Henri Fréville

1905 - 1987

Informations générales
  • Né le 4 décembre 1905 à Norrent-fontes (Pas-de-Calais - France)
  • Décédé le 14 juin 1987 à Rennes (Ille-et-Vilaine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 30 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Département
Ille-et-Vilaine
Groupe
Républicains populaires et centre démocratique
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 18 novembre 1962 au 2 avril 1967
Département
Ille-et-Vilaine
Groupe
Centre démocratique
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 12 mars 1967 au 30 mai 1968
Département
Ille-et-Vilaine
Groupe
Progrès et démocratie moderne

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 2 octobre 1971 au 1er octobre 1980

Biographies

Biographie de la Ve République

FRÉVILLE (Henri, Gustave, Théophile)

Né le 4 décembre 1905 à Norrent-Fontes (Pas-de-Calais)
Décédé le 15 juin 1987 à Rennes (Ille-et-Vilaine)

Député d’Ille-et-Vilaine du 30 novembre 1958 au 30 mai 1968
Sénateur d’Ille-et-Vilaine de 1971 à 1980

Henri Fréville est né le 4 décembre 1905 à Norrent-Fontes (Pas-de-Calais). C’est en Artois que, précisément, sa famille, d’origine paysanne, trouve ses racines au XVe siècle. C’est aussi sur ses terres du Pas-de-Calais qu’elle vit jusqu’au début du XXe siècle. Après avoir fréquenté le collège Mariette de Boulogne-sur-Mer, Henri Fréville, fils de directeur d’école publique, entre au lycée Faidherbe de Lille, avant de rejoindre le prestigieux lycée parisien Louis-le-Grand. Simultanément, il étudie à la faculté des lettres de Paris, où il prépare et passe avec succès l’agrégation d’histoire et de géographie. Par ailleurs, docteur ès lettres, il est l’auteur d’une thèse de doctorat sur l’intendance en Bretagne au dix-huitième siècle, qui lui vaudra le grand prix Gobert de l’Académie française, en 1955. En septembre 1932, il est nommé professeur au lycée Chateaubriand de Rennes.

Disciple de Marc Sangnier, Henri Fréville appartient à la Jeune République, mouvement démocrate-chrétien orienté au centre gauche, avec lequel il adhère au Front populaire en 1936. À ce titre, il est de ceux qui apportent leur soutien aux républicains espagnols résistant au franquisme.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est fait prisonnier par les Allemands, lors de la retraite de Dunkerque. Il n’est libéré qu’en mars 1943, et regagne Rennes. Il entre alors dans la Résistance, comme délégué à l’information clandestine, de mai 1943 à août 1944, puis comme directeur à l’Information, au sein du Commissariat régional de la République dirigé par Victor Le Gorgeu, d’août 1944 au 30 septembre 1945.

Au sortir de la guerre, de 1945 à 1948, Henri Fréville est attaché au Centre national de la recherche scientifique (C.N.R.S.). Il est nommé ensuite professeur de première supérieure au lycée de Rennes, de 1948 à 1949. La même année, il entre à l’université de Rennes, comme chargé de cours, puis maître de conférences. Il y devient professeur des universités, titulaire de la chaire d’histoire économique et institutionnelle, à partir du 1er novembre 1958. Il fonde l’Institut armoricain de recherches historiques.

