Emile Janvier

1900 - 1972

Informations générales
  • Né le 29 septembre 1900 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 17 mai 1972 à Saint-denis-sur-sarthon (Orne - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 16 mars 1960 au 9 octobre 1962
Département
Orne
Groupe
Union pour la nouvelle République

Biographies

Biographie de la Ve République

JANVIER (Emile, Serge)
Né le 29 septembre 1900 à Paris
Décédé le 17 mai 1972 à Saint-Denis-sur-Sarthon (Orne)

Député de l’Orne de 1960 à 1962

C’est au terme de quinze ans d’engagement dans la vie publique qu’Emile Janvier devient député de l’Orne en remplacement de Louis Terrenoire au printemps 1960. Comme beaucoup d’anciens résistants, ce minotier, Parisien de naissance mais installé dans l’Orne, souhaite incarner une nouvelle conception de l’action politique au lendemain de la Libération. Son action se déploie d’abord dans le cadre municipal, puisqu’il devient maire de Saint-Denis-sur-Sarthon en 1945. Très attaché à la personne du général de Gaulle alors président du Gouvernement provisoire de la République française, il est élu conseiller général du canton d’Alençon-ouest à l’occasion des élections cantonales de septembre 1945. Le contexte politique semble alors favorable aux gauches, même si le MRP s’implante très tôt dans l’Orne.

Hostile aux institutions de la IVème République, Emile Janvier s’engage au Rassemblement du peuple français (RPF) qu’a fondé le Libérateur de la patrie en avril 1947. Cette formation politique tolère la double appartenance, mais le MRP, pourtant « parti de la Fidélité » à de Gaulle pour de nombreux Français, veille à se détacher très nettement du RPF, qu’il juge son concurrent politique. Cette rigidité s’exerce en particulier à l’encontre de Louis Terrenoire, député de l’Orne, qui fait bénéficier le mouvement gaulliste de son implantation dans le département à partir de l’automne 1947. Emile Janvier est un des artisans du succès du RPF à Alençon lors des élections municipales d’octobre 1947. Il assume rapidement des fonctions importantes au sein du mouvement gaulliste en tant que délégué départemental. Il n’abandonne cette responsabilité qu’en janvier 1951, avant les élections législatives de juin. Confirmé à l’Assemblée départementale par les électeurs du canton d’Alençon-ouest en 1951 et en avril 1958, Emile Janvier reste fidèle aux idées du général de Gaulle jusqu’à la chute de la IVème République.

Il soutient le « oui » à la nouvelle Constitution lors du référendum du 28 septembre 1958. Louis Terrenoire lui propose de devenir son suppléant dans la première circonscription de l’Orne pour les élections législatives de novembre. L’ancien député MRP, qui fut secrétaire général du RPF de 1951 à 1954 et vient d’être nommé directeur des Informations à la Radiodiffusion-Télévision française (RTF), a en effet besoin d’un « second » qui lui permette de compenser son relatif éloignement de la vie politique ornaise depuis 1951. Le tandem Terrenoire-Janvier obtient l’investiture de la Démocratie chrétienne de France, créée par Georges Bidault, et surtout de l’Union pour la Nouvelle République (UNR), qui se réclame du général de Gaulle. Le maire d’Alençon Marcel Hébert, membre des Républicains sociaux de Jacques Chaban-Delmas, conteste toutefois à Louis Terrenoire le monopole du gaullisme et dépose sa candidature peu avant la clôture des inscriptions à la Préfecture de l’Orne. Confrontés à cette dissidence, Louis Terrenoire et Emile Janvier choisissent d’y répondre en insistant sur leur fidélité au général de Gaulle dans leur profession de foi. Là où le candidat titulaire se réclame du gaullisme de guerre et rappelle qu’il fut secrétaire du CNR sous l’Occupation, c’est le « complet désintéressement » d’Emile Janvier dans ses engagements politiques qui y est loué. Le soutien à de Gaulle constitue le principal programme de Louis Terrenoire et de son suppléant Emile Janvier, qui demeurent discrets sur le règlement du conflit algérien, sinon pour réclamer le rétablissement de « la Paix ».

Louis Terrenoire arrive nettement en tête le 23 novembre 1958 avec 16 020 voix, soit 28,8% des suffrages exprimés. Il obtient ses meilleurs résultats dans le canton de Sées (44,8%) et dans celui d’Alençon-ouest (43,1%), qu’Emile Janvier représente au Conseil général de l’Orne. Elu député le 30 novembre 1958 par 50,7% des suffrages exprimés dans le cadre d’une triangulaire, Louis Terrenoire fait très vite figure de « ministrable » compte tenu de la confiance que lui voue le général de Gaulle. Il entre au gouvernement de Michel Debré au début de l’année 1960, après la semaine des Barricades, pour prendre en charge le portefeuille sensible de l’Information.

Son suppléant Emile Janvier lui succède sur les bancs du Palais-Boubon : la Constitution de la Vème République dispose en effet que les fonctions ministérielles sont incompatibles avec un mandat parlementaire. Le maire de Saint-Denis-sur-Sarthon s’inscrit au groupe de l’Union pour la Nouvelle République (UNR) de l’Assemblée nationale. Il y siège d’abord à la Commission de la production et des échanges, puis à la Commission des lois des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de juin à septembre 1962.

