N° 0995 - Rapport d'information sur l'implantation des entreprises françaises en Russie (M. Hervé Mariton)




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N° 995

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er juillet 2003.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ
en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

sur l'implantation des entreprises françaises en Russie.

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Hervé Mariton,
Député.

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INTRODUCTION 7

I.- LA FRANCE EST LE QUATRIÈME INVESTISSEUR EUROPÉEN EN RUSSIE : UNE PERFORMANCE MOYENNE MAIS UNE IMPLANTATION SOLIDE ET DIVERSIFIÉE 8

A.- BILAN CHIFFRÉ DE L'INVESTISSEMENT DIRECT FRANÇAIS  EN RUSSIE 9

1.- Une performance moyenne... 9

2.- ... probablement sous-estimée 10

3.- ... dans un contexte d'investissement faible et très  sectorisé 11

B.- MODALITÉS D'IMPLANTATION DES ENTREPRISES FRANÇAISES  EN RUSSIE 13

1.- La forme juridique de l'implantation : un enjeu à ne  pas sous-estimer 13

a) Une première prise de contact : le bureau de représentation et la succursale 13

b) La filiale : de plain-pied sur le marché 14

2.- Des faiblesses caractéristiques mais de belles  réussites individuelles 17

a) Une présence parfois plus faible que celle de nos partenaires européens... 17

b) ... compensée toutefois par des réussites notables dans des secteurs diversifiés de l'économie russe 19

II.- L'ATTRACTIVITÉ ET LES DIFFICULTÉS DU MARCHÉ RUSSE  : MYTHES ET RÉALITÉS 27

A.- LE CHOIX PROCLAMÉ DE LA RUSSIE EN FAVEUR DE  L'ECONOMIE DE MARCHÉ 27

1.- Une volonté affichée de s'insérer dans l'économie  mondiale dont les résultats se font encore attendre 27

a) Une collaboration graduelle avec les grandes puissances économiques mondiales 27

b) Une adhésion à l'Organisation mondiale du commerce loin d'être acquise 27

35

a) Un rebond économique manifeste consécutif à la crise de 1998... 35

b) ... qui laisse toutefois subsister des doutes sur les fondamentaux de la croissance russe 37

B.- DES RÉSULTATS JUGÉS INSUFFISANTS PAR LES ACTEURS DU  MARCHÉ 38

1.- Un environnement des affaires qui reste très difficile 38

a) Un cadre juridique instable et sur-réglementé... 40

b) ... allié à une protection inefficace des droits des entreprises... 42

c) ... et à des comportements de prédation quasi-institutionnalisés... 43

d) ... contribuent à rendre particulièrement longue et coûteuse toute implantation en Russie 44

2.- Des réformes qui se font attendre 46

a) Le secteur des monopoles naturels 46

b) Le secteur bancaire 47

c) La réforme administrative et judiciaire 48

3.- Une interrogation persistante : la Russie veut-elle  vraiment des investissements directs étrangers ? 49

a) Un espace économique fragmenté 50

b) L'absence de stratégie globale de promotion des investissements 50

c) Un statut légal et fiscal des étrangers défavorable 52

III.- UNE NOUVELLE DONNE EST POSSIBLE SI UNE VOLONTÉ POLITIQUE PROLONGE, DE PART ET D'AUTRE, LE BON CLIMAT ACTUEL 54

A.- UN CONTEXTE POLITIQUE PORTEUR POUR NOS  INVESTISSEMENTS 54

1.- Le renforcement récent de nos liens politiques et  institutionnels... 54

a) Un rapprochement p href="#P407_127315">58

B.- DES ACTIONS CONCRÈTES A ACCOMPLIR RAPIDEMENT 59

1.- La poursuite du processus de réforme en Russie  demeure indispensable 59

a) Mettre en œuvre des mesures propres à attirer les investisseurs 59

b) Ne pas retarder l'échéance des réformes structurelles 60

2.-... mais doit être accompagné par des initiatives françaises et européennes 61

a) Améliorer l'image de la Russie auprès des entreprises françaises 61

b) Développer les échanges universitaires 62

c) Résoudre la question des visas 63

CONCLUSION 65

EXAMEN EN COMMISSION 67

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS 71

ACTIVITES COMPLEMENTAIRES 73

LISTE DES PRÉCONISATIONS 74

« La Russie ! Quel phénomène merveilleux sur la scène du monde ! »
Pogodine

INTRODUCTION

Investir en Russie : c'est compliqué, on ne vous attend pas nécessairement, mais on peut gagner gros.

Les difficultés de l'investissement en Russie sont objectives. Certes, l'image de la Russie est parfois abîmée, mais les problèmes sont bien réels. A dire vrai, rien ne démontre que les investissements étrangers sont vraiment bienvenus. Mais l'enjeu reste tentant, la Russie est une nouvelle frontière qui vaut d'être explorée et où il peut y avoir beaucoup à gagner. C'est un enjeu fort, par sa dimension, ses perspectives, sa difficulté, sa complexité, sa violence parfois et la force de décision qu'il exige de ceux qui s'y lancent.

Les entreprises françaises ne sont pas sur ce marché les plus audacieuses.

Il faut savoir, il faut y aller.

La Russie pâtit depuis plusieurs années d'un problème d'image non seulement auprès de l'opinion publique française mais également auprès des décideurs économiques. Pouvoir autoritaire, bureaucratie, corruption, réseaux mafieux ne sont pas les moindres maux qui lui sont reprochés. Pourtant lorsque l'on interroge économistes et praticiens du marché russe, ceux-ci s'accordent à dire que les obstacles rencontrés en Russie ne sont pas fondamentalement différents de ceux que connaissent la plupart des pays en transition pour accéder à la démocratie et à l'économie de marché : selon l'un d'entre eux, spécialiste chevronné des marchés émergents dans une grande banque française, la Russie serait simplement « le plus tordu des pays émergents ». Mais comme l'affirme un autre Français présent à Moscou : « En Russie, tout est difficile, rien n'est impossible ».

C'est que la Russie n'est pas un pays en transition comme les autres, elle offre des perspectives sans commune mesure avec le reste des pays de l'Est : d'après Antoine Kuruneri-Millet, spécialiste du droit russe des affaires, « des ressources naturelles et humaines exceptionnelles font de cet espace la plus grande zone de développement économique potentiel de la planète » (1), opinion relayée par tous les interlocuteurs des entreprises françaises et étrangères implantées en Russie rencontrés à Moscou (2).

S'implanter en Russie reste cependant une gageure : les investisseurs étrangers subissent en effet des contraintes particulièrement fortes et spécifiques au marché russe qu'il serait illusoire de nier ou de minimiser. Il apparaît cependant tout aussi incohérent de conclure à l'impossibilité de faire des affaires "normalement" sur ce marché et de s'en détourner tant la Russie apparaît aujourd'hui incontournable aux yeux des prometteuses de ce pays de 150 millions d'habitants aux richesses multiples mais renforcent également la conviction selon laquelle la Russie ne doit pas cesser de réformer ses institutions et ses mécanismes de marché pour définitivement entrer dans une ère de progrès économiques et sociaux.

Ces réformes indispensables, la France peut et doit les accompagner. Le partenariat stratégique entre la Russie et la France, et entre la Russie et l'Union européenne, nous y encourage. La France dispose d'atouts non négligeables, sur un plan économique, mais également du point de vue juridique, pour aider le Gouvernement russe à adopter un cadre de régulation efficace et transparent de son économie et accélérer son intégration dans le commerce international. Les secteurs de coopération et les points de convergence entre la Russie et la France sont nombreux. Il convient de les mettre à profit afin d'œuvrer au renforcement de la présence française en Russie.

I.- LA FRANCE EST LE QUATRIÈME INVESTISSEUR EUROPÉEN EN RUSSIE : UNE PERFORMANCE MOYENNE
MAIS UNE IMPLANTATION SOLIDE ET DIVERSIFIÉE

A.- BILAN CHIFFRÉ DE L'INVESTISSEMENT DIRECT FRANÇAIS EN RUSSIE

1.- UNE PERFORMANCE MOYENNE...

D'après les chiffres transmis à votre Rapporteur par la Mission économique de Moscou, en 2001 les flux d'investissements directs étrangers (IDE) en provenance de France et à destination de la Russie se sont élevés à 46 millions d'euros. Si ce chiffre représente bien une baisse de 38 % par rapport à l'année 2000 (où nos investissements avaient atteint la somme de 74 millions d'euros), sur le long terme, il consacre le passage de la Russie à la 50ème place des pays destinataires d'IDE en provenance de France alors que celle-ci n'était encore que 194ème en 1999. En termes de stock d'IDE, la Russie se situe même au 28ème rang des investissements français avec un total cumulé de 649 millions d'euros en 2001 (4).

D'après le Goskomstat (comité d'Etat pour les statistiques de la Fédération de Russie), la France se classe ainsi à la 8ème place mondiale des investisseurs directs en Russie, après les Etats-Unis, les Pays-Bas, Chypre, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Japon et la Suisse, et à la 4ème place au niveau européen.

A titre de comparaison, on rappellera que d'un point de vue strictement commercial, la part de marché française se situe autour de 4,1 %, après avoir connu un bond de 30 % de ses exportations en 2001, retrouvant ainsi son niveau de 1997 (5). La Russie se classe ainsi comme notre 27ème client, le 2ème parmi les pays d'Europe centrale et orientale (PECO), derrière la Pologne et devant la République Tchèque, la Hongrie et la Roumanie. La part de marché française reste cependant loin des parts de marché allemandes (12,9 %) et américaine (7,9 %), se classant au 8ème rang mondial et au 5ème rang hors pays de la CEI, derrière l'Allemagne, les Etats-Unis, la Chine et l'Italie.

Même si la France talonne l'Italie en ce qui concerne ses exportations (4,1 % contre 4,8 % pour nos voisins transalpins), il s'agit là d'une petite déception d'autant que nos entreprises continuent d'être à la traîne des entreprises allemandes aussi bien en termes d'exportations que d'investissements. Cette question, soulevée à plusieurs reprises dans le cadre des entretiens menés à Moscou, appelle plusieurs types d'explications (6). Les entreprises allemandes sont traditionnellement plus exportatrices que les entreprises françaises et elles ont en outre toujours considéré la Russie comme leur « pré carré ». La Russie quant à elle bénéficie d'une bien meilleure image outre-Rhin qu'en France. S'agissant des autres pays, le rang de la Grande-Bretagne est essentiellement dû aux investissements de ses grands groupes pétroliers. Quant à la performance des Pays-Bas et de Chypre, il s'agit largement d'un effet visuel : nombre d'entreprises européennes ont en effet leur siège social aux Pays-Bas et la en Russie par le biais de leurs filiales. Les raisons du "détournement" de ces flux sont multiples. Elles peuvent être historiques ou sectorielles : ainsi BNP-Paribas est présent sur le marché russe des matières premières par le biais de la filiale suisse de la BNP qui intervient en Russie depuis 1872 ; certains spécialistes estiment par ailleurs que le droit anglo-saxon se prête plus aux activités de certains secteurs, comme celui des matières premières. Les principales explications sont toutefois d'ordre économique et fiscal : ainsi, comme indiqué précédemment, plusieurs entreprises françaises ont leur siège aux Pays-Bas, certaines interviennent également depuis Chypre par le biais de placements off-shore, d'autres encore choisissent l'Allemagne qui, outre des liens historiques étroits avec la Russie, a longtemps présenté l'avantage de bénéficier d'une convention bilatérale excluant la double imposition prévoyant la déductibilité des frais de marketing et de publicité, contrairement à la convention fiscale franco-russe  (8).

Ces remarques valent par ailleurs pour nos flux commerciaux. Ainsi, alors qu'en 2002, les douanes françaises ont observé une baisse de 30 % des exportations de médicaments vers la Russie, le niveau global des importations en Russie de médicaments produits par des entreprises pharmaceutiques françaises augmentait de près de 50 % : les flux avaient en effet transité par la Hongrie et la Finlande  (9).

Sur la base de ces observations, la Mission économique de Moscou s'est lancée dans un vaste chantier de calcul des flux d'IDE français afin de contrebalancer les chiffres de la Banque Centrale russe qui estime aujourd'hui à 375 millions de dollars le stock d'investissements français. En l'état actuel de ses travaux, la Mission économique de Moscou serait déjà parvenue à un chiffre plus proche des 500 millions de dollars sans compter les investissements de Total et hors flux en nature. Déjà, une étude menée en 2000 par les conseillers économiques de l'Union européenne sur la base des données des Etats membres avait constaté le fossé entre les statistiques du Goskomstat et les chiffres des pays européens, reflétant les lacunes en matière de saisie des flux par les douanes russes.

3.- ... DANS UN CONTEXTE D'INVESTISSEMENT FAIBLE ET TRÈS  SECTORISÉ

La place française s'inscrit dans un contexte d'investissement bien particulier et spécifique à la Russie parmi les pays émergents. En effet, d'après le Goskomstat, les flux d'IDE en Russie n'auraient atteint que 2,469 milliards de dollars en 2001, un chiffre dérisoire comparé, d'une part, aux quelque 100 milliards de dollars liés aux flux d'exportation et, d'autre part, aux sommes perçues par d'autres pays en développement comme la Chine, le Brésil et même la Pologne. Ces pays se situent en effet en 2001 aux 5ème, 11ème et 18ème places des pays destinataires d'IDE dans le monde, grâce à des flux d'IDE respectifs de 46,8, 22,5 et 9 milliards de dollars. La Russie s permanence des investissements engagés en Russie et surtout l'absence de grand mouvement de désinvestissement suite à la crise de 1998. Ce stock est aujourd'hui estimé à 21,795 milliards de dollars, soit environ 0,4 % des stocks d'IDE mondiaux  (12).

En 2001, la Russie se situait ainsi en 41ème position des pays destinataires d'IDE dans le monde et à la 2ème place seulement des pays de la Communauté des Etats indépendants, après le Kazakhstan (destinataire de 35 % des IDE en direction de la CEI). Sur l'ensemble des pays d'Europe centrale et orientale, la Russie n'a reçu en 2001 que 9,3 % des investissements directs réalisés dans cette zone. Ce phénomène n'est pas nouveau : d'après les statistiques de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), de 1989 à 2001, la Russie a été destinataire de 47 dollars d'IDE cumulés par habitant et par an contre 1401 dollars pour la moyenne des PECO (et 2615 dollars pour la seule République tchèque).

