N° 3363 annexe 18 - Rapport de M. Pierre Albertini sur le projet de loi de finances pour 2007 (n°3341)



N
° 3363

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2006

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2007 (n° 3341),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 18

JUSTICE

Rapporteur spécial : M. Pierre Albertini

Député

____

I.– LES MOYENS DE LA MISSION JUSTICE POUR 2007 7

A.– LA DOTATION DE LA MISSION 7

B.– LE PLAFOND D’EMPLOIS DE LA MISSION 9

C.– LES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT DE LA MISSION 10

D.– LES HYPOTHÈSES DE FINANCEMENT DE LA RÉFORME DE LA JUSTICE 11

II.– LA LOI D’ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION POUR LA JUSTICE : UN TAUX D’EXÉCUTION SATISFAISANT 13

A.– LA PROGRESSION DES MOYENS RÉALISÉE SUR CINQ ANS 13

B.– LA MISE EN œUVRE DES ACTIONS CONDUITES PAR OBJECTIFS 15

III.– LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES 19

A.– QUESTIONS RELATIVES À LA NOMENCLATURE 19

B.– LA DÉCONCENTRATION DE LA GESTION ENCORE INSUFFISANTE 20

C.– LE MINISTÈRE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES DOIT AUSSI APPLIQUER LA LOLF 21

IV.– LA JUSTICE JUDICIAIRE 23

A.– LES MOYENS DU PROGRAMME 23

B.– LA MISE EN œUVRE DE LA LOLF : DES DIFFICULTÉS NON RÉSOLUES DANS LE DOMAINE DE LA GESTION 25

C.– LA GESTION DU PERSONNEL : DES DIFFICULTÉS AUJOURD’HUI, L’AVENIR À PRÉPARER 26

D.– LES FRAIS DE JUSTICE : VERS LE RESPECT DE LA DOTATION INITIALE ? 27

E.– LA MODERNISATION : UNE DYNAMIQUE POSITIVE, SOURCE D’ÉCONOMIES 29

V.– L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE 31

A.– LE RENFORCEMENT DES CRÉDITS ET DES RESSOURCES HUMAINES 32

B.– LA PROGRESSION DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT 33

C.– LA POLITIQUE D’ÉQUIPEMENT : PREMIÈRES MISES EN SERVICE 33

D.– LE DÉVELOPPEMENT DES MESURES ALTERNATIVES 35

E.– LE POIDS EXCESSIF DU CONTRÔLE FINANCIER ET COMPTABLE 35

VI.– LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 37

A.– DES MOYENS EN PROGRESSION SIGNIFICATIVE 37

B.– L’INSUFFISANCE DE CRÉDITS ET L’ABSENCE D’OUTILS RENDENT LA GESTION DU PERSONNEL ENCORE DIFFICILE 38

C.– ASSAINIR LA GESTION, ADOPTER UNE LIGNE DE CONDUITE ET S’Y TENIR 40

VII.– L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE 41

VIII.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE ET ORGANISMES RATTACHÉS 43

AUDITION DU MINISTRE EN COMMISSION ÉLARGIE 45

EXAMEN EN COMMISSION 71

Article 49 : Revalorisation de l’aide juridictionnelle 73

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 77

Article 34 État B 77

ANNEXE RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES SUR LES TUTELLES ET CURATELLES 79

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires le 10 octobre.

Au 30 septembre, 18 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial, qui a pu in fine travailler avec 93 % des réponses.

Il est regrettable que le premier envoi de réponses ait été très tardif – en date du 29 septembre – alors que les premières réponses aux questionnaires parviennent généralement aux rapporteurs dès le début septembre. Il semble que la bonne information du Parlement ait été victime d’un blocage inhabituel des réponses dans les niveaux supérieurs de l’administration du ministère. Ce retard a nui à la préparation de l’examen des crédits de la justice dans la mesure où l’accumulation tardive des réponses ne permet plus d’en prendre connaissance dans de bonnes conditions. Votre Rapporteur spécial souligne qu’un grand effort avait pourtant été accompli de la part des rapporteurs pour harmoniser leurs questions et même la numérotation, afin d’en faciliter le traitement par les services.

Il insiste sur l’utilité d’une arrivée régulière des réponses commençant dès que possible, sachant que beaucoup de bilans d’activité et d’« états des lieux » sont préparés par les services pendant l’été, pour un examen approfondi tant du bilan de l’action des services que du projet de loi de finances, celui-ci ne pouvant, il est vrai, être fait qu’à partir de la fin septembre.

Observations du Rapporteur spécial

Avec un budget de 6,271 milliards d’euros, le ministère de la Justice enregistre la plus importante progression de tous les ministères, soit 5 %, illustrant ainsi la volonté de maintenir la Justice parmi les priorités gouvernementales. Le budget de la justice est en hausse continue depuis 2002, et a connu une progression totale de 38 %.

La programmation établie par la loi d’orientation et de programmation du 9 septembre 2002 arrivera à son terme à la fin de l’année 2007 : ses objectifs auront été respectés aux 4/5èmes, ce qui est fort rare et doit être souligné. En particulier, les prévisions de construction des établissements pénitentiaires auront été respectées : quinze nouveaux établissements seront livrés en 2007 et 2008, dont les quatre établissements pour mineurs. Il convient cependant d’être attentif à ce que le personnel nécessaire y soit affecté.

La réforme de la procédure pénale envisagée par le ministère de la Justice entraînera un coût qu’il estime à environ 30 millions d’euros, avec notamment la création de 70 emplois nouveaux de magistrats et de 102 emplois de personnel des greffes. Votre Rapporteur spécial s’interroge sur le financement de la réforme, dont le coût réel ne pourra être précisé qu’au lendemain de l’adoption définitive du projet de loi. S’il est plus élevé que la prévision prise en compte dans le présent budget, la mise en œuvre de la réforme sera compromise pour 2007.

La décision du ministre de confier un contrôle extérieur et indépendant des prisons au Médiateur de la République, ainsi que de généraliser la présence des délégués du médiateur en prison, doit être approuvée. Le Gouvernement a garanti au Médiateur qu’il disposerait de tous les moyens nécessaires ; pourtant cet engagement ne connaît pas de traduction budgétaire tangible.

De même, l’adhésion de la France aux règles pénitentiaires européennes définies par le Conseil de l’Europe le 11 janvier 2006 emporte le respect d’obligations particulièrement exigeantes s’agissant des conditions de détention et d’accès aux soins comme de la formation du personnel pénitentiaire. Votre Rapporteur spécial s’interroge sur l’adéquation entre les moyens budgétaires envisagés pour 2007 et le respect de ces principes fondamentaux.

La progression de la dotation destinée à l’aide juridictionnelle mérite approbation. Les avocats sont une pièce maîtresse d’un bon procès et leur rémunération est faible si on la compare à celle en vigueur dans les autres pays européens. Toutefois, l’aide est largement accordée dans notre pays et la progression de son coût conduit à préconiser un filtrage du sérieux des demandes.

L’adoption par la commission des Finances, le 9 novembre, de l’amendement joint au présent rapport a suscité la réaction de la Commission nationale de l’Informatique et des libertés. Celle-ci révèle sa très mauvaise situation financière due à l’augmentation du point fonction publique, à l’ajout d’une nouvelle cotisation patronale et à l’insuffisance des crédits de vacation. Votre Rapporteur spécial en prend acte tout en regrettant que la CNIL n’ait pas transmis de réponse au questionnaire budgétaire. La réponse rédigée en vue du projet de loi de finances pour 2006 ne faisait pas mention précisément de l’imminence d’insuffisances de crédits.

Votre commission des Finances a demandé à la Cour des comptes de procéder à une enquête consacrée au thème des tutelles et curatelles. La communication recensant les graves défauts de la situation actuelle et analysant les mécanismes de régulation nécessaires est annexée au présent rapport spécial. Elle montre que la réforme est indispensable et urgente ; elle doit être complète y compris dans son volet social.

Le calcul de la masse salariale pour 2006 n’a pas permis de financer l’ensemble des ETPT prévus pour certains programmes. Le ministère prévoit en 2007 la résorption des emplois non financés, ce dont il faut se féliciter. Ce problème devra faire l’objet d’un suivi, car il a occasionné des difficultés et des coûts en 2006 : fin de contrats, paiement d’allocations de retour à l’emploi, contentieux, puis nouvelles embauches ou recrutement de fonctionnaires pour pourvoir les postes si les crédits viennent à être délégués.

Il convient d’approuver le travail de recensement des diverses commissions administratives comportant des magistrats afin de supprimer ces commissions dans le cadre de la simplification administrative ou d’en retirer les magistrats si leur autorité n’y est pas nécessaire.

Votre Rapporteur spécial n’a pas développé dans le présent rapport d’analyse de la performance, car beaucoup de données chiffrées manquent encore, du fait du retard pris par les outils d’information du ministère. Il rendra compte de cet aspect lors de la présentation du projet de loi de règlement au premier semestre 2007.

I.– LES MOYENS DE LA MISSION JUSTICE POUR 2007

Le budget de la mission Justice progressera de près de 5 % pour l’année 2007, après une progression de 4 % en 2005 et de 4,6 % en 2006. Il faut se féliciter de cette consolidation des efforts accomplis au cours des dernières années, alors que le budget total de l’État pour 2007 ne progressera que de 0,8 %. Le rattrapage des crédits et des ressources humaines se poursuit donc pour cette année qui sera la dernière de la programmation établie par la loi d’orientation et de programmation pour la Justice de 2002.

La dotation de la mission s’élève à 6,271 milliards d’euros en crédits de paiement, ce qui représentera 2,34 % du budget de l’État. Elle représentait 2,13 % du budget de l’État en 2006 et 1,69 % en 2002. Les autorisations d’engagement s’élèvent à 7,10 milliards d’euros, en progression de 3 %.

Depuis le début de la législature, le budget de la Justice a progressé de près de 1,8 milliard d’euros, soit une augmentation de 38 %, traduisant un rattrapage en profondeur après des années pendant lesquelles ce domaine de l’action de l’État a été comparativement négligé.

LE BUDGET DE LA JUSTICE EN 2007

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2006

PLF 2007

2006/2007
(en %)

LFI 2006

PLF 2007

2006/2007
(en %)

Justice judiciaire

2.701

2.721,72

0,77

2.505,77

2.605,87

3,99

Administration pénitentiaire

2.819

2.869,25

1,78

2.130,70

2.246

5,41

Protection judiciaire de la jeunesse

739,80

820,60

10,92

735,80

799

8,59

Accès au droit et à la justice

344,17

369,46

7,35

344,17

338,48

-1,65

Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés

321,84

321,28

-0,17

263,82

281,80

6,82

Total

6.925,81

7.102,31

2,55

5.980,26

6.271,15

4,86

L’augmentation des crédits prévue en 2007 permettra de financer la dernière tranche de la loi d’orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) du 9 septembre 2002.

Pour l’année 2007, les dépenses ordinaires programmées pour la mission s’élèvent au total à 111,01 millions d’euros (tranche LOPJ programmée en projet de loi de finances pour 2007). La création d’emplois prévue au titre de la LOPJ pour la mission est de 1.538 emplois. Si l’on prend en compte la justice administrative, il convient d’ajouter à ces montants 4,53 millions d’euros de dépenses ordinaires et 57 emplois.

Le tableau suivant retrace la progression des crédits depuis 2002.

ÉVOLUTION BUDGET ÉTAT/BUDGET JUSTICE
EN LOI DE FINANCES INITIALE DE 2002 À 2007

(en millions d’euros)

 

2002

2003

2004

2004 (b)

2005

2006(c)

2007(d)

Budget de l’État (a)

269,07

273,72

283,69

– 

288,45

266,09

267,85

Budget de la Justice

4.542,76

4.881,80

5.109,17

5.078,80

5.284

5.980,26

6.271,15

Budget Justice/État (en  %)

1,69

1,78

1,80

– 

1,83

2,25

2,34

Accès au droit et à la justice

344,17

338,48

Services judiciaires

2.002,65

2.122,73

2.221,81

2.210,88

2.275,85

2.505,77

2.605,87

Services pénitentiaires

1.384,94

1.492,54

1.608,28

1.592,40

1.654,36

2.130,70

2.246,01

Services de la protection judiciaire de la jeunesse

539,67

565,61

587,13

584,48

613,18

735,80

779

Administration centrale

591,12

675,51

666,87

665,95

714,93

230,01

246,31

Autres (CNIL, Recherche, LH, OL)

24,38

25,40

25,08

25,08

25,67

33,81

35,50

(a) En milliards d’euros.

(b) À périmètre constant, hors effet du transfert des prestations familiales.

(c) Les pensions qui jusqu’en 2005 étaient inscrites au budget général, font l’objet en 2007 d’une comptabilisation dans un compte spécial (compte d’affectation spéciale des pensions) qui se situe en dehors du périmètre du budget général. Le montant de celui-ci, à partir de 2006, est donc hors pensions civiles.

La répartition des crédits entre les différents programmes s’effectuera de la façon suivante :

(en millions d’euros)

Crédits de paiement

LFI 2006

PLF 2007

Évolution
(en %)

Accès au droit

344

338

- 2

Administration pénitentiaire

2.131

2.246

+ 5

Services judiciaires

2.506

2.606

+ 4

Protection judiciaire de la jeunesse

736

799

+ 9

Conduite et pilotage de la politique de la justice

264

282

+ 7

TOTAL
dont pensions, FNAL et CNAF

5.890

957

6.271

. 015

+ 5

TOTAL

hors pensions, FNAL et CNAF

4.933

5.263

 

Autorisations d’engagement

     

Accès au droit

344

369

+ 7

Administration pénitentiaire

2.819

2.869

+ 2

Services judiciaires

2.701

2.722

+ 1

Protection judiciaire de la jeunesse

740

820

+ 11

Conduite et pilotage de la politique de la justice

322

322

+ 0

TOTAL

dont pensions, FNAL et CNAF

6.926

957

7.102

1.015

+ 2,5

TOTAL

hors pensions, FNAL et CNAF

5.969

6.087

 

Le plafond d’emploi ministériel de 71.475 ETPT (équivalents temps plein travaillé) est augmenté de 548 nouveaux ETPT dont 250 au titre des extensions en année pleine des ETPT créés en 2006, ce qui porte le niveau du plafond ministériel d’emplois pour 2007 à 72.023 ETPT.

Deux transferts sont prévus dans le présent projet de loi de finances.

La création de 548 ETPT correspond d’une part au complément des créations d’ETPT obtenues en 2006, et d’autre part, à une capacité de recrutement de 500 personnes dont la date d’arrivée moyenne se situe à mi-année et de 48 personnes arrivant en début d’année.

Les créations d’emplois sont présentées dans le tableau suivant.

CRÉATIONS BRUTES D’EMPLOIS AU MINISTÈRE DE LA JUSTICE
(SERVICES JUDICIAIRES – ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE)
(a)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006 (b)

2007
(PLF)

Services judiciaires

525

855

700

709

355

540

555

– magistrats (créations budgétaires)

307

320

180

150

100

186

195

– fonctionnaires (créations budgétaires)

218

535

520

559

255

354

360

– fonctionnaires (levée de gel)

             

– magistrats temporaires

             

Administration pénitentiaire

530

1.525

870

1.111

533

520

698

– dont personnel de surveillance

330

1.221

613

707

210

416

698

Protection judiciaire de la jeunesse

380

300

314

234

107

60

290

Total
(dont créations budgétaires)

1.435

2.680

1.884

2.054

995

1.120

1.543

(a) En 2006 et en 2007, les effectifs sont exprimés non en emplois budgétaires mais en emplois correspondant à des autorisations de recrutement nouvelles.

(b) Les chiffres de l’année 2006 ont été modifiés pour prendre en compte un amendement à la loi de finances initiale pour 2006. En effet, aux 500 emplois inscrits en PLF 2006 (480 hors administration centrale), s’ajoutent 640 emplois au titre du « plan banlieues ». Ces emplois ont été affectés dans les bureaux d’exécution des peines des tribunaux de grande instance et dans les services pénitentiaires d’insertion et de probation.

En 2006, les crédits accordés ne permettaient pas de financer la totalité du plafond d’emplois. L’écart entre les emplois votés et les rémunérations réelles devrait être réduit, en 2007 selon les prévisions de l’administration. Les directions et les directions régionales devraient pouvoir résorber leur quota d’emplois non financés en 2006 (environ 300 pour la seule Protection judiciaire de la jeunesse par exemple). Cette question reste néanmoins à suivre.

Les mesures catégorielles de la mission sont plus limitées qu’en 2006. Elles disposeront d’une enveloppe de 5,2 millions d’euros répartie comme suit :

MESURES CATÉGORIELLES EN 2007

(en millions d’euros)

Programme

Montant 2006

Montant 2007

Services judiciaires

8,4

1,5

Administration pénitentiaire

5,8

3,3

Protection judiciaire de la jeunesse

1,8

0,2

Conduite et pilotage de la politique de la justice

0,9

0,09

Total

16,89

5,2

Cette enveloppe de crédits permettra de financer d’une part, les mesures décidées en janvier 2006 par le ministre de la Fonction publique et, d’autre part, la deuxième tranche de la réforme statutaire de la filière des personnels de surveillance.

L’ensemble des moyens humains concourant au programme Accès au droit et à la justice, soit 660 agents, doit être rattaché pour 2007 au programme Justice judiciaire et identifiés sur une nouvelle action Support à l’accès au droit et à la justice.

Les crédits de fonctionnement courant de l’ensemble de la mission Justice s’élèvent en 2007 à 1,79 milliard d’euros, contre 1,69 milliard d’euros en 2006, soit une progression de 100 millions d’euros représentant une croissance de près de 5,6 %.

Ils se répartissent entre les programmes de la façon suivante :

FONCTIONNEMENT COURANT (TITRE 3 EN AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT)

(en millions d’euros)

Programmes

LFI 2006

PLF 2007

101 - Accès au droit et à la justice

4,157

3,580

107 - Administration pénitentiaire

493

521

166 - Justice judiciaire

701

726

182 - Protection judiciaire de la jeunesse

337

380

213 - Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés

157

160

TOTAL

1.692

1.792

Suite à l’affaire dite d’Outreau et aux recommandations émises par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, le Garde des Sceaux a engagé une réforme de la procédure pénale.

Votre Rapporteur spécial s’interroge sur le financement de cette réforme. Celle-ci prévoit notamment l’enregistrement audiovisuel des auditions lors des gardes à vue et devant le juge d’instruction, ainsi que la création de pôles de l’instruction, ce qui nécessitera la création de 70 emplois nouveaux de magistrats et de 102 emplois de personnel des greffes. Les estimations effectuées par le ministère s’élèvent à environ 30 millions d’euros mais le ministre lui-même a indiqué que cette évaluation ne pourrait être précisée qu’au lendemain de l’adoption définitive du projet de loi. Il y a fort à parier que ce chiffre soit rapidement revu à la hausse, compromettant la mise en œuvre de cette réforme dès l’année prochaine.

Pour 2007, 27,7 millions d’euros sont imputés sur le programme Justice judiciaire, auxquels s’ajoutent 1,58 million d’euros de mesures nouvelles (destinées notamment au renforcement du caractère contradictoire des expertises) inscrits sur le programme Accès au droit et à la justice. L’impact de la réforme au cours des années suivantes est retracé dans le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DE L’IMPACT DE LA RÉFORME DE LA PROCÉDURE PÉNALE
SUR LE PROGRAMME JUSTICE JUDICIAIRE

(en euros)

 

2007

2008

2009

2010

Emplois

18.962.233

Le ministère finançant par ailleurs 710.000

26.943.620
dont 4.271.387
de mesures nouvelles

26.943.620

26.943.620

Fonctionnement
Avec enregistrement auditions

650.658

1.007.580

dont 356.922
de mesures nouvelles

1.007.580

1.007.580

Premier équipement

4.354.800

– 

– 

– 

Investissement

3.052.000

6.104.000

3.052.000

– 

Locations pérennes

240.750

294.300

dont 53.550
de mesures nouvelles

294.300

294.300

Locations transitoires

481.500

588.600

dont 107.100
de mesures nouvelles

588.600

– 

Total

27.741.941

34.938.100

dont 4.788.959
de mesures nouvelles

31.886.100

28.245.500

Source : ministère de la Justice

Les coûts ci-dessus recensés sont liés en particulier aux besoins de surfaces supplémentaires (locations ou extensions), d’équipements en matériels de visioconférence, d’enregistrement et de numérisation.

Pour le programme Accès au droit et à la justice, il est annoncé que la mise en œuvre de la réforme nécessitera 2,38 millions d’euros (dont 802.000 en mesures nouvelles) pour 2008 et la même dotation pour les années suivantes.

II.– LA LOI D’ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION POUR LA JUSTICE : UN TAUX D’EXÉCUTION SATISFAISANT

L’année 2007 étant la cinquième et dernière année de la période de mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation pour la Justice (LOPJ) du 9 septembre 2002, il est temps de faire le point sur l’application de ce qui représente en quelque sorte le « contrat de législature » en faveur des moyens de la Justice. À l’évidence, la LOPJ aura été l’instrument d’une remise à niveau d’une ampleur exceptionnelle.

