1. – Les auditions
Les commissions peuvent se réunir sur des ordres du jour non législatifs, afin de procéder à des auditions de personnalités. L’article 5 bis de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dispose qu’« une commission spéciale ou permanente peut convoquer toute personne dont elle estime l’audition nécessaire, réserve faite, d’une part, des sujets de caractère secret et concernant la défense nationale, les affaires étrangères, la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, d’autre part, du respect du principe de la séparation de l’autorité judiciaire et des autres pouvoirs ». Introduites en 1996, ces dispositions reconnaissent aux commissions le droit de convoquer toute personne de leur choix, le fait de ne pas répondre à une convocation étant puni de 7 500 € d’amende.
Les commissions entendent ainsi très fréquemment des membres du Gouvernement, y compris le Premier ministre, des commissaires européens, des experts, des représentants des milieux socioprofessionnels ou toute autre personnalité. Au cours de la XIVe législature, 2 837 auditions ont été organisées par les commissions permanentes et spéciales.
Généralement, ces auditions interviennent dans le cadre de la préparation d’un texte de loi, mais elles peuvent avoir un objet purement informatif, notamment dans les commissions dont l’activité législative est moindre (affaires étrangères, défense, développement durable).
Conformément à l’article 46 du Règlement, ces auditions sont ouvertes à la presse et retransmises en direct sur le site internet de l’Assemblée nationale, le bureau de la commission pouvant toutefois décider de déroger à cette règle de publicité par une décision motivée et rendue publique.
2. – Les missions d’information
L’article 145 du Règlement prévoit la possibilité pour les commissions permanentes de créer des missions d’information temporaires. Ces missions peuvent être limitées à une seule commission ou communes à plusieurs d’entre elles, d’une durée plus ou moins longue et impliquer ou non des déplacements en France ou à l’étranger. De telles missions sont parfois créées pour préparer l’examen d’un texte de loi ou pour contrôler l’application ou l’évaluation d’une loi récemment adoptée.
Les missions d’information se concluent le plus souvent par la présentation de rapports d’information, dont la commission autorise la publication. Ces rapports peuvent donner lieu, en séance publique, à un débat sans vote ou à une séance de questions.
Les missions peuvent être individuelles ou collectives et leur composition est laissée à l’appréciation des commissions. La réforme du Règlement du 27 mai 2009 y a cependant renforcé le rôle de l’opposition. En effet, selon l’article 145 du Règlement, une mission composée de deux membres doit comprendre un député appartenant à un groupe d’opposition et une mission composée de plus de deux membres doit s’efforcer de reproduire la configuration politique de l’Assemblée.
3. – L’octroi aux commissions permanentes des pouvoirs des commissions d’enquête
La loi du 14 juin 1996 a introduit dans l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires un article 5 ter qui donne aux commissions permanentes la faculté de demander à leur assemblée de bénéficier des prérogatives des commissions d’enquête (pouvoir de contrôle sur pièces et sur place, audition sous peine de sanction pénale, droit de communication) pour une mission déterminée et une durée n’excédant pas six mois.
En 2011, cette faculté a été étendue aux « instances permanentes créées au sein de l’une des deux assemblées parlementaires pour contrôler l’action du Gouvernement ou évaluer des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d’une seule commission permanente » (loi du 3 février 2011 tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques). Ainsi, le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) de l’Assemblée nationale, de même que les délégations aux droits des femmes des deux assemblées et les délégations sénatoriales aux collectivités territoriales et à la prospective peuvent exercer cette prérogative. En revanche, les missions d’information et la délégation parlementaire au renseignement, qui dispose d’autres moyens d’investigation, n’ont pas cette faculté. L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) peut, pour sa part, en bénéficier expressément en application de l’article 6 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 (voir infra).
Cette disposition a été mise en œuvre pour la première fois par la commission des lois afin d’assurer le contrôle parlementaire de l’état d’urgence décidé après les attentats du 13 novembre 2015. Les prérogatives d’une commission d’enquête ont ainsi été attribuées à cette commission selon la procédure prévue aux articles 145-1 à 145-3 du Règlement pour une durée de trois mois à compter du 4 décembre 2015, puis, l’état d’urgence ayant été prolongé, pour une seconde période de trois mois qui a débuté le 4 mars 2016.
1. – Le contrôle du budget et du financement de la sécurité sociale
La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances consacre le rôle de la commission des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat en matière de contrôle budgétaire. Son article 57 dispose ainsi que celles-ci « suivent et contrôlent l’exécution des lois de finances et procèdent à l’évaluation de toute question relative aux finances publiques ». Cette mission est confiée au président, au rapporteur général, aux rapporteurs spéciaux (membres de la commission chargés d’examiner tout ou partie des crédits d’une mission) ou à un ou plusieurs de leurs membres désignés par elles à cet effet. Durant chaque session de la XIVe législature, 48 rapports spéciaux ont été rendus.
Par ailleurs, les autres commissions sont également amenées à examiner les crédits des missions budgétaires relevant de leur champ de compétences. Elles désignent alors en leur sein des rapporteurs pour avis qui ne disposent toutefois pas des mêmes pouvoirs d’investigation que leurs collègues membres d’une commission des finances. Durant chaque session de la XIVe législature, 74 avis ont été rendus.
Les rapporteurs budgétaires, spéciaux et pour avis, obtiennent une grande partie des informations dont ils ont besoin dans les réponses aux questionnaires envoyés avant le 10 juillet aux ministres concernés.
La mission du rapporteur spécial est double. D’une part, lors de l’examen du budget, il examine les crédits regroupés au sein d’une mission et présente en commission puis en séance un rapport sur ces crédits. D’autre part, à titre permanent, il suit et contrôle leur emploi.Tout au long de l’année, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances sont ainsi en droit de contrôler sur pièces et sur place l’exécution de la loi de finances ainsi que la gestion des entreprises publiques relevant de leur secteur de compétences ; ce contrôle peut se traduire par la publication de rapports d’information budgétaire.
