N° 1985 - Proposition de loi constitutionnelle de M. Édouard Balladur relative au renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement en matière européenne




 

N° 1985

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 décembre 2004.

PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE

relative au renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement
en
matière européenne,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Edouard BALLADUR, Roland BLUM
et Hervé de CHARETTE

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le renforcement des pouvoirs du Parlement est l'une des questions qui se pose aujourd'hui à la démocratie française. Le souhait est largement partagé : les assemblées devraient accroître leur capacité de contrôle de l'activité du Gouvernement.

La Constitution du 4 octobre 1958 a mis en place un « régime parlementaire rationalisé » qui a démontré toute son efficacité. Il n'est pas question de le remettre en cause. Toutefois, depuis 1958, il est un fait nouveau qui a transformé profondément la politique française : la construction européenne. Or dans ce domaine, bien que notre Constitution ait connu des aménagements utiles, le cadre d'action du Parlement demeure aujourd'hui encore trop rigide. En effet, si le Parlement français comme tous les Parlements nationaux de l'Union a vu le champ de son pouvoir législatif réduit par l'activité normative européenne, ce mouvement doit être équilibré par un contrôle parlementaire accru des activités communautaires.

Introduit à l'occasion de la révision constitutionnelle du 25 juin 1992, préalable à la ratification du Traité de Maastricht, et réformé en 1999 avant l'adoption du Traité d'Amsterdam, l'article 88-4 de la Constitution impose au Gouvernement la transmission des propositions ou projets d'actes européens comportant des dispositions de nature législative. En revanche, il laisse le Gouvernement libre de transmettre ou non tout autre projet ou proposition d'actes qui ne comporterait pas de telles dispositions ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne. Cet article reconnaît aux assemblées la faculté de voter des résolutions sur ces projets et documents européens dès lors qu'ils leur sont transmis. L'introduction de ces dispositions dans la Constitution est un progrès évident dans l'affirmation du rôle des assemblées dans la politique européenne.

Le traité institutionnel qui va être soumis au peuple français propose de renforcer ce rôle des Parlements nationaux notamment en assurant le respect du principe de subsidiarité par les institutions européennes. Le Parlement français ne peut rester à l'écart de ce mouvement. Il faut donc aujourd'hui aller plus loin et profiter de l'occasion que nous offrira la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité établissant une constitution pour l'Europe pour renforcer les pouvoirs des assemblées en la matière en complétant l'article 88-4 de la Constitution.

Selon nous, une réforme de l'article 88-4 doit permettre au Parlement d'exercer son droit de contrôle et d'expression sur tout projet ou document européen, quel qu'il soit. Nous proposons en conséquence de permettre aux assemblées lorsqu'elles le demandent de se voir transmettre de droit par le Gouvernement tous les projets ou documents européens sur lesquels elles souhaiteraient prendre position par le vote de résolutions.

Cette proposition de loi constitutionnelle prévoit un dispositif équilibré qui respecte les prérogatives du pouvoir exécutif tout en renforçant le rôle du Parlement. Il n'est question ni d'imposer au Gouvernement la transmission systématique aux assemblées de tous les actes et documents européens qui se comptent par milliers chaque année, ni de créer une procédure qui aurait pour effet de le soumettre à des demandes innombrables de transmission de tels actes ou documents.

Les organes habilités à demander la transmission de ces projets ou documents seraient les Présidents de chacune des assemblées, à l'évidence. Les Présidents des commissions permanentes prévues par la Constitution nous semblent aussi devoir bénéficier de ce pouvoir car ces commissions doivent demeurer les principaux acteurs du contrôle de l'activité européenne, qui ne peut plus être perçue seulement comme un aspect de la politique étrangère mais bien comme relevant aussi des affaires intérieures de notre pays. Enfin, il nous semble indispensable que la demande de transmission de tout projet ou document européen puisse émaner des parlementaires de la majorité ou de l'opposition ; c'est pourquoi nous proposons d'ouvrir cette faculté à soixante députés ou soixante sénateurs, à l'instar de ce que l'article 61 de la Constitution prévoit pour la saisine du Conseil constitutionnel.

C'est grâce à l'extension du droit de contrôle du Parlement français sur les activités de l'Union européenne que nous contribuerons aussi à la construction d'une Europe politique plus conforme aux principes de la démocratie.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Le premier alinéa de l'article 88-4 de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il y est tenu lorsque le Président de l'Assemblée nationale ou du Sénat, le Président de l'une des commissions permanentes de ces assemblées, ou soixante députés ou soixante sénateurs le demandent. »

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118896-4
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 1985 - Proposition de loi constitutionnelle relative au renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement en matière européenne (M. Edouard Balladur)


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