D'aucuns expliquent le faible niveau des IDE en Russie par le sort dévolu aux investisseurs étrangers dans la première phase de libéralisation de l'économie, sous la présidence de Boris Eltsine, qui diverge profondément des stratégies adoptées par les PECO. En effet, le processus de privatisation initié à la fin des années 1990 a suivi une logique de redistribution "interne" des actifs au profit d'une élite nationale (les oligarques) alors que les PECO s'engageaient dans une transition basée sur une large ouverture de l'économie aux investisseurs étrangers. L'image de la Russie a en outre pu souffrir de la crise de 1998, mais il est manifeste que les chiffres reproduits ici ne traduisent pas les bons résultats de l'économie russe et de la stratégie de relative libéralisation et d'ouverture mise en œuvre depuis l'arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir.

En outre, si l'on considère l'investissement en général en Russie, il présente non seulement un faible niveau global mais il apparaît également excessivement concentré sur un petit nombre de secteurs au premier rang desquels se trouvent l'extraction et la transformation du pétrole et du gaz ainsi que les produits pétroliers. D'après l'OCDE (13), le secteur des combustibles a ainsi été à l'origine de près de la moitié des investissements industriels russes en 2000. Cette situation reflète ainsi la dépendance persistante de l'économie russe vis-à-vis de l'énergie, premier secteur exportateur et premier contribuable du budget fédéral. Le niveau d'investissement dans ce secteur a en outre pour corollaire une faible diversification de l'économie russe liée à l'insuffisance des fonds consacrés à la restructuration des autres pans de l'économie et en particulier de l'industrie.

B.- MODALITÉS D'IMPLANTATION DES ENTREPRISES FRANÇAISES  EN RUSSIE

Au-delà des chiffres, la présence française en Russie se manifeste p align: justify">a) Une première prise de contact : le bureau de représentation et la succursale

- Le bureau de représentation

La création d'un bureau de représentation reste la forme privilégiée d'une primo-implantation en Russie. C'est donc sous cette forme que sont présentes les entreprises lorsqu'elles sont encore dans la phase exploratoire de leur implantation. Le bureau de représentation se définit en effet comme une entité séparée (dans l'espace) mais dépendante de la société mère et exclusivement chargée de promouvoir ses intérêts en Russie. La société mère assume l'entière responsabilité des actes du bureau de représentation dont le directeur agit sur la base d'une procuration donnée par cette dernière. En effet, le bureau de représentation ne dispose ni de la qualité de personne morale ni de moyens propres. Un bureau de représentation ne peut donc conclure de contrats en son nom et doit se contenter d'œuvrer à leur conclusion au nom de la société qu'il représente. Pour ce faire, la représentation peut exercer des activités de stockage de marchandises, de présentation et de livraison, elle peut également fournir des renseignements et faire de la publicité, mais toute activité de production lui est strictement interdite.

Une accréditation, payante, valable pour une durée maximale de trois ans renouvelable, est nécessaire à l'ouverture d'un bureau de représentation. Un rapport sur les activités du bureau doit être fourni tous les six mois à l'autorité d'accréditation. Le respect de formalités supplémentaires est en outre exigé si le bureau souhaite par exemple ouvrir un compte bancaire ou importer des marchandises de l'étranger. On soulignera à cet égard que la représentation qui se livre à des activités commerciales et réalise des profits est imposable en Russie : son statut change et devient moins favorable (fiscalité plus lourde et procédures de liquidation plus complexes).

- La succursale

La succursale se définit également comme une unité séparée de la société mère qui a une existence propre, tout en étant dépourvue de la personnalité morale : comme le bureau de représentation, elle est chargée de remplir certaines fonctions de la société mère qui peuvent comprendre des activités de représentation mais également, à la différence d'un bureau, des activités de production. Les modalités concrètes de création et de fonctionnement de la succursale diffèrent peu de celles du bureau de représentation. Son ouverture est également soumise à une procédure d'accréditation valable cinq ans et renouvelable.

b) La filiale : de plain-pied sur le marché

A l'opposé de l'ouverture d'un bureau de de leurs apports au capital social. La ZAO et l'OAO sont des sociétés dont le capital social est divisé en actions : entre elles, seuls diffèrent le nombre d'actionnaires autorisés, le montant du capital social minimum et les conditions de cession des actions.

Quelle que soit la configuration choisie parmi celles-ci, l'implantation peut prendre la forme soit d'une filiale à capitaux entièrement étrangers soit d'une joint-venture (14). Il est capital pour les investisseurs de bien comprendre et peser les enjeux de cette summa divisio avant tout lancement d'un projet en Russie. En effet, outre l'existence d'obligations strictes de notification, voire d'autorisation préalable au titre de la politique anti-monopole en cas de création d'une société de droit russe ou de prise de participation dans une société de droit russe, le principal inconvénient de ces formules réside dans la gestion du partenariat, lorsque partenaire il y a.

La majorité des interlocuteurs rencontrés par votre Rapporteur à Moscou s'accordent en effet à souligner les dangers des partenariats. Bien que le recours à cette formule s'avère parfois incontournable dans certains secteurs où les partenariats permettent un accès privilégié au marché, les divergences de vue entre partenaires conduisent cependant bien souvent à des paralysies difficilement surmontables en droit. Ainsi, s'agissant des OOO, la législation russe autorise tout associé à se retirer de la société, à tout moment et sans motif particulier, et à exiger le remboursement de la valeur réelle de sa part sociale. Elle permet également aux associés dont les parts représentent au total plus de 10 % du capital social de la société de solliciter auprès du tribunal l'éviction d'un associé dont ils estiment qu'il manque gravement à ses obligations ou rend particulièrement difficile, voire impossible, le fonctionnement de la société par ses actions ou par son inaction. Dans les faits, ces dispositions ont déjà été utilisées par des associés russes pour « expulser » un investisseur étranger.

Plus généralement, la législation russe confère à l'actionnaire minoritaire (celui qui détient au moins 25 % des droits de vote de la ZAO ou 33 % des droits de vote de l'OOO) un droit de blocage lui permettant le cas échéant d'empêcher l'assemblée générale de prendre la plupart des décisions importantes intéressant l'entreprise qui relèvent de sa compétence, comme par exemple la modification du statut ou du capital social, ou bien encore la réorganisation ou la liquidation de la société. Souvent préconisée par le partenaire russe qui souhaite se positionner sur un pied d'égalité avec son associé, une opération prévoyant la détention du capital à égalité au sein d'une joint-venture doit donc être mûrement réfléchie. Une détention des parts au-delà de 75 % apparaît nettement préférable. Les conflits entre associés ne sont pas rares en effet, d'autant que les opérateurs étrangers présents sur le marché russe estiment généralement que les visions de profits :

Dans le cadre d'un partenariat, l'option d'un contrôle exclusif entre 75 % et 100 % du capital est fortement recommandée, de même que la création d'une nouvelle société doit être préférée à une prise de participation dans une société existante en raison de l'opacité des informations disponibles sur les entreprises russes.

2.- DES FAIBLESSES CARACTÉRISTIQUES MAIS DE BELLES  RÉUSSITES INDIVIDUELLES

a) Une présence parfois plus faible que celle de nos partenaires européens...

D'après les interlocuteurs français et étrangers rencontrés sur place, l'implantation des entreprises françaises en Russie ne présenterait pas de spécificités marquées par rapport aux autres pays occidentaux. Votre Rapporteur estime cependant que plusieurs faits marquants doivent être relevés.

- Une présence globalement plus faible que celle de l'Allemagne

Eu égard à l'internationalisation des entreprises françaises en général, les chiffres d'investissement français et leur traduction dans l'implantation d'entreprises en Russie pourraient être meilleurs qu'ils ne le sont à l'heure actuelle. En effet, si l'on compare nos performances avec celle de l'Allemagne, on notera que celle-ci est trois fois plus présente que nous en Russie alors qu'elle l'est seulement deux fois plus au niveau mondial. D'après les données de la représentation commerciale russe en France, sur un total de 110 000 entreprises françaises présentes à l'international, moins de 4000 travailleraient avec la Russie (commerce et investissement confondus). Si, pour le conseiller économique de l'Ambassade d'Allemagne en Russie, les entreprises allemandes présentes en Russie ne se défendent pas mieux au plan individuel que les entreprises françaises, leur présence en plus grand nombre démontre toutefois qu'il existe bien moins de réticences à l'égard de ce pays en Allemagne qu'en France. De nombreux interlocuteurs ont en outre souligné le rôle positif pour les entreprises allemandes joué par la puissante "Union des entreprises allemandes" qui remplit à la fois les fonctions d'une chambre de commerce et d'industrie et le rôle d'un lobby auprès des autorités russes (15). La France, elle, ne dispose pas de structure ad-hoc et doit se contenter de s'exprimer par la voix de l'European Business Club (16). Il existe bien un « Club France » mais il s'agit là essentiellement d'une structure « amicale » d'information et d'échanges entre opérateurs français.

Préconisation 2 :

Les entrepreneurs français auraient tout intérêt à se regrouper pour créer une structure de lobbying sur le modèle de l'Union des entreprises allemandes décevant que sur les 3 000 PME réputées exporter vers la Russie (sur un total de 3 800 entreprises françaises présentes sur ce marché) qui assurent tout de même 48 % du montant global des ventes françaises en Russie  (17), il ne s'en trouve pas plus pour se lancer dans une implantation en Russie.

Préconisation 3 :

Les pouvoirs publics, en lien avec les organisations professionnelles, devraient organiser des actions spécifiques d'information sur le marché russe en direction des PME françaises.

- Une présence quasi-inexistante en régions

Si, quelle que soit leur origine, les IDE en Russie restent très concentrés géographiquement sur les régions de Moscou et de Saint-Pétersbourg, les entreprises étrangères, notamment allemandes et italiennes, semblent plus ouvertes aux investissements en régions que les entreprises françaises. L'Italie dispose même de plusieurs représentations en régions alors que la France a supprimé les siennes, ne maintenant que quelques Alliances (18). Or, pour certains, les régions russes représentent un potentiel énorme pour l'heure inexploité. La plupart des investisseurs français semblent cependant estimer qu'investir en région demeure trop risqué étant donné l'insuffisance des informations disponibles sur les conditions de développement de l'activité et la survivance de régimes particuliers d'investissement. Ivan Prostakov, représentant commercial de la Fédération de Russie en France, plaide toutefois pour la diffusion d'une meilleure information sur les régions russes en France ainsi que pour la mise en œuvre de coopérations régionales entre la France et la Russie susceptibles d'inciter les entrepreneurs français à s'intéresser au développement régional de la Russie.

Préconisation 4 :

Un cadre de coopération interrégional devrait être établi entre la France et la Russie

En tout état de cause, aux yeux des investisseurs français présents à Moscou, la faiblesse relative de l'implantation française reste compensée par la présence et la réussite en Russie de presque tous les grands groupes français. Il est vrai que cette présence qui s'affirme aujourd'hui dans de nombreux secteurs a su résister à la crise de 1998 et porte en germe des développements prometteurs.

b) ... compensée toutefois par des réussites notables dans des secteurs diversifiés de l'économie russe

- Dans le secteur énergétique

A ce jour, la Russie dispose de 45 % des réserves mondiales prouvées de pétrole hors OPEP et Etats-Unis ; elle est devenue en 2002 le premier producteur mondial devant l'Arabie Saoudite. L'énergie pétrolière joue un rôle prépondérant dans l'économie russe en tant que principal secteur exportateur et principal contributeur au budget fédéral. Les projets développés par les investisseurs, étrangers ou nationaux, sont donc sous haute surveillance. Dans le cadre imposé des contrats de partage de production dits « production sharing agreements » dont l'objet est de définir le partage des bénéfices de l'exploitation d'un gisement entre la compagnie pétrolière, l'Etat fédéral et le gouvernement local, les autorisations d'exploitation (de niveau législatif) sont octroyées au cas par cas (19). Dans ce contexte, Total est présent en Russie depuis 1995 : en 2001, il était le premier importateur occidental de pétrole russe. La concurrence locale et étrangère a cependant un poids non négligeable qui tend en outre à se renforcer (20). A cet égard, le contrat de partage de production apparaît comme un outil archaïque, permettant aux autorités publiques de peser sur les décisions économiques, ce qui peut se révéler une source de blocages importante (notamment en cas de conflit entre autorités fédérales et locales (21)). Cette situation contribue d'ailleurs à renforcer l'attractivité des ex-républiques soviétiques des bords de la Caspienne, plus souples dans leur politique d'exploitation et plus ouvertes à la présence des compagnies étrangères.

Les secteurs de l'électricité et du nucléaire restent en grande partie fermés aux investisseurs étrangers. Dans le domaine du nucléaire, Areva est toutefois présent en Russie, sans engagement capitalistique pour le moment, mais développant les échanges scientifiques et commerciaux dans la perspective de prendre part ultérieurement aux importantes restructurations qui devront être menées à bien dans ce secteur. Dans le domaine de l'électricité, malgré des évolutions liées &a href="#P213_37796" name="P213_37797">23), il connaît peu de développements du côté des investissements directs, outre la réalisation majeure de Starsem en 1996, société à capitaux conjoints créée par le centre spatial de Samara, l'agence aéronautique et spatiale russe, EADS et Arianespace afin de commercialiser le lanceur spatial Soyouz. Des collaborations ponctuelles existent toutefois sur certains projets (Alcatel avec NPO-PM, Sextant et Snecma avec MIG), de même que des partenariats industriels.

