N° 1876 tome 1 - Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale , après déclaration d'urgence, pour 2005 (1830)




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N° 1876

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 octobre 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2005 (n° 1830)

TOME I


RECETTES ET ÉQUILIBRE GÉNÉRAL

PAR M. Bernard Perrut,

Député.

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TOME I 3

INTRODUCTION 11

I.- LES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE SONT PARTICULIÈREMENT PEU LISIBLES 13

A. UNE ORGANISATION COMPLEXE 13

1. Une structuration en branche par risque 13

a) Quatre branches ... 13

b) ... ou cinq ? 13

2. Une structuration compliquée par la multiplicité des régimes d'affiliation 14

a) Le maquis des régimes 14

b) Les limites de leur rationalisation 15

3. En dépit du principe d'autonomie financière, des relations complexes entre les différents acteurs du système 16

a) Des liens de trésorerie 16

b) Des mécanismes de compensation entre branches 16

c) Des mécanismes de compensation entre régimes particulièrement sophistiqués et contestés 17

B. UNE SITUATION AGGRAVÉE PAR LES RELATIONS ENTRETENUES PAR LA SÉCURITÉ SOCIALE AVEC D'AUTRES ACTEURS 20

1. Les fonds : bienfait ou malédiction ? 20

a) Des fonds aux missions variées 20

b) Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) 20

c) Le Fonds de réserve des retraites (FRR) 23

2. Une situation globalement clarifiée depuis la disparition du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) 25

a) La fin du peu regretté FOREC 25

b) Une simplification qui n'est pas remise en cause par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 28

3. La persistance de nombreux éléments de complexité 34

C. UNE PRÉOCCUPATION CROISSANTE : LA CLARIFICATION DES COMPTES SOCIAUX 36

1. Les droits sur les tabacs : un bon exemple de mauvaise visibilité des comptes sociaux 36

2. Etat-sécurité sociale : une relation tumultueuse 38

3. Des progrès dans la compensation des pertes des organismes de sécurité sociale 40

II.- L'AMORCE D'UN REDRESSEMENT FINANCIER EN 2005 N'EST PAS EXCLUSIVE DE POLITIQUES AMBITIEUSES 43

A. L'ENSEMBLE DES COMPTES SOCIAUX DANS LE ROUGE MALGRÉ DES SITUATIONS CONTRASTÉES 43

1. Un point bas historique pour le régime général 44

a) Un déficit record et généralisé 44

b) Un déficit dont la composante structurelle fait question. 45

c) Des situations très contrastées selon les branches 47

2. Le poids du déficit de l'assurance maladie 49

a) Une tendance à la dégradation en apparence inéluctable 49

b) L'ONDAM, un concept largement décrédibilisé 50

3. Les autres financeurs de la sécurité sociale également atteints 52

B. 2005, ÉTAPE DÉCISIVE VERS LE REDRESSEMENT FINANCIER 53

1. Un redressement du solde des comptes attendu 53

a) Des perspectives de croissance plaidant pour une amélioration générale des comptes 53

b) Un quasi-équilibre proche pour la famille et la branche accidents du travail et maladies professionnelles 55

c) Une dégradation marquée pour la branche vieillesse 56

2. L'assurance maladie, au cœur de la réforme 56

a) La clef du redressement financier 56

b) Une méthode de réforme 58

c) Un modèle pour toutes les branches ? 59

TRAVAUX DE LA COMMISSION 61

I.- AUDITIONS 61

A. AUDITION DU PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES 61

B. AUDITION DU MINISTRE DE LA SANTÉ ET DE LA PROTECTION SOCIALE, DU MINISTRE DE LA FAMILLE ET DE L'ENFANCE, DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX PERSONNES ÂGÉES, DE LA SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX PERSONNES HANDICAPÉES ET DU SECRÉTAIRE D'ÉTAT À L'ASSURANCE MALADIE 79

II.- EXAMEN DU RAPPORT 105

III.- EXAMEN DES ARTICLES 113

TITRE IER ORIENTATIONS ET OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE 113

Article 1er Approbation du rapport annexé 113

TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES 118

Avant l'article 2 118

Article additionnel avant l'article 2 Création d'une taxe additionnelle sur les droits tabac au profit du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles 118

Avant l'article 2 119

Article additionnel avant l'article 2 (articles L. 131-8 du code de la sécurité sociale) Rapport au Parlement sur les compensations d'exonérations par l'Etat 119

Article additionnel avant l'article 2 (articles L. 135-1 du code de la sécurité sociale) Suppression du conseil de surveillance du Fonds de solidarité vieillesse 120

Article additionnel avant l'article 2 (articles L. 127-1 du code de la sécurité sociale) Modernisation des conventions d'objectifs et de gestion 120

Article 2 (articles L. 651-1 et L. 651-5 du code de la sécurité sociale) Assujettissement des institutions financières à la contribution sociale de solidarité des sociétés 121

Après l'article 2 123

Article 3 (article 13 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées) Mesures garantissant la continuité des missions de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie 123

Article 4 Prévisions de recettes pour 2005 128

Cotisations et impôts affectés à la sécurité sociale 132

Article 5 Prévisions révisées de recettes pour 2004 136

Recettes par catégorie pour 2004 136

Après l'article 5 138

TITRE III DISPOSITIONS RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE 139

Article additionnel avant l'article 6 Participation des députés aux conseils d'administration des hôpitaux 139

Avant l'article 6 140

Article 6 (article L. 162-26 du code de la sécurité sociale, article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004 et article 36 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie) Tarification à l'activité 141

Avant l'article 7 142

Article 7 Avances de trésorerie aux établissements privés et aux professionnels exerçant à titre libéral dans ces établissements 142

Article 8 (article L. 753-4 du code de la sécurité sociale) Possibilité de majorations des prix et des tarifs de responsabilité des médicaments et des dispositifs médicaux dans les départements d'outre-mer 143

Article 9 (article 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001) Financement et missions du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) 143

Article additionnel après l'article 9 Constitution d'un groupement d'intérêt public pour faciliter le recrutement des professionnels de santé dans les secteurs sanitaire et médico-social 144

Article 10 (articles L. 162-22-2, L. 162-22-9, L. 174-1-1, L. 227-1 du code de la sécurité sociale et article L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles) Fongibilité entre les différentes enveloppes de l'ONDAM 144

Après l'article 10 145

Article 11 (article L. 322-3 du code de la sécurité sociale) Exonération du ticket modérateur pour les consultations de prévention destinées aux adolescents en classe de cinquième 145

Article 12 (article L. 712-10-1 du code de la sécurité sociale et article L. 722-24-1 du code rural) Affiliation des enseignants et documentalistes contractuels ou agréés des établissements privés sous contrat au régime d'assurance maladie des fonctionnaires 145

Article 13 Dotation de financement du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) 146

Article 14 Dotation de financement de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) 147

Article 15 (article 51 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004) Participation de l'assurance maladie au financement de stocks de produits de prophylaxie et de traitement nécessaires en cas de menace sanitaire grave 147

Article 16 Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie révisé pour 2004 148

Article 17 Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2005 148

Article 18 Fixation de l'objectif de dépenses de la branche maladie pour 2005 148

Après l'article 18 149

TITRE IV DISPOSITIONS RELATIVES AUX AUTRES POLITIQUES DE SÉCURITÉ SOCIALE 149

Section 1 Branche accidents du travail et maladies professionnelles 149

Avant l'article 19 149

Article 19 Contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) 150

Avant l'article 20 150

Article 20 Contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) 150

Article 21 Contribution des entreprises ayant exposé leurs salariés à l'amiante au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) 151

Après l'article 21 151

Article additionnel après l'article 21 (article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998) Procédure d'inscription sur la liste des entreprises ouvrant droit au bénéfice de la cessation d`activité 152

Article 22 Montant du versement de la branche accidents du travail à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles 152

Article 23 Fixation de l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2005 152

Section 2 Branche famille 153

Article additionnel avant l'article 24 (article L. 122-25-4 du code du travail) Extension du congé supplémentaire de paternité 153

Article additionnel avant l'article 24 (article L. 122-26 du code du travail) Extension de la durée du congé de paternité en cas de naissance prématurée 153

Article 24 (article L. 531-2 du code de la sécurité sociale) Majoration de la prime d'adoption 153

Article 25 (article L. 211-10 du code de l'action sociale et des familles) Réforme du mode de financement de l'Union nationale des associations familiales (UNAF) 154

Article 26 Prise en charge par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) des majorations de pension pour enfants 154

Article 27 Fixation de l'objectif national de dépenses de la branche famille pour 2005 155

Section 3 Branche vieillesse 155

Avant l'article 28 155

Article 28 (articles 18 et 19 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ; articles L. 135-6, L. 135-7, L. 135-7-1, L. 135-7-2 et L. 135-8 du code de la sécurité sociale) Réforme du régime de retraite des personnels des industries électriques et gazières 156

Après l'article 28 157

Article 29 Régime de départ anticipé en retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers relevant de la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) 158

Après l'article 29 158

Article 30 Objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2005 158

TITRE V OBJECTIFS DE DÉPENSES RÉVISÉS POUR 2004 159

Article 31 Objectifs de dépenses révisés pour 2004 159

TITRE VI MESURES DIVERSES ET DISPOSITIONS RELATIVES À LA TRÉSORERIE 162

Article 32 (articles L. 138-7, L. 138-17, L. 138-19 à L. 138-21, L. 245-3 et L. 245-5-5 du code de la sécurité sociale) Dispositions relatives au recouvrement de certaines contributions 162

Article 33 (articles L. 174-2, L. 174-2-1 et L. 174-18 du code de la sécurité sociale et article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004) Facturation par les établissements de santé aux caisses d'assurance maladie 165

Article 34 (article L. 114-6 du code de la sécurité sociale) Amélioration de la qualité des comptes sociaux 168

Article additionnel après l'article 34 (article L.  114-7 du code de la sécurité sociale) Création d'un mécanisme d'alerte des dépenses de sécurité sociale 170

Article 35 Fixation des plafonds d'avance de trésorerie pour 2005 170

CNIEG - comptes toutes branches confondues 182

Régime minier - comptes toutes branches confondues 184

Après l'article 35 185

ANNEXE 187

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES  187

INTRODUCTION

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 est le neuvième du genre depuis l'institution des lois de financement en 1996.

La Constitution et les textes organiques afférents lui ont donné une place éminente dans les travaux du Parlement et un cadre juridique extrêmement précis. Pourtant, à la différence du débat budgétaire, celui sur le budget de la sécurité sociale donne parfois le sentiment d'avoir lieu en d'autres temps que lors de l'examen de la loi de financement.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 a pu être qualifiée de « texte de transition » du fait du poids des choix de la majorité précédente sur son élaboration. Celle de l'an dernier a été largement déterminée par le débat sur l'avenir de la protection sociale au travers de la réforme des retraites qui a abouti à la loi du 21 août 2003. Elle était en quelque sorte une étape entre ce premier texte majeur de réforme de la sécurité sociale et la réforme devenue inéluctable de ce deuxième pilier qu'est l'assurance maladie. Encore convient-il de rappeler que la loi de financement pour 2004 a donné lieu à une réforme ambitieuse de la politique familiale avec la mise ne place de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE). Le présent texte intervient quant à lui après l'adoption de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie et celle du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Au terme de tant de réformes, on ne peut s'étonner que le présent projet de loi de financement pour 2005 ne contienne pas de mesures aussi spectaculaires, ne vise pas à mettre en place quelque réforme majeure. Encore convient-il de relever la présence de mesures fortes : on peut par exemple penser à la fixation d'un ONDAM particulièrement volontariste dans la droite ligne de la réforme de l'assurance maladie, aux mesures garantissant le financement de la prise en charge des victimes de l'amiante, aux efforts consentis en faveur de l'adoption ou au dispositif adossant le régime des industries électriques et gazières au régime général.

La caractéristique majeure de ce projet de loi de financement est autre : il concrétise les orientations arrêtées dans le cadre de ces réformes, il en tire les conséquences en termes de moyens et vise à en asseoir la réalisation. Il est l'occasion unique pour le Parlement de débattre de l'ensemble des orientations de la protection sociale et de marquer son accord - ou ses éventuelles réserves - sur celles-ci par le vote de dépenses et de recettes supérieures à 350 milliards d'euros, soit un budget nettement supérieur à celui de l'Etat. Il s'agit donc d'un temps démocratique fort.

Pourtant, le rapporteur souhaite que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale soit le dernier du genre. En dépit de la volonté affichée de clarification et des mesures prises en ce sens depuis 2002 - l'une des plus symboliques résidant dans la suppression l'an dernier du FOREC - la nature même de notre système de protection sociale et son histoire ont érigé un édifice d'une extrême complexité. Force est malheureusement de reconnaître que les lois de financement actuelles - tout en constituant un réel progrès - ne répondent pas suffisamment aux exigences démocratiques.

Le présent rapport reviendra rapidement sur certaines caractéristiques de notre système de sécurité sociale, sur quelques-uns des éléments de sa complexité - souvent supposés à tort connus de tous - avant d'aborder la présentation des comptes 2004 et d'aborder les perspectives pour 2005. Toutefois, la pédagogie, même si elle est nécessaire - la sécurité sociale doit être un bien commun pas une affaire de spécialistes -, ne peut suffire.

