Jean, Emmanuel Letourneau

1907 - 1986

Informations générales
  • Né le 18 septembre 1907 à Le lude (Sarthe - France)
  • Décédé le 16 mars 1986 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Sarthe
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Sarthe
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Sarthe
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Sarthe
Groupe
Mouvement républicain populaire

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 18 septembre 1907 au Lude (Sarthe)
Décédé le 16 mars 1986 à Paris (5e)

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Sarthe) Député de la Sarthe de 1946 à 1955
Ministre des postes, télégraphes et téléphones du 27 janvier au 24 novembre 1946
Ministre du commerce du 22 janvier au 9 mai 1947
Ministre du commerce, de la reconstruction et de l'urbanisme du 9 mai au 20 novembre 1947
Ministre de la France d'outre-mer du 28 octobre 1949 au 24 juin 1950
Ministre d'Etat chargé des relations avec les pays associés du 12 juillet 1950 au 21 mai 1953

Jean Letourneau est né le 18 septembre 1907 dans le village du Lude, dans la Sarthe. Son père est directeur d'une banque. Après une licence en droit, il entre dans une petite compagnie de charbonnages, dont il devient l'administrateur délégué.

Son engagement politique est précoce : il milite dès les années vingt au sein du Parti démocrate populaire, ancêtre du MRP, dont il intègre le Comité national en 1936, et vice-préside l'Association catholique de la jeunesse française de 1929 à 1935. Il écrit en outre, à partir de 1934, dans différentes publications de sensibilité démocrate-chrétienne : Le Petit démocrate, organe du Parti démocrate populaire, L'Aube, dirigée par Francisque Gay, et La Croix.

Après la défaite de l'armée française, à l'été 1940, Jean Letourneau rejoint les rangs de la Résistance ; il seconde Georges Bidault, qui sera président du CNR, et s'emploie avec Francis Closon et Pierre-Henri Teitgen à élaborer un statut juridique destiné à régir le secteur de la presse après la Libération. Ces articles lui valent d'être nommé en 1944 directeur de la Presse au ministère de l'Information ; il est en outre appelé, la même année, à siéger au sein du Comité directeur du MRP.

C'est donc fort logiquement que Jean Letourneau prend la tête de la liste du MRP dans son département natal de la Sarthe aux élections du 21 octobre 1945 pour la première Assemblée Constituante. Sa liste ne recueillant que 28 866 voix sur 189 383 suffrages exprimés, il doit au système de la répartition des restes à la plus forte moyenne de remporter l'un des cinq sièges à pourvoir. Le département de Jean Letourneau est nettement dominé par la SFIO, puisque la liste conduite par Christian Pineau obtient trois élus ; quant au dernier siège, il revient au candidat de la « liste d'entente républicaine », Philippe d'Argenlieu.

Nommé membre de la Commission de la presse, de la radio et du cinéma, Jean Letourneau devient, le 27 janvier 1946, ministre des postes, télégraphes et téléphones du cabinet Gouin ; à ce titre, il est notamment à l'origine d'un projet de loi, déposé le 3 avril 1946, qui détermine les relations que les services de la Poste et ceux de la SNCF sont amenés à entretenir pour l'acheminement des colis postaux.

Avec ses collègues du groupe MRP, Jean Letourneau vote en faveur des nationalisations mais s'oppose, le 19 avril 1946, au projet de Constitution de la IVe République ; le texte est de toute façon rejeté par le référendum du 5 mai, ce qui rend nécessaire la convocation d'une seconde Assemblée constituante.

Ces élections se tiennent le 2 juin. Jean Letourneau conduit de nouveau la liste du MRP dans la Sarthe, qui enregistre une très forte poussée, avec 60 511 voix sur 194 129 suffrages exprimés ; elle obtient deux élus, et son renforcement s'opère au détriment de la liste de la SFIO, qui ne retrouve que deux de ses trois députés sortants.

Jean Letourneau retrouve alors, le 6 août 1946, le ministère des postes, télégraphes et téléphones. Il est aussi, par interim, amené à exercer les fonctions de ministre de la France d'outre-mer et de ministre des finances ; c'est à ce dernier titre qu'il est amené à plusieurs reprises à intervenir à la tribune de l'Assemblée, no tamment lors de la discussion du projet et des propositions de loi relatifs au statut général des fonctionnaires. C'est lui, enfin, qui prononce, le 5 octobre 1946, l'allocution au nom du gouvernement au moment de la séparation de l'Assemblée constituante.

Jean Letourneau approuve le nouveau projet de Constitution voté par l'Assemblée nationale le 28 septembre 1946 et ratifié par référendum le 13 octobre. Il sollicite à nouveau le renouvellement de son mandat lors des élections législatives du 10 novembre ; il est réélu sans peine malgré le léger recul de la liste du MRP, qui recueille 53 690 voix sur 183 989 suffrages exprimés.

