environnement définit les conditions de modification du périmètre ou de la réglementation de la zone de conservation halieutique ainsi que les conditions de prorogation du classement.

Enfin, l’article L. 924-5 renvoie à décret en Conseil d’État pour la fixation des modalités d’application du chapitre sur les zones de conservation halieutiques.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article 43 a fait l’objet de deux modifications de fond :

– l’amendement n° 229 rect. bis de Mme Billon, adopté en séance publique avec un avis favorable du Gouvernement et de la commission, a prévu que le bureau du Conseil national de la mer et des littoraux serait consulté pour tout décret sur le classement en zone de conservation halieutique ;

– l’amendement n° COM-36 de Mme Primas, adopté en commission, a conduit à transférer à l’autorité administrative déconcentrée la définition des mesures de réglementation ou d’interdiction des activités dans la zone de conservation halieutique.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 43 a fait l’objet de trois amendements de votre rapporteure : deux amendements rédactionnels et un amendement rétablissant les dispositions relatives à la consultation du public sur les modifications du périmètre et de la réglementation de la zone de conservation halieutique ainsi que les dispositions relatives à la prorogation du classement, qui avaient été supprimées au Sénat par l’adoption d’un amendement de Mme Sophie Primas.

*

* *

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD457 de la rapporteure.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD411 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Cet amendement vise à concilier l’objectif de protection environnementale des zones de conservation halieutique avec l’exercice d’activités et d’actions existantes et nouvelles pouvant intervenir dans la zone.

Mme la rapporteure. Il a pour objet de renforcer la prise en compte des activités économiques lors de l’analyse préludant à l’élaboration du projet de création d’une zone de conservation halieutique.

Ce faisant, il va à l’encontre des modifications que l’Assemblée avait apportées en première lecture à l’alinéa 7 du présent article dans le but de faire primer, dans ladite analyse, les critères scientifiques sur les intérêts économiques.

Je ne puis que donner un avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Mon avis est également défavorable. Il n’est pas possible de juger de l’intérêt du maintien d’activités qui n’existent pas encore.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD503 de Mme Laurence Abeille et CD1004 du Gouvernement.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement est très proche de l’amendement CD1004 du Gouvernement, que je trouve même plus satisfaisant et auquel je suis prête à me rallier.

Le préfet maritime pouvant être maître d’œuvre de certaines activités en mer, il n’est pas logique qu’il soit aussi l’autorité environnementale permettant de réglementer les activités sur le site.

Mme la rapporteure. Il s’agit de revenir au texte que l’Assemblée avait adopté en première lecture. Compte tenu de la proximité des deux amendements, je suggère à Mme Laurence Abeille de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Après réflexion, le Gouvernement a décidé de retirer l’amendement CD1004. Il s’agit de trouver un bon équilibre entre, d’une part, la simplicité et la clarté du processus de création de zones de conservation halieutiques et, d’autre part, l’efficacité de ce processus et l’application du principe de subsidiarité.

Nous sommes très sensibles au reproche d’une trop grande centralisation. Nous pensons qu’il faut plus de subsidiarité et de proximité géographique. Dans certains cas, par exemple pour la pêche, certaines mesures peuvent être définies de façon plus pertinente au niveau local, notamment par les préfets.

Le Gouvernement a entendu l’appel à une gestion moins centralisée, mais des instructions pourraient être adressées aux services déconcentrés pour encadrer les mesures que les préfets définiront.

L’amendement CD1004 est retiré.

Mme Laurence Abeille. Dans ces conditions, je maintiens mon amendement et invite la commission à le voter. (Sourires)

M. Julien Aubert. Mme la secrétaire d’État m’a reproché tout à l’heure la formulation que j’ai employée à propos de l’exercice d’activités existantes ou nouvelles pouvant intervenir dans la zone. Elle a pourtant repris la même rédaction. Où est la cohérence ?

La commission rejette l’amendement CD503.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD458 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD597 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le Sénat a réécrit l’alinéa 14 en supprimant les dispositions relatives à la consultation du public sur les modifications du périmètre et de la réglementation de la zone de conservation halieutique, ainsi que les dispositions relatives à la prorogation du classement. Je propose de rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement. Puis elle adopte l’article 43 ainsi modifié.

Article 43 bis
Rapport relatif aux activités d’extraction de granulats marins

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Lors de l’examen en commission à l’Assemblée nationale, un article 43 bis a été inséré dans le texte à l’initiative de Mme Viviane Le Dissez. Il prévoit la remise au Parlement d’un rapport évaluant l’impact environnemental et économique sur le littoral et l’écosystème marin des activités d’exploration ou d’exploitation des ressources minérales.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Cet article a été supprimé en commission à l’initiative du rapporteur qui a considéré que l’élaboration du guide méthodologique pour l’élaboration de plans de gestion durable des granulats marins par façade maritime actuellement en cours était une réponse suffisante à cette problématique.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 43 bis a été rétabli par l’amendement n° CD598 de la rapporteure.

*

* *

La commission examine l’amendement CD598 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de rétablir cet article, supprimé par le Sénat, et qui prévoyait la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement évaluant l’impact environnemental et économique sur le littoral et l’écosystème marin des activités d’exploration ou d’exploitation des ressources minérales.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement, et l’article 43 bis est ainsi rétabli.

Article 44
(articles L. 942-1, L. 942-4, L 942-10, L. 945-4-1 [nouveau]
et L. 945-5 du code rural et de la pêche maritime)

Dispositions de coordination

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’introduction d’un chapitre sur les zones de conservation halieutiques dans le code rural et de la pêche maritime a rendue nécessaire l’adaptation du dispositif de contrôle et de sanctions prévu par le titre IV du livre IX du code. L’article 44 procède à ces mesures de coordination.

Lors de son examen à l’Assemblée nationale, il a fait l’objet d’amendements rédactionnels de la rapporteure et d’un amendement du Gouvernement qui a élargi les attributions des gardes jurés et a rapproché leur statut de celui des gardes particuliers assermentés.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article 44 n’a fait l’objet que d’amendements rédactionnels déposés par le rapporteur.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 44 a fait l’objet d’une série d’amendements rédactionnels de la rapporteure.

*

* *

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD459, CD460, CD1074, CD461 et CD476 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 44 ainsi modifié.

Article 45
(article L. 334-1 du code de l’environnement)

Attribution du statut d’aire marine protégée aux zones de conservation halieutique

Les aires marines protégées ont été créées par la loi du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux (33). Elles constituent un réseau animé par l’Agence des aires marines protégées, établissement public national à caractère administratif. Cette agence peut même se voir confier la gestion directe d’aires marines protégées (34). L’article L. 334-4 du code de l’environnement prévoit d’ailleurs que la gestion des parcs naturels marins ne peut être assurée que par cette agence.

Le III de l’article L. 334-1 du code de l’environnement définit la liste des aires marines protégées qui comprennent :

– les parcs nationaux ayant une partie maritime ;

– les réserves naturelles ayant une partie maritime ;

– les arrêtés de biotopes ayant une partie maritime ;

– les parcs naturels marins ;

– les sites Natura 2000 ayant une partie maritime ;

– les parties maritimes du domaine relevant du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres.

L’article 45 ajoute à cette liste les zones de conservation halieutiques créées par l’article 43 du projet de loi.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 45 a été réécrit lors de son examen au Sénat par des amendements du rapporteur, adoptés respectivement en commission et en séance. Outre une série d’améliorations rédactionnelles, ces amendements ajoutent deux types d’espaces à la liste des aires marines protégées définies par le III de l’article L. 334-1 du code de l’environnement.

En premier lieu, ils insèrent dans cette liste les parties maritimes des parcs naturels régionaux. Depuis la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (35), les parcs naturels régionaux peuvent comprendre un espace maritime adjacent à leur territoire terrestre ou des espaces appartenant au domaine public maritime naturel de l’État. Pour le Rapporteur, cette évolution doit « permettre aux gestionnaires de ces […] espaces de bénéficier de l’expertise de l’Agence française de la biodiversité et de participer au réseau qu’elle anime » et « d’intégrer ces espaces dans les tableaux de bord du réseau d’aires marines protégées, afin d’en améliorer le pilotage et l’efficience » (36).

En second lieu, ces amendements ajoutent à cette liste les réserves nationales de chasse et de faune sauvage ayant une partie maritime (37) (définies à l’article L. 422 27 du code de l’environnement). Il ne s’agit pas d’une mesure nouvelle mais de l’inscription au niveau législatif d’une disposition prévue par l’article 2 de l’arrêté du 3 juin 2011 portant identification des catégories d’aires marines protégées entrant dans le champ de compétence de l’Agence des aires marines protégées (38).

3. La position de votre commission en deuxième lecture

La rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

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La commission adopte l’article 45 sans modification.

Article 46 bis
(article L. 321-2 du code de l’environnement)

Perception de la taxe sur le transport de passagers

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

La taxe sur le transport de passagers, définie par l’article 285 quater du code des douanes (reproduit à l’article L. 321-12 du code de l’environnement) a été créée par la loi « Barnier » du 2 février 1995 (39). Il s’agit d’une mesure de fiscalité écologique qui permet de faire contribuer les passagers embarquant à destination d’espaces naturels protégés, au financement de la protection de ces espaces. Elle est due par les entreprises de transport public maritime et est ajoutée au prix demandé aux passagers. Elle est assise sur le nombre de passagers embarqués à destination :

– d’un site naturel classé ou inscrit ;

– d’un parc national ;

– d’une réserve naturelle ;

– d’un site du domaine relevant du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou sur lequel le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres a instauré une servitude de protection ;

– d’un port desservant exclusivement ou principalement un espace appartenant à une de ces quatre catégories.

L’avant-dernier alinéa de l’article 285 quater prévoit que « la taxe est perçue au profit de la personne publique qui assure la gestion de l’espace naturel protégé ou, à défaut, de la commune sur le territoire de laquelle se trouve le site et est affectée à sa préservation ».

L’article 46 bis, introduit lors de l’examen du texte en commission à l’Assemblée nationale à l’initiative de Mme Viviane Le Dissez, complète cet alinéa en prévoyant que cette taxe « peut être perçue par le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres pour les sites qui le concernent ».

Par ailleurs, cet amendement étend l’application de la taxe à Mayotte.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article 46 bis n’a fait l’objet que d’un amendement qui a remplacé la reproduction par l’article L. 321-12 du code de l’environnement de l’article 285 quater du code des douanes par un simple renvoi à cet article.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure salue l’initiative du rapporteur du Sénat, qui contribue à améliorer la clarté de la loi. La pratique du « code suiveur » est en effet une source de complexité et d’insécurité juridique. Les modifications d’articles reproduits dans des « codes suiveurs » risquant de ne pas être reprises dans les retranscriptions qui en sont faites, il importe de remplacer systématiquement les retranscriptions d’articles par des renvois.

Elle a proposé l’adoption de l’article sans modification.

*

* *

La commission adopte l’article 46 bis sans modification.

Section 6
Protection des espèces marines

Article 46 quater
Équipement des navires avec un dispositif anticollision avec les cétacés

1. Les dispositions adoptées au Sénat

Dans les années 1980, il a été constaté que de nombreux mammifères marins d’espèces diverses fréquentaient le bassin corso-liguro-provençal qui subit une pression élevée liée aux nombreuses activités humaines (utilisation de certaines techniques de pêche, pollution, urbanisation, collisions avec les navires,…). La France, l’Italie et la Principauté de Monaco ont donc signé un accord le 25 novembre 1999 (40) pour créer dans cette zone un sanctuaire pour ces mammifères, dit « sanctuaire Pelagos ». Cet accord est entré en vigueur le 21 février 2002.

Il vise à instaurer des actions concertées et harmonisées entre ces trois pays pour la protection des cétacés et de leurs habitats contre toutes les causes de perturbations : pollutions, bruit, captures et blessures accidentelles,… Le sanctuaire doit concilier le développement harmonieux des activités socio-économiques avec la protection nécessaire des habitats et des espèces qui y vivent.

Un sanctuaire du même type, le « sanctuaire Agoa » a été créé dans les eaux des Antilles en 2010. Sa création a été officialisée le 5 octobre 2010 à Montego Bay par une déclaration de la France faite lors de la conférence des parties du protocole relatif aux aires et espèces spécialement protégées (41). Le sanctuaire Agoa a aujourd’hui le statut d’ « aire marine protégée ».

L’article 46 quater, introduit par le Gouvernement lors de l’examen du texte en séance publique, prévoit la mise en place à titre expérimental d’un dispositif de partage des positions visant à éviter les collisions avec les cétacés pour les navires de l’État qui naviguent dans la partie sous juridiction française des sanctuaires Pélagos et Agoa.

Cet article prévoit aussi que, sur la base de cette expérimentation, un rapport doit être remis d’ici à 2017 sur l’extension de ce dispositif aux navires de commerce et de grande plaisance.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

À l’initiative de votre rapporteure, un amendement de rédaction globale de cet article a été adopté. Il vise à apporter une série de précisions rédactionnelles à l’article introduit au Sénat à l’initiative du Gouvernement et à définir précisément le cadre de l’expérimentation en fixant une durée.

Par ailleurs, dans un objectif de coordination de ce projet de loi avec la proposition de loi pour l’économie bleue de M. Arnaud Leroy (42), texte actuellement en navette sur lequel l’urgence a été déclarée, l’amendement de réécriture supprime la phrase de l’article 46 quater qui prévoyait que le rapport sur l’expérimentation du dispositif sur les navires d’État débouche sur des propositions d’extension à d’autres types de navires. Il s’inspire des mesures proposées par l’article 22 quinquies de cette proposition de loi pour étendre l’expérimentation du dispositif anti-collision à une partie des navires de commerce.

*

* *

La commission examine l’amendement CD838 de M. Lionel Tardy, tendant à supprimer l’article.

M. Lionel Tardy. La mise en place, sur les navires de l’État, d’un dispositif empêchant les collisions avec les cétacés ne me semble pas relever de la loi. Seule la généralisation d’un tel dispositif aux navires de commerce, qui sera envisagée dans un rapport à l’issue de l’expérimentation, nécessitera éventuellement une disposition législative. Je m’étonne que cet article ait été ajouté par le Sénat sur proposition du Gouvernement.

Mme la rapporteure. Je suis d’autant plus défavorable à cet amendement que je propose, par l’amendement CD599 rectifié qui vient immédiatement après, de réécrire cet article, notamment pour le mettre en cohérence avec la proposition de loi d’Arnaud Leroy pour l’économie bleue, adoptée en janvier dernier par l’Assemblée nationale et qui est en ce moment examinée au Sénat, en étendant précisément l’expérimentation des dispositifs anticollision à certains navires de commerce, et en renonçant à la demande de rapport, car il est compliqué de faire des rapports dans le cadre d’une expérimentation.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable également.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD599 rectifié de la rapporteure.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement, qui améliore la rédaction du projet de loi, ne pose pas de problème au Gouvernement.

Parallèlement, certaines dispositions de la proposition de loi portée par Arnaud Leroy concernent d’autres navires que ceux de l’État. Nous devons, cela dit, choisir, d’ici à la séance publique, le vecteur législatif ainsi que la nature des dispositions à retenir. Doit-on aller au-delà de l’expérimentation ? La question se pose.

M. Arnaud Leroy. Mme la secrétaire d’État m’a enlevé les mots de la bouche. Les dispositions des deux textes se recoupent sans être tout à fait les mêmes, s’agissant des types de navires et de la phase d’expérimentation. Elles devront faire l’objet d’un examen minutieux.

M. Martial Saddier. Peut-on m’expliquer pourquoi la longueur minimale des navires a été fixée à vingt-quatre mètres ?

Mme la rapporteure. Parce que les navires relèvent de deux catégories différentes selon que leur longueur est supérieure ou inférieure à vingt-quatre mètres.

Mme Laurence Abeille. Il m’est arrivé de voir émerger une baleine à côté d’un bateau sur lequel je me trouvais. (Rires) Bien qu’il s’agisse d’un très gros animal, ce sont les navires d’une certaine taille qui causent des dommages aux populations de baleines.

Il peut sembler redondant de parler de « protection des espèces protégées », mais je trouve intéressante cette idée, qui a émergé dans le texte et qui donne une idée de l’état d’esprit dans lequel nous sommes. Même si cette question peut paraître anecdotique, elle ne l’est aucunement. Je suis heureuse d’apprendre qu’il y a des dispositifs complémentaires, car s’en tenir aux navires de l’État me semblait insuffisant. La volonté politique d’équiper les navires de commerce afin de protéger réellement les populations de baleines me semble être un élément extrêmement intéressant.

M. Arnaud Leroy. Les grands cétacés sont un sujet passionnant, dont on ne parle pas suffisamment ! (Rires)

Je souligne que les propositions de notre rapporteure ce soir, comme celles du Gouvernement et comme les miennes dans la proposition de loi relative à l’économie bleue, ne valent que pour des zones géographiques très précises, qui sont des espaces désignés par le droit international. Nous ne nous livrons pas ici à un exercice abstrait.

Il est donc important d’aller de l’avant.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La rédaction du 3° manque de clarté.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 46 quater ainsi modifié.

Chapitre IV
Littoral

Article 47
(articles L. 322-1, L. 322-8 et L. 322-9 du code de l’environnement)

Compétences du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres
en matière de patrimoine culturel

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres a été créé en 1975. Il s’agit d’un établissement public de l’État à caractère administratif dont les missions sont définies par l’article L. 322-1 du code de l’environnement. Il a notamment pour mission de mener une politique foncière de sauvegarde de l’espace littoral et de respect des sites naturels et de l’équilibre écologique. Pour ce faire, il intervient par le biais d’acquisitions foncières en employant une série de moyens définis notamment par les articles L. 322-3 à L. 322-8 du code de l’environnement : acquisition, donation, affectation du domaine public ou privé de l’État, préemption, expropriation…

S’il est propriétaire, le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres n’est pas pour autant gestionnaire : dans de nombreux cas, les sites qu’il possède sont gérés par des collectivités territoriales (surtout des communes), des établissements publics ou encore des associations loi 1901, ce que permet l’article L. 322-9 du code de l’environnement.

L’article L. 322-1 du code de l’environnement définit le champ géographique dans lequel le Conservatoire du littoral est habilité à mener sa politique foncière. Il couvre :

– les cantons côtiers délimités au 10 juillet 1975 ;

– les communes riveraines des mers, des océans, des étangs salés ou des plans d’eau intérieurs d’une superficie supérieure à 1 000 hectares ;

– les communes riveraines des estuaires et des deltas lorsque tout ou partie de leurs rives sont situées en aval de la limite de salure des eaux ;

– les secteurs géographiquement limitrophes des cantons et des communes mentionnés ci-dessus, qui constituent avec eux une unité écologique ou paysagère et auxquels l’intervention du Conservatoire du littoral a été étendue par arrêté préfectoral ;

– les zones humides situées dans les départements côtiers auxquelles l’intervention du Conservatoire du littoral a été étendue par arrêté préfectoral.

Par ailleurs, l’article L. 322-1 du code de l’environnement prévoit que le Conservatoire du littoral peut également exercer ses missions sur le domaine public maritime qui lui est affecté ou confié.

Aujourd’hui, près de 160 000 hectares sont placés sous la protection du Conservatoire du littoral, ce qui correspond à 700 sites naturels protégés.

Les I à III de l’article 47, qui n’a fait l’objet à l’Assemblée nationale que d’un amendement rédactionnel, modifient les articles L. 321-1, L. 322-8 et L. 322-9 du code de l’environnement pour y insérer une série de dispositions techniques visant à faciliter l’action du Conservatoire du littoral :

– la mission foncière du Conservatoire du littoral est étendue à la sauvegarde du patrimoine culturel présent sur les terrains qu’il acquiert (ce qui concerne par exemple les phares) ;

– la fonction de conseil du Conservatoire du littoral est explicitement étendue aux enjeux de gestion intégrée du trait de côte ;

– la condition tenant à la situation géographique des immeubles qui leur permettait de bénéficier de l’exonération des droits de mutation à titre gratuit est supprimée ;

– il est précisé à l’article L. 322-9 que les conventions signées par les gestionnaires doivent prévoir le reversement périodique au conservatoire du surplus des produits qui n’ont pas été affectés à la gestion du bien ;

– le Conservatoire du littoral est associé à l’élaboration des plans départementaux des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature (PDESI).

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 47 n’a été modifié lors de son examen au Sénat que par un seul amendement, adopté en commission à l’initiative du rapporteur. Cet amendement complète l’article 47 par un IV qui permet de résoudre le problème des agents de collectivités territoriales détachés depuis plus de six ans auprès du Conservatoire du littoral.

Du fait de la modification du statut de la fonction publique territoriale (qui interdit tout détachement d’une durée supérieure à six ans), ces agents seraient obligés d’être réintégrés dans leur collectivité d’origine alors que ni le Conservatoire, ni les collectivités, ni les agents concernés ne le souhaitent.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CD117 de M. Arnaud Leroy.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à permettre à des personnes privées dûment agrémentées de gérer des immeubles du domaine relevant du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. Aujourd’hui, 90 % des sites sont gérés par les collectivités territoriales ; certains le sont par des établissements publics ou pas des associations loi de 1901. Pourquoi remettre en cause cette gestion désintéressée au profit d’une gestion par des entreprises ? Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 47 sans modification.

Article 49
(articles 713 du code civil et articles L. 1123-3 et L. 2222-20 du code général de la propriété des personnes publiques)

Transfert de biens sans maître au Conservatoire de l’espace littoral
et des rivages lacustres

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 49 ouvre la possibilité de transférer les immeubles sans maître au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou, à défaut, à un conservatoire régional d’espaces naturels, lorsqu’ils sont territorialement compétents et en font la demande.

L’article L. 1123-1 du code de l’environnement définit les biens sans maître comme « les biens autres que ceux relevant de l’article L. 1122-1 [successions des personnes qui décèdent sans héritiers ou successions qui sont abandonnées)] et qui :

1° Soit font partie d’une succession ouverte depuis plus de trente ans et pour laquelle aucun successible ne s’est présenté ;

2° Soit sont des immeubles qui n’ont pas de propriétaire connu et pour lesquels depuis plus de trois ans la taxe foncière sur les propriétés bâties n’a pas été acquittée ou a été acquittée par un tiers. Ces dispositions ne font pas obstacle à l’application des règles de droit civil relatives à la prescription ;

3° Soit sont des immeubles qui n’ont pas de propriétaire connu, qui ne sont pas assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties et pour lesquels, depuis plus de trois ans, la taxe foncière sur les propriétés non bâties n’a pas été acquittée ou a été acquittée par un tiers. Le présent 3° ne fait pas obstacle à l’application des règles de droit civil relatives à la prescription. »

L’article 713 du code civil prévoit que les biens sans maître « appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés » et précise que cette règle ne s’applique pas si :

– la commune a renoncé par délibération à exercer ses droits au profit de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. Dans ce cas, les biens sans maître appartiennent à cet EPCI. Si cet EPCI renonce lui-même à exercer ses droits, les biens sans maître appartiennent à l’État ;

– la commune renonce à exercer ses droits sans délibération. Dans ce cas, les biens sans maître appartiennent à l’État.

Le I de l’article 49 du projet de loi modifie l’article 713 du code civil pour prévoir une série de cas pour lesquels ce ne sera pas à l’État que seront transférés les biens sans maître quand la commune et l’ECPI renoncent à exercer leurs droits.

Cette exception concerne les « biens situés dans les zones définies à l’article L. 322-1 du code de l’environnement », c’est-à-dire les biens situés :

– dans les cantons côtiers délimités au 10 juillet 1975 ;

– dans les communes riveraines des mers, des océans, des étangs salés ou des plans d’eau intérieurs d’une superficie supérieure à 1 000 hectares ;

– dans les communes riveraines des estuaires et des deltas lorsque tout ou partie de leurs rives sont situées en aval de la limite de salure des eaux ;

– dans les secteurs géographiquement limitrophes des cantons et des communes mentionnés ci-dessus, qui constituent avec eux une unité écologique ou paysagère et auxquels l’intervention du Conservatoire du littoral a été étendue par arrêté préfectoral ;

– dans les zones humides situées dans les départements côtiers auxquelles l’intervention du Conservatoire du littoral a été étendue par arrêté préfectoral.

Ces biens sont attribués par priorité :

1° Au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, si ce dernier en fait la demande ;

2° À un conservatoire régional d’espaces naturels agréé au titre de l’article L. 414-11 du code de l’environnement si le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ne demande pas que ces biens lui soient attribués et que ce conservatoire fait la demande ;

3° À l’État, si ni le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, ni les conservatoires régionaux d’espaces naturels concernés n’ont fait la demande.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 49 a été complété lors de son examen au Sénat par deux amendements de cohérence juridique (43).

Le premier étend le dispositif de transfert prioritaire des biens sans maître en modifiant l’article L. 1123-4 du code général de la propriété des personnes publiques relatif à l’acquisition d’immeubles non assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties et qui sont considérés comme des biens sans maître parce qu’ils n’ont pas de propriétaires connus et que la taxe foncière sur les propriétés non bâties n’a pas été acquittée ou a été acquittée par un tiers. Le présent 3° ne fait pas obstacle à l’application des règles de droit civil relatives à la prescription. L’amendement procède à une harmonisation avec la nouvelle rédaction de l’article L. 1123-3.

Le second amendement modifie l’article L. 2222-20 du code général de la propriété des personnes publiques relatif à la procédure de restitution des immeubles sans maître pour prévoir la restitution dans les cas où les immeubles ont été attribués au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou à un conservatoire régional d’espaces naturels. Cet ajout permet d’éviter de créer des situations de vide juridique.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

*

* *

La commission examine les amendements identiques CD101 de M. Jean-Marie Sermier, CD232 de M. Martial Saddier, CD334 de M. Dino Cinieri, CD366 de M. Julien Aubert et CD802 de M. Gérard Menuel, tendant à supprimer l’article.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements étant défendus, je propose qu’un seul orateur les défende.

M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement est quasiment rédactionnel. L’article L. 322-1 du code de l’environnement s’articule en trois paragraphes dans lesquels le terme de « zones » est employé. Pour éviter toute confusion, il est nécessaire de préciser la rédaction de l’article.

Mme la rapporteure. Je ne partage pas le point de vue selon lequel cet amendement serait rédactionnel ! (Sourires) Il vise en réalité à réduire les secteurs dans lesquels il est possible d’effectuer, au profit du Conservatoire du littoral ou des conservatoires régionaux d’espaces naturels, le transfert des biens sans maître. Il prévoit que ne pourront être transférés que les biens situés dans les secteurs mentionnés au I de l’article L. 322-1 du code de l’environnement, c’est-à-dire notamment les cantons côtiers, les communes riveraines des mers et des océans et les communes riveraines des estuaires et des deltas. Or la rédaction actuelle vise l’ensemble de l’article L. 322-1, dont le III mentionne également « les secteurs géographiquement limitrophes des cantons et des communes mentionnés au I et constituant avec eux une unité écologique ou paysagère » et les « zones humides situées dans les départements côtiers » : l’action du Conservatoire du littoral peut être étendue à ces zones par arrêté préfectoral.

Sous prétexte de précision rédactionnelle, cet amendement propose une modification importante. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La commission rejette les amendements de suppression.

Puis elle adopte l’article 49 sans modification.

Article 50
(articles L. 113-27 et L. 215-2 du code de l’urbanisme)

Sécurisation des interventions du Conservatoire de l’espace littoral
et des rivages lacustres en cas de superposition de zones de protection

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 50, qui a été adopté sans modification par l’Assemblée nationale, vise à sécuriser des interventions du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres dans les cas où il y a une superposition de zones de protection. Cette situation pose aujourd’hui problème en Languedoc-Roussillon, où il peut y avoir superposition d’un périmètre d’intervention pour la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN) et d’un espace naturel sensible (ENS).

L’article 50 modifiait l’article L. 143-3 du code de l’urbanisme, qui a été abrogé par une ordonnance du 23 septembre 2015 procédant à la recodification du code de l’urbanisme (44). L’article 50 précisait que les biens préemptés par le Conservatoire du littoral dans le cadre de la procédure prévue par l’article L. 142-3 rejoignent le domaine propre du Conservatoire du littoral.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 50 a été réécrit par un amendement du Rapporteur adopté en séance publique avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement. Cet amendement tire les conséquences de la recodification du code de l’urbanisme intervenue entre l’examen du texte à l’Assemblée et son examen au Sénat. Par ailleurs, il simplifie la procédure de création des zones de préemption propres au profit du Conservatoire du littoral dans les espaces remarquables du littoral.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Un amendement rédactionnel a été adopté à l’initiative de la rapporteure.

*

* *

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD462 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 50 modifié.

Article 51 ter A
Programme d’actions de protection des mangroves et plan d’action pour la protection des récifs coralliens

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 ter A a été inséré dans le texte par un amendement du Gouvernement adopté en séance publique.

Il définit deux objectifs pour l’État, qui doivent contribuer à arrêter la perte de biodiversité qui affecte l’outre-mer et préserver le rôle joué par la biodiversité dans l’adaptation de ces territoires au changement climatique :

– élaborer et mettre en œuvre un programme d’actions territorialisé de protection de 55 000 hectares de mangroves d’ici 2020 ;

– élaborer un plan d’action contribuant à protéger 75 % des récifs coralliens dans les outre-mer d’ici 2021.

L’article 51 ter A précise que l’État doit chercher à atteindre ces objectifs « avec l’appui de ses établissements publics sous tutelle et en lien avec les collectivités territoriales concernées ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 51 ter A a fait l’objet de l’amendement n° 388 rectifié de M. Patient adopté en séance avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement. Cet amendement substitue aux termes : « en lien avec les collectivités territoriales concernées » les termes : « en concertation avec les collectivités territoriales concernées ».

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

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La commission adopte l’article 51 ter A sans modification.

Chapitre IV bis
Lutte contre la pollution

Article 51 quater AA
(article L. 77-10-1 du code de justice administrative)

Création d’une action de groupe spécifique pour les dommages environnementaux

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 quater AA a été introduit en séance publique au Sénat, suite à l’adoption de l’amendement n° 295 rectifié de Mme Bonnefoy et des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Cet amendement, qui a été adopté malgré un avis défavorable du Gouvernement et de la commission, pose de nombreux problèmes rédactionnels. Toutefois, il permet l’introduction dans le droit français d’un dispositif innovant auquel votre rapporteure apporte tout son soutien.

Dans la rédaction résultant des discussions du Sénat, cet article insère un chapitre dans le code de justice administrative qui esquisse le cadre de l’action de groupe dans le domaine environnemental.

Il prévoit que cette action de groupe peut être engagée par trois types d’associations :

– associations agréées de protection de l’environnement ;

– associations agréées dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ;

– associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels.

Cet article autorise ces associations à engager une action, non seulement devant une juridiction civile, mais encore devant une juridiction administrative.

Les actions qui peuvent faire l’objet d’une telle procédure sont définies comme des actions permettant « d’établir que plusieurs personnes, placées dans une situation similaire, ont subi des préjudices individuels résultant d’un dommage causé à l’environnement ayant une cause commune ».

L’article précise enfin que ces actions peuvent avoir deux objectifs :

– obtenir la cessation d’un manquement ;

– obtenir la réparation des dommages corporels et matériels résultant d’un dommage causé à l’environnement.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

À l’initiative de votre rapporteure, un amendement n°CD600 rectifié a été adopté pour déplacer les dispositions relatives à l’action de groupe dans le domaine environnemental du code de justice administrative au code de l’environnement.

Par ailleurs, dans son intervention sur l’article 51 quater AA, votre rapporteure a indiqué que cet article devait faire l’objet d’un processus de concertation qui permette d’aboutir à une rédaction présentant toutes les garanties de sécurité juridiques requises.

*

* *

La commission examine d’abord les amendements identiques CD75 de M. Jean-Marie Sermier, CD109 de Mme Sophie Rohfritsch, CD233 de M. Martial Saddier, CD262 de M. Dino Cinieri, CD347, CD365 et CD412 de M. Julien Aubert, CD590 de M. Philippe Plisson, CD803 de M. Gérard Menuel et CD842 de M. Gilles Lurton, tendant à supprimer l’article.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements étant défendus, je propose qu’un seul orateur par groupe les défende.

M. Martial Saddier. Le Sénat a cru bon d’introduire ici la possibilité d’une action de groupe dans le domaine environnemental. Toutefois, il nous semble que cette mesure n’a pas sa place dans le code de justice administrative, où l’inscrit cet article.

Plus généralement, l’action de groupe environnementale ainsi conçue nous semble prématurée, et mal fondée juridiquement. Il est nécessaire de disposer d’expertises bien plus poussées. Il serait également bon de rechercher un consensus entre nos deux assemblées.

Nous demandons donc la suppression de cet article.

M. Julien Aubert. Nous ne disposons pas de réflexions suffisamment sérieuses sur les conséquences juridiques de cette mesure. D’un côté on se plaint de l’engorgement des tribunaux, et de l’autre on vote des articles qui modifient les conditions d’exercice des recours !

De plus, cet article donne le monopole des actions de groupe dans le domaine de l’environnement aux associations de défense de l’environnement. Or il ne me semble pas que l’actio popularis puisse reposer uniquement sur des professionnels de la protection de l’environnement : tout citoyen, tout type d’organisme doit pouvoir agir. Il est dangereux de cantonner ces recours juridiques à un seul type d’association : cela revient à déresponsabiliser une partie de la société. L’environnement est au contraire la responsabilité de chacun, et les possibilités de recours doivent être aussi larges que possible.

M. Philippe Plisson. Mes arguments sont les mêmes : l’action de groupe ne doit pas être le monopole d’associations organisées. Avec les réseaux sociaux, aujourd’hui, les citoyens peuvent se mobiliser plus facilement : s’ils souhaitent se regrouper pour ester en justice, ils doivent pouvoir le faire sans le truchement d’associations officielles, organisées.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Il faut au contraire, je crois, conserver ce dispositif pertinent. Certes, il présente des problèmes de rédaction, et il dépasse la question de la biodiversité.

Le projet de loi relatif à la justice du XXIe siècle devrait être débattu par l’Assemblée nationale au mois de mai. D’ici là, il faut à mon sens maintenir cet article dans le présent texte : c’est un sujet auquel nous tenons, et auquel nos concitoyens tiennent. Or, si nous faisons disparaître cet article, il n’est pas sûr qu’il réapparaisse ultérieurement.

Nous pourrons toujours nous adapter si des mesures similaires étaient adoptées dans d’autres textes.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à l’action de groupe en matière environnementale. La majorité actuelle a d’ailleurs introduit un dispositif très proche dans la loi relative à la consommation du 17 mars 2014.

Cet article présente toutefois un problème de rédaction : il n’est pas opérationnel et devra être revu.

Le Gouvernement prévoit d’insérer, dans le projet de loi sur la justice du XXIe siècle, un dispositif « socle », pour l’ensemble des composantes du droit, visant tous les dispositifs de ce type, hors droit de la consommation. Le ministère de la justice a déjà avancé sur le projet portant sur l’action de groupe environnementale, mais le travail n’est pas terminé. Dès lors, je suis défavorable à la suppression de cet article, qui pose les bases d’une telle action de groupe.

J’ai bon espoir de vous faire, lors de la discussion en séance publique, une proposition définitive de dispositif : nous pourrons alors décider si nous gardons cet article ou si nous le renvoyons à la loi sur la justice du XXIe siècle. À ce stade, je ne peux toutefois offrir aucune garantie.

Restons-en donc à cet article pour aujourd’hui. S’il devient sans objet, il sera toujours temps de le supprimer en deuxième lecture au Sénat.

Mais l’action de groupe environnementale est une vraie avancée. La supprimer, même pour des raisons de forme, serait un très mauvais signal.

M. François-Michel Lambert. Le contraste entre la majorité et l’opposition est très clair ! Pour certains, l’environnement, « ça commence à bien faire », et ils font tout ce qu’ils peuvent pour retarder notre entrée dans un nouveau siècle, un siècle où l’on prend en considération l’environnement et la biodiversité.

Il est indispensable de maintenir cet article : nos concitoyens doivent s’opposer, par des actions de groupe, aux attaques contre l’environnement et la biodiversité. En quoi serait-il gênant que ces actions s’appuient sur des associations environnementales agréées, structurées, compétentes ? C’est en tout cas préférable aux actions d’associations créées de toutes pièces pour s’opposer à un projet, et pour qui la défense de l’environnement n’est qu’un prétexte.

Il faut sans doute améliorer la rédaction de cet article, mais il faut conserver dans la loi cette amélioration apportée par le Sénat, où la majorité n’est pourtant pas la même qu’à l’Assemblée nationale.

Mme Delphine Batho. J’apporte mon soutien à Mme la rapporteure et au Gouvernement.

Je précise qu’à ce jour il n’existe dans le projet de loi sur la justice du XXIe siècle aucune disposition relative à l’action de groupe, à l’exception du domaine des discriminations : nous avons eu ce même débat lors de la discussion de la loi pour une République numérique, à propos de la protection des données personnelles, et j’avais alors vérifié de près l’état de ce projet de loi.

Le dispositif de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite « loi Hamon », reconnaît la possibilité d’agir aux associations de défense des consommateurs : il n’y a donc aucune raison de ne pas reconnaître aux associations de défense de l’environnement la possibilité de mener des actions de groupe en matière environnementale.

Je suis consciente que le texte proposé ici n’est pas parfait. Je me demande d’ailleurs s’il ne faudrait pas ouvrir aux associations de défense des consommateurs la possibilité d’une action de groupe en matière environnementale – on peut par exemple penser à l’affaire Volkswagen.

M. Julien Aubert. Vous parlez d’associations agréées, Monsieur Lambert, mais le texte mentionne aussi « une association régulièrement déclarée depuis cinq ans au moins, dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ». Il suffit donc que je dépose les statuts d’une telle association, et dans cinq ans je pourrai prétendre à mener une action de groupe ! Il n’y a donc aucun contrôle sur la nature ou l’éventuel agrément des associations autorisées à agir en justice.

D’autre part, pourquoi l’action de groupe serait-elle obligatoirement canalisée par certains types d’associations ? Notre collègue Delphine Batho a évoqué la possibilité de l’ouvrir à des associations de défense des consommateurs. C’est un débat intéressant. Il y a tout de même des problèmes financiers qui se poseront : vous accordez un monopole à des associations qui pourront établir des relations financières avec des cabinets d’avocat, qui auront la main sur l’argent qui circulera. (Murmures) Derrière la défense des petits oiseaux, certains verront des sommes importantes à gagner ! (Murmures) Il faut donc bien réfléchir avant de prendre une telle mesure, ou à tout le moins l’encadrer plus fortement.

M. Philippe Plisson. La formulation de l’article n’est pas bonne, mais sur le fond, je suis favorable à l’action de groupe en matière de défense de l’environnement : la ministre s’étant engagée à revoir la rédaction de l’article, je retire mon amendement.

L’amendement CD590 est retiré.

M. François-Michel Lambert. Monsieur Julien Aubert, vous n’avez pas entendu ce que j’ai dit. J’ai parlé d’associations créées ex nihilo à l’occasion d’un projet particulier. Ce n’est pas le cas ici, puisqu’il leur faut, pour pouvoir agir, exister depuis cinq ans !

Ne peut-on vouloir faire progresser la loi ? Mme la ministre l’a dit, ce texte est une base de travail. Cet article permet de faire pour la défense de l’environnement ce que nous avons déjà fait pour celle des consommateurs. La finance doit-elle toujours être plus forte que l’environnement ?

M. Arnaud Leroy. Je veux dire ma satisfaction de voir entrer dans notre droit l’action de groupe en matière environnementale. C’est un vrai progrès, que l’on disait pourtant impossible au début de la législature. Saisissons donc cette occasion.

Je partage le point de vue de Delphine Batho. Et, par cohérence, ne devrions-nous pas copier la rédaction de la loi Hamon ?

Je ne partage pas, en revanche, les craintes de M. Julien Aubert, qui a peur d’associations qui se créeraient spécialement pour faire des bénéfices sur de telles actions de groupe… Il faudrait donner des exemples !

M. Julien Aubert. Pas de problème ! Regardez ce qui se passe dans le domaine de l’urbanisme !

M. Arnaud Leroy. Je voudrais avoir des exemples concrets, documentés, et je suis prêt à les regarder avec vous pour en arriver à une rédaction juridiquement fiable, qui puisse éviter les effets d’aubaine comme les à-coups brutaux. Mais on ne peut pas arrêter le processus d’élaboration d’une loi en raison de vagues frayeurs.

M. Martial Saddier. Tous les jours, sur le terrain, et quelle que soit la majorité en place, nous entendons des commentaires peu élogieux sur la façon dont nous écrivons la loi. J’entends que la majorité prépare un texte sur la justice du futur qui ne comporterait pas de volet environnemental : cela m’inquiète. J’ai grand respect pour ceux qui emploient ces termes, mais l’idée de « saisir une occasion » pour écrire la loi me paraît également inquiétante.

Notre commission n’est pas l’instance la plus qualifiée de cette maison en matière juridique. (Murmures de désapprobation) La majorité serait, je crois, bien inspirée de peser à l’intérieur de sa famille politique pour que l’action de groupe en matière environnementale soit étudiée à l’occasion de la discussion du projet de loi sur la justice du XXIe siècle, au lieu de voter ce soir, à la va-vite, un texte qui risque de se révéler inapplicable, voire contre-productif.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je souligne que cet article a été inséré par le Sénat.

La commission rejette les amendements de suppression.

Puis elle examine l’amendement CD600 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à insérer cet article dans le code de l’environnement et non dans le code de justice administrative.

Mme la secrétaire d’État. Nous y reviendrons de toute façon. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 51 quater AA ainsi modifié.

Article 51 quater A
(article 8 du code de procédure pénale)

Prescription de l’action publique pour les délits de pollution des eaux marines et fluviales

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 quater A a été introduit lors de l’examen du texte en commission au Sénat, suite à l’adoption de l’amendement du rapporteur Jérôme Bignon. Il modifie les règles relatives à la prescription de l’action publique pour les délits de pollution des eaux marines et fluviales.

En l’état actuel du droit, l’article 8 du code de procédure pénale dispose qu’ « en matière de délit, la prescription de l’action publique est de trois années révolues ». Pour la définition de la date de début de computation du délai de prescription, l’article 8 renvoie à l’article 7, qui définit les délais de prescription pour les crimes et dispose que « l’action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n’a été fait aucun acte d’instruction ou de poursuite ».

L’article 8 fixe certaines dérogations à la date de début de computation du délai de prescription, qui concernent certains délits commis à l’encontre des personnes vulnérables : dans ces cas, le délai de prescription « court à compter du jour où l’infraction apparaît à la victime dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique ».

L’article 51 quater A complète l’article 8 du code de procédure pénale de manière à prévoir une nouvelle exception aux règles de computation des délais de prescription. En effet, le délai de droit commun n’est pas adapté aux pollutions des eaux et des sédiments par les métaux lourds ou encore par d’autres polluants organiques persistants car ces pollutions sont généralement découvertes plusieurs années après la commission des faits. Cette situation s’explique notamment par l’existence d’un processus de bioaccumulation très long par les espèces marines. Ainsi, si l’usage et la commercialisation des PCB (polychlorobiphényles) sont interdits depuis 1987, on continue à constater leur présence et leurs effets dans les milieux aquatiques d’eaux douce ou salée, ce qui limite l’exploitation de certaines espèces de poissons.

C’est pourquoi l’article 51 quater A ajoute un nouvel alinéa à l’article 8 du code de procédure pénale, qui dispose que « le délai de prescription de l’action publique des délits mentionnés aux articles L. 216-6 et L. 432-2 du code de l’environnement court à compter de la découverte du dommage», et non plus à compter du jour où le délit a été commis.

Les délits concernés sont :

– le fait de jeter, déverser ou laisser s’écouler dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, une ou des substances quelconques dont l’action ou les réactions entraînent des effets nuisibles sur la santé, des dommages à la flore ou à la faune, des modifications significatives du régime normal d’alimentation en eau ou encore des limitations d’usage des zones de baignade (article L. 216-6 du code de l’environnement) ;

– le fait de jeter ou abandonner des déchets en quantité importante dans les eaux superficielles ou souterraines ou dans les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, sur les plages ou sur les rivages de la mer (article L. 216-6 du code de l’environnement) ;

– le fait de jeter, déverser ou laisser écouler dans des cours d’eau, canaux, ruisseaux et plans d’eau, des substances dont l’action ou les réactions détruisent le poisson ou nuisent à sa nutrition, à sa reproduction ou à sa valeur alimentaire (article L. 432-2 du code de l’environnement).

2. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article a fait l’objet d’un amendement de réécriture globale du Gouvernement, qui a conduit à déplacer les dispositions prévues du code de procédure pénale au code de l’environnement.

*

* *

La commission étudie l’amendement CD250 de M. Martial Saddier, tendant à supprimer l’article.

M. Jean-Marie Sermier. Cet amendement vise à conserver la rédaction actuelle de l’article 8 du code de procédure pénale, qui fait courir le délai de prescription de l’action publique en matière de pollution des eaux de surface à partir de la date de commission de l’acte de pollution.

Mme la rapporteure. La rédaction de cet article peut, en effet, poser problème, et il est sans doute mal placé : je vous proposerai de le déplacer. Je souhaiterais qu’un travail avec le Gouvernement avant le passage en séance publique permette d’en proposer une meilleure formulation.

Je vous demanderai donc de retirer cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD1007 du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement rédactionnel vise à intégrer les dispositions prévues par cet article au code de l’environnement plutôt qu’au code de procédure pénale. Cela paraît d’autant plus nécessaire que l’article 8 du code de procédure pénale devrait être modifié lors de l’examen de la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale.

Mme la rapporteure. Avis favorable. Je retire mon amendement CD1069 au profit de celui du Gouvernement.

L’amendement CD1069 de la rapporteure est retiré.

M. Martial Saddier. Quelle est la définition juridique de la « découverte » du dommage ?

Mme la rapporteure. C’est une question qui se pose… Nous devrons travailler avec le Gouvernement pour nous assurer que ce dispositif est constitutionnel. Il arrive que nos propos soient pertinents, Monsieur Martial Saddier, même si vous n’êtes pas très élogieux pour les compétences juridiques de notre commission ! (Sourires)

La commission adopte l’amendement CD1007 du Gouvernement, et l’article 51 quater A est ainsi rédigé.

Article 51 quater B
(article L. 142-2 du code de l’environnement)

Ouverture de la possibilité pour les associations d’exercer les droits reconnus à la partie civile en cas d’inobservations d’obligations non pénalement sanctionnées

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 quater B a été introduit lors de l’examen au Sénat en séance publique, suite à l’adoption de l’amendement n° 30 de Mme Evelyne Didier et des membres du groupe CRC. Cet amendement, qui a été adopté avec un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, modifie l’article L. 142-2 du code de l’environnement pour ouvrir aux associations la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile en cas d’inobservations d’obligations non pénalement sanctionnées.

En l’état actuel du droit, l’article L. 142-2 du code de l’environnement dispose que les associations agréées de protection de l’environnement « peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l’environnement, à l’amélioration du cadre de vie, à la protection de l’eau, de l’air, des sols, des sites et paysages, à l’urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, la sûreté nucléaire et la radioprotection, les pratiques commerciales et les publicités trompeuses ou de nature à induire en erreur quand ces pratiques et publicités comportent des indications environnementales ainsi qu’aux textes pris pour leur application ».

Ce droit est également reconnu par l’article L. 142-2 du code de l’environnement à certaines associations qui ne sont pas des associations agréées (45) mais sont régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans.

Les infractions concernées ne concernent que celles qui relèvent du droit pénal et l’article 51 quater B modifie l’article L. 142-2 du code de l’environnement pour permettre aux associations agréées de protection de l’environnement d’agir en justice en exerçant les droits reconnus à la partie civile pour des infractions qui ne seraient pas sanctionnées sur le plan pénal.

2. La position de votre commission

Étant donné qu’il n’y a pas de partie civile à un procès qui n’est pas pénal, l’article 51 quater B pose d’importants problèmes juridiques et la rapporteure a proposé à la commission sa suppression.

L’article 51 quater B a été supprimé par l’adoption d’une série d’amendements identiques déposés par le Gouvernement, la rapporteure, M. Chevrollier, M. Sermier, M. Saddier, M. Cinieri, M. Bricout, M. Aubert, M. Plisson, M. Menuel et M. Lurton.

*

* *

La commission examine les amendements identiques CD65 de M. Guillaume Chevrollier, CD76 de M. Jean-Marie Sermier, CD234 de M. Martial Saddier, CD263 de M. Dino Cinieri, CD280 de M. Jean-Louis Bricout, CD346 de M. Julien Aubert, CD364 de M. Julien Aubert, CD591 de M. Philippe Plisson, CD601 de la rapporteure, CD804 de M. Gérard Menuel, CD843 de M. Gilles Lurton et CD1010 du Gouvernement, tendant à supprimer l’article.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements étant défendus, je propose qu’un seul orateur par groupe les défende.

M. Dino Cinieri. La notion de manquement est imprécise, contrairement à celle d’infraction. Élargir l’action de groupe en cas de manquement risquerait d’être contre-productif.

Mme la rapporteure. Il n’y a pas de partie civile à un procès non pénal.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement propose également la suppression de cet article.

La commission adopte l’amendement à l’unanimité.

En conséquence, l’article 51 quater B est supprimé.

Article 51 quinquies
(article L. 253-7-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime)

Traitement des fonds de cuve et résidus de produits phytopharmaceutiques

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 quater a été introduit lors de l’examen en commission à l’Assemblée nationale, par un amendement du Gouvernement. Il a fait l’objet d’un amendement rédactionnel en séance publique à l’Assemblée.

Cet article vise à donner un fondement juridique solide aux dispositions de l’arrêté interministériel du 12 septembre 2006 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits visés à l’article L. 253-1 du code rural qui définit les conditions de mélange des produits phytosanitaires dans les cuves des pulvérisateurs, ainsi que les modalités d’épandage, de vidange et de réutilisation des fonds de cuve.

Dans ce but, il introduit un article L. 253-7-2 dans le code rural et de la pêche maritime qui dispose que « l’autorité administrative définit par arrêté les modalités de mise en œuvre des produits destinés à être mélangés à de l’eau dans une cuve avant leur utilisation, d’épandage des fonds de cuve, de vidange des fonds de cuve et de réutilisation du fond de cuve résultant d’une première application de produit. » dans un but de protection de l’environnement.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 51 quinquies a fait a été amendé lors de son examen en commission au Sénat à l’initiative de Mme Sophie Primas (46), de manière à prévoir que c’est non seulement dans un but de protection de l’environnement mais encore dans l’intérêt de la santé publique que les conditions de mélange des produits phytosanitaires dans les cuves des pulvérisateurs, ainsi que les modalités d’épandage, de vidange et de réutilisation des fonds de cuve doivent être définies par arrêté.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure se félicite des précisions apportées au Sénat et, à son initiative, l’article 51 quinquies a été adopté sans modification.

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* *

La commission se penche sur l’amendement CD298 de M. Dino Cinieri, tendant à supprimer l’article.

M. Dino Cinieri. La gestion des fonds de cuve est réglementée en France par arrêté. Il n’est donc pas nécessaire de légiférer sur ce sujet.

En outre, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 14 janvier 2014 a d’ores et déjà complété la réglementation sur les produits phytosanitaires, ce qui va conduire à une modification de l’arrêté de 2006 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytosanitaires, qui traite notamment de cette gestion des fonds de cuve.

Par ailleurs, dans le cadre du plan Ecophyto II, une priorité en termes de recherche et d’innovation est donnée à l’agroéquipement. Ces travaux devront permettre d’accompagner au mieux les agriculteurs dans la préservation de l’environnement.

Il ne semble donc pas pertinent de créer des contraintes supplémentaires pour les agriculteurs.

Mme la rapporteure. Avis défavorable, bien sûr. Une sécurisation juridique est nécessaire, car l’arrêté ministériel du 12 septembre 2006 n’est fondé sur aucune base législative.

Mme la secrétaire d’État. La rapporteure est pleine de sagesse.

M. Gérard Menuel. Je croyais qu’il existait une base législative : c’est quelque chose qui existe depuis des années.

Mme la rapporteure. Eh oui, parfois on met la charrue avant les bœufs… (Rires)

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 51 quinquies sans modification.