Son taux de réalisation doit s’établir à 80 % pour les créations d’emploi, à 76 % en termes de crédits de paiement de dépenses ordinaires et à 90 % pour les dépenses en capital, étant précisé que ce taux s’établit à 82 % pour les dépenses en capital relatives aux juridictions administratives, dont le poids budgétaire relatif est modeste.

À ces acquis portant sur les moyens en personnel et d’ordre matériel, s’ajoutent les progrès dans la réalisation des objectifs plus qualitatifs assignés par la LOPJ, concernant l’amélioration des délais de traitement des procédures, la qualité des jugements ou l’efficience de l’activité judiciaire. Dans ces domaines, si les progrès ne font pas de doute, leur mesure est encore très lacunaire, faute d’une batterie complète d’indicateurs renseignés sur une période suffisamment longue.

La répartition des emplois entre les différents programmes s’effectuera en 2007 conformément au tableau ci-après (y compris les transferts d’emplois). Il fait apparaître que le taux de réalisation des objectifs de la LOPJ a été très satisfaisant pour le personnel pénitentiaire (100 %) et satisfaisant pour les postes de magistrats judiciaires (85 %). La contrepartie est une maîtrise de l’évolution du personnel de la direction des services judiciaires, qui a assumé l’effort de productivité, en connaissant un taux de réalisation de 58 %, lequel correspond tout de même à plus de 2.000 créations d’emplois.

Globalement, le taux de réalisation des créations de postes programmées a donc été de 80,3 %, soit plus de 7.700 emplois, chiffre à rapprocher du plafond total des ETPT du ministère, un peu au-dessous de 72.000 en 2007.

TAUX D’EXÉCUTION DE LA LOPJ EN CRÉATIONS D’EMPLOIS

Affectations

LOPJ

2003

2004

2005

2006

2007

TOTAL

Exécution
(en %)

Magistrats judiciaires

950

180

150

100

186

195

811

85,4

Fonctionnaires DSJ

3.500

520

546

251

351

360

2.028

58

Personnels de la DAP

3.740

870

1.127

530

520

698

3.745

100

Personnels de la PJJ

1.250

314

234

105

60

290

1.003

80,2

Administration générale

180

40

48

51

7

0

146

81

Total

9.620

1.924

2.105

1.037

1.124

1.543

7.733

80,30

Le taux de réalisation des créations d’emploi pour le Conseil d’État et les autres juridictions administratives sera inférieur, soit 71,3 %.

Le retard important pris par les services judiciaires pour la création d’emplois de fonctionnaires des greffes ne sera pas rattrapé en 2007. Seuls 2.026 emplois auront été créés pour les greffes des juridictions et l’École nationale de la magistrature sur les 3.500 programmés, ce qui représente un taux d’exécution de 57,9 %.

Le tableau suivant présente par programme le taux d’exécution de la LOPJ en dépenses ordinaires. Ce taux, très inégal d’un programme à l’autre, est supérieur à 90 % pour les juridictions administratives et pour la protection judiciaire de la jeunesse.

TAUX D’EXÉCUTION DE LA LOPJ EN DÉPENSES ORDINAIRES
(EN CRÉDITS DE PAIEMENTS)

(en millions d’euros)

 

Montant total prévu pour 2003/2007

Droit de tirage mobilisé au titre de la LOPJ entre 2003 et 2007 (prévisions) (1)

Prévision d’exécution 2003/2007
(en %)

Justice judiciaire

944,9

721,2

76,4

Administration pénitentiaire

800,7

640,5

80

Protection judiciaire de la jeunesse

293,4

269,5

91,8

Accès au droit et à la justice

262,5

227,5

86,7

Conduite et pilotage de la politique de la justice

359,7

156,2

43,4

Conseil d’État et autres juridictions administratives

113,9

102,6

90,1

Total

2.775,1

2.117,5

76

(1) Déduction faite des annulations de crédits

Source : ministère de la Justice

Enfin, le taux d’exécution de la loi de programmation en dépenses en capital est globalement très proche de 90 %, comme le montre le tableau qui suit.

TAUX D’EXÉCUTION DE LA LOPJ EN DÉPENSES EN CAPITAL

(en crédits de paiement et en millions d’euros)

 

Montant total prévu pour 2003/2007

Droit de tirage mobilisé au titre de la LOPJ entre 2003 et 2007 (prévisions) (1)

Prévision d’exécution 2003/2007
(en  %)

Chancellerie

845

760

89,9

Conseil d’État et autres juridictions administratives

53,5

44

82,2

(1) Déduction faite des annulations de crédits

Source : ministère de la Justice

En réalité, les crédits ouverts pour la période 2003-2007 ont été supérieurs à la programmation de la LOPJ.

En effet, les montants prévus par la LOPJ en autorisations d’engagement ont été insuffisants pour couvrir les programmes immobiliers pénitentiaires en partenariat public–privé, procédure qui n’avait pas été envisagée au moment de l’élaboration de la loi. Ces montants ont donc été accrus, passant de 1,13 milliard d’euros à 1,78 milliard d’euros.

Au total, ce seront 2,34 milliards d’euros qui auront été ouverts pendant la durée d’exécution de la loi de programmation, soit un taux d’exécution de 138,6 % de la prévision.

En crédits de paiement, 858,86 millions d’euros auront été ouverts pour la même période, soit 101,4 % des moyens programmés.

Les moyens nouveaux obtenus au titre de la LOPJ doivent aller de pair avec la mise en œuvre par les juridictions de mesures visant à améliorer leur fonctionnement pour une meilleure efficacité de la justice et la réduction des délais de traitement des affaires civiles et pénales.

La mise en place de contrats d’objectifs entre la Chancellerie et les cours d’appel et entre les cours d’appel et les juridictions en est considérée comme l’instrument privilégié.

Une dizaine de contrats d’objectifs ont été signés avec les cours d’appel, et commencent à produire leurs effets. Plusieurs contrats, préparés en 2005, n’ont pas à ce jour été signés, en raison notamment de la quasi-impossibilité de mettre en place les moyens humains indispensables à leur bonne exécution. L’allongement de la durée de la scolarité des greffiers d’un côté, et le nombre limité de création d’emplois de fonctionnaires de l’autre, n’ont en effet pas permis à la Chancellerie de nommer en même temps les magistrats et les fonctionnaires.

Les premiers résultats des contrats d’objectifs sont très encourageants, cependant les objectifs de réduction des délais fixés par la LOPJ ne pourront être atteints dans les délais prévus du fait que cette loi de programmation n’a pas été intégralement exécutée, au regard des autorisations de recrutement des fonctionnaires, ce qui n’a pas permis l’accompagnement concomitant des nominations de magistrats.

L’installation des juges de proximité a progressé, mais connaît un ralentissement en 2006. Au total, au 30 juin 2006, 976 candidatures ont été soumises au CSM. L’effectif total des juges de proximité en fonction s’élevait à cette date à 530, installés dans 325 juridictions de proximité, soit dans 68 % de l’ensemble des juridictions à pourvoir de métropole et des départements d’outre-mer. Sept candidats effectuaient leur stage préalable et 53 candidats suivaient une formation probatoire.

Les statistiques nationales confirment la très nette progression de l’activité civile de la juridiction de proximité : le nombre des affaires nouvelles est ainsi passé de 18.518 pour 2004 à 77.550 pour 2005, soit une augmentation de plus de 400 %. Pour sa part, le pourcentage des affaires relevant de la compétence de la juridiction de proximité est passé de 3,47 % à 14,62 %. Dans le même temps, le nombre des affaires terminées est passé de 15.264 à 52.276, soit une augmentation de plus de 240 %. Il représente ainsi 10,12 % du nombre d’affaires civiles jugées tant par les tribunaux d’instance que les juridictions de proximité, au lieu de 3,02 % en 2004.

Votre Rapporteur spécial considère que l’effort doit à présent porter sur la formation des juges de proximité, même si le nombre de recrutements initialement prévu, qui était de l’ordre de 3.000 juges, n’a pas été réalisé.

L’objectif de développer la capacité d’exécution des sanctions, formulé par la LOPJ, est notamment mis en œuvre par la création des bureaux d’exécution des peines, à partir de 2004.

Au 1er juillet 2006, sur l’ensemble des TGI, 42 avaient créé un BEX (soit 22,6 % de l’ensemble de ces tribunaux), dont 20 fonctionnent principalement pendant les audiences de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. 132 autres juridictions ont un projet de mise en place d’un BEX, dont 57 sont en voie de finalisation.

La généralisation de ces structures constitue une priorité. Aux termes d’un contrat d’objectif conclu entre les chefs de cours d’appel et le directeur des services judiciaires, le nombre d’emplois de greffiers et de personnels de catégorie C affectés dans les « BEX » est de 318 fonctionnaires, soit 102 greffiers et 216 personnels de catégorie C. Les greffiers seront nommés dans les juridictions en mars 2007, les personnels de catégorie C y sont affectés au cours du deuxième semestre 2006.

Le Garde des Sceaux a décidé l’expérimentation de Bureaux de l’exécution des mesures et des peines (BEX « mineurs ») dans quatre TGI. Ces bureaux seront distincts de ceux concernant les majeurs ; cette initiative pourrait ensuite être généralisée en 2007 à tous les tribunaux pour mineurs.

L’un des objectifs de la loi était la réduction des délais moyens de traitement des affaires civiles à douze mois devant les cours d’appel, six mois devant les tribunaux de grande instance et trois mois devant les tribunaux d’instance.

Pour les cours d’appel, le résultat – 14 mois – se rapproche de l’objectif fixé par la loi d’orientation. Le délai de 12 mois peut être atteint si la diminution du délai de traitement se poursuit, pour 2006 et 2007, au rythme constaté en 2005.

Pour les TGI, la durée moyenne de traitement affichée en 2004 comme en 2005, étant de 6,7 mois, se rapproche de l’objectif, alors que ce délai était encore de 9,5 mois en 2003.

Pour les tribunaux d’instance, la durée moyenne de traitement reste de 4,7 mois, encore éloignée des objectifs de la loi d’orientation.

L’augmentation du taux de réponse pénale se poursuit en 2005, avec une progression de plus de trois points par rapport à 2004. Une réponse pénale a ainsi été donnée en 2005 à 77,9 % des affaires poursuivables.

Enfin, le nombre d’affaires classées sans suite pour inopportunité des poursuites diminution encore fortement, tombant à 22 % en 2005 ; il était de près de 32 % en 2002.

Le traitement des procédures pénales a également évolué.

La part des modes de comparution rapide dont le développement est lié à la pratique du traitement en temps réel (comparution immédiate, convocation par le procureur, convocation par officier de police judiciaire) a nettement progressé en 2005, passant de 73 % en 2002, à 73,3 % en 2004 puis à 74,9 %.

Si l’on additionne les faits liés à l’utilisation des procédures dites rapides et des procédures simplifiées, on constate que les parquets développent une politique permettant une meilleure maîtrise des délais de réponse pénale, l’utilisation de ces procédures ayant connu une nouvelle progression entre 2004 et 2005, passant de 77,9 % de l’ensemble des poursuites à 81,5 %.

III.– LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE
RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES

La maquette adoptée en juin 2005 rattache de façon contestable la justice administrative à une mission distincte de la mission Justice. Le programme Justice administrative est en effet rattaché depuis à la mission transversale Conseil et contrôle de l’État, elle-même rattachée au Premier ministre. Les arguments présentés à l’appui de ce changement de maquette n’ont convaincu ni les commissions parlementaires compétentes ni les groupes politiques ; en effet la justice judiciaire et la justice administrative sont les deux faces d’une même politique publique, que la nouvelle nomenclature présente maintenant de manière éclatée. Votre Rapporteur spécial considère que ce rattachement opéré sans aucune concertation avec le Parlement doit être corrigé.

Une demande a été présentée par M. Guy Canivet, Premier Président de la Cour de cassation, visant à modifier la nomenclature pour distinguer, au sein de la mission Justice, deux programmes, l’un consacré au « Ministère public » et l’autre aux « Juridictions judiciaires ». Cette demande résulte d’une délibération adoptée en 2005 par la Conférence nationale des premiers présidents de cour d’appel.

Les présidents font valoir que chaque chef de cour « est investi de responsabilités fonctionnelles bien distinctes, certaines dépenses de frais de justice échappant à la décision de l’un comme de l’autre ». Les procureurs généraux quant à eux s’opposent à une scission du processus judiciaire, jugeant difficile d’affecter personnel et crédits d’un côté ou de l’autre, et craignant d’aboutir à une masse de crédits trop limitée pour une bonne gestion ou la mise en œuvre de la fongibilité.

Le Garde des Sceaux n’est pas favorable à l’instauration de deux corps distincts ; le maintien de l’unité du corps favorisant la mise en œuvre des politiques pénales. Au regard de la LOLF, la séparation du siège et du parquet apparaît, pour les services, fictive et difficile à mettre en œuvre, car un certain nombre d’agents travaille tant pour l’un que pour l’autre ; il est en est de même pour la masse des crédits, qui sera en cas de division insuffisante pour une bonne gestion. En ce qui concerne les frais de justice, la scission n’est pas plus simple car il est difficile de fixer une limite entre frais de poursuite et frais de jugement.

Le problème de l’incompatibilité des actes des premiers présidents dans leur rôle de juge de l’indemnisation des victimes de l’institution judiciaire, d’une part, d’ordonnateurs secondaires et gestionnaires de l’enveloppe des frais de justice d’autre part, et de la partialité qui pouvait en résulter, a été soulevé par les partisans de la suppression de la dyarchie. Ce problème a été résolu par la décision de confier l’indemnisation des victimes à l’administration centrale.

Votre Rapporteur spécial a interrogé des chefs de cour dans le cadre des auditions qu’il a conduites : aucune difficulté particulière liée à la dyarchie de l’ordonnancement ne lui a été décrite, la dyarchie étant même appréciée comme source de dialogue et aide pour la gestion des frais de justice par certains procureurs généraux. Il apparaît que la mise en œuvre de la LOLF n’est pas le bon support pour trancher des principes essentiels de l’organisation judiciaire et des relations entre siège et parquet, qui relèvent de la compétence du législateur organique. Les parties au débat reconnaissent que la séparation des programmes pourrait entraîner à court ou moyen terme la séparation du corps.

La responsabilité du pilotage des programmes a été bien intégrée par les responsables. Ce pilotage semble plus prononcé pour un programme où de nombreuses évolutions sont en cours : c’est le cas pour la protection judiciaire de la jeunesse, qui connaît de nombreuses transformations parmi lesquelles la redéfinition de ses missions.

Pour la justice judiciaire, le responsable de programme a instauré un dialogue de gestion avec les responsables de BOP, ainsi que le pilotage du contrôle de gestion. Il prévoit à présent de créer un système d’information incluant de nombreuses statistiques, notamment l’activité des juridictions, le taux de réponse pénale, la performance des cours d’appel, afin de pouvoir leur restituer ensuite ces informations. À l’avenir, une réflexion sera engagée sur l’évolution de l’organisation de la justice judiciaire : devront se développer d’une part, la mutualisation des moyens (on peut déplorer l’immobilisme de la carte judiciaire, qui a pour conséquence un manque criant de moyens dans certains ressorts et des situations beaucoup plus confortables dans d’autres) et, d’autre part, une meilleure complémentarité des fonctions, pour pallier l’insuffisance chronique de personnel.

De façon générale, le dialogue de gestion devra évoluer vers une plus grande prise en compte de la performance, afin de privilégier la définition et la poursuite des objectifs, dans un environnement général où l’insuffisance relative des moyens risque de persister.

Les gestionnaires de BOP observent que leur gestion reste contrainte par le niveau central ou le contrôleur en région, pour des actes pour lesquels ils sont en principe compétents. De nouveaux « verrous » sont apparus pour la prise de décision là où il n’y en avait pas, notamment dans la gestion de la Protection judiciaire de la jeunesse lorsque par exemple l’administration centrale ayant validé l’économie générale d’un projet de fermeture d’établissement du secteur public pour des raisons de mauvais fonctionnement et d’insécurité, les décisions relatives à la suppression des postes dans cet établissement et au redéploiement dans une autre structure sont encore soumises à une validation centrale, ce qui est une survivance des anciennes pratiques administratives.

Ce maintien de validations successives aboutit en pratique à une recentralisation de la gestion.

Il importe que l’administration centrale applique tant la lettre que l’esprit de la loi organique et laisse aux gestionnaires de BOP la latitude nécessaire.

Les différentes catégories de personnel se sont familiarisées avec les contrats d’objectifs et de moyens et se sentent à présent impliquées dans les questions financières.

Cependant l’inadéquation de l’outil informatique s’avère très pénalisante au niveau local : application NDL très complexe, nouvelle nomenclature comptable inadaptée et d’interprétation variable selon les contrôleurs.

La LOLF suppose un changement d’approche de la part des structures financières et comptables. Or notre système financier et comptable maintient un pouvoir de contrôle sur tous les actes quotidiens de gestion, sur les imputations comptables et par conséquent sur la marche courante des affaires. La manière dont cette fonction s’exerce aujourd’hui remet en cause plusieurs dispositions de la LOLF, et notamment la possibilité donnée au responsable de programme de gérer de manière globalisée ses crédits.

Pour l’administration pénitentiaire par exemple, la mise en place de la LOLF a mobilisé en administration centrale l’équivalent de dix emplois supplémentaires pendant un an. Les tâches supplémentaires générées par le fonctionnement en mode LOLF correspondent à cinq emplois permanents. L’accroissement des tâches au niveau local a nécessité la création de trente emplois supplémentaires, soit plus de trois par direction régionale, sans aucun gain en efficacité supplémentaire. Le temps nécessaire aux actes courants de gestion est multiplié par deux.

Dès lors qu’un budget opérationnel de programme est validé, un véritable contrat de confiance doit s’établir entre le ministère de l’Économie et des finances et les gestionnaires de programme.

De cet ensemble de facteurs, il résulte parfois le sentiment d’une régression dont la LOLF serait directement responsable, alors que c’est plutôt le défaut d’adaptation des systèmes d’information et des circuits de contrôle au bon principe de la LOLF qui induit les dysfonctionnements constatés.

La réactivité des recrutements et de la gestion du personnel semble améliorée de façon générale. Ainsi, par exemple, l’administration a établi une gestion prévisionnelle des emplois ; une « carte des emplois » et un plan de rééquilibrage des emplois s’établissent dans certaines directions. Elle tire également bénéfice de la souplesse permise par le recours aux recrutements contractuels. Cette réactivité est pourtant encore freinée par différents facteurs.

Votre Rapporteur spécial a présenté ici des observations portant sur l’ensemble des programmes ; d’autres seront ajoutées à propos du programme Justice judiciaire et du programme Protection judiciaire de la jeunesse dans les développements consacrés à ces programmes.

IV.– LA JUSTICE JUDICIAIRE

Avec une dotation de 2.605,9 millions d’euros en crédits de paiement, le programme Justice judiciaire est en progression de 2,9 % à périmètre constant par rapport à 2006.

Cette augmentation s’explique principalement par l’augmentation des moyens accordés à la Cour de cassation, par la prévision des crédits nécessaires à l’enregistrement des décisions judiciaires et par un effort financier en faveur de la formation, avec des dotations accrues à l’École nationale de la magistrature et à l’École nationale des greffes.

Les crédits du programme figurent dans le tableau suivant :

JUSTICE JUDICIAIRE :
PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2007

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Traitement et jugement des contentieux civils

738,91

735,32

Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

959,95

938,43

Cassation

58,71

56,72

Conseil Supérieur de la Magistrature

1,2

1,2

Enregistrement des décisions judiciaires

13,52

13,52

Soutien

838,57

747,8

Formation

81,11

85,11

Support à l’accès au droit et à la justice

27,72

27,72

Total

2.719,69

2.605,82

Le programme Justice judiciaire comprend 30.301 ETPT, contre 29.475 en 2006. Il s’agit de 7.714 magistrats, 2.038 fonctionnaires de catégorie A+ ou A, 8.861 fonctionnaires de catégorie B (99 % sont des greffiers) et 11.688 fonctionnaires de catégorie C.

Ce plafond d’emplois comprend le transfert de 660 ETPT depuis le programme Accès au droit et à la justice et de 5 ETPT vers le programme Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés. À structure constante, le nombre d’ETPT augmente de 5,8 %.

Pour 2007, 834 entrées sont prévues. Les hypothèses de recrutement sont les suivantes : 285 magistrats, 31 greffiers en chef, 170 greffiers et 348 agents de catégorie C. Le recrutement de greffiers accuse toujours un déficit par rapport au recrutement de magistrats.

