Patrice, Pierre, François Brocas

1919 - 1968

Informations générales
  • Né le 28 novembre 1919 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 28 août 1968 à Montauban (Tarn-et-Garonne - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Gers
Groupe
Républicain radical et radical-socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 30 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Département
Gers
Groupe
Entente démocratique

Biographies



Né le 28 novembre 1919 à Paris (8e)

Décédé le 28 août 1968 à Montauban (Tarn)

Député du Gers de 1956 à 1958

Né dans une famille de la bourgeoisie parisienne, Patrice Brocas effectue ses études primaires et secondaires dans le 8e arrondissement de Paris. Après le baccalauréat, il commence des études de droit et obtient une licence. La déclaration de guerre le trouve élève aspirant à l'Ecole de cavalerie de Saumur. Après juillet 1940, il est versé quelques mois dans les Chantiers de jeunesse. Il reprend ensuite ses études. En 1941, il passe une licence ès lettres et en 1942, obtient un diplôme d'études supérieures de droit, et est lauréat de la Faculté de droit de Paris. Il entre dans un groupe de résistance, celui du capitaine Biaggi. En 1943, il devient inspecteur des services administratifs de la S.N.C.F. La même année, il se marie avec Marie-Joseph Tracou et aura trois enfants.

En avril 1945, il prépare et réussit le concours d'entrée au Conseil d'Etat. En juillet 1949, il est secrétaire de la Commission de la sidérurgie à la conférence de coopération économique européenne de Paris. En 1948, il est secrétaire général adjoint de la conférence internationale de la main-d'œuvre à Rome. Le 31 mai 1950, il est nommé Maître des requêtes au Conseil d'Etat. En mai 1951, il est désigné comme commissaire du gouvernement près la Commission supérieure de cassation des dommages de guerre. De 1949 à 1954, il est aussi Maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris. De 1948 à 1954, il est professeur à l'Ecole nationale d'organisation économique et sociale.

En 1951, Patrice Brocas a commencé une carrière politique élective en étant candidat du Parti radical dans le Gers aux élections du 17 juin. Il figure en troisième position sur une liste conduite par l'ancien ministre Abel Gardey. Dans ce département, où trois sièges sont à pourvoir, et où aucun apparentement n'est conclu, sur 111 981 électeurs inscrits et 78 069 suffrages exprimés, le Parti radical arrive en tête, avec 21 150 voix, mais n'emporte qu'un siège, les deux autres allant respectivement au Parti communiste, avec 17 714 voix, et à la S.F.I.O., avec 15 165 voix. Patrice Brocas n'est donc pas élu. Mais, en octobre, il remporte une élection cantonale à Samatan. Il devient rapporteur général du budget au conseil général du Gers. Ce mandat électif lui permet d'étendre son influence dans le département, tout en exerçant ses fonctions de Maître des requêtes au Conseil d'Etat. En mars 1954, il est rapporteur de la Commission des marchés des P.T.T. et des chemins de fer.

Le 2 janvier 1956, pour les élections législatives anticipées, il mène la liste radicale. Plusieurs apparentements sont conclus, notamment entre les radicaux et l'Union démocratique et socialiste de la Résistance, mais aucun n'atteint la majorité absolue. Les trois sièges sont donc répartis à la proportionnelle. Sur 114 665 électeurs inscrits et 85 674 suffrages exprimés, la S.F.I.O. arrive en première position avec 18 218 voix, suivie par le Parti communiste avec 17 008 voix. Le Parti radical obtient 14 753 voix et emporte le troisième siège.

Le 31 janvier, le nouveau député du Gers est nommé membre, à la fois de la Commission de l'intérieur et de la Commission de la production industrielle et de l'énergie. Le 10 février, il est élu vice-président de la Commission de l'intérieur. Son activité parlementaire est importante. Il présente plusieurs rapports au nom de sa commission, concernant notamment l'administration de l'Algérie. Evoquant l'affaire du canal de Suez, le 2 août 1956, il se définit comme « un député national », et défend la politique du gouvernement de Guy Mollet. Rapporteur de la Commission de l'intérieur, le 16 juillet 1957, dans le débat sur la reconduction de la loi sur les pouvoirs spéciaux en Algérie, il déclare : « Aujourd'hui l'accent doit être mis sur les exigences de la défense de l'Etat et de la protection du citoyen. C'est pourquoi une législation conçue pour des temps normaux ne saurait faire face à des circonstances exceptionnelles ». Dans le débat sur la révision constitutionnelle, en février 1958, il est amené à proposer une réforme pour redonner vigueur au droit de dissolution et revenir au scrutin majoritaire. « La pire des erreurs, indique-t-il, serait de laisser croire que nous consentons à ce que se perpétue l'état de chose actuel, la crise générale où sombre l'autorité de l'Etat ». Le 1er juin 1958, il justifie son vote pour la confiance au général de Gaulle, en disant son espoir qu'il pourra mettre un terme au conflit algérien, tout en rappelant la tradition républicaine. Il présente, à cette occasion, une défense de la IVe République : « Tout n'est certes pas condamnable dans l'œuvre accomplie par le Parlement depuis le jour où le général de Gaulle a abandonné le pouvoir ». Le 2 juin, il vote les pleins pouvoirs et la révision constitutionnelle.


