N° 3403 - Rapport de M. Jean-Pierre Kucheida sur le projet de loi , adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin (n°3196)




N
° 3403

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 31 octobre 2006.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française, et le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la propriété commune d’un système de sauvetage sous-marin,

PAR M. JEAN-PIERRE KUCHEIDA,

Député

——

Voir les numéros :

Sénat : 325, 396 et T.A.125 ( (2005-2006)

Assemblée nationale :  3196 (2006-2007)

INTRODUCTION 5

I – LE PRÉSENT ACCORD PORTE SUR LA PROPRIÉTÉ COMMUNE À TROIS ETATS D’UN SYSTÈME DE SAUVETAGE SOUS-MARIN 7

A – BIEN QUE LABELLISÉE OTAN, IL S’AGIT D’UNE COOPÉRATION TRIPARTITE 7

B – UN CONSORTIUM ASSOCIANT DES INDUSTRIELS DES TROIS PAYS EST CHARGÉ DE LA FABRICATION 8

II – LE PRÉSENT ACCORD PORTE UNIQUEMENT SUR LES ASPECTS JURIDIQUES LIÉS À LA PROPRIÉTÉ CONJOINTE DU SYSTÈME NSRS 11

A – LE PRÉSENT ACCORD PERMET D’ÉTABLIR JURIDIQUEMENT LA PROPRIÉTÉ CONJOINTE DU SYSTÈME NSRS 11

B – TROIS MÉMORANDUMS D’ENTENTE VIENNENT COMPLÉTER LE PRÉSENT ACCORD 12

CONCLUSION 13

EXAMEN EN COMMISSION 15

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d’autoriser l’approbation d’un accord entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni, fait à Bruxelles le 9 décembre 2003, relatif à la propriété commune d’un système de sauvetage sous-marin.

L’objectif pour ces trois pays est de se doter d’un système commun de sauvetage des équipages de sous-marins qui permette en particulier le transfert sous pression des personnels du submersible accidenté à la surface et leur traitement médical, notamment la décompression. Ce système doit par ailleurs pouvoir être très rapidement transporté sur les lieux de l’accident, éventuellement par avion, et embarqué sur un navire porteur, civil affrété ou militaire, disponible sur zone.

Avant de détailler le contenu du présent accord, votre Rapporteur s’attachera à présenter le système de sauvetage sous-marin que la France partagera avec la Norvège et le Royaume-Uni.

I – LE PRÉSENT ACCORD PORTE SUR LA PROPRIÉTÉ COMMUNE À TROIS ETATS D’UN SYSTÈME DE SAUVETAGE SOUS-MARIN

A – Bien que labellisée OTAN, il s’agit d’une coopération tripartite

Dénommé « projet en coopération NSRS » pour « NATO Submarine Rescue System », ce système qui fait référence à l’OTAN est, en réalité, propre aux trois Etats Parties.

Initialement, les Etats-Unis, l’Italie et le Royaume-Uni, trois pays disposant de systèmes de sauvetage depuis de nombreuses années mais en fin de vie, ont proposé au début des années quatre-vingt-dix de lancer un programme pour le développement de systèmes de remplacement au sein de l’OTAN. Ainsi, le NATO Industry Advisory Group (NIAG) a cofinancé une étude de pré-faisabilité portant sur plusieurs dizaines de solutions innovantes pour le sauvetage pressurisé. Puis, le projet a été transmis à différents groupes de travail de l’OTAN, mais sans aboutir.

Les Etats-Unis, l’Italie et le Royaume-Uni, bientôt rejoints par la France et la Norvège ont alors financé leur propre étude de faisabilité, qui a fait l’objet d’un mémorandum d’entente en 1996. En 1999, les évaluations ont conclu à la faisabilité du système de sauvetage.

C’est alors que les Etats-Unis et l’Italie ont décidé de ne pas poursuivre le développement en commun de ce système, préférant acquérir et mettre en œuvre leur propre système. Dès 1997 d’ailleurs, les Etats-Unis annonçaient l’existence d’un projet purement national répondant à des spécifications opérationnelles différentes de celles du projet OTAN.

En revanche, la Turquie a rejoint le projet de la France, de la Norvège et du Royaume-Uni, ces quatre pays signant en août 2000 un mémorandum d’entente portant sur la phase de définition du projet. A l’issue de l’évaluation, notamment financière de ce projet, la Turquie a abandonné pour des raisons économiques.

Depuis la phase de conception, le NSRS n’était plus un programme de l’OTAN mais il a été impossible de trouver un accord sur un nouveau nom de baptême. En outre, le NSRS bénéficiait déjà d’une certaine renommée internationale. Par ailleurs, la Norvège souhaitait conserver un lien avec l’OTAN.

