N° 3667 - Rapport d'information de Mme Valérie Rosso-Debord déposé par la commission des affaires européennes sur la prise en charge de la dépendance en Europe




No 3667

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2011.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
la prise en charge de la dépendance en Europe,

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Valérie ROSSO-DEBORD,

Députée

——

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Michel Herbillon, Jérôme Lambert, Didier Quentin, Gérard Voisin vice-présidents ; M. Jacques Desallangre, Mme Marietta Karamanli, MM. Francis Vercamer secrétaires ; M. Alfred Almont, Mme Monique Boulestin, MM. Pierre Bourguignon, Yves Bur, Patrice Calméjane, François Calvet, Christophe Caresche, Philippe Cochet, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Delebarre, Michel Diefenbacher, Jean Dionis du Séjour, Marc Dolez, Daniel Fasquelle, Pierre Forgues, Mme Marie-Louise Fort, MM. Jean-Claude Fruteau, Jean Gaubert, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Mmes Annick Girardin, Anne Grommerch, Pascale Gruny, Elisabeth Guigou, Danièle Hoffman-Rispal, MM. Régis Juanico, Marc Laffineur, Robert Lecou, Michel Lefait, Lionnel Luca, Philippe Armand Martin, Jean-Claude Mignon, Jacques Myard, Michel Piron, Mmes Chantal Robin-Rodrigo, Valérie Rosso-Debord, Odile Saugues, MM. André Schneider, Philippe Tourtelier.

SOMMAIRE

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Pages

RÉSUMÉ DU RAPPORT 9

REPORT SUMMARY 17

INTRODUCTION 25

PREMIERE PARTIE : UN DÉFI COMMUN QUI A DONNÉ LIEU À DES RÉPONSES À L’ORIGINE DIFFÉRENCIEES, MAIS DORÉNAVANT CONVERGENTES 27

I. LE DÉFI DÉMOGRAPHIQUE : LE NOMBRE ET LA PROPORTION 27

A. L’AUGMENTATION DE LA PART DES PLUS DE 80 ANS DANS L’UNION EUROPÉENNE, MAIS AUSSI DANS LE RESTE DU MONDE DÉVELOPPÉ ET DANS CERTAINS PAYS ÉMERGENTS 27

B. DES PYRAMIDES DES ÂGES NOMBREUSES AU SOMMET 29

C. UNE AUGMENTATION PRÉVISIBLE ET SIGNIFICATIVE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE LIÉE À LA DÉPENDANCE ET À LA SANTÉ 32

1. Une évolution générale 32

2. Des conséquences précises pour un Etat membre : l’exemple des Pays-Bas 33

II. DES MODÈLES D’ORGANISATION DIFFÉRENTS, MAIS UNE CONVERGENCE DÉJÀ PERCEPTIBLE 37

A. UNE COMPÉTENCE DES ETATS MEMBRES, AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE 37

B. PLUSIEURS MODÈLES 39

1. Des interventions publiques d’ancienneté variable, directement fonction de la tradition de chaque Etat pour l’organisation de sa protection sociale et de ses services sociaux 39

a) Une mise en place échelonnée, depuis l’immédiat après-guerre 39

b) Quatre traditions différentes d’organisation des régimes sociaux : un modèle universel et municipal en Europe du Nord, un modèle universel adossé à l’assurance maladie ; un modèle libéral ; un schéma « familialiste » 40

2. Un effort financier inégal et réparti de manière variable, mais avec une prédominance de l’effort public 41

a) Un écart substantiel, en pourcentage du PIB, entre la Suède, ou les Pays-Bas, et les pays moins avancés en la matière 41

b) Une participation en général assez faible du secteur privé 42

3. Trois grands schémas : un seul programme ; un dispositif moins structuré avec des allocations universelles ; un filet minimum sous condition de ressources 43

C. LES POINTS DE CONVERGENCE 44

1. Un premier constat sur quelques éléments 44

a) La priorité donnée au maintien à domicile 44

b) Le développement des prestations financières, plutôt que des prestations en nature 45

c) Le libre choix des opérateurs, même pour les prestations en nature des collectivités publiques 45

d) Un rôle limité pour les assurances privées 46

2. Le résultat prévisible des actions à mener face au défi commun du maintien d’une offre adaptée de services disposant d’une main d’œuvre suffisante 47

a) Assurer une offre de services pérenne grâce aux aidants familiaux, aux prestations monétaires et à un effort en direction de la main d’œuvre 47

b) Garantir la viabilité financière à long terme des dispositifs par une mutualisation la plus large possible 49

c) Accroître l’efficacité des méthodes de délivrance des prestations 51

DEUXIÈME PARTIE : TROIS PAYS CARACTÉRISTIQUES 53

I. LES PAYS-BAS ET L’ALLEMAGNE : DEUX ETATS QUI ENGAGENT DANS L’ENSEMBLE DES SOMMES COMPARABLES 53

II. LA CRÉATION RÉCENTE, EN 1995, D’UN « CINQUIÈME  RISQUE » OBLIGATOIRE SPÉCIFIQUE, MAIS ADOSSÉ À L’ASSURANCE MALADIE : L’ALLEMAGNE 55

A. UNE ORGANISATION SIMILAIRE À CELLE DES AUTRES ASSURANCES SOCIALES 55

1. Une branche spécifique des assurances sociales étroitement couplée à l’assurance maladie et un dispositif de couverture universelle, créé en 1995 et récemment réformé 55

2. Un régime obligatoire, public ou privé, selon le choix effectué pour l’assurance maladie 55

3. Une approche large qui vise sans condition d’âge tous les cas de perte d’autonomie, et distingue trois niveaux de dépendance 56

4. Un financement du régime public par cotisations sociales, qui a assuré jusqu’à maintenant l’équilibre financier 57

5. Un effort limité compte tenu de l’importance de la part des personnes âgées dans la population 58

B. UNE PRISE EN CHARGE FORFAITAIRE QUI LAISSE UN RÔLE ESSENTIEL AUX COLLECTIVITÉS LOCALES ET AUX AIDANTS 58

1. Une prise en charge forfaitaire des frais liés à la perte d’autonomie 58

2. Le recours subsidiaire, mais essentiel, aux Länder et aux communes 59

a) Les Länder 59

b) L’allègement du rôle des communes, qui reste néanmoins important, avec la réforme de 1995 60

3. La reconnaissance croissante du rôle des aidants 60

a) Les droits à congés spécifiques : congé de six mois et congé de dix jours 60

b) L’entrée en vigueur de la réforme du Familienpflegezeit prévue pour 2012 61

c) Le versement de cotisations retraite 61

d) Un élément favorable : la réduction d’impôt au titre des services à domicile 62

C. LA PRIORITÉ AU MAINTIEN À DOMICILE SUR L’HÉBERGEMENT EN INSTITUTION 62

1. Le maintien à domicile pour les deux tiers des bénéficiaires 62

a) Une priorité affirmée depuis la réforme de 2007 62

b) L’immense majorité des personnes dépendantes 62

c) L’importance de la création du coordinateur dans le cadre de la réforme de 2008 64

2. L’hébergement en institution pour un tiers des personnes, notamment dans le cadre de formules innovantes 64

3. Le suivi et l’évaluation publique de la qualité des institutions 65

D. DES PERSPECTIVES DE RÉFORME AVEC UN DÉBAT TRÈS VIF SUR L’HYPOTHÈSE ÉVOQUÉE D’UN RECOURS À LA CAPITALISATION 66

III. UN RÉGIME ANCIEN REPOSANT DORÉNAVANT SUR UNE FORTE IMPLICATION DES COMMUNES : LES PAYS-BAS 67

A. UN DISPOSITIF LARGE QUI ASSURE UNE COUVERTURE SUBSTANTIELLE 67

1. Une responsabilité ancienne et l’absence de distinction du handicap et de la dépendance 67

2. Un effort particulièrement important de la part du pays le plus prospère de l’Union européenne 67

B. DEUX PILIERS, L’UN NATIONAL, L’AUTRE COMMUNAL, DEPUIS LA RÉFORME DE 2007 68

1. Un financement par l’impôt, avec une certaine participation des bénéficiaires 68

2. Le pilier national créé en 1968 : l’AWBZ 68

a) Les modalités de fonctionnement 68

b) L’évaluation de la dépendance par un organisme indépendant 70

c) Le rôle des bureaux régionaux de santé 70

3. Un deuxième pilier communal, de proximité, depuis 2007 : le WMO 72

a) Une décentralisation de la mise en œuvre et un objectif de maîtrise des coûts 72

b) Les prestations des communes 72

4. Les éléments de gestion à long terme : la réduction du rôle des établissements d’accueil au profit du maintien à domicile ; le débat politique sur les prestations financières du PGB 74

a) Le choix du maintien à domicile plutôt que le placement en institution 74

b) Le rôle croissant des aidants familiaux 75

c) Les travaux des organismes publics indépendants d’évaluation sur l’augmentation structurelle des dépenses de soins pour les personnes âgées 76

d) Les premières orientations politiques pour le futur 77

IV. UN DISPOSITIF LARGEMENT SOUS CONDITIONS DE RESSOURCES : LE ROYAUME-UNI 79

A. UNE INTERVENTION PUBLIQUE RÉSERVÉE AUX PLUS MODESTES ET UN RÔLE CLEF DES COLLECTIVITÉS LOCALES 79

1. Une allocation universelle modeste et des prestations locales sous conditions de ressources 79

2. Un effort de l’ordre de 20 milliards d’euros si l’on tient compte des dépenses médicales 80

B. L’IMPORTANCE DE L’AIDE À DOMICILE ET LE RÔLE ESSENTIEL DES AIDANTS FAMILIAUX 81

1. La part minoritaire du placement en institution 81

2. Une politique développée de soutien aux aidants 82

C. LA PERSPECTIVE D’UN NATIONAL CARE SERVICE (NCS) ? 82

TROISIÈME PARTIE : QUELQUES ENSEIGNEMENTS DES EXPÉRIENCES ÉTRANGÈRES 85

I. FINANCER LES RÉGIMES PUBLICS : DES APPROCHES PRAGMATIQUES 85

A. DES FINANCEMENTS DIVERSIFIÉS 85

B. DEUX MODALITÉS ALTERNATIVES DE PARTICIPATION DES BÉNÉFICIAIRES AU FINANCEMENT DE LEURS PRESTATIONS : LE PLAFONNEMENT DES AIDES PUBLIQUES OU L’EXIGENCE D’UNE CONTRIBUTION LIMITÉE 87

II. ORGANISER ET DÉLIVRER DES PRESTATIONS 91

A. PRÉVENIR, DÉFINIR ET IDENTIFIER 91

1. Des exemples d’actions de prévention 91

a) Le Plan national de prévention en Italie 91

b) Des visites de prévention au Danemark, pour les plus de soixante quinze ans 91

c) L’incitation aux mesures de prévention en Allemagne 91

d) L’expérimentation, en lien avec la médecine du travail, d’un suivi spécifique des salariés, à partir de 45 ans, dans une entreprise de travaux publics en Finlande 92

2. La définition : une approche plus ou moins large et la distinction, ou non, de la dépendance et des autres cas de perte d’autonomie 92

3. La reconnaissance de la situation de dépendance et la classification 93

a) Une évaluation systématique de la personne, selon des modalités mettant en jeu de manière diverse le niveau local et le niveau national 93

b) L’évaluation par un organisme dédié et indépendant aux Pays-Bas, le CIZ 94

c) La classification et la distinction des niveaux de dépendance 95

B. GARANTIR L’ÉTHIQUE 98

1. La qualité des soins et des prestations 98

2. La lutte contre la maltraitance 99

3. Le respect de la volonté, notamment sur la dignité de la fin de vie 99

a) Le respect de la volonté de rester à domicile 99

b) Les formules de testament de vie ou de tiers de confiance 100

C. MAINTENIR À DOMICILE OU HÉBERGER EN ÉTABLISSEMENT SPÉCIALISÉ 100

1. La préférence pour le maintien à domicile 100

a) Les résultats : une large domination du maintien à domicile, d’ailleurs conforme aux vœux des personnes 100

b) Un désengagement relatif du placement en institution en Suède, avec des fermetures de lits, et aux Pays-Bas 101

c) Le moindre coût du maintien à domicile 102

d) Deux formules possibles : prestations en nature ou prestations monétaires 102

e) Des résultats très variables : les exemples de l’Italie et du Danemark 103

f) Les aides à l’adaptation du domicile 104

2. Le développement des formules intermédiaires 104

a) Les habitats spécifiques 104

b) Le développement, sur le modèle de l’hospitalisation à domicile et des courts séjours, des formules d’accueil diurnes 105

3. Le recours aux établissements spécialisés 105

a) Un mode d’hébergement croissant avec l’âge 105

b) Différentes formules avec un degré de médicalisation variable et l’apparition de spécialisations 106

c) La crainte d’une pénurie de places 107

d) Un coût important 107

D. SOUTENIR LES AIDANTS 108

1. Un rôle stratégique 108

a) Un caractère irremplaçable 108

b) Une place qui pourrait cependant évoluer notamment avec l’accroissement de la mobilité des personnes 109

2. Les actions en leur faveur et la question du statut des aidants 109

a) La conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle : les congés spécifiques et l’aménagement du temps de travail 110

b) Des formules de dédommagement ou de rémunération 111

c) La formation 112

d) Les possibilités de soutien et d’allégement des tâches 112

E. COORDONNER 113

1. L’idéal d’une vision d’ensemble la plus complète possible 113

2. Différents cas de coordination : guichet unique, interlocuteur unique gestionnaire de cas 114

TRAVAUX DE LA COMMISSION 115

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LA RAPPORTEURE 125

RÉSUMÉ DU RAPPORT

La dépendance, la perte d’autonomie avec l’âge, est une problématique récente. Elle est l’une des conséquences d’un phénomène heureux, celui de l’augmentation spectaculaire de l’espérance de vie depuis la fin de la Seconde guerre mondiale grâce aux progrès de la médecine, notamment.

L’augmentation prévisible du nombre des personnes âgées dépendantes par rapport à la population totale est très certainement l’un des défis majeurs que nous devrons relever dans les années futures. L’ensemble des projections démographiques le montre. La proportion et le nombre des personnes de plus de 80 ans, et plus précisément de celles de plus de 85 ans, qui est la tranche d’âge où la dépendance se manifeste, va augmenter. Tous les pays européens sont concernés, et au-delà l’essentiel de leurs partenaires de l’OCDE, plus particulièrement le Japon et la Corée, et même des pays émergents, avec la Chine. L’enjeu est d’abord humain et démographique mais également stratégique pour les finances publiques, avec une augmentation significative des dépenses de santé et de soins au sens large, c'est-à-dire comme disent les anglo-saxons, de cure et de care.

Ce constat est partagé. C’est celui de l’OCDE qui vient de publier un rapport intitulé « Besoin d’aide ? », le mois dernier, comme du Centre d’analyse stratégique, qui vient de diffuser un rapport intitulé « Les défis de l’accompagnement du grand âge ».

Bien qu’elles aient été mises en place assez récemment, à la fin des années 1940 pour le pays le plus précoce, le Danemark, et dans les années 1960 ensuite, en Suède et aux Pays-Bas, les politiques relatives à la dépendance restent très diverses en Europe. Plusieurs raisons à une telle situation.

D’abord, chacun des pays est intervenu à partir de ses propres conceptions en matière sociale et il y a quatre grands modèles sociaux en Europe.

Ensuite, l’Union européenne n’est pas intervenue en la matière. Les seuls textes qui traitent de la question sont des textes de coordination. Il y a, d’une part, le règlement de coordination des régimes de sécurité sociale, qui dans sa nouvelle version du règlement no 883/2004 évoque les prestations dépendance pour dire que les prestations en espèces sont exportables, et pas les prestations en nature, lorsqu’un assuré social change d’Etat membre de résidence. Il y a, d’autre part, la directive 2011/24/CE sur la mobilité des patients qui ne mentionne la dépendance, où plus exactement les soins à long terme, pour coller à la traduction littérale de l’anglais, que pour les exclure de son champ d’application. Cette exclusion est un élément important du compromis politique qui a prévalu.

Par conséquent, on constate en la matière des disparités importantes d’effort de financement de la dépendance.

Selon les estimations publiées, avec des réserves car il y a des écarts de périmètre, la France est avec 1,7 % du PIB au-dessus de la moyenne de l’OCDE. Elle est au-dessus de l’Allemagne (1,3 %), mais au-dessous de la Suède (3,6 % du PIB) et des Pays-Bas (3,5 % du PIB). La seule constante est qu’en dépit de la diversité des situations, ce sont les financements publics qui prédominent, à l’exception de la Suisse et dans une moindre mesure des Etats-Unis.

En ce qui concerne les aspects techniques, l’OCDE constate trois schémas d’organisation de la prise en charge de la dépendance :

– le premier est celui d’un seul programme ou régime, et tel est le cas en Allemagne avec un « cinquième risque » de sécurité sociale et aux Pays-Bas ;

– le deuxième schéma est moins structuré, avec plusieurs éléments autour d’une allocation universelle. C’est de celui-ci que relève la France, avec l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA ; 

– le troisième schéma est celui du filet minimum sous conditions de ressources, et l’OCDE rattache les Etats-Unis, mais aussi le Royaume-Uni, à ce schéma.

Cette diversité des situations tend cependant à s’estomper et le diagnostic est que ce sera vraisemblablement de plus de plus le cas, car face à des défis communs, les différents systèmes devraient converger.

Les premiers éléments de convergence sont, ainsi, déjà présents avec, dans l’ensemble des pays : d’une part, la priorité au maintien à domicile, ce qui répond aux souhaits des habitants et implique, pour les pays les plus anciennement impliqués, une rupture par rapport au tout institutionnel des années 1970 ; d’autre part, le développement des prestations monétaires, plutôt que des prestations en nature sous forme d’allocation d’heures de services ; en outre, la tendance au libre choix des opérateurs, même pour les prestations en nature délivrées sous l’égide des collectivités publiques ; enfin, un rôle limité pour les assurances privées.

Le rôle des assurances privées est en général réduit et faible en termes de population couverte, sauf pour les Etats-Unis et la France, avec 5,5 millions de personnes avec une assurance privée complémentaire, ainsi que pour l’Allemagne, mais en Allemagne les caisses privées d’assurance maladie, où sont affiliés ceux des Allemands qui peuvent opter (les plus aisés), ont l’obligation d’assurer la dépendance dans les mêmes conditions que le régime public.

Aux Etats-Unis, on observe qu’outre la difficulté des personnes à anticiper suffisamment tôt les difficultés futures, faute de le pouvoir sur le plan financier ou faute de le vouloir, les limitations de garanties des assureurs jouent aussi un rôle de frein important au développement des assurances privées.

Pour l’avenir, cette convergence des systèmes de prise en charge de la dépendance devrait s’accroître en raison de plusieurs éléments.

Il s’agit d’abord de la nécessité de conserver une offre de soins adaptée, et par conséquent, d’avoir suffisamment de main d’œuvre, ce qui implique un statut plus attractif et aussi, vraisemblablement, un recours à l’immigration. Dans certains cas, d’ailleurs, il y a actuellement appel à des clandestins en raison des contraintes de coût et de garde des personnes continûment nuit et jour. Il s’agit ensuite de la nécessité d’avoir une mutualisation la plus large possible, avec une extension de la population couverte permettant de couvrir des personnes qui n’ont pas les mêmes capacités contributives. Il convient, enfin, de tenir compte de la pression de l’efficacité croissante des prestations avec un recours accru aux nouvelles technologies, telles que la e-santé, pour autant que ces techniques le permettent et sans perdre de vue que la dimension humaine reste essentielle en la matière. Au Japon, les techniques robotisées sont déjà très développées.

Sur la mutualisation la plus large possible pour assurer un financement pérenne, l’OCDE rappelle que l’arithmétique financière n’est pas simple en la matière puisque toutes les personnes âgées ne deviennent pas dépendantes, seules un cinquième le devenant en l’état, et qu’une fois qu’une personne est dépendante, il y a par nature incertitude sur la durée des prestations. L’espérance de vie à domicile en cas de perte d’autonomie et celle en établissement sont connues, mais la variabilité est forte sur le plan individuel. En outre, comme les organismes de prévision aux Pays-Bas l’ont fait remarquer, le coût de la dépendance s’accroît très fortement et très brutalement dans les derniers moments de la vie. Ce sont d’ailleurs ces éléments qui font qu’en l’absence d’obligation, les assurances privées ne se développent pas et prévoient des plafonds de garantie importants.

De manière à permettre des comparaisons d’ensemble avec d’autres pays, la deuxième partie du rapport présente aussi la situation en Allemagne et aux Pays-Bas, deux Etats membres où des missions sur place ont pu être effectuées, ainsi qu’au Royaume-Uni. En dépit de la difficulté des comparaisons, même s’ils partagent tous deux une conception large de la perte d’autonomie couvrant sans condition d’âge toute la dépendance mais aussi le handicap et les pathologies psychiatriques, l’Allemagne, avec 1,3 % de son PIB, et les Pays-Bas, avec 3,5 % de son PIB, dépensent la même enveloppe de l’ordre de 15 milliards d’euros pour la dépendance et de 20 à 25 milliards d’euros au total sur tous les cas de perte d’autonomie.

Or, ces deux pays ont un écart de population d’environ 1 à 5, et un écart de PIB par tête à l’avantage des Pays-Bas, ce pays étant, hormis le Luxembourg, le pays le plus riche d’Europe.

S’agissant de l’Allemagne, celle-ci dispose d’un régime obligatoire depuis 1995. Ce régime a été créé pour alléger la charge des communes au titre de l’aide sociale. Il est adossé à l’assurance maladie. La question de l’affiliation à l’assurance dépendance ne se pose donc pas. Organiquement, les caisses sont cependant séparées, même si jumelées. Le financement de l’assurance dépendance se fait par cotisations sociales, avec un taux de 1,95 % partagé entre employeurs et salariés de manière égale dans 15 Länder sur 16. Une surcotisation de 0,25 % est exigée des personnes sans enfant. La part patronale a été compensée par une journée ouvrée supplémentaire dans les Länder où le financement est paritaire.

Le dispositif prévoit trois niveaux de dépendance qui donnent droit à des prestations en nature, avec libre choix si possible du prestataire agréé par la caisse dépendance compétente, ou des prestations en espèces d’un montant moins élevé. La priorité est donnée au maintien à domicile sur le placement en institution.

C’est un système forfaitaire, sur le plan financier. Si les prestations dépassent le montant octroyé, alors le bénéficiaire assure le paiement de la différence, et s’il ne le peut pas, ce sont les communes qui interviennent au titre de l’aide sociale.

En ce qui concerne enfin les aidants, des dispositifs prévoient deux types de congés, l’un court de dix jours, l’autre de 6 mois. Une réforme a prévu une nouvelle possibilité de modulation du temps de travail sur deux ans, mais la négociation collective s’avère délicate, selon les éléments communiqués. De tels dispositifs sont essentiels pour éviter l’épuisement des aidants.

Comme dans tous les pays, l’Allemagne envisage des pistes de réforme. Celle qui suscite le plus de débat, proposée par le Dr Philipp Rössler, du Parti libéral FDP, est le recours à une dose de capitalisation pour faire face au déficit futur. Certains, majoritaires semble-t-il, y voient une atteinte au principe de la solidarité nationale.

Les Pays-Bas sont le deuxième pays présenté dans le rapport. C’est un système ancien avec un financement public pour l’essentiel et des paiements des bénéficiaires sous la forme d’un co-paiement. Ce dispositif a été modifié en profondeur en 2007 avec le transfert d’une partie des compétences aux communes, en comptant que la mise en jeu de l’échelon de proximité engendrerait des économies. Les transferts financiers correspondants sont intervenus sous forme de dotations d’Etat attribuées sur la base de critères objectifs.


Il y a donc deux systèmes de prestations, l’ancien AWBZ maintenu, dont le périmètre est réduit, et le nouveau WMO, qui est communal.

Sur le fond, les Pays-Bas privilégient maintenant le maintien à domicile, ce qui n’était pas le cas auparavant lors du « tout institutionnel », et développent aussi le rôle des aidants familiaux et les prestations en espèces, sous la forme du budget personnel ou PGB.

Un élément à noter aux Pays-Bas est l’importance du nombre des logements adaptés à la dépendance, qui doit être porté progressivement de 1,5 million à 2 millions vers 2014.

Le troisième pays présenté dans le cadre du rapport est le Royaume-Uni. Il ne relève pas de la même philosophie. Il est rattaché par l’OCDE au système du filet de sécurité. Certes il existe une allocation universelle, perçue au-delà de 65 ans, mais son montant est faible eu égard aux besoins (191 livres par mois et 288 livres par mois pour ceux qui ont besoin d’aide la nuit) et l’essentiel des prestations sont délivrées par les collectivités locales (councils) et placées sous conditions de ressources. Il y a peu de place en maisons de retraites (360 000). Dans ce contexte, l’essentiel repose sur les aidants, pour lesquels des mesures sont prévues avec sous certaines conditions une allocation de 55 livres par semaine.

Depuis plusieurs années, la question d’un National care service, pendant du NHS, avec un socle minimum de prestations gratuites est évoquée.

Dans une optique strictement comparative, la troisième partie du rapport tire quelques enseignements concrets des expériences étrangères.

Pour ce qui concerne le financement, on constate ainsi une grande diversité dans la répartition entre l’impôt, les cotisations sociales, les paiements des assurances privées et la part acquittée par le bénéficiaire. C’est le résultat d’un grand pragmatisme.

Un élément à signaler est qu’il existe deux mécanismes de plafonnement. Le premier est au bénéfice de l’organisme payeur, comme en Allemagne. Les prestations sont plafonnées et la différence est à la charge du bénéficiaire, de sa famille ou à défaut de l’aide sociale. Le second est en vigueur en Suède et aux Pays-Bas. On limite la participation du bénéficiaire, les co-paiements, de telle sorte qu’il lui reste un minimum de revenu disponible. Ce principe du pécule qui reste disponible est clairement plus coûteux pour le système de financement.

Sur l’organisation et la délivrance des prestations, le rapport met en évidence plusieurs constantes ou éléments spécifiques.