BROCAS (Patrice)
Né le 28 novembre 1919 à Paris (Seine)
Décédé le 28 août 1968 à Montauban (Tarn-et-Garonne)
Député du Gers de 1958 à 1962
(Voir le Dictionnaire biographique des parlementaires de la IVe République)

Patrice Brocas, qui vient d’être réélu conseiller général du canton de Samatan, se rallie à la Ve République et se porte candidat à sa réélection dans la première circonscription du Gers (Auch et Mirande), avec l’étiquette « républicain radical et radical-socialiste et d’Union nationale ». Sa profession de foi adressée aux électeurs dans un département qui a répondu « non » au référendum du 28 septembre 1958, est claire. Patrice Brocas reconnaît qu’il « serait injuste de porter une condamnation absolue contre tout ce qui a été accompli de 1946 à 1958 », mais constate qu’« aucune solution définitive n’a pu être apportée aux problèmes essentiels, faute d’un gouvernement stable et efficace ». Il se réjouit donc du retour du scrutin uninominal et se prononce en faveur du renforcement des prérogatives du Gouvernement face au Parlement.

Cette adhésion à la nouvelle Constitution s’accompagne d’un discours social, mais aussi d’une défense de la propriété privée, avec le refus de toute nouvelle nationalisation, du régime républicain, menacé par les communistes « qui travaillent pour le compte de l’impérialisme soviétique », ainsi que de l’affirmation de la nécessité que l’Algérie « demeure indissolublement liée à la métropole » et du souhait que la France soit dotée de sa propre force nucléaire.

Ce programme séduit les électeurs : au premier tour, Patrice Brocas rassemble 39,59 % des suffrages exprimés, soient 15 527 voix. C’est un peu plus que celles additionnées par les candidats de gauche, le communiste Edmond Castera, député sortant (6 685 voix), et le socialiste – SFIO – Henri Tournan (7 536). C’est aussi un peu moins du double des suffrages recueillis par Me Pierre Popie, représentant des modérés, militant de l’indépendance de l’Algérie, qui tombe quelques années plus tard sous les balles de l’OAS.
Dans sa profession de foi du second tour, Patrice Brocas s’inscrit dans une ligne politique proche du « national-mollétisme » et en appelle à battre les communistes « inféodés à Moscou » et les socialistes qui ont voté « non » à la nouvelle Constitution. Il se présente comme un jeune député soucieux avant tout de s’atteler aux trois grands enjeux du temps : le problème agricole, la refonte de l’administration et la réforme de la fiscalité. Face aux candidats des deux partis de gauche et à celui des modérés, il conforte sa première place avec un gain de 1991 voix, soit 17 518 voix et 43 % des suffrages exprimés. Il reste donc député du Gers.

D’abord rattaché à la Formation administrative des non-inscrits, regroupant principalement des radicaux, comme lui, et des parlementaires ayant jadis appartenu à l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR), il suit ses membres lorsque celle-ci se transforme, en juillet 1959, en un groupe parlementaire, celui de l’Entente démocratique, présidé par Jean Médecin, puis par Maurice Faure. Chacun de ses membres y dispose de sa liberté de vote. Patrice Brocas en est vice-président. Il y représente la sensibilité de centre-gauche, attachée à la défense des droits du Parlement, à l’idéal européen et au maintien d’un lien étroit entre l’Algérie et la métropole.

Le succès électoral de Patrice Brocas est confirmé au niveau local : il est élu maire d’Auch en 1959. Il deviendra en 1962 président de l’Association départementale des maires.

Le député du Gers siège à la commission des affaires étrangères. Il en est le rapporteur pour avis pour le budget des Affaires marocaines et tunisiennes, rattaché au budget des Affaires étrangères. Il est également membre de la commission spéciale du règlement de l’Assemblée nationale. Il est également secrétaire du groupe parlementaire France-Angleterre et vice-président du groupe parlementaire France-États-Unis d’Amérique.

