Louis, Jérôme Gohier

1746 - 1830

Informations générales
  • Né le 27 février 1746 à Semblancay ( - Généralité de Tours France)
  • Décédé le 29 mai 1830 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Assemblée nationale législative
Mandat
Du 1er septembre 1791 au 20 septembre 1792
Département
Ille-et-Vilaine
Groupe
Modérés

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député en 1791, ministre et membre du Directoire, né à Semblançay (Généralité de Tours) le 27 février 1746, mort à Paris (Seine) le 29 mai 1830, il appartenait à une famille de notaires de Rennes.

Il fit ses études aux jésuites de Tours, se fit inscrire comme avocat au parlement de Bretagne, et fit représenter à Rennes quelques pièces qui eurent du succès. Ses plaidoiries le mirent également en vue, et, lors de la lutte du parlement contre Loménie de Brienne, il fut chargé de rédiger sa protestation. Il fut du nombre des six députés du tiers-état de Bretagne qui présenteront au roi (avril 1789) la réponse aux imputations de l'ordre de la noblesse. Membre de la cour provisoire qui remplaça, en 1790, la chambre des vacations du parlement, il fut élu, le 1er septembre 1791, député d'Ille-et-Vilaine à l'Assemblée législative, le 3e sur 10, à la pluralité des voix.

Il entra au comité de législation, « plein de zèle et de bonnes intentions, a dit Mme Roland, mais du reste homme médiocre, » se mêla activement aux débats, prononça un discours (21 novembre 1791) sur la constitution civile du clergé, parla (9 janvier 1792) en faveur de la sanction du roi ratificative des décrets de la haute cour ; demanda (8 février) le séquestre des biens des émigrés. A propos du serment à exiger des prêtres, il dit en terminant son discours (24 mai) : « L'efficacité de ce serment ne repose pas sur la confiance que nous avons dans la bonne foi des prêtres; son but est principalement de les lier par leur propre intérêt. Il s'agit moins de les attacher à la constitution, que de neutraliser leurs efforts. Les gens les moins éclairés se défieront des discours d'un prêtre, s'ils voient que ses conseils sont on opposition avec son serment; l'hypocrisie révolte même les plus crédules, en sorte qu'un prêtre qui aura prêté le serment se trouvera par là même dans l'impuissance de nuire. » Elu secrétaire de l'Assemblée le 16 juin, il donna son opinion, le 19, sur le mode de constitution de l'état civil, le 28 sur l'âge où l'on pourra se marier sans le consentement des parents, et conclut pour l'âge de vingt ans, « parce que c'est de la nature, et non de ses père et mère, que l'enfant tient le droit de se marier, et qu'il doit pouvoir contracter cet engagement aussitôt qu'il est parvenu à l'âge où l'union des deux sexes est un besoin irrésistible », exposa, le 15 août, « le plan de contre-révolution de la cour » et présenta, le 25 septembre, un rapport sur les papiers inventoriés dans les bureaux de la liste civile; l'Assemblée en ordonna l'impression et l'envoi aux armées et aux 83 départements.

Il ne fut pas réélu à la Convention, et fut appelé par Garat au secrétariat général du ministère de la Justice; puis, lorsque Garat passa à l'Intérieur, il devint ministre de la Justice (20 mars 1793). En cette qualité il adressa, le 7 avril de la même année, la lettre suivante au président de la Convention:

« Citoyen président, en exécution du décret rendu hier, qui ordonne de mettre en état d'arrestation Louis- Philippe-Joseph-Egalité, il a été conduit à la mairie pour y faire la reconnaissance de sa personne. Ayant joint ici le procès-verbal, vous verrez qu'il regarde ce décret comme étranger à sa personne, vu sa qualité de représentant du peuple. Mon respect pour son caractère ne me permet pas de juger les difficultés; j'en réfère à la Convention. Le ministre de la Justice, GOHIER. »

Sur la proposition de Sers, la Convention passa à l'ordre du jour.

Le zèle révolutionnaire de Gohier ne se ralentit pas; le 17 juin, il envoya à la Convention la liste des députés Girondins arrêtés ou en fuite; fit ordonner (19 septembre) la destruction des titres de noblesse à la Chancellerie, et fit part de cet acte à la Convention en ces tenues: « Citoyens, en proclamant l'égalité, vous avez voulu qu'il ne restât aucune trace des distinctions qui pouvaient blesser la dignité de l'homme. Vous avez condamné aux flammes tous les titres imaginés par l'orgueil ; vous avez décrété qu'on ne reconnaîtrait désormais dans la République française d'autre distinction que celle du mérite et de la vertu; mais les enfants de la folie des hommes ne sont pas tous détruits. Je viens d'être instruit, par un commis de la Chancellerie, qu'il existait dans un bureau soixante-sept registres contenant les édits et les règlements des anciennes chancelleries, et des titres de ces hommes dévorés du désir de devenir grands, et qui étaient en effet si petits. Je prie la Convention de décréter que ces titres seront brûlés. » Cette proposition, convertie en motion, fut immédiatement décrétée.

Lorsque les ministères furent remplacés par des commissions exécutives, Gohier renonça à ses fonctions (29 germinal an II), et fut appelé, en l'an IV, au poste, de président du tribunal criminel de la Seine, puis, en fructidor an V, à celui de juge au tribunal de cassation.

Candidat au Directoire au moment du coup d'Etat de fructidor, il ne fut élu directeur que le 29 prairial an VII, en remplacement de Treilhard dont la nomination était annulée. Le 2 messidor, à son installation, il prononça un long discours d'acceptation, fut nommé président du Directoire l'année suivante, et fit, à cette occasion, un nouveau et long discours au Champ-de-Mars, le 1er vendémiaire an VIII, pour l'anniversaire de la proclamation de la République. Un peu plus d'un mois après, au coup d'Etat de brumaire, Boulay (de la Meurthe) fut chargé par le général Bonaparte « d'obtenir» » la démission de Gohier. Celui-ci faisant quelque résistance, Boulay lui dit : « Vous ne voudriez pas, citoyen, qu'on mette à cette demande plus que de l'invitation ? » Gohier s'empressa d'acquiescer.

Consigné un moment au Luxembourg, il se retira dans sa propriété d'Antony, prés de Sceaux, mais ne bouda pas le régime nouveau, qui, en l'an X, le nomma « commissaire général des relations commerciales de l'Empire français en Batavie », en d'autres termes, consul de France à Amsterdam. Il occupa ce poste jusqu'à la réunion de la Hollande à la France, refusa par raison d'âge et de santé la même situation aux Etats-Unis, et se retira à Eaubonne, près de Montmorency, où il se livra à la culture des lettres, et composa notamment (1827) contre la Restauration une philippique dédiée à Béranger, et qui se terminait ainsi :

Horace et Tibulle à la fois
Bon Français, aimable poète,
L'honneur des chansonniers, reçois
Tribut d'une simple musette:
Chant du cygne d'un vieil athlète
Que l'âge a mis hors des combats.
Toi, plus heureux, ah ! fouette, fouette,
Chante toujours, ne t'endors pas !

Il mourut à 84 ans, après avoir publié les Mémoires d'un vétéran irréprochable de la Révolution (1825). On a aussi de lui: La Mort de César, tragédie de Voltaire, avec un nouveau dénouement (1794) , etc. Napoléon Ier a dit de lui: « C'était un avocat de réputation, d'un patriotisme exalté; jurisconsulte distingué, homme intègre et franc. »