Simultanément, il commence une carrière politique locale sous les couleurs du Mouvement républicain populaire (MRP). Élu conseiller municipal de Rennes en 1947, il devient adjoint au maire, au cours de la même mandature, puis premier magistrat de la ville, en mai 1953. Il sera réélu à ce poste jusqu’en mars 1977. Il complète son cursus honorum d’élu local par un mandat de conseiller général, à partir de mars 1958. Jusqu’en mars 1976, il siège à l’Assemblée départementale d’Ille-et-Vilaine qu’il préside au cours des dix dernières années de son mandat. Il est, par ailleurs, membre du Haut conseil à l’aménagement du territoire. Son parcours politique revêt un caractère national avec le retour du général de Gaulle au pouvoir. En effet, lors des premières élections législatives de la Cinquième République, il est élu député de la première circonscription d’Ille-et-Vilaine, le 30 novembre 1958. Au cours de la campagne électorale, il a dû affronter un candidat investi par l’Union pour la nouvelle République (U.N.R.), Pierre Morel. Henri Fréville ne se différencie de son adversaire le plus déterminé que sur le plan de la politique sociale, qu’il ne souhaite « ni dirigiste », « ni libérale », mais « nationale ». Aussi souhaite-t-il que le bénéfice de la Sécurité sociale soit étendu à l’ensemble de la population, non par une simple « surcompensation », mais par une refonte organique du système de financement. Par ailleurs, il ne peut imaginer que la « grande politique de renaissance française », souhaitée par le fondateur du régime, ne puisse se concevoir « sans l’adhésion confiante de la jeunesse ». L’éducation des jeunes est l’une des préoccupations essentielles du nouveau député de Rennes-nord.

À son arrivée à l’Assemblée nationale, Henri Fréville est nommé membre de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et y siège pour la durée de la législature. Il rejoint le groupe parlementaire des Républicains populaires et du Centre démocratique (R.P.C.D.). Le 28 avril 1959, il est nommé membre du conseil d’administration du Bureau universitaire de statistique et de documentation scolaires et professionnelles. Durant la première législature de la Cinquième République, il intervient, en séance publique, dans le cadre de treize discussions différentes. Il devient très rapidement un spécialiste des questions d’éducation et de santé publique, thèmes chers aux démocrates-chrétiens dont l’un d’eux, Joseph Fontanet, député de la Savoie, recevra plus tard successivement les deux portefeuilles ministériels. Henri Fréville s’exprime sur l’éducation avec une grande fréquence, dans la discussion tant des propositions et projets de loi que des budgets s’y rapportant. Dès le 2 juillet 1959, il prend la parole dans la discussion du projet de loi, relatif à l’équipement scolaire et universitaire, pour en souligner l’insuffisance devant les besoins réels, et en appeler à l’inadaptation du ministère de l’économie nationale aux réalités modernes. Il prend une part active à la discussion, en décembre 1959, d’un des projets de loi cher au Premier ministre Michel Debré, sur les rapports entre l’Etat et les établissements d’enseignement privés. Le 23 du même mois, il énumère les conditions dans lesquelles l’Etat peut venir en aide à l’enseignement privé sans porter atteinte aux caractères intrinsèques de celui-ci. Son investissement est tout aussi manifeste lorsque le projet de loi sur l’enseignement et la formation professionnelle agricoles arrive en discussion, le 31 mai 1960. Il souhaite une meilleure collaboration entre les ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale. Un an plus tard, le 3 mai 1961, il renouvelle son intérêt pour les questions d’éducation, en s’exprimant sur le projet de loi programme, relatif à la recherche scientifique et technique. Il montre en quoi le développement de la collaboration entre le CNRS et l’université est souhaitable. Après avoir critiqué « l’archaïsme et l’insuffisance des laboratoires universitaires », le professeur d’université qu’il est défend l’augmentation nécessaire des traitements des chercheurs. Il termine son discours en soulignant l’importance des sciences humaines. La seule question orale avec débat qu’il pose a trait au logement des étudiants, le 27 octobre 1961. Ce jour-là, il propose de leur réserver des logements dans les habitations à loyers modérés (H.L.M.). Devenu un orateur récurrent de ces questions, il intervient également dans les discussions budgétaires relatives à l’éducation nationale, le 21 novembre 1959, le 4 novembre 1960, le 28 octobre 1961.