La France connaît en revanche des réalisations plus concrètes dans le secteur automobile, grâce à Renault. Le marché automobile russe présente des perspectives de croissance impressionnante avec un parc avoisinant les 15 millions de véhicules seulement pour une population de 150 millions d'habitants  (24). 400 000 véhicules légers se sont vendus en Russie en 2002, marquant une croissance importante des ventes de marques étrangères (+ 54 %). Renault occupe ainsi la troisième place parmi les marques importées en Russie. Après avoir connu des années difficiles, notamment dans sa relation avec son partenaire, la mairie de Moscou (25), Renault vient d'annoncer son passage au stade de l'implantation industrielle en investissant 230 millions d'euros dans la réalisation d'une usine destinée à la production d'un modèle de véhicules spécialement conçu pour la classe moyenne russe. L'usine devrait entrer en fonction en 2005 et permettre d'assembler jusqu'à 60 000 véhicules par an à partir de 2007. Renault qui détient actuellement 62 % des parts d'Avtoframos, société conjointe qu'elle a créée avec la mairie de Moscou en 1998, compte maintenant augmenter sa participation jusqu'à 75 %. L'entreprise française a en outre en projet de faire venir des sous-traitants pour pallier l'intégration excessive du tissu industriel russe qui ne lui permet pas d'avoir accès aux fournisseurs locaux.

Dans la lignée de l'industrie automobile, on notera également la présence en Russie de Michelin, premier importateur de pneumatiques (et premier contributeur des douanes), qui se lance lui aussi aujourd'hui dans une implantation industrielle d'envergure (création d'une usine et d'un village pour expatriés à une centaine de kilomètres de Moscou) après avoir commencé par ouvrir un bureau de représentation il y a dix ans. D'après Yves Caux, représentant général de Michelin en CEI, cette implantation, lancée en 2001 et qui devrait être effective en 2003, a été rendue nécessaire pour concurrencer les trois grands groupes pétrochimiques russes présents sur le marché.

On notera également la réussite de Schneider Electric : présente commercialement en ex-URSS depuis les années 1970, l'entreprise a ouvert un bureau de représentation dans les années 1980 avant de créer sa filiale en 1997. Ayant su résister à la crise grâce à une réduction de son activité et à la dévaluation du rouble, Schneider Electric profite aujourd'hui de la croissance de la demande de biens d'équipement que M. Pierre Leveque, directeur général CEI, estime à 30-35 % annue problème de la contrefaçon et de la violation des droits de la propriété intellectuelle : d'après les entreprises du médicament, les produits contrefaits représenteraient aujourd'hui 12 à 15 % du marché et affecteraient 30 % des importations soit une perte annuelle estimée à 34 millions de dollars  (26).

Enfin, le secteur agroalimentaire présente également de bons résultats, plusieurs groupes agroalimentaires françaises étant présents en Russie, au premier rang desquels Danone. Implanté en Russie depuis le milieu des années 1990 par le biais d'une filiale détenue conjointement avec la BERD, Danone-Bolchevik (du nom de la biscuiterie russe rachetée par le groupe) détient désormais plus de 10 % du marché russe et vient de prendre une participation minoritaire dans le groupe russe Wimm Bill Dann, leader sur le marché des jus de fruits et produits laitiers  (27). On citera également Bonduelle, Lactalis et Pernod-Ricard, dont la filiale qui emploie 120 personnes représente 30 % du marché des spiritueux en Russie (40 %, hors vodka). S'agissant de Bonduelle, première marque de conserve en Russie, elle est implantée à la fois sous la forme d'un bureau de représentation chargé de la promotion des ventes de ses produits (qui sont assurées par des importateurs locaux) et d'une société de droit russe (OOO) détenue à 100 % qui s'essaie à la production de maïs doux. Bonduelle a en effet décidé de créer sa propre filiale de production après avoir connu de nombreux problèmes d'approvisionnement en matière première. La filiale assure le financement des activités de production et fournit le matériel agricole mais son développement reste contraint par les incertitudes de la législation concernant le statut des entreprises agricoles et la propriété de la terre.

- Le commerce et les services

Malgré la restructuration qu'a connu le secteur bancaire russe depuis la crise de 1998, celui-ci reste de taille étroite et souffre encore de la méfiance de la population alors qu'il ne dispose pas réellement d'instruments propres à stimuler l'épargne et jouer son rôle de redistribution des richesses et de financement de l'économie. Les crédits à l'économie ne dépassent pas 15 % du PIB et moins de 10 % des investissements des entreprises sont financés par prêts bancaires. Cet espace laissé libre par les banques russes, de grandes banques françaises et étrangères l'ont investi. Malgré les pertes subies pour certaines d'entre elles lors de la crise de 1998, aucune filiale de banques occidentales n'a cessé ses activités en Russie (28). Il en existe actuellement 24, dont quatre filiales de banques françaises, la Société Générale, le Crédit Lyonnais, Natexis-Banques Populaires et BNP Paribas. BNP-Paribas, présente depuis très longtemps en Russie sur le créneau du financement des principaux secteurs de l'économie, est passée du bureau de représentation à la filiale en 2002. Quant à la Société Générale, elle a récemmen l'arrivée précoce de concurrents européens (l'allemand Métro et le turc Ramstore), la France se lance enfin à l'assaut du secteur de la grande distribution en Russie par le biais d'Auchan. L'entreprise s'est implantée en Russie en 2002, ouvrant 2 hypermarchés à la périphérie de Moscou et prévoyant l'ouverture d'un troisième site pour 2003. Auchan estime ne pas souffrir de la concurrence sur un marché atomisé, malgré la présence de quelques 130 supermarchés  à Moscou et dans la banlieue (29). Les marges dans le secteur sont toutefois très faibles, mais le coût du personnel est maintenu à un niveau relativement bas (le salaire moyen se situe autour de 10 000 roubles mensuels). La création de supermarchés bénéficie en outre de l'appui des autorités qui souhaitent moderniser les circuits de distribution en supprimant les marchés de plein air.

Enfin, on signalera également d'autres succès importants, dans l'industrie (Saint-Gobain, Arcelor), dans le domaine de la logistique (Daher, Faure et Machet), des médias (Hachette Filipacchi, Lagardère), du BTP (Bouygues Construction) et du conseil juridique (bureau Francis Lefebvre, cabinet Salans).

II.- L'ATTRACTIVITÉ ET LES DIFFICULTÉS
DU MARCHÉ RUSSE  : MYTHES ET RÉALITÉS

A.- LE CHOIX PROCLAMÉ DE LA RUSSIE EN FAVEUR DE  L'ECONOMIE DE MARCHÉ

1.- UNE VOLONTÉ AFFICHÉE DE S'INSÉRER DANS L'ÉCONOMIE  MONDIALE DONT LES RÉSULTATS SE FONT ENCORE ATTENDRE

a) Une collaboration graduelle avec les grandes puissances économiques mondiales

- G7 / G8 : La Russie est associée aux réunions du G7 depuis plusieurs années déjà. Lors du sommet de Kananaskis en 2002, elle a obtenu, sur proposition de la France, la présidence du G8 en 2006, ce qui signifie son admission en tant que membre à part entière au sein du G8. Bien que le "G7 Finances" ne doive pas être totalement ouvert à la Russie dans un premier temps (elle continuerait d'y être associée au cas par cas), cette décision revêt une importance capitale pour l'image et le positionnement de la Russie au sein des grandes puissances mondiales.

- GAFI (Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux) (30) : le renforcement de la législation russe sur le blanchiment d'argent (adoptée à l'unanimité par la Douma) ainsi que le renouvellement des instruments indispensables à la lutte contre les réseaux (nomination d'un nouveau gouverneur de la Banque centrale, mise aux standards Tracfin...) ont permis au GAFI de retirer la Russie de la "liste noire" des pays et territoires non coopératifs en octobre 2002. La Russie a ensuite obtenu le statut d'observateur au GAFI en février 2003 avant de devenir son trentième membre en juin.

b) Une adhésion à l'Organisation mondiale du commerce loin d'être acquise

- OMC : la Russie a formellement demandé son admission à l'OMC dès 1995 (alors qu'elle avait déjà fait acte de candidature au GATT en 1993) mais les négociations ont réellement pris corps après que le Président Poutine a rangé l'adhésion aux rangs des priorités de la Russie. La perspective d'une accession de la Russie à l'OMC à l'horizon 2004-2005 est communément retenue malgré la volonté initiale des Russes de voir l'affaire réglée lors du sommet de Cancun (septembre 2003). Certaines négociations devraient en effet s'avérer difficiles notamment sur la question du prix interne de l'énergie considéré comme une subvention déguisée à l'industrie par l'Union européenne et les Etats-Unis, principaux partenaires de négociation de la Russie. Il devrait toutefois s'avérer délicat pour la Russie de faire accepter immédiatement une hausse des tarifs dans ce secteur tant pour des raisons politiques que sociales. Des améliorations de l'offre russe sont également attendues dans le secteur agroalimentaire et dans les services concernant respectivement les soutiens apportés aux producteurs russes et les restrictions dans l'accès au march& nécessité de protéger certains segments de l'économie encore en restructuration comme l'industrie automobile ou la filière agroalimentaire, qui pâtissent déjà à l'heure actuelle du flux des importations étrangères qui fournissent 43 % des ventes au détail (31). Toutefois, si de nombreux pans de l'économie russe risquent de souffrir de l'adhésion à l'OMC, celle-ci fait figure d'ultime stimulation poussant la Russie à entreprendre la modernisation des secteurs encore protégés de son économie. Ces évolutions nécessaires seront par ailleurs rendues plus aisées par le fait que la Russie bénéficiera parallèlement d'un accès facilité aux marchés étrangers par l'extension de la clause de la nation la plus favorisée, de l'abandon des procédures anti-dumping à son encontre et de la possibilité d'avoir recours aux procédures multilatérales de règlement amiable des différents commerciaux. Enfin, l'adhésion de la Russie à l'OMC constituerait un signal fort en direction des investisseurs étrangers.

Préconisation 5 :

La France doit encourager la Russie à poursuivre ses efforts pour s'insérer dans l'économie mondiale en achevant au plus tôt les négociations en cours dans le cadre de l'OMC.

c) Un partenariat avec l'Union européenne qui ne va pas sans heurts

Avec 38 % du flux total d'IDE, l'Union européenne est le premier investisseur en Russie. Face au processus d'ancrage des anciens pays de l'Est à l'économie européenne, la Russie a donc tout intérêt à collaborer avec l'Union européenne (32). La prise de conscience des intérêts communs qui unissent l'Union européenne et la Fédération de Russie s'est traduite par un rapprochement entre les deux entités, rapprochement accentué par l'arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir. C'est d'ailleurs ce dernier, alors Premier ministre, qui avait présenté aux Quinze la « Stratégie de développement des relations de la Russie avec l'Union européenne » en octobre 1999, lors du sommet d'Helsinki. Propulsée « deuxième priorité régionale » de la politique étrangère russe après l'accession de M. Poutine à la présidence de la Fédération, l'Union européenne a, à son tour, fait un geste significatif en direction de son partenaire en lui reconnaissant le statut d'économie de marché lors du sommet Union européenne-Russie du 22 mai 2002, devançant en cela les Etats-Unis  (33). Cette décision, entrée en vigueur en novembre 2002, devrait grandement faciliter le commerce des produits russes vers l'Europe, mais ce geste de l'Union européenne constitue surtout un signe d'encouragement important à l'adhésion de la Russie à l'OMC.

Les relations entre l'Union européenne et la Russie s'inscrivent dans un cadre institutionnel stable, forgé depuis la fin des années 1990. L'Accord de partenariat et de coopération signé le 24 juin 1994 à Corfou et entré en vigueur le 1er décembre 1997 pose ainsi les bases d'une future zone de libre échange entre l'Union européenne et la Russie : octroi du traitement de la nation la plus favorisée pour la Russie, suppression par la Communauté européenne des restrictions quantitatives aux échanges (sauf protections particulières : acier, matières nucléaires), mise en place d'un calendrier d'harmonisation des législations sur la concurrence et la propriété intellectuelle. La Russie bénéficie donc aujourd'hui d'un large accès au marché communautaire. La stratégie commune envers la Russie adoptée lors du sommet de Cologne (juin 1999) a renforcé encore les objectifs de l'Accord de partenariat et de coopération, l'Union se fixant pour but la création d'un espace économique européen commun. Un groupe de travail de haut niveau a été créé à cet effet en mai 2001 et des sommets entre la « troïka » européenne et le Président russe sont en principe organisés tous les six mois. Malgré des avancées concrètes plutôt faibles, le concept d'espace écono par an) et TACIS (enveloppe de 360 millions d'euros pour la période 2000-2003)  (34).

Les autorités russes appellent régulièrement à un renforcement du partenariat mais s'inquiètent également des avancées du processus d'élargissement qui leur font craindre une éviction du marché des pays d'Europe centrale et orientale (PECO). En outre, en dépit de l'accord sur le transit à Kaliningrad (novembre 2002) et des avancées récentes sur la question des visas (sommet de Saint Pétersbourg, mai 2003), des incompréhensions de fond demeurent. Le dialogue russo-européen souffre en effet de l'absence de diagnostic commun sur la Russie au niveau des Quinze et de la forte réticence des pays candidats à collaborer plus étroitement avec leur puissant voisin. Certains observateurs décèlent également du côté russe une absence de véritable reconnaissance du rôle joué par l'Union européenne et une préférence marquée pour les relations bilatérales avec les Etats qui la composent.

Les relations commerciales entre l'Union européenne et la Russie restent par ailleurs tendues. L'Union européenne a en effet consenti de nombreuses concessions à la Russie, notamment en lui reconnaissant le statut d'économie de marché, alors que subsistent plusieurs différends commerciaux sérieux liés à la persistance d'entraves à l'accès au marché russe pour les entreprises européennes (surtaxation de certains produits importés, multiplication des délais et des frais de dédouanement, absence de protection des droits de la propriété intellectuelle). Parallèlement, certaines importations russes font l'objet de mesures anti-dumping décidées par les instances communautaires afin de protéger les entreprises européennes contre des pratiques commerciales jugées déloyales. L'Union européenne a même engagé dans certains cas des procédures de sanction (limitation du contingent d'importation de produits russes). La Russie serait ainsi le 4ème pays impliqué dans ce type de procédures, derrière la Chine, l'Inde et Taïwan, mais leur nombre serait désormais en recul (35).

2.- LA DIFFICILE MISE EN œUVRE DES RÉFORMES STRUCTURELLES

a) Principe et méthode ou comment se débarrasser des oripeaux de l'économie soviétique ?