ÉVOLUTION DES EMPLOIS EN ÉQUIVALENT TEMPS PLEIN

 

2006

2007

Progression

Crédits demandés pour 2007

Magistrats de l’ordre judiciaire

7.600

7.714

+ 114

814.383.942

Personnels d’encadrement

1.992

2.038

+ 46

123.987.640

Personnel de greffe, d’insertion et éducatifs (cat B+)

8.562

8.804

+ 242

396.580.586

Personnels administratifs et techniques de catégorie B

56

57

+ 1

2.407.531

Personnels administratifs et techniques de catégorie C type

11.265

11.688

+ 423

435.620.610

Total

29.475

30.301

+ 826

1.772.980.309

Source : projet de loi de finances pour 2007

Malgré les nouveaux recrutements, le ratio entre le nombre de magistrats et celui des fonctionnaires des services judiciaires se détériore, passant de 2,87 en 1992 à 2,63 en 2005.

Le total des crédits de personnel prévus pour la justice judiciaire atteint 1.772,98 millions d’euros. La valeur moyenne du point en 2007 est en progression de 0,71 % par rapport à la moyenne annuelle en 2006.

Les mesures catégorielles inscrites dans le projet de budget se limitent à la prise en compte de l’accord sur l’amélioration des carrières conclu dans la fonction publique le 25 janvier 2006 pour un montant de 0,43 million d’euros hors charges.

Le ministère de la Justice souhaite mettre en œuvre en 2007 une politique indemnitaire modulable concernant les fonctionnaires des services judiciaires, pour un montant de 1,06 million d’euros. Elle ne peut être que limitée vu la faiblesse de la dotation prévue ; il s’agit cependant d’un début à encourager.

Il serait souhaitable de réduire l’écart entre le régime indemnitaire des magistrats et celui des fonctionnaires des services judiciaires, afin de mieux prendre en considération le rôle joué dans le fonctionnement des juridictions. L’ensemble de ces personnels doit être intéressé aux résultats des juridictions par une généralisation de la modulation des primes.

Les crédits de fonctionnement sont regroupés sur le titre 3 du programme. Ils s’élèvent à 726,32 millions d’euros en 2007 contre 701,5 millions d’euros en 2006, soit une augmentation de 24,82 millions d’euros représentant une progression globale de 3,44 %.

Les autorisations d’engagement afférentes aux dépenses d’équipement s’élèvent en 2007 à 189,2 millions d’euros (hors crédits prévus l’Établissement Public du Palais de Justice de Paris), soit une progression de 18,2 % par rapport à 2006.

Les crédits de paiement afférents aux dépenses d’équipement s’élèvent à 103,2 millions d’euros.

L’Établissement public du Palais de justice de Paris (EPPJP) voit sa dotation reconduite à hauteur de 2,17 millions d’euros pour 2007.

Le montant des crédits délégués en fonctionnement pour l’installation des juges de proximité durant l’année 2006 s’est élevé à 400.000 euros. Ce montant comprend l’achat de mobilier, de fournitures et documentation, de matériel informatique mutualisé entre plusieurs juges de proximité et des frais de déplacement lors de leurs stages de formation. Une provision d’un montant identique sera bloquée pour l’année 2007 et déléguée au fur et à mesure des installations de juges de proximité.

Les vacations versées aux juges de proximité devraient s’élever pour la totalité de l’année 2006 à 2,5 millions d’euros. En 2007, le nombre de vacations prévu sera de 119.540 pour un montant total de 8,6 millions d’euros.

La mise en œuvre de la loi organique s’est accompagnée de quelques difficultés non encore résolues :

– les outils manquent encore pour évaluer la charge de travail des juridictions : Outilgref apporte un certain nombre d’informations, mais un système plus abouti doit être étudié ;

– les services administratifs régionaux (SAR) ont des tâches supplémentaires, auxquelles ils peinent pour le moment à faire face. Il n’y a pas eu de renforcement du personnel de gestion à l’échelon déconcentré, alors que l’on évalue à 200 ou 300 les agents auparavant chargés de cette tâche en préfecture. Un rapport de l’Inspection générale des services judiciaires a préconisé une mobilité des administrateurs civils vers les cours d’appel afin de mobiliser toutes les compétences nécessaires et de soutenir les catégories chargées des tâches de gestion : greffiers, greffiers et agents de catégorie C. Le statut des SAR devrait évoluer vers plus d’autonomie, les fonctions des agents vers une professionnalisation, et il faudra veiller à ce que les rémunérations y soient attractives (la nouvelle bonification indiciaire s’y applique) ;

– la question de l’échelon de gestion approprié n’est pas entièrement résolue : il convient d’éviter que les juridictions du premier degré ne se sentent dépossédées, se retrouvent privées de marge de manœuvre, et soient dans l’impossibilité, par exemple, de procéder elles-mêmes à l’entretien des bâtiments ;

– les tarifications effectuées par les tribunaux de commerce comme par les conseils de prud’hommes sont peu contrôlées et ne sont pas encore soumises à un code de bonnes pratiques : une réflexion au niveau central serait souhaitable, afin de procéder à une action pédagogique ainsi que cela a été le cas pour les frais de justice, et par exemple établir une nomenclature par type d’affaires pour la tarification afin d’éviter les abus.

Le ministère, et en particulier le programme Justice judiciaire ont été pénalisés à la fois par le mode de calcul des ETPT pour le passage à la LOLF, et par le calcul de la masse salariale pour 2006. Les créations d’emplois prévues par la loi d’orientation et de programmation pour la justice de 2002 n’ont pas été inscrites dans les faits.

Le mode de calcul des ETPT choisi par le ministère des Finances a eu pour conséquence la suppression des postes vacants. Or ces postes étaient très nombreux dans le secteur de la justice, pour une raison tenant à la féminisation de différentes catégories de personnel – ainsi les magistrats (52 % de femmes), les greffes, comme d’ailleurs la P.J.J. qui tend également à une féminisation de plus en plus importante avec aujourd’hui un recrutement de jeunes femmes pour la majorité des postes. Les emplois vacants étaient décomptés à hauteur de 1 pour 5 temps partiels à 80 %, la vacance de postes constituant un support pour le recrutement effectué par l’administration centrale.

Ce « rompu de temps partiel » ayant été supprimé, la direction des services judiciaires estime à 1.000 ETPT la perte d’emplois toutes catégories confondues. Les caractéristiques particulières du secteur de la justice – féminisation et recours fréquent au temps partiel – n’ont donc pas été prises en considération par Bercy.

Cette suppression des postes vacants est à l’origine de grandes difficultés tant pour les chefs de cour que pour les services déconcentrés : elle a entraîné une plus grande rigidité de gestion ; par ailleurs la nouvelle fongibilité ne peut être exercée cette année, dans un contexte d’insuffisance de la masse salariale.

Le calcul de la masse salariale par le ministère des Finances a été fondé sur l’exécuté au 30 juin 2005, avec une prévision d’extension à la fin de l’année. Ce calcul n’a tenu compte que des agents payés (non des postes vacants, donc). La direction des services judiciaires a considéré que la masse salariale obtenue ne permettait pas de financer les ETPT prévus par le programme, aussi n’a-t-elle délégué aux BOP que 80 % de la masse salariale en janvier, gardant le reste au niveau de l’administration centrale. Le disponible sera alloué en fin d’année, mais il est prévisible qu’une petite partie seulement des 100 créations de postes prévues pourra avoir lieu.

Ainsi, en prenant en considération l’exemple de la Cour d’appel de Rouen, la base de calcul des ETPT a conduit à supprimer 30 postes vacants, qui résultaient d’une rotation importante et rapide des postes, alors que la fidélisation des jeunes magistrats et fonctionnaires s’avère difficile. À ce manque s’ajoute l’insuffisance de crédits par rapport au plafond d’emplois, qui rend difficile d’assumer en même temps le recrutement prévu de réservistes de l’administration pénitentiaire pour assurer la sécurité des tribunaux, ainsi que le coût des pensions dont la charge réelle n’a pas été intégrée à la masse salariale et qui incombe à présent au gestionnaire.

Des problèmes persistent dans les greffes, où les créations de postes restent insuffisantes et sont toujours en décalage avec le nombre de postes de magistrats ouverts au concours en début de loi de programmation.

En outre, l’ouverture prochaine des nouveaux établissements pénitentiaires imposera des créations de postes, ce qui entraînera un nouvel et difficile arbitrage entre les différentes directions du ministère.

La direction des services judiciaires souhaiterait que soient anticipés les départs à la retraite massifs de magistrats en 2009-2010 : 300 recrutements par an seront alors nécessaires, ce qui posera un problème de qualité des recrutements et justifierait un « lissage » du recrutement dès à présent. De même, le doublement des départs en retraite des greffiers pendant les années 2006-2010 rendra le fonctionnement des tribunaux très difficile dès 2008 et les moyens apparaissent dès aujourd’hui insuffisants pour procéder aux recrutements indispensables.

Enfin, Votre Rapporteur spécial souligne que des applications informatiques placées sous la responsabilité du ministère des Finances ne sont pas disponibles : l’application NDL est jugée obsolète, le système Cassiopée accumule des années de retard et les SAR ne disposent pas encore d’outil pour suivre la consommation des emplois et celle de la masse salariale, alors que la loi l’impose.

Le passage aux crédits limitatifs a eu un effet positif : la prise de conscience de la progression continue des frais, lesquels absorbaient 90 % de la progression des crédits d’administration judiciaire. Le plan d’action de maîtrise des frais de justice décidé par le Garde des Sceaux a permis de remettre en question certaines sources de dépenses. On peut aujourd’hui faire état de nombreuses avancées :

– la création d’une « mission frais de justice » sous l’autorité du secrétaire général du ministère, comptant une trentaine de personnes ;

– la nomination d’un référent frais de justice dans toutes les cours d’appel ;

– le fonctionnement du logiciel Fraijus au plan national depuis mars 2006 : les magistrats y intègrent leurs engagements de dépenses ; la gendarmerie a intégré l’ensemble de ses fichiers, mais les fichiers de dépenses engagées par la police ne sont encore que partiellement intégrés. Cet outil ne permettra une vision d’ensemble qu’en 2007 seulement, et pour 2006, seule la tendance de l’évolution pourra être constatée ;

– la création de la délégation interministérielle aux interceptions judiciaires : une plate-forme d’interception mise en place dès 2006 pour un coût de 16 millions d’euros d’investissement mais avec un retour rapide escompté, et une plate-forme nationale prévue pour 2008 ;

– l’obtention d’un tarif pour les services rendus par les opérateurs de téléphonie mobile : l’économie attendue pour la justice est de 40 % de la dépense ;

– la mise en concurrence des laboratoires pour l’établissement des empreintes génétiques a abouti à un tarif moyen de 100 euros (au lieu de 380) pour une empreinte sur un individu, une baisse plus forte étant encore possible ;

– une réflexion est en cours sur la réforme des circuits financiers de paiement des frais de justice, car le paiement s’effectue mémoire par mémoire, chacun étant soumis à un circuit actuel très long. Il est envisagé de créer des services facturiels et de gestion au niveau régional ; cependant il est souhaitable de garder un lien entre le magistrat et l’expert, le premier fixant la rémunération du second.

Il est essentiel que les économies réalisées aillent à la revalorisation d’autres secteurs : la médecine légale, la psychiatrie et la psychologie, les experts et interprètes.

Les crédits inscrits s’élevaient pour 2006 à 370 millions d’euros, soit une progression de la dotation de 11,5 millions d’euros seulement. Une réserve de 50 millions d’euros pouvait être mobilisée en cas de dépassement. La consommation prévue pour cette année s’élèverait à 423 millions d’euros, ce qui représenterait une forte décrue par rapport à 2005 (487 millions d’euros).

Pour 2007, il est tenu compte d’une progression du volume des frais de 7,5 %, et la dotation demandée a été fixée à 423 millions d’euros. Une revalorisation d’un euro de la lettre c (consultation généraliste) a été effectuée au 1er août 2006, revalorisation intégrée dans la prévision des frais de justice.

La progression de la dépense et celle des dotations figurent dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DE L’ENSEMBLE DES FRAIS DE JUSTICE

(en millions d’euros)

Année

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Dotation finale

248,103

266,565

258,823

271,070

288,190

338,000

419,067

487,37

Dotation initiale

248,103

266,565

283,215

277,169

293,190

310,100

338,151

358,15

Dépense

247,059

243,140

258,361

262,010

290,090

341,431

410,865

500

Solde

1,044

23,424

0,462

9,060

– 1,900

– 3,43

– 80,92

– 129,22

Évolution de la dépense
(en %)

5,44

– 1,59

6,25

1,42

10,72

17,70

20,34

22

Évolution de la dépense

12,757

-3,918

15,220

3,649

28,080

51,341

69,434

89,135

Cependant, la mise en œuvre du nouveau système de paiement s’accompagne de difficultés.

Ainsi les paiements inférieurs à 2.000 euros, auparavant effectués par les régies de juridictions doivent à présent être effectués par les SAR – qui subissent par ailleurs un accroissement de leurs tâches. On constate un retard dans la consommation des crédits variable selon les ressorts, le retard dans nombre de juridictions s’expliquant par le mauvais circuit de paiement et par les stocks de factures restant dans les régies des juridictions. Ces retards sont très dommageables pour les experts ou les associations qui travaillent largement pour l’institution judiciaire et qui peuvent se trouver en cessation de paiement.

À ces retards s’ajoute le passif des années antérieures non encore payé malgré la consigne d’accélérer les paiements, donnée en fin d’année 2005.

Enfin, les magistrats regrettent que l’outil Fraijus soit dissocié du logiciel de procédure, ce qui impose une saisie distincte pour les frais de justice ; on notera que les deux procédures seront liées, pour le pénal, dans le système Cassiopée qui devrait être disponible fin 2007.

Votre Rapporteur spécial constate que de nombreux aspects de l’action du ministère sont soumis à des audits de modernisation. En particulier, quatre d’entre eux concernent le programme Justice judiciaire.

Le premier audit, relatif aux analyses d’empreintes génétiques, a mis en évidence l’écart des prix demandés par les laboratoires, pouvant aller de 80 à 360 euros pour une même prestation. Il préconise le recours à des marchés, pour les analyses sur personnes dénommées ayant pour objet leur inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques. La Direction des services judiciaires mettra en œuvre cette préconisation le 1er janvier 2007, ce qui permettra d’accélérer la documentation du FNAEG, en intégrant des résultats d’analyses effectuées de manière homogène, sans aggravation des frais de justice.

Le deuxième audit a formulé des préconisations pour promouvoir les bureaux de l’exécution (BEX) dans toutes les juridictions, de sorte que les décisions de justice soient effectivement appliquées.

La généralisation de ces structures constitue à présent, comme il a déjà été souligné, une priorité pour le ministère. En outre, une expérimentation de Bureaux de l’exécution des mesures et des peines va commencer dans quatre tribunaux de grande instance.

Le troisième audit concerne l’utilisation de la visioconférence entre les juridictions, les établissements pénitentiaires, les commissariats de police et les brigades de gendarmerie. Il tend à limiter les transfèrements de détenus et les escortes, coûteuses et génératrices de risques pour les forces de l’ordre comme pour le public. Un plan d’équipement concerté et un programme pluriannuel d’équipement constituent la clé de voûte du système. Le succès dépendra des efforts que les ministères partenaires pourront engager, les juridictions ayant pris une avance notable. Les gains seront sensibles pour les forces de police et de gendarmerie, si elles parviennent à financer l’investissement nécessaire.

Enfin, le quatrième audit porte sur la dématérialisation de la procédure pénale, génératrice de gains de productivité considérables. Le garde des Sceaux s’est engagé à la généraliser en 2007, et l’ensemble des Cours d’appel ont été invitées à transmettre leur demande de matériel de numérisation avant le début décembre 2006.

V.– L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

Ce programme, qui représente 35,7 % de la mission Justice, comporte cette année trois actions, du fait du regroupement de certaines d’entre elles, contre cinq l’an passé : la première concerne la Garde et le contrôle des personnes placées sous main de justice, la deuxième l’Accueil et l’accompagnement des détenus, la troisième action est consacrée au Soutien et à la formation.

La démographie carcérale est légèrement améliorée par rapport à 2006 : la population détenue s’élève à 58.000 personnes soit 1.000 détenus de moins, ce qui influe sur les conditions de détention.

Votre Rapporteur spécial tient à souligner un certain nombre d’évolutions positives.

En effet, un changement de culture est à l’œuvre progressivement ; il peut être perçu à travers différents éléments : la création des quartiers courtes peines et des établissements pour mineurs (avec la scolarisation au centre du dispositif), les recrutements nombreux (1.500 en 2007), dont 25 à 30 % de femmes parmi les gardiens surveillants avec une revalorisation de l’administration pénitentiaire dans l’opinion, l’amélioration des pratiques professionnelles à laquelle travaille la direction centrale, la généralisation des unités de visite familiale souhaitée par le Garde des Sceaux, le recours à des modes de gestion privée pour les procédures d’achat, notamment.

Il approuve la décision du ministre de créer un contrôle extérieur et indépendant des prisons confié au Médiateur de la République, décision prise en application du Protocole additionnel de la convention des Nations unies contre la torture signé par la France le 16 septembre 2005, ainsi que la généralisation de la présence des délégués du médiateur en prison. Ces décisions auront une incidence budgétaire sur la mission Justice mais également sur la mission Direction de l’action du Gouvernement.

Le Gouvernement a garanti au Médiateur de la République qu’il disposerait de tous les moyens nécessaires ; étant donné qu’aucun financement n’est prévu dans la présente mission, il conviendra de s’assurer que les crédits inscrits sur la mission Direction de l’action du Gouvernement seront suffisants.

De même, l’adhésion de la France aux règles pénitentiaires européennes définies par le Conseil de l’Europe le 11 janvier 2006 emporte le respect d’obligations particulièrement exigeantes s’agissant des conditions de détention et d’accès aux soins comme de la formation du personnel pénitentiaire. Votre Rapporteur spécial s’interroge sur l’adéquation entre les moyens budgétaires envisagés pour 2007 et le respect de ces principes fondamentaux.

Les crédits de l’administration pénitentiaire pour 2007 s’élèvent à près de 2,9 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 2,24 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 5 % par rapport à ceux inscrits dans la loi de finances initiale pour 2006. Hors dépenses de personnel (titre 2), cette progression est de 7 % pour le budget de fonctionnement, d’intervention et d’investissement de l’administration pénitentiaire.

La population détenue s’élève à 59.488 personnes, dont 31,2 % de prévenus. On notera que la proportion des personnes prévenues sous écrou parmi l’ensemble des détenus tend à diminuer depuis 1996, passant de 38 % de la population totale en 1996 à 31 % en 2006. Le nombre de prévenus a baissé de 2.450 personnes en un an, la tendance s’amplifiant ces derniers mois (17.487 prévenus au 1er septembre 2006, contre 21.000 en 2005), effet imputable aux conséquences de l’affaire «Outreau ».

Le tableau suivant présente l’évolution des crédits de paiement par titre :

ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
CRÉDITS PAR TITRE

(en millions d’euros)

Titres

2006

2007

Évolution

Titre 2 – dépenses de personnel

1.356, 89

1.414,49

+ 4,24

Titre 3 – dépenses de fonctionnement

492,94

521,95

+ 5,88

Titre 5 – dépenses d’investissement

241,35

295,45

+ 22,41

Titre 6 – dépenses d’intervention (1)

39,51

14,11

- 64,28

Total budget

2.130,70

2.246

+ 5,41

(1) Changement de périmètre du Titre 6 (certaines dépenses sont transférées sur le Titre 3).

Source : Direction de l’administration pénitentiaire

Le plafond d’autorisation d’emplois de l’administration pénitentiaire prévu par la loi de finances pour 2007 est de 31.297 ETPT, contre 31.020 en 2006, soit 277 ETPT supplémentaires. Ce plafond se décline de la manière suivante :

ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
PLAFONDS D’AUTORISATION D’EMPLOIS

 

Plafond autorisé pour 2006

Demandés pour 2007

Variation 2006/2007
(en  %)

Magistrats

17

17

0

Personnel d’encadrement

1.301

1.315

+ 14

B métiers du greffe, de l’insertion et de l’éducatif

3.665

3.697

+ 32

B administratifs et techniques

940

949

+ 9

Personnels de surveillance C

22.269

22.465

+ 196

C administratifs et techniques

2.828

2.854

+ 26

Total

31.020

31.297

+ 277

Cependant, il conviendra d’examiner si la masse budgétaire permettra de rémunérer tous les ETPT inscrits, ce qui n’a pas été le cas en 2006.

Les recrutements prévus s’élèvent à 1.900 : 1.200 pour le remplacement de départs en retraite et 700 recrutements nets pour l’ouverture des établissements.

Le régime indemnitaire des agents de l’Administration pénitentiaire continue de bénéficier des mesures favorables décidées au cours des années récentes. Au total, 5,8 millions d’euros seront consacrés cette année à la poursuite de la réforme statutaire du personnel et à la revalorisation du régime indemnitaire.

Ces moyens s’élèvent en 2007 à 521,9 millions d’euros contre 492,9 millions d’euros en 2006, soit une augmentation de 29 millions d’euros.

La progression doit permettre de renforcer la sécurité des établissements et les mesures alternatives à l’incarcération telles notamment le placement sous surveillance électronique. S’agissant de l’action Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice, la progression des dépenses doit permettre de faire face à l’évolution de la population pénale et à la montée en puissance des marchés de gestion déléguée.

