Edouard, Gustave, Hector Depreux

1898 - 1981

Informations générales
  • Né le 31 octobre 1898 à Viesly (Nord - France)
  • Décédé le 16 octobre 1981 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Seine
Groupe
Socialiste
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Seine
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Seine
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Seine
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Seine
Groupe
Socialiste

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 31 octobre 1898 à Viesly (Nord)
Décédé le 16 octobre 1981 à Paris (15e)

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Seine)
Député de la Seine de 1946 à 1958 Ministre de l'Intérieur du 24 juin 1946 au 24 novembre 1947
Ministre de l'Education nationale du 12 février au 26 juillet 1948

Edouard Depreux appartient à la génération des jeunes combattants de la Première Guerre mondiale puisque, né le 31 octobre 1898 à Viesly, dans une famille d'industriels, il doit interrompre ses études de philosophie pour participer en 1917 aux combats. Il est gazé et décoré de la Croix de guerre. De la sympathie pour les ouvriers et de l'influence intellectuelle de Jean Jaurès il passe à un véritable engagement politique auquel n'est pas étranger non plus son attachement à la paix : il rejoint la S.F.I.O. L'attirance pour la politique n'est pas nouvelle dans sa famille puisque son grand-père, Théophile Depreux avait été sénateur du Nord à partir de 1895 dans la gauche républicaine. Poursuivant ses études de droit et de lettres, le jeune admirateur du socialiste Jean Longuet soutient un diplôme d'études supérieures consacré à « Louis Blanc dans le gouvernement provisoire de 1848 ». Inscrit au barreau de Paris il est élu conseiller municipal de la ville de Sceaux en 1935 puis conseiller général en 1938.

En 1940, il est appelé comme « capitaine-défenseur ». Il entre dans la Résistance mais le gouvernement de Vichy, mal informé de ses sentiments profonds, le nomme en 1941 président de la nouvelle assemblée départementale de la Seine. Il donne immédiatement sa démission. Membre du comité exécutif clandestin de la S.F.I.O., président de la Fédération socialiste clandestine, rédacteur du Populaire clandestin, Edouard Depreux, jouit d'un réel prestige à la Libération qui en fait, en 1944, le maire de Sceaux, l'élection confirmant cette nomination en 1945. Ses actions clandestines le qualifient pour siéger, au titre des mouvements de Résistance, dans l'Assemblée consultative provisoire. Tête de liste de la S.F.I.O. en octobre 1945, il est élu représentant de la Seine dans la première Assemblée nationale Constituante avec 84 272 suffrages, puis réélu le 2 juin 1946 avec 81 674 voix et, à nouveau en novembre 1946 pour la première Assemblée législative malgré une forte érosion de voix (60 831) alors que progresse le Parti communiste et que surgissent les partisans de l'« Union contre le tripartisme », préfiguration du mouvement gaulliste.

A l'Assemblée consultative, Edouard Depreux est membre de la Commission des affaires étrangères, de la Commission des prisonniers et déportés, de la Commission de la justice et de l'épuration dont il assure la présidence. Dans les deux Constituantes il appartient à la Commission de la justice et de la législation générale et la retrouve au cours de la première législature ; il est alors membre de la Commission de la famille et de la Commission chargée d'enquêter sur certains faits relatifs à l'Indochine (affaire des généraux) en 1950. Deux grandes interventions, rigoureuses et empreintes de culture, retiennent l'attention de l'Assemblée. La première est la défense d'un projet de nouvelle constitution qu'il souhaite plus humaine, plus démocratique que celle de la IIIe République à laquelle il ne témoigne guère d'attachement en raison de ses origines pacifistes et du conservatisme social incarné par le Sénat. La seconde est consacrée aux problèmes immédiats de la justice. S'il souhaite, dès 1944, une épuration des plus énergiques, un procès du maréchal Pétain en large audience, il élève plus tard des doutes sur des jugements indulgents pour certains et sévères pour de modestes coupables. La réforme de la justice ne satisfait pas l'avocat : le juge unique n'est acceptable que si l'âge lui a donné de la maturité ; il suggère d'accueillir comme cela se pratique en Grande-Bretagne des avocats d'une quarantaine d'années. Les palliatifs divers ne sauraient masquer les difficultés de recrutement dues à la médiocrité des rémunérations.

Le débat constitutionnel inspire une analyse sévère de la IIIe République et du Sénat. Aussi est-il partisan d'une assemblée unique et d'un préambule qui formulerait les exigences d'une démocratie moderne. Il vote les deux projets constitutionnels.