Article 51 octies
(articles L. 212-1 et L. 212-2-2 du code de l’environnement)

Échéances d’atteinte du bon état chimique des eaux, surveillance de la matrice biote, et agrément des laboratoires d’analyse

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 octies, introduit lors de l’examen en séance à l’Assemblée nationale en première lecture, par l’adoption d’un amendement du Gouvernement, vise à adapter le droit français à la directive 2013/39/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013 modifiant les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE en ce qui concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l’eau.

Cette directive a introduit de nouvelles exigences pour la protection des milieux aquatiques et du biote (47) qui visent à réduire ou à supprimer les émissions de nouveaux polluants chimiques rejetés par l’industrie, l’agriculture, l’artisanat, les ménages... Ces exigences doivent permettre d’atteindre un bon état chimique de l’eau, qui participe à la sauvegarde de la biodiversité aquatique.

L’échéance pour atteindre l’objectif du bon état chimique de l’eau a été fixée à 2021 pour les substances dont les normes de qualité environnementale ont été modifiées par la directive du 12 août 2013. Elle a été fixée à 2027 pour les substances qui ont été rajoutées à la liste de celles pour lesquelles des normes de qualité environnementale sont fixées. Or, l’article L. 2121 du code de l’environnement dispose que « les objectifs de qualité et de quantité des eaux que fixent les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux […] doivent être atteints au plus tard le 22 décembre 2015 ». Ces objectifs correspondent notamment au « un bon état écologique et chimique » des eaux de surface, au bon état chimique et à l’équilibre entre les prélèvements et la capacité de renouvellement des masses d’eaux souterraines ou encore à la prévention de la détérioration de la qualité des eaux.

De manière à prendre en compte les évolutions introduites par la directive, l’article 51 octies modifie le V de l’article L. 2121 du code de l’environnement pour prévoir une dérogation à ce principe pour ce qui concerne les échéances d’atteinte du bon état écologique et chimique des eaux de surface prescrites par les directives européennes. Celles-ci seront désormais fixées par voie réglementaire.

Par ailleurs, la directive du 12 août 2013 fixe des normes de qualité environnementales sur la matrice biote pour certaines substances qui étaient jusqu’alors seulement surveillées dans l’eau (48) et prévoit qu’elles doivent être surveillées dans le biote à partir de 2016.

L’article L. 212-2-2 du code de l’environnement prévoit aujourd’hui que « l’autorité administrative établit et met à jour pour chaque bassin ou groupement de bassins, après avis du comité de bassin, un programme de surveillance de l’état des eaux » et que « les analyses des eaux et des sédiments nécessaires à la mise en œuvre du programme de surveillance sont effectuées par des laboratoires agréés par le ministre chargé de l’environnement ».

Pour prendre ne compte les nouvelles exigences de la directive, l’article 51 octies modifie l’article L. 212-2-2 du code de l’environnement de manière à prévoir que le programme de surveillance de l’état des eaux concerne aussi l’état du biote.

Par ailleurs, dans un objectif de simplification administrative, il prévoit que les analyses des eaux et des sédiments nécessaires à la mise en œuvre de ce programme de surveillance seront effectuées par des laboratoires « agréés au titre de la protection de l’environnement », et non plus par des laboratoires « agréés par le ministre chargé de l’environnement », ce qui permet d’autoriser l’ONEMA et en conséquence la future agence de la biodiversité à délivrer les agréments des laboratoires pour les analyses des polluants et des peuplements d’animaux aquatiques (daphnies, poissons…).

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 51 octies a seulement fait l’objet d’un amendement rédactionnel du rapporteur lors de son examen en séance publique (49).

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Les modifications apportées par le Sénat à l’article 51 octies n’apportant aucun commentaire de sa part, votre rapporteure a proposé son adoption sans modification.

*

* *

La commission adopte l’article 51 octies sans modification.

Article 51 nonies
(article L. 213-10-8 du code de l’environnement)

Soutien aux projets territoriaux visant la suppression des néonicotinoïdes dans le cadre du plan Ecophyto

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article a été introduit dans le texte suite à l’adoption lors de l’examen en séance publique d’un amendement de Mme Laurence Abeille, sous-amendé par votre rapporteure. Il impose au plan Ecophyto de valoriser les projets territoriaux visant la suppression des néonicotinoïdes.

Pour ce faire, il modifie le V de l’article L. 213-10-8 du code de l’environnement qui prévoit qu’entre 2012 et 2018, un prélèvement annuel est effectué au profit de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques sur le produit de la redevance pour pollutions diffuses qui est due par les personnes, qui acquièrent des produits phytopharmaceutiques, des semences traitées au moyen de ces produits, ou qui commandent une prestation de traitement de semence au moyen de ces produits. Ce prélèvement doit permettre la mise en œuvre du « programme national visant à la réduction de l’usage des pesticides dans l’agriculture et à la maîtrise des risques y afférents », communément appelé « plan Ecophyto ».

L’amendement adopté, tel que sous-amendé par votre rapporteure, précise que le plan Ecophyto doit valoriser « notamment les projets de groupements d’intérêt écologique et économique ou les projets territoriaux visant la suppression des produits phytosanitaires de la famille des néonicotinoïdes. ».

La ministre a apporté en séance publique son soutien à cet amendement en déclarant que (50)« le Gouvernement est favorable à cet amendement et au sous-amendement » qui « rejoint les démarches que la France est en train de faire auprès du commissaire à la santé » que la ministre a rencontré pour « lui demander de réévaluer rapidement et dès 2015 la toxicité des substances néonicotinoïdes dont l’usage fait l’objet d’un moratoire, au regard des risques pour la santé humaine, la santé animale et l’environnement, ainsi que des deux autres substances néonicotinoïdes qui ne devaient être réévaluées qu’en 2017 ». À cette occasion, la ministre a réaffirmé ses préoccupations relatives aux effets sur les populations d’abeilles, les pollinisateurs et les oiseaux et a indiqué qu’elle allait lancer « une stratégie nationale de valorisation et de relance des pollinisateurs sauvages et des abeilles ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du développement durable du Sénat a également apporté son soutien à cette mesure et c’est avec un avis défavorable de la commission que l’amendement supprimant l’article a été adopté en séance publique. Cet amendement était porté par de Mme Sophie Primas, qui a indiqué qu’il ne convenait pas que la loi crée une « sous-enveloppe » dans le plan Ecophyto pour les néonicotinoïdes car, « si les néonicotinoïdes sont très à la mode, d’autres substances et d’autres domaines d’intervention existent » et « si l’on doit prévoir une enveloppe pour l’expérimentation Dephy, une enveloppe pour le bio, une enveloppe pour le certiphyto, nous n’avons pas fini ! » (51).

Le Gouvernement, qui avait donné un avis favorable à l’introduction de l’article 51 nonies lors de l’examen du texte à l’Assemblée a indiqué qu’il était désormais favorable à la suppression de cet article en précisant : « l’article 51 nonies est un peu bavard, et l’on voit bien l’objectif, au demeurant louable, qui est d’introduire le mot « néonicotinoïdes » dans le projet de loi. Mais, comme ces produits néonicotinoïdes figureront en d’autres endroits du texte, je n’ai aucune raison de m’opposer à cet amendement de suppression » (52).

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Estimant que la problématique des néonicotinoïdes doit être traitée de préférence par le rétablissement de l’article 51 quaterdecies, la rapporteure n’a déposé aucun amendement sur cet article, dont la suppression a été maintenue.

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* *

L’article 51 nonies demeure supprimé.

Article 51 decies A
(article L. 257-3 du code rural et de la pêche maritime)

Amélioration de la diffusion des données sur l’utilisation des produits phytosanitaires par les agriculteurs produisant des végétaux destinés à la consommation humaine ou animale

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 decies A a été introduit suite à l’adoption en séance publique au Sénat de l’amendement n° 461 de M. Labbé et des membres du groupe écolo. Cet amendement, qui a reçu un avis défavorable du Gouvernement et de la commission,

En l’état actuel du droit, l’article L. 257-3 du code de l’environnement dispose qu’un arrêté du ministre chargé de l’agriculture définit les conditions dans lesquelles les exploitants produisant, au stade de la production primaire, des denrées alimentaires, des produits destinés à l’alimentation animale ou des aliments pour animaux d’origine végétale « s’enregistrent auprès de l’autorité administrative et tiennent le registre prévu par la réglementation en vigueur ».

L’article 51 decies A complète l’article L. 257-3 du code de l’environnement en rajoutant à cet arrêté un objectif : définir les conditions dans lesquelles ces exploitants « transmettent les données légalement exigibles à l’autorité administrative en charge du traitement automatisé et de la mise à disposition du public ».

Cet amendement – dont la rédaction rend imparfaitement compte du sens – s’inscrit dans la perspective tracée par le rapport d’information de Mme Nicole Bonnefoy fait au nom de la mission commune d’information sur les pesticides (53) qui constate que les usages que les agriculteurs font des pesticides sont mal connus car, aujourd’hui, les seules données disponibles sont celles qui concernent les ventes. Cet amendement cherche à ce que soit mise en place une télédéclaration obligatoire des données du registre phytosanitaire tenu par les agriculteurs qui consigne l’ensemble des traitements par parcelle. Il vise aussi à permettre la mise en œuvre d’un système de traitement automatisé de ces données analogue à celui de la banque nationale des ventes réalisées par les distributeurs de produits phytosanitaires Rendre ces informations accessibles permettrait de vérifier s’il existe des corrélations entre l’usage de certains produits et les troubles environnementaux ou sanitaires et de contrôler la fiabilité des déclarations sur les ventes de produits phytopharmaceutiques.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 decies A a été supprimé par l’adoption d’une série d’amendements identiques, auxquels votre rapporteure a donné un avis favorable.

Au cours des débats, de nombreuses craintes ont été exprimées quant à la surcharge de travail que cet article induirait pour les agriculteurs, qui ne disposent ni du temps nécessaire, ni parfois de l’équipement adéquat, pour transmettre des données numérisées à l’administration sur l’utilisation des produits phytosanitaires.

Par ailleurs, confier à l’administration la charge de la numérisation des registres ferait peser sur cette dernière une charge financière et technique considérable.

*

* *

La commission est saisie des amendements identiques CD66 de M. Guillaume Chevrollier, CD78 de M. Jean-Marie Sermier, CD235 de M. Martial Saddier, CD335 de M. Dino Cinieri, CD363 de M. Julien Aubert, CD563 de M. Bertrand Pancher, CD661 de M. Jean-Yves Caullet, CD805 de M. Gérard Menuel et CD867 de M. Jean-Louis Bricout, tendant à supprimer l’article.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Gérard Menuel. La disposition prévue par l’article est redondante. En effet, la réglementation en vigueur prévoit déjà un registre, qui contient des éléments très précis et qui est régulièrement transmis aux autorités lors des contrôles effectués au titre de la conditionnalité des aides. En outre, la mesure serait contraire à l’objectif de simplification que nous nous efforçons de promouvoir.

M. Yannick Favennec. Cet article vise à imposer aux exploitants agricoles la transmission à l’autorité administrative du registre où ils consignent leurs pratiques en matière d’utilisation de produits phytosanitaires. Il a été introduit au Sénat par nos collègues écologistes, contre l’avis exprimé au nom de la commission par son rapporteur, Jérôme Bignon. Celui-ci avait rappelé que très peu d’agriculteurs en France exercent leur métier dans la clandestinité et avait fait valoir, en revanche, la nécessité d’endiguer définitivement le virus de la surréglementation.

Mon groupe partage évidemment ce point de vue. En effet, il est rare que des agriculteurs utilisant des produits phytosanitaires ne respectent pas la réglementation et ne fassent pas l’objet de contrôles réguliers. Notre rôle est de montrer à nos agriculteurs que nous avons confiance en eux, et non de créer un climat de suspicion délétère, surtout dans la période de crise que nous traversons.

Par ailleurs, l’article est, dès à présent, en partie satisfait : les exploitants agricoles tiennent déjà un registre qu’ils transmettent aux autorités lors des contrôles, au risque de perdre les aides qui leur sont accordées dans le cadre de la politique agricole commune.

De plus, les agriculteurs ont l’obligation de se former régulièrement à l’utilisation des produits visés – aux termes du plan Ecophyto II, tous les cinq ans à compter de 2016, et non plus tous les dix ans.

En outre, pour davantage de transparence, les déclarations des distributeurs de produits phytopharmaceutiques incluent désormais le code postal de l’acheteur professionnel.

L’article est donc sans objet. En revanche, il risque de créer des contraintes supplémentaires qui ne s’imposent absolument pas, surtout en cette période difficile pour nos agriculteurs.

M. Jean-Yves Caullet. Le principal objectif de l’article est que les entreprises agricoles puissent fournir les éléments relatifs à leur utilisation des phytosanitaires. Or cet objectif est déjà atteint : le registre existe et peut être consulté si nécessaire.

Outre la complication supplémentaire qu’impliquerait la mesure pour les agriculteurs, l’administration ne sera pas en mesure de traiter les données et de les mettre à la disposition du public sous une forme qui respecte l’obligation de confidentialité et qui soit intelligible, compte tenu du nombre de molécules, de préparations, de marques en jeu. Nous n’obtiendrons donc pas l’information souhaitée. Mieux vaut un registre bien tenu – c’est important, et il faut bien sûr veiller à assurer les formations requises pour cela – et accessible aux autorités en tant que de besoin.

Mme Laurence Abeille. Cet article a en effet été défendu par nos collègues écologistes au Sénat. La transmission du registre phytosanitaire à l’administration en vue d’établir une base de données sur l’utilisation des pesticides en France est tout à fait insuffisante actuellement. Les agriculteurs ont en effet pour seule obligation de tenir ce registre à la disposition de l’administration, et les seules données relatives à l’utilisation des pesticides dans notre pays sont les chiffres de vente avec le code postal des acheteurs : ce n’est pas assez pour mener des recherches sur les effets des pesticides sur la biodiversité et la santé, ni pour gérer les zones sensibles, par exemple les bassins-versants.

Il est nécessaire d’améliorer la quantité et la qualité des informations relatives aux pesticides pour mieux appréhender les risques que présentent ces produits. Les impératifs de progrès scientifique et de transparence sont aujourd’hui reconnus par tous. Ce consensus a été rappelé lors de la discussion de l’amendement de nos collègues au Sénat.

On sait que certains chercheurs sont obligés de créer des systèmes détournés pour reconstituer l’utilisation des pesticides. Plusieurs publications le montrent, dont l’une porte sur la pollution des eaux, une autre sur l’exposition des populations. Or les chercheurs y mettent en avant les marges d’erreur de leur système. Par exemple, le code postal de l’acheteur ne correspond évidemment pas toujours à celui de la parcelle dans laquelle les pesticides sont épandus. De plus, on ne dispose d’aucune information sur le moment de leur utilisation ni sur la quantité exacte utilisée dans chaque parcelle. En collectant, en agrégeant et en mettant à disposition des données relatives à l’utilisation des pesticides, on pourrait corriger ces biais, ce qui représenterait un progrès considérable pour la recherche fondamentale et permettrait de cerner bien mieux les risques auxquels ces produits exposent l’environnement et la santé publique.

Dans certains États des États-Unis, cette déclaration est obligatoire, ce qui a permis à des chercheurs d’établir des corrélations géographiques entre l’utilisation des pesticides à proximité d’habitations et le développement de certaines pathologies.

Les agriculteurs devant déjà tenir des registres, la contrainte supplémentaire que représenterait le système proposé est minime. La différence fondamentale est la suivante : une fois agrégées numériquement, ces données deviendraient exploitables par les chercheurs.

La déclaration obligatoire existe d’ailleurs pour d’autres substances polluantes, comme les flux d’azote pour les éleveurs.

Enfin, n’oublions pas que le ministre de l’agriculture a récemment rappelé le caractère essentiel de la transparence des données en matière de pesticides.

M. Guillaume Chevrollier. Cela a été dit, les exploitants tiennent déjà un registre et de nouvelles obligations viennent de leur être imposées en la matière, dont une formation régulière à l’utilisation de ces produits. De nouvelles mesures sur la traçabilité ont également été adoptées. À l’heure où les agriculteurs se plaignent des normes et des contraintes qui pèsent sur eux, cette nouvelle obligation, source de lourdeur administrative, serait mal comprise. Trop, c’est trop !

M. François-Michel Lambert. Je suis estomaqué de ce que j’entends ! Pour une fois que la loi n’est pas prescriptrice mais renvoie à un arrêté ministériel… Monsieur Guillaume Chevrollier, ce qui est proposé n’est qu’un ajustement de ce qui se fait déjà.

Quant au fond, outre ce qu’a très bien dit Laurence Abeille, la mesure est conforme à l’intérêt des agriculteurs. Alors que nous vivons dans un monde en révolution numérique, où les données doivent être partagées, alors que le projet de loi pour une République numérique est en cours d’examen, nous laisserions le monde agricole à l’écart de cette révolution, en nous privant de données qui seraient disponibles pour les chercheurs et permettraient en retour aux agriculteurs d’améliorer leur production et de dégager des marges ? Supprimer cet article, c’est affaiblir l’agriculture de demain, l’abandonner au monde d’hier, certes très agréable mais qui est entièrement remis en cause par la révolution numérique.

M. Jean-Marie Sermier. Sous couvert de cet article, on fait un procès d’intention aux agriculteurs de France : c’est intolérable. Ce qu’a dit Mme Abeille est faux : l’ensemble des produits fait l’objet de recherches, leur mise sur le marché est soumise à autorisation, leur dosage est également encadré. Les agriculteurs respectent les dosages et les volumes : ils ne trichent pas.

Mme Laurence Abeille. Je n’ai rien dit de tel.

M. Jean-Marie Sermier. Avant de leur vendre des produits, les coopératives et les particuliers sont d’ailleurs tenus de vérifier les surfaces exploitées. Il n’y a aucun surdosage aujourd’hui en France.

Il existe dans notre pays 400 000 à 500 000 exploitations agricoles, et dix à vingt parcelles, appelées îlots, par agriculteur : cela fait donc de 5 à 10 millions de parcelles. Avec 10 interventions par an – liées aux herbicides, aux phytosanitaires, etc. –, on en arrive à 50 à 100 millions de données à traiter. Et, pour chacune, il faut vérifier les dosages, les volumes, la météo, le vent, la vitesse du tracteur : il sera strictement impossible d’en tirer quoi que ce soit !

Il est urgent de supprimer cet article qui accuse les agriculteurs et s’oppose à notre agriculture raisonnable.

M. Julien Aubert. François-Michel Lambert se dit estomaqué ; pour ma part, je suis stupéfait, sidéré ! La disposition proposée est le type même de la fausse bonne idée, et ce que j’entends révèle une profonde méconnaissance du monde rural.

Premièrement, les exploitants ne sont pas là pour coopérer avec la recherche, même s’ils sont sans doute heureux de pouvoir le faire, mais pour produire. Je comprends que la recherche poursuive ses objectifs, que les chercheurs aient intérêt à accéder aux données, mais cela ne doit pas se faire au détriment de cette fonction première.

Quant au numérique, les propos de François-Michel Lambert sont très étonnants. Les agriculteurs nous expliquent qu’ils ont toutes les peines du monde à envoyer leurs déclarations à la Mutualité sociale agricole (MSA) ; parfois, alors qu’ils ont déjà basculé dans le numérique, ils sont obligés de fournir des doubles papier ou de se battre pendant plusieurs jours pour télétransmettre leurs documents, parce qu’ils vivent dans des territoires mal desservis par le réseau numérique ; et vous voulez en rajouter une couche !

Troisièmement, ce que vous proposez est à rebours des pratiques administratives modernes en matière de contrôle. Voyez le contrôle fiscal de l’impôt sur le revenu : il y a quelques années, l’administration demandait au contribuable de fournir les pièces justificatives ; aujourd’hui, celles-ci ne doivent être produites qu’en cas de contrôle. La voilà, la méthode moderne !

Comme disait Georges Pompidou : « Arrêtez d’emmerder les Français ! ». (Murmures)

M. Jean-Yves Caullet. Indépendamment des difficultés qu’entraînerait la mesure, quelle serait son utilité ?

Par ailleurs, le numérique ne fait pas la fiabilité d’une donnée ! Ce n’est pas parce que les données seront nombreuses et rapidement disponibles qu’elles seront de qualité. Même les données météorologiques doivent être normalisées. On ne peut se contenter de réunir des millions de registres pour les passer à la grande moulinette de la recherche qui, comme par magie ou presque, en tirera des résultats ! Il faut établir la fiabilité des éléments recueillis, leur homogénéité spatiale et temporelle, pour en faire une utilisation statistique. La statistique, soit on en fait son métier, soit on n’en parle pas ! Pareille collecte au chalut en eaux profondes (Rires) ne donnera pas un matériau exploitable scientifiquement ; il serait mensonger de soutenir le contraire.

La recherche et la connaissance sont des sources de préoccupation légitimes, Madame Abeille, mais on ne peut fonder une connaissance fiable sur des données ainsi réunies, surtout dans ces domaines où entrent en jeu les conditions d’utilisation, notamment météorologiques. Si l’on veut mener des recherches, qu’on le fasse : l’administration dispose des données brutes qu’elle peut fournir après anonymisation aux chercheurs, lesquels sont en mesure de procéder à des études ciblées, par secteur, par produit, par itinéraire technique.

Mme Delphine Batho. L’open data des traitements phytosanitaires est un vrai sujet.

L’administration dispose de bien plus de données qu’on ne veut bien le dire. L’émission Cash Investigation l’a d’ailleurs montré en rendant publics plusieurs chiffres quantifiant la présence de ces produits dans l’environnement. Le système actuel est globalement inefficace, y compris Ecophyto : on a appris aujourd’hui que les quantités de pesticides vendus ont encore augmenté de 9 % entre 2013 et 2014.

Qui est responsable ? Tel est à mes yeux l’enjeu du débat. La logique actuelle de l’obligation de moyens se révèle inefficace : il faut passer à une obligation de résultats. En outre, on ne saurait rabattre la responsabilité de l’État et des pouvoirs publics, qui autorisent certaines substances, sur celle des agriculteurs qui les utilisent.

Pour ces raisons, je suis défavorable au texte adopté par le Sénat. Je suis favorable à l’open data des produits phytosanitaires, comme de toutes les données dont dispose l’administration, mais je ne souhaite pas que l’on impose un formulaire administratif de plus aux agriculteurs.

Les surdosages sont une réalité, de même que l’utilisation de pesticides interdits, que l’on retrouve par exemple dans l’air de ma région ; mais la création d’un registre ne résoudra nullement ce problème. Les substances interdites, en effet, n’y seront pas davantage déclarées qu’elles ne le sont aujourd’hui.

Mme la rapporteure. Je suis entièrement d’accord avec Mme Batho et M. Caullet. Je suis donc favorable aux amendements de suppression. Inutile d’en rajouter : cela ne résoudra pas les problèmes auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés. Il faut travailler différemment.

Mme la secrétaire d’État. Même avis, pour les mêmes raisons.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je partage cet avis.

La commission adopte les amendements de suppression.

En conséquence, l’amendement CD602 de la rapporteure tombe et l’article 51 decies A est supprimé.

Article 51 undecies A
(article 214-17 du code de l’environnement)

Articulation entre la continuité écologique des cours d’eau et la préservation des moulins

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article, introduit lors de l’examen en commission au Sénat par l’adoption de l’amendement de M. Rémi Pointereau, vise à concilier la restauration des continuités écologiques et la protection des moulins.

La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques a inséré dans le code de l’environnement un article L. 214-17 dont le I précise la typologie des cours d’eau pour lesquels l’autorité administrative contrôle les ouvrages y étant implantés ou pouvant y être implantés. Dans ce cadre, le préfet coordonnateur de bassin fixe, pour chaque bassin ou sous-bassin deux listes.

La première est une liste des cours d’eau qui sont en très bon état écologique, qui servent de réservoir biologique nécessaire au maintien ou à l’atteinte du bon état écologique des cours d’eau d’un bassin-versant ou dans lesquels une protection complète des espèces amphialines (54) est nécessaire. Pour ces cours d’eau :

– aucune autorisation ou concession ne peut être accordée pour la construction de nouveaux ouvrages s’ils constituent un obstacle à la continuité écologique ;

– le renouvellement de la concession ou de l’autorisation des ouvrages existants, régulièrement installés est subordonné à des prescriptions spécifiques.

La seconde liste comprend les cours d’eau dans lesquels il est nécessaire d’assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs. Les règles relatives aux ouvrages installés ou installables sur ces cours d’eau sont plus souples que pour ceux de la première liste. L’article L. 214-17 du code de l’environnement prévoit seulement que « tout ouvrage doit y être géré, entretenu et équipé selon des règles définies par l’autorité administrative, en concertation avec le propriétaire ou, à défaut, l’exploitant ». Dans la pratique, cela signifie que les ouvrages hydrauliques situés sur ces cours d’eau doivent comporter des dispositifs d’ouverture (par exemple des vannes) permettant de laisser passer les sédiments à des intervalles réguliers.

L’article 51 undecies A complète l’article L. 214-17 du code de l’environnement en indiquant que les règles applicables aux ouvrages implantés sur des cours d’eau relevant de la seconde liste doivent assurer « la conciliation du rétablissement de la continuité écologique avec les différents usages de l’eau, en particulier le développement de la production d’électricité d’origine renouvelable » et qu’à cette fin « elles privilégient les mesures d’aménagement ou de gestion des ouvrages à chaque fois que le bilan entre les coûts et les avantages desdites mesures en comparaison d’une mesure d’effacement le justifie ».

Selon le Rapporteur au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, « la restauration de la continuité écologique des cours d’eau rencontre depuis plusieurs années une forte opposition des propriétaires de moulins qui reprochent aux pouvoirs publics de n’avoir qu’une politique unilatérale de l’eau en seule faveur des espèces piscicoles, ignorant sciemment les autres impacts » tandis que « les associations de pêcheurs et les associations de protection de l’environnement contestent le développement « aventureux » de la petite hydroélectricité au « bénéfice environnemental discutable » (55).

Par ailleurs, pour M. Rémi Pointereau, auteur de l’amendement n° 172, les propriétaires de moulins reprochent à l’ONEMA de privilégier l’effacement systématique des seuils sur les cours d’eau, ce qui est en contradiction avec l’objectif poursuivi de développement des énergies renouvelables poursuivi par le Gouvernement, objectif auquel la mobilisation du potentiel hydroélectrique des moulins pourrait contribuer.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 undecies A a été supprimé à l’initiative de votre rapporteure, qui a indiqué que son application enverrait un signal négatif qui conduirait à freiner le travail difficile de restauration des continuités écologique.

Votre rapporteure tient toutefois à préciser qu’elle souhaite que le dialogue, au plan local, permettre de trouver des solutions qui satisfassent l’ensemble des parties prenantes. Le problème réside aujourd’hui davantage dans la manière d’appliquer la loi que dans sa rédaction.

Consciente des difficultés qui pouvaient se poser pour les propriétaires de moulins – notamment patrimoniaux – votre rapporteure apporte par contre tout son soutien au dispositif prévu par l’article 51 undecies B et soutient la proposition formulée par certains de ses collègues de faire passer la durée du délai supplémentaire pour la réalisation des travaux de trois à cinq ans.

*

* *

La commission aborde l’amendement CD603 de la rapporteure, tendant à supprimer l’article.

Mme la rapporteure. Cet article porterait atteinte à la restauration des continuités écologiques. Or nous devons être très prudents sur ces sujets.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

M. Julien Aubert. Cette argumentation nous laisse un peu sur notre faim ! L’objectif de l’article est de « concili[er] [le] rétablissement de la continuité écologique avec les différents usages de l’eau, en particulier le développement de la production d’électricité d’origine renouvelable » : cela ne paraît pas critiquable. Mme la rapporteure indique que la mesure porterait atteinte à la restauration des continuités écologiques, mais ces mécanismes de production d’électricité d’origine renouvelable existent déjà. Quel risque cet article, dont la rédaction me semble plutôt pragmatique, comporte-t-il précisément ?

M. Jean-Marie Sermier. Personne ne conteste la nécessité des corridors écologiques dans l’eau et de la circulation des poissons. Mais certains ouvrages et usages permettent de produire de l’électricité tout en préservant les intérêts environnementaux, patrimoniaux ou sportifs – je songe aux sports aquatiques. Prenons donc garde de détruire des barrages qui n’empêchent pas les poissons migrateurs de se déplacer.

Mme la rapporteure. Aux termes de la directive-cadre sur l’eau, il faut restaurer la continuité écologique de nos rivières – la trame bleue. Nous avons des outils qui permettent d’appliquer cette directive, en particulier les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et les schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) lorsqu’ils existent. Dans ce cadre, tout ouvrage doit faire l’objet d’un examen, en concertation avec ses propriétaires, afin de savoir s’il est nécessaire ou non de l’aménager ou de l’araser.

Il serait très difficile de « privilégi[er] les mesures d’aménagement ou de gestion des ouvrages chaque fois que le bilan entre les coûts et les avantages desdites mesures en comparaison d’une mesure d’effacement le justifie », comme le préconise l’article.

Il y a aujourd’hui une véritable fronde des propriétaires de moulins ou d’autres ouvrages qui refusent la directive-cadre sur l’eau et veulent empêcher toute intervention sur leurs ouvrages. Nos collègues Françoise Dubois et Jean-Pierre Vigier ont publié à ce sujet un rapport très intéressant qui rappelle les objectifs de la directive. Personne n’oblige à l’effacement des ouvrages, mais il est indispensable de les améliorer au cas par cas, qu’ils soient hydroélectriques ou non. Le maître d’ouvrage, par exemple un syndicat mixte, doit pouvoir travailler avec chaque propriétaire pour étudier avec lui la possibilité de maintenir l’ouvrage.

La réglementation actuelle est conservée : nul besoin de cet article pour mettre en œuvre la trame bleue, absolument nécessaire à la circulation des poissons et au transport des sédiments.

Mme Françoise Dubois. Je suis d’accord avec la rapporteure, mais il est un peu dommage de supprimer l’article. En effet, les propriétaires de moulins sont des acteurs importants en matière de continuité écologique aquatique ; or, en préparant notre rapport d’information avec Jean-Pierre Vigier, nous nous sommes aperçus que ce ne sont pas eux qui sont le plus écoutés. Voilà pourquoi nous avions fait part de nos réserves vis-à-vis de l’effacement des barrages et de l’installation de passes à poissons, qui ne sont pas toujours très utiles mais qui coûtent très cher.

Les propriétaires des moulins, qui ont des droits et des devoirs, entretiennent en général correctement leur propriété, grâce aux associations et aux aides existantes. Il existe des solutions alternatives comme les rivières de contournement, qui ne coûtent rien, beaucoup moins cher en tout cas que les passes à poissons. Il peut donc être intéressant de conserver les ouvrages sur les petites rivières. Les propriétaires de moulins nous ont dit qu’ils n’étaient invités à participer à aucune instance de concertation, à la différence des pêcheurs ou des chasseurs : c’est regrettable.

M. Philippe Plisson. Je préside une communauté de communes qui gère un bassin-versant et nous nous efforçons de restaurer la continuité écologique, en concertation avec les propriétaires de moulins. Il faut savoir qu’une alose ne peut pas franchir cinq obstacles consécutifs. Nous devons donc privilégier, soit la biodiversité, soit les moulins. Or ceux-ci sont pour les poissons des obstacles infranchissables.

N’est-ce pas une loi sur la biodiversité que nous examinons ? À un moment donné, il y a des choix à faire ; et, en ce qui me concerne, je fais le choix du poisson. (Sourires)

Il faut supprimer cet article.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CD1076 de la rapporteure, CD873 et CD1036 de M. Jean Launay, CD201 de M. Jean-Marie Sermier et CD690 de M. Jacques Krabal tombent, et l’article 51 undecies A est supprimé.

Article 51 undecies B
(article 214-17 du code de l’environnement)

Délai de trois ans accordé aux propriétaires de bonne foi pour la réalisation des travaux sur les moulins permettant l’amélioration de la continuité écologique

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article a été introduit lors de l’examen en séance publique au Sénat, suite à l’adoption, avec un avis favorable de la commission et un avis de « sagesse bienveillante » du Gouvernement (56) des amendements de MM. Roland Courteau et Michel Raison. Il vise à accorder un délai de réalisation supplémentaire aux exploitants ou propriétaires d’ouvrages – et notamment aux propriétaires de moulins - qui ont largement entamé les démarches pour effectuer les travaux rendus nécessaires pour le transport de sédiments et la circulation des poissons migrateurs sur les cours d’eau mais n’ont pas encore pu réaliser ces travaux

En l’état actuel du droit, le III de l’article L. 214-17 du code de l’environnement dispose que les obligations résultant du I de cet article (cf. article 51 undecies A) s’appliquent à la date de publication des listes qu’il mentionne.

Toutefois, il prévoit une dérogation pour les ouvrages régulièrement installés sur les cours d’eau figurant sur la seconde liste, c’est-à-dire la liste des cours d’eau pour lesquels le seul objectif fixé est la nécessité d’assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs. Pour ces ouvrages, les obligations prévues par le I de l’article L. 214-17 ne s’appliquent qu’ « à l’issue d’un délai de cinq ans après la publication des listes ».

L’article 51 undecies B complète les dispositions relatives aux ouvrages déjà installés sur les cours d’eau de la seconde liste en prévoyant que, lorsque les travaux demandés « n’ont pu être effectués dans le délai de cinq ans susvisé, mais que le dossier relatif aux propositions d’aménagement ou de changement de modalités de gestion de l’ouvrage a été déposé auprès des services de police de l’eau, le propriétaire ou à défaut l’exploitant de l’ouvrage dispose d’un délai supplémentaire de trois années pour les réaliser. ». Lors de la présentation de son amendement en séance publique, M. Roland Courteau a indiqué qu’accorder un délai supplémentaire de trois ans aux propriétaires et exploitants de moulins de bonne fois se justifiait pour deux raisons :

– de tels travaux nécessitent des phases d’études, d’instruction des dossiers en vue de l’obtention des autorisations administratives et de réalisation dont la durée cumulée peut largement dépasser cinq ans ;

– la réalisation de ces travaux nécessite de faire appel à des entreprises extérieures spécialisées, qui ne peuvent répondre à l’ensemble des demandes dans les délais impartis car elles sont très sollicitées en raison du grand nombre d’ouvrages concernés (57).

2. La position de votre commission en deuxième lecture

Une série d’amendements rédactionnels présentés par votre rapporteure a été adoptée ainsi que l’amendement n°CD203 de M. Sermier, qui fait passer le délai dérogatoire introduit au Sénat de trois à cinq ans. Cette initiative a recueilli un avis favorable de la rapporteure (cf. ci-dessus article 51 undecies A).

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CD202 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Plus de 2 200 cours d’eau sont actuellement classés en liste 2, ce qui impose que 15 000 ouvrages soient traités en cinq ans pour permettre la circulation des poissons migrateurs et le transport de sédiments. Or seule une centaine d’ouvrages est traitée chaque année dans chacun des grands bassins, soit environ 600 par an.

L’amendement propose donc de donner la priorité aux cours d’eau les plus sensibles, ceux qui sont classés « grands migrateurs », en introduisant un niveau de priorité supplémentaire au sein de la liste 2, afin d’agir de manière à la fois réaliste et proportionnée aux enjeux.

Mme la rapporteure. J’entends vos préoccupations. Je sais aussi – ce sujet important n’est pas consensuel – qu’il est nécessaire d’accorder un délai supplémentaire aux propriétaires d’ouvrages qui ont engagé des travaux. Je salue donc l’initiative qu’a prise le Sénat de voter cet article, et je soutiendrai par ailleurs dans un amendement à venir votre proposition de porter de trois à cinq ans le délai supplémentaire accordé aux propriétaires.

Mais l’introduction d’un niveau supplémentaire de priorité au profit des « grands migrateurs » impliquerait probablement leur classement dans une troisième catégorie, ce qui pourrait remettre en cause les processus en cours dans des rivières où il n’y a pas de migrateurs. Cela risque d’être contre-productif.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la secrétaire d’État. Je suis d’accord pour dire qu’il faut hiérarchiser les actions à mener. Mais l’amendement complique le dispositif existant, ajusté en première lecture. Donner la priorité aux poissons grands migrateurs par rapport aux espèces holobiotiques et à la restauration de l’hydromorphologie de nos rivières n’est pas une bonne idée. D’une part, cette stratégie concentre les efforts sur des situations complexes alors qu’il en existe beaucoup d’autres pour lesquelles il sera plus facile d’agir immédiatement avec succès, ce qui déclenchera une dynamique positive. D’autre part, elle ne résout pas le problème de la restauration de l’hydromorphologie, indispensable pour atteindre le bon état écologique demandé par l’Europe.

Avis défavorable.

M. Jean-Marie Sermier. Je suis plutôt satisfait que vous souhaitiez prolonger le délai, Madame la rapporteure. Mais je répète les chiffres : 15 000 ouvrages à traiter, alors que 600 le sont chaque année ; à ce rythme, il faudrait 25 ans pour réaliser la totalité de l’opération. J’accepte toutefois de retirer mon amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD465, CD464, CD463 et CD467 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD203 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Comme je l’ai indiqué lors de l’examen de l’amendement CD202, il s’agit de porter de trois à cinq ans le délai supplémentaire consenti aux exploitants ou propriétaires.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. J’ai conscience de l’ampleur du travail que nécessite la restauration de la continuité écologique de l’ensemble de nos rivières. Le Sénat a ainsi introduit par amendement la possibilité d’accorder un délai de réalisation supplémentaire aux exploitants ou propriétaires de bonne foi qui ont entamé les démarches nécessaires en déposant leur dossier auprès de l’administration mais n’ont pu effectuer les travaux dans les délais prévus ; cet amendement avait été accueilli favorablement par Ségolène Royal. Toutefois, porter ce délai supplémentaire de trois à cinq ans, comme le propose M. Sermier, me semble excessif. Avis défavorable.

Mme Laurence Abeille. Je partage l’avis de Mme la secrétaire d’État. Si nous allongeons encore le délai accordé pour la réalisation des travaux, nous savons que, dans deux ou trois ans, nous n’aurons toujours pas avancé. Il faut envoyer un signal aux exploitants et aux propriétaires.

M. Jean-Marie Sermier. Il faut en effet leur envoyer un signal, mais en portant le délai supplémentaire dont ils peuvent bénéficier à cinq ans, faute de quoi toutes les opérations ne pourront pas être réalisées. En outre, et vous l’avez précisé avec juste raison, Madame la secrétaire d’État, ce délai serait accordé aux propriétaires et exploitants de bonne foi, qui ont déjà déposé leur dossier administratif. Il s’agit simplement de leur donner le temps nécessaire pour réaliser les travaux.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD466 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 51 undecies B ainsi modifié.

Article 51 undecies
(articles L. 218-83, L. 218-84, L. 218-86, L. 612-1, L. 622-1, L. 632-1 et L. 640-1 du code de l’environnement)

Contrôle et gestion des eaux de ballast et des sédiments des navires

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 undecies a été introduit lors de l’examen en commission à l’Assemblée nationale, par l’adoption d’un amendement du Gouvernement. Lors de l’examen en séance publique, il a fait l’objet d’un amendement de votre rapporteure qui l’a déplacé au sein du chapitre IV du titre V, sans en modifier le contenu.

Cet article renforce le dispositif d’interdiction de largage des eaux de ballast à proximité du littoral, en anticipant l’entrée en vigueur prochaine de la BWM 2004 (58) (convention internationale pour le contrôle et la gestion des eaux de ballast et sédiments des navires) initiée suite à la Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement de 1992 à Rio de Janeiro et adoptée le 13 février 2004 dans le cadre de l’Organisation Maritime Internationale (OMI).

Cette convention a été ratifiée par la France par la loi n° 2008-476 du 22 mai 2008 mais elle n’est pas encore entrée en vigueur au niveau international. Elle doit entrer en vigueur douze mois après avoir été ratifiée par 30 États représentant 35 % du tonnage de la flotte de commerce mondiale.

La convention BWM vise à prévenir, réduire, voire empêcher le déplacement d’organismes aquatiques nuisibles et d’agents pathogènes grâce au contrôle et à la gestion des eaux de ballast et des sédiments des navires.

En effet, les espèces aquatiques envahissantes représentent une menace majeure pour les écosystèmes marins et la navigation maritime a été reconnue comme étant un vecteur principal d’introduction d’espèces dans de nouveaux milieux. Ce problème s’est aggravé sous l’effet de l’accroissement du volume des échanges commerciaux et du trafic au cours des dernières décennies, notamment du fait de l’utilisation des coques en acier, qui permettent aux navires d’utiliser de l’eau plutôt que des matériaux solides comme ballast (59). Ces eaux sont destinées à contribuer, avec la cargaison, à équilibrer les navires. Lors des opérations commerciales de chargement et de déchargement des navires, cette eau, située généralement dans les doubles fonds des navires, peut être rejetée. La masse des rejets est estimée à 5 milliards de tonnes dans le monde dont 22 millions de tonnes en France (60).

En France, l’introduction d’agents nuisibles par les eaux de ballast a par exemple été illustrée par l’apparition de l’Alexandrium catenella en provenance d’Asie du Sud-Est dans l’étang de Thau en 1997, à proximité du port de commerce de Sète. Cette algue microscopique contamine les produits de la conchyliculture, les rendant impropres à la consommation.

L’article 51 undecies modifie la section 8 du chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l’environnement pour l’adapter à la convention BWM 2004 :

Le a du 1° modifie l’article L. 218-83 du code de l’environnement de manière à prévoir que les règles relatives aux eaux de ballast seront applicables à tous les navires, quelle que soit leur jauge et leur provenance désormais. De plus, il précise qu’elles seront applicables « dans les eaux sous souveraineté et sous juridiction françaises » et non plus seulement « dans les eaux territoriales ou intérieures françaises », ce qui permet d’étendre l’application des règles à la zone économique exclusive. Enfin, les 4°, 5° et 6° de l’article 51 undecies étendent le champ d’application territoriale du dispositif à la Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna (sous réserve des compétences dévolues à ces territoires dans les eaux territoriales) et aux Terres australes et antarctiques françaises.

Le a et le c du 1° modifient les règles fixées par l’article L. 218-83 du code de l’environnement et renvoient aux textes réglementaires pour leur application. Il n’est plus question que des navires attestent d’un échange de plus de 95 % des eaux de ballast dans les eaux internationales qu’ils prouvent qu’ils procèdent au renouvellement des eaux de ballast ou à la gestion des eaux de ballast et des sédiments « au moyen d’équipements embarqués approuvés par l’autorité compétente ».

Le 2° modifie l’article L. 218-84 du code de l’environnement pour rendre les sanctions applicables plus dissuasives en cas de non-respect des règles relatives aux eaux de ballast.

Enfin, le 3° modifie le régime des exceptions fixées par l’article L. 218-86 du code de l’environnement :

– il introduit une exception supplémentaire, qui apparaît cependant superflue (cas des navires qui ne sont pas conçus ou construits pour transporter des eaux de ballast des navires munis de citernes de ballast scellées à bord) ;

– il précise que l’exception dont bénéficient les navires en situation de difficulté ou d’avarie ne peut être invoquée que lorsque le rejet des eaux de ballast pour but de « garantir la sécurité du navire ou la sauvegarde de la vie humaine en mer, ou de réduire au minimum les dommages causés par un événement de pollution » et  il étend le bénéfice de cette exception aux « situations d’urgence » ;

– il étend aux navires auxiliaires le bénéfice de l’exception prévue pour les navires de guerre, ce qui pourrait bénéficier aux flottes étrangères faisant escale dans les ports français, comme la Royal Fleet Auxiliary britannique (la France ne possède en effet pas de flotte auxiliaire).

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article 51 undecies n’a fait l’objet que d’un amendement de cohérence juridique adopté en commission à l’initiative du rapporteur (61) et qui visait à corriger une erreur matérielle dans la nouvelle rédaction qui était proposée pour l’article L. 218-6 du code de l’environnement. Cette rédaction introduisait une discrimination non conforme au droit international en accordant le bénéficie du régime d’exception défini par cet article aux seuls navires de l’État français alors qu’aux termes de la convention, l’ensemble des États parties doivent en bénéficier.

3. La position de votre commission

Les modifications apportées par le Sénat n’appelant aucun commentaire de sa part, votre rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

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La commission adopte l’article 51 undecies sans modification.

Article 51 duodecies A
(article 167 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte)

Abrogation d’une habilitation à légiférer par ordonnance

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 duodecies A est issu de l’amendement n° 671 qui a été adopté en séance publique à l’initiative du Gouvernement avec un avis favorable de la commission.

Il supprime le 12° de l’article 127 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de cette loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi afin « de modifier certaines dispositions du code de l’environnement afin de les mettre en conformité avec la convention pour le contrôle et la gestion des eaux de ballast et sédiments des navires, signée à Londres le 13 février 2004, en particulier en ce qui concerne le champ d’application, le niveau des sanctions et l’application à certaines collectivités d’outre-mer ».

La mise en conformité du code de l’environnement avec la convention sur les eaux de ballast ayant été réalisée par le biais de l’insertion de l’article 51 undecies (cf. ci-dessus), cette habilitation n’est plus utile et le Gouvernement a souhaité la supprimer.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 duodecies A a été adopté sans modification par la commission.

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La commission adopte l’article 51 duodecies A sans modification.

Article 51 duodecies
(articles L. 219-1 à L. 219-6 du code de l’environnement)

Régime d’opposabilité des documents stratégiques de façade et des documents stratégiques de bassin maritime et transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 duodecies a été introduit par l’adoption de l’amendement n° 1536 du Gouvernement lors de l’examen du texte en séance publique.

Cet amendement vise à clarifier le régime d’opposabilité des documents stratégiques de façade et des documents stratégiques de bassin maritime en réécrivant les articles L. 219-1 à L. 219-6 du code de l’environnement qui définissent la stratégie nationale pour la mer et le littoral, les documents stratégiques qui déclinent cette stratégie pour chaque façade maritime et les documents stratégiques de bassin maritime (qui remplacent les documents stratégiques de façade en outre-mer).

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article a fait l’objet d’une série de modifications rédactionnelles à l’initiative du rapporteur comme du Gouvernement (62) et de deux types d’amendements « de fond ».

a. La modification du régime d’opposabilité des documents stratégiques de façade et des documents stratégiques de bassin maritime

Lors de l’examen du texte en commission, le rapporteur a fait adopter un amendement qui vise à donner au document stratégique de façade ou de bassin la même force juridique à l’égard des documents maritimes et des documents terrestres. Il remplace ainsi le rapport de prise en compte qui était prévu pour les documents terrestres par un rapport de compatibilité.

L’adoption de l’amendement n° 625 du Gouvernement en séance publique a conduit à revenir sur cette évolution en rétablissant le rapport de prise en compte.

b. La transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime

Nombreux sont les acteurs qui, du fait de la diversification et de la densification des activités maritimes, souhaitent voir advenir une telle planification de l’espace maritime. Aujourd’hui, la conciliation des différents usages de la mer au moyen d’une approche spatialisée est devenue une priorité, qui doit permettre de prévenir la multiplication des conflits d’usage. Le développement des exploitations de gaz et de pétrole offshore, celui des énergies renouvelables, l’essor de la navigation, de la pêche et de l’aquaculture ou encore le développement du tourisme sont des activités qui exercent une pression sur l’espace et les ressources marines, et doivent être conciliées entre elles mais aussi avec la nécessité de préserver le patrimoine culturel sous-marin, les écosystèmes et la biodiversité.

Cette approche en matière de gestion des océans et de gouvernance maritime a été mise au point dans le cadre de la politique maritime intégrée pour l’Union européenne (PMI), dont le pilier environnemental est constitué par la directive-cadre du 17 juin 2008 (63). L’objectif de la PMI est de soutenir le développement durable des mers et des océans et de développer une prise de décision plus coordonnée, plus cohérente et plus transparente pour ce qui est des politiques sectorielles de l’Union qui affectent les espaces maritimes. Le développement de la planification peut également favoriser le développement d’activités génératrices de croissance, comme l’a indiqué la communication de la commission intitulée « La croissance bleue : des possibilités de croissance durable dans les secteurs marin et maritime » (64).

Pour amorcer la transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime (65), le rapporteur a fait adopter lors de l’examen du texte en commission un amendement qui complète l’article L. 219-3 du code de l’environnement et dispose que le document stratégique « met en œuvre une planification de l’espace maritime qui tient compte des aspects socioéconomiques, environnementaux et liés à la prévention des risques, afin de promouvoir le développement durable dans le secteur maritime. Il applique une approche fondée sur les écosystèmes et favorise la coexistence des activités et des usages. ».

L’adoption de l’amendement n° 625 du Gouvernement en séance publique a quant à lui introduit, dans le code de l’environnement, un article L. 219-5-1 qui vise à transposer la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime pour laquelle le délai de transposition expire le 18 septembre 2016 (66). Le paragraphe 2 de l’article 2 de la directive du 23 juillet 2014 définit la planification de l’espace maritime comme le « processus par lequel les autorités concernées des États membres analysent et organisent les activités humaines dans les zones maritimes pour atteindre des objectifs d’ordre écologique, économique et social ». La directive invitant à s’appuyer sur des dispositifs préexistants, le document stratégique de façade défini par l’article L. 219-3 du code de l’environnement sera, conformément aux orientations des comités interministériels de la mer de 2013 et 2015, l’outil de mise en œuvre de la planification de l’espace maritime.

Le but de la planification de l’espace maritime est défini par le premier alinéa et reprend la définition du paragraphe 1 de l’article 1er de la directive du 23 juillet 2014. Il s’agit de « promouvoir la croissance durable des économies maritimes, le développement durable des espaces maritimes et l’utilisation durable des ressources marines ».

La « planification de l’espace maritime » est définie par le deuxième alinéa comme le « processus par lequel l’État analyse et organise les activités humaines en mer, dans une perspective écologique, économique et sociale », ce qui reprend la définition donnée par le paragraphe 2 de l’article 3 de la directive.

Par ailleurs, cet alinéa précise que la planification de l’espace maritime ne s’applique pas aux activités dont l’unique objet est la défense ou la sécurité nationale (67).

Le troisième alinéa définit les documents qui serviront de support à cette planification : il s’agit des documents stratégiques de façade. Ce document doit, en application du cinquième alinéa de l’article contenir des plans qui « visent à contribuer au développement durable des secteurs énergétiques en mer, du transport maritime, et des secteurs de la pêche et de l’aquaculture, ainsi qu’à la préservation, à la protection et à l’amélioration de l’environnement, y compris à la résilience aux incidences du changement climatique » et « peuvent poursuivre d’autres objectifs tels que la promotion du tourisme durable et l’extraction durable des matières premières ». La directive impose que ces plans soient établis au plus tard le 31 mars 2021.

Le champ géographique couvert par cette planification est défini par le troisième alinéa de l’article L. 219-5-1 qui mentionne :

– « les façades définies à l’article L. 219-1 », qui, selon cet article, « sont par les caractéristiques hydrologiques, océanographiques, biogéographiques, socio-économiques et culturelles des espaces concernés » et dont la délimitation, en métropole, doit être « cohérente avec les régions et sous-régions marines identifiées à l’article 4 de la directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, établissant un cadre d’action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin, et tient compte de la politique commune de la pêche » ;

« les espaces définis au 1° de l’article L. 219-8 », c’est-à-dire les « eaux marines » qui comprennent, en application de cet article : « les eaux, fonds marins et sous-sols situés au-delà de la ligne de base servant pour la mesure de la largeur des eaux territoriales et s’étendant jusqu’aux confins de la zone où la France détient et exerce sa compétence, conformément à la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 » ainsi que « les eaux côtières telles que définies par la directive n° 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2000, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, y compris les fonds marins et le sous-sol, dans la mesure où les aspects particuliers liés à l’état écologique du milieu marin ne sont pas déjà couverts par ladite directive ».