Pour 2007, l’administration pénitentiaire se désengage totalement de la gestion des centres de rétention administrative (CRA) au profit de la police nationale (pour 10 centres) et de la gendarmerie nationale (pour 3 centres). Les crédits de fonctionnement afférents aux CRA (4,09 millions d’euros) sont transférés à ces deux ministères de tutelle.

La loi d’orientation et de programmation a prévu, à la suite du programme « 4000 places » lancé en 1997, la création de 13.200 places supplémentaires : 10.800 places dans le cadre de la réalisation de nouveaux établissements pénitentiaires et 2.400 places dédiées à l’application des nouveaux concepts pénitentiaires adaptés à la diversité de la population pénale (2.000 pour les détenus majeurs et 400 dans des structures exclusivement destinées aux mineurs).

Au terme de ce nouveau programme de construction (2008-2009), la capacité du parc pénitentiaire sera portée à près de 60.000 places, soit une augmentation de l’ordre de 20 % par rapport à la situation actuelle ; environ 31.000 places, soit plus de la moitié du parc, auront alors moins de vingt ans d’existence. Il est possible que cette capacité soit excessive, mais elle permettra alors de fermer les structures les plus anciennes.

Votre Rapporteur spécial tient à souligner l’importance de la continuité régularité de l’effort financier dans le domaine de l’équipement : elle devra se traduire au-delà de la période de programmation par l’achèvement des constructions et par une réhabilitation constante des structures. Il ne faut pas revenir à la situation antérieure où l’arrêt des investissements et le manque de réhabilitation conduisent à un effort beaucoup plus important et coûteux ensuite.

Les premiers établissements pénitentiaires du « programme 13.200 » devraient entrer en fonction à la fin de l’année 2007, soit cinq années après la décision de les créer, ce qui représente un gain d’une année par rapport aux durées moyennes précédemment observées.

La loi de programmation de 2002 aura été parfaitement respectée en ce qui concerne la construction des établissements pénitentiaires prévus.

La partie du programme pénitentiaire réalisée dans le cadre de partenariats public-privé a fait l’objet de contrats conclus en 2006. Le premier contrat a été signé avec le groupe Eiffage le 23 février 2006, pour la réalisation en 2008 et 2009 de quatre établissements totalisant 2.790 places, pour un investissement de 270 millions d’euros. Il est prévu de signer un deuxième lot réparti sur trois établissements, totalisant 1.690 places, avant la fin 2006. Un troisième lot, d’une capacité de 2.000 places, devrait être ensuite lancé selon les modalités prévues par l’ordonnance du 17 juin 2004, relative aux contrats de partenariat ; il permettra d’intégrer les services à la personne, en plus de la construction, l’exploitation et la maintenance immobilière des bâtiments.

La LOPJ a prévu un vaste programme de rénovation, d’extension et de mise aux normes des quartiers des mineurs avec l’objectif est de parvenir à la création de 500 nouvelles places réparties de façon équilibrée sur l’ensemble du territoire national.

Les sept établissements pour mineurs sont en construction ; la livraison des quatre premiers devrait intervenir au printemps 2007. Ce programme aura permis à ce jour de créer 275 places aux normes et d’en remettre 275 à niveau. La capacité totale d’accueil de mineurs est de 1.133 places dont 851 aux normes – pour un nombre de mineurs incarcérés inférieur à 700 –, sur 64 établissements pénitentiaires.

Le directeur de l’administration pénitentiaire évalue à 5.500 les personnels nécessaires pour accompagner la création de ces places de détention. Il conviendra de suivre leur affectation dans les nouvelles structures.

L’équipement des établissements pénitentiaires en visioconférence se développe avec trente-huit établissements équipés ou en cours d’équipement.

D.– LE DÉVELOPPEMENT DES MESURES ALTERNATIVES

Le nombre de placements sous surveillance électronique, « PSE », a continué de progresser : + 6,5 % entre le 1er juin 2005 et le 31 mai 2006, passant à cette date à 1.598 personnes sous PSE de façon simultanée et portant le total à 11.558 bénéficiaires depuis le début de l’expérimentation en 2002. Le succès du placement sous surveillance électronique est réel, avec un taux d’évasion de 0,3 % et un taux de retrait de 4,62 %.

Un dispositif de placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) est expérimenté depuis l’adoption de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales.

La mise en œuvre de la LOLF s’avère particulièrement complexe pour l’administration pénitentiaire et a entraîné l’alourdissement des procédures pour les actes de gestion. Le système d’information budgétaire et comptable est insuffisant, contrairement aux outils de gestion de la masse salariale qui sont satisfaisants. Ainsi que votre Rapporteur spécial l’a déjà décrit plus haut, les gestionnaires ne constatent pas de progrès dans la gestion en mode LOLF car le contrôle financier et comptable s’est arrogé un droit de regard permanent sur les actes de gestion, et sur l’opportunité de la dépense, au lieu de laisser au gestionnaire de budget opérationnel de programme la latitude que la loi organique voulait lui conférer.

Cette évolution est particulièrement regrettable et doit être corrigée, afin que l’administration consacre davantage de son temps à améliorer les procédures, notamment pour la passation des marchés, par exemple, ainsi qu’à tout l’aspect « performance » de ses tâches.

VI.– LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

Le budget 2007 s’inscrit dans la progression constante des crédits depuis dix ans et l’amplifie même : avec un montant total de 799 millions d’euros, les crédits de la PJJ augmentent de 8,6 % sur un an.

Ce montant doit permettre l’ouverture de vingt nouveaux centres éducatifs fermés (CEF), portant à 465 le nombre de places disponibles d’ici la fin de l’année prochaine.

Les crédits du secteur associatif habilité progressent de 16 %, soit 43 millions d’euros supplémentaires. Ces crédits passent de 270,44 millions d’euros à 313,21 millions d’euros en 2007.

Les crédits de fonctionnement s’élèveront à 407 millions d’euros, dont 339 millions d’euros pour le secteur associatif et à 68 millions d’euros pour le secteur public et en crédits de paiement de 380 millions d’euros, dont 312 millions d’euros pour le secteur associatif et 68 millions d’euros pour le secteur public.

Les centres éducatifs renforcés (CER) ont répondu aux attentes qui ont conduit à leur conception, permettant d’apporter une solution à des mineurs incapables d’accepter la règle de structures collectives. Cependant, les CER coûtent anormalement cher dans le secteur public : le coût complet d’une journée en CER public est estimé à 877 euros sur 2005, alors qu’il n’est que de 419 euros pour le secteur associatif habilité en 2005. L’écart est expliqué, semble-t-il, en partie par des dysfonctionnements propres à certains centres, certains ayant fermé depuis 2005. Une démarche d’évaluation quantitative et qualitative des CER doit être prochainement entreprise par les services de l’inspection de la PJJ.

De même, les CEF présentent un bon bilan : dix-huit CEF sont en activité, soit 170 places au 9 octobre 2006.

Le plafond d’emplois du programme est porté à un effectif global de 8.806 ETPT. Cette augmentation des effectifs comprend l’extension en année pleine des créations d’emplois 2006, soit 30 ETPT et la création de 55 ETPT supplémentaires.

La masse salariale progressera de 21 millions d’euros, ce qui permet à la fois des augmentations de salaires (pour prendre en compte l’incidence de l’évolution de la valeur du point, le GVT et les mesures indemnitaires dites « Jacob »), mais aussi des recrutements (à hauteur de 290 postes) et une réduction de la vacance à hauteur de 150 postes environ.

L’autorisation de recruter 800 contractuels, représentant 10 % de ses effectifs budgétaires, donnée par le ministre délégué au Budget et à la réforme de l’État en 2003 a été reconduite en 2006 ce qui permet d’améliorer la gestion du secteur public de la PJJ .

La programmation de l’investissement décidée au plan national est largement insuffisante, et il est regrettable que beaucoup d’investissements urgents (réhabilitations, toitures, désamiantage de parties de bâtiments) ne figurent pas dans la progression triennale d’investissement, bien que certains aient été prévus au contrat de plan. Les retards accumulés, qui conduisent à des dégradations plus importantes ou à des situations dangereuses nécessitant une mise aux normes, obligent en fait les directions régionales à procéder aux travaux en mobilisant des crédits de fonctionnement par exemple.

La construction et l’ouverture prévue en 2007 de 5 CEF mobilisent la majeure partie des crédits d’investissement dans plusieurs directions régionales.

Il est regrettable, par ailleurs, que la politique de cessions immobilières à laquelle participe la P.J.J. ne lui soit pas toujours favorable : les fonds issus de la vente d’immobilisations importantes alimente le compte d’affectation spéciale général, sans que la P.J.J. ne soit bénéficiaire du produit, alors qu’elle doit relocaliser ses structures dans des locaux plus petits, et doit parfois recourir à des locations immobilières. Ce procédé ne motive pas la P.J.J. à se défaire de bâtiments trop vastes, ce qui est regrettable pour l’efficacité de la gestion immobilière.

La réactivité des recrutements et de la gestion du personnel semble améliorée de façon générale. L’administration a établi une gestion prévisionnelle des emplois ; une « carte des emplois » et un plan de rééquilibrage des emplois s’établissent dans certaines directions. Elle tire également bénéfice de la souplesse permise par le recours aux recrutements contractuels. Cette réactivité est pourtant encore freinée par différents facteurs.

Si les gestionnaires de BOP se satisfont de l’enveloppe qui leur a été allouée pour 2006, ils relèvent cependant que les crédits de rémunérations souffrent d’une sous-budgétisation, variable d’une direction régionale à l’autre. Ce phénomène est lié à la base de calcul choisie par le ministère des Finances pour définir la masse salariale du programme, base qui s’est révélée plus ou moins éloignée de la réalité selon les BOP.

En région Île de France en particulier, où travaillent beaucoup de fonctionnaires de cadre A, il existe un écart de 1,2 million d’euros entre les postes inscrits au budget et les rémunérations réelles des personnels. Au plan national, le déficit de financement serait de 300 postes.

L’insuffisance de crédits est évidemment source de difficultés ; elle empêche la réactivité de jouer car les chefs de BOP ont choisi une attitude de prudence, hésitant à recruter et étant même prêts à mettre fin à un certain nombre de contrats qui n’auraient pu être financés (130 contrats ont ainsi été temporairement menacés en région Île de France, une partie l’est encore), ce qui entraîne d’autres dépenses comme le paiement d’allocations de retour à l’emploi, elles aussi sous-évaluées par le ministère des Finances. Le versement de ces allocations devrait être confié aux Assedic, qui disposent d’une instance d’appel pour faire face aux contentieux éventuels, ce dont la P.J.J. ne dispose pas.

Le contrôleur de gestion tend dans ce cas à suggérer qu’un plan de licenciement soit dressé : il y a là une véritable contradiction interne car les licenciements ne pourront que conduire le gestionnaire à demander le recrutement de fonctionnaires, ce qui sera plus coûteux.

Le coût des vacations est également sous-estimé, ce qui complique encore le recours aux psychiatres, déjà peu nombreux et peu attirés par la collaboration avec les services de la P.J.J.

Si le recours à la fongibilité asymétrique a été demandé en 2005 en région Île de France, où l’expérimentation LOLF s’est déroulée, ce n’a pas été le cas en 2006, du fait de la sous-budgétisation. L’année dernière, la fongibilité n’a pas joué conformément à son objectif, car l’accord de validation étant parvenu deux mois après la demande, la disposition des fonds a été trop tardive pour un usage autre qu’en crédits de fonctionnement, alors que la sécurisation des bâtiments est loin d’être satisfaisante.

Le redéploiement des agents fonctionnaires entre structures en fonction de l’évolution de l’activité et de la charge de travail demeure difficile : s’il est possible en théorie, la pratique est difficile, les chefs de BOP devant souvent attendre la vacance du poste à fermer, ou la création d’un poste supplémentaire, pour opérer le redéploiement.

La concentration des crédits de formation au sein du BOP Centre national de formation des éducateurs (CNFE) devrait évoluer pour laisser une part des crédits au niveau des directions régionales, afin d’y accompagner les décisions de gestion du personnel.

En conclusion, votre Rapporteur spécial soulignera l’urgence de disposer d’outils de gestion prévisionnelle des emplois.

Votre Rapporteur spécial se félicite de l’augmentation des crédits qu’apporte le projet de budget pour 2007 : il conviendra d’examiner dans quelle mesure cette augmentation contribue à résoudre les problèmes ici évoqués.

Le passage aux crédits limitatifs a entraîné des changements très importants pour la P.J.J. Tout d’abord, il doit être souligné que des reports de l’année précédente (équivalents aux paiements du mois de décembre) obèrent dès le début d’année les crédits disponibles pour l’année suivante, alors que le contexte est plutôt celui d’une progression de l’activité de la P.J.J.

Le financement du secteur associatif habilité a connu un déficit de 88 millions d’euros au plan national pour 2005. L’absence de crédits a conduit à cesser les paiements en septembre 2005, sauf pour les petites structures dont la survie serait mise en danger. Dans un tel contexte, les gestionnaires ont été contraints d’établir des priorités pour le paiement : petites associations prenant en charge des mineurs délinquants, CEF et CER – qui sont des priorités de la politique nationale – , mesures d’investigation en troisième lieu.

Un dialogue s’est établi avec les associations, dans le cadre d’une campagne de tarification en début d’année 2006, pour les sensibiliser aux économies souhaitables ; cependant le cumul des impayés depuis 2005 a placé l’administration dans une situation délicate. Les emprunts auxquels doivent recourir les associations occasionnent en outre des frais de trésorerie.

Le caractère limitatif des crédits a conduit à la redéfinition de la mission de la direction, entreprise en 2005, laquelle se désengage progressivement de la protection des jeunes majeurs, sauf lorsqu’il s’agit de la fin de prise en charge d’un mineur par les services. Cette redéfinition des missions entre la P.J.J. et les conseils généraux a fait l’objet d’un dialogue avec les magistrats – prescripteurs de mesures de protection – dans toutes les cours d’appel.

L’administration semble aujourd’hui hésiter entre deux positions : d’un côté, il existe une volonté de redéfinir les missions et financer en premier lieu les prises en charge considérées comme prioritaires par le ministère, d’un autre côté a été décidée en mars 2006 une ouverture de crédits de 14 millions d’euros, appréciable pour venir en aide au secteur associatif, mais contribuant aussi à décrédibiliser quelque peu le discours des directions régionales les plus « vertueuses » dans la recherche de l’équilibre financier.

Il convient donc de définir plus clairement la ligne de conduite que doivent suivre les directeurs régionaux, afin de ne pas les placer dans une situation incertaine. La démarche volontariste entreprise par l’administration, avec la nomination de commissions chargées d’examiner la situation dans chaque département, en particulier ceux risquant de se trouver dans l’incapacité d’honorer leurs obligations vis-à-vis du secteur associatif, doit être approuvée.

VII.– L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE

Ce programme Accès au droit et à la justice bénéficiera d’une dotation de 338,5 millions d’euros pour 2007, en progression à structure constante (1) de 6,9 % par rapport à 2006.

Le périmètre est modifié, avec une nouvelle action Médiation familiale et lieux neutres de rencontre dont les crédits destinés au soutien des fédérations nationales et du réseau des associations et services intervenant en ce domaine étaient inscrits en 2006 sur le programme Justice judiciaire. En outre, afin d’assurer une meilleure gestion des personnels des services judiciaires, les ETPT du programme sont transférés vers le programme Justice judiciaire. Ainsi, les dépenses de personnel des juridictions affectés dans les bureaux d’aide juridictionnelle, les conseils départementaux d’accès au droit (CDAD), et dans les maisons de justice et du droit, mais aussi les ETPT d’administration centrale du service de l’accès au droit et à la justice et de la politique de la ville (SADJPV) et la masse salariale y afférant sont rattachés au programme Justice judiciaire.

Le tableau suivant présente l’évolution de ses crédits.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME
ACCÈS AU DROIT ET AIDE AUX VICTIMES

(en euros)

 

LFI 2006

PLF 2007

Évolution
(en %)

Aide juridictionnelle

Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

Aide aux victimes

Médiation familiale et lieux neutres de rencontre (1)

320 996 084

12 364 340

10 808 675

323 023 714

3 693 863

9 731 933

2 031 081

0,6

- 70,1

- 9,9

NS

TOTAL

344 169 099 (2)

338 480 591

1,6

(1) Crédits inscrits en 2006 sur le programme Justice judiciaire.

(2) dont 27,7 millions d’euros de crédits de personnel transférés à compter de 2007 au programme Justice judiciaire.

L’évolution des crédits pour chacune des actions du programme se justifie comme suit :

Le budget de l’action Aide juridictionnelle – hors personnel - pour 2007 est de 323 millions d’euros. Il tient compte d’une augmentation des admissions de 3 % en 2006 et 2007 (941.000 admissions prévues en 2007 contre 913.000 en 2006 et 886.500 en 2005).

Votre Rapporteur spécial souligne que la France compte le plus grand nombre de bénéficiaires de l’aide juridictionnelle en comparaison avec les autres pays européens ; la Justice y est donc parmi les plus accessibles. Dans d’autres pays, ainsi le Royaume Uni, le nombre des bénéficiaires est moindre et la rémunération des avocats est en revanche plus importante. Un audit est actuellement en cours, recherchant l’évolution souhaitable pour notre système de plus en plus coûteux ; ainsi, un recouvrement en cas de retour à une meilleure fortune pourrait être envisagé.

Votre Rapporteur spécial estime en effet que le système doit évoluer, notamment en instituant un mode de filtrage des demandes d’aide en fonction de la nature des demandes.

Le budget de l’action Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité s’élève à 3,69 millions d’euros (hors personnel), contre 4,2 millions d’euros en 2006.

Conformément aux objectifs de la LOPJ, le ministère poursuit l’objectif de couverture du territoire national au rythme de 4 à 5 Conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) par an. Au 1er juillet 2006, les CDAD sont institués dans 82 départements.

Le budget de l’action Aide aux victimes – hors personnel – pour 2007 s’élève à 9,73 millions d’euros : il connaît donc une diminution de 9% par rapport à la dotation allouée pour 2006.

Les crédits d’intervention de la mission concernent essentiellement le programme Accès au droit et à la justice, dont les crédits s’élèvent à 334,9 millions d’euros en 2007 contre 312,2 millions d’euros en 2006, soit un montant supplémentaire de 22,7 millions d’euros représentant une progression de 7 %. Cette progression est due à l’augmentation des crédits d’aide juridictionnelle et à la modification du périmètre du programme (réintégration de la médiation familiale qui en 2006 était inscrite dans le programme Justice judiciaire).

La médiation familiale sera dotée de 2 millions d’euros.

VIII.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE
ET ORGANISMES RATTACHÉS

Ce programme recevra une dotation de 321,28 millions d’euros en autorisations d’engagement et 281,80 millions d’euros en crédits de paiement.

Ce programme regroupe deux types de crédits : d’une part, ceux qui sont nécessaires au fonctionnement des institutions rattachées que sont la commission nationale informatique et libertés (CNIL), le Haut commissariat aux commissaires aux comptes et les ordres de la Légion d’honneur et de la Libération, et d’autre part, les crédits nécessaires à la conduite et au pilotage de la politique de la Justice.

Hors dépenses de personnel, les moyens des institutions rattachés connaissent une progression sensible puisqu’ils passent de 27,7 millions d’euros en 2006 à 28,6 millions d’euros en 2007, soit une augmentation de près de 3,2 % d’une année sur l’autre.

Le budget de la CNIL est renforcé pour atteindre 9,9 millions d’euros, contre 9 millions d’euros en 2006, la progression étant principalement destinée aux dépenses de personnel, sans que votre Rapporteur spécial soit autrement informé des motifs de leur augmentation de 0,8 million d’euros.

S’agissant des moyens de fonctionnement consacrés à la seule Chancellerie, le montant des crédits ouverts en 2007 progresse de 9,3 % et s’établit à 149,9 millions d’euros affectés en quasi-totalité (144 millions d’euros) à la gestion administrative commune du ministère. Pour l’essentiel (67,3 millions d’euros), ces dépenses seront consacrées à l’entretien et au développement des grandes applications informatiques d’intérêt national et particulièrement au développement de l’application CASSIOPEE destinée à automatiser la chaîne de traitement des affaires pénales, à l’informatisation du système de gestion des ressources humaines, et au développement de la plateforme d’interception judiciaire.

AUDITION DU MINISTRE EN COMMISSION ÉLARGIE

Séance du jeudi 2 novembre 2006

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances - Je suis heureux de coprésider cette réunion avec le président Houillon. Je rappelle que la formule de la commission élargie permet souplesse et réactivité. J’invite donc chacun à privilégier les interventions courtes et les questions, et à éviter les monologues académiques…

M. Philippe Houillon, président de la commission des lois – Monsieur le garde des Sceaux, la commission des lois a plaisir à vous retrouver une nouvelle fois après l’audition d’hier sur le projet relatif à la prévention de la délinquance, et avant celle qui nous réunira le mercredi 29 novembre sur les projets relatifs à la réforme de la justice. La présente réunion, en formation « élargie », a trait aux crédits de la mission « Justice », qui fait l’objet de deux rapports pour avis de la commission des lois.