Les premières mesures de "conversion" de l'économie russe au capitalisme mises en œuvre sous la présidence de Boris Eltsine avaient pour unique vecteur les privatisations. Celles-ci se sont déroulées en dehors de tout cadre légal et transparent et ont permis à une minorité de personnes bien placées et bien informées de prendre possession de nombreux actifs, pour un prix dérisoire. Après une décennie chaotique qui s'est achevée par la crise financière de 1998, l'arrivée au pouvoir du Président Poutine a coïncidé avec une relance des réform name="P260_60038">36) au sein de groupes de travail portant sur divers sujets sensibles (fiscalité, douanes, normes comptables, etc.), le FIAC a été consulté par les autorités russes sur un certain nombre de réformes. Le Gouvernement russe semble également ouvert aux actions menées par les nombreuses associations de défense des intérêts des entreprises étrangères implantées en Russie (European Business Club, Union des entreprises allemandes, Chambre de commerce américaine, toutes structures par ailleurs membres du comité de direction du FIAC). Il convient toutefois de signaler que plusieurs interlocuteurs rencontrés à Moscou se sont montrés sceptiques sur la réelle participation de ces instances aux réformes en cours, estimant que leur présence servait essentiellement d'alibi au pouvoir russe, lui permettant ainsi à la fois d'améliorer son image à l'extérieur de la Russie et de justifier sur le plan intérieur la mise en œuvre des réformes indispensables.

Si dans sa dernière livraison sur la Russie (37), l'OCDE estime impressionnant le bilan du gouvernement russe dans le domaine de la réforme structurelle, la quantité de textes adoptés ne doit pas masquer les insuffisances des réformes économiques intéressant les investisseurs étrangers, notamment sur le plan fiscal et administratif.

b) Des réformes bien engagées mais inachevées

- La réforme du droit du travail : en vigueur depuis le 1er février 2002, le nouveau code du travail remplace le code soviétique de 1971 qui n'avait subi que quelques modifications dans les années 1990. Il consacre un assouplissement des règles relatives au recours aux contrats à durée déterminée et à l'aménagement du temps de travail, mais reste très protecteur des droits des salariés et strict en matière de conditions de travail. Les opérateurs présents en Russie estiment à cet égard que ce nouveau code est en fait très proche du code du travail français, tout en soulignant qu'il fait l'objet d'une plus grande souplesse dans son application. La quasi-absence de syndicats et leur rôle s'apparentant plus à celui d'un comité d'entreprise exclusivement chargé d'organiser les loisirs et la vie culturelle du personnel sont une donnée actuelle des relations collectives.

- La réforme fiscale : l'adoption en 2001 du nouveau code des impôts a permis un allégement significatif de la pression fiscale à la fois pour les personnes physiques (fixation de l'impôt sur le revenu à un taux unique de 13 %) et pour les entreprises (réduction de l'imposition sur les bénéfices des sociétés de 35 % à 24 %, élimination de nombreuses taxes assises sur le chiffre d'affaires, création d'un impôt social unique rassemblant les diverses cotisations aux fonds de sécurité sociale). Cette réforme, qui a contribué à accroître la lisibilité du système fiscal russe, semble avoir répondu aux souhaits des investisseurs étrangers pour lesquels la fiscalité apparaissait auparavant comme l'obstacle - La réforme foncière : adoptée en deux volets à l'automne 2001 et à l'été 2002, la réforme foncière constitue une avancée en demi-teinte. Son premier volet libéralise les transactions sur les terres urbaines à usage industriel et commercial qui ne représentent toutefois que 2 % des terrains de la Fédération de Russie. Le deuxième volet du nouveau code foncier permet la libre propriété, l'usage et la vente par les personnes morales et physiques des terres agricoles qui représentent 24 % du territoire russe mais limite ces dispositions aux nationaux. Les investisseurs étrangers font dans ce domaine l'objet d'une véritable discrimination : il est en effet interdit aux personnes physiques et morales étrangères ainsi qu'aux personnes morales russes détenues à plus de 50 % par des étrangers de se porter acquéreur de terres agricoles. Les investisseurs étrangers ne peuvent exploiter de terres agricoles que sur la base d'un contrat de bail accordé pour une période maximale de 49 ans. On soulignera en outre que la loi impose d'utiliser les terres agricoles à des fins strictement agricoles et octroie aux autorités locales des pouvoirs exorbitants en matière de transaction (droit préférentiel pour l'achat des terres et droit de fixer une taille maximum des surfaces de terrains détenus par une même personne physique ou morale). Aucun dispositif d'enregistrement et de suivi des transactions foncières n'a en outre été mis en place  (38).

Préconisation 6 :

Si l'objectif de la réforme foncière est bien de sélectionner les producteurs les plus à même de permettre la restructuration et la croissance du secteur agricole russe, alors les investisseurs étrangers ne devraient pas être écartés de ce processus par des mesures discriminatoires. La France doit défendre cette position auprès des autorités russes.

- Un code sur le gouvernement d'entreprise a été établi en 2002 qui constitue en fait un recueil de bonnes pratiques qu'il est recommandé aux entreprises d'adopter sans que ces préconisations aient force de loi. Cette initiative répond là aussi aux souhaits des investisseurs étrangers confrontés à des difficultés pour obtenir des informations correctes et pertinentes sur les entreprises russes ainsi qu'à diverses pratiques de manipulation des actifs notamment par le biais de faillites fictives et de participations croisées. Toutefois, la traduction concrète de la volonté du Gouvernement en la matière se révèle un peu faible. Celui-ci a néanmoins annoncé par ailleurs la réalisation d'un plan de réforme des normes comptables russes destinées à être remplacées par les normes internationales (International Accounting Standards) dès 2004 pour les entreprises et les banques, en 2005 pour les holdings et en 2008 pour les autres compagnies.

- La réforme du cadre réglementaire de l'activité économique a pour objectif de limiter les procédures administratives lourdes et complexes applicables aux échanges commerciaux (douanes, certification) et à la création d'entreprise (licences). Le Gouvernement russe espère ainsi réduire le pouvoir excessif de la bureaucratie qui constitue une barrière importante au développement des affaires, non seulement pour les investisseurs étrangers, mais également pour les petits entrepreneurs russes. Le programme de réforme lancé en 2001 a donc visé en premier lieu à alléger le cadre réglementaire de l'investissement : unification et réduction des droits de douane ; réduction du nombre d'activités nécessitant une licence et création d'un "guichet unique" pour l'enregistrement des licences ; mise au point de nouvelles procédures de certification des produits et création de listes de « produits sûrs » exemptés de ces procédures ; encadrement des inspections décidées par l'administration et création de voies de recours en cas d'abus de pouvoir (avec possibilité d'indemnisation des pertes subies) (39). Cette tentative de dé-bureaucratisation de l'économie est à saluer mais ses résultats concrets sont loin d'être suffisants. Comme le souligne l'European Business Club dans son livre blanc 2002, la multiplication de règles inutiles imposées à tout projet d'investissement et l'application de ces règles par la bureaucratie continuent de représenter la source majeure des problèmes rencontrés sur le marché russe.

3.- UNE CONJONCTURE MACROÉCONOMIQUE PLUTÔT FAVORABLE

La intérieur (les produits nationaux se substituant aux importations devenues trop coûteuses). Ainsi, depuis l'automne 1998, le PIB a augmenté d'un quart en volume et la production industrielle d'un tiers (40). Parallèlement, l'OCDE estime que la Russie est passée d'un déficit courant de 6 milliards de dollars en 1998 à un excédent de plus de 45 milliards de dollars en 2000. L'important excédent commercial (qui représentait 25 % du PIB en 2000) ainsi que l'amélioration des rentrées fiscales ont rendu en outre possible le dégagement d'un excédent budgétaire élevé (autour de 3 %) ainsi qu'un allégement du fardeau de la dette (rachat par anticipation d'une partie de la dette et création d'un fonds de réserve). La croissance est donc allée de pair avec un assainissement des finances publiques et une remonétisation de l'économie  (41).

Si l'excédent de la balance courante a entraîné une accumulation de réserves de change par la banque centrale, rendant possible le remboursement anticipé de la dette (42), il a également eu pour contrepartie des sorties nettes de capitaux élevées correspondant à des flux d'investissements légaux, quasi-légaux voire illégaux à l'étranger (ces derniers étant estimés par l'OCDE entre 14 et 25 millions de dollars). En outre, la Banque centrale s'est révélée incapable de stériliser tout l'afflux de devises et d'empêcher l'inflation d'atteindre des niveaux relativement élevés (18,6 % en 2001 et 15,1 % en 2002).

Ainsi, dès 2001, on assiste à une appréciation du rouble en termes réels, qui se rapproche de son niveau d'avant la crise, et à une inflation des coûts pour les entreprises, mettant un terme à l'expansion de la production industrielle, d'où le regain des importations. D'après les données de la Mission économique de Moscou, celles-ci ont progressé de 11,8 % en 2000, 19 % en 2001 et 13 % en 2002 afin de satisfaire une demande intérieure en augmentation constante grâce à la hausse des salaires réels (qui dépassent désormais leur niveau de 1997) et à la chute du chômage, au plus bas depuis le début des années 1990 (environ 6 %). La croissance de la consommation se situe autour de 9 % annuels, mais l'investissement atteint à peine les 2,5 %. C'est donc essentiellement les facteurs extérieurs et plus particulièrement l'augmentation des prix internationaux de l'énergie et des matières premières qui ont pris le relais de la croissance (qui s'est maintenue autour de 5 % en 2001 et 2002) et permis à la Russie de préserver ses revenus (43).

b) ... qui laisse toutefois subsister des doutes sur les fondamentaux de la croissance russe

Malgré un certain ralentissement de la croissance et la disparition progressive des facteurs ayant entraîné le rebond économique consécutif à la crise, les résultats affichés par la Russie restent bons. Ainsi, dans son rapport 2002 s en cas de chute brutale des cours du pétrole. La dépendance de la Russie vis-à-vis des cours des matières premières sur les marchés internationaux s'est renforcée ces dernières années et fait craindre que la Russie ne tombe dans le « piège de la rente ». En effet, les secteurs pétroliers et gaziers absorbent encore la plus grande part des investissements en Russie et les prix élevés de l'énergie sur les marchés mondiaux, en favorisant une amélioration de la conjoncture économique, contribuent à masquer la nécessité des réformes économiques. A cet égard, d'aucuns s'inquiètent déjà d'une surévaluation de la bonne santé de l'économie russe qui s'est d'ores et déjà traduite par une chute importante de la prime de risque sur les emprunts d'Etat et par un engouement des investisseurs pour la dette privée russe (45).

Comme le souligne la BERD, un des défis les plus importants qui attend désormais la Russie est la réduction de la dépendance vis-à-vis des secteurs pétroliers et gaziers et la diversification de son économie. Malgré des résultats satisfaisants à l'heure actuelle, il apparaît que la poursuite de la croissance sur le long terme ne sera possible que si les restructurations indispensables au renforcement de la compétitivité de l'industrie russe ainsi que les réformes structurelles nécessaires à la création d'un environnement globalement plus propice à l'initiative privée et aux investissements sont mises en place.

B.- DES RÉSULTATS JUGÉS INSUFFISANTS PAR LES ACTEURS DU  MARCHÉ

Malgré une appréciation plutôt positive des réformes engagées par le Président Poutine et de la situation macroéconomique de la Russie, l'OCDE décelait en février 2002 plusieurs indices laissant présager un diagnostic plus sombre de l'environnement des entreprises et de l'investissement : fortes sorties nettes de capitaux, investissement intérieur faible, en dehors du pétrole et du gaz, petit nombre d'entreprises privées de taille moyenne, etc.

Ce dernier point apparaît particulièrement pertinent pour juger des progrès soi-disant accomplis par la Russie pour s'insérer dans l'économie de marché. Il contraste en tout cas singulièrement avec les pays d'Europe centrale et orientale et la plupart des pays en transition où les progrès économiques se sont généralement mesurés à l'aune du développement des petites et moyennes entreprises qui se situent souvent à l'avant-garde du secteur privé naissant. Ce n'est pas le cas en Russie et il est à cet égard intéressant de constater combien les obstacles rencontrés par les petits entrepreneurs russes pour créer et surtout faire subsister leur entreprise se rapprochent de ceux expérimentés par les investisseurs étrangers (46).

1.- UN ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES QUI RESTE TRÈS DIFFICILE

a) Un cadre juridique instable et sur-réglementé...

Les investisseurs étrangers, mais également les entrepreneurs locaux, sont tout d'abord confrontés à une production exponentielle de normes et de procédures dans laquelle il est difficile de ne pas se perdre. D'après un interlocuteur français, toute initiative économique impliquerait ainsi le choix du "régime de la loi sous laquelle on se place". Or, l'existence même d'un tel choix démontre qu'un investisseur n'est in fine jamais tout à faire sûr de respecter la loi lorsqu'il lance une opération. A cette incertitude fondamentale, s'ajoute a contrario une « somme de tracasseries et de règles à la fois incompréhensibles et incontournables » selon les termes d'un investisseur français, qui constituent autant de barrières administratives au bon développement de l'activité économique. On peut ajouter à ceci que l'administration a conservé un comportement bureaucratique, qui se traduit souvent par des contrôles tatillons et des exigences superfétatoires, n'ayant parfois d'autre but que de lui permettre de remplir les objectifs quantifiés qui lui ont été assignés. Ces comportements ont évidemment des conséquences en termes de délai et de coût pour les entreprises. Ils peuvent s'avérer particulièrement lourds dans certains secteurs, comme la banque, mais, globalement, ils touchent tous les domaines de la vie économique.

S'agissant par exemple des douanes, les entreprises françaises continuent de déplorer l'opacité et la lenteur des procédures ainsi que certains comportements arbitraires. Cette tendance s'est renforcée lorsqu'en février 2001, des procédures plus lourdes de dédouanement ont été mises en place afin de lutter contre les importations frauduleuses : entraînant la réduction du nombre de terminaux de dédouanement (de 350 à 70 à Moscou), ces mesures ont conduit à un nouvel allongement des délais des entreprises et à une augmentation importante de leurs frais. Parmi les problèmes graves et persistants dans ce secteur, l'European Business Club note en outre dans son livre blanc 2002 le manque de transparence et de prévisibilité des procédures, le code douanier laissant encore une grande place aux décisions discrétionnaires. Il recommande en conséquence la création d'une autorité administrative indépendante pour superviser le fonctionnement des douanes, faire des recommandations aux autorités et instruire les plaintes des entreprises.

