N° 3746 - Rapport de M. Jean Roatta sur le projet de loi , adopté, par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part (n°3731)




N
° 3746

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 février 2007.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification de l’accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et le Royaume du Maroc, d’autre part,

PAR M. JEAN ROATTA,

Député

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Voir les numéros :

Sénat : 201, 228 et T.A. 78 (2006-2007).

Assemblée nationale : 3731

INTRODUCTION 5

I – POURQUOI IL EST NÉCESSAIRE D’INTÉGRER LE MAROC À « L’ESPACE AÉRIEN EUROPÉEN COMMUN » 7

A – CETTE INTÉGRATION RENFORCE « L’ESPACE AÉRIEN EUROPÉEN COMMUN » 7

B – CET ACCORD EST BÉNÉFIQUE POUR LE MAROC, PAYS SUR LEQUEL L’EUROPE DOIT S’APPUYER, AU SUD DE LA MÉDITERRANÉE 8

II – L’ACCORD EURO-MAROCAIN DU 12 DÉCEMBRE 2006 SUR LES SERVICES AÉRIENS 11

A – UN ACCORD GÉNÉRAL QUI SE SUBSTITUE À DE NOMBREUX ACCORDS BILATÉRAUX ENTRE LE MAROC ET LES PAYS DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE 11

B – DES STIPULATIONS DE NATURE ÉCONOMIQUE : TITRE IER, ARTICLES 2 À 13 12

C – UNE COOPÉRATION RÉGLEMENTAIRE ENTRE LE MAROC ET LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE : TITRE II, ARTICLES 14 À 20 15

D – DES STIPULATIONS INSTITUTIONNELLES : TITRE III, ARTICLES 22 À 30 16

E – UNE MISE EN œUVRE PROGRESSIVE : L’ANNEXE IV DE L’ACCORD 17

CONCLUSION 19

EXAMEN EN COMMISSION 21

Mesdames, Messieurs,

La Commission des affaires étrangères est saisie d’un projet de loi autorisant la ratification de l’accord euro–méditerranéen relatif aux services de transport aérien, signé à Bruxelles, le 12 décembre 2006, entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d’une part, et le royaume du Maroc d’autre part.

Ce projet de loi a été adopté par le Sénat lors de sa séance du 15 février 2007.

L’accord en question a été négocié par la Communauté européenne en vertu d’un mandat que lui avait conféré le Conseil des ministres des transports en décembre 2004. L’objectif de ce texte est l’intégration totale du Maroc, à terme, dans l’espace aérien commun européen. Cette intégration se manifestera par l’application aux relations aériennes entre les Etats membres de la Communauté européenne et le Maroc de l’ensemble des principes en vigueur au sein de la Communauté, tant au plan économique et commercial que réglementaire.

Cet accord qui peut paraître technique s’inscrit dans la volonté européenne d’élargir l’espace aérien commun à l’ensemble des pays voisins de la Communauté européenne. Il ne faut pas s’y tromper ; il s’agit là d’un texte important dans le projet plus global des Européens qui est de construire dans leur proche voisinage, et singulièrement au Sud de la Méditerranée, un espace intégré qui permette de stabiliser les abords de la Communauté en offrant à ces pays voisins de meilleures conditions de coopération avec l’Europe et de développement économique.

Ainsi, la Communauté européenne a déjà conclu un accord de ce type avec les pays des Balkans occidentaux en juin 2006. Une négociation va être ouverte prochainement avec l’Ukraine. Quant au Maroc, il est le premier pays non européen à avoir signé un tel accord. Gageons que ce texte fera figure de référence dans les relations aéronautiques entre l’Union et les autres pays de la rive méditerranéenne.

Si la Communauté a tout intérêt à signer de tels accords, il en est de même également pour le Maroc. Ce texte ouvre la perspective d’un renforcement de la desserte aérienne du Royaume, qui s’est d’ailleurs déjà considérablement améliorée depuis la politique de libéralisation engagée en 2004. Cela est évidemment de nature à renforcer l’industrie du tourisme au Maroc, ainsi que le volume d’échanges entre nos deux pays.