Ces crédits, et il convient d’emblée de s’en féliciter, sont en hausse sensible. Mais ils doivent accompagner l’indispensable mutation de la justice, attendue de nos concitoyens comme l’ont montré les travaux de notre commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau. Vous comprendrez donc aisément que nous vous interrogions sur les moyens nécessaires à la mise en œuvre, sinon de l’ensemble des propositions que nous avons faites, du moins de celles que vous avez reprises dans les projets de loi dont nous aurons à discuter prochainement, qu’il s’agisse des pôles de l’instruction, de l’accélération et de l’amélioration des procédures, ou encore de la formation des magistrats.

M. Pascal Clément, garde des Sceaux, ministre de la justice – La justice sera en 2007, une nouvelle fois, une des priorités budgétaires du gouvernement. Le budget de la Justice augmente de 5 %, après 4 % en 2005 et 4,6% en 2006. Cette nouvelle augmentation pour 2007 est à comparer à celle – 0,8 % - du budget de l’État. Le budget de la justice s’élève au total à 6,271 milliards d’euros, soit 2,34 % du budget de l’État au lieu de 1,69 % en 2002. Depuis 2002, le budget de la justice a ainsi augmenté de près de 1,8 milliard d’euros. Cette priorité continue depuis la loi d’orientation et de programmation pour la justice marque la volonté du gouvernement de renforcer les fonctions régaliennes de l’état, en donnant à la justice les moyens d’assurer efficacement ses missions.

Cette année, la justice doit relever trois défis : celui de sa modernisation, celui de son accessibilité et celui de son efficacité. J’ai l’ambition d’une justice modernisée, dans son fonctionnement et dans ses procédures. C’était le défi que nous assignait la représentation nationale l’an dernier, lorsqu’il s’agissait de mettre en place la LOLF. Ce rendez-vous, nous l’avons honoré.

Les responsables locaux des services judiciaires, de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse se sont vu attribuer une enveloppe de crédits et des objectifs, dans le cadre de « dialogues de gestion ». Ils ont été en mesure d’exercer, au plus près des besoins, les arbitrages nécessaires entre leurs crédits de fonctionnement et leurs crédits de rémunération.

Les chefs de cour sont désormais, conjointement, ordonnateurs des dépenses et responsables des marchés. Ils portent sur la gestion un regard nouveau, intéressé, responsable. Je rappelle que les ordonnateurs des dépenses des juridictions étaient auparavant les préfets. Les chefs de cour exercent désormais pleinement leurs responsabilités juridiques et financières. Ils sont de véritables « managers » du service public de la justice, comme en témoigne la gestion décentralisée des budgets des juridictions, réalisée avec le souci de l’économie et de la performance.

Avec mon collègue en charge du budget et de la réforme de l’État, nous avons souhaité approfondir cette démarche de modernisation. J’ai ainsi voulu que la Justice joue un rôle moteur dans les audits de modernisation de l’État. À la lumière d’un audit sur ce sujet, je souhaite que la visioconférence soit utilisée chaque fois que l’acte à accomplir pourra se satisfaire de cette technique, sans présentation physique de la personne devant le juge ou la juridiction. L’ensemble des juridictions et les principaux établissements pénitentiaires devraient être équipés en visioconférence d’ici la fin de cette année. Cette modernisation sera source d’économies importantes sur les déplacements d’experts et de magistrats, notamment dans les DOM-TOM, mais également en matière de transfèrement de détenus. Son utilisation dans le fonctionnement courant des services permet déjà des économies significatives de temps et de crédits, tout en favorisant une plus grande proximité entre des services répartis sur l’ensemble du territoire.

Dans la continuité de cette démarche de modernisation, je souhaite que la Justice s’appuie sur les nouvelles technologies pour être plus performante. J’ai ouvert, pour l’année qui vient, un chantier important : celui de la numérisation des procédures pénales. Il s’agit en effet de profiter de l’évolution des technologies pour assurer une plus grande fluidité dans le déroulement de ces procédures et l’accès en temps réel aux dossiers, tant pour les magistrats que pour les auxiliaires de justice. Le rapport de la mission d’audit de modernisation vient de m’être remis. D’ici la fin d’année, plus de la moitié des TGI mettront en œuvre la première vague de cette numérisation.

Le ministère de la justice a relevé un autre défi. Le cinquième des crédits du ministère est passé du statut de crédits évaluatifs, à celui de crédits limitatifs. Ces crédits concernaient les frais de justice, l’aide juridictionnelle, le financement du secteur associatif de la protection judiciaire de la jeunesse et la prise en charge de la santé des détenus. Dans chacun de ces cas, il convient à présent de rester dans l’enveloppe des crédits votés.

Il y a un an, je vous présentais un programme de maîtrise des frais de justice. J’ai rencontré un certain scepticisme, avant que chacun ne constate que la justice s’était effectivement donné les moyens de mieux maîtriser son budget. Cette démarche a produit des résultats concrets. Alors que les frais de justice connaissaient une augmentation de 15 à 20 % par an jusqu’à atteindre 487 millions d’euros en 2005, ils seront en 2006 conformes aux prévisions, soit environ 420 millions d’euros. J’avais assuré que cette maîtrise ne se ferait pas au détriment de la liberté d’initiative des magistrats et de la recherche de la vérité. Je crois pouvoir affirmer que nous y sommes arrivés. Nous poursuivrons donc nos efforts en 2007, pour contenir la progression de ces dépenses, en nous assurant notamment que les tarifs de nos fournisseurs sont compétitifs et que l’attention des prescripteurs, magistrats et officiers de police judiciaire, reste mobilisée. Ce sont donc 423 millions d’euros en autorisations d’engagement que nous avons pu inscrire en loi de finances pour 2007, pour les frais de justice. Si l’enveloppe de ces crédits est donc limitativement définie, elle l’est de façon réaliste et raisonnable.

Je souhaite ensuite que la Justice soit plus accessible pour tous les citoyens. C’était un des objectifs que vous nous aviez assignés en 2002, en votant la LOPJ.

L’accessibilité, c’est avant tout donner aux citoyens une réponse rapide lorsqu’il s’adresse à la justice. Entre 2002 et 2005, les délais moyens de traitement ont baissé pour toutes les affaires, même si des délais anormalement longs peuvent encore être constatés. Ainsi, les délais moyens de traitement dans les juridictions du premier degré ont été réduits de 28 %, passant en moyenne de 9,4 à 6,7 mois. Pour prendre un exemple plus précis, en matière de divorce, les délais étaient de 12 mois en 2004, de 10 mois en 2005 et devraient être réduits à 9 mois en 2006. Ces efforts doivent bien sûr être poursuivis, afin de parvenir à des délais de jugement acceptables par nos concitoyens.

Le ministère de la justice doit également s’assurer que chacun puisse connaître et exercer ses droits. L’accès au droit doit être favorisé et, tout particulièrement, le droit à disposer d’un avocat pour les plus démunis. Ainsi, j’ai décidé, en accord avec le Premier ministre, d’une augmentation des crédits consacrés à l’aide juridictionnelle de 6,6 %. Cette mesure représente 20 millions d’euros, dont plus de 16 millions consacrés à la revalorisation de l’unité de valeur, qui permet de fixer la rétribution des avocats. Le budget total de l’aide juridictionnelle sera ainsi de 323 millions d’euros en 2007. Il s’agit là d’un effort financier important, dans un contexte budgétaire toujours contraint. Cette mesure ambitieuse est néanmoins nécessaire et témoigne de la volonté du gouvernement d’assurer une juste rétribution des avocats, conforme à l’exigence d’une défense de qualité.

L’accessibilité de la justice doit aussi concerner les victimes, en leur garantissant une prise en charge concrète. Ainsi, la forte progression des crédits destinés aux associations d’aide aux victimes depuis 2002 a permis d’augmenter de 38% le nombre de victimes suivies, soit plus de 100 000 en 2005. L’effort budgétaire consacré à l’aide aux victimes est maintenu en 2007, à hauteur de 9,7 millions d’euros. Près de 3,7 millions d’euros seront consacrés au développement de l’accès au droit, par l’intermédiaire des maisons de la justice et du droit et des conseils départementaux de l’accès au droit. Ces structures sont en effet désormais présentes dans quasiment tous les départements. Les maisons de la justice et du droit ont vu leur nombre passer de 43 en 2002 à 118 en 2005.

Enfin, la Commission nationale de l’informatique et des libertés disposera d’un budget fortement renforcé. Près de 10 millions d’euros lui sont attribués, soit une hausse de 13 % en 2007, après celle de 26 % l’an dernier.

Je souhaite enfin que l’année judiciaire 2007 soit placée sous le signe de l’efficacité. Cette efficacité s’appuie tout d’abord sur de nouveaux recrutements et l’aboutissement du programme immobilier lancé il y a quatre ans.

Les crédits inscrits dans le PLF pour 2007 nous permettront de procéder à 1  548 recrutements supplémentaires. Sur la législature, 7 700 emplois nouveaux auront ainsi été créés. Cet effort considérable permettra aux juridictions d’accueillir 160 magistrats, 160 greffiers et 200 fonctionnaires de greffe supplémentaires, afin de rendre notre système judiciaire plus efficace.

La protection judiciaire de la jeunesse sera renforcée par le recrutement supplémentaire de 290 agents spécialisés dans les métiers de l’éducation et de l’insertion. Ils auront à cœur de répondre aux nouvelles formes de délinquance des mineurs sur l’ensemble du territoire national. L’installation, en 2008, de l’école nationale de la PJJ à Roubaix permettra, en outre, de renouveler la formation de ses personnels, dans la fidélité à ses principes fondateurs.

L’administration pénitentiaire bénéficiera de 703 emplois supplémentaires en 2007. Cela lui permettra notamment de recruter les 458 agents nécessaires à l’ouverture des nouveaux établissements pénitentiaires.

En effet, les années 2002 à 2006 ont été des années de construction et de réhabilitation. En 2007, commencera la mise en service des nouveaux établissements pénitentiaires et palais de justice, tandis que les opérations de rénovation se poursuivront. L’investissement du ministère dans ce programme immobilier représentera 1,1 milliard d’euros en autorisations d’engagement. Parmi ces crédits, 890 millions permettront à l’administration pénitentiaire de respecter l’objectif de la LOPJ, en créant 13 200 places réparties sur trente établissements afin de faire face à la surpopulation carcérale et à la vétusté de certains établissements.

Notre pays disposera ainsi d’environ 60 000 places conformes à nos besoins quantitatifs et adaptés aux nouvelles normes pénitentiaires du Conseil de l’Europe. Sept établissements pénitentiaires pour mineurs seront livrés en 2007 et deux début 2008. Dix établissements pour détenus majeurs sont d’ores et déjà lancés dans le cadre de partenariats public-privé. L’ensemble des établissements prévus par la LOPJ seront construits d’ici 2010.

L’effort immobilier se poursuivra également pour les juridictions grâce à un programme de construction-rénovation de 190 millions d’euros. Dès 2007, les palais de justice de Thonon-les-Bains, Avesnes-sur-Helpe et la cour d’appel de Bordeaux seront livrés. Les travaux se poursuivront ou commenceront à Annecy, Bobigny, Dijon, Le Havre, Nanterre ou Pointe-à-Pitre. Deux opérations seront réalisées en partenariat public-privé : le palais de justice de Bourgoin-Jallieu et l’extension de celui de Toulon. Plusieurs centaines de juridictions bénéficieront, elles aussi, d’améliorations ou de rénovations de leur patrimoine immobilier.

Enfin, pour la PJJ, l’ouverture de vingt centres éducatifs fermés supplémentaires est programmée, portant le nombre de places disponibles dans ces établissements à 465 à la fin de 2007.

Ces recrutements et ces constructions nous permettront d’assurer la bonne exécution des décisions de justice. En quatre ans, le taux de réponse pénale a déjà augmenté de plus de 10 %, la justice apportant une réponse pénale dans 79 % des dossiers qui lui sont transmis – et pour les mineurs, ce taux est même de 87 %. J’ajoute que notre politique active de diversification de la réponse pénale a permis d’accroître le nombre de mesures alternatives aux poursuites de 45 %, rendant la justice plus effective.

J’avais fait, l’an dernier, de la mise en place des bureaux d’exécution des peines, l’une de mes priorités pour 2006. Aujourd’hui, 67 ont été créés dans les tribunaux de grande instance. Cette mesure sera généralisée à tous les TGI d’ici la fin de l’année. Ils seront dotés des moyens humains et matériels nécessaires à leur mission. Leur implantation sera étendue aux tribunaux pour enfants afin d’assurer une réponse pénale plus efficace à l’égard des mineurs.

Je souhaite aussi poursuivre la politique de sécurisation des établissements pénitentiaires engagée depuis 2002. La France dispose désormais d’un des taux d’évasion les plus faibles d’Europe. Conforter ce résultat nécessite une adaptation permanente des dispositifs de sécurité. Le programme d’équipement des prisons en moyens de protection contre les intrusions par voie aérienne, tout comme l’installation de brouilleurs de portables, seront poursuivis. L’équipement de protection des personnels pénitentiaires sera, par ailleurs, renforcé.

La sûreté des juridictions est également une de mes priorités. Ainsi, 18 millions d’euros sont consacrés à ce programme dans le budget 2007. Dans les juridictions les plus sensibles, j’ai décidé de faire appel, en complément du gardiennage, à des professionnels particulièrement adaptés. Aussi, nous déploierons, aux côtés de réservistes de la police nationale, d’anciens surveillants de l’administration pénitentiaire. Les expériences menées à Rouen, Aix ou Toulouse ont montré combien leur savoir faire permettait de pacifier les juridictions. Ils seront 260 sur le terrain, à partir du début 2007. Par ailleurs, nous équipons progressivement les juridictions qui ne l’étaient pas, de portiques de détection, de vidéosurveillance et d’alarmes afin de réduire les risques d’agression.

Si la justice doit être ferme avec ceux qui se croient au-dessus d’elle, elle a également vocation à réinsérer dans la société les mineurs suivis par la PJJ et les détenus ayant purgé leur peine.

La PJJ voit ses crédits augmenter de +8,6% cette année. L’effort en faveur des centres éducatifs fermés ne se fera pas au détriment des prises en charge classiques. Les crédits du secteur associatif progressent de 43 millions d’euros, au bénéfice de l’ensemble des structures de prise en charge des mineurs.

Je souhaite également tout mettre en œuvre pour éviter les « sorties sèches » de prison, c’est-à-dire les sorties sans suivi ni soutien adapté. Ainsi, nous devons poursuivre nos efforts en faveur des mesures d’aménagements de peine, qui ont augmenté à 27 % entre 2003 et 2005. Aucune mesure ne doit être négligée, mais je souhaite insister cette année sur le bracelet électronique mobile. Nombre d’observateurs étaient sceptiques lorsque nous nous étions fixé l’objectif de 3 000 placements simultanés pour la fin de l’année 2007, mais nous sommes en train de gagner ce pari. L’expérimentation du bracelet électronique offre au juge la possibilité de concilier protection de la société, respect des victimes et réinsertion des condamnés à de longues peines ou présentant un risque de récidive.

Nous devons avoir, enfin, l’ambition de la réforme. Le débat sur la réforme de la justice a été un des temps forts de cette année. Je souhaite que l’année 2007 soit l’année des premières réponses à l’affaire dite d’Outreau. À la suite de ce drame, l’équilibre entre les droits de la défense et l’efficacité de la procédure nécessitait d’être repensé.

La justice est confrontée aujourd’hui à trois enjeux : lutter contre les détentions provisoires injustifiées, renforcer les droits de la défense, moderniser le régime de la responsabilité des magistrats. Mes propositions ont été adoptées il y a deux semaines par le conseil des ministres.

Cette réforme nécessitera en particulier la création de 70 emplois de magistrats et de 102 emplois de fonctionnaires de greffes. Les postes de magistrats seront pourvus par redéploiement et un recrutement de fonctionnaires devra être organisé. Ce projet comporte, comme pour tous les projets de loi. Une étude d’impact financier qui est estimé pour le ministère de la justice à 30 millions d’euros. Ce financement ne figure pas dans le PLF 2007 puisque le chiffrage précis de cette réforme en 2007 dépend du périmètre définitif de la loi et de son calendrier de mise en œuvre, mais, dès que la loi sera promulguée, le Gouvernement abondera en tant que de besoin les crédits du ministère.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des financesJ’aimerais que tous les projets de lois soient assortis d’une étude d’impact financier !

M. le Garde des Sceaux  Nous sommes exemplaires !

M. Jean-Paul Garraud, rapporteur pour avis de la commission des lois pour les programmes « Justice judiciaire » et « Accès au droit et à la justice » Le budget de la justice, qui s’élève à 6,271 milliards d’euros, connaît, comme cela a été dit, une progression notable : 5 % en 2007, et 38 % depuis 2002. La réforme de la procédure pénale, qui fait suite aux travaux de la commission parlementaire d’Outreau, a dégagé des objectifs clairs : assurer la cohérence de l’organisation territoriale de l’instruction, favoriser le travail en équipe, améliorer le contrôle de la chambre de l’instruction sur le déroulement des informations et sur la détention provisoire, et enfin renforcer le caractère contradictoire des expertises.

Un certain nombre de dispositions budgétaires ont déjà été prises pour répondre à ces préoccupations, notamment en faveur de la mise en place des pôles de l’instruction – sans revenir sur la présence d’un juge d’instruction par tribunal de grande instance. L’objectif est de créer 125 pôles et de développer la co-saisine. Dans ce schéma, la place du juge des libertés et de la détention peut susciter des interrogations – certains membres de la commission d’enquête en avaient d’ailleurs préconisé la suppression pure et simple. Le pôle de l’instruction pourrait avoir compétence pour l’ensemble de ce qui concerne la détention provisoire et donc remplacer le JLD, juge unique – et peut-être inique, selon l’adage. Beaucoup de députés s’intéressent à cette question et une évolution est peut-être envisageable. Quant au renforcement du contrôle par la chambre de l’instruction et à la réforme de l’expertise, en particulier psychiatrique, ce sont deux sujets primordiaux.

L’année dernière, nous étions très inquiets de l’évolution des frais de justice, qui augmentaient de 15 à 20 % chaque année. À la suite des travaux de la mission que vous avez instituée, sous l’autorité de secrétaire général de la Chancellerie, des efforts importants ont été réalisés. Un nouvel article du code de procédure pénale a notamment permis d’encadrer les tarifs des réquisitions des opérateurs téléphoniques, qui ont baissé de 40 % depuis. C’était une mesure indispensable à la maîtrise des frais de justice et le sujet semble réglé. Quant aux juges de proximité, leur nombre augmente – 530 étaient en activité au 30 juin – et il faut souligner que seules huit de leurs décisions ont été annulées par la Cour de cassation. Leurs compétences ont été accrues, aussi bien au civil qu’au pénal. En revanche, un problème semble se poser au sujet du remboursement de leurs frais de déplacement.

L’accès au droit et à la justice regroupe l’aide juridictionnelle, l’accès au droit et l’aide aux victimes. Ses crédits connaissent une progression notable, de 6,2 %. L’aide juridictionnelle, notamment, passe de 303 à 323 millions d’euros, avec une augmentation de six points de l’unité de valeur de référence pour la rétribution des avocats.

J’en viens à mes questions. La première concerne la dégradation du ratio entre le nombre des magistrats et celui des fonctionnaires des services judiciaires, qui était de 2,87 en 1992 et de 2,63 en 2005 alors que les missions confiées à la justice ont été alourdies. Il y a certes eu des créations de postes de magistrats, mais qui n’ont pas été accompagnées de postes de fonctionnaires. Or, un magistrat n’est rien sans son greffier ! Il est important de maintenir la corrélation entre les deux. Ma seconde question porte sur les juges d’application des peines : toutes les réflexions qui ont été conduites montrent qu’il est absolument indispensable d’augmenter leurs moyens, alors que les peines d’emprisonnement assorties d’un sursis avec mise à l’épreuve ont progressé de 20 % en quatre ans et que nous souhaitons développer les mesures de sûreté, telles que le bracelet électronique. Il convient donc de faire un effort dans ce domaine.

Les primes au mérite ont fait couler beaucoup d’encre, mais elles sont maintenant parfaitement entrées dans les mœurs. En revanche, il me semble tout à fait anormal que seuls les magistrats puissent en bénéficier, et pas les greffiers, alors qu’ils travaillent en équipe. Enfin, il me semble qu’il faut consacrer des moyens à l’amélioration de la gestion des ressources humaines du ministère. C’était une des grandes préoccupations de la commission parlementaire : sans vouloir en aucune façon mettre en cause le travail des agents, il faut parvenir à placer la bonne personne au bon endroit. Avant d’élaborer de nouvelles lois, il faut améliorer l’application de celles qui existe. Cette préoccupation rejoint celle de nombreux agents du ministère.