Enfin, les objectifs de la planification de l’espace maritime et les exigences minimales pour cette planification définis par les articles 5 et 6 de la directive sont repris dans les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 219-5-1 :

– tenir compte des aspects socio-économiques et environnementaux ;

– utiliser une approche fondée sur les écosystèmes prévue à l’article L. 219-7 ;

– favoriser la coexistence optimale des activités et des usages en incluant les interactions terre-mer et tenir compte des impacts de ces usages sur l’environnement, les ressources naturelles et les aspects liés à la sécurité ;

– favoriser la cohérence entre les plans qui résultent de la démarche de planification de l’espace maritime et d’autres processus, tels que la gestion intégrée des zones côtières ;

– contribuer au développement durable des secteurs énergétiques en mer, du transport maritime et des secteurs de la pêche et de l’aquaculture, à la préservation, à la protection et à l’amélioration de l’environnement (y compris à la résilience aux incidences du changement climatique), et éventuellement poursuivre d’autres objectifs comme la promotion du tourisme durable ou encore l’extraction durable des matières premières.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 duodecies a fait l’objet d’une série d’amendements rédactionnels et d’harmonisation juridique de votre rapporteure ainsi que d’un amendement de Mme Viviane Le Dissez qui a remplacé les termes « valorisation des ressources marines » présents dans la définition de la stratégie nationale pour la mer et le littoral par les termes « utilisation durable des ressources marines », de manière à reprendre avec plus d’exactitude les termes employés par la directive du 23 juillet 2014.

*

* *

La commission examine l’amendement CD972 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Cet amendement de cohérence rédactionnelle vise à substituer au mot : « valorisation », les mots : « utilisation durable ».

Mme la rapporteure. Favorable.

Mme la secrétaire d’État. Favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD468 et CD469 de la rapporteure.

Elle en vient ensuite à l’examen de l’amendement CD470 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un amendement de cohérence qui tend à supprimer l’alinéa 12 de l’article 51 duodecies, introduit en commission au Sénat pour tenir compte de l’insertion en séance publique des alinéas 22 à 27, qui visent le même objectif, à savoir la transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime.

Mme la secrétaire d’État. Favorable.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CD1037 de Mme Viviane Le Dissez tombe

La commission est saisie des amendements identiques CD36 de M. Michel Heinrich et CD906 de M. Gérard Menuel.

M. Michel Heinrich. Les alinéas 11 à 13 de l’article 51 duodecies précisent le contenu des documents stratégiques de façade, déclinaisons territorialisées de la stratégie nationale en mer. Cependant, aucune disposition légale ne vient encadrer le dispositif d’élaboration de ces documents, qui est intégralement renvoyé à un décret ultérieur. Au vu de l’importance stratégique de ces documents et de leur opposabilité aux documents d’urbanisme et donc au projet de territoire des collectivités territoriales littorales, il conviendrait, d’une part, que les élus des collectivités territoriales littorales soient associés à leur élaboration au travers des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière de plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) et des structures porteuses des schémas de cohérence territoriale, comme c’est le cas pour le schéma régional d’aménagement et de développement durable et d’égalité du territoire (SRADDET), et, d’autre part, que le projet de document stratégique de façade soit adressé pour avis à ces personnes publiques.

M. Gérard Menuel. L’article et le décret d’application prévoient d’inscrire ces documents dans le corpus du droit de l’urbanisme en les rendant opposables aux PLU, aux PLUI et aux schémas de cohérence territoriale (SCoT). Or, malgré l’importance des documents stratégiques de façade pour la définition du projet des territoires littoraux, la loi reste muette sur l’association des élus locaux à leur élaboration ; l’amendement vise à corriger cette anomalie.

Mme la rapporteure. La consultation des EPCI compétents en matière de PLUI et la réalisation d’une enquête publique alourdiraient considérablement la procédure de réalisation des documents stratégiques de façade. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Ces amendements visant à soumettre le document stratégique de façade à enquête publique ne sont pas adaptés, compte tenu de l’échelle de ces documents : quatre façades pour le littoral de la France métropolitaine. Cette enquête publique alourdirait la procédure, alors que la mise à disposition du public, qui figure dans la loi actuelle, répond aux obligations définies par la directive sur la planification de l’espace maritime. Par ailleurs, il convient de rester cohérent avec la procédure de mise à disposition du public retenue pour le plan d’action pour les milieux marins, qui forme un chapitre du document stratégique de façade. Avis défavorable.

M. Michel Heinrich. À quel moment les collectivités concernées sont-elles associées à l’élaboration du document stratégique de façade ? Jamais.

Mme la secrétaire d’État. C’est prévu par voie réglementaire.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD471, CD472, CD473, CD474 et CD475 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 51 duodecies ainsi modifié.

Article 51 terdecies A
(articles L. 541-10 et L. 541-10-5 du code de l’environnement)

Interdiction des cotons-tiges à tige en plastique et création de sanctions pour le non-respect de l’interdiction des sacs, verres, gobelets, assiettes et cotons-tiges en plastique

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

a. L’interdiction des cotons-tiges

L’article 51 terdecies A a été introduit dans le texte par l’adoption, en séance publique au Sénat, de l’amendement n° 50 rectifié, présenté par Mme Evelyne Didier.

Son I modifie l’article L. 541-10-5 du code de l’environnement pour interdire à partir du 1er janvier 2018 la vente ou la mise à disposition gratuite de tous les cotons-tiges à l’exception des cotons-tiges en papier biodégradable et compostable.

Mme Evelyne Didier a indiqué que cette mesure se justifiait pour deux raisons :

– du fait de leur taille, les cotons-tiges sont très difficiles à trier parmi les ordures ménagères et, lors du compostage de déchets ou de la valorisation des boues de station d’épuration, la tige en plastique est très difficilement séparable du reste des déchets auxquels elle se trouve mêlée. Cela conduit à polluer les terres cultivées sur lesquelles est déversé du compost issu de déchets urbains ou de boues de stations d’épuration ;

– ils sont souvent jetés dans la cuvette des toilettes, et non dans la poubelle et se retrouvent ainsi dans le circuit des eaux usées. Or, en cas de fortes pluies, le réseau unitaire des eaux usées peut arriver à saturation et une grande partie de ces eaux est alors rejetée dans les cours d’eau par les déversoirs d’orage, ce qui fait que les cotons-tiges viennent grossir la masse des résidus plastiques qui polluent les rivières et les océans.

Cet amendement a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, la ministre chargée de l’écologie indiquant à cette occasion : « Je salue le courage de Mme Didier, car il n’est pas évident de défendre de tels amendements, qui soulèvent pourtant de réels problèmes environnementaux. » (68).

Cet amendement a toutefois suscité des interrogations de la part de Mme Isabelle Debré et de M. Hervé Poher, qui craignaient que cette mesure n’ait un impact sur les entreprises françaises et sur l’emploi. Dans son exposé de l’amendement, qu’elle présentait au nom du groupe communiste républicain et citoyen, Mme Evelyne Didier a indiqué que « les industriels français et européens sont prêts à massifier la production de tiges en papier ». Par ailleurs, elle a souligné que « c’est un chef d’entreprise qui, voilà une dizaine d’années, [lui] a demandé d’intervenir sur ce sujet des cotons tiges ! » dans sa réponse à Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques, qui s’inquiétait du « fait que le carton biodégradable, qui est déjà utilisé pour le papier toilette […] est une calamité pour l’assainissement » (69).

b. Création de sanctions pour l’utilisation sacs plastiques et de cotons-tiges à tiges en plastique

Le II de l’article 51 terdecies A modifie l’article L. 541–10 du code de l’environnement pour créer une sanction administrative en cas de non-respect de la réglementation relative aux cotons-tiges et aux sacs, aux assiettes et verres en plastique, selon la présentation qu’a effectuée Mme Evelyne Didier de l’amendement en séance publique. (70)

Le I du même article dispose que « la fabrication, la détention en vue de la vente, la mise en vente, la vente et la mise à la disposition de l’utilisateur, sous quelque forme que ce soit, de produits générateurs de déchets peuvent être réglementées en vue de faciliter la gestion desdits déchets ou, en cas de nécessité, interdites ».

Le premier alinéa du II du même article L. 541–10 prévoit qu’en application du principe de responsabilité élargie du producteur, il peut être fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs produits générateurs de déchets ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent.

Les personnes concernées s’acquittent de leur obligation :

– en mettant en place des systèmes individuels de collecte et de traitement des déchets issus de leurs produits ;

– ou en mettant en place collectivement des « éco-organismes ». Ceux-ci sont définis comme des « organismes auxquels ils versent une contribution financière et transfèrent leur obligation et dont ils assurent la gouvernance ». Ces éco-organismes sont agréés par l’État pour une durée maximale de six ans renouvelable. Pour être agréés, ils doivent établir qu’ils disposent des capacités techniques et financières nécessaires pour répondre aux exigences d’un cahier des charges qui est fixé par arrêté interministériel.

Le III de l’article L. 541–10 définit la procédure de sanctions prévue pour les personnes qui ne respecteraient pas les obligations définies par le premier alinéa du II de cet article :

– le ministre chargé de l’environnement l’avise des faits qui lui sont reprochés et de la sanction qu’il encourt ;

–  l’intéressé peut alors présenter ses observations, écrites ou orales, dans le délai d’un mois et être assisté d’un conseil ou représenté par un mandataire de son choix ;

– le ministre chargé de l’environnement peut ensuite prononcer une amende administrative. Le montant de cette dernière tient compte de la gravité des manquements constatés et des avantages qui en sont retirés. Il ne peut excéder, par unité de produit fabriqué, importé ou distribué 500 € pour une personne physique et 7 500 € pour une personne morale.

Le II de l’article étend cette procédure et les sanctions aux personnes qui ne respecteraient pas les interdictions prévues par le II et le III l’article L. 541-10-5 du code de l’environnement, c’est-à-dire :

– l’interdiction de la mise à disposition (gratuite ou payante) de sacs plastiques dans les points de vente (II de l’article L. 541-10-5) ;

– l’interdiction de la mise à disposition de gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table en matière plastique (III de l’article L. 541-10-5) ;

– l’interdiction de la mise à disposition (gratuite ou payante) de cotons-tiges qui ne sont pas en papier biodégradable et compostable (nouvel alinéa introduit dans le III de l’article L. 541-10-5 par le I de l’article 51 terdecies A).

2. La position de votre commission en deuxième lecture

Cet article a fait l’objet d’une série d’amendements parlementaires qui visent à en préciser la portée, ainsi que d’un amendement du Gouvernement.

a. Précision de la portée de l’interdiction des cotons-tiges

L’amendement CD641 substitue aux termes « mise à disposition à titre onéreux ou gratuit » les termes « mise sur le marché ».

Les amendements CD1058, CD1059 et CD1057 visent à préciser le type de bâtonnets ouatés concernés.

Pour éviter qu’une lecture trop littérale de l’article (qui mentionne le terme de « bâtonnets ouatés » sans autre précision) ne conduise appliquer cette interdiction à d’autres dispositifs (dispositifs médicaux utilisés pour les examens de biologie médicale en laboratoire par exemple) qui peuvent faire l’objet de modalités de collecte particulières et ne sont pas jetés dans les toilettes, l’amendement CD1058 précise que l’interdiction s’applique aux seuls bâtonnets ouatés à « usage domestique ». La rédaction résultant des travaux du Sénat pouvait par exemple conduire à interdire les écouvillons utilisés dans les laboratoires.

De plus, il est apparu opportun, en plus de mentionner le terme d’ « usage domestique », d’exclure expressément de l’interdiction prévue par l’article 51 terdecies A les « dispositifs définis aux articles L. 5211-1 et L. 5221-1 du code de la santé publique » car la réalisation de prélèvements à domicile est une pratique qui se développe de plus en plus aujourd’hui avec, par exemple, la mise sur le marché d’autotests ou l’utilisation de plis pré-affranchis permettant la transmission à un laboratoire de prélèvements. C’est l’objet de l’amendement CD1057 qui a été adopté.

Enfin, l’amendement CD1059 a précisé que cette interdiction visait les seuls cotons-tiges en plastique, de manière à permettre le développement d’alternatives dans des matériaux qui ne soient ni du papier ni du plastique.

b. Interdiction des produits cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage comportant des particules plastiques solides

L’amendement CD1009 présenté par le Gouvernement a complété le III de l’article L. 541-10-5 du code de l’environnement pour interdire à compter du 1er janvier 2018 la mise sur le marché de produits cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage comportant des particules plastiques solides.

c. Sécurisation juridique du régime de sanctions

L’amendement CD1070 de votre rapporteure réécrit le II de l’article 51 terdecies.

Il insère dans la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement relative à la conception, à la production et à la distribution de produits générateurs de déchets un article L. 541-10-11 qui fixe le régime des sanctions applicables à l’ensemble des manquements aux obligations imposées par cette section.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CD641 de M. Yves Goasdoué.

Mme Viviane Le Dissez. Cet amendement vise à permettre l’écoulement des stocks de bâtonnets ouatés dont la tige est en matière plastique qui auront été mis en vente préalablement à la date d’entrée en vigueur de leur interdiction.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD1058 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’article 51 terdecies A vise à interdire les cotons-tiges utilisés dans le cadre domestique et qui, bien souvent, sont jetés dans la cuvette des toilettes, ce qui entraîne une pollution des plages et du milieu marin. Toutefois, pour éviter qu’une lecture trop littérale de l’article – qui fait référence aux « bâtonnets ouatés », sans autre précision – ne conduise à appliquer cette interdiction à d’autres dispositifs – par exemple les dispositifs médicaux utilisés pour les examens de biologie médicale en laboratoire – qui peuvent faire l’objet de modalités de collecte particulières, le présent amendement vise à préciser que l’interdiction s’applique aux seuls bâtonnets ouatés à usage domestique. (Sourires)

Mme la secrétaire d’État. Favorable. En effet, il n’est pas opportun d’interdire les bâtonnets à usage médical, qui font l’objet d’une collecte particulière et risquent donc moins d’être rejetés dans le milieu naturel.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD1059 de la rapporteure et CD1060 de M. Yves Goasdoué.

Mme la rapporteure. L’article 51 terdecies A tend à interdire la mise à disposition à titre onéreux ou gratuit de bâtonnets ouatés dont la tige n’est pas composée de papier biodégradable et compostable en compostage domestique. Cependant, il peut être intéressant de permettre le développement de matériaux qui ne soient ni du papier ni du plastique. C’est pourquoi mon amendement vise à limiter l’interdiction aux seuls cotons-tiges dont la tige est en plastique.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

Mme Laurence Abeille. Nous nous efforçons de limiter la pollution de l’eau en interdisant les bâtonnets en plastique, mais peut-être devrions-nous nous pencher également sur la composition du coton… (Rires)

Mme Catherine Beaubatie. De toute façon, la Faculté déconseille l’utilisation auriculaire de cotons-tiges ! (Rires)

La commission adopte l’amendement CD1059. En conséquence, l’amendement CD1060 tombe.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD1057 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement complète les précédents.

Mme la secrétaire d’État. Favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle passe ensuite à l’examen, en discussion commune, des amendements CD605 rectifié de la rapporteure et CD1009 du Gouvernement.

Mme la rapporteure. Mon amendement vise à interdire la production, la distribution et la vente de produits cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage comprenant des particules de plastique solides. En effet, ces produits sont, à l’instar des cotons-tiges, une source majeure de la pollution des océans par les matières plastiques dont l’accumulation dans le milieu marin est un problème environnemental mondial. Les conséquences de cette pollution sur la biodiversité marine et la santé humaine suscitent une vive inquiétude des scientifiques. Il est donc essentiel de légiférer afin de restreindre la production de ces matériaux.

Je précise que nous avons renoncé à inclure dans cet amendement l’interdiction des détergents et des produits d’entretien qui comportent également des microbilles en plastique, car il semble que, pour ces produits, l’élaboration de matériaux de substitution prenne plus de temps. Je souhaiterais néanmoins que Mme la secrétaire d’État nous indique comment nous pourrions également les prendre en compte.

Mme la secrétaire d’État. Il me semble en effet très pertinent de limiter l’utilisation des microbilles de plastique, dans la mesure où celles-ci contribuent à la pollution marine et à la constitution des fameux continents de plastique. C’est pourquoi le Gouvernement a déposé l’amendement CD1009, après une longue concertation avec les professionnels des cosmétiques. Sur le fond, Mme la rapporteure propose d’organiser la même interdiction, mais elle suggère d’anticiper la date de son entrée en vigueur. Or, il s’agit d’un sujet très sensible pour les entreprises de l’industrie cosmétique française, notamment pour les petites et moyennes entreprises (PME), dont la rotation des stocks n’est pas très importante et qui, contrairement à certaines grandes entreprises, n’ont pas pris des engagements de reformulation par anticipation. Les PME ne souhaitent pas non plus que soit fixée une date d’interdiction de vente au public. Il n’est en effet pas légitime de détruire des stocks de produits pour mettre en œuvre une mesure de protection de l’environnement. Je propose donc à Mme la rapporteure de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement.

En ce qui concerne l’interdiction des détergents, nous y viendrons, mais nous devons agir progressivement. L’interdiction des microbilles en plastique est, à cet égard, un signal très important adressé à l’ensemble de l’industrie.

M. Jean-Yves Caullet. Ces microbilles en plastique sont nocives, quel que soit le produit dans la composition duquel elles entrent. Je voterai bien entendu l’amendement du Gouvernement, mais il aurait été préférable, me semble-t-il, de formuler une interdiction générale, quitte à confier au pouvoir réglementaire l’application de cette interdiction dans chaque secteur à des dates pertinentes en fonction des contraintes économiques.

M. François-Michel Lambert. Très juste !

L’amendement CD605 rectifié est retiré.

La commission adopte l’amendement CD1009.

Puis elle examine l’amendement CD1070 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement tend à sécuriser la rédaction des sanctions administratives prévues au présent article. Il s’agit en effet de respecter le principe de proportionnalité, en proposant que le montant de ces sanctions ne puisse excéder, par unité ou par tonne de produit concerné, 1 500 euros pour une personne physique et 7 500 euros pour une personne morale. Il s’agit bien d’amendes maximales qui correspondent à des cas extrêmes. Cela ne permet pas pour autant au juge d’infliger des amendes disproportionnées, comme le souligne l’emploi des termes suivants : « une amende administrative dont le montant tient compte de la gravité des manquements constatés et des avantages qui en sont retirés ».

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 51 terdecies A ainsi modifié.

Article 51 terdecies
(article L. 2334-22 du code général des collectivités territoriales)

Modulation de la dotation de solidarité rurale pour les communes qui maîtrisent leur éclairage public

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 terdecies a été introduit en séance publique par un amendement du groupe Ecolo, qui a souhaité rétablir dans le projet de loi relatif à la biodiversité des dispositions qui avaient été déjà introduites à l’Assemblée nationale dans le projet de loi relatif à la transition énergétique et supprimées par le Sénat dans ce cadre.

Cet article vise à inciter les communes à la sobriété énergétique en favorisant celles qui limitent l’éclairage public inutile pendant la nuit par une modulation de la dotation de solidarité rurale.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article a été supprimé en commission au Sénat à l’initiative du rapporteur qui considère que le dispositif prévu comporte de nombreux inconvénients. Il priverait certaines petites communes d’une partie de la dotation de solidarité rurale destinée aux communes rurales les plus en difficulté alors le gain serait très limité pour les communes qui bénéficieraient du dispositif. Par ailleurs, supprimer l’éclairage public poserait des problèmes pour le maintien de la sécurité publique.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 terdecies a été rétabli en commission par l’adoption de l’amendement CD607 de votre rapporteure.

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La commission est saisie de l’amendement CD607 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rétablir l’article 51 terdecies, supprimé par le Sénat, et qui visait à inciter les communes à la sobriété énergétique en favorisant celles qui limitent l’éclairage public inutile pendant la nuit grâce à une modulation de la dotation de solidarité rurale.

Mme la secrétaire d’État. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

M. Jean-Marie Sermier. Sur le fond, il s’agit d’un bon amendement, mais les choses ne sont pas aussi simples que cela. S’il existe des solutions permettant de réduire l’éclairage la nuit, il est important de maintenir, pour des raisons de sécurité, une forme d’éclairage dans les principales rues d’une commune, notamment certains jours de la semaine. La modulation de la dotation de solidarité rurale ne devrait donc pas être soumise à la condition d’une interdiction pure et simple de l’éclairage public nocturne.

Mme la rapporteure. Nous sommes d’accord. Du reste, les communes qui limitent l’éclairage public nocturne utilisent des mécanismes qui permettent de sécuriser la circulation des piétons, par exemple. Néanmoins, le moment est venu d’inciter les communes – qui sont de grandes consommatrices d’énergie, même lorsqu’elles utilisent des LED – à limiter cet éclairage. Sinon, nous ne parviendrons jamais à réaliser des économies d’énergie et à préserver la biodiversité nocturne.

La commission adopte l’amendement.

L’article 51 terdecies est ainsi rétabli.

Article 51 quaterdecies
(article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime)

Restriction de l’utilisation des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 51 quaterdecies a été introduit par l’adoption en séance publique de l’amendement n° 754 rectifié de Mme Delphine Batho et M. Gérard Bapt. Cet article modifie l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime pour prévoir que « l’usage des produits phytosanitaires de la famille des néonicotinoïdes est interdit à compter du 1er janvier 2016 ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article 51 quaterdecies a été supprimé lors de l’examen en commission au Sénat (71). À ce sujet, le rapporteur a indiqué qu’il considérait que le présent article n’avait aucune portée juridique dans la mesure où il enfreignait de manière manifeste le règlement européen du 21 octobre 2009. Il a ajouté que le calendrier d’application proposé par l’Assemblée posait problème aux agriculteurs, compte tenu des possibilités de substitution limitées des produits visés pour certains usages (72).

Lors de l’examen du texte en séance publique, de nombreux amendements de rétablissement ou de réécriture de l’article 51 quaterdecies ont été déposés et cet article a été rétabli, dans une rédaction toutefois différente de celle issue des travaux de l’Assemblée nationale : cette nouvelle rédaction résulte de l’adoption d’un amendement de Mme Bonnefoy et des membres du groupe socialiste et républicain et de l’adoption d’un sous-amendement présenté par Mme Primas.

La rapporteure regrette vivement cette modification de l’article qui l’édulcore considérablement en ne posant plus d’interdiction générale de l’utilisation des néonicotinoïdes à partir d’une date déterminée. En effet, la rédaction de l’article adoptée par le Sénat prévoit seulement qu’« un arrêté du ministre chargé de l’agriculture […] détermine les conditions d’utilisation des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » et précise que, si cet arrêté doit tenir compte de l’avis du 7 janvier 2016 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail issu de la saisine n° 2015 SA 0142, il doit aussi prendre en compte les conséquences sur la production agricole au regard des alternatives de protection des cultures disponibles.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 quaterdecies a été rétabli dans sa rédaction résultant des travaux de l’Assemblée nationale. Toutefois, la date à laquelle l’interdiction s’applique a été fixée au 1er janvier 2017, pour prendre en compte le retard pris par l’examen du texte.

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La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CD126 de M. Arnaud Leroy, CD504 de Mme Laurence Abeille et CD556 de Mme Delphine Batho, ainsi que l’amendement CD589 de M. Philippe Plisson.

M. Gérard Bapt. Notre amendement vise à rétablir l’interdiction de tous les produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, y compris les semences traitées avec ces produits – que Mme Delphine Batho et moi-même avions fait adopter par l’Assemblée nationale en avril dernier –, tout en reportant d’un an la date d’application de cette interdiction. Le Sénat a en effet supprimé cette disposition – avec l’accord du Gouvernement, me semble-t-il – en adoptant une mesure qui, si elle tient compte de la dangerosité de plus en plus reconnue de ces produits, se situe en deçà d’une interdiction générale.

Que s’est-il passé depuis le vote du texte en première lecture à l’Assemblée nationale ? Une mobilisation importante a eu lieu, dont rend compte, du reste, le nombre important des signataires de cet amendement, et des éléments nouveaux sont apparus. Tout d’abord, une étude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), commandée par le Gouvernement, a confirmé la nécessité de maintenir le moratoire de trois ans décidé au niveau européen, moratoire qui concerne cependant l’utilisation de trois substances contenant des néonicotinoïdes et qui est limitée à certaines cultures pendant certaines saisons. Ensuite, une étude conjointe de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a, pour la première fois, démontré la nocivité de ces substances pour les colonies d’abeilles. Une autre étude, publiée à Londres par la Royal Holloway University, a prouvé la réduction des services de pollinisation assurés par les bourdons et a mesuré, pour la première fois, les conséquences économiques d’une telle réduction sur la production de pommes. Enfin, une étude du ministère de l’écologie publiée en novembre 2015 sur la détection des pesticides dans les cours d’eau français a montré que le néonicotinoïde le plus vendu en France a connu une progression fulgurante, qui témoigne de l’extraordinaire succès commercial que rencontrent les produits de cette famille.

De fait, cet insecticide neurotoxique est très efficace, bien plus encore que le dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT), par exemple, qui a été retiré du marché en Europe et dont on a montré, au Brésil, où il est encore utilisé dans les favelas, qu’il augmentait les risques de malformation à la naissance. On connaît très bien les mécanismes par lesquels ces produits portent atteinte à la biodiversité. En revanche, on ne connaît pas encore leurs effets à long terme sur l’homme, notamment sur le développement des enfants ou au stade fœtal. Toutefois, la nicotine est interdite aux femmes enceintes et des études cliniques menées au Japon – où le Gaucho est très utilisé – ont révélé des cas d’intoxication suraiguë entraînant l’hospitalisation d’adultes, sur qui l’effet décline en deux à trois semaines. J’ajoute qu’il est désormais démontré que ces substances sont nocives pour les pollinisateurs sauvages que sont les bourdons et les abeilles, mais aussi pour les papillons nocturnes.

C’est pourquoi nous vous proposons, avec le soutien de la corporation des agriculteurs, d’interdire ces néonicotinoïdes, qu’ils soient utilisés en semences ou en épandage foliaire, à compter du 1er janvier 2017.

Mme Laurence Abeille. Nous avions considéré le vote de cette disposition en première lecture comme une formidable victoire, tant ces produits sont nocifs pour la biodiversité et probablement pour la santé humaine, puisque nous avons connaissance d’indices alarmants à ce sujet. L’un des arguments avancés par les sénateurs et le Gouvernement en faveur de la suppression de cette disposition est que le droit européen interdirait à la France d’intervenir dans la réglementation des substances actives, en l’espèce les néonicotinoïdes, réglementation qui relèverait exclusivement d’une décision européenne. Je rappelle pourtant que l’État français est souverain en matière d’autorisation ou d’interdiction des produits contenant de telles substances. En effet, en vertu de l’article 69 du règlement européen n° 1107/2009, lorsqu’il apparaît qu’une substance active ou un produit phytopharmaceutique est susceptible de constituer un risque grave pour la santé humaine ou animale ou l’environnement, un État membre ou la Commission européenne peut engager une procédure visant à en restreindre ou à en interdire l’utilisation et la vente.

Nous disposons désormais, sur ce sujet, d’une information abondante, dont la population a aujourd’hui connaissance. Selon les sondages, elle souhaite, du reste, que l’on en finisse avec ces produits dangereux qui maltraitent l’environnement. Il n’y pas si longtemps, lorsqu’on roulait en voiture la nuit, le capot et le pare-brise de la voiture étaient constellés d’insectes ; aujourd’hui, cela ne se produit plus. La pollinisation, que l’usage de ces substances met en péril, est un enjeu fondamental pour l’avenir de l’humanité. Il faut donc mettre fin à la commercialisation et à l’utilisation de ces produits.

M. Arnaud Leroy. Tout a été dit par Gérard Bapt. Si c’est une première que d’interdire par la loi certaines substances, il nous faut l’assumer, compte tenu de la somme de données dont nous disposons sur leur nocivité pour la santé publique et l’environnement. Lors de la COP21, la crise climatique a été présentée comme le défi majeur pour l’humanité, mais la perte de la biodiversité représente un enjeu tout aussi important : nous assistons à une vague d’extinction d’espèces, notamment de pollinisateurs, parfaitement documentée.

Nous devons donc prendre nos responsabilités, dans le respect du droit européen, comme l’a expliqué ma collègue Laurence Abeille. La France peut, si elle le décide, se protéger. Il n’y a pas de problématique de marché. Peut-être faudra-t-il ensuite mettre en place des contrôles aux frontières pour s’assurer que ces substances interdites ne pénètrent pas en fraude dans notre pays.

En tout cas, c’est un beau combat. Avec les mesures proposées, nous touchons à l’essence même du projet de loi : donner une vraie valeur aux services que nous rend la nature. Il s’agit de protéger la nature quand elle doit l’être, de l’exploiter quand on le peut, en s’assurant que d’autres pourront le faire après nous. Nous sommes face à un choix politique important, et je serai ravi de voter pour ces amendements.

M. Philippe Plisson. Mon amendement va dans le même sens que les précédents. En plus, j’avais signé le premier amendement de Delphine Batho et Gérard Bapt, et j’avais demandé à signer le CD556, mais mon nom s’est perdu dans les sables. (Sourires)

Je veux donc m’associer à cet amendement qu’évidemment je voterai des deux mains.

Mme la rapporteure. Je ne vais pas répéter les arguments développés en soutien de cet amendement que nous souhaitons rétablir concernant l’utilisation des néonicotinoïdes. Je rappelle cependant que ces substances ont un impact fort sur la santé publique et sur la faune, mais aussi sur la diversité de la flore.

Ce projet de loi sur la reconquête de la biodiversité mérite que nous prenions nos responsabilités. Comme nous l’avions fait en première lecture, nous devons agir en faveur de la santé, d’une alimentation saine et de la protection des abeilles. De mon point de vue, il faut interdire ces produits. En les interdisant, nous servons aussi les agriculteurs : il y a d’autres moyens de cultiver que d’utiliser encore et toujours plus ces produits qui sont maintenant quasiment passés dans les mœurs, ce que nous regrettons. Comme Gérard Bapt l’a rappelé, leur usage a augmenté de 9 % en l’espace de trois ans, ce qui est énorme.

Si nous ne faisons rien, nous allons nous engager encore plus dans ce cercle vicieux. Ces substances continueront à mettre des bébés en difficulté, à tuer des agriculteurs, des concitoyens, nos abeilles et nos insectes pollinisateurs. Finalement, elles continueront d’anéantir tout ce dont nous profitons pour vivre sur cette planète.

Il est important de rétablir cette interdiction, avec force et conviction, parce que c’est le seul chemin qui nous permettra d’aller jusqu’au bout de cette reconquête que nous souhaitons de tous nos vœux. Je suis favorable à ces amendements.

Mme la secrétaire d’État. La question des risques liés à l’usage des néonicotinoïdes est un sujet très important et très sensible, sur lequel il faut faire preuve d’ambition et de sens des responsabilités. Cette famille d’insecticides comporte cinq substances autorisées dans l’Union européenne. Depuis plusieurs années, il est avéré que trois d’entre elles ont de lourdes conséquences sur les insectes pollinisateurs, mais aussi sur la santé des agriculteurs.

Le moratoire français imposé sur le Cruiser dès 2012 a conduit l’Union européenne à opter en 2013 pour un moratoire partiel sur les trois substances suspectées d’avoir un effet sur les abeilles. Cependant, malgré la mise en place de ces premières mesures, l’usage des néonicotinoïdes a augmenté fortement au cours des deux dernières années en France – de 26 % entre 2013 et 2014 –, notamment celui des trois substances soumises au moratoire européen.

Afin d’assurer une meilleure protection des abeilles et des pollinisateurs sauvages, dont l’action est indispensable tant pour la biodiversité que pour les productions agricoles elles-mêmes, Ségolène Royal a entrepris diverses démarches. Fin 2014, une action spécifique a été décidée dans le cadre de la conférence environnementale pour que la France ait une démarche volontariste au niveau européen.

En mai dernier, Ségolène Royal a ainsi adressé une note à la Commission européenne pour demander une accélération des réévaluations des substances néonicotinoïdes en cours, et au minimum, un maintien des restrictions d’usage actuelles. Lors d’une communication en conseil des ministres, elle a également rappelé que la France s’engageait fortement dans une démarche d’extension du moratoire européen à l’ensemble des pesticides néonicotinoïdes.

Dans le cadre du plan d’action « France terre de pollinisateurs », Ségolène Royal a veillé à ce que des actions sur les néonicotinoïdes soient identifiées, notamment la valorisation de projets territoriaux et le développement d’alternatives dans le cadre du nouveau plan Ecophyto.

Elle a par ailleurs saisi l’ANSES, le 24 juin dernier, afin que cette agence s’implique fortement dans les réévaluations en cours au niveau européen, et qu’elle évalue l’ensemble des études sur ce sujet. Le rapport de l’ANSES, remis le 12 janvier dernier et rendu public, confirme qu’en l’absence de mesures de gestion adaptées, l’utilisation des néonicotinoïdes a de sévères effets négatifs sur les pollinisateurs.

L’ANSES indique que deux types d’usages sont plus particulièrement critiques : ceux qui sont déjà soumis au moratoire européen ; l’usage de semences enrobées, y compris pour les céréales d’hiver, qui nécessiteraient pour la protection des abeilles des règles impossibles à mettre en œuvre au regard des pratiques agricoles réelles. Seule l’interdiction de cet usage permet de protéger les pollinisateurs.

En l’état des connaissances, l’ANSES considère que les autres usages – en serres notamment – sont moins critiques ou qu’ils nécessitent des compléments de vérification qu’elle sollicitera auprès des industriels concernés.

Au niveau européen, la question des risques liés à l’usage des néonicotinoïdes est également un sujet très important. Les autorités allemandes ont ainsi décidé de ne pas autoriser leur usage pour le traitement de semences des céréales d’hiver. Quant à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA), elle a confirmé en septembre 2015 ses conclusions de 2013 concernant la réévaluation sur les usages en pulvérisation foliaire, qui avaient justifié les restrictions d’usages. La réévaluation complète des trois substances soumises au moratoire européen sera d’ailleurs finalisée en 2016, et la réévaluation des deux autres néonicotinoïdes sera terminée en avril 2017 et avril 2018.

Ces conclusions vont dans le sens des résultats issus de plusieurs études publiées l’année dernière : le rapport du Conseil européen des académies des sciences, qui met en évidence le caractère dommageable des néonicotinoïdes sur les pollinisateurs et les milieux ; l’étude de l’ANSES relative à la coexposition des abeilles aux facteurs de risques, qui préconise une diminution des stress chimiques – notamment des néonicotinoïdes – auquel sont confrontées les abeilles. Il y a deux semaines, l’Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services (IPBES), l’équivalent pour la biodiversité du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a aussi rappelé l’importance des pollinisateurs, notamment pour l’agriculture.

Face à tous ces éléments, nous devons prendre nos responsabilités ; l’État français doit prendre ses responsabilités. Sur le principe, je ne peux qu’être favorable à ces amendements. Mais nous devons aussi nous assurer d’aboutir à un résultat, une fois que ce projet de loi aura terminé la navette parlementaire. C’est pourquoi Ségolène Royal a soutenu au Sénat un amendement de Chantal Jouanno qui reprenait plus strictement les recommandations du rapport de l’ANSES sur l’interdiction des semences enrobées.

Ici, un tel choix ne se présente pas, puisque nous sommes seulement en présence d’amendements visant à une interdiction globale de ces substances. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée concernant ces amendements, mais vous avez bien compris que, selon moi, nous devons être courageux.

M. Jean-Marie Sermier. Nous devons certes être courageux, mais nous devons aussi faire attention aux effets de manches, et respecter les agriculteurs et l’ensemble de nos concitoyens qui attendent de nous des décisions fondées sur des éléments précis.

Avant de revenir sur un certain nombre de contre-vérités qui ont pu être énoncées, je voudrais faire une mise au point : dans cette assemblée, il n’y a pas, d’un côté, des députés qui seraient pour les abeilles, la pollinisation, l’environnement, le respect de la planète, etc. et, de l’autre, des députés qui seraient favorables à je ne sais quelle industrie chimique. (Murmures) La loi sur la biodiversité nous a tous mobilisés pour atteindre un objectif : laisser aux générations qui vont nous succéder une planète au moins aussi propre que celle dont nous avons hérité. Dans le même temps, nous devons veiller à ce que la planète puisse produire une certaine quantité de nourriture, car la production agricole est essentielle à la vie.

De telles mesures sont-elles compatibles avec les textes européens ? Il est faux de dire qu’un État peut librement refuser tel ou tel produit. Le refus d’un produit ne peut être que le fruit d’une décision mûrement réfléchie et étayée par des éléments scientifiques reconnus. Les éléments scientifiques ont été demandés à l’ANSES par le Gouvernement. Début janvier, l’agence a produit une étude qui conforte l’idée que les néonicotinoïdes sont des insecticides dangereux et qui précise qu’il faut encadrer leur utilisation, ainsi que le Sénat a décidé de le faire. En aucun cas, l’étude ne demande l’interdiction de ces substances.

Mme la secrétaire d’État. Si !

M. Jean-Marie Sermier. Si nous décidions d’interdire les néonicotinoïdes à compter du 1er janvier 2017, nous irions tout droit vers un recours justifié, et qui aurait toutes les chances de succès, en vertu du règlement européen n° 1107/2009.

Quelles seraient les conséquences d’une interdiction ? Comme il n’y a pas de molécule de substitution pour l’enrobage des semences, l’interdiction conduirait une utilisation plus importante des insecticides foliaires. Il faut bien traiter les ravageurs de cultures. Or nous n’avons aucun produit de substitution pour traiter la jaunisse de la betterave ou la flavescence dorée de la vigne. Pour venir à bout des cicadelles, nous serions obligés d’utiliser d’autres insecticides. Une interdiction des néonicotinoïdes se traduirait par une augmentation de l’utilisation d’autres insecticides qui ne sont pas meilleurs pour la santé quand ils sont mal utilisés.

Nous avons déjà eu ce débat tout à l’heure. Pour ma part, je fais confiance aux agriculteurs et aux viticulteurs. Ils savent comme tout le monde que les produits phytosanitaires présentent à la fois des avantages et des risques ; ils ne s’en servent pas pour le seul plaisir d’utiliser leur pulvérisateur. Il faut considérer ces produits comme des médicaments pour les cultures, qui peuvent être victimes de ravageurs et de maladies. Or un malade respecte la posologie prescrite par son médecin, il ne prend pas dix fois la dose. Quand ils sont utilisés avec bienveillance et dans le respect de la loi, ces insecticides ne présentent pas les dangers dont vous parlez.

Vous évoquez la pollinisation et les abeilles. Or l’étude qui nous a été présentée dans cette salle est extrêmement claire : elle indique que le risque pour les abeilles ne peut pas être démontré, qu’il n’y a pas de certitude sur le plan statistique. Une chose est sûre : la mortalité des abeilles est plus forte dans le nord de l’Europe, là où l’on n’utilise absolument pas les néonicotinoïdes. Par conséquent, il faut faire attention à ce qu’on dit et aux relations directes, parce qu’on s’est aperçu que les abeilles étaient notamment victimes de certains problèmes sanitaires qui n’étaient pas mis en avant.

Rappelons aussi que les néonicotinoïdes ne sont pas seulement utilisés en agriculture. Certains biocides contiennent des néonicotinoïdes. Tous ces produits vont-ils être supprimés ? Va-t-on renoncer à lutter contre les insectes et les parasites qui sont vecteurs de maladies humaines telles que la typhoïde ou la tuberculose, ou de maladies animales telles que la fièvre aphteuse ou la peste porcine ?

Madame Laurence Abeille, je reconnais que certaines études alertent sur les dangers de ces substances, un peu comme Gilles-Eric Séralini dénonçait la toxicité du Roundup : si on met du glyphosate dans leur boisson, les rats développent des tumeurs, nous disait-il. Évidemment ! (Murmures divers) À ces niveaux d’ingestion, il y a évidemment des problèmes et des maladies. Les néonicotinoïdes ont obtenu des autorisations de mises sur le marché (AMM) qui continuent d’être valides et de faire l’objet de recherche de la part des organismes des vingt-huit pays de l’Union européenne et d’autres. Il faut faire confiance à la recherche.

Les sénateurs ont trouvé un point d’équilibre. Considérant que ces produits sont sans doute dangereux, ils ont cherché le moyen d’encadrer leur usage. Ils proposent que, dans les trois mois après la promulgation de la loi, le ministre de l’agriculture prenne un arrêté pour préciser l’utilisation des néonicotinoïdes. Une interdiction à compter de janvier 2017 serait inévitablement source de pollution supplémentaire par d’autres insecticides.

M. Jean-Yves Caullet. Tout le monde peut s’accorder sur deux choses : le caractère toxique de ces produits ; la nécessité d’avoir des agricultures qui, petit à petit, se libèrent des pesticides ou, tout au moins, qui y recourent le moins possible. Mais un autre constat s’impose : ce n’est pas l’interdiction d’une molécule qui peut entraîner, à elle seule, le basculement de tout système agronomique. Même si nous adoptions ces amendements, le système agronomique français ne changerait pas au 1er janvier 2017 ; son évolution prendra du temps.

Prenons les traitements de semences. En la matière, l’ANSES préconise des précautions d’utilisation et non pas une interdiction totale. Si ces préconisations étaient appliquées au 1er janvier 2017, elles provoqueraient un report vers d’autres produits dans les exploitations, parce que le système ne sera pas devenu agro-écologique dans l’intervalle. À système agronomique égal, l’interdiction d’une substance conduira à un report vers d’autres produits.

Selon l’ANSES, l’utilisation des néonicotinoïdes en enrobage de semences n’est pas anodine : il y a des transmissions dans la plante, des rémanences, etc. J’en suis tout à fait convaincu et cela a d’ailleurs été parfaitement démontré. Cela étant, je suis sûr aussi que les effets les plus dramatiques de ces substances, ceux qu’a cités notre collègue Bapt sur la santé humaine notamment, sont liés aux aspersions. Avec ce mode d’utilisation, les néonicotinoïdes présentent une dangerosité directe pour les utilisateurs comme pour les consommateurs de produits.

Nous ne sommes pas obligés de choisir entre tout ou rien. Il n’y a pas, d’un côté, la solution courageuse consistant à interdire et, de l’autre, l’aveuglement conduisant à ne rien faire. Le Sénat ne propose pas de ne rien faire. Sa proposition peut être jugée insuffisante mais soyons clairs : il ne s’agit pas de ne rien faire et le Gouvernement réaffirme au passage sa volonté d’aller vers la diminution puis la substitution complète, voire l’interdiction, de ces produits toxiques.

Se pose, en outre, le problème, que j’allais dire corrélatif, concernant l’usage de ces produits en dehors de l’agriculture, notamment dans les biocides utilisés en milieu hospitalier. Seul Philippe Plisson visait spécifiquement le domaine phytosanitaire dans son amendement qu’il a malheureusement abandonné. Tels qu’ils sont rédigés, tous les autres amendements posent un problème sur lequel nous serons bien obligés de revenir.

À titre de comparaison, on cite souvent l’Allemagne, pays qui a un climat beaucoup plus continental que le nôtre et qui n’est évidemment pas exposé aux mêmes attaques d’insectes sur ses cultures de céréales. Et, pour la France, les céréales représentent une production majeure.

Tout en ayant le même objectif que les auteurs de ces amendements, c’est-à-dire faire en sorte que l’agriculture française finisse par se passer des néonicotinoïdes, je pense qu’il faut procéder par étapes. Nous avons déjà interdit leur usage là où il n’était pas indispensable, à savoir sur les voies publiques et dans les jardins. Nous avons interdit leur pulvérisation. Que l’on restreigne leurs autres usages, au fur et à mesure que les progrès agronomiques le permettront, et nous toucherons au but sans avoir brisé notre système agronomique.

Une fois cette mutation achevée, l’agriculture française pourra en tirer un avantage compétitif. À terme, il faudrait d’ailleurs que les néonicotinoïdes ne soient plus du tout utilisés au niveau européen, et qu’une interdiction d’importation de produits qui en contiendraient des traces figure dans les traités transatlantiques. Ce serait une victoire supplémentaire.

Pour toutes ces raisons, je préfère la voie empruntée par le Sénat, même si on peut muscler leur proposition, si je puis dire. Une interdiction serait certes un acte très démonstratif, mais nous aurions beaucoup de mal à la gérer dans les délais prévus.

M. Gérard Menuel. Je partage tout ce qui vient d’être dit par Jean-Marie Sermier et Jean-Yves Caullet. Nous devons prendre nos responsabilités, avez-vous dit, Madame la secrétaire d’État. Tout le monde est responsable, quand il y a des décisions à prendre. Nous irons vers une interdiction des néonicotinoïdes mais le délai proposé, le 1er janvier 2017, est tout à fait inapplicable dans les conditions actuelles pour l’agriculture.

La jaunisse fait des dégâts considérables sur l’orge de printemps ou d’hiver, comme nous l’avons constaté il y a une dizaine d’années, avant que ces produits ne soient utilisés : les rendements pouvaient baisser de 20 % ou 25 %. La céréaliculture peut être remise en cause du jour au lendemain. Dans le secteur de la betterave, nous avons aussi constaté de fortes chutes des rendements, il y a une dizaine d’années. Les néonicotinoïdes ont permis de mettre fin à la jaunisse qui gagnait en importance, d’année en année. Rappelons au passage, qu’il n’y a pas d’abeille sur les betteraves, plantes qui ne fleurissent pas sauf celles que l’on destine à produire des semences.

La brutalité d’une interdiction au 1er janvier 2017 aurait des conséquences économiques importantes. Au Sénat, un long débat dans lequel le Gouvernement s’est impliqué, s’est terminé par l’adoption d’un amendement visant à prendre en compte les alternatives de protection des cultures disponibles. Comme le disait mon prédécesseur, cette orientation me paraît salutaire. Elle permettra à la recherche d’évoluer au cours des prochains mois et des prochaines années. Au Sénat, tout le groupe socialiste et plus des deux tiers du groupe Les Républicains ont approuvé un amendement de Nicole Bonnefoy, ce qui prouve que, après une longue réflexion, la proposition pouvait convenir a minima à tout le monde.

Mme Delphine Batho. Sur ce sujet, il n’y a pas seulement une ou deux études scientifiques ; il existe plus de 1 100 études convergentes à l’échelle internationale. (Approbations) Nous ne discutons pas d’un vague problème lié à un produit chimique ; nous parlons d’un phénomène de contamination généralisée par un toxique extrêmement puissant ; l’une de ces substances est 5 000 à 10 000 fois plus puissante que le DDT interdit depuis bien longtemps.

Comme l’a indiqué Mme la secrétaire d’État, l’usage de ces substances augmentant, l’imidaclopride est passé en quelques années du cinquantième au douzième rang du classement des substances que l’on retrouve dans les cours d’eau et les rivières de France. Ces produits ont un impact sur la biodiversité, sur les pollinisateurs comme les abeilles, mais aussi sur les oiseaux et les milieux aquatiques. Ils ont aussi des conséquences sur un secteur de l’agriculture, l’apiculture, qui est confrontée à la diminution de 37 % des abeilles et des pollinisateurs sauvages en Europe.

S’il y a une brutalité, pour reprendre ce mot qui a été utilisé, c’est celle qui est subie par les abeilles. La dose létale de l’imidaclopride pour les abeilles est de 0,005 nanogramme ; cette dose multiplie par deux la mortalité des abeilles.

Les recommandations de l’ANSES – puisque ce n’est pas le rôle de l’Agence de prendre des décisions politiques – sont inapplicables parce qu’elles renvoient la responsabilité à l’agriculteur. Nous en revenons au même genre de débat que celui que nous avons eu sur l’affaire du registre. Selon le texte du Sénat, le ministre de l’agriculture prendrait un arrêté pour dire aux agriculteurs : vous ne devez pas planter des cultures attractives pour les pollinisateurs après des cultures provenant de semences traitées au néonicotinoïdes ou près de telles cultures. On rajoute un étage de complexité supplémentaire, faute d’avoir le courage politique de prendre la décision simple qui s’impose : interdire ces substances.

Certains évoquent des effets de transfert vers d’autres produits en cas d’interdiction des néonicotinoïdes. Si cet argument était recevable, Stéphane Le Foll, le ministre de l’agriculture, n’aurait pas courageusement interdit le Cruiser OSR, comme il l’a fait en juin 2012. Si cet argument était recevable, la France n’aurait pas défendu le moratoire partiel, en décembre 2013 au niveau européen. D’ailleurs, le terme « moratoire » est inapproprié puisqu’il ne s’agit que de certaines restrictions d’usage.

Selon tous les scientifiques, la logique des restrictions par culture ou par type d’usage ne donne aucun résultat. Pourquoi de telles dispositions sont-elles inopérantes ? Imaginons que l’on n’interdise ces substances que sur les cultures censées servir de nourriture aux abeilles et pas sur les céréales à paille. Compte tenu de la rémanence de ces produits, le tournesol planté dans un champ où était cultivé du blé Gaucho quelques années auparavant, sera contaminé par les néonicotinoïdes.

S’agissant de l’eurocompatibilité, je signale que certaines substances sont interdites en France tout en étant autorisées au niveau européen. Je peux en fournir la liste à ceux que cela intéresse.

Pour finir, je voudrais surtout insister sur la convergence d’intérêts qui existe entre agriculteurs et apiculteurs. Dans l’Union européenne, 84 % des cultures dépendent des pollinisateurs sauvages. Les études scientifiques montrent qu’il n’y a pas eu d’effondrement des rendements agricoles après les décisions de restrictions d’usage qui ont été prises ; elles indiquent, à l’inverse, que sans pollinisateurs sauvages, la productivité du colza s’effondre de 70 % et celle du tournesol de 50 %. Au lieu d’opposer les uns aux autres, il faut comprendre qu’il existe une convergence des intérêts de tous. Même les rendements agricoles ont tout à gagner à la survie des abeilles et des pollinisateurs sauvages.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je suis, moi aussi, tout à fait favorable à l’interdiction de l’ensemble de ces substances actives. On peut toutefois se demander si la mesure proposée pourra être appliquée à partir du 1er janvier 2017. J’entends les arguments que vient de développer Delphine Batho et il n’est pas question, en effet, de trouver des produits de substitution mais bien de changer de pratique dans un contexte où, néanmoins, je ne suis pas sûre que le monde agricole, vu son état, soit réceptif à cette exigence. Aussi le délai prévu, j’y insiste, me paraît-il très court.

M. François-Michel Lambert. Il est intéressant de noter que le terrible impact causé par les néonicotinoïdes n’inquiète pas qu’un seul bord politique.

La plupart des acteurs du monde rural nous alertent : les apiculteurs, bien sûr, des agriculteurs, aussi, auxquels j’ajouterai les chasseurs, conscients que la disparition de certains insectes risque d’entraîner un effondrement du nombre d’oiseaux – or les chasseurs ne seront pas toujours aux côtés de l’ensemble des écologistes, si vous voyez ce que je veux dire. Je suis donc à l’écoute, avant tout de ceux qui, dans le monde rural, se lèvent parfois à l’aube et qui connaissent leur environnement par cœur : eh bien, leurs mises en garde ne datent pas d’hier mais d’il y a bien des années déjà ! Ils rejoignent en cela les scientifiques. Aussi ces avertissements n’ont-ils rien d’un combat idéologique mais résultent d’une réalité perçue sur le terrain.

Certes, je veux bien comprendre que certains agriculteurs craignent pour leurs revenus, mais il faut bien voir que l’usage des néonicotinoïdes est une impasse technologique dont ils doivent sortir. Nous devons donc aller de l’avant et, comme nous y a invité la secrétaire d’État, nous montrer courageux en répondant aux attentes de ceux qui nous interpellent.

M. Jean-Yves Caullet. Je souhaite être bien compris : je n’ai jamais dit que je souhaitais maintenir l’usage des néonicotinoïdes dans l’agriculture.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous ne l’avons pas compris ainsi, je tiens à vous rassurer, mon cher collègue. (Sourires)

M. Jean-Yves Caullet. J’estime seulement que leur interdiction à partir du 1er janvier 2017 ne me paraît pas à même de nous permettre d’atteindre l’objectif consistant à changer de système agricole. Je ne figure pas parmi les sourds lâches : j’entends moi aussi et je tâche d’assumer mes responsabilités. Je le répète, le but est bien de se passer de ces produits et de bien d’autres.