Le rapporteur appelle solennellement à la réforme de l'organisation même des lois de financement de la sécurité sociale, vœu d'ailleurs exprimé par le gouvernement lors du débat sur la réforme de l'assurance maladie. Cette réforme urgente doit répondre à un triple objectif : un débat politique portant sur les orientations mises en œuvres, une vision claire des comptes, une vision prospective des actions et de l'équilibre de la sécurité sociale. Les lois de financement de la sécurité sociale ne sauraient être réduites à un débat sur des équilibres financiers ; leur examen doit devenir le moment de véritables choix : l'Assemblée nationale ne peut qu'attendre avec impatience l'adoption en Conseil des ministres d'un tel projet.

*

Pour préparer l'examen de ce projet de loi de financement, de nombreuses auditions ont été organisées par le rapporteur (cf. annexe). Il ne peut que se réjouir qu'elles aient en outre pu avoir lieu après la diffusion de l'avant-projet de loi, voire après le dépôt du projet lui-même, grâce à un calendrier gouvernemental en nette amélioration par rapport aux années antérieures.

La commission a examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 pendant 4 séances, dont deux auditions, totalisant 8 heures 20 de réunion. Elle a été saisie de 156 amendements sur les 35 articles du projet. Elle a adopté 31 amendements, dont 25 émanant des rapporteurs, 4 du groupe UMP et 2 du groupe socialiste.

I.- LES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
SONT PARTICULIÈREMENT PEU LISIBLES

La loi de financement de la sécurité sociale a pour vocation de retracer les comptes sociaux et de permettre le vote des dépenses et recettes de la sécurité sociale. Cet objectif en principe simple se heurte à la difficulté de rendre compte dans un cadre unique de l'hétérogénéité de l'organisation de notre système de sécurité sociale (A), accrue par l'existence de relations particulièrement complexes avec d'autres acteurs - qu'il s'agisse de fonds de financement ou de l'Etat (B). La clarification des comptes sociaux constitue à l'évidence tout à la fois une exigence et un défi (C).

A. UNE ORGANISATION COMPLEXE

1. Une structuration en branche par risque

a) Quatre branches ...

La sécurité sociale est structurée en quatre branches chargées chacune de la gestion d'une catégorie de risques :

- la branche maladie en charge de la maladie, la maternité, l'invalidité et le décès ;

- la branche accidents du travail et maladies professionnelles ;

- la branche vieillesse en charge de l'assurance vieillesse et de l'assurance veuvage ;

- la branche famille.

Cette organisation en apparence simple ne l'est pas tant.

Par exemple la prise en charge des pensions relève de la branche vieillesse, celle des avantages familiaux non contributifs, c'est-à-dire ne dépendant pas de l'existence d'un revenu donnant lieu à prélèvement, est effectuée par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), fonds de financement alimenté notamment par un versement de la branche famille (dont le niveau est fixé pour 2005 par l'article 26 du présent projet).

b) ... ou cinq ?

De même, alors que l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) est un organisme national de sécurité sociale, chargé de la trésorerie du régime général, au même titre que les caisses nationales d'assurance vieillesse (CNAV), de l'assurance maladie (CNAM) et d'allocations familiales (CNAF), qu'elle gère un réseau d'organismes locaux, elle n'est pas pour autant à la tête de ce qui pourrait être assimilé à une cinquième branche, celle du recouvrement.

Enfin, les débats entourant la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ont montré l'ambiguïté liée à la prise en charge d'un nouveau risque, celui de la perte d'autonomie. S'il s'agit indéniablement d'une cinquième branche de la protection sociale selon les propos tenus par le Premier ministre le 6 novembre 1999, l'appartenance de ce nouvel organisme de protection sociale à la sécurité sociale est contestée.

On voit donc qu'il n'y a pas stricte coïncidence entre branche et couverture d'un risque précis.

2. Une structuration compliquée par la multiplicité des régimes d'affiliation

a) Le maquis des régimes

Cette organisation en branches se double d'une extrême hétérogénéité des régimes. Il existe ainsi au-delà du régime général, qui couvre 85 % des assurés, d'autres régimes importants de salariés : SNCF, régime des mines, Caisse nationale des industries électriques et gazières, ... Un deuxième  critère de distinction entre régimes est celui de l'appartenance ou non au monde agricole : celui-ci se singularise notamment par son réseau unique regroupant la gestion de l'ensemble des risques sous l'égide de la Mutualité sociale agricole. Un troisième critère est celui de la distinction entre régimes de salariés et de non-salariés, ces derniers étant au surplus marqués par un extrême éparpillement. Loin du souhait des fondateurs de la sécurité sociale qui aspiraient à un système couvrant l'ensemble de la population française, l'histoire de notre sécurité sociale a été marquée par le maintien de ces régimes spécifiques.

Cette hétérogénéité n'est à l'évidence ni un facteur de simplicité ni un facteur d'équité. La Cour des comptes a consacré une large part des développements de son rapport pour 2004 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale à la question des coûts de gestion des organismes de sécurité sociale. Rien que pour le régime général, elle pointe la disparité des réseaux - 128 caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), 122 caisses d'allocations familiales, 16 caisses régionales d'assurance vieillesse. On peut s'interroger sur les gaspillages résultant d'un maillage aussi hétérogène. On peut aussi, à la lumière de la difficile mise en place du RSI-ISU (Régime social des indépendants-Interlocuteur social unique), le guichet unique des professions indépendantes, se demander quelle est l'efficacité de ces structures en apparence redondantes.

b) Les limites de leur rationalisation

Le rapporteur ne peut que comprendre le scepticisme que peut susciter une organisation en apparence aussi dépourvue d'unité et de logique. De fait, les recommandations de la Cour visant à mettre de l'ordre dans les structures doivent être suivies d'effets et plusieurs des organismes nationaux concernés se sont d'ores et déjà attelés à cette tâche (la CNAM et la CCMSA notamment). Toutefois, cet effort de rationalisation ne peut s'effectuer que dans le respect d'une double contrainte.

La première est celle de conserver leurs spécificités aux divers régimes dès lors que leur situation le justifie. L'objectif de 1945 d'une protection sociale parfaitement uniforme gérée dans un cadre unique a vécu ; si la progressive convergence du nombre de prestations (notamment par la généralisation de la couverture maladie) et des cotisations tend - et l'on ne peut que s'en réjouir - à gommer certaines différences réellement constitutives d'inégalités, il ne semble pas opportun de fondre tous les régimes dans un même moule. Force est de constater l'attachement d'un certain nombre de catégories de Français à « leur » régime de sécurité sociale. Il est d'ailleurs paradoxal de constater que cet attachement se manifeste certes lorsque ledit régime est plutôt avantageux et/ou jouit de la solidarité des autres (régimes spéciaux de la SNCF ou de la Banque de France par exemple) mais aussi lorsqu'il est fortement mis à contribution dans le cadre de cette solidarité (Caisse nationale des barreaux français ou Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales) ou lorsque ses prestations se situent plutôt en deçà de la norme.

Le régime agricole en constitue l'une des meilleures illustrations. Les agriculteurs ne voient pas uniquement dans la Mutualité sociale agricole (MSA) un organisme de protection sociale mais un partenaire à part entière. La caisse locale de la MSA - dirigée par des administrateurs élus - n'est pas un simple guichet mais un interlocuteur pour l'ensemble des demandes du monde agricole - quelle que soit la prestation sociale concernée - et à ce titre elle joue un rôle d'amortisseur social plus que celui d'un distributeur de prestations. On mesure donc l'erreur que constituerait l'intégration du régime agricole dans le régime général comme certains l'imaginent aujourd'hui, voyant dans cette mesure une solution peu coûteuse aux difficultés financières du régime.

Ce serait au surplus négliger la deuxième contrainte devant entourer une éventuelle rationalisation non des régimes cette fois mais de leurs réseaux, en particulier du régime général. Les organismes locaux de sécurité sociale constituent un élément essentiel de la nécessaire proximité, d'un maillage territorial adapté. Qu'il faille restructurer les réseaux est incontestable ; toutefois, cela ne doit pas passer par une politique aveugle de fermeture mais par le regroupement des activités par plateformes de services sur un nombre plus réduit de sites tout en conservant localement des implantations d'accueil du public, d'aide à l'usager.

3. En dépit du principe d'autonomie financière, des relations complexes entre les différents acteurs du système

a) Des liens de trésorerie

La trésorerie de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) recouvre non seulement les opérations d'encaissements et de décaissements et les opérations de dépenses des différentes branches du régime général (avec un suivi individualisé par branche depuis la loi du 25 juillet 1994), mais aussi un certain nombre d'opérations pour compte de tiers dont le volume a fortement crû ces dernières années (notamment le versement de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) au Fonds de solidarité vieillesse (FSV), au Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (FFAPA) (1)et à la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

La gestion commune de la trésorerie s'opère par l'intermédiaire du compte unique de disponibilités courantes de l'ACOSS auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), laquelle consent à l'ACOSS des avances destinées à couvrir ses besoins de trésorerie.

Ces liens font que naturellement les déficits constatés, par exemple dans une branche, ont des répercussions sur la capacité des autres branches à utiliser ces facilités de trésorerie. De même, le déséquilibre de fonds tels que le FSV crée une tension sur la trésorerie du régime général.

Les déficits constatés dans un domaine ont nécessairement des répercussions sur les autres. Par exemple, aujourd'hui le déficit croissant du FSV ne lui permet plus de financer les dépenses autres que celles réellement exposées par les régimes de base d'assurance vieillesse.

b) Des mécanismes de compensation entre branches

En dépit du principe d'autonomie financière des branches, il existe de nombreux transferts inter-branches

- branche maladie : prises en charge de cotisations familiales des praticiens et auxiliaires médicaux et du transfert au titre des travailleuses familiales ;

- branche accidents du travail et maladies professionnelles : transfert entre les branches accidents du travail et maladies professionnelles  et maladie de la CNAM (tel que prévu par l'article 22 du projet de loi) destiné à compenser la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles ;

- branche vieillesse : transfert entre les branches vieillesse et maladie du régime des mines (supprimé à partir de 2005) ;

- branche famille : transfert au titre de l'assurance vieillesse des parents au foyer.

c) Des mécanismes de compensation entre régimes particulièrement sophistiqués et contestés

Ces mécanismes de compensation visent à opérer des transferts entre les différents régimes de façon à garantir le caractère solidaire du système de protection sociale en déterminant la situation des différents régimes si on leur appliquait les caractéristiques d'un régime fictif qui servirait une prestation dite de référence : dans ces conditions de fonctionnement, les régimes excédentaires sont débiteurs à la compensation et les régimes déficitaires, créanciers.

On peut ainsi citer :

- les compensations bilatérales du risque maladie, transferts entre le régime général et six régimes spéciaux pour les prestations en matière d'assurance maladie-maternité ;

- la compensation spécifique entre régimes spéciaux pour le risque vieillesse ;

- la compensation généralisée des risques vieillesse et maladie. Elle concerne les régimes de salariés considérés comme un bloc et les régimes de non-salariés.

Ultime raffinement de cette volonté de gommer les inégalités liées aux disparités entre la structure démographique des régimes, la compensation généralisée du risque vieillesse se fait même en deux étapes puisqu'il y a d'abord compensation entre les seuls régimes de salariés puis compensation entre les régimes de salariés (regroupés en un bloc) et les régimes de non-salariés. Celle-ci repose, là encore, sur l'application d'un régime fictif, mais les capacités contributives des régimes sont déterminées en fonction de leur effectif de cotisants. Le bloc des salariés étant globalement débiteur, sa contribution est répartie entre les régimes de salariés au prorata de leurs masses salariales plafonnées.

Ces mécanismes de compensation peuvent conduire à des transferts importants d'un régime à l'autre. La masse globale des transferts ainsi opérés avoisine 14 milliards d'euros en 2004, soit le montant du déficit prévisionnel du régime général.

Masse des transferts de compensations

(en millions d'euros)

2002

2003

 %

2004

 %

2005

 %

Compensations bilatérales

1 620

1 704

5,2

1 819

6,8

1 815

- 0,2

Compensation démographique maladie

1 384

1 414

2,1

1 445

2,2

1 464

1,3

Compensation démographique vieillesse

8 242

8 410

2,1

8 442

0,4

8 477

0,4

Compensation spécifique

2 895

2 616

- 9,6

2 300

- 12,1

1 977

- 14,1

Total

14 141

14 144

0,0

14 006

- 1,0

13 733

- 2,0

Les transferts sont ainsi particulièrement lourds pour des régimes comme le régime général (7,3 milliards d'euros), la CNRACL (2,3 milliards d'euros) et a contrario constituent un apport très substantiel pour d'autres : régime des exploitants agricoles (5,5 milliards), du régime minier (2,7 milliards d'euros) ou encore régime des salariés agricoles (plus de 2 milliards).

De tels transferts ne sont acceptables qu'à la condition que les critères servant à la compensation soient à la fois incontestables et stables. Force est de constater que les critères actuels ne répondent pas toujours à ces deux conditions. A titre d'exemple, on peut citer l'incidence de la réévaluation par l'INSEE des effectifs de cotisants actifs salariés pour 2002 sur la base du recensement de 1999.

Incidence de la réévaluation par l'INSEE des effectifs de cotisants actifs salariés pour 2002 sur la base du recensement de 1999

Cette opération s'est traduite par une réévaluation de plus de 600 000 cotisants au régime général, ce qui a accru la charge de compensation de la CNAM de plus de 180 millions d'euros et celle de la CNAV d'environ 80 millions d'euros. Le coût total pour le régime général, tous risques confondus et pour le régime des salariés agricoles qui lui est intégré financièrement, est de près de 270 millions d'euros. Cette opération, défavorable à tous les régimes de salariés, est favorable aux non-salariés, et notamment au régime des exploitants agricoles (88 M€) et à la CANAM (136 M€). Pour sa part, l'État voit globalement sa charge allégée d'environ 120 millions d'euros.