M. le Garde des Sceaux  La réforme qui a été présentée au conseil des ministres vise en particulier à améliorer le contrôle des chambres de l’instruction sur l’activité des juges d’instruction. En clair, dans toute la France, les assesseurs des chambres d’instruction seront des juges à plein temps. Les 42 postes que cela implique sont inscrits dès à présent dans la loi de finances. Cela devrait permettre de grands progrès dans le suivi des juges d’instruction. Avec ces moyens supplémentaires, les chambres de l’instruction vont perdre leur réputation, au demeurant injustifiée, de « chambres des évêques » et prendre toute leur place.

S’agissant de la présence d’un juge d’instruction dans chaque tribunal de grande instance à chambre unique, il va de soi qu’il est tout à fait inutile de prévoir une co-saisine dans les affaires simples. En revanche, les affaires criminelles ou complexes seront adressées aux pôles d’instruction – qui seront le plus souvent départementaux. La co-saisine est l’annonce de la collégialité : celle-ci est extrêmement difficile à mettre en place, sauf à accepter que les recrutements soient d’une qualité moindre qu’aujourd’hui. La mise en place de cette collégialité supposerait en effet le recrutement, d’un seul coup, de 250 magistrats supplémentaires. C’est une véritable difficulté pratique, pas seulement budgétaire, et toute suggestion sera la bienvenue.

Le problème de la proportion entre magistrats et fonctionnaires des greffes s’est surtout posé en 2005, pour la raison que la scolarité, cette année-là, est passée de douze à dix-huit mois. L’année 2005 a donc été une année très inconfortable pour beaucoup de juridictions qui n’ont reçu aucun greffier pour compenser les départs à la retraite, alors qu’elles connaissaient déjà un déficit. Aujourd’hui, les choses s’améliorent. Plus de 360 greffiers auront pris leurs fonctions cette année et 260 en 2007 – soit 160 de plus que de départs à la retraite. La situation sera parfaitement normale d’ici deux à trois ans, mais le pire est déjà derrière nous. Le ratio était en 1990 de 2,8 fonctionnaires des greffes pour un magistrat et il est de 2,6 aujourd’hui, mais nous arriverons très vite à trois pour un.

En ce qui concerne les juges d’application des peines, en 2002, il en manquait dans toute la France et tout le monde ne parlait que de ça. À l’époque, il y en avait 176. Aujourd’hui, ils sont 352 ! Il me semble que le nécessaire a été fait. Quant à l’extension des primes au mérite aux fonctionnaires, une première enveloppe d’un million a été inscrite en loi de finances à cet effet. Dans un premier temps, le directeur des services judiciaires en arrêtera la répartition, après consultation des organisations professionnelle.

Vous avez aussi évoqué la fusion des grands corps de fonctionnaires. Le ministère est divisé en quatre directions : administration pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse, direction des services judiciaires et administration centrale. La fusion des corps de catégorie A, qui ne comptent qu’un nombre limité d’agents, est engagée et celle des corps de catégorie B est à l’étude. Elle devrait aboutir en 2007. Le problème est plus difficile pour la catégorie C, qui regroupe 33 000 agents. Il ne paraît pas possible de réaliser la fusion dans les délais prévus par le protocole sur la fonction publique de janvier dernier. Une dérogation a été accordée au ministère pour réaliser la fusion en deux temps : il faudra parvenir à un maximum de deux corps de catégorie C par direction avant la fin de cette année, puis à deux corps pour l’ensemble du ministère d’ici au 1er janvier 2009.

Mme Michèle Tabarot, Rapporteure pour avis de la commission des lois pour les programmes « Administration pénitentiaire » et « Politique judiciaire de la jeunesse » L’examen des programmes « Administration pénitentiaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse » permet de constater les efforts sérieux que le Gouvernement a consentis dans ces domaines. Des inquiétudes s’étaient exprimées l’année dernière quant aux renforts en personnel rendus nécessaires par la montée en puissance des programmes immobiliers. Elles semblent dissipées aujourd’hui. Ce budget, conforme aux objectifs de la LOPJ, fait montre en effet d’ambition en matière de recrutement et de créations et réhabilitations d’établissements.

En ce qui concerne l’administration pénitentiaire, les crédits de paiement progressent de 5 %. Avec la création de 277 équivalents temps plein, le plafond de recrutement est porté à près de 2 000 emplois, ce qui permettra de doter premiers établissements du « programme 13 200 », qui seront livrés en 2007. Il est évident que les conditions de détention pourraient être meilleures mais je tiens très sincèrement à souligner, à la veille de la parution de l’enquête très médiatique de l’Observatoire international des prisons, l’effort mené par le garde des Sceaux pour la création et la réhabilitation d’établissements. C’est en effet la première réponse à apporter pour améliorer la situation des détenus. Mais on peut aussi saluer d’autres décisions, telles que la généralisation des unités de visite familiale, qui montre un effort important pour le maintien du lien familial, si important, le renforcement de la médiation, le développement des solutions alternatives ou la création d’établissements de courtes peines. Dans le contexte de l’après-Outreau, il faut aussi porter une attention toute particulière à la cohabitation entre condamnés et présumés innocents, à la mise en contacts de prévenus soupçonnés de faits lourds avec des détenus condamnés à de courtes peines. Il est essentiel de limiter au maximum cette mixité. Quelles mesures comptez-vous prendre dans ce domaine ?

Ma seconde question concerne la formation professionnelle en détention, qui est un élément essentiel de la réinsertion, mais aussi d’occupation des détenus. Des dysfonctionnements se sont produits cette année. Le ministère de la cohésion sociale a-t-il pris des engagements pour qu’ils ne se reproduisent pas ? Par ailleurs, la religion occupe une place importante dans l’univers carcéral : beaucoup de détenus y trouvent un espace de dialogue et d’échange. Or, il ressort des entretiens que j’ai eus avec les aumôniers nationaux que le maillage territorial est insuffisant. Face à la montée des intégrismes, qui est encore plus inquiétante à l’intérieur des prisons, et étant convaincue que les prosélytes ne peuvent occuper que le terrain laissé libre par les ministres officiels des cultes, il me semble que les aumôniers sont les meilleurs garants de nos valeurs républicaines. Qu’envisagez-vous de faire pour garantir la modération du discours religieux en prison ?

Le budget de la protection judiciaire de la jeunesse traduit lui aussi un effort conséquent de la part du Gouvernement, avec des renforts en personnel et l’ouverture de 28 centres éducatifs fermés. La direction de la PJJ a entrepris des efforts depuis 2003, aidée en cela par la mise en place de la LOLF, pour rationaliser son organisation et la gestion de ses effectifs, établir des outils de suivi statistique performants et diversifier ses modes d’intervention. Mais les délais de prise en charge des mineurs, malgré des progrès, restent trop longs. La part imputable à la PJJ dans ce retard diminue, et celle imputable aux magistrats augmente. Quoi qu’il en soit, 18 mois après le prononcer de la peine, un pourcentage élevé de mineurs ne l’ont toujours pas effectuée. Comment comptez-vous améliorer ce délai ?

Il apparaît, ensuite, que la très belle initiative que constitue le parrainage mérite d’être largement développée. Mais le dispositif souffre d’un manque de notoriété, et les éducateurs ne sont pas toujours en mesure de répondre aux interrogations des chefs d’entreprise. Est-il possible d’envisager l’intervention du service public de l’emploi ou des missions locales ? Enfin, je répète qu’il est très néfaste de mélanger des catégories de personnes très différentes, comme des enfants victimes et de jeunes délinquants. Comment faire pour les séparer et donner une réponse adaptée à chacun ?

M. le Garde des Sceaux : Les travaux lancés pour l’exécution de la LOPJ sont sans précédent. Ils permettront de créer 13 200 places en plus des 50 000 existantes. Par ailleurs, 5000 places devraient être totalement réhabilitées, notamment aux Baumettes, à la Santé, à Fleury-Mérogis. Les crédits de réhabilitation s’élèvent à 120 millions d’euros pour 2007 et représentent annuellement, sur la période 2002-2006, le double de ceux votés sous la précédente législature.

Nous disposerons donc d’un peu plus de 60 000 places, pour 56 000 détenus environ. Notre pays, avec 91 détenus pour 100 000 habitants, figure parmi ceux où la proportion de détenus est la plus faible – l’Allemagne compte 95 détenus pour 100 000 habitants, l’Italie et l’Espagne 97 et 98, l’Angleterre et le Portugal 134. Les proportions sont plus faibles dans les pays du Nord, mais il est difficile de nous comparer avec ces pays plus petits. Puissions-nous éradiquer cette idée reçue selon laquelle la France détiendrait un nombre record de détenus !

Par ailleurs, je suis favorable à ce que la presse fasse le point sur la situation dans les prisons, mais lorsqu’un metteur en scène se vante à la radio d’être « de parti pris », où est l’information ? Cette intervention était d’autant plus malheureuse qu’elle était très critique à l’égard de la France, ignorant l’apport des programmes Chalandon et Méhaignerie qu’il convient de saluer.

Je souhaite que soit mené, quelle que soit la couleur politique des prochaines majorités, un programme continu de réhabilitation et de construction, sans lequel les émissions de télévision et les discours tenus la main sur le cœur ne serviront guère. Beaucoup plus qu’en de beaux discours, je crois en une dépense budgétaire concrète qui nous permette de nous conformer aux réglementations du Conseil de l’Europe. À ce propos, je rappelle que M. Gil Robles, dont j’ai critiqué le rapport, ne représentait que lui-même, et non pas le Conseil de l’Europe, pour lequel il ne travaille d’ailleurs plus.

En tout cas, nul ne peut plus prétendre aujourd’hui que le budget de la justice soit ridicule. Nous avons fait beaucoup d’efforts ces cinq dernières années, et nous devons poursuivre sur la même voie, en évitant les coups d’accordéon, quand bien même la conjoncture économique ne permet pas toujours de se montrer très généreux. Pour la première fois, c’est le budget de la justice qui a bénéficié de la plus forte progression.

Par ailleurs, il n’est plus question de mélanger les courtes peines et les longues. Les primo-délinquants exécutant une courte peine seront hébergés dans des quartiers réservés, où des programmes de réinsertion en lien avec leur délit leur seront proposés. Deux de ces quartiers courte peine ouvriront dès 2007 à Fleury-Mérogis et à Toulouse. De surcroît, l’ambitieux programme immobilier en cours permettra de séparer les prévenus des condamnés.

S’agissant de la rémunération de la formation professionnelle en prison, qui dépend du ministère des affaires sociales, les crédits étaient passés de 13 à 10 millions entre 2005 et 2006. Je me suis battu pour retrouver 3 millions en 2006, et j’espère que cette décision permettra un ajustement pérenne. M. Borloo m’a assuré que les crédits nécessaires seraient dégagés cette année.

Pour ce qui est du prosélytisme, les 900 aumôniers sont en grande majorité catholiques, avec une importante minorité protestante, et seulement quelques rabbins et aumôniers musulmans. Je me réjouis que le Conseil français du culte musulman ait nommé un aumônier national des prisons, en la personne de M. Talabi. Je croyais, à mon arrivée au ministère, que les aumôniers étaient des prêtres ou des imams. Il n’en est rien – ce sont des laïques pour la plupart. Les choses se passent bien en général, même s’il existe une centaine de détenus islamistes à tendance dangereuse, dont le bureau du renseignement créé au sein de l’administration pénitentiaire, connaît très bien le passé, l’histoire, les relations, ce qui permet de ne pas commettre d’erreur lors des placements en prison. De surcroît, les personnels pénitentiaires sont formés à la pratique des cultes et à la lutte contre les prosélytismes en établissement.

Le délai de prise en charge des mineurs par la PJJ est resté quasi constant depuis 2001, alors que le nombre de mesures a augmenté de 25 %. Le nombre de mesures en attente de plus de quinze jours a diminué de 30 %. Le délai moyen de prise en charge des investigations est de onze jours. Selon une enquête lancée auprès des magistrats des six cours d’appel, 71 % des magistrats sont satisfaits, voire très satisfaits des conditions de prise en charge pour l’ensemble des investigations. Les délais de placement dans un foyer ou une famille d’accueil sont inférieurs à trois jours en moyenne. La réduction des délais est au cœur des préoccupations de la direction de la PJJ. Cet objectif assigné à ses services figure du reste parmi les indicateurs de performance. La prochaine création de bureaux d’exécution « mineurs » devrait permettre de prendre en charge immédiatement les mineurs qui le nécessitent. Les moyens inscrits au projet de loi de finances permettront à la PJJ de réduire de 150 le nombre des emplois vacants, notamment dans les services de milieux ouverts.

Je vous remercie d’avoir abordé la question du parrainage, qui me tient particulièrement à cœur, puisque c’est un projet que j’ai lancé à partir d’une expérience que j’ai menée dans la Loire. Nous comptons aujourd’hui 700 parrains. Le Premier ministre a réuni cette semaine, sur ma suggestion, l’ensemble des préfets, des recteurs, des procureurs généraux, des procureurs, qui ont beaucoup applaudi le PDG du groupe La Revue fiduciaire, M. de Lavilleguérin, venu leur présenter le dispositif. M. Guy Geoffroy m’a appris hier que le jeune qu’il parrainait venait de décrocher un contrat d’embauche. Nous pouvons faire des merveilles ! Ainsi, Pierre Gagnaire, grand chef qui s’est illustré dans mon département, a écrit à tous les chefs des Relais et Châteaux, de sorte que c’est ce réseau qui, contre toute attente, recrute le plus de jeunes sous main de justice ! Le jeune filleul de Pierre Gagnaire est aujourd’hui en apprentissage chez Gagnaire et y fait ses preuves !

Quant à la séparation des mineurs délinquants et des mineurs victimes au sein des établissements, je rappelle que les centres éducatifs fermés, tant critiqués à leur création, sont un véritable succès. Imaginez que plus de cinquante jeunes passent environ six mois, renouvelables une fois, dans un milieu fermé, sous l’autorité de pédagogues, d’éducateurs de la PJJ, de surveillants, et que les juges des enfants n’en revoient pas plus d’un sur deux à la sortie. Ce résultat est sans précédent ! Le séjour en établissement doit avoir la vertu de permettre à un jeune de faire le point, de faire retraite, se calmer. Une fois apaisé, il peut enfin trouver avec ses éducateurs le moyen d’être heureux, de trouver un métier. Il est alors envoyé faire des stages – rémunérés.

Les centres d’éducatifs renforcés complètent la palette du dispositif, avec les établissements pour mineurs qui fonctionneront dès cet été. Par ailleurs, les mineures des foyers de l’école Le Nôtre et de Saint-Quentin, qui ont commis des viols et des actes de barbarie sur d’autres mineures de ces foyers, étaient toutes placées au titre de l’assistance éducative. Elles sont donc à la fois victimes et délinquantes.

Afin de prendre en compte cette complexité, le projet de loi sur la protection de l’enfance prévoit que les mineurs et les jeunes majeurs doivent être accueillis dans des unités de vie distincts « en fonction du projet individualisé éducatif de chacun d’eux » et que les établissements doivent garantir leur « sécurité ».

M. Pierre Albertini, rapporteur spécial de la commission des finances : Je ne reviens pas sur les chiffres : je rappellerai simplement que l’effort de rattrapage se poursuit. Cette action publique a été trop longtemps négligée, et nous souhaitons tous que cet effort soit poursuivi.

Permettez-moi tout d’abord d’aborder la question de l’exécution de la loi d’orientation et de programmation pour la justice. Selon le rapport rendu en octobre 2006, « l’exécution est globalement respectée pour les crédits et dans une moindre mesure pour les créations d’emploi ». Ce rapport extrapole les données arrêtées à 2005 pour les projeter sur 2006 et 2007.

Le taux d’exécution sera donc satisfaisant pour les crédits d’investissement, notamment grâce à la montée en puissance des contrats de partenariat public-privé. Il en ira de même des autres crédits.

En revanche, l’exécution sera insuffisante en matière de créations d’emplois. L’objectif initial ne sera notamment pas atteint pour les fonctionnaires des services judiciaires puisque le taux d’exécution prévisible de cette catégorie sera de 58 %.

Au-delà des chiffres, la justice s’apprécie aussi sur un plan qualitatif. En l’espèce, les délais de traitement des affaires n’ont cessé de s’améliorer, de même que l’effectivité de la réponse pénale, grâce notamment à la généralisation des bureaux d’exécution.

Cela étant, les objectifs sur le nombre de places en centres éducatifs fermés ou en centres d’éducation renforcée ne seront pas atteints.

Quant aux juges de proximité, nous devons revoir l’objectif. Alors que 3300 juges de proximité avaient été annoncés, 530 sont en fonction aujourd’hui. Nous serons donc très loin de l’objectif initial, qui avait du reste été fixé de manière assez pifométrique, et très au-delà des besoins des juridictions. Mieux vaudrait se concentrer sur l’amélioration de la formation des juges de proximité déjà en place.

Concernant la mise en œuvre de la LOLF, sans revenir sur le rapport que j’ai présenté à la commission des finances le 5 juillet dernier, je voudrais signaler quelques améliorations, et quelques difficultés persistantes.

Il convient tout d’abord de saluer, au sein du ministère de la justice, la création du secrétariat général, ainsi que l’instauration d’un dialogue de gestion assez fructueux avec les contrôleurs financiers. Enfin, la quasi-maîtrise de l’évolution des frais de justice est à mettre à l’actif des efforts de l’administration centrale et des chefs de cour.

Certaines difficultés subsistent cependant.

Tout d’abord, la charge de travail des services administratifs régionaux a considérablement augmenté, sans que leurs moyens en personnels ne suivent. Nous devons mener une réflexion approfondie sur les moyens et le statut de ces services. La gestion déconcentrée du personnel reste problématique, ce qui ruine l’idée de fongibilité des crédits.

Enfin, les services du ministère de l’économie et des finances devraient à leur tour s’imposer une petite révolution culturelle. La justice a fait beaucoup d’effort pour s’imprégner des règles de gestion de la LOLF, mais je n’en dirai pas autant des services du ministère de l’économie et des finances.

Dès lors qu’un budget opérationnel de programme est validé, un véritable contrat de confiance doit s’établir entre le ministère de l’économie et des finances et les gestionnaires responsables du programme. Or, en dépit de cette validation, les verrous se maintiennent, certains aspects de gestion sont recentralisés, ce qui est contraire à l’esprit de la LOLF.

Je terminerai par quelques observations, à commencer par l’évolution des dépenses de l’aide juridictionnelle. Nous sommes tous attachés à ce que l’aide juridictionnelle permette aux plus modestes d’accéder au droit, mais 886 000 admissions à l’aide juridictionnelle ont été enregistrées en 2005, et nous ne pourrons faire l’économie d’une réflexion sur un éventuel filtrage des demandes déposées au titre de l’aide juridictionnelle.

Par ailleurs, le secteur associatif habilité au sein de la PJJ souffre d’une sous-budgétisation récurrente.

Concernant les prisons, la situation devrait s’améliorer dans les prochaines années. J’ai été très sensible à la baisse de la détention provisoire ces derniers mois, mais je crains que la réforme envisagée ne soit homéopathique. Il faudrait aller plus loin en matière de santé, de travail dans les prisons et de lutte contre les sorties sèches.

Je salue la mission confiée au médiateur de la République sur le contrôle des prisons, et la généralisation des délégués du médiateur. Le respect des normes adoptées par le Conseil de l’Europe en janvier 2006 est un vrai défi à relever.

Il est enfin nécessaire de faire évoluer de manière concomitante les primes des magistrats de la cour de cassation et celles des magistrats du Conseil d’État et de la Cour des comptes. Je sais que le Conseil d’État et la Cour des comptes, indûment soustraits à la mission « Justice », bénéficient d’une proximité singulière avec le Premier ministre, les cabinets ministériels et les directeurs d’administration centrale, mais je pense que les magistrats de la Cour de cassation n’ont pas moins de mérite que les autres et que leurs primes doivent évoluer au même rythme. Je sais que vous y êtes sensibles, mais je tenais à le répéter, dans un souci qui, je le souligne, est d’équité et non de corporatisme.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances : Je poserai quatre questions complémentaires au nom de la commission des finances.

S’agissant tout d’abord de la LOLF, nous nous interrogeons sur le caractère opérationnel de la fongibilité asymétrique, notamment pour les chefs de cour qui sont nombreux à ne pas jouer de cette faculté ouverte par la loi.

Par ailleurs, les indicateurs du programme 166, qui est le programme principal, sont plutôt quantitativistes – délais, nombre de dossiers traités etc. Serait-il possible d’y introduire du qualitatif ? L’exercice semble difficile, mais les chefs de cour que nous avons rencontrés y sont prêts.

Pour ce qui est des moyens, ne pourrait-on profiter des nouvelles technologies, notamment la visioconférence, pour éviter les transferts de détenus, particulièrement lourds et coûteux ?