M. Gérard Menuel. Le lien est peut-être trop rapidement établi entre la vente de produits comme les néonicotinoïdes et la mortalité des abeilles. On a récemment soutenu cette thèse à la télévision, dans l’émission Cash Investigation, sans que nombre d’éléments soient vérifiés. Je suis l’élu du département qui, selon cette émission, consommerait le plus de produits chimiques. Or, la semaine dernière, le syndicat apicole de l’Aube, au cours de son assemblée générale, s’est réjoui de l’augmentation de la production de miel grâce à la bonne récolte dans le département !

Au quotidien, les relations entre apiculteurs et agriculteurs ne sont en effet pas vécues aussi brutalement qu’on peut le penser. Je suis moi-même à la tête d’une exploitation agricole et les apiculteurs viennent me voir, chaque printemps, pour installer des ruches – et nous le faisons en bonne intelligence.

Le Sénat a fait évoluer le texte dans le bon sens et j’estime qu’il faut – au minimum – trouver des solutions alternatives à ces produits chimiques, de façon que les exploitations agricoles ne souffrent pas d’une chute de rendement et donc de difficultés sociales et économiques importantes à partir du 1er janvier 2017 si le dispositif devait être adopté.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Pour répondre, notamment, à Martine Lignières-Cassou, je rappelle que, dans la perspective de l’examen du texte en séance publique, il vous est possible de déposer des amendements visant à repousser l’échéance du 1er janvier 2017.

La commission adopte les amendements identiques CD126, CD504 et CD556.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je précise que ces amendements ont recueilli treize voix pour, six contre.

En conséquence, les amendements CD589 de M. Philippe Plisson, CD505 de Mme Laurence Abeille, CD583 et CD586 de M. Bertrand Pancher, CD384 de M. Jean-Louis Bricout et CD577 de M. Bertrand Pancher tombent.

La commission adopte l’article 51 quaterdecies ainsi modifié.

Article 51 sexdecies A
Interdiction de la distribution gratuite de magnets publicitaires

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Lors de l’examen du texte en séance publique, l’amendement n° 164 de Mme Billon et des membres de l’union centriste introduisant dans le texte l’article 51 sexdecies A a été adopté avec un avis de sagesse du Gouvernement et de la commission.

Il interdit à compter du 1er janvier 2017 « la distribution de publicité à titre gratuit sur des supports aimantés », c’est-à-dire la distribution de magnets publicitaires.

Selon l’exposé des motifs de cet amendement, qui n’a malheureusement été présenté que très brièvement en séance publique, cette interdiction est motivée par le fait que « ces magnets consommant des ressources naturelles et [ne sont] pas recyclables ».

2. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 sexdecies a été supprimé par l’adoption d’un amendement de votre rapporteure, qui a exprimé de vives réserves sur la pertinence de la mesure. En effey, nombreux sont les objets dont la production consomme des ressources naturelles et dont toutes les composantes ne sont pas recyclables et il n’y a pas lieu de prévoir une mesure qui cible spécifiquement les magnets publicitaires.

*

* *

La commission examine l’amendement CD608 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à supprimer l’article 51 sexdecies A introduit par le Sénat et qui prévoit l’interdiction, à partir du 1er janvier 2017, de la distribution gratuite de supports aimantés publicitaires, dits magnets, au motif que la production de ces derniers consomme des ressources naturelles et qu’ils ne sont pas recyclables. Or nombreux sont les objets dont la production consomme des ressources naturelles et dont toutes les composantes ne sont pas recyclables ; il n’y a donc pas lieu de prévoir une mesure qui cible spécifiquement les magnets publicitaires.

Mme la secrétaire d’État. Il est vrai que l’on peut s’interroger sur le ciblage spécifique de ces produits.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 51 sexdecies A est supprimé.

Article 51 sexdecies
Rapport sur les plantes invasives

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article a été inséré dans le texte suite à l’adoption en séance publique d’un amendement du groupe Ecolo. Il demande la remise d’un rapport au Parlement sur les plantes invasives, dans les six mois à compter de la promulgation de la loi. Il précise que ce rapport doit notamment porter sur les interdictions de vente de certaines espèces.

2. Les modifications apportées par le Sénat

L’article a été supprimé lors de l’examen du texte en commission à l’initiative de Rapporteur qui a considéré qu’ « un énième rapport sur ces questions ne permettrait pas d’agir efficacement » (73) et que la question était du ressort du pouvoir réglementaire. En effet, l’article L. 411-3 du code de l’environnement prévoit la possibilité d’interdire l’introduction dans le milieu naturel, le transport et la commercialisation de telles espèces mais à ce jour, un seul arrêté a été publié interdisant la vente de deux espèces de jussies a été pris.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 51 sexdecies a été rétabli lors de l’examen en commission par l’amendement CD609 rectifié qui a apporté deux modifications au dispositif adopté initialement par l’Assemblée nationale :

– le délai de remise du rapport a été allongé ;

– le sujet du rapport a été recentré sur l’impact du développement des espèces invasives sur la biodiversité, au regard des objectifs que la France se fixe dans ce domaine.

*

* *

La commission examine à l’amendement CD609 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rétablir l’article 51 sexdecies supprimé par le Sénat, et qui prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’impact du développement des espèces invasives sur la biodiversité, au regard des objectifs que la France se fixe dans ce domaine.

Mme la secrétaire d’État. La France doit déjà produire ce qu’on appelle des rapportages de données aux instances européennes sur l’application du règlement relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes. Je vous propose, par conséquent, de retirer votre amendement ou bien, si vous souhaitez le maintenir, je vous demanderai de caler la date de remise du rapport du Gouvernement avec celle du rapportage européen.

Mme la rapporteure. J’y consens sans difficulté, même si j’insiste sur l’importance de ce rapport.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous modifierons l’amendement pour l’examen du texte en séance publique.

Mme la secrétaire d’État. Très bien.

Mme la rapporteure. Car il faut savoir que des espèces invasives se vendent, qu’il s’agisse d’algues, de tortues de Floride…

M. le président Jean-Paul Chanteguet. …ou d’écrevisses rouges de Louisiane !

Mme la rapporteure. En effet, et, les gens s’en débarrassant dans la nature, ces espèces assèchent la biodiversité.

La commission adopte l’amendement, et l’article 51 sexdecies est ainsi rétabli.

Article 51 septdecies
(articles L. 512-18, . 512-21, L. 516-1, L. 556-1 du code de l’environnement et article L. 642-2 du code de commerce)

Assouplissement du cadre juridique régissant les carrières, les stockages de CO2 et les sites industriels à reconvertir

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 51 septdecies a été introduit par le Gouvernement en séance publique. À cette occasion, le Rapporteur a déploré le dépôt tardif, indiquant que « cet amendement ayant été déposé tardivement pour des raisons diverses, il nous a été impossible d’en mesurer tous les enjeux » (74).

a. Suppression de l’obligation de mettre à jour l’état de pollution des sols pour les carrières et les sites de stockages de CO2

L’article L. 512-18 du code de l’environnement prévoit que « l’exploitant d’une installation classée relevant des catégories visées à l’article L. 516-1 est tenu de mettre à jour à chaque changement notable des conditions d’exploitation un état de la pollution des sols sur lesquels est sise l’installation ». Cette mesure a été introduite dans le code de l’environnement par la loi du 30 juillet 2003 (75) prise suite aux problèmes posés par la fermeture de l’usine Métaleurop Nord.

Les installations concernées par les obligations sont :

– les installations définies par décret en Conseil d’État présentant des risques importants de pollution ou d’accident ;

– les carrières ;

– les installations de stockage de déchets.

Le 1° du I de l’article 51 septdecies vise à exonérer les carrières et les sites de stockage géologique de dioxyde de carbone de l’obligation de mettre à jour l’état de pollution des sols à chaque changement notable des conditions d’exploitation, au motif que cela favoriserait la transition énergétique.

Cependant, outre le fait que les carrières ne semblent pas spécifiquement être un élément moteur de la transition énergétique, la suppression de l’obligation de révision périodique de l’état des sols semble porteuse de risques pour l’environnement mais aussi pour les personnes qui y travaillent et pour celles qui sont susceptibles d’acquérir ces sites par la suite.

Par ailleurs, l’état des sols est, à chaque révision, transmis non seulement au préfet mais aussi au maire de la commune concernée et, le cas échéant, au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’urbanisme concerné. Supprimer la révision périodique de l’état de la pollution des sols conduirait à réduire considérablement les informations dont disposent les collectivités territoriales sur le territoire desquelles des carrières sont implantées. Or on aurait tort de croire que l’extraction de l’ensemble des matériaux « dangereux » est régie par le code des mines et que les substances de carrières sont inoffensives.

b. Allègement des garanties financières exigées des entreprises chargées de réhabiliter les sites pollués

i. Suppression de l’exigibilité des garanties financières à la première demande

Le 2° de l’article 51 septdecies concerne l’ensemble des installations classées pour la protection de l’environnement (carrières, gîtes géothermiques mais aussi industries polluantes, élevages,…). Il modifie l’article L. 512-21 du code de l’environnement.

Cet article prévoit que « lors de la mise à l’arrêt définitif d’une installation classée pour la protection de l’environnement ou postérieurement à cette dernière, un tiers intéressé peut demander au représentant de l’État dans le département de se substituer à l’exploitant, avec son accord, pour réaliser les travaux de réhabilitation en fonction de l’usage que ce tiers envisage pour le terrain concerné ». Il pose un certain nombre de garanties permettant de s’assurer du sérieux de ce tiers demandeur :

– présentation au préfet d’un mémoire de réhabilitation définissant les mesures permettant d’assurer la compatibilité entre l’usage futur envisagé et l’état des sols ;

– nécessité de disposer de capacités techniques suffisantes ;

– nécessité de disposer de garanties financières couvrant la réalisation des travaux de réhabilitation qui peuvent être prescrits par le préfet pour rendre compatibles l’état des sols et l’usage que le tiers demandeur veut en faire.

Le V de l’article L. 512-21 du code de l’environnement prévoit que « Ces garanties sont exigibles à la première demande ». Le 2° de l’article 51 septdecies supprime cette phrase.

Selon les informations transmises à la rapporteure, cette modification est justifiée par le fait que l’emploi de la notion de « garanties financières à première demande » exclut le dispositif de cautionnement et rend le coût des garanties financières plus élevé, ce qui risque d’exclure un certain nombre d’acteurs du dispositif du « tiers demandeur ».

ii. Empêcher les garanties financières qui ont été constituées lors de la mise en activité d’installations polluantes d’être utilisées pour indemniser les créanciers d’une entreprise en cas de liquidation judiciaire de cette dernière.

Le 3° du I de l’article 51 septdecies modifie l’article L. 516-1 du code de l’environnement. Cet article prévoit que « la mise en activité […] des installations définies par décret en Conseil d’État présentant des risques importants de pollution ou d’accident, des carrières et des installations de stockage de déchets est subordonnée à la constitution de garanties financières ».

Ces garanties sont destinées à assurer, suivant la nature des dangers ou inconvénients de chaque catégorie d’installations :

– la surveillance du site ;

– le maintien en sécurité de l’installation ;

– les interventions éventuelles en cas d’accident avant ou après la fermeture ;

– la remise en état du site après fermeture.

Le troisième alinéa de l’article L. 516-1 du code de l’environnement prévoit qu’ « un décret en Conseil d’État détermine la nature des garanties et les règles de fixation de leur montant ». Le 3° du I de l’article 51 septdecies complète cet alinéa en prévoyant que « Ce décret fixe les conditions dans lesquelles les sommes versées au titre des garanties financières sont insaisissables au sens de l’article L. 112-2 du code des procédures civiles d’exécution (76) par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil et les conditions de leur utilisation en cas d’ouverture d’une procédure collective. ».

L’article 2284 du code civil prévoit que « Quiconque s’est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir » et l’article 2285 que « Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers ; et le prix s’en distribue entre eux par contribution, à moins qu’il n’y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence. »

Selon l’exposé des motifs de l’amendement du Gouvernement, cette disposition permet « de sécuriser ces sommes lorsqu’elles sont consignées auprès de la Caisse des dépôts et consignation en cas de liquidation judiciaire de l’entreprise ». Elle vise à ce qu’elles ne puissent être utilisées pour indemniser les créanciers de l’entreprise en cas de liquidation judiciaire.

iii. Modification de la rédaction des obligations de vérification de la réalisation des travaux par le maître d’ouvrage lors du changement d’utilisation d’un site dont le sol est pollué

L’article L. 556-1 du code de l’environnement dispose que « sur les terrains ayant accueilli une installation classée mise à l’arrêt définitif et régulièrement réhabilitée […] lorsqu’un usage différent est ultérieurement envisagé, le maître d’ouvrage à l’initiative du changement d’usage doit définir des mesures de gestion de la pollution des sols et les mettre en œuvre afin d’assurer la compatibilité entre l’état des sols et la protection de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques, l’agriculture et l’environnement au regard du nouvel usage projeté ».

Il prévoit que « le maître d’ouvrage à l’initiative du changement d’usage fait attester de mise en œuvre par un bureau d’études certifié dans le domaine des sites et sols pollués » et que, « le cas échéant, cette attestation est jointe au dossier de demande de permis de construire ou d’aménager ».

Le 4° de l’article 51 septdecies remplace dans cette phrase le terme « mise en œuvre » par le terme « prise en compte ». Selon les informations qui ont été transmises à la rapporteure, cette modification serait nécessaire car l’attestation concernée est à remettre lors de la demande du permis de construire ou d’aménager et qu’à ce stade, le bureau d’études certifié ne peut attester que de la prise en compte de la pollution et non de sa mise en œuvre.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

Le 1° du I de l’article a été supprimé par l’adoption de l’amendement CD610 rectifié de la rapporteure. Il exonérait les carrières et les sites de stockage géologique de dioxyde de carbone de l’obligation de mettre à jour l’état de la pollution des sols à chaque changement notable des conditions d’exploitation, obligation avait été imposée aux installations présentant des risques importants de pollution ou d’accident, aux installations de stockage des déchets et aux carrières par la loi du 30 juillet 2003 prise suite aux problèmes posés par la fermeture de l’usine Métaleurop Nord.

L’un des arguments avancés par l’exposé des motifs de l’amendement créant l’article 51 septdecies est que cette mesure « permettra aux exploitants [des carrières] de focaliser leurs efforts sur les questions plus essentielles de préservation de la biodiversité dans le cadre de leur activité ». Or il n’est pas prouvé que la suppression de la mise à jour de l’état de la pollution des sols favorise la préservation de la biodiversité.

Par ailleurs, le régime des carrières relevant en grande partie du code minier, la rapporteure a considéré qu’un tel sujet n’avait pas à être abordé dans le cadre d’un texte sur la biodiversité mais plutôt dans le cadre d’un texte minier.

Enfin, l’état de la pollution des sols devant être transmis à chaque révision, non seulement au préfet mais aussi au maire de la commune concernée et, le cas échéant, au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’urbanisme concerné, supprimer sa révision périodique conduirait à réduire considérablement les informations dont disposent les collectivités territoriales sur le territoire desquelles des carrières sont implantées. Or on aurait tort de présenter les carrières comme des activités non polluantes sans impact sur leur voisinage.

*

* *

La commission examine l’amendement CD610 rectifié de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à supprimer le 1° du I – à savoir l’alinéa 2 – de l’article 51 septdecies introduit en séance au Sénat et qui exonère les carrières et les sites de stockage géologique de dioxyde de carbone de l’obligation de mettre à jour l’état de la pollution des sols à chaque changement notable des conditions d’exploitation.

Il ne faut pas présenter les carrières comme des sites non-polluants, sans impact sur le voisinage et en général.

La commission adopte l’amendement puis elle adopte l’article 51 septdecies modifié.

Chapitre V
Sanctions en matière d’environnement

Article 52
(articles L. 415-3, L. 415-6, L. 624-3 et L. 635-3 du code de l’environnement)

Sanctions applicables à certaines infractions en matière d’environnement

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 52 renforce les amendes prévues en cas d’atteinte aux espèces en multipliant par dix le montant des amendes encourues pour les infractions mentionnées aux articles L. 415-3, L. 624-3 et L. 635-3 du code de l’environnement et en multipliant par cinq le montant de l’amende encourue dans le cas où l’infraction est commise en bande organisée.

Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, l’article a fait l’objet d’une série d’amendements rédactionnels ainsi que d’un amendement de la rapporteure portant à deux ans la peine d’emprisonnement encourue pour les infractions mentionnées à l’article L. 415-3 du code de l’environnement.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article n’a été modifié que par un amendement du rapporteur, adopté en commission, qui supprime le doublement de la peine d’emprisonnement votée à l’Assemblée nationale. La commission du développement durable du Sénat a estimé que le doublement du montant des amendes encourues était un signal suffisant.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 52 a été supprimé par un amendement de M. Dino Cinieri, qui a fait l’objet d’un avis défavorable de votre rapporteure et du Gouvernement.

Au cours des débats, les détracteurs de la mesure ont indiqué qu’ils considéraient que l’augmentation des peines susceptibles d’être prononcées par le juge en cas d’infraction à la réglementation visant les espèces protégées semblait disproportionnée, eu égard à l’ensemble des actes susceptibles d’être jugés à ce titre. Par ailleurs, il a été indiqué que certaines infractions (notamment celles concernant la destruction d’espèces protégées ou de leurs habitats) pouvaient être commises par imprudence ou par négligence.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD299 de M. Dino Cinieri, tendant à supprimer l’article.

M. Dino Cinieri. L’augmentation des peines susceptibles d’être prononcées par le juge en cas d’infraction à la réglementation visant les espèces protégées semble disproportionnée, eu égard à l’ensemble des actes susceptibles d’être jugés à ce titre.

Cette réglementation vise non seulement, ainsi que le précise l’étude d’impact, les atteintes les plus graves aux espèces, notamment celles susceptibles de rapporter des revenus importants à leurs auteurs via le trafic international des espèces animales ou végétales, mais aussi la destruction de toutes les espèces protégées ou de leur habitat. Or, pour la plupart, ces infractions ne sont pas commises volontairement, et encore moins à des fins financières. Certaines d’entre elles peuvent notamment être commises par imprudence ou par négligence. Ainsi en va-t-il de la destruction de l’habitat d’une espèce protégée alors que l’on ignore sa présence.

Nous proposons de supprimer l’augmentation des peines pour l’ensemble des infractions, à l’exception de celles qui sont commises en bande organisée.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. J’entends vos arguments, mais, selon moi, les juges sont capables de faire la part des choses et de prononcer des peines proportionnées. Ceux qui commettent des infractions plaident souvent la méconnaissance, mais pas toujours à juste titre. Si nous voulons vraiment avoir une action forte en matière de protection de la biodiversité et des espèces, il faut que nous envoyions un signal clair. Nous en avons assez de constater les destructions sur le terrain, auxquelles s’ajoute le braconnage. Avis défavorable à cet amendement de suppression.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Il est nécessaire de prévoir des sanctions suffisamment dissuasives, y compris lorsqu’il ne s’agit pas de trafic en bande organisée ou que ce trafic ne peut être démontré. Les quanta de peine prévus par l’article sont des maxima, et les tribunaux sont chargés d’assurer la proportionnalité de la peine prononcée. De plus, je rappelle que le droit européen, via la directive 2008/99/CE du 19 novembre 2008 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal, impose à la France de mettre en œuvre des peines effectives, proportionnées et dissuasives. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Vigier. Il faut, bien évidemment, protéger l’environnement et sanctionner les contrevenants, mais les peines d’amende prévues sont totalement disproportionnées. Je soutiens donc cet amendement de suppression.

La Commission adopte l’amendement. (Contestations)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il y a eu treize voix pour, neuf contre.

En conséquence, l’article 52 est supprimé.

Les amendements CD251 de M. Martial Saddier, CD611 de la rapporteure, CD103 de M. Jean-Marie Sermier, CD337 de M. Dino Cinieri, CD362 de M. Julien Aubert, CD422 de Mme Sophie Rohfritsch, CD807 de M. Gérard Menuel et CD252 de M. Martial Saddier n’ont plus d’objet.

Article 53
(article L. 415-2 du code de l’environnement et article 59 octies [nouveau] du code des douanes)

Échanges de données visant à améliorer la protection des espèces menacées

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 53 vise à permettre les échanges de données entre les agents des douanes, les inspecteurs de l’environnement et l’organe de gestion de la convention CITES (convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) signée le 3 mars 1973 à Washington et dont l’objectif est de garantir que le commerce international des espèces ne nuit pas à la conservation durable des espèces sauvages et de la biodiversité.

Lors de son examen à l’Assemblée nationale, un amendement du Gouvernement a été adopté qui :

– permet aux douanes de transmettre spontanément au ministère de l’écologie d’autres informations confidentielles que celles contenues dans les procès-verbaux ;

– introduit dans le texte la notion de réciprocité dans la transmission des informations.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen au Sénat, l’article 53 a fait l’objet seulement d’un amendement de cohérence juridique du Rapporteur adopté en séance publique avec un avis favorable du Gouvernement et de la commission.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Les modifications apportées par le Sénat n’appelant aucun commentaire de sa part, la rapporteure a proposé l’adoption de l’article sans modification.

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La Commission adopte l’article 53 sans modification.

Article 53 bis
(article 29 du code de procédure pénale)

Harmonisation du délai de transmission des procès-verbaux par les gardes particuliers assermentés

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 53 bis, introduit dans le texte par l’adoption d’un amendement de M. Clément, aligne le délai de transmission des procès-verbaux par les gardes-pêche particuliers sur celui des inspecteurs de l’environnement, qui est de cinq jours à compter de la clôture du procès-verbal. Pour ce faire, il a modifié l’article L. 437-13 du code de l’environnement.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Considérant qu’il était possible d’aller plus loin, la commission du développement durable du Sénat a réécrit l’article. L’article 53 bis ne modifie désormais plus l’article L. 437-13 du code de l’environnement relatif aux gardes-pêche particuliers assermentés mais l’article 29 du code de procédure pénale relatif à l’ensemble des gardes particuliers assermentés (ce qui inclut les gardes-pêche particuliers assermentés mentionnés par l’article L. 437-13 du code de l’environnement).

L’article 29 du code de procédure pénale prévoit que « les gardes particuliers assermentés constatent par procès-verbaux tous délits et contraventions portant atteinte aux propriétés dont ils ont la garde » et que ces procès-verbaux « sont remis ou envoyés par lettre recommandée directement au procureur de la République […] dans les trois jours au plus tard » à compter de la constatation des faits.

Or l’ordonnance du 11 janvier 2012 relative à la simplification et à l’harmonisation des dispositions de police administrative et judiciaire du code de l’environnement (77), qui a harmonisé les délais de transmission des procès-verbaux d’infraction au code de l’environnement à cinq jours suivant la clôture du procès-verbal, n’a pas modifié cette disposition, qui était dans le code de procédure pénale.

C’est pourquoi l’article 53 adopté par les sénateurs modifie le délai pour l’envoi des procès-verbaux par les gardes particuliers assermentés, qui passe de « trois jours […] y compris celui où ils ont constaté le fait » à « cinq jours après celui de la constatation du fait », ce qui revient à passer le délai de deux jours après constatation du fait à cinq jours après constatation du fait.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure, qui salue l’initiative du Sénat, a proposé l’adoption de l’article sans modification.

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La Commission adopte l’article 53 bis sans modification.

Article 53 ter A
(article L. 428-21 du code de l’environnement)

Saisie par les gardes-chasse particuliers et les agents des fédérations départementales des chasseurs des armes de chasse et autres objets ayant servi à commettre une infraction

(supprimé)

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 53 ter A a été inséré dans le texte par l’adoption des amendements n° 6 rectifié quinquies de M. Cardoux et 248 rectifié de M. Bertrand, adoptés avec un avis favorable de la commission et une demande de retrait du Gouvernement.

Il modifie l’article L. 428-21 du code de l’environnement pour permettre aux gardes-chasse particuliers et aux agents des fédérations des chasseurs de procéder à la saisie matérielle des objets ayant permis la commission des infractions.

L’article L. 428-20 du code de l’environnement définit la liste des personnes habilitées à rechercher et à constater l’ensemble des infractions de chasse, qui inclut par exemple les officiers et agents de police judiciaire ou encore les gardes champêtres.

Par ailleurs, l’article L. 428-21 du code de l’environnement prévoit que les gardes-chasse particuliers assermentés (78) peuvent constater les infractions de chasse mais seulement celles qui portent préjudice aux détenteurs de droits de chasse qui les emploient.

Cet article permet aussi aux agents de développement de la fédération départementale des chasseurs d’assurer garderie particulière des propriétés dans le cadre de conventions. Ces agents sont alors habilités à constater les infractions de chasse sur ces propriétés.

Enfin, l’article L. 428-21 prévoit que les gardes-chasse particuliers assermentés et les agents de développement de la fédération départementale des chasseurs sont habilités à procéder à la saisie du gibier tué à l’occasion des infractions qu’ils constatent qu’ils doivent en faire don à l’établissement de bienfaisance le plus proche ou le détruire. L’article 53 ter A complète ces dispositions en permettant « la saisie des objets ayant permis la commission d’une infraction », ce qui ne couvre pas seulement les armes mais peut aussi par exemple concerner les voitures.

2. La position de votre commission en deuxième lecture

Les membres de la commission du développement durable ont voté contre l’article, qui a donc été supprimé.

La rapporteure tient à rappeler que cet article posait d’importants problèmes juridiques. En effet, la saisie des objets ayant servi à commettre une infraction en matière de chasse –  par exemple la saisie des armes – constitue une prérogative importante de police judiciaire et ne peut être confiée qu’à un nombre limité d’agents qui ont suivi une formation spécifique.

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La Commission examine les amendements identiques CD950 de la rapporteure et CD952 de Mme Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. Je propose de supprimer l’article 53 ter A introduit par le Sénat, car il pose des problèmes juridiques très importants : la saisie des objets ayant servi à commettre une infraction en matière de chasse, notamment des armes, constitue une prérogative importante de police judiciaire et ne peut être confiée, dès lors, qu’à un nombre limité d’agents, tels que les officiers de police judiciaire, qui ont suivi une formation particulière.

Mme la secrétaire d’État. La saisie est en effet une prérogative importante de police judiciaire, qui constitue une atteinte au droit de propriété. Il convient donc de la confier à un nombre limité d’agents disposant de pouvoirs de police judiciaire larges, dans un esprit de proportionnalité et de nécessité. Avis favorable à cet amendement de suppression.

M. Martial Saddier. Je suis élu dans un département frappé historiquement, hélas, par le braconnage. Or nous constatons que la plupart des procédures judiciaires engagées pour des actes de braconnage commis en flagrant délit — dont nous convenons tous qu’ils sont condamnables, y compris au sein de cette commission — n’aboutissent pas parce qu’elles sont cassées pour vice de procédure ou de forme. Je connais bien ces dossiers, car un tribunal spécialisé en la matière siège dans ma circonscription. Donc, plutôt que d’envoyer un signal en multipliant le quantum des peines par dix, ainsi que le prévoyait l’article 52, il y aurait lieu de mener un travail approfondi sur la procédure judiciaire concernant ces infractions commises en flagrant délit. Je me permets d’appeler votre attention sur ce point, Madame la secrétaire d’État, Madame la rapporteure.

M. Philippe Plisson. Sur le fond, je comprends que l’on veuille assortir la saisie des objets ayant servi au braconnage d’un certain nombre de garanties, notamment en ne confiant cette prérogative qu’à des personnes habilitées. Toutefois, cela va dans le sens inverse de ce que nous souhaitons : combattre les braconniers. L’engagement des procédures prenant du temps et les peines n’étant pas nécessairement appliquées, il y a une forme d’impunité. Le fait que les gardes-chasse particuliers puissent confisquer l’objet du délit constituerait une avancée en matière de lutte contre le braconnage. Il ne me semble donc pas opportun de supprimer cet article.

M. Jean-Yves Caullet. Selon l’exposé sommaire de l’amendement CD894, qui est identique à ceux que nous examinons, mais qui n’a pas été défendu, « le braconnage n’est pas en soi une atteinte à la biodiversité, mais au droit de chasse ». Cet argument est ridicule et dénote en outre une connaissance particulièrement pointue du milieu du braconnage ! (Sourires)

Il convient de mener une réflexion approfondie sur la saisie des armes. Le code de procédure pénale enjoint à chaque citoyen de tout faire pour empêcher qu’un crime ou un délit flagrant soit commis et, s’il le peut, de remettre son auteur aux autorités de police judiciaire. La possibilité de saisir l’arme peut entrer dans ce cadre, mais doit en effet être assortie de garanties. À cet égard, la rédaction proposée pour cet article n’est peut-être pas la plus appropriée.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement vise lui aussi à supprimer la possibilité donnée aux gardes-chasse particuliers de saisir les objets ayant servi à commettre des infractions. La saisie est en effet une prérogative importante de police judiciaire, qu’il convient de confier à un nombre limité de personnes.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’ai entendu un certain nombre d’entre vous dire que ce projet de loi portait sur la biodiversité, et non sur la chasse. Or le présent article, introduit par le Sénat, prévoit une disposition relative à la chasse — je le dis notamment à l’attention de Philippe Plisson. Pour votre information, je rappelle qu’elle avait été introduite antérieurement dans la proposition de loi de M. Jérôme Bignon portant diverses dispositions en matière de chasse et qu’elle avait alors été rejetée, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet étant ministre de l’écologie. Je prends peu parti dans le cadre de l’examen de ce texte, mais, en l’espèce, je suis favorable, à titre personnel, à la suppression de cet article.

La Commission rejette les amendements. (Murmures de contestation)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il n’y a pas de raison de douter du vote. Il y a égalité de voix (onze pour, onze contre), donc ces amendements ne sont pas adoptés.

Je mets l’article aux voix.

La commission rejette l’article 53 ter A qui est ainsi supprimé. (Murmures)

Article 53 ter
(articles L. 362-5 et L. 415-1 du code de l’environnement )

Rétablissement de l’habilitation des agents des collectivités territoriales à constater les infractions relatives à la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels et à la faune et la flore protégée

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 53 ter a été inséré dans le texte par l’adoption en commission de l’amendement n° COM-313 de M. Hervé Poher. Il rétablit l’habilitation des agents des collectivités territoriales et de leurs groupements, commissionnés et assermentés à cet effet, à constater les infractions relatives à la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels et à la protection de la faune et la flore.

Cette possibilité avait été supprimée par l’ordonnance du 11 janvier 2012 relative à la simplification et à l’harmonisation des dispositions de police administrative et judiciaire du code de l’environnement (79)

2. La position de votre commission en deuxième lecture

Votre rapporteure, qui se félicite de ce rétablissement, a proposé l’adoption de l’article sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 53 ter sans modification.

Article 54 bis
(article L. 432-10 du code de l’environnement)

Absence de sanctions pénales pour certaines pratiques de pêche

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 54 bis a été inséré dans le texte à l’initiative de la rapporteure pour éviter aux pratiquants du « no-kill fishing » de risquer de se voir infliger l’amende de 9 000 euros prévue par l’article L. 432-10 du code de l’environnement pour l’introduction de brochets, perches, sandres ou black-bass dans des eaux principalement peuplées de truites.

En effet, il serait assez illogique de verbaliser les pêcheurs qui remettent à l’eau ces poissons alors qu’ils se trouvaient déjà dans l’eau.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de l’examen de l’article en séance publique, le Sénat a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Lors de l’examen du texte en commission, un amendement de clarification rédactionnelle de votre rapporteure a été adopté.

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* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD477 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 54 bis ainsi modifié.

Article 54 ter
(article L. 431-7 du code de l’environnement)

Protection de la truite et pisciculture

(suppression maintenue)

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 54 ter a été inséré dans le texte par l’adoption de l’amendement n° 1281 de M. Clément en séance publique. Il vise à interdire l’introduction de poissons carnassiers dans les piscicultures situées dans des eaux où la protection de la truite est nécessaire.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Cet article a été supprimé par l’adoption de l’amendement de Mme Primas lors de l’examen du texte en commission. La commission a en effet considéré que la rédaction de l’article posait de nombreux problèmes juridiques et risquait de porter une atteinte grave aux piscicultures qui produisent du poisson pour l’alimentation ou le rempoissonnement alors que l’amendement visait très probablement les piscicultures touristiques.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Se rangeant à l’avis du Sénat, la commission n’a pas procédé au rétablissement de l’article.

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L’amendement CD642 de Mme Viviane Le Dissez est retiré.

La Commission maintient la suppression de l’article 54 ter.

Article 56
(article L. 945-4 du code rural et de la pêche maritime)

Sanctions applicables en cas de pêche d’espèces en danger

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 56 alourdit le régime des sanctions applicables en cas de pêche d’espèces menacées. Il n’a fait l’objet que d’un amendement rédactionnel de la rapporteure.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen en commission, cet article a fait l’objet de l’amendement n°COM-165 de Mme Didier et des membres du groupe CRC qui a interdit le chalutage en eaux profondes.

Cette mesure a été supprimée par l’adoption en séance publique de l’amendement n° 211 rectifié ter de Mme Primas, qui a fait l’objet d’un avis défavorable du Gouvernement et de la commission.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

Lors de l’examen de l’article en commission, l’amendement CD679 de M. Bertrand Pancher rétablissant l’interdiction du chalutage en eau profonde a été adopté. Votre rapporteure tient à indiquer qu’elle apporte tout son soutien à cette mesure.

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* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD613 et CD612 de la rapporteure, CD553 de Mme Laurence Abeille et CD679 de M. Bertrand Pancher.

Mme Laurence Abeille. Nous abordons la problématique de la biodiversité en milieu marin, plus particulièrement dans les fonds marins, sujet dont nous avons déjà discuté à plusieurs reprises. Le groupe écologiste a déposé une nouvelle fois le présent amendement, qui vise à interdire le chalutage en eaux profondes. Cette interdiction a été adoptée en commission au Sénat lors de l’examen du projet de loi, mais elle a malheureusement été rejetée en séance publique, malgré le soutien du Gouvernement et du rapporteur.

Le débat est connu, et aucun argument ne va dans le sens du maintien de cette pratique de pêche. Du point de vue de la biodiversité, nous savons qu’elle est catastrophique : elle porte atteinte à des espèces telles que le grenadier de roche, qui est en danger d’extinction. De plus, les prises accessoires sont très nombreuses : des espèces de requin en danger d’extinction, par exemple, se font prendre massivement dans les filets. Surtout, le chalutage profond détruit des espaces à la biodiversité remarquable encore largement méconnue. Il nous prive donc d’un potentiel de développement futur important, notamment de la connaissance d’espèces qui peuvent avoir un intérêt médical. Si l’on souhaite que « l’économie bleue » soit une économie durable, il faut préserver ce potentiel de développement.

Du point de vue économique, depuis que l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) a publié des données à ce sujet en juillet 2014, nous savons que la pêche en eaux profondes ne concerne qu’une dizaine de navires, et qu’aucun de ces navires ne la pratique à plein temps. Leur reconversion ne serait donc pas difficile, et l’interdiction de ce type de pêche ne détruirait aucun emploi. En revanche, elle mettrait un terme à la destruction de la biodiversité dans les fonds marins.

M. Bertrand Pancher. J’ai déposé un amendement analogue, avec des arguments quasi équivalents. J’avoue ne pas comprendre que l’on puisse continuer à défendre la pêche en eaux profondes. D’abord, ne nous racontons pas d’histoires : elle ne fait vivre pratiquement aucun pêcheur. Ensuite, c’est un véritable scandale pour l’environnement : on va finir par détruire des espèces, certaines d’entre elles étant sur le point de disparaître. La Société centrale des armements Mousquetaires à la pêche (Scapêche), filiale du groupe Intermarché, seule à pratiquer cette pêche en Europe, m’a indiqué que l’interdiction ne serait plus un problème pour elle, car elle ferait désormais descendre ses filets à des profondeurs moindres. Cependant, comme d’habitude, il y a un lobbying un peu difficile à comprendre sur cette question. Cela tient sans doute au fait que les pêcheurs sont très individualistes et peu organisés. (Murmures)

On ne peut pas se dire écologiste et défendre la pêche en eaux profondes.

Mme la rapporteure. Je souscris aux arguments développés par Laurence Abeille et Bertrand Pancher. J’avais soutenu, en première lecture, l’interdiction de la pêche en eaux profondes. Les poissons qui sont pêchés de cette manière, je le rappelle, ont souvent des cycles de reproduction longs, qui peuvent atteindre 100 à 150 ans. Lorsque l’on racle le fond de la mer, ces poissons ne sont même plus en mesure de se reproduire. Je suis tout à fait favorable à l’interdiction de cette pratique de pêche, qui n’a plus, de toute façon, un grand avenir devant elle. Cela nous permettra de préserver la faune sous-marine, qui n’est déjà pas en très bon état. Nous devons consentir des efforts très importants en ce sens. Ainsi que l’a dit Bertrand Pancher, c’est un véritable scandale de continuer à autoriser la pêche en eaux profondes.

Mme la secrétaire d’État. Je n’ai pas une virgule à changer à l’argumentation très précise développée par Ségolène Royal sur ce sujet au Sénat. Je me range à sa position et suis donc favorable à ces amendements, plus précisément au CD679.

M. Yves Nicolin. La pêche en eaux profondes est pratiquée non seulement dans les eaux territoriales françaises, mais aussi, et sans doute davantage, dans les eaux internationales. Si la France l’interdit dans ses eaux territoriales, que se passera-t-il au-delà, dans les eaux internationales ? Nos pêcheurs seront-ils contrôlés et sanctionnés une fois de retour dans les eaux françaises ? De quelle manière ?

M. Martial Saddier. L’amendement CD679, auquel vous venez de donner un avis favorable, Madame la secrétaire d’État, renvoie à un décret en Conseil d’État. Je suppose que vous avez en tête les grandes lignes de son contenu, ainsi que le délai approximatif dans lequel le Conseil d’État sera saisi. Pouvez-vous éclairer notre commission sur ces points ?

Mme la secrétaire d’État. L’idée est aussi d’envoyer un signal pour relancer la procédure législative en cours sur ce sujet au niveau européen, car elle s’est un peu enlisée. À ce stade, le décret n’est pas encore rédigé. Bien évidemment, il sera élaboré en concertation avec les acteurs concernés, en particulier avec la profession. Il a été décidé que le chalutage serait interdit au-dessous de 800 mètres, ni plus ni moins. Les zonages seraient ceux qui sont envisagés au niveau européen.

M. Yves Nicolin. Le seuil des 800 mètres a-t-il été fixé au niveau européen ou au niveau national ?

Mme la secrétaire d’État. Au niveau européen.

M. Bertrand Pancher. Lorsque j’ai rencontré les dirigeants du Scapêche, il y a un an et demi, après une campagne contre le chalutage profond organisée avec l’association BLOOM, je les ai interrogés sur les conséquences économiques de cette interdiction. Ils m’ont indiqué qu’ils avaient compris le message des consommateurs, que la situation actuelle n’était pas tenable du point de vue écologique et que leurs trois ou quatre navires qui pêchaient en eaux profondes auparavant — et encore, pas à plein-temps — faisaient désormais descendre leurs filets à des profondeurs moindres. Donc, si cet amendement est adopté, il ne posera aucune difficulté concrète à la Scapêche, seule société à pratiquer cette pêche non seulement en France, mais en Europe. Le problème sera donc réglé, et nous enverrons un bon signal au niveau international.

M. Arnaud Leroy. Je m’interroge sur l’opportunité de légiférer au niveau français sur une thématique en cours d’examen au niveau européen. Nous avons eu cette discussion il y a trois semaines dans l’hémicycle lorsque nous avons examiné la proposition de loi pour l’économie bleue. Or le secrétaire d’État chargé de la pêche a exprimé alors une position assez claire, en se référant au débat européen qui n’a pas encore abouti. Il y a certes un accord sur le seuil des 800 mètres, accepté notamment par la profession, mais il reste un grand nombre de questions complémentaires à régler, notamment celle des prises accessoires : que faire des poissons appartenant à des espèces vivant habituellement en eaux profondes lorsqu’ils sont pêchés à des profondeurs moindres ? Ce point et d’autres font actuellement l’objet de discussions entre les États européens.

J’entends bien l’argument selon lequel il faut envoyer un signal, mais c’est un sujet qui a défrayé la chronique et exacerbé les passions, d’un côté comme de l’autre. Nous devrions nous en tenir au compromis qui a été trouvé. Quant au calendrier, Madame la secrétaire d’État, je ne trahis guère de secret en disant que la rédaction du décret en Conseil d’État prendra beaucoup de temps, et aboutira presque en même temps que les discussions à Bruxelles. Il est exact que le dossier est quelque peu encalminé au niveau européen. Il vous revient de réveiller vos interlocuteurs lors d’une prochaine visite à Bruxelles, et de faire en sorte que nous soyons traités sur un pied d’égalité avec tous nos partenaires européens, notamment avec nos concurrents danois et espagnol.

M. Gilles Lurton. Je rejoins la position que vient d’exprimer Arnaud Leroy. Nous avons en effet beaucoup discuté de cette question lors de l’examen de la proposition de loi pour l’économie bleue. Un processus européen est en cours. La France a donné son accord à une proposition qui prévoit l’interdiction du chalutage au-dessous de 800 mètres et une protection des écosystèmes marins vulnérables, ainsi que des adaptations pour préserver la pêche artisanale de certaines espèces de fond telles que la langoustine ou la lotte. Cette proposition a été adoptée à l’unanimité par le Conseil des ministres de l’Union européenne. Elle est actuellement examinée par les députés européens, qui sont saisis de cette question depuis des mois, voire des années, et ont l’intention d’aboutir à un résultat concret. Je trouverais très dangereux que la France prenne seule la position défendue par les auteurs de ces amendements.

M. Martial Saddier. Compte tenu du territoire que je représente, je connais peu les sujets relatifs à la mer, qui sont très intéressants, et je dois dire que j’ai beaucoup progressé hier soir dans la connaissance des baleines ! (Rires)

Je comprends de votre réponse, Madame la secrétaire d’État, que la rédaction du décret n’a pas encore commencé. Or cette législature a désormais une durée de vie limitée. En adoptant cet amendement, il s’agirait donc davantage de donner un signal que d’avoir une action réelle.

Pouvez-vous nous éclairer sur les conséquences sociales de l’interdiction de la pêche en eaux profondes, Madame la secrétaire d’État ? Combien d’entreprises, de bateaux et de salariés seraient concernés ? Sans prendre position sur le fond, il me semble très important de protéger la biodiversité et les différentes espèces de poissons — tel est l’objet du présent projet de loi —, mais aussi de se préoccuper de la protection des personnes qui travaillent dans ce secteur.

Mme la secrétaire d’État. Selon les différentes sources dont je dispose, le nombre de bateaux concernés varie entre zéro et un. (Murmures) Ledit bateau serait d’ailleurs en train de se désengager du chalutage profond et d’orienter majoritairement son activité vers d’autres types de pêche.

M. Yves Nicolin. À quoi cette interdiction servira-t-elle, alors ?

M. François-Michel Lambert. Elle servira, bien sûr, de même que sert le délit d’obsolescence programmée que nous avons voté en 2014. Certes, il n’est pas simple de prouver que l’obsolescence d’un produit est programmée, mais nous avons envoyé un signal extrêmement fort. On le voit : de nombreux fabricants ont développé une communication proactive à ce sujet et ont, je suppose, modifié leurs pratiques.

Ainsi que vient de l’expliquer Mme la secrétaire d’État, il s’agit de donner, là aussi, un signal, d’être à l’écoute de l’attente des citoyens et de répondre à l’inquiétude exprimée par de nombreux experts et scientifiques à propos de la surpêche. Il y a un mois à peine, la Commission européenne a estimé que, en mer Méditerranée, on pêchait dix fois plus qu’il ne faudrait pour que les ressources halieutiques aient la capacité de se régénérer. Qu’allons-nous faire en tant que représentants du peuple ? Faire comme si nous n’entendions pas ce que disent le peuple et les experts, ou bien envoyer un signal très fort ?

Arnaud Leroy a souhaité que Mme la secrétaire d’État réveille ses interlocuteurs sur ce dossier encalminé à Bruxelles — je reprends ses termes. Or, pour ce faire, il faut de bons arguments. En votant massivement l’interdiction du chalutage profond, la représentation nationale donnera à Mme la secrétaire d’État les moyens de relancer le dossier au niveau européen.

M. Philippe Le Ray. Gwendal Rouillard, qui connaît parfaitement le sujet, aurait pu vous dire qu’il concerne essentiellement le bassin lorientais, pour au moins trois bateaux et plus de 1 000 emplois.

Pourquoi notre pays souhaite-t-il soudain accélérer les choses, quitte à s’isoler, alors qu’un processus européen est en cours ? Les pêcheurs de ma circonscription, que je rencontre régulièrement, sont pleinement conscients que leurs pratiques doivent évoluer et ont d’ailleurs déjà adopté une démarche de développement durable et de protection de la ressource. Il faut leur faire confiance.

Il est urgent que nous nous concertions et nous coordonnions au niveau européen, que nous échangions avec nos partenaires, plutôt que d’isoler un territoire qui serait ainsi mis en grande difficulté. Je suis fermement opposé à cet amendement, dont l’adoption aurait des conséquences dramatiques pour le Morbihan et plus généralement pour la Bretagne.

M. Philippe Plisson. On peut établir un parallèle entre la pêche en eaux profondes et l’utilisation des néonicotinoïdes en agriculture. On a beau avoir conscience qu’il s’agit d’une mauvaise pratique, elle perdure parce que, dit-on, on ne sait pas faire autrement, que cela crée des emplois et de l’activité économique. Il me semble cependant que cet argument ne tient pas : on ne peut pas continuer ainsi indéfiniment, car on sait qu’il y aura une fin, en particulier pour les générations futures. Aussi chacun doit-il modifier des pratiques qui ne sont pas vertueuses.

On nous explique que, pour prendre une décision, il faut attendre que l’Europe ait statué. Mais peut-on encore avoir confiance en cette Europe qui trouve des vertus au Roundup ? Monsanto n’y est-il pas plus influent que tous ceux qui ont développé des maladies à cause de certaines pratiques ? Il nous faut donc faire acte de courage et adopter cet amendement, pour envoyer un signal fort.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nombreux sont encore ceux qui souhaitent intervenir, mais il va bien falloir que nous passions au vote. Si nos travaux devaient reprendre cet après-midi, après les questions au Gouvernement, il n’est pas sûr que nous nous retrouverions aussi nombreux que ce matin. Je rends hommage à ceux qui assistent en permanence à nos débats, et il est vrai que j’ai tendance à les privilégier. Ceux qui ne viennent que pour aborder un sujet précis et défendre un amendement exagèrent un peu. (Approbations diverses)

M. Gilles Lurton. En tant que Breton, je partage les propos de Philippe Le Ray. Les professionnels de la pêche ont consenti beaucoup d’efforts ces dernières années et les gouvernements successifs leur ont beaucoup demandé. Ils ont parfois dû ne plus sortir en mer pendant deux mois, voire pendant six mois, pour permettre au stock de bars de se reconstituer. Ils préfèrent donc avoir pour interlocuteurs des personnes qui respectent leur métier et ont conscience de ces efforts, plutôt que de travailler dans un climat délétère de suspicion constante. Je crois que cet amendement enverrait un très mauvais signal.

M. Jean-Marie Sermier. Notre pays souhaite en entraîner d’autres pour défendre des thèmes liés à l’environnement. Mais soit il court tout seul devant, soit il essaie de rassembler la plupart des vingt-huit pays de l’Union, afin d’aboutir à une législation cohérente. Avec cet amendement, quel signal va-t-on donner ? Je rappelle que l’Union européenne s’est déjà saisie de la question et qu’elle avance progressivement, même s’il est vrai que l’on avance moins vite à vingt-huit que tout seul. Sans doute faudrait-il même élargir encore notre vision de l’Europe à la planète, car, en matière de pêche, la solution passe par une prise en compte au niveau mondial.

M. Sylvain Berrios. Il est curieux d’utiliser la loi pour émettre ce qui risque de n’être qu’un vœu pieux et de braquer les pêcheurs qui, au contraire, pourraient nous aider à atteindre notre objectif. Adopter ces amendements reviendrait à dégrader le travail législatif. L’Assemblée enverrait certes un signal, mais il serait mauvais.

M. Arnaud Leroy. Quand on connaît l’engagement des professionnels sur la question, on se dit que nous sommes bien près de trouver une solution. Or nous répondons ici à la pression d’un lobby.

Mme Laurence Abeille. Cela n’a rien à voir !

M. Arnaud Leroy. Madame Laurence Abeille, vous qui dénoncez volontiers les lobbies quand ce sont ceux des industriels, vous refusez de voir que certaines organisations non gouvernementales — en l’occurrence, l’association BLOOM — sont elles aussi des lobbies. (Murmures)

Il importe de ne pas se livrer à des comparaisons hâtives avec ce que nous avons pu faire hier à propos des néonicotinoïdes, qui posent un problème de santé publique. S’agissant de la pêche en eaux profondes, des engagements ont été obtenus de la part des professionnels, ce qui n’est pas le cas des néonicotinoïdes.

J’aurais aimé que l’on se penche sur l’épineux dossier de la pêche illégale, que l’on réfléchisse aux moyens supplémentaires dont la France devrait se doter pour protéger nos stocks dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), et à la manière de faire évoluer la réglementation internationale sur la question des stocks chevauchants en haute mer. Il ne s’agit pas là d’un débat passionnel, car il n’y a pas de lobbies, mais de vrais enjeux.

En matière de pêche en eaux profondes, les professionnels ont pris des engagements, et ce ne peut être que pour le symbole qu’on tente aujourd’hui de remporter sur eux une victoire par KO. C’est dommage, le sujet mérite mieux que cela et j’aimerais que l’on calme le jeu.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement concerne au maximum 250 pêcheurs. Voilà longtemps que la société Scapêche pratique autre chose que la pêche en eaux profondes. L’interdiction du chalutage profond ne changera absolument rien à l’activité des pêcheurs. En vertu de quoi peut-on dire qu’il faut autoriser un mode de pêche entraînant la disparition de poissons dont la durée de vie est de quatre-vingts à cent ans ? Ce serait envoyer un signal moralement intolérable.

Enfin, si l’Union européenne ne pousse pas et si les pays membres ne tirent pas, je ne vois pas comment l’harmonisation européenne pourra avancer ! Je n’ai pas oublié le dernier débat sur le sujet qui a eu lieu au Parlement européen. Par le lobby de la France, on a fait en sorte qu’aucune majorité ne se dégage. Que l’Union européenne fasse donc son travail, mais que cela ne nous empêche pas, aujourd’hui, de faire le nôtre.

Mme la rapporteure. J’ai beaucoup de respect pour les pêcheurs, mais cette interdiction ne changera rien. Je partage les propos de Bertrand Pancher en ce qui concerne l’harmonisation européenne que l’on attend depuis longtemps, mais, si l’on veut assurer la reproduction des espèces encore présentes dans nos mers, il est indispensable d’arrêter sans tarder la pêche en eaux profondes. Ce qui se passe aujourd’hui dans les fonds marins est catastrophique. Si nous attendons que l’Union européenne et les lobbies — qui ont certainement plus d’argent que les ONG — aient fini de travailler, il sera trop tard. Il est extrêmement important d’adopter cet amendement qui, je le rappelle, est présenté dans le cadre d’une loi sur la reconquête de la biodiversité. Il est encore possible de sauver quelques espèces, mais le temps nous est compté. Je vous demande de bien réfléchir avant de voter. C’est important pour la faune maritime.

Mme la secrétaire d’État. Je salue les pêcheurs français qui se sont réorientés, depuis un certain nombre d’années, vers des pratiques beaucoup plus responsables et respectueuses de l’environnement. Les navires qui pratiquaient le chalutage à plus de 800 mètres de profondeur ont changé leur mode de pêche et n’utilisent plus cette technique qui est devenue complètement résiduelle.

Les négociations communautaires prennent beaucoup trop de temps. Il ne faudrait pas qu’un retour en arrière vers des pratiques passées soit possible. C’est pourquoi il faut envoyer des signaux à l’Union européenne. Cela a d’ailleurs déjà été fait puisque Ségolène Royal a saisi le président du Conseil des ministres, le commissaire européen chargé de la pêche et le rapporteur sur ce texte au Parlement européen. Le Gouvernement fait donc son travail. Mais c’est au niveau du Parlement européen que tout se joue. Il paraît nécessaire que les parlementaires français parlent aux parlementaires européens au vu de la lenteur du processus.