La France doit soutenir la Russie dans sa politique de lutte contre la fraude tout en plaidant pour que le point de vue des investisseurs implantés de longue date soit entendu. A cet égard, il serait utile d'insister sur l'intérêt de mettre en place des "listes blanches" d'importateurs recensant les opérateurs réputés honnêtes et dispensés des procédures de contrôle douanier renforcé.

Mais c'est principalement dans le domaine des formalités de création d'entreprises et d'importation de produits que les exigences de la législation russe paraissent hors de proportion. L'OCDE rapporte ainsi que selon des évaluations réalisées en 2001, la Fédération de Russie compterait près de 2000 différents types de licences (48). De même, les procédures de certification des produits apparaissent à la fois disproportionnées et inutiles : toujours selon l'OCDE, 80 % des produits en circulation en Russie feraient l'objet d'une certification mais d'après l'European Business Club, 70 % des certificats en circulation ne seraient pas conformes à la réglementation, voire seraient en réalité des faux. A titre d'exemple, on notera qu'en décembre 2002, le Gouvernement russe a décidé d'une nouvelle mesure destinée à lutter contre la contrefaçon : imposer la certification des médicaments commercialisés en Russie. Cette mesure a pour l'heure rendu plus difficile et plus coûteux l'accès au marché russe pour les entreprises étrangères mais il est peu probable qu'elle ait réellement permis de lutter efficacement contre ce fléau (dont les entreprises étrangères sont les premières victimes), comme en témoignent les chiffres exponentiels dans ce secteur. Enfin, on signalera également que la coexistence de plusieurs organismes de certification (49), dont les compétences peuvent se recouper, multiplie les démarches à accomplir tout en constituant une source potentielle de remise en cause des autorisations déjà acquises.

Préconisation 8 :

La France doit demander une réduction de la liste des produits soumis à certification ainsi qu'une limitation des procédures de contrôle ; l'harmonisation des normes européennes et russes devrait être considérée comme une priorité et achevée au plus vite

Enfin, dans le domaine fiscal, la complexité et l'enchevêtrement des règles associés aux multiples contrôles dont font tout particulièrement l'objet les entreprises étrangères contribuent là aussi à accroître le sentiment d'insécurité juridique des acteurs économiques. Il convient à cet égard de noter qu'en droit fiscal russe, le chef comptable et le directeur de l'entreprise sont responsables de l'application de la législation fiscale dans l'entreprise, y compris sur le plan pénal. La suppression de la police fiscale devrait toutefois contribuer à normaliser la situation (50).

b) ... allié à une protection inefficace des droits des entreprises...

Nombre d'investisseurs étrangers, outre le fait qu'ils déplorent la multiplication de procédures souvent inutiles et coûteuses, regrettent parallèlement l'absence de régulation dans certains secteurs et appellent de leurs vœux la création d'autorités de régulation indépendantes, notamment dans le domaine de la concurrence, ainsi qu'un renforcement du pouvoir judiciaire.

En effet, les règles minimales de concurrence loyale sont rarement respectées par les entreprises russes qui n'hésitent pas à jouer de leur influence pour imposer des nuisances aux entreprises étrangères, tels que l'envoi de corps d'inspection ou de contrôle et le déclenchement d'actions en justice dilatoires. En réponse, les investisseurs étrangers disposent de voies de recours limitées si l'on constate les problèmes récurrents liés au manque d'indépendance des juges (qui font fréquemment l'objet de pressions ou de pots de vin) et à l'absence de sanctions disciplinaires prises à leur encontre. Les effets des récentes réformes destinées à augmenter les garanties d'indépendance des juges (introduction de nouvelles procédures de nomination et de démission des fonctions et création de procédures de sanctions) tardent à se faire sentir. En outre, ces nouvelles dispositions ne résolvent pas totalement, d'une part, la question de l'effectivité des jugements, et, d'autre part, celle de l'incitation des juges à l'impartialité (51). Toutefois, comme le montre l'expérience de Danone, il est possible pour les investisseurs étrangers de faire valoir leurs droits devant les tribunaux, même lorsque le contentieux implique les pouvoirs publics (52).

Il n'en demeure pas moins que les droits des entreprises sont régulièrement bafoués dans certains domaines. Il en est ainsi notamment des droits de la propriété intellectuelle, la multiplication des contrefaçons (l localement en toute légalité, de copies au nom et à l'apparence (packaging et présentation) très proches des originaux ainsi que de contrefaçons strictement identiques. D'après le ministère de la santé russe, 7 à 9 % des médicaments distribués sur le marché russe en 2001 étaient des copies ou des contrefaçons. Dans un registre similaire, on notera que certaines entreprises ont également eu le désagrément d'avoir soit à racheter leur propre marque, enregistrée illégalement en Russie par des sociétés sans scrupules, soit à intenter des actions en justice longues et coûteuses pour être rétablies dans leurs droits (53).

Préconisation 9 :

La France devrait maintenir la demande formulée dans le cadre de l'Union européenne afin que la mise en conformité des règles de protection des droits de la propriété intellectuelle se fasse rapidement

c) ... et à des comportements de prédation quasi-institutionnalisés...

Si l'on conjugue l'inflation normative avec une forte autonomie administrative, le tout s'inscrivant dans un contexte de faible niveau des revenus dans l'administration, les conditions semblent toutes réunies pour favoriser la corruption.

En effet, si les entrepreneurs russes et étrangers se plaignent régulièrement d'être harcelés par des inspections et des contrôles incessants de certaines administrations (qui d'ailleurs entraînent des coûts informels élevés), il faut noter que certains de ces comportements relèvent parfois du plus pur arbitraire, voire de comportements opportunistes destinés à permettre aux fonctionnaires qui y prennent part de "grappiller" les fruits d'une évolution économique dont ils sont en grande partie privés. Rares sont en effet les instances avec lesquelles il n'est pas possible de négocier la durée, voire l'issue d'une procédure.

Dans certains cas, ces comportements s'apparentent à ce que l'on pourrait appeler une « prédation quasi-institutionnalisée » tant ils sont devenus la règle plus que l'exception. Par exemple dans le domaine des douanes, l'accréditation d'intermédiaires officiels censés se charger des formalités pour les importateurs étrangers ne constitue bien souvent qu'un leurre masquant l'existence d'un « tarif officiel de la corruption ». Ainsi, bien que l'écrasante majorité des interlocuteurs français rencontrés à Moscou aient affirmé avoir toujours refusé toute forme explicite de corruption, il est avéré que le recours à des intermédiaires pour régler certaines affaires dont les investisseurs préfèrent ignorer les modalités soit une pratique assez répandue, sans évoquer la caisse de vodka offerte aux douaniers ou aux pompiers pour favoriser les bonnes relations, à une échelle plus modeste.

Le pouvoir dont dispose certains corps de l'administration vis-à-vis des entreprises va parfois même très loin. Ainsi, d'aucuns estiment que les pompiers et les inspecteurs de l'hygiène ont un quasi pouvoir de vie et de mort sur les entreprises. La Mission économique de Moscou rapporte à cet égard dans son guide S'implanter en Russie une anecdote selon laquelle une entreprise française aurait été forcée de financer la présence permanente de toute une brigade de pompiers sur son site ! L'appréciation du phénomène de la corruption par les investisseurs étrangers reste toutefois très variable. Certains se targuent en effet de n'avoir jamais rencontré de « personnes indésirables ou malintentionnées » sur le marché russe alors que d'autres avouent y avoir été confrontées sans toutefois y avoir cédé (soit par ét s'inscrit nécessairement sur le long terme. Le prix du "ticket d'entrée" en Russie reste en effet élevé et le retour sur investissement peut en outre être très long. Pour Menno Grouvel (54), investir en Russie prend deux à trois fois plus de temps que partout ailleurs. Ceci explique d'ailleurs sans doute en partie la faible présence des PME françaises, déjà moins orientées vers les marchés étrangers que leurs homologues allemandes ou italiennes. L'instabilité de l'environnement des affaires contribue par ailleurs à maintenir le risque à un niveau élevé et d'aucuns estiment même la rémunération de ce risque inférieure à ce qu'elle devrait être à l'heure actuelle (55). Les entrepreneurs sur place mettent d'ailleurs en garde les investisseurs potentiels contre l'espoir d'obtenir toujours une croissance continue de leur activité : la Russie reste pour l'heure un pays émergent, or un pays émergent est un pays qui connaît des crises régulières. Il est toutefois possible de surmonter ces crises, comme en témoignent les nombreuses entreprises françaises restées en Russie au moment de la crise de 1998 et récompensées aujourd'hui (56). La Russie demeure donc aujourd'hui un marché difficile : « la très grande complexité de l'environnement russe nécessite une pratique et une résilience particulièrement affûtées » (Menno Grouvel).

Pour toutes les raisons évoquées précédemment, l'apprentissage du marché russe peut donc s'avérer douloureux. L'expérience de Renault, mais également celle de BP sont là pour en témoigner. Si aujourd'hui ces entreprises, dans des domaines très différents, réalisent des investissements importants et se positionnent de manière très favorable dans leurs secteurs respectifs, leur parcours a été semé d'embûches et grevé de pertes financières. Les efforts d'adaptation à la manière russe de faire des affaires ne doivent en effet pas être sous-estimés (57). Comme le rappelle Antoine Kuruneri-Millet, il n'y a pas de réelle culture juridique en Russie et l'écrit y revêt une importance moindre que dans les pays occidentaux : « en Russie, le droit n'a pas le rôle et la place que nous lui reconnaissons en Occident pour la régulation de l'activité économique et des relations entre les personnes juridiques. Le droit seul ne suffit pas pour assurer l'exécution des obligations ou commander l'action en justice » (58). La Russie reste en effet un pays où les relations interpersonnelles ont une importance capitale, y compris dans les affaires. Ainsi, la règle négociée a souvent plus de chance de s'appliquer que la règle de droit. Les rapports de force ont tendance à prédominer et les plus puissants sont généralement les plus respectés. En cela, la Russie diffère profondément du reste des pays d'Europe centrale et orientale, singulièrement de la Hongrie et de la République Tchèque, où les acteurs économiques présents sur ces différents marchés ont pu constater une certaine « occidentalisation » des m La Banque européenne de reconstruction et de développement se montre particulièrement laudative dans son rapport 2002 en faisant la liste des réformes récemment adoptées en Russie et se plaît à souligner des progrès sensibles « en termes de réduction des contraintes réglementaires et fiscales des entreprises et d'amélioration de la protection des droits des investisseurs ». Le nombre de secteurs encore interdits aux investisseurs étrangers et de contraintes non encore résolues pesant sur leurs opérations devrait pourtant contribuer à atténuer ce diagnostic.

En outre, les sujets auxquels le Gouvernement russe devrait aujourd'hui s'attaquer présentent de fortes résistances au changement qui ne peuvent que retarder l'échéance des réformes en cette année électorale (60).

a) Le secteur des monopoles naturels

Le secteur des « monopoles naturels » couvre en Russie des pans très importants de l'économie qui sont aujourd'hui très largement fermés aux investisseurs étrangers (61). Comme le souligne l'European Business Club dans son livre blanc 2002, quasiment aucune réforme n'est intervenue dans ce secteur, lequel demeure hors des mécanismes du marché. Très régulés par le Gouvernement (notamment au niveau de la fixation des prix), les monopoles naturels se caractérisent donc par l'absence de concurrence, un faible niveau de transparence allant de pair avec de nombreuses participations croisées et de faibles investissements. Il subventionne ainsi par divers biais (politique tarifaire, non réclamation des impayés, financement direct d'équipements publics) à la fois les ménages, les entreprises et les régions russes (62).

S'agissant plus particulièrement du secteur de l'énergie, il faut noter que la Russie, qui possède environ un tiers des réserves mondiales de gaz naturel, est actuellement à l'origine du quart du gaz fourni sur le marché mondial et se classe 2ème producteur mondial d'électricité après les Etats-Unis (63). Ces secteurs, qui contribuent largement au budget de l'Etat, sont encore dominés par deux entreprises géantes verticalement intégrées qui en détiennent le monopole : Gazprom (64) et RAO UES, sociétés par actions constituées en 1992 et contrôlées par l'Etat. Celles-ci sont aujourd'hui confrontées à de graves problèmes liés à la faiblesse des investissements et de la politique tarifaire fondée autant sur des considérations politiques que sur la base de critères économiques. Des réformes propres à attirer des investissements dans ce secteur devraient donc être mises en œuvre avec pour objectif de séparer les domaines compétitifs des composantes monopolistiques. Or si des orientations générales en ce sens ont bien été définies en 2000 par l'Etat, aucune avancée n'est à constater da 'Arial'; font-size: 10pt">Malgré des chiffres de croissance flatteurs, le secteur bancaire russe reste sous-développé, la capitalisation bancaire par rapport au PIB atteignant seulement 7 %. Ainsi, en dépit d'une forte hausse des crédits à l'économie (qui bénéficie toutefois essentiellement aux entreprises exportatrices), le volume du crédit au secteur privé reste globalement très bas. Des restructurations "par le bas" (67) du secteur bancaire liées à la crise de 1998 ont bien eu lieu mais elles ne lui permettent toujours pas de remplir pas sa principale fonction dans l'économie qui est de servir de pont entre épargnants et investisseurs. La défiance à l'égard des établissements bancaires reste forte parmi la population qui continue à placer majoritairement ses fonds dans les deux grandes banques d'Etat (Sberbank et Vneshtorgbank). S'agissant des banques privées, beaucoup appartiennent encore aux grands groupes industriels russes et sont uniquement vouées aux transactions internes.