Enfin, la commission des finances s’est obligée à un droit de suite sur les travaux réalisés par les missions d’évaluation et de contrôle. Marie-Hélène des Esgaulx, sous l’autorité de Yves Deniaud et Augustin Bonrepaux, a conduit un travail sur la prise en charge des demandeurs d’asile. À cette occasion est apparu le problème de la salle d’audience de Roissy. Le président de la commission des finances a interrogé le Premier ministre le 12 avril, mais nous n’avons pas eu de réponse. Nous avons répété en vain notre question le 5 juillet. La commission, en examinant les crédits de la mission concernée, il y a quelques jours, a adopté une observation en la matière. Quand la salle d’audience de Roissy sera-t-elle mise en service ? Le rapport de la MEC sur ce même sujet a par ailleurs conclu à la nécessité d’améliorer l’indemnisation des médecins et interprètes requis d’office. Qu’en sera-t-il ?

M. le Garde des Sceaux : Vous êtes très aimable de me poser des questions qui relèvent du Ministre de l’Intérieur… (Sourires)

S’agissant de l’exécution de la LOLF, nous atteignons presque les 80 %, soit 2,8 milliards d’euros et 7 700 emplois dont 776 de magistrats. Peu de lois de programmation ont été respectées dans ces proportions.

Par ailleurs, des délais anormalement longs de traitement des affaires sont toujours constatés, mais les délais moyens ont été réduits de 28 % dans les juridictions du premier degré.

Le taux de réponse pénale a augmenté de dix points, et les mesures alternatives aux poursuites de 45 %. Les 13 200 nouvelles places de prison permettront de réduire l’encombrement carcéral, et le calendrier est tenu.

Pour ce qui est des normes pénitentiaires européennes, que nous avons adoptées ainsi que les 45 autres États membres du conseil de l’Europe en janvier 2006, je rappelle qu’elles n’ont pas de valeur impérative, mais nous les faisons nôtres, et nous avons distribué à nos personnels une charte d’action de l’administration pénitentiaire qui en rappelle les orientations, concernant notamment le principe de l’encellulement individuel et des 10 % de cellules à trois pour les détenus qui ne pourraient supporter la solitude absolue. J’ai visité à Fleury-Mérogis une cellule réhabilitée – les toilettes et la douche sont à l’intérieur de la cellule, et une croix en guise de fenêtre permet de ne plus donner cette impression de soupirail.

J’en viens au problème de l’admission à l’aide juridictionnelle. J’ai annoncé dernièrement aux bâtonniers 6,6 % d’augmentation. Ils ont salué cette avancée par rapport aux années précédentes, mais je n’ai pas reçu le même accueil en province ! Il est vrai que le chiffre de 886 000 admissions est énorme par rapport aux autres pays, surtout si l’on considère que cela rend d’autant plus faible la rémunération pour chaque affaire. Mais une progression annuelle de 15 à 20 % des crédits ne sera pas tenable très longtemps. C’est pourquoi nous devons poursuivre le dialogue avec les avocats, ainsi qu’avec les assureurs dans le cadre de l’assurance protection juridique. Mais ces derniers veulent faire travailler leurs propres avocats, alors que nous prônons la liberté de choix du défenseur. J’espère avoir gain de cause, d’autant plus que cette solution ne coûterait pas plus cher aux assureurs, qui octroieraient une somme forfaitaire à leurs assurés.

À propos des sorties sèches, je veux insister sur le rôle des centres de visites familiales, qui va bien au-delà de l’aspect humain, car il n’est pas possible de réinsérer quelqu’un qui a perdu tout contact avec sa famille. Oui, la réinsertion sociale et humaine passe par la réinsertion familiale. Il est donc essentiel, pour les personnes condamnées à de longues peines, de pouvoir passer deux à trois jours dans une petite maison, certes au sein de l’établissement pénitentiaire, mais avec sa femme et ses enfants. Chacun reconnaît que les détenus s’en trouvent changés psychologiquement, que leur désir le plus cher est de revivre cette scène au plus vite, que leur réinsertion ultérieure en est grandement facilitée. C’est pourquoi de tels centres ont été créés dans toutes les nouvelles prisons, et qu’un système moins perfectionné mais équivalent a été institué dans les vieux bâtiments des centrales.

Dans la mesure où les règles du Conseil de l’Europe imposent un contrôle externe sur les prisons il appartiendra désormais, en plus des nombreuses commissions existantes et du parquet, au médiateur de la République, autorité indépendante, de vérifier si les choses se passent comme les textes le prévoient.

Même si elle relève surtout du ministère de l’intérieur, j’en viens à la question de Roissy. Le projet a un peu tardé pour deux raisons. Le ministère de l’intérieur a dû régler une situation financière et immobilière complexe liée à la zone d’attente de Roissy, avant de pouvoir lancer la construction de cette annexe dédiée à la justice. Je rappelle qu’il doit s’agir d’une véritable annexe du palais de justice de Bobigny respectant à ce titre toutes les caractéristiques d’un lieu de justice : ouverture au public et accueil de ce public avec possibilité de tenir des audiences en parallèle, visioconférence, liaison informatique adéquate avec le TGI de Bobigny.

Aujourd’hui, ces problèmes de principes sont réglés. Le ministère de l’intérieur prévoit de notifier le marché de conception-réalisation en juillet 2007 et de livrer les locaux fin 2008. Le coût de l’investissement, intégralement à sa charge, est de 1,5 million d’euros.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances Les transfèrements coûtent 1,3 million…

M. le Garde des sceaux – Je vous répète que tous les tribunaux seront équipés de systèmes de visioconférence, de même qu’une quarantaine d’établissements pénitentiaires. Ce dispositif va être généralisé, et nous allons ainsi réaliser des économies importantes. Je suis tout à fait prêt à ce que mon ministère assume la charge de ces transfèrements. Encore faudrait-il prévoir, avec l’accord de Bercy, de répartir sur quelques années la charge budgétaire que représenteraient les 2000 surveillants supplémentaires nécessaires au remplacement des policiers et gendarmes.

M. Michel Vaxès – Dans votre réponse sur la loi de programmation, vous avez en fait confirmé qu’il manquera 2 milliards sur les 8 milliards d’euros annoncés et près de 3000 emplois sur les 10 000 promis.

Par ailleurs, lors de la présentation de votre projet à la presse, vous vous êtes félicité du programme de maîtrise des frais de justice. Pourtant, il y a six mois, les journaux faisaient état de retards considérables dans le paiement des jurés, des experts et de centaines de milliers de factures. Votre satisfaction tient-elle au fait que les retards dans ses dépenses sont désormais rattrapés ?

Dans son rapport de janvier dernier sur la gestion des prisons, la Cour des comptes a souligné que les dysfonctionnements dans la prise en charge par les services pénitentiaires d’insertion et de probation des personnes qui leur sont confiées, en milieu tant ouvert que fermé, s’expliquaient principalement par les problèmes d’effectifs de ces services. En effet, la priorité donnée à la sécurité et l’insuffisance des moyens ont des répercussions sur les résultats de la mission d’aide à la réinsertion. La plus grande partie des crédits sera de la sorte absorbée par la garde et le contrôle des personnes placées sous main de justice. N’est-il pas dommageable ce que votre budget ne prenne pas en compte des observations de la Cour des comptes ?

Enfin, on annonce pour le mois de décembre prochain un certain nombre de mouvements d’avocats à propos de l’aide juridictionnelle. Mais, au-delà de la demande de réévaluation des prestations dont vous avez reconnu la légitimité, c’est une véritable réforme en profondeur de l’aide juridictionnelle qui apparaît nécessaire. Êtes-vous prêt à la faire figurer dans le projet de loi que vous nous présenterez dans les prochaines semaines ?

M. Christophe Caresche – Ce budget intervient quelques mois après les travaux de notre commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau, au sein de laquelle un consensus assez fort s’est dégagé sur la nécessité de donner davantage de moyens à la justice. Or, même si je reconnais qu’un effort est accompli, on est encore loin du compte et les objectifs de la loi d’orientation ne sont que partiellement atteints.

Il est vrai que 160 emplois supplémentaires de magistrats sont prévus, dans la continuité des créations des deux années antérieures, mais nous aimerions savoir s’il s’agit effectivement de postes supplémentaires ou de la simple compensation des nombreux départs en retraite prévus.

S’agissant des greffiers, je rappelle qu’il n’y a pas eu de concours en 2006 et qu’il n’y aura pas de créations de postes en 2007. Ceux dont vous avez parlé correspondent donc simplement à des fins attendues de scolarités.

Pour la justice de proximité, j’ai noté comme M. Albertini que l’objectif des 3 300 recrutements d’ici 2007 ne sera pas atteint, puisque 585 seulement étaient intervenus au 15 octobre dernier. L’écart est important.

On le voit, beaucoup reste à faire pour donner à la justice des moyens correspondants à ses besoins et aux préoccupations mises en exergue par l’affaire d’Outreau.

En ce qui concerne les prisons et l’administration pénitentiaire, ne faisant pas partie de ceux qui mènent un combat idéologique contre la prison, il me semble que le débat porte moins sur le nombre de places de détention que sur les conditions d’accueil des détenus. L’enquête intéressante menée par l’Observatoire international des prisons confirme les conclusions d’une précédente commission d’enquête parlementaire. On observe que l’essentiel des crédits va à la sécurisation. On peut le comprendre dans la mesure où le taux de 158 agressions contre les personnels pour 10 000 détenus reste particulièrement élevé, l’objectif de la loi de programmation de passer en 2005 à moins de 100 agressions pour 10 000 détenus étant loin d’être atteint. Mais la dégradation des conditions de sécurité est sans conteste liée aux mauvaises conditions d’incarcération, qui favorisent l’agressivité et la violence. Aussi, plus on incarcère, plus les difficultés augmentent.

Bien sûr, il est nécessaire de moderniser un certain nombre d’établissements et de créer des places nouvelles qui se substituent à celle des établissements dégradés, mais il faut aussi développer considérablement les alternatives à la prison et tous les moyens qui permettent de faire en sorte que l’incarcération ne soit plus l’unique voie de la sanction. Nous avons sur ce point une divergence avec la majorité, car le dispositif de peine-plancher que le ministre de l’intérieur veut introduire dans son projet sur la prévention de la délinquance se traduira à l’évidence par une inflation carcérale.

La situation préoccupante des détenus en prison apparaît clairement dans les indicateurs du document budgétaire. L’indicateur 3-1, page 80, montre ainsi une prévision de dégradation du pourcentage des personnes condamnées placées sous écrou bénéficiant d’un aménagement de peine.

M. le Garde des Sceaux – Je ne sais pas quel savant a rédigé cette partie du document, qui est absolument incompréhensible. Ce qui compte, ce n’est pas la prévision mais ce qui est effectivement réalisé. Retenez donc plutôt ce chiffre : 15 000 aménagements de peine en 2002, 20 000 aujourd’hui.

M. Christophe Caresche – Que je sache, c’est bien votre ministère qui affiche des prévisions en retrait par rapport aux réalisations de l’année antérieure et cet indicateur montre quand même que la situation se dégrade. C’est aussi le cas de l’indicateur 6-1, page 82, puisque le pourcentage des détenus bénéficiant d’une formation générale et professionnelle – ce qui est quand même un élément important de la réinsertion – passe d’une réalisation de 29,7 % en 2005 à une prévision de 27,4 % en 2006.

Plus accablant encore, l’indicateur 6-3 sur le pourcentage de détenus bénéficiant d’un projet de préparation à la sortie, qui permet en fait de mesurer le taux de sorties sèches, passe de 31,7 % en 2005 – ce qui marquait un effort important par rapport à une prévision de 21 % - à 22 % en prévision en 2006.

M. Warsmann a fait un rapport intéressant sur cette question et nous nous accordons tous sur la nécessité qu’il y ait moins de sorties sèches. Ce recul est donc préoccupant. Et si l’on accompagne moins les détenus à l’intérieur comme en dehors des prisons, cela s’explique bien par le fait que les moyens sont concentrés sur les constructions et sur la sécurisation.

M. Étienne Pinte – Au printemps dernier, après le séisme provoqué par l’affaire dite d’Outreau, j’ai pris la décision de m’immerger plusieurs jours dans le fonctionnement du tribunal de grande instance de Versailles. Ce fut une expérience enrichissante et instructive.

De tous mes échanges avec les magistrats et les personnels, je tire d’abord la conclusion que nous pourrions débattre sans fin du bien-fondé d’une réforme de la justice. En effet, pour certains magistrats, une remise à plat de notre système judiciaire s’impose ; pour d’autres appliquer les textes existants serait amplement suffisant ; d’autres encore se demandent si une telle réforme serait bien opportune à quelques mois d’échéances électorales importantes. Il me semble aussi que nous devons garder à l’esprit que l’inflation législative entraîne une grande insécurité juridique et un risque élevé d’erreur.

Surtout, une réformette comme un toilettage de fond de notre institution judiciaire n’auraient aucun sens si les moyens budgétaires nécessaires n’étaient pas engagés. En effet, il m’apparaît clairement, après ce que j’ai vu et entendu, que ce dont souffre le plus notre justice pénale, c’est du manque de moyens, tant humains que matériels.

Les efforts de ce projet de loi de finances en faveur de la justice ne m’ont pas échappé. Mais le retard est important et notre pays occupe un rang très médiocre en Europe au regard de la dépense par habitant en faveur de la justice.

Si les magistrats sont en nombre insuffisant, ce sont surtout les personnels de greffe qui manquent cruellement, et chaque magistrat a ainsi un nombre très élevé de dossiers à traiter – plus de 100 à Versailles. Les locaux sont si exigus que les dossiers s’entassent dans les bureaux et les couloirs. De ce point de vue, j’ai observé que dans la présentation de votre programme patrimonial pour 2007, vous n’aviez pas, monsieur le garde des Sceaux, cité le commencement des travaux pour la cour d’appel et la cour d’assises de Versailles, que vous aviez pourtant promis l’an dernier. Le matériel fait également défaut : comment photocopier des dossiers de plusieurs centaines de pages quand on ne dispose pas d’assez de photocopieurs ?

Cette insuffisance des moyens à des conséquences redoutables : une justice pénale lente – quel sens à un jugement rendu des mois, voire des années après les faits ? –, une inexécution trop fréquente des peines – quelle est alors la valeur de la peine prononcée ?

Face à ce constat, je m’interroge sur les priorités de notre société : quelle place accordons-nous aux victimes d’infraction ? Quels moyens consacrons-nous à la réinsertion des délinquants ? Quel regard portons-nous sur les détenus ? Il est préoccupant que la justice ne soit pas encore l’une nos préoccupations principales alors que la France est considérée comme un État de droit plutôt exemplaire. Or, lorsque la crédibilité de notre justice est entachée, c’est l’une des fondations de notre démocratie qui vacille.

M. Émile Blessig – Si la LOLF a été à l’origine d’une nouvelle approche budgétaire, il m’apparaît que la culture des indicateurs peut-être la meilleure comme la pire des choses et qu’il est impératif de faire la différence entre les indicateurs de situations et les indicateurs d’évolution.

Ainsi, si l’on parle souvent du nombre des personnes détenues, j’aimerais pour ma part connaître le nombre de celles qui entrent et qui sortent de prison chaque année, ce qui permettrait une analyse des flux.

Nous avions voté en 2000 une loi assez générale instituant un mécanisme de sas de sortie par le biais d’une nouvelle procédure d’aménagement de peine. J’aimerais savoir comment a évolué la situation, quelles ont été les mesures prises et quelle est la mobilisation des services à la suite du rapport Warsmann du 15 juin 2005 et du rapport thématique de la Cour des comptes de janvier 2006.

Je souhaite également témoigner, à propos de la mission justice judiciaire, d’une évolution culturelle intéressante dans le ressort de la cour d’appel de Colmar où l’ensemble des parlementaires ont rencontré le procureur général, le premier président et tous les bâtonniers pour faire le point sur la prise de conscience de la nécessité de la maîtrise budgétaire mais aussi sur les problèmes auxquels sont confrontés les auxiliaires de justice et les magistrats.

Je souhaite aussi insister sur la nécessité pour le service public de la justice en Alsace-Moselle de tenir compte de la mise en œuvre du droit local – livre foncier, registre du commerce, registre de nantissements – dont on estime qu’elle mobilise 25 % des effectifs. Dans ces conditions, le déficit en fonctionnaires est estimé à 20 postes équivalents temps plein, ce qui pose un véritable problème de gestion du personnel. Or cela n’a pas été pris en considération dans votre budget.

Afin de pérenniser les postes de fonctionnaires de catégorie C et d’éviter une rotation préjudiciable au bon fonctionnement des juridictions, il serait utile d’organiser rapidement des recrutements locaux.

J’en viens enfin aux frais liés aux dépenses de sécurité des bâtiments judiciaires et à l’organisation des procès exceptionnels. Dans le ressort de la cour d’appel de Colmar, il faudra ainsi organiser en 2007 trois grands procès en dehors des locaux judiciaires traditionnels : le procès en appel du crash du mont Sainte-Odile, le procès de la catastrophe du parc de Pourtalès et le procès de l’affaire Bodein. Pour ce dernier, le seul poste des frais de gardiennage et de mise en sécurité s’élève à 166 000 euros pour le site de Strasbourg. Il me semble donc que ces frais exceptionnels devraient faire l’objet d’une démarche particulière.

Mme Marylise Lebranchu – Je crois que nous avions réalisé en 2000 et en 2001 un travail assez consensuel sur la façon, avant même d’en venir à l’adoption de nouveaux textes, de faire mieux fonctionner l’institution judiciaire. Il en ressortait qu’il fallait pour cela réussir d’une part à avoir, compte tenu des nombreux détachements, 8000 magistrats effectivement en poste, d’autre part à parvenir à un taux d’accompagnement de trois réfugiés les fonctionnaires pour un magistrat. Faute d’y être parvenu, on n’a pas su créer les conditions propices à d’autres réformes.

Car je crois – et c’est un reproche que nous pouvons partager - qu’à coup de petites réformes, même si elles s’accompagnent d’aujourd’hui heureusement d’études d’impact, on arrive à un empilement qui rend illisibles les conditions dans lesquelles l’institution s’adapte à ce qui lui est demandé.

En ce qui concerne la situation dans les prisons, si, compte tenu des programmes de construction-réhabilitation, le taux d’occupation est de près de 99 % dans les centres de détention, il est inférieur à 80 % dans les centres de peines aménagées et il atteint 144 % dans les maisons d’arrêt, cinq ou six d’entre elles dépassant même les 200 %. Comment s’étonner dans ces conditions que notre volonté de réduire le nombre des sorties sèches ne soit pas suivie d’effet, puisque c’est dans les maisons d’arrêt que s’effectue la très grande majorité des petites peines, que c’est aussi là que la grande criminalité recrute et que nous sommes bien incapables d’y prévoir un quelconque accompagnement. Dans ces conditions, parvenir à 10 000 détenus de moins permettrait une meilleure prise en charge et des sorties de qualité, comme dans les centres de détention.

En ce qui concerne les mineurs et les jeunes majeurs criminels, je pense qu’il faudrait que la sanction conduise à une reconnaissance de la citoyenneté et de la responsabilité. Les centres éducatifs, fermés ou non, peuvent jouer un rôle important. Nous manquons de centres de placement immédiat. Si nous sommes tous poussés à adopter les peines plancher pour les jeunes récidivistes, c’est aussi parce qu’on ne sait pas comment prendre en charge ceux qui ne vont heureusement pas en détention provisoire et qui sont aussi dangereux pour eux-mêmes que pour les autres.

Pour toutes ces raisons que je suis très attaché à ce que nous ayons un grand débat pénitentiaire.

M. Jérôme Lambert – Comme Étienne Pinte, je me suis immergé dans un TGI – à Angoulême pour ma part - et je veux ici marquer ma confiance envers les magistrats qui font, dans des conditions difficiles, un travail de qualité. Je ne reviendrai pas à ce propos sur la question des moyens, que mes collègues ont abondamment traitée.

Je souhaite plutôt savoir, monsieur le garde des Sceaux, si vous poursuivez la réflexion sur la réorganisation de la carte judiciaire et sur la disparition de certains petits tribunaux. Je ne vous entends plus en parler, tant mieux, mais j’aimerais être définitivement rassuré…

Par ailleurs, pour m’être rendu à la prison d’Angoulême, je m’étonne que, dans ce bâtiment qui a été rénové, les détenus se trouvent encore parfois à plus de six par cellule, ce qui crée bien sûr des situations très difficiles.

J’aimerais enfin que vous soyez plus précis dans votre analyse sur la revalorisation de l’aide juridictionnelle. Dans le ressort d’Angoulême, de nombreux justiciables ne disposent que de revenus très modestes et les revendications des avocats paraissent amplement justifiées.

M. Pierre Cardo – Je souhaite pour ma part insister sur la nécessité d’impliquer un réseau local dans l’accompagnement des jeunes qui sont souvent rejetés par leurs parents pendant leur séjour en prison et même à leur sortie. Il paraît impératif d’organiser un maillage du territoire par de tout petits établissements, qui permettent ce travail de proximité.

S’agissant par ailleurs des CER et des CEF, je m’interroge sur l’idée que l’inspection soit menée par les services de la PJJ eux-mêmes : est-il souhaitable qu’un malade fasse lui-même le diagnostic et rédige l’ordonnance ?

