Jean Tricart

1915 - 2000

Informations générales
  • Né le 30 septembre 1915 à Ambazac (Haute-Vienne - France)
  • Décédé le 27 novembre 2000 à Limoges (Haute-Vienne - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 24 avril 1948 au 4 juillet 1951
Département
Haute-Vienne
Groupe
Communiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Haute-Vienne
Groupe
Communiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Haute-Vienne
Groupe
Communiste

Biographies

Biographie de la IVe République

TRICART (Jean)
Né le 30 septembre 1915 à Ambazac (Haute-Vienne)
Décédé le 27 novembre 2000 à Limoges (Haute-Vienne)

Député de la Haute-Vienne de 1946 à 1958

Issu d’une famille de cultivateurs, Jean Tricart semble avoir eu trois passions dans sa carrière: le monde paysan, le parti communiste et son journal L’Echo du Centre. Militant antifasciste dès l’entre-deux-guerres, il revendique l’héritage politique de son père, «un jeune cultivateur, venu de la boue des tranchées » et qui s’est prononcé en 1920 « pour l’adhésion à la troisième internationale. » Pourtant, ce n’est qu’à la faveur de la seconde guerre mondiale, et de son engagement dans la Résistance, qu’il a rejoint à son tour le parti communiste. Officier des forces françaises de l’intérieur (FFI), commandant d’une compagnie de Francs tireurs et partisans français (FTPF), il devient Premier secrétaire de la Fédération communiste de la Haute-Vienne en 1945, un poste qu’il occupe jusqu’en 1964. Membre du comité central du PCF, où il préside la commission centrale de contrôle financier, il va fonder et diriger avec Marcel Rigout le quotidien communiste L’Echo du Centre, très prisé dans cette région de vieille tradition ouvrière.
Conseiller municipal du Palais-sur-Vienne, il ne figure qu’en troisième position de la liste communiste pour l’élection de juin 1946 à la deuxième Assemblée nationale constituante. Les deux députés sortants, Marcel Paul, ministre de la production industrielle (novembre 1945-décembre 1946) et Alphonse Denis, lui aussi grand résistant, fondateur du Front national dans le Limousin, très implanté localement, le précèdent sur la liste communiste et d’union républicaine et résistante. Leur programme insiste d’abord sur la reconstruction de la France et de son industrie, puis sur la modernisation de l’agriculture française, sur le ravitaillement, la restauration des finances. La politique générale n’est abordée qu’aux neuvième et dixième points du programme, qui évoquent notamment l’épuration des vichystes, la destruction de la puissance militaire allemande et l’exigence des réparations de guerre, ainsi que la lutte contre le franquisme espagnol. C’est un communisme de tradition, enraciné dans l’histoire locale du mouvement rural. La liste ayant obtenu 66 815 voix sur 175 214 exprimés, soit 38,13 %, elle obtient deux élus, soit Marcel Paul et Alphonse Denis, mais Jean Tricart reste sur la touche. Lors de l’élection de novembre 1946, il est à nouveau en troisième position sur la liste communiste d’Union Républicaine et Résistante. Cette liste ayant obtenu 64 367 voix, soit 38,6 % des 166 647 exprimés, contre 36,9 % à la liste SFIO, 19,1 % à celle du Mouvement républicain populaire (MRP) et 5,4 % à celle du Parti Républicain de la Liberté et d’Union Gaulliste, Marcel Paul et Alphonse Denis sont réélus, mais Jean Tricart échoue une nouvelle fois. C’est la démission de Marcel Paul, en mai 1948, qui lui permet d’accéder enfin à l’Assemblée nationale. Siégeant à la commission du ravitaillement (1948-1950) et à celle de l’agriculture (1950-1951), il apparaît comme un défenseur actif des intérêts de la petite paysannerie, comme en témoignent ses propositions de loi instaurant un dégrèvement d’impôts pour les éleveurs touchés par la fièvre aphteuse (27 janvier 1949) et élaborant un véritable statut du fermage et du métayage (décembre 1950), ainsi que son intervention remarquée dans la discussion générale sur les prix agricoles, déplorant le manque de débouchés pour les produits français et les conditions de l’accord commercial franco-allemand (21 février 1950). Au cours de ce premier mandat, Jean tricard dépose deux propositions de résolution, un avis et un rapport et intervient à six reprises en séance publique. Il défend notamment huit amendements et un sous-amendement. Il dépose une demande d’interpellation.