Mme la rapporteure. Je retire les amendements CD613 et CD612.

Mme Laurence Abeille. Je retire l’amendement CD553.

Les amendements CD613, CD612 et CD553 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD679.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le vote est clair : dix-neuf voix pour, onze contre.

Puis elle adopte l’article 56 ainsi modifié.

Article 57 bis
Rapport évaluant la mise en œuvre de la convention de Washington sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 57 bis a été inséré dans le texte par l’adoption en séance publique à l’Assemblée nationale d’un amendement du groupe Ecolo.

Cet article, prévoit la remise d’un rapport au Parlement qui évalue la mise en œuvre par la direction générale des douanes et droits indirects de la convention CITES (80) dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.

Cet article précise que ce rapport doit notamment porter sur la capacité des douaniers à repérer les espèces de faune et de flore concernées et sur les conditions de replacement des animaux saisis.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Considérant que la mise en œuvre de la convention CITES fait l’objet d’une évaluation annuelle dans le rapport d’activités de la direction générale des douanes et droits indirects, le rapporteur a proposé un amendement de suppression de l’article qui a été adopté en commission.

3. La position de votre commission en deuxième lecture

L’article 57 bis a été rétabli par l’adoption d’une série d’amendements identiques présentés par votre rapporteure, Mme Viviane Le Dissez et Mme Laurence Abeille.

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* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD506 de Mme Laurence Abeille, CD643 de Mme Viviane Le Dissez et CD965 de la rapporteure.

Mme Laurence Abeille. La Commission européenne avait adopté un plan d’action visant à lutter contre le trafic d’espèces sauvages qui est devenu l’une des formes les plus lucratives de la criminalité organisée. Ce plan, qui comporte trente-deux mesures à l’horizon 2020, est axé sur trois priorités : il s’agit de réduire l’offre et la demande des produits illicites issus d’espèces sauvages, de lutter plus efficacement contre la criminalité organisée en renforçant la coopération entre les services compétents tels qu’Europol, et de renforcer la coopération entre les pays d’origine, de destination et de transit. À titre d’exemple, un éléphant est tué toutes les quinze minutes. On estime que 8 à 20 milliards d’euros passent chaque année entre les mains de groupes criminels organisés, ce qui place ce trafic au même niveau que les trafics de drogue, d’êtres humains ou d’armes.

L’article 57 bis a été supprimé au Sénat au motif que la mise en œuvre de la convention internationale de Washington sur le trafic d’espèces protégées fait déjà l’objet d’une évaluation annuelle. Or le rapport annuel de la Direction des douanes et des droits indirects ne présente que de façon extrêmement succincte, imprécise et partielle, les activités des douanes relatives au trafic illicite de faune et de flore.

Mme Viviane Le Dissez. Le commerce illégal d’animaux sauvages et de bois précieux pèse chaque année près de 9 milliards d’euros. Il est important de faire le point sur la convention de Washington.

Mme la rapporteure. L’amendement CD965 est identique à ceux qui viennent d’être défendus et auxquels je suis donc bien évidemment favorable.

Mme la secrétaire d’État. Il est exact que, jusqu’à présent, les rapports annuels de la douane en matière de mise en œuvre de la convention de Washington étaient très succincts. Toutefois, le comité permanent de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) a décidé, à l’occasion de sa dernière session, au mois de janvier 2016, que les États parties devaient, dès 2017, soumettre chaque année un nouveau rapport sur le commerce illégal, que chaque saisie soit documentée de façon détaillée — date, lieu, service concerné, espèce, description et quantité des spécimens, motif de la saisie, moyen de transport, méthode de dissémination, pays d’origine présumé, pays de transit, destination finale présumée, base juridique utilisée, sanction appliquée, utilisation des spécimens confisqués et, si possible, valeur estimée des spécimens et nationalité du contrevenant.

Par ailleurs, un rapport du conseil général de l’environnement et du développement durable concernant précisément les conditions d’accueil des animaux sauvages saisis sera rendu public avant la fin du mois.

En conséquence, un nouveau rapport du Gouvernement ne me semble pas indispensable. Mais, sur le principe, je ne peux qu’y être favorable.

M. Martial Saddier. Pouvez-vous nous donner le nombre de rapports que nous avons d’ores et déjà demandé depuis la semaine dernière et nous dire quels sont ceux qui sont éventuellement dans les cartons ? Alors que l’on parle de simplification et d’efficacité de la loi, le nombre de rapports commence à nous effrayer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous dresserons la liste une fois le texte adopté. Tous les groupes sont responsables de cette situation que l’on peut effectivement dénoncer. Le seul à faire preuve de constance dans ce domaine est Lionel Tardy.

La Commission adopte les amendements.

L’article 57 bis est ainsi rétabli.

Chapitre VI
Simplification des schémas territoriaux

Article 58
(article L. 122-1 du code forestier, Section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre IV [abrogée], articles L. 141-2, L. 142-1, L. 421-1, L. 421-13, L. 425-1 et L. 433-4 [nouveau], Section 2 du chapitre III du titre III du livre IV [abrogée], et intitulé de la Section 3 du chapitre III du titre III du livre IV du code de l’environnement)

Orientations régionales de gestion et de conservation
de la faune sauvage et de ses habitats, schémas départementaux
de vocation piscicole et plans départementaux de protection du milieu aquatique et de gestion des ressources piscicoles

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 58 du projet de loi initial proposait d’abroger les dispositions relatives aux orientations régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses habitats, arrêtées par le préfet de région (article L. 414-8 du code de l’environnement), et aux schémas départementaux de vocation piscicole (article L. 433-2 du même code), parce que ces schémas ne sont, en pratique, plus mis à jour depuis plusieurs années et parce que d’autres documents s’y substituent.

L’article 58 proposait également, en conséquence, de supprimer le lien de compatibilité entre les schémas départementaux de gestion cynégétique et les orientations régionales de gestion et de conservation de la faune.

À l’initiative de votre rapporteure, l’Assemblée nationale, en première lecture a adopté ces dispositions d’abrogation, mais les a complétées par une reconnaissance au niveau législatif du plan départemental de protection du milieu aquatique et de gestion des ressources piscicoles, par la création d’un article L. 433-4 dans le code de l’environnement. Ce plan sera élaboré par la fédération départementale ou interdépartementale des associations agréées de pêche et de protection des milieux aquatiques, et devra être approuvé par le préfet.

L’Assemblée a également adopté un amendement de suppression de renvois à l’article L. 433-2 abrogé, qui figuraient dans d’autres articles du code de l’environnement sous la forme d’une mention des « associations mentionnées à l’article L. 433-2 ».

2. Les modifications adoptées par le Sénat

En commission, le Sénat a adopté :

● deux amendements de coordination des rapporteurs,

● un amendement de la rapporteure pour avis intégrant, dans l’article
L. 425-1 du code forestier, l’obligation pour les schémas de gestion cynégétique d’être compatibles avec les programmes régionaux de la forêt et du bois,

● un amendement du rapporteur tendant à revenir sur la suppression, par l’Assemblée, des deux mentions « associations mentionnées à l’article L. 433-2 », pour remplacer celles-ci par une désignation explicite des fédérations d’associations agréées de pêche, afin de préserver leur possibilité de participer à l’action publique et d’ester en justice.

En séance, le Sénat a adopté l’article 58 dans sa rédaction issue des travaux de sa commission.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article avec deux modifications rédactionnelles proposées par votre rapporteure.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD214 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. L’amendement est défendu.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à conserver les orientations régionales de gestion de la faune sauvage et de ses habitats. Or, aujourd’hui, elles apparaissent redondantes avec les schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE). Cet outil ne paraît pas très utile, car il existe des outils plus efficaces. Je suis donc défavorable à l’amendement.

Mme la secrétaire d’État. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de coordination CD19 de la rapporteure.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD20 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer une redondance.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 58 ainsi modifié.

Article 58 bis AA
(article L. 430-1 du code de l’environnement)

Pêche de loisir

Cet article, introduit par l’adoption en séance au Sénat d’amendements identiques de MM. Jean-Noël Cardoux (LR) et Alain Bertrand (RDSE), vise à ce que l’ensemble des dispositions du Titre III du Livre IV du code de l’environnement, relatives à la pêche en eau douce et à la gestion des ressources piscicoles (et notamment aux conditions d’exercice du droit de pêche), permettent le développement de la pêche de loisir, dans le respect des espèces piscicoles et du milieu aquatique. Cet amendement a reçu un avis favorable du rapporteur du Sénat et du Gouvernement.

La commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 58 bis AA sans modification.

Article 58 bis A
(article L. 425-1 du code de l’environnement)

Prolongation de la validité du schéma départemental de gestion cynégétique

1. Le droit en vigueur

Dans chaque département, en application de l’article L. 425-1 du code de l’environnement, la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs élabore un schéma de gestion cynégétique, en concertation notamment avec les chambres d’agriculture, les représentants des propriétaires privés et les représentants des intérêts forestiers, et après une consultation du public. Ce schéma doit être approuvé par le préfet, qui vérifie sa compatibilité avec plusieurs autres documents de planification (programmes régionaux de la forêt et du bois, schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires...). L’article L. 425-1 dispose que ce schéma est établi pour une période de six ans, renouvelable.

Le schéma de gestion cynégétique comprend notamment les plans de chasse, des mesures concernant la sécurité des chasseurs et des non-chasseurs, la fixation des prélèvements maximum, des dispositions permettant de surveiller et de prévenir les dangers sanitaires dans chaque espèce de gibier (article L. 425-2 du même code). Il est opposable aux chasseurs (article L. 425-3 du même code), et les infractions aux dispositions du schéma sont punies d’amendes.

2. Les dispositions adoptées par le Sénat

En commission, le Sénat a introduit cet article 58 bis A en adoptant des amendements identiques présentés par la rapporteure pour avis, Mme Sophie Primas, et M. Jean-Noël Cardoux. Cet article complète l’article L. 425-1 du code de l’environnement pour permettre une prorogation, par arrêté du préfet, des schémas départementaux de gestion cynégétique pour une durée limitée à six mois lorsque les travaux d’élaboration du nouveau schéma n’ont pas pu être menés à leur terme.

3. La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 58 bis A sans modification.

Chapitre VII
Habilitations à légiférer par ordonnance et dispositions diverses

Le chapitre VII regroupe des habilitations à légiférer par voie d’ordonnance sur un ensemble de sujets variés.

Les ordonnances prévues par les articles 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 67 et 68 doivent être prises dans un délai de six mois après la publication de la loi d’habilitation, un projet de loi de ratification devant être déposé dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance. L’ordonnance prévue par l’article 66 doit, elle, être prise dans un délai de dix-huit mois après la publication de la loi d’habilitation, un projet de loi de ratification devant être déposé dans un délai de trois mois à compter de sa publication.

Article 59
(articles L. 211-3, L. 211-12, L. 212-5-1, L. 310-1 à L. 310-3, L. 331-3, L. 331-3-1 et L. 331-3-2 [nouveaux], L. 411-5, L. 412-1, L. 424-10 et L. 421-12 du code de l’environnement)

Demande d’habilitations sur huit sujets différents

(suppression maintenue)

Cet article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance pour modifier plusieurs dispositions du code de l’environnement.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Huit domaines sont concernés par ces habilitations :

1° les modalités de participation du public et des consultations applicables aux procédures de modification et de révision des décrets de création de parc national et des décrets d’approbation ou de révision de charte de parc national ;

2° des erreurs matérielles dans les actes de classement des espaces naturels ;

3° l’articulation entre les dispositions relatives aux zones humides d’intérêt environnemental particulier et celles relatives aux zones stratégiques pour la gestion de l’eau ;

4° les inventaires du patrimoine naturel ;

5° le régime d’autorisation des activités visées à l’article L. 412-1 du code de l’environnement ;

6° les dérogations à l’interdiction de destructions d’œufs d’oiseaux et fédérations interdépartementales de chasseurs ;

7° les modalités de création des fédérations interdépartementales de chasseurs ;

8° les règles relatives à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes, cette dernière ratification ayant été introduite en séance publique par un amendement du gouvernement sur avis favorable de votre rapporteure.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Ces dispositions, qui avaient été légèrement modifiées en commission, ont été supprimées par deux amendements identiques, le premier ayant été déposé par Mme Evelyne Didier et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen, le second par le Gouvernement. L’objectif de ces deux amendements consiste à supprimer une habilitation à légiférer par ordonnance qui prive le Parlement de son pouvoir législatif.

Les dispositions qui étaient destinées à être adoptées par ordonnance dans le cadre de l’article 59 sont réintroduites sous la forme d’articles législatifs ci-après.

3. La position de votre commission

Votre rapporteure est favorable au remplacement d’une habilitation à légiférer par ordonnance par de véritables dispositions législatives. C’est la raison pour laquelle, sur sa recommandation, votre commission a confirmé la suppression de cet article.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article 59.

Article 59 bis AA
(articles L. 211-3, L. 212-5-1, L. 300-4 [nouveau], L. 331-3, L. 331-3-1 et L. 331-3-2 [nouveaux] du code de l’environnement)

Simplification des règles de fonctionnement des parcs nationaux, rectification d’une erreur matérielle et coordination entre codes

Cet article, introduit en séance publique au Sénat par un amendement gouvernemental, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article vise à remplacer l’habilitation du Gouvernement à agir par ordonnance pour simplifier les modalités de modification et de révision des espaces classés en fonction de leur importance.

Les modalités de modification et de révision de la charte des parcs nationaux sont développées dans les articles L. 331-3-1 et L. 331-3-2 nouveaux. Il s’agit de définir la modalité de participation du public (enquête publique) et les consultations définies par le décret général d’application de la loi (partie réglementaire du code de l’environnement) pour les extensions des périmètres classés par le décret de création du parc. Ces dispositions ont notamment pour objet la perspective de reclassement de réserves naturelles nationales contiguës au cœur d’un parc national. Elles ouvrent également la perspective de classement en aire optimale d’adhésion de communes non encore comprises dans ce périmètre. L’article prévoit également un aménagement pour les extensions éventuelles du cœur maritime ou de l’aire maritime adjacente.

Lors d’une modification du décret de création du parc il est prévu que la modification de la charte subséquente soit approuvée par décret en Conseil d’État après une enquête publique et des consultations institutionnelles simplifiées. Par ailleurs, la modification du décret de création, lorsqu’elle concerne la composition du conseil d’administration, ne fait pas l’objet d’une enquête publique sur toutes les communes du cœur et de l’aire optimale d’adhésion mais fait l’objet d’une consultation institutionnelle simplifiée. Selon le Gouvernement, le Conseil d’État sera invité « à préciser si la consultation du public est systématiquement indispensable ».

Conformément au cadre fixé en 1960 et en 2006, toute diminution de périmètre classé par le décret de création ou toute modification de la réglementation du cœur du parc continue de faire l’objet d’une procédure parallèle à celle du classement, c’est-à-dire qu’est organisée une enquête publique identique à celle réalisée lors de la création, sur le territoire de toutes les communes classées en cœur de parc national et en aire optimale d’adhésion.

Par dérogation au principe du parallélisme des formes (enquête publique) et des compétences (décret du Premier ministre ou décret en Conseil d’État), il est prévu que de simples « rectifications d’erreurs matérielles » de coordonnées terrestres (numéros de parcelles) ou marines (points de coordonnées) seront rectifiées par un arrêté du ministre rapporteur de l’acte de classement, sans faire l’objet d’un nouveau décret simple du Premier ministre modificatif ou d’un décret en Conseil d’État modificatif.

Le Grenelle de l’environnement ayant rattaché toutes les enquêtes publiques « environnementales » au code de l’environnement sans supprimer le renvoi au code de l’expropriation, il est proposé de faire dépendre à nouveau cette enquête des dispositions code de l’expropriation compte tenu de son objet et de l’absence d’impact négatif sur l’environnement de l’instauration de ces servitudes.

Enfin, la modification relative au dispositif de préservation des zones humides supprime le lien entre l’identification des zones humides d’intérêt écologique particulier, par les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, et leur délimitation par le préfet. Elle supprime la subordination des zones stratégiques pour la gestion de l’eau à une délimitation préalable d’une zone humide d’intérêt écologique particulier par le préfet qui rendait inapplicable ces dispositions, et clarifie le rôle et la compétence respective du préfet et du schéma d’aménagement et de gestion des eaux. Il y a donc au final deux outils distincts et indépendants, l’identification de l’un ne conditionnant plus la mise en place de l’autre.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté huit amendements rédactionnels.

*

* *

La Commission adopte successivement les huit amendements rédactionnels CD132 à CD139 de la rapporteure. Puis elle adopte l’article 59 bis AA ainsi modifié.

Article 59 bis AB
(articles L. 411-3, L. 411-4, L. 411-5, L. 411-6, L. 411-7 et L. 411-8, L. 411-9, L. 411-10 et L. 411-11 [nouveaux], L. 414-9, L. 415-2 [nouveau], L. 415-3, L. 624-3, L. 635-3 et L. 640-1 du code l’environnement)

Lutte contre les espèces exotiques envahissantes

Cet article, introduit en séance publique au Sénat par un amendement gouvernemental, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions apportées par le Sénat

Cet article inscrit dans le projet de loi certaines dispositions de l’ordonnance qui était prévue à l’article 59 et à laquelle le Gouvernement a renoncé. Les mesures comprises dans cet article constituent le dispositif de lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Il s’agit, pour l’essentiel, d’adapter le code de l’environnement au règlement (UE) n° 1143/2014 du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes.

Cette transposition est nécessaire pour disposer des bases juridiques indispensables à la mise en place de dispositions d’interdiction ou d’autorisation de réalisation de diverses activités portant sur des espèces exotiques envahissantes ainsi que pour contrôler l’importation et éviter la propagation de telles espèces. Il est également nécessaire de prévoir la possibilité d’agir contre ces espèces lorsqu’elles sont présentes sur le territoire.

Les mesures d’adaptation comportent une légère réorganisation au chapitre premier du titre premier du livre quatrième du code de l’environnement de façon à en clarifier la lecture entre les mesures de protection des espèces de faune et de flore indigènes, les plans d’action en faveur de ces espèces puis les mesures de prévention contre les espèces exotiques envahissantes et les plans de lutte contre celles-ci.

En séance publique au Sénat, le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable.

2. La position de votre commission

Sur les 12 000 espèces exotiques présentes en Europe, 10 % à 15 % posent des problèmes environnementaux, économiques ou sanitaires dont le coût est estimé à 12 milliards d’euros par an à l’échelle du continent. Il s’agit donc là d’un véritable enjeu qui ne manquera pas d’être aggravé par le réchauffement climatique qui permettra à de plus en plus d’espèces originaires de régions chaudes de s’installer et de se développer sur le continent européen. Il est donc temps de prendre les mesures nécessaires.

Le tableau ci-après constitue une « table de concordance » des futures dispositions législatives du code de l’environnement en matière de contrôle de l’introduction d’espèces. Il présente les liens avec le règlement (UE) n° 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes

TABLE DE CONCORDANCE

Articles
(code de l’environnement)

Objectif

Description de l’objectif

L. 411-5

Reprend à l’identique le 3° du I. de l’actuel L. 411-3 c. env. et le II. de ce même article

Encadrer l’introduction dans le milieu naturel de certaines espèces indigènes (notamment pour éviter des phénomènes de « pollution génétique » et d’éventuels conflits avec les activités humaines)

L. 411-6

Reprend à l’identique le 1° et le 2° du I. de l’actuel L. 411-3 c. env. et le II. de ce même article

Nécessaire pour intégrer en droit français les articles 6, 11 et 12 du règlement n° 1143/2014 du 22 octobre 2014

Encadrer l’introduction dans le milieu naturel des espèces exotiques envahissantes

L. 411-7

Intègre en droit français les articles 7 à 9 du règlement n° 1143/2014 du 22 octobre 2014

Interdire, sauf permis dérogatoires, les activités portant sur les espèces exotiques envahissantes « préoccupantes pour l’Union [européenne] » au sens du règlement

L. 411-8

Intègre en droit français l’article 15 du règlement n° 1143/2014 du 22 octobre 2014

Réaliser aux frontières des « contrôles officiels » pour éviter l’introduction dans l’UE de spécimens d’espèces exotiques envahissantes « préoccupantes pour l’Union [européenne] »

L. 411-9

Reprend à l’identique le III. de l’actuel L. 411-3 c. env.

Nécessaire pour intégrer en droit français les articles 17 à 20 du règlement n° 1143/2014 du 22 octobre 2014

Actions concrètes de lutte contre les spécimens d’espèces exotiques envahissantes déjà installés dans le milieu naturel.

L. 411-10

Intègre en droit français les articles 13, 14 et 16 du règlement n° 1143/2014 du 22 octobre 2014

Adoption par l’État de plans nationaux de lutte contre les espèces exotiques envahissantes.

L. 411-11

Renvoie à un décret en Conseil d’État

 

Source : Ministère de l’écologie, de l’énergie et des transports

De la même manière que votre rapporteure était favorable à l’habilitation à légiférer par ordonnance sur ce thème en première lecture à l’Assemblée nationale, elle est favorable à l’adoption des dispositions de cet article adoptées par le Sénat.

Toutefois, ces nouveaux articles du code de l’environnement ont rendu nécessaire l’adoption par votre commission d’un amendement technique de coordination destiné à corriger un certain nombre de références légistiques dans différents codes.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CD1068, deuxième rectification, de la rapporteure, et les amendements CD1017 et CD1011 du Gouvernement.

Mme la rapporteure. L’amendement CD1068, deuxième rectification, vise à réécrire l’article 59 bis AB qui, selon la division des lois, présentait quelques omissions.

Mme la secrétaire d’État. Le règlement n° 1143/2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes prévoit la mise en place de diverses mesures de contrôles officiels destinés à éviter l’introduction dans l’Union européenne d’espèces exotiques envahissantes.

L’amendement CD1068, deuxième rectification, précise les rôles respectifs des services de la direction générale de l’alimentation (DGAL) et de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) ainsi que le champ d’application de ces contrôles. En particulier, lorsqu’une importation est autorisée, le contrôle de l’identité des marchandises et leur contrôle physique reviennent à la DGAL, alors que la DGDDI s’assure de la présence du permis autorisant l’importation de ces marchandises.

Il vise également à faire respecter la limite des compétences de la DGDDI, notamment en ce qui concerne la mise en quarantaine, procédure pour laquelle la douane n’est pas compétente.

L’amendement CD1068, deuxième rectification, intègre toutes ces dispositions. Aussi, je retire mes amendements au bénéfice de celui de la rapporteure.

Les amendements CD1017 et CD1011 sont retirés.

M. Martial Saddier. Il est toujours regrettable de voir arriver un matin, en commission, un amendement de quatre pages qui vise à réécrire un article, d’autant que la même chose est déjà arrivée hier soir. Un amendement qui réécrit un article fait souvent tomber l’ensemble des amendements suivants, ce qui restreint considérablement le rôle des parlementaires et la discussion sur ledit article. Certes, je ne dirai pas qu’il ne nous est jamais arrivé de le faire, mais on peut regretter collectivement cette manière de travailler.

Tout en ne retirant pas ma confiance à Mme la rapporteure qui nous indique que la division des lois a voulu corriger quelques omissions, peut-être pourrait-elle prendre deux minutes pour nous donner des éclaircissements.

Mme la rapporteure. Voilà plus de dix jours, me semble-t-il, que cet amendement a été déposé sur le site Eloi. Vous avez donc eu dix jours pour le lire, ce qui devait être possible même dans vos montagnes… (Murmures et sourires)

Il est vrai que, parfois, nous manque celui de prendre connaissance d’amendements déposés à la dernière minute, mais ce n’est pas le cas de celui-ci. J’essaie de veiller à ce que nous disposions des amendements bien avant la réunion où nous devons les examiner.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. On me dit que cela fait cinq jours qu’il est sur le site Eloi. Aussi avez-vous eu plusieurs jours pour l’étudier, ce qui semble suffisant.

M. Martial Saddier. Vous ne pouvez pas me reprocher de ne pas avoir assisté à chaque minute des débats de la semaine dernière. Je suis présent depuis le début de l’examen du texte, à l’exception de lundi soir, la réunion ayant été décidée au dernier moment par la majorité et la présidence de la Commission. Alors que certains parlementaires de la région parisienne ont eu la chance de pouvoir rentrer chez eux ou de se rendre à des réunions dans leur circonscription dès le mercredi soir, d’autres, dont je suis, sont restés à Paris toute la soirée du mercredi, sans avoir rien à faire, et n’ont pu rejoindre leur département — ces montagnes qui me sont chères — que le jeudi après-midi. J’ai donc perdu une journée de travail. Comme d’autres, je n’ai pas pu assister à la séance de lundi soir, ce que je regrette.

Quoi qu’il en soit, je ne peux accepter la réponse que l’on vient de nous donner. Au nom du groupe Les Républicains, je condamne donc la pratique qui consiste à réécrire ainsi un article dans son entier. Ce n’est pas ainsi que l’on fait un travail de qualité.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je n’ai pas cru avoir le droit de convoquer au dernier moment une réunion pour le mercredi soir, de nombreux parlementaires ayant prévu de rentrer dans leur circonscription. J’ai donc indiqué clairement que j’en convoquerais une lundi soir, ce qui fut fait. Ainsi les parlementaires étaient-ils prévenus quelques jours à l’avance.

La Commission adopte l’amendement CD1068, deuxième rectification.

Puis elle adopte l’article 59 bis AB ainsi modifié.

Article 59 bis AC
(articles L. 424-1 et L. 424-10 du code de l’environnement)

Dérogations à l’interdiction de destructions d’œufs d’oiseaux

Cet article, introduit en séance publique au Sénat par un amendement gouvernemental, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Cet article vise à remplacer l’habilitation du Gouvernement à agir par ordonnance, prévue à l’article 59, par des dispositions législatives destinées à simplifier le régime dérogatoire prévu pour la destruction des œufs et des nids de certaines espèces protégées en vue d’en assurer le contrôle biologique et de prévenir les nuisances.

Dans le code de l’environnement trois articles traitent de la protection des oiseaux, de leurs œufs et de leurs nids.

Les articles L. 411-1 et L. 411-2 fondent au niveau législatif les mesures de protection établies par les articles R. 411-1 à R. 411-3 et l’arrêté ministériel du 29 octobre 2009 fixant la liste des espèces d’oiseaux protégées et les modalités de leur protection au niveau européen. Ces textes prévoient que peuvent être accordées des dérogations aux mesures de protection, à diverses fins dont la liste figure à l’article L. 411-2.

L’article L. 424-10 interdit de détruire, d’enlever ou d’endommager intentionnellement les œufs et les nids des oiseaux, de ramasser les œufs dans la nature et de les détenir. Cet article, issu de lois datant du XIXsiècle, n’ouvre aucune possibilité de déroger à cette interdiction.

Or, il se trouve que la jurisprudence pluri-centenaire relative au « gibier » considère que tous les oiseaux relèvent de cette notion (Cass. crim. 24 septembre 1847). En conséquence, l’article L. 424-10 du code de l’environnement qui se situe dans la section IV « commercialisation et transport du gibier » du chapitre IV « exercice de la chasse » du titre deux « chasse » du livre quatre « patrimoine naturel » du code de l’environnement est de fait en contradiction avec les articles L. 411-1 et L. 411-2 qui se situent au titre premier « protection du patrimoine naturel » du même livre quatre du code de l’environnement.

Au-delà de l’incohérence juridique, cette contradiction a pour effet concret de ne pas permettre l’octroi de dérogations aux interdictions établies par l’article L. 424-10 pour des espèces d’oiseaux figurant sur la liste des oiseaux dont la chasse est autorisée, établie par arrêté ministériel du 26 juin 1987 alors que des dérogations peuvent être accordées en application de l’article L. 411-2 pour des espèces d’oiseaux protégées figurant sur les listes établies par l’arrêté du 29 octobre 2009.

Les dérogations à l’interdiction de détruire, d’enlever ou d’endommager intentionnellement (par exemple en les rendant étanches à l’air et empêchant ainsi le développement des embryons sans provoquer la ponte de remplacement qui se produit lors de leur enlèvement) les œufs peuvent être justifiées, par exemple, pour des fins scientifiques, pour prévenir des dommages aux cultures, à l’élevage, aux pêcheries, à d’autres formes de propriétés, pour la protection de la faune et de la flore sauvages. Elles peuvent porter sur des espèces qui ne figurent pas obligatoirement sur les listes des espèces classées nuisibles.

Par exemple, dans le cas de la ville du Havre, il s’agit de permettre aux agents de la ville de détruire les nids de goélands qui prolifèrent dans des conditions d’hygiène déplorables. Cette disposition est prévue par ailleurs dans la directive européenne sur la conservation des oiseaux sauvages, dite directive 2009/147/CE dite « Oiseaux » du 30 novembre 2009, mais n’avait jamais été transposée en droit français.

L’article 59 bis AC du projet de loi, en modifiant l’article L. 424-10 du code de l’environnement, a pour objet de compléter cet article en ouvrant les mêmes possibilités que celles prévues à l’article L. 411-2 pour déroger aux interdictions ayant pour objet de protéger les espèces d’oiseaux.

En séance publique au Sénat, le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article assorti de trois modifications :

– un amendement de M. Jacques Krabal dont l’objectif est d’interdire sur une période de 90 jours entre le 1er avril et le 31 juillet la destruction mécanique de la jachère, des bordures de champs et de cours d’eau ainsi que de tout terrain à usage agricole sans enjeu économique, afin de prévenir la destruction ou de favoriser le repeuplement de toutes les espèces de gibier de faune et de flore sauvage. En effet, ces zones sont les réservoirs de biodiversité et concourent aussi à la trame verte. Ils ne doivent donc pas être broyés en période de reproduction des espèces ;

– deux amendements rédactionnels déposés par votre rapporteure.

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La Commission est saisie de l’amendement CD689 de M. Jacques Krabal.

M. Olivier Falorni. Cet amendement vise à assurer l’entretien pertinent des zones agricoles sans enjeu économique.

Les zones sans enjeu économique sont les réservoirs de biodiversité en zone de culture. Ils concourent aussi à la trame verte. Il convient d’éviter de les broyer en période de reproduction des espèces. Par exemple, la période de reproduction de la perdrix grise s’étend, dans l’Aisne, du 1er mai au 15 juillet.

Mme la rapporteure. Le terme de « zones agricoles sans enjeu économique » est très flou. Quel qu’il soit, un terrain peut toujours être revendu, acheté. Il a donc une valeur économique. Aussi, je vous demande de retirer cet amendement afin de le réécrire.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à préserver la biodiversité en interdisant le broyage des jachères, bords de cours d’eau et terrains agricoles sans enjeu économique pendant la période de plus grande vulnérabilité des espèces animales et végétales. Si je ne peux que partager l’objectif général, l’amendement vise l’article L. 424-1 du code de l’environnement qui est inadapté, car il ne traite que des espèces de gibier. En outre, il est pour partie redondant avec les dispositions actuelles de cet article.

Pour ces raisons, je vous propose de retirer cet amendement et de le réécrire en vous inspirant d’un arrêté qui avait été pris par Yves Cochet, en 2001, sur le même sujet.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD142 et CD143 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 59 bis AC modifié.

Article 59 bis A
(article L. 421-12 du code de l’environnement)

Régime des fédérations interdépartementales des chasseurs

Cet article, introduit au Sénat, n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Cet article, inséré en commission au Sénat, inscrit directement dans le code de l’environnement le dispositif relatif aux fédérations interdépartementales de chasseurs qui était visé par l’habilitation prévue au 7° de l’article 59.

La rédaction du présent article a été enrichie par l’adoption d’un amendement présenté par Mme Sophie Primas au nom de la commission des affaires économiques.

En effet, la rédaction actuelle du code de l’environnement a figé le dispositif de fusion avec la création de deux fédérations interdépartementales en Île-de-France : la Fédération interdépartementale des chasseurs de l’Essonne, du Val d’Oise et des Yvelines (FICEVY) et la Fédération interdépartementale des chasseurs de Paris, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne (FICHSV).

L’amendement de Mme Primas modifie la rédaction de l’article L. 421-12 de ce code, en supprimant la référence au régime spécifique des fédérations interdépartementales de chasseurs de la région parisienne et en indiquant que des fédérations interdépartementales des chasseurs peuvent être créées à l’initiative de fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs, et par accord unanime entre elles.

Si elle entre in fine en vigueur, cette disposition sera utilisée dans un premier temps par les deux fédérations interdépartementales de chasseurs existant en Île-de-France qui souhaitent fusionner pour devenir la Fédération interdépartementale d’Île-de-France « FICIF ».

Les fédérations départementales existantes par ailleurs pourraient également mettre en œuvre ce dispositif à l’avenir, pour faire face en particulier à la baisse des effectifs des chasseurs, rationaliser leurs budgets et mutualiser leurs moyens.

Le dispositif de fonctionnement des fédérations interdépartementales créées par fusion de fédérations interdépartementales préexistantes restera identique à celui existant.

2. La position de votre commission

Bien que n’ayant pas été examiné par l’Assemblée en première lecture, cet article est très proche des dispositions pour lesquelles avait été adoptée une autorisation à légiférer par ordonnance dans le cadre de l’article 59. C’est la raison pour laquelle votre commission l’a adopté sans modification.

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La Commission adopte l’article 59 bis A sans modification.

Article 59 bis B
(article L. 422-4 du code de l’environnement)

Maintien des associations de chasse en cas de fusion de communes

Introduit au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Cet article, adopté en séance publique sur un amendement de M. Mézard, a reçu un avis favorable à la fois du rapporteur et du Gouvernement.

Aujourd’hui, une seule association communale de chasse est autorisée par commune. Le présent article vise à autoriser le maintien d’une association de chasse par commune déléguée en cas de création d’une commune nouvelle par fusion. En effet, si l’on applique strictement la loi dans sa rédaction actuelle, les communes qui auront fusionné, devenues communes déléguées, ne pourront pas conserver leur association de chasse. Or les problèmes de chasse peuvent faire obstacle à une fusion, parce que les gens sont attachés à leur territoire, à leurs habitudes et à leur société de chasse.

Sans porter préjudice à personne, puisque le nombre de chasseurs comme les territoires chassés resteront inchangés, cette mesure évitera que les règles relatives aux associations communales de chasse ne freinent la constitution de communes nouvelles, à laquelle sont attachés le Gouvernement et, de plus en plus, l’ensemble des Français.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article assorti d’un amendement qui réécrit le second alinéa pour permettre l’association ou la fusion d’associations communales de chasse agréées avec d’autres structures cynégétiques.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CD264 de M. Dino Cinieri, CD281 de M. Jean-Louis Bricout, CD592 de M. Philippe Plisson, CD845 de M. Gilles Lurton, CD859 de M. Stéphane Demilly et CD955 de Mme Karine Berger, et les amendements CD644 de Mme Karine Berger et CD908 de M. David Douillet.

M. Dino Cinieri. Il importe de concilier la réforme territoriale et la fusion des communes qu’elle implique avec le maintien des associations communales de chasse agréées (ACCA).

La réglementation en vigueur a des effets destructeurs pour les ACCA dès lors que le 22° de l’article R. 422-63 du code de l’environnement entraîne la dissolution d’une ACCA lorsqu’elle est unique au sein d’un groupe de communes qui fusionnent dans un département où les ACCA ne sont pas obligatoires. C’est pourquoi il convient de laisser aux ACCA une part de liberté pour procéder à la fusion avec d’autres ACCA ou ne pas être entraînées dans la disparition en cas de fusion de communes.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement CD281 est défendu.

M. Philippe Plisson. Je suis rapporteur de la commission de coopération communale en Gironde, en application de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), et je peux vous dire que c’est un sacré bazar ! À vouloir ajouter l’enjeu des ACCA à des problématiques extrêmement complexes, on risque de mettre le feu à tout un département. Permettre aux ACCA qui sont dans un territoire fusionné de continuer à exister et d’avoir un temps de réflexion et de latence pour pouvoir s’organiser un jour différemment me semble frappé au coin du bon sens.

M. Stéphane Demilly. Je partage l’avis de M. Plisson : il est essentiel de laisser aux ACCA une part de liberté pour fusionner avec d’autres ACCA à la suite des fusions de communes permises par la réforme territoriale. Elles constituent en effet un élément déterminant de l’organisation de la chasse dans notre pays et doivent pouvoir remplir pleinement leurs missions.

M. Gilles Lurton. Dans mon département, les communes de Guipry et de Messac viennent de fusionner. L’une hébergeait une ACCA, pas l’autre. En l’état actuel des textes, les ACCA risquent de totalement disparaître du territoire de ces communes.

Mme Karine Berger. La loi NOTRe a introduit la possibilité de fusionner des petites communes, ce qui constitue une très bonne mesure. Le département des Hautes-Alpes a été pionnier, puisque c’est celui dans lequel ont été lancées le plus grand nombre de fusions. Maintenant que certaines ont eu lieu, la préfecture souhaite voir fusionner les ACCA, parce que la loi Verdeille du 10 juillet 1964 prévoit une seule ACCA par commune. Cette disposition freine la bonne volonté d’un certain nombre d’autres petites communes.

Sans perturber les mécanismes de chasse ni affaiblir la biodiversité, il s’agit simplement de donner la possibilité aux ACCA de suivre le mouvement de fusion, à leur rythme et selon leur volonté, afin que la question de la gestion de la chasse ne vienne pas perturber le vrai sujet du rapprochement des petites communes et du renforcement des collectivités locales.

Par les amendements CD955 et CD644, il vous est proposé, en cas de fusion de communes, de ne pas fusionner immédiatement les ACCA si ces dernières ne le souhaitent pas. L’amendement CD644 a pour avantage de prévoir une évaluation de la mesure dans dix-huit mois, en demandant au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur cette question, ce qui permettrait de vérifier que les objectifs de ces amendements ont été atteints.

M. David Douillet. Il ne s’agit pas de déséquilibrer ce qui marche : laissons aux gens la liberté de décider. Dans beaucoup d’endroits, on aura beau faire, les fusions seront impossibles. Il existe parfois des litiges entre ACCA dont les motifs ont été oubliés depuis longtemps, mais qui perdurent néanmoins.

Dans certains territoires limitrophes, les modes de gestion de la biodiversité sont totalement différents. Comment pourrait-on les fusionner ? Tout cela est ubuesque.

M. Jean-Louis Bricout. Le dispositif de fusion de communes doit être encouragé, ne serait-ce que dans un souci d’économie. Mais, souvent, des petits détails tels que celui-ci viennent contrarier ces fusions. Laissons aux communes le temps de respirer, et laissons ces associations vivre simplement et fusionner si c’est nécessaire et qu’elles le souhaitent.

M. Jean-Pierre Vigier. Les fusions de communes et celles d’ACCA sont deux problématiques différentes. Laissons fusionner les communes qui le souhaitent, laissons les ACCA libres de le faire, sinon ce sera la guerre dans certains territoires. Ce sont deux sujets différents, laissons les acteurs de terrain décider localement.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. En toute honnêteté, je n’ai pas perçu l’intérêt de la réécriture de l’article 59 bis B, dont la rédaction actuelle est claire et brève : « En cas de fusion de communes, les associations communales de chasse agréées préalablement constituées peuvent être maintenues. »

Je ne vois donc pas l’intérêt de sa réécriture, mais, si vous avez le sentiment que vos amendements peuvent apporter quelque chose, je rends un avis de sagesse.

M. Jean-Yves Caullet. La rédaction actuelle est statique, alors que celle proposée indique qu’il existe une possibilité de fusionner et qu’il n’est pas exclu de le faire.

M. Gérard Menuel. Ces amendements sont utiles, car ils clarifient la loi Verdeille.

La Commission adopte les amendements CD264, CD281, CD592, CD845, CD859 et CD955.

En conséquence, les amendements CD644 et CD908 tombent.

La Commission adopte l’article 59 bis B ainsi modifié.

Article 59 bis
(articles L. 412-1, L. 415-3, L. 624-2 et L. 635-2 du code de l’environnement)

Simplification des procédures nécessaires pour la protection de certaines espèces

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article, inséré en commission à l’Assemblée nationale, simplifie les procédures nécessaires pour la protection de certaines espèces. Il prévoit les dispositions principales suivantes :

– la possibilité de soumettre à autorisation individuelle administrative le ramassage, la récolte ou la capture d’espèces comme la salicorne ou la grenouille ;

– un régime de déclaration se substitue au régime d’autorisation aujourd’hui requis pour des activités présentant peu d’effets sur l’état de conservation des espèces dites CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) et un régime simplifié en métropole ainsi que pour la Polynésie Française et Wallis-et-Futuna.

À l’origine, ces dispositions devaient figurer dans l’article 59 du présent projet qui prévoyait d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Déjà, dès le débat en commission, votre rapporteure avait souhaité extraire ces dispositions du champ des ordonnances pour les adopter par voie législative.

La suppression par le Sénat de l’article 59 conforte dans son choix la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté trois amendements dont deux rédactionnels et un de précision.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans le modifier.

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* *

La Commission adopte l’article 59 bis sans modification.

Article 59 ter
(articles L. 413-6, L. 413-7 et L. 413-8 [nouveaux] du code de l’environnement, article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime)

Encadrement de la détention d’espèces non domestiques protégées

Introduit au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. Les dispositions adoptées par le Sénat

Les articles L. 413-1 à L. 413-5 du code de l’environnement, regroupés au chapitre III du titre Ier du livre IV du code de l’environnement, définissent les règles relatives à la détention d’animaux en captivité au sein d’établissements.

Pour les particuliers, le dernier alinéa de l’article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime autorise l’extension, aux espèces animales non domestiques protégées au titre des articles L. 411-1 et L. 412-1 du code de l’environnement, du dispositif d’identification applicable aux chiens et aux chats prévu par cet article.

L’article L. 212-10 prévoit en effet que, préalablement à leur cession, à titre gratuit ou onéreux, les chiens et les chats doivent être identifiés par un procédé agréé par le ministre chargé de l’agriculture et mis en œuvre par des personnes qu’il habilite à cet effet. Il en est de même, en dehors de toute cession, pour les chiens nés après le 6 janvier 1999 âgés de plus de quatre mois et pour les chats de plus de sept mois nés après le 1er janvier 2012. L’identification est à la charge du cédant.

L’article D. 212-66 du même code dispose que « les indications permettant d’identifier les animaux et de connaître le nom et l’adresse de leur propriétaire sont portées à un fichier national ».

Afin d’encadrer davantage la détention en captivité d’espèces non domestiques protégées, la commission du développement durable du Sénat a souhaité créer le présent article additionnel.

Le I de cet article divise le chapitre III du titre Ier du livre IV du code de l’environnement en deux sections : la première section, qui regroupe les articles L. 413-1 à L. 413-5, récupère l’ancien nom du chapitre, « Établissements détenant des animaux d’espèces non domestiques », tandis que la seconde, intitulée « Prescriptions générales pour la détention en captivité d’animaux d’espèces non domestiques », comporte trois articles nouveaux, les articles L. 413-6 à L. 413-8.

L’article L. 413-6 dispose que les spécimens de mammifères, d’oiseaux, de reptiles, d’amphibiens d’espèces non domestiques soumis à une protection particulière, c’est-à-dire qui figurent sur les listes fixées en application des articles L. 411-1, L. 411-2 et L. 412-1, détenus en captivité doivent être identifiés individuellement dans les conditions précisées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture.

Les données relatives à l’identification de ces animaux, le nom et l’adresse de leurs propriétaires successifs et la mention de l’exécution des obligations administratives auxquelles ces derniers sont astreints pourront être enregistrées dans un fichier national et faire l’objet d’un traitement automatisé dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Ce dispositif, très encadré, fera l’objet d’un décret d’application pris en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Le décret précisera les conditions dans lesquelles la collecte des données et leur traitement peuvent être confiés à des personnes agréées par les ministres chargés de l’écologie et de l’agriculture, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des données enregistrées et les catégories de destinataires de ces données.

L’article L. 413-7 conditionne toute cession d’un spécimen vivant non domestique, qu’elle soit gratuite ou onéreuse, à la livraison à l’acquéreur d’une attestation de cession (I) et à la vérification, par le cédant, que le nouveau détenteur dispose, le cas échéant, des autorisations administratives requises pour la détention du spécimen concerné (II). L’article impose également (III), que toute publication d’offre de cession d’un spécimen mentionné à l’article L. 413-6 doit mentionner le numéro d’identification de l’animal.

Enfin, l’article L. 413-8 oblige le cédant à remettre à l’acquéreur un document d’information sur les caractéristiques, les besoins et les conditions d’entretien de l’animal, lors de sa livraison.

En conséquence, le II du présent article additionnel supprime le dernier alinéa de l’article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime.

Les sénateurs ont considéré que ce dispositif devrait permettre aux pouvoirs publics de disposer d’un outil plus précis, en termes statistiques notamment, pour lutter contre les trafics des espèces en question, mais aussi la propagation des maladies. Par ailleurs, en responsabilisant les détenteurs de ces spécimens, le Sénat espère également contribuer à la moralisation des échanges de ces animaux.

Cet article n’a pas été amendé en séance publique.

2. La position de votre commission

Votre rapporteure considère que la création du fichier national d’identification des animaux de la faune sauvage captive constitue un progrès qui permettra non seulement de bénéficier d’un meilleur suivi statistique, administratif et sanitaire des animaux, mais aussi d’identifier les propriétaires successifs en cas de cession à titre gratuit ou onéreux.

Les pouvoirs publics disposeront d’un outil plus précis, propre à lutter efficacement contre les vols, trafics et fraudes de ces espèces et donc à maîtriser les flux de ces animaux sur le territoire national. Les contrôles par les services seront facilités et les mouvements de ces espèces seront quantifiés par des statistiques fiables.

Conformément aux souhaits de votre rapporteure, votre commission a adopté cet article seulement amendé par quatre modifications rédactionnelles.

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* *

La Commission adopte successivement les quatre amendements rédactionnels CD144 à CD 147 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CD489 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à interdire les cirques avec animaux sauvages. Il n’est pas proposé de les interdire directement, mais d’aménager une phase de transition durant laquelle les responsables de cirque détenant des animaux pourront poursuivre les représentations.

Les animaux sauvages tenus en captivité et utilisés dans les cirques présentent quasi systématiquement des déviances comportementales et connaissent un taux de mortalité élevé. La cause est à rechercher dans des conditions de captivité totalement inadaptées à leurs besoins physiologiques.

L’exhibition des animaux sauvages dans les cirques ne s’est faite que près d’un siècle après la création de ce type de spectacle, elle n’en est donc pas indissociable. Nous connaissons de nombreux cirques qui ne présentent pas d’animaux sauvages, mais qui utilisent des animaux domestiques ou mettent l’accent sur les trapézistes, les clowns ou les funambules. Cette mesure ne remet donc pas en cause la tradition circassienne.

Plusieurs pays européens ont interdit aux cirques de détenir des animaux capturés dans la nature : c’est le cas de la Belgique, de l’Estonie, de la Hongrie, de la Norvège et de la Pologne. D’autres ont interdit la détention d’animaux de plusieurs espèces sauvages : l’Autriche, Malte, la République tchèque, la Slovaquie et la Suède, notamment.

Aujourd’hui, il est difficile de recenser le nombre exact d’animaux possédés par les cirques, car certains sont illégaux et d’autres changent régulièrement de nom ou de direction. On peut néanmoins connaître les différents types d’animaux exploités : girafes, félins, camélidés, bovidés, ratites, hippopotames — et la liste est encore longue. Ces animaux sont sauvages, leurs besoins naturels ne correspondent donc en aucun cas à ceux qui leur sont imposés par les cirques.

Dans cette loi sur la biodiversité, la question des animaux sauvages et de leur protection se pose, et il nous semble important d’insérer ce dispositif qui permettra à terme à ces animaux sauvages de ne plus être tenus en captivité dans les cirques.

Mme la rapporteure. Cet amendement est bien connu du groupe d’études sur la protection des animaux. L’interdiction d’acquérir des animaux sauvages à titre onéreux ou gratuit me semble une bonne chose, sachant que cela n’empêchera pas la présence d’animaux dans les cirques, car beaucoup d’entre eux se reproduisent en captivité.

Nous pouvons donc demander aux propriétaires de cirque de ne plus acquérir d’animaux sauvages sans que cela n’interdise de présenter des animaux sauvages dans les cirques.

Sur le fond, je pense que les arts circassiens sont bien plus intéressants que la présentation d’animaux qui, cela a été reconnu, présentent des signes de déviance particuliers lorsqu’ils sont tenus en captivité. De plus, leurs conditions de captivité sont parfois complètement inadaptées à leurs besoins.

Je vous propose donc d’adopter cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Certains pays — tels que Chypre, Malte, la Grèce ou la Bolivie — ont déjà interdit la présence d’animaux dans les cirques. D’autres — l’Autriche, la Bosnie, la Croatie, la Slovénie et neuf autres pays hors d’Europe — ont interdit les animaux sauvages. Vingt-trois autres pays ont mis en place des restrictions.

En adoptant cet amendement, la France utiliserait une voie originale vers l’abandon progressif de la présence d’animaux non domestiques. D’ailleurs, de nombreux cirques jouissant d’une grande notoriété, comme le cirque du Soleil, le cirque Plume ou le cirque Archaos, ne présentent pas d’animaux sauvages.

L’amendement ne prévoit que l’interdiction d’acquérir de nouveaux animaux. Les cirques auront donc le temps d’effectuer une mutation de modèle économique. Cette mesure constituerait un bon signal, qu’il faudrait néanmoins préparer avec les acteurs du monde du cirque. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de votre commission.

M. Jean-Yves Caullet. Cette mesure est habile, car elle ne met pas en péril un modèle économique, même s’il est précaire et discutable. C’est une extinction progressive qui est prévue. Je me demande simplement s’il ne serait pas prudent, d’ici à la séance, de vérifier ce que signifie « non domestique ». Dans l’exposé sommaire, notre collègue mentionne les chameaux et les dromadaires, qui sont domestiqués dans bien des parties du monde, ainsi que les émeus et les autruches, qui sont des animaux d’élevage dans certains pays. Ne serait-il pas judicieux de prévoir le renvoi à un décret pour définir précisément la liste des espèces concernées ? Je voterai cet amendement, mais j’appelle votre attention sur cette question de terminologie.

Par ailleurs, Mme la rapporteure a fait allusion aux animaux d’espèces sauvages nés en captivité. Quel sera leur sort, dans la mesure où ils ne peuvent être remis en liberté ?

M. Jean-Marie Sermier. Je ne conteste pas les objectifs de l’amendement, et je confirme que certains cirques qui n’ont pas d’animaux sont très intéressants, à l’instar du cirque Plume qui se trouve sur ma circonscription. Cependant, cette mesure n’est pas réellement liée à la biodiversité, et la loi sur la biodiversité ne traite pas des problèmes de ces quelques animaux présents dans les cirques. Surtout, nous n’avons aucune étude d’impact. Avez-vous auditionné les représentants de la profession ? Pourront-ils adapter leur modèle économique dans les années à venir ? Il semble difficile de prendre le risque de mettre à mal une profession au détour d’un amendement, même si elle doit s’adapter avec le temps.

M. Arnaud Leroy. Je comprends la préoccupation qui inspire l’amendement, mais je m’interroge sur la méthode, notamment en ce qui concerne la consultation des professionnels. Je m’en remets à Mme Laurence Abeille pour savoir ce qui a été fait.

Je suis aussi d’accord avec Jean-Yves Caullet, et j’ajouterai à ses préoccupations celle des zoos, qui se voient parfois assigner des objectifs pédagogiques. Je voudrais éviter que le débat dérive sur cette question : nous constatons une évolution dans les zoos, il faut donc clairement affirmer qu’ils ne sont pas concernés par cette mesure.

Les cirques eux aussi évoluent, mais une concertation d’ici à la séance publique permettrait de nous procurer des éléments chiffrés et d’aménager d’éventuelles exemptions pour certaines grandes compagnies.

M. Guy Bailliart. L’expression « non domestique » ne concerne guère que les fauves, la plupart des autres animaux utilisés dans les cirques étant domestiqués dans une partie ou l’autre du monde.

