N° 4407 - Rapport de M. Thierry Mariani sur le projet de loi autorisant la ratification du traité entre la République française et la République tchèque relatif à la coopération dans le domaine de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques (n°3906).




N
° 4407

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 janvier 2017.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, autorisant la ratification du traité entre la République française et la République tchèque relatif à la coopération dans le domaine de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques,

PAR M. Thierry MARIANI

Député

——

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 3906.

SOMMAIRE

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Pages

I. LES ENJEUX DE LA COOPÉRATION SPATIALE AVEC LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE 7

II. LE TEXTE DU TRAITÉ : UNE RÉDACTION CLASSIQUE ET MODÉRÉMENT CONTRAIGNANTE 9

III. UN TEXTE SOUMIS À L’APPROBATION DU PARLEMENT POUR DES RAISONS DE FORME JURIDIQUE 11

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

ANNEXE : TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 15

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent traité, signé en 2014, vise à donner un cadre général à la coopération spatiale avec la République tchèque.

Il convient de ne pas en exagérer les enjeux, d’une part car la République tchèque n’est pas, pour l’heure, un des « grands pays » de l’espace, d’autre part et surtout car le texte qui nous est soumis est court, de portée très générale et peu contraignant juridiquement, même s’il apporte quelques garanties utiles, notamment en matière de propriété intellectuelle. Il est donc loisible de se demander pourquoi un tel texte doit prendre la forme solennelle d’un traité international soumis à ratification parlementaire : ce sont des raisons de formalisme juridique qui expliquent cet état de fait.

Pour autant, même si l’on peut trouver excessif ce formalisme, votre rapporteur approuve la ratification d’un texte destiné à développer la coopération dans un domaine, l’espace civil, qui est l’un des points forts technologiques et économiques de la France, et ce avec un autre État membre de l’Union européenne, un pays ami et démocratique.

La République tchèque ne fait pas partie, historiquement, des grands pays associés à l’histoire de la conquête spatiale et ses activités dans ce domaine restent encore limitées.

Cependant, parmi les pays d’Europe centrale, elle est l’un de ceux qui manifestent le plus grand intérêt pour le développement des compétences et des activités spatiales. Elle a une longue tradition d’utilisation de l’espace à des fins scientifiques. Par le passé, plusieurs charges utiles, instruments ou petits satellites, ont été développées. En 2010, enfin, la République tchèque s’est dotée d’un plan national de l’espace.

Par ailleurs, elle a accédé à l’Agence spatiale européenne en 2008, puis placé le domaine spatial au cœur de sa présidence de l’Union européenne en 2009, avant d’obtenir que le siège de l’agence européenne chargée de superviser le programme européen de navigation par satellites Galileo soit implanté à Prague. Il faut à cette occasion saluer la récente entrée en service opérationnelle de celui-ci, les premières applications étant accessibles depuis décembre 2016, après le lancement de la majorité de la constellation de satellites nécessaires.

La France et la République tchèque ont conclu le 16 juin 2008 un Partenariat stratégique dont le domaine spatial constitue l’un des volets concrets. Le plan d’action de ce partenariat stratégique a été renouvelé à l’occasion d’une visite à Prague du Premier ministre Manuel Valls en décembre 2014. Cette relation bilatérale étroite s’appuie sur une sensibilité politique commune, des priorités européennes partagées, ainsi que des échanges économiques substantiels. La France était, en 2015, le 2ème investisseur en République tchèque, avec 500 entreprises françaises implantées qui représentent 100 000 emplois, et le 5ème partenaire commercial du pays. La France est aussi le 3ème partenaire scientifique de la République tchèque, derrière l’Allemagne et les États-Unis.

C’est dans le cadre de ce partenariat stratégique qu’a été négocié et signé le présent traité, premier traité de coopération spatiale conclu par la République tchèque.

Ce traité permettra à la fois de mener des activités de coopération spatiale au niveau institutionnel et d’ouvrir la voie à d’éventuelles coopérations pour notre industrie spatiale.