Hostile au rapprochement avec la République fédérale d’Allemagne (RFA) dans le cadre d’une Europe atlantique, il vote notamment contre la constitution du conseil de l’Europe (9 juillet 1949) et contre la ratification du pacte de l’Atlantique (26 juillet 1949). Un de ses discours les plus marquants est prononcé lors de la discussion générale sur le projet de loi d’amnistie pour les faits de collaboration (7 novembre 1950). Rappelant le massacre d’Oradour-sur-Glane, non loin de Limoges, il s’oppose vigoureusement à ce projet qui va selon lui «effacer la trace même de leurs crimes », et qui constitue à ses yeux « la suite logique de l’abandon des réparations et de la préparation de votre fameuse armée européenne. » Ce sont les propos d’un homme marqué par la Résistance, et resté très méfiant envers l’Allemagne, comme va en témoigner son second mandat parlementaire.
Il est en effet réélu le 17 juin 1951, en deuxième position derrière Alphonse Denis, sur la liste dite d’Union Républicaine Résistante et Antifasciste pour l’Indépendance Nationale, le Pain, la Liberté et la Paix. L’intitulé de cette liste, présentée par le Parti communiste français, est déjà tout un programme, que confirme l’engagement électoral : défense de l’URSS contre les « bellicistes américains », pacte de paix entre les grandes puissances, paix au Viêt-Nam, réduction des crédits de guerre, tels sont les axes majeurs de ce manifeste, qui s’adresse, au-delà de l’électorat communiste, « aux Français de toutes opinions et de toutes croyances. » La liste recueille une moyenne de 66 778 voix, soit 39,1 % des 170 635 exprimés (Jean Tricart ayant personnellement obtenu 66 839 voix) contre 2,7 % à celle du Parti radical, 6,9 % à celle du MRP et 32 % à celle de la SFIO. Lors de ce deuxième mandat, Jean Tricart reste à la commission de l’agriculture (1951-1955), où il se montre toujours très actif. Au cours de ce deuxième mandat, il dépose sept propositions de loi, trois propositions de résolution et deux rapports. Ces initiatives parlementaires visent notamment à une modification de l’ordonnance du 17 octobre 1945 sur le statut du fermage et du métayage (17 juillet 1951), à fournir une aide financière aux exploitants victimes de la fièvre aphteuse (24 juin 1952), et une autre contre les reprises frauduleuses ou abusives d’exploitations par les non-exploitants (2 juin 1954). Ses vingt-huit interventions portent toutes sur les questions agricoles, notamment pour soutenir l’amendement de son collègue communiste Waldeck-Rochet pour création d’un fonds national d’allocation de vieillesse agricole (4 janvier 1952), contre la transformation du métayage en fermage, qu’il considère comme une « duperie » (3 juillet 1952), pour souligner la détresse des petits cultivateurs, conséquence « de la politique antipaysanne du gouvernement » (20 octobre 1953), pour réclamer la défense du marché français (6 août 1954) ainsi qu’un enseignement professionnel agricole obligatoire et gratuit (28 juin 1955). Il défend alors dix-sept amendements, plusieurs sous-amendements et deux contre-projets. Il fait deux rappels au règlement, dépose une motion de procédure et propose un article additionnel. Lors des votes marquants, il s’inscrit dans l’orthodoxie du groupe communiste, contre la loi Barangé-Marie sur l’enseignement privé (21 septembre 1951), contre la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA, 13 décembre 1951), contre l’investiture d’Antoine Pinay (6 mars 1952) et celle d’André Laniel (26 juin 1953), pour l’investiture de Pierre Mendès France (17 juin 1954), contre la Communauté européenne de Défense (CED, 30 août 1954) et les accords de Paris (29 décembre 1954).