En juin 2001, la loi sur la banque centrale et la loi sur l'insolvabilité des organismes de crédit ont été modifiées de manière à accroître les pouvoirs de la Banque centrale russe en matière d'inspection, de contrôle des pratiques comptables et de retrait d'agrément des banques défaillantes. Ces dispositions ont en outre été renforcées par la nomination d'un nouveau directeur de la Banque centrale. Cependant, bien qu'un plan global de réforme du secteur bancaire ait été dévoilé par le Gouvernement russe en juin 2002, aucune avancée dans ce domaine n'a été constatée depuis lors. Les acteurs économiques sont notamment en attente d'une loi rationalisant les procédures de surveillance des banques et surtout d'une loi sur la garantie des dépôts. Le niveau du risque emprunteur reste très élevé en Russie et la protection des droits des créanciers insuffisante. Des progrès dans ce domaine apparaissent donc indispensables à une amélioration du financement et du fonctionnement global de l'économie russe.

c) La réforme administrative et judiciaire

Si le thème de la réforme administrative a connu quelques avancées dans le domaine de l'allégement des procédures réglementant l'économie, le Gouvernement russe semble ne pas encore s'être attaqué au problème de fond que constitue la survivance d'une administration pléthorique au fonctionnement hérité de la bureaucratie soviétique. Or, le chantier de la dé-bureaucratisation de l'économie ne peut connaître d'avancées significatives sur le terrain si les fonctionnaires chargés d'appliquer les réformes tentent au contraire de les contrecarrer. Si la résistance au changement des bureaucrates est un thème classique, il s'agit aussi d'une réalité à laquelle il est indispensable de mettre fin. Comme le montrent les témoignages des acteurs économiques russes et étrangers, le pouvoir de nuisance de l'administration constitue aujourd'hui le principal obstacle au développement de l'initiative privée.

Dans ce cadre, la réforme judi 160;VRAIMENT DES INVESTISSEMENTS DIRECTS ÉTRANGERS ?

Face aux difficultés auxquelles sont confrontés les investisseurs occidentaux en Russie et au peu de progrès concrets dans l'amélioration du climat des affaires en général, une question se pose inévitablement : la Russie veut-elle vraiment attirer des investissements directs étrangers ? Igor Yourguens, vice-président du RSPP (68), reconnaît ainsi l'existence de « beaucoup de réticences à l'investissement étranger dans certains secteurs ». De nombreux interlocuteurs ont par ailleurs avoué avoir décelé des attitudes globalement hostiles à leurs projets de la part des Russes. Ainsi, l'idée selon laquelle les IDE ne seraient actuellement que tolérés en Russie est assez répandue. En effet, si les Russes ont réellement besoin des capitaux ainsi que du savoir-faire commercial et de la "vision industrielle" des investisseurs étrangers qui font aujourd'hui défaut, ils entendent rester maîtres de leur économie. D'aucuns prétendent même que lorsque des moyens convenables de collecte et de valorisation de l'épargne seront mis en place et lorsque les capitaux russes expatriés seront à nouveau massivement investis dans l'économie nationale (69), les investisseurs étrangers ne seront clairement plus les bienvenus. Cette méfiance vis-à-vis de l'étranger ou, si l'on préfère, cette préférence nationale des Russes, qui se retrouve à bien des niveaux, contraste singulièrement avec la stratégie de large ouverture des pays d'Europe centrale et orientale et exprime une vision assez décalée de l'économie mondiale contemporaine.

a) Un espace économique fragmenté

L'insécurité juridique en Russie n'est pas seulement liée à des facteurs conjoncturels affectant toute économie en transition : instabilité de la législation, contradictions entre anciennes et nouvelles normes, difficultés de mise en œuvre des réformes. Il existe en effet des obstacles à l'investissement inhérents au système russe et à son organisation fédérale. Le partage actuel des compétences (soit exclusives, soit conjointes) entre le pouvoir fédéral et les 89 sujets de la Fédération apparaît si confus que certains interlocuteurs rencontrés à Moscou parlent d'absence totale d'espace économique unifié en Russie. Il reste ainsi très difficile de savoir qui décide (du pouvoir central ou des pouvoirs locaux) et les acteurs économiques se voient souvent appliquer un empilement de législations contradictoires. Ceci explique l'extrême concentration des investissements sur les régions de Moscou et de Saint-Pétersbourg mais également les réticences des entrepreneurs à investir globalement en Russie. Il faut toutefois noter que la « réforme administrative » mise au point par Vladimir Poutine comprend un volet destiné à aplanir ces dissensions en restaurant la « verticale du pouvoir » en Russie. Cette politique a donné lieu à la nomination de 7 représentants plénipotentiaires à la tête de 7 nouve 'Arial'; font-size: 10pt">- Le principe du traitement national

La politique suivie par la Russie depuis le début des années 1990 pour attirer les investisseurs occidentaux n'a pas évolué et se borne toujours à leur octroyer les mêmes droits qu'aux investisseurs nationaux, ce qui apparaît peu propice à un afflux massif d'IDE. S'agissant plus particulièrement des investisseurs français, le principe d'égal traitement avec leurs homologues russes est à la fois inscrit dans l'accord bilatéral sur l'encouragement et la protection des investissements signés entre la France et l'URSS le 4 juillet 1989 (70) et dans l'Accord de Partenariat et de Coopération avec l'Union européenne.

Dans les faits, ce principe d'égal traitement tourne généralement au désavantage des investisseurs étrangers, qui n'ont pas la même connaissance du « terrain » et des « règles du jeu » que les Russes. En outre, ce principe connaît des limitations sectorielles qui le prive bien souvent de son contenu. En effet, l'étendue de ces restrictions, en principe limitées aux secteurs considérés comme stratégiques, ne fait l'objet d'aucune définition par la loi. C'est ainsi qu'après le secteur financier (71) et surtout le très large secteur des "monopoles naturels", de nouvelles restrictions ont pu être instaurées dans le domaine agricole. Or, de facto, cela revient à réserver des pans entiers de l'économie aux grands groupes industriels et financiers nationaux dirigés par les oligarques.

- L'inapplication de la législation sur les investissements étrangers

Une loi fédérale est certes intervenue en juillet 1999 pour confirmer l'application du principe du traitement national aux étrangers et définir plus précisément le régime applicable aux IDE mais in fine elle n'accorde pas d'autres droits aux opérateurs étrangers que ceux déjà prévus par la précédente loi de 1991.

Cette loi accorde en effet certaines garanties aux investisseurs étrangers, censées être propices aux décisions d'investissement (72). Malheureusement, ce texte est resté en grande partie inappliqué, eu égard au trop grand degré de généralité de ses dispositions, dont la plupart n'ont en outre pas fait l'objet de mesures d'application, ou à leur excessive restriction. La Mission économique de Moscou illustre ce point dans « S'implanter en Russie » en prenant l'exemple de la clause de stabilisation instaurée par la loi afin de protéger les investisseurs face à d'éventuelles modifications législatives allant à l'encontre de leurs intérêts : celle-ci n'a jamais été mise en œuvre dans la mesure où, d'une part, la liste des modifications pouvant ouvrir droit à l'application de cette disposition apparaît particulièrement limitée et où, d'autre part, l'appréciation de leur caractère néga autorités russes vis-à-vis des investisseurs étrangers, comme en témoignent les insuffisances de la législation, ceux-ci ont en outre à déplorer l'intervention régulière de nouvelles procédures rendant plus contraignante leur présence sur le territoire russe.

- La loi sur le statut légal des étrangers

La nouvelle loi fédérale sur le statut des citoyens étrangers entrée en vigueur le 1er novembre 2002 ne devrait à cet égard pas faciliter la situation des salariés expatriés exerçant en Russie. Le texte prévoit en effet des procédures plus lourdes que précédemment pour obtenir l'autorisation de vivre et de travailler en Russie. L'employeur doit ainsi commencer par obtenir des autorités locales une attestation prouvant la nécessité de recourir à de la main d'œuvre étrangère, puis du ministère de l'intérieur une autorisation pour employer des salariés étrangers laquelle doit permettre à ces derniers de retirer un permis de travail, délivré pour une durée d'un an renouvelable sur demande de l'employeur. Ces formalités sont obligatoires quels que soient les postes occupés, la nouvelle loi ne mentionnant plus la procédure simplifiée qui permettait préalablement aux cadres d'obtenir la délivrance d'un permis de travail dans un délai d'environ un mois. Il existe donc non seulement un risque d'allongement des délais d'obtention des visas mais des difficultés de renouvellement des permis de travail des expatriés arrivant aujourd'hui à expiration sont également à redouter, et ce d'autant plus que les textes d'application se font attendre. On peut donc considérer que ces restrictions constituent désormais un frein important à l'implantation d'entreprises étrangères en Russie.

Préconisation 10 :

La France doit engager un dialogue avec le ministère de l'intérieur de la Fédération de Russie afin de l'inciter à infléchir sa politique actuelle consistant à durcir les conditions de séjour et de travail des étrangers en Russie.

- L'impôt social unique et la suppression des incitations fiscales à l'investissement

On notera également que depuis le 1er janvier 2003, les entreprises étrangères sont tenues d'acquitter l'impôt social unique sur les rémunérations versées aux expatriés alors que celles-ci en étaient auparavant exonérées à condition que les salariés concernés ne bénéficient pas du droit aux prestations de retraite, d'assurance sociale et d'assurance maladie obligatoires. D'après la Mission économique de Moscou, cette nouvelle mesure induit une pression fiscale supplémentaire estimée à 36,5 % sur la 1ère tranche de rémunération (jusqu'à 100 000 roubles). Parallèlement, les investisseurs se sont vus supprimer toute une série d'incitations fiscales à l'investissement lors de la parution de la deuxième partie de code des impôts qui a proc&eacut SI UNE VOLONTÉ POLITIQUE PROLONGE, DE PART
ET D'AUTRE, LE BON CLIMAT ACTUEL

A.- UN CONTEXTE POLITIQUE PORTEUR POUR NOS  INVESTISSEMENTS

1.- LE RENFORCEMENT RÉCENT DE NOS LIENS POLITIQUES ET  INSTITUTIONNELS...

a) Un rapprochement politique et stratégique

L'accession de Vladimir Poutine à la Présidence de la Fédération de Russie s'est traduite par une ère de stabilité politique sans précédent depuis la fin de la période soviétique qui a été soulignée par de nombreux interlocuteurs. Il s'agit là d'un facteur important dans la décision économique, les investisseurs préférant évidemment opérer dans un environnement stable.

En outre, les bonnes relations politiques entre la France et la Russie depuis 3 ans constituent indéniablement un point positif pour les relations économiques entre les deux pays tant il est vrai qu'en Russie, plus qu'ailleurs, les orientations données par le chef de l'Etat sont suivies avec attention par les milieux économiques dont les intérêts sont bien souvent en adéquation avec ceux de la puissance publique. Comme l'a fait judicieusement remarquer un chef d'entreprise rencontré à Moscou, « en Russie, tout passe par le haut ».

C'est dire l'importance symbolique des rencontres entre les deux chefs de l'Etat dont l'année 2003 devrait être particulièrement riche. Le Président Poutine s'est ainsi rendu en France en février pour une visite d'Etat de trois jours au cours de laquelle les questions économiques ont été évoquées à plusieurs reprises. M. Poutine était d'ailleurs accompagné à cette occasion par M. Klebanov, ministre de l'industrie et de la recherche, et par M. Youssoufov, ministre de l'énergie. Il a en outre profité de la venue d'une délégation du RSPP à l'invitation du MEDEF pour réaffirmer sa volonté de voir progresser les réformes économiques en Russie et son souhait de voir se renforcer la présence des entreprises françaises en Fédération de Russie. En outre, plusieurs accords économiques et financiers ont été signés dans le cadre de cette visite d'Etat (73).

On notera également l'organisation, en marge des réjouissances organisées en l'honneur du tricentenaire de Saint-Pétersbourg, d'un sommet Union européenne-Russie au cours duquel a notamment été évoquée la possibilité de créer un « conseil de partenariat permanent chargé d'aplanir les différends bilatéraux » (Le Monde, 3 juin 2003).

Enfin, dans la foulée, Jacques Chirac et Vladimir Poutine se sont de nouveau rencontrés lors du sommet du G7 à Evian qui a confirmé l'intégration prochaine de la Russie au sein du club des 8 plus grandes puissances mondiales, décision dans laquelle la France institutionnelle qui s'intensifie

Le renforcement des relations entre la France et la Russie se traduit dans un cadre institutionnel de coopération bilatérale mis en place au plus haut niveau. Le « séminaire gouvernemental » (74) réunit ainsi annuellement premiers ministres et ministres des deux pays. Ses décisions sont préalablement préparées par le CEFIC (Conseil économique, financier, industriel et commercial) présidé, d'un côté, par le Directeur des relations extérieures du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie et, de l'autre, par le vice-ministre du Développement économique et du Commerce. Le CEFIC se réunit également en sessions annuelles précédées par les réunions de douze groupes de travail sectoriels.

Dans ce cadre, les principales difficultés se faisant jour dans les divers champs couverts par les groupes de travail sont en principe réglées par le CEFIC et seuls les arbitrages les plus délicats remontent in fine jusqu'au séminaire gouvernemental. Dans les réunions des groupes de travail du CEFIC, auxquelles peuvent être conviés des représentants du monde de l'entreprise, des questions ponctuelles, spécifiques à tel ou tel investissement sont parfois abordées afin de débloquer certaines situations délicates. Le CEFIC, lors de sa dernière réunion, tenue à Paris le 22 octobre 2002, a notamment salué l'efficacité du groupe de travail sur les investissements dont les travaux ont permis de résoudre une grande partie des difficultés évoquées lors de la précédente session.

Pour prendre un exemple concret, celui du groupe de travail « Industrie » du CEFIC qui traite de la coopération industrielle avec la Russie, son objectif est double : proposer des améliorations à l'environnement de l'activité des entreprises françaises en Russie et mener des actions de promotion de nos technologies devant conduire à leur valorisation sur le marché russe. Les dernières discussions au sein du groupe ont ainsi permis d'évoquer le problème du respect des droits de propriété intellectuelle en Russie. Un sous-groupe d'experts sur la propriété industrielle et la lutte contre la contrefaçon a donc été créé afin, non seulement, de trouver des solutions rapides aux problèmes qui se posent actuellement aux investisseurs français, mais également d'aider la Russie à mettre en place un cadre juridique de protection efficace.

Préconisation 11 :

Les mécanismes de dialogue institutionnels entre la France et la Russie doivent être renforcés et plus directement orientés vers la défense de cas individuels d'entreprises françaises implantées en Russie.