Compte tenu de l'impact considérable de la moindre modification, il convient de prêter une attention particulière à la réforme des règles de compensation préconisée par la commission des comptes de compensation et à la clarté des critères qui seront retenus. Toutefois, l'ampleur des sommes concernées et la délicatesse du chantier supposent sa mise en œuvre dans les meilleurs délais afin de restaurer une plus grande équité dans le système.

Le rapport d'audit sur les mécanismes de compensation
entre régimes de base obligatoires légaux de sécurité sociale

A l'initiative du président de la Commission de compensation entre régimes de sécurité sociale, des discussions sur les mécanismes de compensation ont été conduites en 2003 et 2004 avec l'ensemble des régimes. Ces discussions se sont appuyées sur un rapport établi par le secrétariat de la commission, dont l'objectif était une mise à plat des mécanismes et la présentation de mesures visant des améliorations et/ou des modifications concrètes de ces mécanismes. Ce rapport d'audit a été présenté et débattu au sein de la Commission, puis remis au ministre de la santé et de la protection sociale le 9 juillet 2004.

Le rapport traite de l'ensemble des compensations relevant de la compétence de la commission tant pour le risque maladie que pour le risque vieillesse, et aborde tous les aspects de la compensation (textes juridiques, méthodes de calcul, définitions des paramètres...). Il présente les principes historiques de la compensation et décrit les mécanismes actuels. Le rapport formule un certain nombre d'observations et de critiques sur ces mécanismes, et examine ensuite différentes options de réforme.

Dans le cadre de la compensation généralisée vieillesse par exemple, ont été examinées les incidences de la consolidation de certains régimes, l'application d'une prestation de référence correspondant à la moyenne de tous les régimes, la prise en comptes des durées de cotisations, des droits dérivés, des revenus des nonsalariés, des ressources propres des régimes, des sommes déjà prises en charge par un organisme tiers...

Des croisements entre plusieurs de ces scénarios de base ont été réalisés. Tous ces scénarios de réforme ont donné lieu à une évaluation de leur impact financier sur les montants des transferts. Le rapport porte une appréciation sur ces différentes options quant à leur adéquation aux principes généraux de la compensation. Il ne préconise pas de changement immédiat des règles, mais invite à approfondir la réflexion sur les différentes scénarios envisagés et sur leur impact financier global.

Le rapport insiste par ailleurs sur l'importance de la qualité des données qui servent aux calculs des transferts de compensation. D'ores et déjà, pour l'application des règles actuelles, il paraît souhaitable de s'interroger sur les données, notamment sur leur harmonisation entre les régimes. Au-delà, et dans la perspective d'éventuels changements, la qualité des données doit être une préoccupation centrale : l'amélioration des mécanismes dans leur principe ne peut être envisagée que si les données sur lesquelles elle repose sont fiables.

On mesure donc la difficulté qu'il y a à dresser un tableau clair de l'activité ne serait-ce que des quatre branches de la sécurité sociale. Or elles ne vivent pas en vase clos.

B. UNE SITUATION AGGRAVÉE PAR LES RELATIONS ENTRETENUES PAR LA SÉCURITÉ SOCIALE AVEC D'AUTRES ACTEURS

1. Les fonds : bienfait ou malédiction ?

a) Des fonds aux missions variées

Les quatre branches de la sécurité sociale coexistent avec de nombreux fonds à vocation sociale. Certains comme le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) dont la dotation est fixée en loi de financement de la sécurité sociale (article 13 du projet de loi), ne vivent que des dotations versées par la branche dont leur activité relève et ne constitue qu'un relais de l'action de celle-ci, un moyen d'identifier et d'utiliser rapidement les crédits destinés à réaliser des actions précises.

D'autres, quoique souvent pour l'essentiel dotés par des crédits de la branche s'en distinguent nettement sur un plan financier - ils n'entrent pas dans l'objectif financier de la branche, ils peuvent recevoir des dotations d'autres sources - et par leurs missions. Tel est par exemple le cas des fonds « amiante » : le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) procède ainsi par exemple à l'indemnisation des salariés ou anciens salariés victimes de l'amiante, dans la logique de la branche accidents du travail et maladies professionnelles  (AT-MP) mais également à celles des familles victimes par contamination dans une logique de solidarité (sa dotation est prévue par l'article 19 du projet de loi). De même, le Fonds de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante (FCAATA), lui aussi financé exclusivement par la branche accidents du travail et maladies professionnelles en 2004 (voir les articles 20 et 21 du projet), prend en charge un retrait d'activité qui relève en temps ordinaire de la branche vieillesse.

Enfin, certains fonds sont dotés de ressources propres qui en font des financeurs à part entière de la sécurité sociale, l'annexe f du projet de loi de financement de la sécurité sociale leur étant d'ailleurs explicitement consacrée : il s'agit pour l'essentiel du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du Fonds de réserve des retraites (FRR) (2).

b) Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

Le Fonds de solidarité vieillesse, établissement public de l'État à caractère administratif disposant de l'autonomie administrative, budgétaire, financière et comptable, est chargé du financement des avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale.

Les charges du FSV regroupent trois catégories de dépenses :

- le minimum vieillesse (parmi lesquels notamment l'allocation aux vieux travailleurs salariés, le secours viager, l'allocation aux vieux travailleurs non-salariés, l'allocation viagère aux rapatriés et l'atténuation de l'allongement de la durée d'assurance pour les anciens combattants d'Afrique du Nord) ;

- les majorations de pensions pour enfants et conjoints à charge, avantages accordés dans le cadre de la politique familiale ;

- les cotisations prises en charge au titre de périodes validées gratuitement (service national légal et chômage pour l'essentiel) par les régimes de base d'assurance vieillesse reposant sur une évaluation du manque à gagner pour les régimes en termes de cotisations, du fait de périodes non travaillées. Pour compenser ce manque à gagner, le Fonds de solidarité vieillesse effectue un versement forfaitaire calculé en fonction du taux cumulé de cotisations en vigueur dans le régime général, d'une assiette forfaitaire égale à 90 % du SMIC et des effectifs concernés. Depuis 2001, le FSV prend également en charge les cotisations versées aux régimes complémentaires d'assurance vieillesse (AGIRC et ARRCO) au titre des périodes de chômage et de préretraite indemnisées par l'État.

En face de ces charges, les produits du FSV sont constitués par une fraction de CSG, une fraction de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), 20 % du prélèvement social de 2 % et un transfert de la CNAF vers le FSV (fixé à 60 % du montant de la majoration de 10 % pour enfants à charge par l'article 26 du projet de loi).

Tableau synthétique des dépenses et des ressources du FSV

Charges

Produits

Minimum vieillesse :

. AVTS/AVTSN/AMF/Secours viager

. Majoration L. 814-2

. Allocation spéciale du SASV

. Allocation vieillesse supplémentaire

. Allocation aux rapatriés

Majoration de pensions :

. Pour enfants

. Pour conjoint à charge

Validation des périodes de :

. Service national légal

. Chômage (régimes de base et complémentaires)

. Perception des allocations de cessation anticipée de travail (CATS)

.  Perception de l'allocation de préparation à la retraite des anciens combattants d'Afrique du Nord

CSG :

. Sur les revenus d'activité

. Sur les revenus de remplacement

. Sur les revenus du patrimoine

. Sur les revenus de placements

. Sur les gains des jeux

Droit sur les alcools et les boissons non alcoolisées (1)

Taxe de prévoyance (2)

Contribution sociale de solidarité des sociétés (CSSS)

Prélèvement social de 2 % sur les revenus du capital

Transfert CNAF

Produits du placement des disponibilités du fonds

(1) Jusqu'en 1999

(2) jusqu'en 2001

Source : direction de la sécurité sociale (SDEPF-6A).

Cette brève description des activités et des moyens du FSV illustre bien les difficultés de la coexistence entre les fonds de financement et les branches de la sécurité sociale : difficulté parfois à séparer les missions, imbrication des financements avec partage de recettes, mécanismes de transferts complexes, instabilité des ressources dont il est souvent plus facile en période de restrictions de priver un fonds voué à un relatif anonymat qu'une branche de la sécurité sociale, tentation de modifier les circuits de financement et ainsi de juguler ou déplacer les éventuels insuffisances de recettes. L'évolution de l'affectation d'une fraction de CSG au FSV est à ce titre « exemplaire ».

Evolution de l'affectation d'une fraction de CSG au FSV

Instituée en 1991, la CSG calculée au taux de 1,1 %, puis de 2,4 % depuis le 1er juillet 1993, a d'abord été affectée à la seule branche famille, puis à compter du 1er janvier 1994, réparti entre celle-ci et le Fonds de solidarité vieillesse aux taux respectivement de 1,1 % et 1,3 %.

Au 1er janvier 1997 et 1er janvier 1998, le taux de la CSG a augmenté pour financer les régimes d'assurance maladie (après diminution des cotisations maladie), la fraction du FSV restant fixée à 1,3 %.

A compter de 2001, cette fraction est fixée à 1,15 % de CSG, la diminution de 0,15 point étant transférée aux régimes d'assurance maladie.

A partir du 1er janvier 2002, ce taux a été réduit à 1,05 %, la part de 0,10 % revenant au Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie.

En 2005, la loi n°2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie dans sa partie financement instaure l'élargissement de l'assiette applicable aux salariés et aux chômeurs : à compter du 1er janvier 2005, la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (ou liés à la recherche d'emploi) passe de 5 % à 3 %. Dans le but de rendre neutre cette opération, la loi diminue l'affectation de la CSG au FSV assise sur les revenus salariaux et sur les allocations chômage de 1,05 % à 1,03 %.

c) Le Fonds de réserve des retraites (FRR)

Le fonds de réserve pour les retraites (FRR) instauré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 est depuis le 1er janvier 2002 un établissement public de l'État à caractère administratif autonome dont la mission est exclusivement dédiée à la constitution de réserves. D'ailleurs, afin d'assurer la réalité de cet objectif, les ressources du fonds sont indisponibles jusqu'en 2020.

Les différentes catégories de ressources du fonds de réserve sont les suivantes :

- une fraction du solde du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (CSSS) ;

- le versement de tout ou partie des excédents du FSV ;

- le versement de l'excédent de la CNAVTS au titre du dernier exercice clos, une partie de ce versement pouvant être anticipé en cours d'exercice ;

- une fraction égale à 65% du prélèvement social de 2% portant sur les revenus du patrimoine et les produits de placement ;

- les versements du compte d'affectation spéciale des « produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés » prévu au budget de l'Etat, correspondant, en 2002, à une partie des produits des privatisations effectuées par l'Etat (ouverture du capital des autoroutes du sud de la France (ASF) et Crédit lyonnais) ;

- toute autre ressource affectée au FRR, notamment, en 2001 et 2002, le produit de la vente des licences UMTS (téléphonie mobile de 3e génération) et le produit de la vente des actifs des caisses d'épargne dont le fonds bénéficie encore actuellement ;

- deux catégories de ressources prévues par la loi n° 2001-152 du 19 février 2001 sur l'épargne salariale : la contribution de 8,2 % sur la part de l'abondement de l'employeur supérieur à 2 300 euros au plan partenarial d'épargne salariale volontaire et les montants d'intéressement et de participation non réclamés par les salariés et reçus par la caisse des dépôts et consignations au terme du délai de prescription trentenaire. Le rendement de ces deux recettes est faible ;

- les produits des placements du FRR.

On mesure rapidement à la lecture de cette énumération les difficultés posées par les ressources du fonds : sur les quatre premières d'entre elles, deux sont partagées avec d'autres financeurs de la sécurité sociale et les deux autres n'ont de réalité qu'en période d'excédent des comptes. Les autres ressources sont aléatoires ou plus marginales. Dès lors, il n'est pas étonnant que les recettes du FRR n'atteignent que 19,1 milliards d'euros à la fin de 2004 alors que l'objectif initial était de provisionner 150 milliards d'euros d'ici 2020.

La réforme du statut d'EDF-GDF s'accompagne d'une réforme de la gestion du régime spécial de retraite des industries électriques et gazières (IEG). Cette réforme prévoit notamment son adossement à compter du 1er janvier 2005 au régime général d'assurance vieillesse des salariés pour la partie des prestations qui correspond à celles offertes par la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS). En contrepartie de cet adossement, l'article 19 de la loi du 9 août 2004 prévoit le versement par la caisse des industries électriques et gazières d'un droit d'entrée, la « soulte ».

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 prévoit dans son article 27 une nouvelle mission pour le FRR dont les activités seront désormais retracées dans deux sections. La soulte est versée par la caisse des IEG au FRR dans une section spécifique du fonds. Ce dernier la gèrera pour le compte de la CNAVTS. Par ailleurs, il versera chaque année à la CNAVTS, une somme correspondant au surcoût lié à la différence de situation entre le régime IEG et le régime général telle que définie au 3° de l'article 19 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004.

Cette mesure pour utile qu'elle soit et gage du bon usage des fonds versés par EDF ainsi que de la neutralité de l'opération ne contribue à l'évidence pas à une simplification des circuits de financement entre le FRR et ses partenaires au sein du système de sécurité sociale.

2. Une situation globalement clarifiée depuis la disparition du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)

a) La fin du peu regretté FOREC

L'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé un Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), dont la mission consistait à prendre en charge les mesures d'allègements généraux de cotisations patronales portant sur les bas salaires ou liés à la réduction du temps de travail. Il a été substitué à l'Etat pour rembourser aux organismes de sécurité sociale le coût de ces exonérations de cotisations qui relèvent de la politique de l'emploi.