Edouard Depreux devient ministre de l'Intérieur le 24 juin 1946 et le demeure jusqu'au 24 novembre 1947. Il est ministre de l'Education nationale du 12 février au 26 juillet 1948. C'est en qualité de ministre de l'Intérieur qu'il présente un projet de loi relatif au transfert des cendres de Victor Schœlcher au Panthéon et qu'il règle les élections municipales en défendant le scrutin proportionnel pour Paris et les grandes villes et en règlementant la propagande écrite en cette période de pénurie de papier. Il présente aussi un projet d'organisation départementale instaurant une certaine déconcentration administrative. L'Algérie retient l'attention du ministre de l'Intérieur qui avertit que les événements comme ceux de Sétif ne se heurteront à aucune faiblesse. Il fait voter le statut de l'Algérie le 27 août 1947 car il estime nécessaire de préserver la décolonisation même si de nombreux membres de son propre parti ne sont pas disposés à l'entendre. La coordination des différents services techniques concernant l'Algérie est facilitée par la création d'un comité technique interministériel. Il montre une réelle fermeté lors des incidents de Marseille où il défend le préfet des Bouches-du-Rhône, déclarant que le renvoi des C.R.S. se justifie dès lors qu'ils se sont comportés en partisans plutôt qu'en loyaux fonctionnaires. Edouard Depreux se prononce à la fin de 1948 contre la constitution d'une troisième force et va désormais manifester sa défiance devant certaines pratiques du régime. Lorsqu'il enquête sur l'« Affaire des généraux » il refuse de se considérer comme mandaté par son parti et ne cache pas sa désapprobation, regrettant que des sanctions n'aient pas été prises à l'encontre des généraux.

Les élections du 17 juin 1951 lui permettent d'être réélu, seul de la liste S.F.I.O. avec 44 777 voix alors que les communistes ont quatre élus, le R.P.F., trois et le M.R.P., un. Il retrouve la Commission de la justice et devient, le 6 avril 1954, président de la Haute Cour de justice. Il est également brillamment réélu en 1956 avec 62 538 voix. Pendant la IIIe législature il est membre de la Commission de la justice, de la Commission du suffrage universel, de la Commission de la famille. Le 5 mai 1958 il est à nouveau nommé président de la Haute Cour de justice constitutionnelle.

Le député de la Seine intervient sur le caractère insuffisant des recettes garanties par l'Etat dans les budgets des collectivités territoriales, le relogement des locataires expulsés, l'argent de poche des pensionnaires des hospices et l'alimentation en eau des Parisiens. Il souhaite que la lutte contre l'inflation ne se réalise pas au détriment des salaires et des prestations sociales. L'ancien ministre de l'Education nationale continue à s'intéresser aux questions scolaires en s'opposant à l'octroi de bourses pour l'enseignement secondaire privé et en rédigeant, en 1956 une proposition de loi portant réforme de l'enseignement. Il souhaite une prolongation de la scolarité jusqu'à 18 ans et l'encouragement des activités périscolaires. Tout un réseau d'écoles normales, départementales, académiques et supérieures formerait les instituteurs et les professeurs. Les études universitaires distingueraient des formations de base, professionnelles et allégées, et des formations scientifiques approfondies.

Edouard Depreux se sent de plus en plus en désaccord avec les conceptions politiques de la S.F.I.O. mais il adopte une ligne de conduite originale qui lui évite le silence ou l'exclusion : il affirme ses opinions mais il observe au moment du vote la plus parfaite discipline. C'est ainsi qu'hostile à la C.E.D. - il est le rapporteur de la minorité au congrès de Montrouge de la S.F.I.O. en 1952 - il vote le projet de Pierre Mendès-France pour lequel il ne cesse d'affirmer son admiration. Très favorable à la décolonisation il estime que le gouvernement doit agir plus librement au Maroc et, après avoir formulé ses critiques il ratifie la convention franco-tunisienne en juillet 1955 et les accords d'Aix en souhaitant la constitution d'un gouvernement marocain réunissant toutes les tendances afin d'établir des liens solides avec la France. Il ne cache pas, tant dans la pressse qu'à la tribune, la « cruelle déception » que lui cause le Front républicain, et son désaccord avec la politique de Guy Mollet en Algérie. Il est hostile à une participation socialiste dans les gouvernements de Bourgès-Maunoury et de Félix Gaillard mais vote la loi-cadre de Bourgès-Maunoury.

Il vote l'investiture de Pierre Pflimlin et la réforme constitutionnelle le 27 mai 1958 et voit sans faveur le retour du général de Gaulle au pouvoir. Il demande que le général de Gaulle réprouve l'action de l'armée dans une déclaration solennelle. Il vote contre son programme et son gouvernement les 1er et 2 juin 1958. Il se prononce sur le « non » au référendum et fonde la Parti socialiste autonome (P.S.A.).