Marie, Jean, Antoine, Nicolas Caritat de Condorcet

1743 - 1794

Informations générales
  • Né le 17 septembre 1743 à Ribemont ( - Généralité de Soissons - France)
  • Décédé le 29 mars 1794 à Bourg-la-Reine (Seine - Département de Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Présidence(s)

Présidence de l'Assemblée nationale
du 7 février 1792 au 19 février 1792

Mandat(s)

Régime politique
Révolution
Législature
Assemblée nationale législative
Mandat
Du 26 septembre 1791 au 20 septembre 1792
Département
Seine
Groupe
Centre gauche
Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 6 septembre 1792 au 29 mars 1794
Département
Aisne
Groupe
Centre droit

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député à l'Assemblée législative de 1791 et membre de la Convention, né à Ribemont (Généralité de Soissons, France), le 17 septembre 1743, mort à Bourg-la-Reine (Département de Paris), le 27 mars 1794, d'une famille originaire du Dauphiné, il fut élevé par son oncle, l'évêque de Lisieux, et s'adonna surtout aux mathématiques.

Il avait à peine vingt-et-un ans, quand il présenta à l'Académie des sciences un mémoire sur le calcul intégral, qui le fit nommer adjoint au secrétariat de l'Académie ; il y poursuivit des travaux sur les équations, sur l'intégral de toute équation en termes finis, sur la méthode du maximum, etc. Lié avec Turgot, d'Alembert et Voltaire, il inclina bientôt vers les études philosophiques, publia une réfutation du Dictionnaire des trois siècles de Sabathier de Castres, annota les Pensées de Pascal, et mérita cet éloge de Voltaire : « Ce philosophe véritable tient Pascal dans sa balance : il est plus fort que celui qu'il pèse. » Il entreprit ensuite des essais biographiques sur Euler, Linné, Buffon, de Jussieu, Franklin, concourut devant l'Académie française pour un éloge du chancelier de l'Hospital, qui ne fut pas couronné, publia des Réflexions sur l'esclavage des nègres, et se fit l'éditeur, l'annotateur et le critique des Œuvres complètes de Voltaire.

Les événements qui précédèrent la Révolution l'entraînèrent bientôt vers la politique ; avant la réunion des états généraux, il composa une Déclaration des droits de l'homme, sous un nom américain ; puis, il émit l'idée de vendre les biens du clergé pour payer les dettes de l'Etat, et fit connaître son opinion sur la plupart des questions pendantes, dans sa brochure : Sur ce qui a été fait et sur ce qui reste à faire.

« Je ne me soucie pas, écrivait-il à la Metherie en 1790, des titres de noblesse. Chacun doit être libre d'ajouter à son nom le sobriquet qui lui plaît, dans la vie et les actes privés. Mais point de noms de baptême, parce que la théologie ne vaut pas mieux que la féodalité. » Il faisait alors partie du Club de 1789, qui n'était qu'un démembrement du club des Jacobins, composé des membres les plus modérés de cette Société.

En mars 1791, Louis XVI le choisit pour un des six commissaires de la Trésorerie, aux appointements de vingt mille livres; ce choix et le traitement qui y était attaché le rendirent suspect au Jacobins, et il fut violemment attaqué dans leurs journaux.

Elu le 26 septembre 1791, député de Paris à l'Assemblée législative, le 22e sur 24, par 351 voix sur 723 votants, il débuta, le 25 octobre 1791, par un discours fort applaudi sur les émigrés, pour la plupart desquels il réclamait une indulgence éclairée, non sans attaquer la Cour : « Soyez modérés et justes, dit-il, mais fermes, vous serez respectés par les nations étrangères ; si vous suivez le mouvement d'une juste indignation, on vous croira faibles ; si vous accordez un pardon qu'on ne vous demande point, on vous croira ou dupes de l'artifice de vos ennemis, ou dominés par une influence secrète, et plus occupés des intérêts d'une famille que du salut d'un grand peuple. » Le 25 décembre, il parla sur les menaces de guerre avec l'Europe.

Il fut élu président de l'Assemblée, le 5 février 1792, et demanda le 16 qu'on éclairât « les citoyens égarés ou timides » sur les dangers de guerre civile. En mars, pour briser le droit de veto, il proposa de considérer le monarque comme ayant abdiqué, et, le 20 avril, déposa son célèbre rapport sur l'organisation de l'instruction publique, qui maintenait l'intervention absolue de l'Etat en matière d'enseignement, en attendant l'époque « où tout établissement public d'instruction deviendra inutile, lorsque chaque homme trouvera dans ses propres connaissances, dans la rectitude de son esprit, des armes suffisantes pour repousser toutes les ruses de la charlatanerie. » Il proposait d'ailleurs la gratuité de l'instruction à tous les degrés. Le 19 juin, il demanda qu'on brûlât au pied de la statue de Louis XIV six cents volumes in-folio contenant la nomenclature des titres de noblesse, prononça un remarquable discours sur les moyens de parer aux dangers de la patrie, discours dont l'impression fut votée d'enthousiasme.