Ainsi, en matière de prévention, on observe dans une grande entreprise de Finlande un suivi personnalisé des salariés, dans le cadre d’une médecine du travail plus fréquente, de manière à s’assurer au-delà de 45 ans que le poste de travail est bien adapté. C’est une logique préventive du bien vieillir, particulièrement intéressante.

Sur l’évaluation de la personne, qui est systématique, elle est menée aux Pays-Bas par un organisme indépendant, le CIZ, pour les prestations de l’AWBZ.

La question du respect de l’éthique et de la dignité des personnes est traitée partout, avec notamment des mesures de lutte contre la maltraitance, des obligations de qualité et des rapports d’inspection. En Allemagne, les rapports sont accessibles sur Internet.

Sur le respect de la volonté de la personne en matière de choix entre le maintien à domicile ou placement en institution, ou de choix sur les questions médicales ou de fin de vie, les dispositions existent. Leur accès sur Internet comme c’est le cas en Allemagne auprès de certains organismes, facilite les procédures.

S’agissant de la question clef, à savoir de la répartition des personnes entre les soins à domicile et l’hébergement en institution, environ 70 % de la population concernée des pays de l’OCDE est à domicile. Cette situation correspond aux vœux des personnes. Il y a quelques exceptions, dont la Belgique en Europe avec 45 % des personnes en institution.

C’est d’ailleurs la solution la plus économique pour les finances publiques. Elle bénéficie aussi du développement des formules intermédiaires, et notamment des formules d’accueil diurne, avec des exemples en Espagne et au Royaume-Uni. Il y a possibilité de maintien à domicile plus longtemps, tout en allégeant les aidants et en permettant à l’accès à des prestations parfaitement professionnalisées et adaptées.

Sur les maisons de retraite médicalisées ou non, la difficulté est toujours pour les foyers l’importance du reste à charge dans les pays comme l’Allemagne où le coût est plus élevé que les prestations publiques.

Le rapport évoque également le cas des aidants, dont le rôle va partout croissant, et pour lesquels il convient d’éviter les phénomènes d’épuisement. Des dispositifs relevant de la logique d’un statut sont prévus : congés ou aménagement d’horaire négociés avec l’employeur, comme au Royaume-Uni, formation, dédommagement, aide à l’accomplissement des tâches, et droits sociaux sont évoqués. Il faut bien veiller cependant à ce qu’ils soient adaptés. Lorsque qu’une grande proportion des aidants sont des conjoints âgés, les dispositifs de congés ou de validation des points de retraite ne concernent qu’une moindre proportion de l’ensemble des aidants.

Enfin, le rapport traite en dernier point la question de la coordination des différents intervenants, l’une des plus difficile. Elle est partout posée. Au-delà de l’impératif du guichet unique, la formule du coordonnateur, comme en Suède et en Allemagne, est clairement digne du plus grand intérêt, de manière que quelqu’un d’autre que les personnes dépendantes ou les familles dispose d’une vision d’ensemble et puisse les orienter le mieux possible dans le maquis institutionnel que l’on constate partout en raison du grand nombre d’interlocuteurs concernés : Etat, collectivités locales, sécurité sociale, organisme dépendance, assurances privées, prestataires de soins, etc.

REPORT SUMMARY

Dependency (long-term care) and age-related loss of autonomy is a recent issue. It is one of the consequences of a fortunate phenomenon, the spectacular rise in life expectancy since the end of the Second World War thanks to the progress of medicine in particular.

The predictable increase in the dependent elderly with respect to the total population is very certainly one of the major challenges we must face in the years ahead, as evidenced by demographic projections as a whole. The proportion and the number of persons over 80 years old, and more specifically those over 85 years old, which is the age bracket where dependency appears, is going to rise. All European countries are concerned, and further afield most of their OECD partners, more especially Japan and Korea and even emerging countries, like China. The challenge is first human and demographic, but also strategic for public funding, with a significant increase in health and care expenditure broadly speaking.

This is a shared observation. It is that of the OECD which has just published a report entitled 'Help Wanted?', last month, and it also that of the Centre d’analyse stratégique (French government strategic analysis centre), which has just circulated a report entitled 'The challenges of accompanying the very elderly'.

Although introduced quite recently, at the end of the 1940s in the earliest country, Denmark, and subsequently in the 1960s in Sweden and the Netherlands, dependency policies are very varied in Europe. Several reasons explain this situation.

First, each of the countries has intervened on the basis of its own conceptions in the social field and there are four main social models in Europe.

Next, the European Union has not intervened in this field. The only legislative texts addressing the issue are of a coordinating nature. On the one hand, there is the regulation on the coordination of social security systems which, in its new version of regulation no. 883/2004, mentions dependency benefits to say that benefits in cash are exportable, but not benefits in kind, when an insured person changes Member State of residence. There is also, on the other hand, Directive 2011/24/EC on the mobility of patients, which does not mention dependency, or more exactly long-term care, except to exclude them from its scope. This exclusion is an important factor in the political compromise which has prevailed.

Consequently, high disparities are seen in the funding effort for dependency.

According to the published estimations, yet with reservations because there are differences resulting from what is included in dependency, France is with 1.7% of GDP above the OECD average. It is above Germany (1.3%), but below Sweden (3.6% of GDP) and the Netherlands (3.5% of GDP). The only constant is that despite the diversity of situations, it is public funding which predominates, except for Switzerland and to a lesser extent the United States.

Regarding the technical aspects, the OECD has noted three organisational approaches for the coverage of dependency:

– The first is that of a single programme or system, and this is the case in Germany, with a social security 'fifth risk', and in the Netherlands;

– The second approach is less structured with several components around a universal allowance. It is that adapted by France, with the personalised autonomy allowance, the APA;

– The third approach is that of the means-tested minimum safety net and the OECD places the United States and also the United Kingdom under this approach.

This diversity of situations is however tending to fade and it is predicted that this will probably be increasingly the case: owing to common challenges the different systems should converge.

The first factors of convergence are, for instance, already present with, in the countries as a whole: first, the prioritisation of keeping the elderly at home, which meets the desires of the elderly and implies, for the earliest involved countries, a radical change from the all-out institutional approach of the 1970s; second, the development of monetary benefits rather than benefits in kind by way of hours of services; also, there is a trend towards the free choice of operators, even for services in kind provided under the aegis of public authorities; last a limited role for private insurance.

The role of private insurance is generally limited and low in terms of the population covered, except for the United States and France, with 5.5 million persons with a complementary private insurance policy, as well as for Germany but, in Germany, private health insurance funds, which are paid into by the Germans who can choose this option (the wealthiest), are obliged to insure dependency on the same basis as the public system.

In the United States, it can be seen that apart from the difficulty people have in anticipating sufficiently early their future difficulties, for want of being able to do so financially or for want of the will to do so, limitations on the guarantees offered by insurers also act as a major brake on the development of private insurance.

As for the future, this convergence of the systems covering dependency should increase owing to several factors.

First, there is the need to keep an adapted supply of care and, consequently, to have sufficient labour, which implies a more attractive status and also, probably, recourse to immigration. In some cases, moreover, illegal immigrants are nowadays called on owing to the constraints of the cost and of the minding of the elderly 24 hours a day. Then there is the need to have the broadest possible pooling, with an extension of the population covered allowing people to be covered who do not have the same contributive capacity. Last, it is necessary to take account of the pressure of the increasing efficacy of services with a greater use of new technologies, such as e-health, provided these techniques are capable of providing such efficacy and without losing sight of the fact that the human dimension remains essential in this field. In Japan, automated techniques are already highly developed.


As for the broadest possible pooling to ensure sustainable funding, the OECD recalls that financial arithmetic is not easy in this field since not all the elderly become dependent (only a fifth become so at present) and that, once a person is dependent, the duration of the services is quite naturally an uncertain point. Life expectancy at home of those having lost their autonomy and life expectancy in institutions are known, but variability is high from one individual to another. Also, as pointed out by the forecasting institutes in the Netherlands, the cost of dependency increases very highly and very suddenly in the last moments of life. It is moreover these factors which mean that if there is no obligation, private insurance does not develop and lays down high coverage ceilings.

To allow overall comparisons with other countries, the second part of the report also presents the situation in Germany and in the Netherlands, two Member States where fact-finding missions were conducted on the spot, as well as in the United Kingdom. Despite the difficulty of comparisons, even if they both share a broad conception of the loss of autonomy covering, without any condition of age, dependency as a whole and also handicap and psychiatric pathologies, Germany, with 1.3% of its GDP, and the Netherlands, with 3.5% of its GDP, spend the same sum of approximately 15 billion euros for dependency and 20 to 25 billion euros in all for all cases of loss of autonomy.

However, these countries have a population difference of approximately 1 to 5, and a per capita GDP difference to the advantage of the Netherlands, this country being, except for Luxembourg, the richest country in Europe.

Referring to Germany, it has had a compulsory system since 1995. This system was created to lighten the burden on district councils regarding social aid. It is part of the health insurance system. The issue of taking out dependency insurance therefore does not arise. Organically, the funds are however separate, even if twinned. Dependency insurance is funded by social contributions, with a rate of 1.95% shared equally between employers and employees in 15 Länder out of 16. An additional contribution of 0,25% is demanded of persons without children. The employer's share has been compensated for by an additional working day in the Länder where funding is joint.

The scheme provides for three levels of dependency which entitle to benefits in kind, with free choice where possible of the service provider approved by the competent dependency fund, or benefits in cash of a lesser amount. Keeping the elderly at home is therefore prioritised over placing them in institutions.

It is a lump-sum system financially speaking. If the services exceed the amount granted, then the beneficiary pays the difference, and if he cannot, district councils intervene with social aid.

Finally as for carers, measures provide for two types of leave, short ten day leave, the other being six months leave. A reform has laid down a new possibility of modulating working time over two years, but the collective bargaining is proving to be tricky according to the information received. Such measures are essential to avoid carers suffering burnout.

As in all countries, Germany is envisaging approaches to reform. The most controversial approach, proposed by Dr Philipp Rössler of the liberal FDP party, is recourse to a dose of capitalisation to cope with the future deficit. Some, in the majority apparently, see here an infringement of the principle of national solidarity.

The Netherlands is the second country presented in the report. It is an old system with public funding for the most part and payments to beneficiaries in the form of a co-payment. This system was overhauled in 2007 with the transfer of part of the powers to district councils, it being reckoned that use of the local level would lead to savings. The corresponding financial transfers have been made in the form of State appropriations allocated on the basis of objective criteria.

There are therefore two systems of benefits, the former AWBZ (Exceptional Medical Expenses Act) which has been kept but stripped of some services, and the new WMO (Social Support Act), which is the responsibility of municipalities.

Basically, the Netherlands now favours keeping the elderly at home, which was not the case before during the all-out institutional period, and is also developing the role of family carers and benefits in cash, in the form of the personal health budget or PGB.

A fact to be noted in the Netherlands is the large number of housing units adapted to dependency, which is to be progressively raised from 1,5 million to 2 million around 2014.

The third country presented in the report is the United Kingdom. It does not apply the same philosophy, being classified by the OECD under the safety net system. Admittedly there is a universal allowance, collected after age 65 but its amount is low given the needs (£191 per month and £288 per month for those needing night help) and most of the services are supplied by district councils and means-tested. There are few places in institutions (360,000). In this context, carers are relied on to a high extent. Measures have been introduced for them with an allowance of £55 per week received under certain conditions.

For several years now, the issue of a National care service, to partner the NHS, with a minimum base of free services has been floated.

For a strictly comparative purpose, the third part of the report draws a few practical lessons from the foreign experiences.

As for funding, there is a high diversity in the breakdown between taxation, social contributions, payments by private insurance and the share borne by the beneficiary. This is the result of great pragmatism.

A fact to be mentioned is the existence of two ceiling mechanisms. The first is for the benefit of the funding agency, as in Germany. Benefits are capped and the difference is to be paid by the beneficiary, his family or, failing that, social aid. The second is in force in Sweden and the Netherlands. Participation by the beneficiary, co-payments, are limited so that they are left with a minimum available income. This principle of savings remaining available is clearly more costly for the funding system.

Regarding the organisation and supply of services, the report highlights several constants or specific elements.

For instance, in the field of prevention, a large company in Finland offers personalised check-ups for their employees as part of more frequent occupational medicine, so as to ensure that after the age of 45 the work post is well adapted. This is particularly interesting as part of the 'growing old well' preventive approach.

Regarding the assessment of the person, which is systematic, it is conducted in the Netherlands by an independent body, the CIZ, for AWBZ benefits.

The issue of respect for ethics and the dignity of persons is dealt with everywhere with, in particular, measures combating ill-treatment, quality obligations and inspection reports. In Germany, the reports can be accessed on the Internet.

As for respect for the person's choice regarding being kept at home or being placed in an institution, or their choice regarding medical issues or end-of-life matters, provisions exist. Their access on the Internet, as is the case in Germany at certain organisations, facilitates the procedures.

Referring to the key issue of the breakdown between people receiving care at home and those in an institution, approximately 70% of the population concerned in the OECD countries is at home. This situation reflects the will of the elderly. There are some exceptions, such as Belgium in Europe with 45% of the elderly in institutions.

This is moreover the most economical solution for public funding. It also benefits from the development of intermediary approaches, and especially day centres, with examples in Spain and the United Kingdom. There is the possibility of keeping people at home longer while providing respite for carers and allowing access to perfectly professional and adapted services.

Regarding institutions with medical care or not, the difficulty for families is always the high amount of the rest to be paid in countries like Germany where the cost is higher than the public benefits.

The report also mentions the case of carers, whose role is increasing everywhere, and for whom it is necessary to avoid burnout phenomena. Measures heading along the lines of a status are planned: care leave or flexible working time arrangements negotiated with the employer, as in the United Kingdom, training, compensation, help in accomplishing tasks, and social rights are mentioned. It must however be ensured that these measures are adapted. When a high proportion of carers are elderly spouses, measures related to leave or the validation of retirement points concern only a lesser proportion of carers as a whole.

As the last point, the report addresses the issue of the coordination of the various players, one of the most difficult matters. It is raised everywhere. Apart from the absolute necessity of a one-stop-shop, the appointment of care managers, as in Sweden or Germany, is clearly worthy of the greatest interest so that someone else than the dependent or the families has an overall view and can guide them as best as possible in the institutional maze seen everywhere owing to the high number of players concerned: the State, district councils, social security, dependency bodies, private insurance, care providers, etc.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Historiquement, la perte d’autonomie pour les actes essentiels de la vie s’est d’abord réglée dans le cadre clos de la famille ou bien dans celui, souvent plus fermé, des institutions de bienfaisance, laïques ou religieuses.

Aucune de ces solutions n’était réellement satisfaisante pour ceux que l’accès au grand âge, rarement, le handicap, plus souvent, invalidait au point de les rendre dépendants d’autrui.

A défaut d’argent, mais aussi et surtout d’autorité, l’entourage naturel pouvait être enclin à la négligence. Le roman français du XIXe siècle ne donne que trop d’exemples d’une telle situation. La mort du Père Goriot, dans l’abandon, enterré par deux jeunes étudiants ambitieux mais humains, et non par ses filles, n’est que le plus connu.

Les institutions collectives n’offraient pas un meilleur cadre avec leurs grandes salles communes ou leurs chambrées, sauf cas très exceptionnel d’un traitement de faveur.

L’un des progrès essentiels du XXe siècle aura donc été d’avoir traité la question d’une manière plus humaine, même sans être toujours exempte de tout défaut.

Deux étapes majeures doivent être rappelées.

D’abord, les progrès de la médecine pendant et après la Première Guerre mondiale, pour traiter le cas des grands invalides. Les soins particuliers ont été développés avec des centres spéciaux et l’expérimentation de nouveaux traitements tels la physiothérapie ou l’hydrothérapie et les débuts de la rééducation, avec un objectif professionnel pour permettre aux anciens soldats invalides d’exercer un métier lors de leur retour à la vie civile.

Ensuite, dans la seconde moitié du siècle, la question de la dépendance proprement dite s’est progressivement posée, de manière distincte du handicap.

Elle l’a d’ailleurs été dans des circonstances infiniment plus heureuses, grâce à l’augmentation de l’espérance de vie. Celle-ci a gagné une année tous les quatre ans environ. Etre octogénaire n’est plus rare, devenir centenaire n’est plus l’exception.

A cette question nouvelle qui s’est progressivement posée, les Etats ont répondu de manière assez différenciée. Chacun a eu recours au secteur privé, au secteur public, à l’Etat, aux collectivités territoriales, au tiers secteur, associatif sans but lucratif ou mutualiste, selon ses propres traditions culturelles, politiques philosophiques, religieuses et sociales.

Mais tous se sont heurtés à la question du financement et de ses modalités. Les arbitrages ont été opérés ainsi entre les cotisations sociales, l’impôt et les financements privés.

Pour ce qui concerne l’Union européenne, on constate ainsi une très grande diversité d’organisation, en dépit du caractère assez récent des politiques menées en la matière, puisque les plus anciennes remontent aux mieux à la fin des années 1940, et plus généralement aux années 1960.

Cette hétérogénéité n’est cependant guère surprenante : la compétence est restée entre les mains des Etats membres, sans aucune intervention de l’Union européenne, si ce n’est pour coordonner. Néanmoins, pour le futur, on constate que sous la pression d’enjeux communs, qu’ils soient démographiques ou financiers, les différents systèmes ont tendance à converger.

Le présent rapport n’a d’autre objectif que de présenter à titre purement comparatif et documentaire, les traits essentiels de la question et les grands principes retenus par les principaux partenaires de la France pour la résoudre.

Il a également une vocation différente mais complémentaire, des travaux de grande qualité qui ont été récemment menés dans le cadre de l’OCDE, et qui se sont achevés avec la publication le mois dernier du rapport intitulé Besoin d’aide ?, réalisé par Mmes Francesca Colombo et Ana Llena-Nozal, ainsi que MM. Jérôme Mercier et Frits Tjadens, comme des travaux réalisés par le Centre d’analyse stratégique sur Les défis de l’accompagnement du grand âge, coordonnés par Mme Virginie Gimbert et M. Guillaume Malochet, dont le rapport vient également d’être diffusé.

Après avoir rappelé les principaux éléments de la divergence à l’origine puis de la convergence actuelle des modes de prise en charge et de traitement de la dépendance, il expose d’abord les dispositifs en vigueur dans trois de nos principaux partenaires, notamment en Allemagne et aux Pays-Bas, dans lesquels la rapporteure s’est rendue respectivement les 21 et 29 juin derniers.

Il expose ensuite quelques enseignements à retenir sur le traitement des principales questions clefs.

PREMIERE PARTIE :
UN DÉFI COMMUN QUI A DONNÉ LIEU À DES RÉPONSES À L’ORIGINE DIFFÉRENCIEES, MAIS DORÉNAVANT CONVERGENTES

I. LE DÉFI DÉMOGRAPHIQUE : LE NOMBRE ET LA PROPORTION

Dans l’ensemble, l’autonomie de chacun se réduit avec l’âge. La moitié des personnes de plus de 80 ans ont ainsi besoin d’une aide pour accomplir les tâches de la vie courante.

Même si l’âge effectif de la perte d’autonomie recule et peut être retardé sous l’effet de politiques préventives adaptées, cette réalité reste incontournable : la dépendance est l’une des conséquences du vieillissement en nombre qu’ont permis les progrès sanitaires du XXe siècle.

Comme le remarque ainsi l’OCDE dans son étude précitée récemment publiée, « Besoin d’aide ? », le nombre des personnes dépendantes va arithmétiquement augmenter dans les années futures dans les grands pays développés et dans certains pays émergents, puisque la part des plus de 80 ans dans la population totale croît sans cesse, et par conséquent celle des plus de 85 ans, âge à partir duquel la perte d’autonomie se manifeste significativement.

S’établissant à 4 % actuellement de la population de l’OCDE, celle-ci devrait donc s’élever à 10 % en 2050, avec une augmentation particulièrement significative pour les pays dont la natalité s’est réduite de manière plus précoce et plus marquée que dans les autres pays, à savoir l’Allemagne et le Japon. Dans ces pays, la part des plus de 80 ans devrait atteindre respectivement 15 % et 17 % cette même année.

Dans cet ensemble, les pays de l’Union européenne apparaissent comme ceux qui vont devoir collectivement faire face à un défi plus marqué que chez leurs principaux partenaires économiques, à l’exception du Japon, ainsi que de la Corée du Sud, comme l’indiquent les courbes suivantes.

Source : OCDE.

Pour ce qui concerne plus précisément chacun des pays étudiés par l’organisation, le graphique suivant donne de manière plus détaillée les données correspondantes.

Accroissement de la part des plus de 65 ans et des plus de 80 ans dans la population de 2010 à 2050



       

Japon


         

Allemagne

         

Corée

         

Italie

         

Slovénie

         

Finlande

         

Autriche

         

Suisse

         

Espagne

         

Grèce

         

Portugal

         

Danemark

         

France

         

République tchèque

         

Royaume-Uni

         

Pologne

         

Belgique

         

Canada

         

Pays-Bas

         

République slovaque

         

OCDE

         

Nouvelle Zélande

         

Hongrie

         

Suède

         

Luxembourg

         

Norvège

         

Islande

         

Australie

         

Etats-unis

         

Irlande

         

Chili

         

Mexique

         

Turquie

           
           
           

Source: OCDE.

             

On observe très clairement qu’avec une proportion de 10 % pour les plus de 80 ans en 2050, la France se situera dans une position intermédiaire en Europe, reflet tant de sa natalité plus dynamique que celle de ses partenaires, mais aussi d’une espérance de vie plus élevée.

L’autre aspect de cette évolution démographique est l’augmentation du nombre des plus de 80 ans.

Il est mécaniquement lié à l’augmentation de la proportion correspondante, mais il est essentiel d’insister en la matière sur ce point.

En effet, pour les choix de politique publique, tels que celui entre le maintien à domicile et l’admission en établissement, on peut parfaitement se trouver face à la situation apparemment paradoxale, mais tout à fait possible, d’une pénurie des places en établissement, en dépit de la priorité accordée à des solutions alternatives.

La proportion des personnes en établissement pourra en effet diminuer alors même que leur nombre, en valeur absolue, continuera à croître.

La comparaison des pyramides des âges actuelles et prévisibles, pour deux pays, l’Allemagne et la France, permet de constater cet effet.

Pour la France en effet, on constate que le sommet prévu pour 2050 est plus épais qu’il ne l’est actuellement.

Pour l’Allemagne, l’évolution prévue est encore plus spectaculaire, avec un rétrécissement marqué à la base et des classes d’âge nombreuses chez les très âgés.

De manière plus précise, pour la France, les travaux de l’Observatoire des retraites donnent les éléments suivants pour 2050 pour les plus de 80 ans, d’après les projections de l’INSEE de 2006 :

– le nombre des plus de 80 ans passerait de 3 millions en 2007 à plus de 7 millions en 2050 ;

– cet accroissement serait réparti de manière équilibrée entre les femmes et les hommes.

Projection pour la France métropolitaine du nombre de personnes âgées de 80 ans et plus
entre 2000 et 2050

Sexe

2007

2030

2050

Hommes

986 000

1 843 000

2 865 000

Femmes

1 983 000

2 986 000

4 461 000

Ensemble

2 969 000

4 829 000

7 326 000

Source : Scénario central de l'Insee, projections de 2006 – Observatoire des retraites.

Cet élément du nombre est essentiel, car ainsi qu’il a été indiqué à la rapporteure, le principal élément qui influe sur le coût de la dépendance est le nombre des personnes concernées, indépendamment des politiques suivies, qui ne peuvent jouer que sur des paramètres de second plan.

Les dépenses de prise en charge, qui se montent actuellement à 1,5 % du PIB en moyenne dans les pays de l'OCDE, sont prévues pour augmenter significativement en conséquence des évolutions démographiques qui viennent d’être évoquées. Elles pourraient doubler voire tripler à l’horizon 2050.

A l’heure actuelle, la Suède et les Pays-Bas ont le niveau de dépense le plus élevé en proportion de leur PIB, à raison de 3,5 % et 3,6 % respectivement, alors que le Portugal (0,1 %), la République tchèque (0,2 %) et la Slovaquie (0,2 %) sont les pays où le niveau des dépenses correspondantes est minimum.

Les projections donnent une augmentation très significative de ces coûts à l’horizon 2050.

En effet, ceux-ci s’approcheraient de 10 % du PIB aux Pays-Bas, et dépasseraient 5 % en Suède.

Pour les autres pays, la dépense augmenterait significativement, en proportion du PIB, comme l’indique le tableau suivant.

Dépenses publiques de prise en charge de la dépendance (% du PIB)

   

2050

 

Année de
référence

Prévalence de la
dépendance

Évolution de la
structure de coût de

la prise en charge de
la dépendance

Diminution de l’offre
de soins familiaux

   

Scénario de référence (1)

Vieillissement en bonne santé

(2)

‐1 % du PIB par travailleur

(3)

+1 % du PIB par travailleur

(4)

100 % de soins à domicile (5)

100 % de soins en établissement (6)

Union
Européenne

2007

           

Allemagne
Autriche
Belgique
Danemark
Espagne
Finlande
France
Italie
Norvège
Pays‐Bas
Royaume‐Uni
Suède 

0.9
1.3
1.5
1.7
0.5
1.8
1.4
1.7
2.2
3.4
0.8
3.5

2.3
2.5
2.9
3.4
1.4
4.2
2.2
2.9
4.5
8.2
1.3
5.5

2.2
2.4
2.8
3.2
1.3
4.2
2.1
2.8
4.3
7.7
1.2
5.3

2.1
2.3
2.6
3.1
1.3
3.8
1.9
2.6
4.1
7.5
1.2
5.0

2.5
2.7
3.2
3.7
1.5
4.7
2.5
3.2
4.9
9.0
1.4
6.1

2.4
2.6
3.1
3.7
1.4
4.5
2.3
3.3
4.6
8.4
1.3
5.8

2.7
2.6
3.5
3.4
3.0
5.3
2.6
3.9
5.3
9.2
1.3
6.3

Moyenne
pays de
l’OCDE
membres UE

1.3

2.4

2.3

2.2

2.7

2.5

2.9

Autres pays OCDE

2006

           

Australie
Canada
États‐Unis 
Japon
Nouvelle-Zélande

0.8
1.2
1.0
1.4
1.4

1.8
2.7
1.9
4.0
3.9

1.6
2.4
1.7
3.5
3.6

1.7
2.4
1.7
3.6
3.5

2.0
2.9
2.1
4.4
4.3

2.0
2.7
2.2
4.0
4.6

2.4
3.4
2.6
4.4
6.2

Moyenne
autres pays

1.2

2.9

2.6

2.6

3.2

3.1

3.8

Source : Centre d’analyse stratégique.