Par ailleurs, pourquoi les parcs d’attractions, qui utilisent les animaux exactement dans les mêmes conditions, seraient-ils exclus du champ d’application de la mesure ? Le critère à prendre en compte n’est-il pas la qualité du traitement des animaux plutôt que l’endroit où ils sont ? (Approbations)

Mme Florence Delaunay. Je soutiens l’amendement, et j’aimerais appeler votre attention sur sa rédaction, qui concerne les responsables d’établissements « itinérants ». Il existe une grande différence entre les zoos, où les animaux sont traités avec respect et confort, et les cirques itinérants qui transportent des animaux sauvages, comme des girafes. Imaginez quelles sont les conditions de transport d’une girafe sur les petites routes départementales des Landes ! (Sourires)

Les animaux sauvages ne participent pas au spectacle des cirques itinérants et ne sont employés que pour attirer les spectateurs en figurant dans la ménagerie. Cet amendement n’affectera donc pas le spectacle donné par les cirques.

M. Jean-Pierre Vigier. Il s’agit d’un sujet important, à même de mettre à mal l’activité des cirques : la moindre des choses serait donc de connaître la position des professionnels de ces métiers pour étudier quelle transition peut être envisagée. Cet amendement me semble trop rapide.

M. Stéphane Demilly. L’équilibre économique des cirques est déjà extrêmement précaire : est-il nécessaire d’en rajouter ? J’ai l’impression que nous nous égarons. Cette loi va devenir un vrai fourre-tout, et nous finirons par discuter d’un amendement sur le diamètre des aquariums pour les poissons rouges ! La présence d’animaux dans les cirques est une vieille tradition, et je trouve dommage que l’on aborde cette question dans la loi sur la biodiversité.

M. Florent Boudié. Si cet amendement s’applique aux établissements itinérants, qu’en est-il des cirques fixes, tel que le Cirque d’hiver, ou d’autres établissements qui utilisent des animaux sauvages, comme le parc du Puy du Fou ? Le champ d’application de cet amendement me semble trop imprécis.

Mme la rapporteure. Certains prétendent que cette mesure n’a pas sa place dans la loi sur la biodiversité, alors qu’il s’agit d’animaux sauvages, tandis que personne n’hésite à parler longuement de la chasse et des ACCA dans cette même loi... (Murmures)

Je ne doute pas que, si je demandais à chacun de vous, individuellement, s’il pense que le traitement réservé dans certains cas aux animaux est bon, il répondrait qu’il ne l’est pas et qu’il faut faire quelque chose. Mais, dès que nous sommes dans un contexte collectif, les bonnes volontés s’égaillent.

L’objectif de cet amendement est de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’acquisitions, gratuitement ou à titre onéreux, pour les cirques itinérants. Mme Delaunay a parfaitement décrit les conditions dans lesquelles sont tenus les animaux dans ces cirques itinérants, et les mauvaises conditions de transport qu’ils connaissent. Même si les propriétaires voulaient faire des efforts, ce ne serait pas possible : on ne doit tout simplement pas transporter ces animaux dans de telles conditions.

Par ailleurs, le groupe d’études sur la protection des animaux a travaillé, il y a quelques années, avec les organisateurs de cirque. Certains, soucieux de défendre leur modèle économique, vous diront que tout est pour le mieux. Mais il n’est pas ici question de porter atteinte à ce modèle économique : ils pourront continuer leurs spectacles et une grande partie des espèces d’animaux sauvages se reproduit en captivité. Le fait d’interdire l’acquisition à titre onéreux ou gratuit ne va donc pas transformer les cirques dès demain. Mais cela nous permettra peut-être de réfléchir ensemble à la question.

À force de répéter que ce n’est pas le moment ni le texte pour prendre ces mesures, nous ne ferons jamais rien et tout le monde se plaindra dans son coin du traitement que subissent certains animaux, sans jamais rien faire collectivement pour l’empêcher.

M. Jean-Marie Sermier. Nous partageons l’ambition de la rapporteure sur la question de l’acquisition des animaux sauvages. Mais cet amendement est peut-être mal rédigé et n’a peut-être pas sa place dans ce texte. Vous dites avoir travaillé avec les professionnels concernés il y a plusieurs années : ce n’était donc pas dans le contexte de ce projet de loi. Nous avons adopté précédemment un amendement portant sur le contrôle des douanes, et vous évoquez le problème des transports, qui met en jeu une autre législation. Nous sommes donc prêts à travailler, mais retirez cet amendement pour qu’un projet plus sérieux puisse être mis en place à brève échéance.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. L’amendement CD489 est-il maintenu ?

La Commission rejette l’amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Puisque vous voulez connaître les scores : neuf pour, quinze contre.

La Commission adopte ensuite l’article 59 ter ainsi modifié.

Article 59 quater
(article L. 413-1 du code de l’environnement)

Établissements détenant des espèces invertébrées

Introduit au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Le Sénat a adopté en séance publique un amendement créant un article additionnel qui vise à exonérer les établissements détenant des espèces d’invertébrés, sauf lorsque ces établissements procèdent à la présentation au public de leurs spécimens, de l’application du chapitre III du titre Ier du livre IV du code de l’environnement.

Ce chapitre, qui compte cinq articles, fixe le régime des établissements détenant des animaux d’espèces non domestiques. Il prévoit deux contraintes principales :

– les établissements d’élevage d’animaux d’espèces non domestiques, doivent être titulaires d’un certificat de capacité pour l’entretien de ces animaux ;

– leur ouverture doit faire l’objet d’une autorisation administrative.

Le premier des articles de ce chapitre, l’article L. 413-1, prévoit déjà un certain nombre d’exemptions. Ainsi, ces dispositions ne s’appliquent pas aux produits de la pêche maritime et de la conchyliculture destinés à la consommation ni aux établissements de pêche et aux instituts chargés de leur contrôle

La catégorie des invertébrés – animaux dépourvus de squelette – est particulièrement vaste puisque, sur 1,7 à 1,8 million d’espèces recensées sur terre, on trouve environ 990 000 animaux invertébrés, 360 000 plantes et micro-organismes, et seulement 45 000 types d’animaux vertébrés. Outre les nombreuses classes d’insectes, araignées et autres mollusques, cette catégorie inclut tous les vers de terre.

L’application stricte de l’actuelle législation conduirait donc tout établissement élevant des lombrics ou toute sorte de vers destinés à produire du compost de déchets à être considéré comme élevant des animaux et à avoir besoin d’une autorisation administrative et d’un certificat de capacité pour « élever » ces animaux.

Avec beaucoup de sagesse, le texte adopté par le Sénat dispense donc ces établissements de toute formalité administrative. Il s’agit donc bien « d’opérer une simplification » ainsi que l’a déclaré le rapporteur Jérôme Bignon en séance.

Cette simplification concernera également les établissements élevant, par exemple, les escargots destinés à l’alimentation humaine ou des insectes destinés à produire des protéines en vue de l’alimentation animale. Cependant, dans ces cas, le ministère de l’agriculture restera compétent pour contrôler la qualité sanitaire et le caractère « consommable » des produits issus de ces élevages.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans l’amender.

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La Commission adopte l’article 59 quater sans modification.

Article 59 quinquies (nouveau)
(ordonnance n° 2015–1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme)

Ratification de l’ordonnance portant nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme

Votre commission a adopté un amendement créant un article additionnel portant ratification de l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 visant à procéder à une nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme.

La ratification de cette ordonnance avait été adoptée par le Sénat en première lecture à l’article 36 octies, mais avait été placée par mégarde dans la section « vergers ». À la demande de la rapporteure, votre commission a donc supprimé l’article 36 octies pour le recréer après l’article 59 quater, dans le chapitre consacré aux ordonnances et aux dispositions diverses (cf. supra l’article 36 octies pour l’analyse des dispositions).

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La Commission examine l’amendement CD1062 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de déplacer dans le chapitre adéquat un article de ratification d’une ordonnance relative à l’urbanisme que le Sénat a introduit par mégarde dans la section « Vergers ».

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 59 quater

Elle examine ensuite l’amendement CD1065 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le Sénat a voté en première lecture la ratification de l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme.

Cette ordonnance, prise en application de l’article 171 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a procédé à une nouvelle rédaction, à droit constant, des dispositions législatives du livre Ier du code de l’urbanisme, afin d’en clarifier la rédaction et le plan.

Le présent amendement vise à la rectification d’une erreur matérielle née de cet exercice de recodification. Il permet ainsi de réintroduire dans le code de l’urbanisme une disposition dont l’entrée en vigueur s’est réalisée concomitamment aux dernières étapes de la recodification. En effet, l’ordonnance de recodification du 23 septembre 2015 n’a pas pris en compte la modification de l’ancien article L. 123-13 du code de l’urbanisme qui a été complété par un 4°, issu d’une mesure de la loi ALUR, dont l’entrée en vigueur avait été différée sur ce point particulier au 1er juillet 2015.

Cet article prévoyait : « Le plan local d’urbanisme est révisé lorsque l’établissement public de coopération intercommunale ou la commune décide : 1° Soit de changer les orientations définies par le projet d’aménagement et de développement durables ; 2° Soit de réduire un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière ; 3° Soit de réduire une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ou d’une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance ; 4° Soit d’ouvrir à l’urbanisation une zone à urbaniser qui, dans les neuf ans suivant sa création, n’a pas été ouverte à l’urbanisation ou n’a pas fait l’objet d’acquisitions foncières significatives de la part de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent, directement ou par l’intermédiaire d’un opérateur foncier ».

Il convient par conséquent d’ajouter ce 4° à l’article L. 153-31 du code de l’urbanisme afin de corriger cette erreur matérielle et de rendre effectivement applicable cette mesure. Ce dispositif prévu par la loi ALUR est essentiel à la lutte contre l’étalement urbain et, depuis, il n’a aucunement été remis en cause par le législateur.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à corriger une erreur matérielle en réintroduisant une disposition importante de lutte contre l’étalement urbain, qui figurait dans la loi ALUR et qui a été malencontreusement supprimée à l’occasion de la recodification du livre Ier du code de l’urbanisme. Avis favorable.

M. Martial Saddier. À titre personnel, je ne crois pas que cette suppression ait été si malencontreuse.

D’autre part, la référence que font Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d’État au code de l’urbanisme et à la loi ALUR atteste que cet amendement n’a nullement sa place dans cette loi sur la biodiversité. Il s’agit en effet d’un problème d’urbanisme ; or notre rôle n’est pas ici de remédier aux effets de tel ou tel choix fait dans la loi ALUR. Cet amendement est donc un cavalier législatif — je dis ceci pour le compte rendu et, le cas échéant, pour nourrir le recours que nous pourrions déposer devant le Conseil constitutionnel. (Murmures)

Enfin et surtout, il est vrai, Madame la rapporteure, que la consommation de l’espace a été excessive dans le passé, mais les mesures législatives de contrôle de cette consommation qu’ont empilées la gauche et la droite depuis dix ans interdisent de prétendre que l’on consomme l’espace aujourd’hui comme il y a trente ans.

Il suffit de participer de près ou de loin à l’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale (SCOT), à la révision d’un plan local d’urbanisme (PLU) ou à l’élaboration d’un plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) pour constater que les choses ont bien changé ! Songez que la définition d’une zone d’activité économique par un SCOT ou un PLUI prend quatre ou cinq ans, au prix d’un débat et d’arbitrages très difficiles entre le monde agricole, les élus et les chambres consulaires : faut-il y ajouter des verrous législatifs supplémentaires imposant telle et telle contrainte, faute de quoi la zone en question n’existera que sur le papier ? Ajoutons-y les délais de recours : en clair, cet amendement aboutira à geler complètement le développement économique de notre pays.

Nous y sommes donc plus que farouchement opposés.

Mme la secrétaire d’État. Nous n’allons pas aujourd’hui refaire la loi ALUR. Il s’agit en l’occurrence de l’une de ses dispositions qui a malencontreusement été supprimée suite à une recodification. En rejetant cet amendement, vous refuseriez l’une des mesures importantes de ladite loi en faveur de la reconquête de la biodiversité et contre l’artificialisation des sols. Votre argumentation me semble donc non seulement exagérée, mais hors de notre sujet.

(Contestations sur le vote)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous recommençons le vote.

Il y a égalité de voix, donc l’amendement n’est pas adopté ! J’espère que vous ne doutez pas de mon honnêteté !

La Commission rejette l’amendement.

Article 60
(articles L. 331-10, L. 427-6, L. 427-8, L. 33-10-4, L. 422-2, L. 422-15, L. 424-10, L. 427-8, L. 427-10, L. 423-16, L. 424-15, L. 427-11, L. 428-14, L. 428-15 du code de l’environnement ; article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales)

Substitution de la notion d’« espèce déprédatrice » à celle d’« espèce nuisible et malfaisante »

Dans sa version originelle, cet article habilitait le Gouvernement à procéder par ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, pour remplacer, dans le code de l’environnement et le code général des collectivités territoriales, la notion d’« espèce nuisible et malfaisante » par celle d’« espèce déprédatrice » et pour préciser les dispositions relatives à la destruction des spécimens de ces espèces.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a accédé à la demande du Gouvernement et l’a habilité à légiférer par ordonnance. Elle a toutefois amendé l’article.

En effet, à l’initiative de sa rapporteure, votre commission a substitué, dans le champ de l’habilitation, les termes d’« espèce susceptible d’occasionner des dégâts » à ceux d’« espèce déprédatrice ». En effet, cette dernière expression pourrait laisser croire que ces espèces occasionnent par nature des dégâts, alors que la notion d’« espèce susceptible d’occasionner des dégâts » prend mieux en compte la dimension aléatoire et comportementale qui peut justifier, au cas par cas et de manière dûment circonstanciée, la régulation de certaines espèces.

La nouvelle terminologie adoptée par l’Assemblée nationale pose la vraie question : celle des dégâts occasionnés par ces animaux et non celle de leur simple existence dans l’écosystème.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du développement durable du Sénat a adopté deux amendements identiques présentés par Mme Sophie Primas, au nom de la commission des affaires économiques, et de M. Jean-Noël Cardoux, pour inscrire directement dans la loi le dispositif envisagé par habilitation, et lever toute incertitude sur le contenu de l’ordonnance, de crainte que ne soient remises en cause les procédures existantes.

Les sénateurs ont tenu compte du changement de vocabulaire souhaité par l’Assemblée nationale en remplaçant les termes d’« animaux nuisibles », soit par ceux d’« animaux susceptibles d’occasionner des dégâts », lorsqu’il est fait référence aux animaux identifiés sur des listes suivant la procédure prévue à l’article L. 427-8 du code de l’environnement, soit par ceux d’« espèces non domestiques », lorsqu’il est fait référence aux animaux nuisibles au sens large, pouvant inclure des espèces protégées ou non, s’agissant par exemple d’animaux abattus dans le cadre d’opérations de régulation administrative. Outre le code de l’environnement et le code général des collectivités territoriales, un article du code de procédure pénale et un article du code des assurances sont modifiés dans le même objectif.

Par ailleurs, l’article adopté par le Sénat modifie les articles L. 427-6 du code de l’environnement et L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales dans le but de préciser les dispositions relatives à la destruction des spécimens de ces espèces, comme le prévoyait l’habilitation.

À l’article L. 427-6, le présent article remplace les termes de « chasses et battues » par ceux, plus larges, d’« opérations de destruction » et précise que celles-ci « peuvent consister en des chasses, des battues générales ou particulières et des opérations de piégeage ».

L’article énumère également les cas précis dans lesquels ces opérations de destruction peuvent être organisées, afin de prévenir le recours abusif à ce dispositif et d’en renforcer la compréhension auprès des citoyens. Ces opérations devront ainsi répondre à au moins l’un des motifs suivants :

1° Dans l’intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages, et de la conservation des habitats naturels ;

2° Pour prévenir les dommages importants notamment aux cultures, à l’élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d’autres formes de propriétés ;

3° Dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques ;

4° Pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique ;

5° Pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement.

Les mêmes précisions sont ajoutées à l’article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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* *

La Commission examine l’amendement CD148 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement est rédactionnel.

M. Philippe Plisson. Selon moi, cet amendement n’est pas rédactionnel ; il complexifie le dispositif de destruction des espèces nuisibles en en durcissant les conditions. Nous souhaitons réguler ces espèces et, pour ce faire, mobilisons les chasseurs contre les sangliers, les chevreuils, les ragondins voire les renards ; à cet égard, le présent amendement ne peut que poser des problèmes.

Mme la rapporteure. Cette lecture est celle des chasseurs ; elle est erronée. Je ne suis tout de même pas née de la dernière pluie ! (Rires)

M. Philippe Plisson. Cessez ce procès d’intention ! (Murmures)

Mme la rapporteure. Je ne vous fais aucun procès d’intention.

Il ne s’agit pas de compliquer le dispositif, mais de reformuler une partie de l’article afin de clarifier les opérations de destruction. Lisez donc l’amendement ; il ne me semble pas opportun d’en débattre plus longuement, ce projet de loi abordant d’autres sujets bien plus importants.

M. Martial Saddier. Nous partageons les inquiétudes de Philippe Plisson : sans mettre en cause votre bonne foi, madame la rapporteure, la réécriture que vous proposez complexifiera le dispositif. Nous voudrions être certains que cet amendement ne cible pas au fond une espèce ou une situation particulière.

M. David Douillet. Les arguments de MM. Philippe Plisson et Martial Saddier sont de bon sens. Nous rencontrons déjà de grandes difficultés pour réguler nos territoires et en respecter non seulement les équilibres cynégétiques, mais aussi l’équilibre entre les espèces : lorsque l’une d’entre elles devient hégémonique, elle détruit ses concurrentes. (Murmures) Depuis la nuit des temps, l’homme joue son rôle dans ce théâtre où les espèces doivent vivre en équilibre, faute de quoi certaines d’entre elles sont vouées à la disparition.

La lutte contre les espèces nuisibles se heurte à la grande complexité des territoires, qui sont parfois escarpés au point d’être difficiles d’accès. N’ajoutez pas aux escarpements naturels la complexité de la loi !

Mme Laurence Abeille. S’il était adopté, le présent amendement aurait pour conséquence de faire tomber l’amendement CD487 que j’ai déposé au même article. Je propose donc de le rectifier de sorte que les battues administratives n’aient lieu que six jours par semaine et non sept (Protestations), dans l’intérêt de tous ceux qui, randonneurs ou promeneurs, souhaitent profiter de la nature, de la forêt, de la campagne et qui ne peuvent le faire pendant la période de chasse. En effet, les panneaux annonçant les battues sont souvent posés du début à la fin de la période de chasse, empêchant de nombreuses personnes d’accéder à ces espaces. Les pétitions contre l’ouverture de la chasse le dimanche ont recueilli des dizaines de milliers de signatures. Il me semble donc opportun d’insérer cette mesure somme toute modeste — il ne s’agit que de supprimer une journée de battues administratives par semaine — dans l’amendement de la rapporteure.

Mme la rapporteure. MM. Philippe Plisson et David Douillet font une curieuse interprétation de mon amendement : il ne rectifie que des erreurs matérielles à la demande de la division des lois, mais n’altère en rien les dispositions concernées ; je l’ai vérifié. Cessez donc de soupçonner systématiquement de mauvaises intentions de ma part. Le présent projet porte sur la biodiversité, non sur la chasse. Faudrait-il donc parler de la chasse quand cela vous agrée et s’interdire de le faire dans le cas contraire ? Je sais d’autre part combien certaines communications extérieures sont importantes pour tel et tel d’entre nous, mais je refuse que d’autres écrivent la loi à notre place ! (Murmures) Relisez donc le texte de l’amendement : vous n’y trouverez rien qui vous empêche de le voter.

J’en viens à la proposition de Mme Laurence Abeille. Je suis naturellement défavorable à l’organisation de battues administratives le dimanche qui, pour les randonneurs, les promeneurs et les populations dans leur ensemble, sont très impressionnantes. Il ne s’agit évidemment pas de cesser les battues, mais celles-ci pourraient être organisées d’autres jours que le dimanche, comme c’est déjà parfois le cas. Une telle mesure d’apaisement bénéficierait à tous sans revenir sur un quelconque principe fondamental.

En clair, il me semble nécessaire d’adopter les modifications rédactionnelles que je propose. Nous pourrons d’autre part, Madame Laurence Abeille, examiner d’ici à la séance publique votre proposition concernant les battues organisées le dimanche — que les populations n’aiment guère, disons-le. Donc je maintiens l’amendement CD148.

M. David Douillet. Nous ne sommes pas plus que vous nés de la dernière pluie, Madame la rapporteure : votre amendement complexifie la lutte contre les espèces nuisibles.

D’autre part, Madame Laurence Abeille, il est déjà très difficile d’organiser des battues administratives — dont je souligne qu’elles visent à lutter contre la prolifération d’espèces qui dérangent les populations et déséquilibrent les territoires. Elles répondent donc à une forme d’urgence. Aucun chasseur n’y participe de gaîté de cœur, et pour cause : elles ne correspondent pas au code d’éthique d’un véritable et bon chasseur, et s’apparentent presque à une opération d’extermination (Murmures et rires).

Il est donc très difficile de trouver des chasseurs et des rabatteurs souhaitant y participer. La fin de semaine est le moment le plus favorable pour y parvenir ; autrement, nous peinerons à réguler les espèces et à préserver l’équilibre de nos territoires.

M. François-Michel Lambert. L’amendement de la rapporteure, qui est selon moi de nature rédactionnelle, précise le cadre dans lequel se dérouleront les battues administratives et réduit le risque de contestation. En revanche, la proposition de Mme Laurence Abeille, à laquelle je suis favorable sur le fond, n’a pas sa place dans cet amendement et, le cas échéant, devrait être présentée sous forme d’amendement en séance afin que le débat ait lieu. Enfin, j’entends les arguments de M. David Douillet selon lesquels il est difficile de mobiliser les personnes nécessaires pour réaliser des battues administratives, lesquelles procèdent par définition d’une décision de l’administration et ne correspondent pas toujours aux souhaits des chasseurs.

M. Florent Boudié. Dans le territoire de chasse où je suis élu, Monsieur Douillet, aucune battue administrative n’a jamais nécessité la création d’une cellule d’aide psychologique. (Rires)

L’amendement de la rapporteure reprend au mot près la formulation des points 1° à 5° de l’article initial. Modifie-t-il la procédure de demande d’autorisation d’une opération de destruction, qui comprend un ordre du préfet donné après avis du directeur départemental de l’agriculture et de la forêt et du président de la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs ? Si ce n’est pas le cas, alors le texte issu des travaux du Sénat n’est en aucun cas rendu plus complexe.

Mme la rapporteure. La procédure demeure exactement la même.

M. Philippe Plisson. Je n’apprécie pas les procès d’intention par lesquels on accuse tel ou tel député d’abdiquer son libre arbitre pour se laisser dicter ses choix par d’autres. Je suis en accord avec vous sur certains points, Madame la rapporteure : nous avons perdu ensemble notre combat concernant les semences fermières, mais nous avons eu gain de cause ensemble sur la pêche en eaux profondes. Nous partageons depuis un certain temps des luttes communes en faveur de l’écologie ; vous n’avez donc aucune leçon à me donner, car je ne l’accepterais pas. Je suis chasseur, je préside le groupe d’études sur la chasse et les territoires et je ne m’en cache pas. C’est en cette qualité que j’interviens pour défendre la chasse et les chasseurs dans cette loi qui ne porte pourtant pas sur ce sujet. Nous travaillerions dans de meilleures conditions sans les procès qui nous sont faits avec une agressivité qui pollue les débats.

Au fond, Madame la rapporteure, notre position sur votre amendement dépendra de la vôtre : le climat de suspicion est tel, en effet, qu’il a pu se nicher dans certaines arrière-pensées le sentiment qu’il s’agit d’un amendement anti-chasse — à vous de nous prouver le contraire. Je constate toutefois qu’il est très difficile d’organiser des battues et de trouver des volontaires, et pour cause : les intéressés sont lassés du temps passé en poste au bout d’un chemin pour attendre tel ou tel spécimen d’une espèce qu’il faut détruire parce qu’elle pollue la nature et les jardins ! Vous souhaitez limiter les jours de battue, mais ce n’est pas en semaine que les ouvriers et les paysans sont disponibles pour les effectuer ; c’est le samedi et le dimanche ! Ils passent en effet leurs fins de semaine à réguler les espèces nuisibles pour éviter qu’elles n’envahissent vos jardins ! Faisons donc preuve de discernement, arrêtons de faire toujours les mêmes procès pour dialoguer sur le fond à propos de questions qui nous concernent tous. Cessons de jeter la suspicion, voire davantage, sur un loisir ancestral qui mérite d’exister !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’ai connu un président de fédération départementale et de la fédération nationale des chasseurs qui n’était pas chasseur lui-même…

Mme la rapporteure. Je précise à M. Florent Boudié que la procédure d’autorisation des opérations de destruction ne change nullement. À ceux qui pensent le contraire, je demande de citer l’alinéa de l’amendement qui leur pose problème, et nous procéderons à l’examen juridique nécessaire. En attendant, j’estime que l’assaut que je subis est excessif : je n’ai fait que proposer des modifications rédactionnelles suggérées par la division des lois en m’assurant que le dispositif demeurait inchangé sur le fond.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En clair, la reformulation de cet article ne provient pas directement de notre rapporteure, qui l’a acceptée, mais de la division des lois, dont on peut croire qu’elle n’est manipulée, ni par les défenseurs de la chasse, ni par ses opposants. Autrement dit, la suspicion que suscite cette reformulation n’est pas fondée.

En l’état, je vous fais la proposition suivante : cet amendement pourrait être retiré, à condition que tous les autres amendements à l’article le soient également.

Mme la secrétaire d’État. Je constate que les débats sont toujours aussi passionnés, y compris sur des amendements qui ne le méritent pas. (Sourires) On ne saurait estimer que le Gouvernement est hostile à la chasse, et les chasseurs ont d’ailleurs exprimé leur satisfaction suite à la lecture du texte au Sénat et aux arbitrages soutenus par la ministre. En l’occurrence, le Gouvernement approuve pleinement cet amendement de réécriture. Il serait hors de propos de crier au complot : il ne s’agit que d’une mesure de simplification. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je suis opposée à la proposition visant à y intégrer la question des battues — même si elle mérite d’être posée par ailleurs. Ni le projet de loi, ni l’amendement, ne portent en effet sur la chasse ; contentons-nous d’examiner ce qu’il contient sans lui donner une importance excessive.

M. Martial Saddier. Cette discussion permet de faire tomber les masques et révèle la confusion extrême qui règne dans la majorité. (Murmures) Plusieurs amendements visent en effet à transformer ce texte en loi sur la chasse. Les députés du groupe Les Républicains, quant à eux, souhaitent débattre de biodiversité et s’étonnent des propositions d’amendement ou de sous-amendement qui ne sont autre chose que des tentatives de compromis politiques passés avec la partie écologiste de la majorité en vue de faire de cette loi sur la biodiversité une loi anti-chasse. Compte tenu des interventions émanant de la majorité, je demande au nom de mon groupe une suspension de dix minutes.

Mme Laurence Abeille. Je n’ai déposé aucun amendement anti-chasse, mais seulement des amendements qui visent à protéger et à reconquérir au mieux la biodiversité dans l’esprit du projet de loi. L’amendement que j’allais défendre sur les battues organisées le dimanche répond à une préoccupation de nos concitoyens qui souhaitent à juste titre pouvoir circuler en toute sécurité sur les chemins ruraux pour y cueillir les champignons ou pratiquer telle ou telle autre activité sans subir une quelconque menace sur leur personne — n’oublions pas en effet que des accidents de chasse se produisent.

L’objectif est de partager le territoire, de telle sorte qu’il ne soit pas mis sept jours sur sept à disposition des chasseurs, mais qu’il soit accessible un jour par semaine à toutes et tous sans fusil. Selon un récent sondage, cette mesure est souhaitée par 76 % des Français et un nombre croissant d’associations de randonneurs et de sportifs se mobilisent depuis des mois pour que soit adoptée, comme dans de nombreux autres pays, une mesure consistant à partager le territoire un jour par semaine. De grâce, n’assimilons pas cette mesure simple à un dispositif anti-chasse !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mes chers collègues, je vous propose d’adopter l’article 60 sans modifier sa rédaction actuelle. À cette fin, je demande à Mme la rapporteure de bien vouloir retirer son amendement, et aux autres auteurs d’amendements de faire de même.

M. Philippe Plisson. Je suis partisan de la pacification de nos débats et j’adhère à votre proposition pleine de sagesse et de bon sens.

M. Martial Saddier. Dans le même état d’esprit, et dans la mesure où d’autres amendements pourront être déposés dans le cadre de l’article 88 de notre Règlement et dans celui de la séance publique, le groupe Les Républicains se bornera à maintenir ses amendements sans les argumenter.

Mme la rapporteure. Il me semble que je n’ai guère le choix. Aussi vais-je retirer mon amendement, tout en déplorant de devoir le faire.

L’amendement CD148 est retiré.

La Commission rejette successivement les amendements identiques CD265 de M. Dino Cinieri, CD276 de M. Jean-Louis Bricout, CD593 de M. Philippe Plisson, CD748 de M. Jacques Krabal, CD846 de M. Gilles Lurton, CD680 de M. Stéphane Demilly, CD909 de M. David Douillet, les amendements CD488 et CD487 de Mme Laurence Abeille et les amendements rédactionnels CD149 et CD21 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 60 sans modification.

Article 61
(articles L. 2213-30 et L. 2213-31 du code général des collectivités territoriales)

Dissociation des mares de la notion d’insalubrité publique

Pendant longtemps, les mares ont été regardées comme autant d’espaces insalubres favorisant la reproduction des moustiques et la propagation des maladies. C’est la raison pour laquelle la législation (article L. 2213-30 du code général des collectivités territoriales) impose au maire d’« ordonner les mesures nécessaires pour assurer l’assainissement et, s’il y a lieu, après avis du conseil municipal, la suppression des mares communales placées dans l’intérieur des villages ou dans le voisinage des habitations, toutes les fois que ces mares compromettent la salubrité publique ». Le préfet peut se substituer au maire défaillant pour décider de la suppression immédiate de ces mares.

Ces dispositions tendent à tomber en désuétude car la situation a évolué. De nos jours, notamment sous l’effet de l’urbanisation, le nombre de mares a fortement diminué et celles qui restent sont souvent regardées comme des zones humides à préserver.

C’est la raison pour laquelle, par cet article, le Gouvernement a sollicité auprès du Parlement la possibilité de légiférer par ordonnance pour abroger ces dispositions devenues obsolètes voire, selon l’étude d’impact, « incompatibles avec le code de l’environnement qui proclame que la protection des zones humides est d’intérêt général ».

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté cet article en y apportant seulement deux amendements rédactionnels défendus par la rapporteure.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a considéré que « s’il n’était effectivement pas justifié de supprimer une mare dès les premiers signes d’insalubrité, lorsque d’autres mesures, de prévention ou moins radicales, suffisent à résoudre les difficultés constatées, il [était] néanmoins utile que le maire conserve un pouvoir de police spécifique dans ce domaine pour faire cesser les risques de propagation des maladies, en particulier dans les territoires d’outre-mer ».

Le Sénat a donc adopté un amendement de son rapporteur, supprimant l’habilitation à procéder par ordonnance et modifiant directement le dispositif actuel du code général des collectivités territoriales.

La mention de la suppression des mares dans les articles relatifs aux pouvoirs de police du maire destinés à lutter contre l’insalubrité des mares n’y figurera plus de manière expresse, la préférence étant donnée à des mesures d’assainissements qui préservent les zones humides.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 61 sans modification.

Article 62
(articles L. 212-1, L. 219-9, L. 321-17 [nouveau] et L. 414-2 du code de l’environnement ; article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques)

Extension de certains espaces naturels protégés au-delà des 12 milles marins, mise en cohérence des plans d’action pour le milieu marin avec les autres outils existants, protection du domaine public maritime à Mayotte

Cet article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance, dans les six mois à compter de la promulgation de la loi, pour modifier des dispositions relatives aux espaces maritimes.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels qui n’ont pas altéré le fond de l’habilitation à procéder par ordonnance.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En séance publique, le Gouvernement a déposé un amendement visant à réécrire complètement cet article, en conformité avec ce que prévoyait l’habilitation, de manière à ne plus procéder par ordonnance mais à inscrire directement les dispositions dans les différents codes.

Les dispositions adoptées ont pour objet d’adapter la législation existante pour les projets pouvant avoir un impact sur le milieu marin, et d’assurer la compatibilité des plans d’action pour le milieu marin (issus de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin ») avec les plans et programmes des autres directives dans le domaine de l’eau et de la biodiversité (les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux et les documents d’objectifs des sites « Natura 2000 »).

Inspirées des recommandations du rapport « La délicate rencontre entre la terre et la mer » élaboré sous la présidence de Jérôme Bignon, ces dispositions contribuent, selon le Gouvernement, à la gestion intégrée de la mer et du littoral en renforçant l’articulation entre les dispositifs existants dans le domaine des eaux douces avec celui prévu par la directive pour les eaux marines en vue de l’atteinte du bon état écologique des milieux marins.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement soutenu par Mme Pascale Got et visant à intégrer au schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) un volet littoral fixant les grandes orientations en matière de gestion du trait de côte.

L’amendement adopté prévoit que, lorsque la région comporte des territoires littoraux, le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, mentionné à l’article L. 4251-1 du code des collectivités territoriales, contient un volet littoral.

Ce volet fixe des objectifs de moyen et long termes en matière de gestion du trait de côte en identifiant les mesures d’amélioration des connaissances, d’aménagement du territoire, de préservation et de restauration des espaces naturels, de prévention et d’information des populations permettant de limiter le risque lié au recul du trait de côte. Il comporte un plan de gestion des stocks sédimentaires côtiers déterminant les modalités d’un partage équilibré et durable de la ressource.

Votre commission a également adopté six amendements rédactionnels.

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La Commission examine les amendements identiques CD79 de M. Jean-Marie Sermier et CD241 de M. Martial Saddier.

M. Jean-Marie Sermier. Le code de l’environnement établit d’ores et déjà une coordination entre les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), les documents d’objectifs Natura 2000 et les plans d’action pour le milieu marin (PAMM). Par ailleurs, l’instruction du Gouvernement du 17 février 2014 relative à l’articulation entre la directive-cadre sur l’eau (DCE) et la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) complète le dispositif. Cet article nous semble donc inutile et nous demandons sa suppression.

M. Martial Saddier. L’amendement CD241 est défendu.

Mme la rapporteure. En première lecture, cet article habilitait le Gouvernement à légiférer par ordonnances afin de modifier certaines dispositions relatives aux espaces maritimes. Lors de l’examen du texte par le Sénat, le Gouvernement a renoncé à recourir aux ordonnances, préférant inscrire les modifications directement dans le code. Les dispositions ainsi adoptées adaptent la législation en vigueur aux projets susceptibles d’avoir un impact sur les milieux marins et garantissent la compatibilité des PAMM avec les plans et programmes des autres directives relatives à l’eau et à la biodiversité.

Il serait regrettable de réduire à néant le travail considérable que les services du ministère ont accompli dans des délais réduits. Je suis donc défavorable à l’amendement.

Mme la secrétaire d’État. Vous souhaitez supprimer l’ensemble de cet article relatif à la compatibilité entre les PAMM et les autres plans et décisions ; il est pourtant indispensable à une réelle gestion intégrée de la mer et du littoral, car 80 % des pollutions marines proviennent de la terre.

L’articulation entre les dispositifs concernant les eaux douces avec celui prévu pour les eaux marines est primordiale, mais la circulaire aujourd’hui applicable est insuffisante : l’inscription de cette mesure dans la loi renforcera ce lien pour les prochaines générations de plans relatifs à l’eau et à la mer. Le manque de connaissance des milieux marins profonds est une réalité. En revanche, grâce à l’IFREMER et à l’Agence de l’eau, les causes de détérioration de la qualité de l’eau sur les eaux côtières sont bien établies. Les comités de bassin en ont pleinement conscience, et les causes d’origine terrestre de cet impact sur les milieux marins doivent être mieux traitées à l’avenir.

Si le Comité national de l’eau n’a pu être consulté sur cette version de l’article, c’est simplement parce que le Gouvernement a demandé au Sénat la suppression de toutes les ordonnances inutiles afin d’accélérer la mise en œuvre de la loi et sans ajouter de décrets d’application. Au demeurant, le Comité avait été consulté au sujet du projet d’article habilitant l’État à légiférer par ordonnances. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CD150 et CD151 de la rapporteure.

La Commission étudie l’amendement CD841 de Mme Pascale Got.

Mme Pascale Got. Cet amendement propose d’intégrer au schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) un volet littoral fixant les grandes orientations en matière de gestion du trait de côte. Un plan de gestion des sédiments côtiers permet également de mieux gérer les ressources naturelles et ainsi de limiter le recul du trait de côte. Il est le produit d’un travail collectif conduit au sein du Comité national de suivi de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte au terme duquel il est apparu que l’échelon régional était le plus pertinent.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD152 à CD154 et l’amendement de coordination CD155 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 62 ainsi modifié.

Article 62 bis
(articles L. 331-1, L. 332-1 et L. 334-3 du code de l’environnement)

Extension des espaces protégés aux eaux sous juridiction de l’État et aux espaces du plateau continental

Introduit au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Inséré en commission, cet article inscrit dans la loi le dispositif pour lequel le Gouvernement demandait une habilitation à procéder par ordonnance au 1° de l’article 62, afin d’étendre le périmètre des espaces protégés ayant une partie maritime.

Le présent article permet aux parcs nationaux (au I), aux réserves naturelles (au II) et aux parcs naturels marins (au III), d’étendre leur périmètre au plateau continental et aux eaux sous juridiction de l’État, lorsque cela n’est pas prévu.

En effet, un grand nombre d’espèces marines ont une aire de répartition plus vaste que les seules eaux territoriales : pour assurer au mieux leur préservation, il est donc utile de pouvoir étendre le périmètre des parcs nationaux, des réserves naturelles et des parcs naturels marins à l’ensemble des eaux sous juridiction de l’État (zone économique exclusive et plateau continental).

La convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (dite Convention de Montego Bay) prévoit d’ailleurs explicitement que les États parties ont l’obligation de protéger le milieu marin de la zone économique exclusive et du plateau continental.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement mettant en œuvre la décision d’extension de la réserve naturelle des Terres australes françaises en zone économique exclusive qui a été annoncée lors de la COP 21. La collectivité des Terres australes et antarctiques françaises est régie par un principe de spécialité législative. Une mention expresse est donc indispensable pour étendre la compétence de cette collectivité sur la gestion des zones marines de la réserve naturelle des Terres australes françaises.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 62 bis sans modification.

Article 62 ter
(article L. 212-2 du code de l’environnement)

Consultation du Centre national de la propriété forestière sur le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE)

Introduit au Sénat, cet article n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale en première lecture.

1. L’apport du Sénat

Cet article, adopté en commission, inclut le Centre national de la propriété forestière dans la liste des entités consultées sur le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).

L’article L. 212-2 du code de l’environnement dispose que le comité de bassin soumet le projet de schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux à l’avis du Comité national de l’eau, du Conseil supérieur de l’énergie, des conseils régionaux, des conseils départementaux, des établissements publics territoriaux de bassin, des chambres consulaires, des organismes de gestion des parcs naturels régionaux et des établissements publics des parcs nationaux concernés. Ces avis sont réputés favorables s’ils ne sont pas rendus dans un délai de quatre mois suivant la transmission du projet.

Le présent article, qui résulte de l’adoption d’un amendement de Mmes Anne-Catherine Loisier et Annick Billon, ajoute le Centre national de la propriété forestière à cette liste, compte tenu du rôle joué par la forêt dans la gestion quantitative et qualitative de l’eau.

2. La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La commission adopte l’article 62 ter sans modification.

Article 64
Habilitation à prendre des ordonnances pour clarifier et simplifier l’application de la politique Natura 2000

(suppression maintenue)

L’habilitation demandée à l’article 64, en application de l’article 38 de la Constitution, visait à clarifier par ordonnance certaines dispositions du code de l’environnement afin d’en préciser le sens ou de simplifier leur application.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

En première lecture, l’Assemblée nationale avait adopté conforme, à quelques amendements rédactionnels près, la demande d’habilitation qui poursuivait trois objectifs principaux :

– améliorer la cohérence, interne ou en relation avec d’autres outils, du dispositif Natura 2000. C’était l’objet notamment des 2° et 4° de l’article (alinéas 3 et 5) ;

– clarifier la nature des engagements souscrits au titre de Natura 2000 ainsi que du champ d’application de la procédure de référé suspension (1°, 5° et 7° constituant les alinéas 2, 6 et 8) ;

– simplifier le dispositif Natura 2000. C’était l’objet des 3° et 6° (alinéas 4 et 7).

2. Les modifications apportées par le Sénat

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de suppression de l’article déposé par le gouvernement, la ministre ayant expliqué préférer « reprendre cette disposition par une circulaire », arguant du caractère réglementaire de la plupart des dispositions de cet article.

Les dispositions des 1° et 2° de cet article font l’objet d’une inscription directe dans le code de l’environnement par le biais de l’article 64 bis examiné ci-après.

3. La position de votre commission

Votre commission a confirmé la suppression de cet article.

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La Commission maintient la suppression de l’article 64.

Article 64 bis
(articles L. 414-1 et L. 414-2 du code de l’environnement)

Dispositions relatives aux sites Natura 2000

Cet article, introduit au Sénat par la commission du développement durable, inscrit directement dans le code de l’environnement deux brèves dispositions d’harmonisation dont l’adoption était initialement prévue par voie d’ordonnance à l’article précédent. Il n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale.

1. L’apport du Sénat

Le Sénat a directement inscrit dans le code de l’environnement les 1° et 2° dont l’adoption par ordonnance était originellement prévue à l’article 64.

Le 1° harmonise la rédaction de l’article L. 414-1 du code précité. En effet, l’article L. 414-1 prévoit qu’avant toute notification à la Commission européenne de la création d’un site Natura 2000, son projet de périmètre est soumis à la consultation des organes délibérants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale concernés. L’autorité administrative ne peut s’écarter des avis motivés rendus à l’issue de cette consultation que par une décision motivée.

La même disposition est prévue pour toute modification de périmètre d’un site, à ceci près que l’article précise alors que le projet de périmètre modifié est soumis à la consultation des organes délibérants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale territorialement concernés.

Le 1° vise donc à harmoniser la rédaction de cet article en insérant l’adverbe « territorialement » dans les dispositions relatives à la délimitation du projet initial de périmètre.

Le 2° a pour objet de supprimer une disposition devenue obsolète, à l’article L. 414-2 : le I de l’article L. 414-2 dispose que pour chaque site Natura 2000, un document d’objectifs définit les orientations de gestion, les modalités de leur mise en œuvre et les dispositions financières d’accompagnement. Son deuxième alinéa prévoit que ce document peut être approuvé à compter de la notification à la Commission européenne de la proposition d’inscription d’une zone spéciale de conservation, ou de la désignation d’une zone de protection spéciale.

Le 2° supprime cet alinéa, jugé non conforme à la directive « Habitats », qui prévoit que les plans de gestion des sites Natura 2000 sont établis par les États membres après que les zones spéciales de conservation ont été désignées en droit national.

2. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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La Commission adopte l’article 64 bis sans modification.

Article 65
Habilitation à procéder par ordonnance pour définir le cadre juridique applicable aux réserves biologiques

Cet article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance pour donner une base législative aux réserves biologiques forestières.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté cet article d’habilitation qui n’a été modifié que par deux amendements rédactionnels.

2. Les modifications apportées par le Sénat

En séance publique, le Gouvernement a fait adopter un amendement de suppression de cet article, considérant que les dispositions qui auraient été prises dans le cadre de l’habilitation à agir par ordonnance étaient de nature réglementaire et qu’il était possible d’agir par circulaire.

3. La position de votre commission

Plutôt que de supprimer cet article, votre commission a préféré l’amender. Pour cela, elle a adopté un amendement soutenu par Mme Viviane Le Dissez et ayant pour objet d’inscrire dans la loi les modalités de création et de gestion des réserves biologiques.

En effet, les réserves biologiques ne disposent pas actuellement d’assise juridique. Elles sont mises en œuvre par l’Office national des forêts (ONF) en application de deux instructions internes et sur la base du dernier alinéa de l’article L. 212-2 du code forestier.

Les réserves biologiques participent à la gestion durable des forêts et à la préservation de la biodiversité qui y est associée. Il s’agit de donner un socle juridique législatif à cet outil permettant à la fois de le pérenniser, de lui donner une meilleure visibilité et de faciliter sa bonne articulation avec les autres outils existants tant de gestion des forêts publiques que de protection des espaces naturels.

L’amendement adopté précise principalement les points suivants :

– les réserves biologiques sont créées par arrêté conjoint des ministres chargés des forêts et de l’environnement, après avis du Conseil national de la protection de la nature, puis, selon les cas, accord de la collectivité ou de la personne morale intéressée ;

– l’arrêté de création d’une réserve biologique définit son périmètre et ses objectifs et peut interdire ou soumettre à des conditions particulières les activités susceptibles de compromettre la réalisation des objectifs de cette réserve ;

– en cas de modification du périmètre, des objectifs ou de la réglementation d’une réserve biologique, un arrêté modificatif doit être pris ;

– les réserves biologiques sont gérées conformément à un plan de gestion, approuvé par arrêté conjoint des ministres chargés des forêts et de l’environnement. Ce plan de gestion fait partie intégrante du document d’aménagement auquel il est annexé.

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La Commission examine les amendements identiques CD636 et CD954 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Les réserves biologiques ne disposent pas actuellement d’assise juridique. Mises en œuvre par l’Office national des forêts (ONF), elles participent à la gestion durable des forêts et à la préservation de la biodiversité qui y est associée. Il s’agit de donner un socle juridique permettant à la fois de pérenniser cet outil, de lui conférer une meilleure visibilité et de faciliter sa bonne articulation avec les autres outils existants.

Mme la rapporteure. Ces amendements ont pour objet l’inscription dans la loi de dispositions devant, à l’origine, faire l’objet d’une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnances. Les réserves biologiques, en effet, ne disposent pas de statut juridique, aucune disposition législative ou réglementaire ne définissant cette catégorie d’espace ni le type de gestion qui leur est applicable. Je préfère la rédaction de l’amendement CD662 de M. Jean-Yves Caullet, qui ajoute une période transitoire, mais, puisqu’il n’est pas défendu, je suis favorable aux amendements de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la secrétaire d’État. Ces amendements contribuent à clarifier et à simplifier les outils de protection des espaces naturels. J’aurais, moi aussi, préféré l’amendement de M. Caullet, mais suis également favorable à ceux-ci.

M. Martial Saddier. Je souhaite présenter un sous-amendement introduisant la mention du ministre de l’agriculture, car le ministre de la forêt est aussi celui de l’agriculture…

Mme la secrétaire d’État. Sur le plan juridique, la rédaction proposée par l’amendement est la bonne. Votre demande est donc satisfaite : c’est bien le ministre chargé de l’agriculture qui signera l’arrêté.

M. Martial Saddier. J’entends votre argument, mais, dans ces réserves biologiques, se trouvent nécessairement des prairies naturelles ou autres relevant du champ de compétence du ministre de l’agriculture ; bien des problèmes devront être réglés avant que n’existe un ministre chargé des seules forêts : il paraît donc logique de mentionner le ministre de l’agriculture, de la forêt et de l’environnement.

Mme la rapporteure. Je ne comprends pas vraiment la difficulté. Nous modifions le code forestier : c’est donc le ministre chargé des forêts qui est mentionné, et ce ministre est celui chargé de l’agriculture…

M. Jean-Marie Sermier. Je veux préciser la remarque de Martial Saddier : aujourd’hui, le ministre chargé de la forêt est le ministre de l’agriculture, mais rien ne garantit que, plus tard, il n’y ait pas un ministère particulier chargé de la forêt. D’autre part, on peut imaginer que le ministère de la forêt soit un jour intégré au ministère de l’environnement. Dans ces deux cas, le ministre de l’agriculture n’aurait plus voix au chapitre.

La Commission adopte les amendements.

L’article 65 est ainsi rétabli.

Article 66
(articles L. 171-2, L. 171-8, L. 172-4, L. 172-13 et L. 173-5 du code de l’environnement)

Harmonisation des dispositions relatives à la police de l’environnement

Cet article, dans sa rédaction originelle avait pour objet d’habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance dans le domaine de la police de l’environnement et des sanctions.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

À l’Assemblée nationale, cet article n’a fait l’objet que d’amendements rédactionnels.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Au Sénat, en revanche, l’article a été entièrement réécrit. En effet, le Gouvernement a déposé un amendement destiné à inscrire directement dans la loi les dispositions qui devaient initialement être prises par ordonnance.

Dans sa nouvelle rédaction, l’article 66 vise donc à finaliser les travaux d’harmonisation de l’exercice de la police de l’environnement, rénovés récemment par l’ordonnance n° 2012-34. En effet, l’entrée en vigueur de cette ordonnance a mis en lumière que de nouvelles clarifications et harmonisations étaient nécessaires pour garantir la pleine effectivité des dispositions édictées. Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité corriger des erreurs matérielles :

– le 1° corrige des erreurs introduites par l’ordonnance. En effet, l’accès des agents de contrôle aux lieux non clos ne justifie pas une autorisation du juge des libertés en cas de refus. Par ailleurs, l’accès à un véhicule nécessite un encadrement et notamment un contrôle effectif de l’autorité judiciaire quand bien même les dispositions de l’article L. 171-2 ont trait à la police administrative ;

– le 2° clarifie la rédaction de l’article L.171-8 du code de l’environnement. Celui-ci semble réserver les mesures de police et les sanctions aux seuls travaux et opérations. Or, le champ des mises en demeure est bien plus large. Une rédaction simple et harmonisée avec l’article L. 171-7 est proposée ;

– le 3° harmonise les modalités des contrôles que les inspecteurs de l’environnement sont amenés à conduire au titre des différentes législations qui ont un lien avec l’environnement, telles que le code de la santé publique, le code rural et de la pêche maritime, le code forestier, dans un souci de simplification et d’efficacité de leur action ;

- le 4° complète les prérogatives des agents de contrôle de manière à leur permettre de faire procéder à la destruction des animaux morts par les services d’équarrissage (cas du grand gibier notamment), pour des raisons sanitaires évidentes ;

– le 5° élargit la possibilité pour le juge pénal d’ordonner la suspension, l’arrêt de l’activité ou la remise en état, à des personnes morales. Il n’y a pas de fondement à ce que seules les personnes physiques soient implicitement visées. En outre, l’article élargit à un an la durée pendant laquelle l’astreinte financière peut être prononcée, qui correspond mieux aux durées généralement constatées de remise en état d’un milieu dégradé. Ainsi l’astreinte sera effective ;

– le 6° rétablit la possibilité que l’exécution d’office de mesure de régularisation soit portée par la ou les agences de l’eau et collectivités volontaires. En effet, l’État n’assure plus de mission d’ingénierie lui permettant d’exercer efficacement ce type de mission. Les frais engagés seront couverts par les consignations de fonds correspondantes. Par ailleurs, l’amendement rétablit la possibilité de demander un suivi environnemental complémentaire, à la charge de la personne en situation irrégulière ;

– le 7° élargit le champ du référé pénal dans le domaine de l’eau à l’ensemble des infractions et, notamment, au délit de pollution de l’eau. En outre, la limitation de la durée prononcée par le juge est portée à un an, ce qui est plus conforme au délai généralement constaté pour une mise en conformité ou une procédure de sanction. Sans cette extension, le juge doit actuellement se prononcer tous les trois mois ;

– le 8° aligne la procédure de commissionnement et d’assermentation des gardes du littoral sur celle des agents des réserves et des inspecteurs de l’environnement, dans un effort de simplification et d’harmonisation de la police de l’environnement ;

– le 9° rétablit le pouvoir de transaction pénale des directeurs de parcs nationaux, qui sont l’autorité administrative compétente dans cette législation. L’ordonnance de 2012 avait malencontreusement supprimé ce pouvoir ;

– le 10° toilette l’habilitation des agents actuellement affectés dans les parcs naturels marins qui intègrent l’Agence française pour la biodiversité. Il élargit également leurs possibilités de constatation d’infraction aux contraventions, et dans toutes les aires marines protégées ;

– le 11° toilette l’habilitation des agents de police afin qu’ils puissent constater toutes les infractions à la réglementation sur la circulation des véhicules à moteurs dans les espaces naturels, y compris les contraventions.

