N° 2929 - Rapport de Mme Muriel Marland-Militello sur la proposition de loi , adoptée par le Sénat, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale (n°2625)



N° 2929

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 mars 2006.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale

PAR Mme Muriel Marland-Militello

Députée.

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Voir les numéros :

Sénat : 1ère lecture 483, 511 (2004-2005), 28 et T.A. 26 (2005-2006)

Assemblée Nationale : 1ère lecture n° 2625

INTRODUCTION 5

I.- LE DÉLÉGUÉ DÉPARTEMENTAL, UN « AMI DE L'ÉCOLE » 7

A. DU « MAGISTRAT AUX MœURS » AU DÉLÉGUÉ DÉPARTEMENTAL 7

B. LE SOUCI LÉGITIME DES AUTEURS DE L'AMENDEMENT ADOPTÉ AU SÉNAT 8

II.- LA NÉCESSITÉ DE MODIFIER LA DISPOSITION INTRODUITE PAR LE SÉNAT DANS LE CODE DE L'ÉDUCATION EST BIEN ÉTABLIE 9

A. LA MODIFICATION DU CODE DE L'ÉDUCATION S'EST RÉVÉLÉE INOPPORTUNE 9

B. L'ADOPTION DE LA PRÉSENTE PROPOSITION DE LOI RÉSOUDRAIT LE PROBLÈME POSÉ 9

TRAVAUX DE LA COMMISSION 11

TABLEAU COMPARATIF 13

INTRODUCTION

Lors de l'examen du projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, le Sénat a adopté un amendement portant article additionnel relatif aux missions des délégués départementaux de l'éducation nationale, déposé par M. Yves Détraigne (Union Centriste - Union pour la démocratie française). Cet amendement ayant été adopté par la commission mixte paritaire dans la rédaction issue du Sénat, l'article 40 de la loi d'orientation et de programmation pour l'avenir de l'école n° 2005-380 du 23 avril 2005, codifié à l'article L. 241-4 du code de l'éducation nationale, précise que les délégués départementaux de l'éducation nationale, chargés de l'inspection des écoles publiques et privées, « ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune ou, à Paris, Lyon et Marseille, de leur arrondissement de résidence ».

Cette disposition est apparue nécessaire pour que les délégués puissent exercer leurs missions dans la plus stricte neutralité. En pratique, elle pose des problèmes d'application considérables, ce qui a donné lieu à une multitude de questions écrites adressées au ministre de l'éducation nationale et au dépôt de trois propositions de loi :

- au Sénat, la proposition de loi déposée le 18 juillet 2005 de Mme Annie David (groupe communiste et républicain) tendant à modifier l'article 40 de la loi d'orientation pour l'avenir de l'école relatif au lieu d'exercice des délégués départementaux de l'éducation nationale  et la proposition de loi déposée le 26 septembre 2005 de M. Jean-Claude Carle (UMP, rapporteur, au nom de la commission des affaires culturelles du Sénat, du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école) relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale ;

- à l'Assemblée nationale, une proposition de loi (n° 2690) déposée le 23 novembre 2005 par M. Jean-Luc Warsmann (UMP) visant à assurer la mission des délégués départementaux de l'éducation nationale dans les établissements de leur commune ou de leur arrondissement.

Ces propositions, avec des rédactions différentes, poursuivent le même objectif : pour des raisons d'efficacité, permettre à nouveau aux délégués départementaux d'assurer leur mission dans les établissements de leur commune ou de leur arrondissement.

I.- LE DÉLÉGUÉ DÉPARTEMENTAL, UN « AMI DE L'ÉCOLE »

Le délégué départemental de l'éducation nationale exerce, à titre bénévole, une fonction d'interface et de liaison entre les acteurs de l'éducation, en particulier l'école, ses usagers, la municipalité et les autorités académiques. Conformément aux termes d'une circulaire ministérielle de la fin du XIXè siècle, c'est bien un « ami de l'école ».

