N° 1161 - Proposition de résolution de M. Daniel Garrigue sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (COM (2003) 397 final/E-2365)


Document

mis en distribution

le 28 octobre 2003

   

N° 1161

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 octobre 2003

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la proposition de directive du Conseil modifiant
la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les taux réduits de taxe
sur la valeur ajoutée
(COM [2003] 397 final/E 2365),

(Renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31
du Règlement)

PRÉSENTÉE,

en application de l'article 151-1 du Règlement,

par M. Daniel GARRIGUE

Rapporteur de la Délégation

pour l'Union européenne,

Député.

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Voir le numéro : 1160.

Economie - Finances publiques.

EXPOSE DES MOTIFS

Le régime communautaire actuel des taux réduits de TVA est soumis à un régime extrêmement complexe. En effet, aux dérogations accordées dans le cadre des négociations d'adhésion de certains Etats à la Communauté, se sont ajoutées de multiples mesures transitoires et plusieurs régimes spéciaux.

Cette situation présente plusieurs inconvénients. Au-delà du caractère opaque de la loi communautaire, elle engendre des difficultés pratiques pour les particuliers, les entreprises et les administrations. De surcroît, elle place les Etats dans des situations inégales injustifiées : on ne comprend pas pourquoi les uns bénéficient de dérogations dans certains secteurs et non les autres ; ni pourquoi seuls certains pays peuvent, par exemple, appliquer des taux zéro. Enfin, elle présente des risques de distorsion de concurrence au sein du marché intérieur.

C'est la raison pour laquelle la Commission européenne, saisie de multiples plaintes et demandes, propose - à la lumière du bilan de l'expérimentation des taux réduits sur les services à forte intensité de main-d'œuvre, mise en place depuis 2000 - une réforme d'ensemble, sous la forme d'une proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE (aussi appelée sixième directive TVA), qui fixe les principales règles du régime communautaire de la TVA.

Cette réforme - qui devrait être adoptée rapidement, compte tenu de l'expiration, à la fin de 2003, de l'autorisation d'appliquer des taux réduits sur les services à forte intensité de main-d'œuvre - constitue un enjeu important. Politique, d'abord, dans la mesure où elle touche à un domaine essentiel de la souveraineté des Etats : la fiscalité. Economique, aussi, l'harmonisation des réglementations et des taux de TVA étant une condition du bon fonctionnement du marché européen et l'application de taux réduits pouvant être un facteur de croissance et de création d'emplois. Enfin, l'enjeu est également social, compte tenu du nombre important de professions pouvant bénéficier de taux réduits (secteurs du médicament, des équipements médicaux, des denrées alimentaires, du logement social, du bâtiment ou de l'hôtellerie notamment), et culturel, puisqu'il concerne les domaines du livre, de la presse, des spectacles ou des services de radiodiffusion et de télévision.

Il convient de soutenir la proposition de directive pour deux raisons essentielles. En premier lieu, elle constitue une rationalisation et une simplification extrêmement positives de la réglementation actuelle. Deuxièmement, elle est équilibrée et satisfait à deux des trois demandes principales formulées par la France, à savoir le maintien des travaux de rénovation de logements parmi les domaines éligibles, et l'inclusion dans ceux-ci de la restauration. L'insertion de ces deux secteurs est, en effet, essentielle, dans la mesure où elle répond à une importante demande de l'opinion publique et compte tenu des effets positifs déjà enregistrés ou encore attendus en France.

En outre, deux domaines supplémentaires justifieraient une dérogation. Il s'agit, en premier lieu, des disques et des cassettes sonores, qui constituent la troisième demande formulée par la France et mériteraient de bénéficier d'un taux réduit au même titre que le livre. Il serait également opportun, ainsi que l'a déjà demandé la Délégation, de supprimer la TVA à l'importation sur les œuvres d'art, objets de collection et antiquités, dont le rendement est faible et qui est un facteur important de délocalisation des œuvres d'art hors d'Europe.

Enfin, il serait souhaitable que la Commission propose aux Etats membres une réforme d'ensemble du régime communautaire de la TVA
- qui puisse remédier aux inconvénients du régime transitoire actuel - et de poursuivre la réflexion sur l'extension du vote à la majorité qualifiée en matière fiscale, afin de ne pas paralyser l'action communautaire dans la future Union élargie.

Tels sont les motifs qui justifient l'adoption de la présente proposition de résolution.

PROPOSITION DE RESOLUTION

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 93 du traité instituant la Communauté européenne,

Vu la sixième directive du Conseil n° 77/388/CEE du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme,

Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (COM [2003] 397 final/document E 2365),

1. Estime nécessaire de réformer le régime communautaire actuel des taux réduits de TVA, qui, par sa complexité et ses incohérences, nuit au bon fonctionnement du marché européen et donne à l'opinion publique une mauvaise image de l'Europe ;

2. Approuve la proposition de directive du Conseil susvisée, qui permet de remplacer ce régime par un dispositif clair et rationnel ;

3. Juge indispensable de maintenir, dans la proposition de directive, la possibilité offerte aux Etats membres d'appliquer des taux réduits de TVA à la rénovation et à la réparation de logements, cette mesure ayant permis en France - notamment - de relancer ce secteur, de créer plus de 40 000 emplois et de restreindre le travail clandestin ;

4. Juge tout aussi primordial de maintenir cette possibilité pour la restauration, dont bénéficient déjà huit Etats sur quinze dans l'Union européenne et qui constitue une source substantielle de croissance et de créations d'emplois ;

5. Réclame que, compte tenu de la forte demande de l'opinion publique, en particulier des jeunes Européens, en faveur de l'application de taux réduits de TVA sur les disques et les cassettes sonores, cette faculté puisse être proposée aux Etats membres, ne serait-ce que pour une durée limitée, à titre d'expérimentation ;

6. Estime essentiel, pour le développement, voire la survie du marché de l'art européen, que soit supprimée la TVA à l'importation sur les œuvres d'art, antiquités et biens de collection, et que si cette mesure ne pouvait être adoptée dans le cadre de la présente proposition de directive, il soit au moins prévu, dans un de ses considérants, que la Commission soumettra à brève échéance aux Etats membres une proposition de directive à cet effet ;

7. Juge hautement souhaitable que, dans le prolongement et l'esprit de la présente proposition de directive, la Commission propose aux Etats membres une réforme d'ensemble du régime communautaire de la TVA, qui puisse remédier aux inconvénients du dispositif transitoire actuel, dont la complexité nuit à l'intérêt général européen ;

8. Considère que la réflexion sur l'extension du vote à la majorité qualifiée en matière fiscale doit absolument être poursuivie, afin de ne pas paralyser l'action communautaire dans la future Union élargie, tout en respectant la souveraineté des Etats et le principe de subsidiarité.