I – POURQUOI IL EST NÉCESSAIRE D’INTÉGRER LE MAROC À « L’ESPACE AÉRIEN EUROPÉEN COMMUN »

On observe depuis quelques années le développement d’accords dits de « ciel ouvert » dans le domaine du transport aérien international. L’Europe s’inscrit dans ce mouvement et l’accord signé à Bruxelles, à la fin de 2006, avec le Maroc, l’illustre.

Par cet accord, non seulement « l’espace aérien européen commun » va se trouver renforcé, mais, de plus, l’économie marocaine va pouvoir bénéficier d’un nouveau facteur de développement.

A – Cette intégration renforce « l’espace aérien européen commun »

C’est en 1987, qu’a été lancé le mouvement d’intégration européenne dans le domaine des services aériens. Peu à peu, on a procédé à un remplacement progressif du système fondé sur un réseau d’accords bilatéraux par l’application uniforme de principes communautaires conformes à l’objectif du marché unique : la suppression des restrictions imposées en matière de propriété des compagnies aériennes, d’accès aux marchés, de volume de trafic ou de tarifs.

Depuis 1997, les marchés domestiques des différents membres de la Communauté européenne sont ouverts à la libre concurrence pour tous les transporteurs aériens immatriculés au sein de la Communauté. Dans le même temps, les procédures administratives et la réglementation technique du transport aérien ont été harmonisées.

Plusieurs décisions importantes de la Cour de justice des Communautés européenne du 5 novembre 2002 ont clarifié les compétences respectives de la Communauté et des Etats membres.

La Cour a notamment déclaré que la Communauté européenne dispose d’une compétence externe en droit du transport aérien du fait de l’exercice de sa compétence interne, « lorsque les engagements internationaux relèvent du domaine d’application des règles communes » ou, en tout cas, « d’un domaine déjà couvert en grande partie par de telles règles ». La Cour observe ainsi que « lorsque la Communauté a inclus dans ces actes législatifs internes des clauses relatives au traitement à réserver aux ressortissants des pays tiers (…) elle acquiert une compétence externe exclusive dans la mesure couverte par ces actes ». 

Au-delà de la création de ce marché intérieur, les autorités européennes entendent aussi développer, à l’extérieur des frontières de la Communauté, un espace aérien européen commun (EAEC) où s’appliqueraient des règles uniformes, tant sur le plan économique et commercial que sur le plan des normes de sécurité et de contrôle. Cette harmonisation destinée à garantir les conditions de sécurité les plus élevées et une concurrence loyale doit toucher, en premier lieu, les pays voisins de l’Europe (1).

C’est dans cette perspective que le Conseil a adopté une « feuille de route » en juin 2005 et s’est fixé pour objectif la création d’un espace aérien commun élargi avec les pays voisins d’ici 2010.

Un premier accord a été signé, en juin 2006, avec huit pays ou territoires des Balkans occidentaux : l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, la Macédoine, la Roumanie, la Serbie-et-Monténégro et la mission des Nations unies au Kosovo. Cet accord a également été conclu avec l’Islande et la Norvège.

Le Maroc est le premier Etat non européen à bénéficier de cette politique. Ce n’est pas un hasard si ce pays a été l’objet de cette première attention. En effet, la France a milité avec force pour qu’une priorité soit donnée au Maroc, sur le fondement de sa participation active au processus euro–méditerranéen de Barcelone.

La référence au processus euro–méditerranéen apparaît dans le titre même de l’accord qui est aujourd’hui soumis à l’Assemblée nationale. Son préambule ouvre la voie à un processus plus large pour lequel cet accord constituera « une référence dans les relations aéronautiques euro–méditerranéennes afin d’exploiter pleinement les avantages de la libéralisation dans ce secteur économique essentiel ».

Observons enfin que la politique de constitution d’un « espace aérien européen commun » est accompagnée d’un processus de négociation de nouveaux accords aériens globaux avec des partenaires extérieurs à l’Europe. Il s’agit d’améliorer l’ouverture des marchés et la convergence réglementaire avec ces pays tiers. Un accord a été finalisé en ce sens avec les Etats-Unis. Des négociations doivent se poursuivre avec la Chine, l’Inde, l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Chili.

