N° 1814 - Proposition de loi de M. Hervé Mariton relative à la mise en oeuvre d'un service essentiel pour les transports terrestres de voyageurs




 

N° 1814

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 septembre 2004.

PROPOSITION DE LOI

relative à la mise en œuvre d'un service essentiel
pour les
transports terrestres de voyageurs,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Hervé MARITON

Député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La Constitution est claire : la mise en œuvre du service minimum dans les services publics de transport terrestre de voyageurs, conciliant les principes constitutionnels que sont le droit de grève, la continuité du service public, la liberté d'aller et de venir peut se faire par la loi et ne peut se faire que par la loi. On rappellera en particulier que le septième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958 énonce que « le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».

Le gouvernement a engagé des consultations et des analyses comparatives précieuses et développées. Le ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du Territoire, du Tourisme et de la Mer a reçu le 21 juillet 2004 le rapport de la Commission Mandelkern pour la Continuité des Services Publics dans les Transports Terrestres de Voyageurs. Aujourd'hui, la consultation se poursuit utilement.

Aussi bien, il nous paraît indispensable de rappeler que seule la loi peut - et doit - résoudre la question de société posée.

La demande sociale pour une meilleure régulation de la grève dans les services publics de transport de voyageurs est très forte. Plus des trois quarts de nos compatriotes sont favorables à l'instauration d'un service minimum.

Le rapport de la Commission Mandelkern formule des propositions équilibrées et opérationnelles que nous reprenons ici largement.

Il s'agit, avec une méthode de dialogue social soutenu, de définir le service essentiel attendu par les usagers, d'en organiser, d'en assurer, d'en évaluer la mise en œuvre. Cette responsabilité incombe à chaque autorité organisatrice de transports, avec l'avis attentif d'une Haute Autorité pour la continuité du service public et le dialogue social.

Ainsi formulée, la proposition de loi paraît tout à la fois adaptée à la difficulté du sujet et à la nécessité d'une solution.

Enfin, il ne paraît pas que le législateur doive s'excuser de faire la loi. C'est notre mission, c'est une garantie de démocratie. C'est aussi ici, par un rôle nécessaire et souligné de la loi, la reconnaissance souvent demandée et volontiers partagée, de la spécificité du service public.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est créé une Haute Autorité pour la continuité du service public et le dialogue social, chargée de concourir, par ses avis, à la mise en œuvre des libertés constitutionnelles, du droit de grève, de la liberté de mouvement et de la continuité du service public, pour les services de transport terrestre de voyageurs.

La Haute Autorité est composée de trois membres désignés par le président du Conseil Economique et Social, de trois membres désignés par le vice-président du Conseil d'Etat, de trois membres désignés par le président de la Cour de Cassation. Son président est désigné parmi ses membres, par le président du Conseil Economique et Social. Ses services sont ceux du Conseil Economique et Social.

La Haute Autorité, lorsqu'il s'agit de donner un avis sur la question d'un service public rendu à l'intérieur du territoire d'une collectivité régionale, consulte le président du Conseil Economique et Social régional concerné.

Article 2

Chaque autorité organisatrice de transports, telle que définie à l'article 7 modifié de la loi du 30 décembre 1982, dite loi d'orientation des transports intérieurs, définit un schéma de service essentiel.

Ce schéma précise, pour chaque ligne de transport le niveau minimum de service nécessaire à garantir la liberté d'aller et venir, la liberté du travail, l'accès aux services publics.

Le schéma est défini, après avis de la Haute Autorité, par décision de l'assemblée délibérante de l'autorité locale organisatrice de transports et par décret en Conseil d'Etat pour l'Etat.

Les partenaires sociaux, le Conseil Economique et Social, les Conseils Economiques et Sociaux régionaux concernés sont associés à la préparation des schémas dans des conditions définies par décret. Une consultation publique des usagers est organisée pour chaque ligne de transport.

Les schémas doivent être publiés dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi.

Article 3

Après l'article L. 521-3 du code du travail, il est inséré un article L. 521-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-1. - Pour les services publics de transport terrestres, par dérogation à l'alinéa 2 de l'article L. 521-3, lorsque les personnels mentionnés à l'article L. 521-2 font usage du droit de grève, la cessation concertée du travail doit être précédée d'un préavis dans les conditions ci-après :

« Le préavis émane de l'organisation ou d'une des organisations syndicales les plus représentatives sur le plan national, dans la catégorie professionnelle ou dans l'entreprise, l'organisme ou le service intéressé.

« Il précise les motifs du recours à la grève.

« Le préavis doit parvenir sept jours francs avant la décision de la grève à l'autorité hiérarchique ou à la direction de l'établissement, de l'entreprise ou de l'organisme intéressé. Il fixe le lieu, la date et l'heure du début ainsi que la durée limitée ou non, de la grève envisagée.

« Cette date est postérieure d'au moins trois jours à la décision de grève.

« Pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier. La Haute Autorité publie, à l'issue de cette période, un avis sur cette négociation.

« Chacun des membres du personnel gréviste doit indiquer à l'entreprise sa décision de participer à la grève 48 heures au moins avant le début de celle-ci. Cette décision est communiquée à un service de régulation qui la garde confidentielle jusqu'au début effectif de la grève. Cette décision peut être retirée. »

Article 4

Chaque opérateur de transport prépare une convention avec les organisations syndicales représentatives de l'entreprise destinée à mettre en œuvre la prestation de service essentiel prévue par la loi et définie par le schéma publié par l'autorité organisatrice de transports.

Dans un délai de deux mois après la publication de chaque schéma de service essentiel, un état de préparation de ces conventions est adressé à la Haute Autorité qui publie son avis.

Dans un délai d'un an après la publication de chaque schéma de service essentiel, l'opérateur précise, qu'elles résultent d'un accord conventionnel ou de sa seule définition, après avis de la Haute Autorité, les mesures d'organisation prises pour effectuer le service essentiel décidé par l'autorité organisatrice de transports.

Article 5

Vingt-quatre heures avant chaque journée concernée par une grève, l'opérateur de transport publie le plan de service prévisionnel. Il organise l'information gratuite sur ce plan.

Article 6

La mise en œuvre de la présente loi fera l'objet d'un bilan dans un délai de trois ans de la part de chaque autorité organisatrice de transports concernée et du Conseil Economique et Social.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118528-0
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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