La loi de financement pour 2004 a mis fin à son existence après un bilan peu glorieux mais illustrant bien les vicissitudes qui accompagnent parfois la complexité des circuits mis en place : ainsi ce n'est qu'après un an de tergiversations que le fonds a officiellement été mis en place, période pendant laquelle la sécurité sociale n'a pas été remboursée des exonérations de cotisations sociales correspondantes, ce qui a laissé subsister sur l'Etat une dette de plus de 2 milliards d'euros qui n'aura finalement pu être soldée qu'en 2004.

On ne saurait pour autant nier le caractère inégalé de l'un de ses traits majeurs : la capacité à accroître la complexité des flux de financement de la sécurité sociale comme en témoignent les schémas suivants.

LES FLUX DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE en 2003
(hors Etat et BAPSA)
_________________

RESSOURCES AFFECTÉES FONDS DE FINANCEMENT RÉGIMES DE BASE

graphique
Contributions pharma

MALADIE

CNAM

CANAM

Autres régimes

Droits tabacs

Fonds préretraite amiante

graphique
Taxe auto

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Taxe assurance

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Taxe véhicules sociétés

graphique
Droits alcools

Fonds de solidarité vieillesse

graphique
TGAP

graphique
CSB

graphique
CSG

graphique
Taxe prévoyance

graphique
C3S

graphique
Prélèvement social 2 %

graphique
CRDS

LES FLUX DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE en 2004
(hors Etat et BAPSA/FFIPSA)

_________________

RESSOURCES AFFECTÉES FONDS DE FINANCEMENT RÉGIMES DE BASE

MALADIE

CNAM

CANAM

Autres régimes

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Contributions pharma

graphique
graphique
Droits tabacs

graphique
graphique
graphique

graphique

Fonds de solidarité vieillesse

onds de réserve

ACCIDENTS DU TRAVAIL

Taxe boissons (3)

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graphique

graphique
graphique
graphique
graphique
CSG

FAMILLE - CNAF

Fonds de réserve

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graphique
VIEILLESSE

CNAV

Autres régimes

C3S

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graphique
graphique
Prélèvement social 2 %

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CRDS

b) Une simplification qui n'est pas remise en cause par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005

Le présent projet de loi ne propose pas de recréer de nouvelles tuyauteries. Par rapport au régime en vigueur sous la précédente majorité, il n'y a aucun changement apporté aux mécanismes de répartition des impositions affectées ni aucune modification des transferts entre régimes ou branches. La suppression du FOREC a été l'occasion d'adopter enfin un code de bonne conduite, un pacte de stabilité des flux de financement. Il ne comporte que des mesures d'équilibrage financier internes aux branches à deux exceptions, celle liée à l'adossement du régime des IEG au régime général qui sert la neutralité financière de l'opération et celle liée à la création de la CNSA.

Aucune de ces deux mesures ne peut rivaliser en complexité avec la « machinerie infernale », selon l'expression de M. Pierre Morange, rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 pour les recettes et l'équilibre général, que constituait le FOREC.

· L'adossement du régime des IEG au régime général

L'adossement du régime des IEG implique un mécanisme relativement complexe destiné à assurer la neutralité financière de l'opération pour le régime général.

La loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz a profondément réformé le régime d'assurance vieillesse des personnels des industries électriques et gazières (IEG) en adossant leur régime spécial aux régimes de droit commun de la Caisse national d'assurance vieillesse (CNAV) et des régimes complémentaires (AGIRC et ARRCO). L'article 27 du projet de loi (4) s'efforce de mettre en place un circuit assurant la transparence et la neutralité financière de l'adossement de la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG) sur le régime général.

La formule de l'adossement retenue pour procéder à l'adaptation nécessaire de régime spécial liée à l'ouverture à la concurrence des IEG présente de multiples avantages, au premier rang desquels l'absence de coût pour les cotisants des régimes de base et complémentaires. Plus satisfaisant sur ce dernier point que l'intégration pure et simple dans le régime général au prix d'une soulte, l'adossement s'accompagne de certaines contraintes :

- la réforme doit être transparente pour les personnels qui verseront des cotisations et percevront des prestations dans les conditions prévues par leur statut, sans changement par rapport au système actuel ;

- dès lors, les IEG devront, compte tenu du principe de neutralité pour les régimes de droit commun, financer les droits spécifiques à leurs personnels (soit près de la moitié des prestations) et provisionner ces charges ;

- si ces deux premiers points n'ont pas d'incidence sur le régime de base du régime général, le financement des droits de base appelle lui un calcul des transferts à opérer entre la CNIEG et la CNAV garantissant la neutralité de l'opération  par le versement d'une soulte à la CNAV ;

- estimée à 6,9 milliards d'euros lors de la préparation du projet de loi, la soulte consistera d'une part en versements provenant de la contribution tarifaire assise sur les tarifs d'usage des réseaux et en versements des entreprises électriques et gazières ;

- par ailleurs, si la tenue de la comptabilité de la CNAV en droits constatés ne lui permet pas d'absorber de façon étalée le versement de la soulte, il ne semble pas sain que le brusque abondement lié au versement de la soulte redresse de façon artificielle les comptes de la CNAV en 2005, d'où un mécanisme de gestion de la soulte confié au Fonds de réserve des retraites.

L'opération n'est évidemment pas sans conséquence sur les conditions d'équilibre non seulement de la branche vieillesse mais également sur les recettes et l'équilibre du présent projet de loi de financement.

Dès lors, le rapporteur estime que l'opération doit s'effectuer dans le respect des conditions suivantes :

- le calendrier de versement de la soulte doit, ainsi que son montant naturellement, être connu dans les meilleurs délais afin d'offrir à tous les acteurs la meilleure prévisibilité possible ;

- la neutralité financière de l'opération - dépendant à la fois du montant global de celle-ci, des paramètres utilisés à cet effet (y compris la nature des droits repris (5)) - doit être solennellement garantie ;

- les paramètres retenus doivent donc être aussi proches que possible dans le calcul du montant de la soulte versée au régime de base et dans le calcul de celle destinée aux régimes complémentaires ;

- L'usage de la soulte doit être transparent et la CNAV doit bénéficier de l'intégralité de celle-ci - intérêts compris (6)- au seul bénéfice de la compensation du surcoût de la prise en charge des personnels des IEG. La soulte ne doit pas servir le financement du déficit courant de la CNAV.

Si l'opération est complexe et soumise à conditions, le rapporteur estime que celles-ci sont désormais remplies compte tenu des négociations intervenues entre le dépôt du projet de loi le 5 octobre dernier et l'examen du texte par la commission et de ce fait les réserves qu'il avait formulées lors de l'audition du ministre de la santé et de la protection sociale semblent ne plus avoir lieu d'être.

· La création de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

La création de cette caisse introduit un nouvel acteur dans le schéma de financement mais dont la place est clairement définie

La loi du 30 juin 2004 précitée affecte à un nouvel organisme de protection sociale - mais pas de sécurité sociale - la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), les moyens hérités de l'ancien Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (FFAPA) - c'est-à-dire pour l'essentiel une fraction de la CSG - et les moyens supplémentaires issus de la journée de solidarité créée par la loi.

Ses recettes sont les suivantes :

- une contribution des employeurs publics et privés de 0,3 % sur une assiette identique à celle des cotisations patronales d'assurance maladie ;

- une contribution additionnelle de 0,3 point sur la fraction de la contribution sociale généralisée (CSG) assise respectivement sur les revenus du patrimoine et sur les revenus du placement ;

- une fraction de 0,1 point du produit de la CSG ;

- une participation des régimes obligatoires de base de l'assurance vieillesse.

Recettes de la CNSA en année pleine

(en millions d'euros)

TOTAL

2 874

Contribution patronale

1 600

Contribution sur les revenus du patrimoine et des placements

300

Fraction de 0,1 point de CSG

903

Versement des caisses de retraite .

61

Ses dépenses en régime de croisière (c'est-à-dire à compter du 1er janvier 2005) consisteront en :

- l'affectation de 40 % du produit de la contribution patronale de 0,3 % et de la contribution additionnelle sur les revenus de l'épargne au financement d'actions en faveur des personnes âgées ;

- l'affectation d'un montant identique à celui de la contribution patronale au financement d'actions en faveur des personnes handicapées.

- l'affectation des 20 % restants du produit de la contribution patronale de 0,3 % et la contribution additionnelle sur les revenus de l'épargne et du produit d'une fraction de 0,1 point de CSG destiné à prendre en charge une partie de l'APA.

- le financement des dépenses de modernisation des services d'aide à domicile et des dépenses de formation et de qualification des personnels soignants recrutés dans le cadre du plan de renforcement de la médicalisation des services et établissements accueillant des personnes dépendantes.

I - Améliorer la vie à domicile

1. Augmenter et diversifier l'offre

Le programme prévoit une série de mesures concrètes pour atteindre ces objectifs, notamment :

- création de 17 000 places de services de soins infirmiers à domicile permettant d'atteindre près de 100 000 places en 2007 ;

- création de 4 500 places d'hébergement temporaire ;

- création de 8 500 places d'accueils de jour dédiés à la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou d'affections apparentées.

L'enveloppe de ces 13 000 nouvelles places d'hébergement temporaire et d'accueil de jour sera également affectée à des dispositifs innovants, notamment : places d'accueils de jours itinérants, d'accueils de nuit, gardes itinérantes de nuit.

2. Développer l'innovation pour mieux personnaliser la réponse aux attentes et aux besoins

Il s'agit donc de permettre aux personnes âgées et à leurs proches de pouvoir disposer d'une offre de services enrichie :

- développement de services polyvalents d'aide et de soins à domicile afin d'améliorer la coordination et l'adaptation des réponses à domicile en termes d'aide et de soins ;

- développement d'un accueil familial adapté ;

- facilitation de l'aide au déplacement et au transport accompagné des personnes âgées ;

- développement de l'hospitalisation à domicile en gériatrie ;

- mesures incitatives en faveur de l'amélioration de l'accessibilité et de l'adaptation de l'habitat des personnes âgées ;

- utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication pour améliorer la qualité de vie des personnes âgées à domicile ;

- création de relais d'écoute et de lieux de parole destinés aux aidants ;

- mise à l'étude d'un congé d'accompagnement de 3 mois maximum pour s'occuper d'un ascendant.

II - Professionnaliser l'aide, rendre les métiers plus attractifs

Le secteur des personnes âgées souffre d'une pénurie de vocations. Il a encore trop souvent l'image de professions difficiles et peu valorisantes.

L'avenir de la prise en charge des personnes âgées repose en grande partie sur des professionnels qualifiés et en nombre suffisant.

Il conviendra d'augmenter les flux de personnels qualifiés dans les années à venir.

Il convient aussi de valoriser l'expérience et de former les nombreuses personnes non qualifiées qui exercent actuellement dans les établissements et à domicile : la validation des acquis de l'expérience (VAE) leur permettra à cet effet l'acquisition de tout ou partie d'un diplôme.

Par ailleurs les modes d'accès aux formations qualifiantes de niveau 5 seront élargis, notamment en ouvrant la formation d'aide soignant à l'alternance, ou en encourageant l'apprentissage. Il conviendra également de faciliter les passerelles entre les formations pour permettre des allègements de formation et de certification pour les professionnels qui souhaitent diversifier leur formation et pour faciliter la mobilité professionnelle.

Enfin, les métiers d'aide à la personne âgée seront valorisés par une campagne nationale, programmée sur plusieurs années, et fortement relayée au programme local.

Source : dossier de presse gouvernemental sur la réforme de la solidarité pour l'autonomie

L'article 3 du présent projet de loi sécurise d'ailleurs les conditions dans lesquelles la CNSA intervient et donne une base légale pérenne à ses actions en complément de celles menées au sein de la sécurité sociale.

Certains ont exprimé la crainte que la CNSA ne soit un moyen pour l'assurance maladie de se désengager de la prise en charge des soins liés à la perte d'autonomie, la crainte d'une « Sécu pour les vieux et les handicapés ». Il convient de réaffirmer clairement les principes régissant la prise en charge des personnes âgées (mais aussi celle des personnes handicapées) tels que les ont par exemple exprimés de façon unanime l'ensemble des membres de la mission d'information sur l'avenir de l'assurance maladie, présidée par M. Jean-Louis Debré, président de l'Assemblée nationale, en juin dernier :

« La mission a souhaité réaffirmer solennellement son attachement à la solidarité entre bénéficiaires sous toutes ses formes. A ainsi été abordée à plusieurs reprises la question de la solidarité des plus jeunes vers les plus âgés. (...) La population de plus de 80 ans consomme 14 % des dépenses alors qu'elle ne représente que 4 % de la population globale. Cela représente en 2003 environ 17 milliards d'euros de dépenses. La population de plus de 60 ans consomme quant à elle environ la moitié des dépenses de santé, alors qu'elle ne représente que 21 % de la population totale. (...) La mission a confirmé qu'elle ne souhaitait pas voir les dépenses de soins en faveur des personnes âgées sortir du champ de l'assurance maladie (...) Aucune voix ne s'est exprimée - ni devant la mission ni en son sein - pour contester ces transferts qui sont la traduction du principe de solidarité lui-même. »

Toutefois, les débats en commission sur le présent texte ont montré que toutes les craintes n'avaient pas disparu. Au-delà des affirmations de principe, on peut s'intéresser aux faits :

- il n'existe aucun mécanisme de transfert de l'assurance maladie vers la CNSA : pas un euro ne transite ni ne transitera des caisses de l'assurance maladie vers celles du nouvel organisme ;

a contrario, l'assurance maladie reçoit de la CNSA des crédits en complément de ces actions en faveur de la prise en charge de la perte d'autonomie.