B – Cet accord est bénéfique pour le Maroc, pays sur lequel l’Europe doit s’appuyer, au Sud de la Méditerranée

Si cet accord est important dans le projet européen de constituer un espace aérien cohérent, il est également essentiel pour le Maroc.

L’amélioration de la desserte aérienne du Maroc est l’une des conditions du développement touristique de ce pays qui mène, en ce domaine, une politique volontariste. Le Maroc a adopté, en 2001, un plan ambitieux baptisé « vision 2010 » ; il se fixe des objectifs chiffrés très précis. En matière d’arrivées touristiques, le Maroc entend atteindre les 10 millions de touristes contre 5,5 millions en 2005. La capacité hôtelière passerait à 230 000 lits contre 110 000 lits en 2003. Il s’agirait également de créer 600 000 emplois nouveaux soit un quasi-doublement par rapport à 2003. Enfin, les autorités marocaines entendent renforcer la contribution du tourisme au PIB national pour la porter à près de 20 % en 2010.

Pour atteindre cet objectif, les autorités marocaines ont déjà entamé, en 2004, une libéralisation de leur trafic aérien afin d’inciter de nouveaux opérateurs, étrangers, à desservir le Maroc. En effet, en dépit de la création récente de deux compagnies marocaines à bas prix (« low cost »), seule la venue de ces opérateurs extérieurs peut permettre un tel développement du trafic, en particulier grâce à des vols sans escale desservant directement les principales destinations touristiques que sont Marrakech, Agadir ou Fès.

Depuis 2004, le nombre de compagnies étrangères assurant des vols réguliers vers le Maroc a d’ailleurs doublé en passant de 22 à 44. Le trafic aérien s’est ainsi accru de manière spectaculaire ; le nombre de passagers internationaux, qui s’était stabilisé à 5 millions de passagers par an de 2000 à 2003, a atteint plus de 7 millions de passagers en 2005 ; il devait dépasser les 8 millions de passagers en 2006.

L’accord euro–méditerranéen sur les services aériens qui est soumis aujourd’hui à l’Assemblée nationale doit permettre de renforcer cette tendance en facilitant la desserte. Le Maroc espère pouvoir créer, chaque année, environ une centaine de nouvelles fréquences hebdomadaires pour atteindre son objectif de 15 millions de passagers internationaux d’ici 2010.

On ne peut que se satisfaire de cette perspective qui devrait renforcer le processus de modernisation et de développement économique de ce pays important sur la rive sud de la Méditerranée. On n’insistera pas ici sur les relations d’amitié qui unissent profondément le Maroc à la France dans tous les domaines, économiques, politiques, culturels, tout simplement humains. L’Europe a tout à gagner à soutenir l’essor de ce pays exemplaire à plus d’un titre, qui essaie de trouver une voie médiane, empreinte d’une grande sagesse, entre ouverture au monde et respect de son identité.

On peut être assuré qu’en encourageant le progrès dans ce pays, on pourra conforter le Maroc dans son rôle de stabilité en Afrique du Nord, pour le bénéfice à la fois des Marocains, des Africains en général et des Européens.

II – L’ACCORD EURO-MAROCAIN DU 12 DÉCEMBRE 2006
SUR LES SERVICES AÉRIENS

L’accord sur les services aériens du 12 décembre 2006 est relatif aux relations aériennes du Maroc avec l’ensemble des pays de la Communauté européenne. Il se substitue aux accords bilatéraux précédemment conclus avec ces Etats tout en portant sur un champ géographique plus large encore.

Son objet principal est de supprimer la plupart des limitations actuelles en matière de trafic aérien en contrepartie de la reprise, par le Maroc, de l’acquis communautaire en ce domaine. La perspective est bien, dans un délai de deux ans, d’intégrer le Maroc à l’espace aérien européen commun.

A – Un accord général qui se substitue à de nombreux accords bilatéraux entre le Maroc et les pays de la Communauté européenne

Le Maroc est aujourd’hui lié par des accords bilatéraux sur les services aériens à une quinzaine de pays de la Communauté européenne (2) parmi lesquels figurent les plus importants en matière d’aviation civile c’est–à–dire la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, les Pays–Bas ou la Suède.