Certes, le développement encore assez modeste, à l’heure actuelle, des activités spatiales tchèques ne permet sans doute pas d’espérer des réalisations considérables à court terme, ainsi que le reconnaît implicitement l’étude d’impact annexée au présent projet de loi : « plusieurs axes de coopérations sont envisagés (…). Ces pistes, encore préliminaires, feront l’objet de discussions prochaines plus approfondies avec la partie tchèque, lors desquelles l’évaluation des moyens afférents sera discutée ».

Il faut toutefois rappeler que les deux pays ont commencé en 2011 à collaborer dans le domaine de la recherche spatiale en lançant conjointement la mission Taranis (Tool for the Analysis of RAdiation from lightNIng and Sprites), destinée à l’étude des phénomènes orageux dans la haute atmosphère ; ce programme associe des laboratoires français (LPC2E et IRAP) et l’Université Charles de Prague.

Par ailleurs, une journée industrielle spatiale franco-tchèque organisée à Paris en juin 2015 a confirmé l’intérêt de nombreuses sociétés des deux pays pour des perspectives de coopération : tous les grands noms de l’industrie française de l’espace, mais aussi des entreprises de taille intermédiaire et des PME du secteur y ont pris part, pour rencontrer, de l’autre côté, une vingtaine d’entreprises tchèques. Le secteur spatial est l’un des domaines d’excellence de l’offre commerciale française à l’international et toutes les occasions de le promouvoir doivent donc être soutenues.

La rédaction du présent traité est tout à fait classique pour un accord de coopération. Ses dispositions sont de portée générale et généralement peu contraignantes pour les deux parties, étant précisé que la coopération envisagée sera de toute façon menée dans le cadre des lois et règlements nationaux des deux parties (article 1er), dans la limite des ressources budgétaires qu’elles voudront bien y consacrer (article 7) et en fonction des projet concrets qui seront proposés, le traité se limitant à fournir un cadre général.

L’article 1er de l’accord définit l’objet du traité, à savoir le renforcement de la « coopération scientifique et technique dans le domaine de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques » entre les deux pays.

Les articles 2 et 3 définissent respectivement les domaines de la coopération (recherche, formation, développement de systèmes, infrastructures et applications spatiales…) et ses formes éventuelles (consultations ; coordination des stratégies spatiales avec notamment l’élaboration conjointe de propositions dans le cadre de programmes européens ; échanges d’informations, d’étudiants et de chercheurs ; réalisation de projets conjoints…).

Les articles 4 à 8 prévoient les modalités institutionnelles de mise en œuvre de la coopération bilatérale. Les instances nationales chargées de la mise en œuvre du traité seront le Centre national d’études spatiales (CNES) français et le ministère tchèque des transports ; un comité mixte devra en principe se réunir annuellement ; les échanges de personnels seront facilités.

Les articles 9 à 12 – complétés par une annexe concernant l’article 9 – comprennent notamment les dispositions habituelles (mais utiles), en matière de coopération scientifique dans des domaines « sensibles », protégeant la propriété intellectuelle, la confidentialité des informations échangées et le respect des régimes nationaux de classification de certains documents et de contrôle des exportations à usage militaire ou dual.

L’article 13 établit une exonération douanière, classique dans ce type d’accords et à la portée de toute façon limitée entre deux États membres de l’Union européenne (qui échangent entre eux sans droits) : elle permettra d’exonérer les matériels importés depuis un pays tiers à l’Union Européenne et dédouanés par l’un des deux pays puis expédiés sur le territoire de l’autre dans le cadre d’activités de coopération spatiale.

Enfin les articles 14 et 15 portent les dispositions finales du traité : règlement amiable des différends, modalités d’entrée en vigueur et de dénonciation…

On peut s’étonner que l’organisation, dans des termes juridiquement peu contraignants, d’une coopération bilatérale dans un secteur particulier de la recherche justifie la passation d’un texte aussi formel qu’un traité international, de surcroît soumis à ratification parlementaire ; ce d’autant, qu’au moins à court terme, les enjeux concrets de cette coopération demeurent modestes.