Evolution des crédits de l'ONDAM
consacrés aux personnes handicapées et aux personnes âgées

(en millions d'euros)

Evolution des crédits de l'ONDAM
consacrés en 2005 :

Montant

Dont part apportée par la CNSA

- aux personnes handicapées

+ 330

+ 114

- aux personnes âgées

+ 420

+ 365

Il n'y a donc pas désengagement de l'assurance maladie mais complémentarité des actions. Il convient en outre d'observer que l'usage des crédits de la CNSA est parfaitement fléché, que l'affectation de ressources venant renforcer l'action de l'assurance maladie est juridiquement obligatoire et qu'il n' y a donc pas à craindre non plus un éventuel désengagement de la CNSA.

Toutefois, le rapporteur est sensible aux interrogations formulées par de nombreux commissaires sur deux questions majeures : celle de la transparence et de l'équité du financement de la perte d'autonomie - liée à celles du financement des établissements sociaux et médico-sociaux - et celle de l'articulation entre volet sanitaire et volet social de la politique mise en œuvre. De ce point de vue, les actions menées globalement par la CNSA afin de favoriser le recrutement et la formation de personnels oeuvrant dans le domaine de l'aide à la personne sont essentielles. Elles jouent un rôle structurant. Une réflexion plus prospective n'en doit pas moins être menée et le rapporteur entend saisir le gouvernement de cette question.

3. La persistance de nombreux éléments de complexité

On observera tout d'abord qu'il n' y a que rarement spécialisation des ressources de la sécurité sociale en fonction des dépenses financées. Ainsi, les recettes principales (cotisations et CSG notamment) sont affectées à l'ensemble des branches, dans des proportions différentes et selon des clefs de répartition parfois particulièrement complexes.

Structure des recettes des régimes de base en 2002

graphique

Ainsi, la CSG est elle répartie selon la clef suivante.

Clef de répartition de la CSG

Taux de CSG

Proposée par le projet

CSG sur les revenus d'activité

taux

7,5 %

1,08 point à la CNAF

1,03 point au FSV

0,1 point à la CNSA1

5,29 points à la branche maladie

CSG sur les revenus de remplacement

1,1 point à la CNAF

1,05 point au FSV

0,1 point à la CNSA1

1) Personnes imposables

graphique
taux

6,2 %2

3,95 points à la branche maladie 2

6,6 %3

4,35 points à la branche maladie 3

2) Personnes imposables au titre de la taxe d'habitation mais pas à celui de l'impôt sur le revenu

taux

3,8 %

3,8 points à la branche maladie

CSG sur les revenus du patrimoine et les produits de placement

taux:

8,2 % 4

1,1 point à la CNAF

1,05 point au FSV

0,1 point à la CNSA1

5,95 points à la branche maladie

CSG sur les jeux

taux

9,5 %

1,1 point à la CNAF

1,05 point au FSV

0,1 point à la CNSA1

7,25 points à la branche maladie

Source : Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale.

CNAF : Caisse nationale d'allocations familiales

FSV : Fonds de solidarité vieillesse

1 Depuis le 1er juillet 2004, antérieurement au Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie.

2 Allocations chômage et indemnités journalières (quel que soit le statut fiscal de la personne dans le cas des indemnités journalières).

3 Pensions, préretraites.

4 8,5 % compte tenu du relèvement de 0,3 point au profit de la CNSA à compter du 1er juillet 2004.

Une illustration particulièrement marquante de la complexité du partage des ressources est fournie par la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (CSSS).

La CSSS est théoriquement répartie entre les régimes de non salariés non-agricoles en fonction de leurs déficits comptables exprimés en droits constatés. En réalité, l'attribution de CSSS à ces régimes peut s'avérer différente de leurs droits compte tenu de deux paramètres principaux :

- d'une part, les droits des régimes au titre d'une année sont évalués à partir de leur résultat prévisionnel, le résultat réel pouvant s'avérer sensiblement différent ;

- d'autre part, la CSSS doit maintenir constamment positive la trésorerie des régimes afin de leur permettre d'assurer le paiement des prestations à leur échéance, ce qui peut amener à des attributions supérieures aux droits.

De ce fait, l'affectation de CSSS peut s'avérer particulièrement fluctuante, voire aléatoire pour le FSV (cf. supra) ou le FFIPSA, exemple des conséquences de l'imbrication des financements.

Les comptes de la CSSS

2002
réalisé

2003
réalisé

%

2004
prévu

%

2005
prévu

%

EMPLOIS

2 328,0

1 792,0

-23%

3 497

95%

2 972

-15%

Affectation de la CSSS

CANAM

703,5

909,4

29,3%

1 508

66%

1 621

8%

CANCAVA

321,5

259,8

-19,2%

489

88%

455

-7%

ORGANIC

730,6

- 81,0

668

838

18,7%

CBREBTP

40,0

39,4

-1,5%

42

6,6%

43

2,4%

BAPSA/FFIPSA

520,0

650,0

25,0%

775

19,2%

Gestion administrative

12,4

14,4

16,1%

15

4,2%

15

Autres charges

RESSOURCES

3 249,5

3 283,6

1,2%

3 330

1,4%

3 415

2,5%

Contributions

3 220,7

3 265,0

1,5%

3 315

1,5%

3 400

2,5%

Produits financiers

28,8

18,6

-13,2%

15

-20%

15

RESULTAT

921,5

1 491,6

- 167

443

Transfert vers FSV

566,6

921,5

1 325

443

C. UNE PRÉOCCUPATION CROISSANTE : LA CLARIFICATION DES COMPTES SOCIAUX

1. Les droits sur les tabacs : un bon exemple de mauvaise visibilité des comptes sociaux

Les droits sur les tabacs sont traditionnellement un impôt d'Etat, héritage de l'ancien monopole concédé à la SEITA.

Il a été décidé de transférer en partie les droits sur les tabacs à l'assurance maladie pour compenser le coût du tabagisme pour les dépenses de santé. Ainsi, fin 1996, 6 % de ces droits ont été affectés au Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires (FNPEIS) de la CNAMTS.

A partir de 2000, l'Etat a décidé de participer au financement des exonérations de cotisations sociales en transférant au FOREC une de ses recettes fiscales, en l'occurrence les droits sur les tabacs : 91 % ont ainsi été affectés au FOREC. L'opposition d'alors avait dénoncé le détournement de cette recette fiscale, qui n'aurait eu de justification qu'en abondant la branche maladie.

La loi de finances pour 2001 a affecté l'intégralité du produit du droit de consommation sur les tabacs aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes créés pour concourir à leur financement. Il revenait alors à la loi de financement de la sécurité sociale de répartir ce produit chaque année.

Compte tenu de la suppression et de la rebudgétisation du FOREC, la loi de financement de la sécurité sociale perd l'intégralité de sa compétence au profit de la loi de finances, en vertu de l'article 36 de la LOLF, en matière d'affection d'une imposition redevenue impôt d'Etat. C'est pourquoi l'article 42 du projet de loi de finances pour 2005 définit une nouvelle clef de répartition pour le droit de consommation sur les tabacs.

Clef de répartition du droit de consommation sur les tabacs

Bénéficiaires

LFI 1997

LFI 1998

LFI 2000

LFSS 2001

LFSS 2002

LFSS 2003

LFI
2004

PLF
2005

Etat

93,61 %

90,9 %

5,9 %

-

-

-

26,94 %

14,83 %

CNAMTS

6,39 %

9,1 %

16 %

2,61 %

8,84 %

15,2 %

22,27 %

32,50 %

FOREC

-

-

77,7 %

97 %

90,77 %

84,45 %

-

-

Fonds préretraites amiante

-

-

0,39 %

0,39 %

0,39 %

0,35 %

0,31 %

0,31 %

BAPSA

-

-

-

-

-

-

50,16 %

-

FFIPSA

-

-

-

-

-

-

0,31 %

52,36 %

Le rapporteur se félicite qu'une part toujours plus importante des droits sur les tabacs soit affectée à l'assurance maladie. On ne peut en particulier que se réjouir de l'affectation de plus d'un milliard d'euros de droits tabac supplémentaires à l'assurance maladie qui permet d'honorer l'engagement pris cet été dans l'article 70 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie sans hausse supplémentaire de la fiscalité du tabac qui a atteint des niveaux que l'on ne peut dépasser sans risquer d'entrer dans une zone de rendements décroissants ou de favoriser les phénomènes d'achats transfrontaliers et de contrebande.

En revanche, on ne peut que regretter l'instabilité de cette clef d'affectation et de la nature même des destinataires de ces affectations. On doit par exemple observer les conséquences de la disparition des droits tabacs spécifiques antérieurement affectés au BAPSA qui contribue au déséquilibre actuel de ce régime. Cette instabilité est d'autant plus complexe à gérer que certaines dispositions relèvent des lois de financement quand d'autres ont leur place en projet de loi de finances.

On peut observer une telle instabilité des clefs d'affectation dans la plupart des impôts et taxes affectés à la sécurité sociale : en témoigne par exemple cette année, la proposition faite en projet de loi de finances de transférer les droits alcools résiduels dont bénéficie la CNAM pour le moment au budget de l'Etat

2. Etat-sécurité sociale : une relation tumultueuse

Le rapporteur n'a pas la prétention de faire un panorama exhaustif des relations entre l'Etat et la sécurité sociale qui suffiraient à faire l'objet d'un rapport à elles seules. En revanche, il semble intéressant au travers de quelques exemples de mesurer quelles sont les difficultés caractérisant cette relation.

Le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) créé par la loi de finances pour 2004 en vue de se substituer au budget annexe des prestations sociales des non-salariés agricoles (BAPSA) est un nouveau fonds de financement de la sécurité sociale au sens de la loi organique du 22 juillet 1996, relevant de ce fait de la loi de financement de la sécurité sociale et qui figurant à l'annexe f. La mise en œuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) impliquait en effet la disparition du BAPSA, qui ne répondait pas aux critères définis par ce texte pour les budgets annexes. En conséquence le nouveau fonds a repris sa mission, à savoir assurer le financement des prestations sociales des exploitants agricoles, qui sont des dépenses des régimes obligatoires de base au sens de la loi de financement.

Les recettes de ce fonds sont de plusieurs natures :

- les cotisations des assujettis au régime affectées au service des prestations ;

- la part de CSG maladie affectée au régime des exploitants agricoles ;

- les participations des autres régimes, à savoir la compensation démographique et la contribution de la CNAF ;

- les subventions du Fonds spécial d'invalidité (FSI) et du Fonds solidarité vieillesse (FSV) ;

- les financements publics constitués par les divers impôts et taxes affectés (droits de consommation sur les tabacs, taxe sur les fabricants de tabacs, C3S) et la « traditionnelle » subvention d'équilibre du budget de l'Etat au régime agricole.

C'est évidemment sur la dernière catégorie de recettes - les financements publics - que la relation Etat-régime agricole présente des difficultés. Les charges du régime ont tendance à s'accroître de façon plus rapide que ses ressources contributives du fait de sa situation démographique : la population d'agriculteurs vieillit ; c'est une donnée avec laquelle il faut composer. En outre, l'année 2004 a été marquée par la mensualisation des pensions des exploitants agricoles prévue par l'article 105 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, mesure certes attendue mais dont la charge est évaluée à 30 millions d'euros par an. Face à ces charges, les recettes permanentes du régime ne peuvent suffire et son équilibre était traditionnellement garanti par une subvention de l'Etat. Celle-ci ne constitue plus une obligation juridique et, de fait, aucune subvention n'est prévue pour l'année 2005.

Le passage du BAPSA au FFIPSA en 2003-2004 s'est donc accompagné d'une dégradation de la situation du régime des exploitants agricoles sous le double effet de faiblesses structurelles (déséquilibre démographique du régime), de mesures conjoncturelles (mensualisation des pensions, coût de l'emprunt contracté pour ce faire) et de l'absence de solution de financement pérenne d'un niveau suffisant. L'affectation de droits sur le tabac - recette en outre peu dynamique - s'est faite à un taux trop faible : dès lors que l'affectation d'une part supplémentaire des droits sur le tabac à la sécurité sociale diminuera les recettes du budget de l'Etat, on saisit bien la difficulté pour celui-ci de proposer une telle mesure qui creuse son propre déficit. De même, l'absence de versement par l'Etat de subvention d'équilibre peut s'expliquer : elle n'en constitue pas moins une modification profonde des conditions d'équilibre du régime agricole.

Cette situation n'est pas durablement tenable : le déficit courant ne cesse de croître - 1,5 milliard prévus pour 2005 -, se nourrit des intérêts de la dette financée dans des conditions peu avantageuses et « oubliée » lors de la reprise de dette maladie intervenue cet été. Le monde agricole attend une solution qui ne peut venir des seuls efforts du régime, pourtant particulièrement bien géré.

Dès lors, le rapporteur estime qu'il appartient à la représentation nationale d'inciter le gouvernement à engager le débat sur ce point. Il sera donc dans ce but proposé d'affecter au FFIPSA une nouvelle recette. Il ne s'agit pas nécessairement de trouver immédiatement les moyens d'éponger la dette et de retrouver l'équilibre d'autant que la contrainte budgétaire comme les règles régissant la recevabilité financière brident quelque peu l'initiative. En revanche, de façon un peu provocatrice, le rapporteur proposera d'affecter au FFIPSA une nouvelle recette de façon à faire réagir le gouvernement et à tout le moins à amorcer le nécessaire redressement du régime.

Le rapporteur ne reviendra pas sur d'autres mesures du projet de loi de financement qui témoignent de l'imbrication entre sécurité sociale et Etat et des difficultés qu'elles suscitent mais il convient de les apprécier au regard de l'application du principe de compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale.