Ces accords contiennent des stipulations relatives à l’octroi de droits de trafic sur des routes aériennes spécifiées. Ils fixent l’étendue et les limites de ces droits, prévoient la désignation des compagnies habilitées à exploiter les services aériens correspondants, traitent des tarifs, du régime fiscal, de la réglementation de sûreté et de contrôle applicables pour le trafic international. Ils excluent généralement toute possibilité de prise de contrôle de compagnies aériennes de l’une des parties par une compagnie de l’autre partie.

Chacun s’accorde sur le fait que ces accords ont permis le développement du trafic entre le Maroc et les pays de la Communauté européenne. Cependant, faute d’harmonisation, ces conventions imposent toujours des contraintes qui sont jugées excessives aux compagnies aériennes marocaines ou européennes. Ainsi ces dernières ne peuvent desservir le Maroc que depuis leur pays d’origine, sur des routes aériennes spécifiées dans l’accord bilatéral et, dans certains cas, avec des limitations de fréquence ou de volume de passagers. De même, les compagnies marocaines ne peuvent exploiter une ligne située entre deux villes européennes.

Or, depuis deux décennies, le transport aérien est globalement engagé dans un processus de libéralisation tendant à éliminer des accords internationaux de telles stipulations restrictives, qui instaurent un contrôle étroit de l’accès au marché, des tarifs et des niveaux de service. A l’initiative des Etats-Unis, cette politique dite du « ciel ouvert » a également été adoptée par les pays de la Communauté européenne, après que ceux-ci eussent créé un véritable marché intérieur du transport européen.

L’accord euro–marocain du 12 décembre 2006 s’intègre pleinement dans cette perspective. Il se substituera aux actuels accords bilatéraux existants qui ne resteront en vigueur que dans la mesure où ils prévoiraient des dispositions plus favorables, à savoir l’octroi de droits non couverts par le nouvel accord.

Le champ géographique de cet accord qui engage tous les pays membres de la Communauté européenne est, par définition, plus large que celui formé par toutes les conventions bilatérales que le Maroc avait signées avec seulement certains Etats européens. Ce texte supprime toutes les limitations de nationalité, de fréquences ou de capacité, simplifie substantiellement les procédures administratives et reconnaît sans restriction le droit d’établissement des compagnies européennes et marocaines au sein de l’espace commun.

On peut distinguer au sein de cet accord quatre catégories de stipulations. Les premières portent sur les aspects économiques ; les deuxièmes sont relatives à la coopération réglementaire entre le Maroc et la Communauté européenne ; les troisièmes sont de nature institutionnelle ; les dernières fixent les conditions d’entrée en vigueur progressive de cet accord.

B – Des stipulations de nature économique : titre Ier, articles 2 à 13

Le titre Ier contient les stipulations relatives aux aspects économiques.

Après l’article 1er, qui définit les termes employés dans l’accord, comme il est d’usage, l’article 2 et l’annexe I fixent l’étendue des droits accordés aux transporteurs des parties à l’accord.

Le premier d’entre eux est le droit de survol qui constitue la première liberté commerciale selon l’Organisation internationale de l’aviation civile. Le droit d’escale technique – il s’agit de la deuxième liberté commerciale –qui permet d’atterrir pour des raisons non commerciales est également affirmé.

Concernant le droit d’escale à des fins commerciales – pour débarquer ou d’embarquer des passagers, des marchandises ou du courrier –, l’accord reconnaît à toute compagnie le droit d’opérer depuis ou vers l’Etat dont l’aéronef possède la nationalité – ce sont les troisième et quatrième libertés commerciales –, dès lors que l’exploitation porte sur un service agréé et sur une route spécifiée. Enfin le droit est également reconnu d’opérer depuis ou vers tout autre Etat partie à l’accord – c’est la cinquième liberté commerciale.

L’annexe I supprime presque toutes les restrictions en matière de routes aériennes spécifiées. Ainsi les compagnies européennes pourront exploiter des routes partant de tout point situé dans la Communauté européenne, desservant un ou plusieurs points au Maroc et poursuivant éventuellement vers un autre point situé au-delà ; cependant, pour ce faire, s’agissant du trafic passager, il faut que ces points soient situés dans les pays auxquels s’applique la politique européenne de voisinage (3).