Il en fait de même sur les sujets liés à la santé publique. La commission à laquelle il appartient le nomme rapporteur pour avis suppléant dans la discussion du projet de loi de finances pour 1960. L’année d’après, en qualité de rapporteur pour avis, il souhaite améliorer le budget du ministère de la santé ; à cet égard, il regrette l’abandon des anciennes formes d’hôpitaux psychiatriques, et démontre la nécessité d’une mise au point de la législation existante en matière d’aide sociale. Il souhaite qu’un effort soit accompli en faveur des jeunes travailleurs. Enfin, il suggère la mise en place d’une politique de l’immigration qu’il juge « nécessaire », et souhaite l’amélioration des relations entre les médecins et la Sécurité sociale. Il occupe les mêmes fonctions de rapporteur pour avis dans la discussion budgétaire pour 1961, au cours de laquelle il défend la poursuite « nécessaire » de l’humanisation des hôpitaux, et œuvre à la mise en place de l’Ecole nationale de santé publique de Rennes. C’est précisément un projet qu’il a défendu, en début de législature, en qualité de rapporteur. Le 18 juillet 1960, après avoir déposé un amendement qu’il retire par la suite, il défend l’implantation de cette école à Rennes, en insistant sur l’organisation de son éventuel enseignement, par le biais du système des élèves permanents et stagiaires.

Enfin, au terme de ce premier mandat, Henri Fréville défend la corporation des architectes. Rapporteur d’une proposition de loi tendant à instituer des sociétés professionnelles coopératives dans cette profession, il souligne la nécessité de concilier le caractère libéral de la profession d’architecte avec l’utilisation des techniques les plus perfectionnées et parfois fort coûteuses.

Au cours de ce premier mandat, Henri Fréville s’inscrit dans la majorité parlementaire, en se démarquant toutefois de la politique voulue par le général de Gaulle et mise en place par le chef du gouvernement. Il approuve d’ailleurs le programme de Michel Debré dès le 16 janvier 1959, et renouvelle sa confiance le 15 octobre suivant. Sans surprise, il vote en faveur du projet de loi sur les rapports entre l’Etat et les établissements d’enseignement privés le 23 décembre 1959. Il s’exprime de la même manière lors du scrutin public sur l’ensemble du projet de loi relatif aux pouvoirs spéciaux, le mardi 2 février 1960, comme sur le projet de loi constitutionnelle du 11 mai 1960, tendant à réformer la Communauté. S’il est de ceux qui expriment leur approbation au programme du gouvernement présenté par Georges Pompidou, le 27 avril 1962, il vote la motion de censure déposée contre le gouvernement et adoptée le 4 octobre 1962.

Candidat à sa succession dans la première circonscription d’Ille-et-Vilaine, le maire de Rennes ne pâtit pas de ce dernier vote. Certes, il trouve face à lui un candidat gaulliste, le professeur d’enseignement technique André Tanguy. Mais, avec Guy Houist, son suppléant depuis 1958, chargé de mission au Centre du bâtiment, membre de son conseil municipal, président du Comité départemental des H.L.M. et de l’Union nationale des foyers de jeunes travailleurs, il remporte l’élection législative dès le premier tour, avec 21 723 des 43 408 suffrages exprimés. Le candidat gaulliste ne recueille que 10 000 voix de moins ; le candidat communiste et la représentante du Parti socialiste unifié (P.S.U.) arrivent en queue de liste avec, respectivement, 4 818 et 5 178 voix. Aussi Henri Fréville, a-t-il mené une campagne fidèle à son tempérament politique passé.

Conscient que les années cinquante et soixante ont amené « des problèmes nouveaux d’une extraordinaire ampleur », il a insisté, dans son programme électoral, sur le maintien de la paix intérieure et de l’ordre public, l’une et l’autre demeurant précaires s’ils ne parviennent à trouver leur fondement dans le respect des institutions, c’est-à-dire dans un équilibre et une collaboration fonctionnelle des pouvoirs. Il souhaite que le maintien des libertés passe notamment par l’impartialité de la radiodiffusion et de la télévision nationales, monopoles d’Etat, mais non apanage d’un parti ou d’une idéologie. À cette suite, il justifie son action passée, éloignée de tout esprit partisan, en soutien du général de Gaulle, ou en parlementaire critique lorsque le gouvernement « sort des limites de ses attributions ». C’est fort de ce constat qu’Henri Fréville souhaite poursuivre l’« important travail législatif » accompli entre 1958 et 1962, mais non aux dépens, comme il en souligne l’évidence, du niveau de vie de plusieurs catégories de Français, à l’instar des personnes âgées, des familles, des artisans et des paysans. À l’extérieur, le député-maire de Rennes estime que la liberté et la prospérité de la France ne pourront être effectives qu’au sein d’une Europe unie.