3. Des progrès dans la compensation des pertes des organismes de sécurité sociale

L'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale issu de l'article 5 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale dite loi « Veil » prévoit que les exonérations - partielles ou totales - de cotisations sociales donnent lieu à compensation intégrale par le budget de l'Etat des pertes de recettes induites pour les organismes de sécurité sociale. Le bien-fondé de ce principe n'est jamais contesté. En revanche, son application donne fréquemment lieu à débat voire à polémique et souffre d'un manque de clarté évident.

En témoigne d'ailleurs le fait que certaines exonérations restent non compensées, quoique pour certaines postérieures à l'affirmation du principe. La Cour des comptes se fait d'ailleurs régulièrement l'écho dans ses rapports sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de l'existence de mesures d'exonérations de cotisations sociales non compensées par l'Etat ou compensées de façon partielle. On ne reviendra pas non plus sur le débat qui a agité toute l'existence du FOREC.

Devant les insuffisances du dispositif, l'article 70 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a renforcé la protection des ressources de la sécurité sociale :

- sont désormais visées l'ensemble des ressources de la sécurité sociale et non les seules cotisations : la nuance est importante puisque la part des cotisations dans son financement a considérablement baissé depuis l'instauration et la montée en charge de la contribution sociale généralisée (CSG) et représente désormais à peine de plus de 50 % des recettes ; ainsi une exonération de CSG devrait désormais être compensée ;

- sont également inclus les transferts de charge, c'est-à-dire le fait de confier à l'assurance maladie une charge nouvelle incombant antérieurement à l'Etat et dont le financement n'est pas transféré.

Ce renforcement du principe s'applique à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie et est donc applicable aux mesures contenues dans le présent texte ainsi que dans le projet de loi de finances. On peut se demander s'il ne serait pas opportun, afin d'en renforcer encore la portée d'élever la disposition au rang organique à la faveur de la réforme projetée.

En conclusion, on mesure bien la difficulté que constitue l'exercice d'analyse des comptes de la sécurité sociale et d'explication des flux financiers. En conséquence le rapporteur propose plusieurs amendements destinés à les rendre plus accessibles ainsi qu'à améliorer le contrôle sur l'application des lois de financement :

- un amendement proposant la remise au Parlement d'un rapport annuel sur la compensation, qui ne serait pas un document de plus, mais pourrait être élaboré parallèlement au rapport de la commission des comptes, peu disert sur cette question, et servirait ainsi de façon concrète à un examen mieux éclairé du PLFSS (et du PLF) ;

- un amendement modernisant le dispositif des conventions d'objectifs et de gestion et améliorant notamment le contrôle parlementaire sur leur contenu, leur application et leur bonne articulation avec les lois de financement ;

- un amendement qui, dans le prolongement de la démarche vers la certification des comptes prévue par l'article 34 du projet de loi, met en place un mécanisme d'alerte démocratique permettant aux pouvoirs publics d'être informés dans les meilleurs délais de risques réels de dérapage des dépenses de sécurité sociale.

II.- L'AMORCE D'UN REDRESSEMENT FINANCIER EN 2005
N'EST PAS EXCLUSIVE DE POLITIQUES AMBITIEUSES

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale intervient au terme d'une année 2004 marquée par une nouvelle dégradation de l'ensemble des comptes sociaux, qui atteignent un point bas historique (A). Si 2005 constitue une étape décisive vers le redressement financier cet objectif n'entame pas la volonté de réformes ambitieuses (B).

A. L'ENSEMBLE DES COMPTES SOCIAUX DANS LE ROUGE MALGRÉ DES SITUATIONS CONTRASTÉES

Il semble opportun de préciser d'emblée quelle est la situation de chacun des principaux comptes sociaux.

Evolution des soldes des comptes sociaux

(en milliards d'euros)

2002

2003

2004

2005

Régime général

Maladie

- 6,1

- 11,1

- 13,2

- 7,9

Accidents du travail

0,0

- 0,5

- 0,5

- 0,7

Vieillesse

1,7

0,9

- 0,1

- 1,4

Famille

1,0

0,4

- 0,2

0,0

Total régime général

- 3,5

- 10,2

- 14,0

- 10,1

Autres régimes de base

- 0,2

- 0,2

- 0,1

- 0,8

Ensemble des régimes de base

- 3,7

- 10,4

- 14,1

- 10,8

FSV

- 1,4

- 0,9

- 0,4

- 1,2

FOREC

0,2

- 0,6

Ensemble des régimes de base et fonds

- 4,8

- 11,9

- 14,5

- 12,0

Ensemble des régimes complémentaires

3,3

8,9

6,4

6,4

Déficit en pourcentage des charges

CNAM

CNAM-AT

CNAV

CNAF

10,0 %

5,2 %

0,1 %

0,4 %

5,9 %

7,0 %

1,8 %

0,1 %

Source : commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2004.

1. Un point bas historique pour le régime général

a) Un déficit record et généralisé

On ne reviendra que rapidement sur le constat dressé par tous, et rappelé encore voici quelques semaines lors de son audition devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales par M. Philippe Séguin, premier président de la Cour des comptes : le déficit de la sécurité sociale aura atteint en 2004 un niveau historique.

Le solde du régime général devrait atteindre en 2004 son point le plus bas, avec un déficit de près de 14 milliards d'euros. Ce montant est supérieur de près de 4 milliards d'euros au déficit enregistré en 1995, qui avait été l'année la plus sombre de la décennie quatre-vingt-dix.

Il convient de rappeler que les quatre branches du régime général ont en outre reçu en 2003 et 2004, pour 1,1 milliard d'euros chaque année, des versements de la CADES au titre du remboursement d'une dette du FOREC. Cette recette exceptionnelle a donc amélioré les résultats 2003 et 2004 mais disparaîtra en 2005. Hors opérations exceptionnelles, le déficit du régime général est de 15 milliards d'euros en 2004.

Soldes du régime général et de la branche maladie sur la période 1990-2005

graphique

graphique
graphique

Il est en outre d'autres éléments que les seuls chiffres bruts, plus significatifs encore : le premier est que ce déficit tend à se dégrader de plus en plus rapidement ; le deuxième est que la concentration de l'essentiel du déficit sur certaines catégories de dépenses - même si toutes les branches sont déficitaires en 2004 - fait que celui-ci atteint des niveaux préoccupants non seulement en montant absolu mais également en part relative par rapport au montant des dépenses et recettes.

Régime général 2002-2005

(en millions d'euros)

2002

2003

%

2004

%

2005

%

CNAM MALADIE

Charges

117 310

125 116

6,7 %

132 054

5,5 %

134 857

2,1 %

Produits

111 213

114 011

2,5 %

118 860

4,3 %

126 930

6,8 %

Résultat

- 6 098

- 11 105

- 13 194

- 7 927

CNAM AT

Charges

8 618

9 254

7,4 %

9 661

4,4 %

10 114

4,7 %

Produits

8 573

8 778

2,4 %

9 156

4,3 %

9 409

2 ,8 %

Résultat

- 45

- 476

- 505

- 704

CNAM maladie et AT

Charges

125 928

134 370

6,7 %

141 715

5,5 %

144 970

2,3 %

Produits

119 785

122 789

2,5 %

128 016

4,3 %

136 339

6,5 %

Résultat

- 6 143

- 11 581

- 13 699

- 8 631

CNAV

Charges

68 675

72 112

5,0 %

75 174

4,2 %

78 760

4,8 %

Produits

70 334

73 058

3,9 %

74 104

2,8 %

77 346

3,0 %

Résultat

1 659

946

- 71

- 1 413

CNAF

Charges

45 171

47 071

4,2 %

48 821

3,7 %

50 206

2,8 %

Produits

46 200

47 497

2,8 %

48 639

2,4 %

50 175

3,2 %

Résultat

1 029

426

- 183

- 31

Régime général consolidé

Charges

234 461

248 029

5,8 %

259 915

4,8 %

267 847

3,1 %

Produits

231 006

237 820

2,9 %

245 963

3,4 %

257 771

4,8 %

Résultat

- 3 455

- 10 209

- 13 952

- 10 076

FSV

Charges

12 405

13 408

8,1   %

13 766

2,7   %

13 941

1,3 %

Produits

11 051

12 474

12,9   %

13 337

6,9   %

12 773

- 4,2 %

Résultat

- 1 353

- 934

- 429

- 1 167

FOREC

Charges

15 434

16 203

5,0 %

Produits

15 658

15 614

- 0,3 %

Résultat

224

- 588

Source : direction de la sécurité sociale.

Le troisième constat, l'un des plus préoccupants, est que ce déficit revêt désormais une dimension chronique, sinon structurelle, et pose notamment la question du dynamisme des recettes.

b) Un déficit dont la composante structurelle fait question.

Une partie de la dégradation de 2004 résulte à l'évidence de la faiblesse de la croissance, du classique effet de ciseaux entre dépenses et recettes et du décalage existant entre la reprise de croissance, celle de l'emploi et celle de la masse salariale. On rappellera qu'un point de masse salariale équivaut à 1,6 milliard d'euros pour le régime général. On ne saurait trop souligner la difficulté qu'a, même au plus fort de la croissance, la sécurité sociale pour renouer avec l'équilibre. Ainsi, par exemple, le redressement apparent des comptes intervenu entre 1996 et 2000, pour spectaculaire qu'il soit, a tout de même conduit au maintien d'un déficit de l'assurance maladie deux fois supérieur en 2000 à ce qu'il était en 1991.

Dès lors, c'est fort légitimement que l'ensemble des acteurs développe une réflexion sur l'éventuelle réforme du mode de financement afin de donner une assise moins cyclique, plus dynamique aux recettes de la sécurité sociale. Sur ce point, le débat désormais classique sur la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale - en particulier la prise en compte dans son assiette de la notion de valeur ajoutée - n'est pas dépourvu d'intérêt intellectuel mais ne semble pas répondre aux véritables besoins. De ce point de vue, les conclusions de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie restent - du point de vue du rapporteur - parfaitement d'actualité et montrent l'absence - sinon de position consensuelle - de position même majoritaire des acteurs sociaux comme de la classe politique en faveur d'une telle réforme.

Extraits des conclusions de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie concernant la réforme
des cotisations patronales

« Le débat est récurrent depuis des années sur une possible modification de l'assiette des cotisations patronales - dont les modalités peuvent d'ailleurs varier, certains proposant une prise en compte de la valeur ajoutée de l'entreprise, d'autres lui préférant un prélèvement assis sur l'excédent brut d'exploitation - de façon à favoriser l'emploi et mieux cerner la richesse réelle des entreprises.

« Les partenaires sociaux interrogés sur ce point ont fait part d'opinions très partagées. Quatre organisations sur huit ont exprimé leur opposition à une telle modification de l'assiette : la CFDT, par crainte que la modification pèse sur la négociation salariale, et la CGT-FO, par attachement au financement traditionnel par les cotisations - fondement de la gestion paritaire - y sont opposées ; la CGPME l'est également par refus de tout prélèvement supplémentaire pesant sur les entreprises et le MEDEF pour des raisons de nature comparable, allant jusqu'à qualifier cette réforme de « véritable erreur ». Il convient de rappeler que l'un des principaux griefs traditionnellement faits à une telle proposition est l'importance des transferts de charge qu'elle entraînerait entre entreprises utilisatrices de main d'œuvre et entreprises à forte intensité capitalistique au détriment des secondes. Il n'est pas surprenant que l'UPA se soit déclarée favorable à une modification de l'assiette afin de l'asseoir sur la valeur ajoutée des entreprises. La CGT et la CFE-CGC se sont prononcées en faveur de cette même option tandis que la CFTC l'a jugée intéressante et ne s'y est pas déclarée défavorable à condition que le transfert d'une assiette vers l'autre soit lissé dans le temps.

« On relèvera que la plupart des partenaires sociaux y ont vu une alternative à l'assiette actuelle sans référence à une éventuelle hausse du prélèvement qu'elle entraînerait, à l'exception de la CFTC qui estime que des prélèvements supplémentaires seront de toute façon nécessaires.

« La mission a analysé avec attention les arguments du débat. De nombreux membres ont été séduits par la simplicité théorique du dispositif mais seuls quelques uns ont été convaincus de la possibilité de le mettre en œuvre sans désorganiser l'appareil productif et de son apport réel au financement de l'assurance maladie. Nettement partagés sur cette question, la plupart des membres de la mission ne retiennent pas la modification de l'assiette des cotisations sociales patronales comme une piste de réforme de l'assurance maladie. »

De fait, la question pour intéressante qu'elle soit ne semble pas prioritaire parce que le simple retour de la croissance ne saurait suffire à restaurer l'équilibre de la sécurité sociale. Il est cependant extrêmement difficile et il serait intéressant d'évaluer la part structurelle de ce déficit, c'est-à-dire la part qui ne dépend pas du caractère cyclique des dépenses et recettes, qui représente le solde véritable entre celles-ci indépendamment des aléas conjoncturels.

La première source de difficultés résulte dans l'absence même de notion d'équilibre méthodologiquement satisfaisante. Le présent projet de loi de financement ne comporte pas davantage que les précédents d'article d'équilibre permettant de connaître le solde des dépenses et recettes et de se prononcer sur un tel solde. Aucune disposition de la loi de financement ne permet de mesurer instantanément les effets des amendements éventuellement adoptés sur l'équilibre. Le rapporteur aurait souhaité introduire un tel article d'équilibre par voie d'amendement mais à l'examen, l'exercice s'avère impossible parce que les champs mêmes des recettes et des dépenses ne correspondent pas !