Rapporteur des pétitions qui, avant la journée du 10 août, réclamaient la déchéance du roi, il conclut au danger d'adopter sur ce point une résolution quelconque, et, dès le 13 août, fit adopter une exposition des motifs relatifs à la convocation d'une Convention nationale, et à la déchéance du pouvoir exécutif.

Quatre départements l'élurent membre de la Convention : l'Aisne, le 6 septembre 1792, le 8e sur 12, par 565 voix sur 644 votants ; l'Eure, le 7 septembre, le 11e sur 12, par 283 voix sur 558 votants ; le Loiret, le 6 septembre, le 8e sur 9, par 260 voix sur 392 votants ; la Sarthe, le 6 septembre, le 7e sur 10, à la pluralité des voix sur 537 votants. Dans cette assemblée, il se tint d'abord à l'écart des luttes des partis. Girondin par caractère, il disait des Jacobins « qu'il vaudrait mieux essayer de les modérer que de se brouiller avec eux. » Il fut nommé membre du comité de Constitution, le 11 octobre 1792, et commença, en novembre, à attaquer Robespierre dans sa Chronique de Paris : « C'est un prêtre, disait-il, et il ne sera jamais que cela. »

Dans le procès de Louis XVI, il dit au 2e appel nominal: « Quand l'Assemblée aura prononcé la peine de mort, je voudrais que l'exécution fût suspendue jusqu'à ce que la Constitution fût finie et publiée, et que le peuple eût alors prononcé dans ses Assemblées primaires, suivant les formes que la Constitution aura réglées ; mais étant consulté aujourd'hui en vertu d'un décret, s'il doit y avoir appel au peuple ou non, je dis non.» Au 3e appel nominal, il répondit : « Toute différence de peine pour les mêmes crimes est un attentat contre l'égalité. La peine contre les conspirateurs est la mort. Mais cette peine est contre nos principes. Je ne la voterai jamais. Je vote pour la peine la plus grave dans le Code pénal, et qui ne soit pas la mort. Je demande que la réflexion de Mailhe soit discutée, car elle le mérite. » Après la condamnation, il s'associa vainement à ceux qui réclamèrent un sursis. Ce fut les 15 et 16 février 1793, qu'il présenta son rapport sur les travaux du comité de Constitution.

Membre du comité de Salut public (26 mars 1793), il fut chargé, en avril, de rédiger le manifeste adressé par la Convention à tous les peuples au sujet de la violation du droit des gens commise par les Autrichiens sur les quatre représentants que leur avait livrés Dumouriez. Il ne fut pas compris dans les proscriptions des 31 mai et 2 juin contre les Girondins, mais il dénonça bientôt, dans un pamphlet adressé à ses commettants, l'insurrection de Paris, et la faiblesse de la Convention.

Attaqué par Chabot, le 8 juillet, il fut décrété d'accusation, put s'échapper et se cacha à Paris chez une amie généreuse, Mme Verney. Ce fut là qu'il écrivit la savante Esquisse des progrès de l'esprit humain, dans laquelle il entend substituer au sentiment religieux la notion de la perfectibilité indéfinie de l'homme et de l'humanité.

Il ne quitta cet asile que lorsque parut le décret qui punissait de mort quiconque cachait un proscrit ; il prit un déguisement, changea son nom en celui de Pierre Simon, nom du père nourricier de sa fille, et se dirigea vers Sceaux, ou habitait son ami Suard.

Réduit à se cacher dans les carrières, la faim l'obligea à entrer dans un cabaret de Clamart, où il fut arrêté comme suspect et jeté en prison (7 germinal an II). Interrogé, il se fit passer pour le valet de chambre d'un M. Dionis du Séjour, et fut conduit à Bourg-la-Reine, alors Bourg-de-l'Égalité, où il avala, dans sa prison, un poison qu'il portait sur lui pour se soustraire à l'échafaud (19 germinal).

On l'enterra sous le nom de Pierre Simon; mais quelques mois après, sa veuve, Sophie de Grouchy, réclama une enquête, et l'identité de Condorcet fut pleinement établie, grâce à la montre trouvée sur lui, montre qu'il avait échangée en avril 1792, avec son beau-frère le général de Grouchy, et grâce aussi à un Horace qu'il avait dans sa poche, et qui lui avait été donné par Suard.

Outre les principaux ouvrages déjà cités, on a de lui un grand nombre de publications scientifiques, littéraires et politiques.