Jean Letourneau choisit cette fois de sièger au sein de la Commission des affaires étrangères ; il est en outre nommé juré à la Haute cour de justice. C'est pendant cette première législature que se déroule l'essentiel de sa carrière ministérielle. Nommé le 22 janvier 1947 ministre du commerce du gouvernement Ramadier, il se voit confier le portefeuille de la reconstruction et de l'urbanisme après le départ de Charles Tillon, en mai 1947 ; il doit toutefois quitter ses fonctions lorsque Paul Ramadier, victime des dissensions internes à la SFIO, présente le 24 novembre 1947 sa démission de la Présidence du Conseil. Jean Letourneau redevient alors simple parlementaire, mais se consacre plus activement au journalisme, au point de prendre, au début de l'année 1949, la direction du grand quotidien chrétien-démocrate L'Aube.

Jean Letourneau retrouve un portefeuille ministériel à la fin du mois d'octobre 1949, dans le second cabinet Bidault. Partisan, aux côtés du nouveau président du Conseil, d'une défense intransigeante de l'Empire français, il a pour mission, alors que le corps expéditionnaire s'enlise dans des opérations militaires en Indochine, de rétablir l'ordre dans les relations entre la France et ses colonies. Cette responsabilité lui incombe pendant plus de trois ans et demi, d'abord en tant que ministre de la France d'outre-mer (octobre 1949-juin 1950) puis en tant en tant ministre, parfois avec le rang de ministre d'Etat, chargé des relations avec les Etats associés (cabinet Pleven : juillet 1950-mars 1951 ; 3e cabinet Queuille : mars-juillet 1951 ; 2nd cabinet Pleven : août 1951-janvier 1952 ; cabinet Faure : janvier-mars 1952 ; cabinet Pinay : mars 1952-janvier 1953 ; cabinet Mayer: janvier-juin 1953). Fermement opposé à l'abandon de la présence française, Jean Letourneau gagne la confiance d'Antoine Pinay, qui, à la mort du maréchal De Lattre, en avril 1952, ajoute à ses pouvoirs ceux de haut-commissaire de France à Saïgon ; il y reste un peu moins d'un an, alors que la position du corps expéditionnaire français devient de plus en plus difficile. A la chute du gouvernement Mayer, en mai 1953, le president du Conseil Joseph Laniel l'écarte de la nouvelle équipe ministérielle.

Entretemps, Jean Letourneau a sollicité et obtenu le renouvellement de son mandat aux elections législatives du 17 juin 1951, à la tête de la liste « d'Union republicaine d'action familiale, sociale et rurale » presentée par le « Groupement national des républicains démocrates ». La liste a obtenu 28 528 voix sur 180 837 suffrages exprimés, et emporté l'un des cinq sièges à pourvoir ; Jean Letourneau a d'ailleurs recueilli 32 740 voix sur son nom propre. La donne, dans le département de la Sarthe, a cette fois été changée par la percée du RPF, dont la liste, conduite par Raymond Dronne, a emporté deux des cinq sièges à pourvoir.

Pendant cette législature, Jean Letourneau consolide son enracinement électoral dans le département de la Sarthe : il est élu conseiller général en 1952 et maire de Chevillé en 1953. Son activité parlementaire est contrastée : il n'est l'auteur que de deux textes, dont l'un, déposé le 27 septembre 1951, est un projet de loi relatif à la transcription en Indochine des jugements, arrêts et actes en matière d'état civil, mais intervient à de très nombreuses reprises à la tribune de l'Assemblée, la plupart du temps en qualité de ministre en charge des relations avec les pays associés. Le 23 juillet 1954, deux mois après la défaite de Dien Bien Phu, il prend longuement la parole pour justifier son action de 1949 à 1953, et pour souligner la nécessité de préserver une forme de présence française en Extrême-Orient.

Au cours des principaux votes qui jalonnent ces quatre années et demie, Jean Letourneau s'aligne généralement sur les positions du MRP : il se prononce en faveur de la création de la CECA (13 décembre), vote la confiance au cabinet Pinay (6 mars 1952) et au cabinet Laniel (26 juin 1953), mais choisit de s'abstenir volontairement lors du scrutin d'investiture de Pierre Mendès France (17 juin 1954). Il vote contre la question préalable opposée à la discussion du projet de ratification du traité de Paris (30 août, vote équivalent au rejet de la CED) et contre la ratification des accords de Paris (29 décembre 1954) ; il soutient enfin l'investiture d'Edgar Faure à la Présidence du Conseil (23 février 1955).

Aux élections législatives du 2 janvier 1956, la liste de Jean Letourneau est en net recul, avec 18 091 voix sur 197 487 suffrages exprimés. Malgré l'apparentement conclu avec la liste des Républicains sociaux et avec celle du Centre national des indépendants, Jean Letourneau ne retrouve pas son siège, la liste RPF de Raymond Dronne devançant de quelques centaines de voix celle du MRP. Brièvement conseiller de l'Union française (avril 1956 - décembre 1958), il s'éloigne ensuite progressivement de la vie publique, abandonnant en 1958 son mandat de maire et en 1963 son mandat de conseiller général. Il intervient toutefois une dernière fois dans le début public en 1983, par un article paru dans les colonnes du Figaro, pour s'opposer au projet de loi sur la presse préparé par le gouvernement de Pierre Mauroy.

Jean Letourneau décède à Paris le 16 mars 1986.