À son retour au Palais-Bourbon, Henri Fréville retrouve la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la durée de la législature. Le 19 février 1963, il est nommé membre du Conseil d’administration du bureau universitaire de statistique. Au cours de ce deuxième mandat, il dépose et défend une proposition de loi, le 18 décembre 1962, relative à la radiodiffusion-télévision française (R.T.F.). Son activité parlementaire reste soutenue, puisqu’il intervient, en séance publique, à vingt-deux reprises, entre 1962 et 1967. Trois thèmes dominent : le statut des médias radiotélévisés ; la réforme des collectivités locales ; l’éducation et la santé publique. Tout d’abord, conformément à sa profession de foi, le député de la première circonscription d’Ille-et-Vilaine veille très attentivement au nouveau statut de la R.T.F. Il s’agit, pour lui, de la nécessité d’assurer l’objectivité de l’information. C’est ce qu’il affirme à la tribune de l’Assemblée, le 14 juin 1963, avant d’y insister à nouveau, au printemps 1964, dans la discussion du projet de loi portant statut de l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF). À ce propos, le 28 mai, il souhaite que soient clairement définies, à la tête de l’O.R.T.F., les deux autorités, de contrôle et de gestion, de manière « ferme et sereine ». Il dépose trois amendements en ce sens, dont l’un vise, par sa plus grande précision, à l’objectivité de la diffusion de manière optimale : il défend ainsi la création d’un comité de contrôle des émissions près le conseil d’administration de l’établissement, chargé de veiller à la tenue et à l’objectivité des programmes. La délibération parlementaire ira jusqu’à la réunion d’une commission mixte paritaire, dont l’essentiel de la mission a veillé à limiter « le monopole abusif » résultant de l’utilisation de la radio et de la télévision.

Henri Fréville s’investit également dans les travaux parlementaires liés à la réforme des collectivités locales. Déjà, le 27 novembre 1963, il prend part au débat sur la déclaration du gouvernement relative à l’aménagement du territoire, notamment dans le cadre des circuits commerciaux. Le 20 mai 1964, il s’exprime dans la discussion du projet de loi relatif à l’élection des conseillers municipaux des communes de plus de 30.000 habitants. Fort de son expérience de maire de Rennes et de président du Conseil général, il propose alors une réforme des finances locales. L’année d’après, le 21 mai 1965, dans la discussion des questions orales, il s’exprime à nouveau sur les collectivités locales, et déplore l’alourdissement de la fiscalité directe communale. Il critique les exonérations choquantes en matière de patente, en dénonçant l’exemple des administrations publiques. Un an plus tard, le 17 mai 1966, il souligne la distinction entre la politique de décentralisation administrative et de déconcentration économique.

Enfin, la santé publique, liée aux problèmes d’éducation, reste le sujet de prédilection du maire de Rennes. À l’exception des deux derniers projets de loi de finances de la législature (1966 et 1967), il est rapporteur pour avis du budget du ministère de la santé publique et de la population. Le 14 janvier 1963, il met l’accent, notamment, sur le problème de l’enfance inadaptée, et sur la situation des établissements spécialisés assurant leur rééducation. Il souhaite leur prise en charge par les caisses de Sécurité sociale et la création de classes spéciales pour ces enfants ne pouvant recevoir l’enseignement dans les conditions normales. Lors de la discussion du budget suivant, le 24 octobre 1963, il revient sur le thème de la politique sociale de l’enfance. Enfin, l’année d’après, il souhaite une meilleure coordination entre recherche et enseignement, et prône la mise en place d’une vaste politique hospitalière ; son collègue et ami démocrate-chrétien, Noël Barrot, député de la Haute-Loire, œuvre dans ce sens. Le 7 novembre 1964, il préconise enfin une politique de la jeunesse, thème qui, à nouveau, permet au député breton de faire le lien entre santé et éducation. Ses diverses interventions dans les débats budgétaires relatifs au ministère de l’éducation nationale vont dans la même direction, de même que celles touchant aux déclarations du gouvernement en ce domaine. Le 19 juin 1963, il rappelle les difficultés du logement des étudiants, déjà mises en évidence sous son mandat précédent. Le 29 octobre 1964, il renouvelle son souhait de la formation de maîtres spécialisés. Le 18 mai suivant, il se veut vigilant sur le futur régime de la licence d’enseignement, et sur le rôle de l’agrégation et de la recherche universitaire. Enfin, lors de son ultime intervention de la législature en séance publique, le 30 novembre 1966, il prend part à la discussion du projet de loi portant création d’organismes de recherche, en montrant la nécessité, pour le gouvernement, de doubler le potentiel scientifique en cinq ans. Il est convaincu de l’intérêt de la collaboration entre université et industrie.