Patrice Brocas ne limite pas ses interventions aux questions internationales. Il est l’un des principaux porte-paroles de la famille radicale dans l’hémicycle, conforme à son rôle de premier plan dans les congrès des Radicaux.

Son mandat se résume à une rupture progressive avec la politique du général de Gaulle sur les trois sujets majeurs que sont la défense des droits du Parlement, la politique étrangère – notamment la construction européenne – et la question algérienne.

Dès le 16 janvier 1959, lors de la discussion du programme du Premier ministre Michel Debré, il justifie le vote de la confiance par les radicaux en raison de « l’action que mènera le président de Gaulle pour mettre un terme au conflit algérien », en dépit des réserves et désaccords, notamment sur la suppression des retraites des anciens combattants, l’agriculture « sacrifiée » et l’absence de perspective pour une Europe politique.
Une divergence d’importance intervient d’emblée sur le règlement de l’Assemblée nationale. Sans éprouver de nostalgie pour le régime d’Assemblée, le député du Gers estime qu’il est impératif que le Parlement puisse contrôler le gouvernement. Ainsi, le 21 janvier 1959, explique-t-il le vote des radicaux contre le projet de règlement provisoire de l’Assemblée nationale. D’abord, il impose des limites sur « les pouvoirs de contrôle […des parlementaires…] à l’égard du Gouvernement ». Ensuite, il est discriminatoire envers les « membres des petits groupes », ainsi que les « députés isolés ». Leurs places dans les commissions leur seront assignées par les groupes les plus importants. Le 27 mai 1959, lors du vote sur le règlement définitif, il répète que le contrôle parlementaire reste insuffisant, la motion de censure étant un procédé « trop lourd » et la question orale « sans portée réelle ». Il faudrait prévoir le vote de propositions de résolution à la suite des questions orales, ce qui a été refusé. Estimant que « le Parlement doit assurer la suprématie du pouvoir politique et des élus de la nation à l‘égard des administrations », il conclut, sous les applaudissements de la gauche, que les députés « ont été envoyés ici, non pour diminuer, mais pour affermir la République ! »

Quelques mois après, le 14 octobre 1959, à l’occasion de la déclaration de politique générale du Gouvernement, Patrice Brocas indique approuver, mais de manière stricte, la mise en œuvre de la déclaration du 16 septembre, du chef de l’État sur l’autodétermination de l’Algérie. Il vote également le 2 février 1960 en faveur du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relatives au maintien de l’ordre en Algérie, à la suite de la « semaine des barricades », mais il est favorable à une approche restrictive. Il souhaite en particulier une limitation temporelle de ces pouvoirs spéciaux : « Je ne vois pas en quoi il est nécessaire de déléguer plus largement au Gouvernement les pouvoirs maintenus, déjà trop restrictivement, au Parlement ! ».
Peu après, la divergence s’accroît encore sur cette question du respect des prérogatives du Parlement. Le 27 novembre 1960, Patrice Brocas vote en faveur de la motion de censure déposée à la suite de l’engagement de la responsabilité du Gouvernement sur le vote du projet de loi de finances pour 1960. Il dresse un bilan très négatif de la première année gouvernementale, invoquant un « constat de carence » sur la politique agricole, déplorant « l’insuccès économique », « l’injustice sociale », ainsi que le « désarmement moral et intellectuel de la nation devant le péril communiste » à propos de la visite de Nikita Khrouchtchev. Il considère que « ce serait un grand malheur pour ce pays si, d’abandon en abandon, le Parlement venait à ne plus être qu’une Chambre consultative. » En plusieurs occasions, notamment lors de l’examen du texte de la commission mixte paritaire, le 17 décembre, il renouvelle ses critiques sur le non-respect des droits de l’Assemblée et des parlementaires de l’opposition.