Les compagnies marocaines pourront opérer de tout point situé au Maroc vers n’importe quel point de la Communauté européenne.

Le « cabotage » – c’est-à-dire la possibilité pour un opérateur étranger d’exploiter une ligne intérieure – est exclu par l’article 2 de l’accord. Cependant il est prévu par l’annexe I que les compagnies marocaines pourront desservir successivement plusieurs points situés dans la Communauté européenne à condition que les vols aient le territoire marocain pour point de départ ou d’arrivée.

L’annexe I écarte également toute restriction portant sur le volume du trafic, la fréquence ou la régularité du service ou sur les types d’aéronefs exploités, hormis le cas où de telles restrictions seraient justifiées par des motifs douaniers, techniques, d’exploitation, d’environnement ou de protection de la santé. L’affrètement par des compagnies européennes ou marocaines d’aéronefs de compagnies d’un pays tiers doit rester exceptionnel ou répondre à des besoins temporaires et être soumis à l’approbation de l’autre partie.

Les conditions de délivrance des autorisations d’exploitation sont fixées par l’article 3. Ces autorisations doivent être accordées « dans les délais les plus brefs » sous les conditions suivantes :

– s’il s’agit d’un transporteur marocain, que le transporteur ait son principal établissement et, le cas échéant, son siège au Maroc ;

– s’il s’agit d’un transporteur européen, que le transporteur ait son principal établissement et, le cas échéant, son siège dans un pays de la Communauté européenne ;

– que le Maroc, pour un transporteur marocain, ou l’Etat européen responsable de la délivrance du certificat de transporteur aérien, pour un transporteur européen, maintienne un contrôle réglementaire effectif sur ce transporteur ;

– que le transporteur soit détenu majoritairement ou en totalité par le Maroc ou des ressortissants marocains ou par un Etat membre de la Communauté européenne ou des ressortissants européens, pour un transporteur marocain, ou, pour un transporteur européen, par un Etat membre de la Communauté européenne, par un pays de l’Espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège) ou par la Suisse, ou par des ressortissants de ces Etats.

Dans tous les cas, le transporteur devra répondre aux conditions prévues par les lois et règlements appliqués par l’autorité nationale compétente en matière d’exploitation de services aériens internationaux.

L’article 4 fixe les conditions de révocation de l’autorisation d’exploitation, notamment lorsque les conditions précédentes ne sont plus réunies.

L’article 5 prévoit que la détention majoritaire ou le contrôle effectif d’un transporteur aérien marocain par des intérêts européens ou d’un transporteur européen par des intérêts marocains nécessite une décision préalable du comité mixte en charge de la gestion de l’accord euro–marocain. Cette décision précise les conditions associées à l’exploitation de services aériens entre les pays parties à l’accord ou avec des pays tiers.

Les lois et règlements des parties contractantes relatifs à l’entrée et à la sortie du territoire des aéronefs, des passagers, des membres d’équipage ou du fret demeurent applicables comme le stipule l’article 6.

L’article 7 de l’accord prévoit l’application de la réglementation communautaire en matière de droit de la concurrence et d’aides d’Etat mentionnée dans l’accord d’association déjà conclu avec le Maroc, en l’absence de règles plus spécifiques prévues par l’accord sur les services aériens lui-même.

L’article 8 pose le principe de la renonciation aux subventions destinées aux transporteurs aériens, considérées comme incompatibles avec la notion d’espace aérien ouvert. Par dérogation à ce principe, les subventions demeurent possibles si elles poursuivent un objectif légitime et qu’elles sont transparentes et proportionnées à l’objectif visé. La partie concernée doit alors en informer l’autre partie.

L’article 9 est relatif aux activités commerciales. Il précise les conditions dans lesquelles les transporteurs aériens de chaque partie peuvent poursuivre leurs activités commerciales sur le territoire de l’autre partie qu’il s’agisse de l’établissement de bureaux, du recours à des services d’assistance en escale, de la vente de billets, du transfert de recettes ou de la conclusion d’accords de coopération commerciale.

Les articles 10 et 11 déterminent les dispositions applicables en matière d’exemption de droits de douane, de taxes et de redevances d’usage.