Grâce à la qualité des prévisions à long terme de ses organismes publics, le CBP (Centraal Planbureau) et le SCP (Sociaal en cultureel Planbureau), les Pays-Bas peuvent faire l’objet de données prospectives détaillées.

Ainsi l’OCDE(2) estime que les dépenses de santé au sens large, y compris la dépendance, représentaient 9,8 % du PIB des Pays-Bas en 2007 (davantage que dans les autres Etats OCDE, 8,9 %), essentiellement financées par la collectivité publique (81,4 % contre 72,8 % en moyenne dans l’OCDE).

Les dépenses de santé (financées collectivement ou individuellement) augmentant de 4 % par an en termes réels, elles devraient représenter une part de plus en plus importante du PIB.

La responsabilité essentielle de cette croissance revient aux dépenses liées aux soins longue durée, ou de dépendance, pris en charge par l’AWBZ (environ 3 % du PIB). Ce sont les personnes d’un grand âge qui font le plus appel aux soins de santé longue durée : en 2007, les dépenses de soins allaient de 5 000 euros par personne à partir de 80 ans à près de 45 000 euros pour les plus de 90 ans. Les coûts pour une personne de 83 ans sont 10 fois plus importants que pour une personne de 67 ans. Les dépenses collectives de dépendance, qui s’établissent à 21,2 milliards d’euros en 2010, pourraient ainsi augmenter de 3,5 % par an d’ici 2015.

Le coût total du vieillissement de la population serait équivalent à 9 % du PIB entre 2010 et 2060 (au 5e rang des pays de l’Union européenne et le double de la moyenne européenne).

Ainsi, la préoccupation principale est de freiner la générosité du système néerlandais et les dépenses liées au vieillissement pour assurer la soutenabilité budgétaire à long terme.

Selon les compagnies d’assurance santé, les dépenses de santé pour les personnes âgées représentent actuellement 5 % du PIB. Du fait du vieillissement de la population, les coûts devraient passer à 12,2 % du PIB en 2050. Si l’on tient compte également de l’augmentation des exigences des patients, il pourrait même s’agir de 30 %.

Si le rythme actuel de croissance des dépenses se maintient, les dépenses devraient augmenter de 25 % d’ici à 2020. Entre 2007 et 2020, le secteur de la santé aura besoin de 500 000 nouveaux employés (soit une part de près de 20 % du marché du travail).

Comme l’indique le tableau suivant, les conséquences sont particulièrement significatives pour l’évolution à long terme des finances publiques.

Projections de long terme des finances publiques

(à politique inchangée, base 2010)

% PIB

2011

2020

2040

2060

Total dépenses

50,25

50

57,75

59,75

dont retraite

5

6

8,5

8

Santé

9,75

10,75

14,25

14,25

Dépenses liés à l’âge (Commission)

20,5*

22,6

28,5

29,9

Solde UEM

-5

-2,75

-9

-11,25

Dette UEM

69

75

132

217


Source
 : Ambassade de France aux Pays-Bas

II. DES MODÈLES D’ORGANISATION DIFFÉRENTS, MAIS UNE CONVERGENCE DÉJÀ PERCEPTIBLE

Il n’y a pas de régime européen commun pour la dépendance.

Comme pour les autres prestations sociales, la compétence continue à relever des seuls Etats membres et l’Union européenne n’est intervenue que pour opérer la coordination, c'est-à-dire la continuité des droits des assurés sociaux lorsqu’ils se déplacent d’un Etat membre à l’autre, soit dans le cadre d’un séjour temporaire hors de leur Etat de résidence, soit en cas de transfert de résidence. Deux textes ont ainsi été adoptés.

Le premier de ces textes est le règlement de coordination des régimes de sécurité sociale entre les Etats membres. L’ancien règlement (CEE) no 1408/71 a été remplacé par le règlement (CE) no 883/2004 du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, entré en vigueur l’année dernière, qui constitue dorénavant le règlement de base. Ses dispositions sont précisées par plusieurs textes d’application, notamment par le règlement (CE) no 987/2009 du 16 septembre 2009.

Le nouveau règlement de base apporte deux modifications importantes. La première est la mention explicite des soins de longue durée dans la définition des prestations en nature de l’assurance maladie.

La seconde est liée à la levée de toute clause de résidence pour les prestations en espèces servies par les Etats membres, à l’article 7. Elle consiste en l’insertion des prestations en espèces correspondantes dans la catégorie des prestations exportables, c'est-à-dire de celle dont on garde le bénéficie même en cas de résidence en dehors de l’Etat membre d’affiliation. En revanche, les prestations en nature continuent d’être celles de l’Etat membre de résidence.

Pour sa part, l’article 28 du règlement d’application précité indique la procédure à suivre pour l’exportation de ces prestations en espèces pour les soins de longue durée, en cas de séjour temporaire, ou bien en cas de résidence dans un autre Etat membre que l’Etat compétent pour les servir.

Le deuxième corps de règles qui mentionne les soins de longue durée est celui de la directive 2011/24/UE du 9 mars 2011 relative à l’application des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, dont la date de transposition est le 25 octobre 2013.

Ce texte prévoit, en effet, les conditions dans lesquelles les assurés sociaux peuvent choisir de se faire délivrer leurs soins de santé dans un autre Etat membre que celui de leur affiliation.

Il intervient en parallèle au règlement de coordination des régimes de sécurité sociale, et on doit espérer à terme que les dispositions sur la prise en charge des prestations reçues dans un autre Etat membre soient mentionnées dans le seul règlement de coordination des régimes de sécurité sociale.

Comme l’a indiqué notre collègue Daniel Fasquelle, député, dans son rapport d’information no 1308 du 9 décembre 2008, sur l’application des droits des patients dans un cadre transfrontalier, portant sur la proposition de directive présentée par la Commission européenne, c’est en majeure partie pour des raisons de procédures – la difficulté à obtenir l’unanimité des Etats membres exigée par toute modification du règlement de coordination des régimes de sécurité sociale – que le choix d’un deuxième texte, une directive intervenant sur une base juridique différente et n’exigeant que la majorité qualifiée, a été opéré.

Sur le fond, la directive 2011/24/CE exclut les prestations en nature liées à la dépendance.

En effet, son considérant no 14 prévoit : « La présente directive ne devrait pas s’appliquer aux services dont le but premier est d’aider les personnes qui ont besoin d’aide pour accomplir des tâches quotidiennes courantes. Elle ne devrait, en particulier, pas s’appliquer aux services de soins de longue durée jugés nécessaires pour permettre à la personne qui a besoin de soins de vivre aussi pleinement que possible et de la manière la plus autonome possible. La présente directive ne devrait donc pas s’appliquer, par exemple, aux services de soins de longue durée dispensés par des services de soins à domicile, dans des résidences offrant des services d’assistance à l’autonomie et dans des maisons de retraite ou des foyers-logements («maisons de soins»). »

Par conséquent, au a) du 3 de son article premier, le dispositif prévoit une disposition d’exclusion très claire en indiquant que la directive ne s’applique pas « aux services dans le domaine des soins de longue durée dont le but est d’aider les personnes qui ont besoin d’aide pour accomplir des tâches quotidiennes courantes ».

La directive de 2011 ne mentionne donc les soins de longue durée que pour les exclure.

Dans l’ensemble, le dispositif manque cependant de clarté et l’on doit se poser la question d’une meilleure lisibilité des dispositions correspondantes.

C’est d’ailleurs sans surprise que la rapporteure s’est vue confirmer par les services de la Commission européenne qu’une réflexion était en cours sur ce sujet. Un groupe d’experts a été désigné et devrait rendre ses conclusions au début de l’année prochaine.

Ses travaux ont d’ailleurs un objet plus large puisqu’il s’agit également de voir quelles mesures pourraient être prévues en la matière au niveau communautaire.

Par ailleurs, la question pourra également être évoquée dans le cadre des éléments relatifs à l’année 2012, désignée sur l’initiative de la Commission européenne, comme « Année européenne du vieillissement actif ».

Sous l’angle de la qualité de soins, la Commission européenne exerce cependant une certaine impulsion, avec une stratégie européenne pour combattre la maltraitance faite aux personnes âgées.

Avec le soutien du programme Daphné II, douze partenaires de la société civile ont ainsi travaillé en réseau pour mettre en place :

– une Charte européenne des droits et responsabilités des personnes âgées, et en particulier des femmes âgées, ayant besoin d’assistance et de soins longue durée ;

– un guide d’accompagnement de la Charte destine aux soignants et aidants, qui explique les articles de la Charte et fournit des recommandations ;

– une liste complémentaire de bonnes pratiques.

Un nouveau projet WeDO (Wellbeing and Dignity of Older People) est en cours et s’achèvera en 2012.

Il faut également évoquer l’initiative-pilote « partenariat européen innovant sur le vieillissement actif et en bonne santé (EIP) », lancée à la fin de l’année 2010 et qui figure parmi les thèmes de la stratégie 2020.

Les dispositifs spécifiques de protection contre la perte d’autonomie ont été mis en place dans les pays précurseurs de l’Europe du Nord, peu de temps après la Seconde guerre mondiale, en 1949 au Danemark, et un peu plus tard, en 1964 en Suède, ainsi qu’en 1968 aux Pays-Bas avec la loi sur les dépenses médicales exceptionnelles (AWBZ) organisant la prise en charge des dépenses non couvertes par l’assurance maladie.

En Suède, cette mise en place a d’ailleurs été consécutive à la suppression en 1956 des obligations juridiques d’assistance des enfants envers leurs parents.

Dans un deuxième groupe de pays, les initiatives gouvernementales sont intervenues un peu plus tard, à partir des années 1980 et, surtout, des années 1990, dès lors que le nombre des personnes très âgées s’est accru sous l’effet alors très préhensible de l’augmentation de l’espérance de vie.

En Italie, c’est dès 1984 que la prestation destinée aux personnes handicapées, mise en place en 1980, a été étendue aux personnes âgées ayant perdu leur autonomie.

Au Royaume-Uni, la loi sur le National Health Service and Community Care est intervenue en 1990, pour organiser le partage des compétences entre les autorités locales et le système de santé dans l’évaluation et la prise en charge des besoins des personnes en perte d’autonomie.

En Allemagne, c’est en 1995 qu’a été créée l’assurance dépendance obligatoire adossée à l’assurance maladie.

Dans notre pays, créée en 1997, la prestation dépendance a été remplacée en 2001 par l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).

Pour ce qui la concerne, l’Espagne a organisé très récemment, par la loi no 39/2006 du 14 décembre 2006, et à partir de 2007, un dispositif de prise en charge universel de la dépendance qui est en fait plus large, car couvrant sans disposition d’âge, la perte d’autonomie.

Dans l’ensemble des pays européens, on observe quatre « modèles » d’organisation des services sociaux.

Bien qu’ils soient plus récents que les autres, les régimes relatifs à la dépendance sont organisés dans chaque pays selon le schéma retenu pour les autres secteurs.

Le premier de ces modèles, qualifié de « social-démocrate », mais aussi de nordique, est celui établi par les pays scandinaves. Il est caractérisé par deux éléments. La prestation est universelle et elle est décentralisée, c’est-à-dire gérée par les municipalités. Celles-ci délivrent directement les services. Si tel n’est pas le cas, elles passent des marchés avec des entreprises du secteur privé, avec mise en concurrence. Ces modèles sont d’inspiration beveridgienne, étant donné que la couverture sociale est financée par l’impôt, et elles ont tendance à le faire, notamment en Suède.

Le deuxième modèle est le modèle corporatiste ou bismarckien. Les droits sociaux sont liés au travail. La prestation dépendance y est conçue comme relevant d’une couverture spécifique financée par les cotisations sociales. L’Allemagne, qui a créé une branche dépendance en 1995 au sein de son système de sécurité sociale, mais aussi les Pays-Bas, avec cependant une forte participation des collectivités locales depuis 2007, relèvent de ce schéma.

Le troisième modèle est le modèle libéral, avec un recours accru au marché. Selon ce schéma, l’Etat met uniquement en place un filet de sécurité qui s’adresse aux plus démunis. Le Royaume-Uni s’apparente en l’état, à ce schéma. Les Etats-Unis, hors d’Europe, en relèvent avec un filet de sécurité et une part plus significative qu’ailleurs couverte par les assurances privées.

Le quatrième modèle est le schéma de tradition familiale. Par nécessité, les pays méditerranéens s’y rattachent. Les systèmes d’aide publics ou privés sont très peu développés.

Dans ses comparaisons, l’OCDE a établi que les dépenses de dépendance, exprimées en pourcentage du PIB, s’échelonnent de 0,1 % au Portugal à 3,5 % aux Pays-Bas et 3,6 % en Suède.

Il s’agit en fait des dépenses prises en charge de manière « institutionnelle » par des caisses publiques ou privées, et selon des données qui n’incluent pas la majorité des frais de séjour dans les établissements. En dépit de leur caractère partiel, ces données fournissent quelques éléments d’éclairage significatifs.

Comme l’indique le graphique suivant, la position de la France est intermédiaire, à raison de 1,7 % du PIB, soit un niveau un peu supérieur à la moyenne de l’OCDE (2,5 %).

Part des dépenses de dépendance en pourcentage du PIB (dépense publique et dépense privée)

2008

                     


                   
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     

Note: Data for Austria, Belgium, Canada, the Czech Republic, Denmark, Hungary, Iceland, Norway, Portugal, Switzerland and the United States refer only to health-related long-term care expenditure. In other cases, expenditure relates to both health-related (nursing) and social long-term care expenditure. Social expenditures on LTC in the Czech Republic are estimated at 1 % of GDP (Source: Czech Ministry of Health, 2009). Data for Iceland and the United States refer only to nursing long-term care in institutions. Data for the United States underestimate expenditure on fully private LTC arrangements. Data for Poland exclude infrastructure expenditure, amounting to about 0.25 % of GDP in 2007. Data for the Netherlands do not reflect user co-payments, estimated at 8 % of total AWBZ expenditure in 2007. Data for Australia refer to 2005; data forthe Slovak Republic and Portugal refer to 2006; data for Denmark, Japan and Switzerland refer to 2007.

 

Source: OECD Health Data 2010.

               

La répartition entre le secteur privé et le secteur public est très inégale, avec une dépense publique prédominante voire exclusive dans la plupart des Etats.

En revanche, deux exceptions sont notables, à savoir la Suisse, avec un financement à 60 % dans le cadre des caisses privées, et les Etats-Unis avec un financement privé à 40 %.

Au troisième rang, on observe l’Allemagne, à raison de 30 % financés par les caisses d’assurance dépendance adossées aux caisses d’assurance maladie privées.

Dans le cadre de ses travaux comparatifs précités, l’OCDE a dressé les principaux éléments sur les modes d’organisation du financement de la dépendance.

La dépendance exigeant l’accès à des prestations coûteuses, puisque reposant essentiellement sur de la main d’œuvre, avec une exigence de qualification, les pays ont dû progressivement mettre en place des dispositifs permettant l’accès aux soins de l’immense majorité de ceux ne bénéficiant pas de ressources suffisantes pour assumer la totalité de leur coût et dont l’état général ou l’environnement ne permettent pas de faire appel aux seuls proches, aidants familiaux ou autres bénévoles.

Seuls trois pays de l’OCDE s’appuient uniquement sur le recours à ce mode traditionnel de bénévolat familial ou de proximité, à savoir la Turquie, le Mexique et le Chili.

La plupart des autres ont mis en place un système structuré, selon trois grands schémas alternatifs. La différence entre chacun d’entre eux repose sur les critères d’éligibilité.

Environ un tiers des pays ont un programme unique de couverture universelle financé soit par l’impôt, comme dans les pays nordiques, soit par des dispositifs d’assurance sociale dépendance, comme en Allemagne avec une branche spécifique (le cinquième risque), au Japon et aux Pays-Bas, soit encore par l’assurance maladie, comme en Belgique où l’essentiel de la couverture dépendance est intégrée dans le système de santé.

Ces programmes uniques sont à vocation universelle. La différence entre eux tient aux critères d’attribution des prestations, qui dépendent en fait du niveau de la dépendance.

Le deuxième élément essentiel de différenciation entre les pays relevant de cette première catégorie tient à la part de l’effort restant à la charge du bénéficiaire.

En contrepartie, les prestations délivrées sont strictement règlementées, le plus souvent, notamment en Belgique et dans les pays d’Europe du Nord.

La deuxième catégorie regroupe les pays dits « à système mixte » qui n’ont pas de régime structuré dédié à la dépendance, mais qui ont mis en place des allocations universelles d’aide aux personnes, soit financières, comme en France, classées donc ainsi par l’OCDE, et en Italie, en Autriche et en République tchèque, soit des prestations en nature, comme en Australie et en Nouvelle-Zélande.

En général, dans ces pays, plusieurs dispositifs et mécanismes sont prévus.

Les allocations correspondantes peuvent également intervenir en complément d’autres prestations telles que celles de l’assurance maladie ou d’autres prestations destinées à couvrir la dépendance.

En tout état de cause, le coût de la dépendance n’est généralement pas couvert dans ces pays, soit en raison d’un plafonnement des prestations, soit sous l’effet de l’absence de coordination entre différents dispositifs qui s’accompagnent d’un morcellement des droits.

La troisième catégorie de pays comprend ceux où a été mis en place un filet de sécurité sous condition de ressources, essentiellement les Etats-Unis et, en Europe, le Royaume-Uni.

Compte tenu du coût des prestations nécessaires en cas de dépendance et l’impossibilité pour l’immense majorité des personnes de les financer par elles-mêmes, l’étude précitée conclut que les allocations universelles constituent le plus sûr moyen d’un accès équitable à un niveau élevé de prestation.

C’est l’explication que l’on peut donner à la convergence des dispositifs nationaux vers un système de type universel et conçu sur des bases pragmatiques.

Qu’il s’agisse de l’OCDE, dans le cadre du rapport précité, ou du Centre d’analyse stratégique, dans le cadre de son rapport de juin 2001 sur les défis de l’accompagnement du grand âge, on observe déjà cette tendance à la convergence, sur quelques points clefs.

La première tendance est celle de la priorité au maintien à domicile sur la prise en charge institutionnelle.

Elle est clairement contraire aux premières modalités d’organisation des dispositifs de prise en charge de la dépendance, développées dans les années 1960 et 1970 aux Pays-Bas et en Suède, et fondées sur le placement en institution.

Pour les pays de la deuxième vague, ce mode d’intervention est plus naturel, car il ne correspond pas à un changement de modèle.

La deuxième tendance commune à tous les pays est complémentaire à la première, et concerne le développement des allocations financières, comme alternative aux prestations en nature.

Il y a naturellement pour l’institution qui finance - Etat, collectivité locale, ou organisme de sécurité sociale - un intérêt à cette évolution, dont les coûts sont davantage maîtrisables que ceux des prestations en nature.

Il y a aussi un intérêt des bénéficiaires qui, lorsque les utilisations des prestations monétaires sont souples, peuvent davantage mobiliser les aidants familiaux ou des aidants de proximité et peuvent également favoriser le libre choix des prestataires.

La troisième tendance est la reconnaissance du libre choix des personnes dépendantes pour leur prestataire, même lorsqu’il s’agit de prestations en nature délivrées par une collectivité publique.

Le Danemark est très intéressant en la matière puisque depuis 2002, les collectivités publiques prestataires, qui sont les communes, doivent permettre le choix entre leurs propres services et ceux des opérateurs extérieurs.

Ce libre choix est clairement facilité par la mise en place de prestations monétaires accessibles sur demande, comme alternatives aux prestations en nature.

Le libre choix n’est pas réservé aux seules prestations monétaires. Il peut également s’exercer pour les prestations en nature. Tel est le cas en Allemagne pour les prestations en nature délivrées par les caisses d’assurance dépendance, et aux Pays-Bas pour les prestations délivrées sous l’égide des bureaux régionaux de santé.

Il y a cependant une limite à ce libre choix. C’est celle de l’obligation de faire appel à un prestataire agréé. Cette obligation n’est pas contestable, puisque l’agrément ou l’autorisation est assorti d’obligations de service et de normes de qualité et donc de sécurité.

Pour les collectivités prestataires, ce libre choix est aussi la contrepartie et l’un des éléments de la légitimité de la mise en concurrence, dans une optique non seulement de diversification de l’offre, mais également de réduction des coûts.

Seuls quatre pays connaissent un développement significatif des assurances privées en matière de dépendance, les Etats-Unis et la France, pour la population couverte, ainsi que l’Allemagne et le Japon.

En France, en 2010, environ 15 % de la population âgée de plus de 40 ans dispose d’un contrat dépendance.

Aux Etats-Unis, cette proportion est bien moindre, à raison de 5 %.

S’agissant de la « part de marché », la part du financement de la dépendance par des assurances privées est faible dans tous les pays de l’OCDE, à l’exception des Etats-Unis, où 7 % des dépenses de dépendance sont ainsi couvertes, ainsi que du Japon (5 %) et de l’Allemagne (1,8 %).

Comme on le verra, la situation de l’Allemagne est particulière, car l’assurance privée en matière de dépendance fonctionne comme le régime public. Elle couvre, dans le cadre d’une obligation qui incombe aux caisses privées, les personnes qui ont exercé leur préférence pour une assurance maladie privée.

Les assureurs ont partout développé deux types de produits d’assurance : l’un forfaitaire, avec une prestation versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions prévues par le contrat ; l’autre dite « indemnitaire », avec un dédommagement des dépenses encourues au titre des soins de longue durée.

Le modèle indemnitaire domine aux Etats-Unis, au contraire de la France où c’est le forfaitaire qui l’emporte.

Au Royaume-Uni, les assureurs proposent deux types de plans :

– les plans pour des soins immédiats (Immediate Care Plans ou Immediate Needs Annuities), dans le cadre desquels le bénéficiaire, après avoir versé une somme déterminée notamment en fonction de son âge, de ses besoins et de son état de santé, recevra une somme mensuelle fixe jusqu’à la fin de ces soins qui peut correspondre avec son décès ;

– les plans fondés sur un bien immobilier (Equity Realease Plan), le bénéficiaire se voyant accorder un prêt garanti par le bien immobilier dont il est propriétaire et la garantie jouant éventuellement après décès.

Sans même avoir à mentionner les difficultés inhérentes aux particuliers pour ce type de plan (difficultés de financement pour les uns, conscience insuffisante des enjeux pour les autres en l’absence d’obligation d’affiliation), la difficulté tient aussi à l’absence de modèle de financement suffisamment robuste pour assurer spécifiquement la dépendance.

Comme l’observent ainsi les auteurs du rapport de l’OCDE à propos des Etats-Unis :

– les contrats d’assurance privée ne couvrent pas toutes les dépenses de dépendance, mais offrent un paquet pré-défini des prestations, avec des plafonds dans la garantie. Il y a donc une réduction partielle et non totale de l’incertitude pour le bénéficiaire ;

– les personnes modestes choisissent en général les options les moins coûteuses des contrats, celles qui correspondent aux prestations futures les plus limitées, et le risque couvert reste ainsi faible pour elles ;

– la fixation des primes en fonction du risque et non du revenu fait que les contributions demandées aux personnes modestes ne peuvent être que comparativement très élevées, s’il n’y a pas de mécanisme d’aide publique.

Le premier point est particulièrement important car les limitations de garanties sont le reflet de l’impossibilité en l’état de définir des modèles assurantiels pleinement satisfaisants.

La difficulté tient, en effet, à ce que la dépendance peut se traduire, de manière incertaine, à une date et pour une période qui ne le sont pas moins, par des prestations d’un niveau de coût extrêmement élevé et sans qu’il existe en l’état aucune capacité de prévoir le risque, ce qui impose de prévoir des contrats à prestations limitées et qui restent en tout état de cause très coûteux.

Face à l’augmentation prévisible du nombre de personnes dépendantes, l’enjeu essentiel pour les Etats est de maintenir une offre de services suffisante et adaptée, d’assurer la viabilité financière du système de prise en charge et d’optimiser au maximum leur rapport coût efficacité.

Ces éléments ont été constatés tant par l’OCDE que par le Centre d’analyse stratégique.

La question du maintien à un niveau suffisant, sans pénurie, d’une l’offre de soins adaptée se pose dans tous les Etats.

Il s’agit de faire face à une éventuelle insuffisance de l’offre, dans les années futures.

Cette crainte d’un care déficit n’est pas partagée, notamment par le rapport précité du Conseil d’analyse stratégique.

Il y a notamment une incertitude sur l’évolution du nombre de personnes dépendantes dans le futur. D’un côté, on vieillit davantage, mais aussi mieux. De l’autre, on survit mieux qu’autrefois à certaines pathologies graves, mais dans des conditions qui exigent cependant des soins. Enfin, il y a la question des conditions réelles du vieillissement futur des personnes obèses, en nombre croissant dans les pays de l’OCDE et en Europe.

L’OCDE constate par ailleurs que cette question du risque de care deficit est indépendante de celle des modalités, publiques ou privées, de financement de l’accès aux prestations.

C’est la conséquence de ce que le secteur des services liés à la dépendance est un secteur de main d’œuvre, et que la question clef est celle de la capacité à disposer d’une main d’œuvre qualifiée en nombre suffisant.

Cette question de la main d’œuvre se règle d’ailleurs actuellement « de fait » dans certains cas, avec le recours à l’immigration clandestine tant pour des raisons de « souplesse » vis-à-vis du droit du travail que pour des raisons de coût.