Dans la même perspective, le 5 mai 1960, il signe et défend la motion de censure déposée contre le gouvernement, qui a refusé de convoquer le Parlement en session extraordinaire. À ses yeux, ce refus « bouleverse complètement l’équilibre voulu par la Constitution », et menace de « précipiter une évolution, au terme de laquelle il ne peut y avoir que le naufrage de toutes nos libertés. »
L’année 1960 est aussi le début d’une divergence sur l’Algérie, avec la politique conduite par le Gouvernement, selon les orientations du chef de l’État. Réagissant à l’allocution télévisée du 14 juin 1960 du général de Gaulle, qui utilise pour la première fois l’expression « l’Algérie algérienne », Patrice Brocas estime que face au problème du lien entre l’Algérie et la métropole « vieux de cent trente ans », le chef de l’État ne fait pas mieux que les gouvernements de la IVe République et raille « ses imprudents partisans [qui lui] prêtaient des qualités de thaumaturge ». La tonalité de son rapport pour avis sur les crédits des Affaires marocaines et tunisiennes, prévus par le projet de loi de finances, est critique : le 4 novembre 1960, le député du Gers juge décevants les rapports avec les deux anciens protectorats, et regrettable l’accord conclu le 13 octobre précédent avec la Tunisie. La politique étrangère menée suscite également ses réserves. Manifestant une sensibilité atlantiste propre à nombre d’élus radicaux, il reproche au Gouvernement de Michel Debré, son refus de participer à la mise en place d’une force atomique commune de dissuasion, dans le cadre de l’OTAN, le 22 novembre 1960, lors de l’examen du projet de loi de programme relative à certains équipements militaires. Il conclut sur la « profonde méfiance » à l'égard de la politique étrangère dont le Premier ministre se fait le défenseur.

En 1961, la divergence s’accentue encore. Ainsi l'allocution du 13 juillet 1961 suscite-t-elle ce commentaire sans appel du député du Gers : « Nous regrettons que ce discours ne propose aux Français aucun objectif capable de soulever l’enthousiasme », comme le publie Le Monde, le 14 juillet 1961. Trois mois plus tard, aux assises du 59e congrès du Parti radical, qui se tient à Royan, Patrice Brocas accentue à nouveau ses critiques. Il reproche la posture anti-atlantiste et anti-européenne de Charles de Gaulle et déplore également que si « la Quatrième République a bien pensé et mal agi, la Cinquième République a mal pensé et mal agi » pour résoudre le problème algérien. S’inspirant de la situation israélienne, il défend l’idée d’une Algérie indépendante, confiant sa destinée à un gouvernement composé d’une élite musulmane et européenne amie de la France et œuvrant à associer étroitement les deux pays. Aussi, signe-t-il le manifeste daté du 30 décembre 1961 qui en appelle à une organisation fédérale du territoire algérien ou, à défaut, à une partition du territoire.

Sur le plan institutionnel, en juillet 1961, il exprime à nouveau son désaccord profond avec le Gouvernement, lors de l’examen du projet de loi relatif aux dates des élections cantonales et des élections municipales. Les dispositions, prolongeant le mandat des élus concernés, ont été annulées par le juge administratif en raison de l’incompétence de l’autorité règlementaire pour intervenir dans ces domaines, par méconnaissance volontaire des compétences du législateur.

En 1962, l’opposition des conceptions est frontale tant sur la politique intérieure, le fondement des institutions et la politique économique, que sur l’Algérie, la construction européenne et la politique étrangère.

Ainsi, le 26 avril 1962, à l’occasion du débat qui suit la communication du Gouvernement, désormais conduit par le nouveau Premier ministre, Georges Pompidou, Patrice Brocas se montre-t-il particulièrement sévère. Il considère que « la logique politique et le respect du suffrage universel auraient exigé le renouvellement, non pas du Premier ministre, mais bien de l’Assemblée nationale », la majorité ayant été élue, à ses yeux, en 1958, sur le maintien de l’Algérie française. Il dénonce avec véhémence la dérive de la pratique institutionnelle gaulliste, estimant que le régime représentatif, établi par la Constitution de 1958, a laissé place à « un tête-à-tête grandiose » entre le chef de l’État et le peuple, ce qui peut s’avérer « singulièrement périlleux pour la conduite de l’État ». Par ailleurs, il condamne l’absence de souffle du programme Pompidou dépourvu, selon lui, de « buts » et d’ « idéal » proposés « à l’enthousiasme de notre peuple », comme si l’on voulait « préparer une nation de citoyens passifs, uniquement préoccupés d’atteindre ou de dépasser les objectifs d’un plan économique ». Il formule des réticences très précises, lors de la séance du 21 juin 1962, sur le projet de loi portant approbation du IVe Plan, qu’il juge très insuffisant pour les régions faiblement industrialisées, notamment en ce qui concerne l’irrigation des coteaux de Gascogne, un thème cher à ses électeurs.

Quelques semaines plus tard, le 29 juin, avant le référendum en Algérie, il intervient en posant une question orale sur le rapatriement des Français musulmans. Considérant que « l’honneur de la France est atteint » par l’abandon de ces populations, il entend exprimer dans l’hémicycle « la protestation » de « consciences profondément meurtries ».