L’article 12 est relatif aux tarifs. Selon ses stipulations, l’établissement des tarifs des services aériens exploités est libre et non soumis à approbation. La réglementation européenne s’applique pour les tarifs des transports effectués dans la Communauté européenne.

L’article 13 prévoit enfin que les autorités compétentes de chaque partie contractante fournissent sur demande des autorités compétentes de l’autre partie les informations et les statistiques relatives au volume de trafic.

C – Une coopération réglementaire entre le Maroc et la Communauté européenne : titre II, articles 14 à 20

Le titre II de l’accord est relatif à la coopération réglementaire.

Celle-ci porte notamment sur la sûreté de l’aviation civile. Elle passe par la mise en oeuvre, par le Maroc, d’une partie de la réglementation communautaire. Le titre II évoque le recours à l’inspection des aéronefs soupçonnés de ne pas respecter les normes internationales de sécurité aérienne (article 14), la mise en œuvre des contrôles de sécurité des passagers, de leurs bagages et du fret et l’assistance en matière de sûreté aérienne (article 15) et la gestion du trafic aérien (article 16).

L’article 14, ainsi que les articles 16 à 20 prévoient l’application de la législation communautaire dans six domaines :

– sécurité de l’aviation,

– gestion du trafic aérien,

– protection de l’environnement,

– protection des consommateurs,

– systèmes informatisés de réservations et aspects sociaux.

L’annexe VI à l’accord énumère, dans ces différents domaines, chacun des vingt–huit règlements ou directives applicables, en tout ou partie, aux relations entre le Maroc et la Communauté européenne pour l’exploitation des services aériens.

L’accord prévoit ainsi une « convergence réglementaire » qui doit conduire à terme le Maroc à reprendre l’ensemble des dispositions communautaires pertinentes.

D – Des stipulations institutionnelles : titre III, articles 22 à 30

L’article 22 instaure un comité mixte composé de représentants des parties qui est responsable de la gestion de l’accord et de son application correcte. Se réunissant en fonction des besoins et au moins une fois par an, il formule des recommandations et prend des décisions d’un commun accord qui ont force contraignante pour les parties.

Le comité mixte examine notamment les questions relatives aux investissements bilatéraux majoritaires ou aux changements dans le contrôle effectif des transporteurs aériens des parties. Il développe également la coopération par la voie d’échanges d’experts et sur les conséquences sociales de l’application de l’accord, notamment en matière d’emploi.

L’article 23, relatif au règlement des différends et à l’arbitrage, précise les conditions dans lesquelles les parties contractantes peuvent saisir le comité mixte pour régler les différends sur l’interprétation et l’application de l’accord. Si cette procédure est infructueuse, les parties contractantes peuvent recourir à un tribunal d’arbitrage.

L’article 24 permet à une partie qui considère que l’autre partie n’a pas rempli l’une des obligations que lui impose l’accord de prendre des mesures de sauvegarde. Celles-ci doivent se limiter, dans leur champ d’application et leur durée, à ce qui est strictement nécessaire pour remédier à la situation. Le comité mixte en est alors informé.

L’article 25 prévoit la possibilité de modifier l’accord pour tenir compte d’éventuels nouveaux accords aériens conclus avec d’autres pays méditerranéens.

Comme indiqué plus haut, en vertu de l’article 26, l’accord euro–marocain se substituera aux dispositions de même nature établies dans les accords bilatéraux conclus entre les Etats membres et le Maroc. La liste de ces accords est détaillée à l’annexe II.

Les modalités d’amendement, de dénonciation et d’enregistrement de l’accord sont fixées par les articles 27 à 29.

En application de l’article 30, l’accord entrera en vigueur un mois après la notification de la dernière ratification par un Etat partie. Toutefois, chaque Etat partie aura la possibilité de l’appliquer provisoirement, sous réserve du respect des dispositions de son droit interne. La France sera ainsi en mesure d’appliquer provisoirement cet accord une fois que seront accomplies ses procédures internes de ratification.

E – Une mise en œuvre progressive : l’annexe IV de l’accord

L’annexe IV de l’accord est relative aux dispositions transitoires.