Une autre difficulté porte sur l'analyse du caractère conjoncturel ou structurel de tel ou tel type de dépenses ou recettes. La question n'est pas anodine lorsque l'on songe à l'importance de certaines opérations exceptionnelles : on a déjà évoqué les effets des versements CADES en 2003 et 2004 ; on doit relever les effets qu'aurait l'inclusion en droits constatés en 2005 de la soulte liée à l'adossement du régime des IEG au régime général.

Quelques pistes à explorer dans le cadre de la réforme des dispositions organiques relatives aux lois de financement de la sécurité sociale

- l'harmonisation du champ des dépenses et de celui des recettes

- la définition et le vote d'un solde d'équilibre

- l'identification des composantes structurelle et conjoncturelle de cet équilibre

c) Des situations très contrastées selon les branches

La situation des différentes branches est très contrastée. Pour l'analyse détaillée de celle correspondant à chacune d'entre elles, on se reportera utilement au tome correspondant du présent rapport. On ne reviendra ici que sur les traits essentiels.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles(AT-MP) est déficitaire en 2004 d'environ 500 millions d'euros mais on rappellera que ce déficit résulte très largement de mécanismes de transferts au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles qui conduit la branche AT-MP à verser 330 millions à la branche maladie ainsi qu'au titre de l'indemnisation des victimes de l'amiante avec le versement en 2004 de 600 millions d'euros aux deux fonds concernés. Là encore, se pose la question de la répartition des charges entre Etat et sécurité sociale puisque le premier n'abonde pas en 2004 les fonds en question dont une partie de l'activité relève pourtant de la solidarité nationale. Cette situation fait dire aux gestionnaires de la branche que celle-ci est bien gérée, qu'elle est en réalité excédentaire et alimente la revendication parfois exprimée d'une autonomie financière de la branche.

Les résultats de la branche famille sont largement dépendants de facteurs démographiques, à savoir le nombre de naissances, l'âge des enfants et la taille des familles. Or le nombre des naissances demeure important depuis 2000 et se situe à 760 000 en métropole. Dès lors, il est inutile d'escompter une baisse significative des charges de la branche mais la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant - dont le coût est évalué à 140 millions d'euros pour 2004 - suffit presque à expliquer le faible déficit constaté en 2004, 183 millions d'euros, qui ne devrait être que temporaire.

Le déficit de la branche vieillesse est plus préoccupant.

La dégradation du solde de la branche, amorcée en 2003, s'accentue en 2004 : la CNAV devient légèrement déficitaire en 2004, à hauteur de 71 millions d'euros. Toutefois, le résultat 2005 devrait confirmer la dégradation de ce solde sous l'effet de la poursuite voire de l'accélération de certaines tendances constatées en 2004 : même si l'évolution tendancielle des effectifs de retraités reste lente, la croissance des prestations s'accélère avec la montée en charge des mesures de la loi du 21 août 2003. Même si la montée en charge du dispositif est moins rapide que prévu, la mesure dite « carrières longues » permettant les départs anticipés en retraite avant 60 ans pourrait bénéficier à 130 000 personnes en 2004 et entraîner un coût de 600 millions d'euros qui explique largement le déficit. S'y ajoutent les effets, du fait de la révision à la hausse des prévisions d'inflation, des revalorisations des pensions tandis que les recettes restent relativement atones du fait notamment de la faible revalorisation du plafond de la sécurité sociale ce qui contribue à la faible progression de l'assiette et donc des produits.

Toutefois, l'essentiel du déficit du régime général résulte de la situation de la branche maladie.

2. Le poids du déficit de l'assurance maladie

a) Une tendance à la dégradation en apparence inéluctable

La situation des comptes 2004 de l'assurance maladie est incontestablement mauvaise. Le déficit prévisionnel de la branche pour 2004 (13,2 milliards d'euros) est supérieur à celui de l'ensemble du régime général en 1995, alors même que ce dernier avait conduit à créer la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). Le seul déficit 2004 équivaut à la totalité de la dette accumulée entre 1996 et 1998 qui avait conduit à la prolongation de cinq ans de la durée de vie de la CADES (de 2009 à 2014). Outre le fait que cette situation est incompatible avec les engagements européens de la France, la dette issue de l'accumulation des déficits pèse sur les comptes courants de la branche (500 millions d'euros d'intérêts prévus en 2004).

Surtout, cette évolution semble ne pas connaître de freins puisque l'année 2004 a vu tous les postes de dépenses progresser dans des proportions importantes pour des raisons structurelles sur lesquelles on ne reviendra pas. Elles ont été longuement exposées tant par le Haut conseil sur l'avenir de l'assurance maladie, que par la mission d'information précitée ou encore par les différents intervenants dans le débat sur la réforme de l'assurance maladie.

Les causes du déficit d'après la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie concernant la réforme
des cotisations patronales

« En conclusion, les membres de la mission - tout en ayant des perceptions parfois divergentes de l'importance de tel ou tel facteur d'augmentation du déficit - constatent que le dérapage de la dépense n'est pas imputable à un poste de dépense clairement identifiable mais relève d'un phénomène généralisé et durable qui traduit les faiblesses structurelles de notre système de santé. »

Tel est effectivement le sentiment que donne l'évolution des différentes enveloppes de l'ONDAM en 2004.

Décomposition de l'ONDAM 2004 et prévisions 2004

(en milliards d'euros)

Objectifs 2004

Prévisions tous régimes

Objectif 2004

Obj./Base 2003 (a)

Obj./Réal. 2003 (b)

Prévisions actuelles tous régimes

Ecart à l'objectif

Evolution

I. Métropole

126,3

3,9 %

4,1 %

127,4

1,1

5,0 %

I.1 Soins de ville

60,5

3,2 %

3,5 %

61,4

0,9

5,1 %

I.1.1. Objectif délégué

27,7

3,6 %

I.1.2. Autres dépenses de ville

33,7

6,3 %

I.2 Versements aux établissements

65,8

4,6 %

4,6 %

66,0

0,1

4,9 %

I.2.1. Etablissements sanitaires

48,0

4,1 %

3,8 %

48,1

0,1

4,0 %

I.2.1.1. Etablissements sanitaires sous DG

47,6

4,1 %

4,0 %

47,6

0,0

4,0 %

I.2.2. Médico-social

9,8

7,4 %

8,6 %

9,8

0,0

8,6 %

I.2.2.1 Médico-social (EI-AH)

6,2

6,0 %

8,3 %

6,2

0,0

8,3 %

I.2.2.2. Médico-social (personnes âgées)

3,6

10,0 %

9,1 %

3,6

0,0

9,1 %

I.2.3. Cliniques privées

8,0

4,1 %

5,0 %

8,1

0,1

5,7 %

II. Ressortissants français à l'étranger

0,2

3,0 %

- 3,9 %

0,2

0,0

3,0 %

III. Prestations DOM

3,1

6,0 %

2,2 %

3,3

0,2

10,0 %

IV. Réseaux

0,1

171,7 %

495,2 %

0,1

0,0

495,2 %

ONDAM

129,7

4,0 %

4,1 %

131,0

1,3

5,2 %

Lecture : la colonne (a) indique les objectifs de taux d'évolution des différents postes de dépenses par rapport à la base 2003 telle qu'elle était estimée lors de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2003. Les objectifs de chaque sous-enveloppe étant fixés en valeur et non en taux d'évolution, la réévaluation de la réalisation 2003 (suite à la prise de connaissance des réalisations provisoires de 2003) modifie les taux de croissance que doit respecter chaque sous-enveloppe pour atteindre l'objectif en 2004 : ces taux de croissance modifiés sont indiqués dans la colonne (b).

b) L'ONDAM, un concept largement décrédibilisé

La première - et principale - faiblesse de l'ONDAM est qu'il ne constitue en rien une norme de progression des dépenses opposable : sans nostalgie aucune de quelque forme que ce soit de maîtrise comptable, on ne peut qu'admettre qu'un objectif dont le dépassement n'entraîne aucune conséquence est plus difficile à faire respecter. Son respect impose dès lors d'autres conditions, au premier rang desquelles la crédibilité.

La deuxième tient à la façon dont l'ONDAM est défini, à la perception qu'en ont les acteurs. Le taux de croissance proposé de l'ONDAM pour l'année N dépend du dénominateur choisi. Pour un même montant d'objectif, le taux sera plus faible si la « base » (dépenses de l'année précédente) est plus élevée. Il existe une démarche dite de « rebasage » qui consiste à prendre en compte, pour calculer l'évolution de N-1 à N, la base égale non pas à l'objectif de l'année N-1 voté par le Parlement, mais le montant réalisé de l'année N-1 tel qu'il est évalué par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre de l'année N. Cette technique est intellectuellement compréhensible mais on ne doit pas négliger ses effets délétères sur les acteurs du système de santé : elle alimente l'idée que l'ONDAM peut toujours être « bricolé » et que la fixation du nouvel ONDAM vient cautionner les errements constatés l'année précédente.

De fait, l'ONDAM 2004 n'a pas davantage que les précédents été respecté et reste à un niveau élevé.

Evolution des composantes de l'ONDAM

graphique

N.B : par rapport aux chiffres publiés ce tableau comporte une correction qui rattache à l'exercice 1999 des dépenses enregistrées comptablement en 2000.

La troisième faiblesse de l'ONDAM - qui vient renforcer les doutes sur sa crédibilité - tient à la confusion entre objectif de branche et ONDAM. Il est réellement peu lisible d'avoir deux objectifs différant de plusieurs milliards d'euros pour des dépenses contribuant à la gestion du même risque.

ONDAM et objectif de la branche maladie : les raisons de la dualité actuelle

L'ONDAM comprend, pour la métropole et les départements d'outre-mer, les dépenses de soins remboursées par les régimes obligatoires de base (prestations en nature et en espèces) pour les risques maladie et accidents du travail et les prestations en nature pour le risque maternité.

En sont en revanche exclues les indemnités journalières maternité, les rentes d'accidents du travail et les indemnités journalières versées directement par l'employeur aux agents des services et entreprises publics, des collectivités locales et de l'Etat.

En sont de même exclues les remises conventionnelles versées par les entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au titre du dépassement de l'objectif d'évolution de leur chiffre d'affaires, dans le cadre des accords signés avec le Comité économique des produits de santé.

Là encore, la réforme des textes organiques devra absolument remédier à ces dysfonctionnements.

3. Les autres financeurs de la sécurité sociale également atteints

On ne reviendra pas sur les missions du FSV précédemment décrites mais simplement sur la situation financière difficile dans laquelle il se trouve.

Compte de résultat du FSV

(en millions d'euros et en droits constatés)

2002

2003

2004

%

2005

%

PRODUITS

11 051,5

12 473,9

13 336,5

6,9

12 773,5

- 4,2

CSG

9 078,4

9 297,4

9 504,6

2,2

9 829,2

3,4

C3S

566,6

921,5

1 325,0

43,8

443,0

- 66,6

Prélèvement social 2 % sur capital

350,0

350,0

363,7

3,9

371,7

2,2

Autres cotisations et contributions

0

0

100,0

-

120,0

20,0

Versement de la CNAF

1 004,4

1 874,6

1 942,1

3,6

1 979,2

1,9

Reprises sur provisions et produits financiers et exceptionnels


51,9


30,4


101,0


ns


30,4


ns

CHARGES

12 404,9

13 407,5

13 765,6

2,7

13 940,8

1,3

Cotisations chômage prises en charge

6 642,1

7 355,4

7 757,7

5,5

7 854,3

1,2

dont versement à l'AGIRC et ARRCO

448,1

456,6

464,3

1,7

471,3

1,5

Autres cotisations prises en charge

7,4

6,4

7,8

21,8

6,1

- 21,8

Minimum vieillesse

2 485,3

2 504,2

2 545,9

1,7

2 566,9

0,8

Majorations de pensions de retraite

3 117,9

3 199,8

3 310,8

3,5

3 370,8

1,8

Autres charges (techniques, financières et exceptionnelles)


152,2


341,7


143,4


- 58,0


142,7


- 0,5

RÉSULTAT NET

- 1 353,4

- 933,7

- 429,1

+ 54,0

- 1 167,4

272,0

Versement au FRR

0

0

0

0

SOLDE CUMULÉ

- 123,1

- 1 056,8

- 1 485,9

40,6

- 2 653,3

78,5

En dépit d'une année exceptionnellement rentable s'agissant de l'affectation de CSSS, la dégradation des comptes du FSV se poursuit et tend même à s'accélérer. Le rapporteur estime qu'une réflexion sur le fonctionnement et ses modalités de financement s'impose. Le conseil de surveillance du fonds - apparemment du fait de désignations de membres non effectuées - ne s'est semble-t-il pas réuni depuis trois ans et n'a donc bien entendu formulé aucune proposition en ce sens. En conséquence, le rapporteur propose un amendement de suppression de ce conseil afin de provoquer en son sein une prise de conscience et d'interpeller le gouvernement sur les éventuelles évolutions à apporter au fonctionnement et au financement du FSV.

Cette évolution des comptes du FSV comme celle d'un certain nombre de régimes (exploitants agricoles par exemple) est symptomatique de la dégradation marquée de l'ensemble des comptes sociaux en 2004, qui appelait de toute évidence une réponse.

B. 2005, ÉTAPE DÉCISIVE VERS LE REDRESSEMENT FINANCIER

1. Un redressement du solde des comptes attendu

a) Des perspectives de croissance plaidant pour une amélioration générale des comptes

Après plusieurs années de dégradation, la croissance économique s'améliore à partir de 2004, avec une croissance du PIB estimée à 2,5 % pour 2004 et 2005. L'effet s'en fera sentir essentiellement en 2005 du fait du décalage temporel entre l'évolution de la masse salariale, sur laquelle les deux tiers des recettes du régime général sont assises (y compris les exonérations de cotisations compensées) et celle du PIB.

