N° 1589 - Proposition de loi constitutionnelle de M. Jean-Luc Warsmann visant à garantir l'avenir et le financement de la sécurité sociale




 

N° 1589

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 mai 2004.

PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE

visant à garantir l'avenir et le financement
de la
sécurité sociale,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Jean-Luc WARSMANN

Député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre Constitution reconnaît l'importance
de la sécurité sociale

La sécurité sociale est constitutive de notre pacte républicain.

Traduisant cette importance pour la cohésion de la Nation, les principes fondateurs de notre système de sécurité sociale créé en 1945 ont été inscrits, dès l'origine, dans la Constitution par le législateur.

Le préambule de la Constitution de 1946 proclame ainsi que la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». La Constitution de 1958 confirme son attachement à cette garantie dans son préambule ainsi qu'à l'article premier selon lequel « La France est une République, indivisible, démocratique et sociale ».

Intervenant au terme d'une période déjà marquée par des déficits sociaux élevés (plus de 250 milliards de francs cumulés en 1995), la révision constitutionnelle du 22 février 1996 a introduit l'article 47-1 dans le corps de la Constitution de la Ve République pour prévoir et organiser le vote des lois de financement de la sécurité sociale.

Les déficits répétés fragilisent la sécurité sociale

Moins de 10 ans après les réformes introduites par le gouvernement de M. Alain Juppé, la situation des comptes de la sécurité sociale est redevenue préoccupante. Si les branches vieillesse, famille et accidents du travail sont demeurées proches de l'équilibre, le creusement du déficit de l'assurance maladie menace de déstabiliser la sécurité sociale toute entière. Les comptes du seul régime général affichent un déficit atteignant près de 9 milliards d'euros pour 2003 et avoisinant les 14 milliards d'euros en 2004.

En l'absence de ressources supplémentaires suffisantes, c'est actuellement le recours à l'endettement qui permet à la sécurité sociale d'honorer ses engagements vis-à-vis des Français. Cet endettement devrait atteindre, à la lin de l'année 2004, plus de 49 milliards d'euros, dont 34 doivent être remboursés par l'intermédiaire de la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) d'ici à 2014.

Ces dettes constituent un transfert indu vers les générations futures qui en supporteront les intérêts et le remboursement. A l'heure où une action résolue d'assainissement des finances publiques est entreprise pour réduire la dette de l'Etat, la croissance accélérée de la dette sociale n'est pas acceptable.

Garantir dans la Constitution l'équilibre financier
de la sécurité sociale

L'objet de la présente proposition de loi constitutionnelle est de poser le principe d'équilibre réel de la sécurité sociale entre dépenses et recettes, ces dernières excluant formellement le recours à l'emprunt.

La présente proposition s'intègre dans le dispositif actuel des lois de financement de la sécurité sociale et fait obligation aux pouvoirs publics de parvenir à un équilibre réel des comptes de la sécurité sociale sur chaque exercice, sans recours possible à l'endettement.

Si en cours d'exercice, un déséquilibre des comptes apparaît, celui-ci doit être corrigé par le vote d'une loi de financement rectificative complétée, le cas échéant, par la loi de financement de la sécurité sociale de l'année suivante.

Une loi organique sera nécessaire pour préciser les conditions de cet équilibre et prévoir les opérations, notamment d'investissement, autorisées à déroger au principe de non-endettement. S'inspirant, en effet, des dispositions légales concernant les collectivités territoriales (article L. 1612-4 du code général des collectivités territoriales), seuls pourraient être admis les emprunts contractés en contrepartie d'investissements et les concours temporaires de trésorerie.

Pérenniser la sécurité sociale

Ce changement dans la gouvernance de la sécurité sociale permettra de sortir de la phase d'instabilité que connaît notre régime de protection sociale depuis le début des années 80 où se succèdent les phases de crise financière aiguë et les plans de sauvetage de grande ampleur.

Ces crises épisodiques autour du « trou » de la sécurité sociale menacent, si rien n'est fait, de remettre en question l'organisation de notre protection sociale. Le constat régulier des déficits sociaux alimente plus largement une inquiétude des Français quant à la préservation des mécanismes de solidarité dans notre pays.

L'attachement des Français aux éléments constitutifs de leur modèle social, comme l'est la sécurité sociale, justifie que soit érigé en principe le financement de notre protection sociale, sans report de charge sur les générations futures.

Rassurer nos concitoyens sur la préservation
de la sécurité sociale

L'inscription dans la Constitution du principe d'équilibre réel des comptes de la sécurité sociale offre un cadre favorable à la réalisation de réformes étalées dans le temps, conduites par des acteurs responsables.

Les Français étaient conscients qu'une réforme des retraites était indispensable. Ils savent aussi qu'une réforme de l'assurance maladie est nécessaire, afin que les moyens consacrés par la Nation à la santé, près de 9 % du produit intérieur brut, soient mieux employés. Il faut agir car le retour à une croissance plus forte ne sera pas en mesure de ramener spontanément le régime général à l'équilibre, ainsi que le démontrent les rapports de la Commission des Comptes de la sécurité sociale pour 2003 et du Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance Maladie.

En rendant impossible l'accumulation de déficits sociaux et en interdisant leur financement par l'emprunt, la présente proposition de lois constitutionnelle vise à responsabiliser les pouvoirs publics et les partenaires sociaux à l'égard de la sécurité sociale. La mise à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale supposera une action solidaire de leur part, tant au niveau des recettes supplémentaires destinées à couvrir de nouvelles dépenses, que sur le suivi de la progression des dépenses.

L'adoption de la présente proposition de loi constitutionnelle pourra utilement compléter le dispositif de réforme de l'assurance maladie actuellement étudié par les pouvoirs publics et constituera pour nos concitoyens un signal fort de la volonté de préserver les acquis de la sécurité sociale à la française.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Le cinquième alinéa de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 est ainsi rédigé :

« Les lois de financement de la sécurité sociale garantissent son équilibre financier pour chaque exercice et, compte tenu de la leurs prévisions de recettes, excluant le recours à l'emprunt, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. »

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118358-X
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

--------------

N° 1589 - Proposition de loi constitutionnelle visant à garantir l'avenir et le financement de la sécurité sociale (M. Jean-Luc Warsmann)


© Assemblée nationale