N° 3348
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 octobre 2006.
PROPOSITION DE LOI
relative à l’instauration du péage sans barrière,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration
générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
par MM. Frédéric SOULIER, Jean AUCLAIR, Patrick BALKANY, Patrick BEAUDOUIN, Jacques-Alain BÉNISTI, Jérôme BIGNON, Marcel BONNOT, Jacques BRIAT,
Mme Maryvonne BRIOT, MM. Yves BUR, Jean-Yves COUSIN, Jean-Pierre DECOOL, Jean-Pierre DUPONT, Jean-Michel FERRAND, René GALY-DEJEAN, Daniel GARD, Guy GEOFFROY, Jacques GODFRAIN, François-Michel GONNOT, Mme Arlette GROSSKOST, MM. Pierre HÉRIAUD, Jean-Yves HUGON, Mme Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET,
MM. Daniel MACH, Richard MALLIÉ, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Philippe-Armand MARTIN, Jean-Pierre NICOLAS, Daniel PRÉVOST, Jacques REMILLER, Martial SADDIER et Daniel SPAGNOU
Députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La généralisation du télépéage commun aux différentes sociétés concessionnaires d’autoroutes et d’ouvrages concédés en France depuis décembre 2000 a notablement amélioré le service rendu aux usagers. Elle leur permet d’acquitter le péage sans manipulation d’aucune sorte, grâce à des boîtiers fixés sur les pare-brises des véhicules. Aujourd’hui, près de 1,5 million d’automobilistes utilisent ce nouveau moyen de paiement efficace.
La mise en place du télépéage poids lourds sur le réseau des autoroutes concédées françaises à compter de la fin de l’année 2006 et l’objectif poursuivi par la Commission européenne, dans le cadre de la directive 2004/52/CE du 29 avril 2004 dite « télépéage » dont la transposition a été effectuée par la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports, ont amené les exploitants autoroutiers à travailler à la mise au point technique de dispositifs de péage sans arrêt des véhicules (péage en flux libre), qui est une modalité des systèmes de télépéage.
Le dispositif consiste à supprimer les barres levantes dans les voies réservées au télépéage afin que les usagers équipés de télébadges ne soient plus obligés de s’arrêter lors de leur passage au péage.
Plusieurs pays, dont l’Autriche et l’Allemagne, ont déjà développé un système de télépéage sans barrière pour les poids lourds. Il est souhaitable que les usagers des autoroutes françaises puissent bénéficier sur le territoire national de ce service supplémentaire de confort et de sécurité qu’est le péage sans arrêt.
En effet, le développement du télépéage sans arrêt permet notamment :
–d’améliorer la fluidité du trafic et de diminuer la congestion aux barrières de péage ;
–de maîtriser les emprises, en évitant l’agrandissement des barrières (une voie de télépéage permet d’absorber un débit de 1 000 véhicules par heure, contre 250 pour une voie traditionnelle).
Le développement du télépéage permet, en outre, une valorisation des emplois du péage en les faisant évoluer vers des fonctions à valeur ajoutée dans le domaine commercial et la relation clientèle.
La mise en place d’un système sans barrière physique de péage doit néanmoins être accompagnée d’un dispositif pour limiter le risque de fraude. Le succès du développement de ce nouveau dispositif est donc intimement lié à l’efficacité d’un dispositif de contrôle et de sanction fiable.
Or, le dispositif législatif actuel de la lutte contre la fraude au péage est insuffisant, non dissuasif et lourd à mettre en œuvre.
Il est donc nécessaire de le faire évoluer pour permettre à un système de péage sans barrière de fonctionner de manière efficace avec deux objectifs :
–ne pas surcharger les services de police par la gestion de contraventions systématiques pour les usagers en défaut de paiement ;
–instituer un dispositif transactionnel à l’usager en défaut de paiement sur des voies de ce type permettant d’éteindre la procédure pénale, et ainsi ne pas engorger les juridictions.
La présente proposition de loi a pour objet d’apporter ces adaptations nécessaires répondant à ces deux objectifs :
–en autorisant, sous des conditions strictes, la communication des informations du fichier national des immatriculations aux agents assermentés des exploitants d’une autoroute ou d’un ouvrage d’art à péage, afin que ceux-ci puissent proposer une procédure transactionnelle aux automobilistes en défaut de paiement ;
–en permettant la mise en place de cette procédure transactionnelle proposée en cas de contravention au paiement du péage au lieu de la procédure pénale actuellement prévue.