Au II, l’article remet en cohérence les sanctions relatives au non-respect des engagements spécifiques d’une charte Natura 2000. En effet, la rédaction actuelle prévoit une contravention et des circonstances aggravantes doublant l’amende, ce qui n’est pas conforme aux principes du code pénal. La solution proposée est de qualifier de délit ces incriminations, le juge proportionnant la peine à la gravité de l’atteinte au site Natura 2000.

Par ailleurs, dans un souci de lisibilité du code de l’environnement, l’article codifie les dispositions prévoyant des sanctions pénales relatives à Natura 2000 et prévoit une homogénéisation du vocabulaire utilisé.

3. La position de votre commission

L’article 66 étend aux délits environnementaux la possibilité d’appliquer certaines procédures du code de procédure pénale aux délits commis en bande organisée. Sur la demande de votre rapporteure, votre commission a adopté un amendement ayant pour objet d’inclure dans le dispositif ainsi créé les délits liés aux déchets, dès lors qu’ils sont commis en bande organisée.

Votre commission a également adopté trois amendements de votre rapporteure à portée purement rédactionnelle.

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La Commission adopte les amendements rédactionnels CD157 à CD159 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement CD1077 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’article 66 étend aux délits environnementaux la possibilité d’appliquer certaines procédures du code de procédure pénale aux délits commis en bande organisée. Cet amendement vise à inclure dans le dispositif ainsi créé les délits liés aux déchets, dès lors qu’ils sont commis en bande organisée.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

M. Martial Saddier. Il est vrai que beaucoup de décharges sauvages et autres malversations commises concernant les déchets ne font malheureusement pas l’objet de poursuites. Cependant, pouvez-vous préciser la notion de bande organisée dans ce contexte ?

Mme la rapporteure. Aux termes du code de procédure pénale, la notion de bande organisée suppose la préméditation de l’infraction ainsi qu’une organisation hiérarchisée, quel que soit le délit commis. Le cas échéant, cela peut s’appliquer à une filière.

M. Martial Saddier. Certes, il peut y avoir des filières organisées. Toutefois, toutes les infractions commises dans le domaine des déchets ne sont pas le fait de bandes organisées : une seule entreprise peut tout à fait être à l’origine de nombreux problèmes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 66 ainsi modifié.

Article 67
Habilitation à procéder par ordonnance pour réaliser une expérimentation visant à simplifier la gestion des espaces naturels protégés

(suppression maintenue)

Cet article avait pour objectif initial d’habiliter le gouvernement à prendre une ordonnance pour réaliser une expérimentation visant à simplifier la gestion des espaces naturels protégés.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’habilitation demandée, en application de l’article 38 de la Constitution, visait à autoriser par ordonnance une expérimentation :

– limitée dans une durée de quatre ans (alinéa 1) ;

– limitée dans son champ d’application (alinéas 1 et 2) ;

– et comprenant trois volets (alinéas 2 à 4) :

• la réalisation d’un document de synthèse des mesures de protection et de gestion s’appliquant aux espaces naturels qui se superposent (1°, alinéa 2) ;

• l’instauration d’une instance consultative réunissant les parties et d’une instance consultative scientifiques uniques communes aux espaces concernés (2°, alinéa 3) ;

• la désignation d’un gestionnaire unique commun à chacun des espaces qui se superposent en tout ou partie, à l’exception de ceux dépourvus de gestionnaires, de ceux dont les propriétaires demeurent les seuls décideurs des modalités ainsi que les espaces très spécialisés (réserves nationales de chasse et de faune sauvage) ou intégrés à une autre politique publique (réserves biologiques domaniales) (3°, alinéa 4).

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a supprimé cet article en séance publique à la demande du Gouvernement qui a fait valoir que les conséquences d’une telle simplification n’avaient pas été assez étudiées. Il semblerait par ailleurs que la faible adhésion des gestionnaires d’espaces naturels à ce projet ait fortement réduit le nombre de candidats à l’expérimentation.

3. La position de votre commission

Votre commission a confirmé la suppression de cet article.

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M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le Sénat a supprimé l’article 67. Je ne suis saisi d’aucun amendement visant à le rétablir. Sa suppression est donc maintenue.

Article 68
Habilitation à procéder par ordonnance pour refondre le droit applicable aux espaces maritimes

(suppression maintenue)

Cet article avait pour objet d’habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance pour refondre le droit applicable aux espaces maritimes.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’habilitation demandée à l’article 68 du projet de loi, en application de l’article 38 de la Constitution, vise, par ordonnance :

– Aux 1° et 2° (alinéas 3 et 4), à préciser la définition et la délimitation des espaces maritimes ainsi que les conditions d’exercice de la souveraineté, des droits souverains et de juridictions dans ces espaces, en ce qui concerne la navigation et les activités de recherche, d’exploration, d’exploitation, la protection et la préservation du milieu marin, ainsi que la pose de câbles et de conduites ;

– Au 3° (alinéa 5), à définir les conditions d’encadrement des activités, dans les fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale des personnes morales ou physiques de nationalité française titulaires de contrats d’exploration ou d’exploitation et bénéficiant du patronage de l’État auprès de l’Autorité internationale des fonds marins ;

– Au 4° (alinéa 6), à introduire de nouvelles dispositions pénales et répressives en lien avec les dispositions prévues aux 1° à 3° supra ;

– Au 5° (alinéa 6), à procéder aux mesures d’adaptation nécessaire pour rendre ces dispositions applicables outremer

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission du développement durable du Sénat a considéré que cet article sollicitait une trop large habilitation à procéder par ordonnance, notamment pour définir les conditions d’exercice de la souveraineté et de la juridiction en ce qui concerne la navigation et les activités de recherche, d’exploration et d’exploitation, la protection et la préservation du milieu marin et la pose de câbles et de conduites dans les espaces maritimes.

Elle a vivement regretté que le Gouvernement n’ait pas détaillé davantage le contenu envisagé, que ce soit dans l’étude d’impact ou en réponse aux interrogations du rapporteur, alors que le projet d’ordonnance semblait pourtant prêt.

Pour ces raisons, le Sénat a supprimé cet article.

3. La position de votre commission

Votre commission a confirmé la suppression de cet article.

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La Commission maintient la suppression de l’article 68.

Article 68 ter B
(article L. 332-25 du code de l’environnement)

Rétablissement de la nature contraventionnelle des infractions à la réglementation des réserves naturelles

(supprimé)

Cet article a été introduit au Sénat par la commission du développement durable. Il n’a donc pas été examiné par l’Assemblée nationale.

1. L’apport du Sénat

Cet article, inséré par la commission du développement durable du Sénat, restitue aux infractions à la réglementation des réserves naturelles leur caractère contraventionnel.

En effet, l’ordonnance n° 2012-9 du 5 janvier 2012 relative aux réserves naturelles a modifié l’article L. 332-25 du code de l’environnement, en ajoutant à la liste des infractions punies de six mois d’emprisonnement et de 9 000 euros d’amende les infractions à la réglementation des réserves naturelles (par exemple, les troubles sonores, les abandons d’ordures, les divagations d’animaux, les bivouacs, les atteintes à la faune et à la flore, etc.).

Article L. 332-25 du code de l’environnement

Est puni de six mois d’emprisonnement et de 9 000 euros d’amende :

1° Le fait de ne pas respecter une des prescriptions ou interdictions édictée par la réglementation de la réserve naturelle prévue par l’article L. 332-3 ;

2° Le fait de modifier l’état ou l’aspect des lieux en instance de classement en réserve naturelle sans l’autorisation prévue à l’article L. 332-6 ;

3° Le fait de détruire ou de modifier dans leur état ou dans leur aspect les territoires classés en réserve naturelle sans l’autorisation prévue à l’article L. 332-9 ;

4° Le fait de ne pas respecter les prescriptions des périmètres de protection prévues à l’article L. 332-17.

Or la partie réglementaire du code continue à définir, aux articles R. 332-69 et suivants, les contraventions applicables à ces infractions.

L’article additionnel, inséré par l’adoption de deux amendements identiques de MM. Ronan Dantec et Cyril Pellevat, a donc rétabli la nature contraventionnelle de ces infractions en supprimant le 1° de l’article L. 332-25.

Selon les cas, ces infractions redeviendront donc passibles de contraventions de 2e, 3e, 4e ou 5e classe, sanctionnées d’une amende comprise entre 150 et 1 500 euros.

2. La position de votre commission

Votre commission a supprimé cet article sur la proposition de votre rapporteure. En effet, les réserves naturelles sont des territoires d’excellence pour la préservation de la diversité biologique et géologique. Ce sont des outils de protection des espaces naturels au même titre que les parcs nationaux.

C’est pourquoi, dans un souci d’aggravation des peines pour des infractions constatées dans ces espaces, le législateur a prévu dans l’ordonnance n° 2012-9 du 5 janvier 2012 que toute infraction à la réglementation des réserves naturelles et des cœurs de parcs nationaux puisse être qualifiée en délit ce qui introduit un parallèle avec les dispositions en vigueur pour les parcs nationaux (articles L. 331-26 du code de l’environnement).

L’article 68 ter, ajouté par le Sénat, revenait sur cette ordonnance et donnait un bien mauvais signal. Il convenait donc de le supprimer.

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* *

La Commission examine l’amendement CD1064 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Les réserves naturelles sont des territoires d’excellence pour la préservation de la diversité biologique et géologique. Ce sont des outils de protection des espaces naturels au même titre que les parcs nationaux.

C’est pourquoi, dans un souci d’aggravation des peines pour des infractions constatées dans ces espaces, le législateur a prévu, dans l’ordonnance n° 2012-9 du 5 janvier 2012, que toute infraction à la réglementation des réserves naturelles et des cœurs de parcs nationaux puisse être qualifiée en délit, ce qui introduit un parallèle avec les dispositions en vigueur pour les parcs nationaux.

L’article 68 ter B, ajouté par le Sénat, qui revient sur cette ordonnance doit donc être supprimé.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 68 ter B est supprimé.

Chapitre VIII
Biodiversité terrestre

Article 68 quater
(article L. 424-2-1 [nouveau] du code de l’environnement)

Interdiction de la chasse des mammifères pendant les stades de reproduction et de dépendance

(suppression maintenue)

Cet article, inséré en commission à l’Assemblée nationale, interdit la chasse des mammifères pendant la période de reproduction, d’élevage et de dépendance des jeunes, sauf pour les espèces soumises à un plan de chasse ou classées nuisibles.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article a été adopté en commission à l’Assemblée nationale, à l’initiative de la députée écologiste Laurence Abeille.

Il complète l’article L. 424-2 du code de l’environnement afin de prévoir une interdiction générale de la chasse de tous les mammifères « pendant les différents stades de reproduction et de dépendance, à l’exception de ceux appartenant à des espèces soumises à plan de chasse ou entrant dans la catégorie des espèces susceptibles d’être classées nuisibles ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a considéré que l’article 68 quater envisageait une extension aux mammifères des principes de la directive « Oiseaux » pour les espèces qui ne seraient pas soumises à plan de chasse ou qui n’entreraient pas dans la catégorie des nuisibles.

Or, les périodes de chasse actuellement en vigueur ont été choisies en fonction de la biologie de l’espèce et ont été validées par les arrêts du Conseil d’État du 20 octobre et du 30 juillet 1997.

Le rapporteur a considéré que le projet de loi n’était pas un texte relatif à la chasse, et qu’il ne devait pas être le lieu de réactivation de longs débats polémiques sur la chasse. Il s’est donc montré favorable aux amendements visant à supprimer cet article.

En séance publique, Mme Évelyne Didier a déposé un amendement visant à rétablir cet article. Cet amendement a reçu un avis défavorable du rapporteur et du Gouvernement, au motif qu’une telle disposition aurait davantage sa place dans un projet de loi sur la chasse dont la ministre a annoncé la préparation.

La ministre chargée de l’écologie a également souligné qu’il convenait de continuer à autoriser les destructions sur tous les territoires géographiques des espèces nuisibles. Elle a cité l’exemple du blaireau qui prolifère dans certaines régions, ce qui engendre des dégâts considérables : trous dans les talus, déstabilisation de terrains, etc. En outre, il est apparu que certaines espèces animales, comme le lièvre, peuvent être considérées comme étant en perpétuelle période de reproduction. Pour toutes ces raisons, cet article n’a pas été rétabli.

3. La position de votre commission

Malgré un avis défavorable de votre rapporteure, votre commission a confirmé la suppression de cet article.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD160 de la rapporteure et CD507 de Mme Laurence Abeille.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement rétablit, sans le modifier, un article adopté en première lecture par l’Assemblée nationale et supprimé par le Sénat.

Aujourd’hui, les blaireaux sont une espèce chassable, ce dont il faut se réjouir car c’est le premier degré de protection d’une espèce dans la mesure où des règles encadrent les périodes et les méthodes de chasse. Les espèces non chassables, à l’inverse, peuvent être prélevées à tout moment, de n’importe quelle façon.

Toutefois, un problème se pose : actuellement, les blaireaux peuvent être chassés en période de reproduction, en mai et juin. Or ils sont en voie de diminution : d’abord, parce qu’ils ont de grandes difficultés à se reproduire – les naissances ne se font que tous les deux ou trois ans ; ensuite, parce qu’ils sont victimes d’accidents de la circulation. Il est important pour la biodiversité, objet de ce projet de loi, de permettre à ces animaux de se reproduire convenablement pour pouvoir perpétuer leur espèce.

Cet amendement vise donc à introduire un article interdisant le déterrage des blaireaux pendant les périodes de reproduction et de gestation. Soulignons ici que le déterrage est une méthode de chasse cruelle, au même titre que le gazage, interdit depuis 1991, technique employée pendant longtemps parce que l’on croyait que les blaireaux étaient, comme les renards, porteurs du virus de la rage.

Entendons-nous bien. Cet amendement n’est pas un amendement anti-chasse. Je considère que les chasseurs ont une éthique : ils ne vont généralement pas tirer les animaux lorsqu’ils sont suivis de jeunes, lorsqu’ils sont en période de reproduction ou dans une période d’affaiblissement.

Mme Laurence Abeille. À ce jour, aucune disposition législative n’interdit la chasse des mammifères pendant les périodes de reproduction, d’élevage ou de dépendance des jeunes. Alors que, dans la plupart des pays européens, le blaireau est une espèce protégée, en France, cette espèce a un statut tout à fait unique de gibier pour lequel une période de chasse complémentaire peut être autorisée par le préfet. Le blaireau peut alors être chassé par vénerie sous terre dès le 15 mai alors que les jeunes blaireaux ne sont pas encore sevrés.

Cette pratique est autorisée dans soixante et onze départements et conduit à la destruction non seulement des adultes mais aussi des petits que la nature même cette technique de chasse ne permet d’épargner : ils sont directement mis à mort par les chiens introduits dans les terriers.

Chevreuils, daims, sangliers et renards peuvent être chassés dès le 1er juin. En Alsace et en Moselle, le chevreuil mâle peut être chassé dès le 15 mai, le sanglier, le renard et le lapin dès le 15 avril.

Outre l’atteinte évidente à la biodiversité pendant une période de grande vulnérabilité, ces pratiques représentent un risque important pour les activités humaines autres que la chasse qui peuvent se dérouler à une cette période de l’année.

Cet amendement entend rétablir l’article introduit par notre assemblée et supprimé par le Sénat qui vise à interdire la chasse pendant les périodes de reproduction. Il est important de respecter le cycle de la nature, de protéger au mieux la faune en évitant que les animaux ne soient menacés.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Comme l’a dit Ségolène Royal à plusieurs reprises, le projet de loi relatif à la reconquête de la biodiversité ne porte pas sur la chasse. Je suis donc gênée qu’une telle disposition soit introduite. En première lecture, l’Assemblée nationale avait adopté un amendement similaire qui vise la période complémentaire de vénerie du blaireau.

Vous connaissez mes convictions à ce sujet. J’ai reçu la Fédération nationale des chasseurs le 4 mars. Ses représentants ne m’ont pas donné l’impression d’être fermés à la perspective d’étudier les dates de période complémentaire de la chasse au blaireau, aujourd’hui autorisée à partir du 15 mai.

En termes de méthode, il me semblerait préférable d’organiser une concertation entre les différentes parties concernées et de disposer de l’avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS).

Sur tous les articles et amendements concernant la chasse, je m’en remettrai donc à la sagesse de l’Assemblée.

M. Gérard Menuel. Je suis défavorable à ces amendements tout à fait inutiles, qui n’ont pas lieu d’être dans un projet de loi sur la biodiversité.

D’une part, ils évoquent les mammifères de manière générale alors qu’ils visent les blaireaux en particulier. D’autre part, ils paraissent tout à fait inapplicables. La reproduction des mammifères en forêt ne suit plus de périodes fixes : on trouve ainsi des marcassins toute l’année, car le climat est aujourd’hui plus doux.

Il faut compter sur l’éthique dont les chasseurs savent faire preuve.

M. David Douillet. Des chasseurs qui ne prendraient pas en compte le rythme biologique des espèces n’auraient plus rien à faire dans ce milieu. Conscients des enjeux de la biodiversité depuis des décennies, ils déterminent avec les autorités des plans de chasse comprenant un nombre spécifique d’animaux à tirer en fonction de comptages précis. Ils respectent bien évidemment les périodes de gestation afin que les animaux se reproduisent dans de bonnes conditions. Je dirai même plus, les chasseurs protègent les animaux. Si certaines espèces d’oiseaux, pendant l’hiver, ne faisaient pas l’objet de soins de la part des chasseurs, qui leur installent des abris et des agrainoirs, elles auraient disparu de nos prairies et de nos champs.

Il faut aussi prendre en compte le fait que le dérèglement climatique affecte beaucoup d’espèces. On constate, par exemple, des décalages de deux voire trois semaines dans les périodes de brame ou de reproduction.

De tels amendements ne prennent pas en compte la réalité du terrain.

M. Philippe Plisson. Ces amendements nous ramènent à une jurisprudence qui est source de beaucoup de problèmes pour la pratique de la chasse, je veux parler de celle de la directive européenne 79-409 fondée sur le principe d’une interdiction de chasser pendant les périodes de reproduction.

En outre, leur rédaction évoque les mammifères de manière générale, sans citer d’espèces en particulier. Le blaireau n’est pas la seule espèce concernée. Le lièvre peut avoir deux ou trois cycles de reproduction par an. Les chasseurs ne pourront-ils plus le tirer parce qu’ils ne sauront pas si la hase est pleine ? On ne va pas faire passer des échographies au gibier tous les quinze jours ! (Rires)

Rappelons que si le blaireau est chassé, c’est qu’il provoque des dégâts, comme le renard, dans les poulaillers : il détruit les nids et mange les poules. Les chasseurs ne passeraient pas sinon des après-midi entiers à déterrer, avec l’aide de chiens, un animal qui n’est pas mangé.

Pour toutes ces raisons, ces amendements sont mal venus. Il ne s’agit pas d’une loi qui porte sur la chasse. Je suis de ceux qui, depuis des années, demandent que les associations de protection de la nature et les chasseurs se mettent autour de la table pour discuter de toutes les questions qui se posent, qu’il s’agisse du problème évoqué dans ces amendements ou de la prolongation des périodes de chasse pour des espèces qui prolifèrent, par exemple. Une discussion raisonnée et sage est possible. Encore faut-il que chacun ne reste pas dans sa tranchée pour essayer de tirer des balles sur l’adversaire. Et c’est encore ce qui se passe avec ces amendements pernicieux.

Comme le suggère Mme la secrétaire d’État, il serait bon que les auteurs de ces amendements les retirent.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement n’a pas demandé le retrait mais s’en est remis à la sagesse de l’Assemblée.

M. Julien Aubert. Je comprends votre démarche, madame la rapporteure. Simplement, vous n’évoquez devant nous que le blaireau alors que la rédaction de votre amendement englobe tous les mammifères. Je ne voudrais pas que, sous prétexte d’un exemple ad hoc, sans doute très pertinent, on en vienne à créer des problèmes pour d’autres catégories de gibier.

Se pose également un problème de principe. Comme la secrétaire d’État le souligne, j’estime qu’un tel amendement n’a pas sa place dans ce projet de loi.

M. Florent Boudié. Comme nous le verrons tout à l’heure à propos de l’article 68 quinquies, dans ce débat sur le projet de loi relatif à la biodiversité, nous opérons trop souvent des glissements vers la question de la chasse.

Par ailleurs, sur le plan juridique, cet amendement, extrêmement large, ne cible absolument pas le blaireau. Si nous voulons le cibler, ciblons-le : le blaireau est une espèce partiellement protégée aux termes de la convention de Berne de 1979 et des pays comme la Belgique, le Luxembourg et le Royaume-Uni ont choisi de le protéger de manière stricte.

Mme Viviane Le Dissez. Je ferai deux remarques.

N’oublions pas que les directives européennes doivent s’appliquer. Nous n’avons pas à considérer qu’elles posent problème.

Deuxièmement, protéger les mammifères en gestation est nécessaire car tuer les mères et les petits pourrait avoir un effet à terme sur la réduction de telle ou telle espèce.

Mme la rapporteure. Mon amendement est bel et bien lié à l’objectif de cette loi, qui est la reconquête de la biodiversité. Lorsqu’une espèce se reproduit moins, ses chances de préservation sont réduites. C’est une loi physiologique simple. Tuer les mères et les petits conduit à affaiblir l’espèce et compromet ses chances de reproduction.

Du reste, quand, ce matin, nous avons évoqué les associations communales de chasse agréées (ACCA), personne n’a considéré qu’il s’agissait d’une question qui ne relevait pas de la loi.

Par ailleurs, mon amendement vise les blaireaux, même s’il ne les cible pas explicitement car c’est la seule espèce qui peut être chassée en période de reproduction. Et comment est-elle chassée ? Par l’envoi de chiens dans les terriers, qui déchiquettent les petits et leurs mères.

Enfin, le blaireau n’est pas l’animal nuisible que certains se plaisent à décrire. Il a un régime alimentaire diversifié, qui varie au fil des saisons – vers de terre, mollusques, insectes, amphibiens, micro-mammifères, charognes, fruits, bulbes et baies.

Il y a des mustélidés, qui ne sont pas des espèces chassables, qui sont appelés à subir le même sort. Quand je demande dans mon département combien il y a des fouines, personne n’est capable de me répondre. Mais un jour, il risque de ne plus y en avoir du tout. Certes, il ne s’agit pas d’une espèce aussi symbolique que les éléphants, que les tigres ou que les lions, mais c’est une espèce qui a un rôle dans la nature et que nous n’avons pas le droit de laisser disparaître. Je me ferai toujours l’avocate des espèces qu’on est en train de détruire. C’est une lourde faute d’accepter leur disparition.

Pour toutes ces raisons, j’estime que cet amendement a toute sa place dans cette loi.

La Commission rejette successivement les amendements CD160 et CD507.

En conséquence, elle maintient la suppression de l’article 68 quater.

(Contestations et murmures)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ces amendements ont été repoussés par douze voix contre 8 !

J’entends ce qui est dit par les uns et les autres à propos des dispositions relatives à la chasse et de leur place dans une loi concernant la biodiversité. Je rappellerai seulement que ce matin, nous nous sommes prononcés sur une disposition introduite par le Sénat visant à donner des pouvoirs supplémentaires aux gardes-chasse particuliers.

Nous avons tous une part de responsabilité dans nos propos et dans le texte qui sortira de nos débats. Je le dis de manière très respectueuse.

Article 68 quinquies
(article L. 424-4 du code de l’environnement)

Interdiction de la chasse à la glu ou à la colle

(suppression maintenue)

Cet article, inséré en commission à l’Assemblée nationale, interdit la pratique de la chasse dite à la glu ou à la colle. Il s’agit d’une pratique autorisée dans cinq départements du sud-est de la France : les Alpes-de-Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône, le Var et le Vaucluse.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

L’article 68 quinquies, qui a été inséré en commission par un amendement de Mme Laurence Abeille, interdit une méthode de chasse non sélective : la chasse à la glu.

Un certain nombre de conditions sont posées à cette méthode de chasse traditionnelle : gluaux posés une heure avant le lever du soleil et enlevés avant onze heures, présence constante du chasseur, nettoyage immédiat de tout oiseau pris, libération immédiate de tout autre gibier – les grives draines, les litornes, les mauvis, les musiciennes et les merles noirs –, quantité strictement limitée. Mais il apparaît que ces prescriptions, très difficilement contrôlables, ne sont pas respectées dans les faits.

Il en résulte donc que cette pratique ne respecte pas l’article 9 de la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages, dans la mesure où elle s’avère, dans les faits, non sélective.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Sur avis favorable de son rapporteur, le Sénat a supprimé cet article au motif que le présent projet de loi n’était pas un texte relatif à la chasse, ces dispositions ne faisant que rouvrir des débats ayant déjà été tranchés à de nombreuses reprises.

Tout en rappelant que la Commission européenne venait de saisir les autorités françaises d’une demande d’information portant notamment sur le caractère sélectif de la pratique du gluau, le rapporteur a considéré qu’il n’était aujourd’hui pas contestable que les chasseurs soient des acteurs incontournables de la biodiversité, au même titre que d’autres utilisateurs de la nature.

3. La position de votre commission

Malgré un avis défavorable de votre rapporteure, votre commission a confirmé la suppression de cet article.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD508 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à rétablir un article interdisant la chasse à la glu ou à la colle introduit par notre assemblée en première lecture et supprimé par le Sénat.

Dans une loi relative à la biodiversité, pourquoi introduire des éléments relatifs à la chasse ? La biodiversité recouvre aussi bien la flore que la faune, les habitats et les espèces en voie de disparition. La perte de biodiversité n’est pas une vue théorique, c’est une réalité extrêmement concrète. Nous la vivons de manière spectaculaire avec la disparition progressive d’animaux emblématiques comme le rhinocéros blanc. Le présent projet de loi, et c’est ce qui fait toute sa richesse, s’intéresse à la biodiversité ordinaire, à notre environnement quotidien dont on oublie qu’il est précieux parce qu’il n’est pas spectaculaire. Il concerne certaines espèces végétales ou animales, qui font l’objet d’une protection plus ou moins forte.

Si je me suis intéressée plus spécifiquement à la chasse à la glu, c’est qu’il s’agit d’un mode de chasse non sélectif, contrairement à la chasse à courre. Cette pratique qui consiste à mettre de la colle ou de la glu sur des rameaux permet de piéger les oiseaux. Or un oiseau piégé, c’est un oiseau qui souffre : ainsi immobilisé, il se débat, ses plumes sont arrachées, ses articulations démises. C’est particulièrement vrai pour des oiseaux comme les fauvettes, les pouillots ou les roitelets beaucoup plus petits que les espèces recherchées que sont les grives ou les merles. Une fois relâchés, ils ont très peu de chances de survie.

De plus, il est très difficile de savoir si les détenteurs d’une autorisation de chasse à la glu respectent la réglementation, d’autant que certains de ces petits animaux peuvent se vendre très cher sur le marché, jusqu’à 400 euros. Se pose un véritable problème de braconnage.

Cette technique de chasse aboutit aussi à capturer des oiseaux protégés. Récemment un faucon crécerelle a ainsi été piégé par un dispositif de chasse à la glu. Recueilli par un centre de sauvegarde, il serait en bonne voie pour reprendre son envol.

M. Philippe Plisson. Pouvez-vous nous préciser l’endroit de sa capture ?

Mme Laurence Abeille. Il a été pris en charge par le centre de sauvegarde de la Ligue pour la protection des oiseaux d’Aquitaine situé à Audenge en Gironde.

M. Philippe Plisson. Croyez-vous vraiment que la chasse à la glu est pratiquée en Gironde ?

Mme Laurence Abeille. Il s’agissait peut-être de braconnage, je ne sais. Cette technique de chasse est effectivement plutôt traditionnellement pratiquée dans le Sud-Est – mais toutes les traditions ne sont pas dignes d’être conservées.

Toujours est-il qu’elle doit être interdite. C’est ce que nous proposons dans cet amendement.

Mme la rapporteure. J’avais soutenu l’adoption de cet amendement lors de l’examen du texte en première lecture. On nous dit que la chasse à la glu ou à la colle était une tradition : heureusement que l’on n’a pas conservé toutes les traditions ! (Murmures)

Cette méthode de chasse n’empêche pas que des oiseaux n’appartenant pas aux cinq espèces autorisées s’y fassent prendre, si bien qu’elle n’est pas sélective ! Une loi relative à la biodiversité doit défendre la pérennité de toutes les espèces. En outre, cette chasse se pratique pendant les périodes d’ouverture des autres formes de chasse, si bien que les contrôles sont peu nombreux. Les oiseaux capturés subissent des dommages et ont très peu de chance de survivre après leur libération.

J’émets un avis favorable à l’adoption de cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Ce texte n’est pas une loi sur la chasse, et les modes de chasse relèvent du domaine réglementaire. Cet amendement vise à rétablir l’article voté par l’Assemblée nationale en première lecture pour interdire une chasse destinée à prélever les grives et les merles noirs à l’aide de branches enduites de glu. Cette chasse, traditionnelle, se pratique dans cinq départements du Sud-Est de la France et se trouve strictement encadrée par des arrêtés ministériels et préfectoraux. Les oiseaux capturés doivent être immédiatement nettoyés, le chasseur devant impérativement être présent pendant la période de chasse – de l’aube à onze heures du matin. Les oiseaux pris n’appartenant pas aux espèces ciblées par cette chasse doivent être immédiatement nettoyés puis relâchés.

L’autorisation de ce mode de chasse constitue une dérogation à la directive européenne sur la protection des oiseaux sauvages qui encadre strictement leur chasse. Il faut notamment que ces modes de chasse portent sur des petites quantités, soient contrôlés, ne portent que sur les espèces cibles, et qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante. Ces conditions ne sont pas toutes remplies ; ainsi, les prélèvements semblent élevés – 30 000 oiseaux pour le seul département du Vaucluse. Les oiseaux, autres que la grive et le merle, même nettoyés ne sont pas en bon état lorsqu’ils sont relâchés, ce qui remet en cause la sélectivité de ce mode de chasse. L’Espagne a été condamnée pour une chasse très similaire. Plusieurs condamnations ont également été prononcées en France récemment pour des captures d’oiseaux à l’aide de glu.

Cependant, les associations de protection de la nature n’ont jamais déposé de recours et la Commission européenne n’a jamais lancé de procédure d’infraction contre l’arrêté ministériel du 17 août 1989.

Pour toutes ces raisons, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Quelle chute ! (Rires)

Puisque des connaisseurs de la chasse à la glu sont présents dans cette salle (Sourires), j’aimerais bien obtenir des précisions sur ce mode de chasse. Pourquoi attrape-t-on des grives à la glu ? Que fait-on de ces oiseaux ?

M. Julien Aubert. En première lecture, cet amendement a été adopté à la veille des élections départementales dans un hémicycle presque vide. (Murmures)

La chasse à la glu est concentrée dans cinq départements – le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône, les Alpes-Maritimes, un département alpin et le Var –, mais pas dans celui du Val-de-Marne ni en Aquitaine, madame Abeille. Plutôt que de chasse à la glu, il conviendrait d’utiliser les termes de capture à la glu. Même en Provence, je rencontre des gens qui critiquent le fait d’attraper des oiseaux avec de la colle pour les manger ; or ces oiseaux sont capturés vivants, non pas sur des branches d’arbre, mais sur des verguettes, c’est-à-dire des baguettes de bois.

Les chasseurs à la glu se positionnent dans un poste fixe, si bien qu’il est très facile d’effectuer des contrôles. Le chasseur, bloqué dans son poste, ne s’enfuira pas en voyant le contrôleur alors qu’il a installé des verguettes et des cages pour les oiseaux.

On capture l’oiseau avec de la glu, on le détache avec de la cendre – même si des produits existent aujourd’hui – et on le conserve dans une cage durant la saison de la chasse où il est utilisé comme appelant. Il s’agit bien d’une chasse sélective – comme l’a reconnu la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) le 28 avril 1988 – car la grive ou le merle noir sont capturés pour la qualité de leur chant. On prend donc grand soin de lui, comme pour un chien de chasse, et on ne le torture surtout pas, parce qu’on en a besoin pour la chasser d’autres oiseaux. À la fin de la saison de la chasse, l’oiseau est relâché. Il ne s’agit donc pas d’une chasse, mais d’une capture.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Bien ! On capture donc des appelants avec de la glu. Mais qu’utilise-t-on pour chasser les autres oiseaux à l’aide de ces appelants ?

M. Julien Aubert. Un fusil. Mme la secrétaire d’État a parlé d’un prélèvement important ; or le quota de prélèvement annuel s’élève à 40 000 sur une population de 78 000 individus, le nombre total d’oiseaux concernés atteignant 320 millions. La chasse à la glu ne constitue donc pas une attaque contre la biodiversité, les chats domestiques faisant davantage de dommages parmi les oiseaux. (Murmures)

Les chasseurs sont très attachés à cette pratique traditionnelle qui existe depuis plusieurs siècles et ne comprennent pas qu’un texte ne concernant pas la chasse vienne l’interdire. Avec mes collègues du groupe Les Républicains, nous sommes opposés à cet amendement qui nous semble reposer sur une mauvaise interprétation de cette pratique.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le prélèvement renvoie au nombre d’oiseaux tués avec un fusil ? On entretient, volontairement ou involontairement, une confusion entre le nombre d’appelants piégés par la glu et celui de grives tuées avec des fusils.

M. Julien Aubert. On parle du prélèvement d’oiseaux capturés avec de la glu et que l’on relâche vivants à la fin de la saison de chasse.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le chiffre est quand même important. (Approbations)

M. Julien Aubert. Oui, mais on ne les garde pas tous. Si l’oiseau ne peut jouer le rôle d’appelant, il est immédiatement relâché.

M. Vincent Burroni. M. Julien Aubert a très bien expliqué la chasse à la glu. L’oiseau ne souffre pas, car le chasseur le nettoie dès qu’il est collé et le relâche s’il n’appartient pas à l’une des espèces autorisées à jouer le rôle d’appelant. Les oiseaux conservés sont placés dans des volières et sont bien nourris ; lorsqu’ils déclinent dans cette fonction, les chasseurs les relâchent.

Le prélèvement obéit à des quotas européens, nationaux, locaux et individuels, chaque chasseur devant noter ses captures pour permettre le contrôle.

Toutes les pratiques ancestrales ne sont pas bonnes, mais celle-là n’est pas mauvaise et se trouve ancrée dans les traditions provençales. Parmi les 74 000 chasseurs recensés dans les cinq départements où cette chasse a cours, 6 900 s’adonnent à ce mode de chasse, qui subit des contrôles et qui ne crée pas de problème de biodiversité.

Mme Florence Delaunay. Je ne comprends pas le dépôt de cet amendement, les oiseaux n’étant pas tués par la chasse à la glu, il n’existe pas de risque pour la biodiversité. Il serait excessif d’interdire cette pratique à cause du braconnage, celui-ci étant interdit et puni. Je ne suis pas favorable à l’adoption de cet amendement.

M. Philippe Plisson. Cette chasse n’est pas pratiquée en Gironde, et je n’avais pas une connaissance pratique de sa nature lors de l’examen du texte en première lecture. Je ne vois d’ailleurs pas comment le pauvre rapace auquel vous avez fait allusion, madame Laurence Abeille, a pu être englué en Gironde puisque je n’y ai jamais vu de chasse à la glu et ne savais même pas en quoi elle constituait avant le dépôt de ce projet de loi.

De nombreux chasseurs se sont mobilisés devant les permanences des députés du Sud-Est ; après étude, je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’une chasse éthique. Les oiseaux non conservés sont nettoyés, et cette occupation génère une grande convivialité ; nous ne nous trouvons pas en présence d’assassins se délectant de la mort de petits oiseaux.

La CJUE a reconnu le 28 avril 1988 le caractère sélectif de ce mode de chasse, ce dernier ayant également reçu une accréditation nationale. Il n’y a donc aucune raison de persécuter ces chasseurs.

M. François-Michel Lambert. Voici l’écologiste traître à la cause ! (Rires) S’attaquer à la chasse à la glu pour défendre la biodiversité constitue une aberration. L’interdiction de la chasse à la glu représenterait une perte pour la biodiversité de notre Provence et celle des collines de ma circonscription, décrites par Marcel Pagnol.

La chasse à la glu ne constitue pas une chasse létale et ne provoque pas de stress comparé au bruit du tir d’un fusil pour les animaux. Les voitures, les motos et les largages d’eau par les canadairs effraient bien plus les oiseaux, y compris les espèces protégées comme l’aigle de Bonelli.

On reproche à ce mode de chasse de n’être pas sélectif, mais même les meilleurs chasseurs blessent parfois un animal qu’ils n’avaient pas visé et qui ne s’en relèvera pas. Un oiseau capturé avec de la glu s’envolera à nouveau lorsqu’il sera libéré. Qui veut remettre en cause les pratiques non sélectives doit attaquer la chasse dans son ensemble ! (Murmures)

Cette chasse oblige à rester dans un poste, situé à moins de dix mètres de l’endroit où la glu est posée, afin de s’occuper de l’animal en moins d’une minute. Elle n’engendre aucun effet négatif sur l’environnement, puisqu’il n’y a pas de dispersion des polluants et puisque les verguettes sont enfermées dans des coffres en dehors de la période d’autorisation de la chasse. Cette activité maintient des espaces naturels car il faut entretenir les chemins qui conduisent aux postes. Elle se trouve, en outre, encadrée et contrôlée afin de n’avoir pas d’impact majeur sur l’environnement ; les prélèvements s’avèrent modestes, puisque 6 000 chasseurs capturent 40 000 oiseaux, soit moins de dix prises vivantes annuelles par chasseur.

Nombre de personnes étudiant l’évolution de la biodiversité utilisent les informations assemblées par les chasseurs – le jour de passage des oiseaux et les espèces repérées dans tout le Sud-Est de la France.

La chasse à la glu, symbiotique, génère d’importantes aménités dans notre région.

Cette chasse sélective et strictement contrôlable respecte les prescriptions de la directive du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages – dite directive « Oiseaux ». Puisqu’elle s’effectue depuis un poste, le braconnage n’est pas possible et l’on peut contrôler les chasseurs à tout moment. Le problème réside dans le nombre insuffisant de contrôleurs.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous prie de conclure.

M. François-Michel Lambert. Bien d’autres se sont exprimés longuement !

La ligue pour la protection des oiseaux (LPO) d’Aquitaine a trouvé un faucon crécerelle, dont la glu provenait de la sève des pins et non des chasseurs. Je me suis rendu dans un centre de soins de la LPO dans le Vaucluse où aucun des oiseaux blessés ou morts ne devait son sort à la chasse à la glu.

Madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu vos arguments sur le respect de l’encadrement de cette pratique, mais ne peut-on pas dire que celle-ci a simplement besoin de davantage de contrôles ? On ne va pas interdire les voitures pouvant rouler à plus de 100 kilomètres par heure parce que certains conducteurs dépassent cette vitesse ! Si l’on interdisait la chasse à la glu, pratique non létale, d’autres systèmes émergeraient pour aider la chasse à la grive, et l’on n’aurait rendu aucun service à la biodiversité.

M. Arnaud Leroy. Je voudrais remercier mes collègues qui m’ont donné la matière pour écrire un livre intitulé La chasse à la glu expliquée à ma fille. (Rires)

Nous dénaturons le texte relatif à la biodiversité avec de telles dispositions, qui ne concernent en outre que cinq départements. Je comprends les arguments développés par Mme la rapporteure, et nous pourrions trouver un consensus sur ce sujet. Seuls 6 000 chasseurs sont concernés, et on dispose de moyens pour s’assurer que leur pratique respecte le cadre normatif.

M. David Douillet. Julien Aubert et François-Michel Lambert se sont montrés très précis, comme doit l’être une commission parlementaire. Or l’exposé sommaire de l’amendement de Mme Abeille s’avère pour le moins imprécis et sans pertinence. La chasse à la glu n’entraîne pas la maltraitance ou la mort d’oiseaux, et il conviendrait de se remettre en question avant de déposer un tel amendement. Si tel n’était pas le cas, vous feriez preuve de mauvaise foi, madame Abeille.

Mme Laurence Abeille. Les députés représentent l’ensemble de la Nation et non pas le département où ils sont élus, monsieur Julien Aubert ! Nous devons regarder l’intérêt général, et je suis très sensible à la défense du bien commun.

À écouter M. François-Michel Lambert, on a l’impression que tout est pour le mieux dans le monde merveilleux de la chasse à la glu. Des associations travaillent sur ce sujet depuis des années, et on ne peut pas balayer d’un revers de main les résultats de leurs études, notamment le fait que ce mode de chasse n’est pas sélectif. En effet, la glu ne piège pas que des grives et des merles, mais également des espèces protégées, ce qui prouve que les chasseurs ne respectent pas l’obligation de rester près des bouts de bois enduits de glu.

Je ne fais pas preuve de mauvaise foi, je suis engagée, avec d’autres, dans une démarche de préservation et de reconquête de la biodiversité, qui nécessite des mesures dans certains secteurs, notamment celui de la chasse non sélective. Ne nous racontons pas d’histoires sur la beauté des paysages décrite par Marcel Pagnol – à l’époque duquel les braconnages étaient d’ailleurs nombreux – et agissons pour la biodiversité.

Mme la rapporteure. Mme Laurence Abeille a raison de dire que l’on peut connaître une pratique sans être issu de la région où il se pratique ; je connais la chasse à la palombe – je l’ai même pratiquée avec des amis –, la chasse à la glu et ses dégâts pour les oiseaux, et la corrida. (Protestations)

Vous ne pourrez pas m’empêcher de penser que cette chasse n’est pas sélective ; tous les petits passereaux pris par la glu sont dix fois moins gros que les grives et les merles lorsqu’ils sont libérés. Ils souffrent beaucoup, et on éprouve beaucoup de peine à les remettre d’aplomb pour qu’ils puissent repartir.

Cette pratique alimente en outre des trafics, notamment de chardonnerets.

Enfin, on peut d’autant plus interdire cette pratique qu’elle concerne peu de chasseurs dans notre pays.

Je maintiens mon avis favorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement – par seize voix contre six – et maintient la suppression de l’article 68 quinquies.

Article 68 sexies
(articles L. 341-2, L. 341-6 et L. 341-10 du code forestier ; article L. 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux)

Ajustement de la compensation des opérations de défrichement

Cet amendement vise à permettre des opérations d’ouverture de milieux forestiers dans les espaces naturels protégés lorsqu’ils sont réalisés en vue de la préservation du patrimoine naturel.

1. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale

Cet article additionnel a été inséré en séance publique à l’Assemblée nationale par l’adoption d’un amendement du Gouvernement.

Il procède à plusieurs modifications du code forestier, visant à faciliter les opérations de déboisement favorables au patrimoine naturel, et à simplifier la compensation pour les opérations de défrichement.

Les alinéas 2 à 4 excluent de la qualification de défrichement les opérations de déboisement ayant pour but de créer à l’intérieur des bois et forêts les équipements indispensables à la restauration des milieux nécessaires à la préservation ou la remise en bon état du patrimoine naturel.

Les alinéas 5 à 7 étendent le champ des mesures et travaux de génie civil ou biologique susceptibles de compenser une opération de défrichement, en intégrant les mesures et travaux qui visent à réduire les impacts du défrichement sur les fonctions définies à l’article L. 341-5, soit :

1° Au maintien des terres sur les montagnes ou sur les pentes ;

2° A la défense du sol contre les érosions et envahissements des fleuves, rivières ou torrents ;

3° A l’existence des sources, cours d’eau et zones humides, et plus généralement à la qualité des eaux ;

4° A la protection des dunes et des côtes contre les érosions de la mer et les envahissements de sable ;

5° A la défense nationale ;

6° A la salubrité publique ;

7° A la valorisation des investissements publics consentis pour l’amélioration en quantité ou en qualité de la ressource forestière, lorsque les bois ont bénéficié d’aides publiques à la constitution ou à l’amélioration des peuplements forestiers ;

8° A l’équilibre biologique d’une région ou d’un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l’écosystème ou au bien-être de la population ;

9° A la protection des personnes et des biens et de l’ensemble forestier dans le ressort duquel ils sont situés contre les risques naturels, notamment les incendies et les avalanches.

En proposant une nouvelle rédaction du 3° de l’article L. 341-6, cet article diversifie les mesures et travaux de génie civil ou biologique permettant de compenser un défrichement. Cette modification facilitera l’obtention de l’autorisation préalable.

Les alinéas 8 à 9 dispensent une opération de défrichement de l’obligation de compensation si le défrichement projeté est prévu par un document de gestion, pour un motif de préservation du patrimoine naturel, dans un espace naturel protégé : parc national, réserve naturelle classée, site classé, site « Natura 2000 », ou réserve biologique d’une zone identifiée dans un schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).

L’alinéa 10 procède à une coordination, permettant d’appliquer le régime de sanctions et mesures administratives en cas de non-respect des obligations de compensation d’opérations de défrichement, telles que modifiées par le présent article.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article, en soulignant qu’il permet de résoudre une contradiction entre deux codes, le code de l’environnement et le code forestier. Le code de l’environnement demande, en effet, aux propriétaires forestiers de s’engager à protéger un certain nombre de sites, à accepter volontairement un certain nombre de contraintes et à suivre des politiques de protection qui peuvent impliquer de déboiser des parcelles. Le code forestier, quant à lui, oblige à la compensation des opérations de défrichement par des travaux de boisement ou de reboisement pour une surface équivalente, et parfois même supérieure.

L’adoption d’amendements rédactionnels et de précision n’a toutefois pas permis aux deux chambres de s’entendre sur un texte entièrement identique dès la première lecture.

3. La position de votre commission

Votre commission a adopté deux modifications rédactionnelles de votre rapporteure ainsi que les amendements suivants :

– un amendement de M. Jean-Yves Caullet ayant pour objet d’éviter toute confusion entre les mesures prises dans le cadre d’une autorisation de défrichement et celles prises dans le cadre d’une autorisation environnementale. L’amendement adopté vise donc à limiter les travaux de génie civil et biologique aux bois et forêts concernés par le défrichement ou aux massifs qu’ils composent afin que les mesures compensatoires prévues par l’autorisation de défrichement restent liées à la problématique principalement forestière. Ces mesures compensatoires prévues par l’autorisation de défrichement n’ont ni pour vocation ni pour finalité de se substituer aux compensations environnementales prises au titre du code de l’environnement (eau, espèces protégées, etc…) ;

– plusieurs amendements identiques ayant pour objet l’ajout du motif « de préservation ou de restauration du patrimoine paysager » aux motifs permettant l’exonération de compensation pour défrichement. En effet, une des missions principales des parcs naturels régionaux est de protéger et valoriser le patrimoine naturel remarquable mais également le patrimoine paysager remarquable de leurs territoires. Ces deux types de patrimoines sont souvent indissociables. Dès lors, pour permettre aux syndicats mixtes de parcs naturels régionaux de pouvoir mettre en œuvre dans de bonnes conditions leurs projets de territoires, il est apparu nécessaire d’ajouter cette seconde notion à la première ;

– un amendement du Gouvernement dont l’objet est de prévoir que les conditions d’application des 1° et 2° du I de l’article sont fixées par décret en Conseil d’État. En effet, dans l’intérêt des bois et forêts ainsi que du milieu naturel, et pour donner de la visibilité aux opérateurs sur ces nouvelles conditions applicables au régime du défrichement, il est apparu indispensable de fixer, par voie réglementaire, les critères permettant de déterminer ce qu’est un équipement indispensable à la mise en valeur et à la protection des bois et forêts, ce qu’est la préservation ou la restauration d’un milieu naturel au sens de ces dispositions, comment ces mesures constituent des annexes indispensables à ces bois et forêts, ainsi que la liste des documents de gestion des espaces concernés auxquels l’administration peut se référer dans son autorisation de défrichement ;

– plusieurs amendements identiques visant à supprimer les alinéas 11 et 12 de l’article. Ces alinéas avaient pour objet de compléter l’article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime, introduit par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, notamment en ce qui concerne les études préalables et les compensations. Or, le dernier alinéa de cet article prévoit déjà un décret d’application qui devrait être prochainement promulgué. Par conséquent, et dans le but d’éviter toute confusion, la commission a jugé inopportun de légiférer sur ce point, d’abord parce qu’il s’agit de toute évidence d’un domaine réglementaire et ensuite parce que le décret prévu serait prêt à être publié, ce qui n’est pas le cas du présent projet de loi ;

– plusieurs amendements identiques ayant pour objet de faire compenser intégralement par l’État les pertes de recettes résultant pour les communes et les établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties accordée en application de l’article 1395 E du code général des impôts, lorsque le montant de l’exonération est supérieur à 10 % du budget annuel de fonctionnement de la collectivité. L’amendement prévoit que la perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

En effet, pour faciliter l’appropriation des dispositifs de gestion et de restauration des habitats et espèces d’intérêt communautaire du réseau Natura 2000, la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (LDTR) a introduit une exonération totale, sur cinq ans renouvelables, des parts communale et intercommunale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) pour les propriétaires de certaines parcelles situées en site Natura 2000 ayant signé une charte ou un contrat Natura 2000.

L’article 146 de la LDTR indique que l’État compense, chaque année, les pertes de recettes résultant de l’exonération pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Mais, par l’intermédiaire de lois de finances successives, depuis 2009, cet article a été modifié avec l’introduction d’un coefficient de minoration ayant pour conséquence une réduction progressive du remboursement versé aux collectivités : ainsi, en 2016, moins de 25 % des montants devraient être remboursés. L’impact financier est important pour certaines communes rurales.

L’amendement adopté permet de ne plus pénaliser les petites communes rurales et leurs établissements à fiscalité propre et de relancer le dispositif de contractualisation (chartes et contrats Natura 2000) actuellement largement sous-utilisé. Cette relance a été jugée nécessaire pour permettre à l’État de remplir ses engagements communautaires et prévenir une potentielle condamnation de la France par la Cour de Justice de l’Union européenne.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD664 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Jean-Yves Caullet. Il s’agit d’inclure dans les déboisements ne nécessitant pas d’autorisation de défrichement ceux qui sont prévus en vue de préserver ou de restaurer des milieux naturels. Dans l’intérêt même des forêts ainsi que du milieu naturel, il est indispensable de fixer par voie de décret les critères permettant de déterminer d’une part ce qu’est un équipement indispensable à la mise en valeur et à la protection des forêts, et d’autre part ce que sont les travaux nécessaires à la préservation ou à la restauration d’un milieu naturel au sens de ces dispositions et enfin, comment ces mesures constituent des annexes indispensables aux bois et forêts. Cette clarification éviterait des conflits entre ce qui est nécessaire aux uns et ce qui est utile aux autres.

Mme la rapporteure. Favorable.

Mme la secrétaire d’État. Cette proposition fait déjà l’objet d’un amendement de la rapporteure – le CD1067 – et d’un amendement du Gouvernement, le CD1045. Je vous propose donc de retirer le vôtre.

L’amendement est retiré.

La Commission aborde les amendements identiques CD104 de M. Jean-Marie Sermier, CD239 de M. Martial Saddier, CD340 de M. Dino Cinieri, CD810 de M. Gérard Menuel et CD857 de M. Stéphane Demilly.

M. Jean-Marie Sermier. L’amendement CD104 a pour but de permettre que le boisement compensateur soit appliqué prioritairement sur des surfaces telles que les friches industrielles urbaines ou commerciales, les terres agricoles étant généralement soumises à de très fortes pressions.

M. Alain Leboeuf. Défendu.

M. Martial Saddier. Défendu également.

Mme la rapporteure. Avis plutôt défavorable car la rédaction de ces amendements m’apparaît plus incantatoire que précise. Peut-être pourriez-vous les retirer.

Mme la secrétaire d’État. Même avis.

M. Martial Saddier. Si vous êtes d’accord sur le fond, que proposez-vous, madame la rapporteure ?

Mme la rapporteure. Revoyez la rédaction en vue du débat en séance.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CD237 de M. Martial Saddier, CD338 de M. Dino Cinieri, CD808 de M. Gérard Menuel et CD855 de M. Stéphane Demilly, et l’amendement CD880 de M. Gérard Menuel.