Le Maroc disposera de deux années au plus pour appliquer les différents aspects de la réglementation communautaire mentionnés à l’annexe VI de l’accord et pour se mettre en conformité avec le droit européen de la concurrence. La reprise de l’acquis communautaire fera l’objet d’une évaluation réalisée sous la responsabilité de la Communauté européenne et qui devra être validée par le comité mixte.

Dès lors, la mise en œuvre de l’accord sur les services aériens doit s’effectuer en deux phases.

Durant la première phase – c’est-à-dire pendant les deux années destinées à intégrer l’acquis communautaire et jusqu’à la validation par le comité mixte – les limitations de nationalité, de fréquence et de capacité seront en grande partie supprimées. Le droit d’exploiter les liaisons entre tout point situé au Maroc et tout point situé en Europe sera reconnu de manière illimitée, que ce soit pour le trafic passager ou pour le fret. Dès lors, toute compagnie européenne, quelle que soit sa nationalité, pourra desservir toute route aérienne entre la Communauté européenne et le Maroc, sans aucune limitation de fréquence ou de capacité.

Par exemple, une compagnie française pourra desservir le Maroc depuis la Belgique ou l’Italie. Les principales compagnies européennes pourront, de la sorte, accroître leurs dessertes du Maroc. Les compagnies marocaines pourront, elles aussi, exploiter toute liaison entre un aéroport marocain et un aéroport européen.

La seconde phase, dont l’ouverture est subordonnée à la décision favorable du comité mixte, verra la suppression des dernières restrictions. Les transporteurs européens pourront embarquer des passagers ou du fret au Maroc à destination d’un point situé en dehors de leur propre territoire d’origine ; de même, les transporteurs marocains pourront embarquer des passagers ou du fret en un point de la Communauté européenne à destination d’un autre point de la Communauté européenne. De la sorte les compagnies marocaines pourront desservir successivement deux villes européennes.

CONCLUSION

A n’en point douter la mise en application de cet accord constituera une avancée notable dans les relations entre la Communauté européenne et le Maroc. Il s’agira là d’un signal très positif à destination également des autres pays de la rive sud de la Méditerranée dont la stabilité et le développement économique constituent un objectif stratégique pour les Etats européens.

Lorsque la France et le Maroc auront ratifié cet accord, il s’appliquera immédiatement aux relations aériennes entre les deux pays comme le prévoit l’article 30, et ce sans attendre que l’ensemble des pays de la Communauté aient procédé à la ratification.

La France a donc tout intérêt à ce que ce texte entre en vigueur dans les meilleurs délais conformément à l’excellence de ses relations avec le Royaume du Maroc.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 20 février 2007.

Après l’exposé du Rapporteur, M. Hervé de Charette a observé qu’on avait rarement mis tant de célérité à ratifier un accord : celui dont l’Assemblée est ici saisie a été signé en décembre 2006 et le Sénat a adopté, le 15 février 2007, le projet de loi qui en autorise la ratification. Cela illustre la qualité des relations entre la France et le Maroc, ce dont il faut se réjouir. Cependant, il faudrait prendre garde à ce que les relations que la France entretient avec les pays d’Afrique du Nord n’apparaissent pas déséquilibrées, l’Algérie et la Tunisie pouvant en prendre ombrage.

M. François Loncle a déclaré partager en grande partie les préoccupations exprimées par M. Hervé de Charette, s’interrogeant sur le fait que la Tunisie n’ait pas bénéficié, à ce jour, d’un tel accord.

M. Jean Roatta, Rapporteur, a rappelé que de tels accords étaient signés avec la Communauté européenne et ses membres, la France ne maîtrisant, dès lors, pas le calendrier des négociations. De plus, contrairement à la Tunisie et à l’Algérie, le Maroc est très peu desservi par voie maritime en attendant que soit mis en service le nouveau port de Tanger qui s’annonce comme l’un des plus beaux de la Méditerranée. 80 % des 1,6 million de Français qui se rendent chaque année au Maroc prennent l’avion, 17 % la voiture et 70 000 seulement partent de Sète par voie maritime. Il s’est déclaré favorable à ce qu’un accord aérien semblable soit signé dans les meilleurs délais avec la Tunisie et d’autres pays, celui signé avec le Maroc ayant de ce point de vue une valeur exemplaire.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 3731).

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La Commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 3731).

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