L’article 47-2 de la Constitution, introduit par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, dispose que la Cour des comptes doit assister le Parlement dans le contrôle de l’exécution de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale.
Pour compléter cette action traditionnelle des rapporteurs spéciaux, la commission des finances de l’Assemblée nationale s’est dotée en 1999 d’une nouvelle structure appelée à renforcer le contrôle du Parlement sur l’utilisation des fonds publics et l’efficacité de la dépense publique : la mission d’évaluation et de contrôle (MEC). Son rôle principal consiste à réaliser chaque année une évaluation des résultats de différentes politiques publiques. Dix rapports ont été faits par la MEC sou la XIVe législature.
Dans la même perspective, depuis août 2004 (décembre 2005 au Sénat), la commission des affaires sociales s’est dotée d’une mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS). La MECSS a pour mission de suivre de manière permanente l’application des lois de financement de la sécurité sociale et de procéder à l’évaluation de toute question relative aux finances de la sécurité sociale.
Enfin, depuis 2018, le Printemps de l’évaluation a pour ambition, en renforçant les modalités d’examen du projet de loi de règlement, de devenir le lieu de convergence des travaux d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée nationale. La commission des finances adopte en début d’année un programme d’évaluation. Dans ce cadre, chaque rapporteur spécial travaille sur un thème d’évaluation qu’il a proposé, en procédant aux enquêtes et auditions nécessaires.
Tous les ministres sont ensuite auditionnés par la commission des finances fin mai-début juin et interrogés sur les performances des politiques publiques dont ils ont la charge. Enfin, trois jours sont consacrés à ces questions en séance publique au cours desquels prennent place des séances de questions, des débats et, surtout, la discussion et l’adoption de propositions de résolution. »
2. – Le contrôle de certaines nominations
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a donné aux commissions permanentes un pouvoir supplémentaire, celui de se prononcer sur certaines nominations et, le cas échéant, de s’y opposer. Le dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution prévoit qu’une loi organique détermine les emplois ou fonctions pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Dans ce cas, le Président de la République ne peut procéder à la nomination si l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.
La Constitution prévoit par ailleurs l’application de ces dispositions pour la nomination des membres du Conseil constitutionnel (article 56), des personnalités qualifiées siégeant au Conseil supérieur de la magistrature (article 65) et du Défenseur des droits (article 71-1).
Les emplois et fonctions concernés sont déterminés par la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution. Cinquante postes sont actuellement concernés, dans des secteurs très divers (autorités administratives indépendantes, agences nationales, établissements publics, etc.). La loi du 23 juillet 2010 indique quelle est la commission permanente compétente pour émettre ces avis.
Par ailleurs, des textes législatifs spécifiques ont également soumis la nomination de certaines personnalités au vote des commissions parlementaires concernées. Le calcul de majorité est alors défini dans le texte et peut différer des règles posées dans l’article 13 de la Constitution. Ainsi, l’article 19 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique prévoit que les membres de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique désignés par les présidents des deux assemblées sont nommés s’ils recueillent trois cinquièmes des suffrages exprimés.
L’article 29-1 du Règlement précise les conditions dans lesquelles les commissions permanentes chargées du contrôle des nominations exercent cette prérogative. Disposant d’un délai de huit jours après que l’identité de cette personne a été rendue publique, les commissions peuvent, si elles le souhaitent, désigner un rapporteur qui, depuis la réforme du Règlement de novembre 2014, doit appartenir à un groupe d’opposition ou à un groupe minoritaire. L’audition est publique et suivie d’un scrutin secret. Lorsque la nomination de la personnalité requiert un vote dans les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat, le dépouillement se fait concomitamment.
Durant la XIVe législature, 65 personnalités ont été entendues par les commissions permanentes en application du dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution, 21 autres l’ayant été au titre de dispositions législatives spécifiques.
3. – Le contrôle de l’application des lois
Depuis 2004, à l’issue d’un délai de six mois suivant l’entrée en vigueur d’une loi dont la mise en œuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire, un rapport sur la mise en application de cette loi doit être présentée à la commission compétente. Prévu au premier alinéa de l’article 145-7 du Règlement, ce rapport fait état des textes réglementaires publiés et des circulaires édictées pour la mise en œuvre de ladite loi, ainsi que de ses dispositions qui n’auraient pas fait l’objet des textes d’application nécessaires. Depuis la réforme de 2009, la rédaction de ce rapport est confiée à deux députés, dont l’un appartient à un groupe d’opposition et parmi lesquels figure de droit le rapporteur du projet ou de la proposition de loi faisant l’objet du rapport de mise en application. Sous la XIVe législature, la Conférence des présidents a également créé, le 6 octobre 2015, une mission commune sur l’application de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
La réforme du Règlement intervenue en 2014 a également prévu la possibilité pour deux députés – dont l’un appartient à un groupe d’opposition – de présenter à la commission compétente un rapport évaluant l’impact d’une loi trois ans après son entrée en vigueur. Ce rapport fait état des conséquences juridiques, économiques, financières, sociales et environnementales de la loi et présente les éventuelles difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ladite loi.
4. – Les suites des travaux de contrôle des commissions
L’ensemble de ces rapports d’information peuvent donner lieu en séance publique, à un débat sans vote ou à une séance de questions.
Par ailleurs, en application de l’article 145-8 du Règlement, les commissions disposent également de la faculté de se pencher sur les conditions dans lesquelles, six mois après la publication du rapport d’une mission d’information, sont mises en œuvre les conclusions présentées par cette dernière.