Il s'agit d'une fonction ancienne puisqu'elle remonte à la Convention, qui a créé les « magistrats aux mœurs ». Le terme de « délégué » apparaît en 1833 dans la loi Guizot ; la loi Falloux de 1850 définit des missions des « délégués cantonaux ». La loi sur l'organisation de l'enseignement primaire de 1886, un décret de 1887 et une lettre du ministre de l'instruction publique, Marcellin Berthelot, du 25 mars 1887 complètent les missions de celui qu'on a pu appeler un « missionnaire laïque et républicain », cette fonction étant supprimée sous le régime de Vichy.

Après une circulaire de 1969 qui crée la dénomination de « délégué départemental de l'éducation nationale » (DDEN) et un décret de 1980, le décret n° 86-42 du 10 janvier 1986 fixe le statut et les missions du DDEN.

Les DDEN, qui sont aujourd'hui plus de 25 000, exercent leurs fonctions à titre bénévole. Ils sont chargés de transmettre aux municipalités et aux autorités académiques toutes informations sur l'état et les besoins des établissements préélémentaires et élémentaires. Ainsi, dans les écoles, les visites des délégués portent sur l'état des locaux, la sécurité, le chauffage, le mobilier scolaire et le matériel d'enseignement, l'hygiène et la fréquentation scolaire, à l'exclusion de toute question strictement pédagogique. La fonction s'étend à des aspects multiples de la vie scolaire, qu'il s'agisse des centres de loisirs, des transports scolaires, de la cantine, des bibliothèques, des caisses des écoles... Leurs interventions peuvent également concerner l'aménagement des locaux et des cours d'école ou l'enfance handicapée.

Les délégués départementaux participent aux conseils d'école. Ils participent également au respect de la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port par les élèves de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles.

Les DDEN sont désignés pour quatre ans par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale. La plupart sont des retraités, en majorité des enseignants ; les enseignants en position d'activité ne peuvent pas être désignés. Les délégués de chaque circonscription forment une délégation ; chaque délégation élit un président et un vice-président. La délégation détermine les écoles que chaque délégué doit visiter. Le DDEN communique aux inspecteurs de l'éducation nationale et aux maires tous les renseignements qu'ils ont pu obtenir lors de leurs visites dans les écoles.

C'est le 18 mars 2005, que le Sénat a examiné en séance publique l'amendement rectifié de MM. Yves Détraigne et Yves Pozzo di Borgo et d'autres membres du groupe UC-UDF (Union centriste - Union pour la démocratie française). Lors de la discussion, les auteurs de l'amendement ont souligné qu'il importait que le DDEN ne puisse être juge et partie ; à cette fin, il paraissait opportun de préciser qu'un DDEN ne peut exercer sa mission dans sa commune de résidence. Cela paraissait de nature à garantir leur neutralité. La commission a émis un avis de « sagesse positive », le gouvernement s'en remettant également à la sagesse du Sénat. L'amendement a ainsi été adopté.

II.- LA NÉCESSITÉ DE MODIFIER LA DISPOSITION INTRODUITE PAR LE SÉNAT DANS LE CODE DE L'ÉDUCATION EST BIEN ÉTABLIE

Après dix mois d'application, il apparaît à tous que la disposition issue de l'amendement de M. Yves Détraigne doit être revue.

Après la promulgation de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, il est apparu que l'adoption de l'amendement posait un certain nombre de problèmes.

D'abord, la liste des fonctions des DDEN montre que celles-ci ne peuvent bien être exercées qu'à la condition qu'une certaine proximité existe entre le délégué et les écoles visitées. En outre, obliger les DDEN à ne visiter que les écoles ne se situant pas dans sa circonscription d'inspection départementale les conduira à engager des frais de transport, alors même que la fonction de DDEN est exercée à titre bénévole.

La disposition est enfin particulièrement inopportune en raison du prochain renouvellement des DDEN, qui sont désignés pour quatre ans par l'inspecteur d'académie, après avis du conseil de l'éducation nationale dans le département. Or, la modification législative réduit considérablement l'attractivité de la fonction.

Ces problèmes ont conduit au dépôt de propositions de loi à l'Assemblée nationale et au Sénat (cf. supra). L'article litigieux ne pas être totalement supprimé mais seulement modifié : en effet, il n'est pas opportun qu'un conseiller municipal - de majorité ou d'opposition - exerce la fonction de DDEN dans les écoles relevant de la commune dont il est l'élu.

