N° 1821 - Proposition de loi de M. François Rochebloine visant à compléter le dispositif de contrôle et d'interdiction des mines antipersonnel




 

N° 1821

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 septembre 2004.

PROPOSITION DE LOI

visant à compléter le dispositif de contrôle
et d'
interdiction des mines antipersonnel,

(Renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. François ROCHEBLOINE

MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre Albertini, Gilles Artigues, Pierre-Christophe Baguet, Jean-Claude Beaulieu, Yves Boisseau, Jean-Pierre Brard, Jean-François Chossy, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Jean-Yves Cousin, Jean Dionis du Séjour, Jean-Pierre Door, Philippe Folliot, Pierre Hériaud, Francis Hillmeyer, Michel Hunault, Maryse Joissans-Masini, Christian Kert, Yvan Lachaud, Edouard Landrain, Lionnel Luca, Christophe Masse, Jean-Pierre Nicolas, Rudy Salles, François Sauvadet, Dominique Tian et

Francis Vercamer

Addition de signature :
M. Étienne Pinte

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La campagne de lutte contre les mines antipersonnel a trouvé en France un point d'appui important avec le vote de la loi du 8 juillet 1998 (n° 98-564) qui a prévu notamment la création de la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel (CNEMA). S'inscrivant dans le processus initié et validé à Ottawa, avec la signature, le 3 décembre 1997, de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, cette loi place la France dans le peloton de tête des pays qui participent à l'éradication du fléau que sont les mines antipersonnel.

Depuis son installation en 1999, la CNEMA a réalisé, dans son rôle de transparence, un important travail dans le champ de compétence que lui a confié la loi de 1998. Ainsi, la CNEMA :

- s'est appliquée à contrôler la destruction des stocks de mines antipersonnel détenus par les armées françaises,

- s'est assurée que les entreprises et les arsenaux avaient détruit ou transformé leur outil de production et qu'ils n'avaient pas délivré de brevets de fabrication,

- a contrôlé chaque année le stock de mines antipersonnel autorisé par la Convention d'Ottawa pour la formation des démineurs français ou étrangers, les études de techniques de déminage, les essais ou expérimentations diverses.

Il est un fait que chaque conflit armé amène son lot de désolation, de destructions et de victimes parmi les populations civiles, mais pour les mines, l'œuvre de mort n'est jamais terminée. Or, l'utilisation des mines antipersonnel, dont les effets, la spécificité et l'efficacité redoutable sont largement reconnus aujourd'hui, est interdite par les textes. Il apparaît, toutefois, que d'autres armes, fruits des progrès technologiques, s'avèrent tout aussi dangereuses et pernicieuses pour les populations civiles.

La CNEMA a donc naturellement souhaité engager une réflexion sur certaines catégories de mines antichar afin d'en connaître le fonctionnement. Cette réflexion a conduit :

- au retrait de deux types de mines antichar du service opérationnel des armées, du fait que leur système de mise de feu était similaire au système de mise de feu des mines antipersonnel (le simple contact, non intentionnel, d'une personne avec la mine entraînait son explosion)

- à une recommandation, demandant pour des commandes futures d'un autre type de mines, une augmentation de l'effort de pression déclenchant l'explosion de la mine.

La CNEMA avait demandé en outre que des essais soient effectués sur des mines antichar dont le déclenchement est provoqué par la variation du champ magnétique qui les entoure. En effet, un doute subsistant quant à leur niveau de sensibilité, par exemple du fait d'une présence humaine ou animale dans leur environnement immédiat, le ministère de la Défense a fait savoir à la CNEMA que les essais demandés sur ces types de mines ne pouvaient pas être effectués, « la modélisation des éléments constitutifs de l'expérience représentant des difficultés techniques considérables ».

Par ailleurs, il convient de mentionner le développement de nouvelles catégories d'armes issues de bombes à fragmentation qui ont les mêmes fonctions et se comportent comme des mines antipersonnel : les « sous-munitions ». Or, là encore, la CNEMA n'a pu pousser davantage les réflexions et élargir le champ de ses investigations, du fait d'un encadrement strict de ses attributions et de sa mission, découlant de la définition restrictive introduite par la loi n° 98-564 du 8 juillet 1998, qui se limite à la seule terminologie « mines antipersonnel ».

Cette terminologie entre cependant en contradiction avec l'article 10 de la même loi qui stipule que la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel assure le suivi de l'action internationale de la France en matière de déminage. Il apparaît désormais que la maîtrise des opérations de déminage sur d'anciens théâtres d'opération, suppose une parfaite connaissance par les professionnels démineurs, des « sous-munitions » qui sont de fait, pour les populations qui y sont exposées, de véritables mines antipersonnel.

Signalons enfin, que cette similitude entre mines antipersonnel et sous-munitions, a également été mise en évidence lors du « Colloque international des structures nationales chargées de la lutte contre les mines antipersonnel » qui s'est tenu à Paris les 12 et 13 mars 2004.

La France s'est toujours clairement positionnée en ce domaine en faveur de l'émergence d'un droit humanitaire international et d'une amélioration de la protection des populations civiles.

Aussi, il est donc proposé d'élargir le champ des interdictions visant les mines antipersonnel et, corrélativement, celui des missions de la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel à des armes ne répondant pas strictement à la définition de la Convention d'Ottawa, mais qui sont assimilables aux mines antipersonnel du fait de leur mode de déclenchement faisant de ces armes des mines antipersonnel hyper-destructrices.

Tels sont les motifs de la présente proposition de loi qu'il vous est demandé d'adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Pour l'application de la loi n° 98-564 du 8 juillet 1998 tendant à l'élimination des mines antipersonnel, le terme « mine antipersonnel » s'applique à toute arme qui met hors de combat, blesse ou tue une ou plusieurs personnes et dont l'action de destruction est déclenchée par un contact involontaire d'une personne avec cette arme, ou avec un dispositif annexe lié à cette arme, ou indépendant ou partie intégrante de cette arme.

Le terme « mine antipersonnel » s'applique également à toute arme qui met hors de combat, blesse ou tue une ou plusieurs personnes et dont l'action de destruction est déclenchée par la présence involontaire d'une personne à proximité de cette arme ou d'un dispositif annexe lié à cette arme, ou indépendant ou partie intégrante de cette arme.

Article 2

Un décret en Conseil d'Etat fixe la date de destruction des armes répondant à la définition de l'article 1er, ainsi que le nombre des armes à conserver ou à transférer pour la mise au point de techniques de détection, de déminage ou de destructions et pour la formation à ces techniques.

Article 3

Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées par l'augmentation à due concurrence des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118537-X
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

---------------------

N° 1821 - Proposition de loi visant à compléter le dispositif de contrôle et d'interdiction des mines antipersonnel (M. François Rochebloine)


© Assemblée nationale