Actuellement, la part du secteur de la dépendance dans la population active est de l’ordre de 1 à 2 %. Cette proportion devrait doubler d’ici 2050.

A défaut de disponibilité suffisante en main d’œuvre, la pression à la hausse des salaires et des prix des prestations sera très élevée.

Aussi l’OCDE recommande-t-elle pour les solutions à mettre en œuvre, deux orientations.

La première d’entre elles consiste à améliorer l’assistance aux aidants familiaux, qui sont la base de la prise en charge matérielle de la dépendance dans les pays de l’OCDE.

Le rapport précité observe de manière pragmatique l’intérêt de prévoir des prestations en espèces aux bénéficiaires de soins, leur permettant de disposer d’une souplesse dans l’utilisation des aides, même s’il faut éviter que les aidants ne se retrouvent « piégés » dans des emplois peu rémunérés, ainsi que, dans le cadre du droit du travail, les dispositions permettant un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, et des services de soutien.

La deuxième orientation vise à renforcer les possibilités de recrutement de main d’œuvre pour le secteur formel, celui des professionnels de la prise en charge de la dépendance.

Les auteurs du rapport préconisent à cet égard trois pistes :

– l’élargissement des sources de recrutement, avec notamment le recours aux migrants ;

– la fidélisation du personnel pour réduire un turn over actuellement très élevé, en créant les conditions d’une amélioration des rémunérations dans le secteur ;

– la recherche de moyens permettant d’accroître la productivité du personnel.

Pour ce qui concerne la viabilité financière à long terme des dispositifs de prise en charge de la dépendance, l’OCDE recommande de poursuivre l’objectif d’une couverture universelle, de manière à mutualiser les risques le plus possible et à associer des personnes n’ayant pas les mêmes capacités contributives.

Trois éléments font qu’une telle mutualisation est inéluctable pour garantir le plus possible la viabilité du système à long terme :

– le coût de l’aide à une personne dépendante, qui va croissant au-delà d’un certain âge et devient assez rapidement, et brutalement, très élevé ;

– l’incertitude quant à savoir si une personne sera on non dépendante, car toutes les personnes âgées ne deviennent pas dépendantes. Environ 20 à 25 % de celles qui atteignent 85 ans seront dépendantes ;

– dans l’affirmative, l’incertitude sur le moment où une personne va être dépendante, ainsi que sur la durée de sa dépendance. Si en France l’espérance de vie d’une personne dépendante est de 4 ans, et de 18 mois pour celles en établissement, les variations individuelles sont très fortes.

Le premier élément, celui du coût de la dépendance qui devient très élevé, a été chiffré par le Centraal Planbureau des Pays-Bas et comparé avec la dépense de soins.

Il en résulte que si la courbe des dépenses de soins médicaux augmente avec l’âge, notamment avec le grand âge, celle de dépenses de dépendance croît encore davantage et sans commune mesure.

--- : courbe des dépenses de dépendance selon l’âge

–– : courbe des dépenses de santé selon l’âge

Source : Centraal Bureauplan – Pays-Bas.

Par conséquent, il n’y a pas de modèle fiable de financement de la dépendance et la seule variable sur laquelle on peut jouer est le nombre pour assurer un financement le plus large possible.

C’est pourquoi, dans cette optique, les auteurs du rapport précité de l’OCDE recommandent en outre trois éléments complémentaires pour étayer le financement à long terme des régimes de dépendance :

– une limitation des coûts grâce au ciblage des prestations universelles vers ceux qui ont les besoins les plus élevés, avec soit des critères d’accès stricts à ces prestations, soit le développement d’une participation variable, de la part du bénéficiaire, au financement des prestations qui lui sont délivrées ;

– un élargissement des modalités de financement, grâce à une assiette étendue à d’autres éléments que les prélèvements sur la masse salariale, et le développement de certains éléments de préfinancement ;

– un développement d’instruments financiers adaptés, comme par exemple un financement hypothécaire pour les personnes dépendantes propriétaires de leur logement.

Sur ce dernier point, on observe que des formules existent déjà. Au Royaume-Uni, des assurances privées proposent déjà un dispositif d’Equity Release Plan, dans le cadre duquel les prestations de dépendance sont partiellement financées par des prêts hypothécaires garantis par des biens immobiliers. Après le décès du bénéficiaire, l’assureur se rembourse à hauteur de sa créance, capital et intérêts, grâce à la vente du bien.

L’OCDE recommande également d’accroître l’efficacité de la délivrance des prestations, selon trois voies.

La première vise à favoriser le maintien à domicile, et la prise en charge de la proximité, moins coûteuses que le placement en institution, et à développer en tout état de cause la coordination entre les différents intervenants de manière à éviter les doublons.

La deuxième vise à améliorer la productivité des services liés à la dépendance, notamment avec le développement des allocations financières permettant de faire jouer la concurrence par le libre choix des prestataires.

On ne peut cependant qu’être sceptique sur cette solution, dans la mesure où le secteur de la dépendance est essentiellement un secteur de main d’œuvre.

Certes, il existe des possibilités de recours aux nouvelles technologies, à la robotique, et le Japon en est un excellent exemple, mais celles-ci restent cependant en grande partie limitée par le fait que pour le très grand âge, là où les prestations sont très coûteuses, le contact personnel et la présence humaine restent essentiels.

La troisième ne concerne pas la dépendance proprement dite, mais relève de la santé publique, en encourageant le vieillissement en bonne santé.

Cela rejoint les politiques de prévention et plus généralement, les politiques de santé publique qui visent l’objectif d’un vieillissement en meilleure santé possible.

DEUXIÈME PARTIE :
TROIS PAYS CARACTÉRISTIQUES

I. LES PAYS-BAS ET L’ALLEMAGNE : DEUX ETATS QUI ENGAGENT DANS L’ENSEMBLE DES SOMMES COMPARABLES

En Allemagne, le régime de perte d’autonomie au sens large, y compris le handicap et les pathologies psychiatriques, correspond à un effort public ou privé à caractère obligatoire, de l’ordre de 25 milliards d’euros.

D’une part, le régime obligatoire contre la perte d’autonomie engage de l’ordre de 22 milliards d’euros, dont 19,5 pour les caisses publiques et 2,5 pour les caisses privées, et, d’autre part, les dépenses d’aide sociales des communes sont de l’ordre de 2,7 milliards d’euros.

Si l’on ne tient compte que des personnes dépendantes, on obtient un ordre de grandeur d’environ 15 milliards d’euros.

Les coûts des investissements des Länder ne sont pas pris en compte, faute d’avoir été communiqués.

Aux Pays-Bas, les sommes engagées sont comparables, pour une population il est vrai bien moindre : 16,6 millions d’habitants contre 82,2 en Allemagne.

Pour ce qui concerne l’AWBZ, régime public obligatoire qui couvre non seulement la dépendance, mais également le handicap et les maladies psychiatriques, la dépense est de 22 milliards d’euros, avec une estimation de 11 milliards d’euros pour les personnes âgées dépendantes et parmi cette enveloppe, 3 milliards d’euros pour les prestations à domicile.

Il faut ajouter les dépenses à charge des collectivités locales, depuis le transfert de compétences opéré en 2007 dans le cadre de la loi WMO sur le soutien social. Cette somme est estimée à 1,7 milliard d’euros en 2010. On obtient donc une enveloppe totale de l’ordre de 13 milliards d’euros pour les Pays-Bas.

Les dépenses couvertes par l’assurance maladie ne sont pas prises en compte dans ces éléments. Néanmoins, faute de certitude quant à la coïncidence de ces différents périmètres, il faut se garder de prendre en compte ces éléments comme plus précis que de simples ordres de grandeur.

II. LA CRÉATION RÉCENTE, EN 1995, D’UN « CINQUIÈME  RISQUE » OBLIGATOIRE SPÉCIFIQUE, MAIS ADOSSÉ À L’ASSURANCE MALADIE : L’ALLEMAGNE

En Allemagne, la dépendance fait l’objet d’une branche spécifique au sein des organismes de sécurité sociale.

En effet, la loi de 1995 a créé en leur sein un « cinquième risque ». Celui-ci fait l’objet d’une section séparée au sein du code social (Sozialgesetzbuch), l’assurance dépendance ou SPV (Soziale Pflegeversicherung).

L’objectif a été de mettre fin à la situation antérieure où la prise en charge de la dépendance reposait essentiellement sur les familles, avec le recours éventuel à l’aide sociale des Länder et, surtout, des communes.

Le dispositif de 1995 a connu une réforme en 2007, avec la loi relative au développement structurel de l’assurance dépendance, entrée en vigueur au 1er juillet 2008.

Celle-ci a notamment accru le taux de cotisation, prévu diverses modalités d’amélioration de l’information, créé un mécanisme de coordonnateur et également créé des droits à congé pour les aidants familiaux, en vue de faciliter le maintien à domicile.

L’assurance dépendance est en Allemagne étroitement liée à l’assurance maladie.

Chaque caisse d’assurance maladie a, en effet, l’obligation de créer une caisse dépendance, autonome par rapport à elle. L’affiliation à l’assurance maladie implique une affiliation automatique à l’assurance dépendance.

Cette obligation vaut tant pour le régime public obligatoire, que pour les caisses privées d’assurance maladie, qui peuvent être choisies en Allemagne au-delà d’un certain niveau de revenu. C’est au-delà de 48 150 euros annuels que les Allemands peuvent opter non pas pour le régime légal, mais pour des caisses privées, et agréées, d’assurance maladie.

La distinction entre caisse publique et caisse privée n’a aucune conséquence en matière de dépendance. C’est en effet un régime obligatoire légal et les caisses privées doivent assurer la dépendance dans les mêmes conditions de prestation et de prélèvement que l’assurance publique.

Depuis 2008, le dispositif est parfaitement universel, puisque les rares inactifs qui ne l’étaient pas antérieurement sont obligatoirement affiliés à une caisse d’assurance maladie et donc à une caisse dépendance.

Comme l’affiliation à l’assurance dépendance est intrinsèquement liée à l’assurance maladie et que l’essentiel des allemands sont affiliés au régime public, seuls une minorité, à savoir 9 millions de personnes et 9 % de la population, dépend des caisses privées. L’immense majorité, à savoir 70 millions de personnes, est couverte par le régime public.

Le choix est opéré en fait sur l’assurance maladie, comme on l’a vu.

Le cinquième risque repose en Allemagne sur une conception large, indépendante de tout critère d’âge.

Les personnes pouvant bénéficier des prestations du régime sont définies comme celles souffrant de handicap physiques, psychiques ou mentaux exigeant durablement, c'est-à-dire pour une période d’au moins six mois, une aide importante pour accomplir les gestes de la vie courante. Ces besoins d’assistance recouvrent les domaines de l’hygiène personnelle, de l’alimentation et de l’entretien ménager.

Trois niveaux de dépendance sont distingués selon l’ampleur des besoins à couvrir : le niveau I (dépendance importante) ; le niveau II (dépendance lourde) ; le niveau III (dépendance très lourde).

Le niveau de dépendance le plus élevé, le niveau III, fait l’objet d’une décomposition avec une catégorie particulière dite III H-F (Härtefälle), celle des personnes ayant besoin d’aide au moins 7 heures par jour, dont 2 heures la nuit, ou qui ont besoin de soins de base exigeant la présence d’au moins deux personnes.

L’évaluation du bénéficiaire des prestations incombe au service médical de la caisse d’assurance maladie concernée.

Depuis la réforme entrée en vigueur en 2008, chaque bénéficiaire a en outre droit une fois par an au moins à un conseiller dépendance, interlocuteur unique des assurés.

Les caisses de l’assurance dépendance sont financées, de même que les caisses d’assurance maladie, par cotisations sociales.

Le niveau des cotisations est actuellement de 1,95 % du salaire pour les personnes avec enfant, et de 2,20 % pour les personnes sans enfant.

La répartition des cotisations se fait à égalité entre employeur et employés, soit un taux de 0,975 %. La prise en charge de la part patronale a eu pour contrepartie la suppression d’un jour férié, dans quinze Länder. Dans le seizième, la Saxe, le principe du partage paritaire de la contribution a été rompu, avec une part salariale représentant 80 % du total et une part patronale s’établissant à 20 %.

La majoration est justifiée par la nature du régime, qui est un régime de solidarité entre les générations, dans la limite d’un plafond.

Il n’y a pas de possibilité d’interruption du paiement des cotisations. En cas de perte d’emploi, le versement est poursuivi dans le cadre de l’indemnisation du chômage.

Par ailleurs, en cas de changement d’employeur et de caisse, les droits acquis sont automatiquement transférés.

L’équilibre financier du régime de dépendance a été jusqu’ici préservé grâce à trois éléments.

A l’origine d’abord, lors de la mise en place du régime en 1995, une réserve a été constituée, puisque trois mois de cotisations ont été prélevés sans versement d’aucune prestation correspondante.

Ensuite, le niveau des cotisations a été substantiellement relevé, puisque le taux était de 1 % à l’origine et qu’il a été doublé depuis lors. En même temps, le montant des prestations versées a été en partie maîtrisé, grâce à la stabilité de la grille des prestations.

Enfin, les prestations versées au titre de l’assurance légale ne couvrent qu’une partie de l’effort public en faveur de la dépendance. En effet, les Länder et les communes continuent à intervenir.

Le tableau suivant récapitule les termes de cet équilibre depuis 1995.

Evolution financière du régime d'assurance-dépendance publique

Mds€

 

1995

2000

2005

2006

2007

2008

Recettes

8,41

16,54

17,49

18,49

18,02

19,77

Dépenses

4,97

16,67

17,86

18,03

18,34

19,14

Solde

3,44

- 0,13

-0,37

0,46

-0,32

0,63

Source : Ministère fédéral de la Santé BMG.

Pour ce qui concerne les assurances privées dépendance, les primes sont fixées librement par les compagnies, mais elles ne peuvent cependant dépasser le montant de la cotisation au régime légal.

En raison de l’ancienneté et de l’ampleur de la baisse de la natalité en Allemagne à partir du début des années 1970, la proportion des plus de 65 ans et des plus de 80 ans est en Allemagne particulièrement élevée, à raison respectivement de 20,4 % (en 2010) et 5,1 % (en 2008).

Le ratio de dépendance s’établit pour sa part à 30,8 % en 2010.

L’effort en faveur de la dépendance apparaît limité, à raison de 0,89 % du PIB en 2010.

Les prestations dont bénéficient les personnes qui souffrent d’une perte d’autonomie, non seulement les personnes âgées dépendantes, mais aussi les handicapés, sont versées selon un tarif, qui dépend du type de prestation et du niveau de dépendance.

Ce tarif en est actuellement le suivant.

Montants des prestations monétaires ou en nature versées
par l’assurance dépendance en Allemagne

(en euros)

 

Prise en charge à domicile

Prise en charge en institution

 

Prestation monétaire

Prestation en nature

Temps partiel

Temps complet

Niveau I

225

440

440

1 023

Niveau II

430

1 040

1 040

1 279

Niveau III

685

1 510

1 510

1 510

Niveau III H-F

(cas spécifiques)

 

1 918

 

1 825

Source : AOK.

Pour les cas les plus lourds, les caisses de dépendance peuvent assurer une prise en charge supplémentaire, dans la limite de 2 400 euros par an.

Cette prise en charge forfaitaire n’assure donc qu’une couverture partielle des coûts.

Pour les soins à domicile, ceux-ci peuvent être versés soit en nature, soit en espèces.

Il est possible de procéder à une combinaison des deux.

En outre, dans la limite d’un plafond, de 2 557 euros, les caisses d’assurance dépendance peuvent également prendre en charge les dépenses d’aménagement du logement.

En raison du caractère forfaitaire des versements des caisses dépendance, les frais qui restent à la charge des bénéficiaires sont importants.

Il en résulte donc la nécessité de faire appel, souvent, aux financements complémentaires des communes dans le cadre de l’aide sociale.

Les Länder interviennent en matière de dépendance essentiellement pour le financement des établissements publics, notamment des coûts d’investissement.

Jusqu’à la réforme de 1995, l’essentiel des dépenses de dépendance était assuré par les communes. Les sommes qu’elles versaient au titre de l’aide sociale (Sozialhilfe) concernaient, en effet, 80 % des personnes dépendantes.

Depuis 1995, leur rôle est devenu subsidiaire. Il reste cependant essentiel, car 30 % encore des personnes bénéficiant de prestations à domicile et 50 % de celles faisant appel à des prestations en établissement sollicitent encore le bénéfice de l’aide sociale.

Le coût de la dépendance est cependant de l’ordre de 2,7 milliards d’euros pour les communes, comme on l’a vu.

La logique de l’intervention des communes en Allemagne est bien celle de l’aide sociale, avec, d’une part, un examen du patrimoine de la personne qui évite d’avoir à se poser la question d’un éventuel recours ex post sur succession et, d’autre part, si nécessaire, mais de manière assez théorique, l’appel aux obligés alimentaires.

La commune examine ainsi l’adéquation entre les besoins et les services pris en charge mais aussi s’assure de la mobilisation préalable des ressources du demandeur, notamment son capital qui n’est donc pas réalisé ex post dans le cadre d’un recours sur succession mais ex ante, avant que l’intéressé ne puisse bénéficier d’une aide d’action sociale. Une exception peut être faite pour un logement principal, d’une taille adaptée, si sa vente entraînerait une entrée en établissement plus onéreuse qu’un maintien à domicile.

La loi précitée de 2008 a créé deux dispositions en faveur des aidants familiaux, en créant la possibilité de prendre un congé pour s’occuper d’un parent dépendant.

Il s’agit, d’une part, du congé de soutien familial (Familienpflegezeit). Celui-ci permet aux employés des entreprises de plus de quinze salariés, de prendre un congé non rémunéré pour s’occuper d’un parent dépendant, pour une période pouvant aller jusqu’à six mois.

Pendant ce congé, les droits sociaux sont maintenus pour ce qui concerne le risque maladie et le risque dépendance.

Pour ce qui concerne la vieillesse, le salarié en congé peut continuer à se constituer des droits par versement de cotisations volontaires.

D’autre part, la législation allemande reconnaît un deuxième droit à congé, d’une durée plus limitée, de dix jours, pour faire face aux situations d’urgence.

Ce congé est universel, car il s’applique à tous les salariés indépendamment de la taille de l’entreprise.

Il permet de s’absenter dix jours à ceux qui sont confrontés à un cas de dépendance soudaine dans leur famille. C’est un congé non renouvelable, pendant lequel la couverture maladie et la couverture dépendance restent assurées.

Il permet en pratique aux personnes qui prennent ce congé soit de trouver une solution, soit de prodiguer eux même les soins à titre temporaire.

A partir du 1er janvier 2012, est prévu l’entrée en vigueur du dispositif du nouveau congé Familienpflegezeit, qui devrait permettre au salarié de réduire temporairement son temps de travail sans que son niveau de rémunération diminue en conséquence, à charge pour lui ensuite de travailler de nouveau à temps plein, mais avec une rémunération réduite, jusqu’à que l’écart initial soit compensé.

Le temps de travail minimum serait de quinze heures par semaine. La durée du congé serait de deux ans. Les modalités de mise en œuvre du congé, et de récupération, sont prévues pour être très flexibles et définies individuellement, entre le salarié et l’employeur.

Un système de prêt sans intérêt est prévu au profit de l’employeur, pour qu’il puisse continuer à verser un salaire plus important que celui correspondant aux heures de travail.

Destinée à satisfaire la demande des quelque 65 % de salariés qui souhaitent s’occuper de leurs proches, la loi ne fournit cependant qu’un cadre dont les partenaires sociaux doivent définir les modalités d’application.

Selon les éléments communiqués à la rapporteure à Berlin lors de son déplacement, aucune perspective d’accord n’était en vue.

Afin d’éviter la perte de droits à la retraite, l’assurance dépendance verse des cotisations retraites pour tout assuré qui soigne un parent dépendant à titre non professionnel pendant une durée de 14 mois au moins.

La montant des cotisations sociales versées est plafonné à 0,75 point par an, et dépend du degré de dépendance de la personne soignée, ainsi que du maintien ou non d’une activité rémunérée.

Le bénéfice de la réduction d’impôt pour les services à domicile est en Allemagne facilité depuis 2010, pour les personnes dépendantes. Le dispositif a été déconnecté de celui de l’accès au bénéfice de l’assurance dépendance.

Il n’est pas non plus tenu compte d’une éventuelle allocation dépendance.

La priorité au maintien à domicile a été clairement affirmée par la réforme de 2007.

Celle-ci prévoit pour encourager cette solution, une amélioration de l’information des proches des personnes dépendantes, avec la mise en place de Points de soutien à la dépendance (Pflegestützpunkt). Ces centres sont cofinancés par les communes et les caisses d’assurance-dépendance. Leur implantation dépend néanmoins des Länder, et le programme a pris sur ce point quelque retard.

En 2007, sur les 2,25 millions de personnes percevant des prestations de l’assurance dépendance obligatoire, les deux tiers, soit 1,8 million étaient prise en charge à domicile.

Le graphique suivant en donne le détail.

Mode d’hébergement et de soins des personnes dépendantes selon le degré (I à III) en 2007
(2,5 millions de personnes dépendantes, dont 1,54 million – 68 % – à domicile)

La prise en charge à domicile permet le libre choix du patient entre des allocations financières et des prestations en nature.

Le niveau des prestations monétaires est, comme on l’a vu, de 225 euros par mois pour le niveau I, de 430 euros pour le niveau II et de 685 euros pour le niveau III.

Les équivalents monétaires des prestations en nature correspondantes sont plus élevés, à raison de 440 euros, 1 040 euros et 1 510 euros par mois, respectivement.

En outre, pour le niveau de dépendance le plus élevé, le niveau III HF, celui des cas particuliers, la contrepartie des prestations est estimée à 1 918 euros par mois.

Les prestations correspondantes sont les suivantes : soins corporels, nourriture, mobilité, pour les soins de base. S’y ajoutent également, le cas échéant, les soins ménagers.

En outre, les caisses de dépendance peuvent prendre en charge des frais d’adaptation du domicile, jusqu’à une somme de 2 557 euros.

Pour aider les personnes dépendantes et leurs proches, les caisses d’assurance ont l’obligation de donner comme correspondant à chaque bénéficiaire ou à son entourage un conseiller dépendance (case manager).

Celui-ci est l’interlocuteur unique des assurés pour l’ensemble de la question.

Il doit être en relation avec les assurés au moins deux fois par an, et même quatre fois par an pour les personnes dépendantes de niveau III.

L’objectif est notamment de permettre une meilleure intégration et coordination des soins et des prestations, en particulier de développer les liens entre les soins ambulatoires, les programmes de réadaptation et les institutions médicalisées. Les conseillers dépendance interviennent également lors des sorties de milieu hospitalier.

Les conseillers dépendance sont également en relation avec les aidants.

Pour ce qui concerne le placement en institution, l’Allemagne offre trois types d’hébergement. En 2007, environ 710 000 personnes étaient ainsi placées.

Il s’agit, d’une part, des maisons de retraite Altenwohnenheim, formule qui permet une vie autonome en appartement, avec des services collectifs, tels que les repas en commun, d’autre part, des Altenheim, avec des prestations de la vie quotidienne plus développées ainsi que des soins, et, enfin, des centres médicalisés ou centres de soins (Pflegeheim).

Dans le cadre d’une politique d’ailleurs plus large visant à maintenir le tissu social, l’Allemagne développe depuis plusieurs années des établissements faisant cohabiter les différents âges, notamment les « maisons à plusieurs générations » (Mehr-Generationen-Haüser).

Depuis 2008, les groupes résidentiels permettent aux personnes qui partagent la même résidence de regrouper leurs demandes de prestation en nature et de demander de manière conjointe des prestations pour les soins de base et les tâches domestiques. L’intérêt pour les professionnels est de dégager du temps supplémentaire pour délivrer les soins.

L’une des questions les plus délicates est celle du coût. Selon le ministère fédéral de la santé (2008), le reste à charge est en moyenne de 580 euros par mois, en cas de placement en institution, avec d’importantes disparités régionales selon le niveau d’implication des Länder.

La loi sur les centres de soins (pour personnes âgées) prévoit plusieurs obligations.

Il s’agit d’abord d’une obligation en termes de personnel d’encadrement. Pour être agréé, un opérateur doit ainsi garantir qu’il dispose d’un « nombre suffisant » d’employés qualifiés et qu’au moins la moitié des soignants sont des soignants diplômés. Cela est concrétisé dans les conventions conclues entre les centres de soins et l’association des caisses d’assurance dépendance de chaque Land. Ces conventions définissent des taux d’encadrement en fonction des niveaux de dépendance.

Il s’agit également d’obligations en termes sanitaire et de traitement des personnes.

La loi précitée prévoit d’ailleurs que chaque centre doit être contrôlé une fois par an. Ce sont les services sociaux des Länder qui en sont compétents et la régularité de ces examens varie d’un Land à l’autre.

La grille de contrôle prévoit plusieurs critères, et un regroupement selon les éléments suivants : logement, soins, services domestiques et hygiène.

Les rapports correspondants sont rendus publics.

Lors de ses travaux à Berlin, la rapporteure a pu se rendre compte que les résultats d’évaluation sont en général plus sévères que l’opinion qu’ont les patients des établissements dans lesquels ils sont hébergés.

Par ailleurs, un peu plus des trois quarts des centres de soins ont mis en place des systèmes de gestion de la qualité, avec des contrôles externes réguliers, des services des réclamations ou des chargés de qualité.

Enfin, la Fondation allemande de l’aide aux personnes âgées a développé un système de rapport de fautes (Critical Incident Reporting-System (CIRS)) qui est mis à la disposition des centres de soins et des aides-soignants eux-mêmes. Ils ont ainsi la possibilité de communiquer - de manière anonyme - à tous les utilisateurs du système les anomalies constatées lors de leur travail. Ces rapports ne font toutefois pas l’objet d’un suivi obligatoire

En dépit du caractère récent de la réforme de 2007, des réflexions sont en cours en Allemagne, pour permettre au système de trouver ses équilibres de long terme.