2.- ... SE TRADUIT DANS LES FAITS PAR UNE AMÉLIORATION DE  NOS RELATIONS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES

a) Des secteurs d'intérêt particulier

Le secteur aéronautique et spatial qui était le thème principal du séminaire gouvernemental réuni à Toulouse le 18 novembre 2002 reste le secteur privilégié de la coopération franco-russe et du développement de nos relations commerciales. Ce secteur stratégique bénéficie d'un soutien politique fort, comme en témoignent les récentes déclarations du Président de la République au salon du Bourget en faveur d'un renforcement de la coopération aéronautique et aérospatiale entre la France et la Russie (75). De nombreux contrats se sont noués récemment dans ce secteur de même que des partenariats industriels sur des projets ponctuels importants. Un vaste programme de coopération industrielle entre EADS et Rosaviacosmos a ainsi été lancé en juillet 2001 en présence des Présidents français et russe, dont la première réalisation est, d'une part, la signature d'un contrat commercial entre Aeroflot et Airbus pour la fourniture de 18 appareils par Airbus et, d'autre part, de la conclusion d'un accord de coopération entre Airbus et le groupe russe Kaskol, en vue de la création d'un centre d'ingénierie aéronautique. Début mai 2002, un accord de coopération a également été conclu entre EADS et le constructeur aéronautique IAPO pour la certification et la commercialisation internationale de l'appareil amphibie Beriev 200. Un partenariat industriel devrait également voir le jour entre SNECMA et NPO Saturn pour la réalisation d'un nouveau moteur d'avion destiné à un futur appareil russe de transport régional. Enfin, les parties au projet de réalisation d'un nouvel avion militaire d'entraînement (MIG-AT) ont récemment confirmé leur participation malgré les retards subis dans la concrétisation des contrats de fourniture d'équipements signés en 1997 par SNECMA et SEXTANT avec la société russe RSK MIG.

D'autres secteurs, comme le tourisme, font également l'objet d'une attention particulière de la part des autorités et des entreprises. L'agriculture, où des accords de coopération ont récemment permis la fourniture de bovins et le développement d'une assistance technique (décembre 2002), et les services urbains, où se développe une coopération institutionnelle et technique (76), apparaissent également comme des secteurs en pointe. Evoquant les secteurs d'intérêt particulier entre la France et la Russie lors du dîner d'Etat offert en l'honneur du Président Poutine et de son épouse le 11 février 2003, le Président de la République Russie s'est également améliorée en 2002. La Russie se situe désormais à la deuxième place de nos marchés à l'exportation au sein des PECO et à la première en tant que fournisseur (nos importations de Russie se sont élevées en 2002 à 5,238 millions d'euros soit plus du double des importations de 1998, ce qui constitue, d'après la Mission économique de Moscou, un niveau inégalé).

Pour entrer dans le détail des exportations françaises, on notera que les plus fortes progressions enregistrées sur l'année 2002 ont été constatées notamment dans les secteurs de l'industrie automobile (+ 50,2%) et des produits agricoles (+ 26,3%), traduisant une meilleure adaptation de l'offre au marché russe et consacrant la relance du secteur agroalimentaire (et notamment des viandes). Les produits français les plus achetés en Russie demeurent toutefois les parfums et produits de toilette, cependant directement suivis par les véhicules automobiles et les équipements informatiques.

Parallèlement à ces bons résultats, la politique d'assurance-crédit sur la Russie, fermée depuis la crise de 1998, a été réouverte sur le moyen terme début 2001 et son plafond d'encours a été sensiblement relevé en 2002 pour atteindre 350 millions d'euros. La Coface a en outre élargi la liste des banques russes agréées pour ses opérations de crédit qui sont désormais au nombre de 7 (au lieu de 4 auparavant). Ces décisions, propres à favoriser les échanges, tiennent compte de l'amélioration des performances économiques et financières russes et de l'évolution du risque pays, la Russie ayant bénéficié de deux reclassements en termes de primes OCDE en 2001 et 2002.

c) Une multiplication des rencontres et des échanges

Comme le notait déjà en juin 2002 la Mission économique de Moscou dans sa « Lettre CEI-Russie », la bonne gestion macroéconomique de la Russie à l'heure actuelle ainsi que la volonté réformatrice affichée par le Président Poutine ont indéniablement contribué à améliorer la perception que les entreprises françaises ont du marché russe.

Cela se traduit, en France, par la tenue régulière de sessions d'information sur la Russie dans le cadre du CFCE (Centre français du commerce extérieur) qui organise notamment chaque année, en octobre, un séminaire sur la Russie complété par un forum d'affaires permettant aux entrepreneurs désireux de s'implanter en Russie de rencontrer des opérateurs déjà présents sur le marché russe. Les visites et séjours de prospection en Russie, organisés directement par les entreprises mais également par les chambres de commerce et d'industrie, se multiplient. Enfin, les entreprises françaises participent à de nombreux événements du type foires ou quinzaines commerciales et en profite pour faire la promotion de leurs produits. On citera à cet égard le salon "France Tech Russie 2003" qui se tiendra à Moscou en octobre 2003 et qui a pour objectif de réputation des produits français. Intitulée "Une image radar de 15 pays", cette enquête avait pour objectif d'analyser l'opinion des Russes sur 15 pays occidentaux et de l'étranger proche sur la base d'un échantillon représentatif de la population choisi à travers toute la Fédération. Les questions posées portaient à la fois sur les relations bilatérales, l'image des produits et celle du pays en général. Or, la France est arrivée globalement en tête de ce sondage, recevant les appréciations les plus positives chez les personnes interrogées.

B.- DES ACTIONS CONCRÈTES A ACCOMPLIR RAPIDEMENT

1.- LA POURSUITE DU PROCESSUS DE RÉFORME EN RUSSIE  DEMEURE INDISPENSABLE

a) Mettre en œuvre des mesures propres à attirer les investisseurs

Les interlocuteurs rencontrés par votre Rapporteur au sein du ministère du Développement économique et du Commerce de la Fédération de Russie se sont dits préoccupés par le faible niveau des investissements directs étrangers en Russie et des investissements français en particulier. A cet égard, ils ont émis l'idée de créer une agence spécialisée sur la question des investissements sur le modèle de l'AFII (agence française des investissements internationaux). Si cette initiative ne devrait pas se montrer décisive dans l'attrait des IDE en Russie, elle va toutefois dans le bon sens et le choix du modèle français doit être souligné.

Préconisation 12 :

La France doit soutenir la création d'une agence russe sur le modèle de l'AFII et apporter le cas échéant un concours technique à la réalisation de cette initiative, qui ne peut qu'être bénéfique aux entreprises françaises.

Mais ce sont bien sûr des mesures plus concrètes qu'attendent les investisseurs étrangers, susceptibles de témoigner de la volonté du Gouvernement russe dans ce domaine. A cet égard, l'abandon des mesures discriminatoires à l'encontre des citoyens étrangers, notamment originaires de l'Union européenne, devrait être engagé au plus vite. Parallèlement, comme le montre l'exemple de la Chine et le succès de ses zones économiques spéciales, il apparaît incompréhensible que la Russie ne tire pas parti des instruments juridiques et économiques dont elle dispose pour attirer les investissements directs étrangers. Cette question évoquée à plusieurs reprises à Moscou semble remporter un large soutien, notamment dans le domaine automobile où la création de zones franches faciliterait la venue d'équipementiers et notamment de PME sous-traitantes.

Préconisation 13 :

La France doit appeler l'attention des autorités russes sur l'utilité des mesures susceptibles de constituer une incitation forte pour les investisseurs étrangers à s'implanter en Russie et y créer des emplois. A cet égard, la relance des zones franches, du moins dans certains secteurs comme l'automobile, semblerait une mesure particulièrement appropriée.

b) Ne pas retarder l'échéance des réformes structurelles

De manière générale, il doit être mis fin aux défaillances du système normatif russe ainsi qu'à ses abus dont souffrent à la fois investisseurs étrangers et entrepreneurs locaux. La poursuite des réformes, au premier rang desquelles la réforme administrative et judiciaire, apparaît seule susceptible de permettre une amélioration réelle du climat des affaires.

Préconisation 14 :

Dans son dialogue avec la Russie, la France doit mettre l'accent sur la dé-bureaucratisation de l'économie et un effort tout particulier devrait porter sur le respect des droits des entreprises, au premier rang desquels les droits de propriété intellectuelle.

Enfin, pour aborder la question des grands équilibres macroéconomiques de la Russie, on ne peut que souligner le retard pris par ce pays dans le domaine des réformes sociales. En effet, comme la rappelle Julien Vercueil, universitaire spécialiste de la transition économique , « la réforme économique ne doit pas se focaliser uniquement sur l'offre. Il y a aussi la demande (...) les inégalités très fortes en Russie restent un obstacle réel à la croissance durable. Pour qu'il y ait des consommateurs, il faut une classe moyenne, et, pour cela, il faut aussi une politique des revenus » (78). Or, si les revenus des particuliers ont globalement progressé depuis la crise de 1998, la pauvreté demeure un problème important dans de nombreuses couches de la population. Dans les domaines de la santé (79), de l'éducation, des retraites et des transferts sociaux, les dispositions en vigueur demeurent insuffisantes. Ainsi, à la mi-2001, plus de 30 % de la population avaient encore des ressources inférieures au seuil de subsistance officiel (80). Ces difficultés sociales se ressentent également au niveau des entreprises (instabilité du personnel au bas de l'échelle des revenus, problèmes d'alcoolisme, absentéisme) et contribuent au développement de la corruption et du « marché gris », les personnes n'obtenant pas de revenus suffisants dans leur activité principale (notamment les fonctionnaires) se tournant vers l'économie informelle. Ces remarques plaident donc pour une plus grande intervention de l'Etat dans le domaine social qui signifierait, comme le recommande l'OCDE, un élargissement du budget fédéral pour l'heure très étroit, afin de ne pas laisser les inégalités se creuser au niveau régional.

Préconisation 15 :

La France doit engager le gouvernement russe à ne pas ignorer les réformes sociales indispensables à la croissance de la demande intérieure s'il veut que celle-ci se développe sur des bases solides permettant de tirer l'économie vers le haut et de ne pas multiplier le nombre de laissés pour compte, source potentielle de risques économiques et politiques.

2.-... MAIS DOIT ÊTRE ACCOMPAGNÉ PAR DES INITIATIVES FRANÇAISES ET EUROPÉENNES

a) Améliorer l'image de la Russie auprès des entreprises françaises

Nombre de directeurs généraux rencontrés à Moscou ont avoué leurs difficultés à faire accepter au siège de leur société mère les projets d'investissement qu'ils comptaient mettre sur pied en Russie. S'agissant des entreprises cotées en bourse, l'image de la Russie aurait une telle influence sur les décisions d'investissement qu'elle aurait contribué à repousser certains projets. Il règne, il est vrai, en France un climat de suspicion généralisée à l'égard de la Russie qu'aucun fait économique ne saurait pourtant étayer. Le fait politique, d'évidence, influence ici le jugement. Parallèlement, Ivan Prostakov, représentant commercial de la Russie en France, se montre particulièrement surpris par le niveau de méconnaissance de la situation actuelle en Russie que trahissent les questions posées par les entrepreneurs lors des rencontres organisées dans les régions françaises par les chambres de commerce et d'industrie. Si certaines régions, notamment l'Alsace (81), ont sauté le pas et ont commencé à développer des liens avec la Russie, le niveau général d'information sur la Russie apparaît très faible et contribue sans doute à la prospérité des clichés les plus éculés sur ce pays.

Préconisation 16 :

Des actions de sensibilisation et des sessions d'information sur l'investissement en Russie devraient être mises en œuvre au niveau local par les directions régionales du commerce extérieur, en partenariat avec les chambres de commerce et d'industrie et la représentation commerciale de la Russie en France.

b) Développer les échanges universitaires

Bien que l'écrasante majorité des interlocuteurs rencontrés à Moscou se félicitent du niveau de compétences de la main d'œuvre russe, certains d'entre eux pointent également du doigt la rareté de ce « capital humain » qui nécessite souvent d'être formé aux exigences des entreprises occidentales. Parallèlement, certains experts signalent désormais les risques de pénurie de professionnels qualifiés en Russie, eu égard au niveau de demande engendrée par la croissance économique, dont la forte augmentation des salaires, dans certains secteurs et dans les segments les plus qualifiés du marché du travail, semble un signe avant-coureur.

En outre, dans certains secteurs, comme les secteurs financiers ou le commerce, la Russie accuse un retard important dans la formation des cadres, aussi bien en termes quantitatifs que qualitatifs. Or, à ce niveau, la bataille risque de se jouer entre pays occidentaux (82). En effet, la Russie connaît déjà les prémices d'une concurrence entre pays développés pour la formation de ses futures élites. Une demande existe toutefois vis-à-vis de la France comme en témoigne le succès d'Edufrance au salon de l'éducation de Moscou. Le développement et l'extension des projets existants comme l'organisation de masters de gestion internationale en partenariat avec certaines universités françaises ou de cycles de formation pour les chefs d'entreprise russes pourrait donc s'avérer très positif. Les étudiants russes francophones verraient les débouchés se multiplier au sein des filiales françaises en Russie qui elles-mêmes bénéficieraient d'un apport de main d'œuvre locale aux qualifications reconnues. C'est là un souhait formulé par la plupart des entrepreneurs français présents en Russie qui correspond, en outre, à l'annonce faite par le Président de la République, à l'occasion de la visite d'Etat de Vladimir Poutine en février 2003, de multiplier par trois les échanges d'étudiants d'ici la rentrée 2005. A cette occasion, Jacques Chirac a même évoqué la création d'un « espace universitaire et de recherche commun » entre l'Europe et la Russie.

Préconisation 17 :

La mise en place de filières francophones au sein des universités russes ainsi que la création d'instituts universitaires franco-russes sur la base d'expériences existantes (83) devraient être favorisées, notamment dans des secteurs clés comme la gestion, afin de permettre aux étudiants russes de venir se former en France et d'approfondir leur connaissance de la langue et du pays.

c) Résoudre la question des visas

La question des visas demeure une épine dans les relations entre la France et la Russie et plus généralement entre l'Union européenne et la Russie. On ne peut qu'appeler à une résolution rapide de la situation actuelle qui constitue un frein particulièrement concret et douloureux aux échanges entre nos pays. Les spécialistes des questions de sécurité soulignent toutefois des progrès dans la coopération entre l'Union européenne et la Russie pour la Justice et les Affaires Intérieures : malgré la lenteur des avancées dans ce domaine, il semblerait que l'ensemble des partenaires reconnaisse aujourd'hui la nécessité d'avancer sur ces questions.