Emile Janvier s’intéresse beaucoup au travail législatif, auquel il se familiarise au cours de sa première année de mandat. Le député de l’Orne pend la parole à quatre reprises dans l’hémicycle entre le printemps 1961 et l’automne 1962. Rapporteur pour avis d’un projet de loi relatif à la transformation de l’OECE en OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) en mai 1961, il exprime le souhait que les excédents de la production agricole française puissent être écoulés au bénéfice des pays en développement, et pris en compte dans l’aide que l’OCDE souhaite leur accorder. Elu d’un département agricole et minotier de profession, il s’inquiète d’une possible remise en cause du principe d’un prix annuel et administré du blé le 29 octobre 1961.

La principale intervention d’Emile Janvier à l’Assemblée nationale se situe au lendemain des accords d’Evian, qui mettent un terme à la guerre d’Algérie. Le 20 mars 1962, le député de l’Orne se réjouit publiquement de la fin des combats et de l’ambition affichée par la lettre des accords : « Nous sommes engagés dans une voie audacieuse, mais humaine, et nous sommes décidés non à tout perdre, comme le prétendent ceux qui l’espèrent et jouent la catastrophe, mais bien au contraire à tout sauver ». Il souligne que cette issue n’aurait pu être trouvée sans l’autorité du chef de l’Etat et les possibilités que lui offrent les institutions de la Ve République. Emile Janvier saisit l’occasion de formuler un véritable credo gaulliste devant ses collègues, en rappelant son propre engagement contre l’Occupant, pendant la seconde guerre mondiale : « Il y aura tantôt vingt-deux ans, nous avons pris l’habitude de servir les causes nationales les plus désespérées et les plus déchirantes. Dans la nuit sans étoile où nous étions alors, nous avons entendu l’appel du général de Gaulle et nous l’avons suivi. Malgré les angoisses de l’époque, l’Histoire approuva son choix et justifia nos sacrifices. De Gaulle n’est pas l’homme des solutions de facilité. Il n’est pas non plus l’homme des solutions trompeuses. Il sait voir haut et loin. Il ne suit pas son époque, il la précède. C’est sans doute pourquoi il a choisi pour l’Algérie la seule solution difficile mais honnête et finalement payante : la libre disposition d’elle-même ». L’ancien suppléant de Louis Terrenoire conclut ce discours où s’entend l’écho d’une véritable foi gaulliste en appelant les partisans de l’Algérie française à la raison, dans l’intérêt de la Nation. « Me tournant vers ceux qui, encore de bonne foi dans cette enceinte, veulent s’isoler de la communauté nationale, je veux leur dire en toute sérénité : à quoi va vous mener votre attitude actuelle ? L’Algérie d’antan que vous vouliez à tout prix conserver (…) n’est plus en aucun cas possible, ni nationalement, ni mondialement. Votre solution algérienne était une solution trompeuse qui ne trompait plus personne que vous-mêmes. Vous nous vantiez à tout propos l’amitié qui vous liait en dehors de toute contrainte à la population musulmane, et c’est cette même population que vos amis abattent aujourd’hui sauvagement dans la rue. Quelle dérision ce serait, si ce n’était une tragédie ! (…) Réfléchissez à tout cela pour arrêter, s’il en est temps encore, les solutions du désespoir, absurdes ou criminelles ».

Gaulliste de la fidélité, Emile Janvier respecte la discipline de vote du groupe UNR entre 1960 et 1962. Il approuve le programme du gouvernement de Georges Pompidou (27 avril 1962), se prononce en faveur de la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault (5 juillet 1962) et ne vote évidemment pas la motion de censure du 4 octobre 1962.

Après la dissolution de l’Assemblée nationale, Louis Terrenoire sollicite le renouvellement de son mandat de député en novembre 1962. Le sortant Emile Janvier accepte à nouveau d’être son suppléant. Dans un département qui a voté « oui » à l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel direct avec une majorité de 76,2%, le succès de Louis Terrenoire et d’Emile Janvier ne fait guère de doute. Il est acquis dès le premier tour, le 18 novembre 1962, grâce au soutien de 53, 95% des électeurs de la première circonscription de l’Orne.

Réélu confortablement en mars 1967, puis en juin 1968, Louis Terrenoire reste secondé par le maire de Saint-Denis-sur-Sarthon. Les rumeurs récurrentes prédisant un retour au gouvernement de l’ancien ministre de l’Information ne trouvent pas de concrétisation dans les années 1960 : Emile Janvier ne retrouve plus les bancs de l’Assemblée nationale après 1962. Toujours député-suppléant, il s’éteint dans son département d’élection, âgé de soixante-et-onze ans, avant la fin de la quatrième législature de la Vème République.

En 1973, Louis Terrenoire fait le choix de ne pas se représenter aux suffrages des électeurs. La première circonscription de l’Orne lui donne un successeur gaulliste en la personne de Daniel Goulet, maire du Mêle-sur-Sarthe.