Pouvez-vous à ce propos nous donner des indications sur ce qui fait que l’on envoie des jeunes plutôt en CEF, en CER ou dans le système carcéral ? Cela tient-il au projet ou au nombre de places ?

M. Pierre Albertini, rapporteur spécial – J’ai une toute dernière question : peut-on espérer que sera déposé avant la fin de la législature un projet de loi relatif aux majeurs sous tutelle ou curatelle, sujet sur lequel la commission des finances avait demandé un rapport à la Cour des comptes ?

M. le Garde des Sceaux – MM. Vaxès et Caresche ont tous deux parlé chiffres, avec toutefois une approche légèrement différente l’un de l’autre. La LOPJ est bien réalisée à 80 % : 2,8 milliards d’euros sur 3,5 milliards, ainsi qu’il ressort de tous les bons ouvrages sur le budget… Quant au SPIP, il a gagné un millier de fonctionnaires, et 186 millions d’euros sont consacrés à la réinsertion, soit une augmentation de 4 % et non une diminution.

M. Caresche, après avoir porté une appréciation plutôt positive, dont je le remercie, sur le budget, a soulevé la question du remplacement des magistrats partant à la retraite. C’est un grand motif de préoccupation, car ce sont les « classes pleines » qui approchent de l’âge fatidique – et cela vaut, d’ailleurs, pour toute la fonction publique. Je m’en suis ouvert à Bercy dès l’an dernier ; nous saurons demain ou après-demain si j’ai été écouté… C’est une raison de plus pour être très circonspect sur la collégialisation, car il ne sera pas possible de recruter subitement un nombre très accru de magistrats de qualité. Au demeurant, les magistrats de la cour d’appel de Rennes, auxquels j’ai rendu visite l’autre jour, m’ont tous dit qu’ils manquaient surtout de greffiers, et j’indique à ce propos qu’il n’y a pas eu d’année sans concours : le passage de la scolarité de douze à dix-huit mois a simplement retardé l’entrée en fonction des nouvelles recrues, et le taux souhaitable sera atteint d’ici un ou deux ans.

S’agissant des alternatives à l’incarcération, je conviens à nouveau que les tableaux figurant dans le « bleu » ne sont pas clairs. S’il y a un tel écart entre les prévisions et la réalité, c’est parce que nous avions anticipé un nombre de détenus plus élevé qu’il ne l’a été : 60 000 au lieu de 56 000. Au total, ce sont 20 000 personnes qui bénéficieront de ces alternatives en 2007, contre 15 000 en 2002. Le bracelet électronique est expérimenté dans le ressort de deux cours d’appel, le sera bientôt dans une troisième, avant d’être généralisé. Quant au nombre de mineurs en détention, il est de 560, soit quelque 300 de moins qu’en 2002.

Je m’en suis tenu, concernant l’enquête de l’Observatoire international sur les prisons, à une stricte neutralité. Il faut savoir que cette association, fondée par un ancien détenu pour crime, est de quelque parti pris, ce qui explique qu’aucun surveillant n’ait accepté d’y répondre. J’ai d’ailleurs dû, pour le faire distribuer dans les établissements, recourir au Médiateur de la République, qui s’est chargé de cette mission avec le talent que chacun lui connaît.

La surpopulation dans les maisons d’arrêt, dénoncée à juste raison par Mme Lebranchu, est évidemment insupportable, mais grâce à l’effort de construction et de modernisation que nous faisons, elle devrait avoir disparu d’ici à 2008 ou 2010 – ce qui permettra à mon successeur de couper quelques rubans…

Je remercie et félicite MM. Pinte et Lambert, au nom de l’institution judiciaire, de s’être volontairement immergés un certain temps dans le fonctionnement de leurs TGI respectifs, et ne doute pas que les magistrats y auront été sensibles. Que M. Pinte se rassure : l’appel d’offres pour les travaux de la cour d’appel et la cour d’assises de Versailles sera lancé dès 2007, et la livraison est prévue pour 2010.

Je n’ai jamais vu de réforme de la justice, quelle que soit son ampleur et son contenu, qui ait été bien accueilli, et lorsque j’entends parler avec nostalgie de la réforme Peyrefitte, je m’en amuse quelque peu, pour avoir été de ceux qui, au sein de la majorité de l’époque, menaient la bataille – avec le soutien de M. Chirac, d’ailleurs – contre cette loi dite « Sécurité et liberté », qui prétendaient enfermer la décision du juge dans une « fourchette », avec une peine-plancher et une peine-plafond… Je n’ai donc pas la prétention de vous proposer une réforme parfaite, mais simplement de résoudre quelques problèmes lancinants, comme la détention provisoire, les délais d’expertise, ou encore la solitude du juge. Sur ce dernier point, je me souviens d’ailleurs que nous avions voté à l’unanimité, sous M. Badinter, à quelques mois de la fin de la législature, la généralisation de la collégialité, et qu’après l’alternance de 1986, son successeur, M. Chalandon, chef d’entreprise avisé à défaut d’être un grand juriste, avait tôt fait de constater qu’il n’en avait pas les moyens, si bien que nous avons dû revenir – pas à l’unanimité, cette fois – sur la décision prise quelques mois plus tôt.

La vision que l’on a de la carte judiciaire varie grandement selon que l’on est élu en province ou dans le « PNBC » – Paris-Nanterre-Bobigny-Créteil –, auquel cas on a tendance à considérer qu’un tribunal par département suffit. Pour ma part, la solution aux inconvénients de la carte actuelle réside dans la spécialisation – à l’instar de ce qui a été fait avec les GIRS, avec le pôle financier du parquet de Paris, ou encore avec les deux pôles de santé – plutôt que dans la suppression de juridictions. Si mes trois prédécesseurs, dont Mme Lebranchu ici présente, ont eu le courage de supprimer quelques tribunaux de commerce, je n’ai pas eu celui de continuer, car les choses devenaient plus délicates…

Le nombre de personnes qui font un séjour en prison s’élève, au cours d’une année, à 85 000, monsieur Blessig. C’est considérable, et cela donne la mesure de la difficulté de la tâche des surveillants de prison, à qui je rends ici hommage, car ce sont des personnels d’une grande qualité, notamment sur le plan humain, contrairement à l’image que certains croient parfois devoir donner d’eux. Il faut savoir que, dans l’affaire d’Outreau, ce sont des surveillants de prison qui ont aidé certains des accusés à tenir le coup, à résister à la tentation du suicide, voire qui ont tiré le signal d’alarme pour dire que l’on était en pleine erreur judiciaire.

À Colmar, les choses devraient s’arranger, grâce au « dialogue de gestion » qui s’est engagé entre les chefs de cour et la direction des services judiciaires.

Quant au recrutement local des agents de catégorie C, c’est une excellente idée, qui sera mise en pratique dès 2007 : pourquoi obliger des Alsaciens à s’expatrier à Douai ? (Sourires)

Pour la tenue des grands procès, une ligne spécifique de 3 millions d’euros a été inscrite.

C’est au cours de l’exécution des courtes peines, c’est vrai, que se joue souvent le basculement dans la récidive, et c’est pourquoi nous allons construire deux mille places – soit autonomes, soit dans des quartiers ad hoc – pour les condamnés à ces peines, afin qu’ils ne soient pas mêlés à des délinquants endurcis.

Je confirme la livraison en 2007 de sept établissements pour mineurs, d’une capacité de 60 places chacun, ainsi que la rénovation de 600 places dans des quartiers pour mineurs. Nous offrirons ainsi des réponses diversifiées à la délinquance des mineurs, et éviterons leur enfermement dans des prisons-pourrissoirs.

Je conclurai mon propos en rappelant que le nombre de créations nettes de postes atteint cette année 555 pour les services judiciaires : 160 magistrats, 160 greffiers, 200 fonctionnaires des greffes, 35 juges de proximité. Je rappelle, s’agissant de ces derniers, qu’à la suite des réserves d’interprétation faites par le Conseil constitutionnel avant la promulgation de la loi, le Conseil supérieur de la magistrature s’est montré très exigeant : il y a eu beaucoup de candidats, mais peu d’élus, et certains d’entre eux, au curriculum vitae pourtant impressionnant, ont dû être écartés à l’issue de leur stage – par exemple des commissaires de police trop inexperts en droit civil. Si l’on ajoute à ces créations les 290 emplois nouveaux de l’administration pénitentiaire et les 290 de la protection judiciaire de la jeunesse, on obtient un total de 1 548. Je souhaite à mon successeur d’être aussi bien loti…

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances – Je ferai une brève observation : pour la première fois, nos collègues ont fait référence, au cours des échanges, aux indicateurs des projets annuels de performance. Nous sommes aux débuts de l’application de la LOLF, et certains de ces indicateurs devront sans doute être affinés, mais il est à la fois légitime, utile et nécessaire qu’ils nourrissent nos débats.

Il me reste, monsieur le garde des Sceaux, à vous remercier.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Pascal Clément, Garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur les crédits de son ministère (voir compte rendu analytique de la réunion du 9 novembre 2006), lors de la réunion de la commission élargie, la commission des Finances a examiné les crédits de la mission Justice et l’article 49 rattaché.

Votre Rapporteur spécial a présenté un amendement, similaire à deux amendements rejetés par la commission des Lois, visant à augmenter les crédits du programme Accès au droit et à la justice afin de pouvoir revaloriser la rétribution des avocats au titre de l’aide juridictionnelle, pour un montant de 25,3 millions d’euros. Les avocats, avec les magistrats et les fonctionnaires de la Justice, constituent les éléments d’un bon procès et d’une justice bien rendue. Aussi la progression de leur rémunération, pour les dossiers d’aide juridictionnelle, est souhaitable, car elle est, pour le moment, en pratique inférieure au SMIC horaire. Cependant, la réflexion sur la mise en place d’un système de « filtre » des demandes d’aides juridictionnelle ne doit pas être écartée. Cette augmentation de crédits est compensée par une diminution portant sur les programmes Justice judiciaire et Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés, notamment sur les frais de gardiennage des scellés et sur divers crédits d’équipement.

La Commission a adopté cet amendement (amendement n° II-204).

Puis, la Commission a adopté les crédits de la mission Justice, ainsi modifiés et vous demande d’émettre un vote favorable à leur adoption.

Article 49

Revalorisation de l’aide juridictionnelle

Texte du projet de loi :

I. - Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée de l’unité de valeur mentionnée au troisième alinéa de l’article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est fixé, pour les missions achevées à compter du 1er janvier 2007, à 22,09 €.

II. - En 2007, par dérogation au troisième alinéa de l’article 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’augmentation des plafonds d’admission à l’aide juridictionnelle est limitée à 1,8 %.

Exposé des motifs :

I. L’article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique prévoit que l’État affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d’aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau. Le montant de cette dotation résulte, d’une part, du nombre des missions d’aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d’autre part du produit d’un coefficient par type de procédure et d’une unité de valeur de référence.

Le montant de l’unité de valeur de référence s’établit à 20,84 € depuis 2004.

Il est proposé de porter ce montant à 22,09 € en 2007, soit une hausse de 1,25 € (+ 6%).

II. Les dispositions de l’article 75 de la loi de finances pour 2006 ont eu pour effet d’augmenter de 25 % toutes les tranches du barème applicable aux revenus de 2006 par rapport aux limites effectives relatives au barème afférent aux revenus de 2005.

Or l’article 4 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique dispose que les plafonds de ressources permettant l’octroi de l’aide juridictionnelle sont revalorisés au 1er janvier de chaque année « comme la tranche la plus basse du barème de l’impôt sur le revenu ».

En l’absence de mesure correctrice, les plafonds d’aide juridictionnelle seraient relevés de 25 % au 1er janvier 2007.

Le II de cet article permet de préserver le champ actuel de l’aide juridictionnelle.

Observations et décision de la Commission :

I.– Le droit en vigueur

Le nombre total des admissions à l’aide juridictionnelle a augmenté de 9,8 % en 2003, de 10 % en 2004 et de 6,6 % en 2005 pour atteindre le niveau de 886.533 admissions. En 2005, le rythme d’évolution est plus modéré, la hausse des admissions civiles se ralentit (+ 5,2 %), alors que celle des admissions pénales reste soutenue (+ 8,5 %). Le ralentissement observé en 2005 se confirme au premier semestre 2006, avec une légère baisse des admissions (– 0,7 %).

La hausse enregistrée au cours des dernières années est à mettre en relation avec les mesures prises en faveur des justiciables les plus fragilisés ou démunis à l’automne 2002 et en 2003 : admission sans condition de ressources des victimes des atteintes les plus graves à la personne ou de leurs ayant droit, augmentation des correctifs familiaux pour les deux premières personnes à charge du demandeur, exclusion des allocations logement de l’appréciation des ressources pour l’admission. Ces deux dernières réformes continuent à expliquer la croissance en 2004, dans la mesure où elles s’appliquent sur l’ensemble de l’année, alors qu’en 2003, elles sont intervenues en cours d’année.

L’aide juridictionnelle est le plus souvent totale, cette dernière représentant 88 % des admissions.

Décisions

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Admissions

           

AJ Totale

605.929

570.603

597.561

662.855

734.661

783.690

AJ Partielle

92.850

87.213

91.076

92.996

97.093

102.843

Total

698.779

657.816

688.637

755.851

831.754

886.533

Rejets, retraits désistements

85.592

74.184

76.081

78.303

73.760

104.371

Les rejets définitifs s’établissent à 82.959, soit un taux de rejet définitif de 8,4 % par rapport aux décisions prononcées par les bureaux d’aide juridictionnelle, soit 990.904 décisions.

Les admissions à l’aide juridictionnelle pour des contentieux administratifs ont progressé plus lentement que les années précédentes (+ 1,5 %). En revanche, les admissions relatives aux conditions de séjour des étrangers augmentent fortement en 2005 (+ 17,2 %).

Les admissions 2005 se répartissent à raison de 51 % pour des procédures civiles, 43 % pour des procédures pénales et de 6 % pour des affaires administratives ou relatives aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers.

Entre 2000 et 2006, la dotation initiale inscrite au chapitre 46.12 est passée de 235,32 millions d’euros à 303,02 millions d’euros (+ 29 %).

La dotation budgétaire, qui est de 303,02 millions d’euros en 2006, est portée à 323,02 millions d’euros en 2007.

II.– Le dispositif proposé par le présent article

Les plafonds de ressources, fixés en 1992 à 4.400 francs (670,78 euros) et 6.600 francs (1.006,16 euros), connaissent une revalorisation automatique basée sur l’évolution de la tranche la plus basse du barème de l’impôt sur le revenu, comme le prévoit l’article 4 troisième alinéa de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.

Les plafonds de l’aide totale (859 euros en 2006) et de l’aide partielle (1.288 euros en 2006) ont progressé de 28 % entre 1992 et 2006, soit un taux supérieur à l’évolution de l’indice des prix (20 %) sur la même période.

La loi de finances pour 2006 a supprimé l’abattement forfaitaire de 20 % et a relevé en contrepartie de 25 % les tranches de l’impôt sur le revenu. Cela a pour conséquence que des personnes assujetties à l’IR en 2006 ne le seront plus en 2007, année de première application de la réforme. L’indexation de la revalorisation étant effectuée sur la tranche inférieure de l’IR, l’impact de la réforme est important sur la population éligible à l’aide juridictionnelle. Cet impact est évalué à 85 millions d’euros, non pris en compte dans la dotation de l’action au sein de la mission Justice.

Aussi le présent article a-t-il pour effet de neutraliser cette conséquence de la réforme de l’impôt sur le revenu.

Il prévoit pour 2007 une augmentation des plafonds d’admission à l’aide juridictionnelle à 1,8 %. Pour 2008, la revalorisation pourra à nouveau avoir lieu automatiquement, de 1,8 à 2 % par an.

*

* *

Votre Rapporteur spécial a expliqué que les plafonds de ressources pour l’éligibilité à l’aide juridictionnelle connaissent une revalorisation automatique basée sur l’évolution de la tranche la plus basse du barème de l’impôt sur le revenu, comme le prévoit l’article 4 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.

Les plafonds de l’aide totale et de l’aide partielle ont progressé de 28 % entre 1992 et 2006, soit un taux supérieur à l’évolution de l’indice des prix (20 %) sur la même période.

La loi de finances pour 2006 a supprimé l’abattement forfaitaire de 20 % et a relevé en contrepartie de 25 % les tranches de l’impôt sur le revenu. Cela a pour conséquence que des personnes assujetties à l’IR en 2006 ne le seront plus en 2007, année de première application de la réforme. L’indexation de la revalorisation étant effectuée sur la tranche inférieure de l’IR, l’impact de la réforme est important sur la population éligible à l’aide juridictionnelle. Cet impact est évalué à 85 millions d’euros, non pris en compte dans la dotation de l’action au sein de la mission Justice.

Aussi l’article 49 a-t-il pour effet de neutraliser cette conséquence de la réforme de l’impôt sur le revenu. Il prévoit pour 2007 une augmentation des plafonds d’admission à l’aide juridictionnelle de 1,8 %. Pour 2008, la revalorisation pourra à nouveau avoir lieu automatiquement, de 1,8 à 2 % par an.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du Rapporteur spécial (amendement n° II-203).

La Commission a ensuite adopté cet article, ainsi modifié.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 34
État B

Amendement n° II-204 présenté par M. Pierre Albertini, Rapporteur spécial de la commission des Finances

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

Programmes

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

0

14.077.000

0

Administration pénitentiaire

dont titre 2

0

0

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

0

0

Accès au droit et à la justice

dont titre 2

25.295.936

0

0

Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés

dont titre 2

0

11.218.936

0

TOTAUX

25.295.936

25.295.936

SOLDE

0

EXPOSÉ SOMMAIRE

S’agissant du programme n° 166 « Justice judiciaire », cet amendement tend à transférer pour un total de 14.077.000 € :

– 11.900.000 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 02 « Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales » du programme n° 166 « Justice judiciaire » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme s’impute sur les frais résultant du gardiennage des scellés dont les crédits ont progressé de plus de 60 % en 2 ans pour tenir compte d’un changement de présentation des mémoires de la préfecture de police de Paris.

– 2.177.000 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 06 « Soutien » du programme n° 166 « Justice judiciaire » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme s’impute sur les crédits alloués à l’établissement public du palais de justice de Paris qui a pour mission de concevoir, d’acquérir, de faire construire, d’aménager de nouveaux locaux pour le Palais de justice de Paris, à l’exception de la Cour de cassation. Les professionnels de la justice refusant le déménagement du palais de justice de Paris de l’île de la cité vers le sud-est de Paris, les crédits alloués à celui-ci peuvent donc être consacrés à l’augmentation de l’unité de valeur de l’aide juridictionnelle.

S’agissant du programme n° 213 « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés », cet amendement tend à transférer pour un total de 11 218 936 € :

– 3.000.000 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 01 « État-major » du programme n° 213 « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme s’impute sur les crédits alloués à la politique de communication du ministère de la justice et notamment à la réalisation d’une campagne d’information gouvernementale en direction du grand public sur le fonctionnement de la justice en 2007, dont on mesure mal la nécessité.

– 784.000 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 03 « Évaluation, contrôle, études et recherche » du programme n° 213 « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme s’impute sur les crédits alloués au groupement d’intérêt public « Mission de recherche Droit et Justice », structure faisant doublon avec des structures de recherche existantes et avec la future Fondation du Droit en cours de constitution.

– 5.369.480 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 04 « Gestion administrative commune » du programme n° 213 « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme se décompose comme suit :

– 600.000 € alloués au nettoyage des locaux,

– 1.369.480 € alloués à des petits travaux d’entretien,

– 900.000 € alloués à des travaux de ravalement du site Vendôme à Paris,

– 2.500.000 € alloués au lancement des travaux de création d’une cantine sur le site Vendôme à Paris.

– 2.065.456 € en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action n° 05 « Commission nationale informatique et libertés » du programme n° 213 « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » vers l’action n° 01 « Aide juridictionnelle » du programme n° 101 « Accès au droit et à la justice ». Cette somme s’impute sur les crédits de fonctionnement pour 2007, dont 55 % correspondent à la réalisation du projet de déménagement de la CNIL, dont l’urgence ne s’impose pas.

Au total, cela permet de transférer sur le programme n° 101 « accès au droit et à la justice » de manière à porter les rétributions des avocats au titre de l’aide juridictionnelle au niveau qui devrait être le leur de façon à respecter les engagements pris par le ministre en 2004.

Article 49

Amendement n° II-203 présenté par M. Pierre Albertini, Rapporteur spécial de la commission des Finances

Dans l’alinéa 1 de cet article, après les mots : « l’unité de valeur », insérer les mots : « de référence ».

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel visant à compléter la notion à laquelle se réfère le I du présent article. En effet, l’article 27 (3ème et 4ème alinéas) de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique comme l’article 90 du décret n° 91 – 12.166 du 19 décembre 1991 font mention de la notion d’ « unité de valeur de référence ».

ANNEXE
RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES
SUR LES TUTELLES ET CURATELLES

L’annexe de ce rapport n’est disponible qu’en format pdf

© Assemblée nationale