Sur le plan financier, plusieurs hypothèses sont en cours de discussion :

– la hausse des cotisations, et une base de financement élargie ;

– l’accroissement de la sélectivité des critères pour le premier niveau de dépendance ;

– un délai de carence, éventuellement couvert par une assurance privée, avant l’accès au dispositif public.

La question de l’évolution de la grille des prestations est également posée.

Dans l’ensemble, le sujet est assez consensuel, sauf sur l’hypothèse, très controversée, de l’introduction d’un certain niveau de capitalisation dans le dispositif, proposée par le Dr Philip Rössler, alors ministre fédéral de la santé.

Un grand nombre d’Allemands et d’élus jugent un tel élément contraire au principe de solidarité qui est à la base de l’actuel dispositif.

III. UN RÉGIME ANCIEN REPOSANT DORÉNAVANT SUR UNE FORTE IMPLICATION DES COMMUNES : LES PAYS-BAS

Aux Pays-Bas, la prise en charge des personnes ayant des pertes d’autonomie a été prévue assez tôt, dès 1968, par la loi générale sur les dépenses exceptionnelles dite AWBZ (Algemene Wet Bijzondere Ziektekosten).

Cette loi a été destinée à compléter pour les risques lourds réputés non assurables le dispositif de l’assurance maladie, selon des dispositions d’application universelle.

La conception de la perte d’autonomie retenue dans le cadre de l’AWBZ est large, puisqu’elle concerne, sans condition d’âge, tant la dépendance des personnes âgées, au sens français, que le handicap physique ou mental, et les maladies psychiatriques chroniques.

En 2008, 588 000 personnes ont bénéficié de l’AWBZ, soit 3,6 % des 16  millions d’habitants que compte le pays.

Un peu moins de 400 000 sont des personnes âgées de 65 ans ou plus.

La proportion des plus de soixante cinq ans est de 15,3 % en 2010. La part des plus de 85 ans s’établit à 3,9 % pour 2008.

Pour sa part, le ratio de dépendance est de 22,9 % en 2010.

La dépense correspondante pour les personnes âgées dépendantes au titre de l’AWBZ s’est établie en 2007 à 4 % du PIB au total, dont 2,5 % au titre des personnes âgées dépendantes.

Globalement, l’effort des Pays-Bas pour le sanitaire est très élevé la proportion de la main d’œuvre employée dans le secteur étant très importante, à raison de 16 % de la population active et de 7 % de la population active pour le seul secteur de la perte d’autonomie.

C’est un effort très largement facilité par la situation économique des Pays-Bas, qui sont le pays de l’Union européenne dont le PIB par tête est le plus élevé, si l’on excepte le cas très particulier du Luxembourg.

Avec en 2010 un indice de PIB par tête en parité de pouvoir d’achat à 134, le pays dispose d’un revenu moyen supérieur d’un tiers à la moyenne communautaire.

Le système des Pays-Bas est dans l’ensemble à l’opposé de celui de l’Allemagne et de nombreux autres Etats : le financement de la dépendance se fait pour l’essentiel par l’impôt ; des contributions réelles, mais sommes toutes limitées des bénéficiaires, sont prévues.

A l’opposé, le financement par les cotisations sociales ou l’impôt de sommes forfaitaires, laisse aux personnes dépendantes et à leur proche un « reste à charge » important.

De 1968 à la réforme de 2007, l’AWBZ a seule assuré la prise en charge de l’ensemble des personnes dépendantes, aussi bien pour les séjours en établissement que pour les soins à domicile, dans un cadre large couvrant aussi bien le sanitaire que le social et le médico-social.

Le périmètre de l’AWBZ n’a pas cessé d’évoluer depuis son origine. Au socle initial, en effet, des éléments nouveaux ont été ajoutés.

En 2007, l’opération inverse a été amorcée, avec, dans le cadre de la loi WMO, le transfert d’une partie des compétences sur les communes. Ce point est évoqué plus en détail au 3) ci-après.

L’AWBZ a donc été recentrée sur la seule prise en charge sanitaire des personnes souffrant de pathologies lourdes.

Cette réforme est intervenue dans le cadre plus global de la réforme des régimes sociaux aux Pays-Bas, avec l’entrée en vigueur en 2006 de la réforme de l’assurance maladie et la mise en place du Zvw (Zorgverzekeringswet) en remplacement de l’ancien Ziekenfond.

Le financement est assuré par trois éléments avec, en 2007, à hauteur de 70 % de l’enveloppe totale, des cotisations sociales sur les salaires, par l’impôt à concurrence de 22 %, et de co-paiements fonction du revenu du bénéficiaire des prestations, pour le restant, comme l’indique le tableau suivant.

Financement de l’AWBZ en 2007

Financement

 

%

En milliards d’euros

Financement public

Cotisations de sécurité sociale

70

20,8

Budget de l’Etat

22

       

Tickets modérateurs

 

8

1,5

Source : Rapport interministériel d’économies sur les Soins longue durée, 1er avril 2010.

Ce financement correspond à la nature de l’AWBZ qui est une assurance obligatoire universelle et destinée à trois groupes de population : les personnes âgées dépendantes, les personnes handicapées et celles atteintes de maladies psychiatriques chroniques.

Le taux de cotisation est actuellement de 12,15 %, applicable aux premiers 32 000 € des revenus. Seuls les patients de plus de 18 ans payent un ticket modérateur. Cette contribution est proportionnelle aux revenus. Il n’y a pas d’analyse du capital (supprimée en 1997 lors de la réforme de l’AWBZ avec l’entrée des résidences du troisième âge dans le système AWBZ).

En 2010 une participation forfaitaire a été introduite pour la fonction d’accompagnement : 12,6 euros par heure, dans certaines limites. Pour le patient qui reçoit des soins à domicile, le ticket modérateur s’élève en moyenne à 300 euros par an. Pour le patient qui séjourne en institution, la participation forfaitaire obéit à d’autres règles de calcul. Elle s’élève en moyenne à environ 6400 euros par an.

L’articulation de l’AWBZ avec l’assurance maladie, réformée depuis le 1er janvier 2006, dans le cade de la loi sur l’assurance maladie précitée Zvw, se fait selon la distinction du soin (cure) et du soin de long terme (care).

Sur le plan légal, les opérateurs qui interviennent au titre de l’AWZB relèvent de la législation relative à la qualité des soins et sont ainsi soumis à des inspections.

En 2007, les dépenses au titre des prestations de l’AZWB se sont établies à 22 milliards d’euros, dont 20,7 milliards d’euros pour les prestations en nature et 1,3 milliards d’euros pour les prestations en espèces.

L’essentiel des prestations en nature est constitué par l’accueil en établissement, à raison de 14,8 milliards d’euros, le montant consacré aux prestations en nature à domicile s’établissant à 1,3 milliards d’euros.

L’essentiel des personnes relevant de l’AWBZ sont des personnes âgées, mais le nombre des handicapés est également important.

Sur 588 000 personnes traitées au 1er janvier 2008, 391 000 étaient des personnes âgées dépendantes, 113 000 des personnes handicapées et 84 000 des personnes atteintes de maladies psychiatriques chroniques.

Au total, ces 588 000 personnes représentaient 3,6 % de la population des Pays-Bas.

Le bénéfice de l’AWBZ, n’est accessible qu’après évaluation.

Aux Pays-Bas, cette évaluation des besoins individuels relève d’un organisme indépendant placé auprès du ministre de la santé, le centre d’évaluation des soins ou CIZ (Centraal Indicatieorgaan Zorg).

Il procède à une évaluation des besoins, notamment pour déterminer si la personne doit ou non aller en établissement et transmet ensuite son avis au bureau régional de santé compétent.

Les bureaux régionaux de santé ont un rôle clef pour la mise en œuvre de l’AWBZ.

Au sein de chaque bureau régional, un coordinateur de soins doit recueillir l’avis de la personne concernée sur la nature des prestations qu’elle souhaite recevoir (prestations en nature, allocations ou combinaison des deux) et d’organiser sa prise en charge concrète, en liaison avec les professionnels.

Formellement, le ressort de chacun des bureaux régionaux est confié à un seul des assureurs privés intervenant par ailleurs dans l’assurance maladie obligatoire depuis la réforme de 2006.

Alors que pour l’assurance maladie obligatoire Zvw, l’assuré est libre de choisir l’assureur privé de son choix, et peut changer au début de chaque année, tel n’est pas le cas pour l’AWBZ.

Ce monopole territorial, d’ailleurs discuté aux Pays-Bas, peut être considéré d’une manière ambiguë. Il implique pour les bénéficiaires de l’AWBZ d’avoir deux interlocuteurs, l’un pour la dépendance, l’autre pour l’assurance maladie, si l’exercice de leur libre choix fait que les deux assureurs ne sont pas les mêmes. Les financements publics sont donnés par l’Etat aux compagnies d’assurance qui ont les monopoles régionaux. L’opération n’est pas jugée satisfaisante par les compagnies, car elle n’est pas bénéficiaire pour elles. En fait, petit à petit, le système fonctionne avec des listes d’attente. Néanmoins, elles ne demandent pas, selon les éléments communiqués, l’abandon du monopole, qui leur procure certains avantages en matière de stabilisation de la clientèle, vraisemblablement.

Ce sont les bureaux régionaux de santé qui sont en relation avec les prestataires et contractent avec eux.

Ils doivent respecter un certain nombre de règles fixées par l’autorité de santé des Pays-Bas ou Nza (Nederlandse Zoorgautoriteit), notamment celle du tarif maximum.

Ils ne peuvent imposer un prestataire précis au patient, qui a le libre choix. Beaucoup de prestataires relèvent du tiers secteur, à but non lucratif.

Les prestations sans hébergement sont les prestations de soins corporels, les soins infirmiers, les prestations d’accompagnement et de traitement.

Toutefois, le patient qui reçoit des prestations à domicile peut opter pour des prestations financières, plutôt que pour des prestations en nature.

C’est le système du budget personnalisé ou PGB (Persoonsgebondenbudget), qui permet de percevoir une somme correspondant à 75 % du tarif de la prestation, car on estime qu’il peut se fournir de manière plus efficace et que sa démarche permet d’échapper aux frais généraux et frais administratifs divers.

Le système du PGB s’est beaucoup développé. Il a mobilisé une enveloppe de 1,3 milliard d’euros en 2007, avec 26 000 bénéficiaires, dont 20 000 au titre, soit du seul PGB, soit pour les bénéficiaires d’un dispositif mixte avec des prestations en natures pour une partie des prestations totales et le PGB pour le restant.

Le PGB bénéficie souvent aux enfants s’occupant de leurs parents, ou bien aux parents s’occupant de leurs enfants.

Pour les prestations avec hébergement, l’AWBZ est notamment chargée de l’hébergement en établissement, et celui-ci reçoit un « prix de journée » selon l’état du patient, à savoir une allocation définie par patient et par jour, depuis une réforme intervenue en 2009 afin de mettre en place le mécanisme des « paquets de soins selon l’intensité des besoins » dits ZPP (Zorgzwaartepakketen).

Les besoins de la personne dépendante font l’objet d’une évaluation, pour déterminer le « paquet de soins » correspondant. Dix paquets de soins sont définis, allant du ZPP 1 pour une personne qui doit être en établissement mais dont l’état exige peu d’assistance, au ZPP 10 pour les soins palliatifs.

Les tarifs correspondants sont fixés par l’autorité nationale de santé NZa (Nederlandse Zorgautoriteit). Ils sont actuellement compris entre 56,44 euros pour le ZZP 1 hors traitements et 216,92 euros pour le ZPP 2, hors traitements.

La participation du bénéficiaire est toujours exigée, mais plafonnée en fonction de ses ressources. Une personne seule doit toujours bénéficier d’une somme minimale restant à sa libre disposition. Celle-ci est de 276 euros par mois pour une personne seule et 430 euros par mois pour un couple.

A partir de 2007, et dans une optique essentiellement financière visant à limiter les dépenses de l’AWBZ, la loi sur le soutien social dite WMO (Wet Maatschappelijke Ondersteuning) donne la responsabilité de la prise en charge du social et du médico-social aux communes.

Le WMO prévoit le transfert progressif des compétences aux 418 communes, avec d’abord l’aide à domicile, l’autonomie et la participation à la vie sociale des personnes âgées d’abord, dès 2007, et ensuite l’accompagnement prévu pour 2014.

L’objectif est de contenir l’évolution du coût du système de prise en charge des pertes d’autonomie, grâce à une gestion plus fine à l’échelon de proximité.

Les communes sont tenues d’exécuter les dispositions de la loi WMO et doivent notamment mettre en place un guichet unique et établir un plan quadriennal.

L’aide à domicile propose deux types d’aide ménagère pour les personnes qui ont besoin de soutien dans leur vie quotidienne : HH1 (aide purement pour les tâches ménagères) et HH2 (aide aussi pour l’organisation du ménage).

Les communes interviennent soit par la mise à disposition de services, qu’elles acquièrent auprès de prestataires, notamment auprès du secteur non lucratif, soit par versement de subventions aux prestataires.

En 2008, selon des estimations assez approximatives puisque le nombre de celles délivrées au titre du WMO n’est pas établi, mais parlantes, quelques 600 000 prestations individuelles, dont 250 000 prestations à domicile, auraient été servies par les communes.

Les communes peuvent également financer des travaux réalisés au domicile des bénéficiaires, selon les éléments communiqués sur place.

L’optique est différente de celle de l’AWBZ, puisque là où celle-ci avait l’obligation de prendre en charge, les communes ont une obligation de compensation. Les domaines concernés sont la participation des citoyens à la société et la délivrance de services individuels à ceux qui souffrent de leur incapacité.

L’évaluation des besoins de la personne est réalisée par la commune.

Elle concerne donc la capacité de mener un foyer, la capacité de se déplacer dans le domicile et autour de l’habitat, celle de se déplacer au-delà en utilisant les moyens de transport et la possibilité de rencontrer les autres.

Elle tient toujours compte des possibilités de recours au voisinage et à l’entourage.

Les mesures prévues sont toujours individualisées. En pratique, elles concernent la fourniture de services à domicile, d’équipement tels que les fauteuils roulants, les facilités de transport et les aides matérielles au déplacement et à l’aménagement des logements.

Le financement de la WMO repose sur le co-paiement, c’est-à-dire sur la participation des bénéficiaires, ainsi que sur des enveloppes budgétaires de l’Etat accordées aux municipalités sur des critères objectifs, fonction de leur population notamment.

Les communes peuvent en principe conserver l’excédent par rapport au versement de l’Etat. L’objectif est d’inciter les municipalités à limiter leurs dépenses sociales, puisqu’elles peuvent alors utiliser les excédents pour financer d’autres missions.

Néanmoins, leurs instances représentatives rappellent que leur gestion est sous le regard attentif des conseillers municipaux d’opposition, et des associations de bénéficiaires, qui détiennent une forte influence aux Pays-Bas.

Le niveau et les caractéristiques du co-paiement, c'est-à-dire de ce qui incombe aux bénéficiaires, sont laissés à l’appréciation des communes : nature forfaitaire ou non et lien avec le revenu.

En 2007, toutes les municipalités confondues ont reçu un budget total de 1,218 milliards d’euros. Le macro-budget pour les conseils municipaux est établi par le gouvernement central chaque année sur la base d’un avis obligatoire du SCP, calculé selon une règle ajustée au volume et au prix(3). Le conseil municipal a l’obligation de trouver des solutions pour les citoyens qui ont besoin d’aide ménagère. En 2007, 11 % des municipalités ont dépensé plus de 105 % du budget, tandis que 16 % ont dépensé moins de 75 %. Plus de la moitié ont dépensé 75 à 95 % de leur budget. Dans la loi WMO, les co-paiements ont une structure identique à celle de l’AWBZ, mais les conseils municipaux sont libres d’en modifier les modalités (dans la limite du maximum AWBZ). Ils représentaient environ 200 millions d’euros en 2007.

Par ailleurs, les communes sont aidées dans leur tâche, en ce qui concerne l’adaptation du logement. Le parc locatif social représente environ un tiers de l’habitat, et les logements déjà adaptés sont recensés par les bailleurs.

En 2006, le nombre des personnes ayant été en institution, maisons de retraites ou établissements spécifiques, s’est établi à 164 000 contre près de 227 000 pour l’hébergement à domicile.

C’est le résultat d’un choix délibéré au profit du maintien à domicile, car la situation n’était auparavant pas la même.

En effet, après la mise en œuvre de la loi AWBZ, les Pays-Bas ont, de même d’ailleurs que la Suède, fait le choix dans les années 1970 de l’hébergement en institution.

Depuis lors, la tendance s’est inversée et la proportion des plus de 80 ans vivant en résidence est passée de 50 % en 1980 à moins de 20 % aujourd’hui.

Depuis plusieurs années, l’accent est mis sur le maintien à domicile tant pour des motifs financiers que pour répondre aux souhaits des personnes. Un plan d’encouragement en ce sens, pour le période 2007-2011, et intitulé « Mieux chez soi » est d’ailleurs en cours. Il a été présenté conjointement par les ministères de la santé et du logement.

Il repose sur l’augmentation du nombre des logements adaptés avec des aménagements d’accessibilité à l’intérieur et à l’extérieur, lequel devrait passer de 1,5 million en 2006 à 1,9 million en 2015.

Cette politique de maintien à domicile présente un double avantage :

– d’abord, elle correspond aux souhaits des personnes ;

– ensuite, elle est l’un des éléments de la maîtrise de coûts.

En effet, selon les estimations communiquées par le ministère de la santé, les coûts par personne des établissements sont beaucoup plus élevés que s’il y a maintien à domicile, soit dans le cadre d’un domicile adapté, soit dans le cadre de formules intermédiaires.

Les dépenses de l’AWBZ par personne s’établissent à 58 500 euros par an en cas d’hébergement, et à 22 000 euros par an en cas de prestations en nature à domicile.

En tout état de cause, la formule du maintien à domicile avec le budget personne, le PGB, est la moins coûteuse, à raison de 14 500 euros par tête.

Néanmoins, en dépit de cette orientation, le nombre des personnes hébergées en établissement médicalisé (Verpleeghuis) augmente, ainsi que le temps d’attente, car en dépit des efforts pour le maintien à domicile, l’effet du nombre, à savoir de l’augmentation de l’effectif de personnes dépendantes, prime.

D’ailleurs, les personnes qui y entrent sont dans un moins bon état de santé qu’antérieurement, car elles y entrent plus tard.

Bien que l’Etat, et non la famille, soit responsable de la prise en charge des personnes âgées, le rôle des aidants familiaux reste essentiel et s’est même fortement accru ces dernières années.

En 2008, leur nombre était estimé à 1,8 million de personnes, dont 60 % de femmes.

La loi AWZB prévoit différentes dispositions en leur faveur, notamment des systèmes de garde de jour ou de garde de nuit. Celles-ci sont complétées par les obligations qui incombent aux communes depuis la loi WMO de 2007 : informations, groupes de soutien, formules de « répit ».

Selon une évaluation menée en 2010, un tiers des aidants a eu accès à un groupe de soutien et les trois quart ont bénéficié de formules de répit. Neuf sur dix estiment que le dispositif dont ils ont bénéficié est satisfaisant.

Leur indemnisation est possible par l’intermédiaire du PGB alloué à la personne dépendante.

Pour leur part, les communes tiennent également compte du rôle éventuel de la famille et, plus largement, de l’entourage, dans la délivrance des prestations WMO.

Il y a donc aux Pays-Bas une forte volonté d’implication de la famille et de l’entourage.

Aux Pays-Bas, le Bureau central du Plan ou CPB (Centraal Planbureau) est un organisme public indépendant, qui fait des expertises. Il a été créé comme en France le commissariat au Plan, dans l’immédiat après-guerre, pour la reconstruction.

Il évalue notamment les programmes des différents partis politiques à l’approche des élections.

Pour ce qui concerne les dépenses sociales de santé et de dépendance, de cure et de care, le CPB constate que le long terme, depuis 1972, les dépenses de soins augmentent davantage que sous le seul effet du facteur démographique.

S’agissant des dépenses de santé proprement dites, la tendance structurelle à l’augmentation est plus importante que pour les dépenses de dépendance, qui elles suivent davantage, mais pas totalement, la démographie.

Une telle augmentation structurelle pose donc clairement un défi pour le financement à long terme des dépenses liées à l’âge aux Pays-Bas, d’autant que :

– la part des personnes âgées dans la population s’accroît ;

– les dépenses médicales pour chaque individu, augmentent de manière sensible à partir de 55 ans ;

– le coût de la dépendance croît spectaculairement dans les dernières années de la vie.

Pour ce qui concerne plus spécifiquement les personnes âgées les plus fragiles, celles qui ont effectivement besoin de soins, les études sont effectuées aux Pays-Bas par l’Institut pour la recherche sociale ou SCP (Sociaal en culturel Planbureau) .

Elles constatent une forte augmentation de demandes d’hébergement tant en maisons de retraite médicalisées, qu’en maisons de retraite non médicalisées.

Néanmoins, il s’agit là d’une pression du nombre et non de la proportion car jusqu’à 90 ans, la majeure partie des personnes âgées continue à habiter à domicile.

Le deuxième point qui est souligné est l’importance de la gamme des soins qu’exige leur état. En effet, les pathologies des personnes âgées ne sont jamais simples, et les difficultés se combinent souvent les unes aux autres. On est même sur le plan médical dans des situations de multimorbidité.

Dans ce contexte, les actions entreprises en amont en faveur d’un vieillissement en bonne santé sont essentielles.

En 2010, le rapport d’un groupe de travail interministériel sur l’avenir du système des soins de longue durée a été publié.

Quatre voies ont été définies pour tenter de limiter la progression des coûts financés sur fonds publics.

La première repose sur le maintien en l’état du système, avec uniquement l’augmentation du niveau des co-paiements à la charge du bénéficiaire, et en introduisant une prise en compte du patrimoine.

La deuxième tient à un renforcement des transferts de compétence au pilier décentralisé du WMO.

La troisième consiste en un renforcement des prestations en espèces, jugées moins coûteuses dans l’ensemble que les prestations en nature.

La quatrième consiste à tenter d’introduire dans le dispositif les assurances privées, comme cela été fait pour l’assurance maladie Zvw, comme on l’a vu à partir de 2006.

L’un des débats les plus aigus porte actuellement sur la question précise du budget personnel, le PGB.

Les libéraux du VVD sont pour sa réduction. A l’opposé, le parti PVV de M. Geert Wilders, qui a conclu un accord de soutien avec la coalition des libéraux du VVD et des chrétiens démocrates du CDA, est pour sa part favorable à son maintien.

IV. UN DISPOSITIF LARGEMENT SOUS CONDITIONS DE RESSOURCES : LE ROYAUME-UNI

Au Royaume-Uni, la loi de 1990 sur le service national de santé et sur l’assistance (National Health Service and Community Care Act) fait la distinction entre la santé, qui dépend du NHS, et l’assistance, qui dépend des collectivités locales (councils) et qui ont compétence pour l’organisation des soins aux personnes âgées dépendantes. Le rôle des collectivités locales est précisé par le Care Standard Act de 2000 qui règlemente les services sociaux et les travailleurs sociaux.

Elles peuvent délivrer ces soins directement, ou bien faire appel à des prestataires privés.

Dans les faits, le principe reste celui de la prise en charge de la dépendance par les familles et les individus eux-mêmes.

S’il existe une allocation universelle, nationale, l’attendance allowance, attribuée sur une base universelle sans condition de ressources aux plus de 65 ans qui ont besoin d’aide dans leur vie quotidienne, son montant reste faible à raison de 191 livres par mois pour les personnes qui n’ont besoin que d’une assistance de jour, et de 288 livres par mois pour celles qui ont également besoin d’aide la nuit.

Cette aide peut se combiner avec celle mise en place par les collectivités locales, mais qui est placée, elle, sous conditions de ressources.

L’accès aux services délivrés par les collectivités locales est en revanche payant, sauf pour les personnes les plus modestes.

Les conditions de ressources sont très strictes, le patrimoine est pris en considération et les aides sont ainsi limitées aux personnes les plus modestes.

Pour ce qui concerne l’accès aux maisons de retraite, aucune aide n’est prévue si les revenus de la personne, plus ses économies et sa maison (sauf si son partenaire continue d’y vivre) dépassent 22 250 livres sterling. Pour les personnes dont le patrimoine est compris entre 13 500 et 22 250 livres sterling, le montant de l’aide correspond à la différence entre le prix pratiqué par la maison de retraite et les revenus de la personne âgée (pension, allocation…) plus 1 livre de participation pour chaque tranche de 250 livres dans la fourchette du patrimoine.

Au-dessous d’un patrimoine estimé à 13 500 euros, tous les revenus de la personne sont utilisés pour payer la maison de retraite, à l’exception d’une somme de 21,90 livres par semaine pour les besoins personnels.

Il existe également un dispositif de garantie sur le patrimoine. Lorsque l’habitation est prise en compte dans le patrimoine, la personne peut bénéficier d’un accord de paiement différé (deferred payment agreement) qui fonctionne sur le principe d’un prêt accordé par la collectivité locale pour financer la maison de retraite. Le remboursement de la contribution allouée par la collectivité est effectué au moment de la vente de la maison. L’accord reste valable jusqu’à une date fixée par le propriétaire (par exemple parce qu’il a décidé de vendre) ou jusqu’après cinquante-six jours après le décès du propriétaire.

Pour les aides à domicile, les conditions sont fixées localement.

Le dispositif d’ensemble fonctionne ainsi uniquement comme un filet de sécurité.

Plus de 40 % des personnes qui sont admises en maison de retraite semblent devoir assumer seules les coûts de leur placement.

La loi du 8 avril 2010 Personal Care at Home Bill a prévu trois réformes pour améliorer les aides, dans le domaine du maintien à domicile :

– la possibilité pour les collectivités locales de prendre en charge à 100 % les dépenses de dépendance, pour le maintien à domicile des 400 000 personnes qui en ont le plus besoin, au-delà d’un délai de six semaines ;

– la prise en charge accrue des frais de maison de retraite, au-delà de la deuxième année, après 2014.