Il se présente une nouvelle fois aux élections de janvier 1956, toujours en deuxième position derrière Alphonse Denis sur la liste du Parti Communiste Français. La profession de foi de cette liste est cette fois recentrée sur les enjeux sociaux et économiques, notamment sur la défense de la paysannerie laborieuse, et sur l’opposition à la guerre d’Algérie (retrait immédiat de toutes les « forces de répression »). La liste ayant obtenu une moyenne de 64 135 voix, soit 35,8 % des suffrages exprimés (en léger repli par rapport à 1951), elle devance encore largement celles de la SFIO (25,7 %), de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance – UDSR (11,5 %), menée par Roland Dumas, celle de l’Union et de Fraternité Française (10,8 %), présentée par Pierre Poujade, les autres listes (MRP, Rassemblement des gauches républicaines - RGR, Centre National des Indépendants et Paysans, ARS) ne dépassant pas 7 %. Avec 64 946 voix, Jean Tricart réalise le deuxième meilleur score de la circonscription, derrière sa tête de liste Alphonse Denis (65 456 voix), élu comme lui avec deux socialistes et avec Roland Dumas, dont la liste était apparentée à celle du Parti Radical (3,1 %). Jean Tricart siège une nouvelle fois à la commission de l’agriculture (1956-1958), et continue à défendre la petite paysannerie, par des propositions réclamant un prix garanti aux producteurs de blé (27 janvier 1956) et l’interdiction du cumul excessif des exploitations agricoles (29 février 1956), ainsi que par des interventions en faveur d’une prime pour les producteurs de blé (4 juillet 1956) ou des petits éleveurs de porcs (21 novembre 1956). Il est enfin le rapporteur de la proposition de loi sur le statut du métayage (22 février 1957). Il appartient également à la commission des territoires d’Outre-mer (1956-1958). Au cours de son mandat, il dépose quatre propositions de loi et un rapport. Il intervient à l’occasion de huit débats en séance publique et défend un sous-amendement. Il remplit les fonctions de rapporteur de la proposition de loi tendant à modifier l’article 821 du Code rural (métayage). A cet égard, le 22 février 1957, il prend la parole sur l’historique de la législation sur le métayage, sur l’établissement de la règle du tiercement et sur la limitation des dérogations accordées par les tribunaux paritaires.
Ayant voté avec ses collègues communistes l’investiture de Pierre Mendès France (17 juin 1954), il s’oppose avec son groupe à toute politique de construction européenne avec la RFA, votant pour la question préalable déposée par Edouard Herriot pour couper court à la ratification de la CED (30 août 54), contre la ratification des accords de Londres sur l’entrée de la RFA dans l’OTAN (12 octobre 1954) et contre la ratification du traité de Rome instaurant la Communauté économique européenne (CEE, 9 juillet 1957). Toujours en phase avec son groupe, il refuse de voter la confiance à Edgar Faure (23 février 1955), puis à Guy Mollet (31 janvier 1956), et vote contre les pouvoirs spéciaux en Algérie (12 novembre 1957). A l’instar de ses leaders, Jacques Duclos et Etienne Fajon, il s’abstient lors du vote de confiance à Pierre Pflimlin (13 mai 1958), vote contre la confiance au général de Gaulle (1er juin 1958) et contre les pleins pouvoirs accordés à ce dernier (2 juin 1958). Candidat du parti communiste dans la troisième circonscription de la Haute-Vienne, lors des élections des 23 et 30 novembre 1958, il est battu au deuxième tour par le maire de Limoges, Louis Longequeue (33 403 voix contre 17 404). Il continue la publication de L’Echo du Centre sous la Cinquième République, mais il prend ses distances avec Georges Marchais, secrétaire général en 1972, qui coupe les subventions à son journal au début des années 1970. Proche de Marcel Rigout et des rénovateurs du parti, Jean Tricart renonce alors à tous ses mandats électifs, ne conservant plus que son siège au comité central. Il retrouve néanmoins des responsabilités politiques en conquérant la mairie de Poissy (Yvelines), lors des élections municipales de 1977. Mais il démissionne de ses fonctions en 1981, officiellement pour raisons de santé, officieusement pour désaccord avec Georges Marchais. A sa mort, à l’âge de 85 ans, Robert Hue salue « le résistant, le parlementaire, l’infatigable militant (...) dont le Parti communiste s’honore de l’avoir compté parmi les siens».