Compte tenu de l’ampleur de l’évolution que représente ce nouveau dispositif, il semblerait particulièrement opportun que sa mise en œuvre soit réalisée de manière progressive. Le recours à une expérimentation sur un nombre limité de sites permettrait, par exemple, non seulement de mettre au point techniquement le nouveau dispositif mais également d’informer les usagers sur sa mise en œuvre.
En ce qui concerne la communication des informations du fichier national des immatriculations, l’article 1 (alinéa 2) de la proposition de loi, portant modification de l’article L. 330-2 du code de la route, a pour objectif d’autoriser les agents assermentés des exploitants d’autoroutes ou d’ouvrages routiers à péage, à recevoir communication d’informations du fichier national des immatriculations en cas de constatation d’un défaut de paiement du péage, après avoir constaté cette infraction. Cette modification se traduit par un ajout à la liste des personnes et des entités habilitées à recevoir ces informations.
Il est précisé également qu’afin de mettre en cohérence ces nouvelles dispositions avec celles existant par ailleurs dans le code de la route, le premier alinéa de l’article 1 a pour unique objet de ne pas restreindre aux seuls concessionnaires d’autoroutes et d’ouvrages à péage cette faculté, mais de l’étendre aux agents assermentés de tout exploitant d’infrastructure soumise à péage.
Cette disposition permettra ainsi à l’exploitant de s’assurer de l’identité du contrevenant et, partant, de lui proposer un mode de règlement du litige adapté, sans surcharger les services de police.
En ce qui concerne la procédure transactionnelle, l’article 2 de la proposition de loi a pour objet d’étendre aux contraventions en matière de non-paiement au péage (qui sont des contraventions de la deuxième classe) un mécanisme de transaction pénale similaire à celui prévu par les articles 529-3 et suivants du code de procédure pénale pour les contraventions en matière de transports publics (SNCF ou RATP), permettant au contrevenant d’éviter d’être redevable d’une amende forfaitaire majorée en s’acquittant, auprès de l’exploitant autoroutier, d’une indemnité forfaitaire éteignant l’action publique si elle est acceptée.
Ceci nécessite, à l’instar de ce qui est pratiqué dans les transports publics depuis 1985, de reconnaître aux agents assermentés des exploitants la faculté de proposer aux contrevenants au paiement du péage de s’acquitter du paiement d’une telle indemnité transactionnelle, les poursuites pénales étant finalement réservées aux seuls cas de refus de paiement des montants dus. L’indemnité forfaitaire est versée directement à l’exploitant.
L’article 2 prévoit donc l’instauration de cette procédure transactionnelle dans le code de procédure pénale, ainsi que la mise en cohérence des articles de ce code concernés par cette instauration. Les conditions d’application de la présente loi et notamment la structure de l’indemnité forfaitaire sont précisées par décret.
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En pratique, ces dispositions remplacent l’amende forfaitaire de 35 €, dont le contrevenant doit actuellement s’acquitter, par une indemnité forfaitaire qui constitue une indemnité susceptible de correspondre au trajet le plus long ou le plus cher que l’usager non payeur aurait pu parcourir. Dans l’hypothèse où il refuserait la transaction, une amende forfaitaire majorée d’un montant de 75 € lui sera imputée.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Le code de la route est ainsi modifié :
I. Au 8° de l’article L. 130-4, le mot : « concessionnaires » est remplacé par le mot « exploitants »
II. L’article L. 330-2 est ainsi modifié :
1o – Au I, il est ajouté un 11° ainsi rédigé :
« 11° Aux agents des exploitants d’une autoroute ou d’un ouvrage routier ouvert à la circulation publique et soumis à péage, assermentés dans les conditions prévues par l’article L. 130-7, aux seules fins d’identifier les auteurs des contraventions au présent code qu’ils sont habilités à constater conformément au 8° de l’article L. 130-4 et de leur proposer la transaction visée à l’article 529-6 du code de procédure pénale »
2o – Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« – Les exploitants d’une autoroute ou d’un ouvrage routier ouvert à la circulation publique et soumis à péage doivent produire à l’appui de leur demande les seuls éléments utiles permettant de vérifier la réalité de la contravention pour non-paiement du péage. »
Article 2
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
I. Dans la section II bis, chapitre II bis, titre III, livre II de la première partie du code de procédure pénale, il est rétabli un article 529-6 ainsi rédigé :
« Art. 529-6. – I. – Pour les contraventions pour non-paiement du péage constatées par les agents assermentés de l’exploitant d’une autoroute ou d’un ouvrage routier ouvert à la circulation publique et soumis à péage, y compris dans le cadre des dispositions de l’article L. 130-9 du code de la route, l’action publique est éteinte, par dérogation à l’article 521 du présent code, par une transaction entre l’exploitant et le contrevenant.