Au cours de ce deuxième mandat parlementaire, par ses votes, le député-maire de Rouen fait preuve d’un soutien exigeant aux gouvernements de Georges Pompidou. Le 13 juin 1963, il vote en faveur du projet de loi autorisant la ratification du traité de l’Elysée, signé le 22 janvier précédent, entre la République française et la République fédérale d’Allemagne, dans le but d’une coopération commune. En revanche, lorsque le 26 juillet 1963, les députés doivent s’exprimer sur le projet de loi relatif à certaines modalités de la grève dans les services publics, Henri Fréville n’hésite pas à voter contre ce texte, démarche suivie par l’ensemble des élus démocrates-chrétiens. À l’instar de la représentation nationale, à sa presque unanimité, le président du Conseil général d’Ille-et-Vilaine vote au Congrès, le 20 décembre 1963, pour la révision constitutionnelle relative aux dates d'ouverture et de clôture de la seconde session ordinaire du Parlement. Le 21 mai 1964, il refuse, en revanche, d’apporter sa voix au texte relatif à l’élection des conseillers municipaux, comme ses prises de position sur ces questions l’ont montré antérieurement. Il agit de même, le 26 mai 1965, lors du scrutin public sur le projet de loi relatif au recrutement, en vue de l’accomplissement du service national.

Henri Fréville, secondé par le même suppléant depuis 1958, Guy Houist, avocat et membre du Conseil économique et social, est candidat à sa succession, lors du renouvellement législatif du printemps 1967. La campagne électorale est plus difficile qu’en 1962. Arrivé en tête du premier tour, avec une avance confortable de 9 000 voix sur son principal adversaire, le gaulliste Gabriel Cordoin, il doit affronter un second tour qui l’oppose à ce dernier, mais aussi au candidat du Parti socialiste unifié (P.S.U.), son collègue Charles Foulon, professeur à la faculté des lettres de Rennes. Entre les deux tours, le député sortant perd 1 602 voix, mais est réélu avec 23 230 des 55 721 suffrages exprimés, soit un écart de plus de 6 000 voix sur son concurrent. Fondée sur son expérience et son bilan parlementaires, le maire de Rennes rappelle que son action a tenu pour prioritaire la transmission aux plus jeunes d’un pays « sain, intellectuellement, physiquement et moralement ».

Au Palais-Bourbon, il siège de nouveau à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Membre du groupe Progrès et démocratie moderne (P.D.M.), il est nommé membre de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif aux impôts directs locaux, le 23 octobre 1967. Il est également membre de la commission spéciale, dont il est lui-même à l’initiative, chargée d’examiner la proposition de loi tendant à assurer l’objectivité de l’ORTF. Cette nomination est effective à compter du 10 mai 1968. Au cours de cette législature écourtée par la dissolution consécutive aux événements de mois de mai, Henri Fréville intervient à trois reprises en séance publique, mais ne dépose aucune proposition de loi. La discussion budgétaire pour 1968 le conduit à s’exprimer, le 26 octobre 1967, sur le budget de l’éducation nationale, au chapitre des dotations consacrées à l’enseignement supérieur, qu’il estime bien trop négligeables. Son appartenance à la première des commissions spéciales précitées le conduit à s’exprimer sur la répartition des charges financières entre l’Etat et les collectivités locales, le 22 novembre 1967. Au printemps 1968, lors de la discussion de la motion de censure déposée contre le gouvernement, Henri Fréville fonde son mécontentement à l’encontre du gaullisme fondé sur le problème qu’il estime préoccupant de l’objectivité de l’O.R.T.F. Il combat sans cesse pour l’institution d’un comité de contrôle veillant à l’objectivité des programmes et s’en explique une nouvelle fois, le 23 avril 1968.