Selon les éléments communiqués, l’Etat prend en charge via le NHS 27 % du coût de la dépendance, les collectivités locales un peu moins de 40 %, et le reste est à la charge des familles. Depuis le début des années 2000 en effet, le rôle des collectivités locales a décru, et les services privés se sont développés.

Les dépenses publiques se sont élevées à 13 milliards de livres, soit 18 milliards d’euros environ pour 2004/2005, dont 3 milliards pour le NHS. Pour 2008/2009, les dépenses locales sont estimées à 9 milliards de livres.

Compte tenu de ces éléments financiers, le choix est celui du maintien à domicile, avec ainsi 10 383 établissements et 361 164 places d’accueil pour un pays de plus de 62 millions d’habitants.

Il s’agit néanmoins de 32 % des 1,2 millions de personnes dépendantes recensées, ce qui est comme on l’a vu, une proportion comparable aux autres pays.

Ce sont donc les services à domicile qui jouent un rôle essentiel, avec plus de 5 500 agences de soin enregistrées.

En dépit de son caractère très limité, le dispositif d’aide publique n’est également accessible qu’après évaluation.

Une première évaluation est ainsi nécessaire pour l’accès à l’attendance allowance. Elle est réalisée, sans entretien individuel, sur la base d’un questionnaire adressé par le demandeur aux services du ministère du travail (Department of work and pensions – DWP).

Destinée aux seules personnes restant à domicile, le versement de l’allocation est suspendu à partir de la cinquième semaine passée en maison de retraite.

Pour ce qui concerne les aides des collectivités locales (councils), l’évaluation est menée par les équipes médico-sociales de la collectivité concernée, et tient également compte de la situation financière du demandeur.

L’évaluation doit tenir compte non seulement de l’état et de ses difficultés physiques, mais également de ses souhaits. Les conditions de ressources sont très strictes.

Sur la base de cette évaluation, le service social de la collectivité décide ou non d’attribuer des aides prenant en charge tout ou partie des frais liés à la dépendance. Dans l’hypothèse d’une décision d’attribution, un plan (care plan) est proposé à la personne. Il mentionne notamment les coordonnées de la personne à contacter si besoin et les informations sur les démarches en vue d’une éventuelle réévaluation du plan.

En dépit d’une directive nationale, le montant des aides varie fortement d’une collectivité à l’autre, comme on l’a vu.

Ainsi, les prestations de type plateau repas peuvent être facturées sur une base forfaitaire ou au contraire, être fonction des revenus et biens de la personne.

L’accent est mis sur la qualité avec la mise en œuvre de critères, les national minimum standards for care.

En raison du très faible engagement de l’Etat et de l’implication limitée des collectivités locales, le rôle des 4 millions d’aidants informels est au Royaume-Uni essentiel.

Pour une grande partie d’entre eux, c’est une participation exigeante aux soins. 400 000 enfants, dont 65 % des femmes, apportent en effet une aide pendant au moins 20 heures par semaine à leurs parents. 80 % de ceux qui apportent une aide intense ont moins de soixante-cinq ans.

En contrepartie, l’Etat déploie depuis une quinzaine d’années une politique de soutien en leur faveur, la National Strategy for Carers.

Celle-ci repose des mesures concrètes : formation, prestations spécifiques sous la forme de carer’s allowance dont le montant est de 55,55 livres par semaine, ainsi que paiements de prestations directes : direct payment for carers.

Depuis 2010, l’activité est prise en compte pour le calcul des points de retraite, sous la forme d’un carer’s credit. Ce dispositif permet de comptabiliser chaque semaine de plus de 20 heures de soins pour la retraite de base comme pour la retraite complémentaire.

Le Royaume-Uni a décidé en 2009 d’ouvrir une large consultation et réflexion sur la question de la dépendance, avec un Livre vert intitulé Shaping the Future Together.

Le point de départ a été le constat suivant :

– le nombre élevé de personnes qui ne reçoivent aucune aide ;

– le caractère trop tardif des aides publiques, qui ne sont accessibles que lorsque le niveau de dépendance est particulièrement élevé ;

– la variation du niveau de prise en charge et du niveau des soins reçus selon le lieu de résidence ;

– les marges d’amélioration de la coordination des acteurs ;

– la clarification du système, pour sa plus grande adaptation aux personnes.

Le 30 mars 2010, un Livre blanc pour la mise en place d’un National Care Service a été publié par le ministère de la santé, selon l’idée souvent émise d’un socle minimum commun et gratuit.

L’idée est de mettre en œuvre un homologue du National Health Service. Les discussions buttent sur le financement d’une éventuelle assurance obligatoire. L’hypothèse d’une taxe sur les successions ou le patrimoine est évoquée.

TROISIÈME PARTIE :
QUELQUES ENSEIGNEMENTS DES EXPÉRIENCES ÉTRANGÈRES

I. FINANCER LES RÉGIMES PUBLICS : DES APPROCHES PRAGMATIQUES

Dans le choix du financement des régimes de prise en charge public de dépendance, on constate un grand pragmatisme.

En effet, lorsque l’on récapitule d’une manière globale, l’ensemble des dépenses de dépendance indépendamment du payeur, on constate que dans la majeure partie des pays, le financement des dépenses de dépendance se fait de manière diversifiée, associant toute la gamme des financement : l’impôt, à savoir l’Etat et les collectivités territoriales ; les cotisations de sécurité sociale (les régimes sociaux) ; les financements privés, qu’il s’agisse des participations des bénéficiaires, ou des assurance privées.

La répartition de la prise en charge financière des frais de dépendance varie fortement dans les différents pays, comme l’indique le tableau suivant.

Financement des dépenses de dépendance

(en %)

Pays

Etat/coll. pub.

Sécurité sociale

Assurances privées

Bénéfi-

ciaires

Autres

Institutions à but non lucratif

Entreprises

Total

Suisse

11,7

27,1

0,4

58,4

2,4

2,4

0,0

100

Portugal

2,0

51,4

1,1

45,4

 

0,0

0,0

100

Allemagne

12,5

54,7

1,7

30,4

0,7

0,6

0,1

100

Espagne

61,7

10,2

0,0

28,1

 

0,0

0,0

100

Slovénie

18,3

57,1

0,5

24,0

 

0,0

0,0

100

Corée

46,2

30,7

0,0

17,8

5,3

5,3

0,0

100

Autriche

81,1

0,7

0,0

17,1

1,0

1,0

0,0

100

Canada

81,6

0,4

0,4

16,8

0,8

0,0

0,8

100

Finlande

77,2

7,6

0,0

14,2

1,0

1,0

0,0

100

Estonie

48,2

39,3

0,1

12,4

0,0

0,0

0,0

100

Norvège

89,3

0,0

 

10,7

   

0,0

100

Danemark

89,6

0,0

0,0

10,4

 

0,0

0,0

100

Australie

88,9

0,0

0,3

8,5

2,3

0,0

2,3

100

Japon

44,2

44,8

4,0

7,1

 

0,0

0,0

100

Nouvelle-Zélande

92,0

0,0

1,3

4,4

2,3

2,3

0,0

100

Hongrie

60,1

30,2

0,9

2,4

6,4

6,4

0,0

100

Suède

99,2

0,0

0,0

0,8

 

0,0

0,0

100

France

44,8

54,4

0,4

0,4

 

0,0

0,0

100

Pologne

43,1

49,2

0,0

0,3

7,4

7,4

0,0

100

Belgique

31,4

58,7

9,8

0,2

 

0,0

0,0

100

Islande

39,4

60,6

0,0

0,0

 

0,0

0,0

100

République tchèque

30,5

69,5

0,0

0,0

 

0,0

0,0

100

Pays-Bas

9,5

90,4

0,0

0,0

0,1

0,0

0,1

100

 

Source: OCDE Health System Accounts, 2010.

Le graphique suivant reprend ces éléments en classant les pays par ordre croissant de l’intervention publique, Etat, collectivités locales ou sécurité sociale.

On constate que dans les pays européens, la part privée qui incombe aux ménages est particulièrement élevée en Suisse, au Portugal et en Allemagne.

Elle est très faible aux Pays-Bas et en Suède.

A l’origine de ces différences, il y a non seulement le niveau de l’effort public, mais également ses modalités.

La répartition totale des financements entre financement privé et financement public met en jeu deux mécanismes, alternatifs, de limitation des contributions.

Dans un cas, on limite le niveau de l’aide publique, notamment par des versements monétaires forfaitaires. Dans un autre, on limite le niveau de participation du bénéficiaire, avec soit des mécanismes de ticket modérateur, soit, et les deux mécanismes peuvent être couplés, une limitation de l’effort financier personnel demandé au bénéficiaire, de telle sorte qu’il bénéficie toujours d’un niveau minimum de revenu à sa libre disposition.

Deux Etats membres de l’Union européenne, parmi ceux dont des éléments ont été communiqués à la rapporteure, prévoient un niveau de revenu minimum restant à la libre disposition des personnes dépendantes, et ainsi plafonnent le niveau de leur contribution. C’est un plafond mobile qui dépend du niveau des ressources et qui laisse un pécule libre d’utilisation.

En Suède, ainsi, la prise en charge des personnes âgées est financée par les impôts locaux (82-85 %), dans une moindre mesure par les aides de l’Etat (10 %), et de façon résiduelle par les utilisateurs (5-6 %). Selon les derniers chiffres, les dépenses des communes pour les personnes âgées s’élevaient à 87 milliards de couronnes, soit 20 % de leur budget total. La prise en charge à domicile représente 34 % des dépenses, contre 64 % destinées aux maisons spécialisées.

En 2008, la somme payée par un individu pour recevoir une aide à domicile a été plafonnée à 1 640 couronnes par mois (environ 170 euros). Les ressources nettes (après impôt et loyer) dont doit disposer une personne âgée est fixé à 4 421 couronnes (440 euros) pour une personne seule et 3 704 couronnes (350 euros) par personne pour les couples. Les frais sont pris en charge par la commune de manière à ce que ces minima soient respectés. Ainsi, 19 % des personnes âgées qui reçoivent des soins médicaux à domicile n’engagent pas de frais.

Aux Pays-Bas, la participation du bénéficiaire des prestations dépendance est requise, mais un plafonnement intervient de telle sorte qu’une personne seule doit toujours bénéficier de 276 euros par mois, et un couple de 440 euros par mois.

Concrètement, pour l’AWBZ, le bénéficiaire doit verser une contribution proportionnelle aux revenus. Il n’y a pas d’analyse du capital, celle-ci ayant été supprimée en 1997 avec l’entrée des résidences du troisième âge dans le système. Les patients ne doivent donc pas entamer leur capital afin de contribuer personnellement au coût des soins dont ils font la demande.

En 2010 une participation forfaitaire de 12,6 euros par heure a été introduite pour la fonction d’accompagnement.

Pour le patient qui reçoit des soins à domicile, le ticket modérateur s’élève en moyenne à 300 euros par an. Pour le patient qui séjourne en institution, la participation forfaitaire obéit à d’autres règles de calcul. Elle s’élève en moyenne à environ 6400 euros par an.

S’agissant des prestations de la WMO délivrées par les communes, des co-paiements à la charge du bénéficiaire sont prévus et ont une structure identique à celle de l’AWBZ, mais les conseils municipaux sont libres d’en modifier les modalités (dans la limite du maximum AWBZ). Ils représentaient environ 200 millions d’euros en 2007.

Ces mécanismes du plafonnement de la contribution de la personne dépendante restent particulièrement intéressants pour les personnes hébergées en institution.

Lorsqu’en revanche les prestations obéissent comme en Allemagne à un barème fixe, alors le niveau de participation des bénéficiaires peut excéder leurs revenus, ce qui implique soit une décapitalisation, soit des aides familiales ou de tiers, soit, faute d’autre solution, le recours à l’aide sociale.

Pour sa part, la technique du recours sur succession est très peu utilisée.

Elle existe comme on l’a vu au Royaume-Uni, pour un remboursement de la somme allouée par la collectivité. Mais, il faut mentionner que lors de l’évaluation de l’éligibilité d’une personne aux aides sous conditions de ressources, le bien immobilier n’est pas pris en compte si le conjoint y réside.

S’apparentent à cette technique de recours successoral, comme on l’a vu, au Royaume-Uni, les assurances assorties d’une garantie immobilière.

II. ORGANISER ET DÉLIVRER DES PRESTATIONS

Le 29 avril 2010, pendant la Conférence Etat-Régions a été signé le Plan National de la Prévention 2010-2012 qui s’intéresse à différents aspects de la prévention et qui propose des lignes conductrices à suivre avec des préconisations en termes de mode de vie et de comportement sanitaire.

Parmi les facteurs favorisant la dépendance ont été identifiés : une mauvaise alimentation (obésité et surpoids), le tabagisme, l’alcool, une activité motrice insuffisante.

Pendant le Forum de Bologne de novembre 2010 portant sur la prévention de la dépendance, certaines initiatives locales ont été présentées. C’est le cas, par exemple, de la Lombardie, où la Région a signé un accord avec les fournisseurs de pain pour réduire la quantité de sel dans la farine. C’est le cas aussi de villes, comme Vérone, Turin, Lecco et Cuneo qui ont mis en place des groupes de randonnées afin de promouvoir la socialisation et l’activité physique.

Au Danemark, les collectivités locales ont depuis 1998 l’obligation de prévoir des visites domiciliaires pour les plus de 75 ans, de manière à identifier les cas de perte d’autonomie et à exercer une mission d’information et de conseil. Réalisées par des infirmières, ces deux visites annuelles ne sont pas des visites médicales, même si les questions de santé sont aussi évoquées.

En Allemagne, une mesure de renforcement de la prévention après la délivrance de soins médicaux, par des mesures financières en direction des maisons de retraite et des caisses de dépendance, a été instituée.

Il y a d’abord une incitation financière aux maisons de retraite médicalisées (Pflegeheim), lorsqu’elles ont délivré des mesures de rééducation qui ont pour conséquence de réduire ensuite la lourdeur des soins. Le montant de la somme qui leur est allouée est de 1 536 euros.

Ensuite, les caisses d’assurance maladie remboursent aux caisses d’assurance dépendance une somme de 3 072 euros sur les soins délivrés, lorsque aucune mesure de rééducation n’a été nécessaire dans les six mois après l’intervention.

AGE Platform, réseau européen qui regroupe près de 150 organisations de personnes âgées de 50 ans et plus, et a pour vocation de faire connaître et de promouvoir les intérêts des 150 millions de personnes âgées que compte l'Union européenne, a ainsi mentionné, dans ses échanges avec la rapporteure, l’intérêt de pratiques professionnelles dans le cadre desquelles, en liaison avec la médecine du travail, des actions sont entreprises de manière à ce qu’au-delà d’un certain âge, les conditions du bien être et du vieillissement des salariés soient prises en compte.

Ainsi, en Finlande, l’entreprise de travaux publics HKR Tekniikka, met en œuvre un programme spécifique aux salariés âgés, en liaison avec un programme gouvernemental intitulé TYKES.

Ceux-ci sont régulièrement suivis médicalement. A partir de 45 ans, ils passent une visite de contrôle tous les trois ans chez leur médecin de travail.

Au-delà de 56 ans, l’examen devient annuel, de manière à déterminer leur condition physique et mentale et leur aptitude à leur poste.

Les moins résistants peuvent alors poursuivre leur parcours professionnel dans le cadre d’un métier adapté à leurs capacités physiques et à leurs conditions de santé. De plus, les horaires de travail sont plus souples pour les plus de 56 ans qui peuvent profiter de vingt jours de congé en plus.

De telles pratiques relèvent clairement d’une démarche de la prévention de la dépendance, en favorisant le maintien en bonne santé.

La France est l’un des rares pays à avoir un dispositif d’accès à la dépendance avec une condition d’âge, avec l’accès à l’APA à 60 ans. Il est en est de même du Royaume-Uni, où l’accès à l’allocation universelle Attendance allowance, est ouvert à 65 ans.

Dans l’ensemble, ses partenaires européens retiennent une approche plus large.

Aux Pays-Bas, l’assurance obligatoire AWBZ concerne comme on l’a vu non seulement les personnes âgées dépendantes, mais aussi les cas de maladie psychiatrique chronique et le handicap, physique ou mental. C’est la durée des soins qui est décisive pour la prise en charge par l’assurance dépendance.

En Allemagne, le code social (Sozialgesetzbuch) vise les personnes qui souffrent de maladie, de handicap physique, mental ou psychique.

Il n’y a pas non plus de critère d’âge, mais un critère de durée des soins, de plus de six mois, et d’aide importante pour accomplir les gestes de la vie courante.

Ces besoins d’assistance couvrent les domaines de l’hygiène personnelle, de l’alimentation et de l’entretien ménager.

En Espagne, la loi 39/2006 du 14 décembre 2006 de promotion de l’autonomie personnelle définit la dépendance comme le fait de nécessiter l’attention d’une ou plusieurs personnes pour réaliser les activités basiques de la vie quotidienne, en raison de l’âge, de la maladie ou du handicap.

Au Japon, il existe une clause d’âge, mais l’assurance dépendance universelle distingue tant pour le montant des cotisations que celui des prestations, deux classes d’âge : les plus de 65 ans, qui sont la catégorie 1 ; les 40-65 ans, qui représentent la catégorie 2.

En Suède, l’approche ne se fait pas selon la notion de dépendance, mais selon celle de « besoins ».

On distingue divers degrés dans la décentralisation de l’évaluation, selon l’entité qui en est responsable. La différenciation territoriale est d’autant plus prononcée que, comme c’est le cas en Italie, le rôle du niveau local est important.

En Allemagne, l’évaluation est menée par le service médical de la caisse d’assurance maladie dont dépend la personne, mais selon des orientations nationales.

L’évaluation est, en effet, de la responsabilité de personnels infirmiers en gériatrie des caisses d’assurance maladie, qui assurent une visite domiciliaire de la personne demandant le bénéfice des aides.

Les guides d’évaluation sont fixés au niveau national. La grille concerne les besoins de la personne (les soins corporels, la nourriture, le déplacement), les tâches ménagères de base ainsi que les éventuels besoins en soins et en réadaptation.

L’évaluation porte aussi sur la possibilité de faire appel à des aidants, notamment des aidants familiaux pour le soin à domicile. Les résultats de l’évaluation sont communiqués à la caisse d’assurance dépendance qui adresse un compte rendu, ainsi que la solution envisagée (maintien à domicile ou placement en institution), au demandeur.

Il s’agit d’une évaluation indépendante, puisque les services médicaux de l’assurance maladie sont indépendants de l’assurance dépendance.

Au Royaume-Uni, dont l’évaluation est réalisée par les collectivités territoriales, mais s’appuie nécessairement sur un schéma national d’évaluation des besoins, le Fair Access to Care Services. L’objectif est d’assurer un traitement équitable des personnes ayant des besoins similaires.

En Italie, en revanche, la procédure est totalement décentralisée. Les demandes d’octroi de l’indemnité d’accompagnement, sont instruites par les antennes locales du système de santé. L’évaluation des besoins est le plus souvent le fait d’une équipe pluridisciplinaire composée de médecins, infirmiers et travailleurs sociaux, notamment.

Il n’y a pas de grille d’évaluation unique, chaque région et même chaque commune pouvant avoir sa propre grille.

Aux Pays-Bas, l’évaluation de la dépendance est confiée à un organisme public indépendant, le CIZ (Centrum Indicatiesteeeling Zorg), qui couvre l’ensemble du territoire, avec six bureaux régionaux.

L’évaluation est systématiquement faite par le CIZ pour bénéficier de l’AWBZ, c'est-à-dire du régime national obligatoire relatif à la perte d’autonomie.

En revanche, en ce qui concerne la WMO, les communes peuvent faire leur propre évaluation comme demander communication des évaluations du CIZ.

L’évaluation est réalisée par des équipes pluridisciplinaires comprenant, à côté de médecins, des personnels infirmiers, des travailleurs sociaux, des ergothérapeutes, etc.

Sur le plan de la méthode, elle se fonde sur les classifications internationales en matière de troubles de la santé mentale, de maladie et de handicap.

Les informations sont collectées non seulement auprès de la personne concernée, mais également de son environnement, de son médecin et des travailleurs du secteur social.

L’évaluation suit la démarche dite de « l’entonnoir » :

– la première étape tend à recenser l’ensemble des éléments relatifs à la personne, notamment sur son état médical et sur les pathologies et troubles fonctionnels dont elle peut souffrir, ainsi qu’à son environnement ;

– la deuxième étape consiste à examiner la demande de soins « brut » à partir d’une évaluation des déficiences et des ressources de la personne ;

– la troisième étape s’attache à définir la demande de soins « net », ce compte tenu des possibilités de recevoir les soins de manière informelle ;

– la quatrième étape consiste à traduire ce besoin de soins « net », en proposant un panier de soins correspondant à l’option recommandée, soit celle du soin à domicile, soit celle du placement en institution.

Dans la décision d’évaluation, le CIZ mentionne également les éléments suivants : la durée de validité ; le type des soins dont l’accès est ouvert à la personne concernée ; des recommandations sur l’arbitrage entre une aide financière et une aide en nature, de même que sur la part des soins pouvant être prise en charge par les aidants familiaux, voire par la personne.

L’évaluation est ensuite transmise au bureau régional de santé compétent pour la délivrance des prestations.

Un grand nombre de pays distinguent dans la dépendance plusieurs niveaux, à l’instar de la France qui dans le cadre des GIR (Groupes iso-ressources) fait la distinction de six situations, les cas de dépendance maximale étant aux GIR 2 et GIR 1. L’accès à l’aide personnalisée d’autonomie (APA) n’est cependant que pour les GIR les plus élevés,  de 4 à 1.

La classification repose en général sur trois niveaux. Tel est notamment le cas en Allemagne et en Espagne.

En Espagne, la loi établit trois niveaux de dépendance par grade :

– le grade I correspond aux cas de dépendance modérée : la personne nécessite une aide intermittente et limitée (une fois par jour) dans l’exercice de ses activités quotidiennes de base ;

– le grade II est celui de la dépendance sévère : la personne nécessite une aide « étendue », de deux ou trois fois par jour, dans l’exercice de ses activités de base de la vie quotidienne, mais ne nécessite pas d’appui permanent externe ;

– la grade III est celui de la grande dépendance : la personne nécessite une aide externe de façon continue et indispensable (plusieurs fois par jour) dans l’exercice des activités de base de la vie quotidienne et, en raison de sa perte totale d’autonomie physique, mentale intellectuelle ou sensorielle, manifeste des nécessités d’appui générales.

En Allemagne, les trois niveaux de dépendance sont caractérisés de manière précise par référence au nombre d’activités quotidiennes affectées et au temps passé.

Le tableau suivant récapitule ces éléments :

Classification des niveaux de dépendance en Allemagne

 

Personnes qui ont besoin d’aide pour au moins 2 activités quotidiennes…

…et qui ont besoin d’une aide additionnelle plusieurs fois par semaine

Niveau I

Au moins 1 fois par jour

Pour au moins 1 h 30 par jour (dont 45 minutes comptées en soins de base)

Niveau II

Au moins 3 fois par jour, à différents moments

Pour au moins 3 h par jour (dont 2 h comptées en soins de base)

Niveau III

En continu

Pour au moins 5 h par jour (dont 4 h comptées en soins de base)

Niveau III – Cas particuliers

Personnes en niveau III qui ont besoin d’aides pour la vie quotidienne au moins 7 h par jour (dont au moins 2 h la nuit) ou qui ont besoin de soins de base qui ne peuvent être fournis que par plusieurs personnes à la fois.

Source : Centre d’analyse stratégique, à partir de Schulz E. (2010), The Long-term Care System in Germany, Discussion Papers, n°1039, DIW.

De manière très détaillée par ailleurs, une méthode d’évaluation en vigueur au Québec, le SMAF (Système de mesure de l’autonomie fonctionnelle), expérimentée en France, permet d’évaluer, par grandes fonctions et selon un schéma, la situation de la personne.

La qualité des soins et des prestations fait partie des obligations vis-à-vis des personnes en situation de faiblesse.

Aussi la définition de normes et l’organisation de contrôle de la qualité sont-elles largement prévues.

Une action européenne est d’ailleurs intervenue, comme on l’a vu, avec la Charte européenne des droits et responsabilités des personnes âgées nécessitant des soins et une assistance de longue durée, en 2010.

Sur le plan national, on observe différents dispositifs législatifs et règlementaires.

Des démarches concertées ont abouti aux Pays-Bas au Quality act et Act on professionnal in healthcare, qui imposent une démarche qualité et la publication des données correspondantes par tous les prestataires de soins, y compris pour la dépendance. Un rapport officiel est rendu public.

En Allemagne, la loi sur les centres de soins prévoit une obligation de qualité des soins et une inspection une fois par an. Les Länder sont responsables de leur exécution et de la fréquence des contrôles. Selon les éléments disponibles, les trois quarts des centres de soins ont mis en œuvre une politique de contrôle interne.

Une table ronde sur le secteur de la dépendance a également établi une charte des droits des personnes qui ont besoin de soins de longue durée et d’assistance (Deutsche Charta der Rechte hilfe-und pflegebedürftiger Menschen).

Au Royaume-Uni, depuis octobre 2010, l’entrée en vigueur du Health and social care de 2008 prévoit l’enregistrement des structures du secteur sanitaire et du secteur social, auprès de la Care Quality Commission créée en 2009 par regroupement des structures de contrôle existantes. C’est cette autorité qui contrôle le respect des normes obligatoires dont l’enregistrement suppose le respect.

En Suède,  les contrôles ont été recentralisés et incombent à l’Agence nationale des affaires sociales et de la santé.

Dans tous les pays, des mesures spécifiques sont destinées à éviter la maltraitance.

D’une part, ces obligations sont en général prévues dans les conditions d’agrément ou d’autorisation des opérateurs, notamment des établissements d’accueil. C’est explicitement le cas en Allemagne dans la législation sur les établissements de soins.

En Suède, la politique des normes de soins a été développée dans les années 2000 après la mise au jour dans les médias de différents cas de maltraitance.