Pour les contraventions établies en application de l’article L. 130-9 du code de la route, le lieu de traitement automatisé des informations concernant les constatations effectuées par les appareils homologués est considéré comme le lieu de constatation de l’infraction.
Toutefois, les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables si plusieurs infractions dont l’une au moins ne peut donner lieu à transaction ont été constatées simultanément.
II – La transaction est réalisée par le versement, à l’exploitant, d’une indemnité forfaitaire et de la somme due au titre du péage.
Ce versement est effectué dans un délai de deux mois à compter de l’envoi de l’avis de paiement au domicile de l’intéressé, auprès du service de l’exploitant indiqué dans la proposition de transaction.
Le montant de l’indemnité forfaitaire et de la somme due au titre du péage est acquis à l’exploitant.
III – Dans le délai prévu au deuxième alinéa du II, le contrevenant doit s’acquitter du montant des sommes dues au titre de la transaction, à moins qu’il ne formule dans le délai de deux mois à compter de l’envoi de l’avis de paiement au domicile de l’intéressé, une protestation auprès du service de l’exploitant. Cette protestation, accompagnée du procès-verbal de contravention, est transmise au ministère public.
À défaut de paiement ou de protestation dans le délai de deux mois précité, le procès-verbal de contravention est adressé par l’exploitant au ministère public et le titulaire du certificat d’immatriculation, ou l’une des personnes visées par les alinéas 2 et 3 de l’article L. 121-2 du code de la route, devient redevable de plein droit d’une amende forfaitaire majorée recouvrée par le Trésor public en vertu d’un titre rendu exécutoire par le ministère public. » ;
II. À l’article 529-7, sont insérés après les mots « le stationnement », sont insérés les mots : « et de celles visées au I de l’article 529-6 » ;
III. L’article 529-11 est ainsi rédigé :
L’avis de contravention prévu par les articles 529-1 et 529-8 ou l’avis de paiement de la transaction prévue par l’article 529-6 peut être envoyé à la suite de la constatation d’une contravention au code de la route réalisée grâce à un appareil homologué de contrôle automatique. En cas de réclamation ou de protestation portée devant la juridiction de proximité, le procès-verbal ou le rapport de l’officier ou de l’agent de police judiciaire ou de l’agent verbalisateur faisant état du résultat de ce contrôle est alors dressé. Ce procès-verbal peut être revêtu d’une signature manuelle numérisée. »
IV. Au premier alinéa de l’article 530, les mots « ou au second alinéa de l’article 529-5 » sont remplacés par les mots : « , au second alinéa de l’article 529-5 ou au second alinéa du paragraphe III de l’article 529-6 »
V. L’article 530-1 est ainsi modifié :
1o Au premier alinéa, après les mots « de la protestation formulée en application du premier alinéa de l’article 529-5 », sont insérés les mots : « de celle prévue par le paragraphe III de l’article 529-6 » ;
2o Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de condamnation, l’amende prononcée ne peut être inférieure au montant de l’amende ou de l’indemnité forfaitaire dans les cas prévus par le premier alinéa de l’article 529-2, le premier alinéa de l’article 529-5 ou le premier alinéa du III de l’article 529-6, ni être inférieure au montant de l’amende forfaitaire majorée dans les cas prévus par le second alinéa de l’article 529-2, le second alinéa de l’article 529-5 et le second alinéa du III de l’article 529-6. »
Article 3
Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de la présente loi et notamment la structure de l’indemnité forfaitaire.
Article 4
Les dispositions de l’article 1er sont applicables à Mayotte.
Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS
Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121483-3
ISSN : 1240 – 8468
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