Sa dernière intervention, le 20 juillet 1962, porte sur la révision de la Constitution. A la suite d’une question orale avec débat, il affirme son complet désaccord avec la procédure choisie de l’article 11 et l’absence de délibération parlementaire préalable. Il déplore également que l’avis du Conseil d’État ne soit pas publié.
Si l’action de Patrice Brocas est moins connue que celle de Gaston Monnerville, elle est néanmoins importante. Fin juriste, ayant dispensé des cours à l’Institut d’études politiques de Paris et à l’École nouvelle d’organisation économique et sociale, ancien maître des requêtes au Conseil d’État en disponibilité, il dépose, le 10 octobre 1962, un recours en excès de pouvoir, visant à annuler deux décrets pris par le gouvernement, le 6 octobre, déterminant, pour le premier, les conditions dans lesquelles les partis politiques pourront participer à la campagne du référendum, le second, pour l’organisation matérielle du scrutin et en fixant la date. Adoptés, alors que le gouvernement est démissionnaire, ces deux décrets, en tant qu’ils règlent une question de nature éminemment politique, ne peuvent, selon lui, relever des affaires courantes, qu’un gouvernement démissionnaire est légitimement en droit de gérer. Le Conseil d’État ne suit cependant pas ses arguments, sous peine d’entacher d’illégalité les opérations de référendum.

Élu en 1958, dans le soutien au général de Gaulle, Patrice Brocas s’en est donc sensiblement détaché, tout au long de la législature, en particulier sur la question algérienne. Il exprime, à longueur de discours, le sentiment d’une trahison pour tous ceux qui avaient cru en la volonté du général de Gaulle de maintenir l’Algérie française.
Après la dissolution de l’Assemblée nationale, Patrice Brocas se présente aux élections législatives de novembre 1962, sous l’étiquette radical-socialiste, mais avec le soutien du Mouvement républicain populaire (MRP), dans une configuration qui lui vaut l’opposition de la droite comme de la gauche. Avec 11 929 voix sur les 35 381 suffrages exprimés, il arrive en tête au premier tour, devançant de 3 243 voix Paul Vignaux, maire de Lombez, son adversaire de la SFIO. Mais à l’échelon local, la dynamique ascensionnelle de l’union des forces de gauche, au niveau national, se traduit par une concurrence entre les radicaux et les socialistes. Aussi, à l’issue de la triangulaire du second tour, Patrice Brocas arrive-t-il en deuxième position, avec 16 526 voix (40 % des suffrages), contre 18 152 (44,8 % des suffrages) pour son adversaire socialiste, tandis que le candidat gaulliste Campistron arrive en troisième position.

Patrice Brocas réintègre alors le Conseil d’État. Il est nommé, en 1966, conseiller d’État et conserve ses mandats locaux. Il est réélu maire d’Auch en 1965, et conseiller général du canton de Samatan en 1964. Il n’a de cesse de défendre l’image du Gers en général et de sa préfecture en particulier, n’hésitant pas à dénoncer dans la presse nationale les atteintes qui sont portées contre « son » département. Ainsi déplore-t-il que l’ORTF ait consacré une émission de son magazine « Panorama » qui décrit le Gers comme un territoire archaïque.

Il se lance à nouveau dans la course à la députation aux législatives suivantes. Bien qu’ayant fait campagne sans le soutien du Parti radical-socialiste, avec l’étiquette du Centre démocrate (fondé en 1965 par Jean Lecanuet), Patrice Brocas arrive en tête au premier tour du 5 mars 1967, avec 33,9 % des suffrages, contre 31, 2 % à Paul Vignaux, candidat de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS), mais ce dernier l’emporte au second tour du 12 mars 1967, avec 24 197 voix (51,32 %), contre 22 951 (48,68 %) pour son adversaire. Patrice Brocas dépose alors une requête en invalidation, enregistrée le 23 mars 1967 au Conseil constitutionnel. Celle-ci est fondée sur le contenu d’une lettre, adressée entre les deux tours aux électeurs par son ancien adversaire de 1958, le sénateur socialiste du Gers Henri Tournan, avec en-tête du Sénat, et contenant « des allégations tendant à le discréditer gravement ». L’élection ayant été invalidée le 12 juillet par le Conseil constitutionnel, un nouveau scrutin est organisé, mais c’est à nouveau Paul Vignaux qui l’emporte, lors de l’élection partielle, le 24 septembre 1967, avec 24 197 voix, soit 51,32 %, contre 22 951, soit 48,68 % à Patrice Brocas.

Ce dernier renonce à se présenter aux législatives de 1968. Il décède, quelques semaines plus tard, dans un accident de voiture.
À l’aune des travaux universitaires de François Goguel et de Serge Berstein, le cas de Patrice Brocas illustre celui de nombre de radicaux, peinant à regagner la position qu’ils pouvaient avoir sous la IVe République.