Il serait souhaitable que la France joue un rôle moteur sur la question des visas qui empoisonne la vie et les affaires des citoyens russes comme des citoyens français.C'est d'ailleurs ce qu'a fait le Président de la République lors du dernier sommet Union européenne-Russie en se déclarant favorable à la mise en œuvre, à terme, du principe de libre circulation entre les Etats membres et la Fédération de Russie et en proposant de commencer par assouplir les conditions de délivrance des visas pour les étudiants (84). Environ 1 million de visas ont été délivrés en 2002 aux citoyens russes par les Etats membres de l'Union européenne.

Préconisation 18 :

Le problème des visas devrait faire l'objet d'une solution au plus vite.

CONCLUSION

Comme le souligne le rapport 2002 de la Banque européenne de reconstruction et de développement consacré à la Fédération de Russie, des défis très importants attendent encore ce pays dans les années à venir : l'achèvement du processus de réformes structurelles, la réduction de la dépendance de la Russie vis-à-vis des secteurs pétroliers et gaziers et la mise en œuvre d'une stratégie propre à attirer davantage d'investissements. La Russie a jusqu'à aujourd'hui connu un développement atypique comparé aux pays d'Europe centrale et orientale : les évolutions économiques, initiées par le haut, restent l'affaire du pouvoir politique et l'initiative privée peine à se développer face à une bureaucratie envahissante et parasitaire. Bien que considérés comme des éléments essentiels de ce processus de libéralisation et d'insertion dans l'économie de marché, les investisseurs étrangers sont regardés essentiellement comme un « mal nécessaire » dont on entend limiter le rôle et l'influence.

Pour autant la Russie n'en est pas moins devenue en une dizaine d'années un marché incontournable aux yeux des investisseurs étrangers, le « dernier grand marché » pour certains, du moins un des quatre derniers avec la Chine, l'Inde et le Brésil pour les autres. Si, pour les entreprises françaises implantées en Russie, ce pays devient désormais plus attractif que les trois autres, c'est grâce à sa stabilité politique, au développement accéléré de sa classe moyenne et aux avancées de son processus de normalisation juridico-économique. A cet égard, d'aucuns estiment que la fenêtre aujourd'hui ouverte pour les investisseurs étrangers pourrait bien se refermer d'ici 15-20 ans quand la Russie maîtrisera complètement les mécanismes de marché et surtout pourra bénéficier des capitaux nationaux dormant sur son territoire ou investis à l'étranger.

Toutefois, selon certains observateurs, la France ne serait pas la mieux placée pour réussir en Russie : ce pays susciterait en effet chez nous trop d'incompréhension et les exemples d'échecs économiques français en Russie, encore dans toutes les mémoires, achèveraient de ternir son image à nos yeux. Plus généralement, les Français seraient réputés pour leur manque d'audace, préféreraient « arriver sur un territoire balisé » et ne s'adapteraient pas « aux environnements chaotiques, sauvages » alors que la Russie resterait encore aujourd'hui « un marché pour les aventuriers » (85).

Tout cela apparaît cependant trop partiel et même caricatural. Votre Rapporteur tient, à l'inverse, à souligner que la première vague d'implantation des entreprises françaises en Russie EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a procédé à l'examen du présent rapport d'information le 1er juillet 2003.

Votre Rapporteur, a jugé que l'engagement des entreprises françaises en Russie se caractérise par une certaine tardiveté, aujourd'hui corrigée. Les performances des entreprises françaises sont globalement médiocres. Si les causes en sont difficiles à cerner, et si un certain biais statistique vient parfois déformer les indicateurs disponibles, il n'en reste pas moins que le degré d'investissement des entreprises françaises est inférieur à celui des entreprises allemandes, et que les flux commerciaux entre la Russie et la France sont moins performants que les mêmes flux entre la Russie et l'Italie. Le marché russe demeure un marché difficile qui évolue dans un contexte fluctuant, et parfois même violent, même si la crise de 1998 a été surmontée. L'évolution du contexte politique ne suffit pas à transformer la qualité de la relation économique entre la France et la Russie. Du point de vue français, on a souvent tendance à considérer la Russie comme un pays émergent, dont on attend souvent des conditions d'implantation de nos entreprises comparables aux conditions les plus favorables des pays émergents. Or, les Russes n'ont pas du tout cette appréhension de leur propre marché et n'ont, en tout état de cause, pas fait le choix de conditions particulières d'accueil des entreprises étrangères. Une loi de 1998 a créé des zones franches, mais en pratique, elles n'existent que dans la région de Kaliningrad. Il n'en reste pas moins que certains pays européens obtiennent de meilleures performances que la France en Russie, ce qui s'explique parfois par une plus grande proximité politique, culturelle, géographique, à l'image de l'Allemagne. L'enjeu est essentiel, dans la mesure où, avec une situation politique et économique nouvelle, de nombreuses parts de marché restent à conquérir. Les conditions de la concurrence entre les entreprises étrangères sont souvent perturbées par l'incertitude des systèmes juridiques applicables. D'après un interlocuteur français, toute initiative économique implique ainsi le choix du régime de la loi sous laquelle on se place. Il en résulte, par exemple, que les opérations de partenariat, dites de « joint-ventures » se révèlent souvent particulièrement délicates à mener.

Le rendez-vous majeur pour la Russie est celui de son entrée à l'Organisation mondiale du commerce en 2004 ou 2005. Ce calendrier doit être tenu. Le rapport d'information formule un certain nombre de préconisations, qui soulignent toutes l'intérêt de l'enjeu et la difficulté des opérations d'implantation d'entreprises françaises en Russie. À l'évidence, il est possible d'améliorer le contexte commercial et juridique actuel. Il y a matière à développer, en Russie, les investissements.

M. Marc Le Fur a remercié le Rapporteur pour sa communication. Il a souhaité obtenir des éléments complémentaires pour le secteur agro-alimentaire, où l'importance de la médiation d'un certain nombre de groupes entretient les votre Rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- la question de l'importance des mafias s'est nécessairement posée. Les réponses, un peu contournées qu'il a obtenues, sont toujours prudentes. Les entreprises françaises indiquent qu'elles sont souvent sollicitées et qu'elles ont toujours résisté. Si les cas de « petite corruption », comme le paiement de vacances en France, sont plus aisés à repérer, le recours à des intermédiaires demeure souvent ambigu et flou ;

- certains groupes agro-alimentaires, comme Danone, ont connu de vrais succès en Russie, alors que des interrogations subsistent sur des groupes comme Renault dont la stratégie est peut-être moins efficace et les résultats plus incertains. Auchan illustre par contre la percée de la grande distribution avec plusieurs hypermarchés implantés à la périphérie de Moscou, mais se posent des problèmes très concrets de mentions sur les produits ;

- les performances de l'Allemagne sont de toute évidence meilleures, de même que celles du Royaume-Uni. Ainsi, BP a récemment mené des opérations majeures de prise de participation en Russie. La comparaison avec l'Allemagne illustre la faiblesse du lobbying français et l'accompagnement insuffisant des pouvoirs publics. De plus, il faut que les entreprises françaises puissent regarder au-delà des deux seuls marchés que sont Moscou et Saint-Pétersbourg. Le moindre engagement des PME est également problématique.

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* *

La commission a ensuite autorisé en application de l'article 145 du Règlement, la publication du présent rapport d'information.

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS

· Autorites publiques

M. Fabrice Etienvre, conseiller technique au cabinet du ministre délégué au Commerce extérieur

Mme Dominique Arbelet, sous-directrice Europe, Afrique et Moyen-Orient et Mme Michelle Quéré du bureau Europe orientale et Moyen-Orient de la Direction des relations économiques extérieures du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

Mme Stéphane Pallez, chef du service des Affaires européennes et internationales et M. Alain Chouan du bureau des Pays émergents et autres pays en développement ou en transition de la Direction du Trésor du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

M. Claude Blanchemaison, Ambassadeur de France en Russie

M. Paul Hunsinger, chef de la Mission économique à Moscou

M. Jean-Jacques Gautrot, Directeur international de Areva

M. Menno Grouvel, Directeur Europe continentale et Asie centrale de la Division Exploration et Production de Total

M. Mathieu Lacaze, Chef du département Financement de projets pour l'énergie de BNP-Paribas

M. Carlos Birr Meza, Directeur du bureau de représentation d'EDF à Moscou

M. Jean-Louis Chaussade, Président directeur général d'Ondéo Degrémont

M. Jacques Ioffé, Directeur général de Danone-Bolchevik

Mme Paola Messana, Directeur général d'Hachette-Filipacchi Presse ZAO

M. Michel Bricout, Directeur général du groupe Société Générale en Russie

M. Jacques-Yves Mulliez, Président de Crédit Lyonnais Rusbank

M. Guy Bara, Directeur général de Renault Avtoframos

M. Jean-Luc Pipon, Avocat, responsable de CMS Bureau Francis Lefebvre à Moscou

M. Emmanuel Quidet et M. Alexandre Ivlev, Associés au cabinet Ernst & Young CEI

M. Guillaume Colin, Doctorant au Centre d'études des relations internationales, chargé d'étude par les Conseillers du Commerce Extérieur de la France

M. Igor Yourguens, Vice-président du RSPP (Conseil des industriels et entrepreneurs russes)

M. Michel Pérhirin, Président du conseil d'administration de Raiffeinsenbank Austria

Mme Irène Commeau, Directeur général de l'European Business Club

M. Gilles Faure, Directeur général Europe de l'Est de FM Logistics

M. Yves Caux, Représentant général de Michelin en CEI

M. Patrick Longuet, Directeur général de Auchan Russie

M. Pierre Leveque, Directeur général CEI de Schneider Electric

ACTIVITES COMPLEMENTAIRES

Participation à la journée d'information du Centre français du commerce extérieur sur Saint-Pétersbourg le 6 février 2003.

Préconisation 1

Dans le cadre d'un partenariat, l'option d'un contrôle exclusif entre 75 % et 100 % du capital est fortement recommandée, de même que la création d'une nouvelle société doit être préférée à une prise de participation dans une société existante en raison de l'opacité des informations disponibles sur les entreprises russes.

Préconisation 2

Les entrepreneurs français auraient tout intérêt à se regrouper pour créer une structure de lobbying sur le modèle de l'Union des entreprises allemandes

Préconisation 3

Les pouvoirs publics, en lien avec les organisations professionnelles, devraient organiser des actions spécifiques d'information sur le marché russe en direction des PME françaises.

Préconisation 4

Un cadre de coopération interrégional devrait être établi entre la France et la Russie.

Préconisation 5

La France doit encourager la Russie à poursuivre ses efforts pour s'insérer dans l'économie mondiale en achevant au plus tôt les négociations en cours dans le cadre de l'OMC.

Préconisation 6

Si l'objectif de la réforme foncière est bien de sélectionner les producteurs les plus à même de permettre la restructuration et la croissance du secteur agricole russe, alors les investisseurs étrangers ne devraient pas être écartés de ce processus par des mesures discriminatoires. La France doit défendre cette position auprès des autorités russes.

Préconisation 7

La France doit soutenir la Russie dans sa politique de lutte contre la fraude tout en plaidant pour que le point de vue des investisseurs implantés de longue date soit entendu. A cet égard, il serait utile d'insister sur l'intérêt de mettre en place des "listes blanches" d'importateurs recensant les opérateurs réputés honnêtes et dispensés des procédures de contrôle douanier renforcé.

Préconisation 8

La France doit demander une réduction de la liste des produits soumis à certification ainsi qu'une limitation des procédures de contrôle ; l'harmonisation des normes européennes et russes devrait être considérée comme une priorité et achevée au plus vite.

Préconisation 9

La France devrait maintenir la demande formulée dans le cadre de l'Union européenne afin que la mise en conformité des règles de protection des droits de la propriété intellectuelle se fasse rapidement.

Préconisation 10

La France doit engager un dialogue avec le ministère de l'intérieur de la Fédération de Russie afin de l'inciter à infléchir sa politique actuelle consistant à durcir les conditions de séjour et de travail des étrangers en Russie.

Préconisation 11

Les mécanismes de dialogue institutionnels entre la France et la Russie doivent être renforcés et plus directement orientés vers la défense de cas individuels d'entreprises françaises implantées en Russie.

Préconisation 12

La France doit soutenir la création d'une agence russe sur le modèle de l'AFII et apporter le cas échéant un concours technique à la réalisation de cette initiative qui ne peut qu'être bénéfique aux entreprises françaises.

Préconisation 13

La France doit appeler l'attention des autorités russes sur l'utilité des mesures susceptible de constituer une incitation forte pour les investisseurs étrangers à s'implanter en Russie et y créer des emplois. A cet égard, la relance des zones franches, du moins dans certains secteurs comme l'automobile, semblerait une mesure particulièrement appropriée.

Préconisation 14

Dans son dialogue avec la Russie, la France doit mettre l'accent sur la dé-bureaucratisation de l'économie et un effort tout particulier devrait porter sur le respect des droits des entreprises, au premier rang desquels les droits de propriété intellectuelle.

Préconisation 15

La France doit engager le gouvernement russe à ne pas ignorer les réformes sociales indispensables à la croissance de la demande intérieure s'il veut que celle-ci se développe sur des bases solides, permettant de tirer l'économie vers le haut et de ne pas multiplier le nombre de laissés pour compte, source potentielle de risques économiques et politiques.

Préconisation 16

Des actions de sensibilisation et des sessions d'information sur l'investissement en Russie devraient être mises en œuvre au niveau local par les directions régionales du commerce extérieur, en partenariat avec les chambres de commerce et d'industrie et la représentation commerciale de la Russie en France.

Préconisation 17

La mise en place de filières francophones au sein des universités russes ainsi que la création d'instituts universitaires franco-russes sur la base d'expériences existantes devraient être favorisées, notamment dans des secteurs clés comme la gestion, afin de permettre aux étudiants russes de venir se former en France et d'approfondir leur connaissance de la langue et du pays. 

Préconisation 18

Le problème des visas devrait faire l'objet d'une solution au plus vite.