En effet, il apparaît que, le plus souvent, les coopérations spatiales bilatérales de la France font seulement l’objet d’accords « inter-agences » (n’ayant pas la qualité d’accords internationaux), passés par le CNES, agence spatiale française, avec ses homologues étrangers. C’est cette solution qui avait été initialement envisagée selon l’étude d’impact : « compte tenu du niveau et du volume anticipé de la coopération franco-tchèque dans ce domaine, il était initialement prévu de mettre en place un accord de niveau interagences ». Mais c’est justement la faible structuration du secteur spatial tchèque qui a écarté cette option : il n’existe pas encore d’agence spatiale tchèque et l’accord ne pouvait donc être conclu qu’avec le gouvernement tchèque, ce qui impliquait qu’il soit signé, de l’autre part, par le gouvernement français.

Le problème posé par la forme juridique de l’accord serait d’ailleurs, d’après l’étude d’impact, l’une des raisons de la longueur des négociations (qui ont duré de 2009 à 2014), aux côtés des débats sur la rédaction des clauses concernant la protection de la propriété intellectuelle.

La dissymétrie des organisations en matière d’activités spatiales entre la France et la République tchèque explique aussi que le présent traité soit soumis à autorisation parlementaire de ratification (en République tchèque, de même, le parlement a autorisé la ratification du traité le 26 novembre 2015, puis cette ratification a été opérée par le Président de la République, M. Milos Zeman, le 3 mai 2016).

Du côté français, en effet, il a été signé par le Gouvernement, mais en quelque sorte au nom du CNES, établissement public autonome, qui sera chargé de mener effectivement la coopération prévue en tant qu’« institution compétente ». L’État s’engage donc pour le CNES. Or, si la plupart des clauses du traité n’ont pas de portée juridique réelle compte tenu de leur rédaction, l’une d’elles au moins en a une : l’article 11 prévoit une renonciation mutuelle des parties et des « institutions compétentes » – donc du CNES – à tout recours en responsabilité pour les dommages à leur personnel ou à leurs biens dans le cadre des activités de coopération (avec des exceptions pour les cas les plus graves ou les plus « sensibles » : atteintes aux personnes, dommages intentionnels, négligences graves et questions de propriété intellectuelle). Et, dans un avis du 12 juin 2003 relatif à un projet de loi autorisant l’approbation d’un accord franco-britannique de soutien logistique mutuel, le Conseil d’État a implicitement considéré qu’une clause de renonciation aux recours susceptible de porter atteinte aux droits d’un tiers (situation du CNES par rapport à l’État), par exemple parce que s’appliquant à lui, impliquait une autorisation législative.

Telles sont les raisons de forme juridique qui ont conduit, dans le cas présent, à la signature d’un texte intergouvernemental et à sa soumission à l’approbation de la Représentation nationale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Au cours de sa séance du mercredi 25 janvier 2017, la commission des affaires étrangères examine, sur le rapport de M. Thierry Mariani, le projet de loi autorisant la ratification du traité entre la République française et la République tchèque relatif à la coopération dans le domaine de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques (n° 3906).

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

M. François Rochebloine. Je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur. Je souhaiterais simplement avoir une petite précision concernant l’état des signatures et des ratifications. Je lis que « le processus de ratification a débuté en mars 2015 en République tchèque. Le parlement tchèque a donné son accord à la ratification du traité le 26 novembre 2015. Le traité a été transmis au président tchèque pour ratification ». Ce n’est pas le parlement tchèque qui ratifie ?

M. le rapporteur. Je ne suis pas spécialiste du droit constitutionnel tchèque. Nous pourrons demander des précisions à nos collègues tchèques lors de la prochaine session du Conseil de l’Europe. Mais en France, le processus est le même que celui décrit : le Parlement autorise la ratification, qui relève ensuite de l’exécutif.

M. Jean-Pierre Dufau. La République tchèque n’a pas d’équivalent du CNES. Vont-ils en créer un ?

M. le rapporteur. Ils l’envisagent.

M. François Loncle, président. Il reste beaucoup à faire en la matière.

M. le rapporteur. C’est un sujet spatial, donc il est par définition infini !

La commission adopte le projet de loi sans modification.

ANNEXE : TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Article unique

Est autorisée la ratification du traité entre la République française et la République tchèque relatif à la coopération dans le domaine de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques (ensemble une annexe), signé à Prague le 8 décembre 2014, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de la ratification figure en annexe au projet de loi (n°3906).

© Assemblée nationale