Evolutions comparées du PIB et de la masse salariale

(glissement annuel sur données trimestrielles)

graphique
graphique

Taux de croissance annuel du PIB et de la masse salariale

graphique
graphique

Dès lors, on peut escompter une amélioration des comptes à législation constante - à l'exception de la branche maladie dont l'évolution tendancielle des dépenses est particulièrement forte - et les effets de la réforme de l'assurance maladie accélèrent le redressement.

Ce redressement est particulièrement sensible pour le régime général dont le solde devrait se redresser de 3,9 milliards.

Résultats du régime général et des régimes de base

(en milliards d'euros)

2002

2003

2004

2005

Régime général

Maladie

-6,1

-11,1

-13,2

-7,9

Accidents du travail

0,0

-0,5

-0,5

-0,7

Vieillesse

1,7

0,9

-0,1

-1,4

Famille

1,0

0,4

-0,2

0,0

Total régime général

-3,5

-10,2

-14,0

-10,1

On rappellera les effets des mesures nouvelles contenues dans le présent projet dans le tableau ci-dessous :

Mesures pour 2005

(en millions d'euros)

Agrégat de recettes 2005

Régime général

Autres régimes

Recettes supplémentaires

Contribution tarifaire IEG

4 140

4 140

Contribution des employeurs IEG

2 760

2 760

Baisse des cotisation des enseignants du privé

- 22

- 22

Prise en charge par l'Etat des prestations des enseignants du privé

22

22

Retraite anticipée - Fonction publique d'Etat (cotisations fictives d'équilibre)

70

70

TOTAL

- 22

6 992

6 970

Agrégat de dépenses 2005

Branche maladie

- 159

- 16

- 175

Transfert des IFSI aux régions

- 159

- 16

- 175

Branche vieillesse

7 038

7 038

Retraite anticipée - fonction publique d'Etat

70

70

Retraite anticipée - Fonction publique locale et hospitalière

68

68

Paiement soulte IEG au FRR

6 900

6 900

Branche famille

2

2

Doublement de la prime d'adoption

2

2

TOTAL

- 157

7 022

6 865

En 2005, le début de redressement du solde de la CNAM et l'augmentation du déficit de la CNAV devraient donc se traduire par un certain resserrement des résultats des branches qui resteraient néanmoins contrastés.

Ce contraste persistant plaide en faveur d'une réforme des textes organiques prévoyant un vote par branche qui permettrait d'accroître la lisibilité des comptes et conforterait leur autonomie.

b) Un quasi-équilibre proche pour la famille et la branche accidents du travail et maladies professionnelles

S'agissant de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, le résultat déficitaire depuis 2002 devrait se stabiliser en 2005 à son niveau de 2003 et 2004 (environ 500 millions d'euros). Ce résultat résulte pour l'essentiel des dotations de la branche aux deux fonds qui gèrent les prestations en faveur des victimes de l'amiante, le FIVA et le FCAATA. Le rapporteur souhaite, également à la lumière des inégalités constatées dans l'indemnisation des victimes de l'amiante, que soit menée à son terme la réflexion sur l'indemnisation du risque lié à l'amiante et sur l'éventuel soutien de l'Etat à cette indemnisation. Cette réflexion doit naturellement être menée au sein de la branche, entre partenaires sociaux notamment, mais aussi du côté des pouvoirs publics. Elle rentre en effet pleinement dans le cadre de la réflexion engagée par le gouvernement sur la politique à l'égard des victimes et dans celui de l'habilitation que le Parlement lui a donnée à légiférer par le 7° de l'article 48 de la loi d'habilitation du 18 octobre dernier.

S'agissant de la branche famille, le solde devrait quant à lui rester proche de l'équilibre en 2005. Les prestations de la CNAF connaîtront une croissance assez rapide jusqu'à la fin 2006, la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) se substituant progressivement aux anciennes prestations. Et l'évolution des recettes restant modérée.

c) Une dégradation marquée pour la branche vieillesse

Les facteurs précédemment évoqués pour expliquer le déficit 2004 continueront de se faire sentir et pour certains d'entre eux vont s'accélérer.

Les prestations légales versées par la CNAV devraient augmenter de 5,2 % en 2005. Les charges de départ anticipé devraient représenter 1,3 milliard d'euros soit quasiment le montant du déficit prévu pour 2005 et seul le rendez-vous prévu en 2008 sur l'allongement de la durée d'assurance semble de nature à infléchir significativement cette tendance à la dégradation des comptes.

Bien évidemment, ce sont les mesures liées à la branche maladie qui détermineront largement la réalisation du redressement.

2. L'assurance maladie, au cœur de la réforme

a) La clef du redressement financier

La réduction du déficit prévue en 2005 résultera à la fois d'une accélération des produits et d'un ralentissement très marqué des charges du régime général. L'amélioration des produits traduira pour une part l'effet de la reprise économique, mais plus encore celui du supplément de recettes apporté par la réforme de l'assurance maladie. Elle bénéficiera donc essentiellement à la CNAM, les autres branches n'enregistrant qu'une accélération modeste (CNAF), voire quasi inexistante (CNAV), de leurs recettes.

Taux de variation des produits et des charges du régime général

(en %)

2001

2002

2003

2004

2005 (p)

Produits

5,3 %

3,6 %

3,1 %

3,1 %

4,9 %

Charges

5,1 %

5,7 %

6,0 %

4,5 %

3,1 %

Ecart

0,2 %

- 2,1 %

- 2,9 %

- 1,4 %

1,8 %

Note : taux de variation calculés sur les montants de produits et de charges nets et consolidés

S'agissant des dépenses, leur ralentissement en 2005 portera principalement sur l'assurance maladie. A cet égard, les comptes reflètent l'objectif proposé par le projet de loi de financement pour 2005 (soit 3,2 % pour l'ONDAM).

Sans revenir en détail sur les mesures de redressement de l'assurance maladie, exposées dans le tome 2 du présent rapport, on en rappellera les principaux postes et les économies ou recettes supplémentaires liées.

Le rapport des différentes mesures tant d'économies sur les dépenses que sur les recettes devrait donc en 2007 s'établir ainsi.

Impact financier de la réforme en 2007

1. Organisation et fonctionnement du système de soins

Maîtrise médicalisée

3,50

Produits de santé

2,30

Hôpital (hors revalorisation du forfait journalier)

1,60

Amélioration de la gestion des indemnités journalières

0,80

Systématisation du recours contre tiers

0,30

Economies sur les frais financiers (reprise de la dette par la CADES)

1,10

Diminution des coûts de gestion de la CNAMTS

0,20

Total offre de soins

9,80

2. Participation de l'usager

Contribution de 1 € par acte

0,70

Revalorisation du forfait journalier hospitalier

0,30

Total participation de l'usager

1,00

3. Redressement financier

Transfert d'une partie des droits tabacs de l'Etat à la CNAMTS

1,00

Création d'une contribution additionnelle à la C3S

0,90

Relèvement de la CSG :

- élargissement de l'assiette de la CSG des actifs

- relèvement de 0,4 point du taux de CSG des retraités imposables

- relèvement de 0,7 point du taux sur les revenus du patrimoine

- augmentation de 2 points du taux de CSG sur les jeux

1,00

0,60

0,60

0,10

Total volet recettes

4,20

TOTAL DES MESURES

15,00

Source : Dossier de presse du ministère de la santé sur le projet de loi relatif à l'assurance maladie.

On notera que sur l'ensemble de ces mesures, même en l'absence de tout effort des acteurs du système de santé, l'assurance maladie bénéficierait mécaniquement de 4,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires, d'un milliard de participation de l'usager et de 1,1 milliard d'économies sur les frais financiers liés à la reprise de dette opérée par la CADES, soit 6,3 milliards d'euros en tout.

b) Une méthode de réforme

Cette réforme se caractérise par le refus d'une simple opération de redressement financier.

Il est d'ailleurs frappant de constater que le volet recettes y a été considéré comme secondaire et ne représente effectivement qu'un tiers des sommes concernées. De même, n'a pas été fait le choix - pourtant simple techniquement mais socialement inacceptable - de baisser le niveau de remboursement des dépenses de santé. En dehors des mesures destinées à responsabiliser les usagers - participation de un euro, augmentation du forfait hospitalier - l'essentiel de l'ajustement passe par des réformes de structures et des changements de comportement.

Le gouvernement a ainsi fait le choix d'une maîtrise médicalisée des dépenses de soins et du renforcement de la qualité autour de quelques mesures structurantes : dossier médical personnel, meilleure coordination des soins grâce au système du médecin traitant. Il a également choisi une réforme du mode de financement des établissements de santé graduelle (en huit années) qui augmentera chaque année la proportion du budget de l'hôpital financée par la tarification à l'activité et devrait ainsi accroître l'efficience du système hospitalier en favorisant des regroupements et des restructurations du tissu hospitalier.

Des économies importantes résulteront des mesures prises du côté des produits de santé. Ce ne sont pas moins de 4 milliards d'euros (y compris 1,7 milliard dans le cadre de la maîtrise médicalisée) qui sont attendus d'ici 2007. Le rapporteur a pris bonne note de l'engagement des industries pharmaceutiques, constamment réitéré y compris lors de leur audition par le rapporteur, de réaliser 2,3 milliards d'euros d'économies d'ici 2007, dont 610 dès l'an prochain, par simple effet mécanique des mesures annoncées.

Le taux d'évolution de l'ONDAM fixé de façon volontariste à + 3,2 % (+ 3,8 % hors les effets de la contribution d'un euro et de la revalorisation du forfait hospitalier) apparaît donc exigeant mais n'est pas inaccessible sous réserve de la réalisation de trois conditions majeures :

- une mise en œuvre rapide de la réforme : de ce point de vue, la démarche du gouvernement est relativement exemplaire en matière d'édiction des textes réglementaires ; seule la mise en œuvre du dossier médical personnel ne semble pas particulièrement rapide ;

- un changement des comportements : sur ce point, l'inflexion à la baisse des dépenses de soins de ville au cours de l'année 2004 constitue un signe plutôt encourageant ;

- la mise en œuvre d'une démarche conventionnelle ambitieuse : tel est évidemment le pari majeur sur lequel s'appuie la réforme.

Ce pari n'est pas gagné mais il est gagnable. Il n'en aurait pas été de même si la baisse du taux de progression de l'ONDAM n'avait été que symbolique : ni les acteurs du système de santé ni les Français n'auraient compris cette pusillanimité et chacun en aurait déduit que tout pouvait continuer comme avant.

c) Un modèle pour toutes les branches ?

Les différentes branches ne répondent pas toutes aux mêmes contraintes et aux mêmes logiques en dépit du cadre juridique et financier unique dans lequel elles évoluent. Toutefois, il est possible à la lumière des réformes engagées de dresser un panorama des grands axes de la démarche de sauvegarde de ce bien commun qu'est notre système de sécurité sociale engagée depuis deux ans.

Le premier élément consiste dans le refus d'un ajustement brutal à la baisse des prestations ou à la hausse des prélèvements dans l'optique du seul redressement financier. En témoignent tant la réforme de l'assurance maladie que celle des retraites par laquelle on aurait pu obtenir une amélioration rapide de la situation financière en choisissant simplement de retarder l'âge de droit au départ en retraite pour en bénéficier à taux plein à 62,5 ans, en appliquant immédiatement les effets de l'allongement de la durée de cotisations de 150 à 160 trimestres ou de la décote aux fonctionnaires. Le choix a été fait d'une démarche graduelle.

Le deuxième trait commun est celui du refus des réformes bridant à l'excès les choix individuels : c'est vrai tout aussi bien en matière de retraite (possibilité de surcote, de cumul emploi retraite mais à l'inverse de départ anticipé) que de santé (ainsi le recours au médecin traitant ne remet en rien en cause les principes de la médecine libérale, y compris le choix par le patient). C'est également vrai en termes de politique familiale : les dispositifs mis en œuvre depuis 2004 visent bien à préserver pour les familles l'éventail des choix le plus large possible dans les modes de garde.

Le troisième trait commun est celui du refus de l'inertie : le redressement financier aurait pu obérer toute initiative ; toute l'énergie aurait pu se concentrer sur le retour à l'équilibre. Tel n'est pas le choix accompli. Les contraintes financières laissent la place aux mesures de justice sociale - on peut par exemple penser aux dispositions concernant l'affiliation maladie des maîtres contractuels de l'enseignement privé ou aux mesures pour les carrières longues dans la fonction publique contenues dans le présent texte ou encore la revalorisation des minima contributifs dans le cadre de la réforme des retraites ou enfin l'octroi de moyens significatifs pour la prise en charge de la perte d'autonomie.

Humanité, liberté et solidarité : ce triptyque peut indubitablement caractériser la politique mise en œuvre depuis deux ans en matière de sécurité sociale et doit continuer de l'inspirer dans les années à venir.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

1 () Auquel a succédé la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie en vertu de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

2 () L'analyse du Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, traditionnellement assimilé à la même catégorie, est renvoyée infra aux développements relatifs à la CNSA compte tenu de la réforme opérée par la loi du 30 juin 2004.

3 ()Transfert au budget de l'Etat prévu par le projet de loi finances pour 2005

4 () Cf. commentaire détaillé de cet article dans le tome III.

5 () Le débat ne saurait se focaliser sur le seul montant du versement opéré au profit de la CNAV ; l'étendue des droits qu'elle sera conduite à financer est tout aussi essentielle.

6 () Y compris ceux tenant à l'échelonnement des versements.


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