D’autre part, des dispositions particulières peuvent compléter les dispositions générales du code pénal sanctionnant les atteintes aux personnes vulnérables. Tel est le cas en Espagne, avec les dispositions du code de procédure pénale obligeant les personnes qui constatent des cas de maltraitance à les dénoncer, ainsi que du code de déontologie médicale, lequel oblige le corps médical à protéger la victime et à dénoncer l’agresseur aux autorités compétentes.

En Italie également, une disposition semblable est prévue dans le code de déontologie médicale.

Enfin, des actions sont prévues, comme en Allemagne où un renforcement de la formation et de la rémunération des personnels a été programmé. Néanmoins, selon les éléments recueillis par la rapporteure, cette réforme s’est accompagnée d’un décloisonnement des formations des auxiliaires de soins qui fait craindre à certains une réduction globale du niveau de formation des futurs personnels.

La question du maintien à domicile de la personne dépendante aussi longtemps qu’elle le souhaite est l’une des plus délicates qui soit.

Elle est traitée, selon les éléments communiqués par le Conseil d’analyse stratégique, de la manière la plus complète au Danemark.

La personne âgée reste libre de choisir son lieu de vie, quel que soit le niveau de sa perte d’autonomie. La commune est alors chargée de lui apporter les aides et les soins nécessaires.

Dans tous les pays considérés, les personnes montrent un intérêt pour un accès connu, libre, aisé et sécurisé à des formules de testament de vie ou de pouvoir qui permettent de préciser leur volonté dans les circonstances les plus difficiles, et de désigner également, si elles le souhaitent, une personne de confiance parmi leur entourage, membre de la famille ou autre personne proche.

Ainsi en Allemagne, la HVD (Humanistischer Verband Deutschlands) a mis en accès direct sur Internet deux formulaires de pouvoir, l’un pour les questions de santé, l’autre pour les questions matérielles et légales, notamment financières et postales.

Ces éléments sont particulièrement importants notamment en fin de vie, pour éviter les allers-retours entre le domicile et l’hôpital, ou entre la maison de retraite et l’hôpital.

Dans le cadre du rapport précité Besoin d’aide ?, l’OCDE met en évidence la prédominance du maintien à domicile, dans l’ensemble des pays, sauf exception.

Sur les 2,3 % de la population de l’ensemble des pays étudiés, une proportion de 70 % en moyenne est à domicile, contre 30% en institution.

C’est en Belgique que le placement en institution est comparativement assez élevé, à raison de 45 % des cas.

Le tableau suivant donne en proportion de la population totale, la part de la population bénéficiaire de prestations de dépendance qui les reçoit à domicile et celle qui les reçoit en institution.

Parts des hébergements en institution
et des soins à domicile
en % de la population totale

Pays

Population dépendante

Soins à domicile

Placement en institution

Année

Pologne

 

 

0,2

2008

Corée

 

0,21

0,19

2008

Irlande

   

0,5

2008

Etats-Unis

   

0,5

 

Islande

   

0,7

2008

Espagne

 

0,92

0,28

2009

Italie

 

0,83

0,57

2008

Canada

   

2,00

2007

Luxembourg

 

1,42

0,68

2007

Nouvelle-Zélande

 

1,61

0,49

2008

République slovaque

 

1,49

0,61

2008

Australie

 

1,64

0,71

2007

OCDE

2,3

   

2008

Danemark

 

1,68

0,82

2007

Finlande

 

1,49

1,01

2008

Belgique

 

1,44

1,16

2007

Japon

 

2,1

0,6

2006

Allemagne

 

1,90

0,90

2008

République tchèque

 

2,4

0,4

2008

Royaume-Uni

 

2,9

 

2008

Pays-Bas

 

2,32

1,48

2007

Norvège

 

3,00

0,90

2008

Suisse

 

2,78

1,12

2008

Suède

 

2,83

1,35

2008

Autriche

5,1

 

 

2008

Source : OCDE

Cette formule est d’ailleurs conforme aux voeux des personnes, dans tous les pays.

Comme l’ont observé les rapporteurs du Conseil d’analyse stratégique, la Suède a longtemps été l’archétype du « tout établissement », ayant développé cette préférence dans les années 1970.

Depuis, notamment depuis les années 2000, la voie inverse de la « désinstitutionalisation » a été suivie et le rééquilibrage se traduit même par des fermetures de lits en établissements spécialisés. 26 000 places ont été supprimées depuis 2000 et le nombre des personnes hébergées a diminué de 12 %.

La proportion des personnes en institution s’établit maintenant à 37 %, contre 63% à domicile.

En ce qui concerne les Pays-Bas, le modèle de la prise en charge institutionnelle développé à partir de la fin des années 1960 n’a plus cours. La proportion des plus de 80 ans hébergés en résidence a ainsi chuté de 50% en 1980 à 30 % aujourd’hui.

Les incitations au maintien à domicile relèvent clairement d’une politique de maîtrise des coûts, même si elle n’est pas en l’espèce susceptible d’encourir des reproches sur le plan humain, car elle répond aussi, comme on l’a vu, à la volonté des personnes concernées.

On constate en effet que dans tous les pays la part du PIB consacrée au placement en institution dépasse largement celle affectée au maintien à domicile.

C’est le résultat inverse de la population concernée.

Parts respectives des dépenses pour les soins à domicile et les institutions


Percentage of GDP, 2008

                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     

Source : OCDE.

Pour les prestations à domicile, deux formules sont possibles : celle des prestations en nature et celle des prestations monétaires, à savoir des allocations financières.

La prestation en espèces laisse clairement le libre choix au bénéficiaire, pour choisir le prestataire. C’est aussi, comme on le verra au b) du 2) du D ci-dessous, une formule qui ouvre la possibilité d’un versement aux aidants de proximité, notamment aux aidants familiaux.

La prestation en nature ne présente pas les caractéristiques symétriques. Elle n’est pas en effet contraire au libre choix, puisqu’elle peut s’exercer concurremment avec celui-ci.

Ainsi que la rapporteure a pu le constater lors de ses déplacements sur place, c’est le cas aux Pays-Bas, comme en Allemagne. Il y a possibilité de choix parmi les prestataires agréés.

En revanche, la prestation monétaire est moins élevée que la prestation en nature.

Aux Pays-Bas, les bénéficiaires du PGB, le budget personnel, reçoivent ainsi les trois quarts seulement du montant estimé de la prestation en nature correspondante.

Cette décote est censée représenter les frais administratifs, ainsi que les avantages d’une éventuelle mise en concurrence.

L’allocation financière n’est cependant pas l’unique voie pour obtenir les avantages de la mise en concurrence. Cette dernière peut, en effet, intervenir au moment de la sélection des prestataires par la collectivité publique. Tel est ainsi le cas en Suède, où les municipalités organisent une sous-traitance de leurs obligations par des appels d’offres et des contrats qui prévoient les mêmes obligations, notamment de qualité, que pour les services publics.

Les résultats des différents pays sont en matière de maintien à domicile très variables.

De même que le Centre d’analyse stratégique, on peut opposer deux cas spécifiques.

Le premier est celui de l’Italie où l’attribution sur une base décentralisée d’une prestation universelle, l’indemnité d’accompagnement (indemnitá di accompagnamento), d’un montant de 480 euros par mois, réservée aux personnes ayant besoin d’une attention constante, dans un contexte de forte variation régionale de l’offre de soins, conduit à un recours à des travailleurs immigrés, qui ne sont pas nécessairement employés dans des conditions régulières, au sein de la cellule familiale, avec une flexibilité très importante. Ces travailleurs sont appelés les badantis.

L’Italie n’est d’ailleurs pas le seul Etat où le recours à l’immigration, non nécessairement régulière, est utilisé par de nombreux foyers pour faire face à la situation.

Le second exemple est celui du Danemark où les municipalités, auxquelles il incombe de financer et d’organiser l’offre de soins, offrent une gamme très large de prestations de services.

Le Conseil d’analyse stratégique recense ainsi dans le cadre de son rapport précité une « palette des services proposés est large, que ce soit en hébergement institutionnel, en logements adaptés ou à domicile : aide ménagère, portage des repas à domicile, aides à la personne, aides au transport, aménagement du logement, possibilité de participer à des activités sociales (avec, par exemple, des bons pour taxi gratuit), exercices physiques doux, visites préventives à domicile, etc. »

Depuis la loi WMO et l’amorce d’une municipalisation des prestations, les Pays-Bas tendent à se rapprocher du modèle danois.

L’adaptation des logements existants aux besoins des personnes âgées en perte d’autonomie fait également partie des instruments des politiques d’aide au maintien à domicile.

La proportion des logements adaptés habités par les personnes de plus de 80 ans est particulièrement élevée aux Pays-Bas, à raison de 45 %, sous l’effet comme on l’a vu d’une politique volontaire qui vise à faire passer de 1,5 million à presque 2 millions le nombre de logements ayant bénéficié d’adaptation, et s’établit à quelque 20 % au Danemark, en Suède et en Allemagne.

Avec 18 %, la France est légèrement en retard.

D’un point de vue concret, les adaptations sont aidées sur fonds publics.

Les formules intermédiaires consistent à prévoir des habitats spécifiques aux personnes âgées, avec des services adaptés à leurs besoins et destinées à prévenir l’isolement.

Il s’agit peu ou prou de résidences avec services ou d’adaptation de la formule, avec des stratégies de groupement de logement.

Aux Pays-Bas, les Woongroepen sont des groupes d’habitation regroupant les personnes âgées, et constitués soit de structures indépendantes, soit d’un certain nombre d’habitations dans un ensemble plus vaste. Il y en avait environ 300 sur le territoire. La formule des communautés d’habitation au Danemark relève de la même inspiration.

La formule des résidences avec services est très répandue. En Suède, les « résidences de sécurité » correspondent à un mode « semi-institutionnel ». Elles offrent des services tels que les repas et la présence de personnels soignants, si nécessaire.

Elle a été adaptée à l’existant avec les zones de services résidentiels au Danemark et aux Pays-Bas. Chacun de ces quartiers comprend ses propres services, sa propre équipe de soins et son propre budget, avec un hébergement groupé autour d’un point central.

Plusieurs pays développent les formes d’accueil de jour sur le modèle sanitaire des formules d’hospitalisation à domicile et des formules de courts séjours.

Cette évolution sanitaire vers des formules de soins plus légères sans perte d’efficacité thérapeutique, qui ne concerne d’ailleurs pas uniquement les personnes âgées, mais l’ensemble des patients, permet d’ailleurs pour celles-ci de réduire le besoin d’hébergement en établissement médicalisé.

Pour ce qui concerne les formules de jour destinées aux personnes dépendantes, on peut mentionner les centres diurnes en Italie, qui n’accueillent que pendant la journée et dans des conditions prévues par les autorités locales.

On trouve également la formule des centres de jour en Espagne, ainsi qu’au Royaume-Uni, où les « lieux communautaires » (community venues) accueillent les personnes âgées à la journée.

Le rapport précité de l’OCDE, Besoin d’aide ?, fait apparaître que le recours aux établissements spécialisés va croissant avec l’âge, dans tous les pays.

La proportion de ceux qui sont placés en institution augmente clairement selon la tranche d’âge, comme le montre le tableau suivant.

Pays

Personnes en institution (%)

Année

 

65-79 ans

 

+ 80 ans

 

Australie

30

 

50

 

Belgique

   

53

2007

République tchèque

12

 

15

2008

Danemark

28

 

37

2007

Finlande

35

 

41

2008

Allemagne

25

 

39

2008

Hongrie

25

 

41

2008

Japon

16,3

 

26,9

2006

Corée

33

 

44

2008

Luxembourg

27

 

48

2007

Pays-Bas

25

 

40

2007

Nouv. Zélande

17

 

27

2008

Norvège

21

 

34

2008

Suède

19

 

41

2008

Suisse

21

 

40

2008

         

Source: d'après le rappport de l'OCDE - Besoin d'aide ?.

On observe au demeurant que l’âge d’admission en établissement recule car les plus de 80 ans ne sont majoritairement en établissement que dans deux pays, l’Australie et la Belgique.

Dans la plupart des pays, on opère des distinctions entre les établissements selon le niveau de médicalisation. Pour les cas médicalement les plus lourds, l’établissement médicalisé de longue durée est le dernier recours. Il est également pour les personnes concernées le lieu de vie en même temps que le lieu de soins.

En Allemagne, ainsi, comme on l’a vu, à côté des maisons de retraite avec simplement le partage de certains éléments comme les repas, les Altenwohnheim, il y a les maisons de retraite médicalisées (Altenheim) et les centres de soins médicalisés (Pflegeheim), où sous la responsabilité d’aides soignants spécialisés les personnes dépendantes sont prises en charge, parfois pour la journée uniquement.

Environ un tiers des deux millions de personnes dépendantes sont en Allemagne placées dans le cadre des centres de soins.

Il faut aussi mentionner les hospices qui hébergent les personnes en fin de vie et disposent d’un personnel spécialisé pour la médecine palliative.

Les hébergements tendent à se regrouper. Près de 20 % des centres de soins proposent aussi des services de maison de retraite, médicalisées ou non, selon les éléments recueillis par le Centre d’analyse stratégique.

Au Royaume-Uni, les maisons de retraites (care home), sont médicalisées (nursing care home) ou non (residential home). Elles peuvent être publiques, privées ou gérées par des associations.

On observe une certaine tendance à la spécialisation. En Allemagne ainsi, les colocations de soins ont été créées à l’origine pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

Avec la démence sénile, cette pathologie lourde constitue un cas bien identifié et nombreux d’affection des personnes les plus âgées, exigeant un niveau de soins particulièrement élevé.

D’une manière générale, l’allongement des délais d’attente fait craindre une pénurie de places dans les institutions pour personnes âgées dépendantes.

Le Centre d’analyse stratégique a noté que tel était le cas au Japon, où une demande exprimée sur deux est satisfaite, ainsi qu’aux Pays-Bas et en Suède.

Dans ce dernier pays, la politique de fermeture de lits de la première décennie des années 2000 n’est d’ailleurs plus à l’ordre du jour.

Même lorsqu’il est la seule solution, l’hébergement en institution soulève toujours la difficulté de son coût.

Les données communiquées à la rapporteure en donnent une illustration.

Au Royaume-Uni, par exemple, le coût moyen des maisons de retraite est de 470 livres sterling par semaine, soit 24 500 livres sterling par an (35 000 euros environ), et de 664 livres par semaine, soit 34 528 livres par an (50 000 euros environ), pour les maisons médicalisées.

En Italie, le niveau des dépenses mensuelles pour se loger dans des structures résidentielles varie, à raison de 1 528 euros par mois pour une résidence d’assistance, 2 454 euros pour une résidence d’assistance et 2 702 euros pour une résidence sanitaire d’assistance.

En Allemagne, le coût moyen d’une maison de retraite est de 3 300 euros par mois. Comme on l’a vu, le reste à charge est, en moyenne, de 580 euros, mais peut être beaucoup plus élevé.

Les aidants jouent déjà un rôle majeur dans la dépendance et compte tenu de l’évolution du nombre et de la proportion, celui-ci ira croissant.

Si le nombre de ceux qui participent à des degrés divers à des actions d’aide est estimé dans l’Union européenne à 100 millions de personnes, une définition plus rigoureuse fondée sur l’investissement horaire (plus de 20 heures par semaine) conduit à une estimation du nombre des aidants familiaux de l’ordre de 20 millions de personnes.

Selon un critère encore plus strict (plus de trente-cinq heures par semaine), le nombre des aidants s’établit en Europe à 9,6 millions de personnes.

S’agissant de la proportion de la population concernée, les données de l’OCDE indiquent que les Pays-Bas sont au premier rang, avec 21 % des 18-65 ans.

Les aidants sont donc essentiellement des membres de la famille, mais pas seulement. Il y a aussi des relations, des voisins ou d’autres personnes proches.

Néanmoins, on note une prédominance de membres de la famille et, parmi les aidants familiaux, une très forte proportion de femmes, dans les deux tiers des cas. Ce sont les épouses, les filles et les belles-filles.

D’un point de vue tranche d’âge, on observe dans l’ensemble des pays de l’OCDE que c’est la tranche des 45-64 ans qui compte la proportion la plus élevée d’aidants informels. Cette tranche d’âge est la « génération pivot » du système.

L’aide que délivrent les personnes concernées, souvent qualifiée d’informelle, est difficilement remplaçable. Sans elle d’ailleurs, tout le système de prise en charge des personnes dépendantes s’effondrerait.

Dans l’ensemble des pays, même dans ceux où le dispositif de prise en charge de la dépendance est le plus élaboré, on estime environ 80 % des heures totales de soins la proportion de celles délivrées par les aidants.

Les actions en faveur des aidants sont donc essentielles non seulement sur le plan matériel, mais également sur le plan psychologique. Un des objectifs essentiels est d’éviter l’épuisement des aidants.

Le dispositif des aidants familiaux repose largement sur la proximité géographique, car les enfants ne peuvent porter assistance à leurs parents que s’ils habitent à proximité.

Au fur et à mesure que les effets de la mondialisation et de l’intégration européenne vont se faire sentir, avec un accroissement du nombre des « expatriés » notamment, le nombre de situations où aucun membre de la famille ne peut être un aidant vont se développer.

C’est un élément à prendre en compte pour le futur, car il pourrait se traduire par des situations très différenciées avec d’un côté des cas traditionnels de cohabitation ou de proximité des générations, et de l’autre, des cas d’impossibilité géographique d’aide.

Ce phénomène s’ajoute aux deux autres éléments déjà couramment constatés parmi les hypothèses susceptibles de conduire à une pénurie d’aidants dans le futur : l’accroissement de la fréquence de la séparation des couples ; les recompositions familiales.

Les aidants doivent en effet pouvoir continuer à vivre « comme d’habitude », autant que faire se peut, de manière à éviter les difficultés de l’isolement et du « champ clos », dont eux-mêmes et les personnes dont ils s’occupent peuvent pâtir.

Aussi les arbitrages doivent-ils trouver le juste équilibre de manière à éviter tant les travers d’une compassion stérile que d’une efficacité mécanique qui ne donne pas à ceux qui font et rendent service, la reconnaissance qu’ils méritent.

Les mesures en leur faveur sont essentiellement de quatre ordres : des droits à congés, des droits sociaux, des mesures concrètes d’aide à l’exercice de la mission, des mesures financières.

Elles concernent le statut des aidants, qui ne fait pas en l’état l’objet d’une approche globale.

En outre, il faut bien mesurer que tous les aidants n’ont pas les mêmes besoins. Les conjoints aidants, âgés, qui représentent l’essentiel de la population totale des aidants, ne sont pas concernés par les formules de congés ou d’aménagement du temps de travail, qui sont indispensables pour d’autres.

Même si elle est nettement moins satisfaisante que la formule de l’aménagement du temps de travail, car elle coupe l’aidant de son cadre habituel, le congé est la formule la plus développée chez nos partenaires.

De même qu’en France où l’on distingue deux types de congés, le congé de soutien familial d’une durée de trois mois renouvelable dans la limite d’un an, non rémunéré, et le congé de solidarité familiale, d’une durée de trois mois renouvelable une fois, et indemnisé, on constate chez nos partenaires cette même distinction.

La formule du congé rémunéré, la plus favorable, est en vigueur en Suède, avec le care leave, qui permet aux salariés d’assister l’un de leurs proches en phase terminale de sa vie avec une indemnisation à hauteur de 80 % de leur rémunération, pour une période de deux mois au maximum. Plus de 5 000 personnes bénéficient d’un tel congé chaque année.

La formule du congé sans rémunération est pour sa part beaucoup plus courante.

C’est celle en vigueur en Allemagne avec le Familienpflegezeit d’une durée de 6 mois dans les entreprises de plus de 15 salariés, et avec le congé d’urgence de 10 jours permettant de s’occuper d’un proche.

Aux Etats-Unis, aussi, le Family and medical leave act permet aux salariés de s’absenter jusqu’à 12 semaines pour faire face aux événements de la vie, les naissances et adoptions, comme les obligations vis-às-vis des parents ou enfants en grande difficulté de santé.

Au Royaume-Uni, le Dependant care leave relève de la même philosophie, car il permet de s’absenter pour une durée raisonnable non seulement pour s’occuper d’un parent dépendant, mais également pour les autres cas d’urgence familiale. En outre, la loi prévoit une protection contre le licenciement comme les discriminations en raison de l’exercice de ce droit.

La formule de l’aménagement du temps de travail est plus ambitieuse, mais aussi plus difficile à mettre en œuvre.

En Allemagne, comme on l’a vu, la mise en œuvre du nouveau Familiepflegezeit qui vise à permettre à un salarié de réduire pendant deux ans son activité, avec un minimum de 15 heures par semaine et une rémunération maintenue aux trois quarts, et ensuite, des modalités de compensation, est liée à des accords collectifs difficiles à négocier.

Au Royaume-Uni, le Work and Families Act de 2006 permet au salarié de demander une flexibilité dans son travail, à l’employeur, pour s’occuper d’un adulte, cette disposition étant auparavant réservée aux seuls parents s’occupant d’un enfant. Le rapport d’évaluation de mars 2010, du département BIS (Business, innovation and skill) montre qu’il s’agit de temps partiel dans 45 % des cas, et de télétravail dans 13 %, ainsi que d’horaires flexibles dans 33 % des cas, ces différentes formules pouvant se combiner (le total du détail de toutes les formules identifiées est ainsi supérieur à 100 %).

L’accès à ces possibilités exige une certaine ancienneté (26 semaines, i.e. six mois) et s’agissant d’éléments négociés avec l’employeur, il n’y a pas de limite de temps.

Avant même d’évoquer la question de la rémunération des aidants, il faut mentionner la continuité des droits sociaux pendant les périodes de congés.

En Allemagne ainsi, pendant le Familienpflegezeit, congé non rémunéré d’une durée maximale de six mois, les droits à l’assurance maladie et à l’assurance dépendance sont maintenus et les droits à la retraite sont poursuivis contre paiement d’une cotisation volontaire.

Pour ce qui concerne les allocations spécifiques, le Royaume-Uni reconnaît aux aidants le droit à la Carer’s Allowance, qui s’établit actuellement à 55,55 livres sterling par semaine, soit environ 240 livres par mois. Elle n’est versée qu’au-delà de 16 ans et qu’à condition que les soins délivrés prennent plus de 35 heures par semaine.

Elle n’est pas cumulable avec des revenus supérieurs à 100 livres nets d’impôt par semaine ni avec d’autres allocations. Elle n’est pas non plus compatible avec des heures de cours au-delà de 21 heures par semaine.

Les collectivités territoriales ont leurs propres allocations, en complément.

C’est néanmoins un dispositif très modeste qui est incompatible avec l’exercice d’une activité.

S’agissant des droits à la retraite, les personnes qui ne sont pas bénéficiaires de l’allocation bénéficient, au titre des semaines de plus 20 heures de soins, de points pris en compte pour la retraite de base d’Etat et la retraite complémentaire d’Etat.

En Espagne, l’aidant familial peut percevoir entre 390 et 487 euros par mois pour prendre soin d’une personne très dépendante, et bénéficient d’une affiliation sociale en contrepartie d’une formation.

Une autre formule consiste à ne pas interdire l’utilisation des prestations en espèces pour l’indemnisation des aidants familiaux.

C’est notamment le cas en Italie et en Allemagne. Aux Pays-Bas également, le budget personnel PGB versé dans le cadre de l’AWBZ dont bénéficie la personne dépendante peut être utilisé pour indemniser les aidants.

Pour sa part, la formule du contrat de travail est autorisée, comme en France, dans les pays d’Europe du Nord, dans certaines conditions.

En Suède, mais aussi au Danemark, selon les éléments communiqués, les municipalités peuvent engager dans certaines conditions un membre de la famille ou de l’entourage de la personne dépendante. En Suède,  la municipalité peut verser une aide qui permet la rémunération d’un ami ou d’une connaissance qui vient assister à domicile la personne dépendante. Dans ce pays, environ 3 300 personnes sont ainsi engagées par les municipalités et environ 6 000 rémunérées sur les aides financières directes à la personne dépendante.

Les tâches de aidants sont d’autant moins lourdes pour eux et d’autant plus efficaces pour leurs bénéficiaires que leur niveau de formation est important. Plus on se rapproche des prestations du secteur formel, plus le cadre « informel » dont ils relèvent est important.

En Allemagne, des formules de formation gratuites leur sont accessibles. Au premier stade, ils peuvent bénéficier des conseils du case manager, l’interlocuteur unique, auprès de l’assurance dépendance.

En Suède, la formation fait partie des missions qui incombent aux municipalités pour assister les aidants.

Pour éviter que les aidants ne soient coupés du monde, les différents pays proposent des formules qui permettent aux aidants d’éviter l’enfermement dans leurs tâches. Cet enfermement est un risque d’autant plus développé que la fonction des aidants est le plus souvent perçue, par eux et par autrui, comme une obligation.

Ces formules sont souvent qualifiées de « répit ». Elles concernent aussi bien les conjoints que les autres aidants.

Aux Pays-Bas, la loi AWBZ permet de bénéficier de systèmes de gardes de jour ou de nuit pour les personnes dont les aidants ont la garde et la loi WMO donne l’obligation de prévoir non seulement des informations, mais également des groupes de soutien ou de formule de déchargement temporaire des tâches.

En Allemagne, les cas de maladie et même les vacances sont couvertes par l’assurance dépendance, dans la limite de 4 semaines et d’une enveloppe financière de 1 470 euros par an.

S’agissant de la Suède, les municipalités organisent des formules de soutien variées : groupes de soutien, centres de soutien, activités de bien être et placement temporaire de la personne dépendante dans des structures adaptées.

Dans le cas le plus favorable, la personne dépendante est suivie par un véritable interlocuteur unique qui est habilité et qualifié à connaître de l’ensemble des questions la concernant : l’aspect médical, l’aspect social et l’aspect financier, notamment patrimonial et, surtout, l’aspect institutionnel.

On constate cependant qu’aucun pays n’a véritablement trouvé la formule universelle.

Lors de ses déplacements en Allemagne et aux Pays-Bas, la rapporteure a pu constater que le manque de coordination était également ressenti dans ces pays, en dépit de l’ancienneté de leur expérience et du cadre très structuré de prise en charge et de traitement de la dépendance, cadre très large puisqu’il s’applique également au handicap et aux troubles psychiatriques.