M. Gérard Menuel. Il est nécessaire de préserver les ressources forestières face à l’urbanisation. Mais l’activité agricole les intègre souvent et permet de préserver des arbres. La forêt et l’agriculture ne doivent donc pas être opposées et la spécificité agricole dans ce domaine doit être prise en compte.

M. Martial Saddier. On ne peut pas appliquer le même coefficient à la forêt et aux terrains agricoles, même si l’on peut discuter sur le fond, d’autant que les agriculteurs peuvent être propriétaires et jouer un grand rôle dans l’entretien de forêts.

Mme la rapporteure. Défavorable. Les reboisements peuvent faire l’objet d’un coefficient multiplicateur dans certains cas, notamment en fonction du rôle économique, écologique et social des bois et forêts objets de défrichement. Cet amendement prévoit d’en exonérer les reboisements ayant pour origine les projets agricoles au motif qu’agriculture et forêt ne peuvent être opposées. Je pense toutefois que ce serait un bien mauvais signal que de réduire les contraintes liées au reboisement dans une loi destinée à la reconquête de la biodiversité. C’est justement parce que l’agriculture ne saurait être opposée à la forêt que les agriculteurs doivent contribuer au reboisement avec les mêmes règles que les autres. C’est une question de principes et de justice.

Mme la secrétaire d’État. L’objectif de la compensation au défrichement est d’assurer la protection des surfaces forestières françaises. La suppression de ce coefficient pourrait entraîner une différence de traitement entre usagers et favoriserait la disparition de surfaces forestières au profit de surfaces agricoles. Je suis donc défavorable à ces amendements.

La Commission rejette successivement la série d’amendements identiques et l’amendement CD880.

Elle aborde l’amendement CD665 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Jean-Yves Caullet. Il s’agit de faire en sorte que les prescriptions en faveur de l’environnement puissent accompagner l’autorisation de défrichement. Cependant, il ne faut pas confondre les mesures qui concernent cette dernière et celles prises dans le cadre d’une autorisation environnementale. Cet amendement vise donc à limiter les travaux de génie civil et biologique aux bois et forêts concernés par le défrichement ou aux massifs qu’ils composent afin que les mesures compensatoires prévues par l’autorisation de défrichement restent liées à la problématique forestière. Il permet de mieux circonscrire la réalisation de ces mesures aux parcelles objet du défrichement ou à leur voisinage, à l’intérieur du même massif forestier.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Elle en vient aux amendements identiques CD809 de M. Gérard Menuel et CD856 de M. Stéphane Demilly.

M. Stéphane Demilly. Le chiffre est impressionnant : ces dix dernières années, la surface agricole diminue en moyenne de 80 000 hectares par an. Afin de conforter certaines exploitations agricoles et de maintenir une population rurale dans les zones en déprise, il convient de ne pas appliquer l’indemnité de défrichement dans les cas de mise en valeur agricole.

Mme la rapporteure. Cet amendement pose une double difficulté. Sur le fond, par cohérence avec ce qui vient d’être dit précédemment, il ne paraît pas de bonne politique de favoriser une catégorie de la population qui serait exonérée d’indemnité compensatrice exigée en cas de non-reboisement. Sur la forme, on ne peut pas exonérer quelqu’un d’une indemnité qui n’est pas obligatoire. En effet, cette indemnité peut être payée par les personnes qui n’ont pas la possibilité de compenser un défrichement par un reboisement ; elle est donc facultative. Si nous adoptions cet amendement, plus aucun agriculteur ne reboiserait puisqu’il serait plus simple d’opter pour l’exonération de l’indemnité. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CD162 de la rapporteure.

Puis elle examine les amendements identiques CD646 de M. Christophe Bouillon et CD839 de M. Lionel Tardy.

Mme Viviane Le Dissez. Afin de permettre aux syndicats mixtes de parcs naturels régionaux de mettre en œuvre dans de bonnes conditions leurs projets de territoires, il est nécessaire d’ajouter le motif « patrimoine paysager » concernant l’exonération de compensation pour défrichement.

M. Martial Saddier. Une des missions fondamentales des parcs naturels régionaux est de protéger et de valoriser le patrimoine naturel remarquable mais également le patrimoine paysager de leurs territoires. Les chartes des parcs, documents de gestion approuvés par les collectivités territoriales et l’État, localisent ces éléments de patrimoine et prévoient un certain nombre d’actions de préservation ou de restauration. Ces deux types de patrimoines sont souvent couplés. Afin de permettre aux syndicats mixtes de parcs naturels régionaux de mettre en œuvre dans de bonnes conditions leurs projets de territoires, il est nécessaire d’ajouter le motif « patrimoine paysager » concernant l’exonération de compensation pour défrichement.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte les amendements.

Elle se penche sur l’amendement CD663 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Jean-Yves Caullet. Défendu.

Mme la rapporteure. Favorable.

Mme la secrétaire d’État. L’amendement est satisfait par une proposition ultérieure.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements CD67 de M. Guillaume Chevrollier et CD238 de M. Martial Saddier.

M. Guillaume Chevrollier. Cet article, qui a pour but la compensation forestière, ne doit pas conduire à trop de rigidité. Une terre qui avait une vocation agricole peut avoir été abandonnée et par conséquent boisée. L’agriculteur qui souhaite la défricher pour la mettre en culture doit déposer une demande d’autorisation. En plus de l’obligation de compensation forestière, le porteur de projet doit reboiser des parcelles, selon un coefficient multiplicateur, mais il peut également être redevable d’une taxe additionnelle, qui varie selon les départements entre 2 000 et 10 000 euros l’hectare. L’amendement vise à ne pas appliquer l’indemnité de défrichement dans le cas où la terre retrouve une vocation agricole.

M. Martial Saddier. Défendu.

Mme la rapporteure. Défavorable, pour les mêmes raisons que pour l’amendement CD360.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle passe à l’amendement CD1034 de M. Gérard Menuel.

M. Gérard Menuel. Défendu.

Mme la rapporteure. Défavorable : ce projet doit s’attacher à favoriser le reboisement de qualité. Adopter cette disposition constituerait un bien mauvais signal.

Mme la secrétaire d’État. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CD339 rectifié de M. Dino Cinieri.

M. Alain Leboeuf. Défendu.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD163 de la rapporteure.

Puis elle étudie les amendements identiques CD1045 du Gouvernement et CD1067 de la rapporteure.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement vise à préciser dans un décret en Conseil d’État les critères permettant de déterminer l’équipement indispensable à la mise en valeur et à la protection des bois et forêts, et de définir ce que sont la préservation et la restauration du patrimoine naturel, ainsi que la nature des mesures qui constituent les annexes indispensables aux bois et forêts et des documents de gestion concernés. Cette proposition permet de clarifier et d’encadrer la mise en œuvre de l’exception au régime d’autorisation du défrichement.

Mme la rapporteure. Je retire mon amendement.

M. Martial Saddier. Madame la ministre, pouvez-vous vous engager à associer la filière bois et les collectivités territoriales à l’élaboration du décret ?

Mme la secrétaire d’État. Je m’engage à transmettre ce souhait au ministre de l’agriculture qui portera ce décret.

L’amendement CD1067 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD1045.

Puis elle examine les amendements identiques CD80 de M. Jean-Marie Sermier, CD236 de M. Martial Saddier, CD341 de M. Dino Cinieri, CD667 de M. Jean-Yves Caullet, CD811 de M. Gérard Menuel et CD858 de M. Stéphane Demilly.

M. Alain Leboeuf. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 11 et 12. Ces dispositions méritent d’être inscrites dans un décret et non dans le texte de loi.

M. Jean-Marie Sermier. La loi d’avenir pour l’agriculture du 13 octobre 2014 a prévu la rédaction d’un décret d’application pour la mesure proposée au II de l’article 68 sexies. Ce décret devrait être publié dans les semaines à venir. Il est difficile de modifier le texte alors que le décret serait susceptible d’apporter des éléments d’explication.

M. Stéphane Demilly. Je m’associe aux propos qui viennent d’être tenus.

M. Jean-Yves Caullet. Défendu.

M. Martial Saddier. Défendu.

Mme la rapporteure. Favorable.

Mme la secrétaire d’État. Sagesse.

La Commission adopte les amendements.

Elle aborde les amendements identiques CD647 de M. Christophe Bouillon et CD840 de M. Lionel Tardy.

Mme Viviane Le Dissez. L’amendement proposé permet de ne pas pénaliser les petites communes rurales et leurs EPCI, et de relancer le dispositif de contractualisation – chartes et contrats Natura 2000 –, actuellement largement sous-utilisé. Cette relance est nécessaire pour permettre à l’État de remplir ses engagements communautaires et prévenir une potentielle condamnation de la France par la Cour de Justice de l’Union européenne.

M. Martial Saddier. Au fil des projets de lois de finances, le dispositif a été modifié, induisant un impact financier important pour les petites communes rurales. L’amendement proposé permet de ne pas pénaliser ces communes et leurs EPCI à fiscalité propre, et de relancer le dispositif de contractualisation pour les chartes et contrats Natura 2000, actuellement largement sous-utilisé. Dans certains cas bien précis – notamment lorsque le montant de l’exonération est supérieur à 10 % du budget annuel de fonctionnement de la collectivité –, il convient de revenir à une compensation totale. La question est vitale.

Mme la rapporteure. Le sujet est important et j’essaie d’y travailler depuis longtemps. Je suis favorable à ces amendements : en effet, il existe des communes qui comportent des zones Natura 2000 ou des zones humides, mais qui ne peuvent pas se développer. Il est indispensable de les compenser plus fortement.

Mme la secrétaire d’État. Indépendamment du fond, la taxe foncière sur les propriétés non bâties représente un mécanisme de portée générale, qui doit faire l’objet d’un débat dans le cadre des lois de finances. Je propose donc le retrait de ces amendements.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 68 sexies ainsi modifié.

TITRE VI
PAYSAGE

Chapitre Ier
Sites

Article 69
(articles L. 341-1, L. 341-2, L. 341-9, L. 341-10, L. 341-12, L. 341-13 du code de l’environnement, article L. 341-1-1 [nouveau] du code de l’environnement, articles L. 143-8, L. 630-1 et L. 641-1 du code du patrimoine)

Réforme de la procédure d’inscription des monuments naturels et des sites

L’objet de cet article est de réformer la procédure d’inscription des sites et des monuments naturels sur les listes départementales, et de simplifier la procédure de classement.

À compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi, il ne sera plus possible d’inscrire de nouveaux sites sur les listes départementales.

Le projet de loi introduit, en conséquence, un nouveau dispositif visant à trier les monuments et sites déjà inscrits sur la liste départementale à la date d’entrée en vigueur de la loi.

Avant le 1er janvier 2026, ceux-ci font alternativement l’objet :

– d’une inscription sur une nouvelle liste « lorsque leur dominante naturelle ou rurale présente un intérêt paysager justifiant leur préservation » ;

– d’une mesure de classement ou d’une mesure de protection au titre du code sur le patrimoine lorsque « les caractéristiques du site le justifient » ;

– d’une désinscription par décret, lorsque cette mesure est justifiée par leur état de dégradation irréversible ou par leur couverture par une autre mesure de protection prévue par le code de l’environnement.

Par ailleurs, la procédure de classement des sites est simplifiée :

– la consultation du comité massif, en zone de montagne, est supprimée ;

– l’obligation de notifier le classement d’un site est supprimée.

La procédure de notification de l’intention d’exproprier pour classer est supprimée.

Le projet de déclassement devra faire l’objet d’une enquête publique avant un décret en Conseil d’État. Une procédure spéciale est prévue lorsque l’objet du classement a totalement disparu.

L’articulation des autorisations nécessaires en cas de projets de modification est simplifiée en privilégiant une logique d’autorisation unique.

1. Le texte adopté par l’Assemblée nationale

Six amendements ont été adoptés en commission, sur proposition de votre rapporteure, dont un amendement de coordination.

La possibilité de procéder à de nouvelles inscriptions a été rétablie, pour les sites qui présentent un intérêt suffisant pour justifier leur préservation, dans l’attente d’un classement mais sans justifier d’une mesure de classement immédiat. L’inscription est prononcée par arrêté ministériel, après enquête publique. Les effets de cette inscription cessent si, après un délai de dix ans, le site n’a pas fait l’objet d’une mesure de classement ou d’une autre mesure de protection, ou si une telle procédure n’est pas en cours.

L’échéance fixée pour le traitement des sites inscrits antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi est ramenée du 1er janvier 2026 au 1er janvier 2025.

Pour les sites inscrits antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi, l’inscription sur la nouvelle liste établie par arrêté ministériel requiert une consultation du public, en sus de la consultation de la CSSPP.

La procédure de désinscription par décret a également été complétée afin de prévoir une consultation du public.

Les dispositions relatives à l’articulation des autorisations ont été étendues aux immeubles adossés aux immeubles classés ou à ceux situés dans le champ de visibilité d’un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques. Les autorisations spéciales obtenues au titre des sites classés valent alors également autorisations préalables au titre des monuments historiques, après avis de l’architecte des bâtiments de France. Cette modification étend ainsi le principe de l’autorisation unique au cas de superposition des dispositifs aux abords des monuments historiques.

Onze amendements ont été adoptés en séance publique, sur proposition de votre rapporteure, dont quatre amendements de précision, un amendement rédactionnel et un amendement corrigeant une erreur de référence. Deux amendements coordonnant le code de l’environnement et celui du patrimoine ont également été votés.

La possibilité de procéder à de nouvelles inscriptions, rétablie en commission, a été limitée aux espaces qui nécessitent une vigilance particulière en raison de leur proximité immédiate avec un site classé ou en cours de classement et devient complémentaire de la mesure de classement, lorsque les sites concernés sont soit enclavés dans un site classé ou en cours de classement, soit situés dans sa périphérie. Ce dispositif vise à confier aux nouvelles inscriptions un rôle de complément par rapport aux sites classés. La possibilité d’inscrire de nouveaux sites autonomes, dans l’attente de leur classement dans un délai de dix ans, est donc supprimée.

La consultation du public pour l’inscription sur la nouvelle liste établie par arrêté ministériel a été précisée afin de faire référence à la mise à disposition du public selon les modalités prévues aux II à IV de l’article L. 120-1 du code de l’environnement.

Le public est consulté de la même façon pour toute désinscription.

2. Les modifications apportées par le Sénat

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté un amendement déposé par le rapporteur visant à rétablir la procédure telle qu’elle existe actuellement dans le code de l’environnement tout en conservant les dispositions relatives à la révision du stock.

En Séance publique, le Sénat a adopté trois amendements dont un de coordination.

Le premier amendement soutenu par M. Robert Laufoaulu et des sénateurs du parti Les républicains confie à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, le rôle d’autorité saisie pour avis dans le cadre d’une procédure de désinscription d’un site justifiée par l’état de dégradation irréversible ou par sa couverture par une autre mesure de protection prévue au présent code ou au code du patrimoine.

Le second amendement présenté par le Gouvernement a supprimé la disposition prévoyant un décret d’application qui n’était plus nécessaire.

3. La position de votre commission

En commission, deux amendements rédactionnels et un amendement de correction d’une erreur de référence ont été adoptés.

Ont été aussi adoptés :

– un amendement rétablissant la consultation de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages au cours de la procédure de désinscription d’un site justifiée par l’état de dégradation irréversible ou par sa couverture par une autre mesure de protection prévue au présent code ou au code du patrimoine.

– un amendement défendu par votre rapporteure visant à assurer que, lors de la désinscription d’un monument naturel ou d’un site sur une liste départementale, la couverture par une autre mesure de protection ne se traduise pas par un affaiblissement du niveau de protection.

*

* *

La Commission adopte les amendements rédactionnels CD44 et CD45 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD551 de Mme Michèle Bonneton et CD41 de la rapporteure.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement concerne la commission supérieure des sites, perspectives et paysages. La protection des sites est une politique menée depuis plus d’un siècle dans notre pays. Une première loi a été votée dès 1906 pour protéger les monuments naturels et les sites. Il a fallu revenir à de nombreuses reprises pour améliorer les dispositifs de protection des sites et l’on est passé d’une protection localisée à de plus grands ensembles.

L’article 69 prévoit des dispositions de déclassement des sites lorsque ceux-ci ne remplissent plus les conditions de classement, notamment parce qu’ils sont trop dégradés. Cette politique de déclassement a besoin d’une vision locale que j’approuve, et c’est ce que propose l’article 69 dans son alinéa 6, mais cette vision locale doit être également mise en perspective au niveau national. Dans sa rédaction sortie du Sénat, s’il est bien prévu que les commissions départementales de la nature des sites et des paysages soient consultées, en revanche il n’en est rien de la commission supérieure des sites, perspectives et paysages. Or, dans la pratique, cette commission est consultée.

Je vous propose d’inscrire dans la loi que la consultation de la commission nationale des sites, perspectives et paysages ne soit plus le résultat d’un simple usage, mais l’application d’une procédure prévue par la loi.

Mme la rapporteure. Avis favorable. Je défends, en effet, un amendement proche.

Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable à l’amendement de Mme Laurence Abeille. Je le préfère à celui de la rapporteure, qui ne prévoit que la commission supérieure des sites, perspectives et paysages, à l’exclusion de la commission départementale. Les avis de l’une comme de l’autre me semblent nécessaires.

M. Martial Saddier. Voilà qui ajoute une lourdeur supplémentaire et signifie un dessaisissement de l’échelon local.

Mme la secrétaire d’État. C’est tout l’inverse !

M. Gilles Lurton. Je ne vois pas du tout où l’avis de l’échelon local est ajouté.

Mme la secrétaire d’État. Mme Laurence Abeille propose d’ajouter à cette consultation, qui existe déjà, celle de l’échelon national.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous ajouterions au contraire la consultation de la commission supérieure des sites, perspectives et paysages à la consultation de la commission départementale de la nature des sites et des paysages, déjà prévue.

L’amendement CD41 de la rapporteure est retiré.

La Commission rejette l’amendement CD551.

Puis elle examine l’amendement CD42 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à assurer que, lors de la désinscription d’un monument naturel ou d’un site d’une liste départementale, la couverture par une autre mesure de protection ne se traduise pas par un affaiblissement du niveau de la protection.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement – par treize voix contre onze.

Puis elle adopte l’amendement CD43 rédactionnel de la rapporteure.

La Commission adopte ensuite l’article 69 ainsi modifié.

Article 71
(article L. 341-19 du code de l’environnement)

Coordination

Cet article modifie l’article L. 341-19 du code de l’environnement afin de tirer les conséquences des dispositions de l’article 69 du présent projet de loi. À cet effet :

– il modifie une référence suite à la réécriture de l’article L. 341-1 et à l’insertion de l’article L. 341-1-3, auquel est désormais prévue l’obligation, inchangée, d’aviser l’administration quatre mois avant de procéder à des travaux autres que pour exploitation ou entretien ;

– il supprime la référence à l’obligation de notifier à l’administration l’aliénation d’un monument naturel ou un site classé, suite à la suppression de cette obligation, aujourd’hui prévue au dernier alinéa de l’article L. 341-9.

1. Le texte adopté à l’Assemblée Nationale

Cet article n’a pas été modifié par l’Assemblée nationale.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté un amendement de correction suite à une erreur de référence.

3. La position de votre commission

Cet article a été adopté sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 71 sans modification.

Chapitre II
Paysages

Article 72
(articles L. 350-1 AA, L. 350-1 A et L. 350-1 B [nouveaux] du code de l’environnement)

Atlas de paysages et objectifs de qualité paysagère

Cet article a pour objet de définir la notion de paysage, généralise l’élaboration d’atlas de paysages au niveau de chaque département et précise la notion d’objectifs de qualité paysagère.

1. Le texte adopté par l’Assemblée nationale

Trois amendements ont été adoptés en commission à l’initiative de votre rapporteure, dont un amendement rédactionnel. Le deuxième amendement a supprimé l’obligation d’élaborer un atlas de paysage supprimant également la référence au département, tant pour son périmètre que pour son niveau d’élaboration. Le troisième amendement a en outre modifié le contenu des objectifs de qualité paysagère.

De plus, quatre amendements ont été adoptés en séance publique dont un sous-amendement. Sur l’initiative du Gouvernement, une définition du paysage a été inscrite dans le code de l’environnement. De plus, les objectifs de qualité paysagère ont été précisés. Enfin, à l’initiative de la rapporteure, une nouvelle définition des éléments de paysages a été insérée afin de l’étendre explicitement au bâti.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté six amendements dont deux en commission et quatre en Séance publique.

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté deux amendements soutenus par le rapporteur :

– le premier amendement précise l’échelle de l’élaboration des atlas de paysages ainsi que son caractère systématique. L’objectif est de couvrir l’ensemble du territoire national. Ce premier amendement introduit aussi le principe d’une révision périodique afin de prendre en compte les évolutions du paysage ;

– le second amendement modifie les objectifs de qualité paysagère en supprimant la référence aux éléments du paysage. Le rapporteur a voulu équilibrer le rôle de l’atlas de paysages au regard des objectifs de qualité paysagère fixés dans la charte du parc naturel régional et dans le projet d’aménagement et de développement durables (PADD) du Scot. La référence aux éléments de paysage est supprimée, puisque, selon le rapporteur, cette échelle ne correspond pas à celle d’un Scot ou d’une charte de PNR, tout comme l’énumération, qualifiée de « particulièrement imprécise », des éléments de paysage.

En Séance publique, le Sénat a adopté quatre amendements dont un de précision rédactionnelle.

Le deuxième amendement, déposé par le Gouvernement, supprime la référence, jugée inutile, à un décret d’application du présent article.

Le troisième amendement, présenté par M. André Trillard, introduit au sein de l’article une référence au rôle des éleveurs, qui sont des acteurs socio-économiques façonnant et entretenant les paysages.

Le quatrième amendement, soutenu par le rapporteur, a supprimé la prise en compte de l’atlas de paysages par les objectifs de qualité paysagère inscrits dans les chartes de parcs naturels régionaux et les schémas de cohérence territoriale.

3. La position de votre commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel.

En outre, deux autres amendements ont été adoptés :

– le premier a introduit la prévention des nuisances lumineuses définie à l’article L. 583-1 du code de l’environnement au sein des objectifs de qualité paysagère. L’objectif est de parvenir à une prise de conscience concernant les effets néfastes de la pollution lumineuse nocturne ;

– le second amendement rétablit la définition des éléments de paysage adoptée à l’Assemblée nationale et supprimé au Sénat. Les éléments de paysages permettent en effet de définir les critères retenus pour apprécier la qualité du paysage et d’établir de manière plus précise les objectifs de qualité paysagère.

*

* *

La Commission adopte l’article CD46 rédactionnel de la rapporteure.

Puis elle examine les amendements identiques CD215 de M. Martial Saddier et CD301 de M. Dino Cinieri.

M. Jean-Marie Sermier. Il s’agit de proposer que l’atlas des paysages soit réalisé en concertation avec les acteurs socio-économiques du territoire. Le proverbe chinois a beau dire que « le paysage appartient à celui qui le regarde », celui-ci n’en est pas moins façonné à la fois par la nature et par les hommes, notamment par les agriculteurs. Il nous semble donc important que ces derniers, tous comme les habitants des territoires, puissent participer à l’élaboration des atlas réalisés par les collectivités.

M. Alain Leboeuf. Pour les mêmes raisons, je trouve important que nous ajoutions cet élément dans l’article 72.

Mme la rapporteure. Si vous lisez le texte de l’article, vous voyez que le Sénat a déjà inclus par deux fois dans cet article une référence aux acteurs socio-économiques. Avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable à la concertation de ces acteurs, dont la position doit être prise en compte, mais je ne suis pas favorable à ce que nous fassions de cette consultation une obligation législative. Les atlas sont en effet des éléments de connaissance, non prescriptifs. Le texte précise déjà que l’atlas doit tenir compte des valeurs accordées par les acteurs socio-économiques aux paysages. Il invite à prendre en compte leur point de vue, sans imposer de contrainte quant aux modalités à mettre en œuvre pour le faire. Avis défavorable.

M. Martial Saddier. Tenir compte ne signifie certes pas la même chose qu’être élaboré en concertation. Ce serait tout de même le minimum que de prévoir la consultation en amont des chambres consulaires et des collectivités territoriales. J’y verrais également un avantage du point de vue des coûts, car la concertation éviterait toute redondance des études financées çà et là.

M. Jean-Pierre Vigier. Si l’on est contre cet amendement, l’on est contre le développement économique. Or les territoires meurent sans les acteurs économiques…

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Allons, il ne s’agit que d’un atlas des paysages !

M. Alain Leboeuf. Ces acteurs sont en permanence sur le terrain. En quoi serait-il gênant qu’ils soient associés à l’élaboration de cet atlas ? Les agriculteurs ont une connaissance profonde du terrain et leur présence a besoin d’être affirmée au stade de la concertation.

La Commission rejette les amendements. (Contestations)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Que de défiance ! Il y a eu autant de voix pour que de voix contre (dix) : les amendements ne sont donc pas adoptés.

L’amendement CD581 de M. Bertrand Pancher est retiré.

La Commission examine les amendements identiques CD509 de Mme Laurence Abeille, CD648 de M. Jean-Paul Chanteguet et CD774 de M. Joël Giraud.

Mme Laurence Abeille. Dans ce chapitre consacré aux paysages, je voudrais attirer l’attention sur la prévention des nuisances lumineuses. Mon amendement vise à contribuer à l’atténuation de leur impact.

Plus de onze millions de points lumineux sont installés en France et plus de 3,5 millions d’enseignes lumineuses. Les points lumineux ont progressé de 89 % en 20 ans et leur durée d’éclairement est passée d’environ de 2 100 à 3 500 heures entre 1992 et 2005, avec en 2012, une « moyenne » de 3 300 heures. Cela a créé en France une augmentation de 94 % de lumière artificielle émise la nuit entre le début des années 1990 et 2012 pour le seul éclairage public.

Nous voyons donc bien qu’en termes de paysage, la question des nuisances lumineuses est devenue un souci. La prévention de ces nuisances mériterait donc d’être incluse à l’alinéa 4 de l’article que nous examinons.

M. Olivier Falorni. L’amendement CD774 est défendu.

Mme la rapporteure. Avis favorable. Nous en avons déjà parlé.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements identiques.

Puis elle examine l’amendement CD47 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rétablir l’alinéa adopté par l’Assemblée nationale et supprimé par le Sénat. Les éléments de paysage permettent de définir les critères retenus pour apprécier la qualité du paysage, comme ils permettent d’établir de manière plus précise les objectifs de qualité paysagère. L’énumération de ces divers éléments donne des orientations à ceux qui élaborent les atlas de paysages.

Mme la secrétaire d’État. Cette énumération donne en effet des exemples concrets et utiles. Elle résulte d’un travail de réécriture, au cours de la première lecture, entre le Gouvernement et le rapporteur. Pourtant, elle alourdit l’écriture de la loi, où elle n’a pas toute sa place. Je la verrais plutôt insérée dans un guide méthodologique. C’est pourquoi je demande le retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 72 ainsi modifié.

Article 72 bis AA
(article L. 350-3 [nouveau] du code de l’environnement)

Protection des allées et des alignements d’arbres

(supprimé)

Cet article, adopté au Sénat, instaure un régime de protection pour les allées et alignements d’arbres.

1. Le texte adopté au Sénat

L’article adopté prévoit que le fait de porter atteinte à un arbre ou à plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres est interdit sauf exceptions liées à l’état sanitaire et esthétique de l’arbre et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d’autres mesures.

Ce nouveau régime prévoit aussi un régime de compensation, décliné en un volet financier et un volet en nature.

Enfin, le régime prévoit un régime de sanctions.

2. La position de votre commission

L’article a été supprimé en commission. En effet, le régime apparaît trop complexe à mettre en œuvre. Par ailleurs, de nombreux dispositifs permettent aujourd’hui de préserver les arbres comme les documents d’urbanisme qui peuvent les protéger de tout arrachage, à travers les espaces boisés classés ou les éléments de paysage, par la trame verte et bleue qui identifie les schémas régionaux de cohérence écologique les continuités écologiques. Des dispositions peuvent aussi être prises par les préfets pour protéger les alignements d’arbres.

*

* *

La Commission examine les amendements identiques CD68 de M. Guillaume Chevrollier, CD81 de M. Jean-Marie Sermier, CD240 de M. Martial Saddier, CD342 de M. Dino Cinieri, CD564 de M. Stéphane Demilly et CD812 de M. Gérard Menuel.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Tous ces amendements sont défendus.

M. Guillaume Chevrollier. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article qui vise en effet à sanctuariser tous les arbres et à interdire tout abattage. Or il est nécessaire, pour entretenir les haies et du bois, de pouvoir abattre les arbres. Créer un régime administratif à chaque arbre revient à les sanctuariser tous, sans possibilité de gérer les alignements d’arbres, de modifier la composition des espèces d’arbres dans une haie, ou de produire tout simplement du bois pour la biomasse.

En outre, de nombreux dispositifs permettent déjà aujourd’hui de préserver les arbres. Cet article est à contresens de la vision dynamique de la biodiversité proposée en début du projet de loi biodiversité et apporte une rigidité excessive et inopportune.

M. Jean-Marie Sermier. Je confirme cette analyse. Il existe déjà un certain nombre de mesures pour sauvegarder les arbres et les haies. Ainsi, à Dole, un périmètre de sauvegarde et de mise en valeur est défini, à l’intérieur duquel sont répertoriés tous les arbres déjà présents ; ils ne sauraient être abattus sans autre procès. En revanche, nous ne les conservons pas non plus systématiquement s’il n’y a pas lieu.

M. Martial Saddier. Un arbre est un être vivant. Il a un cycle de vie. Comme élu local, je sais qu’il n’y rien de plus terrible que d’en couper un. Mais cet abattage n’est que l’issue naturelle. En mettant même de côté la problématique de la sécurité et des maladies dont il peut être porteur, je souligne que, lorsque l’arbre est à maturité, il ne joue plus pleinement son rôle de captation du dioxyde de carbone et de diffusion d’oxygène. En revanche, même abattu, le bois continue à stocker du carbone et contribue ainsi à la lutte contre le changement climatique.

M. Yannick Favennec. Plusieurs outils existent déjà pour protéger les arbres, tels que les plans locaux d’urbanisme. Ces derniers peuvent identifier des éléments de paysages et des espaces de continuité écologique. En outre, une inscription ou un classement peuvent porter sur des allées ou sur des alignements d’arbres. Les préfets sont également en mesure de protéger les alignements d’arbres. Je crains donc que cet article ne fige les allées et alignements dans le code de l’environnement, ce qui nous paraît contraire au caractère évolutif des arbres. Je suis donc, moi aussi, partisan de sa suppression.

M. Alain Leboeuf. Nous partageons tous la volonté d’alléger les textes qui nous sont présentés. En l’occurrence, cet article n’ajoute rien aux instruments juridiques disponibles sur le terrain. Il est grand temps d’en alléger le projet de loi. Ne faisons pas à Paris le contraire de ce que nous prétendons vouloir quand nous sommes sur le terrain.

M. Gérard Menuel. Eh oui, les arbres vivent… et meurent !

Mme la rapporteure. J’ai déposé plusieurs amendements rédactionnels qui prennent en compte, je crois, vos préoccupations et vos inquiétudes. Dans la nouvelle rédaction que je vous propose, seuls les allées et alignements d’arbres qui bordent les voies de communication sont concernés par le nouveau dispositif. En outre, des dérogations peuvent être délivrées pour des besoins de construction. Par ailleurs, la référence à la notion de domaine vital de l’arbre, très floue, a été supprimée. Enfin, les sanctions pour la violation de ce dispositif seront fixées par le Gouvernement.

Je souhaite néanmoins que l’on conserve l’esprit de ce nouveau dispositif, qui sanctuarise les allées et alignements d’arbres qui bordent les voies de communication, qui font partie du paysage français et sont bénéfiques à de nombreux points de vue, y compris celui de la sécurité routière. Bien que d’autres outils de protection existent déjà, nous souhaitons, par cet article, marquer notre attachement à cette partie du patrimoine historique de la France. J’émets donc un avis défavorable à la suppression de cet article. Je vous demanderai d’appliquer plutôt les modifications que j’ai faites.

Mme la secrétaire d’État. Ces arbres représentent une forte valeur patrimoniale et une source d’aménité sur notre territoire. Toutefois, des outils tels que les espaces boisés classés définis par la loi relative aux paysages de 1993 ou encore les sites classés sont déjà mobilisables pour en assurer la protection. Je m’en remets à la sagesse des membres de la commission.

La Commission adopte les amendements. (Murmures de contestation)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous précise les scores : dix voix pour l’adoption, neuf contre.

Les amendements CD48, CD53, CD52, CD1073, CD50, CD54 et CD49 de la rapporteure tombent.

Par conséquent, l’article 72 bis AA est supprimé.

Article 72 bis A
(article 7 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture)

Mission paysagère des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement

Cet article adopté au Sénat, confère une mission paysagère aux conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement.

1. Le texte adopté au Sénat

Les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), présents dans chaque département, ont pour mission de développer l’information, la sensibilité et l’esprit de participation du public dans le domaine de l’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement.

Les CAUE participent déjà à l’élaboration de nombreux atlas de paysages par les collectivités, ainsi qu’à la prise en compte des enjeux paysagers dans les documents de planification.

Au vu de la prise en compte des enjeux paysagers dans les politiques d’aménagement du territoire, le Sénat a ainsi rajouté une mission paysagère aux CAUE.

2. La position de votre commission

L’article a été adopté sans modification.

*

* *

La Commission adopte l’article 72 bis sans modification.

Article 72 bis
Paysagistes concepteurs

Cet article, inséré en séance publique à l’Assemblée nationale, encadre l’usage de la dénomination « paysagiste concepteur ».

1. Le texte adopté à l’Assemblée

Le diplôme d’État de paysagiste a été créé par le décret n° 2014-1400 du 24 novembre 2014 portant création du diplôme d’État de paysagiste et fixant les conditions de recrutement par concours et de formation des étudiants. Cette réforme a remplacé, depuis la rentrée 2015, la formation et le diplôme de paysagiste DPLG (diplômé par le Gouvernement).

Un paysagiste concepteur intervient au titre des études et de la conception des projets d’aménagement ainsi que pour assurer la maîtrise d’œuvre des projets.

L’article adopté à l’Assemblée prévoit :

– que la dénomination « paysagiste concepteur » est réservée, pour l’exercice professionnel, aux personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation spécifique à la conception paysagère, délivré par un établissement de formation agréé ;

– que le bénéfice de cette dénomination pour les praticiens en exercice à la date de publication de la présente loi est soumis à des conditions de formation ou d’expériences professionnelles analogues à celles des titulaires du diplôme de « paysagiste concepteur ».

2. Les modifications apportées par le Sénat

Un amendement rédactionnel a été adopté au Sénat.

3. La position de votre commission

L’article a été adopté sans modification.

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* *

La Commission adopte l’article 72 bis sans modification.

Article 74
(article L. 621-29-8 du code du patrimoine)

Interdiction de la publicité sur les bâches d’échafaudages installées sur les immeubles classés

(suppression maintenue)

Cet article, inséré en séance publique à l’Assemblée nationale, abroge l’article L. 621-29-8 du code du patrimoine, qui autorise la publicité sur les bâches d’échafaudage installées sur les immeubles classés.

1. Le texte adopté à l’Assemblée nationale

Contre l’avis du Gouvernement et de la rapporteure, l’article adopté à l’Assemblée abroge l’article L. 621-29-8 du code du patrimoine, qui permet à l’autorité administrative chargée des monuments historiques d’autoriser l’installation de bâches d’échafaudage comportant un espace dédié à l’affichage, dans le cadre de l’instruction des demandes d’autorisation de travaux sur les immeubles classés ou des demandes d’accord de travaux sur les immeubles inscrits. Les recettes perçues à ce titre sont affectées au financement des travaux.

2. Les modifications apportées par le Sénat

Jugeant cette disposition inopportune dans la mesure où elle prive les entreprises d’une source de revenus utile, le Sénat a supprimé l’article 74.

3. La position de votre rapporteure et les travaux de la commission

Pour les mêmes raisons que le Sénat, votre commission n’a pas souhaité rétablir cet article.

*

* *

La Commission l’amendement CD510 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Nous avions introduit, à l’Assemblée nationale, un dispositif qui concerne le paysage urbain, souvent oublié, à savoir l’interdiction des bâches publicitaires géantes qui fleurissent sur les échafaudages lors de travaux, notamment dans les cœurs de ville et dans les lieux de grand passage.

Il suffit de sortir de l’Assemblée nationale pour apercevoir, par-delà le pont de la Concorde, des bâches géantes qui défigurent le paysage urbain. J’en prends régulièrement des photos. Il y en a aussi d’autres le long de la Seine.

L’article L. 621-29-8 du code du patrimoine prévoit que « par dérogation à l’article L. 581-2 du code de l’environnement, dans le cadre de l’instruction des demandes d’autorisation de travaux sur les immeubles classés ou des demandes d’accord de travaux sur les immeubles inscrits, l’autorité administrative chargée des monuments historiques peut autoriser l’installation de bâches d’échafaudage comportant un espace dédié à l’affichage. Les recettes perçues par le propriétaire du monument pour cet affichage sont affectées par le maître d’ouvrage au financement des travaux. »

En fait, cette dérogation a été très largement utilisée, mais pas du tout dans le sens qui était prévu initialement. Ce n’est pas un simple espace dédié à l’affichage que l’on trouve sur ces bâches, mais un affichage complet sur la bâche. Je souhaite donc que nous abrogions cette disposition du code de patrimoine, de façon à retrouver dans le paysage urbain la qualité architecturale que nous apprécions.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas convaincue par la pertinence de cet amendement. C’est pourquoi j’en demande le retrait.

Mme la secrétaire d’État. La question relève plutôt du ministre chargé de la culture. Elle pourrait être plus utilement abordée lors de l’examen du prochain projet de loi sur le patrimoine. J’ajoute que, au cours des débats au Sénat, la ministre Mme Ségolène Royal a indiqué que ces affichages ont déjà permis de financer des travaux de rénovation de monuments historiques, à hauteur de vingt millions d’euros par an.

M. Martial Saddier. À moins que ces bâches ne soient fixées aux édifices par de la glu qui puisse attirer des oiseaux, je me demande vraiment ce que l’amendement vient faire dans ce projet de loi. Nous aurons d’autres fenêtres de tir législatives pour examiner cette question, certes importante. Pour l’heure, nous réclamons le retrait de l’amendement.

M. Jean-Pierre Vigier. Je rappelle qu’il s’agit de bâches publicitaires, posées de manière temporaire, pour la durée des travaux… Elles font d’ailleurs de la réclame pour nos entreprises, qui en ont tant besoin !

Mme Laurence Abeille. Je ne retire pas mon amendement. Je ne crois pas que cette publicité profite à des entreprises françaises. Les produits vantés sont plutôt des smartphones ou des montres qui ne sont pas de fabrication française. Ces opérations de réclame ne sont donc pas utiles à l’économie française ; elles n’ont d’autre but que de faire rapporter de l’argent. Mais je reconnais que beaucoup de monuments souffrent d’un problème de financement de leurs travaux de rénovation.

Quant à dire que cette disposition n’aurait pas sa place dans ce projet de loi, je rappelle tout de même que son titre inclut désormais le mot même de paysage, que nous y avons ajouté. Elle a donc toute sa place dans ce texte.

La Commission rejette l’amendement.

Elle maintient donc la suppression de l’article 74.

*

La Commission adopte enfin l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Par ordre chronologique

M. Guillaume Sainteny, GS Conseil

Agrosolutions

Mme Carole Hernandez Zakine, responsable de l’équipe Expertises

M. Raphaël Zarader, consultant, Rivington

Muséum national d’histoire naturelle

M. Bruno David, président

M. Michel Guiraud, directeur des collections

Ministère de la Justice - Direction des affaires civiles et du sceau

Mme Carole Champalaune, directrice

M. Jean-François Mellet, magistrat, adjoint au chef du bureau droit immobilier et du droit de l’environnement

M. Jean-François Le Coq, magistrat, rédacteur au bureau du droit des obligations

Mme Françoise Gaill, ancienne directrice de l’Institut écologie et environnement du CNRS, coordinatrice du conseil scientifique de la Plateforme océan et climat, présidente du conseil stratégique et scientifique de la Flotte océanographique française

Initiatives Biotechnologies Vertes (IBV)

M. Marc-Richard Molard, délégué permanent d’IBV

Mme Delphine Guey

M. John-David Nahon, responsable Affaires Publiques chez Thomas Marko et Associés

Ministère de l’écologie - Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature

M. Paul Delduc, directeur général

M. François Mitteault, directeur de l’eau et de la biodiversité

M. Olivier Mastain, chef de projet auprès du directeur de l’eau et de la biodiversité

Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () Titre initial du projet de loi.

2 () Différentes sources de valeurs peuvent être distinguées, dont les valeurs d’usage, pour obtenir une valeur économique totale des services environnementaux. Ces notions sont d’ordre économique plus que juridique (valeur d’usage direct : valeur d’un service qui est utilisé pour lui-même ; valeur d’usage indirect : service qui entre en compte dans la production d’un bien ou service ; ou encore valeur d’existence : valeur accordée intrinsèquement à l’existence d’un bien ou service environnemental indépendamment de son usage).

3 () Arrêt n° 3439 du 25 septembre 2012 de la Chambre criminelle.

4 () Voir le rapport n° 519 de M. Alain Anziani, fait au nom de la commission des lois du Sénat, déposé le 17 avril 2013.

5 () Directive 98/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques.

6 () Afin que cette mesure ne soit pas déclarée irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution, l’article précise en outre que ces nouveaux membres ne pourront percevoir aucune rémunération ni indemnité en raison de ces nouvelles fonctions.

7 () Le conseil d’administration comprend quarante-quatre membres titulaires et quarante-quatre membres suppléants, dont : douze représentants titulaires de l’État et douze suppléants ; un député titulaire et un député suppléant nommés par le président de la commission permanente compétente de l’Assemblée nationale ; un sénateur titulaire et un sénateur suppléant nommés par le président de la commission permanente compétente du Sénat ; quatre représentants titulaires d’établissements publics nationaux œuvrant dans le champ d’activité de l’agence et quatre suppléants ; quatre personnalités qualifiées titulaires et quatre suppléants ; cinq représentants titulaires des collectivités territoriales et de leurs groupements, dont au moins un représentant d’une collectivité de montagne, et cinq suppléants ; quatre représentants titulaires des secteurs économiques concernés et quatre suppléants ; trois représentants titulaires des associations agréées de protection de l’environnement et trois suppléants ; deux représentants titulaires des gestionnaires d’espaces naturels et deux suppléants ; trois représentants titulaires élus du personnel et trois suppléants ; cinq représentants titulaires de chacun des cinq bassins écosystémiques ultramarins et cinq suppléants.

8 () Loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

9 () Les « services écosystémiques » peuvent être définis comme les bénéfices que les humains retirent des écosystèmes sans avoir à agir pour les obtenir.

10 () Fixés par arrêté du 26 novembre 2015.

11 () Loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d’établissements publics de coopération culturelle.

12 () Les « hectares admissibles » au régime du paiement unique visés par le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003.

13 () Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles.

14 () Une même compétence ou une même mission ne peut pas simultanément être transférée et être déléguée par la collectivité compétente.

15 () Directive 92 / 43 / CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

16 () Directive 2009/147/CE, du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages.

17 () Loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République.

18 () Loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l’exploration du plateau continental et à l’exploitation de ses ressources naturelles.

19 () L’article 1er de la loi du 30 décembre 1968 dispose que :

« La République française exerce, conformément à la Convention de Genève sur le plateau continental du 29 avril 1958, publiée par le décret n° 65-1049 du 29 novembre 1965, des droits souverains aux fins de l’exploration du plateau continental adjacent à son territoire et de l’exploitation de ses ressources naturelles.

Le plateau continental sur lequel la République française exerce les droits définis ci-dessus est, dans toute son étendue et quels que soient la situation géographique et le statut des territoires auxquels il est adjacent, soumis à un régime juridique unique fixé par la présente loi sous réserve des dispositions des articles 35 et 36. ».

20 () L’article 2 de la loi du 30 décembre 1968 dispose que « toute activité entreprise par une personne publique ou privée sur le plateau continental, en vue de son exploration ou de l’exploitation de ses ressources naturelles, est subordonnée à la délivrance préalable d’une autorisation. ». Il prévoit également qu’ « en ce qui concerne l’exploitation des ressources végétales et des ressources animales appartenant aux espèces sédentaires, les ressortissants des États membres de la Communauté économique européenne sont dispensés de l’autorisation prévue à l’alinéa 1er sauf dans le cas où cette exploitation comporte l’installation d’un établissement de pêche ou de culture marine sur le plateau continental »

21 () Amendements n° 75, 95 rect quinquies, 162 et 440 de M. Courteau, M. Revet, Mme Billon et M. Dantec

22 () Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises

23 () Compte rendu intégral des débats de la séance du 22 janvier 2016.

24 () Convention des Nations Unies sur le droit de la mer conclue à Montego Bay le 10 décembre 1982.

25 () Amendement n° COM-370 de Mme Claireaux et n° COM-322 de Mme Billon.

26 () Cet article dispose notamment qu’« À la fin de l’utilisation du câble sous-marin ou du pipeline, l’exploitant ou, à défaut, le propriétaire de l’installation est responsable de son enlèvement ainsi que de la remise en état du site.

27 () Les activités régies par le code minier et celles relevant de la politique commune de la pêche sont dispensées de l’autorisation mentionnée au premier alinéa de l’article 6.

28 () L’ouverture et la conduite de travaux font l’objet d’une réglementation par le code minier.

29 () Cf. articles L. 123-1 et L. 133-1 du code minier.

30 () Cf. articles L. 123-1 et L. 133-1 du code minier.

31 () Articles L. 124-1 à L.124-9 et L. 134-1 à L.134-12 du code minier.

32 () L’article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que : « La redevance due pour l’occupation ou l’utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l’autorisation. ».

33 () Loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux.

34 () Le II de l’article L. 334-1 du code de l’environnement dispose que : « L’agence anime le réseau des aires marines protégées françaises et contribue à la participation de la France à la constitution et à la gestion des aires marines protégées décidées au niveau international. À cette fin, elle peut se voir confier la gestion directe d’aires marines protégées. Elle apporte son appui technique, administratif et scientifique aux autres gestionnaires d’aires marines protégées et suscite des projets d’aires marines protégées afin de constituer un réseau cohérent. Elle contribue ainsi à la mise en œuvre des engagements internationaux de la France en faveur de la diversité biologique marine et côtière. »

35 () Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.

36 () Jérôme Bignon, Rapport fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et sur la proposition de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, 8 juillet 2015, tome I, p. 303.

37 () Cf. article L. 422 27 du code de l’environnement

38 () L’article 2 de l’arrêté du 3 juin 2011 dispose que : « Entre également dans le champ de compétence de l’Agence des aires marines protégées la catégorie d’aires marines protégées constituée des réserves nationales de chasse ayant une partie maritime, instituées par le ministre chargé de la chasse en application des articles L. 422-27 et R. 422-93 du même code de l’environnement. »

39 () Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement.

40 () Accord du 25 novembre 1999 relatif à la création en Méditerranée d’un sanctuaire pour les mammifères marins.

41 () Protocole relatif aux zones et à la vie sauvage spécialement protégées à la convention pour la protection et la mise en valeur du milieu marin dans la région des Caraïbes.

42 () Proposition de loi pour l’économie bleue, adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 3 février 2016.

43 () Amendements COM-577 et n° 645 de M. Bignon.

44 () Ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme.

45 () L’article L. 141-1 du code de l’environnement dispose que : « Lorsqu’elles exercent leurs activités depuis au moins trois ans, les associations régulièrement déclarées et exerçant leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de la gestion de la faune sauvage, de l’amélioration du cadre de vie, de la protection de l’eau, de l’air, des sols, des sites et paysages, de l’urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances et, d’une manière générale, œuvrant principalement pour la protection de l’environnement, peuvent faire l’objet d’un agrément motivé de l’autorité administrative.

La Fédération nationale des chasseurs, les fédérations régionales des chasseurs, les fédérations interdépartementales des chasseurs et les fédérations départementales des chasseurs sont éligibles à l’agrément mentionné au premier alinéa.

Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, la procédure d’agrément est applicable aux associations inscrites depuis trois ans au moins.

Ces associations sont dites "associations agréées de protection de l’environnement". »

46 () Amendement n° COM-37 de Mme Primas.

47 () C’est-à-dire la faune et la flore présentes dans un lieu donné.

48 () Il s’agit notamment de substances hydrophobes qui s’accumulent dans les couches graisseuses des poissons.

49 () Amendement n° 660 de M. Bignon.

50 () Compte rendu intégral des débats, première séance du jeudi 19 mars 2015.

51 () Séance du 22 janvier 2016.

52 () Compte rendu intégral des débats, séance du 22 janvier 2016.

53 () Rapport d’information n° 42 (2012-2013) de Mme Nicole Bonnefoy, fait au nom de la Mission commune d’information sur les pesticides, déposé le 10 octobre 2012, p. 205.

54 () Il s’agit des poissons migrateurs vivant alternativement en eau douce et en eau salée.

55 () Jérôme Bignon, Rapport fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et sur la proposition de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, 8 juillet 2015, tome I, p. 346.

56 () Compte rendu intégral des débats, séance du 22 janvier 2016.

57 () Compte rendu intégral des débats, séance du 22 janvier 2016.

58 () International convention for the control and management of ships’ ballast water and sediments, adoptée à Londres le 13 février 2014.

59 () Source : http://www.imo.org.

60 () Jérôme Bignon, Rapport fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et sur la proposition de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, 8 juillet 2015, tome I, p. 347.

61 () Amendement n°COM-578.

62 () Amendements n° COM-579, COM-580 et COM-581 de M. Bignon adoptés en commission, amendement n° 646 de M. Bignon adopté en séance, amendement n° 625 du Gouvernement adopté en séance.

63 () Directive 2008/56/CE du Parlement Européen et du Conseil du 17 juin 2008 établissant un cadre d’action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin (directive-cadre stratégie pour le milieu marin.

64 () Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions n° COM/2012/0494 final, La croissance bleue : des possibilités de croissance durable dans les secteurs marin et maritime.

65 () Directive 2014/89/UE du Parlement européen et du Conseil, du 23 juillet 2014, établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime

66 () Article 18 de la directive 2014/89/UE du Parlement européen et du Conseil, du 23 juillet 2014 précitée.

67 () Cf. paragraphe 2 de l’article 2 de la directive du 23 juillet 2014

68 () Compte rendu intégral de la séance du 22 janvier 2016.

69 () Compte rendu intégral de la séance du 22 janvier 2016.

70 () Compte rendu intégral de la séance du 22 janvier 2016 : « cet amendement prévoit une sanction administrative en cas de non-respect de la réglementation relative non seulement aux cotons-tiges, mais aussi aux sacs en plastique et aux assiettes et verres en plastique, afin de rendre plus efficaces les mesures de prévention des déchets marins. »

71 () Amendements n° COM-39, COM-66, COM-96, COM-127, COM-196, COM-502.

72 () Jérôme Bignon, Rapport fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et sur la proposition de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, 8 juillet 2015, tome I, p. 363.

73 () Jérôme Bignon, Rapport fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et sur la proposition de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité, 8 juillet 2015, tome I, p. 368.

74 () Compte rendu intégral des débats, séance du 22 janvier 2016.

75 () Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

76 () L’article L. 112-2 du code des procédures civiles d’exécution définit la liste des biens qui ne peuvent être saisis. Cette liste comprend « les biens que la loi déclare insaisissables ».

77 () Ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement.

78 () Les gardes particuliers assermentés sont commissionnés par un propriétaire ou tout autre titulaire de droits sur une propriété pour surveiller cette propriété. Ils doivent être agréés par le préfet du département dans lequel se situe la propriété (cf. article 29-1 du code de procédure pénale). Ils constatent par procès-verbaux « tous délits et contraventions portant atteinte aux propriétés dont ils ont la garde » (cf. article 29 du code de procédure pénale).

79 () Ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement.

80 () Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, signée à Washington, le 3 mars 1973.