Les pays participant au projet ont alors décidé de garder l’appellation de NSRS, l’autorisation d’utiliser le label OTAN ayant été accordée sous certaines conditions :

- le projet doit être conduit par au moins deux pays membres de l’OTAN,

- le projet doit être ouvert à la participation d’autres pays de l’OTAN,

- le projet doit rendre compte des jalons importants à la Conférence des directeurs nationaux d’armement (Conference of the National Armaments Directors-CNAD).

L’avantage de disposer du label OTAN n’est pas négligeable : il permet d’utiliser la documentation OTAN et d’avoir accès aux différents groupes de travail de l’Alliance (NATO Naval Armaments Group-NNAG, NATO Industry Advisory Group-NIAG, etc.).

B – Un consortium associant des industriels des trois pays est chargé de la fabrication

Le coût total du programme avoisine 167 millions d’euros. La mise en service opérationnel est prévue pour mi-2007. Le 28 mai 2004, la maîtrise d’œuvre a été confiée à Rolls Royce pour la conception, la réalisation, la mise en œuvre et le soutien en service (1) du NSRS sur une durée de sept ans après son admission au service actif. Ce contrat de maîtrise d’œuvre est chiffré à 47 millions de livres, soit environ 70 millions d’euros.

Le NSRS sera basé à Faslane au Royaume-Uni dans la base navale de Clyde où stationnent les sous-marins de la Royal Navy. C’est Babcock Naval Service (BNS) qui assure l’entretien de cette base navale sous contrat avec la Royal Navy.

Deux systèmes distincts composent le NSRS : d’une part, un robot dédié à l’intervention et à la préparation du sauvetage et, d’autre part, un sous-marin de poche pour le sauvetage lui-même.

Concrètement, le véhicule téléopéré devra arriver le premier sur le lieu de l’accident pour expertiser la coque, entrer en communication avec les survivants, les ravitailler par conteneurs étanches transférés par le sas de sauvetage. Dans un deuxième temps, le sous-marin de poche viendra se poser sur le dos du sous-marin accidenté pour évacuer les survivants. Par ailleurs, le robot d’intervention devra également attacher une ligne au sous-marin de poche afin de le hisser à la surface.

Le sous-marin de poche sera aérotransportable jusqu’à la zone concernée et pourra être embarqué avec son équipage sur un navire, civil ou militaire, qui servira de « navire mère » pour l’opération de sauvetage. Le sous-marin de poche est accompagné de son moyen de mise à l’eau et de récupération. Par ailleurs, des caissons de décompression sont prévus pour accueillir les rescapés et assurer leur retour à la pression atmosphérique.

Le robot et le sous-marin de sauvetage sont fabriqués par la société Perry Slingsby, filiale du groupe français COFLEXIP. Le système de mise à l’eau et de récupération du sous-marin est à la charge de la société EB Engineering, basée à Newcastle. C’est DIVEX à Aberdeen qui fabrique les caissons de décompression. L’ensemble est complété par des moyens de poursuite et de positionnement fournis par KONGSBERG en Norvège ; ce sont des équipements permettant de localiser et positionner sur une carte les véhicules sous-marins intervenant sur la zone, et notamment les robots. Les coûts de réalisation et de soutien sont répartis à parts égales entre les trois pays partenaires.

L’entretien matériel du NSRS sera assuré par Rolls Royce, avec le soutien de BNS et des industriels ayant réalisés les différents éléments du NSRS. Le financement est réparti à parts égales entre les trois pays partenaires. Le NSRS est mis en œuvre par Rolls Royce et les pays membres fournissent des personnels et des moyens complémentaires pour les opérations de sauvetage proprement dites.

A partir de la mise en service opérationnel du NSRS, c’est la Marine nationale qui représentera la France, en l’occurrence l’état-major et le commandement des forces sous-marines et de la force océanique stratégique (ALFOST).

II – LE PRÉSENT ACCORD PORTE UNIQUEMENT SUR LES ASPECTS JURIDIQUES LIÉS À LA PROPRIÉTÉ CONJOINTE DU SYSTÈME NSRS

La coopération tripartite engagée est matérialisée dans différents documents. A la demande expresse de nos partenaires, le présent accord se limite aux aspects liés expressément à la propriété commune des équipements NSRS. Les autres aspects de cette coopération tels que le financement ou les relations avec les contractants font l’objet de notes diplomatiques séparées.

A – Le présent accord permet d’établir juridiquement la propriété conjointe du système NSRS

L’article Ier liste les équipements NSRS qui sont l’objet de la propriété commune des trois Etats participant au programme et établit la règle de la propriété commune, à parts égales, de ces équipements.

Aux termes de l’article II, l’unanimité est requise pour l’adoption de toute décision relative au présent accord.