C’est d’ailleurs grâce à un suivi régulier de la situation d’ensemble de la personne que l’on pourrait régler la question du recours au patrimoine pour financer la dépendance, et que l’on pourrait éviter la question toujours très délicate de la récupération sur succession qui, selon les éléments disponibles, concerne uniquement les Etats-Unis, et de manière assez limitée en raison du nombre des dérogations.

Cette difficulté à coordonner tient à l’importance du nombre des interlocuteurs.

Les personnes dépendantes se trouvent en effet dans des situations particulièrement complexes et aucun des éléments qui les concernent, notamment sur le plan sanitaire, n’est simple.

Il y a au contraire une tendance à développer des pathologies complexes, effet de la fragilité de leur organisme, et exigeant des soins médicaux ou de rééducations complexes.

Le nombre d’intervenant est donc par définition élevé pour elles.

Le premier cas de coordination est le guichet ou interlocuteur unique.

Il permet d’éviter d’avoir à s’adresser à plusieurs institutions ce qui simplifie tant l’accès à l’information que les formalités à accomplir, éventuellement.

Cette formule du guichet d’information unique est prévue en Allemagne dans le cadre de la réforme de 2008 mais, comme on l’a vu, peine à, se mettre en place.

Le deuxième cas de coordination est l’interlocuteur unique qui se rend éventuellement au domicile des personnes dépendantes.

C’est la formule retenue aux Pays-bas avec le Preventieve Ondersteuning Matelszorgers, cadre dans lequel les travailleurs sociaux sont directement en contact avec les aidants notamment pour la délivrance des informations. Ils visent également à prévenir chez eux les éventuels troubles psychologiques.

Le niveau de coordination le plus élevé est actuellement celui des gestionnaires de cas, des case managers.

Celui-ci joue le rôle d’interlocuteur unique entre la personne dépendante et son entourage et l’ensemble des professionnels des secteurs sanitaire et sociaux, ainsi que des prestataires de services.

Il a été mis en place dans le cadre de la réforme de 2007, appliquée à partir de 2008, en Allemagne, comme on l’a vu.

Chaque personne a ainsi depuis 2009 un interlocuteur unique, le « conseiller dépendance », placé auprès des caisses d’assurance. Il est pour les assurés l’interlocuteur unique, grâce à une formation dans des domaines variés. L’objectif est notamment d’assurer la bonne coordination des soins ambulatoires, des programmes de réadaptation et des institutions médicalisées.

Le rôle des conseillers est particulièrement important à l’occasion de la sortie d’une hospitalisation des personnes âgées. Deux contacts téléphoniques au moins sont prévus par an (quatre pour les personnes les plus dépendantes) pour s’assurer de la qualité du service rendu au bénéficiaire et, également, un soutien aux aidants familiaux.

En Suède, l’intégration est encore plus poussée, puisque c’est le case officer qui fait l’évaluation. En contrepartie, ses décisions peuvent faire l’objet de recours juridictionnels, depuis le début des années 2000.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le mercredi 13 juillet 2011, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

« Le Président Pierre Méhaignerie. Merci pour ce rapport. Dans ce domaine comme dans d’autres, le « toujours plus » serait évidemment le plus souhaitable mais il ne faut pas oublier les différences de départ entre les différents pays et les contraintes.

J’observe que le coût du modèle social français est de 610 milliards d’euros ; c’est celui qui a le plus progressé au cours de ces années de crise, par rapport à nos partenaires. Il ne faut pas oublier non plus l’impératif de la compétitivité, qui peut être mis à mal par la hausse des cotisations sociales, ni le niveau de la dette.

Dans les vingt-cinq dernières années, les prestations sociales ont augmenté, en France de 6,1 points de PIB alors que cette progression n’a été que de 2,4 points en moyenne dans l’OCDE et qu’elles ont diminué en Suède de 0,7 point. Il ne faut donc pas oublier que nos dépenses sociales sont, par rapport au PIB, très élevées par rapport à celles des pays voisins comparables.

J’estime que la politique la plus efficace est la politique de proximité. S’agissant du problème de la main-d’œuvre dans ce secteur et de sa valorisation, les centres communaux d’action sociale (CCAS) et les associations sont les plus efficaces dans ce domaine. Il faut aussi penser à la nécessité de disposer de logements adaptés et avoir une politique de prévention, tout en gardant à l’esprit que la priorité est la lutte contre le chômage.

M. Bernard Perrut. Ce rapport est d’une grande qualité. La dépendance et l’accompagnement constituent un défi européen et mondial, auquel s’intéressent aussi, maintenant, les Chinois. Même si nous avons déjà une expérience en la matière en France avec, par exemple, l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et les mesures favorisant le maintien à domicile, nous devons nourrir notre réflexion par l’observation des exemples européens. En gardant à l’esprit que les coûts ne sont pas extensibles à l’infini, il nous faut réfléchir aux possibilités de développer les solidarités familiales et le rôle des aidants, et à mieux concilier la vie professionnelle et familiale.

En matière de prévention, il faut examiner les expériences étrangères, par exemple celles du Danemark, où l’action commence à l’âge de cinquante ans, et de la Finlande où elle s’effectue en liaison avec la médecine du travail. Pensez-vous que le renforcement de la prévention puisse être un atout supplémentaire ?

Les collectivités locales, dont le rôle est différent au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, sont, compte tenu de leur proximité du terrain, les plus à même de mener une politique plus réactive, moins coûteuse et plus efficace en matière de dépendance.

Mme Laurence Dumont. Je suis surprise que l’on ne dispose que du sommaire du rapport et non pas de l’intégralité de son texte.

Le Président Pierre Lequiller. C’est la tradition à la Commission des affaires européennes de procéder ainsi.

Mme Laurence Dumont. Il y a dans ce rapport des comparaisons intéressantes dont on aurait aimé disposer plus tôt dans cette législature. Ce rapport succède à celui que vous avez commis l’année dernière préconisant la prise en charge de la dépendance par souscription obligatoire d’une assurance à partir de l’âge de cinquante ans.

Le Président Pierre Méhaignerie. Il a permis d’ouvrir le débat.

Mme Laurence Dumont. La prise en charge de la dépendance faisait partie des projets du Président de la République au cours de la campagne électorale de 2007. La création d’un cinquième risque était annoncée, mais rien n’est venu. La grande réforme dans ce domaine a été faite il y dix ans par la gauche avec la mise en place de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). La seule mesure prise par la majorité actuelle a été l’institution de la journée de solidarité, qui ne pèse que sur les salariés, et qui concrétise l’idée « géniale » de faire travailler les gens gratuitement. Est-ce que cette mesure existe aussi ailleurs en Europe ?

M. le président Pierre Méhaignerie. La seule comparaison pertinente à cet égard est celle du nombre d’heures travaillées par habitant, en comprenant toute la population, c’est-à-dire y compris ceux qui ne travaillent pas, comme les jeunes, etc. En France ce chiffre est de 670 heures par habitant, de 760 dans les pays voisins et de 850 dans beaucoup de pays développés. Comme la compétitivité de la France a faibli, il faut en rechercher les causes.

Mme Laurence Dumont. Il faut évaluer la durée du travail par salarié actif.

Le Président Pierre Méhaignerie. L’indicateur que j’ai donné est le seul valable.

Mme Laurence Dumont. La journée de solidarité a été instituée dans l’urgence et il n’a même pas été possible d’utiliser les sommes ainsi dégagées. Il y a, en effet, une sous-consommation des crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Incidemment nous souhaiterions être éclairés sur l’éviction, il y a quinze jours, du directeur de la CNSA qui n’est toujours pas remplacé. J’observe également que la proposition du rapport de la mission d’information sur la CNSA l’an dernier n’a pas été entendue puisque 100 millions d’euros ont encore été prélevés cette année pour financer le déficit de la Sécurité sociale.

On ne peut donc avoir, en attendant peut-être quelques mesures dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), que de grandes inquiétudes quant à la réalisation des promesses de campagne du Président de la République.

Participant au groupe de travail sur la stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées, dont le modérateur est M. Bertrand Fragonard, je constate que la vision est uniquement financière et budgétaire et que les mesures proposées sont à la fois simplistes et créatrices d’inégalités. L’assurance privée est une des pistes envisagées mais j’estime que les incitations fiscales seraient mieux utilisées pour une prise en charge solidaire. Je suis d’ailleurs scandalisée de voir participer à ce groupe de travail des personnes, qui étaient il y a peu des hauts fonctionnaires du ministère des affaires sociales, ou de cabinets ministériels, et qui siègent maintenant au titre des assurances privées.

Quarante et un présidents de conseils généraux ont, hier, souhaité que soit instituée une deuxième journée de solidarité. Est-ce qu’il y a des projets en ce sens ? Même si une journée de solidarité représente un apport de 2,2 milliards d’euros, plus de 3 milliards si toutes les catégories sont concernées, on ne peut pas financer de cette façon une politique publique.

En matière de prévention, il y a le projet de supprimer le GIR 4, qui permet pourtant de retarder le moment où survient la dépendance.

Enfin, on augmente sans cesse la charge des départements. En 2004, les dépenses étaient partagées à moitié entre l’Etat et les départements alors qu’aujourd’hui, les parts respectives sont de 30 % et de 70 %. Pour nous, l’idée directrice est celle de la solidarité, selon laquelle chacun doit participer en fonction de ses moyens et recevoir en fonction de ses besoins.

M. Claude Leteurtre. Je remercie la rapporteure pour son travail technique remarquable qui nous donne les éléments des choix et décisions dans un domaine révélateur de la complexité de la société, comme l’a définie Edgar Morin. Chacun essaie de trouver des réponses différentes selon ses convictions, sa culture, sa manière d’être dans des sociétés où les réponses idéologiques et religieuses subsistent et varient selon les pays.

Concernant le GIR 4, dans le domaine de la prévention, je n’ai pas entendu le mot isolement, alors que 20 à 30 % des gens de plus de 80 ans n’ont même pas une conversation par semaine. Qu’en est-il dans les autres pays européens ? Plus la réponse est institutionnelle, plus cet isolement est loin d’être rompu.

Vous avez parlé de la difficulté de trouver des personnels qualifiés, mais vous n’avez pas dit un mot de la formation. Est-ce qu’il y a des formations différentes et sont-elles très cadrées ou très institutionnalisées ?

Vous avez fini votre exposé en parlant d’éthique et notre président a également évoqué l’éthique à côté des références financières. J’aimerais savoir comment le testament de vie est reconnu dans les autres pays européens et comment ils le font respecter.

M. Dominique Dord. Ce rapport est d’autant plus intéressant que nous n’avons pas assez souvent ce réflexe de faire des comparaisons européennes. J’ai été surpris que dans l’intervention de notre collègue Dumont, qui était complètement déconnectée et hors sujet, il n’y ait pas eu un seul élément reprenant un des points du rapport.

Premièrement, sur l’éthique, quand on est confronté à la grande dépendance du grand âge se pose la question de ce que veut dire l’humanité. Un gériatre hospitalier public m’a dit récemment que si mon beau-père se trouvait dans une institution hospitalière spécialisée et non dans une maison privée, il serait mort depuis longtemps. Dans les comparaisons éthiques qui peuvent être éventuellement faites sur ce sujet difficile, y a-t-il des éléments sur la manière dont on apprécie une certaine forme d’acharnement ? La durée moyenne en institution de dix-huit mois recouvre des réalités très contrastées. On n’est pas sur une question de maladie, mais sur une question médico-sociale pour laquelle on peut faire des miracles avec une attention quotidienne maximale. Une réflexion est-elle menée ailleurs sur la question difficile de savoir à quel moment il y a une perte d’humanité et jusqu’où peut-on continuer quand il n’y a plus d’humanité ?

A la question matérielle demandant s’il faut continuer à prendre en charge le GIR 4, j’aurais tendance à me demander s’il ne faudrait pas davantage et mieux le prendre en charge et peut-être un peu moins dans des situations où il n’y a plus d’humanité. Il n’est pas sûr que sur ce sujet terrible il y ait des éléments de comparaisons internationaux.

Ensuite, je ne suis pas surpris, contrairement à Mme Dumont, que la rapporteure ait traité de la prise en charge de la dépendance dont elle a même fait le titre de son rapport. Selon moi, cette question de la dépendance pourrait être rattachée à la branche famille parce qu’elle a incontestablement une dimension familiale. L’Allemagne, en fonction de l’implication familiale possible, établit une sorte de ticket modérateur diminuant la taxation des familles. De même, et c’est en place dans plusieurs pays, on en est encore aux balbutiements dans l’aménagement des appartements et il serait intéressant d’envisager dans notre système fiscal des exonérations pour ceux qui consacrent des moyens à la domotique dans ces situations.

Par ailleurs, le rapport est muet sur le recours sur succession et j’aimerais connaître la situation dans les autres pays sur ce point.

Enfin, j’aimerais savoir quel est l’état de la réflexion ailleurs sur les possibilités de la recherche médicale dans la lutte contre la démence sénile, qui nous terrifie tous.

M. Régis Juanico. Il est toujours compliqué de comparer au niveau international et européen des politiques sociales qui sont le fruit d’une histoire et d’une culture très disparates.

En revanche, étudier les bonnes pratiques est intéressant. Avec Michel Heinrich nous menons une étude sur la performance des politiques sociales en Europe au comité d’évaluation et de contrôle et nous sommes allés en Suède récemment. Ce pays de 9 millions d’habitants a un système social décentralisé où, mise à part un ministère de quelques dizaines de personnes et une agence d’évaluation nationale, tout le reste relève de l’action sociale des communes, dont 3,6 % du PIB pour la dépendance. Les taux de prélèvements obligatoires dépassent les 50 % du PIB puisque la TVA représente 25 % et l’impôt sur le revenu 30 %.

Comparaison n’est pas raison mais il est intéressant de voir ce que font d’autres pays, aux structures différentes, mais dont les expériences peuvent néanmoins guider la réflexion.

Je retiens du rapport le rôle limité de l’assurance privée en Europe et le besoin de main-d’œuvre pour l’aide à domicile et le personnel en établissements pour personnes âgées.

Les questions d’attractivité de ces emplois, de formation, de professionnalisation, de conditions de travail – en particulier les horaires décalés, le travail de nuit et les jours fériés, les charges lourdes à porter, la solitude de ceux qui travaillent en aide à domicile – sont importantes pour un secteur comprenant 1,3 million de salariés, qu’il ne faut pas affaiblir.

La majorité a jugé nécessaire il y a quelques mois de baisser le taux d’exonération considérant qu’il s’agissait de niches fiscales, ce qui a entraîné un surcoût horaire pénalisant les structures et les employeurs d’aide à domicile. Il faudrait revoir cette question sereinement.

Enfin, il faut s’intéresser à l’espérance de vie en bonne santé qui passe par une meilleure prévention des risques psychosociaux et de la pénibilité dès quarante-cinq ans. La prévention du vieillissement passe aussi par des adaptations des activités physiques et sportives et des activités culturelles pour maintenir l’éveil intellectuel des personnes âgées.

M. Sébastien Huyghe. Le rapport dit qu’avant de faire jouer la solidarité nationale, il faut faire jouer la solidarité intra-familiale. Nous l’avons favorisée en conduisant des réformes du droit des successions et de la tutelle-curatelle et j’aimerais savoir comment fonctionne le mandat de protection future dans la curatelle, même si nous avons encore peu de recul, et si ce type d’outils juridiques est développé ou non dans d’autres pays.

Mme Martine Pinville. Il y a un an était remis un rapport d’information sur le financement de la dépendance des personnes âgées, suivi de la réunion de groupes ministériels conduisant à une mobilisation très forte au niveau territorial d’un grand nombre d’acteurs locaux et il y a maintenant ce rapport relatif aux comparaisons sur la prise en charge de la dépendance en Europe. Ces débats collectifs montrent l’importance de cet enjeu de société mais ils ne seront fructueux que s’ils peuvent aboutir à l’édification d’une véritable politique en faveur des personnes âgées.

Il ne suffira pas de se contenter de quelques discussions au moment du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale car, pour prévoir sur ce sujet à échéance de dix, quinze, vingt ans, nous aurons besoin de débattre d’un vrai projet de loi.

Je m’associe complètement aux observations de Laurence Dumont et je voudrais insister sur l’importance non seulement du financement mais aussi de l’organisation et de l’articulation, notamment concernant les aidants familiaux et professionnels, pour établir des coopérations plus importantes.

M. Didier Quentin. Je voudrais évoquer comme Dominique Dord une première piste, la domotique, à laquelle les Japonais sont très attentifs.

Une deuxième piste pourrait être l’aide à domicile en milieu rural, qui devrait être citée en exemple, pourvu qu’elle dure, et j’aimerais savoir s’il existe des expériences comparables en Europe.

Enfin, je voudrais citer le programme Pensa mené dans certaines villes, pour garder les seniors actifs et essayer de réduire la dépendance.

Le Président Pierre Lequiller. En réponse aux propos de Dominique Dord et de Régis Juanico, je précise que la Commission des affaires européennes s’efforce de faire régulièrement des comparatifs européens, pour éclairer les débats intérieurs sur des textes importants. Nous l’avons fait notamment avec la Commission des affaires sociales, sur les retraites, l’assurance maladie, la démographie, le sport, la participation. Ce rapport peut éclairer le futur pour que nous puissions nous inspirer des bonnes pratiques en Europe sans, bien entendu, aboutir à une transposition systématique, qui n’aurait pas de sens.

Le Président Pierre Méhaignerie. J’ajoute une anecdote aux propos du Président Lequiller pour rappeler que, lorsque j’ai reçu avec des membres de la Commission des affaires sociales des délégations du Japon, de Turquie et de Tchéquie, elles se sont toutes intéressées à notre politique familiale, qui apparaît comme un repère pour beaucoup de pays dans le monde, alors que nos autres politiques sociales les intéressaient peu, certains nous ayant dit que nous dépensions trop.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Comme il reste peu de temps, je m’en tiendrai aux éléments les plus essentiels :

– sur le développement des solidarités familiales, le travail sur le statut des aidants est majeur et la question est traitée dans le rapport. La conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle relève de cette même problématique. Mais il faut tenir compte du cas des aidants familiaux âgés, nombreux, pour lesquels un statut uniquement lié à la vie professionnelle n’est pas clairement adapté ;

– il y a des incertitudes sur le mandat de protection future. Se pose notamment la question de la perte de confiance et de modalités permettant de s’assurer du renouvellement de la confiance à la personne désignée ;

– il y a des approches différentes en Europe sur la solidarité familiale. A l’origine, aux Pays-Bas et en Suède, les politiques de dépendance ont été mises en place par l’Etat qui considérait que la question ne relevait pas des familles. Il y a une différence à cet égard entre le Nord et de Sud de l’Union européenne ;

– la prévention à partir de 45 ans doit faire partie des propositions dont nous aurons à débattre ultérieurement ;

– sur le calendrier, le groupe auquel appartient Mme Dumont aurait pu demander qu’un tel travail soit engagé et ne l’a pas fait ;

– la mise en place de l’APA a été une mesure essentielle, mais elle n’a pas été financée à l’époque ; elle l’a été par la majorité actuelle ;

– sur la journée de solidarité, l’Allemagne l’a décidé pour financer la dépendance dans 15 des 16 Länder. Le seul Land qui ne l’a pas fait n’a pas une ventilation paritaire de la cotisation dépendance, mais une ventilation inégalitaire, puisque 80 % de sa cotisation est à la charge du salarié. Je suis personnellement opposée à une seconde journée de solidarité ;

– il y aura bien un projet de loi, avec une dimension éthique forte, ainsi que des dispositions dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ;

– le groupe de travail « stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées » animé par M. Bertrand Fragonard s’est limité aux aspects financiers, car c’était son rôle ; mais ce n’est pas le cas des autres groupes de travail. On a ainsi beaucoup parlé de gouvernance, d’éthique et responsabilité, éléments qui seront au cœur du futur dispositif ;

– sur la suppression du GIR 4, je n’ai évoqué cette hypothèse, dans un autre rapport, qu’à l’horizon 2025-2030, quand le choc démographique se produira, afin de pouvoir l’absorber. Il ne s’agit par de supprimer le GIR 4 aujourd’hui, mais de mettre en place les éléments de prévention qui permettront de le supprimer à long terme. Les choses sont très claires. Le fil rouge doit être la solidarité et la responsabilité ;

– s’agissant de l’isolement, la e-santé est incontestablement intéressante. Une enveloppe de 2,5 milliards d’euros a d’ailleurs été prévue à cette fin dans le cadre du grand emprunt. Les autres pays le font aussi. On a parlé du Japon naturellement mais la mécanisation des relations humaines, acceptée par les Japonais, ne serait sans doute pas envisagée de même par les Français. Il y a là une dimension éthique supplémentaire à prendre en compte. Il est vrai qu’il y a des gens qui ne voient personne, sauf quelques commerçants. Il y a néanmoins des dispositifs locaux, comme Téléphon’âge à Nancy, avec des bénévoles qui appellent régulièrement, au moins une fois par semaine pour nouer une relation. On pourrait le proposer dans le cadre de l’année européenne sur le vieillissement ;

– sur la fin de vie et la manière dont on l’accompagne, c’est une question délicate qui dépend des sensibilités personnelles, ainsi que des convictions profondes des peuples et de leur histoire. Les Pays-Bas ont une approche opposée à la nôtre avec une euthanasie encadrée par la loi. Il ne faut pas sur ces questions prendre en considération le seul coût, mais le respect du choix et des droits de la personne ;

– la politique différenciée de taxation en fonction de la présence ou non d’enfants est une piste intéressante. Les enfants sont la richesse et l’avenir d’une société ;

– sur la démence sénile, on trouvera un médicament, il faut l’espérer, mais il y aura toujours des affections de longue durée à combattre ;

– un rapport comparatif vise effectivement à identifier les bonnes pratiques, chez nos principaux partenaires, et les éléments de fond. En l’espèce, ce sont la solidarité, le non recours à l’assurance privée de manière massive, la prévention, l’éthique de prise en charge ;

– l’attractivité et le besoin de main-d’œuvre constituent une question compliquée, car il s’agit de prises en charge lourdes, chères et de métiers peu courus. En Allemagne, des dispositifs de décloisonnement pour passer d’un secteur à l’autre sont mis en place, pour les soignants. Cette idée de passerelle avec la petite enfance ou d’autre secteurs offre des perspectives d’évolution à ces professions ;

– l’enjeu de coordination est effectivement essentiel, mais compliqué à régler. La taille des pays et des communes rend difficiles les comparaisons ;

– le vieillissement actif est effectivement essentiel et les réseaux sociaux jouent leur rôle. Il y a d’ailleurs un aspect préventif vis-à-vis de la maladie d’Alzheimer, qui a une moindre occurrence lorsque l’activité intellectuelle est maintenue. »

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LA RAPPORTEURE

Ø A Paris

* Ministère des solidarités et de la cohésion sociale :

– M. Maxime Durier, conseiller technique pour les relations avec le Parlement ; Cabinet de la ministre ;

– M. Vincent Richez, conseiller technique chargé des relations diplomatiques ; Cabinet de la ministre ;

– M. Fabrice Staad, conseiller pour le financement de la dépendance et le secteur médicosocial ; Cabinet de la ministre ;

– M. Olivier Bontout, sous-direction des synthèses ; direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) ;

–M. Cyril Vinsonnaud, délégation aux affaires européennes et internationales, adjoint au chef du bureau des politiques et relations européennes ;

– Mme Aude Muscatelli, direction de la cohésion sociale ; sous-direction de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées ;

– Mme Nathalie Dutheil, direction de la cohésion sociale ; sous-direction de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées.

* Autres personnalités :

– Mme Florence Leduc, présidente, Association française des Aidants ;

– Mme Anne-Sophie Parent, secrétaire générale, AGE-Platform ;

– M. Vincent Figureau, Mutualité française (contribution écrite).

* Centre d’analyse stratégique :

– M. Sylvain Lemoine, responsable du département « questions sociales » ;

– M. Guillaume Malochet, département « questions sociales » ;

– Mme Virginie Gimbert, département « questions sociales ».

Ø A Berlin

– M. Jörg Rudolph, chef de la division « Assurance dépendance » ; ministère fédéral de la santé ;

– Mme le professeur Vjenka Garms-Homolova, experte pour la dépendance à l’Université Alice-Salomon ;

– M. Chris Behrens, directeur « Prestations dépendance », département « Assurance dépendance de l’AOK Nordost (caisse générale d’assurance maladie et dépendance) ;

– Mme Carola Stritzel, département « Assurance dépendance de l’AOK Nordost (caisse générale d’assurance maladie et dépendance) ;

– ainsi que Mme Caroline Ferrari, ministre-conseillère à l’ambassade de France.

Ø A La Haye

– M. Marcelis Boereboom, directeur général, direction des soins longue durée au ministère de la santé, du bien-être et du sport ;

– M. Ronald Bellekom, spécialiste de la loi WMO, représentant de l’Association des communes néerlandaises (VNG) ;

– M. Floris O.P. de Boer, ministère de la santé, du bien-être et du sport ;

– M. Marcel de Krosse, directeur de la stratégie et des affaires juridiques (CIZ) ;

– M. Wouter Elsenburg, Centraal Plan Bureau (CPB) ;

– M. Fons Hopman, conseiller santé, Collège pour les assurances de santé (CVZ) ;

– M. Cretien van Campen, Sociaal Cultureel – Planbureau (SCP) ;

– ainsi que M. Jean-François Blarel, ambassadeur de France aux Pays-Bas.

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 ) OCDE “Heath Data 2009 – How does the Netherlands compare”.

3 () L’indice du volume est fixé par l’évolution du nombre de personnes âgées de plus de 75 ans qui vivent toujours de manière indépendante (hors institution). L’indice du prix est une moyenne des contributions gouvernementales concernant l’emploi dans le secteur de la santé (OVA (Overheidsbijdrage in de arbeidskostenontwikkeling) 90%) et l’indice des prix à la consommation des ménages (10%). Pour 2009, l’évolution du volume est de pratiquement 2% et l’indice des prix d’environ 3,5%.