La commission des affaires culturelles du Sénat a examiné conjointement les propositions de loi de Mme Annie David et de M. Jean-Claude Carle. Elle a retenu la rédaction proposée par M.  Jean-Claude Carle et ce texte a été adopté en séance publique le 27 octobre 2005. M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a émis un avis favorable à l'adoption en déclarant qu'il n'avait « pas d'objection de principe à formuler sur le fond » et qu'il considérait que le « lien organique » des sénateurs avec les collectivités locales leur permettait d'être les mieux placés pour juger de l'opportunité d'une telle disposition.

Il faut souligner que le texte a fait l'objet d'un large consensus. La proposition de loi adoptée par le Sénat tend à remplacer la disposition introduite à l'article L. 241-4 du code de l'éducation par la phrase suivante : « Toutefois, lorsqu'ils exercent un mandat municipal, les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent intervenir dans les écoles situées sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ni dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe. »

Cette rédaction maintient une exception pour le seul cas où le délégué serait un élu de la commune et permet de prendre en compte la situation où deux ou plusieurs communes se sont réunies pour l'établissement et l'entretien d'une école, en application du deuxième alinéa de l'article L. 212-2 du code de l'éducation. Elle s'appliquera également au cas où les communes membres d'une structure intercommunale, notamment d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ont décidé de lui transférer les compétences en matière scolaire et périscolaire. En application de cette rédaction, un délégué ne pourra visiter les écoles au fonctionnement desquelles la commune dont il est un élu contribue (même si ces écoles sont situées sur le territoire d'autres communes voisines).

Cette proposition de loi apporte donc toute garantie en matière d'exigence de neutralité des DDEN dans l'exercice de leur mission.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a examiné, sur le rapport de Mme Muriel Marland-Militello, la présente proposition de loi, au cours de sa séance du mardi 7 mars 2006.

Un débat a suivi l'exposé de la rapporteure.

M. Pierre-Louis Fagniez a remercié la rapporteure pour la qualité de sa présentation, qui résume parfaitement la situation actuelle. Les DDEN ont un temps craint que des contraintes insupportables ne leur soient imposées. La proposition de loi leur permet d'exercer leurs fonctions dans des conditions pleinement satisfaisantes et elle recueille pour cette raison leur assentiment.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure, a ajouté que les dispositions actuelles risqueraient d'entraîner des frais supplémentaires de transport pour les DDEN, dont il convient de rappeler qu'ils sont bénévoles.

Soulignant la nécessité d'une modification législative, Mme Hélène Mignon a également jugé souhaitable de mettre un terme aux éventuels conflits d'intérêts, en précisant les conditions d'exercice de cette fonction dans le cas où un DDEN exerce un mandat municipal. Les délégués jouent par ailleurs un rôle important, qui nécessite en effet une certaine proximité entre le délégué et les écoles visitées, et il est regrettable que cette fonction ne soit pas toujours suffisamment prise en considération par les collectivités locales et les enseignants.

La commission a ensuite adopté l'article unique de la proposition de loi sans modification.

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En conséquence, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l'Assemblée nationale d'adopter sans modification la proposition de loi, adoptée par le Sénat, n° 2625.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte adopté

par le Sénat

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Propositions de la

Commission

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Code de l'éducation

LIVRE II

L'administration de l'éducation

TITRE IV

L'inspection et l'évaluation de l'éducation

Chapitre Ier

L'exercice des missions d'inspection et d'évaluation

Proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale

Proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale

Article unique

Article unique

La seconde phrase du dernier alinéa (5°) du I de l'article L. 241-4 du code de l'éducation est ainsi rédigée :

Sans modification

Art. L. 241-4.- ......................

5º Par le maire et les délégués départementaux de l'éducation nationale. Toutefois, les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune ou, à Paris, Lyon et Marseille, de leur arrondissement de résidence.

.......................................

« Toutefois, lorsqu'ils exercent un mandat municipal, les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent intervenir dans les écoles situées sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ni dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe. »

 
     
     
     
     
     
     
     

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N° 2929 - Rapport fait par Mme Muriel Marland-Militello au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale


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