Selon l’article III, c’est une seule des trois Parties au présent accord qui sera chargée de passer les contrats nécessaires à la conception, à la réalisation ou au soutien en service des équipements NSRS.

Aux termes de l’article IV, les dommages que les équipements NSRS pourraient causer ou subir seront réglés conformément aux principes établis par la convention entre les Etats Parties au Traité de l’Atlantique Nord sur le statut de leurs forces du 19 juin 1951, dite « SOFA OTAN ».

L’article V stipule que l’aliénation de tout ou partie des équipements NSRS, y compris au moyen du transfert de propriété à un tiers, est décidée par les Parties.

L’article VI traite de la dénonciation et de l’abrogation du présent accord, et des conséquences qui en découlent, notamment sur la propriété des équipements.

L’article VII prévoit la possibilité pour d’autres Etats d’adhérer au présent accord et de participer au projet en coopération NSRS. L’association d’autres pays au projet NSRS se fera au moyen d’arrangements de sauvetage mutuel.

L’article VIII porte sur le règlement des différends entre les Parties. Avant la mise en œuvre d’un mécanisme d’arbitrage, il est prévu de recourir à des consultations diplomatiques.

L’article IX permet d’amender le présent accord.

L’article X est consacré à l’entrée en vigueur de l’accord.

C’est le Gouvernement de la République française qui est dépositaire du présent accord (article XI).

B – Trois mémorandums d’entente viennent compléter le présent accord

En 1996, un premier mémorandum d’entente portait sur la conduite de l’étude de faisabilité d’un système de sauvetage pour sous-marin. En plus de la France, de la Norvège et du Royaume-Uni, les Etats-Unis et l’Italie étaient également signataires de ce document.

Lors de la phase suivante qui portait sur la définition du système, un deuxième mémorandum a été signé en août 2000 par la France, la Norvège et le Royaume-Uni, pays auxquels s’était jointe la Turquie. L’étude de définition a été remise en 2002. C’est alors que, pour des raisons économiques, la Turquie a décidé de se retirer du projet.

Enfin, le 6 juin 2003, les Parties ont signé un mémorandum d’entente couvrant les phases de conception, de fabrication et de soutien en service du projet, pour une durée totale de vingt-neuf ans. Les financements prévus dans ce document couvrent entre autres :

- la conception et la réalisation du NSRS,

- la mise en place et le maintien d’une capacité optimisée d’exploitation, incluant le soutien en service du NSRS,

- la recherche de la compatibilité et de l’interopérabilité avec les systèmes de sauvetage exploités par d’autres pays.

Ce mémorandum autorise a priori et de manière générale l’intervention du NSRS au profit des pays membres ainsi que des pays tiers avec lesquels les pays membres auraient collectivement établi des arrangements de sauvetage mutuel. La mise en œuvre du NSRS au profit d’autres pays tiers requiert l’autorisation préalable des pays membres. Pour une opération de sauvetage au profit d’un pays membre du NSRS, les coûts d’intervention seront soit à la charge du pays demandeur, soit répartis entre les trois pays membres. Pour une opération de sauvetage au profit d’un pays tiers participant à un arrangement de sauvetage mutuel, ledit pays tiers supportera les coûts d’intervention. Pour les autres pays tiers, un remboursement des coûts d’intervention sera souhaité.

CONCLUSION

La France n’a, à ce jour, jamais eu recours à un moyen de sauvetage de sous-marin. Les deux derniers bâtiments perdus, la MINERVE et l’EURYDICE, n’auraient pu être sauvés en raison de la profondeur de la mer Méditerranée à l’endroit où se sont produits ces deux accidents.

Notre pays ne possède pas de moyen national pour le sauvetage de ses équipages de sous-marins, mais il a conclu un accord avec les Etats-Unis en la matière. En revanche, la conception même des sous-marins d’attaque français permet de les ventiler par l’extérieur afin de renouveler leur atmosphère en cas d’accident. Le moyen d’intervention dont nous disposons pour ce faire peut travailler jusqu’à 250 mètres de profondeur avec un scaphandre atmosphérique pour le raccordement des flexibles de ventilation jusqu’à cette immersion. La sécurité du scaphandre est assurée par un véhicule téléopéré de type ROV. Il reste que quelque soit le moyen d’intervention utilisé, il faut pouvoir extraire l’équipage de la coque de l’épave. Ce sera possible dès la mise en service opérationnel du NSRS qui doit être prononcée à la mi-2007.

C’est pourquoi, au vu de ces observations, votre Rapporteur vous recommande l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 31 octobre 2006.

Après l’exposé de M. François Loncle, suppléant le Rapporteur, et conformément à ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3196).

*

* *

La Commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 3196).

© Assemblée nationale