Au cours de ce troisième mandat de député, Henri Fréville vote les motions de censure déposées au cours de la discussion du projet de loi autorisant le gouvernement à prendre des mesures d’ordre économique et social, en première, deuxième et troisième lectures, les 20 mai, 9 et 16 juin 1967.

Candidat aux élections législatives consécutives à la dissolution de l’Assemblée nationale par le général de Gaulle, aidé en cela par un nouveau suppléant, le conseiller général et artisan d’art Georges Brand, Henri Fréville est battu par le gaulliste Jacques Cressard, dans un contexte politique largement favorable aux gaullistes. Il perd la circonscription avec 4 070 voix de retard sur le professeur investi par l’Union des démocrates pour la République (U.D.R.). Il ne se représentera plus aux élections législatives. Le 26 septembre 1971, il fait son entrée au Sénat, et sera l’un des vice-présidents du groupe centriste jusqu’en 1980. Il consacre les dernières années de sa carrière politique à la ville de Rennes, au département de l’Ille-et-Vilaine et à la région Bretagne. Conseiller général et président de l’Assemblée départementale jusqu’en 1976, Henri Fréville est également vice-président du Conseil régional de Bretagne de 1974 à 1976, et président du district urbain de Rennes de 1970 à 1977. Père d’importants programmes de logements, à l’initiative d’une politique de réserve foncière et de zones industrielles, promoteur et réalisateur de l’infrastructure scolaire publique de la ville et ayant souhaité une université ouverte sur les technologies de pointe, ce bâtisseur du Rennes moderne ne parvient pas à assurer sa succession à la mairie ; en 1977, le socialiste Edmond Hervé devient le premier magistrat de la ville et le demeure jusqu'en 2008. Le scrutin municipal de 1977, difficile pour Henri Fréville, a donné lieu à la publication de l’ouvrage Changer la vie, changer la ville, dans lequel son premier adjoint socialiste critiquait les projets du premier magistrat rennais, depuis que ce dernier avait fait le choix, à partir de 1971, de se rapprocher des élus U.D.R. au détriment des socialistes avec lesquels il avait gouverné jusqu’alors ; Un acte de foi : 30 ans au service de la cité a été écrit par Henri Fréville comme réponse et, a posteriori, comme testament du maire démocrate-chrétien à ses administrés.

Catholique pratiquant, homme de dialogue et de tolérance, il était l’auteur de plusieurs études historiques. En plus de sa thèse de doctorat, il a publié La Presse bretonne dans la tourmente, et les Archives secrètes de la Bretagne. Ses travaux consacrés à la Bretagne pendant les Années noires et, plus particulièrement, à l’attitude des nationalistes bretons durant l’Occupation, en font la cible du Front de libération de la Bretagne qui commet un attentat contre lui le 26 août 1975. Chevalier de la Légion d’honneur, il était aussi docteur honoris causa de l’Université d’Exeter et du College of Catherine Saint-Paul, institution américaine située dans le Minnesota.

S’il n’a pu assurer sa succession à Rennes, même si d’autres élus du département, à l’instar d’un Pierre Méhaignerie, peuvent faire figures de successeurs à l’échelle du département, Henri Fréville a la joie de voir son fils, Yves, professeur de sciences économiques à l’Université de Rennes, conseiller municipal et conseiller général de la ville, être élu à l’Assemblée nationale, en 1986, dans la troisième circonscription d’Ille-et-Vilaine. Mais Henri Fréville ne sera pas témoin de la réélection de son fils, aux élections législatives de 1988. Il disparaît le 15 juin 1987, à l’âge de 81 ans. En 1993, l’avenue de Crimée à Rennes est rebaptisée avenue Henri-Fréville.